Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 10 janvier 2013

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour à toutes les personnes dans

  6   le prétoire et à l'extérieur du prétoire.

  7   Veuillez citer l'affaire, s'il vous plaît, Monsieur le Greffier.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Messieurs les Juges, il s'agit de

  9   l'affaire IT-04-75-T, le Procureur contre Goran Hadzic. Merci.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] La présentation des parties, s'il

 11   vous plaît, à commencer par l'Accusation.

 12   M. STRINGER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, et vous,

 13   Monsieur le Juge Mindua. Douglas Stringer, accompagné d'Alexis Demirdjian;

 14   stagiaire, Adam Birnbaum; et commis à l'affaire, Thomas Laugel, du côté de

 15   l'Accusation.

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. La Défense, Maître Zivanovic.

 17   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Du côté de la

 18   Défense Goran Hadzic, Zoran Zivanovic et Christopher Gosnell. Merci.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Stringer, vous avez quelque

 20   chose à évoquer avant l'entrée du témoin.

 21   Pardonnez-moi, Monsieur Demirdjian.

 22   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Bonjour à vous, Messieurs les Juges.

 23   Oui, effectivement, j'ai une suggestion d'ordre pratique à faire concernant

 24   les documents qui ont été inclus dans le rapport de M. Nielsen. Vous avez

 25   sans doute vu l'échange de courriels ces derniers jours. Il y a en somme

 26   deux catégories de documents que nous allons aborder aujourd'hui, les

 27   documents qui sont les notes en bas de page dans le rapport et les

 28   documents qui ne comportent pas les notes en bas de page et qui ont été

 


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  1   montrés à l'expert au mois de décembre.

  2   Alors, pour que les choses soient claires, je crois qu'une décision sera

  3   finalement rendue sur le versement au dossier de ces documents. Et je

  4   propose donc que concernant les documents qui figurent dans le rapport -

  5   pardonnez-moi - je ne vais pas demander le versement au dossier de ces

  6   documents-là pendant l'interrogatoire principal du témoin, alors que les

  7   documents qui ne figurent pas dans les notes en bas de page qui ne sont pas

  8   dans le rapport, ceux-là, je souhaiterais en demander le versement. Donc, à

  9   la fin de l'interrogatoire principal, lorsque je vais demander le versement

 10   au dossier du rapport et des pièces en notes en bas de page, il y en aura

 11   un certain nombre à ce moment-là, nous pourrons conserver ceux qui sont

 12   dans les notes en bas de page et les assembler en un groupe.

 13   Est-ce que cela a un sens pour vous ?

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je suis un petit peu surpris,

 15   Monsieur Demirdjian, parce que je pensais que c'est précisément ce que nous

 16   avons dit dans nos courriels.

 17   Donc nous sommes d'accord.

 18   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Oui, oui, nous sommes d'accord.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] S'il n'y a pas d'objection du côté de

 20   la Défense, dans ce cas…

 21   M. GOSNELL : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Monsieur le

 22   Juge Mindua. Bonjour à vous. D'après ce que j'ai compris, pour l'essentiel

 23   il y aurait un versement au dossier officiel des documents à la fin de

 24   l'interrogatoire principal de l'Accusation, et ensuite une décision serait

 25   rendue par la Chambre par la suite, et à ce moment-là, à un moment donné,

 26   nous aurions la possibilité de présenter des arguments. C'est ainsi que

 27   j'ai compris la chose.

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] A moins que je ne me trompe, je


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  1   pensais que cette approche ne s'appliquait qu'aux notes en bas de page et

  2   non pas aux autres documents.

  3   M. GOSNELL : [interprétation] Oui, je suis d'accord avec vous. C'est ça,

  4   Monsieur le Président.

  5   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je souhaite préciser, comme je vais

  6   afficher les documents qui figurent dans le rapport pour permettre au

  7   témoin de développer ses réponses, même si je les montre, je ne vais pas en

  8   demander le versement au dossier à ce moment-là. Je les afficherai,

  9   j'afficherai le numéro 65 ter, mais à ce moment-là je n'en demanderai pas

 10   le versement.

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Demirdjian, si dans ce cas

 12   vous pouviez préciser qu'il s'agit d'un document qui figure dans les notes

 13   en bas de page, veuillez le préciser au témoin et à nous de façon à ce que

 14   nous sachions que vous n'allez pas en demander le versement au dossier tout

 15   de suite.

 16   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] C'est tout ce que je vous demande.

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien. Faites entrer le témoin, s'il

 18   vous plaît.

 19   Je souhaite indiquer au compte rendu d'audience que nous siégeons

 20   aujourd'hui en vertu de l'article 15 bis, M. le Juge Hall étant absent

 21   aujourd'hui. Merci.

 22   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Nielsen. Je vous

 24   remercie d'être venu à La Haye pour apporter votre concours au Tribunal.

 25   Pour le compte rendu d'audience, veuillez nous donner votre nom ainsi que

 26   votre date de naissance.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je m'appelle

 28   Christian Axboe Nielsen, et je suis né le 12 septembre 1973.

 


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  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie. Je dois vous dire,

  2   car bien évidemment vous le savez déjà, que vous allez prononcer la

  3   déclaration solennelle maintenant qui vous expose aux sanctions de parjure

  4   dans le cas où vous donneriez des réponses qui induiraient en erreur ou qui

  5   ne seraient pas conformes à la vérité à ce Tribunal. Veuillez maintenant

  6   lire la déclaration solennelle.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare que je dirai la vérité, toute la

  8   vérité et rien que la vérité.

  9   LE TÉMOIN : CHRISTIAN AXBOE NIELSEN [Assermenté]

 10   [Le témoin répond par l'interprète]

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. Vous pouvez vous asseoir.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Demirdjian.

 14   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je vous remercie, Messieurs les Juges.

 15   Interrogatoire principal par M. Demirdjian : 

 16   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Nielsen, Monsieur le Professeur.

 17   R.  Bonjour à vous.

 18   Q.  Puis-je commencer par vous poser quelques questions sur votre carrière

 19   professionnelle avant que d'aborder le sujet de votre rapport. Tout

 20   d'abord, pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre quel est le métier que

 21   vous occupez actuellement.

 22   R.  A l'heure actuelle, je suis professeur assistant chargé d'études de

 23   l'Europe du sud et de l'Europe de l'est à l'Université Aarhus au Danemark.

 24   Q.  Très bien. Je vais vous poser quelques questions sur votre carrière.

 25   Peut-être que nous pourrions afficher le curriculum vitae du Dr Nielsen,

 26   numéro 65 ter 3215. Intercalaire numéro 27.

 27   Monsieur le Professeur, veuillez nous parler un petit peu de votre parcours

 28   universitaire et vos différents diplômes.


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  1   R.  J'ai fait toutes mes études universitaires aux Etats-Unis. J'ai une

  2   licence de sciences politiques et en langue germanique et de littérature à

  3   l'Université Saint-Louis de Washington. Ensuite, j'ai obtenu un diplôme, un

  4   master, en affaires internationales, les droits de l'homme et affaires

  5   militaires sur l'Europe centrale et Europe de l'est à l'Université de

  6   Columbia, école internationale des affaires internationales et affaires

  7   publiques. Et ensuite, j'ai passé mon diplôme à l'école des arts et des

  8   sciences à la Columbia University, et j'ai obtenu mon doctorat dans le

  9   domaine de l'histoire centrale européenne et Europe de l'est. Je me suis

 10   spécialisé en particulier dans l'histoire de la Yougoslavie entre les deux

 11   guerres.

 12   Q.  Très bien. Alors, après votre doctorat -- je crois que c'était en mai

 13   2002; c'est exact ?

 14   R.  C'est exact.

 15   Q.  Donc, est-il exact de dire pour un certain nombre d'années, vous avez

 16   travaillé pour le bureau du Procureur au TPIY ?

 17   R.  Oui, j'ai travaillé pour le bureau du Procureur entre 2002 et 2004, et

 18   ensuite à nouveau entre 2006 jusqu'à la fin de l'année 2007.

 19   Q.  Très bien. Est-ce que vous travaillez actuellement comme consultant

 20   pour d'autres tribunaux ?

 21   R.  Oui. Je travaille actuellement comme consultant externe et analyste

 22   pour une des équipes de Défense du Tribunal spécial pour le Liban, et je

 23   travaille également comme consultant et expert externe pour le ministère de

 24   la Justice canadien pour le département des crimes de guerre et crimes

 25   contre l'humanité.

 26   Q.  Alors, maintenant je vais revenir à votre métier actuel. Vous avez

 27   enseigné à l'université d'Aarhus. Quel est votre domaine de spécialisation

 28   ?


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  1   R.  Je suis historien de formation. Je suis spécialisé dans l'histoire de

  2   l'Europe du sud-est, les Balkans, et mon domaine de spécialité est

  3   essentiellement ce qui correspondait à la Yougoslavie.

  4   Q.  Et est-ce qu'actuellement vous faites des recherches ou est-ce que vous

  5   travaillez sur des publications ?

  6   R.  Oui. J'ai quelque chose que je vais publier bientôt sur la dictature du

  7   roi Alexandre en Yougoslavie, et je travaille actuellement sur un nouveau

  8   projet de recherche qui a trait -- ou plutôt, je vais fournir une histoire

  9   sur l'organisation de la police dans la Yougoslavie socialiste.

 10   Q.  Et pour ce qui est de l'histoire de la police, pourriez-vous développer

 11   un petit peu ce sujet ?

 12   R.  Alors, j'ai l'intention d'écrire une histoire complète du ministère des

 13   Affaires internes dans la République socialiste fédérative de Yougoslavie

 14   entre la fin de la Deuxième Guerre mondiale et l'effondrement de la

 15   Yougoslavie en 1991. Ces travaux de recherche, je les mène comme je l'ai

 16   fait par le passé lorsque j'ai préparé mon doctorat et les recherches que

 17   j'ai menées ici au Tribunal. J'utilise les archives que j'arrive à accéder,

 18   en particulier en ex-Yougoslavie, et j'utilise surtout les archives de la

 19   République de Slovénie.

 20   Q.  Et avant de travailler sur ces travaux de recherche, est-il exact de

 21   dire que vous avez fait d'autres recherches sur des questions liées à la

 22   police ?

 23   R.  C'est exact. Je souhaite indiquer que ma dissertation que j'ai rédigée

 24   à Columbia University était surtout fondée sur des sources policières du

 25   Royaume de Yougoslavie. Pendant les années où je travaillais pour le

 26   Tribunal, je me suis essentiellement concentré sur ces sources policières,

 27   et c'est ainsi qu'il y a une continuité dans mes travaux de recherche car

 28   je me concentre sur ces sources policières et les documents qui sont


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  1   particulièrement pertinents sur le plan politique.

  2   Q.  Alors, après avoir travaillé pour le Tribunal et dans les années qui

  3   ont suivi, est-il exact que vous avez témoigné à trois reprises, ou plutôt,

  4   dans trois affaires distinctes ?

  5   R.  Oui, c'est exact.

  6   Q.  Bien. Et ce serait donc dans l'affaire Krajisnik, Stanisic et Zupljanin

  7   et Karadzic; c'est exact ?

  8   R.  C'est exact.

  9   Q.  Quel était le domaine de vos recherches dans ces cas ?

 10   R.  Dans ces trois cas, mon rapport a porté sur le ministère des Affaires

 11   intérieures de la République serbe de Bosnie-Herzégovine, sa création et

 12   son fonctionnement entre novembre 1990 jusqu'à la fin de l'année 1992.

 13   Q.  Je vous remercie.

 14   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Le curriculum vitae du Pr Nielsen ne

 15   figure pas comme note en bas de page dans le rapport de celui-ci. J'en

 16   demande donc son versement au dossier.

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Il sera reçu et recevra une cote.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ceci recevra la cote P364. Merci.

 19   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci.

 20   Q.  Monsieur le Professeur Nielsen, je souhaite maintenant aborder votre

 21   rapport et la méthodologie que vous avez utilisée lorsque vous avez préparé

 22   ce rapport. Est-il exact de dire qu'à la fin de l'année 2011 vous avez

 23   rencontré des membres du bureau du Procureur et que vous vous êtes mis

 24   d'accord sur l'étendue et le sujet du rapport ?

 25   R.  Pour être exact, je ne sais pas si j'ai rencontré des membres du bureau

 26   du Procureur à la fin de l'année 2011, mais j'étais certainement en contact

 27   avec le bureau du Procureur, et à ce moment-là j'ai donné mon accord pour

 28   préparer le rapport qui vous a été remis aujourd'hui, et le cadre de ma


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  1   recherche a été défini à ce moment-là.

  2   Q.  Merci. Est-il exact de dire que le cadre de votre rapport comprenait

  3   essentiellement deux points; le premier étant les évolutions historiques et

  4   politiques en ex-Yougoslavie et en Croatie entre les années 1990 et 1993,

  5   et que le deuxième point portait sur les structures du MUP en Croatie entre

  6   1991 et 1993, et essentiellement dans les entités serbes ? Est-ce exact ?

  7   R.  Oui, c'est exact.

  8   Q.  Je souhaite maintenant que vous expliquiez aux Juges de la Chambre

  9   comment vous avez préparé le rapport et comment vous avez sélectionné vos

 10   sources lors de la préparation de votre rapport.

 11   R.  A l'origine, on m'a remis un nombre assez conséquent de documents ainsi

 12   que des vidéos. C'est le bureau du Procureur qui me les a fournis. Il

 13   s'agissait d'une sélection qui avait été faite par l'équipe de

 14   l'Accusation. On m'a demandé d'examiner ces documents, qui étaient une

 15   façon de commencer mon travail de préparation de ce rapport. Une fois que

 16   je me suis familiarisé avec les documents qu'on m'avait remis, j'ai par la

 17   suite identifié un nombre supplémentaire de documents que je souhaitais

 18   examiner, et j'ai demandé - cela, je l'ai fait tout seul - et j'ai reçu

 19   tous les documents qui à mon sens seraient pertinents, et donc ces

 20   documents m'ont été remis par le bureau du Procureur. Dans plusieurs cas,

 21   le bureau du Procureur, de son propre gré, a également mis le doigt sur des

 22   nouveaux documents qu'ils jugeaient pertinents pour ce rapport, et ces

 23   documents-là m'ont été remis également, et ils m'ont demandé si ces

 24   documents-là devaient faire partie de mon analyse.

 25   Q.  Est-il exact de dire qu'on vous a également permis d'accéder aux bases

 26   de données du bureau du Procureur ?

 27   R.  Même si moi-même je n'ai pas fait énormément de recherches dans la base

 28   de données du bureau du Procureur en ce qui concerne des documents qui


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  1   étaient pertinents eu égard à ce rapport, dans tous les cas, j'étais en

  2   mesure d'identifier et d'obtenir les documents que je souhaitais s'agissant

  3   des documents complémentaires et pertinents. C'est moi-même qui aie

  4   identifié ces autres documents lorsque j'ai examiné un nouveau lot de

  5   documents qui m'a permis de retrouver d'autres documents pertinents, et

  6   c'est en examinant d'autres rapports antérieurs également ainsi que des

  7   jugements prononcés par ce Tribunal qui étaient pertinents et qui portaient

  8   sur la Republika Srpska Krajina.

  9   Q.  Alors, lorsque vous avez examiné tous ces documents, est-ce que vous

 10   examiniez dans ce cas les originaux ou les traductions ?

 11   R.  Il est important pour moi de vous dire, comme je l'ai fait dans des

 12   dépositions antérieures devant ce Tribunal, que dans tous les cas je mène

 13   mon analyse et fonde mes conclusions exclusivement sur les originaux en

 14   B/C/S. Je parle, je lis et j'écris le B/C/S parfaitement, et dans tous les

 15   cas je me fonde sur les originaux, comme je le fais dans le cadre de mes

 16   travaux de recherche historique. Ce qui signifie que dans la plupart des

 17   cas je n'ai pas examiné, à moins que le bureau du Procureur ne me l'ait

 18   demandé, je n'ai pas revu ou regardé les traductions pertinentes de ces

 19   documents.

 20   Q.  Est-il exact de dire, peut-être que c'est quelque chose qui m'a

 21   échappé, que vous enseignez cette langue également ?

 22   R.  Oui. J'ai également enseigné le B/C/S à l'université au Danemark.

 23   Q.  Alors, outre les documents auxquels vous avez eu accès au bureau du

 24   Procureur, avez-vous également utilisé d'autres sources ?

 25   R.  Oui. Outre les documents que j'ai reçus du TPIY, j'ai également utilisé

 26   un petit nombre de sources secondaires, des monographies qui ont été

 27   fournies par d'autres auteurs et j'ai utilisé de façon restreinte ces

 28   sources-là lorsque les sources primaires, à savoir les documents en


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  1   possession du Tribunal, ne permettaient pas de fournir des éléments

  2   d'information pertinents sur des événements précis qui, je le savais,

  3   s'étaient produits au cours de cette période et qui, à mon sens, auraient

  4   constitué un vide si je n'avais pas pu les citer d'une manière ou d'une

  5   autre. Donc j'ai utilisé un certain nombre de travaux, d'ouvrages, que j'ai

  6   identifiés moi-même, répertoriés moi-même, et qui ont été scannés et qui

  7   avaient un numéro ERN.

  8   Q.  Alors étant donné que nous parlons d'ouvrages qui ont été publiés par

  9   d'autres auteurs, il y a un certain nombre de noms qui me viennent à

 10   l'esprit. Comme, par exemple, le livre d'Ilija Petrovic, et un autre livre

 11   publié par Nikica Baric et Caslav Ocic. Comment avez-vous choisi ces

 12   ouvrages et de quelle manière vous êtes-vous reposé dessus ?

 13   R.  Je dois modifier quelque chose que je viens de dire un peu plus tôt.

 14   J'estime qu'en tant qu'historien et analyste que les livres d'Ilija

 15   Petrovic et Caslav Ocic sont, et pour l'un et pour l'autre, des sources

 16   primaires. C'est ainsi qu'il faut les percevoir. Ce sont des historiens

 17   professionnels, ceux-ci ont été écrits par des personnes qui elles-mêmes

 18   ont participé aux événements qu'ils décrivent. Dans le cas de Caslav Ocic,

 19   il était ministre des Affaires étrangères pendant un certain temps dans la

 20   Republika Srpska Krajina. Il a fourni une chronologie assez intéressante

 21   des événements qui se sont déroulés dans la Republika Srpska Krajina, et

 22   dans le cas d'Ilija Petrovic, il a fourni un récit détaillé des événements

 23   politiques et autres événements qui se sont déroulés en Slavonie orientale,

 24   à Baranja, et au Srem. Et lui-même a été un participant important à ces

 25   événements. Et d'après les normes pratiquées dans les analyses et études

 26   historiques, j'ai donné une note à ces récits et je sais que ces auteurs

 27   ont leur point de vue qui est subjectif, mais dans une certaine mesure j'ai

 28   comparé leurs récits avec d'autres documents qui portent sur des événements


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  1   analogues, et pour ce qui est des dates de certaines réunions et de

  2   certains événements en Slavonie orientale et dans l'ensemble de la Krajina,

  3   j'estime que leurs récits sont fiables lorsqu'ils relatent certains

  4   événements, et c'est la raison pour laquelle j'ai utilisé leurs ouvrages,

  5   mais de façon restreinte.

  6   Et pour ce qui est de Nikica Baric, c'est un jeune historien croate, et

  7   d'habitude je n'utiliserais pas un ouvrage rédigé par un historien croate

  8   lorsqu'il parle du soulèvement serbe en Croatie, parce qu'il y a un risque,

  9   le risque qu'il y ait un parti pris, mais j'indique que j'ai utilisé son

 10   ouvrage d'une façon très limitée, mais je l'ai utilisé pour établir des

 11   points chronologiques, et les travaux de Baric ont été bien accueillis sur

 12   l'ensemble de l'ex-Yougoslavie, et il a publié des ouvrages sur le RSK et

 13   dans les ouvrages critiques il a reçu un -- il est très estimé en Serbie et

 14   il est perçu par les historiens serbes comme étant un historien tout à fait

 15   reconnu pour cette période.

 16   Q.  Alors, puisque vous parlez des analyses faites par les pairs, Monsieur

 17   le Pr Nielsen, pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre les

 18   différences peut-être qu'il y a entre un historien qui choisirait --

 19   comment un historien choisit ce qu'il doit inclure dans un rapport par

 20   opposition à comment des avocats abordent la question du versement au

 21   dossier d'un document ?

 22   R.  Eh bien, au sens le plus basique du terme encore une fois la

 23   distinction qui existe entre les sources primaires et les sources

 24   secondaires, je crois que c'est ça qui est important. Les sources primaires

 25   sont les sources qui sont des documents qui sont fournis par les

 26   institutions gouvernementales, les partis politiques, et cetera, qui eux-

 27   mêmes sont en réalité partie prenante aux événements historiques qui se

 28   déroulent. Encore une fois, ici, je parle des mémoires, des


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  1   correspondances, des conversations téléphoniques, je comprends tous ces

  2   éléments-la, les courriels aussi, ce sont ceux des acteurs principaux qui

  3   ont pris part à ces événements historiques qui sont analysés par la suite

  4   par un tribunal ou un historien.

