Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi 26 février 2010

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tout le monde.

  7   Madame la Greffière d'audience, veuillez citer l'affaire.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour à toutes les personnes

  9   présentes dans le prétoire et à l'extérieur du prétoire.

 10   Il s'agit de l'affaire IT-06-90-T, le Procureur contre Ante Gotovina et

 11   consorts.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame.

 13   Monsieur Radic, avant que nous ne recommencions, j'aimerais vous rappeler

 14   que vous êtes toujours tenu de respecter la déclaration solennelle que vous

 15   avez prononcée au début de votre déposition, en vertu de laquelle vous avez

 16   indiqué que vous alliez dire la vérité, toute la vérité et rien que la

 17   vérité.

 18   Maître Kehoe, êtes-vous prêts ?

 19   M. KEHOE : [interprétation] Oui, tout à fait.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie.

 21   LE TÉMOIN : JURE RADIC [Reprise]

 22   [Le témoin répond par l'interprète]

 23   Contre-interrogatoire par M. Kehoe [Suite] : 

 24   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Radic.

 25   R.  Bonjour.

 26   Q.  Monsieur Radic, j'aimerais que nous reprenions le fil de notre

 27   discussion là où nous nous sommes interrompus, hier. Il s'agit des

 28   conversations que vous avez eues au début du mois d'août 1995, après

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  1   l'opération Tempête. Hier, nous avions parlé que tout le monde s'entendait,

  2   d'après l'ambassadeur Galbraith, à ce que 80 % des Serbes ne reviennent

  3   pas.

  4   Alors, j'aimerais attirer votre attention sur ce compte rendu ou ce procès-

  5   verbal. Il s'agit toujours des conversations que vous avez eues.

  6   M. KEHOE : [interprétation] Je souhaiterais dans un premier temps demander

  7   l'affichage de la pièce P463.

  8   Q.  Il s'agit de la conversation entre vous et le président Tudjman, le 22

  9   août.

 10   M. KEHOE : [interprétation] J'aimerais attirer votre attention sur la page

 11   10 de la version anglaise et la page 9 de la version B/C/S. Excusez-moi.

 12   Oui, c'est bien cela. Page 9 de la version B/C/S.

 13   Q.  Alors, j'aimerais vous parler du milieu de cette page, et étant donné

 14   que je ne lis pas le B/C/S, j'aimerais savoir si c'est exactement le même

 15   passage qui se trouve sur l'écran. Je parle de l'intervention qui commence

 16   par : 

 17   "O.K. Je parle de 10 %..."

 18   R.  Ce n'est pas la version B/C/S, ce n'est pas la bonne version B/C/S.

 19   Mme GUSTAFSON : [interprétation] C'est la page 14.

 20   M. KEHOE : [interprétation] Je vous remercie, Madame Gustafson. Mais page

 21   14, alors, dans la version B/C/S. Je n'ai pas l'impression que ce soit la

 22   bonne page non plus.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, voilà, ça y est.

 24   M. KEHOE : [interprétation]

 25   Q.  Donc, dans ce paragraphe, voilà ce que vous dites :

 26   "Très bien, je vous parle de 10 %. Donc, la première priorité de la

 27   colonisation, en fait, c'est ici, du peuplement, c'est ici. A mon avis,

 28   c'est Petrova et Zrinski Gore. C'est là où nous devons établir tôt ou tard

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  1   une ville."

  2   Puis vous prenez le début du paragraphe suivant, et voilà ce que vous avez

  3   dit :

  4   "Toutefois, si on ouvre des usines tout comme l'ont fait les Serbes à Licki

  5   Osijek, et bien, je me suis rendu dans cette usine, justement. Elle a l'air

  6   merveilleuse."

  7   M. KEHOE : [interprétation] Deux pages plus loin, s'il vous plaît. A la

  8   page 12 de la version anglaise, vous avez le président qui commence par

  9   dire :

 10   "Ecoutez. Je rencontre l'armée demain."

 11   Il dit que :

 12   "L'armée est une priorité, suivie par le développement."

 13   Ça, c'est la page 18 de la version B/C/S.

 14   Page suivante. Ah, non, non, c'est la bonne page. Pardon.

 15   Q.  Donc, il dit :

 16   "L'armée est une priorité, suivie par le développement, parce qu'avec

 17   l'armée, nous pouvons commencer de suite."

 18   Je pense qu'hier soir, vous avez eu la pièce P464 qui est un procès-verbal

 19   de la réunion qui a eu lieu avec les dirigeants militaires le lendemain.

 20   Donc, vous avez cette suite de conversations. Il s'agit donc d'ouvrir des

 21   villes, de construire des villes, de faire en sorte que les militaires

 22   s'installent, s'implantent pour développer la zone. J'ai une question à

 23   vous poser à partir, une question qui émane du contre-interrogatoire mené à

 24   bien par l'Accusation. Si l'objectif de ces activités est d'empêcher que

 25   les Serbes ne reviennent, pourquoi est-ce que vous insistez pour que tous

 26   ces développements soient mis en œuvre dans cette zone ?

 27   R.  Bien. Tout à fait. L'objectif n'était pas de faire en sorte que les

 28   Serbes ne reviennent pas. Le seul objectif véritable était que cette zone

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  1   qui était sous-peuplée ou qui avait une très faible densité démographique

  2   puisse avoir des gens qui arrivent. A plusieurs reprises, nous avons dit :

  3   "Il faudrait que l'armée s'y rende également."

  4   Parce que comme je vous l'ai déjà dit, nous avions dit que nous

  5   pensions qu'il valait mieux envoyer les membres de l'armée dans cette zone

  6   plutôt que dans des zones ou dans des villes très grandes, et puis nous

  7   voulions également que des usines soient construites, là-bas.

  8   Nous avions déjà certaines usines dans la région un peu plus au sud, à

  9   Licki Osijek. Mais, là, il y avait quelques centaines d'appartements qui

 10   appartenaient à l'Etat et qui avaient été vidés à l'époque. Donc, le but

 11   était de faire en sorte que les gens reviennent là-bas. Nous prenions comme

 12   prémisse de départ, c'est que nombreux étaient les Serbes qui étaient

 13   partis et qui ne voudraient pas revenir.

 14   C'est pour cela que nous voulions, en fait, inciter les Croates à aller là-

 15   bas, et c'est pour cela que par la suite, nous avons adopté la loi relative

 16   aux zones d'intérêt, les zones d'intérêt spécial pour l'Etat. Cela ne

 17   signifie pas pour autant qu'il faut savoir plutôt que cette zone n'était

 18   pas particulièrement attirante. Donc il fallait envisager des éléments

 19   d'incitation supplémentaires pour que les gens aillent s'implanter là-bas.

 20   C'est pour cela que nous avions besoin de ces éléments. Evidemment,

 21   l'activité la plus simple consistait à y faire arriver l'armée. Il ne faut

 22   pas oublier que les militaires ont des épouses, des enfants. Les épouses

 23   pouvaient travailler dans les usines textiles, les enfants pouvaient

 24   commencer à se rendre à l'école là-bas, ce qui signifie que la vie dans

 25   cette région pouvait ainsi démarrer.

 26   Donc, c'était notre stratégie, c'était notre but, notre objectif

 27   stratégique à l'époque.

 28   Q.  Je vous remercie, Monsieur Radic. Donc, nous allons maintenant passer à

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  1   la vitesse supérieure et parler de certaines des questions qui vous ont été

  2   posées à propos de vos conversations avec le président Tudjman, une fois de

  3   plus, à propos de M. Pasic.

  4   M. KEHOE : [interprétation] Là, il s'agit donc du document P463, la

  5   conversation du 11 [comme interprété] août.

  6   J'aimerais que la page 6 de la version anglaise et la page 9 de la version

  7   B/C/S soient affichées. Il s'agit de la conversation qui a eu lieu entre

  8   vous-même et le président et vous parliez de M. Pasic et du fait qu'il

  9   était Serbe.

 10   Alors vous vous souviendrez, et je pense que vous vous souvenez de la loi

 11   relative aux minorités ethniques, n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui, tout à fait, je m'en souviens.

 13   Q.  Alors conformément à cette loi relative aux minorités ethniques, dans

 14   une ville d'appartenance ethnique serbe d'après le recensement de 1991, il

 15   fallait que le maire de cette ville soit un Serbe de souche, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui, oui. En fait, le but c'était que dans les zones dont étaient

 17   parties la population, il y avait en fait deux maires. Il y en avait un qui

 18   était Serbe et qui vivait à Knin, si vous prenez Knin, comme exemple, donc

 19   il y en avait un qui vivait à Knin, et les Serbes de Knin l'avaient choisi,

 20   l'avaient élu à la fonction de maire.

 21   L'autre avait été élu par des personnes qui étaient parties de Knin, mais

 22   qui -- il faut savoir qu'il était très souvent impossible d'organiser des

 23   élections c'est pour cela que le gouvernement avait nommé cette personne.

 24   Donc il n'y avait pas beaucoup de personnes disponibles, parce que vous

 25   saurez peut-être que lors de l'occasion de Knin il y avait très peu de

 26   Serbes de Knin qui vivaient à l'extérieur de Knin, et c'est pour cela qu'il

 27   a fallu choisir quelqu'un, il a fallu choisir un maire. C'est pour cela que

 28   j'ai dit au président que nous avions quelqu'un qui était parfaitement

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  1   incompétent, et je rappelle qu'il s'agit d'un Serbe pour lui rappeler

  2   également que nous devions choisir un maire en fonction de la loi relative

  3   aux minorités ethniques, donc il fallait que ce soit un Serbe, non pas

  4   forcément parmi les personnes compétentes, mais parmi quelqu'un qui faisait

  5   partie -- qui avait cette appartenance ethnique.

  6   Puisque nous étions sur le point d'amorcer la reconstruction, je pensais

  7   que cette personne qui était peut-être compétent pour exécuter des tâches

  8   administratives pendant qu'il était déplacé, pendant qu'il n'était pas à

  9   Knin, n'était pas compétent pour commencer tout ce travail de

 10   reconstruction, avec la tâche difficile que cela représentait et supposait,

 11   et c'est pour cela que je pensais qu'il fallait que nous choissions

 12   quelqu'un d'autre.

 13   Donc je n'insiste pas tant sur son appartenance ethnique, mais j'insiste

 14   sur mes doutes car je suis septique je ne sais pas s'il sera en mesure

 15   d'exécuter ces tâches importantes.

 16   Q.  Mais le fait est, Monsieur Radic, que vous parlez de l'appartenance

 17   ethnique du maire parce que vous avez cette loi relative aux minorités

 18   ethniques qui exige que de vous-même et de la part du président que vous

 19   prenez en considération l'appartenance ethnique de ce maire; est-ce que

 20   c'est bien exact ?

 21   R.  Oui, oui, tout à fait. Absolument. C'était la loi qui prévalait à

 22   l'époque, et en fonction de cette loi le maire de Knin devait être Serbe.

 23   C'était le cas dans d'autres municipalités de Croatie également.

 24   Q.  Cette loi relative aux minorités ethniques --

 25   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, ce n'est pas la peine

 26   d'étudier cela --

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre est tout à fait informée de

 28   la loi relative aux minorités ethnique dans ce contexte également

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  1   d'ailleurs.

  2   M. KEHOE : [interprétation] Alors j'aimerais juste vous donner une

  3   référence P639, en fait, vous avez un témoin qui décrit la loi, page 6,

  4   paragraphe 11, il est indiqué que l'adoption de cette loi était considérée

  5   comme une condition essentielle pour que la Croatie soit reconnue par la

  6   communauté internationale.

  7   Q.  Donc dans ce contexte lorsque le président Tudjman dit : Ecoutez,

  8   changer cette personne, parce que maintenant ce sont les Croates qui sont

  9   minoritaires à Knin -- ou plutôt, je m'excuse, je m'excuse. Les Croates

 10   sont majoritaire à Knin, et il a des problèmes et il est septique pour ce

 11   qui est de la compétence de cette personne. Donc voilà c'est bien cela qui

 12   est au cœur de cette discussion, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui, oui, tout à fait. L'accent est mis sur les compétences et non pas

 14   sur l'appartenance ethnique, c'était mon point de vue, et je suis sûr que

 15   cela était également le point de vue du président. Mais c'était une

 16   conversation en bâton rompu, nous n'avons pas véritablement fait de

 17   description précise. Moi, je n'avais pas besoin de rappeler au président,

 18   Vous savez, M. le Président, conformément à la loi relative aux minorités

 19   ethniques nous devons faire ceci et cela, mais le fait est que je dis qu'il

 20   est Serbe, et je le dis pour lui rappeler qu'il s'agissait que cela à voir

 21   avec la loi relative aux minorités ethniques qui était en vigueur à

 22   l'époque.

 23   Q.  On vient de me dire qu'il faudrait peut-être que nous parlions un peu

 24   moins vite, je pense que les interprètes en seraient fort contents.

 25   Donc la Chambre a entendu des éléments de preuve suivant lesquels M. Pasic

 26   en dépit du souhait du président Tudjman de le changer, est resté en poste

 27   à Knin, et ce, jusqu'en mars 1996.

 28   Est-ce que vous le saviez, Monsieur ?

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  1   R.  Oui, oui, oui. Je sais que, de ce fait, nous avons eu quelques

  2   problèmes techniques, car Knin ne pouvait pas bien fonctionner. Il aurait

  3   été beaucoup plus judicieux d'avoir une personne ayant plus d'expérience,

  4   une personne qui aurait été beaucoup plus compétente dans le domaine de

  5   l'économie, par exemple.

  6   Peut-être que je pourrais ajouter, qu'en 1996, l'une des personnes les plus

  7   compétentes que nous avions a été nommé maire de Knin. Avant cela, il était

  8   maire de Split, qui est la deuxième ville de la Croatie c'est M. Pujic, et

  9   une fois qu'il est arrivé à Knin, toute la vie à Knin a été organisée et

 10   structurée de façon différente.

 11   Q.  Je vous remercie, Monsieur Radic. J'aimerais passer à un sujet

 12   légèrement différent et j'aimerais que nous parlions du statut des Serbes

 13   qui avaient quitté la Krajina après l'opération Tempête. Hier, nous avions

 14   parlé de la situation en Slavonie occidentale et en fait on avait demandé

 15   aux Serbes de rester, et j'aimerais en fait savoir ce qui s'est passé après

 16   l'opération Tempête lorsque les Serbes sont partis.

 17   Alors j'aimerais en fait maintenant que nous nous replaçons dans le

 18   contexte du début de l'opération Tempête. La réunion du VONS à laquelle

 19   vous avez participée en août 1995, alors est-ce que l'on pourrait, je vous

 20   prie, afficher le document D1454. La page de garde dans un premier temps.

 21   Monsieur Radic, vous pouvez voir la liste des personnes présentes à la

 22   réunion, et vous pouvez voir que vous étiez présent à cette réunion.

 23   Est-ce que vous vous souvenez de cette réunion, Monsieur ?

 24   R.  Oui, tout à fait. C'est peut-être le meilleur souvenir de toutes les

 25   réunions auxquelles j'ai participées, parce que c'est à cette réunion que

 26   nous avons indiqué que nous avons commencé par parler et commencer à dire

 27   nous allons commencer la libération du pays.

 28   Q.  Lorsque vous dites cela vous -- ce que vous entendez c'est que lors de

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  1   cette réunion le gouvernement a décidé de lancer l'opération Tempête; c'est

  2   bien cela ?

  3   R.  Oui, voilà comment les choses se sont passées. C'était la décision du

  4   président Tudjman en tant que commandant en chef, et il nous a informé il a

  5   informé nous les dirigeants proches de cette décision, et nous sommes tous

  6   ralliés à cette décision.

  7   Donc on peut dire qu'il s'agissait d'une réunion absolument capitale et la

  8   décision était que le lendemain nous commencerions à libérer les

  9   territoires occupés de Croatie.

 10   Q.  J'aimerais en fait revenir sur un des éléments de cette réunion, c'est

 11   une observation qui a été faite par le président Tudjman et il s'agit en

 12   fait de fournir des informations aux Serbes et de faire une annonce

 13   destinée aux Serbes de la Krajina pour qu'ils restent. Nous avions parlé de

 14   cette annonce hier, nous avons indiqué que cette communication en fait elle

 15   avait été faite en Slavonie occidentale, cette communication pour que les

 16   Serbes restent. J'aimerais en fait que l'on prenne les pages 22 à 32 de la

 17   version anglaise, et page 43 de la version B/C/S.

 18   Est-ce que nous pourrions avoir le bas de la page pour la version anglaise,

 19   alors cela commence par le mot "dobro" dans la version B/C/S. Vous voyez ce

 20   passage au milieu de la page, Monsieur Radic ?

 21   R.  Oui, oui.

 22   Q.  Le président dit :

 23   "Très bien. Attelons-nous à la tâche. Je n'ai pas entendu d'avis à ce

 24   sujet. J'avais dit que je pensais que nous devrions nous adresser à la

 25   population serbe. Nous devrions appeler les Serbes à déposer les armes. Par

 26   ailleurs, en même temps, nous pourrions dire que nous allons garantir leurs

 27   droits civils, et après cela, nous garantirons l'organisation d'élections

 28   respectueuses du droit. Nous indiquerons également à la communauté

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  1   internationale que les Serbes n'acceptent pas une solution pacifique.

  2   "Donc est-ce que vous pensez qu'il suffit juste de s'adresser aux Serbes ?

  3   Car je dois signer cet appel que nous leur lancerons."

  4   Puis il y a une interruption, il y a quelqu'un qui dit : "Pour le moment,

  5   seulement destiné aux Serbes."

  6   Donc, Monsieur Radic, vous savez, n'est-ce pas, que le lendemain en fait le

  7   président a prononcé un appel public destiné à la population serbe pour

  8   qu'elle reste; vous le savez cela ?

  9   R.  Oui, oui, absolument. D'ailleurs déjà le matin, tous les médias croates

 10   qui pouvaient être entendus dans les territoires occupés ont justement

 11   diffusé ce message du président Tudjman destiné aux Serbes, indiquant

 12   qu'ils devraient rester, que rien ne leur arriverait et qu'ils devaient

 13   rester parce qu'ils faisaient partie des citoyens croates.

 14   Q.  J'aimerais que la pièce D1809 soit affichée. Je pense que c'est une

 15   partie de la page numéro 2 en anglais, il s'agit du paragraphe qui commence

 16   par : "J'invite les membres des forces paramilitaires serbes," et pour la

 17   version B/C/S, il s'agit de la page 2 également. Voilà. Un peu plus haut.

 18   R.  [aucune interprétation]

 19   Q.  C'est le chapitre -- ou le paragraphe plutôt qui commence par :

 20   "J'invite les membres des forces paramilitaires serbes qui sont volontaires

 21   ou qui ont été mobilisés sous la contrainte au sein des forces

 22   paramilitaires serbes à déposer leurs armes auprès des autorités croates,

 23   la garantie étant qu'on leur accordera une amnistie, conformément aux lois

 24   croates en vigueur.

 25   "J'invite les instigateurs de la rébellion à comprendre la futilité de

 26   leurs actes ainsi que leurs conséquences négatives pour la communauté serbe

 27   en Croatie s'ils maintiennent cette rébellion, et je les invite à se rendre

 28   aux autorités croates et à accepter l'amnistie ou à accepter d'être

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  1   traduits en justice en toute légalité pour les délits et crimes qu'ils ont

  2   commis.

  3   "J'invite les citoyens croates de nationalité serbe qui n'ont pas participé

  4   activement à la rébellion de rester chez eux, sans pour autant craindre

  5   pour leur vie ou pour leurs biens, je les invite à accueillir les autorités

  6   croates et je les assure que leurs droits civiques seront respectés et

  7   qu'ils pourront voter lors d'élections organisées par l'administration

  8   locale conformément à la constitution croate ainsi qu'au droit

  9   constitutionnel et en présence d'observateurs internationaux."

 10   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, des éléments de preuve

 11   ont été apportés à cette Chambre de première instance, il y a de nombreux

 12   témoins qui ont parlé de ce texte, qui ont témoigné à ce sujet. Alors je

 13   vous donnerais dans l'ordre, M. Sava Mirkovic, pièce P723, paragraphe 3; le

 14   Témoin protégé 54, pièce P186, page 3; il y a un autre témoin, Petar

 15   Kolovic, qui a témoigné à ce sujet, paragraphe 3 de la pièce P631; nous

 16   avons Stepan Zaric, pièce 2516, paragraphe 3; Mile Sovilj, P86, paragraphe

 17   9, et cetera, et cetera. Il y en a d'autres qui ont témoigné à ce sujet, et

 18   nous vous fournirons en temps voulu le nom de toutes les personnes qui ont

 19   témoigné à ce sujet.

 20   Q.  Alors, Monsieur Radic, le fait de demander aux Serbes de rester et la

 21   décision volontaire de ces Serbes de partir représentaient des événements

 22   de taille pour l'opinion public en Croatie ainsi que la question de savoir

 23   comment on allait prendre en charge la situation de ces personnes, n'est-ce

 24   pas ?

 25   R.  Absolument. Lors de cette réunion que vous avez évoquée, mais lors de

 26   nombreuses réunions précédentes aussi, la position qui avait été prise très

 27   clairement était celle qui figure ici par écrit et prise par le président,

 28   à savoir que de nombreux Serbes avaient été induits en erreur, qu'ils

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  1   avaient participé à la rébellion sans savoir exactement de quoi il

  2   retournait, et le président dit très clairement, sans ambiguïté, Restez, il

  3   ne vous adviendra rien.

  4   Cependant, il s'est produit quelque chose qui a été contraire à la volonté

  5   du président, à savoir qu'ils sont partis de leur propre volonté. Ce n'est

  6   ni la politique croate ni l'armée croate qui les ont forcés à partir. C'est

  7   quelqu'un d'autre qui a organisé cela.

  8   Q.  Alors c'est un fait connu que non seulement ils sont partis de leur

  9   propre gré, mais qu'ils ont rejoint une force armée avec laquelle la

 10   Croatie était en guerre, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Excusez-moi, mais j'aimerais qu'une base

 13   soit établie pour cette question, cette affirmation selon laquelle les

 14   Serbes auraient rejoint une force ou une entité qui était en guerre avec la

 15   Croatie. Je ne suis pas sûre que cela peut être établi.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Je vais clarifier la chose.

 17   Q.  Les gens qui sont partis volontairement, Monsieur Radic, sont partis en

 18   direction d'un autre Etat, ou d'autres Etats, lesquels ? Il s'agissait

 19   d'Etats qui étaient en guerre avec la République de Croatie, n'est-ce pas ?

