Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 20 août 2013

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 8 heures 59.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous dans le

  6   prétoire et dans les pièces adjacentes.

  7   Madame la Greffière, veuillez citer l'affaire.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,

  9   Messieurs les Juges. Bonjour à toutes et à tous.

 10   Affaire IT-04-75-T, le Procureur contre Goran Hadzic.

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 12   Les parties peuvent-elles se présenter, l'Accusation pour commencer.

 13   Mme DENNEHY : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

 14   les Juges. Je suis Muireann Dennehy, avec mon collègue, M. Matthew Gillett;

 15   notre commis à l'affaire, Thomas Laugel; et notre stagiaire, Simona Onicel.

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 17   La Défense, Maître Zivanovic.

 18   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Bonjour. Pour la Défense de Goran Hadzic,

 19   Zoran Zivanovic et Christopher Gosnell.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie --

 21   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos.

 22   [Audience à huis clos]

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 23   [Audience publique]

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Gillett, c'est vous qui

 25   allez procéder à l'interrogatoire ?

 26   M. GILLETT : [interprétation] Non, c'est M. Olmsted qui s'en chargera.

 27   Donnez-nous quelques instants, s'il vous plaît, pour nous réorganiser du

 28   côté de l'Accusation. Merci.

 


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  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Olmsted.

  2   M. OLMSTED : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges.

  3   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour.

  4   M. OLMSTED : [interprétation] Pour que cela soit consigné au compte rendu,

  5   nous serons accompagnés de Maggi Q-e-r-i-m-i, Qerimi, notre stagiaire.

  6   Et je vous demande quelques instants pour pouvoir m'installer.

  7   Messieurs les Juges, l'Accusation est prête à faire entrer le prochain

  8   témoin, qui est M. John Brian Wilson.

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Faisons-le entrer, s'il vous plaît.

 10   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. Merci

 12   d'être venu à La Haye pour prêter votre concours à la Chambre de première

 13   instance.

 14   Je suppose que vous allez déposer en anglais.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 17   Pourriez-vous décliner votre identité ainsi que votre date de naissance.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle John Brian Wilson. Je suis né le

 19   25 mars 1947.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. Vous allez à présent prononcer

 21   la déclaration solennelle par laquelle les témoins s'engagent à dire la

 22   vérité. J'aimerais également attirer votre attention sur le fait que vous

 23   êtes tenu de dire la vérité et que si cela n'est pas le cas, vous vous

 24   exposez au parjure. Je vous invite à prononcer la déclaration solennelle.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 26   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 27   LE TÉMOIN : JOHN BRIAN WILSON [Assermenté]

 28   [Le témoin répond par l'interprète]

 


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  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci beaucoup. Veuillez prendre

  2   place.

  3   Monsieur Wilson, en général je fais ce commentaire aux personnes qui

  4   parlent le B/C/S, mais je pense que cela vaut pour vous et M. Olmsted. Je

  5   vous demanderais de bien vouloir ménager une pause entre les questions et

  6   les réponses car vous devrez être interprétés en B/C/S et il faut laisser

  7   le temps aux interprètes de le faire.

  8   Monsieur Olmsted, à vous.

  9   M. OLMSTED : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 10   Interrogatoire principal par M. Olmsted : 

 11   Q.  [interprétation] Bonjour, Général de Brigade.

 12   R.  Bonjour.

 13   Q.  Je vais commencer par vous poser quelques questions sur votre parcours.

 14   Tout d'abord, pourriez-vous nous dire quelle est votre nationalité ?

 15   R.  Je suis Australien.

 16   Q.  Et est-ce que vous avez servi dans les forces armées australiennes ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Quand avez-vous rejoint les forces armées ?

 19   R.  J'ai rejoint l'armée australienne en 1964.

 20   Q.  Et pendant combien de temps avez-vous servi au sein de l'armée

 21   australienne ?

 22   R.  Environ 34 années, et j'ai pris ma retraite en janvier 1998.

 23   Q.  Quel a été le dernier grade avant votre retraite ?

 24   R.  J'ai pris ma retraite avec le grade de général de brigade. Dans

 25   d'autres armées, on appelle cela général à une étoile.

 26   Q.  Est-ce que vous pourriez brièvement nous donner un résumé de vos

 27   affectations militaires avant 1992.

 28   R.  J'ai été officier en 1967, j'ai reçu ce grade-là. Et en 1968, j'ai été


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  1   posté en Malaisie, j'étais commandant de bataillon d'infanterie. En 1969 et

  2   1970, je suis allé au Vietnam. J'étais le deuxième dans la hiérarchie de

  3   commandement d'une compagnie d'infanterie.

  4   En 1984, j'ai été chef du groupe d'observateurs militaires des Nations

  5   Unies au sud Liban et ce, pendant 12 mois.

  6   Voilà donc mes principales affectations.

  7   Q.  Et pendant ces affectations, est-ce que vous avez été amené à commander

  8   des soldats ?

  9   R.  Oui. En Malaisie, environ 30 soldats; au Vietnam, environ 120; et au

 10   sud Liban, environ 120 officiers.

 11   Q.  Le compte rendu d'audience nous dit qu'en 1984, vous étiez chef des

 12   observateurs militaires des Nations Unies, du groupe chargé de cela au sud

 13   du Liban. Est-ce que c'est bien exact ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Parlons à présent de la période couvrant 1985 à 1992. Quels étaient vos

 16   grades à ce moment-là ?

 17   R.  J'ai été membre de plusieurs états-majors, et j'ai également participé

 18   à la formation et à différents niveaux de commandement en Australie.

 19   Q.  S'agissant de votre expérience au Liban, quelle était votre

 20   responsabilité ?

 21   R.  Le groupe des observateurs militaires observait les activités des

 22   forces de défense israéliennes qui agissaient au sud Liban à l'époque et

 23   faisait rapport au QG de nos supérieurs à Jérusalem, qui, à son tour,

 24   envoyait des rapports aux Nations Unies à New York.

 25   Q.  En janvier 1992, à quel grade avez-vous été nommé ?

 26   R.  En janvier 1992, j'ai été détaché du QG à Jérusalem pour rejoindre une

 27   mission déployée en ex-Yougoslavie, la mission des officiers militaires de

 28   liaison.


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  1   Q.  Et juste avant janvier 1992, est-ce que vous étiez membre de

  2   l'organisme des Nations Unies chargé de la surveillance de la trêve ?

  3   R.  Oui. J'étais commandant adjoint, et j'ai été déployé en Yougoslavie en

  4   janvier 1992.

  5   Q.  Et en votre qualité de commandant adjoint, quelles étaient vos

  6   responsabilités ?

  7   R.  Il y en avait plusieurs, mais en gros j'appuyais le chef d'état-major

  8   ou le commandant de l'UNTSO, donc l'organisme des Nations Unies chargé de

  9   la surveillance de la trêve, et nous supervisions les opérations

 10   quotidiennes de l'organisation, ce qui permettait au chef de l'état-major

 11   de se concentrer sur les questions politiques et stratégiques.

 12   Q.  Je pense que cela n'a pas été consigné au compte rendu, mais à partir

 13   de janvier 1992, vous étiez officier militaire de liaison des Nations Unies

 14   pour la mission en Yougoslavie, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Et combien de temps êtes-vous resté à ce poste -- attendez. Je vais

 17   reformuler.

 18   Est-ce que pourriez nous dire tout d'abord quel grade vous aviez au

 19   sein de ce groupe des officiers militaires de liaison des Nations Unies

 20   pour la mission en Yougoslavie ?

 21   R.  J'étais officier de liaison militaire de haut rang. Il y avait un

 22   groupe de 50 observateurs militaires qui avaient été déployés et qui

 23   avaient été pris des missions de maintien de la paix existantes des Nations

 24   Unies, et j'étais le commandant en quelque sorte.

 25   Q.  Et combien de temps avez-vous occupé ce poste ?

 26   R.  J'ai occupé ce poste du 8 janvier jusqu'à environ le 22 mars 1992,

 27   lorsque les officiers militaires de liaison des Nations Unies pour la

 28   mission en Yougoslavie ont été dissous et remplacés par le groupe des


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  1   observateurs militaires de l'organisme des Nations Unies chargé de la

  2   surveillance de la trêve -- ou plutôt, non, de la FORPRONU.

  3   Q.  Et en mars 1992, à quel grade avez-vous été nommé ?

  4   R.  J'ai été nommé chef des observateurs militaires de la FORPRONU, ou CMO

  5   en anglais, donc chef du groupe des observateurs militaires.

  6   Q.  Et combien de temps avez-vous occupé ce poste ?

  7   R.  Je suis resté CMO jusqu'à environ la mi-novembre 1992.

  8   Q.  En qualité de chef du groupe des observateurs militaires, quelle était

  9   la chaîne de commandement, la hiérarchie ?

 10   R.  Je faisais rapport directement au commandant de force de la FORPRONU.

 11   Q.  Et, à ce moment-là, qui était le commandant de la force ?

 12   R.  Le général Satish Nambiar.

 13   Q.  Qui était le supérieur du général Nambiar ?

 14   R.  Je pense que c'était M. Goulding aux Nations Unies à New York. Je pense

 15   que c'était le directeur des opérations de maintien de la paix. Il avait

 16   peut-être un autre titre, mais c'était sa fonction.

 17   Q.  A quelle fréquence est-ce que vous rencontriez le commandant de la

 18   force en qualité de chef du groupe des observateurs militaires ?

 19   R.  Lorsque j'étais au QG et que je n'étais pas sur le terrain pour aller

 20   voir d'autres unités ni affecté à d'autres missions, je le rencontrais tous

 21   les jours.

 22   Q.  Est-ce qu'il s'agissait de réunions individuelles ou est-ce qu'il

 23   s'agissait de réunions d'information ?

 24   R.  A ce moment-là, la FORPRONU organisait quotidiennement des réunions

 25   d'information à l'attention des commandants le matin. Nous passions en

 26   revue les activités de la veille et nous parlions des événements à venir.

 27   Il s'agissait d'un forum pour que les membres du personnel clés restent

 28   informés des évolutions et des questions prépondérantes.


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  1   Q.  Et vous avez parlé du personnel-clé. Bon, je ne veux pas avoir une

  2   liste de toutes les personnes qui participaient à ces réunions, mais est-ce

  3   que vous pouvez nous donner une idée de ces dirigeants-clés de la FORPRONU

  4   qui participaient à ces réunions ?

  5   R.  Le commandant de force présidait la réunion; son adjoint était présent;

  6   l'officier chargé des affaires civiles, M. Thornberry; l'officier en chef

  7   de la police; l'officier en chef de l'administration; le chef de l'état-

  8   major. Je pense que cela résume bien les choses.

  9   Q.  Et après 1992, quel a été votre poste ?

 10   R.  En janvier 1992, j'ai été nommé conseiller militaire et officier de

 11   liaison de la FORPRONU auprès de la Conférence internationale sur l'ex-

 12   Yougoslavie basée à Genève.

 13   Q.  Pendant combien de temps avez-vous occupé ce poste ?

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Olmsted, un instant.

 15   Monsieur Wilson, vous avez parlé de janvier 1992.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Désolé, Monsieur le Juge. C'était janvier

 17   1993.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] En fait, je suis arrivé là-bas en décembre

 20   1992, pour être exact.

 21   M. OLMSTED : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 22   Q.  Et combien de temps avez-vous occupé ce poste ?

 23   R.  J'ai quitté mon poste le 1er décembre 1993.

 24   Q.  Général, est-ce que vous avez reçu des décorations 

 25   pour vous récompenser de vos services au Moyen-Orient et en ex-Yougoslavie

 26   ?

 27   R.  Oui. J'ai reçu une décoration australienne qui s'appelle la

 28   "Conspicuous Service Cross".


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  1   Q.  Et brièvement, pour que votre parcours soit tout à fait complet, est-ce

  2   que vous pourriez nous dire quels sont les postes que vous avez occupés

  3   après votre départ de l'ex-Yougoslavie.

