Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 7 janvier 2013

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est absent]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 15.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous dans le

  6   prétoire et dans les pièces adjacentes. Je tiens à vous faire part de nos

  7   meilleurs vœux de bonne année.

  8   Monsieur le Greffier d'audience, veuillez citer l'affaire.

  9   M. LE GREFFIER : [aucune interprétation]

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

 11   M. STRINGER : [aucune interprétation] 

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

 13   M. ZIVANOVIC : [aucune interprétation]

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

 15   M. ZIVANOVIC : [aucune interprétation] 

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

 17   M. GILLETT : [aucune interprétation]

 18   L'INTERPRÈTE : La cabine française s'excuse, elle a interprété jusqu'à

 19   présent sur le canal anglais.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien. Les Juges de la Chambre vont

 21   rendre une décision orale.

 22   Le 10 décembre 2012, l'Accusation a présenté une requête pour ce qui est de

 23   modifier sa liste des pièces à conviction en application du 65 ter pour y

 24   ajouter neuf documents. L'Accusation a indiqué que quatre de ces documents

 25   se rapportaient à Davor Strinovic, qui doit commencer à témoigner

 26   aujourd'hui.

 27   La Défense n'a pas fait objection pour ce qui est du rajout de ces quatre

 28   documents tels que précisés dans sa réponse du 24 décembre.


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  1   La Chambre rappelle que cette liste peut être autorisée dans l'intérêt de

  2   la justice. La Chambre se félicite du fait qu'il y ait eu des circonstances

  3   concrètes de présenter et se félicite aussi du fait qu'il n'a pas

  4   d'objection de la part de la Défense ce qui justifie la modification de la

  5   liste des pièces à conviction telles que proposés à la liste 65 ter, et ce,

  6   moyennant pièce 06365, 06366, et 06367, ainsi que 06368.

  7   Ces documents sont pertinents et suffisamment importants pour justifier

  8   leur rajout en cette phase-ci du procès. Les Juges de la Chambre de

  9   première instance sont convaincus que le rajout de ces documents ne va pas

 10   porter préjudice à la Défense.

 11   Donc cette requête se voit être accordée et l'Accusation peut rajouter ces

 12   documents à la liste des pièces à conviction. Pour ce qui est de la

 13   recevabilité de documents, on se penchera dessus lorsque ces documents

 14   seront présentés pour un versement au dossier.

 15   Les Juges de la Chambre ont également été saisis d'une requête pour ce qui

 16   est d'autres aspects.

 17   Alors, Maître Stringer, aux fins de planifier les semaines à venir et en

 18   particulier celles qui commencent par les journées du 21 et 28 janvier,

 19   vous êtes sollicité pour ce qui est de nous saisir d'une liste de témoins

 20   pour ces semaines, et ce, avant jeudi.

 21   M. STRINGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Cela ne posera

 22   pas problème.

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. J'aimerais qu'on fasse entrer

 24   le témoin maintenant.

 25   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. Merci

 27   d'être venu à La Haye aux fins d'aider les Juges de cette Chambre de

 28   première instance. Tout d'abord, dites-nous si vous nous entendez dans une


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  1   langue que vous êtes à même de comprendre ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Messieurs les Juges, je vous entends et

  3   je vous comprends parfaitement bien. Merci.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] J'aimerais que vous nous décliniez

  5   votre nom et prénom, ainsi que votre date de naissance, ainsi que votre

  6   appartenance ethnique.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Davor Strinovic. Je suis né le 8

  8   mars 1949, et je suis Croate de par mon appartenance ethnique.

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci, Monsieur Strinovic. Vous allez

 10   maintenant donner lecture du texte de la déclaration solennelle qui fait

 11   que les témoins s'engagent à dire la vérité. Je tiens à souligner le fait

 12   qu'une fois que vous aurez prononcé cette déclaration solennelle, vous vous

 13   exposez à des sanctions liées aux parjures si vous témoignez faussement ou

 14   si vous témoignez de façon non conforme à la vérité devant ce Tribunal.

 15   Veuillez donner lecture de cette déclaration maintenant.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 17   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 18   LE TÉMOIN : DAVOR STRINOVIC [Assermenté]

 19   [Le témoin répond par l'interprète]

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Grand merci. Vous pouvez vous asseoir

 21   à présent.

 22   Monsieur Gillett, à vous.

 23   M. GILLETT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Merci,

 24   Messieurs les Juges.

 25   Interrogatoire principal par M. Gillett : 

 26   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur. J'aimerais que vous nous disiez

 27   quelle est votre profession et quelles sont les fonctions que vous occupez

 28   actuellement.


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  1   R.  Je suis spécialiste en médecine légale, et je suis chef de l'Institut

  2   de la criminologie et de la police judiciaire à Zagreb. Et je suis chef de

  3   la commission du gouvernement pour les personnes disparues, et ce, depuis

  4   l'année 1991.

  5   Q.  Pendant combien de temps vous trouvez-vous être un pathologiste en

  6   médecine légale ?

  7   R.  Je suis arrivé à cette institution en 1976, et depuis 1980 je suis

  8   devenu spécialiste en matière de médecine légale.

  9   Q.  Est-ce que vous pouvez nous expliquer brièvement ce que fait qu'un

 10   pathologiste en médecine légale.

 11   R.  Un spécialiste ou cette spécialisation se trouve être liée a l'étude ce

 12   certains problèmes, et ce, notamment pour ce qui est de la définition des

 13   causes de décès. Tous les cas de décès où il y a eu mort violente ou mort

 14   suspecte où l'on ne sait pas quelle est la cause, cela est étudié par la

 15   médecine légale.

 16   Et il n'y a pas seulement autopsie, les autopsies c'est l'un des

 17   aspects importants de notre travail, mais un médecin légiste fait autre

 18   chose. Il témoigne devant les tribunaux, il témoigne en tant qu'expert, et

 19   lorsqu'il travaille à la faculté, comme c'est mon cas, on procède à

 20   l'éducation des étudiants en médecine, en droit, en activités liées à

 21   police, et on rédige des manuels dans ce domaine-là.

 22   Q.  Lorsque vous faites référence à vos activités post mortem, c'est-à-dire

 23   vos autopsies, est-ce que vous pouvez nous dire combien d'autopsies vous

 24   avez effectuées au fil de votre carrière ?

 25   R.  Pour être précis, enfin, je ne peux pas très précis parce que ça fait

 26   37 ans que je fais ce métier, et c'est au quotidien que je procède à des

 27   autopsies. C'est le plus grand des instituts en République de Croatie que

 28   nous ayons, et ça fait -- on effectue 1 400 à 1 600 autopsies par an. Il


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  1   m'est difficile de parler avec plus de détail. Il y a eu des années où j'en

  2   faisais 500 ou 600 des autopsies. Maintenant ça se fait, ça se chiffre à

  3   250 à 300, mais j'en ai effectué au minimum une dizaine de milliers moi-

  4   même.

  5   Q.  A quelle fréquence témoignez-vous au sujet de ces questions liées à la

  6   pathologie, et ce, notamment dans les procès au niveau national ?

  7   R.  Etant donné que nous nous trouvons dans la plus grande des villes de

  8   Croatie où il y a le plus de tribunaux et le plus de juges, cela fait qu'il

  9   est très fréquent que les médecins légistes et moi-même nous nous

 10   déplacions vers les tribunaux pour donner des opinions par écrit ou de

 11   façon verbale. Il m'est difficile de vous donner des chiffres, mais dans

 12   tout état de cause, depuis que je suis devenu spécialiste en médecine

 13   légiste en 1980 donc, de façon quotidienne je me trouve être en contact

 14   avec des expertises soit verbalement soit par écrit moyennant déplacement

 15   vers les tribunaux, et c'est une chose que j'effectue régulièrement depuis

 16   1980.

 17   Q.  Est-ce que vous avez déjà témoigné devant ce Tribunal en tant que

 18   témoin expert ?

 19   R.  Oui. Autant que je m'en souvienne, je suis venu devant ce Tribunal à

 20   cinq reprises pour ce qui est des affaires qui ont été traitées par ce

 21   Tribunal et que vous devez certainement connaître.

 22   Q.  Certes, merci. Vous avez mentionné le fait que vous rédigiez des études

 23   scientifiques. Alors, combien de publications avez-vous eues dans ce

 24   domaine concret ?

 25   R.  Si vous me parlez de la médecine légale, et c'est ce que je sous-

 26   entends dans votre question, je dirais à peu près 55 à 60 études qui

 27   englobent des rédactions de manuels d'études à l'intention de maisons

 28   d'édition nationales ou étrangères, et ça se solde à peu près par le


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  1   chiffre que je viens de vous donner.

  2   Q.  Vous avez mentionné le fait que vous faisiez partie d'une commission

  3   pour les personnes disparues en Croatie. Alors, est-ce que vous pouvez nous

  4   dire quand est-ce que cette commission pour les personnes détenues et

  5   disparues a été créée en Croatie ?

  6   R.  Ça s'est créé en fin 1991, en décembre de cette année-là, pour être

  7   plus précis, et cette commission existe jusqu'à nos jours. Alors

  8   l'appellation a peut-être changé, mais c'est la même commission, et c'est

  9   la commission qui s'occupe des mêmes problèmes depuis sa création jusqu'à

 10   nos jours.

 11   Q.  Et pourquoi cette commission a-t-elle été mise en place ? Quelle est la

 12   finalité de sa création ?

 13   R.  Lorsque la guerre a commencé en Croatie, nous avons compris qu'il y

 14   avait beaucoup de problèmes qui s'imposaient, et c'était notamment celui

 15   des personnes disparues. Ce chiffre a évolué au fil du temps, et il a été

 16   important, et nous avons souhaité d'une certaine façon par la création de

 17   cette commission mettre en place un établissement qui étudierait ces

 18   problèmes et qui aiderait aux familles des disparus, les familles des

 19   disparus pour déterminer et mettre en place une espèce d'ordre dans les

 20   chiffres pour ce qui est des personnes disparues ou des personnes qui

 21   avaient été détenues de par le passé.

 22   Q.  Vous avez mentionné une fonction qui a été celle du début de la

 23   création de cette commission. Est-ce que les fonctions que vous avez

 24   exercées ont évolué de façon substantielle en 1995 et depuis, et si oui,

 25   comment ?

 26   R.  Je puis vous dire la chose suivante, je vais être bref pour indiquer

 27   aux Juges de la Chambre les fonctions de cette commission jusqu'en 1995 et

 28   après. Alors, la commission a été créée en 1991 en premier lieu pour


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  1   collecter le plus possible des renseignements au sujet des personnes

  2   disparues, les listes des personnes disparues, les renseignements ante

  3   mortem, donc les renseignements qui englobent toute information relative à

  4   la personne disparue. On a collecté ces informations au fil de quatre

  5   années. Nous avons contacté, par le biais de la Croix-Rouge et les autres

  6   organisations, les familles, les proches de ces gens-là, qui avaient

  7   fréquenté la personne disparue avant sa disparition aux fins d'obtenir le

  8   plus possible d'informations qualitativement bonnes pour ce qui est donc

  9   des renseignements généraux et des renseignements spécifiques, qui sont

 10   très précieux pour ce qui est de notre travail, les renseignements liés à

 11   l'état de santé, les maladies qui pouvaient, par exemple, se refléter sur

 12   les os, le port de prothèses, des fractures anciennes qui pouvaient nous

 13   aider à identifier les personnes de façon classique. Alors, il y avait

 14   aussi les empreintes des mâchoires des individus. Nous avons contacté les

 15   dentistes des personnes disparues et nous avons demandé la documentation,

 16   enfin, tout ce qui concernait les soins dentaires, s'il y en avait. Et je

 17   pourrais vous dire qu'en Croatie, beaucoup d'éléments de cette

 18   documentation n'étaient pas accessibles. Pourquoi ? Pour plusieurs raisons.

 19   Les renseignements principaux nous venaient des familles et des proches des

 20   personnes disparues, pour ce que est des renseignements ante mortem. On

 21   avait collecté cela au fil de toute une série d'année. Et lorsqu'on

 22   retrouvait un corps, il nous était plus facile de procéder aux

 23   identifications.

 24   C'est ce que nous avons effectué de façon intense pendant cette période

 25   entre 1991, ou plutôt, 1992, date de début des activités, et 1995. Ça,

 26   c'est une partie, un volet, et ça a été des préparatifs pour ce qui est de

 27   ce qui allait suivre.

 28   L'autre segment c'était de se procurer le plus possible de renseignements


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  1   de la part de parties autres qui étaient impliquées dans les événements ou

  2   la situation liée à la disparition de ces individus. Nous avons effectué

  3   des rencontres avec les Serbes locaux, avec l'ex-Yougoslavie, c'est-à-dire

  4   la Serbie, et plus tard avec la Bosnie-Herzégovine, pour obtenir le plus

  5   possible de renseignements qui seraient susceptibles de nous aider pour

  6   retrouver les fosses ou les tombes individuelles et pour procéder à une

  7   identification plus aisée de ces individus.

  8   Ça a été une période de quatre années, entre 1992 et 1995, où nous

  9   avons préparé tout ce qui était possible de préparer pour commencer en 1995

 10   à accéder aux endroits où se trouvaient les fosses et commencer à exhumer.

 11   Là aussi, ça a pris du temps. Nous avons procédé graduellement. Il n'a pas

 12   été facile de les retrouver, parce que pendant plusieurs années elles ont

 13   été dissimulées, et il y a eu des changements intervenus dans la végétation

 14   et dans la configuration du terrain avec plein de buissons et de plantes.

 15   Donc il n'a pas été facile de continuer. Mais nous avons, depuis 1995 à nos

 16   jours, retrouvé ces fosses, ces corps ou les dépouilles, et nous avons

 17   commencé à étudier le matériel que nous avons retrouvé pour identifier les

 18   personnes disparues. Cela a été l'objectif principal de nos activités.

 19   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demanderaient à ce témoin de parler un peu

 20   plus lentement pour faciliter leur travail.

 21   M. GILLETT : [interprétation]

 22   Q.  Quel a été votre rôle concret, notamment pendant cette période entre

 23   1995 et au-delà, pour ce qui est des exhumations et de l'identification des

 24   dépouilles que vous avez retrouvées ?

 25   R.  Etant donné que j'ai été membre de la commission à compter de 1991, il

 26   a été logique pour moi, puisque nous avons dû continuer la tâche entamée,

 27   la découverte des fosses et des tombes individuelles, j'ai été chargé de la

 28   partie médicale de ces identifications. Qu'est-ce que cela veut dire ? Eh


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  1   bien, cela veut dire qu'au fur et à mesure qu'on a retrouvé les fosses

  2   communes ou les dépouilles de ces individus, on a créé des équipes, des

  3   équipes qui ont d'abord été chargées des exhumations et ensuite de traiter

  4   les dépouilles humaines.

  5   Il y en a eu au début énormément dans toutes les parties de la

  6   Croatie qui a été à ce moment-là complètement libérée. Il y avait des

  7   fosses un peu partout et tous les médecins légistes et spécialistes en

  8   pathologie sont intervenus dans ce type d'activités, pour ce qui est donc

  9   d'exhumer les dépouilles et d'analyser les restes. Il a fallu coordonner

 10   les activités liées à ces fosses communes et à ces tombes et procéder à des

 11   expertises avec des experts qui étaient censés être présents lors des

 12   exhumations ou lors des analyses ultérieures. Il a fallu donc coordonner

 13   les activités avec moi-même, et j'ai veillé à ce que tout soit couvert et à

 14   ce que toutes les activités puissent être effectuées sans entrave.

 15   Q.  Est-ce que vous avez personnellement participé à certaines exhumations

 16   et autopsies de victimes dont les dépouilles ont été retrouvées ?

 17   R.  Pendant toute cette période jusqu'à nos jours, je participe directement

 18   au traitement de ces dépouilles et à leur identification. Il y en a eu bien

 19   plus auparavant. J'ai eu beaucoup de déplacements vers le terrain, vers les

 20   sites d'exhumation, et il y a eu des analyses faites in situ, puis il y a

 21   eu des études à l'Institut de médicine légale à Zagreb où nous avions des

 22   locaux spécialement aménagés à cet effet. Pour répondre, en somme, je

 23   dirais que depuis 1995, je participe de façon active en ma qualité

 24   d'organisateur et en ma qualité de personne chargée de la réalisation de ce

 25   type d'activités.

 26   Q.  Est-ce qu'il y a eu des intervenants internationaux d'impliqués dans ce

 27   processus d'exhumation et d'autopsie ?

 28   R.  Oui. Je me dois de dire que je ne sais pas quelle a été l'organisation


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  1   de la répartition des tâches, mais il y a eu à plusieurs reprises en

  2   Croatie des visites d'experts internationaux venus des Nations Unies ou

  3   d'organisations internationales autres pour procéder en Croatie à des

  4   exhumations et à l'étude des dépouilles mortelles. Je dirais donc qu'il y a

  5   eu bon nombre d'experts qui se sont chargés de toute la tâche, depuis

  6   l'exhumation au niveau des sites d'enfouissement jusqu'à l'étude des

  7   dépouilles où on nous a confié ce qui a été retrouvé pour procéder aux

  8   activités ultérieures liées à l'identification ou à l'accord de précision

  9   s'il y avait des points obscurs, pour pouvoir mener à terme le travail dans

 10   son ensemble.

 11   Q.  Lorsque ces représentants des organisations internationales avaient

 12   procédé aux exhumations ou aux études des dépouilles post mortem, y a-t-il

 13   eu des représentants de présents en provenance de la Croatie ou de la

 14   Yougoslavie ?

 15   R.  Ce que je puis dire, c'est qu'en termes pratiques, lorsqu'il y a eu

 16   exhumation d'effectuée en Croatie, il y a eu plusieurs parties de

 17   présentes, en particulier s'il s'agissait d'organisations internationales

 18   chargées des exhumations et des examens. Il y avait toujours quelqu'un de

 19   présent du côté croate, mais aussi du côté serbe. C'étaient pour

 20   l'essentiel des experts venus de Serbie ou de ce qu'il est convenu

 21   d'appeler la Krajina.

 22   Q.  Je me propose de vous poser un peu plus de questions pour ce qui est du

 23   processus technique des exhumations, des autopsies et des identifications.

 24   Mais avant que de passer à cela, je voudrais dire que dans la documentation

 25   il y a souvent des termes qui apparaissent, et j'aimerais vous demander des

 26   éclaircissements. Il y a un terme de saponification qui est utilisé. Est-ce

 27   que vous pouvez expliquer ce que cela signifie, ce terme de saponification

 28   ?


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  1   R.  Après le décès, il y a des changements qui interviennent au niveau du

  2   corps humain. Les un ou deux premiers jours, ces changements ne sont pas

  3   visibles. Le corps est encore frais, et on peut aborder toute une série de

  4   questions. Mais au fil du temps, il y a des changements qui interviennent.

  5   Alors, si le corps est immergé dans l'eau ou dans une terre humide telle

  6   que l'argile, il y a un début de saponification. Il y a donc un savon qui

  7   se crée, et ce savon reste compact. Le corps reste intact, la peau reste

  8   intacte, et dans la plupart des cas de figure les organes restent intacts.

  9   Ça peut durer plusieurs mois ou un an et même plus. Et cela fait que le

 10   corps est bien préservé. On peut par la suite identifier sur ce corps les

 11   modifications intervenues sur le corps, c'est-à-dire les tatouages, les

 12   cicatrices et autres modifications au niveau de la peau qui restent

 13   présentes pendant plusieurs années. Sur la peau d'une dépouille saponifiée,

 14   on peut voir des blessures, c'est-à-dire blessures par balle, blessures

 15   apportées par couteau, où le corps est bien conservé. Pour ce qui est de

 16   l'examen interne, on peut voir les organes, on peut voir les dégâts subis

 17   par ces organes. Pour nous, la saponification, ça nous aide pour ce qui est

 18   du procédé à suivre pour identifier la personne dont il s'agit, parce que

 19   ça nous donne plus d'éléments d'analyse. Et après la mort, on peut tirer

 20   des conclusions pour ce qui est des causes de décès et autres faits qui ne

 21   sont pas si faciles à identifier dans d'autres cas de figure, par exemple.

 22   Q.  Lorsqu'il s'agit du squelette, est-ce que vous pouvez parler de ce qui

 23   signifie squelettisation.

 24   R.  Après le décès, si le corps est exposé à l'air extérieur ou à l'air

 25   ambiant, au bout de quelques mois il y a un squelette qui reste seulement.