 20   R.  Personnellement, j'ai du mal à imaginer qu'un homme puisse quitter

 21   volontairement son domicile, son foyer, et c'est la raison pour laquelle je

 22   suis conduit à penser que tout cela avait été pensé, planifié et organisé

 23   au préalable, qu'il y avait des plans qui avaient été élaborés par les

 24   autorités menant la politique Grand-Serbe et que le retrait des Serbes

 25   simultanément avec le retrait de leurs forces armées était quelque chose

 26   qui avait donc été planifié. Ma conviction ultime est qu'ils ont été

 27   contraints, contraints par Milosevic ou par ce qui le re-- ceux qui le --

 28   ou ce qu'il représente, représentait.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître, je considère que vous ne

  2   respectez pas tout à fait les limites que la Chambre a définies pour le

  3   contre-interrogatoire. Est-ce que vous pourriez en tenir compte, s'il vous

  4   plaît ?

  5   M. KEHOE : [interprétation] En effet, Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous prie de bien vouloir revenir

  7   dans les limites que nous avions tracées.

  8   M. KEHOE : [interprétation] Très bien.

  9   Q.  Alors, ces individus, ces personnes qui sont parties et la question de

 10   savoir comment ils allaient être traités, ils n'étaient pas citoyens de la

 11   République de Croatie à ce moment précis, n'est-ce pas ?

 12   R.  Non, en effet. Ils n'étaient pas citoyens de la République de Croatie,

 13   mais ils avaient le droit de formuler une demande, d'émettre une demande

 14   pour devenir citoyens croates. Parce que ceux qui étaient nés en Croatie

 15   avaient parfaitement le droit de demander la nationalité croate. Mais c'est

 16   là l'un des fondements mêmes de la rébellion. Ils ne souhaitaient pas être

 17   des citoyens croates.

 18   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, comme la Chambre a déjà

 19   été saisie d'éléments de preuve, je n'insisterai pas sur ce sujet.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'avons peut-être pas besoin de

 21   tout lister, de tout passer en revue en présence du témoin. La Chambre n'a

 22   pas forcément tout en tête, mais sait de quels éléments de preuve vous

 23   parlez et de quels éléments de preuve elle a été saisie.

 24   M. KEHOE : [interprétation] Très bien.

 25   Q.  Monsieur Radic, vous savez par ailleurs que les personnes qui sont

 26   parties étaient citoyens de la République serbe de Krajina et qu'ils

 27   étaient citoyens de la République fédérative de Yougoslavie, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui, c'est un fait connu. Non seulement ils affirmaient être des

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  1   citoyens de la République fédérative de Yougoslavie, mais ils affirmaient

  2   également qu'ils allaient annexer cette partie de la Croatie à la

  3   République fédérative de Yougoslavie. C'était le but même et le fondement

  4   de la rébellion.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais avoir un éclaircissement,

  6   s'il vous plaît.

  7   Vous avez dit que ceux qui étaient nés en Croatie avaient le droit de

  8   demander la nationalité croate, de devenir des citoyens croates pendant

  9   cette période. Mais quel était le pourcentage de ceux qui, en juillet 1995,

 10   étaient, appartenaient au groupe ethnique croate, vivaient en Croatie et

 11   étaient nés en Croatie ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] J'aurais bien du mal à vous dire cela de tête,

 13   maintenant. Mais disons que cela représentait environ 60 % de personnes qui

 14   étaient nées en Croatie et les 40 % restants étaient venus s'installer sur

 15   place en provenance d'autres régions de l'ancienne Yougoslavie pour leur

 16   travail. En provenance de Bosnie, de Serbie et d'autres parties du

 17   territoire, des personnes qui, donc, étaient venues vivre en Croatie. Dans

 18   l'ensemble, il s'agissait de membres de la JNA, des forces de police mais

 19   également de personnes exerçant des activités toutes autres.

 20   Je ne peux pas maintenant vous fournir un chiffre précis. C'est

 21   plutôt mon sentiment. 

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Veuillez poursuivre, Maître.

 23   M. KEHOE : [interprétation]

 24   Q.  Alors, pour ce qui concerne, donc, ces mêmes personnes. Pour résumer,

 25   Monsieur Radic, la République de Croatie n'a pas considéré les personnes

 26   qui avaient quitté la République serbe de Krajina comme des citoyens

 27   croates. D'autre part, ces mêmes personnes ne se considéraient pas elles-

 28   mêmes comme étant des citoyens croates; est-ce exact ?

Page 27317

  1   R.  C'est un fait. Mais voilà, le président, dans cette lettre également, a

  2   lancé un appel à l'intention de ceux qui souhaitaient devenir des citoyens

  3   croates en leur disant de rester, afin d'accepter cet état de fait. Mais ce

  4   qui est intervenu, c'est leur propre volonté ou celle de quelqu'un qui les

  5   y a contraints, qui les a donc contraints à prendre une telle décision.

  6   Q.  Lorsque le président Tudjman se réfère éventuellement à ceux qui

  7   étaient partis, est-ce que vous n'avez jamais entendu, est-ce que vous ne

  8   l'avez jamais entendu dire qu'il s'est référé à eux comme à des personnes

  9   qui avaient renoncé à la nationalité croate, à la citoyenneté croate ?

 10   R.  Oui. Une fois qu'on a vu qu'ils étaient, qu'on a constaté que ces

 11   personnes étaient parties, le président a eu l'occasion de le répéter à

 12   plusieurs reprises.

 13   Je dois dire qu'il connaissait bien mieux que nombre d'entre nous

 14   cette fraction de la population ou ce sujet, parce qu'il a passé une bonne

 15   partie de sa vie à Belgrade. Il avait été général de la JNA et il avait

 16   donc passé une bonne partie de sa vie à Belgrade, si bien qu'il était bien

 17   plus familier de la façon de penser de cette personne que nombre d'entre

 18   nous, plus jeunes, qui l'entourions.

 19   [La Chambre de première instance se concerte] 

 20   M. KEHOE : [interprétation]

 21   Q.  L'ambassadeur Galbraith a dit devant cette Chambre,

 22   M. KEHOE : [interprétation] C'est la pièce P444 --

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Excusez-moi, Maître, mais il me semble

 24   que la Chambre s'est concentrée dans son interrogatoire principal sur des

 25   éléments supplémentaires que l'on pourrait attendre -- on pourrait

 26   s'attendre à obtenir du témoin par rapport aux entretiens auxquels il a été

 27   présent. Maintenant, nous nous engageons sur le terrain de la politique du

 28   président Tudjman dans son ensemble au sujet de laquelle nous avons déjà

Page 27318

  1   été saisis d'un grand nombre d'éléments de preuve. Donc nous sommes en

  2   train de répéter ou de réentendre des choses que nous avons déjà entendues,

  3   et la Chambre ne souhaite pas que l'on procède ainsi. La Chambre souhaite

  4   vous rappeler que vous devez vous en tenir aux limites qui ont été fixées

  5   et que vous n'avez par ailleurs pas demandé l'autorisation de procéder

  6   autrement. Nos instructions étaient tout à fait claires. Par conséquent, la

  7   Chambre considère que vous avez outrepassé ces limites et vous prie de bien

  8   vouloir revenir dans le cadre de ce qui avait été fixé.

  9   Vous êtes en train d'essayer de nous expliquer ce que vous faites --

 10   M. KEHOE : [interprétation] Oui. Mais, j'aimerais introduire quelques

 11   éléments de contexte parce que d'une part, on ne s'attendait pas à ce que

 12   ces personnes reviennent et d'autre part, on a la conception qui était

 13   celle de M. Tudjman, et il y a l'intervention de --

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui --

 15   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi, mais je voudrais finir, Monsieur

 16   le Président.

 17   Le président Tudjman considérait qu'ils n'avaient pas ce droit parce qu'ils

 18   avaient rejoint une force armée avec laquelle la Croatie était en guerre.

 19   C'est ça, l'élément de contexte important.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, si vous procédez ainsi,

 21   vous allez être amené à fournir un contexte extrêmement large par rapport à

 22   ce qui fait l'objet de l'attention de la Chambre, et ce n'est pas la

 23   direction que cette dernière souhaite prendre.

 24   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, Mme Gustafson a fait la

 25   même chose, et il n'y a pas eu d'objection de la Chambre. J'essaie de

 26   fournir à la Chambre les informations les plus pertinentes possibles en

 27   portant à son attention la façon dont les participants à cette réunion,

 28   dont l'un d'ailleurs est décédé entre-temps, en sont venus à discourir de

Page 27319

  1   ce sujet. Il y a eu un entretien et des points de vue échangés entre

  2   l'ambassadeur Galbraith d'un côté, et les autres participants à la réunion.

  3   Les avis n'étaient pas les mêmes. Lorsqu'on se penche sur le procès-verbal

  4   et sur la déposition de l'ambassadeur Galbraith dans la pièce P444, on voit

  5   qu'il parle précisément de cela, à savoir Tudjman qui aurait déclaré que

  6   ces personnes avaient renoncé à la citoyenneté croate, et c'est quelque

  7   chose de complètement différent.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] N'est-il pas exact que la déposition de

  9   l'ambassadeur Galbraith, ainsi que vous l'avez vous-même indiqué, s'est

 10   concentrée de façon très spécifique sur une réunion particulière avec le

 11   président ?

 12   M. KEHOE : [interprétation] Non, ce n'est pas exact. Si vous vous repenchez

 13   sur sa déposition, vous verrez qu'il ne parle pas d'une réunion

 14   particulière mais de toute une série de réunions.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Là, le sujet a été abordé, mais la

 16   Chambre a le sentiment que vous vous éloignez de plus en plus. Nous ne

 17   sommes pas en train d'avaliser le fait de s'écarter un petit peu de la

 18   ligne qui avait été fixée, ni en train de comparer ce que vous faites avec

 19   la façon de procéder de Mme Gustafson. Mais je vous demande de bien vouloir

 20   revenir dans le cadre que nous avions déterminé, et de ne pas en sortir.

 21   M. KEHOE : [interprétation] Très bien. Merci, Monsieur le Président.

 22   J'aurais souhaité pouvoir formuler mes objections au compte rendu

 23   d'audience de façon plus précise et plus approfondie, parce que j'estime

 24   qu'il s'agit là d'un sujet absolument crucial que celui de ces entretiens.

 25   Q.  Alors, revenons sur le contexte de ces différents entretiens portant

 26   sur le fait de faire venir des gens, faire s'installer une partie de la

 27   population, et en nous parlant du document 426, la Loi sur la saisie

 28   temporaire des biens immobiliers, nous parlons de l'entretien avec le

Page 27320

  1   président Tudjman qui figure dans la pièce P463, entretien du 22 août 1995.

  2   La pièce P464, l'entretien donc du jour suivant avec les membres des forces

  3   armées envisageant un cantonnement de l'armée dans cette zone afin de la

  4   revitaliser.

  5   Donc pendant que tout cela se produit, la Croatie est toujours en guerre,

  6   n'est-ce pas ? De ce fait, une menace considérable pèse toujours sur le

  7   développement de ces mêmes zones, une préoccupation quant à la sécurité de

  8   cette zone est toujours d'actualité ?

  9   R.  Tout à fait, dans la Bosnie-Herzégovine voisine, à l'époque, la guerre

 10   fait rage et le déploiement de nos unités militaires est bien évidemment

 11   centré également sur la nécessité de nous défendre, compte tenu du fait que

 12   Milosevic est toujours au pouvoir, qu'il n'en a pas été écarté. Notre armée

 13   doit se trouver là-bas, c'est essentiel pour la défense de la Croatie. Dans

 14   ce contexte-ci, si jamais cela contribue en plus sur le plan économique,

 15   démographique, et à d'autres égards également à une évolution positive,

 16   c'est important également d'intégrer ces facteurs. Il est également

 17   extrêmement important dans ce contexte de préserver chaque maison,

 18   indépendamment de l'appartenance ethnique de ceux qui ont pu y vivre

 19   précédemment.

 20   Q.  Alors, je voudrais attirer votre attention sur le commentaire qui a été

 21   celui de la Défense Gotovina suite au mémoire préalable au procès qui a été

 22   déposé par l'Accusation, paragraphes 105, 106, 107, dans lesquels

 23   l'Accusation a soutenu qu'un conflit armé s'était déroulé entre la HV et la

 24   RSK pendant la période couverte par l'acte d'accusation, mais pas

 25   uniquement pendant cette dernière, et qu'il y avait également eu un conflit

 26   armée entre la Croatie et la Serbie pendant cette même période couverte par

 27   l'acte d'accusation et au-delà.

 28   Je crois qu'on peut se contenter de dire que pendant l'ensemble de cette

Page 27321

  1   période la République de Croatie était en conflit armé avec l'ensemble de

  2   ces forces serbes.

  3   Donc sur cette base, sur la base du fait qu'il y avait toujours une guerre

  4   faisant rage, peut-on dire qu'indépendamment de cela, des membres de la

  5   communauté internationale, y compris l'ambassadeur Galbraith, souhaitaient

  6   le retour des Serbes qui étaient partis, n'est-ce pas ?

  7   R.  Je n'arrive pas à me rappeler que Galbraith n'ait jamais parlé, en tout

  8   cas pas en ma présence, d'un retour en masse des Serbes. Peut-être qu'il y

  9   a eu des propos qu'il a pu tenu en public. Mais la façon dont je m'en

 10   souviens est plutôt la suivante, la réalité pragmatique des choses, c'est

 11   ce dont nous parlions en permanence, était selon nous qu'une petite

 12   fraction seulement des personnes qui étaient parties reviendrait en

 13   Croatie.

 14   Moi, personnellement, je n'avais pas des rapports particulièrement amicaux

 15   avec l'ambassadeur Galbraith, si bien que je n'avais pas non plus

 16   l'occasion de le rencontrer très souvent.

 17   Q.  Voyons maintenant un enregistrement vidéo qui a déjà été présenté comme

 18   élément de preuve dans ce procès. Il s'agit de la pièce 1821, une

 19   déclaration du ministre Granic qui se penche sur la position publique de la

 20   Croatie concernant les retours en masse.

 21   [Diffusion de la cassette vidéo]

 22   L'INTERPRÈTE : Note de la cabine française : les interprètes n'ont pas la

 23   transcription de la vidéo.

 24   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 25   M. KEHOE : [aucune interprétation]

 26   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 27   L'INTERPRÈTE : Les interprètes ont une transcription du 28 août 1995.

 28   M. KEHOE : [aucune interprétation]

Page 27322

  1   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

  2   L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]

  3   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

  4   M. KEHOE : [aucune interprétation]

  5   [Diffusion de la cassette vidéo]

  6   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  7   "Le vice-premier ministre et le ministre des Affaires étrangères, Mate

  8   Granic, a reçu aujourd'hui, sur leur demande, les représentants de l'Union

  9   européenne; Jean-Jacques Gaillarde; et les premiers secrétaires des

 10   ambassades italienne et espagnol, Camilo Vilarino Marzo et Benedetto

 11   Latteri, sur leur propre demande, et le représentant de la Commission

 12   européenne auprès de la MOCE, Fulvio Paolini, était également présent à

 13   l'entretien.

 14   Les représentants de la Trojka européenne ont transmis au ministre

 15   Granic la préoccupation de l'Union européenne concernant la situation en

 16   termes de droits de l'homme des personnes en Krajina serbe, le ministre

 17   Granic a dit qu'il s'agissait d'incidents isolés qui témoignaient avant

 18   tout d'une frustration, il a exprimé sa confiance en l'établissement des

 19   institutions civils, ainsi que sa certitude que les problèmes seraient

 20   résolus. Le ministre Granic a souligné que le retour des personnes qui

 21   étaient parties dépendrait avant tout de la normalisation finale des

 22   territoires concernés et de la normalisation des relations avec la RSFY.

 23   Dans les circonstances considérées, des requêtes individuelles ont été

 24   reçues et seront traitées conformément aux lois croates.

 25   "Le ministre Granic --"

 26   L'INTERPRÈTE : Note de la cabine française : les interprètes ont une

 27   transcription qui ne correspond pas à la vidéo.

 28   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

Page 27323

  1   M. KEHOE : [interprétation]

  2   Q.  Donc la position du ministre Granic est que le retour des Serbes

  3   dépendra en dernier lieu de la normalisation des relations avec la RSFY,

  4   n'est-ce pas, et bien sûr, il y a des considérations humanitaires qui

  5   dicteront éventuellement leur retour, n'est-ce pas ?

  6   R.  C'est exact.

  7   Q.  Alors n'était-ce pas la position prise publiquement, aussi bien qu'en

  8   privé d'ailleurs, parmi les ministres ?

  9   R.  Tout à fait. C'était de notoriété publique, mais cela faisait également

 10   l'objet de nos débats quotidiens.

 11   Q.  Monsieur Radic, c'est effectivement ce qui s'est passé après la

 12   normalisation des relations avec la RSFY, le retour organisé des personnes

 13   qui étaient parties et qui avaient rejoint la Bosnie-Herzégovine ou la

 14   Serbie a commencé à prendre place ?

 15   R.  Absolument. Mais cela s'est déroulé à grande échelle après la fin de la

 16   guerre, après les échanges de réfugiés, de personnes expulsées, après les

 17   échanges d'informations concernant les victimes de la guerre et personnes

 18   disparues, et cetera, ce n'est qu'après tout cela que l'on pouvait

 19   commencer à organiser un retour à plus grande échelle.

 20   Hier nous avons pu voir cette information montrant que plusieurs années

 21   plus tard le président Tudjman a pu déclarer qu'à Vukovar, à ce jour-là, 14

 22   500 personnes étaient revenues. Donc c'était de jour en jour à mesure que

 23   la normalisation prenait corps que les possibilités d'un retour elles-mêmes

 24   devenaient meilleures, donc la reconstruction également était en cours et

 25   les prérequis techniques au retour de ces personnes également étaient en

 26   train de se mettre en place.

 27   Q.  Ces prérequis techniques, je pense que vous en avez parlé, comprenaient

 28   également une demande officielle visant à obtenir la nationalité ou la

Page 27324

  1   citoyenneté croate, ensuite une demande de retour, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Alors je voudrais accélérer encore, et que nous revenions maintenant

  4   sur un entretien que nous avons abordé déjà précédemment au mois d'août, je

  5   parle de vos conversations privées concernant les politiques qui avaient

  6   été discutées tant en privée qu'en public. Je voudrais mettre en avant les

  7   préoccupations qui étaient les vôtres, il y a eu toute une série de

  8   réunions, l'une d'entre elle est celle du 7 août 1995, la pièce D813.

  9   D1813, excusez-moi.

 10   Alors c'est une séance publique, une réunion en séance publique du 7 août.

 11   Pourrions-nous passer en page 30 de la version anglaise, s'il vous plaît.

 12   Il s'agit ici d'un ensemble de personnes qui s'expriment, M. Granic, M.

 13   Valentic.

 14   M. KEHOE : [interprétation] Alors pourrions-nous passer à la page 26 dans

 15   le prétoire électronique et à la page 59 -- excusez-moi. Alors page 20 en

 16   anglais et page 45 en B/C/S, dans le système électronique.

 17   Q.  Alors, Monsieur Radic, je voudrais que nous voyions ensemble les

 18   entretiens que vous avez tant à titre privé qu'à titre public, concernant

 19   les difficultés se présentant dans ce territoire, tout particulièrement

 20   après l'opération Tempête, et le paragraphe que je voudrais porter à votre

 21   attention, alors c'est une longue discussion que vous avez sur ce sujet.

 22   Mais sur la page particulière que nous avons sous les yeux. Faites-moi

 23   confiance, c'est bien vous qui vous exprimez ici.

 24   Donc je voudrais que nous nous penchions sur le paragraphe qui commence par

 25   :

 26   "Il y a juste une ou deux choses très importantes que je voudrais

 27   souligner."

 28   Est-ce que vous voyez de quoi je parle ?

Page 27325

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Donc je cite :

  3   "Il y a une ou deux choses très importantes que je voudrais

  4   souligner. Les activités entreprises dans le but de permettre le retour des

  5   personnes ne peuvent pas avancer de façon spontanée. Tout ça doit être

  6   organisé de façon très précise et très efficace. Donc ce gouvernement n'est

  7   pas en train d'envoyer un signal clair, une invitation claire aux candidats

  8   au retour leur permettant de revenir en masse, mais nous devrions organiser

  9   les choses, et dire que demain à telle ou telle date les personnes

 10   concernées devraient retourner, revenir à Drnis, ou Vrlika, ou que ce soit

 11   de façon organisée."

 12   Alors vous étiez donc préoccupé par le maintien d'au moins un minimum

 13   d'ordre dans la zone concernée. Dites-nous pourquoi ?

 14   R.  Un jour plus tôt, j'avais reçu l'information au sein d'une séance du

 15   gouvernement qu'un candidat au retour avait été tué à Lovinac. Lovinac est

 16   un village croate qui a été complètement détruit pendant la guerre il se

 17   trouve dans la zone se situant entre Gospic et Gradac, et cette personne

 18   qui souhaitait rentrer chez elle, dès que possible est entrée dans sa cour

 19   à commencer à retirer des branchages qui s'étaient accumulés, et a sauté

 20   sur une mine. C'était de peur de voir ce type d'événement se reproduire au

 21   centuple, ou pire encore que nous avons décidé qu'il était absolument

 22   nécessaire d'organiser les choses et qu'il était inadmissible de laisser

 23   les candidats au retour se précipiter de façon désorganisée dans leur

 24   village respectif. Il était nécessaire de remettre en état les

 25   infrastructures nécessaires, de dégager les voies de communication, de

 26   réintroduire l'eau, l'électricité, et ensuite de procéder étape par étape,

 27   village par village, bourgade par bourgade, en commençant par les zones où

 28   le danger était le moins important et où il y avait le moindre de travaux à

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  1   entreprendre, commencer par là-bas donc pour que les candidats au retour

  2   puissent revenir là-bas en premier. Il fallait d'abord s'assurer que rien

  3   d'important n'était détruit, qu'il n'y avait pas de mine. Si tel avait été

  4   le cas, si on avait à faire devant la certitude, on aurait pu leur dire à

  5   tous de revenir dès le lendemain. Mais dans la situation qui était la

  6   nôtre, nous ne disposions d'aucune information, d'aucun document concernant

  7   ces menaces potentielles. Nous avons été contraints de procéder comme nous

  8   l'avons fait, et nous avons été obligés de dire aux gens d'attendre qu'ils

  9   reçoivent une invitation.

