Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 5 septembre 2013

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes dans le

  6   prétoire et à l'extérieur du prétoire.

  7   La Greffière d'audience, veuillez citer l'affaire, s'il vous plaît.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Il s'agit

  9   de l'affaire IT-04-75-T, le Procureur contre Goran Hadzic.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 11   La présentation des parties, s'il vous plaît, à commencer par l'Accusation.

 12   M. OLMSTED : [interprétation] Matthew Olmsted et Alex Demirdjian du côté de

 13   l'Accusation, avec notre commis à l'affaire, Thomas Laugel, et notre

 14   stagiaire, Simona Onicel.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 16   Maître Zivanovic, du côté de la Défense.

 17   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

 18   les Juges. Pour la Défense de Goran Hadzic, Zoran Zivanovic et Christopher

 19   Gosnell.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Faites entrer le témoin dans le

 21   prétoire, s'il vous plaît.

 22   [Le témoin vient à la barre]

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour, Général. Je souhaite vous

 24   rappeler que vous êtes toujours tenu par votre déclaration solennelle.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour à vous.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, c'est à vous.

 27   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 28   LE TÉMOIN : ALEKSANDAR VASILJEVIC [Reprise]

 


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  1   [Le témoin répond par l'interprète]

  2   Contre-interrogatoire par M. Zivanovic : [Suite]

  3   Q.  [interprétation] Général, veuillez regarder votre déclaration, s'il

  4   vous plaît, le paragraphe 160 -- en réalité, je crois que nous pourrions

  5   l'afficher à l'écran.

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Dans ce paragraphe, vous avez dit, entre autres choses, que vous avez

  8   entendu dire de Borisavljevic que Goran Hadzic et Zeljko Raznjatovic se

  9   sont rendus à Velepromet les 19 et 20 novembre 1991. Tout d'abord, je

 10   souhaite préciser cette date du 19 novembre, s'il vous plaît. On peut lire

 11   un peu plus loin dans cette déclaration qu'à l'époque, il y avait 186

 12   prisonniers croates à Velepromet placés sous la garde du capitaine Bajic et

 13   qu'Arkan souhaitait en assumer la responsabilité immédiatement, mais qu'ils

 14   ont été transférés à Ovcara et ensuite emmenés à Sremska Mitrovica.

 15   Donc je souhaite vous poser maintenant cette question-ci : savez-vous à

 16   quel groupe de prisonniers ceci fait référence ? Parce que nous savons,

 17   effectivement, que 186 ou que 187 prisonniers d'Ovcara ont été transférés à

 18   Mitrovica et qu'il s'agissait des prisonniers qui s'étaient rendus à

 19   Mitnica.

 20   R.  Tout d'abord, au sujet de la date, la date du 19. Je crois que pendant

 21   la déposition précédente, nous avons indiqué que ces dates n'étaient pas

 22   fiables, à savoir les personnes qui m'ont transmis ces informations. Il

 23   s'agit du 20 plutôt que du 19. Ça, c'est le premier point.

 24   Deuxièmement, je ne sais pas où ces personnes ont été faites prisonnières,

 25   les personnes qui sont mentionnées ici dans ce document, mais je l'ai su le

 26   19 lorsque j'étais à Vukovar. On m'a dit que ces personnes avaient été

 27   transférées de Mitnica à Sremska Mitrovica. Il est possible qu'il y ait eu

 28   une sélection, ou plutôt, un tri des prisonniers; autrement dit, un certain


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  1   nombre de personnes de Mitnica qui étaient à Velepromet à l'époque. Mais je

  2   ne le sais pas avec certitude.

  3   Q.  Merci. C'était la question que je souhaitais vous poser.

  4   Un peu plus loin, on peut lire dans la même déclaration que, non pas le

  5   lendemain, mais le surlendemain de cet événement - c'est en tout cas ce que

  6   dit cette déclaration - le gouvernement du SBSO a tenu une réunion à

  7   Velepromet, et à cette réunion il y a été décidé de transférer ces

  8   prisonniers relevant de la compétence de la TO de Vukovar placée sous le

  9   commandement de Stankovic [phon]. Est-ce bien ce que Borisavljevic vous a

 10   dit ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  D'après les propos de Borislavjevic, pour ce qui est de ces 186

 13   prisonniers que l'on a interrogés, ces prisonniers ont été transférés à

 14   Ovcara et, de là, à Mitrovica. C'est la version de Borisavljevic, n'est-ce

 15   pas ?

 16   R.  Mais permettez-moi de préciser ce point à propos de cette séance étant

 17   donné qu'il a déplacé la date. Il ne s'en souvenait pas. Moi, je lui en ai

 18   parlé en 1995. Il a dit que c'était le jour d'après, donc le surlendemain

 19   du 19, et donc le jour d'après c'est le 20. Donc il ne s'agit pas du 19,

 20   mais du 20. Et donc, ce jour-là est sans doute déplacé aussi. En tout cas,

 21   c'est ce que je suppose. Et j'ai remarqué que la date n'était pas sûre, il

 22   y avait différentes versions. Les gens ne se souvenaient pas de ces dates.

 23   Il y a peut-être eu une erreur commise à ce niveau-là.

 24   Q.  De toute façon, il vous a dit qu'il s'agissait de deux jours distincts

 25   lorsqu'il a transféré les prisonniers de Velepromet à Ovcara ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Lorsque Arkan les a demandés et lorsque la réunion du gouvernement a eu

 28   lieu ?


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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Eh bien, voyez-vous, nous disposons d'information - page du compte

  3   rendu d'audience 5 089 - qui indique que ces prisonniers, 187 prisonniers,

  4   je suppose, ont été transférés à Sremska Mitrovica depuis Ovcara. Mais nous

  5   disposons d'information également qui indique que ces prisonniers ont été

  6   transportés à Ovcara directement après s'être rendus à Mitnica. Leurs noms

  7   ont été consignés comme il se doit et ces prisonniers ont été remis;

  8   autrement dit, ces prisonniers n'ont pas du tout été emmenés à Velepromet.

  9   R.  Soit. Si c'est ce que Borisavljevic vous a dit, bien.

 10   Q.  Mais avez-vous entendu parler ou avez-vous eu connaissance de cette

 11   information-là ?

 12   R.  De quoi voulez-vous parler ?

 13   Q.  A savoir que 186 ou 187 prisonniers de Mitnica, autrement dit, ceux qui

 14   se sont rendus à Mitnica, ont été transférés à Ovcara directement sans être

 15   emmenés à Velepromet ou ailleurs, et ensuite qu'ils ont été emmenés à

 16   Sremska Mitrovica ?

 17   R.  Alors, moi, je ne dispose que de l'information qui indique que plus

 18   tard -- autrement dit, les dates --

 19   Q.  Autrement dit, il n'y a que Borisavljevic qui vous a donné cet élément

 20   d'information ?

 21   R.  C'est exact.

 22   Q.  Merci. Je vous ai posé une question au sujet de cette décision qui

 23   consistait à remettre les prisonniers à la TO de Vukovar placée sous le

 24   commandement de Stanko Vujanovic, car je vois qu'au paragraphe 159 de votre

 25   déclaration vous parlez du fait que le commandant de la TO de Vukovar était

 26   Miroljub Vujovic. Donc je ne sais pas si Borisavljevic vous a parlé de

 27   Vujanovic particulièrement, ou s'agit-il peut-être d'un lapsus pour ce qui

 28   est des noms ?


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  1   R.  Voyez-vous, moi, je ne connaissais pas le commandant de la Défense

  2   territoriale personnellement et je ne sais pas de quelle date il s'agit.

  3   Moi, j'ai reçu des informations lorsque je me suis entretenu à Jovan

  4   Vulovic [phon], un journaliste de "Vreme", car cet homme lisait à partir de

  5   ses notes qu'il avait prises à Vukovar. Ce qu'il a dit constituait une

  6   source au sujet des événements qui se sont déroulés à cet endroit-là. Et

  7   l'autre source, c'est Borisavljevic.

  8   Q.  Oui, vous en parlez dans votre déclaration.

  9   R.  Moi, je ne peux pas vous dire exactement lequel des deux commandait la

 10   Défense territoriale et lequel occupait un autre poste.

 11   Q.  Je souhaite maintenant vous demander de bien vouloir regarder le 1D568.

 12   C'est le numéro 46 sur notre liste. Nous avons au dossier un document qui

 13   est extrait des journaux de l'époque. Le titre est : "Pas de menace de

 14   massacre à Vukovar." Il s'agit en réalité d'une déclaration qui est faite

 15   par notre représentant de la SSNO, Miodrag Starcevic.

 16   Vous souvenez-vous peut-être du poste qu'il occupait à l'époque à la SSNO ?

 17   R.  Oui, je m'en souviens. Il travaillait dans le service juridique,

 18   l'administration juridique.

 19   Q.  Merci. Voyez-vous, je souhaite que nous agrandissions la partie en

 20   B/C/S, s'il vous plaît, simplement le premier paragraphe. Il a dit que les

 21   demandes récentes du gouvernement croate étaient sans fondement parce qu'il

 22   n'y avait rien permettant d'indiquer qu'il y avait de véritables raisons

 23   d'avoir peur parce que personne à Vukovar ne va massacrer les civils, les

 24   personnes âgées et les enfants.

 25   Tout d'abord, je souhaite vous demander si vous vous souvenez de ces

 26   demandes récentes du gouvernement croate ? Qu'est-ce qu'ils demandaient

 27   exactement ?

 28   R.  Ecoutez, je ne connais même pas la date. La date est importante.


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  1   Q.  Un instant, s'il vous plaît. Il s'agit du 19 novembre. Ceci a été

  2   publié le 19 novembre 1991.

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Donc cette déclaration a été faite le jour d'avant, n'est-ce pas, le 18

  5   novembre ?

  6   R.  Oui. Moi, je ne disposais pas d'information de ce genre.

  7   Q.  Ecoutez -- voyez-vous, il y a quelque chose que je trouve assez

  8   frappant. On mentionne des hommes âgés, des femmes et des enfants. Est-ce

  9   une erreur ? On ne mentionne pas des prisonniers de guerre, des personnes

 10   faites prisonnières par les forces armées. Donc je souhaite vous demander

 11   si ceci a été omis par erreur, soit par les journaux, soit par…

 12   R.  Eh bien, voyez-vous, à cette date du 19 novembre, j'étais dans le

 13   village de Milici, comme je vous l'ai dit. J'aurais pu me trouver à

 14   Belgrade aussi sans avoir vu ce texte. Mais depuis que les opérations

 15   étaient terminées le 18 à Vukovar - en tout cas c'est ce qu'ils disent - on

 16   a fait sortir la population des maisons, des sous-sols, et ces personnes

 17   ont été évacuées de la ville.

 18   On a sans doute fait allusion ici à la peur par rapport à ce qui allait

 19   advenir de ces hommes âgés. Les personnes âgées, les enfants, et cetera,

 20   toutes ces personnes qui s'étaient trouvées dans les maisons jusqu'à ce

 21   moment-là, eh bien, toutes ces personnes étaient en train de sortir. Il y

 22   avait cette pression sur Vukovar de façon permanente. Mais c'est un fait

 23   que le premier groupe qui est sorti a exprimé le désir de se rendre en

 24   Croatie. Il y avait cette colonne - je ne sais pas si je me souviens bien -

 25   il y avait environ 1 000 personnes qui formaient cette colonne. Et ces

 26   personnes sont revenues de la frontière, car les Croates ne souhaitaient

 27   pas les laisser entrer. Et donc, les Croates sont retournés à Mitrovica, et

 28   à ce moment-là la Croix-Rouge a tenté de s'en occuper. Savez-vous, à ce


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  1   moment-là, il y avait énormément de propagande qui était diffusée. Il y

  2   avait des informations qui précisaient que certains enfants dans des

  3   jardins d'enfants avaient été tués. Il y avait toutes sortes de choses que

  4   l'on disait, et je crois que cela faisait partie de la campagne générale

  5   liée à Vukovar.

  6   Q.  Merci. Au paragraphe 158, vous parlez, entre autres -- en réalité, il y

  7   avait un des officiers qui s'est occupé des corps, des cadavres, qu'on a

  8   utilisé un bulldozer, et cetera. Je souhaitais préciser quelque chose.

  9   Lorsque vous dites -- lorsque vous parlez de cet enterrement ici, lorsque

 10   vous dites qu'il s'agit de creuser une tombe et qu'il fallait la recouvrir,

 11   qu'est-ce que vous voulez dire ? Ou est-ce qu'il s'agit d'autre chose ?

 12   R.  D'après moi, c'était cela, c'était la fosse commune où les victimes ont

 13   été enterrées.

 14   Q.  Merci.

 15   Nous disposons d'un autre élément d'information. A cette date-là, pour être

 16   précis, le 19 novembre, entre autres personnes, le général Jerko Crmaric

 17   était à Vukovar également. Et d'après nos informations, il était commandant

 18   adjoint chargé des questions logistiques au niveau de la 1ère Région

 19   militaire, me semble-t-il. En avez-vous entendu parler ? Je crois que vous

 20   ne l'avez pas vu, car vous avez dit que vous n'avez vu personne d'autre

 21   hormis les organes de la sécurité que vous avez cités.

 22   R.  Je connais le général Crmaric, et il est exact de dire qu'il occupait

 23   le poste de commandant adjoint chargé des questions logistiques au niveau

 24   de la 1ère Région militaire, mais je n'ai pas connaissance du fait qu'il

 25   était à Vukovar. Je ne l'ai pas vu et je n'ai pas reçu d'information à cet

 26   effet.

 27   Q.  Nous avons ici au dossier un document, le 1D584. Encore une fois, il

 28   figure sur notre liste, c'est le numéro 51. Il s'agit d'un document -- en


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  1   réalité, il s'agit d'une série d'instructions qui portent sur les personnes

  2   qui sont détenues par la JNA lors de conflits internes, et je vois qu'il

  3   est justement la personne qui a donné ces instructions et on peut lire dans

  4   ce document ce qui est fait ou comment sont traitées telles et telles

  5   personnes. Le général Crmaric faisait-il partie des organes de la sécurité

  6   avant d'occuper ce poste-ci ?

  7   R.  Je ne sais pas s'il a occupé ce poste après avoir travaillé pour

  8   l'organe de la sécurité, mais il a travaillé dans ce service pendant un

  9   certain temps les années précédentes.

 10   Q.  Connaissez-vous ces instructions ?

 11   R.  Oui. Lorsque je me suis préparé dans le cadre du procès intenté contre

 12   moi en Croatie, j'ai eu l'occasion de voir ce document. Et je peux dire que

 13   cette instruction était à la suite d'une autre instruction qui avait été

 14   rédigée par la SSNO suite aux ordres donnés par le chef de l'état-major

 15   général, Blagoje Adzic. Et ensuite, ceci a été envoyé aux commandants des

 16   régions militaires, et à ce moment-là les détails ont été peaufinés.

 17   Q.  Merci.

 18   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Ce document -- moi, je veux parler du

 19   document précédent. Pardonnez-moi, j'ai oublié d'en demander le versement.

 20   Il s'agit du 1D568 et 1D584.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ceci sera admis et recevra une cote.

 22   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ces documents reçoivent respectivement

 23   les cotes D100 et D101.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 25   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

 26   Q.  Alors, il y a encore une question que je souhaite vous poser. Vous avez

 27   vu dans un certain nombre de documents et vous avez certainement appris par

 28   la suite que le 20 novembre était la date la plus importante, et c'est la


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  1   raison pour laquelle nous sommes ici aujourd'hui. C'est la raison pour

  2   laquelle nous participons à ces débats juridiques, en tout cas en ce qui

  3   concerne Vukovar. D'après les informations dont nous disposons, à ce

  4   moment-là, pendant ces 72 heures cruciales, qui ont commencé le 19 novembre

  5   et ce, jusqu'aux dernières heures du 20 novembre, il y a eu un total de dix

  6   officiers des organes de la sécurité qui se trouvaient à Vukovar. Vous avez

  7   dit que ces personnes appartenaient à la 1ère Région militaire. Nos

  8   informations sont quelque peu différentes. D'après nous, il y avait des

  9   hommes de l'administration de la sécurité et d'autres de la Région

 10   militaire, et vous avez dit quelque chose vous-même, vous avez dit que

 11   Marko Crmaric était là. Pourriez-vous nous dire pourquoi il était important

 12   qu'un nombre aussi important de personnes expérimentées se trouvent à cet

 13   endroit pendant ces 24, voire 36 heures ?

 14   R.  Non. Je m'en tiens toujours à ce que j'ai dit en ce qui concerne les

 15   organes de la sécurité. Ils n'étaient pas au nombre de dix. Je crois qu'ils

 16   étaient cinq au total, y compris l'adjudant. Etant donné que vous alléguez

 17   que les officiers de l'organe de la sécurité étaient au nombre de dix, eh

 18   bien, je le nie et je vous demande leurs noms -- ne m'interrompez pas

 19   maintenant, s'il vous plaît. Vous posez une question à propos du général

 20   Crmaric, s'il travaillait pour les services de la sûreté, mais ceci n'a

 21   rien à voir avec cette question. C'était l'adjoint du commandant chargé des

 22   questions de logistique au niveau de la 1ère Région militaire. Alors, cette

 23   instruction qui porte sur la manière dont doivent être traitées les

 24   personnes a été rédigée par l'assistant chargé des questions logistiques au

 25   sein de la SSNO, le général Sivic. Et cette instruction-ci au niveau de la

 26   1ère Région militaire a été rédigée par le général Crmaric, et à l'époque

 27   il ne travaillait pas pour les organes de la sécurité. Vous vous dites :

 28   Ils étaient au nombre de dix, et comment se fait-il qu'ils étaient en si


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  1   grand nombre ? Il y avait des gens de la 1ère Région militaire parce que

  2   nous parlons d'une action complexe qui consistait à évacuer des personnes

  3   se trouvant dans la ville, et, bien évidemment, il y avait des officiers de

  4   haut rang qui devaient être envoyés à cet endroit-là. C'était un homme

  5   expérimenté qui avait certaines obligations en vertu de cette instruction.

  6   Il y a même une commission qui a été établie au sein de la 1ère Région

  7   militaire, commission qui ne comprenait pas les organes de la sécurité. Et

  8   si la commission et Crmaric étaient là, cela, je peux le comprendre, mais

  9   ces hommes-là ne font pas partie des organes de la sécurité.

 10   Q.  Merci. Vous avez précisé ce point suffisamment.

 11   Entre autres, Général, pendant l'interrogatoire principal, à la page 7 952

 12   et les pages suivantes du compte rendu d'audience, vous avez expliqué

 13   pourquoi la JNA ne pouvait pas occuper la Slavonie, la Baranja et le Srem

 14   occidental, parce que ces régions faisaient partie de la Yougoslavie. Vous

 15   en souvenez-vous ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Une pièce de la liste 65 ter, numéro 644, vous a été montrée. Il s'agit

 18   d'une déclaration - vous vous souvenez peut-être - qui a été faite après la

 19   libération de Vukovar lorsque Goran Hadzic a fait une allocution et a dit

 20   que les pires personnes devaient être jugées à Vukovar, et c'est quelque

 21   chose que nous avons de déjà affiché sur nos écrans. Il a dit, entre

 22   autres, que ces personnes seraient jugées à Vukovar, devant les tribunaux

 23   yougoslaves et éventuellement les tribunaux serbes, qu'ils s'agissent de

 24   tribunaux de première instance ou en appel, et qu'ils devaient en décider.

 25   Et vous avez donné votre avis, vous avez dit que ce n'était pas possible

 26   parce qu'il ne s'agissait pas d'une partie constitutive de la Yougoslavie.

 27   Si je m'en souviens bien, c'était votre explication.

 28   Voici la question je souhaitais vous demander : savez-vous si, même


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  1   avant la guerre sur ce territoire, il y avait un tribunal à Vukovar et un à

  2   Beli Manastir, et cetera ? Est-ce que vous le savez ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Alors, veuillez me dire si l'Etat qui existait à l'époque et si le

  5   gouvernement du SBSO et si la JNA estimaient que ce territoire faisait

  6   partie de la Yougoslavie et si cela posait un problème pour les tribunaux

  7   de Serbie ou de Yougoslavie, si c'était difficile pour eux de réexaminer

  8   les décisions prises par les tribunaux de Vukovar et de Beli Manastir ?

  9   Bien sûr, il s'agit d'une question juridique et je sais que vous n'êtes pas

 10   juriste, mais vous pourriez néanmoins peut-être nous expliquer ceci.

 11   R.  Moi, je vais parler des aspects pratiques. Vous dites qu'il y avait des

 12   tribunaux à Vukovar, à Beli Manastir, à Osijek, et cetera, mais il y avait

 13   également une Défense territoriale qui avait son état-major à Vukovar et à

 14   Beli Manastir, et cetera, mais cela n'était plus le cas. Donc la situation

 15   était nouvelle. Je ne sais pas si les tribunaux dont vous parlez

 16   fonctionnaient à l'époque; par exemple, le tribunal de Vukovar. Moi,

 17   j'aimerais savoir de quelles affaires ces tribunaux étaient saisis, compte

 18   tenu des crimes qui avaient été commis. Je ne sais pas si les tribunaux

 19   fonctionnaient ou existaient à l'époque. Quand bien même c'était le cas, je

 20   ne sais pas si ces tribunaux fonctionnaient.

 21   Q.  Pardonnez-moi si je vous interromps, mais aviez-vous l'obligation

 22   d'être au courant de ce genre de chose puisque vous travailliez pour

 23   l'organe de la sécurité en tant que chef de la SSNO, à savoir si le

 24   tribunal de Vukovar jugeait des affaires et rendait des jugements ?

 25   R.  Bien sûr que je ne savais pas. Je n'étais pas censé savoir toute chose.

 26   Mais en principe, la Défense territoriale de la Slavonie, Baranja et Srem

 27   occidental devait être considérée comme partie intégrante des forces armées

 28   de la Yougoslavie. Or, ça n'a pas été le cas. On a dit également cela au


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  1   SSNO, à la présidence. Et pour autant que je le sache, tout le monde a fait

  2   la sourde oreille.