 26   Les tissus tendres, la peau disparaissent, et il n'y a plus de tissus à

 27   trouver. Il n'y a que des os. C'est lorsqu'il s'agit d'un corps qui est

 28   resté à ciel ouvert. Et lorsqu'il est dans la terre, il faut sept à dix ans


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  1   pour que ce corps soit squelettisé [phon], pour qu'il n'y ait plus qu'un

  2   squelette. Parce que d'habitude, il y a des bouts de vêtements, des

  3   fragments de vêtements qui restent. Et ce qui est important, c'est que

  4   lorsque nous avons un squelette, les os permettent de tirer des conclusions

  5   pour ce qui est donc d'identifier l'individu, voir s'il y a des éléments

  6   nous permettant de reconnaître l'individu dont il s'agit partant des

  7   informations liées à ces os et partant des causes de décès. Et nous pouvons

  8   tirer des conclusions au sujet de la cause de décès pour ce qui est des

  9   changements intervenus au niveau des os. Il peut y avoir des blessures

 10   spécifiques qui indiqueraient quelle est la cause du décès, et il y a des

 11   blessures ou des changements non spécifiques où il est très difficile de

 12   tirer des conclusions au sujet de la véritable cause du décès. On peut dire

 13   qu'il s'est agi d'un traumatisme et d'une blessure vague, mais on ne peut

 14   pas parler de façon directe de la cause du décès. Etait-ce un coup de hache

 15   ou était-ce une balle qui a traversé rapidement le corps ou étaient-ce des

 16   éclats d'obus, où les blessures sont à peu près les mêmes que dans des cas

 17   de fractures et blessures similaires.

 18   Q.  Passons maintenant au processus de l'identification des restes. Vous

 19   avez parlé d'ante mortem, des éléments d'information ante mortem. En quoi

 20   est-ce que cela aide à identifier les restes ?  

 21   R.  Pour commencer, je dirais la chose suivante : l'identification au sens

 22   classique du terme dont nous allons parler était la seule méthode appliquée

 23   jusqu'à à peu près 1998, quasiment jusqu'en l'an 2000. En fait, l'ADN ne

 24   commence à être appliqué qu'en 1991-1992. En Croatie, cette méthode

 25   commence à peine à ce moment-là, et elle devient la première méthode

 26   d'identification dans chaque cas.

 27   Lorsque je parle d'éléments d'information ante mortem, ils nous ont été

 28   d'une très grande importance, parce qu'en 1995, 1996 ou 1997, c'est


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  1   uniquement sur la base des comparaisons des éléments d'information que nous

  2   avions ante mortem et ce que nous trouvions au moment de l'autopsie que

  3   nous pouvions tirer des conclusions. Et comme je l'ai déjà dit, c'est à

  4   partir de 1991 déjà que nous avons commencé à collecter ces informations,

  5   qui allaient apporter des réponses par la voie de la comparaison au moment

  6   de l'autopsie. C'est ce qui allait nous permettre de procéder à une

  7   identification plus ou moins certaine. Donc ces éléments d'information ante

  8   mortem, en quoi se composent-ils ? Il s'agit d'informations sur le genre,

  9   la taille, la stature, l'âge - ce que normalement ce formulaire devrait

 10   comporter - ensuite plusieurs éléments de détails, les vêtements, ce que la

 11   personne portait aux pieds, tout ce que la personne a pu porter qui

 12   pourrait aider l'identification, et ensuite le fait que l'individu ait été

 13   malade, que des modifications soient intervenues au niveau des os, des

 14   tissus, modifications au niveau dentaire. Et je souligne encore une fois

 15   que dans cette liste d'éléments d'information ante mortem, la dentition

 16   apporte des éléments très importants. Lorsque nous avons des dents

 17   préservées, donc une partie du crâne et une partie de la dentition, eh

 18   bien, ça nous permet de procéder avec une très grande probabilité,

 19   quasiment à 100 %, qu'il s'agit effectivement de tel ou tel individu. Il

 20   est très difficile de trouver deux individus qui auront une dentition

 21   identique. C'est quasiment comme des empreintes digitales. Donc vous avez

 22   une dentition normale, déjà vous avez la distance entre les dents, la

 23   taille des dents, la couleur des dents, l'absence de dent, ensuite toutes

 24   les interventions au niveau dentaire, des plombages, toutes les opérations

 25   subies, des prothèses fixes, amovibles. Donc vous avez toute une série

 26   d'informations. Lorsque vous avez les informations ante mortem obtenues de

 27   la part du dentiste ou sur la base d'une anamnèse qui était disponible,

 28   cela vous permet de vous fonder là-dessus au moment de l'autopsie. Donc


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  1   c'est quasiment avec une totale certitude que vous pouvez identifier

  2   l'individu parce qu'il n'y a quasiment pas deux dentitions identiques.

  3   Donc c'est ce qui nous a été particulièrement précieux. Tout ce que nous

  4   avons appris au niveau ante mortem a été renseigné, tous les éléments

  5   pertinents au niveau d'identification. Et aussi, tout ce que nous avions

  6   pouvait nous aider pour identifier la cause du décès, parce que parfois

  7   vous avez des déclarations de témoins, vous avez des entretiens avec des

  8   proches, et je dois dire que des milliers sont venus nous contacter et que

  9   nous avons eu des entretiens avec eux. Souvent vous avez des témoins qui

 10   ont des informations sur les circonstances de la mort de quelqu'un, et cela

 11   peut vous aider, peut constituer un élément permettant d'identifier.

 12   Je tiens à souligner, donc, lorsqu'il s'agit d'une identification au sens

 13   classique du terme et lorsqu'il s'agit d'information ante mortem, plus on

 14   en a, meilleure est leur qualité -bien sûr, lorsque nous obtenus quelque

 15   chose de comparable au niveau de l'autopsie aussi - eh bien, lorsque nous

 16   pouvons nous fonder sur la comparaison entre les deux groupes d'éléments,

 17   cela nous permet de procéder à une bonne identification. Donc, au sens

 18   d'identification classique du terme, ce qui est gênant, c'est lorsque nous

 19   n'avons qu'un seul élément qui nous permet de procéder à l'identification.

 20   C'est toujours plus souhaitable d'en avoir davantage pour procéder à une

 21   identification plus certaine. Et comme je viens de le dire, c'est jusqu'en

 22   l'an 2000 tout particulièrement que ces éléments ante mortem étaient très

 23   importants parce que nous n'avions pas encore de possibilité de procéder

 24   par l'analyse de l'ADN.

 25   Q.  Je vous remercie. Justement, parlant de l'ADN, est-ce que vous pouvez

 26   nous décrire très rapidement comment l'ADN nous permet d'identifier les

 27   restes ?

 28   R.  Oui. L'analyse par l'ADN nous a facilité la tâche de manière très


Page 2311

  1   considérable au niveau de l'identification. C'est cette analyse qui,

  2   lorsque vous avez effectivement une bonne analyse de l'ADN, vous pouvez

  3   procéder avec une certitude 99, voire 100 %, donc vous êtes certain qu'il

  4   s'agit bien de l'individu que vous identifiez. Donc vous n'avez même pas

  5   besoin de comparer avec les proches, la famille, et cetera.

  6   Donc tout un chacun a sa proche ADN, différente de toutes les autres, sauf

  7   lorsqu'il s'agit de vrais jumeaux. Donc cette "DNA" est unique, unique pour

  8   chaque individu.

  9   Lorsque nous analysons les restes d'un individu, la qualité de ces restes

 10   est importante. Donc, est-ce que nous avons des os, est-ce que nous avons

 11   des dents qui sont parfaits pour prélever l'ADN ? Généralement, ce sont les

 12   dents et les os qui se préservent le plus souvent. Donc nous préservons

 13   l'ADN par échantillage [phon] là-dessus. Donc nous prélevons l'ADN sur les

 14   os ou les dents d'un individu inconnu. Nous ne savons pas à ce stade de qui

 15   il s'agit. Donc nous passons à l'étape ultérieure. Il convient de procéder

 16   à une comparaison entre cette ADN et les échantillons de sang des proches,

 17   donc père, mère, épouse et enfant de la personne portée disparue. C'est là

 18   que nous avons les meilleurs échantillons, de meilleure qualité, donc au

 19   niveau de la paternité. Nous pouvons prouver qui est le père, c'est-à-dire

 20   qui est l'enfant d'un individu, lorsque nous avons les parents, le père et

 21   la mère, sur la base des échantillons de sang des proches qui sont en vie.

 22   Lorsque nous avons donc le fils qui a été porté disparu, nous allons

 23   pouvoir démontrer que cette mère et ce père sont bel et bien les parents de

 24   cet enfant, donc que cette personne ne peut être personne d'autre que leur

 25   enfant.

 26   Lorsque nous avons l'épouse et l'enfant, nous démontrons que l'enfant ne

 27   peut descendre que de cette mère et de ce père, et c'est de cette manière-

 28   là que nous arrivons à identifier le père.


Page 2312

  1   Donc la méthode par l'ADN est quasiment parfaite, sauf dans les cas

  2   où elle ne peut plus nous être d'aucun secours, lorsque nous n'arrivons pas

  3   à prélever l'ADN au niveau des os et au niveau des dents. C'est le cas des

  4   corps détruits par le feu, par des températures très élevées, lorsqu'il n'y

  5   a plus d'ADN identifiable au niveau des os, lorsqu'il y a eu détérioration

  6   par l'air, lorsque l'os décompose ou est réduit à l'état de poudre, et à ce

  7   moment-là on ne peut plus prélever l'ADN. Donc, ni par la méthode

  8   classique, ni par l'ADN, nous n'arriverons plus à l'identifier, parce qu'il

  9   n'est pas possible d'échantillonner l'ADN dans certains cas.

 10   Et je tiens aussi à ajouter que la méthode d'analyse par ADN, qui

 11   commence en 1992-1993, en fait, a été employée quasiment à partir de la fin

 12   de 1999, de l'an 2000, c'est là qu'on a commencé à l'appliquer. Nous avons

 13   trois grands laboratoires en Croatie, dont le plus grand à Zagreb, où c'est

 14   une matière de routine aujourd'hui. Chaque corps analysé est subi à une

 15   analyse par l'ADN, donc l'identification sera toujours en dernière instance

 16   basée sur l'ADN.

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Strinovic, est-ce que je

 18   pourrais vous demander de ralentir un petit peu. Les interprètes ont un

 19   petit peu de mal à vous suivre.

 20   M. GILLETT : [interprétation] Merci.

 21   Q.  Je vais vous interroger sur la cause du décès, vous avez mentionné ce

 22   sujet, et les facteurs qui interviennent au niveau des conclusions qui

 23   portent sur la cause du décès.

 24   Premièrement, est-ce que vous pouvez nous parler d'objets

 25   vestimentaires, de quelle manière est-ce qu'ils vous aident ?

 26   R.  Ecoutez, pour commencer, je voudrais dire une chose : lorsqu'on

 27   identifie la cause du décès sur les corps qui ont été retrouvés plusieurs

 28   années après la mort, c'est l'une des choses le plus difficile pour un


Page 2313

  1   médecin légiste. Je dois dire qu'il est très difficile de procéder par

  2   certitude. Bien sûr, nous essayons d'être le plus clairs possible.

  3   Lorsque nous avons des morts récentes, ça ne pose pas problème, mais

  4   lorsque vous avez des décès qui sont intervenus il y a plusieurs années,

  5   alors là, ça devient plus délicat. Il est très difficile d'avoir une

  6   certitude à 100 %.

  7   Alors, maintenant, pour ce qui est des objets vestimentaires. Tout ce qui

  8   se trouve devant le corps et tout ce qui a subi des dégâts d'une manière ou

  9   d'une autre peut nous aider à déterminer la cause de la mort. Donc les

 10   vêtements en font partie. Tout objet qui se trouve sur le corps d'une

 11   personne décédée, et si cela recouvre la partie du corps qui a été

 12   endommagée, eh bien, se trouverait à être endommagé également. Donc, si

 13   vous avez une arme à feu, un projectile qui a endommagé, bien sûr, la peau

 14   et les organes, elle aura également endommagé les vêtements. Donc il va y

 15   avoir une manière régulière d'endommager, donc des traces relativement

 16   régulières, rondes qui vous indiquent que c'est une balle ou un projectile

 17   qui est à l'origine du dégât. Mais ces dégâts, en fait, ne persistent pas

 18   sur une longue durée. Ils vont disparaître avec le temps, et à ce moment-là

 19   il sera plus difficile de se prononcer sur l'état des vêtements. Mais les

 20   vêtements aident en principe. Donc, lorsque nous identifions des dégâts

 21   typiques sur les pièces vestimentaires, eh bien, nous pouvons faire

 22   correspondre cela aux dégâts au niveau de la peau, des tissus ou des os, ce

 23   qui nous permettra d'apporter plus facilement la conclusion finale, de

 24   savoir s'il y a eu blessure, et cetera.

 25   Q.  Et qu'en est-il du crâne ?

 26   R.  Le crâne -- dans la plupart des cas, lorsque le crâne a été préservé,

 27   c'est l'élément le plus exact qui nous permet de constater la cause du

 28   décès, à cause d'un certain nombre de facteurs spécifiques. A savoir, si le


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  1   crâne a été préservé, je parle là d'os du crâne, on voit des dégâts qui le

  2   plus souvent constituent l'empreinte de l'objet qui est à l'origine. Donc

  3   une hache, éventuellement - un traumatisme très important - nous trouverons

  4   des traces de passage de la hache au niveau de l'os. Nous trouverons des

  5   orifices d'entrée et de sortie, par exemple, qui sont très caractéristiques

  6   s'il s'agit d'un projectile.

  7   A savoir, chaque projectile, lorsqu'il touche l'os, vu sa vitesse, il

  8   traverse l'os. Mais comment est-ce qu'il l'endommage ? Le point d'entrée

  9   constitue un orifice régulier et rond et l'orifice de sortie -- en fait, à

 10   l'intérieur, l'os sera davantage endommagé qu'à l'extérieur, donc vous avez

 11   une forme en entonnoir. Et au niveau de l'orifice de sortie, vous aurez la

 12   situation inverse, donc c'est à l'intérieur que l'os sera moins endommagé

 13   qu'à là sortie. Donc vous aurez un entonnoir inversé. Donc deux entonnoirs

 14   seront présents, l'un tourné vers l'intérieur, l'autre vers l'extérieur. Ce

 15   qui nous permettra de constater quelle a été la direction du tir et qu'il

 16   s'agissait effectivement d'une blessure par arme à feu. Ça, c'est au niveau

 17   du crâne et ce qui nous intéresse au niveau de l'identification. Mais

 18   lorsqu'il s'agit de la cause de décès, c'est particulièrement intéressant

 19   donc pour des blessures par arme à feu.

 20   Mais imaginons donc qu'il s'agit précisément de cela et que le

 21   projectile a été particulièrement rapide. Si la vélocité du projectile est

 22   très grande, les dégâts seront plus amples au niveau de toutes les

 23   structures, et en particulier au niveau des os. Pourquoi ? Parce que cette

 24   grande vélocité suppose aussi une grande énergie, et cette énergie

 25   cinétique se transformera en énergie élastique qui, elle, blesse les

 26   organes, les tissus et les os. Et donc, au bout d'un certain temps, à

 27   partir du moment où l'os n'est plus présent, nous aurons des fractures du

 28   crâne, et sur la base de ces petits éléments d'os, il sera très difficile


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  1   de constater s'il s'est agi effectivement à l'origine d'une blessure par

  2   arme à feu.

  3   Parce que lorsqu'il y a fracture multiple d'os, cela peut être dû

  4   également à l'explosion d'un obus, d'une grenade, et d'autres traumatismes

  5   peuvent se produire, traumatismes par autre objet, des coups, par exemple,

  6   qui produiront des fractures multiples d'os. Et à partir du moment où le

  7   tissu aura disparu, les tissus mous, la peau, et cetera, il ne restera plus

  8   que l'os brisé en plusieurs endroits et il sera difficile de reconstruire

  9   la blessure. Donc c'est simplement pour dire que la blessure n'est pas

 10   toujours nécessairement claire parce que cela dépend de la nature du

 11   projectile. Il y aura des cas où on pourra facilement et avec certitude

 12   conclure à la cause du décès, et parfois nous ne pourrons pas.

 13   Q.  Et qu'en est-il des rayons X, en quelle manière est-ce qu'ils peuvent

 14   nous aider à constater la cause du décès ?

 15   R.  Oui. Je dois dire qu'au tout début de nos analyses, nous n'avions pas

 16   de rayons X. Mais nous avons pu nous procurer un appareil en 1996 et nous

 17   avons pu nous servir de rayons X, qui nous permettent non seulement

 18   d'enregistrer les os, mais aussi tout objet métallique qui se trouve au

 19   niveau du corps, ce qui est très difficile de constater au moment de

 20   l'autopsie. Croyez-moi, il est très difficile au moment de l'autopsie de

 21   retrouver des éclats, par exemple, ou tout autre objet métallique. Et les

 22   rayons nous aidaient à identifier l'emplacement plus précis de ces objets

 23   métalliques.

 24   Ce qui est le cas surtout lorsqu'il s'agit de corps qui ont passé

 25   plusieurs années enterrés et où l'examen externe, ou l'examen des tissus

 26   mous, ne nous permet pas d'identifier facilement l'endroit où se trouvait

 27   un projectile, une balle. Donc la seule manière de procéder, d'identifier

 28   c'est ces petits fragments qui sont parfois grands que de quelques


Page 2316

  1   millimètres -- donc, la seule manière de procéder est de procéder par

  2   rayons X.

  3   Donc, à partir du moment où nous avons pu faire cela, nous avons pu

  4   conclure à la cause du décès avec plus de certitude, et c'est surtout

  5   lorsqu'il s'agissait d'éclats qui peuvent parfaitement être la cause de la

  6   mort, et c'était la seule manière d'avoir plus de certitude au moment

  7   d'apporter nos conclusions sur la cause.

  8   Q.  Donc, sur la base de ce que vous nous avez dit, si vous avez un rapport

  9   d'autopsie qui nous dit que la cause de la mort n'a pas pu être déterminée,

 10   est-ce que cela nous permet toujours d'avoir un doute ? Donc, est-ce qu'il

 11   est encore possible que cette personne ait été tuée par une arme à feu même

 12   si vous n'avez pas pu identifier avec certitude la cause du décès ?

 13   R.  Oui, justement. C'est ce que j'ai essayé d'expliquer. Dans certains

 14   cas, nous avons des blessures typiques au niveau des tissus mous, ou des os

 15   surtout quand ils sont encore présents. Mais parfois ce n'est pas une

 16   blessure typique. Vous avez des fractures multiples, de multiples blessures

 17   ou dégâts, où il n'est pas possible d'être certain sur la cause de mort,

 18   même si cela a pu être effectivement une arme à feu.

 19   M. GILLETT : [interprétation] Je vais demander à présent le document 65 ter

 20   03005, je vous demande donc de le présenter sur les écrans.

 21   Est-ce que je vois que le Juge Mindua a une question ?

 22   M. LE JUGE MINDUA : Oui, Monsieur le Procureur. Avant de passer au prochain

 23   sujet, s'il vous plaît.

 24   Oui, Monsieur le Témoin Strinovic, si j'ai bien compris, corrigez-moi si je

 25   me trompe, s'agissant du crâne, vous avez dit que plus le projectile est

 26   rapide, moins il est aisé d'établir la cause du décès; c'est bien cela ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact. Dans le cas où la vitesse du

 28   projectile provoque des fractures multiples au niveau des os du crâne. Et


Page 2317

  1   c'est quelque chose qui s'est produit très fréquemment. Donc, dans le cas

  2   où ces projectiles rapides provoquent des dégâts de sorte qu'il n'y a pas

  3   de blessures d'entrée ou de sortie mais une fracture multiple, à savoir les

  4   fragments d'os, eh bien, dans ce cas-là il est difficile de dire quelle a

  5   été la cause du décès. 

  6   M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup. Merci. Alors, est-ce le cas aussi pour

  7   des tissus mous ou bien c'est différent ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Quand un projectile rapide entre en contact

  9   des tissus mous, il va traverser certains tissus, et il faut tenir compte

 10   de la vélocité. Plus cette vélocité est grande, plus il y a des dégâts. De

 11   sorte qu'un projectile lent, quand il traverse les tissus, va passer en

 12   flèche par un canal qui correspond au diamètre du projectile. S'il s'agit

 13   d'un projectile très rapide, qui a une vélocité de plus 800 ou 1 000 mètres

 14   par seconde, eh bien, les dégâts vont être bien plus importants, les dégâts

 15   au niveau de certains tissus, et ces dégâts vont avoir la même raison que

 16   les dégâts provoqués au niveau des os. Donc l'énergique cinétique d'un 

 17   projectile rapide se transforme en énergie élastique qui provoque une

 18   espèce de grande vague au niveau des tissus et provoque donc des dégâts

 19   bien plus extensifs que la taille du projectile. Et c'est pour cela que ces

 20   projectiles rapides sont très dangereux. Parce qu'ils ne vont pas forcément

 21   blesser des organes vitaux, mais ils vont quand même être la cause du

 22   décès, parce qu'ils provoquent un choc traumatique, saignements, et la mort

 23   in fine.

 24   M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup. C'est très clair. Merci.

 25   M. GILLETT : [interprétation]

 26   Q.  Est-il exact de dire, pour résumer tout cela, qu'une blessure infligée

 27   par un projectile plus lent va provoquer une blessure d'entrée et de

 28   sortie, par exemple, au niveau du crâne, et dans ce cas, dans le cas de ce


Page 2318

  1   projectile plus lent, il sera plus facile d'affirmer la cause du décès que

  2   dans le cas où il s'agit d'un projectile rapide qui a causé de gros dégâts

  3   au niveau du crâne; est-ce exact ?

