Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 14 octobre 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à toutes les personnes présentes

  6   de la part et autour du prétoire.

  7   Monsieur le Greffier, veuillez citer la cause, je vous prie.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

  9   Monsieur le Juge, et bonjour à toutes les personnes présentes dans le

 10   prétoire.

 11   Il s'agit de l'affaire IT-06-90-T, le Procureur contre Ante Gotovina et

 12   consorts.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le Juge Kinis et moi-même ont informé

 14   les parties que, pour des raisons personnelles, Mme le Juge Gwaunza n'est

 15   pas en mesure de siéger aujourd'hui. Nous nous sommes demandés s'il fallait

 16   que nous siégeons, et nous avons conclu qu'il allait dans l'intérêt de la

 17   justice de continuer à siéger sans la présence de Mme le Juge Gwaunza

 18   conformément à l'article 15 bis.

 19   J'aimerais également soulever une autre question.

 20   Car le 9 octobre 2009, la Chambre avait indiqué en audience qu'elle était

 21   en train d'étudier la question juridique extrêmement complexe posée par le

 22   fait que l'on a utilisé des passages d'une déclaration 92 ter qui avait

 23   trait à un témoin qui avait pris ses distances, par rapport à ce qu'il

 24   avait dit dans le prétoire, et compte tenu également de la jurisprudence de

 25   ce Tribunal à propos de différentes déclarations contradictoires. Ce jour-

 26   là, la Chambre a entendu les premiers arguments ou représentés par la

 27   Défense de M. Gotovina et ainsi que par l'Accusation en l'espèce et a

 28   invité les parties à présenter toutes les thèses qu'ils souhaitaient

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  1   présenter.

  2   Le 12 octobre 2009, la Défense de Gotovina a indiqué à la Chambre qu'elle

  3   était disposée à se pencher davantage sur cette question, et la Chambre a

  4   répondu en indiquant qu'elle souhaiterait entendre les autres parties

  5   lorsqu'ils étaient prêts à intervenir.

  6   La Chambre invite maintenant les parties à présenter ou à déposer

  7   plutôt des écritures au plus tard le 28 octobre 2009, à propos des

  8   répercussions pratiques de la jurisprudence mises au point en cas de

  9   déclarations préalables contradictoires pour ce qui est de régler la

 10   question de la recevabilité et du versement au dossier des extraits des

 11   déclarations 92 ter qui n'ont pas été certifiées dans le prétoire. Voilà

 12   donc l'invitation qui vous est fournie par la Chambre.

 13   Nous allons maintenant attendre que le témoin entre dans le prétoire.

 14   [Le témoin vient à la barre]

 15   LE TÉMOIN : IVO CIPCI [Reprise]

 16   [Le témoin répond par l'interprète]

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Cipci.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais vous rappeler que vous êtes

 20   toujours tenu de respecter la déclaration solennelle que vous avez

 21   prononcée hier au début de votre déposition.

 22   Etes-vous prêt, Maître Kay, je vous en prie ?

 23   M. KAY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 24   Je me penche sur le paragraphe 17 de la déclaration du témoin, Monsieur le

 25   Président.

 26   Interrogatoire principal par M. Kay : [Suite]

 27   Q.  [interprétation] Monsieur Cipci, dans votre déclaration, vous dites que

 28   vous avez appris que M. Cermak avait été envoyé à Knin pour s'occuper --

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  1   pour présider en quelque sorte au retour, à la vie normale des civils qui

  2   étaient restés dans ce secteur, et vous avez dit :

  3   "C'est ce que le MUP m'avait dit."

  4   J'aimerais vous poser quelques questions à ce sujet; plus précisément,

  5   j'aimerais vous poser des questions à propos de toute discussion que vous

  6   auriez pu avoir afin de comprendre comment cette information vous avait été

  7   transmise. Est-ce que vous comprenez ?

  8   R.  Oui, oui, je comprends tout à fait.

  9   Q.  Alors est-ce que vous vous souvenez du moment où vous avez entendu pour

 10   la première fois que M. Cermak allait être envoyé à Knin pour faire en

 11   sorte que la vie reprenne son cours normal ? Est-ce que vous souvenez de la

 12   première fois où vous en avez entendu parler ?

 13   R.  Oui, oui, je m'en souviens particulièrement bien. C'était le 6. Donc le

 14   5, je suis arrivé à Knin. Le président était censé arriver le 6 donc le

 15   président Franjo Tudjman était censé arriver le 6, donc moi, le 6 je me

 16   trouvais à Knin le matin parce qu'il -- ce qu'on avait supposé c'est qu'il

 17   poursuivrait leur chemin jusqu'à Kijevo le 6; il faut savoir que mon

 18   assistant est venu, le ministre -- l'assistant du ministre, donc Josko

 19   Moric, est également venu. J'ai entendu qu'ils étaient arrivés. J'ai même

 20   vu M. Cermak lorsqu'il est arrivé et j'ai même demandé tout de suite à

 21   monsieur -- à mon assistant ou à mon ministre, M. Jarnjak, quelle était la

 22   fonction de M. Cermak.

 23   Etant donné que je disposais déjà de 100 policiers cantonnés à Knin, donc

 24   je voulais tout simplement savoir qui je pouvais contacter au sein de

 25   l'armée au cas où mes employés qui étaient déployés à Knin avaient besoin

 26   de quelque chose et qu'ils étaient placés sous le commandement du

 27   responsable de l'administration de Knin dont le nom je ne me souviens pas

 28   en fait, non, il me semble que c'était un M. Romanic. C'est là que M.

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  1   Jarnjak, mon ministre, m'a dit que M. Cermak allait arriver à Knin et que

  2   M. Cermak venait exclusivement pour faire en sorte que la vie normale

  3   reprenne son cours sur le territoire. Il m'a également dit que M. Cermak

  4   avait bénéficié en quelque sorte du statut de commandant de la garnison.

  5   J'avais eu des contacts précédents avec le commandant de la garnison de

  6   Split qui était beaucoup plus importante en fait et donc je savais qu'elle

  7   était son autorité. M. Cermak, en dépit du fait qu'il était  général, qu'il

  8   avait été nommé général beaucoup plus tôt, ne pouvait pas avoir une

  9   autorité plus importante que le commandant de la garnison de Split qui

 10   était beaucoup plus importante et qui comprenait plusieurs Unités de

 11   Combat, le commandement de la Marine croate; deux Bataillons de la Police

 12   militaire; le 72e Bataillon de la Police militaire; et le 73e Bataillon.

 13   Vous voulez que je poursuive ?

 14   Q.  Un petit moment, je vous prie, parce que je viens d'entendre le

 15   sténotypiste et les interprètes ont du mal à vous suivre donc, Monsieur

 16   Cipci, il faut en fait que les interprètes puissent faire leur travail pour

 17   retransmettre votre message. Je peux vous dire qu'ils parlaient très, très

 18   vite. Donc, moi, j'ai tendance à parler lentement dans le prétoire parce

 19   que je sais que mes propos sont traduits et interprétés, donc est-ce que

 20   vous pouvez vous en souvenir, est-ce que vous pourriez essayer d élément

 21   faire ?

 22   R.  Je vais essayer de parler très lentement pour les interprètes et pour

 23   le sténotypiste car je voudrais qu'il fasse bien leur travail.

 24   Q.  Merci beaucoup. Vous nous avez fourni de nombreux renseignements donc

 25   je vais revenir sur certains éléments de votre intervention.

 26   Vous venez de nous dire que vous aviez 100 policiers à Knin et que

 27   vous vouliez savoir qui vous pouviez contacter donc pour l'armée parce que

 28   vos employés, comme vous l'avez dit, étaient déployés là-bas sous les

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  1   ordres de M. Romanic. M. Jarnjak vous a indiqué quelle était la fonction de

  2   M. Cermak qui était venu pour s'occuper du retour à la vie normale à Knin,

  3   et vous nous avez dit donc qu'il était commandant de la garnison.

  4   Alors si nous pouvons donc revenir sur ce que vous venez de dire.

  5   J'aimerais savoir si vos employés, vos salariés donc ces 100 policiers de

  6   votre administration de la police, est-ce qu'ils devaient avoir des

  7   contacts ou être subordonnés à M. Cermak d'une façon ou d'une autre ?

  8   R.  Non. Non, non, ils n'étaient censés avoir aucun contact avec lui. Ils

  9   étaient directement subordonnés à M. Romanic. M. Romanic était subordonnés

 10   à Cetina, et Cetina, lui, était subordonné à Jarnjak. Voilà qu'elle était

 11   donc la hiérarchie au sein de la police.

 12   Q.  Bien. Alors nous allons parler de cette journée du 6 août, et

 13   j'aimerais savoir si parmi les renseignements que vous avez reçus, il avait

 14   été suggéré que M. Romanic devait être subordonné au commandement du

 15   général Cermak ?

 16   R.  Non, je n'ai pas eu d'informations à ce sujet, absolument pas. M.

 17   Romanic a été nommé, le 6, chef temporaire de l'administration de la police

 18   de Knin. Le lendemain, le 7, me semble-t-il, donc j'ai gelé officiellement

 19   donc investi dans ses fonctions avec le ministre adjoint pour le SZUP et je

 20   pense qu'il y avait avec nous le chef de la police, de l'administration de

 21   la police de Sibenik, M. Matic. Je pense que les documents officiels pour

 22   M. Romanic sont arrivés et c'est ainsi donc que nous l'avons officiellement

 23   donc installés dans son nouveau bureau. Donc il s'agissait de M. Smiljan

 24   Reljic qui était le ministre -- l'assistant du ministre pour SZUP qui était

 25   en fait le "SZUP" étant le bureau pour l'ordre constitutionnel.

 26   Est-ce que je parle en -- trop vite ?

 27   Q.  C'est avec une certaine hésitation que je vous dis que vous parlez

 28   encore trop vite. Mais ça va quand même mieux, vous faites des efforts.

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  1   R.  Alors il faudra peut-être que je fasse des pauses.

  2   Q.  Alors à propos de l'information que vous nous aviez fournie sur M.

  3   Romanic, vous nous avez dit que vous l'avez, en quelque sorte, investi dans

  4   ses fonctions; est-ce que vous connaissiez M. Romanic ? Est-ce qu'il

  5   n'avait jamais travaillé pour vous en fait ?

  6   R.  Non. J'ai rencontré M. Romanic, ce jour-là, lorsque M. Reljic, M. Matic

  7   et moi-même sommes arrivés à Knin. Nous l'avons rencontré dans l'escalier

  8   de l'administration de la police, en fait il était assis là, dans

  9   l'escalier, parce que c'est là que se trouvait son bureau en tant que chef

 10   de l'administration de la police. Car, précédemment, il faut savoir que

 11   Knin n'avait jamais disposé de sa propre administration. Il y avait juste

 12   un poste de police avant. Donc ce jour-là, j'ai rencontré pour la première

 13   fois, M. Romanic.

 14   Q.  Merci. Lorsque vous dites, en fait je voulais avoir une explication à

 15   propos de l'inauguration, parce que vous avez dit le lendemain, le 7,

 16   alors; est-ce que vous pourriez indiquer à la Chambre ce que vous entendiez

 17   par cela ?

 18   R.  Ce que j'entendais c'est tout simplement que j'avais eu un appel

 19   téléphonique de Jarnjak qui m'avait dit de me rendre à Sibenik, pour y

 20   trouver le chef Matic. Ensuite, il m'avait dit d'aller à Drnis, qui était

 21   le lieu de naissance de Smiljan Reljic, qui se trouvait là à ce moment-là,

 22   et tous les trois, nous étions censés ensuite allés à Knin. C'est à Knin

 23   que nous étions censés rencontrer M. Romanic, puis nous devions donc le

 24   présenter officiellement et l'investir officiellement dans ses nouvelles

 25   fonctions. Donc voilà ce que j'entends par l'inauguration de M. Romanic. Je

 26   suppose d'ailleurs que M. Smiljan Reljic avait avec lui le document

 27   officiel relatif à la nomination de M. Romanic. Ceci étant je n'en suis pas

 28   si sûr que cela, en fait.

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  1   Q.  Merci. Alors je reviens encore à cette première longue réponse, la

  2   première longue réponse que vous m'avez fournie. Vous avez indiqué que vous

  3   aviez certaines connaissances à propos de la garnison. Parce que vous, vous

  4   étiez basé à Split; est-ce que c'est là que se trouvait le QG de votre

  5   administration de police à Split ?

  6   R.  Le QG de l'administration de la police, son bâtiment à proprement

  7   parler, oui, il se trouvait à Split.

  8   Q.  Merci. Est-ce que vous saviez s'il y avait à Split donc une garnison,

  9   la garnison de Split ?

 10   R.  Non seulement je le savais mais j'étais un ami personnel du commandant

 11   de la garnison de Split. Nous sommes d'ailleurs toujours amis, il s'agit de

 12   M. Zoricic. Je pense qu'il était général de brigade, je n'en suis pas sûr,

 13   mais je le connaissais. Donc de temps à autres, nous nous fréquentions,

 14   nous étions amis donc, toujours dans un cadre tout à fait privé.

 15   Q.  A propos justement de sa fonction de commandant de garnison de Split,

 16   est-ce qu'il avait l'autorité ou le commandement par rapport à la police

 17   civile ?

 18   R.  Avant de répondre à votre question, j'aimerais juste vous dire deux

 19   mots à ce sujet.

 20   Lorsque j'ai pris mes fonctions de chef de l'administration de la police,

 21   j'ai étudié les documents juridiques relatifs à mon travail. Donc j'ai

 22   étudié les lois ainsi que les statuts relatifs au travail du ministère de

 23   l'Intérieur. Etant donné qu'il y avait une guerre et que j'avais la 4e

 24   Brigade de la Garde à Split ainsi que deux Bataillons de la Garde

 25   nationale, sans oublier le QG de la navire croate et le 72e Bataillon de la

 26   Police militaire ainsi que le 73e Bataillon de la Police militaire, j'ai

 27   étudié donc le droit pour mieux connaître le système et le fonctionnement

 28   de l'armée croate.

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  1   Ce qui m'intéressait, c'était les liens entre le ministère de

  2   l'Intérieur et le ministère de la Défense. C'est justement parce que j'ai

  3   étudié tout cela que j'ai pu arriver à une conclusion très rapidement,

  4   parce que cela est indiqué dans la loi, par le droit, un commandant de

  5   garnison n'a absolument aucune autorité sur les Unités de Combat qui sont

  6   déployées dans son secteur. C'est la raison pour laquelle, pendant les

  7   quatre années de guerre, jamais -- au grand jamais je n'ai eu une réunion

  8   officielle avec le commandant de la garnison, M. Zoricic. Toutefois, je

  9   communiquais très souvent avec lui, mais à titre privé. Il faut savoir que

 10   j'avais donc des contacts fréquents avec le commandant de la 4e Brigade,

 11   avec le commandant de la Marine croate, j'avais également des contacts avec

 12   les commandants de la Brigade de la Garde -- des Brigades de la Garde

 13   nationale, plutôt, j'avais contact avec le commandant --

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Permettez-moi de vous fournir

 15   quelques orientations, Monsieur.

 16   Lorsque vous voyez que le texte sur votre écran, lorsque vous voyez

 17   que ce texte s'arrête, qu'il n'y a plus de mouvement, cela signifie que le

 18   sténotypiste a terminé d'écrire. Il le fait en fait à partir de

 19   l'interprétation de vos propos. Donc regardez votre écran de temps à

 20   autres, Monsieur.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] L'écran de gauche ?

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'écran qui est en mouvement en quelque

 23   sorte.

 24   Je suppose, Madame l'Huissière, que le témoin peut regarder l'écran

 25   anglais, également.

 26   Peut-être que vous pourriez essayer de prendre comme exemple pour le

 27   rythme, pour votre début, soit Me Kay, soit moi-même, ou un juste milieu

 28   entre les deux.

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  1   M. KAY : [interprétation]

  2   Q.  Oui, je pense que nous avons peut-être raté certains renseignements à

  3   propos de vos contacts avec les commandants de la Brigade de la Garde

  4   nationale; alors est-ce que vous pourriez peut-être me répéter ce que vous

  5   souhaitiez dire ? Vous avez mentionné les commandants de la Brigade de la

  6   Garde nationale, qu'en est-il des autres ?

  7   R.  Oui, oui, je peux tout à fait répéter. Je vous disais que j'avais des

  8   contacts avec tous les commandants des unités militaires, ainsi que

  9   l'amiral Sveto Letica, et cela pour une raison très, très simple. Ma

 10   fonction en fait était une fonction du comté de Split et de Dalmatie, qui

 11   était englobé par l'administration de la police de Split et de la Dalmatie,

 12   et cela comprenait la ville de Split, ainsi que 12 autres villes et

 13   d'autres municipalités. Donc ma fonction consistait à faire en sorte que

 14   règne l'ordre public.

 15   C'est la raison pour laquelle j'avais des contacts avec tous ces

 16   commandants pour pouvoir établir dans un premier temps des relations

 17   normales avec ces personnes, et cela afin de pouvoir éviter ou prévenir

 18   tout incident qui aurait pu survenir à la suite du déploiement d'un grand

 19   nombre de soldats dans mon secteur, dans ma zone.

 20   Parce que outre les troupes, du fait de l'administration de la police

 21   dont je m'occupais, il fallait également compter sur des passages fréquents

 22   de soldats du HVO qui venaient de Bosnie. J'avais également le commandement

 23   des forces internationales dont le QG se trouvait. Là, il y avait un énorme

 24   centre logistique également, c'est la raison pour laquelle j'avais

 25   également des contacts très fréquents avec le commandant des forces

 26   internationales, dont le commandement se trouvait d'ailleurs à une dizaine

 27   de kilomètres de Split. Il ne faut pas oublier donc cette énorme base

 28   logistique qui se trouvait au nord de la zone portuaire pour les cargos de

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  1   la ville de Split.

  2   Q.  Je vous remercie de tous ces détails. J'aimerais, en fait, vous poser

  3   une question à propos de vos contacts avec les bataillons, le 72e et le 73e

  4   Bataillons de la Police militaire, et je reviens toujours à cette première

  5   longue réponse que vous avez faite.

  6   Pourquoi est-ce que vous aviez des contacts avec eux, en tant que chef de

  7   l'administration de la police ?

  8   R.  Bien, écoutez, bien sûr, que j'étais le chef de l'administration de la

  9   police, et à ce titre, je devais définir toutes les relations entre la

 10   police militaire qui était cantonnée à Split et la police civile. Donc je

 11   voulais qu'il y ait quand même une certaine coordination des tâches et

 12   missions, et je vais vous expliquer pourquoi; parce qu'à l'époque -- à

 13   cette époque-là, notre système judiciaire général était divisé en deux

 14   parties : vous aviez d'un côté, le système judiciaire militaire, et de

 15   l'autre, le civil. Il y avait, par exemple, la police militaire, le

 16   procureur militaire, les tribunaux militaires; et, par ailleurs, vous aviez

 17   la police civile, les procureurs d'Etat, ainsi que les tribunaux civils.

 18   Q.  Oui, la Chambre a reçu beaucoup d'informations à ce sujet et connaît

 19   très bien cette structure, je vous remercie de m'avoir fourni cette

 20   information, mais c'est une information dont nous disposons déjà, les Juges

 21   ont beaucoup entendu d'éléments de preuve à ce sujet, donc si vous n'y

 22   voyez pas d'inconvénient, Monsieur le Président.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, vous pouvez procéder ainsi.

 24   M. KAY : [interprétation]

 25   Q.  Je souhaite aborder un autre sujet maintenant, qui concerne le

 26   paragraphe 23 de votre déclaration il s'agit d'une question liée aux permis

 27   de passage et M. Cermak.

 28   Peut-on examiner la pièce D497, s'il vous plaît.

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  1   R.  Je ne vois rien à l'enclave.

  2   Q.  Ce sera présenté à la fin.

  3   R.  [aucune interprétation]

  4   Q.  Il s'agit d'un document du 16 août.

  5   Nous attendons encore la version en anglais.

  6   M. KAY : [interprétation] Merci.

  7   Q.  Ceci émane du ministère de l'Intérieur, de l'administration de la

  8   police de la Dalmatie, et c'est vous qui l'avez signé, la date en est le 16

  9   août 1995, et ceci a été envoyé à l'état-major opérationnel Provratak à

 10   Zagreb avec une annexe.

 11   Est-ce que vous reconnaissez ce document en tant que document que vous avez

 12   rédigé vous-même ?

 13   R.  Ce que je vois à l'écran correspond à ma signature. C'est une lettre

 14   que j'ai adressée au ministère, à l'état-major Povratak, mais je ne vois

 15   pas le document que j'ai mis en annexe.

