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1 Le mercredi 8 octobre 2008
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 19.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.
6 Monsieur le Greffier, veuillez citer l'affaire.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Madame, Messieurs les Juges, il
8 s'agit de l'affaire IT-06-90-T, le Procureur contre Ante Gotovina et
9 consorts.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier.
11 Monsieur Hedaraly, est-ce que l'Accusation est prête à convoquer son témoin
12 suivant ?
13 M. HEDARALY : [interprétation] Oui, l'Accusation souhaiterait faire
14 comparaître le Témoin 52 à Zagreb par vidéoconférence.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Nous allons voir si le lien a bel
16 et bien été établi avec Zagreb.
17 Oui, je peux vous voir à Zagreb. Je vois visiblement le témoin ainsi que le
18 représentant du greffe.
19 Est-ce que vous pourriez indiquer à la Chambre de première instance qui se
20 trouve dans la salle à Zagreb.
21 M. LE GREFFIER [à Zagreb] : [interprétation] Bonjour, Monsieur le
22 Président, Madame, Monsieur les Juges. Je vous dirais que tout le matériel
23 a été installé. Nous sommes maintenant installés à Zagreb, nous pouvons
24 commencer à entendre la déposition du témoin.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Urukalo, pourriez-vous nous dire
26 si vous m'entendez dans une langue que vous comprenez ? Si vous regardez
27 votre écran, vous allez voir qui s'adresse à vous, Madame.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Dois-je me lever ?
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous me voyez ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vois un homme, je vois ce monsieur à
3 l'écran.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suis l'un des Juges. Je siège avec
5 deux autres Juges dans cette affaire. Vous pouvez me voir, je porte cette
6 robe rouge ainsi que les deux autres Juges. Est-ce que cela est clair pour
7 vous, Madame ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est bien clair.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous n'allez pas entendre ma voix parce
10 que je ne parle pas votre langue, par conséquent, ce que je vous dis est
11 traduit, donc vous allez entendre la voix de quelqu'un d'autre, mais cette
12 personne va vous traduire exactement ce que je dis. Est-ce que vous m'avez
13 bien compris ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'entends que la voix de cette femme,
15 maintenant.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette femme est en train de traduire
17 dans votre langue ce que je suis en train de vous dire. De même, ce que
18 vous allez nous dire nous sera traduit également, donc même si nous ne
19 parlons pas la même langue, nous pouvons grâce aux interprètes comprendre
20 ce que vous nous dites et vous pouvez comprendre ce que nous allons vous
21 dire. Est-ce que tout est clair maintenant ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Oui, c'est clair. Ce que vous venez de me
23 dire, je l'ai bien compris.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez nous voir sur votre écran et
25 nous, nous pouvons vous voir sur nos écrans grâce à la caméra qui se trouve
26 dans la pièce où vous vous trouvez, donc nous pouvons vous voir et vous
27 pouvez nous voir; est-ce que cela est clair ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien que vous soyez à Zagreb, vous êtes
2 dans un prétoire puisque nous pouvons vous voir dans le prétoire et vous
3 êtes sur le point de commencer votre déposition en audience publique.
4 Est-ce que vous m'avez bien compris ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Par la suite, des questions vont vous
7 être posées, ce n'est pas moi qui vous poserai les questions, mais je vous
8 dirai qui vous posera les questions. Vous serez invitée ou priée de
9 répondre à ces questions. Mais avant que vous ne commenciez votre
10 déposition, le Règlement en vigueur dans ce Tribunal stipule que vous devez
11 prononcer une déclaration solennelle en vertu de laquelle vous allez dire
12 la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai déjà dit et je peux le répéter une
14 centaine de fois. J'ai déjà dit ça.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, de toute façon nous devons procéder
16 par étape.
17 Etant donné que vous ne pouvez pas lire --
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas lire.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je le sais donc c'est pour cela que
20 je vais vous dire quels sont les mots que vous devez prononcer dans le
21 cadre de la déclaration solennelle.
22 Alors pourriez-vous répéter les mots que je vais prononcer et je vais le
23 faire lentement. Est-ce que vous pouvez répéter les mots suivants.
24 Je déclare solennellement --
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Allez-y, allez-y.
26 Pourriez-vous répéter les mots que je prononce. Je vais les prononcer
27 lentement et je vous invite à répéter ces mots, ces mots qui sont les
28 suivants : Je déclare solennellement …
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Mon Dieu, qu'est-ce qui m'arrive. Je déclare
2 solennellement.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ensuite, que je dirai la vérité.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Que je dirai la vérité, la vérité d'ailleurs
5 c'est ce que je vais dire parce que je suis là pour ça.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous également répéter les mots
7 suivants : toute la vérité et rien que la vérité.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, ce que j'avais à dire je l'ai dit,
9 qu'est-ce que je peux vous faire.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cet après-midi vous allez répondre aux
11 questions qui vont vous être posées, et vous allez également nous dire la
12 vérité, toute la vérité ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
14 M. MISETIC : [interprétation] J'aimerais dire au nom de la Défense que nous
15 acceptons cette déclaration comme une déclaration légitime.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Regardez votre écran, je vous prie,
17 Madame, et vous allez voir M. Hedaraly. M. Hedaraly va vous poser des
18 questions. M. Hedaraly travaille pour le bureau du Procureur.
19 Essayez de bien prêter attention à ses questions et essayez d'y répondre à
20 ses questions.
21 Vous allez le voir. Il ne porte pas de robe rouge mais une robe noire.
22 Monsieur Hedaraly, je vous en prie.
23 M. HEDARALY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
24 LE TÉMOIN: DRAGINJA URUKALO [Assermentée]
25 [Le témoin répond par l'interprète]
26 [Le témoin dépose par vidéoconférence]
27 Interrogatoire principal par M. Hedaraly :
28 Q. [interprétation] Bonjour, Madame Urukalo.
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1 R. Bonjour.
2 Q. Avant que nous ne commencions, est-ce que vous pourriez décliner votre
3 identité pour le compte rendu d'audience.
4 R. Vous avez mon nom et mon prénom déjà.
5 Q. Oui, je le sais. J'aimerais juste vous demander de le confirmer à
6 l'intention de la Chambre.
7 R. Draginja Urukalo. Qu'est-ce que je peux vous dire d'autre ?
8 Q. Merci. Est-ce que vous pourriez confirmer que votre date de naissance
9 est le 15 décembre 1922 ?
10 R. Oui.
11 M. HEDARALY : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir la pièce
12 5495 de la liste 65 ter à l'écran, il s'agit de l'intercalaire numéro 1
13 pour le représentant du Greffier à Zagreb.
14 Q. Madame Urukalo, le représentant du greffier est en train de vous
15 montrer un document. Est-ce que vous pourriez regarder le coin inférieur
16 droit du document et nous dire si c'est bien vous qui avez apposé cette
17 croix à cet endroit du document ?
18 R. Oui.
19 Q. Hier, avez-vous eu la possibilité d'examiner cette déclaration, et ce
20 que j'entends en fait, j'aimerais savoir si cette déclaration vous a été
21 relue de votre langue ?
22 R. On me l'a lue.
23 Q. Et quand cette déclaration vous a été lue, est-ce qu'elle reprenait
24 fidèlement ce que vous avez dit aux membres du bureau du Procureur lorsque
25 vous les avez rencontrés en 2003 ?
26 R. Oui.
27 Q. Et la déclaration qui vous a été relue, est-ce qu'elle correspond à la
28 vérité ?
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1 R. Oui, c'est la vérité. Ce que j'ai dit, je l'ai dit, et c'était ce dont
2 j'avais le souvenir.
3 Q. Et si on vous posait des questions semblables à celles qui vous ont été
4 posées, et dont les réponses se trouvent dans la déclaration, est-ce que
5 vous apporteriez les mêmes réponses si ces questions vous étaient posées
6 aujourd'hui devant la Chambre ?
7 R. Pourquoi je ne le ferais pas ? Ce que j'ai dit, je l'ai dit, qu'est-ce
8 qu'il y a d'autre ? Je l'ai dit une fois et ça suffit.
9 M. HEDARALY : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaiterais que
10 la pièce 5495 de la liste 65 ter soit versée au dossier conformément à
11 l'article 92 ter.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas d'objection.
13 Monsieur le Greffier.
14 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela devient la pièce P964.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce P964 est versée au dossier.
16 M. HEDARALY : [interprétation]
17 Q. Madame Urukalo, j'ai quelques questions à vous poser et je vais poser
18 ces questions pour préciser certains éléments qui figurent dans votre
19 déclaration que vous avez examinée hier.
20 R. Oui.
21 Q. Ma première question porte sur le paragraphe 3 de votre déclaration, il
22 est fait référence à des personnes qui sont parties du village le vendredi
23 soir. J'aimerais vous poser la question suivante, Madame.
24 R. Oui.
25 Q. Est-ce que quelqu'un vous a dit pourquoi ces personnes sont parties ?
26 R. Personne ne me l'a dit. Qu'est-ce que j'en savais, qui m'aurait dit ça,
27 j'ai simplement vu que les gens s'enfuyaient, que les tracteurs partaient,
28 et moi je suis restée à la maison, et je voulais aller nulle part. Parce
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1 que tout est parti, tout a été détruit, le blé, les cultures, tout, moi,
2 j'en avais un petit peu, alors qu'est-ce que je pouvais faire ? Je ne
3 savais rien, qui était là et pourquoi. Moi, je ne connaissais pas ces gens.
4 Q. Au paragraphe suivant, vous décrivez comment les soldats croates sont
5 entrés dans votre village. Est-ce que cela s'est passé le vendredi ou le
6 lendemain, à savoir le samedi ?
7 R. C'était après. Ce n'était pas tout de suite le vendredi parce qu'ils
8 étaient tous partis, et ça c'était après, après quand toute cette armée a
9 surgi.
10 Q. Est-ce que vous savez si cela s'est passé le lendemain ou plusieurs
11 jours après le départ de ces personnes ?
12 R. C'était après qu'ils sont arrivés ceux-là, un jour ou deux plus tard.
13 Après le vendredi, après ceux qui sont partis, l'armée a fait irruption
14 dans le village tout de suite le samedi, j'étais à la maison.
15 Q. Lorsqu'ils sont arrivés, vous dites dans votre déclaration qu'ils
16 tiraient partout. Est-ce qu'ils vous ont dit quelque chose ou est-ce que
17 vous leur avez dit quelque chose ?
18 R. Ils tiraient des coups de feu. Qu'est-ce qu'ils nous auraient dit ? Ils
19 circulaient dans le village et ils tiraient partout, et quand les gens
20 étaient là et qu'ils tiraient, les gens essayaient de s'abriter quelque
21 part. Qui allait parler ? Ils ne faisaient que tirer. Après ils faisaient
22 irruption dans les maisons et ils hurlaient. Je n'aime pas ces écouteurs,
23 je n'aime pas ce que j'ai sur la tête. J'aime bien voir.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est bizarre tout ça pour moi.
26 M. HEDARALY : [interprétation] Je ne sais pas, peut-être qu'il faudrait
27 baisser ou augmenter le volume. Je ne sais pas si c'est ça le problème.
28 Q. Dans votre déclaration, au paragraphe 4, vous faites référence au fait
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1 que certains des soldats vous ont appelé une mère chetnik. Et je crois
2 comprendre que vous avez apporté une correction à cette déclaration
3 aujourd'hui ?
4 R. Non. Ce n'est pas qu'ils m'ont dit que j'étais la mère d'un Chetnik,
5 c'est qu'eux ils m'ont dit que j'étais une pute chetnik, c'est ça que j'ai
6 dit et c'est ça qu'ils m'ont dit. Vous, maintenant, vous parlez de la mère.
7 Il ne manquait plus que ça.
8 Q. Merci. J'aimerais maintenant que nous parlions de ce qu'ont fait les
9 soldats, et je sais que cela risque d'être pénible, donc si vous avez
10 besoin d'une interruption, n'hésitez pas à le demander aux Juges, parce que
11 je veux m'assurer de bien comprendre la chronologie des événements.
12 Dans votre déclaration, vous faites référence au fait qu'un soldat vous a
13 forcée à vous déshabiller. Est-ce qu'il s'agit des mêmes soldats que ceux
14 qui vous ont traitée de pute chetnik ?
15 R. Qu'est-ce que je peux en savoir ? Il y en avait qui entrait, il y en
16 avait qui sortait. Je me souviens de certaines choses quand je les vois,
17 voyez-vous, mais on ne peut pas exiger que je sois aussi intelligente. Qui
18 est-ce qui peut savoir ça ?
19 Q. Combien de soldats croates sont entrés dans le village ce jour-là ?
20 R. C'est moi qui aurais dû les compter, qui est-ce qui aurait pu les
21 compter ? Qui est-ce qui aurait pu compter ? Il y en avait qui arrivait,
22 d'autres qui partaient. Qu'est-ce que je peux savoir combien ils étaient ?
23 Q. Est-ce qu'il s'agissait d'un groupe important, est-ce qu'ils étaient
24 plus qu'une dizaine, est-ce qu'ils étaient juste quelques-uns ?
25 R. Mon Dieu. Mon Dieu. Comment j'aurais pu ? Qui est-ce qui pouvait les
26 compter, Monsieur ? Qui est-ce qui aurait dû les compter ? Qu'est-ce que
27 j'en sais combien ils étaient ? Moi, j'étais là avec mes soucis à moi, je
28 ne les ai pas comptés, et je ne peux même pas vous dire comment j'aurais pu
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1 les compter. Je ne le sais pas. Ce n'est pas facile.
2 Q. Nous allons parler de Dusan Urukalo, votre voisin. Est-ce que vous
3 savez quel âge il avait à l'époque ? Est-ce qu'il était plus jeune que vous
4 ou plus âgé que vous ?
5 R. Plus vieux que moi. Lui est mort, le pauvre. Sa femme aussi est morte.
6 Q. D'accord.
7 M. HEDARALY : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir la pièce
8 5497 de la liste 65 ter à l'écran.
9 Monsieur le Greffier à Zagreb, je m'adresse à vous, il s'agit d'une série
10 de deux photographies qui figurent à l'intercalaire 4.
11 Q. Madame Urukalo, est-ce que vous voyez les photographies qui se trouvent
12 devant vous ?
13 R. Je les vois.
14 Q. Est-ce que cela représente la cour qui se trouve derrière votre maison
15 ?
16 R. Oui. A partir de la rue, devant la maison, ce panier de basket-ball,
17 quand ils nous ont faits déshabiller il a fallu que je joue. Il ne me
18 restait que mes chaussures et mes sous-vêtements, et le pauvre homme a dû
19 se mettre complètement nu.
20 M. HEDARALY : [interprétation] Est-ce que je pourrais demander le versement
21 au dossier de la pièce 5497 [comme interprété], Monsieur le Président.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'entends pas d'objections.
23 Monsieur le Greffier.
24 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela devient la pièce P965.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce P965 est versée au dossier.
26 M. HEDARALY : [interprétation]
27 Q. Madame Urukalo, je souhaiterais maintenant que parlions de l'arrivée de
28 votre petit-fils au village. Lorsqu'il est arrivé, est-ce que les autres
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1 soldats étaient encore là ?
2 R. Ils ont traversé le village et sont partis dans le village vers notre
3 coopérative. Ils ont circulé dans le village vers Marici, qu'est-ce que
4 j'en sais. Il y en avait trois que je n'ai pas reconnus. Ils ne voulaient
5 même pas parler avec moi, et moi je n'ai fait mal à personne.
6 Q. Lorsque votre petit-fils est arrivé, est-ce qu'il est arrivé tout seul
7 ou est-ce qu'il était avec d'autres soldats ?
8 R. Seul, il est venu seul. Comme on dit, dans cette auto de l'armée, je ne
9 sais pas comment ça s'appelle. Il est venu me voir, moi. Il n'a rien fait
10 de mal à personne. Il y avait des voisins, il n'y avait que des vieux parmi
11 les voisins et ils ont tous été tués, abattus, ceux qui étaient avec moi.
12 Q. Combien de temps après le départ des autres soldats ou quand après le
13 départ des autres soldats est arrivé votre petit-fils ?
14 R. Qu'est-ce que je sais, combien de temps de temps s'était passé. Pas
15 beaucoup. On ne pouvait pas arriver dans le village. Il avait à peine
16 atteint le milieu du village quand ils sont arrivés.
17 Q. Lorsque votre petit-fils est arrivé, est-ce que vous étiez encore
18 dévêtue ?
19 R. Quand je l'ai vu entrer avec un fusil, je n'avais pas pu m'habiller, ça
20 m'a affolée. Je ne savais même plus comment m'habiller. Quand il est entré,
21 j'étais tellement paniquée que je ne l'ai pas reconnu. Voilà ce qui s'est
22 passé. Lui, il s'est approché de moi, et il m'a dit qu'il allait les
23 chercher, et moi j'ai refusé. J'ai refusé qu'il aille les poursuivre pour
24 chercher qui avait fait ça.
25 Q. Est-ce que vous lui avez dit ce qui s'était passé ?
26 R. Je ne sais pas. J'étais tellement affolée, je ne sais pas ce que je lui
27 ai raconté.
28 Q. Est-ce que vous vous souvenez s'il vous a demandé ce qui s'était passé
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1 lorsqu'il a vu que vous n'aviez pas de vêtements ?
2 R. Il m'a demandé. Il m'a vue complètement dévêtue, et il a vu que je
3 pleurais. Il m'a demandé, évidemment.
4 Q. Est-ce que vous avez parlé à votre petit-fils récemment ?
5 R. Ça fait longtemps que je n'ai pas parlé avec lui, mon Dieu. Peut-être
6 la dernière fois, c'était quand il est venu me voir en dépit de son père et
7 de sa mère, qui ne voulaient pas.
8 Q. Est-ce que vous savez pourquoi son père et sa mère lui interdisent de
9 venir vous rendre visite ?
10 R. Parce qu'ils ont fait toutes sortes de choses chez moi. Ils ont tout
11 emporté; mon bétail, deux vaches, des veaux, des cochons, et tout le blé,
12 27 têtes de bétail en tout. Ils n'osent plus venir chez moi. Ils n'ont pas
13 le courage.
14 Q. Est-ce que vous savez si votre petit-fils sait que vous avez mentionné
15 son nom dans votre déclaration ?
16 R. Mais le pauvre, comment est-ce qu'il ne le saurait pas ? C'est peut-
17 être pour ça qu'ils ne viennent plus me voir. Evidemment, j'ai dû dire son
18 nom quand j'ai fait ma déclaration. Il n'y avait rien d'autre que je
19 pouvais dire.
20 Q. Lorsque vous dites "c'est pour cela qu'ils ne viennent pas me rendre
21 visite," est-ce que c'est quelque chose qu'ils vous ont dit ?
22 R. Peut-être que c'est pour ça qu'ils ne viennent pas me rendre visite.
23 Qu'est-ce que j'en sais ? Je ne sais pas moi. Tout ce que je sais, c'est
24 qu'ils ne viennent pas me voir.
25 Q. Est-ce qu'ils vous ont jamais expliqué pourquoi ils ne viennent pas
26 vous rendre visite ?
27 R. Non, il ne me l'a pas dit. Comment est-ce qu'il aurait pu savoir,
28 puisqu'ils n'étaient pas venus avec lui ? Comment il pouvait le savoir ?
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1 Q. Dans votre déclaration, vous mentionnez le fait que votre petit-fils a
2 écrit quelque chose sur les murs de votre maison lorsqu'il est venu dans le
3 village; est-ce exact ?