  4   R.  Oui, vous avez tout à fait raison.

  5   M. GILLETT : [interprétation] Est-il possible à présent de voir la pièce

  6   03005 sur l'écran, s'il vous plaît.

  7   Q.  Vous devez le voir sur l'écran devant vous, Docteur.

  8   Voyez-vous ce document ?

  9   R.  Oui, s'il s'agit de mon curriculum vitae, oui, c'est bien cela. C'est

 10   ce que je vois.

 11   Q.  Est-ce que ce document donne encore davantage des détails concernant

 12   votre formation, votre appartenance à différentes sociétés de

 13   professionnels et d'experts, votre expérience professionnelle ?

 14   R.  Oui, c'est bien clair. D'ailleurs, c'est moi-même qui suis l'auteur de

 15   ce curriculum vitae, et il correspond à la vérité.

 16   Q.  Eh bien, si on feuillette ce curriculum vitae, on va voir quel a été

 17   votre rôle dans le cadre des exhumations et des identifications; est-ce

 18   exact ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Est-ce que ce qui est écrit ici reflète de façon exacte la méthode que

 21   vous avez utilisée pour procéder aux exhumations et aux identifications ?

 22   R.  Oui, effectivement.

 23   M. GILLETT : [interprétation] Monsieur le Président, je vais demander que

 24   le document 65 ter 03005 soit versé au dossier en tant qu'un document

 25   public.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ce document est versé. Il va recevoir

 27   une cote.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] La cote sera P351. Merci.


Page 2319

  1   M. GILLETT : [interprétation]

  2   Q.  Maintenant je vais poser quelques questions au sujet des documents

  3   concrets concernant des victimes en l'espèce. Pour ce faire, nous avons un

  4   tableau contenant un grand nombre de documents.

  5   M. GILLETT : [interprétation] Nous avons imprimé des copies papier de ces

  6   documents pour les Juges et pour la Défense. Il s'agit de deux types de

  7   tableaux. D'un côté les tableaux qui énumèrent tous les incidents et un

  8   autre qui concerne uniquement des incidents liés à Ovcara. Avec la

  9   permission des Juges, je voudrais vous distribuer cela pour faciliter notre

 10   travail.

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Faites donc.

 12   M. GILLETT : [interprétation] Et en attendant que tout le monde reçoive les

 13   exemplaires, je voudrais vous dire que pour le bureau du Procureur il est

 14   tout à fait possible de fournir à la Défense et aux Juges des exemplaires

 15   des documents électroniques de bases de données, donc correspondants à ces

 16   tableaux. Il s'agit des documents qui font partie des documents contenant

 17   des numéros 65 ter, et donc c'est justement par le biais de ces numéros ERN

 18   et 65 ter que ces documents vont pouvoir être identifiés.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Vous dites que c'est donc un document

 20   où on peut faire des recherches, vous voulez dire que c'est une base de

 21   données Excel ?

 22   M. GILLETT : [interprétation] Oui.

 23   Q.  On va commencer par ce document plus volumineux, c'est le document des

 24   victimes qui n'ont pas été trouvées à Ovcara.

 25   Docteur Strinovic, quand vous avez préparé votre déposition pour

 26   aujourd'hui, on vous a demandé d'examiner cette liste de documents

 27   d'autopsie et d'identification; est-ce exact ?

 28   R.  Oui.


Page 2320

  1   Q.  Le tableau que vous voyez sous vos yeux, est-ce que dans ce tableau on

  2   trouve les références aux documents que vous avez examinés ?

  3   R.  Oui, je pense que oui.

  4   M. GILLETT : [interprétation] Il y a un certain nombre de documents

  5   supplémentaires dont on parle dans le tableau, on n'a pas demandé au Dr

  6   Strinovic de les examiner. Il s'agit des questionnaires concernant des

  7   personnes portées disparues. Vous pouvez voir cela dans la colonne qui

  8   énumère les documents qu'il n'a pas examinés.

  9   Q.  Si vous regardez "La cause du décès", c'est la colonne qui est la

 10   troisième colonne à partir de la droite, est-ce qu'ici on voit la cause du

 11   décès pour chaque victime dont on trouve les données dans les documents en

 12   référence ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Et quand vous avez examiné ces documents, si vous arriviez à la

 15   conclusion que le document était authentique, est-ce que vous avez entouré

 16   la case "Non" ou "Oui" dans la colonne dédiée à "l'authenticité" des

 17   documents ?

 18   R.  Oui, c'est exact.

 19   Q.  Et à chaque fois que l'on voit une écriture à la main dans ce document,

 20   elle appartient à qui cette écriture ?

 21   R.  C'est la mienne.

 22   Q.  Quand vous avez examiné tous ces documents et cette documentation, vous

 23   avez été en mesure d'authentifier ces documents en utilisant quelle

 24   méthode, sur la base de quoi, je vous pose une question générale ?

 25   R.  Eh bien, j'ai comparé cela avec les originaux des rapports d'autopsie

 26   qui se trouvent dans l'Institut de la médecine légale de Zagreb. En faisant

 27   une comparaison entre les deux documents, j'ai pu établir, oui ou non,

 28   l'authenticité de ces documents.


Page 2321

  1   Q.  Avez-vous participé à la création de certains de ces rapports, de ces

  2   documents ?

  3   R.  Si vous parlez des rapports d'autopsie, oui.

  4   Q.  Savez-vous, connaissez-vous les autres personnes qui ont fait les

  5   rapports d'autopsie et qui sont autres que vous-même dont le nom figure

  6   dans ces documents ?

  7   R.  Oui. Je les connais tous. Ce sont mes collègues.

  8   M. GILLETT : [interprétation] Monsieur le Président, nous allons parcourir

  9   certains exemples. Dans l'intérêt du temps, nous n'allons pas examiner tous

 10   les documents, je vais essayer de choisir les documents caractéristiques,

 11   emblématiques pour ainsi dire, ou qui va nous aider à élucider la méthode.

 12   Vous trouvez des lettres SS qui sont écrites parfois à côté de certains

 13   documents. Et il ne faut pas prêter d'attention à cela, c'est une

 14   annotation en interne.

 15   Q.  Si l'on examine la première page, le premier paragraphe correspond au

 16   paragraphe 24, la première liste des victimes, et ensuite on trouve les

 17   annexes. Ce sont des victimes que l'on trouve dans l'annexe à l'acte

 18   d'accusation. La première victime c'est Zoran Andjal. C'est un rapport

 19   d'autopsie.

 20   M. GILLETT : [interprétation] Et s'il est possible, je vais demander que

 21   l'on présente ce document sur l'écran, c'est le document qui comporte le

 22   numéro ERN 02027317, c'est le document 65 ter 03685. Merci.

 23   Q.  Si vous regardez le nom de la personne qui a fait ce rapport ou des

 24   personnes qui ont fait ce rapport, est-ce que vous êtes en mesure de

 25   reconnaître les noms qui figurent ?

 26   R.  C'est le Dr Mladen Marcikic. Il est le chef du département de la

 27   médecine légale d'Osijek.

 28   Q.  Est-ce que vous connaissez Boris Dumencic ?


Page 2322

  1   R.  Bien sûr. Lui aussi il a fait son stage à Zagreb, son stage de

  2   spécialisation, mais sinon il travaillait dans l'hôpital d'Osijek.

  3   Q.  La deuxième phrase dans le texte de la première page qui commence "Le

  4   23 février 1998", on peut lire à la localité LOK 1, sous le numéro 152,

  5   "une exhumation de dépouilles a été faite." A quoi correspondent ce chiffre

  6   et cette abréviation ?

  7   R.  Quand vous commencez l'exhumation à un endroit, eh bien, vous assignez

  8   donc un numéro ou un nom à cette localité, la localité numéro 1, numéro 2,

  9   et cetera, et le numéro 152 correspond au numéro du sac où on va placer les

 10   dépouilles d'une personne. Le numéro 152, eh bien, c'est le sac de la

 11   dépouille correspondant à la personne dont on a trouvé les restes ou ce

 12   mortuaire.

 13   Q.  Quelles sont les informations que l'on trouve dans ce rapport ?

 14   Pourriez-vous nous décrire cela brièvement ?

 15   R.  Eh bien, ici nous pouvons tout d'abord voir la description des

 16   vêtements et des objets trouvés. Si vous voulez, je peux les citer. Sinon,

 17   je peux vous répondre de façon générale.

 18   Q.  Ça va, vous pouvez poursuivre.

 19   R.  Ensuite, on fait l'examen du corps, donc on fait l'autopsie, et ensuite

 20   on décrit tout ce qu'on a trouvé, on commence par la tête, où on a trouvé

 21   donc des fractures multiples des os du crâne, ensuite on va parler de la

 22   mâchoire supérieure, inférieure, des autres parties du corps. Vous avez

 23   besoin d'un détail, d'un commentaire --

 24   Q.  Non, tout va bien. Et ensuite donc, où est-ce qu'on trouve la cause du

 25   décès de cette victime ?

 26   R.  Dans la conclusion, on va trouver les informations essentielles

 27   concernant la nature des blessures, et vous allez voir qu'il s'agissait

 28   d'une mort violente et c'est la cause du décès.


Page 2323

  1   Q.  Est-ce que la description des blessures que l'on trouve dans la

  2   conclusion correspond à ce que l'on trouve dans le tableau dans la colonne

  3   "cause du décès" concernant, par exemple, Zoran Andjal ?

  4   R.  Oui. Dans ce tableau que vous voyez, eh bien, on voit les blessures

  5   qui, de par leur nature, leur quantité, avec une grande probabilité, nous

  6   amènent à la conclusion d'une blessure provoquée par balle ou explosion.

  7   Q.  Dans le rapport, si on a trouvé avec la dépouille, par exemple, une

  8   carte d'identité militaire ou une arme, est-ce que ceci se trouverait aussi

  9   dans le rapport d'autopsie ?

 10   R.  Je dois dire que le médecin légiste, à partir du moment où il reçoit le

 11   corps, eh bien, il va décrire tout ce qu'il voit, y compris les armes. Si

 12   la personne n'est pas habillée, eh bien, il va dire qu'il n'y a pas de

 13   vêtements de trouvés, mais je veux vous dire que l'on décrit absolument

 14   tout ce qui appartient au corps. Il peut y avoir donc aussi la description

 15   des armes éventuellement trouvées sur le corps.

 16   Q.  A la page 1 de ce rapport, et on n'a pas forcément besoin de

 17   l'examiner, mais je peux vous dire d'ores et déjà qu'ici on dit qu'il

 18   s'agit d'une personne qui a entre 26 et 32 ans, et c'est quelque chose qui

 19   a été établi, comme on dit, dans le rapport, après avoir fait -- il

 20   faudrait le montrer sur l'écran.

 21   R.  Je ne l'ai pas trouvé sur l'écran.

 22   Q.  Excusez-moi. C'est dans l'original croate. C'est la deuxième page,

 23   troisième paragraphe du texte dans l'original en croate.

 24   R.  Oui, voilà ce que je peux vous dire. Quand on essaie d'établir les

 25   changements au niveau des os, ce qu'on va essayer d'établir, c'est de voir

 26   si sur la base de ces changements on peut établir l'âge de la personne.

 27   Vous avez plusieurs méthodes pour faire cela, pour déterminer l'âge. Par

 28   exemple, si vous examinez les côtes, donc les côtes qui vont avoir subi


Page 2324

  1   quelques modifications, il va y avoir une ossification des os au niveau de

  2   là, avec l'âge, de sorte que les côtes ne vont plus avoir le même aspect.

  3   Ces modifications, ces changements au niveau des côtes vont nous aider à

  4   établir l'âge ou déterminer l'âge de la personne.

  5   Ici, dans ce cas précis, on a pu voir qu'il s'agit d'une personne

  6   assez jeune et qui a entre 21 et 46 ans, donc c'est la phase où il n'y a

  7   pas encore eu l'ossification. Et c'est pour cela qu'il a été donc possible

  8   de donner cette tranche d'âge, d'établir que cela était la tranche de la

  9   personne trouvée. Mais ce sont des changements que l'on trouve au niveau de

 10   tous les os de l'homme et, par exemple, les côtes, là on trouve le

 11   cartilage, eh bien, il est plus facile d'établir l'âge de la personne,

 12   parce qu'on peut établir, on peut voir, apercevoir les changements au

 13   niveau de chaque os, au niveau des cartilages, au niveau de l'ossification.

 14   Q.  Et vous parlez au niveau du point suivant du test --

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que vous pouvez demander, s'il

 16   vous plaît, au témoin de quoi il s'agit lorsqu'il est question d'Iscan

 17   Yasar.

 18   M. GILLETT : [interprétation]

 19   Q.  [aucune interprétation]

 20   R.  D'après Iscan Yasar, cela veut dire qu'on se base sur des auteurs de la

 21   méthode, que ce sont eux les auteurs de la méthode qui, sur la base de

 22   l'examen de toute une série de cas, il aura été possible de procéder à une

 23   catégorisation des blessures pour établir les différentes tranches d'âge.

 24   Donc, ce sont les noms des auteurs qui sont les auteurs de la méthode en

 25   question.

 26   Q.  Donc, Suchey-Brooksukoy - excusez ma prononciation - de quoi s'agit-il

 27   ?

 28   R.  Ici, la méthode est tout à fait comparable -- ou plutôt la situation


Page 2325

  1   est tout à fait comparable à celle du point précédent. C'est sur la base de

  2   l'examen de la symphyse, la partie antérieure du bassin, donc au niveau de

  3   la symphyse pubienne, il y a un certain nombre d'altérations qui se

  4   produisent sur la base de l'âge, donc des modifications du cartilage, une

  5   ossification qui se produit avec l'âge qui avance. Donc, des altérations

  6   qui permettent de catégoriser les cas en différents groupes et par tranche

  7   d'âge. Donc, d'après ce que nous avons ici, d'après l'analyse de la

  8   symphyse pubienne, la tranche d'âge concernée est celle de 21 à 46 ans, qui

  9   constitue effectivement une fourchette assez large. On peut se baser là-

 10   dessus, mais cela ne constitue pas une méthode tout à fait précise.

 11   M. GILLETT : [interprétation] Passons au document suivant, le deuxième

 12   document pour la même victime, qui figure à l'acte d'accusation : ERN

 13   06822903, 65 ter 3686.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Gillett, je pense que le

 15   mieux serait peut-être de procéder à la première pause maintenant, même si

 16   nous avons eu 15 minutes de retard au départ. Ça nous évitera d'éviter

 17   toute confusion.

 18   Monsieur le Témoin, nous allons faire une pause de 30 minutes, et nous

 19   reviendrons à 11 heures.

 20   M. GILLETT : [interprétation] Merci.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] C'est M. l'Huissier qui va vous

 22   raccompagner.

 23   [Le témoin quitte la barre]

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est suspendue.

 25   --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

 26   --- L'audience est reprise à 11 heures 00.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Gillett, pendant que nous

 28   sommes en train d'attendre le témoin, peut-être pourrais-je vous demander


Page 2326

  1   la chose suivante -- je vais vous demander de tirer la chose au clair avec

  2   le témoin. Pages 86 et 87, la dernière des colonnes manuscrites, il y a une

  3   note manuscrite, et on dit "CD correct", quoi que cela veuille dire. Et en

  4   pages 88 et 89, il est dit "No protocol".

  5   M. GILLETT : [interprétation] Eh bien, c'est certainement sur ma liste de

  6   questions, Monsieur le Président.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

  8   [Le témoin vient à la barre]

  9   M. GILLETT : [interprétation] Est-ce que je peux continuer ?

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Allez-y.

 11   M. GILLETT : [interprétation]

 12   Q.  Bienvenue, Docteur Strinovic. Merci d'être revenu. Alors, maintenant je

 13   vais me pencher sur le deuxième des documents qui se trouvent sur la liste

 14   des victimes du tableau qui n'est pas lié à Ovcara, et il est question de

 15   Zoran Andjal. Est-ce que vous pouvez nous dire de quel type de document,

 16   celui qu'on voit sur l'écran ?

 17   R.  Il s'agit d'une attestation de décès. C'est un document qui est délivré

 18   à l'attention de la famille, et on confirme à titre définitif

 19   l'identification. Et quand on est d'accord avec l'identification, d'abord

 20   la famille signe pour dire que c'est bien la personne en question, et il y

 21   une attestation de décès. Avec cette attestation de décès, on va à la

 22   municipalité où le corps a été retrouvé pour recevoir une fiche de décès

 23   qui est un document final pour attester que la personne en question est bel

 24   et bien décédée.

 25   Q.  S'agissant de ce document, dans la case numéro 3, première page,

 26   on dit la date du décès est celle du 22 septembre 1991. Alors, sur quoi se

 27   fondent cette information et cette date ?

 28   R.  Vous comprenez certainement le fait que nous ne pouvons pas savoir la


Page 2327

  1   date exacte du décès. On obtient des renseignements. C'est la famille qui

  2   nous en fournit ou la commission principale. Et on dit quelle est la date

  3   de disparition, et c'est probablement la date la plus proche du décès.

  4   Parce que la date du décès, à titre objectif, il est difficile de la

  5   définir. Donc le renseignement qu'on voit ici, c'est une date qui est liée

  6   à la date de disparition, et c'est celle-là que l'on considère être la date

  7   du décès.

  8   Q.  Ai-je raison de dire alors que ce n'est pas toujours la date certaine

  9   et précise du décès ?

 10   R.  C'est exact. C'est ce que j'ai dit tout à l'heure. Nous ne savons pas.

 11   Nous n'avons pas été témoins du moment du décès. Nous ne pouvons qu'émettre

 12   des suppositions partant des renseignements autres, et le renseignement

 13   autre en question, c'est la date de disparition.

 14   Q.  Et qu'en est-il du lieu de décès qui se trouve être consigné ? Est-ce

 15   que ceci se base sur le même type d'information que tout à l'heure ?

 16   R.  Il en va de même, oui. Le fait est que le lieu de découverte du corps

 17   est considéré comme étant le lieu du décès. Ce n'est pas forcément le cas.

 18   Mais dans la plupart des cas, nous n'avons pas de source d'information

 19   sûre, et on prend comme lieu de décès le lieu ou l'endroit où on a retrouvé

 20   la dépouille.

 21   Q.  Alors, peut-être cela va-t-il vous paraître comme étant évident, mais

 22   si vous aviez eu un témoin des événements ou des informations concrètes

 23   concernant le lieu et l'heure du décès, ce serait repris dans le certificat

 24   de décès ?

 25   R.  Oui. Je pense que oui.

 26   Q.  Bon. J'aimerais que nous passions au troisième document pour ce qui est

 27   de cette victime, Zoran Andjal.

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Gillett, j'ai une question


Page 2328

  1   au sujet de la dernière des questions que vous avez posées et la réponse

  2   qui a été reçue.

  3   Monsieur Strinovic, vous avez dit : "Je pense que c'est ce qui serait

  4   consigné." Alors, qu'est-ce qui serait consigné, la date du décès obtenue

  5   dans l'information en question, ou alors est-ce que l'on indiquerait qu'une

  6   information existerait concernant telle et telle date ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai compris la question, mais il m'est

  8   difficile de vous répondre de façon précise. D'habitude, nous avions

  9   coutume de mettre la date de disparition comme étant la date du décès. S'il

 10   y avait plusieurs témoignages de personnes qui avaient eu vent des

 11   événements et de dates, on pouvait l'indiquer comme date de décès. Mais je

 12   ne sais pas vous répondre de façon plus précise que cela, hélas.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 14   M. GILLETT : [interprétation] J'aimerais qu'on se penche sur ce troisième

 15   document lié à la victime en question. Le numéro ERN est le 06822905. Il

 16   s'agit de la pièce 65 ter 03687. C'est un rapport d'analyse d'ADN.

 17   Q.  Vous avez déjà expliqué le processus d'identification partant de l'ADN.

 18   Je ne vais pas revenir sur le détail de vos explications, mais je remarque

 19   que dans ce rapport il est question d'un corps qui porte le numéro 152,

 20   originaire de Celije, et le même numéro que celui du premier document au-

 21   dessus.

 22   Alors, en page 1, dernière ligne du texte, il est dit dans la version

 23   anglaise que cela provient probablement de Zoran Andjal. Partant de quoi

 24   pouvez-vous tirer la conclusion qui serait celle de dire que cela provient

 25   probablement de la dépouille de Zoran Andjal ?

 26   R.  C'est une formulation habituelle s'agissant de l'ADN. On parle de

 27   99,9999 %, et statistiquement cela est considéré comme étant le plus

 28   probable. Mais de fait, cela est certain.


Page 2329

  1   Q.  Pouvons-nous nous pencher sur la page 2 de ce document, je vous prie,

  2   si tant est que page 2 il y a. C'est bon. Au tout dernier segment du texte,

  3   sous l'intitulé "Opinion", est-ce qu'on peut retrouver le pourcentage que

  4   vous venez de nous donner à l'instant ?

  5   R.  Comme on peut le voir, vers la fin de cette opinion, on indique le

  6   pourcentage de 99 et trois 9 après la virgule, disant que c'est la

  7   probabilité avec laquelle il s'agit de cette personne-là. Donc c'est,

  8   statistiquement parlant, le pourcentage de certitude que l'on a. C'est

  9   pratiquement certain.

