Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 13 juillet 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 06.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous.

  6   Madame la Greffière, veuillez citer le numéro de l'affaire, je vous prie.

  7   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

  8   Messieurs les Juges.

  9   Il s'agit de l'affaire IT-06-90-T, le Procureur contre Ante Gotovina

 10   et consorts.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière.

 12   La Défense Gotovina est-elle prête à entendre son témoin suivant ?

 13   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agit bien de M. Barkovic.

 15   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que M. Barkovic pourrait entrer -

 17   -

 18   M. KEHOE : [interprétation] Un instant, je vous prie.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 20   M. KEHOE : [aucune interprétation]

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce que je constate c'est que des numéros

 22   de pièces enregistrées aux fins d'identification ont été préparés à

 23   l'avance par Mme la Greffière en coopération avec vous.

 24   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est très bien.

 26   M. KEHOE : [interprétation] Nous allons nous efforcer de suivre la même

 27   procédure que par le passé plutôt que de passer en revue chaque document,

 28   c'est-à-dire que nous avons l'intention d'examiner les déclarations 92 ter

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  1   préliminaires, puis de proposer le versement au dossier de ces déclarations

  2   en même temps que les pièces.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une référence est faite aux paragraphes

  4   dans les déclarations préliminaires apparemment.

  5   Monsieur Russo, je suppose qu'il n'y a pas d'objection contre cette façon

  6   de procéder, ce qui veut dire que nous avons simplement déjà affecté de

  7   façon préliminaire un certain nombre de numéros.

  8   M. RUSSO : [interprétation] Pas d'objection. En fait, je n'ai d'objection à

  9   l'encontre d'aucun document, à l'exception d'un seul. Il manque une page à

 10   l'un des documents. Je ne suis pas sûr que ce soit simplement un problème

 11   technique.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous mentionnez le numéro provisoire

 13   de ce document au ministère de la Défense, ce serait bien de façon à ce que

 14   la Défense Gotovina puisse vérifier.

 15   M. RUSSO : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Il s'agit de la

 16   pièce D1599, enregistrée aux fins d'identification.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La page manquante se trouve où ?

 18   M. RUSSO : [interprétation] Je crois que, dans l'original, il est indiqué

 19   que la page 5 est manquante. J'ai la traduction sous les yeux.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 21   M. RUSSO : [interprétation] Si elle est simplement manquante et qu'elle est

 22   impossible à retrouver, pas de problème. Je ne ferai pas objection à

 23   l'admission de ce document.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout va bien.

 25   M. KEHOE : [interprétation] Je vérifierai sans aucun doute.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Y a-t-il autre chose ?

 27   Si tel n'est pas le cas, Madame l'Huissière, veuillez, je vous prie, faire

 28   entrer M. Barkovic dans le prétoire.

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  1   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Barkovic.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M'entendez-vous dans une langue que vous

  5   comprenez ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Barkovic, avant que vous ne

  8   commenciez votre déposition, le Règlement de procédure et de preuve de ce

  9   Tribunal exige que vous prononciez une déclaration solennelle dans laquelle

 10   vous indiquerez que vous direz la vérité, toute la vérité et rien que la

 11   vérité.

 12   Je vous invite donc à prononcer cette déclaration solennelle en vous

 13   appuyant sur le texte qui vous est tendu à l'instant par Mme l'Huissière.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je déclare

 15   solennellement que je dirai la vérité, toute la vérité et rien que la

 16   vérité.

 17   LE TÉMOIN : MLADEN BARKOVIC [Assermenté]

 18   [Le témoin répond par l'interprète]

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

 20   M. KEHOE : [interprétation] Puis-je procéder, Monsieur le Président ?

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie.

 22   Interrogatoire principal par M. Kehoe : 

 23   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Professeur. Pouvez-vous, je vous

 24   prie, décliner vos nom et prénom pour le compte rendu d'audience et épeler

 25   votre nom de famille.

 26   R.  Je m'appelle Mladen Barkovic, B-a-r-k-o-v-i-c, accent aigu [comme

 27   interprété].

 28   Q.  Professeur Barkovic, vous rappelez-vous avoir rencontré les membres de

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  1   la Défense Gotovina à deux reprises, le 30 avril 2009 pour la première, et

  2   ensuite une deuxième fois le 18 mai 2009 ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Vous rappelez-vous avoir signé une déclaration le 18 mai 2009 ?

  5   R.  Oui.

  6   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je demande l'affichage

  7   du document 65 ter numéro 1D2693, et j'aimerais qu'un exemplaire de ce

  8   document soit remis au professeur grâce à Mme l'Huissière.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame l'Huissière, veuillez apporter

 10   votre aide à Me Kehoe.

 11   M. KEHOE : [interprétation]

 12   Q.  Monsieur le Professeur, vous avez maintenant sous les yeux le document

 13   65 ter 1D2693. Reconnaissez-vous ce document comme étant la déclaration

 14   signée par vous le 18 mai 2009 ?

 15   R.  Je le reconnais.

 16   Q.  Avez-vous eu l'occasion de relire ce document avant de pénétrer dans le

 17   prétoire ce matin ?

 18   R.  Oui, absolument.

 19   Q.  Lorsque nous avons examiné ce document ensemble vous et moi, Monsieur

 20   le Professeur, nous avons apporté quelques corrections à ce document,

 21   n'est-ce pas, et j'aimerais que nous les passions maintenant en revue, à

 22   commencer par ce qu'on peut lire au paragraphe 10 du document. Le premier

 23   document énuméré dans ce paragraphe qui figure sous la cote 1D2645 devrait

 24   en fait se lire 1D2648. Vous le voyez, n'est-ce pas, au paragraphe 10 ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Très bien. Je suis l'ordre des paragraphes. Nous passons au paragraphe

 27   16, à l'avant-dernière ligne de ce paragraphe, nous lisons, 133e Brigade de

 28   la Garde patriotique, et je crois que vous nous avez dit qu'il fallait lire

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  1   113e, n'est-ce pas ?

  2   R.  113e, oui, Sibenik, oui.

  3   Q.  Au paragraphe 20, à la dernière ligne, vous évoquez ce document et nous

  4   lisons le nombre de 4365 sous-officiers qui ont été nécessaires à

  5   l'organisation; en fait, il faut lire 4735, n'est-ce pas, il y a eu

  6   interversion de numéro ?

  7   R.  Oui.

  8   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, la dernière correction

  9   ne figure pas dans le document de M. Barkovic, mais elle est

 10   malheureusement en anglais. C'est une erreur de traduction qui se trouve au

 11   paragraphe 23, à la quatrième ligne avant la fin du paragraphe en anglais.

 12   Il s'agit d'un document 65 ter qui est évoqué, nous lisons pour l'instant

 13   dans le texte, le document 65 ter numéro 1 SD 2695. Il convient de lire

 14   1D2659. Il y a eu donc inversion des deux derniers numéros de ce document

 15   dans la version anglaise. Le numéro indiqué dans l'original est exact.

 16   Q.  Professeur, s'agissant des corrections apportées à votre déclaration,

 17   est-ce qu'elle rend fidèlement compte de ce que vous avez dit à la Défense

 18   Gotovina lorsque vous l'avez rencontrée ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Les renseignements qui figurent dans votre déclaration préalable, sont-

 21   ils conformes à la vérité et exacts, selon ce que vous savez ?

 22   R.  Oui, d'après ce que je sais et crois, en effet.

 23   Q.  Professeur, si je vous interrogeais aujourd'hui au sujet des éléments

 24   qui sont indiqués dans votre déclaration préalable, votre déposition au

 25   sujet de ces questions seraient-elles identiques à ce qu'on peut lire dans

 26   le texte ?

 27   R.  Oui.

 28   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, nous demandons le

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  1   versement au dossier du document 65 ter 1D1693 qui est enregistré en tant

  2   que pièce enregistrée aux fins d'identification sous la cote D1583.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, j'ai quelques questions à

  4   vous poser. Le premier numéro que l'on trouve au paragraphe 23, parce que

  5   toutes les autres cotes commencent par 1D, suivi d'un numéro à quatre

  6   chiffres, est-ce que la structure de cette cote est différente puisqu'elle

  7   semble commencer par 1 SD, je parle du document qui figure dans le texte

  8   comme étant 1 SD 2695 et on a interverti un à titre de correction le 9 et

  9   le 5 ?

 10   M. KEHOE : [interprétation] En effet, Monsieur le Président, il convient de

 11   lire le document 65 ter 1D2659, c'est la cote exacte, je vous remercie,

 12   Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai encore une ou deux questions à vous

 14   poser.

 15   Monsieur le Professeur Barkovic, lorsque vous avez fait votre déclaration

 16   préalable, vous l'avez apparemment signée, je vois une signature dans la

 17   version en B/C/S sur ce document rédigé le 18 mai; ceci est-il exact ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous signé votre déclaration après

 20   l'avoir lue dans votre langue ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous relu la version anglaise de

 23   votre déclaration préalable ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avons relu la version de travail rédigée

 25   en anglais avant que je n'appose ma signature. Après qui, nous avons

 26   apporté les corrections dans la version croate. Quant à la version

 27   anglaise, je l'ai vérifiée en même temps que les membres de l'équipe au

 28   cours des derniers jours.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous aviez déjà lu une version

  2   antérieure de la traduction anglaise le 18 mai ou à quelle autre date ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Le 18 mai, j'ai relu la version de travail de

  4   la traduction anglaise, et par la suite, nous avons apporté des corrections

  5   en nous fondant sur la version croate de ma déclaration, celle que j'ai

  6   signée. Ensuite, la version croate a été traduite et je ne l'ai plus revue

  7   avant de venir ici, simplement au cours des deux derniers jours, j'ai

  8   également contrôlé la version anglaise de ma déclaration. J'ajoute bien

  9   entendu que ma connaissance de l'anglais est telle qu'il peut subsister

 10   quelque différence sémantique dans la version anglaise par rapport à la

 11   version croate en fonction de ma façon de comprendre l'anglais.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie. Maître Kehoe, j'ai

 13   également une question à vous adresser. Au paragraphe 16, il y a une

 14   question qui est traitée dans la fiche complémentaire remise aux Juges

 15   également. Nous constatons que la traduction semble comporter une

 16   correction.

 17   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais le témoin a signé la version

 19   originale, et apparemment, il n'a pas apporté de correction dans ce

 20   paragraphe. Or, dans la traduction, nous trouvons une correction car la

 21   réponse ne semble pas être ce qu'elle devrait être. Ce qui pose un problème

 22   quant à la nature même d'une traduction. Un commentaire ?

 23   M. KEHOE : [interprétation] Mon commentaire, Monsieur le Président,

 24   consistera à dire que ce qui le "[sic]" que l'on voit dans la version

 25   anglaise est présente, car c'est ce que le lecteur devrait savoir.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais dans l'original, nous trouvons une

 27   référence à la 113e.

 28   M. KEHOE : [interprétation] A la 133e.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais qui est-ce qui a réalisé la

  2   traduction ? Vous dites nous. Apparemment, quelqu'un sait ce que devrait

  3   être la bonne réponse, mais qui est-ce ?

  4   M. KEHOE : [interprétation] En relisant les documents, Monsieur le

  5   Président, et en assemblant la liasse de documents qui sera utilisée, il

  6   est apparu qu'il s'agissait de la 113e, et nous avons pensé que pour être

  7   précis vis-à-vis de la Chambre, il convenait de modifier le document que le

  8   témoin a signé afin que les Juges puissent obtenir l'aide dont ils ont

  9   besoin du point de vue de la traduction. Nous avons pensé qu'il serait bon

 10   d'informer les Juges de la Chambre qu'il y avait une erreur à ce sujet et

 11   que le document 65 ter 1D2638 fait référence à la 113e Brigade et non à la

 12   133e. C'est la raison pour laquelle nous avons inscrit ici qu'entre

 13   parenthèses, mais c'était simplement dans la volonté de souligner à

 14   l'intention des Juges de la Chambre qu'il y avait une erreur à ce niveau.

 15   Nous avions l'intention, bien sûr, de porter cela à l'intention des Juges

 16   de la Chambre et bien entendu, les Juges pourront voir lorsqu'ils liront ce

 17   document, ce qu'il en est exactement.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais ce n'est pas la correction que je

 19   suis en train de commenter. Je me demandais simplement dans quelle mesure

 20   la traduction pouvait être le résultat du travail d'une personne commentant

 21   le contenu du document, alors que cela va au-delà d'une simple traduction

 22   de mots. Apparemment, il y a tout de même une production personnelle à ce

 23   niveau.

 24   M. KEHOE : [interprétation] En effet, vous avez tout à fait raison,

 25   Monsieur le Président, et c'est la raison d'ailleurs pour laquelle nous

 26   avons mis sic entre parenthèses.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vous remercie de vos réponses.

 28   Des objections, Monsieur Russo.

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  1   M. RUSSO : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, pourriez-vous

  3   affecter une cote ? Cela a déjà fait s'agissant de la déclaration du

  4   témoin, document D1583. Mme la Greffière a proposé d'affecter à ce document

  5   cette cote donc, la pièce D1583 est admise en tant qu'élément de preuve.

  6   Veuillez poursuivre.

  7   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. S'agissant de

  8   l'équilibre des documents qui sont inclus dans la liasse, tous avec un

  9   numéro en 1D, c'est une liste qui a été fournie au greffe, et des numéros

 10   provisoires ont été affectés jusqu'au document D1603.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Donc le problème du document D1599

 12   a été résolu ou pas ?

 13   M. KEHOE : [interprétation] J'ai examiné ce document dans sa version

 14   originale en B/C/S et si nous prenons les numéros dans l'ordre, nous

 15   voyons, dans le coin supérieur droit, qu'apparemment, les documents

 16   semblent se suivre, à la pause je consulterai M. Russo sur ce point, mais

 17   ma commise aux audiences, Mme Katalinic, a tout vérifié sur l'écran, et

 18   nous voyons que les numéros des documents se suivent, en fait. Donc je

 19   montrerai cela à M. Russo c'est certain pendant la pause mais c'est le

 20   document dont nous avons demandé la traduction.

 21   M. Russo peut le voir certainement.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fin, M. Russo n'a pas d'objection

 23   contre l'admission de ce document complet ou incomplet, si j'ai bien

 24   compris.

 25   Par conséquent, la pièce D1584 -- les documents D1584 à D1603 inclus tels

 26   que décrits par Mme la Greffière dans la liste d'aujourd'hui, sont

 27   téléchargés dans le prétoire et sont admis, et la Chambre aimerait qu'on

 28   lui dise une nouvelle fois que la pièce D1599 a bien été vérifiée.

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  1   M. KEHOE : [interprétation] Oui. J'ai expliqué cela dans le résumé.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez lire le résumé de la

  3   déposition.

  4   M. KEHOE : [interprétation] Le Pr Mladen Barkovic a travaillé dans le

  5   département de l'éducation militaire de l'entraînement et de la recherche,

  6   ainsi que du développement de l'armée croate et au collège de guerre entre

  7   1991 et 2005. Il a occupé des positions importantes dans le domaine de

  8   l'organisation et du développement de l'enseignement et du système

  9   d'entraînement militaire de l'armée croate et a participé à l'enseignement

 10   dispensé par l'armée croate avec l'officier responsable ainsi qu'au

 11   processus d'éducation qui a permis à l'armée croate de mettre en place un

 12   certain nombre de programmes d'enseignement entre 1991 et 1995.

 13   Selon le Pr Barkovic, la situation du personnel, du matériel, et de

 14   l'organisation de l'armée de Croatie pendant l'année 1991 était extrêmement

 15   insatisfaisante. Par conséquent, au départ la tâche principale du

 16   département chargé de l'éducation militaire, de l'entraînement, de la

 17   recherche, et du développement ainsi que du collège de guerre a consisté à

 18   apporter un soutien au processus d'organisation structurelle de l'armée

 19   croate en une organisation militaire unifiée dans son ensemble avec une

 20   structure de commandement et de contrôle efficace qui en était la composant

 21   la plus importante. Pour réaliser cet objectif, il a fallu créer entre

 22   autres, un système d'éducation et d'entraînement accéléré destiné aux

 23   commandements subalternes de la hiérarchie, détachement, peloton,

 24   compagnie.

 25   S'agissant de la participation au programme d'éducation et d'entraînement

 26   mise en place, le général Gotovina a envoyé des sous officiers et les

 27   officiers de la région militaire de Split suivre des stages à l'Académie

 28   militaire de Croatie conformément au quota approuvé dans la région

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  1   militaire de Split.

  2   Le Pr Barkovic a également participé personnellement au MPRI et aux stages

  3   proposés et mis en place avec leur aide. Le Pr Barkovic était au sein de

  4   l'armée de Croatie responsable de la coordination avec le MPRI pour mettre

  5   en place des programmes d'entraînement destinés aux officiers et sous

  6   officiers, de l'armée de Croatie. Le premier stage de formation de ce genre

  7   avec le MPRI a commencé à la fin de 1994 et était un stade destiné aux sous

  8   officiers, car l'armée de Croatie ne disposait pas d'un nombre suffisant

  9   d'instructeurs qualifiés pour entraîner les sous officiers, et encore moins

 10   des sous officiers qualifiés.

 11   Le Pr Barkovic remarque que le niveau des sous officiers est un niveau

 12   capital pour le maintien de la discipline au sein d'une armée. Les sous

 13   officiers constituaient un problème important pour l'armée de Croatie car

 14   celle-ci n'était tout simplement pas capable de développer et d'entraîner

 15   les hommes à ce niveau-là compte tenu des circonstances extraordinaires que

 16   l'armée de Croatie -- à laquelle l'armée de Croatie devait fait faire face

 17   entre 1991 et 1995 situation marquée entre autres par le manque de temps

 18   pour entraîner les soldats qui avaient été choisis aux fins de suivre un

 19   tel entraînement, compte tenu également du niveau d'éducation des sous

 20   officiers choisis, des opérations militaires qui se menaient à ce moment-

 21   là, du manque d'instructeurs, et du manque de lieu et d'installations

 22   destinés à l'éducation.

 23   Les lois de la guerre internationale constituaient l'un des éléments

 24   importants du programme d'éducation et d'entraînement de l'armée de

 25   Croatie. Le Pr Barkovic a coordonné son action avec le Comité international

 26   de la Croix-Rouge s'agissant de la formation dispensée aux membres de

 27   l'armée de Croatie au sujet des conventions de Genève, donc le traitement

 28   des civils durant les opérations militaires était reconnu comme devant

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  1   respecté le droit international.

  2   Voici la fin du résumé de la déposition du témoin, Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez poursuivre.

  4   M. KEHOE : [interprétation]

  5   Q.  Nous allons maintenant aborder un certain nombre de sujets pas tous

  6   ceux qui figurent dans votre déclaration, mais je voudrais obtenir des

  7   précisions sur un certain nombre de points.

  8   J'appelle votre attention sur le paragraphe 4 de votre déclaration,

  9   Professeur, dans la première phrase de ce paragraphe, il est fait mention

 10   du fait que la situation du point de vue du personne, du matériel et de

 11   l'organisation de l'armée de Croatie durant l'année 1991 était extrêmement

 12   insatisfaisante.

 13   Alors nous allons discuter de cela et nous allons parler un peu du

 14   personnel. Mais pourriez-vous nous donner le plus rapidement possible une

 15   idée globale de ce que vous aviez à l'esprit lorsque vous parliez de ce

 16   problème d'insuffisance du problème qui existait au sein de l'armée de

 17   Croatie pendant l'année 1991 ?

 18   Pourriez-vous nous nous dire exactement à quoi vous pensiez ?

 19   R.  Compte tenu du fait que depuis la tenue des premières élections libres

 20   et démocratiques en Croatie en 1990, et ce, jusqu'en septembre 1991, la

 21   Croatie ne comptait un ministère de la Défense sans force armée. Tous les

 22   hommes en arme au sein des forces de police étaient -- pardon, les forces

 23   au sein des forces de police, quatre Brigades de la Garde ont été

 24   constituées également, il y avait également une sorte de gendarmerie

 25   relevant de la police. Il est donc clair qu'au moment de l'agression à

 26   l'été 1991, la Croatie ne disposait pas d'un état-major général, ne

 27   disposait pas d'une structure susceptible de faire face à ce genre de

 28   situation, et de mener des actions de combat dignes de ce nom, compte tenu

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  1   notamment également du fait que la Croatie était en partie occupée, en

  2   d'autres termes, certaines parties de son territoire faisaient l'objet

  3   d'une occupation. Personne ne pouvait raisonnablement croire que nous

  4   pourrions faire face.

