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1 Le mercredi 6 février 2013
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.
5 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour à toutes les personnes
6 présentes dans le prétoire et à l'extérieur du prétoire.
7 Monsieur le Greffier d'audience, veuillez citer l'affaire, je vous prie.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges.
9 Il s'agit de l'affaire IT-04-75-T, le Procureur contre Goran Hadzic.
10 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je souhaiterais que les parties se
11 présentent, en commençant par l'Accusation.
12 M. STRINGER : [interprétation] Oui.
13 Pour l'Accusation, Messieurs les Juges, Douglas Stringer accompagné d'Alex
14 Demirdjian et Thomas Laugel.
15 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Et qu'en est-il de la Défense. Maître
16 Zivanovic.
17 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Pour la
18 Défense de M. Goran Hadzic, je suis présent, donc Me Zoran Zivanovic, et Me
19 Christopher Gosnell. Je vous remercie.
20 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je souhaiterais que l'on fasse entrer
21 le témoin dans le prétoire.
22 [Le témoin vient à la barre]
23 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Nielsen.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.
25 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous rappelle que vous êtes
26 toujours tenu de respecter la déclaration solennelle que vous avez
27 prononcée.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr.
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1 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell, je vous en prie.
2 M. GOSNELL : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les
3 Juges. Merci.
4 LE TÉMOIN : CHRISTIAN NIELSEN [Reprise]
5 [Le témoin répond par l'interprète]
6 Contre-interrogatoire par M. Gosnell : [Suite]
7 Q. [interprétation] Bienvenue à nouveau, Monsieur Nielsen.
8 R. Bonjour. C'est un plaisir de vous voir.
9 Q. Le plaisir est mutuel.
10 M. GOSNELL : [interprétation] Je souhaiterais dans un premier temps
11 demander un document de l'Accusation, P370.
12 Q. C'est le document dont nous parlions lorsque vous étiez ici il y a à
13 peu près 15 jours, Monsieur Nielsen. Et lors des dernières questions et
14 réponses, je vous avais demandé si ce document -- et je rappellerais qu'il
15 s'agissait d'un document relatif à un ordre ou à des instructions ou à des
16 consignes de la 1ère Division de la Garde prolétarienne, donc il s'agit en
17 fait d'un commandement de ville non identifié, nous voyons que cela est
18 laissé en blanc. Donc, il s'agit d'un formulaire, en quelque sorte, envoyé
19 à plusieurs commandements de ville ou à un commandement. Ce n'est pas très
20 clair.
21 Quoi qu'il en soit, le signataire est Mico Delic, un général de division,
22 et apparemment il était le commandant de cette 1ère Division, et je vous
23 avais demandé si ce document reprenait en tout cas l'opinion de M. Delic
24 qui indiquait qu'il fallait mettre en place une procédure pour autoriser
25 l'occupation des logements abandonnés afin de maintenir l'ordre public. A
26 cette question, vous avez répondu que c'était effectivement l'espoir que
27 nourrissaient certains officiers de la JNA, comme cela est indiqué dans ce
28 document, et je cite : "Car l'établissement de ce type de procédure
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1 pourrait ralentir, pour ne pas dire complètement éliminer, les expulsions
2 illicites." Page 2 597 du compte rendu d'audience.
3 Donc, vous convenez qu'en ce qui concerne ce document, ce document
4 correspond à une tentative de faire en sorte qu'il y ait une occupation des
5 logements abandonnés qui se passerait de façon ordonnée; est-ce exact ?
6 R. Oui, c'est exact. Et je pense qu'il y a deux éléments essentiels dans
7 ce document. Dans un premier temps, les quatre questions qui sont posées au
8 début du document, qui montrent les préoccupations de tout un chacun à ce
9 moment-là; et nous avons également dans la version B/C/S, l'avant-dernier
10 paragraphe, où il est question du fait qu'il faut absolument maintenir
11 l'ordre public et assurer la sécurité des citoyens, et que le harassement
12 ou le mauvais traitement ou les sévices subis par les citoyens ne doivent
13 pas être autorisés.
14 Q. Très bien. Et vous aviez indiqué précédemment qu'il y avait une raison
15 qui expliquait cela. Il y avait eu une arrivée massive de réfugiés en
16 provenance de Slavonie occidentale, ce qui fait que les autorités locales
17 étaient sous pression de ce fait, et, en fait, c'étaient eux qui parfois
18 ont harcelé les résidents locaux, et vous avez indiqué que cela pouvait
19 engendrer "une situation extrêmement volatile."
20 R. Oui, c'est tout à fait l'impression qui se dégage lorsque nous avons
21 pris en considération les documents plus récents qui ont été fournis par
22 Belgrade.
23 Q. Et si vous prenez la page 2 de la version anglaise, qui, me semble-t-
24 il, correspond toujours à la première page de la version B/C/S, nous voyons
25 une décision en trois phases en quelque sorte, et c'est toujours le général
26 Delic qui en est l'auteur. Il indique que dans un premier temps les
27 autorités doivent déterminer quelles maisons ou logements abandonnés
28 devront être occupés par qui, et il est indiqué qu'ils "doivent être
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1 entièrement transférés aux organes civils municipaux ayant le contrôle
2 lorsqu'ils existent, et lorsqu'il n'y a pas d'organe civil ayant le
3 contrôle de la municipalité, le point de vue du commissaire de la
4 municipalité doit être demandé." Alors, j'aimerais dans un premier temps
5 vous demander si -- bon, il semblerait qu'il y ait une distinction qui est
6 faite entre, d'un côté, un transfert de décision aux autorités locales,
7 mais par ailleurs, lorsqu'il n'y a pas d'autorités locales, il y a un
8 processus de consultation dans le cadre de laquelle l'opinion est demandée
9 au commissaire de la municipalité.
10 Est-ce que c'est une distinction que vous retrouvez dans la version B/C/S ?
11 R. Ecoutez, je pense que cela concerne à la fois la traduction anglaise et
12 le document original en B/C/S, car il y a une erreur qui s'est glissée dans
13 votre question. Vous avez dit que lorsque ce type d'organes municipaux
14 n'existe pas, l'opinion ou l'avis du commissaire de la municipalité doit
15 être obtenu.
16 Alors que moi je lis qu'il est indiqué que s'il n'y a pas de
17 commissaire pour la municipalité en question, le point de vue du
18 gouvernement de la région serbe, du district de Slavonie, Baranja et Srem
19 occidental, doit être demandé.
20 Q. Mais regardez ce qui est indiqué : s'il existe une autorité locale, il
21 faut leur transférer la décision. S'il n'y a pas d'autorité locale, dans un
22 premier temps, demandez le point de vue du commissaire, et s'il n'y a pas
23 de commissaire, alors, dans ce cas de figure, l'on demandera le point de
24 vue du gouvernement du district. Est-ce bien exact ou est-ce qu'il y a
25 quelque chose qui m'a échappé ?
26 R. Non, je pense que nous sommes d'accord. Il s'agit d'une procédure qui
27 se scinde en trois phases.
28 Q. Très bien. Et j'attirais votre attention, en fait, sur le fait que dans
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1 le premier cas, s'il existe en place un organe municipal civil, c'est à cet
2 organe qu'il revient de se charger de cette question. Mais par ailleurs,
3 s'il n'y a pas d'autorité locale, on demande tout simplement que l'avis ou
4 le point de vue du commissaire soit obtenu, et s'il n'y a pas de
5 commissaire, c'est alors au gouvernement du district que cet avis sera
6 demandé.
7 R. Est-ce qu'il s'agit d'une question ?
8 Q. Est-ce que vous êtes d'accord avec ce que je viens d'avancer ?
9 R. Oui, je suis d'accord. Et je pense, pour que je ne l'oublie pas, je
10 vous dirais que parmi les quelque 370 documents, plus ou moins, que nous
11 avons obtenus de Belgrade, je pense que ce document date du 23 décembre
12 1991, et je pense qu'il serait extrêmement instructif de s'intéresser
13 aujourd'hui à la lettre qui a été intéressée le même jour aux militaires
14 par M. Hadzic. Une réponse a été fournie par les militaires le 25 décembre
15 1991. Ces deux documents font partie du nouveau jeu de documents et portent
16 justement sur cette question précise. Voilà le lien entre les autorités
17 civiles et les autorités militaires.
18 Q. Mais vous convenez qu'en ce qui concerne ce document, la conséquence
19 est que, à la lecture de ce document, s'il n'y a pas d'organe municipal
20 local, il appartient toujours au commandement de la ville de prendre la
21 décision ultime à propos de l'occupation des logements occupés [comme
22 interprété] ?
23 R. Comme nous l'avons indiqué, il s'agit d'une procédure sur trois phases
24 et s'il n'y a pas -- s'il n'y a pas d'autorité ou d'organe d'autorité civil
25 pour la municipalité, ça c'est la première phase, puis s'il n'y a pas de
26 commissaire, c'est la deuxième phase, alors l'avis du gouvernement du
27 district serbe doit être obtenu.
28 Q. Oui. Mais j'essaie d'aborder avec vous les conséquences, les
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1 répercussions de cette procédure, et voilà ce que j'avance à votre
2 intention -- bon, supposons qu'il n'y a pas d'organe municipal, le
3 commandement de la ville va trouver le commissaire, lui demande son avis,
4 reçoit une suggestion en réponse, et à ce moment-là, s'il n'y a pas
5 d'organe local, il appartient au commandement de la ville d'exécuter la
6 décision, et non seulement l'exécuter mais de prendre la décision pour ce
7 qui est de l'occupation des logements
8 abandonnés ?
9 R. C'est exact.
10 Q. Et au paragraphe suivant, nous voyons d'ailleurs que même lorsque les
11 organes municipaux s'occupent de l'occupation des logements abandonnés, il
12 est indiqué : "Les commandements de ville devront s'assurer, indépendamment
13 de qui prend la décision, et notamment s'il s'agit des commandements," --
14 et là j'indique d'ailleurs qu'il ne s'agit pas de commandements de ville,
15 mais bon, dans le contexte c'est la référence, "… et notamment si les
16 commandements l'ont fait, assurer donc que les maisons attribuées aux
17 réfugiés en provenance d'autres zones pour qu'ils aménagent même de façon
18 temporaire dans les maisons de ceux qui ne reviendront certainement pas à
19 cause des crimes qu'ils ont commis."
20 Est-ce que vous convenez que cela, donc, prend en considération le fait que
21 les commandements de ville sont censés exercer une autorité ultime et
22 finale, même lorsqu'il s'agit des décisions des organes municipaux ?
23 R. Comme je l'ai déjà indiqué, je pense que c'est une tentative pour
24 essayer d'imposer un début, un semblant d'ordre ou d'organisation, au vu
25 d'autres documents que j'ai également vus. Donc, une fois de plus, les
26 commandements de ville se voient indiquer par le général de division qu'ils
27 sont censés, dans la mesure de leurs moyens, régler et empêcher en fait le
28 genre de problèmes qui ont été constatés jusqu'à ce moment-là. Et ce qui
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1 est important, c'est qu'il est indiqué autorisant ou permettant le retour,
2 comme cela est indiqué dans le paragraphe suivant, autorisant le retour de
3 personnes qui sont restées loyales et qui ne se sont pas compromises. Et
4 donc, cela renvoie aux quatre questions qui se trouvent au début du
5 document.
6 Q. Si vous prenez le haut de la page 2, il s'agit des réponses aux quatre
7 premières questions, voilà ce qui est indiqué :
8 "Nous avons reçu la réponse suivante du commandement du 1er District
9 militaire."
10 Puis, la réponse en question est indiquée dans le document. Est-ce que vous
11 convenez que cela semble indiquer de façon implicite que ce document fait
12 état de la politique, en fait, qui va être appliquée à tout le 1er District
13 militaire ?
14 R. Oui, je pense qu'il s'agit certainement de l'aspiration du commandement
15 du 1er District militaire à ce sujet. Bien entendu, ils espèrent que, quel
16 que soit l'organe d'autorité locale et quel que soit l'organe de police qui
17 peut exister ou peut être en place dans ces municipalités, ils les aideront
18 à empêcher ce qui se passe, et cela est indiqué dans le bas du document,
19 ils empêcheront donc tout harcèlement de la population par ces organes ou
20 leurs employés.
21 Q. C'est exact. Et l'avant-dernier paragraphe de ce document, qui se
22 trouve à la page 3 de ce document, indique :
23 "Les commandements de ville sont notamment responsables du maintien de
24 l'ordre public, de la sécurité et de la sécurité des citoyens."
25 Est-ce que cela correspond à ce que vous venez de dire ?
26 R. Oui, tout à fait. Comme nous l'avons déjà indiqué en janvier, cela doit
27 se passer dans la mesure du possible là où il existe des organes locaux
28 d'autorité civile, notamment là où la police existe, dans ces
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1 municipalités.
2 Q. Et le document indique que vous garantirez ces conditions, n'est-ce pas
3 ?
4 R. C'est exact. Mais une fois de plus, je dirais que cela ne signifie pas
5 pour autant que la seule responsabilité incombait aux militaires. Parce
6 qu'à la lecture de ce document et d'autres documents, il est évident qu'il
7 s'agit d'un processus -- nous avons parlé du processus de transition en
8 janvier, et il est évident que le pouvoir des autorités locales est peu à
9 peu établi dans les municipalités locales où il était complètement absent à
10 cause du conflit armé. Les militaires constatent qu'il y a de nombreux
11 problèmes dans de nombreux cas. Et, malheureusement, ce type de problèmes
12 inclut le harcèlement de la population civile, dans la mesure où il faut
13 savoir que parfois cela est commis également par la police locale. Et il
14 faut savoir que les militaires, à ce moment-là, continuent à vouloir dire :
15 En tout état de cause, nous avons de toute façon l'obligation catégorique
16 d'empêcher ce type de problèmes et de faire en sorte que l'on mette en
17 œuvre un début d'ordre public et de paix, et si nous le faisons, nous le
18 ferons en coopération avec les autorités locales, et si elles ne sont pas
19 là, nous devons quand même le faire parce que personne d'autre ne le fera.
20 Q. Et comme cela est indiqué au tout début de votre déposition, nous nous
21 intéressons à ces documents de la JNA, et nous nous intéressons à ces
22 documents d'usage parce qu'ils tiennent compte d'événements qui se sont
23 déroulés sur le terrain. Donc, est-ce que vous convenez que lorsque nous
24 voyons que la JNA indique que cela sera fait, que les commandements des
25 villes devront garantir ou assurer, cela tient compte du fait qu'ils ont
26 constaté qu'ils avaient besoin d'assurer ce rôle ?
27 R. Oui. Et je m'excuse auprès de la sténotypiste quand je parle très vite.
28 Mais je suis d'accord avec vous. Je peux tout simplement vous dire
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1 qu'il y a quand même une certaine ironie qui s'est glissée dans ce
2 document, parce que le document dont nous disposons suggère que les
3 militaires souhaiteraient vraiment transférer la responsabilité de ces
4 questions aux autorités civiles, notamment à la police. Toutefois, les
5 documents qui ont été produits par les militaires, notamment par le 1er
6 Commandement ici -- par le commandement du 1er District militaire,
7 suggèrent que dans bien des cas la police, lorsqu'elle existait, ou les
8 autorités civiles, lorsqu'elles existaient, ou les autorités du district,
9 lorsqu'elles existaient, participaient ou étaient partie prenante,
10 malheureusement, dans le type de harcèlement ou de sévices faits subis aux
11 citoyens et à l'expulsion des citoyens que les militaires souhaiteraient
12 vraiment empêcher.
13 Donc, la question - exprimée par les militaires - est comme suit : que
14 pouvons-nous faire pour faire en sorte de transférer l'autorité aux
15 autorités civiles lorsque ces autorités civiles ont en partie un
16 comportement que nous souhaitons prévenir.
17 Q. Je suppose que vous ne serez pas surpris si je vous dis que je rejette
18 absolument l'affirmation selon laquelle cela a été tributaire des activités
19 des autorités de district, et de toute façon je vous présenterai des
20 documents pour revenir sur cette question.
21 Ce que j'essaie en fait de vous faire constater ou de vous demander, c'est
22 -- j'aimerais savoir si vous acceptez que ce document semble tenir compte
23 de la situation suivante : la seule force qui est capable d'assurer l'ordre
24 public dans ces zones après des opérations de combat importantes, la seule
25 autorité capable de le faire est la JNA, n'est-ce pas ?
26 R. Là, je pense que nous tournons un peu en rond. Parce que bien sûr que
27 je suis d'accord pour dire que les militaires, fondamentalement, sont en
28 train de se positionner comme les garants de la paix en dernier recours. Si
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1 les autres organes ne sont pas en place, comme je l'ai déjà dit, les
2 militaires ont encore, dans ce cas d'espèce, un rôle à jouer pour assurer
3 la sécurité des civils et pour empêcher ce type de problèmes.
4 Q. Par conséquent, cela suggère que les autres organes n'existent pas à ce
5 moment-là, ne sont pas en place ?
6 R. Comme je vous l'ai dit à maintes reprises --
7 Q. Mais est-ce que vous pourriez répondre à ma question par un oui ou par
8 un non. Toutes vos réponses sont consignées. Je comprends tout à fait les
9 nuances que vous souhaitez apporter, et les Juges les comprennent
10 également, et l'Accusation pourra poser des questions de suivi, mais
11 maintenant je vous pose une question bien précise.
12 R. Je ne peux pas répondre à cette question tout simplement par
13 l'affirmative ou la négative. De façon très succincte, ce que je peux vous
14 dire, c'est que cela dépendait des municipalités à l'époque, comme nous
15 pouvons le constater dans le document. Donc, ma réponse à votre question
16 est comme suit : oui, cela suggère que dans certaines municipalités, les
17 autorités civiles n'étaient pas en place, ce qui fait que les militaires
18 devaient assumer ce rôle.
19 M. GOSNELL : [interprétation] Est-ce que le document P371 pourrait être
20 affiché, je vous prie. Il se trouve à l'onglet 350 dans la liste de
21 l'Accusation.
22 Q. Vous avez déjà fait référence à ce document, donc je ne vais pas trop
23 entrer dans les détails, mais j'aimerais juste attirer votre attention sur
24 un ou deux éléments.
25 M. GOSNELL : [interprétation] Je souhaiterais que la deuxième page du
26 document soit affichée en version anglaise. Et pour le contexte, je vous
27 dirais que c'est un document qui porte la date du 25 décembre 1991. C'est
28 le colonel Belic, qui était le commandant du commandement de la ville
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1 d'Ilok. Il est adressé au commandement de la 1ère Brigade des Gardes.
2 Et à la page 2 dans la version anglaise, ou probablement à la première page
3 de la version anglaise, il est indiqué qu'à Ilok il y a 800 maisons et
4 appartements libres, non occupés. Alors, est-ce que vous savez si cela
5 correspond à un chiffre exact ou non ?
6 R. Je n'ai absolument pas d'informations pour le moment qui me
7 permettraient de confirmer ou d'infirmer ce chiffre.
8 Q. Il est indiqué :
9 "Dans 150 logements environ, des personnes ont emménagé sans autorisation.
10 Au cours de la période à venir, ces logements seront vidés et il faudra
11 envisager une planification et une organisation des logements."
12 Alors, est-ce que vous convenez que le colonel Belic indique dans ce
13 document que des personnes ont emménagé dans ces logements sans pour autant
14 que la JNA leur octroie l'autorisation nécessaire ? Ils sont maintenant
15 dans ces maisons, en faire partir les gens qui s'y trouvent, et ensuite
16 faire venir d'autres personnes dans ces logements. Alors, est-ce que cela
17 vous semble être ce qui est indiqué dans ce document ?
18 R. Oui, je pense que c'est ce qui est effectivement envisagé. Mais
19 j'aimerais vous indiquer qu'il s'agit d'un document que nous avons déjà vu,
20 comme vous l'avez indiqué d'ailleurs, et au début, la JNA indique que,
21 malheureusement, certains de ces problèmes qui ont vu le jour sont en
22 partie provoqués par le fait que les autorités du district de la SAO, comme
23 je l'ai indiqué dans le premier paragraphe, n'ont pas pris les mesures
24 nécessaires. Il est évident. Cela est également manifeste dans la lettre
25 qui a été envoyée par le commandement de la JNA à Ilok le même jour à M.
26 Hadzic.
27 Q. Et c'est ce que vous aviez indiqué comme correspondant à un libellé peu
28 clair à propos de difficultés non objectives, et dans ce premier paragraphe
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1 vous voyez que ce commandant fait référence à l'indolence injustifiée du
2 gouvernement du district.
3 Alors, faisons abstraction de la connotation péjorative, est-ce que vous
4 convenez que dans ce document il n'est pas indiqué que le gouvernement du
5 district est en train d'essayer d'évincer la JNA dans le rôle qu'elle
6 jouait à Ilok ?
7 R. Oui, de toute façon, cela est expliqué beaucoup plus clairement dans
8 l'échange de correspondance entre M. Hadzic et le commandement de la ville
9 d'Ilok les 23 et 25 décembre. Si l'on prend la globalité des documents
10 obtenus de Belgrade, je pense qu'il serait raisonnable d'avancer que le
11 commandement de la JNA est en train de faire une allusion à quelque chose
12 qui est expliqué dans d'autres documents, à savoir il y a un certain nombre
13 de personnes qui avaient des liens avec le gouvernement du district et qui
14 auraient apparemment - et j'utilise le conditionnel parce que je n'ai pas
15 été en mesure de vérifier ceci - mais qui auraient apparemment participé à
16 cette procédure d'expulsion des citoyens de leurs foyers dans certaines
17 municipalités. Cela est indiqué dans les documents militaires. Et je pense
18 peut-être que l'auteur de ce document fait référence à ceci.
19 Q. Il semblerait à la lecture de ce document qu'ils considèrent que les
20 permis délivrés par le gouvernement du district ne sont pas valables. Est-
21 ce que vous êtes d'accord avec cela ?
22 R. C'est une question extrêmement intéressante, parce qu'elle nous renvoie
23 au premier document que vous m'aviez montré en janvier, document où l'on
24 voyait en fait que l'auteur du document avait quelques problèmes et se
25 posait la question s'il était censé considérer l'organe du district de la
26 SAO comme un organe légitime. Et on voit que cette question lui pose
27 quelques problèmes.
28 Q. Mais c'est justement ce à quoi je veux en venir. Moi, lorsque je lis ce
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1 document, j'ai l'impression que le colonel Belic semble considérer les
2 autorités du district avec un certain dédain ou mépris, et il ne semble pas
3 reconnaître les permis délivrés par le gouvernement du district comme des
4 permis valables.
5 R. Ecoutez, c'est peut-être ce qui s'est passé à Ilok. Et j'ai fait
6 référence à cette correspondance un peu plus tôt. Il semblerait en fait
7 qu'il y ait un jeu entre les militaires et M. Hadzic, chacun des camps
8 assure l'autre camp de son respect quasiment absolu et de son souhait de
9 coopération. C'est explicite dans le cas des militaires, c'est un peu plus
10 implicite dans le cas de la lettre de M. Hadzic, mais on a l'impression
11 qu'ils ne sont pas tout à fait sur la même longueur d'onde à propos de ce
12 sujet et à propos d'autres questions, et ils indiquent qu'ils espèrent que
13 ces types de difficultés pourront être éliminées dans la période à venir.
14 Q. J'attire votre attention sur un élément précis. Parce que dans le
15 troisième paragraphe avant la fin, dont le début se trouve à la page 3 de
16 la version anglaise et se poursuit à la page 4, il est indiqué :
17 "Des occupations non autorisées à Ilok sont assez répandues, bien que
18 ce commandement de la ville n'ait pas délivré ne serait-ce qu'un seul
19 permis. Point n'est besoin de décrire les différents cas, mais il se peut
20 que cela ait été fait par des ministres de la SAO et un ancien policier qui
21 se trouve maintenant à Backa Palanka, les ministres étant MM. Bogunovic et
22 Ljubo Loncarevic."
23 Donc, M. Belic semble dire qu'il y a, effectivement, des permis qui
24 ont été apparemment délivrés par ces ministres, mais que lui considère ces
25 permis comme tout à fait non valables et non autorisés.