 10   Q.  Où peut-on trouver des échantillons de pris sur des personnes qu'on a

 11   comparés avec les dépouilles pour déterminer l'identité de la personne dont

 12   il est question ?

 13   R.  Dans ce cas concret, si c'est cela votre question, le sang a été donné

 14   par la mère et par le père. Donc il y a la paternité et la maternité qui

 15   sont déterminés, et c'est donc les parents de la personne qui est

 16   recherchée qui fournissent ces données-là.

 17   Q.  Je vous ai vu pointer du doigt l'écran. Est-ce que vous êtes en train

 18   de montrer l'intitulé "Findings", c'est-à-dire "Constatations" ?

 19   R.  Oui, j'ai donné lecture du pourcentage. Mais dans les constats, il y a

 20   les éléments de liés aux membres de la famille, et ici il s'agit du père et

 21   de la mère.

 22   Q.  Bien. Merci. Je vais à présent me pencher sur une entrée qui est liée à

 23   une victime répondant au nom d'Ivan Zelember. Il s'agit de la page 5 de ce

 24   tableau.

 25   M. GILLETT : [interprétation] Le document que j'aimerais qu'on nous montre

 26   sur notre écran est celui qui porte la référence 65 ter 03709. C'est le

 27   premier des documents de la liste, et il est question d'un rapport

 28   d'autopsie pour cette victime qui se trouve en page 5.


Page 2330

  1   Q.  Alors, en attendant l'affichage de ce document, je fais remarquer qu'en

  2   page 3, sous l'intitulé "Conclusions", il est fait référence à une fracture

  3   du côté droit de l'os des ossements du visage, et il s'agit notamment de la

  4   partie supérieure de la mâchoire et de la partie gauche du bras. Je vous

  5   renvoie au document qui se trouve à la page 3 de la version anglaise.

  6   Alors, ces différentes fractures, les trouvez-vous sur le document

  7   qui est affiché à l'écran ? Je pense que c'est repris par le tableau aussi,

  8   mais est-ce que vous voyez le document sur l'écran ?

  9   R.  Oui, je le vois, ce document.

 10   Q.  Est-ce que ces blessures ont pu être portés ou subis du fait d'un

 11   simple accident, du fait d'une chute, par exemple, ou d'une chose analogue

 12   ?

 13   R.  Ce type de blessures telles que décrites, compte tenu de l'emplacement

 14   et de la répartition des fractures, cela reflète des coups et non pas une

 15   chute. Parce que quand il y a chute, les blessures sont portées autrement.

 16   Il y a des blessures qui sont typiques pour ce qui est de coups portés par

 17   un objet contendant ou alors porté par un poing, un coup de poing.

 18   Q.  Qu'en est-il de l'emplacement ou de la juxtaposition de ces blessures

 19   partant de quoi il peut être dit qu'il s'agit de blessures typiques pour ce

 20   qui est de traumatismes dus à des coups et non pas à une chute ?

 21   R.  D'abord, il y a deux blessures portées à la mâchoire supérieure, et on

 22   voit aussi l'os maxillaire qui a subi des coups. Donc quand il y a chute,

 23   il y a un endroit qui est typique pour ce qui est des chutes. Mais pour ce

 24   qui est des coups, on peut s'attendre à des blessures de ce type-ci. Donc

 25   il faudrait que la chute soit vraiment très grande pour qu'on ait ce type

 26   de blessure-ci. La répartition des blessures telle que présentée ici, c'est

 27   typique pour des coups. Pour ce qui est de l'omoplate, ça, c'est des

 28   blessures qui sont certainement dues à une chute vers l'avant suite à un


Page 2331

  1   coup subi. Donc on peut subir une blessure à la mâchoire inférieure, mais

  2   pas à l'omoplate. Donc il est très rare que l'omoplate soit blessé ou

  3   fracturé de façon autre si ce n'est par des coups que la personne en

  4   question a reçus.

  5   Q.  Est-ce que je peux maintenant me tourner ou vous demander de vous

  6   pencher sur la page 25 du tableau. Il s'agit d'une entrée qui se rapporte à

  7   Pero Rasic. Non, ce n'est pas la page 25, excusez-moi, c'est la page 14 du

  8   tableau. Alors Pero Rasic est l'une des victimes qui se trouve être listées

  9   au paragraphe 25 de l'acte d'accusation.

 10   La première des choses concernant cette victime, c'est qu'à l'acte

 11   d'accusation on parle de Petar Rasic, alors ici on dit, Pero Rasic. Comment

 12   cela s'est-il passé ou produit de votre avis ?

 13   R.  Ce que je peux vous dire c'est que Petar et Pero c'est le même nom,

 14   même prénom. On peut l'interpréter ou le prononcer de deux façons, il se

 15   peut qu'il y ait eu une erreur pour ce qui est de l'inscription Pero ou

 16   Petar, mais de fait, c'est le même prénom.

 17   Q.  Pour ce qui est de cette victime-ci, nous avons un rapport d'autopsie

 18   qui a été compilé en 2002 en Croatie, et nous avons en pièce jointe un

 19   rapport d'autopsie préalable qui date du 16 octobre 1991. Alors, comment se

 20   fait-il qu'il y ait eu deux rapports d'autopsiée de rédigés, enfin avec 20

 21   ans d'écart dans deux pays différents ?

 22   R.  Oui, ce n'est pas le seul cas de figure où nous avons eu ce genre

 23   d'exemple. Il s'agit d'une situation où un corps a été retrouvé en bord du

 24   Danube, aux rives du Danube à proximité de Novi Sad. Ce corps, une fois

 25   retrouvé, a été transféré vers l'établissement de Novi Sad qui a fait

 26   l'autopsie et a établi un protocole en 1991. Ensuite, la personne comme

 27   inconnu a été enterré au cimetière, et par la suite on a identifié cette

 28   personne en prenant des restes de cette dépouille, et on a envoyé cela en


Page 2332

  1   Croatie pour des analyses ADN, et la personne en question a été identifiée

  2   20 ans plus tard.

  3   Q.  Pour ce qui est du rapport d'autopsie effectué ou compilé par Novi Sad,

  4   et on peut le voir en page 14 du 65 ter 3755, peut-être serait-il

  5   préférable de nous le montrer sur notre écran. Je vais reprendre ce qui est

  6   dit. Pour ce qui est de ce rapport d'autopsie de 1991, on dit qu'il y a un

  7   tatouage sur le bras de la personne en question qui présente un oiseau en

  8   plein vol, à ce bras gauche, et avec une date qui porte enfin qui est la

  9   date du 13 janvier 1986 [comme interprété], avec une inscription JNA. Puis

 10   on a trouvé un métal jaune, et une bague, et on le montre à la page 14.

 11   Alors est-ce que ceux-ci sont des éléments qui peuvent aider à identifier

 12   la victime ?

 13   R.  Bien sûr que ces renseignements tel qu'énoncés, et cela s'est fait peu

 14   de temps après la découverte du corps et on a pu identifier ces détails tel

 15   que le tatouage, et ça peut grandement aider à identifier la personne en

 16   question, en effet. 

 17   Q.  Est-ce que ce type de renseignements peuvent nous aider, si ce type de

 18   renseignements peuvent nous aider à identifier, pourquoi les rapports

 19   précédemment compilés et provenant de Serbie n'ont pas été communiqués ou

 20   divulgués auparavant ?

 21   R.  Eh bien, je peux difficilement répondre à ceci. C'est une personne

 22   qu'on a retrouvée sur les rives du Danube. On a pu supposer d'où la

 23   personne venait, mais il a fallu que beaucoup de temps se passe pour qu'on

 24   ait ce type d'échange d'information afin que nous puissions enfin traiter

 25   des cas de figure de ce genre. Il y a des circonstances politiques et

 26   autres qui découlent d'éléments inconnus qui ont fait que la chose a duré

 27   aussi longtemps.

 28   Q.  Je vais vous demander de nous apporter des éclaircissements au sujet


Page 2333

  1   des "circonstances politiques". Je comprends parfaitement qu'il y a toute

  2   une série d'éléments différents, mais est-ce que vous pouvez nous dire ce

  3   que vous sous-entendiez par là ?

  4   R.  Mais je voulais dire qu'il n'y avait pas de bonne volonté de façon

  5   évidente pour ce qui est de procéder à ce type d'échange d'information pour

  6   déterminer les raisons ou les causes du décès et l'identité de personnes

  7   qui ont été retrouvées comme cela.

  8   Q.  Bien. Je me propose de revenir plus tard vers ce sujet, lorsque nous

  9   saurons à parler des cas de figure liés à Ovcara. Maintenant, je voudrais

 10   que nous nous penchions sur la page 34, liée à un dénommé Josip --

 11   L'INTERPRÈTE : Le nom n'a pas été bien compris et bien entendu par le

 12   témoin.

 13   M. GILLETT : [interprétation]

 14   -- je vous renvoie vers le document 65 ter 03856, page 2.

 15   Alors page 2 du document, cause du décès, d'abord il y a un terme en latin

 16   qui parle de vulnus sclopetaria capitis, si j'ai bien lu l'énoncé du

 17   constat. Et on dit que la cause du décès est due à la guerre. Alors est-ce

 18   que vous pouvez nous dire ce que signifie cette dénomination latine ? Et

 19   pourquoi dit-on cause du décès situation de guerre ?

 20   R.  Alors ça c'est vulnus capitis, c'est une blessure à la tête par balle.

 21   Alors la cause c'est la guerre, ce formulaire est rempli par un employé

 22   administratif à l'établissement et à l'institut, donc des fois on mettait

 23   causes du décès qui ne sont pas une dénomination latine comme ici. Mais on

 24   dit cause du décès victime de la guerre. C'est tout ce que je peux vous

 25   dire à ce sujet.

 26   Q.  Je crois que si nous passions vers la page 2 de la version anglaise, on

 27   pourra voir le descriptif qui nous montre des endroits où la guerre est

 28   citée comme étant la cause du décès.


Page 2334

  1   Alors, excusez-moi. Oui, voilà, ça figure là, sous les raisons du décès

  2   mort violente et on dit guerre. C'est ce qui est indiqué en version

  3   anglaise à la page 2.

  4   Alors, mis à part ces divergences du point de vue des noms ou des prénoms

  5   qu'on a pu constater à l'étude des tableaux, il y a des divergences pour ce

  6   qui est des dates de naissance qui sont indiquées à l'acte d'accusation ou

  7   qui sont indiquées dans les différents documents. Alors, comment se peut-il

  8   qu'il y ait eu des dates différentes de naissance s'agissant des mêmes

  9   personnes ?

 10   R.  Eh bien, ça dépend de façon évidente de la source des informations. Ces

 11   informations liées aux dates quelles qu'elles soient, on les obtient de la

 12   part de quelqu'un, ça peut être la famille, ça peut être l'épouse, la

 13   femme, la mère. Et en tout état de cause, nous avons dû obtenir ces

 14   informations de la part de quelqu'un. On ne les a pas inventées. Ces

 15   renseignements proviennent de quelqu'un, et il se peut qu'il y ait des

 16   divergences, qu'il convient d'attribuer à la source même de l'information

 17   en question.

 18   Q.  Pour les besoins du compte rendu d'audience, je dirais qu'il y a un

 19   exemple de ce type qui se rapporte à Ivan Palijan, page 20 du rapport. A

 20   l'acte d'accusation il est dit qu'il est né en 1956, alors que le Dr

 21   Strinovic a indiqué dans son tableau que la date de naissance est celle de

 22   1949. Ça se trouve en page 27 du tableau.

 23   Alors, si à présent nous passons à la page 85 du tableau, qui se trouve

 24   donc vers la fin du tableau en question, et on voit Helena Albert on voit

 25   dans le protocole "missing", et on dit que les documents sur le CD semblent

 26   être les bons. Alors qu'est-ce que cela veut dire au juste ?

 27   R.  Excusez-moi. Je n'ai pas très bien pu vous suivre. Répétons une fois de

 28   plus. Vous avez dit page 85, n'est-ce pas ?


Page 2335

  1   Q.  85. Excusez-moi d'avoir été vite. Dernière colonne, "commentaires

  2   additionnels", on a rajouté à la main "le protocole est manquant. Et les

  3   documents sur le CD semblent être les bons." Alors est-ce que vous pourriez

  4   expliquer qu'est-ce que ça veut dire ? Je vous parle de la première des

  5   entrées sur cette page, la victime étant Helena Albert.

  6   R.  Albert Helena. Eh bien, cela veut dire que nous n'avons pas le

  7   protocole lié à l'autopsie. Il n'a pas été accessible lors de la rédaction

  8   de ce rapport. Et ce que nous avons obtenu de votre part sur le CD, nous

  9   semble être un constat correct.

 10   Q.  Quand vous dites "constat correct", est-ce que cela veut dire que vous

 11   vous êtes penché sur la documentation qu se trouve sur le disque concernant

 12   cette victime qui s'appelle Helena Albert ?

 13   R.  Oui. C'est exactement ce que cela veut dire.

 14   Q.  Je fais remarquer qu'il y a plusieurs annotations à la main similaires

 15   en page 86 pour ce qui est de Viktorija Albert et en page 87 pour ce qui

 16   est d'Ana Terzic. Les Juges de la Chambre ont constaté deux cas de figure

 17   où dans les commentaires additionnels il est dit pas de protocole, et pour

 18   ce qui est de la colonne authentifiant les documents, le Dr Strinovic a dit

 19   non pour ce qui est de ces documents. Alors, je vais en parler de façon

 20   distincte une fois qu'on en aura terminé avec le tableau, si cela arrange

 21   les Juges de la Chambre. Merci.

 22   Alors, une fois que vous avez étudié les documents additionnels, est-ce que

 23   vous êtes à même de confirmer l'authenticité des documents lorsque vous

 24   avez mis un "oui" à côté de la rubrique d'authenticité du document ?

 25   R.  Oui, c'est ce que je peux vous dire.

 26   Q.  Bien. Est-ce que vous pouvez confirmer d'avoir signé chacune des pages

 27   de ce tableau en bas de page ?

 28   R.  Oui, je crois bien que oui.


Page 2336

  1   M. GILLETT : [interprétation] Messieurs les Juges, en cette phase-ci nous

  2   demanderions le versement au dossier de ce tableau et des documents

  3   connexes. Nous réalisons parfaitement bien le fait qu'il s'agit de

  4   documents volumineux. Et il y a des documents logistiques qui vont peut-

  5   être donner lieu à des objections.

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien, s'il n'y a pas. Monsieur

  7   Zivanovic.

  8   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je voudrais

  9   faire objection quant au versement au dossier de ce document, et notamment

 10   pour ce qui est de ce "questionnaire croate lié aux personnes disparues"

 11   s'agissant de Kusic, Darko. Page 3 du tableau. En particulier, il s'agit de

 12   la page 3 du document, et c'est le paragraphe 8G, et ceci se trouve aussi

 13   aux pages 13 et 14 où l'on indique que la personne qui a rapporté le décès

 14   de cette personne qui se trouve avoir incriminé l'accusé. Donc c'est une

 15   espèce de déclaration ici, et cela pourrait être versé au dossier

 16   uniquement en application de l'article 92 ter du Règlement.

 17   M. GILLETT : [interprétation] Est-ce que je peux --

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] De quel document parlez-vous ?

 19   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Page 3.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Quel nom ?

 21   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Kusic Darko.

 22   M. GILLETT : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais tirer les

 23   choses au clair.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui.

 25   M. GILLETT : [interprétation] Je crois que mon éminent confrère a parlé du

 26   questionnaire, nous n'avons pas demandé à ce que soit versé au dossier les

 27   documents qui ne portent aucune annotation pour ce qui est de

 28   l'authenticité des documents. Or, ceci est un document que nous considérons


Page 2337

  1   être de cela. Nous n'avons donc pas demandé à ce que ceci soit versé au

  2   dossier.

  3   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Fort bien, je comprends, ainsi les

  4   documents qui comportent des blancs dans la colonne qui porte sur

  5   "l'authenticité du document" ne sont pas proposés au versement.

  6   M. GILLETT : [interprétation] Oui, c'est exact.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que cela répond à votre souci

  8   ?

  9   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, tout à fait. Je retire mon objection.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. Le tableau ainsi que les

 11   documents à l'appui sont versés au dossier et reçoivent une cote. Nous

 12   allons demander à M. le Greffier d'affecter les cotes de la manière la plus

 13   appropriée.

 14   M. GILLETT : [interprétation] Oui, ce serait la meilleure façon de

 15   procéder. La procédure en application de l'article 92 ter où nous avons un

 16   grand nombre de documents connexes, mais bien sûr, je m'en remettrais à

 17   vous.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. Continuez.

 19   M. GILLETT : [interprétation]

 20   Q.  Prenons maintenant les entrées qui correspondent à ce à quoi a fait

 21   référence le Président lorsqu'il est question de "No protocol" ou l'absence

 22   de protocole. Page 88 du tableau pour le premier, Stevan Nad. Et l'avant-

 23   dernière case de la dernière colonne, "Commentaires supplémentaires".

 24   Vous avez expliqué ce que vous pensiez dans d'autres cas où il a été

 25   renseigné la mention "absence de protocole". Donc vous disiez que vous

 26   n'aviez pas dans l'institution.

 27   M. GILLETT : [interprétation] Alors, maintenant, prenons le document 04181

 28   de la liste 65 ter. Son numéro ERN est 02008482.


Page 2338

  1   Q.  Alors, premièrement, reconnaissez-vous l'une des personnes qui aurait

  2   pris part à cette autopsie ?

  3   R.  Oui, Dr Marcikic d'Osijek. Nous en avons déjà parlé.

  4   Q.  Et si vous voulez bien jeter un coup d'œil sur la dernière page, je

  5   pense que c'est la page 2, essayons de voir ce qu'il en est du cachet et de

  6   la signature. Une page de plus, s'il vous plaît.

  7   Reconnaissez-vous la signature et le cachet qui figurent ici comme

  8   étant ceux du Dr Marcikic ?

  9   R.  Oui, je peux confirmer cela.

 10   Q.  Vous avez eu l'occasion de relire ce document pendant le récolement.

 11   Est-ce que ce document semble être un document authentique d'autopsie ?

 12   R.  Oui. Ce sont des protocoles habituels qui étaient rédigés par le Dr

 13   Marcikic, donc ma réponse est affirmative.

 14   Q.  Essayons de passer à la dernière page du tableau, page 89. Pour la

 15   première victime, Vlahovic, là encore, de nouveau, nous voyons qu'il a été

 16   renseigné "Absence de protocole".

 17   M. GILLETT : [interprétation] 65 ter, s'il vous plaît, 04183. Document ERN

 18   02008479.

 19   Q.  Là aussi, c'est un rapport d'autopsie qui aurait été établi par le Dr

 20   Mladen Marcikic, comme cela est écrit ici. Essayons de voir ce qui en est

 21   de la signature en dernière page du document.

 22   Reconnaissez-vous sa signature ou son cachet ou les deux sur ce document ?

 23   R.  Oui, de même que dans le cas précédent.

 24   Q.  Quand vous avez examiné ce document pendant le récolement, y avait-il

 25   quoi que ce soit qui vous aurait permis de penser que ce document ne

 26   constituait pas un rapport d'autopsie authentique ?

 27   R.  Non. Là encore, c'est un de ses rapports habituels, dirais-je, du Dr

 28   Marcikic.


Page 2339

  1   Q.  Revenons à la première page de ce document, du rapport d'autopsie.

  2   Plusieurs dommages sont décrits au niveau du crâne, un orifice d'entrée dû

  3   à la balle au niveau occipital et un orifice de sortie au niveau de la

  4   région temporale. Première page de la version anglaise. C'est au milieu de

  5   la page, au paragraphe qui commence par le mot "Tête".

  6   Nous avons un orifice d'entrée qui semble être dû à une balle au

  7   niveau occipital, et au niveau de la tempe, l'orifice de sortie. Comment

  8   est-ce que celui qui examine a pu distinguer entre les deux, l'orifice

  9   d'entrée et l'orifice de sortie ?

 10   R.  J'avais déjà expliqué cela précédemment au niveau du crâne. En

 11   pratique, s'il s'agit d'un projectile habituel, nous pouvons constater les

 12   orifices d'entrée et de sortie de manière exacte en fonction de l'aspect de

 13   la fracture au niveau de l'os. Donc l'orifice d'entrée externe sera moindre

 14   que l'orifice d'entrée à l'intérieur, qui sera plus grand, et à l'inverse,

 15   pour l'orifice de sortie. Donc il nous est possible dans ce type de

 16   situation, lorsque nous avons une balle qui traverse le crâne, c'est avec

 17   certitude que nous pouvons savoir par où le projectile est entré et par où

 18   il est sorti.

 19   Q.  Si je ne me trompe pas, lorsqu'il s'agit d'orifice d'entrée au niveau

 20   occipital, c'est à l'arrière du crâne. Et puis, au niveau de la tempe,

 21   c'est devant. Donc, qu'est-ce que cela nous dirait par rapport à la manière

 22   cette victime ainsi que d'autres victimes présentant des blessures

 23   comparables sont décédées ?