  4   R.  J'ai été nommé chef de la force de défense australienne pendant deux

  5   ans et demi après mon retour. Et mon dernier poste a été celui de

  6   commandant d'une organisation de l'armée dans la région de Sydney et

  7   j'avais sous mes ordres environ 5 000 personnes.

  8   Q.  Revenons à janvier 1992, au moment où vous avez été déployé et où vous

  9   étiez officier militaire de liaison pour la mission en Yougoslavie.

 10   Pourriez-vous nous dire quelle était votre responsabilité principale à ce

 11   moment-là ?

 12   R.  A l'époque, M. Vance avait négocié une tentative d'accord et de cessez-

 13   le-feu entre les parties belligérantes en ex-Yougoslavie, et les officiers

 14   militaires de liaison des Nations Unies pour la mission en Yougoslavie

 15   avaient été déployés là-bas pour observer et superviser le cessez-le-feu,

 16   faire rapport en cas de violation du cessez-le-feu, pour faciliter la

 17   communication entre les parties belligérantes et pour proposer de bons

 18   services.

 19   Q.  Vous avez fait référence à un accord de cessez-le-feu. Est-ce que vous

 20   vous souvenez de la date de cet accord ?

 21   R.  Je pense qu'il a eu lieu le 2 janvier 1992 et qu'il a été signé à

 22   Sarajevo.

 23   Q.  Et quelle était la filière hiérarchique ? Qui était votre supérieur à

 24   ce moment-là ?

 25   R.  Eh bien, je faisais rapport directement à M. Goulding.

 26   Q.  Je pense que vous avez parlé du nombre d'officiers de liaison

 27   militaires qui étaient sous vos ordres. Est-ce que vous pourriez nous dire

 28   combien d'entre eux ont été déployés ?


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  1   R.  A la base, 50 officiers de liaison ont été déployés. La moitié d'entre

  2   eux se trouvaient en Croatie, et l'autre moitié, de l'autre côté de la

  3   ligne de confrontation dans des régions de Croatie occupées par la JNA. Et

  4   il y avait de petits états-majors à Zagreb et à Belgrade sous la direction

  5   de M. Goulding. Il avait été décidé d'opérer une alternance entre ces deux

  6   états-majors pour garantir une communication équitable entre les parties.

  7   Q.  Est-ce que les officiers militaires de liaison assuraient une

  8   coordination de leur travail et des informations qu'ils réunissaient avec

  9   d'autres organisations internationales sur le terrain ?

 10   R.  A l'époque, la Mission d'observation de la Commission européenne était

 11   également déployée dans la région. Nous coopérions au niveau local même si

 12   nos missions étaient différentes, mais j'étais en contact régulier avec le

 13   QG de la Mission d'observation et nous échangions régulièrement des

 14   informations.

 15   Q.  En qualité d'officier militaire de liaison en chef, est-ce que vous

 16   avez eu l'occasion de voyager dans les régions qui sont devenues par la

 17   suite des zones protégées des Nations Unies ?

 18   R.  Oui, j'ai beaucoup voyagé entre janvier et mars 1992 dans les zones

 19   protégées des Nations Unies, mais aussi en Croatie et, dans une moindre

 20   mesure, en Serbie.

 21   Q.  Est-ce que vous-même et vos observateurs militaires de liaison avez eu

 22   l'occasion d'observer la situation dans les villages et de voir dans quel

 23   état se trouvait la population dans ces régions qui sont devenues des zones

 24   protégées des Nations Unies ?

 25   R.  Les officiers militaires de liaison ont été déployés dans des états-

 26   majors militaires de la JNA et de l'armée croate. Ils étaient immobiles et

 27   n'avaient pas la possibilité de circuler librement dans la région, mais de

 28   temps en temps ils avaient l'occasion d'observer les régions pendant le


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  1   déploiement et le redéploiement. Et, bien sûr, j'ai eu plusieurs occasions

  2   de me rendre dans ces différentes régions et d'observer amplement les

  3   circonstances au sein des zones protégées des Nations Unies et en Croatie.

  4   Q.  Qu'est-ce que vous avez observé s'agissant de la population locale ?

  5   R.  Nous parlons de quoi, Monsieur ? Je ne suis pas sûr d'avoir compris

  6   votre question.

  7   Q.  Dans les régions des zones protégées des Nations Unies, qu'avez-vous

  8   constaté ?

  9   R.  Beaucoup de villages étaient presque totalement abandonnés. Certains

 10   villages et certaines villes où il y avait une population, eh bien, j'ai vu

 11   qu'il était évident qu'une partie de la population avait fui et que ce

 12   n'était plus la totalité de la population qui s'y trouvait.

 13   Il y avait beaucoup de dommages, de dégradation, surtout le long de la

 14   ligne de confrontation, mais aussi dans des villages qui étaient bien loin

 15   de la ligne de confrontation.

 16   Q.  Est-ce que vous avez pu apporter des observations quant à ce qui est

 17   arrivé à la population non serbe dans ces zones protégées des Nations Unies

 18   ?

 19   R.  Cela m'a été rapporté par plusieurs sources. On m'a dit que la plupart

 20   de la population non serbe avait quitté les zones protégées des Nations

 21   Unies, soit de leur propre gré, soit par la force.

 22   Q.  Vous avez parlé de l'accord de cessez-le-feu qui avait été mis en

 23   place. Est-ce que le cessez-le-feu a été respecté par les parties au

 24   conflit ?

 25   R.  Pour vous donner une réponse brève, je dirais non. Il y a eu 200 à 300

 26   violations rapportées par jour des deux côtés de nos officiers militaires

 27   de liaison. Parmi les constatations, il y avait, par exemple, un homme qui

 28   avait tiré sur l'autre partie et aussi, de l'autre côté du spectre, des


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  1   tirs d'artillerie lourds dans des zones urbaines.

  2   Q.  Et quelles parties au conflit commettaient ces violations du cessez-le-

  3   feu ?

  4   R.  Les deux parties. Dans la même proportion.

  5   Q.  J'aimerais savoir dans quelle mesure les violations du cessez-le-feu

  6   des forces serbes en Croatie pouvaient être, comparé aux violations

  7   effectuées par le côté croate ?

  8   R.  Eh bien, je dirais que c'est plus ou moins le même nombre. Mais les

  9   force serbes disposaient davantage d'artillerie et l'utilisaient plus

 10   librement.

 11   Q.  Et que ciblaient les forces serbes ?

 12   R.  Il y avait des cibles militaires mais aussi non militaires dans les

 13   zones urbaines.

 14   Q.  Et est-ce que le ciblage des zones urbaines était prédominant ?

 15   M. GOSNELL : [interprétation] Objection. Le témoin n'a pas dit que les

 16   zones urbaines étaient ciblées.

 17   M. OLMSTED : [interprétation] Oui, mais il a déclaré des cibles non

 18   militaires dans les zones urbaines.

 19   M. GOSNELL : [interprétation] Je suis désolé, j'avais mal entendu la

 20   réponse. Je retire mon objection.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.

 22   Veuillez continuer.

 23   M. OLMSTED : [interprétation]

 24   Q.  Pouvez-vous répondre à la question, s'il vous plaît. Est-ce que le

 25   ciblage de ces zones urbaines était problématique ?

 26   R.  Si vous y viviez, oui. Mais cela représentait également une violation

 27   patente des lois de la guerre.

 28   Q.  Est-ce qu'à un moment les violations du cessez-le-feu ont diminué en


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  1   nombre ?

  2   R.  Oui. Mais ça a été un processus graduel qui s'est étalé sur plusieurs

  3   mois et, en fait, suite au retrait des forces de la ligne de confrontation,

  4   tel qu'exigé par le plan Vance, et le déploiement de la FORPRONU.

  5   Q.  Avant le déploiement de la FORPRONU - nous y viendrons dans un instant

  6   - est-ce que la situation avait considérablement changé s'agissant du

  7   cessez-le-feu et de ces violations ?

  8   R.  Les violations étaient constantes de janvier à mars. Il n'y a pas eu

  9   d'amélioration significative, même si les deux camps disaient qu'ils

 10   essayaient de réduire le nombre de violations. Mais dans la pratique, rien

 11   n'a changé.

 12   Q.  Et pour ce qui est du nombre de violations et leur diminution après

 13   l'approbation de la FORPRONU, quels étaient les camps qui commettaient ces

 14   violations ?

 15   R.  Les deux camps ont continué à commettre des violations.

 16   Q.  Vous avez dit que vous avez observé et que vous aviez également reçu

 17   des informations à cet égard, que vous avez observé qu'il y avait eu des

 18   destructions ou des dommages occasionnés à des biens au sein des zones

 19   protégées des Nations Unies lorsque vous faisiez partie des officiers

 20   militaires de liaison des Nations Unies pour la mission en Yougoslavie.

 21   Est-ce que vous pourriez nous dire dans quelle région les destructions

 22   étaient les plus importantes ?

 23   R.  Parmi les quatre zones protégées des Nations Unies, je dirais que les

 24   pires destructions avaient eu lieu dans le secteur est. Et ensuite, peut-

 25   être dans le secteur sud.

 26   Q.  Vous avez déclaré que le long de la ligne de confrontation, les

 27   dommages étaient considérables. Est-ce que vous pourriez nous décrire le

 28   type de dommages que vous avez observés bien au-delà de la ligne de


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  1   confrontation, c'est-à-dire dans les régions qui à l'époque, ou dans les

  2   mois précédant cette période-là, étaient des zones de bataille ?

  3   M. GOSNELL : [interprétation] Objection. La question est vague. Nous ne

  4   savons pas à quelle ligne de confrontation le conseil fait référence. Nous

  5   savons qu'elle a changé avec le temps.

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez être plus

  7   précis, Monsieur Olmsted.

  8   M. OLMSTED : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  9   Q.  Vous avez parlé de la ligne de confrontation. Est-ce que vous pourriez

 10   nous dire ce qu'étaient ces lignes de confrontation auxquelles vous avez

 11   fait référence ?

 12   R.  Eh bien, c'étaient les lignes de confrontation qui ont existé en

 13   janvier 1992, lorsque les officiers militaires de liaison des Nations Unies

 14   pour la mission en Yougoslavie sont arrivés, et qui sont restés en place

 15   jusqu'en mars 1992. Même s'il y a eu une séparation des forces pendant

 16   l'année 1992, cette ligne est restée intacte pour la plupart.

 17   Q.  Alors, je voudrais revenir à ma question.

 18   La destruction au-delà des lignes de confrontation, bien loin de ces lignes

 19   de confrontation, j'aimerais que vous nous décriviez le type de dommages

 20   que vous avez constatés là-bas.

 21   Q.  Certains dommages résultaient directement d'actions militaires. Cela

 22   était évident, vu les dommages provoqués. D'autres dommages semblaient

 23   avoir été provoqués au hasard et étaient des cas isolés dans les villages.

 24   Par exemple, un village qui comptait 20 à 30 maisons, dans ce genre de

 25   village-là, j'ai vu qu'il y avait eu deux ou trois maisons qui avaient été

 26   incendiées ou démolies. Dans d'autres villages, il en restait trois ou

 27   quatre debout et le reste a été incendié ou démoli. Cela dépendait de la

 28   région.


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  1   Q.  Mais si les dommages résultaient d'une bataille, que constatiez-vous ?

  2   R.  On y verrait alors davantage de dommages provoqués par des explosifs ou

  3   de l'artillerie ou des armes sur des blindés. Ce genre de dommages est très

  4   facile à détecter.

  5   Mais les dommages dont moi je parle bien loin de la ligne de confrontation

  6   semblaient avoir été provoqués délibérément. On avait incendié délibérément

  7   des maisons - cela semblait être une activité assez commune - mais il y a

  8   aussi eu d'autres types de structures qui ont été incendiés, des églises,

  9   des mosquées, des grands bâtiments qui avaient été explosés.

 10   Q.  Est-ce que vous vous êtes rendu à Vukovar ?

 11   R.  Je suis passé en voiture à Vukovar en janvier 1992.

 12   Q.  Et que pouvez-vous nous dire de la destruction de cette ville ?

 13   R.  Je me souviens que la destruction était assez importante, mais

 14   c'étaient des dommages provoqués par des batailles.