26 R. Oui.
27 M. GOSNELL : [interprétation] Est-ce que le document 6063 de la liste 65
28 ter pourrait être affiché. C'est un document qui se trouve à l'onglet 353
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1 de la liste de l'Accusation.
2 Q. Il semblerait qu'il s'agit d'une réponse en quelque sorte, une réponse
3 à la lettre précédente envoyée par le colonel Belic. Le document est envoyé
4 par le gouvernement de la SBSO, ministère de la Justice et de
5 l'Administration. Et le document porte la date du 29 décembre 1991, et on
6 invoque Ilok comme l'endroit où ça se passe.
7 Alors, pour commencer, je souhaite vous poser la question suivante : est-ce
8 que c'est le premier document qui est lié au gouvernement du district et
9 qui semble être envoyé depuis la ville d'Ilok ?
10 R. Je ne suis pas en mesure de répondre à cette question. Il faudrait
11 examiner tout le document avant de pouvoir tirer une telle conclusion.
12 Q. A mon avis, il s'agit apparemment d'une sorte de réaction ou d'une
13 sorte de réponse aux questions soulevées par le colonel Belic. Etes-vous
14 d'accord avec moi ?
15 R. Oui. Et comme je l'ai déjà souligné, on exprime ici le désir de
16 coordonner les activités d'une façon plus efficace à l'avenir, et cetera.
17 M. GOSNELL : [interprétation] Je souhaite demander le versement au dossier
18 de ce document.
19 M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Juste pour vérifier, mon estimé confrère
20 souhaite verser au dossier juste la page de garde ou tout le jeu du
21 document ? Parce que le jeu complet du document compte 30, voire 40 pages,
22 si j'ai bien compris.
23 M. GOSNELL : [interprétation] Eh bien, c'est l'Accusation qui a souhaité
24 verser au dossier le document dans sa totalité, n'est-ce
25 pas ?
26 M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Nous n'avons pas demandé le versement,
27 mais nous n'avons rien contre non plus.
28 M. GOSNELL : [interprétation] Eh bien, à ce moment-là, nous souhaitons
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1 verser le document dans sa totalité au dossier.
2 M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
3 Juges, c'est un document qui sera étudié aussi lors de la déposition d'un
4 autre témoin expert parce qu'il y a des tableaux qui sont rattachés au
5 document principal, avec des chiffres qui montrent quels étaient les
6 mouvements de la population, le déplacement de la population, combien de
7 personnes ont quitté la région, de quelle appartenance ethnique ils étaient
8 avant le conflit, après le conflit. Donc, je ne suis pas sûr que ce soit le
9 bon document à verser au dossier par le biais de ce témoin. En tout cas, on
10 peut l'admettre au dossier et puis le montrer au témoin suivant.
11 M. GOSNELL : [interprétation] Peut-être serait-il plus facile alors de ne
12 verser au dossier que la page de garde. Je souligne, par ailleurs, que la
13 Défense n'accepte pas les chiffres qui figurent dans le tableau rattaché.
14 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Donc, vous souhaitez verser au
15 dossier seulement la page de garde ? Très bien.
16 M. GOSNELL : [interprétation] Si c'est possible du point de vue logistique
17 pour le Greffe.
18 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.
19 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
20 [La Chambre de première instance se concerte]
21 M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Messieurs les Juges, je suis désolé de
22 compliquer la situation davantage. En fait, il me semble que si le document
23 n'est pas versé au dossier dans sa totalité, alors il n'a plus aucun sens.
24 Je pense qu'il est clair, d'après le compte rendu d'audience, ce que M.
25 Nielsen a dit au sujet de ce document, donc il me semble qu'on peut
26 l'admettre au dossier dans sa totalité, et un autre témoin peut après nous
27 présenter ses commentaires quant à la substance, quant au contenu du
28 document.
Page 2943
1 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je pense que la meilleure solution
2 c'est de télécharger de nouveau ce document puis de l'admettre au dossier
3 avec une autre cote.
4 Est-ce que cela vous arrange ?
5 M. GOSNELL : [interprétation] Oui, parfaitement.
6 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Alors, veuillez télécharger de
7 nouveau le document, et, pour l'instant, nous allons l'enregistrer aux fins
8 d'identification.
9 M. LE GREFFIER : [interprétation] La première page du document 6063 de la
10 liste 65 ter recevra la cote D28, MFI.
11 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
12 M. GOSNELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
13 Peut-on afficher, s'il vous plait, la pièce P372; intercalaire 261 [comme
14 interprété] de l'Accusation.
15 Q. Il s'agit d'une lettre envoyée par un certain comité central pour les
16 questions de logement. La date c'est le 11 février 1992. Vous avez déjà
17 fourni vos observations au sujet de ce document au cours de votre
18 déposition, donc je ne vais pas revenir sur le même sujet. Mais il se
19 trouve que l'Accusation ne vous a pas posé de questions au sujet du
20 paragraphe 2 de ce document, et, par conséquent, vous n'avez pas eu
21 l'occasion de nous éclairer de vos commentaires. Alors, au paragraphe 2, on
22 semble retrouver une sorte de conseil donné à la municipalité de Mohovo, et
23 on peut y lire :
24 "Nous tenons à vous informer que le gouvernement du district serbe n'a pas
25 adopté de décision quant au déplacement des personnes d'appartenance
26 ethnique croate depuis le territoire du district serbe parce qu'il est plus
27 qu'évident que le seul fait d'être croate ou d'appartenir à un autre groupe
28 ethnique ne représente pas une base suffisante pour priver ces personnes du
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1 droit de résider ou de rester sur le territoire du district serbe."
2 Donc, ici, on semble indiquer que les habitants ne doivent pas être
3 harcelés ou forcés à déménager à cause de leur appartenance ethnique.
4 R. Je suis bien d'accord avec vous que c'est ce qui est écrit dans le
5 document. En revanche, si on procède à une analyse de la situation, la
6 question qui se pose, c'est de savoir si on peut accepter ce document tel
7 quel compte tenu des documents précédents que nous avons vus. A un moment
8 donné, le district a bel et bien participé, peut-être pas à l'expulsion des
9 personnes d'appartenance ethnique, mais en tout cas à l'aménagement des
10 personnes d'appartenance ethnique serbe. Et donc, quand on examine tous les
11 documents disponibles dans leur totalité, notamment les documents
12 militaires en provenance de Serbie que j'ai pu étudier, il semblerait qu'il
13 est arrivé aussi que des personnes d'appartenance croate soient expulsées.
14 Mais il est vrai qu'au paragraphe 3 de ce document, on interdit
15 expressément le harcèlement ou les déplacements forcés et l'expulsion
16 d'individus.
17 Q. Mais quand il s'agit de politique générale mise en place, au cours de
18 votre déposition vous avez dit qu'il y avait une différence entre les
19 documents destinés à l'usage externe et à l'usage interne. Or, il s'agit
20 ici d'un document à usage interne, ce qui veut dire qu'il y a un niveau de
21 responsabilité plus élevé quant à sa teneur. Etes-vous d'accord avec moi
22 pour dire que ce document est envoyé tout simplement de la part de ce
23 comité pour logement central à une municipalité ?
24 R. Il est vrai que ce document est envoyé à une municipalité. Toutefois,
25 une approche analytique à ce document montre qu'il est possible de le lire
26 autrement. Nous avons vu précédemment un document de la Sûreté d'Etat serbe
27 qui relevait du secret d'Etat ou, tout au moins, d'un secret officiel. Ce
28 document n'est pas de ce type, il n'a pas de tampon, ce n'est pas un
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1 document confidentiel.
2 Q. Et puis, au paragraphe 3, ou plutôt, au paragraphe 4, en fonction de la
3 façon dont on compte les paragraphes, on peut voir que des personnes
4 peuvent être privées du droit de résidence à condition qu'il y ait "des
5 informations fiables portant sur leur coopération avec l'ennemi et les
6 autorités oustachi; et s'ils sont toujours impliqués dans ce type d'action,
7 défendent de telles positions et ont de telles opinions."
8 Alors, est-ce que cela est conforme à la position adoptée par la JNA dans
9 d'autres documents que vous avez pu voir ?
10 R. Oui, cela semble être conforme à la position générale défendue par la
11 JNA. Mais je pense que le mot-clé dans le passage que vous venez de lire
12 c'est le mot "fiable". La situation était très difficile et tendue après
13 les conflits armés qui ont déjà eu lieu, et à la lecture de nombreux
14 documents, on peut conclure qu'on ne s'appliquait pas vraiment pour
15 vérifier si les informations relatives à la coopération d'un Croate avec
16 des autorités étaient fiables ou non, et, malheureusement, cela a eu pour
17 conséquence une série d'incidents où les gens ont été attaqués ou expulsés
18 de leurs lieux de résidence.
19 Q. Oui, mais là vous êtes en train de mélanger les pommes et les poires.
20 Dire qu'une personne d'appartenance ethnique croate a fait l'objet d'une
21 attaque illégale est une chose, même s'ils ont été attaqués par les
22 réfugiés de Slavonie occidentale qui, vous l'avez déjà dit, ont créé une
23 situation très volatile. Ce n'est pas la même chose que de dire que les
24 expulsions ont été organisées ou approuvées d'une façon pratiquement légale
25 par les autorités municipales.
26 R. Oui, il est vrai qu'il n'y avait pas de procédure mise en place,
27 malheureusement, d'après ce que j'ai pu voir, pour vérifier si des
28 allégations au sujet de Croates étaient vraies ou non, et c'est pourquoi
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1 des personnes pouvaient être traitées de façon tout à fait arbitraire, sur
2 la base d'allégations non vérifiées. Je suis d'accord avec vous pour dire
3 que ce document a été rédigé au mois de février 1992 et qu'il a l'ambition
4 de prévenir ce type de situation en soulignant que le seul fait d'être
5 d'appartenance ethnique croate ne suffit pas pour justifier l'expulsion du
6 territoire du district serbe. Mais à la lecture de la documentation
7 militaire qui date de la même époque, on voit que le nombre de Croates qui
8 ont quitté la région est beaucoup plus petit, en effet, à ce moment-là
9 qu'au mois de novembre ou de décembre 1991.
10 Q. Est-ce parce qu'un grand nombre de Croates ont parti au moment où les
11 opérations militaires ont eu lieu ?
12 R. A la lecture de la documentation militaire, on peut constater qu'un
13 grand nombre de Croates ont quitté le territoire soit au cours des
14 opérations militaires ou à la veille des opérations militaires. Une
15 minorité de Croates qui sont restés après les opérations militaires ont été
16 forcés à partir ou il leur a été impossible de rester à cause des
17 circonstances que j'ai déjà décrites.
18 Q. Et ce document semble suggérer qu'en fait, c'est aux municipalités
19 d'adopter des décisions au cas par cas ?
20 R. Oui, c'est ce qui semble être indiqué ici. Mais dans les documents
21 récemment fournis, nous avons les listes, non seulement de Croates, mais
22 aussi de Hongrois, et cetera, donc des listes où on énumère les gens
23 d'appartenance ethnique non serbe, et les autorités locales font des
24 commentaires sur leur compte en essayant d'évaluer à quel point ils sont
25 loyaux aux autorités nouvellement mises en place.
26 Q. Et quand on étudie la documentation issue du 1er District militaire, il
27 semblerait qu'ils mettent l'accent surtout sur la coopération avec les
28 municipalités au niveau de l'occupation des logements ?
Page 2947
1 R. Oui. Mais si on accepte qu'il s'agit d'une procédure légitime, je parle
2 de ces évaluations de la loyauté des habitants, alors c'est bien évidemment
3 aux autorités municipales qui connaissaient tous les habitants qui
4 habitaient sur le territoire de la municipalité de procéder à une telle
5 évaluation.
6 Q. Bon, vous avez déjà dit que ces questions-là ne relevaient pas de votre
7 expertise, donc je ne vais pas approfondir le sujet.
8 M. GOSNELL : [interprétation] J'aimerais que nous passions maintenant au
9 document 6094 de la liste 65 ter, c'est l'intercalaire 362 de l'Accusation,
10 s'il vous plaît. Le document ne devrait pas être diffusé en public.
11 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document a déjà été admis au dossier.
12 Il porte la cote P329, sous pli scellé.
13 M. GOSNELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.
14 Q. Le document semble être envoyé par le 1er Corps d'armée mécanisé par
15 l'assistant du commandant, qui se trouve à une ville juste de l'autre côté
16 de la frontière avec la Serbie, non loin d'Ilok.
17 Si nous passons à la page 3 de la version anglaise, s'il vous plaît, à peu
18 près le huitième paragraphe du document. Je ne sais pas s'il figure à la
19 page 1 ou 2 du document.
20 Et on peut y lire :
21 "A la fin de la présentation, le président de la communauté locale a ouvert
22 un débat. La conclusion a été la suivante. Il existait deux factions
23 différentes dans le village : en premier lieu, les Serbes de Slavonie
24 occidentale; et en deuxième lieu, les Serbes, habitants locaux, qui
25 s'appliquent à protéger les Croates."
26 Donc, ceci confirme-t-il votre hypothèse sur les tensions ou le divorce qui
27 existaient entre les réfugiés qui venaient d'arriver dans la zone et la
28 population locale, y compris les autorités locales, les autorités
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1 municipales, qui avaient eu l'attitude protectrice vis-à-vis de leurs
2 voisins croates ?
3 R. Oui, c'est un phénomène semblable à celui que nous avons pu voir en
4 Bosnie. Les habitants locaux sont beaucoup plus tolérants vis-à-vis de
5 leurs voisins qui appartiennent à d'autres groupes ethniques et ils sont
6 prêts à continuer à coexister avec eux, et c'est souvent l'arrivée des gens
7 de l'extérieur qui peut radicaliser la situation et changer leurs points de
8 vue où on insistait sur la coexistence multiethnique. Donc, c'est quelque
9 chose qui s'est passé aussi dans d'autres parties de la Yougoslavie. Nous
10 voyons que -- dans la documentation militaire, on voit que les habitants
11 locaux insistent que les Croates, les Hongrois ou d'autres puissent rester
12 sur le territoire de la municipalité concernée.
13 Il faut souligner, cependant, ce qui est indiqué dans le paragraphe
14 précédent, parce que c'est plutôt intéressant : les mêmes autorités
15 municipales ont adopté la décision de changer le nom du village pour le
16 rebaptiser Arkanovo, ce qui semble indiquer de quelle façon ils envisagent
17 M. Raznjatovic.
18 Q. Mais il semblerait en fait que ces deux points de vue ne soient pas
19 complètement incompatibles.
20 R. Oui, mais une telle hypothèse n'a aucun sens d'après tout ce que nous
21 savons du comportement fiché par M. Raznjatovic dans la région. Cette
22 suggestion montre qu'il était très respecté par certains habitants locaux,
23 voire par certains membres de l'armée.
24 Q. Passons maintenant à la page 4 de la version anglaise, et ce qui
25 m'intéresse particulièrement, c'est le paragraphe qui commence par les mots
26 "Après avoir écouté…" C'est le cinquième paragraphe à compter du bas de la
27 page. Je cite :
28 "Après avoir suivi leurs débats, le débat et l'intervention de l'assistant
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1 du commandant chargé des affaires civiles," donc c'est en fait là le
2 commentaire de l'auteur du document, "donc, après avoir écouté leurs débats
3 quant à l'attribution de missions particulières pour ce qui est de la
4 création du fonctionnement des autorités civiles, l'organisation et la
5 création des unités de la Défense territoriale et des suggestions quand aux
6 méthodes à appliquer pour résoudre tous les problèmes cités," et cetera.
7 Et puis, dans la suite, on indique qu'il s'agit de trois aspects
8 particuliers qu'il faudrait résoudre, trois problèmes particuliers qu'il
9 faudrait résoudre.
10 Premièrement, "établir un comité chargé des questions de logement et
11 d'évacuation"; ensuite, les questions qui concernent "le logement et les
12 vivres qu'il faut fournir à la population"; et numéro 3, "créer les unités
13 de Défense territoriale et de police dès que possible pour assurer la
14 sécurité dans le village, la sécurité des personnes et la mise en œuvre des
15 décisions légales."
16 Alors, sur la base d'autres documents où il est question de ce même
17 sujet, je vous repose la même question que tout à l'heure : ce document
18 montre-t-il que peu d'institutions fonctionnaient et que les commandements
19 militaires de la JNA, dans ce cas particulier d'officiers chargés de la
20 protection civile, assument le rôle principal pour assurer le
21 fonctionnement des organisations locales et la création des autorités
22 municipales ?
23 R. Oui, en effet.
24 M. GOSNELL : [interprétation] Peut-on afficher, s'il vous plaît, le
25 document P373; intercalaire 363 de l'Accusation.
26 Q. Ceci est un document qui a été rédigé à un niveau assez élevé. Il
27 est envoyé par le 1er Corps d'armée mécanisé depuis le QG. La date c'est le
28 16 février 1992, Et il est envoyé au district militaire. Il est envoyé par
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1 l'assistant du commandant chargé des affaires civiles à son homologue au
2 niveau du 1er District militaire, donc c'est un document d'un niveau assez
3 élevé, envoyé du corps d'armée au district militaire.
4 Alors, au cours de votre déposition, vous avez déjà examiné ce
5 document. Il existe, pourtant, un document [comme interprété] sur lequel
6 vous ne vous êtes pas penché. Il figure à la page 2 de la version anglaise.
7 C'est le dernier paragraphe sur cette page, le dernier paragraphe complet :
8 "Il est intéressant à soulever que dans de nombreux cas les Serbes
9 qui ont été réinstallés souhaitaient imposer leur volonté aux résidents de
10 longue date et contrôler la procédure de prise de décision. Dans les
11 endroits où il y a eu des cas de meurtre non résolus, des pressions ont été
12 exercées pour que la population croate déménage, que ces habitants croates
13 soient loyaux ou non, qu'ils participent aux forces de défense croates ou
14 non."
15 Alors, vous voyez que dans ce document aussi on établit une
16 distinction entre les réfugiés qui arrivent et les habitants locaux, et on
17 souligne la différence que ces deux groupes-là affichent dans leur attitude
18 vis-à-vis des Croates ?
19 R. Oui.
20 Q. Et à la page 4, point 4, on peut lire que -- il y a des allégations. Je
21 cite :
22 "Les personnes relocalisées exercent une grande pression sur les habitants
23 locaux parce qu'ils encouragent les relocalisations de la population croate
24 et des habitants d'autres groupes ethniques. Ils disent qu'on ne peut pas
25 avoir de coexistence, que ces personnes-là doivent être relocalisées et que
26 les Croates doivent être traités comme les Serbes ont été traités par les
27 Croates. Ces propos-là sont soutenus de façon tacite par tous les organes
28 compétents, qu'il s'agisse du gouvernement ou des autorités municipales."
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1 Quand on parle ici du "gouvernement", j'imagine que vous diriez qu'il
2 s'agit du gouvernement de district, n'est-ce pas ?
3 R. Oui, tout à fait. Le gouvernement du district est également évoqué au
4 paragraphe suivant.
5 Q. Penchons-nous maintenant sur la fin de la page 2 en anglais, début de
6 la page 3 en B/C/S. On évoque un problème très concret. Il est indiqué :
7 "Les maisons croates sont occupées et leurs biens sont confisqués de
8 façon illégitime. Nous avons de nombreux cas de familles serbes
9 relocalisées qui s'installent dans deux ou trois maisons par famille. Donc,
10 c'est un rapport rédigé par les organes chargés des affaires civiles au
11 sein du 1er Corps mécanisé en coopération avec le commandement de la ville.
12 On investit de grands efforts pour prévenir des situations de ce type."
13 Alors, vous remarquez que nous faisons face ici à une contradiction.
14 D'une part, aux pages 2 et 3, il dit que la police et les autorités
15 municipales investissent de gros efforts pour prévenir les situations de ce
16 type; puis, à la page 4, il dit que les réfugiés exercent une pression sur
17 les Croates, mais ils bénéficient d'un soutien tacite des autorités
18 municipales.
19 Alors, comment expliquez-vous ces divergences qui figurent dans le
20 document ?
21 R. Je ne dirais pas qu'il s'agit simplement d'opinions
22 contradictoires si l'on suppose que les autorités citées par l'auteur sont
23 monolithiques, ce qui n'est absolument pas le cas. Dans toutes les
24 autorités, et nous avons la communauté locale à Bapska, que nous avons vue
25 un peu plus tôt, où il y a évidemment un conflit de pouvoir entre les
26 habitants qui sont là de longue date et les personnes nouvellement arrivée.
27 Peut-être qu'il s'agissait-là des personnes qui souhaitaient justement que
28 la communauté soit rebaptisée, et à la police où il y avait des officiers
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1 de police qui travaillaient depuis des décennies. C'était le village dans
2 lequel ils avaient grandi, ils avaient eu le plus clair de leur carrière à
3 cet endroit. Mais il y avait également des officiers de police qui étaient
4 nouvellement arrivés, et quelques-uns d'entre eux de Slavonie occidentale,
5 quelques-uns de Serbie, voire même du Monténégro dans certains cas ou de
6 Bosnie, et, bien sûr, il y avait des forces paramilitaires qui étaient là
7 également, donc des forces de police nébuleuses et mal définies qui
8 semblaient parcourir la région et affirmer leur présence au cours de cette
9 période.
10 Donc, d'après la manière dont j'interprète ce document, je crois
11 qu'il s'agit d'une illustration exacte d'une situation assez dynamique que
12 nous avons abordée au mois de janvier, situation dans laquelle il y a très
13 certainement un certain nombre des hommes de la police et de résidents et
14 d'autorités locales, voire même peut-être des représentants de la région
15 militaire, qui souhaitent empêcher que cette situation ne perdure, mais il
16 y a d'autres personnes qui contribuent justement à l'existence de ces
17 problèmes, et c'est ce qu'on déplore dans ce document.
18 Q. Vous êtes d'accord pour dire qu'il y a différentes attitudes
19 possibles parce que les institutions au pouvoir, en tout cas de côté civil,
20 sont assez faibles ?
21 R. Je suis d'accord avec vous. Et, malheureusement, il semblerait que ce
22 soit le cas. Certaines municipalités et communes à ce moment-là ont pris
23 des décisions dans le but de protéger les Croates, les Hongrois, les
24 Ukrainiens, et cetera, mais que ces décisions ont été par la suite
25 contredites ou annulées de façon violente par les forces mêmes qui
26 jouissaient d'une puissance de feu plus importante.
27 Q. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que certains individus se sont
28 arrogés des titres et ont dit : Voilà, je suis tel et tel et je suis à tel
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1 et tel poste, et en se fondant sur le pourvoir dont je suis investi, je
2 vais pouvoir me livrer à telles ou telles activités ?
3 R. Il y a des exemples de ce type. Il y a un document militaire qui a été
4 mis à ma disposition où un homme s'est autoproclamé une "idole" au niveau
5 de la municipalité locale et souhaite que tout un chacun le traite ainsi,
6 alors qu'il venait tout juste de terminer l'école secondaire. Et il rend un
7 certain nombre de décisions qui, aux yeux des militaires, sont des
8 décisions qui ne sont pas prises en connaissance de cause, ils manquent
9 d'informations et ne correspondent pas du tout aux différentes nationalités
10 en présence. Encore une fois, il y a d'autres exemples de ce type dans ces
11 documents. Malheureusement, après que les autorités civiles aient été
12 établies, il y a très peu de traces d'un quelconque effort pour essayer de
13 corriger ces erreurs qui ont été commises ou de poursuivre les personnes
14 qui ont pris des décisions aussi arbitraires et qui ont affirmé leur
15 autorité de façon aussi arbitraire et pris des décisions en conséquence.
