Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 1er juillet 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 23.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes.

  6   Veuillez nommer l'affaire, Monsieur le Greffier.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour à tous. Il s'agit de l'affaire

  8   IT-06-90-T, le Procureur contre Ante Gotovina et consorts.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 10   Est-ce que la Défense est prête pour appeler son témoin suivant.

 11   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si j'ai bien compris, vous n'avez pas

 13   demandé de mesures de protection.

 14   M. KEHOE : [interprétation] Oui, c'est exact.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Faisons entrer M. Bilic.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Oui. M. Veselko Bilic, effectivement, c'est le

 17   nom du témoin.

 18   Nous allons travailler conformément au 92 ter concernant cette déposition.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous vouliez expliquer comment les

 20   choses vont fonctionner.

 21   M. Waespi.

 22   M. WAESPI : [interprétation] Nous n'avons aucune objection quant à la

 23   requête qui a été présentée hier soir.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. C'est d'ores et déjà

 25   inscrit au procès-verbal.

 26   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Bilic. Est-ce

 28   que vous m'entendez dans une langue que vous comprenez ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Bonjour.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de témoigner, le Règlement de

  3   procédure exige que vous prononciez la déclaration solennelle, à savoir que

  4   vous allez dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  5   Ce texte vous est présenté par l'huissière. J'aimerais que vous

  6   prononciez cette déclaration solennelle à présent.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je jure de dire la vérité, toute la

  8   vérité et rien que la vérité.

  9   LE TÉMOIN: VESELKO BILIC [Assermenté]

 10   [Le témoin répond par l'interprète]

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Veuillez vous asseoir,

 12   Monsieur Bilic.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Avant de commencer, je dois dire que je me

 14   suis rappelé d'un certain nombre de détails entre-temps, et je voulais

 15   simplement vous en faire part.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je comprends qu'il y a un certain

 17   nombre de détails dont vous voulez nous faire part. Vous pourrez le faire

 18   pendant votre audition. Vous allez être entendu par M. Kehoe dans un

 19   premier temps, et vous aurez sans aucun doute l'occasion de nous donner

 20   davantage de détails dont vous n'avez pas encore parlé à la Défense dans

 21   cette affaire.

 22   Veuillez vous asseoir. Ne vous inquiétez pas, vous en aurez l'occasion à un

 23   moment ou un autre.

 24   Maître Kehoe.

 25   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, merci. A l'écoute de ce

 26   qu'il vient de dire, en fait, je me rends compte qu'il a des notes

 27   auxquelles il aimerait faire référence. Je pense que la réponse qu'il nous

 28   a donnée n'était pas exactement celle qui a été finalement traduite.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

  2   Est-ce que vous souhaitiez vous adresser à la Chambre parce que vous

  3   souhaitez nous donner davantage de détails; ou est-ce que vous vouliez

  4   simplement nous dire que vous aviez rédigé un certain nombre d'éléments que

  5   vous souhaiteriez consulter pour répondre aux questions.

  6   Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce qu'il en est ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est à ce moment que je me suis souvenu d'un

  8   certain nombre de détails, parce que je savais que j'allais devoir

  9   témoigner ici. Ces informations ne sont pas évidemment importantes, mais

 10   elles sont importantes à mes yeux. Elles ont trait notamment au début de

 11   tous ces événements en 1991. Ce n'est peut-être pas quelque chose de très

 12   important pour vous, par rapport à ce que j'ai fait concernant l'opération

 13   Tempête.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce que je vous propose, c'est que vous

 15   répondiez dans un premier temps aux questions qui vont vous être posées par

 16   Me Kehoe. Il est tout à fait probable que cela relève des détails que vous

 17   avez notés. Si tel n'est pas le cas, vous aurez probablement l'occasion

 18   d'en parler plus tard. Mais j'aimerais simplement vous rappeler que

 19   l'objectif de cette déposition n'est pas tant ce qui s'est passé en 1991,

 20   même si ça reste pertinent. C'est de répondre aux questions qui vont vous

 21   être posées.

 22   En tout cas, vous allez être entendu par Me Kehoe. Allez-y, Monsieur.

 23   Interrogatoire principal par M. Kehoe : 

 24   Q.  [interprétation] Monsieur, est-ce que vous pouvez nous dire votre nom

 25   pour le compte rendu d'audience, en l'épelant s'il vous plaît ?

 26   R.  Je m'appelle Veselko Bilic.

 27   L'INTERPRÈTE : Peut-on demander au témoin de se rapprocher du micro ?

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Monsieur le Témoin, s'il vous

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  1   plaît, approchez-vous des micros.

  2   R.  Je m'appelle Veselko Bilic. Je suis aussi connu sous le nom de Srecko.

  3   Je suis né en 1957 dans le village de Krkovici. J'habite à l'heure actuelle

  4   à Knin, rue Simunoviceva, au numéro 3.

  5   Q.  Quelques questions préliminaires. Est-ce que vous vous rappelez avoir

  6   rencontré des membres de l'équipe de la Défense le 18 juin 2009, il y a un

  7   peu plus d'une semaine ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Est-ce que vous vous rappelez avoir signé une déclaration ce jour-là ?

 10   R.  Oui.

 11   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais que l'on

 12   fasse apparaître à l'écran la pièce 1D2767.

 13   Q.  Ce document qui apparaît à l'écran, est-ce que vous êtes d'accord pour

 14   dire que c'est le document que vous avez signé le 18 juin 2009, Monsieur

 15   Bilic ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Est-ce que vous avez pu relire ce document avant de venir témoigner

 18   aujourd'hui ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Monsieur Bilic, j'aimerais revenir non pas à hier mais à avant-hier, le

 21   29 juin, est-ce que vous avez pu rencontrer des membres de la Défense dans

 22   l'affaire Gotovina ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Est-ce que vous avez fourni un certain nombre de détails concernant

 25   votre déclaration ?

 26   R.  Oui.

 27   M. KEHOE : [interprétation] Venons-en à la page 2 de ce document,

 28   paragraphe numéro 1.

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  1   Q.  Au moment de l'opération Tempête, vous avez dit que vous n'aviez pas

  2   été mobilisé officiellement avant cette opération Tempête, mais plutôt que

  3   vous étiez allé au point de rencontre de votre propre chef. Est-ce que vous

  4   pouvez confirmer cela ?

  5   M. WAESPI : [interprétation] Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

  7   M. WAESPI : [interprétation] Je pense que c'est une question importante,

  8   cette question de la démobilisation, et ce que je propose, c'est que l'on

  9   pose la question de manière différente.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 11   M. WAESPI : [interprétation] Il faudrait que ce soit le témoin qui réponde

 12   de lui-même, sans qu'on ne lui rafraîchisse la mémoire.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Nous avons une déclaration au titre

 14   du 92 ter. Normalement on présente ces informations après coup. Ce sont des

 15   informations qui nous sont arrivées de façon tardive, et s'il y a des

 16   informations supplémentaires, évidemment elles pourraient servir. Mais s'il

 17   y a d'autres choses en dehors de ce document, j'aurais tendance à être

 18   d'accord avec M. Waespi pour dire que la question devrait être posée de

 19   façon non directrice.

 20   Mais du fait que vous parliez de vos entretiens du 29 juin, et je

 21   suis en train justement de les parcourir…

 22   Oui, effectivement, Monsieur Waespi, je pense qu'on le trouve dans le

 23   premier paragraphe de cette fiche d'informations complémentaires.

 24   Le témoin l'a probablement lu et il a dit qu'il était d'accord, donc ça

 25   n'est pas une question directrice. Sauf si ça fait partie d'une

 26   conversation qui a eu lieu avant-hier avec le témoin, à ce moment-là, toute

 27   cette question de la direction ne s'applique pas.

 28   Donc à mon avis en la matière, étant donné les informations

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  1   supplémentaires qui sont disponibles dans cette fiche, je pense qu'il est

  2   possible de procéder de cette manière. Est-ce que vous souhaitez toujours

  3   que ces questions soient posées de façon moins directrice ?

  4   M. WAESPI : [interprétation] Je vous laisse décider, Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. A ce moment-là, continuez,

  6   Maître Kehoe.

  7   M. KEHOE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'essaierai de

  8   respecter vos craintes, cher confrère.

  9   Q.  Monsieur Bilic, est-ce que vous avez affirmé à la Défense dans

 10   l'affaire Gotovina que vous n'avez pas été mobilisé avant l'opération

 11   Tempête, mais que vous étiez allé à ce point de rencontre, de ralliement,

 12   de votre propre chef ?

 13   R.  Oui, absolument. C'est ce que j'ai déclaré. J'ai été démobilisé en

 14   1995, un peu avant cette opération Tempête. La date, je ne m'en souviens

 15   plus précisément, mais je pense qu'on peut la retrouver dans les documents,

 16   dans les archives. En 1994, j'ai été déclaré invalide de guerre, parce que

 17   j'avais été blessé en 1992. J'étais considéré comme invalide à 60 %. Je ne

 18   me sentais pas bien, et j'avais même pensé à prendre ma retraite.

 19   Q.  Oui, je pense que vous avez répondu à la question.

 20   J'aimerais qu'on avance, qu'on poursuive un petit peu. Est-ce que je

 21   pourrais vous demander encore de vous rapprocher du micro, s'il vous plaît,

 22   pour que les interprètes puissent vous entendre.

 23   M. WAESPI : [interprétation] Je pense que le problème, c'est sa chaise.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, peut-être qu'en réglant sa chaise -

 25   - peut-être si vous vous asseyez un peu plus droit parce que ces chaises

 26   sont un peu --

 27   M. KEHOE : [aucune interprétation]

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous savez, moi aussi, je fais des

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  1   pieds et des mains avec ces chaises. C'est toujours un peu délicat.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pèse un peu lourd. Peut-être que c'est pour

  3   ça.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, mais non.

  5   C'est mieux ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez.

  8   M. KEHOE : [interprétation]

  9   Q.  Lorsque vous êtes allé à ce point de ralliement, est-ce que vous avez

 10   reçu une arme ?

 11   R.  Oui, absolument.

 12   Q.  Est-ce que vous avez rendu cette arme ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Quand l'avez-vous rendue ?

 15   R.  Le 18 août 1995.

 16   Q.  Au paragraphe 1 de votre déclaration, vous dites :

 17   "J'étais membre de la 15e Brigade jusqu'au 18 août 1995."

 18   Est-ce que cela correspond à la date à laquelle vous avez rendu votre arme

 19   ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Hier, est-ce que vous avez de nouveau rencontré la Défense dans

 22   l'affaire Gotovina et est-ce que vous avez parlé de différents points

 23   concernant votre déclaration ?

 24   R.  Oui. Mais je ne me rappelle plus de ce que j'ai dit. Il y a peut-être

 25   des détails qui me sont revenus à l'esprit, mais à mon avis, ce sont des

 26   détails mineurs. Je ne me souviens pas.

 27   Q.  Non, l'idée c'est simplement de vérifier que votre déposition comme

 28   témoin soit aussi précise que possible. C'est ça que nous sommes en train

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  1   de faire.

  2   Au paragraphe 4 de votre déclaration, lorsque vous parlez des villages que

  3   vous avez traversés, vous avez noté --

  4   M. KEHOE : [interprétation] C'est au milieu de la page, Monsieur le

  5   Président.

  6   Q.  Vous avez dit être entré dans le village de Lazanice. Avez-vous dit à

  7   l'équipe de Défense que vous ne saviez plus si c'était Lazanice ou Travice

  8   ?

  9   R.  Oui, absolument, je me souviens avoir dit cela. C'est vrai que ma

 10   mémoire m'a fait défaut.

 11   Q.  En dehors de ces précisions, Monsieur Bilic, cette déposition qui

 12   apparaît à l'écran, est-ce qu'elle correspond précisément à ce que vous

 13   avez dit à l'équipe de Défense dans l'affaire Gotovina le 18 juin 2009 ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Ces informations dont vous nous avez fait part sont précises et

 16   reflètent la vérité, autant que vous puissiez vous en souvenir ?

 17   R.  Oui, absolument. C'est le cas à 100 %. J'ai simplement dit que je

 18   n'allais pas me souvenir de la date de notre arrivée à Kistanje le 6 ou le

 19   7, mais en dehors de cela, tout est vrai. Je n'ai rien à ajouter à cette

 20   déposition.

 21   Q.  Et --

 22   R.  Sauf peut-être le fait qu'on a été trop gentils parce que notre

 23   commandant nous a empêchés d'avancer. On aurait pu faire plus et plus

 24   rapidement.

 25   Q.  Très bien. On y viendra un petit peu plus tard. Je voulais simplement

 26   revenir sur des éléments concernant votre déposition.

 27   Maintenant, si je devais vous reposer ces questions concernant ce

 28   dont il est question dans cette déposition, est-ce que vos réponses

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  1   seraient les mêmes que celles que vous avez faites dans le cadre de cette

  2   déposition ?

  3   R.  Oui, 100 % les mêmes.

  4   M. KEHOE : [interprétation] Nous allons verser cette pièce au dossier,

  5   1D2767.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi.

  7   M. WAESPI : [interprétation] Pas d'objection.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Monsieur le Greffier.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] C'est la pièce D1547.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette pièce a été versée au dossier.

 11   Les informations complémentaires seront-elles versées au dossier ou pas ?

 12   M. KEHOE : [interprétation] Il n'y a pas de traduction, Monsieur le

 13   Président…

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a pas eu de traduction. Donc le

 15   témoin n'a pas pu les lire.

 16   M. KEHOE : [interprétation] C'est exact.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A ce moment-là, je pense que les choses

 18   avancent. 

 19   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Bilic, le public suit cette

 21   audition et le public ne sait pas ce qu'il y a dans votre déclaration. Il

 22   n'y a qu'un résumé de cette déclaration qui sera lu par Me Kehoe. C'est

 23   tout simplement un résumé. Inutile de réagir, de répondre. C'est simplement

 24   un petit résumé pour que le public puisse suivre ce dont il s'agit.

 25   M. KEHOE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 26   M. Bilic a témoigné que lui-même et sa famille étaient des réfugiés de

 27   Krkovic qui était occupé par l'ARSK et qu'ils étaient réfugiés à Vodice. Du

 28   12 octobre 1991 au 13 juin 1992, le témoin a été membre de la 130e [comme

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  1   interprété] Brigade de Sibenik de la HV. Plus tard, en 1992, il a rejoint

  2   les rangs de la 15e Brigade jusqu'à sa démobilisation avant l'opération

  3   Tempête.

  4   Avant l'opération Tempête, le témoin a appris que les membres de la 15e

  5   Garde nationale se réunissaient pour l'opération Tempête, donc il s'est

  6   rendu au point de ralliement avec son uniforme.

  7   Lorsque l'opération Tempête a commencé le 4 août 1995 au matin, son

  8   équipe a été déployée à Velika Glava sur le site du cimetière. Aucune

  9   avancée n'a été faite ce jour-là étant donné la forte résistance de Gracac.

 10   On leur a demandé de revenir à leur position initiale et de relancer

 11   l'attaque le 5 août à midi. Ce jour-là, ils ont avancé vers Kistanje. Il

 12   est arrivé à Kistanje le 6 ou le 7 août. A ce moment-là, les maisons

 13   n'avaient subi aucun dommage.

 14   De Kistanje, le témoin a continué dans la direction d'Ivosevci. A

 15   Ivosevci, ils ont capturé les blessés de l'ARSK et les ont remis aux

 16   médecins. Ils ont aussi capturé une dizaine de personnes qui portaient des

 17   vêtements habillés en civil.

 18   Ensuite, ils ont continué d'avancer pour rejoindre les membres de la

 19   4e Brigade au nord de Knin. Le lendemain, le témoin était à Knin. Il n'y

 20   avait pas de dommages là non plus, sauf une maison en bas du fort. Le

 21   témoin est ensuite rentré à Ivosevci jusqu'au 18 août, au moment où il a

 22   rendu son arme.

 23   Ensuite, le 15e Régiment a continué vers Drvar, mais il est resté à

 24   Ivosevci avec d'autres membres de son unité jusqu'à ce qu'il ait été

 25   appréhendé par la police.

 26   Le témoin a été condamné à huit ans d'emprisonnement pour meurtre, ce

 27   qui a été ramené à sept ans et six mois. Le témoin a ensuite précisé que

 28   pendant toute la période il avait été membre de la HV, et pendant

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  1   l'opération Tempête, il n'avait jamais reçu un ordre qui lui demanderait de

  2   faire un crime.

  3   C'est donc le résumé, Monsieur le Président.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître Kehoe.

  5   Veuillez poursuivre.

  6   M. KEHOE : [interprétation]

  7   Q.  Après avoir parlé de votre déposition, j'aimerais revenir sur la

  8   période qui a suivi l'opération Tempête.Avez-vous mené des activités

  9   criminelles après l'opération Tempête ?

 10   R.  Oui, en effet.

 11   Q.  Qui vous a arrêté lorsque vous avez été arrêté ?

 12   R.  La police militaire m'a arrêté et remis à la police civile.

 13   Q.  Monsieur Bilic, j'aimerais vous montrer le rapport concernant votre

 14   arrestation et votre interrogatoire.

 15   M. KEHOE : [interprétation] Il s'agit de la pièce 65 ter 1D2739.

 16   Q.  Il s'agit d'une note officielle faisant état de votre arrestation en

 17   date du 11 septembre 1995.

 18   Avez-vous déjà vu cette note, Monsieur ?

 19   R.  Cela se peut, mais je ne m'en souviens pas. Sans doute. Sans doute en

 20   1995.

 21   M. KEHOE : [interprétation] J'aimerais demander le versement de cette

 22   pièce, 1D2739 [comme interprété].

 23   M. WAESPI : [interprétation] Pas d'objection.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D1548.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui est ainsi versée au dossier.

 27   Maître Kehoe.

 28   M. KEHOE : [interprétation]

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  1   Q.  En parcourant cette déclaration, troisième paragraphe depuis le haut,

  2   il est question du fait que vous vous trouviez à Kistanje et que vous y

  3   avez trouvé un revolver dans une maison appartenant à une personne

  4   d'appartenance ethnique serbe; est-ce exact ?

  5   Avez-vous trouvé un revolver dans une maison serbe à Kistanje ?

  6    R.  Oui. Non seulement un revolver ou un pistolet, mais également son sac

  7   militaire. Je ne sais pas exactement comment on appelle ce type de sac dont

  8   dispose chaque officier. J'y ai trouvé un certain nombre de documents, car

  9   il était commandant d'une unité, sans doute quelque part à Krkovic.

 10   Je l'ai remis au commandement à Kistanje. Je ne sais pas où ce

 11   document a finalement atterri. J'ai gardé le pistolet, le sac ou porte-

 12   documents. Il y avait aussi de nombreux uniformes, mais nous n'y avons pas

 13   touché.

 14   Q.  J'aurais quelques questions supplémentaires concernant ces armes.

 15   Lorsque vous parcouriez ces endroits à Kistanje et ailleurs, y avait-il de

 16   nombreuses armes disponibles dans la zone, au lendemain de l'opération

 17   Tempête ?

 18   R.  On pouvait en trouver dans chaque maison, des armes, des Zolja, des

 19   uniformes, à tout le moins un fusil de chasse que l'on appelait "ciganka".

 20   Il n'y avait pas une seule maison où on ne trouvait pas d'armes, et je peux

 21   vous dire que j'ai parcouru des dizaines de maisons, une maison après

 22   l'autre.

 23   Q.  Plus loin dans cette note, il est question d'un endroit qui s'appelle

 24   Bratiskovci. Voyez-vous cela ? Au bas de la page. Cette ligne depuis le bas

 25   de la version en B/C/S.

 26   R.  Hm-hm.

 27   Q.  Il y est dit que vous aviez cette arme, puis dans les derniers cinq ou

 28   six jours que vous avez passés à Bratiskovci, il y avait des maisons

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  1   partiellement détruites, et vous aviez l'intention de voler pour satisfaire

  2   vos besoins.

  3   Est-ce exact, Monsieur, est-ce que vous vous trouviez à Bratiskovci

  4   quelque cinq ou six jours auparavant et que vous aviez l'intention de voler

  5   pour satisfaire à vos besoins ?

  6   R.  Oui, je me trouvais à Bratiskovci et j'y étais ce jour-là. Je n'y ai

  7   pas passé six jours, mais je m'y trouvais le jour où la police m'a arrêté.

