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1 Le jeudi 7 février 2013
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.
5 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour à toutes les personnes
6 présentes dans le prétoire et hors du prétoire.
7 Monsieur le Greffier d'audience, veuillez citer l'affaire, je vous prie.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges.
9 Il s'agit de l'affaire IT-04-75-T, le Procureur contre Goran Hadzic.
10 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je souhaiterais que les parties se
11 présentent, en commençant par l'Accusation.
12 M. STRINGER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs
13 les Juges. Douglas Stringer, accompagné de Sarah Clanton, de Thomas Laugel
14 et de notre stagiaire, Vros Zigic, pour l'Accusation.
15 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.
16 Qu'en est-il de la Défense.
17 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Pour la
18 Défense de Goran Hadzic, Me Zoran Zivanovic ainsi que Me Christopher
19 Gosnell. Je vous remercie.
20 M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]
21 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, nous avions
22 l'intention, et nous avons oublié de le mentionner auparavant, qu'il y a
23 deux questions préliminaires que nous souhaiterions soulever eu égard à ce
24 témoin, ou, enfin, que Mme Clanton souhaiterait soulever, avant que le
25 témoin ne soit escorté dans le prétoire.
26 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce qu'il faut que nous passions à
27 huis clos partiel pour ce faire ?
28 M. STRINGER : [interprétation] Pour la deuxième question, oui.
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1 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien. Nous allons commencer par la
2 première question préliminaire.
3 Mme CLANTON : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges.
4 J'ai fourni la note de récolement hier, et je souhaiterais indiquer que
5 lorsque j'ai examiné les comptes rendus d'audience dans l'affaire Mrksic
6 pour ce témoin, nous nous sommes rendus compte qu'il y avait une erreur
7 dans l'interprétation vers l'anglais. Il s'agit d'une réponse, en fait,
8 qu'il fait lors de sa déposition dans l'affaire Mrksic. Nous avons été à
9 même d'écouter la cassette B/C/S avec le témoin ainsi qu'avec nos
10 assistants linguistiques et nous avons effectivement confirmé qu'il y avait
11 une erreur dans l'interprétation anglaise.
12 Cela fait partie de sa déclaration en application de l'article 92 ter, sa
13 déclaration dans l'affaire Mrksic j'entends. Et, par conséquent, nous avons
14 fourni aux parties l'information en question avec ce qu'il a dit
15 effectivement en B/C/S ainsi qu'une traduction anglaise corrigée.
16 Et si vous le souhaitez, je peux vous fournir la référence exacte de la
17 page et de la ligne en question.
18 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Fort bien. Est-ce que cela a
19 maintenant été corrigé, et je pense à la déclaration 92 ter que nous avons,
20 nous ?
21 Mme CLANTON : [interprétation] Il s'agit de sa déposition. Et je pense
22 qu'il faudrait que nous prenions contact avec le Greffe pour voir comment
23 corriger la traduction ou le compte rendu d'audience officiel en anglais.
24 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] D'où ma question. Vous dites que vous
25 avez fourni cela aux parties, mais qu'en est-il des Juges ?
26 Mme CLANTON : [interprétation] Nous avons fourni cette information dans la
27 note de récolement et nous voulions vous en informer parce qu'il y a ce
28 problème avec l'anglais. Le témoin ne peut pas véritablement faire
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1 d'observations à ce sujet parce qu'il ne parle pas anglais, lui. Nous nous
2 en sommes rendus compte pendant la séance de récolement et nous avons été
3 en mesure de confirmer qu'il s'agit d'une erreur d'interprétation commise à
4 l'époque.
5 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Fort bien. Qu'en pense la Défense ?
6 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Non, nous n'avons rien à dire.
7 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Fort bien.
8 Nous allons maintenant passer à huis clos partiel.
9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos
10 partiel, Messieurs les Juges. Merci.
11 [Audience à huis clos partiel]
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20 [Audience publique]
21 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.
22 Monsieur, pourriez-vous nous dire votre nom, votre date de naissance ainsi
23 que votre appartenance ethnique.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Dragutin Berghofer.
25 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Et quelle est votre date de naissance
26 ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 29 octobre 1940. Je suis né à Osijek.
28 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Et quelle est votre appartenance
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1 ethnique ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis Croate.
3 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie. Vous êtes sur le
4 point de prononcer la déclaration solennelle. En prononçant cette
5 déclaration solennelle, les témoins s'engagent à dire la vérité. Et je dois
6 vous indiquer que vous vous exposez à une sanction pour parjure si vous
7 venez à induire en erreur le Tribunal dans le cadre de votre déposition.
8 Est-ce que je peux vous inviter maintenant à prononcer la déclaration
9 solennelle.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
11 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
12 LE TÉMOIN : DRAGUTIN BERGHOFER [Assermenté]
13 [Le témoin répond par l'interprète]
14 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.
15 Veuillez prendre place.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
17 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Clanton, je vous en prie.
18 Interrogatoire principal par Mme Clanton :
19 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Berghofer.
20 R. Bonjour.
21 Q. Est-ce que vous avez déjà témoigné ici à La Haye en mars 2006 dans
22 l'affaire contre Mile Mrksic, Veselin Sljivancanin et Miroslav Radic ?
23 R. Oui.
24 Q. Et depuis votre arrivée ici à La Haye, avez-vous écouté
25 l'enregistrement audio de votre déposition dans cette affaire ?
26 R. Oui.
27 Q. Et avez-vous reconnu cet enregistrement comme votre déposition ?
28 R. Oui.
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1 Q. Et si les mêmes questions venaient à vous être posées, les questions,
2 donc, qui vous ont été posées à l'époque, est-ce que vous fourniriez les
3 mêmes réponses ?
4 R. Oui.
5 Q. Vous avez maintenant prononcé la déclaration solennelle, est-ce que
6 vous confirmez l'exactitude et la véracité de votre déposition dans
7 l'affaire Mrksic ?
8 R. Oui.
9 Mme CLANTON : [interprétation] Messieurs les Juges, l'Accusation
10 souhaiterait demander le versement au dossier du document 04458, du
11 document 04459 et 04460 en application de la liste 65 ter, versés sous pli
12 scellé. Il s'agit des onglets 1 à 3. Et nous aimerions également demander
13 le versement au dossier des documents connexes, qui se trouvent aux onglets
14 4 à 9.
15 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Il se peut que quelque chose m'ait
16 échappé. Mais pourquoi est-ce que cela devrait être versé sous pli scellé ?
17 Mme CLANTON : [interprétation] Parce que, Monsieur le Président, lors de sa
18 déposition précédente, une partie de sa déposition avait été donnée à huis
19 clos partiel du fait de ce que le témoin disait.
20 Et nous allons fournir aux Juges une version publique expurgée de sa
21 déposition très prochainement.
22 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien. Cela sera versé au dossier.
23 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
24 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document 4460 deviendra le document
25 P106 [comme interprété], versé sous pli scellé.
26 Le document 4459 deviendra le document P1066.1065, sous pli scellé
27 toujours.
28 Le document 4458 deviendra le document P1067.1065, versé sous pli scellé.
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1 Le document 2828 deviendra le document 1068.1065.
2 Le document 2643 deviendra le document P1069.1065.
3 Le document de la liste 65 ter 2640 deviendra le document P1070.1065.
4 Le document de la liste 65 ter 2644 deviendra le document P1071.1065.
5 Le document de la liste 65 ter 3038 deviendra le document P1072.1065.
6 Et le document de la liste 65 ter 2645 deviendra le document
7 P1073.1065.
8 Je vous remercie, Monsieur le Président.
9 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.
10 Mme CLANTON : [interprétation]
11 Q. Monsieur Berghofer, je souhaiterais vous dire qu'aujourd'hui lorsque je
12 fais référence à votre déposition dans l'affaire Mrksic en 2006, j'y ferai
13 référence comme votre déposition à l'affaire Mrksic. Et je ne préciserai
14 pas à chaque fois les noms de deux autres personnes, à savoir MM.
15 Sljivancanin et Radic, tout simplement parce qu'il est beaucoup plus facile
16 de faire référence à votre déposition dans l'affaire Mrksic.
17 Je fournirai en outre les numéros de page de la traduction anglaise de
18 votre déposition. Bon, point n'est besoin que vous suiviez ce qui est
19 indiqué à propos des documents. Contentez-vous d'écouter les questions.
20 Et comme la Chambre a versé au dossier votre déposition dans l'affaire
21 Mrksic, je vous poserai quelques questions aujourd'hui à propos de certains
22 thèmes.
23 Premièrement, j'aimerais vous poser une question à propos de votre
24 déposition dans l'affaire Mrksic. Vous aviez fait référence aux autobus qui
25 vous avaient conduits à la caserne de la JNA le 20 novembre 1991.
26 Dans l'affaire Mrksic, lorsque vous avez fait votre déposition - page 5 208
27 [comme interprété] du compte rendu d'audience - vous aviez indiqué que le
28 20 novembre 1991, vous avez quitté l'hôpital de Vukovar et que vous vous
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1 trouviez dans un convoi composé de six autobus.
2 Mme CLANTON : [interprétation] Je souhaiterais demander à M. Laugel de nous
3 diffuser un extrait vidéo du document de la liste 65 ter 4986. La cote ERN
4 est la cote V000-6801. Donc, nous avons un extrait d'une vidéo beaucoup
5 plus longue qui correspond au numéro 65 ter 04986.1. Alors, pour ce qui est
6 du code horaire, il s'agit de 1 heure, 38 minutes et 50 secondes, jusqu'à 1
7 heure, 39 minutes et 39 secondes. Donc, nous ne demandons pas que le son
8 soit diffusé ou que cela soit versé au dossier pour le moment. Nous ne
9 voulons voir que les images.
10 Et je voudrais que M. Laugel montre la vidéo et fasse un arrêt sur image
11 deux secondes après le début.
12 [Diffusion de la cassette vidéo]
13 Mme CLANTON : [interprétation] Et l'arrêt sur image se fait environ à 1
14 heure, 38 minutes, 54 secondes.
15 Q. Monsieur Berghofer, est-ce que vous reconnaissez le bus que l'on voit
16 dans cet arrêt sur image ?
17 R. Oui, oui. Voilà, il s'agissait de ces autocars plutôt.
18 Q. Et lorsque vous parlez de "ces autocars", est-ce que vous pourriez nous
19 dire où vous les aviez vus précédemment ?
20 R. Ils se trouvaient devant l'hôpital.
21 Q. Est-ce que vous reconnaissez le pont que traverse en fait cet autocar ?
22 R. Oui. C'est ce qu'on appelle le pont en bois, bien qu'il n'ait pas été
23 construit en bois, mais c'est comme cela que les gens l'appelaient depuis
24 une cinquante d'années environ. Donc, le pont en bois, "drveni most".
25 Q. Et quel est le nom du fleuve qui coule sous ce pont ?
26 R. Vuka.
27 Q. Et qui se trouvait à bord de ce bus ?
28 R. Moi, je me trouvais dans le bus. Et toutes les personnes qui se
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1 trouvaient à l'hôpital, enfin, qui étaient prisonniers à l'hôpital.
2 Q. Donc, d'où venait cet autocar ?
3 R. Il venait de l'hôpital et il se dirigeait vers Belgrade.
4 Q. Est-ce qu'il y avait essentiellement des hommes et des femmes, ou est-
5 ce qu'il s'agissait d'hommes ou de femmes qui se trouvaient dans cet
6 autocar ?
7 R. A ma connaissance, il n'y avait qu'une femme dans cet autocar avec son
8 fils. Il s'agissait de Dragica Tuskan.
9 Mme CLANTON : [interprétation] J'aimerais maintenant demander à M. Laugel
10 de poursuivre la diffusion. Donc, c'est à la gauche de l'écran.
11 J'aimerais maintenant demander à M. Laugel de faire un arrêt sur image à 1
12 heure, 39 minutes et 2 secondes.
13 [Diffusion de la cassette vidéo]
14 Mme CLANTON : [interprétation]
15 Q. Monsieur Berghofer, que voyez-vous sur cet arrêt sur
16 image ?
17 R. Alors, sur la partie droite, je vois le Dr Bosanac; je pense que c'est
18 elle.
19 Q. Monsieur Berghofer, mais est-ce que vous pourriez vous concentrer sur
20 la photo qui se trouve sur la gauche de votre écran. Que voyez-vous sur la
21 partie gauche ?
22 R. Près du bus, sur la gauche - dans la photo de gauche j'entends - on a
23 l'impression que l'autocar suivant arrive, et c'est donc l'avant de
24 l'autocar qui est photographié sur la droite.
25 Q. Est-ce que vous saviez d'où venait ce deuxième autocar ?
26 R. Il y en avait un qui suivait l'autre. Moi, je me trouvais dans le
27 quatrième autocar, donc ces trois premiers autocars se trouvaient devant
28 l'autocar où je me trouvais, puis il y en avait deux autres derrière nous.
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1 Q. Monsieur Berghofer, où sont allés les autocars ?
2 R. Ecoutez, voyez-vous, là c'est le centre de la ville. Puis ensuite, nous
3 nous sommes déplacés sur 400 mètres, 500 mètres tout droit, puis ensuite
4 ils ont tourné vers la droite. C'est la route qui va vers la caserne et
5 Negoslavci.
6 Mme CLANTON : [interprétation] Je voudrais vous montrer la fin de cet
7 extrait, donc 1 heure, 39 minutes et 39 secondes.
8 Q. Une fois de plus, Monsieur Berghofer, l'écran va se diviser en deux,
9 mais j'aimerais attirer votre attention sur la gauche de l'écran.
10 R. Bien.
11 [Diffusion de la cassette vidéo]
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Les autocars se déplacent, là.
13 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
14 Mme CLANTON : [interprétation]
15 Q. Monsieur Berghofer, j'ai demandé à notre commis aux audiences de
16 remontrer cet extrait. Un petit moment, je vous prie.
17 Monsieur Berghofer, qui est l'homme, le grand homme, qui se trouve sur la
18 gauche de l'écran ?
19 R. Il s'agit du commandant Veselin Sljivancanin. Et bien sûr que je l'ai
20 reconnu lorsque j'ai été libéré, lorsque je me trouvais à Zagreb, lorsque
21 je regardais la télévision. C'est lui l'homme qui était au commandement à
22 l'hôpital de Vukovar.
23 Q. Monsieur Berghofer, où se trouve M. Sljivancanin sur la photographie ?
24 R. Ecoutez, les gens de Vukovar l'appellent le nouveau pont, mais en fait,
25 le pont en bois est beaucoup plus nouveau que celui-ci. Enfin, ce pont qui
26 se trouve au centre de la ville, il a été construit avant le pont en bois.
27 Donc, je dirais, il y a quelque 300 mètres. Ils ont 300 mètres qui séparent
28 ces deux ponts dans le centre de la ville.
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1 Q. Et, Monsieur Berghofer, est-ce que vous êtes en mesure de nous dire
2 quel est le nom du pont que l'on voit sur la gauche de l'arrêt sur image ?
3 Juste derrière M. Sljivancanin.
4 R. Ecoutez, nous, les gens de Vukovar, puisque c'était un pont en bois,
5 c'était le seul pont que nous avions franchi après la Deuxième Guerre
6 mondiale.
7 Q. Monsieur Berghofer, lorsque vous vous trouviez sur ce nouveau pont, le
8 pont que vous avez décrit où se trouve M. Sljivancanin, est-ce qu'à partir
9 de ce nouveau pont on peut voir le pont en bois lorsqu'on se trouve sur le
10 nouveau pont ?
11 R. Oui, oui. Oui, oui, bien sûr, on peut le voir. Je vous ai déjà dit, il
12 y a environ 300 mètres entre les deux ponts. Peut-être même pas 300 mètres.
13 Oui, bien sûr, vous pouvez voir une personne. Si c'est quelqu'un que vous
14 connaissez bien, vous pouvez le reconnaître. Vous ne reconnaîtrez pas
15 forcément n'importe qui, mais si c'est quelqu'un que vous connaissez bien,
16 vous le reconnaîtrez. Puis vous pouvez également communiquer avec la
17 personne et l'appeler d'un pont à l'autre.
18 Q. Et sur cet extrait vidéo, à qui parle le commandant Sljivancanin ?
19 R. Moi, personnellement, je l'ai toujours appelé "Mirovnjak", le médiateur
20 pour la paix. Parce que la télévision croate a diffusé également ceci. Et
21 Sljivancanin, il l'a pratiquement attrapé par le collet et jeté dans l'eau,
22 mais cet homme, il a véritablement fait de gros efforts. Alors, moi, bien
23 sûr, je ne parle pas anglais, mais il y avait une traduction, et on pouvait
24 voir de toute façon toute la gestuelle, et vous savez fort bien quelle fut
25 la réaction de Sljivancanin.
26 Q. Monsieur Berghofer, est-ce que vous savez pour quelle organisation
27 travaillait cette personne à qui le commandant Sljivancanin parlait ?
28 R. Je pense que c'était un Anglais. En fait, c'est ce que j'ai appris par
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1 la suite. Mais vous savez, la Croix-Rouge, elle se trouvait à Mitrovica. Et
2 puis, à Vukovar, il y a eu plusieurs organisations internationales telles
3 que l'UNTAES. Lui, c'était celui qui devait s'occuper ou protéger les
4 blessés et les civils. C'est ce que je pense.
5 Q. Monsieur Berghofer, vous nous avez dit il y a quelques moments que vous
6 aviez vu cela à la télévision lorsque vous avez été libéré de prison, et
7 que vous avez été ainsi en mesure de reconnaître la personne que vous avez
8 vue à l'hôpital comme étant Veselin Sljivancanin.
9 Est-ce que vous pensez que c'est cela que vous avez vu à la télévision
10 lorsque vous avez été libéré ?
11 R. Oui. Je l'ai vu deux ans, deux ans et demi après avoir été libéré,
12 lorsque j'ai eu un poste de télévision.
13 Mme CLANTON : [interprétation] L'Accusation souhaiterait demander le
14 versement au dossier de cet extrait, à savoir la pièce 04986.1 de la liste
15 65 ter.
16 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
17 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ce document recevra une cote.
18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote P1074. Merci.
19 Mme CLANTON : [interprétation]
20 Q. Monsieur Berghofer, j'aimerais vous poser une question maintenant sur
21 la situation à Vukovar en novembre 1991. Vers la mi-novembre 1991.
22 Mme CLANTON : [interprétation] J'aimerais demander à M. Laugel de nous
23 projeter un extrait de la liste 65 ter 04799. Ce sera le 04799.2. L'ERN est
24 V000-1131. Ceci, à l'onglet 10. Un extrait qui est d'environ une minute et
25 demie. Et le code d'arrêt pour cet extrait est à 1 heure, 24 minutes et 5
26 secondes, et va jusqu'à 1 heure, 25 minutes et 30 secondes. Et les comptes
27 rendus de la vidéo ont été téléchargés et sont disponibles sous le même
28 numéro de la liste 65 ter.
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1 [Diffusion de la cassette vidéo]
2 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
3 "… de tous les bâtiments et de tous les appartements. Je ne suis pas
4 désolé pour moi-même ni pour mon appartement, mais je suis désolé pour tous
5 les autres.
6 … et de tous les toits…
7 … sur les armes que l'on a enterrées derrière l'abri, vous savez…
8 … derrière l'abri… ils ont également enterré les uniformes…
9 … ils ont été incendiés, ils ont brûlé dans l'hôpital, tous ceux qui s'y
10 trouvaient…
11 … dites-nous où c'est.
12 Derrière l'abri, il y a une porte…
13 Attendez un instant qu'on se calme pour qu'on dise à ces gens…
14 Ils ont probablement posé des mines ?
15 Oui. Non, non.
16 Nous ne savons pas s'ils ont posé des mines ou pas.
17 Pap Domislovic [phon], vous pouvez le vérifier, est le plus grand criminel…
18 je ne sais pas s'il a été touché… dans l'hôpital.