 15   Q.  Vous avez dit qu'il s'agissait de dégâts provoqués par les combats. La

 16   question au sujet de laquelle vous avez déjà témoigné concernant la

 17   destruction qui n'avait rien à voir avec les combats. Est-ce que vous avez

 18   vu quelque chose de la sorte à Vukovar ?

 19   R.  Je ne m'en souviens pas.

 20   M. OLMSTED : [interprétation] Est-ce que nous pouvons maintenant afficher à

 21   l'écran le 65 ter 785, s'il vous plaît. Intercalaire numéro 2.

 22   Q.  Ce que nous avons sous les yeux est le rapport du secrétaire général

 23   des Nations Unies conformément à la Résolution 721 et daté du 27] novembre

 24   [comme interprété] 1991. Connaissez-vous ce rapport ?

 25   R.  Oui, tout à fait.

 26   Q.  Comment le connaissez-vous ?

 27   R.  C'est mon écriture que je reconnais ici sur la première page.

 28   Q.  Est-ce quelque chose que vous auriez regardé avant d'être déployé par


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  1   les officiers militaires des Nations Unies en 

  2   Yougoslavie ?

  3   R.  Oui. Et les autres documents du Conseil de sécurité ayant trait à la

  4   FORPRONU et à l'UNMLOY faisaient partie des informations que nous recevions

  5   avant d'être déployés.

  6   Q.  Est-ce que vous pourriez regarder la page 4, s'il vous plaît. Ce qui

  7   m'intéresse, c'est le premier paragraphe, la dernière phrase, où il est dit

  8   :

  9   "Il semblerait également que ce soit le cas que les violations de cessez-

 10   le-feu par la JNA ont été plus nombreuses et certainement plus violentes."

 11   Comment ceci cadre-t-il avec la situation qui prévalait au moment où vous

 12   travailliez pour les Nations Unies, à savoir que vous faisiez partie des

 13   officiers militaires de liaison des Nations Unies en Yougoslavie ?

 14   R.  Ceci est tout à fait exact. Et j'attribue ceci au fait que la JNA

 15   disposait de quantités beaucoup plus importantes d'armes lourdes que les

 16   forces croates et qu'ils s'en servaient en toute liberté et assez souvent.

 17   Q.  Est-ce que nous pourrions regarder la page 6 maintenant, s'il vous

 18   plaît, de ce document.

 19   Les paragraphes 15 et 16 [comme interprété] de ce troisième chapitre

 20   évoquent la question du déplacement de la population. Veuillez nous dire,

 21   s'il vous plaît, dans quelle mesure cette information coïncidait avec ce

 22   que vous avez pu observer au début de l'année 1992.

 23   R.  Ceci semble coïncider.

 24   Q.  Et lorsque vous remplissiez vos fonctions en ex-Yougoslavie en 1992 et

 25   en 1996 [comme interprété], pendant toute la période de votre présence là-

 26   bas, avez-vous assisté à des réunions en présence de Slobodan Milosevic, le

 27   président de la République de Serbie ?

 28   R.  Oui, tout à fait, à de nombreuses reprises.


Page 7424

  1   Q.  Pourriez-vous nous parler de façon générale de quel genre de réunions

  2   il s'agissait dans ce cas ?

  3   R.  Alors, il s'agissait de régler des questions liées aux efforts de

  4   maintien de la paix des Nations Unies, des efforts de négociations en ex-

  5   Yougoslavie.

  6   Q.  Et y avait-il d'autres représentants de la communauté internationale à

  7   ces réunions ?

  8   R.  Il y avait un nombre important de représentants des Nations Unies.

  9   Certainement M. Goulding, le commandant de la force; le co-président de la

 10   Conférence internationale sur l'ex-Yougoslavie; et différents membres du

 11   personnel de la FORPRONU haut placés.

 12   Q.  Et à ces réunions, les représentants de la communauté internationale

 13   ont-ils soulevé avec le président Milosevic les questions concernant la

 14   sécurité dans les régions contrôlées par les Serbes en Croatie ?

 15   R.  Oui, tout à fait.

 16   M. GOSNELL : [interprétation] Ceci est une question directrice, Monsieur le

 17   Président.

 18   M. OLMSTED : [interprétation] Je souhaite en fait orienter le témoin vers

 19   la question générale. Je ne lui demande pas de répondre à cette question-

 20   là. Je ne peux en tout cas pas demander au témoin de parler de chaque sujet

 21   qui a été abordé avec M. Milosevic au cours de cette période.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vais vous autoriser à poser cette

 23   question.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, les questions liées à la sécurité

 25   étaient communément abordées.

 26   M. OLMSTED : [interprétation]

 27   Q.  Et pourriez-vous nous dire de quelles questions il s'agissait ?

 28   R.  Lors des premières réunions, il s'agissait de créer les conditions dans


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  1   les zones protégées des Nations Unies qui auraient permis à une force du

  2   maintien de la paix d'être déployée, force du maintien de la paix

  3   légèrement armée. Et les discussions ont porté sur le manquement du côté

  4   serbe de respecter le plan Vance-Owen. Il s'agissait de créer un

  5   environnement sûr pour permettre à la FORPRONU de faire son travail.

  6   Beaucoup de discussions ont également porté sur des violations graves du

  7   plan Vance-Owen -- de la teneur de ce plan Vance-Owen.

  8   Q.  Vous avez déclaré qu'une des questions qui ont été abordées était de

  9   créer les conditions nécessaires dans ces zones contrôlées par les Serbes

 10   en Croatie. Quelle difficulté y avait-il à cet endroit-là ? Pourquoi

 11   fallait-il créer des conditions pour permettre à la mission de faire son

 12   travail ?

 13   R.  Le plan Vance nécessitait que les parties retirent leurs forces

 14   militaires des zones protégées des Nations Unies. Il fallait démilitariser

 15   dans ce cas toute force locale, et il fallait qu'ils permettent à la

 16   FORPRONU de créer un environnement sûr pour tous les habitants de ces zones

 17   protégées.

 18   Les parties ne cessaient d'enfreindre ces principes et ces conditions

 19   du plan en ne permettant pas cette démilitarisation ou ne favorisant pas un

 20   environnement sûr pour la population qui était restée.

 21   Q.  Alors, c'est ce dernier point qui m'intéresse. Quel environnement sûr y

 22   avait-il, ou quel était cet environnement dans lequel vivait la population

 23   locale ?

 24   R.  Alors, si vous n'étiez pas un Serbe, c'était très peu sûr. C'était un

 25   environnement tout à fait menaçant. Il y a eu de nombreux cas de personnes

 26   qui ont été harcelées, assassinées, cambriolées, contraintes à quitter

 27   leurs maisons. Ceci est parfaitement documenté par la police des Nations

 28   Unies ainsi que par le personnel militaire.


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  1   Q.  Et pendant combien de temps ces problèmes se sont-ils poursuivis ?

  2   R.  Certainement jusqu'au mois de décembre 1993, au moment où j'ai quitté

  3   le service des Nations Unies.

  4   Q.  Et ces questions ont-elles été abordées avec le président Milosevic

  5   lors de ces réunions ?

  6   R.  Oui, tout à fait.

  7   Q.  Et pourriez-vous nous dire ceci, s'il vous plaît, le président

  8   Milosevic était le président d'une république qui faisait partie de la

  9   Yougoslavie. Pourquoi avez-vous soulevé ces questions avec lui ?

 10   R.  Parce que le personnel-clé des Nations Unies estimait que c'était M.

 11   Milosevic qui tirait toutes les ficelles. C'était lui qui avait le pouvoir

 12   politique derrière tout ce conflit. Et que s'il fallait trouver une

 13   solution aux grandes questions, il fallait s'adresser à M. Milosevic.

 14   Q.  Du point de vue des négociateurs des Nations Unies, comment était

 15   perçue la relation entre le président Milosevic et la JNA ?

 16   R.  Nous pensions que la JNA répondait aux desiderata et conditions posés

 17   par Milosevic.

 18   Q.  Lorsque la question des crimes et autres activités contre la population

 19   non serbe dans les zones contrôlées par les Serbes a été soulevée en

 20   présence du président Milosevic, comment avait-il l'habitude de répondre à

 21   ce genre de questions ?

 22   R.  Essentiellement, il niait toute responsabilité personnelle. Il laissait

 23   entendre que la question était une question qui devait être traitée

 24   localement, qu'il fallait aborder ces questions-là avec les autorités

 25   locales, qu'il s'agissait peut-être d'éléments incontrôlés. A d'autres

 26   occasions, il aurait pu s'agir de provocations de la part des Croates. En

 27   général, il évitait la question et pointait du doigt les autorités locales

 28   ou les personnes locales.


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  1   Q.  Vous avez dit qu'il parlait d'éléments incontrôlés. A-t-il jamais

  2   expliqué ce qu'il entendait par là ?

  3   R.  Il sous-entendait qu'il y avait des gangsters motivés personnellement

  4   plutôt que des groupes centralisés et contrôlés.

  5   Q.  Vous a-t-il jamais expressément dit ce qu'il entendait par là ? Je

  6   comprends que c'est ce que l'on sous-entend. A-t-il jamais dit ouvertement

  7   --

  8   R.  Non, jamais.

  9   Q.  Vous avez dit qu'il avait l'habitude de vous dire à vous ainsi qu'aux

 10   autres représentants des Nations Unies d'aborder ces questions-là avec les

 11   autorités locales dans les zones contrôlées par les Serbes en Croatie.

 12   Avez-vous tous fait cela ?

 13   R.  Ceci a été fait à de nombreuses et nombreuses reprises le long de la

 14   chaîne de commandement de la FORPRONU, que ce soit le bas de la pyramide ou

 15   le haut de la pyramide, et c'est le commandant de la force qui a rencontré

 16   les hauts dirigeants politiques de la République serbe de Krajina

 17   également.

 18   Q.  Lorsque vous parlez de "hauts représentants politiques", qu'entendez-

 19   vous précisément ?

 20   R.  M. Hadzic particulièrement.

 21   Q.  Lorsque vous parlez de ces crimes commis contre la population non serbe

 22   pendant les années 1992 et 1993, et lorsque je dis "vous", je ne parle pas

 23   de vous personnellement, mais vous ainsi que d'autres représentants des

 24   Nations Unies, vous avez soulevé ces questions en présence de M. Hadzic.

 25   Comment avait-il l'habitude de réagir ?

 26   M. GOSNELL : [interprétation] Objection. La question est ambiguë, dans la

 27   mesure où on ne sait pas si la description qui porte sur la période 1992 et

 28   1993 parle de la période au cours de laquelle la question a été posée ou


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  1   des violences commises.

  2   La question est importante, Monsieur le Président, car il faut

  3   préciser à quel moment il y a eu une réaction. En tout cas, il faut donner

  4   un cadre temporel.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que vous pouvez

  6   préciser, Monsieur Olmsted.

  7   Et -- encore une chose. Votre question est la suivante : comment

  8   avait-il l'habitude -- attendez…

  9   Comment avait-il l'habitude de réagir.

 10   Est-ce que c'est vraiment l'habitude de réagir que vous voulez dire ?

 11   M. OLMSTED : [interprétation] Oui, je vais reformuler cela également.

 12   Mais je vais tout d'abord aborder la question soulevée par le conseil de la

 13   Défense.

 14   Q.  Alors, veuillez nous dire ceci, Monsieur, s'il vous plaît : à quel

 15   moment ces questions des crimes contre la population non serbe ont-elles

 16   été abordées avec M. Hadzic, crimes commis en Croatie ?

 17   R.  Alors, d'après ce que je sais, c'était en janvier 1992 et cela s'est

 18   poursuivi jusqu'au moment où j'ai quitté les Nations Unies en décembre

 19   1993.

 20   Q.  Il s'agit d'une période de deux ans. Alors, commençons par aborder le

 21   début de cette période. Au début de l'année 1992, comment M. Hadzic a-t-il

 22   réagi lorsque ces crimes ont été évoqués en présence de M. Hadzic par les

 23   représentants officiels des Nations Unies ?