  5   Autre élément dont il faut tenir compte la Croatie faisait l'objet d'un

  6   embargo, embargo imposé aux importations d'armement mais pas seulement

  7   d'armement, embargo touchant également l'entraînement militaire, et

  8   d'autres choses encore. En d'autres termes, nous étions livrés à nous-mêmes

  9   et nous ne pouvions faire que ce que nous étions capable de faire seul. Si

 10   l'on n'oublie pas qu'il n'y avait pas d'état-major principal, on peut

 11   comprendre qu'il n'y avait pas véritablement de digne de ce nom,

 12   susceptible de régir les activités des forces armées, le ministère de la

 13   Défense était seul et ne disposait que de maigres ressources. Il faisait

 14   partie du gouvernement croate et il devait faire face à certaines questions

 15   opérationnelles notamment tout au long des mois de l'été 1991. Voilà en

 16   gros la situation à l'époque.

 17   Q.  Très bien. Maintenant j'en reviens à votre rôle véritable au sein de la

 18   structure de commandement. Quels ont été les défis que vous avez connus

 19   vous et l'état-major principal de la HV en matière d'entraînement et de

 20   formation afin d'amener les membres de la HV à agir de manière

 21   professionnelle ?

 22   R.  Oui. Il y avait beaucoup plus de défis que de solutions possibles.

 23   D'abord nous étions confrontés à un problème de temps. Il était

 24   impossible vu le temps dont nous disposions de mettre en place des cours

 25   d'entraînement de formation. Les premiers cours mis en place ont alors été

 26   organisés pour les sous officiers et officiers supérieurs au niveau des

 27   pelotons, des compagnies, des sections, tout ceci a été organisé sur sept

 28   jours.

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  1   Par la suite, les cours ont été rallongés à deux semaines, un mois,

  2   et puis ensuite deux mois. En très peu de temps, il fallait donc pouvoir

  3   organiser quelque chose pour les soldats d'active et qui devaient passer un

  4   mois à se former afin de les porter à un niveau de professionnalisme accru.

  5   Autre grand défi, il s'agissait, bien sûr, de trouver le personnel

  6   chargé de l'instruction de ces hommes. Nous étions confrontés à un dilemme;

  7   pouvait-on véritablement rappeler les hommes qui occupaient des positions

  8   sur le terrain et -- leur formation afin qu'ils puissent à leurs tours

  9   former d'autres hommes ? En valait-elle la peine, valait-elle la peine de

 10   les rappeler ? Nous avons finalement décidé effectivement d'en rappeler

 11   certains alors qu'ils se trouvaient sur la ligne de front sachant qu'ils

 12   avaient une expérience directe des combats, et ensuite ces hommes étaient

 13   formés.

 14   Quant aux moyens dont nous disposions, nous étions confrontés au même

 15   dilemme. Valait-il mieux utiliser du matériel à des fins de défense sur la

 16   ligne de front ou bien fallait-il mieux l'utiliser dans le cadre de ces

 17   formations et de ces entraînements. Nous ne disposions pas des moyens dont

 18   nous avions besoin. Nous n'avions pas les moyens d'instruction et

 19   d'entraînement dont nous aurions eu besoin. Toujours en ce qui concerne les

 20   moyens, nous manquions d'espace. Nous manquions des installations

 21   nécessaires pour tenir ce genre de séances d'entraînement. La Croatie a

 22   hébergé un nombre très important de réfugiés, des personnes déplacées et

 23   ceux qui venaient de Vukovar par exemple étaient logées dans les locaux de

 24   l'armée croate et ils occupaient donc les lieux que nous ne pouvions donc

 25   plus utilisés à des fins de formation et d'entraînement, et ceci est resté

 26   vrai jusqu'après la fin de la guerre.

 27   Q.  Professeur Barkovic, les Croates parmi nous vous invitent à ralentir,

 28   s'il vous plaît.

Page 20141

  1   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, en page, un instant,

  2   en page 14, lignes 4 et 5, le témoin a précisé l'endroit où ils étaient

  3   hébergés, logés, je ne crois pas que le compte rendu reflète cette

  4   information.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation]

  6   Monsieur Barkovic.  

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais de qui parlez-vous ? Des réfugiés ou des

  8   militaires ?

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Barkovic, voici ce qu'on lit

 10   maintenant :

 11   "La Croatie accueillait de nombreux réfugiés et personnes déplacées dans

 12   les locaux donc de l'armée croate, ils occupaient donc les locaux…"

 13   Mais de quels locaux parlez-vous ? 

 14   M. MISETIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président, vous avez oublié

 15   une ligne.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai oublié une ligne.

 17   M. MISETIC : [interprétation] Oui, la ligne 4.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En effet. En effet. Je lisais sur un

 19   écran et la version qui s'y trouve n'est pas tout à fait la même que sur

 20   l'autre.

 21   "Et notamment ceux venus de Vukovar étaient logés, hébergés," mais où

 22   exactement ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans les locaux des casernes, de la caserne de

 24   l'Académie militaire croate.

 25   Il y avait plusieurs casernes de ce genre.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Voilà. Le compte rendu est

 27   maintenant complet. Merci.

 28   Veuillez poursuivre.

Page 20142

  1   M. KEHOE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   Q.  J'aimerais qu ensemble demeurions un instant sur cette première phrase

  3   du paragraphe 4, vous parlez de l'organisation normative; c'est le terme

  4   qui est employé ici de la HV. Alors de quoi parlez-vous exactement ?

  5   Qu'est-ce que vous entendez par là ?

  6   R.  Alors s'agissant de la réglementation, bien sûr, on pourrait parler de

  7   beaucoup d'autre chose, mais ici en l'occurrence s'agissant d'activités de

  8   guerre, du recours à la force militaire, il faut bien sûr qu'il y ait un

  9   certain nombre de règles et de dispositions régissant l'usage stratégique

 10   et théorique des forces. Au niveau inférieur, on trouve, bien sûr, des

 11   considérations tactiques, les considérations liées à l'utilisation du

 12   matériel, aux procédures à suivre. Mais si l'on descend de quelques

 13   échelons, s'agissant de l'usage du matériel et des forces, nous n'avions

 14   rien de tout cela. Il n'y avait pas de systèmes militaires organisés à

 15   l'époque dont nous parlons, c'est-à-dire jusqu'à la fin de l'année 1991

 16   lorsque les premières directives ont commencé à apparaître. A l'époque,

 17   l'on donnait simplement des ordres à ceux qui se trouvaient aux échelons

 18   supérieurs du ministère de la Défense, de l'état-major principal, et

 19   ensuite nous nous fondions sur les [imperceptible] existant et qui

 20   s'appliquaient à l'ancienne JNA, les instructions précisant les modalités

 21   d'usage de moyens techniques, tactiques dans le cadre de combats.

 22   L'une des premières tâches en matière de formation consistait à enseigner

 23   aux hommes certaines procédures standardisées, leur montrer comment former

 24   à leur tour d'autres personnes. Donc finalement nous sommes partis de rien.

 25   Nous avons rédigé un certain nombre d'instructions visant à contribuer le

 26   processus d'établissement de règles et de lignes directrice applicables à

 27   l'usage des forces militaires, autres aspects, le système militaire,

 28   l'organigramme et puis avec le temps la structure militaire a commencé à

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  1   évoluer et à devenir de plus en plus régulier disons.

  2   Q.  Très bien. Revenons à la question du personnel concerné. J'avance un

  3   peu dans votre déclaration et j'attire votre attention sur le début du

  4   paragraphe 5. Vous dites :

  5   "Qu'en dépit du fait du manque d'officiers, caractérisés par une

  6   instruction et une formation militaire suffisante tous les membres de la HV

  7   qui avaient suivi préalablement une instruction et un entraînement

  8   militaire ont été promus à un niveau supérieur dans la filière hiérarchique

  9   alors que les positions de commandement intermédiaires et subalternes ont

 10   été occupées par des personnes qui allaient recevoir cette instruction et

 11   cet entraînement militaire."

 12   Alors j'aimerais que vous développiez un peu ce point. Quels étaient les

 13   problèmes rencontrés s'agissant de la structure de la HV et des problèmes

 14   que ceci représentait pour vous ?

 15   R.  Compte tenu de l'agression, bien entendu, nous avons dû constituer une

 16   force militaire importante, mais nous ne disposions pas de suffisamment de

 17   matériel ni de suffisamment d'armes. Nous devions donc mobiliser un nombre

 18   important d'hommes pour constituer de nombreuses unités militaires. C'est

 19   ainsi que nous avons augmenté nos capacités.

 20   Une unité militaire ne peut fonctionner que si la filière hiérarchique --

 21   la structure hiérarchique est bien définie, bien dotée en personnel, dotée

 22   en personnes capable d'effectuer ce genre de tâches. Au fur et à mesure que

 23   ces unités militaires ont été constituées, il y avait de plus en plus de

 24   possibilités de promotion, à savoir quiconque ayant bénéficié d'une

 25   instruction ou d'un entraînement militaire dans le cadre d'écoles pour le

 26   personnel d'active de l'ancienne armée yougoslave, ou bien au travers

 27   d'écoles d'officiers de réserve ou d'écoles chargées de former les sous-

 28   officiers, ou peut-être encore du fait d'une connaissance militaire acquise

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  1   à l'étranger, quiconque donc répondait à ces critères montait rapidement

  2   dans la hiérarchie. En d'autres termes, les anciens officiers de la JNA

  3   étaient immédiatement affectés à des postes élevés aux niveaux plus

  4   subalternes, les postes de commandement de sections et des compagnies

  5   devenaient vacants.

  6   Ce qui signifie qu'en septembre et en octobre 1991, les besoins en

  7   matière d'instruction et d'entraînement sont devenus de plus en plus

  8   importants et il fallait offrir des cours de plus ou moins longue durée

  9   pour permettre à des hommes formés d'assumer ces positions de commandement

 10   supérieur, donc au niveau des compagnies et des sections.

 11   Q.  Pour que tout soit parfaitement clair, ces positions de commandement

 12   subalternes étaient offertes à des sous-officiers, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui. C'est là que l'on connaissait la plus grande pénurie, pénurie de

 14   sous-officiers; aux niveaux subalternes de commandement. Les postes de

 15   commandement des pelotons étaient proposés aux personnes qui faisaient

 16   preuve de la plus grande ambition, parfois même contre leur gré, parce que

 17   les responsabilités liées à ce genre de poste sont devenues de plus en plus

 18   importantes; cela étant dit, à l'époque, le moral des hommes étant ce qu'il

 19   était, ces postes étaient facilement pourvus. Quoi qu'il en soit, nous

 20   avions des personnes à des postes de sous-officier qui n'avaient même pas

 21   de capacités tactiques ou techniques, et il fallait donc les former afin

 22   qu'ils puissent diriger d'autres hommes dans une unité militaire digne de

 23   ce nom.

 24   Q.  Très bien. Nous allons revenir un petit peu plus dans le détail sur ces

 25   questions tout à l'heure dans le courant de la matinée.

 26   Mais avant cela, j'aimerais évoquer avec vous quelques éléments de votre

 27   déclaration; paragraphe 10, vous parlez -- les unités de la Garde

 28   patriotique. J'aimerais que nous examinions deux documents, D1588 --

Page 20145

  1   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, pour le témoin,

  2   j'aimerais qu'une copie papier de ce document lui soit remise. Ceci

  3   pourrait accélérer les choses.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, pas d'objection ?

  5   M. RUSSO : [interprétation] Non.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

  7   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

  8   Q.  Professeur, examinons l'intercalaire 7 de votre classeur D1588. C'est

  9   un document du district militaire de Split qui concerne l'analyse de

 10   l'instruction et de la formation en 1994. Si l'on examine la deuxième page

 11   de l'anglais, vers le bas, au paragraphe qui commence ainsi : "Une

 12   situation relativement pacifique…"

 13   Tout à la fin de ce paragraphe on dit donc :

 14   "Notamment lorsque l'on sait qu'environ 60% des membres de toutes nos

 15   unités sont des personnes expulsées."

 16   Vous en parlez -- et d'ailleurs j'examine maintenant un autre document qui

 17   se trouve à l'intercalaire 8 de votre classeur, le document D1587. Donc je

 18   vais faire référence à ces deux documents, Monsieur Barkovic, et je vais

 19   vous poser quelques questions à leur sujet dans un instant.

 20   Donc toujours à l'intercalaire 8 de votre classeur.

 21   R.  Oui, c'est bon.

 22   Q.  Il s'agit d'un rapport sur l'instruction et l'entraînement dont a

 23   bénéficié le 15e Régiment de la Garde, document portant la date du 19

 24   novembre 1994. J'aimerais que l'on examine la première annexe de ce

 25   document, à la septième page de l'anglais. Aux deuxième, troisième,

 26   quatrième, et cinquième lignes avant la fin du paragraphe, on lit que le

 27   15e Régiment de la Garde est constitué à 70% d'hommes provenant des zones

 28   occupées et de lieux d'emplacement situés le long de la ligne de front.

Page 20146

  1   C'est à la page 7 en B/C/S.

  2   Dans votre déclaration, Professeur, vous dites à peu près à la moitié du

  3   dixième paragraphe que le niveau de préparation au combat, le niveau

  4   d'instruction et d'entraînement, était bien inférieur au niveau constaté au

  5   sein des brigades professionnelles, et ce, pour un grand nombre de raisons.

  6   Parlez-nous, s'il vous plaît, de cette différence entre les brigades

  7   professionnelles et ces brigades de la Garde nationale, qu'est-ce qui

  8   explique cette différence, quelles sont ces multiples raisons dont vous

  9   parlez.

 10   R.  Les raisons sont liées à la manière différente dont ces unités ont été

 11   créées, et au contexte d'alors en Croatie. La première raison a trait au

 12   choix des hommes. Dans l'un des cas, la sélection était faite de manière

 13   tout à fait sérieuse, menée à la lumière de critères bien établis; et la

 14   sélection était suivie par la fourniture d'un entraînement, d'une

 15   instruction pour les brigades de la Garde, un entraînement initial au cours

 16   duquel les officiers et les sous-officiers de la brigade de la Garde

 17   avaient priorité à l'Académie militaire croate, et l'Académie militaire

 18   offrait une excellente formation.

 19   Les unités nationales ou patriotiques c'est tout autre chose. Ces unités

 20   ont été formées selon un principe territorial, et constituées de personnes

 21   se portant volontaires pour défendre leur pays; mais leurs connaissances,

 22   leur savoir militaire était relativement limité.

 23   Comme je l'ai dit, les capacités de l'académie étaient également

 24   assez limitées et les membres des Gardes nationales ou patriotiques avaient

 25   du mal à entrer à l'Académie. Très peu y sont parvenus, en réalité.

 26   Voilà les trois raisons principales expliquant la différence : la

 27   sélection des hommes, les priorités en matière d'entraînement et

 28   d'instruction, et le fait que leurs membres avaient été mobilisés selon un

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  1   principe territorial. Quasiment tous ces membres venaient de ce territoire.

  2   Peut-être pas tous, mais en tout cas 60 à 70 %.

  3    Nous avons essayé de remédier à ce problème. Ainsi, l'état-major

  4   général chaque année donnait un certain nombre d'ordres prévoyant un

  5   entraînement pour les unités, ici on voit un exemple d'ordre qui concerne

  6   précisément cette question de la formation d'un régiment de la Garde

  7   patriotique ou nationale.

  8   J'espère que j'ai répondu à la question que vous m'avez posée qui

  9   consistait à savoir pourquoi les premiers étaient beaucoup mieux formés que

 10   les seconds et pourquoi ils pouvaient donc participer à des missions

 11   beaucoup plus complexes.

 12   Q.  J'aimerais rester un instant sur ce thème. Sur ce document qui

 13   est affiché à l'écran et qui concerne le 15e Régiment de la Garde

 14   patriotique, voyons la page suivante de l'anglais, et je vérifierais s'il

 15   s'agit de la même page pour le B/C/S. On voit en haut de la page ce qui

 16   suit :

 17   "Avec les commandants des bataillons, des compagnies et des sections,

 18   nous avons développé le thème suivant, droit international humanitaire de

 19   la guerre…

 20   "Les rudiments ont été présentés dans le cadre de conférences au

 21   cours desquelles nous avons utilisé des fascicules de la Croix-Rouge

 22   internationale et de la Croix-Rouge humanitaire" - dit le document - "afin

 23   de familiariser vos commandants à ces différents documents."

 24   Nous allons procéder plus lentement, je pense que ce serait utile.

 25   Monsieur, ce document porte sur la situation au 19 novembre 1994.

 26   Pouvez-vous nous dire quelques mots supplémentaires sur votre rôle et votre

 27   expérience au sein de l'état-major principal et notamment sur la nécessité

 28   d'offrir une instruction sur le droit international humanitaire, pouvez-

Page 20148

  1   vous nous dire quelle a été la démarche engagée par l'armée croate à cet

  2   égard.

  3   R.  Je me souviens que très peu de temps après l'ouverture et les premières

  4   activités de l'académie croate au début de 1992, nous avons pris contact

  5   avec le bureau du CICR de Zagreb qui nous a aidés dans notre tâche, et

  6   chaque fois qu'un cours était dispensé à l'académie militaire croate, des

  7   représentants du CICR intervenaient et prenaient la parole pendant quelques

  8   heures. Quelqu'un donc du CICR participait et faisait une conférence et

  9   notamment dans le cours consacré à la direction et au commandement, il y

 10   avait aussi toute une partie qui était consacrée à la conduite à tenir par

 11   les hommes, des explications étaient alors fournies aux soldats, leur

 12   étaient précisés les actes et conduites conformes aux conventions de Genève

 13   et les actes et conduites en contravention de ces textes.

 14   Chaque année, un nouvel accord était signé, accord de coopération

 15   avec le CICR, c'était un système bien huilé. Cela ne se faisait pas

 16   seulement au niveau de l'académie militaire mais également au niveau des

 17   unités. Au cours des entraînements qui étaient dispensés, lors d'accalmies

 18   pendant les combats, pendant les périodes de repos, des conférences étaient

 19   données sur le droit international humanitaire, cette action était donc

 20   menée à deux niveaux différents. Un manuel consacré au droit international

 21   et à la conduite de la guerre a également été traduit.

 22   Q.  Prenons les choses par ordre --

 23   M. KEHOE : [interprétation] Mais avant cela, donnez-moi un instant.

 24   [Le conseil de la Défense se concerte]

 25   M. KEHOE : [interprétation] M. Misetic me dit qu'il y a eu un commentaire

 26   fait sur le moment de la formation qui n'aurait pas été repris dans la

 27   traduction.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quelle page et quelle ligne ?

Page 20149

  1   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, c'était à --

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est à la page 21, 23, 24.

  3   M. MISETIC : [interprétation] C'était à la page 21, les lignes 15 et 16 --

  4   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

  5   M. MISETIC : [aucune interprétation]

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une partie de votre réponse qui abordait

  7   le moment où cette instruction a été donnée n'a pas été traduite.

  8   Alors est-ce que vous pourriez peut-être reprendre ce morceau, s'il vous

  9   plaît.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Les premiers cours qui couvraient ce thème-là

 11   au collège de guerre furent dispensés au printemps 1992. Il s'agissait d'un

 12   cours sur 15 jours en février 1992. Ce fut à ce moment-là que le collège de

 13   guerre a commencé à fonctionner.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Continuons.