 16   Q.  Nous allons traiter de cela immédiatement. Peut-on montrer la page 2 ?

 17   Nous pouvons voir le document intitulé : "Le 16 août 1995," le sujet

 18   concerne le rapport sur la présence des membres de la Mission d'observation

 19   de la CE dans la zone de Vrlika. Si vous examinez le texte, vous pouvez

 20   voir qu'il est question d'un télégramme, qui informe sur l'identité des

 21   personnes en Croatie qui sont membres de la MOCE, identité établie à

 22   travers un entretien avec eux. Il s'agit des noms des personnes et il y est

 23   indiqué d'où elles viennent, de même que leur véhicule et leurs activités

 24   principales, il est indiqué qu'ils ont été arrêtés à un point de contrôle

 25   lorsqu'ils ont entré à Vrlika.

 26   M. KAY : [interprétation] Veuillez passer à la page 3, s'il vous plaît.

 27   Q.  Ils ont rendu visite au commandant du Bataillon de Kenyan stationné à

 28   Civljane, ils ont été informés des fosses communes dans les villages de

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  1   Cetina et Jezevic, et il était question de savoir s'ils avaient un permis

  2   leur autorisant de se rendre dans la zone en question. Ensuite on leur a

  3   dit de retourner à Knin pour l'obtenir, et ensuite il est dit que -- il est

  4   indiqué ce qu'ils souhaitaient faire, et ensuite référant ces faits au fait

  5   qu'une autre équipe de leur groupe, d'après leur propre hiérarchie, les a

  6   informés du fait qu'elles avaient reçu un certain certificat délivré par le

  7   général Cermak qui leur permettait de déplacer librement dans toute la zone

  8   croate, et ceci portait sur l'ensemble de la MOCE, et ceci leur a été

  9   communiqué lors d'un entretien. C'est vous qui avez signé ce rapport.

 10   Est-ce que vous vous souvenez des informations contenues dans ce rapport et

 11   de cet incident particulier ?

 12   R.  Ecoutez, je me souviens de beaucoup de choses, mais il ne faut pas

 13   oublier que beaucoup d'années se sont écoulées, puis moi, je ne suis pas

 14   tout jeune, non plus. Mais je me souviens de ces détails-là compte tenu du

 15   fait que j'avais déjà annoncé à M. Cermak s'agissant de la zone de ma

 16   responsabilité s'agissant des personnes qui avaient besoin d'un permis,

 17   délivré par moi, que ces personnes se présentaient avec un permis délivré

 18   par lui que j'allais écarté ces personnes.

 19   Suite à cette annonce, j'ai agi ainsi : il y avait des personnes telles que

 20   celles mentionnées dans ce rapport lorsqu'ils arrivaient ils avaient

 21   toujours une autorisation de la part du ministère de la Défense. Je crois

 22   que c'était Markica Rebic ou je ne sais pas exactement qui mais il y avait

 23   deux généraux qui autorisaient ce genre de chose -- coordonnaient les

 24   activités avec la communauté internationale. Puis leurs autorisations

 25   passaient par le ministère de l'Intérieur et m'étaient transmises, et

 26   ensuite si ces personnes devaient séjourner dans ma zone de responsabilité,

 27   c'est moi qui leur délivrais les autorisations nécessaires.

 28   Avec la permission du président de la Chambre, je vais ajouter

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  1   quelque chose.

  2   Avant l'opération Eclair, au niveau du ministère de l'Intérieur, nous avons

  3   tenu plusieurs réunions et nous avons défini exactement la manière dont les

  4   points de contrôle allaient être constitués et qui allait donner des

  5   permis, et pour qui, permis de passage ou de circulation. A ce moment-là,

  6   il a été indiqué que s'agissant de toutes les personnes civiles, c'était le

  7   chef de l'administration de la police sur le territoire duquel se trouvait

  8   un point de contrôle qui était responsable, et s'agissant des militaires et

  9   des véhicules militaires, nous n'avions pas l'autorisation de les arrêter.

 10   Donc il n'était pas important pour moi de savoir qui donnait les

 11   autorisations concernant les militaires.

 12   Q.  Quel était alors le problème concernant le certificat délivré par le

 13   général Cermak, certificat permettant aux membres de la MOCE de se rendre

 14   là où ils souhaitaient en Croatie ? Pourquoi est-ce que ça vous posait un

 15   problème ? Pourquoi avez-vous rejeté cela ?

 16   R.  Ceci posait problème car il s'agissait des civils même si c'était des

 17   étrangers, c'était des civils, ce n'était pas des militaires.

 18   Q.  Peut-on revenir maintenant à la page 2 et nous pouvons voir en

 19   manuscrit à droite un certain nombre de noms : Moric, Reljic, Benko,

 20   Zidovec.

 21   R.  Moric était l'adjoint du ministre chargé de la police. Reljic était

 22   l'adjoint du ministre pour un autre domaine pour SZUP, Benko était à la

 23   tête de la police criminelle, et Zidovec était à la tête du département des

 24   Affaires juridiques donc c'était des officiels du ministère.

 25   Q.  Est-ce que vous pouvez nous indiquer pour quelle raison ce rapport leur

 26   a été envoyé à eux aussi, ce rapport avec les informations y contenus,

 27   pourquoi est-ce que ceci a été transmis à ces personnes-là ?

 28   R.  Il m'est difficile de répondre à cette question. Mais je pense que

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  1   toutes ces personnes ont plutôt leur ressort au sein du ministère étaient

  2   impliqués aux événements qui se sont déroulés après l'opération Tempête, et

  3   Reljic -- et Benko, qui était donc l'adjoint du ministre, chargé de la

  4   police criminelle car, bien sûr, il a fallu entreprendre toutes les mesures

  5   prendre, toutes les mesures nécessaires dans la région de Knin afin de

  6   résoudre les questions sur le plan juridique et pour ce qui est des

  7   poursuites criminelles liées aux expulsions et ainsi de suite.

  8   Q.  Pour autant que vous le sachiez, est-ce que l'une quelconque de ces

  9   quatre personnes s'est rendu dans la région de Knin dans le cadre de ces

 10   fonctions à des moments différents ?

 11   R.  M. Reljic, dès le 5 ou le 6 je pense, s'est trouvé dans la région de la

 12   Krajina car il est originaire de Knin, donc il lui était logique de venir

 13   rendre visite à sa maison ou dans sa région. Je suppose que c'était la

 14   raison pour laquelle il est venu. En ce qui concerne M. Moric, je suppose

 15   qu'après le 6, il était à Knin aussi, le 6. Il était lorsque le président

 16   Tudjman est venu, donc je crois qu'il est resté même après mais je ne me

 17   souviens pas l'avoir rencontré. En ce qui concerne M. Benko, je ne suis pas

 18   sûr s'il est venu, mais je sais qu'il a envoyé plusieurs de ces personnes

 19   dans la région de Sibenik et de Zadar et c'était des personnes qui devaient

 20   s'occuper des aspects juridiques.

 21   Pour cette raison, j'ai mis à la disposition de M. Benko, le chef de

 22   ma propre police criminelle. C'était quelqu'un de très compétent qui

 23   pouvait les aider à accomplir certaines tâches qui relevaient de leur

 24   ressort. Zidovec, il était chargé des affaires d'administration et

 25   juridiques - il venait de 100 hommes mais je ne le voyais pas. Katica

 26   Osrecki, qui était l'adjoint du ministre, elle aussi ministre des finances,

 27   elle y venait de temps en temps. Au cours de quelques journées qui ont

 28   suivi l'opération Tempête, nous sommes allés voir M. Cermak ensemble,

Page 23083

  1   c'est-à-dire Mme Katica et moi-même.

  2   Q.  Merci. Le nom de l'adjoint du ministre des finances n'est pas consigné

  3   au compte rendu d'audience. Est-ce que vous pourriez répéter le nom de la

  4   personne avec laquelle vous êtes allé voir m. Cermak ?

  5   R.  C'est Mme Katica Osrecki.

  6   Q.  Est-ce que vous vous souvenez quel était le but de la réunion entre M.

  7   Cermak et elle ?

  8   R.  Il s'agissait d'une réunion purement privée car Mme Katica Osrecki

  9   connaissait déjà M. Cermak. Lorsqu'elle s'est rendue dans la région, elle

 10   m'a demandé que l'on se rende ensemble auprès de lui car elle ne savait pas

 11   exactement comment se déplacer à travers Knin. C'était les journées qui ont

 12   suivi l'opération Tempête. Donc c'était une visite privée, une rencontre

 13   entre Mme Katica Osrecki et Ivica Cipci d'un côté, et M. Cermak de l'autre.

 14   Q.  Merci. S'agissant de ce même sujet, s'agissant du refus d'entrée pour

 15   les membres de la MOCE qui avaient reçu une autorisation de la part de M.

 16   Cermak, est-ce que vous étiez au courant d'un accord signé, le 6 août,

 17   entre M. Akashi, représentant des Nations Unies, et M. Sarinic,

 18   représentant le gouvernement croate qui a accordé la liberté de mouvements

 19   à des parties différentes des forces de l'ONURC qui se trouvaient en

 20   Croatie pour des raisons différentes ? Est-ce que vous, au sein de

 21   l'administration de la police, vous étiez au courant de cet accord ?

 22   R.  Si mes souvenirs sont bons, je crois que j'avais pris connaissance de

 23   cela mais est-ce que vous pouvez me répéter la date à laquelle cet accord a

 24   été conclu entre Sarinic et --

 25   Q.  Ceci a été signé, le 6 août, à Zagreb.

 26   R.  D'accord.

 27   Q.  Si vous souhaitez voir un exemplaire de cet accord, c'est la pièce --

 28   R.  Non, ce n'est pas nécessaire.

Page 23084

  1   Q.  D28.

  2   R.  D'accord. Cependant, je pense si mes souvenirs sont bons maintenant au

  3   bout de 15 ans environ, que dans la pratique, les choses fonctionnaient

  4   quand même différemment, à savoir tous les membres des missions

  5   d'observation et d'autres forces internationales s'adressaient au ministère

  6   de la Défense qui était le seul autorisé à permettre aux personnes ou à

  7   certaines catégories de personnes dans les zones de combat. Je pense que

  8   les personnes que j'ai déjà mentionnées, Rebic et Tolj, c'était ces

  9   personnes-là qui donnaient les autorisations et ensuite seul les personnes

 10   concernées pouvaient se déplacer.

 11   Leurs autorisations étaient transmises jusqu'à nous, et je me

 12   souviens que je voyais parfois des observations internationales dans des

 13   véhicules; ils se déplaçaient dans ces voitures à travers la Krajina. L'un

 14   d'eux conduisait et l'autre était assis à côté avec une caméra et filmait

 15   tout ce qui était en train de se passer, et moi-même, j'ai vu cela à

 16   plusieurs reprises.

 17   Q.  Je voulais vous poser la question suivante : s'agissant de passage pour

 18   les observateurs de la MOCE, qui avaient dit qu'ils avaient reçu

 19   l'autorisation de la part de M. Cermak, leur permettant de se déplacer là

 20   où ils souhaitaient; est-ce que vous avez considéré que ces personnes

 21   étaient autorisées à se rendre où bon leur semblait en termes de l'accord

 22   Akashi-Sarinic, du 6 août ?

 23   R.  Il ne fait aucun doute qu'ils pouvaient se déplacer. Cependant, toutes

 24   ces personnes devaient toutefois avoir un document garantissant qu'ils

 25   étaient bien les personnes en question et indiquant où ils allaient venir.

 26   Vous savez, il ne s'agissait pas de billet pour une pièce de théâtre, avec

 27   lequel on entre où on veut. Il s'agissait d'un territoire sensible, ils

 28   devaient avoir un permis indiquant où ils allaient, et nous ne pouvions pas

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  1   alors leur refuser cela. En vertu de l'accord entre le gouvernement croate

  2   et M. Sarinic, d'un côté, et eux, de l'autre, c'est ainsi que les choses

  3   devaient se passer. Nous avons des obligations de notre côté, mais leurs

  4   obligations étaient de nous notifier à l'heure et de demander

  5   l'autorisation d'entrer dans le territoire à temps. C'est la manière dont

  6   j'ai interprété les choses.

  7   Q.  Merci. Je souhaite que l'on se penche sur un autre document, un autre

  8   permis de passage.

  9   M. KAY : [interprétation] Il s'agit de la pièce D494.

 10   Q.  Vous allez le voir à l'écran, qu'il s'agit d'une lettre du 15 août

 11   1995, émanant de vous en tant que chef de l'administration de la police de

 12   Split et de la Dalmatie, adressée à l'état-major opérationnel de Povratak,

 13   à Zagreb. La lettre dit : nous transmettons une copie du permis de passage

 14   permettant l'entrée à la garnison de Knin, délivré par l'état-major

 15   principal de l'armée croate, le commandement de la garnison de Knin. Il est

 16   demandé de répondre et confirmer par écrit la validité des permis pour les

 17   civils en question.

 18   Tout d'abord, est-ce que vous vous souvenez de cette lettre, en tant que

 19   lettre que vous avez rédigée vous-même ?

 20   R.  Oui, je me souviens. J'ai écrit cette lettre, je me souviens également

 21   que M. Cermak, pendant une visite privée qui a eu lieu immédiatement après

 22   l'opération Tempête, m'a montré un permis imprimé qu'il avait produit lui-

 23   même, afin de permettre à certaines personnes d'avoir la liberté de

 24   mouvement dans la zone libérée. J'ai dit à M. Cermak, immédiatement, que de

 25   tels permis délivrés aux civils allaient peut-être considérer comme

 26   invalides dans ma zone de responsabilité. Conformément à cela, j'ai envoyé

 27   une lettre à l'état-major opérationnel Povratak, avec une copie d'un tel

 28   permis délivré par M. Cermak. J'ai reçu leur réponse disant que les permis

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  1   de M. Cermak étaient vali0des seulement pour les militaires et non pas pour

  2   les civils.

  3   Q.  Est-ce que nous pouvons nous pencher sur le document, tout d'abord pour

  4   voir la partie manuscrite, d'après la traduction il est écrit :

  5   "En vérifiant cela par le biais par de l'administration de Knin, le colonel

  6   -- le général de brigade Cermak donnera l'ordre visant à annuler la liberté

  7   de circulation des civils.

  8   "Ceci doit être envoyé par écrit par le ministère de la Défense."

  9   Tout d'abord, est-ce que vous savez qui a écrit cela sur votre lettre ?

 10   R.  Je ne vois pas la signature à l'écran.

 11   M. KAY : [interprétation] Peut-être que nous pouvons montrer cette partie

 12   du texte --

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est illisible.

 14   Je suppose peut-être compte tenu du fait que j'ai envoyé cela à

 15   l'état-major, que c'était M. Moric qui était en charge de l'état-major

 16   opérationnel de Povratak qui a écrit cela, ou bien peut-être ceci a été

 17   fait par un assistant de M. Moric qui se trouvait à l'époque à l'état-

 18   major. Je ne suis pas sûr.

 19   M. KAY : [interprétation]

 20   Q.  Est-ce que vous voyez quelles sont les lettres que l'on voit dans la

 21   signature, les initiales, ça correspond à qui à votre avis ?

 22   R.  A mon avis, c'est peut-être, ce sont peut-être les initiales de Josko

 23   Moric, "J.M" d'après ce que je crois pouvoir lire à l'écran.

 24   Q.  Merci. Puis vous avez dit dans votre réponse que vous avez pu

 25   reconnaître l'écriture; est-ce que vous pourriez nous donner d'autres

 26   informations à ce sujet-là ?

 27   R.  Non, non, j'ai dit que je ne pouvais pas reconnaître la signature, mais

 28   s'agissant des initiales en bas du texte, j'ai l'impression que ceci

Page 23087

  1   correspond à "J.M," ce qui pourrait être Josko Moric.

  2   Q.  Est-ce que vous pouvez dire quoi que ce soit au sujet des vérifications

  3   effectuées à travers ou par le biais de l'administration de la police de

  4   Knin ? Est-ce que vous pouvez nous dire quoi que ce soit au sujet de cette

  5   vérification de la validité des permis ?

  6   R.  Pour ce qui est du contenu de ce texte, il est écrit ici :

  7   "Qu'il faut vérifier cela par le biais de l'administration de la

  8   police de Knin et le général Cermak…"

  9   Je ne sais pas avec qui Josko Moric a parlé, mais je suppose que

 10   Moric a appelé le chef en charge à Knin, et que c'est lui qui aurait parlé

 11   avec Cermak. Mais je ne le sais vraiment pas avec certitude.

 12   Q.  Merci.

 13   M. KAY : [interprétation] Peut-on examiner maintenant la pièce D495 ?

 14   Q.  S'agit-il d'un exemplaire d'une copie du permis que vous avez mentionné

 15   ?

 16   R. Oui.

 17   Q.  Nous voyons des parties manuscrites là-dessus ?

 18   R.  Oui. Ceci est valable uniquement pour les militaires et les civils de

 19   service au sein de la HVO, autrement dit de l'armée croate, et c'est ce que

 20   j'avais déjà dit à M. Cermak. Les civils, lorsqu'ils doivent traverser mes

 21   points de contrôle, doivent avoir mon autorisation. Les civils qui étaient

 22   de service au sein de l'armée croate pouvait se déplacer avec son

 23   autorisation à lui, lorsque lui considérait que ces personnes étaient en

 24   mesure de se déplacer librement.

 25   Q.  Est-ce que vous savez qui a écrit l'information qui figure dans ce

 26   permis que nous avons devant nous ? Tout d'abord, la première partie, là où

 27   il est dit que :

 28   "Conformément à l'annonce de l'état-major du MUP, ceci est valable

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  1   seulement pour les militaires et civils de service au sein de l'armée

  2   croate."

  3   Est-ce que vous savez qui a rédigé cela ?

  4   R.  C'est une question difficile. Je ne sais pas.

  5   Q.  Donc ce n'émane pas de votre bureau ?

  6   R.  Non, non, pas du tout. C'est visiblement quelque chose qui émane du

  7   bureau du général Cermak. Car dans la première phrase, il est écrit :

  8   "Conformément à l'annonce de l'état-major du MUP…"

  9   Or c'est l'état-major opérationnel Povratak, dont le chef était Josko

 10   Moric c'est à lui que j'ai envoyé ma question concernant la validité des

 11   permis de Cermak, et il est écrit :

 12   "Conformément à l'annonce de l'état-major du MUP, ceci est valable

 13   seulement pour les militaires et civils de service au sein de l'armée

 14   croate."

 15   Par conséquent, il est clair que le bureau de M. Cermak avait reçu une

 16   notification officielle de l'état-major Povratak portant sur le fait qu'il

 17   n'avait pas le droit de donner des autorisations aux civils.

 18   Q.  Merci. Est-ce que vous vous souvenez qu'hier nous nous sommes penchés

 19   sur un document ? Il s'agit de la pièce D496, dont la date était également

 20   le 15 août 1995, c'est un document que vous avez envoyé et qui concernait

 21   les passagers empruntant la ligne Split-Knin ? Vous rappelez-vous avoir

 22   examiné ce document hier ?

 23   R.  Je me rappelle que nous avons discuté des questions que j'avais posées

 24   quant à la possibilité de continuer à contrôler tous les trajets sur cette

 25   ligne ferroviaire, ainsi que les laissez-passer, et les laissez-passer

 26   annulés. Je me souviens avoir vu ce document hier sur l'écran et l'avoir

 27   examiné.

 28   Q.  Donc s'agissant des laissez-passer délivrés par Cermak, nous les avons

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  1   examinés et votre document date du 15 août, pouvez-vous nous dire, dans ces

  2   conditions, quelle était la politique du ministère de l'Intérieur, et du

  3   Groupe chargé de l'opération Povratak, opération retour, s'agissant de la

  4   nécessité de délivrer des laissez-passer pour se rendre dans les zones

  5   récemment libérées ?

  6   R.  Voyez-vous, lors des accords conclus avant l'opération Tempête, il

  7   avait été décidé que nous devions mettre immédiatement en place des postes

  8   de contrôle et nous entendre avec la police militaire afin que les

  9   contrôles à ces postes de contrôle soient exercés par des patrouilles

 10   mixtes, étant donné la nécessité de contrôler les civils comme les

 11   militaires. Quant aux civils, les laissez-passer devaient être délivrés

 12   d'une façon très restrictive, à savoir que ceux qui étaient autorisés à

 13   rentrer étaient les personnes qui avaient un statut leur donnant droit au

 14   retour. Par ailleurs, il y avait aussi toutes les personnes qui par leur

 15   profession étaient liées à la normalisation de la situation à Knin

 16   puisqu'elles avaient un travail à accomplir dans ce cadre dans la région.

