Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 14451

  1   Le jeudi 15 janvier 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 21.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tout le monde.

  6   Monsieur le Greffier, veuillez appeler l'affaire, je vous prie.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

  8   Madame, Monsieur les Juges. Bonjour à tout le monde. Il s'agit de l'affaire

  9   IT-06-90-T, le Procureur contre Ante Gotovina et consorts.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier.

 11   Avant que nous ne reprenions le fil de l'interrogatoire de M. Konings,

 12   j'aimerais régler rapidement quelques questions de procédure. La Chambre a

 13   été informée qu'il n'y avait pas d'objections soulevées contre le versement

 14   au dossier des pièces P1269 et P1270.

 15   M. KEHOE : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Par conséquent, les pièces P1269 et

 17   P1270 sont versées au dossier.

 18   Monsieur Russo, l'Accusation est invitée -- et je me tourne vers vous parce

 19   que c'est vous qui avez convoqué le témoin, c'est vous qui saurez quand

 20   vous aurez une certaine disponibilité, mais toujours est-il que

 21   l'Accusation est invitée après la fin de la déposition de M. Konings à

 22   trouver la semaine prochaine le temps nécessaire pour une séance de mise au

 23   point et de logistique. Bien entendu, il faudra que vous informiez la

 24   Chambre et la Défense de votre préférence.

 25   La Chambre est également informée qu'il y a un accord, limité certes, mais

 26   accord toutefois à propos du système de coordonnées utilisé dans certains

 27   documents présentés. Si vous avez quoi que ce soit à nous dire à ce sujet,

 28   la Chambre souhaiterait vous entendre. C'est vous, Maître Misetic ?

Page 14452

  1   M. MISETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  2   Malheureusement, nous nous étions mis d'accord, en tout cas moi j'ai eu une

  3   conversation avec M. Russo, et nous n'avions pas compris ce qu'avait dit M.

  4   Russo ici dans le prétoire, hier. Nous avions cru comprendre que le bureau

  5   du Procureur avait effectivement pris ces coordonnées et les avait reprises

  6   pour voir à quoi elles correspondaient. En fait, il semblerait maintenant

  7   que pour ce qui est de reprendre les coordonnées, l'Accusation ne l'a pas

  8   fait. Mais nous, nous l'avons fait, et que pense que ce n'est pas la peine

  9   de continuer à en parler. Nous nous sommes mis d'accord sur le fait que

 10   pour ce qui est de ces coordonnées, nous avons l'intention de revenir là-

 11   dessus lors du contre-interrogatoire du témoin. Donc, je peux dire que nous

 12   avons eu une conversation avec M. Russo, une conversation qui a eu un

 13   certain sens, et je crois comprendre de M. Russo qu'en fait ils ont repris

 14   eux-mêmes les coordonnées, les ont utilisées pour voir à quoi cela

 15   correspondait. Mais M. Russo a indiqué qu'il allait se pencher sur la

 16   question. De toute façon, à moins qu'il n'y ait une raison de leur part de

 17   penser que ces coordonnées ne sont pas exactes, ils pourront le dire et ils

 18   pourront présenter et soulever des objections --

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Bien sûr, alors là il y a deux

 20   éléments distincts, différents. Premièrement, il s'agit de savoir quel est

 21   le système de coordonnées qui a été utilisé - donc avec les références

 22   classiques; puis deuxièmement, il s'agit de savoir ce que l'on trouve

 23   lorsqu'on utilise ce système de coordonnées sur une carte.

 24   M. MISETIC : [interprétation] Non, ce n'est pas le système de coordonnées

 25   qui est en général utilisé par les Nations Unies. C'est un système

 26   différent. Il s'agit en fait du système suivant.

 27   Je vais vous l'épeler pour bien m'assurer de ne pas faire d'erreur. Il

 28   s'agit du système Gauss-Kruger, G-a-u-s-s, trait d'union, K-r-u-g-e-r.

Page 14453

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, bien.

  2   M. MISETIC : [interprétation] C'est le système que nous allons utiliser.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous sommes informés de cela, M. Russo

  4   est également informé.

  5   M. MISETIC : [interprétation] Permettez-moi de vous dire qu'il s'agit du

  6   système qui était utilisé par l'armée yougoslave, donc c'est la base du

  7   système de l'armée yougoslave --

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suppose que vous aurez suffisamment

  9   d'exemples à nous fournir. Vous n'allez pas seulement nous vérifier cela

 10   par le biais d'un seul exemple, je suppose. Par exemple, si vous avez une

 11   référence qui est faite à un carrefour et lorsque vous reprenez les

 12   coordonnées et que sur la carte vous vous rendez compte que cela vous amène

 13   au milieu d'une piscine, par exemple là on pourrait penser qu'il peut y

 14   avoir des problèmes.

 15   Donc vous allez mettre cela à l'épreuve, et je pense que cela nous

 16   permettra de comprendre le système utilisé.

 17   M. RUSSO : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président, mais

 18   j'aimerais juste rebondir sur ce qu'a dit M. Misetic. Il a tout à fait

 19   raison lorsqu'il dit que je suis d'accord avec ce qu'il a avancé. En fait,

 20   nous n'avons pas véritablement parlé du système de coordonnées, nous

 21   n'avons pas parlé du système dont il vient de nous donner les détails. Mais

 22   toutefois, nous le croyons sur parole lorsqu'il nous dit que c'était le

 23   système utilisé par l'armée croate. Ce que j'ai dit hier c'est que nous

 24   avons pris la carte croate que nous avions reçue de la part du gouvernement

 25   croate lorsque nous leur avons demandé, nous avons utilisé donc cela et

 26   nous avons vu comment est-ce que l'on pouvait dessiner les lignes. Donc, je

 27   suppose que les lignes sur la carte correspondent au système qu'il a

 28   mentionné. Je n'ai pas vu la carte, et comme ils ont pris la peine

Page 14454

  1   d'établir et de reprendre les coordonnées et de les dessiner sur la carte,

  2   je pense qu'ils ont l'intention de montrer cela au témoin lors du contre-

  3   interrogatoire, et je pense que nous pourrons nous mettre d'accord là-

  4   dessus.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais tout cela a été évoqué parce

  6   qu'hier il y a une requête qui avait été présentée, et je dois dire que

  7   maintenant le débat est un peu moins passionné.

  8   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il est moins intense, en tout cas.

 10   Je vais essayer de dire quelque chose. Je ne sais pas si j'arriverai à

 11   prononcer l'adjectif anglais, mais je ne sais pas si cela a une connotation

 12   médicale intrinsèque, ce que vous me dites, Maître Misetic. Je crois en

 13   fait que cela est exprimé par l'Accusation. J'aimerais savoir si c'est

 14   quelque chose qui peut être utilisé sans connotation médicale.

 15   M. RUSSO : [interprétation] En fait, l'Accusation a parlé de la page du

 16   dictionnaire parce que nous voulions également savoir comment l'on définit

 17   le terme "stacionar". Je crois comprendre, d'après ce que dit Me Misetic,

 18   que cela a un certain sens, un sens d'ailleurs très précis dans le contexte

 19   militaire. Toutefois, nous avons réagi à l'objection qui avait été soulevée

 20   hier, et c'est une explication en fait de la part de la personne qui a

 21   traduit cela au sein du CLSS. En fait, ils avaient expliqué qu'il s'agit

 22   d'un dispensaire et d'un poste médical.

 23   D'où le désaccord, et cela n'est toujours pas réglé.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons essayer de le régler à

 25   l'avenir --

 26   M. MISETIC : [interprétation] J'allais juste ajouter à la suite de ce qu'a

 27   dit M. Russo que nous devrions peut-être prendre un certain temps pour voir

 28   ce que signifie exactement ce mot dans ce contexte; et j'aimerais que d'une

Page 14455

  1   manière ou d'une autre nous puissions en parler ou fournir la solution à la

  2   Chambre.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, merci de cette information.

  4   Puis finalement, j'ai été informé du fait qu'il y a des observations

  5   qui ont été faites à propos de la carte de l'année 1993 qui a été montrée à

  6   la Chambre hier.

  7   M. RUSSO : [interprétation] C'est exact, parce qu'il y avait la question du

  8   mot "stacionar", et de toute façon cela ne serait nul et non advenu si la

  9   Chambre prend une décision à propos de la pertinence du document ou si la

 10   Chambre décide que le document n'a pas suffisamment de valeur probante, ce

 11   qui fait qu'il ne sera pas versé au dossier. Ceci étant, s'il s'agit d'un

 12   poste médical, le document pourrait être considéré comme recevable.

 13   M. MISETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, nous avons des

 14   objections pour ce qui est de la pertinence et pour ce qui est du manque de

 15   valeur probante. M. Russo et moi-même avons eu quelques discussions à ce

 16   sujet pour voir en fait si la carte de 1993 qui avait été utilisée dans le

 17   cadre d'un exercice d'entraînement a par la suite été utilisée lors de

 18   l'opération Tempête en 1995. Je pense que nous sommes d'accord pour dire

 19   qu'il n'y a pas de référence explicite au fait que cette carte a été

 20   utilisée lors de l'opération Tempête.

 21   Nous avançons en fait qu'elle n'a pas été utilisée pendant

 22   l'opération Tempête. Il n'y a pas de moyens de preuve qui permettent

 23   d'étayer cette affirmation et, par conséquent, je sais que M. Russo

 24   demandera à la Chambre de tirer des conclusions, parce que je pense que

 25   certains des objectifs pourraient se retrouver dans d'autres documents qui

 26   eux ont été utilisés lors de l'opération Tempête. Ceci étant dit, il y

 27   avait des cibles fixes en 1993, et ces cibles peuvent être les mêmes en

 28   1995. Je ne pense pas que cela signifie que toute la carte Poskok 93 doit

Page 14456

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 14457

  1   être considérée comme une carte qui aurait été utilisée lors de l'opération

  2   Tempête.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais alors maintenant vous

  4   mélangez un peu les genres; vous demandez dans un premier temps si la carte

  5   a une pertinence, puis maintenant vous parlez des conclusions que l'on peut

  6   dégager à partir de cette carte. Une carte peut avoir sa pertinence même si

  7   vous n'acceptez pas que toutes les cibles de l'exercice d'entraînement se

  8   trouvent sur la carte et ont été utilisées, mais cela dépend de la

  9   globalité des moyens de preuve. Il faudra voir si cette conclusion est

 10   justifiée ou non.

 11   M. MISETIC : [interprétation] Je pense que l'on pourrait déterminer si

 12   cette carte précise a été utilisée. On peut dégager des conclusions à

 13   partir de documents ou à partir d'un certain journal de bord ou à partir

 14   d'un ordre indiquant que l'on doit utiliser cette liste.

 15   Deuxièmement, il faut penser au préjudice par rapport à la valeur probante.

 16   Parce que si nous considérons que cette carte est admissible, cela exigera

 17   de la part de la Défense qu'elle commence à présenter des moyens de preuve

 18   à propos des circonstances pour certaines structures qui figurent sur la

 19   carte de 1993.

 20   Il faudrait que nous nous livrions à tout cet exercice, qu'il

 21   faudrait que nous présentions à la Chambre les cibles pendant les séances

 22   d'entraînement en 1993 qui se trouvent sur les cartes. Il faudrait que nous

 23   parlions des circonstances et il faudrait que l'on place tout cela dans le

 24   contexte idoine, et je ne pense pas franchement que cet exercice soit

 25   particulièrement utile. Je pense aux ressources de la Défense et je pense à

 26   la globalité des moyens de preuve, et je ne pense pas que la Chambre de

 27   première instance doit être littéralement bombardée ou inondée d'éléments

 28   relatifs à l'année 1993 à propos des cartes et à propos de leur

Page 14458

  1   utilisation.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qu'il s'agisse d'une conséquence logique

  3   de la décision de verser au dossier cela, de toute façon la décision n'a

  4   pas encore été prise.

  5   La première question est de savoir si nous allons d'ores et déjà

  6   décider que la carte ne sera pas considérée comme recevable quelles que

  7   soient les circonstances. Si cela est décidé, la question du mot

  8   "stacionar" devient nulle et non avenue. C'est évident.

  9   [La Chambre de première instance se concerte]

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Au vu des informations reçues par la

 11   Chambre jusqu'à présent, la Chambre ne voit pas pourquoi elle déciderait de

 12   ne pas verser au dossier la carte. Bien entendu, ce n'est pas une décision

 13   définitive à propos du versement au dossier et de la recevabilité de la

 14   carte; nous avons entendu de nombreuses informations, on nous a dit que

 15   cela était utilisé à des fins d'entraînement, que cela remontait à l'année

 16   1993. Alors il s'agit, bien entendu, d'autant de renseignements utiles. Par

 17   exemple, les parties sont d'accord à propos de certaines informations,

 18   elles sont d'accord pour dire qu'il s'agit bien d'une carte de l'année

 19   1993. Si cela se trouve sur la carte quelque part, il sera facile à la

 20   Chambre d'emboîter le pas. Mais dans la mesure où les parties sont d'accord

 21   à propos du contexte factuel de la carte, la Chambre invite les parties à

 22   présenter les différents renseignements à la Chambre, et nous verrons

 23   quelle sera la décision définitive que nous rendrons.

 24   M. RUSSO : [interprétation] Est-ce que cela signifie que nous allons

 25   recevoir un numéro d'enregistrement aux fins d'identification et que nous

 26   réglerons le problème lors de cette séance d'intendance dont vous avez

 27   parlé ?

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, pendant cette séance nous verrons

Page 14459

  1   comment la situation évolue. Nous verrons si les parties seront invitées à

  2   fournir de plus amples renseignements à propos de cette carte. Il est

  3   difficile à la Chambre de le dire, parce que nous avons seulement jeté un

  4   coup d'œil très rapide à cette carte. Donc, il nous est très difficile

  5   d'identifier s'il s'agit de cibles. En plus, les légendes ne sont pas très

  6   claires. Donc pour le moment, nous ne pouvons pas ajouter grand-chose.

  7   J'aimerais maintenant vous donner lecture d'une demande d'information de la

  8   part de la Chambre, demande d'information destinée aux parties. Ce sera la

  9   dernière question de procédure que j'ai sur mon ordre du jour avant de

 10   poursuivre.

 11   C'est une demande d'information de la part de la Chambre, demande

 12   d'information présentée aux parties, car la Chambre souhaiterait connaître

 13   le calendrier de la suite de la présentation des moyens à charge ainsi que

 14   le calendrier du début de la présentation des moyens à décharge.

 15   Bien entendu, la Chambre est parfaitement consciente du nombre de questions

 16   pendantes qui rendent difficile les prévisions précises pour l'avenir

 17   proche, mais toutefois, la Chambre estime qu'il est important d'avoir une

 18   certaine idée du calendrier, et nous aimerions que les parties puissent

 19   nous indiquer ce à quoi nous attendre.

 20   C'est pour cela que la Chambre invite l'Accusation et chacune des équipes

 21   de la Défense à présenter de façon orale des observations à propos des cinq

 22   questions suivantes. Ces présentations orales seront entendues le vendredi

 23   23 janvier 2009.

 24   Dans un premier temps, l'Accusation est invitée à informer la Chambre du

 25   nombre de témoins à charge qu'elle a l'intention de convoquer. La Chambre

 26   aimerait également savoir de la part de l'Accusation à quelle date elle

 27   pense terminer la fin de la présentation de ses moyens à charge.

 28   Deuxièmement, la Chambre demande aux équipes de la Défense de l'informer si

Page 14460

  1   elles ont l'intention de présenter des écritures conformément à l'article

  2   98 bis du Règlement de procédure et de moyens de preuve; et le cas échéant,

  3   la Chambre souhaiterait savoir quel est le temps qui sera requis pour les

  4   équipes de la Défense.

  5   Troisièmement, les parties sont invitées à informer la Chambre du nombre de

  6   journées ouvrables qu'elles souhaiteraient avoir entre le dernier jour de

  7   la présentation des moyens à charge et une audience éventuelle pour les

  8   requêtes au titre de l'article 98 bis.

  9   Quatrièmement, les équipes de la Défense sont invitées à informer la

 10   Chambre du nombre de journées ouvrables dont elles souhaiteraient

 11   idéalement disposer entre une audience éventuelle pour la question des

 12   écritures ou des arguments au titre de l'article 98 bis, et le début de la

 13   présentation des moyens à décharge.

 14   Cinquièmement, et en dernier lieu, les équipes de la Défense sont invitées

 15   à informer la Chambre dans quel ordre elles souhaiteraient présenter leurs

 16   moyens à décharge, au cas où bien entendu le besoin se fait sentir pour

 17   présenter ces moyens à décharge.

 18   La Chambre s'évertuera de prendre en considération les desideratas exprimés

 19   par les parties.

 20   J'en ai ainsi terminé avec les demandes d'information de la Chambre.

 21   M. RUSSO : [interprétation] Je m'excuse, mais je pense que nous devons

 22   avoir un numéro d'enregistrement aux fins d'identification pour la carte

 23   Poskok. Il s'agit de la pièce 2168 [comme interprété] de l'article 65 ter.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui, mais je pensais que nous le

 25   ferions cela lorsque nous reprendrons le fil de l'interrogatoire. Mais bon,

 26   nous pouvons le faire maintenant, ce n'est pas grave.

 27   Monsieur le Greffier.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, cela deviendra la pièce P1273,

Page 14461

  1   enregistrée aux fins d'identification.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

  3   je me tourne vers M. l'Huissier pour lui demander de bien vouloir faire

  4   entrer M. Konings dans le prétoire.

  5   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Konings.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant que nous ne poursuivions,

  9   j'aimerais vous rappeler que la déclaration solennelle que vous avez

 10   prononcée au début de votre déposition est toujours valable.

 11   J'ai également remarqué que vous êtes arrivé avec des documents, ce

 12   qui n'est pas un problème. Mais si vous souhaitez consulter des documents

 13   qui ne vous sont pas remis par l'Huissier, j'aimerais dans un premier temps

 14   que vous m'en parliez et que vous m'indiquiez que vous souhaitez consulter

 15   tel ou tel document.

 16   Monsieur Russo.

 17   M. RUSSO : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 18   LE TÉMOIN : HARRY KONINGS [Reprise]

 19   [Le témoin répond par l'interprète]

 20   Interrogatoire principal par M. Russo : [Suite]

 21   Q.  [interprétation] Bonjour, Colonel Konings. J'aimerais dans un premier

 22   temps aujourd'hui que nous commencions par étudier une carte du plan

 23   d'activités de la 4e Brigade des Gardes, et comme vous l'avez indiqué dans

 24   votre addendum, il s'agit de l'une des brigades de métier dont la tâche

 25   avait été d'investir ou de prendre la ville de Knin.

 26   M. RUSSO : [interprétation] Monsieur le Greffier, je souhaiterais avoir la

 27   pièce de la liste 65 ter 5037.

 28   Q.  En attendant, Mon Colonel, que ces documents apparaissent sur l'écran,

Page 14462

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 14463

  1   je dois juste vous dire que c'est une de ces cartes que l'on vous a

  2   montrées. C'est le bureau du Procureur qui vous a montré cette carte, et

  3   elle est difficilement lisible. Mais je vais vous demander tout d'abord,

  4   maintenant qu'on la voit sur l'écran, est-ce que vous vous souvenez avoir

  5   vu cette carte ?

  6   R.  Oui, oui, je l'ai vue.

  7   Q.  Je voudrais tout d'abord que l'on se concentre sur le texte que l'on

  8   peut lire sur la carte.

  9   M. RUSSO : [interprétation] Nous l'avons traduit. Et je vais demander au

 10   greffier de nous montrer la traduction de ce texte.