 15   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. On pourrait peut-

 16   être - justement s'agissant du calendrier des moments, reprendre le

 17   document 1592.

 18   Q.  Il s'agit, dans votre dossier, Monsieur le Témoin, de l'onglet 13.

 19   C'est un document qui a été signé par le général Bobetko en date du 14

 20   décembre 1992 et que l'on pourrait appeler à l'écran.

 21   Dans ce document, nous avons la description d'une formation, instruction,

 22   je prends la dernière page, c'est la description du programme ici, et l'on

 23   voit le point divers. L'on voit qu'il y a dans l'organisation du temps un

 24   morceau qui est consacré au droit international de la guerre.

 25   Est-ce que vous voyez cela, Professeur ?

 26   R.  Oui, oui.

 27   Q.  Justement ce temps qui fut réservé pour cela, est-ce que vous savez

 28   quel a été le temps qui a été réservé pour aborder cette question-là et en

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  1   discuter ?

  2   R.  Oui. Après la nouvelle année 1993, nous avons commencé l'instruction et

  3   l'entraînement au niveau supérieur du collège, au niveau de la direction et

  4   du commandement; donc supérieur à tout ce que nous avions fait par le

  5   passé, c'est justement le programme de cette instruction. Quand on parle de

  6   temps réservé c'était une plage horaire qui était réservée à quelqu'un qui

  7   viendrait du bureau du CICR de Zagreb qui viendrait. Mais nous ne savions

  8   pas encore quand, aussi nous avions prévu une place horaire pour qu'il

  9   puisse donner cette instruction aux futurs commandants de bataillons et de

 10   brigades pour qu'ils aient l'occasion de prendre connaissance de ce sujet.

 11   Q.  Est-ce que les membres du CICR sont venus sur place pour donner cette

 12   instruction ?

 13   R.  Oui, oui, ils sont venus. Ils étaient toujours très heureux de pouvoir

 14   venir, ils étaient aussi très actifs et prenaient des initiatives. Très

 15   souvent, spontanément, ils proposaient leurs services, et quand nous

 16   demandions quelque chose, ils offraient plus que ce que nous avions

 17   demandé.

 18   Q.  Je vous propose de prendre sur le même thème le document D1601, qui a

 19   été versé comme élément de preuve, il s'agit d'un document du CICR en date

 20   du 25 juillet 1995. Il s'agit de l'onglet numéro 10 [comme interprété] de

 21   votre dossier.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'agissant de ce dernier document où

 23   l'on parle du temps qui est réservé à cette instruction, le temps réservé.

 24   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'avons vu que le paragraphe 11 ou

 26   12, quel est le temps total imparti à cette instruction ?

 27   M. KEHOE : [interprétation] Je n'ai pas vraiment compté le nombre d'heures

 28   total.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, j'ai vu qu'il y avait trois heures

  2   qui étaient réservées au droit international de la guerre.

  3   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais savoir ce que cela représente

  5   par rapport au temps total consacré à cette instruction.

  6   M. KEHOE : [interprétation] Très bien. Nous calculerons cela et nous vous

  7   donnerons la réponse.

  8   Q.  S'agissant de ce document, le D1601, nous avons donc un document qui

  9   vient de la personne responsable de l'administration politique du CICR en

 10   date du 25 juillet 1995. Ce qui m'intéresse ici, si vous pouvez prendre la

 11   page suivante.

 12   Professeur, ce qui m'intéresse c'est dans quel ordre les choses se

 13   sont passées --

 14   M. KEHOE : [interprétation] En anglais, il s'agit en fait de la

 15   deuxième page.

 16   Q.  Nous pouvons voir :

 17   "Dans le respect de la continuation d'une coopération existante et

 18   fructueuse entre le ministère de la Défense de la République de la Croatie

 19   et le comité international de la Croix-Rouge en matière de promotion du

 20   droit humanitaire international au sein de l'armée croate entre 1992 et

 21   1994, les parties signataires à cet accord s'accordent à continuer cette

 22   coopération en 1995."

 23   Vous voyez de quoi il s'agit ?

 24   R.  Oui.  

 25   Q.  Est-ce que vous pouvez justement nous confirmer cette relation entre

 26   l'armée croate et la CICR ?

 27   R.  Oui, oui. C'est en effet une coopération que nous avons commencée en

 28   1992. Ce document date de 1995, et il apporte une démonstration du fait que

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  1   cette coopération entre le ministère de la Défense et notre armée et la

  2   CICR est une coopération qui a continué.

  3   Q.  Très bien. Prenons le document D1602, il s'agit de l'onglet 14 de votre

  4   dossier. Il s'agit, Professeur, d'un document du CICR, qui porte le titre

  5   de principes de base du droit de la guerre.

  6   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas si on

  7   peut faire la chose suivante. Peut-être pourrions-nous afficher la page

  8   croate mais la retourner, la mettre dans l'autre sens, parce qu'il y a une

  9   date qui n'a pas été traduite et qu'il serait intéressant que la Chambre

 10   puisse voir.

 11   Dans l'autre sens. Voilà, nous l'avons.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien.

 13   M. KEHOE : [interprétation]

 14   Q.  Professeur Barkovic, donc cet un document traitant des principes de

 15   base de guerre du CICR. Pourriez-vous nous lire la date que nous avons ici

 16   et qui est reprise sur ce document ?

 17   R.  Imprimé au mois de juin 1995. Avec une distribution de

 18   10 000 exemplaires.

 19   Q.  Est-ce que des documents semblables à celui-ci ont été distribués avant

 20   le mois de juin 1995 par l'armée croate ?

 21   R.  Oui. Mais nous avions épuisé le stock rapidement, et c'était souvent en

 22   fait les facultés du collège de guerre qui les distribuaient à tous les

 23   participants à leurs séminaires et leurs stages de formation et

 24   d'instruction, tout comme d'ailleurs tout autre matériel et manuel de

 25   formation et d'instruction qui était distribué pendant ces cours.

 26   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je ne crois pas qu'il

 27   soit nécessaire de reprendre cette brochure par le détail page à page ici.

 28   Malheureusement, la traduction ne reprenait donc pas la date qui est ce que

Page 20153

  1   je voulais verser ici.

  2   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

  3   M. KEHOE : [interprétation]

  4   Q.  Prenons l'instruction en tant que telle et prenons le paragraphe 7 de

  5   votre déclaration. Vous n'êtes pas sans savoir qu'au paragraphe 7 -- à

  6   l'avant-dernière ligne on peut lire :

  7   "Dans certains districts militaires, des centres d'instruction et

  8   d'entraînement étaient mis sur pied ?"

  9   Vous voyez cette phrase ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Vous nous dites certains centres militaires. Est-ce que ceci

 12   reprendrait le centre militaire de Split, qui était sous le commandement du

 13   général Gotovina ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Très bien. Avançons, passons au paragraphe 19 de votre déclaration,

 16   plus ou moins au milieu de ce paragraphe vous faites référence au centre de

 17   formation à Sepurine, qui se concentrait sur la formation et l'instruction

 18   de soldats d'active, de commandants d'escadrons et de sous-officiers,

 19   commandants de sections et de pelotons.

 20   Est-ce que c'est le centre qui avait été créé par le général Gotovina pour

 21   le District militaire de Split ?

 22   R.  Je pense qu'au départ c'était le centre qui avait été mis sur pied pour

 23   l'instruction de la 4e Brigade de la Garde nationale à Split. La réponse

 24   pourrait être oui.

 25   Mais par la suite sur initiative du général Gotovina, ce centre s'est

 26   développé et cette instruction a également été proposée à d'autres brigades

 27   de la Garde nationale. C'est finalement devenu un centre assez grand qui a

 28   offert ses services de formation à tous les sous-officiers et qui a rejoint

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  1   le collège militaire croate. En d'autres termes, il est le résultat de ce

  2   besoin d'instruction pour sous-officiers, et était au départ le centre

  3   d'instruction pour une seule brigade, la Garde nationale, mais qui s'est

  4   développé pour pouvoir ultérieurement proposer ses services à toutes les

  5   autres brigades.

  6   Q.  Continuons justement sur cette formation et concentrons-nous peut-être

  7   sur les documents qui sont utilisés. Je voudrais aborder justement un

  8   document, le 65 ter 2508 [comme interprété], qui n'a pas de cote MFI, il

  9   s'agit d'un document 65 ter qui avait été présenté à l'Accusation. J'ai

 10   consulté d'ailleurs avec mon collègue juste avant l'audience, et il m'a dit

 11   qu'il ne s'y opposait pas, je pense.

 12   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 13   Mme FROLICH : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Vous avez alors autorisé à

 15   verser cette pièce sur la liste 65 ter.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 17   Q.  Professeur, puis-je vous inviter à prendre l'onglet 22 de votre

 18   classeur. Il s'agit donc du document 2D2781 de la liste 65 ter. C'est une

 19   demande du général Gotovina.

 20   Alors avant de ne pencher sur le contenu de ce document, je voudrais vous

 21   demander, Professeur : quel est le thème de ce document ? Il s'agit donc :

 22   "D'une demande qui a été formulée pour prêter main-forte à la construction

 23   d'un centre d'instruction pour l'infanterie et l'artillerie pour répondre

 24   aux besoins du deuxième échelon de l'Unité de réserve du district militaire

 25   de Split." 

 26   De quoi s'agit-il ici ?

 27   R.  En fait, il s'agit ici des forces de réserve. Quand on parle du

 28   deuxième échelon, il s'agit des réserves; ceux qui sont mobilisés c'est la

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  1   Garde nationale. Ils sont fort semblables, dans les tâches qu'ils devaient

  2   accomplir.

  3   Ce que ce document nous montre de manière très claire, c'est que

  4   l'instruction qui est dispensée ici, se concentrait sur les sous officiers

  5   d'active, or le général Gotovina était convaincu qu'il fallait également

  6   donner instruction aux sous officiers de réserve, et c'est dans ce sens

  7   qu'il a mis sur pied un centre d'instruction semblable à celui de Sepurine

  8   celui-ci était constitué à Split et il se consacrait aux sous officiers de

  9   réserve.

 10   Q.  On peut descendre dans ce document et l'on trouvera en fait le titre :

 11   "Explication de la demande," "Justification de la demande," et l'on voit

 12   qu'il est mis que :

 13   "Il y a des besoins réels d'instruction et d'entraînement des sous

 14   officiers au niveau des sections et des compagnies, pelotons, sections et

 15   compagnies,"

 16   Cette demande est donc formulée, mais on voit très bien qu'il est mis

 17   dans ce premier paragraphe :

 18   "Devant les besoins substantiels d'instruction et de formation pour le

 19   district militaire de Split et la capacité assez limitée du centre de

 20   Formation de Sepurine et son orientation portant sur les unités de la

 21   garde, je me vois contraint de trouver une solution effective pour la

 22   formation des sous officiers de réserve afin qu'ils soient aptes au

 23   combat."

 24   Quel était le problème que rencontraient les installations d'instruction au

 25   combat ?

 26   R.  De quels bâtiments ou de quels aménagements parlez-vous ici ? Ceux de

 27   Sepurine ou les autres ?

 28   Q.  Je fais référence à ceux dont on parle ici dans ce document.

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  1   R.  Ce qui est abordé ici c'est que les casernes devaient être repensées de

  2   façon à justement pour pouvoir convenir à la formation des sous officiers,

  3   il fallait voir un peu comment étaient les casernes de Bribirski au départ,

  4   et ce qui devait y être fait, c'est moi personnellement, je ne le sais pas.

  5   Mais à voir la demande il est précisé que certains de ces bâtiments doivent

  6   adaptés pour pouvoir convenir à la formation de sous officiers de réserve.

  7   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais que l'on

  8   puisse verser cette pièce comme élément de preuve donc document portant la

  9   cote 1D2781.

 10   M. RUSSO : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

 12   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Très bien. Ce document portera

 13   dorénavant la cote D1604.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce document est donc accepté comme

 15   élément de preuve.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 17   Q.  S'agissant de la formation des sous officiers dont vous venez de nous

 18   parler, Monsieur le Témoin, puis-je vous inviter à prendre le paragraphe 20

 19   dans votre déclaration, dans ce paragraphe vous faites état de l'importance

 20   des sous officiers. S'agissant du paragraphe 18, que nous avions déjà

 21   parcouru, dans la deuxième phrase de ce paragraphe nous pouvons lire que :

 22   "Un des grands problèmes rencontrés justement par ces sous officiers qui

 23   travaillaient pour l'armée croate depuis le début de la guerre était

 24   justement cette carence en officiers qualifiés."

 25   Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce que vous avez voulu dire sur base

 26   de votre expérience ?

 27   R.  Bon, il y a une chose que je dois dire d'emblée, c'est que les missions

 28   des sous officiers, des officiers tombent sous deux types de tâches à

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  1   accomplir par une armée. On peut toujours bien sûr promouvoir un sous

  2   officier au grade d'officier par une filière hiérarchique, et permettre

  3   être à ceux qui se trouvent tout en bas de la filière hiérarchique, de

  4   devenir officier si voulu.

  5   En fait la performance d'une armée dépend de l'efficacité de ces sous

  6   officiers. C'est eux qui sont en quelque sorte l'épine dorsale d'une armée.

  7   S'ils ne sont pas performants, cela pose problème, en effet, un officier

  8   seul ne peut pas garantir que son armée sera opérationnelle. Nous avons dû

  9   doter chaque poste de commandement de la filière hiérarchique d'une

 10   personne, aussi ce que nous faisions c'était mettre les meilleurs sous

 11   officiers aux postes d'officier, et ce, sur information pratique du

 12   personnel en place. Si un sous officier occupait le poste d'un officier

 13   pendant trois mois, si sa performance était satisfaisante il était

 14   automatiquement promu au grade d'officier, cela entraînait une carence

 15   chronique de sous officiers. D'autant plus que les sous officiers ne

 16   souhaitaient pas simplement être promus à des grades de sous officiers

 17   supérieurs, ils voulaient devenir officiers eux-mêmes, et donc nous ne

 18   pouvions plus garantir un vrai corps de sous officiers au sein de l'armée

 19   croate, et c'est ce à quoi je fais référence dans ce paragraphe 18 de ma

 20   déclaration.

 21   Q.  Professeur, en pratique, quelle sont les séquences de ce manque de sous

 22   officiers formés lorsque l'on arrive au niveau des pelotons et sections

 23   dans l'armée croate ?

 24   R.  Quand on discute de la direction d'unité inférieure, les pelotons et

 25   les sections, ce qui est important c'est qu'il y ait, à ce niveau-là, du

 26   personnel pour prendre en charge la discipline et le bon fonctionnement de

 27   l'unité mais aussi le moral de l'unité, et qui puisse s'assurer que ces

 28   unités puisent souscrire à toute une gamme de valeur que celle-ci soit des

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  1   valeurs sociales habituelles, ou des valeurs militaires, et s'assurer que

  2   l'unité toute entière puisse souscrire à ces valeurs. Pour cela, il faut un

  3   bon sous-officier qui aurait acquis ces qualités grâces à une bonne

  4   instruction, un bon entraînement au départ, mais aussi qui ait ces qualités

  5   naturellement, que ce soit inné, qu'il ait déjà en lui ce sens du

  6   commandement pour motiver la loyauté de ses hommes, s'assurer qu'on le

  7   respectera et on lui obéira et que l'on fera ce qui est souhaitable en

  8   fonction des valeurs recherchées et souhaitées. Ils ne s'adonneront pas à

  9   des conduites considérées comme étant illégales, irrégulières ou non

 10   souhaitables. Donc ce sont les sous-officiers qui sont là pour appliquer

 11   aussi les mesures disciplinaires et pour prendre les mesures éventuelles

 12   nécessaires en cas de violation de discipline par les membres de son unité.

 13   Du fait de cette carence de sous-officiers à des postes de commandement

 14   dans les sections et les pelotons, et du fait de ces changements fréquents

 15   à ces postes, nous avons constaté qu'il n'y avait pas suffisamment de

 16   discipline ni d'aptitude au combat dans l'armée, parce que le sous-officier

 17   non seulement doit être le meilleur soldat du peloton ou de la section;

 18   mais il doit aussi pouvoir prouver ses capacités, il doit pouvoir acquérir

 19   la confiance de ses soldats par ce qu'il a fait sur le terrain, par

 20   l'exemple qu'il aura donné. C'est le seul moyen de faire faire à des hommes

 21   ce qu'ils doivent faire, que ce soit d'ailleurs en temps de paix ou en

 22   temps de guerre.

 23   Q.  Restons sur le même thème avant de passer à un autre document, prenons,

 24   par exemple, le paragraphe 5. Plus ou moins à la fin de ce paragraphe 5 de

 25   votre déclaration, nous pouvons lire que :

 26   "Vu qu'il n'y avait pas d'autres membres du personnel disponibles, la

 27   nomination accélérée de sous-officiers ou d'officiers suite à une formation

 28   et instruction était la seule solution. Nous nous sommes retrouvés dans une

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  1   situation qui était tout à fait contraire à la normale."

  2   Pourriez-vous nous en parler un peu ? Quand vous nous parlez de la

  3   situation tout à fait contraire à la normale.

  4   R.  Dans une réponse que j'ai déjà donnée aujourd'hui à une question qui

  5   m'a été posée précédemment, je vous ai expliqué que l'armée croate s'était

  6   retrouvée dans une situation où elle était victime d'agressions et une

  7   partie de son matériel occupé, et c'est la même chose qui prévaut ici.

  8   Quand l'organisation militaire était en train d'être mise sur pied, nous

  9   avons eu des civils qui ont rejoint les rangs de l'armée. Grâce à des cours

 10   et des instructions et des entraînements, ces civils ne pouvaient être

 11   désignés que pour certains postes seulement. Avant d'être affectés ou de

 12   voir qui seraient les leurs, il était assez habituel que ces personnes

 13   suivent une instruction militaire.

 14   Aussi, nous avons dispensé une formation continue -- une instruction

 15   continue de sous-officiers et d'officiers. A l'issue de cette instruction,

 16   ces personnes pouvaient gravir la filière hiérarchique d'un échelon, et

 17   c'est tout à fait habituel dans des forces armées. Mais nous avions chez

 18   nous des hommes qui étaient déjà dans des unités militaires et qui étaient

 19   sur la ligne de front qui ont été envoyés à l'instruction et ils ont

 20   bénéficié de cette instruction pendant un moment restreint. A l'issue de

 21   cette instruction, ils étaient renvoyés dans l'unité dont ils provenaient.

 22   Ce que nous voulions, c'était nous assurer que ceux qui étaient déjà sur le

 23   terrain et qui accomplissaient leur devoir militaire pouvaient, à l'issue

 24   de cette instruction, accomplir les mêmes devoirs militaires, mais mieux.

 25   Malheureusement, c'est quelque chose que nous avons mis en place vers

 26   la fin de la guerre seulement et nous n'avons pu finalement que donner

 27   cette instruction à quelques niveaux supérieurs. Il y avait des écoles pour

 28   les états-majors qui pouvaient également dispenser cette donnée. Cette

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  1   instruction, en fait ce système était mis sur pied de façon à pouvoir

  2   justement améliorer la performance militaire de ces hommes.

  3   Q.  Professeur, une toute dernière question avant que nous n'interrompions

  4   pour la pause.

  5   M. KEHOE : [interprétation] Avec votre permission, Monsieur le Président.

  6   Q.  Professeur, donc avant 1991 vous étiez déjà dans l'armée croate et vous

  7   étiez à la JNA. Sur la base de cette expérience-là, quel était le temps

  8   nécessaire requis pour qu'un soldat d'active soit nommé sous-officier au

  9   sein de la JNA ? Combien de mois ou combien d'années ? Est-ce que vous avez

 10   ce genre d'information sur donc le temps nécessaire à l'époque ?