16 Q. Alors, je vais vous donner maintenant un exemple un peu plus banal de
17 quelqu'un qui se dit être une idole, et, en réalité, sur cette même page,
18 si je regarde ceci, c'est assez important parce qu'on parle de quelqu'un
19 dont il est allégué qu'il a pris part au gouvernement de la région
20 militaire. Et vous parlez d'allégations :
21 "Ici, il y a également des représentants autoproclamés du
22 gouvernement de la SAO et de la police secrète. Il est difficile d'en
23 déterminer la légitimité. Nous avons un exemple en particulier qui nous
24 vient à l'esprit. A savoir, un groupe de policiers serbes qui restait dans
25 le secteur du village de Bapska, dans les caves, et Marko Loncarevic, alias
26 Chetnik, s'est présenté comme étant le ministre de la Défense du
27 gouvernement et arme les Serbes qui ont été réinstallés à cet endroit dans
28 le but de constituer ses propres groupes et détachements."
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1 Et donc, Monsieur, je suppose qu'après avoir regardé ce document,
2 vous savez qu'Ilija Kojic est le ministre de la Défense en SBSO à cette
3 époque, n'est-ce pas ?
4 R. C'est exact.
5 Q. Avez-vous jamais vu un quelconque document qui donnerait à penser que
6 Marko Loncarevic occupait un poste au sein du ministère de la Défense du
7 gouvernement du district de la région ?
8 R. Non, du tout.
9 Q. Et ne pensez-vous pas que l'auteur de ce document était tout à fait
10 conscient du fait que cette affirmation de la part de Marko Loncarevic
11 était erronée ?
12 R. Alors, si l'auteur savait que cette affirmation était fausse, en tout
13 cas il n'est pas clair au niveau de la connaissance qu'il en a, mais je
14 suis certain que l'auteur de ce document savait ou était au courant de la
15 situation qui est évoquée, à savoir qu'il y avait un certain nombre de
16 commandants autoproclamés ou de dirigeants autoproclamés qui se promenaient
17 dans la région et qui avaient entrepris de telles activités à cette époque.
18 Q. Une autre observation importante dans ce document à la page 5, où on
19 peut lire :
20 "Un autre fait est que tous les niveaux des autorités civiles," je suppose,
21 "de ces organes et des communes locales du gouvernement ne se respectent
22 pas les uns les autres, ou mutuellement, et critiquent leurs positions
23 mutuelles."
24 Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que les relations entre les
25 différents organes étaient fort difficiles ? Et je pense que c'est quelque
26 chose que vous avez déjà dit, mais je veux vous poser la question carrément
27 : est-ce que vous pensez qu'il y avait des relations difficiles entre
28 différents niveaux du gouvernement, y avait des relations difficiles à
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1 l'intérieur même des institutions gouvernementales ?
2 R. Je suis d'accord pour dire qu'il y avait de nombreux désaccords et de
3 nombreux conflits entre différentes personnalités au cours de cette
4 période, y compris au niveau du gouvernement du district.
5 Q. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que tous les documents de la
6 JNA que nous avons vus, que nous avons vus aujourd'hui et que nous avons
7 vus la dernière fois, qu'en ce qui concerne ces documents, rien ne laisse
8 entrevoir que la JNA, à un quelconque moment, estimait être subordonnée aux
9 autorités au gouvernement du district ?
10 R. Je suis d'accord.
11 M. GOSNELL : [interprétation] Est-ce que nous pouvons maintenant afficher
12 le L38, s'il vous plaît, qui correspond à l'intercalaire 128 de
13 l'Accusation.
14 Page 4 de l'anglais, s'il vous plaît. Je crois que cela devrait se situer
15 vers la fin du document. Oui, cela devrait figurer sur la dernière page en
16 B/C/S également.
17 Q. Et il s'agit là du procès-verbal de la 17e séance du gouvernement de la
18 région du SBSO tenue le 19 novembre à Erdut. Au point 5, on peut lire -- et
19 il s'agit là des conclusions qui auraient, semble-t-il, été adoptées à
20 l'unanimité lors de cette séance :
21 "Les unités de la JNA sont subordonnées au gouvernement de la région serbe
22 sur son territoire."
23 Avez-vous vu un quelconque élément de preuve indiquant que cette conclusion
24 a été transmise à la JNA ?
25 R. Je n'ai vu aucune preuve directe indiquant que cette conclusion ait
26 jamais été transmise à la JNA. Encore une fois, je souhaite faire remarquer
27 que la correspondance quasiment jour pour jour un mois plus tard entre M.
28 Hadzic et le commandement de la JNA à Ilok est la meilleure illustration de
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1 la position du gouvernement du district de la SAO et de l'armée, qui tente
2 en fait de définir leur relation mutuelle compte tenu d'un certain nombre
3 de malentendus qui se sont produits sur le terrain également.
4 Q. Et est-ce que vous avez une quelconque indication que la JNA s'est
5 elle-même subordonnée au gouvernement ?
6 R. Je ne dispose d'aucune preuve précisant que la JNA se serait
7 subordonnée en pratique au gouvernement en vertu de cette décision. Encore
8 une fois, je crois que je dois souligner ici que mes travaux de recherche
9 ont surtout porté sur les organes de la police dans la SAO, et, par
10 conséquent, je ne me suis pas concentré précisément sur cette question. Je
11 ne suis pas un expert militaire, et je ne peux pas en parler à ce stade.
12 Q. Eh bien, cela se peut ou cela ne se peut pas. Mais ce qui est
13 important, il s'agit de conjectures. Mais lorsqu'il s'agit en fait des
14 questions relatives à la police, nous avons vu de nombreux documents de la
15 JNA, et la JNA s'est subordonnée dans ces régions-là au gouvernement du
16 district, et je crois qu'on -- ou de la région. Je ne pense pas que l'on
17 puisse remettre cela en cause, n'est-ce pas ?
18 R. Oui, c'est exact.
19 Q. Alors, je souhaite maintenant passer à la discussion d'Arkan, votre
20 discussion à propos d'Arkan que nous avons entendue lors de votre
21 déposition précédente, page 2 521, et je cite vos propres termes :
22 "Il y avait des centres d'entraînement qui semblent avoir été exclusivement
23 placés sous le contrôle d'organes affiliés à Belgrade."
24 Et à 2 522, vous avez identifié ces centres d'entraînement, vous avez dit
25 qu'il s'agissait d'Erdut et Golubic. Et ensuite, à la page 2 523, vous avez
26 dit dans votre déposition qu'Arkan, d'après vous, contrôlait exclusivement
27 ce centre d'entraînement parce que "l'idée générale était que c'est lui qui
28 jouissait de la protection et de la faveur des organes serbes ou fédéraux
Page 2958
1 basés à Belgrade."
2 M. GOSNELL : [interprétation] Est-ce que nous pouvons maintenant afficher
3 le P194.140, s'il vous plaît. Il s'agit d'une pièce de la Défense qui
4 figure sur notre liste.
5 Q. Vous n'aviez pas encore dit ceci dans votre déposition au moment où
6 l'Accusation vous a montré ce document dans le cadre de son interrogatoire
7 principal. Mais l'Accusation vous posait une question, à savoir comment il
8 était possible de concilier ce document-ci avec des informations qui
9 précisaient qu'Arkan était un employé de la SDB de Serbie. Et dans ce
10 contexte-là, vous avez dit dans votre déposition comme suit, à la page 2
11 509 :
12 "Je ne suis pas certain de savoir comment je pourrais concilier cela,
13 hormis le fait de dire qu'en qualité d'analyste, il s'agit des documents
14 qui ont été mis à ma disposition. Par conséquent, j'estimais qu'il était
15 juste de les inclure dans mon rapport."
16 Cette réponse m'a semblé intéressante parce qu'elle était quelque peu
17 différente des réponses que vous avez données concernant d'autres
18 documents. Concernant certains documents, vous avez dit qu'ils vous ont
19 semblé crédibles parce qu'ils étaient corroborés par d'autres documents, à
20 la page 2 439 du compte rendu d'audience; ou parce qu'ils illustrent une
21 hypothèse qui est étayée par d'autres documents, vous avez dit ceci à la
22 page 2 453. Donc, voici ma question : avez-vous eu des doutes ou des
23 hésitations concernant l'authenticité de ce document-ci ?
24 R. Eh bien, je n'ai aucune hésitation ou des doutes à propos de
25 l'authenticité de ce document, et je l'ai cité à la note en bas de page 323
26 de mon rapport, à la page 51.
27 Q. C'est au paragraphe 201 de votre rapport, me semble-t-il. Ce que vous
28 dites ici -- et je crois que c'est vraiment sans équivoque :
Page 2959
1 "Comme je l'ai observé précédemment, Goran Hadzic, au mois de septembre
2 1991, en sa qualité de président du gouvernement de la SAO du SBSO, avait
3 nommé Zeljko Raznjatovic, Arkan, commandant du centre de la TO à Erdut."
4 Et de manière aussi peu équivoque, à la phrase suivante vous dites que :
5 "Arkan avait à ce moment-là été le commandant des unités spéciales de
6 la TO de la SAO en SBSO."
7 Savez-vous si, oui ou non, il existait réellement quelque chose connu sous
8 le nom de spécial -- ou les forces spéciales de la TO de la SAO en SBSO ?
9 Est-ce qu'une telle unité existait, d'après vous, en septembre 1991 ?
10 R. Je souhaite faire remarquer que la raison pour laquelle je dis ceci
11 dans le rapport dans la note en bas de page 323, c'est que tout d'abord je
12 dis ce que dis ce document au vu de celui-ci. Il existe un certain nombre
13 de documents, ils ne sont pas très nombreux, je crois qu'ils sont en nombre
14 de deux ou de trois dans le nouveau lot de documents, qui précisent
15 qu'Arkan commandait la TO en SBSO au cours de cette période. Donc, de
16 telles unités spéciales sont citées, on précise qu'elles ont existé. Je ne
17 peux pas vous dire si elles ont réellement existé ou pas, et je n'ai pas vu
18 de documents émanant directement de cette unité ou non. Je ne sais même pas
19 si ces unités ont fourni de tels documents.
20 Q. Donc, vous dites que les documents que vous avez vus font état de la
21 TO, d'unités spéciales, en SBSO avant la date du 21 septembre 1991 ?
22 R. Ces documents parlent de l'existence des unités spéciales. A savoir si
23 elles parlent précisément de la date du 21 septembre 1991, je ne peux pas
24 vous répondre sur cette question à ce stade aujourd'hui.
25 Q. D'après nous, il s'agit d'un faux. Et je souhaite parcourir avec vous
26 certains passages de ce document et les comparer à d'autres documents.
27 Donc, je souhaite pour commencer regarder ou analyser certains aspects de
28 ce document.
Page 2960
1 Vous constaterez qu'il y a une référence en haut du document au secrétariat
2 du président. Le voyez-vous ?
3 R. Oui.
4 Q. Est-ce que vous vous souvenez si, oui ou non, ce type de formulation a
5 été utilisé dans d'autres documents émanant du gouvernement du SBSO, le
6 gouvernement du district ?
7 R. Je ne me souviens pas qu'une telle formulation ait été utilisée
8 ailleurs. Mais je souhaite également noter, comme nous l'avons dit déjà,
9 nous l'avons abordé, nous disposions de très peu de gouvernement [comme
10 interprété] émanant du gouvernement.
11 Q. Et nous voyons le numéro affiché en haut qui est le 1/91, et je vous
12 demande simplement d'en prendre bonne note.
13 Ce que j'ai remarqué à propos de votre rapport, il y a une nomenclature
14 assez curieuse dans votre note en bas de page concernant ce document. Vous
15 parlez du numéro 65 ter 1D1630. Alors, il ne s'agit pas d'un numéro 65 ter
16 utilisé en l'espèce, donc d'où vient cette cote ?
17 R. Je crois que ceci a figuré parmi les documents, peut-être pas le lot
18 initial, mais une série de documents qui m'a été remise par le bureau du
19 Procureur lorsque j'ai commencé à préparer ce rapport. Je me souviens d'un
20 petit nombre de documents de ce type qui n'avaient pas de numéro ERN mais
21 qui n'avaient que des numéros 65 ter, y compris un petit nombre de
22 documents qui avaient des numéros 65 ter qui correspondaient à la liste de
23 documents de la Défense.
24 Q. Alors, nous sommes sur le point d'enlever ce document. Vous l'avez bien
25 vu donc, puisque vous l'avez eu sous les yeux ?
26 R. Oui.
27 Q. Merci.
28 M. GOSNELL : [interprétation] Alors, je souhaite maintenant regarder le
Page 2961
1 L43, qui correspond à l'intercalaire 137 de l'Accusation.
2 Ce n'est pas le document que j'espérais voir affiché. Est-ce que nous
3 pouvons avoir le numéro 65 ter 00754, qui correspond à l'intercalaire de
4 l'Accusation numéro 137.
5 Donc, il s'agit du numéro 65 ter 00754. Il s'agit du bon document
6 maintenant.
7 Messieurs les Juges, pouvons-nous faire la pause de façon à ce qu'à mon
8 retour j'aie le document qui correspond ? Pardonnez-moi.
9 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Nielsen, nous allons avoir
10 notre première pause et revenir à 11 heures. L'huissier va vous
11 raccompagner. Merci.
12 [Le témoin quitte la barre]
13 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est levée.
14 --- L'audience est suspendue à 10 heures 25.
15 --- L'audience est reprise à 11 heures 00.
16 M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Messieurs les Juges, en attendant la venue
17 du témoin, il y a juste une petite question que je souhaite aborder avec
18 vous.
19 J'ai abordé la question avec mon confrère. Il a besoin du deuxième
20 volet d'audience et du troisième volet d'audience. Est-ce que nous
21 pourrions avoir une demi-heure supplémentaire aujourd'hui parce que nous
22 souhaitons présenter des questions supplémentaires ? Parce que M. Nielsen
23 doit prendre l'avion aujourd'hui.
24 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
25 [Le témoin vient à la barre]
26 [La Chambre de première instance se concerte]
27 M. GOSNELL : [interprétation] Puis-je avoir le 00248. Qui est, en réalité,
28 un document qui est mentionné dans un autre document qui figure sur la
Page 2962
1 liste de l'Accusation. Et j'ai consulté mon confrère de la partie adverse,
2 qui était d'accord pour dire que ce document ne figurait ni sur la liste de
3 la Défense ni sur la liste de l'Accusation.
4 Encore une fois, il ne s'agit pas du bon document. Donc, ce que je
5 fais faire en fait, c'est l'afficher et présenter le document qui figure
6 sur la liste. C'est le document 1939; intercalaire numéro 292 de
7 l'Accusation. Lorsque nous le recherchons, c'est la page 63 de l'onglet,
8 s'il vous plait. Et cela devrait correspondre environ à la page 226 en
9 B/C/S. C'est peut-être même la page 225.
10 Voilà, c'est ce document. Paragraphe 69.
11 Q. Donc, Monsieur, d'après votre rapport, je comprends que vous faites
12 référence à ce document à la note de bas de page 51 de votre rapport. Et,
13 en règle générale, vous considérez les documents qui sont inclus dans le
14 livre de M. Petrovic comme des documents authentiques, n'est-ce pas ?
15 R. Oui, oui, dans les cas où j'ai pu examiner les documents, parce
16 que le bureau du Procureur a une autre version de ces documents qui
17 corroborent ce qui est indiqué dans ce livre.
18 Q. Mais cela est vrai pour ce qui est de ce document. Je voulais vous
19 présenter l'autre version, mais de toute façon il s'agit du même document,
20 en fait. Je voulais vous présenter la version qui a été présentée dans le
21 bulletin. Donc, j'aimerais attirer votre attention sur le numéro 1/91.
22 Vous le voyez ?
23 R. Oui.
24 M. GOSNELL : [interprétation] Page suivante de la version anglaise. Et page
25 suivante de la version anglaise.
26 Q. Vous voyez que M. Hadzic signe en tant que premier ministre, qu'il
27 signe ce document.
28 M. GOSNELL : [interprétation] Est-ce que nous pourrions, je vous prie --
Page 2963
1 est-ce que nous pourrions reprendre le début de ce document, à savoir deux
2 pages précédentes. Voilà, c'est cela.
3 Q. Vous voyez qu'il n'est pas fait référence au secrétariat du président.
4 Dans l'intitulé, il est indiqué "premier ministre"; est-ce bien exact ?
5 R. Oui. Bien que je souhaiterais vous dire, pour qu'il n'y ait pas de
6 malentendu, que le terme "premier ministre" en B/C/S peut également se
7 traduire par "président du gouvernement".
8 Q. Oui, c'est exact. Et je vous remercie de cette précision.
9 M. GOSNELL : [interprétation] Est-ce que nous pourrions afficher le
10 document 00261; onglet 88 dans le jeu de documents de l'Accusation.
11 Q. Juste une question de suivi à propos du dernier document : il n'est pas
12 indiqué bureau du premier ministre ou secrétariat du premier ministre,
13 n'est-ce pas ?
14 R. Non.
15 Q. Il s'agit d'une décision relative à la mise en œuvre des
16 réglementations. Et vous voyez que la date est du 30 août 1991. Il est
17 indiqué juste avant la date "à Dalj". Alors, il s'agit d'un numéro avec
18 quatre chiffres 02-3-2/1-1991. Vous voyez cela ?
19 R. Oui.
20 Q. Et est-ce que vous considérez que ce document, qu'il s'agisse de la
21 forme du document ou du fond du document, est-ce vous le considérez
22 authentique ?
23 R. Oui.
24 M. GOSNELL : [interprétation] Nous aimerions demander le versement au
25 dossier de ce document, Monsieur le Président.
26 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le document sera versé au dossier.
27 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document deviendra le document D29.
28 M. GOSNELL : [interprétation] Le document suivant par ordre chronologique
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1 est le document P19410 [sic]. Il s'agit du document qui nous intéresse le
2 plus. Il s'agit du document P194.10.
3 Q. Dans ce cas, vous voyez qu'il est question donc du secrétariat du
4 président, et nous revoyons ce chiffre 1/91. Et nous avions déjà vu ce
5 numéro dans le deuxième document.
6 R. Oui, effectivement, nous l'avions vu, le numéro, dans l'avant-dernier
7 document présenté.
8 Q. Et ce document est un document du 21 septembre 1991, donc trois
9 semaines environ après le document précédent, qui portait la date du 30
10 août 1991, n'est-ce pas ?
11 R. Oui.
12 Q. Et là, vous voyez qu'il n'y a pas de numéro avec quatre chiffres pour
13 ce qui est du numéro d'identification de ce document.
14 R. C'est exact.
15 M. GOSNELL : [interprétation] Nous avons le document P260.253, qui
16 correspond à l'onglet 53 pour les documents de la Défense.
17 Q. Il s'agit du document suivant pour ce qui est de la chronologie des
18 documents du gouvernement du district. Là, il n'y a pas de numéro. Vous
19 voyez qu'il y a un blanc. Et ce document a été émis six jours après le
20 document principal qui nous intéresse. Et vous voyez que là il n'est plus
21 question du secrétariat du président, mais du secrétariat du gouvernement;
22 est-ce bien exact ?
23 R. C'est exact. Il y avait effectivement un secrétariat du gouvernement,
24 et la page que vous m'avez montrée précédemment qui venait de la gazette du
25 bulletin officiel du district faisait également référence au secrétariat du
26 gouvernement.
27 Q. Merci de cette précision.
28 Et nous voyons qu'au bas du document quelqu'un signe au nom du premier
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1 ministre, M. Hadzic, et puis nous voyons une signature qui figure au bas de
2 ce document.
3 R. Oui, oui, je vois que c'est quelqu'un qui signe au nom de M. Hadzic.
4 C'est exact.
5 Q. Avant que ce document ne disparaisse de nos écrans, il s'agit d'une
6 question technique, en fait, et je ne sais pas si vous avez saisi cela,
7 mais cela, c'est après la promulgation de la constitution et le nom de la
8 SBSO a été modifié. Il n'est plus question de District autonome serbe, mais
9 il est question de district serbe, donc l'adjectif "autonome" a disparu.
10 Est-ce que vous accepteriez qu'il s'agisse tout simplement d'une erreur
11 qu'ils avaient faite ?
12 R. Oui, on trouve ce genre d'erreur parce qu'ils n'étaient pas
13 véritablement particulièrement attentifs à ce genre de détail.
14 M. GOSNELL : [interprétation] Le document P196.140, je vous prie, qui
15 correspond à l'onglet 31 pour les jeux de documents de la Défense.
16 M. LE JUGE MINDUA : [interprétation] Maître Gosnell, excusez-moi. Avant de
17 passer à un autre document, j'aimerais poser cette question au témoin.
18 Monsieur le Témoin, dans l'étude des institutions que vous avez menée sur
19 ces sujets, est-ce qu'il est possible d'avoir d'un côté un secrétariat du
20 gouvernement, et de l'autre un secrétariat du président du gouvernement ?
21 Est-ce que c'est possible ? Dans vos recherches, vous avez remarqué cela ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est possible, Monsieur le Juge.
23 M. LE JUGE MINDUA : [interprétation] Si vous n'avez pas pu trouver les
24 exemples au cours de l'analyse de différents textes -- parce que, si je
25 comprends bien, c'est que nous sommes en train de faire avec l'avocat de la
26 Défense.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis d'accord avec vous, Monsieur le Juge.
28 C'est justement ce que nous sommes en train de faire maintenant. Toutefois,
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1 comme je l'ai indiqué à Me Gosnell, je n'ai pas remarqué un nombre
2 important de documents émis par le secrétariat du président du
3 gouvernement, alors que j'ai vu un grand nombre de documents émis par le
4 secrétariat du gouvernement.
5 Et je vous dirais que, malheureusement, quand nous avons des
6 documents de la part des autorités du district, ces documents ne sont pas
7 complets, et au vu des documents dont nous disposons, je ne peux pas
8 dégager de conclusion. Je ne peux pas conclure s'il existait ou non,
9 d'ailleurs, un secrétariat du président du gouvernement.
10 M. LE JUGE MINDUA : [interprétation] Alors, pour le moment, je me
11 limite là. Merci.
12 M. GOSNELL : [interprétation]
13 Q. Document P196.140, qui porte la date du 2 octobre 1991. Il semblerait
14 qu'il s'agisse d'une décision qui porte le numéro ou la cote 1/91. Et si
15 nous pouvons passer à la page 2 de ce document, ou peut-être que le bas de
16 la page suffira, v voyez que c'est le premier ministre, Goran Hadzic, qui
17 signe le document; est-ce que cela est bien exact ?
18 R. C'est exact. Et si je peux me permettre l'audace d'aller un peu de
19 l'avant, parce que je vois très bien où cela va nous mener, il y a un
20 certain nombre de documents qui portent le numéro d'enregistrement 1/91.
21 Et, bien entendu, il y a un certain nombre d'institutions différentes au
22 sein du district, et certaines de ces institutions ont des bureaux Et cela
23 est tout à fait conforme à la façon dont fonctionnaient les autorités du
24 gouvernement, à savoir que chacun des bureaux avait au moins un numéro de
25 série d'enregistrement, parfois plus qu'un d'ailleurs, ce qui fait que
26 plusieurs entités au sein du même gouvernement étaient en mesure d'avoir le
27 numéro ou la cote 1/91.
28 Q. Oui, mais ces documents émanent tous du premier ministre, M. Goran
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1 Hadzic ?
2 R. Si nous examinons de près ces documents, nous voyons que l'intitulé de
3 ces différents documents n'est pas toujours identique. Il y a différents
4 titres, ce qui signifie que même si le signataire est M. Goran Hadzic, il
5 peut signer des documents qui sont émis par différentes unités des
6 autorités du district.
7 Q. Est-ce que nous pouvons remonter et voir le haut du document. Voilà.
8 Cela émane du gouvernement du district serbe de la SBSO, n'est-ce pas
9 ?