  5   Et ensuite je parle de sources secondaires qui, dans la plupart des cas

  6   sont des ouvrages, des ouvrages universitaires, ou des publications qui

  7   fournissent des informations, des résumés de deuxième main ou des récits de

  8   deuxième main de ces mêmes événements, et dans ces cas-là, bien évidemment,

  9   je pense que les historiens et les avocats accorderaient un poids beaucoup

 10   moins important à ces sources-là, non seulement parce que ces sources dans

 11   une grande mesure proviennent de ouï-dire, mais également pour des raisons

 12   subjectives et parce que ces sources secondaires sont éloignées pour ce qui

 13   est du lieu et du temps des événements originaux et ces personnes-là n'ont

 14   pas participé directement aux événements.

 15   Donc en tant qu'analyste et historien, lorsque j'ai travaillé pour le

 16   Tribunal, j'ai essayé dans ce rapport-ci également de me fonder dans la

 17   mesure du possible sur des sources primaires, et je souhaite noter en

 18   particulier des sources primaires qui émanent de la partie serbe pour nous

 19   permettre de réduire le parti pris inhérent qui risquerait de se faire

 20   sentir si au lieu de cela je me reposais sur les récits des événements

 21   fournis par les Croates.

 22   Q.  Alors, pour en terminer sur ce chapitre, Monsieur le Professeur

 23   Nielsen, pourriez-vous nous expliquer comment vous avez procédé à votre

 24   sélection d'articles de presse ?

 25   R.  Oui. Dans un petit nombre de cas dans le rapport, j'ai utilisé des

 26   articles de presse, des articles de journaux ou des passages d'émissions

 27   télévisées, ce que nous appelons dans notre jargon d'analystes des sources

 28   ouvertes. Je crois que dans la grande majorité des cas, je me suis procuré


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  1   des sources ouvertes serbes et encore une fois pour réduire le risque d'un

  2   quelconque parti pris qui aurait pu voir le jour si je m'étais au lieu de

  3   cela reposé ou fondé sur des sources ouvertes croates correspondant à cette

  4   période.

  5   Je me suis également fondé sur un certain nombre d'entretiens et

  6   d'interviews qui ont été publiés dans les médias serbes, et en particulier

  7   il s'agit d'interviews avec les auteurs principaux en RSK ou d'autres

  8   régions dans d'autres structures politiques de la Krajina.

  9   Q.  Justement du point de vue des entretiens --

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Un instant, Monsieur Demirdjian, s'il

 11   vous plaît.

 12   Monsieur Neilsen, vous avez dit :

 13   "Et notamment, je pense à des sources primaires émanant des Serbes, et ceci

 14   afin de minimiser l'effet de biais qui pourrait entacher les récits des

 15   mêmes événements émanant des Croates."

 16   Est-ce que vous pourriez nous donner quelques précisions à ce sujet,

 17   s'il vous plaît.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Compte tenu de ce

 19   qui est connu des organes de la police et des organes militaires de toutes

 20   les parties au conflit en ex-Yougoslavie, et notamment dans la période

 21   s'étendant de 1990 à 1995, qu'il serait extrêmement délicat ou, en tout

 22   cas, problématique de fonder une analyse du fonctionnement de la police

 23   dans les parties du territoire de la Croatie contrôlées par les Serbes,

 24   analyse qui se fonderait uniquement sur des sources croates, parce que ces

 25   mêmes sources auraient un intérêt particulier à dépeindre la partie serbe

 26   dans ses actions de la façon la plus négative possible, et pour moi il

 27   serait extrêmement difficile de confirmer si oui ou non ces sources croates

 28   nous fournissent un récit fiable ou non des événements en question.


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  1   A l'inverse, je crois que de se reposer sur des sources yougoslaves ou

  2   serbes pendant la même période qui, elles aussi sont marquées par leurs

  3   intérêts propres, serait problématique, parce que cet intérêt consisterait

  4   à dépeindre leurs propres actions sous un jour le plus favorable possible.

  5   Donc, si les Serbes ou les forces yougoslaves dans les documents qui

  6   émanent d'eux parlent d'événements sous un angle négatif ou défavorable à

  7   la situation sécuritaire, eh bien il y a une probabilité assez importante

  8   que ceci se soit effective passé, mais pour la même raison en ce qui

  9   concerne le ministère bosno-serbe des Affaires intérieures, je me suis

 10   appuyé presque exclusivement sur les documents propres des Serbes de Bosnie

 11   afin d'éviter autant que possible tout biais, tout parti pris, qui pourrait

 12   entacher les documents émanant de la partie bosno-musulmane ou bosno-croate

 13   concernant la police serbe de Bosnie.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. Veuillez poursuivre, Monsieur

 15   Demirdjian.

 16   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges. Je voudrais

 17   maintenant que nous affichons le document numéro 2130 de la liste 65 ter,

 18   intercalaire numéro 302.

 19   Q.  C'est juste pour donner un exemple d'un article de journal que vous

 20   avez sélectionné dans le cadre de votre rapport.

 21   Alors, Monsieur Nielsen, est-ce que vous voyez bien la version en B/C/S

 22   s'afficher sur la partie gauche de votre écran ?

 23   R.  Oui.

 24   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Pouvons-nous faire défiler la page en

 25   B/C/S afin de voir le nom de l'auteur, ainsi que le nom de la publication ?

 26   Est-ce que vous le voyez ? Est-ce que vous voyez la partie gauche en B/C/S,

 27   la partie gauche de cet article ? C'est la seule page que nous ayons ? Très

 28   bien.


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  1   Q.  Alors, Monsieur Nielsen, est-ce que vous reconnaissez cet article ?

  2   R.  Oui, je le reconnais, il s'agit d'un entretien avec Goran Hadzic que je

  3   cite dans mon rapport. Et si je puis me permettre, je crois que dans la

  4   version en B/C/S le nom du journaliste apparaît à la fin de l'article

  5   plutôt qu'au début.

  6   Q.  Merci. Alors, est-ce qu'il s'agit d'un journal ou d'un magazine ?

  7   M. GOSNELL : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Comme vous

  8   le savez, nous avons élevé une objection à l'admission en tant que pièce à

  9   conviction de ce document. Alors, en soi, bien entendu, cela ne nous

 10   empêche pas d'entendre M. Nielsen, ni d'entendre son opinion en qualité

 11   d'expert quant au contenu de cette pièce, mais si jamais vous deviez

 12   prendre la décision de ne pas admettre ce document, je souhaite suggérer

 13   que d'entendre la réponse à toutes ces questions concernant ce document, sa

 14   provenance, la nature de la publication et l'opinion d'expert de M. Nielsen

 15   consisterait à -- enfin, entrerait en contradiction avec la décision que

 16   vous auriez prise de ne pas le verser au dossier. Donc, je souligne qu'il

 17   s'agit là de déclarations de M. Hadzic données à un journaliste bien après

 18   les événements, et je souhaiterais entendre quel est le point de vue de la

 19   Chambre quant à l'admissibilité, à la recevabilité de ce document ou non,

 20   avant que nous entendions M. Nielsen répondre.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur le Procureur.

 22   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je ne sais pas si ceci modifiera en quoi

 23   que ce soit la position de mon confrère, mais je n'ai pas à ce stade la

 24   moindre intention de m'appesantir sur le contenu de cet article. Je

 25   souhaite simplement que M. Nielsen nous explique de quelle façon il a

 26   choisi cet entretien, et comment il en a déterminé la fiabilité. Donc, je

 27   n'ai pas l'intention de m'engager sur le terrain de la teneur, compte tenu

 28   de cet article. Je ne sais pas si cela change en quoi que ce soit la


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  1   position de mon confrère, mais j'ai simplement l'intention et uniquement

  2   l'intention de m'appuyer sur cet article en qualité de référence à l'appui

  3   de ce qui figure au rapport, et rien d'autre.

  4   M. GOSNELL : [interprétation] Eh bien, je ne vois pas comment on peut

  5   s'aventurer sur le terrain de la fiabilité de ce document sans s'intéresser

  6   au moins un peu à son contenu. Et notre position est tout à fait claire, il

  7   n'y a pas d'indication suffisante qui permettra de considérer ce que le

  8   journaliste a consigné ici comme étant fiable. Il s'agit des propos de M.

  9   Hadzic. Je pense que ceci est nettement en deçà de ce que la Chambre estime

 10   comme devant être rempli pour admettre un document dans des circonstances

 11   ordinaires. Et le fait de vouloir le faire passer par un témoin expert n'y

 12   change rien. Je pense que c'est même pire.

 13   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Eh bien, Messieurs les Juges, je crois

 14   qu'il suffirait de demander à M. Nielsen comment et pourquoi il a choisi

 15   cet article de journal, sans s'intéresser à son contenu, et si jamais c'est

 16   nécessaire, puisqu'il semble y avoir maintien de cette objection quant à

 17   l'exactitude et à la fiabilité de l'article, nous pourrons toujours le

 18   faire. Nous pouvons faire une enquête, essayer de déterminer si ce

 19   journaliste est à notre disposition, mais à ce stade ce qui m'intéresse,

 20   c'est la façon dont cet article de journal et d'autres ont pu être choisis

 21   en tant que sources. Il y en a beaucoup d'autres dans le rapport.

 22   [La Chambre de première instance se concerte]

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Veuillez continuer de la manière que

 24   vous avez indiquée, Monsieur Demirdjian.

 25   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci.

 26   M. GOSNELL : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. J'ai

 27   simplement une demande en provenance de mon client, et je pense qu'elle est

 28   légitime. Est-ce que nous pourrions tout simplement prendre soin de la non-


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  1   diffusion de l'image, la photographie des enfants de M. Hadzic à

  2   l'attention du public.

  3   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Tout à fait.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

  5   Monsieur le Procureur, à vous.

  6   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges. Alors, passons

  7   à la dernière page en B/C/S, le bas de la page.

  8   Q.  Dans la version anglaise, je crois que vous pouvez voir que l'auteur

  9   est Gordana Jovanovic. Est-ce que vous pourriez nous expliquer de quelle

 10   façon vous en êtes venu à choisir cet article de journal et pourriez-vous

 11   expliquer aux Juges quelle est l'évaluation que vous en faites ?

 12   R.  Je n'arrive pas à me souvenir si c'est là un document qui m'a été

 13   fourni par le bureau du Procureur ou si c'est moi-même qui en ai fait la

 14   demande. Je peux, cependant, vous fournir un commentaire : la raison pour

 15   laquelle j'ai décidé de m'y référer dans mon rapport est qu'il s'agit là

 16   d'un entretien avec l'accusé, qui était lui-même un acteur important dans

 17   le contexte de la RSK et du MUP de la RSK. Alors, comme le nom le suggère,

 18   cette publication est un magazine serbe qui publie de très nombreux

 19   entretiens avec des acteurs importants des événements dans les parties du

 20   territoire de la Yougoslavie contrôlées par les Serbes au milieu des années

 21   1990.

 22   Et au cours des années précédentes, en tant qu'analyse, j'ai eu la

 23   possibilité de lire de nombreuses éditions de ce magazine qui s'appelle

 24   "Intervju". Par conséquent, ce magazine m'est tout à fait familier, ainsi

 25   que le type d'entretien auquel ils procédaient et le type de personne avec

 26   qui les entretiens étaient faits.

 27   En tant qu'analyse, je dirais que, donc dans l'expérience qui est la

 28   mienne, le contenu de ces entretiens qui paraissaient dans le magazine


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  1   "Intervju" correspondait généralement d'assez près aux déclarations

  2   officielles faites par les personnalités en question dans d'autres

  3   contextes, qu'il s'agisse de la télévision, de documents politiques

  4   officiels, de discours. Par conséquent, en tant qu'analyste, je n'ai à ce

  5   jour aucune raison de douter de la véracité des propos qui sont rapportés

  6   dans ces entretiens ou de leur transcription telle que parue dans le

  7   magazine en question, et a priori je ne me rappelle aucun cas de différends

  8   sérieux qui seraient intervenus entre les journalistes de ce magazine et

  9   les personnalités interviewées quant au contenu de ce qui avait été publié.

 10   Q.  Très bien. Alors, Monsieur Nielsen, votre rapport a été finalisé au

 11   mois de juin et rendu disponible à la Défense fin juin 2012. Depuis cette

 12   date, n'est-il pas exact de dire qu'on vous a fourni une nouvelle série de

 13   documents ?

 14   R.  Oui, c'est exact. Récemment, on m'a fourni toute une série de documents

 15   émanant de la Serbie qui n'étaient pas disponibles au sein du bureau du

 16   Procureur à l'époque où j'ai rédigé mon rapport.

 17   Q.  Avez-vous eu la possibilité d'examiner une partie de ces documents ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Nous y reviendrons ultérieurement. Serait-il exact de dire qu'au mois

 20   de décembre de l'année dernière, donc en 2012, vous avez rencontré des

 21   représentants du bureau du Procureur pour une séance de récolement à la fin

 22   de laquelle un erratum a été préparé ?

 23   R.  Oui, c'est exact.

 24   Q.  Et dans cet erratum il y a eu correction d'un certain nombre de

 25   coquilles ?

 26   R.  C'est exact.

 27   Q.  Je vous remercie.

 28   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Pouvons-nous passer brièvement à huis clos

 


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  1   partiel, s'il vous plaît.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Passons à huis clos partiel.

  3   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

  4   [Audience à huis clos partiel]

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 15   [Audience publique]

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 17   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

 18   Q.  Alors ceci met un terme à cette partie de mon interrogatoire principal,

 19   Monsieur Nielsen. Je voudrais maintenant que nous passions à votre rapport.

 20   Je crois que vous avez demandé à ce que l'on vous remette un exemplaire

 21   imprimé de votre propre rapport. J'en ai un. A moins qu'il n'y ait des

 22   objections, je voudrais le remettre à M. Nielsen.

 23   Je vais commencer avec le contexte historique et politique général et

 24   avancerai dans votre rapport en procédant dans l'ordre qui est celui du

 25   rapport. Au paragraphe numéro 3, vous vous référez au recensement de 1991

 26   qui, pour la Croatie, indiquait que sur une population totale de 4 784 265

 27   habitants, 78,1 % étaient Croates et 12,2 % appartenaient au groupe

 28   ethnique serbe.

 


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  1   Alors, juste pour être tout à fait clair, vous avez obtenu ces chiffres sur

  2   la base du recensement tel que publié par le bureau croate des

  3   statistiques, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui, ainsi que c'est indiqué en note de bas de page.

  5   Q.  A votre connaissance, ces chiffres sont-ils exacts ? Ont-ils jamais été

  6   contestés ?

  7   R.  A ma connaissance, il n'y a pas eu de contestation significative de ces

  8   chiffres.

  9   Q.  Dans le recensement, il y a un certain nombre de groupes ethniques

 10   énumérés. Nous avons les Croates, les Serbes, la population d'origine

 11   hongroise, et cetera, et il y a également une partie de la population qui

 12   est désignée comme les Yougoslaves. Alors, est-ce que vous pourriez nous

 13   dire comment il convient de comprendre ce terme de groupe ethnique

 14   "yougoslave", à votre connaissance ?

 15   R.  Au sein de l'ex-Yougoslavie était prévue cette possibilité de se

 16   déclarer Yougoslave plutôt que, par exemple, Croate ou Serbe. C'était le

 17   cas dans la Yougoslavie socialiste. En me fondant sur mes connaissances

 18   d'historien, je dirais que ceux qui se déclaraient Yougoslaves étaient

 19   avant tout des citadins dans différentes villes yougoslaves, et dans un

 20   nombre important de cas il s'agissait également de personnes issues d'un

 21   mariage mixte et qui, pour cette raison, ne souhaitaient pas se déclarer

 22   comme appartenant à l'une ou l'autre des deux nationalités. Mais cette

 23   catégorie ou ce groupe des Yougoslaves n'a jamais représenté à un aucun

 24   moment l'un des groupes les plus importants dans les recensements à

 25   l'époque de la Yougoslavie.

 26   Q.  Merci.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Demirdjian, juste pour le

 28   compte rendu d'audience, ce n'est pas moi qui étais en train de m'exprimer.


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  1   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Oui, je m'en suis rendu compte.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

  3   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

  4   Q.  Alors nous allons passer aux élections en Croatie, paragraphe numéro 5,

  5   élections d'avril, mai 1990. Vous y parlez des principaux partis politiques

  6   comme le HDZ et le SDS. Et à l'appui de ceci, je crois que nous pouvons

  7   citer ce qui figure en note de bas de page numéro 4, vous référez encore

  8   une fois à l'ouvrage publié par Nikica Baric concernant le nombre de sièges

  9   remportés par le SDS.

 10   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Alors, pourrions-nous maintenant afficher

 11   le document qui figure à l'intercalaire 314. Sur la liste 65 ter, c'est --

 12   L'INTERPRÈTE : Un numéro que l'interprète n'a pas entendu.

 13   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] -- en anglais, je crois qu'il faut

 14   afficher le numéro de page ERN qui se termine en 0624. En fait, c'est le

 15   résumé en anglais de cette partie de l'ouvrage. Merci.

 16   Dans ce résumé en anglais, il nous faudrait d'ailleurs la page numéro 2,

 17   s'il vous plaît. Voilà. Je crois que c'est plutôt vers le bas de la page

 18   que Nikica Baric explique la chose suivante : il dit que certaines des

 19   actions du nouveau gouvernement croate ne pouvaient être soutenues par les

 20   Serbes. C'était juste après les élections.

 21   Q.  Alors, est-ce que vous pourriez nous expliquer à quoi il se réfère ici

 22   ?

 23   R.  Eh bien, comme je l'indique dans le paragraphe numéro 5, les premières

 24   élections multipartites qui ont été organisées en Croatie en 1990 ont

 25   conduit à la victoire des partis nationalistes, et notamment à celle du

 26   parti assez nationaliste de l'Union démocratique croate, le HDZ, qui a

 27   obtenu le plus grand nombre de voix. Par ailleurs, le Parti démocratique

 28   serbe, ou SDS, parti national représentant les Serbes de Croatie, a lui


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  1   aussi reçu un nombre significatif, un nombre important de voix de la part

  2   des Serbes vivant en Croatie. L'un comme l'autre de ces deux partis se

  3   définissent comme des organisations politiques censées défendre les

  4   intérêts des Croates pour le HDZ, et des Serbes pour le SDS. En tant que

  5   tels, ils occupaient les deux extrémités du spectre politique, et chacun de

  6   ces deux partis dépensait une énergie politique considérable à s'efforcer

  7   de convaincre la population correspondante, la sienne donc, qu'elle ne

  8   pouvait trouver la sécurité physique, politique, financière et économique

  9   qu'en se rassemblant sur une base ethnique.

 10   Dans le cas du HDZ, et notamment de son dirigeant, Franjo Tudjman, on a

 11   assisté de façon répétée à l'affichage de symboles nationalistes dont

 12   certains -- à vrai dire, ils étaient nombreux à renvoyer à l'époque de

 13   l'Etat indépendant de Croatie, Etat fasciste qui avait existé de 1941 à

 14   1945. Il s'agissait d'une imagerie, d'une rhétorique, entre autres choses,

 15   qui dans leur ensemble ont conduit Nikica Baric à confirmer que les Serbes

 16   de Croatie doutaient fortement de leur avenir au sein de la Croatie,

 17   notamment d'une Croatie qui se dirigerait vers son indépendance.

 18   Q.  Alors la phrase suivante après celle qui a déjà été citée :

 19   "Les Serbes ont utilisé toutes les occasions qui se sont présentées pour

 20   montrer que les Croates représentaient une menace pour eux et l'ont utilisé

 21   comme prétexte pour leurs propres actions agressives."

 22   Qu'en dites-vous ?

 23   R.  Sur la base de mes propres observations de la politique serbe en

 24   Croatie pendant cette période, je dirais que les Serbes ont réagi de façon

 25   très négative à la victoire retentissante du HDZ et à l'élection de Franjo

 26   Tudjman comme président de la Croatie. Comme je l'indique au paragraphe

 27   numéro 6, l'angoisse qui a résulté de cette victoire au sein de la

 28   communauté serbe de Croatie a très rapidement, et plus tard


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  1   systématiquement, été rapprochée de la mémoire qu'avaient les Serbes de

  2   Croatie de l'oppression dont ils avaient été victimes en Croatie par le

  3   passé. Cette angoisse a fait l'objet dans une très grande mesure d'une

  4   manipulation de la part des hommes politiques serbes en Croatie. Encore une

  5   fois, c'était pour eux un moyen de mobiliser la population serbe en Croatie

  6   autour du SDS qui se présentait comme étant le seul représentant politique

  7   légitime des Serbes de Croatie.