 24   R.  Cela dépendait des circonstances et des allégations particulières. Dans

 25   certains cas, il a nié que ces crimes ont été commis ou qu'il en avait une

 26   quelconque connaissance. Dans d'autres cas, il indiquait qu'il s'agissait

 27   de provocations de la part d'activités croates. Et dans d'autres cas, il

 28   disait que c'était le résultat d'un malentendu, de subordonnés incontrôlés.


Page 7429

  1   Cela dépendait des circonstances.

  2   Q.  Et ces réponses que vous venez de nous donner, ces réponses ont-elle

  3   changé au fil du temps ? Autrement dit, en 1993, a-t-il proposé d'autres

  4   justifications, ou est-ce en général le type de réponse qu'il donnait ?

  5   R.  C'était en général le type de réponse qu'il donnait. Mais, par exemple,

  6   en septembre 1992, il y a eu de la part des autorités politiques croates

  7   une pression exercée pour que les réfugiés puissent rentrer, et c'était une

  8   initiative très déstabilisatrice car cela rendait la situation très tendue

  9   dans les zones protégées des Nations Unies.

 10   Donc, dans ces conditions-là, M. Hadzic faisait porter la faute aux

 11   personnes responsables de ce type de provocations. Et cela dépendait. Mais

 12   ses réactions étaient sensiblement les mêmes, à ma connaissance, pendant

 13   cette période 1992-1993 et ressemblaient beaucoup aux réponses fournies par

 14   d'autres dirigeants politiques serbes.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Olmsted.

 16   M. OLMSTED : [interprétation] Oui, je vois l'heure.

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui.

 18   Monsieur Wilson, c'est l'heure maintenant d'avoir notre deuxième pause et

 19   nous reviendrons à 12 heures 45. L'huissier va vous raccompagner.

 20   [Le témoin quitte la barre]

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

 22   --- L'audience est suspendue à 12 heures 18.

 23   --- L'audience est reprise à 12 heures 46.

 24   [Le témoin vient à la barre]

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur

 26   Olmsted.

 27   M. OLMSTED : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 28   Q.  Avant la pause, vous avez témoigné concernant les problèmes auxquels


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  1   devait faire face la population non serbe dans les zones contrôlées par les

  2   Serbes en Croatie et que vous avez porté ceci à l'attention du président

  3   Milosevic et de M. Hadzic, ainsi que d'autres personnes.

  4   Vous avez dit dans votre déposition qu'une des questions soulevées

  5   consistait à dire que les Croates avaient été expulsés de leurs maisons.

  6   Alors, compte tenu des informations dont vous disposiez à ce moment-là,

  7   qu'advenait-il des Croates que l'on contraignait à quitter leurs maisons ?

  8   R.  Je souhaite tout d'abord corriger ce que vous venez de déclarer. Ce

  9   n'est pas moi qui ai soulevé ces questions en présence de M. Milosevic et

 10   de M. Hadzic. En fait, j'ai assisté à cette réunion lorsque ceci a été

 11   évoqué.

 12   Q.  Alors, je vais être plus précis.

 13   R.  Alors, je ne sais plus où nous en sommes par rapport à votre question.

 14   Q.  Pas de problème. Je vais la reposer.

 15   Avant la pause, vous avez dit dans votre déposition qu'une des questions

 16   qui étaient soulevées lors de ces différentes réunions était la question

 17   des Croates qui étaient chassés de leurs maisons ou contraints à quitter

 18   leurs maisons. Alors, quelles informations aviez-vous à ce moment-là

 19   concernant les Croates et qui étaient ces personnes qui étaient contraintes

 20   à quitter leurs maisons ?

 21   R.  Alors, personnellement, moi je n'ai jamais été le témoin de ce genre de

 22   chose, à savoir quelqu'un que l'on aurait chassé de chez lui. Et donc, mes

 23   informations provenaient d'informations qui me provenaient de la MOCE, la

 24   Mission des observateurs européens, ou de la FORPRONU ou tel qu'allégué par

 25   les autorités croates, en particulier en janvier 1992 lorsque je venais

 26   d'arriver. Il est allégué qu'il y a énormément d'informations dont dispose

 27   la FORPRONU que de nombreuses personnes ont été contraintes à quitter leurs

 28   maisons, soit parce qu'elles étaient menacées physiquement, et il y a des


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  1   gens, en réalité, qui ont été assassinés, violés, voire encore --

  2   contraints à partir. Lorsque je suis arrivé en janvier 1992, la majorité

  3   des personnes non serbes qui vivaient dans les zones protégées étaient des

  4   personnes âgées, personnes qui avaient du mal à partir, et ces personnes-là

  5   étaient particulièrement vulnérables dans un environnement devenu de plus

  6   en plus menaçant et qui était le fait des autorités à l'époque.

  7   Q.  Et un terme a-t-il été utilisé par les négociateurs des Nations Unies

  8   ou de façon générale pour définir cela ?

  9   R.  Il y a un terme qui a été utilisé et employé par les journalistes qui

 10   était celui de nettoyage ethnique.

 11   Q.  Vous avez dit qu'une des réponses ou réactions de M. Hadzic lorsque ces

 12   questions ont été soulevées à différentes réunions en présence de

 13   représentants officiels des Nations Unies, eh bien, consistait à dire que

 14   les crimes avaient été commis par des subordonnés incontrôlés.

 15   Dans quel contexte fournissait-il ce genre d'explication ?

 16   R.  Encore une fois, tout dépend des circonstances. A savoir s'il y avait

 17   un événement en particulier, à savoir un affrontement entre les forces des

 18   Nations Unies, il peut dire en fait que ceci -- il peut dire que c'est le

 19   fait d'un commandant subalterne sur le terrain ou que c'était de sa propre

 20   initiative ou son manquement à assumer ses responsabilités correctement.

 21   Q.  Alors, je souhaite me concentrer encore une fois sur le cadre dans

 22   lequel ces crimes ont été commis et ce terme utilisé contre la population

 23   croate, le terme de nettoyage ethnique. Est-ce que ce serait utilisé pour

 24   expliquer la commission de ces crimes ?

 25   R.  L'essentiel de la thèse consistait à dire que les deux nations ne

 26   pouvaient pas cohabiter, qu'il fallait les séparer et que les Serbes et les

 27   Croates devaient vivre séparément dès lors.

 28   Q.  Lors de ces réunions avec M. Hadzic, a-t-il jamais nié que ces crimes


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  1   étaient commis contre la population non serbe dans les zones contrôlées par

  2   les Serbes ?

  3   R.  Je crois que oui. Il trouvait des excuses ou avançait d'autres raisons

  4   pour retarder ou empêcher différentes actions correctrices ou différentes

  5   activités. Et il reconnaissait [comme interprété] qu'il y avait une

  6   campagne de nettoyage ethnique.

  7   Q.  Hormis les réunions auxquelles vous avez participé vous-même en

  8   présence de M. Hadzic, comment avez-vous appris l'existence d'autres

  9   réunions au cours desquelles ces questions ont été abordées avec M. Hadzic,

 10   en particulier en 1992 ?

 11   R.  Alors, j'étais le destinataire de tous les rapports d'importance, des

 12   rapports de routine ou des rapports importants des observateurs militaires

 13   des Nations Unies. Il s'agissait de documents à diffusion restreinte sur

 14   toutes les évolutions importantes de façon à ce que je puisse remplir mes

 15   fonctions. Et le type de questions traitées portait en général -- dans le

 16   cas où il y avait des questions importantes, comme l'intimidation de la

 17   population locale, dans ce cas ces éléments figuraient dans les rapports ou

 18   alors il y aurait une correspondance spéciale, et quotidiennement j'avais

 19   accès à ce type d'information au sein de la FORPRONU.

 20   Q.  Vous avez parlé un peu plus tôt du fait qu'il y avait des séances

 21   d'information régulières au niveau du FC lorsque vous-même vous étiez le

 22   chef du groupe des observateurs militaires. Et dans ce cas, M. Hadzic

 23   assistait-il à ces réunions ?

 24   R.  Peut-être --

 25   M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, je dois m'y opposer

 26   parce que c'était une question très directrice. Même s'il est vrai que ces

 27   réunions d'information ont été mentionnées, de façon à faire un parallèle

 28   entre ces deux faits, c'est simplement -- c'est simplement une question


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  1   directrice.

  2   M. OLMSTED : [interprétation] Très bien. Alors, ces réunions ont été

  3   évoquées lors de ces séances d'information.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, je ne me souviens pas d'une discussion

  6   particulière dans ce cadre-là ou de mention de M. Hadzic. Mais je me

  7   souviens avoir vu des rapports écrits et des correspondances écrites et je

  8   me souviens d'avoir eu des discussions avec M. Thornberry ainsi que

  9   l'officier de police en chef sur ces questions-là.

 10   M. OLMSTED : [interprétation]

 11   Q.  Alors, veuillez nous dire pourquoi les dirigeants de la FORPRONU,

 12   autrement dit, les gens qui ont rencontré M. Hadzic -- pourquoi M. Hadzic

 13   par opposition à quelqu'un d'autre ?

 14   R.  Parce que c'était le dirigeant politique serbe de la Krajina et

 15   l'autorité dans la région. Et si nous essayions d'aller plus haut, il

 16   fallait à ce moment-là rencontrer M. Milosevic, qui nous renvoyait vers M.

 17   Hadzic.

 18   Q.  Et comment les dirigeants de la FORPRONU considéraient-ils M. Hadzic,

 19   est-ce qu'ils estimaient que c'était un interlocuteur valable ?

 20   R.  Je ne peux pas répondre à cette question.

 21   Q.  Soit. Alors, je vais vous poser la question différemment.

 22   Lorsque des questions ont été soulevées avec M. Hadzic, était-il en mesure

 23   de réagir par rapport à ce qui avait été dit ?

 24   M. GOSNELL : [interprétation] Objection. Cela mène à des conjectures. Aucun

 25   fondement n'a été posé permettant de poser cette question au témoin et

 26   quand ces questions ont été posées. Je crois qu'il faut quelque chose de

 27   plus spécifique.

 28   M. OLMSTED : [interprétation] C'est ce que je ferai en fonction de sa


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  1   réponse, une fois qu'il aura répondu. Et je ne souhaite pas le diriger dans

  2   un sens ou dans un autre et lui soumettre un exemple en particulier.

  3   Je crois que je pourrais être un peu plus précis.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je crois que vous devriez essayer,

  5   effectivement.

  6   M. OLMSTED : [interprétation]

  7   Q.  Lorsque des questions portant sur les régions contrôlées par les Serbes

  8   en Croatie, questions d'ordre local, ont été abordées avec M. Hadzic,

  9   aviez-vous des observations là-dessus, à savoir était-il en mesure de

 10   réagir ou est-ce qu'il pouvait répondre à ces questions à caractère local ?

 11   R.  Eh bien, je dois vous dire que sur cette période de deux ans, les

 12   activités n'ont jamais cessé. Alors, quelles que soient les actions que

 13   pouvait entreprendre M. Hadzic ou pas, ceci n'a eu que très peu d'effet sur

 14   le nettoyage ethnique ou l'intimidation contre la population. Donc ces

 15   activités, manifestement, pouvaient se poursuivre et ce, aux mains de M.

 16   Hadzic et de son organisation.

 17   Q.  Alors, laissons de côté la question du nettoyage ethnique. Alors,

 18   d'autres questions, peut-être des questions plus routinières ou de choses

 19   qui devaient être mises en œuvre à un niveau local dans les zones protégées

 20   des Nations Unies, M. Hadzic, dans ce cas, pouvait-il mettre en œuvre ces

 21   mesures-là ?

 22   R.  Moi, je ne peux parler que de mon expérience au niveau des échanges

 23   avec M. Hadzic et qu'à la mi-1993, j'ai soulevé cette question de la

 24   liberté de circulation avec la FORPRONU avec lui. Il a dit qu'il allait se

 25   pencher sur la question, enquêter dessus et lever les restrictions sur la

 26   liberté de circulation, me semble-t-il, et il y a eu des améliorations à

 27   court terme. Mais, autrement dit, il a prouvé qu'il pouvait agir dans sa

 28   zone de responsabilité. Mais à un niveau local, il valait mieux soulever


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  1   cette question avec les autorités onusiennes locales qui étaient basées à

  2   cet endroit-là. Je dois dire que j'ai lu de nombreux rapports sur ces

  3   questions-là, les questions qui ont été soulevées par les Nations Unies

  4   avec les autorités locales, et ceci était en vain.