 24   R.  On peut analyser cela de deux manières. Lorsque nous avons cet orifice

 25   d'entrée à l'arrière, et lorsque ces deux côtés et sur la partie antérieure

 26   que nous avons l'orifice de sortie, cela nous permet d'identifier la

 27   position de la tête au moment où la balle a été tirée. Donc la tête a été

 28   présentée par l'arrière vers le canon de l'arme. Ça, c'est une première


Page 2340

  1   partie de l'analyse. Une deuxième partie de l'analyse, c'est le type de

  2   situation que l'on constate au moment des exécutions, par exemple, où l'on

  3   a exécuté par une balle dans la tête, où la tête a pu présenter ce

  4   positionnement. Donc la personne a pu présenter l'arrière de sa tête à la

  5   position d'où le tir est parti.

  6   M. GILLETT : [interprétation] Nous demandons que ces deux documents soient

  7   versés au dossier, les 04181 et 04183.

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Versés au dossier et la cote sera

  9   attribuée à ces documents.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ils recevront respectivement les cotes

 11   P352 et P353.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Gillett, s'il vous plaît,

 13   juste pour bien comprendre le tableau ainsi que la déposition de M.

 14   Strinovic. Ici, pour cette entrée spécifique, est-ce que cela signifie

 15   qu'il change son "non" de la colonne "Authenticité du document" pour Anda

 16   Vlahovic et le remplace par un "oui" ?

 17   M. GILLETT : [interprétation]

 18   Q.  Docteur Strinovic, maintenant que vous avez pu examiner ces documents,

 19   commençant par Anda Vlahovic, est-ce que vous répondriez par un oui pour ce

 20   qui est de l'"Authenticité du document", pour répondre à la question qui

 21   vous est posée par M. le Président ?

 22   R.  Bien entendu. Lorsque j'ai un document sous les yeux, je peux dire,

 23   Oui, je l'ai. Et quand je n'en ai pas, je n'en ai pas. Donc, au moment où

 24   j'ai rédigé ce rapport, je n'avais pas ce document en main. Et c'est la

 25   raison pour laquelle j'ai répondu par la négative. Maintenant la situation

 26   est différente. Je vois qu'il s'agit bien d'un document authentique,

 27   document provenant du Dr Marcikic, et maintenant je répondrais par un oui.

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.


Page 2341

  1   M. GILLETT : [interprétation]

  2   Q.  Et pour que ce soit tout à fait précis, est-ce que vous diriez que

  3   c'est la même chose que pour le document qui concernait Stevan Nad ?

  4   R.  Oui, tout à fait. Ce serait exactement la même situation.

  5   M. GILLETT : [interprétation] Alors, prenons maintenant le document 05850

  6   de la liste 65 ter. Et nous allons arrêter d'examiner le tableau à l'écran.

  7   Prenons la page 5 en anglais du document 05850. Alors je m'explique, ce

  8   document comprend une réponse émanant des autorités croates suite à notre

  9   demande d'entraide, mais la partie qui nous intéresse, qui est pertinente

 10   en l'occurrence, constitue une liste qui a été dressée avec une série de

 11   noms et des informations qui commence en page 5 en anglais. Et je vois que

 12   cela s'affiche à l'écran en B/C/S.

 13   Q.  Alors, Zoran Andjal est le premier nom qui figure ici, au point 1, nous

 14   en avons déjà parlé. Alors, si l'on examine ce qui a été renseigné pour

 15   Zoran Andjal, quels sont les éléments qui ont été renseignés ?

 16   R.  Excusez-moi. Les caractères sont si petits que je n'arrive pas à lire.

 17   Est-ce que vous pouvez agrandir, s'il vous plaît ? Il me serait utile de

 18   voir un peu mieux. Merci.

 19   Q.  Merci.

 20   R.  Donc vous me demandez de préciser ce qui figure ici dans ce tableau

 21   correspondant au nom de Zoran Andjal ?

 22   Q.  Plus précisément dans la colonne qui comporte les "Remarques".

 23   R.  Cela commence par fosse commune, le nom de celle-ci, Celije, et ensuite

 24   la date de l'exhumation, celle du 23 février 1998. Ensuite, l'individu a

 25   été placé dans la housse mortuaire 152 et a été identifié le 3 novembre

 26   2000.

 27   Q.  Plus loin, au niveau 12, pour Ernest Baca, dans la colonne des

 28   remarques il a été dit : "Il a été repris en République de Serbie." Qu'est-


Page 2342

  1   ce que cela signifie ?

  2   R.  Cela veut dire qu'à partir du moment où les échanges ont pu être

  3   conduits, où nous avons pu nous saisir des corps qui ont été exhumés en

  4   Serbie, à Novi Sad, nous avons pu donc réceptionner ces corps. Dans son

  5   cas, cela a eu lieu le 21 mars 2002, et il a été identifié le 12 février

  6   2003.

  7   Q.  Est-ce que je peux juste vérifier les dates. Donc c'est pour l'entrée

  8   au point 12, le corps qui a été réceptionné --

  9   R.  2002.

 10   Q.  Ai-je raison de dire qu'il a été réceptionné de Serbie le 21 mars 2002

 11   et qu'il a été identifié le 12 février 2003 ?

 12   R.  Oui, oui, tout à fait, c'est exact. C'est exactement ce qui est écrit

 13   ici.

 14   Q.  Est-ce que ce document nous fournit des éléments d'information

 15   comparables pour les victimes qui ont été exhumées dans différentes fosses

 16   communes ?

 17   R.  Oui.

 18   M. GILLETT : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge, nous

 19   en demandons le versement.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Avant de faire cela, un

 21   éclaircissement sur la colonne précédente. Où il est écrit ID, je suppose

 22   que cela signifie identifié, mais nous avons aussi le NES, ainsi que le NP,

 23   alors à quoi correspondent ces abréviations ?

 24   M. GILLETT : [interprétation] Oui, je vous comprends. Nous avons une

 25   légende en dernière page.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui. Très bien.

 27   M. GILLETT : [interprétation] J'en demande donc le versement.

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Versé au dossier et la cote sera


Page 2343

  1   attribuée.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] La cote attribuée sera celle de P354.

  3   Merci.

  4   M. GILLETT : [interprétation] J'en demande le versement sous pli scellé,

  5   parce que cela comporte une composante de demande d'entraide.

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Versé sous pli scellé.

  7   M. GILLETT : [interprétation] A quel moment est-ce qu'on prendre la pause

  8   suivante ?

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] A 12 heures 15.

 10   M. GILLETT : [interprétation] Je demande l'affichage à l'écran du document

 11   06365. Ça a été un des documents qui ont été ajoutés à la liste 65 ter

 12   aujourd'hui au début de l'audience, ainsi que les trois autres documents

 13   que je vais examiner.

 14   Q.  Première page de ce document -- et il s'agit du rapport 858/91

 15   correspondant à une personne non identifiée. J'aimerais savoir qui est à

 16   l'origine de ce rapport ou de ce protocole d'autopsie ?

 17   R.  De toute évidence, c'est un protocole qui a été rédigé en 1991. Vu la

 18   manière dont il a été rédigé, je suppose qu'il a été rédigé en Serbie. Plus

 19   précisément, je ne saurais pas vous dire. Peut-être qu'à la lecture du

 20   document on pourrait voir où on a procédé à l'autopsie. Mais de toutes les

 21   manières, ce corps semble avoir été autopsié en 1991. Comme le corps a été

 22   trouvé dans le Danube près de Novi Sad, je suppose que l'autopsie a été

 23   faite à Novi Sad.

 24   Q.  Avez-vous vu d'autres documents comparables, semblables à celui-ci ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Sous l'intitulé "Autopsie" en page 2 du document, nous voyons dans les

 27   conclusions que cette personne a reçu un coup de feu dans la tête, une

 28   balle dans la tête, mais qu'elle était encore en vie lorsqu'elle s'est


Page 2344

  1   retrouvée dans le fleuve Danube. Alors, comment est-ce que celui qui a

  2   procédé à l'examen a pu savoir que la personne était encore en vie à ce

  3   moment-là ?

  4   R.  Au moment de la blessure, même si c'est une blessure au niveau de la

  5   tête, la mort n'est pas nécessairement imminente. Elle peut se produire

  6   quelques heures après le moment de blessure. Si le corps est encore en vie,

  7   la personne respire au moment où elle se retrouve immergée dans l'eau, donc

  8   elle va aspirer de l'eau, ce qui va nous permettre d'établir la cause de

  9   mort. Si l'œdème spongieux du poumon est intervenu, nous allons pouvoir

 10   savoir donc si l'eau a atteint le poumon, et donc cela nous permettra de

 11   comprendre le cas. Donc, ici cette personne a pu être blessée à la tête, il

 12   y a eu contact avec l'eau et cette personne s'est en fait noyée. C'est par

 13   noyade qu'est intervenue la mort.

 14   M. GILLETT : [aucune interprétation]

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] C'est versé au dossier et nous allons

 16   recevoir une cote.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira du numéro P355.

 18   M. GILLETT : [interprétation] Maintenant je vais vous demander de nous

 19   montrer le document 65 ter 06366.

 20   Q.  Donc, ici nous voyons une analyse de l'ADN. Je vais vous demander

 21   d'examiner le document et de nous dire qui l'a faite.

 22   R.  Cette analyse a été faite dans l'hôpital d'Osijek. Elle a été effectuée

 23   par un médecin qui est encore au jour d'aujourd'hui chargé d'effectuer de

 24   telles analyses ADN.

 25   Q.  Dans le document précédent, nous avons vu un numéro tout en haut du

 26   document, 858/91. Il s'agissait d'une personne non identifiée. Comment est-

 27   il possible de faire un lien entre ce rapport de l'analyse ADN avec le

 28   rapport que nous venons de voir, un rapport d'autopsie ?


Page 2345

  1   R.  Eh bien, vous pouvez établir un lien avec les numéros de Novi Sad.

  2   C'est le numéro 858/91. C'est le numéro qui a été utilisé à Novi Sad.

  3   C'était donc le numéro utilisé dans les rapports d'autopsie, et de l'autre

  4   côté, ici, vous avez le numéro qui se trouve sur la housse, et ces numéros

  5   correspondent. Ceci vous montre un lien manifeste entre les deux cas.

  6   M. GILLETT : [interprétation] Monsieur le Président, je vais demander que

  7   ce document soit versé au dossier.

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Il va être versé et il va recevoir

  9   une cote.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cette cote va être le numéro P356.

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 12   M. GILLETT : [interprétation] Maintenant je vous demanderais de nous

 13   montrer le document 06367.

 14   Q.  Pourriez-vous nous dire de quoi il s'agit, quel est ce document ?

 15   R.  Pourriez-vous agrandir ce document ? Merci.

 16   Il s'agit d'un certificat de décès. On en a parlé tout à l'heure.

 17   C'est un document officiel que la famille reçoit à partir du moment où on a

 18   identifié une personne. Dans ce cas, il s'agit d'un certificat de décès

 19   concernant Ivan Tomicic. On voit donc où il est mort, il est mort dans la

 20   municipalité d'Erdut. Est-ce qu'il vous intéresse quoi que ce soit d'autre

 21   ?

 22   Q.  Non, ça va.

 23   M. GILLETT : [interprétation] Et je vais demander que ce document soit

 24   versé au dossier.

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Il va être versé.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document va recevoir la cote P357.

 27   M. GILLETT : [interprétation] Est-il possible de montrer le document 06368

 28   à présent.


Page 2346

  1   Q.  Vous avez pu examiner ce document pendant la session de récolement.

  2   Pourriez-vous nous dire de quoi il s'agit ? Si vous avez besoin de voir une

  3   image plus grande, dites-le-nous.

  4   R.  Oui, je me souviens de ce cas. On en a parlé, effectivement. Dans le

  5   cas où nous avons une personne portée disparue, si on n'a pas réussi à

  6   identifier cette personne dans une période donnée alors qu'il existe des

  7   preuves fiables que cette personne est morte, si nous avons des témoins qui

  8   peuvent en témoigner, eh bien, au niveau du tribunal de la municipalité de

  9   la résidence de cette personne, on va donc prendre une décision déclarant

 10   une personne morte. Vu que les recherches n'ont pas donné de résultats

 11   alors que l'on dispose des indices fiables de preuve de la mort de la

 12   personne, il se peut que la famille possède la décision confirmant la mort

 13   de la personne et qu'entre-temps nous retrouvions le corps de la personne,

 14   nous l'identifiions. Dans ce cas-là, on entame une autre procédure pour

 15   obtenir le certificat de décès, un document qui a la valeur équivalente à

 16   celui que l'on voit sur l'écran.

 17   Q.  Cette décision, d'après ce que vous avez pu voir, est-ce une décision

 18   authentique ? Et qui est la victime en question ?

 19   R.  Dans la mesure où j'y vois les armoiries croates, un cachet, on voit

 20   qu'il s'agit du tribunal municipalité de Beli Manastir. Eh bien, sur la

 21   base de ces informations, je me dis que ça doit être un document

 22   authentique. Et cette décision concerne la personne portée disparue Tibor

 23   Siles, né le 23 mai 1963 à Osijek.

 24   M. GILLETT : [interprétation] Je vais demander que ce document soit versé

 25   au dossier.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Il va être versé. Je demande une

 27   cote.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira du document P358.


Page 2347

  1   M. GILLETT : [interprétation] Monsieur le Président, maintenant je vais

  2   parler de l'incident Ovcara, qui se trouve au paragraphe 32 de l'acte

  3   d'accusation. Donc, là nous allons examiner le tableau moins volumineux.

  4   Cet incident est couvert par toute une série de faits qui ont fait l'objet

  5   d'un accord entre les parties qui vont entre les numéros 103 et 110, et on

  6   peut dire, pour résumer cet accord, que les 194 victimes dont les noms se

  7   trouvent en annexe de l'acte d'accusation concernant le paragraphe 32 ont

  8   été tuées à Ovcara, qu'ils ont été détenus au moment de leur mort et qu'ils

  9   ont été enterrés dans des fosses communes à Ovcara, la fosse qui a été

 10   protégée par le personnel de l'ONU, et que les exhumations et les autopsies

 11   ont été menées à bien par les experts domestiques et internationaux, les

 12   représentants des autorités croates et yougoslaves ayant été présents.

 13   Q.  Donc pourriez-vous nous dire comment avez-vous participé à ces

 14   exhumations et à ces analyses ?

 15   R.  Eh bien, je vais vous dire en préambule que depuis le début j'ai été

 16   impliqué dans ces exhumations, dans l'enquête, la recherche de corps des

 17   personnes tuées à Ovcara. Au moins de décembre 1991, on m'a proposé de

 18   faire partie d'une commission pour les personnes détenues et portées

 19   disparues. C'est une commission qui venait d'être créée à l'époque. Il

 20   s'agissait de retrouver les personnes portées disparues en Croatie, mais

 21   pour la plupart, il s'agissait des personnes portées disparues de l'hôpital

 22   de Vukovar. Il s'agit d'un événement qui est survenu entre le 19 et le 20

 23   décembre 1991, et depuis on a essayé de retrouver ces gens, de connaître

 24   leur sort. Déjà en 1992, il y a eu des négociations entre les Croates et

 25   les Serbes en présence des organisations internationales et les questions

 26   essentielles concernaient justement le sort des gens que l'on a amenés de

 27   l'hôpital de Vukovar.

 28   Donc tout cela pour vous dire que j'ai participé depuis le début à la


Page 2348

  1   chronologie des événements, à l'enquête concernant Ovcara.

  2   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je viens de remarquer une erreur au

  3   niveau du compte rendu d'audience, page 51, ligne 2, c'est une erreur au

  4   niveau de la date.

  5   M. GILLETT : [interprétation]

  6   Q.  On voit le 9 novembre 1991, c'est la date de la création de la

  7   commission. Est-ce la bonne date ?

  8   R.  Je dois vous dire que je ne connais, je ne sais pas à quel moment on a

  9   mentionné pour la première fois cette commission, mais moi, j'ai été

 10   convoqué au mois de décembre. Est-ce que la commission avait été créée

 11   auparavant, je ne sais pas.

 12   M. ZIVANOVIC : [interprétation] A ce moment-là, il ne parlait pas de la

 13   création de la commission, il ne parlait pas de cela. Il parlait de la

 14   disparition des patients de l'hôpital de Vukovar. C'était cela la date dont

 15   il parlait.

 16   M. GILLETT : [interprétation] Merci. Je vais poser des questions au sujet

 17   de détails concernant cet incident, et donc on va y revenir, et donc ce

 18   point va être corrigé s'il n'est pas exact.

 19   Q.  Donc pour commencer, je vais vous demander d'examiner le tableau que

 20   l'on a distribué, et je vais vous poser une question similaire aux

 21   questions que je vous ai posées au sujet du tableau précédent. Sans entrer

 22   en détail, vu qu'il y a un certain nombre de faits qui ont fait l'objet

 23   d'un accord, mais pour préparer votre déposition d'aujourd'hui, est-ce

 24   qu'on vous a demandé d'examiner les rapports d'autopsie ou bien des

 25   rapports tout simplement concernant les victimes de l'incident d'Ovcara ?

 26   R.  Oui, c'est quelque chose que j'ai fait à plusieurs reprises déjà, et

 27   dans ce cas-ci, à nouveau, je me suis préparé de la même façon, j'ai

 28   comparé les rapports d'autopsie avec les informations que l'on trouve dans


Page 2349

  1   le tableau.

  2   Q.  Est-ce que vous avez été en mesure d'identifier ces documents, de les

  3   authentifier ?

  4   R.  Oui, je l'ai fait, et à chaque page vous pouvez trouver ma signature.

  5   Q.  Et dans la colonne surnommée la "méthode ID", qui est la cinquième

  6   colonne à partir de la droite, on parle donc de l'identification classique

  7   et les identifications par le biais de l'ADN. De quoi s'agit-il, est-ce que

  8   cela concerne votre réponse précédente quand il s'agit de l'identification

  9   des victimes ?

 10   R.  Oui, on pourrait encore en parler, mais on a abordé le problème

 11   d'Ovcara de façon que nous disposions des informations classiques vu qu'à

 12   l'époque on ne pouvait pas encore effectuer des analyses ADN. Donc au

 13   début, on a vraiment procédé à l'identification de la façon la plus

 14   traditionnelle qu'il soit, à savoir la comparaison des informations ante

 15   mortem.

 16   Q.  Et si pour voir cela de plus près, est-il possible d'examiner un

 17   document, le document ERN 00959729 [comme interprété] concernant Josip

 18   Kozul. Il y a une erreur au niveau du compte rendu d'audience, il s'agit de

 19   la page 00559729.

 20   Est-ce que dans ce rapport on trouve les éléments habituels que l'on

 21   retrouve dans le rapport d'autopsie, d'après votre expérience ?

 22   R.  Oui. Je dirais que c'est un rapport de qualité, vu que toutes les

 23   informations habituelles y figurent. Donc c'est un rapport qui est très

 24   bien ficelé.

 25   Q.  Maintenant, je vais vous demander d'examiner la page suivante. Le

 26   premier mot que l'on trouve ici, à savoir "enchevêtrement". On dit qu'il

 27   n'y a pas d'enchevêtrement. De quoi s'agit-il ? C'est vraiment le premier

 28   mot que l'on voie tout en haut du document. 


Page 2350

  1   M. GILLETT : [interprétation] Est-il possible de voir l'exemplaire en B/C/S

  2   de ce même document. Nous n'avons pas d'exemplaire en B/C/S ?

  3   En réalité, je dois vous dire que nous avons juste choisi quelques extraits

  4   traduits en B/C/S, dans le document bien plus volumineux qui est écrit en

  5   B/C/S et qui doit être disponible dans le système du prétoire électronique

  6   sous les numéros 00559729 à 00560697. Mais je vais essayer de retrouver le

  7   numéro 65 ter de ce document. Donc le numéro 65 ter c'est 4192.

  8   Q.  Est-ce que vous connaissez ce thème "l'enchevêtrement" sans regarder le

  9   document ?

 10   R.  Oui, dans ce contexte, oui. Quand j'ai vu l'enchevêtrement, je n'ai pas

 11   très bien compris, mais quand on parle de l'enchevêtrement des corps, oui,

 12   c'est bien plus clair. C'est quelque chose qui arrive souvent dans les

 13   fosses communes, et il faut vraiment faire en sorte que les corps soient

 14   séparés dans la mesure du possible. Parfois c'est parfaitement impossible,

 15   mais ici, par exemple à Ovcara, eh bien, en faisant vraiment attention à la

 16   façon dont on procède à l'exhumation, il a été possible de vraiment séparer

 17   les corps de sorte qu'il n'y ait pas d'enchevêtrement. Donc ici il n'y pas

 18   eu d'enchevêtrement.

 19   M. GILLETT : [interprétation] Monsieur le Président, les rapports

 20   d'autopsie concernant ces victimes se ressemblent. Donc je ne veux pas tous

 21   les comparer.

 22   Q.  Mais est-ce que, Monsieur le Témoin, vous pouvez nous dire si vous

 23   connaissez l'âge moyen des victimes d'Ovcara ?