  8   Q.  Alors, sur la base des documents et des ouvrages que vous avez lus, que

  9   savez-vous de la position des Serbes par rapport à une Croatie indépendante

 10   ?

 11   R.  Le seul précédent réel à cette notion, dans la mémoire vivante en tout

 12   cas, et vu depuis la situation qui était celle de 1991, était l'Etat

 13   indépendant de Croatie, l'Etat fasciste déjà évoqué. Pour cette raison et

 14   en raison de la politique génocidaire qu'avait menée l'Etat indépendant de

 15   Croatie à l'encontre de la population serbe de Croatie, la notion même d'un

 16   Etat croate indépendant était susceptible, même dans les meilleurs

 17   circonstances possibles, d'entraîner une angoisse très importante au sein

 18   d'une grande partie de la population serbe de Croatie.

 19   Comme je l'ai déjà indiqué, la rhétorique quasi incendiaire de Franjo

 20   Tudjman, qui lui-même était historien et n'a pas hésité à s'engager dans la

 21   voie d'un révisionnisme au nom duquel il a par moments dénié les

 22   souffrances dont les Serbes avaient été victimes en Croatie ou, en tout

 23   cas, minimisé les souffrances des Serbes en Croatie pendant la Seconde

 24   Guerre mondiale, tout cela a contribué à la création d'une atmosphère

 25   d'angoisse extrême parmi de très nombreux Serbes en Croatie.

 26   Q.  Vous nous avez parlé de cette rhétorique à l'origine d'une angoisse

 27   très importante au sein d'une grande partie des Serbes de Croatie. Mais y

 28   avait-il une partie de la population serbe qui avait un point de vue


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  1   favorable quant à une Croatie indépendante ?

  2   R.  Il est difficile de déclarer s'il y avait une partie, quelle qu'elle

  3   soit, de la population serbe qui avait une optique favorable en ce qui

  4   concerne une Croatie indépendante. Toutefois, l'on pourrait sans doute dire

  5   que dans une certaine partie des Serbes, tout particulièrement ceux qui

  6   résidaient dans les grandes villes croates, ces Serbes auraient pu

  7   éventuellement être disposés à appuyer davantage d'autonomie, si ce n'est

  8   de l'indépendance de la Croatie, si le HDZ avait tenté de diffuser cette

  9   politique de façon conciliante. C'est, je dois dire là, des conjectures de

 10   ma part pour la bonne raison que le HDZ n'a rien fait en la matière.

 11   Q.  Très bien. Si nous passons au paragraphe 6, vous expliquez ici comment

 12   les hommes politiques en Croatie cultivaient la crainte chez la minorité

 13   serbe, que les Serbes seraient soumis à la discrimination et reliaient

 14   cette crainte au génocide qui était intervenu pendant la Deuxième Guerre

 15   mondiale. Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre quelle est la position

 16   dans les cercles universitaires par rapport à cette affirmation qu'un

 17   génocide avait été réalisé à l'encontre des Serbes pendant la Deuxième

 18   Guerre mondiale ?

 19   R.  Je crois que cela reflète bel et bien le consensus des cercles

 20   universitaires comme je le déclare au paragraphe 6, que l'Etat indépendant

 21   fasciste de Croatie avait mis en œuvre des politiques extrêmement

 22   discriminatoires à l'encontre des Serbes et autres minorités, en

 23   particulier les Juifs et les Romains, en Croatie, aboutissant au génocide à

 24   l'encontre de ces minorités sur le territoire de la NDH qui était, ne

 25   l'oublions pas, dans le territoire de la Croatie d'aujourd'hui mais

 26   également en Bosnie-Herzégovine et une grande partie de la Serbie.

 27   Les politiques de l'Etat NDH variaient en intensité selon l'époque et en

 28   particulier certaines politiques extrêmement négatives recherchées par cet


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  1   Etat, par exemple, la conversion forcée de croyants serbes orthodoxes au

  2   catholicisme variait donc au fil du temps. Toutefois, j'estime que c'est là

  3   la réflexion bel et bien des connaissances savantes en l'Etat quant aux

  4   politiques du NDH qui étaient absolument toxiques, négatives et

  5   relativement génocidaires en ce qui concerne tout particulièrement les

  6   Serbes, les Romains et les Juifs, les populations donc de cet Etat.

  7   Q.  Au paragraphe 6 je pense, où vous évoquez une déclaration de Milan

  8   Martic dans un entretien en 1994. Peut-être que nous pourrions l'afficher.

  9   Il s'agit du document 65 ter 4981, à l'onglet 315.

 10   En note de bas de page, vous y indiquez que Milan Martic avait déclaré ou

 11   parlait d'une indication claire du rétablissement du nazisme de la période

 12   1941 à 1945. Et là encore pour en venir à votre observation au paragraphe 6

 13   de la façon dont les hommes politiques serbes s'en servaient, les

 14   événements dont se servaient -- ou maniaient les événements de la Deuxième

 15   Guerre mondiale, que pourriez-vous affirmer à cet égard ?

 16   R.  La déclaration de Milan Martic reflète bel et bien et exactement la

 17   rhétorique politique des dirigeants serbes en Croatie de la période allant

 18   du moment des élections multipartites en Croatie et jusqu'à 1995, où lui-

 19   même et d'autres ont préféré décrire le -- désolé, tout d'abord, le

 20   mouvement de création d'une Croatie indépendante et après 1991, le nouvel

 21   Etat indépendant en Croatie comme étant le retour de l'Etat fasciste

 22   indépendant de Croatie datant de la Deuxième Guerre mondiale.

 23   Et comme je le déclare au moins au paragraphe 6, logique et un corollaire

 24   funeste était le choix de nombre de dirigeants serbes politiques et de

 25   certains Serbes de la grande population de parler des Croates d'emblée

 26   comme étant des Oustachi, c'est-à-dire un mouvement fasciste qui a mené à

 27   l'Etat indépendant croate et donc à citer les organes de l'Etat à Zagreb,

 28   donc l'Etat croate, comme étant des organes oustachi ou du NDH, et encore


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  1   une fois après 1991 de citer le nouvel Etat indépendant croate comme étant

  2   le NDH.

  3   Il convient de noter, comme je le fais d'ailleurs au paragraphe 6, que ce

  4   type d'association de la parole entre le mouvement indépendant croate et

  5   l'Etat indépendant dans les années 1991 et l'Etat croate fasciste des

  6   années '40 de l'autre côté se reflétait du côté croate par une tendance

  7   tout aussi funeste dans les médias croates et les hommes politiques croates

  8   de citer les Serbes dans l'ensemble comme étant des Chetniks, c'est-à-dire

  9   des Serbes nationalistes extrêmes puisqu'il s'agissait donc pour les

 10   Chetniks du mouvement royaliste qui existait pendant la Deuxième Guerre

 11   mondiale.

 12   Q.  Passons au paragraphe 7, Docteur Nielsen, vous y expliquez comment en

 13   juin et en juillet 1990 les Croates serbes ont commencé à contempler ou à

 14   parler de l'établissement de l'autogouvernement et de l'autonomie de la

 15   nation serbe.

 16   Alors ceci s'est tenu, peut-on dire, quasiment une année après l'adoption

 17   de la nouvelle constitution en Croatie, n'est-ce pas ?

 18   R.  Est-ce que vous avez dit six mois avant ou après ?

 19   Q.  Six mois avant.

 20   R.  Oui, c'est exact.

 21   Q.  Pour être plus clair, quand la nouvelle constitution croate a-t-elle

 22   été adoptée ?

 23   R.  Elle a été promulguée le 22 décembre 1990.

 24   Q.  Il semblerait qu'à l'époque des modifications constitutionnelles ont

 25   été proposées d'ores et déjà à l'été 1990. Peut-être que l'on pourrait

 26   consulter l'onglet 8. Document 65 ter 50, 5-0. Là encore, il s'agit d'un

 27   document qui se trouve dans votre rapport. Il s'agit donc d'un article de

 28   presse venant de Tanjug du 31 juillet 1990. On y voit dans le droit fil de


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  1   la décision du référendum serbe qui se tiendrait. Vers la fin de cet

  2   article, le paragraphe, l'avant-dernier, indique que :

  3   "Le Conseil national serbe d'aujourd'hui rejette tous les amendements à la

  4   constitution de la République croate adoptée par l'assemblée croate. Le

  5   Conseil rejette également l'utilisation de symboles nationaux, tout

  6   particulièrement le blason," et cetera.

  7   Bien que la constitution ait été adoptée en décembre de 1990, il semble que

  8   déjà à l'été 1990 des modifications constitutionnelles étaient déjà

  9   enclenchées. Alors, quelle était la position dans l'ensemble des hommes

 10   politiques serbes par rapport à ces modifications constitutionnelles ?

 11   R.  La position du Parti démocratique serbe était la suivante, qu'à

 12   l'évidence négative concernant les modifications proposées et qui

 13   mèneraient, ou ouvriraient la voie tout du moins, vers l'indépendance

 14   croate et dans le sens de toute modification constitutionnelle qui pourrait

 15   à l'évidence, aux yeux des Serbes, aboutir à une régression ou

 16   l'élimination de leur statut en terme de nation constituante de la Croatie,

 17   un statut constitutionnel dont ils jouissaient jusqu'en 1990. Donc, dans ce

 18   cas, ce que nous voyons ici, c'est la rédaction de la nouvelle

 19   constitution. Ce projet est à l'évidence une procédure de plus longue

 20   haleine qui a été débattue au Sabor, c'est-à-dire au parlement en Croatie,

 21   et que les Serbes sont d'ores et déjà à cette étape en train d'exprimer des

 22   préoccupations graves quant à l'orientation de ce projet.

 23   Q.  Au paragraphe 7, vous expliquez qu'un référendum s'est tenu par rapport

 24   à l'autonomie serbe, et vous citez le rapport de la commission centrale qui

 25   supervisait ce vote.

 26   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Document 59 de la liste 65 ter, à l'onglet

 27   12. Si vous voulez bien, nous allons l'afficher. Certes.

 28   Q.  Alors, pourriez-vous nous dire comment, dans quelle optique vous voyez


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  1   les résultats, c'est-à-dire 567 127 personnes ont voté pour l'autonomie

  2   serbe contre 144 contre ? Comment expliquez-vous ce résultat ?

  3   R.  Ce que nous voyons pendant cette période aussi bien en Croatie qu'en

  4   Bosnie-Herzégovine, ce sont des schémas des partis politiques des Serbes

  5   ethniques, aussi bien en Croatie qu'en Bosnie-Herzégovine, nommer le Parti

  6   démocratique serbe pour instaurer leur position politique qui était contre

  7   une autonomie accrue de l'indépendance de la Croatie et de la Bosnie-

  8   Herzégovine. L'une des façons dont l'un de ces partis a mobilisé l'appui

  9   politique et a fait connaître son opposition aux tendances vers

 10   l'indépendance croate ou bosnienne, c'est de tenir justement ces

 11   référendums. Ce référendum, par exemple, en Croatie est en fait un

 12   référendum autosélectif. Toute personne qui souhaite participer à ce

 13   référendum organisé par les Serbes en Croatie sera disposée à voter oui.

 14   Tous ceux qui sont contre ne prendront sans doute pas part à ce référendum.

 15   Et donc, c'est aussi pour cette raison, comme je le déclare au paragraphe

 16   8, que les autorités de la République de Croatie considéraient ce

 17   référendum comme étant informel, officieux, et donc illicite, et ont tenté

 18   d'y mettre fin.

 19   Q.  Si nous passons à la page 1 de la version anglaise, au point 2, on y

 20   voit les municipalités en bas de la page, si vous voulez bien faire un gros

 21   plan -- oui. Merci. Donc vous voyez les municipalités où ce vote s'est

 22   déroulé. Knin, Benkovac, et cetera, et à la quatrième ligne, l'on y voit

 23   que certaines municipalités en Slavonie orientale et Baranja, Beli Manastir

 24   et Vukovar, ont également pris part à ce référendum.

 25   Et si vous voulez bien revenir au document suivant, P62.50. A l'onglet 334.

 26   C'est un rapport d'un poste de police. C'est un document qui ne se trouve

 27   pas dans votre rapport, d'ailleurs. Je crois que vous avez eu la

 28   possibilité de l'examiner.


Page 2429

  1   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Pourrions-nous l'avoir à l'écran.

  2   Q.  Vous voyez en haut à gauche poste de sécurité publique de Djakovo. Je

  3   sais que je vous l'ai déjà demandé, mais savez-vous où se trouve Djakovo

  4   exactement ?

  5   R.  Oui. Djakovo se trouve en Slavonie.

  6   Q.  Et il y semble de ce document, si l'on examine ce rapport, la police

  7   croate s'est ingérée, comme vous l'avez dit dans votre rapport, pendant ce

  8   référendum. Vous avez dit il y a quelques instants qu'il s'agissait donc

  9   d'un référendum autosélectif. Pourriez-vous tirer quoi que ce soit de ce

 10   rapport de police à cet égard ?

 11   R.  Eh bien, tout d'abord, je note que dans le document précédent, nous

 12   avons vu la liste des municipalités qui s'y trouvaient, et dans certains

 13   cas des segments de municipalités qui sont conformes aux régions où il y

 14   avait une majorité ou tout du moins une population très importante serbe.

 15   Donc, là encore, ceci indique que ce n'était pas un référendum national,

 16   territorial, mais plutôt qui a été réalisé tout d'abord dans les régions où

 17   les populations serbes de Croatie se trouvaient en concentration

 18   importante.

 19   Et si l'on regarde le document que nous avons devant les yeux, nous y

 20   voyons qu'il y a des particuliers qui se sont servis de leurs propres

 21   véhicules et, en fait, se sont portés volontaires pour organiser de façon

 22   officieuse ce référendum et aller dans les villages dans différentes

 23   municipalités et consulter des personnes, des Serbes, qu'ils considèrent

 24   comme étant prédisposés favorablement à l'organisation de ce référendum qui

 25   devrait se tenir. Et ces personnes, ensuite, sont chargées d'identifier

 26   d'autres Serbes dans leurs municipalités, dans leurs villages, et cetera,

 27   pour les mobiliser pour voter au référendum pour que les résultats soient

 28   aussi étoffés que faire se peut.


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  1   Je noterais que dans ce document et dans le document que je cite au

  2   paragraphe 8, l'hostilité des autorités de la République croate, tout

  3   particulièrement le déploiement de la police croate pour tenter de

  4   confisquer les bulletins de vote et, en tout cas, d'entraver le référendum,

  5   semble avoir constitué la confirmation, tout du moins aux yeux de certains

  6   Serbes, que la police croate était de fait censée agir ou souhaitait agir

  7   de façon qui irait à l'encontre des intérêts des Serbes en Croatie.

  8   Q.  Et l'on voit au troisième paragraphe, dernière phrase, où l'on y

  9   précise les activités de Brkovic, l'on y voit :

 10   "Et à cet égard, il a prévu de se rendre dans les villages à majorité

 11   serbe."

 12   Est-ce que cela correspond à ce que vous, vous avez tiré de la façon dont

 13   le référendum s'était tenu ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Très bien. Passons au paragraphe -- nous sautons au paragraphe 14 de

 16   votre rapport. Vous expliquez que différents événements se sont tenus au

 17   printemps 1991, y compris un référendum qui a été tenu par les Serbes de

 18   Croatie le 12 mai. Ceci se trouve dans le document 150 de la liste 65 ter,

 19   qui est à l'onglet 48 de la liste. Si vous voulez bien, on va afficher ce

 20   document.

 21   Et je crois que l'on peut dire que pendant ce référendum, encore une fois,

 22   une majorité importante des habitants partaient - il s'agit là donc de la

 23   SAO Krajina - et ont voté en faveur de leur maintien en Yougoslavie.

 24   Peut-on dire que pendant ce même mois, le gouvernement croate a tenu son

 25   propre référendum sur l'indépendance ?

 26   R.  Oui, je le pense.

 27   Q.  Est-ce que la Croatie a donc déclaré son indépendance un mois plus

 28   tard, le 25 juin; c'est exact ?


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  1   R.  Oui, c'est exact.

  2   Q.  Très bien. En regardant ce document, pourriez-vous à nouveau nous

  3   donner votre observation sur les municipalités où ce référendum s'est tenu.

  4   R.  Eh bien, les municipalités que l'on voit sur la liste sont des

  5   municipalités qui sont dans la région de Krajina, de la Croatie, qui est

  6   une région historique et qui existe depuis nombreux de siècles et où, donc,

  7   pour des raisons historiques à nouveau, il se trouvait une population serbe

  8   très importante et, de fait, à majorité serbe. Ce sont donc ces

  9   municipalités dans cette région comme étant la Krajina qui deviennent le

 10   moteur d'entraînement de l'organisation des Serbes en Croatie.

 11   Il convient de souligner à titre d'intérêt général qu'un grand nombre de

 12   Serbes en Croatie résidaient dans les grandes villes, par exemple, Zagreb,

 13   Karlovac, Osijek, Split, et cetera, et dans de nombreux cas, ces Serbes, du

 14   point de vue numérique, constituaient des groupes plus importants que

 15   certaines populations des municipalités de la Krajina qui étaient de

 16   démographie moindre, mais c'étaient ces municipalités rurales où les Serbes

 17   constituaient une grande majorité qui étaient encore une fois la force

 18   d'entraînement de l'organisation des Serbes.

 19   Q.  Eh bien, par rapport à cela, au numéro 10, nous voyons Knin. Pouvez-

 20   vous décrire aux Juges de la Chambre l'importance de la ville de Knin avant

 21   le début du conflit ?

 22   R.  Knin est une ville qui se trouve dans la partie rurale de la Krajina

 23   dalmate, et je crois que l'on peut dire sans se tromper que Knin, à aucun

 24   égard avant 1991, n'était un lieu considéré important dans l'esprit

 25   populaire des résidents de la République de Croatie. Il s'agit d'une ville

 26   bien plus petite que les grandes zones primaires urbaines en Croatie et,

 27   dans le contexte de l'activité policière, était subordonnée à des centres

 28   démographiques plus importants de Sibenik.


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  1   Q.  Avant que de prendre une pause, j'aimerais vous poser une question

  2   ayant trait aux paragraphes 15, 16 et 17, où nous voyons que vous citez

  3   Milan Martic, qui était à l'époque secrétaire du SUP de la SAO Krajina. Au

  4   paragraphe 16, vous y déclarez qu'il est nommé ministre de Défense de la

  5   SAO Krajina le 29 mai 1991. Et encore une fois, si nous passons au

  6   paragraphe 17, c'est un mois plus tard, il est renommé ministre des

  7   Affaires intérieures de la SAO Krajina.

  8   Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre ce cumul de fonctions ?

  9   R.  Il m'est difficile d'expliquer le cumul de ces fonctions autre que de

 10   dire qu'il est clair que Milan Martic, qui était l'un des agents de police

 11   les plus en vue de Knin, encore une fois, a été l'acteur sans doute qui a

 12   rempli les fonctions les plus importantes dans l'organisation de la

 13   structure policière en Krajina. Peut-être que l'on pourrait expliquer

 14   l'ajout de titres ou ce cumul de fonctions en notant que Martic et d'autres

 15   membres de la force policière de Knin et de la SAO Krajina considéraient la

 16   police comme étant la force la plus utile et la plus proche de défense,

 17   encore une fois, contre des mouvements éventuels pour repousser

 18   l'établissement de l'autonomie serbe en Krajina. Et donc, dans ce sens, il

 19   est tout à fait logique que la police non seulement serait la force des

 20   affaires intérieures comme cela a toujours été en Yougoslavie socialiste,

 21   mais cette force ferait partie d'une défense qui était naissante, et donc

 22   ce titre de ministre de la Défense.

 23   Q.  Merci.

 24   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Messieurs les Juges, je vais passer à un

 25   autre chapitre. Donc ceci est peut-être le point nommé pour faire une

 26   pause.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci, Monsieur Demirdjian.

 28   Docteur Nielsen, nous allons faire notre première pause. Nous reviendrons à


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  1   11 heures. Vous allez être accompagné pour sortir du prétoire. Merci.

  2   [Le témoin quitte la barre]

  3   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Nous suspendons l'audience.

  4   --- L'audience est suspendue à 10 heures 27.

  5   --- L'audience est reprise à 11 heures 01.

  6   [Le témoin vient à la barre]

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur

  8   Demirdjian. Merci.

  9   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 10   Q.  Monsieur le Pr Nielsen, je souhaite passer au deuxième paragraphe -- ou

 11   pardon, au paragraphe B de votre rapport, qui traite de la création du SAO

 12   SBSO. Vous avez indiqué au paragraphe 18 qu'un référendum s'est tenu sur

 13   l'autonomie des Serbes en août en septembre 1990, et ensuite au paragraphe

 14   19, vous parlez de la création du Conseil national serbe dans le SAO SBSO.