4 R. Oui. Ça, c'est écrit. C'est écrit quelque part. Il a écrit : Ne touchez
5 pas la grand-mère.
6 Q. Je vous montrerai la pièce qui se trouve à l'intercalaire 3 dans le
7 classeur de Zagreb et qui correspond à la pièce 5496 de la liste 65 ter.
8 Est-ce que vous pourriez confirmer qu'il s'agit bien du mur de votre maison
9 qui se trouve maintenant à l'écran ?
10 R. Oui. Je vois. Oui, c'est ça.
11 Q. Je ne sais pas dans quelle mesure nous pouvons voir cela à l'écran,
12 mais la Défense conviendra qu'il s'agit de --
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, ce n'est pas très, très lisible ou
14 visible, mais avec quelques efforts --
15 M. HEDARALY : [interprétation] Non, mais je pense que --
16 M. MISETIC : [interprétation] Je n'ai rien sur ma photographie.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais à l'écran vous pouvez voir
18 qu'il y a effectivement des lettres. Le témoin nous a dit quels sont les
19 mots qui sont apparemment écrits.
20 M. HEDARALY : [interprétation] Oui, mais le problème vient du fait qu'elle
21 est analphabète, donc elle ne peut pas exactement vous dire ce qui y est
22 écrit.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
24 M. HEDARALY : [interprétation] J'ai la déclaration de la personne qui a
25 pris la photographie, donc je peux vous lire les mots qui se trouvent sur
26 ce mur.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ça. Je suis illettrée et je ne sais pas.
28 M. HEDARALY : [interprétation] Que --
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis-je supposer que, sans compter sur
2 le témoin, les parties vont se mettre d'accord à propos de ce qui est
3 écrit. Je peux déchiffrer. Je vois que ça commence par un N, puis ensuite
4 il y a un E. C'est un peu difficile. Il y a N, E, R ou R, I, R --
5 M. HEDARALY : [interprétation] Je pense qu'il est indiqué : Ne touchez pas,
6 et ensuite HV 142, puis ensuite occupé --
7 M. MISETIC : [interprétation] J'aimerais avoir une petite minute pour
8 pouvoir consulter cela. Je suis d'accord avec tout ce qui vient d'être dit,
9 mais je n'arrive pas à déchiffrer les derniers mots.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais ce n'est pas la peine
11 d'importuner le témoin avec ceci, parce que de toute façon elle ne peut pas
12 nous aider à ce sujet.
13 Monsieur Hedaraly.
14 M. HEDARALY : [interprétation] Oui, je souhaiterais demander le versement
15 au dossier de la pièce 5496 de la liste 65 ter, et j'ai plus de questions à
16 poser.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a pas d'objections.Monsieur le
18 Greffier.
19 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela deviendra la pièce P966.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. La pièce P966 est versée au
21 dossier.
22 M. HEDARALY : [interprétation]
23 Q. Je vous remercie, Madame Urukalo. Je n'ai plus de questions à vous
24 poser, mais il se peut que d'autres personnes souhaitent vous poser des
25 questions.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Urukalo, est-ce que vous me voyez
27 à nouveau ? Je suis la personne qui apparaît à votre écran et qui porte
28 cette robe rouge.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous vois.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'autres questions vont maintenant vous
3 être posées par les conseils de la Défense. Donc il ne s'agit pas de la
4 même personne à qui vous venez de parler. Il ne s'agit pas de M. Hedaraly,
5 bien qu'ils soient habillés comme lui.
6 J'aimerais savoir ce qu'il en est -- oui, Maître Misetic.
7 Le premier conseil de la Défense va maintenant vous poser quelques
8 questions. Il s'agit de Me Misetic. Regardez votre écran, vous allez le
9 voir maintenant, et il va vous poser quelques questions.
10 Maître Misetic.
11 M. MISETIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
12 Contre-interrogatoire par M. Misetic :
13 Q. [interprétation] Bonjour, Madame Urukalo.
14 R. Bonjour.
15 M. MISETIC : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir la pièce
16 1D00-0410.
17 Q. Madame Urukalo, est-ce que vous vous souvenez être allée chez un
18 notaire public le 15 novembre 1995, et vous avez ainsi autorisé votre fils
19 Dane Siklic et votre belle-fille Slavka Siklic à gérer et s'occuper de vos
20 biens ?
21 R. Ils m'ont tirée jusqu'à Sibenik pour que je leur donne par écrit tout
22 ce que j'avais dans la maison. Ils m'ont trompée, moi, une pauvre vieille,
23 pour en profiter, eux.
24 Q. Quelques --
25 R. Ils ont fait ce que personne d'autre n'aurait fait.
26 Q. Il s'agissait de votre bétonneuse et de cet instrument de labour.
27 R. Oui. Oui. L'instrument de labour, oui.
28 Q. [hors micro]
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, la première partie de
2 votre question n'a pas été reprise dans le compte rendu d'audience, parce
3 que l'interprétation n'était pas terminée. Donc n'oubliez pas de faire un
4 temps d'arrêt.
5 M. MISETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Moi aussi, je n'ai pas compris les deux
7 dernières questions. Je les ai ratées.
8 M. MISETIC : [interprétation] Je dirais juste aux fins du compte rendu
9 d'audience qu'à la ligne 22, la question était : Est-ce qu'ils ont aussi
10 pris votre bétonneuse ainsi que l'instrument avec lequel vous labouriez ? A
11 la page 15, ligne première, la question était : Est-ce qu'ils ont également
12 pris certaines têtes de votre bétail ?
13 Q. Madame Urukalo, nous allons reprendre et commencer par le bétail. Est-
14 ce qu'ils ont pris certaines de vos bêtes ?
15 R. Ils ont tout emporté, tout ce que j'avais. C'est pour ça qu'ils n'ont
16 plus le courage de venir chez moi. Ils m'ont dit que je devais avoir 100
17 marks allemands qu'ils allaient me donner, mais je n'ai jamais vu le
18 moindre sou venant d'eux, mon Dieu.
19 Q. Pour ce qui est de ces têtes de bétail, il y avait Des moutons, des
20 vaches, des veaux ainsi que des cochons ?
21 R. Deux vaches, deux veaux, deux cochons qui étaient gros comme des loups.
22 Ce que je regrette le plus, c'est qu'ils m'ont pris quatre cochons qui
23 appartenaient à mon témoin de mariage. Il était censé aller dans un autre
24 village, pas le village où il a servi de témoin au mariage.
25 Q. Je ne sais pas si la Cour aimerait que je traduise le terme "kum" ?
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, cela est le signe d'une relation
27 spéciale telle qu'avec un parrain, par exemple.
28 M. MISETIC : [interprétation]
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1 Q. Madame Urukalo, lorsqu'ils vous ont conduite à Sibenik, est-ce que vous
2 vous souvenez avoir mis votre empreinte digitale sur un document dans le
3 bureau du notaire publique le 15 novembre 1995 ?
4 R. Mais tout ce qu'ils m'ont dit de faire, moi, pauvre que je suis, je
5 l'ai fait, et maintenant voilà ce qui se passe. On me reproche.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites que vous avez fait ce qu'ils
7 vous ont demandé de faire, puis vous avez ajouté quelque chose, Madame.
8 Est-ce que vous pourriez répéter ce que vous avez ajouté.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Qu'est-ce que je vais répéter ? Tout ce
10 qu'ils me demandaient, tout ce qu'ils disaient au notaire, qu'est-ce que je
11 savais, moi, qu'est-ce que je pouvais rendre à qui que ce soit, à mes
12 enfants, parce que tout ce qu'on me disait, il fallait que je le fasse.
13 Quand il a écrit sur le papier les chaises et la table de la cuisine, alors
14 il n'y a plus rien, il n'y a plus d'espoir. Comment rendre l'espoir ? On
15 l'attendait comme un ministre, quand il est arrivé dans ma maison.
16 M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaiterais
17 demander que la pièce 1D00-0410 soit attribuée une cote.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Mon Dieu, pauvre de moi, pourquoi est-ce que
19 je suis née.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur le Greffier.M. LE GREFFIER
21 : [interprétation] Cela devient la pièce D838.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D838 est versée au dossier.
23 M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, est-ce que nous
24 pourrions avoir la pièce 1D00-0414.
25 Page 2 de la version anglaise, je vous prie. Dans un premier temps, la
26 première page, pour que la Chambre puisse voir cette première page. Il
27 s'agit d'une déclaration de témoin de la Défense, témoin à décharge. Il
28 s'agit de la déclaration du petit-fils de Mme Urukalo; Joska Siklic. Alors
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1 j'aimerais que l'on affiche la page suivante.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous l'intention de verser ce
3 document au dossier ?
4 M. MISETIC : [interprétation] Non, mais je pense qu'il est beaucoup plus
5 juste de présenter le document au témoin, ensuite, si nous devons convoquer
6 M. Siklic, au moins sa déclaration aura été présentée au témoin.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.
8 M. MISETIC : [interprétation]
9 Q. Madame Urukalo, votre petit-fils Joska a fait une déclaration également
10 à propos de ce qui s'est passé le 6 août. Il a dit qu'il est arrivé le 6
11 août et que lui-même ainsi que d'autres membres du 6e Régiment de la Garde
12 nationale sont arrivés dans votre hameau, il s'agit du paragraphe 7, et que
13 vous lui avez offert ce dont vous disposiez, à savoir essentiellement du
14 jambon fumé, du vin et du schnaps.
15 C'est ce que vous vous souvenez de cela, de cette journée du 6 août ?
16 R. Oui, puisqu'il venait tous les jours. Il n'est pas venu seul
17 jusqu'à ce qu'il soit chassé.
18 Q. Lorsque vous dites "qu'il a été chassé", qu'est-ce que vous voulez dire
19 exactement, vous voulez dire que quelqu'un le conduisait chez vous tous les
20 jours; c'est cela ?
21 R. Il venait seul, il avait sa voiture à lui. Il a une voiture encore
22 aujourd'hui.
23 Q. Aux paragraphes 8 et 9 de sa déclaration, voilà ce qu'il dit : "Pendant
24 mon séjour là-bas, je n'ai observé aucun sévice et personne n'a fait
25 référence à des sévices.
26 "Ma grand-mère n'a jamais mentionné à ce moment-là qu'elle avait fait
27 l'objet de sévice de la part des soldats de la HV. Ma grand-mère ne m'a
28 jamais dit" --
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1 R. Maintenant, il est obligé de mentir. Je ne l'aurais pas dit, c'est
2 peut-être eux qui l'ont dit, personne n'aurait rien su de cela si ça ne
3 s'était pas passé comme ça. Maintenant c'est le moment, sa grand-mère, sa
4 grand-mère de sa famille, mon Dieu.
5 Q. Voilà ce qu'il dit : "Ma grand-mère ne m'a jamais dit qu'on l'avait
6 forcée à se déshabiller et à ne garder que ses sous-vêtements et n'a pas
7 mentionné en plus le fait qu'elle a dû jouer au basket avec quelqu'un."
8 R. Moi, je vais te dire, j'espère qu'il était sain d'esprit quand il a dit
9 une chose pareille, c'est moi qui te le dis.
10 M. MISETIC : [interprétation] Page suivante, je vous prie.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je prie Dieu pour que personne d'autre ne vive
12 la même chose une nouvelle fois, eux ils n'ont qu'à avoir honte, mais ce
13 qui s'est passé s'est passé.
14 M. MISETIC : [interprétation]
15 Q. Au paragraphe 15, --
16 R. C'est eux qui se mettent là-dedans et après ils se plaignent.
17 Q. Au paragraphe 15, voilà ce qu'il dit : "Ma famille s'est occupée de ma
18 grand-mère pendant toute cette période. Elle nous a autorisés à gérer ses
19 biens, ce qu'elle a par la suite certifié dans un bureau de notaire public
20 le 15 novembre 1995."
21 Est-ce que votre famille s'est occupée de vous à partir de l'opération
22 Tempête jusqu'au 15 novembre 1995 ?
23 R. Puisqu'on a été chassé.
24 Q. Qu'est-ce qu'ils vous ont forcée à faire ?
25 R. Elle a tout emporté -- ils ont tout enlevé, tout ce que j'avais dans ma
26 maison. Ils n'ont rien laissé quand ils sont venus me voir. Pour eux,
27 j'aurais aussi bien pu être morte. J'aurais pu souhaiter la même chose pour
28 eux, alors ils voyaient un petit peu comment je me sens maintenant.
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1 Q. J'aimerais vous poser une dernière question, votre petit-fils a
2 également dit : "Je n'ai rien écrit sur les murs de la maison de ma grand-
3 mère et je ne vois pas pourquoi j'aurais dû le faire."
4 Est-ce que vous savez qui a écrit cela sur le mur de votre maison ?
5 R. Mais c'est personne d'autre que sa main à lui. Il n'y a pas besoin de
6 faire semblant, vous voyez comment ils nous mentent, voilà.
7 M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président --
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils n'ont qu'à venir et mettre le feu,
9 d'ailleurs c'est ce qui va se passer, après tout ce qu'il m'a fait, il faut
10 le finir.
11 M. MISETIC : [interprétation] Au vu de la décision rendue par la Chambre,
12 je pense aux décisions qui ont été prises précédemment, nous n'allons pas
13 demander le versement au dossier de cette pièce à conviction. J'en ai
14 terminé.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.
16 Qu'en est-il des autres équipes de la Défense.
17 M. KAY : [interprétation] Je n'ai pas de questions.
18 M. MIKULICIC : [interprétation] Je n'ai pas de questions non plus.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly.
20 M. HEDARALY : [interprétation] Je n'ai pas de questions supplémentaires à
21 poser.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Urukalo…
23 [La Chambre de première instance se concerte]
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Urukalo, il se peut que les Juges
25 aient une ou deux questions à vous poser.
26 Dans un premier temps, nous avons Mme le Juge Gwaunza qui a une, voire
27 plusieurs questions à vous poser. Il s'agit de Mme le Juge Gwaunza et vous
28 allez la voir sur votre écran.
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1 Questions de la Cour :
2 Mme LE JUGE GWAUNZA : [interprétation] Vous dites qu'on vous a traînée
3 jusqu'au bureau du notaire public pour que vous signiez, pour que votre
4 propriété passe à votre fils. Alors j'aimerais vous poser une question,
5 est-ce que vous n'auriez pas pu tout simplement refusé de vous y rendre et
6 de signer ?
7 R. Mais ce n'est pas moi qui l'ai voulu, c'est lui qui m'a convaincue et
8 qui m'a emmenée pour le faire, et il l'a fait parce qu'il le voulait. Parce
9 qu'après ils pouvaient faire ce qu'ils voulaient de moi. Qu'il ait honte.
10 Mme LE JUGE GWAUNZA : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous dire
11 quand est-ce qu'ils vous ont pris la propriété de votre maison ?
12 R. Chaque fois qu'il venait, il emportait quelque chose. Qu'est-ce que je
13 peux en savoir, je ne peux pas me rappeler tout ça. J'ai mal au cœur déjà
14 quand j'entends ce qu'on me dit, qu'on me le rappelle.
15 Mme LE JUGE GWAUNZA : [interprétation] Je vous remercie.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Urukalo, j'aimerais vous poser
17 une question également.
18 Nous avons vu la photographie de votre maison avec ces mots qui étaient à
19 peine visibles, et j'ai l'impression que cela a été couvert d'une couche de
20 peinture blanche. Est-ce que vous avez vu cela ?
21 R. A la chaux, à la chaux ça a été recouvert. On a mis du blanc pour qu'on
22 ne le voie plus sur la maison. Quand les soldats sont venus, ils m'ont dit
23 que je pouvais me torcher le cul avec, que ça n'avait aucune validité, que
24 ça ne valait rien. Moi, je ne voulais plus le voir. Voilà tout ce que j'ai
25 vécu, tout ce que j'ai dû vivre.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que c'est vous qui avez passé à
27 la chaux ces mots, est-ce que c'est vous-même qui avez fait cela ?
28 R. Non, non, ce n'est pas moi qui l'ai fait. Je ne sais plus, peut-être
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1 que c'est mon petit-fils qui l'a fait, qui a passé ça à la chaux pour que
2 ça ne se voie plus, parce que cette fameuse tempête, elle a été terminée,
3 il ne fallait plus le voir. Ils ont fait tellement de choses qu'ils
4 auraient même pu tuer mon fils. Il y a la moitié du monde qui le connaît.
5 Il ne leur a rien fait. Il était chauffeur, il travaillait très dur dans la
6 maison, lui et ma fille. Ce n'est pas lui qui a fait du mal, mais il a
7 attrapé un pickpocket dans un grand magasin. On a écrit là-dessus dans les
8 journaux. Il a été attrapé le soir.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vos autres enfants continuent
10 à venir vous rendre visite ?
11 R. Comment est-ce que moi je pourrais leur rendre visite, je ne peux pas
12 bouger, moi. J'ai peur avec les bagages, avec les sacs, avec tout. Moi,
13 j'ai tiré avec moi tout ce que j'ai pu tirer, et tous ceux qui m'ont vu
14 disent oui, tu as tout retiré. Maintenant, on me jette de la honte. Les
15 étables et les cochons et tout, ils m'ont tout pris, tout ce qu'il y avait
16 sur terre. Je les ai aidés. Je les ai toujours aidés. Mon mari est mort et
17 il a travaillé 23 ans. Il nous a aidés à l'étranger.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Urukalo, je n'ai plus de
19 questions à vous poser, étant donné que M. Hedaraly n'a plus de questions à
20 vous poser, nous en avons terminé avec votre déposition.
21 Madame Urukalo, je comprends parfaitement qu'il ne vous a certainement pas
22 été facile à votre âge d'être venue témoigner. Je vous remercie vivement
23 d'être venue --
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous pouvez me croire, ça n'a pas été facile,
25 croyez-moi, ce n'était pas facile, je suis triste, et plus que triste. Sur
26 ces vieux jours, si vieille vivre quelque chose qui n'était pas nécessaire
27 pour moi, et que moi, pauvre de moi on me maltraite.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Urukalo, j'aimerais une fois de
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1 plus vous remercier d'être venue et j'aimerais vous remercier d'avoir
2 répondu à ces questions --
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Grand merci à vous aussi.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous en avez terminé avec cette
5 déposition. Nous allons donc mettre un terme à cette vidéoconférence.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci à vous aussi.
7 [Fin de la déposition du témoin par vidéoconférence]
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Hedaraly.
9 M. HEDARALY : [interprétation] Je pense que le témoin suivant est à temps,
10 il est là; M. Margetts est également présent. Je ne sais pas, nous pouvons
11 poursuivre ou faire une pause maintenant.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons eu une heure d'audience.
13 Peut-être qu'il serait en effet plus judicieux de faire une pause un peu
14 prématurée et nous reprendrons après.
15 Nous reprendrons à 15 heures 35.
16 --- L'audience est suspendue à 15 heures 12.
17 --- L'audience est reprise à 15 heures 45.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Faites entrez le témoin.
19 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Buhin.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous rappelle que vous êtes toujours
23 tenu de respecter la déclaration solennelle faite au début de votre
24 déposition.
25 Maître Mikulicic, je vois l'heure et j'ai à l'esprit ce que vous avez dit
26 hier.
27 Veuillez poursuivre.
28 M. MIKULICIC : [interprétation] Je l'aurai à l'esprit aussi.
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1 LE TÉMOIN: STJEPAN BUHIN [Reprise]
2 [Le témoin répond par l'interprète]
3 Contre-interrogatoire par M. Mikulicic : [Suite]
4 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Buhin.