 24   R. Pour autant que je m'en souvienne, la fourchette était de 16 à 72 ans.

 25   Ce sont en fait des informations qui ont été renseignées a posteriori à

 26   partir du moment où on a pu identifier. Parce que pendant l'analyse, un

 27   anthropologue peut donner l'âge approximatif sur la base de la dentition,

 28   des côtes, de la symphyse pubienne. Donc nous avons mentionné tout cela.


Page 2351

  1   Donc il peut établir l'âge approximatif. Mais à partir du moment où

  2   l'identification finale a été menée, terminée, si nous connaissons

  3   exactement la date de naissance de l'individu en question, bien sûr que

  4   nous connaissons exactement son âge. Donc, la tranche d'âge 16 à 72 ans, ce

  5   sont les informations les plus fiables qui soient, puisqu'elles ont été

  6   obtenues après l'identification.

  7   Q.  Dans ce tableau-là où il y a des mentions écrites à la main, est-ce que

  8   cela a été écrit de votre main ?

  9   R.  Oui, certainement, mon écriture, et c'est aussi ma signature à la fin.

 10   Q.  Dans certains cas, avez-vous indiqué des discordances entre la date de

 11   naissance, l'orthographe du nom ? Est-ce que vous avez renseigné cela ?

 12   Est-ce que vous avez écrit la date exacte ou l'orthographe exacte ?

 13   R.  Oui. Si l'on parcourt ce tableau qui correspond à Ovcara, nous verrons

 14   bien qu'il y a des endroits où la date de naissance a été modifiée, où le

 15   nom a été modifié et des situations comparables. Donc, cela est le résultat

 16   de l'identification finale où nous avons pu fournir les renseignements

 17   précis et exacts.

 18   M. GILLETT : [interprétation] A ce stade, nous demandons que le tableau et

 19   les documents à l'appui soient versés au dossier. Ce sont les documents où

 20   nous avons des "oui" qui figurent dans la colonne d'authenticité, la

 21   colonne finale, le oui ou le non. Il y a un certain nombre de

 22   questionnaires pour des personnes portées disparues à la fin du tableau qui

 23   n'ont pas été renseignées dans la colonne d'authenticité.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Gillett, dans la version

 25   Excel, est-ce que vous allez ajouter les numéros 65 ter de tous ces

 26   documents ?

 27   M. GILLETT : [interprétation] Oui, nous avons en effet déjà établi une

 28   version avec les numéros de la liste 65 ter, mais lorsque nous les avons


Page 2352

  1   faits pour la première fois, ils n'étaient pas encore disponibles.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. C'est versé au dossier.

  3   Une cote a été attribuée.

  4   M. GILLETT : [interprétation] Juste quelques éclaircissements. Parfois, il

  5   est un peu difficile de bien lire les notes qui ont été renseignées à la

  6   main. Pour Anton Mutvar, la date devrait se lire le 30 janvier 1969. Pour

  7   l'entrée OVC004, la note manuscrite doit se lire comme étant le 13 juin

  8   1959. Pour l'entrée OVC066, la note manuscrite se lit Holjevac, H-O-L-J-E-

  9   V-A-C, avec L. Pour OVC073, le 1er novembre 1979. Et je pense que pour le

 10   reste de ces notes, elles seront lisibles dans les versions électroniques.

 11   Je dois aussi dire que les signes diacritiques n'y figurent pas, parce que

 12   ça rendait la recherche électronique des noms très difficile.

 13   Je vois qu'il est 12 heures 15.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, nous allons

 15   revenir à 12 heures 45, et M. l'Huissier va vous raccompagner.

 16   [Le témoin quitte la barre]

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est suspendue.

 18   --- L'audience est suspendue à 12 heures 16.

 19   --- L'audience est reprise à 12 heures 45.

 20   [Le témoin vient à la barre]

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Veuillez continuer, Monsieur Gillett.

 22   M. GILLETT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 23   Q.  Docteur Strinovic, avant la pause, nous étions en train de parler des

 24   victimes exhumées à Ovcara, et j'aimerais vous demander de nous dire

 25   combien de corps au total a-t-on exhumés de cette fosse commune à Ovcara ?

 26   R.  Oui. A cette fosse commune d'Ovcara, il a été exhumé exactement 200

 27   corps.

 28   Q.  Est-ce que tous les corps ont été identifiés ?


Page 2353

  1   R.  Non. Etant donné que nous nous sommes chargés de l'identification,

  2   depuis le tout début nous savons qu'on a identifié au total 193 personnes.

  3   Dont une personne a été identifiée avec l'ADN mais n'a pas été acceptée

  4   comme étant la personne en question par la famille, et on en a donc 192,

  5   une où on l'attend que la famille accepte l'analyse ADN et sept où il n'y a

  6   pas eu identification du tout.

  7   M. GILLETT : [interprétation] Je voudrais que l'on montre au témoin le 65

  8   ter 02498 sur nos écrans.

  9   Q.  Alors, sur cette liste, nous pouvons voir une série de chiffres, OVC-

 10   001, OVC-002, et cetera, et ils sont 200. Ça coïncide avec le total de

 11   corps que vous venez de nous donner. Alors, si on se penche plus bas sur

 12   l'OVC-011, on voit qu'il n'y a pas de nom. Alors, de quoi s'agit-il, le "No

 13   name", comme inscription ?

 14   R.  L'OVC-001, avez-vous dit ?

 15   Q.  Non. OVC-011.

 16   R.  Ça signifie que ce OVC-011 n'a pas été identifié.

 17   Q.  Si l'on passe maintenant à la page 3 de ce document, à la fin de cette

 18   liste de 200 dépouilles sous des références OVC -- et là j'aimerais qu'on

 19   nous tourne encore une page. Encore une, s'il vous plaît.

 20   On peut voir ici des chiffres qui vont jusqu'à OVC-200, puis ensuite

 21   il y a six noms qui sont sur la liste où l'on dit "Non décédés". Alors,

 22   est-ce que vous pouvez expliquer un peu de quoi il s'agit ici ?

 23   R.  Ce sont des gens qui étaient à Ovcara mais qui n'ont pas été tués.

 24   C'est des personnes qui sont encore vivantes.

 25   Q.  Alors, après ces six noms où l'on dit qu'ils ne sont "Pas décédés", il

 26   y a toute une série d'autres noms, une cinquante ou une soixante, et c'est

 27   une liste qui se poursuit à la page d'après. Est-ce que vous savez nous

 28   dire ce qu'il est advenu de ces gens-là ? Comment leurs noms ont-ils


Page 2354

  1   aboutis sur cette liste ?

  2   R.  Lorsque les gens de l'hôpital de Vukovar ont disparu, il a été établi

  3   des listes de personnes disparues de l'hôpital de Vukovar. Parmi ces noms,

  4   il y avait les 200 corps retrouvés à Ovcara. Mais la liste était plus

  5   longue, ce qui fait que le nombre des personnes disparues à l'hôpital était

  6   de 260 à peu près. Et les personnes qui sont énumérées là sont justement

  7   des personnes qui figurent sur la liste des disparus et qui n'ont pas été

  8   retrouvées mais qui figuraient sur la liste initiale des personnes

  9   disparues en provenance de l'hôpital de Vukovar.

 10   Q.  A-t-on continué à déployer des efforts en vue de retrouver ces

 11   personnes après établissement des listes originales ?

 12   R.  Oui. Depuis le tout début, nous nous efforçons de retrouver les

 13   personnes figurant sur cette liste. Nous n'allons pas cesser de les

 14   rechercher. Mais hélas, à ce jour, nous n'avons pas encore retrouvé toutes

 15   les personnes qui se trouvent sur cette liste.

 16   M. GILLETT : [interprétation] Nous demanderions le versement au dossier de

 17   ce document.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] C'est versé au dossier et annoté.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce à conviction P359.

 20   Merci.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] C'est moi qui vous remercie.

 22   M. GILLETT : [interprétation]

 23   Q.  Docteur Strinovic, avant la pause, vous nous avez dit que vous pourriez

 24   fournir l'ordre chronologique des investigations au sujet des incidents

 25   d'Ovcara et de cette fosse commune. Alors, ayez l'amabilité de nous exposer

 26   l'ordre chronologique des événements.

 27   R.  A compter de la disparition de ces personnes de l'hôpital de Vukovar,

 28   et il s'agit de la nuit du 19 au 20 novembre 1991, il a été établi des


Page 2355

  1   listes de personnes disparues et on a essayé d'apprendre la vérité. Il y a

  2   eu des témoins. Il y a eu des indices et des renseignements disant que les

  3   personnes figurant sur la liste de l'hôpital avaient été emmenées quelque

  4   part et que suite à cela on perdait leur trace. Cela fait qu'on a sans

  5   cesse, à l'occasion des réunions que nous avons eues avec la Serbie, on a

  6   essayé sans cesse, donc, d'en apprendre davantage au sujet du sort des gens

  7   de l'hôpital de Vukovar. Et pendant toute cette période depuis la

  8   disparition de ces individus jusqu'à la découverte de la fosse commune et

  9   jusqu'aux identifications, nous avons toujours cherché à établir la vérité

 10   au sujet de l'événement.

 11   Alors, ce qui suit dans l'ordre chronologique après ces événements du

 12   20 novembre 1991, ce qui s'est passé d'important, c'est qu'en 1992, le Dr

 13   Clyde Snow, qui était connu hors de la République de Croatie, il venait des

 14   Nations Unies, lui, et en sa qualité d'expert, il était venu pour essayer

 15   de trouver l'emplacement de la fosse commune avec les dépouilles. Il est

 16   venu en Slavonie de l'est, et vers le mois de novembre, si mes souvenirs

 17   sont bons, il a été sur les lieux, il a trouvé quelque chose qu'il avait

 18   trouvé suspect, il a trouvé des indices, à savoir un secteur qui était

 19   différent, entassé, pour ce qui est du terrain. Et à cet endroit, il a

 20   trouvé des douilles, il a trouvé en surface du terrain des restes

 21   d'ossements humains, et c'était sa première visite à Ovcara, et il a donc

 22   supposé que c'est là que pouvait se trouver la fosse commune.

 23   Suite à cela -- et je disais que c'était en 1992, cela. En 1993, on

 24   est retournés sur les lieux et on a délimité de façon plus détaillée le

 25   site. On a commencé à excaver pour déterminer la taille de cette fosse

 26   commune, et il devait être entamé des exhumations. Les préparatifs étaient

 27   effectués, mais il y a eu un coup d'arrêt de porté aux exhumations, et ce

 28   qu'on a pu faire pendant toute cette période depuis la visite de cet expert


Page 2356

  1   et au-delà, on a assuré le gardiennage de cette fosse par les soins de la

  2   FORPRONU. C'est des militaires qui ont sécurisé les lieux. C'était un site

  3   protégé. Et en 1993, la FORPRONU était là-bas encore, a gardé le site, et

  4   nous n'avons pu accéder à ce site pour ce qui nous concerne pas avant 1996.

  5   Et ça s'est passé au mois de septembre. C'est là qu'on entame les

  6   préparatifs et on commence à exhumer la fosse commune d'Ovcara. Lors de ces

  7   préparatifs et de ces déplacements vers les lieux, j'ai été là pour le

  8   monitoring du côté croate, et il y avait du côté serbe des experts de

  9   Serbie et des experts de Vukovar même. Ce qui fait que le monitoring a été

 10   assuré pendant les exhumations. Même ces travaux ont été réalisés par des

 11   experts internationaux qui ont préparé les exhumations, qui ont procédé aux

 12   exhumations et qui ont retrouvé les 200 corps, comme on l'a déjà indiqué.

 13   Et ces corps ont été posés dans des sacs en plastique, à compter du numéro

 14   1 jusqu'au numéro 200 pour le dernier des corps retrouvés au fond de la

 15   fosse. Une fois qu'on a sorti toutes ces dépouilles, on a organisé un

 16   convoi pour les acheminer jusqu'à Zagreb. Et à la faculté de médecine, au

 17   département de pathologie, on a aménagé des locaux spéciaux pour les

 18   besoins de l'identification, et on a entamé le processus d'analyse des

 19   restes humains. Ces analyses ont commencé vers la fin du mois d'octobre

 20   1996 et jusqu'à la fin de l'année en question où on achevé les analyses.

 21   Les experts qui ont été chargés de ceci, avec un monitoring croate,

 22   serbe et international, nous avons exercé un contrôle à l'égard de ce qui

 23   se faisait et des modalités appliquées.

 24   Alors, une fois que tout ceci a été effectué, en début 1997, nous

 25   avons pris en charge ces dépouilles. On a signé des procès-verbaux pour ce

 26   qui est des autopsies, pour ce qui est notamment des parties importantes au

 27   sujet des identifications. Les pressions ont été fortes. Les familles

 28   demandaient à ce que ça se fasse au plus vite. On nous a donc confié les PV


Page 2357

  1   pour ce qui est de l'identification. Et s'agissant des PV au sujet des

  2   causes de décès, on ne les a pas reçus.

  3   Il y a eu un processus d'identification qui s'est fait de façon

  4   classique, renseignements ante mortem qu'on avait recueillis entre-temps et

  5   comparaison avec les résultats des autopsies. C'est ainsi que nous sommes

  6   arrivés à un certain nombre de cas de figure assez simples et clairs, et on

  7   a pu entamer les identifications. On a convoqué les familles à l'Institut

  8   de médecine légale à Zagreb et on a entamé ce processus. L'identification

  9   s'est faite au fur et à mesure, ce qui fait que nous avons tenu --

 10   Enfin, j'ai voulu vous expliquer pourquoi cela a duré si longtemps.

 11   Il y a deux semaines à peine, nous avons procédé à une dernière

 12   identification, c'est-à-dire à la 192e identification qui a été confirmée

 13   il y a deux semaines à Zagreb. Donc, sans interruption aucune entre 1997 et

 14   de nos jours, nous avons continué et persévéré, et nous comptons arriver à

 15   en terminer avec l'identification des sept restantes. Ce processus a duré

 16   de façon ininterrompue.

 17   Pendant les premières années, il s'agissait de l'identification

 18   classique, c'est-à-dire comparaison des renseignements ante mortem et des

 19   restes humains avec l'assistance des familles avec des renseignements,

 20   photos et éléments nouveaux. Et c'est au fur et à mesure que nous avons

 21   effectué ces identifications. Il y a quelques 97 personnes d'identifiées de

 22   façon classique.

 23   Q.  Docteur Strinovic, Docteur Strinovic, si je puis vous demander de

 24   ralentir quelque peu pour les interprètes. Veuillez continuer, je vous

 25   prie.

 26   R.  On vient d'en arriver à la fin des identifications classiques, c'est-à-

 27   dire ces 96 ou 97 corps identifiés de la sorte, ensuite on est passés aux

 28   ADN. Et pour le reste des victimes d'Ovcara, on a procédé à des analyses


Page 2358

  1   ADN et on est arrivés à 192 identifications officielles et une où il y a eu

  2   identification, mais ça n'a pas été accepté par la famille, pour des

  3   raisons émotionnelles, je pense. Et donc, il en reste encore sept de non

  4   identifiées. C'est ce que je pourrais dire d'important au sujet de la

  5   chronologie depuis la première journée de la disparition de ces personnes à

  6   ce jour. Si vous voulez d'autres explications, bien entendu, je suis tout à

  7   fait disposé à vous les fournir.

  8   Q.  J'ai quelques questions pour apporter des éclaircissements. Revenons au

  9   début de la chronologie. Avant la pause, vous avez fait référence à un

 10   incident où les gens ont été emmenés de l'hôpital de Vukovar, et la date

 11   consignée au compte rendu est celle du 9 novembre 1991. Il y a quelque

 12   moment de cela, vous nous avez donné une date qui est celle du 19 et du 20

 13   décembre. Alors, est-ce que vous vous souvenez du fait qu'il s'agit de

 14   novembre ou décembre 1991 ? Je réalise parfaitement bien que vous n'étiez

 15   pas présent.

 16   R.  Oui, la date peut être retenue parce que c'est la date de la chute de

 17   Vukovar, le 19 novembre 1991. C'est lié à la chute de Vukovar, et c'est là

 18   que l'hôpital est tombé dans les mains de la partie serbe.

 19   Q.  Merci. Alors, pour ce qui est d'enchaîner au niveau de la chronologie,

 20   vous avez parlé de 1993 pour ce qui est d'une exhumation initiale qui a

 21   commencé puis qui a été stoppée. Alors, qui est-ce qui a stoppé ceci en

 22   1993 ?

 23   R.  D'après ce que j'en sais, les exhumations ont été stoppées en 1993 pour

 24   des raisons politiques. Alors je ne sais pas vous dire exactement pourquoi.

 25   Quelqu'un d'autre pourrait peut-être vous le dire. Mais d'après ce que j'ai

 26   pu apprendre et savoir, c'est le fait qu'il s'agissait d'un grand nombre de

 27   victimes de l'hôpital qui se trouvaient à un seul et même endroit. C'est

 28   probablement la raison pour laquelle la procédure avait été stoppée.


Page 2359

  1   Q.  Mais qui a stoppé la procédure ?

  2   R.  Je ne le sais pas, je vous le répète. Je ne puis que le supposer, comme

  3   je vous l'ai dit tout à l'heure. Les raisons de cela me semblent évidentes.

  4   C'était le fait des autorités qui se trouvaient être en place sur le

  5   terrain. Ce n'étaient pas des autorités croates.

  6   Q.  Est-ce que vous pouvez préciser de quelles autorités il s'agit, d'après

  7   vous ?

  8   R.  Pour autant que je le sache, à l'époque c'était la JNA et les Serbes du

  9   cru qui détenaient le pouvoir dans ce secteur.

 10   Q.  Vous nous avez dit que vous ne saviez pas exactement quelles étaient

 11   les raisons pour lesquelles cela a été stoppé, mais vous avez invoqué des

 12   raisons politiques. Est-ce que vous pourriez préciser un petit peu ou pas

 13   du tout ?

 14   R.  Je ne peux pas vous parler des raisons politiques puisque je ne suis

 15   pas un homme politique. Mais lorsque vous avez une situation où un très

 16   grand nombre de personnes sont portées disparues depuis l'hôpital, alors

 17   qu'il devient évident que ces gens ont été tués et inhumés quelque part,

 18   c'est une situation qui peut-être, en 1993, ne pouvait pas être portée à la

 19   connaissance du public. Je suppose que c'étaient ça les raisons pour

 20   lesquelles ça a été stoppé. Cela pourrait au moins partiellement répondre à

 21   votre question qui portait sur des raisons politiques.

 22   Q.  Cela se comprend parfaitement. Alors, reparlons des exhumations en tant

 23   que telles. Donc, de 1993 jusqu'en 1996, il n'y a pas eu d'exhumations.

 24   Quel est l'impact de ce délai sur l'identification des victimes ? Est-ce

 25   que cela a rendu le processus d'identification plus ou moins difficile ?

 26   R.  J'en ai déjà parlé, c'est en 1993 qu'on a stoppé les exhumations et on

 27   n'a pu procéder aux exhumations jusqu'en 1996, y compris toutes les

 28   activités liées à ça ont été arrêtées. La zone a été déclarée zone à


Page 2360

  1   laquelle tout accès a été interdit. Donc, de toute évidence, plus le temps

  2   passait, plus les corps se détérioraient. Donc l'identification a plus de

  3   chance d'être précise si moins de temps s'est passé entre le décès et

  4   celle-ci. Donc il sera plus difficile d'identifier et d'établir la cause du

  5   décès avec le temps qui passe.

  6   Q.  Vous avez mentionné un incident où on a emmené de l'hôpital de Vukovar

  7   des gens et que vous avez appris cela assez rapidement. Alors, qu'est-ce

  8   qui vous a permis de savoir ce qui s'est passé, quelles ont été vos sources

  9   ?

 10   R.  Mais il y avait plusieurs sources. Des coupures de journaux. Les

 11   journaux ont écrit et ont parlé de ce qui a pu se produire, où sont passés

 12   les gens qui ont été portés disparus. Puis, il y a eu les rapports du Dr

 13   Bosanac et du Dr Njavro, qui ont été chirurgien et chef de l'hôpital, et

 14   qui ont envoyé beaucoup d'informations à Zagreb. Donc ces informations nous

 15   sont parvenues à la commission dont j'étais membre. C'étaient ça mes deux

 16   principales sources d'information, d'un côté les médias, et d'autre part

 17   les informations que nous avons reçues de l'hôpital de Vukovar. Puis aussi,

 18   les proches qui venaient nous contacter, qui nous apportaient des

 19   renseignements sur les personnes portées disparues et qui demandaient de

 20   les retrouver. Excusez-moi, juste pour ajouter une chose : à ce stade,

 21   plusieurs Croates qui pensaient être fusillés à Ovcara et qui ont néanmoins

 22   survécu sont arrivés à Zagreb et ils ont eux aussi joué le rôle de témoins

 23   qui ont commencé à parler sur ce qui semblait s'être passé à Ovcara.

 24   Q.  Vous nous avez dit que votre commission a reçu quelques informations,

 25   commission établie en décembre 1991. Qui avez-vous rencontré dans le cadre

 26   de cette commission ?