 11   Q.  Donc vous pouvez voir au début, on peut lire qui a approuvé la carte,

 12   qui l'a signée, quel est le titre de la carte. Ensuite, un petit peu plus

 13   bas, on peut voir le contenu qui correspond à la légende que l'on voit sur

 14   la carte. Et vous allez voir qu'à la deuxième ligne de cette légende, on

 15   peut voir "les lance-roquettes multiples autopropulsés".

 16   M. RUSSO : [interprétation] Maintenant je vais demander que l'on examine la

 17   pièce 65 ter 6446.

 18   Je voudrais dire au colonel mais aussi aux Juges que nous avons

 19   agrandi certaines portions de cette carte pour pouvoir les montrer. Il

 20   s'agit de la légende mais aussi de la partie de la carte qui montre Knin et

 21   ses environs, et c'est surtout cela qui m'intéresse.

 22   M. RUSSO : [interprétation] Donc nous pourrions peut-être tourner la carte,

 23   cette partie-là de la carte.

 24   Q.  Vous allez remarquer que dans cette légende on parle de ces lance-

 25   roquettes multiples, et ceci correspond à une case verte qui est sur la

 26   gauche de ce texte.

 27   M. RUSSO : [interprétation] Maintenant nous pouvons passer sur la deuxième

 28   page de la carte. Nous n'avons plus besoin de nous occuper de cette partie-

Page 14464

  1   là, et je pense que pour cette deuxième partie nous n'avons pas besoin de

  2   traduction. Donc vous pouvez enlever la traduction de l'écran.

  3   Q.  Donc vous allez voir, Colonel, que les deux cases vertes de tout à

  4   l'heure, on les voit justement au niveau de Knin, à deux endroits

  5   différents à Knin. Et puis je vais vous demander de prendre note du fait

  6   qu'en bas de cette case verte, celle qui est -- la deuxième, celle qui est

  7   en bas, enfin cette -- on peut voir que la case verte couvre en partie ce

  8   qui est le chemin de fer dans la ville de Knin. Et juste à l'extérieur on

  9   peut voir la forteresse de Knin, c'est juste à l'extérieur de la case. Donc

 10   c'est pour voir à peu près où se trouvent ces cases.

 11   M. RUSSO : [interprétation] Maintenant je vous demanderais de passer à la

 12   page suivante.

 13   Q.  Donc là, ce que nous avons fait ici, c'est de montrer à peu près à quoi

 14   correspondent ces cases, donc qu'est-ce qui se trouve sur la carte au

 15   niveau de l'endroit où sont apposées les cases vertes sur la carte et on

 16   peut voir donc les cases maintenant correspondent aux carrés bleus, et

 17   juste en bas vous allez voir la forteresse de Knin.

 18   M. RUSSO : [interprétation] Ensuite, je vais vous demander de nous montrer

 19   la dernière case de cette pièce. Mais il faudrait tourner la carte, s'il

 20   vous plaît.

 21   Q.  Donc ce que nous avons essayé de faire ici, c'est de placer l'endroit à

 22   peu près où se trouvaient ces cases sur une vue aérienne, une photo

 23   aérienne de la région. Comme vous allez voir, les carrés ne sont pas des

 24   vrais carrés, c'est vraiment à cause du logiciel qui a été utilisé et de

 25   l'angle de prise de vue qui correspond. Mais ce que je voudrais vous

 26   demander de regarder --

 27   Mais je voudrais vous poser d'abord quelques questions au sujet de

 28   l'utilisation de lance-roquettes multiples dans les zones peuplées par la

Page 14465

  1   population civile.

  2   Dans la section 10, vous avez dit que ces lance-roquettes sont moins

  3   précis que les obusiers, c'est une constatation générale. Maintenant, je

  4   voudrais vous demander s'il est approprié d'utiliser ces lance-roquettes

  5   multiples sur des zones peuplées par les civils ?

  6   R.  Je dois revenir sur les points dont on a déjà discutés. Tirer sur une

  7   zone habitée par des civils, quelles que soient les armes utilisées, cela

  8   dépend de nombreux facteurs. On en a déjà parlé : la valeur des cibles

  9   militaires, la proximité des éléments civils dans la zone, puis évidemment

 10   la précision des armes dont vous disposez.

 11   Donc là, je viens de vous énumérer trois facteurs importants qui vont

 12   faire que le commandant va décider oui ou non de tirer avec des systèmes

 13   d'arme indirects.

 14   Quand on parle de systèmes de lance-roquettes, à partir du moment où ce ne

 15   sont pas les projectiles guidés, ils sont moins précis que les systèmes de

 16   mortiers ou d'obusiers parce que ce projectile brûle pendant une certaine

 17   période de temps et le contrôle du temps pendant lequel le projectile brûle

 18   fait la différence entre chaque projectile.

 19   A partir du moment où vous avez ce temps précis, le temps qu'il leur

 20   faut pour brûler, en combinaison avec le système guidé qui se trouve à

 21   l'intérieur du projectile, vous avez un projectile qui est assez précis, et

 22   vous êtes pratiquement capable d'envoyer un projectile en visant une

 23   fenêtre, la fenêtre d'une maison et que le projectile traverse la fenêtre.

 24   Mais que je sache, les lance-roquettes que l'on utilise dans d'autres

 25   pays dans le monde étaient les systèmes non guidés. Donc là, j'en arrive à

 26   la conclusion que là il ne s'agissait pas des armes extrêmement précises.

 27   A cause de cela, je n'utiliserais pas ces armes pour attaquer de

 28   toutes petites cibles dans une zone peuplée par la population civile.

Page 14466

  1   Donc les lance-roquettes sont des systèmes qui ne sont pas utilisés

  2   pour des cibles extrêmement précises, à moins qu'il y ait un système GPS ou

  3   un système de guidage très pointu.

  4   M. RUSSO : [interprétation] Je voudrais demander que cette pièce soit

  5   versée au dossier.

  6   M. KEHOE : [interprétation] 65 ter 5037 est la grande carte. 65 ter 6546,

  7   c'est la petite portion de la carte. Le problème qui se pose ici, pour moi

  8   en tout cas, c'est là où nous avons superposé des informations sur la

  9   carte.

 10   Donc je pense que tout simplement ce n'est pas complètement exact, le

 11   carré d'en haut n'est pas placé correctement. Donc le Procureur devrait

 12   faire des efforts pour corriger cela.

 13   En ce qui concerne les pièces 65 ter 5037 et 65 ter 6446, nous n'avons pas

 14   d'objections.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Laissez-moi voir.

 16   Donc vous dites que les carrés supérieurs qui étaient dans la carte

 17   d'origine de couleur verte, puis maintenant c'est un carré bleu ou violet,

 18   donc qu'est-ce que vous dites ? Qu'il faudrait les déplacer plutôt vers la

 19   gauche ?

 20   M. KEHOE : [interprétation] Oui, oui, c'est bien cela.

 21   M. RUSSO : [interprétation] Donc là vous parlez de la photo aérienne.

 22   M. KEHOE : [interprétation] Non, non, non. C'est la grande carte qui

 23   m'intéresse.

 24   M. RUSSO : [interprétation] Donc c'est la première page de cette pièce,

 25   vous regardez finalement le document original.

 26   M. KEHOE : [interprétation] Non, non. C'est la première page alors qu'il

 27   faudrait la comparer à ce que l'on voit ici; donc comparer la première page

 28   avec la page qu'on a sur l'écran à présent.

Page 14467

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous dites que cette carte n'est

  2   pas exacte ?

  3   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce que je vois ici c'est que les côtés

  5   gauches du carré qui est en haut, ils se trouvent dans la direction sud-

  6   nord, pratiquement à l'endroit où se trouve apparemment la forteresse.

  7   Si l'on regarde la carte originale -- quand on regarde l'original, on

  8   a l'impression que c'est pratiquement la même chose. Je ne dis pas au

  9   millimètre près, mais c'est très, très semblable.

 10   M. RUSSO : [interprétation]  Si vous regardez en haut, à droite du carré

 11   qui est en haut, vous allez voir que là ce carré englobe le passage du

 12   chemin de fer; donc là où il y a le pont du chemin de fer. Vous allez voir

 13   vraiment la même chose dans les carrés bleus.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'il y a des différences, elles sont

 15   vraiment minimes. Est-ce que vous êtes d'accord ?

 16   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce qu'on voit, en tout cas on peut dire

 18   que si les détails sont extrêmement importants, si cela prouve être

 19   extrêmement important, Monsieur Russo, vous allez devoir revoir votre copie

 20   et faire une carte plus précise que cela. En attendant, on va verser au

 21   dossier cette pièce. D'accord ?

 22   M. RUSSO : [interprétation] D'accord.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, veuillez attribuer

 24   une cote.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] 65 ter 5037 devient la pièce P1274; et 65

 26   ter 6446 devient la pièce P1275.

 27   M. RUSSO : [interprétation] Je ne sais pas s'il serait plus utile aux Juges

 28   de faire de ces deux pièces à conviction une seule pièce puisque de toute

Page 14468

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19   

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 14469

  1   façon le deuxième agrandissement ne serait peut-être pas aussi utile que

  2   cela, à moins de le comparer avec la carte originale.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'ai pas vraiment de point de vue là-

  4   dessus. Evidemment que la carte originale va être notre point de départ,

  5   c'est cela qui est le plus important.

  6   Donc 5037, c'est --

  7   M. RUSSO : [interprétation] C'est la carte originale.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est la carte originale, et 6446, c'est

  9   la série des deux projections que vous avez faites, extrapolations, n'est-

 10   ce pas ?

 11   M. RUSSO : [interprétation] Oui.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] P1274 et P1275 vont être versées au

 13   dossier, mais les extrapolations faites par le bureau du Procureur vont

 14   peut-être devoir être plus précises si le besoin se présente.

 15   M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 16   Maintenant je vais vous demander de nous montrer la pièce 65 ter 5742.

 17   Q.  Donc ce que nous venons d'examiner, c'est une carte qui était un plan

 18   d'action de la 4e Brigade. Vous en avez bien sûr parlé dans votre rapport

 19   d'expert.

 20   C'est le document que nous sommes en train d'examiner, c'est le

 21   rapport sur l'utilisation de l'artillerie de la 7e Brigade de la Garde pour

 22   les dates du 4 et 5 août, et à la quatrième ligne, on peut voir que 248

 23   projectiles de lance-roquettes multiples ont été tirés.

 24   Et puis là, je viens sur la dernière question, je reviens sur la

 25   dernière question que je vous ai posée. Même si un tout petit nombre de ces

 26   projectiles venus des lance-roquettes multiples avaient été tirés sur Knin,

 27   est-ce que vous pensez que ceci aurait représenté une utilisation

 28   raisonnable de l'artillerie ?

Page 14470

  1   R.  Comme je l'ai dit ici, le manque de précision de ces systèmes de lance-

  2   roquettes est tel que ces projectiles sont moins précis que les projectiles

  3   d'artillerie; et c'est pour cela que j'ai dit que je n'utiliserais pas ces

  4   types de projectiles sur ce genre de cibles, à moins que vous l'utilisiez

  5   en dehors de la distance qui implique des dégâts collatéraux, comme par

  6   exemple de 500 mètres que nous utilisons en Afghanistan.

  7   J'en ai parlé hier, et puis je dois revenir sur la valeur militaire

  8   de la cible, parce qu'il faut à chaque fois avoir cela à l'esprit et penser

  9   sans cesse à cela quand il s'agit de cibles qui se trouvent parmi les

 10   endroits, les zones résidentielles. Parce que de toute façon les

 11   projectiles non guidés sont extrêmement imprécis.

 12   Ensuite, vu l'information que j'ai reçue, à savoir que les cibles

 13   militaires à Knin étaient d'une valeur très approximative, je ne pense pas

 14   que j'aurais utilisé de tels lance-roquettes sur des cibles se trouvant

 15   dans des zones peuplées par les civils. Donc si j'avais vraiment pensé

 16   qu'il fallait tirer sur les cibles militaires dans cette zone où il y avait

 17   autant de civils, en tout cas, je n'aurais pas utilisé des lance-roquettes,

 18   tout simplement.

 19   Q.  Si un commandant décidait d'utiliser l'artillerie contre une cible à

 20   Knin, par exemple contre le QG de la Republika Srpska, d'après vous,

 21   qu'est-ce qu'il faut prendre en compte -- ou bien, je vais poser la

 22   question autrement.

 23   D'après vous, quelles seraient les raisons militaires, quels seraient les

 24   avantages militaires si l'on utilisait un canon de 130 millimètres ?

 25   R.  Je suis désolé de revenir sur les aspects que j'ai déjà essayé

 26   d'expliquer, à savoir tout d'abord c'est une question de connaître

 27   l'importance de la cible, et le QG de l'ARSK peut être qualifié comme une

 28   cible importante en soi. Mais on en a déjà parlé. Ce QG se trouve dans un

Page 14471

  1   bâtiment extrêmement fort, donc l'utilisation de l'artillerie n'est pas

  2   appropriée, ce n'est pas le premier choix à faire parce qu'il est

  3   pratiquement impossible de détruire cet immeuble de sorte à toucher

  4   vraiment le QG, si le QG s'y trouve toujours. Mais on va imaginer que le QG

  5   y est, qu'il fonctionne, qu'il se trouve bel et bien dans cet immeuble. Ça

  6   va être très, très difficile d'anéantir ce QG avec les armes d'artillerie.

  7   Vu le manque de précision des projectiles de lance-roquettes multiples,

  8   vous avez moins de chance de tirer exactement sur le QG que de tirer sur

  9   les bâtiments autour, donc vous avez plus de chance que les projectiles

 10   tombent avant ou après l'immeuble que sur l'immeuble proprement dit.

 11   Et donc vu ce manque de précisions, je n'aurais pas choisi les lance-

 12   roquettes si le QG de l'ARSK est une cible extrêmement importante. Mais je

 13   peux imaginer que c'est bien le cas à partir du moment où les officiers y

 14   sont, où c'est un QG qui fonctionne, dans ce cas-là j'aurais utilisé des

 15   armes plus précises, artillerie notamment, tout en sachant que vous courez

 16   le risque d'avoir des dégâts collatéraux qui impliquent la population

 17   civile.

 18   Q.  Pourriez-vous dire aux Juges quels seraient les types de dégâts

 19   infligés au QG de l'ARSK, vu que de toute façon on a parlé du bâtiment,

 20   donc quel type de dégâts seraient infligés au bâtiment proprement dit par

 21   les projectiles des lance-roquettes multiples ?

 22   R.  Là, ce sont des projectiles à très haut degré d'explosivité, surtout

 23   quand il s'agit de rafales de 155 ou 152. Donc là c'est vraiment les armes

 24   qui sont très utiles contre les éléments non -- enfin, les éléments non

 25   blindés. Les gens -- les éléments dans un espace ouvert contre des

 26   véhicules blindés mais légers. Mais en ce qui concerne les bâtiments,

 27   évidemment qu'il va y avoir des dégâts. Il va y avoir des trous. Peut-être

 28   qu'ils vont même détruire les toits mais ceci peut être comparé avec les

Page 14472

  1   tirs d'artillerie, tout simplement.

  2   M. RUSSO : [interprétation] Monsieur le Président, je vais demander que

  3   cette pièce soit versée au dossier, 65 ter 5742.

  4   M. KEHOE : [interprétation] Pas d'objection.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] C'est la pièce P1276.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous nous dire, les TF, qu'est-

  7   ce que c'est que les TF ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est un détonateur à retardement. Ça veut

  9   dire qu'ils vont sans doute exploser dans l'air.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc finalement avec un projectile à

 11   retardement, vous ne savez pas quand est-ce qu'il va exploser; c'est ça ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Si on n'a pas mis le "timer", cela va

 13   exploser comme un projectile normal. Et si on a défini le temps, ça va être

 14   différent.

 15   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 16   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 17   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 18   M. RUSSO : [interprétation]

 19   Q.  Maintenant je vais poser une question par rapport à la question posée

 20   par le Juge. Quand vous avez ce détonateur à retardement, est-ce que

 21   d'habitude on fait en sorte que le projectile explose après avoir percuté

 22   la cible ? Donc ce détonateur à retardement, on l'utilise donc pour faire

 23   exploser les projectiles plus tard ?

 24   R.  Je n'ai pas compris la question. Pourriez-vous la poser différemment.

 25   Q.  Vous avez dit que le détonateur à retardement qui se trouve sur un

 26   projectile, s'il n'est pas branché, que le projectile va exploser

 27   normalement.

 28   Donc à quoi cela sert que d'avoir ce détonateur à retardement s'il

Page 14473

  1   n'est pas prévu que le projectile explose avant l'impact ?

  2   R.  Il peut y avoir des raisons différentes pour cela. Donc tout

  3   simplement, vous pouvez -- peut-être que vous avez en stock des projectiles

  4   avec ces détonateurs à retardement, donc vous les utilisez. Les systèmes

  5   que nous avons aux Pays-Bas sont équipés de ces détonateurs à retardement

  6   presque systématiquement. Mais pour les projectiles d'artillerie, vous

  7   l'ajoutez avant de tirer, vous vissez cela. Donc vous utilisez ces

  8   détonateurs à retardement uniquement si vous souhaitez que le projectile

  9   explose en vol.

 10   Mais vous pouvez tout simplement donner l'ordre de tirer, et ensuite

 11   vous utilisez les projectiles avec le détonateur à retardement comme si

 12   c'était des projectiles simples. C'est plus coûteux, mais peut-être que

 13   dans une opération comme celle-ci ce n'était pas tellement important.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais poser une autre question

 15   parce que j'ai du mal à comprendre quel est le problème exactement.

 16   Donc est-il exact que les détonateurs qui ont ces dispositifs à

 17   retardement, qu'ils vont d'abord percuter les cibles et ensuite ils vont

 18   exploser, ou bien alors que, par exemple, le projectile est entré dans

 19   l'immeuble par le toit et il n'explose que par la suite ?

 20   Quand on dit détonateur à retardement, cela ne veut pas forcément

 21   dire que le projectile va exploser après coup ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est une fonction supplémentaire qui existe

 23   dans les détonateurs et vous pouvez le faire assez simplement. Il suffit de

 24   tourner une vis au moment où vous tirez le projectile, et cela va faire que

 25   l'explosion va se faire à retardement; donc va d'abord percuter le bâtiment

 26   et ensuite va exploser.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc ce dispositif -- 

 28   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

Page 14474

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 14475

  1   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation] 

  2   M. RUSSO : [interprétation] J'ai un document que je voudrais verser

  3   directement. C'est un document qui figurait sur la liste des pièces pour le

  4   colonel Konings. Ceci nous montre comment on a utilisé les MBRL, donc les

  5   lance-roquettes multiples, sur Knin.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe.

  7   M. KEHOE : [interprétation] Je voudrais tout simplement demander que l'on

  8   attribue une cote provisoire, le temps de vérifier que tout est exact.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce P1277, marquée aux

 11   fins d'identification.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

 13   Vous pouvez poursuivre.

 14   M. RUSSO : [interprétation] Merci. Puis-je demander maintenant la pièce

 15   P64.

 16   Q.  Colonel Konings, je souhaite vous montrer un document qui a été rédigé

 17   par un observateur de l'ONU à Knin, un observateur haut placé,

 18   approximativement deux semaines après l'attaque d'artillerie.

 19   Tout d'abord, avez-vous eu l'occasion de passer en revue ce document avant

 20   de venir déposer aujourd'hui ?

 21   R.  Oui, j'ai eu l'occasion de le voir.

 22   Q.  Je souhaite maintenant que l'on se penche sur le paragraphe 2. Je

 23   souhaite --

 24   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi, mais est-ce que vous pourriez me

 25   dire la référence dans le rapport.