  8   Cela dit, Slobodan Burukalo [phon] un joueur de foot dans la deuxième ligne

  9   de Zagreb, était originaire de Bratiskovci. J'ai rendu visite à sa grand-

 10   mère. Elle m'a dit que je devrais prendre le tracteur avant que d'autres

 11   Oustachi ne s'en emparent. C'est ainsi qu'ils nous appelaient, les Croates.

 12   Elle m'a donné le tracteur ainsi que du pain. Nous étions amis. Nous nous

 13   connaissions avant la guerre. Elle avait trois fils dont deux sont restés

 14   en Croatie et l'un d'entre eux est parti puisqu'il a épousé quelqu'un

 15   ailleurs.

 16   J'ai mis dans la voiture du vin et du jambon qu'elle m'avait donnés.

 17   A ce moment-là, la police m'a arrêté, estimant que j'étais en train de

 18   voler. Je me trouvais avec mon frère, et la police militaire m'a emmené à

 19   Sibenik pour m'y interroger.

 20   Ils savaient déjà que Dara avait été tué --

 21   Q.  Nous y arriverons en temps voulu. Procédons plus progressivement.

 22   Donc là, il s'agit du 11 septembre 1995. Après l'opération Tempête et

 23   après la période de conflit, est-ce que vous-même et vos amis avez commencé

 24   à boire de l'alcool souvent ?

 25   R.  Oui, d'ailleurs nous buvions sans cesse. Il n'y avait rien à manger

 26   sauf du jambon de Parme et du vin. Nous avions très faim et nous buvions 24

 27   heures sur 24. Telle était la situation. Nous étions euphoriques, suite à

 28   la libération après avoir été réfugiés pendant cinq ans et victimes de

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  1   pillages et de vols. Des membres de ma famille ont été tués. Après tous ces

  2   événements, nous nous sentions ainsi.

  3   Q.  Très bien.

  4   Lorsque vous vous trouviez avec vos amis et collègues et que vous

  5   buviez, est-ce que vous êtes retourné sur place pour tenter de vous venger

  6   pour tout ce qui avait été commis à l'encontre des Croates entre 1991 et

  7   1995 ?

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Waespi.

  9   M. WAESPI : [interprétation] Je pense qu'il conviendrait peut-être de

 10   demander au témoin, pourquoi êtes-vous retourné sur place ?

 11   M. KEHOE : [interprétation] Très bien, je vais formuler la question ainsi.

 12   Q.  Lorsque vous êtes rentré à Bratiskovci, pourquoi êtes-vous retourné à

 13   cet endroit ? Vous nous avez dit que vous y avez retrouvé un ami. Aviez-

 14   vous d'autres raisons encore pour retourner à Bratiskovci ou à ces autres

 15   villages ?

 16   R.  Nous avions un millier de raisons.

 17   Q.  Nous n'allons pas parcourir en revenu toutes ces raisons, parce que

 18   cela nous prendra un peu trop de temps, mais dites-nous quelles étaient les

 19   raisons principales pour lesquelles vous êtes retournés sur place ?

 20   R.  Mon village était entouré de villages serbes. Ainsi, les Croates du

 21   village étaient entourés de villages serbes ou chetniks, comme vous

 22   souhaitez les appeler.

 23   On nous avait tout volé, nos tracteurs, notre bétail, le matériel,

 24   nos poules. J'étais originaire d'une famille pauvre, une famille

 25   villageoise, mais nous avions deux vaches, 18 moutons, un tracteur. Nous

 26   avions du vin, des jambons de Parme, et on nous a tout pris. Mêmes les

 27   pierres des murs de notre maison ont été emmenées. Ils ont abattu les

 28   arbres et tout abattu et tué. Nous avons perdu notre orgueil, notre

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  1   identité, tout. Mais nous avons pu les récupérer grâce à l'opération

  2   Tempête.

  3   A l'époque nous étions pris d'euphorie. Il y avait beaucoup d'alcool

  4   et il y avait de la fumée dans l'air, l'odeur de la poudre de fusils. Nous

  5   étions ivres, et puis nous nous souvenions de certaines choses. Nous

  6   traversions le territoire, nous nous souvenions de nos tracteurs, de nos

  7   vaches et ainsi de suite. Voilà le contexte. Si nous avions souhaité tuer

  8   tout le monde, nous l'aurions fait dès le départ.

  9   Je regrette ce que j'ai fait, mais je peux vous dire que si les

 10   choses étaient à refaire, je n'agirais pas de la sorte.

 11   Q.  Lorsque vous êtes entré dans ces villages, est-ce que vous êtes entré

 12   dans les maisons serbes ? Est-ce que vous les avez pillées ? Est-ce que

 13   vous avez emporté des choses ?

 14   R.  Non, nous n'avons pas procédé au pillage. La plupart du temps, j'étais

 15   avec la famille Urukala [phon], que je connaissais déjà. Son petit-fils a

 16   fait de la boxe avec moi à Zagreb dans un club, le club Metalac. Nous nous

 17   connaissions avant la guerre, nous jouions au foot. Nous nous connaissions

 18   tous et nous passions du temps ensemble. En été on jouait au foot, dans des

 19   tournois de foot, ou on allait nager à Vodice. Je ne suis jamais entré dans

 20   les maisons de personnes que je ne connaissais pas.

 21   Q.  Vous avez dit que vous n'avez pas pillé des maisons, mais vous nous

 22   aviez dit que vous étiez entré dans une maison. On vous a dit de prendre un

 23   tracteur pour que quelqu'un d'autre ne s'en empare pas. Ce tracteur que

 24   vous avez pris, était-ce le vôtre ?

 25   R.  Non, c'était le tracteur qui appartenait à cette femme. Elle m'a dit :

 26   Prenez ce tracteur, mieux vous que ce soit vous que d'autres Oustachi,

 27   puisqu'ils nous qualifiaient tous d'Oustachi. Elle m'a dit : Ils viennent

 28   chez nous quotidiennement, et à ce moment-là des civils avaient commencé à

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  1   entrer sur le territoire depuis quelques jours après la fin de l'opération

  2   Tempête, et elle m'avait dit, Prenez-le plutôt que quelqu'un d'autre ne le

  3   prenne.

  4   Q.  Vous et vos amis -- enfin, je vais reformuler.

  5   Lorsque vous parcouriez ces villages, est-ce que vous et vos amis

  6   avez retrouvé des biens qui à votre avis vous appartenaient ?

  7   R.  Oui, en effet.

  8   Q.  Et qu'avez-vous fait dès lors ?

  9   R.  Je rentrais de la maison de cette femme. Je n'étais pas seul, mais en

 10   chemin j'ai rencontré des amis du village sur la route. Ils ont vu un petit

 11   tracteur sur le côté de la route et ils m'ont demandé de les aider à

 12   charger certaines choses dans ma voiture et j'ai utilisé mon véhicule pour

 13   tirer le tracteur. Il y avait également une remorque à laquelle nous avons

 14   attaché un autre tracteur et donc nous avons emmené toutes ces choses à la

 15   maison. C'était tout à fait courant d'agir ainsi à l'époque.

 16   Toutefois, par la suite, certaines personnes ont été interrogées, des

 17   habitants du village, au sujet des meurtres à Varivode. Ils ont rassemblé

 18   toutes les personnes qui avaient participé à ces opérations et ont

 19   interrogé certains de mes hommes qui étaient des lâches. Il suffisait

 20   qu'ils soient giflés une ou deux fois par un policier pour qu'ils

 21   commencent à parler d'avoir volé un tracteur ou un mouton et ainsi de

 22   suite.

 23   Q.  Et la période dont vous parlez pendant laquelle vous êtes entré dans

 24   ces maisons avec vos amis, que vous avez pris des choses qui à votre avis

 25   vous appartenaient, quelle était la période en question au juste ?

 26   R.  Je ne saurais vous le dire avec précision, mais c'était après

 27   l'opération. Les vrais guerriers sont passés à autre chose. Je n'ai pas pu

 28   le faire parce que j'avais un problème de santé. J'avais été opéré à la

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  1   jambe, et j'ai encore de la peine à marcher parce que j'ai mal à la jambe.

  2   Mais je voulais tout de même pouvoir entrer en marchant dans cette salle,

  3   ce prétoire, pour que le général puisse me voir.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais on vous a seulement demandé quelle

  5   était la période au juste. On ne nous a rien demandé au sujet de votre

  6   jambe, même si cela peut avoir de l'importance pour vous. Cela n'a aucun

  7   lien direct avec la question qui vous a été posée.

  8   Par rapport au début de l'opération Tempête, s'agissait-il d'un jour, trois

  9   jours après, une semaine plus tard, deux semaines ou un mois plus tard ?

 10   Pouvez-vous nous dire au juste quand tout cela est arrivé ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Un peu plus tard, quelques 20 jours après

 12   l'opération Tempête.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et est-ce que vous nous parlez là du

 14   fait d'avoir été interrogé par la police ou ce que vous nous avez décrit,

 15   le tracteur que vous aviez emmené et un autre tracteur qui a été chargé ?

 16   De quel événement parlez-vous lorsque vous dites que cela a eu lieu 20

 17   jours après l'opération Tempête ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout cela a eu lieu en l'espace de deux ou

 19   trois jours, en ce qui me concerne et toutes les mauvaises expériences.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc cela concerne les tracteurs trouvés

 21   au bord de la route et le fait d'avoir été interrogé par la police, tout

 22   cela en l'espace de trois jours ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Plus ou moins. Pendant quelques jours, j'étais

 24   ivre et ces événements se sont produits. Je n'ai pas passé beaucoup de

 25   temps sur le terrain, car par la suite j'ai dû aller voir des médecins. Je

 26   me suis fait opérer au genou à Zagreb --

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je comprends bien que d'autres

 28   choses se sont produites par la suite.

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  1   Cela dit, sur la base de toutes vos réponses, aux alentours de la fin

  2   du mois d'août, ce que vous nous avez décrit s'est produit.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'on vous a posé la question de savoir

  5   si vous avez trouvé les choses qui d'après vous vous appartenaient. Puis

  6   vous nous avez parlé de ces tracteurs. Vous avez croisé des personnes que

  7   vous connaissiez, elles vous ont demandé de les aider. Qu'est-ce qui à

  8   votre avis vous appartenait -- ou est-ce qu'ils pensaient que ces choses

  9   leur appartenaient ?

 10   Pouvez-vous nous dire, qu'avez-vous trouvé qui d'après vous vous

 11   appartenait ou qui d'après eux, leur appartenait ? S'agissait-il des

 12   tracteurs ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me souviens pas d'un tel détail. Tout

 14   cela était tout à fait banal. Je ne m'en souviens tout simplement pas.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais l'on vous a demandé si vous aviez

 16   trouvé des biens qui à votre avis vous appartenaient. Vous avez répondu par

 17   l'affirmative.

 18   Alors qu'avez-vous trouvé au juste qui d'après vous vous appartenait ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne m'en souviens pas. Je ne me souviens pas

 20   de ce que j'ai dit dans ma déclaration à ce sujet. Tout ce que je sais,

 21   c'est que le tracteur que j'avais emmené ne m'appartenait pas, mais à cette

 22   femme, cette amie qui me l'avait donné en disant qu'il valait mieux que je

 23   prenne le tracteur plutôt que quelqu'un d'autre.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon.

 25   Alors c'est clair.

 26   Maître Kehoe, essayons de nous en tenir aux faits et notamment aux faits

 27   qui découlent des réponses.

 28   M. KEHOE : [interprétation] Très bien.

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  1   Q.  Est-ce que vos amis ont également trouvé des biens qui d'après eux leur

  2   appartenaient, comme du bétail, des appareils ménagers ou des télévisions ?

  3   R.  Oui, ils m'ont dit qu'ils avaient reconnu de nombreuses choses qui leur

  4   appartenaient. Il ne s'agissait pas uniquement de mes amis proches, mais

  5   tous les habitants de mon village ont retrouvé des choses dans d'autres

  6   villages. Telle personne a retrouvé une vache, telle autre personne a

  7   retrouvé un tracteur, ou ils ont reconnu également leurs poules car il y

  8   avait un type très particulier de poules que nous élevions dans notre

  9   village. Alors il y avait toute une série de petites choses que les gens

 10   reconnaissaient et ramenaient chez eux.

 11   Je ne pense pas que cela avait quoi que ce soit d'insolite. Tout cela nous

 12   avait été pris et nous appartenait.

 13   Par la suite, en parcourant d'autres villages, nous avons vu de

 14   nombreuses choses qui venaient de notre village.

 15   Q.  Monsieur Bilic, avançons un petit peu dans le temps. Parlons de la

 16   police. Est-ce que la police a tenté de vous empêcher et d'empêcher vos

 17   amis et les personnes que vous connaissiez de vous emparer de ces choses ?

 18   R.  Oui, ils ont essayé de le faire. Mais ils n'étaient pas à même de le

 19   faire. Pour être tout à fait franc, ils étaient impuissants. Nous

 20   connaissions cette zone par cœur, nous connaissions tous les sentiers dans

 21   les forêts et ils n'avaient que des points de contrôle ou des barrages sur

 22   les routes principales, la police militaire et la police civile. Mais c'est

 23   une zone qui est boisée, nous savions comment trouver un chemin pour éviter

 24   que l'on nous repère et nous évitions les points de contrôle. Et nous avons

 25   pris du vin, du jambon de Parme. La police était impuissante, que ce soit

 26   la police militaire ou civile ainsi que la FORPRONU.

 27   Il y avait des points de contrôle, par exemple à Djevrska et ailleurs, mais

 28   nous arrivions toujours à trouver un chemin. Même s'il y avait eu un

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  1   policier par soldat, ils n'auraient pas réussi à nous empêcher d'agir. Il

  2   n'y avait pas assez de policiers à l'époque, donc ils ne pouvaient pas nous

  3   empêcher d'agir.

  4   Q.  J'aimerais passer à un autre sujet, notamment le sujet du meurtre de

  5   Dara Milosevic. Tout d'abord, nous allons regarder la déclaration que vous

  6   avez faite à la police

  7   M. KEHOE : [interprétation] La pièce D1548.

  8   Q.  Il s'agit de votre interrogatoire.

  9   M. KEHOE : [interprétation] Et à la deuxième page -- en fait, il faudrait

 10   plutôt voir au bas de la deuxième page en B/C/S et au début de la deuxième

 11   page en anglais.

 12   Q.  Et on peut y lire :

 13   "En ce qui concerne le meurtre qui a eu lieu dans le village de Bribir, il

 14   a déclaré qu'il n'avait aucune information à ce sujet et ne savait pas où

 15   cela s'était produit."

 16   Lorsque vous avez déclaré cela à la police le 11 septembre 1995,

 17   c'était faux, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui, c'est bien ce que j'ai dit et j'avais menti. Je ne pensais pas

 19   forcément que cela avait tant d'importance. Je crois que c'était quelque

 20   chose de très courant pour l'époque.

 21   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, on vient de me rappeler

 22   qu'à la page 15, ligne 15, il y a une omission au compte rendu, "le nombre

 23   de membres de sa famille tués entre 1991 et 1995."

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, ce serait bien que cela figure au

 25   compte rendu.

 26   Vous avez dit, vous avez parlé de membres de votre famille tués entre 1991

 27   et 1995. Apparemment, vous avez cité un chiffre. Pouvez-vous nous redire

 28   combien de votre famille ont été tués pendant ces quatre années ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je me suis souvenu de d'autres noms hier soir.

  2   J'avais dit huit, mais malheureusement le nombre était plus élevé.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pouvez-vous nous dire exactement combien

  4   ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] L'un après l'autre ?

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Plutôt le chiffre afin que nous

  7   puissions nous faire une idée générale. Cela suffirait.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Voyons, il faut que je compte. Une dizaine

  9   environ, que ce soit des proches ou des membres de la famille élargie.

 10   Parce que nous étions tous apparentés d'une manière ou d'une autre. Il y

 11   avait des oncles, des tantes, nous étions tous apparentés dans ce village.

 12   Quatre soldats ont été tués pendant la première offensive sur le village,

 13   puis l'armée et les Chetniks sont entrés dans le village.

 14   Et lors de l'offensive, ils ont tué tous ceux qui étaient restés sur place.

 15   Ils ont tué trois ou quatre personnes et certains ont été décapités. Leurs

 16   têtes ont été jetées dans des puits.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous souhaitions simplement savoir quel

 18   était le nombre des membres de votre famille tués. Bon. Mais cela a été

 19   précisé.

 20   Veuillez poursuivre, Maître Kehoe.

 21   M. KEHOE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 22   J'aimerais qu'on puisse voir le document 1D2770 de la liste 65 ter. Il

 23   s'agit d'un rapport qui concerne M. Bilic et son arrestation, et pour les

 24   besoins du compte rendu d'audience, Monsieur le Président, il s'agit d'un

 25   extrait d'un autre document qui apparaît sous la cote 1D1244 dans la liste

 26   65 ter.

 27   Q.  Monsieur Bilic, nous allons regarder la page 2 de ce document. Il

 28   s'agit d'un rapport vous concernant pour ce qui est du meurtre de Dara

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  1   Milosevic. Au deuxième paragraphe, il est marqué qu'entre le 6 septembre

  2   1995 et le 7 septembre 1995, vous vous êtes rendu à Pavici; est-ce exact ?

  3   Est-ce que vous vous êtes rendu à Pavici à cette époque ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Pour quelle raison vous êtes-vous rendu à Pavici ?

  6   R.  Je ne me suis pas rendu à Pavici à proprement parler; j'ai passé par

  7   Pavici. C'est la première fois que je traversais Pavici. 

  8   Q.  Bien.

  9   R.  [aucune interprétation]

 10   Q.  Pourquoi vous êtes-vous arrêté ? Pourquoi vous vous êtes rendu là-bas ?

 11   Vous aviez un but particulier ? Deviez-vous rendre visite à quelqu'un ?

 12   Pourquoi vous êtes-vous arrêté ?

 13   R.  Non. Je m'y suis rendu avec le commandant d'une autre section

 14   d'Urocevci qui gardait -- comment on les appelle ? Les gazoducs -- ou

 15   plutôt les canalisations d'amenée d'eau. Ils gardaient les lieux de culte,

 16   l'église, et cetera. Quand je rentrais, je l'ai rencontré. J'allais dans

 17   cette direction parce que mes hommes aussi étaient par là.

 18   Quand nous sommes revenus, nous nous sommes arrêtés à Pavici, parce qu'il

 19   pleuvait très fort ce jour-là, et on s'y est trouvé par accident, en fait,

 20   par coïncidence. Nous avons remarqué un homme que je connaissais,

 21   Zdravcina; c'est un Chetnik, l'un des organisateurs de l'époque de 1995, et

 22   il a donné des gifles à mon père. Je l'ai reconnu. Le type avec qui j'étais

 23   était Jakov Vucenovic. Il était enseignant. Je lui ai dit, Vous, vous êtes

 24   plus cultivé que moi. Allez demander à Dara.

 25   Je connaissais le fils de Dara qui était au 5e Régiment. Mon

 26   intention, ce n'était pas de la tuer. J'aurais pu le faire tout de suite.

 27   Moi, je voulais la capturer vivante, cette Chetnik. L'organisateur était de

 28   Bribirske Mostine. Il était un des participants de la soi-disant révolution

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  1   "log". Ils nous ont arrêtés sur la route --

  2   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

  3   M. KEHOE : [interprétation] Arrêtez-vous.

  4   Je m'excuse, Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous parlez un peu trop vaguement. Vous

  6   faites des références à des "types" plutôt que de donner des détails.

  7   Essayons d'être un peu plus précis.

  8   M. KEHOE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  9   Q.  Qu'est-ce que vous faisiez dans la maison de Dara Milosevic ?

 10   R.  J'attendais le Chetnik qui s'appelait Zdravcina car je l'ai vu là-haut.

 11   Je n'étais pas dans la maison, mais plutôt derrière cette maison. Je l'ai

 12   attendu pendant trois nuits, pas pendant la journée, mais la nuit. Je

 13   voulais le capturer vivant parce que je voulais lui apprendre quelque

 14   chose. Mon meilleur ami et mon parent, Perisa Borislav, on était sans

 15   nouvelles de lui après une opération à Dragisa.