  5   Q.  Et lorsque vous parlez des autorités locales, vous voulez parler de

  6   qui, en fait ? Du haut de la pyramide jusqu'en bas ou à un certain échelon

  7   ?

  8   R.  Alors, pour ce qui est de réponse particulière, je parle du poste de

  9   police, par exemple, et des milices locales.

 10   M. OLMSTED : [interprétation] Numéro 65 ter 785 à l'écran, s'il vous plaît,

 11   page 6. C'est un document que nous avons regardé avant la pause.

 12   Q.  Si nous regardons au paragraphe 17, il est dit :

 13   "Des événements ayant trait à une détention de personnes déplacées ou de

 14   mouvements organisés de personnes déplacées dans ces régions d'où ont fui

 15   d'autres personnes et la pression exercée sur des groupes particuliers pour

 16   qu'ils évacuent certaines villes ou villages ont donné lieu à de fortes

 17   préoccupations. M. Vance a soulevé cette question avec ses interlocuteurs,

 18   notamment le président Milosevic le 2 décembre, et encore une fois le 5

 19   décembre. Il s'agit d'une réponse détaillée et complète aux enquêtes qui

 20   ont été diligentées."

 21   A votre connaissance, les Nations Unies ont-elles reçu une réponse

 22   exhaustive aux enquêtes qui ont été menées ?

 23   R.  [aucune interprétation]

 24   M. OLMSTED : [interprétation] Je demande le versement au dossier de cette

 25   pièce, s'il vous plaît.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Versée au dossier. Cela recevra une

 27   cote.

 28   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] P2794, Messieurs les Juges.


Page 7436

  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

  2   M. GOSNELL : [interprétation] Pardonnez-moi si j'interromps. Est-il exact

  3   de dire qu'il s'agit du numéro 65 ter 785 ?

  4   M. OLMSTED : [interprétation] Oui, c'est le cas.

  5   M. GOSNELL : [interprétation] D'après mon prétoire électronique, ce

  6   document porte déjà une cote. Le P2631.

  7   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, c'est exact.

  9   Merci, Monsieur Gosnell.

 10   M. OLMSTED : [interprétation] Oui. Malheureusement, ce doit être un de ces

 11   documents d'expert qui a récemment reçu une cote. Je pense que le reste de

 12   mes documents ne poseront pas problème. Je vais vérifier pendant la pause.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 14   M. OLMSTED : [interprétation]

 15   Q.  Est-ce que vous avez pris part à des négociations pendant que vous

 16   étiez en poste au sein de la mission des officiers de liaison militaires

 17   des Nations Unies en Yougoslavie ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Et quel est le rôle que vous avez joué ?

 20   R.  Eh bien, j'ai accompagné M. Goulding à des négociations de haut niveau

 21   en janvier 1992, et à partir de ce moment-là on a pris la décision de

 22   déployer la FORPRONU. L'objectif de cette visite a été de s'assurer que les

 23   deux parties étaient déterminées à respecter le plan Vance et de voir si

 24   ces accords allaient être respectés et faire en sorte que l'environnement

 25   approprié soit créé qui permettrait le déploiement de la FORPRONU.

 26   J'ai accompagné également le commandant de la force lors de plusieurs

 27   déplacements pendant deux semaines après son arrivée en mars 1992, où il a

 28   rencontré plusieurs représentants des autorités politiques et militaires, y


Page 7437

  1   compris, me semble-t-il, M. Hadzic à ce moment-là.

  2   Q.  Voyons maintenant ce qu'il en est des réunions auxquelles vous avez

  3   assisté aux côtés de M. Goulding. Qui étaient ses interlocuteurs ?

  4   R.  C'était M. Milosevic à Belgrade. M. Hadzic et une délégation du secteur

  5   est, également à Belgrade. Nous avons rencontré M. Babic, qui était à ce

  6   moment-là le représentant du pouvoir politique à Knin dans le secteur sud.

  7   C'étaient les principaux interlocuteurs que nous avons rencontrés du côté

  8   serbe et puis plusieurs autres personnalités en Croatie.

  9   M. OLMSTED : [interprétation] Le document 917, s'il vous plaît, de la liste

 10   65 ter. A l'intercalaire 14.

 11   Q.  Général, c'est le programme de la mission à la tête de laquelle s'est

 12   trouvé M. Marrack Goulding du 26 au 30 janvier 1992. Du moins, les

 13   premières pages parlent d'une série de réunions auxquelles a assisté M.

 14   Goulding pendant cette période. Avez-vous assisté à ces réunions ?

 15   R.  Oui, j'ai été présent à toutes ces réunions.

 16   Q.  Est-ce que ce document reflète de manière fidèle ces réunions ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Nous voyons que la première réunion est une réunion qui s'est tenue

 19   avec Branko Kostic, qui a été le vice-président de la présidence de la

 20   RSFY. Alors, quelle a été la raison pour laquelle on l'a rencontré en

 21   premier ?

 22   R.  Il était à la tête de la présidence Tronquée yougoslave, mais les

 23   véritables conversations politiques se sont déroulées avec M. Milosevic.

 24   Q.  Et nous voyons que ces entretiens se sont déroulés le 26 janvier.

 25   Dites-nous, s'il vous plaît, ce qui a fait l'objet de la réunion ?

 26   R.  C'était au sujet de la mise en place d'un environnement qui permettrait

 27   le déploiement de la FORPRONU. Donc il s'agissait d'un conflit à grande

 28   échelle qui était encore en cours, conflit très grave, indépendamment du


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  1   cessez-le-feu qui était censé être mis en place. Et M. Goulding demandait

  2   aux parties de s'engager fermement à créer cet environnement qui

  3   permettrait à la FORPRONU de se déployer et d'assumer ses responsabilités,

  4   avec quelques réserves. Les parties ont consenti à cela.

  5   M. OLMSTED : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, je précise,

  6   Monsieur le Président, qu'il s'agit de la pièce à conviction P2640.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] C'est exact.

  8   M. OLMSTED : [interprétation]

  9   Q.  Le président Milosevic a-t-il fait des propositions lors de cette

 10   réunion ?

 11   R.  Le président Milosevic souhaitait que M. Goulding prenne en

 12   considération les considérations des dirigeants locaux eu égard au

 13   déploiement de la FORPRONU et de faire en sorte de répondre à leurs

 14   préoccupations, et il a demandé que M. Goulding rencontre les autorités

 15   politiques dans les zones protégées des Nations Unies ou les zones futures

 16   de protection par les Nations Unies.

 17   Q.  Et nous voyons que vous et M. Goulding avez rencontré M. Hadzic le 27

 18   janvier. Sur quoi a porté la réunion ?

 19   R.  C'était toujours la même question, la question de création d'un

 20   environnement qui permettrait le déploiement de la FORPRONU, et nous avons

 21   demandé que M. Hadzic nous garantisse qu'il allait coopérer avec nous.

 22   Q.  Et quelles sont les questions qui ont été abordées avec M. Hadzic ?

 23   R.  Premièrement, on a demandé qu'il démilitarise la zone.

 24   Ensuite, que le cessez-le-feu soit effectivement respecté.

 25   Troisièmement, il s'agissait de se montrer déterminé à garantir un

 26   environnement de paix et de sécurité pour que la FORPRONU puisse se

 27   déployer, pour que la population locale puisse vivre dans ce genre

 28   d'environnement.


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  1   Et à ce sujet, il s'agissait aussi de mettre fin à toute intimidation à

  2   l'encontre de la population non serbe.

  3   Q.  Vous souvenez-vous de la manière dont M. Hadzic a répondu à la question

  4   de l'intimidation à ce moment-là ?

  5   R.  Je ne me rappelle pas tous les détails de la conversation. Cela s'est

  6   déroulé il y a 20 ans. Mais l'entretien a porté surtout sur l'impossibilité

  7   des Serbes qui résidaient dans les zones protégées par les Nations Unies de

  8   continuer de vivre avec les Croates, et en particulier sous une autorité

  9   politique croate. Et, en fait, au sujet des provocations auxquelles se

 10   livraient les forces croates, ce qui engendrait un environnement

 11   d'insécurité et de menace qui pesait sur la population serbe. Du moins, le

 12   long des lignes de confrontation.

 13   Et de manière générale, il affirmait qu'il serait très difficile de trouver

 14   une solution politique même si on prenait le temps qu'il fallait.

 15   Q.  Et pour préciser votre dernière réponse, qui a parlé de cette

 16   impossibilité des Serbes de vivre avec les Croates dans les zones protégées

 17   par les Nations Unies ?

 18   R.  Oui, il s'agissait de l'impossibilité de vivre ensemble.

 19   Q.  Oui, de vivre ensemble. Qui en a parlé ?

 20   R.  M. Hadzic ainsi que d'autres dirigeants politiques serbes. Ils disaient

 21   qu'effectivement, c'était une bonne chose d'avoir signé le plan Vance mais

 22   que ça n'allait jamais fonctionner sur le terrain puisque les deux

 23   communautés n'allaient pas pouvoir trouver un terrain d'entente.

 24   Q.  Et M. Hadzic, est-ce qu'il a pris position par rapport au plan Vance et

 25   par rapport à la mission de la FORPRONU ?

 26   R.  Il a accordé son soutien de manière générale sur ce plan. Nous avons

 27   quitté cette réunion en pensant que M. Hadzic et son organisation politique

 28   dans le secteur est allaient faire preuve de coopération et allaient nous


Page 7440

  1   fournir leur assistance.

  2   Q.  Vous avez rencontré également Milan Babic à Knin le 27 janvier, d'après

  3   ce qu'on voit dans ce document.

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire ce qui a fait l'objet de cette réunion

  6   ?

  7   R.  C'était une réunion beaucoup plus difficile. M. Babic pensait que les

  8   Serbes et les Croates ne pouvaient absolument pas continuer de vivre

  9   ensemble. Il était hostile au déploiement de la FORPRONU, et nous n'avons

 10   pas pu lui faire changer d'attitude pendant ces entretiens.

 11   Q.  Avez-vous essayé d'imposer des conditions au déploiement de la FORPRONU

 12   ?

 13   R.  Son exigence principale était que la FORPRONU ne soit pas déployée en

 14   profondeur dans les zones de protection. Il pensait qu'elle devait être

 15   déployée le long de la ligne de confrontation pour séparer les deux forces

 16   militaires opposées.

 17   Et la préoccupation des Nations Unies était que, tout comme dans d'autres

 18   cas de missions de paix ailleurs dans le monde, à la fin on allait créer un

 19   statu quo, on allait geler la situation et les négociations politiques

 20   allaient devenir encore plus difficiles. Donc M. Goulding a insisté sur le

 21   schéma qui avait été proposé de notre côté plutôt que de nous déployer le

 22   long de la frontière.

 23   Q.  Et est-ce que M. Goulding a estimé que l'opposition de M. Babic au plan

 24   Vance-Owen était quelque chose de significatif ?

 25   R.  Il a pensé que ça allait empêcher le déploiement de la FORPRONU, et

 26   donc il en a parlé auprès de M. Milosevic à Belgrade et lui a demandé

 27   d'accorder son soutien aux Nations Unies.

 28   M. Milosevic a laissé entendre à M. Goulding qu'il ferait quelque


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  1   chose, et il y a eu effectivement des élections qui ont eu lieu par la

  2   suite en Krajina. M. Babic a été évincé et M. Hadzic a été nommé au poste

  3   de président pour l'ensemble des zones de protection des Nations Unies.

  4   Q.  Alors, page 2, à la date du 29 janvier, nous voyons qu'il y a eu

  5   une réunion avec le président Milosevic à ce moment-là.