19 Il n'est pas venu hier… mais maintenant, nous avons entendu dire qu'hier…
20 Pap Tomislav ?
21 Pap Tomislav, le plus grand criminel; Dosan, Molnar, Dane, Korac,
22 Ivan, qui m'a insultée parce que je suis une femme serbe…
23 Et qui d'autre ?
24 Pedja.
25 Allez-y. Dites tous les noms de ceux que vous connaissez.
26 Encore une fois, Korac, Ivica… tous les Molnars… et ensuite, un homme de
27 Zagorje qui a endossé des vêtements civils et est allé à l'hôpital.
28 Très bien.
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1 Il y avait davantage de civils qui nous ont tiré dessus.
2 Ils ont tous changé de vêtements. Ce garçon de 17 ans… ils ont tiré
3 de nos appartements.
4 Soyez prêt, les Oustachi vont venir ici d'Allemagne… où est l'Europe
5 aujourd'hui ?"
6 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
7 Mme CLANTON : [interprétation]
8 Q. Monsieur Berghofer, dans quelle ville cela est-il filmé ?
9 R. C'est au pont que nous appelons le nouveau pont, Novi Most, ou l'hôtel
10 grand, qui est juste devant le pont.
11 Q. Et sans donner les noms, pourriez-vous me dire si vous reconnaissez les
12 femmes qui apparaissent dans cet extrait vidéo ?
13 R. Eh bien, je les connaissais toutes deux, et je n'ai jamais eu de
14 difficultés avec elles. En fait, je crois que nous conversions avec la dame
15 blonde. Nous nous saluions et -- en qualité d'artisan, j'avais des contacts
16 avec elle. Mais disons que je les connais toutes les deux.
17 Q. Et de quelle appartenance ethnique sont-elles ?
18 R. La dame blonde vient de dire qu'elle est Orthodoxe et d'appartenance
19 serbe.
20 Q. Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre à qui elles s'adressent ?
21 R. Il s'agit de la Défense territoriale de Vukovar. Elles se relataient
22 qui elles avaient vu, ce qui fait que, de ce côté, ces réservistes ont
23 commencé à parler de Tomislav Pap comme étant le frère de cet autre homme.
24 Cette autre personne mentionnée, Molnar, ensuite Ivica, qui a été mentionné
25 également, et Dosen. Ce sont toutes des personnes locales, des réservistes
26 de Vukovar, qui connaissaient ces autres hommes que les femmes ont cités et
27 dont elles ont donné les noms.
28 Q. Monsieur Berghofer, les hommes mentionnés par ces femmes et les noms
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1 que vous venez de mentionner, Tomislav Pap, Dosen, Molnar, de quelle
2 appartenance ethnique étaient-ils ?
3 R. Pour autant que je le sache, les Dosen étaient des Croates. Molnar, je
4 peux également affirmer qu'il est Croate. Et sans doute Tomislav Pap
5 l'était également, étant donné son nom, même que ce ne peut être une
6 garantie car il y a des noms qui sont tant orthodoxes que croates. Mais je
7 présume, puisqu'il était l'aide du Dr Bosanac, qu'il était Croate.
8 Q. Monsieur Berghofer, qu'est-il arrivé à Tomislav Pap ?
9 R. J'ai rencontré Tomislav Pap dans le hangar à Ovcara.
10 Q. L'avez-vous jamais revu après le 20 novembre 1991 ?
11 R. Non, plus jamais.
12 Mme CLANTON : [interprétation] Nous souhaitons verser le document 04799.2
13 de la liste 65 ter au dossier.
14 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
15 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le greffier m'indique qu'il y a déjà
16 une transcription anglaise pour cet extrait. Pas de B/C/S. Si ce n'est pas
17 un problème pour la Défense --
18 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Non.
19 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. Versé et reçoit une cote.
20 M. LE GREFFIER : [interprétation] Et reçoit la cote P1075. Merci.
21 Mme CLANTON : [interprétation] Il y a une transcription B/C/S. Nous nous
22 assurerons que ce soit téléchargé et peut-être joint à la transcription
23 anglaise.
24 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
25 Mme CLANTON : [interprétation]
26 Q. Monsieur Berghofer, j'aimerais passer à un sujet différent. Je voudrais
27 vous poser une question sur la connaissance que vous avez des installations
28 que vous avez identifiées comme étant Velepromet dans l'affaire Mrksic. On
Page 3053
1 vous a montré des vues aériennes, il s'agit de la page du compte rendu 5
2 309 de Mrksic, et vous nous avez dit que vous avez été emmené brièvement à
3 Velepromet le 20 novembre 1991, et le 21 novembre 1991 également.
4 La question que je voudrais vous poser est : aviez-vous entendu parler de
5 ce lieu nommé Velepromet avant ces dates ?
6 R. Mais bien sûr. J'étais voisin en quelque sorte. J'habitais à quelque
7 500 mètres de Velepromet.
8 Q. Pourrait-on donc dire que quand vous êtes arrivé le 20 novembre et le
9 21 novembre 1991, cet endroit vous était connu ?
10 R. Oui.
11 Mme CLANTON : [interprétation] Je demanderais à M. Laugel maintenant de
12 nous projeter le clip de liste 65 ter 04798.3. L'ERN est V000-1130. Il
13 s'agit de l'onglet 11.
14 C'est un extrait de 40 secondes, et le code principal est de 36 minutes, 54
15 secondes, à 37 minutes, 28 secondes. Nous ne demandons pas que le son soit
16 également utilisé. Nous aimerions tout simplement le projeter, et ce, pour
17 les images.
18 Si M. Laugel pouvait nous le projeter et ensuite faire un arrêt sur image à
19 37 minutes et 5 secondes.
20 [Diffusion de la cassette vidéo]
21 Q. Monsieur Berghofer, voyez-vous la dame que l'on voit sur cette image?
22 R. Oui, c'est une habitante de Vukovar. La mère de Zvonko Ilis [phon] que
23 j'ai rencontrée à Ovcara et qui a été par la suite tuée.
24 Mme CLANTON : [interprétation] J'aimerais demander à M. Laugel de nous
25 projeter un peu plus de cette vidéo et de faire une pause.
26 [Diffusion de la cassette vidéo]
27 Q. Monsieur Berghofer, voyez-vous qui que ce soit sur cette image que vous
28 reconnaîtriez ?
Page 3054
1 R. L'homme au milieu est Bratso, Wilhelm. A droite, l'homme à la
2 moustache, Toje [phon] Plajner.
3 Q. Cet homme à 37:08 est la personne qui est la deuxième à droite ? C'est
4 celui-ci ?
5 R. Le deuxième homme à droite. A droite, il s'agit d'Ostojic. A gauche,
6 également un ancien habitant de Vukovar, mais je ne me souviens plus de son
7 patronyme.
8 Q. Monsieur Berghofer, celui que vous avez identifié à la moustache,
9 pourriez-vous nous dire son nom à nouveau pour le compte rendu ?
10 R. Plajner. Il était avec moi à Mitrovica. Il était chargé de la salle à
11 Sremska Mitrovica. Il était de Mitnica.
12 Q. Quand vous dites qu'il était chargé de la pièce, est-ce que cela veut
13 dire qu'il était l'un des gardes, l'un des soldats ou l'un des prisonniers
14 ?
15 R. Il était l'un des prisonniers.
16 Mme CLANTON : [interprétation] J'aimerais que M. Laugel nous passe cet
17 extrait jusqu'au bout.
18 [Diffusion de la cassette vidéo]
19 Mme CLANTON : [interprétation]
20 Q. Monsieur Berghofer, reconnaissez-vous l'endroit où cette vidéo a été
21 filmée ?
22 R. A Velepromet, à droite quand on entre dans l'enceinte. C'était un
23 entrepôt, et il y avait environ 15 de ces entrepôts. C'étaient des
24 conteneurs, en quelque sorte.
25 Mme CLANTON : [interprétation] Nous aimerions verser le document 04798.3 de
26 la liste 65 ter au dossier.
27 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ce document sera versé.
28 M. LE GREFFIER : [interprétation] Et recevra la cote P1076. Merci.
Page 3055
1 Mme CLANTON : [interprétation]
2 Q. J'aimerais quitter le sujet maintenant de Velepromet et passer à un
3 autre thème.
4 J'aimerais vous poser quelques petites questions sur les personnes que vous
5 avez vues dans le hangar à Ovcara le 20 novembre 1991.
6 Tout d'abord, j'aimerais vous poser des questions sur le document, et je
7 demanderais au responsable d'afficher le document 02640.1. Et j'aimerais
8 également qu'il vous remette une copie imprimée.
9 Monsieur Berghofer, reconnaissez-vous la cursive sur ce document ?
10 R. Oui.
11 Q. Et de qui est cette écriture ?
12 R. Pour autant que je sache, mon écriture.
13 Q. Monsieur Berghofer, si vous voulez bien regarder en haut de la page et,
14 encore une fois, vers le milieu à droite, et dites-moi si vous reconnaissez
15 la signature sur cette page.
16 R. Oui. C'est ma signature.
17 Q. Monsieur Berghofer, dans l'affaire Mrksic, vous avez témoigné d'une
18 liste analogue. Il s'agit du compte rendu à la page
19 5 301 à 5 303. Et j'aimerais vous demander si vous pouvez confirmer que les
20 noms qui se trouvent à gauche, numérotés de 1 à 30, sont les noms que vous
21 avez fournis lors de votre témoignage dans l'affaire Mrksic ?
22 R. Oui.
23 Q. Et à droite, il y a des noms supplémentaires de votre main. Pourriez-
24 vous nous dire quand vous avez vu ces personnes qui sont donc énumérées à
25 droite ?
26 R. Je les ai vues à Ovcara. Certains d'entre eux étaient mes voisins et
27 d'autres étaient mes amis et également mes collègues. Il y en a sans doute
28 50 de plus, mais je n'ai pas pu me souvenir de tous les patronymes.
Page 3056
1 Q. Monsieur Berghofer, quand avez-vous ajouté ces noms sur cette liste ?
2 R. Ceux qui se trouvent à droite ?
3 Q. Oui, ceux qui se trouvent à droite.
4 R. Ce matin.
5 Q. Et quand vous avez ajouté ces noms énumérés, est-ce que vous l'avez
6 fait de mémoire ?
7 R. Oui.
8 Mme CLANTON : [interprétation] Monsieur le Président, nous aimerions verser
9 le document 02640.1, nous aimerions le verser au dossier.
10 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Versé et reçoit un cote.
11 M. LE GREFFIER : [interprétation] Et reçoit la cote 1077.
12 Mme CLANTON : [interprétation]
13 Q. Monsieur Berghofer, j'aimerais passer à un autre sujet et vous poser
14 des questions sur votre détention. Vous avez déjà déposé dans l'affaire
15 Mrksic, donc nous aimerions tout simplement vous poser quelques questions
16 sur votre emprisonnement à Sremska Mitrovica.
17 Quand y êtes-vous arrivé ?
18 R. Le 22 novembre 1991.
19 Q. Et ce jour-là, d'où étiez-vous venu ?
20 R. Des casernes de Vukovar.
21 Q. Et comment êtes-vous arrivé des casernes de Vukovar à Sremska Mitrovica
22 ?
23 R. En autocar Cazmatrans. Si vous me posez la question de l'itinéraire des
24 casernes à Sremska Mitrovica, il s'agissait des autocars rouges avec les
25 immatriculations de Bjelovar. Et il s'agissait d'autocars Cazmatrans, des
26 autocars longs.
27 Q. Et combien de personnes environ se trouvaient dans cet autocar avec
28 vous ?
Page 3057
1 R. Dix-sept ou 18 environ, pour autant que je m'en souvienne. Le Dr Sadika
2 est monté dans l'autocar à Negoslavci. Il y avait une autre dame de quelque
3 45 ans, et puis -- ces deux femmes. Je ne me souviens pas de la troisième,
4 mais il y avait trois femmes.
5 Q. Monsieur Berghofer, vous avez dit que quelqu'un est monté à Negoslavci.
6 Etait-ce là le seul arrêt de cet autocar ?
7 R. Oui. Cela a été le seul lieu où l'autocar s'est arrêté, à Negoslavci.
8 Le Dr Sadika et Slobodan Nikolic sont montés à bord.
9 Q. Et tous les passagers qui se trouvaient à bord de l'autocar étaient des
10 civils ?
11 R. Tous.
12 Q. Y avait-il d'autres personnes dans l'autocar qui n'étaient pas des
13 civils ?
14 R. Non. La personne qui était chargée du voyage et Djuro, que je
15 connaissais bien et qui était le chauffeur, et une autre personne qui
16 portait un costume, pas forcément militaire, qui était de couleur olive
17 clair. Je parle de ce dernier, c'est lui qui était chargé de ce voyage.
18 Q. Monsieur Berghofer, avez-vous eu l'impression de pouvoir descendre à
19 quelque moment que ce soit de cet autocar avant d'arriver à Sremska
20 Mitrovica ?
21 R. Il n'y avait pas de possibilité quelle qu'elle soit de sortir de
22 l'autocar.
23 Q. Dans l'affaire Mrksic, vous avez décrit aux Juges de la Chambre la
24 descente de l'autocar et de passer par une haie d'hommes. Il s'agit du
25 compte rendu, page 5 379.
26 Est-ce que vous avez vu qui que ce soit avant de sortir de l'autocar, si
27 vous avez vu quelqu'un à Sremska Mitrovica qui venait de Vukovar ou des
28 villages avoisinants de Vukovar ?
Page 3058
1 R. Pour autant que je m'en souvienne, à côté de Sremska Mitrovica il y
2 avait une école ou un gymnase. J'ai vu bon nombre de nos femmes qui s'y
3 trouvaient, et il y avait parmi elles Dusko Ostojic. Ils étaient à
4 l'extérieur autour de ce gymnase.
5 Q. Monsieur Berghofer, pour préciser pour le compte rendu d'audience, est-
6 ce que Dusko Ostojic est un homme ou une femme ?
7 R. Un homme. Dusko Ostojic. Le père de l'homme que j'ai reconnu dans le
8 hangar à Vukovar qui était debout à droite et qui portait des lunettes.
9 Q. Et quel était l'âge environ de Dusko Ostojic à l'époque ?
10 R. Il avait sans doute 65 ans ou 66 ans.
11 Q. Et comme je l'ai dit tout à l'heure, vous avez donc déposé concernant
12 la haie et les sévices et le passage à tabac. J'aimerais que vous décriviez
13 les sévices et les blessures que vous avez subis le 22 novembre 1991.
14 R. Je ne crois pas qu'il sera possible de le décrire ainsi, mais je vous
15 dirais la chose suivante : c'était horrible, horrible, horrible.
16 Q. Avez-vous été blessé lors de ce passage à tabac ?
17 R. Eh bien, il m'est difficile de marcher jusqu'aujourd'hui. Thrombose.
18 Mais j'étais le seul. Il n'y avait pas juste un homme qui nous battait. Ils
19 nous battaient tous. Mais il y en avait un, Dusko, il était extrêmement
20 pugnace dans ces sévices. On ne pourrait même pas le comparer à un lion. Il
21 nous rouait de coups encore plus fort.
22 Q. Et après ce passage à tabac, avez-vous été traité pour vos blessures ?
23 R. Eh bien, il y avait Gajic qui était en train de poser des bandages sur
24 ma personne. Et j'étais complètement tuméfié, comme si j'avais été bronzé à
25 Hawaii. J'ai été nu pied pendant quatre ou cinq jours. Mes genoux ne sont
26 plus bons. Je ne sais lire un journal et je ne peux pas regarder des films
27 sur la guerre. C'est tout. Désolé.
28 Q. Cette personne nommé Gajic, qui était-il ?
Page 3059
1 R. C'était un ami de Mitnica. Il était également l'un des défenseurs de
2 Vukovar.
3 Q. Monsieur Berghofer, vous avez décrit dans l'affaire Mrksic le fait
4 qu'un homme, Soljic, a été tué. Il s'agit du compte rendu
5 5 380 et 5 474. Puis-je vous demander comment Soljic a-t-il été tué ?
6 R. Lorsque nous sommes arrivés sur le terrain de handball, il nous a fallu
7 enlever nos vêtements. Auparavant, nous avions été roués de coups alors que
8 nous passions par la Dom et ils nous ont forcés à nous déshabiller
9 complètement. Ils ont continué à nous battre, particulièrement Dusko qui
10 nous battait de façon sauvage, et il frappait les hommes de façon très
11 dure, sans doute, car ils ne pouvaient se relever. Par exemple, moi, je me
12 suis évanoui à plusieurs reprises, mais je reprenais conscience.
13 Mais cet homme, Niko Soljic, n'a pas été pris de panique du tout. Mais il y
14 avait un homme qui se moquait de nous comme Dusko, et il y avait un autre
15 homme qui a dit à Dusko : Comment peux-tu les traiter ainsi ? Et ensuite,
16 ils m'ont enlevé mes chaussures. Ce qui fait que les quatre mois et demi
17 que j'ai passés à Sremska Mitrovica, j'étais pieds nus.
18 Q. Alors, cette personne qui est décédée, vous étiez à quelle distance de
19 lui, Niko Soljic ?
20 R. Il était juste à côté de moi.
21 Q. Et vous avez dit que vous ainsi que d'autres personnes, vous vous êtes
22 évanouis suite aux passages à tabac. Comment avez-vous appris que Soljic
23 était mort et non pas simplement qu'il avait perdu connaissance ?
24 R. Je me levais entre les passages à tabac. Et je souhaite signaler que
25 les personnes qui se trouvaient à droite n'ont pas été frappées autant que
26 nous qui étions de l'autre côté. Comme celui qui m'a attaqué. Et on m'a
27 porté, mais il y avait cet autre homme qui ne s'est jamais levé. Donc, il a
28 gelé sur place. C'est pour ça que Dusko a dit : Ecoutez, ce type a beaucoup
Page 3060
1 de glace à manger.
2 Q. Monsieur Berghofer, est-ce que quelqu'un à la prison vous a-t-il jamais
3 parlé du fait que M. Soljic avait été tué ?
4 R. Non, pas avec moi.
5 Q. Avez-vous jamais entendu dire qu'il y a des gens qui ont parlé du
6 meurtre de M. Soljic ?
7 R. Je ne sais pas. Je sais qu'il y avait ce jeune homme, Ularik, un des
8 mes voisins, qui a donné une déclaration. Ils avaient un lien de parenté
9 quelconque, et lui a fait une déclaration.
10 Q. Et lorsque vous dites qu'il a fait une déclaration, qu'est-ce qu'on lui
11 a demandé de faire ?
12 R. Eh bien, vous savez comment les choses se passent. Il est tombé, il est
13 mort. Je ne sais pas exactement quel était le libellé de tout ceci que le
14 jeune a signé là-bas. Je ne sais pas ce qu'ils lui ont demandé. Je sais
15 qu'ils l'ont emmené une fois pour qu'il donne quelque chose comme une
16 déclaration.
17 Q. Lorsque vous dites "le jeune type", vous voulez parler de qui ?
18 R. Eh bien, il y avait ce petit jeune dans la même pièce que celle où je
19 me trouvais. C'était une pièce qui faisait 3 mètres sur 3. Il avait environ
20 16 ans. C'est pour ça je parle de ce petit jeune. Il vivait à Slavija, dans
21 ce bâtiment.
22 Q. Pour préciser, quel est le nom de famille de la personne que vous
23 appelez le petit jeune ?
24 R. Ularik est son nom de famille.
25 Q. Et vous avez dit qu'Ularik a été emmené et qu'il y a un document qu'il
26 a signé, qu'il y avait une déclaration. Pouvez-vous nous dire de quoi il
27 s'agissait ?