 10   Q.  Nous vous avons déjà entendu dire au cours des jours précédents que

 11   donc les gens revenaient, le procès-verbal parle du retour de ces retours,

 12   et il y a des destructions qui se sont produites. Donc dans le document

 13   P463, en page 4 sur 37, j'aimerais que nous revenions sur cette partie de

 14   votre entretien privé avec le président, c'est la page 6 dans la version

 15   B/C/S et vous parlez de cette destruction consécutive à certains retours.

 16   Donc pendant que cela s'affiche, Monsieur Radic, une partie de votre

 17   travail dans les évaluations auxquelles vous procédiez concernant le retour

 18   de ces personnes une partie de votre travail consistait à déterminer

 19   l'importance des dommages qui avaient été portés à certaines parties du

 20   territoire, et vous deviez également estimer ce que vos services seraient

 21   amenés à entreprendre comme travaux pour remettre en état ces différentes

 22   infrastructures afin de pouvoir y héberger les personnes qui quitteraient

 23   les hôtels où ils avaient été hébergés sur la côte, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui. Nous avons organisé le retour, la reconstruction, l'ensemble de ce

 25   processus, les deux premières démarches c'était d'abord le déminage et

 26   procéder à une estimation, évaluation des dommages.

 27   Des équipes spécialistes se sont rendues sur le terrain pour faire une

 28   estimation, évaluation des dommages pour pouvoir tout simplement nous

Page 27327

  1   organiser, ce qui nous incombait de faire.

  2   Q.  Maintenant je voudrais vous demander de vous reporter sur le bas de la

  3   page, où vous dites, par exemple : "Néanmoins."

  4   Je crois que vous êtes à la fin de la page 4.

  5   [Le conseil de la Défense se concerte]

  6   M. KEHOE : [interprétation] Tournons la page de la version B/C/S pour voir

  7   le texte de la page 7, s'il vous plaît.

  8   Q.  Bien, alors vous dites :

  9   "Néanmoins, un chose que je dois vous dire c'est que je me suis rendu

 10   partout à bord de ma voiture, à bord d'un hélicoptère. Ecoutez, il y a eu

 11   beaucoup de feu qui a été mis partout aujourd'hui, hier, et avant-hier, M.

 12   le pendant, et ça c'est un grand mal ça."

 13   M. KEHOE : [interprétation] Tournez la page, s'il vous plaît, allez de

 14   l'avant. En haut de la page version anglaise.

 15   Q.  "Je me suis rendu à Kijevo pour me rendre compte, je connais bien la

 16   région. Près de Kijevo, vous avez le village Civljane, qui a la taille

 17   vraiment de ce village tel un village serbe les maisons ont été tout à fait

 18   retapées, tout a été indemne. Le jour de l'Assomption je me suis rendu et

 19   tout a été incendié.

 20   M. KEHOE : [interprétation] Allez encore du haut de la page en B/C/S, s'il

 21   vous plaît, dans le prétoire électronique.

 22   Q.  "Ceci n'était pas le cas de villes parce que là-bas les autorités sont

 23   vraiment en place. Mais ailleurs il ne s'agit pas évidemment de parler de

 24   soldat, il s'agit d'un 5e échelon qui vient sous la casquette, je ne sais

 25   pas trop qui pour enfiler un tel uniforme, pour déambuler, il s'agit

 26   évidemment des trouillions, enfin des gens qui s'adonnent à des pillages et

 27   à des incendies. Ce sont nos biens à nous; ce n'est pas à un autrui. Que

 28   faux témoignage maintenant, si maintenant on met le feu dans le village de

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  1   Kijevo, où nous avons pu peut-être installer la population ? Encore à ce

  2   jour où je parle, j'ai reçu une lettre missive du cardinal, le même contenu

  3   de la missive, par exemple, un tel Cilko reprenant ce nom nous dit que ce

  4   sont nos gens-là qui ont incendié là-bas. Je ne vous parle pas de ce que

  5   d'autres gens ne parlent, je me suis rendu j'ai tout vu de mes propres

  6   yeux, pillage, rapine, et incendies."

  7   Alors tournons la page de la version anglaise et en haut de la page version

  8   anglaise, vous poursuivez. Il s'agit de la page 10 en version B/C/S.

  9   En haut de la page, vous parlez toujours au président Tudjman et vous dites

 10   notamment :

 11   "Pour ce qui est de cette période où nous avons connu un peu de misère" et

 12   tout le reste --

 13   M. KEHOE : [aucune interprétation]

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] -- qu'il n'y avait pas de pages pertinentes et

 15   la bonne page en version B/C/S.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Je m'en occupe.

 17   Q.  Patientez.

 18   M. KEHOE : [interprétation] Ceci devrait être la page 10, version croate.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Page 9, probablement, plutôt.

 20   M. KEHOE : [interprétation] Oui. Nous y sommes.

 21   Q.  En bas de la page, Monsieur Radic. Voici le commentaire :

 22   "C'est une période où nous avons connu vols, pillages, misères et toutes

 23   autres choses du genre."

 24   M. KEHOE : [interprétation] Nous n'y sommes toujours pas en B/C/S. Je ne

 25   sais pas comment empêcher tout cela, mais --

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois qu'en croate, je crois que c'est la

 27   page 9, version croate.

 28   M. KEHOE : [interprétation]

Page 27329

  1   Q.  Oui, je suis d'accord.

  2   M. KEHOE : [interprétation] Page 9, version croate. Une page en arrière,

  3   s'il vous plaît, pour la version B/C/S.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe, chaque page est censée

  5   être numérotée dans le prétoire électronique. Il s'agit, évidemment, d'un

  6   numéro qui précède. Donc, vous devez avoir en vue tout cela, ce décalage

  7   lorsqu'il s'agit évidemment de chiffres lorsque vous guidez le témoin.

  8   Alors, là, nous pouvons pouvoir suivre comme suit.

  9   M. KEHOE : [interprétation]

 10   Q.  Cette partie, d'ailleurs :

 11   "Pillages, de malheurs et du reste, je ne vois pas vraiment les voies

 12   et les moyens, comment prévenir tout cela. Le mal crucial, c'est lorsque le

 13   tout est incendié et lorsque tout a été détruit."

 14   Le président a dit ensuite --

 15   M. KEHOE : [interprétation] Passons à la page suivante en B/C/S.

 16   Q.  Là, le président dit : "Dès le début, nous disions toujours que tout

 17   ceci devait être empêché."

 18   Donc, nous sommes en train de traiter ce que vous avez dit en privé au

 19   président. Mais nous parlons également de ce que vous avez en public

 20   ouvertement dit. C'est de cela que nous nous proposons de parler. Je vous

 21   prie de nous en dire plus long sur cette conversation. Dans quelle mesure

 22   vous avez été frustré par tout cela ?

 23   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je ne pense pas que ce soit vraiment une

 24   question qui soit une suite donnée au sujet entamé par la Chambre de

 25   première instance, ou bien l'Accusation. Avec votre permission, évidemment,

 26   si on continue ainsi, j'aurai besoin moi-même de contre-interroger.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe --

 28   M. KEHOE : [interprétation] Dans votre e-mail, vous nous avez dit que vous

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  1   avez été intéressés à des problèmes touchant à la sécurité de même qu'à de

  2   conversations, soit en public, soit en privé. Le fait est qu'on n'en a pas

  3   parlé directement et de façon concrète de cette conversation. Mais étant

  4   donné qu'il s'agit d'une conversation qui traite de la sécurité, alors là,

  5   il y a lieu de signaler qu'il y a eu lieu de parler de la nature privée ou

  6   publique de cette conversation. Maintenant, il s'agit d'une conversation

  7   menée avec le président de la République, qui n'est pas en vie de nos

  8   jours.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être que vous ne nous avez pas bien

 10   compris. Lorsque nous avons parlé de problèmes relatifs à la sécurité,

 11   peut-être vous nous avez pas bien compris. On a parlé de problèmes,

 12   problèmes de sécurité dans les zones qui se trouvent dans le nord par

 13   rapport à Karlovac, où la Croatie s'est trouvée séparée de son territoire.

 14   Nous avons parlé également de la question du peuplement et surtout de la

 15   façon dont il fallait procéder pour que ce peuplement soit en sécurité.

 16   C'est sur cela que nous avons voulu nous concentrer. Vous vous souvenez, de

 17   nombreuses questions ont été posées au sujet de ces 10 %, où était le

 18   problème, quel était le problème, comment le tout a été pris en charge,

 19   notamment à la lumière de la composition démographique. Voilà le problème

 20   concernant la sécurité et qui nous intéressait et que nous avons eu à

 21   l'esprit. Pourtant, je crois que vous ne pouvez pas ne pas avoir à l'esprit

 22   les questions posées par nous, l'interrogatoire mené par nous.

 23   Je ne me souviens pas d'avoir, au cours de l'interrogatoire principal, posé

 24   des questions comme quoi on voulait savoir s'il y avait quelqu'un qui était

 25   contre ces pillages, contre les incendies, et cetera. Et si oui, ceci

 26   devait être quelque chose de marginal.

 27   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je me dois de dire que

 28   je suis fort surpris de vous entendre dire que la Chambre n'ait pas posé

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  1   telle question, et cela pour une simple et bonne raison. C'est que j'ai

  2   compris que ce témoin, entre autres, a été cité à la barre pour vérifier

  3   les intentions des autorités locales et ceux qui ont été pris par

  4   l'entreprise criminelle commune au cours de la période qui précède

  5   l'opération Tempête.

  6   Donc, ce témoin-ci menait certaines activités dans le domaine de la loi

  7   relative à la reprise temporaire de biens et propriétés, et il y jouait un

  8   certain rôle.

  9   Au paragraphe 12, lorsqu'on parle de l'entreprise criminelle commune,

 10   l'Accusation traite directement d'incendies, de destructions et d'autres

 11   aspects, aspects de dévastation, et l'Accusation en a parlé ouvertement à

 12   cet égard.

 13   Je ne me souviens pas avoir entendu l'Accusation parler directement de

 14   destructions dans Donji Lapac. Mais vous me pardonnerez, l'Accusation a

 15   parlé, pardon, de destructions dans Donji Lapac. Pourtant, cela nous semble

 16   fort important étant donné la conception d'entreprise criminelle commune.

 17   Maintenant, nous avons la possibilité de nous entretenir avec une personne

 18   présente à de telles conversations et réunions, et nous devons peut-être

 19   pouvoir apprendre ce qui a été dit, de quoi il s'agissait.

 20   Nous avons cru que ceci avait de l'intérêt pour vous, étant donné qu'il est

 21   fort important de savoir comment se présentaient les intentions avant

 22   l'opération Tempête, et savoir également quelles étaient les intentions

 23   dans le domaine de pillages et destructions, et cetera, parce qu'il s'agit

 24   d'un élément important que nous pouvons toujours opérer dans les écritures

 25   de l'Accusation.

 26   [La Chambre de première instance se concerte]

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe, je vous prie de passer à

 28   un autre sujet, et lors de la pause que nous allons tout à l'heure, nous

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  1   allons considérer l'attitude qui est la vôtre et nous allons voir après

  2   délibérations où nous allons justement voir comment se présentent les

  3   limites de votre intervention. Peut-être vous aurez l'occasion de reposer

  4   les questions.

  5   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Si vous le voulez

  6   bien, nous pouvons vous offrir certains éléments de preuve, certains

  7   documents, et nous pouvons le faire avant la pause.

  8   Puis-je poursuivre, Monsieur le Président ?

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Kehoe, je vous en prie,

 10   faites.

 11   M. KEHOE : [interprétation]

 12   Q.  Maintenant, Monsieur le Témoin, nous allons nous éloigner de ce sujet.

 13   Certainement, j'aimerais bien que l'on puisse commencer à parler de la loi

 14   portant reprise temporaire des biens, il s'agit d'un sujet qui a été entamé

 15   par la Chambre de première instance. Mais je voudrais vous demander d'avoir

 16   à l'esprit l'époque, la période pertinente où cette conversation a eu lieu,

 17   le 11, Qu'allons-nous faire de tous ces biens et propriétés ? Lorsque nous

 18   en parlerons -- nous pouvons d'abord commencer par le document P462 parce

 19   que dans ce document on en traite de long en large.

 20   Monsieur Radic, ce qui m'intéresse c'est l'évolution de ce décret, de ce

 21   statut, toutes les conversations qui s'en sont ensuivies concernant

 22   l'évolution de cette loi. Je vous le dis parce que vous devez comprendre

 23   les raisons pour lesquelles je vais tout cela, d'abord il s'agit d'une

 24   toute première conversation qui a eu lieu à ce sujet. Il me semble que

 25   suite a été donnée à un début, la Chambre de première instance a dit que

 26   vous avez étudié vous-même la page 10 du document. Je voudrais vous

 27   demander maintenant de vous y reporter.

 28   M. KEHOE : [interprétation] Page 10 version anglaise.

Page 27333

  1   Il s'agit de la page 15 de la version anglaise, affichez-nous cette page,

  2   s'il vous plaît.

  3   Q.  Alors ici tout commence par le débat sur la loi et par le traitement

  4   des aspects pratiques de cette loi, des gens qui s'en vont, des gens qui

  5   sont de retour. M. Valentic a dit que si quelqu'un se réinstalle entre-

  6   temps, et s'il y a des gens qui sont de retour, alors M. Susak a dit :

  7   "Personne ne devrait emménager en vertu d'une telle loi."

  8   Monsieur Radic, lorsque vous avez parlé de la mise en application de cette

  9   loi, il y a un problème pratique, quels sont les procédés suivant lesquels

 10   les gens devraient s'installer, comment reconstruire les maisons pour

 11   permettre les conditions propices à une réinstallation. Il s'agit de

 12   questions tout à fait pratiques dont vous avez dû débattre, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui. Normalement, il s'agit d'une période qui suit de très près

 14   l'opération Tempête. La guerre fait rage encore, de nombreuses maisons ont

 15   été soit détruites en partie ou rasées, ou il y a danger de voir des

 16   maisons encore détruites lorsque des pilleurs sont déambulés tout autour

 17   dans les parages pour s'adonner à des vols, et cetera, nous n'avons pas

 18   suffisamment de capacités pour les en prévenir, donc il s'agit d'une série

 19   de questions pratiques qui n'ont rien à voir définitivement uniquement avec

 20   le volet législatif, voilà la raison pour laquelle il a fallu en parler

 21   avec sérieux. A des réunions, des gens venaient pour nous faire part d'une

 22   panoplie d'idées, je dirais, alors là au gouvernement on s'est mis à table

 23   pour projeter et pour offrir une conception, un projet de loi qui a été

 24   traité ensuite et adopté.

 25   Q.  Parlons-en un petit peu de ces différents débats, toujours à la même

 26   page, s'il vous plaît. Pouvons-nous obtenir les propos de M. Krpina.

 27   M. KEHOE : [interprétation] C'est la page suivante version croate. Allez à

 28   la page suivante, s'il vous plaît, de la régie technique.

Page 27334

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, vous n'y êtes pas.

  2   M. KEHOE : [interprétation]

  3   Q.  Ecoutez, je vais vous en donner lecture et vous en recevrez

  4   l'interprétation dans votre casque.

  5   M. KEHOE : [interprétation] Il s'agit de la page 24 version croate.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Hm-hm.

  7   M. KEHOE : [interprétation]

  8   Q.  Or, M. Krpina dit :

  9   "Monsieur le Président, je pense que nous devrions d'abord adopter cette

 10   loi, ces biens abandonnés devraient être considérés et décrétés comme étant

 11   les biens publics, mais toujours l'accent mis sur le fait qu'il a fallu

 12   maintenir et conserver ces biens."

 13   Il dit "à condition que." D'autres personnes interviennent qui disent, par

 14   exemple, page 20 version anglaise, 22 B/C/S, M. Sarinic a dit comment on a

 15   procédé -- par exemple, comment les Français ont procédé pour s'occuper du

 16   problème de propriété de biens lorsqu'il a fallu faire face à la même

 17   situation en Algérie.

 18   M. KEHOE : [interprétation] Page 28, B/C/S. Nous y sommes d'ailleurs pour

 19   parler du texte version anglaise.

 20   Q.  M. Sarinic dit :

 21   "Je me suis intéressé d'ailleurs à la situation où les Français avaient

 22   quitté l'Algérie."

 23   M. KEHOE : [interprétation] Or, M. Milas vous allez le trouver en version

 24   anglaise vers le milieu de la page, page suivante B/C/S.

 25   Q.  M. Milas dit :

 26   "Ils parlent de la Loi constitutionnelle de Tchéquie où un décret a été

 27   entériné datant de 1945 lorsqu'il s'agit d'appropriation pure et simple de

 28   propriétés et de biens, il s'agit d'un décret de Benes, président en

Page 27335

  1   république, la cour constitutionnelle a tout simplement donné de l'aval à

  2   ce document comme étant constitutif et légal. Par conséquent, ils n'ont pas

  3   fait formation de progrès…"

  4   Donc un débat a été mené, une série d'éléments offerts parlent de la Loi

  5   Benes lorsqu'il a été décidé que les biens et les propriétés des Allemands

  6   en 1945 devaient être appropriés, saisi. Donc d'entrée de jeu, voilà toutes

  7   les voies et les moyens ont été étudiés pour savoir comment s'occuper du

  8   problème de maisons vacantes, de ces propriétés à l'abandon ?

  9   R.  Oui. A ces réunions, il y avait des gens qui devaient avoir une

 10   expérience longue internationalement parlant. M. Sarinic qui était en

 11   France. M. Milas en Tchéquie, eux ils nous parlaient de situations déjà

 12   connues et d'expériences connues dans et par d'autres pays, et on en a

 13   vraiment discuté.

 14   Q.  Essayons de voir maintenant la suite donnée à cette conversation, à ces

 15   débats étant donné que nous touchons à la fin du mois d'août, nous sommes

 16   déjà début septembre, je vous prie de vous reposer sur un document que vous

 17   avez déjà pu parcourir et voir, il s'agit du document D1823, il s'agit de

 18   la transcription du 31 août 1995, il s'agit d'une réunion à huis clos, en

 19   attendant l'affichage.

 20   Monsieur Radic, nous avons compris qu'il y avait de biens diverses

 21   différentes idées lancées depuis le mois d'août où on parlait confiscation,

 22   on parlait telle ou telle excuse ou condition et le tout ayant trait au

 23   propriété, alors voyons maintenant cette conversation à laquelle prend part

 24   M. Nikica Valentic, premier ministre.

 25   Donc je vous prie de vous reporter à la page 2 sur un total d'une trentaine

 26   de page en version anglaise, et je veux vous dire, Monsieur Radic, que

 27   vous-même vous êtes intervenu, c'est ce qu'on peut voir dans ce document

 28   encore que nous n'avons toujours pas la page de garde non plus la toute

Page 27336

  1   première page version croate.

  2   M. KEHOE : [interprétation] Vous devez vous mettre à la page 5.

  3   Q.  Ça commence par le paragraphe : "Comme vous avez pu le voir."

  4   On parle donc de ce décret qui potentiellement pourrait se faire adopter,

  5   il s'agit d'un décret portant appropriation temporaire des biens.

  6   M. Valentic intervient, et dit :

  7   "Comme vous avez pu le voir, il s'agit d'une nécessité de conserver les

  8   biens qui, de fait, sont restés sans leur propriétaire, il s'agit de biens,

  9   ou il s'agit de valeur chiffrée en milliards; qui ne se trouvent sous la

 10   protection de personne, et dans la majeure partie des cas ces biens et

 11   propriétés ont -- pillés et incendiés. Si le tout n'est pas protégé,

 12   pratiquement il est tout à fait impossible dans une si vaste zone protéger

 13   de tels biens et propriétés. Nous en sommes conscients quant aux

 14   implications politiques qui pourraient s'en suivre, et voilà la raison pour

 15   laquelle nous avons opté pour des solutions qui ont un bien fondé, concret,

 16   politique, et juridique. Voilà pourquoi je demande à M. Misetic de bien

 17   vouloir argumenter la loi et le décret; et je vais justement me classant

 18   sur le pourquoi de ce décret."

 19   Maintenant passons à la page suivante dans la version anglaise page 6,

 20   numéro 6, version croate.

 21   Je vous prie de vous reporter sur le débat tel qu'il s'étant suivi là où

 22   nous avons notamment l'intervention de M. Misetic, qui parle d'une

 23   troisième catégorie, c'est-à-dire des gens qui ont quitté la Krajina, il

 24   s'agit de voir le texte au beau milieu du texte, la version anglaise, vous

 25   y êtes pour ce qui est du paragraphe en version :

 26   "La troisième catégorie il s'agit de bien de ces citoyens, en territoires

 27   temporairement occupés et lesquels citoyens ont quitté la République de

 28   Croatie après la libération; et toutes ces trois catégories de bien

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  1   devraient être considérées comme biens et propriétés sans leur propriétaire

  2   titulaires étant donné que ces derniers ont quitté la République de

  3   Croatie. Le but de cette législation c'est justement de pouvoir exploiter

  4   et gérer ces biens et propriétés en bon maître pour primo d'abord éviter

  5   les dommages tout à fait incommensurables, et ensuite secondo pour que

  6   moyennant une bonne gestion et exploitation de ces biens on puisse

  7   sécuriser un très grand nombre de citoyens de Croatie primo des Croates qui

  8   viennent d'autres zones et d'autres régions de l'ex-Yougoslavie et qui se

  9   sont vus expulser par les Serbes vers le territoire de la République de

 10   Croatie."

 11   M. KEHOE : [interprétation] En version B/C/S, nous devons tourner la page,

 12   passer à la page suivante.

 13   Q.  "Etant donné que jusqu'ici et à l'avenir, chaque démarche de la Croatie

 14   au plan international se verra étudier selon les paramètres du droit

 15   international étant donné que la République de Croatie devient un facteur

 16   politique, militaire, et en général, non seulement dans ces territoires de

 17   l'ex-Yougoslavie mais je dirais en terme d'Europe et du monde entier, et

 18   c'est la Croatie là qui prend un rôle de facteur politique important dans

 19   ces territoires, il y a plusieurs propositions, plusieurs opinions. En vue

 20   de mener à bien une coordination de la politique tous ceux qui ont pris

 21   part à la proposition de ces lois c'est que l'ensemble de ces biens et

 22   propriétés vont être placés sous une administration séquestre par la

 23   République de Croatie, ne pas dire moyennant un acte ou moyennant une loi

 24   qu'il s'agit là de biens, de propriété de la République de Croatie."

 25   Je crois que maintenant nous sommes venus au moment où nous devons marquer

 26   une pause, Monsieur Radic; j'aimerais bien parler plus amplement de cela.

 27   M. KEHOE : [interprétation] Mais, Monsieur le Président, je vois que c'est

 28   le moment venu -- le moment opportun de marquer une pause.

Page 27338

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Soit. Par conséquent, je vais tout

  2   d'abord demander au témoin de quitter le prétoire étant donné que nous

  3   allons maintenant marquer une pause.