 16   Q.  [aucune interprétation]

 17   R.  Des soldats croates.

 18   Q.  Pourrait-on revenir à la question.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, d'abord où se trouve

 20   Pavici.

 21   M. KEHOE : [interprétation]

 22   Q.  Le village de Pavici, là où a été tuée Dara Milosevic, où se trouve-t-

 23   il ce village ?

 24   R.  A côté de Bribirske Mostine et mon village. Tous ces lieux se trouvent

 25   à une distance de 5 ou 6 kilomètres. J'ai été à l'école --

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de rentrer dans les détails de

 27   votre éducation, est-ce que vous pourriez nous assister et on pourrait se

 28   mettre d'accord sur où se trouve Pavici, pour que nous sachions de quoi

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  1   nous parlons.

  2   M. WAESPI : [interprétation] Monsieur le Président, la carte sous la cote

  3   numéro 25 dans notre cahier qui porte la cote P2427, il s'agit de la

  4   municipalité de Skradin.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

  6   M. WAESPI : [interprétation] Au sud de Kistanje.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Skradin, oui, je vois Skradin.

  8   M. WAESPI : [interprétation] Et il y a le village plus gros de Bribirske

  9   qui est un petit peu au nord-ouest de cette municipalité-là, puis il y a

 10   Pavici, un village un peu plus petit.

 11   M. KEHOE : [interprétation] Oui, c'est à peu près ça. Si on va un petit peu

 12   à droite, en direction de Kistanje, on voit que c'est proche d'un village

 13   qui n'est pas très éloigné de Djevrska. Si on va jusqu'à Kistanje, ensuite

 14   on va au sud-ouest, en direction sud-ouest.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Sud-ouest…

 16   M. KEHOE : [interprétation] Djevrska.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 18   M. KEHOE : [interprétation] Puis si on continue au-delà du Djevrska, on

 19   voit bien que plus en direction du sud-ouest, ce village.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci de répéter la cote de la carte,

 21   Monsieur Waespi.

 22   M. WAESPI : [interprétation] P2427.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 24   M. WAESPI : [interprétation] D'ailleurs, j'ai en ma possession une carte

 25   détaillée, si vous souhaitez la visionner.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous en avez une, très bien.

 27   M. WAESPI : [interprétation] Oui, je vais faire en sorte qu'il soit affiché

 28   sur le prétoire électronique. J'ai même son numéro de la liste 65 ter.

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  1   [Le conseil de la Défense se concerte]

  2   M. WAESPI : [interprétation] Cette carte P2427, dans la municipalité de

  3   Sibenik, ensuite on voit Skradin, et vous voyez le nom de Skradin qui est

  4   souligné et le village de Bribir est à peu près 2 centimètres au-dessus de

  5   ce mot Skradin. 

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Waespi.

  7   M. WAESPI : [interprétation] Et le petit village de Pavici est juste au

  8   nord de Bribir.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

 10   M. KEHOE : [interprétation] Le nom du village n'apparaît sur aucune de ces

 11   cartes. Mais c'est effectivement là que ça se trouve.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Au moins, on sait à peu près

 13   où on est situé et aussi on voit que Krkovic se trouve par là.

 14   Continuez, Maître Kehoe.

 15   M. KEHOE : [interprétation] Est-ce que vous voyez où se trouve Krkovic ?

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Krkovic, c'est un endroit où le

 17   témoin…

 18   M. WAESPI : [interprétation] C'est de là qu'il est originaire.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est de là qu'il est originaire.

 20   Je voulais voir la distance et je vois que les distances en question sont

 21   assez réduites.

 22   Continuez.

 23   M. KEHOE : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur Bilic, à quelle distance se trouve votre village, Krkovic, de

 25   Pavici et de la maison de Dara Milosevic, environ ? La distance.

 26   R.  Krkovic et Bribirske Mostine, il y a 2,5 à 3 kilomètres entre les deux.

 27   C'est là où se trouvait la principale école pour tous les villages

 28   environnants.

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  1   Bribirske Mostine et Pavici sont peut-être à une distance de 1

  2   kilomètre. Donc en tout, 3 à 4 kilomètres.

  3   Q.  Revenons à la question de tout à l'heure.

  4   Pourquoi vous trouviez-vous dans la maison de Dara Milosevic ?

  5   R.  Je l'ai déjà dit. J'étais en train de traverser le village et j'ai vu

  6   l'individu qui, en 1991, avait giflé mon père et l'avait maltraité. Puisque

  7   nous passions devant sa maison en nous rendant en direction des sources

  8   d'eau, c'est là où on allait prendre de l'eau et on la transportait par

  9   tracteur.

 10   C'était en 1991, juin ou juillet. Les barricades avaient déjà été

 11   érigées, et mon père et moi-même avons été arrêtés.

 12   Q.  Vous avez noté que cet homme-là avait giflé votre père en 1991.

 13   Mais en septembre 1995, pourquoi vous vous êtes trouvé dans la maison

 14   de Dara Milosevic ? Qu'est-ce que vous faisiez dans sa maison ?

 15   R.  Je voulais capturer cet homme vivant. C'est pour cette raison que j'y

 16   étais, pas simplement pour un jour, mais trois nuits. La quatrième nuit,

 17   j'ai entendu quelqu'un parler dans la maison, et la police m'a dit plus

 18   tard que c'était la femme, la femme qui était sous influence et se parlait

 19   à elle-même, et moi j'étais convaincu que c'était lui. Elle faisait du pain

 20   et il y avait plein à manger dans la maison. M. Vucenovic, dont j'ai déjà

 21   parlé --

 22   Q.  Quand vous êtes rentré dans la maison, qu'avez-vous fait ?

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour en revenir à une autre question.

 24   Quelle était la relation entre la personne que vous recherchiez et

 25   cette femme ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas. Je ne sais pas. Je sais que

 27   lui, on l'a vu. Elle, elle faisait du pain, donc elle ne faisait pas du

 28   pain que pour elle-même. Elle était seule au village.

Page 19582

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit que vous ne connaissiez

  2   pas la relation entre les deux.

  3   Si moi, je cherche M. X, pourquoi je me rendrais dans la maison de Mme Y ?

  4   Qu'est-ce qui vous a fait croire que lui, il allait peut-être se rendre là-

  5   bas, se trouver présent dans cette maison ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que nous l'avions déjà vu auparavant. Ce

  7   jour-là en particulier, je veux dire le jour où on l'a vu, on n'a pas pu le

  8   capturer parce qu'il pleuvait très fort. C'était cinq minutes après que

  9   l'enseignant est arrivé.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous l'avez vu où ? Dans la maison de

 11   cette dame ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Devant cette maison. Il lui parlait. Il

 13   parlait à cette femme. J'en suis à 100 % sûr.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et parce qu'il pleuvait, vous ne l'avez

 15   pas poursuivi, malgré le fait qu'il était tout seul là avec une personne

 16   âgée…

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais essayer de vous expliquer.

 18   J'ai un petit peu de tempérament, et étant donné cela, surtout en ce qui

 19   concernait cet individu, j'ai demandé à l'enseignant qui était plus âgé,

 20   Jakov Vucenovic, un enseignant au cours secondaire, je lui ai demandé, Va

 21   voir cette vieille dame et demande-lui où est-ce qu'on peut le retrouver.

 22   Nous, quant à nous, nous nous sommes garés à une certaine distance de la

 23   maison. Lui s'est rendu à la maison, et il a dit, Grand-mère, qui vous a

 24   parlé il y a cinq minutes ?

 25   Tout ceci s'est déroulé dans l'espace de cinq minutes. Elle, elle a

 26   répondu dans leur dialecte, Non, non, je peux te dire que je ne lui parlais

 27   pas.

 28   Donc elle ne voulait pas admettre qu'elle lui avait parlé. Ensuite,

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  1   j'ai dit, Bien, on s'en fiche d'elle. On va partir, puis je vais le

  2   rattraper à un moment donné ou un autre.

  3   Donc nous sommes partis. Nous avons quitté la maison. Mais à environ 7 ou 8

  4   heures du soir ce même jour, il y avait un bar à Vodice, là où se

  5   rassemblaient les soldats le soir pour se détendre. Plusieurs soldats parmi

  6   eux m'ont dit qu'ils avaient rencontré Zdravcina, la personne que je

  7   recherchais.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remets entre les mains de Me

  9   Kehoe qui va donc continuer à essayer d'obtenir une version aussi factuelle

 10   que possible de la façon qui soit la plus propice à la logique.

 11   M. KEHOE : [interprétation] Est-ce que je peux demander votre autorisation

 12   d'être un petit peu plus directeur, afin que nous puissions aller aussi

 13   rapidement que possible ?

 14   M. WAESPI : [interprétation] Oui, bien entendu.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.

 16   M. KEHOE : [interprétation]

 17   Q.  Donc vous êtes retourné de cette maison de Pavici avec un pistolet pour

 18   retrouver ce Serbe que vous recherchiez ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Et vous êtes assis là, et vous l'avez attendu pendant trois jours,

 21   n'est-ce pas ?

 22   R.  Trois nuits, oui, mais pas pendant la journée. Ça ne valait pas le coût

 23   pendant la journée, car derrière la maison il y avait une forêt où ils se

 24   cachaient.

 25   Q.  Donc vous vouliez vous venger du fait que cet individu avait giflé

 26   votre père, n'est-ce pas ?

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi.

 28   M. WAESPI : [interprétation] Oui, bien sûr, j'étais d'accord pour qu'il y

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  1   ait un certain degré de direction, mais pour ce qui est factuel par rapport

  2   au reste -- 

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas pour ce qui est des motifs.

  4   M. WAESPI : [interprétation] Effectivement.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.

  6   M. KEHOE : [interprétation]

  7   Q.  Vous vouliez vous venger du fait que votre père avait été giflé ?

  8   R.  Non, ce n'est pas exactement une vengeance. Je voulais le capturer

  9   vivant. Je voulais qu'il me raconte tout, et il savait tout, sans doute,

 10   parce que c'était lui le premier organisateur, avec d'autres individus dans

 11   ce village que je connaissais très bien et que j'ai vus à l'époque monter

 12   la garde quand Ugljesa, le propriétaire du restaurant, a été tué.

 13   Le deuxième était vivant, Zdravcina, je voulais lui parler.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi.

 15   M. WAESPI : [interprétation] Le témoin a parlé de ces motifs quant au fait

 16   qu'il recherchait ce Chetnik. Maintenant, si ce que vous voulez savoir

 17   c'est quelles sont les raisons pour lesquelles il a tué la dame, vous

 18   devriez poser la question directement.

 19   M. KEHOE : [interprétation] Pour ce qui est des questions directrices --

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour les faits, il n'y a pas de

 21   problème. Maintenant, pour des considérations subjectives, c'est autre

 22   chose.

 23   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Continuez.

 25   M. KEHOE : [interprétation]

 26   Q.  Monsieur Bilic, est-ce que vous étiez saoul quand vous vous êtes rendu

 27   à cette maison et quand vous avez tiré sur Dara Milosevic ?

 28   R.  Je ne m'en souviens pas. J'étais sans doute sous influence d'alcool

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  1   dans une certaine mesure, bien que je pouvais boire pas mal sans en subir

  2   les effets. Je voulais le capturer vivant, et c'était lui ma cible. Je ne

  3   voulais pas tuer la femme.

  4   Q.  Est-ce que quelqu'un de la HV vous a ordonné de vous rendre dans cette

  5   maison pour capturer cet individu, ou est-ce que vous avez fait cela de

  6   votre propre initiative ?

  7   R.  Je l'ai fait de ma propre initiative. J'ai demandé à certains jeunes

  8   hommes de m'accompagner pour m'aider, mais c'étaient des lâches. Je voulais

  9   le capturer vivant, donc je m'y suis rendu tout seul.

 10   Malheureusement, il s'est produit quelque chose que je n'aurais pas

 11   souhaité. La femme était saoûle, elle se parlait toute seule dans la

 12   maison. C'était la troisième ou quatrième nuit. Donc je suis rentré dans la

 13   maison.

 14   Q.  Je comprends. Donc vous vous êtes rendu là-bas le jour où on lui a tiré

 15   dessus. Est-ce que vous portiez l'uniforme à ce moment-là ?

 16   R.  Oui, je portais un uniforme.

 17   L'INTERPRÈTE : L'interprète demande que le témoin répète à propos de

 18   l'uniforme.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] L'uniforme était noir.

 20   M. KEHOE : [interprétation]

 21   Q.  Et vous vous êtes rendu là-bas la nuit. Vous avez tiré sur Dara

 22   Milosevic. Pouvez-vous nous dire pourquoi vous avez tiré sur Dara Milosevic

 23   ?

 24   R.  Ce n'était pas ce que je souhaitais. Ce n'est pas elle que je visais.

 25   C'était un accident. C'était un concours de circonstances. Je pensais

 26   l'avoir entendue parler à quelqu'un et en réalité ce n'était pas le cas. Je

 27   l'ai appris plus tard le fait qu'elle se parlait toute seule. Elle criait

 28   d'ailleurs. Ce n'est que plus tard, lorsque j'étais déjà en détention que

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  1   la police m'a dit qu'elle avait l'habitude de boire et de circuler dans le

  2   village en se parlant toute seule. Et je ne le savais pas, je suis rentré

  3   dans la maison.

  4   Q. Vous êtes rentré dans la maison, vous avez tiré sur cette femme.

  5   R.  Non, ce n'est pas comme ça exactement.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe, faisons les choses

  7   chacune à son tour.

  8   Vous êtes rentré dans la maison. Qu'est-ce que vous avez vu ? Combien de

  9   personnes avez-vous vues ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était la nuit, environ à 3 heures ou 4

 11   heures du matin. J'étais convaincu que le Chetnik était là devant avec elle

 12   et qu'ils se disputaient et qu'ils parlaient. Donc je suis rentré dans la

 13   maison.

 14    M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne vous demande pas de quoi vous

 15   étiez convaincu. Je vous demande ce que vous avez vu. Vous avez dit qu'il

 16   faisait noir. Est-ce qu'il y avait des lumières dans la maison ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc il n'y avait pas de lumières dans

 19   la maison.

 20   Et à ce moment-là, quand vous êtes rentré dans la maison, est-ce que

 21   vous avez entendu quelqu'un parler ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'étais pas dans la maison. J'étais

 23   derrière la maison et je montais la garde. Et je l'ai fait pendant trois

 24   nuits. Et tout ce qu'on entendait pendant toute cette période c'était le

 25   silence.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ma question s'applique au moment où vous

 27   êtes rentré dans la maison. Vous avez dit que vous n'avez vu personne parce

 28   qu'il faisait noir. Et il n'y avait aucune lumière, il n'y avait pas de

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  1   lumière; est-ce que c'est bien cela ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] La question n'est pas tout à fait exacte. Je

  3   le formulerais différemment.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dites-moi comment je dois formuler mes

  5   questions, mais restez factuel.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était l'été. Donc c'était déjà le lever du

  7   jour, vers 3 ou 4 heures. Le jour commence à se lever et de plus en plus on

  8   voyait un petit peu.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc il y avait déjà un petit peu de

 10   luminosité. Et qu'est-ce que vous avez vu en rentrant dans la maison ?

 11   Avez-vous vu des êtres vivants ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. J'ai ouvert la porte en donnant des coups

 13   de pied. Et j'ai dit, Oustachi, à qui tu parles ? Et puis, je me suis rendu

 14   compte que je ne voyais qu'elle et personne d'autre mais elle s'est

 15   rapprochée de moi et elle criait.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous êtes rentré dans la maison,

 17   vous avez vu un être humain, vous l'avez vu, elle.

 18   Est-ce que vous avez vu quelqu'un d'autre ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et qu'est-ce que vous lui avez dit ou

 21   crié ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Il me semble que j'ai dit quelque chose comme,

 23   Oustacha, à qui tu parles ? Et elle, elle était effrayée, elle m'a repoussé

 24   parce que j'ai tiré une fois à ce moment-là.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Chaque chose en son temps.

 26   Donc vous avez dit, Oustacha, à qui vous parlez, et est-ce qu'elle vous a

 27   répondu en utilisant des mots ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Elle a dit, Oui, diable d'Oustacha, sors

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  1   de ma maison. Quelque chose comme ça, mais ils ont un accent serbe qui est

  2   un petit peu différent. J'ai tiré une fois sans réfléchir.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Combien de temps s'est écoulé entre le

  4   moment où vous êtes rentré dans la maison et le moment où vous avez tiré et

  5   le moment où la personne est morte ? Est-ce qu'il y a un laps de temps

  6   d'une seconde, trois secondes, dix secondes ? Essayez de vous rappeler.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je peux encore reconstituer ça dans mon

  8   esprit malgré le fait que j'essaye de me débarrasser de ces souvenirs.

  9   Quand je suis rentré dans la maison, j'ai immédiatement crié, A qui tu

 10   parles ? Et je me suis rendu compte que je rentrais dans une toute petite

 11   pièce. D'ailleurs, d'après ce que j'avais vu depuis l'extérieur, je pensais

 12   que ça allait être une pièce assez grande, mais en réalité, non. C'était

 13   une pièce petite et j'ai dit, Chetnik, à qui tu parles ? Elle a dit, Toi,

 14   le diable Oustacha. Et là, j'ai tiré une fois. Je ne sais pas si je l'ai

 15   fait exprès ou par accident.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc il s'agit d'une question de

 17   secondes, c'est ça ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien entendu. Quelques secondes. Je n'ai

 19   pas eu le temps de réfléchir et jamais l'idée que j'allais la tuer n'a

 20   traversé mon esprit. Son fils avait été militaire en même temps que moi.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc on disait qu'il s'agissait d'un

 22   délai de quelques secondes.

 23   Maître Kehoe, désolé de vous interrompre, mais je voulais connaître les

 24   faits.

 25   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

 26   Q.  A la suite de cela, Monsieur, et on va revenir maintenant au rapport

 27   qui porte la cote 1D2770. On vous a arrêté le 9 septembre, d'après ce

 28   rapport, et l'arme avec laquelle vous avez abattu Dara Milosevic vous a été

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  1   confisquée, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui.

  3    Q.  Au dernier paragraphe, on voit que les autorités policières ont pu

  4   établir que cette arme correspondait à la balle qui avait été trouvée dans

  5   le corps de Dara Milosevic.

  6   R.  Oui.

  7   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, on aimerait que ce

  8   document soit versé au dossier.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi.

 10   M. WAESPI : [interprétation] Pas d'objection.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 12   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D1549.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et celui-ci sera versé au dossier.

 14   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que je peux en

 15   finir avec un dernier document avant la pause ? Je vais être assez bref.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Une question peut-être sur le point

 17   précédent.

 18   Lorsque vous êtes entré dans cette maison, est-ce que vous vous souvenez si

 19   cette femme était debout, assise, est-ce qu'il y avait une table, une

 20   chaise, un lit dans cette pièce ?

 21   Est-ce que vous pourriez nous décrire un peu les choses.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Elle était debout. C'était une petite pièce,

 23   je crois qu'il n'y avait qu'un lit et un placard. J'ai juste jeté très

 24   rapidement un coup d'oeil à la salle et ensuite je suis sorti.

 25   M. KEHOE : [interprétation] C'est la pièce 1D2771. C'est le jugement de la

 26   chambre et de la cour d'appel.

 27   Q.  Monsieur Bilic, vous avez été jugé et condamné pour meurtre, n'est-ce

 28   pas ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Au départ, vous avez été condamné à huit ans de prison et en appel,

  3   cette peine a été ramenée à sept ans et demi, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais verser au

  6   dossier la pièce suivante, 1D2771, qui vient d'un document du bureau du

  7   Procureur, 65 ter 3926.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi.

  9   M. WAESPI : [interprétation] Pas d'objection.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, cette pièce est

 12   versée au dossier. C'est la pièce D1550.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Cette pièce est versée au

 14   dossier.

 15   Maître Kehoe, vous aviez l'intention de parler de l'application de la peine

 16   ?

 17   M. KEHOE : [aucune interprétation]

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 19   Est-ce que vous avez purgé votre peine ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, absolument.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Jusqu'à la fin ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Combien de temps êtes-vous resté en

 24   prison ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai été gracié par le président Tudjman,

 26   c'est ce qui s'est passé. Je ne sais plus en quelle année c'était. Ma

 27   conviction a été réduite de deux ans du fait de ma bonne conduite et du

 28   fait de mon mauvais état de santé. J'ai été relâché après trois ans et

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  1   demie de prison finalement.