  6   Est-ce que c'est là que M. Goulding a parlé de la question de M. Babic avec

  7   M. Milosevic ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Alors, est-ce que vous avez compris que le remplacement de M. Babic par

 10   M. Hadzic avait une certaine signification ?

 11   R.  Eh bien, à mon sens, cela signifiait que M. Hadzic allait suivre les

 12   consignes de M. Milosevic et que c'est pour cela qu'il a été mis à ce

 13   poste.

 14   Q.  Est-ce que votre conclusion a été confirmée par ce qui allait se

 15   produire par la suite ?

 16   R.  Non.

 17   Q.  Est-ce que vous avez été le seul au sein du sommet de la FORPRONU qui a

 18   formulé cette opinion-là du lien entre M. Hadzic et le président Milosevic

 19   ?

 20   R.  C'était une opinion qui était généralement partagée. La plupart des

 21   protagonistes des Nations Unies, à partir du moment où ils étaient déployés

 22   dans le pays et lorsqu'ils prenaient connaissance de la situation et

 23   entraient en contact avec les différentes autorités à tous les échelons,

 24   ils finissaient par considérer que M. Hadzic était le bras prolongé du

 25   président Milosevic en Krajina.

 26   Q.  Page 7 de ce document, s'il vous plaît.

 27   Lettre en date du 3 février 1992 du vice-président Kostic adressée au

 28   secrétaire général des Nations Unies. Et au paragraphe 2, M. Kostic écrit


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  1   en disant que :

  2   "La présidence de la RSFY a obtenu le consentement au plan de paix et les

  3   opérations au terme du plan de paix, l'engagement des forces des Nations

  4   Unies également et des représentants serbes dans les zones touchées."

  5   Alors, Monsieur, est-ce qu'il était important d'obtenir le consentement des

  6   représentants serbes dans les zones serbes de Croatie pour que le plan

  7   Vance puisse être traduit dans les faits ?

  8   R.  Oui, c'était absolument fondamental. C'étaient eux qui allaient mener à

  9   bien la démilitarisation, qui allaient créer l'environnement de sécurité et

 10   qui allaient permettre à la FORPRONU de fonctionner. C'étaient eux qui

 11   étaient les instances de pouvoir. Et on avait besoin de leur coopération.

 12   Q.  Alors, vous avez été déployé en tant que membre de la FORPRONU. Parlons

 13   maintenant de cela, le début du mois de mars 1992.

 14   Vous avez dit, je pense, que vous êtes arrivé en mars 1992 en faisant

 15   partie de la mission préparatoire. Est-ce que vous pouvez nous en parler ?

 16   R.  Oui. Le commandant de la force et l'état-major de la FORPRONU ont été

 17   déployés à la mi-mars, je pense le 11 mars, ou peut-être le 8, 1992. Et

 18   pendant une période de deux semaines, la FORPRONU -- ou, plutôt, la mission

 19   des officiers de liaison militaires des Nations Unies, donc l'organisation

 20   que j'avais mise sur pied en janvier, a continué de fonctionner et le

 21   commandant de la force et ses principaux collaborateurs ont profité de ce

 22   moment pour rencontrer les représentants des autorités locales et pour

 23   négocier ce qui était nécessaire pour garantir le déploiement de la

 24   FORPRONU. Pendant cette période, j'ai accompagné le général Nambiar lors de

 25   l'ensemble de ses déplacements et de ses entretiens.

 26   Q.  Et à quel moment est-ce que le déploiement de la FORPRONU a commencé

 27   dans les zones de protection des Nations Unies ?

 28   R.  Ça s'est fait par étapes. Le processus a commencé en mars et a continué


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  1   probablement jusqu'en juillet. Il y a eu des éléments qui sont arrivés de

  2   loin, de l'Amérique du sud. C'était une opération très complexe d'un point

  3   de vue logistique, donc il a fallu beaucoup de temps pour que ces gens

  4   arrivent. Donc il a fallu pas mal de temps pour que la FORPRONU puisse

  5   déployer l'ensemble sur l'ensemble du territoire des zones de protection et

  6   qu'elle puisse assumer entièrement sa responsabilité sur ces territoires.

  7   Q.  Nous avons déjà entendu des dépositions sur le plan Vance. Ce plan

  8   comportait plusieurs volets.

  9   Donc, est-ce que vous pouvez nous dire s'il était prévu que sa mise

 10   en œuvre se déroule par étapes ?

 11   R.  De mémoire, il s'agissait de cinq étapes.

 12   Premièrement, il s'agissait de séparer les forces le long de la ligne

 13   de confrontation. La deuxième étape devait être la démilitarisation des

 14   zones de protection des Nations Unies. Donc les forces locales présentes

 15   sur place devaient être désarmées et la vie, la paix devaient être

 16   rétablies. Ensuite, il a fallu déployer la police appropriée. Je pense que

 17   j'ai un petit peu perdu l'ordre chronologique, puisque la JNA devait se

 18   retirer aussi des zones de Croatie qu'elle avait occupées. Et enfin, la

 19   dernière étape consistait à créer un environnement de sécurité pour la

 20   population locale.

 21   M. OLMSTED : [interprétation] Je demande que l'on nous affiche le document

 22   1944 de la liste 65 ter. Il s'agit de l'intercalaire 118.

 23   Q.  Général, est-ce que vous avez eu l'occasion de revoir ce document ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Les informations qu'il contient nous parlent de la présence de la

 26   FORPRONU en Yougoslavie, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Passons à la page 5, s'il vous plaît. Cette partie, justement, reprend


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  1   le contenu du plan Vance.

  2   Regardons la partie intitulée "Basic concept", concept de base, au

  3   point 7. On nous dit :

  4   "Le rôle des troupes des Nations Unies sera de garantir que les zones

  5   restent démilitarisées et que toutes les personnes qui y résident soient

  6   protégées de toute crainte d'attaque armée."

  7   Lors de quelle phase du plan Vance les troupes des Nations Unies étaient-

  8   elles censées fournir cette protection ?

  9   R.  Lors de la phase 5.

 10   Q.  Vous nous avez donné les grandes lignes des différentes étapes.

 11   Pourquoi la démilitarisation des zones protégées des Nations Unies devait-

 12   elle arriver en premier ?

 13   R.  Pour faire arrêter les combats sur la ligne de confrontation. Lorsque

 14   les forces sont proches l'une de l'autre, la situation empire et les

 15   violations sont plus importantes. Donc il fallait tout d'abord séparer ces

 16   deux camps. Et ensuite, il fallait retirer dans les zones protégées des

 17   Nations Unies les forces armées parce qu'elles créaient une menace et un

 18   environnement instable pour la population locale, et aussi parce qu'elles

 19   pouvaient passer à l'offensive assez facilement, dépasser les zones

 20   protégées, ou encore mettre sur pied des patrouilles dans les zones

 21   protégées et provoquer des problèmes de sécurité. Donc l'intégralité de la

 22   zone devait revenir au maximum à la vie civile normale. Il fallait se

 23   débarrasser de toutes les armées, de toutes les armes, et faire en sorte

 24   que la zone soit gérée par une hiérarchie municipale normale. La FORPRONU,

 25   en outre, devait fournir un appui politique pour assurer la sécurité

 26   générale en empêchant les armes de circuler, en empêchant les forces de

 27   circuler et en permettant à la police de faire son travail et d'assurer un

 28   environnement le plus normal possible à la population civile.


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  1   Q.  Est-ce que vous pourriez nous expliquer quelle est la différence pour

  2   vous entre le maintien de la paix et l'application de la paix ?

  3   R.  Le maintien de la paix veut dire qu'il faut faire en sorte de maintenir

  4   un accord entre deux parties belligérantes. D'observer l'accord, donc.

  5   L'application de la paix veut dire qu'il faut faire appliquer la

  6   paix, qu'il y a une force combattante. Par exemple, l'action en Irak était

  7   une opération d'application de la paix sous mandat du Conseil de sécurité

  8   et de ses résolutions. Au Moyen-Orient, c'est un processus de maintien de

  9   la paix, par contre. On supervise et on s'assure qu'un accord existant soit

 10   honoré entre les deux parties.

 11   Q.  Et pour la FORPRONU, quel genre de mission était-ce ?

 12   R.  Eh bien, la FORPRONU était une organisation de maintien de la paix

 13   légère armée. Il fallait faire observer un accord entre deux parties

 14   belligérantes.

 15   Q.  Passons à la page 2 et éloignons-nous un instant du plan Vance.

 16   Au paragraphe 6 de ce document, on voit cinq étapes qui sont reprises

 17   pour le plan. Et ces étapes ne sont pas expressément énumérées dans le plan

 18   Vance. Est-ce que vous pouvez nous expliquer leur objectif ?

 19   R.  Les cinq étapes visent à séparer les deux armées et à créer un

 20   environnement sûr et sécurisé pour les résidents des zones protégées. C'est

 21   l'objectif de ces cinq phases.

 22   Q.  Passons au paragraphe qui se trouve à cette même page, le paragraphe 8,

 23   qui est juste en dessous de ces cinq étapes.

 24   On nous dit :

 25   "Les Serbes ont choisi de placer leurs armes lourdes et leur

 26   équipement lourd sous contrôle conjoint des Nations Unies et des Serbes à

 27   des emplacements centralisés, les maisons de munitions."

 28   Quel nom a-t-on donné à ce processus ?


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  1   R.  C'est le processus le double cadenas. En effet, les deux parties, les

  2   Nations Unies et la partie qui avait apporté son accord, devaient convenir

  3   d'ouvrir des entrepôts où se trouvaient les armes pour que l'autre partie y

  4   accède.

  5   Q.  Et quel genre d'armes étaient considérées comme étant des armes lourdes

  6   ?

  7   R.  Toute arme au-dessus d'un mortier de 82 millimètres et des véhicules

  8   blindés de transport de troupes.

  9   Q.  Et vous avez dit que les deux camps devaient se mettre d'accord avant

 10   de débloquer, de décadenasser ces armes. Est-ce que la FORPRONU a jamais

 11   donné son autorisation ?

 12   R.  Pas quand j'y étais. Pas en 1992, pas en 1993. Même si les forces

 13   serbes ont essayé d'entrer de force dans ces entrepôts au début de l'année

 14   1993 sans accord, sans aval des Nations Unies et ont eu accès à ces armes.

 15   Q.  Passons à la page 6 à présent. Et revenons au plan Vance.

 16   Au paragraphe 11, le plan stipule que les troupes de la FORPRONU

 17   contrôleraient l'accès aux zones protégées en créant des postes de contrôle

 18   sur toutes les routes et voies principales y menant.

 19   Quel était l'objectif de ces postes de contrôle ?

 20   R.  L'objectif était d'empêcher le mouvement d'éléments de l'armée ou armés

 21   ou la circulation d'armes de guerre à l'intérieur des zones protégées,

 22   autour des zones protégées ou encore de les empêcher d'en faire entrer.

 23   Q.  Si nous regardons plus bas au paragraphe 13, on y parle d'un groupe

 24   d'observateurs militaires non armés. Est-ce que vous savez si ces

 25   observateurs suivaient les ordres de quelqu'un ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Combien d'observateurs militaires agissaient dans les zones protégées

 28   des Nations Unies ?


Page 7448

  1   R.  [aucune interprétation]

  2   L'INTERPRÈTE : Inaudible pour les interprètes.

  3   Q.  D'où venaient-ils ?

  4   R.  D'environ 20 à 25 pays du monde entier. Tous des militaires de carrière

  5   et pas des officiers de réserve.

  6   Q.  Et est-ce que le nombre d'observateurs militaires a augmenté avec le

  7   temps ?

  8   R.  Oui. Mais au moment où je suis parti de la FORPRONU en décembre 1992,

  9   le mandat a été changé et des missions supplémentaires ont été octroyées

 10   aux observateurs militaires.

 11   Q.  Quel était le mandat principal des observateurs militaires, brièvement

 12   ?

 13   R.  Il fallait superviser le retrait de la JNA et de l'armée croate et

 14   patrouiller dans les zones protégées des Nations Unies pour garantir

 15   qu'elles aient été démilitarisées, mais aussi patrouiller d'un point de vue

 16   plus général au sein des zones protégées pour savoir ce qu'il s'y passait

 17   et faire agir leurs bons officiers s'il y avait conflit. La plupart d'entre

 18   eux devaient faire rapport de toutes leurs activités en passant par le

 19   commandant de secteur dans chaque secteur.