  3   Q.  C'est exact. Vous faites maintenant référence à la décision qui disait

  4   que la Défense territoriale de la SBSO devrait être jointe aux forces

  5   armées de la RSFY. C'est bien de cela que vous étiez en train de parler ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Alors, c'était tous des citoyens de la Yougoslavie, d'après les

  8   critères de l'époque. Vous nous avez dit que l'armée populaire yougoslave

  9   n'avait pas suffisamment d'effectifs, qu'il y avait pas mal de désertion et

 10   des gens qui ne répondaient pas aux appels sous les drapeaux. Est-ce que

 11   vous pouvez nous dire pourquoi on a refusé de faire en sorte que cette

 12   Défense territoriale s'intègre au sein des forces armées de la Yougoslavie

 13   dans ce type de situation où vous aviez quand même des gens qui avaient

 14   accepté de prendre part aux activités de combat et d'être subordonnés à

 15   l'armée populaire yougoslave, sans pour autant que cela n'ait fait l'objet

 16   d'une décision, d'après, du moins, ce que vous en savez vous-même ?

 17   R.  C'est parce qu'ils faisaient partie intégrante de la Défense

 18   territoriale de la Croatie avant cela. Alors, il y a eu création de régions

 19   autonomes depuis et ça n'a pas été entériné comme étant des unités

 20   constitutives de la République socialiste fédérative de la Yougoslavie. Par

 21   conséquent, ça ne pouvait pas revêtir ces attributs-là. Il fallait qu'il y

 22   ait un niveau quelconque, un QG, qui devrait correspondre aux QG

 23   provinciaux de la TO. Cela a d'ailleurs été le cas au Kosovo. Et en votre

 24   qualité de juriste, je crois que la situation devrait se présenter de façon

 25   beaucoup plus claire pour ce qui est de ce TO qui avait déclaré faire

 26   sécession vis-à-vis de la TO de la Croatie mais n'avait pas, entre-temps,

 27   obtenu une nomenclature organisationnelle liée à la Yougoslavie. Donc ça

 28   n'a pas fait partie de la République socialiste fédérative de la


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  1   Yougoslavie auparavant à titre officiel. Ce dont nous avons débattu, à

  2   savoir : au début, dans une phase première, ils sont armés à titre

  3   individuel, puis ils ont eu des armes de façon plus organisée, puis ils ont

  4   eu une organisation militaire interne propre à eux au niveau du QG. Ça n'a

  5   pas fait obstacle, donc. Tous ceux qui avaient souhaité défendre la

  6   Yougoslavie aux côtés des forces armées de la TO de Vojvodine et de la JNA

  7   en général pouvaient se joindre à ces forces armées. C'est la raison pour

  8   laquelle il y ait eu des instructions relatives à l'acceptation des

  9   volontaires.

 10   Q.  On a vu des documents où certains détachements de la TO, de Borovo

 11   Selo, par exemple, de Trpinja et autres, avaient été intégrés aux activités

 12   de combat sous le commandement des unités de la JNA. Je ne vais pas

 13   m'attarder outre mesure sur ces points-là parce que ça fait partie d'un

 14   autre volet. Mais j'aimerais que nous nous penchions plus en détail sur le

 15   texte que nous avons sur nos écrans. Est-ce que vous avez relevé le fait

 16   que l'on parlait ici de "tenir des procès à l'égard des pires à Vukovar" ?

 17   Ça ne sous-entendait pas, donc, que l'on passe tous les prisonniers en

 18   justice et leur intente des procès, mais rien que s'agissant de ceux que

 19   l'on considérait faire l'objet de bon nombre d'éléments de preuve

 20   concernant la perpétration de crimes graves. Et on considérait donc que les

 21   tribunaux étaient la place qui leur était destinée. Ou est-ce que, a

 22   contrario, vous estimiez que l'on devait juger la totalité des prisonniers

 23   ?

 24   R.  Je n'ai pas dit qu'ils souhaitaient juger la totalité des prisonniers.

 25   J'ai dit qu'ils voulaient prendre en charge la totalité des prisonniers,

 26   parce qu'ils ont un système judiciaire à eux qui serait chargé de la

 27   procédure et il y aurait des procès en première instance et au-delà.

 28   Q.  Est-ce que vous avez retrouvé ceci dans ce texte ?


Page 8154

  1   R.  Non. C'est ce que j'ai déclaré. Il y a une autre question qui est

  2   intéressante et qui l'est de nos jours encore. Parce que si vous entamez un

  3   procès à l'égard des 100 ou 200 personnes d'Ovcara et si on les avait

  4   condamnées à une peine de mort par fusillade, parce qu'on dit qu'on

  5   jugerait les pires de criminels, alors disons que ces 200 et quelques

  6   avaient été les pires des criminels, y a-t-il eu un procès avant cela ? Et

  7   quel a été le jugement rendu ?

  8   Q.  Excusez-moi. Mais quand vous dites avant cela, qu'entendez-vous ?

  9   R.  Le 20, quand ils les ont pris en charge. Est-ce que c'était un tribunal

 10   militaire ? Est-ce qu'ils étaient jugés sommairement ?

 11   Q.  Qui en a parlé ?

 12   R.  Ecoutez, est-ce qu'on a rendu des jugements ? Bon, ils ont affirmé

 13   avoir un système judiciaire. Quand ils ont pris en charge ces prisonniers,

 14   il fallait les faire passer par une procédure judiciaire et les condamner à

 15   mort, à mort par fusillade ou autre chose.

 16   Q.  Mais combien de temps pensez-vous qu'il ait fallu pour les juger ? Une

 17   semaine ? Deux semaines ? Un mois ? Trois mois ? Ou six mois ? D'après

 18   vous, d'après vos opinions relatives aux procédures judiciaires.

 19   R.  Ce n'est pas une référence à ma constatation à la question. Moi, je

 20   commente ce que M. Hadzic a dit. Il a dit : Nous avons notre système

 21   judiciaire, on les jugera, et les pires seront condamnés. Est-ce qu'ils ont

 22   été condamnés ? On leur a confié ces prisonniers --

 23   Q.  Qui a obtenu ces prisonniers ?

 24   R.  Le gouvernement de la SBSO à la session du 20 novembre.

 25   Q.  D'où tirez-vous cette information ?

 26   R.  Mais parce que j'ai été mis au courant après coup.

 27   Q.  Dites-nous de quoi il s'agit ?

 28   R.  Ecoutez, le colonel Bogdanovic, qui était présent -- que l'on prenne


Page 8155

  1   les déclarations faites par le colonel Panic qui a été envoyé par le

  2   commandement de la brigade à cette session --

  3   Q.  Excusez-moi. Excusez-moi --

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Messieurs, vous êtes en train de vous

  5   chevaucher tout le temps. Quand bien même vous auriez besoin d'interrompre

  6   la partie adverse, si je puis m'exprimer ainsi, vous devez interrompre et

  7   attendre que les interprètes finissent l'interprétation de ce que vous avez

  8   déjà dit ou de ce que vous aviez à dire. Donc, soyez attentifs. Les pauses

  9   entre les questions et les réponses sont indispensables. Pas

 10   d'interruption, pas de chevauchement, et interruption mais avec une pause

 11   quand même. Merci.

 12   Monsieur Olmsted.

 13   M. OLMSTED : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je crois

 14   comprendre que nous n'avons pas obtenu la réponse complète à la dernière

 15   question puisqu'il y a eu interruption.

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, je suis d'accord.

 17   M. OLMSTED : [interprétation] Il avait parlé du "général Panic." Est-ce

 18   qu'on pourrait lui demander de répéter ?

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui. C'était la dernière des

 20   questions posées et la dernière des réponses, mais allez-y un peu plus

 21   lentement. Un peu de compréhension pour les interprètes qui ont une tâche

 22   difficile avec vous --- avec les deux d'entre vous.

 23   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

 24   Q.  Quand vous avez appris que le gouvernement avait pris en charge les

 25   prisonniers -- non. Vous avez répondu que le gouvernement avait pris en

 26   charge ces prisonniers -- oui, donnez-moi un instant. Excusez-moi. Alors,

 27   on a dit que le gouvernement était chargé des prisonniers, on les avait

 28   pris en charge, je parle du gouvernement de la SAO, à sa session du 20


Page 8156

  1   novembre. Et je vous ai demandé de la bouche de qui avez-vous appris cela

  2   et vous avez donné un certain nombre de noms, mais il me semble que cela

  3   n'a pas été consigné.

  4   R.  Oui. Mais moi, j'avais répondu par une question qui était celle de

  5   demander s'il y avait eu un procès et une condamnation et je n'ai pas

  6   obtenu de réponse.

  7   Q.  Attendez, je vais vous dire juste une chose. Est-ce que vous savez

  8   quand est-ce qu'on a découvert la fosse commune d'Ovcara ? Si vous ne le

  9   savez pas, je n'insiste pas sur une réponse.

 10   R.  Je ne le sais pas.

 11   Q.  D'après certaines de nos informations, ça s'est passé vers la fin de

 12   1993 seulement et il a fallu pas mal de temps pour déterminer les identités

 13   -- d'abord exhumer puis identifier les restes, et vous savez vous aussi que

 14   sans cela un procès en justice ne saurait démarrer. Mais il y a autre

 15   chose, Général. Vous avez été témoin à l'occasion d'un procès qui s'est

 16   tenu à Belgrade au sujet d'Ovcara. Est-ce que vous vous souvenez de la

 17   durée de ce procès ? Enfin, en un temps de paix, la guerre n'avait plus

 18   cours.

 19   R.  J'ai témoigné dans deux procès. D'abord, un procès diligenté par le

 20   tribunal militaire à Belgrade contre des auteurs inconnus d'un délit au

 21   pénal, et il me semble que ça a duré relativement peu de temps, un mois ou

 22   deux. Mais là je vous donne une approximation. Et on a constaté que ce

 23   n'étaient pas des militaires qui assumaient la responsabilité de ce qui

 24   s'était passé. On ne sait toujours pas qui en avait assumé la

 25   responsabilité. C'est le tout premier procès où j'ai témoigné.

 26   Q.  Est-ce que vous pourriez nous donner l'année, je vous prie, à peu près

 27   ? Etait-ce en 1999 ?

 28   R.  Je pense que oui. C'était le début de 1999, avant que je ne sois


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  1   réactivé dans le service. Et une deuxième fois, j'ai témoigné au tribunal

  2   chargé des crimes de guerre. Là, ça a duré plus longtemps.

  3   Q.  Mais en 1999, ce tribunal militaire ne connaissait pas l'identité des

  4   personnes qui étaient censées être jugées, c'est-à-dire les auteurs de ce

  5   méfait; vous ai-je bien compris ?

  6   R.  Ils ont lancé une procédure à l'égard de militaires qui avaient été

  7   suspectés d'y avoir pris part et la procédure a voulu que, pour autant que

  8   je le sache, cela ait été transféré à des autorités de justice civile,

  9   parce que c'étaient des inconnus qui étaient présumés auteurs de ce crime.

 10   Q.  Moi, je pense que c'était parce qu'on avait supprimé les tribunaux

 11   militaires peut-être, mais ne perdons pas de temps là-dessus. Vous avez par

 12   la suite témoigné en 2005, me semble-t-il, dans ce procès intenté contre je

 13   ne sais combien, une quinzaine de personnes, qui ont fini par être

 14   condamnées. Est-ce que vous êtes bien d'accord avec moi ?

 15   R.  Je suis d'accord, oui.

 16   Q.  Et ce procès a duré entre 1999 et 2007 ou 2008, n'est-ce pas ? Vous

 17   êtes d'accord ?

 18   R.  Non, je ne suis pas d'accord. Ça a duré entre 2005, date du début de

 19   procès, jusqu'à l'année où vous avez dit que ça s'est terminé. Parce que

 20   c'était deux procès différents.

 21   Q.  En d'autres termes, vous ne comptez pas la procédure d'investigation

 22   dans le temps du procès ?

 23   R.  Eh bien, je ne vais pas maintenant m'aventurer à parler de la

 24   problématique juridique.

 25   Q.  Bon, Général, revenons vers ce texte que nous avons sous les yeux.

 26   Pouvons-nous voir de plus près la fin de ce texte. Il est dit qu'à

 27   l'occasion de cette session du gouvernement, il y avait Zeljko Raznatovic,

 28   Arkan. La deuxième colonne à droite en version B/C/S. Je crois qu'en


Page 8158

  1   version anglaise, ça se trouve en bas de page et ça passe quelque peu vers

  2   la page suivante. Alors, il est en train de dire que son unité -- enfin :

  3   "'Mon unité,' dit-il, 'est l'une des preuves montrant que la force de

  4   la Serbie est intarissable si on se bat pour une cause juste. Nous tous qui

  5   nous sommes battus à Vukovar, nous avons été placé sous le commandement

  6   unifié de la JNA qui a de formidables officiers et soldats de tous les

  7   groupes ethniques…'"

  8   Donc, à titre public, il a dit qu'ils étaient placés sous le

  9   commandement unifié de la JNA. Est-ce que vous savez nous dire si jamais

 10   quelqu'un -- quiconque aurait démenti cela, aurait dit à l'opinion publique

 11   que ce n'était pas vrai que d'affirmer qu'ils s'étaient battus sous le

 12   commandement de la JNA ?

 13   R.  Je ne sais pas s'il y a eu un démenti. Je dirais pour l'essentiel que

 14   l'on a ignoré la chose et qu'on ne l'a pas considérée digne d'une réponse.

 15   Mais je reviendrais sur un point.

 16   Q.  Vous avez pris une partie du texte, et je vous comprends. Vous pouvez

 17   prendre le texte entier qui se trouve sous vos yeux si vous estimez qu'il y

 18   a un point qui serait plus important encore que celui que j'ai mis en

 19   exergue.

 20   R.  A la date qui est celle du document que vous avez montré, le 10

 21   décembre 1991, je pense, et c'est un document du Corps de Novi Sad qui

 22   parle des effectifs et des hommes à Arkan --

 23   Q.  Je crois que c'est un document qui date d'une période ultérieure, au

 24   mois de décembre.

 25   R.  Oui, j'ai dit le 10 décembre. Alors, en sa qualité de membre du Corps

 26   de Novi Sad, vient-il pour accompagner Hadzic ? Peut-être aurait-on dû

 27   mettre un officier plus digne de cela - Biorcevic, par exemple - si

 28   quelqu'un devait être là de la JNA. Alors, j'en reviens à ce qu'il était et


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  1   ce qu'il faisait. Il ne portait un uniforme de la JNA, et il ne lui

  2   appartient pas de parler des officiers respectables de la JNA. Il a, à deux

  3   reprises, donné des gifles à des soldats qui n'étaient pas subordonnés à

  4   lui. Il a fait l'objet d'une procédure à deux reprises pour ce type de

  5   comportement.

  6   Q.  Excusez-moi, je viens de penser à une chose. Lorsque nous avons parlé

  7   de la session du gouvernement, celle où nos questions et réponses se sont

  8   chevauchées et ça n'a pas été consigné, du moins les interprètes n'ont pas

  9   réussi à tout interpréter, vous avez mentionné deux noms, deux noms de la

 10   bouche desquelles personnes vous avez entendu ce qui s'était passé à la

 11   session du gouvernement. Vous avez parlé de Bogdan Vujic et vous avez parlé

 12   du lieutenant-colonel Panic, qui à l'époque était l'adjoint, le suppléant

 13   du colonel Mrksic. Est-ce que vous êtes bien d'accord avec moi pour dire

 14   que c'est ces deux noms-là que vous avez mentionnés ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Est-ce que vous pouvez me dire : avez-vous fait confiance à cet homme,

 17   Bogdan Vujic ?

 18   R.  Mais par rapport à quoi ?

 19   Q.  Lui prêtiez-vous foi de façon générale ?

 20   R.  De façon générale, oui.

 21   Q.  Quand vous avez demandé par rapport à quoi tout à l'heure, est-ce qu'il

 22   y a des éléments où vous n'auriez pas prêté à ce point-là foi vis-à-vis de

 23   cet homme ?

 24   R.  Je lui faisais confiance pour ce qui est de la période où il était en

 25   service d'active et période à laquelle j'ai eu des contacts à titre

 26   officiel avec lui et j'ai participé avec lui à certaines missions

 27   conjointes. Le considérer comme digne de foi après, là où je n'ai plus eu à

 28   communiquer avec lui, je ne puis que faire des évaluations au sujet de ce


Page 8160

  1   qui est vrai des propos qu'on lui attribue avoir tenus et si je compare,

  2   par exemple, avec des informations dont j'ai eu à connaître à partir de

  3   sources autres.

  4   Je vais être concret. Il a affirmé qu'on l'avait envoyé aussi vers ces

  5   centres de rassemblement, j'imagine aussi à Ovcara, et il a dit que c'est

  6   l'administration de la sécurité qui l'avait envoyé. C'est ainsi qu'il

  7   s'était présenté lorsqu'il est venu à Velepromet. Mais il n'était pas dans

  8   l'administration de la sécurité, c'était un officier à la retraite. Nous à

  9   l'administration de la sécurité, nous n'avions pas des officiers dans nos

 10   effectifs de guerre. Et il avait été, d'autre part, engagé par la 1ère

 11   Région militaire. Le chef de la sécurité de la 1ère Région militaire lui

 12   avait probablement confié certaines missions. Alors, cette partie-là, je ne

 13   peux pas trop lui prêter foi parce que je connais les faits. Mais je le

 14   respecte en sa qualité d'officier tout à fait intègre et honnête. Dans nos

 15   activités conjointes, je n'ai jamais eu d'observations ou de remarques

 16   sérieuses à formuler à son égard.

 17   Q.  En d'autres mots, d'après certaines informations en votre possession,

 18   il se serait présenté en disant qu'il venait de l'administration de la

 19   sécurité, et vous estimez que cela n'est pas conforme à la vérité parce

 20   qu'il n'avait pas de mission et il n'avait pas été engagé par cette

 21   administration chargée de la sécurité à l'époque où, donc, il avait déjà

 22   été mis à la retraite, pendant cette guerre de 1991.

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Laissez-moi vous demander ceci. Passons plutôt vers le sujet de Sremska

 25   Mitrovica. D'après vos informations, le gouvernement de la SAO SBSO et

 26   Goran Hadzic sont venus deux fois à Sremska Mitrovica pour demander de

 27   prendre part aux investigations, voir un peu les listes des personnes

 28   détenues, des prisonniers autrement dit. Et les deux fois, on a refusé de


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  1   faire droit à leur demande. Une fois c'était Maksimovic, et la deuxième

  2   fois, vous aussi, vous avez dit que ça ne pouvait pas se faire. Est-ce que

  3   c'était les deux seuls contacts dont vous ayez eu à connaître concernant

  4   leur déplacement avec de telles requêtes à Sremska Mitrovica, suite à la

  5   chute de Vukovar en 1991 ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Etant donné qu'il avait été dit que des armes allaient être prises pour

  8   prendre en charge ces prisonniers, dites-moi : lorsqu'ils sont venus,

  9   étaient-ils armés ? Avaient-ils des armes sur eux ou sont-ils venus sans

 10   armes ?

 11   R.  Ils ne portaient pas de canons longs. Avaient-ils des armes

 12   individuelles, c'est-à-dire des armes légères, je n'en sais rien. C'était

 13   le service d'accueil du KP Dom qui devait en prendre soin. L'ordre était de

 14   ne pas laisser entrer les gens avec des armes.

 15   Q.  Donc ce n'était pas apparent ? Vous n'avez vu personne porter une arme

 16   de façon visible, ostentatoire, lorsque vous les avez contactés ?

 17   R.  C'est exact.

 18   Q.  Je vais vous demander autre chose encore. Est-ce que vous avez trouvé

 19   bizarre de les voir arriver à la prison pour demander des prisonniers

 20   auprès d'un individu qui était directement chargé de ces prisonniers, sans

 21   pour autant s'adresser à des autorités supérieures de la Serbie ou de la

 22   JNA, ou demander auprès du SSNO ou auprès du gouvernement de la République

 23   de Serbie une autorisation pour ce qui était de le faire ?

 24   R.  Ils avaient demandé ceci avant. A titre concret, le 27 novembre, M.

 25   Susa, qui était ministre de la Justice, a envoyé un courrier au commandant

 26   de la 1ère Région militaire, le général Panic, en posant les mêmes

 27   questions que celles qui m'ont été posées à moi. Je vous en ai déjà parlé.

 28   Q.  En d'autres termes, ils n'ont pas reçu de réponse positive, ou du moins


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  1   vous ne savez pas qu'il y ait eu une réponse positive. Ils n'ont pas fait

  2   une référence affirmative lorsqu'ils sont venus vous voir pour dire que les

  3   autorités les avaient autorisés à prendre en charge des prisonniers ?

  4   R.  C'est tout à fait exact.

  5   Q.  Ecoutez, ça prête à confusion dans mon esprit. Parce que s'ils avaient

  6   eu ceci, venir voir le directeur de la prison, le dénommé Maksimovic,

  7   demander des prisonniers et réclamer des prisonniers en dépit des réponses

  8   négatives qu'ils avaient reçues précédemment -- ce que je veux dire par là,

  9   voir un homme à niveau de commandement subalterne en dépit des réponses

 10   négatives de la part des officiers supérieurs pour ce qui était d'une

 11   réponse à donner à leur requête ?

 12   R.  Tout d'abord, Maksimovic n'était pas directeur de la prison.

 13   Q.  Je m'excuse d'avoir utilisé ce terme. Il n'était pas directeur de la

 14   prison, mais il était à l'échelon inférieur pour ce qui est des

 15   responsabilités vis-à-vis des prisonniers par rapport ou en comparaison

 16   avec l'administration supérieure de la région militaire.

 17   R.  Oui, je suis d'accord, mais je ne comprends pas pourquoi ils sont venus

 18   le voir, lui.

 19   Q.  [aucune interprétation]

 20   R.  Ils ont reçu une réponse négative en haut, puis ils sont venus plus bas

 21   pour essayer d'avoir une réponse différente.

