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1 Le mardi 8 septembre 2009
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 [Le témoin vient à la barre]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tout le monde.
7 Monsieur le Greffier, veuillez citer l'affaire.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour à
9 toutes les personnes présentes dans ce prétoire.
10 C'est l'affaire IT-06-90-T, le Procureur contre Ante Gotovina et
11 consorts.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier.
13 Monsieur Russo, êtes-vous prêt à poursuivre votre contre-interrogatoire ?
14 M. RUSSO : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Corn, il est peut-être inutile
16 de vous rappeler que la déclaration solennelle que vous avez déclarée hier
17 est toujours de vigueur, donc vous êtes toujours tenu par cette
18 déclaration, mais voici que je le fais.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
20 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
21 M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, de m'avoir donné
22 la parole.
23 LE TÉMOIN : GEOFFREY CORN [Reprise]
24 [Le témoin répond par l'interprète]
25 Contre-interrogatoire par M. Russo : [Suite]
26 Q. [interprétation] Bonjour, Professeur.
27 R. Bonjour.
28 Q. Je voudrais tout d'abord revenir sur quelques points que nous avons
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1 soulevés hier. Il s'agit de la page 21 223, ligne 13 du compte rendu
2 d'audience. Je vous ai posé des questions au sujet des documents qui
3 figurent au paragraphe 12 du document D1644, donc c'est la feuille avec les
4 informations supplémentaires. Je vous ai demandé si ces documents, si vous
5 les avez consultés avant d'écrire votre addendum. Vous avez dit que c'était
6 exact, généralement parlé.
7 Ensuite je vous ai demandé si on vous a fourni d'autres documents
8 concernant le lieutenant-colonel Konings et Marko Rajic, et vous avez dit :
9 "Je n'arrive pas à faire le lien comme cela, immédiatement, mais je peux
10 vous dire que j'ai consulté d'autres documents, notamment le compte rendu
11 d'une réunion avec le président et les officiers du QG militaire. Je pense
12 que c'est quelque chose qui s'est produit à Brioni. Il y a eu quelques
13 directives psychologiques, pour ainsi dire, concernant la population
14 civile. Moi, j'ai regardé en détail la déposition du Témoin Marko Rajic.
15 Comme j'ai dit, la disposition visuelle des objectifs militaires à Knin
16 c'est quelque chose qui était extrêmement important pour moi. Je pense que
17 c'est une information qui a influé de façon importante mon processus de
18 réflexion."
19 Donc vous avez tout d'abord identifié les documents que vous avez utilisés
20 pour vous préparer pour venir déposer ici, et ce que vous me dites suggère
21 à mes yeux qu'il s'agissait là d'une préparation, d'une préparation pour
22 écrire votre rapport. Mais vous m'avez dit que ceci influait de façon
23 importante l'écriture de votre rapport.
24 Donc je n'ai toujours pas compris si vous pensez que le compte rendu
25 de Brioni, la déposition de Marko Rajic et tout cela, si c'est un élément
26 important de votre addendum.
27 R. Ecoutez, j'essaie d'être aussi candide que je puisse l'être. Je
28 n'ai pas pu écrire l'addendum de ce rapport sans avoir pris connaissance du
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1 contexte de l'opération. De toute façon, personnellement, je ne vois pas
2 comment un quelconque expert qui doit analyser la méthode utilisée au cours
3 d'une opération de guerre puisse faire ce rapport sans connaître la nature
4 générale de l'opération. Quand je regarde, par exemple, l'addendum de M.
5 Konings, tout cela est basé sur des hypothèses. Il me paraît en même temps
6 assez clair qu'il applique ces hypothèses dans un contexte plus large de
7 l'opération, puisque ces hypothèses n'incluent pas chaque aspect de
8 l'opération Tempête.
9 Donc ce que j'essaie de dire et le message que j'essaie de faire
10 passer c'est que, moi, j'ai écrit cet addendum sur la base des hypothèses
11 que m'ont fourni les conseils de la Défense sur les choses que j'ai
12 apprises lors de la réunion à Tampa et les éléments que je pensais qu'ils
13 étaient importants et en m'assurant en même temps qu'ils ont été déjà
14 présentés aux Juges. Ensuite j'ai essayé de voir ensemble avec les conseils
15 de la Défense qu'elles sont ces informations pour lesquelles ils me
16 disaient qu'ils avaient été déjà présentés devant ce Tribunal. C'est tout
17 simplement que je ne pense pas avoir pu expurger de mon processus de
18 réflexion le contexte général de l'opération.
19 C'est quelque chose dont je parle dans le dernier paragraphe, le
20 dernier paragraphe que vous avez cité et qui figure au compte rendu
21 d'audience d'hier.
22 Q. Merci, Professeur. Je ne dis pas que c'est de votre faute, je ne dis
23 pas que ce n'est pas bien d'avoir placé tout cela dans le contexte mais
24 vous comprenez que le Procureur n'est pas vraiment sûr de ce que vous aviez
25 en tête au moment où vous avez écrit votre rapport.
26 Est-ce que vous pouvez nous dire qui était présent au moment où vous avez
27 été informé de l'opération ?
28 R. Il y avait les trois avocats qui sont présents en ce moment dans le
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1 prétoire ainsi qu'une personne qui s'appelle Goran et qui était un
2 conseiller technique.
3 Q. Est-ce qu'il y avait qui que ce soit d'autre ?
4 R. Hormis moi-même, non.
5 Q. Pendant cette opération, Professeur, est-ce que l'on vous a montré des
6 documents témoignant de résultats du pilonnage sur les quartiers
7 résidentiels avant l'opération Tempête et ceci à partir des troupes du
8 général Gotovina ?
9 R. Non.
10 Q. Est-ce qu'on vous a parlé du pillage et des incendies des biens des
11 Serbes par les forces commis par les forces du général Gotovina avant
12 l'opération Tempête ?
13 R. Non.
14 Q. Est-ce qu'on vous a montré des documents concernant les points de vue
15 du gouvernement croate et du président Tudjman concernant le statut des
16 Serbes de leur retour éventuel en Croatie ?
17 R. Je sais, je crois que l'on a parlé d'une réunion, d'une réunion qui a
18 eu lien entre le président et les QG militaires dont faisait partie le
19 général. Est-ce que nous en avons parlé à Tampa ? Ecoutez, je n'en suis pas
20 sûr à 1 000 %. Je vous ai dit que j'ai vu la réunion, j'ai vu le compte
21 rendu de la réunion de cette réunion; cela étant dit, je ne suis pas sûr
22 que ce compte rendu c'est bien le compte rendu qui tombe dans la catégorie
23 que vous venez d'invoquer à savoir le souhait de voir la population serbe
24 partir de ses terres. Je sais qu'il y a eu des discussions de la part des
25 Serbes de la Zone opérationnelle autour de Knin mais d'après ce que j'ai
26 compris, d'après ce que vous me dites, vous parlez aussi du souhait de ne
27 pas les voir revenir et ça je ne m'en souviens pas.
28 Q. Vous avez parlé de la réunion qui a eu lieu à Brioni et vous avez dit
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1 que vous ne vous souveniez pas si c'est quelque chose qui s'est produit
2 pendant cette présentation que l'on vous a fait au mois de décembre 2008 ou
3 bien si ces informations si c'est quelque chose que vous avez grâce au
4 compte rendu que vous avez lu ?
5 R. Ecoutez, je ne m'en souviens pas; c'est vrai.
6 Q. Mis à part cette réunion à Brioni, est-ce qu'on vous a fourni des
7 informations concernant d'autres réunions entre le président Tudjman et
8 d'autres officiels où au cours duquel on a éventuellement discuté du retour
9 des Serbes ?
10 R. La seule autre source d'information que j'avais, il s'agissait des
11 directives psychologiques pour ainsi dire que j'ai pu examiner avant de
12 venir déposer et après avoir écrit l'addendum.
13 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire ce que c'était cette directive ?
14 R. Il y en avait une qui était importante. Je pense que c'était l'opinion
15 de quelqu'un qui examinait ces rapports et c'est une personne qui a fait
16 part de son opinion quant à la réaction des généraux ou leur acceptation de
17 directives psychologiques de l'opération. Moi, je me souviens très bien
18 avoir écrit dans la marge que je ne pensais pas que la conclusion à la
19 quelle on était arrivé dans ce rapport était correcte et j'en suis arrivé à
20 cette conclusion sur la base des informations que j'ai pu trouver dans la
21 transcription de l'affaire Gotovina.
22 Q. Est-ce qu'il s'agissait là de la transcription d'un témoin qui a déposé
23 en l'espèce ?
24 R. Je pense que oui.
25 Q. Est-ce que vous savez qui était-ce ?
26 R. Non.
27 Q. Vous a-t-on montré les transcriptions des dépositions d'un autre témoin
28 mis à part le lieutenant-colonel Konings, Marko Rajic et de cet individu
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1 que vous venez de mentionner ?
2 R. Que je sache, non.
3 Q. Au cours de la présentation orale qu'o vous a fait à la fin du mois de
4 décembre 2008, est-ce qu'on vous a montré des documents portant sur la
5 prise de contrôle du poste d'observation de l'ONU par les forces du général
6 Gotovina pendant l'opération Tempête ?
7 R. Non.
8 Q. Est-ce que vous avez examiné des pièces en l'espèce, des motions, et
9 cetera, enfin des requêtes, et cetera ?
10 R. Mis à part les rapports du colonel Konings, c'est un rapport d'expert
11 et mon propre rapport qui fait maintenant partie du dossier, non, j'en ai
12 j'en avais pas vu d'autres.
13 Q. Est-ce qu'on vous a dit quoi que ce soit au sujet des positions du
14 Procureur en l'espèce ?
15 R. Au cours de la préparation de la déposition, après avoir déposé
16 l'addendum - je pense que c'est le mois dernier - on m'a fait part de
17 quelques informations d'ordre général quant aux positions du Procureur et
18 de la Défense, autrement dit, pour être encore plus précis, je vais
19 reformuler. Donc, évidemment, moi, je me suis concentré sur l'utilisation
20 de l'artillerie pendant l'opération Tempête, l'utilisation de l'artillerie
21 sur la ville de Knin, et il s'agissait donc de placer cet aspect-là de
22 l'affaire dans un contexte plus large. C'est dans ce sens qu'on a fait les
23 liens entre cette partie-là du rapport qui m'a intéressé et le contexte
24 plus large, à savoir aussi les allégations en l'espèce contre le général
25 Gotovina.
26 Q. Pourriez-vous nous dire ce qu'on vous a dit exactement ?
27 R. Pendant la préparation à ma déposition, j'ai voulu être sûr en fait
28 que, moi, j'allais déposer. C'est uniquement au sujet de ce qui est au cœur
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1 de mon rapport, à savoir au sujet de l'utilisation de l'artillerie et la
2 légalité de la façon dont elle a été utilisée, et ceci, basé sur les faits
3 qu'on a fournis, et ils étaient tout à fait d'accord. Ensuite ils m'ont dit
4 quelles étaient les allégations dont fait l'objet le général Gotovina, à
5 savoir que l'utilisation de l'artillerie de ces forces n'était pas
6 convenable, et si on en arrivait à la conclusion que c'était une
7 utilisation illégale, que ceci allait s'inscrire dans le cadre des
8 allégations de système systématique, d'un modèle systématique de
9 l'intention délictueuse du défendant.
10 Q. Est-ce qu'on vous a dit quoi que ce soit de particulier au sujet de
11 l'illégalité prétendue de l'attaque ?
12 R. D'après le rapport du colonel Konings, on voit assez clairement que le
13 Procureur considère que les cibles de l'artillerie étaient ce qui était
14 considéré illégal et ce qui est différent des conclusions que j'ai pu
15 tirer, et d'ailleurs, si on lit les faits que vous avez énumérés dans votre
16 lettre, je comprends très bien pourquoi le Procureur allègue que l'on n'a
17 pas utilisé correctement les feux d'artillerie, les armes d'artillerie.
18 Au cours des discussions que j'ai pu avoir avec la Défense, les conseils de
19 la Défense m'ont fourni des faits qui s'inscrivaient mieux dans la théorie
20 dans la thèse du Procureur que dans les hypothèses et qui ont servi de base
21 de mon rapport. Les faits que vous, vous avez fourni au colonel Konings,
22 j'en ai été informé donc puisque j'ai cru comprendre qu'ils ont servi de
23 base de son rapport.
24 Q. Je ne suis pas sûr d'avoir compris la dernière partie de la réponse,
25 mais j'avais l'impression que vous avez compris quelle était la thèse du
26 Procureur sur la base du rapport du colonel Konings. Moi, je vous ai
27 demandé autre chose, je vous ai demandé ce que la Défense vous a dit au
28 sujet de nos thèses.
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1 R. Je vais vous citer un exemple.
2 Comme je vous ai dit déjà à plusieurs reprises, à partir du moment où j'ai
3 écrit cet addendum, j'ai pensé qu'il était important que les faits -- que
4 les hypothèses sur lesquels je basais mon opinion soient des faits qui
5 figurent au compte rendu d'audience, dans le dossier en l'espèce, et j'ai
6 posé la question à ce sujet à la Défense à plusieurs reprises. A plusieurs
7 reprises au cours de ces discussions, les conseils de la Défense m'ont dit
8 qu'il était parfaitement clair que le Procureur n'allait pas être d'accord
9 ou qu'il allait probablement pas être d'accord avec tous les faits, avec
10 toutes les hypothèses que nous vous avons fournis. Par exemple, ils
11 pensaient qu'on a utilisé bien davantage le feu indirect en suivant un
12 modèle assez chaotique quand il s'agit du pilonnage de Knin. Donc,
13 finalement, je n'avais pas vraiment besoin qu'ils me les disent, je n'avais
14 pas besoin de cette information parce que c'est quelque chose qui figurait
15 finalement comme un postulat de base de l'addendum du rapport de M.
16 Konings. C'est moi-même qui suis arrivé à cette conclusion et je me suis
17 dit que c'était les faits présentés par le Procureur -- ce témoin, et qu'il
18 pensaient qu'il s'agissait là des faits qui figuraient au compte rendu
19 d'audience, en l'espèce également. Mais ce sont les discussions donc que
20 j'ai pu avoir avec le conseil de la Défense à ce sujet.
21 Q. Vous a-t-on dit quoi que ce soit d'autre, là, je parle des conseils de
22 la Défense et surtout quand il s'agit des allégations concernant une
23 attaque illégale, illicite et qui n'a pas de lien direct avec ce que vous
24 avez pu lire dans le rapport de M. Konings ?
25 R. La seule autre information qui relèverait de cette catégorie serait la
26 façon dont la Défense a évalué ces -- qu'ils pensaient qu'allaient être les
27 conclusions du Procureur par rapport à certains éléments de preuve. Par
28 exemple, à la lecture des informations fournies du lieutenant Konings, ou
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1 bien en lisant les hypothèses que vous lui avez envoyées, à un moment
2 donné, ont dit que l'hôpital figurait en tant que cible sur la liste de
3 cible, et la Défense pense que ceci témoignait d'une intention délictueuse
4 de la part du HV, puisque l'hôpital ne devrait jamais figurer sur la liste
5 des cibles, mais c'est une hypothèse que vous avez présentée à cet expert.
6 Donc si vous voulez, moi, j'ai fourni mon opinion quant aux cibles et
7 aux listes de cible et au fait qu'il s'agit d'une cible valide, correcte ou
8 non, et ces informations je les ai fournies dans mon addendum.
9 Q. Vous nous avez effectivement cité un ou deux exemples. Ce qui
10 m'intéresse c'est de savoir tout ce qu'on vous a dit au sujet des thèses du
11 Procureur.
12 Est-ce que vous pouvez me dire tout ce que l'on vous a dit
13 parce que là vous venez de citer juste quelques exemples ?
14 R. Je vais commencer par la fin. En ce qui concerne les questions qu'on
15 allait me poser, la Défense m'a dit que je devais m'attendre à ce que le
16 Procureur conteste certains faits ou certaines hypothèses qui ont servi de
17 postulat de base pour mon rapport pour l'addendum -- qu'ils allaient donc
18 douter de leur crédibilité même s'il s'agissait des faits qui figurent en
19 l'espèce, dans le dossier en l'espèce.
20 Par exemple, il y a eu des discussions sur les frappes des armes
21 d'artillerie, les cibles de ces tirs. La Défense attendait à ce que le
22 Procureur suggère que le modèle de tir était systématiquement un modèle de
23 tir chaotique ou indirect quand il s'agissait des tirs sur Knin. Il
24 s'agissait aussi -- enfin, il pensaient aussi qu'il y allait y avoir des
25 discussions sur les tirs sur le poste de commandement du corps qui étaient
26 une cible importante et la question qui se posait c'était de savoir si le
27 commandement était présent sur ces lieux oui ou non, donc je parle du QG de
28 l'armée serbe.
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1 Je pense qu'on a aussi évoqué la question si les observateurs des Nations
2 Unies, qu'ils étaient présents à Knin parlaient des frappes d'artillerie
3 partout dans Knin, et je me suis posé la question de savoir si je voyais
4 une explication à ce problème, et j'en ai déjà parlé --
5 Q. Je vais vous arrêter avant que vous ne poursuiviez.
6 Je voudrais exactement ce qu'on vous a dit au sujet des observateurs de
7 l'ONU, et est-ce qu'on vous a dit quelque chose, et quelle est l'opinion --
8 enfin, la conclusion que vous avez tirée sur la base de ces informations.
9 R. Je pense qu'on a dit, ou bien on a évoqué un témoin - je ne sais plus -
10 donc que les individus travaillant pour l'ONU à Knin et qu'ils ont dit que
11 d'après eux il y avait des impacts d'artillerie absolument partout dans la
12 ville, et ils pensaient donc que l'utilisation de l'artillerie était
13 hautement chaotique. Mais ils ne sont pas allés plus loin, c'est cela,
14 parce que je les ai interrompus là-dessus, parce que je leur ai dit que je
15 n'étais absolument pas surpris de savoir qu'ils aient pu avoir cette
16 impression puisqu'en regardant les photos aériennes que j'ai pu observer
17 lors de la réunion, à Tampa, effectivement, il y avait des cibles
18 militaires partout dans la ville et ce sont les forces ennemies qu'ils ont
19 placé là où elles étaient.
20 Donc, moi, si j'observais cette attaque de loin, effectivement, j'aurais eu
21 cette même impression, à savoir qu'il y a des excursions partout dans la
22 ville et c'est pour ça que je vous ai arrêté là-dessus. C'est pour cela que
23 j'ai réagi comme j'ai réagi comme j'ai réagi à cette information.
24 Q. Bien. Justement, j'aimerais que nous nous penchions un peu sur cette
25 question.
26 Parce que dans un premier temps, je crois comprendre que vous interprétez
27 la situation comme suit : si quelqu'un observe la ville et vous dit qu'il y
28 a des pilonnages dans toute la ville et, vous, vous pensez qu'il y a des
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1 objectifs militaires dans toute la ville, votre interprétation c'est qu'ils
2 -- c'est un -- c'est une erreur que de penser, en fait, qu'ils sont en
3 train de pilonner sur toute la ville.
4 C'est ainsi que vous interprétez la situation, n'est-ce pas ?
5 R. Non, non, non. Moi, je n'étais pas présent. Je n'ai pas observé ce qui
6 s'est passé. Mais j'ai dit à la Défense : vous pouvez tirer à partir de cet
7 élément de preuve différentes conclusions. Premièrement, par exemple, une
8 des conclusions, c'est qu'il y a des attaques chaotiques aléatoires menées
9 contre toute une ville. Mais je pense qu'il y a eu donc -- les forces
10 serbes ont dispersé, en quelque sorte, des objectifs militaires, et eux,
11 leur but, c'était de cibler les objectifs militaires qui étaient dispersés
12 dans toute la ville, ce qui créait une impression visuelle d'une attaque
13 aléatoire sur une grande échelle. Donc, je me souviens très précisément que
14 j'ai utilisé la formule suivante, à savoir qu'à partir de cet élément de
15 preuve, l'on pouvait dégager plusieurs conclusions raisonnables et
16 multiples.
17 Q. Alors, que tout soit bien clair. Vous n'êtes pas en train de suggérer
18 qu'une interprétation est plus raisonnable qu'une autre. Vous n'êtes pas en
19 train de dire, oui, je suis d'accord pour dire qu'il y ait eu -- qu'il y a
20 eu pilonnage aléatoire.
21 C'est cela, n'est-ce pas ?
22 R. Non, non, moi, je n'étais pas présent, je vous le répète. Donc les
23 personnes qui ont donné leur point de vue, ce qui n'était pas clair pour
24 moi, c'est que je ne savais pas si ces personnes savaient, en fait, qu'il y
25 avait dispersion d'objectifs militaires. Moi, je le savais cela, d'où ma
26 réaction. C'est ce qui a déclenché justement ma réaction. Je pense et je
27 continue à le dire que vous pouvez, à partir de cette idée, dégager
28 plusieurs conclusions. Alors, ceci étant dit, je ne sais pas laquelle,
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1 parmi ces conclusions, est exacte.
2 Q. Mais vous dites que ce qui n'est pas clair pour vous, c'est que les
3 personnes qui ont dégagé ces conclusions étaient conscients du fait qu'il y
4 avait eu dispersion des objectifs militaires au sein de la ville. Alors,
5 est-ce que vous avez des raisons de penser qu'eux ne le savaient pas ?
6 R. Ce que je sais, c'est qu'il est des personnes qui travaillaient pour
7 les Nations Unies et qui ont avancé le fait qu'ils avaient l'impression que
8 toute la ville avait été attaqué par l'artillerie justement.
9 Q. Mais est-ce qu'ils vous ont dit, en fait, que certaines de ces
10 personnes se sont déplacées dans la ville pendant ces attaques ?
11 R. Oui, ils me l'ont dit. D'ailleurs, je me souviens qu'il y en a un qui
12 disait qu'il a conduit pendant -- dans toute la ville. Je pense qu'il
13 participait à un exercice d'évacuation pendant justement tout ce phénomène
14 d'attaque contre la ville.
15 Q. Est-ce que l'on vous a fourni des informations à propos de ces
16 personnes qui ont fourni ces informations ? Est-ce qu'elles étaient en
17 mesure de faire la différence entre des tirs sur des cibles, des tirs
18 corrigés et des tirs qui sont tout simplement aléatoires ?