5 R. Bonjour.
6 Q. Je ne sais pas s'il faut dire Buhin ou Buhin. Je ne voudrais pas mal
7 prononcer votre nom.
8 R. Buhin est la prononciation régulière, mais étant donné que j'ai grandi
9 à Vukovar, je me suis habitué à l'autre manière de prononcer mon nom. Peu
10 importe.
11 Q. Hier, nous avons, à la fin de la journée, parlé au sujet de Grubori, et
12 maintenant j'aimerais néanmoins vous poser encore quelques questions à ce
13 sujet.
14 Tout d'abord, est-ce que vous saviez que dès que l'incident survenu à
15 Grubori a été signalé, M. Mihic, le chef du poste de police à Knin, et M.
16 Romanic, le chef de l'administration de la police, s'étaient rendus sur les
17 lieux du crime, sur le terrain ?
18 R. Je ne le savais pas. Tout ce que je sais, c'est qu'une patrouille a été
19 dépêchée et qu'elle n'a pas réussi à retrouver le hameau de Grubori.
20 Q. Vous avez dit que vous vous êtes rendu à la base de l'ONU pour avoir un
21 certain nombre d'entretiens là-bas. Est-ce que vous pourriez nous dire
22 quand est-ce que cela s'est passé par rapport au jour où l'incident survenu
23 à Grubori vous a été signalé ? Nous avons vu hier que vous l'avez appris le
24 25 dans l'après-midi.
25 Quand est-ce que vous vous êtes rendu à la base de l'ONU ?
26 R. Le 26, le matin, vers 9 heures, moi et mon collègue Baric nous nous
27 sommes rendus à la base et nous avons eu un entretien avec les policiers de
28 l'ONU.
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1 Q. Quelle était la raison pour laquelle vous vous êtes rendus là-bas, vous
2 et votre collègue Baric ?
3 R. Eux, ils nous ont dit qu'il y avait des cadavres à Grubori, et nous
4 avons supposé qu'ils s'étaient rendus sur place et que c'était eux qui
5 pouvaient nous emmener là-bas pour nous montrer où étaient les cadavres.
6 Q. Et quel était le résultat de votre entretien ? Est-ce qu'ils ont
7 effectivement confirmé qu'ils s'étaient rendus sur les lieux ? De quoi
8 avez-vous parlé ?
9 R. Oui. Ils ont confirmé qu'ils s'étaient rendus sur place et qu'ils
10 étaient prêts à nous y emmener. Nous nous sommes mis d'accord que nous
11 allions nous retrouver vers une heure l'après-midi, et ils nous ont donné
12 trois heures pour nous organiser pour prévoir l'arrivée d'un juge
13 d'instruction de Zadar et pour que nous puissions organiser une équipe pour
14 dresser le constat, afin de nous rendre ensemble sur les lieux.
15 Q. Mais cela ne s'est jamais produit, n'est-ce pas ?
16 R. Oui, comme je vous l'ai dit, vers 12 heures, à midi donc, nous avions
17 eu un entretien avec M. Sacic. M. Moric nous a contactés par téléphone, et
18 cette idée a été abandonnée, même si entre-temps, nous nous sommes mis
19 d'accord avec M. Cetina comment procéder.
20 Q. Merci. Dans votre déclaration, c'est la pièce P963 --
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Mikulicic, on me signale qu'il
22 faut vous approcher du micro.
23 M. MIKULICIC : [interprétation] Je vais essayer.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voulais vous demander quelque chose
25 au sujet de votre dernière réponse, Monsieur Buhin.
26 Quelle idée a été abandonnée ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Cet accord que nous avons conclu, à savoir
28 qu'un juge d'instruction et une équipe d'enquête allaient se rendre à Knin.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc on a abandonné l'idée selon
2 laquelle une équipe d'enquête allait être envoyée sur les lieux. Et vous
3 dites : "Même, si entre-temps, on s'était mis d'accord avec M. Cetina que
4 tout allait être réalisé."
5 D'une part, vous dites que l'idée a été abandonné, mais d'autre part vous
6 avez convenu que vous vous êtes mis d'accord que tout allait être réalisé.
7 Comment dois-je comprendre votre réponse ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit que je m'étais mis d'accord avec M.
9 Cetina qu'un juge d'instruction et une équipe allaient venir sur les lieux,
10 et vers midi lorsque M. Moric a téléphoné il a dit que moi et M. Baric nous
11 n'allions pas nous mêler des affaires de la police judiciaire. Il me l'a
12 dit à moi personnellement. Du coup, moi, j'ai arrêté de m'intéresser à
13 cette affaire. Je n'ai pas contacté la police de l'ONU ni qui que ce soit
14 au sujet de cette affaire.
15 C'est ce que je voulais dire lorsque j'ai dit que nous avions abandonné ce
16 qui était convenu.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A partir de ce moment-là, vous dites que
18 l'idée avait été abandonnée d'envoyer une équipe d'enquête. C'est ce que
19 vous dites ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. A partir de ce moment-là, à partir du
21 moment où M. Moric m'a appelé par téléphone, moi, je ne m'occupais plus de
22 l'événement survenu à Grubori et je n'étais plus en contact avec la police
23 de l'ONU.
24 Je n'ai pas suivi cette affaire à partir de ce jour-là. Je ne sais pas ce
25 qui s'était passé par la suite.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'idée d'envoyer une équipe d'enquête
27 qui avait été abandonnée ou pas, vous dites que vous, vous êtes retiré
28 vous-même et que vous n'aviez plus rien à faire avec cette affaire. Le fait
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1 de savoir si cette idée ait été abandonnée ou pas, est-ce que vous le savez
2 si elle a été abandonnée ou pas ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, j'ai dit que nous avons abandonné l'idée
4 convenue lors de la rencontre avec la police de l'ONU, et que la police
5 régulière allait se rendre sur les lieux. Mais tous les autres accords sont
6 restés au niveau des contacts entre M. Cetina et la police.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître Mikulicic.
8 M. MIKULICIC : [interprétation]
9 Q. Si je vous ai bien compris, lorsque vous dites que cette idée a été
10 abandonnée, vous voulez dire que l'idée selon laquelle vous-même vous
11 deviez être engagé en espèce, et après avoir parlé de la chose avec M.
12 Moric, il a été conclu selon ses consignes, que c'était la police
13 judiciaire qui devait s'en charger et non pas la police régulière, n'est-ce
14 pas ?
15 R. Oui.
16 Q. Merci de votre explication.
17 Une autre chose, est-ce que vous saviez que ce jour même, le jour où
18 l'incident est survenu à Grubori, une réunion a été organisée par l'ONU
19 avec les locaux dans l'école de Plavno au sujet d'un certain nombre de
20 problèmes de sécurité qui prévalaient dans la vallée de Plavno ? Le saviez-
21 vous ?
22 R. Je ne m'en souviens pas. Mais probablement je n'en étais pas informé.
23 Q. D'accord. Monsieur Buhin, dans votre déclaration, c'est à la page 5,
24 l'avant-dernier paragraphe de la pièce P963, vous avez dit que par la
25 suite, et c'est à la page 6, au deuxième paragraphe de la version en
26 anglais, vous avez appris que les meurtres commis à Grubori n'avaient pas
27 été traités en tant qu'affaire criminelle.
28 Quand est-ce que vous avez appris cela ?
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1 R. Je l'ai appris une fois que je suis rentré travailler au sein du
2 ministère de l'Intérieur à Zagreb lorsque j'en ai parlé avec mes collègues
3 de la police judiciaire qui s'étaient chargés de l'affaire.
4 Q. Avez-vous appris, ou plutôt, est-ce qu'aujourd'hui vous savez que
5 l'enquête au sujet de l'événement survenu à Grubori est une affaire qui
6 n'est toujours pas close au sein du bureau du Procureur à Sibenik ?
7 R. Je ne le sais pas. Je n'ai pas de connaissance à ce sujet.
8 Q. Vous avez dans votre déclaration parlé des meurtres survenus dans le
9 village de Gosic, et vous avez dit même que vous y étiez rendu
10 personnellement avec M. Romanic et d'autres personnes.
11 Cet incident, ainsi que l'incident de Varivode, a fait l'objet d'une
12 enquête conjointe de la police judiciaire militaire et de la police
13 judicaire du ministère de l'Intérieur. Le savez-vous ?
14 R. Je me souviens de cet incident, mais s'agissant des détails, je sais
15 qu'un constat a été dressé sur les lieux. Mais je ne me souviens pas des
16 détails. Je ne sais pas qui y avait participé.
17 Q. Nous avons déjà examiné un certain nombre de pièces à ce sujet.
18 J'attire votre attention à la pièce D802, qui montre qu'une action a été
19 engagée, une action au sujet de Varivode, dans le cadre de laquelle il
20 était fixé quelles étaient les missions confiées à la police militaire et
21 quelles étaient les missions confiées à la police civile.
22 A ce sujet, vous avez dit que personne ne vous avait appelé pour déposer au
23 sujet des meurtres survenus à Gosic. Vous n'étiez pas un témoin oculaire de
24 ces événements, n'est-ce pas ?
25 R. Non. Avec les membres de la police régulière, je m'étais rendu sur les
26 lieux. Nous avons établi un périmètre conformément aux règlements de la
27 police régulière, et tout le reste a été réalisé par les membres de la
28 police judiciaire.
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1 Q. Vous n'avez pas participé à l'enquête criminelle, n'est-ce pas ?
2 R. Non.
3 Q. Conviendrez-vous, Monsieur Buhin, qu'il n'est pas habituel qu'un membre
4 de la police soit appelé à déposer dans une affaire s'il n'était pas
5 oculaire d'un événement, ou s'il n'avait pas de connaissances pertinentes
6 en l'espèce. En conviendrez-vous ?
7 R. Oui.
8 Q. Le fait que vous n'ayez pas été appelé pour déposer au sujet des
9 meurtres survenus à Varivode et Gosici, il n'y a rien d'inhabituel là-
10 dedans, n'est-ce pas ?
11 R. Non, je n'ai pas été surpris et je ne vois pas pourquoi je serais
12 appelé à déposer.
13 Q. Merci. Par la suite, je me réfère à votre déclaration dans laquelle
14 vous avez dit que le gouvernement croate, par le biais du ministère de
15 l'Intérieur, a confié une tâche à la police, à savoir de protéger les biens
16 et les gens. Est-ce que vous vous en souvenez ?
17 R. Oui. Ce sont des tâches de base confiées à la police régulière.
18 Q. C'est à la page 7 en anglais, le troisième paragraphe.
19 Lors de votre déposition, vous avez dit que la police avait rencontré
20 un certain nombre de problèmes parce qu'il n'y avait pas suffisamment de
21 gens, compte tenu du terrain qui était partiellement miné, parce qu'elle ne
22 connaissait pas suffisamment bien le terrain, parce que les membres de la
23 police n'avaient pas suffisamment d'expérience, n'étaient pas suffisamment
24 bien formés. Donc il est évident que la police devait fixer un certain
25 nombre de priorités, si je ne m'abuse; c'est cela, n'est-ce pas ?
26 R. Oui. Compte tenu de notre nombre et des équipements techniques et
27 d'autres circonstances, c'est exactement ce que nous devions faire.
28 Q. Brièvement, quelles étaient ces priorités ?
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1 R. C'était d'abord sécuriser les installations d'importance fondamentale
2 qui se trouvaient sur le terrain, puis sécuriser les installations où
3 étaient cantonnés les membres de la police, puis le bâtiment appartenant au
4 poste de police et à l'administration de la police, puis établir les points
5 de contrôle pour contrôler les voies routières principales. Puis le peu de
6 policiers qui nous restaient étaient utilisés pour organiser les
7 patrouilles, et ils procédaient uniquement à des patrouilles spécifiques et
8 ne patrouillaient pas de manière générale.
9 Q. Lorsque vous parlez des installations vitales, est-ce que vous parlez
10 des bâtiments, des biens culturels et religieux et des usines, et cetera ?
11 R. Oui, parce que justement à Kistanje, il se trouve un monastère qui
12 n'était pas endommagé, et nous y avons placé un certain nombre de policiers
13 pour le sécuriser. Puis il y a une école qui se trouve à Kistanje qui
14 n'était pas endommagée. Nous y avons placé un certain nombre de policiers
15 également. A Kistanje se trouvait une usine, je ne me souviens plus de
16 laquelle il s'agissait, puis nous avons sécurisé également plusieurs
17 bâtiments importants.
18 Q. D'après vos souvenirs, avez-vous eu l'occasion de retrouver un certain
19 nombre de dépôts où se trouvaient les équipements militaires de l'armée de
20 la Republika Srpska Krajina ?
21 R. Non, mais nous n'avons pas eu l'occasion de découvrir de dépôts. Par la
22 suite, nous avons découvert un dépôt utilisé par les policiers de Martic,
23 et nous l'avons sécurisé.
24 Q. Est-ce que vous vous souvenez que par la suite on a trouvé un certain
25 nombre de munitions et d'armes ?
26 R. Je ne m'en souviens pas.
27 Q. Dans le préambule, nous avons parlé des tâches de base qui vous étaient
28 confiées, et c'était justement de mettre en place la politique du
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1 gouvernement croate, politique que le gouvernement croate voulait mener par
2 le biais de la police, et cetera.
3 M. MIKULICIC : [interprétation] Mais j'aimerais maintenant qu'on passe à
4 huis clos partiel, parce que j'aimerais vous montrer la pièce P501. Il
5 s'agit d'une pièce versée sous pli scellé.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous passons à huis clos partiel.
7 M. MIKULICIC : [interprétation]
8 Q. Comme vous vous en rappellerez --
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une seconde, une seconde.
10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur
11 le Président.
12 [Audience à huis clos partiel]
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1 [Audience publique]
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Greffier.
3 M. MIKULICIC : [interprétation]
4 Q. Conviendrez-vous avec moi que moyennant ces consignes, c'est l'idée à
5 laquelle vous avez fait référence qui était mise en œuvre, à savoir que le
6 gouvernement chargeait le MUP de toutes les missions relatives à la défense
7 des biens individuels ?
8 R. Oui. C'était les missions les plus importantes qui relevaient également
9 des diverses dispositions de la Loi sur les affaires intérieures.
10 Q. Est-ce qu'à un certain moment durant votre travail vous auriez appris
11 que le gouvernement de la République de Croatie, par le truchement du
12 ministère de l'Intérieur, avait pris des mesures ou entrepris des actions
13 visant à dissimuler ou couvrir des crimes de quelque nature que ce soit, ou
14 auriez-vous trouvé peut-être un élément susceptible de vous fournir ce
15 genre d'indication ?
16 R. Non, jamais.
17 Q. Monsieur Buhin, avez-vous communiqué officiellement avec le général
18 Markac dans quelque situation que ce soit ?
19 R. Non, je n'ai jamais communiqué avec lui oralement. Nous nous sommes
20 simplement rencontrés dans les bureaux du ministère où nous nous croisions.
21 Je le connaissais de vue et nous n'avons jamais communiqué ensemble.
22 Q. Je vous remercie de vos réponses.
23 M. MIKULICIC : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de
24 questions pour le témoin.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je remercie, Maître Mikulicic.
26 Monsieur Buhin, vous allez maintenant être contre-interrogé par Me
27 Misetic, conseil de M. Gotovina, en tout cas dès le moment où il aura
28 installé le mobilier dont il a besoin pour ce faire.
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1 M. MISETIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
2 Contre-interrogatoire par M. Misetic :
3 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Buhin.
4 R. Bonjour.
5 Q. J'aimerais commencer par revenir sur un sujet déjà abordé hier. Vous
6 rappelez-vous que Me Kay vous a demandé si M. le ministre Jarnjak ne
7 s'était jamais trouvé à Knin, et que vous avez répondu qu'à votre
8 connaissance il ne s'était plus trouvé à Knin après l'opération Tempête
9 pendant la durée de votre séjour à Knin. Ceci est-il exact ?
10 R. Exact.
11 Q. Etiez-vous présent lorsque la plaque a été apposée à Knin le 6 août en
12 l'honneur de la direction de la police de Knin ?
13 R. Je me souviens seulement du fait que cela ne s'est pas passé le 6. Deux
14 ou trois jours plus tard M. Moric est arrivé. Il avait sur lui les plaques
15 que nous avons apposées. Je ne me souviens plus si avant mon arrivée la
16 plaque de "la direction de la police" était déjà apposée sur le bâtiment de
17 la police.
18 Q. D'accord.
19 M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, j'aimerais que l'on
20 diffuse, à l'intention du témoin, la vidéo qui constitue la pièce D227.
21 [Diffusion de la cassette vidéo]
22 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
23 "Monsieur le Chef, permettez-moi de vous remettre ceci, qui est une
24 plaque sur laquelle sont écrits les mots 'République de Croatie, ministère
25 de l'Intérieur, direction de la police de Knin.' La Loi constitutionnelle
26 sur les minorités ethniques prévoit que Knin constitue un district et
27 qu'une direction de la police soit créée à Knin.
28 Etant donné que selon la même loi il n'existe pas encore l'assemblée
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1 qui devrait proposer la nomination du chef de la police au nom du
2 gouvernement de Croatie, vous êtes nommé au poste de chef de la police en
3 exercice jusqu'aux élections, après quoi l'assemblée proposera le nom d'un
4 chef au gouvernement de la République de Croatie. Jusqu'à cette date,
5 j'agis au nom de la constitution de la République de Croatie et en
6 application des lois de la police en créant les autorités civiles de Knin
7 et dans le secteur où vous remplissiez vos responsabilités, la direction de
8 la police. Vous êtes associé à la direction de la police de Zadar.
9 Je vous félicite."
10 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, le mot félicite a été interprété.
12 Veuillez poursuivre, Maître.
13 M. MISETIC : [interprétation] Je vous remercie.
14 Q. Monsieur Buhin, vous rappelez-vous avoir assisté à cette cérémonie ?
15 R. Je suis très certain de ne pas y avoir assisté. Ceci c'est sans doute
16 passé dans les premières heures de la matinée du 6 août, avant l'arrivée
17 sur les lieux de M. Baric et de moi-même à Knin. C'est la raison pour
18 laquelle cette cérémonie n'est pas restée dans ma mémoire.
19 Q. D'accord. Est-il exact dans ces conditions que M. Romanic était déjà à
20 Knin lorsque vous y êtes arrivé ?
21 R. Exact. C'est lui qui a reçu des mains de M. Jarnjak la plaque sur
22 laquelle étaient écrits les mots "Direction de la police".
23 Q. D'accord. J'aimerais également parler avec vous du sujet dont vous avez
24 discuté avec M. Margetts qui concerne le moment où les civils ont commencé
25 à revenir à Knin. J'aimerais d'abord vous soumettre une série de documents,
26 après quoi je vous poserais des questions au sujet de ces documents.
27 M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, je demande l'affichage
28 sur les écrans de la pièce P352, je vous prie.
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1 Q. Monsieur Buhin, ceci est un rapport de situation émanant du secteur sud
2 des Nations Unies chargé de Knin, en date du 6 août 2003. Si nous passons à
3 la page 6 de ce rapport, parce que la page que vous voyez maintenant est la
4 page de garde, page 6 de la version anglaise dont je demande l'affichage,
5 c'est le paragraphe F qui m'intéresse.
6 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, je tiens à préciser
7 que ceci ne faisait pas partie des documents qui nous ont été communiqués.