10 R. C'est exact. Et si ma mémoire ne m'abuse, l'un des documents précédents
11 que nous avons vus, qui portait également cette cote 1/91, avait également
12 été émis par le gouvernement du district serbe de la SBSO. Mais là, par
13 contre, il y avait les mots "secrétariat du gouvernement".
14 Q. Nous n'accordons pas une très très grande importance à ces cotes. Il se
15 peut que cela représente un intérêt, mais ce qui est important pour nous,
16 c'est la référence au secrétariat du président que l'on trouve seulement
17 sur un de ces documents parmi les différents documents. Je vous le dis, ce
18 n'est pas une question que je vous pose.
19 M. GOSNELL : [interprétation] Et j'aimerais maintenant que nous passions au
20 document suivant, P251.245, qui correspond à l'onglet 52 des documents de
21 la Défense. Et je pense que ce document ne doit pas être montré au public.
22 Q. Ce document est, une fois de plus, signé par le premier ministre, M.
23 Goran Hadzic, et nous y trouvons une référence à nouveau au secrétariat du
24 gouvernement. Il n'y a pas de cote. Le lieu est Dalj. La date est le 16
25 octobre 1991. Est-ce exact ?
26 R. Oui, c'est exact.
27 Q. Et vous n'avez aucune raison de ne pas croire qu'il s'agit d'un
28 document authentique au vu de ce document, qu'il s'agisse de la forme ou du
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1 fond ?
2 R. Il s'agit probablement d'une copie d'un document. Il est assez étrange
3 de voir qu'il n'y a pas de numéro ou de cote pour cet ordre, mais je n'ai
4 aucune raison de douter de l'authenticité dudit document. Une fois de plus,
5 ils n'étaient pas toujours particulièrement méticuleux lorsqu'ils
6 produisaient ce genre de documents.
7 Q. Oui, mais ce n'est pas le seul document sur lequel il n'y a pas de
8 cote, n'est-ce pas ?
9 R. Non, bien sûr. Mais vous pouvez également trouver des documents sans
10 cote où figurent des dates qui n'existent pas, par exemple, telles que le
11 31 novembre.
12 Q. Bien.
13 M. GOSNELL : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir le document
14 L43.
15 Q. On trouve une référence dans votre rapport à la note de bas de page 60.
16 C'est un document de l'Accusation qui figure sur la liste des documents de
17 l'Accusation.
18 Une fois de plus, il s'agit d'une décision signée par le président du
19 gouvernement, M. Goran Hadzic, et il semblerait qu'il s'agisse de la
20 nomination d'une personne au poste de conseiller municipal de la
21 municipalité. Une fois de plus, nous voyons ce numéro à quatre chiffres,
22 02-3-25/1-1991. Vous voyez cela ?
23 R. Oui.
24 M. GOSNELL : [interprétation] Document P51, qui correspond à l'onglet 55
25 pour les documents de la Défense.
26 Q. Il s'agit d'une décision qui porte la date du 21 janvier 1992 qui est à
27 nouveau signée par M. Hadzic. Et nous retrouvons ce numéro à quatre
28 chiffres dans ce document. Et il semblerait qu'il s'agisse de faciliter
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1 l'opération d'un plan d'activités au vu d'établir les autorités civiles.
2 M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je ne pense pas que nous ayons le bon
3 document. Parce que là, nous avons une liste des membres du SDS.
4 M. GOSNELL : [interprétation] Non, mais ce n'est pas le document que
5 je souhaitais avoir. Est-ce qu'il s'agit bien du document P51 ?
6 Bon, il va falloir que je revienne chercher le document plus tard et
7 que je passe à autre chose pour le moment.
8 Q. Je comprends que vous nous dites que les documents qui émanent du
9 gouvernement et qui portaient sur la Republika Srpska ne sont pas très
10 nombreux, mais là nous avons vu à peu près six documents environ qui sont
11 des décisions signées par le premier ministre, M. Goran Hadzic. Parfois,
12 nous ne trouvons pas toujours la référence au gouvernement, bien que de
13 façon générale cette référence existe. Parfois, il y a une référence, dans
14 deux des documents, au secrétariat du gouvernement.
15 Mais moi, ce que j'avance, c'est que dans aucun de ces documents - et
16 il y en a beaucoup plus - dans aucun de ces documents, disais-je, qui ont
17 été produits entre août 1991 et le début de l'année 1992, nous ne trouvons
18 jamais de référence au secrétariat du président du gouvernement.
19 Alors, je sais que vous n'avez pas tous les documents avec vous
20 maintenant, mais est-ce que vous convenez qu'il y a quand même une certaine
21 anormalité et que cela ne nous permet pas d'évaluer tous ces documents ?
22 R. Je peux tout à fait marquer un accord avec vous, en ce sens que moi je
23 n'ai pas été en mesure de consulter d'autres documents émanant du
24 secrétariat du président. Et au vu du document cité dans ma note en bas de
25 page numéro 323, il s'agit du seul document qui fait référence à ce
26 secrétariat, et cela doit être pris en considération lorsqu'il s'agira de
27 déterminer la fiabilité et l'authenticité dudit document.
28 Q. Oui. Mais vous ne l'avez pas mentionné dans votre rapport, cela, n'est-
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1 ce pas ?
2 R. C'est exact. Je ne l'ai pas mentionné -- enfin, je n'ai pas mentionné
3 le moindre souci relatif à la fiabilité ou à l'authenticité de ce document
4 dans mon rapport.
5 M. GOSNELL : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir le document
6 1D186, qui se trouve à l'onglet 9 des documents de la Défense.
7 Q. Nous, la Défense, avons écrit au gouvernement de Serbie pour voir s'il
8 pouvait retrouver ce document dans ses archives.
9 M. GOSNELL : [interprétation] En fait, je ne sais pas, peut-être qu'il
10 faudrait que nous passions à huis clos partiel. Je n'en suis pas sûr, mais
11 je pense que ce serait peut-être une meilleure idée.
12 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Huis clos partiel.
13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur
14 le Président.
15 [Audience à huis clos partiel]
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22 [Audience publique]
23 M. GOSNELL : [interprétation]
24 Q. Voilà ce que j'avance à votre intention pour permettre un terme à cette
25 discussion et pour dégager une conclusion : il y a une référence qui n'est
26 normale - qui est erronée d'ailleurs, catégoriquement erronée - à propos du
27 secrétariat du président. Nous avons également une référence à l'existence
28 d'une unité qui n'existe pas. Nous trouvons une référence à Arkan qui était
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1 le commandant de cette unité non existante. Et potentiellement, bien que je
2 ne vais pas véritablement accorder une grande fiabilité à cela, nous avons
3 un numéro de référence erroné. Alors, lorsque vous prenez tous ces éléments
4 et ensuite que vous repassez cela dans le contexte dont nous allons parler
5 et que vous prenez en considération tous ces paramètres et que, de pair
6 avec cela, vous ne savez pas quel est l'origine du document, est-ce que
7 cela ne devrait pas en quelque sorte vous indiquez que l'on peut pas
8 véritablement accorder toute foi à votre rapport ?
9 R. Ecoutez, je vais scinder ma réponse en deux volets. Premièrement, je
10 répondrais directement à votre question. Puis, en deuxième lieu, je ferais
11 une observation plus générale, et avec l'autorisation des Juges, il faudra
12 que cela se fasse à huis clos partiel.
13 Mais la première partie de ma réponse en audience publique est comme suit :
14 je suis d'accord avec vous, il y a des nombreux éléments que vous avez
15 soulevés qui sont parfaitement valables à propos de l'éventuelle
16 crédibilité de ce document. Et ce sont des éléments qui, je l'espère,
17 seront pris en considération par vous et par les Juges de la Chambre
18 lorsqu'ils accorderont le poids qu'ils souhaiteront accorder à ce document
19 comparé à d'autres documents.
20 Je dirais, toutefois, que si je pense à l'ensemble des documents que j'ai
21 pu consulter, nous avons un document très intéressant du général Biorcevic
22 du mois de novembre 1991, qui se trouvait basé à Novi Sad, et il s'agit en
23 fait d'une mitrailleuse qu'il offre à M. Raznjatovic. Et dans ce document
24 précis, l'arme qui est donnée à M. Raznjatovic, à propos de cette arme, le
25 général Biorcevic déclare qu'Arkan a cette fonction de commandant de la
26 Défense territoriale du district de la SBSO, et il fait référence aux
27 forces spéciales.
28 Donc, c'est un document qu'il faudrait également prendre en considération.
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1 Et pour ce qui est de la deuxième partie de mon intervention, qui sera
2 beaucoup plus générale, je souhaiterais que nous passions à huis clos
3 partiel pour ce faire.
4 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien. Huis clos partiel.
5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
6 [Audience à huis clos partiel]
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3 [Audience publique]
4 M. GOSNELL : [interprétation] Nous en avons terminé avec ce document.
5 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell, est-ce que vous
6 comptez passer à un autre sujet ?
7 M. GOSNELL : [interprétation] Oui.
8 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Alors, j'aimerais poser une question
9 relative à ce document à M. Nielsen.
10 Monsieur Nielson, ça fait déjà un petit moment que nous débattons des
11 termes "président" et "secrétariat du président". Et dans ce document, les
12 termes utilisés sont celui du président et du secrétaire du président. Mais
13 vous dites qu'en B/C/S il peut exister une analogie. Est-ce vous pourriez
14 nous la préciser, s'il vous plait.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout ce que j'ai essayé de signaler, c'est que
16 le terme "premier ministre" en anglais ou en français -- enfin, le terme
17 qui est le plus souvent utilisé en B/C/S, le terme équivalent, est celui du
18 "président du gouvernement". C'est le terme qui apparaît le plus souvent
19 dans les textes serbes pour désigner le premier ministre. Et ici, dans
20 l'original en B/C/S, nous voyons le nom et la signature de la signature de
21 M. Hadzic là où il est indiqué "président du gouvernement". Autrement dit,
22 le premier ministre dans la plupart des cas, dans grande majorité des
23 textes.
24 Et donc, voilà ce que j'essaie de souligner : que si le secrétariat du
25 président a existé, alors dans ce cas de figure particulier, il ne s'agit
26 pas en fait du secrétariat du président, mais plutôt du secrétariat du
27 président du gouvernement, autrement dit, du secrétariat du premier
28 ministre.
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1 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Et dans ce document particulier, dans
2 la version B/C/S, les termes utilisés, est-ce qu'ils sont différents par
3 rapport aux autres documents que nous avons vus en B/C/S ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce qui est indiqué en bas de la page, là où
5 nous voyons la signature de M. Hadzic, là il n'y a rien de particulier dans
6 ce document.
7 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Et qu'en est-il de ces termes qui
8 figurent en haut de la page, où il est indiqué secrétariat du président ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, Me Gosnell a bien raison de souligner
10 que c'est le seul exemple où ce terme a été utilisé. Je n'ai jamais
11 retrouvé ce terme de "secrétariat du président" dans les autres textes que
12 j'ai étudiés.
13 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Et quel est le terme utilisé en B/C/S
14 ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] En B/C/S, "sekretrijat predsednika,"
16 secrétariat du président.
17 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
18 Vous pouvez poursuivre, Maître Gosnell.
19 M. GOSNELL : [interprétation]
20 Q. J'aimerais franchir une autre étape, poser une autre question qui
21 découle de la question posée par le Président. En fait, les termes du
22 "premier ministre" et du "président" ne sont pas sans ressemblance en
23 B/C/S. Ai-je raison de le souligner ?
24 R. Oui. Je voulais éviter des sources de confusion possible, parce que
25 dans la traduction de ce document particulier -- nous avons une mauvaise
26 traduction parce que la traduction que nous voyons ici est "government
27 president". Ça ne veut absolument rien dire en anglais. Il aurait fallu
28 dire soit "president of the governement," président du gouvernement, ou
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1 alors premier ministre, "prime minister",
2 Q. Et c'est le seul document où nous retrouvons ce terme du secrétariat du
3 président, voire même du secrétariat du premier ministre. Ai-je raison de
4 l'affirmer ?
5 R. Oui.
6 M. GOSNELL : [interprétation] Passons maintenant au document 1028 de la
7 liste 65 ter, qui correspond à l'onglet 188 parmi les documents de
8 l'Accusation.
9 Q. Au cours de votre déposition, à la page du compte rendu d'audience 2
10 510, vous avez déclaré :
11 "Arkan bénéficiait du soutien des personnes au pouvoir très importantes à
12 Belgrade. Il était intouchable."
13 Compte tenu du fait que vous avez examiné les différents documents et
14 compte tenu de ce que nous avons vu au sujet du 21 septembre 1991, ce ne
15 sont pas les mesures prises par Goran Hadzic qui ont rendu Arkan
16 intouchable. Ai-je raison de l'affirmer ?
17 R. Il m'est très difficile de répondre à cette question. Permettez-moi de
18 préciser d'abord que ce que vous avez cité en vous référant à la page du
19 compte rendu d'audience 2 510, vous avez cité tout simplement mon sentiment
20 -- ou les observations que j'ai faites en rapportant que de façon générale,
21 à Belgrade, on croyait qu'Arkan était soutenu par des personnes très
22 importantes au pouvoir et qu'il était intouchable. Alors, il est vrai que
23 lorsque les autorités militaires ou autres parlent des pouvoirs d'Arkan et
24 de son statut intouchable, ceux qui l'entourent, de façon générale, ne
25 pensent pas que ceci est dû parce qu'il a quelque chose à voir avec les
26 autorités locales, mais plutôt parce qu'il bénéficie du soutien des
27 autorités de Belgrade, notamment de la Sûreté de l'Etat de la République de
28 Serbie.
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1 M. GOSNELL : [interprétation] Examinons maintenant la page 71 du document
2 affiché à l'écran. Ceci est le procès-verbal d'une réunion, de la 194e
3 réunion de la présidence de la RSFY.
4 Q. Pourriez-vous me rappeler quel est le poste occupé par le général Panic
5 à ce moment précis ?
6 R. A ce moment précis, si ma mémoire ne me fait pas défaut, il était chef
7 de l'état-major. Je ne suis pas tout à fait sûr quel est poste qu'il
8 occupait à ce moment précis, mais il me semble qu'il était le chef de
9 l'état-major de la JNA.
10 Q. Et seriez-vous d'accord pour dire qu'il était peut-être le commandant
11 du 1er District militaire à ce moment donné ?
12 R. C'est possible. Aussi, je ne suis pas un expert sur les choses
13 militaires. Mais M. Panic et sa participation au sein de la présidence de
14 la RSFY sont évoqués au paragraphe 205 de mon rapport.
15 Q. Oui. Et c'est dans ce paragraphe que vous citez M. Panic disant que
16 Hadzic considère Arkan comme un garde corps. Ai-je raison de l'affirmer ?
17 R. Oui, tout à fait. C'est ce que j'ai indiqué dans mon rapport. Ensuite,
18 dans la suite de son discours, M. Panic dit qu'il est nécessaire de
19 demander à Hadzic d'éloigner Arkan de cette région. Et il souligne aussi
20 qu'il a débattu déjà de ce sujet avec M. Milosevic, qui, je cite, faisait
21 tout ce qu'il faisait pour résoudre le problème.
22 Il faut noter aussi que M. Panic, malgré l'inquiétude que les activités
23 d'Arkan suscitaient à ce moment-là, et c'est quelque chose que je souligne
24 au paragraphe 205, M. Panic souligne que les autorités militaires avaient
25 accepté Arkan précédemment parce qu'elles pensaient qu'il s'acquittait de
26 missions de caractère positif, et ceci explique peut-être pour quelles
27 raisons le général Biorcevic a décidé de lui offrir une arme au mois de
28 novembre 1991.
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1 Q. Alors, j'aimerais que maintenant nous envisagions ces propos du général
2 Panic dans un contexte plus large, donc, en étudiant ce procès-verbal. Il
3 nous faut la page 71 -- j'essaie de retrouver le passage qu'il nous faut.
4 Je vais vous donner lecture du passage pertinent. Je ne vois pas exactement
5 où ce passage commence, mais voilà la partie qui est citée dans votre
6 rapport. Je cite les propos du général Panic :
7 "Il faut vraiment que nous en finissions une fois pour toute avec Arkan et
8 les Aigles blancs et tous ceux qui essaient de détruire tout ce que nous
9 nous efforçons de faire aujourd'hui. Arkan a été dirigé par Hadzic. Hier,
10 je suis allé à Knin et tout le monde se demandait ce qu'Arkan faisait dans
11 cette région. Mais celui-ci l'a amené avec lui comme une sorte de garde du
12 corps. Il faudrait téléphoner au président Hadzic pour lui dire qu'Arkan
13 doit quitter la région. Ce jeune homme cherche à faire ses preuves d'une
14 façon ou d'une autre. Mais vous savez que c'est un criminel notoire sur la
15 scène internationale et qu'il ne peut pas continuer à exercer ces fonctions
16 dans la région. Pendant qu'il est gentil et qu'il se comporte comme il le
17 faut, c'est très bien de le garder; mais lorsqu'il ne sert plus à rien, il
18 faut s'en débarrasser. Et la même chose vaut pour Jovic."
19 Passons maintenant à la page 73 en version anglaise, s'il vous plaît. En
20 fait, le chiffre qui est indiqué en bas de la page c'est 70. Et dans ce cas
21 de figure, c'est Borisav Jovic qui s'exprime. Et Borisav Jovic dit :
22 "Quant à ces Aigles et quant à Arkan, je pense que l'armée devrait procéder
23 à leur arrestation conformément aux ordres que nous avons donnés."
24 Et alors, c'est Panic qui réplique en disant :
25 "Mais c'est au ministère de l'Intérieur de le faire."
26 Et Borisav Jovic dit :
27 "Non, ce n'est pas notre prémisse de départ. Notre position c'est que
28 personne ne doit être expulsé ou chassé."
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1 Et puis, si nous passons vers la moitié de la page 71, Jovic dit :
2 "Nous n'avons pas essayé de les empêcher de combattre les Oustachi,
3 mais nous voulons leur interdire d'expulser les habitants innocents, c'est
4 ça le principal."
5 Et puis, un peu plus loin, il dit :
6 "Si l'armée veut bien accepter cette mission, j'aimerais bien la leur
7 confier, parce que s'ils les trouvent la main en sac, alors ils peuvent les
8 désarmer et procéder à leur arrestation…"
9 Et puis, Panic dit, c'est à la page suivante :
10 "Il n'y a pas de tâche qui ne puisse pas être accomplie par l'armée
11 pourvu que l'ordre en soit donné par le commandement Suprême. Si le
12 commandement Suprême nous ordonne de quitter la Bosnie demain, nous le
13 ferons et très facilement. Nous allons proclamer un état d'urgence et nous
14 allons tout simplement traverser la rivière Drina. Si nous recevons un
15 ordre de ce type, nous allons le mettre en œuvre."
16 Alors, arrêtons-nous ici pendant quelques instants. A la lecture de
17 cette réponse fournie par Panic, est-ce que -- je vais le formuler ainsi :
18 est-ce que vous penser que ce que signifie cette réponse de Panic, c'est
19 qu'il veut bien accepter un ordre de ce type, ou est-il plutôt en train de
20 nous dire : Eh bien, vous pouvez nous donner des ordres si vous le voulez,
21 mais ce ne serait pas très souhaitable ou cela peut engendrer une
22 catastrophe ?
23 R. Eh bien, je comprends pour quelle raison vous pouvez interpréter
24 les propos de Panic de cette façon-là, mais je pense que vous interprétez
25 énormément. Je pense que ce qui est important, c'est le passage que vous
26 avez lu à haute voix tout à l'heure. C'est la première réaction de Panic,
27 qui dit que c'est au MUP de procéder à ces arrestations. Je veux dire,
28 Arkan est difficile, c'est un problème qu'ils ont créé eux-mêmes, c'est
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1 quelqu'un qu'ils ont patronisé, c'est quelqu'un qu'ils ont armé, qu'ils ont
2 financé et qui est maintenant devenu persona non grata, et, en fait, ils se
3 passent ce problème les uns aux autres. Personne ne veut assumer la
4 responsabilité de chasser Arkan et de l'arrêter. Et, malheureusement,
5 l'histoire nous montre qu'Arkan est resté actif dans la région jusqu'à la
6 moitié des années 1990.
7 Q. A la fin de la page 72, on dit, et je cite :
8 "Une fois lors d'une réunion, j'ai demandé quelle était la relation entre
9 Arkan et la JNA, et c'est vous qui m'avez dit que ces relations étaient
10 très bonnes."
11 Et puis, Jovic répond en disant :
12 "Oui, pour ce qui concerne les sujets relatifs à la guerre."
13 Et puis, Kostic dit :
14 "Il faut éviter tout conflit important. Il faut régler la chose
15 gentiment, de façon à ce que ces hommes puissent rester dans la région dans
16 les rangs de l'armée s'ils le souhaitent."
17 Et puis, Panic réplique en disant :
18 "Arkan s'est très bien acquitté des missions qui ont été confiées
19 dans la région. A un moment donné, il est devenu dissident, mais ils ont
20 réussi à le ramener dans les rangs, et cetera. Toutefois, il ne rend pas
21 service à la Yougoslavie en ce moment. Il faudrait l'appeler pour lui
22 confier une mission. Les personnes qui l'ont envoyé sur place devraient
23 l'appeler. Et moi, je ne sais pas qui l'a envoyé sur place. Tout ce que je
24 constate, c'est qu'Arkan a été présent à Bijeljina, à Zvornik, dans les
25 environs de Sarajevo, à Knin, et cetera. Quelqu'un le dirige, quelqu'un lui
26 confie des missions et il faudrait voir qui c'est, parce que ce n'est pas
27 nous."
28 Et puis, on dit :
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1 "Arkan est très discipliné quand on lui confie des missions à
2 accomplir. Ce sont les personnes qui le dirigent qui devraient l'appeler."
3 Alors, je vais vous poser la question de façon générale : qu'est-ce
4 qui se passe exactement ici ? Qu'est-ce que vous pensez que
5 Panic est en train de dire ? Est-ce que vous pensez qu'il faut comprendre
6 ses propos littéralement, ou est-ce que vous pensez qu'autrefois il avait
7 des rapports de coopération très étroits avec Arkan et que maintenant il
8 essaie en fait de s'en tirer ?
9 R. Je souhaite d'abord souligner ce qui figure dans le premier passage que
10 vous avez lu. En B/C/S, ici, on dit : "J'ai demandé une fois quels étaient
11 les rapports entre Arkan et la JNA, et c'est vous qui m'avez dit qu'il
12 était gentil." Donc, qu'il était "gentil", c'est ce qui est indiqué en
13 B/C/S, et non pas que ses relations étaient "bonnes".
14 Maintenant, pour répondre à votre question, oui, il y a des indications
15 très claires qui nous disent qu'Arkan [comme interprété] savait
16 pertinemment qui Arkan était. J'ai trouvé un document, un rapport de 1982,
17 je crois, donc dix ans avant cette réunion, et déjà à l'époque l'armée
18 savait qu'Arkan était un criminel de profession qui, même, avait accompli
19 des actes très peu patriotiques. Par exemple, il a évité de faire son
20 service militaire obligatoire dans les rangs de l'armée yougoslave à
21 l'époque socialiste. Donc, il n'y a aucun doute pour ce qui est de savoir
22 qui Arkan était.
23 La façon dont j'interprète ce que Panic dit ici, ce qui me semble
24 important dans ses propos, c'est qu'il engage cette discussion avec Borisav
25 Jovic qui, lui, est très proche de Slobodan Milosevic. Donc, pour moi, ce
26 qui est sous-entendu ici, c'est que les dirigeants politiques et la police
27 sont vus comme des rivaux de l'armée. C'est vous qui avez laissé cette
28 personne faire tout ce qu'il a fait. C'est vous qui l'avez aidé tant qu'il
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1 vous vous semblait patriotique et que ses activités vous paraissaient
2 nobles parce que vous souhaitiez avoir un contrôle dans cette région de
3 Yougoslavie. Mais dernièrement, il est devenu problématique. C'est vous qui
4 avez créé ce problème, c'est à vous de le résoudre. Donc, les militaires
5 disent que ce sont les autorités civiles qui en sont responsables, et tout
6 le monde le sait parmi les personnes qui sont assises au tour de la table.