  2   M. KEHOE : [interprétation] C'est au paragraphe 5 de la déclaration.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. C'est simplement que -- Oui, vous

  4   avez tout à fait raison, Maître Kehoe. J'aurais dû m'en souvenir.

  5   Pardonnez-moi.

  6   C'est un doublon. Bon, je vous rends la monnaie de votre pièce, je

  7   crois, en la matière. Peu importe.

  8   Y a-t-il autre chose dont vous souhaitiez parler avant la pause, Maître

  9   Kehoe ?

 10   M. KEHOE : [interprétation] Non.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous allons reprendre à 16

 12   heures 15.

 13   --- L'audience est suspendue à 15 heures 50.

 14   --- L'audience est reprise à 16 heures 20.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, veuillez poursuivre.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 17   Je vais mentionner un certain nombre de pièces sans les faire apparaître à

 18   l'écran, étant donné ce que vous nous avez dit hier, je pense que -- On va

 19   donc utiliser les pièces dont la cote est 1D2735 et 2736.

 20   Q.  Monsieur Bilic, connaissez-vous quelqu'un qui s'appellerait Barislav

 21   Djeranic ?

 22   M. WAESPI : [interprétation] Le nom, apparemment, c'est Serkanic.

 23   M. KEHOE : [interprétation] Oui, absolument. Serkanic, vous avez raison.

 24   Q.  Est-ce que vous connaissez cette personne, Monsieur Bilic ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Savez-vous qu'il a fait plusieurs déclarations à la police, au MUP, à

 27   la police de l'Intérieur, où il a dit que vous aviez participé à un viol à

 28   Gorice, dans le village de Gorice ?

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  1   R.  Oui, je l'ai appris un peu plus tard. Mais c'est un menteur invétéré.

  2   Q.  Etiez-vous dans la maison de cette femme lorsqu'elle a subi une

  3   agression sexuelle ?

  4   R.  Oui, j'y étais, mais elle n'a pas subi d'agression sexuelle.

  5   Q.  Cette femme était-elle Serbe ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Quand cela a-t-il eu lieu ?

  8   R.  Je ne sais pas. Tout a eu lieu pendant ces quelques jours, comme je

  9   viens de vous l'indiquer. Cinq ans pendant lesquels -- cinq jours pendant

 10   lesquels je buvais beaucoup et j'étais un peu fou.

 11   Q.  Avec qui étiez-vous à l'époque, quand vous étiez dans la maison de

 12   cette femme ?

 13   R.  Le procès a eu lieu il n'y a pas très longtemps, mais j'avoue que j'ai

 14   oublié. Il y avait deux ou trois hommes, et en général, je ne traînais pas

 15   avec eux, mais peut-être qu'un soir j'étais avec eux. J'étais dans ma

 16   voiture.

 17   Q.  C'était Ante Matic ?

 18   R.  Non.

 19   Q.  Nikola Bilic ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Neno Bilic ?

 22   R.  Non.

 23   Q.  Stipe Perisa ?

 24   R.  Je crois qu'il était là. Non. En fait, je ne sais pas. Je ne sais pas.

 25   Je ne m'en rappelle pas. Le procès a eu lieu très récemment, mais ces gens-

 26   là, ce n'était pas avec eux que je traînais en général. Ce sont des amis,

 27   des connaissances, des gens que je connais vaguement du village, mais ils

 28   n'étaient pas à mon niveau à l'armée, et donc ce n'étaient pas mes amis non

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  1   plus.

  2   Q.  Avez-vous été accusé et avez-vous été condamné pour cette agression

  3   sexuelle ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Avez-vous été condamné, et si oui, quelle a été votre peine ?

  6   R.  Oui. Il y a eu une peine d'un an qui a été prononcée, peine d'un an de

  7   traitement.

  8   L'INTERPRÈTE : L'interprète demande à ce que le témoin répète sa réponse.

  9   M. KEHOE : [interprétation]

 10   Q.  Bien. Alors si vous pouvez bien répéter votre réponse. Avez-vous été

 11   condamné, et si oui, quelle a été votre peine ?

 12   Merci de bien vouloir répéter votre réponse.

 13   R.  J'ai écopé d'un an de prison. J'ai été surveillé et traité dans

 14   l'hôpital de la prison. Je ne me rappelle plus du nom de la rue de la

 15   prison.

 16     Q.  Où en est cette affaire maintenant ?

 17   R.  Je dois dire que je n'ai même pas reçu le jugement de la chambre de

 18   première instance. C'est quelque chose qui s'est terminé voilà un mois ou

 19   un mois et demi, peut-être.

 20   Q.  Le soir où vous étiez dans la maison de cette femme avec ces personnes,

 21   est-ce que ces hommes-là portaient un uniforme ce soir-là ?

 22   R.  Je ne sais pas. Je ne me rappelle pas. Ce procès a eu lieu très

 23   récemment mais je ne me rappelle pas. Je dois dire que je n'ai pas prêté

 24   une grande attention à ces détails. Peut-être que oui, peut-être que non.

 25   Je ne sais pas. Impossible de vous dire. C'est ce que j'ai dit à la

 26   chambre, peut-être disposez-vous du jugement, du verdict.

 27   Q.  Etaient-ils armés ? Avaient-ils des armes ?

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que ce jugement est définitif ?

Page 19595

  1   M. KEHOE : [interprétation] Je crois que c'est en appel en ce moment-là.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc il faut rappeler aux témoins que si

  3   les questions qu'ils font peuvent leur porter préjudice, à ce moment-là ils

  4   ne sont pas obligés de répondre à ces questions, sauf si on les oblige à le

  5   faire.

  6   Etant donné que cette affaire n'est pas close, peut-être que si vous

  7   répondez en toute honnêteté aux questions qui vous sont posées par Me

  8   Kehoe, vous allez peut-être vous mettre dans une situation délicate. Alors

  9   si tel est le cas, vous pouvez refuser de répondre à une question, même si

 10   la Chambre peut vous demander ou exiger de vous que vous répondiez à cette

 11   question, mais vous avez le droit de dire, Si je réponds en toute honnêteté

 12   à cette question, je peux me mettre dans une situation délicate. A ce

 13   moment-là, il faut que vous nous le disiez.

 14   Voulez poursuivre, Maître Kehoe.

 15   M. KEHOE : [interprétation]

 16   Q.  Quelques questions encore sur ce point. Est-ce que vous portiez un

 17   uniforme ce soir-là ?

 18   R.  Oui, je crois.

 19   Q.  Est-ce que quelqu'un de l'armée croate vous a demandé à vous ou à

 20   quelqu'un d'autre qui était là d'aller dans la maison de cette femme serbe

 21   ce soir-là ?

 22   R.  Non.

 23   M. KEHOE : [interprétation] Etant donné le jugement que vous avez rendu

 24   hier concernant les notes officielles et le fait qu'il ne fallait pas les

 25   présenter, nous allons présenter les notes dont la cote est MFI 1D2735 et

 26   1D2736.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, très bien.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sont donc les pièces qui sont versées

Page 19596

  1   au dossier, D1551 et D1552, respectivement, marquées aux fins

  2   d'identification.

  3   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas d'autres

  4   questions pour l'instant.

  5   Merci beaucoup, Monsieur Bilic.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Y a-t-il d'autres questions pour ce

  7   témoin ?

  8   M. CAYLEY : [interprétation] Non, pas de questions.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Mikulicic.

 10   M. MIKULICIC : [interprétation] Une question, Monsieur le Président.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Une question.

 12   Contre-interrogatoire par M. Mikulicic : 

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous allez maintenant être interrogé par

 14   M. Mikulicic, qui est le conseil de M. Markac.

 15   M. MIKULICIC : [interprétation]

 16   Q.  Bonjour, Monsieur Bilic.

 17   R. [aucune interprétation]

 18   Q.  Une précision. Dans le paragraphe 4 de votre déposition qui est

 19   maintenant la pièce D1547, vous nous dites que l'ennemi a fortement résisté

 20   à Gracac et sur la route Pavasovici-Gracac. Est-ce que vous pourriez nous

 21   dire où se trouve Gracac, ou en tout cas l'endroit auquel vous faites

 22   allusion ?

 23   R.  De Skradin on arrive dans la village de Palasovic où se trouvait

 24   l'armée croate. De Pavasovici à Gracac, il y avait une route qui était un

 25   "no man's land". Gracac est le premier village serbe qu'on était censé

 26   prendre dans le cadre de l'opération Tempête. Malheureusement, nous n'y

 27   sommes pas arrivés ce matin-là.

 28   Q.  Donc Gracac est proche de Skradin ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Connaissez-vous un autre Gracac à Lika ?

  3   R.  Oui, ça c'est un endroit tout à fait différent, complètement différent.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi, êtes-vous prêt à

  5   interroger le témoin ?

  6   M. WAESPI : [aucune interprétation]

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous allez maintenant, Monsieur le

  8   Témoin, être entendu par le conseil de l'Accusation.

  9   M. WAESPI : [interprétation] Il s'agit effectivement d'un Gracac différent.

 10   Et celui dont on parle est à une autre page.

 11   Contre-interrogatoire par M. Waespi : 

 12   Q.  [interprétation] Avant l'opération Tempête, votre casier était vierge

 13   [comme interprété], n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   M. WAESPI : [interprétation] Pourrait-on faire apparaître le 3926 de la

 16   liste 65 ter. Sur le prétoire électronique -- c'est un document assez

 17   important, mais dans le prétoire électronique, c'est les pages 43 et 44,

 18   deux pages. Et en anglais, c'est la première traduction qui est liée à la

 19   liste 65 ter.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous souhaitez verser ces deux pièces

 21   au dossier, il faudra nous dire quelles pages vous voulez verser au

 22   dossier.

 23   M. WAESPI : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur Bilic, j'ai compté huit jugements, huit condamnations pour

 25   différents crimes graves, vol, destruction de propriété, participation à

 26   des actions violentes auxquelles vous avez participé entre 1976 et 1993.

 27   R.  Oui, c'est exact.

 28   Q.  Vous avez été condamné à plusieurs reprises à purger des peines de

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  1   prison dont certaines de plus d'un an et dont une qui a duré deux ans et

  2   deux mois; est-ce exact ?

  3   R.  Oui, je crois. Je dois dire que j'ai un peu oublié tout ça.

  4   Q.  Je pense que vous avez dit au Procureur, M. Zganjer, qu'avant

  5   l'opération Tempête, vous aviez passé quatre à cinq ans derrière les

  6   barreaux ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Avant l'opération Tempête, vous avez été traité à Sibenik dans la

  9   clinique psychiatrique. Est-ce que c'est également exact ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Venons-en maintenant au moment où vous avez rejoint les rangs du 15e

 12   Régiment de Garde nationale.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous voulez verser cette

 14   pièce au dossier ?

 15   M. WAESPI : [aucune interprétation]

 16   M. KEHOE : [interprétation] Pas d'objection.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] C'est la pièce portant la cote P2561.

 18   M. WAESPI : [interprétation]

 19   Q.  Je pense que vous avez témoigné ou dit dans votre témoignage qu'en 1992

 20   et 1993, vous faisiez partie du 15e Régiment de la Garde nationale; est-ce

 21   exact ?

 22   R.  Pardonnez-moi, je n'ai pas compris la question.

 23   Q.  Dans votre déposition de témoin, vous avez dit à la Défense que dès

 24   1992 et 1993, vous faisiez partie du 15e Régiment de la Garde nationale.

 25   C'est dans le premier paragraphe de votre déposition; est-ce exact ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  En 1995, on le voit dans votre déposition au paragraphe 3, vous dites :

 28   "On m'a dit que des membres du 15e Régiment de la Garde nationale se

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  1   rassemblaient pour Tempête, parce que mon cousin m'en avait informé. Ils

  2   sont allés aux chutes de Krka, où le point de ralliement pour cette

  3   opération était situé. Il y avait déjà 2 000 ou 3 000 soldats sur place. On

  4   m'a donné une arme à Skradin. On m'a donné un pistolet automatique et mon

  5   uniforme."

  6   Est-ce que quelqu'un a noté votre nom lorsque vous avez rejoint le 15e

  7   Régiment de la Garde nationale ? Est-ce que vous pouvez nous expliquer le

  8   processus pour que vous deveniez membre actif de cette garde ?

  9   R.  C'est très simple. A Skradin, il y avait le poste de commandement du

 10   15e Régiment de la Garde nationale. Il y avait également des entrepôts où

 11   il y avait les armes. Je me rappelle d'un garde qui s'appelait Sladic et

 12   qui était sur place. Lui, c'était la personne principale de cet entrepôt.

 13   Il m'a donné une arme, une "ciganka". Les 12 d'entre nous qui ont pu monter

 14   dans un camion ont été envoyés aux chutes de Krka. Nous avons passé la nuit

 15   sur place et nous avions attendu le levé du jour pour attaquer.

 16   Q.  Qui vous a envoyé à ces chutes de Krka ? Est-ce que vous vous rappelez

 17   du nom de cette personne ?

 18   R.  Non. Nous nous sommes réunis à cet endroit-là, il y avait des milliers

 19   et des milliers de gens. Je ne me rappelle pas du nom de cette personne. Si

 20   j'essayais de vous donner un nom, je pense que je dirais des bêtises.

 21   Je suis venu comme bénévole, comme volontaire. J'avais pris ma

 22   retraite le 26 octobre 1995, je touchais ma retraite, mais j'avais fait une

 23   demande; donc j'étais censé être à la retraite et je me suis porté

 24   volontaire pour cette opération Tempête, du fait que mon cousin était

 25   sergent en charge des communications. Il m'a dit de mettre nos familles à

 26   l'abri parce qu'il pensait qu'il y aurait d'autres tirs d'obus. Et ensuite,

 27   moi, je suis allé à Skradin. Je suis allé voir mes parents à l'hôtel,

 28   d'abord; ensuite, nous sommes allés à Skradin.

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  1   Q.  Dans ce camion dans lequel vous êtes montés pour aller aux chutes de

  2   Krka, combien y avait-il de soldats ?

  3   R.  Disons une douzaine, une douzaine d'hommes. Mais il y avait des allers

  4   et venues de camions, même chose pour les voitures, beaucoup de mouvements.

  5   Q.  Et dans le camion, tous étaient soldats, comme vous ?

  6   R.  Oui, absolument, tous soldats. La plupart étaient volontaires. Les

  7   hommes qui étaient avec moi étaient volontaires. Moi, j'ai réuni un groupe

  8   de volontaires, des gens que je connaissais d'avant.

  9   Mon commandant, d'ailleurs -- pas mon commandant, non, mais le

 10   commandant du bataillon a demandé aux hommes les plus courageux, deux ou

 11   trois équipes de mener une attaque profonde, deux ou trois côtés le matin.

 12   J'ai donc récupéré une équipe. Il me connaissait déjà, le commandant, comme

 13   un soldat. Il connaissait mon passé et donc il était d'accord pour que je

 14   puisse sélectionner une douzaine d'hommes et j'ai évidemment choisi ceux

 15   que je pensais être les meilleurs.

 16   Q.  Merci. Et ce commandant du bataillon, son surnom, c'était Kova; est-ce

 17   exact ?

 18   R.  Oui, c'est ça.

 19   Q.  Est-ce que vous vous rappelez de son grade ?

 20   R.  Il commandait le bataillon. Mais avant ça, moi, j'étais dans un autre

 21   bataillon à Vodice. Et là, il n'était pas responsable, il était à Skradin.

 22   Donc on est allé sur le terrain en fonction des besoins. J'ai fait partie

 23   de l'équipe d'intervention à Vodice. Et dès lors qu'il fallait intervenir,

 24   moi, j'ai été formé dans différents camps.

 25   Q.  Vous nous parlez de 1995, c'est là où vous avez fait partie de cette

 26   équipe d'intervention, n'est-ce pas ?

 27   R.  Non, c'était avant, quand j'étais dans l'armée régulière. En 1995, je

 28   me suis porté volontaire pour participer à l'opération Tempête.

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  1   Q.  Revenons-en sur 1995. Donc c'est bien en 1995 que votre commandant de

  2   bataillon vous a demandé de former une équipe; c'est bien cela ?

  3   R.  Non, ça ne s'est pas passé comme cela. Il a demandé à l'un de ses

  4   soldats, quelqu'un qui s'occupait des tâches administratives, un soldat

  5   subalterne, quelqu'un d'assez jeune; le commandant Kova souhaitait

  6   rassembler les hommes à Skradin le matin. Et à 3 heures du matin, il a dit,

  7   Bon, les mecs, si vous n'êtes pas suffisamment courageux, inutile de vous

  8   lever. Moi, j'ai besoin de trois équipes de volontaires, trois équipes

  9   d'une trentaine d'hommes.

 10   Q.  Et vous le connaissiez d'avant la guerre, ce fameux Kova ?

 11   R.  Non. Je l'avais connu pendant la guerre parce que Skradin c'est une

 12   petite ville. Dans le 15e Régiment, on se connaissait tous -- bon, on ne

 13   connaissait peut-être pas tous nos noms, nos identités, mais on se

 14   connaissait comme ça, de vue. Et moi, je sortais du lot  parce que je

 15   participais à différentes opérations sur le terrain.

 16   Q.  M. Kova, votre commandant, est-ce qu'il savait que vous vous étiez

 17   porté volontaire ?

 18   R.  Oui, il le savait, évidemment; et je n'étais pas le seul. Il y avait

 19   des milliers de volontaires. Il y avait même des femmes et des enfants qui

 20   voulaient participer, mais ils n'en avaient pas le droit.

 21   Q.  Je crois que je vous ai déjà posé cette question, mais bon, vous n'y

 22   avez peut-être pas répondu.

 23   Est-ce que quelqu'un a noté votre nom dans cet entrepôt où l'on vous a

 24   remis cette arme ?

 25   R.  Oui, je vous ai dit qu'il l'avait fait, mais je ne me rappelle pas du

 26   nom de qui que ce soit. Je pense que c'était Sladic qui était le

 27   responsable de cet entrepôt à Skradin, là où se trouvait ce dépôt d'armes.

 28   On m'a donné donc une "ciganka". C'est le nom qu'on lui donnait, en tout

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  1   cas.

  2   Q.  Dans votre déclaration, vous avez dit que votre unité avait subi des

  3   pertes. Vous avez parlé de six blessés et d'un tué après avoir traversé

  4   Pavasovici et on vous a demandé de vous retirer.

  5   Qui vous a demandé de faire marche arrière ?

  6   R.  En tout cas, ce n'est pas moi qui ai demandé de faire marche arrière.

  7   C'est un ordre qu'on nous a donné, c'était Zabac. Et à ce moment, j'étais à

  8   droite de Pavasovici et j'ai entendu des tirs et les Chetniks résistaient.

  9   Je pense qu'ils ont utilisé des mitraillettes et tiraient. Mais ça, c'est

 10   quelque chose que j'ai appris plus tard. J'étais à quelques centaines de

 11   mètres du cimetière là où l'homme avait été tué et les six autres avaient

 12   été blessés.

 13   Q.  Avec qui avez-vous été en communication ? Vous nous parlez d'une

 14   communication radio là, mais qui était dans ce groupe dont vous parliez ?

 15   R.  Je ne sais pas qui était responsable des opérations, peut-être le

 16   commandant en chef, je ne sais pas. Il y avait quelqu'un de responsable en

 17   tout cas.

 18   Q.  Mais à qui parliez-vous par radio ? Ou de qui receviez-vous des

 19   messages radio ?

 20   R.  Mon nom de code, c'était Zabac-3.

 21   Q.  Qui était Zabac-1 ?

 22   R.  Je ne sais pas. Peut-être Pavasovic, quelqu'un qui se trouvait à

 23   droite. Je ne sais pas. Nous venions de différentes directions.

 24   Q.  Qui était Pavasovic ?

 25   R.  Ah non. Je parlais du village de Pavasovic. C'est un village serbe.

 26   C'est là que se trouvait l'armée croate. Entre Pavosovici et Gracac. Une

 27   distance de 1 kilomètre entre les deux.

 28   Q.  Merci. Donc vous aviez communiqué avec d'autres membres de votre unité,

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  1   que ce soit à votre niveau ou au niveau de votre compagnie. Est-ce que

  2   c'est une bonne représentation de la façon dont vous communiquiez par radio

  3   à l'époque ?