 17   Je délivrais donc des laissez-passer à toutes ces personnes, je parle de

 18   personnes travaillant dans les entreprises électriques, à la télévision, la

 19   radio, la banque, et dans des entreprises de ce genre.

 20   Quant aux autres personnes qui simplement avaient le désir de rentrer, un

 21   désir affectif, qu'il s'agisse de personnes âgées, de femmes, d'enfants, ou

 22   autres, elles n'obtenaient pas de ma part un quelconque laissez-passer.

 23   Même les hommes, qui étaient mes subordonnés et qui n'avaient pas un statut

 24   officiel leur donnant droit au retour dans la région de Knin, ne pouvaient

 25   en qualité de civils ou en uniforme franchir les postes de contrôle en

 26   question.

 27   Je sais qu'un jour, il y avait un de mes hommes qui avait pris la route

 28   pour se rendre vers Knin et j'ai donné l'ordre à la police de lancer une

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  1   procédure disciplinaire à son encontre car il avait franchi un poste de

  2   contrôle et avait pénétré dans le territoire de Knin sans mon autorisation,

  3   il venait de Makarska, et ceci vous montre à quel point la politique

  4   appliquée par moi et les critères appliqués par moi étaient restrictifs.

  5   Q.  Pour illustrer cela --

  6   M. KAY : [interprétation] Je demande l'affichage du document 2D00760 sur

  7   les écrans.

  8   Nous attendons l'affichage de ce document, et entre-temps, Monsieur le

  9   Président, je demande l'autorisation d'ajouter ce document à la liste 65

 10   ter de la Défense.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame De Landri.

 12   Mme DE LANDRI : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'autorisation vous est accordée.

 14   M. KAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 15   Q.  Monsieur le Témoin, vous étiez en train de parler des laissez-passer

 16   délivrés par vous. Reconnaissez-vous le document affiché à l'écran en ce

 17   moment comme étant un laissez-passer de ce genre destiné aux membres d'une

 18   équipe d'ouvrier électrique donc des gens qui travaillaient pour une

 19   société d'électricité ?

 20   R.  Oui. Oui.

 21   Mais ce laissez-passer a été signé, si je vois bien, par mon adjoint, car

 22   il est écrit ici "substitut," ou "adjoint du chef," et ce n'est pas ma

 23   signature qu'on voit ici, mais celle de Petar Pasic, qui était mon adjoint,

 24   si je ne me trompe. Mais, en tout cas, ce document est bien un des

 25   exemplaires de laissez-passer que nous délivrions à toutes personnes qui

 26   étaient habilitées à se rendre vers le territoire de Knin, donc des gens

 27   qui travaillaient pour la poste, la banque, la radio et la télévision, ou

 28   l'électricité.

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  1   M. KAY : [interprétation] Je vous remercie. Je n'ai plus besoin de vous

  2   poser des questions et, Monsieur le Président, je vous demande le versement

  3   au dossier de ce document.

  4   Mme DE LANDRI : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

  6   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document devient la pièce D1724.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D1724 est admise en tant que

  8   pièce à conviction.

  9   M. KAY : [interprétation]

 10   Q.  Je passe maintenant à un autre sujet, Monsieur Cipci. Il ressort de

 11   votre déclaration préalable, que vous vous rendiez régulièrement dans la

 12   région de Knin dans la période qui a fait suite à l'opération Tempête; ceci

 13   est-il exact ?

 14   R.  J'y suis allé assez souvent, en particulier dans les touts premiers

 15   jours qui ont suivi l'opération. Le 5, je suis allé à Knin. Le 6, je suis

 16   allé à Knin, j'y arrivais tôt le matin.

 17   Q.  Je vais maintenant vous interroger au sujet de la période qui suit.

 18   Donc par la suite, avez-vous continué à vous rendre régulièrement à Knin ?

 19   Quand je dis "Knin," je ne parle pas que de la ville mais de toute la zone

 20   environnante.

 21   R.  Par la suite je me suis rendu dans la zone libérée, mais moins

 22   fréquemment qu'au cours des touts premiers jours qui ont suivi la fin de

 23   l'administration, et ce, pour une raison très simple. En effet, en dehors

 24   des employés travaillant pour moi qui se trouvaient déjà à Knin le 5,

 25   j'avais là-bas pas mal de mes hommes qui travaillaient au poste de police.

 26   En effet mes hommes, ceux qui venaient de ma direction travaillaient à la

 27   mise en ordre des documents officiels et à la délivrance des papiers

 28   nécessaires aux personnes qui arrivaient dans la région, ils étaient

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  1   également chargés de mettre en ordre les archives.

  2   Puis j'avais également envoyé là-bas pas mal de commandants de poste de

  3   police comme pour le poste de police de Drnis, de Lapac, et je ne me

  4   souviens plus de combien d'autres. Donc mes hommes dirigeaient un certain

  5   nombre de postes de police dans la région, et puisqu'ils étaient très

  6   jeunes et étaient soumis à la peur et n'avaient pas d'appuis logistiques

  7   suffisants, je leur rendais visite à deux fins : d'abord, pour leur montrer

  8   que moi-même qui était un homme beaucoup plus âgé qu'eux, je pouvais venir

  9   dans la région et qu'eux les jeunes n'avaient pas besoin d'avoir peur; et

 10   deuxièmement, j'allais là-bas à bord de ma Ranch Rover, qui est une voiture

 11   assez vaste, et j'apportais pas mal d'aide logistique qui leur était

 12   destinée. Voilà les raisons pour lesquelles je me rendais souvent dans la

 13   Krajina et je circulais un peu partout dans le secteur libéré. J'allais

 14   voir mes hommes ceux qui travaillaient pour moi-même si officiellement ils

 15   étaient sous l'autorité de M. Romanic. Mais c'est moi qui les avais envoyé

 16   là-bas et je me considérais responsable d'eux et je pensais que j'avais le

 17   devoir de m'en occuper.

 18   Q.  Avez-vous coopéré avec d'autres officiers de police de haut rang qui se

 19   trouvaient dans la zone à cette époque ? Avez-vous coordonné votre action

 20   avec eux ?

 21   R.  Celui que je connaissais c'était M. Romanic mais par la suite, nous ne

 22   nous sommes pas vus aussi souvent qu'avant parce que je n'avais pas

 23   nécessité d'entrer en contact avec lui. Il était subordonné à M. Cetina,

 24   qui était le chef et qui agissait à Zadar. Il n'était pas sous mes ordres

 25   donc nous n'avions pas de raisons particulières en tout cas

 26   professionnelles de nous rencontrer. Quand j'allais dans la région,

 27   j'allais voir mes hommes ceux qui sortaient du lycée et que j'avais envoyés

 28   là-bas. Puis il y avait aussi ceux qui travaillaient dans les locaux du

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  1   lycée là-bas et que j'avais envoyés sur place.

  2   Puis j'allais voir également ceux qui travaillaient dans les bureaux

  3   administratifs ou juridiques où j'avais envoyé des jeunes gens chargés de

  4   mettre en ordre les papiers officiels et de délivrer des papiers à toutes

  5   les personnes qui arrivaient dans la région et qui en avaient besoin. Puis

  6   j'allais voir également les postes de police où j'avais envoyé des hommes,

  7   j'allais leur rendre visite. Voilà.

  8   Q.  Est-ce que vous avez eu des contacts avec les coordinateurs nommés par

  9   le ministère de l'Intérieur de l'opération Povratak, opération retour

 10   depuis Zagreb, ceux qui avaient été nommés pour seconder la direction de la

 11   police dans la région ?

 12   R.  Je sais que l'état-major -- ou plutôt, le ministère avait envoyé un

 13   certain nombre d'hommes pour qu'ils apportent leur concours sur place. Je

 14   connaissais la chose mais je n'avais pas nécessité de contacter ces hommes,

 15   car ils venaient en grande partie de la police judiciaire et avaient été

 16   envoyés à la police de Sibenik pour mener à bien les procédures judiciaires

 17   lancées contre des personnes coupables d'un certain nombre d'actes

 18   criminels après l'opération Tempête dans le secteur, et si ce n'était pas

 19   la police judiciaire qui les avait envoyée, c'était la direction de la

 20   police.

 21   Q.  Donc s'agissant de ce que vous faisiez dans la région de Knin, à ce

 22   moment-là, dans le cadre de votre travail de policiers, et eu égard aux

 23   contacts que vous avez pu avoir dans la région, que diriez-vous au sujet de

 24   l'accusation lancée contre M. Cermak selon laquelle il aurait été

 25   commandant de la police civile ?

 26   R.  Il importe, avant tout, de comprendre que le territoire dépendant de la

 27   direction de la police de Knin n'était pas sous ma responsabilité. Donc mes

 28   visites à Knin et dans les zones nouvellement libérées peuvent être

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  1   considérées comme semi privées même si j'allais rendre visite aux hommes

  2   qui travaillaient dans les postes de police.

  3   Mais selon ce que je sais, je suis en mesure de dire avec certitude, je

  4   peux dire donc avec certitude que M. Cermak n'a jamais eu d'attributions

  5   particulières au sein de la police civile car le commandant de la caserne

  6   de Split n'avait lui-même aucune attribution particulière sur la police

  7   militaire et encore moins sur la police civile.

  8   M. Cermak a rempli ses fonctions de commandant de la caserne dans le plein

  9   respect de la loi qui était en vigueur à cette époque. Et il lui était

 10   absolument impossible d'avoir des attributions supérieures à celles qui

 11   étaient les attributions de M. Zoricic, commandant de la caserne à

 12   l'époque. Même si leurs missions n'étaient pas définies par un grade mais

 13   par la loi, et lorsque -- si l'on regarde les attributions qui étaient

 14   celles de M. Cermak par la loi, on constate qu'elles n'impliquent en aucun

 15   cas qu'il ait le moindre pouvoir de commandement sur la police civile.

 16   Si je me souviens bien, j'ai lu la loi à l'époque : le commandant d'une

 17   caserne a pour mission d'établir une relation de bonne qualité avec les

 18   autorités civiles et la police civile. Donc le devoir de M. Cermak c'était

 19   d'établir une coopération de bonne qualité avec M. Romanic pas avec moi.

 20   Avec moi, il pouvait créer que des liens d'amitié de bonne qualité durant

 21   les quelques rencontres que nous avons eues ensemble.

 22   Mais officiellement, sa mission était de créer de bonnes relations,

 23   une bonne collaboration avec M. Romanic. Mais vis-à-vis de la police

 24   civile, il n'avait, à ma connaissance, aucun devoir particulier et il ne

 25   pouvait pas en avoir, d'après la loi.

 26   Q.  Merci. Avez-vous à quelque moment que ce soit reçu la moindre

 27   indication ou un quelconque renseignement vous indiquant qu'il aurait

 28   essayé d'influencer la police d'une façon ou d'une autre ?

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  1   R.  Non. Ce genre de renseignement ne parvenait pas jusqu'à moi. Mais

  2   à mes yeux, il aurait été tout à fait normal et tout à fait clair étant

  3   donné les circonstances dans lesquelles s'est trouvé M. Cermak, étant donné

  4   les circonstances dans lesquelles s'est trouvé M. Romanic, étant donné les

  5   circonstances dans lesquelles s'est trouvé M. Petar Pasic, commissaire du

  6   gouvernement, ces circonstances qui étaient celles d'une situation très

  7   délicate, il aurait été tout à fait normal à mes yeux que leur

  8   collaboration, soit quotidienne de façon à ce que dans le cadre d'une

  9   coopération mutuelle, ils règlent les problèmes nombreux qui se posaient.

 10   Le 5, lorsque les 100 hommes envoyés par moi sont arrivés à Knin,

 11   j'ai dû le soir même leur envoyer une citerne d'eau potable et un groupe

 12   électrogène pour créer de la lumière parce qu'il y avait ni eau ni

 13   électricité à Knin. Voilà la situation que M. Cermak, M. Romanic et M.

 14   Petar Pasic ont eu à affronter lorsqu'ils sont arrivés à Knin. Je comprends

 15   et j'apprécie la nécessité pour eux d'être en contact quotidien et de

 16   s'appuyer les uns sur les autres pour que le travail à faire soit fait dans

 17   de bonnes conditions et pour que la situation qui régnait à Knin se

 18   normalise dans les plus brefs délais.

 19   Q.  Si M. Cermak avait rédigé un ordre écrit destiné à la police de Knin,

 20   la police aurait-elle obligation d'obtempérer à un ordre écrit de ce genre

 21   ?

 22   R.  Voilà ce que je vais vous répondre. En m'appuyant sur mon expérience de

 23   policier, si M. Cermak avait émis un ordre officiel de quelle que nature

 24   qu'il soit, cet ordre n'aurait absolument rien représenté aux yeux de la

 25   police. Parce que, moi, je peux très bien envoyer un ordre officiel au

 26   ministère des Affaires extérieures et cet ordre n'aurait pas la moindre

 27   valeur, parce que le ministre n'est pas mon subordonné, et Romanic n'était

 28   pas le subordonné de M. Cermak. Mais si M. Romanic découvre qu'un crime a

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  1   été commis dans le secteur dont il est responsable, il était dans ces

  2   conditions de son devoir d'informer la direction de la police de ce qui

  3   s'était passé. D'ailleurs cette obligation pesait sur tout citoyen venant à

  4   apprendre qu'un crime a été commis. Tout citoyen dans une telle situation

  5   était tenu de rendre compte de cela à la police et la police ensuite

  6   prenait les mesures qui s'imposaient. Autrement dit, si M. Cermak avait

  7   émis un ordre de quelle que nature qu'il soit visant à ce qu'une enquête

  8   préliminaire soit menée à bien, parce qu'un crime avait été commis, ceci

  9   n'a rien à voir avec un ordre officiel. La police est tenue de réagir à une

 10   plainte déposée par qui que ce soit même si elle est anonyme.

 11   La police dans ce cas procède à un certain nombre de mesures

 12   destinées à enquêter. Si une plainte ou un rapport de ce genre est signé

 13   par quelqu'un, si cette plainte comporte une signature, avec une adresse et

 14   un numéro de téléphone, la police doit procéder à toutes les vérifications

 15   d'usage. Autrement le policier qui n'a pas agi dans ce sens peut faire

 16   l'objet de poursuite disciplinaire. Donc si nous parlons d'ordre adressé à

 17   la police que M. Cermak aurait pu envoyer à M. Romanic, s'il a envoyé un

 18   tel ordre, il s'agissait simplement de note ou d'information envoyée par

 19   lui.

 20   Si M. Cermak a envoyé un ordre à la police, mais je ne sais pas

 21   vraiment pas pourquoi il l'aurait fait cela, je suppose que cet ordre était

 22   rédigé à sa place dans son bureau et qu'il s'était contenté de le signer.

 23   Parce que je peux simplement supposer que M. Cermak, lorsqu'il a repris les

 24   fonctions de commandant de la caserne, a dû lire le texte de loi et les

 25   diverses dispositions concernant ses droits et ses obligations.

 26   Q.  Je vous remercie. Dans votre réponse, nous lisons au compte rendu en

 27   anglais, je cite :

 28   "Si M. Romanic avait découvert qu'un crime avait été commis dans la région

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  1   dont il était responsable, il était de son devoir d'en informer la

  2   direction de la police."

  3   Est-ce que vous vouliez dire M. Cermak ou M. Romanic, parce que M. Romanic

  4   était le chef de la direction de la police ?

  5   R.  Mais toute personne qui occupe un poste de responsabilité officielle a

  6   donc de ce fait des responsabilités supérieures à celles d'un citoyen

  7   normal. Donc si le commandant d'une caserne apprend que quelque chose s'est

  8   passée, quelque chose de répréhensible, il a le devoir d'en informer

  9   n'importe quelle personne ayant un pouvoir officiel de lancer des

 10   poursuites ou en tout cas de lancer une procédure pour établir la véracité

 11   de cet acte. Par conséquent, c'est une obligation morale pour tout citoyen,

 12   mais si vous êtes officier de -- fonctionnaire de l'état, dans ce cas, il

 13   ne s'agit pas simplement d'une obligation morale mais d'une responsabilité

 14   de fonctionnaire au service de l'état.

 15   Donc ce que j'ai dit c'est "M. Cermak."

 16   Q.  Je vous remercie. Pour en terminer sur ce point, est-ce que M. Cermak

 17   aurait eu d'autres pouvoirs disciplinaires sur la police ?

 18   R.  Je l'ai déjà dit, il n'avait aucun pouvoir. Si j'ai dit qu'il n'avait

 19   aucun pouvoir, ceci concerne également des pouvoirs disciplinaires.

 20   M. KAY : [interprétation] Je vous remercie. Merci beaucoup. Je n'ai plus de

 21   questions.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je encore ajouter

 23   une phrase, une question ?

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais ça dépend de ce que vous allez dire

 25   dans cette phrase, mais enfin, prononcez votre phrase et nous verrons

 26   ensuite quelle est la pertinence.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà simplement ce que je voulais dire

 28   encore. La majorité des questions qui m'ont été posées, et des réponses que

Page 23098

  1   j'ai faites, peuvent être obtenues en consultant les textes de loi adoptés

  2   dans cette période par la République de Croatie. Dans ces textes de loi, on

  3   voit exactement quelles sont les attributions et compétences exactes de

  4   chaque personne dans le poste qu'elle occupe. Voilà ce que je voulais dire.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. La Chambre, que vous avez face à

  6   vous, a déjà acquis une certaine expérience quant aux textes de loi adoptés

  7   dans la période. Mais les Juges de la Chambre ont également entendu parler

  8   du fait que la pratique à l'époque n'était pas toujours à 100 % équivalent

  9   à ce qu'indiquaient les textes de loi.

 10   Par conséquent, nous apprécions les réponses faites par vous aux questions

 11   qui vous ont été posées, et nous n'allons, bien entendu, pas perdre de vue

 12   l'existence des textes de loi.

 13   Je pense qu'il serait bon que nous fassions la première pause maintenant,

 14   ce qui donnera la possibilité aux autres équipes de Défense ainsi qu'à

 15   l'Accusation de se préparer au contre-interrogatoire du témoin.

 16   Donc nous faisons la pause et reprenons nos débats à 10 heures 50.

 17   --- L'audience est suspendue à 10 heures 25.

 18   --- L'audience est reprise à 10 heures 55.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant que nous ne poursuivions, Maître

 20   Kehoe, je me tourne vers vous ainsi que vers l'Accusation, car je pense qu

 21   élément prochain témoin attend, est déjà donc à notre disposition. Donc

 22   j'aimerais savoir si vous envisagez d'avoir plus d'un quart d'heure à lui

 23   consacrer à ce témoin aujourd'hui ?

 24   M. KAY : [aucune interprétation]

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ah, je vois maintenant qu'il y a trois

 26   personnes qui se sont levées.

 27   M. KAY : [interprétation] J'avais consulté les parties un peu plus tôt à ce

 28   sujet, et j'ai eu le privilège également de pouvoir prendre connaissance de

Page 23099

  1   la liste des pièces pour le contre-interrogatoire. Je pense que ce témoin

  2   devrait être renvoyé et il pourrait revenir donc après la pause. N'oubliez

  3   pas qu'il s'agit d'un témoin très important, donc je pense qu'il faudrait

  4   peut-être lui donner une heure à laquelle il devrait revenir.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, vous êtes d'accord.

  6   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qu'est-ce que cela signifie pour demain

  8   ?

  9   M. KAY : [interprétation] Je pense que ce témoin nous allons l'entendre

 10   demain.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pendant toute l'audience de demain --

 12   M. KAY : [interprétation] Non, pas pendant toute l'audience, mais pendant

 13   un certain temps, car nous avons également la question des pièces

 14   enregistrées aux fins d'identification.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 16   M. KAY : [interprétation] Donc je ne pense pas qu'il soit judicieux de

 17   commencer à entendre la déposition d'un témoin très important, et puis

 18   d'avoir après quelques trois ou quatre semaines d'interruption d'audience.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non, non. Nous n'allons pas siéger

 20   pendant dix ou 11 jours à partir de jeudi, en fait.

 21   M. KAY : [interprétation] Oui, et nous avons donc des témoins qui ont été

 22   prévus pour cette semaine et pour la semaine d'après. Des experts qu'il va

 23   falloir prendre en considération. Donc en fait je voulais le mettre juste à

 24   la fin; il était le tout dernier témoin en quelque sorte.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Bien.

 26   Je me tourne vers les autres parties, pour voir si vous êtes d'accord avec

 27   cette évaluation que nous venons d'entendre -- alors je ne pense pas. Bon,

 28   il n'est pas judicieux de commencer aujourd'hui mais peut-être qu'il ne

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  1   serait même pas judicieux de commencer à l'entendre demain ce témoin alors,

  2   si j'ai bien compris.