8 M. MISETIC : [interprétation] Il aurait dû vous être communiqué. Nous
9 allons vérifier, Monsieur le Président.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Vérifiez, entre-temps vous
11 pourriez poursuivre.
12 M. MISETIC : [interprétation] Oui.
13 Q. Au paragraphe F, ce rapport des Nations Unies en date du 6 août, cela
14 se trouve environ au milieu du paragraphe, stipule ce qui suit, je cite :
15 "D'autres civils, et notamment des véhicules automobiles portant
16 l'immatriculation de Split sont vus à Knin, où un sentiment de normalité
17 est revenu."
18 Ça, c'était le 6 à 20 heures 30.
19 M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, j'aimerais maintenant
20 l'affichage de la pièce P806.
21 Mon commis aux audiences m'informe que le document dont il était
22 question tout à l'heure a été communiqué à l'Accusation. Il s'agit du
23 document numéro 50 sur la liste de pièces communiquées à l'Accusation.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pendant que M. Margetts vérifie, vous
25 pouvez poursuivre.
26 M. MISETIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
27 Q. Monsieur Buhin, ceci est un rapport des représentants de la Communauté
28 européenne chargés de suivre l'évolution des événements. Il porte la date
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1 du 8 août 1995.
2 M. MISETIC : [interprétation] J'aimerais que nous nous penchions sur la
3 page 2 de ce document, paragraphe 4(a).
4 Q. Le 8 août, la Mission de vérification de la Communauté européenne écrit
5 ce qui suit : "Des représentants de la population locale et des membres de
6 l'armée de Croatie continuent à piller à grande échelle et un convoi de
7 pilleurs a été vu en train de vider des objets hors de la ville. Les
8 personnes déplacées sont déjà en train de revenir dans leurs anciennes
9 maisons."
10 Donc ça c'est le 8, en date du 8.
11 M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, j'aimerais maintenant
12 que nous passions à la pièce P933, je vous prie.
13 Q. En première page de ce document, en dessous de l'intitulé "Situation
14 militaire," nous voyons un paragraphe, et je rappelle que ce document est
15 un rapport de la Mission de vérification de la Communauté européenne en
16 date du 9 août 1995.
17 Nous lisons donc dans ce paragraphe, je cite : "Il semble que Knin devienne
18 pour la première fois un centre d'attraction touristique important; une
19 circulation intensive ayant été constatée sur la route principale reliant à
20 Knin à Drnis."
21 Passons maintenant à la dernière page de ce document, je vous prie, sous
22 l'intitulé "Questions humanitaires," vers le milieu du paragraphe en
23 question.
24 Nous lisons au sujet de Drnis, je cite : "Nous avons constaté la même
25 évolution à Drnis. De nombreux civils se trouvent dans la ville, et
26 apparemment ils recherchent des biens immobiliers leur ayant appartenu
27 précédemment."
28 Monsieur Buhin, on vous a posé des questions au sujet du moment où
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1 les civils ont commencé à revenir dans la région, et je viens de vous
2 soumettre trois documents qui ont été versés au dossier par l'Accusation,
3 et qui émanent de sources liées aux Nations Unies et à la Communauté
4 Européenne. Ces trois documents indiquent que des civils avaient commencé à
5 revenir à Knin dans l'ancien secteur sud des Nations Unies quelques jours à
6 peine après la fin de l'opération Tempête. Ceci correspond-il à vos
7 souvenirs ?
8 R. Oui, ce dont je me souviens le mieux, c'est que l'arrivée la plus
9 importante de civils a eu lieu lorsque le premier train venant de Zagreb
10 est entré dans la ville. Après quoi, une ligne ferroviaire régulière a
11 circulé et des civils sont arrivés régulièrement à Knin en provenance de
12 Zagreb et de Split.
13 J'ai un peu de mal à me rappeler les détails, mais à la lecture de
14 ces rapports, je constate que très certainement des civils arrivaient, qui
15 possédaient des laissez-passer, ou qui avaient franchi les postes de
16 contrôle, ou emprunté les routes principales qui n'étaient plus contrôlées
17 par la police. Le secteur était assez vaste et les membres de la population
18 locale connaissaient bien les grandes routes ainsi que les routes
19 secondaires. En tout cas, les routes qui n'étaient pas contrôlées par la
20 police étaient empruntées intensément et la police des Nations Unies
21 surveillait la situation et en rendait compte dans des rapports. Donc bien
22 sûr il y a eu des cas correspondant à ce qui est indiqué ici.
23 Q. Je reviendrai sur la question du train dans un instant. Mais il y a
24 autre chose que je voulais vous demander. Ces rapports évoquent des
25 personnes déplacées qui rentraient dans leurs anciennes maisons et évoquent
26 également, s'agissant de Drnis, le fait que la Mission de vérification de
27 la Communauté européenne a apparemment constaté que ces civils auraient
28 recherché des biens immobiliers leur ayant appartenu précédemment. Est-ce
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1 que c'était quelque chose qui se produisait fréquemment dans le secteur des
2 personnes qui revenaient à la recherche de leurs biens immobiliers ou de
3 leurs propriétés, et quel problème cela posait-il vis-à-vis de la police
4 s'agissant de la prévention des pillages ?
5 R. C'était quelque chose qui se passait fréquemment, en effet. Il
6 s'agissait de personnes qui tentaient de retrouver leurs biens le plus
7 rapidement possible, et en tout cas ce qu'ils pouvaient sauver en dehors de
8 ce qu'ils avaient emporté avec eux, lorsqu'ils étaient partis dans ces
9 centres de réfugiés.
10 Des problèmes ont été vécus aux postes de contrôle en raison de cela parce
11 que ces personnes étaient incapables de prouver ce qu'elles avaient emporté
12 ou ce qu'elles avaient emporté leur appartenaient effectivement. Pour
13 résoudre ce problème, ces personnes essayaient d'emprunter des routes
14 secondaires où il y avait moins de circulation afin de parvenir à passer,
15 ce qui posait un gros problème à la police.
16 Q. Si quelqu'un a un poste de contrôle voyait arriver une personne
17 déplacée ou un réfugié qui lui disait que les articles qui se trouvaient
18 dans sa voiture étaient en fait des biens qui lui appartenaient par le
19 passé et qui lui avaient été volés pendant l'occupation, comment est-ce que
20 l'officier de police responsable pouvait savoir si la personne en question
21 était en train de dérober ces objets ou si ces objets appartenaient
22 effectivement à cette personne ? Quelles mesures prenait dans ce cas-là, de
23 façon régulière, l'officier de police concerné ?
24 R. Les officiers de police n'avaient aucun moyen de déterminer si les
25 biens étaient des biens volés ou s'ils avaient auparavant appartenu à
26 l'individu en question. Personne n'était habilité à délivrer à un citoyen
27 un quelconque reçu concernant des objets si ces objets devaient sortir de
28 la région. Le plus souvent, il était recommandé aux personnes en question
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1 de rester non loin de leurs propriétés afin d'en assurer la protection, et
2 il leur était dit que c'est dans une période ultérieure que ces personnes
3 auraient la possibilité d'établir que les biens en question leur avaient
4 été éventuellement volés.
5 Q. D'accord. S'agissant du train, je vous indique que les parties
6 impliquées dans la présente affaire sont convenues que la date où le train
7 a de nouveau circulé normalement, c'est-à-dire la date de l'arrivée du
8 président Tudjman à Knin, est celle du 26 août 1995.
9 M. MISETIC : [interprétation] J'aimerais maintenant vous montrer un
10 document qui est la pièce 1D00-5423 [comme interprété]. Il s'agit d'une
11 vidéo.
12 [Diffusion de la cassette vidéo]
13 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
14 "Sasa Kopljar : Maintenant c'est Knin et notre collègue Denis Latin vous
15 parle de Knin. Bonsoir, Denis.
16 Denis Latin : Bonsoir, Sasa. Bonsoir la Croatie depuis Knin.
17 Sasa Kopljar : C'est le jour de l'Assomption de la Vierge Marie. Est-ce que
18 cette fête a été célébrée dans les dix jours seulement qui nous séparent de
19 la libération de Knin ?
20 Denis Latin : Je dois dire que c'était un événement remarquable à Knin
21 aujourd'hui. Nous estimons que deux à trois milles personnes se sont rendus
22 à Knin aujourd'hui. Je pense que les images parlent le mieux, montrant les
23 images de la télévision quelques instants.
24 Plus de 500 réfugiés de Knin sont arrivés avec le premier train qui est
25 parti de Split à destination de Knin, et l'Assomption de la Vierge Marie a
26 également donné la possibilité à d'autres de fêter ce jour dans les rues de
27 la ville.
28 Après la messe célébrée dans les ruines de l'église Saint-Ante, la plupart
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1 des citoyens de Knin se sont dirigés vers leurs maisons qu'ils ont décidé à
2 ne plus jamais quitter."
3 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]
4 M. MISETIC : [interprétation]
5 Q. Monsieur Buhin, vous venez de voir des images qui montraient un train
6 arrivant de Split à Knin le 15 août, et apparemment à bord de ce train se
7 trouvaient de très nombreux civils. Vous rappelez-vous qu'un service
8 ferroviaire reliant Split à Knin fonctionnait effectivement avant l'arrivée
9 du train de la liberté à bord duquel se trouvait le président Tudjman le 26
10 août ?
11 R. En cet instant, j'éprouve également quelques hésitations, car d'après
12 les images que nous venons de voir, on peut penser que la circulation
13 ferroviaire avait commencé déjà avant. Or, dans mon souvenir, le premier
14 train n'a circulé que le jour où le président Tudjman se trouvait à bord du
15 train. Mais maintenant, d'après les images, je vois que la circulation
16 ferroviaire avait dû être rétablie déjà bien avant.
17 Q. Les personnes qui se trouvaient à bord du train venant de Split, dans
18 le commentaire de la diffusion vidéo, nous avons entendu qu'il se trouvait
19 environ 500 personnes à bord du train. Le journaliste, pour sa part, parle
20 de 2 à 3 000 personnes qui se trouvaient à Knin ce jour-là. Mais il n'est
21 pas exact, n'est-ce pas, que toutes ces personnes avaient besoin d'un
22 laissez-passer pour entrer à Knin ?
23 R. De toute façon, toutes ces personnes n'auraient pas pu obtenir un
24 laissez-passer. Il est exact que parmi ces personnes, il y en avait qui
25 venaient sans laissez-passer.
26 M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le
27 versement au dossier de la vidéo qui constitue la pièce 1D00-0423.
28 M. MARGETTS : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.
2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ce document
3 devient la pièce D839.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D839 est admise en tant
5 qu'élément de preuve.
6 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, je saisis l'occasion
7 pour indiquer que le document dont nous parlions tout à l'heure était bien
8 dans le classeur, mais qu'il était difficile à trouver. Je vous remercie.
9 M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, je demande maintenant
10 l'affichage sur les écrans de la pièce D661, je vous prie.
11 Q. Monsieur Buhin, ce que nous voyons sur nos écrans porte l'intitulé
12 d'ordre de travail provenant du 6e poste de police de Benkovac, en date des
13 11 à 12 septembre 1995. Donc, c'est un document qui identifie une
14 patrouille. On voit dans ce document le nom de Stefan Ljutic.
15 Veuillez d'abord nous expliquer ce qu'est un ordre de travail eu égard à
16 une patrouille.
17 R. C'est le formulaire normal que l'on appelle un ordre travail, que tout
18 officier de police ou tout membre d'une patrouille reçoit avant de partir
19 vers le lieu où il est censé travailler.
20 Q. D'accord. Alors penchons-nous sur cet ordre de travail, document
21 distribué aux membres de la patrouille. On voit l'énumération des missions
22 confiées à la patrouille, et au troisième point de cette énumération, nous
23 lisons, je cite : "Procéder à la vérification et à l'inspection de toute
24 personne ou véhicule suspect (véhicule portant l'immatriculation de l'armée
25 de la République de Croatie en particulier) et transmettre la note
26 officielle qui s'impose."
27 Et plus loin, nous lisons, je cite : "Les personnes prises en train de
28 transporter des objets ou d'autres articles doivent être remises au poste
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1 de police pour enquête criminelle."
2 Maintenant, tournons la page. Il s'agit d'un paragraphe de cet ordre de
3 travail qui concerne une autre patrouille apparemment, ou en tout cas, la
4 description de ce que la patrouille a fait dans le cadre des fonctions qui
5 lui sont assignées.
6 Et nous lisons ce que disent les membres de la patrouille pour la date du
7 12 septembre, je cite : "A 20 heures 30, sur la route reliant Biljane
8 Gornje à Atlagica Kula, nous avons rencontré Pero Ostric qui a été emmené
9 au poste de police pour enquête ultérieure, en coopération avec les
10 responsables de la police militaire. Le véhicule à bord duquel il se
11 trouvait a été confisqué, et le document confirmant cette confiscation est
12 fourni ci-joint."
13 Alors, selon le libellé de l'ordre de travail, la police devait arrêter
14 toute personne ou tout véhicule suspect, y compris des véhicules portant la
15 plaque d'immatriculation de l'armée de Croatie, n'est-ce pas ?
16 R. La personne qui rédigeait les missions pour la patrouille manquait
17 probablement d'expérience, parce que cette personne n'aurait pas pu confier
18 cette mission à la police civile pour qu'elle vérifie les véhicules portant
19 des plaques d'immatriculation de l'armée croate. Ça, c'est dans un premier
20 temps.
21 Deuxièmement, nous voyons que la police a agi rapidement, parce qu'en fait,
22 ils ont fait arrêter ce véhicule qui était de type Zastava 750. Il
23 s'agissait d'une voiture de particulier. Ils ont été en mesure de
24 déterminer que cela était conduit par une personne portant l'uniforme
25 militaire, et avec la police militaire, une enquête a été diligentée.
26 Q. Donc, je peux avancer donc que quelqu'un qui faisait partie de l'armée
27 croate et qui portait l'uniforme pouvait être arrêté par la police si cette
28 personne commettait un acte criminel. Cette personne pouvait donc être
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1 arrêtée et conduite au poste de police local du MUP pour être ensuite
2 transférée à la police militaire. Il s'agissait bien de la procédure
3 idoine, n'est-ce pas ?
4 R. Oui.
5 M. MISETIC : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir la pièce D97,
6 je vous prie.
7 Q. Il s'agit d'un rapport envoyé par le ministre Jarnjak le 2 octobre
8 1995. C'est un rapport qui est destiné au ministère public, au procureur,
9 M. Hranjski.
10 M. MISETIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons avoir la page 2, je
11 vous prie.
12 Q. Voyez qu'il s'agit de statistiques qui portent sur la période comprise
13 entre le 22 août et le 2 octobre 1995. Il s'agit donc de statistiques
14 établies par les administrations de la police. Vous avez dans un premier
15 temps les profils des auteurs de crimes. Voyez pour Zadar-Knin, il est
16 question de 192 enquêtes sur le terrain --
17 M. MISETIC : [interprétation] Un petit moment.
18 [Le conseil de la Défense se concerte]
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais est-ce qu'il s'agit du document qui
20 a posé problème un peu plus tôt avec les trois --
21 M. MISETIC : [interprétation] Nous sommes en train de vérifier cela,
22 Monsieur le Président.
23 [Le conseil de la Défense se concerte]
24 M. MISETIC : [interprétation] On me dit que la version exacte se trouve
25 dans le prétoire électronique. Il va falloir établir le lien pour ce qui
26 est de la traduction --
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Nous avons déjà eu ce problème
28 auparavant, effectivement.
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1 M. MISETIC : [interprétation]
2 Q. Voyez, dans la version croate, les auteurs de ces crimes ont été
3 identifiés à Zadar-Knin, 28 membres de la HV, 194 civils, et il y a une
4 personne coupable d'abus d'uniforme.
5 En fait, la police pouvait tout à fait identifier des auteurs de crimes
6 même s'il se trouvait qu'il s'agissait de membres de la HV, n'est-ce pas ?
7 R. Je ne peux pas véritablement avancer cela parce que s'il était établi
8 que l'auteur du crime faisait partie de l'armée croate, la police militaire
9 était convoquée, et c'est ensuite la police militaire qui se chargeait de
10 cette affaire.
11 Alors peut-être que dans certains cas, pour des raisons
12 professionnelles ou pour d'autres raisons, ils travaillaient conjointement
13 pour voir quels étaient les crimes qui avaient été commis par l'auteur des
14 crimes en tant que membre de l'armée et quels étaient les crimes qui
15 étaient commis par une personne civile.
16 Q. Est-ce que nous pouvons passer à la pièce D809.
17 M. MISETIC : [interprétation] Je me permets de vous demander
18 l'autorisation de procéder au changement pour ce qui est de la pièce D97, à
19 savoir remplacer la traduction anglaise actuelle par la traduction anglaise
20 corrigée.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, faites donc et nous nous en
22 réjouissons d'ailleurs.
23 M. MISETIC : [interprétation] Je vous remercie.
24 Q. Alors voilà, il s'agit là d'un rapport d'enquête judiciaire déposé par
25 M. Kardum, la date étant la date du 1er septembre 1995. Si vous regardez
26 cette page, Monsieur, vous voyez qu'il s'agit d'un rapport d'enquête
27 judiciaire établi à l'encontre de Nino Starcevic, qui a été identifié par
28 M. Kardum, il s'agit d'un soldat dont le nom faisait partie des registres
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1 militaires de Zadar.
2 M. MISETIC : [interprétation] Si vous tournez la page.
3 Q. Veuillez parcourir cela, il semblerait que M. Starcevic a participé au
4 vol d'un véhicule qui lui a été confisqué et un rapport d'enquête
5 judiciaire a ainsi été déposé.
6 En fait, les membres du ministère de l'Intérieur pouvaient déposer des
7 rapports d'enquête judiciaire à l'encontre de personnes identifiées comme
8 étant des membres de la HV, n'est-ce pas ?
9 R. Je ne peux pas avancer cela, car d'après ce que je sais, tout cela
10 aurait dû être fait par la police militaire. Mais il se peut que je me
11 trompe parce que je ne suis pas un expert versé dans les règles et les
12 devoirs de la police judiciaire.
13 Q. Bien.
14 M. MISETIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons afficher la pièce
15 D486, je vous prie.
16 Q. Il s'agit d'un rapport établi par Cedo Romanic en date du 21 septembre
17 1995. Veuillez lire ce rapport, et indiquez-moi lorsque vous aurez terminé
18 votre lecture.
19 R. J'ai fini ma lecture.
20 Q. Il s'agit d'un incident à un poste de contrôle, un officier de police a
21 tiré deux salves de mitraillette contre un véhicule qui était conduit par
22 Miroslav Lucin, parce qu'il a essayé de s'enfuir du poste de contrôle en
23 conduisant.
24 M. Romanic, par le biais de cette lettre, indique qu'il a été fait usage de
25 la force, que cette mesure était appropriée. Convenez-vous que des
26 officiers de police pouvaient faire usage de la force pour appréhender un
27 commandant de la HV pour l'empêcher de commettre un crime ?
28 R. A cette époque, c'était acceptable. A l'heure actuelle, il faut savoir
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1 que nous avons davantage de ressources, les communications sont meilleures,
2 et je suis sûr que la police agirait de façon différente. La police
3 essaierait de suivre le véhicule en question jusqu'à un endroit où il
4 serait possible de l'arrêter et de s'acquitter de leur tâche de policier.
5 Il ne faut pas oublier que c'était le début de la guerre, que les
6 gens avaient la gâchette facile. La police a fait cela car l'objectif était
7 de l'arrêter. Face à une personne si agressive qui avait dit qu'elle
8 faisait partie de la police, elle aurait peut-être pu agir de façon encore
9 plus grave, donc c'est la raison pour laquelle à ce moment donné cette
10 mesure prise était acceptable.