  4   Vous n'avez qu'à suivre Mme l'Huissière, Monsieur le Témoin.

  5   [Le témoin quitte la barre]

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe.

  7   M. KEHOE : [aucune interprétation]

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez entamé hier. Nous voici à la

  9   fin de notre premier volet de l'audience d'aujourd'hui. De combien de temps

 10   vous aurez besoin encore ?

 11   M. KEHOE : [interprétation] J'aurais besoin encore d'une heure au plus.

 12   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 13   M. KEHOE : [aucune interprétation]

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kay, et vous ?

 15   M. KAY : [interprétation] Je n'ai pas de questions étant donné les

 16   questions posées par M. Kehoe.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En ce qui concerne les questions posées

 18   par la Chambre de première instance.

 19   M. KAY : [interprétation] Non.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mikulicic, vous avez des

 21   questions.

 22   M. MIKULICIC : [interprétation] J'aurai peut-être à l'esprit une dizaine de

 23   minutes de temps de parole dont j'aurais besoin.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Passons.

 25   Marquons maintenant une pause, pour reprendre l'audience dans une vingtaine

 26   de minutes à 10 heures 55.

 27   --- L'audience est suspendue à 10 heures 32.

 28   [Le témoin vient à la barre]

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  1   --- L'audience est reprise à 11 heures 00. 

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, la Chambre s'est penchée

  3   sur la portée de votre contre-interrogatoire.

  4   Si vous souhaitez poser quelques questions ciblées à propos des procès-

  5   verbaux où il est question d'incendies et de pillages, bien que la Chambre

  6   ne se soit pas, elle, intéressée directement à cette question, et la

  7   Chambre n'a pas considéré que cela était véritablement l'un des sujets de

  8   son interrogatoire, vous êtes autorisé à le faire. Par ailleurs, la Chambre

  9   s'attend à ce que vous ne resouleviez pas à nouveau toute cette question du

 10   pillage et de l'incendie.

 11   Madame Gustafson.

 12   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Si c'est la décision qui est rendue par la

 13   Chambre, j'aimerais attirer votre attention sur le fait que ce témoin

 14   figurait sur la liste des témoins de la Défense de M. Gotovina. Je ne vois

 15   vraiment pas, Me Kehoe a fait référence à une occasion unique, peu s'en

 16   faut, et si c'est une question qui va être posée par la première fois lors

 17   d'un contre-interrogatoire et même s'il n'y a que quelques questions qui

 18   sont posées, étant donné qu'il s'agit d'un thème important dans cette

 19   affaire, qui est au cœur de cette affaire, j'aurais besoin d'un certain

 20   temps pour me préparer et pour poser des questions à ce sujet au témoin

 21   également.

 22   Je vous remercie.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voyons, voyons d'abord quelles questions

 24   vont être posées par Me Kehoe.

 25   Maître Kehoe, vous avez entendu Mme Gustafson. Elle nous a dit que, bon,

 26   c'est la première fois que l'on pose ces questions au témoin. D'ailleurs,

 27   je vous dirais que dans une certaine mesure, la Chambre s'est déjà penchée

 28   sur cette question lors de communications avec les parties. Donc, les

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  1   parties avaient décidé de ne pas convoquer ce témoin, vous auriez pu le

  2   faire, d'ailleurs, si vous l'aviez souhaité. Donc, il y a quand même des

  3   limites qui vont vous être imposées.

  4   Alors, voyons si nous pouvons véritablement nous cibler sur le pillage et

  5   les incendies.

  6   Poursuivez.

  7   M. KEHOE : [interprétation] Je comprends. Bien entendu, bon, je peux

  8   prendre en considération l'inquiétude exprimée par l'Accusation si vous le

  9   souhaitez. Mais sinon, je peux aller de l'avant.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie.

 11   M. KEHOE : [interprétation]

 12   Q.  Alors, avant de revenir à cette question des incendies et des pillages,

 13   puisque nous avons été interrompus à ce sujet, et j'aimerais revenir sur la

 14   loi relative à la saisie temporaire, et nous avons des observations qui ont

 15   été faites à la fois par M. Valentic et par Me Misetic.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Il s'agit, en fait, du document D1863, page 28

 17   de la version anglaise, et 46 de la version B/C/S' dans le paragraphe où le

 18   premier ministre Valentic s'exprime, et il s'agit, en fait, de quatre

 19   lignes à partir du haut en anglais :

 20   Q.  "Le droit d'utilisation et de gestion signifie que nous ne sommes pas

 21   en train de nous immiscer dans le droit de propriété. Cela va être régulé

 22   par une loi tout à fait séparée.

 23   M. KEHOE : [interprétation] Alors, est-ce que nous pouvons sauter quelques

 24   paragraphes. Je vous demanderais de faire défiler le document vers le bas.

 25   Q.  "Ergo…" - donc par conséquent - "ce type de décret permettra à

 26   quiconque qui demande à revenir de présenter une demande en 30 jours, et au

 27   cas où la propriété n'a pas fait l'objet d'une mise sous séquestre -- au

 28   cas où il n'a pas fait l'objet de mise sous séquestre. S'ils ne respectent

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  1   pas les délais, alors la propriété peut faire objet d'une mise sous

  2   séquestre."

  3   Donc nous avons eu quelques débats à ce sujet, mais vous avez participé

  4   quand même à nombre de débats avec différents interlocuteurs qui ont

  5   exprimé leurs points de vue à ce sujet, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Je pense que c'est finalement un décret qui a été adopté le 4 septembre

  8   1995, la Chambre d'ailleurs dispose de ce décret. Il s'agit de la pièce

  9   P476, qui donne un délai de 30 jours à la population pour qu'elle

 10   s'inscrire, puis il y a la loi à proprement parler, qui fait l'objet de la

 11   pièce D422, et qui a été adoptée le 20 septembre 1995, et il s'agit de la

 12   pièce D422, et le délai a été prorogé à 90 jours.

 13   Donc est-ce que nous pourrions dire qu'au début de la discussion, beaucoup

 14   de questions ont été posées pour voir ce que l'on pouvait faire de ces

 15   propriétés, puis ensuite il y a cette période de mise sous séquestre de 30

 16   jours, puis de 90 jours, et cela en septembre 1995, tout cela en un mois de

 17   temps ?

 18   Est-ce que c'est ainsi que les choses se sont passées ?

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, mais ne pensez-vous pas

 20   que j'avais déjà posé cette question au témoin, j'ai donné exactement les

 21   mêmes dates ?

 22   Je ne vois franchement pas quelle est l'utilité de poser cette question au

 23   témoin, cela a déjà été versé au dossier, on a entendu des éléments de

 24   preuve; on l'a entendu plusieurs fois.

 25   M. KEHOE : [interprétation] Mais, écoutez, Monsieur le Président, cela

 26   émane des questions posées par la Chambre, si vous m'y autorisez.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, vous avez demandé au témoin si cela

 28   était exact. Je vous ai déjà dit en fait que le témoin l'a déjà dit à la

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  1   Chambre, la Chambre est informée.

  2   Poursuivez.

  3   M. KEHOE : [interprétation]

  4   Q.  Donc vous avez ces discussions qui ont eu lieu, ces discussions privées

  5   qui ont eu lieu avec M. l'Ambassadeur Galbraith, afin de voir comment cette

  6   loi allait être mise en œuvre; est-ce que cela a été discuté avec tous les

  7   parties ?

  8   R.  Voilà ce que je vous dirais. Nous avons parlé de cette loi, nous en

  9   avons beaucoup parlé. Nous étions nombreux à ne pas avoir beaucoup

 10   d'expérience en la matière, mais nous savions quels étaient nos objectifs,

 11   les objectifs ils étaient très précis et très clairs dans nos esprits, le

 12   but était de protéger et de préserver les biens fonciers afin de les

 13   utiliser afin qu'ils ne tombent pas en ruines.

 14   Je dois vous dire que je ne me souviens pas avoir rencontré personnellement

 15   l'ambassadeur Galbraith à l'époque, mais j'ai rencontré quand même de

 16   nombreux représentants de la communauté internationale, et nous avons

 17   essayé d'adapter nos propositions à ce qu'ils avançaient pour que nos

 18   propositions puissent être acceptées par la communauté internationale.

 19   Je me souviens d'ailleurs qu'à une occasion, j'ai eu une conversation avec

 20   Mme Albright. Mme Albright m'a dit qu'il fallait que nous empêchions

 21   l'incendie de ces maisons. Je lui ai dit que : Bien entendu, nous le

 22   faisions et nous le faisons, non pas parce que vous nous le demandez de le

 23   faire, mais parce que cela est tout à fait conforme à nos principes, et

 24   cela est conforme à notre constitution. Nous devons empêcher que les

 25   maisons soient mises à feu. Nous devons empêcher ce pillage des maisons.

 26   Nous devons absolument protéger la propriété privée. En même temps, nous

 27   devons utiliser ces propriétés de la meilleure façon que nous le pouvions à

 28   cette époque si dure où il y avait de nombreuses personnes déplacées en

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  1   Croatie, il y avait des personnes qui venaient de Bosnie-Herzégovine, et

  2   ceux qui venaient de Bosnie-Herzégovine étaient d'ailleurs à la fois

  3   Croates et des Bosniaques.

  4   Donc au lieu de les héberger dans des centres sportifs, sous des tentes,

  5   dans des gymnases, au lieu de les loger dans ce genre d'infrastructures où

  6   c'était tout à fait temporaire, ces personnes que nous voulions protéger,

  7   les propriétés, l'idée essentielle était en fait d'avoir une famille qui

  8   pouvait habiter dans une maison, et c'était très bien parce qu'ainsi la

  9   propriété n'était plus abandonnée et pouvait être utilisée.

 10   Q.  Monsieur Radic, alors je vais aller à l'essentiel. La Chambre vous a

 11   posé une question à propos d'un témoignage qui a été fait par M.

 12   l'Ambassadeur Galbraith devant cette Chambre de première instance, pages 27

 13   159 à 27 160, plusieurs paragraphes, il indique que cette loi relative à la

 14   saisie temporaire des biens fonciers n'était qu'un prétexte pour s'emparer

 15   des biens fonciers quittés par les Serbes qui étaient partis.

 16   Qu'avez-vous à dire à ce sujet ?

 17   R.  Il est de notoriété publique que M. Galbraith était un être très

 18   superficiel, et il ne connaissait pas tous les tenants et aboutissants du

 19   problème. Il se peut qu'il ait dit que cela ait été un prétexte pour

 20   quelque chose d'autre, mais cela n'est pas vrai. Parce que, moi,

 21   personnellement, j'ai coordonné ce travail, il a pu certainement lui

 22   observer le travail sans être vraiment partie prenante, mais je peux tout à

 23   fait vous confirmer de façon très claire quel était l'objectif principal de

 24   cette saisie des propriétés.

 25   L'idée essentielle était de protéger les biens en question et non pas de

 26   les détruire, et ce n'était certainement pas un prétexte pour que les

 27   personnes ne reviennent pas chez elles. Parce que si tel avait été notre

 28   souhait, la méthode la plus simple aurait consisté à tout brûler, tout

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  1   incendier. Mais vous pouvez voir que, moi, j'ai dit directement au

  2   président, Nous devons empêcher les incendies. Ce qui a été confirmé par le

  3   président. Je peux également vous dire que nous avons eu au moins 50

  4   conversations de la sorte au cours desquelles nous avons dit, Protégeons

  5   les propriétés, empêchons que ces propriétés ne soient brûlées, parce que

  6   ce sont des propriétés qui sont importantes pour tous les citoyens de la

  7   Croatie.

  8   Donc nous n'aurions pas empêché les incendies si notre objectif principal

  9   consistait à faire en sorte que les gens ne reviennent pas.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, je vous ai demandé un peu

 11   plus tôt de ne pas poser des questions qui allaient en fait nous faire

 12   obtenir de la part du témoin des réponses qui portent sur des éléments de

 13   preuve que nous avons déjà reçus. Alors votre dernière question, la

 14   question à propos du prétexte. Ecoutez, je pense que le témoin a maintenant

 15   fourni trois fois cette explication, ce n'est pas la peine de lui poser la

 16   question une quatrième ou une cinquième fois.

 17   Poursuivez.

 18   M. KEHOE : [interprétation] Ecoutez, je revenais à la question qui avait

 19   été posées par la Chambre pour une kyrielle de raisons.

 20   Q.  Mais bon, nous allons maintenant nous pencher sur le dernier document,

 21   le document P475.

 22   Donc il s'agit de la loi relative aux modifications apportées à la loi

 23   portant sur la saisie temporaire et l'administration de biens fonciers

 24   précis, et il est indiqué -- regardez le paragraphe premier qui a changé :

 25   "Pour ce qui est de rendre la propriété des propriétés et l'utilisation des

 26   propriétés aux personnes mentionnées à l'article 2 de cette loi, cela fera

 27   l'objet d'un règle en fonction de l'accord relatif à la normalisation des

 28   relations entre la République de Croatie et la République fédérale de

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  1   Yougoslavie."

  2   Vous voyez la date, la date du 17 janvier 1996. Donc là, il est question

  3   des Serbes qui reviennent, donc d'après ce que vous compreniez, cette

  4   n'allait pas être abordée tant que les relations entre les deux pays

  5   n'étaient pas normalisées. C'est bien ainsi que vous compreniez la

  6   situation, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui, et c'est ce qui est indiqué par cette loi d'ailleurs.

  8   Q.  Très brièvement, pour revenir à un sujet déjà abordé très rapidement

  9   par vous, qui nous permettra de mettre un terme rapidement à cette

 10   discussion, et j'aimerais d'ailleurs à ce sujet que le document P463 [comme

 11   interprété], page 4, soit affiché, ce n'est pas la peine de le lire à

 12   nouveau, mais il est question en fait d'incendies des maisons. Vous en avez

 13   parlé avec nous, vous nous avez dit que cela était l'un des fléaux les

 14   pires, et le président Tudjman dit : Cela aurait dû être empêché dès le

 15   début.

 16   C'est une conversation privée entre vous deux. Mais pourquoi est-ce que

 17   vous indiquez ceci au président ? Est-ce que vous pourriez nous en donner

 18   la raison.

 19   R.  Il y a deux raisons. La première raison étant que j'étais président de

 20   la Commission chargée du Renouveau de la vie dans cette zone. C'était une

 21   commission de l'Etat qui avait été nommée par le gouvernement à l'époque.

 22   Mais en sus, moi, personnellement, je me suis rendu dans toutes ces zones

 23   libérées, donc je parlais de choses que j'avais vues de visu le jour de

 24   l'assomption, j'ai vu des maisons qui brûlaient, et j'ai dit au président

 25   que cela était très, très mauvais. Il m'a demandé qui brûlait les maisons.

 26   Je lui ai dit : Mais écoutez, c'est différentes personnes dans les zones

 27   qui arborent des uniformes militaires mais qui ne font pas partie de

 28   l'armée. Si vous allez à la place centrale de la ville, dans Zagreb,

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  1   j'entends, vous verrez des personnes qui déambulent en uniforme alors

  2   qu'elles ne sont pas membres de l'armée. Donc juste après la guerre, tout

  3   le monde pouvait se dissimuler derrière un uniforme, par exemple.

  4   L'INTERPRÈTE : [hors micro]

  5   M. KEHOE : [interprétation] Je m'excuse.

  6   Q.  Donc vous avez condamné cela à titre privé, en privé, mais vous avez

  7   également fait des déclarations publiques qui condamnaient ce genre de

  8   comportement, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui, tout à fait, je l'ai fait très souvent. Je l'ai fait directement.

 10   Je l'ai fait lors d'entretiens accordés à la télévision. Je l'ai fait lors

 11   de séances gouvernementales et ailleurs d'ailleurs. Je dois vous dire que

 12   le président du pays, le premier ministre et tout le gouvernement se

 13   rallaient à moi. Mais je dois vous dire que c'était une conviction

 14   personnelle, sincère mais ce n'était pas seulement ma conviction c'était la

 15   conviction du président de mon pays et de tous les dirigeants de mon pays.

 16   Ma tâche qui m'avait été confiée c'était la reconstruction. Si nous

 17   parlons de reconstruction de maisons, il vaut mieux préserver des maisons

 18   plutôt que de les laisser détruire pour les reconstruire par la suite,

 19   parce que c'est pour cela que nous voulions protéger le plus grand nombre

 20   de foyers que possible.

 21   Q.  Alors pièce 1D3058, c'est une pièce de la liste 65 ter. Il s'agit d'un

 22   article de presse du 23 août 1995, donc une journée après votre discussion,

 23   après votre conversation, conversation qui faisait l'objet de la pièce

 24   P463.

 25   Je ne sais pas s'il y a une version B/C/S qui existe donc je vais vous en

 26   donner lecture en anglais, Monsieur. Il s'agit d'un document qui vient de

 27   Tanjug du 23 août donc et voilà ce qui est indiqué donc :

 28   "Le vice-premier ministre croate Jure Radic a dit mercredi que les

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  1   propriétés des Serbes en Krajina étaient pillées et détruites.

  2   "Radic a dit lors d'une séance gouvernementale croate qu'il se dissociait

  3   tout à fait de cette situation. Au nom du gouvernement, Radic a proposé que

  4   les ministères de la défense et de l'intérieur se voient confier la tâche

  5   de prévention d'un tel comportement et qu'il faudrait qu'il punisse les

  6   auteurs de ces crimes.

  7   "Radic a avancé que ces crimes n'avaient pas été commis par l'armée croate

  8   ou par la police mais par des personnes dont le sillage des actions

  9   militaires personnes qui pillaient et détruisent les propriétés en

 10   question."

 11   Monsieur Radic, vous voyez la date, vous voyez la teneur de cet article de

 12   presse; est-ce que cela correspond à ce que vous aviez dit lorsque vous

 13   avez proféré des condamnations publiques de ce type de comportement ?

 14   R.  La date et le texte du message sont tout à fait conformes a ce dont je

 15   me souviens. Bien sûr, chaque journaliste y ajoute sa touche personnelle

 16   pour écrire un article. Mais j'avais effectivement dit qu'il fallait

 17   absolument protéger ces biens fonciers, et je voulais très, très,

 18   sincèrement que ce message soit bien perçu par tous les citoyens croates

 19   qui pouvaient apporter leur contribution à la préservation de ces biens

 20   fonciers.

 21   M. KEHOE : [interprétation] Je souhaiterais demander le versement au

 22   dossier de la pièce 1D3058.

 23   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Pas d'objection.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Madame la Greffière.

 25   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce D02021.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D2021 est versée au dossier.

 27   Poursuivez.

 28   M. KEHOE : [interprétation]

Page 27349

  1   Q.  Monsieur Radic, vous trouviez-vous avec le président Tudjman à Karlovac

  2   lorsqu'il a fait un discours au cours duquel il a condamné publiquement la

  3   destruction des biens fonciers en Croatie ?

  4   R.  Si vous faites référence à notre voyage à bord du train de la liberté,

  5   vers Split, j'étais présent, oui. J'y étais présent à plusieurs reprises

  6   lorsque le président a relayé ce message.

  7   M. KEHOE : [interprétation] Bon, je vous donne juste la référence, il

  8   s'agit de la pièce D1451, vidéo du 26 août du président Tudjman qui

  9   condamne la destruction en question.

 10   Alors, Monsieur le Président, je vais vous expliquer en fait ce que j'ai

 11   l'intention de faire parce que donc, bon, il y a certains éléments de

 12   preuve qui ont été apportés par le témoin auparavant. Alors nous avons vu

 13   la vidéo de M. Liborius où M. Liborius parle de la destruction de Kistanje

 14   et du fait que la construction a commencé en 1996, et donc cela correspond

 15   à ce qu'a dit M. Radic ici.

 16   Alors, bien entendu, donc j'ai posé des questions directrices, et il y a,

 17   par exemple, la page 5 du compte rendu d'audience où le témoin dit : Oui,

 18   mais cela nous empêche au vu de situation de -- ça nous empêche de loger,

 19   d'héberger des personnes dans ces maisons. Je le dis parce que je voulais

 20   savoir, en fait, ce qui intéressait la Chambre.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous êtes capable de poser quelques

 22   questions ciblées à propos des comptes rendus, même si la Chambre ne s'est

 23   pas elle précisément intéressée aux pillages, aux incendies, vous avez la

 24   possibilité de le faire. Mais, mais, mais, mais --

 25   M. KEHOE : [aucune interprétation]

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faut que vous ayez bien compris,

 27   parce que cela a son importance dans cette affaire, il faut que vous ayez

 28   bien compris, disais-je, ce qui a été dit, ce qui a été fait, quand, où,

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  1   les mesures qui ont été prises, ce qui se passait sur le terrain. Tout ça

  2   c'est un sujet fort complexe. Donc la Chambre s'est intéressée aux éléments

  3   de preuve apportés par un témoin qui avait participé à certaines des

  4   réunions qui n'étaient pas des réunions publiques et je dois vous dire que

  5   cela nous a été présenté à moult reprises. Par conséquent, la Chambre a

  6   indiqué, me semble-t-il très clairement dans nos orientations, dans nos

  7   conseils que nous ne voulions pas obtenir de plus amples ou d'autres

  8   éléments de preuve à propos des activités législatives. Parce que nous

  9   savons quelles ont les mesures qui ont été prises. Nous en avons entendu

 10   parler, on nous a présenté la planification, les programmes de

 11   planification, mise au point, et mise en œuvre. L'objectif était de -- par

 12   rapport à ce témoin, j'entends, était de voir si ce que sait ce témoin nous

 13   permet de mieux comprendre ce qui a été dit pendant ces réunions.

 14   Donc je suis parfaitement conscient du fait, Maître Kehoe, que nous

 15   pourrions poser des questions à ce témoin pendant des semaines et des

 16   semaines à propos de tout ce qu'il sait. Ce n'est pas la raison pour

 17   laquelle la Chambre a convoqué ce témoin, et manifestement, les parties se

 18   sont abstenues de le convoquer pour la même raison. Donc voilà, voilà, le

 19   contexte, voilà les limites.

 20   Je vous ai déjà dit, me semble-t-il, d'ailleurs, que, bien sûr, nous

 21   connaissons tous les éléments de preuve. Bon, je ne peux pas vous dire que

 22   nous sommes au fait du moindre détail et qu'il ne faut pas vérifier

 23   certaines choses. Mais à propos des incendies et des pillages, nous avons

 24   entendu des moyens de preuve très fréquemment, cela est absolument

 25   indubitable, et je pense qu'il est évident qu'il n'allait pas dans

 26   l'intérêt de la Croate que les maisons soient pillées et incendiées. Parce

 27   que quelle que soit l'approche retenue à propos des personnes qui allaient

 28   vivre et être logées dans ces maisons, mais si vous adoptez un point de vue

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  1   neutre et vous voulez que les gens viennent s'installer là, il vaut mieux

  2   avoir des maisons qui n'ont pas été détruites et incendiées et pillées.