 26   M. RUSSO : [interprétation] Il n'y a pas de référence dans le rapport.

 27   M. KEHOE : [interprétation] Il n'y a pas de référence dans le rapport. Si

 28   j'avais bien compris, on parlait d'une opinion d'expert concernant

Page 14476

  1   certaines questions particulières et que ceci doit être reflété dans une

  2   certaine mesure dans le rapport. Je souhaite noter que lors de la

  3   préparation des deux rapports, pendant des mois et des mois, ce document

  4   n'a pas été mentionné.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A quel moment avez-vous vu ce document ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Lors de mes préparatifs avec le bureau du

  7   Procureur, c'est l'Accusation qui me l'a montré.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a quelques jours ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, plusieurs fois lors de la phase de

 10   préparation, donc il y a plus d'un an.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Monsieur Russo, vous avez invité M.

 12   Konings à faire un commentaire là-dessus ?

 13   M. RUSSO : [interprétation] Oui. Le colonel Konings a reçu cela, et nous en

 14   avons parlé dans la note de récolement supplémentaire concernant le

 15   récolement qui a eu lieu les 26 et 28 novembre.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, nous l'avons vu.

 17   Maître Kehoe.

 18   M. KEHOE : [interprétation] C'est une note de récolement, c'est un document

 19   que l'Accusation a remis au témoin, je pense, au mois de mars. Ceci n'a pas

 20   été communiqué dans les opinions différentes du rapport. La dernière que

 21   j'ai reçue a été soumise par le bureau du Procureur le 30 octobre 2008.

 22   Apparemment, nous sommes en train de recevoir maintenant encore un avis

 23   d'expert qui n'avait pas été communiqué. Je pense que cette note

 24   supplémentaire d'information ne suffit pas, certainement pas en vertu de

 25   l'article 94 bis.

 26   [La Chambre de première instance se concerte]

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre permettra à M. Russo de poser

 28   cette question au témoin, et s'il est nécessaire de clarifier cela de

Page 14477

  1   manière supplémentaire lors du contre-interrogatoire, la Chambre souhaite

  2   le savoir. La Chambre n'exclue pas la possibilité selon laquelle ce rapport

  3   en particulier et sa pertinence plutôt, que le fait que ceci fait partie du

  4   rapport que ceci est survenu un peu plus tard.

  5   Poursuivez, Monsieur Russo.

  6   M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  7   Q.  Colonel Konings, je souhaite que vous vous concentriez sur le

  8   paragraphe 2 et de nous dire si les informations qui y sont contenues -

  9   bien sûr, à supposer que c'est exact - si ces informations auraient changé

 10   vos opinions exprimées dans l'addendum au sujet de l'attaque d'artillerie

 11   contre Knin.

 12   R.  L'on y décrit la conclusion que le pilonnage général se concentrait sur

 13   les objectifs militaires. On a discuté du pilonnage des objectifs

 14   militaires à travers la ville, puis une autre conclusion concerne les

 15   dégâts provoqués par le pilonnage.

 16   Ceci est logique par rapport à ce que j'ai essayé d'expliquer, c'est-

 17   à-dire lorsque vous commencez à pilonner une zone peuplée par les civils,

 18   qui comporte un petit nombre de cibles militaires et de cibles militaires

 19   de moindre importance au niveau de la taille, la zone civile aux alentours

 20   sera visée aussi et touchée aussi.

 21   Ce qui corrobore le fait que l'utilisation de l'artillerie dans une

 22   telle zone n'est pas le meilleur choix.

 23   Q.  Merci. Nous allons passer au paragraphe 3 où il est indiqué qu'un

 24   bâtiment résidentiel a été touché, puis il est indiqué que 21 bâtiments ont

 25   été gravement endommagés dans le pilonnage et encore 23 bâtiments ont été

 26   un peu endommagés dans le pilonnage.

 27   Est-ce que vous pouvez dire si ce niveau de dégâts change votre opinion par

 28   rapport à la nécessité de l'attaque d'artillerie le 4 août ?

Page 14478

  1   M. KEHOE : [interprétation] Avec tout le respect, je souhaite indiquer que

  2   c'est une question qui aurait dû être posée par l'Accusation à un autre

  3   témoin que l'Accusation a enlevé de la liste. Il s'agit du lieutenant-

  4   colonel Hjertnes, qui aurait expliqué ce qu'il avait remarqué lorsque ses

  5   observateurs de l'ONU l'ont observé. Nous avons maintenant une question

  6   qu'ils auraient pu poser à cette personne qui était là. Ils ne l'ont pas

  7   fait. Maintenant, ils parlent des 23 bâtiments touchés. On ne sait pas si

  8   c'est des bâtiments militaires ou civils ?

  9   M. RUSSO : [interprétation] Je ne pense pas qu'il convient d'en parler

 10   devant le témoin. Nous avons cité à la barre plusieurs observateurs de

 11   l'ONU qui ont dit qu'ils ne pouvaient pas entrer dans des structures

 12   militaires et ils ne pouvaient pas savoir quelles étaient les cibles

 13   militaires mentionnées dans ce paragraphe.

 14   Mais simplement, je demande au témoin de dire si ce niveau de dégâts,

 15   tel qu'il est énoncé dans le document, changerait son opinion au sujet de

 16   l'attaque, si l'attaque aurait dû avoir lieu et si l'attaque était

 17   appropriée.

 18   [La Chambre de première instance se concerte]

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, tout d'abord, ce témoin ne

 20   peut pas déposer au sujet de l'exactitude des observations contenues dans

 21   ce rapport.

 22   La Chambre ne comprend pas tout à fait votre objection car l'opinion

 23   du témoin est clairement indiquée. M. Russo lui demande s'il aurait changé

 24   d'avis par rapport à cette information. Il peut donner deux réponses

 25   possibles. Soit oui, soit non. Mais si j'ai bien compris, cette question

 26   porte sur la question de savoir si l'opinion du témoin concernant le

 27   caractère approprié ou pas de l'utilisation de ce système d'armes aurait

 28   changé sachant le niveau de dégâts. Je pense que ceci est plutôt favorable

Page 14479

  1   à la Défense.

  2   Si la réponse est non, ça ne changera rien, plus ou moins. Même si

  3   nous ne comprenons pas entièrement l'utilité, la finalité de cette question

  4   et de cette réponse en ce moment, nous considérons que ceci peut être utile

  5   à la Chambre, et donc nous ne demanderons pas au témoin de répondre à la

  6   question.

  7   M. RUSSO : [interprétation]

  8   Q.  Est-ce que vous voulez que je répète la question ?

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais puisque le témoin n'est pas

 10   invité à répondre à la question, il n'est pas nécessaire de la répéter.

 11   M. RUSSO : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

 12   Donc là, je souhaite montrer au témoin une séquence vidéo assez

 13   longue, d'environ 15, 20 minutes. Je ne sais pas si la Chambre préfère que

 14   l'on procède à une pause.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'ici 20 minutes on aura une pause, ce

 16   qui permettra à M. Konings de prendre en considération ce qu'il a vu

 17   pendant la pause, et aussi de demander s'il y a des parties qu'il souhaite

 18   revoir. Donc, je pense qu'il serait le plus opportun de visionner cette

 19   séquence vidéo, et ensuite avoir la pause.

 20   M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous montrerons

 21   une séquence de 3759 sur la liste 65 ter, par le biais du logiciel

 22   Sanction.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Encore une question. Les questions que

 24   vous allez poser après la séquence de 20 minutes, peut-être il va falloir

 25   vous repencher sur certains détails. Est-ce que vous avez une liste que

 26   vous pouvez trouver facilement ?

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne vais pas poser des questions

 28   concernant des parties en particulier, mais je vais demander au témoin ce

Page 14480

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28   

Page 14481

  1   qu'il entend dans la vidéo et si ce qu'il entend correspond aux bruits de

  2   tirs d'artillerie.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas-là, nous allons visionner et

  4   écouter la séquence vidéo.

  5   M. KEHOE : [interprétation] Peut-on avoir la source de cette séquence vidéo

  6   ?

  7   M. RUSSO : [interprétation] Il s'agit d'un document dont le numéro 65 ter

  8   est 3779 [comme interprété]. C'est Zastava film.

  9   M. KEHOE : [interprétation] Je pense que ceci a été versé au dossier dans

 10   une certaine mesure. Il y a eu deux versions de ce film de Zastava qui ont

 11   été versées au dossier; l'une qui avait été expurgée par l'Accusation, et

 12   l'autre qui est plus complète et qui a été versée au dossier par le biais

 13   d'un témoin dont j'ai oublié le nom, mais je pense que c'est un témoin

 14   protégé. Est-ce que c'est la même vidéo ou différente ?

 15   M. RUSSO : [interprétation] C'est la même vidéo qui comporte des parties

 16   d'une section plus longue où l'on voit un bâtiment résidentiel.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc c'est une sélection des extraits de

 18   l'ensemble du film, si j'ai bien compris.

 19   M. RUSSO : [interprétation] C'est exact. Nous avons le film qui commence à

 20   1 minute 45 jusqu'à 5 minutes 52 du film Zastava, ensuite ça reprend à 7

 21   minutes 2 secondes et va jusqu'à 21 minutes 35 secondes.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Est-ce que ceci vous fournit

 23   suffisamment d'information, Maître Kehoe ?

 24   M. KEHOE : [interprétation] Je pense que Zastava film a été communiqué,

 25   mais je souhaitais savoir si c'était quelque chose qui a déjà été versé au

 26   dossier et qu'il s'agit d'une répétition. Ce n'est toujours pas clair.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agit d'une nouvelle sélection et

 28   peut-être il serait pratique plutôt que de demander aux personnes de

Page 14482

  1   trouver des parties pertinentes à un moment ultérieur. Je pense qu'il vaut

  2   mieux présenter cela de manière séparée, puisque les capacités

  3   électroniques nous le permettent.

  4   Poursuivez, s'il vous plaît.

  5   [Diffusion de la cassette vidéo]

  6   M. RUSSO : [interprétation]

  7   Q.  Colonel Konings --

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, vous avez dit que

  9   c'était quatre minutes plus 14 minutes, ça fait 18. Mais à mon avis, on n'a

 10   pas vu 18 minutes de séquence vidéo.

 11   M. RUSSO : [interprétation] Je pense que la deuxième vidéo a été

 12   raccourcie, Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je l'indique afin d'éviter toute

 14   confusion, le temps que vous avez indiqué ne correspond pas à ce que l'on

 15   voit sur la vidéo, car nous avons un autre décompte du temps qui commence

 16   par zéro minutes. Donc apparemment, vous n'avez pas montré ce que vous

 17   aviez annoncé.

 18   Poursuivez.

 19   M. RUSSO : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

 20   Q.  Monsieur Konings, sur la base de ce que vous avez pu entendre dans

 21   cette séquence vidéo et la fréquence de tir, est-ce que vous pouvez dire à

 22   la Chambre si vous avez une idée du type de tir, si ce sont des tirs de

 23   destruction, de neutralisation ou autres types ?

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe.

 25   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi, mais vraiment, cette information

 26   que l'on demande, ce serait simplement des suppositions.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, nous ne le savons pas. Attendons

 28   voir ce que le témoin nous dira. Apparemment, vous êtes en train de parler

Page 14483

  1   de la fréquence des sons ou de leur type, je n'en ai aucune idée. Mais on

  2   verra s'il s'agit simplement de conjecture ou pas.

  3   Mais je suppose que vous parlez, Monsieur Russo, de la première

  4   partie de la séquence ou dans l'ensemble, car sinon, il faudra peut-être

  5   que l'on se penche sur de longues parties de la deuxième partie de la

  6   séquence où il n'y a pas de son du tout. Donc est-ce que vous pouvez

  7   préciser de quoi vous parlez ?

  8   M. RUSSO : [interprétation] Oui.

  9   Q.  Je parle surtout de la première partie de la séquence vidéo, la partie

 10   qui a été dans la plus grande partie filmée dans le noir. Est-ce que vous

 11   pouvez dire à la Chambre quelles sont vos conclusions par rapport à la

 12   fréquence de tir et au type de tir, à votre avis ?

 13   R.  On peut remarquer plusieurs types de fréquences. Tout d'abord, vous

 14   pouvez noter qu'un peu loin, on entend une fréquence plus élevée des tirs,

 15   plusieurs explosions qui se succèdent à des intervalles raccourcies. Donc

 16   je dirais qu'il s'agit de l'utilisation des tirs sur une certaine cible. Je

 17   ne sais pas, bien sûr, quelle est la cible.

 18   Et puis l'autre observation concerne le nombre de projectiles qui ont

 19   été tirés en tant que projectiles singuliers. Et il y a une fréquence des

 20   tirs concentrés. Vous pouvez parfois avoir 50 projectiles tirés sur une

 21   certaine cible dans une période courte.

 22   Et puis supposons qu'il y avait des cibles militaires, souvent

 23   visiblement elles étaient visées par plusieurs projectiles singuliers. Et

 24   souvent il s'agissait des projectiles d'artillerie, car je peux reconnaître

 25   le bruit. Malheureusement j'avais reconnu cela à Sarajevo à de nombreuses

 26   reprises moi-même. Ce sont des observations que je peux faire au sujet de

 27   ces projectiles singuliers mais il m'est difficile d'établir quelle était

 28   la cible. Je ne peux pas le faire, mais si je dois classifier ces

Page 14484

  1   projectiles, je dirais que certainement ça rendait la vie des gens dans la

  2   ville très difficile, à la fois des civils et des militaires, et chaotique

  3   car ils ne savaient pas où le projectile suivant allait tomber.

  4   Q.  Est-ce que vous pouvez dire à la Chambre de première instance quel

  5   était l'effet sur une cible militaire des tirs de projectiles singuliers ?

  6   R.  Je peux vous dire que chaque projectile avait un certain effet. Même si

  7   vous avez beaucoup d'expérience et si vous avez l'habitude de l'utilisation

  8   d'artillerie et des mortiers, lorsque vous êtes à proximité, ça vous pousse

  9   à vous demander ce que vous devez faire et si vous devez rester ou pas sur

 10   place.

 11   Mais si vous êtes dans une zone protégée, dans un bâtiment qui ne

 12   peut pas résister à ces projectiles, probablement les soldats entraînés

 13   vont prendre la décision d'y rester et voir ce qui se passera par la suite.

 14   Mais les soldats qui ne sont pas bien entraînés et les civils pourraient

 15   être saisis de la panique et essayer de quitter les lieux.

 16   M. RUSSO : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de

 17   questions pour ce témoin.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Russo.

 19   Nous allons procéder à la pause, mais qui va interroger le témoin après la

 20   pause ?

 21   Maître Kehoe ?

 22   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous allez être le premier à

 24   interroger le témoin. Peut-être nous pouvons demander au témoin de quitter

 25   le prétoire dès à présent, et puis ensuite nous allons faire une pause de

 26   25 minutes. Ensuite je souhaiterais que les parties me donnent leur

 27   évaluation du temps.

 28   [Le témoin quitte la barre]

Page 14485

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe.

  2   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. J'aurais besoin de

  3   trois jours de contre-interrogatoire.

  4   M. CAYLEY : [interprétation] Nous n'avons pas de question pour ce témoin.

  5   M. KUZMANOVIC : [interprétation] En fonction de ce que demandera Me Kehoe,

  6   je dirais une demi-journée ou une journée.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une demi-journée à une journée.

  8   Comme toujours, la Chambre, lorsqu'elle accorde le temps, et la

  9   Chambre bien sûr est consciente de l'importance de cet expert, de ce

 10   témoin, mais aussi, comme toujours, nous allons veiller à ce que le contre-

 11   interrogatoire soit mené de manière aussi efficace que possible.

 12   Nous allons reprendre notre travail à 4 heures 10.

 13   --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.

 14   --- L'audience est reprise à 16 heures 14.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Konings, vous allez maintenant

 16   répondre aux questions du contre-interrogatoire de Me Kehoe, qui est le

 17   conseil de M. Gotovina.

 18   Je vous en prie, Maître Kehoe.

 19   M. KEHOE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   Contre-interrogatoire par M. Kehoe : 

 21   Q.  [interprétation] Bonjour, Colonel. C'est un grand plaisir que de vous

 22   rencontrer. J'ai quelques questions à vous poser, quelques questions

 23   d'ordre général. Puis ensuite, très rapidement, nous allons passer à votre

 24   rapport. Pour ce qui est d'ailleurs de quelques questions à propos de votre

 25   grade, vous êtes lieutenant-colonel depuis 1992, c'est exact ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Et pendant cette période, et même avant d'ailleurs, étant donné que

 28   vous aviez travaillé avec l'artillerie, j'aimerais savoir si vous avez

Page 14486

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 14487

  1   suivi un entraînement pour apprendre la tactique de la HV, pour apprendre

  2   quel était l'armement de la HV, pour apprendre comment cette armée

  3   fonctionnait ?

  4   R.  Non, je n'ai pas eu de formation spécifique ciblant l'armée croate.

  5   Mais nous avons toujours eu, avant l'année 1992, un entraînement qui

  6   portait sur les opérations du Pacte de Varsovie, et puis bien entendu nous

  7   nous préparons toujours avant une opération précise.

  8   Q.  Et pour ce qui est du Pacte de Varsovie, il faut savoir que -- la JNA

  9   ne faisait pas partie du Pacte de Varsovie ?

 10   R.  Non. Mais, la JNA fonctionnait quand même. Dans son fonctionnement il y

 11   avait beaucoup de similitudes avec les forces du Pacte de Varsovie.

 12   Q.  Alors pour ce qui est de votre CV, Monsieur, j'aimerais vous poser une

 13   question, et cela émane d'une déclaration que vous avez faite au bureau du

 14   Procureur le 31 mai 1996 [comme interprété]. Il s'agissait en fait de

 15   l'affaire Dragomir Milosevic.

 16   Et j'aimerais d'ailleurs que cela soit affiché sur le système du prétoire

 17   électronique.

 18   Première page, vous voyez donc, deuxième page, premier -- deuxième

 19   paragraphe. Alors vous remarquez dans cette première phrase, voilà ce que

 20   vous dites :

 21   "J'ai eu une longue expérience de l'utilisation technique, tactique et

 22   opérationnelle de l'artillerie, des mortiers notamment, et de l'appuie feu

 23   en règle générale. Je ne me considère pas comme un expert, mais je dirais

 24   plutôt que j'ai une bonne connaissance des systèmes de mortiers et

 25   d'artillerie, de leurs munitions et de leur utilisation opérationnelle."

 26    Je dois vous dire que je suis un peu perplexe, Colonel. C'est pour cela

 27   que j'attire votre attention sur ce fait. Car vous dites que vous ne vous

 28   considérez pas comme un expert. Alors je ne voudrais pas vous faire dire ce

Page 14488

  1   que vous n'avez pas dit. Mais est-ce que vous pourriez peut-être nous aider

  2   et nous indiquer en fait ce que vous entendez lorsque vous dites que vous

  3   n'êtes pas un expert, que vous ne vous considérez pas comme expert mais que

  4   vous êtes tout simplement un officier qui a une bonne connaissance de

  5   l'utilisation technique, tactique et opérationnelle de l'artillerie et des

  6   mortiers ?