19 R. Ce que l'on m'a dit, c'est qu'il y avait des membres des Nations Unies
20 qui observaient les attaques et qui ont indiqué qu'ils avaient l'impression
21 que la ville entière subissait une attaque.
22 On ne m'a pas indiqué si cela -- si ces rapports -- si leur
23 déposition faisait référence à des aspects techniques des tirs
24 d'artillerie. Vous, vous avez fourni ce terme, "tir," pour avoir un effet
25 escompté. En fait, lorsque vous tirez de cette façon, vous savez quel
26 résultat vous voulez obtenir. Donc, quel était le résultat qu'ils voulaient
27 obtenir ? Moi, ce que je suppose, c'est que si j'observe les effets, les
28 résultats d'une attaque, vous avez l'effet cinétique d'une attaque
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1 d'artillerie. Je n'ai pas forcément la maîtrise de tous les éléments de la
2 situation, je ne sais pas forcément quel est l'effet opérationnel qu'essaie
3 d'obtenir le commandant. Je ne vois que l'effet cinétique, en fait.
4 Donc, lorsque vous me dites : est-ce qu'ils vous ont dit si ces
5 personnes savaient si les tirs ciblaient ou étaient fait pour obtenir
6 certains effets ou résultats escomptés ou s'il s'agissait de tirs
7 aléatoires, je n'en sais rien ? Moi, ce que je suppose, c'est qu'ils
8 n'étaient pas en mesure de le savoir cela, parce qu'ils -- je ne pense pas,
9 en fait, qu'ils étaient au courant de la planification opérationnelle qui
10 définissait les résultats que souhaitait obtenir le commandant en question.
11 Q. D'après votre réponse, je ne pense pas que vous avez compris, en fait,
12 cette formule que j'ai utilisée, tir pour résultat. C'est une formule qui a
13 été utilisée par plusieurs personnes, plusieurs témoins, ici et qui
14 indique, en fait, qu'il y a, sur une seule cible, plusieurs projectiles qui
15 arrivent.
16 M. KEHOE : [interprétation] Je voudrais, en fait, soulever une objection
17 par rapport à cette évaluation.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Etant donné qu'une objection vient
19 d'être soulevée, vous venez de résumer les propos du témoin, Monsieur
20 Russo, mais il faut que vous soyez plus précis.
21 M. RUSSO : [interprétation]
22 Q. Ecoutez, moi, je vais vous expliquer ce que j'entends par cette formule
23 "tir pour avoir des résultats." Ce que j'entends, en fait, c'est la
24 différence qu'il faut tirer entre le fait de tirer un tir pour essayer de
25 se rapprocher d'une cible et le fait de tirer des tirs multiples, en même
26 temps, vers ce qui semble être une cible.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe.
28 M. KEHOE : [interprétation] Ecoutez, cela n'est pas très pertinent parce
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1 que le point de vue de M. Russo n'a absolument aucune -- n'est d'aucune
2 conséquence.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais cela fait partie de sa
4 question. Donc, s'il a -- il a posé la question au témoin -- à moins que
5 vous n'êtes en train de me dire, Maître Kehoe, que toutes les questions où
6 cette formule a été utilisée n'ont pas de pertinence.
7 M. KEHOE : [interprétation] C'est ce que j'avance parce que -- bon, bien
8 entendu, cela est pertinent pour la Chambre dans la mesure où le témoin a
9 quelque chose à dire, mais ce n'est pas pertinent -- enfin, pour ce qui est
10 de l'opinion exprimée par M. Russo, d'où mon objection.
11 [La Chambre de première instance se concerte]
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le terme qui a été utilisé -- la
13 question qui a été posée par M. Russo pourrait justement prêter à
14 confusion. Donc, M. Russo a tout à fait le droit de nous fournir une
15 explication à propos de ce qu'il entend. Alors, pour ce qui est de savoir
16 si c'est ce que les témoins ont dit ou non, il appartient à la Chambre d'en
17 décider.
18 Monsieur Russo, je vous en prie.
19 M. RUSSO : [interprétation] Je vous remercie.
20 Q. Est-ce que vous comprenez ce que j'entends maintenant lorsque j'utilise
21 cette formule avec ajustement, donc, pour obtenir des résultats bien précis
22 ?
23 R. Oui, je pense que je comprends. J'insisterais, une fois de plus, sur
24 quelque chose. Il ne s'agit pas, en fait, de parler, il ne s'agit pas des
25 détails opérationnels de l'utilisation de l'artillerie.
26 Ce que vous -- ce que vous entendez, en fait, c'est une formule qui est
27 assez classique dans notre jargon et qui permet, en fait, d'identifier une
28 cible, cible dont vous croyez, puisque vous êtes le commandant, que vous
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1 pouvez obtenir un résultat bien précis, si vous -- si vous utilisez contre
2 cette cible plusieurs salves d'artillerie. Donc, l'observateur, en fait,
3 lui, il identifie la cible. Il indique que les tirs peuvent être -- peuvent
4 commencer. Vous avez le premier tir et puis les -- ou les différentes
5 salves et à partir du premier tir, l'observateur ou le guetteur ajuste son
6 tir et c'est cela que l'on appelle "les tirs ajustés." Mais vous voyez,
7 cela signifie, en fait, que le résultat qui est recherché par le commandant
8 est un résultat destructeur, mais il est tout à fait possible que le
9 commandant ne souhaite pas obtenir un résultat destructeur.
10 Si vous prenez en fait les hypothèses qui figurent dans mon addendum, il
11 est absolument clair que le général Gotovina et son état-major d'artillerie
12 savaient en fait qu'ils avaient de gros problèmes de contingence de
13 munitions. Donc il a déterminé que ce qui était la priorité absolument
14 c'était la façon d'attaquer pour pouvoir prendre en considération la brèche
15 qui -- parce qu'en fait, il voulait faire une brèche au niveau des
16 positions défensives serbes, d'où l'utilisation de l'artillerie contre des
17 objectifs militaires à Knin qui a été menée à bien à partir d'une économie
18 des forces, et l'effet obtenu n'est probablement pas la destruction.
19 Ce qui est implicite dans votre question, d'ailleurs. Je suppose en fait --
20 les témoins ont supposé que le général souhaitait obtenir une destruction,
21 mais je ne pense pas en fait qu'ils puissent savoir si cela était le
22 résultat escompté.
23 Il y a eu deux ou trois salves qui ont été tirées pour justement permettre
24 d'ajuster les tirs dans ce contexte.
25 Q. Je pense avoir compris votre réponse, Professeur. Mais corrigez-moi si
26 je ne m'abuse, mais dans ce que vous dites, vous partez d'une prémisse pour
27 avancer ce que vous dites, à savoir les observateurs des Nations Unies
28 n'ont pas vu ces tirs ajustés, ils ne se sont pas rendu compte qu'il y
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1 avait toute une série de tirs et de projectiles qui atterrissaient sur une
2 cible bien particulière après qu'il y ait eu correction de tirs.
3 Je vais terminer.
4 Donc on a l'impression en fait que vous dites que le général Gotovina
5 n'avait pas l'intention de détruire des objectifs et que donc il n'aurait
6 pas tiré un volume important de projectiles sur une cible donnée. Par
7 conséquent, que toute personne qui aurait vu cela, ce que j'appelle moi des
8 tirs ajustés, aurait pu en conclure qu'il s'agissait tout simplement de
9 tirs aléatoires avec un tir ici et là.
10 Est-ce que j'ai bien compris la dernière partie de votre réponse ?
11 R. J'aimerais vous répondre par une question : est-ce que j'ai bien
12 compris ce que vous, vous entendez par tir ajusté ?
13 Parce qu'en fait, j'aimerais revenir sur ce qui est important dans ma
14 réponse pour répondre à la dernière partie de votre question. Parce que je
15 ne pense pas que des personnes qui observent les résultats cinétiques des
16 tirs d'artillerie à Knin auraient pu connaître l'effet opérationnel qui
17 était escompté par ces tris.
18 Alors ce qui est clair pour moi et ce qui est absolument manifeste
19 dans l'addendum c'est que le QG, par exemple, était considéré comme une
20 cible extrêmement prioritaire du fait de sa fonction, commandement,
21 renseignement, communication et contrôle. Donc ce n'est pas une surprise
22 pour moi de savoir que des personnes qui ont observé l'attaque sur Knin ont
23 vu quelque chose qui correspond beaucoup plus à votre définition de tirs
24 ajustés, lorsqu'il y a donc des tirs contre un QG, il y a par opposition
25 des tirs sur un autre secteur. Mais pour répondre à votre question en fait,
26 je pense que l'on pourrait conclure de façon rationnelle si l'on observe
27 l'effet cinétique qu'un tir qui n'est pas suivi par une attaque beaucoup
28 plus lourde ou par une salve justement, donc que cela en fait ne correspond
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1 pas à leur supposition qui est que les premiers tirs ont été faits pour
2 justement ajuster les tirs. Donc ils ne savent pas en fait si la première
3 salve a été effectuée à des fins d'ajustement ou pour tout simplement
4 tirer.
5 Q. Maintenant c'est clair. Je vous remercie.
6 Mais on vous a fait part de l'opinion de personnes qui ont observé
7 l'attaque, ils pensaient qu'il s'agissait de tirs aléatoires sur toute la
8 ville, et je comprends pourquoi vous avez, à juste titre d'ailleurs, arrêté
9 la Défense, à ce moment-là, et indiqué ce que vous, vous entendiez et
10 quelles étaient les conclusions qui pouvaient être dégagées.
11 Mais ce qui m'intéresse beaucoup plus c'est si vous avez demandé des
12 éléments de preuve, parce que si quelqu'un vous dit : un témoin de cet
13 événement a indiqué qu'il lui semblait qu'il s'agissait d'une attaque
14 aléatoire dans toute la ville, il me semble que vous auriez pu demander des
15 informations. Des informations du style, est-ce que cette personne savait
16 quelles étaient les cibles ? Combien de personnes ont avancé ce point de
17 vue ? Est-ce que ces personnes, comme vous l'avez dit, étaient au courant
18 des objectifs opérationnels ? Quelles étaient leurs compétences pour
19 présenter ce point de vue ?
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe.
21 M. KEHOE : [interprétation] J'ai déjà soulevé une objection. En fait,
22 maintenant je soulève une objection par rapport à la façon dont la question
23 est posée, il présente des opinions et ensuite il termine par une question
24 au témoin.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Corn, voilà ce que M. Russo
26 aimerait savoir.
27 Apparemment, vous avez interrompu la Défense qui vous fournissait une
28 explication qui était une explication rationnelle et qui aurait pu indiquer
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1 que les personnes qui avaient observé la situation auraient pu dégager des
2 interprétations erronées de la situation.
3 Alors M. Russo voudrait savoir : pourquoi est-ce que vous les avez
4 interrompus ? Pourquoi est-ce que vous ne leur avez pas demandé des
5 informations ou des renseignements supplémentaires, que savaient ces
6 personnes, et cetera, et cetera ?
7 Apparemment, c'est ce que M. Russo souhaiterait savoir, si j'ai bien
8 compris la question de M. Russo.
9 M. RUSSO : [interprétation] Oui, oui, tout à fait, Monsieur le
10 Président.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pouvez répondre
12 alors ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Les informations qui m'ont été données ne
14 correspondaient pas aux détails formulés par M. Russo lorsqu'il a posé la
15 question. Il m'a été dit qu'il y avait des personnes qui travaillaient pour
16 les Nations Unies qui avaient dit qu'ils avaient eu l'impression que la
17 ville entière faisait l'objet d'une attaque. Il ne s'agissait pas
18 d'attaques aléatoires, il ne s'agissait pas d'utilisation aléatoire
19 d'artillerie. Ils ont dit qu'il semblait que la ville entière faisait
20 l'objet d'une attaque. C'est ce qui m'a été dit. Alors à ce moment-là --
21 alors peut-être que, je ne sais pas, j'étais un peu trop enthousiaste. Je
22 me suis un peu trop emballé. Mais j'ai eu cette idée qui m'est passée par
23 la tête parce que je savais qu'il y avait des objectifs militaires
24 disséminés dans toute la ville et j'ai dit : voilà, il y a une explication
25 logique à cela.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certes. Mais je pense que M. Russo vous
27 pose une question en fait, parce que d'un côté, nous avons l'impression
28 qu'au vu de votre expérience, vous auriez dû savoir que cela n'était pas
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1 toute la déposition du témoin, il est évident que le témoin nous aurait dit
2 l'impression qu'il avait eue, mais on lui aurait également demandé où il se
3 trouvait exactement, s'il s'était déplacé dans la ville, ce qu'il avait pu
4 observer, ce qu'il savait. En d'autres termes, de nombreuses questions
5 techniques et détaillées lui auront été posées, et les réponses à ces
6 questions auraient été un critère qui vous aurait permis en fait de mettre
7 à l'épreuve l'explication possible.
8 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Russo aimerait savoir pourquoi vous
10 vous êtes arrêté au début de cette conversation et que vous n'avez pas
11 essayé d'obtenir --
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien --
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- de plus amples renseignements, n'est-
14 ce pas ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
16 Lorsque j'ai dit que je les ai interrompus, je les ai interrompus
17 lorsqu'ils ont dit que les gens avaient dit qu'ils avaient l'impression que
18 toute la ville avait fait l'objet d'attaques. Il me semble que par la suite
19 je leur ai demandé où ils se trouvaient. Donc c'est pour cela qu'il m'a été
20 dit qu'il y avait une personne qui avait conduit dans toute la ville, je
21 pense qu'il m'avait été dit qu'il avait essayé de récupérer les réfugiés ou
22 d'aider à l'évacuation de réfugiés, puis il y en avait d'autres qui se
23 trouvaient dans un immeuble et qui regardaient l'attaque. Alors cet
24 immeuble, d'après mes souvenirs, ne se trouvait pas au centre de la ville,
25 mais se trouvait à la périphérie de la ville. De cela je m'en souviens en
26 fait, donc de ce fait, c'est pour cela qu'ils ont eu cette impression.
27 Mais avec le recul maintenant, je pense que toutes les informations que
28 j'ai obtenues je les ai obtenues à ce moment-là, parce qu'eux, ils étaient
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1 présents; moi, je n'y étais pas, je n'étais pas sur les lieux. Je ne suis
2 pas forcément en train de contredire les conclusions auxquelles ils sont
3 parvenus à partir de leurs observations. Tout ce que je me suis contenté de
4 faire c'est de montrer à la Défense que moi je pensais que du fait de la
5 dispersion des objectifs militaires dans la ville, il se pouvait qu'il y
6 ait une autre explication. Voilà, nous nous en sommes tenus à cela.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
8 Poursuivez, Monsieur Russo.
9 M. RUSSO : [interprétation] Je vous remercie.
10 Q. Professeur, en réponse à une question posée par M. le Juge Orie, page
11 19 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui, lignes 18 à 19, vous avez dit
12 :
13 "Il m'avait été dit qu'il y avait des personnes qui travaillaient pour les
14 Nations Unies et qui avaient indiqué qu'ils avaient l'impression que toute
15 la ville faisait l'objet d'attaques et qu'il n'y avait pas, et qu'il ne
16 s'agissait pas d'attaques aléatoires ou d'utilisation aléatoire de
17 l'artillerie."
18 Mais vous conviendrez quand même que si toute la ville fait l'objet d'une
19 attaque, il s'agit d'une attaque aléatoire ?
20 R. Mais tout dépend en fait de la présence d'objectifs militaires dans la
21 ville et de l'endroit où ils se trouvaient.
22 Q. Oui, mais ce que je vous dis enfin --
23 R. Ce que je vous dis c'est qu'ils n'ont pas dit, ces témoins ont dit
24 qu'il s'agissait d'attaques aléatoires.
25 D'ailleurs, maintenant je ne me souviens pas s'il s'agissait des
26 témoins qui me l'ont dit ou si je l'ai lu dans le rapport. Mais
27 l'impression qui s'en dégageait c'est qu'ils avaient eux l'impression que
28 toute la ville était attaquée.
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1 Q. Oui, mais, moi, voilà ce que j'essaie de comprendre. Ils vous ont dit
2 que ce qu'ils avaient vu, enfin ce qu'ils avaient vu était de telle nature
3 que cela aurait dû faire l'objet d'une enquête un peu plus poussée, n'est-
4 ce pas ?
5 R. D'après ce que j'ai compris des positions de l'ennemi, donc s'il y
6 avait un objectif militaire dans la ville, disons par exemple le QG du
7 corps et vous avec un témoin qui dit : j'ai eu l'impression que toute la
8 ville était attaquée, alors, bien entendu, là, on est en droit de se poser
9 des questions.
10 Mais ma réaction en fait s'est fondée sur le fait ou sur ce qui m'a été
11 montré; bon il y a des suppositions qui ont été présentées, des prémisses,
12 des faits et à savoir l'ennemi avait placé dans Knin différents objectifs
13 militaires qui se trouvaient dans toute la ville, donc il n'y avait pas un
14 seul secteur bien précis pour les objectifs militaires. Il y avait des
15 objectifs militaires disséminés dans toute la ville, et l'ennemi avait
16 placé ainsi des objectifs qui étaient extrêmement importants dans la ville
17 et avait donc créé l'impression que la ville était quelque chose qu'il
18 fallait protéger.
19 En fait, moi, je me suis imaginé, je me suis mis dans la position de
20 quelqu'un qui imaginait les effets cinétiques de ces tirs d'artillerie à
21 déflagration importante qui sont dirigés vers les objectifs militaires de
22 l'ennemi dans toute la ville et je me suis dit il se peut qu'il existe une
23 autre explication pour cette situation.
24 Q. Professeur, d'après ce que vous savez donc la dispersion des objectifs
25 militaires dans toute la ville, est-ce que vous pensez qu'il aurait été
26 licite de pilonner toute la ville pour pouvoir supprimer ces objectifs
27 militaires, parce que j'ai l'impression quand même que c'est un élément qui
28 est implicite dans votre réponse ?
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1 R. J'aimerais vous rappeler mon premier rapport. Ma réponse est absolument
2 catégorique; elle est négative, parce que cela est interdit par le droit
3 humanitaire international. Vous ne pouvez pas -- en fait, lorsque vous avez
4 des objectifs militaires disséminés dans un secteur civil, vous ne pouvez
5 pas considérer qu'il s'agit, que cela fait un correspond à un objectif
6 important. Vous avez le protocole additionnel numéro un qui interdit en
7 fait cette pratique de bombardements généraux pendant la Deuxième Guerre
8 mondiale, pendant la guerre du Vietnam, et je dirais que c'est
9 véritablement l'une des valeurs fondamentales du droit humanitaire
10 international. Il est absolument mal avisé pour ne pas dire indu de
11 considérer comme un seul militaire objectif un secteur où l'ennemi a
12 dispersé des objectifs militaires au milieu de la population civile.
13 Q. Je vous remercie. Alors au vu de ce que vous savez à propos donc de
14 cette dispersion d'objectifs militaires dans Knin, vous conviendrez quand
15 même qu'il y avait certains quartiers de la ville qui ne se trouvaient pas
16 près des objectifs militaires ?
17 R. Il y a certainement des quartiers de la ville qui ne faisaient, enfin
18 qui ne relevaient pas de la catégorie des objectifs militaires licites.
19 Mais vous avez fait référence à la marge éventuelle d'erreurs, et en fait
20 cela d'ailleurs est une question qui est posée par l'addendum du
21 lieutenant-colonel Konings --
22 Q. Non, non, non. J'aimerais dans un premier temps que vous répondiez à la
23 question que je vous ai posée.
24 R. Ecoutez, je ne peux pas répondre à votre question sans pour autant vous
25 dire ce que je pense de votre définition d'une erreur probable, et je ne
26 suis pas sûr que je sois d'accord avec vous.
27 Q. Je vais vous donner la possibilité de revenir là-dessus et d'exprimer
28 votre désaccord. Mais ce que j'aimerais savoir c'est ce qui suit donc :
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1 vous avez donc les objectifs militaires, le lieu où se trouve ces objectifs
2 militaires dans la ville. Si vous dessinez autour de ces objectifs
3 militaires, ce que j'appelle la gamme probable d'erreurs avec les armes qui
4 sont utilisées pour tirer sur la ville, est-ce que cela comprendrait toute
5 la ville ?
6 M. KEHOE : [interprétation] Ecoutez, ça n'a pas été la première question
7 qui a été posée et je dirais en fait que l'Accusation n'a absolument
8 présenté pendant la présentation de ses moyens à charge aucune preuve pour
9 ce qui est de cette marge probable d'erreurs.
10 M. RUSSO : [interprétation] C'est une question ou c'est une observation,
11 Monsieur le Président ?
12 M. KEHOE : [interprétation] C'est une objection à propos de la façon dont
13 le Procureur pendant la présentation des moyens à charge a présenté cette
14 marge probable d'erreurs. C'était à eux que revenait le fardeau de la
15 charge plutôt de présenter cela. S'il pensait que cela était véritablement
16 un problème. Tout simplement cela n'a pas été un problème, l'Accusation en
17 fait n'a absolument pas présenté d'arguments à ce sujet, donc il n'y a
18 aucune base pour poser cette question.
19 M. RUSSO : [interprétation] Je vais répondre.
20 Pour ce qui est des éléments de preuve, je fais référence au rapport du
21 lieutenant-colonel Konings. Vous avez également des positions de Marko
22 Rajic ainsi que la déposition d'un capitaine -- dont l'interprète n'a pas
23 saisi le nom -- et il y a probablement des marges d'erreurs pour ce qui est
24 de certaines des armes qui ont été utilisées contre Knin.
25 M. KEHOE : [aucune interprétation]
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Essayons de revenir à la déposition de
27 ce témoin.
28 Vous pouvez lui poser une question, Monsieur Russo, et vous lui avez une
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1 question, Monsieur Russo, et le témoin vous a dit qu'il y avait
2 certainement certains quartiers de la ville qui ne pourraient pas être
3 considérés comme des cibles militaires légitimes.
4 Alors à partir de cette idée. Voyons dans un premier temps si le
5 témoin indique s'il existe des quartiers qui ne peuvent pas faire l'objet
6 d'attaques licites, ce qui me semble être un point de départ extrêmement
7 important pour ce qui est de la réponse à votre question.