 11   R.  Dans la JNA, l'instruction et l'entraînement étaient donnés via un

 12   système scolaire d'âge secondaire, c'étaient donc des personnes à partir de

 13   15 ans qui, dans leur parcours scolaire secondaire, suivaient le collège de

 14   guerre pendant quatre ans. Les deux premières années étaient consacrées à

 15   une formation générale et les deux dernières étaient consacrées à une armée

 16   particulière. Lorsque ces jeunes terminaient à l'âge de 18 ans, ils

 17   terminaient l'école secondaire et rejoignaient l'armée régulière, l'armée,

 18   et étaient donc militaires de carrière avec ceux qui faisaient leur service

 19   militaire. Ceux qui formaient les sous-officiers étaient des officiers

 20   supérieurs qui avaient souvent une formation de combat et qui avaient eu

 21   une formation pendant trois mois.

 22   M. KEHOE : [interprétation] Je crois qu'il nous manque une partie de votre

 23   réponse dans la traduction, donc je propose qu'on intervienne maintenant

 24   avant qu'on ne soit trop loin dans cette déclaration.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic.

 26   M. MISETIC : [interprétation] Je pense que du fait de la rapidité de votre

 27   déclaration, il y a beaucoup de lignes qui manquent, beaucoup

 28   d'informations qui nous manquent. Prenons la page 34 à la ligne 3, lorsque

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  1   l'on parle de l'âge des écoliers.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En effet, quel était l'âge des jeunes à

  3   la sortie de cette formation de l'école secondaire ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Dix-neuf.

  5   M. MISETIC : [interprétation] Deuxième question, page 34, encore une fois

  6   aux lignes 5 et 6. Vous nous avez parlé de quelque chose supérieur, mais il

  7   manque quelque chose à assortir avec ce mot.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans la traduction que nous avons reçue

  9   et entendue, nous avons entendu parler d'un cadre supérieur. Est-ce que

 10   vous pourriez peut-être étoffer ce que cela veut dire dans ce contexte de

 11   façon à ce que l'information soit complète ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me souviens pas avoir parlé de cadre

 13   supérieur. Ce que j'ai dit c'est qu'à l'issue de cette formation à l'école

 14   secondaire ils devenaient sous-officiers et rejoignaient l'armée avec ceux

 15   qui faisaient leur service militaire, donc ils étaient ensemble. Ce n'était

 16   pas pertinent.

 17   M. MISETIC : [aucune interprétation] 

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors que dans l'armée croate, et puis vous

 19   avez fait une comparaison, peut-être vous pourriez ré-expliquer cette

 20   comparaison.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous ré-expliquer cette

 22   comparaison ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 24   Après avoir décrit quelle était la pratique au sein de la JNA, j'ai

 25   également comparé cela avec la situation dans l'armée croate.

 26   Dans l'armée croate, ceux qui avaient bénéficié d'une instruction de

 27   sous-officiers étaient des personnes qui étaient plus âgés et qui avaient

 28   peu d'expérience de la vie et du combat, dans certains cas. Ce qui d'un

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  1   côté simplifiait la formation et l'instruction, d'un autre côté c'est une

  2   instruction qui ne durait que trois mois. Nous n'avons qu'une seule

  3   génération de sous-officiers qui a pu bénéficier d'une instruction sur six

  4   mois. Il s'est avéré cependant que nous n'avions pas le temps de continuer

  5   cette instruction sur six mois, et nous avons donc dû décider de la

  6   raccourcir.

  7   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que c'est le

  8   bon moment pour interrompre.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il vous reste encore combien de temps,

 10   pensez-vous ?

 11   M. KEHOE : [interprétation] Oui, je crois en effet. Je crois qu'ici, j'en

 12   aurais encore pour une demi-heure, et puis autre chose.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous allons donc lever la

 14   séance pour 25 minutes, et on se retrouve ici à 11 heures précises.

 15   --- L'audience est suspendue à 10 heures 36.

 16   --- L'audience est reprise à 11 heures 03. 

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître Kehoe.

 18   M. KEHOE : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Président.

 19   Q.  Professeur, j'aimerais maintenant vous soumettre une série de trois

 20   documents avant de vous poser des questions ceci pour gagner du temps, car

 21   vous comprendrez exactement dans quel cadre de référence se situent ces

 22   questions, et la première concerne le document D1595 qui est l'intercalaire

 23   2 dans votre série de documents. C'est un document qui date du 2 mars 1994,

 24   et qui concerne la formation des sous officiers de la 4e Brigade des

 25   Gardes.

 26   Le document suivant sera l'intercalaire 6 de votre dossier, à savoir la

 27   pièce D1590.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, nous n'avons même pas le

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  1   numéro en anglais sur les écrans pour le moment.

  2   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Et bien,

  3   revenons au document D1595. Toutes mes excuses, Monsieur le Président.

  4   Examinons l'intercalaire 2 avant de passer à l'intercalaire 6, je demande

  5   que l'on fasse défiler le texte anglais vers le bas, et que nous ayons la

  6   page une complète à l'écran. Au bas de la page nous lisons :

  7   "En dispensant d'une instruction quotidienne, motiver les sous officiers

  8   aux fins de préserver la réputation des membres de la 4e Brigade des Gardes

  9   en toute situation et de faire en sorte que leur influence positive

 10   s'exerce sur les autres membres de la brigade et de l'armée de Croatie."

 11   Je demande que l'on passe quelques pages plus loin, donc affichage de la

 12   page 7 de la version anglaise de même que de la page 7 de la version B/C/S.

 13   Vous remarquez, dans cette page, que dans le chapitre consacré aux

 14   objectifs de l'instruction, quelques paragraphes plus loin, nous lisons :

 15   "Leur enseigner les rudiments de la psychologie militaire qui leur

 16   permettront de travailler de meilleure façon avec d'autres, d'instruire les

 17   autres, et de se comporter convenablement en cas de crise."

 18   Faisons défiler un peu la page vers le haut, il est question également du

 19   fait que l'un des objectifs consiste à faire respecter la discipline

 20   applicable aux sous officiers.

 21   Page suivant maintenant de la version anglaise, donc page 8, qui est

 22   également la page 8 de la version B/C/S. Nous lisons, objectif faisant

 23   l'objet de ce chapitre :

 24   "Et cet objectif consiste à enseigner aux sous officiers les règles

 25   fondamentales et les obligations du service au sein des Brigades des

 26   Gardes."

 27   Autre objectif au paragraphe 2.3.4.1 [comme interprété], qui concerne

 28   les règlements de service, je cite :

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  1   "L'objectif du sujet consiste à enseigner aux sous officiers le

  2   respect correct des obligations et l'apprentissage des mesures

  3   disciplinaires applicables au sein de l'armée de Croatie."

  4   Ensuite on rentre dans le détail du sujet.

  5   Puis page 13 de la version anglaise qui correspond à la page 22 de la

  6   version B/C/S, il est indiqué la nécessité de discuter des éléments

  7   relatifs au commandement et au contrôle militaire, au nombre desquels on

  8   trouve en particulier le moral des troupes, la discipline, et cetera.

  9   Passons maintenant à l'intercalaire 6, à savoir dans votre liasse,

 10   dans votre dossier, le document D1590. C'est un ordre émanant du général

 11   Gotovina en date du 7 janvier 1995, qui fait suite à un ordre du quartier

 12   général concernant l'instruction des sous officiers. Au premier paragraphe

 13   nous remarquons dans cet ordre qu'il est question de la nécessité

 14   d'organiser et de dispenser une instruction aux commandants de pelotons,

 15   sections, compagnies et bataillons des Régiments de la Garde patriotique de

 16   la région militaire de Split, et un lieu en particulier est mentionné.

 17   Au paragraphe 2 nous lisons : "Objet du séminaire," et au paragraphe

 18   3, Monsieur le Professeur, vous remarquez qu'il est question de

 19   détachements et pelotons, et nous voyons un certain nombre de numéros qui

 20   font suite à cette mention.

 21   Le total de ces numéros est égal à 100; s'agit-il des niveaux

 22   d'instruction individuels des sous officiers ? Il faut que vous répondiez

 23   oralement.

 24   R.  Oui, niveau des officiers, oui.

 25   Q.  Alors sans perdre de vue ces documents, j'aimerais maintenant que nous

 26   passions à un troisième document, qui nous amène un peu plus loin

 27   chronologiquement. Le dernier document datait du 7 janvier 1995, j'aimerais

 28   maintenant vous soumettre le document D1596, qui est rédigé par le général

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  1   Gotovina. Vous le trouverez à l'intercalaire 5 de votre dossier, paragraphe

  2   20 de votre déclaration préliminaire, ce document date du 16 février 1995.

  3   M. KEHOE : [interprétation] J'en demande l'affichage sur les écrans.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Le numéro d'intercalaire ?

  5   M. KEHOE : [interprétation] Intercalaire 5.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi.

  7   M. KEHOE : [interprétation] 5.

  8   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  9   M. KEHOE : [interprétation]

 10   Q.  Vous l'avez sous les yeux, Professeur ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Ce document nous montre un paragraphe intitulé proposition, sélection,

 13   déploiement et contrôle des sous officiers et il s'agit de l'armée de

 14   Croatie qui s'adresse au ministre MM. Susak, Bobetko, et autres, et ce

 15   document est entre autres adressé au général Roso.

 16   J'aimerais que nous passions à la page suivante de ce document. Dans la

 17   première phrase de cette page, le général Gotovina écrit, je cite :

 18   "J'ai lancé des avertissements répétés aux officiers de haut rang de

 19   l'armée de Croatie au sujet des problèmes d'effectifs vécus par l'armée de

 20   Croatie, j'en ai fait état lors de diverses réunions et séances

 21   d'information, et notamment lors des réunions organisées par la région

 22   militaire de Split. J'ai évoqué ce sujet pour la dernière fois dans une

 23   analyse des ordres, du travail et de la discipline au sein de l'armée de

 24   Croatie en 1994, qui a été appliqué, comme vous le savez, au sein de la

 25   113e Brigade de Sibenik les 9 et 10 février 1995."

 26   Toujours dans ce paragraphe, nous lisons ensuite, je cite :

 27   "J'ai établi un lien direct entre les questions d'ordre de travail et de

 28   discipline liées aux effectifs en 1994 et le problème du groupe d'hommes

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  1   bien particulier que nous désignons sous le nom sous officiers."

  2   Puis une phrase plus loin, je cite :

  3   "M'efforçant de trouver une solution aux problèmes et d'améliorer les

  4   ordres, le travail et la discipline à long terme, j'en suis arrivé à me

  5   rendre compte que des transformations radicales seraient nécessaires dans

  6   l'attitude générale, qui est manifesté à l'égard des sous officiers de

  7   l'armée de Croatie. L'attitude actuelle est insatisfaisante."

  8   Puis un peu plus loin, je cite :

  9   "Si nous prétendons, comme nous le faisons à juste titre que sous les sous

 10   officiers sont le pilier de l'armée, nous devrions adopter une autre

 11   attitude vis-à-vis de ce pilier dans tous les aspects de la vie et du

 12   travail."

 13   Alors, Professeur, vous connaissez ce document et vous pouvez nous

 14   l'expliciter quelque peu : quel est le problème qui se pose ici alors que

 15   nous sommes déjà en février 1995 eu égard aux sous officiers ?

 16   R.  Dans l'interprétation actuelle de ma déclaration, nous avons précisé

 17   les modalités de l'instruction et de l'entraînement dispensé aux sous

 18   officiers. Je rappellerai en bref que, depuis 1993, existait une école des

 19   sous officiers qui avait la capacité d'instruire à la fois entre 200 et 300

 20   stagiaires, ce qui fait moins de 1 000 stagiaires par an étant donné qu'un

 21   stage d'instruction durait trois mois.

 22   Il existait une autre école destinée aux sous officiers de la garde qui se

 23   trouvaient à Sepurine et j'aimerais souligner la question dont j'ai parlée,

 24   à savoir le fait que des sous officiers étaient constamment promus au grade

 25   d'officier sans passer par les grades supérieurs des sous officiers. Ce

 26   problème était très bien connu par M. Gotovina. Il le connaissait

 27   d'ailleurs probablement dans la période antérieure de sa carrière déjà et

 28   il a pris des mesures pour veiller à ce que les perspectives d'avancement

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  1   des sous officiers intègrent les niveaux supérieurs du corps des sous

  2   officiers sans que et qu'un sous officier ne passe pas directement au

  3   niveau d'officier. Donc ce système d'appréciation du corps des sous

  4   officiers de leur importance dans la construction d'une armée valable ainsi

  5   que la reconnaissance de leur réputation au sein des forces armées a été

  6   établi et c'est un des éléments qui était à la base de la structure du

  7   corps des sous officiers comme il l'est dans nombre d'autres armées. Je ne

  8   sais pas quels autres détails pourraient vous intéressez.

  9   Q.  Nous allons revenir sur quelques détails et l'un de ces détails c'est

 10   que le général Gotovina au paragraphe grand A de ce document qui se trouve

 11   je crois en page 3 de la version B/C/S.

 12   Vous évoquez ce sujet des votre déclaration préalable au paragraphe 20 de

 13   votre déclaration, donc le général Gotovina fait remarquer que le corps des

 14   sous officiers est pourvu à 60 % de sa capacité.

 15   Si nous passons à la page 3 de la version B/C/S, page 3 de la version

 16   anglaise, nous voyons un certain nombre de numéros, de chiffres, et nous

 17   lisons je cite :

 18   "Le sens que nous donnons à l'instruction des sous officiers ressort

 19   particulièrement bien du fait que plus de 80 % des sous officiers de la

 20   Région militaire de Split vienne des champs de bataille de la patrie où ils

 21   ont obtenu leurs grades dans le cadre du service fourni en temps de

 22   guerre."

 23   Un peu plus loin nous lisons :

 24   "L'instruction proposée actuellement à l'école de l'armée de Croatie est

 25   brève et a été d'ailleurs réduite passant de six à quatre mois."

 26   Alors le général Gotovina semble préoccuper par les effectifs des sous

 27   officiers et par leur niveau d'instruction et de la durée de leur

 28   instruction. Quelle était la position de l'état-major principal à ce sujet

Page 20169

  1   ?

  2   R.  Je dois dire que les faits évoqués ici sont exprimés très

  3   rationnellement et étaient tout à fait présents dans la Région militaire de

  4   Split à l'époque. Ils démontrent en tout cas d'une part la pénurie de sous

  5   officiers. Deuxièmement, étant donné les promotions des sous officiers, ils

  6   démontrent donc l'avancement rapide de ces hommes et puis également la

  7   pénurie d'écoles d'instruction militaire dépendant de l'armée de Croatie et

  8   la nécessité d'apporter des modifications à cette situation.

  9   Maintenant quelle était la position exacte de l'état-major principal ? Je

 10   ne sais pas. Mais ce que je sais c'est qu'en 1994, un projet a été mis en

 11   place qui s'intégrait à la transition vers la démocratie, avec l'aide de

 12   MPRI qui était une société américaine, et dans le cadre de ce projet, j'ai

 13   été moi-même chef du projet. L'équipe chargée de ce projet avait, pour

 14   mission principale, après analyse et prise en compte de la situation

 15   existante, dévaluée [phon] dans le sens indiqué dans ce document par le

 16   général Gotovina. Donc notre mission était de créer une structure

 17   permettant l'avancement des hommes et le choix des sous officiers ainsi que

 18   leur engagement au poste qui leur correspondait au sein de l'armée de

 19   Croatie dans le sens indiqué dans ce document.

 20   Donc je considère que le ministère de la Défense et l'état-major principal

 21   ont bien identifié ce problème, qu'ils l'avaient déjà fait avant et que

 22   c'est ceci qui a abouti à la création du projet mené de concert avec le

 23   MPRI, projet à long terme, bien sûr, qui ne pouvait pas dans un laps de

 24   temps court suffire à lui seul pour résoudre tous les problèmes.

 25   Q.  Dernière question évoquée par le général Gotovina en bas de page 3 et

 26   dans la page 4 de la version B/C/S, sous l'intitulé : "Incitation pour les

 27   sous officiers à les promouvoir à certains grades et certains postes

 28   professionnels de façon générale." Il fait remarquer :

Page 20170

  1   "Le fait est…"

  2   Vous voyez ce passage, Professeur ? Page 4 de la version B/C/S, page 3,

  3   c'est là que le passage commence au niveau du grand C.

  4   R.  Oui.

  5   Q.  "Le fond du problème réside dans le fait que les sous officiers de

  6   l'armée de Croatie ne sont pas populaires et il importe de dire que nous

  7   avons fait très peu de choses pour autant que nous ayons fait quelque chose

  8   afin de les rendre plus populaire. Aujourd'hui, la plupart des hommes se

  9   considèrent comme des officiers. Rares sont ceux qui se considèrent comme

 10   sous officiers. La plupart pensant qu'être sous officiers est temporaire

 11   mais ce niveau au sein de l'armée n'est pas simplement un niveau

 12   hiérarchique, c'est également un service, une profession, une spécialité

 13   militaire dont il est impossible de se passer."

 14   Alors cette définition précise, je veux dire : comment comprenez-vous ce

 15   que le général Gotovina essayait de faire passer par ce commentaire ?

 16   R.  Je comprends ce commentaire comme il a été écrit. Je crois qu'il a été

 17   écrit très précisément et avec une grande exactitude.

 18   C'est un fait que le métier de sous officier est une spécialité bien

 19   particulière. Les sous officiers ne sont pas habilités à commander des

 20   unités ou à commander des opérations. Ils sont habilités à diriger un

 21   groupe d'hommes qui leur ont été confiés par les officiers. Mais ils sont

 22   responsables de la construction d'une équipe avec laquelle ils vont mener à

 23   bien ces missions. Ils vivent au sein de ces équipes, ils instruisent ces

 24   hommes et les meilleurs unités sont celles qui sous les ordres de sous-

 25   officier. Si le sous-officier ne pense qu'à sa promotion au grade

 26   d'officier, il ne travaille pas bien. Ce n'est pas un métier à court terme

 27   c'est un métier a long terme. Il faut construire une équipe, ce qui prend

 28   du temps. Je pense que nous pouvons comprendre cette phrase, comme une

Page 20171

  1   prise en compte profonde de la structure de l'organisation militaire et de

  2   la façon professionnelle de mener à bien certaines missions en train tant

  3   que militaire. 

  4   Q.  Passons maintenant à la dernière page de ce document, page 5 de la

  5   version anglais et de la version en B/C/S, sous le titre conclusion.

  6   C'est la dernière phrase de ce paragraphe qui m'intéresse, je cite :

  7   "Disposer de sous-officiers compétents à ces postes, implique sans l'ombre

  8   d'un doute que les modalités de travail et l'ordre seront mieux organisés,

  9   que la discipline sera meilleure et que les incidents exceptionnels seront

 10   plus rares, mais également que les hommes seront davantage prêts au

 11   combat."

 12   Alors de quelle façon ces sous-officiers compétents dont parle le général

 13   Gotovina, peuvent-ils intervenir pour obtenir un niveau de travail,

 14   d'organisation et d'ordre amélioré, et ce qui est encore plus important une

 15   meilleure discipline et une réduction du nombre des incidents exceptionnels

 16   ?