11 Q. Pour ce qui est de --
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, est-ce que nous
13 pourrions entendre de la part du témoin une réponse apparemment à la
14 question que vous avez posée. Parce qu'en fait il ne s'agit pas de savoir
15 quel type de force pouvait être utilisé contre une personne dans certaines
16 circonstances, j'avais cru comprendre que vous lui avez demandé ce qu'il
17 avait à dire à propos d'un officier de police qui prenait des mesures
18 contre un militaire même si ce militaire avait une fonction de
19 commandement.
20 M. MISETIC : [interprétation] Oui, mais à la ligne 17 je pense qu'il a
21 répondu, page 46, ligne 17.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. Voilà comment j'ai compris la
23 réponse du témoin. Il a dit quel type de force peut être utilisé,
24 maintenant il serait suivi, et cetera, et cetera. J'avais cru comprendre
25 que vous lui avez demandé si quelqu'un qui faisait tout simplement partie
26 de la police civile pouvait agir de cette façon à l'encontre de quelqu'un
27 qui se trouvait en position de commandement militaire.
28 M. MISETIC : [interprétation] Oui.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Apparemment, il y a un problème.
2 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, et il faut savoir contre qui est
3 dirigée cette mesure, parce qu'il y avait deux personnes qui avaient un
4 statut différent.
5 M. MISETIC : [interprétation] Oui, mais --
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne souhaiterais pas que l'on discute
7 de ce genre de chose en présence du témoin. Si vous posez une question et
8 que le témoin répond en 30 secondes à la question, la Chambre apprécierait
9 particulièrement le fait que la réponse fournie ait un lien avec la
10 question que vous avez posée. En tout cas, cela nous permettrait de mieux
11 comprendre.
12 M. MISETIC : [interprétation] Oui, tout à fait.
13 M. MARGETTS : [interprétation] Je souhaiterais que l'on précise la teneur
14 du document plutôt que de nous donner une idée partielle à propos de ce
15 document.
16 M. MISETIC : [interprétation] Je lui ai demandé de lire l'intégralité du
17 document, alors je ne sais pas comment est-ce qu'il pourrait mieux nous
18 préciser cela, mais je souhaiterais toutefois que l'on demande au témoin
19 d'ôter ses écouteurs.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certes.
21 M. MISETIC : [interprétation] Il est indiqué de façon très, très claire
22 dans la version en croate, et je pense également à la version anglaise,
23 mais je vais vous le dire, il est dit que "le commandant d'état-major
24 Miroslav Lucin a eu une altercation avec les policiers mentionnés ci-
25 dessus, les a insultés, les a empêchés d'accomplir leur fonction. Puis il
26 s'est assis."
27 En fait il n'y a pas de point, il s'agit d'une seule phrase.
28 Puisqu'il s'agit d'une seule et même phrase le sujet est le commandant
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1 Miroslav Lucin.
2 Donc je suis absolument persuadé que la phrase fait référence au
3 commandant et on utilise ce pronom personnel "il", voilà d'où vient le
4 problème.
5 M. MARGETTS : [interprétation] Notre problème c'est que c'est un document
6 qui pose problème. Parce que la voiture est conduite par Dragomir Zepina,
7 qui est civil, au départ la personne qui est assise à côté du conducteur
8 est un commandant de la police militaire. Là nous avons une action
9 conjointe menée contre des personnes qui représentent des instances
10 différentes. Ce n'est pas aussi clair que cela, ce n'est pas tout
11 simplement quelqu'un de la police civile contre un auteur de délit qui fait
12 partie de l'armée --
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien entendu, si nous voyons toute la
14 chronologie des événements, il y a une voiture civile, une voiture de
15 particulier qui est conduite, et d'ailleurs la personne en question, M.
16 Zepina, comment est-il décrit --
17 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, je pourrais peut-être vous expliquer.
18 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
19 M. MARGETTS : [interprétation] Nous voyons ici qu'il y a la police
20 militaire et la police civile qui agissent de concert contre un auteur de
21 délit militaire et un auteur de délit civil. Si la question qui est posée
22 indique qu'il y a une mesure conjointe qui a été prise contre différentes
23 personnes, cela me convient tout à fait.
24 M. MISETIC : [interprétation] Ce qui est important c'est qu'il parle de
25 mesures conjointes qui ont été prises et que les deux ont été conduits au
26 poste de police de Benkovac.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vois d'où vient le problème. Il
28 y a une voiture qui arrive près d'un poste de contrôle, à son bord il y a
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1 apparemment deux personnes, si vous lisez de façon soigneuse, visiblement
2 il y en a une qui est civile parmi ces personnes, et il y a l'autre
3 personne qui est un commandant, un militaire. Des mesures sont prises, et à
4 partir de ces mesures qui sont prises on peut envisager la possibilité
5 qu'il s'agissait d'un poste de contrôle mixte, parce qu'il est dit que le
6 représentant du 6e poste de police de Benkovac et le membre du 72e Bataillon
7 de la Police militaire de Benkovac ont opéré sur le site.
8 Je suppose, Monsieur Margetts, que lorsqu'il est question du site, il est
9 question du poste de contrôle, cela d'ailleurs étant une interprétation
10 parmi tant d'autre. Donc ce que M. Margetts indique c'est qu'il se peut
11 qu'il y ait eu un poste de contrôle mixte, et il y a deux personnes qui
12 arrivent, un militaire et apparemment un civil, il semblerait a priori
13 qu'il s'agisse également d'une voiture civile, ensuite il y a des mesures
14 qui sont prises. Le problème de M. Margetts vient du fait que vous avez
15 présenté cela au témoin à titre d'exemple, vous lui avez présenté cela
16 comme une illustration de la façon dont la police civile pouvait prendre
17 des mesures contre un commandant militaire. Est-ce que j'ai trop précisé
18 cela ?
19 M. MARGETTS : [interprétation] Non, c'est tout à fait cela. C'est justement
20 là où je voulais en venir. Deuxièmement, on ne sait pas très bien à quelle
21 heure ou quand cette personne avait des liens avec les militaires. Je ne
22 vois pas de référence à un uniforme militaire; je vois qu'il y a un
23 conducteur qui semble être à bord d'un véhicule civil.
24 M. MISETIC : [interprétation] Non, ce n'est pas ainsi que je vois les
25 choses.
26 Je pense que l'on a mal interprété ce qui a été dit. Il n'y a pas de
27 référence au poste de contrôle conjoint. Ce qui s'est avéré c'est qu'une
28 fois que la personne a été détenue, ils auraient pu appeler la police
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1 militaire sur les lieux.
2 Moi, je lis la version croate.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quelle ligne exactement lisez-vous ?
4 M. MISETIC : [interprétation] Il s'agit du troisième paragraphe. Cela a été
5 traduit par les termes "ont opéré sur le site", mais dans le document
6 d'origine, il est question des lieux du crime, et vous avez les personnes
7 qui ont pris des mesures. Vous avez le lieu du crime, vous avez un pneu de
8 voiture contre lequel on a tiré, vous avez la police militaire de la HV et
9 la police civile qui arrive sur les lieux en question.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Ça c'est également une
11 interprétation de votre part. Nous avons demandé au témoin de lire un
12 document, vous voyez, il y a trois juristes éminents qui semblent ne pas
13 être d'accord --
14 M. MISETIC : [interprétation] J'aimerais quand même dire quelque chose --
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, peut-être mais --laissez-moi finir
16 quand même. Il y a visiblement un désaccord à propos de ce que nous indique
17 ce document. Vous demandez au témoin de le lire le document et vous ne
18 savez pas quelle va être son interprétation du document, donc je pense que
19 cela pourrait susciter beaucoup de confusion, on ne saura pas si l'on parle
20 de la même chose. Bien entendu, il aura lu la version croate, mais il va
21 peut-être avoir lu quelque chose de tout à fait différent de ce que j'ai
22 lu, de ce que M. Margetts a lu et de ce que vous avez lu, et c'est quelque
23 chose qu'il faut éviter coûte que coûte.
24 M. MISETIC : [interprétation] Si vous m'y autorisez, Monsieur le Président.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
26 M. MISETIC : [interprétation] Je comprends tout à fait le point de vue
27 exprimé par M. Margetts, évidemment nous pensons qu'il a tort. J'ai
28 présenté au témoin, avant de lui montrer ce document, un ordre de service
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1 où il est indiqué précisément que ce poste de police doit arrêter les
2 véhicules où il y a des plaques d'immatriculation de la HV. Ensuite, le
3 témoin nous dit que c'est quelqu'un d'autre qui a rédigé l'ordre et que ces
4 personnes ne savaient pas ce qu'elles rédigeaient.
5 Je comprends tout à fait que M. Margetts veuille complètement disséquer le
6 document, mais je souhaiterais présenter le document au témoin, puisqu'il
7 est policier il peut interpréter, en fait j'aimerais lui poser la question
8 suivante : est-ce que vous pouviez faire usage de la force pour tirer sur
9 un pneu de voiture conduite par un membre de l'armée croate. Dans les
10 questions supplémentaires il pourrait lui poser la question à propos des
11 voitures civiles et non pas des voitures militaires.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais cela exige une analyse telle
13 qu'elle n'est peut-être pas requise pour le témoin, je n'en sais rien, je
14 pense que le témoin doit pouvoir se sentir libre de décrire toutes les
15 circonstances pour lesquelles cela serait acceptable ou non, mais cela nous
16 prendrait une demi-heure au moins.
17 M. MISETIC : [interprétation] Oui, mais toute personne qui porte un
18 uniforme militaire ne pouvait pas être arrêtée par la police. C'est ce
19 qu'ils ont avancé. C'est ce qu'ils avancent jusqu'à présent.
20 M. MARGETTS : [interprétation] Je pense que je suis peut-être mieux placé
21 pour expliquer notre point de vue.
22 M. MISETIC : [interprétation] Oui, mais s'ils peuvent prouver que lorsque
23 quelqu'un portait un uniforme militaire on ne pouvait pas faire usage de la
24 force contre lui --
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans toutes les circonstances --
26 M. MISETIC : [interprétation] -- alors je n'insisterai pas.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Margetts va avoir la possibilité de
28 nous le dire.
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1 M. MARGETTS : [interprétation] Ce n'est pas la question des uniformes
2 militaires qui est pertinente dans ce document.
3 Il n'y a pas de référence dans ce document hormis le fait que la
4 personne est identifiée comme faisant partie de l'armée. Les personnes
5 savaient à quel moment ces mesures ont été prises, qu'elles fassent ou non
6 partie de l'armée. Pour ce qui est de l'utilisation de l'uniforme
7 militaire, il y a des moyens de preuve considérables, et d'ailleurs j'en ai
8 pour preuve différents documents qui ont montré comment la police de base
9 fonctionnait et agissait.
10 Je pense que ce témoin a des moyens de preuve importants à nous
11 donner à ce sujet, d'où le problème parce que ce document enduit en erreur
12 le témoin et ne nous permet pas de trouver des moyens de preuve qui
13 seraient pertinents en l'espèce.
14 M. MISETIC : [interprétation] Le fait qu'il a un certain point de vue
15 à propos de ce document ne signifie pas que je ne peux pas présenter cela
16 au témoin.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, tout à fait.
18 M. MISETIC : [interprétation] Il l'a fait avec son carnet de bord. En fait,
19 il a présenté des journaux, des carnets de bord de personnes à ce témoin
20 alors qu'il n'était absolument pas préoccupé par ces questions.
21 [Le conseil de la Défense se concerte]
22 [La Chambre de première instance se concerte]
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, la Chambre est d'avis
24 que pour ce qui est du document et des questions que vous avez posées au
25 témoin, le risque de confusion est beaucoup trop important pour vous
26 permettre de continuer de la sorte.
27 Ce qui ne signifie pas que vous ne pouvez pas poser des questions à
28 propos des éléments de fond que vous voulez soulever, mais pas sur la base
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1 de ce document qui, de façon très factuelle, nous donne une description de
2 la situation. Poursuivez, en tenant compte de ce que je viens de dire.
3 M. MISETIC : [interprétation]
4 Q. Monsieur Buhin, pour arrêter quelqu'un qui est en train de commettre un
5 crime, et j'inclus dans ma question des membres de la HV, si la police
6 militaire ne se trouvait pas aux côtés de la police, de la police de métier
7 sur les lieux d'un crime alors qu'un crime était commis, la police avait le
8 droit de faire usage de la force pour empêcher les membres de la HV de
9 commettre des crimes, n'est-ce pas ?
10 R. C'est exact.
11 Q. Maintenant --
12 M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je lui demander
13 si dans ce document telle chose et telle chose --
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Faites abstraction du document.
15 M. MISETIC : [interprétation] Bien.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Hier, des questions hypothétiques ont
17 été posées. Je n'avais pas encouragé ce genre d'exercice, mais si vous
18 décrivez de façon claire une situation hypothétique, nous aimerions
19 entendre la réponse du témoin. Mais il ne faut pas que cela prête à
20 confusion.
21 M. MISETIC : [interprétation] Oui, tout à fait.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc dans ces circonstances,
23 exceptionnellement, je vous y autorise.
24 M. MISETIC : [interprétation] Oui.
25 Q. Je vais vous poser une question fondamentale.
26 Est-ce que vous saviez qu'a un moment donné aux alentours du 5 [comme
27 interprété] septembre, il n'y a plus eu de postes de contrôle mixtes avec
28 la police militaire, il n'y avait plus que le MUP qui contrôlait les postes
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1 de contrôle ? Est-ce que vous le saviez, cela ?
2 R. Je ne sais pas quand est-ce que cela a été fait, mais je sais que
3 cela a été fait.
4 Q. Si le MUP était de faction seul à un poste de contrôle et qu'un membre
5 de la HV à bord d'une voiture particulière refusait de s'arrêter à un poste
6 de contrôle du MUP, il est vrai, n'est-ce pas, que les officiers du MUP
7 avaient le droit de faire usage de la force, si nécessaire, pour arrêter
8 cette personne au poste de contrôle ?
9 R. C'est vrai. D'autant plus que la police ne savait absolument pas,
10 n'avait aucune façon de savoir ce qui était transporté dans les véhicules,
11 de savoir quelles étaient les intentions des conducteurs. Donc les
12 véhicules devaient être arrêtés coûte que coûte et une vérification devait
13 être faite.
14 M. MISETIC : [interprétation] J'aimerais maintenant aborder un nouveau
15 sujet.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, bien entendu, mais maintenant il y
17 a quelque chose qui m'est passé par l'esprit. Vous avez une voiture civile
18 qui arrive à un poste de contrôle, mais comment est-ce qu'on sait qu'à son
19 bord se trouve un militaire ?
20 M. MISETIC : [interprétation] Je vais lui poser la question.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
22 M. MISETIC : [interprétation]
23 Q. Si un véhicule s'approche d'un poste de contrôle, toutes les personnes
24 qui conduisaient ce genre de véhicule civil devaient s'arrêter au poste de
25 contrôle, même les personnes qui portaient l'uniforme militaire, n'est-ce
26 pas ?
27 R. Oui. Oui, les gens devaient présenter leurs documents d'identité pour
28 voir s'ils faisaient bien partie de l'armée ou s'il s'agissait de personnes
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1 tout simplement qui portaient des uniformes militaires.
2 Q. Donc le document d'identité prouve à l'officier au poste de contrôle
3 que la personne fait bien partie de la HV, puis par ailleurs, l'officier
4 voit dans le véhicule des biens qui, d'après lui, sont des biens qui ont
5 été volés. Donc cet officier était autorisé à arrêter le membre de la HV in
6 situ, de le conduire au poste de police local, ensuite il devait attendre
7 l'arrivée de la police militaire pour que la police militaire prenne la
8 relève; c'est cela ?
9 R. Oui, c'est tout à fait cela.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Maître Misetic.
11 M. MISETIC : [interprétation] Merci.
12 Monsieur le Président, je ne sais pas quand vous envisagez d'avoir la
13 pause.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai oublié de regarder l'heure. Voyons,
15 je pense qu'il faudrait faire une pause dans une dizaine de minutes.
16 M. MISETIC : [interprétation] Merci.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez décider vous-même quel est
18 le moment propice pour ce faire.
19 M. MISETIC : [interprétation] Merci.
20 Q. Monsieur Buhin, parlant de ces certificats, tels que vous les avez
21 appelés dans votre déclaration, vous avez dit qu'ils étaient peut-être
22 falsifiés. Est-ce que vous vous souvenez de votre déposition à ce sujet ?
23 R. Oui.
24 Q. Tout d'abord, vous personnellement, avez-vous jamais vu un véhicule
25 militaire à bord duquel il s'y trouvait des biens pour lesquels vous
26 pensiez que c'étaient des biens volés ? Je parle de vous personnellement ?
27 R. Moi, personnellement, non, je n'en ai jamais vu.
28 Q. Personnellement, avez-vous jamais vu que la police militaire a permis à
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1 un véhicule militaire de passer alors que l'on disposait d'un certificat
2 falsifié ?
3 R. Non. Je n'étais jamais présent lors d'une occasion pareille.
4 Q. Dans ce cas-là, je suppose que là vous parlez de quelque chose que des
5 policiers qui étaient placés sous vos ordres vous avaient signalé ?
6 R. Oui. Je l'ai appris moi-même en parlant avec des policiers qui se
7 trouvaient aux points de contrôle, qu'on avait vu un camion qui avait
8 l'indication HV, qu'il était arrêté aux points de contrôle et qu'on l'a
9 laissé passer par la suite. On supposait qu'à bord de ce camion se
10 trouvaient des équipements qui n'appartenaient pas à l'armée, mais il
11 s'agit là que des conjectures qu'on était en train de faire. Ce n'étaient
12 que des rumeurs qui circulaient à l'époque, parce qu'il était très
13 difficile de dire à quoi servaient ces biens pour l'armée croate.
14 Q. A votre niveau et vos subordonnés, vous ne pouviez pas vérifier s'il y
15 avait de la vérité dans ces rumeurs, n'est-ce pas ?
16 R. C'est exact.
17 Q. Vous ou vos subordonnés, vos policiers subordonnés, est-ce que vous
18 savez que les véhicules de la HV servaient à fournir de soutien logistique
19 pour toutes sortes d'activités qui d'habitude sont des activités civiles,
20 des activités que procédait le gouvernement dans les zones nouvellement
21 libérées ?
22 R. Je ne peux pas vous dire avec certitude que nous le savions. On le
23 supposait, on supposait que c'était utilisé à cette fin.
24 Q. Vous étiez dans le secteur. Peut-on dire que l'institution qui avait le
25 plus de capacités logistiques au sein du gouvernement croate à l'époque,
26 dans ce secteur, était effectivement l'armée croate ?
27 R. Personne d'autre n'aurait pu le faire à l'époque, de toute façon.
28 Q. Donc l'armée était impliquée dans les travaux tels que déblayer les
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1 routes, n'est-ce pas ?
2 R. C'est exact.
3 Q. L'armée procédait au déblayage des villes suite à des actions
4 militaires, n'est-ce pas, pour enlever les débris et les déchets ?
5 R. Partiellement, la protection civile s'en chargeait, mais l'armée était
6 utilisée à cette fin aussi.
7 Q. Vous avez dit tout à l'heure que vous pensiez que le général Cermak
8 avait, entre autres, comme fonction de rétablir les infrastructures dans le
9 secteur, n'est-ce pas ?