  3   Cela nous l'avons entendu à plusieurs reprises, fréquemment, et je pense en

  4   fait que ce témoin nous l'a déjà dit cela lors d'une réponse il y a quatre

  5   ou cinq réponses de cela. Il y a déjà fait référence à cela, donc ce n'est

  6   absolument pas nouveau pour la Chambre.

  7   M. KEHOE : [interprétation] Alors, bien entendu, je parlais de Kistanje

  8   parce que hier matin la Chambre a justement fait référence à Kistanje, à la

  9   destruction de Kistanje, à la reconstruction et aux efforts de

 10   reconstruction --

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais ce qui est absolument important

 12   pour la Chambre, qui, bien entendu, a été informée de la déclaration du

 13   témoin, et s'il est question d'un programme de reconstruction avec des

 14   maisons qui ont été construites, si vous ne savez pas quand est-ce que cela

 15   s'est passé, si vous ne savez pas comment cela s'est passé, les

 16   informations de cette déclaration n'ont aucun sens pour nous si cela s'est

 17   passé en 2002, ou en 1997, ou en 1996, ou en 1999. Donc vous aurez peut-

 18   être remarqué, Maître Kehoe, que la Chambre a essayé d'obtenir des

 19   informations factuelles très précises, et qu'ensuite la Chambre n'a pas

 20   posé de questions de suivi. Nous voulions juste être informés de la

 21   situation, et c'est tout. C'est tout. La Chambre n'a pas posé d'autres

 22   questions.

 23   M. KEHOE : [interprétation] Voilà ce que je voulais vous dire, Monsieur le

 24   Président.

 25   J'ai compris vos questions comme étant des questions qui portaient sur

 26   l'intention, et l'élément qui est constitué par l'intention comporte

 27   plusieurs facettes, et en plus, est retrouvé dans plusieurs zones. Donc

 28   c'est pour cela alors, en matière d'entreprise criminelle commune, nous

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  1   pensions que la Chambre voulait avoir des renseignements supplémentaires.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, si c'est ce que vous vouliez

  3   faire, vous auriez dû convoquer le témoin, ici.

  4   M. KEHOE : [interprétation] Oui, mais en fait, il a été dit --

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, il y un objectif limité, et je

  6   l'avais dit, nous l'avons dit aux parties. Nous ne voulions pas éplucher

  7   tous les éléments de preuve. Vous, vous avez décidé de ne pas convoquer le

  8   témoin et la Chambre a décidé de limiter la portée de son interrogatoire

  9   principal.

 10   Alors nous savons pertinemment qu'il a des connaissances sur d'autres

 11   questions, et de toute façon, et nous nous attendons à ce que les parties

 12   se rallient à ce que nous avons fait.

 13   M. KEHOE : [interprétation] Oui, je vous comprends tout à fait. Je suis

 14   d'accord avec vous, Monsieur le Président, lorsque vous nous dites que nous

 15   pourrions avoir un contre-interrogatoire qui durerait des semaines. De

 16   toute façon, je suis presque arrivé au terme de mon contre-interrogatoire.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, Maître Kehoe, je vous ai

 18   autorisé à poser quelques questions sur certains éléments, plutôt que de

 19   nous lancer dans un débat qui va prendre beaucoup plus de temps que les

 20   questions que vous allez poser au témoin.

 21   M. KEHOE : [interprétation] Mais c'est pour cela que j'ai soulevé la

 22   question de Kistanje. C'est parce qu'en fait, j'essaie d'en venir à la

 23   question de la reconstruction avec une vidéo qui a été montrée très

 24   rapidement, mais qui montre qu'il y a des efforts de reconstruction qui ont

 25   été faites, qui ont été faits plutôt dès 1996. Alors, vous savez, j'allais

 26   lui demander : quand est-ce que vous avez commencé à construire ? Quelles

 27   sont les maisons qui ont été reconstruites ?

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, à propos de la

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  1   reconstruction, je répète une fois de plus que la Chambre a dit qu'elle

  2   n'était pas intéressée par les programmes qui ont suivi. Ce n'est pas ce

  3   que nous essayons d'obtenir.

  4   Je vais vous donner lecture de ce que nous avons dit :

  5   "La Chambre n'a pas l'intention d'obtenir d'autres éléments de preuve

  6   relatifs à la légitimité des activités ou à la planification ou aux

  7   programmes de planification, de mise au point ou de mise en œuvre."

  8   Ensuite nous ajoutons :

  9   "La Chambre a déjà entendu beaucoup d'éléments de preuve à ce sujet."

 10   Bon, ensuite nous donnons le nom de certaines personnes. Voilà,

 11   apparemment, maintenant, il s'agit d'un programme qui est vaste ou peu

 12   important, d'ailleurs, mais dont nous n'avons jamais entendu parler jusqu'à

 13   présent, dont nous voyons une référence à cela dans la déclaration du

 14   témoin. Nous nous sommes demandé :

 15   "Est-ce que cela est tout à fait nouveau ? De quoi s'agit-il ?"

 16   Nous avons ensuite obtenu des renseignements à propos de la période.

 17   Nous avons plus ou moins obtenu de renseignements sur le contexte, et nous

 18   n'avons plus posé d'autres questions à ce sujet.

 19   Madame Gustafson, je ne sais pas, moi, si nous voyons des ouvriers du

 20   bâtiment qui construisent 150 ou 200 maisons; est-ce que cela

 21   représenterait pour vous une lourde préparation pour des questions

 22   supplémentaires ?

 23   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, donc poursuivez mais

 25   n'oubliez pas le temps qui vous a été imparti.

 26   M. KEHOE : [interprétation] Je comprends tout à fait.

 27   Q.  Vous avez mentionné, Monsieur Radic, un effort de reconstruction qui a

 28   commencé à Kistanje en 1996; c'est bien cela, n'est-ce pas ? C'est exact ?

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  1   R.  Oui. J'ai dit que, d'après mes souvenirs, cela avait commencé en 1996,

  2   mais nous avons commencé cette reconstruction dans différentes zones à des

  3   dates différentes. Mais pour autant que je m'en souvienne, cela s'est passé

  4   en 1996.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, j'aimerais que vous vous

  6   concentriez sur les questions et que vous essayiez d'y répondre.

  7   M. KEHOE : [interprétation]

  8   Q.  Je vais vous montrer une vidéo très brève filmée par M. Liborius, un

  9   observateur, enfin, un ancien observateur de la MOCE, juste un petit

 10   extrait.

 11   [Diffusion de la cassette vidéo]

 12   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] 

 13   "Je m'appelle Soren Liborius. Je travaille pour la MOCE et après

 14   l'opération Tempête en août 1995. Nous nous approchons maintenant de la

 15   ville de Kistanje, dans l'ancien secteur sud sur la route qui part de Knin.

 16   Kistanje était une forteresse serbe où la majorité, la très vaste majorité

 17   de la population était serbe. Kistanje a été incendié immédiatement après

 18   l'opération Tempête. En fait, l'incendie volontaire a commencé pendant la

 19   première journée, celle du 5 août.

 20   "Lorsque les membres des organisations internationales ont traversé

 21   Kistanje à bord de véhicules, il y avait beaucoup de maisons en train de

 22   brûler. Mais l'incendie de maisons et d'installations se trouvant à

 23   Kistanje s'est poursuivi pendant toute la durée du mois d'août. L'intensité

 24   de ces incendies était à son comble de façon très claire lors de la

 25   première semaine, après les 4 et 5 août.

 26   "Alors, ce que nous voyons maintenant, ce sont de nombreux efforts de

 27   reconstruction qui sont déployés. On peut voir de nombreuses maisons dotées

 28   de nouveaux toits, de nouvelles fenêtres, de nouvelles portes. La majorité

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  1   de la population appartient maintenant au groupe ethnique croate, et elle

  2   est originaire soit de la région du Kosovo en Yougoslavie, ou bien il

  3   s'agit de personnes déplacées appartenant au groupe ethnique croate qui

  4   sont revenues, ou bien de Croates de Bosnie qui sont hébergés

  5   temporairement dans ces logements.

  6   "Nous voyons les novelles tuiles en terre cuite qui sont sur les toits.

  7   Tout cela a été reconstruit à l'automne 1996 et au printemps 1997, et

  8   l'apparence de la ville de Kistanje, telle qu'elle apparaît aujourd'hui est

  9   différente de ce que l'on pouvait voir à l'été 1995, ainsi qu'en août

 10   1996."

 11   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 12   M. KEHOE : [interprétation]

 13   Q.  Alors, Monsieur Radic, il s'agit d'un extrait d'une vidéo, donc cela

 14   commence en 1986 [comme interprété]. Mais à qui étaient les maisons qui

 15   faisaient l'objet de cet effort de reconstruction ?

 16   R.  Je pense qu'il y a ici un malentendu assez sérieux, si les Juges

 17   veulent bien me permettre de tirer cela au clair.

 18   J'ai dit qu'en 1996, nous avions entamé la construction de nouvelles

 19   maisons à Kistanje, maisons dans lesquelles nous avons ensuite transféré

 20   des personnes qui étaient logées à titre temporaire. Alors, comme on peut

 21   le voir dans cette vidéo, en 1995, c'est la reconstruction ou la réparation

 22   des maisons partiellement détruites qui a commencé. Ce qui est dit ici est

 23   inexact, à savoir que la majorité des maisons dans Kistanje auraient été

 24   endommagées. C'est une faible fraction de logements qui avaient été

 25   endommagés. Elles ont été réparées, alors que la plupart des maisons

 26   n'étaient que très peu touchées, si bien qu'il y avait très peu de choses à

 27   faire avant de pouvoir y transférer des personnes.

 28   Donc nous parlons de deux choses tout à fait différentes. D'un côté, la

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  1   réparation des maisons, disons pour simplifier, de maisons serbes qui

  2   avaient été peu endommagées, d'un côté, et d'un autre côté, la construction

  3   d'un nouveau lotissement où nous avons immédiatement transféré des

  4   personnes. Donc, on voit ici les conduits permettant de faire passer

  5   l'acheminement en eau, en électricité, tout ce qu'il faut pour la vie

  6   normale des personnes. Il y a eu ce lotissement de 150 maisons, dont nous

  7   avons entamé la construction en 1996 si bien qu'aujourd'hui, il y ait à

  8   Kistanje une capacité d'accueil deux fois supérieure à ce qu'elle était

  9   dans le passé. Il y a deux fois plus de logements.

 10   Q.  Merci, Monsieur le Témoin. Je n'ai pas d'autres questions.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître.

 12   Maître Kay.

 13   M. KAY : [interprétation] Pas de questions.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc pas de question de la Défense

 15   Cermak.

 16   Maître Mikulicic.

 17   M. MIKULICIC : [interprétation] Je n'aurais que quelques questions pour le

 18   témoin.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Radic, c'est maintenant Me

 20   Mikulicic qui va vous contre-interroger pour le compte de l'accusé Markac.

 21   Contre-interrogatoire par M. Mikulicic : 

 22   Q.  [interprétation]  Bonjour, Monsieur le Témoin.

 23   R.  Bonjour, Maître.

 24   Q.  Je vais simplement vous poser quelques questions et je vous prie

 25   d'essayer de vous souvenir au mieux que vous pouvez et de me répondre.

 26   Alors, à partir de la déclaration que vous avez fournie, à l'époque, à

 27   l'équipe de la Défense du général Gotovina, on peut voir qu'à peu près à

 28   partir de 1992 et à peu près jusqu'en 2003, vous avez participé à la vie

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  1   politique en différentes qualités, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Nous voyons que vous avez occupé également différents postes au sein de

  4   la République de Croatie, des postes au sein de partis politiques, mais

  5   également dans la vie publique, alors en cette qualité je voudrais vous

  6   demander si vous avez eu l'occasion de rencontrer des représentants au

  7   sommet de la vie politique et des partis en Croatie ?

  8   R.  Oui, tout à fait. C'était une partie intégrante de ma vie pendant 12

  9   ans.

 10   Q.  Est-ce que cela inclut les présidents des partis, le premier ministre,

 11   les ministres, le président, et ainsi de suite ?

 12   R.  Oui, j'étais à la tête du bureau de la présidence et pendant deux ans

 13   et demi, c'était pendant des heures et des heures que nous passions

 14   quotidiennement un certain temps ensemble. Je voyageais souvent avec lui

 15   lorsqu'il était en déplacement, et mes collègues également.

 16   Q.  Alors l'acte d'accusation dressé en l'espèce contre les accusés

 17   Gotovina, Cermak et Markac dit que, conjointement avec d'autres personnes

 18   parmi lesquelles figurent certaines que vous venez de mentionner avec

 19   lesquelles vous collaboriez quotidiennement, ils auraient participé à une

 20   entreprise criminelle commune dont le but aurait été d'écarter de façon

 21   durable la population serbe de la Krajina en Croatie en recourant aux

 22   menaces, à la force, aux expulsions et aux transferts de population forcés,

 23   à la destruction de biens privés, et par d'autres moyens également.

 24   Alors la question que je voudrais vous poser est la suivante : Est-ce que,

 25   Monsieur Radic, dans l'accomplissement de vos devoirs en tant que

 26   participant à la vie politique en Croatie en tant que vice-premier

 27   ministre, en votre qualité de chef du cabinet de la présidence, en votre

 28   qualité de secrétaire général du HDZ, en votre qualité de parlementaire ou

Page 27358

  1   à d'autres postes, est-ce que vous avez jamais assisté à la préparation

  2   d'une telle entreprise ou d'un tel projet tel que décrit dans l'acte

  3   d'accusation ?

  4   R.  Non, jamais, absolument jamais. C'est quelque chose qui est tout à fait

  5   incompatible avec ma vision du monde, et je n'ai jamais entendu rien de tel

  6   de la bouche d'aucune des personnes appartenant à ce cercle.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson.

  8   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Enoncer ainsi la thèse de l'Accusation de

  9   la façon la plus vague et la plus générale qui soit et demander au témoin

 10   d'en donner une confirmation ou une affirmation va largement au-delà des

 11   limites fixées par la Chambre pour le contre-interrogatoire de ce témoin

 12   dans l'e-mail que la Chambre a envoyé aux parties.

 13   Je vous remercie.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître.

 15   M. MIKULICIC : [interprétation] Monsieur le Président, je me contentais de

 16   citer l'article 12 de l'acte d'accusation.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est exactement ce que Mme Gustafson

 18   essaye de nous dire, elle essaie de nous indiquer que vous devriez vous

 19   abstenir de faire cela.

 20   Vous pourriez aussi demander au témoin si des accusés sont coupables ou non

 21   coupables, ou donner lecture de l'ensemble de l'acte d'accusation. Bien

 22   sûr, j'exagère, je force le trait.

 23   M. MIKULICIC : [interprétation] Monsieur le Président, avec le respect que

 24   je vous dois --

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je disais je force un peu le trait. Mais

 26   manifestement cela sort du cadre que nous avons indiqué aux parties. Les

 27   questions complexes qui amalgament une vingtaine au moins d'éléments

 28   factuels et juridiques au lieu de se contenter de deux, trois ou quatre

Page 27359

  1   éléments ne viennent pas en aide à la Chambre dans la démarche que nous

  2   souhaitons avoir ici.

  3   Alors je vous prie de poursuivre en ayant cela à l'esprit.

  4   M. MIKULICIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  5   Q.  Monsieur Radic, est-ce que vous étiez au courant de l'existence d'un

  6   tel plan ?

  7   R.  Je n'ai pas entendu la première partie de la phrase, excusez-moi.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mikulicic, Mme Gustafson

  9   s'est levée. Mme Gustafson souhaite peut-être émettre exactement la même

 10   objection à la question que vous posez.

 11   La Chambre a cité ce témoin pour obtenir des précisions sur certains sujets

 12   bien précis, vous pourriez demander à tout témoin s'il avait ou non

 13   connaissance d'un tel projet --

 14   M. MIKULICIC : [interprétation] -- mais, Monsieur le Président, le témoin

 15   était au cœur des instances politiques et gouvernementales de la Croatie à

 16   l'époque, il n'est pas n'importe qui.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous ne l'avez pas cité à

 18   comparaître. Vous ne lui avez pas demandé de venir déposer à la barre. Or,

 19   vous lui demandez s'il est au courant de menées criminelles --

 20   M. MIKULICIC : [interprétation] Mais c'est la teneur même de l'acte

 21   d'accusation, c'est la raison même de notre présence ici.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais en fait ce que nous recherchons ce

 23   sont les faits. Alors vous pouvez poser des questions au témoin concernant

 24   telle ou telle réunion à laquelle il a été présent. Mais vous contenter de

 25   lui demander s'il y avait une entreprise criminelle ou non, là encore je

 26   vais forcer le trait, mais cela sort complètement du cadre que nous avons

 27   fixé pour ce qui est de la citation à comparaître de ce témoin.

 28   Alors en dehors de cela, Madame Gustafson, j'imagine que cela correspond à

Page 27360

  1   l'objection que vous vouliez soulever. Parce que Me Mikulicic avait signalé

  2   avoir besoin d'une dizaine de minutes pour poser ses questions. Ici nous

  3   voulons véritablement entendre uniquement les réponses qui sont pertinentes

  4   et qui font suite aux questions qui ont déjà été posées. Si M. Radic était

  5   d'avis qu'il y avait à l'époque des visées criminelles, je ne suis pas sûr

  6   -- s'il s'exprimait en ce sens, je pense que l'ensemble de ses réponses

  7   aurait pris un cours complètement différent. Il nous a expliqué la teneur

  8   de certains projets et de certains plans qui étaient tout à fait

  9   raisonnables.

 10   Cela ne mène à rien, il n'y a aucune raison d'envisager la moindre visée ou

 11   intention criminelle par rapport à ce qu'il nous a expliqué. Cela sort du

 12   cadre de ce que le témoin lui-même a dit. Je voudrais vérifier juste une

 13   chose…

 14   [La Chambre de première instance se concerte]

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, je viens de vérifier

 16   avec mes collègues pour ce qui est de s'opposer aux questions qui ne

 17   viennent pas en aide à la Chambre pour ce qui est de la détermination des

 18   faits et qui nous feraient donc perdre du temps, mais le fait de soulever

 19   des objections représente une perte de temps tout aussi bien.

 20   Alors, Maître, poursuivez.

 21   Vous aviez demandé dix minutes.

 22   M. MIKULICIC : [interprétation] Entendu. Je n'ai qu'une dernière question.

 23   Q.  Monsieur Radic, vous nous avez dit ne pas être au courant de

 24   l'existence d'un tel plan ou d'un tel projet. Mais est-ce que vous auriez

 25   dû logiquement être au courant d'une telle entreprise compte tenu des

 26   contacts que vous aviez et de la position qui était la vôtre ?

 27   R.  Oui, j'aurais certainement été au courant, parce qu'à une époque

 28   j'étais l'homme numéro 2 ou numéro 3 de l'Etat croate. En même temps,

Page 27361

  1   j'étais le chef du cabinet du président, j'étais le secrétaire général du

  2   parti au pouvoir, donc j'étais au sommet même de l'Etat, et il aurait été

  3   tout à fait impossible qu'une telle chose ait existé sans que j'en sois au

  4   courant.

  5   Q.  Merci pour vos réponses, Monsieur Radic.

  6   M. KEHOE : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, je n'ai pas

  7   d'autres questions.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître.

  9   [La Chambre de première instance se concerte]

 10   Questions de la Cour :  

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai encore quelques questions pour

 12   vous, Monsieur Radic.

 13   La première sera la suivante, elle concerne les éléments de cette

 14   conversation concernant Plaski et Saborski. Vous vous souviendrez que Mme

 15   Gustafson vous a demandé si Plaski était un village croate, si Saborski

 16   avait été un village serbe. Puis on a posé des questions concernant cette

 17   façon de faire déménager les gens deux fois à Plaski d'abord et puis

 18   ensuite, les faire revenir à Saborski. Puis la discussion s'est poursuivie

 19   concernant cette opposition ferme qui existait à l'idée de faire déménager

 20   les gens deux fois, et il a été suggéré qu'il avait des raisons pour ceux

 21   qui se trouvaient à Plaski d'y rester.

 22   Ensuite on a attiré votre attention sur le fait qu'à Plaski, il y avait

 23   peut-être bien des appartements disponibles, et que le fait de ne pas

 24   quitter Plaski pourrait éventuellement être expliqué par le fait qu'il

 25   s'agissait d'appartements sous le régime de la propriété sociale ou

 26   d'appartements d'Etat. Alors vous avez dit qu'il était très facile de

 27   vérifier cela.

 28   Mais juste aux fins d'une meilleure transparence, je sais qu'on peut

Page 27362

  1   regarder sur "Google Earth," par exemple.

  2   Si l'on regarde le village de Plaski, on a l'impression, quand même,

  3   d'avoir affaire à une zone rurale avant tout. En tout cas, pour ce que l'on

  4   peut voir, il ne semblerait pas qu'il y ait de barres d'immeubles ou de

  5   grands immeubles contenant des appartements. Mais vous avez recouru à cette

  6   explication pour ce qui est des raisons pour lesquelles les gens seraient

  7   restés à Plaski.

  8   Vous avez dit qu'il serait facile de le vérifier; mais quelle méthode

  9   suggérez-vous à cette fin quant à la présence, par exemple, d'appartements

 10   qui étaient propriété d'Etat dans ce village particulier ? Comment

 11   procédez-vous pour une vérification de cela ?

 12   R.  Je suis tout à fait d'accord avec vous pour dire qu'il est

 13   particulièrement difficile de vérifier cela. Je n'ai été que deux ou trois

 14   fois dans ma vie à Plaski. Je vous rappelle qu'au centre de cette localité,

 15   il y a plusieurs bâtiments, plusieurs immeubles d'habitation. Il n'y en a

 16   pas énormément. En tout, il s'agit peut-être de quelques dizaines

 17   d'appartements.

 18   Mais en tout Conseil de sécurité, Plaski, tout comme Saborski, est

 19   une zone -- représente une zone dans laquelle vivaient avant tout des

 20   ouvriers forestiers. C'est une zone d'exploitation syvicole, et les

 21   appartements étaient propriété de l'Office croate des forêts. Il est tout à

 22   fait certain que les instituteurs des écoles locales, également, s'étaient

 23   vus attribuer des appartements qui appartenaient à l'Etat.