  3   Mme DE LANDRI : [interprétation] C'est cela, Monsieur le Président.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais alors renvoyer chez lui un témoin,

  5   ce n'est pas quelque chose que nous faisons quand même facilement. Maître

  6   Kay, avez-vous envisagé une autre solution ? Je ne sais pas, bon, si nous

  7   siégeons demain après-midi, cela ne suffira pas de toute façon, je ne

  8   dirais même pas si c'est une possibilité.

  9   M. KAY : [interprétation] Ecoutez, c'est un témoin très, très important,

 10   Monsieur le Président.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Vous y avez réfléchi, nous y avons

 12   réfléchi, ce qui fait que le témoin peut disposer pour le moment. Je vous

 13   laisse le soin de traiter avec la Section des Témoins et des Victimes, et

 14   nous verrons quelles -- enfin, nous savons maintenant quelles sont les

 15   conséquences pour le calendrier.

 16   Maître Kehoe, est-ce que vous êtes prêt à commencer votre contre-

 17   interrogatoire de M. Cipci ?

 18   M. KEHOE : [interprétation] Oui, tout à fait.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie.

 20   Contre-interrogatoire par M. Kehoe : 

 21   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Cipci.

 22   M. KEHOE : [interprétation] Est-ce que la déclaration D1723 peut être

 23   affichée à l'écran ? C'est le paragraphe 4 qui m'intéresse. Il s'agit de la

 24   déclaration de M. Cipci.

 25   Q.  Monsieur Cipci, j'aimerais attirer votre attention sur le paragraphe 4

 26   et j'ai quelques questions liminaires à vous poser qui porte sur la

 27   planification avant l'opération Tempête, donc avant le 4 août.

 28   Vous avez reçu des consignes de la part du ministre Jarnjak qui vous avait

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  1   indiqué qu'il faudrait que vous vous prépariez à aller dans la zone occupée

  2   dès qu'elle serait libérée, et ce, pour pouvoir assurer le contrôle de

  3   cette zone, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  A ce titre, vous indiquez, au paragraphe 5, qu'en fait, vous -- au

  6   paragraphe 6, en fait, je m'excuse, vous dites que vous aviez trois fois

  7   plus de policiers que cela n'était nécessaire donc pour accomplir cette

  8   tâche ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Monsieur Cipci, lors de vos discussions avec le ministre Jarnjak ou

 11   avec M. Moric l'assistant du ministre, que le MUP suivant lequel le MUP

 12   devrait autoriser des activités criminelles à avoir lieu ? Je vous pose

 13   cette question, Monsieur, parce que j'aimerais que vous répondiez pour que

 14   cela soit consigné au compte rendu d'audience.

 15   R.  Non, non, non. Non, non. Non, non, cela n'a jamais été mentionné. C'est

 16   justement la police qui existe pour prévenir que des crimes -- pour

 17   empêcher que des crimes soient commis, c'est la police, en fait, qui doit

 18   sanctionner ou prévenir les crimes commis.

 19   Q.  Monsieur Cipci, au vu de cet objectif, est-ce que vous avez compris que

 20   les instructions du ministre Jarnjak ou du ministre assistant Moric,

 21   instructions qui vous étaient destinées, visaient à se que vous vous

 22   déplaciez très rapidement dans cette zone pour en assurer la sécurité et

 23   partant pour empêcher donc que des crimes y soient commis ?

 24   R.  Avec le ministre Jarnjak, et d'ailleurs je ne pense pas que Moric n'ait

 25   jamais assisté aux réunions avec les chefs de police, mais je vous disais

 26   donc, avec le ministre Jarnjak, a deux ou trois reprises, nous avons parlé

 27   de façon assez exhaustive de nos obligations après le début de l'opération

 28   Tempête. Nous avons parlé des dispositions juridiques et de la tâche de la

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  1   police, qui devaient faire en sorte que l'ordre public règne, qu'ils

  2   devaient également protéger les villes et biens des personnes dans cette

  3   zone. Conformément à la législation en vigueur, nous étions tenus, après la

  4   libération, d'entrer dans la zone avec le nombre nécessaire de policiers

  5   pour, et ce, pour nous acquitter de nos obligations juridiques.

  6   Je dirais que pour ce qui est de ma zone de responsabilité, j'ai agi de

  7   façon légèrement différente parce que j'avais eu une mauvaise expérience au

  8   cours de la Deuxième Guerre mondiale il y avait quatre armées, deux

  9   factions, et deux forces de libération, qui sont entrées dans ma ville, ce

 10   qui fait que toutes les quatre forces armées, qu'il s'agissait de forces de

 11   libération ou de forces d'occupation, se sont toutes comportées de la même

 12   façon, à savoir qu'elles ont tué et pillé. Donc au vu de ce vécu, de cette

 13   expérience, j'ai supposé que la même situation pourrait se répéter cette

 14   fois-ci, une fois que l'armée croate aurait libéré le territoire.

 15   Donc pour moi, ce qui était extrêmement clair, c'est qu'il y avait une

 16   animosité ou une haine qui était quasiment pathologique, c'est ce que je me

 17   hasarde à dire, donc de ce fait j'ai supposé que des actes de "revenge" --

 18   de vengeance auraient pu se produire --

 19   Q.  Non, écoutez, je souhaiterais vous interrompre.

 20   R.  Oui, je vous en prie.

 21   Q.  Au vu de vos instructions et compte tenu de votre expérience, vous vous

 22   êtes déplacé très rapidement dans votre secteur, notamment à Vrlika, et le

 23   5 août, comme vous l'indiquez au paragraphe 5 de votre déclaration, vous

 24   avez donc -- vous y avez établi un poste de police; c'est cela ?

 25   R.  Non seulement j'y suis arrivé très rapidement, mais également j'ai

 26   donné l'ordre à M. Urija, qui était le chef du Secteur de la Police, le

 27   chef de la police du secteur, je lui ai ordonné de faire en sorte que les

 28   Unités de Police soient prêtes, et je lui ai ordonné d'avoir un nombre

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  1   suffisant de policiers qui pouvaient être mis en faction dans le bâtiment

  2   en question. Donc je lui ai donné l'ordre d'aller, d'arriver à Vrlika avec

  3   l'armée croate, et j'ai fait l'effort d'accompagner mes forces pour

  4   qu'elles arrivent dans Vrlika avec l'armée, parce que, moi, je voulais me

  5   trouver dans ma zone de responsabilité, à savoir Vrlika, en même temps que

  6   l'armée croate pour pouvoir avoir la maîtrise et le contrôle de la zone

  7   dont j'étais responsable immédiatement.

  8   Donc nous avons mis sur pied un poste de police. Nous avons également

  9   organisé des postes de contrôle. En accord d'ailleurs avec les commandants

 10   des unités qui se trouvaient là et qui étaient des unités de l'armée

 11   croate, nous avons organisé une cérémonie très, très rapide, très brève, et

 12   ensuite ils sont partis de la zone.

 13   Q.  Alors pour ne pas trop perdre de temps, j'aimerais vous montrer le

 14   document 1D2991, document qui porte sur ce sujet justement.

 15   M. KEHOE : [interprétation] J'aimerais qu'il soit affiché à l'écran.

 16   Q.  Il s'agit de votre rapport, Monsieur, rapport du 5 août 1995, qui porte

 17   sur la création donc du poste de police à Vrlika, et donc cela a été fait à

 18   16 heures le 5 août, et vous indiquez également et vous envoyez cette

 19   information à tous les autres sous postes de police :

 20   "Que les territoires qui avaient été précédemment occupés, le

 21   territoire de cette administration de la police est maintenant placé sous

 22   contrôle."

 23   C'est bien ce que vous avez écrit, n'est-ce pas, Monsieur ?

 24   R.  Est-ce que vous pourriez répéter votre question, je vous prie ? Qu'est-

 25   ce qui est exact, exactement ?

 26   Q.  Dans ce rapport, bon, il s'agit de votre rapport, et vous avez donc

 27   envoyé quelque chose de semblable à cette époque-là ?

 28   R.  Ecoutez, tous les rapports, qui provenaient de mon administration de

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  1   police, n'étaient pas tous rédigés de ma main, d'ailleurs vous voyez qu'il

  2   n'y a pas de signature sur ce document. C'est le chef de mon secteur qui

  3   rédigeait également ce type de documents. Pour l'essentiel, M. Jure Radalj

  4   était donc le chef du Secteur de la Police, et lui, il avait la

  5   responsabilité de tous les policiers qui portaient l'uniforme. Donc c'est

  6   le premier à être entré dans Vrlika avec l'armée, et c'est probablement lui

  7   qui a rédigé ce rapport.

  8   Q.  Mais vous n'avez aucune raison de remettre en question la véracité et

  9   l'exactitude de l'information contenue dans ce rapport, n'est-ce pas ?

 10   R.  Non, non, absolument pas. Non, c'est un rapport que je connais. Il n'y

 11   avait pas de documents écrits qui pouvaient passer par l'administration de

 12   la police sans que je le voie. Il ne pouvait pas non plus être envoyés à

 13   partir de l'administration de ma police sans que je le voie. C'était la

 14   façon dont j'avais choisi de diriger cette administration de la police

 15   parce que c'était l'une des plus grosses administrations de police du pays.

 16   Q.  Oui, je comprends tout à fait.

 17   M. KEHOE : [interprétation] J'aimerais demander le versement au dossier de

 18   cette pièce, la pièce 1D2991.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mme De Landri.

 20   Mme DE LANDRI : [interprétation] Pas d'objection.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela deviendra la pièce D1721 [comme

 23   interprété].

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, bon, je dois vous dire que je

 25   me demande ce que nous avons fait au cours des quatre dernières minutes.

 26   Bon, le témoin a indiqué, de façon très, très claire, qu'il avait justement

 27   mis sur pied l'administration de la police. Le document semble étayer cette

 28   information. Il y a un litige à ce sujet ?

Page 23105

  1   Mme DE LANDRI : [interprétation] Non, absolument pas, Monsieur le

  2   Président.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors pourquoi est-ce que vous ne dites

  4   pas tout simplement je présente directement le document qui était

  5   l'information présentée par le témoin ce qui aurait pris 20 secondes

  6   seulement ?

  7   M. KEHOE : [aucune interprétation]

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est une question qui fait l'objet

  9   d'aucun contentieux.

 10   M. KEHOE : [interprétation] Oui, mais je voulais parler du contrôle du

 11   territoire, et c'est la raison pour laquelle je veux aborder et présenter

 12   les documents. Bon, si vous avez un peu de patience, Monsieur le Président,

 13   je vais aller aussi vite que possible, je vais essayer donc de faire en

 14   sorte que les réponses ne soient pas trop longues, mais c'est un thème qui

 15   m'intéresse beaucoup et je vais procéder aussi rapidement que la Chambre.

 16   Q.  [aucune interprétation]

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, peut-être qu'il faudrait

 18   que je verse officiellement le document au dossier.

 19   M. KEHOE : [interprétation] Oui, je m'excuse.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, je ne vois pas la

 21   cote qui a été attribuée. Est-ce que vous pourriez la répéter, je vous

 22   prie, cette cote ?

 23   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce D1725.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D1725 est versée au dossier.

 25   Poursuivez.

 26   M. KEHOE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 27   Q.  Monsieur Cipci, lorsque vous avez mis en place donc et établi votre

 28   poste de police ainsi que les sous postes de police, à cette époque-là,

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  1   est-ce que les autorités civiles et l'administration de la police ont placé

  2   sous contrôle cette zone ? Je vous parle maintenant du territoire occupé.

  3   Une fois que vous avez donc établi ces postes de police, est-ce que

  4   l'administration de la police a placé sous son contrôle ces zones qui

  5   avaient été précédemment occupées ?

  6   R.  Si vous pensez seulement à ma zone de responsabilité, c'est exact.

  7   Parce que le but était de normaliser la situation à Vrlika, et ce aussi,

  8   rapidement que possible, et pour ce faire, il y avait donc le chef à

  9   Vrlika, les représentants civils qui m'ont accompagné. Il m'accompagnait là

 10   et il a essayé justement d'établir l'autorité civile, en même temps que moi

 11   j'essayais donc d'établir les instances de la police.

 12   Q.  Bien. Alors nous allons passer à autre chose.

 13   Plus tard ce jour-là - et nous sommes toujours à Vrlika - nous voyons

 14   d'après votre déclaration que vous êtes allé à Knin, et je fais référence

 15   aux paragraphes 6 et 7. Alors vous allez dans un premier temps à Kijevo,

 16   comme vous l'indiquez au paragraphe 7, puis ensuite à Knin. J'aimerais

 17   savoir, Monsieur Cipci, si vous avez fait cela parce que vous aviez compris

 18   que même si Knin était à l'extérieur de votre zone de responsabilité le

 19   personnel ou les membres du MUP de M. Cetina n'étaient pas encore arrivés à

 20   Knin à ce moment-là ? C'est pour cela que vous, vous êtes allé à Knin ?

 21   R.  Alors je vais répondre à cette question. Lorsque nous sommes arrivés à

 22   Vrlika, nous avons dû attendre un certain temps parce qu'il y avait des

 23   combats qui se déroulaient, et à notre arrivée à Vrlika, le commandant de

 24   la HV qui se trouvait -- à cet endroit m'a dit Kijevo a été -- a déjà été

 25   libéré. Donc j'ai téléphoné à M. Cetina et je lui ai dit : Kijevo a été

 26   libéré. D'après, en fonction de l'accord qui a été conclu, est-ce que vous

 27   avez envoyé votre force de police à Kijevo ? M. Cetina a répondu en disant

 28   : Cipci, je m'excuse mais Kijevo ne fait pas partie de ma zone de

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  1   responsabilité. Bon, je n'ai pas réagi à cela. Je n'ai pas répondu mais au

  2   lieu de cela j'ai téléphoné immédiatement au ministre Jarnjak. Je lui ai

  3   relayé la conversation que j'avais eue avec Cetina et je lui ai demandé

  4   ainsi la permission de pouvoir entrer avec mes forces dans Kijevo étant

  5   donné que je voulais que la police assure le contrôle le plus rapidement

  6   possible des zones libérées. Donc le ministre a donné son accord et il a

  7   donné un ordre à mon chef de secteur, et ensuite je suis allé à Knin

  8   immédiatement en supposant que Knin se trouvait dans la même situation que

  9   Kijevo, ce qui d'ailleurs a été confirmé.

 10   Q.  Donc vous êtes ensuite reparti à Knin, comme cela est expliqué au

 11   paragraphe 7, et vous avez remarqué qu'il n'y avait pas de présence de

 12   police militaire, ni de police civile d'ailleurs. Donc est-ce qu'à ce

 13   moment-là, vous avez pris mes mesures pour faire en sorte que le MUP, la

 14   police civile puisse arriver à Knin pour assurer la sécurité de cette zone

 15   également ?

 16   R.  Lorsque je suis arrivé à Knin, lorsque je suis arrivé devant le

 17   commandement serbe, j'ai rencontré un certain nombre d'officiers, de

 18   soldats croates, et en parlant à ces officiers, en fait c'est eux qui m'ont

 19   demandé à faire en sorte de faire venir le plus rapidement possible des

 20   membres de la police qu'il s'agisse de la police militaire ou de la police

 21   civile d'ailleurs. Donc ils ont vu que je portais l'uniforme du chef de la

 22   police et je leur ai donné mon accord --

 23   Q.  Je vous interromps. Donc lorsque vous êtes arrivé à Knin, l'après-midi

 24   du 5 août --

 25   R.  Le matin, le matin.

 26   Q.  Le matin du 5 août, des officiers de la HV vous ont demandé de faire

 27   venir la police dans la ville; c'est cela ?

 28   R.  Bon. Il s'agissait d'officiers de grades subalternes. Moi, je savais en

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  1   fait, je connaissais personnellement les commandants de brigades qui

  2   étaient entrés dans Knin, notamment M. Krsticevic, mais là, il s'agissait

  3   d'officiers qui étaient moins gradés, que j'avais rencontrés devant

  4   l'ancien commandement serbe, dans le bâtiment l'ancien commandant serbe.

  5   Ils m'ont dit : M. Cipci, si possible, faites en sorte qu'arrive une force

  6   de police et cela ne fait l'objet d'aucun litige.

  7   Q.  Donc vous n'avez pas consulté le ministre Jarnjak et pour faire venir

  8   une force de police dans Knin, n'est-ce pas ?

  9   R.  Je ne pouvais pas, je n'avais pas de liaison téléphonique ni de liaison

 10   radio avec Zagreb. C'est la raison pour laquelle j'ai dû repartir à Vrlika,

 11   et c'est seulement à ce moment-là que j'ai consulté le ministre. Donc, je

 12   lui ai demandé son aval pour pouvoir entrer dans Knin avec mes officiers.

 13   Et d'ailleurs, il a approuvé cela, et j'ai ensuite donné un ordre à Jure

 14   Radal, mon chef de secteur, pour -- en fait, il avait -- il disposait de

 15   100 policiers qui étaient déjà prêts, puisque j'avais eu beaucoup plus de

 16   policiers étant donné la taille de mon administration de la police, et je

 17   lui ai donné l'ordre de les envoyer aussi rapidement que possible à Knin.

 18   Ils sont arrivés à Knin. Il n'y avait pas d'eau. Il n'y avait pas

 19   d'électricité. C'est la raison pour laquelle en fin d'après-midi, j'ai fait

 20   en sorte qu'un camion de sapeur-pompier rempli d'eau arrive, ainsi qu'un

 21   groupe électrogène, ainsi qu'une station radio, d'ailleurs.

 22   Q.  Je vais vous interrompre.

 23   Mme DE LANDRI : [interprétation] Est-ce que le témoin pourrait terminer ses

 24   réponses ?

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, je ne vais pas m'opposer à

 26   l'intervention de Me Kehoe, parce qu'il lui a posé une question à propos

 27   d'une consultation avec M. Jarnjak, et nous étions déjà en train de parler

 28   d'eau, d'électricité et des méthodes utilisées pour faire venir de l'eau

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  1   avec le groupe électrogène, le camion de sapeur-pompier rempli d'eau, et

  2   cetera. Donc, le témoin, en fait, s'était écarté du sujet principal de la

  3   question.

  4   Donc, j'aimerais vous demander de vous concentrer sur les questions qui

  5   vous sont posées, Monsieur. Si Me Kehoe vient à vous demander quel type de

  6   véhicule a été utilisé pour faire venir de l'eau, vous répondrez à ce

  7   moment-là.

  8   Poursuivez.

  9   M. KEHOE : [interprétation]

 10   Q.  Monsieur Cipci, donc, soit avant cette conversation avec M. Jarnjak,

 11   soit après, d'ailleurs, est-ce que quelqu'un du ministère de l'Intérieur,

 12   M. Jarnjak ou le ministre Moric, ou quelqu'un de la HV, ont essayé de vous

 13   empêcher d'envoyer ces officiers de police à Knin pour qu'ils assurent la

 14   sécurité de cette zone ?

 15   R.  On m'a demandé de les faire venir. Donc, on n'aurait pas pu me demander

 16   de les faire venir tout en m'empêchant de le faire.

 17   Q.  Je vous remercie, Monsieur. J'aimerais vous montrer un document à ce

 18   sujet. Il s'agit de la pièce de la liste 65 ter 1D2990. C'est un rapport du

 19   5 août qui prote justement sur l'établissement de l'autorité croate dans la

 20   zone de Vrlika-Knin.

 21   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je ne pense pas qu'il y

 22   aura des objections à propos du document, mais j'aimerais poser plusieurs

 23   questions à propos de ce document.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, faites. Si le document exige que

 25   l'on pose des questions, ce n'est pas juste clair à la lecture de ce

 26   document.

 27   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

 28   Q.  Donc, je vois en fait que l'objet est : "Etablissement de l'autorité

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  1   croate dans la zone de Vrlika-Knin". C'est un rapport -- document du 5 août

  2   1995 qui émane de votre administration de la police, et vous voyez qu'il

  3   est indiqué 10e Poste de Police.

  4   Donc, j'aimerais demander le versement au dossier de ce document pour

  5   qu'ainsi, nous puissions poser dans questions à propos donc d'une pièce qui

  6   aura déjà été versée au dossier.

  7   Mme DE LANDRI : [interprétation] Pas d'objection.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur le Greffier.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cette pièce devient la pièce D1726.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D1726 est versée au dossier.