 22   Q.  Quelques autres petits points qui se trouvent dans votre déclaration

 23   que je souhaite tirer au clair. Paragraphe 102. Dans ce paragraphe là, on

 24   vous montre une pièce à conviction -- excusez-moi. Je n'ai peut-être pas

 25   trouvé le bon paragraphe, là. Non, non, ce n'est pas le bon paragraphe. Je

 26   m'en excuse.

 27   Il s'agit du paragraphe 99. Dans ce paragraphe, vous indiquez, entre

 28   autres, que Hadzic était contre l'acceptation d'officiers d'active de la


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  1   JNA pour être des commandants de la TO de la SBSO. Mais d'après mes

  2   informations, jamais personne ne lui avait demandé s'il acceptait ou s'il

  3   n'acceptait pas quelqu'un en guise de commandant, notamment pour ce qui

  4   était des officiers militaires. Alors, moi, je voulais vous demander :

  5   quelles ont été vos informations en la matière ?

  6   R.  Ecoutez, il n'appartenait pas à la JNA de nommer ces officiers. Ils

  7   pouvaient envoyer ou nommer des officiers si la demande en avait été faite;

  8   mais de toute façon, Goran Hadzic n'avait jamais demandé ces officiers. Ça,

  9   c'est dans un premier temps. Puis, deuxièmement, il était toujours négatif

 10   vis-à-vis des membres de la JNA, vis-à-vis de l'effectif de la JNA.

 11   J'aimerais vous rappeler ses mots de reconnaissance après l'opération

 12   Vukovar. Il a remercié des personnes, mais il n'a jamais mentionné la JNA.

 13   Il a remercié les organes de la Serbie, je suppose qu'il entendait le MUP

 14   de la Serbie, mais jamais la JNA. Il n'a jamais remercié la JNA.

 15   Fréquemment, il parlait de trahison au sein de la JNA. Il faisait preuve

 16   d'une certaine méfiance vis-à-vis de la JNA.

 17   Q.  Je ne veux surtout pas aborder cette question, premièrement parce que

 18   je n'ai pas beaucoup de temps. Et, de toute façon, en ce qui concerne les

 19   critiques à l'égard de la JNA, vous savez que cela s'est passé et vous

 20   savez que M. Hadzic n'a pas été le seul à la critiquer, d'autres l'ont fait

 21   également, mais je ne veux pas aborder ce sujet maintenant.

 22   Donc, en d'autres termes, vous êtes en train de nous dire qu'il n'a jamais

 23   demandé que des officiers d'active de la JNA soient nommés commandants de

 24   la Défense territoriale de ces unités en Slavonie, Baranja et au Srem

 25   occidental. C'est votre réponse, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui, tout à fait. Et c'était lui qui était chargé, qui dirigeait cela.

 27   Q.  Qu'entendez-vous ?

 28   R.  Eh bien, en tant que président d'un district, il peut tout à fait


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  1   nommer des militaires.

  2   Q.  Mais c'est justement la question que je souhaitais vous poser. Est-ce

  3   que vous faites une différence entre un président et un premier ministre ?

  4   Vous comprenez la différence entre les deux, n'est-ce pas ? Vous savez, par

  5   exemple, que le premier ministre de la Serbie ou de la Yougoslavie n'avait

  6   aucune compétence sur la Défense territoriale. Le président de la

  7   République de Serbie, et nous en avons parlé d'ailleurs, lui, avait

  8   compétence sur la Défense territoriale de la Serbie, mais c'était le

  9   président qui avait cette compétence et non pas le premier ministre ?

 10   R.  Là, il est dit que les organes de la communauté politique et sociale

 11   avaient proposé des personnes pour des postes de commandement au sein de la

 12   Défense territoriale, et la présidence de la RSFY l'a vérifié. Donc il

 13   n'est pas question du premier ministre. Cela n'est pas dit. Et là, une fois

 14   de plus, je pense que nous allons ergoter. Il n'avait pas probablement

 15   demandé la présence d'Arkan, mais il avait accepté Arkan. Il a essayé de

 16   s'imposer par le truchement de Badza, et nous en avons parlé de nombreuses

 17   fois --

 18   Q.  [aucune interprétation]

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ecoutez, Maître Zivanovic, voilà que

 20   vous recommencez une fois de plus.

 21   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

 22   Q.  Et puis, autre chose. Il s'agit du paragraphe 107 de votre déclaration.

 23   Vous faites référence dans ce paragraphe à une réunion. Donc vous parlez de

 24   cette réunion qui a eu lieu le 25 février 1992. Alors, voilà quels étaient

 25   les présents : M. Panic, le général Mandaric, M. Stanisic, M. Stojicic, et

 26   Goran Hadzic également. Or, d'après mes renseignements, Goran Hadzic n'a

 27   pas assisté à cette réunion. Donc je souhaiterais vous demander où vous

 28   avez obtenu ce renseignement suivant lequel il avait assisté à la réunion ?


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  1   Je ne suis pas en train de contester le fait que la réunion ait eu lieu.

  2   C'est sa présence à cette réunion qui m'intéresse.

  3   R.  Ce sont les organes chargés de la sécurité au poste de commandement

  4   avancé du 1er District militaire. C'est là que je l'ai entendu. C'est eux

  5   qui me l'ont dit.

  6   Q.  Est-ce que vous pouvez nous donner le nom de la personne qui vous a

  7   donné cette information ? Vous souhaitez passer à huis clos partiel ?

  8   R.  Je pense que c'était le colonel Petkovic.

  9   Q.  Il n'est plus vivant, d'après ce que je sais ?

 10   R.  Oui, c'est exact.

 11   Q.  Je souhaiterais maintenant que nous nous intéressions à ces questions

 12   relatives aux commandements de ville. Vous nous avez dit que cela ne

 13   relevait pas de votre domaine professionnel, mais vous avez, toutefois,

 14   répondu à certaines questions à propos des commandements de ville. Et vous

 15   avez également dit qu'ils avaient un rôle consultatif. D'une certaine

 16   façon, ils aidaient les autorités civiles à exercer leurs fonctions. Je

 17   souhaiterais que nous nous intéressions à ces consignes ou instructions qui

 18   vous ont déjà été montrées. Il s'agit de la pièce 708.

 19   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Ou plutôt, c'est un document de la liste 65

 20   ter. Le document 708 de la liste 65 ter.

 21   Q.  Donc il s'agit d'une instruction. Voilà la lettre par laquelle cela a

 22   été communiqué. Il est question des missions ou des tâches séparées qui

 23   seront envoyées également, et cela a été envoyé le 6 décembre 1991.

 24   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Pourrions-nous passer à la page suivante,

 25   je vous prie.

 26   Q.  Vous voyez, au premier paragraphe, il est indiqué : Tâches émanant de

 27   l'administration de l'Etat ainsi que de l'autorité législative, judiciaire

 28   et exécutive. Et là, il est indiqué ce que les organes chargés de la


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  1   sécurité -- ah non, ce ne sont pas les organes de la sécurité. Ce sont en

  2   fait les commandements de ville. Il est indiqué ce qu'ils sont censés

  3   faire.

  4   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Page suivante, je vous prie.

  5   Q.  Regardez le paragraphe 9, je vous prie. Il y est question de :

  6   "Coopération directe avec les organes judiciaires et présentation de

  7   mesures visant à améliorer l'efficacité du fonctionnement de

  8   l'administration judiciaire, du système judiciaire et des autres

  9   institutions judiciaires."

 10   Est-ce que vous pensez que cela est la raison pour laquelle le ministre de

 11   la Justice de l'époque, le ministre de la Justice de la Slavonie, Baranja

 12   et du Srem occidental, a envoyé ces demandes, ou plutôt, la raison pour

 13   laquelle une délégation de Slavonie, Baranja et du Srem occidental a voulu

 14   participer à ces enquêtes qui étaient effectuées et a souhaité jouer un

 15   rôle plus actif ?

 16   M. OLMSTED : [interprétation] Là, on demande au témoin de se livrer à des

 17   conjectures puisqu'on lui demande d'indiquer ce que pensait le ministre de

 18   la Justice.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Vous pourriez reformuler votre

 20   question, Maître Zivanovic ?

 21   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, oui, je vais reformuler ma question.

 22   Q.  Est-ce que vous pensez que cela est la base juridique sur laquelle se

 23   sont appuyés les organes de Slavonie, Baranja et Srem occidental pour

 24   demander leur participation à des enquêtes qui étaient en cours à Sremska

 25   Mitrovica ?

 26   R.  Non. Parce qu'il faut savoir que lorsqu'il a demandé cela, ces

 27   instructions ne lui avaient même pas été données, elles n'étaient même pas

 28   arrivées dans la zone. Parce que c'est le 27 novembre qu'il s'est adressé


Page 8167

  1   au 1er District militaire, et non pas aux organes judiciaires, aux organes

  2   judicaires militaires, pour ce qui est de cette coopération.

  3   Q.  Moi, je comprends en fait que c'est une coopération qui est censée

  4   exister entre les organes civils et les commandements de la ville et ce,

  5   sans oublier les organes judiciaires du territoire -- mais bon, fort bien.

  6   Je vous ai posé une question, vous m'avez apporté votre réponse. Fort bien.

  7   Est-ce que nous pourrions maintenant passer au deuxième chapitre. Là, les

  8   choses sont un peu plus précises. Regardez le paragraphe 6, si vous le

  9   voulez bien. Vous voyez, jusqu'à ce moment-là, il y avait des références à

 10   la coopération directe et à la participation, et cetera, et cetera.

 11   Toutefois, au paragraphe 6, il est indiqué ce que sont les tâches dans le

 12   domaine de la sécurité et pour les organes chargés des affaires civiles.

 13   Regardez, il est indiqué :

 14   "Mener à bien certaines enquêtes et présenter des chefs d'accusation contre

 15   les auteurs d'actes criminels."

 16   Donc, moi, j'ai l'impression au vu de ce libellé que les commandements de

 17   ville ou les organes chargés des affaires civiles étaient censés justement

 18   faire ceci sans coopération ou sans consulter les organes locaux du

 19   gouvernement. Est-ce que vous en convenez ?

 20   R.  Non, parce qu'au paragraphe 5 il est question, et je cite :

 21   "De la coordination des activités, de l'établissement de coopération

 22   directe avec les organes du gouvernement pour empêcher et découvrir des

 23   actes criminels et pour découvrir et capturer les auteurs et faire en sorte

 24   qu'ils soient présentés aux organes judiciaires autorisés."

 25   Donc ils ne sont pas les seuls.

 26   Q.  Mais là, vous parlez du paragraphe 6.

 27   R.  Oui -- excusez-moi, je vous ai interrompu. Je parlais, effectivement,

 28   du paragraphe 5.


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  1   Q.  Mais, Général, le paragraphe 5 fait référence à certaines activités, et

  2   le paragraphe 6 fait référence à d'autres activités. Moi, je vous ai posé

  3   une question à propos du paragraphe 6. Si vous êtes d'avis qu'il s'agit de

  4   la même chose, je n'ai rien contre cela.

  5   R.  Je peux tout simplement vous expliquer qu'ils ne peuvent pas prendre de

  6   mesures relatives à des crimes qui ne sont pas de leur ressort, et les

  7   organes militaires s'occupent des crimes auxquels il est fait référence au

  8   chapitre 25, et cela a trait aux tribunaux militaires.

  9   Q.  Est-ce que c'est votre interprétation ?

 10   R.  Non, c'est ainsi que les choses sont conformément à la loi.

 11   Q.  Oui, mais cela a trait à un territoire bien précis où il y avait encore

 12   une administration militaire. Quoi qu'il en soit, je ne vais pas revenir à

 13   la charge puisque vous avez fourni votre réponse à cette question. Mais

 14   regardons maintenant le paragraphe 11. Une fois de plus, il y est question

 15   d'une tâche ou de tâches qui sont censées être effectuées par les

 16   commandements de ville -- ou, plutôt, par l'organe chargé des affaires

 17   civiles. Il est question, donc :

 18   "D'effectuer le travail administratif eu égard à l'achat, au stockage et au

 19   port des armes et des munitions, et il est également question de l'émission

 20   des autorisations à ce sujet."

 21   Et voilà, cela démontre que c'était seulement les commandements de ville

 22   qui s'occupaient de cela; en d'autres termes, l'organe chargé des affaires

 23   civiles. Vous en convenez ?

 24   R.  Non, je n'en conviens pas du tout, car toute cette instruction ne fait

 25   pas référence à la tâche de ces organes, aux tâches qu'ils doivent

 26   exécuter. Plutôt, ils donnent des instructions aux organes civils pour leur

 27   indiquer comment ils peuvent assumer ce travail et ils disent en fait

 28   quelles sont ces activités, qu'il doit y avoir une coordination et qu'ils


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  1   doivent les aider à devenir plus indépendants. Excusez-moi, mais le

  2   Président de la Chambre va à nouveau me faire des reproches si je ne peux

  3   pas dire cela de façon fluide, si vous m'interrompez. Mais --

  4   Q.  Merci. Mais que pensez-vous, pourquoi est-ce qu'il n'est pas dit :

  5   Donner des conseils aux autorités civiles dans le cadre de l'exécution de

  6   leur travail administratif ? Pourquoi est-ce que cela a été omis

  7   précisément dans ce paragraphe ?

  8   R.  Parce que dans les remarques ou observations générales de ce document,

  9   il est dans un premier temps question des tâches, à savoir il s'agit de

 10   faire en sorte que les organes civils soient en mesure d'assumer ces

 11   fonctions et de faire leur travail. Il y est toujours question de "fournir

 12   une assistance". Il ne leur appartient pas d'exécuter les tâches auxquelles

 13   il est fait référence dans ce paragraphe.

 14   Q.  Est-ce que nous pouvons passer au chapitre 5, qui figure à la page 6.

 15   Page 6, deux page plus loin. Merci. Et nous allons attendre que le texte

 16   anglais soit également affiché.

 17   Regardez, il s'agit des sanctions. Donc :

 18   "Sanctions à prendre au cas où ne sont pas respectés les ordres, les

 19   instructions et les suggestions… fournis par l'organe chargé des affaires

 20   civiles, eu égard à la constitution et au fonctionnement de l'autorité et

 21   des activités économiques et sociales du système."

 22   Vous voyez que les sanctions sont énumérées, donc il s'agit des sanctions

 23   qui relèvent de la compétence des tribunaux. Donc la loi indique quel type

 24   de mesures peuvent être prises, et cela va depuis l'emprisonnement jusqu'à

 25   des amendes, et cetera, et cetera. Donc cela démontre que ces sanctions

 26   sont décrites là et il appartient aux organes chargés des affaires civiles

 27   -- ou, plutôt, ce sont les commandements de ville qui sont chargés de cela.

 28   Vous en convenez ?


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  1   R.  J'en conviendrai si vous lisiez le reste de la phrase, parce que ce

  2   sont des dispositions qui sont appliquées si elles ne vont pas à l'encontre

  3   des décrets du Code pénal de la RSFY. Ce qui serait le cas si des organes

  4   militaires venaient à prendre des mesures contre des personnes qui

  5   n'avaient pas commis de crimes ou pour lesquelles on ne soupçonnait pas

  6   qu'elles avaient commis des crimes qui relevaient de la compétence des

  7   tribunaux militaires.

  8   Q.  Fort bien. Je crois --

  9   L'INTERPRÈTE : Les interprètes ont dit qu'ils n'ont pas entendu la fin de

 10   la phrase.

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, regardez ce qui

 12   vient d'être dit.

 13   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Excusez-moi. Paragraphe 8, je vous prie.

 14   Donc, regardons maintenant le paragraphe 8.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 16   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Est-ce que nous pourrions afficher la page

 17   précédente. Excusez-moi.

 18   L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'entendent pas Me Zivanovic.

 19   M. ZIVANOVIC : [interprétation] En fait, est-ce que nous pourrions passer à

 20   la page suivante. Excusez-moi, vraiment. Je pense que je n'ai pas, en fait,

 21   bien noté ces numéros de paragraphes. Voilà. Donc il s'agit du paragraphe

 22   8.

 23   Q.  Et nous allons en donner lecture :

 24   "Outre ce qui est mentionné ci-dessus, dans le cadre du travail effectué

 25   par les organes des affaires civiles, certaines situations demanderont que

 26   soient utilisées des procédures et des mesures tel que cela est indiqué par

 27   le règlement de l'utilisation au combat des unités de la JNA ainsi que les

 28   procédures qui régissent l'utilisation de la police militaire."


Page 8171

  1   La phrase suivante est extrêmement importante :

  2   "L'ordre donné par les officiers commandants autorisés pour ce faire, s'il

  3   venait à être exécuté, ne constitue pas un acte criminel, mais c'est un

  4   ordre qui est contraignant du point de vue juridique."

  5   Est-ce que vous convenez que le commandant, ou plutôt, que les officiers

  6   supérieurs des commandements de ville ou que les responsables des affaires

  7   civiles pouvaient donner des ordres qui étaient contraignants du point de

  8   vue juridique, bien entendu, si l'exécution d'un tel ordre ne constituait

  9   pas un acte criminel ?

 10   R.  Oui, mais là il s'agit d'une situation exceptionnelle. C'est seulement

 11   au cas où une situation précise est telle que ces mesures doivent être

 12   prises. Donc je suppose que c'est lorsqu'il y a une situation absolument

 13   extrême, lorsque, par exemple, vous avez un groupe terroriste sur le

 14   terrain. Dans ce cas d'espèce, vous agissez conformément aux règles et aux

 15   règlements portant sur l'utilisation au combat des unités et vous engagez

 16   une unité de la police militaire. Parce que dans une situation normale, ce

 17   sont les organes du MUP qui se chargent de ce genre de choses par

 18   opposition à l'armée, mais si eux ne peuvent pas le faire, alors, dans ce

 19   cas seulement, la police militaire intervient et agit. Donc cela est

 20   valable seulement pour des situations exceptionnelles, des situations

 21   extraordinaires. Ce n'est pas une règle, cela. C'est une exception à la

 22   règle.

 23   Q.  Général, nous allons dans un premier temps nous mettre d'accord. Il

 24   n'est pas question dans le texte de situations exceptionnelles ou de

 25   situations sortant de l'ordinaire. Il est question de "certaines

 26   situations". Vous en convenez ?

 27   R.  Oui, oui.

 28   Q.  Je vais vous poser une ou deux autres questions, parce que nous n'avons


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  1   plus beaucoup de temps. Mais vous avez, entre autres, parlé de la Krajina.

  2   Une pièce de l'Accusation vous a été montrée, la pièce 1058, qui figure sur

  3   la liste de l'Accusation sous la cote 133.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, est-ce que

  5   vous allez être en mesure de terminer votre contre-interrogatoire avant la

  6   pause ?

  7   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je vais faire de mon mieux.

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

  9   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

 10   Q.  Vous voyez qu'il s'agit d'un rapport. Alors, regardons la dernière page

 11   de ce rapport. C'est Milan Martic, qui à l'époque, me semble-t-il, était

 12   ministre de l'Intérieur ou ministre de la Défense - je ne m'en souviens pas

 13   précisément - mais c'est Milan Martic qui écrit le document. Il y fait

 14   référence à certains pourparlers que M. Goran Hadzic et d'autres membres du

 15   gouvernement de l'époque de la RSK avaient eus avec des représentants de la

 16   communauté internationale. Alors, la teneur du document n'est pas

 17   véritablement essentielle, mais c'est la première page qui m'intéresse. Si

 18   nous pouvions l'afficher à nouveau. Nous voyons à qui le document était

 19   destiné, et puis il est indiqué "à B. Jovic personnellement". Donc je

 20   suppose qu'il s'agit de Borisav Jovic. Puis ensuite, vous voyez qu'il est

 21   écrit -- parmi la liste des destinataires, vous avez M. Stanisic, et puis

 22   ensuite il y a votre nom, A. Vasiljevic, administration de la sécurité du

 23   SSNO.

 24   Alors, dites-moi, est-ce que vous receviez ce genre de rapport de la part

 25   des organes de la RSK en 1992, jusqu'au moment où vous avez quitté ce poste

 26   le 8 mai ?

 27   R.  Je recevais des rapports qui m'étaient envoyés par le truchement de la

 28   hiérarchie professionnelle. Alors, ces personnes sont mentionnées ici. Mon


Page 8173

  1   nom est mentionné probablement parce que nous avions eu une réunion à

  2   Plitvice, et lors de cette réunion nous avions eu des discussions avec les

  3   organes de la Krajina, discussions qui portaient sur la démilitarisation de

  4   cette zone et la constitution des unités de la TO. Je ne souviens pas avoir

  5   obtenu ce document, mais si je l'ai obtenu, je ne pense pas que cela soit

  6   un problème.

  7   Q.  Merci. Je vais vous montrer un autre document. C'est un document qui

  8   est une pièce, le document P2915, qui sur la liste des documents du bureau

  9   du Procureur avait le numéro 214. Il s'agit d'un rapport qui émane du

 10   comité chargé de superviser le cessez-le-feu. Il est question, en fait, de

 11   deux représentants du ministre du gouvernement de Slavonie, Baranja et du

 12   Srem occidental qui ont assisté à une réunion avec des représentants

 13   croates et des représentants de la JNA. A la lecture de ce rapport, est-ce

 14   que vous -- ou même, peut-être que vous le savez sans avoir besoin de faire

 15   référence à ce rapport. Est-ce que vous savez si les ministres du

 16   gouvernement avaient assisté à cette réunion ? Je vous pose la question

 17   parce que, d'après nos informations, les gens qui avaient assisté à cette

 18   réunion n'étaient pas des ministres du gouvernement. Je fais référence à la

 19   Slavonie, la Baranja et au Srem occidental.

 20   R.  Je ne suis pas au courant de cette réunion, donc je sais encore moins

 21   qui y a assisté. Ça, c'était au niveau local.

 22   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Peut-être qu'il va falloir que je continue

 23   pendant cinq minutes après la pause, si vous m'y autorisez.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Non, non, non.