28 R. Eh bien, rien de plus que cela. Ça n'est pas qu'il en ait parlé. Ça
Page 3061
1 n'est pas que j'aie écouté attentivement. Je n'ai pas vraiment eu
2 l'occasion d'écouter attentivement parce que nous étions 152 ou 154 dans
3 cette pièce.
4 Q. Lorsqu'il a été emmené - je sais que vous ne connaissez pas tous les
5 détails parce que la pièce était très encombrée - mais quand ce Ularik a
6 été emmené, ce petit jeune, pour faire une déclaration, sa déclaration
7 portait sur quel incident ?
8 R. D'abord, la première question était : qui le connaissait. Et ensuite,
9 le petit jeune a dit qu'ils avaient un lien de parenté ou quelqu'un était
10 le parrain de quelqu'un d'autre ou la marraine, et puis je suppose qu'il
11 s'est rendu dans son bureau.
12 Q. Monsieur Berghofer, quand vous dites que la première question était qui
13 le connaissait, de qui voulez-vous parler lorsque vous dites qui "le
14 connaissait" ?
15 R. Le feu Soljic.
16 Q. Et pour préciser ce que vous venez de dire : confirmez-vous que vous
17 nous avez dit que la question a été posée de savoir qui avait un lien de
18 parenté avec le feu Niko Soljic, et c'est la raison pour laquelle cette
19 personne dont vous avez donné le nom a fait une déclaration, cet Ularik ?
20 R. Oui, c'est exact.
21 Q. Monsieur Berghofer, il y a quelques instants vous avez décrit la pièce
22 dans laquelle vous vous êtes trouvé. Vous avez dit que c'était la pièce 3-
23 3. Pourriez-vous nous donner la taille de la pièce et le nombre des
24 personnes qui ont été détenues dans cette pièce ?
25 R. Je sais qu'il y avait 154 ou 152 personnes. Nous ne savions jamais
26 exactement combien nous étions. Et tous les jours, ils venaient compter le
27 nombre de personnes qu'il y avait. Ils nous demandaient de passer d'un côté
28 et ensuite de l'autre, ensuite ils comptaient à nouveau. Et cette pièce
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1 était, disons, 12, 13 mètres sur 5,5 ou sur 6 mètres. C'est difficile à
2 dire. C'était une grande pièce. Nous y dormions, et, personnellement, je ne
3 pouvais pas me reposer sur le dos, et les personnes à côté de moi non plus.
4 Nous étions entassés comme des sardines.
5 Q. Monsieur Berghofer, combien de fois avez-vous pu prendre une douche à
6 Sremska Mitrovica ?
7 R. Pardonnez-moi. De quoi voulez-vous parler, de "douche" ?
8 Il y avait de l'eau, ça, je dois le dire. Il y avait le chauffage central.
9 Je dois dire que Sremska Mitrovica était vide, pour ce qui est de ce camp
10 de prisonniers, comme vous voulez l'appeler. Et ensuite, une fois seulement
11 je suis allé prendre une douche, lorsque je suis allé dans cette pièce qui
12 faisait 2 mètres sur 1. Mais ça, c'était 45 jours plus tard.
13 Q. Monsieur Berghofer, si vous vous en souvenez, pourriez-vous donner les
14 noms de certaines personnes qui étaient avec vous aux Juges de la Chambre ?
15 R. Eh bien, je le peux. Il y avait ce Plajner. Il y avait beaucoup de
16 personnes. Buljan, Zeljko, il était là.
17 Q. Monsieur Berghofer, y avait-il quelqu'un que vous avez vu à Ovcara et
18 qui était à Sremska Mitrovica ?
19 R. Dans cette pièce, oui. Il y avait Cakalic, Guncevic, et il y avait moi-
20 même.
21 Q. Y avait-il des femmes et des enfants dans cette pièce ?
22 R. Non, non, non. Pas dans notre pièce, non.
23 Q. Y avait-il des femmes et des enfants dans une autre pièce ?
24 R. Oui. Pardonnez-moi. Il y avait ce jeune homme dans la pièce 3 sur 3. Il
25 avait environ 12 ans. Il était là avec son père. Mais ils souhaitaient le
26 renvoyer à la maison, mais il ne voulait pas repartir sans son père. Il y
27 avait des femmes qui étaient là, parce qu'il y avait cette femme qui ne
28 cessait de crier : Papa, où es-tu ? Viens m'aider.
Page 3063
1 Q. Monsieur Berghofer, dans votre déclaration dans l'affaire Mrksic, vous
2 avez dit que Goran Hadzic est venu une fois à la prison et il a dit que ça
3 sentait très mauvais et qu'il y avait des odeurs pestilentielles, à la page
4 du compte rendu d'audience 5 381. Je souhaite vous poser cette question :
5 qu'est-ce qui provoquait ces odeurs dans la pièce ?
6 R. Il est vrai que M. Hadzic est venu dans cette pièce de 3 sur 3, mais il
7 est vrai également que nous sentions mauvais. Nous puions, je dois le dire,
8 parce que nous n'avions pas pris de douche depuis trois mois. C'est assez
9 vulgaire, ce que je dis, mais… Et aussi un mois après non plus.
10 Q. Et dire "un mois et demi après," vous voulez parler de quelle période
11 de temps exactement ?
12 R. Eh bien, je calcule maintenant. A partir du 22 novembre, disons,
13 jusqu'au 15 janvier. Je parle de mémoire. C'est vrai. Ça, c'était le
14 premier jour. Et ensuite, c'était le 20, la deuxième fois, ou le 15 février
15 1992. Et puis, brusquement, nous avons été autorisés à prendre un bain
16 lorsque nous étions dans la pièce 2 sur 1.
17 Q. D'accord, Monsieur Berghofer. Je souhaite maintenant vous poser une
18 question à propos du moment où M. Hadzic s'est rendu à la prison. Quelles
19 étaient les conditions de détention des prisonniers dans cette pièce ?
20 R. Eh bien, voyez-vous, on emmenait les gens pour les interroger sans
21 cesse. Il y avait des hommes plus jeunes. C'est pour ça qu'ils devaient
22 partir. Alors que nous, on nous a remis de vieux uniformes de l'ex-JNA, et
23 nous devions les porter. Il s'agissait de pantalons et de vestes.
24 Q. Monsieur Berghofer, d'après vous, quel mois M. Hadzic, environ, est-il
25 venu à Sremska Mitrovica ? Vous n'êtes pas obligé de nous donner une date
26 exacte. Donnez-nous simplement le mois.
27 R. Décembre, le 20 ou le 21. En 1991.
28 Q. Et comment saviez-vous que la personne qui était là était Goran Hadzic
Page 3064
1 ? Comment l'avez-vous reconnu ?
2 R. Eh bien, M. Hadzic sait fort bien où on a pris une photographie de lui.
3 A commencer par Plitvice, alors qu'il se trouvait à 500 kilomètres de sa
4 ville natale, Vukovar. Nous appelons ça, les gens de Vukovar, Pâques
5 sanglante. Il y avait des images de Goran Hadzic partout. Et je le
6 connaissais de vue lorsque j'étais plus jeune. Nous ne nous sommes jamais
7 salués. Mais j'étais un invité à Bobetko [phon] et je l'ai vu regarder un
8 jeu ou quelque chose comme ça, mais c'était en passant.
9 Q. Et à l'époque où il se trouvait à la prison, savez-vous quel poste il
10 occupait ?
11 R. A ce moment-là, je ne savais pas. Je ne peux pas vous le dire.
12 Q. Et lorsqu'il était à la prison, il se trouvait à quelle distance de
13 vous ?
14 R. Juste à côté de moi. Juste à côté de moi. Donc, l'homme est venu, nous
15 nous sommes tous rassemblés autour de lui, nous voulions savoir ce qu'il
16 avait à dire. Est-ce que je peux vous dire ce qu'il a dit ?
17 Q. Oui.
18 R. Il est entré. Bien sûr, il était en uniforme militaire, qui était
19 différent des autres uniformes du SNB. Il a regardé à droite et à gauche et
20 il a dit : "Pourquoi vous ne laissez pas ces gens rentrer chez eux ?" Et
21 après cela, il est parti.
22 Q. Monsieur Berghofer, y avait-il quelqu'un d'autre aux côtés de M. Hadzic
23 à ce moment-là ?
24 R. Mon voisin, Rajak, si je me souviens bien. Il portait quelque chose qui
25 ressemblait à un uniforme de capitaine. Il était jeune. Il avait 26 ou 27
26 ans. Il portait un uniforme flambant neuf. Je crois qu'il avait le grade de
27 capitaine. Mais cela remonte à un certain nombre d'années maintenant. Je ne
28 peux pas m'en souvenir. Mais ce jeune homme, il habite dans la quatrième
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1 maison à partir de la mienne. C'est comme ça que je le connais.
2 Q. Il y a quelques instants, vous nous avez dit que vous vous souvenez de
3 ce qu'a dit Goran Hadzic lorsqu'il était debout à côté de vous dans la
4 prison de Sremska Mitrovica. Je souhaite vous demander si c'est la seule
5 fois où vous avez entendu Goran Hadzic parler des prisonniers, notamment
6 ceux qui se trouvaient à Sremska Mitrovica.
7 R. Oui. C'est la seule chose que j'ai entendue de sa bouche. Lui et moi,
8 deux êtres humains.
9 Q. Monsieur Berghofer, je ne souhaite pas vous limiter à ce qu'il a dit
10 lorsqu'il était physiquement à côté de vous. Je souhaite vous demander si
11 vous avez entendu parler Goran Hadzic à d'autres occasions, pas forcément
12 lorsqu'il était à côté de vous comme un autre être humain.
13 R. Oui, bien sûr. J'avais déjà été remis en liberté, cela faisait un an
14 déjà, et à cet endroit où il y avait ces six autocars, au moment où ils
15 quittaient l'hôpital, c'est dans cette rue qui s'appelait Brodjidras [phon]
16 ou Sapudl, et il y a ce journaliste, en général c'était la télévision de
17 Novi Sad qui faisait l'effort de prendre des images de nous et de
18 l'interviewer. C'est ce qu'il a dit, en tout cas c'est ce à quoi ça
19 ressemblait à l'image : "Tous ces Oustachi doivent rentrer pour que le
20 peuple serbe puisse les poursuivre en justice ici à Vukovar."
21 Q. Monsieur Berghofer, quand avez-vous vu ces images où ce journaliste que
22 vous avez décrit s'adresse à Hadzic ? Quand avez-vous vu cette interview ?
23 R. Eh bien, disons en 1993. Fin de l'année 1992. Je dois dire qu'il n'y a
24 pas que moi qui ai acheté un poste de télévision. Je suppose que mes amis
25 avaient fait de même. Donc, nous avons vu cela, mais je ne peux pas vous
26 dire quelle était la date de cela. De toute façon, il passait à la
27 télévision plusieurs fois, donc la télévision croate rediffusait cela en
28 boucle.
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1 Q. Monsieur Berghofer, vous venez de dire, et je dois citer la page du
2 compte rendu d'audience, page 29, ligne 23, que :
3 "Tous les Oustachi doivent rentrer de façon à ce que le peuple serbe
4 puisse les poursuivre en justice ici à Vukovar."
5 Lorsque vous avez entendu cela, cela vous a fait penser à quoi par rapport
6 à ce que vous aviez entendu à Sremska Mitrovica ?
7 R. Eh bien, à Sremska Metrovica, eh bien, de façon assez amicale quand il
8 a vu l'état misérable dans lequel nous étions, que nous sentions si
9 mauvais. Il était parmi nous et il savait que nous n'étions pas des
10 criminels de guerre. Tout le monde n'était pas un criminel de guerre. Et
11 ensuite, il a fait cette déclaration lorsqu'il était avec son peuple, et il
12 n'eut pas été approprié pour lui de défendre des Croates parce qu'il était
13 sous pression de la part de son peuple. Il s'agit donc d'avis et de propos
14 tout à fait différents.
15 Mme CLANTON : [interprétation] Je n'ai plus de questions, Monsieur le
16 Président.
17 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation]
18 Contre-interrogatoire.
19 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Messieurs les Juges.
20 Contre-interrogatoire par M. Zivanovic :
21 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. Je m'appelle Zoran
22 Zivanovic et je suis le conseil de la Défense pour M. Hadzic dans le cadre
23 de cette procédure.
24 R. Bonjour à vous. Je suis ravi de vous rencontrer.
25 Q. Je vais vous poser quelques questions concernant votre déposition
26 d'aujourd'hui.
27 Tout d'abord, je souhaite attirer votre attention sur ces images vidéo que
28 l'on vous a montrées ce matin. C'est l'Accusation qui vous l'a montré à la
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1 page 14 du compte rendu d'audience. Et vous avez au l'occasion de voir --
2 vous avez pu voir deux femmes et un jeune homme en habit civil s'adresser à
3 des soldats en uniforme de la JNA. Ils citaient le nom de différentes
4 personnes qui prétendument leur avaient infligé des sévices.
5 Alors, moi, ce qui m'intéresse, c'est ceci : parmi ces personnes qui
6 étaient en uniforme, avez-vous reconnu quelqu'un ?
7 R. Je ne peux pas rien dire avec certitude, car vous savez quoi ? Dès que
8 quelqu'un porte un uniforme, on ne peut plus le reconnaître. Et il
9 s'agissait de jeunes hommes et ces hommes auraient pu être mon fils. Ils
10 avaient 25 ou 27 ans à l'époque.
11 Q. De toute façon, dois-je en conclure que vous ne pouviez reconnaître
12 personne qui portait un uniforme de la JNA sur ces images et qui parlait à
13 ces deux femmes et à ce jeune homme ?
14 R. Non. Que ces femmes. Si j'avais pu regarder les images pendant plus
15 longtemps, j'aurais peut-être pu déceler autre chose. Mais il s'agit de
16 jeunes personnes. Je connais leurs pères et leurs mères; mais en ce qui les
17 concerne eux, je ne peux rien dire.
18 Q. Il y a autre chose que je souhaitais regarder avec vous. En réalité,
19 cela m'intéresserait de savoir si vous avez eu l'occasion de voir la liste
20 des personnes portées disparues de l'hôpital de Vukovar après votre
21 libération, une fois que tout ceci a été terminé et jusqu'au moment de
22 votre déposition plus tard ?
23 R. Jamais, avant ce moment-là, sauf lorsque je me suis trouvé à Belgrade
24 avec M. Vesko Krstajic. J'ai dû entourer d'un cercle les noms de personnes
25 que je reconnaissais.
26 Q. Et je vous pose cette question précisément parce que lorsque vous avez
27 communiqué avec l'Accusation, il y avait cette liste que vous aviez établie
28 un peu plus tôt et vous y avez ajouté quelques noms, je crois au nombre de
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1 cinq ou six, et ce qui m'intéresse, c'est de savoir comment ceci s'est
2 passé. Comment avez-vous pu vous souvenir de tous ces noms après plus de 20
3 ans ?
4 R. Monsieur Zivanovic, si vous saviez comment j'ai encore présente dans
5 mon esprit l'image de ces hommes. Pinter, c'est le premier que j'ai ajouté
6 sur la liste. C'était un de mes amis pendant 40 ans. Et ensuite, ce Misel.
7 Et je ne cessais de parler de Misel -- pardonnez-moi, je ne cessais de
8 parler du Français. Je pensais que c'était un surnom "Francuz", le Français
9 - je sais que votre question ne portait pas là-dessus - mais lorsque Kemo
10 est venu le chercher. Et je crois qu'il était sur cette première liste il y
11 a longtemps. Et ensuite, il y a Jarabak, je me souviens de ce nom-là.
12 Stanko Duvnjak était un policier. Et ensuite, Vukojevic, Slaven. Et
13 ensuite, le jeune Zivkovic. Alors, ce Kacic, il avait 15 ou 16 ans.
14 Simplement, ils l'ont arraché à sa mère à l'hôpital, parce que c'est un
15 homme bien bâti, et ils l'ont mis à bord de l'autocar.
16 Croyez-moi, Monsieur Zivanovic, ils sont plus nombreux que cela. Je suis
17 toujours surpris lorsque je viens ici. Croyez-moi, je suis toujours mal
18 préparé. Cette liste que je tiens dans les mains, c'est M. Moore qui m'a
19 contraint à le faire. En deux minutes et demie, j'ai dû griffonner tout
20 ceci sur un papier, quels sont les noms. Et, en réalité, il y a cette liste
21 que j'ai à la maison, lorsque je suis rentré à la maison en 1991, en 1992,
22 lorsque je suis revenu de prison.
23 Q. Une autre chose. A la page 21 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui,
24 vous avez dit que toutes les personnes qui se trouvaient à bord de cet
25 autocar qui est allé à Sremska Mitrovica, que toutes ces personnes étaient
26 des civils. A la manière dont je comprends votre déposition dans l'affaire
27 Mrksic, je sais que vous avez dit dans cette affaire-là, entre autres, que
28 vous faisiez partie de la 204e Brigade, et vous avez également dit à quels
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1 bataillon et compagnie vous apparteniez. Et maintenant, je souhaite savoir
2 s'il y avait d'autres personnes qui occupaient un poste analogue au vôtre
3 parmi les personnes que vous avez indiqué comme étant des civils ?
4 R. Monsieur Zivanovic, vous savez quelle était notre situation à Vukovar.
5 Toute personne qui s'était trouvée dans une cave devait s'assurer le statut
6 d'un défenseur de Vukovar. Ljubo avait ce statut-là et Zeljko Buljan, qui
7 prétendument avait été blessé. Sinisa Veber, également, qui a réussi à
8 avoir ce statut-là. Mais croyez-moi, lorsque je vois ces noms ici,
9 certaines de ces personnes n'ont même pas apporté un verre d'eau ni à l'un
10 ni à l'autre. En tout cas, au début, j'ai participé à cela, il y avait la
11 station de radio, et ensuite je me suis occupé de logistique. Et ensuite,
12 il y a Vili Karlovic qui venait de Zagreb et qui est venu donner un coup de
13 main. Il venait de Zagreb. Il a participé aussi à tout cela.
14 Et Stjepan Guncevic. J'essaie de me souvenir maintenant. Et il faut un
15 fusil automatique pour le faire témoigner, mais il a le statut d'un
16 défenseur croate. Toute personne qui a survécu à Vukovar a obtenu le statut
17 de défenseur de la Croatie.
18 Q. Veuillez préciser ceci pour nous : est-ce que cela signifie que les
19 gens qui étaient des civils, qui n'ont pas participé ou n'ont pas été
20 membre de quelconque unité militaire, étaient-ils -- ou, étaient-ils
21 incorporés à la 204e Brigade et aux différents bataillons, ou s'agissait-il
22 de personnes qui avaient été déployées dans ces unités mais qui n'ont pas
23 participé directement aux combats, ou plutôt, ne se sont pas trouvées sur
24 la ligne de front où se déroulaient les combats ?
25 R. Eh bien, d'après ce que je sais, même ce jeune homme, Ularik, qui avait
26 16 ans, même lui était un défenseur de Vukovar.
27 Mais je dois vous dire encore une fois, Monsieur Zivanovic, peut-être que
28 ces gens, peut-être que je les ai sous-estimés, peut-être que je les
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1 offensés d'une manière ou d'une autre. Je n'avais pas l'intention de le
2 faire. Mais peut-être que gens-là ont participé aussi, peut-être qu'ils ont
3 été engagés par leurs commandants. Peut-être qu'ils étaient censés au moins
4 apporter de l'eau ou de la nourriture.
5 Et il y avait toujours des travaux à accomplir au moment où il
6 s'agissait de défendre Vukovar.
7 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je vous remercie. Je vois qu'il est l'heure
8 de faire la pause, Messieurs les Juges.