 11   Poursuivez.

 12   M. KEHOE : [interprétation]

 13   Q.  J'aimerais vous poser deux questions à propos de ce document. Alors,

 14   vous voyez donc qu'il y a le premier paragraphe, où il est indiqué :

 15   "Nous indiquons que pendant l'après-midi du 5 août 1995, des officiers de

 16   l'administration de police Split-Dalmatie sont entrés dans les localités de

 17   Vrlika, Kijevo, Civljane et Knin et ont établi l'autorité civil dans ces

 18   mêmes localités."

 19   Monsieur Cipci, donc il est question d'établir l'autorité civile. Qu'est-ce

 20   que cela signifie exactement ?

 21   R.  Pour moi, cela signifie ce que je sais déjà, d'ailleurs, à savoir j'ai

 22   amené à Vrlika le chef municipal de Vrlika, en quelque sorte, l'autorité

 23   municipale de Vrlika, et son arrivée, en fait, a marqué l'établissement de

 24   l'autorité civile. Ensuite il lui a été demandé de reconstruire Vrlika.

 25   Pour ce qui est des autres localités, Vrlika, Kijevo, Civljane, il s'agit

 26   de petits villages et hameaux qui se trouvent autour de Vrlika à proprement

 27   parler, et il n'y a pas véritablement d'autorité civile. Il n'y a pas

 28   véritablement -- enfin, je pense qu'en ex-Yougoslavie, il s'agissait de

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  1   communes locales.

  2   Pour ce qui est maintenant de Knin, l'autorité civile a été établie en ce

  3   sens que le gouvernement croate a nommé un commissaire pour la ville de

  4   Knin, qui est arrivé. Alors, je ne sais pas s'il était présent le 5 et le 6

  5   août, mais je sais que je l'ai rencontré le 6 à Knin. Il s'agissait de M.

  6   Petar Pasic.

  7   Pour ce qui est des officiers de police, il a été établi que nous avons

  8   établi un sous-poste de police à Vrlika. Il s'agissait d'un sous-poste de

  9   police du 10e Poste de Police, donc c'est la raison pour laquelle cette

 10   lettre a été envoyée par le commandant Marko Bilobrk, qui avait la

 11   responsabilité du 10e Poste de Police. Donc il a rédigé ce rapport de sa

 12   propre initiative et il l'a envoyé au QG Povratak, qui était dirigé par

 13   Josko Moric.

 14   Ce qui est absolument avéré également, c'est que nous sommes arrivés avec

 15   nos employés à Knin et à Kijevo --

 16   Q.  Oui. J'aimerais passer à la question suivante.

 17   Vous parlez de l'établissement de l'autorité civile, est-ce que cela

 18   signifie que l'ordre constitutionnel croate avait été restauré ?

 19   R.  Quoi qu'il en soit, puisqu'il s'agit de Vrlika, c'était la première

 20   phase qui permettait d'établir ou de restaurer cet ordre. Une personne qui

 21   m'a accompagné à Vrlika le 5 ne pouvait pas quand même personnifier tout le

 22   concept de l'autorité civile, mais il lui avait été demandé, en coopération

 23   avec le préfet du comté de Split et de Dalmatie, de faire le nécessaire

 24   pour établir l'autorité civile dans la ville de Vrlika.

 25   En sus du conseil municipal le plus important, il y avait d'autres services

 26   qui devaient être établis également, il y avait toute la structure, en

 27   fait, de l'autorité civile.

 28   Q.  Il est indiqué à la fin de ce texte :

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  1   "Que l'assainissement et le nettoyage du terrain étaient en cours et

  2   que cela était effectué par les membres de la protection civile,

  3   essentiellement dans la zone de la ville de Knin."

  4   M. KEHOE : [interprétation] J'aimerais maintenant présenter un autre

  5   document, qui est le document D606, et j'aimerais demander l'affichage du

  6   document D606.

  7   Q.  Donc, Monsieur Cipci, c'est un document qui porte votre nom, un

  8   document du 9 août 1995, et il s'agit donc d'un rapport relatif à

  9   l'assainissement et au nettoyage du terrain dans la zone de Vrlika. Et vous

 10   faites remarquer que :

 11   "Pour ce qui est de cet assainissement et du nettoyage du terrain dans la

 12   municipalité de Vrlika, le 9 août, voilà ce que vous dites -- je vous fais

 13   remarquer que 60 conscrits, à savoir l'unité d'assainissement du terrain, a

 14   effectué les tâches les plus importantes…"

 15   Puis ensuite, vous avez les différentes catégories, inhumation des corps,

 16   il est question ensuite d'animaux, de bétail, et cetera.

 17   M. KEHOE : [aucune interprétation]

 18   Q.  Puis vous voyez qu'il est indiqué que six corps humains et d'autres

 19   animaux ont également été enterrés.

 20   Donc, il est exact, Monsieur, que l'assainissement du terrain relevait de

 21   la responsabilité du MUP et des autorités civiles, n'est-ce pas ?

 22   R.  Ecoutez, voilà comment se présentait la situation. Avant l'opération

 23   Tempête, avant le début de l'opération Tempête, et lors des réunions que

 24   nous avons eues avec le ministre, toutes ces obligations donc bétail,

 25   mesures d'assainissement, mesures hygiéniques, et cetera, relevaient de la

 26   compétence de la police. Outre les forces de police, j'avais également tout

 27   le personnel de la protection civile ainsi que leur matériel. J'avais

 28   également une Brigade de sapeurs-pompiers qui a participé également à cela

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  1   -- ou une force de sapeurs-pompiers.

  2   Alors quelques jours après l'opération Tempête, il y a eu certain

  3   malentendu à propos du bétail. Parce que le ministre Susak avait autorisé

  4   les unités militaires à récupérer le bétail également, ce qui fut une cause

  5   d'ailleurs de désaccord entre l'armée et la police, pour ce qui était du

  6   bétail. Cela n'a pas une grande pertinence peut-être pour le moment, mais

  7   le fait est que nous avions fait ce que nous devions faire. Moi, j'avais eu

  8   mes conversations avec M. Petar Pasic, et je savais qu'il n'avait pas

  9   suffisamment de matériel, qu'il n'avait pas suffisamment d'hommes pour

 10   faire ce genre de chose. C'est la raison pour laquelle les hommes de la

 11   protection civile ainsi que les sapeurs-pompiers pour qu'ils puissent leur

 12   prêter assistance pour l'exécution de ces tâches qu'il fallait absolument

 13   accomplir pour pouvoir normaliser la situation dans cette zone. Ce qui

 14   n'était pas donc de ma compétence puisque pour moi, il fallait tout

 15   simplement que je fasse cela a Vrlika. Mais à Vrlika, je l'ai fait en deux

 16   jours, je pense par exemple aux panneaux de signalisation sur la route

 17   entre Vrlika et Sinj, je pense, et puis il faut savoir que la vie a repris

 18   son cours normal assez rapidement à Vrlika.

 19   Q.  Alors j'aimerais maintenant passer au paragraphe 10 de votre

 20   déclaration, D1723.

 21   M. KEHOE : [interprétation] Paragraphe 10, donc est-ce que cela

 22   pourrait être affiché à nouveau à l'écran, Monsieur le Greffier.

 23   Q.  Au paragraphe 10, on commence à parler des centres d'Accueil, et vous

 24   dites que le matin du 5 août, lorsque vous êtes arrivé à Knin, vous avez

 25   organisé, vous avez établi des centres d'Accueil pour les personnes âgées

 26   et pour les enfants à l'école élémentaire et aussi pour des jeunes près de

 27   Sinj.

 28   Ici, dans cette affaire, l'Accusation a avancé une allégation selon

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  1   laquelle ces centres d'Accueil étaient simplement un véhicule visant à

  2   faire partir la population serbe de la Krajina. Qu'en pensez-vous compte

  3   tenu du fait que c'était vous à l'origine de l'établissement de ces centres

  4   d'Accueil à Knin, le matin du 5 ?

  5   R.  Non, ceci n'était pas comme vous le dites. Moi, je leur ai dit

  6   d'établir un centre d'Accueil dans le gymnase de l'école. Justement, car

  7   dès le matin, j'avais vu un grand nombre d'hommes, de femmes et d'enfants,

  8   ils m'ont dit qu'ils étaient des Croates, peut-être que ce n'était pas

  9   vrai, peut-être ils étaient des Serbes et ils avaient peur de dire qu'ils

 10   l'étaient. Mais peu importe, moi, j'ai dit à mes hommes que tous ceux qui

 11   souhaitaient s'abriter ce jour-là, et bien qu'il fallait les héberger dans

 12   le gymnase.

 13   D'autant plus qu'à ce moment-là, à Knin, il n'y a plus d'eau ni

 14   d'électricité, alors que nous, nous avions des groupes électrogènes. Donc

 15   nous avions de l'électricité, de l'eau, donc c'était plutôt pour aider la

 16   population. Il n'y avait pas d'autre raison à cela. Car ces mêmes

 17   personnes, au bout de quelques jours, elles pouvaient partir de leur propre

 18   gré.

 19    Je vais vous donner un exemple, le 6 et le 7, le 6 ou le 7, j'ai

 20   reçu un appel de la part de Celestin Srdelic, un bon ami qui est devenu par

 21   la suite notre ambassadeur à Ljubljana. Il m'a téléphoné afin que je l'aide

 22   à trouver son père et la mère de sa femme car, d'après les informations,

 23   ces personnes étaient restées à Knin. J'ai dit à Celestin, Cele, que, s'ils

 24   sont restés à Knin, le plus probablement, ils sont abrités chez mes hommes,

 25   c'est-à-dire à l'administration de la police ou, plus précisément, à

 26   l'école. Moi, je me suis rendu à l'école, dans ce centre d'Accueil. J'ai

 27   regardé la liste, je les ai trouvés, et j'ai dit que Cele les saluait et

 28   que le lendemain ou le surlendemain, il allait venir les rendre visite;

Page 23115

  1   c'est ce qu'il a fait, et d'autres personnes aussi qu'il souhaitait.

  2   Une fois la situation normalisée, les gens sont partis de leur propre

  3   gré, là où ils souhaitaient partir. Un grand nombre -- une bonne partie de

  4   la population, qui est restée à Knin, s'est abritée dans la caserne des

  5   forces internationales; c'est au nord de Knin à l'entrée de la ville. Si

  6   mes souvenirs sont bons et d'après ce que je suppose aussi, c'est dans ce

  7   centre d'Accueil, la population était mixte.

  8   Je sais que le 8, je crois - ou peut-être le 7 - l'évêque de Sibenik,

  9   feu Mgr. Badurina, est venu, lui aussi. Il est venu rendre visite à ces

 10   personnes; moi, je le rencontrais sur place et je crois que M. Pasic

 11   l'accompagnait aussi. Donc il ne s'agissait pas du tout d'un camp dans

 12   lequel on hébergeait ces personnes-là. Il s'agissait d'un centre d'Accueil

 13   visant à venir en aide à ces personnes-là pendant les quelques journées qui

 14   ont suivi après la conquête ou la libération de Knin.

 15   Q.  Monsieur Cipci, je vais vous montrer un document en date du 25 août,

 16   dont l'auteur que vous avez rédigé vous-même, concernant les personnes

 17   trouvées dans la zone nouvellement libérée, envoyé à M. Franjo Djurica.

 18   M. KEHOE : [interprétation] Il s'agit de 1D2992, en vertu de 65 ter.

 19   Veuillez afficher cela à l'écran, Monsieur le Greffier d'audience.

 20   Q.  Monsieur Cipci, veuillez examiner cela. Nous ne voyons pas votre

 21   signature, mais votre nom figure au fond du document. Le document émane de

 22   votre bureau et a un cachet aussi en bas à gauche; est-ce que vous

 23   reconnaissez ce document ? Si vous ne le reconnaissez pas, est-ce que vous

 24   avez des raisons de croire qu'il ne s'agit pas là d'un document authentique

 25   émanant de votre bureau ?

 26   R.  Je n'ai pas de raison de douter de l'authenticité de ce document. Car

 27   après la libération de cette région, tous ceux qui avaient des parents dans

 28   la région de Split et de Sinj, et c'était le cas de nombreuses personnes,

Page 23116

  1   ont exprimé leur souhait d'aller rejoindre leurs familles temporellement.

  2   Près de Sinj, nous avons créé également un centre d'Accueil pour les mêmes

  3   raisons que celles qui étaient derrière l'établissement de ces centres

  4   d'Accueil à Knin, c'est-à-dire pour venir en aide aux gens, le temps que la

  5   situation se normalise et que les personnes puissent se procurer des

  6   vivres, de l'eau et de l'électricité. Donc c'étaient les mêmes raisons tout

  7   simplement afin de leur venir en aide. C'était une solution provisoire.

  8   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite proposer

  9   maintenant le versement au dossier de la pièce 1D2992, en vertu de 65 ter.

 10   Mme DE LANDRI : [interprétation] Pas d'objection.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier d'audience.

 12   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D1727.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] 1727 est versée au dossier.

 14   M. KEHOE : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur Cipci, en regardant ce document, il est indiqué qu'entre 70 et

 16   75 Croates ont été placés dans des bus et ont été envoyés à Split ou Sinj,

 17   chez leurs parents. Au dernier paragraphe, il est dit que cinq Croates ont

 18   été hébergés dans le centre de Réception pour les civils, alors que 35

 19   personnes âgées d'appartenance ethnique serbe résidaient à Vrlika et Sinj,

 20   Jane [phon], Koljani et Otisic pendant l'occasion. Est-ce que vous pouvez

 21   nous expliquer l'on a placé les Croates dans les cars et envoyés à la côte

 22   et qu'on a placés certains d'entre eux dans les centres d'Accueil, alors

 23   que les Serbes sont restés au centre d'Accueil ?

 24   R.  Les Croates qui avaient des membres de famille sont probablement ceux

 25   qui sont partis. Certains Croates n'avaient pas de famille dans la zone de

 26   Split et probablement c'est la raison pour laquelle ils souhaitaient rester

 27   dans des centres d'Accueil pour recevoir de l'eau, de la nourriture et tout

 28   le reste. Je suppose que les Serbes de Vrlika n'avaient pas de famille et

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  1   c'est pour cela qu'ils sont allés là-bas. Je ne vois pas d'autre raison.

  2   Q.  Pourquoi ne pas les laisser chez eux tout simplement ?

  3   R.  Je suppose qu'on ne les a pas laissés chez eux le plus probablement car

  4   les conditions de vie ne permettaient pas qu'ils y restent calmement, ils

  5   subissaient tous le stress, et je suppose que c'est la raison pour laquelle

  6   ceci était organisé ainsi.

  7   Je vois que ceci a été paraphé probablement par mon chef de la police

  8   Jure Radalj, et puis dans l'en-tête il est écrit aussi "à l'attention

  9   personnellement de M. Franjo Djurica, qui lui aussi faisait partie du

 10   ministère. Donc je crois que c'était Juro Radalj qui a rédigé ce document.

 11   Q.  Merci, Monsieur Cipci. Je vais maintenant de nouveau changer de sujet.

 12   Excusez-moi, s'il n'y a pas vraiment de lien direct entre les sujets

 13   différents mais il s'agit des sujets que vous avez abordés dans votre

 14   déclaration.

 15   Je souhaite que l'on traite du paragraphe 12, où vous parlez du fait que

 16   les membres de votre personnel ont été attachés à l'administration de la

 17   police de Knin, et placés sous le commandement de M. Romanic et vous dites

 18   au paragraphe 12, qu'ils se trouvaient dans cinq postes de police

 19   différents.

 20   Je vais revenir brièvement à votre déposition de ce matin en

 21   répondant aux questions de Me Kay au sujet de l'approvisionnement de ces

 22   personnes. Vous dites -- à la page 23, lignes 11 à 13, vous dites que

 23   c'était des jeunes hommes et vous avez essayé de leur expliquer qu'ils

 24   n'avaient pas de raison d'avoir peur. D'où venaient ces jeunes hommes, ces

 25   jeunes policiers ?

 26   R.  Toutes les personnes, tous les employés qui ont été envoyés pour venir

 27   en aide aux autres provenaient de mon administration de la police.

 28   Autrement dit, des postes de police qui relevaient de ma compétence. Il y

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  1   en avait 12 ou 13. Il y avait la police frontalière, la police de la

  2   circulation, c'était les postes de police qui relevaient de ma compétence.

  3   Le chef du Secteur de la Police a choisi un certain nombre de personnes de

  4   ces postes de police pour les envoyer à Vrlika pour aider le poste de

  5   police là-bas. Puis ensuite il y avait des gens qui sont partis avec le

  6   premier lot et puis ensuite avec le deuxième lot, et graduellement environ

  7   100 personnes ont été envoyées et ça correspondait au nombre requis par le

  8   ministre.

  9   Q.  Je vais vous interrompre. Est-ce qu'il serait exact de dire que les

 10   policiers que vous avez envoyés à ces cinq postes de police dans la région

 11   de Kotor-Knin, placés sous le commandement du chef Romanic, donc ces

 12   policiers que vous avez envoyés n'étaient pas originaires de ces villes

 13   dans lesquelles ils ont été envoyés, ils étaient originaires d'autres

 14   régions; est-ce exact ?

 15   R.  Ils ont été envoyés peut-être de Makarska, Vrgovac, de Split. Je ne

 16   sais pas exactement d'où mon chef a sélectionné ces personnes. Mais de

 17   toute façon il s'agissait des personnes qui vivaient et travaillaient dans

 18   la région de l'administration de la police de Split et Dalmatie. Moi,

 19   j'avais 12 villes qui relevaient de ma compétence et chaque ville -- et la

 20   ville de Split était placée sous mon commandement aussi. Il y avait environ

 21   3 500 policiers qui étaient placés sous mes ordres et il a sélectionné ceux

 22   qui allaient être envoyés. J'avais un accord avec le chef Radalj selon

 23   lequel les gens qui allaient commander les postes de police dans lesquels

 24   ces personnes ont été envoyés devaient être laissés afin de faciliter la

 25   communication avec les gens qui sont restés sur place, et c'est la raison

 26   pour laquelle qu'ils ont --

 27   Q.  Je vais vous interrompre. Est-ce qu'il est exact de dire que lorsque

 28   vous avez envoyé ces policiers il s'agissait là des policiers qui ont été

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  1   envoyés dans cette région ? C'était des jeunes hommes, qui n'étaient

  2   envoyés dans cette région et qui ne connaissaient pas les alentours des

  3   postes de police; est-ce exact de dire ça ?

  4   R.  Certainement ils ne connaissaient pas la région. Ils venaient d'autres

  5   régions. Alors, comme je l'ai dit, peut-être de Makarska, de Split, de

  6   Vrgovac, et de faits pour ce qui est des aspects logistiques pour toute la

  7   police dans la région relevant de l'administration de Knin, ceci devait

  8   être effectué par M. Romanic.Cependant, s'agissant du premier groupe et du

  9   deuxième groupe de policiers qui sont partis, je leur avais donné l'ordre

 10   indiquant qu'ils devaient rester en contact permanent avec le chef de mon

 11   Secteur de la Police pour que je sache ce qui était en train de leur

 12   arriver, et il nous a informés du fait qu'ils n'avaient pas été

 13   approvisionnés en vivre de première nécessité de manière appropriée. C'est

 14   la raison pour laquelle à chaque fois que j'allais leur rendre visite je

 15   chargeais tout un tas de vivre dans le camion, vivre dont les gens avaient

 16   besoin, à commencer par les produits d'hygiène jusqu'à la nourriture et

 17   ainsi de suite.

 18   Q.  Bien. Nous allons passer à un autre sujet.

 19   Maintenant je souhaite aborder le paragraphe 25 de votre déclaration,

 20   D1723, concernant le rétablissement de la ligne ferroviaire Split-Knin au

 21   sujet de laquelle Me Kay a parlé avec vous hier.

 22   M. KEHOE : [interprétation] Peut-on examiner le paragraphe 25, de la pièce

 23   D1723, s'il vous plaît ?

 24   Q.  Si vous pouvez examiner le paragraphe 25, Monsieur Cipci, vous parlez

 25   des problèmes qui ont surgi suite au rétablissement de la ligne ferroviaire

 26   Split-Knin, et vous parlez de ce qui est arrivé aux civils lorsqu'ils sont

 27   entrés dans la région le 15 août 1995. Vous avez été informé -- je ne suis

 28   pas sûr dans quelle ligne en B/C/S, mais ligne 30 en anglais, il est écrit

Page 23120

  1   :

  2   "Mes policiers m'ont dit que les citoyens sont allés partout dans la ville

  3   et s'emparés de tout ce qu'ils pouvaient prendre."

  4   Donc vous avez été informé par vos policiers que les civils étaient dans la

  5   ville et qu'ils étaient en train de piller; est-ce exact ?