  4    R.  Je ne sais pas. Moi, je communiquais avec quelqu'un qui était

  5   responsable pour cette opération mais je ne sais pas qui c'était. Moi,

  6   j'étais simple soldat exécutant. Mon objectif c'était de passer par Velika

  7   Glava et de poursuivre au-delà.

  8   Q.  Merci.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi, la plupart des lieux

 10   qui sont mentionnés ici -- Bon. J'ai du mal, par exemple, à situer Velika

 11   Glava.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Cela se trouve près Mijanovici, un peu plus

 13   haut, en amont et également au-dessus de Skradin.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc c'est toujours dans la même zone,

 15   si je comprends bien.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était là où il y avait la ligne de

 17   démarcation ou de séparation à Velika Glava, le site que l'on appelait "le

 18   cimetière". Parfois, ils arrivaient à reprendre ce territoire et puis ils

 19   nous menaient une contre-offensive. Donc le contrôle a changé de main à

 20   plusieurs reprises. S'ils contrôlaient ce lieu-là, ils pouvaient entrer

 21   dans Skradin. Donc c'était un lieu important de notre point de vue.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Donc près de Skradin, près de la

 23   ligne de confrontation.

 24   Poursuivez.

 25   M. WAESPI : [interprétation] Merci.

 26   Q.  Passons à un autre lieu mentionné dans le cadre de l'interrogatoire

 27   principal et cela se rapporte au quatrième paragraphe de votre déclaration.

 28   M. WAESPI : [interprétation] Pouvons-nous voir le document D1547, s'il vous

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  1   plaît.

  2   Q.  Monsieur Bilic, dans votre déclaration, vers la fin du paragraphe 4,

  3   vous parlez de l'emplacement du 15e Régiment de la Garde nationale au

  4   lendemain de l'opération Tempête. Cela se rapporte au village d'Ivosevci.

  5   Je vais vous en donner lecture. Je vous cite :

  6   "Je suis resté à Ivosevci jusqu'au 18 août."

  7   M. WAESPI : [interprétation] Cela se trouve à la deuxième page de la

  8   version anglaise de votre déclaration, juste avant le paragraphe 5, à la

  9   deuxième page en anglais.

 10   S'il y a une page de garde, ce serait à la troisième page. Je m'en excuse.

 11   Donc en tout cas à la fin du quatrième paragraphe.

 12   Q.  Donc je vous cite. 

 13   "Je suis resté à Ivosevci jusqu'au 18 août, moment auquel j'ai restitué mon

 14   arme et j'ai été démobilisé."

 15   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi, mais c'est à la page suivante. A

 16   la page suivante, donc, au haut de la page.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Au milieu du premier paragraphe sur

 18   cette page en anglais. Pourrions-nous voir les numéros et les paragraphes

 19   en anglais également. Voilà. Nous y sommes. Il s'agit donc du paragraphe 4,

 20   si j'ai bien compris.

 21   M. WAESPI : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 22   Q.  Donc je vous cite :

 23   "Je suis resté à Ivosevci jusqu'au 18 août, lorsque j'ai restitué mon arme

 24   et j'ai été démobilisé. Mon unité a poursuivi sa route en direction de

 25   Drvar et je suis resté à Ivosevci en compagnie de quelques autres membres

 26   du 15e Régiment de la Garde nationale et nous avons mené à bien les tâches

 27   qui nous ont été confiées.

 28   "Même après la démobilisation, j'avais encore une arme. Je suis resté dans

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  1   la région d'Ivosevci et j'ai continué à participer à l'exécution de tâches

  2   du mieux possible jusqu'à ce que je sois arrêté."

  3   Regardons brièvement le village d'Ivosevci, où se trouve ce village.

  4   M. WAESPI : [interprétation] La pièce P2423.

  5   Q.  C'est la carte numéro 21 dans votre classeur.

  6   Monsieur Bilic, ce village d'Ivosevci se trouve juste au-dessus de

  7   Kistanje, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Et nous voyons la ville de Kistanje. Nous ne voyons pas le nom de la

 10   municipalité et cela se trouve donc au nord-est de Kistanje, le village

 11   d'Ivosevci.

 12   Est-ce bien le village dont il est question, Monsieur Bilic ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Et quelles étaient ces tâches que vous-même et les autres membres qui

 15   sont restés sur place, donc membres du 15e Régiment de la Garde nationale,

 16   que vous avez entreprises ?

 17   R.  Permettez-moi de commencer depuis le début, depuis que nous soyons

 18   arrivés à Kistanje. Et puis, nous sommes allés à Ivosevci.

 19   Q.  Mais je ne m'intéresse pas ce qui s'est produit à Kistanje. Ce qui

 20   m'intéresse, c'est le fait que vous nous ayez dit que vous êtes resté dans

 21   ce village alors même que votre régiment poursuivait sa route en direction

 22   de Drvar et que l'on vous avait confié des tâches.

 23   Pouvez-vous nous dire brièvement en quoi consistaient ces tâches ?

 24   R.  Nous devions monter la garde autour du château d'eau situé près de

 25   Kistanje. Il y avait deux églises, également, et nous arrêtions les

 26   Chetniks qui n'étaient pas partis. Quelque dix jours plus tard, nous avons

 27   remarqué que l'on donnait à manger aux vaches et forcément, ce n'étaient

 28   pas des femmes qui s'en chargeaient.

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  1   Permettez-moi d'illustrer mon propos. L'on voyait que les vaches

  2   disposaient d'eau, qu'on leur donnait à boire. Il y avait quelque 50 vaches

  3   dans la région, donc nous avons déduit qu'il y avait forcément des hommes

  4   dans la région que nous n'avions jamais vus. Nous n'avions vu que des

  5   personnes âgées et des femmes.

  6   Donc nous, les soldats croates, nous avons souhaité les intercepter à

  7   l'aube et c'est justement à ce moment-là que nous avons pu les faire

  8   prisonniers. C'est une zone boisée sur les hauteurs à quelque 2 mètres en

  9   amont et c'est là où nous les avons fait prisonniers.

 10   Certains d'entre eux montaient la garde autour de l'église à Kistanje

 11   ou d'autres assuraient la garde des routes d'approche et ainsi de suite. La

 12   plupart des hommes ont poursuivi les combats par la suite. Mais comme

 13   j'avais mal au genou, j'avais de l'eau dans mon genou, j'ai dû me rendre

 14   plusieurs fois à Vodice, donc je n'ai pas pu me joindre à eux, bien que

 15   j'aurais souhaité le faire ardemment.

 16   Q.  Je comprends bien. Qui vous a confié ces tâches, par exemple, monter la

 17   garde autour de l'église et les autres tâches que vous nous avez décrites ?

 18   Est-ce que quelqu'un de bien précis vous a donné les instructions chaque

 19   matin ?

 20   R.  Je ne me souviens pas des noms des commandants des pelotons, des

 21   sections qui y étaient. J'étais volontaire. Par ailleurs, c'est moi qui ai

 22   donné l'ordre de monter la garde autour de l'église. J'étais pour ainsi

 23   dire le commandant moral lorsque nous nous trouvions à Kistanje et lorsque

 24   nous sommes arrivés à Ivosevci.

 25   Lorsque je me trouvais à Kistanje, nous avons été filmés par la télévision

 26   croate et cela a été diffusé aux actualités, et dans les premiers

 27   reportages concernant Knin, j'ai dit que nous étions à Kistanje. Il

 28   s'agissait du 6 ou du 7 dans l'après-midi. J'ai dit que nous attentions de

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  1   recevoir des ordres.

  2   Tout cela était filmé par la télévision croate. Moi-même et un

  3   collègue avons été les premiers à arriver à Kistanje, et d'ailleurs tous

  4   les villages de Velika Glava à Kistanje. Nous avons été les premiers à être

  5   interviewés par la télévision.

  6   Q.  Merci. Je crois que l'on retrouve tout cela dans votre déclaration.

  7   Mais revenons-en à Ivosevci. Vous avez dit que vous étiez en quelque

  8   sorte le commandant moral, mais qui était votre commandant ?

  9   R.  Je n'en sais rien. Des hommes plus courageux qui étaient membres d'une

 10   élite étaient déjà repartis en direction de Bihac, je ne sais pas très bien

 11   dans quelle direction. Mais je sais que l'on craignait la prise de Bihac.

 12   Pour ce qui est d'Ivosevci, je ne peux pas vous dire le nom du

 13   commandant, mais nous nous connaissions tous de vue. Nous ne connaissions

 14   pas les noms des uns et des autres.

 15   Q.  Et ceux avec qui vous avez entrepris ces tâches, combien étaient-ils;

 16   vous en souvenez-vous ?

 17   R.  Nous étions toujours une dizaine. Nous formions un groupe et nous

 18   tendions une embuscade pour les Chetniks. J'ai mentionné déjà l'eau,

 19   l'abreuvoir et les vaches.

 20   Mon peloton, ma section à elle toute seule a fait prisonniers de

 21   nombreux Chetniks et nous les avons remis à la police à Bribirske Mostine

 22   et à la FORPRONU qui était à proximité. Ils ont été emmenés à Sibenik ou à

 23   la prison de Split, je ne sais plus très bien. Par la suite, le jour de

 24   Noël 1995, Tudjman les a graciés, ce que je regrette.

 25   Q.  Avez-vous fait part à qui que ce soit du succès que vous avez connu,

 26   c'est-à-dire le fait que vous ayez pu faire prisonniers ces Chetniks ?

 27   R.  Oui, nous les avons remis, et je serai tout à fait franc, nous avons

 28   appelé la police qui se trouvait à Bribirske Mostine, il y avait aussi un

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  1   point de contrôle de la FORPRONU et un point de contrôle de la police et

  2   des militaires. Je ne sais pas où ils les ont emmenés, je crois vers la

  3   prison de Split. Lorsque j'ai été arrêté moi-même un mois plus tard, j'ai

  4   retrouvé un certain nombre d'entre eux en prison. Et si ce n'était pas

  5   aussi regrettable, ce serait presque drôle. Lorsque j'ai tué cette femme,

  6   je l'ai revu --

  7   L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas vraiment saisi de qui il

  8   s'agissait.

  9   M. WAESPI : [interprétation]

 10   Q.  Est-ce que vous avez mentionné le nom de la personne que vous avez

 11   retrouvée lorsque vous vous êtes trouvé en prison ? Si vous avez mentionné

 12   le nom, les interprètes ne l'ont pas saisi.

 13   R.  Je ne comprends pas la question. Je suis désolé.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Plus tôt, vous avez dit que c'était

 15   presque drôle ou risible. Vous avez croisé ou retrouvé quelqu'un après

 16   avoir été arrêté. Apparemment, il s'agit d'une personne que vous

 17   connaissiez déjà.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. La personne que je cherchais lorsque j'ai

 19   tué la vieille dame. Zdravcina, c'est lui que j'ai retrouvé dans la prison

 20   de Sibenik lorsqu'on m'a fait prisonnier. Je l'ai croisé dans un couloir.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le nom est maintenant clair.

 22   Veuillez poursuivre.

 23   M. WAESPI : [aucune interprétation]

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais en fait, il me manque un élément

 25   d'information. J'essaie de me retrouver sur la carte pour retrouver

 26   Bribirske Most --

 27   M. WAESPI : [interprétation] Oui, je ne suis pas tout à fait au clair moi-

 28   même.

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  1   En tout cas, nous avons mentionné Bribirske, l'endroit où le meurtre

  2   a eu lieu, c'est au sud de Kistanje, dans la municipalité de Skradin.

  3   Q.  Encore deux questions à ce sujet, Monsieur Bilic. Dans votre peloton, y

  4   avait-il uniquement des volontaires, comme vous-même, ou y avait-il aussi

  5   des soldats réguliers ? Je parle du peloton qui est resté à Ivosevci.

  6   R.  Je ne saurais vous le dire. Je n'en suis pas certain. Je ne peux pas

  7   affirmer que les autres étaient mobilisés ou des volontaires. Je sais

  8   seulement que ceux parmi les hommes qui étaient les plus courageux et les

  9   plus en forme, les plus valides, se sont rendus à Drvar, mais je n'ai pas

 10   pu les rejoindre parce que je n'étais pas en bonne santé.

 11   Q.  Est-ce que les commandants qui ont poursuivi leur route et se sont

 12   rendus à Drvar, est-ce qu'ils savaient qu'un peloton était resté à Ivosevci

 13   ?

 14   R.  Je ne sais pas. Je n'en sais rien.

 15   Q.  Passons à la question du meurtre de Dara Milosevic. Je ne vais pas

 16   entrer dans les détails, mais par la suite, après avoir tué Dara Milosevic,

 17   vous avez été arrêté par la police civile à un barrage près du hameau de

 18   Gorice, et la police s'intéressait au vin que vous transportiez. Est-ce

 19   exact ?

 20   R.  Oui.

 21   M. WAESPI : [interprétation] Monsieur le Président, pourrions-nous voir un

 22   autre extrait de la pièce 65 ter 3926. En B/C/S, on trouve la référence à

 23   la page 69, et en anglais dans la traduction -- en fait, je crois que c'est

 24   la deuxième traduction qui porte la cote ERN 0334-4653, à la page 5 en

 25   anglais.

 26   Q.  Monsieur Bilic, est-ce que vous vous souvenez avoir fait une

 27   déclaration concernant le meurtre de Dara Milosevic au procureur du

 28   district, Zeljko Zganjer, le 8 octobre 1995 ?

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  1   R.  Si je m'en souviens ?

  2   Non, je ne m'en souviens pas, je ne crois pas.

  3   Q.  Très bien.

  4   M. WAESPI : [interprétation] Voyons en anglais, à la première page, et en

  5   B/C/S je crois que c'est à la page 66. La page de garde de cet entretien ou

  6   interrogatoire.

  7   Q.  Peut-être que cette page vous rafraîchit la mémoire.

  8   Il s'agit d'un entretien avec l'accusé qui a eu lieu au tribunal de

  9   Sibenik, le 8 octobre 1995. Vous étiez, d'ailleurs assisté d'un conseil, ce

 10   jour-là, Frane Baica.

 11   Est-ce que vous vous souvenez d'avoir fait cette déclaration alors

 12   que vous étiez accusé ?

 13   R.  Oui, je le vois bien.

 14   Q.  Je crois que l'on voit votre signature à la dernière page. M. WAESPI :

 15   [interprétation] Passons à la page 69 en B/C/S et à la page 5 en anglais.

 16   Je vais vous donner lecture d'un extrait que l'on voit au milieu du

 17   deuxième paragraphe en anglais, et en B/C/S à la fin de la page.

 18   Q.  "J'ai été arrêté par la police civile à un point de contrôle près du

 19   hameau de Gorice, ils m'ont demandé de leur remettre le vin, mais j'ai

 20   refusé. Puisque j'arborais un uniforme militaire et je me considérais comme

 21   étant un soldat, ils ont appelé la police militaire. Cette police militaire

 22   m'a emmené à Sibenik où ils ont confisqué mon pistolet et ont commencé à

 23   m'interroger pour savoir si j'étais au courant du meurtre d'une vieille

 24   dame à Pavici. Ils ont également confisqué ma voiture. Lorsque la police

 25   militaire m'a relâché, j'ai commencé à me dire qu'on allait peut-être se

 26   rendre compte de ce que j'avais fait, mais j'espérais que l'enquête ne

 27   serait pas très approfondie puisque la victime était une femme serbe."

 28   En ce qui concerne cette dernière observation, pourquoi est-ce que vous

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  1   escomptiez que la procédure judiciaire ne serait pas très approfondie du

  2   fait que la victime était une femme serbe ?

  3   R.  Vous voulez savoir ce que je me disais ?

  4   Q.  Qu'est-ce qui vous a amené à dire cela au procureur ?

  5   R.  Je ne sais pas. Je ne peux que réitérer que tous ceux qui sont restés

  6   en Krajina ont voté en faveur de la Krajina, et à mon sens, ils étaient

  7   tous des Chetniks, tous ceux qui avaient plus de 18 ans. Il y avait de

  8   nombreux civils serbes qui sont restés en Croatie et ont défendu la

  9   Croatie; ces autres ont créé leur propre Etat sur place et je les

 10   considérais tous comme des Chetniks, puisqu'ils m'avaient volé ma maison et

 11   ma patrie. Tous ceux qui avaient 18 ans ou plus étaient à mes yeux des

 12   Chetniks.

 13   Il suffit de garder à l'esprit Vukovar, Zadar, Sibenik et Gospic et

 14   tout ce qu'ils y ont fait. Comment suis-je censé réagir ? Bonsoir, grand-

 15   mère, comment allez-vous ?

 16   Est-ce que c'est ainsi que j'aurais dû réagir après tout ce qu'ils

 17   avaient fait ? Ce n'était pas un acte de vengeance, à mon sens, c'était

 18   quelque chose de tout à fait normal eu égard aux circonstances. Votre point

 19   de vue est évidemment tout à fait différent.

 20   A l'époque, en tant que soldat croate qui avait été humilié ainsi que

 21   ma famille, nous les considérions comme des ennemis jusqu'au moment où nous

 22   avons été libérés. J'étais désolé que Tudjman et les Etats-Unis ou je ne

 23   sais qui nous aient arrêtés avant que nous n'arrivions à Banja Luka et que

 24   nous ne puissions aller encore plus loin, à Belgrade et dans les environs.

 25   Q.  Je vous remercie de votre réponse.

 26   R.  Je vous en prie.

 27   Q.  Vous vous considériez comme étant un soldat à l'époque, début

 28   septembre; est-ce exact ?

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  1   R.  En septembre ? Quel mois au juste ?

  2   Q.  Septembre, le mois juste après le mois d'août, le mois au cours duquel

  3   vous avez tué Dara Milosevic.

  4   R.  A strictement parler, je n'étais plus soldat puisque j'avais restitué

  5   mon arme. Mais bien entendu, nous étions ivres, nous voulions boire et

  6   manger. Nous n'avons pas pris des choses qui leur appartenaient. Nous

  7   étions en train de reprendre ce qui était à nous.

  8   Q.  Mais vous avez dit au procureur que vous vous considériez comme étant

  9   soldat à l'époque. Vous venez de le réitérer.

 10   R.  Très bien. Je me considère, en effet, comme étant un soldat croate.

 11   Q.  En tant que soldat, vous auriez obéi à tout ordre qui vous aurait été

 12   intimé ?

 13   M. MISETIC : [interprétation] Il y a un mot manquant dans la dernière

 14   réponse du témoin.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, il faudrait compléter la phrase.

 16   Vous avez dit :

 17   "Très bien, je me considère également comme…"

 18   Pouvez-vous nous préciser ? Vous vous considériez comme quoi ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Là, dernièrement ?

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous essayons d'élucider votre réponse.

 21   La question qui vous a été posée est la suivante :

 22   "Vous avez dit au procureur," et M. Waespi fait allusion à ce que vous

 23   aviez dit au procureur en 1995, "vous avez dit au procureur que vous vous

 24   considériez comme un soldat."

 25   M. Waespi a ajouté que vous l'aviez réitéré.

 26   Vous avez répondu en disant :

 27   "Très bien, je me considère également…"

 28   Pourriez-vous répéter la fin de la réponse que vous alliez donner ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que je voulais dire, c'est ainsi que je

  2   pensais, que je me voyais. Je ne pensais pas que c'était quoi que ce soit

  3   de mal.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, mais nous voulions simplement vous

  5   demander de répéter ce que vous aviez dit. Vous avez dit :

  6   "Très bien, je me considérais comme…"

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis un invalide, un martyr croate. Si on

  8   me posait la question, j'irais à nouveau me battre. Si on m'attaque, bien

  9   entendu.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que j'ai raison de dire que vous

 11   ne comprenez pas la langue anglaise ? Est-ce que c'est juste de dire que

 12   vous ne comprenez pas l'anglais ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne comprends pas le moindre mot.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Enlevez vos écouteurs, pour l'instant.

 15   Monsieur Misetic, il semblerait que quelque chose manque toujours.

 16   M. MISETIC : [interprétation] Je pense que le témoin a dit :

 17   "Très bien, je me considère encore aujourd'hui," alors que nous sommes au

 18   prétoire, "comme soldat croate."

 19   M. MIKULICIC : [interprétation] Oui, moi aussi, j'ai entendu cela.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi, avez-vous une objection

 21   si je pose une question d'une manière un petit peu directrice ?