7 Tout le monde sait que la Sûreté de l'Etat n'est pas contrôlée par l'armée,
8 mais plutôt par les dirigeants politiques.
9 Q. Est-ce que vous êtes en train de me dire que les militaires disent que
10 c'est aux autorités civiles de régler la question ou croyez-vous que c'est
11 plutôt les autorités civiles qui le disent à l'armée ? Parce qu'ici, quand
12 on pose la question, nous avons cette citation où on dit : "Je vous ai
13 demandé une fois quels étaient les rapports entre l'armée [comme
14 interprété] et la JNA," donc je pense en fait qu'on implique que Panic
15 avait quelque chose à voir avec lui en Croatie, tout en moins.
16 R. Je pense qu'en fait, le sujet est beaucoup plus précis. Je pense que ce
17 qu'ils sont en train de dire ici, c'est que l'armée a dit à un moment donné
18 qu'Arkan ne posait pas de problèmes. A l'époque, il y avait un accord
19 général pour dire qu'Arkan était utile et qu'il agissait pour le bien
20 commun. Mais c'est une époque révolue maintenant. Les autorités civiles
21 critiquent Panic, si vous le voulez, en disant que maintenant il a retourné
22 sa veste, et maintenant, soudainement, ils disent : Non, non, non, cette
23 personne, c'est un criminel. Mais il est clair sur la base de nombreux
24 documents que tout le monde savait qui était Arkan. Pendant de nombreuses
25 années avant cette réunion, tout le monde savait que c'était très dangereux
26 d'engager quelqu'un de ce type pour faire partie des forces armées.
27 Evidemment, les militaires ne sont pas très satisfaits de ses agissements,
28 du fait qu'il ne tient pas compte des formations armées officielles, qu'il
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1 refuse de faire partie de la chaîne du commandement officiel. Et
2 maintenant, ils essaient de resubordonner ces unités de volontaires, y
3 compris l'unité d'Arkan, pour qu'elles fassent partie de la hiérarchie
4 officielle militaire de la chaîne du commandement.
5 M. GOSNELL : [interprétation] Affichons, s'il vous plaît, le document 0247;
6 onglet 12 de la Défense.
7 Q. Pendant que nous --
8 M. STRINGER : [interprétation] Pardonnez-moi. J'ai écouté les autres
9 canaux. Il s'agit d'une discussion fort complexe. Tout ceci a été dit très
10 rapidement, je vois la sténotypiste, je la regarde, et je pense que les
11 interprètes auront peut-être du mal à suivre. Car il s'agit d'un sujet
12 assez compliqué, il serait peut-être bon de garder à l'esprit la rapidité
13 du débit.
14 M. GOSNELL : [interprétation] Je vais faire de mon mieux. Donc, je
15 demandais l'affichage du 02437. Page 3.
16 Q. Alors, il s'agit d'une attaque contre un endroit appelé Luzac vers la
17 mi-novembre 1991. Ceci reflète-t-il vos propos actuels, à savoir qu'il y a
18 eu des tentatives aux fins de subordonner le groupe d'Arkan, mais ils sont
19 listés de façon expresse dans les ordres de bataille menés par la JNA ?
20 R. Je veux faire attention parce que je crois que vous allez me demander
21 d'apporter un commentaire sur ma réaction initiale au document, et c'est
22 une page qui n'émane pas des autorités yougoslaves mais d'un rapport qui a
23 été déposé devant cette Chambre, soit par la Défense, soit par le bureau du
24 Procureur. Mais j'en conviens avec vous qu'il y a eu des tentatives aux
25 fins de subordonner le groupe d'Arkan pendant l'automne de l'année 1991.
26 Ces tentatives ont échoué. Mais il y a eu également des petites opérations,
27 mini-opérations, d'après les rapports militaires, où les deux ont coopéré
28 aux côtés l'un de l'autre à la satisfaction générale pour la JNA et Arkan.
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1 M. GOSNELL : [interprétation] Alors, la provenance de ce document a fait
2 l'objet d'une déposition de témoin qui en a attesté, donc je ne propose pas
3 de l'aborder avec vous. Cependant, compte tenu de ce que vous avez dit, je
4 souhaite néanmoins demander le versement au dossier de ce document.
5 M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je ne pense pas qu'il s'agit du témoin par
6 le truchement duquel il convient de verser ce document, Monsieur le
7 Président. Je ne vais pas aborder la question de l'auteur comme c'est à mon
8 confrère de le faire, mais nous avons un expert militaire qui va témoigner
9 une fois que ce sera traduit. Le témoin n'a pas vu le document auparavant
10 et ne peut pas attester des éléments qu'il contient, de quelles unités ont
11 été utilisées lors de cette attaque à Luzac. Je pense que le fondement est
12 extrêmement faible ici.
13 M. GOSNELL : [interprétation] Je vais retirer le versement au dossier de ce
14 document. Merci, Monsieur le Président.
15 P158 [comme interprété], s'il vous plaît.
16 Q. Un document que vous avez cité aujourd'hui une ou deux fois déjà. Et
17 c'est le général de division M. Biorcevic, commandant du 12e Corps, et il
18 donne des armes de poing comme un trophée de guerre à Radovan Stojicic,
19 Zivko Trajkovic, Zeljko Raznjatovic. Est-ce que vous jugez qu'il s'agit là
20 d'une autre indication précisant que Biorcevic considère que ces individus-
21 là lui sont subordonnés ?
22 R. Non.
23 Q. Est-ce que vous voulez dire que la TO ne relevait pas du droit fédéral
24 yougoslave et n'était pas subordonnée à la JNA, en tout cas lors des
25 opérations de combat pour le moins ?
26 R. Je répondais à votre question bien précise, à savoir si ce document
27 fournit des éléments précisant que Biorcevic estime que ces individus lui
28 étaient subordonnés. Rien dans ce document n'indique que ces personnes
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1 étaient subordonnées à Biorcevic. D'un autre côté, il y a la phrase : les
2 dirigeants qui ont été ceux dont les opérations ont été couronnées de
3 succès dans le cadre de la Défense territoriale dans le district serbe du
4 SBSO. D'après ce que je sais, en examinant les documents des SAO et de
5 Bosnie-Herzégovine, ce n'est pas parce que simplement -- juger utile de
6 donner un trophée de guerre à quelqu'un ne signifie pas pour autant qu'il y
7 a subordination.
8 Q. Merci. Je souhaite maintenant passer à un autre sujet complètement
9 différent, et ceci concerne l'éclatement du conflit en Croatie. A la page 2
10 423, et je cite :
11 "La notion même d'un Etat croate indépendant, dans les meilleures
12 circonstances du monde, était censée occasionner une grande inquiétude au
13 sein de la population serbe en Croatie."
14 Vous avez également dit dans votre déposition que le contexte historique
15 permettant d'expliquer cette inquiétude était le précédent d'une Croatie
16 indépendante, d'un Etat indépendant, pendant la Deuxième Guerre mondiale
17 qui avait adopté des politiques extrêmement discriminatoires à l'égard des
18 Serbes, des Rom et des Hongrois, politiques qui ont "connu un point
19 culminant au moment du génocide contre les Serbes et ces autres minorités
20 sur le territoire indépendant croate."
21 Est-ce exact ?
22 R. Alors, je pense que ceci ne reflète pas de façon exacte le consensus
23 existant parmi les universitaires concernant l'existence d'un Etat croate
24 indépendant.
25 Q. A la page 2 423, vous avez dit que Franjo Tudjman avait "trempé dans le
26 révisionnisme."
27 Pourriez-vous dire exactement de quoi il s'agit ? Comment qualifieriez-vous
28 cette notion de révisionnisme ?
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1 R. Alors, par où commencer ?
2 Q. Vous pourriez peut-être développer ce que vous avez dit lorsque vous
3 avez dit qu'il a trempé dans le révisionnisme.
4 R. Franjo Tudjman a été pendant une grande partie de sa carrière un
5 historien de profession qui a dirigé l'institut historique chargé du
6 mouvement des travailleurs. Et dès le début des années 1960, il a commencé
7 à publier des travaux qui pour l'essentiel tentaient de comprendre ou de
8 sonder ce qui s'était passé pendant cette Deuxième Guerre mondiale, cet
9 Etat indépendant croate. Il a commencé à faire valoir des idées assez
10 controversées, et malgré les politiques très désagréables, cet Etat, après
11 tout, avait été le reflet d'un véritable désir de la part de la nation
12 croate qui souhaitait avoir un Etat indépendant. Donc, il a développé ceci
13 en profondeur, et nonobstant les politiques génocidaires qu'il a tenté à ce
14 moment-là de minimiser, et dans de nombreux cas je crois qu'il l'a même
15 remis en doute, il a déclaré que : Après tout, nous devons considérer que
16 ceci est un succès étant donné que nous, les Croates, nous avons obtenu
17 notre propre Etat. Donc, il y a quelque chose qui est peut-être sauvé après
18 tout concernant cette histoire de l'indépendance de l'Etat croate.
19 Et sa thèse, qu'il a développée dans de nombreux travaux, était un
20 anathème par rapport aux Communistes au pouvoir à l'époque, et donc on l'a
21 renvoyé de son poste. Il a même été incarcéré en Croatie pendant un certain
22 temps. Mais parmi certains universitaires mineurs et parmi des Serbes en
23 Croatie, sa réputation était celle d'un révisionniste ou de quelqu'un qui a
24 nié ces événements, les crimes commis contre les Serbes en Croatie.
25 Q. Alors, vous souvenez-vous s'il y avait dit quelque chose de
26 précis pour ce qui est de nier ou de minimiser ces événements qui se sont
27 produits ? A savoir, le génocide.
28 R. Alors, pour ne parler que d'une seule chose, il faisait partie de
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1 ces universitaires croates qui, dans les années 1980 en particulier, ont
2 essayé de réviser à la baisse le nombre de Serbes qui avaient péri dans des
3 camps de concentration de Jasenovac et de le minimiser de façon importante.
4 Q. Est-ce que vous vous souvenez s'il y avait un consensus au plan
5 historique sur le nombre de victimes qui ont péri dans le camp de
6 concentration de Jasenovac ?
7 R. J'attends la fin de la traduction.
8 Les chiffres qui ont été avancés en ex-Yougoslavie dans le cadre de ce
9 débat sur l'historiographie entre les années 1970 et 1980.
10 "Historikerstreit", un différend historien avec des Serbes qui augmentaient
11 le chiffre dans des proportions très importantes et certains Croates qui,
12 par opposition, réduisaient le nombre jusqu'à moins de 60 000 à un moment
13 donné, qui réduisaient énormément ces chiffres. Et c'est pour cela que des
14 tentatives ont été menées par des universitaires plus raisonnables, plus
15 objectifs, dont le but était d'analyser à nouveau toutes ces preuves pour
16 parvenir à des chiffres plus fiables, et leur chiffres étaient sensiblement
17 plus élevés que ceux fournis par M. Tudjman.
18 Q. Et quel est ce chiffre ?
19 R. Encore une fois, je crois -- mais je ne dispose pas de toutes mes
20 sources sous les yeux. Encore une fois, en me fondant sur mes souvenirs,
21 Tudjman avait réduit le chiffre à 60 000 ou en deça de ce chiffre, qui est
22 beaucoup moins que ce qu'ont avancé ces universitaires qui étaient beaucoup
23 plus objectifs, et si on suit la logique jusqu'au bout, beaucoup moins que
24 les universitaires nationalistes serbes -- ou le chiffre que eux avaient
25 avancé.
26 Q. Ma question aurait dû être plus claire. Alors, quel est ce consensus
27 parmi les historiens, maintenant, sur le nombre de tués ?
28 R. Je crois que les meilleurs chiffres avancés ont été ceux fournis par
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1 Vladimir Zerjavic. Je ne dispose pas du chiffre exact, je ne l'ai pas à
2 l'esprit, mais je crois qu'il doit s'agir d'un chiffre qui correspond à 250
3 000 ou au-dessus.
4 Q. Et lors de votre dernière déposition ici, vous avez dit que Tudjman a
5 fait preuve d'une "rhétorique politique enflammée". Qu'est-ce que vous vous
6 vouliez dire par cela ? Qu'est-ce qu'il aurait pu dire ?
7 R. Comme je l'ai dit, les opinions de Tudjman à propos de la Deuxième
8 Guerre mondiale, et en particulier à l'égard des politiques portant sur
9 l'Etat indépendant de Croatie, à l'égard des Serbes, des Juifs et des Rom,
10 étaient des politiques très controversées dans la cadre des changements que
11 connaissait la Croatie. Donc, des propos tout à fait incendiaires et un
12 grand intérêt porté pour les symboles de l'Etat nation croate, de l'Etat
13 croate, et il affectionnait particulièrement les uniformes, les emblèmes,
14 et ceux qui avaient été portés dans la Deuxième Guerre mondiale et l'Etat
15 fantoche, l'Etat indépendant de Croatie, qui était perçu non seulement par
16 les Serbes mais par des non-nationalistes comme étant controversé et
17 provocateur. Encore une fois, ceux-ci étaient susceptibles de semer le
18 trouble parmi la population serbe et ont rendu la tâche difficile, voire
19 impossible, pour le président Tudjman de se positionner comme étant le
20 dirigeant de tous les citoyens de Croatie, quelle que soit leur
21 appartenance ethnique.
22 M. GOSNELL : [interprétation] Est-ce qu'il serait bien de faire la pause
23 maintenant ?
24 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je pensais ajouter 15 minutes à ce
25 volet d'audience et 15 minutes à l'autre. Donc, nous allons poursuivre
26 ainsi.
27 M. GOSNELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
28 Q. Alors, vous avez également dit dans votre déposition, à la page 2 423 :
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1 "La notion même d'un Etat indépendant croate était dans le meilleur
2 des cas susceptible d'occasionner une grande inquiétude."
3 Et ensuite, vous avez dit dans votre déclaration que :
4 "Davantage de Serbes auraient peut-être été disposés à accepter
5 l'idée d'un Etat indépendant croate si le HDZ prenait cette politique dans
6 un sens plus conciliateur. Encore une fois, je dois dire qu'il s'agit de
7 spéculations, parce que le HDZ a fait tout sauf cela."
8 Je me demandais s'il y a autre chose que vous pourriez ajouter,
9 hormis la rhétorique incendiaire de Franjo Tudjman et le fait de nier le
10 génocide qui est pertinent eu égard à votre réponse ?
11 R. Alors, au mois de janvier, nous avons parlé de M. Josip
12 Boljkovac, qui était le premier ministre des Affaires intérieures de la
13 République de Croatie. Cet homme est un des nombreux acteurs qui ont écrit
14 leurs mémoires sur cette période et qui, nonobstant leur participation au
15 gouvernement qui a été créé en 1990, ont noté avec regret et tristesse que
16 le HDZ était le parti au pouvoir, et le président Tudjman en particulier,
17 et que ceux-ci n'étaient pas disposés ou n'étaient pas capables d'œuvrer
18 dans le sens d'une conciliation et d'amitié avec les Serbes. Et donc, de
19 nombreux Serbes se sont détournés de cette possibilité qui consistait à
20 accepter davantage d'autonomie pour la création, voire même une
21 indépendance totale, de la Croatie.
22 Nous nous concentrons beaucoup sur la partie croate. Je crois que
23 c'est dans l'intérêt de l'objectivité de noter qu'il y avait un certain
24 nombre d'universitaires et d'intellectuels du côté serbe en Serbie et parmi
25 les Serbes de Croatie qui alimentaient les flammes de l'autre côté, si je
26 suis dire, et qui mettaient en cause également l'idée d'une coexistence
27 ethnique mutuelle sous un gouvernement dirigé par le HDZ. Mais je crois que
28 pour ce qui est de la chronologie historique, il est important de dire
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1 qu'il y avait différentes possibilités qui s'ouvraient au HDZ qu'il fallait
2 que les Serbes se sentent à l'aise en Croatie. Eh bien, ceci n'a pas été
3 exploité par le parti politique en question. Et certainement, c'est bien le
4 contraire, ils ont créé une atmosphère très hostile à l'égard des Serbes en
5 Croatie.
6 Q. Encore une fois, nous ne somme pas là pour trancher sur le bien fondé
7 des uns et des autres. Moi, ce que j'essaie de comprendre, ce sont les
8 réactions, et surtout celle de M. Hadzic, une réaction éclairée, surtout
9 étant donné que l'Accusation a affirmé de différentes façons en l'espèce
10 que c'était le but. Et vous comprenez pourquoi je pose cette question.
11 Qu'est-ce qui a fait que le conflit a éclaté - je ne veux pas parler
12 du conflit armé, je veux parler du conflit politique - en réalité, c'est le
13 désir ou le souhait de modifier le statu quo de la part du gouvernement
14 croate, de le transformer, de passer d'une république à un Etat
15 complètement indépendant ?
16 R. Alors, je souhaite éviter de répondre à cette question car je ne pense
17 pas -- et j'enseigne à mes étudiants à l'université, je leur dis qu'il
18 n'est jamais productif ou constructif de commencer à dire qui a commencé
19 quoi. Il s'agit de la désintégration de la Yougoslavie, il s'agit de
20 quelque chose qui est extrêmement complexe, et il y a beaucoup
21 d'antécédents à cette histoire. On peut revenir à l'année 1990 et essayer
22 de suivre ces événements. Le souhait de la part de la Croatie et de la
23 Slovénie d'obtenir leur indépendance, il s'agissait là de quelque chose qui
24 avait été influencé par ce qu'ils percevaient, à juste titre ou non, comme
25 une tentative de la part de la Serbie d'imposer un Etat re-centralisé de
26 l'ancien Etat fédéral yougoslave et aux fins de réexaminer la constitution
27 qui avait été établie depuis 1974 qui avait accordé une grande autonomie
28 aux six républiques de la Yougoslavie. Donc, il est très difficile de
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1 comprendre où ceci a commencé.
2 Q. Oui, je suis d'accord avec vous, et c'est juste, ce que vous dites.
3 Mais la raison pour laquelle j'ai posé la question, c'est qu'à la page 2
4 426 de votre déposition antérieure, que vous n'avez pas sous les yeux,
5 l'impression que j'en ai eu, c'est que les Serbes avaient commencé, peut-
6 être six mois avant l'adoption de la constitution, de militer en faveur
7 d'une plus grande autonomie qui a laissé l'impression d'une relation de
8 cause à effet dans la séquence des événements qui se sont déroulés par la
9 suite. Ou est-ce qu'il faut simplement dire que cela ne sert à rien
10 d'essayer de trouver une réponse à cette question ?
11 R. C'est exact. Nous pourrions revenir encore six mois en arrière et
12 trouver autre chose et aller encore plus loin six mois en arrière et nous
13 trouverions encore quelque chose, mais il fallait bien que je commence
14 quelque part.
15 Je dois dire de façon catégorique que mon rapport n'a pas l'intention de
16 faire porter la faute à quiconque dans ce que j'ai rédigé. Mon rapport
17 parle de ce que nous pouvons comprendre au sujet du processus qui s'est
18 déroulé en Croatie en se fondant sur les documents existants.
19 Q. Dans votre déposition antérieure, page 2 428, vous avez dit que le
20 référendum qui avait été organisé aux mois d'août et septembre 1990 était
21 un référendum qui avait choisi leurs propres intérêts, et c'était un
22 référendum organisé par les Serbes qui essayaient de mener le référendum.
23 Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que la raison à cela, ce n'était
24 pas parce qu'ils souhaitaient augmenter les chiffres -- ils étaient en
25 faveur d'une plus grande autonomie, mais simplement parce que le
26 gouvernement croate souhaitait arrêter quiconque entrait dans une région où
27 la police avait le pouvoir de le faire ?
28 R. Je ne suis pas d'accord pour dire que c'était la seule raison. Cela
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1 fait certainement partie d'une des raisons. Je sais que ceci a été fait en
2 partie secrètement. Mais je crois qu'il y a une sélection qui s'était faite
3 dans l'intérêt de ceux qui avaient organisé le référendum. Et si je lis
4 l'ouvrage de M. Petrovic, je comprends que personne, que ce soit M.
5 Petrovic ou quelqu'un d'autre qui ait participé à l'organisation de ce
6 référendum à l'époque du côté serbe, n'avait d'attentes et ne pensait
7 raisonnablement pas que les Croates allaient les soutenir au niveau de ce
8 référendum. En fait, c'était une question sans objet et il ne servait à
9 rien de rentrer en conflit avec les Croates. Il suffisait de montrer, chose
10 qu'ils ont faite par la suite, qu'il y avait un appui significatif pour que
11 les Serbes restent à l'intérieur de la Yougoslavie.
12 Q. Nonobstant les chiffres, est-ce que vous êtes d'accord pour dire que
13 cette position, à savoir l'appui d'une plus grande autonomie, était un
14 antidote et que la grande majorité des Serbes auraient soutenu cette plus
15 grande autonomie compte tenu des circonstances ?
16 R. Comme je l'ai dit auparavant, je crois qu'il y a une réaction en chaîne
17 ici, et je crois qu'on peut le résumer par cette question que j'ai soulevée
18 au mois de janvier : pourquoi devrais-je être une minorité dans votre pays
19 lorsque vous pourriez être une minorité dans mon pays ? Il suffit de
20 regarder les données démographiques du recensement en Croatie en 1991, ou
21 en Bosnie, pour comprendre qu'il était impossible au plan politique,
22 juridique et au niveau des données démographiques de créer des Etats
23 homogènes au plan ethnique. Une fois que l'un ou l'autre des acteurs a
24 commencé à emprunter cette voie, et surtout compte tenu de l'expérience
25 négative manipulée de part et d'autre par rapport aux événements qui
26 s'étaient déroulés pendant la deuxième guerre mondiale, c'était une
27 tragédie.
28 Q. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que l'on peut avoir un projet
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1 d'indépendance, d'autonomie, de séparation, que ce soit du côté serbe ou du
2 côté croate, que ceci ne signifie pas forcément qu'il y a discrimination
3 ethnique ?
4 R. En théorie, oui. Mais encore une fois, si chacun s'était comporté le
5 mieux du monde, à défaut d'utiliser une autre expression, avec des
6 garanties sur le plan juridique, des observateurs de la communauté
7 internationale, et dans le respect des conventions internationales sur les
8 droits humains et politiques, dans ce cas les choses auraient pu se
9 terminer tout à fait différemment. Mais nous savons que cela n'est
10 malheureusement pas le cas et que cela relève en fait de la sphère
11 universitaire que de se lancer dans des conjectures sur la question.
12 Q. La raison pour laquelle je vous ai posé la question, c'est que le sujet
13 est de savoir quel type de rhétorique convient et quel type de rhétorique
14 est destiné à encourager la discrimination. Et je vais vous poser à cet
15 égard une question précise.
16 Est-ce que vous pensez que l'amendement de la constitution croate -- je
17 crois que c'était à la période de Noël 1990, où les Serbes ont été éliminés
18 en tant que nation constitutive en Croatie, alors que les Croates
19 devenaient, par ce fait, le seul peuple reconnu en quelque sorte, avec un
20 statut ou des droits constitutionnels, est-ce que vous pensez que ceci a
21 encouragé -- ou est-ce que vous pensez que ceci était une tentative visant
22 à la discrimination contre les Serbes ?