8 M. RUSSO : [interprétation] Je suis d'accord.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous voulez poser davantage de
10 questions à ce sujet, faites-le non pas en formulant de façon différente
11 votre question, mais vous pourrez peut-être lui poser quelques questions de
12 suivi au témoin.
13 M. RUSSO : [interprétation] Oui, c'est ce que je vais faire.
14 Q. Alors prenons donc comme prémisse votre observation, à savoir il y
15 avait certains quartiers de la ville de Knin qui n'étaient, ne
16 correspondaient pas à des objectifs militaires légitimes pour des tirs
17 d'artillerie. Ça c'est une première partie de votre évaluation. Donc est-ce
18 qu'il y a une différence entre le fait que l'on cible ces quartiers ou ces
19 secteurs de façon intentionnelle et une -- entre la façon -- et les effets,
20 et une différence entre les effets de l'artillerie ?
21 Parce que je pense que vous conviendrez qu'il y a une différence,
22 n'est-ce pas ?
23 R. Je vais essayer d'être clair. Un objectif militaire licite est la seule
24 chose qui peut inciter un commandant à utiliser de façon délibérée cet
25 objet pour une attaque. Lorsque nous utilisons le terme "cible," cela
26 signifie qu'il y a une décision qui a été prise par un chef opérationnel
27 qui décide que tel objet deviendra l'objet d'une attaque.
28 Seul les objectifs militaires licites dans Knin auraient pu être considérés
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1 comme une cible, auraient pu être ciblés de façon absolument légale par le
2 général Gotovina et par ses commandants subordonnés et son état-major. Les
3 effets de l'artillerie comme nous le savons, on ne peut pas toujours
4 établir en fait une corrélation directe entre les effets de l'artillerie et
5 la cible qui fait l'objet de l'artillerie et je pense aux premiers tirs en
6 fait. Donc vous me demandez en fait s'il y avait une marge probable
7 d'erreurs, et si je pourrais faire un cercle autour d'un objectif militaire
8 qui doit être considéré comme tout à fait licite. Vous voulez savoir en
9 fait s'il y a eu des objets ou des cibles d'attaques intentionnelles qui ne
10 correspondaient pas à des objectifs militaires licites.
11 C'est cela, n'est-ce pas ? C'est ce que vous suggérez ?
12 Q. Non.
13 R. Ah bon.
14 Q. Si quelqu'un affirme que la ville de Knin a été pilonnée --
15 R. [aucune interprétation]
16 Q. -- donc quelqu'un affirme cela. Vous serez d'accord avec moi pour
17 admettre qu'on peut l'expliquer juste de quelque manière uniquement,
18 premièrement, qu'on avait l'intention de toucher différentes cibles qui
19 s'étendent sur toute la ville.
20 R. [aucune interprétation]
21 Q. Puis vous, vous êtes en train de me dire qu'il y a peut-être une autre
22 raison qui n'a rien à voir avec l'intention, et qui aurait pu donner le
23 même résultat.
24 R. Encore une fois, ce qu'on m'a dit c'est qu'un témoin aurait dit que ça
25 semblait être le cas, que toute la ville de Knin avait été pilonnée. Alors
26 dans votre question telle que vous l'avez reformulée vous présentez cela
27 comme étant un fait. Mais c'était une perception. C'est ce qu'on m'a dit.
28 Un témoin qui s'est trouvé sur les lieux a eu la sensation, a eu
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1 l'impression que toute la ville était attaquée.
2 Donc vous avez raison si on corrobore cette perception du témoin, ou
3 si le Juge du fait devant ce Tribunal arrive à la conclusion que, sur la
4 base de cette perception, on peut arriver à la conclusion qu'il y a eu
5 pilonnage sur la ville toute entière, ceci nous permettrait de penser qu'il
6 y a eu une attaque sans distinction, parce que j'ai dit avant qu'il y avait
7 des objectifs militaires éparpillés de par la ville mais cela ne permet pas
8 de dire que toute la ville était une cible militaire.
9 Donc ce que j'ai dit c'était lorsque j'ai réagi à l'affirmation qu'il
10 y avait une explication autre alternative, il y avait une alternative pour
11 cette perception lorsque vous observez les faits cinétiques des projectiles
12 d'artillerie qui sont tirés de manière simultanée dans un effort coordonné
13 afin de couper la capacité de l'ennemi de voir le champ de bataille, de
14 manœuvrer, de se réapprovisionner, et d'apporter des renforts. Ça peut être
15 une attaque intense tous les matins vers l'aube, par exemple, et l'effet
16 cinétique de l'artillerie est exacerbé parce qu'il n'y a pas de lumière
17 naturelle, parce que vous voyez des éclairs dues à l'impact des projectiles
18 d'artillerie, et cetera.
19 C'est ce que j'ai expliqué au conseil de la Défense
20 lorsqu'il en a été question -- lorsqu'ils m'ont dit cela.
21 Q. Je vous remercie, Professeur. Je pense que j'ai compris votre position.
22 Je vais vous la résumer.
23 On vous a soumis la perception de quelqu'un ils pensaient donc c'est
24 quelque chose qui a été observé par le témoin, et vous les avez arrêtés
25 immédiatement en disant : il y a là deux possibilités. Premièrement, ils
26 peuvent avoir raison sur ce qu'ils ont vu; deux, ils peuvent faire erreur.
27 Est-ce que j'ai raison ?
28 R. Non, premièrement, ils peuvent avoir raison; deuxièmement, ils peuvent
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1 se tromper. Mais cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de déduction
2 rationnelle que l'on puisse tirer de cela.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'en est pas nécessairement ainsi.
4 Donc ce n'est pas nécessairement ce que vous pensez.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est tout à fait cela.
6 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
7 M. RUSSO : [interprétation]
8 Q. Vous avez dit donc que :
9 "Il y avait des cibles militaires éparpillées de par la ville mais
10 que cela ne rend pas la ville toute la ville une cible militaire."
11 Alors vous serez d'accord avec moi, pour dire que si le général Gotovina
12 décidait d'attaquer toute la ville comme étant une cible militaire, cette
13 attaque serait illicite ?
14 R. Expliquez-moi comment vous transformez toute la ville en cible
15 militaire ?
16 Q. J'ai l'impression que vous anticipez. Mais répondez tout d'abord sur ma
17 première question.
18 R. Si le général Gotovina a donné l'ordre à ses subordonnés un ordre dans
19 l'intention était qu'il fallait le comprendre comme étant une directive,
20 instruction d'attaquer toute la ville parce qu'il y avait plusieurs
21 objectifs, plusieurs cibles militaires dispersés de par la ville, bien, là,
22 cet ordre n'aurait pas été correct.
23 Q. Il me semble que vous anticipez sur la suite de ma question.
24 Mais vous avez vu l'ordre d'attaque du général Gotovina, l'ordre où il
25 s'adresse à ses forces d'artillerie il leur dit d'ouvrir le feu
26 d'artillerie sur la ville de Knin.
27 R. [aucune interprétation]
28 Q. Vous avez vu cela, vous avez vu également ce que le document qui émet
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1 le général de brigade Rajcic, c'est un document de suivi où il donne
2 l'ordre "de pilonner la ville de Knin."
3 Vous avez vu cela ?
4 R. Oui.
5 Q. Vous me dites que ces ordres ne vous permettent pas d'affirmer que la
6 ville de Knin était devenue la cible des tirs d'artillerie ?
7 R. Là encore, je pense que plusieurs possibilités d'interprétations sont
8 offertes par ces documents.
9 Je ne pense pas que ce soit la formulation idéale. Mais si j'avais analysé
10 cet ordre je me serais adressé au commandant et je lui aurais dit : il faut
11 revoir la terminologie. Donc c'était la pratique habituelle, parce qu'à un
12 niveau, à un échelon élevé de commandement, vous arrivez à un point où on
13 ne s'exprime pas de manière tout à fait précise, vous avez -- je ne sais
14 pas combien de juristes en uniforme dans l'armée américaine, plus 500
15 d'entre eux seront déployés sur le terrain et ils vont vérifier ce qui en
16 est du langage dans les ordres.
17 Donc lorsque j'ai vu cela, de toute évidence, je me suis posé la question,
18 et je pense qu'il faut le replacer dans un contexte plus large.
19 Il y a eu une partie de la déposition lorsque Rajcic a déposé où il est
20 question du fait que le général Gotovina aurait souligné que la priorité
21 était de ne pas prendre des civils pour cible. Il y a eu une discussion
22 entre le général Gotovina et son commandant politique, à savoir le
23 président, c'est au tout début des transcriptions de Brioni où le président
24 souligne l'importance tout à fait primordiale du fait de ne pas perdre
25 l'appui, le soutien de la communauté internationale, et il me semble qu'il
26 dit : il convient de s'assurer que l'opération est menée d'une manière
27 professionnelle.
28 Je sais que le général Gotovina sortait de la Légion étrangère française
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1 donc avant de devenir commandant en Croatie. Donc lorsqu'on garde tout cela
2 à l'esprit on est amené à se poser la question de savoir ce que constitue
3 une exécution professionnelle d'une opération lorsque son président lui dit
4 cela, un commandant opérationnel donc lorsqu'il lui dit : il nous faut
5 préserver le soutien de la communauté internationale et il faut faire en
6 sorte que l'opération est menée professionnellement, en 1995, dans les
7 Balkans. Qu'est-ce que cela veut dire "quel est l'état d'esprit sous-
8 jacent" ?
9 Vous avez une guerre qui est en cours. On ne va pas mener une opération
10 contre un centre de gravité stratégique sans bien la planifier, et il est
11 clair que les objectifs militaires à l'intérieur de la ville de Knin
12 étaient identifiés. Il est clair que le général Gotovina avait des
13 problèmes d'approvisionnement en munition, et l'effort principal
14 prioritaire était d'apporter l'appui à l'effort tactique qui était
15 primordial.
16 Donc la perception que toute la ville de Knin était attaquée, il me semble
17 si on sort cela de contexte effectivement, ça nous amène à nous poser des
18 questions; mais si vous replacez cela dans un contexte plus large, cela
19 vous permet d'arriver à plusieurs conclusions différentes sur la base de
20 cette formulation-là.
21 Q. Mais entre le début et la fin de votre réponse, il semble que vous êtes
22 d'accord pour dire que la terminologie employée par le général Gotovina
23 ouvre la voie à plusieurs explications. Une des explications possibles est
24 qu'il voulait que toute la ville de Knin soit pilonnée ?
25 R. Si vous dites, "attaquez la ville," de toute évidence, une des
26 conclusions que l'on peut tirer de cela est qu'effectivement, c'était l'une
27 des intentions.
28 Q. Vous dites, si vous étiez conseiller juridique et que vous étiez appelé
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1 à revoir la terminologie de cet ordre et si vous lui disiez qu'il fallait
2 donc revoir la terminologie employée, vous lui diriez de faire cela parce
3 que, sinon, l'exécution explicite de l'ordre aurait mené à la commission
4 d'un crime.
5 R. La raison est que je ne voudrais pas qu'il y ait des incertitudes sur
6 l'intention.
7 Q. [aucune interprétation]
8 M. KEHOE : [aucune interprétation]
9 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
10 M. KEHOE : [interprétation] Si nous parlons d'incertitude pour ce qui est
11 de cet ordre, je pense que le mieux serait d'afficher le document 1125 et
12 de savoir exactement de quoi on parle.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, bien sûr, on peut examiner le
14 document. Mais d'après ce que j'ai compris dans la déposition du Pr Corn,
15 il semblerait la chose suivante : afin de comprendre exactement ce qui
16 était entendu, ce ne serait peut-être pas la meilleure idée que de se
17 polariser uniquement sur cette ligne-là contenue dans l'ordre ou ces lignes
18 dans ces ordres parce que pour arriver à la bonne interprétation, il
19 faudrait replacer les choses dans un contexte plus large avant de formuler
20 une opinion finale sur la manière dont il convient de comprendre cet ordre.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est tout à fait cela.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, je ne m'oppose pas à ce
23 que l'on se penche sur les termes employés dans le document, mais la valeur
24 n'en sera que limitée par rapport à ce que vous semblez chercher à
25 atteindre.
26 M. KEHOE : [aucune interprétation]
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, c'est la manière dont j'ai compris
28 le témoin. Monsieur Russo, j'essayais de retrouver la référence précise.
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1 Donc, ça ne ferait pas de mal, en fait, de regarder ce qui est dit
2 dans le texte. En fait, ça pourrait être utile.
3 M. RUSSO : [interprétation] Le témoin, de toute évidence, sait très
4 précisément de quoi je parle. Il sait de quelle partie du texte je parle,
5 de quels termes. Si Me Kehoe souhaite poser des questions supplémentaires
6 là-dessus --
7 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
8 M. RUSSO : [interprétation] -- il est libre de le faire.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, si vous avez bien
10 compris ce que j'allais dire, ce serait peut-être utile que tout un chacun
11 sache exactement quels sont les mots qui ont été utilisés.
12 M. RUSSO : [interprétation] Tout à fait. Je ne m'oppose pas à ce que l'on
13 examine l'ordre. Il s'agit de la pièce P1125. En anglais, page 14, me
14 semble-t-il.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous verrons ça s'afficher à
16 l'écran. Veuillez poursuivre.
17 M. RUSSO : [interprétation]
18 Q. Essayons d'avancer pas à pas.
19 Nous pouvons donner lecture à partir du moment où ce sera affiché. Donc,
20 nous voyons en bas, à l'écran :
21 "Regroupez et organisez les TS et les TRS-2 le long des axes principaux
22 d'attaque, se polariser sur l'appui artillerie aux forces principales
23 engagées dans l'opération offensive" -- et puis plusieurs directions sont
24 indiquées, comment -- "il indique comment il entend faire cela. Donc,
25 premièrement, fournir -- premièrement, des attaques puissantes contre les
26 forces de l'ennemi, le long de la ligne de front. Poste de commandement.
27 Centres de communication. Puis, tirer sur les positions d'artillerie, et
28 puis ouvrir le feu d'artillerie sur les villes de Drvar, Knin, Benkovac,
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1 Obrovac et Gracac."
2 Donc, Professeur Corn, il y a donc les -- prenons le numéro 5, prenons
3 cette formulation comme étant une explication explicite, donc en plus de
4 tout ce que je vous ai demandé de garder à l'esprit, donc le fait d'ouvrir
5 le feu sur des centres de Communication, positions d'artillerie, les villes
6 de Drvar, Knin, Benkovac, Obrovac doivent faire l'objet de tirs
7 d'artillerie. Est-ce que vous seriez d'accord avec moi pour dire
8 qu'explicitement, il s'agit d'un ordre d'attaquer de manière illicite les
9 villes de Drvar, Knin, Benkovac, Obrovac et Gracac ?
10 R. Non, je ne suis pas d'accord avec vous parce que vous pensez que vous
11 pouvez le sortir du contexte.
12 Q. Professeur --
13 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux terminer ?
15 M. RUSSO : [interprétation]
16 Q. [aucune interprétation]
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'interprétation française était quatre
18 ou cinq lignes derrière vous, Monsieur Russo, et c'est la raison pour
19 laquelle j'ai essayé de vous arrêter.
20 Ralentissez, s'il vous plaît, votre débit.
21 Maintenant, vous pouvez terminer votre question.
22 M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je ne pense pas que le
23 témoin a terminé sa réponse avant qu'il y ait eu une nouvelle question de
24 M. Russo. Le témoin s'est arrêté parce que, Monsieur le Président, vous
25 avez demandé une pause pour l'interprétation et le témoin souhaitait
26 ajouter un commentaire.
27 M. RUSSO : [interprétation] J'ai posé une question directe et le témoin m'a
28 répondu directement. Donc, je lui ai demandé s'il était d'accord. Il
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1 n'était pas d'accord, il voulait fournir une explication. Mais je voudrais,
2 tout d'abord, qu'il réponde à ma question.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question était -- la suivante, vous
4 lui avez donné -- fourni des suggestions, et puis, vous avez dit : "Correct
5 ?"
6 Le témoin vous a dit :
7 "Non, je ne serais pas d'accord avec cela." C'est la réponse à votre
8 question."
9 Puis le témoin a commencé à expliquer sa réponse et je pense qu'il convient
10 de l'entendre par rapport au nombre de questions que vous lui avez
11 soumises. Vous avez dit :
12 "Pour commencer, Professeur Corn, parce que je ne pense pas qu'on
13 puisse sortir cela du contexte, est-ce que vous souhaitez ajouter quelque
14 chose ?"
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Le conseil m'a demandé si j'étais d'accord sur
16 le fait que cette formulation -- je ne vois plus ça à l'écran, mais donc,
17 que cette formulation, que cette terminologie signifiait que c'est un ordre
18 qui lançait -- qui donnait l'ordre de lancer une attaque illégale. J'ai dit
19 que je n'étais pas nécessairement d'accord avec cela, que ce serait une
20 conclusion qu'on pourrait tirer sur la base de la formulation, mais lorsque
21 je me penche sur cette formulation, je la replace dans un contexte plus
22 large, et dans ce contexte, ce que je vois, c'est que le commandant oriente
23 ses moyens d'appui artillerie sur des objectifs tactiques et des objectifs
24 opérationnels.
25 Donc la question que vous m'avez posée, Monsieur Russo, se fonde sur une
26 hypothèse, à savoir que le poste de commandement et le centre de
27 communication ne peuvent exister que dans la ville de Knin. Donc, que
28 placer -- qu'attaquer Knin ne peut signifier que le fait qu'on veut
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1 attaquer des cibles qu'on a déjà identifiées. Mais de la manière dont, moi,
2 je l'interprète, parce qu'avant j'ai travaillé dans le renseignement, dans
3 le domaine tactique, je pense que les postes de commandement, les centres
4 de Communications existent dans des zones rapprochées de combat et à
5 l'arrière. Donc comment est-ce que je lis la suite du paragraphe ? Il se
6 polarise sur les faits tactiques de l'appui feu.
7 Donc, ma réponse est par l'affirmative : oui, c'est une des conclusions
8 possibles sur la base de cette formulation, l'ordre, donc, d'attaquer toute
9 la ville. Ça, c'est une conclusion possible. Mais je ne pense pas que le
10 contexte plus large confirme cette hypothèse ou cette déduction.
11 M. RUSSO : [interprétation]
12 Q. Je vous remercie, Professeur. Je voulais qu'on se concentre sur votre
13 accord. Donc, vous êtes d'accord qu'une conclusion possible sur la base de
14 cette formulation est de -- que l'on donne l'ordre d'attaquer toute la
15 ville et je vous demande de nous confirmer que si cette interprétation --
16 cette explication est la bonne, cet ordre émis par le général Gotovina est
17 l'ordre de mener une attaque illicite sur ces villes ?
18 R. Cela peut être compris de cette manière-là, mais quant à savoir si
19 telle était l'intention, je pense que c'est une autre question. Mais,
20 effectivement, c'est une conclusion possible que l'on peut tirer de cela.
21 Q. Très bien.
22 M. RUSSO : [interprétation] P1205, s'il vous plaît, à présent.
23 Q. Avant de continuer, de la manière dont vous interprétez l'ordre que
24 nous avons examiné, vous dites qu'il est possible que lorsque le général
25 Gotovina dit : "Tirez sur des postes de commandement, postes de
26 communication, positions d'artillerie et ouvrir le feu sur les villes de
27 Drvar, Obrovac, Benkovac, Gracac," et cetera, vous dites que l'un des
28 interprétations possibles est qu'il cherche à communiquer à ses
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1 subordonnés, qu'il veut que l'artillerie attaque les postes de
2 commandement, les centres de Communication et positions d'artillerie dans
3 ces villes.
4 Est-ce que j'ai bien compris ?
5 R. Non.
6 Q. D'accord. Alors…
7 R. Dans un contexte plus large de l'appui feu à l'opération, il est clair
8 que l'effort prioritaire de l'appui feu est d'apporter l'appui feu au
9 combat. L'offensive, le début d'action contre des lignes de défense
10 établies, lorsque vous avez une bataille rapprochée, vous allez vous servir
11 de l'artillerie pour un appui feu, il vous faut vous servir de cette
12 artillerie non seulement contre les défenses, mais contre les 3CI et la
13 logistique qui existe à proximité de ce combat rapproché. Donc c'est un
14 principe de base dans des opérations militaires.
15 Donc je le lis dans un contexte plus large, une conclusion possible est que
16 vous avez des objectifs militaires à Knin qui ont été identifiés avant que
17 l'ordre ne soit émis, et il dit à ses subordonnés qui ont la charge de
18 l'artillerie, Placez ces objectifs sous l'attaque afin d'apporter un appui
19 à l'opération plus large. Donc il se polarise sur les objectifs qui ont à
20 voir avec le combat rapproché parce que c'est sa priorité.
21 Q. Mais si ce que vous nous dites, Professeur, est vrai, alors dites-nous
22 : pourquoi, de votre point de vue, il ne dit pas : et attaquer par
23 l'artillerie les cibles militaires à Drvar, Knin, Benkovac, Obrovac, et
24 Gracac ? Parce que cela éclaircirait la chose, pourquoi il ne le dit pas ?
25 R. Premièrement, comment voulez-vous que je vous dise ce qu'il avait à
26 l'esprit, ce serait des conjectures ? Mais ce que je peux vous dire sur la
27 base de mon expérience, parce que j'ai fourni des conseils juridiques aux
28 commandants militaires, qu'il y a toute une série d'explications possibles.
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1 Premièrement, je doute que le général Gotovina ait rédigé le document lui-
2 même. Peut-être qu'il l'a fait. Mais le plus souvent ce n'est pas le
3 commandant qui rédige. C'est l'officier chargé de l'opération qui le fait.
4 Le commandant de toute évidence il signe l'ordre. Donc il se fonde sur le
5 fait que l'officier opérationnel sait comment il rédige.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Attendez.
7 J'essaie de comprendre, j'essaie de comprendre la question, et j'essaie
8 aussi de bien comprendre votre témoignage jusqu'à présent. Vous avez dit
9 que la formulation qu'il emploie peut s'expliquer différemment. Une
10 explication possible serait qu'il souhaitait que l'on attaque les villes en
11 question.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Hm-hm.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une autre explication serait qu'il avait
14 l'intention de donner l'ordre d'attaquer des cibles militaires qui se
15 situent à l'intérieur de ces villes.