 25   M. ZIVANOVIC : [aucune interprétation]

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, vous aurez cinq

 27   minutes avant la pause. D'accord. Pas cinq minutes après.

 28   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Parce que je voulais consulter mon client.


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  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Fort bien. Alors, vous aurez cinq

  2   minutes après la pause, et non pas avant la pause.

  3   M. ZIVANOVIC : [aucune interprétation] 

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Nous allons maintenant faire la pause

  5   et nous reviendrons à 11 heures. M. l'Huissier va vous accompagner hors du

  6   prétoire. Je vous remercie.

  7   [Le témoin quitte la barre]

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est levée.

  9   --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.

 10   --- L'audience est reprise à 11 heures 03.

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je souhaite informer les parties du

 12   fait que la séance de cet après-midi a été organisée. Donc nous allons

 13   siéger de 15 heures à 16 heures 30.

 14   [Le témoin vient à la barre]

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, je vous en prie.

 16   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 17   Q.  Général, veuillez regarder le paragraphe 155 de votre déclaration, je

 18   vous prie. Vous parlez de cadavres qui ont été retrouvés par des

 19   patrouilles de la police militaire dans ce paragraphe et vous dites que le

 20   MUP du SBSO s'est occupé de l'enquête. La police militaire a filmé les

 21   lieux et a consigné les détails nécessaires. Veuillez nous dire ce que cela

 22   signifie en particulier, "a informé le MUP". Leur ont-ils simplement dit

 23   qu'ils ont trouvé tel et tel élément ? Ou leur ont-ils également remis les

 24   films ?

 25   R.  Je ne connais pas ces détails. Au terme de la loi, il suffisait de

 26   sécuriser le site et d'en informer le MUP par radio ou par téléphone, et à

 27   ce moment-là le MUP devait se rendre sur les lieux. Mais ce qu'ils ont fait

 28   en réalité, je ne le sais pas. Je n'en connais pas les détails.


Page 8175

  1   Q.  Qui vous a informé de cela ?

  2   R.  Je suppose que c'était peut-être l'organe de la sécurité de la 1ère

  3   Région militaire. C'était il y a longtemps, donc je ne me souviens pas de

  4   ce détail-là. Mais il serait normal de supposer qu'ils ont tout d'abord

  5   informé l'organe de la sécurité de la 1ère Région militaire.

  6   Q.  Ce qui voudrait dire que c'était Jovanovic, Milic de son prénom, qui

  7   était à la tête de l'organe de la sécurité de la 1ère Région militaire.

  8   Pardonnez-moi, je me suis trompé. Cela devait être Babic à ce moment-là ?

  9   R.  Oui, le général Babic.

 10   Q.  Une question encore, Général, et ma dernière question pour vous.

 11   Pendant ce contre-interrogatoire qui a duré trois jours, je vous ai montré

 12   un certain nombre de documents et vous nous avez soumis vos conclusions,

 13   vos opinions, votre interprétation. Et je vous ai demandé au début, si vous

 14   vous en souvenez, si vous aviez une attitude non partiale à l'égard de la

 15   JNA. Maintenant, je vais vous demander si, lorsque vous avez répondu à mes

 16   questions dans le cadre du contre-interrogatoire et vous avez interprété

 17   les documents, votre interprétation était partiale et en faveur de la JNA ?

 18   R.  Alors, j'ai répondu par l'affirmative à votre question lorsque vous

 19   m'avez demandé si j'étais fier d'avoir été un officier de la JNA. Je n'ai

 20   rien à ajouter à cela. Et je suis sûr que vous êtes fier d'exercer la

 21   profession qui est la vôtre. Cela ne signifie pas que, comme je suis fier

 22   d'avoir été membre d'une telle armée, que je ne suis pas partial lorsque je

 23   témoigne. J'ai essayé de dire la vérité pour autant que ma mémoire ne me

 24   fasse pas défaut. Et je n'aborde pas la question de savoir qui doit

 25   endosser la responsabilité de tout ceci. Dans ma déclaration, il y a

 26   quelque chose que vous n'avez pas cité. Lorsque j'ai dit que Mrksic était

 27   responsable d'avoir rétabli l'ordre public à Vukovar, et ceci était

 28   conforme aux pouvoirs dont il était investi, et que c'était lui plutôt que

 


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  1   le chef d'état-major qui a été critiqué, et il n'a rien fait à cet égard.

  2   J'ai vraiment tenté de dire la vérité parce que je témoigne devant un

  3   tribunal et je suis prêt à être tenu responsable de cela.

  4   Q.  Ecoutez, cela ne fait pas l'ombre d'un doute, mais je vous ai posé une

  5   question simple à laquelle vous auriez pu répondre par oui ou par non.

  6   Pensez-vous qu'étant donné que vous étiez un membre de la JNA pendant

  7   longtemps, que ceci aurait pu influencer certaines de vos conclusions

  8   lorsque vous avez interprété les documents ? C'est tout. Je ne conteste pas

  9   le fait que vous avez dit la vérité à propos des faits.

 10   R.  Non. Alors, le fait que j'aie été un membre de la JNA n'a aucunement

 11   influé sur ma déposition.

 12   Q.  Merci, Général. Je n'ai pas d'autres questions à vous poser.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Zivanovic.

 14   Monsieur Olmsted, c'est à vous, questions supplémentaires.

 15   M. OLMSTED : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 16   Nouvel interrogatoire par M. Olmsted :

 17   Q.  [interprétation] Bonjour, Général.

 18   R.  Bonjour à vous.

 19   Q.  Je souhaite, le plus rapidement possible, préciser certaines questions

 20   qui vous ont été posées dans le cadre du contre-interrogatoire ces deux

 21   derniers jours. Tout d'abord, hier, le conseil de la Défense vous a montré

 22   un ordre de la SSNO à l'attention de Zeljko Raznatovic qui l'envoyait à

 23   Bijeljina, et d'après votre déposition, il s'agissait d'un faux. Confer,

 24   page du compte rendu d'audience 8 104. Vous avez également dit dans votre

 25   déposition hier qu'Arkan était à Bijeljina vers le mois de mars 1992. Alors

 26   qu'il était à Bijeljina, comment Arkan et ses unités se sont-ils comportés

 27   à l'égard de la population non serbe ?

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic.


Page 8177

  1   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je soulève une objection parce que

  2   Bijeljina se trouve en Bosnie-Herzégovine, et cela ne fait pas partie de

  3   cet acte d'accusation-ci; ceci n'a aucune pertinence en l'espèce.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Olmsted.

  5   M. OLMSTED : [interprétation] Je crois que, Messieurs les Juges, si vous me

  6   permettez de poser la question, vous comprendrez où je veux en venir. Moi,

  7   j'ai anticipé là-dessus, mais le sujet de Bijeljina a été soulevé. Il est

  8   même cité dans cet ordre, et c'est l'objet même de cet ordre. C'est la

  9   raison pour laquelle je souhaitais poser des questions de contexte avant

 10   d'en venir au point où je veux en venir.

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic.

 12   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Alors, cet ordre n'a pas été versé au

 13   dossier et donc n'est pas pertinent en l'espèce.

 14   M. OLMSTED : [interprétation] Je vais en venir au fait. Alors, pour ce qui

 15   est d'Arkan en particulier et de son comportement et de sa chaîne de

 16   commandement, qui sont pertinents en l'espèce, quel que soit l'endroit où

 17   il se trouve.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

 19   M. OLMSTED : [interprétation]

 20   Q.  Général, pourriez-vous répondre à la question, s'il vous plaît, pour ce

 21   qui est du comportement d'Arkan et de ses hommes à Bijeljina à l'égard de

 22   la population non serbe ?

 23   R.  Oui, je le peux. Le 1er avril 1992, il y a eu des troubles à Bijeljina.

 24   Si je puis m'exprimer ainsi, les Serbes et les Musulmans se sont affrontés.

 25   Et ensuite, les hommes d'Arkan ont fait irruption à Badovinci et se sont

 26   comportés de façon très cruelle. Si je me souviens bien, il y a eu 50

 27   victimes civiles. L'unité d'Arkan a bloqué la caserne et a empêché la

 28   police militaire d'entrer ou de sortir et de venir dans le secteur. Leurs


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  1   membres ont tué un capitaine de la JNA qui avait été autorisé à quitter la

  2   caserne pour aller voir sa famille. C'était un Croate d'appartenance

  3   ethnique. Il a été tué devant la caserne. Donc il a agi très durement, et

  4   un nombre important de personnes ont été tuées par ses membres.

  5   Q.  Alors, pour préciser tout ceci, quelle était l'appartenance ethnique de

  6   ces 50 victimes civiles ?

  7   R.  Je ne peux pas le confirmer aujourd'hui, mais on peut supposer en toute

  8   certitude qu'il s'agissait de Croates plutôt que de Serbes, car avant cela

  9   c'était à l'invitation des Serbes de Bijeljina qu'il s'est rendu à

 10   Bijeljina.

 11   Q.  Et après l'opération de Bijeljina au cours de laquelle les hommes

 12   d'Arkan et Arkan ont été engagés dans cette intervention, vous souvenez-

 13   vous si, oui ou non, des personnalités politiques sont venues à Bijeljina ?

 14   R.  Oui, je me souviens que le commandant du corps est venu à Bijeljina. Il

 15   était venu de Tuzla. Et cette unité à Bijeljina vient de ce secteur-là.

 16   Biljana Plavsic était là, Fikret Abdic était là, et peut-être même une

 17   autre personne. Mais ce sont ces trois personnes-là qui étaient les

 18   personnes-clés qui se trouvaient à cet endroit-là. Elles ont été arrêtées à

 19   l'entrée de Bijeljina, on les a fouillées. Et, en fait, un de ces ministres

 20   du gouvernement serbe a été contraint à s'allonger sur le sol car il

 21   n'avait pas obéi aux ordres.

 22   Q.  Je vais voir si je peux vous rafraîchir la mémoire concernant cette

 23   personne dont vous vous ne souvenez pas.

 24   M. OLMSTED : [interprétation] Regardons le numéro 65 ter 1023. Onglet

 25   numéro 121.

 26   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je pense que cette question est directrice.

 27   M. OLMSTED : [interprétation] Je tente de rafraîchir la mémoire du témoin.

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Veuillez poursuivre. Objection


Page 8179

  1   rejetée.

  2   M. OLMSTED : [interprétation]

  3   Q.  Il s'agit ici d'un article qui vient de "Duga", intitulé  "La situation

  4   à Bijeljina", du 12 au 25 avril 1992. Pouvez-vous identifier les personnes

  5   représentées sur la photographie ?

  6   R.  C'est M. Hadzic, Biljana Plavsic sur cette photographie. Entre eux, il

  7   y a Arkan. Et je ne reconnais pas le quatrième individu sur cette photo.

  8   Q.  Ceci vous rafraîchit-il la mémoire quant à savoir qui était à

  9   Bijeljina, autrement dit, les représentants politiques, après l'opération ?

 10   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Encore une fois, c'est une question

 11   directrice. Il s'agit d'un article qui est daté du 20 avril, et les

 12   événements se sont déroulés le 1er avril. Je ne pense pas qu'il y ait un

 13   quelconque lien.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je pense que le témoin peut répondre

 15   à la question, qu'on lui rafraîchisse la mémoire ou non. S'il ne s'en

 16   souvient pas, il peut tout simplement le dire.

 17   Général.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me souviens pas pour ce qui est des

 19   informations fournies par l'organe de la sécurité de Bijeljina si, oui ou

 20   non, ce jour-là et lors de cette visite de cette délégation qui s'est

 21   rendue à la caserne, si, oui ou non, M. Hadzic était là. Il n'a pas été

 22   cité dans cette information qui nous a été fournie et je n'ai aucune

 23   connaissance de sa présence à Bijeljina ce jour-là.

 24   M. OLMSTED : [interprétation]

 25   Q.  Général, le conseil de la Défense vous a posé un certain nombre de

 26   questions au sujet de l'ordre qui avait été donné par le colonel Biorcevic

 27   en décembre 1991 qui semblait placer l'unité d'Arkan sous le commandement

 28   du 12e Corps. Pourriez-vous nous dire si le colonel Biorcevic a jamais fait

 


Page 8180

  1   l'objet de réprimandes pour avoir tenté de légitimer l'unité d'Arkan et ses

  2   actions ?

  3   R.  Je ne sais rien à ce sujet. C'était le commandant de la 1ère Région

  4   militaire qui était responsable, et nous avons envoyé l'information dont

  5   nous disposions à la SSNO. Cependant, il n'y a pas eu de réaction

  6   particulière.

  7   M. OLMSTED : [interprétation] Est-ce que nous pouvons maintenant afficher à

  8   l'écran, s'il vous plaît, le P1720. Il s'agit de l'intercalaire numéro 96.

  9   Q.  Pendant le contre-interrogatoire mardi, page du compte rendu d'audience

 10   1 018 [comme interprété], on vous a montré cette pièce, c'est un ordre du

 11   commandement de la 1ère Région militaire qui est daté du 18 novembre 1991.

 12   M. OLMSTED : [interprétation] Pourrions-nous passer à la page 3 de

 13   l'original et la page 4 en anglais, s'il vous plaît.

 14   Q.  Le conseil de la Défense a attiré votre attention sur le point 8 de cet

 15   ordre -- il ne s'agit pas de l'ordre en question.

 16   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 17   M. OLMSTED : [interprétation]

 18   Q.  En attendant que mon collègue fasse les recherches nécessaires, je vais

 19   passer à un autre sujet.

 20   M. OLMSTED : [interprétation] Pourrions-nous passer à huis clos partiel,

 21   Messieurs les Juges, s'il vous plaît.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Huis clos partiel, s'il vous plaît.

 23   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,

 24   Messieurs les Juges.

 25   [Audience à huis clos partiel]

 26   (expurgé)

 27   (expurgé)

 28   (expurgé)


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 25   (expurgé)

 26   (expurgé)

 27   (expurgé)

 28   [Audience publique]

 


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  1   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

  2   M. OLMSTED : [interprétation]

  3   Q.  Au point 14, nous voyons le nom de Ljuban Devetak, son nom est cité

  4   ici, et on indique qu'il est commandant de village. Compte tenu des

  5   informations dont vous disposiez, la JNA l'a-t-elle placé à ce poste-là, à

  6   savoir commandant de village ?

  7   R.  Non, ce n'était pas le cas.

  8   Q.  Est-ce que nous pourrions passer à la deuxième page, s'il vous plaît.

  9   Mais avant de passer à la deuxième page, je souhaite faire remarquer qu'aux

 10   points 17 et 18, nous avons un lieutenant et un capitaine de la JNA qui ont

 11   assisté à cette réunion. Alors, si nous passons à la page 2, nous

 12   constatons d'après le titre et la liste des personnes qui ont assisté à

 13   cette réunion qu'il s'agit d'une réunion des commandants de la Défense

 14   territoriale et des représentants des villages de Lovas, Opatovac, Sotin,

 15   Tovarnik et Mohovo, en présence du ministre adjoint de la région serbe et

 16   des membres de l'état-major principal de la région serbe. Alors, à la page

 17   3, nous constatons que les points à l'ordre du jour sont les problèmes

 18   actuels au sein des états-majors de la Défense territoriale dans les zones

 19   libérées, et nous constatons qu'au point 1 c'est Ljuban Devetak qui a

 20   ouvert la séance et qui a proposé que ce soit Slobodan Grahovac qui préside

 21   la réunion.

 22   Tout d'abord, je vais vous poser cette question-ci : si la JNA commandait

 23   ces différents états-majors de la Défense territoriale, qui normalement

 24   présidait les réunions de ces états-majors ?

 25   R.  Je ne suis pas au courant de cela. Je ne le savais pas auparavant, donc

 26   je ne peux qu'interpréter cela. Si la Défense territoriale est placée sous

 27   le commandement de la JNA, dans ce cas ces deux militaires qui ont assisté

 28   à la réunion, ces deux hommes présideraient la réunion. Il semblerait ici


Page 8183

  1   que ces deux hommes aient été invités par l'état-major de la Défense

  2   territoriale, ce qui est mentionné ici; autrement dit, ils ont été invités

  3   à cette réunion. Peut-être que cela concernait la coordination de certaines

  4   actions ou un autre problème auquel pouvait participer l'armée également.

  5   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je demanderais à ce que le témoin lise

  6   l'ensemble du texte pour éviter toute conjecture concernant l'ordre du jour

  7   de la réunion.

  8   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges, je vais parler de

  9   certaines dispositions, ou plutôt, du procès-verbal de cette réunion. Mais

 10   compte tenu du temps que j'ai, je ne souhaite pas que le témoin lise

 11   l'intégralité du document. Je ne pense pas que ce soit pertinent dans le

 12   cadre des questions que je souhaite lui poser.

 13   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je souhaite simplement dire que l'objet de

 14   la réunion n'a pas été consigné correctement, car l'objet de la réunion

 15   était autre et le sujet était un autre sujet qui a été abordé, à savoir il

 16   s'agissait d'envoyer des membres de la TO de ces villages pour faire partie

 17   de l'opération à Vukovar.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

 19   M. OLMSTED : [interprétation] Je ne comprends pas très bien l'objection du

 20   conseil de la Défense. Lorsque j'ai lu le document, j'ai vu qu'à l'ordre du

 21   jour, au point 1 -- est-ce que cela a besoin d'être traduit à nouveau ou

 22   est-ce exact ? Je ne sais pas très bien quel est le problème ici.

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, d'après vous,

 24   pourquoi y a-t-il une erreur ici ? De la part de M. Olmsted ?

 25   M. ZIVANOVIC : [interprétation] J'ai dit que l'objet de la réunion n'est

 26   pas consigné correctement.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Par M. Olmsted ?

 28   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui. Parce que l'objet de la réunion est


Page 8184

  1   différent, l'ordre du jour est différent, d'après ce que je vois dans ce

  2   document.

  3   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Et à quel endroit du texte M. Olmsted

  4   a-t-il parlé de l'objet de la réunion ? Pourriez-vous me renvoyer au compte

  5   rendu d'audience, s'il vous plaît ?

  6   M. ZIVANOVIC : [hors micro]

  7   L'INTERPRÈTE : Micro pour le conseil.

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Micro, s'il vous plaît.

  9   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Il s'agit de la page 42. Donnez-moi un

 10   petit instant, s'il vous plaît.

 11   Excusez-moi, je n'arrive pas à le retrouver. Je retire mon objection.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Veuillez continuer, Monsieur Olmsted.

 13   M. OLMSTED : [interprétation] Merci. Pour le compte rendu d'audience, je

 14   tiens à préciser que j'étais en train de lire ce que le document nous dit.

 15   Et sous ordre du jour, on donne un ordre du jour, et j'ai pu lire qu'il

 16   s'agissait de : "QG de la TO dans les endroits libérés." Je n'ai en aucune

 17   façon paraphrasé le document.

 18   Q.  Mais toujours est-il, allons de l'avant. En page 4 de ce PV -- à mon

 19   avis, ça se trouve aux deux tiers de la page, vers le bas. On voit que

 20   Jovan Medic, originaire de Tovarnik, dit :

 21   "La coopération avec la JNA est bonne."

 22   Et si on regarde un peu plus bas, on peut voir que Milan Radojcic,

 23   originaire de Lovas, dit également :

 24   "La coopération avec la JNA est bonne."

 25   Si maintenant on se penche sur la page suivante, au haut de celle-ci, on

 26   voit que le capitaine Sabo de la JNA dit que :

 27   "Il faut qu'il y ait de la coopération…"

 28   Et ensuite, on se penche sur ce que le lieutenant Marin dit, et celui-ci


Page 8185

  1   dit que :

  2   "Le segment le plus important de la coopération avec la JNA se résume à des

  3   objectifs sécuritaires…"

  4   Alors, Général, dans tous ces cas de figure, le terme utilisé est celui de

  5   la coopération. Comment ce terme de coopération est-il utilisé en termes

  6   militaires ?

  7   R.  Il s'agit d'activités des deux parties en présence qui ont un statut à

  8   peu près identique. Il ne s'agit pas d'un rapport entre subordonné et

  9   supérieur hiérarchique. Il s'agit de la réalisation de mission ou d'intérêt

 10   commun de deux structures qui sont en train d'harmoniser leurs activités

 11   respectives. J'ai du mal ici à lire la partie manuscrite, mais j'ai pu voir

 12   au travers de plusieurs interventions que, pour l'essentiel, on mentionne

 13   le nombre des volontaires qui ont été envoyés en réponse aux besoins des

 14   unités de la JNA. Des fois c'est 14, des fois c'est 110. C'est peut-être

 15   cela, le domaine de coopération, qui consistait donc à convier la

 16   population locale de ces lieux-dits pour ce qui était de répondre aux

 17   appels de la JNA. Et c'est la raison pour laquelle on vante les mérites de

 18   ladite coopération. C'est de cela qu'il s'agit, d'après ce que je puis

 19   fournir comme interprétation.

 20   Q.  Si l'on se penche maintenant sur la teneur de la page 9, on va y voir -

 21   - enfin, je ne suis pas sûr d'être sur la bonne page. Oui, c'est le cas.

 22   Alors, c'est au bas de la page qu'on peut voir que Dzuro Prodanovic,

 23   originaire de Lovas, cite un certain nombre de conclusions, et très

 24   brièvement, l'une des conclusions consiste en :

 25   "La création d'unités et QG de la TO dans les lieux libérés, et c'est

 26   conforme aux instructions et aux tableaux fournis," ensuite on dit que "les

 27   organes compétents du gouvernement ont œuvré en faveur…"

 28   Et puis, la deuxième conclusion, c'est de dire que :


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  1   "Partant des tableaux d'organisation établis par la JNA, coopération

  2   et coordination à ces endroits…"

  3   Et la troisième conclusion :

  4   "Les problèmes évidents doivent être résolus en continuité en coopération

  5   avec le gouvernement et les commandements militaires pertinents."

  6   De quoi s'agit-il ici, Général, pour ce qui est des relations

  7   établies entre la JNA et les TO de villages dans ce secteur ?