  6   R.  C'est exact.

  7   Q.  Votre stratégie était de placer vos policiers dans le train pour les

  8   empêcher d'apporter les biens pillés à bord des trains pour les laisser à

  9   Knin; est-ce exact ?

 10   R.  C'est exact.

 11   Q.  Dites-nous pourquoi n'avez-vous pas demandé à vos policiers d'arrêter

 12   ces personnes alors qu'elles étaient en train de piller dans la ville ?

 13   R.  Tout d'abord, je n'ai pas pu le faire même si formellement ces

 14   policiers relevaient de moi, je ne pouvais pas leur donner d'ordre. Les

 15   patrouilles avaient été formées par M. Romanic. Quant à la question de

 16   savoir si mes policiers aussi faisaient partie formellement de ces

 17   patrouilles, je ne le sais pas mais ils savaient ce qui se passait dans la

 18   région de Knin. Ils ont informé mon chef du Secteur de la Police, et le

 19   chef du Secteur de la Police m'a informé, et moi, suite à un accord avec

 20   mon chef, je leur ai dit de faire ce qu'ils ont fait même si formellement

 21   parlant je ne pouvais pas leur donner un ordre parce qu'un tel ordre aurait

 22   dû être donné par M. Romanic. Je suppose que vous savez Knin, c'est une

 23   petite ville mais c'est quand même une ville assez grande, et je suppose

 24   que M. Romanic n'avait tout simplement pas suffisant de policiers à sa

 25   disposition pour les envoyer -- empêcher et éventuellement procéder à des

 26   arrestations, car au début, il avait ma centaine de policiers et personnes

 27   d'autre.

 28   Après M. Romanic a reçu de l'aide de Rijeka et d'ailleurs en fonction de la

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  1   manière dont le ministère re-complétait le poste de police de Knin.

  2   Q.  A ce moment-là, le 15 août, est-ce que vos hommes, qui étaient en

  3   communication avec votre quartier général, vous ont donné une idée du

  4   nombre de civils qui étaient dans la ville en train de piller ?

  5   R.  C'était un train entier qui était parti de Split, donc certainement des

  6   centaines et des centaines de personnes, le nombre de personnes qui y

  7   pouvaient entrer dans le train car le transport était gratuit, et après,

  8   ils ont repris le train pour repartir. Je ne connais pas la date exacte et

  9   j'aurais été arrogant d'avancer des chiffres sans les connaître mais je

 10   suppose qu'un très grand nombre de personnes avaient pu monter à bord d'un

 11   train.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, quant à la question

 13   précédente, elle m'amène à poser une question supplémentaire et je souhaite

 14   clarifier quelque chose avec le témoin.

 15   Monsieur le Témoin, vous avez dit qu'ils savaient très bien ce qui se

 16   passait sur le territoire de Knin, qu'ils avaient informé votre chef du

 17   Secteur de la Police, et celui-ci vous a informé ensuite.

 18   "Ensuite en accord avec mon chef, je leur ai dit de faire ce qu'ils

 19   ont fait même si, formellement parlant, je ne pouvais pas leur donner cet

 20   ordre."

 21   Ensuite vous expliquez qu'est-ce que vous leur avez dit de faire.

 22   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je ne souhaite pas vous

 23   interrompre. Ceci figure au paragraphe 25 mais, bien sûr, le témoin peut

 24   répondre à la question.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. Je ne sais pas si c'est sa réponse

 26   ou pas mais d'après ce que j'ai lu --

 27   M. KEHOE : [interprétation] Je donne justement le cadre de référence à la

 28   Chambre.

Page 23122

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais peut-être cela suscitera d'autres

  2   questions. Mais vous avez dit que vous leur avez dit de faire quoi

  3   exactement, dites-le-nous ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je leur ai dit de s'aligner des deux côtés du

  5   train, de rester inerte et j'ai dit que lorsque les gens arrivant à la gare

  6   les voyaient qu'ils n'allaient pas oser monter avec les biens pillés.

  7   C'était exact lorsque le train est parti, la gare est restée avec un nombre

  8   énorme de marchandises. Il y avait des vivres, de la nourriture, des postes

  9   de télévision et ainsi de suite. Par la suite - je suppose suite à l'ordre

 10   donné par M. Romanic - toutes ces affaires ont été repris de la gare.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vos policiers étaient et c'est ce

 12   qui figure d'ailleurs au paragraphe 25, vos policiers étaient là. Ce que

 13   vous nous dites dans votre réponse et dans le paragraphe 25, vous leur avez

 14   dit : laissez-les faire ce qu'ils sont en train de faire. Ensuite, si j'ai

 15   bien compris, vous n'avez pas entrepris quoi que ce soit afin de les

 16   empêcher de piller avant leur arrivée avec les biens pillés à la gare. Est-

 17   ce la manière dont je dois comprendre cette réponse ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Voici ce que j'ai répondu. J'ai dit que

 19   certainement M. Romanic était au courant de ce qui se passait car je

 20   suppose qu'ils l'ont informé lui aussi, et lui, il était tenu d'envoyer les

 21   patrouilles lui-même éventuellement.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais ce n'était pas ma question. Ma

 23   question était : de savoir ce que vous leur avez dit de faire et non pas ce

 24   que Romanic aurait dû faire.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Compte tenu du fait que mes policiers

 26   m'avaient informé de ce qui était en train de se passer dans toute la ville

 27   de Knin, ils ne m'ont pas demandé ce qu'ils devaient faire, mais moi, je

 28   leur ai dit de faire ce qu'ils ont effectivement fait car je n'ai pas pu

Page 23123

  1   leur donner l'ordre de former les patrouilles pour patrouiller la ville.

  2   Ceci ne relevait pas de ma compétence mais j'ai pu leur dire de faire ce

  3   qu'ils ont fait, c'est-à-dire c'est ce qu'ils ont fait c'est-à-dire se

  4   positionner à la gare pour au moins empêcher les civils qui avaient pillé

  5   tout cela de sortir ces biens de Knin.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Quelle était votre autorité vous

  7   permettant de les placer à la gare, car vous avez dit que vous n'avez pas

  8   pu leur donner l'ordre de faire quoi que ce soit contre les pillages ? Dans

  9   votre déclaration, vous dites : je leur ai dit de faire ce qu'ils

 10   souhaitaient faire.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Ils auraient pu m'écouter ou ne pas m'écouter.

 12   Mais compte tenu de l'autorité dont je bénéficiais dans l'administration de

 13   la police de Split et de la Dalmatie, ils m'ont écouté; ils ont écouté un

 14   conseil émanant de moi et non pas un ordre.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourquoi les avez-vous conseillés ?

 16   Pourquoi ne les avez-vous pas conseillés de demander aux gens qui étaient

 17   en train de piller d'arrêter de le faire ? Pourquoi avez-vous attendu

 18   jusqu'à ce que tout le monde vienne à la gare ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Car cela veut dire qu'à un moment donné,

 20   j'aurais dû dépasser mes compétences et me lancer dans le fait de donner

 21   les ordres concernant un territoire pour lequel je n'étais pas responsable.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais ce que je ne comprends pas toujours

 23   pas; vous dites : ils m'écoutaient, bien sûr, je ne pouvais pas leur donner

 24   d'ordre, je n'avais pas d'autorité pour ce faire mais si je leur donnais un

 25   conseil, ils allaient le suivre.

 26   Apparemment, vous les avez conseillés de se rendre à la gare. Or vous

 27   n'aviez pas conseillé qu'ils aillent voir ce qu'ils pouvaient faire afin

 28   d'empêcher les gens de piller ?

Page 23124

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Certainement, compte tenu du nombre de

  2   personnes disponibles, à ce moment-là, objectivement parlant, je n'aurais

  3   pu rien faire car il s'agit là d'un nombre énorme de personnes qui sont

  4   venues à bord de ce train, et à ce moment-là, j'avais l'impression que ma

  5   seule solution était celle que j'ai trouvée, rien d'autre. S'il fallait

  6   faire autre chose, ceci relevait de la compétence du chef de

  7   l'administration de la police de Knin.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Est-ce que vous leur avez dit de

  9   continuer à faire -- de laisser les gens faire ce qu'ils étaient en train

 10   de faire, et là, je parle de ceux qui étaient en train de piller; est-ce

 11   que vous leur avez dit de ne pas les empêcher ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Je n'ai pas dit cela. Je leur ai

 13   simplement dit ce qu'ils devaient faire, et c'est ce qu'ils ont fait -- et

 14   comment le faire.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Merci de cette réponse.

 16   Ensuite un point qui reste pas très clair : vous avez commencé à nous

 17   expliquer ce qui s'était passé avec ces biens; des centaines de gens

 18   avaient pillé les biens et c'est resté à la gare. Qu'est-ce qui est arrivé

 19   à ces biens, ces marchandises ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne le sais pas avec exactitude, mais je

 21   suppose que, suite à cela, le chef Romanic avait donné l'ordre que ceci

 22   soit ramassé et placé quelque part mais, certainement, ces biens-là ne sont

 23   pas restés à la gare. S'agissant d'autres biens pillés et que les gens

 24   essayaient de transporter en traversant mes points de contrôle relevant de

 25   ma compétence, nous lancions des poursuites au sujet de ces activités-là,

 26   et les biens pillés étaient placés à Split.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Ma question était la suivante :

 28   vous n'avez pas conseillé à vos policiers qui ont vu ces gens partir alors

Page 23125

  1   que les biens pillés étaient restés sur les quais de la gare, vous ne leur

  2   avez pas donné le conseil de ramasser tout cela ? Vous avez simplement

  3   laissé cela aux bons soins de M. Romanic ? Est-ce que vous avez été en

  4   communication avec M. Romanic pour savoir quelle était la manière la plus

  5   opportune d'agir, à ce moment-là ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Je n'ai pas pu parler avec M. Romanic

  7   car, tout simplement, je considérais qu'il était suffisamment compétent

  8   pour faire ce qu'il devait faire dans sa zone de responsabilité, car il

  9   n'aurait pas été correct que moi, en tant que chef d'une autre

 10   administration, suggère des choses professionnelles à mon collègue. Peut-

 11   être il l'aurait mal pris. C'est pour cela que je n'en ai pas parlé, mais

 12   j'ai supposé qu'il était suffisamment intelligent et compétent pour

 13   entreprendre quelque chose. Je suppose qu'il l'a fait. Il faudrait demander

 14   à Romanic s'il avait entrepris quelque chose avec les policiers dont il

 15   disposait, à ce moment-là, car avec les forces dont il disposait à ce

 16   moment-là, je doute qu'il pouvait constituer suffisamment de patrouilles

 17   afin de pouvoir empêcher certaines activités dans cette région, mais je

 18   suppose que, lui-même, il avait entrepris quelque chose. Je ne crois pas

 19   qu'il s'est abandonné à la situation et qu'il a laissé les choses se

 20   dérouler de manière totalement désorganisée, parce que ces personnes, qui

 21   étaient au nombre de plusieurs centaines, si Romanic avait pu en arrêter 50

 22   à l'aide des hommes qu'il avait à sa disposition, il resterait les

 23   centaines d'autres qui auraient continué à faire ce qu'elles étaient en

 24   train de faire. Donc, il était illusoire de penser que l'on pouvait

 25   prévenir ce genre d'acte complètement. Cela aurait nécessité qu'un policier

 26   entre pratiquement dans chaque maison pour empêcher ces gens de piller, de

 27   voler et d'emporter tout cela.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Cipci, je ne vous demandais pas

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  1   ce qui eut été raisonnable ou non de la part de M. Romanic. Ma question

  2   portait sur un point différent. Vous considériez qu'il était possible pour

  3   vous de donner aux policiers que vous aviez envoyés là-bas le conseil de se

  4   rendre à la gare ferroviaire, avec les conséquences dont vous avez parlé

  5   dans votre déclaration préliminaire, à savoir que toutes ces personnes ont

  6   abandonné les articles qu'elles avaient volés sur les quais de la gare ou

  7   aux environs de la gare, mais vous pensiez que ce serait abuser de votre

  8   pouvoir que de passer un coup de téléphone à M. Romanic pour lui dire : et

  9   bien, il y a de très nombreux biens volés qui se trouvent sur les quais.

 10   Est-ce que vous pourriez vous en occuper ? Vous considériez que cela

 11   n'aurait pas été un comportement acceptable de votre part, vu les

 12   circonstances, n'est-ce pas ? Pouvez-vous le confirmer, et pouvez-vous

 13   confirmer en même temps, que c'est la raison pour laquelle vous n'avez pas

 14   agi ainsi ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. J'ai simplement dit que j'avais le

 16   sentiment qu'il eut été inadapté pour moi de dire à M. Romanic qu'il avait

 17   le devoir d'envoyer des patrouilles de police sur place pour empêcher les

 18   pillages. Je n'ai pas dit qu'il eut été inadapté de ma part --

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui, mais ce que je vous ai

 20   demandé, c'est si vous aviez communiqué avec M. Romanic pour lui dire que

 21   des objets qui avaient été volés avaient été abandonnés sur les quais de la

 22   gare. Si j'ai compris en partie votre réponse, c'est que, d'après vous, si

 23   vous aviez informé M. Romanic de la présence de tous ces objets à la gare,

 24   cela aurait été de votre part un abus de pouvoir, ces biens abandonnés par

 25   ceux qui les avaient pillés et qui appartenaient à d'autres personnes ?

 26   C'est ce que j'ai compris en écoutant votre réponse, quand vous avez

 27   expliqué pourquoi vous n'avez pas communiqué le résultat de l'action

 28   entreprise par vos hommes à la gare à M. Romanic. Est-ce que je vous ai mal

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  1   compris ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous m'avez partiellement mal compris. Ce

  3   n'était pas hors de mes attributions que de lui dire ce qu'il se passait,

  4   mais j'étais sûr à l'époque - et je suis encore sûr aujourd'hui - que ces

  5   hommes -- ces policiers que j'avais envoyés sur place et qui étaient sous

  6   ses ordres ont effectivement informé M. Romanic de toute la situation après

  7   ce qui s'est passé. Je pensais à l'époque - et je continue à penser

  8   aujourd'hui - que cela aurait été un abus de pouvoir de ma part que de

  9   l'aviser de cela, car il y avait un grand nombre des policiers envoyés par

 10   moi sur place, et il est certain qu'ils l'en ont informé.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous dit aux policiers envoyés par

 12   vous qu'il fallait qu'ils informent M. Romanic ? Est-ce que vous leur avez

 13   dit : allez voir M. Romanic pour lui dire ce qui se passe ici ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas. Ça, je ne sais pas, parce que

 15   c'est surtout le chef du Secteur de la Police, M. Jure Radalj, que j'avais

 16   envoyé là-bas aussi, qui était principalement chargé des communications

 17   avec les policiers. Moi, je n'avais pas de communication permanente avec

 18   ces policiers. Je communiquais avec mon chef de secteur, et lui à son tour

 19   communiquait avec les policiers, c'est-à-dire ses subordonnés. Il y avait

 20   une hiérarchie très stricte, du point de vue de la subordination, dans la

 21   police, et je n'avais pas obligation ou nécessité de contacter directement

 22   les officiers de police.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez rédigé un rapport

 24   sur toute cette action entreprise par vous ou, en tout cas, conseillée par

 25   vous ? Est-ce que vous avez envoyé un rapport à M. Romanic ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suppose qu'un rapport a été rédigé par mon

 27   chef de secteur. C'était une action assez mineure par rapport à toutes les

 28   actions qu'avait à entreprendre la direction de la police. Le chef de

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  1   secteur n'était pas censé s'occuper des questions les moins importantes. Je

  2   ne suis pas capable aujourd'hui de me rappeler le moindre détail de tout

  3   cela, mais si un rapport n'a pas été rédigé en tant que tel par le chef de

  4   secteur, il est possible qu'il ait envoyé une note officielle.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] vous n'avez pas informé votre chef de ce

  6   qui s'était passé ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'ai rédigé aucun rapport au sujet de

  8   tout cela, et je suppose que c'est Jure Radalj, mon chef de secteur, qui

  9   l'a fait.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, qui n'était pas informé, en tout

 11   cas, pas par vous.

 12   Veuillez poursuivre, Maître Kehoe.

 13   M. KEHOE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 14   Q.  Monsieur Cipci, j'aimerais que nous continuions sur la lancée des

 15   questions qui viennent de vous être posées par le Président de la Chambre.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Cet échange se trouve en page 55, ligne 3, du

 17   compte rendu d'audience. C'est le moment où vous parlez des objets volés.

 18   Q.  Vous dites, je cite :

 19   "Je suis certain que ces objets ne sont pas restés sur les quais de la gare

 20   sans que personne ne s'en occupe. Quant au reste, le reste des objets

 21   pillés, et qui avaient été emportés à bord du train, ils ont dû franchir

 22   les barrages dans la période où j'étais en activité -- ils ont dû être

 23   saisis aux barrages, pendant la période où j'étais en activité. Les

 24   pilleurs ont été poursuivis en justice et les biens volés ont dû être

 25   remisés à Split."

 26   Alors sans perdre de vue ce que vous avez dit, Monsieur, j'aimerais que

 27   s'affiche la pièce D989, qui est un rapport de votre main datant du 24 août

 28   1995.

Page 23129

  1   Comme vous le voyez, Monsieur Cipci, il s'agit d'un rapport qui porte la

  2   date du 24 août 1995, et qui est adressé à M. Moric.

  3   M. KEHOE : [interprétation] Affichage de la page 2, paragraphe 3, page 2 en

  4   anglais. Enfin, excusez-moi, nous allons d'abord nous pencher sur la page 2

  5   en croate, après quoi, nous passerons à la version anglaise. Donc affichage

  6   de la version croate pour que M. Cipci voie ce qui est écrit à la fin de la

  7   page.

  8   Q.  Comme vous le voyez, Monsieur Cipci, on y voit votre nom et un sceau.

  9   M. KEHOE : [interprétation] Alors maintenant je demanderais que nous

 10   restions sur la page anglaise de ce texte, et que nous revenions à la

 11   première page de la version croate, paragraphe 3.

 12   Q.  Dans ce paragraphe, vous indiquez, je cite :

 13   "Avant le 23 août  1995, il a été fait rapport de 11 cas de déplacements

 14   non autorisés de biens meubles par d'autres personnes que leurs

 15   propriétaires. Les auteurs de ces actes étaient dans trois de ces cas

 16   membres de l'armée croate et ont été remis entre les mains de la police

 17   militaire pour poursuite ultérieure. Dans six cas, les biens en question

 18   ont été confisqués et une plainte au pénal a été soumise contre les auteurs

 19   de tels actes. Dans un cas, les auteurs de ces actes ont été entendus par

 20   un juge d'instruction. Dans les deux autres cas, l'enquête judiciaire est

 21   encore en cours."

 22   Alors vous nous avez fait remarquer que dans la portion du compte rendu que

 23   je viens de citer, les biens volés avaient remisés à Split. Est-ce que

 24   c'était la pratique normale, de les confisquer et de les remiser dans un

 25   entrepôt à Split ?

 26   R.  Ecoutez, tous les biens, saisis au poste de contrôle installés par moi,

 27   ont été couverts par la procédure régulière. Donc nous devions bien

 28   entreposer ces objets quelque part, et c'est la raison pour laquelle nous

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  1   nous sommes entendus avec le directeur du port de Split de façon à ce qu'il

  2   mette à notre disposition un entrepôt pour que ces biens puissent y être

  3   entreposés, car je ne pouvais ni vendre ces objets ni les donner en cadeau

  4   à qui que ce soit. Il fallait les conserver en tant que pièces à conviction

  5   au cas de procédure pénale et c'est seulement à la fin d'un procès éventuel

  6   que l'on pouvait utiliser ou faire quelque chose d'autre avec ces objets.

  7   La police ne pouvait pas utiliser ces objets de sa propre initiative. Donc

  8   elle était chargée de les entreposer et de les conserver en tant qu'élément

  9   de preuve jusqu'à la fin des procédures judiciaires.

 10   Q.  Monsieur Cipci, à votre connaissance, qu'est-il advenu finalement de

 11   ces objets qui ont été entreposés dans l'entrepôt de Split ? Est-ce qu'ils

 12   ont été détruits ? Est-ce qu'ils ont été restitués, ont-ils été vendus ? Je

 13   veux dire : qu'est-il advenu de tous ces objets ?

 14   R.  Je ne sais pas ce qu'il est advenu par la suite de ces objets. Lorsque

 15   je suis parti en 1997, ces objets étaient toujours sous la garde de la

 16   police. Je pense que les procédures judiciaires avancent très lentement

 17   partout suite au dépôt initial d'une plainte. Il faut effectuer les

 18   vérifications nécessaires par l'entremise du procureur public, il faut

 19   faire intervenir également les représentants du parquet, dans toutes les

 20   affaires judiciaires lancées contre des civils et lorsqu'il y a une affaire

 21   lancée par le procureur militaire, il faut faire intervenir tous les

 22   responsables de l'armée et il y avait un grand nombre d'affaires à traiter.