  7   R.  Oui. Je pense me souvenir exactement de ce que j'ai dit à ce moment-là.

  8   En ce qui me concerne, lorsque l'on parle d'un expert, un expert --

  9   en fait, un expert ne connaît pas forcément l'armée. C'est pour ça que pour

 10   l'armée, il y a des experts par exemple. Vous pouvez être expert ou vous

 11   pouvez avoir un expert pour un domaine très précis d'opérations, un expert

 12   en munitions par exemple. Ça, c'est quelqu'un qui sait absolument tout ce

 13   qu'il y a à savoir à ce sujet. Moi je me considère plutôt comme une

 14   personne qui a beaucoup de connaissances à ce sujet, mais je ne souhaite

 15   pas qu'on m'appelle un expert. Parce que personnellement, moi je ne me

 16   considère pas comme un expert. Alors les gens qui gravitent autour de moi

 17   me considèrent comme un expert, notamment mon commandant actuel ainsi que

 18   des commandants d'ailleurs précédents. Ils pensent, eux, que je suis un

 19   expert. Et d'ailleurs ils m'ont demandé de ne pas prendre ma retraite.

 20   J'aurais dû prendre ma retraite il y a deux ans. Et apparemment ils sont

 21   particulièrement heureux de m'avoir encore parmi eux. Ils m'ont demandé de

 22   ne prendre ma retraite qu'en 2011 alors que là j'aurai plus de 60 ans.

 23   Ça c'est quelque chose de personnel, en fait. Mais moi je peux vous

 24   dire que les gens qui sont autour de moi m'appellent un expert, non

 25   seulement dans le domaine de l'artillerie mais également dans le domaine

 26   des opérations terrestres, en règle générale.

 27   Q.  Bien. J'espère qu'ils vous payent davantage alors pour ceci.

 28   R.  Non, absolument pas.

Page 14489

  1   Q.  Alors Monsieur, lorsque je consultais votre rapport, j'ai remarqué

  2   qu'on vous a remis 60 documents pour que vous prépariez votre premier

  3   rapport; est-ce exact ?

  4   R.  Ecoutez, je ne me souviens pas du nombre exact. Je ne sais plus s'il

  5   s'agissait de 50 ou 60, mais on m'a donné beaucoup de documents, oui, c'est

  6   vrai.

  7   Q.  Et c'est le bureau du Procureur qui vous a donné ces documents ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  C'est M. Russo précisément, lui-même ?

 10   R.  Non, pas seulement M. Russo. M. Tieger également, M. Tieger m'a donné

 11   des rapports, plusieurs rapports. Son équipe aussi m'en a donné. Donc j'ai

 12   reçu plusieurs rapports qui étaient placés sous la responsabilité soit de

 13   M. Russo, soit de M. Tieger.

 14   Q.  Mais avant, avant la préparation de votre premier rapport, est-ce que

 15   vous avez étudié les documents des procès ?

 16   R.  Qu'est-ce que vous entendez par documents de procès ?

 17   Q.  Les documents juridiques qui ont été déposés par le bureau du Procureur

 18   et la Défense.

 19   R.  Non, je me suis concentré tout simplement sur les rapports -- plutôt

 20   sur les informations qui m'ont été transmises par le bureau du Procureur,

 21   puisqu'ils avaient des questions précises à ce sujet. Et bien entendu, j'ai

 22   également recherché des informations sur le site du TPIY. D'ailleurs, j'ai

 23   essayé de trouver certaines idées générales sur l'affaire en question,

 24   puisque cela est du domaine public sur internet.

 25   Q.  Qu'avez-vous découvert sur le site à propos de l'affaire ? Est-ce que

 26   vous pouvez nous le dire ?

 27   R.  Oui. Ce qui m'intéressait c'étaient les personnes qui étaient ici, les

 28   personnes qui ont été condamnées pour ce qu'elles ont fait ou pas fait,

Page 14490

  1   d'ailleurs, pendant cette période. Donc je voulais avoir des indices, je

  2   voulais savoir de qui il s'agissait également, de qui il était question. Je

  3   l'ai fait lorsque je me suis préparé à ma déposition dans l'affaire

  4   Dragomir Milosevic, parce que je ne connaissais pas ces personnes. Je suis

  5   tout à fait disposé d'ailleurs à les rencontrer personnellement, à parler

  6   avec eux puisque nous sommes tous des soldats de métier, et j'aimerais

  7   entendre ce qu'ils ont à dire pour expliquer les raisons qui les ont

  8   poussés à faire apparemment ce qu'ils ont fait.

  9   Q.  Nous allons prendre un peu de recul vis-à-vis des informations que vous

 10   avez reçues. Vous nous dites que vous avez reçu toute cette série de

 11   documents. J'aimerais savoir si vous avez étudié des déclarations de

 12   témoins ?

 13   R.  Non.

 14   Q.  Est-ce que vous avez demandé des déclarations de témoins pour obtenir

 15   des précisions à propos de certains éléments ?

 16   R.  [aucune interprétation]

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, si vous n'y voyez pas

 18   d'inconvénient, j'aimerais préciser quelque chose qui n'est pas très clair

 19   au compte rendu d'audience.

 20   Il me semble avoir entendu le témoin dire que certaines personnes

 21   avaient été condamnées pour certaines choses qu'ils avaient faites ou pas

 22   faites. Vous avez utilisé ce mot, Monsieur, mais est-ce que vous vouliez

 23   plutôt dire incriminé, est-ce que vous vouliez dire condamné ? Parce que

 24   lorsque vous dites "condamné," cela signifie qu'il y ait eu un jugement de

 25   la part d'un tribunal. C'est cela que vous voulez dire ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, non, ce n'est pas ça que je voulais

 27   dire. Je voulais tout simplement -- j'essayais de trouver le mot juste. Je

 28   ne voulais pas dire condamné. Je voulais dire que c'étaient des personnes

Page 14491

  1   pour lesquelles des actes d'accusation avaient été dressés pour ce qu'elles

  2   ont fait ou pas fait, d'ailleurs, par le passé.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voilà, c'est tout ce que je voulais

  4   préciser.

  5   Maître Kehoe.

  6   M. KEHOE : [interprétation]

  7   Q.  Vous avez étudié plusieurs manuels militaires ou manuels relatifs à la

  8   doctrine militaire pour la préparation de votre rapport. Je ne sais pas,

  9   par exemple, des manuels qui ont été rédigés par l'armée néerlandaise, le

 10   manuel de l'OTAN ainsi que le manuel de l'armée des Etats-Unis, par exemple

 11   ?

 12   R.  Oui. Dans un premier temps, j'ai utilisé le manuel néerlandais, le

 13   manuel également qui portait sur l'appui feu. Bien entendu, j'ai tout ça

 14   dans ma mémoire; les manuels utilisés par l'armée néerlandaise à propos des

 15   doctrines pour chaque type d'opération, puis bien entendu, je connais

 16   également les publications et les manuels de l'OTAN, les manuels conjoints

 17   de l'OTAN à différents niveaux. Bien sûr que je connais les manuels de

 18   l'armée américaine et de l'armée du Royaume-Uni, d'ailleurs. Mais je ne les

 19   ai pas utilisés précisément comme références dans mon rapport.

 20   Q.  De toute façon, nous allons revenir là-dessus, mais j'aimerais vous

 21   poser une question, Colonel, à propos de votre premier rapport.

 22   Avant que vous ne prépariez votre premier rapport, est-ce que vous

 23   aviez compris que les cibles à Knin, les cibles prises par l'artillerie,

 24   est-ce que vous aviez compris que cela faisait l'objet d'un contentieux,

 25   d'un litige entre le bureau du Procureur et la Défense ? Est-ce que cela

 26   vous l'aviez compris ?

 27   R.  Oui, oui. Lors de la préparation de mon rapport, j'ai compris

 28   effectivement qu'il n'y avait pas accord, qu'il y avait litige entre les

Page 14492

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 14493

  1   deux parties. Alors on m'a demandé en fait de faire office d'expert ici.

  2   Cela déjà prouvait qu'il y avait un contentieux à propos de l'utilisation

  3   de l'artillerie et des mortiers sur Knin.

  4   Q.  Oui, mais ma question est un peu plus précise. Je vous ai posé une

  5   question à propos des cibles. Est-ce qu'avant d'écrire votre premier

  6   rapport, est-ce que vous saviez qu'il y avait un litige à propos de ces

  7   cibles à Knin ?

  8   R.  J'ai essayé de le dire lors de ma réponse précédente. Lorsque je parle

  9   d'appui feu, cela inclut les cibles, la prise de décisions, les modes de

 10   transport utilisés pour les armes, tout le système de l'artillerie. Je ne

 11   peux pas décompartementaliser [phon] les éléments parce que tout cela se

 12   rejoint. Je ne peux pas juste prendre en considération un seul des

 13   éléments.

 14   Q.  Nous allons être un peu plus pointus dans notre approche. Vous n'avez

 15   pas parlé de cette question des cibles dans votre premier rapport, n'est-ce

 16   pas ?

 17   R.  J'avais parlé des cibles en règle générale, mais je n'ai pas parlé des

 18   cibles pour Knin, non, c'est vrai.

 19   Q.  Est-ce qu'il y a une raison qui explique pourquoi dans votre premier

 20   rapport vous n'avez pas parlé des cibles individuelles à Knin ?

 21   R.  Non, je ne l'ai pas fait. Mais ça c'est l'approche qui a été suivie par

 22   le bureau du Procureur. Dans un premier temps -- d'ailleurs, je ne me

 23   souviens pas quand est-ce que cela s'est passé. Mais à un moment donné, le

 24   bureau du Procureur s'est adressé à moi et m'a demandé si je pourrais, en

 25   tant qu'expert, parler de l'utilisation de l'appui feu. De l'utilisation de

 26   l'appui feu, c'était le but de mon premier rapport. C'est ce que le bureau

 27   du Procureur m'a demandé. Il m'a demandé de rédiger un rapport générique à

 28   propos de tous les tenants et les aboutissants de l'appui feu en règle

Page 14494

  1   générale. Pour ce premier rapport, le bureau du Procureur ne m'a pas

  2   demandé de me concentrer sur les cibles à Knin.

  3   Q.  Mais est-ce que ce premier rapport a été rédigé à partir d'une idée qui

  4   émanait du bureau du Procureur, l'idée étant qu'on vous demanderait

  5   d'écrire un autre rapport pour les cibles de Knin ?

  6   R.  Ils m'ont dit qu'il y avait une situation bien particulière à propos de

  7   Knin. Ils m'ont demandé de rédiger ce premier rapport, et je pense

  8   qu'ensuite ils m'ont dit qu'il faudrait envisager un autre rapport qui se

  9   concentrerait sur Knin. C'était leur approche. J'ai répondu aux questions

 10   comme ils me les ont posées.

 11   Q.  Oui, oui, je comprends tout à fait. Je comprends très bien que vous

 12   vous êtes contenté tout simplement de faire ce qu'on vous a demandé de

 13   faire. Ne vous méprenez pas quant à mes questions. Ce sera ma dernière

 14   question à ce sujet : lorsque vous avez rédigé votre premier rapport, et

 15   vous n'avez pas parlé des cibles qui se trouvent dans votre deuxième

 16   rapport, est-ce que vous avez déposé votre premier rapport, est-ce que vous

 17   l'avez rédigé en sachant pertinemment qu'il allait y avoir un deuxième

 18   rapport ?

 19   R.  Oui, parce que c'est ce que le bureau du Procureur m'avait dit. Le

 20   bureau du Procureur fonctionnait de la sorte : ils m'ont dit qu'ils avaient

 21   besoin dans un premier temps d'un rapport général à propos de l'appui feu.

 22   Ils m'ont dit que cela ferait l'objet du premier rapport. Puis ensuite par

 23   la suite, après ce premier rapport, là ils m'ont posé des questions

 24   beaucoup plus ciblées en quelque sorte, des questions beaucoup plus

 25   précises qui portaient sur la question des cibles, d'où mon addendum.

 26   Q.  Qui vous a dit lorsque vous faisiez votre premier rapport qu'on allait

 27   vous demander de rédiger un deuxième rapport ?

 28   R.  Cela fait six mois maintenant, mais je pense que c'est M. Tieger,

Page 14495

  1   en fait. Il me semble que c'est M. Tieger qui me l'a demandé.

  2   Q.  J'aimerais maintenant passer à un autre sujet. J'aimerais vous parler

  3   de certaines questions qui ont été abordées lors de l'interrogatoire

  4   principal, et il y a certaines questions qui vous ont été posées par M. le

  5   Juge Orie, il s'agissait de questions qui portaient sur la façon dont vous

  6   vous êtes forgé votre opinion et le cadre dans lequel vous vous êtes forgé

  7   votre opinion. J'aimerais savoir si au cours de votre carrière vous avez

  8   suivi un entraînement relatif aux lois des conflits armés. Vous l'avez

  9   fait, cela ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Puis cela fait partie de votre formation, et je pense que vous avez

 12   utilisé cela pendant votre carrière, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui. Vous savez, la législation, elle est importante. La législation

 14   pour l'Etat néerlandais est la base sur laquelle reposent les forces

 15   armées.

 16   Q.  Mais j'aimerais savoir si vous avez jamais rédigé quoi que ce soit sur

 17   le droit des conflits armés ou quelque chose de ce style ?

 18   R.  Non.

 19   Q.  Lorsque vous avez préparé votre rapport d'expert, est-ce que vous avez

 20   pris en considération ou est-ce que vous avez consulté des publications

 21   juridiques militaires ?

 22   R.  Non, non. J'ai utilisé les documents auxquels j'ai fait référence parce

 23   qu'il fallait que j'aie des explications à propos de légitimité, puis j'ai

 24   un collègue également qui est un juriste pour l'armée néerlandaise, donc je

 25   l'ai consulté.

 26   Q.  Alors, Colonel, vous comprendrez, d'après la formation que vous aviez

 27   suivie, que le droit relatif aux conflits armés, ou les droits, les

 28   législations relatives aux conflits armés sont d'application universelle et

Page 14496

  1   s'appliquent à tous les conflits dans le monde, quel qu'en soit le pays.

  2   Vous le comprenez, cela ?

  3   R.  Oui. Je comprends que les législations en matière de conflits armés

  4   sont des législations qui sont universelles. Enfin, elles devraient être

  5   appliquées partout dans le monde. Voilà.

  6   Q.  Effectivement. Elles devraient l'être.

  7   Si vous prenez un peu de recul, ensuite chaque pays individuel, l'OTAN, les

  8   Etats-Unis ont leur propre doctrine militaire. Vous avez une doctrine

  9   militaire par pays, puis il y a la doctrine militaire également de l'OTAN ?

 10   R.  Oui, oui. Chaque pays a sa propre doctrine militaire, et je ne peux que

 11   confirmer pour ce qui en est de l'OTAN. L'OTAN a également une doctrine

 12   commune. Alors bien entendu, il appartient aux différents pays de ratifier

 13   cette doctrine commune et de la mettre en vigueur. Voilà, ça c'est

 14   l'optique pays par rapport à l'OTAN.

 15   M. KEHOE : [interprétation] Je souhaiterais que la pièce 1D65-0127 soit

 16   affichée à l'écran.

 17   Monsieur le Président, si vous m'y autorisez, je vais me permettre

 18   une petite digression, et je vous dirais que les deux documents auxquels je

 19   vais faire référence, 1D65-0172 et 1D65-0227 sont deux documents que je

 20   vais utiliser pour plusieurs thèmes que je vais aborder. Donc je ne sais

 21   pas, peut-être que cela va faire perdre la tête à M. Monkhouse, mais il va

 22   peut-être parfois être difficile de consulter les deux documents en

 23   parallèle.

 24   Donc j'aimerais, avec votre aval, pouvoir donner les documents papier

 25   à la Chambre, ainsi qu'à l'autre partie ainsi qu'au témoin, ce qui nous

 26   permettrait d'aller un peu plus vite en besogne, si nous avons ces

 27   documents papier par opposition à l'utilisation des documents sur l'écran.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je pense que c'est une approche

Page 14497

  1   très pragmatique, même si la Chambre peut, quant à elle, avoir un des

  2   documents fixé sur l'écran et l'autre en parallèle. Avec un soupçon

  3   d'inventivité on peut régler le problème, mais nous vous sommes

  4   reconnaissants si vous pouviez nous fournir les documents papier.

  5   M. KEHOE : [interprétation] C'est tout simplement, Monsieur le Président,

  6   qu'au fil du temps il serait peut-être difficile d'utiliser l'un ou l'autre

  7   des documents sur l'écran.

  8   Q.  Colonel, il s'agit de la doctrine conjointe des alliées. Vous la

  9   connaissez, celle-là ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  J'attends que tout le monde ait bien reçu son document.

 12   J'aimerais que la deuxième page soit affichée. C'est un document de

 13   16 pages, donc c'est la deuxième page dont je souhaiterais demander

 14   l'affichage.

 15   M. KEHOE : [interprétation] C'est la section 0257 qui m'intéresse.

 16   Il s'agit de la page 18.

 17   Q.  Vous voyez qu'au bas de cette page il est question du concept de la

 18   doctrine.

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Je vais vous donner une lecture rapide du paragraphe 0257.

 21   M. KEHOE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez afficher le bas de la

 22   page 0257, puis nous allons tourner la page :

 23   "La doctrine est définie comme suit, les principes fondamentaux en vertu

 24   desquels les forces militaires orientent leurs actions afin d'étayer leurs

 25   objectifs. Elle demande à être appliquée de façon raisonnée. Le but

 26   principal de la doctrine est par conséquent le principe de l'alliance des

 27   forces armées dans le cadre d'une orientation donnée pour que soient

 28   effectuées ces opérations. Il s'agit de savoir comment ces opérations

Page 14498

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 14499

  1   doivent être dirigées, mises en places, commandées, effectuées, mises en

  2   vigueur et récupérées. Par conséquent, il ne s'agit ni du passé, ni de

  3   l'avenir, à moyen terme ou à long terme. C'est le présent qui est concerné

  4   et le futur ou l'avenir immédiat. La doctrine est dynamique et doit être

  5   toujours examinée pour sa pertinence."

  6   Nous allons passer à la section suivante, parce que là il s'agit du

  7   lien entre la politique et la doctrine.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il serait peut-être utile, pour que le

  9   public puisse suivre, de passer à la page 2-17. Lorsque vous avez fait

 10   référence à la page 18, il s'agissait de la numérotation de pages dans le

 11   système électronique, alors que pour ce qui est du document à proprement

 12   parler, il commence à 2-16 et maintenant nous sommes à la page 2-17.

 13   M. KEHOE : [interprétation] Je vous remercie.

 14   Q.  Vous avez 0250 [comme interprété], et je vais vous en donner lecture à

 15   nouveau. Deuxième phrase, voyez qu'il est indiqué qu'il est question de

 16   "compatibilités en matière de combat pendant la guerre et de considération

 17   d'emploi de la force. Par conséquent, il est reconnu que la politique,

 18   telle que convenue par les autorités suprêmes nationales, dirige et oriente

 19   la doctrine."

 20   Colonel, il s'agit de la doctrine de l'OTAN, l'OTAN qui opère suivant

 21   le cadre du droit en matière de conflit armé, n'est-ce pas ?

 22   R.  Il ne s'agit pas seulement d'une approche générique, parce qu'il faut

 23   savoir que c'est un premier document. Mais plus vous entrez dans les

 24   détails du document, plus vous allez dans les détails. Là il s'agit du

 25   début, il s'agit d'une orientation générale qui est donnée à tous les pays

 26   qui ont ratifié ce document et qui le mettent en vigueur.

 27   Q.  Nous avons le droit relatif au conflit armé, si je peux m'exprimer de

 28   la sorte, et en quelque sorte il s'agit là d'un sous-ensemble du droit

Page 14500

  1   relatif au conflit armé. L'OTAN, par le biais de cette doctrine, essaie en

  2   quelque sorte de préciser comment l'OTAN va fonctionner, et ensuite vous

  3   avez les autres éléments qui vous permettent d'être de plus en plus précis

  4   au fil du temps ?