9 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie. Effectivement.
10 Merci, Maître Zivanovic.
11 Monsieur Berghofer, nous allons avoir notre première pause maintenant, et
12 nous reviendrons à 11 heures. L'huissier va vous raccompagner. Je vous
13 remercie.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci à vous.
15 [Le témoin quitte la barre]
16 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, il y a une requête
17 de l'Accusation afin d'ajouter M. Bedzik [comme interprété] à la liste de
18 la pièce 987 à 992. Et il y a des pages manquantes. Pourriez-vous nous
19 donner votre opinion sur la question ou veuillez nous dire quand vous
20 seriez en mesure de le faire ?
21 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Pas d'objection.
22 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie. Dans ce cas, il est
23 fait droit à la requête de l'Accusation.
24 L'audience est levée.
25 --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.
26 --- L'audience est reprise à 11 heures 00.
27 [Le témoin vient à la barre]
28 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, poursuivez, je vous
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1 prie.
2 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.Q. Monsieur,
3 vous avez parlé de cette haie que vous avez dû former. Donc, lorsque vous
4 êtes sortis de l'autocar, vous avez dû passer entre cette rangée d'hommes,
5 lorsque vous êtes arrivés à Mitrovica; est-ce bien exact ?
6 R. Oui.
7 Q. Si vous ne connaissiez pas les gens qui se trouvaient là, êtes-vous
8 toutefois en mesure de nous dire à quelle formation ils appartenaient ?
9 Est-ce qu'ils portaient des uniformes ? Est-ce vous pouviez les
10 reconnaître, les identifier ?
11 R. Ecoutez, ils portaient l'uniforme des gardiens de prison. En fait, ils
12 portaient l'uniforme du personnel de la prison de Sremska Mitrovica.
13 Q. Vous avez également parlé de ces sévices, de la façon dont les détenus
14 de Sremska Mitrovica ont été battus. Et vous avez mentionné Dusko. Je
15 suppose qu'il était de Vukovar. C'est pour cela que vous le connaissez.
16 R. Maître Zivanovic, je ne connaissais pas une seule des personnes
17 présentes là-bas. Je n'aurais pas pu vous dire qu'il s'agissait de Dusko si
18 ce n'était que son ami, lorsqu'il a vu que quelqu'un le battait jusqu'à ce
19 qu'il perde connaissance et que moi j'aie perdu connaissance également, son
20 ami a dit : "Dusko, comment est-ce que tu peux te comporter de la sorte ?"
21 Et ce n'est que lorsque j'ai entendu cela que j'ai appris que cet homme
22 s'appelait Dusko.
23 Q. Dites-moi, est-ce qu'il y avait également des gardiens de prison ou
24 est-ce qu'il y avait d'autres personnes ?
25 R. Non, non. C'étaient des gardiens de prison.
26 Q. J'aimerais vous poser quelques questions à propos de cet extrait vidéo
27 que vous avez visionné. Après votre libération de prison, vous avez acheté
28 un téléviseur, et vous avez dit que cela s'était passé soit entre 1992 ou
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1 en 1993.
2 Et vous nous dites que vous avez vu que Goran Hadzic se faisait
3 interviewer. Vous avez également indiqué que cela s'est passé près de
4 l'endroit où ces six autocars se trouvaient, et je crois comprendre que
5 cela a dû se passer à Vukovar ?
6 R. Oui.
7 Q. Nous n'avons pas cet extrait vidéo, mais nous avons néanmoins un
8 extrait qui montre plus ou moins ce dont vous parlez. Mais c'est un extrait
9 vidéo qui a été pris à Sid. Donc, c'est pour cela que je vous pose ma
10 question : est-ce que vous êtes sûr que cela a été filmé à Vukovar et non
11 pas à Sid, je parle de cet extrait dont vous parliez ?
12 R. Voyez-vous, Maître Zivanovic, nous avons parlé de la rue où se
13 trouvaient les autocars, la rue qui se trouve près de l'hôpital, et nous,
14 en fait, nous disions que cela se trouvait près du "Crvani Magazin", qui se
15 trouve environ à 200 mètres de l'hôpital. Donc, c'est dans cette rue où, à
16 l'époque, se trouvaient les autocars.
17 Q. En d'autres termes, ce que vous nous dites, c'est que cela a été filmé
18 dans le même lieu où les autobus avaient l'habitude d'attendre, mais cela a
19 été filmé après cet événement avec les autocars, n'est-ce pas ?
20 R. Tout à fait.
21 Q. Alors, au vu des propos que vous avez entendus de la part de M. Hadzic,
22 dites-nous, je vous prie, si dans ce film M. Hadzic avait dit que ces gens
23 qui avaient commis des crimes devraient être traduits en justice à Vukovar
24 en première instance, et qu'après ils devraient être traduits en justice en
25 Yougoslavie en appel et en cassation ?
26 R. Non, il n'a pas dit cela précisément. Il a juste dit que ces Oustachi
27 devraient être ramenés à Vukovar pour que les Serbes puissent les juger.
28 C'est grosso modo ce qu'il a dit. Mais cela s'est passé il y a quelques
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1 années, quand même.
2 Q. Avez-vous dit que cela s'est passé il y a plusieurs années ou il y a de
3 nombreuses années ?
4 R. Mais écoutez, il y a beaucoup de temps qui s'est écoulé. Ce que je
5 voulais dire, c'est que ce n'est pas le seul film de M. Goran Hadzic se
6 faisant interviewer par une équipe, une équipe télévisée de Serbie ou
7 d'ailleurs. D'ailleurs, ce type d'extrait a été diffusé à la télé croate.
8 Q. Mais est-ce que vous vous souvenez si dans le même film, le même
9 extrait, M. Hadzic avait dit, outre ce que vous avez déjà relaté, qu'il
10 vaut mieux libérer 100 personnes coupables plutôt que de condamner un seul
11 innocent ?
12 R. Non, non, je n'ai pas entendu cela.
13 Q. Mais c'est la cinquième fois que vous venez témoigner devant le
14 Tribunal. Il y a deux jours, vous avez été en mesure de consulter votre
15 déposition dans l'affaire Mrksic.
16 Et il y a une partie de votre déposition dans l'affaire Mrksic qui
17 m'intéresse. Une question vous a été posée, vous y avez répondu. Il s'agit
18 de la pièce 4460, pages 67 et 69. Et cela correspond à votre déposition du
19 3 mars.
20 Voilà ce que vous avez dit. Vous avez dit que personne du ministère de la
21 Défense de la République de Croatie ne vous avait préparé pour cette
22 déposition. Vous vous en souvenez de cela ?
23 R. Oui.
24 Q. Pourriez-vous nous dire, à propos de votre déposition à La Haye - je ne
25 parle pas de la déposition d'aujourd'hui, je parle de la déposition
26 précédente - dites-nous si vous avez eu des contacts avec le ministère de
27 la Défense de Croatie ?
28 R. Dans la mesure où je m'en souviens, et mes souvenirs sont exacts, non
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1 jamais. Je peux vous dire que non, jamais. Cela ne s'est jamais passé.
2 Q. Mais d'après les renseignements dont nous disposons, votre premier
3 contact avec le bureau du Procureur et ses enquêteurs a eu lieu en 1994-
4 1995. Puis-je avancer sur la réponse ?
5 R. Oui, oui. Oui, cela s'est passé dans le bâtiment de la police de
6 Vinkovci, ou poste de police. Vous savez, les gens n'osaient pas en parler,
7 mais moi je leur ai parlé.
8 Q. Lorsque vous avez dit que les gens n'avaient pas le droit d'en parler,
9 qu'entendiez-vous par cela ? Est-ce que vous voulez dire que quelqu'un
10 interdisait cela ?
11 R. Ecoutez, je ne sais pas s'il s'agit de M. Williams ou de M. Niemann. Je
12 ne m'en souviens plus. Mais je dirais que mon Etat, en quelque sorte,
13 n'avait absolument pas à m'interviewer. De toute façon, c'était un secret
14 de polichinelle. Moi, je n'étais pas autorisé à dire que j'avais dit à ces
15 messieurs quoi que ce soit, parce que de toute façon ma nation, mon Etat,
16 n'avait pas le droit d'exercer des pressions sur moi à propos de ma
17 déposition au Tribunal à La Haye.
18 Q. Alors, est-ce que je vous ai bien compris : est-ce que cela signifie
19 que ces deux personnes du Tribunal vous ont dit que vous ne devriez parler
20 de cela avec personne ou, en tout cas, avec personne représentant les
21 autorités de l'Etat croate ?
22 R. Oui, oui. Oui, c'est plus ou moins cela. Combien est-ce que je pourrais
23 vous expliquer la chose ? Il n'y avait pas d'interdiction. De toute façon,
24 il n'appartenait à personne de me fournir des conseils à ce sujet, et pour
25 autant que je m'en souvienne, ils sont revenus quatre fois. Ils sont même
26 venus me voir chez moi, puis ils ont eu un accident en chemin avec un
27 tramway.
28 Q. Et en 1996, vous avez fait une déclaration pour la première fois devant
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1 ce Tribunal de La Haye ?
2 R. Oui. C'est plus ou moins cela.
3 Q. Oui, voyez-vous, nous disposons de votre déclaration. Pièce 4455. C'est
4 une déclaration que vous avez faite le 27 mars 1996. Et je suppose que vous
5 vous en souvenez de cela ?
6 R. Oui.
7 Q. Voyez-vous, à la page 17 dans le système e-court, nous avons votre
8 déclaration, et vous dites à un moment donné qu'un officier supérieur est
9 venu dans le hangar où vous vous trouviez et qu'il a fait subir des sévices
10 à plusieurs prisonniers. Et vous décrivez ce qui s'est passé. Ce qui n'est
11 pas très important. Mais vous avez dit qu'il s'agissait d'un officier
12 supérieur. Mais vous n'avez pas donné son nom, toutefois. Vous vous
13 souvenez de cela ?
14 R. Oui.
15 Q. Et puis, dans les dépositions que vous avez faites par la suite, vous
16 avez indiqué que cet officier supérieur était Slavko Dokmanovic. Vous vous
17 souvenez de cela ?
18 R. Oui.
19 Q. Pourriez-vous me dire pourquoi vous n'avez pas dit qu'il s'agissait de
20 Slavko Dokmanovic si vous saviez qu'il s'agissait de lui lorsque -- vous ne
21 l'aviez pas dit dès le 27 mars 1996 ?
22 R. En fait, j'aurais besoin de l'assistance des Juges.
23 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, Monsieur Berghofer.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je m'exprimer ?
25 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, oui, vous avez tout à fait le
26 droit de vous exprimer.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Maître Zivanovic, au moment où j'ai fait ma
28 déclaration, on m'avait dit qu'il ne fallait pas que je donne le nom de
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1 l'officier supérieur à ce moment là, l'officier supérieur qui a été vu à
2 Ovcara. Et lorsque les caméras ont été éteintes et lorsque le journaliste
3 est sorti, ils sont revenus dans la pièce puis ils m'ont dit : Monsieur
4 Berghofer, qui était l'officier supérieur haut gradé dont vous n'avez pas
5 donné le nom il y a un petit moment ?
6 Et j'ai répondu : Slavko Dokmanovic. Et tout cela s'est passé le même jour
7 à un l'intervalle de 30 minutes.
8 M. ZIVANOVIC : [interprétation]
9 Q. Mais est-ce que vous pourriez nous dire, alors, qui vous a dit qu'il ne
10 fallait pas que vous donniez le nom de la personne au Tribunal ?
11 R. Je pense que c'était le Juge. C'était une audience publique, les
12 journalistes étaient présents, et je suppose que cela a été fait de la
13 sorte pour que cela ne se passe pas dans le domaine public, pour que tout
14 reste à huis clos, entre ces quatre murs.
15 Q. Et pourriez-vous me dire quand le Juge qui présidait les débats vous a
16 dit qu'il fallait que vous procédiez de la sorte ?
17 R. Les personnes qui m'ont interrogé le savaient. Et avant que je n'entre
18 dans le prétoire, ces personnes m'ont dit qu'il ne fallait pas que je donne
19 le nom de cet officier. C'est pour ça que j'ai dit qu'il s'agissait d'un
20 officier haut gradé de la municipalité de Vukovar. Et nous nous en sommes
21 tenus à cela.
22 Et puis, une demi-heure plus tard, lorsque le prétoire ou cette salle
23 d'audience se vidait des journalistes et des équipes de télévision, je leur
24 ai dit ce que vous avez maintenant sur votre écran.
25 Q. Vous savez, je dois vous dire que je suis un tant soit peu perplexe à
26 la suite de vos explications. Parce que normalement les informations
27 confidentielles sont fournies à huis clos, et lorsqu'il y a huis clos, il
28 n'y a pas de journalistes présents et il n'y a pas de présence du public.
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1 Mais c'est l'explication que vous nous donnez.
2 R. Oui, c'est cela. C'est cela. C'est justement cela.
3 Q. Voyez-vous, c'est cela qui me semble étrange. Et peut-être que vous
4 pourriez nous fournir une explication.
5 Le 27 mars 1996, nous avons le compte rendu de votre déclaration, et
6 notamment la page 17, et je dirais qu'avant de faire cette déclaration,
7 vous avez prononcé une déclaration solennelle en vertu de laquelle vous
8 aviez dit que vous alliez dire la vérité, que vous n'alliez pas dissimuler
9 quelque information que ce fut en réponse à des questions. Alors,
10 maintenant vous avez prononcé la déclaration solennelle, et je m'interroge
11 : vous avez donc écouté ce conseil - je ne sais pas qui vous l'a donné -
12 mais ce conseil suivant lequel vous ne deviez pas fournir d'informations au
13 public et que ça devait rester à huis clos ?
14 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, qu'est-ce que vous
15 voyez ? Qu'est-ce que vous lisez lorsque vous prenez la déclaration
16 solennelle ?
17 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je vois qu'il a prêté serment. Il prêté
18 serment.
19 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui.
20 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, c'est la première page.
21 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous lire
22 cela ? Je ne le vois pas.
23 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Non, non, non, je ne peux pas.
24 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Mais il s'agit du compte rendu
25 d'audience dans un tribunal, n'est-ce pas ?
26 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui. D'après ce que je sais, oui.
27 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Mais alors --
28 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Il s'agit du document 4455.
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1 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Mais lorsque la personne prête
2 serment, est-ce qu'il est indiqué qu'elle ne doit pas garder des
3 informations ? C'est ce que vous avez dit au témoin.
4 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Vous savez, d'après ce que je sais -- bon,
5 c'est assez habituel, c'est classique que lorsqu'une déclaration solennelle
6 est prononcée -- ou peut-être que j'ai mal compris cela.
7 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, mais la question qu'il convient
8 de se poser est comme suit : qu'est-ce que le témoin comprend lorsqu'il lit
9 cette déclaration solennelle ?
10 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Ecoutez, je vais lui demander des
11 précisions justement.
12 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien. Faites donc.
13 M. ZIVANOVIC : [interprétation]
14 Q. Monsieur, est-ce que vous pourriez nous dire si vous vous souvenez
15 avoir prononcé une déclaration solennelle à cette occasion, l'occasion dont
16 nous parlions donc. Est-ce que vous avez déclaré que vous alliez dire la
17 vérité ? Vous vous en souvenez de cela ?
18 R. Oui, je m'en souviens, mais ce n'était ici. C'était dans une autre
19 salle d'audience. Il y avait une galerie vitrée. Et puis, il y avait des
20 journalistes derrière moi.
21 Q. Mais est-ce que vous vous souvenez de cette déclaration ? Est-ce que
22 vous vous souvenez de la formule que vous avez prononcée ?
23 R. Mais de quelle déclaration vous parlez ?
24 Q. La déclaration en vertu de laquelle vous avez dit que vous alliez dire
25 la vérité. Vous vous souvenez avoir prononcé cette déclaration ?
26 R. Oui, oui, comme je l'ai fait maintenant. Mais cela n'a duré qu'une
27 demi-heure. Et là, bon, ils ont dû débrancher la caméra. Il n'y avait plus
28 de journalistes. Moi, je suis juste ici pour écouter et non pas pour faire
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1 des déclarations.
2 Q. Comment est-ce que vous avez compris la déclaration solennelle que vous
3 avez prononcée en vertu de laquelle vous deviez dire la vérité ? Est-ce que
4 cela signifie que si vous étiez informé de certaines informations
5 importantes, à savoir que vous aviez reconnu un homme qui avait torturé des
6 prisonniers à cet endroit, est-ce que vous, vous aviez compris que vous
7 n'étiez pas censé en parler ? Est-ce que vous avez pensé que cela était
8 conforme à la déclaration solennelle que vous avez prononcée ?
9 R. Oui, cela est conforme. Moi, je ne vois pas la différence entre 25
10 minutes, 30 minutes. Je l'ai indiqué. C'est ce qu'ils m'ont dit. Jusqu'au
11 moment où les caméras ont été éteintes et où les journalistes n'étaient
12 plus présents. Comment est-ce que je pourrais vous expliquer cela ?
13 Je n'étais pas un témoin secret. Tout était normal, tout était public.
14 Toutefois, pour que le grand public ne puisse pas avoir accès, eh bien, je
15 vous ai déjà dit ce qui s'est passé. Il y a ce représentant de la
16 municipalité de Vukovar qui est venu. Et avant cela, ils m'ont dit que je
17 ne devrais pas le dire. Donc, moi, en ce qui me concerne, la déclaration
18 solennelle que j'ai prononcée, elle était valable pour cette première
19 partie et pour ce qui s'est passé une demi-heure après. Maître Zivanovic,
20 je vous dis qu'il y avait un décalage d'une demi-heure. Et non pas un
21 décalage de six mois.
22 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Document 2298. C'est le troisième document
23 sur la liste des documents de la Défense.
24 Q. Vous voyez, il s'agit d'un document du ministère de la Défense, donc le
25 bureau de l'assistant du ministre. Et vous voyez votre nom et votre prénom,
26 il s'agit de l'objet du document. Donc, il s'agit justement d'informations
27 relatives à votre déposition.
28 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Est-ce que la page 2 pourrait être affichée
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1 maintenant. Page 2 de ce document.
2 Q. Voyez ce qu'il est écrit. Il est indiqué qu'en 1994 et 1995, vous avez
3 les noms des deux personnes qui vous ont parlé, et il est indiqué ce dont
4 vous avez parlé à cette occasion. Il est également indiqué -- en fait, nous
5 voyons ce nom, Dokmanovic. Et là, il est indiqué ce qui s'est passé en
6 1996, que vous avez eu une communication téléphonique avec La Haye. Il est
7 question de la teneur. Des détails de votre départ, et cetera.
8 Donc, j'aimerais avoir si c'est vous qui avez donné ces renseignements au
9 ministère de la Défense.
10 R. Non, non. Ecoutez, moi, je dois dire que j'ai été surpris lorsque j'ai
11 vu ceci. Ou quelque chose de semblable. Et je me suis dit que jusqu'à ce
12 jour, mon pays, mon Etat, ne savait pas que je me trouvais à La Haye parce
13 que moi je n'avais contacté personne. J'ai seulement eu des contacts avec
14 vos collègues de Belgrade, ceux qui m'ont dit que je devais aller à Zagreb.
15 Je crois que deux ou trois fois j'ai dit la même chose à propos de M.
16 Slavko Dokmanovic. Moi, je n'ai pas compris. Je n'ai pas compris. Si vous
17 me l'aviez dit, bon. En fait, moi je n'ai jamais eu rien à voir avec cela.
18 Je me suis contenté de répéter ce qui s'était passé à Ovcara. Je leur ai
19 dit qui se trouvait avec moi à Ovcara, je leur ai dit qui nous avait roué
20 de coups, si je les avais reconnus ou non. En fait, j'ai toujours dit la
21 même chose.