 15   Au paragraphe 20, nous avons le contenu de la déclaration de la

 16   souveraineté de la nation serbe et du SBO. P1850 [comme interprété].

 17   Intercalaire numéro 143. Pourrions-nous afficher ceci, s'il vous plaît ?

 18   P8050 [comme interprété]. Oui.

 19   La déclaration sur l'autonomie souveraine du peuple serbe en Slavonie,

 20   Baranja et Srem occidental. Est-ce que nous pourrions passer à la page

 21   suivante en anglais. Regardez les points 7 et 8, toujours dans le chapitre

 22   B. Ici nous voyons que la création, où vous parlez ici des fonctions du

 23   Conseil national serbe, et je souhaite que vous commentiez, Monsieur le

 24   Professeur, fassiez un commentaire sur le caractère même de cet organe, ce

 25   Conseil national serbe. Comment devons-nous le comprendre dans le cadre,

 26   dans le contexte des événements au début de l'année 1991 ?

 27   R.  Ce que nous avons ici, c'est un décrit, c'est un processus qui a

 28   démarré dans la région appelée SAO de Krajina, et qui a ensuite été


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  1   développé dans la région de la Slavonie, du Baranja et du Srem occidental,

  2   ainsi que séparément dans la région de la Slavonie occidentale dans

  3   laquelle le peuple serbe, dirigé essentiellement par le Parti démocratique

  4   serbe, s'est mobilisé par rapport à ce qui à leurs yeux était le désir des

  5   hommes politiques croates de tenir une plus grande autonomie et

  6   indépendance pour la Croatie.

  7   Et ce qui a eu pour issue quelque chose qui peut être résumé de la

  8   façon suivante : Pourquoi devrions-nous être une minorité dans votre pays,

  9   alors que vous pourriez potentiellement être une minorité dans notre pays ?

 10   Autrement dit, les hommes politiques serbes, comme nous l'avons vu au

 11   niveau du référendum, au sein du référendum les régions de Croatie où les

 12   Serbes constituaient une majorité démographique ont été définies, et donc

 13   le fait de proclamer des districts autonomes dans ces régions, et d'établir

 14   des institutions de leur plein gré, telles que le Conseil national serbe,

 15   ici au mois de janvier 1991, constituaient à leurs yeux la seule

 16   représentation légitime politique des Serbes dans ces régions de Croatie.

 17   Au plan juridique, ce qui s'est passé au cours de cette période, c'est que

 18   les Serbes, comme nous pouvons le constater dans le document que nous avons

 19   sous les yeux, ne tiendront pas compte de quelconques législations émanant

 20   de Zagreb qui entreront en conflit avec la constitution yougoslave ou qui

 21   auront une incidence négative sur les intérêts des Serbes en Croatie. Dans

 22   une phase plus tardive, les Serbes réaffirment la primauté de la

 23   législation de l'Etat yougoslave, jusqu'à ce que finalement ils estiment

 24   qu'après l'indépendance de l'Etat croate qu'ils considèrent comme une

 25   législation émanant purement de la Croatie et que leurs règlements sont à

 26   leurs yeux nuls et non avenus.

 27   Donc, une tentative au plan politique, au plan juridique et finalement

 28   également au plan militaire aux fins d'organiser la police, les Serbes


Page 2436

  1   avaient l'intention de défendre leurs intérêts contre ce qu'il, à leurs

  2   yeux, était l'indépendance hostile de l'Etat croate, qui était en train de

  3   voir le jour.

  4   Q.  Alors pour ce qui est du territoire, ici on parle d'autonomie, je

  5   regarde le point 9, où nous voyons que la décision indique que cette

  6   déclaration porte sur l'autonomie, et comment cela devrait être exercé sur

  7   le territoire, les Serbes qui ont la majorité maintenant et qui avaient la

  8   majorité le 6 avril 1941. Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre

  9   quelle est l'importance de cette date ?

 10   R.  Alors, en avril 1941 l'Allemagne nazie, ainsi qu'un certain nombre de

 11   ses alliés faisant partie des forces de l'axe, ont lancé une attaque armée

 12   contre ce qui était alors le Royaume de Yougoslavie. Au cours de cette

 13   attaque, la Yougoslavie a rapidement capitulé et l'Etat indépendant

 14   susmentionné de l'Etat croate a été créé.

 15   Et on peut dire sur le plan historique que l'indépendance de la

 16   Croatie -- l'Etat indépendant croate a mis en œuvre une politique

 17   génocidaire contre les Serbes qui a eu des effets très négatifs et néfastes

 18   sur la population serbe vivant en Croatie. Ce que nous constatons ici, et

 19   j'en parle au paragraphe 20 de mon rapport, eh bien, c'est une affirmation

 20   qui est faite par les hommes politiques serbes en Croatie, à savoir que non

 21   seulement ils souhaitent que cette région soit autonome et que la

 22   représentation corresponde à l'appartenance ethnique des Serbes vivant dans

 23   la région et qu'ils estiment être une majorité, mais ils souhaitent

 24   également corriger l'injustice au plan historique du génocide et, par

 25   conséquent, inclure les régions où les Serbes étaient déjà majoritaires en

 26   1941, à savoir avant la création de l'Etat indépendant croate.

 27   Q.  Alors, je souhaite maintenant vous montrer une vidéo que vous citez

 28   dans votre rapport, numéro 65 ter 4804. Et je souhaite vous montrer la


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  1   première séquence vidéo qui commence au début, qui s'arrête à peu près au

  2   compteur à une minute. Nous pouvons maintenant visionner cela.

  3   [Diffusion de la cassette vidéo]

  4   L'INTERPRÈTE : [Voix sur voix]

  5   "Un membre du Conseil national, Ilija Koncarevic, le secrétaire

  6   général Pero Matic, le Pr de Beli Monastir, Slavko Dokmanovic, résident de

  7   la municipalité de Vukovar, Goran Hadzic, le président du conseil municipal

  8   du Parti démocratique serbe de Vukovar, et un membre du comité central du

  9   SDB de Knin et de Dalj.

 10   Le Conseil national serbe pour la Slavonie et le Baranja et le Srem

 11   occidental a été créé cette année le jour de la Noël orthodoxe. Seulement

 12   le nom du secrétaire général Ilija Koncarevic a été connu, et ce soir nous

 13   avons identifié un autre membre, qui est Ilija Petrovic. Monsieur Pretovic,

 14   veuillez nous dire -- "

 15   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 16   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

 17   Q.  Avez-vous déjà vu ces images ?

 18   R.  Oui. Il s'agit d'une des vidéos que j'ai examinée lorsque j'ai préparé

 19   mon rapport.

 20   Q.  Et après avoir analysé cette vidéo, pourriez-vous -- bon, les noms ont

 21   été cités, pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre qui sont ces

 22   personnes qui sont présentées lors de cette émission ?

 23   R.  Alors, nous avons un certain nombre de personnes, Pero Martic, Slavko

 24   Dokmanovic, Goran Hadzic, Caslav Ocic. Ces personnes, comme le dit l'hôte -

 25   - et Ilija Petrovic, qui est l'auteur du livre dont je me suis inspiré à la

 26   note en bas de page 45, est cité également. Eh bien, tous ceux-ci sont les

 27   principaux acteurs, en tout cas ceux qui étaient disposés à paraître en

 28   public à l'époque et qui ont participé à la création du Conseil national


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  1   serbe en Slavonie, Baranja et Srem occidental. M. Petrovic mentionne dans

  2   son livre le fait qu'une part considérable de l'organisation politique

  3   initiale a été faite dans le secret, et toutes les personnes qui ont

  4   participé n'étaient pas disposées à se présenter publiquement à la

  5   télévision de cette manière à l'époque.

  6   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Est-ce que nous pouvons maintenant

  7   visionner une autre séquence vidéo, qui commence à 51.53.

  8   [Diffusion de la cassette vidéo]

  9   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 10   "En terminant cette émission, demandons à M. Koncarevic, le

 11   secrétaire général du Conseil national serbe pour la Baranja et le Srem

 12   occidental, quelle est votre idée d'une solution pour les Serbes en Croatie

 13   ?

 14   M. Koncarevic : Je suis quelque peu limité par les points de vue du Conseil

 15   national serbe dans l'émission de ce soir. Nous avons aujourd'hui adopté

 16   une position en ce qui concerne une solution à ce problème que nous allons

 17   transmettre à la présidence. Il y a des territoires qui sont contestés et

 18   ceux qui ne sont pas contestés en Croatie. Le territoire incontesté sur le

 19   territoire était le territoire où les Croates étaient majoritaires au plan

 20   ethnique avant le début de la Première Guerre mondiale, ce qui est

 21   incontestable. Mais le territoire contestable est celui de la Krajina, du

 22   Srem occidental, de la Baranja, de Slavonie et de Moslavina. Nous proposons

 23   donc à la présidence yougoslave de suspendre l'autorité du Sabor croate et

 24   des dirigeants croates sur tous ces territoires où vit le peuple serbe. Et

 25   ce, parce que leurs droits humanitaires élémentaires doivent être

 26   respectés, ceux du peuple serbe ayant été compromis, comme le droit

 27   élémentaire à la vie. Ce droit a été menacé. En outre --"

 28   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]


Page 2439

  1   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

  2   Q.  Alors, ici, Ilija Koncarevic parle des territoires contestés et non

  3   contestés. Pourriez-vous commenter cela en établissant un lien avec le

  4   document que nous venons de voir ?

  5   R.  Il s'agit d'une déclaration qui illustre le sentiment général qui était

  6   celui qui prévalait parmi les hommes politiques et d'autres qui avaient

  7   participé à la création du Conseil national serbe en Slavonie, Baranja et

  8   Srem occidental, et illustre également la pensée de ceux qui ont participé

  9   à la création des autres SAO en Croatie à l'époque, et il y avait des zones

 10   au plan historique qui, je dirais, étaient incontestablement serbes et que

 11   ces régions devaient faire partie d'une réorganisation politique de la

 12   Croatie sous contrôle serbe ou yougoslave. Encore une fois, nous retrouvons

 13   ici la notion que ces territoires sont définis en termes historiques, si

 14   vous voulez, qui ne se fondent pas seulement sur des données démographiques

 15   de l'époque mais qui se fondent également sur la manière dont les Serbes

 16   ont compris l'existence de ces régions et leur présence en ces régions,

 17   surtout avant la Deuxième Guerre mondiale et également avant la Première

 18   Guerre mondiale, là où ils étaient majoritaires.

 19   Q.  Ici, nous voyons Ilija Koncarevic et M. Petrovic, que nous avons

 20   entendu un peu plus tôt. Vous les citez dans votre rapport. Pourriez-vous

 21   dire aux Juges de la Chambre quel rôle ils ont joué d'après les documents

 22   que vous avez pu lire pour l'année 1991 ?

 23   R.  Ces deux hommes étaient parmi les acteurs les plus en vue, ceux qui ont

 24   été partie prenante à l'organisation de la vie politique serbe dans la

 25   région de Slavonie, Baranja et du Srem occidental, du SBSO. Ils sont

 26   devenus membres du Conseil national serbe et ont pris part à la rédaction

 27   des politiques de cet organe, et comme je l'ai noté, c'est une des raisons

 28   pour lesquelles je me suis fondé dans une large mesure sur les mémoires


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  1   d'Ilija Petrovic, qui était un membre du conseil exécutif et dont le récit

  2   est en général corroboré par d'autres documents comme le "Gezarette

  3   [phon]", la déclaration que nous avons vue un peu plut tôt.

  4   Q.  Au paragraphe 21, vous parlez de la manière dont Goran Hadzic a été

  5   nommé président du Conseil national serbe le 17 mars 1991. Et ensuite, au

  6   paragraphe 22, vous parlez de la décision en vertu de laquelle le SBSO a

  7   rejoint la Vojvodine le 31 mars 1991. Et simplement pour préciser ce point,

  8   s'il vous plaît, pour les Juges de la Chambre, où se trouve la Vojvodine

  9   exactement ?

 10   R.  Tout d'abord, je souhaite simplement dire qu'en ce qui concerne le

 11   paragraphe 21 et la nomination de M. Hadzic en tant que président du

 12   Conseil national serbe, il faut faire remarquer que M. Petrovic, dans son

 13   récit, déclare que cela a pris un certain temps et d'efforts de sa part à

 14   lui et de la part d'autres Serbes dans la région de Slavonie orientale de

 15   convaincre M. Hadzic à accepter un rôle politique actif. Et donc, c'est

 16   pertinent que les Juges de la Chambre sachent cela.

 17   Alors, pour ce qui est de la Vojvodine, la Vojvodine est une région

 18   autonome au sein de la République de Serbie. Dans les grandes lignes, la

 19   région se trouve au nord du Danube, et c'est la région qui est contiguë à

 20   la Slavonie orientale. Il s'agit là d'un des premiers exemples des efforts

 21   déployés de la part des hommes politiques en Slavonie orientale, en Baranja

 22   et au Srem occidental, efforts qui visent à s'assimiler à la République de

 23   Serbie ou dans ce cas à la Région autonome de Vojvodine. Encore une fois,

 24   si les Croates devaient faire sécession et ne plus faire partie de la

 25   République fédérative socialiste de Yougoslavie, dans ce cas les Serbes

 26   souhaiteraient rester à l'intérieur de la Yougoslavie, et une manière de

 27   faire cela consistait à s'assimiler ou à être annexé à la Vojvodine.

 28   Q.  Très bien. Alors, pour ce qui est du paragraphe 23, vous parlez de


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  1   cette lettre qui a été envoyée par le Conseil national serbe à la

  2   présidence de la RSFY sur la dégradation de la situation. Je crois que

  3   c'est Petrovic qui a signé ce document, et il écrit tous les postes de

  4   police croates ont établi une liste de Serbes qui doivent être arrêtés et

  5   tués. Paragraphe 23 de votre rapport.

  6   Comment qualifieriez-vous cette déclaration ?

  7   R.  D'après moi, ici, je dirais qu'il s'agit d'une déclaration qui est le

  8   signe de perceptions erronées, je dirais, des Serbes quant à leurs attentes

  9   eu égard à la police en Croatie, autrement dit, la police qui est contrôlée

 10   par le ministère des Affaires intérieures de la République de Croatie. Il y

 11   avait un certain nombre de changements de nomenclature et de changements

 12   symboliques au niveau de la police en Croatie à cette époque. Par exemple,

 13   le changement de termes, "milicija" était le terme qui avait été utilisé en

 14   ex-Yougoslavie, et maintenant le terme employé était "policija". Et

 15   l'emploi également d'un certain nombre de termes croates qui ont conduit

 16   Petrovic ainsi que d'autres personnes à conclure que ce dont ils étaient

 17   témoins était la remise en place d'une force de police ethniquement croate

 18   qui potentiellement pouvait donner naissance à nouveau à des politiques de

 19   persécution et des politiques très négatives de l'Etat indépendant croate

 20   pendant la Deuxième Guerre mondiale. Donc Petrovic était un homme politique

 21   responsable à l'époque dans la région et il a précisé cela, c'est ce que

 22   les gens entendaient de lui, et ceci contribuait à l'inquiétude et au

 23   climat d'insécurité dans la région de la population à l'époque.

 24   Q.  Merci. Alors, au paragraphe 25, vous parlez des événements qui se sont

 25   déroulés le 25 juin. Les Juges de la Chambre ont entendu beaucoup

 26   d'éléments de preuve là-dessus.

 27   Je souhaite maintenant passer au paragraphe 32 de votre rapport où vous

 28   déclarez que le 23 août 1991, le Conseil national serbe a proclamé une


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  1   mobilisation générale en SBSO. Est-ce que nous pourrions afficher le numéro

  2   65 ter 01939. Il s'agit de l'intercalaire numéro 292 de l'ouvrage de M.

  3   Petrovic.

  4   Est-ce que nous pourrions en B/C/S avoir la page 360, s'il vous

  5   plaît. Merci. Je crois que nous avons une traduction anglaise de ce

  6   document. C'est peut-être un fichier distinct.

  7   Alors, en attendant l'affichage du document anglais, pourriez-vous nous

  8   dire alors si en B/C/S il s'agit de la bonne page pour ce qui est de la

  9   mobilisation générale ?

 10   R.  Oui, tout à fait.

 11   Q.  Fort bien. Je ne suis pas tout à fait certain qu'il s'agisse de la

 12   bonne page en anglais.

 13   M. GOSNELL : [interprétation] Si je peux vous être utile, je crois que

 14   c'est après la page 23 dans la traduction anglaise. Je n'ai pas la

 15   référence exacte, mais c'est de cet ordre-là. 

 16   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci. Page suivante. Pardonnez-moi,

 17   Messieurs les Juges. Je crois qu'il existe une traduction distincte.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] En fait, en pièce jointe, il y a deux

 19   traductions annexées à ce document.

 20   [Le conseil de l'Accusation et le commis à l'affaire se concertent]

 21   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Est-ce que nous pourrions ouvrir l'autre

 22   fichier anglais, s'il vous plaît. Nous allons revenir là-dessus lorsque

 23   nous aurons trouvé la bonne page. Veuillez m'en excuser, s'il vous plaît.

 24   Q.  Monsieur le Professeur, nous allons revenir sur ce paragraphe, mais

 25   pour l'instant je souhaite vous demander de regarder le paragraphe 37.

 26   Dans les paragraphes précédents, 35, 36, vous parlez d'une certaine

 27   activité au plan législatif au sein de la SAO SBSO, nous voyons qu'un

 28   certain nombre de membres du gouvernement sont nommés, et à la date du 9


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  1   octobre une loi est votée sur le gouvernement.

  2   Vous indiquez au paragraphe 37 qu'à partir de ce moment-là, le gouvernement

  3   a remplacé le Conseil national serbe.

  4   Simplement pour préciser ce point, le gouvernement -- ou y avait-il des

  5   quelconques activités du gouvernement avant le 9 octobre 1991 ?

  6   R.  Oui, tout à fait. Comme je l'ai précisé dans les paragraphes

  7   précédents, il y avait un certain nombre de choses qui se passaient. Comme,

  8   par exemple, au paragraphe 36, la création d'unités de protection civile et

  9   de QG de protection civile en Slavonie, Baranja et Srem occidental. Je dois

 10   préciser à l'attention des Juges de la Chambre qu'en tant qu'analyste, dans

 11   la SAO de Krajina et dans la SAO de Slavonie, Baranja et Srem occidental,

 12   il y avait énormément d'incohérences au niveau de la terminologie employée

 13   au cours de cette période. Certaines choses étaient faites par l'assemblée

 14   du gouvernement national ou du Conseil national serbe, et parfois il est

 15   difficile de comprendre quel organe jouait quel rôle, mais d'après Ilija

 16   Petrovic, à partir du 9 octobre, le gouvernement a remplacé le Conseil

 17   national serbe.

 18   Q.  Au paragraphe suivant, vous dites qu'une décision a été adoptée par la

 19   grande assemblée nationale aux fins de fusionner officiellement la Défense

 20   territoriale de Slavonie, Baranja et Srem occidental avec les forces armées

 21   de la RSFY. Compte tenu des documents que vous avez vus, comment la JNA

 22   percevait-elle ce gouvernement qui prenait naissance dans la SAO de la SBSO

 23   ?

 24   R.  C'est une excellente question, et cela dépend de quels officiers de la

 25   JNA on parle, parce que la JNA avait ses propres documents sur les SAO au

 26   cours de cette période. On peut dire, je crois, de façon générale que la

 27   politique de la JNA à cette époque avait évolué et considérait les

 28   tentatives des Serbes en Croatie visant à s'organiser et à se protéger


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  1   contre une politique croate favorisant une indépendance légitime comme

  2   quelque chose de légitime, et donc ils étaient disposés à apporter un

  3   soutien logistique et autre forme d'aide aux Serbes en Croatie pour qu'ils

  4   puissent assurer leur défense. Encore une fois, c'était parce que la JNA,

  5   en tant qu'armée populaire yougoslave, sur le plan de la doctrine et sur un

  6   plan juridique avait l'obligation de protéger l'intégrité territoriale de

  7   la Yougoslavie. Et donc, à partir de là, bon nombre de soldats au sein de

  8   la JNA, si ce n'est pas la plupart de ces soldats de la JNA, qui étaient

  9   les officiers de la Serbie-et-Monténégro et d'autres régions de la

 10   Yougoslavie, considéraient la propension de la Croatie et de la Slovénie à

 11   devenir indépendante comme un acte illégal et hostile.

 12   Je crois qu'il faut remarquer également qu'un certain nombre de documents

 13   de l'époque de la JNA, des officiers de la JNA, y compris les officiers des

 14   organes chargés de la sécurité de la JNA, parlaient des districts autonomes

 15   serbes comme étant des districts qui avaient été créés en Croatie, qui

 16   étaient autoproclamés, et parfois énuméraient la liste des noms des

 17   districts entre guillemets indiquant par là que leur légitimité pouvait

 18   être mise en doute.