  8   R.  Ce que je vois tout d'abord, c'est la participation du gouvernement

  9   dans ces activités parce qu'ils auraient reçu des tableaux d'organisation.

 10   En termes militaires, il s'agit de schémas d'organisation d'unités de la

 11   TO. Deuxièmement, sont censés y prendre part, coopérer et aider les gens de

 12   la JNA. Mais là il est question d'une structure qui découle de ceci, mais

 13   cette structure n'est toujours pas subordonné à la JNA. Ces QG locaux sont

 14   censés créer des unités de la Défense territoriale. Et s'agissant de

 15   l'affaire Lovas, je pense savoir qu'il y a des parties qui ont envoyé des

 16   volontaires à eux et que ça a été placé sous l'autorité locale d'un dénommé

 17   Ljuban Devetak.

 18   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges, je voudrais demander le

 19   versement au dossier de ce document.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ce sera versé au dossier et annoté.

 21   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P2979.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 23   M. OLMSTED : [interprétation]

 24   Q.  Général, j'ai deux petites questions plus ou moins courtes et on en

 25   aura fini. Mardi dernier, page du compte rendu 8 023, le conseil de la

 26   Défense vous a interrogé au sujet de l'article 91 relatif à la Loi sur la

 27   Défense populaire généralisée au sein de la RSFY. On dit que :

 28   "Tout citoyen qui, l'arme à la main, participe à la résistance contre


Page 8187

  1   l'ennemi est à considérer comme étant un membre des forces armées."

  2   Alors, la question vous a été posée à un moment donné, et vous avez répondu

  3   en disant que :

  4   "La loi se rapportait à une période bien antérieure où l'on avait

  5   envisagé une situation où un ennemi viendrait sur le territoire de la

  6   Yougoslavie."

  7   D'abord, dites-nous de quel ennemi parliez-vous ? D'un ennemi local ou d'un

  8   ennemi étranger ?

  9   R.  Non. Là, par ennemi, on sous-entend un agresseur qui serait venu sur le

 10   territoire de la Yougoslavie. Et deuxièmement, s'agissant de ladite

 11   question pour ce qui est de qui l'on devait considérer comme étant membre

 12   des forces armées, j'ai parlé aussi des ordres qui avaient été donnés par

 13   le secrétariat fédéral à la Défense nationale concernant l'accueil des

 14   volontaires dans les rangs de la JNA. Et, par conséquent, ça se rapportait

 15   aussi aux effectifs de la Défense territoriale. Là, on a précisé les

 16   conditions auxquelles les individus devaient satisfaire. Il ne suffisait

 17   pas seulement d'avoir une arme au poing pour aller se battre.

 18   Q.  Est-ce qu'il aurait, à quelque moment que ce soit, été prévu que les

 19   citoyens armés deviennent partie intégrante des forces armées de leur

 20   propre gré ?

 21   R.  Quand il est question de cette loi et de la période à laquelle elle a

 22   été promulguée, il y avait un système de Défense populaire généralisée au

 23   sein de la République socialiste fédérative de Yougoslavie au terme duquel

 24   la totalité des citoyens, d'une façon ou d'une autre, était engagé dans

 25   l'opposition à l'agresseur. Toute personne armée ne pouvait rester hors

 26   système, du système des unités de l'autoprotection civile, des unités de la

 27   Défense territoriale, ou voire encore la JNA. Il s'agissait donc d'une

 28   participation de tous les individus aux structures organisées et mises en


Page 8188

  1   place.

  2   Pour vous dire quels étaient les effectifs de ces unités hormis la

  3   Défense territoriale et la JNA. Dans le cadre de l'autoprotection civile en

  4   Bosnie-Herzégovine, avant la guerre il y avait 115 000 personnes qui

  5   étaient réparties dans les différentes unités de l'autoprotection civile.

  6   Et chaque communauté sociale disposait d'une unité à soi. Il ne s'agit pas

  7   donc d'individus ou de particuliers qui se seraient armés et qui auraient

  8   pris part aux combats. Ils devaient forcément faire partie d'une unité

  9   déterminée et, par voie de conséquence, ils devenaient de ce fait membres

 10   des forces armées.

 11   Q.  Est-ce que ces dispositions avaient été mises en place dans le cadre

 12   d'un ennemi interne ou d'un ennemi venu de l'extérieur ?

 13   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Ceci est une question directrice.

 14   M. OLMSTED : [interprétation] Je ne lui suggère aucune réponse de cette

 15   façon-ci, Monsieur le Président.

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Certes. Continuez.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] La loi ne l'a pas prévu, n'a pas prévu ce type

 18   de situation telle qu'elle est survenue en 1990 et plus tard.

 19   M. OLMSTED : [interprétation]

 20   Q.  Quand vous dites que la loi n'a pas prévu "cela", qu'entendez-vous par

 21   "ne l'a pas prévu" ?

 22   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Peut-être la réponse du témoin n'a-t-elle

 23   pas été bien interprétée. Je ne la vois pas. Il n'a pas dit que cela

 24   n'était pas réglementé, il a dit que ce n'était pas prévu.

 25   M. OLMSTED : [interprétation]

 26   Q.  Mais quoi qu'il en soit, qu'est-ce qu'on n'a pas envisagé ou aménagé ou

 27   prévu ou réglé par la législation ?

 28   R.  Moi, je vais vous dire ce qui était prévu et envisagé. Lorsqu'il


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  1   survenait des troubles internes, des bouleversements à l'intérieur du pays,

  2   la première des instances compétentes pour résoudre les problèmes survenus

  3   c'était la sécurité publique, c'est-à-dire le ministère de l'Intérieur, à

  4   savoir son secteur chargé de la sécurité publique. On pouvait proclamer un

  5   état d'urgence sur le territoire, comme cela s'est d'ailleurs passé

  6   lorsqu'il y a eu proclamation de l'état d'urgence au Kosovo en 1981 et en

  7   1989, où l'on a d'abord déployé les unités du ministère de l'Intérieur

  8   parce que c'est celles-ci qui étaient compétentes pour ce qui est était des

  9   conflits internes. Une fois que ces conflits dépassaient les possibilités

 10   de riposte qui étaient celles des organes de l'intérieur, la présidence

 11   pouvait prendre une décision relative à l'utilisation des forces armées qui

 12   viendraient aider les instances du ministère de l'Intérieur pour surmonter

 13   le problème. Mais les conflits que nous avons eus où une république, en

 14   termes pratiques, avait fait sécession ou avait quitté le système pour

 15   organiser une insurrection armée sur le territoire entier, de telles

 16   possibilités ou éventualités n'avaient pas été envisagées par la loi. C'est

 17   la raison pour laquelle il y a eu auto-organisation de régions autonomes

 18   qui n'avaient pas, elles, voulu faire sécession vis-à-vis de la

 19   Yougoslavie. Je ne peux pas vous donner une interprétation plus large que

 20   celle qui était fournie par le texte de la loi.

 21   Q.  Au final, je vais vous demander ceci. Hier, à la page du compte rendu 8

 22   121, vous avez dit que c'est des documents qui vous ont fait savoir que des

 23   individus originaires de Vukovar avaient été tabassés avant que d'avoir été

 24   acheminés vers des centres de rassemblement et ce, par les soins de la

 25   police. Alors, dites-nous où est-ce que ces passages à tabac ont eu lieu

 26   par les soins de la police ?

 27   R.  Je ne pense pas que vous parlez là des endroits du corps où les coups

 28   ont été infligés, mais vous parlez des lieux. Alors, lorsqu'il y a eu


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  1   formation d'un centre de rassemblement à Stajicevo, ça s'est fait dans un

  2   délai très bref compte tenu de la situation où l'on avait déjà eu des

  3   citoyens de Vukovar en train de quitter la ville de Vukovar. L'accueil de

  4   ces individus et l'administration de la sécurité à Stajicevo ont été

  5   confiés à des effectifs du MUP de Zrenjanin. Ce n'est que par la suite que

  6   des officiers de la JNA sont arrivés avec un commandant du centre d'accueil

  7   avec des individus qui venaient de l'équipe opérationnelle de l'autorité

  8   chargée de la sécurité, et c'est par la suite qu'il y a eu cessation des

  9   tortures lors de l'arrivée de ces individus au centre de rassemblement,

 10   parce que la sécurité du centre de rassemblement avait été assumée par une

 11   unité militaire. Le deuxième cas de figure, je ne me souviens pas du nom

 12   exact de l'endroit, mais je sais qu'il s'agit de personnes amenées par les

 13   membres du MUP qui les ont fait venir au centre d'accueil de Sremska

 14   Mitrovica. Des notes ont été consignées pour constater que ces gens ont été

 15   malmenés, qu'il y avait des blessures visibles sur leurs corps, et il y a

 16   eu des mesures de prises contre les organes de l'intérieur du secteur qui

 17   les avait envoyés. Ce sont deux cas de figure où je puis vous confirmer

 18   qu'il y a bel et bien eu recours à la force physique vis-à-vis des

 19   personnes qui ont été acheminées vers les centres de rassemblement.

 20   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire si ces agents de police qui ont été

 21   impliqués dans les passages à tabac venaient du MUP serbe ou d'un autre MUP

 22   ?

 23   R.  Pour autant que je sache, ils étaient du MUP serbe et il me semble

 24   aussi qu'il s'agissait d'effectifs chargés de la sécurisation du KP Dom à

 25   Mitrovica.

 26   M. OLMSTED : [interprétation] Je n'ai plus de questions à poser, Monsieur

 27   le Président.

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci, Monsieur Olmsted.

 


Page 8191

  1   Général, ceci met un terme à votre témoignage. Nous vous remercions

  2   grandement d'être venu aider le Tribunal à La Haye et nous vous remercions

  3   de votre patience. Vous êtes à présent libre de vous en aller, et je vous

  4   souhaite un bon retour chez vous. L'huissier vous raccompagnera hors de ce

  5   prétoire. Une fois de plus, grand merci.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie également.

  7   [Le témoin se retire]

  8   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges, si vous me le permettez,

  9   j'aimerais quitter le prétoire pour laisser le micro à Muireann Dennehy,

 10   qui se chargera de l'interrogatoire du témoin suivant. Je remercie les

 11   Juges de la Chambre de nous avoir fourni l'opportunité d'avoir une audience

 12   de plus aujourd'hui pour terminer l'audition de ce témoin.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] En attendant l'arrivée du témoin

 14   suivant -- ou, plutôt, on attend l'huissier pour qu'il aille chercher le

 15   nouveau témoin.

 16   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. Tout

 18   d'abord, je vais vous demander si vous m'entendez dans une langue que vous

 19   comprenez ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci de me poser la question. Oui, je vous

 21   entends.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que vous pouvez nous décliner

 23   votre nom, prénom et date de naissance.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Mladen Loncar, et je suis né le 4

 25   mai 1961.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. Monsieur Loncar, vous allez

 27   d'abord donner lecture d'une déclaration solennelle qui fait s'engager les

 28   témoins de dire la vérité. Je tiens à vous indiquer que vous vous exposez à

 


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  1   des sanctions de parjure au cas où vous fourniriez des informations fausses

  2   ou non conformes à la vérité à ce Tribunal. Et je vais vous demander de

  3   nous donner lecture de cette déclaration solennelle tendue à vous par les

  4   soins de M. l'Huissier.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  6   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  7   LE TÉMOIN : MLADEN LONCAR [Assermenté]

  8   [Le témoin répond par l'interprète]

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. Vous pouvez vous asseoir.

 10   Madame Dennehy, le témoin est à vous.

 11   Mme DENNEHY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Merci,

 12   Messieurs les Juges. Avant que de commencer avec mon interrogatoire

 13   principal, j'ai un petit point de procédure à évoquer qui se rapporte à un

 14   document portant la référence 65 ter 6490. Je voudrais présenter une

 15   requête pour ce qui est de son rajout à la liste des pièces à conviction.

 16   Le document a été communiqué à la Défense lundi soir. Il s'y trouve un

 17   croquis du camp de Begejci, et le témoin -- enfin, c'est un croquis qui

 18   montre l'endroit où le témoin a été détenu. Nous avons demandé à la Défense

 19   de se prononcer, mais nous n'avons toujours pas reçu de réponse.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Mais qui c'est qui a dressé ce

 21   croquis ?

 22   Mme DENNEHY : [interprétation] C'est le témoin.

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 24   Est-ce que l'Accusation [comme interprété] a une position à formuler ?

 25   M. GOSNELL : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 27   Il est fait droit à votre requête.

 28   Mme DENNEHY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.


Page 8193

  1   Interrogatoire principal par Mme Dennehy : 

  2   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, Monsieur Loncar, est-ce que vous

  3   m'entendez dans une langue que vous comprenez ?

  4   R.  Oui, je vous entends bien.

  5   Q.  Docteur Loncar, à quel type d'occupation vaquez-vous maintenant ?

  6   R.  Je suis psychiatre dans une clinique de psychiatrie au centre

  7   hospitalier de Zagreb. Le domaine restreint dont je m'occupe, c'est une

  8   sous-spécialisation, c'est la psychiatrie sociale, et au sein de celle-ci,

  9   à une discipline à part qui s'appelle la traumatologie psychiatrique. En

 10   sus, je suis chargé d'un programme national d'assistance sociale aux

 11   victimes de la guerre patriotique. Je suis le tout premier auteur de ce

 12   programme destiné aux victimes. Cela comporte deux niveaux. Il y a des

 13   centres provinciaux à caractère interdisciplinaire, où il y a des docteurs,

 14   des psychologues et des intervenants sociaux. Et il y a des centres auprès

 15   des centres hospitaliers qui sont chargés des traumatismes psychologiques

 16   et psychiatriques avec des psychiatres qui ont des spécialisations dans le

 17   domaine des traumatismes. Alors, sur ce sujet, je dirais que je travaille

 18   sur le sujet depuis pas mal d'années et j'ai publié plusieurs études, et en

 19   particulier pour ce qui est des séquelles des traumatismes ou d'un vécu

 20   traumatique, et notamment le stress post-traumatique.

 21   Q.  Merci, Docteur. Excusez-moi de vous interrompre, Docteur Loncar. Vous

 22   avez fourni à cette Chambre pas mal de détails au sujet de votre profession

 23   et de ce à quoi vous vaquez, et j'aimerais que nous fragmentions un peu.

 24   Depuis quand travaillez-vous dans le domaine de la psychotraumatologie ?

 25   R.  Eh bien, c'est en fin 1991, début 1992 que j'ai fait une spécialisation

 26   en matière de psychiatrie, et j'ai enchaîné avec ce volet dont je m'occupe

 27   jusqu'à nos jours. Avant la guerre, mon orientation primordiale était la

 28   psychiatrie neurobiologique. J'ai commencé en 1992 à la faculté de


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  1   médecine, dans le département chargé de l'information et des recherches qui

  2   était lié au ministre de la Santé --

  3   Q.  Docteur Loncar, excusez-moi de vous interrompre à nouveau. Mais étant

  4   donné que nous sommes limités dans le temps aujourd'hui, je voudrais que

  5   vous vous concentriez et répondiez explicitement aux questions que je vous

  6   pose.

  7   Dites-nous, je vous prie, combien de fois êtes-vous comparu en tant que

  8   témoin devant ce Tribunal ?

  9   R.  C'est la troisième fois.

 10   Q.  Et quelles sont les affaires où vous avez témoigné précédemment ?

 11   R.  Dans l'affaire Babic, Martic, et maintenant ceci est ma troisième

 12   affaire.

 13   Q.  Et en quelle qualité avez-vous témoigné devant ce Tribunal auparavant ?

 14   R.  J'ai témoigné comme témoin expert.

 15   Q.  Et quelle était la thématique de votre témoignage d'expert ?

 16   R.  C'était mon domaine restreint, à savoir les séquelles subies par les

 17   victimes suite au stress post-traumatique, le PTSD, et les séquelles que

 18   j'ai étudiées de façon distincte, l'expérience traumatique, psychique et

 19   physique, mais aussi sexuelle. Il y a eu des femmes qui ont été victimes de

 20   viol et il y a également des hommes qui ont été exposés à des mauvais

 21   traitements sexuels.

 22   Q.  Je vais brièvement me pencher sur votre contexte personnel. Veuillez

 23   nous dire où est-ce que vous avez grandi.

 24   R.  Je suis né à Donji Gradac, en Bosnie-Herzégovine, mais c'est à l'âge de

 25   six mois que j'ai déménagé avec mes parents au village d'Ilok, en Slavonie.

 26   Je ne me souviens pas de l'endroit où je suis né, j'étais bébé. Et, de

 27   fait, j'ai grandi et j'ai fait mes classes à Ilok. C'est le lieu où j'ai

 28   grandi et séjourné.


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  1   Q.  Et où avez-vous suivi votre formation médicale ?

  2   R.  L'université la plus proche lorsque l'on habitait Ilok était Novi Sad,

  3   et c'est là où j'ai étudié la médecine. Cela se trouve à une quarantaine de

  4   kilomètres d'Ilok.

  5   Q.  Et quand est-ce que vous avez obtenu votre diplôme de la faculté de

  6   médecine ?

  7   R.  J'ai obtenu mon diplôme à Novi Sad en 1987-1988.

  8   Q.  Et à la suite de l'obtention de votre diplôme de la faculté de médecine

  9   en 1987-1988, quand avez-vous commencé à étudier cette spécialisation qui

 10   est la vôtre, à savoir la psychiatrie ?

 11   R.  Alors, pendant un laps de temps bref, j'ai vécu à Ilok après

 12   l'obtention de mon diplôme. Je voulais travailler comme interne à l'hôpital

 13   de Vukovar, mais il n'y avait pas de vacances de postes. C'est la raison

 14   pour laquelle je suis reparti à Novi Sad, et c'est à Novi Sad que j'ai fait

 15   mon internat, puis ensuite j'ai commencé à étudier pour ma thèse de master

 16   dans une clinique psychiatrique. Puis, après un certain temps, j'ai été

 17   employé là-bas, parce que j'ai remplacé quelqu'un à titre temporaire. Puis

 18   ensuite, j'ai obtenu un poste permanent.

 19   Q.  Docteur Loncar, les interprètes n'ont pas compris votre dernière

 20   phrase. Pourriez-vous la répéter.

 21   R.  Oui. Je disais que j'ai commencé à exercer ma spécialisation en

 22   neurologie et psychiatrie. Cela, c'était avant la guerre. Parce qu'avant la

 23   guerre, en fait, la neurologie et la psychiatrie formaient une seule et

 24   même spécialisation, mais bon, j'ai choisi la psychiatrie.

 25   Q.  Vous venez juste de mentionner la guerre. Et j'aimerais savoir comment

 26   le début des hostilités en ex-Yougoslavie a eu un impact sur vos études ?

 27   R.  Eh bien, je peux vous dire ce que j'ai vu. Ce que j'ai moi-même vécu,

 28   je peux vous le relater. Dans cette zone, jusqu'en 1988, année où Slobodan


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  1   Milosevic a eu le pouvoir, nous vivions tout à fait normalement et personne

  2   ne s'intéressait de savoir qui était qui. En d'autres termes, les

  3   différentes religions et les différentes appartenances ethniques n'avaient

  4   absolument aucune importance pour nous. Ce n'est que vers l'année 1988 que

  5   les tensions entre les différentes appartenances ethniques ont commencé à

  6   être ressenties par la population. Et puis, la situation s'est empirée pour

  7   culminer en 1990 ou 1991.

  8   Q.  Merci, Docteur Loncar. Mais j'aimerais savoir plus précisément comment

  9   cette montée en puissance des tensions ethniques a eu une incidence à

 10   l'époque sur vos études à Novi Sad ?

 11   R.  Moi, j'ai travaillé normalement jusqu'à l'année 1988. Mes collègues

 12   étaient des personnes cultivées, normales, et je n'avais absolument aucun

 13   problème de ce style. Et puis, lorsque Slobodan Milosevic a eu le pouvoir,

 14   lorsque les relations ont commencé à se détériorer en Yougoslavie, qui plus

 15   est, Milosevic avait lancé cet embargo sur les biens slovènes. Et étant

 16   donné qu'Ilok se trouvait à la frontière, mes collègues me donnaient de

 17   l'argent pour que je puisse acheter pour eux là-bas des biens slovènes. Et

 18   puis, avec le passage du temps, les tensions se sont intensifiées, les

 19   appartenances ethniques ont commencé à avoir une certaine importance, et

 20   bien que nous ayons continué à vivre dans un environnement multiculturel,

 21   on pouvait ressentir les tensions.

 22   Q.  Docteur Loncar, vous venez juste de nous parler des activités de M.

 23   Milosevic. Est-ce que vous, vous aviez des activités politiques à l'époque,

 24   avant ou pendant la guerre d'ailleurs ?

 25   R.  Avant la guerre, je me suis hasardé sur l'arène politique pendant un

 26   laps de temps très bref et c'est au moment où ont eu lieu, en 1990, ces

 27   élections libres et ouvertes. C'est en fait là qu'a été fondée l'Alliance

 28   démocratique des Croates en Vojvodine. Je me souviens nous avions invité


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  1   toutes les partis qui étaient présents à Novi Sad, y compris le parti qui

  2   dirigeait, le Parti socialiste de Serbie. Bon, cela a duré peu de temps,

  3   deux mois, mais ensuite la peur a commencé à se propager, à faire tache

  4   d'huile, et cette initiative a disparu spontanément.

  5   Q.  Vous venez de nous dire que l'Alliance démocratique des Croates en

  6   Vojvodine a été créée. Quel était l'objectif de cette Alliance démocratique

  7   des Croates ?

  8   R.  Les Hongrois de souche avaient déjà fondé leur parti. C'était un parti

  9   pour les minorités et ce parti préconisait la sauvegarde des traditions

 10   culturelles dans cette zone. Et nous, nous avions été d'avis que nous

 11   pourrions apporter notre contribution à cette diversité culturelle. Car il

 12   ne faut pas oublier qu'en Vojvodine, il y a plus de 20 appartenances

 13   ethniques qui vivaient là-bas.