22 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Page suivante, je vous prie.
23 Q. Voyez-vous, ici, il est dit que le 28 mars vous avez répondu aux
24 questions et qu'avant que vous n'entriez dans le prétoire, il y a des noms
25 qui sont mentionnés, il y a d'autres noms qui ont été biffés, et on vous a
26 dit que vous ne devriez pas mentionner le nom de Slavko Dokmanovic pendant
27 la première partie de votre interrogatoire parce que des journalistes
28 étaient présents. C'est exactement ce que vous nous avez dit maintenant.
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1 Dites-nous si vous avez relayé ces informations au ministère de la
2 Défense de Croatie ?
3 R. Non, parce qu'il y a des informations dans ce document qui ne
4 sont pas exactes.
5 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire, alors, ce qui est inexact ?
6 R. Lorsqu'il est dit : Cakalic, jusqu'au moment où il a perdu
7 connaissance. Après une heure, Berghofer avec huit autres hommes ont été
8 sortis d'Ovcara, alors que d'autres se trouvaient dans une situation où ils
9 pouvaient en fait se suicider. Donc, il a mentionné Emcelic [phon] et
10 Zarkan [phon] qui se trouvait à "Plava Laguna".
11 Nous, nous avons toujours su qui avait survécu à Ovcara. Je ne sais
12 pas où vous, vous avez obtenu cela et je ne sais pas d'où le monsieur de La
13 Haye tenait ceci. Je ne le sais pas véritablement. Mais regardez-moi, j'ai
14 coopéré avec M. Williamson [phon], puisque son nom est indiqué ici. Oui,
15 c'est vrai que j'ai fait des déclarations à son intention, et j'ai indiqué
16 que ce monsieur est venu à Vinkovci trois fois alors que j'étais une
17 personne déplacée, puis après ils sont venus à Osijek, mais venaient du
18 Tribunal de La Haye. Donc, bon, ils sont venus depuis La Haye. Bon, je ne
19 sais pas très bien comment m'exprimer, mais il y a beaucoup de choses qui
20 se trouvent dans ce document qui ne font l'objet d'aucun litige ou
21 contentieux.
22 Q. Très bien.
23 R. Merci.
24 Q. Nous allons voir un autre document.
25 M. ZIVANOVIC : [interprétation] C'est le document suivant -- ou plutôt, il
26 s'agit du document 2232, le document suivant sur notre liste. Ce n'est pas
27 le document, c'est certain. 2322; désolé.
28 Q. Il s'agit également d'une lettre que le ministre de la Défense a
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1 envoyée au président Tudjman en 1998. Et l'on y parle des activités qui ont
2 été prises pour protéger les intérêts de la République de Croatie devant le
3 Tribunal.
4 M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]
5 Mme CLANTON : [interprétation] Pourriez-vous m'indiquer où cela se trouve
6 sur la liste de la Défense ?
7 M. ZIVANOVIC : [interprétation] C'est le document numéro 2.
8 Mme CLANTON : [interprétation] Sur la liste que je vois, il s'agit du
9 document 1535 de la liste 65 ter. Je pense que c'est un document différent.
10 Le greffier pourra me dire si je m'abuse.
11 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Peut-être que je n'ai pas la liste mise à
12 jour, mais cela doit être sur notre liste. Encore une fois, 2322.
13 Mme CLANTON : [interprétation] Je ne vois pas ce document sur la liste de
14 la Défense qui nous a été envoyée au début du contre-interrogatoire --
15 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] J'essaie tout simplement de trouver
16 la liste de la Défense et je n'arrive pas à la trouver.
17 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
18 M. LE JUGE DELVOIE : [hors micro]
19 L'INTERPRÈTE : Le Président hors micro. Le Président hors micro.
20 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Pas sur la dernière liste, n'est-ce pas ?
21 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Désolé. Sur la dernière, sur l'avant-
22 dernière ?
23 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Désolé. C'est une erreur de notre part.
24 Très bien.
25 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Clanton.
26 Mme CLANTON : [interprétation] C'est un document de 35 pages que nous
27 n'avons vu sur une liste, et je souhaiterais avoir la possibilité de le
28 consulter avant de laisser la Défense poser des questions car on aurait dû
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1 être avertis au début de sa déposition ce matin.
2 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Après la pause, ça ira ?
3 M. ZIVANOVIC : [interprétation] J'aimerais dire, c'est une seule phrase que
4 j'aimerais citer dans ce document, pas le document dans son intégralité.
5 Mme CLANTON : [interprétation] Il serait plus approprié que nous puissions
6 voir ce document et le contexte de la phrase. Puisque nous n'avons pas vu
7 le document du tout.
8 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que cela suffira après la
9 pause ?
10 Mme CLANTON : [interprétation] Oui, bien sûr.
11 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que vous pouvez attendre de
12 poser votre question jusqu'après la pause ?
13 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui.
14 M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]
15 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Mais, en fait, c'est la dernière question
16 sur ce sujet dans mon contre-interrogatoire.
17 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ce sera la dernière question à poser
18 dans votre contre-interrogatoire. Qui prendra combien de temps ? Quelques
19 instants ?
20 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Cinq minutes.
21 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.
22 Que pouvons-nous escompter pour les questions supplémentaires ?
23 Mme CLANTON : [interprétation] Je ne crois pas que nous n'ayons grand-chose
24 pour des questions supplémentaires. Mais j'aimerais avoir la possibilité de
25 voir ce document --
26 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Alors, pourquoi ne pas prendre une
27 pause d'une demi-heure maintenant, et nous reviendrons pour la dernière
28 question -- non, non. Je devrais tout d'abord -- est-ce que nous avons un
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1 autre témoin ?
2 M. STRINGER : [interprétation] Oui.
3 On m'informe que le témoin suivant est là, qu'elle est prête, et si
4 nous faisons une pause d'une demi-heure maintenant, nous pourrions revenir
5 et donner quelques instants pour parachever le contre-interrogatoire et
6 passer au témoin suivant.
7 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
8 M. LE JUGE DELVOIE : [hors micro]
9 L'INTERPRÈTE : Le Président hors micro.
10 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. Nous faisons une pause.
11 Monsieur le Témoin, nous allons faire une pause légèrement plus tôt,
12 anticipée. Donc, si vous voulez bien revenir à midi 10. L'huissier va vous
13 accompagner. Merci.
14 [Le témoin quitte la barre]
15 M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]
16 --- L'audience est suspendue à 11 heures 39.
17 --- L'audience est reprise à 12 heures 11.
18 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Clanton, pendant que nous
19 attendons le témoin, le problème de traduction dont vous nous avez parlé
20 dans votre note de récolement, nous ne l'avons pas encore dans le dossier,
21 n'est-ce pas ? Je veux dire, la traduction correcte. Comment pouvons-nous
22 faire ? En fait, en versant la note de récolement, mais je ne sais pas si
23 la Défense en conviendrait.
24 Mme CLANTON : [interprétation] M. Stringer va aborder la question.
25 M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]
26 M. STRINGER : [interprétation] Ce que nous nous proposons de faire,
27 Monsieur le Président, si la Défense en convient, en ce qui concerne la
28 rectification qui doit être apportée, parce que nous avons indiqué
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1 spécifiquement de quoi il s'agit, la Défense pourrait écouter la bande
2 sonore, si elle le souhaite.
3 [Le témoin vient à la barre]
4 M. STRINGER : [interprétation] Et si la Défense, encore une fois, en
5 convient, peut-être que nous pourrions maintenant lire au dossier ce que
6 les parties estiment, maintenant ou demain, quelles devraient être les
7 rectifications en fin de compte. Parce qu'il s'agit d'un compte rendu
8 officiel d'un autre procès, donc le compte rendu de l'autre affaire devrait
9 être rectifié par le service de traduction. Donc, une fois que la
10 rectification [comme interprété] est officielle, nous pourrons à ce moment-
11 là peut-être permuter la version rectifiée et celle qui se trouve à l'heure
12 actuelle dans le dossier. Entre-temps, avant que cela ne se passe, si les
13 parties en conviennent quant au libellé dont il s'agit, que ceci -- donc,
14 si vous voulez, qu'il y ait un marque-page.
15 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je comprends que ce que vous avez
16 dit, Monsieur Stringer, c'est qu'en fait, la question n'est pas encore
17 complètement versée au dossier officiellement. Donc, il vous faut encore --
18 ou la Défense doit disposer de quelque temps pour vérifier votre
19 traduction.
20 M. STRINGER : [interprétation] Oui. La Défense n'a pas abordé la question.
21 Nous pourrions leur remettre la bande sonore maintenant, mais je ne sais
22 pas si la Défense a eu la possibilité d'écouter le segment sur la bande
23 sonore ou d'écouter l'extrait en question.
24 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Pardon.
25 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Nous pourrions vérifier la chose
26 aujourd'hui, demain, et revenir sur la question.
27 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. Merci.
28 Maître Zivanovic, si vous voulez bien poursuivre.
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1 M. ZIVANOVIC : [interprétation] J'ai oublié de présenter Mme Léa
2 Bataillard, qui est de notre équipe, qui s'est jointe à nous.
3 Et j'aimerais également verser le document dont nous nous sommes servi avec
4 le témoin. Donc, de notre liste, 2298.
5 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Versé et reçoit une cote.
6 M. LE GREFFIER : [interprétation] Et reçoit la cote D31.
7 M. ZIVANOVIC : [interprétation]
8 Q. Monsieur le Témoin, maintenant je vais vous montrer un autre document
9 du ministère de la Défense, 2322, en date du 4 juin 1998.
10 Il s'agit d'un rapport du ministère de la Défense adressé au
11 président, M. Tudjman, comme vous allez le voir, sur les activités
12 entreprises par le ministère afin de protéger les intérêts de la République
13 de Croatie par rapport au Tribunal pour l'ex-Yougoslavie à La Haye.
14 Nous allons nous pencher sur un segment de ce rapport. Au paragraphe
15 5, page 14 en B/C/S, qui se trouve à la page 22 en version anglaise.
16 Tout en haut de la page, vous avez le paragraphe 5 en version B/C/S,
17 et on y lit que :
18 "Le service a participé à la préparation des témoins de l'Accusation
19 au cas où l'acte d'accusation serait confirmé dans l'affaire Mrksic et dans
20 le procès contre Dokmanovic (Vilim Karlovic, D. Berghofer, Marin Vidic,
21 alias Bili)."
22 J'aimerais vous proposer la question dont je vous ai déjà posée.
23 Avant le 4 juin 1998, est-ce que vous avez eu des contacts avec le
24 ministère de la Défense et est-ce qu'il vous a préparé pour votre
25 déposition dans ces deux affaires ?
26 R. Pour autant que je m'en souvienne, Monsieur Zivanovic, non,
27 jamais. Je n'ai jamais rencontré M. Karlovic, ni Marin Vidic, Bili.
28 Q. Pourriez-vous répéter les derniers noms que vous avez mentionnés.
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1 Maintenant ils sont corrects.
2 Voyez-vous, ce n'était pas ce que j'avais compris à partir de ce
3 document, que vous vous trouviez tous au ministère de la Défense en même
4 temps. Mais plutôt, ce qu'on y voit ici, c'est qu'ils ont pris part aux
5 préparatifs des témoins de l'Accusation avec vos trois noms qui sont
6 mentionnés, ce qui ne veut pas dire que vous trois, vous vous trouviez
7 présents en même temps. On a pu travailler avec chacun d'enter vous, et ce,
8 séparément.
9 R. Dois-je répondre ?
10 Q. Oui, je vous prie.
11 R. Merci. Vous voyez, même mon patronyme n'est pas bien épelé ici. Je
12 présume quant à moi que certains d'entre eux citaient mon nom également. De
13 ce que je me souviens, le ministère de la Défense ne sait même pas que je
14 suis en vie. Pourquoi serais-je important pour Zagreb ? En quoi le serais-
15 je ? Donc, je ne sais absolument pas de quoi il s'agit.
16 Q. Très bien. Dans ce cas, je vous remercie de vos réponses. Je n'ai pas
17 d'autres questions à vous poser.
18 M. ZIVANOVIC : [interprétation] A la première page de ce document, au
19 paragraphe 5 -- 5, je répète, de ce même document. Non pas tout le
20 document.
21 Mme CLANTON : [interprétation] Monsieur le Président.
22 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, très bien.
23 Mme CLANTON : [interprétation] Je crois que le conseil de la Défense s'est
24 servi de ce document et cela indique qu'il a posé une question et que cette
25 ligne sur laquelle il a posé la question, et la question était -- on y a
26 répondu. Je ne pense pas que c'est un fondement suffisant pour verser de
27 document au dossier.
28 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, Maître Zivanovic.
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1 M. ZIVANOVIC : [interprétation] C'est un document de récusation. C'est tout
2 à fait pertinent pour l'évaluation d'un témoin -- de sa déposition et ses
3 éléments de preuve.
4 Mme CLANTON : [interprétation] Le témoin a déclaré qu'il n'avait jamais vu
5 ce document et qu'il n'en est pas averti. On lui a posé la question et il a
6 répondu à la question.
7 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
8 [La Chambre de première instance se concerte]
9 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, plutôt que de vous
10 demander de verser un nouveau document, nous pensons que tout ce que vous
11 souhaitez verser est d'ores et déjà versé, donc nous n'avons pas besoin du
12 document d'ores et déjà. Donc, nous n'allons pas --
13 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Dans ce cas, je retire ma demande.
14 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. Merci. Et vous venez de
15 terminer de votre contre-interrogatoire, Maître Zivanovic ?
16 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
17 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Clanton, des questions
18 supplémentaires ?
19 Mme CLANTON : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président.
20 Nouvel interrogatoire par Mme Clanton :
21 Q. [interprétation] Monsieur Berghofer, tout à l'heure le conseil de la
22 Défense vous a posé des questions sur une audience à laquelle vous avez
23 participé en 1996 qui s'est tenue à La Haye, et vous avez décrit pour les
24 Juges de la Chambre que lorsque vous êtes arrivé pour cet événement, vous
25 avez déposé, et c'était en public, il y avait des journalistes; est-ce bien
26 exact ?
27 R. Vous voulez dire pour ce Tribunal ici ? En 1996 ?
28 Q. Oui. Ce Tribunal ici à La Haye.
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1 R. En ce qui concerne Slavko Dokmanovic ?
2 Q. En mars 1996, quand vous êtes venu pour l'audience, et le conseil de la
3 Défense vous a posé la question, vous avez dit qu'il y avait un
4 fonctionnaire serbe de haut rang qui était présent dans le hangar à Ovcara.
5 Vous souvenez-vous qu'il s'agissait donc d'une audience publique et qu'il y
6 avait des journalistes ?
7 R. Oui, c'était bien public. La salle était une grande salle. Mais le
8 conseil de la Défense m'a posé une question, mais je ne me souviens pas. Je
9 me souviens uniquement que j'ai, de la part de la personne qui était
10 chargée de la chose -- qu'il m'a fait savoir que devais procéder de la
11 sorte. Comment se fait-il que l'on ait saisi M. Dokmanovic ?
12 Q. Et, Monsieur Berghofer, lorsque cette audience a pris fin, est-ce que
13 les journalistes sont partis ?
14 R. Oui. Et les caméras ont été éteintes. Enfin, c'est ce qu'on m'a dit.
15 Q. Monsieur Berghofer, vous souvenez-vous que ce jour-là - cela aurait été
16 le 27 mars 1996 - que vous avez reçu des nouvelles de votre famille en
17 Croatie ?
18 R. Oui.
19 Q. Quelles étaient les nouvelles que vous avez reçues concernant votre
20 famille en Croatie ?
21 R. Le père de mon épouse était mort.
22 Q. Avez-vous reçu ces informations alors que vous étiez ici à La Haye ?
23 R. Oui, ici. Le Président m'a dit : Désolé cette situation, et il m'a
24 exprimé ses condoléances.
25 Q. Monsieur Berghofer, ce Juge qui présidait vous a exprimé ses
26 condoléances, c'était quand vous êtes revenu à huis clos ?
27 R. Oui, je crois que c'est ainsi que ça s'est passé.
28 Q. Vous souvenez-vous que le Président de cette affaire vous a dit qu'en
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1 raison de cette situation très difficile, que le Tribunal souhaiterait
2 savoir de votre part immédiatement et que vous pourriez donc prendre un
3 avion et retourner chez vous et retrouver votre famille en Croatie
4 immédiatement ?
5 R. Si c'est bien cela, lorsque je suis revenu pour cette autre déclaration
6 30 minutes plus tard, il n'y avait pas grand-chose de plus que je pouvais
7 ajouter. J'en avais terminé en une minute ou deux.
8 Q. Monsieur Berghofer, quand vous êtes revenu pour cette conversation avec
9 le Procureur et le Président dans les 30 minutes qui ont suivies, est-ce
10 que ceci répondait à la question sur M. Dokmanovic, de donner, donc, son
11 nom aux Juges de la Chambre ?
12 R. Oui. Mais, Messieurs les Juges, à l'époque je ne savais pas encore. Je
13 crois que c'est juste à ce moment-là que j'ai appris que la personne est
14 décédée. Donc, tout ceci s'est passé en l'espace d'une ou deux minutes.
15 Q. Monsieur Berghofer, lorsque vous êtes revenu au Tribunal en 1998, vous
16 souvenez-vous d'avoir comparu dans l'affaire le Procureur contre Slavko
17 Dokmanovic en février 1998 et d'avoir déposé dans cette affaire ?
18 R. Oui, tout à fait.
19 Q. Et à ce moment-là, avez-vous répondu à toutes les questions qui vous
20 ont été posées de façon exacte et conforme à la vérité ?
21 R. Oui. Et je l'ai même vu.
22 Q. Vous l'avez vu dans le prétoire; c'est exact ?
23 R. Oui.
24 Q. Monsieur Berghofer, je vais maintenant changer de sujet. Pendant le
25 contre-interrogatoire, le conseil de la Défense vous a posé des questions
26 sur des réunions ou des discussions ou le fait de partager les informations
27 avec les services de Renseignements croates, notamment le ministère de la
28 Défense. On vous a permis de regarder deux documents sur lesquels figure
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1 votre nom.
2 La question que je souhaite vous poser, c'est celle-ci : à chaque fois que
3 vous avez déposé devant ce Tribunal, avez-vous déposé en vous fondant sur
4 vos souvenirs, à savoir de façon exacte et conformément à la vérité ?
5 R. C'est exact.
6 Q. Vous a-t-on jamais demandé, les autorités de Croatie, y compris le
7 ministère de la Défense, vous ont-ils jamais demandé de vous fournir des
8 renseignements sur ce que vous saviez à propos d'Ovcara de façon à ce qu'on
9 puisse faire un lien avec votre déposition à La Haye ?
10 R. A Zagreb uniquement, devant un tribunal, il y avait un monsieur qui est
11 venu de Belgrade et j'ai dû faire une déclaration semblable à celle que
12 j'ai donnée ici. Et lorsque j'ai assisté à différentes audiences concernant
13 des crimes de guerre précis, qui se sont déroulés à Vukovar, mais ceci
14 n'avait rien à avoir avec Ovcara.
15 Pour ce qui est d'Ovcara, je sais que personne ne m'a jamais posé des
16 questions dessus parce qu'ils ne connaissent pas le chiffre exact des
17 personnes qui étaient là.
18 Q. Je vais vous demander de marquer une pause à cet endroit. Ces
19 poursuites judiciaires que vous avez citées à Zagreb et à Belgrade, il
20 s'agit de procédures locales; il n'y a pas d'interaction entre cela et
21 quelqu'un au Tribunal pénal international, les Procureurs ou les Juges,
22 n'est-ce pas ?