 19   Au fil du temps la JNA, et en particulier après la déclaration

 20   d'indépendance de la Croatie en juin 1991, avait tendance à considérer les

 21   SAO de façon beaucoup plus favorable et à leur apporter une plus grande

 22   aide.

 23  *M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Sur ce point, je demanderais à ce que l'on

 24   affiche le numéro 65 ter 6022, à l'intercalaire numéro 33 [comme

 25   interprété]. Messieurs les Juges, il s'agit d'un document qui ne figure pas

 26   dans le rapport du Pr Nielsen, mais c'est un document qui a été fourni

 27   après qu'il ait préparé son rapport.

 28   Q.  Et c'est un document émanant du commandement du 12e Corps le 8 novembre


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  1  * 1995 [comme interprété], village de Dalj. Est-ce que vous vous rappelez

  2   avoir examiné déjà ce document auparavant ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Il s'agit ici de police, et nous y reviendrons, mais pour le moment je

  5   souhaiterais que vous examiniez le premier des tirets, des points

  6   introduits par un tiret en B/C/S. Vous pouvez voir que le 12e Corps essaie

  7   d'envoyer ceci à la 1ère Région militaire qui lui est hiérarchiquement

  8   supérieure et demande des précisions. Alors est-ce que vous pourriez

  9   commenter cette première phrase.

 10   R.  Oui. C'est un document militaire de cette période de l'automne 1991 où

 11   nous voyons qu'une partie des effectifs militaires de la JNA manifestement

 12   essaie encore de s'y retrouver quant à la question de savoir quel est le

 13   statut ou l'autorité légale de l'assemblée de la SAO serbe de Slavonie,

 14   Baranja et Srem occidental, ainsi que du gouvernement de ces derniers.

 15   C'est-à-dire, ont-ils en fait établi leur légitimité au sein légal ? Ceci

 16   est-il internationalement reconnu ? Manifestement, ils essaient de s'y

 17   retrouver d'un point de vue militaire, à savoir dans quelle mesure doivent-

 18   ils coopérer avec le gouvernement de cette région, dans quelle mesure sont-

 19   ils censés obéir aux ordres, lois, instructions ou règlements adoptés par

 20   ces organes. C'est une illustration, en quelque sorte, de ce qui s'est

 21   passé même après l'indépendance de la Croatie, autrement dit certaines

 22   parties de la JNA ne sont toujours pas sûres de savoir quel est le statut

 23   légal précis de ces Régions autonomes serbes.

 24   Au paragraphe 68 de mon rapport je m'y réfère, et cela concerne également

 25   ma réponse précédente, donc au paragraphe 68 il est question des incidents

 26   de mars 1991 à Plitvice, et je cite également un document de la JNA qui

 27   lui-même se réfère à, je cite, "la région autoproclamée Région autonome

 28   serbe de Krajina". Alors encore une fois, c'est une indication qui nous

 


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  1  * montre que la JNA essaie de s'y retrouver en ce qui concerne le statut de

  2   ces Régions autonomes serbes.

  3   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Demirdjian.

  5   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Oui.

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le greffier me montre ce que je crois

  7   être la première partie -- une partie de votre liste de documents où il est

  8   indiqué qu'il conviendrait d'utiliser ces documents en étant à huis clos.

  9   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Excusez-moi, je voudrais vérifier.

 10   [Le conseil de l'Accusation et le commis à l'affaire se concertent]

 11   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Messieurs les Juges, nous allons vérifier

 12   le statut de ce document. Je crois que le gouvernement concerné nous a

 13   répondu en indiquant qu'il n'avait pas d'objection à l'utilisation de ces

 14   documents, mais pour le moment il serait peut-être plus sûr d'utiliser ces

 15   documents à huis clos jusqu'à ce que nous obtenions une réponse ou une

 16   vérification définitive.

 17   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. Dans ce cas-là, nous

 19   allons également procéder à une expurgation au moins temporaire --

 20   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Oui.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] -- du compte rendu d'audience.

 22   Très bien. Nous allons d'abord passer à huis clos partiel.

 23   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 24   [Audience à huis clos partiel]

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 22   [Audience publique]

 23   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci.

 24   Q.  Monsieur Nielsen, passons maintenant au paragraphe numéro 42 de votre

 25   rapport, comme vous l'avez dit, ce gouvernement est en train de se

 26   constituer et d'établir son autorité, vous dites que la Grande Assemblée

 27   nationale a adopté une Loi sur l'organisation territoriale temporaire de la

 28   Région autonome serbe de SBSO. C'est la pièce 42 - nous pourrions

 


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  1   l'afficher à l'écran, s'il vous plaît - intercalaire numéro 131. Cette loi

  2   a été adoptée le 22 novembre 1991. Je voudrais que nous passions à

  3   l'article numéro 11. En page numéro 3. Voilà.

  4   Alors, Monsieur Nielsen, vous pouvez voir ici une description des

  5   municipalités comprises dans le territoire des régions serbes. Vous voyez

  6   différentes régions telles que Bapska, Bogdanovci, Boksic, et cetera.

  7   Alors, à partir des documents que vous avez lus et que nous avons vus, que

  8   pourriez-vous nous dire au sujet de la composition ethnique de ces régions

  9   et des villages dont les noms sont ici énumérés ?

 10   R.  Je ne suis pas expert en démographie et certainement pas dans la

 11   démographie des différents villages et localités de cette région.

 12   Cependant, je peux affirmer qu'à mon sens, l'article 11 comprend et inclut

 13   tous les secteurs de la région de Slavonie, Baranja, et Srem occidental qui

 14   répondent à l'intention exprimée par les membres du Conseil national serbe

 15   d'inclure au sein de cette région serbe toutes les localités à majorité

 16   serbe ou qui étaient à majorité serbe le 6 avril 1941. Dans certains cas,

 17   la réalité militaire sur le terrain à cette date était telle qu'il n'était

 18   pas possible d'inclure toutes les localités répondant à ces critères en

 19   pratique, il n'était pas possible de les inclure dans ce territoire qui

 20   faisait l'objet d'une organisation temporaire. Par exemple, je relève

 21   qu'Osijek est inclus, ainsi que Vinkovci, avec pour siège temporaire

 22   Mirkovci.

 23   Donc, il faudrait relever ici du point de vue du langage utilisé, qu'il

 24   semble y avoir utilisation d'un ordre alphabétique dans ce document. C'est

 25   une indication intéressante qui nous montre que certains des acteurs les

 26   plus importants en Slavonie orientale avaient toujours du mal à s'y

 27   retrouver avec ce même alphabet cyrillique qu'ils mettaient pourtant en

 28   avant.


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  1   Q.  Peut-être pourrions-nous examiner rapidement le recensement, numéro 118

  2   dans la liste 65 ter. C'est un document auquel vous référez dans votre

  3   rapport. Je voudrais juste regarder très rapidement la composition ethnique

  4   de ces villages.

  5   En B/C/S, il faudrait la page 202, s'il vous plaît. Pourrions-nous agrandir

  6   le bas de cette page, s'il vous plaît. Merci.

  7   Excusez-moi, je voudrais que nous regardions d'abord le haut de la page

  8   pour voir l'intitulé des colonnes. Monsieur Nielsen, nous voyons que la

  9   colonne numéro 3 donne le nombre de Croates, avec le terme Hrvati en B/C/S,

 10   alors que dans la colonne numéro 8, nous trouvons le terme Srbi, donc les

 11   Serbes. Alors, pourrions-nous maintenant faire défiler vers le bas de la

 12   page. Alors, je relève qu'en dessous de la municipalité de Vukovar, nous

 13   avons la ville de Bapska. Est-ce que vous voyez le nombre de Croates et de

 14   Serbes ?

 15   R.  Eh bien, si j'identifie correctement les colonnes, je crois que d'après

 16   le recensement, il y a 1 418 Croates et 33 Serbes dans la municipalité de

 17   Bapska.

 18   Q.  Je ne vais pas examiner individuellement chacun de ces villages parce

 19   que vous pouvez voir que certains de ces villages, comme Borovo et Brsadin,

 20   ont une majorité serbe, d'autres villages ont une majorité croate. Je pense

 21   à Ilok et à d'autres villages que nous pouvons voir ici. Que pourriez-vous

 22   nous dire à ce sujet en gardant à l'esprit le document précédent qui

 23   portait sur l'organisation temporaire du territoire ?

 24   R.  Je ne peux que vous répéter la conclusion à laquelle je suis parvenu, à

 25   savoir qu'il s'agit ici d'une expression exacte des aspirations à la

 26   direction politique serbe et de direction de ce Conseil national serbe et

 27   du gouvernement de la SAO SBSO, à savoir d'inclure toutes les localités et

 28   villages où il y avait une majorité serbe, non seulement au recensement de


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  1   1991 mais également du point de vue historique, et notamment avant le mois

  2   d'avril 1941. Alors, bien que je ne dispose pas du recensement de 1941 --

  3   ou plutôt, de 1931, je n'ai pas ces chiffres en face de moi, je suppose que

  4   j'aurais pu dans les archives me les procurer et déterminer qu'à Bapska il

  5   y avait eu une majorité serbe, en réalité, avant avril 1941.

  6   Q.  Merci.

  7   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Messieurs les Juges, je viens de recevoir

  8   la réponse de mes collaborateurs qui ont été très efficaces. Nous avons

  9   reçu la réponse du gouvernement concerné et il n'y a pas de mesures de

 10   protection particulières nécessaires pour ce document. Il s'agit de la

 11   dernière série de documents que nous avons reçus après la finalisation du

 12   rapport du témoin. Donc, le dernier document qui a été versé au dossier

 13   peut être considéré comme un document qui n'a pas besoin d'être placé sous

 14   pli scellé.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. Soit. Je vous remercie.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] La pièce P365 devient donc une pièce

 17   publique. Merci.

 18   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

 19   Q.  Je voudrais maintenant passer au chapitre D qui concerne l'unification

 20   des SAO et l'établissement de la RSK. A partir du paragraphe numéro 50 de

 21   votre rapport.

 22   Au paragraphe numéro 50, vous dites que le 19 décembre, l'assemblée

 23   constitutionnelle de la RSK a promulgué une loi constitutionnelle

 24   permettant le passage à une nouvelle constitution de la RSK. Juste pour

 25   être un peu plus précis, au début du paragraphe, vous dites qu'il s'agit

 26   ici de l'unification des trois SAO, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Alors, en parallèle à ceci, est-ce que vous pourriez dire aux Juges de


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  1   la Chambre quelles étaient les autres évolutions en cours dans la

  2   république voisine de Bosnie-Herzégovine ? Je crois qu'il s'agit également

  3   de la date du 19 décembre 1991.

  4   R.  Eh bien, en Bosnie-Herzégovine pendant cette période, il y avait

  5   également toute une série de régions autonomes serbes dont la mise en place

  6   avait débuté en septembre 1991. Encore une fois, il s'agissait d'une

  7   tentative des Serbes de Bosnie, dans ce cas-là, donc à la Bosnie, une

  8   tentative de leur part de s'assurer qu'ils ne seraient pas assujettis au

  9   contrôle politique d'entités qu'ils ne considéraient pas comme étant les

 10   leurs et de s'assurer qu'ils pourraient rester dans le cadre de la

 11   Yougoslavie si jamais la Bosnie-Herzégovine prenait des mesures visant à la

 12   rendre indépendante comme la Slovénie et la Croatie l'avaient déjà fait. En

 13   décembre 1991, ou vers cette époque, le SDS de Bosnie-Herzégovine a émis un

 14   certain nombre d'instructions qui sont devenues un modèle quant à la façon

 15   dont il convenait d'établir et de mettre en place un pouvoir serbe dans les

 16   parties du territoire de Bosnie-Herzégovine qu'ils considéraient comme

 17   étant leur.

 18   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Pourrions-nous maintenant, s'il vous

 19   plaît, afficher l'intercalaire 38 [comme interprété], document numéro 811

 20   de la liste 65 ter.

 21   Q.  Monsieur Nielsen, nous avons bien les deux versions à l'écran. Est-ce

 22   que vous avez déjà vu ce document auparavant ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Il s'agit d'une lettre de Momcilo Krajisnik à la date du 19 décembre

 25   1991. Très rapidement, pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre qui était

 26   Krajisnik ?

 27   R.  Comme l'indique le document, Krajisnik à l'époque était président de

 28   l'assemblée du peuple serbe en Bosnie-Herzégovine. Il était également


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  1   président de l'assemblée de la République de Bosnie-Herzégovine.

  2   Q.  Cette lettre est également datée du 19 décembre 1991. Je crois que

  3   Krajisnik y informe les membres de la SAO de Krajina qu'il ne sera pas en

  4   mesure d'être présent. Manifestement, il a été invité. Alors, à la lumière

  5   de ce document dans son ensemble, puisque vous l'avez examiné, est-ce que

  6   vous pourriez nous dire quel lien existait entre les membres de l'assemblée

  7   ou du gouvernement des Serbes de Bosnie et les membres des entités des

  8   Serbes de Croatie ?

  9   R.  Le lien entre la direction bosno-serbe et la direction des Serbes de

 10   Croatie était d'assez bonne qualité. Les rapports étaient généralement

 11   assez bons, et comme le montre ce document, nous voyons que M. Krajisnik

 12   relève que tous les Serbes sont engagés dans le même combat, sous le même

 13   drapeau, dans la direction d'une victoire finale.

 14   Dans une période qui s'étend de 1992 jusqu'à la fin de 1995 -- ou plutôt,

 15   août 1995, il y a eu toute une série d'occasions au cours desquelles la

 16   direction bosno-serbe et la direction des Serbes de Croatie ont envisagé la

 17   possibilité de fusionner en une seule entité politique plus importante qui

 18   serait soit distincte de la RSFY, soit lui serait associée. Cependant,

 19   aucun de ces projets de fusion, tel qu'il a pu être envisagé lors de ces

 20   discussions, n'a jamais été réalisé ni concrétisé.

 21   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Messieurs les Juges, ce document ne figure

 22   pas dans le rapport de M. Nielsen. Je voudrais en demander le versement.

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.

 24   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit le numéro de pièce à conviction

 25   P366.

 26   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

 27   Q.  Monsieur Nielsen, vous nous avez indiqué que cette relation ou ce

 28   partenariat a duré de 1992 jusqu'en 1995. Alors je voudrais vous présenter


Page 2455

  1   maintenant un enregistrement vidéo, numéro 4826.1, intercalaire numéro 3

  2   [comme interprété], s'il vous plaît.

  3   [Diffusion de la cassette vidéo]

  4   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  5   "Madame Plavsic --"

  6   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Avant de commencer à visionner cet

  7   enregistrement, je souhaite signaler aux interprètes qu'il convient de

  8   passer à la page 8 de la transcription dans le système e-court.

  9   Probablement que la bonne copie, en fait, a déjà été distribuée.

 10   [Diffusion de la cassette vidéo]

 11   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 12   "Madame Plavsic, vous êtes membre d'une délégation mixte qui est

 13   aujourd'hui venue à Bijeljina pour se rendre compte des destructions

 14   alléguées au sujet desquelles les médias de Sarajevo parlent en grand

 15   détail. Quelle est votre impression, au moins votre première impression ?"

 16   Biljana Plavsic : Eh bien, j'ai traversé la ville, je l'ai traversée en

 17   voiture, et non seulement moi-même mais également les personnes qui

 18   m'accompagnaient, nous avons été attentifs. Nous avons essayé de voir s'il

 19   y avait des vitres brisées, des vitrines cassées, si nous ne retrouverions

 20   pas précisément ce que les médias de Sarajevo nous ont décrit, mais nous

 21   n'avons rien vu de cela."

 22   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 23   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

 24   Q.  Ensuite, ce qui m'intéresse, c'est -- alors, en fait, ce n'est pas tant

 25   la teneur de ce que Mme Plavsic dit ici qui m'intéresse. Qui pouvez-vous en

 26   fait identifier dans cette image ?

 27   R.  Je peux, bien entendu, identifier ici Biljana Plavsic, qui est

 28   interrogée par le journaliste. A sa gauche, c'est-à-dire à la droite de


Page 2456

  1   l'écran pour nous, se trouve Zeljko Raznjatovic, également connu sous le

  2   nom d'Arkan, en tenue camouflée, et à la droite de Mme Plavsic, en costume,

  3   c'est Goran Hadzic, qui est assis.

  4   Q.  Avez-vous déjà vu cet enregistrement vidéo dans le passé ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Est-ce que vous seriez en mesure de dire à la Chambre à quelle époque à

  7   peu près ces images ont été filmées ?

  8   R.  Je me rappelle que ceci remonte au début du mois d'avril 1992. Si ma

  9   mémoire est bonne, elle parle ici de sa visite à Bijeljina lors de laquelle

 10   elle-même, Fikret Abdic et d'autres se sont rendus à Bijeljina, donc, en

 11   réponse à des informations faisant état de très violentes altercations

 12   entre Croates et Musulmans dans cette ville.

 13   Q.  Que pourriez-vous nous dire de la présence de Goran Hadzic et d'Arkan

 14   pendant cet entretien ?

 15   R.  Je n'ai pas la transcription sous les yeux, mais je crois que j'ai dit

 16   Musulmans et Croates, alors que je voulais dire Musulmans et Serbes, bien

 17   entendu.

 18   Est-ce que vous pouvez répéter la question ?

 19   Q.  Oui. En fait, je vous demandais ce que vous pouviez nous dire de la

 20   présence de Goran Hadzic et d'Arkan à cette étape ?

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell.

 22   M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, je dois soulever une

 23   objection. Il n'y a pas de fondement à ce stade à la question posée. Il n'y

 24   a rien dans le rapport qui permette de suggérer que ce témoin ait un avis

 25   d'expert à fournir sur ce point. Donc je ne sais pas quelle est la piste

 26   sur laquelle s'engage mon confrère, mais je soulève une objection à la

 27   façon dont cette question est posée.

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Demirdjian.

 


Page 2457

  1   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Messieurs les Juges, sans donner trop de

  2   détails susceptibles d'affecter la façon dont le témoin va répondre, il y a

  3   toute une partie qui concerne ceci vers la fin du rapport, paragraphes

  4   numéro 201 à 211. Si jamais nous devons nous pencher plus en détail sur

  5   ceci, je demanderais que M. Nielsen ne soit pas présent lors de la

  6   discussion.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Neilsen, est-ce que vous

  8   pourriez accompagner Mme l'Huissière pour quelques instants hors de la

  9   salle d'audience, s'il vous plaît.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr, Monsieur le Président.

 11   [Le témoin quitte la barre]

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Demirdjian, nous débattons

 13   de la présence de M. Hadzic et d'Arkan à Bijeljina --

 14   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Arkan.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Arkan. En Bosnie-Herzégovine, n'est-

 16   ce pas ?

 17   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] En avril 1992, n'est-ce pas ?

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] En avril 1992, ce serait la Republika

 19   Srpska ?

 20   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Oui.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Et votre question est que pense le

 22   témoin de leur présence à cette étape, n'est-ce pas ?

 23   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Oui.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

 25   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Monsieur le Président, ceci a trait à la

 26   dernière section du rapport de l'expert qui traite de la question de la

 27   relation entre l'accusé et Arkan. Ça, c'est la question. Et dans des vidéos

 28   antérieures, nous les voyons à différentes rencontres en différents lieux.


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  1   Ça, c'est la première chose. Et M. Nielsen en traite dans le dernier

  2   chapitre de son rapport -- c'est-à-dire, plus particulièrement de la

  3   relation entre Goran Hadzic et Arkan. Ça, c'est la première chose.

  4   Ensuite, en 2, cela porte sur la coopération entre les Serbes de Bosnie et

  5   les Serbo-Croates dont vient de parler M. Nielsen et dont il parle dans son

  6   rapport. Et je crois que cette question est légitime.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Gosnell, d'autres

  8   observations ?

  9   M. GOSNELL : [interprétation] Brièvement. L'on ne cite pas cette vidéo dans

 10   le rapport de M. Nielsen. Donc ça ne fait pas partie de son opinion. Cela

 11   ne fait pas partie du fondement de l'opinion qu'il présente dans son

 12   rapport, et sans préavis de ce que nous recherchons, de ce que le Procureur

 13   cherche à obtenir, je dirais donc que ceci est hors sujet.

 14   [La Chambre de première instance se concerte]

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ainsi que nous le voyons, Monsieur

 16   Gosnell, votre problème est un problème de préavis. Donc nous vous

 17   donnerons jusqu'à demain et nous demanderons à M. Demirdjian de présenter

 18   la question au témoin demain.

 19   M. GOSNELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Si vous voulez bien faire entrer le

 21   témoin à nouveau.

 22   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. A quelle

 23   heure faisons-nous d'ordinaire la pause, au quart --

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Au quart.

 25   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci.