16 Alors, maintenant, Monsieur Russo, la question suivante : pourquoi est-ce
17 qu'il aurait formulé cela de cette manière - corrigez-moi si je n'ai pas
18 bien compris - mais cette question elle ne sert à rien puisque cela dépend
19 de la manière dont il faut comprendre la formulation ? Donc si l'intention
20 de cette formulation était attaquer ces villes, là, bien entendu, la raison
21 pour laquelle cela a été formulé ainsi c'est parce qu'autrement, ils
22 n'auraient pas touché les autres parties de la ville, les parties civiles,
23 s'ils avaient attaqué uniquement des objectifs militaires; cependant, si
24 d'autre part l'intention était de donner l'ordre d'attaquer uniquement des
25 cibles militaires, dans ces circonstances, vous pouvez dire que la
26 formulation n'est pas la mieux choisie.
27 Donc la réponse à votre question dépend entièrement de l'interprétation
28 qu'il convient de donner à cette formulation, et le Pr Corn nous a dit que
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1 plusieurs interprétations sont possibles. Donc A petit (b) donc lui
2 demander pourquoi, non, il faut scinder cela. Donc si on adopte
3 l'interprétation, petit (a), alors pourquoi ? Si on adopte l'interprétation
4 petit (b), alors pourquoi ?
5 Donc il me semble que ça saut aux yeux, si vous interprétez cet ordre
6 comme étant un ordre qui se fonde sur l'intention d'attaquer toute la
7 ville, vous avez pratiquement la réponse dans la formulation.
8 Cependant, si on l'interprète autrement, je pense que nous avons déjà
9 reçu une réponse de la part du Pr Corn, à savoir la formulation n'est pas
10 tout à fait précise, et il aurait demandé que l'on revoie cette formulation
11 s'il avait été appelé à vérifier ce document.
12 Donc vous avez les réponses. La question ne sert à rien si vous ne
13 faites pas une distinction entre les différentes interprétations.
14 Si vous n'êtes pas d'accord avec mon analyse, je vais vous entendre
15 et, bien sûr, le mieux ce serait de formuler des questions de telle façon
16 que je comprenne immédiatement à quel point mon analyse n'était pas exacte.
17 Mais pour commencer, je vais poser ma question au Pr Corn, j'ai
18 écouté la dernière question, vous avez écouté la dernière question de M.
19 Russo, vous avez entendu mon analyse, j'ai estimé que cette question ne
20 servait à rien, êtes-vous d'accord ou non ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis d'accord, et bien entendu, je me
22 fondais sur la supposition que M. Russo me posait la question s'il n'avait
23 pas à l'esprit qu'il fallait attaquer toute la ville de Knin.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui --
25 LE TÉMOIN : [interprétation] L'alternative, je pense que --
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'aurait pas touché d'autres parties
27 de la ville --
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, il est presque 10 heures
2 30. Si vous souhaitez réfléchir encore un petit peu à ma réflexion
3 précédente en préparant vos questions suivantes qui démontreront que le Pr
4 Corn se trompe, lui aussi, je souhaiterais vous donner un petit peu de
5 temps pour faire cela.
6 Sinon, une question de procédure semble se poser. Donc je vous propose, à
7 moins que vous ayez juste une ou deux questions…
8 M. RUSSO : [interprétation] Juste pour répondre à l'analyse de la Chambre.
9 Ce que j'essaie de faire, et peut-être que je ne le fais pas suffisamment
10 bien lorsque je pose mes questions, il me semble que le Pr Corn a choisi
11 parmi les possibilités une interprétation et je voudrais vérifier pourquoi
12 il a adopté cette interprétation en particulier, mais je trouverai une
13 façon moins superflue et moins inutile de lui poser la question et obtenir
14 cet élément d'information.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
16 Monsieur Russo, on n'a peut-être passé plus de temps sur une explication,
17 qui n'est pas nécessairement de l'Accusation. Moi-même, je n'ai pas entendu
18 le Pr Corn choisir entre ces versions, mais nous pouvons lui poser la
19 question au Pr Corn.
20 Est-ce que vous avez vous-même choisi l'interprétation que vous estimez
21 être la bonne ou vous l'avez juste dit dans le contexte l'interprétation de
22 l'Accusation n'est pas nécessairement la bonne ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que c'est le dernière qui s'applique
24 et je m'explique. Dans mon addendum, on m'a fourni des faits, des
25 suppositions qui se polarisent si on l'attaque sur des objectifs militaires
26 situés dans la ville. Donc par rapport à l'addendum, j'aurais à dire que
27 les hypothèses factuelles rejettent la proposition de l'Accusation
28 lorsqu'elle affirme qu'il y avait, que cet ordre visait à ce qu'on attaque
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1 toute la ville.
2 Mais s'agissant de cette question particulière, je pense qu'il a deux
3 déductions raisonnables ou rationnelles qui toutes les deux peuvent être
4 tirées de la formulation. Les deux ont leurs points forts et leurs
5 faiblesses, ais je pense qu'il convient de replacer cela dans un contexte
6 plus large. Donc la supposition est l'intention est d'attaquer la ville
7 mais à ce moment-là pourquoi n'a-t-il pas été même plus pressé que cela si
8 c'est cette hypothèse-là.
9 Donc je pense qu'il y a deux conclusions rationnelles qui sont
10 possibles.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas-là, je pense que nous
12 allons prendre là une pause, Monsieur Russo.
13 Mais tout d'abord, je vais demander à Mme l'Huissière de vous
14 conduire pour sortir de ce prétoire.
15 [Le témoin quitte la barre]
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Misetic, on m'a dit que vous
17 avez une question de procédure à soulever.
18 M. MISETIC : [interprétation] Oui, effectivement. Je voudrais demander à
19 cette fin de passer à huis clos partiel.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous passons à huis clos
21 partiel.
22 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
23 [Audience à huis clos partiel]
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24 [Audience publique]
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.
26 Puisque nous parlons de questions de procédure, Monsieur Cayley, en ce qui
27 concerne le calendrier à présent. Votre présentation de moyens va
28 commencer, doit commencer le 17 septembre. Mais apparemment nous n'allons
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1 pas être en mesure de le faire le 17 septembre. Il faudrait modifier cela.
2 Vous avez demandé à avoir encore plusieurs jours entre l'arrêt, la fin de
3 la présentation des moyens de la Défense Gotovina et des débuts de votre
4 présentation de moyens. Est-ce que vous avez besoin de quelques jours pour
5 vous préparer, ou bien est-ce que vous pensez que, vu que la Défense
6 Gotovina s'arrête le 14 ou le 15, vous allez vraiment avoir besoin de plus
7 de temps ?
8 M. CAYLEY : [interprétation] Je vous interromps. Nous sommes prêts à
9 poursuivre immédiatement donc dès que l'équipe Gotovina termine avec sa
10 présentation des moyens à décharge; nous pouvons donc prendre la suite.
11 Nous avons besoin pourtant d'une date pour prévoir et commencer à organiser
12 l'arrivée de nos témoins.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc le lendemain de la fin des moyens
14 de la Défense Gotovina vous pouvez débuter.
15 M. CAYLEY : [interprétation] Exactement, Monsieur le Président.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, et vu les témoins que nous
17 avons sur notre liste, vu le temps prévu pour chacun de ces témoins, nous
18 avons tous ces éléments, il faudrait peut-être que vous vérifier cela
19 encore une fois avec la Défense Gotovina, et ensuite vous pouvez vous tenir
20 prêt pour commencer le lendemain. Mais il faudrait donc vérifier si nos
21 informations se concordent et si tout cela correspond.
22 M. CAYLEY : [interprétation] Très bien. Nous allons faire cela.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.
24 Nous allons prendre une pause à présent et poursuivre à 11 heures.
25 --- L'audience est suspendue à 10 heures 37.
26 [Le témoin vient à la barre]
27 --- L'audience est reprise à 11 heures 05.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo.
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1 M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
2 Q. Professeur, avant la pause, le Président vous a posé une question, à
3 savoir si vous avez choisi entre différentes interprétations de la formule
4 utilisée quand on parle de placer sous le feu d'artillerie des villes, et
5 vous avez dit que vous avez choisi d'interpréter cela comme s'il s'agissait
6 d'un ordre légitime sans avoir l'intention de détruire la ville.
7 Est-ce que j'ai raison ?
8 R. [aucune interprétation]
9 Q. [aucune interprétation]
10 R. J'ai expliqué que, quand j'ai écrit mon addendum, et quand il
11 s'agissait d'évaluer la légalité de certaines cibles qui ont été les cibles
12 à Knin quand la ville a été placée sous l'attaque, et il s'agissait de
13 tirer des conclusions, et pour moi, cet ordre voulait dire qu'il fallait
14 placer certaines cibles à Knin sous l'attaque.
15 J'ai aussi dit au Juge qu'en regardant ce document en tant que soi, que
16 cela ne servait à rien de choisir de façon très catégorique l'une ou
17 l'autre interprétation, parce que vous pouvez de façon très logique arriver
18 à la conclusion que les deux interprétations finalement tient la route.
19 Moi, je pense qu'on ne peut tout de même accorder un tout petit plus de
20 poids à l'interprétation qu'il s'agissait là des cibles militaires, mais
21 sans pour autant exclure l'autre interprétation, en regardant le document à
22 proprement parler, et rien d'autre.
23 Q. Si l'on place ce document dans le contexte, toutes les informations que
24 vous avez au sujet de cette affaire, sur la base des hypothèses qu'on vous
25 a avancées, des informations, tout ce que vous savez, maintenant quand vous
26 regardez cet ordre, est-ce que vous pouvez nous dire quelle est à présent
27 votre interprétation de cela ?
28 R. Moi, je considère que, là, il ne s'agissait pas d'un ordre exigeant
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1 qu'on se lance dans les tirs sans discrimination sur Knin. Je pense que,
2 quand on place cela dans le contexte de l'opération, il s'agissait d'une
3 opération professionnelle avec -- enfin le commandant c'est un soldat
4 professionnel dans une organisation militaire la plus professionnelle qui
5 soit dans la monde, et tout cela, et d'autres facteurs me font dire qu'on a
6 un objectif de combat extrêmement précis, à savoir battre et détruire
7 l'ennemi. C'est à cela que sert l'infanterie, à savoir l'infanterie légère,
8 se rapprocher de l'ennemi et le détruire. Je pensais que dans un contexte
9 plus large ça serait complètement futile de faire autrement alors qu'il a
10 bien fait comprendre que sa priorité est de faire plier l'ennemi, donc cela
11 ne sert à rien d'avoir un feu aléatoire complètement chaotique.
12 A la lecture de toutes ces informations, j'en arrive à la conclusion que là
13 il ne s'agissait pas de placer la ville de Knin sous l'attaque sans
14 discrimination, mais qu'il s'agit d'un ordre portant sur les cibles bien
15 identifiées à l'avance, précises, cibles militaires.
16 Q. Merci.
17 M. RUSSO : [interprétation] Maintenant je vais vous demander de me
18 présenter la pièce D970.
19 Q. Là il s'agit d'une pièce jointe à l'ordre portant sur l'engagement de
20 l'artillerie, quelque chose qui vient du général Gotovina.
21 M. RUSSO : [aucune interprétation]
22 Q. On peut lire :
23 "Pilonner les villes de Drvar, Knin, Benkovac, Obrovac, et Gracac."
24 Est-ce que vous pensez que l'on peut interpréter cela exactement de la même
25 façon que l'ordre précédent ?
26 R. Oui. Je peux vous fournir un autre élément qui me fait dire cela.
27 Vous savez, moi, je suis passé par là, à savoir vous recevez les ordres du
28 commandement supérieur et ensuite vous, vous écrivez votre propre ordre.
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1 Moi, je ne l'ai jamais fait en situation de combat. Je l'ai fait en
2 situation de formation et j'ai beaucoup travaillé dans ma formation. Même
3 dans un exercice de formation, vous avez les impératifs de temps, vous avez
4 l'intensité des activités, des demandes différentes formulées par les
5 éléments, par les soldats, ce qui fait que dans votre processus vous
6 intégrez le langage de vos supérieurs dans vos propres ordres.
7 Moi, je ne pense pas que ce soit vraiment le général Gotovina qui a
8 dactylographié ses ordres, il a sans doute communiqué ses intentions, le
9 concept, à ses officiers qui l'ont fait, à ses subordonnés. Ensuite un
10 officier de l'état-major prépare l'ordre, et il s'agit de mobiliser les
11 troupes suite à l'ordre de ses commandants.
12 Là, à nouveau, vous voyez que l'accent est mis sur les tâches de
13 l'artillerie, sur la tactique. Ils parlent du besoin de protéger les flancs
14 contre le feu, neutraliser la zone de combat principale.
15 Donc effectivement il s'agit d'un ordre qui n'est pas très bien écrit
16 linguistiquement, qui peut être interprété de différentes façons. Ce n'est
17 pas écrit de façon idéale, pas du tout. Je pense qu'un officier de la JAG
18 qui examine cet ordre, il aurait demandé à l'officier qui l'a écrit d'en
19 écrire un autre, de le réécrire, de le refaire. Mais quand on place tout
20 cela dans un contexte plus large, je comprends pourquoi le document qu'on a
21 à la fin c'est lui qu'on a.
22 Q. Vu l'ordre de lancement d'opération du général Gotovina, vous
23 avez dit que vous l'avez vu, est-ce que vous avez vu celui-ci ?
24 R. [aucune interprétation]
25 Q. [aucune interprétation]
26 R. Non.
27 Q. Je suis tout à fait d'accord que cet ordre peut être interprété de
28 différentes façons. Mais est-ce qu'on ne peut pas l'interpréter autrement,
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1 à savoir qu'il fallait pilonner les villes entières de Drvar, Knin,
2 Benkovac, Obrovac, Gracac, et cetera ?
3 R. Je -- oui, effectivement, vous ne pouvez pas exclure cette possibilité.
4 Q. Professeur, vous, vous avez une opinion totalement différente de celle
5 du lieutenant-colonel Konings, qui s'est exprimé au sujet du droit, et
6 quand vous, vous dites que c'est un ordre qui n'est pas très bien écrit
7 linguistiquement. Mais vu les conclusions qu'en a tirées le colonel
8 Konings, est-ce que vous maintenez votre position ?
9 R. Je dois dire que je comprends ce que le colonel Konings a dit par
10 rapport au droit, j'ai dit que j'ai passé beaucoup de temps à faire la
11 différence entre ce qui relève de la politique et ce qui relève du droit;
12 de l'autre côté, je comprends que c'est tout à fait compréhensible
13 l'interprétation qu'il a faite, parce que mes propres officiers auraient
14 interprété cela de la même façon sans doute. Enfin, il y en a pas mal qui
15 l'auraient fait, en tout cas.
16 Moi, j'ai un autre point de vue parce que je sais qu'il existe des
17 distorsions -- des modifications de la doctrine opérationnelle, et c'est
18 pour cela que j'ai dit que c'est quelque chose qui est tout à fait
19 explicable, souvent on confond les règles d'engagement et le droit, et
20 c'est comme cela que je réagis.
21 Moi, je suis un juriste de l'armée formé, je suis formé pour aider et
22 appuyer les opérations militaires, et quand je reçois un ordre comme cela,
23 je vérifie quand même l'annexe qui explique l'appui feu, parce que je sais
24 qu'au moment où vous devez faire une centaine de choses alors que vous
25 n'avez le temps que pour en faire une vingtaine, des erreurs surviennent.
26 C'est quelque chose qui arrive dans la réalité. Si vous faites partie d'une
27 armée qui a une équipe de juristes chevronnés, évidemment qu'on les
28 utilise.
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1 Mais le danger existe, le danger d'être imprécis tout comme le
2 colonel Konings l'a été quand il a discuté du droit, évidemment que vous
3 avez un danger ici. Mais vous devez comprendre que là c'est un ordre de
4 lancement et que c'est quelque chose qui figure dans les annexes, à savoir
5 on y voit les cibles exactes, ce qu'on a planifié, les possibilités de
6 tirer sur ces cibles, tout ce processus est entamé par cet ordre, et qu'il
7 s'agit donc de placer dans un contexte plus large le contexte de la mission
8 qu'il faut accomplir.
9 Q. Professeur, vous conviendrez que quel que soit le processus, que
10 c'était le général Gotovina qui l'a écrit lui-même l'ordre ou quelqu'un qui
11 l'aurait écrit pour lui, si c'est le général de brigade Rajic qui l'a tapé
12 ou quelqu'un d'autre, ce qui est écrit là-dedans c'est la responsabilité
13 ultime du général Gotovina, n'est-ce pas ?
14 R. Oui, c'est son ordre. C'est lui qui en est responsable. Mais ici,
15 vous avez un rapport qui respecte les principes du droit humanitaire
16 international, et c'est comme cela que ses subordonnés doivent
17 l'interpréter.
18 Donc pour répondre à votre question, oui, c'est lui qui est responsable de
19 cela. Dans un contexte plus large, je pense que de toute façon cette
20 responsabilité doit être placée dans un contexte plus large. C'est la seule
21 façon possible de l'analyser, et c'est d'ailleurs l'objectif de ce procès.
22 Q. Merci. On va revenir sur quelques questions que je vous ai déjà posées
23 sur ce qu'on vous a dit pendant la présentation qu'on vous a fait.
24 Au mois de décembre 2008, quand on vous a parlé du pilonnage qui sont
25 l'œuvre des forces du général Gotovina, est-ce qu'on vous a parlé du
26 pilonnage des autres villes, mis à part Knin pendant l'opération Tempête ?
27 R. Non.
28 Q. Est-ce que vous avez jamais parlé avec le général Gotovina ou un de ses
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1 officiers subordonnés faisant partie de la HV ?
2 R. Non, je n'ai jamais parlé avec le général Gotovina. Je vous ai dit
3 qu'il y avait une personne censée nous aider lors de la réunion. Il
4 s'appelait Goran. Je ne me rappelle pas de son nom de famille, et d'après
5 ce que j'ai compris, il faisait partie des forces armées des Croates donc
6 du HV, et il faisait aussi partie de l'équipe du général Gotovina de la
7 Défense. C'est la seule fois que j'ai eu affaire avec un membre des forces
8 armées croates.
9 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
10 M. KEHOE : [interprétation] Il s'agit de M. Goran Zugic. C'est la personne
11 qui vient de temps en temps nous aider ici dans ce prétoire. Il fait partie
12 de notre équipe, et donc j'ai voulu tout simplement éclaircir ce point.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Plutôt, Monsieur Corn, vous avez parlé
14 des trois conseils qui sont présents dans ce prétoire, mais je ne vois pas
15 les trois conseils ici présents dans ce prétoire aujourd'hui; pourriez-vous
16 me dire de qui il s'agit ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est M. Kehoe, M. Stanton et M. Cronin.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
19 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
20 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
21 M. RUSSO : [interprétation]
22 Q. Est-ce que vous vous avez reçu des informations concernant cette
23 affaire qu'il s'agisse des informations transmises dans les médias, ou bien
24 si vous avez peut-être eu la possibilité d'avoir suivi le procès ?
25 R. Non. Je ne savais pas qui était le général Gotovina. La veille
26 d'arrivée, je suis allé sur Wikipedia voir de quoi il avait l'air pour voir
27 sa photo. C'est la première fois que je l'ai vu.
28 Q. Est-ce que vous aviez des informations au sujet du conflit en Croatie
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1 et surtout et concrètement de l'opération Tempête ?
2 R. Non, je n'ai pas eu d'informations précises au sujet de l'opération
3 Tempête. Moi, à l'époque, j'étais juriste de l'armée faisant partie de la
4 JAG. Je savais qu'il y avait un -- qu'il y a eu un conflit entre les
5 Croates et les Serbes de Croatie mais je n'ai jamais eu d'informations
6 précises à ce sujet.
7 Q. Monsieur, êtes-vous jamais allé à Knin ?
8 R. Non.
9 Q. Etes-vous allé -- êtes-vous jamais allé où que ce soit d'autre en
10 Krajina ?
11 R. Non, je suis allé à Dubrovnik mais je ne pense pas que cela fasse
12 partie de la Krajina, c'est la seule ville de Croatie que j'ai visitée.
13 Q. Est-ce que vous avez eu des contacts avec un autre membre de l'équipe
14 de la Défense Gotovina mis à part le général Gotovina lui-même et par
15 rapport à cette affaire ?
16 R. Non.
17 Q. Professeur, dans la feuille d'information supplémentaire D1644, vous
18 dites :
19 "J'ai examiné ces documents" - donc ce sont les documents qui se trouvent
20 au paragraphe 12, et là, vous dites - "par rapport aux conclusions que j'ai
21 citées au paragraphe 11; et à la lecture et à l'examen de ces documents, je
22 ne modifie pas mes conclusions."
23 Donc, moi, j'ai du mal à comprendre ce que vous voulez dire là-dessus. Donc
24 vous parlez de limitations de vos conclusions par rapport au paragraphe 11,
25 et là, à nouveau, vous en parlez aussi au paragraphe 13.
26 Est-ce que pouvez nous expliquer de quoi il s'agit ?
27 R. Je me suis préparé pour venir déposer en l'espèce --
28 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Donc dans le cadre de cette préparation, il y
2 a eu la visite à Houston effectuée par M. Cronin et M. Stanton quand ils
3 ont donc examiné mon addendum; ils m'ont fourni d'autres informations, par
4 exemple, le compte rendu de la réunion de Brioni, quelques ordres que nous
5 venons d'examiner. Je les ai aussi rencontrés ici à La Haye dans le bureau
6 de Greenberg Traurig, ce bureau d'avocats, et cela a eu lieu dimanche
7 dernier et donc j'ai ajouté ce paragraphe pour dire qu'après avoir écrit
8 mon addendum, je n'ai pas vu de documents qui feraient que je change une
9 quelconque opinion exprimée là-dedans.
10 M. RUSSO : [interprétation]
11 Q. Est-ce que cela veut dire que vous avez donc examiné tous les documents
12 qui figurent au paragraphe 12 ?
13 R. Je les ai examinés mais pas en détail. J'ai vu ces documents. J'ai vu
14 ces photos. Je pense que je vous ai dit : quels étaient ceux qui ont influé
15 sur mon processus de réflexion ? Je vous ai indiqué aussi quels documents
16 j'avais trouvé moins important mais cela dépend de ce que vous voulez
17 savoir exactement. Vous me demandez si je les ai examinés "en détail."