 27   R.  Dans cette commission, la commission chargée des détenus et des

 28   personnes portées disparues de Croatie rencontrait ses homologues de


Page 2361

  1   Serbie. Ces réunions étaient organisées par l'entremise des organisations

  2   internationales, se déroulaient en anglais, et elles étaient coordonnées

  3   par ces organisations internationales.

  4   Q.  Et quels ont été les points à l'ordre du jour lors des réunions de ces

  5   deux commissions ?

  6   R.  Quand on a commencé à se rencontrer, bien entendu, on parlait de

  7   personnes portées disparues de Croatie, des zones occupées. Bien entendu,

  8   chacun avait des arguments à présenter à l'appui de ces demandes de

  9   recherche de personnes portées disparues qu'on n'arrivait pas à retrouver.

 10   Donc nous avons essayé, bien entendu, d'obtenir des informations de l'autre

 11   partie et de même pour la commission de Serbie, qui avait un certain nombre

 12   de noms sur la liste qu'ils avaient dressée. Il s'agissait de personnes

 13   portées disparues pendant la guerre, et ils cherchaient des renseignements

 14   là-dessus.

 15   M. GILLETT : [interprétation] Le document 01161, s'il vous plaît, est-ce

 16   qu'on peut l'afficher à l'écran.

 17   Q.  Ce document s'intitule "Projet de procès-verbal, commission pour

 18   Vukovar, Budapest, le 12 juin." Page 2, nous voyons la liste de

 19   participants à cette réunion. Vous-même, bien entendu. Est-ce que vous

 20   pouvez nous dire qui sont les autres participants, en particulier les

 21   représentants de la commission de la République fédérale de Yougoslavie,

 22   pour autant que vous vous en souveniez.

 23   R.  Parmi les représentants croates, il y avait le professeur de droit, Dr

 24   Simonovic. Il y avait Mme Vesna Bosanac, directrice de l'hôpital de

 25   Vukovar. Dubravka Horvat qui représentait la Croix-Rouge de Croatie et Ivan

 26   Kopjar, je pense qu'il représentait l'armée croate.

 27   Puis les représentants du côté de la Serbie. Je dois dire que je ne connais

 28   pas très bien ces gens-là. Il faut savoir que beaucoup de temps s'est passé


Page 2362

  1   depuis et je n'ai pas gardé contact avec ces gens-là. Il y a mon confrère,

  2   le Dr Stankovic, qui était capitaine à l'époque, et qui allait devenir

  3   général par la suite. Il est venu faire sa spécialisation à Zagreb. Donc je

  4   le connais bien. Sinon, parmi les autres, je ne suis pas tout à fait

  5   certain, je ne voudrais pas vous induire en erreur.

  6   Mais c'était une composition comparable à la nôtre. Donc la Croix-Rouge,

  7   les organisations qui recherchaient les personnes portées disparues,

  8   l'armée, mais je ne pourrais pas vous en dire plus d'après les noms.

  9   Q.  Passons à la page 4 en anglais au point 2. La première ligne du premier

 10   paragraphe, nous voyons que ce texte se lit comme suit, Dr Strinovic a dit

 11   que :

 12   "Il était nécessaire d'établir une commission tripartite afin d'identifier

 13   les restes humains. A la réunion de Pec qui s'est tenue en janvier, un

 14   accord a été obtenu que cette commission soit constituée. Toutefois, à

 15   Genève, la partie serbe a refusé ce type de coopération."

 16   Est-ce que vous vous souvenez d'avoir pris l'initiative de la création

 17   d'une commission tripartite ?

 18   R.  Beaucoup de temps s'est passé depuis, vraiment. Mais ce qui me vient à

 19   l'esprit maintenant c'est que cette commission tripartite donc aurait dû

 20   être composée des représentants de la Croatie, la Serbie, et des

 21   représentants des organisations internationales. C'était ça l'idée donc de

 22   faire représenter ces trois parties, je pense que c'est ça que j'ai dû

 23   vouloir créer.

 24   Q.  Ont-ils cité des raisons pour étayer le refus de cette coopération, la

 25   partie serbe, j'entends ?

 26   R.  Il m'est difficile de vous répondre. Je ne sais vraiment pas quelle a

 27   été la raison. Plusieurs sont possibles, je ne sais pas.

 28   Q.  Page 7 de la version anglaise, l'avant-dernier paragraphe. Page 6,


Page 2363

  1   dernier paragraphe en B/C/S. Le texte n'est pas vraiment lisible. Mais

  2   malheureusement, nous n'avons pas d'autre exemplaire de ce texte. Mais dans

  3   le paragraphe qui est lisible, il est dit que :

  4   "Le colonel Starcevic a déclaré que la JNA avait évacué 174 personnes et

  5   les a remises à la CEE sans noms, sans qu'il y ait de précision de noms. A

  6   en juger d'après le commandant Sljivancanin, sur ces 174 personnes, tous

  7   étaient des blessés et des malades de l'hôpital. Le groupe a passé la nuit

  8   à Ovcara et a été remis le lendemain à l'ECMM."

  9   Est-ce que vous vous souvenez de ce compte rendu sur les personnes portées

 10   disparues de l'hôpital de Vukovar ?

 11   R.  Ce dont je me souviens, il faut savoir que c'était il y a longtemps,

 12   c'est que ces négociations étaient très difficiles, et cet exemple que vous

 13   venez de citer nous le montre que c'était quasiment impossible, que nous

 14   n'avons reçu aucun élément certain, en particulier pour ce qui est

 15   d'Ovcara, qu'on nous a rien donné. Donc si mes souvenirs sont bons, ces

 16   négociations étaient difficiles, laborieuses, et quasiment aucun résultat

 17   n'a été obtenu et, en particulier pour ce qui est des choses essentielles

 18   aux yeux de la Croatie, à savoir Ovcara. Donc les chiffres demandés par les

 19   parties intéressées étaient très élevés, et d'autre part ce qu'on recevait

 20   était minime, donc on n'a pas pu arriver à aboutir à un accord, quasiment à

 21   rien.

 22   M. GILLETT : [interprétation] Nous demandons le versement de ce document

 23   01161, s'il vous plaît.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Versé au dossier et reçoit une cote.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] La cote attribuée est celle de P360.

 26   Merci.

 27   M. GILLETT : [interprétation] Je demande le document 65 ter 02444, c'était

 28   un jeu de photographies qui porte sur les exhumations de la ferme de Lovas.


Page 2364

  1   Je pense que cela est repris au paragraphe 33 de l'acte d'accusation.

  2   Prenons la deuxième photographie, s'il vous plaît.

  3   Q.  Nous avons une série de photographies dans ce dossier. Est-ce que vous

  4   avez pu parcourir l'ensemble de ces photographies ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Donc je ne vais pas les présenter toutes, puisqu'elles se ressemblent.

  7   Je vais en sélectionner quelques-unes à titre d'exemples. Donc prenons le

  8   numéro 8, s'il vous plaît. Page 8, je crois.

  9   Sur cette photographie ainsi que dans une série d'autres, nous voyons les

 10   restes d'un individu et nous avons une carte avec des chiffres et des

 11   lettres. Nous lisons "NN 33". Est-ce qu'on pourrait peut-être faire un zoom

 12   avant sur la carte pour que l'on puisse mieux lire.

 13   R.  Oui. Au moment de l'exhumation, où que ce soit, donc lorsqu'il

 14   s'agissait de restes humains, chaque corps a été exhumé séparément dans

 15   toute la mesure du possible et placé dans une housse mortuaire. Cette

 16   housse portait des indications, alors tout d'abord il y avait la date de

 17   l'exhumation qui était renseignée, ensuite le site, ici nous avons

 18   exactement l'emplacement de l'exhumation, et puis en grand NN, cela

 19   signifie qu'il s'agit d'un individu non identifié, qui porte le numéro 33.

 20   Chaque housse portait son numéro et ils étaient numérotés dans l'ordre à

 21   partir de 1 jusqu'à la fin.

 22   Donc tous les renseignements de base essentiels pour qu'il n'y ait pas de

 23   confusion entre les housses et pour qu'on puisse être certain que la housse

 24   comportait effectivement les restes humains de la personne qui venait

 25   d'être exhumée étaient identifiés avec ces chiffres et ces lettres, donc

 26   c'est pour ça que c'est essentiel à chaque fois au moment de l'exhumation,

 27   au moment de la conservation des housses, au moment du transport des

 28   housses, là où on procédait à l'identification si elle n'était pas faite


Page 2365

  1   sur le terrain, eh bien, il y avait toujours cette même série de numéros

  2   jusqu'à ce que l'identification ne soit terminée et jusqu'à ce qu'il n'y

  3   ait un nombre qui soit attribué à ces restes humains.

  4   Q.  Je comprends lorsque vous dites 1, vous ne voulez pas dire que la

  5   housse que nous voyons ici porte le numéro 1, vous vouliez simplement dire

  6   à titre d'exemple cela comportait les numéros allant de 1 ?

  7   R.  Oui, tout à fait. Non, ce 33 ne constitue pas la première housse. On a

  8   commencé par le 1, et dans l'ordre on a augmenté la numérotation jusqu'à ce

  9   qu'on soit arrivé au 33.

 10   Q.  Je vous remercie. Est-ce que l'on peut afficher la page 22, s'il vous

 11   plaît. Est-ce que vous pouvez nous décrire ce que représente cette

 12   photographie.

 13   R.  Oui. Lorsqu'on procède à une identification, bien entendu comment

 14   procède-t-on, on sépare bien les corps les uns des autres, et ensuite on

 15   prélève tout ce qu'on trouve sur le corps, sur les bras, dans les poches,

 16   donc tout ce qui a un lien certain avec le corps en question, tous ces

 17   objets sont prélevés, autrement dit au moment où on procède à une analyse

 18   de ces restes humains, on analyse non seulement le corps lui-même, mais

 19   aussi tous les objets, objets vestimentaires, entre autres, mais bijoux, et

 20   cetera, documents en particulier, documents personnels qui nous permettent

 21   de faciliter l'identification. Parce qu'il faut savoir, tant qu'on n'avait

 22   pas de l'ADN, ce qui était particulièrement intéressant pour les proches et

 23   ce qui permettait aux proches d'accepter l'identification, c'étaient

 24   précisément ces objets-là : une montre avec une dédicace, une anamnèse avec

 25   le nom de quelqu'un, les clés, par exemple, qui cinq ou dix ans plus tard

 26   pouvaient ouvrir la portière d'une voiture ou d'un appartement. Enfin, tout

 27   ça, c'étaient des détails intéressaient qui permettaient l'acceptation de

 28   la part des proches d'une identification. Et donc ici, justement, nous


Page 2366

  1   avons ces objets qui ont été prélevés à proximité du corps NN 30.

  2   Q.  Le cas échéant, et ici en particulier, comment est-ce qu'on peut savoir

  3   que ces objets ont effectivement été trouvés près du corps NN 30 ?

  4   R.  Lorsqu'on procédait une exhumation, on faisait particulièrement

  5   attention à ne pas rajouter d'objets se trouvant à côté ou à proximité du

  6   corps pour les placer dans la même housse. Donc, c'est de manière très

  7   rigoureuse qu'on a tenu compte d'une chose : les objets prélevés devaient

  8   se trouver effectivement dans ce corps, donc sur les vêtements, dans les

  9   poches, autour du cou, autour d'un bras. Donc, bon, évidemment, il y a

 10   toujours cette possibilité que quelqu'un déplace les objets par la suite,

 11   mais bon, ça, c'est une autre question. Mais tous les objets qui étaient

 12   rigoureusement liés à l'emplacement du corps étaient des objets qui étaient

 13   associés au corps et qui constituaient les éléments sur lesquels ont

 14   s'appuyait pour procéder à l'identification des restes humains, du corps.

 15   M. GILLETT : [interprétation] Messieurs les Juges, l'identité du corps que

 16   nous voyons ici, avec ces effets personnels peut être constaté si vous vous

 17   référez au document 04043 et 04046 de la liste 65 ter, page 9 en anglais.

 18   05850, page 9.

 19   Page 69, s'il vous plaît, dans ce jeu de photographies.

 20   Q.  Je voudrais que vous nous décriviez ce que représente cette

 21   photographie ?

 22   R.  L'on voit ici une fosse ouverte. Autrement dit, à partir du moment où

 23   on procède à une exhumation, quel est le principe que l'on respecte ? On ne

 24   touche pas aux corps ni aux objets tant que la fosse n'a pas été

 25   entièrement ouverte. Donc, il s'agit de pouvoir représenter dans leur

 26   ensemble tous les corps qui gisaient dans une fosse. Et ce n'est qu'à

 27   partir de ce moment-là que grâce à une approche prudente, progressive, on

 28   peut exhumer les corps un par un et bien les distinguer les uns des autres


Page 2367

  1   pour les placer dans les housses.

  2   Puisqu'on peut voir ici qu'il y a beaucoup d'os et les corps semblent

  3   présenter un enchevêtrement. Mais d'après les pièces vestimentaires,

  4   d'après leur positionnement, nous pouvons, si l'on procède dans le cas de

  5   notre exhumation ainsi, nous pouvons, quasiment tous les corps, séparés les

  6   uns des autres. Cela est possible lorsque nous avons une fosse qui n'a pas

  7   été dérangée par la suite et lorsque nous avons effectivement une situation

  8   in situ qui a été celle au moment de la mort. Nous pouvons séparer les

  9   corps pour bien les distinguer les uns des autres. Mais parfois, il y a eu

 10   dérangement. Des corps ont été endommagés par la suite, jetés dans des

 11   puits, ou il y a un enchevêtrement total des os, et là, on ne pourrait pas

 12   procéder comme on peut procéder sur la base de l'image que l'on voit ici.

 13   On ne peut pas procéder à une exhumation de qualité par séparation des

 14   corps. C'est ça qui est important sur cette photographie.

 15   M. GILLETT : [interprétation] Je demande de verser au dossier ce dossier de

 16   photographies. Je constate que nous avons d'autres photographies

 17   comparables à celles-ci.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Versés au dossier et reçoit une cote.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] La cote sera celle de P361.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 21   M. GILLETT : [interprétation] Je demande l'affichage du document 02472 de

 22   la liste 65 ter. Il s'agit d'un rapport, un rapport d'exhumation en

 23   Slavonie orientale, rédigée par John Clark.

 24   Q.  Alors, même avant de voir le document s'afficher, connaissez-vous John

 25   Clark, avez-vous eu l'occasion de travailler avec lui ?

 26   R.  Oui, je connais John Clark. Il s'est rendu à plusieurs reprises à

 27   Zagreb. Nous avons travaillé ensemble sur l'analyse du matériel dans nos

 28   locaux, où John Clark a été amené à procéder à des identifications des


Page 2368

  1   restes humains.

  2   Q.  Page 1, vers la fin, page 2 en B/C/S. Lorsqu'il s'agit de "réception de

  3   corps à la morgue", le texte se lit comme suit :

  4   "A la fin de chaque exhumation, les corps ont été transférés, ils ont été

  5   placés dans des housses mortuaires scellées et qui portaient chacune une

  6   étiquette. Ils ont été transférés, donc, à la morgue de Zagreb."

  7   Est-ce que vous avez eu à voir avec cela ?

  8   R.  Au moment où on apportait les housses à Zagreb et où on procédait à

  9   l'analyse, tout comme dans le cas d'Ovcara, c'était soit moi soit un de mes

 10   confrères qui était présent au moment de l'analyse. Donc, effectivement,

 11   j'ai vu ces housses, j'ai vu les étiquettes qu'elles portaient.

 12   Q.  Page 2 de la version anglaise et de la version en B/C/S, c'est la

 13   méthodologie appliquée dans le cas des autopsies dont il est question ici

 14   qui est présenté, et vous voyez cela au niveau des différents alinéas. Est-

 15   ce que cela respecte les normes qui sont généralement appliquées et

 16   respectées dans le cadre des autopsies ?

 17   R.  Oui, j'ai déjà vu ce type de documents. Ils procédaient exactement de

 18   la même façon que nous. Ils procédaient donc progressivement. On recevait

 19   les housses munies de numéros. On les mettait sur la table d'autopsie.

 20   Ensuite, on procédait comme on le fait d'habitude à l'autopsie proprement

 21   dite.

 22   Q.  Veuillez examiner la page 12 en anglais. Le quatrième alinéa, on peut

 23   lire -- donc c'est le résumé de conclusion et on peut lire que la grande

 24   majorité des corps sont morts d'un tir isolé infligé à la tête ou au cou.

 25   Si on regarde le tableau qui ne concernent pas Ovcara et dont vous

 26   avez déjà parlé, nous avons examiné les incidents qui se trouvent donc aux

 27   pages 76 à 84, donc c'est le tableau plus gros qui avaient été déjà diffusé

 28   aux parties. Les paragraphes qui m'intéressent au niveau de l'acte


Page 2369

  1   d'accusation ou les paragraphes concernés sont les paragraphes 34 à 35.

  2   Donc, si vous regardez ces pages, allant de la page 76 à 84 et si vous

  3   examinez les causes de décès telles que présentées, est-ce qu'ils

  4   correspondent à la cause que l'on voit dans le rapport de John Clark ?

  5   En attendant, je pense que la façon la plus facile pour faire un lien

  6   entre les corps auxquels fait référence John Clark dans son rapport au

  7   paragraphe correspond de l'acte d'accusation est en utilisant justement le

  8   document qui avait déjà été versé plus tôt aujourd'hui, c'est le document

  9   65 ter 05850, où on voit les numéros des corps des victimes, et donc en

 10   suivant ces numéros, vous allez retrouver ces mêmes corps, ces mêmes cas,

 11   dans d'autres tableaux.

 12   Donc je vais répéter ma question. Donc dans les conclusions, les

 13   résumés des conclusions pour les victimes trouvées dans Daljski Atar, c'est

 14   le rapport de John Clark, on dit donc pour ces victimes que la majorité, la

 15   grande majorité est morte suite aux tirs de balles dans la tête ou bien

 16   dans le cou. Est-ce que cela correspond aux informations qui se trouvent

 17   dans le tableau ?

 18   R.  Oui, je viens de jeter un coup d'œil, et effectivement cela correspond

 19   à ce que vous venez de dire.

 20   Q.  Veuillez maintenant vous référer à la page 19 du rapport de John Clark,

 21   c'est la page 30 en B/C/S, le deuxième paragraphe intitulé "les conclusions

 22   post mortem". On y dit et on décrit deux femmes et un homme. Pour l'homme,

 23   on dit qu'il avait un handicap physique évident au niveau de la hanche, et

 24   qu'il devait se déplacer de façon bizarre.

 25   Est-ce quelque chose que vous avez pu découvrir grâce à l'examen du

 26   médecin légiste ou bien de l'anthropologue ou bien des deux ?

 27   R.  Eh bien, quand vous faites un examen, tout d'abord c'est le médecin

 28   légiste qui fait l'examen, quand il s'agit surtout des os. D'abord c'est le


Page 2370

  1   médecin légiste qui va faire l'examen, et ensuite l'anthropologue. Ici, il

  2   s'agit d'une déformation majeure qui aurait pu être ou aurait dû être donc

  3   constatée aussi bien par le médecin légiste que par l'anthropologue. Donc,

  4   on en arrive à la conclusion que cette personne devait avoir du mal à se

  5   déplacer, et pourquoi, parce que les déformations sont telles que cette

  6   conclusion s'impose.

  7   Q.  De quelle façon ce type d'information pouvait être utile pour

  8   identifier la victime ?

  9   R.  Toutes ces informations, chaque information qui indique une déformité

 10   [phon], quelque chose de bizarre, ici, il s'agit donc d'un handicap, enfin

 11   de quelque chose de pas normal au niveau du bassin ou bien de la hanche. Eh

 12   bien, c'est une information précieuse vu que c'est une information qui est

 13   parlante, vu qu'il n'y a pas beaucoup de personnes qui ont exactement le

 14   même handicap.

 15   Si vous avez un groupe de 1 000 personnes portées disparues, il y en a

 16   peut-être deux qui vont avoir ce type d'infirmité. Donc si vous avez un

 17   groupe de personnes portées disparues dans le même village, il est peu

 18   probable que vous avez deux cas semblables du même village. Donc ce type de

 19   problèmes, d'altérations au niveau des os, des membres, très

 20   caractéristiques, vont être très utiles pour identifier la victime, et

 21   d'habitude la famille ne conteste pas ces identifications-là.

 22   M. GILLETT : [interprétation] Nous allons demander que ce rapport de John

 23   Clark soit versé au dossier, c'est le document 02472.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Il va être versé et va recevoir une

 25   cote.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira du numéro P362.

 27   M. GILLETT : [interprétation] Maintenant je vais vous demander de voir la

 28   pièce 05579.


Page 2371

  1   Q.  En attendant, là c'est un rapport sur les exhumations de différents

  2   puits, et on parle de mêmes localités que le rapport précédent, mais nous

  3   donne davantage de détails sur les personnes qui ont pris part à ces

  4   exhumations. Dans ce rapport, on dit que le tribunal a demandé au colonel

  5   Ivan Grujic de procéder à l'exhumation de deux des sites présumés. Est-ce

  6   qu'à l'époque vous avez travaillé avec le colonel Ivan Grujic ? On parle de

  7   l'an 2000.