 22   M. WAESPI : [interprétation] Non.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Bilic, quelqu'un ici dans le

 24   prétoire a cru entendre que vous aviez dit : 

 25   "Je me considère comme un soldat croate jusqu'à aujourd'hui."

 26   Est-ce que c'est bien cela que vous avez dit ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, pas dans ce sens-là, pas dans ce

 28   contexte-là.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que c'est bien ce que vous avez

  2   dit même s'il faut le mettre dans son contexte ? Est-ce que c'est bien les

  3   paroles que vous avez utilisées ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je suis toujours un soldat croate. Je

  5   suis un patriote. Dites-le de la façon que vous voudrez. Je continue à être

  6   prêt à lutter pour mon pays si celui-ci est attaqué. Officiellement, bien

  7   entendu, je ne suis plus militaire. Je suis à la retraite. Je suis un

  8   vétéran croate.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Monsieur Waespi, je pense

 10   qu'on peut continuer.

 11   S'il faut vérifier autre chose, on pourra le faire d'après

 12   l'enregistrement audio.

 13   Continuez.

 14   M. WAESPI : [interprétation]

 15   Q.  Pendant l'opération Tempête, en tant que soldat, suiviez-vous les

 16   ordres systématiquement qui vous étaient donnés par vos supérieurs ?

 17   R.  Je n'en ai pas beaucoup reçus. Ma mission principale, c'était de

 18   traverser la ligne, atteindre Ivosevci et établir un contact avec la 4e

 19   Brigade qui provenait de Knin, de la direction de Knin. C'était ça ma

 20   priorité. Tout ce qui s'est produit par la suite se faisait d'après ma

 21   propre évaluation parce que je n'ai pas pu établir de contact avec les

 22   autres gars qui s'avançaient également. C'est tout.

 23   Q.  Vous auriez accepté n'importe quel ordre qui vous serait parvenu depuis

 24   le général Gotovina et vous l'auriez exécuté, n'est-ce pas ?

 25   R.  Bien entendu. Bien sûr. Je me serais rendu à Belgrade ou à Drvar à

 26   pied, s'il le fallait.

 27   Q.  Passons maintenant au 23 août 1995, au moment où vous avez été arrêté

 28   par la police militaire. Vous étiez dans un véhicule Lada que vous

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  1   conduisiez.

  2   M. WAESPI : [interprétation] Il s'agit, Monsieur le Président, de la pièce

  3   1D987, un rapport de la police criminelle militaire.

  4   Mais avant de ce faire, je voudrais demander le versement du précédent

  5   document, si vous le voulez bien. Il s'agit de la pièce 3926B. C'est son

  6   numéro 65 ter. Les quelques pages, les cinq pages.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agira du compte rendu et de

  8   l'interrogatoire pris par M. Zganjer ?

  9   M. WAESPI : [interprétation] Oui.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que cela est clair, pour vous,

 11   Monsieur le Greffier ? Je vois que vous opinez du chef.

 12   Monsieur Kehoe.

 13   M. KEHOE : [interprétation] Pas d'objection.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas d'objection.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P2562.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Celui-ci est versé au dossier.

 17   M. WAESPI : [interprétation]

 18   Q.  Je vais vous lire maintenant.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une seconde, s'il vous plaît. Je

 20   demanderais au témoin à nouveau d'enlever ses écouteurs.

 21   Témoin, enlevez vos écouteurs.

 22   Monsieur Waespi, vous venez de parler du 23 août et comme vous l'avez dit :

 23   "Lorsque vous avez été arrêté par la police militaire vous conduisiez un

 24   véhicule Lada."

 25   J'ai remarqué qu'il y avait une contradiction entre deux éléments de

 26   preuve qui sembleraient contradictoires, à savoir s'il a été arrêté par la

 27   police civile ou à cause de son uniforme, qu'il a été pris par la police

 28   militaire ou remis à la police militaire alors que dans la déclaration

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  1   d'aujourd'hui, comme il a été déjà fait mention dans la déclaration auprès

  2   de Zganjer, il y a une contradiction avec le paragraphe 5 de la déclaration

  3   selon laquelle il avait été arrêté par la police militaire et ensuite remis

  4   à la police civile.

  5   M. WAESPI : [interprétation] Je pense, il y a eu plusieurs fois où le

  6   témoin a été arrêté. Je pense qu'après le meurtre de Dara Milosevic, il a

  7   été arrêté le 9 septembre.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous parlions maintenant de cet homme.

  9   Nous devons faire une distinction parfaitement claire entre le mois d'août

 10   et le mois de septembre.

 11   M. WAESPI : [interprétation] Exactement. Je vais maintenant parler du 23

 12   août, disons parler du 23 août.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Il m'a semblé, j'ai eu l'impression

 14   que ce qu'il a dit à M. Zganjer, ce que nous trouvons au paragraphe 5,

 15   c'est à la fois son arrestation, que les deux arrestations correspondent,

 16   mais je peux me tromper.

 17   M. WAESPI : [interprétation] Oui.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous fais part du fait que je ne suis

 19   pas tout à fait clair.

 20   M. WAESPI : [interprétation] Oui. On va essayer de clarifier les choses

 21   avec la pièce 1D987.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je vois que le témoin a à nouveau

 23   ses écouteurs.

 24   Continuez.

 25   M. WAESPI : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 26   Q.  Témoin, je vais vous lire le rapport de la police criminelle militaire

 27   portant date du 14 septembre 1995. Il s'agit de vous et de votre

 28   arrestation.

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  1   A la page 3, je lis en anglais alors que c'est la page 3 de la version

  2   B/C/S aussi. Paragraphe 2 en version anglaise et troisième paragraphe en

  3   version B/C/S.

  4   "Le 23 août 1995, à environ 17 heures, à l'approche de Vodice, un véhicule

  5   Lada sans plaque d'immatriculation a été arrêté. A son intérieur se

  6   trouvaient des membres de la HP VP Sibenik."

  7   Dans l'enregistrement en B/C/S, on voit :

  8   "…VP 8287 Sibenik," qui donne une indication de l'unité concernée.

  9   Je continue : "Veselko Bilic, fils de Tomislav, né le 20 mars 1957 à

 10   Krkovic, résidant à Vodice, Sime Sijca, numéro 21; et Mile Colak, fils de

 11   Rajko, né le 16 février 1951 à Piramatovci, avec l'adresse. Ils portaient

 12   un fauteuil à trois places, un fauteuil une place, un lit double, une

 13   petite armoire, un tapis et quatre couvertures de lit qu'ils avaient pris

 14   dans un village qu'ils ne connaissaient pas mais proche de Knin. Les

 15   articles ont été remis pour être conservés et un rapport disciplinaire

 16   militaire a été dressé à l'encontre des personnes mentionnées ci-dessus."

 17   Monsieur Bilic, est-ce qu'il s'agit là d'une description exacte de la façon

 18   dont vous avez fait l'objet d'une arrestation au point de contrôle, pour

 19   autant que vous vous souveniez ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Il semblerait qu'en fait, vous faisiez des pillages dans la zone de

 22   Knin.

 23   R.  Non, ce n'est pas le cas. Nous avons pris nos affaires à nous. L'autre

 24   personne qui est mentionnée ici a simplement reconnu ses effets, et ses

 25   effets lui ont d'ailleurs été rendus par la police au bout d'un certain

 26   temps. Il habitait à Vodice, et il avait certains documents; des factures

 27   pour les lits, pour les armoires. C'est ce que j'ai appris plus tard.

 28   Q.  Vous vous êtes rendu dans quel village pour y emporter ces articles ?

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  1   Un village qui serait proche de Knin ?

  2   R.  Je ne me souviens pas. Je ne me souviens pas de ces détails.

  3   Q.  Est-ce que M. Colak venait de ce même village ?

  4   R.  Je ne sais pas. Non, non, pas du village où nous avons pris ses

  5   affaires. Sa maison a été pillée. Piramatovci est à côté de mon propre

  6   village, dans la même paroisse. Ce sont deux villages qui se touchent. Leur

  7   village a été pillé au même titre que le nôtre. Il a reconnu certains de

  8   ses effets dans les autres villages au-dessus de cette zone. Il a emporté

  9   ses affaires. Lorsque la police nous a arrêtés, ils nous ont pris ses

 10   affaires, donc il n'a pas pu prouver qu'ils lui appartenaient. Mais j'ai

 11   appris plus tard qu'il a pu retrouver certaines factures, il s'est rendu à

 12   la police et que ses effets lui ont été rendus.

 13   Q.  Donc vous vous êtes rendu avec M. Colak à un village proche de Knin, et

 14   il se trouve que vous avez vu des effets que M. Colak a reconnus.

 15   R.  Oui, j'étais à Knin et je les ai rencontrés là-bas. Je leur ai demandé

 16   de m'emmener parce que j'étais à pied. Je me suis rendu à Knin à plusieurs

 17   occasions, simplement pour m'amuser, pour aller au fort et voir certains de

 18   mes amis qui désormais étaient à Knin. C'étaient des soldats croates qui

 19   revenaient chez eux. C'est ainsi que je l'ai rencontré, lui aussi. Même si

 20   j'avais dérobé quelque chose, je n'aurais pas eu honte. Tout ceci nous

 21   appartenait. Ce n'était pas à eux. Même si je les avais aidés, je vous

 22   l'aurais dit de toute façon. Mais il se trouve que non, je ne les aidais

 23   pas. J'étais simplement là pour pouvoir profiter de la voiture.

 24   Q.  Ce village de M. Colak, où est-ce qu'il habitait, M. Colak, avant

 25   l'opération Tempête ou pendant l'opération Tempête ?

 26   R.  Il est de Piramatovci, comme je viens de dire. C'est à côté de mon

 27   propre village, même paroisse; nous avions la même église, le même

 28   cimetière. Ils sont d'une distance de 1 kilomètre. Maintenant, ils se

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  1   touchent et on ne les distingue plus. Il y a les trois villages croates

  2   dans cette zone et ils ne font plus qu'un maintenant. Ils ont tous la même

  3   église, l'église de tous les saints.

  4   Q.  Expliquez-moi à nouveau comment ces affaires, ces effets, le canapé à

  5   trois places, le fauteuil, le tapis, le lit double, et cetera, comment tout

  6   ceci a pu se déplacer depuis un endroit à l'autre, depuis Ivosevci [comme

  7   interprété] jusqu'à Knin pendant la guerre ?

  8   R.  Qu'est-ce que vous entendez par cela ? Il n'y a pas que ça qui a été

  9   emporté; tout a été emporté. Ils ont même pris les pierres des

 10   constructions des maisons. Ils ont tout pris. Ils ont pillé tous les

 11   villages croates.

 12   Q.  Très bien. Passons maintenant à autre chose.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi, je voudrais obtenir une

 14   réponse d'abord.

 15   Si vous le savez, Monsieur le Témoin, dites-nous comment le propriétaire de

 16   ce canapé trois places, comment lui il a pu retrouver ce canapé qui se

 17   trouvait désormais à 25 ou à 30 kilomètres de l'endroit où il vivait

 18   auparavant ? Est-ce qu'il a passé en revue chacune des maisons pour essayer

 19   de retrouver son canapé ou quoi ?

 20   Pouvez-vous nous expliquer quelque chose qui semble relever d'une

 21   coïncidence assez énorme ? Comment peut-on tout d'un coup reconnaître son

 22   propre canapé ou son propre fauteuil, si tant est que tout a été retrouvé

 23   au même endroit ?

 24   Est-ce que vous pouvez nous expliquer ? Est-ce que vous le savez déjà

 25   ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas. Je l'ai rencontré sur la route

 27   et je lui ai demandé de m'amener à Vodice parce que c'est là où il y avait

 28   un campement pour moi en tant que réfugié.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il vous a dit que c'était des

  2   affaires à lui ou est-ce que vous avez simplement pensé que c'était le cas,

  3   sans qu'il vous le précise ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Il m'a dit que ces affaires étaient à lui au

  5   moment où nous avons été arrêtés par la police. Il a dit à la police qu'il

  6   avait reconnu ses propres effets, l'armoire -- il s'agissait d'un ensemble

  7   de meubles qu'il reconnaissait. Il l'a dit tout à fait fermement. Il en

  8   était convaincu. D'ailleurs, j'ai entendu que plus tard cela lui a été

  9   restitué. Alors pour savoir comment il a pu les trouver, je ne sais pas si

 10   c'était par hasard ou si quelqu'un lui a dit.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous venez de nous relater ce qu'il

 12   a dit à la police quand vous avez été arrêtés; est-ce bien le cas ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Deuxième partie de cette histoire, le

 15   fait qu'il avait retrouvé des factures, comment avez-vous su cela ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai appris beaucoup plus tard.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De qui ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Au moment où j'ai été relâché, j'ai quitté la

 19   prison. C'est un cousin éloigné à moi. Quand je suis venu à Vodice, que je

 20   revenais de la prison, je lui ai demandé ce qu'il en était des armoires et

 21   il m'a dit : Ils me les ont restituées, la police.

 22   C'était quelqu'un de tout à fait honnête. Il avait une maison à

 23   Vodice et une autre à Pihanso [comme interprété] qui a été complètement

 24   pillée. Sans doute qu'il recherchait ses affaires. Ce n'est pas simplement

 25   une question d'armoires, mais également son bétail, son tracteur, tout.

 26   Tout a été emporté.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il vous a dit que la police le lui a

 28   restitué. Est-ce qu'il vous a parlé des factures ou est-ce qu'il vous les a

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  1   montrées, ou est-ce que vous avez simplement pensé que c'était le cas; ou

  2   si quelqu'un d'autre vous l'a dit, qui vous l'a dit ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Il me faudrait deviner, mais je ne voudrais

  4   pas mentir ni causer de dérangement ni à lui ni à moi-même.

  5   Je ne me souviens pas des détails. Je ne me souviens même pas des noms des

  6   soldats avec lesquels j'étais lors de l'opération Tempête, et maintenant

  7   vous me demandez des détails concernant des lits. Je parle sérieusement.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous ne vous souvenez pas qui vous

  9   a parlé de ces factures qui ont peut-être convaincu la police de restituer

 10   ces affaires à cette personne ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Ne me posez pas ces questions qui me semblent

 12   vraiment mineures. Je ne me souviens même pas ce qu'il en est de

 13   l'opération Tempête, sans parler de qui a dérobé quel lit, et cetera, ou

 14   des questions mineures de ce type. Il n'y a pas eu de vols. Nous reprenions

 15   ce qui nous appartenait. Ils étaient pauvres.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous posais la question parce que

 17   vous avez témoigné à ce propos.

 18   Monsieur Waespi, vous allez pouvoir continuer.

 19   Combien de temps vous faut-il, parce qu'il va falloir faire également

 20   une pause ?

 21   M. WAESPI : [interprétation] Monsieur le Président, dix, 15 minutes.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dix, 15 minutes. C'est trop pour faire

 23   cela avant la pause.

 24   Faisons la pause et reprenons à 6 heures moins 5.

 25   --- L'audience est suspendue à 17 heures 36.

 26   --- L'audience est reprise à 17 heures 58.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Waespi, veuillez poursuivre.

 28   M. WAESPI : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

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  1   Q.  Monsieur Bilic, une dernière question. Au paragraphe 4 de votre

  2   déposition - et j'y ai déjà fait allusion tout à l'heure - vous dites que

  3   vous êtes resté dans la zone d'Ivosevci et que vous avez continué à

  4   participer aux tâches qui étaient les vôtres dans la lignée de vos

  5   capacités et que cela a continué jusqu'à ce que vous soyez arrêté.

  6   Vous avez donc été arrêté ensuite le 1er [comme interprété] septembre

  7   1995, après le meurtre de Dara Milosevic; est-ce que c'est exact ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Venons-en maintenant au viol de cette femme. Sur le meurtre, vous nous

 10   avez dit que c'était une coïncidence. Pour ce qui est du viol, est-ce que

 11   c'était aussi une coïncidence ?

 12   R.  Qu'est-ce que vous voulez dire par là, coïncidence ?

 13   Q.  Parce que vous nous avez dit, concernant le meurtre de Dara Milosevic,

 14   que c'était quelque chose qui s'était fait comme ça, que c'était un

 15   concours de circonstances.

 16   C'est ce que j'ai noté en tout cas, page 11.

 17   R.  [aucune interprétation]

 18   Q.  Est-ce que c'était un concours de circonstances que cette femme-

 19   là a été violée ?

 20   R.  Qui vous a dit que cette femme avait été violée ? Elle n'a pas été

 21   violée.

 22   M. WAESPI : [interprétation] J'aimerais que l'on ait la pièce 65 ter 7316.

 23   Q.  Vous nous avez dit que vous étiez dans la maison de la victime dont le

 24   nom ne devrait peut-être pas être diffusé, et peut-être que ce rapport ne

 25   devrait pas être diffusé non plus, parce que je ne sais pas si la victime

 26   est toujours en vie ou pas.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Ce document ne sera pas

 28   diffusé. Nous ferons en sorte de ne pas mentionner les noms.

Page 19627

  1   Veuillez poursuivre.

  2   M. WAESPI : [interprétation]

  3   Q.  Monsieur Bilic, ça, c'est le rapport criminel daté du 11 octobre 1995

  4   qui est passé par le procureur général du district et qui y a été envoyé.

  5   Vous y êtes nommément cité.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe.

  7   M. KEHOE : [interprétation] Si on fonctionne comme cela, plutôt que d'avoir

  8   un 65 ter - enfin, les deux documents dont j'ai oublié la cote, mais ces

  9   documents, ce serait 1D155 [comme interprété] et 1D5 [comme interprété] --

 10   en fait, il s'agit de la même personne, donc il faudrait verser ces deux

 11   pièces au dossier.

 12   M. WAESPI : [interprétation] Je pense qu'il s'agit de deux personnes

 13   différentes. Donc il faudrait vérifier tout cela.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faudrait voir si ça fait une

 15   différence, et si oui, pourquoi. Est-ce que c'est pour la véracité du

 16   contenu ou est-ce que c'est pour remettre en question la crédibilité du

 17   témoin. Est-ce que ça fait une différence; c'est ça ?

 18   M. KEHOE : [interprétation] S'il est en train de remettre en question la

 19   crédibilité du témoin et s'il avance sur cette base-là, j'imagine que ça a

 20   déjà été présenté hier et il y a eu une objection du Procureur là-dessus.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous aurez une autre occasion de le

 22   faire et vous aurez de nouveau 25 mots. Vous gagnez de plus en plus de

 23   mots, d'ailleurs. Il y aura une --

 24   M. KEHOE : [aucune interprétation]

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi.

 26   M. WAESPI : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 27   M. KEHOE : [aucune interprétation]

 28   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

Page 19628

  1   M. KEHOE : [aucune interprétation]

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

  3   M. WAESPI : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur Bilic, est-ce que vous pensez être l'un des suspects que

  5   l'on voit au paragraphe 11 ?

  6   M. WAESPI : [interprétation] Page 3 en anglais, page 2 en croate.

  7   Q.  Est-ce que vous voyez votre nom apparaître ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Merci.

 10   M. WAESPI : [interprétation] Venons-en à la page 5 de la version anglaise.

 11   Nous allons à la page 5 de l'anglais; en B/C/S, c'est page 3.

 12   Q.  Il est dit ici que cette même femme avait été violée quelques semaines

 13   auparavant par un groupe de gens, y compris Nikola Bilic. Est-ce que vous

 14   connaissez Nikola Bilic ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Qui est-il ?

 17   R.  Un voisin et un cousin. On appartient tous, plus ou moins, à la même

 18   famille dans le village, vous savez.

 19   Q.  Donc il a violé cette femme avec d'autres - c'était un viol en groupe -

 20   et quelques jours plus tard, le 3 septembre, vous avez rejoint ce groupe et

 21   vous avez de nouveau violé cette vielle femme. Est-ce que c'est ça qui

 22   s'est passé ?

 23   R.  Non, ce n'est pas exact.

 24   Q.  Donc cela --

 25   R.  Ça, c'est ce que vous dites. Mais elle, elle a dit au tribunal qu'elle

 26   n'avait pas été violée. Nous étions costauds, nous étions ivres, il était 2

 27   ou 3 heures du matin, mais il n'y a pas eu de viol.