 17   R.  Oui. Un sous-officier compétent, c'est un homme qui vit aux côtés de

 18   ses soldats. Le nombre des hommes qu'il dirige varie entre cinq et dix

 19   selon qu'il s'agit d'une unité d'infanterie ou autres. Donc c'est une forme

 20   de structure qui permet à un homme d'exercer très efficacement son

 21   commandement. Il voit ses hommes, il sait où ils se trouvent, il sait ce

 22   qu'ils font. Il est en contact permanent avec ses hommes. Tous les membres

 23   de son unité voient également ce que lui il fait, la façon dont il le fait,

 24   et donc le sous-officier donne l'exemple en montrant à ses hommes comment

 25   les choses doivent se faire. Il discute avec ses hommes des valeurs. Il

 26   porte des jugements sur ce qui est bien ou mal, sur le plan éthique, afin

 27   d'améliorer le moral de ses hommes et leur moralité. Il accroît de cette

 28   façon la conscience que les hommes sous ses ordres ont de l'existence de

Page 20172

  1   leur unité, il met l'accent sur les comportements acceptables et non

  2   acceptables. Lorsque ce travail est effectué, les membres de l'unité même

  3   en l'absence d'un sous-officier, si jamais il devait leur venir à l'esprit

  4   d'accomplir un acte qui serait contraire aux règlements ou qui serait

  5   illicite, et bien, ils seront conscients qu'il y a autour d'eux des hommes

  6   qui n'autoriseront pas de tels actes. En raison de cela, ils s'abstiennent

  7   de tels actes. Donc c'est grâce à l'intervention du sous-officier que la

  8   prise de conscience d'une discipline active existe dans une armée bien

  9   structurée de cette façon. Cette prise de conscience n'est pas conditionnée

 10   uniquement par la peur de la sanction mais par une vision positive de ce

 11   que l'homme concerné doit faire ainsi que celui qui se trouve à côté de

 12   lui, pas parce que le sous-officier est présent pour les juger mais même en

 13   l'absence du sous-officier. C'est de cette façon que les hommes sont mieux

 14   prêts à s'engager dans les combats. Ils sont mieux prêts à accepter une

 15   discipline consciemment acceptée dans leur comportement au sein de leurs

 16   unités.

 17   Le corollaire d'un tel comportement c'est bien sûr la réduction des

 18   incidents exceptionnels, les incidents exceptionnels étant tout ce qui est

 19   considéré comme une forme de comportement illicite, à commencer par une

 20   mauvaise façon de remplir les missions, telles que les gardes et ce genre

 21   de chose, et cela peut aller jusqu'à des comportements beaucoup plus graves

 22   comme par exemple la désertion d'une unité. Donc voilà de quelle façon on

 23   peut établir un lien entre le cadre, le corps des sous-officiers et tout ce

 24   qui caractérise une armée du point de vue de l'aptitude au combat, de la

 25   discipline et de la compétence, bien entendu.

 26   Q.  Professeur, suite à votre réponse, je vais vous soumettre des éléments

 27   de preuve présentés à la Chambre qui portent sur des comportements

 28   incorrects de la part de membres de l'armée de Croatie, et j'aimerais que

Page 20173

  1   nous passions en revue ces quelques documents, et que vous répondiez aux

  2   questions liées à ces documents.

  3   Le premier est le document D204. En fait, il y a trois documents que

  4   j'aimerais vous montrer, après quoi, je vous poserais des questions. Donc

  5   je vous demande un peu de patience.

  6   Le document D204, est un ordre du général Gotovina, du 10 août 1995, c'est-

  7   à-dire à peu près quatre jours après la fin de l'opération Tempête.

  8   M. KEHOE : [interprétation] D204.

  9   [Le conseil de la Défense se concerte] 

 10   M. KEHOE : [interprétation]

 11   Q.  [aucune interprétation]

 12   L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]

 13   M. KEHOE : [aucune interprétation]

 14   Q.  L'objet de ce document est ordre relatif au respect des mesures

 15   disciplinaires militaires. Je lis la suite :

 16   "D'après les informations disponibles sur les zones libérées par la

 17   HV, leur analyse, et afin de prévenir le vol de biens, l'inconduite et afin

 18   également de sauver des vies humaines, j'ordonne ce qui suit : j'interdis

 19   tout mouvement arbitraire des membres de la HV dans les zones libérées sans

 20   que leur supérieur en ait été informé."

 21   Je passe au deuxième paragraphe :

 22   "Prendre toutes les mesures nécessaires et s'engager pleinement à la mise

 23   en œuvre d'une conduite militaire conforme aux règles de  discipline et au

 24   maintien de l'ordre dans la zone de responsabilité et prévenir l'incendie

 25   criminel et tout autre acte illicite. Prendre des mesures résolues contre

 26   quiconque agirait d'une façon qui soit contraire aux règles de discipline."

 27   C'est signé Ante Gotovina.

 28   J'aimerais maintenant que l'on examine le document P1140. C'est un ordre du

Page 20174

  1   colonel Mladen Fuzul, en date 19 août 1995. Voici ce que est dit en

  2   préambule de cet ordre :

  3   "En raison de la violation constatée de l'ordre et des règles de

  4   discipline, et pour préserver la réputation internationale de la République

  5   de Croatie, j'ordonne ce qui suit :

  6   "1.  Etablir le contrôle dans toutes les unités et la prise de

  7   mesures immédiates, pour prévenir l'incendie de bâtiments et la tuerie

  8   d'animaux;

  9   "2.  La prise de mesures disciplinaires et pénales devant les

 10   individus agissant d'une manière irresponsable."

 11   J'aimerais maintenant que nous examinions un dernier document avant que je

 12   vous pose une série de questions. Il s'agit de la pièce P918.

 13   M. KEHOE : [interprétation] J'aimerais qu'elle soit affichée à l'écran.

 14   Q.  C'est un document qui émane de la Région militaire de Split, section

 15   des affaires politiques, signé de la main de Mario Tomasovic, l'objet est :

 16   "Un avertissement."

 17   Examinons le deuxième paragraphe complet. On y parle de la suite de

 18   l'opération Tempête et on lit ce qui suit :

 19   "Toutefois, en raison de l'irresponsabilité de certains soldats, sous

 20   officiers et officiers qui compromettent l'armée et l'Etat croate par leur

 21   conduite et leurs actes inappropriés, ce succès a été en partie remis en

 22   cause.

 23   Le succès dont on parle au paragraphe précédent, le succès donc de

 24   l'opération Tempête.

 25   Au paragraphe suivant :

 26   "C'est pour cette raison et pour s'inscrire dans la suite de la politique

 27   menée par le commandant suprême Franjo Tudjman ainsi que les instructions

 28   du ministère de la Défense et de l'administration politique du ministère de

Page 20175

  1   la Défense de la République de Croatie qu'il est nécessaire de prévenir les

  2   phénomènes suivants. On parle ensuite de l'incendie et de la destruction

  3   constante de bâtiments et de bien dans tout le territoire libéré, la tuerie

  4   de bétail, la confiscation de biens; et au point 4, on voit une conduite

  5   inappropriée vis-à-vis des civils restant sur place et des prisonniers de

  6   guerre, et particulièrement vis-à-vis des membres et des soldats (des

  7   forces de paix) - entre parenthèses."

  8   Professeur, nous avons évoqué plusieurs questions ce matin : d'abord la HV,

  9   l'instruction, l'existence de ces régiments de la Garde patriotique, les

 10   infrastructures d'instruction et de formation des sous officiers, le manque

 11   en réalité de ces infrastructures, de ces locaux, la nécessité d'une

 12   instruction touchant au droit international humanitaire, et puis après,

 13   l'opération Tempête. On constate que plusieurs ordres et rapports tels que

 14   nous venons d'examiner sont produits, rapports qui figurent aux dossiers de

 15   cette affaire. 

 16   Alors s'il y a eu formation, Professeur, et si ces ordres ont été donnés

 17   par le général Gotovina, ordres adressés à ses soldats, comment se fait-il

 18   que de telles choses aient pu se produire ?

 19   R.  Je ne peux faire appel qu'à des connaissances indirectes pour vous

 20   répondre. Toutefois, je pense que l'on peut fournir une explication

 21   relativement aisée.

 22   Prenons l'exemple d'un Régiment de la Grade patriotique, qui libère un

 23   secteur donné, secteur d'où viennent les membres du régiment. Ils se

 24   retrouvent face à leurs propres biens qui ont été réduits à néant alors que

 25   leurs voisins qui jusqu'à l'opération de la Tempête vivaient sur place ou

 26   qui sont même restés une fois l'opération terminée, jouissent encore de

 27   leurs biens et propriétés laissées intactes. Il aurait fallu un niveau de

 28   tel contrôle très important pour que ces personnes ne fassent rien de

Page 20176

  1   déraisonnable. Or ce n'est pas un niveau de contrôle que nous avions. L'une

  2   des autres raisons c'est que même ceux qui avaient reçu une instruction sur

  3   le droit international humanitaire, même ceux-là n'étaient pas en mesure de

  4   brider l'émotion que ressentaient leurs soldats, on sait bien qu'il suffit

  5   d'une ou de quelques personnes qui se conduisent contraire, d'une manière

  6   contraire aux règles pour que des dommages considérables soient provoqués.

  7   C'est la raison pour laquelle dans une situation telle que celle-ci

  8   sachant, je le répète, qu'il y avait peu de sous officiers, et compte tenu

  9   des possibilités d'instruction et d'entraînement à l'époque on comprend

 10   donc facilement comment des hommes pouvaient s'adonner aux types

 11   d'activités mentionnées dans ces documents et interdites par ceci. 

 12   Le troisième problème c'était la hiérarchie. L'unité de commandement est

 13   l'un des principes, bien sûr, où le supérieur donne ordre à son premier

 14   subordonné qui est ensuite fait descendre les ordres vers ses subordonnés à

 15   lui, et cetera, et cetera. En d'autres termes, ces ordres émanaient du haut

 16   et passaient différents échelons au sein de la filière hiérarchique et à

 17   chacun de ces niveaux, on était confronté "au risque de bruit" - entre

 18   guillemets - en d'autres termes, au risque d'incompréhension de ces

 19   différents textes, particulièrement si les échelon subalternes de la

 20   filière hiérarchique en particulier les sous officiers ne comprenaient pas

 21   très bien comment il fallait appliquer les ordres en question.

 22   Q.  Oui. Mais justement compte tenu de l'instruction donnée, lorsque des

 23   soldats se mettent à piller un secteur donné, qui est la première personne

 24   qui devrait mettre un terme à ces activités ?

 25   R.  Bien, j'en reviens à ce que nous avons dit aujourd'hui; ce sont les

 26   sous officiers pour deux raisons : d'abord, parce qu'ils sont toujours avec

 27   leurs hommes, avec leurs soldats et puis parce qu'ils doivent inspirer la

 28   loyauté, le respect et ils doivent veiller à ce que leurs hommes sachent

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  1   quelle est la conduite à tenir.

  2   Ce sont donc les premiers qui doivent remarquer si ce genre d'acte est

  3   effectivement perpétré et qui doivent ensuite veiller à ce que ce genre de

  4   conduite soi évité à tout prix, donc ce sont les sous officiers.

  5   Q.  Bien. Mais à la lumière de ce que vous nous avez dit ce matin, pourquoi

  6   n'ont-ils pas pu prévenir ce genre d'actes ? Qu'est-ce qui les en a

  7   empêchés ?

  8   R.  Il y a eu plusieurs raisons. D'abord le nombre de sous officiers

  9   instruits et formés. Souvent les sous officiers sur le terrain n'avaient

 10   pas bénéficié d'une instruction ou d'une formation pour les raisons

 11   susmentionnées.

 12   Une autre raison encore c'est que beaucoup d'hommes considéraient la tâche,

 13   la fonction de sous officier comme un tremplin vers une position

 14   supérieure.

 15   Voilà deux raisons qui suffiraient à expliquer les choses mais il y a

 16   aussi une troisième raison à savoir l'absence d'un corps de sous officiers

 17   disons qui dans toute la filière hiérarchique et pas seulement à un niveau

 18   de celle-ci aurait pu veiller au respect de la discipline.

 19   Q.  J'aimerais revenir à la deuxième raison que vous avez évoquée,

 20   Monsieur, à la ligne 20, vous dites que :

 21   "La deuxième raison est que beaucoup considéraient que la position de

 22   sous officier était en fait un tremplin vers -- les échelons supérieurs de

 23   la hiérarchie."

 24   Pouvez-vous nous expliquer ceci dans le détail et quel rapport entre

 25   ce que vous dites et la raison pour laquelle ils n'ont pas pu mettre un

 26   terme à ces actes et ces conduites inappropriées ?

 27   R.  L'objectif était de mettre en place une force armée importante en

 28   très peu de temps, et je pense que c'est aussi un élément qui est entré en

Page 20178

  1   jeu. Les rangs de l'armée n'ont cessé de gonfler, et au fur et à mesure,

  2   les sous officiers ont été promus à des échelons supérieurs. Des tentatives

  3   ont été faites pour développer un corps plus important de sous officiers

  4   mais seulement en 1994, lorsque la situation -- lorsque les combats ont

  5   connu une certaine accalmie avant les opérations militaires. A ce moment-là

  6   un contrat a été signé avec la société MPRI et l'une des activités

  7   consistait à développer ce groupe de sous officiers censés fonctionner

  8   comme je l'ai expliqué.

  9    Une autre tentative a consisté à essaye d'ouvrir des écoles d'instruction

 10   et d'entraînement pour les sous officiers parce que la marine compte ce

 11   genre d'établissement ainsi que de l'armée de l'air.

 12   Q.  S'agissant de votre réponse à laquelle je reviens, vous avez dit : je

 13   vous le rappelle que les sous officiers ont considéré un petit peu cette

 14   position, ce grade, ces grades comme un tremplin vers un échelon supérieur

 15   de la hiérarchie. Pouvez-vous nous expliquer quelle était l'incidence de

 16   cet état d'esprit sur la situation sur le terrain ?

 17   R.  Le problème qui se posait était surtout le problème de temps. Le temps

 18   nécessaire pour constituer une équipe pour susciter un sentiment

 19   d'appartenance à une unité, pour faire tout cela, il faut du temps. Les

 20   sous officiers doivent disposer du temps nécessaire au côté des membres de

 21   leur peloton ou de leur section. Si le temps manque ou bien s'il n'est pas

 22   prévu que les sous officiers occupent sa fonction pendant une période de

 23   temps relativement importante, il ne parvient pas à créer cette unité entre

 24   lui et les membres de son groupe, s'il sait lui-même qu'il va être emmené à

 25   occuper une position plus élevée dans peu de temps.

 26   Il faut du temps pour établir cette cohésion entre le sous officier et son

 27   unité, pour faire en sorte que l'unité militaire fonctionne convenablement.

 28   M. KEHOE : [interprétation] Donnez-moi une minute, Monsieur le Président,

Page 20179

  1   s'il vous plaît.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.

  3   [Le Conseil de la Défense se concerte]

  4   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de

  5   questions pour ce témoin.

  6   Q.  [aucune interprétation]

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître Kehoe.

  8   Madame Higgins, avez-vous des questions à poser à ce témoin ?

  9   Mme HIGGINS : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mikulicic,

 11   M. MIKULICIC : [interprétation] Non, pas de questions, Monsieur le

 12   Président.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, je suppose que vous en

 14   avez, vous.

 15   M. RUSSO : [interprétation] Oui, effectivement, Monsieur le Président.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Barkovic, M. Russo va

 17   maintenant procéder à votre contre-interrogatoire. M. Russo représente le

 18   bureau du Procureur.

 19   Contre-interrogatoire par M. Russo : 

 20   Q.  [interprétation] Bonjour, Professeur.

 21   R.  Bonjour.

 22   Q.  Avant d'entrer dans certains domaines plus particuliers, j'aimerais

 23   préciser quelque chose d'emblée. Vous savez, que des soldats de la HV, et

 24   non pas seulement des membres des Régiments de la Garde patriotique, mais

 25   des membres de brigades professionnelles ont commis des crimes, des crimes

 26   de pillage, d'incendie, juste après l'opération Tempête, n'est-ce pas ?

 27   R.  En toute honnêteté, je dois vous dire que je ne sais pas qui ont été

 28   les auteurs de ces actes, je ne les connais pas par leurs noms, à part ce

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  1   que j'ai pu lire dans les journaux où il était question d'individus et

  2   d'unités. Je n'en sais pas plus.

  3   Q.  Je ne vous pose pas de questions sur des individus en particulier, je

  4   vous demande simplement si vous savez que des soldats, par exemple, des 4e

  5   ou 7e Brigade de la Garde ou de toute autre Brigade de la Garde nationale

  6   ont commis effectivement des actes, tels que des actes de pillage, des

  7   incendies, et cetera, juste après l'opération Tempête ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Votre déclaration et votre déposition peuvent-elles m'emmener à

 10   conclure que vous attribuez ces actes criminels à une pénurie de sous

 11   officiers ?

 12   R.  C'est l'une des raisons. Dans toute communauté quel que soit son niveau

 13   d'instruction, d'éducation, d'entraînement, quelle que soit l'éducation

 14   donnée aux individus par leurs familles, il y a toujours un certain degré

 15   de criminalité. On sait qu'il peut y avoir différents motifs poussant les

 16   individus en question à se comporter de manière criminelle, et c'est le cas

 17   ici dans la situation dont nous parlons.

 18   Je sais que les sous officiers qui dirigent dix à 30 hommes en

 19   fonction sont garants de la discipline militaire au sein d'une armée. Ils

 20   sont la colonne vertébrale de cette armée et ils garantissent que de tels

 21   incidents ne se produisent pas.

 22   Q.  Merci. On vous a montré un certain nombre de documents, Maître Kehoe,

 23   pour ne pas le nommer, documents tels que des ordres donnés par le général

 24   Gotovina, qui cherchait à prévenir le pillage et les incendies, documents

 25   relatifs au maintien de la discipline, et autres encore.

 26   Alors savez-vous si des ordres semblables ont été donnés aux membres de

 27   l'armée croate, c'est-à-dire tant aux Brigades de la Garde professionnelles

 28   qu'aux Régiments de la Garde patriotique, avant les opérations menées à

Page 20181

  1   Grahovo et à Glamoc ?

  2   R.  Je l'ignore. Cela étant, je sais comment fonctionne l'armée, il est

  3   tout à fait logique et nous avons vu d'ailleurs un exemple d'un document du

  4   colonel Mladen Fuzul, tout à fait logique donc que les commandants ayant

  5   reçu ces ordres les fassent descendre le long de la filière hiérarchique

  6   vers les échelons inférieurs. Je suppose que c'est donc ce qui s'est passé

  7   même si je n'ai pas entendu parler de ce genre de document.

  8   Q.  Professeur, il n'est pas nécessaire qu'un commandant émette un ordre

  9   invitant à ne pas commettre un crime, n'est-ce pas ? Ceci fait partie du

 10   code de discipline militaire ?

 11   R.  C'est exact.

 12   Q.  Mais lorsqu'un commandant émet un ordre de cette aquavit, à savoir un

 13   ordre visant à prévenir le pillage et à prévenir le fait que des maisons

 14   soient incendiées, l'idée, n'est-ce pas, est d'insister particulièrement

 15   sur l'objet de l'ordre auprès des soldats.

 16   R.  Oui, cela signifie sans doute que ce genre d'incidents se sont

 17   produits, qu'ils ont été analysés et qu'il a été conclu qu'une intervention

 18   supplémentaire était nécessaire, d'où la prise de ces mesures pour insister

 19   encore davantage sur des questions exigeant une intention particulière.

 20   Suite à un incident inhabituel ou extraordinaire, l'armée procède à une

 21   analyse et prend les mesures qu'il y ait eu déjà régulation de la situation

 22   en question ou pas. C'est le cas dès lors qu'il y a des incidents liés au

 23   trafic et dans plein d'autre situation que je connais. Je ne suis donc pas

 24   surpris que des mesures supplémentaires aient été prises dès lors que des

 25   premiers signes que ce genre d'acte était commis, sont apparus.

 26   Q.  Lorsque cette mesure supplémentaire consistant à émettre un ordre

 27   particulier est prise, vous conviendrez avec moi qu'il est nécessaire de

 28   veiller au respect de l'ordre en question, et il est tout aussi important

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  1   dès lors que les hommes ne se conforment pas à l'ordre en question, que des

  2   mesures soient prises à l'encontre de ceux qui ne l'ont pas respecté, des

  3   mesures disciplinaires, on s'entend.