23 R. Ce que je pense, et je crois que je l'ai dit dans mon rapport, je crois
24 que ceci renforçait, et parmi les Serbes, à donner naissance pour la
25 première fois à un sentiment très fort, à savoir qu'ils allaient être des
26 citoyens de deuxième rang en Croatie, que leurs droits seraient des droits
27 qui ne pourraient être appliqués qu'après les droits des Croates. Et je
28 crois que dans ce sens, et c'est l'avis d'un nombre important d'hommes
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1 politiques croates, je crois que l'ancien président de Croatie, Stjepan
2 Mesic, a dit la même chose, il a dit qu'il s'agissait là d'une erreur qui
3 avait été commise par les dirigeants croates à l'époque et était
4 complètement inutile. Et rien ne les empêchait de conserver la nation serbe
5 comme une nation constituante, et qu'il s'agissait là d'un des signaux qui
6 ont contribué à la dégradation des relations entre les Serbes et les
7 Croates. Je souhaite également signaler qu'un autre concept qui avait vu le
8 jour à l'époque, c'était celui de la victimisation. Et même si je comprends
9 bien qu'il y avait une inquiétude et un mécontentement de la part des
10 Serbes à l'époque parce que les Serbes n'étaient plus une nation
11 constituante dans la République de Croatie, à l'inverse, à mon sens, ce qui
12 posait un gros problème, c'est que cela avait été très exagéré, et certains
13 dirigeants serbes à l'époque en Croatie affirmaient que ceci allait mener
14 directement aux camps de concentration pour les Serbes.
15 M. GOSNELL : [interprétation] Je vois l'heure maintenant.
16 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci, Maître Gosnell.
17 Avant que nous n'ayons une pause, je souhaite voir comment les choses vont
18 évoluer et ce que nous allons pouvoir faire aujourd'hui.
19 Maître Gosnell, combien de temps vous faut-il encore pour terminer votre
20 contre-interrogatoire ?
21 M. GOSNELL : [interprétation] Je crois que j'aurais besoin d'une heure
22 encore. Je crois que cela suffit. Je crois que j'ai une heure et quart, et
23 c'est ce que j'avais prévu.
24 M. LE JUGE DELVOIE : [hors micro]
25 L'INTERPRÈTE : Le Président est hors micro.
26 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Pardonnez-moi.
27 Alors, les 15 minutes, vous les avez eues, et il reste 60 minutes, si
28 nous devons mettre de côté 30 minutes pour les questions supplémentaires.
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1 C'est ce à quoi vous vous attendez, Monsieur Demirdjian ?
2 M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je vais essayer d'être le plus rapide
3 possible. J'aurais peut-être besoin de 20 minutes.
4 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien.
5 [La Chambre de première instance se concerte]
6 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Donc, nous allons avoir une pause
7 maintenant et nous reviendrons à 13 heures. Et ensuite, nous siégerons
8 jusqu'à 14 heures 30 au maximum. Je crois que cela vous convient, Monsieur
9 Nielsen, parce que vous devez voyager.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie. Je suis très reconnaissant
11 envers vous, Monsieur le Président.
12 [Le témoin quitte la barre]
13 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est levée.
14 --- L'audience est suspendue à 12 heures 32.
15 --- L'audience est reprise à 13 heures 00.
16 [Le témoin vient à la barre]
17 M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, dans l'intérêt de ne
18 pas trop perdre du temps, je vais peut-être m'occuper de quelques questions
19 techniques.
20 A la page 62, ligne 25 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui, j'ai par
21 erreur fait référence à la page 2 343 du compte rendu d'audience. Or, la
22 référence juste est la page 2 423 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui.
23 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
24 M. GOSNELL : [interprétation] Est-ce que le document 06059 de la liste 65
25 ter pourrait être affiché à l'écran.
26 Q. Et, Monsieur Nielsen, j'espère que vous ne m'en voudrez pas trop, mais
27 je vais un peu sauter du coq-à-l'âne pour reprendre les éléments les plus
28 importants pour nous. Je voulais juste vous l'annoncer.
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1 Maintenant je vais afficher un document qui ne fait pas partie des listes
2 de pièces ni de la Défense ni de l'Accusation, mais vous l'avez mentionné,
3 me semble-t-il, trois fois. Il s'agit d'une lettre de M. Hadzic destinée au
4 commandant de la ville d'Ilok en date du 2 [comme interprété] décembre
5 1991. Et je ne me trompe pas lorsque je dis que vous n'y faites pas
6 référence dans votre rapport, n'est-ce pas ?
7 R. Oui. Maître Gosnell, avant que je ne réponde à cette question à propos
8 du document que j'ai mentionné un peu plus tôt, je voulais vous dire, parce
9 que je voudrais que tout soit bien clair pour la Chambre de première
10 instance, je voudrais donc réviser la déclaration que j'ai faite à propos
11 du nombre de victimes de la Deuxième Guerre mondiale, à Jasenovac, parce
12 que j'avais indiqué à Me Gosnell que je ne me sentais pas à l'aise pour
13 avancer comme cela, au pied levé, ces chiffres. Mais j'ai un ouvrage avec
14 moi, je l'ai consulté pendant la pause, et je voulais, par conséquent, vous
15 informer rapidement que les chiffres cités par M. Tudjman pour les morts de
16 Jasenovac, c'est un chiffre compris entre 20 000 et 30 000, donc encore
17 moins important que ce que je pensais. Et les chiffres qui sont considérés
18 plus objectifs et qui émanent d'un des historiens les plus objectifs à ce
19 sujet font référence à 80 000 à 90 000 morts pour Jasenovac. Et les
20 chiffres les plus élevés dans cette fourchette de chiffres dépassent les
21 600 000 victimes. Donc, voilà, ceci est pour vous donner une idée.
22 Je ne sais pas s'il était même nécessaire d'avoir une discussion à ce
23 sujet. Et je pense en fait que M. Tudjman avait même essayé de redonner ou
24 de rebaptiser une place pour les victimes du fascisme à Zagreb. Il voulait
25 la rebaptiser la place des Grands Croates, ce qui d'ailleurs a suscité
26 quand même moult polémiques.
27 J'ai le document du 20 [comme interprété] décembre devant moi. Il ne
28 s'agit pas du 23 décembre.
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1 Q. Je pense que le numéro exact est 06055. Je vois que mon estimé confrère
2 semble acquiescer. Alors, en attendant que ce document ne s'affiche,
3 Monsieur Nielsen, j'aimerais vous parler d'autre chose. C'est assez
4 secondaire, mais vous avez fait référence au fait qu'Arkan devenait un
5 sujet qui dérangeait tout le monde en avril 1992, et vous vous souviendrez
6 peut-être que la dernière fois que vous vous êtes trouvé ici, je vous avais
7 dit que certaines personnes avaient quand même une certaine tendance à
8 utiliser des références à Arkan afin de discréditer, notamment M. Hadzic.
9 Est-ce que vous pensez que les deux éléments ont un lien avec l'autre, et
10 qu'à un moment donné plus personne ne voulait rien avoir affaire avec Arkan
11 et qu'en fait, plus personne ne donnait son aval à Arkan ou n'approuvait
12 Arkan, mais qu'il y avait plutôt un consensus général, une sorte de
13 désapprobation, et que l'on essayait de faire le lien entre lui et M.
14 Hadzic comme une façon de discréditer M. Hadzic ?
15 R. Je suis d'accord avec vous qu'à un moment donné, de nombreuses
16 personnes, de nouveaux protagonistes, ont considéré Arkan comme une
17 présence négative et qu'il y a un certain nombre de ces protagonistes qui
18 ont essayé véritablement de le tenir à distance, de ne rien avoir affaire
19 avec lui, alors qu'auparavant ils avaient approuvé ses actes. Toutefois,
20 dans le document où figure le nom de M. Hadzic, et que ce nom de M. Hadzic
21 est mentionné avec celui de M. Raznjatovic, également connu sous le surnom
22 d'Arkan, je ne pense pas que ces documents - en tout cas, ce n'est pas
23 ainsi que je les interprète - je ne pense pas que ces documents aient été
24 préparés avec l'intention de discréditer M. Hadzic ou avec la seule
25 intention de le discréditer. Je remarque également que je ne suis pas en
26 mesure de trouver des cas où M. Hadzic savait que d'autres personnes
27 l'associaient avec M. Arkan. Je ne trouve pas de cas où M. Hadzic a pris
28 avec lui ses distances publiquement par rapport à M. Arkan ou avait parlé
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1 sur un ton désapprobateur de M. Hadzic [comme interprété].
2 Q. Oui, par exemple, si nous avons une allégation de la part de M. Milan
3 Martic ou d'un autre politicien qui essayait de discréditer M. Hadzic, la
4 façon la plus commode de le faire était d'invoquer Arkan, qui était
5 considéré comme un allié proche de M. Hadzic, ou voire un collègue ou un
6 ami qui était placé sous son autorité ?
7 R. Une fois de plus, je dirais que si vous avez une référence précise à
8 propos d'Arkan et de M. Hadzic, si vous avez, par exemple, une référence de
9 la part de M. Martic ou de quelqu'un d'autre, je pourrais tout à fait en
10 parler. Mais les références que je cite dans le chapitre relatif à Arkan
11 sont telles que -- moi, je ne considère pas que l'un de ces documents ait
12 été écrit exclusivement ou seulement afin de critiquer M. Hadzic.
13 Q. Mais le document auquel je pense est un rapport du SDB [comme
14 interprété] qui se fonde sur une source dont les initiales sont consignées
15 dans votre rapport comme VDZ. Je pense que vous avez fait référence à ce
16 document auparavant. Est-ce que vous convenez qu'à propos d'une personne
17 telle que celle-ci, il y aurait une motivation d'agir comme je l'ai indiqué
18 ?
19 R. Oui, je pense je suis d'accord avec vous que ce type de motivation
20 pourrait exister de la part de cette personne. Et c'est la raison pour
21 laquelle je pense que ce document doit être lu en prenant en considération
22 cet élément, mais il faut une fois de plus comparer cela ou le mettre en
23 parallèle avec des nombreux autres documents où une association entre M.
24 Hadzic et M. Arkan est mentionnée.
25 Q. Est-ce que nous pourrions nous intéresser à la page numéro 2 de ce
26 document, qui est le document auquel vous avez fait référence à plusieurs
27 reprises, qui est, je le répète, une lettre envoyée au commandement de la
28 ville d'Ilok, lettre qui porte la date du 23 décembre 1991. En haut de la
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1 page en anglais, voilà ce que nous lisons :
2 "J'espère que vous savez que nous n'avons pas du tout contesté la
3 présence de l'armée dans notre zone, ne serait-ce que pour un moment, et sa
4 participation à toutes les questions car nous comprenons que cela fait
5 partie d'un processus exhaustif allant de la libération à la stabilisation
6 de la zone afin de créer les conditions propices pour que nos ministères et
7 nos autorités civiles puissent assumer la responsabilité complète de leur
8 travail.
9 "Il est un fait que nous n'avons jamais été officiellement informés
10 des conditions dans lesquelles cette règle devait être établie dans une
11 partie de notre district serbe. Ce qui est véritablement entendu, c'est
12 qu'il faut faire la part de choses entre la juridiction militaire et la
13 nôtre, mais le fait est que nos efforts sont souvent limités par son
14 existence et ses conditions."
15 Alors, il semblerait -- je ne sais pas si vous êtes d'accord, mais il
16 semblerait qu'il y a certainement une possibilité d'arrière-pensée, mais
17 lorsque vous lisez ceci, est-ce que vous avez l'impression que M. Hadzic
18 exprime un certain mécontentement par le fait qu'il avait été écarté par
19 l'armée à Ilok ?
20 R. Oui, je pense qu'il y a un certain mécontentement qui est exprimé ici.
21 De façon implicite, c'est une critique des militaires lorsqu'il déclare que
22 lui et les autres qui font partie du monde civil n'ont pas été informés
23 officiellement des conditions. Donc, pour moi, cela équivaut à une critique
24 des militaires. Pourquoi est-ce que je n'ai pas été informé ? C'est cela
25 que ça signifie.
26 Q. Et au bas de la page 2, il est écrit :
27 "Nous espérons et nous attendons à ce que notre ministre des finances
28 puisse avoir la possibilité de vérifier la situation ainsi que les
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1 approvisionnements de fonds sur les comptes de transfert, nous attendons
2 votre assistance en la matière d'autant plus étant donné que l'activité
3 économique à Ilok a repris essentiellement grâce à l'engagement direct des
4 organes militaires."
5 Et puis, au milieu de la page numéro 3, et c'est le dernier passage
6 sur lequel j'attire votre attention :
7 "Il a été dit au gouvernement que la situation se stabilisait à nouveau à
8 Ilok et que vos commandements ont été compétents. Alors, bien entendu, nous
9 ne sommes pas perturbés ou gênés par ceci, mais dans un esprit de
10 coopération, nous apprécierons avoir au moins ne serait-ce que certaines
11 informations relatives aux critères conformément à tout cela a été fait, si
12 possible avec une observation indiquant que notre approbation devra être
13 donnée."
14 Est-ce que vous avez des observations à propos de ce passage ?
15 R. Lorsque vous lisez cela avec la réponse que M. Hadzic reçoit par la
16 suite du commandement militaire à Ilok, il devient absolument manifeste que
17 d'un côté les militaires et de l'autre côté M. Hadzic et son gouvernement
18 ont eu des confrontations à propos de plusieurs questions, et ce, à
19 plusieurs reprises. Ils ne voyaient pas les choses toujours de la même
20 façon, et ils y font référence, mais le message général est que nous devons
21 à partir de maintenant mieux coordonner nos efforts pour que ces propos,
22 que ces problèmes ne se reposent plus.
23 Q. Est-ce que vous diriez qu'il essaie d'utiliser une certaine forme
24 diplomatique afin de minimiser ce qui semblerait être un conflit quand même
25 avec la JNA en matière des compétences et à propos des informations à
26 propos de ce qui se passe ?
27 R. Oui, je pense que dans une certaine mesure il utilise des formules
28 diplomatiques et il parvient à ses fins, d'ailleurs. Par ailleurs, les
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1 militaires, et cela est peut-être toujours vrai des officiers militaires de
2 métier, sont parfois beaucoup moins diplomates lorsqu'ils indiquent leur
3 mécontentement à propos de la façon dont les choses se sont déroulées
4 jusqu'à ce moment dans cette lettre et deux jours plus tard.
5 Q. Ecoutez, je ne vous re-propose pas cette lettre, mais à notre avis, ce
6 que vous venez de dire correspond mieux à la réalité.
7 M. GOSNELL : [interprétation] Et nous aimerions demander le versement au
8 dossier du document 06055 de la pièce 65 ter.
9 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, cette pièce sera versée au
10 dossier.
11 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela deviendra le document D30.
12 M. GOSNELL : [interprétation]
13 Q. Monsieur Nielsen --
14 M. GOSNELL : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir le document
15 P37, qui correspond à l'onglet 171 de l'Accusation.
16 Q. Il s'agit d'une conversation, d'une discussion qui a eu lieu lors d'une
17 réunion de la présidence de la RSFY, et vous y faites référence au
18 paragraphe 206 de votre rapport et vous en parlez à la page 2 486 de votre
19 déposition.
20 Il s'agit des observations de M. Hadzic à propos de ce que vous appelez, et
21 je vous cite, "la question de l'expulsion forcée de la population civile."
22 Alors, je vais attendre que la page 68 pour la version anglaise et 92 pour
23 la version B/C/S soient affichées.
24 Alors, voilà, c'est parfait. Tout à fait au centre de la page.
25 Monsieur Nielsen, il y a quelque chose que je n'ai pas compris, et il
26 s'agit de la façon dont vous interprétez les propos de M. Hadzic. Est-ce
27 que vous pourriez préciser votre pensée et ce que d'après vous dit M.
28 Hadzic ici ?
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1 R. Ecoutez, merci de me donner la possibilité de préciser. Je suis
2 d'accord avec vous parce que je ne pense pas avoir été très clair lorsque
3 nous en avons parlé la dernière fois.
4 Alors, pour vous donner le contexte que l'on ne peut pas voir sur cette
5 page, juste avant M. Hadzic et où est son intervention, il y a un très long
6 passage au cours duquel M. Radovan Karadzic s'exprime et il parle des
7 mouvements, des déplacements de population, et - comme je l'indique au
8 paragraphe 206 - il demande : "Qui va forcer les Croates de la Vojvodine à
9 venir en Krajina. Ce sont des idées tout à fait nébuleuses qui choquent le
10 monde, bien que l'Inde et le Pakistan aient quant à eux fait ce genre des
11 choses. En Europe, à l'heure actuelle, l'on peut se demander si cela serait
12 faisable." Ce dont je doute -- alors, voilà, ça, c'est le point de départ,
13 Radovan Karadzic dit d'un côté : A certains moments au cours de l'histoire,
14 il y a eu des déplacements de population, et à l'heure actuelle le monde
15 est d'avis que cela ne doit pas être répété et, donc, que cela ne peut pas
16 être fait en Europe à l'heure actuelle.
17 Et donc, lorsque M. Hadzic intervient, sa première phrase - c'est ainsi que
18 moi je l'ai interprétée - il dit : Ceci n'est pas nébuleux. Alors, en B/C/S
19 -- est-ce que nous pourrons avoir toute la traduction pour que je puisse la
20 voir. Je vais vous -- alors, je vais lire ce qui suit, où Goran Hadzic
21 s'exprime :
22 "Il n'y a absolument rien de nébuleux à propos de ceci. Les Serbes de
23 Zagreb devraient être relocalisés, et ceux de Belgrade" -- enfin, on
24 pourrait le traduire de façon différente. "Cela, c'est absolument hors de
25 question. Cela ne peut même pas être discuté." Mais j'aimerais indiquer que
26 dans la traduction, lorsque M. Hadzic dit "et à partir de cette zone," donc
27 après "ceux de Belgrade," et puis en B/C/S il y a quelque chose, "à partir
28 de cette zone," cela ne se trouve pas dans la traduction anglaise.
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1 Donc, il fait une déclaration, mais la deuxième phrase de cette
2 déclaration est ambiguë. Mais la première phrase, pour moi, est très, très
3 claire. Puisque M. Karadzic vient de s'exprimer et il dit : "Mais c'est une
4 idée tout à fait nébuleuse," et M. Hadzic, lorsqu'il parle -- M. Karadzic
5 fait référence aux mouvement de population, et M. Hadzic lui répond en lui
6 disant : "Ceci n'est pas nébuleux."
7 Q. On vient de m'informer, Monsieur Nielsen, que le mot "de" ne
8 figure pas dans la version B/C/S.
9 R. Oui, c'est exact. Mais, en fait, ils se servent, et là je vais me
10 servir d'une expression spécialisée, ils se servent du génitif, "de ce
11 terrain", "de ce territoire". Or, comme vous le savez, ces procès-verbaux
12 souffrent souvent d'imperfection, et je présente de nouveau mes excuses à
13 la sténotypiste. Il arrive souvent, comme il nous arrive ici, que les
14 intervenants s'expriment tellement vite que quelques mots ou quelques bouts
15 de phrase soient perdus. Mais je tiens à revenir sur la première phrase de
16 la réponse de M. Hadzic, qui n'a rien d'ambiguë à mon avis. Moi, je
17 traduirais en disant "ce n'est pas nébuleux." Dans la traduction officielle
18 vers l'anglais, nous voyons : "Il n'y a rien de nébuleux à cela." Mais si
19 nous revenons à la déclaration faite par M. Karadzic, la seule chose à
20 laquelle il peut penser, c'est que cette idée de relocaliser les
21 populations, de procéder à des échanges de population -- il ne peut penser
22 qu'à ça, d'autant plus que M. Karadzic cite quelques exemples historiques.
23 Q. Donc, pour résumer, M. Karadzic, apparemment, est en train de
24 nous dire que c'est une approche plutôt douteuse, et puis M. Hadzic répond
25 : Non, non, non, ça n'a rien de douteux. C'est hors de question. On ne peut
26 pas le faire. Ce n'est pas nébuleux. Ai-je raison de l'affirmer ?
27 R. Peut-on afficher, s'il vous plaît, la page précédente en B/C/S ?
28 En anglais, nous lisons : "Pour commencer, il ne faut pas favoriser les
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1 Serbes de Krajina. Au contraire, il faut les encourager à revenir sur
2 place."
3 Et puis, un peu plus loin, nous avons la question : "Mais qui va forcer les
4 Croates de la Vojvodine de démanger à Krajina ? Ce sont des idées
5 nébuleuses." En B/C/S, "To su maglovit ideje." Et, à mon avis, quand il
6 parle de ce qu'est nébuleux ou de ce qui n'est pas nébuleux, quand M.
7 Hadzic répond que "cela n'a rien de nébuleux," je pense qu'en fait, il
8 réagit à la question rhétorique posée par M. Karadzic, qui dit, lui, "ce
9 sont des idées nébuleuses." Donc, ce que je veux vous dire, c'est d'attirer
10 votre attention et l'attention de la Chambre sur ce dialogue, et je note
11 que peut-être ça vaut la peine de demander une traduction anglaise révisée
12 pour que chacun puisse tirer ses conclusions en lisant le texte.
13 Q. Mais examinons la chose dans le contexte. Est-ce que vous êtes en train
14 de nous dire que M. Hadzic s'engage en faveur de transfert forcé des
15 populations civiles ?
16 R. D'après mon interprétation, Karadzic est en train de dire, compte tenu
17 de la situation historique et de l'opinion publique européenne, qu'il n'est
18 pas possible de procéder à des échanges forcés ou au déplacement forcés des
19 populations, et M. Hadzic se demande s'il en est vraiment ainsi. Voilà,
20 c'est mon interprétation.
21 Q. Eh bien, moi je vais vous soumettre mon interprétation, qui tient
22 compte du contexte plus large. Si nous lisons le passage dans sa totalité,
23 à commencer par "il me semble," nous y voyons que M. Karadzic regrette le
24 départ des Serbes de la Krajina vers la Serbie et ailleurs, parce que, à
25 son avis, cela affaiblit la position de la minorité serbe en Croatie. Et
26 puis, il présente ses croyances et il dit qu'il croit qu'il existe une
27 autre alternative, qui n'est pas très ragoûtante, mais qui à son avis est
28 en fait l'alternative défendue par les Croates, et il s'agit de l'échange
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1 des populations serbe et croate entre les territoires de la SBSO en Croatie
2 et le territoire de la Vojvodine en Serbie. C'est ainsi que j'interprète ce
3 mot "ils" quand il dit : "Je vous dis ceci seulement pour vous faire
4 comprendre quelle est leur façon de parler." Donc, quand il parle de "leur
5 façon de parler," quand il parle de "eux", n'êtes-vous pas d'accord qu'il
6 parle en fait de Croates ?
7 R. C'est une interprétation possible.
8 Q. Et l'interprétation que je viens de fournir n'est-elle pas en
9 concordance avec la réponse fournie par M. Hadzic, qui n'a autrement aucun
10 sens ? Il dit : "Les Serbes de Zagreb et de Belgrade devaient être
11 relocalisés." Autrement dit, il aimerait que les Serbes qui sont déjà
12 partis reviennent en Krajina serbe ?
13 R. Eh bien, pour commencer, nous sommes bien d'accord sur la plupart des
14 points dont nous avons discuté. Mais quand il s'agit de ce cas particulier,
15 je m'en tiens à mon interprétation, que j'ai déjà présentée au paragraphe
16 206 de mon rapport. J'ajoute seulement qu'il est important que tout le
17 monde lise attentivement ce passage pour en tirer ses propres conclusions.
18 Pour ce qui est de notre entretien en ce moment, eh bien, il va falloir
19 convenir que nous ne sommes pas d'accord sur ce point.
20 Q. Alors, regardons les deux premiers paragraphes sur cette page, où M.
21 Karadzic dit que :
22 "Il devrait y avoir un service centralisé qui s'occupe de la réalisation
23 des objectifs nationaux. Ce service devrait être rattaché à la Krajina. Il
24 devrait être basé sur des principes économiques." Il dit : "Je ne sais pas
25 grand-chose sur la législation et sur les lois, vous en avez peut-être déjà
26 parlé. Vous avez peut-être déjà parlé sur des différents lois qui
27 concernent l'investissement, les impôts, et cetera, mais il me semble que
28 la situation là-bas doit être meilleure pour qu'il soit superflu -- pour
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1 que les entreprises soient motivées d'y aller là-bas, parce que de toute
2 façon le prix de travail est moins élevé, et cetera."