10 R. Je pensais que sa fonction englobait beaucoup de choses et qu'il devait
11 aider à ce que l'on normalise la vie dans la ville.
12 Q. Cela comprenait aider le gouvernement civil dans les tâches que le
13 gouvernement civil ne pouvait pas accomplir à l'époque, étant donné qu'il
14 manquait de moyens logistiques, n'est-ce pas ?
15 R. Oui. Bien sûr que oui.
16 Q. Saviez-vous que le général Cermak, en essayant d'aider les autorités
17 civiles, avait à sa disposition des camions et d'autres équipements pour
18 aider le gouvernement civil à rétablir la vie normale dans la région ?
19 R. Les membres de l'armée étaient les seuls qui avaient un plus grand
20 nombre de moyens et de véhicules à leur disposition. Les autorités civiles
21 n'en disposaient pas autant.
22 Q. Ce qu'on transportait à bord de ces véhicules, les policiers ne
23 pouvaient pas le savoir, n'est-ce pas, à moins qu'ils n'aient vérifié eux-
24 mêmes ce qui se trouvait à bord de ces véhicules et pour quelle raison,
25 n'est-ce pas ?
26 R. Oui.
27 Q. Mes dernières questions portent sur la pièce D48.
28 En attendant son affichage à l'écran, conviendrez-vous que si aux points de
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1 contrôle les membres de la police permettaient aux camions appartenant à la
2 HV qui avaient à bord des biens volés, si l'on permettait à ces véhicules
3 de traverser les points de contrôle, cela constituerait un acte criminel
4 commis par les membres de la police militaire croate, n'est-ce pas ?
5 R. C'est exact.
6 Q. Dans sa lettre adressée à Lausic, le 17 août, M. Moric indique
7 différents problèmes rencontrés avec les membres de la HV. M. Margetts vous
8 a posé des questions au sujet de cette lettre et vous a demandé si
9 certaines choses évoquées dans cette lettre étaient effectivement des
10 choses que vous aviez signalées à Zagreb, et vous avez accepté que c'était
11 effectivement le cas.
12 S'il y avait un problème, à savoir que les membres de la police militaire
13 aux points de contrôle aidaient des gens à piller des biens dans le
14 secteur, c'est quelque chose que vous auriez signalé à M. Moric pour que
15 lui puisse en rendre compte à M. Lausic, n'est-ce pas ?
16 R. Oui.
17 Q. Merci, Monsieur Buhin. Je n'ai plus de questions pour vous.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Margetts.
19 M. MARGETTS : [interprétation] J'ai juste quelques questions pour les
20 questions supplémentaires, si vous me permettez. Ça prendra entre cinq et
21 dix minutes.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous proposez que vous posiez
23 d'abord vos questions et qu'on lève la séance pour aujourd'hui.
24 [La Chambre de première instance se concerte]
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Margetts, nous souhaiterions
26 d'abord faire la pause, parce que nous aurons peut-être des questions. De
27 toute façon, il faudra faire la pause.
28 J'ai du mal à voir l'heure. Nous allons reprendre à 17 heures 40.
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1 --- L'audience est suspendue à 17 heures 16.
2 --- L'audience est reprise à 17 heures 45.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Margetts.
4 J'ai entendu le canal B/C/S sur le canal 4. Je n'entends plus maintenant,
5 j'imagine que le problème a été résolu. Veuillez poursuivre.
6 M. MARGETTS : [hors micro]
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a encore un problème, Monsieur
8 Margetts.
9 M. MARGETTS : [interprétation] Je vais répéter.
10 Monsieur le Greffier, je vous prie d'afficher la pièce D233.
11 Nouvel interrogatoire par M. Margetts :
12 Q. [interprétation] Monsieur Buhin, hier soir, Me Mikulicic vous a posé
13 une question au sujet des missions confiées aux équipes de la protection
14 civile chargées des travaux sanitaires. Vous avez parlé du déminage, et
15 vous avez parlé brièvement des techniciens membres de la police
16 scientifique et du rôle des équipes chargées des travaux sanitaires.
17 Là, vous avez un ordre en date du 5 août 1995 qui émane de Zdravko Zidovec,
18 qui traite des mesures hygiéniques et sanitaires. Je vous prie de le lire
19 et de me le dire quand vous aurez terminé la lecture.
20 R. J'ai terminé la lecture.
21 Q. Merci. Une question toute brève. Avez-vous déjà vu cet ordre ou les
22 éléments qui figurent dans cet ordre ? Est-ce que ces éléments vous ont été
23 communiqués au préalable ?
24 R. Je ne l'ai jamais vu auparavant. Mais j'ai appris que c'était la
25 manière dont il fallait procéder.
26 Q. Aux points 1 à 4 est déterminée quelle est la procédure qu'il fallait
27 adopter et comment les équipes chargées des travaux sanitaires devaient
28 réaliser ces missions.
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1 R. Oui, précisément. Mais je ne pourrais pas vous dire si effectivement
2 cela était suivi à la lettre dans tous les cas.
3 Q. Merci, Monsieur Buhin. Passons maintenant à un autre sujet.
4 Aujourd'hui, Me Misetic a parlé avec vous au sujet du retour des civils
5 dans le secteur. En répondant à l'une de ses questions, vous avez dit que
6 les civils qui disposaient d'une sorte de laissez-passer pouvaient
7 traverser les points de contrôle.
8 A l'époque, en août 1995, aviez-vous peur des terroristes ou de ceux qui
9 s'opposaient à ce que le gouvernement croate investisse le territoire ?
10 M. MISETIC : [interprétation] Il n'y a pas de lien entre mes questions et
11 la présence de terroristes. On indique faussement la teneur de sa
12 déposition au sujet de ces laissez-passer. Je pense que le témoin a dit
13 précisément le contraire de ce que le Procureur vient de dire.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne fais pas droit à votre objection.
15 La question porte sur le contrôle des personnes qui rentraient ou qui se
16 déplaçaient dans le secteur. Vous pouvez poursuivre, Monsieur Margetts.
17 M. MARGETTS : [interprétation]
18 Q. Monsieur Buhin, à l'époque, en août 1995, aviez-vous peur de la
19 présence éventuelle des terroristes ou de ceux qui s'opposaient au contrôle
20 qu'exerçait le gouvernement croate sur le territoire ?
21 R. Oui, bien sûr que c'était quelque chose qui me préoccupait.
22 Q. Est-ce que c'est justement une des raisons pour lesquelles ces laissez-
23 passer étaient délivrés, que les civils étaient enregistrés ?
24 R. Je pense que oui.
25 Q. Peut-on dire alors qu'entre autres, le rôle de la police régulière
26 était de surveiller et de savoir qui était présent sur le territoire ?
27 R. Oui. Lorsqu'on procédait à l'identification d'une personne, il fallait
28 savoir si cette personne était enregistrée ou si c'était quelqu'un qui
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1 était resté sur place après les opérations militaires.
2 Q. Et aux points de contrôle, vous tâchiez de le faire, et dans le
3 secteur, de manière générale, vous essayiez d'établir qui était présent ?
4 R. Aux points de contrôle, s'agissant des personnes qui entraient et qui
5 sortaient, on procédait aux vérifications et aux contrôles; et par le biais
6 des patrouilles dans le secteur, l'on procédait à vérifier les documents
7 appartenant aux personnes que l'on soupçonnait pour quoi que ce soit.
8 Q. Merci, Monsieur Buhin. Je n'ai plus de questions.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic.
10 M. MISETIC : [interprétation] Juste quelques questions.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'habitude, ce sont les Juges qui posent
12 des questions et ensuite, vous verrez si nos questions suscitent d'autres
13 questions.
14 Monsieur Buhin, Mme le Juge Gwaunza a une question pour vous.
15 Questions de la Cour :
16 Mme LE JUGE GWAUNZA : [interprétation] J'aimerais que l'on revienne à votre
17 déclaration, page 5 de la version en anglais, le quatrième paragraphe. Je
18 ne sais pas quel serait le paragraphe dans l'autre version.
19 Dans ce paragraphe, au milieu :"Après que l'armée a libéré Knin, certains
20 d'entre eux sont partis en Bosnie. Une fois rentrés, ces soldats ont
21 procédé aux actes de pillage et d'incendie." Ma question est la suivante :
22 lorsqu'ils sont rentrés, saviez-vous si quoi que ce soit avait été
23 entrepris pour les empêcher à piller et à incendier ?
24 R. Les premiers jours, c'était très difficile de faire, parce qu'il y
25 avait un grand nombre de personnes en uniforme de l'armée croate, parce
26 qu'il y avait peu de policiers. Il était quasiment impossible de contrôler
27 la situation. Ce n'est qu'après sept ou dix jours qu'on a commencé à
28 contrôler la situation d'une manière un peu plus stricte.
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1 Mme LE JUGE GWAUNZA : [interprétation] Merci, mais la première partie de ma
2 question portait sur le fait de savoir quand est-ce qu'ils sont rentrés.
3 R. Excusez-moi. Pourriez-vous répéter votre question ?
4 Mme LE JUGE GWAUNZA : [interprétation] Oui. Vous dites dans votre
5 déclaration : "Après que l'armée a libéré Knin, certains membres de l'armée
6 sont partis en Bosnie." Ensuite, vous dites : "Une fois qu'ils sont
7 rentrés," j'imagine que vous parlez de ces mêmes soldats, "une fois de
8 retour, ces soldats se sont livrés aux actes de pillage et d'incendie."
9 Alors, ma question est la suivante : quand est-ce qu'ils sont rentrés ?
10 R. Je ne peux pas vous dire quand, mais c'était cinq ou dix ou 15 jours
11 plus tard. Je ne pourrais pas vous donner une date précise.
12 Mme LE JUGE GWAUNZA : [interprétation] Merci. J'ai encore une question
13 relative au dernier paragraphe sur cette même page. Vers la fin de ce
14 paragraphe, ici, vous parlez des policiers qui sont rentrés et vous dites :
15 "Certains d'entre eux ont pris la retraite à cause des erreurs qu'ils
16 avaient commises." Ma question est la suivante : quelles étaient ces
17 erreurs ?
18 R. D'après ce que je sais, ils n'entreprenaient pas de mesures qu'ils
19 étaient censés entreprendre. Il s'agit des régions de Glina et Petrina.
20 Mais je ne connais pas très bien les détails de ces événements.
21 Mme LE JUGE GWAUNZA : [interprétation] Merci.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le Juge Kinis a encore quelques
23 questions pour vous.
24 M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Monsieur Buhin, tout d'abord, j'ai une
25 question générale. Je vous prie de nous expliquer la différence entre un
26 registre policier et un registre des casiers judiciaires, et comment on les
27 tenait.
28 R. Le registre est quelque chose qui existe dans chaque poste de police et
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1 dans chaque administration de la police. L'on y consigne la date et l'heure
2 à laquelle une information a été signalée, puis la teneur de cette
3 information, dans une rubrique distincte, l'on indique quelles sont les
4 mesures prises à ce sujet.
5 S'agissant du casier criminel, c'est un registre à part au sein de la
6 police judiciaire.
7 M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Compte tenu de votre réponse,
8 j'aimerais que l'on précise quelque chose. Comment pouviez-vous déterminer
9 si un incident signalé à la police comportait des éléments criminels si
10 vous n'avez pas pu examiner au préalable ledit incident ?
11 R. C'était impossible à confirmer.
12 M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Alors la question qui se pose est de
13 savoir quelle était la procédure qui vous permettait de rendre compte du
14 fait que tel ou tel incident correspondait à un crime, et que tel autre
15 incident ne correspondait pas à un crime ?
16 R. Après réception de l'information ou après tout autre façon qui
17 permettait d'apprendre qu'un acte criminel avait été commis, une patrouille
18 était envoyée sur les lieux, ou même un représentant du poste de police,
19 pour vérifier ce qui s'était passé. C'est seulement après le rapport du
20 policier ou de la patrouille concernée que d'autres actes étaient entrepris
21 selon le fait qu'on avait déterminé qu'il s'agissait d'un acte criminel ou
22 pas.
23 M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Toujours dans le même ordre d'idée, je
24 demanderais à M. le Greffier d'afficher sur les écrans votre déclaration
25 écrite, page 4 de la version anglaise, premier paragraphe en haut de la
26 page.
27 Dans ce paragraphe, vous dites : "Je recevais régulièrement des
28 renseignements au sujet des crimes commis chaque jour. Si la chose était
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1 possible, nous envoyions sur place des policiers et rendions compte", et
2 cetera, et cetera.
3 Ma question est la suivante : pourriez-vous expliquer à la Chambre quel est
4 le sens exact des mots que vous utilisez ici lorsque vous dites "si la
5 chose était possible" ?
6 R. Etant donné qu'il était question des circonstances qui prévalaient
7 immédiatement après les combats sur un terrain qui n'était pas bien connu
8 par les policiers et qui pouvait éventuellement être miné, il y a eu des
9 cas où il était difficile, sinon pratiquement impossible de se rendre
10 immédiatement sur les lieux pour procéder aux constations d'usage. Il
11 arrivait parfois que nous ayons besoin de prendre d'autres mesures aux fins
12 de vérifier que l'équipe de déminage s'était bien rendue sur les lieux, ou
13 que des personnes connaissant le terrain étaient sur place. C'est à cela
14 que je pensais lorsque j'ai dit cela.
15 M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Oui, je comprends bien. Je comprends
16 que dans certaines circonstances il peut y avoir des raisons qui
17 éventuellement entravent le travail de la police et que la police soit
18 placée dans l'impossibilité de réagir immédiatement.
19 Mais est-ce que vos mots pourraient signifier, et si je me trompe
20 veuillez me le dire, je vous prie, est-ce que les mots employés par vous
21 pourraient signifier qu'il arrivait parfois que la police n'intervienne pas
22 dans une situation donnée, qu'elle n'intervienne pas du tout ?
23 R. La police procédait toujours aux constatations et vérifications
24 d'usage. Nous ne renoncions pas. La seule question qui se posait était de
25 savoir s'il était possible de le faire immédiatement après les faits ou
26 d'attendre que d'autres mesures soient prises dans l'intervalle.
27 M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Cela signifie que vous êtes en mesure
28 de confirmer ici devant le Tribunal que dans tous les cas où un rapport
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1 était reçu indiquant qu'un acte criminel avait été commis, une action
2 policière s'ensuivait. Ce que je viens de dire est-il exact ?
3 R. Exact.
4 M. LE JUGE KINIS : [interprétation] A présent, j'ai encore une question à
5 vous poser. S'agissant de la pièce D49, et Monsieur le Greffier, je vous
6 demanderais de bien vouloir afficher ce document sur les écrans.
7 Si je ne me trompe, ce document est l'ordre émanant de Joska Moric le 18
8 août 1995.
9 Ma question est la suivante et elle concerne le deuxième paragraphe de ce
10 texte dans lequel nous lisons : "A compter d'aujourd'hui, tout incendie
11 volontaire de maisons ou acte de pillage doit faire l'objet d'une enquête
12 sur les lieux."
13 Avez-vous respecté cet ordre ?
14 R. Je pense que oui. Je ne vois pas pourquoi nous n'aurions pas enquêté au
15 sujet d'un cas quelconque.
16 M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Oui, mais lorsque nous nous penchons
17 sur les registres de la police et que nous comparons ce document avec
18 d'autres éléments de preuve reçus par la Chambre depuis le début de la
19 présente affaire, nous pourrions aboutir à une conclusion un peu
20 différente, à savoir qu'en réalité tous les incendies impliquant des actes
21 de pillage n'ont pas toujours fait l'objet d'une enquête sur les lieux.
22 Ceci a d'ailleurs été confirmé parce que vous l'avez dit vous-même en
23 indiquant que la police judiciaire n'avait pas toujours entrepris les actes
24 nécessaires au vu de tels incidents, faute d'effectifs. Comment expliquez-
25 vous cette situation en réalité ? En tant que coordinateur, quelles étaient
26 exactement les fonctions qui vous incombaient en vue d'assurer l'exécution
27 de cet ordre, et quelles mesures avez-vous réellement prises à cette fin ?
28 R. Je n'ai pas le souvenir de ces problèmes, mais ce sont des problèmes
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1 qui relèvent de l'action de la police judiciaire et qui ne relevaient pas
2 de ma responsabilité. En tout cas, pour autant que je le sache, chaque fois
3 que des informations étaient reçues par la police de base, elle réagissait
4 et envoyait des hommes sur le terrain, et la police judiciaire était elle
5 aussi dûment informée.
6 M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Monsieur Buhin, si les éléments
7 d'information dont je dispose sont exacts, et je parle de votre déposition
8 et également de la déposition de M. Kardum en particulier, il n'a parfois
9 reçu aucune information au sujet d'un acte criminel tel qu'incendie
10 volontaire ou pillage commis à Knin, donc je me demande comment il était
11 possible que les observateurs internationaux aient constaté que de tels
12 incidents avaient eu lieu alors que la police n'aurait rien constaté de son
13 côté ?
14 R. Je ne voudrais pas contester les affirmations de M. Kardum. Ce que je
15 sais c'est que nous avons agi comme nous le devions en réaction à tous les
16 rapports, à toutes les informations reçues, et pour autant que je le sache,
17 il n'y avait aucune raison de ne pas agir suite à une information relative
18 à un tel incident.
19 Je n'exclus pas la possibilité qu'il y ait eu des cas de ce genre lorsque
20 nous étions incapables de réagir physiquement à de tels rapports ou de
21 telles informations, mais en tout cas chaque fois qu'un officier de police
22 avait constaté un incident, une action était entreprise comme il se doit.
23 M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Je vous remercie.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Buhin, j'aimerais vous donner
25 lecture de certaines parties de la déclaration écrite qui vous a été
26 soumise mais qui n'a pas été versée au dossier. Il s'agit de la note
27 officielle qui a été placée sous vos yeux, celle qui a été établie le 13
28 octobre 2001. La question qui m'intéresse est la situation prévalant à
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1 Grubori. Dans ce document, nous trouvons une indication de ce que vous
2 auriez écrit dans un rapport, et nous lisons ce qui suit :
3 "Il", ce qui veut dire vous, "a désigné les patrouilles de police qui
4 devaient se rendre sur les lieux de l'incident. Peu de temps après, il a
5 reçu un appel téléphonique de Joska Moric, assistant du ministre, qui
6 l'appelait depuis le quartier général du MUP à Zagreb, et qui lui a dit
7 qu'il n'était pas nécessaire d'envoyer sur les lieux de l'incident des
8 patrouilles de police car des membres de la police spéciale y seraient
9 envoyés à leur place."
10 Un peu plus loin dans le texte, nous lisons : "Il a le souvenir
11 d'avoir fait remarquer qu'un officier de police devait dans tous les cas
12 être envoyé sur les lieux d'un incident afin de vérifier la véracité des
13 rapports des représentants des Nations Unies."
14 Un peu plus bas dans le texte, nous lisons qu'il a écrit qu'après que
15 vous ayez reçu la consigne de respecter les ordres de ne pas envoyer des
16 officiers de police sur les lieux de l'incident : "Il a respecté cet ordre
17 et aucune patrouille de police n'a été envoyée sur les lieux de l'incident,
18 mais que toutefois déterminer si des membres de la police spéciale se sont
19 rendus sur les lieux de l'incident ou pas, il n'est pas en mesure de le
20 dire."