  4   R.  En général, oui. Toutefois, il me semble que les incidents qui sont

  5   survenus ici relèvent du droit pénal. A cet égard, les soldats n'étaient

  6   pas censés réagir, mais faire rapport aux officiers qui étaient habilités à

  7   faire face à ce genre de situation. Ils ne pouvaient imposer des mesures

  8   disciplinaires que pour des violations mineures des règles disciplinaires

  9   ne constituant pas des délits au regard du droit pénal. En d'autres termes,

 10   les commandants étaient habilités à prendre des mesures disciplinaires et

 11   devaient faire rapport en cas de violation plus grave à ceux qui étaient

 12   habilités à enquêter.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Misetic.

 14   M. MISETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, j'aimerais que

 15   l'on vérifie la page 53, la phrase qui commence à la ligne 11, et qui se

 16   termine à la ligne 14.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui commence par : "Généralement, oui,

 18   mais toutefois…"

 19   M. MISETIC : [interprétation] "Toutefois il me semble…" oui, c'est ça.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

 21   Monsieur Barkovic, je vais vous relire une partie de votre déposition dont

 22   nous ne sommes pas tout à fait sûrs. Nous ne sommes pas sûrs qu'elle

 23   reflète fidèlement ce que vous avez dit. J'ajouterais que vous parlez

 24   tellement vite que nous sommes régulièrement confrontés à cette difficulté.

 25   Ceci n'a rien à voir avec une éventuelle incompétence de la part de nos

 26   interprètes ou de notre sténotypiste.

 27   Je vais donc vous redonner lecture du passage en question --

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Toutes mes excuses, Monsieur le Président. Je

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  1   vais tâcher de ralentir.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous donne lecture de la partie

  3   concernée de votre réponse.

  4   Vous avez dit :

  5   "Toutefois, il me semble que les incidents survenus relèvent de la

  6   catégorie de délits pénaux vis-à-vis desquels les soldats n'étaient pas

  7   habilités à réagir, mais bien à en faire rapport aux officiers habilités à

  8   connaître de délits relevant du droit pénal."

  9   Tout ceci est un peu surprenant. De quoi parliez-vous exactement ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je voulais dire que d'abord, au lieu de

 11   soldats, il faut lire commandants. Les commandants sont ceux qui peuvent

 12   prendre des mesures disciplinaires à l'encontre de soldats. La deuxième

 13   obligation consiste à faire rapport de ce genre de délit à ceux qui sont

 14   habilités de par leur position et leur fonction à enquêter.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 16   Permettez-moi de vous poser une question là-dessus. Imaginons que je suis

 17   commandant de section et que je constate qu'un homme est en train de mettre

 18   le feu à une maison appartenant à un civil. Que suis-je censé faire ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Il faut réagir immédiatement et arrêter les

 20   faits, puisque vous êtes dans une position où en tant que commandant vous

 21   pouvez dire ce qu'il peut faire et ce qu'il ne peut pas faire. Mais le

 22   commandant de section ne peut ni poursuivre ni inculper cette personne

 23   directement. Cela, c'est l'aboutissement d'une procédure et c'est vrai

 24   qu'une punition est dès lors nécessaire. Il faut bien sûr réagir

 25   directement, immédiatement quand quelque chose se passe.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites, arrêtez immédiatement, et

 27   rien ne se passe. Que faites-vous ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça, c'est de la discipline militaire, une fois

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  1   de plus.

  2   Un soldat doit obéir à son supérieur. Le supérieur peut réagir en utilisant

  3   la force lui-même, ou donner l'ordre à deux hommes qui seraient près de lui

  4   de l'interrompre, saisir la personne et la faire arrêter.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors que faisons-nous de cette personne

  6   ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] La police militaire doit être appelée et cette

  8   personne doit être remise à la police militaire, ainsi qu'un rapport sur

  9   les faits, et puis, à ce moment-là, l'affaire est entre les mains de la

 10   police militaire. N'oublions pas que les officiers militaires sont occupés

 11   par tout ce qui est en train de se passer et que ce genre d'incidents, dans

 12   une armée bien organisée, bien disciplinée, ne sont pas jamais que

 13   l'exception et non la règle.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Imaginons que la police militaire n'est

 15   pas dans les parages, et qu'il faut attendre deux heures avant que celle-ci

 16   ne se rende sur place.

 17   Qu'allez-vous faire avec cette personne ? Vous utilisez la force pour

 18   le garder sous contrôle, et vous attendez que la police militaire arrive;

 19   ou que faites-vous ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, il faut qu'à partir de ce

 21   moment-là, cette personne soit gardée sous contrôle.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup.

 23   Continuez, Monsieur Russo.

 24   M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 25   Q.  Dans l'esprit des questions qui viennent d'être posées par le

 26   Président, le fait de faire respecter la discipline et de la maintenir, et

 27   pour tout commandement que ce soit du grade du plus bas de sous-officier

 28   jusqu'au lieutenant général en chef, c'est la mission qui leur incombe,

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  1   n'est-ce pas ? Est-ce que c'est exact ?

  2   R.  Oui, mais n'oublions pas quelles sont les possibilités de contrôle

  3   parce que, lorsque l'on parle d'un groupe opérationnel --

  4   Q.  Non, non, je voudrais simplement une réponse bien ciblée à ma question.

  5   Je veux donc aller un peu plus loin, fouiller un peu plus.

  6   Vous nous dites -- vous avez indiqué, en tous les cas, dans votre

  7   déclaration, que lorsqu'un sous-officier n'assume pas ses devoirs disons

  8   opérationnels, à ce moment-là il devient impossible pour un officier de

  9   mettre sur pied une armée opérationnelle; est-ce exact ?

 10   R.  Oui. C'est lié à toute la gamme de contrôle possible. Un sous-officier

 11   a cinq à dix hommes sous ses ordres, ce qui est forcément beaucoup plus

 12   simplement que ce qu'un officier est parfois amené à faire avec 30 ou 40

 13   soldats. C'est encore une fois plus simple qu'un commandant d'armée qui lui

 14   a 100, 150 personnes sous ses ordres. C'est cela que je voulais dire. Mais

 15   je ne voulais pas dire que c'était une obligation.

 16   Q.  Merci. Quand un sous-officier n'assume pas ses fonctions et ne peut

 17   éviter que ses soldats ne procèdent à des pillages ou à mettre le feu, est-

 18   ce que ce n'est pas, à ce moment-là, à son supérieur direct à agir, donc la

 19   responsabilité de ce supérieur de façon à maintenir la discipline et la

 20   faire respecter ? Donc c'est à la personne au-dessus de ce sous-officier

 21   plutôt qu'à ses subordonnés, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui, oui.

 23   Q.  Ici, ce que nous reconnaissons tous, nous avons un lieutenant ou un

 24   commandement qui est incapable d'arrêter ce genre d'action directement, que

 25   ce soit le pillage ou le fait de mettre feu. Il doit par la suite non pas

 26   simplement faire semblant qu'il a oublié, mais faire état de ce qu'il a

 27   constaté et s'assurer que ce qu'il a vu puisse remonter toute la hiérarchie

 28   militaire et la discipline militaire; est-ce correct ?

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  1   R.  Oui, oui.

  2   Q.  Je reviens à ce que je vous avais demandé au tout début de ce contre-

  3   interrogatoire, le fait que M. Kehoe vous ait montré ces commandements sur

  4   le fait d'éviter les pillages, de brûler, et cetera, et que ces ordres

  5   avaient été donnés avant les opérations à Glamoc et Grahovo, vous étiez au

  6   courant donc que ces ordres étaient réellement ceux qui portaient sur le

  7   fait d'éviter le pillage et le fait que l'on procède à des incendies

  8   volontaires; est-ce exact ?

  9   R.  Il est normal, quel que soit l'ordre ou le commandement, selon les

 10   procédures qui sont les nôtres, sur le traitement des civils pendant la

 11   guerre et de leur propriété, que la zone soit délimitée, et il est normal

 12   d'insister, quel que soit l'ordre, que ceci soit s'appuie sur les documents

 13   adéquats.

 14   Mais peut-être n'ai-je pas compris une partie de votre question ?

 15   Q.  Oui, en effet. Je vais la reposer.

 16   Etes-vous conscient du fait que les ordres qui étaient donnés de ne pas

 17   procéder à des pillages ou incendies volontaires n'avaient pas été transmis

 18   aux soldats à Grahovo et Glamoc ?

 19   R.  Si ces choses-là se passent, c'est que les ordres donnés n'ont pas

 20   atteint l'objectif poursuivi ou n'ont tout simplement pas été exécutés.

 21   Q.  Vous seriez ainsi d'accord avec moi à ce moment-là que lorsque ce genre

 22   d'ordre est émis, il n'est pas effectif, il n'est pas réel, et qu'il n'est

 23   pas suivi, appliqué, il incombe au commandant en question de veiller à ce

 24   que l'ordre soit respecté par la suite.

 25   R.  Non. Lorsqu'il s'agit de contrôle et d'inspection, des mesures doivent

 26   être prises à ce moment-là, il faut le faire au niveau personnel, puis il

 27   faut voir aussi aux niveaux -- pourquoi ça n'a pas été respecté et voir ce

 28   qu'on peut faire pour corriger, car analyser la question à fond de façon à

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  1   pouvoir atteindre le niveau de conduite adéquat ?

  2   Q.  Dans l'esprit de cette réponse, certains des objectifs du code de

  3   discipline militaire visent à corriger un soldat qui commettrait des

  4   violations de cette discipline; et de surcroît, dans un deuxième niveau, en

  5   fait c'est pour servir d'exemple pour que les soldats soient invités à

  6   suivre le code de discipline; et troisièmement, s'assurer du bon

  7   fonctionnement de toute la filière hiérarchique; c'est exact ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Lorsqu'un soldat commet une telle violation et procède à soit au

 10   pillage ou incendie volontaire, il n'y a pas de conséquence qui s'ensuive,

 11   à ce moment-là, l'objectif du code de discipline n'est pas poursuivi qui

 12   est de corriger ce soldat-là et servir d'exemple aux autres soldats pour

 13   éviter que celui-ci ne commette les mêmes inactions; est-ce exact ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Le général Gotovina était au courant du manque de sous-officiers et

 16   surtout du manque aussi de formation des sous-officiers qui avaient été

 17   désignés, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Il était également au courant des problèmes rencontrés par ses soldats

 20   avec la discipline, et ce, avant l'opération Tempête; est-ce exact ?

 21   R.  Je ne sais pas, mais je peux imaginer qu'il était au courant.

 22   Q.  Il était surtout au courant du fait que les soldats qu'il allait

 23   utiliser dans l'opération Tempête allaient procéder à des pillages et des

 24   incendies volontaires de propriétés de civils, n'est-ce pas ?

 25   R.  Je ne peux pas dire, moi je ne sais pas ce qu'il pensait. Il avait

 26   probablement certaines raisons de penser qu'il y aurait parfois un manque

 27   de discipline, mais sa mission était grave et était énorme et il devait

 28   aussi pouvoir fonctionner avec certains risques dont il fallait tenir

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  1   compte dans cette zone-là.

  2   Q.  Je voudrais bien comprendre votre réponse.

  3   Donc ce que je vous disais c'est que le général Gotovina était bien au

  4   courant du fait que les membres de la 4e et 7e Brigades, ainsi que des

  5   membres de la Garde nationale qui participaient aux opérations à Grahovo et

  6   à Glamoc avaient dans cette zone-là déjà procédé à des incendies

  7   volontaires avant l'opération Tempête, ce n'est pas quelque chose que vous

  8   démentez ou que vous contestez, n'est-ce pas ?

  9   R.  Non, je ne le conteste pas. Je disais oui, en effet, il pouvait y avoir

 10   pensé.

 11   Q.  Vous êtes au courant également du fait qu'au milieu de tous ces

 12   pillages et incendies volontaires à Glamoc et Grahovo le général Gotovina a

 13   mis en place ce qu'il fallait pour assurer la promotion de certains sous-

 14   officiers, malgré tout.

 15   R.  Je ne sais pas. Même s'il est bien connu qu'à l'issue de chaque

 16   victoire militaire récompense est offerte à tous ceux qui ont été chevi-

 17   ouvrier [phon] de ce succès militaire. Ce n'est pas toujours les mêmes

 18   personnes et les récompenses ne sont pas toujours pareilles. Certains

 19   seront récompensés, d'autres pourraient être punis. Je n'imagine pas qu'il

 20   ait récompensé ceux qui auraient commis des exactions.

 21   M. RUSSO : [interprétation] Puis-je demander que l'on affiche la pièce P71

 22   ?

 23   Pourrait-on afficher la page 49 de la version en anglais et la page 25 de

 24   la version en B/C/S ? Dans la version en B/C/S, on pourrait se concentrer

 25   sur la partie gauche de la page.

 26   Q.  Ce que l'on peut voir ici, Professeur, le rapport du 72e Bataillon de

 27   Police militaire et l'on voit :

 28 "A Grahovo, tous les soldats, sauf la 1ère Garde Croate et le 3e Bataillon de

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  1   la Garde -- de la 1ère Brigade de la HVO, ont procédé à des incendies

  2   volontaires des habitations."

  3   M. RUSSO : [interprétation] Maintenant on passe à la page 73 dans la

  4   version en B/C/S.

  5   La partie gauche de ce document en B/C/S. Ce que l'on a en bas de page, on

  6   peut lire que le ministre Susak s'est rendu dans la zone et a fait part de

  7   sa déception de voir le pillage et les incendies volontaires et c'est

  8   particulièrement remarquable dans la zone des 4e et 7e Brigades.

  9   Puis page 71, pour la version anglaise et page 53 pour la version en B/C/S.

 10   On peut descendre l'écran pour la version anglaise et c'est à gauche pour

 11   la version en B/C/S. Je suis désolé, j'ai besoin de la page 53 dans la

 12   version anglaise et 27 dans la version en B/C/S. Est-ce que ce sont bien

 13   les pages qui sont affichées ?

 14   Q.  Ce que l'on peut voir ici c'est ce qu'a déclaré le général Gotovina. Il

 15   est important, je cite :

 16   "De se préparer pour la promotion de soldats et de sous officiers, et

 17   d'officiers ainsi que pour l'octroi de récompenses."

 18   Donc, Professeur, vous pouvez bien voir que d'après ce rapport tous les

 19   soldats sauf ceux de la 1ère Garde et le 7e Bataillon ont participé à ces

 20   incendies volontaires, et nous avons le général Gotovina qui annonce la

 21   promotion entre autres des sous officiers.

 22   Alors pensez-vous que c'était raisonnable dans le chef du général Gotovina

 23   et que des mesures n'auraient pas dû être prises afin d'éviter que, lors

 24   d'opérations futures, ce genre de conduite ne se répète ?

 25   R.  Si nous prenons une situation militaire dans son entièreté, une

 26   situation de guerre, et qu'on met ces deux éléments en relation, bon, je ne

 27   pense pas que ce soit alors la bonne chose à faire parce que l'opération

 28   militaire est bien plus complexe que les incidents qui ont eu lieu pendant

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  1   cette opération. Personne ne sait jamais tout ce qui est passé dans le

  2   détail pendant une opération militaire.

  3   Je ne parle pas de cette opération bien spécifique ici, je parle

  4   d'opérations militaires en général. Ce qui est logique c'est lorsqu'une

  5   unité a accompli sa mission.

  6   M. RUSSO : [aucune interprétation]

  7   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi, excusez-moi. Je voudrais que le

  8   témoin puisse expliquer sa réponse.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Moi, je pense que la question était sur

 10   cette situation bien particulière, bien spécifique et que le témoin voulait

 11   expliquer sans tenir compte de cette situation particulière.

 12   Alors est-ce que vous pourriez d'abord répondre à la question : est-ce

 13   qu'il y a quelque chose que vous vouliez dire qui n'est pas en lien direct

 14   avec la question, vous êtes libre de le faire pour pouvoir donner

 15   l'explication ?

 16   Nous continuons donc. Poursuivez, Monsieur Russo.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] A mon avis, établir un lien entre ces deux

 18   faits, donc d'un côté, nous avons les incendies, et de l'autre, nous avons

 19   les promotions ce n'est pas suffisamment spécifique. J'imagine que le

 20   général Gotovina n'avait pas envisagé d'offrir une promotion ou une

 21   récompense aux personnes qui étaient responsables de ces actes-là.

 22   J'imagine. Si c'est le cas, sa réaction comme commandant militaire est tout

 23   à fait adéquate à savoir que les personnes qui ont permis la réussite

 24   soient promues et récompensées.

 25   Que parallèlement des mesures disciplinaires puissent être prises à

 26   l'encontre de ceux qui avaient commis des exactions et des infractions

 27   disciplinaires et que des poursuites soient entamées voire même des

 28   poursuites pénales. C'est exactement ce qui se passait je pense quand on

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  1   vérifie ce qu'il y a dans les documents.

  2   M. RUSSO : [interprétation]

  3   Q.  Bien. On va reprendre d'abord la première partie de votre

  4   réponse.

  5   On peut s'attendre à ce que des mesures disciplinaires soient prises

  6   à la lecture de ce que nous avons dans le journal opérationnel et du fait

  7   des exactions. La conduite de certains des membres de l'armée, or, Monsieur

  8   le Professeur, je crois que justement il fallait qu'il y ait une

  9   discipline, des mesures disciplinaires prises à l'encontre de ceux qui

 10   avaient commis ces incendies volontaires et le --

 11   M. KEHOE : [interprétation] Je crois que c'est une erreur d'appréciation du

 12   témoignage qui a été présenté, et je crois ce qu'il faut faire c'est

 13   justement établir le lien avec la discipline militaire, les mesures

 14   disciplinaires.

 15   M. RUSSO : [aucune interprétation] 

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe, vous ne pouvez pas

 17   présenter votre point de vue de ce qui se passe, et on peut s'attendre à ce

 18   que M. Russo présent son point de vue et qu'il y ait une erreur de

 19   présentation et représentation de ce qui a été expliqué ici.

 20   Monsieur Russo, est-ce que vous êtes conscients des inquiétudes qui

 21   viennent d'être exprimées par M. Kehoe ?

 22   M. RUSSO : [interprétation] Monsieur le Président, je pense, tout d'abord,

 23   que ce n'est pas faire bonne utilisation du temps d'audience que de

 24   représenter tous ces témoignages à notre témoin, en fonction des

 25   références.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, votre question portait sur le fait

 27   d'accepter quelque chose qui était repris dans un témoignage, et qu'il

 28   faudrait donc --

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  1   Monsieur Kehoe.

  2   M. KEHOE : [interprétation] Oui, il s'agit d'une seule chose, il s'agit de

  3   la question 90(H) sur la discipline. Or c'est justement quelque chose qui

  4   n'a pas encore été présenté à M. Milas, qui était un instructeur et qui

  5   était ici pour représenter la police militaire, quand lui était là.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- prendre les choses dans l'ordre une à

  7   la fois.

  8   Je pense qu'il ne faut pas reprendre tout le document et tout relire. Mais

  9   il est clair que le témoin dans son témoignage nous a dit que si des délits

 10   sont commis, des mesures disciplinaires doivent être prises contre ceux qui

 11   les ont commis. Monsieur Russo, vous étiez d'accord avec lui sur cette

 12   partie-là, reprenons alors la question que vous vouliez poser ensuite.

 13   M. RUSSO : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur Barkovic, notre Chambre a entendu un autre témoignage et a

 15   reçu d'autres témoignages couvrant tous les mois qui couvraient les

 16   opérations Grahovo et Glamoc de l'opération Tempête selon ces informations

 17   aucune mesure disciplinaire n'aurait été prise contre les membres du 4e

 18   Bataillon, de la 7e Brigade, et aucune mesure disciplinaire donc prise

 19   contre les individus qui avaient commis des pillages ou incendies

 20   volontaires.

 21   En êtes-vous conscient, ou êtes-vous au courant de ce fait ?

 22   R.  Je ne le savais pas avant, et je suis d'accord avec vous -- vous dire

 23   que des mesures auraient dû être prises.