18 Qu'est-ce que vous voulez dire par cela ?
19 Q. Vous avez, quand vous dites qu'à la vue, qu'à la lecture de ces
20 documents, vos conclusions restent les mêmes, j'ai voulu tout simplement
21 vérifié que vous les avez vraiment examinés ?
22 R. [aucune interprétation]
23 Q. [aucune interprétation]
24 R. Ce que j'ai voulu dire et la conclusion à laquelle je suis arrivée
25 c'est qu'il y en avait qui était moins important et d'autres qui étaient
26 plus importants. Evidemment, ceux que j'ai jugés trop plus importants, je
27 les ai examinés de la façon plus détaillée, plus intense. Par exemple,
28 quand j'ai lu l'ordre en disant : placez les villes, telle -- telle ville
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1 sous l'attaque, évidemment, là, vous avez un clignotant rouge qui s'allume
2 disant danger; il faut que j'examine cela et il faut que je réfléchisse au
3 contexte qui a entouré cet ordre.
4 Ce n'est pas que -- on ne peut pas dire que quelqu'un m'a mis un papier
5 sous les yeux, en me disant : écoute, regarde cela, il faut que tu regardes
6 cela, il faut que tu l'examines celui-ci.
7 Q. Professeur, dans votre rapport, vous dites à la page 28 :
8 "D'après les informations qui figurent au compte rendu d'audience, il
9 convient de conclure que le général Gotovina a réfléchi à ce qui allait se
10 passer avec les civils à Knin et il a réfléchi, il a pris en compte la
11 population civile de Knin quand il a décidé de l'action à prendre, à savoir
12 à utiliser les tirs indirects d'artillerie."
13 Donc quand vous parlez des informations, quand vous parles des éléments et
14 de ce qui se trouve au compte rendu, vous parlez finalement des
15 informations que vous a fournies l'équipe de la Défense Gotovina; est-ce
16 exact ?
17 R. Oui.
18 Q. Dans la lettre du 19 mai ?
19 R. Oui.
20 Q. Aux pages 28 et 29, on trouve donc les hypothèses qui ont servi de base
21 pour votre rapport, les faits, les hypothèses tels que fournis par la
22 Défense Gotovina dans sa lettre du 19 mars; est-ce exact ?
23 R. Attendez voir ce que je trouve la lettre.
24 Oui.
25 Q. Donc lorsque vous avez découvert des éléments d'information qui vous
26 semblaient pertinents, vous n'avez pas considéré qu'il fût utile de
27 mentionner d'autres éléments d'information pour ce qui est de l'utilisation
28 d'artillerie faite par le général Gotovina ?
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1 R. Je vais vous expliquer à nouveau ce qui m'a en quelque sorte fait
2 réfléchir. Je vais vous expliquer comment nous avons réfléchi.
3 On m'a demandé de donner mon point de vue sur ce que je considérais être la
4 question ultime qui allait être posée ici devant ce Tribunal, à savoir
5 l'utilisation de la part du général de l'artillerie. Il s'agit de savoir
6 s'il était conforme à ces obligations conformément au droit du conflit
7 armé.
8 Alors je suis allé trouvé la Défense au départ ils avaient indiqué qu'ils
9 allaient me fournir moult documents et comptes rendus d'audience et procès-
10 verbaux, et cetera, et cetera. Je leur ai dit que j'estimais que ce qui
11 était absolument essentiel c'était que mon point de vue doive se fonder sur
12 des éléments factuels et qu'il fallait que ces éléments factuels soient
13 absolument conformes au dossier en l'espèce utilisés pendant le procès.
14 C'est pour cela que j'utilise le mot de "dossier." Au vu des faits et des
15 hypothèses qui ont été fournis, je voulais en fait que la Défense me
16 garantisse que les dossiers qu'ils me donnaient pour étayer en fait ces
17 faits et ces hypothèses qu'ils me fournissaient.
18 C'est pour cela en fait que j'ai essayé de les utiliser pour donner mon
19 point de vue, parce que si j'avais utilisé d'autres faits, d'autres
20 prémisses et d'autres hypothèses qui ne font pas partie du dossier, à mon
21 avis, mon point de vue n'aurait pas été particulièrement utile et précieux.
22 Parce que tout ce que j'aurais fait c'est fournir, au vu de mon expérience,
23 mon point de vue, mais ce que j'ai essayé de faire c'est de donner mon
24 point de vue pour que le Juge du fait puisse parvenir à la conclusion en
25 l'espèce, et je pense, en fait, que ce qui est important c'est la base et
26 les sources utilisées. C'est pour cela que j'ai pensé qu'il était
27 extrêmement utile que je leur dise ce qui est important c'est la décision
28 qui a été prise de ne pas lancer une attaque sur des zones où il y avait un
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1 mélange en quelque sorte de civils et de militaires les civils fuyant la
2 zone où était pratiquée l'incursion.
3 C'est la meilleure explication que je peux vous fournir, c'est pour cela en
4 fait que j'ai essayé toujours de forger et de présenter mon point de vue à
5 partir des faits et des hypothèses qui figurent dans la lettre, en tout
6 cas, c'est ce que j'ai essayé de faire.
7 Q. Monsieur le Professeur, lorsque vous avez énuméré ces éléments
8 d'information, à ce moment-là, vous aviez déjà vu l'ordre d'offensive du
9 général Gotovina et vous avez indiqué que cela pour vous a était une sorte
10 de clignotant qui s'allumait; et lorsque vous faites l'énumération de ces
11 éléments d'information qui vous semblent pertinent pour la façon dont il a
12 utilisé l'artillerie, vous n'avez pas pensé qu'il était utile de mentionner
13 le fait que cela avait en quelque sorte tiré la sonnette d'alarme pour vous
14 ? Vous n'avez pas pensé que la Chambre de première instance devrait être
15 mise au courant de cette considération de votre part ?
16 R. Comme je vous l'ai expliqué. Dans le contexte plus général, je pense
17 que j'ai compris ce que cela signifiait. C'était mon point de vue. Alors ma
18 réponse elle est négative. Si, manifestement, j'avais pensé qu'il était
19 utile ou important d'ajouter cela aux faits et aux hypothèses, j'en aurais
20 parlé au conseil de la Défense et je lui aurais demandé si je pouvais
21 inclure, le fait de décider de ne pas tirer sur les forces qui
22 s'enfuyaient. Car j'ai pensé au vu de l'exécution tactique, au vu de la
23 situation générale, et j'ai pensé en fait que l'effet relatif aux tirs
24 ajustés était beaucoup plus important.
25 Très honnêtement, je ne me souviens plus maintenant si je me suis dit, Cela
26 a déjà été présenté au Tribunal. Le Tribunal en est saisi. Bien évidemment,
27 ils prendront cela en considération. Je ne sais pas si intellectuellement
28 j'ai eu cette démarche.
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1 Q. Monsieur le Professeur, avant que nous nous penchions sur ces faits
2 supposés que vous avez considérés comme pertinents, j'aimerais vous poser
3 une question : conviendrez-vous alors que vous ne disposiez d'aucune
4 information relative aux circonstances factuelles vous avez présenté des
5 hypothèses ou vous avez dégagé des déductions qui sont quand même
6 favorables au général Gotovina, et ce, justement pour combler la lacune en
7 matière d'information, lacune qui était la vôtre ?
8 Est-ce que vous convenez de cela ?
9 R. Est-ce que vous pouvez me donner un exemple précis vous parlez des
10 faits et des suppositions --
11 Vous savez lorsque j'ai commencé, je n'avais absolument aucun avis par
12 rapport à la façon dont il avait agi. Je me suis contenté d'étudier le
13 rapport du colonel Konings et j'ai aidé le conseil de la Défense à
14 identifier ou à découvrir ce qui, pour moi, pose des problèmes dans le
15 rapport, et puis ensuite la situation a évolué à partir de cela. Je ne
16 pense pas qu'à un moment donné j'ai supposé que le général Gotovina
17 agissait en bonne et due forme et que j'aurais en quelque sorte présenté
18 des faits et des circonstances pour renforcer cette supposition. Et
19 d'ailleurs, comme je l'ai déjà dit hier, c'est la Chambre de première
20 instance détermine ou décide que ce que j'avance est erroné, je reconnais
21 d'ailleurs qu'il y a beaucoup de points de vue et d'avis qui ne sont pas
22 encore considérés comme valables.
23 Donc la question critique qu'il convient de se poser est : quels étaient
24 les faits et les circonstances et les suppositions relatives à sa décision
25 au moment où il a pris sa décision ? Cela j'insiste sur ce fait dans mon
26 premier rapport.
27 Q. Justement à propos de ce rapport en haut de la page 28, dans l'alinéa
28 B, vous dites que :
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1 "Parmi des éléments d'information qui vous ont été donnés, il vous
2 avait été dit qu'un couvre-feu avait été imposé aux civils de Knin."
3 Si vous prenez la page suivante au bas de la page suivante, vous tirez des
4 conclusions à partir de ces faits supposés, et à l'alinéa A, vous concluez,
5 et je cite :
6 "Le général Gotovina a essayé d'exploiter le couvre-feu en augmentant ces
7 tirs indirects contre les objectifs militaires à Knin lors des heures de
8 couvre-feux."
9 Puis un peu plus bas, au petit (c), vous concluez que le général Gotovina,
10 et je cite :
11 "A fait usage de tirs indirects pendant des heures qui n'étaient des heures
12 de couvre-feu, et ce, de façon limitée, ce qui suggérait qu'il avait
13 l'intention de perturber les opérations de l'ennemi tout en minimisant les
14 risques de dégâts collatéraux et de blessures collatérales pour les
15 civils."
16 Puis finalement, à la page 30, à la page suivante, à l'alinéa (f), vous
17 concluez que le général Gotovina, et je cite :
18 "A utilisé des lance-roquettes multiples seulement pendant les périodes où
19 il supposait que les civils étaient tenus de respecter l'ordre de couvre-
20 feu -- ou les civils jouissaient du couvre-feu."
21 Alors, Monsieur le Professeur, lorsque vous avez rédigé cet addendum, et
22 d'après la déposition que vous avez faite, vous n'aviez pas d'information
23 ou de moyen de preuve eu égard aux heures de couvre-feu. Si vous prenez la
24 liste des faits supposés que vous considérez comme pertinents, ainsi que la
25 liste de tous les faits supposés qui vous ont été fournis par la Défense de
26 M. Gotovina, il n'y a absolument pas indiqué quelles étaient précisément
27 ces heures de couvre-feu.
28 Donc ce que je souhaite vous dire c'est que vous avez tiré une conclusion
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1 sans pour autant savoir quelles étaient les heures de couvre-feu, et vous
2 avez présenté des conclusions à propos du comportement du général Gotovina
3 et à propos de ses intentions, sans savoir quelles étaient exactement les
4 heures de couvre-feu; comment est-ce que vous expliquez cela ?
5 R. Ecoutez, la seule explication c'est que je pense que vous aviez ces
6 heures de couvre-feu jusqu'à 5 heures du matin. Je vous l'ai déjà dit hier,
7 donc je ne peux pas vous dire que, lorsque j'ai rédigé cet addendum, j'y ai
8 inscrit tous les -- tout le moindre élément d'information qui avait été
9 porté à ma connaissance. Pour répondre à votre question, je dirais que je
10 l'ai probablement, en fait, appris lors de la réunion de Tampa, j'ai
11 probablement appris quelles étaient les heures de couvre-feu.
12 Q. Nous n'allons pas donc aborder la question de savoir ce que vous avez
13 appris à Tampa.
14 M. RUSSO : [interprétation] Mais j'aimerais que la pièce D41 soit affichée
15 -- ou D241 soit affichée à l'écran.
16 Q. On vous a fourni le document que je suis sur le point de vous montrer
17 et en fait cela indique que ce vous venez de dire à propos des heures de
18 couvre-feu est erroné parce que la situation était exactement le contraire
19 de vos conclusions car vous dites : le général Gotovina a essayé
20 d'optimaliser ses tirs indirects pendant les heures de couvre-feu et vous
21 verrez, d'après le document qui va être affiché, que cela n'est pas exact.
22 Car il est indiqué que les heures de couvre-feu courent de 22 heures à 5
23 heures. Donc alors il est absolument indubitable que le général Gotovina a
24 choisi 5 heures du matin pour commencer ses attaques d'artillerie, et en
25 fait donc c'est pendant les heures où il n'y avait pas de couvre-feu --
26 R. [aucune interprétation]
27 Q. -- qu'il a optimalisé ses tirs d'artillerie. Alors maintenant que vous
28 savez que la situation est exactement l'inverse de celle à laquelle vous
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1 aviez pensé lors des conclusions, est-ce que vous seriez incité à tirer les
2 conclusions tout à fait inverses, à savoir qu'il a optimalisé, utilisé son
3 artillerie pendant les heures qui n'étaient pas des heures de couvre-feu ?
4 Donc est-ce que cela, pour vous, correspond à une intention d'augmenter le
5 risque pour les civils ?
6 R. Non, pas forcément, pas nécessairement.
7 Parce que j'aimerais répondre à la première partie de votre question, parce
8 qu'en fait, je reconnais que les faits qui sont déterminés que, si les
9 faits déterminés par la Chambre de première instance ne correspondent pas
10 aux faits et les suppositions que j'ai utilisés pour écrire mon rapport,
11 alors la valeur, de mon avis, s'en trouve diminué.
12 Alors, bien entendu, il appartiendra à la Chambre de déterminer quel poids
13 accorder, à mon avis.
14 Mais, au vu de la situation, moi, je pense que, compte tenu de toute la
15 situation, son utilisation des tirs indirects contre les cibles où étaient
16 concentrés le commandement, le contrôle, la communication et le
17 renseignement à Knin étaient mus essentiellement par la façon dont il
18 prenait en considération ces éléments tactiques. Parce que si vous lancez
19 une attaque au crépuscule -- à l'aube plutôt, ça ne sert à rien de
20 commencer une attaque à minuit parce que l'ennemi aura une marge d'action
21 pendant six ou sept heures, entre minuit et l'aube.
22 Donc, bien entendu, que -- bon, si vous me dites maintenant qu'il y a eu le
23 maximum de tirs d'artillerie entre midi et 2 heures de l'après-midi, et que
24 cela n'a rien à voir avec le lancement et le début de l'opération
25 offensive, et vous me dites que cela crée une probabilité extrêmement
26 élevée de risque pour les civils, je pense qu'effectivement, cela aura --
27 cela va minimiser la qualité de mon opinion.
28 Mais vous, vous me parlez d'une différence de temps entre 5 heures et 5
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1 heures et demie du matin; donc, dire qu'à 5 heures du matin, à la fin du
2 couvre-feu, tout le monde se précipite dehors et prend les armes. Bon, je
3 n'en sais rien, c'est peut-être vrai, je ne connais pas, en fait, quelle
4 est la dynamique culturelle des personnes qui habitent à Knin, bon, c'est
5 quelque chose, la différence culturelle que je suis prêt à prendre en
6 considération, mais je ne pense pas, en fait, qu'il y ait une grande
7 différence entre ces deux horaires.
8 Q. Je comprends tout à fait ce que vous dites, Monsieur le Professeur.
9 Mais en fait, ce que vous me dites, c'est que vous, vous ne saviez pas ce
10 qui se passait à 5 heures du matin --
11 R. [aucune interprétation]
12 Q. -- vous êtes en train de supposer qu'ils ne se trouvaient pas, à 5
13 heures, dans les champs, auprès du bétail, que les gens ne se déplaçaient
14 pas dans les rues, à 5 heures et que c'est donc une hypothèse qui milite en
15 faveur du général Gotovina ?
16 R. [aucune interprétation]
17 M. KEHOE : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président. Mais je
18 pense au contexte de la question. Il va falloir jeter la base de ce
19 contexte justement parce que si c'est une question qui devra être posée, il
20 faudra que le conseil nous dise où il est indiqué qu'à 5 heures du matin,
21 les gens déambulent dans les rues, et cetera -- dans les rues de Knin, bien
22 sûr, et cetera, et cetera.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Russo est en train d'essayer de
24 déterminer les éléments rationnels qui sous-tendent vos conclusions, et il
25 a indiqué au témoin que l'une des hypothèses qui avait été utilisée n'est
26 pas forcément exacte, à savoir le couvre-feu était en vigueur jusqu'à 5
27 heures du matin. Alors, nous parlons de quelque chose d'abstrait et le
28 témoin ne sait pas si les heures de couvre-feu ont été strictement
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1 observées et respectées. Il y a beaucoup de paramètres qui échappent au
2 témoin. Donc, là, nous sommes dans le domaine de l'hypothèse. Bon, je ne
3 vais pas utiliser le mot de "conjectures."
4 Mais, au vu des circonstances, si le témoin explique qu'il n'est pas
5 nécessairement vrai que le -- qu'au moment où le couvre-feu se termine,
6 tout le monde se précipite dehors, c'est différent -- 5 heures du matin,
7 c'est différent de la situation à 14 heures. Si c'était 14 heures, moi, je
8 demanderais -- nous pourrions poser la question au témoin. Nous pourrions,
9 par exemple, demander au témoin si les gens avaient l'habitude de se lever
10 à 4 heures du matin et de vaquer à leurs activités, si les gens retardaient
11 cela d'une heure.
12 Mais ce n'est pas moins logique que de dire, à 5 heures du matin, tout le
13 monde se précipite dehors.
14 Est-ce que vous êtes d'accord avec ce que j'avance ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais avec une nuance -- à une nuance
16 près, Monsieur le Président. Est-ce que c'est ce à quoi s'attendait le
17 commandant qui prenait la décision ? Est-ce que le commandant avait des
18 éléments d'information lui indiquant que les gens commencent normalement
19 leur journée à 4 heures du matin, le couvre-feu s'étend jusqu'à 5 heures du
20 matin, ils sont prêts, donc, à commencer leur journée à 5 heures du matin ?
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais vous, vous ne le savez pas,
22 cela.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, je ne le sais pas.
24 M. RUSSO : [interprétation]
25 Q. Monsieur le Professeur, j'ai compris certains éléments des explications
26 que vous avez avancées, un peu plus tôt, avec l'utilisation de l'artillerie
27 par rapport aux heures de couvre-feu. Mais le fait est que, dans votre
28 rapport, vous faites une déclaration où vous dites : étant donné que le
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1 général Gotovina a utilisé ces tirs indirects pendant les heures qui
2 n'étaient pas les heures de couvre-feu, et ce, de façon limitée, cela
3 signifie qu'il avait l'intention de perturber les positions de l'ennemi
4 tout en minimisant le risque pour les civils. Alors c'est ce que vous
5 avancez. Mais, moi, ce que je vous dis, c'est que le document que je vous
6 montre maintenant modifie cette situation.
7 Alors, pourquoi est-ce que vous n'êtes pas disposé à modifier la
8 déduction que vous avez tirée, alors que vous aviez une information
9 différente ?
10 R. Il y a trois réponses.
11 Tout d'abord, à l'alinéa (c), vous voyez que j'utilise le mot suggérant une
12 intention. Donc c'est une déduction. Ce n'est qu'une déduction parmi tant
13 d'autres. Il se peut qu'il y en ait d'autres. Mais je pense que s'il
14 utilise, au maximum, ses tirs contre les objectifs militaires dans des
15 zones qui sont peuplées, à une heure où, d'après lui, il pense qu'il peut
16 utiliser à bon escient, où il peut exploiter, en fait, les faits du couvre-
17 feu, tout temps, parvenant à son objectif opérationnel; ce sont deux
18 facteurs qui sont pertinents. Si vous prenez le petit (b), je vous dis, en
19 fait, que la façon dont utilisent ces tirs indirects correspondent tout à
20 fait au concept de la mission ennemie, troupes, terrain, temps et civils.
21 Mais puisqu'il y a également les cibles qui sont associées aux positions
22 défensives de l'ennemi et au combat rapproché. Alors, ça, c'est mon point
23 de vue. Mais s'il sait, en fait, que le couvre-feu se termine à 3 heures du
24 matin, et que l'effort principal va être déployé à 5 heures, je pense que
25 l'on peut dire qu'il utilise ce maximum d'artillerie à 5 heures, parce que
26 je pense qu'à Knin, l'utilisation de l'artillerie était synchronisé avec
27 l'utilisation générale des tirs indirects dont l'objectif était de vaincre
28 l'ennemi au niveau de l'attaque, et ce, de façon aussi efficace que
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1 possible.
2 Tout ce que j'avance, c'est que s'il pensait qu'il pourrait utiliser de
3 façon positive le couvre-feu. C'est un autre facteur qu'il devait prendre
4 en considération et que j'utilise pour étayer la déduction en vertu de
5 laquelle je pense que sa décision d'utiliser au maximum ces tirs indirects
6 à un moment donné était une décision raisonnable.
7 Q. Monsieur le Professeur, mais avant que vous ne parveniez à cette
8 conclusion, vous n'aviez pas reçu les moyens de preuve de la part de la
9 Défense de M. Gotovina, qui vous aurait permis de comprendre ce que le
10 général Gotovina pensait qu'il allait se passer dans la ville à 5 heures.
11 Vous ne l'aviez pas obtenu cela, n'est-ce pas ?
12 R. Non, non, non, non. Non, non, je n'ai pas obtenu de déclarations. Je
13 n'ai pas obtenu de confessions non plus d'aveux, de dépositions du général
14 Gotovina. Moi, je ne sais pas exactement ce à quoi il pensait à ce moment-
15 là, et si vous prenez en considération mon premier rapport, j'insiste
16 toujours sur un fait, à savoir lorsqu'on évalue et que l'on utilise un
17 principe du droit du conflit armé qui a été rédigé afin de placer dans un
18 cadre opérationnel, ou que l'on essaie de convertir un cadre opérationnel
19 en responsabilité pénale, qui représente justement un grand défi. L'un des
20 éléments qu'en général on n'a pas, c'est l'état d'esprit de l'accusé et
21 très souvent il faut pouvoir utiliser des éléments de preuve indirects pour
22 essayer de le découvrir cet état d'esprit.