  5   R.  Maître, ce document fait exactement ce qu'il décrit lors de votre

  6   première lecture. Ce document établit les principes généraux et génériques

  7   de la doctrine pour les pays de l'OTAN; ni plus ni moins. Il donne un cadre

  8   pour les opérations, un cadre des orientations, en fait. Il s'agit de

  9   commandements sur le terrain pour diriger, organiser, commander, effectuer

 10   et récupérer des opérations. Tout est inclus, parce que dans le même

 11   document vous trouvez les principes des opérations conjointes, et l'un de

 12   ces principes c'est la légitimité justement.

 13   Il est indiqué ce que pense l'OTAN de la légitimité, et je peux vous

 14   assurer qu'au sein des différents groupes de travail de l'OTAN, nous avons

 15   de longs débats à propos de l'application et l'applicabilité du droit. On

 16   ne peut pas toujours le régler, parce que chaque pays a son interprétation

 17   nationale du droit humanitaire, par exemple. Nous avons, par exemple, des

 18   débats avec les représentants des Etats-Unis, qui sont toujours des casse-

 19   tête parce qu'il s'agit de faire en sorte d'intégrer le droit international

 20   dans les documents militaires.

 21   Ce qui est décrit maintenant dans ce document sera peut-être décrit

 22   de façon différente dans des documents des Etats nationaux, mais je peux

 23   vous assurer qu'il y a certains mots que vous ne trouverez pas ici que vous

 24   trouverez dans la doctrine nationale néerlandaise, par exemple. Comme je

 25   vous l'ai déjà dit, l'approche nationale néerlandaise et la doctrine de

 26   l'armée néerlandaise sont les éléments les plus importants, quel que soit

 27   le point de vue de l'OTAN à ce sujet.

 28   Q.  Vous m'avez amené justement à la question que j'allais vous poser à

Page 14501

  1   propos de la différence de doctrines entre les différents pays, car nous

  2   avons indiqué que le droit relatif aux conflits armés reste le même. Donc

  3   on peut débattre de ce que cela signifie. Mais vous avez fait remarquer que

  4   la doctrine néerlandaise pourrait être différente de la doctrine

  5   américaine, par exemple, ou des Etats-Unis, et la doctrine néerlandaise

  6   pourra être différente de la doctrine russe ou la doctrine israélienne, par

  7   exemple.

  8   R.  Ecoutez, nous en voyons des preuves à l'heure actuelle. Voyez le

  9   comportement des Israéliens et voyez l'utilisation de la violence par les

 10   Israéliens à Gaza. C'est quelque chose que je ne peux pas comprendre.

 11   Enfin, ce n'est peut-être pas la peine de le consigner, mais je ne

 12   comprends pas comment l'on peut véritablement faire ce qui est fait à une

 13   population civile comme ils le font en ce moment, alors que les Israéliens

 14   ont une doctrine, eux. Ça je le sais.

 15   Q.  Donc la réponse à ma question, c'est que si nous prenons les différents

 16   pays, les différents pays ont des doctrines différentes.

 17   R.  Ecoutez, les pays ont le droit de préciser et d'adapter leur doctrine à

 18   leurs propres besoins, ce qui signifie qu'au sein de l'alliance il y a une

 19   base générale pour la doctrine qui est cet AJP 01, et je peux vous assurer

 20   que l'AJP 01 est ratifié et mis en application par tous les pays; mais cela

 21   n'empêche pas les pays, même s'ils disent qu'ils ne le font pas, de faire

 22   ce qu'ils veulent faire. Moi je suis sûr que tous les pays le font. Donc la

 23   doctrine, en fait, c'est une base qui permet de comprendre les opérations.

 24   Mais cela ne signifie pas pour autant qu'il n'y aura pas de différence de

 25   doctrine entre les différents pays. Aux Pays-Bas, la doctrine de l'OTAN est

 26   quasiment complètement intégrée dans notre doctrine nationale.

 27   M. KEHOE : [interprétation] Je demanderais le versement au dossier de la

 28   pièce 1D65-0172. Et nous allons revenir là-dessus.

Page 14502

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Russo.

  2   M. RUSSO : [interprétation] Pas d'objection.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur le Greffier.

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela sera la pièce D1247, Monsieur le

  5   Président.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D1247 est versée au dossier.

  7   Et Monsieur Konings, j'aimerais vous demander de bien vouloir ménager

  8   des temps d'arrêt, ou un temps d'arrêt. Lorsque Me Kehoe a terminé sa

  9   question, n'oubliez pas de ménager un temps d'arrêt parce qu'il faut que la

 10   sténotypiste puisse suivre votre réponse également.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'en excuse, je vais essayer de m'en

 12   souvenir.

 13   M. KEHOE : [interprétation]

 14   Q.  Colonel, c'est ma faute également, je suis ici depuis beaucoup plus

 15   longtemps que vous et je m'excuse auprès des interprètes qui font de leur

 16   mieux pour suivre.

 17   Donc nous avons beaucoup parlé -- enfin, nous avons parlé plutôt du droit

 18   relatif aux conflits armés, de la doctrine, et vous connaissez bien entendu

 19   un autre concept qui s'appelle les règles d'engagement. Vous le connaissez,

 20   ce concept, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui, oui. Nous l'utilisons. Nous utilisons en fait ces règles

 22   d'engagement au cours des opérations, mais ces règles diffèrent suivant les

 23   opérations.

 24   Q.  Justement, c'est ce dont j'aimerais parler.

 25   Alors donnez-moi une idée et -- en fait, avant que je ne vous pose ma

 26   question, je vais vous montrer un extrait d'un manuel. Il s'agit de la

 27   pièce 1D65-0251.

 28   Vous connaissez ce document, Monsieur ?

Page 14503

  1   R.  Oui, je connais ce document, et je dois vous dire également que ce

  2   document est en train d'être rédigé à nouveau. Donc il se peut qu'il y ait

  3   des différences entre ce document et ce que nous sommes en train de mettre

  4   au point et d'enseigner.

  5   Q.  Ecoutez, s'il y a des différences, dites-nous-le et je suis sûr que la

  6   Chambre de première instance sera très reconnaissante.

  7   Mais j'aimerais attirer votre attention sur ce document. Donc il

  8   s'agit d'un document néerlandais qui a été traduit en anglais. Vous voyez

  9   qu'il est question de l'armée royale néerlandaise. Et à la page 4 de ce

 10   document --

 11   M. KEHOE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez descendre un

 12   peu, s'il vous plaît, le paragraphe --

 13   Q.  Donc c'est là le paragraphe qui nous intéresse.

 14   "Règles de combat : fournir les instructions aux commandants quand il

 15   s'agit des méthodes et de la nature de forces à utiliser et ceci dans un

 16   cadre politique. Elles existent pour que les autorités politiques puissent

 17   contrôler l'utilisation de la force dans un contexte politique et

 18   juridique."

 19   Donc on peut voir que les règles de combat changent d'une situation à

 20   une autre. Est-ce que vous pourriez nous fournir quelques exemples de cela

 21   pour que l'on le comprenne mieux.

 22   R.  Je dois vous corriger. Ces règles ne changent pas d'une situation à une

 23   autre. Ces règles de combat sont définies pour toute une opération. Par

 24   exemple, nous avons les règles de combat pour Afghanistan, pour toute

 25   l'opération. Donc par exemple, la permission soit d'utiliser les supports

 26   aériens rapprochés contre certaines cibles ou bien de faire le choix

 27   d'autres moyens dans certaines zones. Donc cela vous donne aussi parfois la

 28   définition du contexte politique. Ils peuvent changer d'une nation à une

Page 14504

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 14505

  1   autre. Mais on vous donne les instructions claires là-dessus pour toute

  2   l'opération. Donc vous avez des manuels, et cetera. Mais de l'autre côté

  3   votre gouvernement définit vos propres règles de combat et c'est fait par

  4   les autorités nationales.

  5   Donc nos troupes en Afghanistan vont respecter leurs propres règles de

  6   combat, et souvent elles sont plus strictes que celles qui sont définies

  7   par le commandant des forces conjointes ou alliées; et vous devez là --

  8   enfin, par ces règles de combat, on définit aussi comment traiter les

  9   prisonniers de guerre, qui les transporte, comment on les traite, et

 10   cetera, et cetera. Aussi l'évaluation des dégâts collatéraux. Par exemple

 11   en Afghanistan, l'évaluation de ces dégâts collatéraux fait partie des

 12   règles de combat qui sont définies. Donc c'est quelque chose qui est assez

 13   précis et qui se réfère à toutes les circonstances envisagées.

 14   Q.  Je voudrais revenir sur ce que vous venez de dire. Donc, en

 15   Afghanistan, vous avez la doctrine et puis aussi vous avez les règles de

 16   combat des forces hollandaises.

 17   R.  Oui.

 18   Q.  On va prendre la situation en Afghanistan. Est-ce que les règles de

 19   combat vont être différentes que les règles de combat qui régissaient

 20   l'armée hollandaise dans le cadre de la force SFOR en Bosnie-Herzégovine

 21   après 1995 ?

 22   R.  Oui, ces règles vont être différentes puisque les circonstances sont

 23   complètement différentes. Et c'est très important à partir du moment où

 24   vous partez pour une opération de connaître parfaitement où vous allez et

 25   de connaître parfaitement les règles de combat. Et là, il ne s'agit pas

 26   seulement du contexte militaire quand je vous dis de connaître la

 27   situation. Parce qu'il faut comprendre que l'instrument militaire n'est

 28   qu'une petite portion de la situation de ce qui se passe autour de nous.

Page 14506

  1   Parce que nous sommes un instrument politique utilisé par les hommes

  2   politiques et nous avons cette possibilité unique d'utiliser la violence

  3   contre d'autres peuples, d'autres infrastructures, mais nous faisons partie

  4   d'un système global, l'approche globale comme nous l'appelons. Donc chaque

  5   opération va exister pour des raisons différentes.

  6   Donc pour chaque opération vous allez avoir par exemple la doctrine

  7   généralisée, quel type que l'on utilise à chaque fois, AJP 1 2 3, et

  8   cetera, ou bien le manuel de combat. Mais ensuite, il y a des circonstances

  9   spécifiques relatives à l'opération en question où vous allez avoir les

 10   règles de combat complètement différentes. Par exemple, en 1995 et en

 11   Afghanistan, ces règles de combat étaient complètement différentes. Avant

 12   cela, il y avait aussi les règles de combat de la FORPRONU qui

 13   définissaient clairement ce que la FORPRONU pouvait ou ne pouvait pas

 14   faire.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc finalement, la réponse était une

 16   réponse positive.

 17   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Parce que la seule chose qu'on vous ait

 19   demandée c'était de savoir si les règles de combat en Afghanistan étaient

 20   différentes des règles de combat en Bosnie après 1995.

 21   Mais si M. Kehoe veut en savoir plus, il va sans doute vous poser la

 22   question. Donc essayez de vous concentrer sur la question proprement dite

 23   parce que vous avez tendance à répondre longuement et vos réponses ont

 24   tendance à s'allonger, d'ailleurs, au fur et à mesure, et M. Kehoe a un

 25   certain temps pour vous poser ses questions; il est limité dans ses

 26   possibilités.

 27   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et si vous pensez qu'il est important

Page 14507

  1   d'ajouter quelque chose, vous pouvez toujours nous le demander et on va

  2   vous accorder cette possibilité.

  3   M. KEHOE : [interprétation]

  4   Q.  Une question par rapport à la dernière réponse que vous avez donnée.

  5   Par exemple, les règles de combat pour la SFOR en 1995 en Bosnie étaient

  6   bien plus restreintes que les règles de combat pour l'armée hollandaise en

  7   Afghanistan aujourd'hui; est-ce exact ?

  8   R.  Je ne saurais comparer les deux parce que je pense que dans une

  9   certaine mesure les règles de combat en Afghanistan, ces règles sont aussi

 10   restreintes, aussi réductrices qu'elles l'étaient en Bosnie, surtout quand

 11   il s'agit du traitement de la population civile.

 12   M. KEHOE : [interprétation] A présent, Monsieur le Président, je vais

 13   demander que la pièce 1D65-02551 soit versée au dossier.

 14   M. RUSSO : [interprétation] Nous n'avons pas d'objection.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D1248.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui vient d'être versée au dossier.

 18   M. KEHOE : [interprétation]

 19   Q.  Je voudrais vous montrer un manuel, un manuel du Royaume-Uni du

 20   ministère de la Défense et qui concerne les lois qui régissent les conflits

 21   armés. Il s'agit du document 1D65-0142.

 22   M. KEHOE : [interprétation] Est-ce que l'on peut montrer cela.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de poursuivre, moi je ne vois pas

 24   de traduction. C'est un document en anglais, vous n'avez pas de traduction

 25   ?

 26   M. KEHOE : [interprétation] Oui, en effet, Monsieur le Président. Ces

 27   manuels, nous les avons en anglais.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais d'habitude, nous avons une

Page 14508

  1   version bilingue de toutes les pièces que vous présentez. Là, cette fois-

  2   ci, vous n'en avez pas. Je ne sais pas quelle est la position des autres

  3   conseils de la Défense. Je ne parle pas de la page de garde que l'on voit

  4   en ce moment et qui est toujours en langue hollandaise.

  5   Donc il n'y a pas d'objection et d'après moi, j'interprète cela comme

  6   l'abandon du droit à la traduction des parties pertinentes pour ce témoin.

  7   Monsieur Kehoe, vous pouvez poursuivre.

  8   M. KEHOE : [interprétation]

  9   Q.  En examinant cette page de garde, est-ce que cela vous dit quelque

 10   chose ? Est-ce que vous connaissez cela ?

 11   R.  Non.

 12   Q.  On va passer à la page suivante. Finalement, la page 53.

 13   M. KEHOE : [interprétation] En haut de la page, Monsieur le Greffier.

 14   Q.  Je vais vous demander d'examiner cela. Donc là, c'est quelque chose qui

 15   concerne les forces du Royaume-Uni.

 16   La première phrase, je vais vous la lire.

 17   "Les lois du conflit armé ne sont pas les mêmes que les règles de combat."

 18   On peut lire plus loin :

 19   "Les lois qui régissent les conflits armés dérivent et font partie du

 20   droit international, et c'est une loi universelle alors que les règles de

 21   combat sont les directives destinées au commandement opérationnel et qui

 22   vont être revues de façon constante, revues et corrigées dans le cadre

 23   juridique et en fonction de l'évaluation de la situation politique et

 24   militaire des intérêts nationaux ou multinationaux et par rapport à la

 25   mission à accomplir et les circonstances auxquelles les forces doivent

 26   faire face. Les règles de combat ne reflètent pas seulement les

 27   considérations juridiques, mais aussi d'autres considérations comme, par

 28   exemple, la nécessité d'éviter la destruction de certaines installations

Page 14509

  1   que l'on cherche à saisir ou conquérir et d'éviter les situations néfastes

  2   du point de vue politique et d'harmoniser les pratiques entre les alliés, à

  3   savoir d'éviter le feu ami, comme on l'appelle."

  4   Donc Monsieur, est-ce que vous pourriez me dire si c'est quelque chose --

  5   est-ce que vous êtes d'accord avec cela ? Je sais que vous n'êtes pas un

  6   juriste.

  7   R.  Oui, c'est très clair.

  8   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais demander que

  9   ceci soit versé au dossier.

 10   M. RUSSO : [interprétation] Le document tout en entier ?

 11   M. KEHOE : [interprétation] Non, la partie qu'on vient de citer.

 12   M. RUSSO : [aucune interprétation]

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur le Greffier, puisqu'il n'y

 14   a pas d'objection de M. Russo.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce D1249.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D1249 est versée au dossier, et ceci est

 17   notamment la page 53 de ce manuel qui régit les conflits armés.

 18   M. KEHOE : [interprétation] A présent, je vais demander que l'on nous

 19   montre la pièce 1D65-0256.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Là, on a la même situation, à savoir il

 21   n'y a pas de traduction de ce document.

 22   M. KEHOE : [interprétation]

 23   Q.  Est-ce que vous avez vu cela ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Ce qu'on a essayé d'illustrer avec ce graphisme, c'était de vous

 26   démontrer quelles sont les interactions entre ces différentes règles. Donc

 27   on commence par quelque chose d'assez spécifique, à savoir les règles de

 28   combat, ensuite la doctrine militaire, et ensuite on va arriver aux lois

Page 14510

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9   

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 14511

  1   qui régissent les conflits armés.

  2   Est-ce que j'ai bien interprété cela ?

  3   R.  Je ne suis pas sûr de bien comprendre ce schéma. Je ne vois pas de quoi

  4   vous parlez exactement.

  5   Q.  Tout d'abord, vous avez les lois qui régissent les conflits armés. Et

  6   là, c'est quelque chose qui régit donc les conflits armés d'après le cadre

  7   juridique. Ensuite, vous avez la doctrine de l'OTAN qui opère dans ce cadre

  8   juridique, et ensuite on va plus loin et on arrive aux règles de combat

  9   d'une opération donnée qui va opérer dans le cadre d'une doctrine. Donc

 10   est-ce que là n'illustre pas justement cette expansion, cette interaction

 11   où on parle du particulier, à savoir les règles de combat vers les cadres

 12   très larges, à savoir les lois qui régissent les conflits armés ?

 13   R.  Vous savez, les règles de combat, ceci ne relève pas seulement du cadre

 14   juridique, c'est aussi quelque chose qui peut régir les points sensibles

 15   d'une opération éventuellement problématiques.

 16   Donc, effectivement, ceci dépend de lois qui régissent les conflits

 17   armés, mais je ne réduirais pas les règles de combat à la doctrine, parce

 18   que cela dépasse aussi la doctrine et les lois qui régissent les conflits

 19   armés. Parce que vous arrivez à régler pas mal de questions de l'ordre

 20   national quand on prévoit, quand on définit des règles de combat. Donc ce

 21   n'est pas seulement du juridique. Ce n'est pas quelque chose qui relève

 22   uniquement du cadre juridique ou de la doctrine.

 23   Q.  On va pour l'instant oublier cet aspect-là des règles de combat, à

 24   savoir celles où il ne s'agit pas d'avoir recours à la force militaire dans

 25   le cadre d'une opération. Je sais que vous parlez du côté voilé, politique,

 26   social, et cetera. Mais en ce qui concerne l'opération militaire,

 27   proprement dit militaire, est-ce que vous êtes d'accord pour dire que les

 28   troupes néerlandaises vont respecter les règles de combat, et que ceci est

Page 14512

  1   fait en respectant la doctrine militaire hollandaise et, bien sûr, les lois

  2   qui régissent les conflits armés ?

  3   R.  [aucune interprétation]

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Konings, je vais reformuler

  5   peut-être la question de M. Kehoe.

  6   Parce qu'il a commencé comme cela, il a dit :

  7   "Si l'on met à côté les règles de combat qui ne relèvent pas de

  8   l'utilisation des forces armées."

  9   Là, on parle uniquement des règles de combat où il s'agit de

 10   combattre ou d'avoir recours à la force militaire. Dans ce cas précis, est-

 11   ce que vous êtes d'accord pour dire que ces règles de combat doivent

 12   s'insérer dans le cadre de la doctrine, et ensuite la doctrine doit

 13   s'insérer aussi dans les lois qui régissent les conflits armés ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends ce que vous dites, mais j'ai

 15   toujours du mal à répondre à cette question.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On va essayer de vous reposer la

 17   question de façon simple. Si, par exemple, les règles de combat disent

 18   qu'il faut aider la population locale à avoir de l'eau, et en même temps si

 19   on dit n'utilisez pas les armes d'artillerie ou l'artillerie lourde, là on

 20   parle uniquement de la deuxième interdiction, uniquement de la deuxième

 21   interdiction. Evidemment, il faut avoir à l'esprit la population civile,

 22   comment la protéger, et cetera. Mais là on parle vraiment de règles de

 23   combat, parlant de façon strictement militaire. Dans ce cadre-là, pour ce

 24   qui est de ces règles-là, est-ce que ces règles doivent s'insérer dans le

 25   cadre de la doctrine militaire.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vois, je vois maintenant de quoi vous

 27   parlez, et dans ce cas-là, je vais dire oui, la réponse est oui, mais je

 28   voudrais ajouter quelque chose.