 24   Q.  Vous seriez aussi d'accord avec moi alors, pour dire que si des mesures

 25   n'ont pas été prises après Grahovo et Glamoc pour justement gérer ce

 26   problème de pillage et d'incendie, bien qu'automatiquement cela allait

 27   entraîner des problèmes supplémentaires pour la suite de l'opération

 28   Tempête; d'accord ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Merci.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je surveille l'horloge. Alors j'ai deux

  4   questions. Quand pensez-vous qu'il serait opportun d'interrompre, et

  5   combien de temps vous reste-t-il ?

  6   M. RUSSO : [interprétation] Je crois que c'est le bon moment pour lever la

  7   séance, et j'aurais besoin d'encore une séance, et je vais essayer de

  8   terminer lors de notre prochaine séance.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

 10   Nous levons la séance, et nous reprendrons nos travaux à 13 heures.

 11   --- L'audience est suspendue à 12 heures 30.

 12   --- L'audience est reprise à 12 heures 53.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Russo.

 14   M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 15   Q.  Professeur, nous avons entendu récemment un témoin venu déposer ici et

 16   nous ayant dit que -- nous ayant parlé du rôle du général Gotovina dans

 17   l'instruction des sous-officiers. J'aimerais vous soumettre ce qui a été

 18   dit par cette personne afin que vous nous disiez si sa version des faits

 19   est exacte ou non.

 20   Est-il exact qu'afin de parer aux lacunes identifiées au niveau des sous-

 21   officiers, la direction de l'armée croate s'est tournée principalement vers

 22   le général Gotovina ?

 23   R.  Je n'en sais rien.

 24   Q.  Bien. Vous ne diriez donc pas que le général Gotovina était le premier

 25   responsable de l'instruction des sous-officiers -- le principal responsable

 26   ?

 27   R.  Non. J'ai suivi ses initiatives, notamment le centre d'Instruction et

 28   d'Entraînement de la 4e Brigade des Gardes, j'ai vu ensuite l'évolution des

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  1   choses, l'instruction proposée à l'ensemble des Brigades des Gardes

  2   jusqu'au document que je viens d'examiner l'initiative visant à créer un

  3   groupe de sous-officiers. Alors, oui, je peux dire à la lumière de tout

  4   ceci qu'il n'était pas inactif dans ce domaine, mais cela ne fait que

  5   montrer qu'il était au courant de ce qui se passait et qu'il a tenté de

  6   constituer un corps ou un groupe plus large de sous-officiers.

  7   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, peut-on vérifier

  8   l'interprétation page 66, ligne 8, s'il vous plaît, le troisième mot ?

  9   L'INTERPRÈTE : L'interprète précise qu'elle a bien dit qu'il était actif

 10   dans ce domaine, et non pas inactif comme le reflète le compte rendu.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Poursuivez.

 12   M. RUSSO : [interprétation]

 13   Q.  L'Académie ou l'école d'instruction, d'entraînement créée par le

 14   général Gotovina pour former la 4e Brigade des Gardes l'a été en 1993,

 15   n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui, pour la 4e.

 17   Q.  Professeur, les sous-officiers ont plus de responsabilités que le

 18   simple maintien et respect de la discipline, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui. Les sous-officiers sont chargés de différentes choses. Ce dont

 20   nous avons un peu moins parlé c'est la formation des soldats afin que ceux-

 21   ci acquièrent des compétences techniques et tactiques. En d'autres termes,

 22   l'entretien et l'usage d'armes et des activités tactiques en matière de

 23   coordination et d'usage des armes. Donc c'est une première chose. Puis il y

 24   a aussi l'entretien du moral des troupes, le respect de la discipline et

 25   l'instauration de valeurs communes au sein d'une équipe. Ils ont donc pour

 26   tâche d'unifier une équipe.

 27   Q.  Très bien. Ils ont également pour tâche, n'est-ce pas, de veiller à ce

 28   que les ordres liés à une mission de combat particulière soient obéis et

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  1   exécutés efficacement par leurs unités ?

  2   R.  C'est plus que cela encore. Ils sont également les meilleurs éléments

  3   qui doivent participer à ce genre de mission.

  4   Q.  Lorsqu'une opération est amenée à son terme et qu'elle est couronnée de

  5   succès, c'est une indication, n'est-ce pas, de la qualité des sous-

  6   officiers ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Bien. Vous conviendrez avec moi que l'opération Tempête a été assez

  9   rondement menée ?

 10   R.  Oui.

 11    Q.  Vous conviendrez également avec moi que le système de direction et de

 12   commandement a également bien fonctionné au cours de l'opération Tempête ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Savez-vous si le général Gotovina a lui aussi estimé que le système de

 15   commandement et de direction avait bien fonctionné pendant l'opération

 16   Tempête ?

 17   R.  Je n'en sais rien. Je pense qu'il était très conscient des points forts

 18   et des points faibles du système, mais je ne sais pas quelle était son

 19   opinion personnelle.

 20   Q.  Très bien. J'aimerais examiner avec vous un certain nombre de documents

 21   à ce sujet.

 22   M. RUSSO : [interprétation] Madame la Greffière, commençons avec le

 23   document 65 ter 1776.

 24   Q.  En attendant que le document s'affiche, Professeur, je précise à votre

 25   intention qu'il s'agit d'une analyse réalisée par le général Gotovina en

 26   date du 16 septembre 1995.

 27   M. RUSSO : [interprétation] J'aimerais que l'on examine la page 14 de la

 28   version en anglais et 8 de la version en B/C/S. C'est en haut de page dans

Page 20197

  1   l'anglais.

  2   Q.  Vous verrez que le général Gotovina dit ici, je cite, que :

  3   "Le système de commandement et de contrôle dans l'opération Oluja a

  4   relativement bien fonctionné dans les conditions qui prévalaient, à ce

  5   moment-là."

  6   M. RUSSO : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais passer à

  7   l'autre document, mais avant cela, je demanderais le versement au dossier

  8   de cette pièce.

  9   M. KEHOE : [interprétation] Y a-t-il une question sur ce document ? Y a-t-

 10   il demande de versement direct de la part de l'Accusation au dossier sans

 11   passer par le témoin ? Si c'est la procédure, en général, nous nous mettons

 12   d'accord au préalable sur ces documents.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais une question a été posée au témoin

 14   sur le thème qui est évoqué dans ce document, mais il ne semble pas qu'il y

 15   ait de lien direct entre ce document-ci et le témoin. Ce sera donc un

 16   document versé directement par l'Accusation au dossier.

 17   M. RUSSO : [interprétation] Oui, c'est possible.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas-là, il sera enregistré aux

 19   fins d'identification.

 20   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je l'examinerai et

 21   je vous dirai ce que j'en pense.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

 23   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P2585.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Enregistrée aux fins d'identification.

 25   Veuillez poursuivre, Monsieur Russo.

 26   M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Examinons

 27   maintenant la pièce 2559.

 28   Q.  En attendant qu'elle s'affiche à l'écran, Professeur, je précise à

Page 20198

  1   votre attention que c'est aussi une analyse réalisée par le général

  2   Gotovina. Ce document porte la date du 15 août 1995.

  3   M. RUSSO : [interprétation] Madame la Greffière, nous souhaitons examiner

  4   la page 5 de l'anglais et 2 du B/C/S. Je demanderais à ce que l'on examine

  5   la partie inférieure de cette page.

  6   Un instant, Monsieur le Président, s'il vous plaît.

  7   Q.  Professeur, vous voyez, au point 1.2, qu'il est dit que :

  8   "La 4e Brigade des Gardes, la 7e Brigade des Gardes, et la 81e, la 113e

  9   de la HV."

 10   Je ne sais pas si c'est là une Unité anti-blindée ou d'infanterie.

 11   R.  Oui, oui, c'est une Unité d'infanterie.

 12   Q.  Le 126e Régiment de la Garde patriotique mérite une attention

 13   particulière s'agissant de l'exercice approprié du commandement et de la

 14   direction.

 15   J'aimerais que l'on examine maintenant la dernière page, la page 8 dans la

 16   version en anglais, et 4 dans le B/C/S.

 17   Vous constaterez, sous 2.10, que le général Gotovina fait référence à des

 18   propositions de récompense ou de distinction pour certains officiers, sous

 19   officiers et commandants occupant des grades inférieurs suite à des

 20   opérations et la manière dont l'opération a été menée.

 21   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Je vais

 22   objection à ce que commentaire.

 23   M. RUSSO : [interprétation] Je ne sais pas ce qui peut faire l'objet d'une

 24   objection en l'occurrence. Je dis simplement au témoin que le général

 25   Gotovina estime, dans ce document, que l'opération s'est déroulée de

 26   manière satisfaisante et qu'il s'en félicite.

 27   M. KEHOE : [interprétation] Non, non, ce n'est pas ça que je remets en

 28   cause. C'est le commentaire de mon confrère de la partie adverse.

Page 20199

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, de quelle partie parlez-

  2   vous ?

  3   M. RUSSO : [interprétation] C'est la partie dont j'ai donné lecture. Peut-

  4   être que je pourrais poser une question au témoin.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Effectivement, j'avais remarqué

  6   tout à l'heure qu'il est question de préparer des propositions de

  7   distinction et de récompense. Ce ne sont pas là des décisions définitives,

  8   semble-t-il.

  9   Mais poursuivez, posez votre question au témoin.

 10   M. RUSSO : [interprétation]

 11   Q.  Professeur, il n'est pas d'usage au sein de l'armée croate, n'est-ce

 12   pas, de proposer ou d'envisager de décerner des distinctions ou des

 13   récompenses à des officiers, non officiers dont la conduite ne vous a pas

 14   satisfait, n'est-ce pas ?

 15   R.  Bien entendu, même si je dois préciser que je ne vois pas ni dans ce

 16   document-ci ni dans les précédents, que ce sont les mêmes personnes qui

 17   s'étaient rendu coupable de différents actes criminels, qui étaient

 18   envisagés comme susceptibles d'être récompensés ou distingués.

 19   Des dizaines de milliers de personnes ont pris part à l'opération, et

 20   bien entendu, tous ne se sont pas rendus coupables d'actes répréhensibles.

 21   Je pense qu'il a dû y en avoir un certain nombre, mais les gens que l'on

 22   propose de récompenser ici ne sont sans doute pas les mêmes, en tout cas,

 23   je l'espère et je ne le crois pas les mêmes que les autres.

 24   Q.  Puisque vous en parlez, vous avez remarqué que je vous ai montré le

 25   rapport du Bataillon de la Police militaire, 72e, selon lesquels tous les

 26   soldats, à l'exception de ceux qui étaient nommés --

 27   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe.

Page 20200

  1   M. KEHOE : [interprétation] Objection. Objection. Nous parlons d'un secteur

  2   particulier. Mon confrère doit encore déterminer si les soldats dont on

  3   parle sont les soldats du HVO ou les soldats de la HV dans la ville à ce

  4   moment-là.

  5   J'objecte donc quant au fondement sur lequel repose cette question.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le fondement de la question c'est le

  7   rapport tel qu'il nous a été présenté et qui fait référence à des unités.

  8   Et apparemment on nous parle de la 4e et d'autres brigades.

  9   M. KEHOE : [interprétation] Mais on ne sait pas si c'est exact.

 10   M. RUSSO : [interprétation] Ce document dit toutes les unités à l'exception

 11   de deux. Je ne sais pas s'il y a un conflit entre les parties ou pas

 12   s'agissant de savoir si ce sont les 4e et 7e qui étaient à Grahovo et à

 13   Glamoc ce jour-là.

 14   M. KEHOE : [interprétation] Mais si, absolument il y a litige. Il y a

 15   litige entre les parties quant à la question de savoir où ces unités se

 16   trouvaient lorsque le rapport a été transmis.

 17   M. RUSSO : [interprétation] Très bien.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Posez votre question au témoin.

 19   M. RUSSO : [interprétation]

 20   Q.  Bien, vous vous souvenez de la partie de ce journal des opérations dont

 21   j'ai donné lecture dans lequel M. Susak, le ministre exprime sa déception,

 22   et indique qu'il s'était passé quelque chose de particulier dans les zones

 23   d'activités des 4e et 7e Brigades des Gardes, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  [aucune interprétation]

 26   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi, mais c'est très précisément ce

 27   pourquoi je faisais objection. Nous parlons d'un secteur dans lequel les

 28   soldats se déplacent d'où ils ne cessent d'entrer et de sortir, et nous

Page 20201

  1   disons que la 4e Brigade de la Garde était présente lorsque ces événements

  2   ont eu lieu. Cette question ne permet pas d'apporter une réponse définitive

  3   à cette question.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivons. C'est l'une des pièces que

  5   nous avons examinée et dans laquelle il est fait référence au 4e et au 7e

  6   Brigade des Gardes.

  7   Il faut examiner les éléments de preuve de dans leur intégralité. Si,

  8   pour chaque document, nous devons entrer dans tous ces détails, si, par

  9   exemple, lorsque l'on parle de 4e Brigade de la Garde il faut se demander

 10   si l'on parle de chacun des membres de la 4e Brigade de la Garde, nous

 11   allons parvenir à une situation où les choses sont intenables. Il faut donc

 12   voir les documents dans leur contexte, Monsieur Kehoe, c'est quelque chose

 13   qui est vrai pour toutes les parties, nous allons examiner les choses dans

 14   leur intégralité.

 15   Monsieur Russo, compte tenu des préoccupations de M. Kehoe, je vous

 16   demanderais de bien vouloir poser la question suivante au témoin.

 17   M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 18   Q.  Professeur, si le général Gotovina est satisfait de la manière dont

 19   fonctionne le système de commandement et la direction au cours de

 20   l'opération Tempête, la pénurie de sous officiers et le manque

 21   d'instruction et d'entraînement de ces sous officiers n'était pas

 22   véritablement le problème ? Compte tenu du fait que le système de

 23   commandement et de direction semble fonctionner au cours des actions de

 24   combat et que les sous officiers semblent tout à fait assumer leurs

 25   responsabilités, n'est-ce pas ?

 26   R.  Je ne vois pas nécessairement de lien direct entre ces deux éléments.

 27   Le fait est que le général Gotovina y compris les autres officiers, et les

 28   officiers de l'état-major principal des forces armées étaient tout à fait

Page 20202

  1   informés de l'état général des forces armées. Par conséquent, les attentes

  2   étaient conformes à la situation que connaissaient les forces armées, ils

  3   ne voyaient pas les choses de l'angle d'une situation idéale, où tous les

  4   objectifs étaient réalisés. Je crois que son degré de satisfaction repose

  5   sur ces attentes compte tenu de l'état dans lequel se trouvait l'armée, à

  6   ce moment-là. Il était tout à fait impossible que tous les membres des

  7   forces armées soient parfaitement entraînés par des officiers formés à cet

  8   effet ou des sous officiers. Ils voient les choses comme elles sont compte

  9   tenu des circonstances. Je ne vois pas comment on pourrait tirer une

 10   conclusion autre que celle-ci. Ils jugent les choses donc non pas dans

 11   l'absolu, mais relativement, comparativement au niveau d'organisation et

 12   d'instruction et d'entraînement. Sans quoi, parvenir à une conclusion telle

 13   que celle-ci relèverait de la sûre simplification.

 14   Q.  Professeur, ce que je vous dis et je vous le dis indépendamment des

 15   critères d'évaluation mis en place par le général Gotovina et applicables

 16   au comportement des soldats pendant les opérations, donc quel que soit ce

 17   critère, il n'en reste pas moins, et je pense que vous en conviendrez que,

 18   d'après ce qui est indiqué ici, il ressort qu'il était satisfait de la

 19   bonne réalisation de ces critères par les unités qui participaient à

 20   l'opération Tempête, n'est-ce pas ?

 21   R.  Lorsqu'une opération militaire s'achève et atteint ses objectifs

 22   militaires, le commandant doit être satisfait du résultat. Il ne veut pas

 23   en être insatisfait. Toutefois, dans le même temps, il lui est loisible

 24   d'observer et de constater toutes les insuffisances, ce qui se fait par le

 25   biais de l'analyse postérieure à l'opération qui est réalisée.

 26   Q.  Lorsque vous avez effectué l'analyse postérieure à l'opération et que

 27   vous avez mis en exergue un certain nombre d'unités spécialement

 28   mentionnées s'agissait du commandement et du contrôle, vous conviendrez,

Page 20203

  1   n'est-ce pas, que cette mise en exergue, cette reconnaissance, marquait le

  2   bon fonctionnement, le bon travail des sous-officiers durant leurs missions

  3   ?

  4   R.  Je ne sais pas quelles ont été les unités félicitées parce qu'au

  5   paragraphe 2.10 auquel vous me renvoyez en rapport avec cette question, il

  6   est question de propositions, de félicitations et de promotions d'un

  7   certain nombre d'individus, c'est-à-dire d'officiers, de sous-officiers, et

  8   de soldats considérés individuellement et non pas d'unités. Autrement dit,

  9   je ne suis pas au courant que des récompenses aient été octroyées à des

 10   unités.

 11   Q.  Je pense que vous m'avez peut-être mal compris, Professeur. Je parle de

 12   la pièce P2559 dans laquelle je lis que lors de l'analyse faite par vous le

 13   15 août à l'intention du général Gotovina, une reconnaissance particulière

 14   est faite du bon niveau de commandement et de contrôle, et ça c'est une

 15   citation. Il reconnaît donc spécialement les qualités de la 4e Brigade et

 16   de la 7e Brigade des Gardes ainsi que de la 81e Brigade des Gardes et du

 17   113e Régiment d'infanterie s'agissant de l'exercice du commandement et du

 18   contrôle. Alors conviendrez-vous avec moi que ceci implique que les sous-

 19   officiers de ces unités ont bien fait leur travail ?

 20   R.  Je pense avoir déjà répondu à votre question. Il est difficile de se

 21   prononcer d'une façon aussi simplifiée que celle-là. Une reconnaissance

 22   spéciale, c'est une mention qui concernait la réalisation des objectifs et

 23   rien d'autre.

 24   Q.  Mais la réalisation des objectifs, Professeur, n'est-ce pas là en fait

 25   une des obligations qui incombent aux sous-officiers, n'est-ce pas exact ?

 26   L'une de leurs obligations ne consiste-t-elle pas à remplir les objectifs

 27   qui leur ont été assignés et qui sont réalisés par leurs unités ?

 28   R.  Oui.

Page 20204

  1   Q.  Je vous remercie.

  2   R.  Mais néanmoins, il faut tenir compte du fait que les objectifs sont

  3   fixés de façon à être réalisables de façon réaliste avec les effectifs et

  4   les forces dont vous disposez, dont dispose le responsable.

  5   Q.  Mais ce document ne démontre-t-il pas, Professeur, que le problème ne

  6   vient pas d'une instruction insuffisante ou d'un nombre insuffisant de

  7   sous-officiers. Lorsque les sous-officiers savent quel est le travail à

  8   accomplir et qu'ils s'y intéressent, ils l'accomplissent ce travail, n'est-

  9   ce pas ?

 10   R.  Dans une de mes réponses, j'ai expliqué que les sous-officiers se

 11   voyaient confier trois sortes de missions, et que parmi ces trois sortes de

 12   missions il est possible qu'il y en ait certaines qu'ils réalisaient mieux

 13   que d'autres. Par ces mots, je veux dire qu'il leur fallait s'appuyer sur

 14   leurs niveaux d'instruction technique et tactique pour maintenir l'esprit,

 15   le moral et la discipline au sein d'une unité. Ces objectifs pouvaient être

 16   atteints si le niveau de leur action s'agissant de l'instruction et de la

 17   tactique était suffisamment bon, même si le moral des troupes ou la

 18   discipline n'était pas parfait. Ces questions sont toutes distinctes les

 19   unes des autres.

 20   Q.  Professeur, je vous ai dit que les soldats de l'armée de Croatie, et là

 21   je parle des professionnels de la Garde et des soldats des régiments de la

 22   Garde patriotique, s'intéressaient moins à empêcher ou à prévenir les

 23   incendies volontaires et les actes de pillage qu'à attaquer les Serbes et

 24   les biens appartenant aux Serbes de façon générale.