23 R. C'est exact.
24 Q. Je n'ai pas d'autres questions à vous poser.
25 Mme CLANTON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
26 [La Chambre de première instance se concerte]
27 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.
28 Monsieur Berghofer, ceci conclut votre déposition, celle que vous avez
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1 faite devant le Tribunal en tant que témoin. Vous pouvez repartir. Nous
2 vous remercions d'être venu à La Haye apporter votre concours au Tribunal.
3 Nous vous souhaitons un bon voyage de retour.
4 L'huissier va vous raccompagner. Merci.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci beaucoup.
6 [Le témoin se retire]
7 Mme CLANTON : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que vous
8 pouvez, s'il vous plait, nous accorder quelques instants, le temps de
9 changer de place, s'il vous plait.
10 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien sûr.
11 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
12 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour, Madame le Témoin.
13 Est-ce que vous m'entendez dans une langue que vous comprenez ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
15 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.
16 Veuillez nous donner vos prénom, nom de famille, date de naissance et
17 appartenance ethnique, s'il vous plait.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Samira Baranjek, 21 février 1966, à Vukovar,
19 Musulmane.
20 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie. Vous êtes sur le
21 point de prononcer la déclaration solennelle en vertu de laquelle les
22 témoins s'engagent à dire la vérité. Je souhaite vous signaler qu'en
23 faisant cela, vous vous exposez à la sanction de parjure dans le cas où
24 vous fourniriez des éléments d'information non véridiques au Tribunal.
25 Je vais maintenant vous demander de prononcer la déclaration
26 solennelle que vous remettra l'huissier.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
28 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
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1 LE TÉMOIN : SAMIRA BARANJEK [Assermentée]
2 [Le témoin répond par l'interprète]
3 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie beaucoup. Veuillez
4 vous asseoir.
5 Mme FRIEDMAN : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Rachel
6 Friedman pour l'Accusation.
7 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] C'est votre témoin, je vous en prie,
8 Madame Friedman.
9 Interrogatoire principal par Mme Friedman :
10 Q. [interprétation] Bonjour, Madame le Témoin.
11 R. Bonjour.
12 Q. Où viviez-vous en novembre 1991 ?
13 R. A Vukovar.
14 Q. Etiez-vous mariée à l'époque ?
15 R. Oui.
16 Q. Comment s'appelait votre mari ?
17 R. Ivan Baranjek.
18 Q. Vous et votre mari, avez-vous eu des enfants ?
19 R. Oui, deux filles.
20 Q. Comment s'appellent-elles ?
21 R. Tamara et Ivana Fransiska.
22 Q. Quel âge avaient vos filles en novembre 1991 ?
23 R. Tamara avait sept ans et Ivana Fransiska avait six mois.
24 Q. Aviez-vous un travail ?
25 R. Non.
26 Q. Votre mari avait-il un travail ?
27 R. Oui. Mon mari travaillait à l'hôpital de Vukovar.
28 Q. Quel était son poste à cet endroit ?
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1 R. C'était un infirmier.
2 Q. Et outre le fait d'avoir travaillé comme infirmier, comment votre mari
3 passait-il le reste de son temps ?
4 R. Eh bien, il peignait. C'était un poète. Il sculptait également. Il a
5 publié deux livres.
6 Q. Et quelle était son appartenance ethnique ?
7 R. Croate. Catholique.
8 Q. Vous ou votre mari, connaissiez-vous Goran Hadzic avant la guerre ?
9 R. Je le connaissais de vue simplement, mais mon mari le connaissait un
10 petit peu mieux.
11 Q. Et comment votre mari l'a-t-il rencontré ?
12 R. Eh bien, il est venu à l'hôpital, Hadzic, et mon mari travaillait dans
13 le service TVC, et il demandait de l'aide à quelqu'un qui était proche de
14 lui. Je ne sais pas qui c'était. C'était un patient de l'hôpital.
15 L'INTERPRÈTE : L'interprète demande à ce que le témoin se rapproche du
16 microphone, s'il vous plaît.
17 Mme FRIEDMAN : [interprétation]
18 Q. Madame, avez-vous entendu ce commentaire ? Les interprètes souhaitent
19 que vous vous rapprochiez un petit peu du microphone de façon à mieux vous
20 entendre.
21 R. Hm-hm.
22 Q. Après cette première rencontre entre votre mari et Goran Hadzic, tout
23 d'abord, vous souvenez-vous environ à quel moment ceci s'est produit ?
24 R. Veuillez répéter cette question-là, s'il vous plaît.
25 Q. Oui. Lorsque votre mari et Goran Hadzic se sont rencontrés à l'hôpital
26 de Vukovar, vous souvenez-vous de quelle année il s'agissait environ ?
27 R. 1988 ou 1989, je n'en suis pas certaine.
28 Q. Après cette première réunion ou entrevue, sont-ils restés en contact ?
Page 3098
1 R. Oui.
2 Q. Veuillez nous parler de la façon dont ils sont restés en contact.
3 R. Mon mari lisait de la poésie sur ce qui était alors Radio Vukovar.
4 Goran Hadzic écrivait de la poésie aussi et il souhaitait que ses poèmes
5 soient lus également.
6 Q. Et votre mari l'a-t-il aidé de quelque manière que ce soit à faire en
7 sorte que ses poèmes soient lus ?
8 R. Oui. Cela s'est fait par l'intermédiaire du directeur de Radio Vukovar;
9 mon mari était en bons termes avec lui. Donc, certains de ses poèmes ont
10 été lus également.
11 Q. Et avez-vous jamais eu l'occasion de voir Goran Hadzic au moment où il
12 était en contact avec votre mari ?
13 R. Eh bien, je l'ai vu à une ou deux reprises, car dans la maison où nous
14 habitions, mon mari avait un studio, et M. Hadzic est venu de temps en
15 temps dans son studio. C'est là qu'ils regardaient les tableaux, qu'ils
16 lisaient des poèmes.
17 Q. Est-ce que vous pourriez dire que vous l'avez vu plusieurs fois ou
18 quelques fois ?
19 R. Oui, trois ou quatre fois.
20 Q. Votre mari vous a-t-il dit quelque chose à propos de Hadzic, d'où il
21 était originaire ou quel métier il exerçait ?
22 R. Oui. Il m'a dit qu'il travaillait quelque part dans un entrepôt à
23 Pacetin.
24 Q. L'escalade du conflit vous a-t-elle contrainte à un quelconque moment à
25 quitter votre maison ?
26 R. Oui.
27 Q. Quand cela est-il arrivé ?
28 R. En octobre de l'année 1991, lorsque Vukovar a été bombardée.
Page 3099
1 Q. Où êtes-vous allée ?
2 R. A ce moment-là, je me suis rendue à l'hôpital de Vukovar, accompagnée
3 de mon mari et de mes enfants. En réalité, mon mari travaillait à
4 l'hôpital, et moi je me suis rendue dans l'abri qui se trouvait là.
5 Q. Combien de temps avez-vous passé à l'hôpital ?
6 R. Quinze jours environ. Quinze jours dans l'abri de l'hôpital.
7 Q. Et où êtes-vous allée après cela ?
8 R. Ensuite, mon mari avait la charge des blessés. Ils les ont emmenés à
9 Komerc, Borovo. Je m'y suis rendue avec mes enfants parce qu'il y avait
10 également un abri à cet endroit-là.
11 Q. Et que faisiez-vous lorsque vous étiez dans l'abri ?
12 R. Eh bien, je m'occupais de mes enfants. Je rendais visite aux blessés,
13 et autant que faire se peut, j'essayais d'aider. Et mon mari exerçait son
14 métier.
15 Q. Combien de personnes s'étaient réfugiés dans cet abri ?
16 R. A Borovo Komerc, il y avait beaucoup de gens. Je ne pourrais pas vous
17 donner de chiffres exacts, mais ils étaient très nombreux.
18 Q. Et outre Borovo Komerc, y avait-il d'autres endroits à proximité où les
19 gens se mettaient à l'abri ?
20 R. Oui, dans l'usine elle-même. C'est là que des gens se sont également
21 mis à l'abri.
22 Mme FRIEDMAN : [interprétation] Je vais maintenant demander à M. Laugel de
23 nous permettre de visionner le numéro 65 ter 4789.2. Cela se trouve à
24 l'intercalaire numéro 4, au compteur 23:18 à 25:55. Je vais demander à M.
25 Laugel de bien vouloir visionner ces images à 25:20 et de faire une pause à
26 25:55 [comme interprété].
27 [Diffusion de la cassette vidéo]
28 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
Page 3100
1 "Pendant la nuit, l'armée avait fermé la partie nord de Vukovar où se
2 trouvait l'hôpital, ce qui a retardé l'évacuation. Le convoi de la Croix-
3 Rouge a dû rebrousser chemin, et cela n'a pas plu au délégué.
4 On s'était habitués à une meilleure collaboration de la part de la JNA
5 avant-hier, mieux que ce que j'ai aujourd'hui.
6 Il a trouvé que le commandant de l'armée n'était pas sympathique.
7 Vous n'êtes pas le bienvenu si vous ne… et ces soldats ont été tués
8 cette nuit également. C'est la guerre ici.
9 La guerre qui avait détruit la ville et qui avait complètement démoli
10 l'hôpital, et pour ce qui est de l'opération d'aujourd'hui, c'était l'armée
11 qui en était responsable. Le commandant a fait déplacer 300 civils,
12 essentiellement des Croates, qui avaient trouvé refuge sur les terrains de
13 l'hôpital. Ils ont été les premiers à partir. Mais, la première partie de
14 cette opération consistait à transférer 420 patients de l'hôpital, la
15 plupart sur des brancards, qui avaient trouvé refuge dans le sous-sol qui
16 faisait l'objet de tirs et qui était assiégé depuis deux mois. Egalement,
17 il y a dix mères et leurs bébés qui venaient de naître et qui sont nés dans
18 des conditions absolument épouvantables. L'évacuation a été entravée par le
19 fait qu'il y avait des soupçons non seulement entre les Serbes et les
20 Croates, mais entre l'armée fédérale et la Croix-Rouge internationale. Et
21 la Croix-Rouge a protesté à nouveau.
22 Comme vous avez dû remarquer, le comité international de la Croix-
23 Rouge n'est absolument pas en mesure de remplir la tâche qui lui a été
24 confiée par les parties.
25 Le commandant a rejeté la protestation d'emblée : La Croix-Rouge
26 internationale, a-t-il dit, tournait autour de la ville en essayant de
27 contrôler les unités de l'armée yougoslave.
28 Il y a eu un autre problème pour le personnel de l'hôpital, les
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1 véritables héros et héroïnes de Vukovar, lorsque leurs patients ont dû
2 attendre pendant des heures avant de connaître la destination où on les
3 emmenait. La route principale en direction de la Croatie était bloquée par
4 des combats intenses. En lieu et place de cela, le convoi s'est dirigé vers
5 l'est en direction d'un hôpital en Serbie, où les blessés ont passé la
6 nuit."
7 Mme FRIEDMAN : [aucune interprétation]
8 [Diffusion de la cassette vidéo]
9 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
10 "Et dans une usine près de Vukovar où les Croates ont été retenus
11 jusqu'au dernier moment, l'armée a encerclé l'hôpital et a rassemblé des
12 milliers de civils et 500 anciens soldats. Il y a eu une migration massive
13 et forcée de personnes en ce moment. Encore une fois, chaque partie…"
14 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
15 Mme FRIEDMAN : [interprétation] Nous allons maintenant demander à M. Laugel
16 de nous montrer un arrêt sur image au compteur 25:20, et si nous pourrions
17 avoir le commentaire du témoin là-dessus. A 25:36, pardonnez-moi.
18 [Diffusion de la cassette vidéo]
19 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
20 Mme FRIEDMAN : [interprétation] Veuillez m'excuser pour cette difficulté
21 technique.
22 Q. Madame Baranjek, à l'endroit que nous avons vu dans la deuxième partie
23 de la vidéo, reconnaissez-vous l'endroit et avez-vous reconnu certaines
24 personnes sur ces images ?
25 Mme FRIEDMAN : [interprétation] Je crois que c'était au compteur 24:25.
26 R. Oui, Mme Katica, qui était avec nous à Komerc, et ensuite elle s'est
27 rendue à l'usine de Borovo.
28 Q. Donc, l'endroit que nous avons vu, le bâtiment que nous avons vu, est-
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1 ce que vous l'avez reconnu ?
2 R. Oui. Ça, c'est Borovo Naselje, oui.
3 Q. Et savez-vous à quel moment les gens ont commencé à sortir de l'abri
4 que nous avons pu voir sur ces images ?
5 R. Le 19 novembre 1991. C'était aux heures du matin, jusqu'à midi. Depuis
6 l'usine de Borovo.
7 Q. Et savez-vous où on les a emmenés ensuite ?
8 R. Je ne sais rien à leur sujet. Je ne sais pas où les autocars sont
9 allés. Je sais, d'après ce que savait cette personne, je sais qu'ils sont
10 allés à Vukovar, à Velepromet, mais je ne l'ai pas vu moi-même.
11 Q. Vous avez parlé d'une femme. De qui voulez-vous parler ?
12 R. Mme Katica, celle que j'ai évoqué il y a quelques instants, celle qui
13 porte un manteau rouge que l'on voit sur ces images.
14 Q. Je vous remercie.
15 Mme FRIEDMAN : [interprétation] L'Accusation demande le versement au
16 dossier du numéro 65 ter 4789.2, s'il vous plaît.
17 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ceci sera versé au dossier et recevra
18 une cote.
19 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ceci recevra la cote P1078.
20 Mme FRIEDMAN : [interprétation]
21 Q. Madame Baranjek, vous qui étiez dans l'abri de Borovo Komerc, est-ce
22 que vous vous êtes également rendus ?
23 R. Oui. Mais nous n'avons quitté Komerc que dans l'après-midi, vers 16
24 heures 30.
25 Q. Et pourquoi êtes-vous sortis de Kormerc ?
26 R. Vers 16 heures 30. Ça n'est pas 14 heures 30; 16 heures 30. Komerc
27 avait été bombardée. Ils lançaient des bombes lacrymogènes, c'était en
28 flammes, et nous avons dû sortir. Et avant cela, l'armée nous avait lancé
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1 des appels pour que nous sortions. Et ceci avait commencé dès les premières
2 heures du matin. Ils utilisaient des haut-parleurs.
3 Q. Et lorsque vous êtes sortie, quelles forces armées avez-vous pu
4 distinguer ou reconnaître à ce moment-là ?
5 R. Oui. C'était l'armée régulière, la JNA, essentiellement des jeunes
6 soldats. Et derrière la clôture de Komerc, un peu plus bas, il y avait des
7 forces paramilitaires en habit civil, en uniforme, en uniforme de
8 camouflage, armées.
9 Q. Et qu'ont-ils fait au moment où vous êtes sortis ?
10 R. Vous voulez parler de l'armée ou… ?
11 Q. Oui, l'armée.
12 R. Rien. Les gens de l'armée nous ont dit de nous tenir dans une colonne.
13 Les femmes et les enfants sont sortis en premier, et ensuite ils ont fait
14 sortir les blessés. Donc, nous étions tous debout dans une colonne.
15 Et la JNA ne nous a rien fait de mal.
16 Q. Et vous êtes restée dans cette colonne pendant combien de temps ?
17 R. Eh bien, pendant une heure, voire plus longtemps. Jusqu'au moment de
18 l'arrivée des autocars.
19 Q. Vous a-t-on emmenée quelque part depuis cet endroit en autocar ?
20 R. Non. De là, nous avons dû partir à pied car les forces paramilitaires
21 qui se trouvaient là, ces hommes armés, devant ne permettaient pas de
22 passer, donc nous avons dû marcher le long de la route 3 kilomètres, voire
23 peut-être même davantage, jusqu'à Trpinska Cesta, en colonne.
24 Q. A Trpinska Cesta, est-ce vous êtes montés à bord des autocars ?
25 R. Oui. C'est à cet endroit que nous sommes montés à bord des autocars.
26 Q. Combien d'autocars y avait-il ?
27 R. Eh bien, il y en avait un certain nombre, des colonnes d'autocars, de
28 camions. Je suis montée à bord du troisième autocar, si vous regardez
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1 depuis le début.
2 Q. Et où cet autocar vous a-t-il emmenés ?
3 R. Ils nous ont conduits le long de Trpinska Cesta. A ce stade, nous avons
4 traversé le village de Vare, nous avons traversé des champs et nous sommes
5 arrivés à Borovo Selo.
6 Q. Et y avait-il d'autres véhicules qui escortaient les autocars ?
7 R. Oui. A l'avant de la colonne, il y avait un véhicule militaire qui
8 s'appelait un Pinzgauer.
9 Q. Où est-ce que les autocars ont fini par arriver ?
10 R. Ils sont arrivés devant l'école élémentaire de Borovo Selo.
11 Q. Avez-vous pu observer quoi que ce soit dans la zone autour de l'école ?
12 R. Oui. En face de l'école, maintenant il y a un terrain de sport -- ou
13 plutôt, lorsque nous sommes arrivés là-bas, il y avait un bulldozer qui se
14 trouvait là-bas. Bon, je ne sais pas, il devait travailler, faire quelque
15 chose. Je n'en sais rien.
16 Q. Et est-ce que vous vous trouviez dans l'autocar avec votre famille ?
17 R. Oui. Il s'agissait de moi-même, de mon époux et de nos enfants.
18 Q. Est-ce que vous pouvez nous décrire ce qui s'est passé lorsque vous
19 êtes descendus de l'autocar ?
20 R. Ecoutez, lorsque nous sommes sortis de l'autocar, un policier de
21 l'époque, qui connaissait mon mari d'ailleurs, a commencé à le rouer de
22 coups. Il m'a donné l'ordre d'aller dans l'école.
23 Q. Lorsque vous êtes arrivés à l'école élémentaire, est-ce que cela s'est
24 passé pendant la soirée du 19 novembre ?
25 R. Oui. La nuit était déjà tombée lorsque nous sommes arrivés.
26 Q. Et avant que nous n'abordions d'autres détails, est-ce que vous
27 pourriez nous dire combien de temps vous avez passé dans
28 l'école ? Quand avez-vous fini par quitter l'école ?
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1 R. J'y ai passé toute la nuit. Ce n'est que le lendemain soir que je suis
2 partie de l'école.
3 Q. Lorsque vous êtes arrivée dans cette école, est-ce que quoi que ce soit
4 vous a été confisqué ?
5 R. Oui. Devant l'école, il y avait des hommes, des femmes; il s'agissait
6 de la population locale. Ils nous crachaient dessus. Ils nous ont enlevé
7 nos sacs. Bon, ils cherchaient apparemment des armes. Ils ont pris les
8 bijoux que nous portions. Ils les ont pris. Et puis, ils nous ont pris
9 également d'autres objets précieux.
10 Q. Lorsque vous êtes entrée dans le bâtiment, est-ce que vous avez pu vous
11 déplacer librement ?
12 R. Non.
13 Q. Quelles étaient les forces qui se trouvaient dans le bâtiment ? Quelles
14 étaient les personnes qui contrôlaient ce que vous faisiez ?
15 R. Il y avait un certain nombre de personnes locales qui vivaient dans le
16 village, et puis il y avait des gens venus d'ailleurs, des gens que je ne
17 connaissais pas, mais ils portaient tous un uniforme. Il y avait des
18 couvre-chefs avec des cocardes. Mais bon, il y avait différents uniformes.
19 Ils avaient des armes…
20 Q. Et est-ce que vous avez vu M. Hadzic dans l'école élémentaire ?
21 R. Oui, oui. Il est venu par la suite, lorsque j'étais encore debout dans
22 le couloir, que j'attendais d'être inscrite.
23 Q. Et où l'avez-vous exactement observé ? Vous, vous vous trouviez dans le
24 couloir. Mais où se trouvait-il, lui ?