Page 14513

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Faites-le, mais brièvement.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà ce que j'ai à vous dire, je comprends

  3   que pour répondre à la question vous avez besoin d'isoler les questions

  4   militaires, mais dans la pratique ce n'est tout simplement pas possible.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je comprends cela. Mais pour la

  6   question, nous avons procédé à un exercice artificiel et nous l'avons fait.

  7   Je vous remercie.

  8   Monsieur Kehoe, vous pouvez poursuivre.

  9   M. KEHOE : [interprétation] Je voudrais à présent demander que cette pièce

 10   1D65-0256 soit versée au dossier.

 11   M. RUSSO : [interprétation] Pas d'objection.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 13   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce D1250.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D1250 est versée au dossier.

 15   M. KEHOE : [interprétation]

 16   Q.  Colonel, on vient de parler de lois qui régissent les conflits armés,

 17   de la doctrine, des règles de combat, et je dois vous remercier de ces

 18   manuels que vous nous avez fournis. Je dois dire que j'étais intéressé en

 19   examinant certains paragraphes de votre rapport, de les lire à la lumière

 20   de ces manuels, notamment un des manuels que vous avez utilisé m'intéresse

 21   particulièrement. C'est le document 1D65-0001.

 22   C'est la page de garde de ce manuel que vous avez fourni au bureau du

 23   Procureur.

 24   R.  Oui. J'ai utilisé ce document pour préparer mon premier rapport. En

 25   regardant le titre, vous allez voir que là il s'agit d'une étude

 26   préliminaire, et ce document est basé sur un document que j'avais au

 27   préalable fourni au bureau du Procureur, mais qui n'a pas été traduit vers

 28   l'anglais. C'est cela, le document de support de feu officiel que nous

Page 14514

  1   utilisons dans l'armée hollandaise. J'ai utilisé ce document, le rapport

  2   préliminaire, parce qu'il est traduit en anglais; sinon, il aurait fallu

  3   que je fasse traduire mon livre.

  4   Q.  Bien. Je vous remercie.

  5   M. KEHOE : [interprétation] Nous avons en effet quelques extraits que nous

  6   allons utiliser de ce document, et nous n'avons pas besoin d'utiliser le

  7   document en entier.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour l'instant, on va procéder page par

  9   page. Ensuite, on va voir si le document en entier va être versé ou non.

 10   M. KEHOE : [interprétation]

 11   Q.  Ce que je voudrais vous demander à présent, c'est d'examiner ce qui se

 12   trouve sur l'écran, à savoir la page du document qui a la cote 1D65-0385.

 13   C'est une comparaison tirée du document que nous venons de voir, à

 14   savoir le manuel de terrain opérationnel hollandais en ce qui concerne le

 15   support de feu. On va le comparer à votre rapport d'expert. Ce qu'on a

 16   fait, c'est de comparer les deux et de voir ce que vous avez enlevé et

 17   soustrait à ce texte. Vous êtes d'accord pour dire qu'un grand nombre des

 18   informations qui figurent dans l'annexe A de votre premier rapport, vous

 19   avez pris cela du manuel hollandais, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Et souvent vous avez fait cela texto, vous avez vraiment cité ?

 22   R.  Pourriez-vous répéter cela ?

 23   Q.  Le plus souvent vous avez cité purement et simplement.

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Finalement, ce que vous avez fait c'est du copier-coller ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Ce qui m'intéresse c'est d'examiner des passages où vous avez ajouté

 28   des informations au manuel. Par exemple, ce qui m'intéresse c'est la page

Page 14515

  1   16 et 70 [comme interprété]. Encore une page, s'il vous plait.

  2   En bas de ce document, on voit la partie 0810 où l'on fait une

  3   paraphrase et l'on raccourcit un peu. Ce qui m'intéresse c'est la page

  4   suivante où on peut lire :

  5   "Le feu d'artillerie ne peut être utilisé que" -- 0810, je me suis

  6   trompé. M. Misetic m'a corrigé. C'est à la ligne 22.

  7   "L'artillerie ne peut être utilisée que dans les milieux très sûrs et quand

  8   les impacts présumés au niveau de la population civile sont tels qu'il n'y

  9   aurait pas de pertes humaines."

 10   Je voudrais trouver cela dans ce manuel hollandais, parce que là il s'agit

 11   d'une déclaration assez catégorique où vous dites qu'on ne peut utiliser

 12   l'artillerie qu'avec une distance de sécurité suffisante pour éviter les

 13   pertes humaines.

 14   R.  Qu'est-ce que vous voulez obtenir là ? Vous voulez avoir les détails

 15   techniques quant à la nature de cette distance sûre ?

 16   Q.  Non, non. Là, en général, ce que vous avez fait c'est de citer le

 17   manuel, et vous avez fait cela vraiment en restant très près du texte. Puis

 18   ensuite, dans le rapport d'expert, vous avez ajouté des informations. Par

 19   exemple, vous dites que l'artillerie ne va être utilisée que quand on peut

 20   avoir une distance sûre pour assurer qu'il n'y ait pas de pertes humaines ?

 21   C'est une déclaration assez catégorique et elle se trouve dans votre

 22   rapport d'expert, et je voudrais savoir où exactement elle se trouve dans

 23   le manuel de l'armée hollandaise, ou bien est-ce que vous avez tiré cela

 24   d'un autre manuel.

 25   R.  Peut-être que cela ne se trouve pas dans la traduction en anglais.

 26   Peut-être que nous l'avons que dans la version hollandaise. Il faudrait que

 27   je vérifie cela.

 28   Q.  D'accord.

Page 14516

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7   

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 14517

  1   M. KEHOE : [interprétation] Il peut faire cela pendant la pause.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

  3   Monsieur Konings, dans ce manuel qui est votre manuel de référence

  4   sur lequel vous vous êtes vraiment appuyé pour écrire votre extrait, je

  5   vais vous demander de trouver l'endroit dans ce manuel qui vous a servi de

  6   base pour écrire ce que vous avez écrit dans votre rapport.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais le faire.

  8   M. KEHOE : [interprétation]

  9   Q.  En attendant, Colonel Konings, nous allons rester sur cette même page

 10   où il est dit :

 11   "Le fait de cibler les cibles clairement civiles est hors de question

 12   puisque l'opération au niveau tactique est planifiée et exécutée contre les

 13   cibles militaires."

 14   Un peu plus loin il est écrit :

 15   "La règle de base est de ne jamais infliger les pertes ou des dégâts aux

 16   civils ou à leurs possessions."

 17   Quelle est la source de cette partie ?

 18   R.  C'est repris du livre que j'ai sur moi. J'en suis sûr, je sais

 19   exactement même dans quel paragraphe ceci est contenu. Je peux vous lire

 20   cela en néerlandais. J'espère que ça peut être interprété et j'espère que

 21   ça peut être traduit et c'est aussi une interprétation de ce qui est

 22   contenu dans ce livre, car le livre que j'ai ici, c'est un manuel de

 23   terrain sur l'appui feu, rédigé en 2000 ou 2001. Ceci est l'interprétation

 24   que j'ai faite après avoir consulté un collègue juriste concernant la

 25   manière dont il faut traiter l'attaque contre la population civile ou les

 26   possessions civiles.

 27   Mais la base est ce qui se trouve dans ce manuel de terrain.

 28   M. KEHOE : [interprétation] En ce moment, je souhaite proposer le versement

Page 14518

  1   au dossier de la pièce 1D65-0385.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo.

  3   M. RUSSO : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas d'objection.

  4   Est-ce que le document qui est cité ici, 001, est versé au dossier aussi,

  5   celui qui était présenté tout à l'heure ?

  6   M. KEHOE : [interprétation] Si le conseil le souhaite, nous allons proposer

  7   son versement aussi.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais soyons très pratiques. Il

  9   s'agit d'un document très long.

 10   M. KEHOE : [interprétation] Très.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce que je suggère c'est d'examiner ce

 12   document, voir dans quelles mesures, mises à part les parties sélectionnées

 13   dans ce document de comparaison, d'examiner ce dont vous avez besoin et

 14   ensuite demander que ceci soit ajouté aux éléments de preuve. Car sinon,

 15   nous nous sommes penchés sur ce document, c'est déjà un document de

 16   comparaison de 69 pages.

 17   M. RUSSO : [interprétation] Je voulais savoir simplement si les deux

 18   étaient versés au dossier, mais si c'est juste le document qui est à

 19   l'écran, je n'ai pas d'objection.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier d'audience, quelle

 21   sera la cote ?

 22   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous nous limitons maintenant au

 24   document comparatif dans lequel le texte apparaît - pas toujours, mais

 25   souvent nous avons le texte de l'original - ensuite le texte du rapport,

 26   puis ensuite la comparaison avec les parties en bleu et en rouge, qui

 27   correspondent à ce qui a été changé.

 28   Monsieur le Greffier d'audience.

Page 14519

  1   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document ID 1D65-0385 deviendra la

  2   pièce à conviction D1251.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Oui. C'est

  4   versé au dossier.

  5   Monsieur Russo, j'essaie de savoir si vous souhaitez ajouter quelque chose

  6   à ce document comparatif.

  7   M. RUSSO : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite attendre la

  8   fin de l'interrogatoire.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Celui de M. Kehoe ?

 10   M. RUSSO : [interprétation] Oui.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas-là, nous avons encore une

 12   journée au moins.

 13   Poursuivez, Maître Kehoe.

 14   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 15   Q.  Colonel, si on examine les commentaires sur les pièces d'artillerie,

 16   elles peuvent être seulement utilisées lorsqu'il sera possible d'éviter des

 17   pertes civiles, mais ceci ne reflète pas la loi sur le conflit armé, n'est-

 18   ce pas ?

 19   R.  C'est vous qui le dites, pas moi.

 20   Q.  Mais est-ce que ceci reflète la loi sur le conflit armé, ou est-ce que

 21   c'est la doctrine au sein de l'armée néerlandaise ?

 22   R.  Tout ce que je peux dire, c'est que notre doctrine est vérifiée par nos

 23   conseillers juridiques, et cela fait partie de leurs tâches de vérifier et

 24   comparer cela aux droits humanitaires. Ce n'est pas mon travail.

 25   Q.  Je souhaite attirer votre attention maintenant à la question de savoir

 26   si ceci reflète de manière précise ce que vous avez appris.

 27   M. KEHOE : [interprétation] Peut-on montrer la pièce 1D65-0148. Il s'agit

 28   d'un manuel de terrain de l'armée des Etats-Unis et il s'agit de la loi

Page 14520

  1   portant sur la guerre armée. J'essaie de trouver la page au plus vite.

  2   Peut-on passer à la page 18, dans le prétoire électronique. Peut-on

  3   agrandir le paragraphe 25 qui se trouve à droite où il est écrit dans le

  4   paragraphe portant sur le statut ennemi des civils dans la dernière phrase

  5   de ce paragraphe 25, il est dit :

  6   "Il est reconnu -- enfin une règle généralement reconnue du droit

  7   international stipule que les civils ne doivent pas être rendus l'objet

  8   d'attaque dirigée exclusivement contre eux."

  9   Q.  Sur la base de votre expérience et de votre formation, la limite est

 10   posée ici, c'est-à-dire les civils ne doivent pas être rendus l'objet de

 11   l'attaque; est-ce exact ?

 12   R.  C'est ce qui est écrit ici.

 13   Q.  C'est tout à fait différent de la situation que vous nous avez

 14   présentée lorsque vous avez dit que les pièces d'artillerie peuvent être

 15   utilisées seulement si la distance de sécurité entre les cibles et les

 16   civils est suffisamment grande pour éviter tous les dégâts civils. C'est un

 17   concept différent.

 18   R.  Oui, c'est un concept différent.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, pour votre information, je

 20   vois qu'à la page de garde, il est écrit 1956, et puis à la page 2, nous

 21   voyons la date du 15 juillet 1976 et puis vous vous intéressez de près à ce

 22   développement. Je me demande si ce document publié en 1976 a été mis à jour

 23   depuis.

 24   M. KEHOE : [interprétation] Oui. Ceci a été mis à jour à de nombreuses

 25   reprises; c'est fait constamment, mais cette page ne change pas. Mais ce

 26   qui se passe c'est qu'aux Etats-Unis, vous serez notifié du fait que

 27   certaines pages ont été changées, mais les trois pages de la loi sur la

 28   guerre terrestre ne changent pas, malgré les mises à jour continuelles.

Page 14521

  1   C'est la manière dont j'ai compris cela.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais, comment peut-on savoir et être sûr

  3   de quelle année date la partie que vous venez de lire en 1976 [comme

  4   interprété] et 2009 ?

  5   M. KEHOE : [interprétation] Ce document en particulier, dans la première

  6   page, il est indiqué, je crois 1956. Je pense que c'est un aspect bien

  7   déterminé depuis longtemps qui n'a pas changé, mais d'autres dispositions

  8   ont effectivement changé. Mais ce dispositif, comme le colonel vient de

  9   mentionner, fait partie de la loi régissant le fait que le civil ne peut

 10   pas être l'objet d'attaque.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, il faudrait voir dans quelles

 12   mesures la loi coutumière y est comprise si ceci se fonde sur les

 13   conventions ratifiées par les Etats-Unis. Pour moi, tout ceci n'est pas

 14   encore clair, mais je l'indique simplement afin que vous sachiez quelles

 15   sont les questions qui, à mon avis, restent ouvertes.

 16   Poursuivez.

 17   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 18   Q.  Je souhaite que l'on passe maintenant à une autre partie de ce

 19   document. Peut-on passer à la page 5 de ce document, dans la rubrique

 20   "Meurtres et dévastations non nécessaires" où il est question du fait que

 21   dans le paragraphe précédent il est question des objectifs militaires qui

 22   sont touchés notamment dans les circonstances mentionnées dans le

 23   paragraphe précédent :

 24    "Pertes de vie et dégâts aux propriétés dus aux attaques ne doivent

 25   pas être excessifs par rapport à l'avantage concret et direct militaire que

 26   l'on s'attend à atteindre."

 27   Si on examine ces éléments, et si on examine en parallèle votre rapport, il

 28   est clair, n'est-ce pas, Colonel que la loi sur le conflit armé interdit

Page 14522

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 14523

  1   d'infliger de manière délibérée les pertes civiles, n'est-ce pas ?

  2   R.  Jusqu'à maintenant, je suis d'accord avec vous.

  3   Q.  Et la loi sur le conflit armé n'interdit pas que l'on inflige des

  4   pertes civiles de manière non délibérée, n'est-ce pas ?

  5   R.  Je ne peux pas répondre par oui ou par non. Vous m'avez simplement

  6   montré un document américain de 56 que je n'ai pas pu étudier. Donc je ne

  7   peux rien dire.

  8   Et au sujet du deuxième paragraphe, je veux dire qu'il est question

  9   de la guerre entre deux états, ce qui est différent dans le monde

 10   international avec évidemment ce qui se passe autour de nous. C'est la

 11   raison pour laquelle du point de vue néerlandais, nous avons amélioré le

 12   système par rapport à l'utilisation de système d'armement et je n'ai pas pu

 13   lire ce document précédemment. J'ai vu juste certaines petites parties du

 14   document. C'est le seul document américain qui comporte la vision des

 15   Etats-Unis. Et comme je vous ai déjà dit, il y a des différences entre

 16   l'approche juridique d'une opération du point de vue néerlandais et du

 17   point de vue américain.

 18   Q.  Nous allons revenir maintenant à ce que vous avez écrit dans votre

 19   rapport. Il s'agit de la pièce 1259 et je souhaite qu'on se penche sur la

 20   page de sous section G, petit x.

 21   Est-ce que vous avez le rapport devant vous ? Sinon, on peut le montrer à

 22   l'écran.

 23   R.  Je vais le prendre.

 24   Q.  Oui, ça va être plus facile.

 25   R.  Quelle partie ?

 26   Q.  Il s'agit de la deuxième page du rapport G sous division 10 G, petit x.

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Au milieu de ce paragraphe, vous dites : "Ces effets indirects" et vous

Page 14524

  1   parlez de l'artillerie,

  2   "Ces effets indirects ne sont peut-être pas délibérés si les cibles

  3   militaires qui sont proches de zones civiles ont fait l'objet d'une

  4   attaque."

  5   Donc vous comprenez, n'est-ce pas, Colonel, que dans l'utilisation de

  6   l'artillerie contre les cibles militaires lorsque la population civile

  7   n'est pas ciblée de manière délibérée, que l'on peut prendre en

  8   considération la possibilité que ceci ait pour résultat des pertes civiles.

  9   Mais tant que ces pertes et dégâts ne sont pas excessifs par rapport à

 10   l'avantage militaire, ce type d'attaque d'artillerie est permissible, est

 11   permissible selon la loi relative aux conflits armés, n'est-ce pas ?

 12   R.  J'ai vu seulement un document américain qui fait référence à la loi

 13   portant sur le conflit armé. Je n'ai pas vu la loi elle-même. Et dans ce

 14   contexte, ce que vous venez de dire est très important, à savoir qu'il ne

 15   faut pas que ceci soit excessif. C'est la raison pour laquelle notre

 16   explication, donc explication de nous aux Pays-Bas est que nous évitions

 17   d'utiliser l'artillerie si nous nous attendons aux dégâts ou aux pertes du

 18   côté civil, surtout si la valeur de cette cible militaire est aussi peu

 19   élevée que ça ne présente pas d'intérêt d'aller attaquer cette cible, et

 20   surtout étant donné que rien ne peut être atteint avec l'artillerie.

 21   Donc, je ne peux pas toujours répéter ce que je dis et prendre tous

 22   les aspects en considération, c'est-à-dire il faut prendre tous les aspects

 23   en considération. Et nous considérons que lorsqu'il est possible de

 24   provoquer des pertes civiles, il ne faut pas utiliser l'artillerie.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo.

 26   M. RUSSO : [interprétation] Juste pour corriger une partie de la

 27   traduction, à la page 67, ligne 17, le mot "réussi." Je pense que Me Kehoe

 28   voulait dire "dégâts qui ne sont pas excessifs," et non pas "réussi."

Page 14525

  1   M. KEHOE : [interprétation] Effectivement. Merci, Monsieur.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. C'est comme cela que je l'ai

  3   compris, moi aussi.

  4   Poursuivez, s'il vous plaît.

  5   M. KEHOE : [interprétation]

  6   Q.  Dans votre rapport, vous êtes catégorique au sujet de l'utilisation de

  7   l'artillerie, alors qu'il est question plutôt de la proportionnalité,

  8   n'est-ce pas ?

  9   R.  C'est la question de la proportionnalité, effectivement.

 10   Q.  C'est quoi, la proportionnalité, s'il vous plaît ? Si je peux vous

 11   demander de vous pencher sur votre rapport, vous parlez de la

 12   proportionnalité dans la liste des facteurs à prendre en considération à la

 13   page 5 de votre rapport, ou plutôt 6 de votre rapport, 6 d [comme

 14   interprété] et au numéro 7, l'application du principe de proportionnalité ?

 15   Qu'est-ce que ceci représente, Monsieur ?

 16   R.  La proportionnalité à mon avis veut dire que lorsque vous attaquez une

 17   certaine cible avec quelques moyens militaires que vous avez à votre

 18   disposition, que la valeur de cette cible doit être telle que l'utilisation

 19   de la violence est permise, et que les dégâts sont tenus à un niveau

 20   minimum.