 28   Q.  Vous avez donc écopé d'un an pour rien.

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  1   R.  Pas tout à fait pour rien quand même. On m'a accusé de tentative de

  2   viol et de maltraitance. Mais s'il y avait eu viol, j'aurais eu 80 ans de

  3   prison.

  4   Mais j'ai également été accusé d'insulter la personne, été accusé de

  5   la manière dont nous sommes entrés dans la maison. Il était 2 ou 3 heures

  6   du matin, on a demandé du vin, et au bout du compte, je me suis endormi sur

  7   le canapé. Donc je ne sais même pas de quel viol vous parlez. C'est un acte

  8   horrible.

  9   Q.  Et sur la même page en anglais, on peut lire que tous ceux qui étaient

 10   impliqués portaient des uniformes et portaient des armes. Est-ce que c'est

 11   exact ?

 12   R.  Je ne sais pas pour les autres. Je sais en ce qui me concerne qu'on

 13   buvait, on était un groupe de gens qui buvaient, et ils faisaient des

 14   bêtises, mais on était tous plus ou moins ivres. Qu'est-ce que je pourrais

 15   vous dire d'autre ? Je ne sais pas. Je suis un peu perdu.

 16   On se retrouvait dans les bars, on buvait des coups, ensuite on nous

 17   disait, il y a du bétail, il y a des bœufs, et c'est pour ça qu'on allait

 18   sur place. Pour ce qui est de cette vieille femme, personne ne l'a violée.

 19   Quand je suis entré, j'ai effectivement crié, Attends, espèce de pute,

 20   donne-nous quelque chose à boire.

 21   Mais de là dire que quelqu'un l'a violée ou que quelqu'un l'a battue,

 22   c'est faux. Elle l'a confirmé d'ailleurs de ses propres dires devant le

 23   Tribunal. Elle a été humiliée, ça oui, et c'est pour ça que nous avons été

 24   condamnés.

 25   Q.  Venons-en maintenant au dernier document.

 26   M. WAESPI : [interprétation] J'aimerais également que cela soit marqué aux

 27   fins d'identification.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais que ce document soit marqué

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  1   aux fins d'identification.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ce sera donc la

  3   pièce qui portera la cote P2563, marquée aux fins d'identification.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  5   M. WAESPI : [interprétation] J'aimerais maintenant que l'on ait la pièce 65

  6   ter 7371 [comme interprété].

  7   Q.  Monsieur Bilic, vous n'avez pas été le seul membre de ce 15e Régiment

  8   de la Garde nationale à avoir été arrêté pour crimes soupçonnés, n'est-ce

  9   pas ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Vous saviez qu'en octobre 1995, il y avait eu des protestations

 12   pacifiques ?

 13   M. WAESPI : [interprétation] Monsieur le Président, d'ailleurs, cela peut

 14   être diffusé de nouveau.

 15   Q.  Il y a eu une manifestation pacifique qui a été organisée par des

 16   membres du 15e Régiment de la Garde nationale, et je cite ce document :

 17   "Etant donné que plusieurs membres démobilisés de cette unité ont fait

 18   l'objet d'enquêtes criminelles et ont été arrêtés pour des raisons

 19   raisonnables du fait qu'on soupçonne qu'ils ont commis des meurtres."

 20   Avez-vous entendu parler de cet appel à la solidarité pour les collègues

 21   qui avaient été démobilisés ?

 22   R.  Non, je ne m'en souviens pas.

 23   M. WAESPI : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais verser ce

 24   dossier.

 25   M. KEHOE : [interprétation] Pas d'objection.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, cette pièce est

 28   versée au dossier, P2564.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, cette pièce est versée au

  2   dossier.

  3   M. WAESPI : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur Bilic, vous nous avez dit que votre peine avait été réduite,

  5   je crois, à un an de prison par le président Tudjman le deuxième jour de la

  6   fête nationale croate. Quel est le jour de cette fête nationale croate ?

  7   R.  C'est le 13 mai, mais en 2001 ça a changé lorsqu'il y a eu un

  8   changement de gouvernement. Je ne sais pas quel était le nom. Je ne connais

  9   pas la nouvelle date.

 10   Q.  Pouvez-vous nous dire de nouveau pourquoi lors de cette fête nationale

 11   croate, pourquoi est-ce que votre peine a été réduite, cette peine que vous

 12   purgiez pour meurtre ?

 13   R.  Pourquoi ma peine a été réduite ? Pourquoi n'aurait-elle pas été

 14   réduite ? J'étais malade, je m'étais bien tenu. J'avais été blessé par

 15   balle, j'avais une bonne conduite. Même si j'avais l'air en bonne santé,

 16   j'étais malade. J'ai fait une demande de grâce, et le président Tudjman m'a

 17   gracié. Aussi toujours pareil, parce que je m'étais bien conduit puis parce

 18   que j'étais malade, donc j'ai passé davantage à l'hôpital militaire de Pula

 19   qu'en prison. J'ai été traité constamment et j'ai des documents qui en

 20   attestent.

 21   M. WAESPI : [interprétation] Je pense que j'ai oublié de verser la pièce

 22   1D987. C'est le rapport de police militaire du 14 septembre.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Effectivement, ça n'apparaît pas.

 24   M. WAESPI : [aucune interprétation]

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est la pièce précédente, et nous

 26   parlons maintenant de celle qui toujours présente, qui apparaît toujours à

 27   l'écran.

 28   Monsieur le Greffier, je crois que je suis en train de mêler les pinceaux.

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  1   Je crois que cette pièce a été versée. Elle a même été admise. Non ?

  2   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le dernier document, que l'on accorde

  4   une cote MFI, toujours pour les mêmes raisons, ce document n'a pas été

  5   présenté au public.

  6   Alors, Monsieur le Greffier, est-ce que vous pouvez répéter la cote du

  7   document ?

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, 65 ter 1D987, qui

  9   devient la pièce dont la cote est P2565.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas d'objection ?

 11   M. KEHOE : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette pièce est donc versée au dossier.

 13   Veuillez poursuivre, Monsieur Waespi.

 14   M. WAESPI : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 16   [La Chambre de première instance se concerte]

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quelques questions du Juge Gwaunza.

 18   Questions de la Cour : 

 19   Mme LE JUGE GWAUNZA : [interprétation] Oui. Je voulais vous poser quelques

 20   questions sur l'affaire dont vous venez de parler, affaire pour laquelle

 21   vous avez été condamné à un an de prison et qui fait l'objet d'un appel à

 22   l'heure actuelle.

 23   Savez-vous pourquoi est-ce qu'il a fallu tellement de temps pour que cela

 24   soit porté devant les tribunaux, cette affaire ?

 25   R.  [aucune interprétation]

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous répéter votre réponse,

 27   s'il vous plaît. Elle n'a pas été entendue par les interprètes.

 28   R.  Je n'en sais rien. Peut-être que certains n'étaient pas accessibles. Je

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  1   ne sais pas. Comment est-ce que je pourrais savoir ?

  2   Mme LE JUGE GWAUNZA : [interprétation] Merci.

  3   [La Chambre de première instance se concerte]

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quelques questions à votre endroit.

  5   Vous nous avez dit que quand vous étiez à Ivosevci, vous surveilliez la

  6   citerne d'eau et l'église ou les deux églises non loin de Kistanje.

  7   Alors, qui avait décidé qu'il fallait garder ces objets, ces lieux ?

  8   R.  J'ai été le premier à entrer dans Kistanje, donc c'est moi qui en ai

  9   décidé. J'ai nommé deux hommes à tenir la garde à côté de l'église pour

 10   qu'elle ne soit pas démolie, et très vite les médias en ont parlé. Des

 11   équipes télé sont venues filmer. On en a parlé à Knin. Les équipes télé

 12   sont venues filmer et on le voit sur les images, aucune des maisons n'était

 13   détruite sur place jusqu'à Kinstanje.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vous avez parlé d'enregistrement

 15   télévisé. Est-ce que quelqu'un ou est-ce que vous possédez une cassette

 16   télévisée chez vous ou ici qui montre ces images à la télévision et cette

 17   interview que vous avez accordée à la télévision ?

 18   R.  La télévision dispose probablement des images. Moi, on ne m'a jamais

 19   remis de copie, mais ils ont probablement saisi l'image.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit que vous aviez arrêté ou

 21   capturé plusieurs hommes et que vous les aviez ensuite remis à la police.

 22   Quelle était la distance que vous avez dû parcourir pour les remettre, je

 23   crois que c'était à Bribirske Most, à moins que je ne me trompe ? C'est à

 24   combien de kilomètres ?

 25   R.  C'est la police qui venait directement, nous, on n'a pas besoin de se

 26   déplacer. La police militaire venait directement. Au départ, il y avait un

 27   blessé, on a appelé le corps médical qui était non loin de nous. Ils sont

 28   arrivés en une vingtaine de minutes. Pour ce qui est de ceux qui ont été

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  1   capturés, la police militaire venait, les amenait à la prison de Zadar, ou

  2   à Sibenik ou à Split, et cetera.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Lorsque vous étiez en

  4   fonction, c'était des fonctions que vous vous étiez données vous-même, mais

  5   en tout cas, lorsque vous faisiez votre travail à l'époque, lorsque vous

  6   étiez dans la région d'Ivosevci, où dormiez-vous la nuit ?

  7   R.  La nuit, on dormait souvent à Ivosevci, ça c'était les premiers jours,

  8   avant que je ne commence à avoir des problèmes au niveau des jambes, et là,

  9   j'ai commencé à aller à Vodice. Lorsqu'on prenait des Chetniks, on passait

 10   les nuits sur place même si on ne dormait pas. Je vous explique ce que je

 11   veux dire par là. 

 12   On était une dizaine, il y en a cinq ou six qui chantaient des chansons

 13   oustachi et on faisait semblant de quitter le village alors que quatre ou

 14   cinq d'entre nous restaient sur place et c'est comme ça qu'on arrivait à

 15   capturer les Chetniks. Parce qu'ils ne se rendaient pas. C'était une

 16   dizaine ou une vingtaine de jours après l'opération Tempête et ils se

 17   cachaient dans les bois avec des arbres immenses qui dépassaient notre

 18   hauteur d'au moins 2 mètres.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, pardonnez-moi. Je vous demandais

 20   simplement où vous dormiez, où vous étiez la nuit. Et je comprends que vous

 21   travailliez toujours la nuit dans une certaine mesure, le soir, la nuit, et

 22   cetera.

 23   Vous nous dites aussi que vous êtes resté quelques jours à Ivosevci et

 24   qu'ensuite vous êtes retourné à Vodice.

 25   Alors, après votre retour à Vodice, où vous étiez demeuré pendant un

 26   certain temps, si j'ai bien compris, est-ce que vous êtes retourné dans la

 27   région de Kistanje plus tard ?

 28   R.  Oui, évidemment.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais alors comment alliez-vous d'un

  2   point à un autre, d'Ivosevci à Vodice ?

  3   R.  Il y avait toujours un véhicule militaire à disposition.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Etait-ce un véhicule qui appartenait à

  5   l'unité dont vous étiez membre ou bien s'agissait-il simplement d'un

  6   véhicule qui passait par là ?

  7   R.  La plupart du temps, nous nous faisions emmener par des véhicules qui

  8   passaient par là. J'ai dû me rendre aux urgences à Vodice à plusieurs

  9   reprises à cause de mon genou.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Est-ce que vous avez utilisé

 11   vos propres moyens de transport ? Aviez-vous une voiture ?

 12   R.  Oui, j'en avais une, mais je ne l'ai pas utilisée pendant les premiers

 13   temps. Ce n'est qu'ultérieurement, lorsque nous avions énormément bu et

 14   aussi beaucoup trop mangé, enfin, c'était un peu la folie, et lorsque cet

 15   événement s'est produit avec la vieille dame, sans l'approbation, le

 16   consentement de quiconque, nous agissions de notre propre initiative, nous

 17   ne suivions aucun ordre et nous étions plusieurs.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais je vous ai posé concernant votre

 19   voiture et rien d'autre.

 20   Cette voiture, la voiture dans laquelle vous vous trouviez lorsque vous

 21   avez été arrêté en septembre - du moins, je crois que c'était au mois de

 22   septembre - cette voiture était-elle la vôtre, la voiture qui a été saisie

 23   par la police ?

 24   R.  Oui. Ce n'était pas ma voiture.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors à qui appartenait cette voiture ?

 26   R.  Je ne m'en souviens même pas aujourd'hui. Nous l'avons trouvée quelque

 27   part ou je suppose peut-être que la voiture appartenait à quelqu'un. Je ne

 28   m'en souviens pas, mais en tout cas, elle n'était pas à moi.

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  1   J'avais ma propre voiture, une Golf 1, que j'ai utilisée par la suite

  2   lorsque nous avons bu d'énormes quantités.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit que vous aviez peut-être

  4   trouvé cette voiture quelque part. Donc à votre avis, c'était peut-être une

  5   voiture qui appartenait à quelqu'un d'autre que vous avez prise ?

  6   R.  Je ne peux pas répondre à la question. Je ne me souviens pas. Peut-être

  7   l'ai-je empruntée. Je n'en sais rien, tout simplement.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'essaye de comprendre. Vous ne vous

  9   souvenez pas s'il s'agissait d'une voiture que vous avez empruntée.

 10   Emprunter, d'après moi, ça veut dire que vous l'avez empruntée à quelqu'un

 11   que vous connaissiez, ou alors, une voiture qui appartenait à quelqu'un que

 12   vous ne connaissiez pas. De quoi s'agissait-il ? Pouvez-vous nous le

 13   préciser.

 14   R.  Je ne m'en souviens sincèrement pas.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous écartez la possibilité

 16   que la voiture ait été volée ?

 17   R.  Non. Cela dit, je suppose qu'ils avaient emmené tous leurs biens de

 18   valeur, donc je n'en sais rien.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous voulez dire par là qu'il n'y

 20   aurait pas eu de voiture sur place qui pouvait encore être volée puisque

 21   tout le monde aurait emmené leur voiture ? Dois-je ainsi comprendre ce que

 22   vous nous dites ?

 23   R.  Oui, c'est à peu près cela.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

 25   Venons-en à autre chose. Vous nous avez dit que la police ne pouvait

 26   rien faire pour empêcher le pillage. Mais en même temps, vous nous dites

 27   qu'une voiture a été arrêtée dans laquelle on transportait bon nombre

 28   d'articles ménagers. Pouvez-vous nous dire où cela s'est produit ?

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  1   R.  Je ne m'en souviens pas.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez été transporté par quelqu'un

  3   qui, apparemment, transportait un canapé rouge, un fauteuil  et d'autres

  4   articles de ce type et puis vous avez été arrêté par la police. Pouvez-vous

  5   nous dire où cela s'est produit ?

  6   R.  Comme je l'ai déjà dit, j'ai croisé cet homme à un endroit, quelque

  7   part sur la route, je ne me souviens plus exactement où, et il m'a ramené

  8   chez moi à Vodice.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et où la police a-t-elle arrêté la

 10   voiture ?

 11   R.  Je ne m'en souviens pas non plus. Il y avait toute une série de points

 12   de contrôle, à Bribirske Mostine, à Cista Mala, un autre point de contrôle

 13   près de Vodice contrôlé par la police civile et militaire. Donc je ne me

 14   souviens pas au juste.

 15   Il s'agissait d'un territoire très étendu et l'on pouvait éviter

 16   certains points de contrôle. La police ne pouvait tout simplement pas

 17   contrôler tout le territoire qui était si étendu que même s'il y avait eu

 18   un plus grand nombre de policiers, ils n'auraient pas pu tout contrôler.

 19   Donc si j'avais souhaité emmener quelque chose, j'aurais pu le faire

 20   parce que nous connaissions chaque centimètre du territoire, chaque

 21   buisson, et la police ne pouvait rien faire pour nous empêcher de faire ce

 22   que nous voulions faire, si nous étions vraiment appliqués à le faire.

 23   Pour ce qui est de l'armée, tout s'est très bien passé, en ce qui

 24   concerne Ivosevci et à partir de là, pour être tout à fait franc, nous

 25   agissions comme il nous plaisait de le faire. Je ne parle pas d'unités, je

 26   parle d'individus. C'est la vérité, je vous décris les choses telles

 27   qu'elles étaient.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Vous nous avez parlé --

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  1   M. KEHOE : [interprétation] Pardon, mais l'interprète a demandé que le

  2   témoin répète ce qu'il avait dit concernant les généraux.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Voyons…

  4   Vous avez dit "à partir de ce moment-là," je crois que vous faisiez

  5   allusion --

  6   M. WAESPI : [interprétation] Je crois qu'il avait mentionné Ivosevci.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous avez dit :

  8   "Pour être tout à fait franc," vous procédiez comme vous en aviez envie. Et

  9   vous avez dit : "Je ne parle pas d'unités, je parle d'individus."

 10   Est-ce que vous avez mentionné des généraux à ce moment-là ? Les

 11   interprètes ne sont pas sûrs d'avoir saisi. Est-ce que vous avez mentionné

 12   des généraux ?

 13   R.  Oui. Ce que j'ai dit, c'est ce qui suit et cela reflète ma pensée

 14   sincère.

 15   Toutes les exactions, si l'on peut dire qu'il s'agissait d'exactions, on ne

 16   sait pas si de tels actes ont réellement été commis, mais je suis le

 17   premier qui devrait être accusé ainsi que toutes les autres personnes qui

 18   auraient perpétré ces crimes.

 19   A partir d'Ivosevci, c'est nous, en qualité d'individus, qui avons commis

 20   ces exactions, si on veut les qualifier ainsi. Il s'agissait de personnes

 21   innocentes que vous avez fait prisonniers ici, ainsi que leurs familles et

 22   de la Croatie toute entière. En fait, ce sont des criminels et des

 23   meurtriers tels que moi-même qui devraient être accusés.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. En ce qui concerne les points

 25   de contrôle, les barrages, vous nous avez parlé de tracteurs qui étaient

 26   transportés. Comment est-ce que vous arriveriez à traverser un barrage en

 27   transportant un tracteur ?

 28   R.  Je l'ai déjà dit, s'il y avait eu 1 000 barrages et deux fois plus de

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  1   policiers, nous aurions tout de même trouvé le moyen de les éviter. La

  2   police contrôlait certains barrages aux points de contrôle, mais nous

  3   connaissions chaque sentier dans les forêts, chaque chemin qui nous

  4   permettait de contourner la police et ces barrages.

  5   Je vous le dis parce que moi-même je suis parvenu à plusieurs reprises, je

  6   transportais un mouton, du jambon, et j'ai réussi à les contourner, à les

  7   éviter, éviter la police parce que si je ne les avais pas évités, ils

  8   m'auraient confisqué ce que je transportais. Mais l'on pouvait poursuivre

  9   son chemin librement, si on le souhaitait.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette Chambre de première instance a eu

 11   connaissance d'éléments de preuve, certains éléments de preuve qui laissent

 12   penser que parfois, aux barrages ou aux points de contrôle, même si

 13   certains biens avaient peut-être été volés, les personnes qui contrôlaient

 14   ces barrages n'étaient pas très vigilantes ou pas très attentives à saisir

 15   ces biens.

 16   Vous est-il arrivé de traverser un barrage sans être inquiété par rapport à

 17   ce que vous transportiez ?

 18   R.  Non, c'est inexact. La police s'acquittait de ses fonctions de façon

 19   adéquate, saisissait ou confisquait des biens. Une fois, des soldats ont

 20   réussi à m'attraper et ils ont confisqué le vin et le jambon que j'avais

 21   sur moi. Mais à Bribirske Mostine, aux barrages, aux points de contrôle,

 22   j'ai vu des dizaines de tracteurs que la police avait confisqués à des

 23   personnes qui se livraient au pillage, qui prétendaient que ces tracteurs

 24   leur appartenaient, mais sans pouvoir le prouver. Alors, la police a saisi

 25   ces biens et par la suite, s'ils pouvaient produire des documents qui

 26   attestaient du fait qu'ils étaient effectivement les propriétaires de ces

 27   tracteurs, à ce moment-là, la police leur restituait ces biens. Et bien

 28   entendu, ceux qui avaient des documents de ce type étaient peu nombreux,

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  1   étant donné qu'ils avaient été expulsés de leurs maisons, ils n'avaient pu

  2   qu'emmener un sac en plastique et avaient dû partir même sans chaussures.