25 R. Il est passé par le couloir et puis il est entré dans la salle de
26 gymnastique de cette école.
27 Q. Et est-ce que vous l'avez vu ou entendu faire quelque chose dans la
28 salle de gymnastique ?
Page 3106
1 R. Oui. Lorsqu'il est entré, il est entré accompagné de plusieurs de ses
2 hommes. Il vociférait. Il leur a donné l'ordre de faire quelque chose. Il a
3 demandé où se trouvaient différentes personnes. Puis il est entré dans la
4 salle de gymnastique. Il y a certaines personnes qui se présentaient. En
5 fait, ils étaient en train d'être interrogés.
6 Q. Mais est-ce que vous l'avez entendu dire quelque chose de précis dont
7 vous vous souviendriez ?
8 R. Oui, oui. Lorsqu'il est entré dans la salle de gymnastique, il a dit
9 que tout le monde allait être interrogé et que toute personne non coupable
10 aurait le droit de rentrer chez elle.
11 Q. Et est-ce que lui-même a interrogé des gens ?
12 R. Mais écoutez, moi, je ne sais pas s'il a interrogé quelqu'un, parce que
13 je ne l'ai pas entendu, mais le fait est qu'il était dans la salle de
14 gymnastique et il recherchait des gens. Il a posé des questions. Il y avait
15 deux personnes qui portaient une blouse blanche, et il a dit : Est-ce que
16 Baranjek est là également ?
17 Voilà. Voilà ce que moi j'ai entendu, moi-même.
18 Q. Est-ce que vous avez entendu une réponse à la question qu'il a posée, à
19 savoir est-ce que Baranjek est là ?
20 R. Non.
21 Q. A ce moment-là, est-ce que vous avez pu voir où se trouvait votre mari
22 ou entendre où se trouvait votre mari ?
23 R. Oui, oui. J'ai entendu qu'il se trouvait dans la salle de gymnastique.
24 Et puis, j'ai entendu sa voix également lorsqu'il s'est présenté, lorsqu'il
25 a dit son nom, mais je ne pouvais pas le voir parce que moi j'étais sur le
26 côté.
27 Q. Et avez-vous entendu Goran Hadzic dire quoi que ce soit aux hommes qui
28 vous avaient emmenée jusqu'à l'école ?
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1 M. GOSNELL : [interprétation] Objection. Voilà une question fort
2 directrice.
3 Il n'a pas été établi qu'il ait dit quoi que ce soit.
4 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Friedman.
5 Mme FRIEDMAN : [interprétation] J'ai posé la question. Elle a indiqué que
6 ce qu'il avait dit aux personnes qui se trouvaient dans la salle de
7 gymnastique, et moi j'ai tout simplement demandé s'il avait dit quoi que ce
8 soit aux personnes qui les avaient emmenés à la salle de gym.
9 M. GOSNELL : [interprétation] Oui, mais il y a une suggestion qui se glisse
10 dans la question, à savoir à propos de ce que Goran Hadzic a dit, ou s'il
11 aurait dit quoi que ce soit à cette personne. Et là, il y a une suggestion
12 qui est présentée.
13 Mme FRIEDMAN : [interprétation] Je peux tout à fait reformuler la question.
14 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, je vous en prie.
15 Mme FRIEDMAN : [interprétation]
16 Q. Alors, est-ce que Goran Hadzic a dit quelque chose, si tant est qu'il
17 ait dit quoi que ce soit, aux personnes qui vous ont emmenée à l'école ?
18 R. La police - que l'on appelait à l'époque la milice, "milicija" - est
19 entrée sur ces lieux. A un moment donné, M. Hadzic leur a dit en criant de
20 ressortir et de ne pas s'immiscer dans ce qu'il faisait, dans son travail.
21 Q. Est-ce qu'à un moment donné vous avez été emmenée quelque part d'autre
22 dans le bâtiment ?
23 R. Oui. Une femme est arrivée, et étant donné que moi j'étais sur le côté
24 avec mes enfants, nous étions debout, elle nous a emmenés dans une pièce de
25 taille plus petite. Les concierges, en fait, avaient une petite pièce,
26 c'est là qu'ils sonnaient la cloche de l'école. Donc, il y avait une table,
27 il y avait deux ou trois chaises, et il y avait également des émetteurs
28 radio sur les pupitres de l'école.
Page 3108
1 Q. Et qu'est-il advenu dans cette pièce ?
2 R. La femme en question a pris note de mon nom, des noms de mes enfants,
3 de mon appartenance ethnique. Elle a écrit toutes ces coordonnées.
4 Q. Est-ce que quelqu'un d'autre est entré dans cette pièce ?
5 R. M. Hadzic est entré dans la pièce plus tard. Il est arrivé, est entré
6 rapidement, avec une certaine arrogance. Il m'a demandé : Où est ton mari ?
7 Donc, il a pris l'émetteur radio - comment est-ce qu'on appelle cela ? - il
8 l'a pris pour parler.
9 Q. Et est-ce qu'il a parlé dans l'émetteur radio ?
10 R. Oui. Oui, oui, d'ailleurs il criait, il riait. Il criait, il était
11 euphorique : "Belgrade, envoyez des personnes, envoyez des réservistes. Et
12 demain, moi je peux aller à Osijek."
13 Mme FRIEDMAN : [interprétation] Je vais demander à M. Laugel de nous monter
14 un extrait vidéo, le numéro étant 4896.1 de la liste 65 ter. Alors, l'heure
15 est 23:29 à 24:03. Cela se trouve à l'onglet 13.
16 M. GOSNELL : [interprétation] Objection, parce qu'il y a un nom qui a été
17 mentionné par le témoin qui n'a pas été consigné au compte rendu
18 d'audience. Un nom, en fait, qui a été donné lorsqu'il s'agissait de ce
19 qu'il avait dit dans l'émetteur radio.
20 Mme FRIEDMAN : [interprétation] Je vous remercie.
21 Q. Avant que nous vous montrions l'extrait, Madame Baranjek, est-ce que
22 vous avez entendu -- donc, je vous avais posé la question, je vous avais
23 demandé si vous aviez entendu ce que M. Hadzic disait dans la radio, et
24 vous avez mentionné le nom d'une personne à qui il parlait. Est-ce que vous
25 pourriez répéter ce nom, je vous prie.
26 R. Mladjo.
27 Q. Merci.
28 [Diffusion de la cassette vidéo]
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1 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
2 "Oui, ça s'est passé il y a quatre jours alors que nous libérions Borovo
3 Naselje, mes unités."
4 Mme FRIEDMAN : [interprétation]
5 Q. Madame Baranjek, est-ce que vous reconnaissez la personne que nous
6 voyons sur la vidéo ?
7 R. Oui, M. Arkan.
8 Q. Il mentionne le lieu de Borovo Naselje. Où se trouve cet endroit ?
9 R. Je n'en sais rien. On peut voir un peu le bâtiment. Il y a un bâtiment
10 résidentiel derrière. Mais où cela se trouve exactement, je n'en sais rien.
11 Q. Merci. Donc, il parle de la libération de Borovo Naselje, et je voulais
12 savoir si les bâtiments que vous avez mentionnés aujourd'hui se trouvent
13 dans les environs de Borovo Naselje ?
14 R. Oui, oui. Oui, c'est Borovo Naselje. La colonne qui se trouvait devant
15 l'usine, tout cela c'est Borovo Naselje.
16 Q. Est-ce que nous pourrions voir le reste de la vidéo.
17 [Diffusion de la cassette vidéo]
18 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
19 "Le journaliste : Est-ce que c'est une blessure grave ?
20 Arkan : Non, non, non, c'est une blessure légère. Je suis reparti
21 immédiatement sur la ligne de front, donc je n'ai quasiment pas été absent
22 de la ligne de front.
23 Le journaliste : Mais il y a un trou dans le fusil également.
24 Arkan : Oui, oui, c'est un trou. Oui, oui, voilà, c'est un petit trou.
25 C'est un trou. C'est un fusil à lunette de petit calibre. Bon, bien, c'est
26 fini, c'est oublié.
27 Le journaliste : Qu'est-ce qui va se passer maintenant ?
28 Arkan : Eh bien, nous poursuivons. Nous allons jusqu'à Osijek."
Page 3110
1 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
2 Mme FRIEDMAN : [interprétation] Et je souhaiterais demander le versement au
3 dossier du document de la liste 65 ter 4896.1.
4 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ce document sera versé au dossier.
5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P1079.
6 Mme FRIEDMAN : [interprétation]
7 Q. Madame Baranjek, nous allons revenir à la présence de Goran Hadzic dans
8 la pièce où il y avait ces émetteurs radio. Est-ce que vous l'avez entendu
9 dire quoi que ce soit lorsqu'il se trouvait là-bas ?
10 R. Oui, oui. Il a demandé à la femme qui avait pris note de mes
11 coordonnées, qui procédait à mon inscription en quelque sorte, il lui a
12 demandé combien de docteurs se trouvaient dans l'école.
13 Q. Et est-ce qu'elle a répondu à cette question ?
14 R. Oui. Elle a dit qu'il y avait le Dr Remedi et le Dr Matic-Kutuzovic qui
15 devaient être transportés à Novi Sad.
16 Q. Et est-ce que la conversation s'est poursuivie entre eux ?
17 R. Non. Une fois de plus, il a appelé par la radio et il a
18 dit : "Braco, envoie des voitures. Il n'y a pas de voitures dans le
19 village."
20 Q. Et que s'est-il passé par la suite, après ceci ? Est-ce que vous êtes
21 restée dans la pièce en question ?
22 R. Non. La femme m'a fait sortir avec mes enfants. Nous avons emprunté le
23 couloir, puis ensuite nous sommes entrés dans une salle de classe où il y
24 avait déjà des femmes et des enfants. Nous étions une vingtaine.
25 Q. Et est-ce que quelqu'un montait la garde de cette pièce ?
26 R. Oui. Oui, oui, il y avait un garde devant la salle de classe. Nous,
27 nous étions à l'intérieur de la salle de classe, et il fermait la porte à
28 clé.
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1 Q. Cette nuit-là, est-ce qu'il y a des gens qui sont sortis de la pièce ou
2 qui sont entrés de cette pièce-là, de cette salle de classe ?
3 R. Est-ce que vous pourriez répéter votre question.
4 Q. Cette nuit-là, est-ce qu'il y a des gens qui sont sortis ou entrés dans
5 la salle de classe ?
6 R. Oui. Cette femme, la même femme, elle est entrée dans la salle de
7 classe et elle a amené du lait pour les enfants. Et M. Hadzic aussi, lui
8 est entré dans la salle de classe.
9 Q. Est-ce que vous pourriez nous décrire ce qu'il a fait ou dit alors
10 qu'il se trouvait dans cette pièce ?
11 R. Il a demandé qui est l'épouse de Baranjek. J'ai répondu. Il m'a
12 regardée puis il est sorti. Non, en fait, avant il m'a demandé, il m'a dit
13 : "Où est ton mari ?" Et je lui ai dit : "Vous l'avez vu dans la salle de
14 gymnastique."
15 Q. Et est-ce qu'il y a des femmes que l'on a fait sortir de la salle de
16 classe ?
17 R. Oui, oui. Il y a un certain nombre de femmes que l'on a fait sortir et
18 qui ont été interrogées dans une autre salle de classe.
19 Q. Et lorsqu'elles sont revenues dans la pièce où vous vous trouviez, quel
20 était leur aspect ?
21 R. Elles avaient été rouées de coups.
22 Q. Et comment est-ce qu'ils appelaient les femmes ? Ils les montraient du
23 doigt ? Ils les appelaient en disant leurs noms ?
24 R. Non, ils disaient leurs noms. Ils les appelaient par leurs noms parce
25 qu'ils avaient une liste.
26 Q. Est-ce que vous avez pu voir la liste ?
27 R. Oui, j'ai vu la liste. Je l'ai vue alors que je me trouvais près de la
28 porte et que je parlais au garde. Mon prénom et mon de famille avaient été
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1 biffés avec un marker rouge. Et ils ne m'ont pas fait sortir pour
2 m'interroger.
3 Q. Est-ce que vous avez vu Goran Hadzic à un autre moment alors que vous
4 vous trouviez à l'école élémentaire ?
5 R. Oui, oui, je l'ai vu deux ou trois fois encore alors qu'il passait dans
6 le couloir et qu'il entrait dans la salle où les personnes étaient
7 interrogées. Moi, j'ai demandé à pouvoir sortir, et le garde qui montait la
8 garde auprès de notre salle de classe m'a laissé sortir ainsi qu'une autre
9 femme pour que nous puissions fumer devant la porte, et c'est là que j'ai
10 vu Goran Hadzic passer. Je l'ai entendu vociférer, hurler, il a dit à ses
11 hommes de faire leur travail. Je ne sais pas quoi d'autre il disait.
12 Mais quoi qu'il en soit, il leur criait dessus.
13 Q. Et qu'est-ce qui vous a fait conclure qu'il s'agissait en fait de ses
14 hommes ?
15 R. Parce que tout le monde lui obéissait.
16 Q. Alors, outre ce que vous avez vu, est-ce que vous avez entendu d'autre
17 chose de la part des femmes qui se trouvaient avec vous, et par là
18 j'entends à propos des actions de Hadzic, de ses agissements ou de ce qu'il
19 a dit cette nuit-là ?
20 R. Oui. Il y avait une grand-mère, une femme âgée, qui était assise dans
21 le couloir. Et elle a dit -- d'ailleurs, nous avons toutes entendu des
22 gémissements qui venaient de la pièce en question. Mais cette grand-mère a
23 été témoin visuel de tout ce qui s'est passé dans la salle. Nous n'avons
24 pas passé tellement de temps dans le couloir.
25 Q. Que vous a-t-elle dit ?
26 R. Elle m'a parlé de mon mari. Lors de son interrogatoire dans cette
27 salle.
28 Je l'ai vu passer, car j'étais encore dans le couloir à ce moment-là.
Page 3114
1 Il est entré dans cette salle de classe. Après cela, la grand-mère a dit
2 qu'il a dû être porté pour sortir de cette pièce, entouré d'une couverture
3 ensanglantée.
4 Q. Vous avez déclaré que vous avez quitté l'école le lendemain du
5 jour où vous étiez arrivés, le 20 novembre. Où vous êtes-vous rendus?
6 R. On nous a demandé si quelqu'un avait des proches en Serbie, en
7 Vojvodina, et j'ai dit que j'avais la famille de ma mère en Vojvodina, à
8 Odzaci. Plusieurs femmes, dont moi-même, ont déclaré que nous nous y
9 rendrions. On nous a dit d'attendre. C'est le jeune homme qui était le
10 gardien de notre salle qui nous l'a dit.
11 Q. Lorsque vous avez quitté l'école, avez-vous effectivement été emmenés à
12 Odzaci en Vojvodine ?
13 R. Oui. Nous y avons été emmenés. Je suis descendue de l'autocar, mais je
14 ne suis pas allée là où j'étais censée aller. C'était un centre de
15 regroupement. Avec mes enfants et une amie, une de mes amis, nous sommes
16 allés plus loin en prenant la route, nous sommes entrés dans une
17 boulangerie, nous nous sommes assis pendant quelque temps, et nous avons
18 continué notre chemin toutes seules.
19 Q. Qui était chargé des autocars qui vous ont emmenés en ce lieu ?
20 R. Un homme qui était en uniforme de camouflage nous a amenés et nous a
21 accompagnés jusqu'à l'autocar. Il a déclaré au chauffeur -- et d'ailleurs,
22 ils avaient mis un document de la Croix-Rouge sur l'autocar. Il était armé.
23 Je ne le connaissais pas. Il est monté dans l'autocar avec nous et il a
24 fait le voyage avec nous.
25 Q. Parmi les personnes qui étaient avec vous, y avait-il des hommes ?
26 R. Pourriez-vous répéter la question. Je n'ai pas compris.
27 Q. Vous avez pris l'autocar avec d'autres femmes qui se trouvaient dans la
28 salle de classe. Y avait-il également des hommes dans l'autocar ?
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1 R. Non. Il y avait uniquement le chauffeur et l'homme armé qui portait un
2 uniforme de camouflage.
3 Q. Vous avez dit tout à l'heure, après que vous soyez descendus de
4 l'autocar, vous avez continué le voyage, seuls. Jusqu'à où êtes-vous allés
5 ?
6 R. Il faisait sombre. Mes amies et moi, nous sommes descendues de
7 l'autocar avec les enfants. Nous avons pris la route, nous avons trouvé la
8 pâtisserie et nous y sommes entrés. L'homme nous a demandé d'où nous
9 venions. Nous lui avons dit. Il nous a donné une tasse de café. Il a donné
10 du lait aux enfants. Nous attendions un autobus. Mais il était tard. Il n'y
11 avait plus d'autobus. Donc, en fin de compte, un homme nous a emmenés --
12 L'INTERPRÈTE : La cabine anglaise demande que le nom du lieu soit répété.
13 Mme FRIEDMAN : [interprétation]
14 Q. Quel était l'endroit où vous vous rendiez ?
15 R. Odzak, en Vojvodine.
16 Q. Y a-t-il eu un moment où vous êtes revenue à Vukovar ?
17 R. Non. Uniquement après la guerre.
18 Q. Vous souvenez-vous de l'année ?
19 R. 1998.
20 Q. Avez-vous jamais revu votre mari après avoir quitté l'école à Borovo
21 Selo ?
22 R. Non.
23 Q. Avez-vous jamais rempli un formulaire de personne portée disparue
24 auprès de la Croix-Rouge internationale concernant votre époux ?
25 R. Oui.
26 Q. Voudriez-vous que nous nous arrêtions pendant quelques instants ?
27 R. Non.
28 Q. Bien.
Page 3116
1 Je demanderais à l'huissier d'afficher le document 3390 de la liste
2 65 ter, qui est à l'onglet 2.
3 Madame Baranjek, puis-je vous demander de regarder l'écran. Et si vous
4 voulez vous arrêter pendant quelques instants, dites-le-nous. Nous en avons
5 presque terminé.
6 Reconnaissez-vous ce formulaire que vous avez rempli ?
7 R. Oui. Désolée, je ne vois pas bien car je n'ai pas mes lunettes, mais
8 c'est bien le formulaire.
9 Mme FRIEDMAN : [interprétation] Pourrions-nous voir la page 3. Et si on
10 pouvait faire un gros plan au bas de la page.
11 Q. On y voit que les dernières informations c'est que votre époux a été
12 tué par un homme dont le nom serait Braka Zivkovic [comme interprété]. Et
13 j'aimerais vous demander si c'est une information exacte, pour autant que
14 vous le sachiez ?
15 R. Non. C'était la déclaration que j'ai déposée après que je sois arrivée
16 à Zagreb. Mais ce n'était pas cet homme-là.
17 Q. Qu'est-ce qui vous a fait apposer ce nom-là, le nom de cet homme-là, à
18 l'époque ?
19 R. Il ressemblait à l'agent de police qui le rouait de coups. Et mon amie
20 m'a dit à l'époque que c'était là son nom. Toutefois, par la suite, j'ai
21 appris que ce n'était pas la même personne.
22 Q. Et connaissez-vous le nom de la personne qui l'a roué de coups ?
23 R. Non, et je ne le sais pas encore aujourd'hui.
24 Mme FRIEDMAN : [interprétation] Nous aimerions verser le document 3390 au
25 dossier.
26 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Il sera versé et recevra une cote.
27 M. LE GREFFIER : [interprétation] Et reçoit la cote P1080. Merci.
28 Mme FRIEDMAN : [interprétation]
Page 3117
1 Q. Avez-vous par la suite entendu quoi que ce soit, d'autres informations
2 sur ce qu'il était advenu de votre mari ?