23 Donc je reconnais parfaitement qu'il s'agit d'un grand défi du
24 Tribunal, de ce Tribunal ou de tout tribunal d'ailleurs. Lorsqu'il s'agit
25 d'allégations relatives à des violations en matière de ciblage, et c'est ce
26 que j'ai essayé d'indiquer lorsque j'ai présenté mon avis, avis auquel je
27 parviens sur la base de faits et des circonstances qui m'ont été fournis.
28 M. RUSSO : [interprétation] Est-ce que nous pourrions, je vous prie, avoir
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1 la pièce 2161 de la liste 65 ter ?
2 Il s'agit en fait d'un rapport qui porte la date du 30 juillet 1995 qui
3 émane de l'administration du renseignement secret. Est-ce que vous pourriez
4 voir la première page pour la version en B/C/S et la deuxième page pour la
5 version anglaise ?
6 Q. Deuxième paragraphe de cette deuxième page de la version anglaise,
7 voyez ce qui est écrit :
8 "Alors outre le fait qu'il fallait prendre une décision pour engager
9 toutes les ressources humaines et matérielles pour la défense de la RSK, le
10 conseil militaire a imposé un couvre-feu entre 22 heures et 5 heures et a
11 décidé de punir très sévèrement," et cetera, et cetera.
12 Alors, Monsieur le Professeur, est-ce que vous convenez, au vu de ce qui a
13 été dit, qu'il fallait justement prendre en considération les moyens de
14 preuve indirects ? Est-ce que vous conviendrez que c'est un élément
15 d'information que le général Gotovina a dû prendre en considération
16 lorsqu'il a pris sa décision relative au moment d'attaquer avec
17 l'artillerie ?
18 M. KEHOE : [interprétation] Je m'excuse, je ne sais pas si le témoin a
19 jamais vu ce document. Je ne le pense pas d'ailleurs, et je pense qu'il
20 faudrait peut-être lui donner la possibilité de prendre connaissance du
21 document.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Premièrement, Monsieur le Professeur
23 Corn, je suppose que, lorsqu'on vous présente un document, vous appréciez
24 la possibilité de pouvoir étudier le document. Donc Me Kehoe vient de faire
25 cette observation. Est-ce que vous auriez besoin de prendre connaissance ou
26 d'étudier un peu plus ce document pour le moment ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je pourrais voir le début du
28 document pour pouvoir en déterminer l'origine ?
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui.
2 M. Russo vous a déjà dit qu'il s'agissait d'un rapport qui émanait de
3 l'administration du renseignement en date du 30 juillet 1995.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, oui, c'est bon, Monsieur le
5 Président, je suis prêt.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Russo.
7 M. RUSSO : [interprétation]
8 Q. Est-ce que vous convenez, Monsieur le Professeur, que cette information
9 devait être pris en considération par le général Gotovina avant de décider
10 du moment où il devait commencer exactement son attaque d'artillerie ?
11 R. Oui, tout cela relève de l'analyse missions, ennemis, troupes, terrain,
12 temps et civil, l'analyse METT-T-C. Alors si un commandant compétent doit
13 disposer de ces renseignements et je suppose qu'il les avait obtenus de la
14 part de son officier du renseignement ou de la part de l'officier des
15 affaires civiles et cela doit être utilisé.
16 Q. Est-ce que cela signifie oui, votre réponse ?
17 R. Ecoutez, vous avez utilisé -- écoutez, je ne sais plus, je pense que
18 vous avez dit que le commandant est requis ou doit -- moi, cela me pose
19 problème. Bon. Cela doit être porté à sa connaissance, certes, mais lorsque
20 vous dites : il est requis, est-ce qu'un commandant doit véritablement être
21 -- doit véritablement être informé du moindre détail d'information reçue
22 par son officier chargé du renseignement ? Ecoutez, c'est impossible. C'est
23 pour cela d'ailleurs qu'il a un officier chargé du renseignement. Parce que
24 l'officier chargé du renseignement, au vu de l'évaluation qu'il a faite,
25 peut justement filtrer en quelque sorte le volume d'information, il peut
26 lui fournir les renseignements dont il a besoin pour ses opérations.
27 Donc je pense que cela est pertinent au vu d'utilisation de tirs
28 indirects dans une zone habitée. Mais je suppose que son officier du
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1 renseignement lui aura fourni ces renseignements. Mais s'il ne l'a pas
2 fait, vous me posez cette question et cela suggère que le général est ipso
3 facto coupable de ce fait, mais le général, il est également, il compte
4 également sur son personnel pour lui fournir les informations, et moi, je
5 peux faire appel à mon expérience personnelle.
6 Je pense que ce rapport n'a pas été présenté directement au général.
7 Il est passé par son service du Renseignement qui l'aura analysé, trillé
8 sur le volet, qui lui aura fourni les renseignements qui d'après eux sont
9 nécessaires au général. Ça c'est la réalité d'un commandant qui planifie et
10 exécute une bataille et il est absolument bombardé de renseignements, de
11 défis, de gageures et c'est pour cela que les commandants ont justement des
12 états-majors qui les aident pour leurs opérations.
13 Q. Mais le général Gotovina doit justement, c'est de son ressort que de se
14 tenir informer, par exemple, des concentrations de civils ?
15 R. Oui, oui.
16 M. RUSSO : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaiterais que la
17 pièce 2161 de la liste 65 ter soit versée au dossier.
18 M. KEHOE : [interprétation] Pas d'objection.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur le Greffier.
20 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela devient la pièce P2619.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce P2619 est versée au dossier.
22 M. RUSSO : [interprétation] Merci.
23 Q. Monsieur le Professeur, dans le chapitre 1 de votre addendum qui figure
24 à la page 25 de votre rapport, vous faites référence au processus de
25 ciblage et vous dites comment il faut choisir l'arme appropriée, l'arme
26 idoine pour obtenir les faits escomptés sur les cibles, et vous dites dans
27 l'avant-dernier paragraphe :
28 "Compte tenu de ce que je sais de la situation opérationnelle du
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1 général Gotovina, il semble manifeste que ces choix que ces options de
2 choix de cibles étaient limités. Il n'y avait pas en fait, il n'avait pas
3 de capacité d'armes électroniques lui permettant de perturber la mission.
4 Il ne disposait pas de matériel de précision du type de ceux qui sont
5 associés aux opérations pour attaquer le centre de commandement de contrôle
6 de communication et renseignements. En fait, sa capacité se limitait à des
7 pièces permettant les tirs indirects des combats terrestres ainsi qu'une
8 capacité aérienne extrêmement limitée."
9 Q. Monsieur le Professeur, vous dites que vous n'avez trouvé aucune
10 indication vous permettant de penser qu'il avait à sa disposition des
11 moyens électroniques puissants. Je suppose que vous avez estimé que c'était
12 un élément pertinent dans votre analyse lorsqu'il s'agissait de savoir ce
13 qu'il en est du choix d'armes par le général Gotovina. Etait-ce raisonnable
14 dans les circonstances ?
15 R. Oui. C'est un facteur très important dans le processus de prise de
16 cibles, un choix de cible.
17 Q. Vous avez vu qu'il n'y avait pas de capacité électronique puissante;
18 est-ce que vous avez demandé à la Défense du général Gotovina de vous
19 fournir des éléments d'information au sujet des capacités électroniques de
20 la HV ?
21 R. Non, j'ai posé la question à Tampa, et j'ai demandé ce qu'il en était
22 de leur moyen pour ce qui est des moyens électroniques. C'était une de mes
23 fonctions; j'étais un ancien officier du renseignement donc j'avais une
24 expertise dans ce domaine. Et je devais fournir des connaissances sur leur
25 capacité de prise de cible et de choix d'armes. Donc j'aimais savoir ce qui
26 en était. Bien sûr que la HV ne pouvait pas avoir le même type de moyen que
27 les Etats-Unis.
28 Q. Oui. Très bien. Alors qu'est-ce qu'on vous a répondu ?
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1 R. Il me semble qu'il y a eu une conversation au sujet d'un hélicoptère
2 qui avait la capacité de brouiller les communications mais je pense que ce
3 n'était pas du tout les communications et les moyens électroniques au
4 niveau d'un bataillon, quelque chose que vous auriez trouvé dans l'armée
5 américaine.
6 En partie, je cherchais aussi à comprendre ce qui en était dans la
7 HV. Donc lorsque je vois qu'il est question de corps d'armée, par exemple,
8 pour ce qui est de l'armée croate ou serbe, je me pose la question, pour
9 savoir quel serait l'équivalent dans l'armée américaine, et en fait, je
10 suis arrivé à la conclusion qu'en fait c'est plutôt bien plus restreint
11 pour ce qui est de la taille est moins d'appui que ça n'aurait été au
12 niveau de brigade, par exemple, dans notre armée.
13 Q. Professeur, je vous remercie. Ça aurait été des capacités de brouillage
14 normalement et également les moyens d'interception sur le plan des
15 communications radio et surveillance électronique ?
16 R. Cela fait longtemps que je ne suis plus penché sur des questions de
17 renseignement militaire, mais si mes souvenirs sont bons, lorsqu'il s'agit
18 de brouillage, ce n'est pas la même chose que les moyens de guerre
19 électronique.
20 Là, vous auriez, par exemple, les équipements électroniques qui vous
21 permettraient de prendre pour cible de manière précise le fait de
22 brouillage, interception, pour pouvoir écouter les conversations de
23 l'ennemi, la destruction aussi. Ce sont aussi des moyens militaires
24 électroniques. Par exemple, pour pouvoir détruire les émetteurs ennemis
25 donc les capacités de transmission. Donc, normalement, le fait de
26 transmettre ou de diffuser des fausses communications ça ne ferait pas
27 partie de cette catégorie.
28 M. RUSSO : [interprétation] Pièce 2156, s'il vous plaît.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors si cela ne ferait pas partie de la
2 catégorie électronique dans quelle catégorie le rangeriez-vous ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] La capacité de transmettre, cela fait partie
4 des transmissions, des communications, et diffuser les informations
5 fausses. Je considère que c'est un autre type de moyen parce que
6 d'expérience sur le plan de la doctrine les moyens de guerre électroniques
7 relèvent de la responsabilité de l'officier du renseignement. En fait, dans
8 l'armée américaine le commandant d'une unité de moyens électroniques est un
9 officier du renseignement. Donc lorsqu'il s'agit de diffusion de fausses
10 informations, cela relève de la responsabilité d'officier d'opération. Vous
11 pouvez vous servir d'équipement de communication, vous pouvez utiliser d'un
12 moyen électronique pour diffuser de fausses informations mais une opération
13 de diffusion de fausses informations ne relève pas, à mon esprit, dans la
14 catégorie des moyens électroniques.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc c'est plutôt les moyens qui sont
16 utilisés que la finalité.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Avec tous mes respects, en fait, c'est le
18 contraire. C'est ce qu'on appelle dans l'armée américaine MIJI. Donc
19 lorsque vous êtes au milieu d'une opération, toutes les procédures
20 opérationnelles comportent un rapport, à savoir le commandement subordonné
21 doit envoyer le long de sa filière hiérarchique le rapport lorsqu'il a la
22 sensation qu'il est victime de la guerre électronique menée par l'ennemi.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie, Monsieur Russo.
24 M. RUSSO : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
25 Q. Nous avons la demande qui émane le 31 juillet 1995 du chef du
26 renseignement HV au général Gotovina et lui demande de donner son aval pour
27 mener à bien "des opérations de guerre électronique et de diffusion de
28 fausses informations radio," dans la région militaire de Split.
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1 Alors ce n'est pas un document qui est très long.
2 R. [aucune interprétation]
3 Q. C'est un document que vous n'avez pas vu lorsque vous avez tiré cette
4 conclusion que le général Gotovina n'avait pas à sa disposition des moyens
5 électroniques ?
6 R. Je n'avais pas vu cela.
7 M. RUSSO : [interprétation] Je demande le versement au dossier.
8 M. KEHOE : [interprétation] Pas d'objection de la part de la Défense.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier d'audience.
10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P2620.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce est versée au dossier.
12 M. RUSSO : [interprétation] Est-ce que nous pouvons avoir à présent la
13 pièce sur la liste 65 ter 7146.
14 Q. Vous avez affiché à l'écran, Professeur, un document qui porte la date
15 du 1er août 1995, et c'est le plan de la HV aux fins de surveillance
16 électronique et de brouillage. Une des pages suivante, comporte l'aval
17 donné par le général Gotovina pour ce plan.
18 M. RUSSO : [interprétation] Page 7 en anglais et en B/C/S.
19 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
20 M. KEHOE : [interprétation] Je voudrais que le témoin voit le début du
21 document.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Si le témoin souhaite voir quelque
23 chose il s'est qu'il doit s'adresser à moi et me le demander. N'hésitez pas
24 à me le demander.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, si je pouvais juste le
26 voir rapidement depuis le début.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, est-ce que l'on peut
28 faire cela ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien.
2 O.K.
3 O.K.
4 O.K.
5 O.K.
6 O.K.
7 O.K.
8 M. RUSSO : [interprétation] Est-ce que l'on peut reprendre la page 7, s'il
9 vous plaît, puisque c'est la page que je voulais examiner ?
10 Q. Vous voyez en haut à gauche l'approbation accordée par le général
11 Gotovina, et vous voyez quelles sont les tâches qui sont données. Il s'agit
12 de détecter et de surveiller les communications par radio entre la VRSK,
13 l'armée de la République serbe de Krajina, le 15e Corps, et la TK, et les
14 communications radio entre la VRS, et cetera.
15 R. Je peux voir la page suivante ?
16 Q. Oui.
17 R. Puis la page suivante, s'il vous plaît ?
18 Q. [aucune interprétation]
19 R. Ou la fin de celle-ci.
20 Est-ce que je peux voir la fin de la dernière page ?
21 Très bien.
22 Q. Monsieur le Professeur, encore une fois, ce n'est pas un des documents
23 que vous avez examinés avant d'arriver à votre conclusion sur le fait que
24 le général Gotovina n'avait pas de moyen électronique puissant ?
25 R. C'est exact.
26 Q. Vous ne l'avez pas vu ?
27 R. C'est la première fois que je vois ce document.
28 Q. Merci.
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1 M. RUSSO : [interprétation] Je demande le versement de la pièce sur la
2 liste 65 ter.
3 M. KEHOE : [interprétation] Pas d'objection.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.
5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P2621.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce P2621 est versée au dossier.
7 M. RUSSO : [interprétation] Sur la liste 65 ter la pièce 7351 --
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux formuler un commentaire ?
9 M. RUSSO : [interprétation]
10 Q. Oui, tout à fait.
11 R. Les tâches des unités subordonnées sont des tâches de surveillance.
12 Vous pouvez surveiller et suivre avec vos propres radios. Mais pour
13 interrompre les transmissions de l'ennemi, là, vous avez besoin d'avoir des
14 moyens de brouillage. Vous allez entendre des -- un grésillement sur votre
15 fréquence, si j'utilise mon microphone, pour vous intercepter, et donc vous
16 allez l'entendre jusqu'à ce que j'arrête ou jusqu'à ce que je change de
17 canal.
18 Mais ceci m'incite à penser à deux choses. Premièrement, il y a une
19 espèce de polarisation opérationnelle sur l'effort de collecte; et
20 deuxièmement, il ne dit pas -- il ne donne pas la directive de brouiller
21 dans ce rapport. Mais peut-être qu'il y en a un autre, donc où il dit :
22 recueillez un maximum d'informations, autant que vous pouvez.
23 Q. Je vous remercie.
24 M. RUSSO : [interprétation] La pièce 7351 sur la liste 65 ter, s'il vous
25 plaît.
26 Q. Monsieur le Professeur, vous avez, à l'écran, un ordre qui provient du
27 chef du grand état-major de la HV, du général Cervenko, sur la guerre
28 électronique, la date du document est celle du 30 juillet 1995, et je cite
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1 :
2 "Afin d'utiliser de manière efficace le brouilleur UHF et pour mettre
3 sur pied, de manière unifiée, le combat électronique lors de l'opération
4 offensive de la HV," et cetera.
5 Donc, il s'agit d'utilisation des unités de guerre électronique. Donc, il
6 dit que la 4e Brigade de la Garde va recevoir une station de brouillage
7 pour sa zone de responsabilité.
8 M. RUSSO : [interprétation] Puis la page suivante en anglais, mais toujours
9 la même en B/C/S.
10 Q. Vers le haut, la 5e Brigade de la Garde, qui se voit confier également
11 une station de brouillage, puis la 7e Brigade de la Garde, section de
12 guerre électronique, dans la zone de responsabilité Knin, se voit confier
13 deux stations de brouillage.
14 Alors, Professeur, là encore, c'est un document que vous n'avez pas eu
15 l'occasion d'examiner.
16 R. C'est exact.
17 M. RUSSO : [interprétation] Je demande le versement de la pièce 7351.
18 M. KEHOE : [interprétation] Pas d'objection.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier d'audience.
20 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P2622.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce P2622 est versée au dossier.
22 M. RUSSO : [interprétation] Je vous remercie. Est-ce que nous pouvons
23 afficher la pièce D965, s'il vous plaît ?
24 Q. Monsieur le Professeur, nous avons à l'écran, à présent, un plan
25 d'appui renseignement de la HV et la date de ce document est le 2 août
26 1995. Les Unités de Reconnaissance électronique se voient instruire à
27 recueillir les éléments de renseignements sur la composition et le
28 déploiement de l'ennemi.
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1 Alors, vous voyez en haut, à gauche, il y a l'approbation au nom du général
2 Gotovina.
3 Voyons un petit peu ce qui est mentionné : recueil d'éléments du
4 renseignement sur la puissance de l'ennemi et son organisation.
5 M. RUSSO : [interprétation] Page suivante.
6 Q. S'il vous plaît, vous voyez les missions qui concernent surtout la
7 collecte des éléments d'information, le fait de repérer le mouvement de
8 l'ennemi.
9 M. RUSSO : [interprétation] Page suivante, s'il vous plaît.
10 Q. De nouveau, collecte d'éléments d'information, nouvelles locations,
11 positions des postes de commandement, les directions possibles des attaques
12 de l'ennemi.
13 M. RUSSO : [interprétation] Puis, la page suivante.
14 Q. De nouveau, des tâches portant sur la collecte d'éléments d'information
15 concernant l'ennemi éventuel, dispositions de combat. Surveiller également
16 les pertes essuyées par l'ennemi, ses effectifs, équipement technique.
17 M. RUSSO : [interprétation] Page suivante.
18 Q. Là encore, quelles sont -- quelles sont les instructions données ?
19 M. RUSSO : [interprétation] Page suivante.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Juste un instant.
21 M. RUSSO : [interprétation] Est-ce que vous pouvez revenir en arrière, s'il
22 vous plaît.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] OK.
24 M. RUSSO : [interprétation]
25 Q. Monsieur le Professeur, vous voyez, sur la base de ce document, ce plan
26 d'appui renseignement; vous voyez qu'il n'y a pas d'ordre visant à se
27 servir de moyens électroniques afin de collecter les éléments d'information
28 sur la population civile. Vous êtes d'accord avec moi que c'est quelque
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1 chose qui peut être fait en se servant de moyens électroniques ? Etes-vous
2 d'accord ?
3 R. Comme je l'ai déjà dit, cela fait longtemps que je n'ai plus travaillé
4 dans le domaine du renseignement. Je n'ai plus rédigé d'annexe aux ordres
5 d'opérations sur le plan du renseignement depuis très longtemps.
6 Alors, la collecte d'éléments d'information sur la population civile
7 fait partie des activités du S5 ou S6, donc affaires civiles qui --
8 maintenant, quant à savoir si l'officier chargé des affaires civiles
9 donnera la suggestion aux officiers chargés d'opérations et à l'officier du
10 renseignement de recueillir ces informations ou non, ça, je ne le sais pas.
11 Mais il y a un lien très clair ici, entre ce qu'on appellerait la
12 liste de priorités du commandant, à savoir l'emporter sur l'ennemi en
13 profondeur et empêcher l'ennemi de se regrouper et d'apporter des renforts,
14 donc isoler les forces de l'ennemi de toute -- et aussi les missions
15 données en moyens électroniques.
16 Donc, de toute évidence, ici, il n'est pas demandé de surveiller
17 l'activité des civils, mais je ne sais pas si cette station d'écoute est
18 nécessairement un moyen idéal pour recueillir ces informations.
19 Q. Professeur, non, je ne veux pas -- je ne veux pas que vous tiriez des
20 conclusions sur la base du fait qu'il n'y a pas d'instruction demandant de
21 collecter les éléments d'information sur la population civile. Je veux
22 simplement votre confirmation au sujet de la fonction de ces moyens.
23 R. Supposons qu'il y a quelque chose à intercepter qui révélerait le
24 déploiement au mouvement des moyens civils et qu'à ce moment-là, vous
25 pourriez utiliser un moyen d'interception. C'est tout comme l'artillerie,
26 vous avez un nombre limité de moyens à votre disposition. Vous avez une
27 certaine probabilité de recueillir les éléments d'information valables et
28 vous concentrez ces moyens limités pour obtenir les meilleures
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1 informations. Par exemple, imaginons qu'on apprenne qu'il y a un convoi qui
2 évacue des civils, et le service du Renseignement sait que ce convoi se
3 sert du UHF pour informer, par exemple, le QG des Nations Unies. Je ne sais
4 pas. Théoriquement, ce serait un bon moyen pour savoir où est le convoi.
5 Mais il y a des facteurs multiples et c'est ça qui va vous inciter à
6 vous servir de vos moyens électroniques pour ces finalités ou pas. Dans de
7 bonnes circonstances oui, on peut le faire.
8 Q. Donc, M. le Professeur, ce document que nous avons à l'écran, ce n'est
9 pas quelque chose dont vous vous êtes servi ?
10 R. Je ne l'ai pas examiné.
11 Q. Donc nous avons vu quelques éléments de preuve de capacité électronique
12 qu'avait le général Gotovina à sa disposition. Est-ce que vous êtes
13 d'accord pour dire que si vous aviez eu le temps de vous pencher sur ces
14 éléments dans le contexte général, que ceci aurait peut-être une incidence
15 sur vos conclusions ?
16 R. Peut-être. Même si sur la base de ce que j'ai vu, il n'y aurait pas eu
17 de modifications significatives. Si vous voulez que je vous dise pourquoi,
18 je vais vous le dire.
19 Q. Mais si vous avez déjà, déjà compris -- enfin, si vous savez déjà,
20 j'aimerais l'entendre.