21 Pourriez-vous me dire si ce dont je viens de donner lecture rend bien
22 compte de ce que vous avez déclaré, et je vous demanderais, si tel n'est
23 pas le cas, d'expliquer aux Juges de la Chambre dans quelle mesure le texte
24 dont je viens de donner lecture s'écarte de ce que vous avez dit.
25 R. Ceci n'est qu'une interprétation personnelle de quelqu'un qui se
26 trouvait dans le voisinage au moment des faits.
27 M. Moric s'est contenté de me dire en quelques mots que je n'avais
28 pas besoin de faire le travail de la police judiciaire, mais qu'il fallait
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1 que je fasse le travail correspondant à mes attributions et, que pour le
2 reste, je devais laisser cela à d'autres, c'est-à-dire aux représentants de
3 la police judiciaire. En tout cas, je pense qu'il avait à l'esprit la
4 police judiciaire.
5 J'ai constaté qu'il n'était pas nécessaire que nous continuions à
6 nous occuper de cela, donc nous sommes passés à d'autres missions qui nous
7 attendaient ce jour-là, nous avons cessé d'agir en tant que police de base
8 au sujet des événements de Grubori. Voilà.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce que j'aimerais que vous nous disiez
10 ce n'est pas si telle ou telle chose ne s'est pas produite, mais ce qui,
11 dans le texte dont j'ai donné lecture, ne correspond pas à vos propos. Vous
12 avez dit notamment que ceci était l'interprétation personnelle de quelqu'un
13 et que, puisqu'il a été question d'envoyer la police spéciale sur place,
14 vous avez pensé ne pas avoir besoin d'y aller. En tout cas, c'est de cette
15 façon que les choses ont été rapportées.
16 Est-ce que vous êtes en train de dire qu'à l'époque vous auriez dit
17 ou affirmé que la police judiciaire serait envoyée sur les lieux, ou
18 plutôt, comme c'est écrit ici, que c'était la police spéciale qui y serait
19 envoyée ?
20 R. Il est certain qu'après 13 ans je n'ai pas un souvenir totalement
21 précis de chaque mot prononcé par moi. J'ai le souvenir de l'incident et de
22 ce qui s'est passé en réaction à cet incident, pour l'essentiel.
23 J'ai donné mon accord au sujet de la procédure dans mes contacts avec M.
24 Ivica Cetina, et j'étais sûr que la procédure serait respectée. Mais c'est
25 seulement l'appel de M. Moric qui a mis un terme à l'action entreprise par
26 la police de base, mais je pensais que la police judiciaire allait
27 continuer le travail et prendre toutes les mesures nécessaires.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans cette déclaration écrite, nous
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1 lisons noir sur blanc ce que vous auriez dit, à savoir que dans une
2 conversation téléphonique, M. Moric vous aurait dit qu'il n'était pas
3 nécessaire d'envoyer sur les lieux les membres de la police de base parce
4 que les membres de la police spéciale y seraient envoyés à leur place.
5 Est-ce bien ce que M. Moric vous a dit et ce que vous avez rapporté à la
6 personne qui vous a interrogé le 13 octobre 2001 ?
7 R. Cet entretien de 2001 a eu lieu, lui aussi, plusieurs années plus tard.
8 Je ne me rappelle pas mot pour mot les mots que j'ai pu échanger avec M.
9 Moric, mais il y a un détail dont je me souviens, à savoir qu'il a parlé de
10 la police spéciale.
11 D'après mes souvenirs, il a dit qu'il savait où se trouvaient les cadavres
12 et que le travail serait fait.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pendant l'entretien de 2001, avez-vous
14 dit que vous ne saviez pas si des membres de la police spéciale se sont
15 effectivement rendus sur les lieux de l'incident ou pas ?
16 R. Vous me parlez de l'entretien avec les enquêteurs du Tribunal de La
17 Haye ou de l'entretien avec M. Moric, s'il vous plaît ?
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je parle à présent de l'entretien qui a
19 donné lieu à l'établissement d'une note officielle le 13 octobre 2001, note
20 officielle établie par Ivica Vesel, un policier. C'est le document qui vous
21 a été montré rapidement pendant votre interrogatoire.
22 R. Au sujet de cette note officielle, j'ai déjà dit que je maintiens
23 qu'elle a été rédigée de façon non professionnelle, car ma conversation
24 avec l'homme que j'avais en face de moi a été très brève et qu'il n'a rien
25 noté par écrit à ce moment-là. En fait, j'ai eu l'impression qu'il
26 s'agissait simplement d'un entretien préparatif ou théorique destiné à
27 répondre à des exigences formelles pour préparer mon entretien à venir avec
28 les enquêteurs des Nations Unies.
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1 J'affirme que cette note a été établie par l'homme qui l'a rédigée sur la
2 base de ses souvenirs et du peu qu'il savait de la situation.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il aurait su à l'époque que vous ne
4 saviez pas si la police spéciale s'était rendue sur les lieux ? Est-ce bien
5 ce que vous nous dites ? Parce que c'est ce qui est écrit dans le document
6 dont je viens de donner lecture. Il y est question de vous, et nous lisons
7 : "Mais s'agissant du fait de savoir si les membres de la police spéciale
8 ont été envoyés sur les lieux de l'incident, il ne sait pas," et le pronom
9 "il" fait référence à vous.
10 Comment est-ce que cet homme, M. Vesel, aurait pu savoir si vous saviez ou
11 si vous ne saviez pas que la police spéciale avait été envoyée sur place ?
12 R. Tout cela ce sont des hypothèses de la part de cet homme. Il ressort de
13 la lecture de cette note que j'étais informé du contenu du rapport déjà la
14 veille. Tant que je n'ai pas lu les documents du registre et que je n'ai
15 pas été convaincu que le rapport était arrivé au moment où il est arrivé,
16 je pensais qu'il était arrivé deux jours après dans la matinée.
17 Donc ce simple détail montre que la note a été rédigée par M. Vesel à
18 partir d'autres sources.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. "D'autres sources" qui lui auraient
20 dit ce dont vous vous souveniez ou ce dont vous ne vous souveniez pas ?
21 R. Ou encore il est possible qu'il ait parlé à des collègues de la police
22 judiciaire qui connaissaient mieux les détails de l'incident que moi, car
23 cet incident faisait déjà beaucoup parler à ce moment-là; à moins qu'il ait
24 découvert certains documents relatifs à l'incident. Car je n'ai pas
25 rapporté tout ce qui est écrit ici.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Est-ce que vous savez de quelles
27 sources il s'agirait ? Est-ce que vous connaissez par exemple les noms de
28 personnes qui ont été interrogées par M. Vesel et qui lui auraient donné
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1 ces informations que, d'après vous, il aurait utilisées ?
2 R. M. Vesel travaille pour la police judiciaire, il travaille au QG au
3 ministère de l'Intérieur. Les collègues qui travaillent avec lui --
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous ai posé une question très
5 précise, Monsieur. Est-ce que vous pouvez me donner les noms des personnes
6 qui ont été interrogées et qui auraient fourni à M. Vesel des
7 renseignements à propos de ce que vous saviez et de ce que vous ne saviez
8 pas ?
9 R. Je ne connais pas le nom de ces personnes.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous des renseignements concrets
11 par rapport à ce qu'il a rédigé ici, avez-vous des renseignements concrets
12 indiquant qu'il aurait interrogé d'autres personnes ?
13 R. Je ne dispose d'aucune information, mais manifestement il y avait
14 beaucoup de renseignements à propos de ce qui se passait.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vous dites qu'il est évident dans
16 quel objectif cette note ou ce document était préparé, parce que je pense
17 que vous avez dit que le but était de vous préparer à l'audition avec le
18 TPIY; est-ce bien exact ?
19 R. Non, non, en fait, je ne sais pas très bien pourquoi ce document a été
20 compilé, et c'est moi qui ai demandé que cela soit fait pour que justement
21 je puisse me préparer à cette audition avec les enquêteurs. Je pense que ce
22 n'est pas ce qui a été fait, à mon avis, mais ce qui a été fait c'était
23 justement d'organiser une audition officielle afin de répondre à cette
24 exigence que j'avais présentée.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous expliquer
26 quel était l'objectif d'être interrogé par un officier croate du MUP afin
27 de vous préparer pour cette audition au TPIY ?
28 Monsieur Margetts.
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1 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je regardais
2 juste les dates qui figurent sur la déclaration du TPIY.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est ce que je fais moi aussi.
4 Monsieur Buhin, attendez, je vais essayer de retrouver…
5 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Pourrions-nous avoir accès à ce document ?
6 Puisque ce n'est pas un document qui est une pièce à conviction, il n'a pas
7 été versé au dossier, nous n'avons aucun moyen de le consulter.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais il a été téléchargé. Il a un
9 numéro, une cote 65 ter.
10 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Bien.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien sûr, si vous voulez avoir un
12 exemplaire papier. J'ai demandé un document papier, parce que les Juges
13 n'ont pas accès aux documents qui ne sont pas enregistrés aux fins
14 d'identification, et je pense que j'ai d'ores et déjà annoncé que nous
15 envisagerions ce que l'on fera de ce document à une date ultérieure.
16 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Oui, tout à fait, mais si vous pouviez
17 nous donner la cote de la liste 65 ter.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne l'aie pas. Je viens de la
19 demander.
20 M. MARGETTS : [interprétation] On vient de m'informer qu'il s'agit de la
21 pièce 2786 de la liste 65 ter.
22 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je vous remercie.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Buhin, vous nous dites que vous
24 aviez demandé qu'un entretien soit mené à bien pour que vous puissiez vous
25 préparer à votre audition avec le TPIY.
26 R. Oui, c'est ce que j'ai dit, effectivement.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous n'aviez pas été interrogé par
28 des enquêteurs du TPIY avant l'entretien que vous avez eu avec M. Vesel ?
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1 R. Non. Cet entretien avec M. Vesel a eu lieu quelques jours avant mon
2 audition avec les représentants du Tribunal à La Haye.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Mais cette note de service, cette
4 note officielle, stipule que bien qu'elle ait été compilée le 1er octobre
5 2001, elle précise toutefois que l'entretien a eu lieu le 9 octobre 2001;
6 alors que dans votre déclaration de témoin, nous voyons que la date des
7 entretiens - je parle des entretiens en 2001 - sont les dates suivantes :
8 le 15 et 16 septembre.
9 R. Oui, mais cela confirme une fois de plus ce que j'ai déjà déclaré, à
10 savoir que cette note a été écrite par la suite lorsque quelqu'un l'a
11 demandée, l'a réclamée. M. Vesel ne se souvenait même pas, d'ailleurs il
12 n'a même pas essayé de se souvenir de la date à laquelle nous nous étions
13 entretenus.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais est-ce que vous lui avez parlé
15 alors ? Vous dites il ne se souvenait pas et d'ailleurs il n'a même pas
16 essayé de se souvenir de la date à laquelle nous nous sommes parlés.
17 Comment savez-vous cela ?
18 R. Je le sais parce qu'il a mis la mauvaise date sur ses notes. Nous
19 avons commencé à parler, et lorsque je me suis rendu compte qu'il n'était
20 pas capable, ou qu'il n'était pas à même plutôt, de m'aider à me préparer
21 pour mon audition avec les représentants du TPIY, nous n'avons pas parlé
22 pendant très longtemps.
23 La conversation s'est arrêtée, et de toute façon cette personne n'a pas
24 pris de note pendant l'entretien.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, d'accord, mais comment est-ce que
26 vous savez qu'il a donné la mauvaise date pour cet entretien ? Est-ce que,
27 vous, vous vous souvenez précisément de l'autre date, de la date à laquelle
28 l'entretien a eu lieu ?
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1 R. Non, je ne suis pas en mesure de vous le dire, mais je suis assez sûr
2 et certain que cela s'est passé avant mon audition avec les représentants
3 du TPIY.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc si je comprends bien votre
5 déposition, vous nous dites, en d'autres termes, que M. Vesel vous a
6 interrogé; qu'il a juste écrit ce que d'autres lui avaient dit plutôt que
7 ce que vous lui avez dit, parce que l'entretien a été trop bref; et que
8 c'était tout simplement pour une question de formalité que cet entretien a
9 eu lieu, bien que vous, vous ayez demandé à avoir cet entretien afin de
10 pouvoir vous préparer à une audition ou à un entretien qui, si nous pensons
11 que les dates sont exactes, avait déjà eu lieu quelques semaines
12 auparavant.
13 C'est véritablement ce que vous nous dites, Monsieur Buhin ?
14 R. Oui, oui. Dans la mesure où j'ai pu vous suivre.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'il y a quelque chose qui n'est pas
16 clair, dites-le-moi. Parce que vous répondez, mais je remarque qu'il y a
17 une certaine réserve dans votre réponse.
18 Vous avez eu quelques problèmes à me suivre apparemment ?
19 R. J'ai essayé de suivre vos propos, Monsieur le Président, et vous avez
20 d'ailleurs bien résumé la situation.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous diriez que j'ai résumé
22 de façon exacte cette partie de votre déposition à laquelle j'ai fait
23 référence ?
24 R. Oui, oui, c'est cela. C'est exact.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous savez si d'autres
26 personnes ont été interrogées par des représentants du bureau du Procureur
27 afin d'être interrogées par les autorités de la police croate, et ce, avant
28 ou après que des déclarations aient été fournies par des témoins potentiels
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1 ?
2 R. Je sais que j'ai plusieurs collègues de la police qui ont eu des
3 entretiens avec des représentants du TPIY. Je ne suis pas informé du fait
4 qu'ils aient eu des entretiens avec les représentants de la police croate.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous êtes la seule personne. En ce qui
6 vous concerne, vous êtes la seule personne avoir eu ce genre d'entretien
7 avec la police croate ?
8 R. D'après ce que je sais, j'ai été le premier à être invité à répondre
9 aux questions posées par les représentants du TPIY. Je dois dire que
10 j'appréhendais beaucoup cet entretien. Je ne savais pas ce que je devrais
11 dire, je ne savais pas comment est-ce que cela évoluerait. C'est pour cela
12 que j'ai demandé l'aide de la police croate, des autorités croates. C'est
13 probablement la raison pour laquelle j'ai été le seul, parce que j'étais le
14 premier.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites que vous ne saviez pas quelle
16 tournure cela allait prendre et ce que vous devriez dire. Vous êtes un
17 officier de police formé et vous êtes juriste de formation, juriste
18 spécialisé, qui plus est, dans le droit pénal, et vous nous dites que vous
19 ne saviez pas ce qui allait se passer pendant l'entretien. Puis-je me
20 permettre d'avancer une suggestion. Je pense que la seule chose que
21 d'aucuns peuvent faire dans ce genre de situation c'est de dire la vérité
22 aux questions qui sont posées, non ?
23 R. Tout à fait. Toutefois, j'étais le premier et j'avais une certaine
24 appréhension. Je ne savais pas comment cela allait se passer, je ne savais
25 pas si j'allais être appréhendé ou si mes propos allaient être présentés à
26 quelqu'un d'autre. C'est pour cela que je voulais qu'un représentant de la
27 police ou un représentant d'autres instances du gouvernement croate soit à
28 mes côtés.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je peux tout à fait comprendre que
2 vous avez essayé d'obtenir des orientations à propos de ce qui pourrait se
3 passer, mais ce que nous voyons c'est quand même une note de service
4 officielle, qui porte apparemment sur le fond de la question et absolument
5 pas sur les questions que vous venez de soulever.
6 R. C'est précisément pour cette raison que j'ai dit que l'entretien que
7 j'ai eu avec ce collègue de la police judiciaire a été très, très bref.
8 Parce que je me suis rendu compte qu'il n'était pas à même de me fournir
9 l'aide que je cherchais à obtenir. Notre conversation fut très brève, et
10 ensuite nous nous sommes séparés.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et ensuite il commence à écrire un
12 document de trois pages dans lequel il fait référence, entre autres, à
13 apparemment ce que vous lui auriez dit à propos de l'incident de Grubori.
14 Il a tout simplement inventé tout cela, ou il a obtenu cela d'autres
15 sources, comme vous le dites ?
16 R. Je pense qu'il a obtenu cette information d'autres sources. Il n'a pas
17 obtenu tous ces renseignements de moi.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais passer à autre chose.
19 Vous nous avez dit que vous n'avez, vous personnellement, jamais vu des
20 objets ou biens volés transportés dans des véhicules de la HV. Vous avez
21 également expliqué qu'il vous a été indiqué ce qui avait été vu aux postes
22 de contrôle, et vous nous avez expliqué qu'il était extrêmement difficile
23 de déterminer s'il s'agissait de biens qui pouvaient être utilisés en toute
24 légitimité par les forces croates ou s'il s'agissait de biens volés.
25 Vous nous avez expliqué - il me semble que cela s'est passé hier - ce qui
26 faisait l'objet de rapports, et je parle des biens qui se trouvaient dans
27 ces véhicules, il s'agissait de portes, de fenêtres, de différents types
28 d'électroménagers, et vous avez ajouté à cela tout ce que l'on peut charger
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1 à bord d'un camion.
2 Apparemment, ce sont les rapports qui vous ont été présentés. Vous nous
3 avez dit qu'il s'agissait juste de rumeurs, de bruits qui courraient à
4 propos de biens volés qui étaient transportés. Est-ce que vous pourriez
5 m'expliquer pourquoi vous avez estimé qu'il s'agissait juste de rumeurs, de
6 bruits qui courraient, notamment lorsque l'on pense aux rapports qui vous
7 étaient présentés ?
8 R. Alors, compte tenu de ce qui était consigné au niveau des postes de
9 contrôle, il y a de nombreux cas de confiscation de différents objets.
10 D'après l'information dont nous disposions, il s'agissait d'objets volés
11 que d'aucuns essayaient de faire sortir de la zone.
12 Par ailleurs, la situation était telle que tous les véhicules qui passaient
13 par les postes de contrôle, je pense par exemple à des véhicules de l'armée
14 croate, n'étaient pas forcément des véhicules qui transportaient des objets
15 nécessaires à l'armée croate. Ça, c'est ce que l'on croyait à l'époque. Il
16 faut savoir que les besoins de l'armée croate étaient assez importants et
17 il n'y a absolument pas de moyens de preuve fondamentaux à cet égard.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, je vais relire votre réponse.
19 Ce qui ne peut pas être corroboré d'aucune manière ? Vous dites que l'avis
20 selon lequel tous ces biens n'étaient pas destinés à l'utilisation
21 militaire, est-ce que c'est cela qui ne pouvait pas être corroboré, d'après
22 vous ?
23 R. Oui.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, vous dites que les fenêtres, les
25 portes et ce genre de matériel, tout ce qu'on pouvait charger à bord d'un
26 camion, vous pensiez qu'il y avait une explication raisonnable et que
27 l'armée croate souhaitait avoir de nouvelles portes et nouvelles fenêtres
28 dans ses bâtiments.
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1 Est-ce que c'est ainsi qu'il faut que je comprenne votre réponse ?
2 R. Non. Vous m'avez mal compris.
3 J'ai dit que l'on emportait de cette région tout ce qu'on pouvait emporter,
4 y compris les fenêtres, les portes et d'autres biens. Je n'ai pas dit que
5 c'était transporté à bord des camions militaires. Mais j'ai dit qu'on a
6 essayé de les emporter de la région dont nous étions chargés de la
7 sécurité. Le plus souvent, c'était fait par les civils qui souhaitaient
8 utiliser ce matériel pour réparer leurs propres bâtiments.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais lorsque je vous ai posé une
10 question hier à ce sujet, il était évident que c'était une question posée
11 dans le contexte des véhicules militaires. Et je vous ai demandé ce que
12 vous pouviez voir à une distance de 20 ou 30 mètres où se trouvait un point
13 de contrôle militaire. Vous aviez dit que vous ne pouviez pas le savoir
14 parce que les voitures n'étaient pas visibles. Ensuite, je vous ai, dans ce
15 même contexte, posé une autre question, et vous avez dit ce qui avait été
16 remarqué à bord de ces camions et ce dont on vous avait présenté des
17 comptes rendus, mais que vous ne l'aviez pas vu vous-même.