 26   [Le témoin vient à la barre]

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien. En attendant le témoin,

 28   j'aimerais qu'on inscrive au compte rendu qu'un ordre de caviardage a été

 


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  1   levé. Il s'agit du document où nous ne savions pas s'il convenait qu'il

  2   soit sous pli scellé ou pas. Merci.

  3   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   Q.  Monsieur Nielsen, à la suite de cet échange en termes de procédure,

  5   nous continuerons demain sur cette vidéo. Donc, en quelque sorte, je mets

  6   cette question en attente jusqu'à demain.

  7   Passons au paragraphe 56 de votre rapport où vous indiquez qu'au 25 ou 26

  8   février 1992, Milan Martic a été élu à titre de ministre des Affaires

  9   intérieures de la RSK. Et à la suite, vous indiquez que le président, Goran

 10   Hadzic, a accordé à Milan Martic une promotion extraordinaire, et ce, au

 11   grade de général colonel de l'armée serbe de la RSK.

 12   A partir des documents que vous avez vus à l'époque, quel était le statut

 13   de l'armée serbe de la RSK à l'époque en juillet 1992 ?

 14   R.  Eh bien, puisque je ne suis pas expert en matière militaire en RSK, je

 15   me restreindrai dans ma réponse à un commentaire d'ordre général, c'est-à-

 16   dire que l'armée serbe de la RSK est ressortie des unités de la Défense

 17   territoriale qui ont été présentes ou créées par les Serbes dans les

 18   régions contrôlées par eux en Croatie et étoffées par certaines parties

 19   d'unités de la JNA et qu'il y avait également une relation entre la police

 20   et ces unités précédemment indiquées qui était touchée par la double

 21   fonction de Milan Martic en qualité de ministre des Affaires intérieures et

 22   ministre de la Défense tout particulièrement à la suite du plan Vance et de

 23   la transformation d'unités militaires en unités policières, tout du moins

 24   pour essayer de contourner les restrictions en partie qui étaient touchées

 25   par le plan Vance.

 26   Q.  Par rapport à la promotion de Milan Martic le 26 juillet 1992, avez-

 27   vous vu la vidéo où cette promotion faisait l'objet d'une cérémonie ?

 28   R.  Oui, c'est exact.


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  1   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Il s'agit de la pièce 48, Monsieur le

  2   Président. J'aimerais donc que l'on en visionne une partie.

  3   [Diffusion de la cassette vidéo]

  4   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Si vous voulez bien, un arrêt sur image.

  5   Q.  Reconnaissez-vous cette personne ?

  6   R.  Oui, il s'agit de Milan Martic.

  7   [Diffusion de la cassette vidéo]

  8   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  9   "Milan Martic : Avant que je ne dise quoi que ce soit, une minute de

 10   silence en l'honneur de nos soldats tombés, les héros serbes, dans ce

 11   corridor et les soldats qui sont tombés au plateau de Miljevac.

 12   Tous : Que Dieu ait leur âme.

 13   Milan Martic : Chers citoyens, j'aimerais d'abord vous remercier de votre

 14   accueil extraordinaire. Je sais que ceci n'est pas un moment de fête car

 15   nous vivons une période troublée. Elle nous force à suivre cette voie. Nous

 16   avons tous été témoins lorsque nous avons été attaqués, toutes les routes

 17   vers la Republika Srpska ont été fermées et il nous a été impossible

 18   d'assurer nos moyens d'existence, pas de médicaments, les malades

 19   mourraient, nos épouses ont dû demander à des soldats étrangers des

 20   cigarettes. Nous avons adressé nos demandes à la FORPRONU pour ouvrir ce

 21   corridor. Mais la FORPRONU n'a pas accédé à cette demande et ne nous a pas

 22   ouvert ce passage. Ça ne devait pas être une surprise lorsque l'on sait que

 23   les Etats-Unis, l'Allemagne et autres pays qui n'ont pas des meilleures

 24   intentions envers les Serbes dirigent la FORPRONU. Nous remercions les

 25   Kenyans qui sont de notre côté, mais la majorité des représentants de la

 26   FORPRONU n'ont certainement pas de bonnes intentions à notre égard et n'ont

 27   pas nos meilleurs intérêts à cœur, et c'est pourquoi nous avons décidé de

 28   ne supplier personne, pas la FORPRONU, pas Genscher, pas Kohl, pas Bush, et


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  1   non plus Yeltsin. Nous avons décidé de pénétrer dans ce corridor avec les

  2   héros serbes et de nous ouvrir ce corridor, ce qui pourrait nous coûter la

  3   vie. Malheureusement, c'est ce qui est arrivé. Vingt-cinq héros --"

  4   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

  5   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Un instant.

  6   Q.  Monsieur Nielsen, lorsque Martic parle d'enfoncer le corridor, de quoi

  7   parle-t-il ?

  8   R.  Il parle d'une opération militaire avec une participation exhaustive de

  9   la police qui s'est tenue à l'été 1991, le but stratégique de la chose

 10   étant de s'assurer qu'il y avait un corridor ou un couloir territorial

 11   reliant les parties orientale et occidentale de la Republika Srpska en

 12   Bosnie-Herzégovine. Les forces, y compris les forces du MUP de la RSK, de

 13   la RSK ont pris part de façon exhaustive à cette opération, et encore une

 14   fois, c'est là l'illustration des objectifs communs et de la coopération

 15   entre la RS et la RSK.

 16   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Avant que nous ne fassions la pause,

 17   pourrions-nous voir le restant de la vidéo.

 18   [Diffusion de la cassette vidéo]

 19   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 20   "Milan Martic : …de la brigade de la police de Krajina a trouvé la

 21   mort dans cette bataille pour le vouloir. Ces hommes n'ont pas été tués ni

 22   oubliés. Ce sont des Serbes, soyez-en sûrs. Et l'un de ceux qui ont perdu

 23   la vie dans ce corridor afin de le sécuriser, en fait, nous sommes dignes

 24   de cet endroit. Ils ont été tués, mais cela, il nous revient de ne jamais

 25   les oublier ni leurs familles. Nous ne les oublierons jamais, soyez-en

 26   sûrs. Je suis absolument certain que lorsque nous avons lancé cette

 27   opération, nous avions donc la bénédiction de 99 % d'entre vous et que vous

 28   étiez convaincus que nous parachèverions notre tâche qui nous a été remise


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  1   par le président de la République de la Krajina Srpska, M. Goran Hadzic, et

  2   le gouvernement de la RSK d'ouvrir ce corridor. Vous avez été convaincus

  3   que nous pourrions parachever cette tâche. Vous saviez que ces héros qui

  4   ont pris part à nombre de batailles --"

  5   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

  6   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci.

  7   Q.  Martic vient de dire que l'ouverture de ce corridor a été une tâche qui

  8   nous a été remise par le président de la république. En se fondant sur des

  9   pouvoirs constitutionnels, peut-être, le président de la république a-t-il

 10   délivré cette mission ?

 11   R.  Dans mon rapport au paragraphe 55, je cite l'article constitutionnel

 12   qui décrit les fonctions, les autorités et les responsabilités du président

 13   de la république, et il s'agit notamment, comme on le voit en haut de la

 14   page 18 de ce rapport, le commandement des forces armées en temps de guerre

 15   et en temps de paix, préparer la défense de la république et ordonner les

 16   mobilisations. Dans la mesure où nous ne voyons ni n'entendons dans

 17   différents documents de la RSK que la police est également incluse dans la

 18   définition des forces armées, c'est là une opération qui pourrait être

 19   jugée avoir été ordonnée, comme on le voit ici même, en vertu de cet

 20   article de la constitution.

 21   Q.  Merci.

 22   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Monsieur le Président, ce serait le moment

 23   à point nommé.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] De fait, nous faisons une pause.

 25   Monsieur Nielsen, vous allez sortir du prétoire, et nous reviendrons à 12

 26   heures 45.

 27   [Le témoin quitte la barre]

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Nous suspendons l'audience.


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  1   --- L'audience est suspendue à 12 heures 16.

  2   --- L'audience est reprise à 12 heures 46.

  3   [Le témoin vient à la barre]

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Si vous voulez bien continuer,

  5   Monsieur Demirdjian.

  6   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  7   Q.  Monsieur Nielsen, avant que je ne passe au chapitre suivant, qui est

  8   l'émergence de la police serbe en Croatie, j'aimerais vous projeter un

  9   deuxième extrait de la même vidéo que nous regardions sur Sanction. A la

 10   suite du discours de Martic, nous allons maintenant voir un discours

 11   prononcé par Goran Hadzic.

 12   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Si vous voulez bien nous passer la vidéo.

 13   Merci.

 14   [Diffusion de la cassette vidéo]

 15   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 16   "Que Dieu ait l'âme de nos héros."

 17   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 18   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Donc, petite allocution d'une minute et

 19   demie. Si nous pouvions aller, en revanche, à 52 minutes. Oui.

 20   [Diffusion de la cassette vidéo] 

 21   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 22   "Non, je ne veux pas fatiguer nos braves sous le soleil. J'aimerais

 23   vous remercier à nouveau et annoncer publiquement que pour aujourd'hui nous

 24   avons deux nouveaux généraux de l'armée serbe. Il y a Borislav Djukic et

 25   Milan Martic. Vivat et merci."

 26   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 27   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci.

 28   Q.  J'aimerais donc relier la chose au paragraphe 56 de votre rapport où


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  1   vous parlez de la promotion de Djukic et de Martic. Ce sera donc la

  2   promotion de ces deux hommes. De quelle compétence s'agissait-il quand il

  3   s'agit de cette promotion ?

  4   R.  D'après ce que j'ai compris de la constitution et de la structure de la

  5   RSK, c'est que le président de la république est également commandant des

  6   forces armées en temps de guerre et de paix, comme je l'ai indiqué au

  7   paragraphe 55 de mon rapport, de l'article 78 de la constitution, et donc,

  8   ce faisant, le président a également compétence de promotions de

  9   militaires, tout particulièrement de haut gradés.

 10   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Monsieur le Président, ce deuxième extrait

 11   n'a pas été versé. Puis-je le verser maintenant ?

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Versé et reçoit une cote.

 13   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document 4945.3 de la liste 65 ter;

 14   c'est cela ?

 15   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Oui, c'est cela.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote P367. Merci.

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 18   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci.

 19   Q.  Monsieur Nielsen, j'aimerais maintenant passer à la section parlant de

 20   l'émergence de la police serbe en Croatie. Avant d'y arriver, puis-je vous

 21   poser une question sur les documents qui étaient à votre disposition par

 22   rapport à la force de police serbe. Vous avez rédigé des rapports de par le

 23   passé ayant trait à d'autres -- par exemple, la police bosno-serbe. A votre

 24   sens, quelle est la qualité des documents qui étaient disponibles par

 25   rapport à la police serbe de Croatie en comparaison ?

 26   R.  Les documents d'ensemble qui ont été recueillis par le bureau du

 27   Procureur concernant les différentes permutations de la police serbe de

 28   Croatie sont de loin inférieurs en qualité aux documents comparables qui


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  1   ont été mis à ma disposition en tant qu'analyste lorsque j'ai réalisé mon

  2   analyse sur la police bosno-serbe, ce qui souligne plusieurs questions

  3   d'ordre méthodologique. Il convient de noter, toutefois, que c'est

  4   également ma conclusion que la rareté et parfois l'état des documents et

  5   leur contenu concernant la police serbo-croate reflètent bien ce qui est,

  6   par comparaison, une opération moins étoffée par rapport à leurs collègues

  7   serbes de Bosnie.

  8   Il convient également de noter, et j'en suis conscient à titre de

  9   collaborateur du Tribunal, que l'état des documents pour la police serbo-

 10   croate reflète également les difficultés rencontrées au cours des

 11   tentatives réitérées pour obtenir lesdits documents auprès des

 12   gouvernements pertinents, non seulement parce que, bien sûr, lorsque l'on

 13   parle de la Slavonie, du Baranja, et du Srem occidental pendant la période

 14   de transition, la plupart des documents ont été enlevés et restent non

 15   disponibles, si ces documents d'ailleurs existent encore aujourd'hui.

 16   Q.  Dans ce chapitre, vous évoquez la création de la SAO Krajina, et je ne

 17   m'appesantirai pas parce que je crois que vous avez suffisamment décrit la

 18   chose.

 19   Si l'on se penche sur la création du MUP et des SBWS, au paragraphe

 20   99 vous décrivez la nomination de Borislav Bogunovic à titre de premier

 21   ministre des Affaires intérieures en septembre 1991, là encore, quant à la

 22   disponibilité des sources, avez-vous été en mesure de trouver des documents

 23   qui portaient sur la structure dudit ministère ?

 24   R.  Je n'ai pas été en mesure de trouver de ce que j'appellerais, moi,

 25   analyste, des documents essentiels qui, de façon claire et concise, cernent

 26   la structure du ministère des Affaires intérieures qui a été créé en

 27   Slavonie, Baranja, et Srem occidental. Encore une fois, si je peux

 28   m'exprimer en terme de comparaison des sources qui n'ont été offertes, je


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  1   déclarerais ce que j'ai déjà observé, que l'état de la documentation

  2   d'ensemble sur la police serbo-croate était inférieur aux documents qui

  3   sont disponibles pour la police serbe de Bosnie, et même dans le, disons,

  4   le monde de la documentation ayant trait aux structures de la police serbe

  5   en Croatie, les meilleurs documents portent sur la région de la SAO

  6   Krajina, et ensuite la RSK, et les informations plus rares sont en revanche

  7   disponibles en ce qui concerne la SAO de la Slavonie occidentale et de la

  8   SAO Slavonie, Baranja, et Srem occidental.

  9   Q.  Par la suite, vous indiquez que Borislav Bogunovic, fin 1991, a été

 10   remplacé, et ce, au paragraphe 118, par Predrag Radlovic. Vous rédigez dans

 11   votre rapport que l'on peut en conclure qu'en février 1992, Radlovic --

 12   Pourrions-nous voir le document 817, je vous prie, à l'onglet  --

 13   Et Monsieur Nielsen, est-ce que ce document vous donne des informations

 14   supplémentaires par rapport au paragraphe 118 de votre rapport ?

 15   R.  Oui. Ce document est la version journalisée de la décision d'élire un

 16   ministre des Affaires intérieures, Predrag Radlovic, et est en date du 19

 17   septembre 1991.

 18   Q.  Je pense qu'il s'agit de décembre, si je ne m'abuse. Est-ce septembre

 19   ou décembre ?

 20   R.  Je pense que j'ai dit septembre -- décembre. Il s'agit de décembre.

 21   Q.  Décembre. Merci. Monsieur le Président, puis-je verser ce document qui

 22   n'est pas dans ce rapport ?

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Versé et reçoit une cote.

 24   M. LE GREFFIER : [interprétation] Et reçoit la cote P368.

 25   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

 26   Q.  Au paragraphe 117, vous indiquez également la création d'un service en

 27   SAO et vous y expliquez que vous aviez des documents extrêmement limités à

 28   cet égard. Pourriez-vous indiquer aux Juges de la Chambre quel est le rôle


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  1   de ce service de sécurité nationale ?

  2   R.  Si l'on parle de la police et autres organismes des affaires

  3   intérieures en Yougoslavie de façon historique, eh bien, il y a depuis 1945

  4   la sécurité publique et une sécurité d'Etat qui sont les deux volets des

  5   affaires intérieures. La Sûreté de l'Etat est par la suite appelée

  6   également la Sûreté nationale dans différentes structures établies par les

  7   Serbes dans les années 1990 et se voit confier la protection de l'intégrité

  8   de l'Etat, et principalement la protection de l'ordre constitutionnel

  9   établi de l'Etat contre des ennemis, tant intérieurs qu'extérieurs.

 10   Q.  Très bien. Au paragraphe 120 dans ce rapport, vous citez un rapport de

 11   la région de Vukovar pour les six premiers mois de 1992.

 12   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Pourrions-nous voir le document 1190 à

 13   l'onglet 221 de la liste 65 ter. Et si l'on pouvait faire un gros plan sur

 14   le premier paragraphe. Bien.

 15   Q.  Pourriez-vous nous donner vos observations sur ce premier paragraphe,

 16   Monsieur Nielsen.

 17   R.  Comme je l'ai noté, il s'agit d'un rapport sur le travail des six

 18   premiers mois de 1992 du département du centre de Vukovar pour la Sûreté de

 19   l'Etat situé provisoirement à Dalj, et nous y voyons qu'il y a eu un

 20   travail opérationnel réalisé pour tenter d'éliminer et d'aller à la

 21   rencontre et d'éliminer les menaces de l'ennemi et tenter d'organiser la

 22   défense et la protection de cette région en coopération avec d'autres

 23   autorités. Là encore, ceci s'inscrit dans le droit fil de ce que je viens

 24   d'indiquer, le rôle traditionnel du travail du service de la Sûreté, et ce,

 25   dans le contexte yougoslave.

 26   Q.  Pourrions-nous passer à la page 4, en haut, et en B/C/S, la page 3 en

 27   bas de la page. Dans ce rapport, la Sûreté de l'Etat décrit les activités

 28   de ses unités début 1992, et là, on y décrit également, si vous voulez bien


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  1   voir le paragraphe qui commence par "Truly speaking" en anglais, donc

  2   "Véritablement", qui décrit donc le départ de certaines Croates, qui est

  3   indiqué comme étant peu approprié. Pourriez-vous nous donner des

  4   observations sur ce paragraphe, Monsieur Nielsen ?

  5   R.  Le service de Sûreté de l'Etat avait entre autres activités le rôle de

  6   surveiller l'état de la sécurité dans les régions sur lesquelles ils

  7   avaient compétence. Il s'agissait de faire rapport de toutes manifestations

  8   ou actions qui, d'une manière ou d'une autre, pouvaient ou étaient

  9   susceptibles de menacer la sécurité de l'Etat. Et dans ce contexte-là, ils

 10   ont jugé utile de faire un rapport sur ce qu'ils appelaient le déplacement

 11   -- ou l'émigration des Croates de cette région, qui s'est passée de façon

 12   inacceptable, voire inappropriée. Et je souhaite indiquer qu'au regard de

 13   l'ensemble des documents que j'ai eu l'occasion d'examiner, y compris des

 14   documents qui ont été fournis par la police, par certains organes de la TO

 15   et certains organes de la JNA, qu'il y a un certain nombre de rapports qui

 16   précisent qu'à l'automne de l'année 1991 et au printemps de l'année 1992,

 17   un nombre important de Croates ont été chassés de cette région, que non

 18   seulement les services de Sûreté de l'Etat mais d'autres organes ont jugé

 19   inacceptables et qui a porté préjudice à la situation au plan de la

 20   sécurité dans cette région.

 21   Q.  Alors, par rapport à ce thème, je souhaite que nous regardions un

 22   nouveau document qui est contenu dans votre rapport qui n'était pas

 23   auparavant contenu dans votre rapport.

 24   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Numéro 65 ter 6052, s'il vous plaît.

 25   Intercalaire numéro 347.

 26   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 27   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Ici, encore une fois, il s'agit de la même

 28   collection de documents pour lesquels nous n'avons pas donné de réponse


Page 2470

  1   encore. Nous pouvons l'utiliser en audience publique. Pardonnez-moi.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

  3   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur le Professeur, il s'agit ici d'un document qui, d'après ce que

  5   nous pouvons constater, a été établi le 17 décembre 1991 par la 1ère

  6   Division mécanisée des Gardes prolétaires. Avez-vous eu l'occasion

  7   d'examiner ce document ?

  8   R.  Oui, tout à fait.

  9   Q.  Alors en termes d'appréciation générale, pourriez-vous dire aux Juges

 10   de la Chambre quel est votre avis sur cet ensemble de documents qui vous a

 11   été fourni après la rédaction de votre rapport ? Est-ce que vous avez

 12   estimé qu'il s'agissait là d'éléments pertinents eu égard à votre rapport ?

 13   R.  Le gros des documents supplémentaires qui m'ont été fournis émanait de

 14   différentes unités militaires de la JNA, en particulier lorsqu'il s'agit de

 15   la deuxième moitié de l'année 1991, et ces documents traitent de différents

 16   événements et observations que ces personnes ont eues à propos des

 17   événements qui se sont déroulés en Slavonie orientale, à Baranja et Srem

 18   occidental, dans la plupart des cas il s'agit essentiellement de documents

 19   militaires, ils jugent utile de commenter les activités ainsi que le

 20   comportement des forces de police et de leurs relations avec différentes

 21   formations paramilitaires qui étaient à ce moment-là dans cette région en

 22   1991. Et en tant que tel, ces documents abordent un certain nombre de

 23   sujets qui ont été préalablement abordés par mon rapport avant que je n'aie

 24   eu l'occasion de les examiner.

 25   Q.  Au vu de ce rapport et ce premier long paragraphe, cette division de

 26   l'armée traite des différentes localités qui étaient essentiellement

 27   habitées par des Croates.