 20   Q.  Et comment les informations contenues dans ces rapports arrivaient-

 21   elles sur votre bureau ?

 22   R.  Il y avait un système de rapport routinier, un rapport quotidien, des

 23   résumés hebdomadaires également. S'il y avait urgence, une procédure

 24   existait aussi. Un canal de communication spéciale était établi pour faire

 25   passer les informations urgentes. Et puis, il y avait aussi des conférences

 26   périodiques auxquelles je participais avec les commandants des différents

 27   groupes d'observateurs militaires. A ces réunions-là, nous pouvions

 28   discuter des différentes préoccupations et exigences des membres.


Page 7449

  1   Q.  Quel était le rôle des observateurs militaires des Nations Unies ? Quel

  2   était leur rôle, leur responsabilité, en cas de constatation de violations

  3   des droits de l'homme dans les secteurs contrôlés par les Serbes en Croatie

  4   ?

  5   R.  Ils pouvaient intervenir et empêcher que les violations ne se

  6   produisent, c'était leur obligation. Si cela n'était pas possible, ils

  7   devaient attirer l'attention de quelqu'un qui pouvait agir le plus

  8   rapidement possible. Une enquête aurait lieu sur les circonstances avec un

  9   maximum de détails possible, et puis un rapport objectif était rédigé et

 10   envoyé dans la filière hiérarchique.

 11   Q.  De qui se composaient les observateurs militaires des Nations Unies ?

 12   R.  C'étaient des personnes impartiales. Ils agissaient par deux, et en

 13   général il fallait que deux nationalités différentes soient représentées

 14   dans ces binômes.

 15   Q.  Passons à la page 7 de ce document. Le paragraphe 19 m'intéresse, il

 16   est vers la fin de la page. Il contient une disposition portant sur le

 17   maintien de l'ordre public dans les zones protégées par les forces de

 18   police locales.

 19   Général, est-ce que l'on n'a jamais envisagé que la FORPRONU s'acquitte de

 20   l'application de la loi dans les zones protégées des Nations Unies ?

 21   R.  Non. Il y avait environ 300 policiers au sein de la FORPRONU, et leur

 22   rôle était d'établir la liaison, de coopérer, de superviser et d'aider les

 23   forces locales de police, mais pas de mener les fonctions de la police au

 24   sein des zones protégées des Nations Unies.

 25   Q.  Si nous regardons encore ce paragraphe, on nous dit plus loin que la

 26   force locale de police se composerait de résidents des zones protégées des

 27   Nations Unies en question, reflétant proportionnellement la composition

 28   nationale de la population qui y vivait avant les hostilités récentes. Est-


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  1   ce que cette disposition a jamais été mise en œuvre sur le terrain ?

  2   R.  Non. Honnêtement, cela aurait été infaisable parce que la plupart de la

  3   population non serbe avait déjà fui les zones protégées. Aucun effort n'a

  4   été entrepris pour incorporer des Croates qui seraient restés dans les

  5   zones protégées au sein de ces forces de police. Et, en fait, je pense

  6   qu'il y a eu discrimination et intimidation de la part des forces de

  7   police.

  8   Q.  Et qui était responsable pour au moins essayer d'établir une

  9   proportionnalité dans les groupes ethniques au sein des forces de police ?

 10   Est-ce que c'était la FORPRONU qui devait le faire ou c'était les autorités

 11   locales qui devaient le faire ?

 12   R.  C'était les autorités locales.

 13   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs le Juges, j'aimerais demander le

 14   versement de ce document.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le document est admis. Quelle sera sa

 16   cote ?

 17   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La pièce P2794.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 19   M. OLMSTED : [interprétation]

 20   Q.  Nous avons évoqué en surface le système de rapport au sein de la

 21   FORPRONU. J'aimerais à présent que vous nous décriviez un petit peu plus en

 22   détail les sources des informations que vous receviez en qualité de chef du

 23   groupe des observateurs militaires pour que nous comprenions bien comment

 24   vous étiez informé des événements sur le terrain.

 25   R.  La source principale, c'était la réunion quotidienne des commandants,

 26   parce que toutes les questions d'importance étaient soulevées.Ensuite, les

 27   documents principaux qui pouvaient contenir des préoccupations de grande

 28   envergure portant sur les zonez protégées et d'autres secteurs.


Page 7451

  1   Il y avait aussi des rapports routiniers quotidiens ou mensuels qui

  2   provenaient de plusieurs sources : l'armée, la police, les affaires

  3   civiles, les ONG, la Mission d'observation de la Communauté européenne, les

  4   rapports des médias et, bien sûr, les discussions que j'ai tenues et

  5   pendant lesquelles j'ai eu l'occasion de parler à plusieurs personnes au

  6   sein de la FORPRONU et en dehors de la FORPRONU.

  7   Q.  Dans quelques instants nous allons regarder plusieurs documents.

  8   Des rapports de situation de la FORPRONU, des informations militaires, des

  9   résumés de ces informations ou des évaluations de situation hebdomadaires.

 10   J'aimerais savoir si ce genre de documents sont les documents, justement,

 11   que vous receviez régulièrement ?

 12   R.  Oui, quotidiennement.

 13   Q.  Les informations reprises dans ces différents rapports qui venaient du

 14   terrain, est-ce qu'elles étaient vérifiées d'une façon ou d'une autre ?

 15   R.  La politique des Nations Unies consistait à dire que si une question

 16   était rapportée, elle devait être vérifiée. Si elle ne pouvait pas être

 17   vérifiée au moyen de preuve réelle, il fallait le stipuler dans le rapport.

 18   Contrairement, par exemple, à un rapport de média où un journaliste écrit

 19   ce qu'il pense avoir eu lieu, nous, nous devions nous fonder sur des faits.

 20   Q.  En qualité de chef du groupe des observateurs militaires, à quelle

 21   fréquence rencontriez-vous les observateurs militaires sur le terrain au

 22   sein des zones protégées ?

 23   R.  Cela dépendait de mes autres responsabilités, mais j'essayais de me

 24   rendre dans chaque zone protégée environ une fois par mois en 1992. Et

 25   puis, en 1993, j'ai accompagné le co-président de Genève, et je crois qu'à

 26   ce moment-là je me suis rendu dans toutes les zones protégées deux fois

 27   environ.

 28   Q.  Et qui était ce co-président ?


Page 7452

  1   R.  C'était M. Cyrus Vance à l'origine, et Lord Owen, et ensuite M. Vance a

  2   été remplacé par M. Stoltenberg.

  3   Q.  Et pendant ces visites sur le terrain, est-ce que vous avez pu vérifier

  4   les informations que l'on vous avait transmises ?

  5   R.  Ce que j'ai constaté était ce qui se trouvait dans les rapports.

  6   Q.  Entre le 24 mars et le 24 juin 1992, où avez-vous passé le plus clair

  7   de votre temps ?

  8   R.  J'étais à Sarajevo.

  9   Q.  Et pourquoi étiez-vous basé là-bas ?

 10   R.  L'état-major avait été déployé à Sarajevo, si ma mémoire est bonne, le

 11   22 mars, et c'était la ville choisie pour le QG de la FORPRONU. Mais vu que

 12   la situation a commencé à se détériorer, le commandant de force a dû

 13   déménager son QG en premier à Belgrade, et puis, environ un mois plus tard,

 14   à Zagreb. Et lorsqu'il est parti de Sarajevo, quelques observateurs

 15   militaires sont restés avec moi, environ huit, et j'ai donc été le

 16   commandant des Nations Unies à Sarajevo. Et j'avais en outre un groupe de

 17   protection français d'environ 60 hommes. J'y suis resté jusqu'à la relève

 18   par la force qui allait ouvrir l'aéroport de Sarajevo aux alentours du 22-

 19   24 juin 1992.

 20   Q.  Et où étiez-vous basé après cela ?

 21   R.  Ensuite, moi je suis retourné au QG de la FORPRONU, QG initial à

 22   Belgrade, et puis à Zagreb.

 23   Q.  Alors, pendant que vous étiez à Sarajevo, est-ce que vous avez continué

 24   à recevoir des rapports sur les événements dans les zones protégées ?

 25   R.  Oui, mais moins fréquemment. L'environnement était très difficile à ce

 26   moment-là, les communications étaient intermittentes, et il était plus

 27   difficile de communiquer entre observateurs militaires et les états-majors.

 28   Q.  Quelles phases du plan Vance ont été terminées pendant la période


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  1   couvrant 1992 et 1993 ?

  2   R.  Eh bien, il y a eu séparation des forces. Démilitarisation partielle

  3   des milices. Mise en place d'une force de police. Je crois que c'est tout,

  4   en gros. Il n'y a certainement pas eu de création d'un environnement stable

  5   et non menaçant.

  6   Q.  Donc la mise en œuvre du plan Vance-Owen a-t-elle permis de protéger la

  7   population dans les zones protégées d'une attaque armée ?

  8   R.  Pas pendant que j'étais sur le terrain entre 1992 et 1993.

  9   M. OLMSTED : [interprétation] Est-ce que nous pourrions afficher le

 10   document 1212, s'il vous plaît.

 11   Q.  Il s'agit là d'un rapport du secrétaire général en vertu de la

 12   Résolution 762 du Conseil de sécurité des Nations Unies et daté du 27

 13   juillet 1992.

 14   Pendant l'existence de la FORPRONU, comment les rapports du secrétaire

 15   général étaient-ils rédigés ?

 16   R.  Alors, rédigés sur la base des informations fournies par la FORPRONU.

 17   Un projet de rapport d'abord préparé au sein du QG de la FORPRONU et

 18   ensuite transmis au bureau de M. Goulding. Et c'est lui en général qui

 19   autorisait que soit envoyé un tel document.

 20   Q.  Et les travaux des UNMO, des observateurs militaires, ont-ils contribué

 21   à fournir des éléments d'information qui figuraient dans ces rapports ?

 22   R.  Oui, tout à fait. Et toutes les autres sources d'informations qui

 23   étaient disponibles au QG de la FORPRONU.

 24   Q.  Pardonnez-moi. Je crois que nous n'avons pas transcrit la dernière

 25   partie de votre réponse.

 26   R.  Et aux Nations Unies à New York.

 27   Q.  Merci. Vous avez eu l'occasion d'examiner ce rapport. Pourriez-vous

 28   nous dire, s'il vous plaît, si les informations que contiennent ces


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  1   rapports sont le reflet exact des informations provenant du terrain dans

  2   les zones protégées, compte tenu de la date de ce rapport ?

  3   R.  Je crois que oui.

  4   Q.  Si nous regardons le paragraphe 2, tout d'abord, le rapport déclare que

  5   la FORPRONU a assumé la responsabilité du secteur est le 15 mai 1992, le

  6   secteur ouest le 20 juin 1992, et les secteurs nord et sud le 2 juillet

  7   1992. Tout d'abord, s'agit-il là de la manière dont se sont déroulés les

  8   événements ?

  9   R.  Je crois que oui.

 10   Q.  Qu'est-ce que l'on entend par les termes "la FORPRONU assumait la

 11   responsabilité" ? De quoi ?

 12   R.  La responsabilité de garantir la sécurité dans les zones protégées des

 13   Nations Unies pour la sécurité de la population civile, à savoir la

 14   démilitarisation. Et ce terme précise que la FORPRONU disposait de troupes

 15   suffisantes à ce moment-là dans toutes ces zones protégées et pouvait

 16   commencer à assumer ses fonctions. Cela ne signifie pas pour autant que les

 17   parties ont coopéré et ont respecté leur partie de l'accord. Cela

 18   signifiait simplement que la FORPRONU disposait des ressources qu'on allait

 19   lui donner pour accomplir sa mission dans ces zones protégées.

 20   Q.  Et sur le plan de la sécurité intérieure, vous avez déjà indiqué qu'il

 21   y avait des problèmes qui se posaient à l'égard de la population non serbe

 22   dans les zones protégées. Lequel de ces quatre secteurs était considéré

 23   comme le plus difficile ?