 14   Q.  J'aimerais maintenant que nous passions à l'été 1991. Où avez-vous

 15   passé vos congés annuels à la fin de cet été-là ?

 16   R.  A l'époque, je suivais donc ma formation de spécialiste à Novi Sad dans

 17   le domaine de la psychiatrie. Tout cela était nouveau pour moi, j'étais le

 18   débutant, donc mes collègues avaient la priorité par rapport à moi en

 19   matière de congés annuels et de vacances. Et j'aimerais également ajouter

 20   que nous avions 15 jours de plus lorsque l'on se spécialisait en

 21   psychiatrie. Donc mes vacances ou mes congés annuels ont commencé au début

 22   du mois de septembre, et je me suis rendu chez mes parents à Ilok. C'est là

 23   que j'ai passé mes congés annuels.

 24   Q.  Et j'aimerais savoir comment est-ce que le conflit a eu un impact sur

 25   les services médicaux qui se trouvaient à Ilok à cette époque-là ?

 26   R.  Même avant la guerre, à Ilok, il n'y avait pas beaucoup

 27   d'infrastructures médicales. Il y avait tout simplement un dispensaire qui

 28   dépendait en quelque sorte de Vukovar pour son organisation ou son


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  1   administration. Il y avait juste deux médecins généralistes à Ilok et deux

  2   dentistes. Donc, à la fin du mois d'août et au début du mois de septembre -

  3   - mais, en fait, j'aimerais ajouter que ces médecins généralistes et ces

  4   dentistes étaient Croates et Serbes. Et finalement, les collègues serbes

  5   ont cessé de venir travailler. La plupart d'entre eux vivaient à Backa

  6   Palanka. Il y avait le Dr Grgic et le Dr Holoker qui étaient des Croates

  7   qui étaient médecins et qui avaient un travail permanent. Ils sont restés,

  8   eux. C'étaient des médecins généralistes. Et lors de mon congé annuel, je

  9   les ai aidés, à titre non officiel. En fait, nous avons improvisé parce

 10   qu'il y a au moins eu deux nourrissons qui sont nés, et en tant que

 11   psychiatre je n'avais pas d'expérience préalable en la matière --

 12   Q.  Excusez-moi de vous interrompre, mais je pense qu'il va falloir que je

 13   vous rappelle de vous concentrer sur les questions que je vous pose. Je

 14   vais peut-être reformuler ma question. J'aimerais savoir si vous pouvez

 15   dire aux Juges de la Chambre comment la guerre a eu un impact pour ce qui

 16   est du matériel médical à Ilok ?

 17   R.  Oui. A un moment donné, Ilok a été isolé, coupé du reste de la Croatie,

 18   et il y a eu une pénurie de médicaments, de tous types de médicaments

 19   d'ailleurs, et cela a eu une incidence sur la population locale, je pense

 20   notamment aux personnes souffrant de maladies chroniques et aux enfants. Il

 21   y avait une pénurie d'antibiotiques, il n'y avait pas de médicaments pour

 22   les épileptiques, pour les personnes souffrant de pathologie cardiaque, et

 23   cetera, et cetera.

 24   Q.  Et qu'avez-vous fait pour pouvoir aider les enfants et les personnes

 25   souffrant de maladies chroniques à Ilok à la fin de l'été 1991 ?

 26   R.  Ecoutez, j'en ai parlé à mes collègues parce que j'étais assez mobile,

 27   j'avais une voiture, et je n'avais pas peur, et d'ailleurs je ne pensais

 28   pas qu'il y ait quoi ce soit de mauvais qui se passe. Donc, ce que j'ai


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  1   fait, moi, c'est que je suis allé acheter des médicaments pour certains

  2   malades à Ilok. Et je me souviens qu'entre autres médicaments, il y avait

  3   un médicament pour un enfant épileptique, et les parents de cet enfant

  4   m'avaient demandé de chercher ce médicament à Novi Sad. Donc, moi, je me

  5   suis rendu à Novi Sad pour acheter des médicaments pour ces personnes.

  6   Q.  Et quand est-ce que vous êtes allé à Novi Sad pour acheter ces

  7   médicaments ?

  8   R. Pour autant que je m'en souvienne, cela s'est passé le 1er octobre 1991.

  9   Mme DENNEHY : [interprétation] Monsieur le Président, je vois quelle heure

 10   il est. Je pense que le moment est peut-être venu de faire la pause.

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci, Madame Dennehy.

 12   Monsieur Loncar, nous allons faire une pause maintenant, une pause d'une

 13   demi-heure, et nous reviendrons à 12 heures 45. M. l'Huissier va vous

 14   accompagner hors du prétoire.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 16   [Le témoin quitte la barre]

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Dennehy, alors je pense à

 18   notre programmation, vous connaissez maintenant un peu mieux le témoin,

 19   vous pouvez en juger davantage, quelle va être la durée de votre

 20   interrogatoire principal ?

 21   Mme DENNEHY : [interprétation] Je pense que je vais utiliser la plupart --

 22   enfin, les trois heures qui m'ont été imparties pour ce témoin. Je vais

 23   essayer de maîtriser, en quelque sorte, le témoin dans la mesure où je peux

 24   lui demander de se concentrer. Toutefois, au vu du nombre de documents et

 25   des renseignements que j'ai besoin d'obtenir de la part de ce témoin, je

 26   pense que je vais utiliser ces trois heures quasiment.

 27   [La Chambre de première instance se concerte]

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Qu'en est-il de la Défense, est-ce


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  1   que vous avez une petite idée sur la question ? Est-ce que vous allez

  2   utiliser trois heures ou moins ? Enfin, trois heures, c'est théoriquement

  3   ce à quoi vous avez droit.

  4   M. GOSNELL : [interprétation] Beaucoup moins que trois heures, Monsieur le

  5   Président.

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien. Mais, donc, nous n'allons pas

  7   en terminer avec la déposition de ce témoin aujourd'hui, n'est-ce pas ?

  8   Parce qu'il nous reste une heure et demie lorsque nous revenons -- une

  9   heure et quart, pour être précis, puis nous aurons une heure et demie

 10   demain -- excusez-moi, non pas demain, mais cet après-midi. Donc, vous,

 11   vous allez utiliser tout ce temps, Madame ?

 12   Mme DENNEHY : [interprétation] Non, je ne pense pas utiliser tout ce temps.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Mais cela nous donne 2 heures 45

 14   comme total.

 15   Mme DENNEHY : [interprétation] C'est exact. Je vais faire de mon mieux pour

 16   limiter mon interrogatoire principal dans la mesure où je le peux.

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui. Mais manifestement, si nous

 18   voulons en terminer avec ce témoin cette semaine pour qu'il ne reste pas

 19   ici ce week-end, et je pense à la programmation de la semaine prochaine, il

 20   faudra que nous revenions demain matin pour un volet d'audience au moins.

 21   Mme DENNEHY : [interprétation] Je pense qu'il serait peut-être utile

 22   d'envisager un volet d'audience demain; mais je ferai de mon mieux, et

 23   j'espère que nous n'en aurons pas besoin de ce volet d'audience demain.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien. La situation est claire

 25   maintenant. Donc vous avez tout à fait le droit d'utiliser tout volet

 26   d'audience prévu cet après-midi. Et voilà, ce sera tout.

 27   Mme DENNEHY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je vous

 28   remercie.


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  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien.

  2   L'audience est levée.

  3   --- L'audience est suspendue à 12 heures 17.

  4   --- L'audience est reprise à 15 heures 04.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je suppose que vous pensiez tous que

  6   j'allais revenir à notre plan, mais je dois dire que je suis sans voix.

  7   Poursuivons donc, simplement.

  8   [Le témoin vient à la barre]

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Veuillez vous asseoir, Monsieur

 10   Loncar.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Dennehy.

 13   Mme DENNEHY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 14   Q.  Monsieur Loncar, avant que nous ne reprenions, j'espère que vous allez

 15   bien et que l'alarme qu'il y a eu un peu plus tôt ne vous a pas perturbé.

 16   Est-ce que nous pouvons poursuivre ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Avant la pause, vous nous avez dit que le 1er octobre 1991, vous vous

 19   êtes rendu à Novi Sad pour trouver des approvisionnements ou des

 20   fournitures médicales pour les personnes d'Ilok. Pourriez-vous dire aux

 21   Juges de la Chambre, s'il vous plaît, ce qui vous est arrivé alors que vous

 22   conduisiez de Novi Sad et reveniez à Ilok ?

 23   R.  Si vous me le permettez, je vais vous dire en une phrase ou deux

 24   pourquoi j'ai quitté Ilok. Déjà à la date du 1er octobre lorsque je me suis

 25   rendu à Novi Sad, avant cela, à Ilok, il y avait une crise humanitaire. A

 26   Ilok, il y avait de nombreuses personnes qui, en réalité, venaient des

 27   villages voisins. Il y avait des pénuries importantes de tout, de

 28   nourriture, de médicaments, et la population locale et les réfugiés


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  1   venaient pour qu'on leur apporte de l'aide. Il y a eu beaucoup de combats

  2   autour de Vukovar, et Ilok est à 35 kilomètres de Vukovar. On sentait la

  3   vibration de ces canons, ou je ne sais pas ce qui était utilisé. Un jour

  4   avant mon départ, j'ai eu l'occasion d'aider au dispensaire lorsqu'un

  5   réfugié est venu de Tovarnik, il avait une blessure par balle au bras, et

  6   il nous a relaté certaines des choses épouvantables qui étaient en train de

  7   se produire.

  8   Et le Dr Grgic et le Dr Holoker m'ont ensuite demandé si je pouvais

  9   aller acheter des médicaments pour empêcher que quelque chose de très

 10   mauvais ne se produise à Ilok. Il n'y avait pas de contrôle au niveau du

 11   pont. L'armée, la JNA, tenait le pont en direction de Backa Palanka --

 12   Q.  Malheureusement, nous n'avons que très peu de temps aujourd'hui, donc

 13   je vais vous demander de répondre très précisément à la question que je

 14   vous ai posée. Les informations que vous nous fournissez sont bien sûr

 15   utiles, mais je vais vous demander de bien vouloir répondre précisément à

 16   ma question.

 17   Donc je vais vous répéter la question : que vous est-il arrivé

 18   lorsque vous avez quitté Novi Sad et que vous êtes reparti à Ilok ?

 19   R.  A ce moment-là, je conduisais un de mes amis, Ivan Suvak, et je me suis

 20   arrêté devant sa maison. Il y avait une aire de parking à cet endroit-là,

 21   et un policier est descendu de cette fourgonnette. Certains étaient en

 22   uniforme et d'autres étaient en habits civils. Ils m'ont demandé la clé,

 23   ils m'ont fait monter dans cette voiture de police et m'ont emmené au SUP

 24   de la province. Et ils disaient en chemin : "Le voici." Cet appel que

 25   j'avais lancé à Novi Sad. Car avant cela, j'ai vu un ami, un prêtre, Ratko

 26   Mlajic [phon], qui m'avait donné de l'argent pour acheter des médicaments,

 27   et c'est la raison pour laquelle j'avais lancé et rédigé cet appel. J'avais

 28   demandé aux observateurs internationaux et éventuellement à Médecins sans


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  1   frontières de venir nous aider, que la catastrophe humanitaire commençait à

  2   prendre des proportions importantes.

  3   Q.  Vous avez dit que certains policiers sont descendus de voiture. Combien

  4   de policiers y avait-il ?

  5   R.  Eh bien, pour autant que je m'en souvienne, et d'après ce que je

  6   pouvais voir à ce moment-là - parce que j'ai été pris de court - je crois

  7   qu'ils étaient au nombre de six ou sept. Certains portaient un uniforme et

  8   d'autres étaient en civil.

  9   Q.  Et vous avez dit qu'ils vous ont emmené jusqu'au bureau du SUP de la

 10   province. Où se trouvait ce bureau ?

 11   R.  C'est à Novi Sad. Ça, c'était le centre qui était là, le centre de la

 12   "milicija", de la police. C'est un bâtiment.

 13   Q.  Veuillez dire aux Juges de la Chambre ce qu'il vous est arrivé dans cet

 14   immeuble du SUP à Novi Sad.

 15   R.  D'après mon souvenir, ils m'ont installé dans un lieu. Ils m'ont emmené

 16   en voiture, et ensuite ils m'ont fait aller jusqu'au troisième étage. Ils

 17   m'ont placé dans une pièce. Un policier en uniforme s'est entretenu avec

 18   moi pendant cinq minutes environ. Il a pris mes coordonnées. Et ensuite,

 19   les policiers en civil ont commencé à rentrer dans la pièce. Ils ont

 20   commencé à me poser des questions et ils ont commencé à me passer à tabac,

 21   ils ont commencé à me torturer. Et ils m'ont gardé comme ça pendant 30

 22   heures, sans pause, sans me donner le temps de dormir. Je pouvais juste

 23   aller aux toilettes une fois. Ils me posaient deux séries de questions : la

 24   première, qui concernait Ilok; et la seconde, qui concernait cette courte

 25   activité qui avait été la mienne au sein de l'Alliance démocratique des

 26   Croates de Vojvodine. Ils m'ont frappé sans pitié.

 27   Je portais une veste en jeans et je n'avais qu'un tee-shirt blanc en

 28   dessous, et ils ont enlevé cela et -- en réalité, ils m'ont attaché les


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  1   mains avec ma veste et ils m'ont frappé à la tête et sur le torse avec une

  2   batte qui faisait environ 90 centimètres de long. C'était plus grand qu'une

  3   matraque normale. Ils me frappaient à la tête et ne cessaient de demander

  4   quelles connaissances j'avais, avec qui j'étais en contact. Ils ont

  5   commencé à me poser des questions sur des connaissances que j'aurais soi-

  6   disant eues de Laszlo Tot, que je ne connaissais pas, qui était le

  7   rédacteur en chef d'un programme à la télévision à Novi Sad. Et ils m'ont

  8   demandé qui je voyais en dehors de mon travail et qui je voyais de la

  9   communauté hongroise à Ilok, quelles unités se trouvaient là. En quelques

 10   mots, c'était cela.

 11   Q.  Je vous remercie, Monsieur Loncar. Vous venez de nous fournir un

 12   certain nombre d'éléments d'information et j'aimerais revenir dessus pour

 13   pouvoir préciser certains points. Vous avez dit :

 14   "Ils m'ont frappé sans merci.

 15   "… ils m'ont frappé avec une matraque qui faisait 90 centimètres de

 16   long environ."

 17   Lorsque vous dites "ils", de qui voulez-vous parler ?

 18   R.  Je me suis rendu compte à ce moment-là qu'il s'agissait de policiers en

 19   civil, mais je ne crois pas qu'il s'agissait de la police judiciaire. Je

 20   crois que c'était la police secrète, d'après les questions qu'ils m'ont

 21   posées. J'ai pensé par la suite qu'il ne s'agissait pas de la police

 22   judiciaire mais de la police secrète qui m'interrogeait.

 23   Q.  Merci, Monsieur Loncar. Et combien de policiers ou membres de la police

 24   secrète vous ont interrogé au QG du SUP à Novi Sad ?

 25   R.  Il y a en avait deux qui étaient là tout le temps, et ensuite cinq ou

 26   six ne cessaient d'entrer et de sortir pendant ces 30 heures.

 27   Q.  Et vous nous avez dit un peu plus tôt qu'ils vous ont frappé avec une

 28   matraque ou une batte qui faisait 90 centimètres de long. Qui n'était pas


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  1   une arme habituelle. Pourriez-vous me dire quelle arme ils ont utilisée

  2   pour vous frapper ?

  3   R.  Je ne sais pas. Il y avait du cuir à l'extérieur. Il ne s'agissait pas

  4   de ce bâton, de cette matraque habituelle, qu'un policier portait dans la

  5   rue.

  6   Q.  Et vous avez dit qu'ils vous ont frappé à la tête et sur le torse.

  7   Quelles blessures avez-vous eues suite à ces passages à tabac ?

  8   R.  Oui, je dois dire qu'ils n'utilisaient pas seulement les matraques,

  9   mais qu'un des policiers qui étaient là en permanence - disons que

 10   c'étaient ceux qui nous interrogeaient - c'était le chef, et c'était lui

 11   qui m'a frappé sur le nez et qui m'a frappé au visage. Et fort

 12   heureusement, il portait des chaussures de tennis seulement, donc mon nez

 13   s'est mis à saigner à un moment donné et ils m'ont donné un morceau de

 14   tissu pour que je puisse empêcher le sang de couler. J'avais des hématomes

 15   dans le dos, au niveau de la poitrine.

 16   Q.  Vous nous avez dit un peu plus tôt que vous avez été interrogé pendant

 17   30 heures environ. Qu'avez-vous fait après qu'on vous ait relâché, suite à

 18   votre interrogatoire ?

 19   R.  Après cet interrogatoire, ils m'ont relâché. Je perdais l'équilibre. Je

 20   connaissais bien Novi Sad, mais j'avais du mal à m'orienter, donc ils m'ont

 21   montré le chemin. Je suis arrivé dans la pièce que je louais et j'ai

 22   demandé à la propriétaire de me donner des analgésiques, des calmants, et

 23   je me suis rendu dans une clinique le lendemain. Je me suis plaint auprès

 24   de mes supérieurs et de mes collègues, je leur ai expliqué ce qui m'était

 25   arrivé.

 26   Q.  Vous nous avez dit que le lendemain, vous vous êtes rendu dans une

 27   clinique. Etait-ce l'endroit où vous travailliez, votre lieu de travail ?

 28   R.  Oui, oui, c'était mon lieu de travail.


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  1   Q.  Et la police secrète vous a-t-elle arrêté à nouveau à Novi Sad ?

  2   R.  Oui. Dans l'intervalle -- je veux dire, entre cette première

  3   arrestation, que je n'oublierai jamais, avec ces passages à tabac, cela a

  4   duré une trentaine d'heures, et dans la période qui a suivi, quatre ou cinq

  5   ou six fois, on m'a emmené de l'endroit où je travaillais. Mes vacances

  6   étaient terminées et j'avais commencé à travailler. Ils venaient me

  7   chercher dans l'après-midi, ils venaient me chercher à mon travail, ils

  8   venaient me chercher et m'emmenaient au même endroit, au SUP de la

  9   province. Chaque fois qu'ils me faisaient venir, ils m'interrogeaient, et

 10   cela était suivi de passages à tabac. Ils m'ont giflé au visage. Je devais

 11   rédiger des déclarations, et j'étais menotté à une table. Ils me donnaient

 12   un morceau de papier et je devais écrire avec l'autre main. Et ils me

 13   contraignaient, entre autres, à écrire que j'étais le fondateur de

 14   l'hôpital de guerre d'Ilok, ce que j'ai dû faire sous la contrainte. Et

 15   lorsque cela était terminé, je devais rédiger la même chose, je devais dire

 16   que le Dr Tomo Grgic avait créé cet hôpital, même si cet hôpital n'existait

 17   pas puisqu'il n'y avait pas les conditions nécessaires pour créer cet

 18   hôpital.

 19   Q.  Monsieur Loncar, vous venez de dire que vous avez été emmené quatre,

 20   cinq ou six fois de l'hôpital où vous travailliez. Combien de fois vous a-

 21   t-on emmené pour être interrogé dans le bâtiment du SUP ?

 22   R.  Eh bien, tous les deux ou trois jours environ, ils m'emmenaient là.

 23   Q.  Veuillez nous dire quel a été le jour où on vous a emmené au -- quand y

 24   a-t-il eu votre dernier interrogatoire au SUP ?

 25   R.  D'après mon souvenir, c'était vers le 4 ou le 5 ou le 6 novembre 1991.

 26   Je ne connais pas la date exacte, étant donné que je ne m'en souviens plus,

 27   de la dernière fois où j'ai été appelé pour être interrogé.

 28   Q.  Et après cet interrogatoire le 5 novembre 1991, où vous a-t-on emmené ?


Page 8207

  1   R.  Les deux personnes qui étaient là, et je crois qu'il s'agissait des

  2   deux personnes principales qui m'ont interrogé, m'ont menotté. Ils ont

  3   placé mes mains dans mon dos. Et le soir, ils m'ont placé dans une voiture

  4   officielle et nous avons traversé le Danube depuis Novi Sad. Nous avons

  5   donc quitté la ville. Nous sommes arrivés sur la rive Srem du Danube. Ils

  6   ont continué en direction de Beocin et Ilok. Et à un moment donné juste

  7   avant Beocin, parce que j'ai vu le panneau, ils se sont dirigés vers Fruska

  8   Gora, la montagne, la forêt. Je ne savais pas où ils m'emmenaient et

  9   pourquoi ils m'emmenaient, et je crois même qu'ils se sont perdus à un

 10   moment donné, donc ils ont rebroussé chemin sur la route. Et je pensais au

 11   pire à l'époque. Je croyais que nous allions quelque part où ils allaient

 12   en terminer avec moi, mais ils ont poursuivi leur chemin le long des routes

 13   de campagne, et à un moment donné nous sommes arrivés devant un bâtiment où

 14   il y avait des soldats. Donc, d'après cela, j'avais compris qu'ils

 15   m'avaient emmené dans quelque chose qui ressemblait à une caserne.

 16   Q.  Quelles forces armées étaient responsables de la caserne, de l'endroit

 17   où on vous avait emmené ?

 18   R.  Ce que j'ai vu, c'est qu'il s'agissait de la police militaire. Il y

 19   avait trois commandants qui étaient là ainsi qu'un lieutenant. D'après ce

 20   qui a suivi, je me suis rendu compte, étant donné que j'avais servi dans

 21   l'ancienne JNA et que je savais un certain nombre de choses, qu'il

 22   s'agissait des organes de sécurité, les organes de sécurité militaire,

 23   j'entends.

 24   Q.  Et est-ce que vous connaissez le nom de l'endroit où on vous a emmené ?

 25   R.  Cet endroit s'appelle Paragovo. C'est à Fruska Gora.

 26   Q.  Et où vous a-t-on détenu à Paragovo ?

 27   R.  Ils m'ont emmené dans le bâtiment principal, et ensuite il y avait un

 28   escalier qui descendait, et les gardes m'ont emmené dans le sous-sol.