  3   Je peux vous dire que le premier jour, lorsque les Chetniks ont

  4   envahi notre village, une centaine ou 200 personnes ont été rassemblées de

  5   force par eux et on a tiré sur eux, sur leurs jambes. Ils ont dû partir en

  6   courant sur un terrain qui ne comportait aucun sentier. A Raslina, au bord

  7   du lac, ils ont été accueillis par des gens qui leur ont permis de

  8   traverser le lac. Mes parents et tous les habitants du village ont passé un

  9   mois en exil en cet endroit.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une dernière question. Lorsque vous vous

 11   trouviez à Ivosevci, l'on vous a demandé qui était votre commandant à

 12   l'époque. Je crois que vous avez dit que vous ne saviez pas qui il était au

 13   juste, si je vous ai bien compris.

 14   Pouvez-vous nous dire quel était son grade ?

 15   R.  Non. Je n'en sais rien. Je n'en sais vraiment rien. Je n'avais pas

 16   combattu à leurs côtés auparavant. Ils avaient leur propre bataillon. Il y

 17   avait un bataillon à Vodice et un autre à Skradin et un troisième encore

 18   était basé, je ne me souviens plus où ce 3e Bataillon était cantonné. Je ne

 19   m'en souviens plus.

 20   Quoi qu'il en soit, c'était une zone très étendue. Notre bataillon, le 15e

 21   Régiment, s'occupait de toute la zone allant de Stankovci à Sibenik, donc

 22   une très grande étendue. Je ne sais pas où l'un de ces bataillons était

 23   cantonné. J'étais dans la section d'intervention à Vodice qui faisait

 24   partie du régiment et nous étions cantonnés à l'endroit qui s'appelait la

 25   fabrique de sucre, pour ainsi dire. Donc il y avait une section, un peloton

 26   --

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et quand était-ce exactement ?

 28   R.  -- et nous participions à des actions d'intervention.

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  1   Dès le début, peut-être un mois ou deux après que le régiment ait été

  2   créé, une autre section d'intervention dirigée par un certain Krunoslav

  3   Lazarin [phon] a été mise sur pied. J'avais déjà été formé, mais par la

  4   suite nous avons bénéficié d'une formation.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous demande quand est-ce que cela

  6   s'est produit par rapport au début de l'opération Tempête. Vous, vous

  7   parlez de la structure du bataillon, alors que moi, ce que je vous

  8   demandais, c'était à propos de l'époque que vous avez passée. Et là encore,

  9   j'ai un peu de mal à retrouver les noms.

 10   Je vous parle du moment où vous faisiez vos propres missions, à une

 11   époque où vous avez monté la garde auprès du château d'eau et des églises.

 12   Vous avez dit à Ivosevci. Et c'est de cette période-là dont vous parlez ?

 13   Moi, je vous posais la question de savoir qui était votre commandant au

 14   moment où vous étiez à Ivosevci.

 15   R.  Je ne sais pas. Je ne connais pas son nom. Je ne l'ai jamais vu. Le

 16   commandement se trouvait à Skradin, donc je ne le connaissais pas. Je n'ai

 17   connu le nom qu'après lorsqu'il a fallu que je reconstitue mon itinéraire

 18   de guerre. Je pense que ce nom était Selimir Vuksic ou quelque chose comme

 19   ça. Je ne le connais pas personnellement. Il se trouvait à Skradin et moi

 20   j'étais dans le champ de bataille inférieur à 10 kilomètres de là, à

 21   Vodice.

 22   [La Chambre de première instance se concerte]

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le Juge Kinis à une question à vous

 24   poser à ce propos, apparemment.

 25   Mme LE JUGE KINIS : [interprétation] Vous avez dit qu'on vous a donné une

 26   affectation selon laquelle il fallait faire des recherches dans les maisons

 27   abandonnées à Kistanje et vous avez également dit pendant votre témoignage

 28   que vous y avez trouvé beaucoup d'armes.

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  1   Est-ce qu'avant ces instructions, cette opération, est-ce que vous avez

  2   reçu des instructions quant à quel sort réserver à ces armes éventuellement

  3   si vous les trouviez dans ces maisons abandonnées ? Est-ce qu'il y avait

  4   des règles qui vous disaient, par exemple, s'il fallait soumettre des

  5   rapports quant à l'issue de ces opérations ou vous laissait-on vous occuper

  6   des armes comme bon vous semblait ?

  7   R.  Pour ce qui est des ordres et le code de conduite, ça, c'est quelque

  8   chose que l'armée croate avait déjà reçu en 1992, 1993. Cela s'appliquait

  9   aussi bien aux brigades et aux régiments. Nous connaissions tous le code de

 10   conduite militaire avant l'opération.

 11   Pour en revenir maintenant aux armes, les armes trouvées à Kistanje et dans

 12   d'autres villages, nous ne pouvions pas les emmener avec nous. On ne peut

 13   pas porter plus de trois fusils. Donc on n'a pas emporté les armes. Les

 14   gars qui suivaient, disons notre sillon, sont ceux qui ont rassemblé les

 15   armes. Moi, je ne pouvais pas rassembler les armes. Il fallait que je

 16   poursuive l'opération.

 17   On trouvait des fusils dans quasiment toutes les maisons et à ce

 18   moment-là, on remettait les armes au barrage le plus proche ou au

 19   commandant le plus proche. Et puisqu'il n'y en avait pas, je ne peux rien

 20   vous dire à ce sujet.

 21   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Autre question. Vous avez parlé pendant

 22   votre témoignage que votre unité a été dépêchée vers Ivosevci, ce qui se

 23   trouve à une distance d'environ 76 ou 77 kilomètres de Vodice.

 24   Est-ce qu'il vous a fallu demander l'autorisation pour faire ce

 25   voyage jusqu'à Vodice ? Est-ce qu'on vous a demandé de revenir le lendemain

 26   matin pour continuer votre opération ? Comment se passait la chaîne de

 27   commandement et de contrôle à l'époque, car vous étiez dans l'armée ?

 28   R.  Oui, en effet. Je suis arrivé à Kistanje. Nous nous y sommes rendus à

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  1   pieds et on a marché pendant un jour et demi. D'ailleurs, j'avais le pied

  2   qui était enflé. J'ai demandé aux gars du corps médical de me transporter

  3   aux urgences car il y avait des médecins dans le sous-sol de l'hôtel Olimp

  4   [phon] à Vodice et ils étaient là, prêts à intervenir.

  5   Donc ils m'ont emmené en bas, là-bas, pour qu'on soustraie l'eau de

  6   mon genou, et ensuite on m'a ramené. Moi, je ne pouvais pas revenir chez

  7   moi et je voulais revenir en dépit de mon genou, mais j'étais malade.

  8   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Qui est-ce qui vous a autorisé à

  9   procéder de la sorte ? Vous avez également dit que pendant trois nuits,

 10   vous vous êtes caché derrière la maison de la victime et que vous attendiez

 11   l'apparition de cet individu que vous vouliez arrêter à l'époque.

 12   C'est qui qui exerçait le contrôle sur vous et sur votre conduite et

 13   sur les soldats, en général, à cette époque-là ? Vous avez dit que vous ne

 14   saviez pas qui était votre officier supérieur, ni qui était le commandant

 15   de la section. Mais est-ce qu'il y avait un système de contrôle sur la

 16   façon dont se conduisaient les soldats ou est-ce qu'on laissait les soldats

 17   se déplacer partout où ils voulaient la nuit ?

 18   R.  Non. Vous avez parlé du meurtre, mais ça s'est produit plus tard.

 19   Au début, tout était connu, on savait qui faisait quoi, où et

 20   comment, qui était autorisé à faire quoi. Nous connaissions bien les

 21   ordres, mais par la suite, à partir du moment où on a été Ivosevci,

 22   quelques jours après l'opération Tempête, les gars qui le pouvaient

 23   s'éloignaient un peu plus. Il y en a certains qui sont restés sur place

 24   pour monter la garde près du château d'eau, dans les églises, et cetera. Je

 25   les ai rejoints. Je ne sais pas de quelle section ils faisaient partie, je

 26   pouvais entrer dans n'importe quel peloton parce qu'on se connaissait tous

 27   là-bas. Ce n'était pas l'armée américaine. On était de simples soldats, des

 28   paysans qui étaient devenus du jour au lendemain soldats. Certaines choses,

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  1   on les faisait indépendamment sans recevoir d'ordre.

  2   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Merci beaucoup.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il y a des questions de suivi

  4   du côté de la Défense ?

  5   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Continuez alors.

  7   Nouvel interrogatoire supplémentaire par M. Kehoe : 

  8   Q.  [interprétation] Je voudrais d'abord voir le document D204, un ordre

  9   provenant du général Gotovina, daté du 10 août 1995. 

 10   Monsieur Bilic, c'est un ordre émanant du général Gotovina concernant le

 11   fait de se conformer aux mesures disciplinaires militaires.

 12   M. Waespi vous a posé des questions concernant votre conduite et par le

 13   Juge Kinis quant à vos mouvements, si on regarde le numéro 1 de cet ordre,

 14   on voit :

 15   "J'interdis un quelconque mouvement aléatoire des membres de la HV dans les

 16   zones libérées sans que les commandants supérieurs en soient informés."

 17   Article numéro 2 :

 18   "Prendre toute mesure nécessaire et exécuter pleinement la conduite

 19   disciplinaire militaire et le maintien de l'ordre dans la zone de

 20   responsabilité, empêcher l'incendie criminel et tout autre acte illicite."

 21   Voici la question de M. Waespi selon laquelle si vous receviez un ordre du

 22   général Gotovina, est-ce que vous l'auriez suivi ? Est-ce que vous avez en

 23   réalité reçu cet ordre ?

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi.

 25   M. WAESPI : [interprétation] Ce n'est pas une question qui vient à la suite

 26   de ma propre question.

 27   M. KEHOE : [interprétation] Mais si, bien entendu que si.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Essayons de comprendre. Avez-vous jamais

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  1   vu cet ordre jusqu'à ce jour ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Personnellement, non. Je n'étais pas

  3   commandant, mais ce que je sais, c'est qu'on a souligné --

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon, la réponse est non.

  5   Est-ce que vous avez jamais reçu un ordre selon lequel tout mouvement

  6   arbitraire des membres de la HV dans les zones libérées sans qu'en soient

  7   informés les commandants supérieurs a été interdit, de façon à ce que les

  8   membres de la HV ne pouvaient pas se déplacer sans que leurs commandants en

  9   soient informés ?

 10    Est-ce que vous n'avez jamais reçu un ordre de ce type ?

 11    LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr que oui. Pendant les premiers jours,

 12   on n'avait même pas le droit de se rendre où que ce soit. On nous a dit de

 13   ne pas nous mélanger. Chacun d'entre nous avait ses propres insignes.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Laissons de côté pour l'instant les

 15   premiers cinq jours de l'opération Tempête. Mais après, avez-vous jamais

 16   reçu un ordre comme quoi il était interdit de se déplacer sans raison aux

 17   membres de la HV dans les zones libérées sans que les commandants

 18   supérieurs en soient informés ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Malheureusement, j'ai assumé certaines

 20   responsabilités de ma propre initiative, comme je vous l'ai déjà dit, et je

 21   m'en tiens responsable. Je me tiens responsable pour beaucoup de choses.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne vous demande pas si vous vous

 23   sentez responsable. Ma question est de savoir si après les quatre ou cinq

 24   premiers jours de l'opération Tempête, vous avez reçu un ordre parvenu par

 25   une voie quelconque. Est-ce que vous avez reçu un ordre selon lequel les

 26   déplacements sans raison des membres de la HV étaient interdits si les

 27   commandants supérieurs n'en étaient pas informés ?

 28   Avez-vous jamais reçu un ordre de ce type ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne m'en souviens pas. Je ne m'en souviens

  2   vraiment pas. Peut-être que si, peut-être que non, mais je ne m'en souviens

  3   pas.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A cette époque précisément, est-ce que

  5   vous avez reçu un quelconque ordre, nous parlons toujours ici de la période

  6   après les quatre ou cinq premiers jours, visant à faire prendre toute

  7   mesure visant à s'engager pleinement dans la mise en œuvre de conduite

  8   disciplinaire militaire ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me souviens pas. Peut-être que si, peut-

 10   être que non. Je ne me souviens pas de ce type de choses.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe.

 12   M. KEHOE : [interprétation] Je vais maintenant traiter de certaines

 13   questions que l'Accusation a soulevées. Le premier document, c'est le

 14   document P2564.

 15   Q.  Regardons le compte rendu d'audience à la page 75, ligne 21. Il s'agit

 16   de la dernière question de l'Accusation concernant le rassemblement.

 17   A la ligne 21, M. Waespi vous a demandé :

 18    "En octobre 1995, vous étiez au courant de l'existence d'une

 19   manifestation pacifique" ?

 20   Si je peux remonter un petit peu, ici, je vais vous lire la partie

 21   inférieure de ce document qui n'a pas été lue, si on passe à la page

 22   suivante. C'est un document émanant du général Lausic.

 23   "Nous vous joignons le rapport de renseignements pour votre information, de

 24   même qu'un ordre pour que vous preniez toutes les mesures nécessaires afin

 25   de prévenir le rassemblement d'être organisé."

 26   Cette partie-là ne vous a pas été lue. Si on passe un peu plus bas, est-il

 27   vrai de dire que vous ne vous souvenez pas d'un tel rassemblement ?

 28   R.  Il me semble qu'à cette époque-là j'étais déjà en prison.

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  1   Q.  Vous étiez en prison. Très bien.

  2   Maintenant, nous allons passer à autre chose. Il s'agit du document 2565 et

  3   le bureau du Procureur vous a parlé de ce document qui comporte deux pages

  4   --

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est celui-là qu'il ne fallait

  6   pas montrer au public.

  7   M. KEHOE : [interprétation] Non, je ne pense pas. C'est celui qui concerne

  8   l'arrêt du 23 août, le contrôle du 23 août.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 10   M. KEHOE : [interprétation] Page 3.

 11   Q. Pendant le témoignage, à la fois pendant le contre-interrogatoire et

 12   lorsque vous répondiez aux questions du Juge, vous avez parlé de ce barrage

 13   où vous avez été arrêté alors que vous vous rendiez en direction de Vodice,

 14   et que vous étiez au volant d'un véhicule Lada. Est-ce qu'il s'agit d'un

 15   véhicule militaire Lada ou d'un véhicule civil ?

 16   R.  Je ne me souviens pas.

 17   Q.  Concernant maintenant les confiscations, allons un peu plus loin. Il

 18   s'agissait d'une Lada qui n'avait pas de plaque d'immatriculation. Les

 19   véhicules militaires en question portent une plaque HV ?

 20   M. WAESPI : [interprétation] Ce sont des questions directrices. Le témoin a

 21   déjà répondu qu'il ne se souvenait pas.

 22   M. KEHOE : [interprétation] Je lui pose une question concernant sa

 23   connaissance des véhicules HV.

 24   Q.  Est-ce que les véhicules HV portent une plaque d'immatriculation avec

 25   un numéro HV ?

 26   R.  Oui, ils avaient leurs propres plaques. Je pense que c'était des

 27   plaques jaunes d'ailleurs, des plaques HV jaunes.

 28   Q.  Si on regarde les deux dernières lignes à ce barrage, on voit que les

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  1   articles ont été mis entre les mains des policiers et qu'un rapport

  2   disciplinaire militaire a été rédigé.

  3   Cela veut dire que les individus qui contrôlaient le barrage vous ont

  4   pris ces articles, n'est-ce pas ? Les personnes chargées du maintien de

  5   l'ordre ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Revenons à un certain nombre de choses que vous avez dites auparavant

  8   dans le paragraphe 4 de votre déclaration. Inutile de les mettre sur

  9   l'écran. La pièce D1547 où il est question du fait que vous avez été

 10   démobilisé et que vous avez rendu vos armes le 18 août. Je voudrais vous

 11   poser des questions sur un certain nombre de rapports qui ont été versés au

 12   dossier par l'Accusation, P2187, dans le rapport de la police militaire

 13   daté du 4 octobre tout d'abord.

 14   Je vais passer en revue très rapidement ces documents et je vais vous

 15   poser une seule question à la fin.

 16   P2187, page 1.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi.

 18   M. WAESPI : [interprétation] Je ne vois pas très bien quel est l'objectif

 19   ici de montrer ces documents au témoin. Il y a un danger que les questions

 20   soient directrices.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai deux préoccupations. La première,

 22   c'est que nous ne pouvons entendre du témoin que des éléments de preuve

 23   qu'il a à sa disposition au cours des procédures normales; je regarde

 24   également ma montre.

 25   M. KEHOE : [interprétation] Je vais essayer de résumer.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Posez la question et on verra s'il y a

 27   besoin de montrer les documents.

 28   M. KEHOE : [interprétation]

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  1   Q.  Monsieur Bilic, est-ce que vous étiez au courant du fait que votre cas

  2   faisait l'objet d'une enquête conjointe avec la police militaire et le MUP

  3   ? Je vous parle ici du meurtre de Dara Milosevic.

  4   R.  Non. La police civile l'a fait.

  5   Q.  Est-ce que vous saviez qu'à l'époque il avait été établi que vous

  6   n'étiez pas membre de la HV au moment où vous avez tué Dara Milosevic ?

  7   R.  Ils ne le savaient pas.

  8   Q.  En fin de compte, ce sont les tribunaux civils qui vous ont jugé,

  9   n'est-ce pas, au moment où vous avez reçu votre peine de huit ans ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Je pourrais soulever les arguments lors de l'étude des documents le

 12   moment venu.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne sais pas si le témoin pourra

 14   véritablement nous aider quant à la compétence en matière d'enquête, mais

 15   si nous avons ces documents, ces éléments pourront faire l'objet d'études à

 16   part.

 17   Je regarde les autres équipes de la Défense. Apparemment il n'y a pas

 18   d'autres questions.

 19   Monsieur Waespi.

 20   M. WAESPI : [interprétation] Oui, je peux faire une procédure sans passer

 21   par le truchement du témoin.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En effet, nous n'avons pas besoin du

 23   témoin

 24   M. WAESPI : [interprétation] En effet.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Bilic, cela apporte à son terme

 26   votre témoignage ici devant ce Tribunal. Je voudrais vous remercier d'avoir

 27   fait le voyage et d'avoir répondu aux questions qui vous ont été posées par

 28   les différentes parties et par les Juges, et je vous souhaite un bon voyage

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  1   de retour.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci. Je voudrais moi aussi vous remercier

  3   d'avoir conduit cette opération convenablement. Je voudrais saluer mes

  4   généraux et leur faire passer les tributs de toute la Croatie. Nous

  5   souhaitons leur retour chez nous.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est assez inhabituel de voir un

  7   témoin saluer un accusé, mais bien entendu, les accusés ont dû entendre

  8   votre message.

  9   Madame l'Huissière, pouvez-vous escorter le témoin.

 10   [Le témoin se retire]

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très rapidement, deux questions de

 12   procédure. Tout d'abord, l'Accusation a-t-elle reçu la déclaration du

 13   témoin pour le témoin AG-24, afin de leur permettre --

 14   Si ce n'est pas le cas, assurez-vous que ça le sera.

 15   M. KEHOE : [interprétation] Oui. J'essaie d'obtenir l'autorisation en vertu

 16   de l'article 70, et je fais de mon mieux, mais pour l'instant ce n'est pas

 17   le cas.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends très bien, mais vous avez

 19   remarqué que l'Accusation a déjà dit qu'il lui faudra la déclaration avant

 20   afin d'être en mesure de répondre.

 21   M. KEHOE : [interprétation] Je fais de mon mieux. Je rajouterais autre

 22   chose. Il y a une question qui malheureusement --

 23   L'INTERPRÈTE : Les orateurs se chevauchent.

 24    M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons déjà volé pas mal de temps

 25   aux interprètes et aux verbalistes et au reste du personnel.

 26   Mais il y a une question qui reste en suspens. Nous n'allons pas

 27   avoir d'audience le 6 juillet. Pour ce qui est des autres questions, on va

 28   les remettre à demain.

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  1   Nous allons arrêter aujourd'hui et nous reviendrons en audience

  2   demain, jeudi 2 juillet à deux heures et quart, dans le prétoire numéro I.

  3   --- L'audience est levée à 19 heures 07 et reprendra le jeudi 2 juillet

  4   2009, à 14 heures 15.

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