  8   R.  Oui, nous avons collaboré depuis 1994, je pense, quand il est venu au

  9   sein de la commission pour les personnes détenues et portées disparues, et

 10   depuis, nous avons toujours collaboré.

 11   M. GILLETT : [interprétation] Je vais demander que ce document ne soit pas

 12   montré au public, parce qu'il s'agit d'un document interne.

 13   Q.  En ce qui concerne les exhumations dont on parle ici, est-ce que vous

 14   êtes au courant des exhumations depuis dans la Slavonie orientale dont on

 15   parle ici à proximité de Borovo Selo ?

 16   R.  Oui, j'ai été informé de cela, et je suis au courant de ces

 17   exhumations. Je pense que la plupart de ces cas ont été analysés à Zagreb.

 18   Mais en tout cas, je suis au courant de cela.

 19   Q.  A la page 2 en anglais et en B/C/S, on parle des différents médecins

 20   légistes qui ont été présents. Est-ce que vous reconnaissez une quelconque

 21   personne d'entre eux, de ce groupe ?

 22   R.  Sur cette liste, je vois le Dr Dumancic, c'est un médecin légiste

 23   d'Osijek qui a souvent été présent sur le terrain, vu qu'il vient d'Osijek,

 24   qui est vraiment à proximité. Il était médecin à Osijek, il a été souvent

 25   présent donc.

 26   Q.  Maintenant, je vais vous demander de voir la page 8 en anglais, en

 27   B/C/S ce sont les pages 9 et 10. Ici, nous avons la description de

 28   l'exhumation du corps comportant le numéro NN 35. Si on regarde le haut de


Page 2372

  1   la page 9 en anglais, on peut voir qu'on indique la cause possible de

  2   décès. Ce sont les trois premières lignes en haut de la page 9, je vais

  3   demander qu'on agrandisse cette partie-là, c'est le numéro de corps qui

  4   correspond à la dernière victime que l'on trouve dans le tableau concernant

  5   Ovcara, Marija Senasi. On parle de cette personne.

  6   Q.  Est-ce que vous arrivez à voir la cause possible du décès de cette

  7   personne ?

  8   M. GILLETT : [interprétation] Et je vais vous demander d'agrandir les

  9   quelques premières lignes en anglais.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je le vois. Je le vois. Merci.  Donc, quelle

 11   était votre question ? Vous m'avez demandé ce que ce la veut dire, n'est-ce

 12   pas ?

 13   M. GILLETT : [interprétation]

 14   Q.  Oui. Que dit le rapport ? Quelles sont les causes probables ou

 15   possibles de la mort ?

 16   M. GILLETT : [interprétation] La page 9 en anglais.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] On dit qu'il s'agit sans doute d'une cause

 18   violente du décès. C'est ce qui est écrit ici. Si vous me demandez pourquoi

 19   c'est écrit comme cela, eh bien, je dois d'abord lire le rapport pour voir

 20   exactement ce qui a été trouvé.

 21   M. GILLETT : [interprétation]

 22   Q.  On va essayer de retrouver le rapport concernant cette victime. Il

 23   s'agit du document 65 ter 04185.

 24   M. GILLETT : [interprétation] Il se trouve sur la page [comme interprété]

 25   ne concernant pas Ovcara, la dernière page. Donc c'est le rapport

 26   d'autopsie concernant Marija Senasi. C'est la page 5 dans l'original qui

 27   nous intéresse.

 28   Q.  La cause du décès --


Page 2373

  1   M. GILLETT : [interprétation] C'est quelque chose qui doit figurer sur la

  2   première page de la traduction en B/C/S. Est-ce bien 04185 ? Je pense qu'il

  3   y a un problème de traduction. Certains rapports ont été écrits en partie

  4   en anglais et en partie en B/C/S, de sorte que nous avons une traduction

  5   qui contient les deux langues. Je vais vous demander donc d'examiner la

  6   cinquième page de l'original. On doit y trouver un résumé. Et dans ce

  7   résumé, ce qui nous intéresse, c'est le troisième paragraphe. Voilà. C'est

  8   bien cela, le document.

  9   Q.  Dans ce résumé, au niveau du troisième paragraphe dans le rapport, on

 10   peut lire : il est possible qu'il s'agissait d'une blessure par balle au

 11   niveau de l'arrière du cou; cela étant dit, la cause du décès n'a pas été

 12   établie. Et c'est pour cela que je vous pose la question. Sur la base de

 13   quelles informations on arrive à la conclusion que la cause probable de la

 14   mort est une blessure par balle à l'arrière du cou ?

 15   R.  Vous me posez une question alors que je ne peux vous répondre avec

 16   certitude. Il a dû trouver quelque chose au niveau du cou. Est-ce qu'il

 17   manquait un morceau de la colonne vertébrale, est-ce qu'il y avait une

 18   déformation ou un problème au niveau des os ? Il me faudrait davantage

 19   d'informations. Il faudrait que je voie exactement ce qui a été trouvé au

 20   niveau de la colonne vertébrale au niveau de la nuque, au niveau aussi du

 21   crâne, car à la lecture de ce résumé, je ne saurais répondre à la question

 22   posée. Parce que ce n'est pas très clair. Il faudrait que je voie les

 23   informations sous-jacentes, à savoir qu'est-ce qui a été diagnostiqué,

 24   trouvé au niveau de la colonne vertébrale au niveau de la nuque, à ce

 25   niveau-là, et après je saurais peut-être répondre à la question posée.

 26   Je suis désolé. Mais vous savez, c'est écrit petit et j'ai du mal à lire.

 27   Il faudrait peut-être agrandir soit le texte en anglais, soit le texte en

 28   croate, pour que je puisse vraiment lire ce qui est écrit et peut-être


Page 2374

  1   répondre à la question posée. Voilà, c'est bien.

  2   Voilà, je viens de dire une description où on dit que la victime -- au

  3   niveau de la victime, après l'examen, l'on a constaté deux fractures

  4   parallèles au niveau de la partie occipitale du crâne qui se rejoignent

  5   dans la partie supérieure. Ensuite, on dit qu'il manque plusieurs

  6   vertèbres, plusieurs os du cou, mais il s'agit des vertèbres, évidemment,

  7   parce qu'il n'y a pas d'autres os dans le cou.

  8   Et donc, sur la base de ces informations, il en arrive à

  9   l'explication possible à savoir qu'il s'agissait donc d'une blessure par

 10   balle infligée à l'arrière du cou de la victime. Donc, qu'est-ce qu'il fait

 11   ? Il a constaté qu'il y a une fracture, il a constaté qu'il manquait

 12   quelques vertèbres, vertèbres supérieures, au niveau du cou. Et sur la base

 13   des informations, il offre une explication qui n'est pas sûre. On ne peut

 14   pas être sûr de cela. Il s'agit là d'un rapport qui n'est pas très

 15   spécifique. On a tout de même une fracture, on a des vertèbres qui manquent

 16   à ce niveau-là du corps. Donc quelque chose a dû se produire là. Une

 17   explication possible est l'explication de la blessure par balle à ce

 18   niveau-là.

 19   Q.  Merci de cette explication.

 20   M. GILLETT : [interprétation] Est-il possible de revenir sur le rapport

 21   précédent, à savoir le document 05579.

 22   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Objection

 23   quant à la possibilité de verser ce document. Il s'agit là d'un rapport

 24   interne qui a été fait soit par l'enquêteur, soit par le procureur, et on y

 25   trouve des informations au sujet d'une victime inconnue. C'est quelque

 26   chose qu'on voit à la page 1. Et c'est un document qui témoigne de la

 27   culpabilité de l'accusé.

 28   M. GILLETT : [interprétation] Le témoin a fourni des informations


Page 2375

  1   supplémentaires au sujet des personnes qui ont pris part à cela. Il a

  2   parlé, par exemple, de Dumancic. Il nous a aussi donné des explications

  3   quant à la méthode utilisée et il nous a dit qu'il était tout à fait au

  4   courant de ces exhumations. Je pense que là il s'agit plutôt d'une question

  5   de poids que d'une question de la possibilité de verser ou non ce document.

  6   Vous allez entendre davantage d'informations au sujet des questions que se

  7   pose mon collègue de la Défense. Vous allez entendre cela de la bouche

  8   d'autres témoins.

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Objection rejetée. Le document va

 10   être versé et il va recevoir une cote.

 11   M. GILLETT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 12   Q.  La dernière question que je vais vous poser, Docteur. Quand on essaie -

 13   - attendez. Je suis vraiment désolé. J'aurais dû attendre le greffier pour

 14   qu'il attribue une cote à ce document.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, en effet. En effet, Monsieur

 16   Gillett.

 17   M. GILLETT : [interprétation] Est-il possible de le verser sous pli scellé,

 18   s'il vous plaît.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [hors micro]

 20   M. GILLETT : [interprétation] C'est le numéro 05579. Nous sommes passés à

 21   un autre document pour aider à expliquer ce document ou l'interpréter.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Mais pourquoi ce document devrait

 23   être placé sous pli scellé ?

 24   M. GILLETT : [interprétation] Parce que c'est un document interne avec le

 25   nom des enquêteurs du bureau du Procureur. Je veux bien réfléchir à la

 26   possibilité de le transformer en un document public le moment venu, mais

 27   pour l'instant, pour ne pas violer les règles de confidentialité, je pense

 28   qu'il serait mieux de le verser à titre confidentiel.


Page 2376

  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Et pour être vraiment sûr que l'on en

  2   parle plus tard, est-ce que vous pouvez nous dire à quel moment vous allez

  3   pouvoir nous donner votre réponse ?

  4   M. GILLETT : [interprétation] Avant la fin de la journée de demain, j'en

  5   suis pratiquement sûr.

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. Pour l'instant, ce

  7   document est versé sous pli scellé. La cote, s'il vous plaît.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P363.

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 10   M. GILLETT : [interprétation]

 11   Q.  Voici, je répète la question que je vous ai posée. Quand on réfléchit à

 12   votre travail et le conflit qui a eu lieu en Croatie, est-ce que vous

 13   pouvez nous donner le nombre total des personnes portées disparues suite au

 14   conflit qui a eu lieu en Croatie dans les années 1990 ?

 15   R.  C'est très difficile ou impossible de répondre à la question que vous

 16   m'avez posée de la façon dont vous l'avez posée, et je vais vous expliquer

 17   pourquoi. En 1991, au moment où la commission a été créée, donc vers la fin

 18   de l'année 1991, le nombre de personnes disparues était extrêmement élevé.

 19   A un moment donné, on parlait de 16 000 à 20 000 personnes portées

 20   disparues. Cela ne voulait pas dire que toutes ces personnes étaient

 21   vraiment mortes. Un grand nombre de personnes ont été retrouvées. Il

 22   s'agissait de personnes placées en détention ou bien qui ont quitté le

 23   pays, et cetera. Donc la réponse à la question que vous m'avez posée, à

 24   savoir quel était le nombre des personnes disparues en 1991, je ne peux pas

 25   vous répondre à cette question-là. Ce nombre a été, certes, très élevé.

 26   Mais je peux vous dire, en revanche, quel est le chiffre officiel dont nous

 27   disposons aujourd'hui des personnes qui ont péri en 1990-1991 ou même en

 28   1995. Je peux éventuellement parler de ce chiffre-là, c'est-à-dire vous


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  1   dire quel est au jour d'aujourd'hui le nombre de personnes portées

  2   disparues. Car en 1991, il s'agissait d'un chiffre important, et il est

  3   vraiment difficile de dire quelles étaient vraiment les personnes portées

  4   disparues et quel est le nombre de personnes retrouvées par la suite.

  5   Q.  Ce qui m'intéresse, c'est le nombre dont vous disposez à présent, le

  6   nombre approximatif de personnes portées disparues aujourd'hui.

  7   R.  Les informations que je vais vous donner, ce sont les informations de

  8   la commission du gouvernement pour les personnes placées en détention et

  9   portées disparues. Nous sommes toujours en train de chercher 968 personnes

 10   disparues en 1991 et 1992, donc à la date du 1er janvier 2013. La plupart de

 11   ces personnes, plus que 88 % de ces personnes, sont de nationalité croate.

 12   Là, je parle des personnes disparues en 1991 et 1992.

 13   En ce qui concerne les événements de 1995, la Croatie est encore à la

 14   recherche de 743 personnes, des citoyens croates mais de nationalité serbe,

 15   pour la plupart disparus en 1995.

 16   Au jour d'aujourd'hui, on a exhumé 933 personnes relevant de ce groupe, et

 17   581 personnes ont été identifiées, donc un total de 61 %.

 18   Donc, au jour d'aujourd'hui, je peux vous dire que la Croatie est encore à

 19   la recherche de 968 personnes, plus 743 personnes. Au total, à peu près 1

 20   700 personnes.

 21   Q.  Et qu'en est-il du nombre de victimes au total, des victimes mortes au

 22   cours du conflit ? Est-ce que là il s'agit d'un chiffre qui dépasse le

 23   chiffre des personnes exhumées, à savoir 933 personnes ?

 24   R.  Je ne peux que répéter ce que j'ai déjà dit : 933 personnes ont été

 25   exhumées, 743 personnes sont toujours portées disparues, et ceci, suite aux

 26   événements qui se sont déroulés en 1995.

 27   Est-ce que nous nous comprenons là, pour cette partie-là ?

 28   Q.  Oui, bien sûr. Si vous ne disposez pas de ces informations, ce n'est


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  1   pas tellement important. Moi, ce qui m'intéresse, c'était vraiment le

  2   nombre de victimes total des personnes tuées au cours du conflit, mais si

  3   vous ne disposez pas de ce chiffre, ce n'est pas tellement important, vous

  4   pouvez me le dire.

  5   R.  Je comprends la question. Là, c'est la question qui a été posée d'une

  6   autre façon. Le nombre exact, j'ai du mal à vous le donner à présent, comme

  7   cela, de tête. Je sais que ce chiffre se situe -- donc les victimes de la

  8   guerre en Croatie se situent autour de 11 000 et quelques personnes. C'est

  9   à peu près le chiffre officiel que l'on a retenu au niveau de la commission

 10   du gouvernement pour les personnes placées en détention et portées

 11   disparues et qui correspond donc au nombre total des victimes en Croatie

 12   pendant la guerre.

 13   Q.  Merci.

 14   M. GILLETT : [interprétation] Monsieur le Président, avec ceci se termine

 15   mon interrogatoire principal. Est-ce que nous cessons de travailler à 14

 16   heures 15 ou bien à 14 heures ?

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] A 14 heures, je pense.

 18   M. GILLETT : [aucune interprétation] 

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Si avec ceci se termine votre

 20   interrogatoire principal, je ne pense pas qu'on va demander à la Défense de

 21   commencer le contre-interrogatoire, qui ne va durer que 15 minutes. Cela

 22   étant dit, j'ai encore quelques questions à poser, des questions qui

 23   relèvent des explications.

 24   Mais vous, vous en avez terminé de votre interrogatoire ?

 25   M. GILLETT : [interprétation] Oui, à moins que je ne puisse vous aider avec

 26   les questions que vous allez poser.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Vous nous avez présenté  et vous avez

 28   versé au dossier une liste, une liste de plus ou moins de 200 noms de


Page 2379

  1   victimes de l'hôpital de Vukovar, de l'incident lié à cet hôpital. Est-ce

  2   qu'on pourrait savoir d'où provient ce document qui comporte 200 noms ? Six

  3   sur la liste n'étaient pas identifiés, et puis il y avait une soixante

  4   d'autres noms.

  5   M. GILLETT : [interprétation] Je voudrais simplement dire qu'il s'agit du

  6   document 02498 de la liste 65 ter. Je ne suis pas certain de la cote en

  7   tant que P.

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] 2498.

  9   M. GILLETT : [interprétation] Oui.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] 2498, c'est cela.

 11   M. GILLETT : [interprétation] Vous me posez la question à moi ou au témoin

 12   ?

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] A celui qui peut me répondre.

 14   Monsieur le Témoin, est-ce que vous vous souvenez de cette liste ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais essayer d'expliquer encore une fois.

 16   S'agissant de l'hôpital de Vukovar, la liste des noms de personnes portées

 17   disparues a été établie tout de suite après cet événement. Il y a eu en

 18   fait plusieurs listes. Certaines listes ont été élargies. Mais cette liste

 19   restreinte comportait plus de 260 noms. C'était la liste qui comportait les

 20   noms de personnes portées disparues. Ça, c'est d'une.

 21   Et puis, une autre chose. Au moment où on a procédé à l'identification des

 22   personnes dont les restes ont été retrouvés à Ovcara, exactement 200 corps,

 23   il faut savoir, ces 200 corps ont été analysés, examinés, et finalement

 24   nous sommes arrivés à 192 plus une identifications de faites. Donc ces noms

 25   de 100 à 192, 193, eh bien, ce sont des noms de personnes dont les corps

 26   ont été retrouvés et exhumés à Ovcara, qui ont été identifiés d'après les

 27   noms et d'après les housses mortuaires 1 à 200 et ont été présentés de

 28   cette manière-là. Mais sur la liste, vous avez un grand nombre de personnes


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  1   qui viennent s'ajouter à cela. Ce sont les personnes qui figurent sur la

  2   liste de personnes portées disparues de l'hôpital et qui n'ont pas été

  3   retrouvées à ce jour ou qui sont portées disparues depuis l'hôpital. Nous

  4   avons des témoins qui confirment leur disparition de l'hôpital. Leurs corps

  5   n'ont pas été retrouvés. C'est une soixantaine d'individus qui, à ce jour,

  6   sont encore considérés comme portés disparus.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Si je vous pose ma question, Monsieur

  8   Strinovic, c'est parce que j'aimerais savoir comment il faut interpréter

  9   cette liste. Elle doit faire partie d'autre chose. De quoi ? Est-ce inscrit

 10   dans un rapport, fait partie d'un rapport ? Le savez-vous ?

 11   M. GILLETT : [interprétation] D'après l'information que nous avons, cela a

 12   été joint en tant que pièce jointe à une télécopie qui a été reçue de la

 13   commission pour les personnes détenues et portées disparues en mars 2003,

 14   et il y avait en fait différentes listes qui ont été établies et qui ont

 15   circulées à différents moments.

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] La commissions dont notre témoin est

 17   membre ?

 18   M. GILLETT : [interprétation] Oui, tout à fait.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Donc, est-ce que vous reconnaissez

 20   cette liste comme ayant été dressée par votre commission, la commission

 21   dont vous faisiez partie ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je reconnais cette liste, Monsieur le

 23   Président. Et c'est essentiellement moi qui aie procédé à l'identification

 24   de ces victimes, moi-même avec mes confrères. J'ai passé une dizaine

 25   d'années à m'occuper de cela. Donc il s'agit de 193 noms de personnes qui

 26   ont été identifiées.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie. Une autre question

 28   sur le dossier comportant les photographies qui vous a été montré. Les


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  1   étiquettes sur les housses mortuaires portaient mention de la ferme de

  2   Lovas. Etait-ce l'emplacement de la fosse commune ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me suis pas rendu à la ferme Lovas, mais

  4   je pense que oui.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] On pourrait peut-être afficher ce

  6   document. 02444 de la liste 65 ter. Ce sera peut-être la page 10. Nous

  7   avons une housse mortuaire qui porte le numéro 20, et je lis "Lakacija 4,

  8   ferme Lovas." Donc il s'agit de l'emplacement 4 à la ferme de Lovas. Est-ce

  9   que cela fait partie de l'indication du site où le corps a été trouvé, ou

 10   est-ce que cela nous dit autre chose ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, il y a eu plusieurs cas

 12   où les corps ont été inhumés à plusieurs endroits. Et c'est le cas sur le

 13   site de la ferme de Lovas. Donc vous avez le secteur de la ferme de Lovas

 14   avec plusieurs emplacements, tel l'emplacement 4, où on a trouvé l'individu

 15   NN32.

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je pense que votre réponse est plutôt

 17   claire. Je vais préciser ma question à laquelle vous m'avez apporté une

 18   réponse. Donc la ferme de Lovas qui -- donc, le nom qui figure ici ne

 19   correspond pas à l'endroit où la mort est intervenue. Cela correspond à

 20   l'endroit où les restes humains ont été trouvés.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 23   Nous allons nous en tenir à cela pour aujourd'hui. Nous reviendrons demain

 24   matin à 9 heures. Je vous prie de tenir compte du fait que vous avez prêté

 25   serment, autrement dit, que vous n'avez pas le droit de parler de votre

 26   déposition avec qui que ce soit et vous n'avez pas non plus le droit de

 27   vous adresser aux parties pour quelque raison que ce soit. M'avez-vous

 28   compris ?


Page 2382

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai bien compris, Monsieur le Président.

  2   Merci.

  3   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] C'est moi. L'huissier vous

  4   raccompagnera.

  5   [Le témoin quitte la barre]

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est levée.

  7   --- L'audience est levée à 14 heures 10 et reprendra le mardi, 8 janvier

  8   2013, à 9 heures 00.

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