3 Alors, ne vous semble-t-il que M. Karadzic était en train de nous dire :
4 Inventons une politique, mettons en place une politique générale qui
5 encouragera la population de revenir dans la région qui est en train d'être
6 quittée par de nombreux Serbes parce que ce n'est pas un endroit où il est
7 agréable de vivre ?
8 R. Oui, c'est le point de départ de tout ce débat qui a suivi.
9 Q. Et dans ce contexte, vous ne voulez pas repenser votre interprétation
10 des propos proférés par M. Hadzic ?
11 R. Eh bien, puisque nous parlons du contexte, je pense aussi à une longue
12 série de discussions qui ont eu lieu lors de ces réunions de la présidence
13 et au cours desquelles il a été question d'expulsion forcée ou d'échange de
14 population, des idées exprimées plus ou moins clairement. Et c'est un sujet
15 qui est abordé au cours de plusieurs réunions de la présidence. Pour moi,
16 tout cela fait partie du contexte général dans le cadre duquel j'interprète
17 ce passage particulier. Mais comme je l'ai déjà dit, moi j'ai mon
18 interprétation. Vous en avez une autre. Et il va falloir en rester là.
19 Q. M. Hadzic a-t-il participé à ces autres réunions de la présidence où il
20 a été question de ces sujets-là ?
21 R. Il a assisté à quelques réunions, mais je ne peux pas vous dire comme
22 cela, au pied levé, à combien de réunions de la présidence il a assisté.
23 Q. Mais vous n'évoquez aucune réunion à laquelle M. Hadzic aurait assisté
24 pour étayer vos arguments dans le rapport.
25 R. Oui, il est vrai que je n'évoque pas les réunions de la présidence dans
26 ce passage de mon rapport.
27 Q. J'aimerais que nous passions maintenant à un autre sujet, le sujet qui
28 est évoqué aux paragraphes 150 à 170 de votre rapport, il s'agit de la
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1 police et de la RSK.
2 M. GOSNELL : [interprétation] Nous n'avons plus besoin du document qui est
3 affiché en ce moment.
4 Q. Alors, d'après le calcul que j'ai fait, il existe exactement deux
5 documents montrant que M. Hadzic a donné des ordres à la police de la RSK.
6 Etes-vous d'accord avec le chiffre que je viens de citer ?
7 R. Vous avez sans doute raison. Ce que j'ai relevé sans aucun doute, c'est
8 qu'il existait très peu de cas de figure où M. Hadzic donne des ordres à la
9 police de la RSK. Je parle là, bien évidemment, sur la base des documents
10 disponibles à ce moment. Mais je tiens à attirer l'attention de la Chambre
11 sur le fait qu'à en croire M. Martic qui s'exprime dans cet enregistrement
12 vidéo du mois de janvier que nous avons déjà vu, le MUP de la RSK a
13 participé à l'opération liée au corridor en Bosnie-Herzégovine en été 1992,
14 et c'est quelque chose qui aurait été fait conformément aux ordres ou aux
15 instructions donnés par M. Hadzic.
16 Q. Des ordres qu'il a relayés sur la base de la décision prise par le
17 Conseil de la Défense suprême, au sein duquel M. Hadzic était membre,
18 n'est-ce pas ?
19 R. J'imagine que oui. En parlant de cette décision, je ne fais que
20 paraphraser les propos de M. Martic dans cet enregistrement vidéo.
21 Q. Et nous voyons que M. Hadzic s'occupe des dealers en devises - vous,
22 vous avez affirmé d'autre part qu'il s'agissait plutôt de dealers en
23 stupéfiants - et il s'occupe, par ailleurs, dans cet ordre de la sécurité
24 qu'il faut fournir aux installations de la radio et de la télévision -- il
25 fallait sécuriser les bâtiments de la radio et de la télévision.
26 R. Oui, je crois que vous avez raison.
27 Q. Et, par ailleurs, je dis aux fins du compte rendu d'audience que c'est
28 évoqué aux paragraphes 156 et 161 de votre rapport. Ce sont deux sujets qui
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1 ont une importance nationale ou stratégique, à savoir régir l'échange de
2 devises et sécuriser les locaux de la télévision et de la radio ?
3 R. Eh bien, comme vous venez de le dire, déjà nous ne sommes pas d'accord
4 pour commencer. Mais pour ce qui est de la sécurisation des locaux de la
5 radio et de la télévision de la RSK, je suis bien d'accord avec vous pour
6 dire que pour les autorités de la RSK, il en allait de l'importance
7 stratégique de contrôler la radio et la télévision.
8 Q. Eh bien, Monsieur Nielsen, je suis bien d'accord que nous ne sommes pas
9 d'accord sur tous les points, mais vous êtes prêt à accepter qu'il ne
10 s'agit pas de trafiquants en stupéfiants, mais plutôt de trafiquants
11 d'échanges illégaux de devises ?
12 R. Je vous ai déjà dit que c'était l'une des interprétations possibles.
13 J'ai aussi ajouté que sur la base de mon expérience et de mon étude de tous
14 les documents de police, les personnes qui procédaient à des échanges
15 illégaux de devises s'occupaient aussi d'autres activités illicites comme,
16 par exemple, les stupéfiants.
17 Q. Mais vous ne rejetez pas complètement cette interprétation suivant
18 laquelle il peut s'agir des échanges illicites, illégaux de devises ?
19 R. Non, je ne rejette pas cette interprétation.
20 Q. Et compte tenu de votre expertise dans l'analyse des activités de la
21 police, vous n'êtes pas surpris de voir que le président donne
22 personnellement des instructions opérationnelles à la police ?
23 R. Je n'ai pas trop compris la tournure de votre phrase en anglais, si
24 vous l'avez formulée à la négative ou à la positive.
25 En tout cas, compte tenu de mon expertise, ce que je peux dire, c'est
26 qu'en Bosnie-Herzégovine il arrivait que le président soit impliqué dans
27 les ordres à donner à la police. Mais dans la plupart des cas, et cela vaut
28 aussi pour la Bosnie-Herzégovine, les ordres de ce type sont relayés par le
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1 ministère compétent, le ministère de l'Intérieur. Ils ne sont pas donnés
2 par le président personnellement, à moins qu'il ne s'agisse d'une question
3 qui touche de près à la sûreté nationale, et cela, de façon urgente.
4 Q. Quoi qu'il en soit dans les autres républiques, ce n'est pas ce que le
5 document prouve vis-à-vis de M. Hadzic et de la police de la RSK, n'est-ce
6 pas ?
7 R. Comme je l'ai déjà expliqué, le document dont nous disposons montre que
8 nous n'avons que les deux ordres que vous avez déjà cités et qui ont été
9 donnés à la police par M. Hadzic, et nous avons aussi un exemplaire, que
10 vous avez aussi déjà évoqué, des instructions ou des ordres, quoi qu'il en
11 soit, donnés quant aux opérations qui ont été entamées dans le corridor en
12 1992.
13 Donc, il est certain que nous n'avons pas un grand nombre de
14 documents indiquant que M. Hadzic ait donné d'ordres directs à la police.
15 Q. Et pour ce qui est de cette opération qui a eu lieu en été 1982 [comme
16 interprété], vous êtes prêt à admettre qu'il s'agissait d'une opération
17 militaire et non pas d'une mission de police
18 typique ?
19 R. C'est exact. L'opération qui s'est déroulée dans le corridor était
20 avant tout une opération militaire, mais c'était l'un des cas de figure où
21 il y avait différents éléments d'importance stratégique, et c'est la raison
22 pour laquelle la police a été traitée au cours de cet incident comme
23 faisant partie des forces armées ou des forces de combat.
24 Q. Mais seulement si la police est directement engagée dans les combats ?
25 R. Oui. Quand la police était utilisée pour défendre ce qui est identifié
26 comme les intérêts nationaux vitaux de la république.
27 Q. Très bien. Donc, les trois ordres émis par M. Hadzic ne montrent pas
28 qu'il se mêlait des tâches traditionnelles de la police au sein de la RSK,
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1 qu'il ne s'impliquait pas au niveau du maintien de l'ordre ?
2 R. Il est vrai qu'après la création de la RSK, il n'y a pas d'indications
3 que j'ai pu trouver sur la base des documents disponibles et suivant
4 lesquelles M. Hadzic aurait participé au maintien de l'ordre ou d'autres
5 questions qui relèvent typiquement du ministère de l'Intérieur.
6 Q. Cela m'amène maintenant à passer à un autre sujet. C'est une série de
7 questions qui vous ont été posées par l'Accusation au sujet de Bapska, et
8 notamment au sujet de l'ordre du jour du gouvernement de la SBSO, à savoir
9 la prise des municipalités qui en 1941 avaient une majorité serbe, même si
10 ces municipalités n'avaient pas une majorité serbe en 1991. Et à un moment
11 donné, page de compte rendu d'audience 2 451, vous avez déclaré que vous ne
12 seriez pas surpris d'apprendre que, par exemple, le village de Bapska avait
13 une majorité serbe avant 1941.
14 Alors, on vous a montré une liste avec un recensement de la population
15 suggérant que la population de Bapska ne comprenait que quelques Serbes.
16 Vous en souvenez-vous ?
17 R. Oui.
18 Q. Alors, est-ce que l'on peut imaginer par rapport à Bapska, et nous
19 allons nous concentrer sur Bapska pour l'instant, que la compétence
20 s'étendait à Bapska et que cet endroit est encerclé de toutes parts par des
21 zones majoritairement habitées par des Serbes ?
22 R. Alors, s'il y avait une région ou une enclave, si c'est ce que vous
23 voulez dire, comme je vous l'ai dit, je ne connais pas les données
24 démographiques par appartenance ethnique des municipalités dans cette
25 région, mais si quelque chose laissait indiquer que Bapska était une
26 enclave où vivaient des personnes d'appartenance ethnique autre que serbe,
27 entourée de régions majoritairement serbes, dans ce cas cela ne me
28 surprendrait pas que certains acteurs qui ont pris part aux opérations
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1 militaires à l'automne de l'année 1991 auraient pris la décision d'inclure
2 Bapska dans la région sur laquelle ils souhaitaient exercer leur
3 compétence.
4 Q. Et vous êtes d'accord, n'est-ce pas, pour dire que ce n'était pas
5 possible pour les forces serbes d'entrer dans la partie orientale de SBSO
6 sans traverser Bapska en venant du territoire
7 serbe ?
8 R. Alors, pour pouvoir répondre honnêtement à cette question, il faudrait
9 que j'aie une carte sous les yeux. Donc, je suis disposé à vous prendre au
10 pied de la lettre, si c'est ce que vous dites, mais je n'ai pas de carte
11 mentale des différentes localités dans la tête. En tout cas, pas Bapska.
12 Q. Vous ne savez pas où se trouve Bapska ?
13 R. Je sais où se trouve Bapska au sens général du terme, mais je ne peux
14 pas vous dire exactement où se trouve Bapska et dans quelle région
15 particulière de SBSO se trouve Bapska.
16 Q. Alors, je souhaite brièvement vous poser une question à propos du fait
17 que vous vous êtes beaucoup appuyé sur le livre d'Ilija Petrovic. Est-ce
18 que vous admettez que son livre est fiable dans sa totalité ? Est-ce qu'il
19 y a des passages que vous jugez moins fiables que d'autres ? Quel est votre
20 sentiment général par rapport à cet ouvrage ?
21 R. Je crois que j'ai répondu à cette question de façon assez précise déjà.
22 Mais mon avis sur le livre : lorsqu'il décrit les événements dans la région
23 du SBSO pendant la période que j'ai analysée, et lorsque j'ai pu constater
24 que ces événements étaient décrits ailleurs dans d'autres documents qui
25 avaient été mis à ma disposition, d'après moi, ses souvenirs de ces
26 événements semblent correspondre à ces autres documents.
27 Q. Vous semblez insister sur le fait que vous admettriez les récits faits
28 par Petrovic et les informations qu'il fournit dans la mesure où ceux-ci
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1 ont été corroborés ?
2 R. Bien évidemment, je préfère toujours pouvoir comparer son récit ou les
3 récits d'autres personnes avec d'autres sources. Cependant, encore une
4 fois, en raison de l'état déplorable dans lequel se trouvaient les
5 documents, il y a un certain nombre de choses que lui décrit et que
6 d'aucuns décrivent qui ne peuvent pas êtres corroborées parce que nous ne
7 disposons pas de documents à propos des incidents précis. Et en l'absence
8 d'autres documents de ce genre et en l'absence de cas où son récit
9 contredit les documents existants, j'ai inclus sa version des événements et
10 j'ai précisé que lui en était l'auteur.
11 Q. Alors, regardons maintenant quelques exemples. Au paragraphe 21, votre
12 unique source pour dire que Goran Hadzic était le président -- pardonnez-
13 moi, il faut que je trouve la référence. Oui. L'unique source qui vous
14 permet d'affirmer que Goran Hadzic avait été nommé président du Conseil
15 national serbe le 17 mars 1991 se trouve au paragraphe 45, et Ilija
16 Petrovic affirme que c'est le cas.
17 Il y a une ou deux autres sources que vous citez dans votre note de bas de
18 page mais qui n'ont pas trait à cette affirmation; vous êtes d'accord ?
19 R. C'est exact. Les sources que j'inclus permettent de corroborer, par
20 exemple, son point de vue à l'égard du SDS à Vukovar, mais pas à l'égard de
21 son point de vue à l'égard du président ou de son rôle dans le Conseil
22 national serbe en SBSO.
23 Q. Donc, le fait qu'Ilija Petrovic identifie correctement Goran Hadzic
24 comme étant membre du Comité exécutif du SDS à Vukovar, est-ce que ceci
25 permet d'étayer votre affirmation à savoir que Goran Hadzic était le
26 président du Conseil national serbe, et cela le rend plus probable ? C'est
27 cela votre hypothèse ?
28 R. Non. Je crois que vous déformez ce que j'ai dit. Je ne suis pas en
Page 3018
1 train de porter un quelconque jugement sur le caractère exact ou non des
2 propos d'Ilija Petrovic ou de récits d'Ilija Petrovic qui identifient
3 Hadzic et la fonction particulière qu'il occupait en fonction du fait que
4 Petrovic a parlé du rôle exercé par M. Hadzic au sein du Comité exécutif du
5 SDS, mais il y a d'autres événements qu'évoque M. Petrovic et qu'il
6 explique correctement. Ça n'est pas le seul cas où M. Petrovic dit quelque
7 chose que j'ai été en mesure de corroborer ailleurs. Et dans le cas qui
8 nous intéresse, je n'ai pas d'autres éléments me permettant de le
9 corroborer.
10 Q. Et malgré le fait qu'il était président, comme cela est abordé au
11 paragraphe 22, l'adhésion de Goran Hadzic n'était pas requise au moment de
12 la déclaration sur l'autonomie parce que cette déclaration a été adoptée
13 lorsqu'il était à l'hôpital, n'est-ce pas ?
14 R. C'est exact. Il était à l'hôpital après les événements de Plitvice
15 Jezera.
16 Q. Et en ce qui concerne le paragraphe 23, je suppose que vous admettez
17 qu'il s'agissait d'une lettre fort importante émanant du Conseil national
18 serbe à l'intention de la présidence du SFRY leur demandant de l'aide. Daté
19 du 28 mai, ce document n'a pas été signé par Goran Hadzic. Il a été signé
20 par Ilija Petrovic, n'est-ce pas ?
21 R. Je ne dispose pas du document. Oui, je pense, comme je l'ai dit ici au
22 paragraphe 23, que c'est Ilija Petrovic qui écrivait pour le compte du
23 Conseil national serbe.
24 Q. Dans votre note en bas de page 48 : "Transmission de la lettre d'Ilija
25 Petrovic" ?
26 R. Oui, il écrit pour le compte de --
27 Q. Donc, Goran Hadzic est le président du Conseil national serbe et n'a
28 pas participé à la déclaration sur l'autonomie le 31 mars, et rien ne
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1 permet de dire qu'il a rédigé cette lettre le 28 mai 1991, n'est-ce pas ?
2 R. Non.
3 Q. Aviez-vous jamais eu l'impression qu'eu égard à certains documents qui
4 figurent en annexe de l'ouvrage de M. Petrovic, qu'il ait été simplement
5 assis derrière une machine à écrire et qu'il a fourni cette liste de
6 documents simplement pour donner plus d'importance à son ouvrage ?
7 R. Je crois que M. Petrovic est certainement quelqu'un qui affectionne
8 l'idée d'amplifier le rôle qu'il a joué au cours de ces événements dans
9 cette région et des différentes procédures politiques qui ont conduit à la
10 création de ce district autonome serbe. Mes analyses se sont fondées sur
11 les documents que j'ai pu examiner par moi-même et il n'y a pas eu un seul
12 cas, d'après moi, où M. Petrovic aurait fourni un document pour lequel
13 j'aurais pu penser qu'il s'agissait d'un faux, en me fondant sur d'autres
14 documents. Si c'est ça, l'idée que vous voulez transmettre.
15 Q. Et avez-vous remarqué que certains documents qui sont en annexe ne
16 figuraient pas dans les journaux officiels ?
17 R. Alors, je remarque également, compte tenu des demandes que j'ai faites
18 pour recueillir les journaux officiels du district autonome serbe, et si je
19 me souviens, ceci est entre les mains du bureau du Procureur, et cela est
20 incomplet. Et je crois que nous ne disposons pas de la collection complète
21 des journaux officiels.
22 Q. Et sur quoi vous fondez-vous pour dire que cela est incomplet ?
23 R. Je me fonde sur le fait, en tout cas, si je regarde le nombre de
24 journaux officiels que j'ai reçus moi-même, et lorsque je les ai demandés
25 du bureau du Procureur, je ne me souviens pas d'avoir reçu chaque journal
26 officiel, chaque numéro, pour avoir la collection complète.
27 Q. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que de très nombreuses notes en
28 bas de page dans votre rapport se fondent exclusivement sur l'ouvrage
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1 d'Ilija Petrovic ?
2 R. C'est exact. Dans bon nombre de cas c'est vrai, et pour les raisons que
3 j'ai déjà avancées.
4 Q. Autrement dit, que vous ne disposiez pas de suffisamment de documents ?
5 R. Oui.
6 Q. Alors, une des questions que vous n'avez pas abordée dans votre
7 rapport, alors dans le détail ou avec précision, c'est ce qui se passait au
8 niveau de la police croate précédant les événements du mois d'août 1991. Y
9 a-t-il une raison pour laquelle vous n'avez pas fait figurer ceci dans
10 votre rapport ?
11 R. Alors, pour vous donner des éléments de contexte généraux, je m'en suis
12 remis au fait qu'il y avait des tensions au sein de la police croate et
13 qu'un certain nombre de personnes, au paragraphe 8, par exemple, je fais
14 état de la police croate qui déployait des hommes dans les postes de police
15 dans des régions qui étaient majoritairement serbes. Et j'ai fait état de
16 la suspension d'un certain nombre, du renvoi d'un certain nombre d'employés
17 du poste de sécurité publique de Knin; et c'était là, les actions menées
18 par la police croate, que la police croate avait décidé de faire, et il
19 s'agissait de tentatives illégales aux fins de contrer les tentatives de la
20 part des Serbes d'exercer le pouvoir sur des régions de la République
21 croate.
22 Cependant, je n'avais pas l'intention de rédiger un passage sur le
23 département du ministère des Affaires intérieures de la République de
24 Croatie depuis le moment des élections pluripartites en Croatie jusqu'à
25 l'éclatement du conflit armé.
26 Q. En revanche, il y a un point sur lequel vous vous attardez. Par
27 exemple, c'est le fait qu'il y a Petrovic qui fait planer le spectre du HDZ
28 qui aurait tenté d'instaurer un régime analogue à l'Etat indépendant de
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1 Croatie. Je pense que vous laissez entendre que son attitude est
2 irresponsable sur ce point.
3 En avançant cette idée, vous êtes en train de vous fonder sur des analyses
4 qui ont été faites sur les changements qui ont eu lieu ou n'ont pas eu lieu
5 au sein de la police à l'époque ?
6 R. Ecoutez, si vous voulez m'aider à retrouver un passage particulier de
7 mon rapport, soit, je pourrais apporter un commentaire dessus.
8 Mais avant la pause précédente, nous avons longuement parlé de mes
9 opinions concernant les activités illégales de différents acteurs du côté
10 croate, y compris le président, et je dois dire que cela comprenait
11 certains représentants officiels des membres de la police. Je peux tout à
12 fait admettre que la police en Croatie, à savoir les membres d'appartenance
13 ethnique croate en Croatie, au sein de la police, tentaient de se servir de
14 la police pour aller dans le sens d'un Etat indépendant croate, et que la
15 police en Croatie a joué un rôle prépondérant dans la création d'un Etat
16 indépendant croate. Là où mon avis diffère de celui de M. Petrovic, et
17 encore une fois je parle de mémoire, M. Petrovic, à une occasion au moins
18 dans son livre, semble laisser entendre ou croire que les Croates, les
19 officiers de police croates, étaient en train d'établir des listes de
20 personnes qui seraient exécutées ou incarcérées du côté serbe.
21 Q. Vous conviendriez avec moi, n'est-ce pas, qu'il y avait de
22 véritables raisons d'être inquiet, compte tenu des événements qui se
23 déroulaient, et en particulier au sein de la police croate au début de
24 l'année 1991 ? Si vous étiez Serbe.
25 R. Oui, je suis d'accord pour dire qu'il y avait des raisons d'être
26 inquiet. Au vu des événements qui se déroulaient au cours de cette période,
27 et je pense que je l'ai dit très clairement un peu plus tôt aujourd'hui.
28 Q. Et vous conviendriez qu'il serait raisonnable, compte tenu de ces
Page 3022
1 circonstances, qu'un homme politique serait susceptible d'aborder ces
2 questions politiques ouvertement pour assurer la population ?
3 R. Oui. Mais cela amène la question de savoir quelles étaient les
4 solutions politiques qui auraient permis de rassurer la population.
5 Q. Bien, évidemment il est très hasardeux de parler de mouvements,
6 mais à certains moments de votre déposition, et la dernière fois vous avez
7 dit que les hommes politiques manipulaient l'opinion publique en SBSO. Vous
8 n'avez pas dit que Goran Hadzic manipulait l'opinion publique.
9 Mais conviendrez-vous avec moi qu'il y avait des hommes, et que
10 c'était tout à fait possible d'être en faveur d'un désir d'autonomie, d'une
11 plus grande indépendance, et d'avoir autorité sur la police, c'était une
12 réponse qui avait un sens par rapport à ce qui se passait au début de
13 l'année 1991 ?
14 R. Je suis d'accord pour ce qui est de la deuxième moitié de l'année 1990
15 ou début de l'année 1991, cette possibilité existait. On pouvait parler de
16 la façon dont les activités policières allaient être organisées. Il y a eu
17 beaucoup de discussions là-dessus, à savoir comment la police en
18 différentes municipalités en Croatie devrait représenter l'appartenance
19 ethnique de la population dans ces municipalités. Il y avait également, au
20 moins en tout cas, c'était possible en théorie, qu'on pouvait discuter de
21 la façon dont la police serait contrôlée et que, si c'était possible, bien
22 évidemment, et ces éventualités-là ont disparu au fil des jours, et ce,
23 rapidement, si, par exemple, Belgrade, Zagreb et les Serbes en Croatie
24 seraient d'accord avec cela. Et je suis d'accord pour dire qu'en tout cas
25 jusqu'au moment des événements de Borovo Selo, si on doit prendre Josip
26 Bojkovac au mot, c'était le ministre des Affaires intérieures en Croatie,
27 et si nous confer [phon] ses mémoires, et d'après ses mémoires M. Hadzic
28 faisait partie de ces hommes qui ont participé à ces discussions jusqu'au
Page 3023
1 moment des événements qui se sont déroulés à Borovo Selo.