Page 8208

  1   Celui-ci était de forme ovale, et il y avait des barreaux en acier. Il y

  2   avait déjà des gens à l'intérieur, il y avait des personnes en civil qui

  3   étaient détenues. Il y avait des planches. Et ils m'ont jeté à l'intérieur,

  4   et je suis resté là jusqu'au matin, ou plutôt, je suis resté là pendant les

  5   trois prochains jours.

  6   Q.  Vous venez de dire qu'il y avait des personnes qui étaient là déjà qui

  7   étaient en civil et qui étaient détenues. Combien de personnes étaient déjà

  8   là au moment où vous êtes arrivé à Paragovo ?

  9   R.  D'après mes estimations, il y avait plus de dix personnes. Je sais que

 10   c'était assez encombré. Nous devions nous coucher sur ces planches, et nous

 11   étions à l'étroit.

 12   Q.  Comment les gardes et les autres prisonniers vous ont-ils traité à

 13   Paragovo ?

 14   R.  Pendant les trois jours, quotidiennement, quasiment toutes les heures,

 15   ils nous forçaient à nous lever. Nous devions mettre nos bras et nos mains

 16   entre les barreaux et ils nous frappaient les mains. Et ensuite, pendant la

 17   nuit, chaque heure ou toutes les deux heures, ils venaient nous réveiller

 18   et nous obligeaient à nous lever. Ils ne nous permettaient pas de dormir.

 19   Et quelquefois, il y avait quelqu'un qu'ils faisaient sortir parce qu'il y

 20   avait un petit espace entre les barreaux, et les gardes avaient l'habitude

 21   à ce moment-là de frapper cette personne qui se trouvait dans cet espace

 22   étroit.

 23   Q.  Alors, avez-vous été interrogé lorsque vous étiez détenu à Paragovo ?

 24   R.  Oui. Deux commandants m'ont interrogé. Je connais leur grade car ils

 25   portaient un uniforme, et comme je vous l'ai dit, je connais ces grades

 26   parce que j'ai servi dans la JNA. Donc je savais que leur grade était le

 27   grade de commandant. Encore une fois, deux séries de questions m'ont été

 28   posées, la première série portant sur Ilok, et la seconde, mes prétendues


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  1   connaissances à Novi Sad, connaissances ou contacts. J'ai, entre autres,

  2   été interrogé également par un lieutenant. Etant donné que c'était le seul

  3   qui ne m'a pas frappé, à un moment donné je lui ai posé la question, je lui

  4   ai dit : "Pourquoi ne m'emmenez-vous pas devant un tribunal si je suis

  5   coupable de quelque chose ?" Et il m'a rétorqué : "Nous n'avons pas

  6   d'éléments permettant de vous poursuivre, mais vous pouvez choisir le camp

  7   dans lequel vous souhaitez être envoyé, en Serbie ou dans la Région

  8   autonome de Krajina." Et j'ai répondu en disant que je travaillais et que

  9   je vivais à Novi Sad et que si nous en venions à cela, eh bien, je souhaite

 10   être envoyé en Serbie.

 11   Le troisième jour de mon séjour à Paragovo, un troisième commandant est

 12   venu me voir. Il m'a dit qu'il avait recherché la maison de ma famille. Il

 13   a crié, il m'a insulté, il a été extrêmement impoli, mais il ne m'a donné

 14   aucune information et il n'a rien pu trouver qui aurait pu me compromettre

 15   de quelque manière que ce soit.

 16   Q.  Monsieur Loncar, vous venez de nous dire qu'il y avait trois

 17   commandants à Paragovo qui vous ont, tous trois, interrogé. A quelle unité

 18   particulière ces commandants appartenaient-ils, si vous le savez ?

 19   R.  D'après les questions qu'ils m'ont posées et de la manière dont ceci

 20   s'est passé, je suppose que ces trois hommes étaient rattachés au service

 21   de la JNA qui s'appelle le service du contre-renseignement, ou KOS, qui en

 22   est l'abréviation.

 23   Q.  Docteur, Monsieur Loncar, vous venez de nous dire que vous avez été

 24   interrogé également par un lieutenant et que c'est le seul qui ne vous a

 25   pas frappé. Est-ce que vous dites donc que vous avez été frappé par les

 26   commandants qui étaient à Paragovo ?

 27   R.  Oui, ils m'ont giflé.

 28   Q.  Et vous avez également dit un peu plus tôt que vous avez passé trois


Page 8210

  1   jours à Paragovo. Où avez-vous été transféré après cela, après Paragovo ?

  2   R.  Un jour, c'était le troisième jour, me semble-t-il, c'était dans

  3   l'après-midi, et avec un ou deux autres hommes, ils m'ont placé dans un

  4   véhicule de la police militaire qui arborait l'insigne VP, qui signifie

  5   police militaire, "Vojna Policija". Nous étions assis à l'intérieur, mais

  6   on ne pouvait rien voir à l'extérieur parce qu'il y avait des vitres

  7   teintées. Et ils nous ont conduits pendant une ou deux heures, d'après mes

  8   estimations. De temps en temps, un soldat ouvrait tout simplement une

  9   petite fenêtre et nous regardait au travers de la vitre pour vérifier que

 10   nous étions bien là, et c'est tout. Après une ou deux heures, j'ai senti

 11   que nous étions sur une route non goudronnée, d'après la manière dont le

 12   véhicule se comportait. Et après un certain temps, nous étions arrivés à

 13   notre destination et la voiture s'est arrêtée.

 14   Q.  Vous avez dit :

 15   "On s'est arrêté à un point de destination."

 16   Où est-ce que vous vous êtes arrêtés ?

 17   R.  Je ne savais pas où on était à ce moment-là. Lorsque ce véhicule s'est

 18   arrêté, j'ai entendu à l'extérieur des voix de personnes, et une voix

 19   demandait : "Est-ce qu'ils sont attachés ?" Et à ce moment-là, la porte de

 20   cette fourgonnette s'est ouverte, et nous, on est sortis. Sur le coup, je

 21   vois une scène qui était frappante. J'ai vu ça dans des films ou j'ai pu

 22   lire ce genre de chose. Il y avait des réflecteurs d'allumés, il faisait

 23   nuit. On entendait des aboiements de chiens qui se trouvaient entre les

 24   fils et qui sautaient dessus mais qui ne pouvaient pas sortir. On avait une

 25   étable devant, et de côté il y avait une haie d'hommes, de soldats. Et nous

 26   sommes sortis parmi eux. Et à ce moment-là, ils ont commencé à nous battre,

 27   mais avec énormément de coups, et on a compris qu'il ne fallait pas tomber.

 28   Il fallait se relever et aller le plus vite possible. Parce qu'à terre, on


Page 8211

  1   risquait de se faire frapper à la tête, ce qui risquait de nous tuer. Et

  2   après tous ces coups et ces trébuchements, on est entrés à l'intérieur par

  3   cette haie d'hommes, et ils étaient cinq ou six de chaque côté jusqu'à

  4   l'entrée de l'étable.

  5   Q.  Et comment s'appelait cette étable où vous êtes arrivé et que vous

  6   venez de décrire ?

  7   R.  Ça, c'est Begejci. Le camp de Begejci.

  8   Q.  Vous venez de nous dire que vous étiez passé par une haie de soldats de

  9   part et d'autre. Combien de soldats y avait-il dans cette haie d'hommes ?

 10   R.  D'après mes estimations, pour autant qu'estimer on peut le faire dans

 11   des moments pareils, mais ils étaient quelque chose à plus ou moins une

 12   dizaine. C'est difficile de le dire.

 13   Q.  Vous nous avez dit qu'ils vous ont battus sauvagement.

 14   Comment vous ont-ils frappés ?

 15   R.  Avec des coups de poing, des coups de pied, des bâtons, ce qu'ils

 16   avaient à portée de main.

 17   Heureusement, ils n'avaient pas d'armes à canon long sur eux, ils n'avaient

 18   que des pistolets. Ils n'ont pas sorti leurs pistolets. Ils nous ont tapé

 19   dessus avec des matraques et nous ont asséné des coups de poing et des

 20   coups de pied. Et ils avaient des bottes sur leurs pieds.

 21   Q.  Comment vous sentiez-vous lorsque vous êtes arrivé à Begejci après ces

 22   tabassages ?

 23   R.  Eh bien, j'étais stupéfait. C'est une chose que je n'ai jamais vue de

 24   tout mon vivant. Et ça m'est resté comme si ça avait été un film. A ce

 25   moment-là, ça me paraissait surréaliste. D'abord, cette étable où l'on nous

 26   a fait entrer, il y avait une double haie de fil de fer avec en haut du

 27   barbelé, ça faisait 2 mètres, 2,5 mètres de haut, avec des miradors et des

 28   gardiens. Entre les deux rangées deux rangées de clôtures en fil de fer, il


Page 8212

  1   y avait des bergers allemands qui aboyaient beaucoup, parce qu'eux aussi,

  2   ils étaient perturbés. Et ce que je me suis dit : Mon Dieu, mais c'est un

  3   camp de concentration.

  4   Q.  Docteur Loncar, j'aimerais à présent vous montrer un document.

  5   Mme DENNEHY : [interprétation] Et à ce titre, j'aimerais qu'on montre au

  6   témoin l'intercalaire 18 dans le classeur donné aux Juges. C'est la pièce

  7   65 ter 6490. Page 1.

  8   Q.  Docteur Loncar, est-ce que vous reconnaissez ce document ?

  9   R.  Oui, c'est un croquis que j'ai dessiné de mémoire concernant ce camp de

 10   Begejci.

 11   Q.  Reconnaissez-vous la signature sur ce document ?

 12   R.  Oui, c'est la mienne.

 13   Q.  Vous avez décrit une partie du camp à l'intention des Juges. Vous avez

 14   dit qu'il y avait une double clôture en fil et qu'il y avait des chiens.

 15   Est-ce que vous pouvez décrire aux Juges de la Chambre de quoi avait l'air

 16   la disposition des bâtiments dans le camp. Vous pouvez vous servir du

 17   schéma que vous avez sur l'écran, et vous avez la possibilité de vous

 18   référer à des lettres A, B, C, et cetera.

 19   R.  Ecoutez, moi, je vais prendre la liberté de vous parler des lettres qui

 20   sont inscrites. Au A, c'est le bâtiment du commandement. Pendant les

 21   journées de détention, j'ai compris que le A c'était le commandement du

 22   camp. Au B se trouvaient l'entrée principale du camp et cette double rangée

 23   de clôture en fil de fer. Je dirais que d'abord tout le camp était cerné de

 24   fil de fer et il y avait des gardiens aussi. Le petit C, c'est ce petit

 25   bâtiment que je n'ai jamais eu l'occasion de voir. Enfin, je ne sais pas de

 26   quoi il s'agissait, je ne savais pas ce que c'était. Et là, il y a, au D,

 27   la clôture extérieure. F, c'est l'entrée de l'étable là où étaient placés

 28   les détenus. E, ici, c'est cette double rangée de fil barbelé, et cette


Page 8213

  1   étable était entourée de clôture en fil de fer. Puis, au G, il y a les

  2   réflecteurs qui éclairaient tout le complexe de l'étable ou du camp. Le H,

  3   c'est des miradors, des postes de gardiennage. Ici, au I, de côté, on avait

  4   creusé des trous improvisés, et on avait mis des feuilles ou des espèces de

  5   films plastiques, c'était les vécés. Et il y avait un seau où l'on mettait

  6   de l'eau avec un verre, et tous les détenus pouvaient aller prendre de

  7   l'eau. Et il y avait une espèce d'auvent au niveau de la lettre L.

  8   Q.  Docteur Loncar, au vu du document que vous avez sous les yeux, que vous

  9   ont dit les gardiens au sujet de cette clôture que vous avez annotée par

 10   une lettre D ?

 11   R.  Ils nous ont menacés. Ils nous ont dit : N'envisagez pas de fuir parce

 12   que c'est sous haute tension. Nous n'avons pas eu l'occasion et on n'a pas

 13   osé non plus aller jusqu'à cette clôture en fil de fer.

 14   Q.  Où a-t-on gardé les prisonniers ? Là, vous pouvez vous servir une fois

 15   de plus de ce document.

 16   R.  C'est sous la lettre K. C'est le bâtiment de l'étable. C'est une

 17   construction reconnaissable, elle datait de l'Empire austro-hongrois.

 18   C'était une ferme abandonnée à l'époque, et à l'intérieur - c'est un

 19   bâtiment qui faisait quelque 50 mètres de long et 10 mètres de large plus

 20   ou moins - il y avait une porte qui ne fermait jamais. En bas, il y avait

 21   du béton, et sur les côtés -- enfin, on sait que c'était une étable parce

 22   qu'il y avait des auges pour faire manger de bétail.

 23   Q.  Vous nous avez dit auparavant qu'il y avait des chiens, des bergers

 24   allemands, qui aboyaient terriblement. Par où patrouillaient ces chiens ?

 25   R.  Ils allaient et venaient dans la partie entre les doubles rangées de

 26   clôture. C'est dans cette partie-là que se trouvaient les chiens. Il y

 27   avait cette double rangée de fil, et autour du bâtiment du camp, c'est-à-

 28   dire de l'étable, c'était partout de la clôture.


Page 8214

  1   Q.  Vous nous avez dit que le H indiquait ces miradors avec des nids de

  2   mitrailleuses. A quelle hauteur cela était-il placé ?

  3   R.  J'ai estimé que c'était à 2,5 mètres ou trois mètres de hauteur qu'on

  4   les avait juchés.

  5   Q.  Combien de prisonniers y avait-il dans le camp que vous avez indiqué

  6   avec la lette K ?

  7   R.  Bien, 500 à 600 au final. Je sais que c'est ce chiffre-là parce que le

  8   soir on nous interpellait et on devait répondre par le numéro qui était

  9   interpellé, 1, 2, 3, et cetera. Je crois qu'ils en avaient énumérés 500 et

 10   quelques. Donc ma réponse est celle d'affirmer que les détenus étaient au

 11   nombre de 500 à 600 à l'intérieur de cette étable.

 12   Q.  Et y avait-il des femmes, des prisonnières ?

 13   R.  Oui. Selon moi, elles étaient 25 à 30, ces femmes.

 14   Q.  Et savez-vous nous dire où se trouvait le directeur du camp ou le

 15   commandant ?

 16   R.  C'est au niveau de la lettre A. C'est là que se trouvait le

 17   commandement du camp, dans cette bâtisse, en haut.

 18   Q.  Et savez-vous nous donner le nom de ce commandant du camp ?

 19   R.  Oui. Il s'est présenté lui-même, il a dit qu'il s'appelait Miroslav

 20   Zivanovic et qu'il était lieutenant-colonel.

 21   Q.  Un peu plus tôt, tout à l'heure, vous nous avez décrit une haie

 22   d'hommes d'une dizaine de soldats. Combien de soldats et de gardiens y

 23   avait-il au total dans le camp ?

 24   R.  Nos déplacements étaient limités et on devait garder les mains dans le

 25   dos et la tête baissée, alors si je devais faire une estimation, je dirais

 26   que dans ce complexe il y avait entre 30 et 50 gardiens et officiers

 27   confondus.

 28   Q.  Et savez-vous nous dire de quelle unité faisaient partie ces gardiens


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  1   et ces officiers ?

  2   R.  Pendant ma détention au camp, on nous a emmenés pour des

  3   interrogatoires, et j'ai compris que les officiers étaient des gens du

  4   contre-renseignement, chargés de la sécurité, et j'ai jugé de cela par les

  5   questions qui nous ont été posées. Certains gardiens portaient des

  6   insignes, d'autres non. Ils étaient membres de la police militaire de la

  7   JNA.

  8   Mme DENNEHY : [interprétation] J'aimerais qu'on nous montre maintenant la

  9   deuxième page de ce document, le document 6490 de la liste 65 ter.

 10   Q.  Docteur Loncar, vous allez voir un autre document. Que voyez-vous ici,

 11   dites-le aux Juges de la Chambre ?

 12   R.  J'ai dressé un croquis ici pour ce qui est du complexe en tant que tel

 13   du camp où étaient placés les détenus. Ici, vous avez cette double rangée

 14   de clôture en fil, puis les miradors avec les réflecteurs, et ici au

 15   milieu, ce bâtiment central, l'étable, et ici la porte qui n'était jamais

 16   fermée. Et au tout début de l'entrée, il y avait là une petite table et une

 17   chaise, et c'est là qu'un officier consignait nos noms lorsque les gardiens

 18   nous faisaient entrer. Et on nous alignait. Quand j'ai été amené au camp de

 19   Begejci, je m'étais trouvé à peu près ici. Tout ça, c'était plein. La

 20   quasi-moitié du camp était déjà pleine lorsque je suis arrivé. Les petits

 21   traits, ça montre comment on nous avait alignés, comment nous étions

 22   couchés dans ce camp. On était comme des sardines dans une conserve, sur un

 23   peu de paille, à même le sol en béton.

 24   Mme DENNEHY : [interprétation] Puis-je demander à ce que le 65 ter 6490

 25   soit versé au dossier.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ce sera versé au dossier. Une

 27   référence, s'il vous plaît.

 28   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pièce P2980, Messieurs les Juges.


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  1   Mme DENNEHY : [interprétation]

  2   Q.  Docteur Loncar, vous venez de dire aux Juges de la Chambre que vous

  3   étiez comme des sardines dans une boîte de conserve lorsque vous étiez dans

  4   cette étable. Comment ces prisonniers ont-ils été contraints à s'installer,

  5   est-ce que vous pouvez nous le décrire ? comment vous forçait-on de vous

  6   allonger ?

  7   R.  Une fois que ce camp a été rempli, lorsque c'était plein, les gardiens

  8   disaient qu'on attendrait encore des Oustachi une fois Vukovar tombée. Et

  9   on a commencé à acheminer là par autocar des gens de Vukovar. Cette rangée

 10   s'est remplie aussi, enfin, la rangée qui est plus près du mur d'en face.

 11   Et là, l'espace est devenu très étroit. On pouvait dormir la nuit rien que

 12   sur le flanc. Et lorsque les gardiens entraient, il fallait que nous nous

 13   mettions à plat ventre et que nous baissions la tête, que nous la placions

 14   entre les bras afin de ne pas voir qui interpelle les gens qui sont sortis

 15   à l'extérieur.

 16   Q.  Docteur Loncar, j'aimerais maintenant vous montrer un autre document.

 17   Vous allez le voir sous peu.

 18   Mme DENNEHY : [interprétation] Je voudrais qu'on nous affiche

 19   l'intercalaire 12. Pièce 6462 de la liste 65 ter.

 20   Q.  Docteur Loncar, est-ce que vous reconnaissez le document que vous avez

 21   devant vous ?

 22   R.  Lors de l'arrivée au camp, on nous a dépossédés de tous les objets

 23   qu'on avait sur nous. Ça, c'est un papier où ils ont fait un listing des

 24   objets qu'ils ont trouvés sur moi. Il y avait ce montant d'argent, ma pièce

 25   d'identité, permis de conduire, carte grise - parce qu'auparavant on

 26   m'avait pris ma voiture - ma montre et des bons de valeur en dinars. Et la

 27   signature, c'est celle de l'officier qui a pris ceci. Je n'étais pas une

 28   exception. Tous ceux qui venaient dans cette étable, voire dans ce camp, se


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  1   voyaient dépossédés de tout objet. Entre autres, il y avait pas mal de

  2   personnes âgées souffrant de maladies chroniques et qui étaient originaires

  3   de villages avoisinants, entre Ilok et Vukovar, ces gens étaient venus avec

  4   des sacs en plastique avec des médicaments, et tout ceci leur a été

  5   confisqué. On ne pouvait rien porter à l'intérieur du camp.

  6   Q.  Docteur Loncar, veuillez tirer quelque chose au clair : les objets que

  7   vous venez de nous énumérer, l'argent, votre permis de conduire, carte

  8   grise, et cetera, ça se trouve être mentionné sur le document que vous avez

  9   sous les yeux, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui.

 11   Mme DENNEHY : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais demander

 12   à ce que cette pièce 65 ter 6462 de la liste 65 ter soit versée au dossier.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ce sera versé au dossier et ça

 14   recevra une cote.

 15   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P2981, Messieurs

 16   les Juges.

 17   Mme DENNEHY : [interprétation]

 18   Q.  Docteur Loncar, je voudrais maintenant vous poser des questions au

 19   sujet des conditions qui prévalaient à l'intérieur du camp. Vous nous en

 20   avez déjà parlé, mais j'aimerais que vous nous en disiez plus. Lorsque vous

 21   êtes arrivé en novembre 1991 à Begejci, quel temps faisait-il à l'extérieur

 22   ?

 23   R.  Eh bien, c'est notoirement connu de savoir qu'en Vojvodine, à cette

 24   période de l'année, il faut plutôt froid. Et à cette époque, il y a un vent

 25   particulier qu'on appelle Kosava. La température était tout le temps en

 26   dessous de 0. Et ça allait jusqu'à moins 10 à l'extérieur. C'est une

 27   estimation approximative. Parce que nous ne pouvions pas le vérifier, cela.

 28   Il faisait terriblement froid. En plus, cette porte n'était jamais fermée.


Page 8218

  1   Tout ce qu'on pouvait faire, c'était se réchauffer les uns les autres.

  2   Parce qu'une fois l'étable pleine, nous étions entre 500 et 600 à

  3   l'intérieur, et nous étions à l'étroit. Nous étions littéralement allongés

  4   l'un à côté de l'autre et nous ne pouvions que nous asseoir. Nous n'avions

  5   pas le droit d'aller et venir, exception faite de la demi-heure qu'on nous

  6   accordait à l'intérieur de cette double clôture de fil de fer pour revenir

  7   par la suite à l'intérieur. Alors, exception faite de cette température,

  8   pour ce qui est des conditions d'hébergement, jusqu'à l'arrivée de la

  9   Croix-Rouge, nous n'avions que de la paille. Lorsque la Croix-Rouge est

 10   arrivée, il y a eu des objections de formulées, et on nous a donné à chacun

 11   une couverture, mais ce n'était pas suffisant non plus parce qu'en bas il y

 12   avait du béton. Et dehors, il faisait en dessous de zéro et la porte était

 13   constamment ouverte. D'autre part, les conditions hygiéniques étaient

 14   terriblement mauvaises. Nous devions demander l'autorisation d'aller

 15   jusqu'à ces toilettes improvisées derrière l'étable, et à chaque fois on

 16   nous assénait des coups. Ce qui fait que les gens se retenaient pendant

 17   plusieurs jours de peur de recevoir des coups lorsqu'ils partaient aux

 18   toilettes.