21 R. Vous devez savoir ce que c'est les moyens de brouillage, et ce que cela
22 fait, quel rôle cela joue lorsqu'il s'agit de prendre pour cible tel ou tel
23 objectif. Donc ce n'est pas différent d'un projectile cinétique
24 d'artillerie. Donc c'est un moyen qui est à la disposition du commandant
25 qui produit un certain effet, un certain résultat.
26 Mais il y a aussi des défauts. Vous devez par exemple diffuser des
27 fréquences très puissantes au dessus des fréquences pour couvrir les
28 fréquences de l'ennemi. Donc l'ennemi qui anticipe votre brouillage, il va
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1 éviter d'utiliser tel ou tel canal. Donc en d'autres mots, vous choisissez
2 votre radio, on vous brouille et puis vous avez une autre fréquence pour
3 vous déplacer sur cette autre fréquence pour vous protéger.
4 Donc aussi l'ennemi peut déterminer votre position lorsqu'il y a
5 brouillage. Donc il faut savoir s'en servir à bon escient, au bon moment,
6 et lorsque pour un bon objectif.
7 Donc la discussion sur les moyens électroniques, je pense avaient à
8 voir avec l'attaque d'artillerie sur le QG du Corps d'armée. Donc une cible
9 C3I d'importance primordiale, et d'autres cibles, et si vous avez, par
10 exemple, le brouillage, ça peut être efficace pendant une certaine période
11 de temps, mais vous pouvez vous exposer à une contre attaque, et l'ennemi
12 peut aussi atténuer les résultats de ce brouillage.
13 Prenons, par exemple, une opération qui est prévu par le commandant en
14 profondeur, j'en ai parlé hier. Donc j'ai parlé de cet effet de
15 prédominance entière, sur la totalité de l'échelle. Alors, vous avez la
16 capacité C3I, mais si vous isolez les forces, si elles ont la sensation
17 qu'elles ne peuvent être en communication avec personne, vous augmentez
18 leur sentiment d'isolement, et cela vous donne plus de marge d'initiative.
19 Donc les moyens de brouillage limité doivent être utilisés à bon
20 escient. Donc lorsque vous voulez par exemple apporter un appui, un assaut,
21 une attaque tactique terrestre.
22 Donc, par exemple, pour aveugler les positions de commandement avancé
23 ou pour réduire l'importance des postes arrières.
24 Q. Vous avez parlé de moyens de brouillage limité. Est-ce qu'on vous a dit
25 qu'il avait des moyens limités ? Maintenant je vous ai montré quels moyens
26 il avait à sa disposition. Est-ce que vous maintenez votre qualification ?
27 R. Oui, tout à fait puisque je me fonde sur mon expérience. Vous avez un
28 groupe de combat au niveau d'une brigade, normalement ils auraient au moins
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1 une compagnie sinon un bataillon de moyens électroniques. Donc ils auraient
2 deux ou trois appareils de brouillage à leur disposition.
3 Q. Mais l'efficacité de vos capacités de brouillage, et bien entendu vos
4 effectifs. Est-ce que vous avez une section, une brigade, mais tout cela
5 est relatif par rapport aux effectifs de l'ennemi que vous avez face à vous
6 et par rapport à la zone ?
7 R. Oui, bien entendu. Il y a la question de redondance aussi : combien de
8 réseaux à l'ennemi ? Vous voyez, par exemple, à l'annexe, à l'annexe qui
9 concerne la surveillance qui se poralise [phon] sur les réseaux de
10 communication multiple de l'ennemi.
11 Donc, par exemple, lorsque j'étais officier du renseignement,
12 lorsqu'il y avait brouillage de la radio du commandant, et lorsque c'était
13 au niveau d'une Unité légère d'Infanterie, le commandant prenait ma radio
14 pour communiquer. Donc vous avez un réseau, donc il y a des réseaux
15 multiples. Et si vous essayer d'aveugler la fonction commandement et de
16 contrôle du commandant, vous devez utiliser vos appareils de brouillage
17 exclusivement, non seulement pour réduire sa capacité, mais aussi pour
18 rendre inefficace les autres appareils.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Rousseau, je regarde l'heure.
20 M. RUSSO : [interprétation] Oui.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un petit peu technique de procédure qui
22 n'a rien à voir avec la déposition.
23 Nous allons faire une pause, une fois qu'on aura escorté le témoin et
24 nous allons reprendre dans 20 minutes.
25 [Le témoin quitte la barre]
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc nous avons parlé du début de
27 l'affaire Cermak, j'ai soulevé cette question même avant d'avoir vu cette
28 écriture où il y a plusieurs inquiétudes qui sont exprimées.
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1 Donc la question est de savoir si on en aura terminé la déposition du
2 témoin de la semaine prochaine. Donc est-ce que vendredi on peut s'attendre
3 à ce que ce soit terminé ?
4 M. KEHOE : [interprétation] Oui, c'est ce que je pense, je pense qu'on aura
5 terminé.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Donc on aura peut-être besoin
7 d'une petite Conférence de mise en état, et peut-être qu'on pourra trouver
8 un moment la semaine prochaine pour être efficace, peut-être à la fin de la
9 semaine ou peut-être non. Mais ce ne serait pas bien de commencer la
10 Défense Cermak puisqu'il faut savoir que nous avons ce week-end prolongé,
11 nous avons le jour férié onusien le 21 septembre.
12 Donc est-ce que la Défense Cermak pourrait prévoir de commencer le 22
13 septembre ou un jour plus tard ? Donc on devrait peut-être prévoir de
14 commencer le 22 septembre, à moins que cela vous pose de problèmes.
15 M. CAYLEY : [interprétation] Non, non, cela nous convient tout à fait, nous
16 serons prêt à commencer le 22 septembre.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a juste une légère incertitude
18 quant au témoignage de ce témoin. Est-ce qu'on pourra le terminer vendredi
19 ?
20 M. CAYLEY : [interprétation] Oui, tout à fait.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je demande aux parties de voir si nous
22 pouvons terminer la déposition du dernier témoin de la Défense Gotovina, de
23 telle manière qu'on ne déborde pas sur la semaine du 21, 22.
24 M. KEHOE : [interprétation] Oui, juste un point, un problème de traduction
25 que Me Misetic voudrait évoquer cela. C'est quelque chose qui s'est
26 présenté lors de la dernière audience.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Misetic.
28 M. MISETIC : [interprétation] C'est un détail. Je pense que ce serait une
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1 bonne chose que l'on puisse afficher la pièce à l'écran, voir la ligne 9,
2 voir la dernière colonne, D965, d'après ce qu'on me dit. Il faudra corriger
3 ce document --
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quelle est la page ?
5 M. MISETIC : [interprétation] C'est ce que nous voyons à l'écran --
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
7 M. MISETIC : [interprétation] -- l'entrée au point 9.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
9 M. MISETIC : [interprétation] La dernière colonne, "PZO" comme "Brigade
10 d'Artillerie et de Roquette," mais en fait c'est "Défense antiaérienne,"
11 c'est ce qu'il conviendrait de mettre.
12 Donc nous téléchargerons la version correcte dans le prétoire électronique.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Cette traduction elle provient
14 d'où, qui est l'auteur de la traduction… vous dites que vous allez
15 télécharger une traduction différente. Bien sûr, il faudra vérifier si on
16 peut --
17 M. MISETIC : [aucune interprétation]
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- autoriser.
19 M. MISETIC : [interprétation] Je pense que la traduction correcte c'est
20 "Défense antiaérienne."
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je suppose que vous allez vérifier
22 avec --
23 M. MISETIC : [interprétation] Oui.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- les traducteurs qui ont la compétence
25 dans ce domaine qui pourront confirmer.
26 M. MISETIC : [interprétation] Oui, tout à fait.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons faire une pause, et nous
28 allons reprendre à 12 heures 50.
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1 --- L'audience est suspendue à 12 heures 31.
2 [Le témoin vient à la barre]
3 --- L'audience est reprise à 12 heures 54.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, vous allez poursuivre.
5 M. RUSSO : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je vous remercie.
6 Q. Professeur, à la page 25, vous avez dit que le général Gotovina n'avait
7 que très peu de moyens en termes d'hélicoptères ?
8 R. Oui, effectivement.
9 Q. Est-ce que vous pensiez que c'était un élément important quand il
10 s'agissait de déterminer si les choix d'armes et d'artillerie que M.
11 Gotovina a utilisé pour tirer sur Knin étaient raisonnables ou non ?
12 R. Oui, vous devez prendre en compte ces capacités globales.
13 Q. Quand vous avez vérifié donc les informations qui vous ont été
14 fournies, je n'ai pas d'indication comme quoi vous ayez eu accès aux
15 documents parlant de ces moyens en termes d'hélicoptères ou aviation.
16 Pourtant vous en tirez une conclusion ?
17 R. Je pense que, là, il s'agit d'une question d'ordre générale que j'ai dû
18 poser quand il s'agissait de savoir quels étaient donc les moyens dont
19 disposaient les forces des deux côtés. C'est peut-être aussi quelque chose
20 qui figure dans le rapport de M. Konings.
21 M. RUSSO : [interprétation] Pourrions-nous avoir la pièce 65 ter 7354 ?
22 Q. Professeur, il s'agit ici d'un document d'analyse qui porte sur
23 l'utilisation de forces aériennes de l'opération Tempête. C'est un document
24 assez long et je ne vais pas vous demander de tout lire, mais vous pourriez
25 peut-être parcourir avec moi un certain nombre de pages, notamment la page
26 6 en anglais. Je pense que c'est aussi la page 6 en B/C/S.
27 Donc on peut voir sous 4, quelles étaient les forces dont disposaient les
28 forces croates. On peut voir qu'il y avait 17 avions de combat et cinq
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1 hélicoptères de combat. Alors la page suivante en bas, la dernière phrase
2 où l'on peut lire :
3 "Nous avons créé un poste de commandement avancé de la force
4 antiaérienne croate pour chaque district militaire, chaque poste de
5 commandement de ces districts militaires, avec pour mission d'utiliser ces
6 forces de façon raisonnable."
7 Q. Est-ce que je peux examiner à nouveau la page précédente, s'il vous
8 plaît ?
9 R. Merci.
10 Q. D'accord.
11 R. C'est beau. C'est bon, j'ai vérifié. Merci.
12 M. RUSSO : [interprétation] Pourrions-nous passer à la page 16 en anglais
13 et en B/C/S ?
14 Q. Là, vous pouvez voir l'avant-dernier paragraphe en bas de la page, on
15 peut lire 14,5 % de vols étaient effectués conformément au plan et 85,5 %
16 des vols ont été effectués sur demande.
17 Donc, Professeur, est-ce que vous avez eu cette information avant de
18 tirer vos conclusions ?
19 R. Non.
20 Q. Quand on parle des MiG-21, les -- ligne 21, ce sont les avions de
21 combat ?
22 R. Oui. Ils peuvent être utilisés aussi bien dans les combats aériens, ou
23 bien air à la terre.
24 Q. Très bien.
25 M. RUSSO : [interprétation] Maintenant je vais demander que ce document
26 soit versé au dossier.
27 M. KEHOE : [interprétation] Il n'y a pas d'objection.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.
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1 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P2623.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui vient d'être versée au dossier.
3 M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Maintenant je
4 vais demander que l'on examine la pièce 65 ter 7361.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, est-il possible d'avoir
6 un stylo ?
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous en avons à votre disposition.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais faire en sorte de vous le retourner,
9 Monsieur le Président.
10 M. RUSSO : [interprétation]
11 Q. Sur votre écran, on voit un extrait du livre du général Gotovina. La
12 section intitulée - celle qui nous intéresse - c'est "L'appui de la force
13 aérienne." C'est le deuxième paragraphe qui m'intéresse, où on peut lire :
14 "Au cours des opérations Ljeto 95, Tempête, Maestral et le mouvement du
15 sud, le commandement du district militaire de Split a reçu les hélicoptères
16 Mi-8, MTV 1, Mi-24V ainsi que des avions MiG 21 bis."
17 A la fin, on peut lire aussi :
18 "Les avions MiG 21 ont été les plus souvent utilisés pour protéger les
19 hélicoptères Mi-24V au cours des opérations Eté 95, Tempête et Maestral;
20 cependant, deux avions agissaient sur demande au cours de l'opération Eté
21 95 et opération Tempête. Ils étaient extrêmement efficaces quand il
22 s'agissait d'agir sur les colonnes de l'ennemi et sur les installations au
23 niveau de Biovcino Selo, Ocestovo et Drvar."
24 Professeur, est-ce que vous savez que le général Gotovina disposait de deux
25 avions MiG 21 dont il pouvait disposer sur demande avant de tirer vos
26 conclusions en disant que ces ressources étaient extrêmement limitées ?
27 R. Je ne pense pas.
28 Q. En ce qui concerne l'utilisation des MiG 21 à Ocestovo, ce qui est
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1 mentionné dans le livre du général Gotovina, est-ce que vous savez à quelle
2 proximité se trouve cet endroit de Knin ?
3 R. Non.
4 M. RUSSO : [interprétation] Je demande que cette pièce soit versée au
5 dossier.
6 M. KEHOE : [interprétation] Pas d'objection.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ceci deviendra la pièce P2624.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui vient d'être versée au dossier.
10 M. RUSSO : [interprétation] Merci.
11 Je vais demander à présent que l'on examine la pièce 65 ter 7353.
12 Q. Ce que vous voyez ici, Monsieur, c'est le rapport des forces aériennes
13 croates en date du 4 août 1995. Comme vous pouvez le voir au deuxième
14 paragraphe, on peut voir que 13 MiG 21, donc des avions de combat, ont été
15 attribués à l'opération. Vous pouvez voir aussi quelles étaient les
16 missions de l'opération. Entre autres, il s'agissait de détruire le poste
17 de relais de Celavac, et ensuite on voit "éliminé" ou "détruit."
18 Est-ce que vous le saviez -- est-ce que vous étiez au courant de cela ?
19 R. Non.
20 Q. Est-ce que vous savez quelle est l'importance de ce poste de relais
21 radio de Celavac par rapport au système de communication de l'ARSK dans la
22 zone de Knin ?
23 R. Non.
24 M. RUSSO : [interprétation] Je demande que cette pièce soit versée au
25 dossier.
26 M. KEHOE : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.
28 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ceci deviendra la
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1 pièce P2625.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui vient d'être versée au dossier ?
3 Monsieur Russo, j'ai quelques inquiétudes quant à la vitesse de vos
4 paroles, et c'est vraiment vous qui parlez trop vite.
5 M. RUSSO : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, je vous
6 présente mes excuses.
7 Q. Maintenant nous revenons sur l'ordre d'attaque du général Gotovina,
8 P1125.
9 M. RUSSO : [interprétation] Je vais demander qu'on examine la page 13 en
10 anglais, la page 12 en B/C/S. Je regarde la section 6, qui figure à la
11 treizième page en anglais. En B/C/S, je pense que nous avons la bonne page,
12 mais en revanche, je ne vois pas la page correspondante en anglais. Voilà,
13 nous y sommes.
14 Q. On y parle des forces aériennes croates, le général Gotovina donne
15 l'ordre :
16 "Qu'avec les avions autorisés pour les combats (MiG 21), les
17 hélicoptères de combat (Mi-24) et les hélicoptères de transport (Mi-8),
18 procédez à l'appui aérien sur les axes de l'attaque en accord avec le plan
19 d'utilisation et suite à l'ordre du commandant du Groupe opérationnel."
20 Est-ce que vous avez pris en compte ce document avant de dire que le
21 général Gotovina n'avait que très peu d'hélicoptères à sa disposition ?
22 R. Non. J'ai dit que c'était au fond assez limité. Je savais qu'il avait
23 quelques hélicoptères.
24 Q. Merci.
25 M. RUSSO : [interprétation] Pouvons-nous à présent voir la pièce P71.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Misetic, la traduction de ce
27 document parle de l'utilisation des forces antiaériennes où l'on voit le
28 mot "PZO," M. Russo vient donc de se mettre d'accord avec votre proposition
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1 de traduction puisque c'est comme cela qu'il a traduit ce sigle.
2 M. RUSSO : [interprétation]
3 Q. Professeur, ici nous avons le journal des opérations du district
4 militaire de Split. Je vais vous demander d'examiner la page 79 en anglais,
5 c'est la page 42 en B/C/S. Ce qui m'intéresse c'est ce qui figure au
6 paragraphe correspondant à 9 heures 27 du matin. Sur l'écran de droite,
7 c'est la page 42.
8 Vous allez voir que le général Gotovina donne l'ordre de "faire voler
9 immédiatement nos avions MiG." A 9 heures 25 -- à 9 heures 55, il est dit
10 que :
11 "Les MiG sont en l'air et ils attendent les ordres à 9 heures 55."
12 Il a indiqué aussi que les hélicoptères sont en train d'évacuer les
13 blessés ou tués.
14 Ensuite page 84 en anglais, et la page 47 en B/C/S. Je cherche ce qui
15 correspond à 9 heures 25 - c'est la page 47 en B/C/S - donc 9 heures 25, où
16 le général de brigade Ademi donne l'ordre aux avions de tirer sur la ligne
17 de chars de l'ennemi au niveau de Stara Straza. Il s'agit de la date du 5
18 août 1995.
19 Savez-vous quelle est la distance qui sépare Stara Straza et Knin ?
20 R. Non.
21 Q. Est-ce que vous avez examiné ce document ?
22 R. Non, je ne l'ai jamais vu auparavant.
23 Q. [aucune interprétation]
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Souhaitez-vous le verser ?
25 M. RUSSO : [aucune interprétation]
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Moi, je voudrais tout de même
27 demander que l'on revienne à la page 42 de ce document.
28 Monsieur Corn, tout à l'heure nous avons parlé de la guerre électronique.
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1 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois à 9 heures 50 quelque chose qui
3 est écrit. On y mentionne justement : "La guerre électronique." En fait, on
4 parle de l'avion de l'ennemi qui va tirer sur Grahovo.
5 Ensuite, entre parenthèses, on voit : "La guerre électronique."
6 L'abréviation pour cela.
7 Alors vous nous avez expliqué dans quelle mesure l'équipement de guerre
8 électronique, dont disposait cette troupe, était insignifiant, si j'ose
9 dire; est-ce que vous pourrez nous dire ce que vous pensez de ce qui est
10 écrit ici ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur, vous pouvez interpréter cela de
12 différentes façons. D'un coté, vous pouvez dire que l'information vient
13 justement de moyens électroniques, puisque, là, il s'agit de prédire
14 quelque chose qui va se passer à l'avenir, qui vous se produire à l'avenir.
15 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Donc je pense que c'est tout à fait possible
17 qu'ils anticipent que leur -- et il y a aussi l'autre possibilité, à savoir
18 qu'ils anticipent que justement leurs moyens de guerre électronique vont
19 faire l'objet d'une attaque par l'avion de l'ennemi.
20 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
21 LE TÉMOIN : [interprétation] La troisième possibilité c'est qu'ils
22 planifient d'utiliser la guerre électronique justement pour empêcher
23 l'attaque de l'ennemi.
24 Donc nous avons trois possibilités, là.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Je vous remercie. C'est vrai que
26 cela ne vous aide pas.
27 Vous pouvez poursuivre, Monsieur Russo.
28 M. RUSSO : [interprétation]
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1 Q. Professeur, je regarde les informations que je vous ai montrées, et
2 est-ce que vous êtes d'accord pour dire que c'est pertinent quand on parle
3 de moyens dont disposait le général Gotovina ?
4 R. On ne peut pas dire qu'il y en avait ou qu'il y en n'avait pas. Il en
5 avait à sa disposition et c'est ça le mot qui est important là. Donc
6 apparemment, là, il s'agit des moyens d'appui aérien qui sont un élément
7 importants en sa faveur. Il semble aussi clair que le général a compris
8 qu'il est important de pouvoir répondre rapidement quand il s'agit donc de
9 ce combat rapproché et qu'il est préoccupé devant la mobilité de l'ennemi,
10 devant ses capacités de manœuvre, et il essaie d'agir là-dessus.
11 Donc évidemment, qu'il savait qu'il avait à sa disposition cet appui
12 aérien rapproché s'il en avait besoin.
13 Mais le plus important ici dans ces documents c'est le pourcentage
14 que l'on voit, à savoir 14,5 % d'utilisation pré planifiée; 85,5 sur ordre.
15 Donc autrement dit, il a utilisé dans les combats rapprochés car il en
16 avait besoin. Il n'a pas utilisé contre les cibles pré planifiées et c'est
17 tout à fait logique puisqu'il essaie d'agir par rapport aux capacités de
18 manœuvre de la force de l'ennemi. Donc il répond tout simplement par
19 rapport à une situation qui se dévoile sous ses yeux.
20 Donc si vous regardez toutes les informations dont on dispose, je
21 suis d'accord pour dire qu'il s'agissait quand même de quelque chose qui
22 est assez limité, et je pense que c'est quelque chose qui est important par
23 rapport à ses capacités de manœuvre d'opérer et qu'il a agi conformément à
24 cela.
25 Q. [aucune interprétation]
26 M. KEHOE : [aucune interprétation]
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout d'abord, je suis la traduction en
28 français, et je vais demander à tout le monde de faire attention au débit,
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1 s'il vous plaît.
2 M. KEHOE : [interprétation] Je vous présente mes excuses. Mais si nous
3 allons passer à un autre sujet, je pense que le conseil du Procureur est
4 obligé en vertu de l'article 99(H) de nous dire quel est son argument par
5 rapport à l'utilisation des moyens, c'est-à-dire si le témoin le savait ou
6 s'il ne le savait pas.
7 M. RUSSO : [interprétation] Tout d'abord, il s'agit d'un article qui
8 concerne les témoins qui peuvent déposer ici. Il ne s'agit pas des
9 informations dont disposait le témoin. Donc il faudrait tout d'abord en
10 informer pour pouvoir lui demander son opinion.
11 M. KEHOE : [interprétation] Mais dans ce cas-là, le conseil n'aurait pas dû
12 lui poser des questions tout simplement.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais essayer de comprendre de quoi il
14 s'agit là.