 24   Cependant, le principe de base, l'idée, c'était de transférer des personnes

 25   originaires de Saborski au plus près de leur localité d'origine, afin

 26   qu'elles aussi puissent participer aux travaux de reconstruction, de remise

 27   en état. C'est dans ces conditions-là que ces derniers étaient le plus

 28   souvent couronnés de succès.

Page 27363

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, ce n'est pas ce que je souhaitais

  2   savoir.

  3   Il ne vous revient pas de spéculer quant à la question de savoir ce que je,

  4   l'accord que je peux partager ou non avec telle ou telle partie.

  5   Vous vous êtes appuyé sur une explication possible quant aux raisons de ne

  6   pas transférer certaines personnes, la façon dont cela affecterait les

  7   droits des personnes en question, le fait que ces personnes pourraient

  8   rester, en fait, dans les appartements, propriété d'Etat où elles se

  9   trouvaient, au lieu de subir encore un transfert supplémentaire.

 10   J'essayais juste de vérifier la base factuelle de l'explication que vous

 11   suggérer pour ce qui est du nombre d'appartements qui étaient propriété

 12   d'Etat à Plaski, la façon de vérifier cela.

 13   M. MISETIC : [interprétation]  Je pense qu'il y a peut-être une erreur

 14   d'interprétation dans la dernière phrase, le dernier paragraphe de la

 15   réponse du témoin. C'est en page 58, ligne 1 du compte rendu.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Soit. Nous allons vérifier cela. Je me

 17   souviens avoir entendu quelque chose d'autre.

 18   Alors, vous nous avez dit ce que vous vous souveniez avoir vu dans le

 19   centre de la localité de Plaski. Est-ce que vous pourriez nous fournir un

 20   peu plus de précisions quant à ces immeubles d'habitation, leur nombre,

 21   leur emplacement ?

 22   R.  Je ne peux pas revenir en arrière dans mes souvenirs avec autant de

 23   précision parce qu'à l'époque, j'ai visité d'innombrables villages croates,

 24   probablement tous les villages croates. Mais je me rappelle avec certitude

 25   qu'à Plaski, il y avait un certain nombre d'immeubles qui étaient des

 26   immeubles d'habitation. Je ne peux pas, malheureusement, vous confirmer

 27   leur nombre.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons pu voir à Bosansko Grahovo, à

Page 27364

  1   Knin et ailleurs, de nombreuses photographies d'immeubles d'habitation.

  2   Est-ce que vous pourriez nous dire au moins approximativement combien

  3   d'appartements se seraient trouvés dans chacun de ces immeubles, pour

  4   autant que vous puissiez vous en souvenir ?

  5   R.  Vous me posez la question concernant Plaski ?

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En effet.

  7   R.  C'était beaucoup moins, si on fait la comparaison avec les villes dont

  8   vous venez de citer le nom. Beaucoup moins d'appartements.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais est-ce que nous sommes en train de

 10   parler d'immeubles contenant, je ne sais pas, moi, quatre appartements, 12

 11   appartements, une trentaine ? Quel est l'ordre de grandeur ?

 12   R.  Mon impression d'aujourd'hui, puisque cela remonte à une quinzaine

 13   d'années, est qu'il pouvait s'agir d'immeubles contenant une dizaine

 14   d'appartements. Il y avait donc plusieurs immeubles de cette taille

 15   approximative.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, vous dites une dizaine

 17   d'appartements par immeuble. Combien y aurait-il eu de tels immeubles, dans

 18   ce cas-là, à peu près, encore une fois ?

 19   R.  Quelques-uns. J'ai bien du mal à m'en souvenir avec précision. Mais

 20   c'est quelque chose que l'on peut vérifier facilement. Du point de vue qui

 21   était le mien, ce n'était certainement pas un nombre d'appartements

 22   important. Il y avait peut-être une vingtaine ou une trentaine

 23   d'appartements d'Etat. Je pourrais dire cela, à peu près, en me fondant sur

 24   mes souvenirs.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'essaie simplement de me faire une idée

 26   de ce dont nous parlons et notamment de la façon dont cette explication que

 27   vous donnez du séjour de ces personnes dans les appartements en question,

 28   du fait qu'elles y soient restées, de la façon dont cette explication

Page 27365

  1   correspond ou non à la réalité.

  2   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, avec votre permission,

  3   nous avons évoqué "Google Earth," mais nous venons de télécharger la carte

  4   de Plaski en provenance de cette même source, et nous pouvons voir qu'il y

  5   a de nombreux bâtiments visibles.

  6   Alors, je ne sais pas si nous nous sommes référés, en fait, à la même page.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois qu'il y avait ou il semblait y

  8   avoir un complexe industriel, mais nous pouvons peut-être vérifier cela.

  9   Est-ce que nous pourrions afficher cela à l'écran, peut-être, et demander

 10   au témoin de nous indiquer à quoi correspondent les différents éléments

 11   visibles ? Voilà. C'est à cela que je pensais. Est-ce que nous pourrions

 12   agrandir l'image, s'il vous plaît ? Non, un petit peu, agrandir un petit

 13   peu, s'il vous plaît.

 14   Monsieur le Témoin, est-ce que vous pourriez nous dire ce que vous voyez

 15   ici -- ou plutôt, est-ce que vous voyez sur cette vue aérienne l'endroit où

 16   ces immeubles d'habitation à Plaski se seraient trouvés, si vous arrivez à

 17   vous en souvenir ?

 18   R.  Alors, il me semble que c'est bien là la localité concernée. A

 19   l'époque, moi, je me suis trouvé au centre de la localité, en centre-ville.

 20   Alors, où cela était exactement ? Je n'arrive absolument pas à m'en

 21   souvenir 15 ans après. Mais je peux confirmer ma réponse à votre question

 22   précédente. Je peux confirmer qu'au moins une trentaine de familles

 23   pouvaient être logées dans les appartements qui étaient propriété de l'Etat

 24   ou des organes de l'Etat.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Soit. Alors, j'ai bien compris qu'il

 26   s'agissait d'un village d'environ 2 000 âmes, si je me  -- 20 000 [comme

 27   interprété] habitants, si je me rappelle bien la réponse que vous avez

 28   donnée à Mme Gustafson. Alors, 30 familles, est-ce que cela nous donne

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  1   quelque chose comme, je ne sais pas, 100 à 1 350 [comme interprété]

  2   personnes ? J'essaie de me faire une idée de ce que cela signifie

  3   concrètement. J'essaie de voir à quoi correspondrait 7 à 8 % de la capacité

  4   de logement, c'est à quoi correspondrait cette estimation, qui a été

  5   avancée comme une explication possible de la présence de ces personnes dans

  6   ces appartements, la raison pour laquelle ils ont continué à occuper ces

  7   appartements plutôt que des biens immobiliers qui étaient propriétés

  8   privées, qui étaient sous le régime de la propriété privé.

  9   R.  Je pense que si nous parlons des habitants de Saborski -- ce sont des

 10   habitants de Saborski dont nous parlons et ce sont eux qui ont été hébergés

 11   à Plaski. Chaque famille revenant dans cette région était très importante

 12   pour nous et chaque famille que nous arrivions à reloger était un succès.

 13   Nous avons à faire à une zone qui se trouve à 200 mètres au-dessus du

 14   niveau de la mer, et à Plaski, nombre d'entre eux étaient employés en fait

 15   --

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Excusez-moi, mais vous êtes en train de

 17   vous éloigner de ce qui m'intéressait. Notre discussion portait sur la

 18   destruction de Saborski, d'une part. D'autre part,

 19   sur le transfert temporaire des habitants de Saborski vers le village

 20   croate de Plaski qui n'avait pas été détruit. Ensuite, il y a eu des

 21   objections soulevées contre l'idée de transférer ces personnes une nouvelle

 22   fois hors de Plaski en direction de Saborski. Ensuite Mme Gustafson vous a

 23   posé une question, en disant que si des personnes souhaitaient déménager

 24   hors de Plaski pour occuper à long terme -- que si les personnes ne

 25   souhaitaient pas quitter Plaski et se retrouvaient en fait à occuper à long

 26   terme des appartements ou des logements qui étaient des logements serbes

 27   mais vous avez répondu en disant, N'oublions pas que ces logements étaient

 28   propriété d'Etat. Alors, moi, ce que j'essaie juste de me représenter c'est

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  1   le nombre d'appartements d'Etat qu'il y avait là-bas. J'essaie de me faire

  2   une idée chiffrée de la chose.

  3   Alors je n'ai pas d'autres questions pour vous. Mais à moins que vous ne

  4   souhaitiez ajouter quelque chose, par exemple, vous parliez des emplois de

  5   ces personnes. Je ne sais pas de quelle façon cela est pertinent.

  6   R.  Non, je n'ai rien à ajouter. Je pense avoir répondu à toutes vos

  7   questions et je quitterai ce prétoire avec l'impression d'avoir vraiment

  8   essayé de donner une image juste et complète de cet effort de

  9   reconstruction et de l'effort visant à permettre le retour des personnes,

 10   visant à permettre à tous les citoyens croates, en tout cas de notre point

 11   de vue actuel --

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'avons pas encore tout à fait

 13   terminé. Je vous ai demandé s'il y avait quoi que ce soit que vous auriez

 14   souhaité ajouter à mes questions.

 15   Madame Gustafson.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi j'ai mal compris.

 17   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Oui. J'ai quelques questions

 18   complémentaires.

 19   Contre-interrogatoire supplémentaire par Mme Gustafson : 

 20   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Radic.

 21   R.  Bonjour.

 22   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Pouvons-nous revenir à la pièce P463, s'il

 23   vous plaît, page 4 en anglais et page 7 en B/C/S.

 24   Q.  Encore une fois, Monsieur Radic, nous revenons à cet entretien du 22

 25   août que vous avez eu avec le président Tudjman. Le 22 août 1995.

 26   Je voudrais que l'on fasse défiler le texte vers le bas de la page.

 27   Vous dites :

 28   "Cependant, il y a une chose que je dois vous dire."

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  1   C'est le moment où vous informez le président Tudjman de votre visite

  2   sur place, où vous vous êtes rendu en voiture, en hélicoptère, vous dites :

  3   "Nos hommes ont incendié un grand nombre de," et cetera, et

  4   l'entretien se poursuit alors.

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Lorsque vous dites : "Mais il y a une chose que je me dois de vous

  7   dire," il semble qu'en ce moment-là vous étiez en train d'informer le

  8   président Tudjman de ce que vous avez vu.

  9   R.  Sans contexte, il s'agit exactement de cela.

 10   Q.  Vous êtes en train de lui expliquer ce que vous avez vu, et si nous

 11   passons à la page suivante, version anglaise. Vous êtes en train de parler

 12   de Kijevo, de Civljane, et vous dites :

 13   "Le jour de l'Assomption, je me suis rendu là-bas et tout a été

 14   incendié."

 15   Je présume que vous êtes en train de parler de Civljane, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Le jour de la fête de l'Assomption de la Sainte Vierge, il s'agit bien

 18   de parler de la date du 15 août, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui, exact, le 15 août.

 20   Q.  Puis après, vous poursuivez pour dire que :

 21   "Il ne s'agissait pas de soldats mais il s'agissait d'un 5e échelon,

 22   qui je ne sais plus la casquette de qui il venait là pour enfiler tel ou

 23   tel uniforme, pour roder tout autour dans les parages.

 24   Puis après, vous dites dans cette page :

 25   "Je ne vous parle pas des propos des autres mais c'est ce que

 26   j'ai pu voir de mes propres yeux en m'y rendant par là, à savoir les

 27   espaces incendiés et des pillages."

 28   Est-ce que vous avez pu voir des gens en uniforme qui se lançaient à des

Page 27369

  1   actions de pillages et à des incendies en passant par cette zone-là ?

  2   R.  J'ai emprunté la route menant de Kijevo à -- de Sinj à

  3   Knin, or le village de Kijevo se tient à quelques centaines de mètres tout

  4   près de la route et j'ai pu me rendre compte qu'il y avait de la fumée qui

  5   se dégageait de maisons. C'est de cela que j'ai pu informer le président.

  6   J'y suis passé le jour pas la nuit, et j'ai voulu attirer l'attention du

  7   président sur le fait que ceci n'était pas d'une bonne cause que ceci

  8   devait être empêché, prévenu. Lui, il se met d'accord avec moi pour dire :

  9   Non, ce n'était pas une bonne chose.

 10   Je le ai dit également lui parlant de ça que je me suis rendu à

 11   Jelacic, Drnis, Benkovac, et cetera, ces petites villes-là où je me suis

 12   rendu compte que tel n'était pas le cas. Je n'ai pas pu voir de scène

 13   similaire mais que j'en ai vu pourtant dans des villages.

 14   Q.  Fort bien. Vous avez dit justement que vous avez pu voir la fumée.

 15   Pourquoi avez-vous parlé de gens qui enfilaient des uniformes, qui étaient

 16   des trouillants [phon], là, qui pillaient, qui incendiaient, pourquoi avez-

 17   vous mentionné des gens en uniforme, puisque vous dites, que vous n'avez

 18   pas vu de gens le faire ?

 19   R.  Je suis parvenu à cette conclusion parce que je savais que des soldats

 20   et la police civile auraient certainement empêché l'accès à ces zones à des

 21   gens. Mais si pendant tout ce moment de trouble quelqu'un s'emmenait à

 22   venir en uniforme j'ai dit qu'à ce moment-là même la place Jelacic de

 23   Zagreb, vous pouvez voir des gens en uniforme, mais cette fois-ci, il ne

 24   s'agit pas de soldats de membres d'une armée; c'était des pilleurs qui eux

 25   à l'abri d'uniforme de bord venaient là pour piller, pour d'abord piller,

 26   voler, et puis après incendier. C'était ça mon attitude en face de cette

 27   affaire.

 28   Je n'ai pas vu que j'ai pu voir des gens qui se lançaient des incendies.

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  1   J'ai dit que c'était ma conclusion, ce dont j'ai pu saisir le président.

  2   Q.  Fort bien. Si donc telle était votre conclusion, parce que vous saviez

  3   que la police et l'armée auraient certainement empêché des civils d'avoir

  4   accès à cette région, vous avez su également et vous avez conclu qu'ii ne

  5   s'agissait pas de membres de l'armée qui étaient des pilleurs ou

  6   incendiaires, alors comment se fait-il ? S'il n'y avait pas de civil là-bas

  7   qu'il ne s'agisse -- qu'il ne s'est pas agi qu'il se soit plutôt agi de

  8   représentants de l'armée, d'où vient cette conclusion ?

  9   R.  J'ai parlé de mes impressions, j'ai parlé de ma conclusion, à laquelle

 10   j'ai pu aboutir, je connaissais fort bien le système militaire qui était le

 11   nôtre, je connaissais le discipline de l'armée et j'étais certain qu'il

 12   n'était pas possible de voir un soldat qui, de façon organisée, se serait

 13   engagé dans de tels actes. D'après ce que j'ai pu savoir et d'après ce dont

 14   le président a été averti également, ceci aurait été une action impossible

 15   parce que de tels gens auraient tout de suite risqué de se faire

 16   sanctionner.

 17   Q.  Donc votre conclusion c'est qu'il ne s'agissait pas vraiment de membres

 18   de l'armée qui en seraient l'auteur ? Cela se fonde sur l'opinion qui est

 19   la vôtre, à savoir l'armée croate était bien organisée, bien menée.

 20   R.  Oui. D'après ce que j'ai pu en savoir, j'ai eu des amis là qui étaient

 21   des commandants militaires. Par exemple, un de mes adjoints du ministère a

 22   enfilé un uniforme pour rejoindre les troupes, pour aller défendre la

 23   Croatie. Or, je connais Sejic Soprato [phon] que les gens, qui se

 24   trouveraient sous son commandement, n'auraient jamais été en mesure de

 25   procéder à de tels actes criminels. Je le connaissais personnellement, je

 26   le connaissais ces jours-là.

 27   Q.  Quels étaient très précisément vos collègues ou amis qui étaient des

 28   commandants des forces armées qui vous auraient parlé de l'armée pour dire

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  1   que les membres de l'armée ne seraient pas prêts à piller ou à incendier ?

  2   R.  Le secrétaire de mon ministère, Marian Perkovic, qui a eu le grade de

  3   général de l'armée croate et qui a rejoint les offices du ministère, c'est

  4   lui qui m'en a parlé.

  5   Q.  A l'époque, après l'opération Tempête, quelle était sa fonction, à quel

  6   poste il était ?

  7   R.  Après l'opération Tempête, il a repris la fonction de secrétaire du

  8   développement de la contribution, c'est lui physiquement parlant qui s'est

  9   occupé de la rédaction et de l'élaboration de la législation de ces

 10   différentes lois et du reste.

 11   Q.  Quelle était sa position dans l'armée croate ?

 12   R.  Je ne peux pas m'en souvenir. C'était l'un de ces gens qui étaient à la

 13   tête d'une unité subalterne.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre de première instance

 15   considère que ceci ne saurait vous être d'une grande aide pour explorer

 16   dans ce sens-là très précisément. Le fait est, c'est ce que vous avez voulu

 17   entendre être dit par le témoin, c'est déjà fait, notamment en ce qui

 18   concerne les conclusions et les bases de ces conclusions.

 19   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je vous remercie.

 20   Q.  Ne vous semble-t-il pas, à regarder les transcriptions de ces

 21   conversations, que le président Tudjman n'a pas été très surpris par les

 22   informations que vous lui avez procurées. J'aimerais vous demander comme

 23   suit : Pour autant que vous le sachiez, le président Tudjman a-t-il été

 24   déjà au courant de tous ces pillages et incendies ?

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, ce que vous avez dit

 26   tout à l'heure, d'après les transcriptions de ces conversations, vous dites

 27   que le président Tudjman n'a pas été surpris. Essayez peut-être d'éliminer

 28   cette fraction de votre question pour vous occuper des faits. Donc la

Page 27372

  1   première partie, fraction de votre question manque de base, de fondement.

  2   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   Q.  Monsieur le Témoin, Monsieur Radic, à ce moment-là, avez-vous eu

  4   l'impression que le président Tudjman a été déjà informé de ces pillages et

  5   de ces incendies, ou peut-être avez-vous pensé que lui il en entendait

  6   parler pour la première fois de votre part ?

  7   R.  A en juger d'après sa réponse qui était -- mais je disais toujours

  8   qu'il fallait bien empêcher tout cela, cela veut dire que quelqu'un devait

  9   l'avoir saisi avant parce qu'il me semble qu'il a dû répondre de la même

 10   façon à d'autres personnes comme il m'a répondu à moi.

 11   Q.  On vous a posé également des questions au sujet des déclarations faites

 12   par vous en public, à savoir lorsque vous avez dénoncé la destruction, et

 13   cetera, et on vous a présenté des éléments de preuve là-dessus. Le fait est

 14   que vous avez dit au conseil de la Défense de M. Gotovina que vous avez été

 15   à Drnis en date du 12 août. Le 12 août, vous vous êtes rendus dans des

 16   zones libérées par et dans l'opération Tempête, n'est-ce pas ?

 17   R.  Non seulement je l'ai dit, mais j'étais à cette réunion à Drnis,

 18   c'était la seconde, par ordre, réunion du quartier général d'Etat.

 19   Q.  Nous ne sommes pas tellement intéressés au contenu de cette réunion. Je

 20   voulais savoir où vous trouviez-vous le 12 août ? Il est clair que vous

 21   vous trouviez à Drnis ?

 22   R.  Oui, à Drnis.

 23   Q.  D'où étiez-vous venu pour vous rendre à Drnis et par quel moyen vous y

 24   êtes-vous rendu ?

 25   R.  Je ne suis pas en mesure de m'en souvenir. Je ne sais plus comment et

 26   d'où je devais partir. Beaucoup trop de temps s'est écoulé depuis pour que

 27   ma mémoire soit bonne là-dessus.

 28   Q.  Avez-vous emprunté une route ?

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  1   R.  Je suppose que oui, mais à la réflexion maintenant plus profonde,

  2   étais-je arrivé de Zagreb ou étais-je arrivé d'abord à Split pour y aller

  3   depuis Split ? Je n'en sais plus. Presque quotidiennement je devais me

  4   rendre sur le terrain ces jours-là.

  5   Q.  Avez-vous peut-être emprunté la route de Knin à Drnis ce jour-là

  6   notamment ?

  7   R.  Je ne suis pas en mesure de m'en souvenir si vraiment je suis allé

  8   depuis Knin à Drnis. Peut-être que non, je pense bien que non, mais je ne

  9   m'en souviens plus.

 10   Q.  Le 12 août, lorsque vous vous rendiez dans cette région, avez-vous pu

 11   peut-être observer des indices signes de destructions préalablement

 12   effectuées, par exemple, avez-vous pu voir des maisons en flammes ou peut-

 13   être des pillages ou des destructions de biens et de propriétés qui étaient

 14   effectuées précédemment ?

 15   R.  Je ne sais pas. Je crois que j'en ai parlé au président, mais je lui ai

 16   fourni justement l'exemple de ce que j'ai vu en date du 15 et j'ai pu lui

 17   parler également de ce que nous avons observé à Drnis. Il y a eu pas mal de

 18   destructions, notamment au niveau des villages environnants. Mais dire que

 19   lors de mon arrivée à Drnis que j'ai vu des incendies, j'en aurais

 20   certainement informé le président. Par conséquent, je peux conclure pour

 21   parler de la date du 15 que j'étais venu depuis Split via Cavoglave pour me

 22   rendre à Drnis.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, il me semble que nous

 24   nous éloignions petit à petit de ces réunions pour parler d'observations

 25   tout à fait personnelles en quelque sorte au sujet de la date du 15, tout

 26   semblait clair. Ça fait partie du compte rendu d'audience. J'aimerais pour

 27   ma part que vous évitiez de vous occuper de ce volet-là concernant les

 28   observations personnelles concernant la période pertinente s'il ne se situe

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  1   pas dans les limites de votre interrogatoire.

  2   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Mais justement, il me semble que c'est

  3   quelque chose qui se sont découlées du contre-interrogatoire que vous

  4   m'avez octroyé.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais vous avez d'autres questions ?

  6   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Oui, juste très brièvement sur un autre

  7   sujet.

  8   Q.  Lors du contre-interrogatoire, il vous a été présenté une séquence

  9   vidéo qui permet de voir le ministre Granic prendre la parole, et il vous a

 10   été dit que les autorités croates avaient pour attitude que le retour des

 11   Serbes dépendrait de la normalisation de situation à moins qu'il y ait des

 12   cas tout à fait spécifiques, considérant du point de vue du droit

 13   humanitaire.