 21   Q.  Et dans une situation dans laquelle les cibles militaires dans une zone

 22   civile se présentent, la question qu'un commandant militaire doit se poser

 23   est la question de savoir si cette cible, qui est peut-être dans une zone

 24   civile, si elle provoquera -- s'il y aura des pertes de vie et dégâts aux

 25   possessions qui ne sont pas excessifs par rapport à l'avantage militaire,

 26   n'est-ce pas ? C'est comme ça que l'on mesure les pour et les contre,

 27   n'est-ce pas ?

 28   R.  Je ne l'ai jamais nié. Je suis d'accord avec vous.

Page 14526

  1   Q.  Donc, lorsque l'on applique le principe de proportionnalité, que le

  2   commandant prend la décision de tirer contre une zone civile, la décision

  3   n'est pas en soi illégale, même s'il y a des dégâts collatéraux. Le

  4   problème se pose seulement si les dégâts provoqués au sein de la population

  5   civile sont excessifs par rapport à l'avantage militaire obtenu, n'est-ce

  6   pas ?

  7   R.  Si mes souvenirs sont bons, lorsque les dégâts sont excessifs ça

  8   devient illégal.

  9   Q.  Exactement. Si les dégâts sont excessifs par rapport à l'avantage

 10   militaire ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Et c'est la décision qu'un commandant militaire doit prendre sur la

 13   base de toute une gamme de circonstances dans le théâtre des combats,

 14   n'est-ce pas ?

 15   R.  Je ne conteste pas cela. C'est tout à fait exact, oui. C'est tout à

 16   fait exact. Mais aussi il faut savoir que la décision prise par le

 17   commandant doit également se fonder sur les règles d'ouverture de feu qui

 18   s'appliquent dans l'opération. Donc, il ne peut jamais faire comme bon lui

 19   semble. C'est lui qui prend la décision, et il a la responsabilité. Je

 20   comprends qu'il est très difficile pour les commandants sur le terrain

 21   d'appliquer ces règles d'ouverture du feu. Et ils doivent prendre en

 22   considération le fait que lorsque l'on utilise la violence, lorsqu'on a

 23   recours à la violence, il faut le faire de manière qui permettra d'éviter

 24   les dégâts aux possessions civiles. C'est le contexte des dégâts

 25   collatéraux de 500 mètres en Afghanistan.

 26   Q.  Et cette règle d'ouverture du feu que vous venez de décrire est une

 27   règle qui fait partie de la loi portant sur le conflit armé et qui est

 28   applicable ?

Page 14527

  1   R.  Oui, je pense que vous avez raison.

  2   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que nous

  3   pourrions procéder à une pause, mais je souhaite d'abord proposer le

  4   versement au dossier de la pièce 1D65-0418 [comme interprété]. Je souhaite

  5   verser au dossier ce document.

  6   M. RUSSO : [interprétation] Je demanderais d'avoir le même temps pour

  7   choisir les portions additionnelles supplémentaires.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Donc, il n'y a pas d'objection,

  9   mais vous demandez éventuellement d'ajouter quelque chose.

 10   M. RUSSO : [interprétation] Oui.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier d'audience.

 12   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D1252.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D1952 est versée au dossier.

 14   Nous allons procéder à une pause, et nous allons reprendre notre travail à

 15   6 heures.

 16   --- L'audience est suspendue à 17 heures 38.

 17   --- L'audience est reprise à 18 heures 03.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Maître Kehoe.

 19   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 20   Q.  Colonel, avez-vous eu la possibilité lors de la pause de trouver dans

 21   votre manuel la phrase suivante :

 22   "Les pièces d'artillerie ne peuvent être utilisées que lorsqu'il y a

 23   une distance sûre entre l'impact escompté et la population civile."

 24   Est-ce que vous avez trouvé cette phrase ?

 25   R.  Non, cette phrase précise ne se trouve pas dans le manuel.

 26   Q.  Alors, nous allons reprendre votre rapport, si vous n'y voyez pas

 27   d'inconvénient, et il s'agit de la pièce P1259, page 6. Il s'agit du

 28   paragraphe 6 (b)(ii), juste après la mise en application de la

Page 14528

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 14529

  1   proportionnalité. Je pense qu'il va falloir que vous tourniez quatre pages.

  2   Colonel, d'après votre énumération des facteurs qui se terminent par

  3   la règle de la proportionnalité ou du principe de la proportionnalité, vous

  4   avez parlé du choix des pièces.

  5   M. KEHOE : [interprétation] Voilà. Vous trouvez cela ?

  6   Q.  Vous faites remarquer au (ii) ce qui suit : Lorsque ces aspects

  7   ainsi que d'autres aspects ont été pris en considération, la meilleure

  8   cible pour l'attaque sera désignée ou choisie.

  9   Nous allons nous concentrer sur cela. Vous conviendrez avec moi que

 10   si vous prenez en considération les ressources d'un pays, les meilleurs

 11   atouts du pays seront différents. Si vous prenez les Etats-Unis, les

 12   meilleurs atouts des Etats-Unis sont différents des meilleures ressources

 13   ou des meilleurs atouts de la Croatie. Je ne sais pas. Prenons un autre

 14   pays. Je ne sais pas. Regardez, par exemple. Même pour les Israéliens,

 15   peut-être que dans leur cas les meilleurs atouts sont différents.

 16   R.  Oui. 

 17   Q.  Et avec l'évolution de la technologie, les meilleures ressources ou les

 18   ressources changent ?

 19   R.  Pas toujours.

 20   Q.  Parfois cela devient plus sophistiqué, quand même ?

 21   R.  [aucune interprétation]

 22   Q.  Si vous avez un commandant raisonnable qui doit prendre une décision à

 23   propos des meilleurs atouts, ce commandant qui est raisonnable doit prendre

 24   une décision pragmatique en se fondant sur les ressources et les atouts

 25   dont lui dispose, n'est-ce pas exact ?

 26   R.  Oui, c'est exact.

 27   Q.  Alors, nous allons poursuivre.

 28   R.  Je m'excuse de vous interrompre --

Page 14530

  1   Q.  Non, non, Colonel. Non, non, si vous voulez étoffer votre propos,

  2   n'hésitez absolument pas.

  3   R.  Vous avez tout à fait raison. Bien sûr que cela dépend des ressources

  4   qu'il a à sa disposition pour cette action, mais il peut également décider

  5   de n'utiliser aucune ressource du tout, et là nous revenons au principe de

  6   la proportionnalité, au principe des dégâts excessifs et à la valeur d'une

  7   cible. Donc parfois, la meilleure décision dans certains cas est de

  8   n'absolument pas utiliser la violence.

  9   Q.  Non, vous avez tout à fait raison. Puisque nous revenons à cette

 10   question de la proportionnalité, il s'agit de voir si les dégâts ne vont

 11   pas être trop excessifs par rapport à l'avantage militaire obtenu ?

 12   R.  C'est tout à fait exact.

 13   Q.  Bien.

 14   M. KEHOE : [interprétation] Je vous demande juste une petite seconde.

 15   Monsieur le Président, Me Misetic vient de me dire quelque chose.

 16   Page 71, ligne 11, j'avais demandé :

 17   "Est-ce que vous avez trouvé cela dans le manuel ?" La réponse était

 18   : "Cette phrase précise ne se trouve pas dans le manuel," mais on a

 19   l'impression que c'est toujours ma question. Cela ne figure pas comme

 20   réponse à ma question. Alors peut-être que cela pourra être rectifié par la

 21   suite, mais je voulais juste le mentionner.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je suis d'accord,

 23   effectivement, la question était : "Est-ce que vous l'avez trouvée, cette

 24   phrase, dans le manuel ?" La réponse a été comme suit : "Cette phrase

 25   précise ne se trouve pas dans le manuel."

 26   Vous savez, ce genre d'erreur pourra peut-être être expliqué par le

 27   fait que vous ne ménagez pas des temps d'arrêt entre les questions et les

 28   réponses. Ne l'oubliez pas.

Page 14531

  1   Poursuivez.

  2   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  3   Je souhaiterais maintenant revenir sur cette comparaison de

  4   règlements. Cela figure dans votre rapport. Pièce D1251. Là, il s'agit

  5   encore de l'annexe A de votre rapport, page 49, D1251. Vous avez un titre :

  6   "Evaluation des dégâts."

  7   Vous avez pris cela du manuel au paragraphe 0252, et d'après le

  8   rapport, vous avez ajouté ce que j'ai surligné en violet dans la colonne

  9   droite lorsque vous parlez justement de l'évaluation des dégâts :

 10   "Il se peut qu'il soit clair que l'évaluation d'une attaque physique

 11   effectuée avec des munitions mortelles nocives pourra être faite de façon

 12   plus facile par comparaison à une situation où il n'y a pas d'armes

 13   mortelles qui ont été utilisées. L'évaluation des dégâts pendant une

 14   bataille, par conséquent, porte sur l'observation des effets ou des

 15   conséquences qui ont été obtenus et le contrôle pour savoir si les effets

 16   obtenus sont les effets que l'on souhaitait obtenir. Des actions peuvent

 17   avoir des effets qu'on avait l'intention d'obtenir, mais les commandants

 18   devront prendre en considération le fait que chaque action aura toujours

 19   des effets à long terme qui ne sont pas intentionnels également."

 20   De quoi parlez-vous, très franchement ? Est-ce que vous parlez d'effets

 21   psychologiques, par exemple ?

 22   R.  C'est l'une des conséquences auxquelles je fais référence. Mais je ne

 23   pense pas seulement à cela. Je pense aux dégâts à l'infrastructure, à

 24   toutes les conséquences lorsque vous utilisez des armes, des armes

 25   mortelles ou qui peuvent donner la mort. Parfois, vous pouvez utiliser

 26   l'artillerie tout simplement pour effrayer les gens. Mais il faut savoir

 27   que vous pouvez utiliser des moyens militaires ou un système d'armement

 28   lors d'une opération. La raison pour laquelle cela ne figure pas dans le

Page 14532

  1   règlement militaire, il ne faut pas oublier les nouveaux règlements que

  2   nous sommes en train de rédiger à l'heure actuelle, mais je dirais que nous

  3   décrivons une opération.

  4   Etant donné que le bureau du Procureur m'a demandé de décrire l'appui

  5   feu et l'utilisation de cet appui feu, je ne me suis pas limité à répéter

  6   tout simplement ce qui figurait dans le règlement. J'ai également fait

  7   référence à certains développements. Il se peut que vous connaissiez le

  8   terme militaire, l'approche retenue en prenant en considération les effets

  9   ou les conséquences d'une opération. C'est un concept des Etats-Unis. C'est

 10   les Etats-Unis qui ont commencé à penser à cela. Cela dépasse justement,

 11   mais de loin, les conséquences physiques que l'on peut constater après une

 12   attaque physique. C'est ce que j'ai essayé d'expliquer ici. J'ai essayé en

 13   tout cas d'expliquer en quelques phrases qu'il y a les effets et les

 14   incidences et les conséquences d'une action, mais il y a ce que l'on

 15   escomptait. Ce que l'on escomptait pas, il y a les conséquences à très long

 16   terme. Je pourrais vous donner une liste d'effets à long terme.

 17   Ce n'est pas seulement valable pour les Pays-Bas ce que je dis. C'est

 18   une doctrine que l'on retrouve au sein de l'OTAN. Alors je sais, Monsieur

 19   le Président, que ma réponse est un peu longue, mais je dois quand même

 20   dire tout cela, parce que lorsque l'on pense aux conséquences, c'est

 21   crucial. C'est essentiel pour une opération, et cela est à prendre en

 22   considération lorsque l'on monte une opération. Parce que ce qui est très,

 23   très difficile, c'est ce qu'on appelle les effets ou les conséquences non

 24   létaux.

 25   Ça, c'est les conséquences psychologiques pour la population, mais ce

 26   sont des conséquences également pour l'infrastructure. Ce sont des

 27   conséquences et des effets que l'on peut voir des années après. Donc voilà

 28   ce que j'ai essayé de dire ici. Cela ne se trouve pas dans le document

Page 14533

  1   original, certes, mais il y a eu toute une évolution que l'on prend en

  2   considération. Maintenant, vous aurez peut-être entendu parler de ce

  3   concept "opérations d'information." C'est un élément extrêmement important

  4   à l'heure actuelle dans nos opérations, parce que l'on essaie d'utiliser

  5   des moyens non létaux pour pouvoir terminer nos opérations, pour essayer de

  6   nous écarter le plus possible des armes mortelles. En fait, c'est ce que

  7   j'indique dans le rapport pour essayer d'expliquer qu'il y a d'autre chose

  8   hormis les pièces d'artillerie.

  9    Q.  Je m'intéresse à cela, parce que ce qui m'intéresse c'est votre

 10   description de ce qui se passe et de ce qui va être publié dans le cadre de

 11   la doctrine néerlandaise actuelle.

 12   R.  C'est pas seulement la doctrine néerlandais actuelle. C'est une

 13   doctrine internationale.

 14   Q.  Mais il s'agit d'une doctrine, n'est-ce pas ? Cela ne se trouve pas

 15   dans la loi ou la législation -- ou le droit, plutôt, relatif au conflit

 16   armé ?

 17   R.  Oui, c'est une doctrine.

 18   Q.  Nous allons poursuivre la lecture de votre rapport, et j'aimerais que

 19   la page suivante soit affichée à l'écran. Il s'agit de la page 50 du

 20   document D1251.

 21   Nous allons -- je vais être un peu rapide maintenant parce que vous y avez

 22   déjà fait référence de façon indirecte, d'ailleurs, lors de votre

 23   interrogatoire principal. Vous avez expliqué les différentes raisons pour

 24   lesquelles l'artillerie est utilisée. Vous avez un point de vue assez

 25   limité, parce que vous parlez de l'artillerie utilisée pour la destruction

 26   de bâtiments; est-ce exact ?

 27   R.  C'est exact.

 28   Q.  A cet effet, je vais vous demander d'examiner la pièce 5879. C'est

Page 14534

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10   

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 14535

  1   encore un extrait de l'armée du ministère de la Défense des Etats-Unis.

  2   C'est un extrait. Il s'agit de l'appui feu dans les batailles terrestres.

  3   Ce qui m'intéresse, c'est surtout la partie où on parle des

  4   destructions.

  5   Je voudrais que l'on parle surtout dans le contexte de l'opération

  6   Tempête, vu ce que vous avez avancé hier et même aujourd'hui.

  7   Ici, on peut lire que :

  8   "Au cours de l'attaque, il s'agit de provoquer autant de dégâts. On

  9   s'attend à ce que les projectiles détruisent les cibles en matériel dur. Si

 10   on doit utiliser beaucoup de munitions pour cela, on ne va pas considérer

 11   cela comme un moyen économique."

 12   Ceci correspond à ce que vous avez dit par rapport à la description

 13   des immeubles, n'est-ce pas, dans l'ex-Yougoslavie ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Mais si on parle de la destruction dans le contexte de l'opération

 16   Tempête, on a une autre situation. Parce que vous saviez que la HV essayait

 17   de libérer la Krajina et de la réintégrer à la République de Croatie ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Donc, il n'y avait pas vraiment de raison logique pour l'armée croate

 20   de détruire ces bâtiments si la République de Croatie avait l'intention de

 21   réintégrer ces territoires et utiliser à nouveau ces bâtiments ?

 22   R.  Oui.

 23   M. KEHOE : [interprétation] Je vais demander que la pièce 65 ter 5879 soit

 24   versée au dossier.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo.

 26   M. RUSSO : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas-là, Monsieur le Greffier.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D1253.

Page 14536

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui vient d'être versée au dossier.

  2   M. KEHOE : [interprétation] Je vais demander maintenant que l'on revienne

  3   sur la pièce D1251, et c'est là où on parle du feu d'interdiction.

  4   Q.  Je ne veux pas parler de tous les aspects de cela parce que dans votre

  5   rapport ce que vous faites souvent c'est de suivre ce qui est écrit dans

  6   les manuels. Ce que je vais faire, c'est surtout de me concentrer sur les

  7   parties que vous avez modifiées par rapport à ce qui est écrit dans le

  8   manuel. Par exemple, en ce qui concerne la catégorie d'interdiction, cela

  9   relève de ces paragraphes modifiés. C'est cela qui m'intéresse maintenant.   

 10   M. KEHOE : [interprétation] Je le vois.

 11   Q.  "Le feu d'interdiction, il s'agit du feu tiré sur une cible ou une zone

 12   qui a pour but d'empêcher l'ennemi d'utiliser ce secteur" --

 13   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi, il faut tourner la page, là.

 14   Q.  Donc je vais relire cela :

 15   "Le feu d'interdiction qui est tiré sur une cible ou une zone avait

 16   pour but d'empêcher l'ennemi d'utiliser cette zone ou bien cette

 17   installation. Il peut y avoir des mines qui -- on peut utiliser les mines à

 18   cet effet."

 19   Donc quand on parle de ce feu d'interdiction, il n'y a rien ici

 20   contraire aux lois qui régissent les conflits armés. Donc c'est tout à fait

 21   légal que d'essayer d'empêcher l'ennemi d'utiliser un

 22   terrain ?

 23   R.  Oui. Pour l'instant, tout va bien. Je n'ai jamais dit qu'il ne fallait

 24   pas utiliser le feu d'interdiction.

 25   Q.  "On peut utiliser très souvent quand on tire sur la population civile,

 26   on peut se rappeler dans le conflit des Balkans d'une attaque illégale sur

 27   des points d'eau et sur les marchés."

 28   Et là, Monsieur, il faut dire que c'est quelque chose qui ne se

Page 14537

  1   trouve pas du tout dans les manuels. C'est la situation à Sarajevo qui vous

  2   a poussé à écrire cela ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Cette expérience de Sarajevo, cette situation, elle était très

  5   différente de ce qui s'est passé pendant l'opération Tempête le 4 et le 5

  6   août 1995.

  7   M. RUSSO : [interprétation] Objection. La question doit être plus précise

  8   et il faudrait demander ce qui était exact différent.

  9   M. KEHOE : [interprétation] Je suis tout à fait d'accord. La question

 10   n'était vraiment pas bonne.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, essayez de faire une meilleure

 12   question alors, de poser une meilleure question.

 13   M. KEHOE : [interprétation]

 14   Q.  Vous avez travaillé à Sarajevo et ce que vous avez expérimenté, ce que

 15   vous avez vécu, c'était les tirs incessants quotidiens par les Serbes sur

 16   les civils de Sarajevo, sur les cibles civiles, et l'armée n'est jamais

 17   entrée dans Sarajevo pour essayer de prendre la ville, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Donc ceci était vraiment différent de ce que nous avons vu pendant

 20   l'opération Tempête, où nous avons tout d'abord une attaque d'artillerie,

 21   ensuite intervient l'armée croate; et ils essayent de reconquérir cette

 22   terre. Ils veulent qu'elle soit réintégrée à la Croatie.

 23   R.  Si cela ne vous dérange pas, je ne saurais être d'accord avec vous,

 24   parce que ce serait trop facile d'arriver à la conclusion à laquelle vous

 25   êtes arrivé. Peut-être qu'il y a quelques similarités quand même de ces

 26   deux situations. Même si Knin n'a pas fait l'objet d'un siège des trois

 27   années et demie, Knin devait être libérée par l'armée du HV et rien -- ce

 28   qu'on peut dire c'est que l'utilisation de ce type de feu est possible dans

Page 14538

  1   toutes les manœuvres.