3 R. Non, je n'ai pas d'informations. Il y a eu nombre de rumeurs,
4 d'histoires, nombre de choses qui se seraient passées, mais je n'ai rien
5 appris et je n'ai rien découvert, quoi que ce soit, jusqu'aujourd'hui. Et
6 pas un seul ossement n'a été retrouvé.
7 Q. Pourriez-vous décrire l'incidence de sa disparition sur vous et vos
8 filles.
9 R. C'est très dur. Ivana Fransiska était très petite. Elle ne se souvient
10 de rien. Tamara se souvient de quelques détails, par exemple, avoir vu des
11 morts sur le chemin alors que nous passions, la façon dont son père a été
12 roué de coups et d'autres détails.
13 Quant à moi, je me souviens de davantage que cela.
14 Q. Merci de votre déposition.
15 Mme FRIEDMAN : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le
16 Président.
17 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Baranjek, j'aimerais vous
18 poser une question de suivi.
19 Vous nous avez dit que M. Hadzic, à trois reprises - dans la salle de
20 classe, dans le gymnase, dans la salle où se trouvaient des émetteurs radio
21 - a demandé où se trouvait votre mari.
22 Savez-vous pourquoi il cherchait précisément votre mari ? Est-ce qu'il vous
23 a dit la raison ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Je ne sais pas pourquoi il le cherchait
25 lui.
26 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
27 Maître Gosnell.
28 Contre-interrogatoire par M. Gosnell :
Page 3118
1 Q. [interprétation] Bon après-midi. Je me présente, Christopher Gosnell.
2 Je représente M. Hadzic dans cette procédure. Et j'ai quelques questions à
3 vous poser, non seulement aujourd'hui, mais sans doute demain matin. Si
4 quelque question que je vous pose ne serait pas claire, si vous ne la
5 comprenez pas, n'hésitez pas à me demander des éclaircissements. Le
6 comprenez-vous ?
7 R. Oui.
8 Q. Est-il exact, si j'ai bien compris, que vous avez donné deux
9 déclarations différentes quant aux événements que vous venez de décrire :
10 l'une étant, si j'ai bien compris, en mai 2000, remise à des enquêteurs de
11 la police croate; et ensuite, à nouveau en 2012, le 26 et 27 juillet, une
12 déclaration de suivi devant un enquêteur du bureau du Procureur ? Est-ce
13 exact ?
14 R. Oui.
15 M. GOSNELL : [interprétation] Pourrions-nous afficher le document de la
16 liste 65 ter 03389.
17 Q. Reconnaissez-vous qu'il s'agit là de votre déclaration donnée à la
18 police croate ?
19 R. Oui.
20 M. GOSNELL : [interprétation] Et si l'on pouvait passer à la dernière page,
21 à la fin du document, je vous prie.
22 Q. Est-il exact que c'est votre signature au-dessus de "rapport soumis
23 par", et on y voit votre nom ?
24 R. Oui.
25 Q. Avant de la signer, avez-vous eu la possibilité de lire cette
26 déclaration dans son intégralité ?
27 R. Non.
28 Q. Pourriez-vous m'expliquer comment cela s'est fait que vous avez signé
Page 3119
1 ce document mais que vous n'avez pas eu la possibilité de le relire ?
2 R. Parce que nous étions plusieurs à remettre ces déclarations. La police
3 était avec nous. Des erreurs se sont glissées. Un compte rendu a été fait
4 de ce qui m'était arrivé, mais pas à moi. C'était quelque chose que j'avais
5 entendu.
6 Q. Je ne suis pas sûr d'avoir compris. Des choses dont vous avez entendu
7 parler mais que -- donc, vous avez rendu compte avec exactitude de ce que
8 vous aviez entendu, donc, au cours de votre entretien avec la police; c'est
9 bien cela ?
10 R. Oui. Cela a été rédigé de façon à ce que cela apparaisse que c'étaient
11 mes propos expliquant ce qui m'était arrivé à moi, alors que c'était
12 quelque chose que j'avais entendu dire qui était arrivé à d'autres. Ainsi,
13 ce n'était pas valide devant une cour.
14 Q. Eh bien, peut-être que -- pour aller au plus court, nous pourrions
15 peut-être voir un document, le document 05961 de la liste 65 ter. Je
16 répète, 05961.
17 Et vous allez voir à l'écran votre déclaration faite au bureau du Procureur
18 en juillet 2012.
19 Au cours de cet échange avec l'enquêteur du bureau du Procureur, avez-vous
20 eu à ce moment-là la possibilité de parcourir la déclaration que vous avez
21 remise à la police en 2000 ?
22 R. Oui. Et ces choses-là ont été mentionnées. En réalité, la traduction
23 n'était pas bonne non plus.
24 Q. Qu'est-ce que vous voulez dire par là, "la traduction n'était pas bonne
25 non plus" ?
26 R. Eh bien, lorsqu'ils me l'ont relue, ce n'était pas bon. Parce que la
27 salle de sport et le gymnase, ça n'est pas une seule et même chose,
28 "sportska dvorana" et "teretana", et c'est ce qui a été marqué dans la
Page 3120
1 déclaration. Je l'ai dit, et donc il a fallu le corriger. Et ensuite, il
2 fallait le corriger, je veux dire ce qui a été dit à propos du policier, de
3 la "milicija", je ne sais pas exactement son nom, et cela, je l'ai dit
4 aussi.
5 M. GOSNELL : [interprétation] Est-ce que nous pouvons voir la page 5, s'il
6 vous plaît, en anglais.
7 Ça pourrait être la dernière page, page 5 -- la dernière page ou l'avant-
8 dernière page dans la version croate.
9 R. Oui.
10 Q. Madame, vous dites avoir signé le document. Il s'agit bien de votre
11 signature, n'est-ce pas ?
12 R. Oui.
13 Q. Vous dites que :
14 "Cette déclaration m'a été relue en langue croate, et cela correspond
15 à la vérité, en tout cas d'après mes connaissances et mes souvenirs."
16 Est-ce exact ?
17 R. Oui. Une fois que les choses qui n'avaient pas été couchées sur le
18 papier correctement ont été corrigées.
19 Q. Donc, vous avez eu l'occasion d'examiner votre déclaration de l'an 2000
20 et d'apporter les corrections nécessaires en juillet 2012, et vous avez
21 donc préparé cette déclaration-ci en 2012, n'est-ce pas ?
22 R. Oui.
23 M. GOSNELL : [interprétation] Est-ce que nous pouvons revenir en arrière et
24 revoir le 003389.
25 Q. Madame, ce que je souhaite faire avec vous, c'est analyser l'ordre
26 chronologique des événements et aborder certains détails qui n'ont pas été
27 abordés par l'Accusation. Si nous passons au paragraphe 5 de cette
28 déclaration-ci qui date de l'an 2000. D'après la manière dont je comprends
Page 3121
1 l'ordre chronologique des événements, vous dites que le 19 novembre, vers
2 16 heures 30, comme vous l'avez dit aujourd'hui, vous avez quitté le
3 bâtiment de Borovo Komerc, et ensuite c'est vers 19 heures 30 que vous vous
4 êtes mis en route à pied en direction de ce qui s'appelle Mali Raj; c'est
5 exact ?
6 R. Je ne sais pas quelle heure il était. Il faisait nuit déjà, mais j'ai
7 pensé qu'il devait s'agir de deux heures environ, que nous avions marché
8 pendant deux heures.
9 Q. Et, en fait, il y a une phrase importante. Vous parlez de cet endroit
10 qui s'appelle Mali Raj, et vous dites que :
11 "A cette occasion-là" --
12 Je vais revenir en arrière. Deux phrases avant cela :
13 "J'étais devant le troisième autocar," vous avez effectivement parlé
14 du troisième autocar aujourd'hui, "et c'est à ce moment-là que mon mari
15 Ivan est arrivé. L'enquêteur qui avait fouillé la maison d'Ivan --"
16 R. Oui.
17 Q. "-- en 1971 frappait l'autocar avec une batte ou une matraque."
18 C'est exact ?
19 R. Oui.
20 Q. Et vous dites que :
21 "A cette occasion-là, à savoir le 19 novembre 1991, le même homme,
22 qui avait environ 45 ans, portait un uniforme de la police militaire de
23 couleur vert olive avec un ceinturon blanc et une épaulette et un couvre-
24 chef gris de la police avec une étoile."
25 R. Oui, oui.
26 Q. Et cet individu que vous décrivez ici, vous dites que c'était le même
27 homme. Est-il exact de dire que cet homme était venu harceler votre mari
28 quelque 20 ans plus tôt ?
Page 3122
1 R. Oui. C'était un enquêteur au sein de ce qui s'appelait alors la
2 "milicija".
3 Q. Alors, pour avancer dans le temps et sortir de cet ordre chronologique,
4 vous dites vous être rendue à l'école primaire de Borovo Selo. Vous êtes
5 descendue des autocars et vous dites avoir vu un policier à cet endroit.
6 Est-il exact que ce policier est le même homme que celui que vous décrivez
7 ici, celui qui portait le ceinturon blanc ?
8 R. Oui. C'était celui qui était à la tête de la colonne dans ce Pinzgauer
9 et c'est lui qui est venu à notre rencontre à l'endroit où il y avait la
10 porte de l'autocar, et il a commencé à frapper mon mari tout de suite. Et à
11 l'époque, mon mari portait dans ses bras un enfant âgé de six mois.
12 Q. Est-ce que nous pouvons tourner la page en anglais, s'il vous plaît,
13 pour nous diriger vers le bas du paragraphe 5. Et vous dites :
14 "A 20 heures 30, notre autocar s'est arrêté devant l'école primaire,
15 de sorte que l'entrée se trouvait sur notre droite."
16 Et ensuite, au paragraphe 6, vous dites :
17 "Après avoir emmené l'enfant, l'enquêteur a commencé à frapper Ivan
18 au niveau de ses reins avec sa matraque en criant : 'J'attends depuis 1971,
19 j'ai attendu pour faire cela, enfant de salope.'"
20 Est-ce l'incident que vous avez décrit où l'enquêteur a frappé votre
21 mari ?
22 R. Oui.
23 Q. Et après cet événement, si nous regardons le paragraphe 7 - et je suis
24 vraiment désolée, Madame, devoir parler de cet événement avec vous - vous
25 dites être entrée dans le foyer de l'école, et aujourd'hui vous avez
26 utilisé, je crois, le terme de "entrée", et le l'entrée se trouvait au même
27 endroit que le foyer ou l'entrée ?
28 R. L'entrée d'une école, appelez ça comme vous voulez. Je ne sais pas.
Page 3123
1 C'est un endroit assez grand. Ça se trouve dans une école.
2 Q. Et ce que vous dites ici dans cette déclaration, c'est qu'il y avait
3 des tables qui avaient été dressées, et on vous a dit qu'ils cherchaient
4 des armes. Arrêtons-nous là un instant.
5 Est-ce que c'est bien ce qui s'est passé lorsque vous êtes entrée
6 dans l'entrée de ce bâtiment, qu'ils cherchaient des armes ?
7 R. Oui.
8 Q. Et au lieu de prendre des armes, ils ont pris vos bijoux.
9 R. Oui. Tout objet de valeur.
10 Q. Ensuite, vous dites au paragraphe 7 de votre déclaration : vers 21
11 heures, 21 heures 15, on vous a fait sortir du foyer, et c'est une femme
12 avec des cheveux de couleur rouge bouclés qui vous a emmenée dans la cave.
13 Vous souvenez-vous de cela, d'avoir été emmenée de l'entrée jusque dans le
14 cave ?
15 R. Oui, oui. Il y avait juste cette femme. Elle s'appelle Senija.
16 Q. Et aujourd'hui vous avez parlé d'une pièce où il y avait des postes
17 radio. Est-il exact que…
18 Pardonnez-moi, Madame. Pourriez-vous répéter le nom que vous venez de
19 citer.
20 R. Senija. Senija. Le nom de son mari est Braco, et ils avaient un
21 restaurant appelé Carda. Ils connaissaient ma mère, elle et son mari, et je
22 l'ai reconnue lorsque je suis arrivée dans le village, mais elle ne m'a pas
23 reconnue car j'étais très petite lorsqu'elle rendait visite à ma mère.
24 M. GOSNELL : [interprétation] Est-ce que nous pouvons tourner la page, s'il
25 vous plaît, de la version anglaise.
26 Q. Puis-je d'abord vous demander ceci : avez-vous trouvé curieux le fait
27 que des postes radio aient été installés au sous-sol; je suppose que
28 c'était à un endroit où la transmission ou la réception n'était pas
Page 3124
1 excellente ?
2 R. Ce n'était pas dans le sous-sol. C'était trois ou quatre marches par
3 rapport à l'entrée. Ce n'était pas une cave.
4 Q. Alors, il s'agit peut-être d'un problème de traduction. Votre
5 déclaration de l'an 2000 parle d'une cave. Mais vous, vous dites que ce
6 n'était pas une cave.
7 R. Oui. Ce n'était pas une cave. Car cette pièce se trouve trois à quatre
8 marches en contrebas par rapport à l'entrée, quel que soit le nom que vous
9 donnez à cet endroit.
10 Q. Est-ce que je peux vous poser cette question : lorsque vous avez donné
11 votre déclaration à la police croate en 2000, y avait-il quelqu'un en
12 particulier qui les intéressait ? Y avait-il une personne qu'ils avaient à
13 l'esprit car ils pensaient que cette personne était suspecte ?
14 R. Oui. Ils m'ont montré des photographies de personnes que j'ai vues à
15 l'école de Borovo Selo, mais en réalité, je ne les connaissais pas
16 personnellement. Mais c'est là que j'ai entendu prononcés leurs noms.
17 Q. Goran Hadzic était-il un des individus qui les intéressaient ?
18 R. Oui.
19 Q. Et ont-ils cité son nom lors de cet entretien ou est-ce vous qui avez
20 cité son nom pour la première fois ?
21 R. Non. Après ma déclaration, ils m'ont montré les photographies. Ce n'est
22 pas lui qu'ils recherchaient en premier. Après avoir recueilli ma
23 déclaration, ils m'ont montré des images et ils m'ont demandé qui
24 connaissait qui, qui était à l'école.
25 Q. Et est-ce qu'ils vous ont montré une photographie, en disant : Ça,
26 c'est Goran Hadzic. Le reconnaissez-vous ? Est-ce ainsi que cela s'est
27 passé ?
28 R. Non, non. Ils nous ont montré des photographies et ils ont dit : "Qui
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1 est cet homme ? Qui est cet homme-là ? Qui est celui-là ?" Et moi, j'ai dit
2 qui c'était, qui étaient les personnes que je reconnaissais. Je donnais à
3 ce moment-là le prénom et le nom. Et si je ne savais pas, eh bien, je
4 disais que j'ai entendu dire à l'école que c'était son nom.
5 Q. Et si vous aviez quelque chose à dire à propos de ces personnes
6 suspectes, notamment Goran Hadzic, c'étaient des informations qui les
7 intéressaient énormément, n'est-ce pas ?
8 R. Veuillez répéter cela. Je n'ai pas tout à fait compris.
9 Q. Et ils étaient très intéressés par les informations dont vous auriez pu
10 disposer à propos de M. Hadzic, n'est-ce pas ?
11 R. Oui. Tout les intéressait.
12 Q. Et une fois que vous avez indiqué avoir des informations concernant des
13 personnes en particulier, notamment M. Hadzic, à ce moment-là ils
14 insistaient pour obtenir toutes les informations dont vous disposiez à
15 propos de cette personne, n'est-ce pas ?
16 R. Je souhaite faire remarquer qu'avant de regarder les photographies,
17 avant qu'ils ne me posent une question à propos de quelqu'un, j'ai donné
18 une déclaration et j'ai dit ce qui m'était arrivé à l'école.
19 Q. La seule question que je vous pose est celle-ci : une fois que vous
20 aviez prononcé le nom de M. Hadzic et que vous aviez parlé de ses
21 activités, si cela n'était pas clair à leurs yeux, est-ce qu'ils
22 cherchaient dans ce cas à avoir davantage de précisions à propos de ce que
23 vous saviez concernant les activités de M. Hadzic ?
24 R. Encore une fois, je vous dis que personne ne m'a posé des questions à
25 propos des détails. Ils ont d'abord recueilli ma déclaration sur ce qui
26 m'était arrivé à l'école. Ensuite, ils m'ont montré des photographies de
27 personnes, et ensuite nous étions censés donner les noms.
28 Q. Alors, ce que vous dites dans cette déclaration-ci, qui est celle de
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1 l'an 2000, à la police, et je cite au paragraphe 7, vous dites :
2 "A l'époque où nous étions enregistrés, Goran Hadzic est entré de façon
3 désinvolte dans la pièce en portant un uniforme de camouflage. Il portait
4 une chemise défaite sans couvre-chef et sans grade et s'est approché d'un
5 poste radio et a contacté Novi Sad, d'après ce que j'ai pu comprendre. Mais
6 la seule chose que j'ai bien pu entendre, c'étaient ses propos : 'Nous
7 parlerons plus tard. Tout va bien.'"
8 R. Oui. Ça, c'était au tout début lorsqu'il est entré. Et ensuite, il a
9 appelé une nouvelle fois et il riait et disait : "Belgrade, Belgrade,
10 Mladjo, envoie des réservistes. Vukovar est tombée. Je peux continuer
11 jusqu'à Osijek demain." Ce sont ses propres termes que j'ai entendus parce
12 qu'il s'agissait d'une petite pièce.
13 Q. Et vous auriez entendu ces mots distinctement parce qu'il criait,
14 n'est-ce pas ?
15 R. Oui, oui.
16 Q. Et pourtant, vous dites dans votre déclaration de l'an 2000 que la
17 seule chose que j'ai entendue distinctement, c'étaient ses propos, "Nous
18 parlerons plus tard. Tout va bien." Pourquoi n'avez-vous pas inclus les
19 autres termes que vous dites aujourd'hui avoir entendus ?
20 R. Je ne sais pas. Je ne sais pas pourquoi ceci n'a pas été consigné à ce
21 moment-là. Je ne sais pas. Parce que j'ai passé une demi-heure dans cette
22 pièce, et il était dans cette pièce pendant dix minutes environ.
23 Q. Il était dans cette pièce pendant dix minutes. Vous l'avez, semble-t-il
24 -- alors, maintenant vous dites qu'il a eu deux conversations, une avec
25 Belgrade et une avec Novi Sad, et vous dites aujourd'hui que les forces
26 devaient avancer en direction d'Osijek, et ceci, dans le cadre d'une
27 enquête menée par la police croate sur Goran Hadzic. Et vous dites qu'ils
28 ont simplement omis de consigner ces détails dans votre déclaration en l'an
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1 2000 ?
2 R. Je ne sais pas contre qui une enquête était ouverte. Cela ne
3 m'intéressait pas du tout. Je me suis rendue à la Croix-Rouge pour aller à
4 la recherche de mon mari. Je ne m'intéressais pas à qui avait été condamné,
5 qui ils recherchaient…
6 M. GOSNELL : [interprétation] Je vois l'heure, Monsieur le Président.
7 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, Maître Gosnell.
8 Madame le Témoin, nous terminons à 14 heures aujourd'hui. Votre déposition
9 n'est pas terminée encore. Vous reviendrez demain à 9 heures. Vous êtes
10 toujours sous serment, ce qui signifie que vous ne pouvez aborder votre
11 déposition avec quiconque et vous ne pouvez absolument pas parler avec une
12 ou l'autre des parties.
13 Avez-vous compris ?
14 L'huissier va maintenant vous accompagner.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends.
16 [Le témoin quitte la barre]
17 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est levée.
18 --- L'audience est levée à 14 heures 01 et reprendra le vendredi 8 février
19 2013, à 9 heures 00.
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