 14   Hier, on vous a parlé par exemple de l'année 1996, où on parlait de prise

 15   en charge de ces gens-là, et vous avez dit qu'il ne s'agissait pas

 16   seulement de prendre en charge les Croates venus dans cette région mais il

 17   s'agissait aussi de parler de Serbes qui avaient quitté cette région.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je sais, Maître, que vous êtes sur pied,

 19   mais attendez que Mme Gustafson mène à bien sa question. Mais je voudrais

 20   demander au témoin de ne pas répondre à la question de Mme Gustafson tant

 21   qu'on n'a pas entendu Me Kehoe.

 22   Mme GUSTAFSON : [interprétation]

 23   Q.  A en juger d'après la déposition faite par vous, aujourd'hui, lorsque

 24   une toute première loi a été adoptée, il n'y avait pas eu un accord de

 25   normalisation des relations. Or, à vous écouter déposer aujourd'hui, le

 26   point de vue des autorités croates au temps où cette loi a été adoptée,

 27   c'est que les Serbes de Croatie qui se trouvaient en dehors de la Croatie

 28   ne pouvaient pas retourner, à moins qu'il y ait des cas spécifiques pour

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  1   des raisons de droit humanitaire.

  2   Or, lorsque cette loi a été adoptée, la portée de la loi ne devait

  3   pas servir à encourager les Serbes d'y retourner, parce que un retour ne

  4   leur avait pas été permis, à cette époque; est-ce exact?

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe.

  6   M. KEHOE : [interprétation] Objection soulevée, Monsieur le Président,

  7   parce que nous n'avons jamais posé de questions au sujet de cette loi

  8   portant sur une prise en charge par l'état très particulière, toute

  9   spéciale. Nous ne nous sommes pas occupés de ce domaine.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson.

 11   Mme GUSTAFSON : [interprétation] J'ai essayé de mettre en corrélation avec

 12   quelque chose qui était la réponse du témoin à une question, hier. Je crois

 13   que ceci était bon.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, en effet. Cette objection n'a pas

 15   été retenue.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je répondre ?

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous parlons de deux choses différentes. Il

 19   s'agit d'abord d'une convention portant normalisation et qui concernerait

 20   un retour en masse. C'est une seconde chose que de voir de s'occuper de ce

 21   qui a été porté par les Serbes, qui ont en vue de retour accepté de

 22   recevoir la citoyenneté croate pour revenir en Croatie.

 23   Le président Tudjman a dit pour parler de Vukovar, qu'il y avait 14

 24   500 personnes. L'idée a été au début de dire qu'il s'agissait de milliers

 25   de gens qui étaient de retour, et il y avait là lieu de voir quoi que ce

 26   soit en collision. La loi était valable pour tous et la pratique, quant à

 27   elle, elle devait évidemment traiter chacun de ces cas à part,

 28   particulièrement à part.

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  1   Mme GUSTAFSON : [interprétation]

  2   Q.  Le président Tudjman parlait de Vukovar, et parlait des gens qui

  3   étaient de retour de Slavonie de l'Est. Il ne s'agit pas des gens qui

  4   étaient de retour et qui venaient en dehors de la Croatie.

  5   M. KEHOE : [interprétation] Est-ce une question ou tout simplement quelque

  6   chose dont vous faites état ? Par conséquent, nous soulevons une objection.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe, est-ce que vous

  8   contestez le fait que le président Tudjman a parlé de 14 500 personnes ?

  9   M. KEHOE : [interprétation] Non, Monsieur le Président, je crois que Mme

 10   Gustafson a compris que des milliers de gens étaient venus pour des raisons

 11   humanitaires. Il ne s'agit pas d'une poignée d'hommes.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Serait-il bon, Madame Gustafson, d'y

 13   revenir à ce fragment-là, d'en donner lecture encore que ce ne soit pas

 14   tout à fait efficace pour voir un petit peu de quoi a parlé le président

 15   Tudjman, et puis après, vous n'avez qu'à poser vos questions.

 16   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Il s'agit de la pièce à conviction P2536.

 17   Page 3, version croate, page 4, version anglaise -- page 4, version anglais

 18   et page 3, B/C/S.

 19   Q.  Il s'agit d'un tout premier paragraphe intégral en croate, qui commence

 20   par, ces propos commencent par :

 21   "Mesdames et Messieurs…"

 22   Comme vous pouvez le voir, le président Tudjman dit :

 23   "A l'intention des tous ces Serbes, citoyens de Croatie, qui se sont faits

 24   délivrer des documents concernant les citoyenneté de Croate, dans ce comté

 25   et dans la région de Osijek-Baranja, dans le bassin danubien, et qui

 26   voudraient -- qui souhaiteraient retourner en Croatie, nous leur

 27   permettrons le retour. Déjà 14 500 personnes sont de retour, ou bien si ces

 28   gens-là ne souhaitent pas être de retour, ils vont être indemnisés et ils

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  1   peuvent se rendre où bon il leur semblera."

  2   Il est en train de parler de Serbes de Slavonie orientale qui retournent,

  3   cette fois-ci en Croatie, n'est-ce pas ?

  4   R.  Il parle en général du total de ce peuple qui devrait être de retour de

  5   Knin, de Pakrac, et cetera, et qui se trouvait ailleurs. Pouvons-nous

  6   constater un fait, à savoir, les gens qui au temps de l'opération Tempête

  7   avaient quitté ces régions, il y en a une partie de ces gens qui se sont

  8   rendus en Serbie, l'autre vers le bassin danubien.

  9   La frontière yougoslave était ouverte pour les Serbes, parce que ces

 10   derniers se sont comportés comme s'ils se trouvaient dans un seul même

 11   état. Nous ne savions pas où s'était rendue une partie des Croates de Knin,

 12   il y en avait qui étaient partis pour Vukovar, d'autres vers Belgrade,

 13   parce que la frontière entre Vukovar et la Yougoslavie se trouvait sous

 14   leur contrôle, pas sous notre contrôle. Nous avons dû disposer d'abord,

 15   pouvoir disposer des données mais le fait est, d'après nos données que 14

 16   500 Serbes étaient de retour dans un laps de temps d'un an ou deux, et

 17   c'était ça notre question. Ces gens-là pouvaient bénéficier justement de ce

 18   qui était prévu à leur intention, grâce à une prise en charge sociale et

 19   autre par l'état.

 20   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je n'ai plus de questions, Monsieur le

 21   Président.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 23   [La Chambre de première instance se concerte] 

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La loi italienne, sur la procédure

 25   criminelle, prévoit une disposition où il est permis au conseil de la

 26   Défense de poser une dernière question au témoin, mais cette règle n'est

 27   pas en vigueur ici, pas dans ce sens-là.

 28   Mais voilà que le Juge Kinis aurait une question pour vous, peut-être

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  1   que j'en aurais une, moi aussi.

  2   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Monsieur Radic, une question très

  3   brève.

  4   Questions de la Cour : 

  5   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Vous vous êtes rendu, dites-vous dans

  6   cette région, en date du 15 août. Vous êtes rendu compte du fait qu'il y a

  7   eu pas mal d'actes criminels sur le terrain. Vous avez mentionné ici qu'il

  8   y avait là, pour parler de questions de sécurité, le problème de retour en

  9   masse parce qu'il y avait pas mal de mines posées, ensuite des engins

 10   piégés, et cetera.

 11   Alors comment expliqueriez-vous le fait que après la date du 15 août, à

 12   l'intention des citoyens croates il y avait une absolue liberté de

 13   circulation dans ces domaines ?

 14   R.  Je n'ai pas très bien saisi la toute dernière phrase. Qu'il y avait la

 15   liberté absolue et totale ou non ? 

 16   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] La Chambre a pu se rendre compte du

 17   fait qu'il y a eu des éléments de preuve qui permettaient d'expliquer qu'en

 18   date du 15 août il a été rendue possible aux citoyens croates une liberté

 19   absolue de se rendre dans ces régions libérées, ils pouvaient s'y rendre,

 20   en sortir, et cetera.

 21   Pourquoi étant donné cette situation-là les responsables d'Etat ne se

 22   trouvaient pas inquiets quant à la sécurité de ces gens-là qui ceci n'était

 23   pas possible ?

 24   R.  Non, d'abord, il n'y avait pas vraiment une pleine liberté de

 25   circulation. Moi qui étais ministre vice-président adjoint, j'ai été arrêté

 26   au point de contrôle. Mais de toute évidence, il y avait des points de

 27   contrôle, mais qui passait par où empruntant telle ou telle colline, ça on

 28   ne peut pas le savoir, c'est pour ça que je peux conclure qu'il s'agissait

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  1   de criminels et non pas de simples citoyens qui se seraient aventurés et

  2   s'engageant par là, à montrer nos cartes d'identité, et cetera.

  3   Les principales voies de communication étaient contrôlées, mais il s'agit

  4   d'une région si vaste que nos propres forces policières n'étaient pas en

  5   mesure de contrôler le tout.

  6   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Je crois que vous n'avez pas raison de

  7   dire ainsi, étant donné que nous avons reçu pas mal d'éléments de preuve,

  8   pièces à conviction, y compris un ordre portant liberté absolue et totale

  9   de la situation après le 15 août, or un premier train organisé depuis Split

 10   à Knin a été organisé justement en cette date-là. Voilà pourquoi je trouve

 11   que votre réponse est inexacte.

 12   R.  Je me souviens bien que j'ai été arrêté près du village Hrvatse [phon]

 13   et j'ai dû évidemment subir un contrôle quant à savoir où je voulais aller.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai comme un sentiment que peut-être

 15   qu'il y a un trouble de communication, il me semble.

 16   Ce que dit le Juge Kinis c'est que les Croates quant à eux, s'ils le

 17   souhaitaient, avaient la possibilité de retourner dans ces territoires. Or,

 18   c'est comme ça que je le comprenais. La question où les gens viennent, il y

 19   a évidemment aucun empêchement, aucun interdit de voyage, on peut

 20   [imperceptible], bien sûr, sur des points de contrôle, telle ou telle

 21   région étant en quelque sorte sous contrôle et bloquée parce que les

 22   opérations étaient en cours.

 23   Mais ce que mon confrère voulait poser comme question c'est de savoir

 24   comment il se faisait que les Croates pouvaient retourner même s'ils

 25   étaient arrêtés à des points de contrôle; pourquoi ne leur a-t-on pas dit,

 26   par exemple, de se tenir loin et à l'écart de cette région étant donné que

 27   les déminages n'ont pas encore été menés à bien et qu'il y a eu des

 28   problèmes de sécurité; parce que évidemment les questions de sécurité ont

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  1   contribué considérablement à cette décision à prendre en matière politique,

  2   à savoir si les Serbes avaient libre accès.

  3   R.  Je suis d'accord avec vous qu'il y a eu un manque de communication,

  4   c'est-à-dire par le biais des médias, nous voulions informer tout le monde

  5   que le temps n'était pas venu pour un retour. Le retour devant être bien

  6   organisé, mais une fois qu'on pouvait rouvrir la voie de communication

  7   menant de Zagreb à Split, il n'y a pas lieu de parler que de Croates --

  8   pour tous les citoyens croates, parce qu'il suffit de montrer sa pièce

  9   d'identité, pour ne pas dire que je suis Serbe ou je suis Croate, mais tout

 10   simplement au lieu d'aller de -- par exemple, sur une route de 500 à 600

 11   kilomètre de Split à Zagreb, de même pour les chemins de fer. Voilà que des

 12   routes nous avons dit en avertissant les gens : Vous ne pouvez pas regagner

 13   vos foyers, à cause justement de cet exemple que j'ai cité aujourd'hui,

 14   voilà un homme qui s'est fait tuer parce que, lui, il voulait à la sienne

 15   regagner son foyer. Donc c'est pour ça que j'ai dit que le retour devait

 16   être un processus bien organisé.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il existe des documents

 18   ou des comptes rendus de réunions où cela a été déclaré ? Est-ce qu'il

 19   existerait d'autres éléments de preuve très clairs dans lesquels il serait

 20   dit ne revenez pas dans votre village, bien que votre citoyenneté croate ne

 21   soit pas remise en question ?

 22   Est-ce que vous pourriez nous donner des exemples de ce que vous avez

 23   dit quand vous avez averti la population ? Il se peut que cela se trouve

 24   d'ailleurs déjà quelque part. Je n'en suis pas sûr. Mais je vous pose la

 25   question puisque vous avez fait référence à ces avertissements.

 26   R.  Ecoutez, je pense que nous l'avons cité aujourd'hui, il me semble

 27   que la Défense a présenté ce document où je prends la parole lors d'une

 28   session publique du gouvernement et c'est justement ce que je dis. Cela a

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  1   été affiché à l'écran aujourd'hui.

  2   M. KEHOE : [interprétation] Il s'agit de la réunion à laquelle j'ai fait

  3   référence. Je pense que c'est la pièce 1813 -- attendez, si vous m'accordez

  4   une petite seconde, je vais vous donner la page exacte.

  5   [Le conseil de la Défense se concerte]

  6   M. KEHOE : [interprétation] Il s'agit d'une conversation qui a eu lieu à

  7   plusieurs reprises et cela fait l'objet de la pièce 813, donc il s'agit de

  8   la page 28. Non, non, non, je m'excuse, non, non, non, non, non. Cela

  9   commence à la page 11, donc c'est la page 17 en anglais, c'est M. le

 10   Ministre Radic qui s'exprime. Donc pages 17 et 18 en anglais, c'est là

 11   qu'il dit : Les gens peuvent revenir, mais il ne faut pas agir à la hâte,

 12   il faut que cela soit préparé. Voilà, je pense que c'est à cela que le

 13   témoin fait référence.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Soit. Mais, moi, ce qui m'intéresse au

 15   premier chef ce sont les mises en garde en public.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Mais c'était une séance publique.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certes. Mais ce n'est pas la même chose

 18   que de s'adresser au grand public.

 19   Enfin, Me Kehoe a attiré notre attention sur un document où cela est

 20   effectivement indiqué.

 21   Est-ce que vous pourriez nous parler d'autres documents ? Est-ce que vous

 22   auriez d'autres éléments de preuve ? Je ne sais pas. Est-ce que cela a été

 23   diffusé à la télévision, par exemple… ?

 24   R.  Bien sûr que je ne dispose pas de ces documents, mais je me souviens

 25   très bien que j'ai rendu visite à des réfugiés d'une localité et je leur ai

 26   dit moi-même personnellement à ces gens qu'ils devraient attendre, qu'il

 27   fallait que le retour soit organisé, je l'ai dit à plusieurs reprises dans

 28   plusieurs lieux, et il est absolument impossible que les médias ne l'aient

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  1   pas couvert cela, mais, moi, personnellement, je ne dispose pas de

  2   documents.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie. Je n'ai plus de

  4   questions à vous poser.

  5   Alors si nos questions supplémentaires ne vous incitent pas à poser

  6   d'autres questions --

  7   Maître Kehoe, oui.

  8   M. KEHOE : [interprétation] En fait, à ce sujet.

  9   Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Kehoe : 

 10   Q.  [interprétation] Monsieur Radic, après l'opération Tempête, pourquoi

 11   est-ce que la République de Croatie n'a pas fermé tout simplement

 12   complètement la République de Croatie ? Pourquoi est-ce qu'ils ne l'ont pas

 13   fait ?

 14   R.  Ecoutez, le but c'était quand même la vie. Parce que pendant cinq

 15   années, les gens avaient vécu comme référence et ils piaffaient

 16   d'impatience pour rentrer chez eux. Donc il ne faut quand même pas oublier

 17   qu'il y avait plusieurs centaines de milliers de Croates qui avaient passé

 18   cinq années comme réfugiés, et lorsque l'opération Tempête est arrivée,

 19   pour eux, c'était comme une deuxième naissance, et ils avaient hâte de voir

 20   si leurs maisons étaient intactes, s'ils pouvaient rentrer. Puis quel type

 21   de gouvernement aurions-nous été si, après la libération, on leur aurait

 22   interdit de rentrer chez eux ? Ils voulaient rentrer chez eux, mais ceci

 23   étant dit, il fallait quand même prendre en considération des questions de

 24   sécurité qui étaient quand même très graves.

 25   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai terminé.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'après le code pénal italien, c'est

 27   vous qui avez le dernier mot, c'est vous qui avez posé la dernière

 28   question.

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  1   Oui, Maître Mikulicic ?

  2   M. MIKULICIC : [interprétation] Je voulais juste vous dire qu'il en allait

  3   de même en matière de procédures pénales croates.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voyez-vous, j'ai encore beaucoup de

  5   choses à apprendre, et cela a été adopté après 1991. C'est à ce moment-là

  6   que le nouveau code de procédures pénales italien a été adopté.

  7   Monsieur Radic, je vous remercie d'être venu à La Haye, d'avoir répondu à

  8   toutes les questions qui vous ont été posées par les Juges de la Chambre,

  9   ainsi que par les parties, et je vous souhaite un bon retour chez vous.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je

 11   serais très heureux, ne serait-ce, que si j'avais apporté une toute petite

 12   contribution à propos, donc, de cette lutte juste que fut la guerre

 13   nationale.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 15   Madame l'Huissière, est-ce que vous pourriez escorter le témoin hors

 16   du prétoire ?

 17   [Le témoin se retire]

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que le cas serait toujours à

 19   l'emplacement du témoin ? Un moment, un moment, Monsieur, je vous prie, un

 20   moment. Non, non, non.

 21    [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai quelques questions de procédure à

 23   l'ordre du jour, et je voulais en parler après le départ du témoin.

 24   M. KEHOE : [interprétation] Je voulais juste soulever une ou deux petites

 25   choses. Ce sera très bref.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, si, de toute façon, nous devons

 27   revenir après la pause, nous allons faire la pause et puis la pause, qui

 28   d'ailleurs aurait dû être faite, il y a un moment de cela, maintenant.

Page 27384

  1   Donc, j'ai quelques questions de procédure qui ne vont pas demander

  2   longtemps. Je suppose 15 minutes.

  3   De combien de temps aurez-vous besoin, Maître Kehoe ?

  4   M. KEHOE : [interprétation] De 30 secondes.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, si c'est vraiment 30 secondes,

  6   je vous invite à intervenir maintenant, ce qui fait qu'après la pause, nous

  7   n'aurons plus qu'à nous occuper des questions de procédure.

  8   M. KEHOE : [interprétation] Regardez l'horloge et je commence.

  9   Je dirais qu'il y a 187 appartements qui appartenaient à l'Etat dans un

 10   lieu [que l'interprète n'a pas indiqué]. Je peux vous en donner la liste.

 11   Deuxièmement, on m'a indiqué qu'il y a un compte rendu, la pièce de la

 12   liste 65 ter 939 du mois de décembre 1995, où le général Cervenko indique

 13   qu'il y a 400 personnes qui sont revenues et qui avaient été tuées par des

 14   mines, et nous fournirons tous ces renseignements au témoin.

 15   L'INTERPRÈTE : L'interprète indique que le lieu était Plaski.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je m'en suis tenu à mes

 17   30 secondes.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais je pense que ce sont les

 19   interprètes et la sténotypiste qui ont fait les frais de vos 30 secondes.

 20   Nous faisons une pause et nous reprenons à 1 heure.

 21   --- L'audience est suspendue à 12 heures 39.

 22   --- L'audience est reprise à 13 heures 06.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il ne s'agit pas vraiment d'une séance

 24   dédiée à des questions d'intendance mais voilà je reprends. Je voudrais me

 25   pencher sur le cas de la pièce P2612.

 26   Me Kehoe a soulevé une objection concernant le versement de cette pièce

 27   pour raison de communication donc elle a reçue une cote provisoire. C'était

 28   pendant l'interrogatoire de M. Radic.

Page 27385

  1   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je n'ai pas examiné

  2   cette pièce depuis, je me réserve le droit de maintenir mon objection mais

  3   je m'adresserai de nouveau à la Chambre par e-mail dès que nous aurons pu

  4   arrêter notre position.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. J'attendrai ces messages de

  6   votre part.

  7   Nous nous sommes penchés brièvement sur les cartes du site "Google maps,"

  8   et nous avons vu que des immeubles d'habitation y étaient apparemment

  9   visibles. Alors à moins qu'il n'y ait des objections sur ce point, je ne

 10   pense pas qu'il soit nécessaire de verser cela au dossier.

 11   Très bien. Alors, Maître Kehoe, vous avez présenté deux références la 187

 12   et la 400. Ces deux documents donc correspondent à ce que nous avons déjà

 13   pu voir dans le compte rendu d'audience. Or je ne sais pas s'il y a la

 14   moindre raison de --

 15   M. KEHOE : [interprétation] C'est un procès-verbal de décembre 1995 et je

 16   ne pense pas qu'il y ait déjà été versé au dossier. Mais j'admets que la

 17   Chambre a déjà eu l'occasion de voir ce procès-verbal de décembre 1995. Il

 18   s'agit des 400 personnes décédées en fait.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois que cet extrait du procès-

 20   verbal et le sort de ces 400 personnes ont été abordés brièvement avec le

 21   témoin. Donc on s'est posé la question de savoir s'il y agissait de blessés

 22   ou de morts, et je crois qu'il n'y avait rien de controverser concernant le

 23   fait qu'il ne se serait agi de 400 morts dus à des mines.

 24    Madame Gustafson.

 25   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Ce n'était certainement pas une question

 26   de mine je veux dire. Il faudrait revoir exactement le procès-verbal ou le

 27   compte rendu.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors je peux considérer, j'imagine, que

Page 27386

  1   le déminage était un problème grave et sérieux après la guerre. Cela est

  2   incontestable, je pense, et que de [imperceptible] et mis à part quant aux

  3   causes précises de tel et tel événement, nous pourrions dire que cela

  4   relève quand même du bon sens.

  5   Donc pour ce qui est du chiffre de 487, Maître Kehoe, la question portait

  6   encore une fois sur la situation en 1995. Je ne sais pas d'où cela vient.

  7   Est-ce que cela a bien trait à la situation en 1995 ? Je vois que Me

  8   Misetic hoche de la tête. Quelle était la source de votre information ?

  9   M. KEHOE : [interprétation] Nous obtenons cela du ministère croate du

 10   ministre de M. Radic concernant le nombre des appartements à l'époque. Nous

 11   pouvons nous procurer ces documents et bien, moi les a communiqués aux

 12   parties avant de demander le versement de quoi que ce soit.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Soit. Peut-être faudrait-il examiner

 14   l'ensemble de ces références parce que sur la base de la déposition du

 15   témoin, nous sommes parvenus à l'estimation approximative donc qu'il est

 16   celle que nous avons évoquée et qui était bien inférieure, je crois, parce

 17   que j'ai multiplié le nombre d'appartements estimés, nous parlions d'une

 18   trentaine d'appartements pour un nombre de quatre personnes par famille en

 19   moyenne. Si nous nous appuyons donc sur la déposition du témoin qui faisait

 20   état de 7 à 8 % de la population se trouvant dans des immeubles

 21   d'habitation, nous arrivons à quelque chose qui est tout à fait différent

 22   du chiffre de 187. Parce que si on multiplie par 4 le nombre de membres

 23   d'une famille moyenne on arrive environ à 550, ce qui représente plutôt 25

 24   % de la population, donc cela viendrait étayer l'explication fournie par le

 25   témoin.