  2   Donc la comparaison entre les deux villes que vous avez dit est

  3   impossible parce que la situation est complètement différente. Mais cela ne

  4   veut pas dire que vous avez le droit d'utiliser l'artillerie en tirant sur

  5   des civils.

  6   Vous avez parlé de l'entrée des soldats après les feux d'artillerie.

  7   Et on ne peut pas parler de cela parce qu'il y a eu les tirs d'artillerie.

  8   Ensuite on ne sait pas du tout ce qu'ils voulaient obtenir par ces feux

  9   d'artillerie, parce que moi je n'en ai aucune idée.

 10   Ensuite la prise de la ville elle-même s'est produite beaucoup de

 11   temps après l'attaque initiale. Et moi, j'ai déjà expliqué que la

 12   combinaison du feu d'artillerie et de l'entrée tardive six heures plus tard

 13   des troupes croates dans la ville démontrent qu'il n'y avait pas de valeurs

 14   militaires de ces cibles dans la ville. Et je ne vois absolument pas quel

 15   est le lien entre l'attaque d'artillerie et le fait que les troupes sont

 16   entrées dans la ville. En tant que commandant militaire, ce que j'aurais

 17   fait, c'était de faire l'économie de l'artillerie, de mes munitions pour

 18   l'utiliser quand j'en ai vraiment besoin.

 19   Q.  Vous ne pouvez de toute façon répondre que sur la base des informations

 20   que vous possédez, et apparemment on ne vous a pas donné toutes les

 21   informations.

 22   Est-ce que vous êtes d'accord ou pas d'accord pour dire que l'attaque

 23   d'artillerie sur Knin a été faite de concert avec l'entrée des soldats

 24   croates dans la ville ?

 25   R.  Au sens très très large du terme, oui, on peut dire -- enfin, d'après

 26   les informations que j'ai reçues, l'attaque d'artillerie était inscrite

 27   dans l'opération Tempête. Mais on ne va pas parler vraiment de la façon

 28   dont cette attaque s'est faite, cette utilisation s'est vraiment faite,

Page 14539

  1   parce qu'on va revenir sur l'ordre opérationnel. Et moi, je n'ai aucune

  2   information quant à ce qu'on voulait dire quand on disait, tirez sur la

  3   ville de Knin, pilonnez la ville de Knin. Et c'est à cause de cela que j'ai

  4   écrit ce que j'ai écrit dans mon rapport.

  5   Q.  Très bien. Maintenant nous allons parler d'une autre partie de votre

  6   rapport, et c'est le feu d'épuisement, le feu incessant. On peut lire :

  7   "Le feu incessant a pour but de créer la confusion, le chaos dans les

  8   troupes ennemies, d'empêcher les mouvements et de nuire au moral des

  9   troupes."

 10   Donc on peut utiliser les feux d'artillerie pour aboutir à cela.

 11   C'est quelque chose de complètement légitime. C'est une utilisation

 12   complètement légitime.

 13   R.  Oui. Et je n'ai jamais dit que ce n'est pas le cas.

 14   Q.  Vu que -- enfin, à condition, bien sûr, que l'on utilise la règle de

 15   proportionnalité.

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Et ensuite vous ajoutez :

 18   "Ce type de feu est très utile quand on veut infliger des pertes à la

 19   population civile et la démoraliser. C'est quelque chose d'extrêmement

 20   négatif, ça a un impact très négatif, et ici je parle sur la base de mon

 21   expérience de l'observateur de l'ONU à Sarajevo."

 22   Donc à nouveau, vous comparez ces feux incessants sur Sarajevo avec les

 23   feux qui ont été tirés pour reprendre la Krajina, n'est-ce pas ?

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe, je pense que vous avez

 25   dit quelque chose, ou je ne sais pas si cela -- en tout cas, vous avez

 26   parlé très rapidement et je ne sais pas si c'est quelque chose qui a été

 27   traduit par les interprètes.

 28   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

Page 14540

  1   Q.  Bien, vu les circonstances et les informations qu'on vous a fournies,

  2   ces feux incessants utilisés contre Knin pouvaient être utilisés contre les

  3   militaires pour créer une situation chaotique pour empêcher leur liberté,

  4   leurs possibilités de déplacement et pour nuire et saper leur moral; est-ce

  5   exact ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Et vous pensez que c'est quelque chose qui est inacceptable uniquement

  8   si c'est utilisé contre la population civile ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Et dans ce contexte, quand un commandant prend la décision de tirer sur

 11   les cibles militaires pour qu'il n'y ait plus d'activité du côté des

 12   militaires, à nouveau évidemment qu'il faut qu'il soit guidé par la règle

 13   de proportionnalité quand il s'agit de prendre la décision d'utiliser ces

 14   feux ou non. Mais si --

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Et si son intention est d'empêcher l'ennemi de circuler, de

 17   s'approvisionner ou d'agir tout simplement et aussi saper le moral des

 18   troupes de l'ennemi, dans ce cas-là, cette utilisation de l'artillerie

 19   devient complètement légitime, n'est-ce pas ?

 20   R.  Je ne le nie pas.

 21   Q.  Maintenant je vais vous demander de regarder votre rapport.

 22   R.  Est-ce que je peux vous poser une question ?

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous souhaitez ajouter quelque chose,

 24   vous pouvez le faire, mais normalement on ne renverse pas les rôles. Ce

 25   n'est pas vous qui posez les questions. Mais si vous voulez ajouter quelque

 26   chose, ajouter à la réponse que vous venez de donner, vous pouvez le faire.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai un doute. Je vais peut-être me répéter en

 28   disant cela. Mais je pense que la façon dont la question est posée montre

Page 14541

  1   qu'il est concentré sur l'objectif militaire de ce tir. Mais moi, je n'ai

  2   pas encore compris quel aurait été l'effet militaire d'un ordre donné par

  3   le commandant opérationnel des troupes croates quand il donne l'ordre de

  4   pilonner la ville. Parce que quand vous lisez dans l'ordre opérationnel,

  5   pilonnez la ville de Knin, sur la base de cela, j'ai écrit ce que j'ai

  6   écrit.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suis tout à fait d'accord avec vous

  8   parce que ce que vous venez de dire effectivement, vous l'avez déjà dit.

  9   Mais nous écoutons avec beaucoup d'attention vos réponses et nous prenons

 10   note de tout ce que vous dites. Puis, ne vous préoccupez pas des objectifs

 11   de M. Kehoe parce que M. Kehoe a son rôle dans ce prétoire. C'est un

 12   conseil de la Défense.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous comprends.

 14   M. KEHOE : [interprétation]

 15   Q.  Maintenant je voudrais que l'on regarde la page 56.

 16   Donc on parle de la mission de l'artillerie et vous dites quelque

 17   chose d'assez général à ce sujet.

 18   "La destruction, la neutralisation, suppression de l'ennemi en

 19   utilisant un feu indirect d'un canon ou bien des systèmes de missiles qui

 20   font partie intégrante du système d'appui feu, synchronisés avec les

 21   opérations des unités de manœuvres."

 22   On va parler des informations qu'on aurait pu vous donner de la part du

 23   bureau du Procureur et qu'on n'a pas fait. Mais ce qui m'intéresse surtout,

 24   c'est la phrase que vous avez ajoutée à savoir :  

 25   "Au cours des quelques années récentes, cette mission s'est vue dotée

 26   de quelques éléments supplémentaires, donc l'utilisation des armes

 27   meurtrières pour aboutir à des effets non meurtriers. Mais par rapport à ce

 28   rapport expert, l'artillerie aurait pu être utilisée pour appuyer les

Page 14542

  1   opérations militaires qui finalement visaient les cibles civiles."

  2   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

  3   M. KEHOE : [aucune interprétation]

  4   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation] 

  5   M. KEHOE : [interprétation]

  6   Q.  Mon Colonel, est-ce que le bureau du Procureur vous a dit que la

  7   HV dans l'opération Tempête a utilisé les instruments militaires dans le

  8   cadre d'une opération militaire qui avait pour objectif, pour cibles exprès

  9   la population civiles ?

 10   R.  Non.

 11   Q.  Alors ce que vous nous racontez ici c'est quelque chose que vous basez

 12   sur votre expérience de Sarajevo ?

 13   R.  J'ai fait une déclaration générale. Ça n'a rien à voir avec Knin. J'ai

 14   juste dit qu'au cours des quelques années récentes, l'utilisation de

 15   l'artillerie a changé, parce que ces armes ont été utilisées plus pour

 16   mettre en garde, faire peur, et cetera. Alors que dans le passé,

 17   l'artillerie était utilisée exclusivement sous forme d'appui aux opérations

 18   militaires. Je ne suis pas le seul à le penser. Evidemment que j'ai basé

 19   cela un peu sur ce que j'ai vu à Sarajevo. Evidemment que je ne peux pas le

 20   nier, j'y ai passé plusieurs années de ma vie, cela m'a maté. Mais cela

 21   aussi vient de mon expérience des opérations militaires en cours, récentes

 22   donc, où on a vu que de telles armes ont été utilisées sur des cibles

 23   civiles. On le voyait tous les jours à la télé.

 24   Q.  Mon Colonel, vu les informations qui vous ont été données par le bureau

 25   du Procureur, est-ce qu'ils vous ont donné une quelconque information, un

 26   quelconque document qui aurait démontré que cette artillerie était utilisée

 27   pour autre chose qu'appuyer des opérations militaires ?

 28   R.  Toute l'information qu'ils m'ont donnée, je vais être franc, la

Page 14543

  1   première fois qui m'a vraiment frappé, c'était de lire cette phrase,

  2   pilonnez la ville de Knin, sans aucune explication. Donc ce n'est pas

  3   quelque chose qui m'a été donné par le bureau du Procureur. Moi, je suis

  4   arrivé aux conclusions auxquelles je suis arrivé tout seul. Et nous avons

  5   travaillé sur les documents qui m'ont été présentés et on s'est concentré

  6   surtout sur les points suivants à savoir quelles sont vraiment les cibles

  7   militaires et quelles sont les cibles moins militaires ou civiles.

  8   Donc ce qui est écrit en bleu dans votre document, c'est basé sur ces

  9   informations.

 10   Q.  C'est vous qui le dites Monsieur. Ce n'est pas basé sur une information

 11   particulière, pas sur un document que vous avez reçu, qu'on vous a

 12   communiqué ?

 13   R.  C'est basé sur le document qu'on m'a communiqué. C'est le bureau du

 14   Procureur qui m'a donné ce document. On m'a posé des questions, on m'a

 15   demandé de donner mon opinion là-dessus. Et moi, j'ai écrit un rapport et

 16   un addendum sur la base de ces informations. Je ne peux que répéter cela. A

 17   moins qu'il y ait une très bonne explication de cette phrase à savoir,

 18   pilonnage de la ville de Knin, je vais m'en tenir à ce que j'ai dit jusqu'à

 19   présent. Voilà, je ne veux pas aller plus loin.

 20   Q.  Colonel, vous aurez beaucoup d'opportunités de réviser votre position.

 21   Et je souhaite maintenant attirer votre attention sur la logique et la

 22   formulation du plan d'attaque de Knin dans ces circonstances et nous allons

 23   commencer par quelque chose qui est assez simple. Si on peut maintenant

 24   nous pencher sur D1248, il s'agit du manuel des opérations de combat

 25   néerlandais dont il a été question tout à l'heure. Vous avez dit que ce

 26   document était en train d'être mis à jour. Et nous allons examiner

 27   maintenant la page…

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous devons attendre un peu pour que le

Page 14544

  1   sténotypiste puisse reprendre son travail. Il n'y aura pas de compte rendu

  2   d'audience. Si même les ordinateurs tombent en panne en raison de notre

  3   rapidité de discours, il va falloir que l'on fasse plus attention.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous avez besoin de l'aide pour

  5   résoudre ce problème technique, veuillez nous le faire savoir, Madame la

  6   Sténotypiste.

  7   M. KEHOE : [interprétation] Je sais que ce n'est pas maintenant dans le

  8   compte rendu d'audience, mais si vous souhaitez faire une pause ou lever

  9   l'audience, nous pouvons le faire peut-être. Il nous reste 15 minutes.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Sans doute, mais en même temps si ceci

 11   peut être réglé d'ici trois, quatre minutes, nous allons attendre, sinon

 12   nous allons avoir -- enfin, lever l'audience sans que ce soit consigné au

 13   compte rendu d'audience.

 14   M. KEHOE : [interprétation] Nous n'aurons pas d'objection à cela. Je n'ai

 15   pad d'objection à ce que l'on lève l'audience pour que ce soit consigné au

 16   compte rendu d'audience, et j'ai l'impression que je ne suis pas le seul à

 17   me sentir ainsi.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 19   M. HEDARALY : [interprétation] Monsieur le Président, je sais que ceci ne

 20   sera pas dans le compte rendu d'audience, mais si on a un petit peu de

 21   temps par rapport à ce que la Chambre a dit plus tôt aujourd'hui, peut-être

 22   nous pourrons avoir une séance consacrée aux questions d'intendance après

 23   la déposition du témoin mardi soir.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais la question a été posée et

 25   consignée au compte rendu d'audience, donc il faudrait aussi consigner la

 26   réponse.

 27   M. HEDARALY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je pensais qu'il

 28   était plus pratique de travailler ainsi. On me dit que l'enregistrement

Page 14545

  1   audio continue à se faire, donc finalement tout sera quand même consigné au

  2   compte rendu d'audience.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'ici une minute nous saurons s'il y a

  4   la possibilité de régler cela.

  5   [Problème technique]

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ça a été réglé. Merci beaucoup. Merci

  7   beaucoup des efforts que tout le monde a déployé pour que le système soit

  8   réglé. Poursuivez, Maître Kehoe.

  9   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 10   Q.  Si l'on se penche maintenant sur ce document et si l'on se penche de

 11   nouveau sur le manuel des opérations de combat pour l'armée royale

 12   néerlandaise et si l'on examine la page 4, brièvement je souhaite que l'on

 13   parle des cibles militaires telles qu'elles ont été décrites dans -- non --

 14   le deuxième paragraphe, oui.

 15   Dans le deuxième paragraphe, la deuxième phrase complète, il y est

 16   dit que : "Les cibles militaires sont les installations qui, en raison de

 17   leur nature, emplacement, finalité ou utilisation, contribuent de manière

 18   active aux opérations militaires et dont la destruction complète ou

 19   partiale dans la capture, ou le fait de les rendre non opérationnel dans

 20   les circonstances existantes présenterait un avantage militaire clair."

 21   Si j'ai bien compris, il s'agit là d'une définition tout à fait

 22   claire des cible militaires, et la seule partie problématique concerne les

 23   situations dans lesquelles ces cibles sont dans des zones civiles, ce dont

 24   on a parlé d'ailleurs.

 25   Et dans ce cas particulier donc, une décision doit être prise par

 26   rapport à l'emplacement des cibles militaires. Là la décision avait été

 27   prise par l'armée de la République serbe de Krajina, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui.

Page 14546

  1   Q.  Et lorsque l'on prend cela en considération - et je ne vais pas parler

  2   maintenant de la question de la proportionnalité et de l'idée des dégâts

  3   excessifs par rapport à l'avantage militaire concret, parmi les points que

  4   vous avez abordés précédemment, et je pense que c'était lors de

  5   l'interrogatoire principal, bien, c'était la question de la possibilité de

  6   mener un assaut frontal ou de faire déplacer les troupes de la part de la

  7   HV dans Knin. Et M. Russo vous a montré, je crois, un document qui montrait

  8   1 900 membres de la

  9   4e Brigade des Gardes.

 10   Vous vous en souvenez ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Bien, lorsqu'un commandant de brigade utilise le principe de

 13   proportionnalité et qu'il prend une décision et qu'il pèse l'importance de

 14   l'objectif militaire contre les dégâts éventuels infligés aux biens civils

 15   ou aux individus civils, il ne prend pas en considération l'idée selon

 16   laquelle il doit accepter un risque augmenté pour ses troupes, n'est-ce pas

 17   ?

 18   R.  Nous ne considérons pas que tel est le cas, car le commandant doit

 19   prendre compte de cela. Je vais clairement l'indiquer. Si vous devez sauver

 20   les vies des civils ou bien sauvez les vies de vos propres soldats, bien,

 21   peut-être que vous devrez prendre une telle décision d'après l'enseignement

 22   donné au commandant. Rien de plus, rien de moins.

 23   Q.  Et ça c'est la doctrine néerlandaise ?

 24   R.  C'est la doctrine néerlandaise. Mais comme je vous ai déjà dit, mon

 25   rapport d'expert se fonde surtout sur la doctrine néerlandaise. Et je fais

 26   partie des forces armées depuis 35 ans.

 27   Q.  Oui, je l'apprécie d'ailleurs, Monsieur. Je l'apprécie. Mais il est

 28   question de la loi sur le conflit armé, et je souhaite que l'on indique

Page 14547

  1   clairement, c'est-à-dire lorsque l'on applique la règle de la

  2   proportionnalité, ça veut dire qu'un commandant raisonnable ne doit pas

  3   prendre en considération en pesant les pour et les contre le risque

  4   augmenté pour ses propres troupes, n'est-ce pas ?

  5   R.  Je ne sais pas. Je ne pense pas qu'il est écrit que le commandant doit

  6   prendre en considération les pertes de ses troupes par rapport aux pertes

  7   civiles. Je ne pense pas.

  8   M. KEHOE : [interprétation] Je vais aborder un sujet assez important.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'il vous faut plus de cinq minutes, il

 10   vaut mieux peut-être lever l'audience d'aujourd'hui.

 11   Monsieur Konings, je vais vous donner les mêmes instructions que

 12   celles que je vous ai déjà données, à savoir vous ne devez pas parler avec

 13   qui que ce soit de votre déposition, que ce soit la déposition jusqu'à

 14   maintenant ou la suite, et nous souhaitons vous revoir ici demain à 9

 15   heures.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Une brève question, si je puis.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne souhaite pas que vous perdiez du temps

 19   mais si j'ai bien compris, vous aurez besoin de moi la semaine prochaine

 20   aussi. Est-ce qu'on peut me donner une idée du temps pour que je puisse

 21   m'organiser en privé et professionnellement.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. J'aurais dû organiser cela avant.

 23   D'après ce que les parties en disent, le plus probablement votre déposition

 24   va se terminer mardi prochain. Cependant, je ne peux pas vous le garantir.

 25   Peut-être ça va être mercredi matin. Si ceci vous pose de gros problèmes.

 26   Oui Maître Misetic.

 27   M. MISETIC : [interprétation] Je pense qu'il n'y a pas d'audience mercredi.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais mardi on travaille toute la

Page 14548

  1   journée ?

  2   M. HEDARALY : [interprétation] Non, c'est vendredi.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, c'est vendredi. Donc peut-être ça

  4   ne sera pas le cas mercredi, mais peut-être jeudi si jamais on ne termine

  5   pas mardi. Si jamais ça vous pose problème, veuillez m'en informer pour

  6   voir ce qu'on peut faire.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Si j'ai bien compris, demain je serai ici

  8   toute la journée, donc il y aura deux audiences.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. Nous allons commencer demain matin,

 10   mais nous n'allons pas travailler dans l'après-midi, ce qui veut dire que

 11   nous allons terminer probablement vers deux heures moins le quart.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] D'accord. Sinon ça aurait pu poser problème.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et lundi et mardi ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Pas de problème.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et jeudi matin, si jamais. On va essayer

 16   d'éviter.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Pas de problème.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup de votre attitude

 19   coopérative.

 20   Et nous allons reprendre notre travail demain, le 16 janvier à 9

 21   heures du matin.

 22   --- L'audience est levée à 18 heures 58 et reprendra le vendredi 16 janvier

 23   2009, à 9 heures 00.

 24  

 25  

 26  

 27  

 28