 25   Que dites-vous de cela ?

 26   R.  Durant une offensive militaire, durant une opération militaire, il

 27   importe de neutraliser l'ennemi et de le repousser hors de la zone en

 28   question, ce qui implique que l'on s'empare de la zone. Ça c'est l'objectif

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  1   numéro 1, numéro 2 et numéro 3. Bien entendu, il importe en toute situation

  2   de veiller à ce que cela se fasse dans le respect des conventions

  3   internationales et règlements internationaux, mais ces objectifs ne peuvent

  4   pas être mis sur un pied d'égalité avec les autres objectifs militaires. Il

  5   faut être sérieux. La guerre n'est pas un jeu. L'objectif principal d'une

  6   guerre ne consiste pas à s'empêcher de détruire une maison simplement pour

  7   rassurer l'ennemi, si cette maison doit être détruite.

  8   Q.  J'aimerais vous montrer un passage d'un journal de guerre du 6e

  9   Régiment de la Garde.

 10   M. RUSSO : [interprétation] Madame la Greffière, je demande l'affichage du

 11   document 65 ter numéro 5709.

 12   Je m'intéresse à la page 4 de ce document en version anglaise et B/C/S.

 13   C'est l'entrée relative au 5 août 1995 qui m'intéresse plus

 14   particulièrement. Dans la version anglaise, je commence par les mots, je

 15   cite :

 16   "A 8 heures 50 on a pu entendre des échos sur les transmissions radio, Evo

 17   Zoreeva Dana Evo Jure I Bobana, autrement dit, l'aube s'est levée -- le

 18   jour s'est levé, Jure et Boban sont arrivés. Obobdina est tombé."

 19   Q.  J'aimerais maintenant vous montrer un autre document, puis je vous

 20   poserai une question.

 21   M. RUSSO : [interprétation] Je demande l'affichage du document 65 ter

 22   numéro 5706.

 23   Q.  Paragraphe 2 où nous lisons, je cite :

 24   "Nos troupes ont accompli bon nombre d'actions de combat pendant la

 25   journée. La mission particulière de l'opération Kozjak 95 a été remplie

 26   avant 8 heures 50, moment où Jure et Boban ont été entendus à partir de

 27   Bodina."

 28   Alors, Professeur Barkovic, vous connaissez le chant : "Evo Zore Evo Dana"

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  1   ?

  2   R.  Oui, oui, je le connais.

  3   Q.  C'est un chant oustachi, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui, oui.

  5   Q.  C'est un chant qui glorifie les exploits de la légion noire, n'est-ce

  6   pas ?

  7   R.  Des crimes de guerre, oui.

  8   Q.  Professeur, pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre --

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, à la ligne où il est

 10   question de ce que le chant glorifie, en raison du fait que deux orateurs

 11   parlaient en même temps, les Juges de la Chambre ne savent pas ce qui est

 12   glorifié dans ce chant.

 13   M. RUSSO : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Il s'agit

 14   de la légion noire. Jure et Boban étaient chefs de la légion noire.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Veuillez poursuivre -

 16    LE TÉMOIN : [interprétation] La légion, oui.

 17   M. RUSSO : [interprétation] 

 18   Q.  Professeur, étant donné ce que vous savez de l'instruction dispensée

 19   aux soldats croates, pourquoi pensez-vous que les soldats auraient estimé

 20   convenable, non seulement de diffuser ce chant mais également de rendre

 21   compte du fait que ce chant avait été diffusé dans deux documents officiels

 22   de l'armée de Croatie ?

 23   L'INTERPRÈTE : Le témoin en anglais.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais vraiment pas. Excusez-moi --

 25   L'INTERPRÈTE : Le témoin passe au B/C/S.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Donc je ne sais pas. Ce qui est évident c'est

 27   que je ne cautionne pas cela. Nous avions très souvent des problèmes durant

 28   l'instruction que nous dispensions aux soldats de leur faire comprendre la

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  1   nécessité de prendre ces distances par rapport à l'aspect politique des

  2   choses ou à ce qui avait pu se passer pendant la Seconde Guerre mondiale,

  3   et cetera. Donc la réalité toutefois, c'est peut-être que dans le cadre de

  4   leurs familles, en raison de la volonté de leurs familles de transmettre

  5   une espèce de tradition, des choses comme celles-ci pouvaient subsister.

  6   Bien entendu, on comprend bien qu'ils ont dû entendre parler de ce chant,

  7   puisqu'ils l'évoquent ici. Pourquoi ils l'ont utilisé dans le cadre d'une

  8   façon de coder une conversation radio, il faudrait le demander à d'autres,

  9   je n'en sais rien. Mais ce que je peux dire de façon tout à fait claire,

 10   car j'ai tout de même fait partie de l'état-major et j'étais chargé de

 11   l'instruction, c'est que nous avons toujours répondu comme il convenait de

 12   répondre à ce genre de sujet. Donc les choses étaient remises en place par

 13   nous.

 14   D'après ce que je sais, parce que le général Gotovina a rendu visite à

 15   l'école à plusieurs reprises, il soutenait toujours nos initiatives.

 16   D'après ce que je sais, il n'est jamais allé dans le sens de tels excès ou

 17   de tels comportements abusifs.

 18   Q.  Je suppose donc que le général Gotovina était présent lorsque ce genre

 19   de sentiment était exprimé ?

 20   L'INTERPRÈTE : Remplacez "lorsque" par "à des moments où."

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas s'il était présent.

 22   M. RUSSO : [interprétation]

 23   Q.  Vous avez indiqué que le général Gotovina, qui a rendu visite à

 24   l'école, à l'académie, n'a jamais cautionné ce genre de chose, et a

 25   toujours abondé dans le sens de nos initiatives, a toujours réagi dans le

 26   sens de nos initiatives.

 27   R.  Non, non, le mot réagit est peut-être erroné. Ce qui est exact, c'est

 28   que dans le cadre des conversations que j'ai pu avoir avec lui, je me suis

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  1   rendu compte qu'il ne cautionnait pas ce genre de comportement. C'est ce

  2   qu'il nous a dit à nous dans les contacts que nous avions officiellement.

  3   Q.  Je tiens à ce que ceci soit clair. Vous avez discuté avec le général

  4   Gotovina du fait que des soldats qui suivaient les cours de l'Académie

  5   exprimaient des sentiments extrémistes contre les Serbes.

  6   R.  Oui, cela arrivait à des individus ponctuellement. Donc nous en avons

  7   discuté ensemble et les positions que nous avons prises étaient les bonnes,

  8   et le général Gotovina soutenait nos positions.

  9   Q.  Que voulez-vous dire lorsque vous affirmez que vous avez pris les

 10   bonnes positions, qu'advenait-il des soldats qui exprimaient ce genre de

 11   sentiment ?

 12   R.  Dans le cadre de la matière désignée sous le nom d'instruction relative

 13   à la patrie, ces soldats suivaient des conférences et écoutaient des hommes

 14   leur parler de l'histoire de l'état croate. Il leur était y compris

 15   expliqué ce qu'avait été l'état indépendant de Croatie entre 1941 et 1945,

 16   ainsi que la politique de la République de Croatie telle que figurant dans

 17   le préambule de la constitution croate sur laquelle cette politique

 18   s'appuie. Tout cela était évoqué au cours de l'instruction.

 19   Q.  Je vous remercie. Vous conviendrez avec moi, n'est-ce pas, qu'au vu de

 20   l'instruction et de ce qui était dit aux hommes par les membres de

 21   l'académie, le fait de diffuser pour commencer le chant, et ensuite le fait

 22   de mettre par écrit une mention signalant cette diffusion devait appeler

 23   des mesures disciplinaires, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui, oui.

 25   M. RUSSO : [interprétation] Avant de poursuivre, je demande le versement au

 26   dossier du document 65 ter 5709, le rapport relatif aux attributions du 6e

 27   Régiment de la Garde patriotique ainsi que le document 65 ter 5706, qui est

 28   le journal de guerre.

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  1   M. KEHOE : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

  3   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, le document 65

  4   ter numéro 5709 devient la pièce P2586, et le document 65 ter numéro 5706

  5   devient la pièce à conviction P2587.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les deux documents sont admis en tant

  7   qu'élément de preuve.

  8   M. RUSSO : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  9   Si la Chambre souhaite disposer d'un document où l'on trouve les paroles de

 10   ce chant, je peux le verser au dossier sur base documentaire et

 11   automatique, Monsieur le Président, mais je ne vais pas le soumettre au

 12   témoin. Dans le cas contraire, je me contenterais de poursuivre.

 13   [La Chambre de première instance se concerte]

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que le témoin a déjà fait son

 15   témoignage sur la nature de cette chanson, son caractère. Je ne crois pas

 16   qu'on ait besoin du texte, des paroles, à moins qu'il n'y ait contestation

 17   sur l'objet de ce genre de chant. Donc s'il n'y a pas de contestation, je

 18   crois que nous n'en avons pas besoin. Merci.

 19   M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   Q.  Bien. Je voudrais maintenant aborder la formation qui était donnée aux

 21   membres des forces croates et le MPRI. Vous avez déjà parlé, abordé la

 22   formation et l'instruction donnée par le MPRI et l'appui dont bénéficiait

 23   le MPRI du général Gotovina, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Cette instruction portait sur non seulement le droit des conflits

 26   armés, mais également comment les sous-officiers devaient faire respecter

 27   ces principes dans leurs unités respectives, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, vous avez dit non

  2   seulement des instructions sur le droit des conflits armés; sur quoi vous

  3   appuyez-vous pour cette question, ce morceau de question, Monsieur Russo ?

  4   Je ne trouve pas dans le paragraphe 22 auquel vous faisiez référence.

  5   M. RUSSO : [interprétation] Je ne faisais pas référence, je ne faisais

  6   référence à aucun élément de preuve en particulier. Je pense que c'est

  7   quelque chose qui n'a pas été contesté lorsque nous avons discuté

  8   d'information.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certains des documents que nous avons

 10   reçus aujourd'hui, en fait, et que nous avons rapidement parcourus ne font

 11   à ma connaissance référence spécifiquement aux règles de la guerre, à moins

 12   que quelque chose m'ait été épargné, que je n'ai pas constaté, et quand je

 13   regarde le programme qui nous a été présenté pour le cours dispensé en

 14   1994, il n'y a pas de détails donnés sur les règles des conflits armés, par

 15   contre, bien sûr, la natation et la course. Donc je crois que pour l'ordre,

 16   en tout les cas, je crois qu'on ne puisse pas trouver de déclarations du

 17   témoin, en tout cas, moi, je n'en n'ai pas trouvées qui justement

 18   reporteraient là-dessus. Quand je vois les onglets 14, 15, 16 et 17 et qui

 19   font justement référence au paragraphe 22, si c'est dans cet esprit que

 20   vous avez interrogé le témoin, je voudrais que vous soyez bien conscient de

 21   ce que je viens de vous dire par rapport à ce fondement.

 22   M. RUSSO : [interprétation] Bien. Je vais préciser tout cela avec le

 23   témoin.

 24   Q.  Est-ce que, Professeur, vous pouvez expliquer à la Chambre sur quoi

 25   s'appuyait l'instruction militaire qui était donnée par le MPRI sur les

 26   règles de conflits armés ?

 27   R.  Dans le cadre des thèmes abordant le commandement, c'était toujours

 28   pris même si ce n'est pas repris ici nommément donc dans toute formation

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  1   sur la direction et commandement. On parlait pour les niveaux les plus

  2   élevés de la formation dans le programme, il y avait justement des thèmes

  3   bien particuliers qui étaient enseignés; sinon, dans toute formation pour

  4   la direction et l'entraînement, il y avait au niveau de l'instruction

  5   d'exercices, situations d'exercices, et cetera.

  6   Mais il est vrai qu'il n'y avait pas dans le programme en tant que

  7   tel une référence explicite en tant que tel au droit humanitaire

  8   international. Il s'agissait là d'un programme de formation pour des sous

  9   officies, des grades inférieurs. On parlait plutôt d'une conduite

 10   souhaitée, et à ce moment-là, encore une fois, c'était dans le cadre de la

 11   direction et du commandement.

 12   Q.  Merci. Il est vrai, n'est-ce pas, que les soldats qui étaient envoyés à

 13   ces cours n'étaient pas vraiment intéressés par ces cours, par cette

 14   instruction, et très facilement arrêtaient de participer au cours ?

 15   R.  Non. Tout d'abord, ce n'était pas des soldats qui allaient à ces cours

 16   mais ceux qui avaient déjà terminé l'école pour sous officier pour l'armée

 17   croate. Aussi ce cours précis était un cours de perfectionnement qui

 18   s'appuyait sur les connaissances acquises à l'école des officiers, et quand

 19   on reprend le programme du MPRI, on voit que ce programme visait à amener

 20   ceux qui suivaient la formation à être meilleurs au niveau de la

 21   communication, de meilleurs instructeurs également afin de déployer -- donc

 22   corriger une conduite adéquate. Ce n'était pas un programme qui se

 23   concentrait sur le combat, et on ne parlait pas d'aptitudes au combat parce

 24   qu'à ce moment-là, ce n'était pas abordé.

 25   Q.  Oui, Professeur. En fait je vais terminer avec ceci parce que nous

 26   n'avons plus que quelques minutes avant que nous terminons. Je voudrais

 27   vous présenter un document de la liste 65 ter.

 28   Il s'agit du document 7276. Il s'agit d'un document. C'est une copie d'une

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  1   lettre de M. Susak. En fait qu'il adressait au district militaire de Split.

  2   Je crois que c'est une lettre que vous connaissez déjà, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Bien. Ça nous permettra de gagner un peu de temps. En fait donc, dans

  5   cette lettre, l'on voit très bien que le commandant Ilic voulait quitter

  6   les cours MPRI pour retourner auprès de son unité et qu'en fait il fallait

  7   qu'il ait d'ailleurs cette autorisation pour pouvoir le faire. Alors ce qui

  8   m'intéresse surtout ici c'est justement ce que le major Ilic et sa conduite

  9   par rapport à cette situation et il explique au ministre Susak ce qui se

 10   passe et la conduite du major Ilic.

 11   Alors il faut prendre la page 4 en anglais et la page 3 en B/C/S et le

 12   paragraphe 5, et l'on peut voir et je cite :

 13   "J'ai appris par la suite que le major Ilic avait demandé d'être

 14   relevé de sa mission et renvoyé dans l'unité son unité

 15   précédente. Personnellement, je ne connais pas les raisons qui ont justifié

 16   son départ. C'est quelque chose que nous n'avons jamais discuté ensemble,

 17   lui et moi. Mais je sais qu'il était malheureux -- il n'était pas satisfait

 18   du programme du DTAP et pas convaincu de la contribution de ce programme à

 19   sa simple lecture.

 20   "En toute franchise, je ne connais pas de situation dans laquelle un

 21   officier subalterne puisse se mettre tellement en avant et avoir une

 22   appréciation trompée de son environnement pour lui permettre de se donner

 23   lui-même une mission qui lui serait propre."

 24   Alors je vous invite maintenant à reprendre la fameuse lettre que

 25   nous analysions, et je cite de cette lettre ce que le général Cosic nous

 26   dit :

 27   "Le major Ilic participait au projet MPRI. Sa mission consistait à

 28   mettre au point les détails du programme MPRI pour que ce programme puisse

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  1   correspondre au mieux aux besoins et priorités de l'armée d'une armée en

  2   guerre et c'est dans ce sens que j'ai personnellement discuté à plusieurs

  3   reprises avec le major Ilic en lui faisant part de l'appui que je voulais

  4   donner à ce travail, à son travail, et malheureusement, le major Ilic a

  5   abandonné cette mission."

  6   Maintenant je voudrais passer au-dessus de la page suivante en

  7   anglais et au milieu de la page suivante en B/C/S, il a -- je cite à

  8   nouveau, il s'agit cette fois de ce qu'aurait dit le général Griffith :

  9   "Les raisons qui sous-tendent à cette insatisfaction devant les

 10   conditions en vigueur ne peuvent pas être considérées comme justifiées, et

 11   sa démarche pour résoudre les problèmes existants n'est pas acceptable.

 12   Quitter le lieu sans accord en menaçant de sauter par la fenêtre est à mes

 13   yeux un comportement tout à fait inadéquat pour un officier de l'armée

 14   croate, et je vous envoie en annexe, l'avis du général Griffith. Nous

 15   avions probablement trop d'espoir dans le major Ilic, et je propose de le

 16   renvoyer dans son unité précédente."

 17   Je reprends la citation un peu plus loin :

 18   "Après consultation avec le général Gotovina, et le brigadier Sundov

 19   ainsi que le colonel Kresic vous aurez une proposition adéquate à proposer

 20   et préparer."

 21   Maintenant, Professeur, il me semble et vous me corrigerez si je me

 22   trompe que le général Griffith était tout à fait conscient que le major

 23   Ilic a eu le pouvoir d'influencer tout son parcours personnel et ne pas se

 24   présenter au cours MPRI et a pu retourner dans son unité, comme il le

 25   souhaitait.

 26   R.  M. Ilic est arrivé au début c'était un jeune soldat et il venait des

 27   Etats-Unis et a rejoint la Croatie. Il a fait preuve d'une grande capacité

 28   lors des premières activités de combat et très vite il a reçu la promotion

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  1   et s'est retrouvé au rang de major que l'on reçoit en général quand on a

  2   environ 30 ans. Il l'a reçu beaucoup plus tôt et il provenait d'un

  3   environnement très dynamique où il travaillait dans un espace ouvert. C'est

  4   comme ça qu'il fonctionnait, que ce soit mentalement ou physiquement. Il

  5   était venu pour donner des cours pour être instructeur dans ce programme

  6   des DTAP. Il n'était pas venu pour apprendre. Il était venu pour enseigner.

  7   Il n'était pas du tout satisfait du travail en classe pendant cette

  8   formation et il a explosé, si vous me permettez l'expression. Il a eu une

  9   de ces crises qui était celle qui consistait à sauter par la fenêtre. Ce

 10   n'était pas raisonnable, certes. Lors d'une autre occasion sans me demander

 11   que ce soit à moi ou au général Griffith d'ailleurs, il a écrit directement

 12   au chef d'état-major.

 13   Bon, alors comme on peut le voir ici, M. Cosic n'était pas satisfait mais

 14   il se rend compte et constate que monsieur en question ne veut pas rester

 15   instructeur et qu'on ne peut pas l'y contraindre. On ne peut pas forcer

 16   quelqu'un à être instructeur, et c'est la raison pour laquelle il dira :

 17   "Dans toutes ses consultations qu'avec les autres officiers et le colonel

 18   Kresic, il va devoir présenter une proposition."

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, je crois que nous allons

 20   devoir reprendre nos travaux là-dessus car, pour le moment, je ne peux pas

 21   poursuivre puisqu'il y a une autre audience prévue ici dans cette salle

 22   d'audience. On ne peut pas dépasser puisque l'heure qu'un parti encore

 23   moins celle que nous avons à notre disposition.

 24   Combien de temps vous reste-t-il, Monsieur Russo ?

 25   M. RUSSO : [interprétation] Environ dix minutes, Monsieur le Président.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc probablement moins que dix minutes.

 27   Bien. J'aimerais bien dans un premier temps, Monsieur le Président,

 28   Monsieur Barkovic, vous dites que vous ne pouvez discuter de votre

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  1   témoignage avec personne, que ce soit d'ailleurs ce que vous avez dit

  2   aujourd'hui, et ce que vous serez amené à dire demain. J'ai de bons espoirs

  3   que nous pourrons conclure demain en une heure environ pas plus et donc on

  4   se retrouve tous ici demain à 9 heures.

  5   Nous suspendons cette partie de séance aujourd'hui en ce 13 juillet et on

  6   se retrouve demain le 14 juillet à 9 heures dans la même salle d'audience.

  7   --- L'audience est levée à 13 heures 49 et reprendra le mardi 14 juillet

  8   2009, à 9 heures 00.

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