 28   Vers la fin du paragraphe, il y a une phrase qui explique que de nombreuses


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  1   localités à populations majoritairement serbes par l'intermédiaire des

  2   états-majors des TO ont exercé des pressions pour que la population croate

  3   s'en aille pour toujours.

  4   Pourriez-vous nous donner des éléments de contexte ?

  5   R.  Alors, à l'intention des Juges de la Chambre, je dois vous dire que

  6   l'intitulé du document ne figure pas sur ce document. Et sous le

  7   destinataire qui est le 1er commandant militaire de la commission chargé

  8   des affaires civiles, déclare quel est l'objet de cette correspondance, il

  9   s'agit de la question de l'émigration et de l'immigration, et donc ce qui

 10   se passe ici c'est que le commandant écrit au 1er commandant militaire pour

 11   savoir ce qu'il doit faire à propos de personnes que l'on déplace ou que

 12   l'on chasse de cette région où elles se trouvent.

 13   Et nous constatons dans ce document, et c'est quelque chose qui figure dans

 14   un certain nombre d'autres documents nouveaux que j'ai eu l'occasion

 15   d'examiner, c'est que les militaires ont du mal à classer les habitants qui

 16   restent, et en particulier ceux qui sont de nationalité croate, comme ils

 17   les déclarent au point 1 au niveau de la première page, qui sont loyaux et

 18   qui n'ont pas de membres de leur famille dans les forces armées croates.

 19   Comment traiter la population locale qui avait des grands-parents dans les

 20   forces armées croates, mais qui ne s'était pas compromise de quelle que

 21   manière que ce soit en aidant lesdites forces.

 22   Et l'armée, la police a beaucoup de mal avec cela et ne sait pas s'il

 23   existe la notion d'une quelconque responsabilité collective sur une base

 24   ethnique, ce qui signifie qu'il faudrait chasser tous les Croates de la

 25   région ou peut-être que certains Croates auraient la possibilité de vivre

 26   encore dans cette région s'ils ne se sont pas compromis d'une manière ou

 27   d'une autre avec les forces croates.

 28   Q.  Comme vous nous l'avez indiqué ici, cette division de la 1ère Division


Page 2472

  1   mécanisée prolétarienne recherche le conseil ou les recommandations du

  2   commandement supérieur ?

  3   R.  C'est exact. Ils déclarent quelle est la situation sur le terrain, ils

  4   la décrivent, et font état d'une situation extrêmement volatile, en

  5   particulier comme nous pouvons le constater au vu d'autres documents parce

  6   qu'un nombre important de Serbes déplacés arrivent de Slavonie occidentale

  7   et souhaitent s'installer dans des régions de Slavonie orientale, de la

  8   Baranja et du Srem occidental qui sont maintenant contrôlées par les Serbes

  9   et qui à de nombreuses reprises -- et qui déplacent par la force les

 10   Croates et ceux qui ne sont pas d'appartenance ethnique serbe de maisons si

 11   ces maisons ne sont pas déjà vides. Donc c'est ce genre de questions-là

 12   dont l'armée a connaissance, dont les militaires ont connaissance et ils

 13   souhaitent avoir des précisions là-dessus, ils souhaitent avoir des

 14   conseils sur comment agir, parce qu'il s'agit d'une situation fort

 15   dynamique et volatile à laquelle ils sont confrontés sur le terrain.

 16   Q.  Merci.

 17   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Alors, nous allons demander à avoir une

 18   traduction revue et corrigée pour que le titre du document soit inclus dans

 19   la traduction. En attendant, pouvons-nous avoir une cote provisoire, s'il

 20   vous plaît.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Marqué aux fins d'identification.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document aura la cote P369 marqué aux

 23   fins d'identification en attendant la traduction.

 24   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Est-ce que nous pourrions maintenant

 25   regarder le numéro 65 ter 6053, l'intercalaire numéro 348, s'il vous plaît.

 26   Q.  Monsieur le Professeur, vous pouvez constater qu'il s'agit encore une

 27   fois d'un document qui émane de la même unité, la 1ère Division mécanisée

 28   des Gardes prolétaires, 23 décembre. Six jours après le document précédent,


Page 2473

  1   un certain nombre de questions qui sont posées, questions 1, 2, 3, 4.

  2   Veuillez passer à la page suivante en anglais, s'il vous plaît. Et nous

  3   constatons qu'en haut de la page il est dit "nous avons reçu la réponse

  4   suivante du commandement du 1er District militaire, de la 1ère Région

  5   militaire."

  6   Et avant de vous poser davantage de questions, avez-vous eu l'occasion

  7   d'examiner ce document ?

  8   R.  Oui, tout à fait.

  9   Q.  Et que pouvez-vous dire au sujet des réponses qui ont été fournies par

 10   la 1ère Région militaire ?

 11   R.  Tout d'abord, comme nous pouvons le constater au début de la réponse du

 12   commandement militaire, il s'agit là, comme je l'ai déjà précisé, lié non

 13   seulement au départ des Croates de cette région mais également à l'arrivée

 14   des réfugiés serbes, et en particulier en Slavonie occidentale qui crée

 15   cette dynamique dont j'ai parlé. Et ensuite les militaires -- ou le

 16   commandant militaire répond en disant que dans la mesure du possible il

 17   devrait tenter de résoudre cette situation en application avec demande des

 18   Serbes -- ou conformément à la demande des Serbes venant d'autres régions

 19   avec les différents organes civils de sécurité lorsque ces organes

 20   existent; et lorsque ces organes n'existent pas, il faut se tourner vers le

 21   commandement de la ville pour essayer de trouver une solution, et s'il n'y

 22   a pas de commandement au niveau de la ville, à ce moment-là recueillir

 23   l'avis du gouvernement du district de Baranja, de la Slavonie orientale et

 24   du Srem occidental.

 25   Q.  Cet ensemble de documents que nous avons vus et que nous allons voir,

 26   que pouvez-vous en dire, que pouvez-vous dire au sujet des relations entre

 27   les unités de la JNA et les organes au pouvoir civils et locaux ?

 28   R.  Ce que je puis dire encore une fois, compte tenu du nombre assez limité


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  1   de documents qui existent sur le thème, c'est une relation liée à la

  2   situation, à savoir cela a trait dans bon nombre de cas, comme nous pouvons

  3   le constater dans ce document, à la question de savoir si les quelconques

  4   autorités civiles, et en particulier les autorités policières, existent

  5   dans la région ou pas, et lorsque ces autorités existent bel et bien, il

  6   faut tenter de résoudre cette situation, et cela dépend pour beaucoup des

  7   personnalités en présence, de leur avis personnel sur la question, sur la

  8   situation, à savoir si les Croates ou les personnes qui ne sont pas

  9   d'appartenance ethnique serbe doivent être autorisés à rester dans la

 10   région et comment l'installation des Serbes, des personnes déplacées, doit

 11   être effectuée.

 12   Et également, cela dépend de la présence ou de l'absence dans certains cas

 13   d'unités paramilitaires dans ces municipalités et ces localités. Et de

 14   façon générale, bien sûr, lorsqu'il y a présence de formations

 15   paramilitaires, ceci a tendance à rendre beaucoup plus complexe la

 16   situation car cela débouche sur des attaques contre les Croates et autres

 17   qui sont restés.

 18   Q.  Est-ce que nous pouvons regarder la page 3 de l'anglais, et, Monsieur

 19   le Professeur, dans l'original il s'agit du troisième paragraphe à partir

 20   du bas, qui commence par "Tous les cas de déplacement illégal." Est-ce que

 21   vous pourriez, s'il vous plaît, nous préciser quel terme est utilisé dans

 22   l'original en serbe. Je vous parler du terme "déplacement illégal".

 23   R.  Eh bien, oui. Si vous me le permettez, je souhaite parler du document

 24   précédent également. Il y a deux termes qui sont très importants et qu'il

 25   faut bien comprendre en serbe. Le premier terme est "iseljavanje", et

 26   l'autre est "useljavanje", car "iseljavanje" signifie littéralement

 27   déplacer à l'extérieur, et "useljavanje" signifie s'installer à. Donc il

 28   s'agit d'un processus double. Il y a des Serbes qui ont été déplacés par la


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  1   force, "iseljavanje", de la Slavonie occidentale, et s'installent,

  2   "useljavanje", en Slavonie orientale, Srem et Baranja. Et les Croates qui

  3   habitaient en Slavonie orientale et au Srem occidental sont déplacés de la

  4   région et sont sans doute réinstallés dans d'autres régions de Croatie, et

  5   certains sont partis à l'étranger.

  6   Q.  Et le terme "ilegalnog", comment le comprenez-vous, qui est juste avant

  7   "iseljavanje" dans ce document ?

  8   R.  Eh bien, évidemment, cela signifie illégal. C'est en tout cas la

  9   perception du général de division Delic, qui est l'auteur de ce document,

 10   et d'après lui, il y avait, sinon pas dans tous les cas, en tout cas dans

 11   bon nombre de cas des cas où les personnes ont été chassées de façon

 12   illégale de leurs maisons, et dans de tels cas il fallait que ce soit

 13   documenté et, comme il le dit, en coopération avec les organes chargés de

 14   la sécurité de la JNA ainsi que les organes des services de sécurité

 15   publique de la région, de la SAO, ou des organes de sécurité publique

 16   concrètement, à savoir en coopération avec la police.

 17   Q.  Et nous sommes passés outre certains événements qui se sont déroulés

 18   vers la fin de l'année 1991. Ce document est daté du mois de décembre 1991.

 19   A votre connaissance, d'après les documents que vous avez eu l'occasion

 20   d'examiner, quel était l'état des actions de combat en Slavonie orientale à

 21   l'époque ?

 22   R.  Alors, en terme de connaissance générale, je crois qu'après la chute de

 23   Vukovar, dans la deuxième moitié de l'année 1991, les opérations de combat

 24   majeures avaient cessé dans cette région.

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Puis-je demander le versement au

 26   dossier de ce document, s'il vous plaît.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Il sera admis et recevra une cote.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document reçoit la cote P370.


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  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

  2   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Sur le même thème, est-ce que nous pouvons

  3   afficher le numéro 65 ter 6058, s'il vous plaît. A l'intérêt numéro 350.

  4   Pardonnez-moi. Il ne s'agit pas du bon document. Oui.

  5   Q.  Monsieur le Professeur, nous constatons ici qu'il s'agit d'un document

  6   qui a été établi par le commandement de la ville d'Ilok le 25 décembre

  7   1991. Avez-vous eu l'occasion d'examiner ce document ?

  8   R.  Oui, tout à fait.

  9   Q.  Et ce document, encore une fois, traite de l'installation, des

 10   déplacements de la population après la fin des actions de combat. Puis-je

 11   vous demander de bien vouloir regarder la fin du premier paragraphe qui

 12   apporte un commentaire sur le gouvernement de la SAO à l'époque. Pourriez-

 13   vous nous commenter cette mention, s'il vous plaît.

 14   R.  Le commandement de la JNA dans la ville d'Ilok exprime son

 15   insatisfaction de façon assez véhémente, comme l'indique le document, à

 16   l'égard de l'indifférence et de l'indolence du gouvernement de la SAO qui,

 17   de façon assez curieuse, signifie que cela aboutit à une poignée de

 18   difficultés non objectives. A mon sens, il s'agit de problèmes qui

 19   existent, et une approche constructive ou magnanime n'a pas été adoptée par

 20   le gouvernement. Encore une fois, il s'agit ici de la dépendance que j'ai

 21   déjà citée, à savoir que cela dépend pour beaucoup des personnes qui

 22   prennent les décisions, des acteurs à qui ont demande d'aborder cette

 23   question des personnes déplacées qui entrent ou qui sortent de la région.

 24   Je dois également remarquer qu'étant donné que nous parlons de questions

 25   terminologiques, il y a un mot-clé dans ce document utilisé à cette époque

 26   qui est celui de "loyauté", alors que nous avons vu dans le document

 27   précédent les militaires qui donnent leur avis sur les personnes qui se

 28   sont comportées de façon loyale envers la JNA en Yougoslavie et qui


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  1   devraient être autorisées à rester. Il s'agit donc d'un climat extrêmement

  2   volatile au plan du conflit ethnique, et ce n'est pas du tout clair si

  3   quelqu'un peut rester, à savoir s'il a été loyal ou pas. Il n'y avait pas

  4   de critère objectif.

  5   Q.  Est-ce que nous pouvons passer à la page 2 de la version en B/C/S, s'il

  6   vous plaît, et à la page 3 de l'anglais.

  7   Que suggère la JNA ici ? Elle semble proposer un certain nombre de points.

  8   R.  Eh bien, parmi de nombreuses autres choses, la JNA propose que cette

  9   procédure de réinstallation soit menée de façon beaucoup plus organisée,

 10   par exemple, en dressant des listes précises des personnes sur le départ et

 11   des personnes arrivant afin - et ce n'est pas la moindre des raisons de

 12   cette proposition - afin de diminuer les conséquences indésirables de

 13   déplacements forcés, non désirés des personnes. Ils demandent également que

 14   les décisions de la SAO impliquant que cette dernière reçoive une forme

 15   d'autorisation écrite ou de justification quant à l'endroit où ils étaient

 16   supposés s'installer fassent l'objet d'inventaires, que l'on dresse des

 17   inventaires des maisons, des objets que les personnes s'installant ont

 18   apportés avec elles, et cetera, parce que beaucoup de ce qui se passait

 19   arrivait sans qu'il y ait la moindre documentation de cette nature. L'armée

 20   et dans une certaine mesure la police également font état de cas de

 21   personnes arrivant de la Slavonie occidentale prenant possession dans

 22   certains cas de la première maison disponible, indépendamment de la

 23   question de savoir si elle était habitée ou non, si les habitants étaient

 24   des non-Serbes notamment. L'armée voulait que l'on mette en place un

 25   système structuré officiel qui permettrait de documenter ce processus afin

 26   de réduire les abus dont elle était le témoin.

 27   Q.  Et vers le bas de ce document en anglais, si nous faisons défiler vers

 28   le bas, nous verrons qu'il y a ce problème d'installation illégale à Ilok


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  1   précisément. Comme vous dites, cela n'a pas été fait avec des permis

  2   attribués en bonne et due forme. Continuons jusqu'à la page suivante en

  3   anglais.

  4   L'armée, ici, suppose que des membres du gouvernement participaient à cela.

  5   Comment est-ce que vous interprétez ceci ?

  6   R.  Il est question d'installation forcée -- le terme utilisé est

  7   "useljavanje" encore, bien que le commandement n'ait pas émis d'ordre à cet

  8   effet, je parle d'installation à Ilok. Alors ils ne veulent pas perdre de

  9   temps avec des détails, mais ils spéculent quant au fait que dans les

 10   coulisses, le ministre des Affaires intérieures Bogunovic et Ivo [phon]

 11   Loncarevic, un ancien officier de police qui à ce moment-là était à Backa

 12   Palanka, agissent donc en coulisses. Ceci correspond, encore une fois, à un

 13   grand nombre de documents que j'ai pu examinés, certains émanant de la

 14   Sûreté d'Etat serbe, d'autres de la JNA, et d'autres encore de la police en

 15   Slavonie orientale, dans lesquels on trouve fréquemment des spéculations

 16   quant à différents individus, certains d'entre eux liés aux autorités de la

 17   région, spéculations qui consistent à dire que ces individus auraient un

 18   bénéfice économique à voir effectuer cette réinstallation forcée de la

 19   population dans le secteur.

 20   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Messieurs les Juges, je souhaite demander

 21   le versement de ce document.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.

 23   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote P371.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 25   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je voudrais demander maintenant

 26   l'affichage du document numéro 6093 de la liste 65 ter, intercalaire numéro

 27   361.

 28   Q.  Monsieur Nielsen, vous allez voir à l'écran un document qui est émis


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  1   plusieurs mois après l'émission de ces propositions par la JNA. La date est

  2   celle du 11 février. Est-ce que vous pourriez nous dire qui est l'auteur de

  3   ce document ?

  4   R.  L'auteur du document est la commission centrale chargée des

  5   installations, et elle est composée de Borislav Bogunovic -- alors c'est

  6   indiqué comme étant illisible, mais ça n'est pas illisible sur l'original.

  7   Il y a également Bogdan Vojnovic, Vojin Susa, et il y a encore une autre

  8   personne.

  9   Q.  Il apparaît ici que ces membres de la commission centrale chargée des

 10   réinstallations répondent à un membre de la communauté locale, et il s'agit

 11   de la communauté locale de Mohovo. Alors, est-ce que vous pourriez nous

 12   dire où cela se trouve ?

 13   R.  Je ne pourrais pas vous le dire de tête, mais je peux vous dire qu'il

 14   est question de Mohovo dans les documents que nous venons d'examiner parce

 15   que c'était l'une des localités énumérées dans l'un des documents

 16   précédents où les maisons avaient été évacuées par les Croates, et il est

 17   indiqué dans ce document précédent que ces maisons étaient disponibles pour

 18   que des Serbes s'y installent.

 19   Q.  Très bien. Merci. Alors, quelle réponse la commission centrale chargée

 20   des réinstallations fournit-elle ici aux questions posées par la communauté

 21   locale de Mohovo ?

 22   R.  Dans ce document, ils relèvent que ce processus de réinstallation est

 23   en cours, que la commission centrale chargée des réinstallations doit

 24   informer la communauté locale de Mohovo qu'aucune décision pour le moment

 25   n'a été prise par le gouvernement de la Région autonome serbe en ce qui

 26   concerne le déplacement de personnes de nationalité croate. Cependant, la

 27   commission exprime également une certaine compréhension à l'égard du

 28   souhait de la communauté locale de Mohovo de voir expulser certains


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  1   individus qui avaient collaboré avec les autorités oustachi si ces actions

  2   sont bien confirmées. Mais ici, nous avons affaire à l'un des documents

  3   correspondant à cette période particulière où nous pouvons voir différentes

  4   autorités et différents organes qui essaient de déterminer s'il est

  5   possible d'avoir une politique unique et de la mettre en œuvre pour toutes

  6   ces questions qui sont d'une importance cruciale -- donc nous voyons qu'il

  7   s'agit d'une réponse à cette communauté locale de Mohovo indiquant qu'il y

  8   a une pression venant de la base qui s'exerce vers le haut, à partir des

  9   communautés locales donc, pression demandant que ces questions trouvent

 10   aussi rapidement que possible une solution et qui demande également des

 11   instructions.

 12   Q.  Dans le troisième paragraphe du document, celui qui commence par

 13   "Cependant", dans la première ligne de la version anglaise en tout cas, il

 14   semble y avoir encore une fois un lien qui est fait avec la collaboration

 15   avec l'ennemi et les autorités oustachi. Est-ce que cela correspond à ce

 16   que vous indiquiez il y a quelques instants ?

 17   R.  Oui, tout à fait, et encore une fois, dans cette première phrase on

 18   peut voir que les organes de la communauté locale de Mohovo peuvent établir

 19   si les individus figurant sur cette liste qu'ils ont fournie ont enfreint

 20   la loi et l'ordre légal de la Région autonome serbe. Encore une fois, ceci

 21   concerne la question de savoir qui est censé, pendant cette période,

 22   déterminer les personnes qui ont été loyales et de bons citoyens et celles

 23   qui ne l'ont pas été.

 24   Q.  Merci.

 25   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je voudrais demander le versement de ce

 26   document.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote P372. Merci.


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  1   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Pouvons-nous maintenant afficher le

  2   document 6096 de la liste 65 ter. Intercalaire 363.

  3   Q.  Alors, Monsieur le Témoin, c'est un document qui remonte à peu près à

  4   la même période que le précédent, 16 février 1992. Il émane du commandant

  5   du 1er Corps d'armée motorisé. Encore une fois, est-ce que vous avez eu

  6   l'occasion d'examiner ce document ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Ceci a été rédigé par les organes de la CP. Est-ce que c'est un

  9   acronyme que vous avez déjà eu l'occasion de voir précédemment ?

 10   R.  Oui. C'est un rapport des organes chargés des affaires civiles, ou

 11   "civilni poslovi" en B/C/S.

 12   Q.  Très bien. Alors, au point 1, il y a quelque chose qui concerne la mise

 13   en place des communautés locales et des organes des autorités civiles. Au

 14   point numéro 2 -- alors, je ne sais pas si sur cette page vous pouvez voir

 15   ce qui m'intéresse. Il y a une discussion sur la mise en place des services

 16   de police sur le territoire. C'est à la page suivante. Merci.