2 Q. Merci beaucoup, Monsieur Nielson. Je vous remercie pour votre
3 déposition.
4 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Demirdjian, vous avez des
5 questions supplémentaires ?
6 M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Oui.
7 Nouvel interrogatoire par M. Demirdjian :
8 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur.
9 R. Bonjour.
10 Q. Je vais essayer d'être aussi bref que possible pour bien m'assurer que
11 vous puissiez prendre votre avion cet après-midi.
12 Donc, en janvier, lors du premier jour du contre-interrogatoire, mon estimé
13 confrère vous a posé une question à propos de votre accès à la base de
14 données du bureau du Procureur, et il s'agissait en fait de savoir quelle
15 méthode vous avez utilisée lors de la préparation de votre rapport.
16 M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Page 2 532 du compte rendu d'audience.
17 Q. Et j'aimerais en fait que vous expliquiez à la Chambre, pour que tout
18 soit bien complet, quelles autres sources, si tant est qu'il y en ait eu,
19 vous avez utilisées pour la préparation de votre rapport lors la phase de
20 collecte d'informations ?
21 R. Alors, dans un premier temps, je devrais véritablement remercier Me
22 Gosnell et son co-conseil pour m'avoir posé des questions qui ont
23 particulièrement stimulé mon intellect. Donc, je les en remercie.
24 Comme je vous l'ai déjà dit, je pense qu'en sus de mon accès à la
25 base de données du bureau du Procureur que j'ai utilisée lors de la
26 préparation de mon rapport, j'ai également utilisé un certain nombre de
27 livres dont j'ai donné les titres, par exemple, le livre de Nikica Baric,
28 que j'ai utilisé lors de la préparation de mon rapport.
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1 Q. Et vous êtes expert en histoire et en questions relatives à la police,
2 que diriez-vous de la façon dont vous avez utilisé les documents fournis
3 par le bureau du Procureur ? Dans quelle mesure est-ce que vous en avez été
4 tributaire, de ces documents ?
5 R. Du point de vue de la méthodologie, j'ai utilisé les documents fournis
6 par le bureau du Procureur, parce qu'à l'exception de certaines archives
7 qui ne soient pas accessibles en ex-Yougoslavie, il n'y a pas d'archives,
8 de documents auxquels j'ai pu avoir accès hormis la base de données du
9 bureau du Procureur et hormis les archives qu'elle possède. Mais j'ai déjà
10 indiqué d'ailleurs, me semble-t-il, un peu plus tôt qu'à chaque fois que
11 j'ai trouvé des documents qui me semblaient pertinents et qui faisaient
12 défaut dans la liste des documents que j'avais obtenues de la part du
13 Bureau du Procureur, j'ai toujours pris contact avec le bureau du Procureur
14 et j'ai demandé que ces documents me soient fournis s'ils étaient
15 disponibles si je ne pouvais pas moi-même les retrouver dans la base de
16 données électronique, EDS.
17 Q. Donc, au sujet de la disponibilité des documents, c'est justement une
18 question qui a été formulée par la Défense à la page
19 2 537 en janvier, une question vous a été posée. On vous avait demandé dans
20 quelle mesure vous avez confiance dans les conclusions de votre rapport, et
21 là je cite Me Gosnell qui dit "dans la mesure où vous aviez quelques
22 documents peu nombreux à l'exclusion des dépositions des témoins." Et à
23 l'époque, vous aviez indiqué que vous n'aviez pas utilisé les dépositions
24 des témoins.
25 C'est une question qui vous a été demandée de façon générale, sans pour
26 autant faire référence à des passages précis de votre rapport, et je
27 voudrais en fait que nous prenions la table des matières de votre rapport.
28 Je ne sais pas si vous en avez une copie.
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1 R. Oui.
2 Q. Alors, il s'agit du document 2837 de la liste 65 ter. La table des
3 matières de trouve à la page 2. Et je vous rappellerais qu'à la page 2 506,
4 lors de votre contre-interrogatoire, on vous a demandé si vous aviez vu et
5 consulté des documents portant sur la structure organisationnelle du MUP en
6 SBSO, et vous aviez dit que pour ce qui était de la SBSO, il y avait très,
7 très peu de documents.
8 Je souhaiterais maintenant que nous nous intéressions au chapitre II,
9 antécédents historiques et politiques. Comment est-ce que vous -- qu'est-ce
10 que vous diriez à propos de la disponibilité des sources à ce sujet ?
11 R. Comme vous le voyez dans le deuxième chapitre, il y a quatre sous-
12 chapitres, et je vous dirais en fait que je pourrais en établir une
13 classification entres les différentes SAO. L'état des documents pour la SAO
14 de la Krajina est de loin le meilleur état, c'est là où les documents sont
15 le plus complets pour ce qui est de la disponibilité des documents; suivi
16 ensuite par le nombre de documents disponibles pour la SAO de Slavonie,
17 Baranja et Srem Occidental; et je dirais que les documents les moins
18 nombreux, en fait, sont ceux qui viennent ou qui ont trait à la SAO de la
19 Slavonie occidentale.
20 Q. Et si vous faites abstraction pour un moment des questions relatives au
21 MUP, que diriez-vous de la disponibilité des sources eu égard aux
22 antécédents ou au contexte historique du conflit au début des années 1990 ?
23 R. Si vous parlez du contexte politique du conflit au début des années
24 1990, je dirais qu'il y a une bonne base de documents -- une bonne base de
25 sources, en fait, parce qu'il faut savoir qu'il y a un grand nombre de
26 discussions importantes qui ont eu lieu à Belgrade, et il y a des procès-
27 verbaux sténographiques qui ont été établis à la suite ou pendant les
28 réunions de la présidence fédérale, par exemple. Toutefois, si nous prenons
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1 en considération les réunions qui ont eu lieu - celles, par exemple, qui
2 ont eu lieu au sein de la SAO de la SBSO - nous avons très, très peu de
3 sources de documents émanant de ces réunions. Donc, là, dans ce cas-là,
4 j'ai dû surtout utiliser l'ensemble des décisions prises, et l'ouvrage de
5 M. Petrovic également.
6 Q. Alors, je vais maintenant passer en revue chacun des chapitres de votre
7 rapport, ou je vais peut-être pas les étudier l'un après l'autre, mais est-
8 ce que vous pourriez confirmer à l'intention des Juges de la Chambre que --
9 lorsque vous dites que les documents étaient peu nombreux, à quel chapitre
10 ou sous-chapitre de votre rapport pensez-vous ?
11 R. Eh bien, une fois de plus, comme l'a indiqué le conseil de la Défense,
12 j'avais préparé un rapport d'experts précédemment qui portait sur le MUP de
13 la Republika Srpska. Et lorsqu'on a l'habitude d'avoir une pléthore de
14 sources, ce qui est le cas pour la Republika Srpska, les sources
15 disponibles pour la zone de la Krajina de Croatie sont très peu nombreuses.
16 Mais il faut savoir en fait que pour ce qui est des entités créées par les
17 Serbes de Croatie, la grande majorité des sources de documents disponibles
18 relevaient de la SAO de la Krajina, par la suite du MUP de la RSK -- et
19 même durant la phase du MUP de la RSK, et je pense à Knin et à la Krajina
20 occidentale, il y a relativement très peu de documents qui existaient et
21 qui permettent à d'aucuns d'apprendre ce qui s'est passé dans la SAO de la
22 SBSO et de la Slavonie occidentale. En fait, je pense que nous en avons
23 parlé lors de l'interrogatoire principal et du contre-interrogatoire. Je
24 dirais que nous avons passé beaucoup de temps à parler de documents qui ont
25 été essentiellement obtenus dans les archives militaires serbes. Donc, cela
26 nous permet de jeter une certaine lumière. Vous avez ces quelque 370
27 documents qui nous ont été donnés qui nous donnent beaucoup plus de
28 renseignements.
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1 Q. Et pour ce qui est du dernier chapitre, à savoir la coopération entre
2 la police des entités contrôlées par les Serbes en Croatie et le MUP de la
3 Serbie, dans quelle mesure est-ce que vous -- ou plutôt, quels sont les
4 documents que vous aviez à votre disposition pour écrire ce chapitre ?
5 R. Dans ce cas de figure, ce qui nous a beaucoup aidés, c'est que de
6 nouveaux documents sont devenus disponibles récemment et envoyés depuis
7 Belgrade, qui a été plus généreuse en nous laissant accéder à ses archives.
8 Mais je dois répéter encore une fois que quand il s'agit du nombre de
9 rapports, la conclusion qui s'impose, c'est qu'il y a dû avoir d'autres
10 rapports pertinents à Belgrade qui n'ont pas été remis à ce Tribunal et que
11 ces documents doivent être nombreux.
12 Q. Très bien. Alors, je vais passer à un autre sujet. Ce matin, nous nous
13 sommes penchés pendant très longtemps sur la pièce P194.140. C'est cet
14 ordre émis par Goran Hadzic pour nommer Arkan commandant du centre
15 d'entraînement de la Défense territoriale à Erdut. Il en a été question aux
16 pages 46 et 47 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui.
17 Alors, dans une des questions qui vous ont été posées par mon estimé
18 confrère, le fait que l'origine de ce document soit inconnue a été évoqué.
19 M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Et juste pour informer les Juges de la
20 Chambre, la Défense nous a adressé une requête demandant que nous trouvions
21 l'origine de ce document et le bureau du Procureur a informé la Défense que
22 c'est un document qui a été fourni par Jovica Stanisic et sa Défense.
23 Q. Alors, vous avez déjà relevé que les autorités compétentes n'étaient
24 pas toujours très méticuleuses lors de la rédaction de différents rapports.
25 Et j'aimerais que nous nous penchions maintenant sur la pièce D30 qui vient
26 de vous être montrée par mon estimé confrère. C'est une lettre du 23
27 décembre 1991 envoyée par Goran Hadzic au commandant de la ville d'Ilok.
28 Pièce D30.
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1 Si nous regardons la première page de ce document. Pour commencer, dites-
2 nous si vous voyez une cote dans ce document ?
3 R. Non. Comme je l'ai déjà indiqué tout à l'heure, ce document ne comporte
4 pas de cote.
5 Q. Et vous saviez, n'est-ce pas, qu'il y a eu une réponse à cette lettre,
6 qu'elle n'est pas restée sans réaction.
7 R. Oui, je sais que la réponse a été envoyée le 25 décembre 1991.
8 Q. J'aimerais que nous nous penchions sur la page 3 de la version anglaise
9 du même document, et je crois qu'il nous faut la page 2 en version B/C/S.
10 Je reviens sur le paragraphe qui a été cité par mon estimé confrère et qui
11 commence par les mots suivants :
12 "Le gouvernement vient d'apprendre que l'aménagement dans la ville d'Ilok
13 se passe plutôt bien."
14 Voyez-vous ce passage ?
15 R. Oui.
16 Q. Dans la phrase suivante, on dit :
17 "Bien évidemment, ce n'est pas une question qui nous préoccupe, mais dans
18 l'esprit de coopération, nous vous serions reconnaissants de nous informer
19 des critères en fonction desquels le processus se déroule et en tenant
20 compte du fait qu'il ne faut pas compter de façon implicite sur notre
21 aval."
22 Alors, dans cette dernière phrase, Goran Hadzic, à votre avis, qu'est-ce
23 qu'il veut dire quand il dit : Il ne faut pas compter sur notre aval de
24 façon implicite ?
25 R. Eh bien, pour commencer, M. Hadzic dit qu'il faut définir de façon
26 conjointe une série de critères, qu'ils se sentent offensés de ne pas avoir
27 été consultée au sujet des critères qui seraient appliqués. Et il affirme
28 ses compétences en disant que l'armée peut bien avoir ses critères, mais
Page 3030
1 cela ne veut pas dire nécessairement que les mêmes critères seront acceptés
2 par le gouvernement de la SAO sans mot dire et qu'il sera nécessaire de
3 procéder à des négociations.
4 Q. Quelque deux paragraphes plus loin, et je pense au paragraphe qui
5 commence par les mots "Concernant le même point," Hadzic informe le
6 commandant de la ville, semble-t-il, que le gouvernement a adopté une
7 décision lors de sa séance, et que grâce à cette décision, un logement
8 temporaire a été accordé aux personnes mentionnées.
9 Alors, compte tenu de votre réponse précédente, qu'est-ce que vous pouvez
10 nous dire au sujet du processus de la prise de décision par le gouvernement
11 ?
12 R. Eh bien, compte tenu de ce que l'armée écrit dans ses rapports
13 suivants, il y a eu toute une série de cas de figure où l'armée a été
14 mécontente des décisions adoptées au niveau de la SAO, et vice-versa. Et
15 donc, pour assurer une meilleure coopération, maintenant ils essaient
16 d'entamer un dialogue direct pour résoudre ensemble tous les problèmes qui
17 se posent. Et comme je l'ai déjà mentionné, le contexte général à l'époque
18 c'est que l'armée n'arrête pas de répéter son désir de ne plus régler les
19 questions qui devraient être réglées par les autorités civiles, et du point
20 de vue de la SAO, c'est aussi dans leur intérêt d'assumer contrôle au
21 niveau des questions de ce type en montrant qu'ils sont capables de les
22 régler de façon appropriée.
23 M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Examinons maintenant le document suivant,
24 qui porte la cote 6059 de la liste 65 ter. Comme mon estimé confrère l'a
25 souligné, ce document ne figure pas sur la liste de l'Accusation, mais je
26 pense que nous sommes bien d'accord --
27 M. GOSNELL : [interprétation] Mais je ne suis pas sûr que nous soyons bien
28 d'accord. Je suis désolé si je vous parais manquer de consistance dans mes
Page 3031
1 commentaires. Mais c'est juste que moi je n'ai pas eu l'occasion d'examiner
2 ce document avec M. Nielsen.
3 M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Eh bien, c'est un document qui a été
4 mentionné trois fois par M. Nielsen lors du contre-interrogatoire de la
5 Défense ce matin. Me Gosnell a décidé de montrer la lettre envoyée par
6 Goran Hadzic au commandement de la ville, et moi je souhaite maintenant
7 vous montrer la réponse pour que les Juges de la Chambre puissent se faire
8 une idée complète de ces rapports qui prévalaient entre le gouvernement et
9 le commandement de la ville.
10 M. GOSNELL : [interprétation] Je retire mon objection, mais je me réserve
11 le droit de poser quelques questions supplémentaires.
12 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Monsieur
13 Demirdjian.
14 M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
15 Q. C'est le document 6059 de la liste 65 ter. La date c'est le 25
16 décembre. Vous voyez qu'en haut de la page à gauche, il est indiqué :
17 "Réponse à votre mémorandum." Et cette réponse est adressée à M. Hadzic.
18 Dans la version anglaise, nous pouvons voir l'introduction qui figure à la
19 page 1.
20 M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Passons à la page 2 de la version
21 anglaise, s'il vous plaît, et je pense que dans la version B/C/S il va
22 falloir regarder le bas de la page. Voilà. Merci.
23 Q. Monsieur Nielsen, est-ce que vous voyez le paragraphe qui commence par
24 les mots "Je dis avouer que je m'attendais," et cetera ?
25 R. Oui, je le vois.
26 Q. Ici, il s'agit de voir comment on va résoudre la question de la
27 relocalisation des réfugiés qui proviennent d'autres régions du pays. Et si
28 vous regardez vers le milieu de la page de la version anglaise - c'est
Page 3032
1 peut-être à la page suivante en version B/C/S - il est indiqué :
2 "Je suis déçu de devoir vous dire et vous informer que les personnes
3 auxquelles vous avez confié la résolution de la question civile la plus
4 importante en ce moment n'ont pas montré les compétences requises pour ce
5 faire. Ils n'ont montré avoir des idées appropriées et des connaissances
6 suffisantes ou, et c'est la pire chose de tout, ils n'ont pas suffisamment
7 de bonne volonté."
8 Alors, de quoi le commandant de la ville informe-t-il Goran Hadzic à ce
9 moment précis ?
10 R. Il est clair que, pour commencer, le commandant de la ville exprime sa
11 déception parce que les autorités du gouvernement au niveau de la SAO n'ont
12 pas agi assez vite pour régler cette question de relocalisation comme
13 l'armée le souhaitait. Et puis, dans la suite, il dit que les autorités
14 civiles auraient dû s'occuper de la question mais qu'elles l'ont fait d'une
15 façon extrêmement décevante. Or, il s'agit de la question civile la plus
16 importante, et les personnes chargées de la résoudre se sont montrées
17 incapables de le faire et n'ont pas agi de façon positive du point de vue
18 de l'armée.
19 Et je souligne aussi que dans l'original B/C/S il est question de manque de
20 bonne volonté.
21 Q. Donc, il faudrait avoir une traduction révisée. Mon éminent confrère
22 vous a montré une lettre de Goran Hadzic qui déclarait que le gouvernement
23 ne contestait pas la présence de l'armée. Et on peut voir le début de ce
24 paragraphe au milieu de la page :
25 "Puisque vous ne contestez pas la présence de l'armée dans la région,
26 ceci nous porte à croire que l'armée est là non pas parce qu'il s'agit
27 d'une zone de combat mais parce qu'elle accomplit des missions de combat,
28 parce que vous permettez gracieusement à l'armée d'être là."
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1 Alors, comment interprétez-vous ce commentaire, à savoir que vous
2 autorisez gracieusement l'armée à être là ? Comment comprenez-vous cela ?
3 R. C'est une déclaration troublante à mon sens, parce qu'en suite il
4 poursuit en disant que tout un chacun sait que l'armée est arrivée avant
5 que les autorités du district serbe ne soient établies. Donc, je ne sais
6 pas s'il essaie de paraître un peu facétieux ou si l'armée est arrivée
7 avant les autorités du district ou pas, mais de "gracieusement permettre
8 leur présence," à mon sens, c'est simplement un peu facétieux.
9 Q. Alors, nous avons dit que les opérations militaires faisaient partie du
10 passé. Il s'agit d'un échange de lettres à la fin du mois de décembre 1991.
11 A l'égard de tous les documents que vous avez vus, et étant donné qu'il
12 s'agit là d'un moment où il n'y a pas d'actions de combat en cours, est-ce
13 que vous êtes en mesure de nous dire quelque chose à propos de la position
14 du gouvernement à l'égard de la présence de l'armée sur le territoire à la
15 fin de l'année 1991 et au début de l'année 1992 ?
16 R. Je n'aimerais pas faire un commentaire général. Comme je l'ai dit
17 auparavant, il semble qu'il y ait un consensus sur le fait qu'il y a encore
18 des tensions assez fortes au printemps de l'année 1992. L'armée souhaite se
19 débarrasser des questions civiles tout en estimant que les efforts déployés
20 par les autorités civiles sont empreints de soupçons, et ils sont déçus à
21 ce moment-là pour ce qui est d'entreprendre ces tâches-là.
22 Q. Alors, vous avez dit avoir semblé un peu facétieux lorsque vous avez
23 parlé du colonel Belic. Alors, si nous regardons en bas de page 4 de la
24 version anglaise et la page 3 en B/C/S. En anglais, on peut lire :
25 "Monsieur le Président, pour pouvoir surmonter ces difficultés," et cetera,
26 et cetera, "je place mon commandement à votre disposition, et j'espère que
27 les conditions de vie redeviendront normales dès que possible."
28 Alors, comment comprenez-vous cet échange de correspondance entre Hadzic et
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1 Belic par rapport à ce qu'ils disent ici, en indiquant qu'ils placent leur
2 commandement à sa disposition ?
3 R. Je ne souhaite pas faire trop grand cas de ces deux lettres. Il s'agit
4 d'un échange de correspondance, même si cette correspondance est très
5 importante, puisque nous ne disposons pas de correspondance de ce type
6 directement entre le commandement d'une armée et M. Hadzic. Mais dans ce
7 cas, comme nous avons pu le constater dans de nombreux autres documents, il
8 y a un nombre très important de choses irrégulières qui se passent dans
9 cette région, et ils ont maintenant décidé - cet officier militaire et
10 Hadzic - d'entamer un dialogue écrit dans le but d'assurer une meilleure
11 coopération à l'avenir.
12 Et je pourrais apporter un commentaire d'ordre plus général.
13 Malheureusement, l'ensemble des documents militaires qui vont jusqu'au
14 printemps de l'année 1992 établissent très clairement que ces irrégularités
15 ont perduré pendant un certain nombre de mois et que rien ne permet de dire
16 clairement que quiconque, que ce soient des paramilitaires, des dirigeants
17 civils ou des dirigeants militaires ou des chefs militaires, ait été tenu
18 responsable devant un tribunal pour ces actes incontrôlés qui ont été
19 commis dans la période qui a précédé la période où la question de la
20 réinstallation a été abordée.
21 M. DEMIRDJIAN : [interprétation] J'ai encore une question avec votre
22 permission.
23 Q. Il s'agit d'un sujet tout à fait différent. Monsieur Nielsen, ce matin
24 on vous a demandé combien d'ordres avaient été donnés par Goran Hadzic à
25 l'attention du ministère de l'Intérieur. A la page 84 du compte rendu
26 d'audience d'aujourd'hui, vous avez répondu en disant :
27 "Il est exact qu'après la création du RSK, rien nous permet de comprendre,
28 d'après ce que j'ai pu voir dans le documents disponibles, que M. Hadzic
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1 ait participé à des actions visant le maintien de l'ordre ou d'autres
2 questions de routine relatives aux affaires intérieures."
3 Alors, pour ce qui est d'un expert concernant les institutions policières
4 en ex-Yougoslavie, si Goran Hadzic, en tant que président de RSK, n'a pas
5 participé lui-même au maintien de l'ordre ou à des questions routinières de
6 la police, est-ce que cela semble indiquer qu'il ne disposait pas de
7 l'autorité ou du pouvoir nécessaire pour intervenir dans de telles
8 questions ?
9 R. Dans mon rapport, je parle des pouvoirs constitutionnels dont il était
10 investi en sa qualité de président de RSK. Je crois que cela se trouve à la
11 page 17 et 18 de mon rapport. Et en ce qui concerne la possibilité qu'il
12 avait de proposer des noms de personnes qui devaient devenir membres du
13 gouvernement et d'adopter des lois dans une certaine mesure, on peut
14 également agréer du fait que dans une moindre mesure, il pouvait remettre
15 des distinctions à d'aucuns. M. Hadzic pouvait influer sur le ministère des
16 Affaires intérieures. A savoir si, oui ou non, il exerçait ce pouvoir et à
17 quelle fréquence il exerçait ce pouvoir dont il était investi en vertu de
18 la constitution, ça c'est une tout autre question.
19 Cependant, je souhaite indiquer rapidement qu'à un moment donné de mon
20 rapport, je parle de conflits entre des membres du personnel de la police
21 en RSK après sa création en février 1992 où certains acteurs en présence
22 ont essayé de faire intervenir M. Hadzic en tant que médiateur pour essayer
23 de trouver une solution à ces conflits de personnalité.
24 M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je crois que c'est l'heure. Ceci met un
25 terme à mes questions directrices [comme interprété]. Je crois que nous
26 pouvons laisser pour demain la question du versement des documents puisque
27 M. Nielsen doit partir.
28 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien.
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1 S'il n'y a pas d'autres questions à poser à M. Nielsen…
2 [La Chambre de première instance se concerte]
3 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Nielsen, ceci met un terme à
4 votre déposition. Vous pouvez partir, et nous vous remercions d'être venu
5 témoigner une nouvelle fois à La Haye. Nous vous souhaitons un bon voyage
6 de retour.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie beaucoup, Monsieur le
8 Président.
9 [Le témoin se retire]
10 M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je souhaite vous remercier, Monsieur le
11 Président, Messieurs les Juges, ainsi que les interprètes de leur patience.
12 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.
13 L'audience est levée.
14 --- L'audience est levée à 14 heures 32 et reprendra le jeudi, 7 février
15 2013, à 9 heures 00.
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