18 Mais vous diriez que ces équipements ménagers, portes, fenêtres qui
19 se trouvaient à bord des véhicules civils, tout cela se trouvait à bord de
20 véhicules civils ?
21 R. Précisément. Parce que nous pouvions vérifier ce qui se trouvait à bord
22 de ces véhicules. Je ne peux pas vous parler des choses que nous n'avons
23 pas vues.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne répèterai pas des questions que je
25 vous ai déjà posées à ce sujet.
26 Une dernière chose.
27 Vous avez dit que la police militaire refusait d'avoir des points de
28 contrôle mixtes. Vous avez dit que c'était une des choses qui étaient à
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1 l'origine de l'ordre selon lequel il fallait ériger des points de contrôle
2 mixtes et de s'engager dans des patrouilles mixtes. Je pense que c'était le
3 même ordre en date du 19 août émanant de M. Moric.
4 Est-ce que vous vous le rappelez ?
5 R. Oui. Cela s'est passé après cet ordre et après des réunions entre M.
6 Moric et M. Lausic.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. S'agissant de ces points de
8 contrôle qui n'étaient pas des points de contrôle mixtes, vous avez dit que
9 parfois les points de contrôle étaient à une distance de 20 ou 30 mètres.
10 Etait-ce la situation avant le 19 août ?
11 R. Oui.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'agissant de ces efforts afin d'avoir
13 des points de contrôle mixtes, on vous a posé une question, et il a été dit
14 que la police militaire n'avait pas suffisamment de personnel pour avoir
15 des points de contrôle mixtes. Donc, vous vous souvenez qu'il n'y avait pas
16 suffisamment d'hommes qui pouvaient être de faction à tous ces points de
17 contrôle mixtes.
18 Est-ce que vous vous en souvenez ?
19 R. Oui, je me souviens très bien de cette problématique. Mais on parlait
20 de toute la région de Kotar-Knin. Sur les routes principales, l'on tâchait
21 d'avoir ces points de contrôle mixtes, et sur les routes moins importantes,
22 il n'y avait que les membres de la police civile qui étaient de faction.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, vos points de contrôle étaient des
24 points de contrôle mixtes, n'est-ce pas ?
25 R. Oui. Après le 19 août, et après que cette information ait été envoyée
26 par MM. Moric et Lausic.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais lorsque vous dites que vous n'aviez
28 pas suffisamment d'hommes pour être de faction aux points de contrôle
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1 mixtes…
2 R. Là où, jusqu'au 19 août, il y avait des points de contrôle distincts de
3 la police militaire et de la police civile, ces points de contrôle ont été
4 rejoints. Il n'y avait plus de points de contrôle séparés. Si la police
5 militaire ne pouvait pas être de faction à un point de contrôle, c'était la
6 police civile qui s'en chargeait.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce sens-là, ce n'étaient plus des
8 points de contrôle mixtes; parce que j'essaie de comprendre la chose
9 suivante : si la police militaire -- en fait, je vais reformuler.
10 Vous avez dit là où les points de contrôle étaient déjà placés, mais placés
11 à une petite distance, là, les points de contrôle civils et militaires
12 étaient fusionnés, tandis que là où il n'y avait pas un point de contrôle
13 militaire à proximité, étant donné qu'il n'y avait pas suffisamment
14 d'hommes, là, c'était un point de contrôle civil exclusivement. Donc, il
15 n'y avait que la police civile qui était de faction à ce genre de point de
16 contrôle.
17 R. C'est exact.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous nous dire quel était le
19 pourcentage de points de contrôle communs après ce changement d'attitude de
20 politique, quel est le pourcentage de vos propres points de contrôle qui
21 étaient des points de contrôle mixtes avec la police militaire après le 19
22 août ? Etait-ce 50 % ou 25 % ou 80 %. Je ne vous demande pas d'avancer un
23 chiffre précis, mais donnez-nous juste un ordre d'idée.
24 R. Je ne pourrais pas avancer un chiffre précis parce qu'il s'agit d'une
25 région vaste, et je ne m'en souviens plus. Mais d'après mes souvenirs,
26 entre 60 et 70 % des points de contrôle étaient des points de contrôle
27 mixtes ou communs.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci de votre réponse.
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1 Maître Misetic.
2 M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
3 Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Misetic :
4 Q. [interprétation] Monsieur Buhin, j'aimerais que l'on revienne à la
5 question posée par M. Margetts, s'agissant des registres portant sur des
6 personnes qui étaient dans la zone, peut-être une suggestion a été avancée
7 que peut-être vous étiez à même de surveiller tous le civils qui étaient
8 entrés dans la zone. Je vous ai montré une séquence vidéo où l'on voyait
9 500 personnes à bord d'un train, alors que déjà il y avait entre 2 à 3 000
10 personnes à Knin en date du 15 août.
11 Est-ce que la police avait des registres au sujet de tous les civils qui
12 étaient entrés dans la région ?
13 R. C'était physiquement impossible. Uniquement à l'époque où les premiers
14 civils ont commencé à rentrer, l'on délivrait les laissez-passer. Et au fur
15 et à mesure que leur nombre augmentait, nous avons abandonné cette
16 procédure de délivrer les laissez-passer, tout simplement parce que ce
17 n'était pas faisable.
18 Q. Bien que vous ayez été préoccupé par les attaques terroristes, vous
19 vous voulez dire que vous saviez tout ce qui se passait au sujet des civils
20 dans le secteur ?
21 R. Nous étions préoccupés par les terroristes et par ceux qui étaient
22 auteurs de crimes. Mais l'on ne vérifiait et contrôlait que les personnes
23 que l'on soupçonnait d'avoir commis quelque chose ou que l'on soupçonnait
24 d'être sur le point de commettre quelque chose. Il n'y a que ces personnes-
25 là que l'on vérifiait.
26 Q. Bien sûr, nous n'avons pas établi quelle était la date à laquelle par
27 exemple un grand nombre de civils étaient arrivés. Vous avez parlé du train
28 liberté; je vous ai montré d'autres rapports.
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1 Mais peu importe quelle était la date à laquelle cela a commencé, peut-on
2 dire que le territoire libéré était au fond un territoire libre de même
3 que, par exemple, le territoire littoral ?
4 R. Une fois que nous avons arrêté de délivrer les laissez-passer, c'était
5 peut-être avant le passage du premier train de Zagreb à Knin -- excusez-
6 moi.
7 Pourriez-vous répéter votre question.
8 Q. Je vais reformuler.
9 A partir de quel moment le territoire libéré a commencé à être traité comme
10 n'importe quel autre partie de la Croatie telle que, par exemple, le
11 littoral en termes de liberté de circulation ?
12 R. A partir du jour où on a annulé les laissez-passer.
13 Q. Le Juge Gwaunza vous a posé une question au sujet du retour des soldats
14 de l'armée croate qui rentraient de Bosnie et qui procédaient aux actes de
15 pillage et d'incendie.
16 Est-ce que c'étaient les soldats dont vous avez parlé au début de
17 votre déposition cette semaine qui étaient démobilisés ?
18 R. Oui. D'après ce qui a été confirmé par la suite parmi les auteurs de
19 crimes, il y avait des soldats démobilisés.
20 Q. Oui. Mais vous avez parlé des soldats qui étaient rentrés de Bosnie et
21 qui avaient commis des crimes. Est-ce que vous dites que ces gens sont
22 rentrés de Bosnie, qu'ils ont été démobilisés et qu'ensuite ils ont commis
23 ces crimes ?
24 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, pour que la
25 déposition soit utile, il faut présenter cela par étape. Je ne vois pas
26 quelle est la base sur laquelle on pose cette question.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Jusqu'à présent, cette question a été
28 formulée d'une manière si générique que l'on ne pourrait pas mais --
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1 Vous pouvez poursuivre, mais suivez la consigne de M. Margetts, si
2 vous voulez.
3 M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
4 Q. Je vais répéter ma question. Est-ce que vous êtes en train de dire que
5 ces gens qui sont rentrés de Bosnie étaient démobilisés et qu'ensuite ils
6 ont commis ces actes criminels en tant que soldats démobilisés ?
7 R. Je ne peux que vous dire ce que m'ont dit mes collègues du ministère
8 qui procédaient aux enquêtes criminelles. Et ils m'ont dit qu'il y avait de
9 tels cas où ces gens, une fois démobilisés, étaient rentrés chez eux dans
10 leurs villages et villes dévastés, et le plus souvent tout simplement ils
11 prenaient quelque chose qu'ils trouvaient dans une maison à côté pour
12 l'utiliser dans leurs propres maisons.
13 Q. Vous avez dit "ces gens qui étaient démobilisés." Vous dites que ces
14 gens étaient démobilisés une fois qu'ils étaient rentrés de Bosnie ? C'est
15 bien que cela que vous avez dit ?
16 R. Je ne peux pas affirmer la partie qui concerne "une fois rentrés de
17 Bosnie". Les gens qui étaient membres des unités militaires étaient ensuite
18 démobilisés et ils étaient rentrés chez eux. Mais je ne pourrais pas vous
19 dire de quel front ils étaient rentrés.
20 Q. Mais dans votre déclaration lorsque vous avez dit que les soldats
21 rentraient de Bosnie, où est-ce que vous avez pris qu'il s'agissait de
22 soldats qui rentraient de Bosnie ?
23 R. Je ne m'en souviens pas. Probablement le général Cermak, lors des
24 premières réunions de coordination, il nous avait promis que l'armée allait
25 être envoyée de Knin à d'autres lignes de front, et par la suite j'ai
26 appris que certains soldats étaient envoyés en Bosnie, et compte tenu de ce
27 contexte, j'ai mentionné la Bosnie également. Mais je n'ai pas de
28 connaissances concrètes à ce sujet.
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1 Q. Donc vous n'avez pas de connaissances précises selon lesquelles les
2 soldats rentrés du front en Bosnie avaient commis des crimes ?
3 R. C'est exact.
4 Q. S'agissant des portes et des fenêtres à bord des camions, vous avez
5 précisé votre déposition d'hier, mais la Chambre a vu un grand nombre
6 d'éléments de preuve au sujet des fenêtres brisées lors de l'opération
7 Tempête, et d'autres dégâts occasionnés à des bâtiments lors de ces
8 opérations.
9 Ces portes et fenêtres, est-ce que vous savez si l'armée croate avait
10 participé au transport du matériel qui servait à reconstruire les bâtiments
11 endommagés lors de l'opération militaire ? Est-ce que vous savez que
12 l'armée croate avait participé au transport et à la livraison de tels biens
13 ?
14 R. Nous n'avons jamais parlé de nouvelles portes ou fenêtres. Il arrivait
15 que certaines personnes rentraient chez eux dans leurs foyers, et ils
16 constataient qu'il y avait des fenêtres et des portes brisées, et ils
17 allaient en chercher dans d'autres maisons. Mais s'agissant du fait que
18 l'armée croate transportait ces biens, je n'ai pas d'informations à ce
19 sujet.
20 Q. Merci, Monsieur Buhin.
21 M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Mikulicic, j'ai une petite
23 question de suivi s'agissant des questions de Me Misetic.
24 Monsieur Buhin, vous avez parlé de soldats démobilisés qui revenaient sur
25 leur lieu d'origine. Une fois qu'ils étaient démobilisés, une fois qu'ils
26 étaient rentrés dans leurs villages, à partir de leur retour, est-ce qu'ils
27 relevaient de la compétence de la police civile, la police classique, ou
28 est-ce qu'ils relevaient encore de la compétence de la police militaire ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas vous le dire avec précision,
2 mais je pense qu'une grande partie des soldats démobilisés ont repris leur
3 vie de civils, donc ils étaient traités en tant que civils.
4 Mais il faudrait peut-être souligner qu'à ce moment-là l'uniforme de
5 la HV était particulièrement prisé, et que les gens ont continué à le
6 porter même après leur démobilisation et qu'il y avait de nombreuses
7 personnes qui se promenaient ainsi à Zagreb, alors que cela n'était
8 absolument pas nécessaire. C'était tout simplement une question d'image,
9 c'était en vogue. C'est cela qui était populaire.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Je vois que nous avons des
11 statistiques intéressantes à propos de l'abus de port d'uniforme et à
12 propos des civils et des militaires.
13 Je n'ai plus de questions.
14 Maître Mikulicic.
15 M. MIKULICIC : [interprétation] Je vais essayer d'être très bref, Monsieur
16 le Président.
17 Je souhaiterais que la pièce D527 soit affichée à l'écran.
18 Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Mikulicic :
19 Q. [interprétation] Monsieur Buhin, j'aimerais juste vous poser une ou
20 deux questions, ce sont les réponses que vous avez apportées au Président
21 de la Chambre de première instance qui me poussent à vous poser ces
22 questions.
23 Nous avons un document qui est maintenant affiché et il s'agit d'un décret
24 relatif à l'organisation provisoire et au travail du ministère de
25 l'Intérieur de la République de Croatie.
26 C'est l'article 27 de ce document qui m'intéresse, et le numéro
27 d'identification est le numéro 3D00-1514.
28 Nous allons voir, Monsieur Buhin, l'article qui régule la structure
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1 du secteur de la police spéciale et ce, dans le cadre du ministère de
2 l'Intérieur. L'article 27 stipule que le secteur de la police spéciale est
3 composé de huit branches : il y a un département de contrôle interne; une
4 unité de combat antiterroriste; ainsi qu'une unité d'antiterrorisme
5 spéciale; une unité de force aérienne. Vous avez également l'unité de la
6 force aérienne Lucko. Au numéro 5, vous avez le département de la
7 propagande psychologique; au numéro 6, le département de la logistique
8 police; vous avez le département pour l'utilisation et l'entraînement des
9 canidés et des chevaux; ainsi qu'un centre de formation.
10 Comme vous le voyez, Monsieur Buhin, il s'agit de la structure de la
11 police spéciale et nous ne voyons absolument nulle part une unité pénale,
12 une unité chargée des enquêtes criminelles. Etes-vous d'accord ?
13 R. Oui.
14 Q. Monsieur Buhin, pendant vos longues années de service en tant
15 qu'officier de police, avez-vous jamais vu --
16 L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine anglaise demande au conseil de la
17 Défense de répéter sa question.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mikulicic, les interprètes
19 n'ont pas suivi votre question. Pourriez-vous la répéter ?
20 M. MIKULICIC : [interprétation] Oui.
21 Q. Monsieur Buhin, bien sûr, je parle très vite parce que l'heure de la
22 fin est déjà terminée.
23 J'aimerais savoir si vous n'avez jamais vu ou entendu parler de
24 membres de la police spéciale qui se sont jamais occupés d'enquête
25 criminelle ?
26 R. Non, je n'ai jamais vu cela et je n'en ai jamais entendu parler.
27 Q. Lorsque M. Vesel, dans sa note de service, rédige qu'il vous a
28 apparemment parlé ou, plutôt, que vous lui avez dit qu'une unité de la
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1 police spéciale serait diligentée sur les lieux de l'événement pour mener à
2 bien une enquête, c'est quelque chose qui n'est absolument pas logique au
3 vu de votre travail au sein de la police, de votre expérience et de vos
4 connaissances ?
5 R. Oui, c'est exact.
6 Q. Est-ce que vous pouvez confirmer que vous n'avez jamais rien dit de la
7 sorte ?
8 R. Bien, je n'en suis pas sûr.
9 Q. Monsieur Buhin, vous aviez demandé d'avoir cette conversation avec M.
10 Vesel, est-ce que vous avez parlé de l'incident du village de Grubori ?
11 Est-ce que vous en avez parlé ?
12 R. J'ai probablement mentionné que nous allions également parler de cela,
13 mais je n'en ai pas parlé en détail avec lui.
14 Q. Je vous remercie.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Maître Mikulicic.
16 Monsieur Margetts. Je regarde l'horloge et je n'ai d'ailleurs même pas
17 encore demandé aux interprètes et aux autres si nous pouvions poursuivre,
18 j'aurais dû leur demander. A moins -- je ne sais pas, si c'est quelque
19 chose d'urgent ou si c'est quelque chose que vous pouvez régler en une
20 minute, je vous demanderais de prendre cela en considération. Est-ce qu'il
21 faut absolument que nous continuions.
22 M. MARGETTS : [interprétation] Non, ce n'est pas un besoin absolu. Je
23 pourrais régler la question en deux ou trois minutes. Si j'avais une à deux
24 minutes à ma disposition.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Deux à trois minutes. Je regarde vers la
26 cabine des interprètes. Si je regarde de très près l'horloge et que je
27 limite M. Margetts à deux minutes et demie -- je n'ai toujours pas de
28 réponse de la part des interprètes. Vous savez, parfois, qui ne dit mot
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1 consent.
2 Deux minutes et demie et je serai très strict, Monsieur Margetts.
3 M. MARGETTS : [interprétation] Merci. Et merci aux interprètes.
4 Nouvel interrogatoire supplémentaire par M. Margetts :
5 Q. [interprétation] Monsieur Buhin, vous avez répondu aux questions posées
6 par le Président de la Chambre, et vous avez fait un distinguo entre les
7 véhicules militaires et les véhicules civils, vous avez dit que les portes
8 et les fenêtres étaient placées à bord d'un camion. La question vous avait
9 été posée.
10 Et vous avez répondu : Oui, tout à fait. Nous pouvions les contrôler
11 et nous pouvions voir ce qu'ils transportaient. Nous ne pouvions rien dire
12 à propos de ceux que nous ne pouvions pas voir parce qu'on ne pouvait pas
13 voir ce qu'ils transportaient.
14 Lorsque vous parlez de "ceux-là", est-ce que vous faisiez référence à
15 des véhicules militaires ?
16 R. Oui, c'est ce que je voulais dire.
17 Q. Alors, comment est-ce que vous compreniez la situation ? Qui pouvait
18 contrôler les mouvements des véhicules militaires ?
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que ce sont mes questions, en
20 fait, qui vous poussent à poser ces questions ? Moi, je me suis abstenu de
21 poser d'autres questions. Parce que si vous examinez le compte rendu
22 d'audience à propos de ce qui lui a été demandé, ce qu'il pouvait voir, ce
23 qu'il ne pouvait pas voir, les camions qui étaient ouverts, ceux qui
24 n'étaient pas ouverts, et cetera, moi, j'ai pensé que j'étais suffisamment
25 informé. Je n'ai pas, justement, posé de questions pour savoir qui étaient
26 les autorités compétentes qui pouvaient régler la question. Cette question
27 n'émane certainement des questions que moi, j'ai posées.
28 M. MARGETTS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Buhin, nous en avons terminé
2 avec votre déposition. Je vous remercie vivement d'être venu à La Haye et
3 d'avoir répondu aux nombreuses questions qui vous ont été posées par les
4 parties ainsi que par les Juges. Je vous souhaite un bon retour chez vous.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous levons l'audience et nous
7 reprendrons demain, 9 octobre, à 14 heures 15 dans la salle d'audience
8 numéro III.
9 --- L'audience est levée à 19 heures 11 et reprendra le jeudi 9 octobre
10 2008, à 14 heures 15.
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