 19   Q.  Merci, Docteur Loncar. Je voudrais maintenant que nous revenions vers

 20   une chose que vous nous avez dite à l'instant. Vous avez parlé de moins 10

 21   à l'extérieur. Mais est-ce que l'étable était chauffée pour les prisonniers

 22   ?

 23   R.  Non. Cette bâtisse n'avait aucun chauffage, ni poêle à bois, ni autre

 24   chose pour réchauffer. Et ce qui n'améliorait pas les choses, il y avait

 25   des petites fenêtres où il n'y avait pas de vitres, ce qui fait qu'il y

 26   avait des courants d'air le jour et la nuit, ce qui fait que le froid

 27   entrait par où il voulait. Et ceux qui étaient à côté de la porte, eux, ils

 28   dormaient presque à ciel ouvert pour ce qui est de la température.


Page 8219

  1   Q.  Vous nous avez mentionné aussi les conditions hygiéniques, vous avez

  2   dit que c'était terrible. Alors, quelles installations sanitaires y avait-

  3   il eues dans ce camp ?

  4   R.  Avant d'arriver, les détenus étaient censés creuser plusieurs trous, on

  5   avait mis des films en plastique autour, et c'étaient des toilettes

  6   improvisées. C'est là qu'on allait faire nos besoins. Et il n'y avait pas

  7   la possibilité de se laver les mains. Il n'y avait pas d'eau, exception

  8   faite de l'eau à boire, qui nous était limitée elle aussi. Ce qui fait que

  9   nous étions plutôt en état négligé. On nous avait dépossédé de tous nos

 10   biens. Tout ce qui pouvait nous servir pour un rasage n'était plus à nous.

 11   Et à un moment donné, il y avait un détenu qui était coiffeur avant la

 12   guerre, et lui, avec un rasoir, se chargeait de nous raser tous, de nous

 13   couper les cheveux. Les cheveux avaient poussé pas mal et il y avait aussi

 14   des parasites qui avaient fait leur apparition. On avait des poux. Et

 15   alors, dans ces conditions, les poux se sont multipliés. Et il y avait des

 16   problèmes au niveau des intestins parce qu'après les toilettes, vous ne

 17   pouviez pas vous laver les mains ni rien.

 18   Q.  Docteur Loncar, vous venez de dire :

 19   "Il n'y avait pas d'eau, si ce n'est des petites quantités d'eau

 20   potable…"

 21   Sur le document que je vous ai montré tout à l'heure, vous nous aviez

 22   indiqué que l'eau se trouvait à l'endroit indiqué par un J. Est-ce que vous

 23   pouvez décrire les quantités d'eau qui avaient été mises à disposition pour

 24   les quelque 500 prisonniers dans le camp ?

 25   R.  C'était un seau d'eau que l'on recevait quotidiennement. Bon, le seau

 26   était assez grand. Disons qu'on pouvait y mettre 10 à 20 litres d'eau. Et

 27   il y avait un verre, et on buvait tous avec ce verre-là.

 28   Q.  Combien de verres y avait-il pour ces 500 prisonniers ?


Page 8220

  1   R.  D'après mes souvenirs, je sais qu'il y en avait qu'un seul. Ceux qui

  2   arrivaient jusqu'au seau se voyaient remettre entre les mains ce verre-là

  3   pour boire.

  4   Q.  Vous nous avez dit un peu plus tôt que du fait des mauvaises conditions

  5   d'hygiène, certains prisonniers avaient des poux. Quelles autres maladies

  6   étaient courantes parmi les prisonniers du camp ?

  7   R.  Alors, outre les poux, les prisonniers se plaignaient souvent de

  8   problèmes intestinaux, de diarrhée notamment. Je suppose que ces problèmes

  9   étaient provoqués par les mauvaises conditions d'hygiène.

 10   Q.  Est-ce que certains détenus du camp ont reçu d'ordre d'effectuer des

 11   travaux forcés ?

 12   R.  Oui. Ils avaient en fait choisi un groupe de prisonniers qui sortaient

 13   du camp pour dégager ou nettoyer un bois, un endroit où il y avait de la

 14   broussaille. Cela se passait tous les jours. Nous n'avions pas le droit de

 15   nous parler les uns les autres, mais nous entendions certains

 16   renseignements. Avant de quitter le camp, ils devaient dans un premier

 17   temps couper un bâton que les gardes utilisaient pour les guider pendant

 18   ces travaux forcés. Puis-je continuer ?

 19   Qui plus est, ils disaient également qu'il y avait des civils qui venaient

 20   des villages environnants ou des passants, et ils montraient les

 21   prisonniers et ils disaient : "Voilà, ces gens, ce sont des Oustachi."

 22   Puis, il y avait certains des civils qui les rouaient de coups.

 23   Q.  Je vais maintenant passer aux interrogatoires qui ont eu lieu dans ce

 24   camp. Est-ce que vous, vous avez jamais subi un interrogatoire ?

 25   R.  Oui. Lorsque je me suis trouvé dans le camp, j'ai été interrogé cinq ou

 26   six fois par des officiers, et je dois ajouter que la police militaire du

 27   SUP provincial est venue au moins une fois. Moi, on m'a conduit pour que je

 28   sois interrogé cinq à six fois.


Page 8221

  1   Q.  Et où est-ce que vous avez été interrogé ? Dans quel bâtiment ?

  2   R.  Les interrogatoires se passaient dans le bâtiment du commandement du

  3   camp. Il y avait certaines salles où il y avait en règle générale un

  4   officier avec un garde, un soldat, et nous devions répondre à leurs

  5   questions. Ça, c'est une chose. Et puis, en outre, nous devions rédiger des

  6   déclarations. En général, on nous forçait à écrire ces déclarations. Les

  7   gens écrivaient n'importe quoi dans ces déclarations parce qu'ils avaient

  8   été roués de coups ou torturés.

  9   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent au témoin de répéter ce qu'il

 10   vient de dire.

 11   Mme DENNEHY : [interprétation]

 12   Q.  Docteur Loncar, les interprètes vous demandent de répéter la phrase qui

 13   suit la phrase où vous aviez dit :

 14   "Les gens écrivaient n'importe quoi dans ces déclarations parce qu'ils

 15   avaient été torturés ou roués de coups."

 16   Ensuite, ils n'ont pas saisi vos propos.

 17   R.  Oui. En fait, ces officiers leur indiquaient ce qu'il fallait écrire.

 18   Ils leur donnaient des ordres à propos de ce qu'il fallait écrire. Moi,

 19   j'avais dû écrire que j'avais été -- que j'avais dirigé un hôpital de

 20   guerre qui n'a jamais existé. Et sinon, ils n'arrêtaient pas de rouer de

 21   coups la personne tant qu'elle n'écrivait pas quelque chose.

 22   Q.  Vous nous avez dit qu'il y avait en règle générale un officier et un

 23   soldat qui étaient présents. A quelles unités appartenaient ces officiers ?

 24   R.  J'ai été en mesure de conclure d'après les questions qui m'étaient

 25   posées que les personnes qui nous interrogeaient n'appartenaient pas à la

 26   police militaire, mais il s'agissait d'officiers du KOS. C'est eux qui nous

 27   interrogeaient. C'est eux qui nous ordonnaient ce que nous devions écrire.

 28   Q.  Vous venez de dire :


Page 8222

  1   "Sinon, tant que la personne n'avait pas écrit ce qu'ils voulaient qu'elle

  2   écrive, ils ne cessaient de la rouer de coups."

  3   Est-ce que vous, vous avez été roué de coups pendant ces interrogatoires ?

  4   R.  Oui. Voilà comment se passaient les interrogatoires. Alors, dans la

  5   pièce en question, nous étions roués de coups. C'était en règle générale le

  6   garde qui se trouvait souvent déjà dans la pièce, et lorsque l'officier lui

  7   faisait un signe, il nous rouait de coups. Et si cela ne se passait pas à

  8   ce moment-là, lorsque nous regagnions l'étable ou la grange, les gardes

  9   continuaient à rouer certaines personnes. Ils jetaient toujours leur dévolu

 10   sur quelqu'un. Et puis, nous avons appris en fait que soit la personne

 11   allait être interrogée le lendemain et qu'elle était rouée de coups le jour

 12   même ou alors la personne avait été interrogée la veille et elle était

 13   rouée de coups après l'interrogatoire. C'était une méthode pour casser les

 14   gens, pour briser leur volonté.

 15   Q.  Et quelles sont les blessures que vous, vous avez eues lors des coups

 16   qui vous ont été infligés pendant les interrogatoires ?

 17   R.  J'ai eu des hématomes, et puis pendant deux jours j'étais absolument

 18   incapable de bouger. Le policier militaire ou le garde m'a frappé si fort

 19   avec son coude dans la partie inférieure des cervicales que j'ai

 20   véritablement eu extrêmement mal. Et pendant des jours, mes mouvements

 21   étaient très, très limités et j'avais énormément de mal à bouger.

 22   Q.  Vous nous avez dit que les interrogatoires avaient lieu dans la pièce

 23   du commandement qui était séparée de la grange. Avant d'être conduit aux

 24   interrogatoires, est-ce que vous pouvez décrire l'atmosphère qu'il y avait

 25   dans cette étable ou grange parmi les prisonniers lorsque les gardes

 26   venaient choisir les prisonniers qui allaient être interrogés ?

 27   R.  La règle était ainsi : nous devions tous nous allonger à plat ventre

 28   avec nos mains placés sous nos têtes. Et étant donné que nous savions que


Page 8223

  1   quelqu'un allait être sorti, on entendait pas une mouche voler. Moi,

  2   j'avais l'impression, en fait, que j'entendais le bâtiment de mon cœur. Et

  3   le seul bruit que l'on entendait, c'était le bruit des bottes des soldats

  4   qui marchaient sur le béton, et vous pouviez ainsi savoir si quelqu'un

  5   s'approchait de vous ou s'éloignait de vous. Et, bien entendu, de ce fait,

  6   vous aviez plus ou moins peur. Parfois, lorsqu'ils vous donnaient des coups

  7   de pied au niveau des pieds, ça, c'était le signe que vous étiez censés

  8   vous lever. Et parfois, ils rouaient de coups les gens dans l'étable, mais

  9   nous n'avions pas le droit de regarder. Et à partir de cet endroit-là,

 10   c'est de là qu'ils conduisaient les gens vers le bâtiment du commandement.

 11   Q.  Vous venez de nous dire que parfois ils rouaient de coups les gens qui

 12   se trouvaient dans l'étable mais que personne n'avait pas de regarder.

 13   Comment est-ce que vous saviez que ces personnes étaient battues ?

 14   R.  Parce que, comme je vous l'ai dit, il régnait un silence de mort. Les

 15   500 prisonniers avaient si peur que personne n'osait bouger. C'était

 16   vraiment un silence de mort qui régnait, et la seule chose que l'on

 17   entendait, le seul bruit, c'était le bruit des coups. Donc il était facile

 18   de savoir que quelqu'un était en train d'être battu, roué de coups. Et,

 19   bien entendu, vous pouviez entendre le gémissement de la personne qu'on

 20   rouait de coups.

 21   Q.  Docteur Loncar, je vais vous montrer un autre document. Ce document

 22   sera affiché sur votre écran.

 23   Mme DENNEHY : [interprétation] Je souhaiterais que le document qui figure à

 24   l'onglet 4, le document 2916.3, vous soit montré.

 25   Q.  Docteur Loncar, est-ce que vous reconnaissez ce document sur votre

 26   écran ?

 27   R.  Oui. Il s'agit d'une liste des prisonniers au camp de Begejci.

 28   Q.  Est-ce que vous reconnaissez la signature qui figure sur la première


Page 8224

  1   page de ce document ?

  2   R.  Oui, c'est ma signature. C'est moi qui ai signé cette liste lorsque je

  3   l'ai examinée.

  4   Mme DENNEHY : [interprétation] Est-ce que nous pouvons afficher la deuxième

  5   page de ce document.

  6   Q.  Docteur Loncar, nous voyons que deux des noms sont encerclés. Est-ce

  7   que vous pourriez nous expliquer ce que signifie les cercles qui entourent

  8   ces deux noms de cette liste ?

  9   R.  Cela signifie que j'ai rencontré ces personnes au camp. Ce sont des

 10   gens d'Ilok. C'était des gens que je connaissais avant. Il s'agissait de

 11   personnes âgées.

 12   Mme DENNEHY : [interprétation] Est-ce que nous pourrions demander

 13   l'affichage de la page numéro 5 de ce document, et je demanderais qu'elle

 14   ne soit pas diffusée à l'extérieur du prétoire.

 15   Q.  Docteur Loncar, le nom de Krunoslav Farkas est entouré ce document.

 16   Qu'est-il arrivé à M. Farkas ?

 17   R.  J'aimerais dans un premier temps vous dire que je connaissais M.

 18   Farkas, je le connaissais depuis Ilok. Lors de notre détention, il a été

 19   tellement roué de coups qu'il a été plongé dans un delirium post-

 20   traumatique, comme cela s'appelle. En fait, il a tout à fait perdu le sens

 21   de l'orientation, perdu ses repères. A un moment donné, il était lié avec

 22   des fils de fer et il a dit : "Maintenant, je rentre à la maison." Il avait

 23   tout à fait perdu le sens de la réalité. Alors, je ne peux pas vous dire

 24   exactement quand, mais un ou deux ans après avoir fait l'objet d'un

 25   échange, il est décédé. Et je pense que cela est la conséquence des

 26   tortures qui lui ont été infligées au camp. (expurgé)

 27   (expurgé)

 28   (expurgé)

 


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  5   [Audience à huis clos partiel]

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 21   [Audience publique]

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 23   Mme DENNEHY : [interprétation]

 24   Q.  Docteur Loncar, vous voyez le nom Zlatko Brajer, c'est un nom qui été

 25   entouré. Est-ce que il s'agit du nom exact de cette personne, est-ce que

 26   vous le savez ?

 27   R.  Oui, même si je dois vous dire qu'il y a plus de 20 ans qui se sont

 28   écoulés, mais toutefois, je m'en souviens parce que j'ai participé à sa

 


Page 8227

  1   réanimation. Alors, il s'appelait Zlatko, ça, j'en suis sûr, son prénom.

  2   Pour ce qui est de son nom de famille, je ne sais pas si c'était Brajer ou

  3   Brajovic, mais c'était lui. C'était un enseignant à la retraite. Et après

  4   l'échange, son épouse m'a contacté à Zagreb et j'ai écrit un certificat

  5   médical pour confirmer qu'il avait bien été tué dans le camp de Begejci

  6   parce qu'il avait été roué de coups.

  7   Pourquoi est-ce que j'ai dû le faire ? Parce qu'un jour, le commandant du

  8   camp, le lieutenant-colonel Zivanovic, m'a donné l'ordre de venir au

  9   bâtiment du commandement, et à l'extérieur, près de la porte, j'ai vu

 10   Zlatko qui gisait par terre. Et au moment où je suis arrivé là, il ne

 11   montrait aucun signe de vie, donc j'ai essayé de le réanimer. J'ai soulevé

 12   les vêtements qui couvraient son tronc, et il était couvert d'hématomes.

 13   Lorsque j'ai essayé de procéder à un massage cardiaque, je me suis rendu

 14   compte que toutes ses côtes avaient été cassées. Il n'y avait pas de

 15   résistance de la part des côtes. Mes mains s'enfonçaient, en fait. Donc

 16   j'ai essayé pendant un petit moment, pendant une minute, de faire ce

 17   message cardiaque, et puis, bon, je n'ai pu que remarquer qu'il était

 18   décédé ensuite.

 19   Q.  Docteur Loncar, vous venez de nous dire que le commandant du camp, le

 20   lieutenant-colonel Zivanovic, vous a donné l'ordre de venir au bâtiment du

 21   commandement. Est-ce que c'était la première fois que vous aviez reçu

 22   l'ordre de la part du commandant du camp de venir au bâtiment du

 23   commandement ?

 24   R.  Il m'a ordonné de le faire à une autre occasion, et c'était pour Zoran

 25   Sipos, pour autant que je me souvienne. On l'avait emmené là l'après-midi,

 26   et ensuite le lieutenant-colonel Zivanovic, le commandant du camp, m'a

 27   appelé pour que j'essaie de le calmer parce qu'il avait été roué de coups

 28   et il était en train de raconter au commandant du camp qu'il avait été


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  1   sauvagement roué de coups au camp de Stajicevo, et donc il avait ensuite

  2   été conduit là. Donc on m'a demandé de voir ce qu'on pourrait lui donner.

  3   Je lui ai dit qu'on devrait lui donner un médicament pour le calmer et puis

  4   qu'on devrait lui donner aussi des analgésiques. Alors, je ne sais pas ce

  5   qui s'est passé par la suite, mais il avait des blessures tout à fait

  6   visibles sur le visage, des hématomes, et il se plaignait. Il avait été

  7   tellement roué de coups qu'il me semblait que pour lui, peu lui importait

  8   que le commandant du camp entende cela ou non. Il était dans un état

  9   d'extrême agitation et il voulait tout simplement parler de ce qu'il venait

 10   de vivre.

 11   Q.  J'aimerais maintenant revenir à M. Zlatko Brajovic dont vous avez

 12   parlé. Lorsque vous avez essayé de le réanimer, où se trouvait à ce moment-

 13   là le commandant du camp ?

 14   R.  A ce moment-là, il était en train d'entrer dans la pièce, et lorsque le

 15   garde m'a conduit là, il était derrière moi dans cette pièce avec la porte

 16   ouverte lorsque Zlatko, lui, gisait par terre.

 17   Q.  Est-ce que vous pouvez décrire quelle était l'apparence de Zlatko

 18   lorsque vous l'avez vu pour la première fois ?

 19   R.  Il avait l'air de quelqu'un qui avait perdu connaissance. Il n'y avait

 20   plus d'activité. Il ne bougeait plus. Donc je me suis approché de lui et

 21   j'ai essayé de le palper, de sentir son pouls, que je n'ai pas trouvé

 22   d'ailleurs, ce qui signifiait que son cœur s'était arrêté de battre. Donc,

 23   ensuite, j'ai placé mon oreille près de son visage pour voir s'il

 24   continuait à respirer et je n'ai rien entendu du tout. Donc, là, j'ai

 25   essayé de le réanimer, et puis c'est là que je me suis rendu compte qu'il

 26   avait les côtes tout cassées, parce que nous avions appris cela lorsque

 27   j'étais étudiant à la faculté de médecine. Donc je sais ce qui se passe

 28   lorsque l'on essaie de réanimer quelqu'un lorsque les côtes sont en bon


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  1   état, et je sais que lorsque vos mains s'enfoncent, cela signifie qu'il n'y

  2   a aucune résistance.

  3   Q.  Docteur Loncar, j'aimerais vous poser une dernière question à propos du

  4   document qui est affiché sur votre écran. Donc vous avez apposé une croix

  5   près de noms qui figurent sur cette liste. Alors, ne donnez pas le nom des

  6   personnes en question, mais j'aimerais savoir à quoi correspond cette croix

  7   ?

  8   R.  Il s'agit des personnes qui se trouvaient avec nous dans le camp et

  9   dont je soupçonnais à l'époque qu'elles étaient victimes de sévices

 10   sexuels. Par la suite, comme je vous l'expliquerai, mes soupçons se sont

 11   avérés exacts, et il s'agissait exactement de cela, de viol.

 12   Mme DENNEHY : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaiterais

 13   demander le versement au dossier de ce document de la liste 65 ter, le

 14   document 6490, sous pli scellé -- excusez-moi, je ne vous ai pas donné le

 15   bon numéro. Il s'agit du document de la liste 65 ter 2916.3. Je demande

 16   qu'il soit versé sous pli scellé. Il existe une version publique expurgée

 17   de ce document, il s'agit du document 2916.4, qui a été saisie dans le

 18   prétoire électronique.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Alors, le premier document.

 20   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le premier document deviendra la pièce

 21   P2982.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Et le deuxième, qui sera également

 23   versé au dossier.

 24   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le deuxième document sera le document

 25   P2983.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

 27   Mme DENNEHY : [interprétation] Monsieur le Président, je remarque l'heure.

 28   Et avant que je ne passe à mon sujet suivant, je pense que nous pouvons


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  1   peut-être en terminer pour aujourd'hui.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, mais vous avez besoin de combien

  3   de temps demain, Madame ?

  4   Mme DENNEHY : [interprétation] Je pense que 45 minutes devraient me

  5   suffire.

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que le reste du volet

  7   d'audience vous suffirait, Monsieur Gosnell ?

  8   M. GOSNELL : [interprétation] Pour le moment, je pense que j'aurai besoin

  9   de 15 à 20 minutes.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 11   Monsieur Loncar, nous allons en terminer pour aujourd'hui. Mais vous n'avez

 12   pas terminé votre déposition de témoin, ce qui signifie que vous êtes

 13   toujours considéré comme témoin; ce qui signifie que vous ne pouvez parler

 14   de votre témoignage à personne, et vous ne pouvez parler à aucune des

 15   parties non plus. Et nous vous attendons demain matin dans ce prétoire à 9

 16   heures. Je vous remercie. M. l'Huissier va vous accompagner hors du

 17   prétoire.

 18   [Le témoin quitte la barre]

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est levée.

 20   --- L'audience est levée à 16 heures 28 et reprendra le vendredi 6

 21   septembre 2013, à 9 heures 00.

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