 26   Donc il y a quand même un certain décalage et même un décalage certain

 27   entre le chiffre que vous fournissez et ce que nous avons entendu. Cela

 28   revient à comptabiliser pratiquement trois fois et demi plus de personnes

Page 27387

  1   que ceux dont le témoin se souvient.

  2   Alors si nous nous appuyons sur ce chiffre également sur la carte

  3   disponible, j'ai pu pour ma part identifier certaines infrastructures,

  4   certains bâtiments, et j'imagine volontiers que certains des éléments

  5   repérables sur cette carte correspondent effectivement à des immeubles

  6   d'habitation. Mais 25 % de la population tout de même c'est beaucoup plus.

  7   Donc si vous voulez vous appuyez sur cette référence je vous invite à

  8   demander une confirmation de cette information et d'en débattre également

  9   avec l'Accusation avant de revenir vers nous pour nous dire ce que vous

 10   considérez comme étant le chiffre exact.

 11   M. KEHOE : [interprétation] Nous ferons comme vous l'indiquez, Monsieur le

 12   Président.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 14   Très bien. Nous passons donc à des sujets qui n'ont rien à voir avec le

 15   Témoin Radic. La Défense Gotovina a envoyé par e-mail une information

 16   émanant de la coition [phon] de l'Ethiopie, une récompense en fait qui a

 17   été attribuée, la Défense Gotovina a indiqué avoir l'intention de

 18   l'utiliser peut-être pendant le contre-interrogatoire du Témoin Radic. La

 19   question qui se posait était de savoir si cela viendrait à être versé au

 20   dossier ou non. Mais, en général, la "common law"" considère

 21   l'accessibilité au public de ce type de source, si les sources sont

 22   accessibles dans ce cas-la ce n'est pas versé.

 23   M. KEHOE : [interprétation] J'en conviens, Monsieur le Président. J'ai

 24   envoyé simplement cela pour donner une idée à la Chambre et aux parties des

 25   terrains sur lesquels nous nous aventurerions peut-être lors du contre-

 26   interrogatoire. Donc il y aurait ici un fondement à tenir compte de cet

 27   élément et je voulais simplement que la Chambre soit pas prise par

 28   surprise. Nous ne demandons pas à ce que cette récompense soit versée ou le

Page 27388

  1   fait que cette récompense soit décernée et le document correspondant soit

  2   versé au dossier.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

  4   Alors je voudrais annoncer que dans la semaine du 5 au 9 avril de cette

  5   année, il n'y aura pas d'audience en l'espèce au cas où les parties ne

  6   seraient pas déjà informées de la chose.

  7   Maintenant je voudrais que nous passions à huis clos partiel, s'il vous

  8   plaît.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,

 10   Monsieur le Président.

 11   [Audience à huis clos partiel]

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 15   [Audience publique]

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

 17   Alors, la pièce D215 est le procès-verbal ou la transcription de la 277e

 18   séance à huis clos du gouvernement de la République de Croatie tenue le 5

 19   octobre 1995. Ce document a été versé par l'intermédiaire du témoin

 20   Gojanovic en date du 19 mai 2008.

 21   Alors l'audience dédiée à des questions administratives qui s'est tenue, le

 22   27 janvier de cette année, a vu l'Accusation déclarer qu'elle fournirait

 23   une traduction intégrale dudit document. Je m'adresse donc à l'Accusation

 24   pour demander à Mme le Procureur si entre-temps, la traduction intégrale

 25   est devenue disponible, et si oui, si elle a été chargée dans le système

 26   électronique.

 27   Monsieur Waespi, Madame Gustafson.

 28   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je n'en suis pas tout à fait sûre,

Page 27390

  1   Monsieur le Président. Mais il y a trois numéros de pièces à conviction qui

  2   sont ici concernés et qui correspondent chacun à un extrait du document.

  3   Donc, peut-être qu'en les réunissant, on obtiendra la traduction intégrale,

  4   mais il faudrait que je puisse vérifier cela.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons donc affaire à un puzzle de

  6   trois pièces ? Je préférerais m'en tenir à ce que l'Accusation a déclaré le

  7   27 janvier, à savoir qu'une traduction intégrale et unique serait chargée

  8   dans le système. Donc, j'attendrais que l'Accusation m'indique que cela a

  9   bien été le cas avant de donner au greffe les instructions nécessaires pour

 10   annexer cette traduction intégrale à la pièce à conviction D215.

 11   Passons maintenant à la pièce P2530. Une version en B/C/S était manquante

 12   pour ce document. Alors, si j'ai bien compris, cette version en B/C/S a été

 13   chargée dans le système. Madame la Greffière, je vous prie de bien vouloir

 14   annexer cette version en B/C/S manquante à la pièce à conviction P2530.

 15   Puis ensuite je vous prie de bien vouloir remplacer la version anglaise de

 16   ce même document, de cette même pièce à conviction numéro P2530 par la

 17   nouvelle version anglaise contenant des incises manuscrites.

 18   Pour finir, je vous prie d'annexer le rapport de l'Accusation faisant

 19   état de discordances relatives à la pièce P2530 au document P2708. On va

 20   attacher ce rapport faisant état de discordances à la pièce à conviction

 21   numéro P2708, et à moins qu'il n'y ait des objections, la pièce P2708 est

 22   versée au dossier.

 23   Y a-t-il des objections à ce sujet ?

 24   M. KEHOE : [interprétation] Très franchement, Monsieur le Président, je

 25   viens juste de demander ce qu'il en était à Me Misetic. Je ne suis pas sûr

 26   de voir exactement de quoi il s'agit. Peut-être que nos confrères

 27   pourraient nous venir en aide.

 28   Mme GUSTAFSON : [interprétation] On m'informe qu'il s'agit de la version

Page 27391

  1   annotée de l'entretien en qualité de suspect de M. Markac. Mais je ne suis

  2   malheureusement pas en mesure de vous fournir la moindre indication

  3   supplémentaire à ce stade.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous voyez, c'est précisément l'avantage

  5   du système électronique. Lorsque je donne un numéro de document, vous

  6   pouvez l'avoir à l'écran pour voir de quoi on est en train de parler. Donc

  7   il s'agit bien de l'enregistrement vidéo et de la transcription de

  8   l'entretien en qualité de suspect de M. Mladen Markac, en date des 3 et 4

  9   mars 2003.

 10   Maître Mikulicic.

 11   M. MIKULICIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 12   Il me semble voir échangé un e-mail avec le bureau du Procureur indiquant,

 13   et que j'ai indiqué, en fait, n'avoir aucune objection contre le versement

 14   de ce document.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas-là, la troisième partie des

 16   instructions que je viens de fournir au greffe, à savoir d'annexer le

 17   rapport de l'Accusation faisant état de discordances relatives à la pièce

 18   P2530 à la pièce P2708, ainsi que de verser la pièce P2708 au dossier, sont

 19   maintenues. Cette partie de mes instructions est maintenue.

 20   Est-ce que vous souhaitez examiner cette pièce P2708, Maître Mikulicic, ou

 21   bien cela est-il suffisamment clair à ce stade ?

 22   M. MIKULICIC : [interprétation] C'est parfaitement clair, Monsieur le

 23   Président.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, je voudrais maintenant passer à

 25   un enregistrement audio, l'enregistrement Galbraith. 1D33-074. Cet

 26   enregistrement a été utilisé par la Défense Gotovina en présence du témoin

 27   Galbraith. Cela concerne une réunion du 9 octobre 1995 à laquelle le

 28   président Tudjman, l'ambassadeur Galbraith et l'ambassadeur Holbrooke

Page 27392

  1   étaient tous présents.

  2   Alors, pour commencer, je voudrais vérifier une chose. Sur ma liste, j'ai

  3   comme indication 1D33-074, et un peu plus loin, on trouve 0474 au lieu de

  4   074.

  5   M. KEHOE : [interprétation] C'est cette dernière référence, Monsieur le

  6   Président, qui est la bonne.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En effet. On retourne sur le bon format.

  8   Donc, nous sommes en train de parler de la page 1D33-0474.

  9   A la page 5 073 du compte rendu d'audience, M. Tieger indique avoir besoin

 10   de davantage de temps pour examiner et écouter l'enregistrement audio,

 11   suite à quoi, au cours des jours suivants, il aurait eu l'intention d'en

 12   informer les parties, d'informer les parties de sa position.

 13   Alors, à ce stade, aucune cote provisoire n'a encore été attribuée à

 14   cet enregistrement audio, donc il est passé à travers les mailles de notre

 15   filet lors des séances précédentes dédiées aux questions administratives,

 16   où nous nous étions penchés, précisément, sur les listes de documents ayant

 17   reçu une cote provisoire.

 18   Je ne suis pas sûr que M. Tieger soit revenu sur ce point en

 19   particulier. En tout cas, il a évoqué la question en page 5 073 du compte

 20   rendu d'audience; alors est-ce que vous pourriez nous informer de ce qu'il

 21   en est à ce sujet, Madame Gustafson ?

 22   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je vais voir avec M. Tieger et je

 23   reviendrai vers la Chambre dès que possible.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous vous attendons à ce

 25   sujet.

 26   Alors, le prochain sujet --

 27   M. KEHOE : [interprétation] Avec votre permission, Monsieur le Président,

 28   entre-temps, afin de ne pas perdre le fil sur ce sujet particulier, est-il

Page 27393

  1   possible d'attribuer une cote provisoire à ce document afin qu'on ne

  2   l'oublie pas une nouvelle fois ?

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est une très bonne suggestion.

  4   M. KEHOE : [interprétation] Oui. C'est une idée de Me Misetic. Je ne joue

  5   que le rôle du perroquet qui vous transmet ses bonnes idées, dans ce cas

  6   précis.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Alors, nous allons attendre

  8   que l'Accusation nous informe de ce qu'il en est. En attendant, la pièce

  9   1D33-0474 va recevoir une cote provisoire.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, la cote

 11   provisoire attribuée à cette référence est le D2022.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Maintenant, plus rien ne peut

 13   plus échapper à notre attention.

 14   Le sujet suivant est celui du rapport Albiston. Il y a la question de la

 15   version confidentielle, la version sous pli scellé de ce rapport, et de la

 16   version expurgée ou non expurgée, également, de ce document. Alors, la

 17   version non expurgée a été versée au dossier alors que la version expurgée,

 18   elle, n'a pas été versée.

 19   M. KAY : [interprétation] En effet. Cela a été annexé à l'une de nos

 20   écritures, Monsieur le Président, donc il n'y a pas encore de numéro de

 21   pièce à conviction pour cette version expurgée. Cela nous pose quelques

 22   problèmes, pour ce qui est de la rédaction de notre mémoire final et des

 23   références aux différents documents. Donc, je souhaiterais que la version

 24   expurgée qui a été adjointe et annexée à notre requête puisse se voir

 25   attribué un numéro de pièce à conviction. Cela a été chargé dans le système

 26   électronique et aux fins de la rédaction des mémoires en clôture, cela

 27   permettrait une bien plus grande transparence. Dans le cas contraire, nous

 28   nous référerons à de longs passages d'un document confidentiel, alors que

Page 27394

  1   ces passages mêmes ne sont pas sous pli scellé -- ne sont pas

  2   confidentiels.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Alors, la Chambre est plutôt

  4   réticente à voir les deux versions, expurgée et non expurgée, toutes deux

  5   versées au dossier, mais si la version attachée à votre requête est la

  6   version expurgée, je crois que nous allons pouvoir trouver une solution, et

  7   je crois que ce sont surtout les notes de bas de page qui faisaient l'objet

  8   des mesures d'expurgation qui devaient être expurgées pour que l'identité

  9   des témoins protégés le soit aussi -- pour qu'elle soit protégée. Donc,

 10   nous suggérerions plutôt que, puisque l'essentiel de ce rapport dans sa

 11   version publique est disponible publiquement, et bien, que l'on se reporte

 12   dorénavant à cette version expurgée du rapport qui fait l'objet d'une

 13   requête publique de votre part et qu'elle sot versée au dossier.

 14   M. KAY : [interprétation] Nous parlons ici d'une très petite partie du

 15   rapport Albiston qui motive le statut confidentiel du rapport. Nous voulons

 16   être absolument sûrs de ce que nous intégrerons dans notre mémoire en

 17   clôture et nous souhaitons que le public puisse se faire une idée de ce sur

 18   quoi nous nous appuyons, et nous ne souhaitons certainement pas qu'une

 19   grande partie de notre mémoire en clôture se trouve expurgée alors que nous

 20   ne voyons aucune bonne raison à cela. Or, c'est précisément ce qui se

 21   produirait si cette pièce à conviction devait rester confidentielle. Mais

 22   le rapport de M. Albiston doit pouvoir faire l'objet de références

 23   précises, parallèlement.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, de toute façon, le résultat

 25   sera le même. Alors, dans un document du domaine public, vous ne pouvez

 26   faire référence qu'à un autre document qui appartient aussi au domaine

 27   public. Vous, vous suggérez que c'est la version expurgée qui serait

 28   ensuite versée au dossier en tant que document du domaine public. Alors

Page 27395

  1   toutes les références, qui seront faites à ce document, qui sera versé au

  2   dossier, pourraient être faites au rapport Albiston, qui serait ensuite

  3   présenté en addendum en tant que dépôt à la date en question, et ça

  4   donnerait exactement le même résultat. Bien entendu, le public comprendra,

  5   il n'aura aucun problème à y faire référence. Alors pour ce qui est de la

  6   version non expurgée qui est versée au dossier, s'il n'y a pas

  7   d'expurgation, vous pouvez faire référence à la page XYZ, mais je ne vois

  8   pas tellement où réside le problème, à condition que la référence est

  9   toujours une référence à un position non expurgé du document. Mais il me

 10   semble, en fait, qu'il s'agit d'un problème qui est extrêmement technique,

 11   parce que vous souhaiteriez que soit versé au dossier le rapport Albiston,

 12   dans sa version expurgée, bien entendu, vous voyez qu'il y a encore

 13   quelques réticences à accepter à la fois la version expurgée et non

 14   expurgée -- à accepter qu'elles soient versées au dossier. Peut-être que

 15   nous pourrions régler cela hors du prétoire, parce que cela n'a aucune

 16   importance, en quelque sorte, hormis les questions pratiques.

 17   M. KAY : [interprétation] Oui.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être que nous pourrions voir si

 19   vous allez maintenir votre point de vue ou si nous pouvons trouver une

 20   solution.

 21   M. KAY : [interprétation] Oui, je suis sûr que nous pourrons trouver une

 22   solution, et il se peut qu'une explication soit nécessaire pour les deux

 23   points de vue. Je suis sûr que nous comprendrons le point de vue de la

 24   Chambre, et je suis sûr que vous comprendrez le point de vue de la Défense

 25   de M. Cermak.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, je pense qu'il faudrait d'abord

 27   que vous abordiez cette question essentiellement avec M. Nilsson, qui est

 28   le juriste qui dirige notre équipe pour cette Chambre de première instance

Page 27396

  1   et pour cette affaire.

  2   M. KAY : [interprétation] Oui.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien entendu, si nous ne trouvons pas

  4   une solution, il faudra que la Chambre statue.

  5   M. KAY : [interprétation] Oui, non, bien entendu.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voilà pour ce qui est de mes questions

  7   de procédure.

  8   Vous avez autre chose à soulever, Madame Gustafson ?

  9   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Oui. Quelque chose de secondaire, Monsieur

 10   le Président, mais le recensement de l'année 1991 a été chargé dans le

 11   système, et c'est là une version absolument complète. Il s'agit de la pièce

 12   7575 de la liste 65 ter, et nous aimerions demander le versement au dossier

 13   de ce document, et je sais que la Chambre avait manifesté son intérêt à ce

 14   sujet et je voulais juste vous le dire.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, la Chambre a manifesté son intérêt

 16   dans la mesure où parfois, pour comprendre certaines questions, il est bon

 17   de savoir quelle était la composition de la population, et la Chambre sait

 18   qu'il y a eu des changements assez fondamentaux depuis l'organisation de ce

 19   recensement. Donc, je dirais en fait qu'il y a eu des changements, oui, que

 20   je qualifie de considérables et de substantiels.

 21   Maître Misetic.

 22   M. MISETIC : [interprétation] Nous soulèverions une objection à ce que

 23   l'ensemble du recensement soit versé au dossier, à moins qu'on nous

 24   présente un argumentaire pour nous expliquer pourquoi. C'est la première

 25   fois que l'on parle de cette idée. Donc, je remarque qu'il y a quand même

 26   déjà des chapitres relatifs au secteur sud qui ont déjà été versés au

 27   dossier. Bon, s'il y a quelque chose de plus précis à propos d'autres

 28   villes et que cela n'a pas été versé au dossier, je peux tout à fait

Page 27397

  1   prendre contact avec l'Accusation et nous trouverons une solution.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je pense que la Chambre avait

  3   demandé à ce que cela soit chargé dans le prétoire électronique

  4   essentiellement pour que nous puissions étudier ledit recensement, si le

  5   besoin s'en fait sentir lorsque, par exemple, il est question de certains

  6   villages à majorité croate ou à majorité serbe. Donc, s'il y a un

  7   contentieux à ce sujet, au moins, nous aurons les données à notre

  8   disposition.

  9   Madame Gustafson, vous avez entendu la préoccupation de Me Misetic.

 10   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Oui, oui, je peux tout à fait prendre

 11   contact avec Me Misetic à ce sujet. Alors, ce qui nous inquiète un peu,

 12   c'est que ce qui a déjà été versé au dossier n'est pas toujours très clair,

 13   alors peut-être que nous pourrions trouver un accord pour remplacer les

 14   pages en question, par exemple.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui, faites donc et puis peut-être

 16   que vous pourriez, en même temps, l'élargir ce qui malmènerait moins mes

 17   yeux lorsque je dois consulter ce recensement de 1991. Puis j'avais oublié

 18   quelque chose, car j'ai une liste qui date d'hier, ce qui fait que

 19   j'aimerais que maintenant nous passions à la liste que j'ai dressée pour

 20   aujourd'hui.

 21   J'aimerais que nous passions rapidement ou brièvement plutôt à huis clos.

 22   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

 23   partiel.

 24   [Audience à huis clos partiel]

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 28   [Audience publique]

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais maintenant vous présenter les

  2   points d'accord pour ce qui est du mémoire préalable au procès du bureau du

  3   Procureur.

  4   Le 4 février, la Défense de M. Gotovina a indiqué son accord par rapport

  5   aux paragraphes 105 à 108 du mémoire préalable au procès du Procureur, qui

  6   a égard -- qui port plutôt sur le conflit armé. Car il y a une exception

  7   qui a été établie à propos de la deuxième phrase du paragraphe 105. La

  8   Chambre aimerait savoir maintenant si les Défenses de M. Cermak et Markac

  9   se rallient à cet accord.

 10   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Mikulicic.

 12   M. MIKULICIC : [interprétation] Alors là je dois dire que nous avons une

 13   approche légèrement différente. Donc pour le moment, je dirais que je ne

 14   marque pas mon accord avec cet accord.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez partiellement

 16   vous y rallier ?

 17   M. MIKULICIC : [interprétation] Oui, c'est peut-être la voie que nous

 18   envisagerions d'emprunter.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors est-ce que vous pourriez peut-être

 20   examiner les possibilités ? Parce que du point de vue pratique s'il y a un

 21   accord conclu, entre toutes les parties, la situation est beaucoup plus

 22   simple. Mais, bien entendu, il ne faut surtout que vous vous trouviez

 23   contraint que vous ayez l'impression que l'on vous force la main pour que

 24   vous marquiez votre accord avec quelque chose avec lequel vous n'êtes pas

 25   d'accord.

 26   Donc peut-être que vous seriez invité -- bon, je vous invite à envisager la

 27   question. Mais je ne sais pas, vous pourriez peut-être en parler avec les

 28   autres conseils de la Défense. Demandez-leur pourquoi ils ont accepté ces

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  1   points d'accord.

  2   M. MIKULICIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

  4   Voilà. Il est maintenant versé au dossier le fait que la Défense de M.

  5   Cermak accepte les accords ou les points d'accord qui ont été établis pour

  6   les paragraphes 105 à 108 du mémoire préalable au procès de l'Accusation eu

  7   égard au conflit armé, à l'exception de la deuxième phrase du paragraphe

  8   105.

  9   Alors maintenant il me reste plus qu'un point à mon ordre du jour. Eu égard

 10   aux pièces D530 et D424, des demandes de vérification ont été présentées

 11   pour que la traduction anglaise de ces pièces fassent l'objet de

 12   vérification. Des memoranda internes ont été présentés par le CLSS à ce

 13   sujet. Est-ce que les nouvelles traductions ont été chargées dans le

 14   système ? Je dois vous avouer je ne sais pas à quelle équipe de la Défense

 15   m'adresser d'ailleurs. Je me souviens que Maître Mikulicic j'ai vu que vous

 16   étiez en train de parler à quatre yeux à quelqu'un comme disent les

 17   français.

 18   M. MIKULICIC : [interprétation] Je m'excuse, je ne vous suis pas

 19   exactement, Monsieur le Président.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voulais savoir si après avoir reçu

 21   les notes de service du CLSS, eu égard aux pièces D530 et D424, les

 22   traductions révisées en question ont été chargées dans le système.

 23   [Le conseil de la Défense se concerte]

 24   M. MIKULICIC : [interprétation] Accordez-moi une petite minute, Monsieur le

 25   Président.

 26   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 27   M. MIKULICIC : [interprétation] Non, j'ai l'impression que cela n'a pas été

 28   chargé dans le système.

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  1   [Le conseil de la Défense se concerte]

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, écoutez, est-ce que vous pourriez

  3   veiller à ce que cela soit fait parce que ce n'est qu'à ce moment-là que

  4   nous pourrons donner la consigne au Greffier de rattacher donc ces

  5   traductions des deux pièces à conviction.

  6   M. MIKULICIC : [interprétation] Nous le ferons.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Moi, je n'ai plus rien sur mon ordre du

  8   jour.

  9   Qu'en est-il des parties ?

 10   Bien. Nous allons lever l'audience et nous reprendrons le jeudi 4 mars à 9

 11   heures dans la salle d'audience numéro III.

 12   --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le jeudi 4 mars

 13   2010, à 9 heures 00.

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