 17   Alors, point numéro 4 en version anglaise. C'est en page 4. Je crois qu'en

 18   B/C/S c'est sur la même page.

 19   Il est indiqué ici que, je cite : "Pendant ces travaux, l'organe des

 20   affaires civiles a rencontré les problèmes suivants, résoudre le problème

 21   des réinstallations et des déplacements." Et vous pouvez voir ici également

 22   au paragraphe 2 qu'il y a des pressions de la part des personnes déplacées,

 23   pressions exercées sur la population locale, et il est question du soutien

 24   des organes des autorités locales, soutien que ces organes devaient

 25   recevoir du gouvernement -- ou plutôt, que le gouvernement devrait accorder

 26   à la communauté locale.

 27   Est-ce que vous pourriez nous donner votre point de vue là-dessus.

 28   R.  Ce document illustre, encore une fois, la façon dont ceci pouvait


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  1   dépendre des endroits où les événements se déroulent, et cela variait d'un

  2   endroit à l'autre. Il y a différentes situations dans lesquelles les

  3   organes civils ou les autorités civiles, y compris la police, ont été mis

  4   en place, et ils ont été mis en place en différentes phases. L'armée essaie

  5   de suivre ces développements en fonction de l'existence ou non d'autorités

  6   locales et d'établir une coopération avec elle, si c'est possible.

  7   Cependant, l'armée est également confrontée à un certain nombre de

  8   situations dans lesquelles les organes locaux déjà existants des autorités

  9   sont hostiles à l'idée même du maintien d'une coexistence entre les Croates

 10   et d'autres non-Serbes d'une part, et les ressortissants du groupe ethnique

 11   serbe d'autre part. Ils relèvent également toute une série de cas dans

 12   lesquels des représentants du gouvernement, y compris un groupe de membres

 13   de la police secrète, ont fait leur apparition. Alors, il est assez

 14   difficile du point de vue de l'armée de déterminer s'il s'agissait

 15   d'organes légitimes ou non, mais l'armée relève, en tout cas, que dans de

 16   nombreux cas, ces groupes semblent jouir d'une forme ou d'une autre de

 17   soutien officiel et participent à des activités qui impliquent, entre

 18   autres, le déplacement forcé de personnes.

 19   Encore une fois, ils notent que ce problème des personnes âgées qui

 20   restent dans le secteur, c'est quelque chose que nous pouvons déduire de ce

 21   document ainsi que d'un certain nombre d'autres documents, qu'il s'agit là

 22   de personnes âgées qui n'ont enfreint aucune loi, ni le nouvel ordre légal

 23   établi par la Région autonome serbe, mais qui sont visées au moins par

 24   certaines des autorités locales parce que leurs fils, leurs filles, ou

 25   d'autres membres de leur famille ont participé aux forces de police croates

 26   ou aux forces armées croates.

 27   Q.  Très bien. Alors, revenons à la page 1 en B/C/S, page 2 en anglais. Je

 28   voudrais attirer votre attention sur le paragraphe qui est d'une assez


Page 2484

  1   grande longueur en fin de la page en B/C/S, où il est question de membres -

  2   - ou plutôt, de la population locale et des Serbes qui se sont réinstallés

  3   à partir d'autres secteurs.

  4   Alors, nous voyons le type de crimes dont il est question. Il est question

  5   de meurtres non élucidés et de la pression visant à faire partir la

  6   population croate. Comme indiqué plus tôt, nous avons un certain nombre de

  7   villages, y compris Mohovo, mais également le fait que des maisons de

  8   Croates sont occupées, et cetera.

  9   Alors, est-ce que ceci correspond aux autres documents que vous avez vus au

 10   sujet de cette période ?

 11   R.  Oui, ceci est conforme au type d'actions et de comportements que j'ai

 12   décrits.

 13   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je souhaite verser ce document.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote P373.

 16   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Et dans cette même série de documents, je

 17   voudrais maintenant demander l'affichage d'un dernier document, numéro 6162

 18   de la liste 65 ter, intercalaire 392, s'il vous plaît.

 19   Q.  Monsieur Nielsen, c'est encore un autre document émanant du 1er Corps

 20   d'armée motorisé. Dans les documents précédents, nous avons vu que les

 21   personnes visées par ces réinstallations ou ces déplacements étaient

 22   principalement du groupe ethnique croate. Ici, nous voyons -- alors, vous

 23   pouvez le voir vers la fin du premier paragraphe, qu'il s'agit de Ruthènes

 24   et d'Ukrainiens sur le territoire de la municipalité de Vukovar. Alors, que

 25   pouvez-vous nous dire quant au ciblage de cette catégorie particulière de

 26   population ?

 27   R.  Encore une fois, si je parle sur la base de l'ensemble de la

 28   documentation que j'ai eu la possibilité d'examiner, pas uniquement ce jeu


Page 2485

  1   de documents nouveau mais également les documents de la police et les

  2   documents de la Sûreté d'Etat de Serbie, eh bien, je dirais que si la

  3   grande majorité des déplacements depuis ce secteur s'était concentrée sur

  4   des Croates, il s'agissait bien entendu d'un secteur peuplé par des groupes

  5   ethniques très différents. Alors, nous avons des Ruthènes, des Ukrainiens,

  6   des Hongrois qui sont cités, des Slovaques également, quelques Tchèques, et

  7   dans un nombre important de cas, les forces armées indiquent qu'il ne

  8   s'agit pas uniquement de Croates qui subissent des pressions visant à les

  9   faire se réinstaller ailleurs, mais qu'il y a également un problème de

 10   manque de protection par les autorités civiles, et dans ce cas précis, que

 11   c'est la population ukrainienne ou ruthénienne qui est concernée. Les

 12   Slovaques en particulier ont envoyé une délégation au secrétariat fédéral

 13   des affaires intérieures à peu près à cette même époque dans une tentative

 14   visant à obtenir des autorités centrales à Belgrade certaines mesures

 15   permettant de répondre aux menaces qui pesaient sur le maintien de leur

 16   présence dans cette région. Et il apparaît clairement à la lumière de ce

 17   document et d'autres documents aussi que les Slovaques avaient été pris

 18   pour cible par certains Serbes parce que pendant la Seconde Guerre

 19   mondiale, les Slovaques avaient également fait partie d'un Etat

 20   collaborateur avec les Nazis, tout comme les Croates.

 21   Q.  Merci, Monsieur Nielsen.

 22   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je voudrais demander le versement de ce

 23   document.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il devient la pièce P374.

 26   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

 27   Q.  Eh bien, sur ce sujet des déplacements forcés, Monsieur Nielsen, je

 28   voudrais que nous passions au paragraphe numéro 206 de votre rapport. Vous


Page 2486

  1   évoquez quelque chose qui est contemporain des événements évoqués dans le

  2   rapport que nous venons de voir. Vous mentionnez la date du 2 mars 1992 et

  3   dites qu'il y a eu une discussion avec Radovan Karadzic au sujet de

  4   possibles échanges de population, et vous vous référez au procès-verbal, et

  5   vous dites que Karadzic aurait dit la chose suivante, je cite :

  6   "Qui forcera les Croates de Vojvodine à aller en Krajina ? Il s'agit d'une

  7   idée nébuleuse et le monde en est choqué. Bien que l'Inde et le Pakistan

  8   aient également procédé à ce genre de choses."

  9   Et vous poursuivez en disant que Hadzic est intervenu en disant que ce

 10   n'était pas si nébuleux que cela.

 11   Alors, après avoir examiné ces procès-verbaux, est-ce que vous pourriez

 12   nous dire comment vous interprétez cette intervention de Goran Hadzic ?

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell.

 14   M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, puisque nous semblons

 15   être en train de nous pencher sur des propos consignés dans des comptes

 16   rendus sténographiés, est-ce qu'il ne serait pas approprié d'en demander

 17   l'affichage pour que nous les ayons devant nous tout comme le témoin au

 18   moment où il en fera le commentaire ?

 19   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] C'est la pièce P37 dont il s'agit - merci

 20   - intercalaire 171. En B/C/S, il s'agit de la page numéro 92. En version

 21   anglaise, c'est la page numéro 68. Voilà, C'est la bonne page.

 22   Q.  Alors, Monsieur Nielsen, est-ce que vous voulez que je répète la

 23   question ?

 24   R.  Je vous remercie. Je suis ravi d'avoir le document devant les yeux, non

 25   pas le compte rendu mais le procès-verbal. Alors, lors de cette rencontre,

 26   c'est l'une des occasions où il y a un débat informel, non pas sur des

 27   sujets précis mais d'ordre général, et Karadzic, à un moment donné, vous

 28   l'avez dit, cite cet épisode mémorable de la partition en Asie du sud où un


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  1   grand nombre de personnes ont été tuées, et de mort violente, lors d'une

  2   migration qui s'y est tenue, et il déclare qu'à l'heure actuelle en Europe,

  3   l'on peut douter que ce soit faisable. Et comme je l'indique, et je puis

  4   étoffer la chose si l'on prend la citation de Karadzic dans son

  5   intégralité, il déclare que ce sont là -- ce n'est pas juste douteux, mais

  6   je cite pour que l'on sache la façon de réfléchir, de penser car ce ne sera

  7   pas organisé et personne ne sera en mesure d'y rester. Il indique, selon

  8   mon interprétation, que ce n'est pas un processus qui pouvait être contrôlé

  9   par qui que ce soit si c'est un processus qui a été lancé, et je pense que

 10   l'on sait que ceci s'est tenu en Inde et au Pakistan.

 11   Et nous avons la réponse de Goran Hadzic qui dit, Rien de nébuleux, ou, en

 12   fait, tel que traduit, Ce n'est pas nébuleux, et il ajoute, Il semble que

 13   ce soit une difficulté, tout du moins dans le procès-verbal, les Serbes de

 14   Zagreb doivent être réimplantés et les Serbes de Belgrade, et à partir de

 15   ce territoire -- en fait, c'est ce qui manque dans la traduction, et

 16   maintenant de ce territoire -- il est évident. Je ne sais s'il dit, C'est

 17   hors de question. Pour moi, cela signifie qu'il n'y a pas de débat en la

 18   matière.

 19   Ce qui est clair, c'est qu'il y a un débat lors de cette réunion de la

 20   présidence socialiste de Yougoslavie où nous avons un débat d'un incident

 21   historique connu de migration massive qui a eu des conséquences violentes,

 22   et Hadzic et Karadzic, tous deux, expriment leurs opinions en la matière.

 23   Q.  Merci. J'aimerais maintenant passer à l'endroit dans votre rapport où

 24   vous parlez de la police et de la RSK. Vous y débattez -- donc, entre 1992

 25   et 1993. Vous parlez de l'union des Régions autonomes serbes au paragraphe

 26   121, et donc l'adoption d'un texte de loi sur les affaires intérieures.

 27   J'aimerais vous poser la question suivante, et c'est un sujet dont nous

 28   avons débattu tout à l'heure, question sur la relation entre la JNA et ces


Page 2488

  1   autorités civiles en émergence. Pour illustrer la chose, affichons le

  2   document 6026 de la liste 65 ter, qui se trouve à l'onglet 338. Donc,

  3   document 6026 de la liste 65 ter, à l'onglet 338. Merci.

  4   Ce document est en date du 20 novembre 1991 et semble avoir été délivré par

  5   la 1ère Région militaire. Monsieur Nielsen, au point 2, l'on y voit que par

  6   rapport à la tâche des commandements locaux, les militaires débattent de la

  7   création d'autorités militaires, listent ensuite les conscrits,

  8   l'établissement des autorités civiles, et ils s'assuraient donc par des

  9   mesures de l'ordre public.

 10   Et si l'on passe à la page 2, version anglaise et version B/C/S, l'on voit

 11   en bas dans les deux versions des indications des membres des gouvernements

 12   locaux et autorités locales.

 13   Alors, c'était certes une illustration, mais dans la totalité des documents

 14   que vous avez vus, à la suite de la chute de Vukovar, comment

 15   circonstancieriez-vous cette relation entre la JNA et les autorités locales

 16   ?

 17   R.  J'en reviens au terme de cela dépend. Cela dépend réellement de quelle

 18   implantation, de quelle municipalité l'on examine, parce que les autorités

 19   civiles, et là j'inclus la police, les organes des affaires intérieures et

 20   la sécurité publique, qui sont à différentes étapes de formation ou de

 21   création et pas nécessairement en fonctionnement intégral, à ce moment-là

 22   tout du moins. Mais quoi qu'il en soit, les militaires souhaitent

 23   réellement identifier les organes d'autorité civile afin de les aider à

 24   passer à un stade opérationnel et d'obtenir leur aide en retour pour

 25   résoudre les problèmes pressants qu'ils essaient tous de résoudre.

 26   Q.  Sans aller trop loin dans les questions militaires, parce que nous

 27   avons des experts militaires en la matière, selon vous, ces opérations de

 28   combat arrivées à un terme, quel est le rôle de ces commandements locaux ou


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  1   municipaux ?

  2   R.  En la matière, je m'en remettrais tout simplement aux experts

  3   militaires.

  4   Q.  Très bien. Pourrions-nous passer au document 6071 de la liste 65 ter,

  5   qui se trouve à l'onglet 365.

  6   Il s'agit donc d'un mois et demi après le document antérieur, donc délivré

  7   par le 1er Corps motorisé le 13 janvier, et il s'agit de l'organisation et

  8   de la subordination de l'organe des affaires civiles.

  9   Dans la version anglaise, si nous passons à la page 3, au point 4. Je crois

 10   que c'est au même endroit dans la version B/C/S. Le 1er Corps motorisé

 11   traite des unités qui sont présentes dans la région et déclare qu'elles

 12   sont responsables intégralement en coopération avec les organes du SUP pour

 13   l'organisation et la mise en œuvre de mesures de sécurité. Au point 5, on

 14   aborde les organes de commandement des affaires civiles, et les

 15   commandements coopéreront de près avec les organes gouvernementaux

 16   officiels et de plein droit dans les régions démographiques et les

 17   municipalités.

 18   Là encore, j'en reviens à la question que je vous ai posée tout à l'heure.

 19   A partir de ces documents, le terme "coopération", qu'y voyez-vous ?

 20   R.  Je reviendrais à la réponse que j'ai présentée tout à l'heure, c'est-à-

 21   dire que lorsque les autorités civiles, y compris les organes des affaires

 22   intérieures, étaient opérationnelles, elles sont censées coopérer avec les

 23   militaires, et vice versa, pour résoudre les problèmes auxquels tous sont

 24   confrontés, incluant la question d'implantation dont on a parlé tout à

 25   l'heure. Il s'agit de la sécurité publique. Il s'agit également de

 26   l'inscription, de l'obtention des biens. Il s'agit également dans une

 27   certaine mesure de l'assainissement et d'autres questions qui sont citées

 28   dans ces nombreux documents.


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  1   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] J'aimerais verser ce document au dossier.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Versé et il reçoit une cote.

  3   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote P375.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

  5   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

  6   Q.  J'aimerais passer maintenant au paragraphe 156 et plus haut de ce

  7   rapport. Vous y indiquez les quelques ordres émis par Goran Hadzic au MUP

  8   de la RSK. En 156, nous avons d'ailleurs élucidé la chose dans la fiche des

  9   errata, la phrase, en fait, est que le président Hadzic a ordonné au MUP de

 10   la RSK de reprendre en main la sécurité des bâtiments. Je crois que vous

 11   vous en souvenez.

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Au paragraphe 161, j'aimerais élucider la chose, vous indiquez qu'en

 14   août 1993, Goran Hadzic a ordonné au ministère des Affaires intérieures

 15   d'arrêter tous les dealers et les revendeurs sur tout le territoire, et

 16   vous avez rédigé "de stupéfiants".

 17   Pourriez-vous expliquer la chose aux Juges de la Chambre, comment en êtes-

 18   vous arrivé à cette conclusion ?

 19   R.  Je peux l'expliquer, certes. Il serait utile peut-être d'avoir le

 20   document à l'écran également, mais je puis vous dire qu'il est important de

 21   déclarer, comme vous l'avez d'ailleurs fait vous-même, qu'il y a très peu

 22   de documents, et je crois encore une fois qu'il convient de le souligner,

 23   très peu de documents qui ont été délivrés directement à la police par

 24   Goran Hadzic. L'un d'entre eux, de ces rares documents, est celui au

 25   paragraphe 161. Et à l'original B/C/S, le terme dont on se sert, que j'ai

 26   traduit comme étant des dealers, et ensuite j'ai indiqué stupéfiants entre

 27   parenthèses, c'est "diljeri" au pluriel, qui est à l'évidence tiré du terme

 28   anglais "dealer", de mon expérience du terme, aussi bien de sources


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  1   ouvertes et d'autres documents, on s'en sert presque uniquement pour citer

  2   ceux qui vendent ou qui achètent des stupéfiants. C'est pourquoi j'ai

  3   ajouté la chose entre parenthèses.

  4   Q.  Merci. Et de ce que vous savez, avez-vous vu des ordres analogues où

  5   des dealers de stupéfiants sont mobilisés dans les forces armées ?

  6   R.  Le seul souvenir que j'ai d'un ordre de la sorte serait des ordres

  7   analogues qui ont été délivrés par la police en Republika Srpska, en

  8   Bosnie-Herzégovine, à la même période.

  9   Q.  Très bien. Oui. En 5 de votre rapport, vous parlez de la coopération

 10   entre la police des instances contrôlées par les Serbes et du MUP en

 11   Serbie, et vous citez un certain nombre de documents où la DB rédige des

 12   rapports d'exécution d'hommes qui ont été emprisonnés à Dalj. Ça, c'est au

 13   paragraphe --

 14   L'INTERPRÈTE : Un paragraphe dont l'interprète n'a pas saisi le chiffre.

 15   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

 16   Q.  -- dans un autre rapport également -- paragraphe 106 de votre rapport,

 17   les événements du 18 octobre, encore une fois, d'Arkan et d'un homme

 18   dénommé Stricevic.

 19   J'aimerais que vous consultiez le document 65 ter 6075, à l'onglet 356, par

 20   rapport à ce document.

 21   Oui. Monsieur Nielsen, cela fait partie de la liasse de documents qu'on

 22   vous a remis après avoir parachevé votre rapport. Délivré par le

 23   commandement de la 80e Brigade motorisée le 18 janvier. Il traite d'unités

 24   paramilitaires chetniks, formations vagabondant et l'on y parle de la

 25   liquidation discrète de citoyens.

 26   C'est un rapport de l'armée elle-même, et on y voit que ni la police

 27   militaire ni civile n'est informée de la chose.

 28   En ce qui concerne les rapports qui sont cités dans votre rapport,


Page 2492

  1   quelle est la comparaison ? Ce sont de nouveaux rapports, DB donc, rapports

  2   militaires de la DB. Quelles sont les observations en la matière ?

  3   R.  Mon observation serait qu'il y a des rapports de la police qui sont

  4   disponibles tant de la RSK et en particulier de la DB de la République de

  5   Serbie qui indiquent qu'il y avait une prise de conscience de la police de

  6   liquidation de civils qui étaient exécutés par des formations

  7   paramilitaires.

  8   Q.  Très bien. Avez-vous eu la possibilité de consulter ce document ?

  9   R.  Oui. Et là encore, il serait possible que dans ce cas ici, l'auteur du

 10   document cite des débats récents qu'il a tenus avec des membres précis de

 11   la police militaire ou de la police civile qui affirment et confirment

 12   qu'ils ne sont pas informés de ce cas de liquidation du couple qui est cité

 13   ici, mais il y avait une prise de conscience générale qui se reflète dans

 14   les documents généraux, c'est-à-dire que ces liquidations se tenaient tout

 15   particulièrement aux mains des groupes paramilitaires.

 16   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais verser

 17   ce document.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Versé et reçoit une cote.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote P376.

 20   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce là le moment

 21   venu de faire une pause ?

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Nielsen, c'est là le terme

 23   de l'audience d'aujourd'hui. Vous reviendrez demain, à 9 heures, je

 24   présume. Vous relevez de la déclaration solennelle que vous avez prononcée.

 25   Ainsi que vous le savez, vous ne pouvez débattre de votre déclaration avec

 26   qui que ce soit ni vous adresser à quelle que partie que ce soit, Procureur

 27   ou Défense, entre-temps.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends, Monsieur le Président.

 


Page 2493

  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Parfait. Eh bien, l'on va vous faire

  2   sortir du prétoire.

  3   [Le témoin quitte la barre]

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est levée.

  5   --- L'audience est levée à 14 heures 00 et reprendra le vendredi, 11

  6   janvier 2013, à 9 heures 00.

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* Le texte en gras et en italiques était auparavant confidentiel suite à une ordonnance portant expurgation rendue par la Chambre. La confidentialité du texte a été depuis levée par la décision de la Chambre du 1er janvier 2013.

* Le texte en gras et en italiques était auparavant confidentiel suite à une ordonnance portant expurgation rendue par la Chambre. La confidentialité du texte a été depuis levée par la décision de la Chambre du 1er janvier 2013.

* Le texte en gras et en italiques était auparavant confidentiel suite à une ordonnance portant expurgation rendue par la Chambre. La confidentialité du texte a été depuis levée par la décision de la Chambre du 1er janvier 2013.