 23   Tout ce que je sais c'est que ces objets étaient encore conservés par la

 24   police en 1997, lorsque j'ai pris ma retraite. Quant à ce qu'il en est

 25   advenu par la suite, je ne sais pas. Ils sont d'ailleurs sans doute abîmés

 26   aujourd'hui.

 27   Q.  Monsieur Cipci, j'en suis toujours à ce document. J'aimerais l'utiliser

 28   comme point de transition pour passer à un nouveau sujet.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, vous avez dit que ces

  2   objets étaient encore dans l'entrepôt. Est-ce qu'il y a une liste des

  3   objets qui ont été placés dans cet entrepôt ? Est-ce qu'il y a un registre

  4   qui a été établi ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je répondre ?

  6   Lorsque ces objets ont été confisqués au poste de contrôle de la police, la

  7   police a établi des listes des biens saisis, et ces listes officielles ont

  8   été utilisées dans le cadre des procédures judiciaires intentées par les

  9   procureurs. Ces listes étaient jointes en tant qu'annexe à la note

 10   officielle les concernant. Les objets ont été entreposés et ont reçu des --

 11   et ont été assortis de description qui permettait d'identifier les

 12   personnes auteurs de l'acte délictueux. Des numéros de référence leur ont

 13   été donnés en cas de procédure judiciaire, ces objets pouvaient être

 14   examinés relativement vite en rapport avec chacun des auteurs poursuivis.

 15   Chaque objet avait son numéro de référence qui permettait de le localiser

 16   et il y avait également les références nécessaires pour identifier la

 17   personne qui faisait l'objet d'une plainte au pénal, et qui était donc

 18   poursuivie en justice.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc cet entrepôt, une liste complète

 20   était conservée des objets qui entraient, qui sortaient ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Cet entrepôt était sous le contrôle de la

 22   police, ainsi que sous le contrôle de la direction du port pour sa partie

 23   nord. Les objets ne pouvaient donc pas sortir de l'entrepôt sans

 24   l'autorisation préalable de la police, et d'ailleurs, ils n'en sont pas

 25   sortis.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est très bien de le savoir. Mais ce

 27   n'est pas ce que je vous ai demandé. Je vous ai demandé si une liste était

 28   tenue, parce qu'à savoir si les objets ont besoin d'une autorisation pour

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  1   sortir, c'est une chose, mais savoir si une liste est tenue, c'est une

  2   autre chose. Est-ce qu'il y avait une liste complète de tout ce qui était

  3   conservé dans cet entrepôt ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait une liste complète de tous les

  5   objets qui ont été confisqués, et c'est seulement à la demande d'un

  6   tribunal que ces objets pouvaient être transportés, si le tribunal

  7   souhaitait les utiliser en tant que pièce à conviction. Je ne sais pas

  8   toutefois combien de procès ont été lancés suite au dépôt de plainte au

  9   pénal.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Encore une fois, je vous ai demandé si

 11   une liste complète de ces objets existait, votre réponse semble être

 12   affirmative. Il y avait donc une telle liste.

 13   Veuillez poursuivre, Maître Kehoe.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 15   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je vais maintenant

 16   passer à un autre sujet.

 17   Q.  J'aimerais que nous examinions un autre document, mais que nous

 18   conservions ce document-ci, pour le moment, tout de même, Monsieur Cipci.

 19   Paragraphe 3, toujours, vous faites remarquer dans ce paragraphe que trois

 20   des auteurs de tels pillages étaient ou plutôt que dans trois affaires

 21   relevant de cette question de pillage, trois auteurs étaient membres de

 22   l'armée de Croatie et avaient été aux mains de la police militaire. Donc je

 23   suppose à la lecture de ce rapport, Monsieur Cipci, et d'après votre

 24   témoignage jusqu'à présent, que les objets ont été confisqués au poste de

 25   contrôle et que les soldats de l'armée croate après avoir été placés en

 26   détention, étaient remis entre les mains de la police militaire; c'est bien

 27   cela ?

 28   R.  C'est exact.

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  1   Q.  Donc vos hommes - pardon, continuez.

  2   R.  Excusez-moi. Au poste de contrôle même, ils étaient remis entre les

  3   mains des personnes responsables. Nous ne les avons pas emmenés à Split.

  4   S'il n'y avait pas de policiers militaires sur place, nous en appelions un

  5   ou plusieurs et c'est au poste de contrôle même que ces hommes étaient

  6   remis entre les mains de la police militaire.

  7   Q.  Donc, Monsieur Cipci, si je comprends bien la procédure que vous avez

  8   décrite, vos officiers de police qui se trouvaient au poste de contrôle

  9   stoppaient un soldat de l'armée croate, le mettait en détention, s'ils le

 10   suspectaient de pillage, et s'il n'y avait aucuns policiers militaires sur

 11   place, vous appeliez la police militaire et vous demandiez qu'elle envoie

 12   sur place au poste de contrôle un policier militaire afin qu'il se charge

 13   du soldat de l'armée de Croatie que vous suspectiez de pillage; c'est bien

 14   cela ?

 15   R.  C'est exact.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Je vous demanderais un instant, Monsieur le

 17   Président.

 18   [Le conseil de la Défense se concerte]

 19   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je pensais que j'aurais

 20   encore pas mal de temps à consacrer à cette question mais étant donné la

 21   réponse que je viens d'entendre, je vais m'abstenir.

 22   Ce que je vais vous dire maintenant, Monsieur le Président, n'a rien à voir

 23   avec ce témoin mais il n'y a pas de problème s'il m'entend. Une question de

 24   procédure s'est posée. Je reviens, à ce moment-là, où M. Margetts a été

 25   entendu. Je suis sûr que vous vous rappelez très bien, Monsieur le

 26   Président, ce qui s'est passé à ce moment-là; moi ça m'était complètement

 27   sorti de l'esprit. Nous avions des documents dont nous avons demandé le

 28   versement automatique au dossier. Il n'y avait pas de désaccords de la

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  1   partie adverse. Mais enfin nous avons réexaminé les comptes rendus. Je vais

  2   consulter M. Waespi pendant la pause au sujet de ces documents, mais ce qui

  3   est sûr c'est qu'il y a encore la question de ces documents à régler, ça

  4   m'a échappé. Mais je ne vais pas le faire en présence du témoin, et je

  5   parlerai d'abord à M. Waespi pendant la pause, si vous voulez bien.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Donc nous vous réentendrons sur ce

  7   sujet.

  8   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

  9   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 10   M. KEHOE : [interprétation] Je n'ai plus de questions pour ce témoin,

 11   Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas, je pense que nous allons

 13   faire la pause, mais j'aimerais rapidement que nous discutions d'un point à

 14   huis clos partiel.

 15   Monsieur Cipci cela n'a absolument rien à voir avec votre témoignage.

 16   Par conséquent, j'invite Mme l'Huissière à vous escorter hors du prétoire,

 17   et je demande que nous passions quelques instants à huis clos partiel.

 18   [Le témoin quitte la barre]

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, nous sommes à huis

 20   clos partiel.

 21   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 23135-23141 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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 20   [Audience publique]

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons faire une pause et

 22   reprendrons à 13 heures.

 23   --- L'audience est suspendue à 12 heures 39.

 24   --- L'audience est reprise à 13 heures 02.

 25   [Le témoin vient à la barre]

 26    M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe.

 27   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. J'aimerais

 28   présenter un autre document qui a trait, en fait, aux questions -- aux

Page 23143

  1   dernières questions qui ont été posées, et il s'agit d'un rapport établi

  2   par M. Cipci. J'en ai parlé à Mme De Landri et elle n'a pas d'objection.

  3   Donc, il s'agit de la pièce 1D2993 de la liste 65 ter, rapport de M. Cipci

  4   établi le 2 octobre 1995.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous voulez le présenter directement,

  6   c'est cela ?

  7   M. KEHOE : [interprétation] Oui, oui, tout à fait, mais je tiens compte de

  8   la suite logique des questions posées à ce témoin. Donc, je pense --

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

 10   Monsieur le Greffier, qu'en sera-t-il ?

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D1728.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il sera enregistré aux fins

 13   d'identification, Monsieur le Greffier. Dès qu'il sera saisi sur nos

 14   écrans, nous pourrons le -- jeter un œil, parce que nous n'allons pas

 15   verser au dossier un document sans le voir.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Oui, oui, tout à fait.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, qu'en est-il de Me Mikulicic ?

 18   Avez-vous des questions à poser ?

 19   M. MIKULICIC : [interprétation] Oui, quelques questions, Monsieur le

 20   Président.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Cipci, vous allez maintenant

 22   répondre aux questions de Me Mikulicic, qui est le conseil de M. Markac.

 23   Je vous en prie, Maître Mikulicic.

 24   Contre-interrogatoire par M. Mikulicic : 

 25   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Cipci.

 26   R.  Bonjour.

 27   Q.  Nous allons nous exprimer dans la même langue, ce qui va compliquer

 28   davantage la vie des interprètes. C'est la raison pour laquelle je vous

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  1   demanderais de ménager des temps d'arrêt entre mes questions et vos

  2   réponses, ce qui donnera la possibilité aux interprètes de faire leur

  3   travail, et je vous demanderais également de ne pas parler trop vite. De

  4   toute façon, bon, je souffre de la même maladie que vous, Monsieur Cipci, à

  5   savoir je suis, moi aussi, un orateur qui a tendance à parler très vite,

  6   mais je vais demander à M. le Greffier de bien vouloir afficher la pièce

  7   P497.

  8   Donc, Monsieur Cipci, vous allez maintenant voir sur votre écran un

  9   document qui a déjà été versé au dossier. Il s'agit de l'ordre -- d'un

 10   ordre relatif à l'établissement du QG de Povratak, et donc, dans les

 11   documents que nous avons déjà vus, la référence à l'opération Povratak se

 12   trouve -- elle est très fréquente. Donc, j'aimerais vous demander de bien

 13   avoir l'amabilité, au vu de votre expérience, au vu de votre profession,

 14   d'avoir l'amabilité, disais-je, de nous dire quel était l'objectif de

 15   l'opération Povratak. Quelles sont les actions qui ont été prises dans le

 16   cadre de Povratak ?

 17   R.  Le QG de l'opération Povratak a été établi par le ministère de

 18   l'Intérieur. Il était dirigé par l'assistant du ministre de l'Intérieur,

 19   Josko Moric, et cette opération n'avait qu'un seul but, et cet objectif

 20   était comme suit : la police croate -- la police civile devait, dès la

 21   libération de certaines zones, se rendre dans les zones libérées pour

 22   s'assurer -- ou pour faire, en fait, ce que la police est censée faire,

 23   conformément aux législations régissant le ministère de l'Intérieur. C'est

 24   la raison pour laquelle des officiers de police ont dû participer à cette

 25   opération, et il s'agissait de policiers en uniforme qui devaient maintenir

 26   l'ordre public et qui étaient censés, en fait, assurer l'intégrité des

 27   personnes dans cette zone, donc, le fait que ces personnes -- qu'on ne

 28   devait pas nuire à ces personnes. Il y avait également le Secteur de la

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  1   Police criminelle qui devait participer à cette opération. Lorsqu'ils

  2   étaient informés de commission de crimes, ils étaient censés déposer des

  3   rapports d'enquête judiciaire auprès du Procureur public pour faire en

  4   sorte que l'on diligente une enquête. Il y avait également un service de

  5   Protection de l'ordre constitutionnel. Il s'agit des services du

  6   Renseignement qui étaient censés mener à bien une analyse entière et

  7   exhaustive de l'évolution de la situation durant l'occupation afin de

  8   rendre justice à toutes les personnes qui avaient participé à la rébellion

  9   armée afin de contrôler la situation, après la libération des territoires.

 10   Il y avait également des analystes qui étaient censés tout archiver dans

 11   les ordinateurs, tout saisir dans les ordinateurs pour que le ministère de

 12   l'Intérieur puisse disposer d'une documentation exhaustive.

 13   Il y avait également deux autres services, le service de la

 14   Protection civile et le service des Sapeurs-pompiers qui faisaient partie

 15   des administrations de la police. Ils étaient censés fournir toute la

 16   logistique aux autres services, et tout cela, en fait, était nécessaire

 17   pour que la vie reprenne son cours normal, en fait, dans la zone.

 18   Puis nous avions également la logistique pour les administrations de la

 19   police qui étaient censées fournir un soutien à tous les autres services.

 20   Il y avait, par exemple, des dactylos qui étaient censés dactylographier

 21   les procès-verbaux, les rapports, et cetera, et tout ce qui était

 22   nécessaire d'ailleurs, tout ce qu'il fallait écrire. 

 23   Q.  Monsieur Cipci, il est évident qu'il s'agissait d'une opération fort

 24   complexe, avec des actions fort complexes et que du fait de la complexité

 25   de cette action, un grand nombre de fonctionnaires et d'employés des

 26   services publics y ont participé. Cela était nécessaire pour obtenir les

 27   résultats escomptés.

 28   R.  Oui, bien entendu, d'ailleurs l'effort principal devait être soutenu

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  1   par le gouvernement de la République de Croatie, qui devait donc fournir le

  2   soutien logistique optimal, les ressources humaines, les ressources

  3   financières afin de faire en sorte que l'autorité civile puisse commencer à

  4   fonctionner. Alors il n'y avait pas de personne qui avait été élu pendant

  5   les élections. Ce qui fait que nous avons dû envoyer des commissaires, qui

  6   ont dû s'acquitter de leurs fonctions jusqu'au moment où des élections ont

  7   eu lieu. Par exemple, à Sibenik, nous avions Petar Pasic, qui était le

  8   commissaire du gouvernement, qui s'occupait de l'autorité civile et qui

  9   devait s'assurer du bon fonctionnement de l'autorité civile. Sans l'aide du

 10   gouvernement, il n'aurait pas été en mesure de faire grand-chose, pour ne

 11   pas dire qu'il n'aurait rien pu faire du tout.

 12   Q.  Le titre de cette opération qui était très générale, très générique

 13   même était "Povratak." Vous avez participé à cet événement, et comment est-

 14   ce que vous compreniez le titre de cette action, ce titre de Povratak ?

 15   R.  Ce titre suggérait qu'il fallait mettre en place des conditions pour

 16   que puissent revenir les personnes, les personnes qui s'étaient enfuies de

 17   la zone, la veille de l'opération Tempête. Il y a eu de nombreuses

 18   personnes qui l'ont fait, je vous parle des ressortissants serbes ou des

 19   Serbes de souche. Des conditions devaient exister pour leur retour, il

 20   fallait également envisager des conditions pour le retour des habitants

 21   croates de la zone qui s'étaient enfuis ou qui avaient été expulsés

 22   d'ailleurs lors de l'occupation, qui avaient quand même duré trois à quatre

 23   ans.

 24   Vous devez savoir qu'un grand nombre de Croates avaient dû quitter cette

 25   zone parce qu'ils avaient été expulsés, ils avaient été contraints de

 26   quitter leur bureau, leurs ateliers de travail qui avaient été détruits,

 27   leurs appartements. Donc les contions devaient exister pour assurer le

 28   retour des deux groupes. C'est la raison pour laquelle la police devait

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  1   faire son travail, les autorités civiles, les pouvoirs de la police

  2   devaient fonctionner. C'est la raison pour laquelle le QG a été formé avec

  3   le ministère de l'Intérieur, cela pour assurer que les conditions

  4   permettant une vie normale puissent être remplies.

  5   Si cela fonctionnait bien, la police pouvait faire en sorte que les

  6   personnes qui avaient été chassées ou qui s'étaient enfuies la veille de

  7   l'opération Tempête, puissent revenir chez elles. Alors comment est-ce que

  8   les choses ont évolué, nous le savons tous, d'ailleurs grâce à Dieu.

  9   Q.  Alors vous avez ce document, cet ordre de M. Moric, vous voyez

 10   que c'est un ordre qui date du 3 août, et nous allons pouvoir le voir si le

 11   document -- le bas du document est affiché. Vous voyez c'est un document

 12   qui porte la date du 3 août 1995, ce qui signifie qu'il a été envoyé avant

 13   le début de l'opération Tempête.

 14   Monsieur Cipci, j'aimerais vous poser cette question maintenant :

 15   Comment se fait-il que ce document donne un ordre à toutes les

 16   administrations de la police y compris la vôtre, d'ailleurs,

 17   l'administration de la police de Split-Dalmatie, dont vous étiez le chef,

 18   donc comment se fait-il que cela a été demandé à toutes les administrations

 19   de police ? Comment se fait-il que l'on ait demandé l'établissement d'un QG

 20   spécial qui serait indépendant du reste des activités menées à bien par

 21   l'administration de la police ?

 22   L'INTERPRÈTE : Les interprètes de la cabine anglaise demandent au témoin de

 23   se rapprocher du microphone.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez, je vous prie,

 25   Monsieur, vous rapprocher du microphone ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, tout à fait, bien sûr. Je peux me

 27   rapprocher autant que cela est nécessaire.

 28   Cela a été fait parce que pendant la guerre, le système de travail des

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  1   administrations de la police était tel, que nous avions très souvent des

  2   actions qui étaient telles qu'elles dépassaient en quelque sorte les

  3   activités de la police classique menées à bien dans ces circonstances

  4   normales. Pour mener à bien ce genre d'action, nous créions ou établissions

  5   un QG spécial, cette action fut peut-être l'action la plus importante pour

  6   toutes les administrations de la police. Parce qu'elle exigeait de

  7   nombreuses personnes, cette action, et il fallait que ce travail soit

  8   effectué le mieux possible, c'est pour ça que les administrations de police

  9   ont dû établir des sous QG qui avaient la même tâche, qui s'étaient vu

 10   confier la même tâche qui était supervisée par le QG principal par le

 11   ministère de l'Intérieur dirigé par M. Josko Moric.

 12   Donc la structure de la police, elle était celle que je viens de vous

 13   décrire. Elle était identique, si vous prenez en considération la

 14   hiérarchie, et vous aviez en fait en haut et en bas de la structure

 15   hiérarchique des QG identiques ou semblables qui ont été établis. Pour

 16   l'administration de la police, donc vous aviez cela aux échelons

 17   inférieurs, et aux échelons supérieurs, vous aviez les représentants

 18   officiels du ministère de l'Intérieur.

 19   M. MIKULICIC : [interprétation]

 20   Q.  Merci, de ces réponses, Monsieur Cipci.

 21   Vous avez été nommé en 1993, au poste du chef de l'administration de la

 22   police de Split; est-ce exact ?

 23   R.  Oui, c'est exact.

 24   Q.  Avant cela, si j'ai bien compris pendant 33 ans, vous étiez juge à des

 25   niveaux différents devant des tribunaux différents; juge d'instruction,

 26   magistrat, juge de la cour d'appel, ainsi de suite. Ai-je raison de dire

 27   cela ?

 28   R.  Oui.

Page 23149

  1   Q.  Donc pour ce qui est de votre formation, vous avez été formé pour

  2   protéger la loi et l'ordre juridique de l'état ?

  3   R.  J'ai été déjà élevé comme ça et puis ensuite formé professionnellement

  4   pour respecter la loi, et puis d'ailleurs à mon avis, après un nombre aussi

  5   élevé de travail dans les tribunaux, j'ai compris que c'est la seule

  6   manière de vivre et de se comporter. C'est l'une des raisons pour laquelle

  7   j'ai accepté l'offre du ministre Jarnjak, de me joindre au rang de la

  8   police, en quittant les tribunaux. Car j'ai conclu, en ces temps de

  9   turbulence et de guerre, je pouvais ainsi donner la contribution la plus

 10   grande de ma part à la cité de Split et le comté de Split et de la

 11   Dalmatie, donc en tant que chef de l'administration de la police. Je pense

 12   que je ne me suis pas trompé.

 13   Q.  Monsieur Cipci, pendant que vous étiez juge ou par la suite, chef de

 14   l'administration de la police; est-ce qui que ce soit vous a mis sur la

 15   pression ? Est-ce qu'on vous a influencé, ou est-ce qu'on vous a suggéré

 16   qu'il fallait passer outre certaines activités illégales ou illicites ?

 17   Est-ce qu'on vous aurait suggéré de ne pas poursuivre certains auteurs de

 18   crimes ? Est-ce que l'on vous a jamais demandé de faire cela ?