15 Donc j'essaie de comprendre ce qui s'est passé au cours de la dernière
16 demi-heure, disons. Apparemment, M. Russo a présenté des éléments de preuve
17 au témoin, éléments de preuve qui n'avaient pas été pris en considération
18 par le témoin lorsqu'il s'est forgé son point de vue, et moi, je n'ai pas
19 eu l'impression que le témoin avait contredit les éléments à charge
20 présentés par l'Accusation donc. Alors peu importe qu'il s'agit d'éléments
21 de preuve qui étayent la thèse de l'Accusation ou qui visent à démontrer
22 qu'il y avait eu des documents assez limités qui ont été mis à la
23 disposition de ce témoin expert. Je ne sais pas lequel de ces deux
24 postulats est le juste. Mais le fait est qu'il existe une obligation pour
25 l'Accusation vis-à-vis d'un témoin, si la déposition du témoin contredit la
26 thèse de l'Accusation, s'il me semble avoir bien compris et interprété
27 l'article 90(H) petit (ii).
28 Alors, Maître Kehoe, j'aimerais savoir où et quand ce témoin a
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1 contredit dans le cadre de sa déposition, j'entends, la thèse de
2 l'Accusation.
3 M. KEHOE : [interprétation] Premièrement, Monsieur le Président, si vous
4 prenez l'article 90(H)(ii), cela ne se limite pas ou cet article ne se
5 limite pas au témoin qui témoignage sur le fait.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela n'a pas été dit par l'Accusation.
7 M. KEHOE : [interprétation] Oui, cela a été soulevé par l'Accusation. Il a
8 dit que cela se limitait au témoin qui témoigne sur le fait.
9 Si vous perdez de répondre, je vous dirais que cela se limite aux témoins
10 qui sont en mesure de déposer sur un point ayant trait à sa cause. Et --
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
12 M. RUSSO : [interprétation] Ce que je vous dis, en fait, c'est qu'il s'agit
13 d'éléments de preuve qui sont des éléments de preuve factuels. Il ne s'agit
14 pas d'une opinion juridique qui est demandée.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, faisons abstraction de cela pour
16 le moment.
17 Maître Kehoe.
18 M. KEHOE : [interprétation] Deuxièmement, le -- alors, bien entendu,
19 l'Accusation va indiquer que l'utilisation de l'artillerie faite par le
20 général Gotovina n'est pas -- n'a pas été faite à la suite d'un choix
21 judicieux. Ce n'est pas une utilisation raisonnable. C'est le point de vue
22 de l'Accusation. C'est sa thèse. En fait, donc, il aurait dû poser des
23 questions au niveau opérationnel et au niveau tactique et à propos du
24 théâtre des opérations.
25 Mais s'il -- si, au vu des éléments de preuve qui ont été présentés,
26 l'Accusation va indiquer que c'est ce qu'aurait dû faire le général
27 Gotovina, l'article 90(H) les oblige à indiquer ou à interroger un témoin
28 qui est en mesure de déposer sur un point et entrer à sa cause. Elle doit -
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1 - l'Accusation doit confronter le témoin aux éléments qui contredisent ces
2 déclarations, et donc il aurait dû demander si le général -- ou il aurait
3 dû dire que le général Gotovina aurait dû utiliser des avions, qu'il s'agit
4 d'avions fixes ou d'avions rotatifs, par opposition à l'artillerie. Si
5 c'est cela, c'est la question qu'il doit poser au professeur Corn, devant
6 cette Chambre.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais est-ce que cela est bien votre
8 point de vue, Monsieur Russo ? Est-ce que vous dites que cela aurait dû
9 être utilisé par opposition à l'artillerie ?
10 M. RUSSO : [interprétation] Ecoutez, nous ne sommes pas obligés de dire
11 quel va être notre argument final et définitif lors de notre réquisitoire.
12 Mais notre point de vue, c'est qu'il a utilisé son artillerie de façon qui
13 n'était pas raisonnable. C'est ce que nous indiquons au témoin et je pense
14 que le témoin est tout à fait conscient de notre point de vue.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Nous allons vérifier.
16 Etes-vous tout à fait conscient du fait que l'Accusation avance que
17 l'artillerie a été utilisée de façon irraisonnable pendant l'opération
18 Tempête ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, je comprends tout à fait que cela
20 est leur thèse. Alors, je ne peux pas m'empêcher de tirer des déductions --
21 ou de faire des déductions à partir de cela et de penser aux questions
22 relatives à la disponibilité des pièces qu'ils avaient l'intention
23 d'utiliser; ce qui renforce ma position et lamine la leur.
24 [La Chambre de première instance se concerte]
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre statue de la façon suivante :
26 L'Accusation a respecté ses obligations au titre de l'article 90(H)(ii).
27 Poursuivez, Monsieur Russo.
28 M. RUSSO : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je
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1 voulais juste préciser quelque chose à propos de ces questions que j'ai
2 posées. Ces questions ont été posées, entre autres, pour mettre en brèche,
3 en quelque sorte, l'affirmation du témoin dans son rapport, affirmation
4 suivant laquelle le général Gotovina disposait de matériel et d'équipement
5 extrêmement limité. Et je pense que le témoin est informé, en fait, de
6 cette question.
7 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
8 M. KEHOE : [interprétation] Mais cela fait partie intégrante de la thèse.
9 Mais il ne faut pas oublier ce qui est, en fait, corollaire par rapport à
10 cela. Si l'utilisation d'avions fixes ou rotatifs est quelque chose qui
11 aurait dû être utilisée parce que --
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, Maître Kehoe, je n'ai pas
13 invité M. Russo à expliquer ce qu'il avait fait devant la Chambre.
14 Alors, bien entendu, je vais vous autoriser à terminer votre phrase,
15 et par ailleurs, la Chambre ne souhaiterait surtout pas un long débat à
16 propos de la décision qu'elle vient de rendre.
17 M. KEHOE : [interprétation] Fondamentalement, en fait -- bon, je ne vais
18 pas revenir à la charge. J'ai tout à fait compris ce que vous vouliez dire.
19 Et je m'excuse si je n'ai pas donné cette impression.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, je ne vous demande pas
21 quelle est votre remarque suivante, mais votre question suivante.
22 M. RUSSO : [interprétation] Oui, Monsieur.
23 Q. Si vous prenez votre addendum, section 1, dernier paragraphe, page 25,
24 voilà ce que vous dites et je cite :
25 "Il semble clair qu'au vu de la doctrine METT-T-C, le général Gotovina
26 aurait dû prendre en considération l'utilisation -- ou aurait dû utiliser
27 une attaque terrestre pour détruire ou perturber le commandement, contrôle,
28 communications et renseignements, le QG de l'ennemi à Knin, mais que cela
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1 n'était pas véritablement une option viable."
2 Alors, j'aimerais savoir sur quoi vous vous fondez pour présenter ce
3 point de vue.
4 R. Premièrement, il s'agit d'une doctrine ou d'un principe qui est
5 quasiment universel, un principe de la doctrine, à savoir il faut éviter
6 quasiment, coûte que coûte, des combats terrestres dans un environnement
7 urbain, des zones habitées; cela, il faut l'éviter. Je pense que cela est
8 compris par la plupart des forces armées. C'est vraiment une solution de
9 tout dernier recours parce qu'en fait, l'environnement urbain est tel qu'il
10 minimise votre aptitude à manœuvrer et cela ne vous permet pas d'avoir une
11 vision d'ensemble claire du champ de bataille.
12 Si vous vous souvenez, hier, j'avais insisté sur un fait, j'avais dit
13 qu'un commandant qui exécute une opération a pour objectif prioritaire,
14 l'initiative -- il doit conserver l'initiative, conserver l'élan pris et
15 c'est lui, en fait, qui donne le ton et qui est responsable de la cadence
16 et du rythme de la bataille. Du point de vue historique, d'ailleurs, nous
17 voyons que cela -- qu'il y a, en fait, des exemples universels de la
18 brutalité des combats à pied dans les zones habitées, je pense à la
19 bataille de Stalingrad, par exemple, vous voyez, c'est une anecdote
20 intéressante, le débat entre le général de Gaulle et Eisenhower : est-ce
21 que Paris aurait dû être libérée ou contournée, alors qu'Eisenhower était
22 absolument catégorique et disait qu'il ne voulait absolument pas se lancer
23 dans des combats de rue dans Paris à cause de l'impact que cela aurait
24 représenté. Nous savons qu'il n'a pas, en fait, remporté -- qu'il n'a pas
25 pu prouver son point de vue et qu'il a été le grand perdant dans cet
26 argument. Donc ça c'est véritablement quelque chose -- c'est un axiome de
27 doctrine.
28 Donc, un commandant qui est prudent et qui se trouve à cette
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1 question, est-ce qu'il faut détruire ou dégrader des objectifs militaires
2 qui se trouvent dans un terrain ou dans un contexte urbain doit répondre à
3 cette question ?
4 Puis, deuxièmement, il y a autre chose qui est très très clair. Les
5 efforts prioritaires déployés par le général visaient à détruire les
6 positions ennemies fixes. Ce qui est loin d'être une tâche aisée. C'est une
7 tâche qui est particulièrement périlleuse car un commandant préfère
8 toujours attaquer un ennemi dans le cadre d'un combat avec la mobilité que
9 cela représente par opposition à un ennemi qui se trouve investi dans des
10 positions fixes. Je pense que vous verrez que le général, en fait, a pris
11 en considération, de façon manifeste, cette priorité puisqu'il dit à ses
12 unités subordonnées de mener à bien -- ou plutôt, en fait, il se rend
13 compte que mener à bien un assaut, une attaque urbaine, au vu des
14 conditions, aurait, en fait, fait en sorte que l'effort prioritaire se
15 serait déplacé et n'aurait plus été un effort tactique, mais un effort
16 d'appui, dans le cadre de l'attaque parce que vous n'aurez pas -- il
17 n'aurait pas pu le faire très facilement.
18 Il y a un autre facteur qu'il ne faut pas perdre de vue. Il faut -- il ne
19 faut pas oublier le résultat qu'il compte obtenir pour bien mettre en place
20 ces conditions débouchant sur le succès de ses efforts. Ce qu'il voulait,
21 ce n'était pas capturer le QG. Il ne voulait pas le détruire, ce QG. Il
22 voulait perturber le mouvement de ce QG. Il voulait perturber tous les
23 phénomènes ou tous les -- tous les phénomènes d'approvisionnement et il
24 voulait en sus créer un sentiment d'isolement pour les forces ennemies se
25 trouvant au niveau au C3I, au lieu de l'attaque. Donc, c'est ce que j'en
26 déduis, d'après ce que -- tout ce que je sais de cette attaque.
27 Donc, s'il pensait que pour ses efforts soient couronnés de succès au
28 niveau de l'opération, il fallait qu'il capture l'immeuble du QG, cette --
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1 lorsque vous pensez au METT-T-C, il aurait, en fait, procédé à une analyse
2 différente, Parce qu'il n'y a que quelques pièces ou quelques éléments du
3 matériel qui vous permettent de capturer des personnes. Mais si vous
4 envisagez la viabilité d'une attaque terrestre dans Knin, il ne faut pas
5 oublier ce qu'il souhaitait obtenir dans le cadre de cette mission, et il
6 ne faut pas non plus oublier que les opérations militaires qui sont menées
7 par des soldats à pied sont considérées comme extrêmement dangereuses. Au
8 vu de tous ces facteurs, je pense qu'il est très, très, très improbable
9 qu'il ait considéré cette possibilité d'action comme une possibilité
10 viable.
11 Q. Monsieur le Professeur, je pense que nous n'avons peut-être pas la même
12 définition du terme "viable." Mais avant que nous ne nous penchions sur
13 cette question, est-ce que vous avez compris que l'un des objectifs de
14 l'opération Tempête n'était pas de saisir ou de capturer la ville de Knin ?
15 R. Non, non, non, non. J'avais compris que l'objectif prioritaire de
16 l'opération Tempête était de faire fuir les forces ennemies de cette zone
17 et de capturer donc le QG qui se trouvait à Knin. Ça c'était l'objectif
18 stratégique. Alors le général Gotovina a fait ce qu'un commandant
19 opérationnel est censé faire, il a converti ses objectifs stratégiques en
20 une action opérationnelle. Il a -- et pour lui la priorité était de vaincre
21 l'ennemi qui se trouvait sur des positions défensives, l'ennemi qui
22 protégeait ce secteur. Je suppose en fait que ce qui était supposé c'était
23 qu'une fois que les défenses de l'ennemi étaient mises à mal, et ce, sur
24 toute leur profondeur, il aurait été facile de capturer Knin. Donc je ne
25 vous suggère pas qu'il s'est rendu compte qu'il aurait pu capturer et
26 contrôler Knin, mais ce que je suggère c'est que cela n'était pas forcément
27 l'objectif premier de cette opération.
28 Q. Donc vous dites qu'il ne s'agissait pas d'une option viable et peut-
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1 être que votre définition du terme viable n'est pas la même que la mienne
2 parce qu'en ce qui me concerne lorsque j'utilise le terme "viable," cela
3 signifie c'est quelque chose que vous pouvez faire.
4 R. Oui, la possibilité est une des composantes de la viabilité.
5 Q. Lorsque vous dites que ce n'est pas une option viable d'après votre
6 avant-dernière réponse, je suppose que même si cela était impossible ce que
7 vous n'avez pas dit, de toute façon cela n'était pas souhaitable; c'est
8 bien cela ?
9 R. Non, non, je pense que comme vous dites ce n'était pas conseiller, non,
10 cela peut induire en erreur. Parce que dans un premier temps, je suppose
11 que cela était possible. Si le général avait décidé que l'effort
12 prioritaire de son corps consistait à capturer la ville, je pense que vous
13 auriez vu des manœuvres tout à fait différentes, vous auriez vu en fait que
14 les unités subordonnées auraient été utilisées de façon différente. Donc ce
15 que j'entends lorsque je dis que ce n'est pas viable, c'est que dans le
16 cadre de tous les efforts qu'il devait faire et dans ce contexte, il aurait
17 fallu qu'il engage certains -- ou plutôt, pour être plus clair, il aurait
18 pu prévoir, et ce de façon assez raisonnable, que cela aurait requis de la
19 part de son matériel un engagement qui aurait été tel qu'il n'aurait pas pu
20 le concentrer pour avoir ces tactiques au niveau des positions défensives
21 de l'ennemi.
22 Puis un autre aspect pour ce qui est de l'utilisation de ce terme
23 "viable." L'une des raisons pour lesquelles les opérations de fantassins
24 sur terrain urbain n'est pas très bien considérée, c'est parce que
25 justement les espaces des champs de bataille ne peuvent pas être prévoir et
26 lorsque l'on prévoit la cadence d'une bataille, cela a un rapport direct
27 avec le rythme, avec les initiatives qui peuvent être prises et à quel
28 rythme. Donc si le général Gotovina en fait c'était dit : est-ce que je
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1 peux prendre Knin, capturer Knin avec un bataillon ? S'il engage ce
2 bataillon, il le fait en sachant pertinemment qu'il ne peut absolument pas
3 prévoir si ce bataillon pourra accomplir sa mission de façon satisfaisante.
4 Il peut bien entendu nourrir des espoirs à ce sujet. Mais ce n'est, ce
5 n'est pas véritablement une analyse rationnelle des forces qui doit être
6 menée à bien par un commandant sur un terrain ouvert, ou même contraint à
7 une position ennemie fixe.
8 Et d'ailleurs, l'histoire le prouve cela, car le problème pour le
9 commandant c'est qu'une fois qu'il a engagé une force pour un objectif
10 donné, cette force elle peut être utilisée pour ce faire. Il ne peut pas
11 l'utiliser pour autre chose. Et il ne faut jamais envoyer des renforts
12 lorsqu'il y a échec; ça c'est un autre aspect de la doctrine militaire, de
13 la doctrine des opérations militaires. Parce que le problème avec les
14 terrains urbains, c'est qu'en fait vous ne pouvez pas prévoir des renforts,
15 du fait de l'imprévisibilité de ce type d'opération. C'est pour cela que
16 les commandants sont toujours, on conseille toujours aux commandants
17 d'essayer d'envisager d'autres méthodes pour essayer de capturer des
18 positions ennemies dans un environnement urbain.
19 Q. Avant d'examiner en profondeur les possibilités d'une attaque terrestre
20 sur Knin, vous nous dites si le général Gotovina a apprécié, par exemple,
21 est-ce qu'il pouvait prendre Knin avec un bataillon ? Est-ce que vous savez
22 quelles étaient l'évaluation et l'appréciation du général Gotovina pour ce
23 qui est de la viabilité de sa capture de Knin avec ces hommes ?
24 R. Non. Parce que, d'après ce que j'ai vu dans les documents, d'après les
25 informations que j'ai vues, il a apprécié qu'il n'aille pas faire cela
26 l'effort, faire de cela l'effort prioritaire.
27 M. RUSSO : [interprétation] La pièce P461, s'il vous plaît. Prenons la page
28 10 en anglais, s'il vous plaît; la page 19 en B/C/S.
Page 21336
1 Q. Voyons où le général Gotovina dit -- ou pour commencer, ce sont les
2 transcriptions de Brioni, Monsieur le Professeur. Le général Gotovina dit,
3 je cite :
4 "Les forces en déplacement vers Knin se composent de 400 bons fantassins du
5 3e Bataillon, le 126e Régiment, tous sont de ce secteur, connaissent bien le
6 terrain sur le bout des doigts. Ils ont des raisons de combattre ici, et à
7 ce moment, il est difficile de les garder en laisse. Il y a le premier
8 Zdrug croate qui compte 300 hommes qui a fait ses preuves dans ce secteur,
9 et à ce stade quoi qu'il en soit, nous pouvons compter sur ces hommes
10 d'infanterie. Il y a des Unités spéciales du MUP croate et du MUP d'Herceg-
11 Bosna qui se compose de 350 combattants d'infanterie des combattants
12 excellents qui se sont distingués dans l'opération; en d'autres termes,
13 nous avons à peu près 1 000 bons militaires d'infanterie formés aux
14 opérations d'assaut, transfert rapide sur ce terrain accidenté, et nous
15 pouvons facilement capturer Knin sans aucun problème."
16 Alors, Monsieur le Professeur, si le général Gotovina arrive à l'évaluation
17 qu'il peut facilement et sans aucun problème de Knin avec ces mille hommes,
18 qu'est-ce qui vous permet de ne pas être d'accord avec lui ?
19 R. Oui, j'ai lu cela et je pense que c'est une citation importante.
20 Replaçons ça, encore une fois, dans un contexte plus large et peut-être que
21 vous avez une impression différente. Prenez le paragraphe qui précède, le
22 président parle d'ouvrir le feu sur Knin --
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, merci de déplacer le texte.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Et de placer direct, les opérations enfin les
25 orienter directement en direction de Knin.
26 Quand j'ai lu cela, ça m'a sauté aux yeux pour les raisons que vous
27 invoquez, donc nous avons un général qui dit, Je suis prêt à marcher sur
28 Knin, et à le capturer, mais je pense qu'il y a d'autres éléments dans ce
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1 document qui étaye la conclusion qu'il y a d'autres voix qui s'expriment
2 lors de cette réunion et qu'à différents endroits, il s'agit de concevoir
3 l'opération visant à détruire l'ennemi.
4 Il est dit --
5 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi la suite du texte.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais ceci n'est pas la situation à Knin
7 aujourd'hui. Il y a une contre-attaque à Knin. Ceci justifierait cette
8 action. Nous avons un prétexte pour attaquer.
9 Donc au fond, le commandant opérationnel écoute son chef politique qui lui
10 dit :
11 "En tant que partie de la planification, il y a la destruction
12 tactique des forces armées de l'ennemi, et cherchez une occasion
13 d'endommager la ville."
14 Le commandant répond :
15 "Je pense que la manière raisonnable d'interpréter cela, c'est de
16 faire un pas en arrière, Monsieur le Président, ne vous inquiétez pas au
17 sujet de Knin. Je peux prendre Knin si je le veux. Nous avons les forces
18 qu'il faut. Je suis capable de le faire."
19 Mais, Général, tout au long de cette conversation, on parle de la
20 destruction tactique des forces armées. Si je suis le général qui commande
21 et je sais qu'en profondeur je détruis l'ennemi, je serais capable de
22 rentrer dans Knin, à partir du moment où les forces ennemies commencent à
23 s'écrouler, une fois que j'ai opéré une percée dans leur ligne; la
24 direction à Knin sait qu'il y a une issue inévitable, et que c'est moi qui
25 dicte les règles du jeu.
26 Donc, là encore, je pense qu'on peut interpréter ces propos au général
27 Gotovina comme disant : en tant que partie de mon plan, je suis prêt à
28 marcher sur Knin, et à prendre la ville. Mais je pense que, dans un
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1 contexte plus large, c'est plutôt une autre lecture qu'il faut en faire, il
2 cherche à détourner le président de ce type de pression. La raison pour
3 laquelle je dis c'est parce que, de toute évidence, depuis quelque temps,
4 il a la capacité de le faire, donc il peut tout simplement ouvrir le feu
5 sur Knin et lancer cette espèce d'attaque intense.
6 Si vous regardez quel est l'issue de cette réunion, il y a des ordres qui
7 sont donnés, il y a des annexes, il y a des tâches qui sont confiées à
8 différentes unités, les priorités qui sont déterminées, et vous avez le
9 même jugement opérationnel, donc de capacité d'utiliser mon appui aérien,
10 mon Mi-24, les unités antichars. Donc j'ai ce qu'il faut pour détruire
11 l'ennemi et pour le faire, il me faut réunir les conditions, rassembler et
12 réunir les structures d'appui, et je vais me servir des moyens lorsque je
13 pense que je peux le faire.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je regarde l'heure. Il nous faudra
15 rapidement conclure.
16 Si j'ai bien compris, vous n'êtes pas disponible demain, et vous allez
17 revenir jeudi, le 10 septembre, à 14 heures, et dans le cour -- dans la
18 salle d'audience numéro II. Je vais vous instruire à ne vous adresser à
19 personne au sujet de votre déposition, déposition passée ou à venir.
20 Pour ce qui est de notre calendrier, nous entendrons une déposition par
21 vidéoconférence demain. Nous levons l'audience et nous reprendrons, le 9
22 septembre, mercredi, à 9 heures, dans la salle d'audience numéro I.
23 --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le mercredi 9
24 septembre 2009, à 9 heures 00.
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