 24   R.  Le secteur est.

 25   Q.  Et avez-vous pu parvenir à des conclusions à cet effet ? Que se

 26   passait-il dans ce secteur-là ?

 27   R.  Alors, le problème qui se posait au niveau de tous les secteurs, et en

 28   particulier dans le secteur est, c'est que les partis politiques n'ont


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  1   jamais été les garants de la démilitarisation de leurs secteurs. Et ceci

  2   avait été planifié de façon centralisée, et il s'agissait d'éviter de

  3   garantir la sécurité pour la population locale et de soustraire à cela.

  4   Q.  Vous nous avez dit que le secteur est était le pire. D'après vous,

  5   quelle était la situation dans les autres secteurs ?

  6   R.  Alors, le deuxième secteur qui se portait mal était le secteur sud, le

  7   nord, et ensuite l'ouest.

  8   Q.  Alors, la page 2, s'il vous plaît, paragraphe 4, où on parle d'une

  9   réalisation importante : le retrait de la JNA de tous les secteurs, à

 10   l'exception d'un bataillon d'infanterie dans le secteur est.

 11   Veuillez nous dire à quelle distance des frontières des zones protégées se

 12   retirait la JNA ?

 13   R.  Dans le secteur est, la JNA est allée de l'autre côté de l'autre rive

 14   du Danube et était déployée de ce côté-là pour pouvoir revenir, le cas

 15   échéant.

 16   Q.  Ceci a-t-il posé des problèmes ?

 17   R.  Eh bien, cela n'était pas [comme interprété] vraiment menaçant pour la

 18   population non serbe dans le secteur est, et c'était une menace non voilée

 19   à l'égard de l'armée croate. Et ils devaient bien se tenir, sinon la JNA

 20   allait revenir.

 21   Q.  Au moment du retrait de la JNA, qu'est-il advenu du matériel militaire

 22   et des armes de la JNA ?

 23   R.  La JNA a emporté toutes ses armes et tout son matériel militaire.

 24   Q.  Et qu'en est-il du matériel militaire des autres Serbes locaux, la

 25   Défense territoriale et autres forces ?

 26   R.  Eh bien, le plan Vance prévoyait que les armes lourdes appartenant à

 27   des milices locales devaient être placées dans un système de double

 28   verrouillage et que les armes de ces milices devaient être confiées aux


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  1   Nations Unies ou remises à la JNA. Mais dans la réalité, quelques armes

  2   lourdes ont été placées dans un système de double verrouillage, et

  3   quasiment toutes les petites armes et armes légères ont été retenues -- en

  4   tout cas, étaient en possession de milices qui avaient endossé d'autres

  5   uniformes, uniformes de la police. Les armes ont été dissimulées dans

  6   différents coins des zones protégées. Effectivement, les milices n'ont pas

  7   disparu. Les milices n'ont pas été désarmées. Les milices étaient en une

  8   sorte de camouflage.

  9   Q.  Si nous regardons le paragraphe 5, on peut lire que :

 10   "Avant que la FORPRONU n'assume ses responsabilités dans les zones

 11   protégées, il était devenu manifeste que la JNA transférait nombre de ses

 12   armes lourdes à la Défense territoriale et aux milices paramilitaires qui

 13   s'étaient établies dans la région."

 14   Etiez-vous au courant de ce problème-là ?

 15   R.  Au sens large du terme, oui.

 16   Q.  Que se passait-il exactement ?

 17   R.  La JNA s'assurait que les forces militaires qu'elles avaient laissées

 18   étaient en mesure de défendre ces zones protégées des Nations Unies avec

 19   les armes nécessaires dans le cas où les forces croates tentaient de

 20   reprendre le terrain ou, en tout cas, qu'ils pourraient retarder les forces

 21   croates suffisamment longtemps et permettre à la JNA de revenir et de

 22   reprendre possession du territoire.

 23   Q.  Le plan Vance avait-il prévu que cette transmission des ressources de

 24   la JNA aux forces armées locales était quelque chose qui allait se passer ?

 25   Est-ce que cela avait été prévu ?

 26   R.  Non, pas du tout. Je crois qu'il s'agissait là d'une circonstance créée

 27   délibérément compte tenu du plan Vance.

 28   Q.  [aucune interprétation]


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  1   M. OLMSTED : [interprétation] Je souhaite maintenant afficher le numéro 65

  2   ter 1339. Il s'agit de l'intercalaire numéro 56.

  3   Q.  Il s'agit là d'un rapport de situation quotidien de la FORPRONU daté du

  4   3 novembre 1992. Je souhaite que nous regardions le bas du document. On

  5   voit ici énumérés les noms des CMO, c'est-à-dire chefs du groupe des

  6   observateurs militaires. Que cela signifie-t-il ?

  7   R.  En fait, c'est mon titre en tant que chef du groupe des observateurs

  8   militaires. Cela signifie que je suis un des destinataires du rapport. En

  9   fait, c'est une diffusion standard.

 10   Q.  Est-ce que nous pouvons passer à la page 2, s'il vous plaît. Alors,

 11   veuillez regarder le secteur est, le point 1, ce passage-là du document. On

 12   peut lire :

 13   "Sur le pont d'Erdut, trois fusils AA, deux véhicules blindés de transport

 14   de troupes et un char qui ont été retrouvés cachés derrière une maison."

 15   Tout d'abord, "AA", qu'est-ce que cela veut dire ?

 16   R.  C'est antiaérien.

 17   Q.  Et ces armes constituaient-elles une violation de ce système de double

 18   verrouillage ?

 19   R.  Sans regarder une carte, je peux vous dire qu'il peut s'agir en fait de

 20   coordonnées ici. C'est possible qu'on les ait retrouvées du côté de la rive

 21   est du Danube, donc il pourrait s'agir d'armes légitimes. Mais il faudrait

 22   que je regarde une carte, parce qu'en fait ces coordonnées sur la carte

 23   sont importantes dans les zones protégées pour constater si, oui ou non, il

 24   y a violation.

 25   M. OLMSTED : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 26   je demande le versement au dossier de ce document, s'il vous plaît.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Soit.

 28   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce P2795, Messieurs


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  1   les Juges.

  2   M. OLMSTED : [interprétation]

  3   Q.  La FORPRONU a-t-elle reçu des rapports sur les violations de la

  4   présence ou de l'utilisation d'armes lourdes de la part du gouvernement

  5   croate ?

  6   R.  Je ne comprends pas très bien votre question. Nous parlons de l'emploi

  7   ou de la présence de ces armes ?

  8   Q.  La présence de ces armes.

  9   R.  Eh bien, de temps en temps, nous recevions des correspondances de la

 10   part des autorités croates alléguant qu'il y avait des zones où étaient

 11   entreposées des armes à certains endroits, et ensuite on parlait de la

 12   présence d'éléments militaires dans différentes régions des zones

 13   protégées.

 14   M. OLMSTED : [interprétation] Est-ce que nous pouvons regarder le numéro 65

 15   ter 5273, s'il vous plaît. Intercalaire numéro 165.

 16   Q.  Il s'agit là d'une note interne de la FORPRONU datée du 11 octobre

 17   1992. Est-ce que nous pouvons passer à la page 2. Alors, ce que nous avons

 18   ici, c'est une lettre adressée à la FORPRONU, et on voit ici le sigle CLO.

 19   Qu'est-ce que cela signifie ?

 20   R.  Je pense que c'est l'officier de liaison en chef. Je n'ai pas le

 21   contexte. Je suppose.

 22   Q.  C'est parce que je vois ici du côté droit colonel Petronova [phon],

 23   CLO.

 24   R.  Oui. Dans ce cas, ce serait un officier de liaison de la FORPRONU qui

 25   se trouverait à Zagreb à côté du ministère de la Défense croate, et il y

 26   avait une communication permanente entre les forces croates et la FORPRONU

 27   par le truchement de cet officier.

 28   Q.  Alors, est-ce que nous pouvons faire défiler ce texte vers le bas un


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  1   petit peu. Nous allons regarder la première page, information portant sur

  2   un nombre d'armes dissimulées à différents endroits. Je vois un canon B-1,

  3   dix chars, quelques véhicules blindés de transport de troupes.

  4   Veuillez nous dire si les informations contenues dans les rapports émanant

  5   du gouvernement croate, eh bien, ces éléments d'information pouvaient-ils

  6   être vérifiés ?

  7   R.  Dans le cas où nous recevions de telles correspondances, bien sûr que

  8   nous enquêtions. Et nous devions vérifier cela, bien sûr, et aborder la

  9   question avec les autorités locales. Dans certains cas, des correspondances

 10   comme celle-ci se fondaient sur l'imagination des uns et des autres. Dans

 11   d'autres cas, il s'agissait de renseignements sûrs.

 12   M. OLMSTED : [interprétation] Je demande le versement au dossier, s'il vous

 13   plaît.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Soit.

 15   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] P2796, Messieurs les Juges.

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 17   M. OLMSTED : [interprétation]

 18   Q.  Vous avez peut-être abordé cette question ou répondu à ceci dans vos

 19   questions [comme interprété] précédentes. Après le retrait de la JNA des

 20   zones protégées des Nations Unies, je crois que vous avez dit qu'il y avait

 21   d'autres forces armées en présence et qui intervenaient.

 22   Veuillez nous dire quelles forces armées étaient présentes.

 23   R.  Eh bien, ça, c'est quelque chose qui est un élément crucial, Messieurs

 24   les Juges, parce que l'ensemble des milices comportaient quelque 16 000

 25   hommes, et il s'agissait de personnel de l'armée qui du jour au lendemain

 26   est devenu personnel de la police. Autrement dit, ils ont changé simplement

 27   leurs uniformes, mais ils n'ont pas changé leurs fonctions. Il s'agissait

 28   de la police de frontière, de la police des douanes, cela n'avait pas


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  1   d'importance. Mais leur rôle sur le terrain consistait à cacher le fait

  2   qu'il n'y avait pas eu de démilitarisation des milices dans les zones

  3   protégées des Nations Unies. C'était une politique et un programme qui

  4   avaient été exécutés au plus haut niveau avec la coopération, je suppose,

  5   de la JNA et des plus hauts responsables politiques au niveau des autorités

  6   locales et au sein de la structure politique serbe.

  7   Alors, plutôt que d'avoir une force de quelques milliers d'hommes dans le

  8   cas de la Krajina, il y avait 7 000 policiers qui faisaient partie de cette

  9   communauté locale, et finalement nous étions en présence de 22 000

 10   policiers dans ces zones protégées des Nations Unies. C'était une manière

 11   d'éviter la mise en œuvre de la démilitarisation prévue par le plan Vance-

 12   Owen. Et donc, il s'agissait d'un environnement extrêmement menaçant pour

 13   la population locale, et en particulier les non-Serbes.

 14   En fait, la plus grande partie du nettoyage ethnique et les actes de

 15   violence ont été menés par ces policiers spéciaux.

 16   Q.  Et comment cette police spéciale était-elle armée ?

 17   R.  Ils disposaient d'armes de poing, ça, je le sais, et avaient accès

 18   également à des armes lourdes sur l'ensemble des zones protégées des

 19   Nations Unies.

 20   M. OLMSTED : [interprétation] Je vois qu'il est l'heure de faire la pause.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Olmsted.

 22   Monsieur Wilson, nous en avons terminé pour aujourd'hui. Vous ne pouvez pas

 23   partir encore. Nous nous attendons à ce que vous reveniez demain matin. Et

 24   puisque vous êtes encore témoin de la Chambre, cela signifie que vous

 25   n'êtes pas en droit d'aborder la question de votre déposition avec

 26   quiconque, et vous n'êtes pas en droit non plus d'aborder la question de

 27   votre déposition avec l'une ou l'autre des parties.

 28   Merci. L'huissier va vous raccompagner.

 


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  1   [Le témoin quitte la barre]

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est levée.

  3   --- L'audience est levée à 13 heures 59 et reprendra le mercredi 21

  4   août 2013, à 9 heures 00.

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