 19   R.  A vrai dire, ça m'est arrivé une seule fois, lorsque j'étais jeune juge

 20   dans un tribunal, un petit tribunal, lorsque le procureur insistait pour

 21   que l'on passe, pour que l'on rende un jugement d'acquittement.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Attendez. Est-ce que vous vous

 23   intéressez aux activités de ce témoin en tant que policier ou en tant que

 24   juge ? Je croyais que c'était seulement lorsqu'il était policier que ceci

 25   vous intéressait.

 26   M. MIKULICIC : [interprétation] Tout à fait, Monsieur le Président.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Donc, si ceci s'est passé seulement

 28   une fois lorsque vous étiez jeune, ceci n'est pas pertinent pour nous.

Page 23150

  1   Poursuivez.

  2   M. MIKULICIC : [interprétation]

  3   Q.  Monsieur Cipci, l'essentiel de ma question portait sur vos activités

  4   pendant que vous étiez chef de l'administration de la police. Donc, pendant

  5   l'opération Eclair et par la suite, est-ce que pendant cette période, des

  6   pressions ont été exercées sur vous ?

  7   R.  Jamais des pressions n'ont été exercées sur moi, car dès le début de

  8   mes activités, j'ai fait savoir au ministre et à tous les adjoints du

  9   ministre, alors que je n'étais pas leur subordonné, j'ai dit qu'il était

 10   hors de question que je respecte un ordre si cet ordre n'est pas conforme à

 11   la loi. Le ministre le savait et, comme je l'ai déjà dit, j'étais le membre

 12   le plus âgé du ministère de l'Intérieur, j'étais bien respecté et personne

 13   n'a jamais osé suggérer que je fasse quelque chose qui, à mon avis, aurait

 14   été une activité illégale ou pas strictement légale.

 15   Q.  Parmi les gens autour de vous, parmi tous vos contacts, est-ce que vous

 16   avez jamais entendu quelqu'un dire qu'un plan avait existé selon lequel il

 17   fallait expulser la population serbe des zones nouvellement libérées et

 18   empêcher leur retour ?

 19   R.  J'ai entendu parler de cela pour la première fois lorsque la presse a

 20   commencé à en parler, mais je pense que c'était après le début des

 21   procédures menées devant ce Tribunal. Mais avant cela, je n'ai jamais

 22   entendu quoi que ce soit à ce sujet-là.

 23   Q.  Merci de ces réponses, Monsieur Cipci.

 24   M. MIKULICIC : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de

 25   questions à poser.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître Mikulicic.

 27   Madame de Landri, êtes-vous prête à commencer les questions supplémentaires

 28   ?

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  1   Mme DE LANDRI : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Cipci, c'est Mme De Landri qui

  3   va vous interroger maintenant, qui représente l'Accusation.

  4   Contre-interrogatoire par Mme De Landri :

  5   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Cipci.

  6   R.  Bonjour.

  7   Q.  Je représente l'Accusation. Je m'appelle Adria De Landri. J'ai quelques

  8   questions à vous poser concernant les questions du conseil de la Défense.

  9   Votre travail concernait le droit, n'est-ce pas, pendant de nombreuses

 10   années ?

 11   R.  Oui, c'est exact

 12   Q.  Est-ce que vous pouvez dire à la Chambre quels étaient les domaines de

 13   vos activités en matière du droit ?

 14   R.  Lorsque j'étais jeune juge, je travaillais dans la cour municipale

 15   d'Omis, c'est une ville qui se trouve à une trentaine de kilomètres de

 16   Split, et je devais m'acquitter de toutes les activités relevant de la

 17   compétence de cette cour. Donc, j'étais en charge du droit civil, du droit

 18   pénal, des litiges, du droit relatif aux biens immobiliers, tout ce qui

 19   relevait de la compétence de la cour municipale à Omis, car il y avait moi

 20   et le président de la cour sur place, mais le président s'occupait

 21   exclusivement des affaires civiles, et moi, je devais faire tout le reste.

 22   Ensuite, je suis allé travailler dans la cour municipale de Split au bout

 23   d'un an. Là, j'étais chargé des litiges. Ensuite, donc, dans la cour

 24   municipale de Split, je m'occupais des affaires civiles. Au bout d'un an et

 25   demi, j'ai été muté à la cour de comté -- à l'époque, ça s'appelait cour du

 26   district, et là, j'étais juge de la chambre de première instance, et

 27   souvent, j'ai été actif dans le cadre des affaires au pénal, surtout

 28   pendant l'été, lorsque la plupart des juges prenaient les vacances. Moi, je

Page 23152

  1   ne prenais jamais les vacances pendant l'été, car je vivais de toute façon

  2   tout près de la mer et je ne devais pas partir pour passer les vacances

  3   d'été. Donc, le président de la cour et moi-même, on était en charge des

  4   affaires impliquant des blessures corporelles graves, des meurtres, des

  5   assassinats, et ensuite, c'était moi qui étais en charge de telles

  6   affaires. Ensuite, pendant un an et demi, j'étais chargé des activités

  7   criminelles administratives -- bureaucratiques, et pendant un an et demi,

  8   j'ai été juge d'instruction. Ensuite j'ai été juge de la chambre d'appel

  9   chargé des questions civiles, et c'est ce que j'ai fait pendant dix ans.

 10   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire comment vous êtes devenu juge ? Je

 11   vais clarifier ma question : vous avez été nommé ou vous avez été élu ?

 12   R.  Les chefs des administrations de la police ont été nommés par le

 13   ministre, et je dois dire d'ailleurs que le ministre avait négocié pendant

 14   sept mois environ pour que je quitte le tribunal et que je vienne

 15   travailler en tant que chef de l'administration. Comme je l'ai dit tout à

 16   l'heure, j'ai considéré que compte tenu --

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez bien la question. La question

 18   portait sur la question de savoir si le processus -- enfin, quel était le

 19   processus par le biais duquel vous deveniez juge ? Est-ce que vous étiez

 20   élu ou nommé au poste de juge, je suppose ?

 21   Mme DE LANDRI : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame De Landri, tout à l'heure,

 23   j'avais rejeté une objection lorsque Me Kehoe intervenait, mais si le

 24   témoin ne répond pas à votre question, vous pouvez lui reposer la question.

 25   Est-ce que vous pouvez nous dire si vous avez été élu ou nommé au

 26   poste de juge ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Ah, vous parlez du poste de juge. Moi, je

 28   pensais que c'était au sujet du poste du chef de l'administration.

Page 23153

  1   S'agissant du poste de juge, j'ai été élu par la municipalité de la ville

  2   en question et par la suite, confirmé par le parlement croate. Chez nous,

  3   les juges n'étaient pas nommés et élus, et j'ai été élu par le parlement de

  4   la République de Croatie à l'époque, qui faisait partie de la RSFY, car le

  5   système judiciaire relevait de la compétence de la république.

  6   Mme DE LANDRI : [interprétation]

  7   Q.  Est-ce que ceci est vrai pour l'ensemble de votre carrière judiciaire ?

  8   Vous étiez toujours élu ?

  9   R.  Tout au long de cette période, à partir du moment où j'ai été élu en

 10   tant que juge de la cour municipale, j'ai été élu par l'assemblée

 11   municipale. Par la suite, s'agissant de l'assemblée -- il s'agissait de

 12   l'assemblée du comté, et ceci a été confirmé par le Parlement. Par la

 13   suite, lorsque j'étais déjà dans la cour du comté, j'ai été directement élu

 14   parle parlement suite à la proposition du ministre de la justice de la

 15   Croatie.

 16   Q.  Je souhaite brièvement attirer votre attention sur votre carrière

 17   juridique. D'après la description que vous avez fournie à la Chambre, est-

 18   ce qu'on peut dire que vous n'avez jamais travaillé dans le domaine du

 19   droit militaire ?

 20   R.  Par un concours de circonstance, j'ai été également juge dans le

 21   district -- dans la Région militaire de Split chargé des officiers et des

 22   sous officiers car j'avais également terminé les études pour les officiers

 23   de réserve. J'avais un grade assez important, par la suite j'ai été nommé

 24   au poste du juge du tribunal militaire donc j'étais -- tribunal

 25   disciplinaire militaire donc j'étais juge du tribunal disciplinaire chargé

 26   des officiers, sous officiers qui auraient violé certaines normes de

 27   conduite. Donc c'était mon contact avec le système judiciaire militaire mis

 28   à part ce que je faisais déjà et j'ai pu le faire compte tenu du fait que

Page 23154

  1   j'avais fini les études pour devenir officier de réserve.

  2   Q.  Je vais essayer de vous ramener à votre carrière d'avocat actif. Est-ce

  3   que vous avez travaillé dans le domaine du "droit militaire" en tant que

  4   praticien avant de devenir juge ?

  5   R.  Je n'ai jamais été avocat, j'ai uniquement été juge et je ne me suis

  6   pas occupé de droit militaire.

  7   Q.  Vous avez dit -- dans votre déposition ce matin, page 7 du compte rendu

  8   d'aujourd'hui, lignes 7 à 25, vous avez dit, je cite :

  9   "Manifestement, j'ai étudié les lois applicables au système de

 10   fonctionnement de l'armée croate. Ce qui m'intéressait c'était de

 11   déterminer les rapports existant entre le ministère de l'Intérieur et le

 12   ministère de la Défense. C'est parce que j'ai étudié tout cela que très

 13   facilement je suis arrivé aux conclusions auxquelles je suis arrivé, car il

 14   est stipulé précisément dans la loi qu'un commandant de caserne n'a aucun

 15   pouvoir sur les unités combattantes déployées dans sa zone de

 16   responsabilité."

 17   Pourriez-vous citer un règlement ou un texte officiel sur lequel vous vous

 18   appuyez pour dire cela ?

 19   R.  Vous me demandez un détail. Je ne peux pas vous répondre après les 15

 20   ans qui viennent de s'écouler mais j'avais à ma disposition toutes les lois

 21   disponibles car nous recevions et nous avions dans notre bibliothèque

 22   juridique tous les textes de lois de l'ex-Yougoslavie. Par ailleurs, je

 23   n'avais aucune difficulté à me procurer toutes les lois ou décrets

 24   d'application qui concernaient l'armée croate, la police croate --

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Cipci, avant de décrire en

 26   détail ce que contenait la bibliothèque, répondez à la question, je vous

 27   prie, parce que la question consistait à vous demander simplement si vous

 28   pourriez citer un règlement ou un texte officiel, et vous nous avez dit

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  1   qu'à l'époque vous avez examiné ces documents mais qu'au jour

  2   d'aujourd'hui, vous n'avez pas la capacité d'en citer un.

  3   Je pense que ceci répond à la question, Madame De Landri; ou aimeriez-vous

  4   savoir exactement combien il y avait de livres dans la bibliothèque en

  5   question ?

  6   Veuillez poursuivre.

  7   Mme DE LANDRI : [interprétation] Mais j'aimerais demander au témoin une

  8   précision.

  9   Q.  Monsieur Cipci, vous avez témoigné avec une certaine certitude même si

 10   cela se passait il y a déjà quelques heures au sujet du pouvoir que vous

 11   estimiez que M. Cermak avait sur l'armée donc son pouvoir militaire et vous

 12   avez dit cela avec une grande certitude. Donc étant donné ce que vous venez

 13   de dire à l'instant qui est un peu différent de cette déclaration très

 14   ferme que vous avez faite ce matin, j'aimerais vous demander si vous

 15   pourriez nous expliquer pourquoi cette différence a surgi.

 16   M. KAY : [interprétation] Expliquez quelle est une variation, selon les

 17   termes de Mme De Landri; j'ai du mal à comprendre.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Madame De Landri, ce que le témoin

 19   a dit un peu plus tôt ce matin, c'est qu'après avoir examiné les textes de

 20   lois, il était parvenu à la conclusion et il l'avait fait sans difficulté

 21   qui était la sienne parce qu'il est précisément stipulé dans la loi :

 22   "Qu'un commandant de caserne n'a pas de pouvoir."

 23   Donc c'est la conclusion à laquelle il est parvenu après avoir étudié

 24   tous ces documents. Maintenant le fait que le témoin nous dise qu'il ne

 25   peut pas en citer un après 15 ans, c'est une question de précision

 26   supplémentaire. Ce n'est pas vraiment une différence par rapport à ce qu'il

 27   a dit précédemment, s'il ne se rappelle pas maintenant ce qui était à

 28   l'origine de sa conclusion de l'époque.

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  1   Je pense que ce que vous devriez tenter d'établir en tout cas il me

  2   semble que c'est cela le sujet c'est que le témoin, en ce moment, est

  3   incapable de vous citer précisément un texte de lois relatif à ce qu'il a

  4   déclaré ce matin; ça au moins c'est clair. Si vous souhaitez explorer

  5   davantage cette question, bien sûr, faites-le.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, un mot que j'aimerais

  7   dire, s'il vous plaît, très rapidement.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais laisser la liberté à Mme De

  9   Landri de se prononcer sur votre possibilité de le faire ou pas.

 10   Madame De Landri, les textes juridiques relatifs à l'exercice du

 11   pouvoir non seulement par un commandant de caserne mais également par toute

 12   sorte d'autres personnalités officielles bien sûr ont été discutées assez

 13   longuement devant cette Chambre déjà et je pense que la Chambre a déjà dit

 14   que la connaissance de toutes ces sources de droit qui réglementent ce

 15   pouvoir particulier n'est pas dépourvu de pertinence mais que nous n'avons

 16   pas une nécessité absolue d'entrer dans tous les détails à ce sujet.

 17   Par conséquent, s'il y a  un point très précis que vous aimeriez explorer

 18   avec le témoin, faites-le. Mais simplement je pensais que vous aimeriez

 19   savoir qu'en ce moment la question de savoir s'il a souvenir tout à fait

 20   précis des textes juridiques sur lesquels il s'est appuyé pour former ses

 21   conclusions de l'époque, qu'elles soient justes ou fausses sont --

 22   Mme DE LANDRI : [interprétation] Monsieur le Président, excusez-moi

 23   d'interrompre. I y a de nombreux documents que l'on peut consulter.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre comme vous l'estimez

 25   bon, Madame De Landri.

 26   Mme DE LANDRI : [interprétation]

 27   Q.  Monsieur Cipci, je vais maintenant vous poser quelques questions au

 28   sujet des déclarations préalables écrites faites par vous.

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  1   Mme DE LANDRI : [interprétation] Affichage de la pièce D1723.

  2   Q.  J'aimerais appeler votre attention sur le paragraphe 4 de ce texte.

  3   Vous parlez d'une rencontre particulière dans ce paragraphe 4. Vous le

  4   voyez ? Prenez votre temps.

  5   R.  Très bien, maintenant je le vois.

  6   Q.  Vous rappelez-vous la date de cette rencontre, de cette réunion ?

  7   R.  Je ne sais pas qu'elle est la date exacte, je crois qu'après les 15 ans

  8   écoulés, il serait présomptueux de ma part de vous dire que je connais la

  9   date exacte. Mais en tout cas, je sais que cela, cette réunion a eu lieu

 10   avant l'opération Tempête.

 11   Q.  Vous pourriez nous donner une date approximative ?

 12   R.  Une dizaine, une quinzaine de jours avant.

 13   Q.  Vous rappelez-vous le lieu de cette réunion ?

 14   R.  Si je me souviens bien, cette réunion a eu lieu au ministère de

 15   l'Intérieur à Zagreb, dans la rue Savska.

 16   Q.  Pour que le compte rendu soit tout à fait clair, avez-vous assisté à

 17   cette réunion ?

 18   R.  Bien sûr, j'étais présent. Tous les chefs, chargés de faire leur

 19   travail pendant et après l'opération Tempête, avaient été convoqués à cette

 20   réunion. Je veux parler de tous les responsables des directions de la

 21   police situés dans les environs du territoire à libérer; autrement dit, à

 22   Split, à Zadar, Sibenik, Karlovac, et Zagreb.

 23   Q.  Pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre quels étaient les autres

 24   participants à cette réunion ?

 25   R.  Le ministre, c'est certain, y a assisté, et je crois qu'étaient

 26   également présents ses assistants. Je crois que M. Moric, M. Smiljan Reljic

 27   étaient présents. M. Moric étant l'assistant chargé des tâches

 28   fondamentales de la police, et M. Smiljan Reljic étant l'assistant chargé

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  1   du SZUP.

  2   Q.  Lorsque vous dites "le ministre," vous parlez du ministre M. Jarnjak,

  3   n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui, de M. Ivan Jarnjak qui était ministre.

  5   Q.  Dites-nous : quels sont les détails que vous avez en mémoire de ce qui

  6   a été discuté à cette réunion ?

  7   R.  A cette réunion, nous avons reçu des consignes de la bouche du ministre

  8   qui nous a dit tout ce que nous étions chargés de faire, à savoir que

  9   chaque poste de police et chaque direction de la police étaient chargés de

 10   fournir les effectifs et officiers responsables aux postes de police dans

 11   leurs zones de responsabilité et, par ailleurs, il nous a été indiqué que

 12   nous devions fournir un certain nombre de policiers dont le rôle

 13   consisterait à apporter leur concours aux postes de police en question pour

 14   obtenir une normalisation de la situation dans toute la région. Le nombre

 15   minimal qui a été précisé était une centaine de policiers, qui devaient

 16   venir s'adjoindre aux policiers qui étaient censés être présents dans les

 17   postes de police de la région à libérer.

 18   Q.  Quelles ont les consignes précises, que vous avez reçu au sujet de

 19   votre rôle dans cette période ?

 20   R.  Vous parlez de mon rôle personnel, ou du rôle de la police ?

 21   Q.  Je parle de votre rôle individuel, personnel, sur le plan

 22   professionnel.

 23   R.  Mon rôle professionnel, en tant que chef de la direction de la police,

 24   consistait à donner des ordres à mes subordonnés pour leur permettre

 25   d'accomplir leur tâche et de faire en sorte qu'ils soient prêts à

 26   intervenir dès le début de l'opération Tempête. Car en dehors de moi,

 27   personne ne connaissait la date et l'heure du début de l'opération Tempête.

 28   Moi, j'en avais été informé, j'étais le seul à les connaître, et c'est en

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  1   fonction de cette connaissance que j'ai distribué mes consignes. Mais, les

  2   hommes auxquels je distribuais mes consignes étaient tenus de les respecter

  3   toutes, et donc d'accomplir toutes les tâches de préparations.

  4   Q.  De qui précisément vous receviez vos consignes ?

  5   R.  De qui je recevais mes consignes ? Comme je l'ai déjà dit, je les

  6   recevais de M. le ministre, M. Jarnjak, quant à moi, j'émettais, je donnais

  7   des consignes à Jure Radalj, qui était chef de la police de base, et qui

  8   devait fournir les effectifs nécessaires au poste de police de Vrlika ainsi

  9   qu'aux hommes qui l'aidaient dans son travail.

 10   Mme DE LANDRI : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que ce

 11   serait peut-être un moment opportun pour suspendre l'audience.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 13   J'aimerais savoir -- je vois que vous venez de commencer, et je ne tiens

 14   absolument pas à vous intimider le moins du monde, mais je vous demanderais

 15   si vous pourriez nous donner une idée du temps qu'il vous faut encore.

 16   Ne manquez pas d'allumer votre micro.

 17   Mme DE LANDRI : [interprétation] Encore deux ou trois parties d'audience,

 18   Monsieur le Président.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien sûr, je ne peux pas m'enquérir

 20   auprès des autres parties du temps qu'il leur faudra, il est trop tôt pour

 21   cela. Les Juges ont sans doute des questions à poser. A partir de demain,

 22   nous n'allons plus siéger pendant un certain temps, donc je vous inviterais

 23   à réfléchir à la possibilité éventuelle de limiter vos questions à deux

 24   segments d'une heure et demie, au maximum, peut-être même un peu moins, ce

 25   qui nous permettrait étant donné les questions de fond sur lesquelles le

 26   témoin est interrogé, d'en terminer avec la déposition de ce témoin demain,

 27   et cette option est de loin la plus favorable.

 28   S'il n'y a pas d'autres questions à évoquer, nous allons maintenant

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  1   suspendre l'audience.

  2   Monsieur Cipci, je tiens à vous dire une nouvelle fois que vous avez

  3   obligation de ne parler à personne de votre déposition, qu'il s'agisse de

  4   la partie de votre déposition que vous avez déjà faite, ou de celle que

  5   vous vous apprêtez à faire.

  6   Je vous invite à revenir demain matin à 9 heures dans cette même salle

  7   d'audience, car maintenant nous allons suspendre, nous reprendrons nos

  8   travaux demain, jeudi, 15 octobre, à 9 heures du matin.

  9   [Le témoin quitte la barre]

 10   --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le jeudi 15 octobre

 11   2009, à 9 heures 00.

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