Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 22 septembre 2014

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour à toutes les personnes à

  6   l'intérieur et à l'extérieur du prétoire.

  7   Je vais demander à la Greffière de citer l'affaire.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Il

  9   s'agit de l'affaire IT-04-75-T, le Procureur contre Goran Hadzic.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vais demander au Procureur de se

 11   présenter.

 12   Mme CLANTON : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Pour le

 13   bureau du Procureur, Sarah Clanton, Douglas Stringer, et notre commis à

 14   l'affaire, Thomas Laugel, et notre interne, Marina Marcikic.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] La Défense.

 16   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Me Zivanovic, pour la Défense de Goran

 17   Hadzic avec Christopher Gosnell, avec Jolana Makraiova, notre assistante

 18   juridique.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. Est-ce que votre prochain

 20   témoin est prêt, Monsieur Gosnell ?

 21   M. GOSNELL : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Oui, en

 22   effet, elle est prête à comparaître.

 23   Le témoin a besoin de s'asseoir souvent. Elle a du mal à se tenir debout.

 24   [Le conseil de la Défense se concerte] 

 25    M. GOSNELL : [interprétation] Est-ce que je peux demander à passer à huis

 26   clos partiel, un instant, s'il vous plaît.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. Huis clos partiel.

 28   Mme LA GREFFIÈRE : [aucune interprétation] 

 


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  1   [Audience à huis clos partiel]

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 12   [Audience publique]

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Vous pouvez faire rentrer le témoin.

 14   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir, Madame le

 16   Témoin.

 17   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 20   Faut-il que je m'approche du micro, faut-il que je me rapproche encore ?

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour, Madame le Témoin. Je vous

 22   remercie d'être venue au Tribunal pour aider le Tribunal.

 23   Tout d'abord, est-ce que vous m'entendez dans une langue que vous comprenez

 24   ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. Pourriez-vous vous présenter,

 27   vous donnez donc votre nom, date de naissance. 

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Karmen Brlic-Jovanovic. Je suis

 


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  1   née le 13 juillet 1948.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Brlic, je vais  vous demander

  3   nous donner lecture de la déclaration solennelle. Par cette déclaration

  4   vous vous engagez à dire la vérité en tant que témoin. Je voudrais vous

  5   rappeler que cette déclaration solennelle que vous allez prononcer vous

  6   expose au risque de peine et poursuite si jamais si les informations que

  7   vous allez donner ne sont pas véridiques.

  8   Je vais vous demander donc de lire le texte de la déclaration solennelle

  9   que je vais vous présenter.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Dois-je me lever ?

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Non.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 13   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 14   LE TÉMOIN : KARMEN BRLIC-JOVANOVIC [Assermentée]

 15   [Le témoin répond par l'interprète]

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci, Madame.

 17   Monsieur Gosnell.

 18   M. GOSNELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   Interrogatoire principal par M. Gosnell : 

 20   Q.  [interprétation] Bonjour, Madame Brlic-Jovanovic.

 21   R.  Bonjour.

 22   M. GOSNELL : [interprétation] Je vais demander à voir le document 1D1167

 23   sur l'écran, c'est un document qui se trouve sur l'intercalaire 3. Moi,

 24   j'ai un exemplaire papier aussi bien pour le témoin que pour vous, Monsieur

 25   le Président.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 27   M. GOSNELL : [interprétation]

 28   Q.  Madame le Témoin, reconnaissez-vous ce document, le document que vous


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  1   voyez sous vos yeux ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Et qu'est-ce que c'est ?

  4   R.  C'est ma déclaration de témoin. Je l'ai faite l'année dernière devant

  5   Mme Aleksandra Andric, et nous nous sommes rendues chez un notaire qui a

  6   apposé son cachet.

  7   Q.  Est-ce que vous connaissez le contenu de cette déclaration ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Est-ce que vous l'avez vue avant de la signer, en entier ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Est-ce que cela reflète ce que vous avez dit quand vous avez donné

 12   votre déposition ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Est-ce que vous répondriez aux questions que l'on vous a posées de la

 15   même façon à nouveau aujourd'hui si je vous les pose ?

 16   R.  Oui.

 17   M. GOSNELL : [interprétation] Je vais demander, Monsieur le Président, à

 18   verser le document 1D1167. Je vais demander son versement au dossier avec

 19   des pièces connexes, à savoir 1D455 et 1D456.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ces documents sont versés au dossier.

 21   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce à conviction

 22   D200.

 23   En ce qui concerne les pièces connexes, elles vont recevoir les cotes

 24   suivantes D201.200 et D202.200.

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 26   M. GOSNELL : [interprétation]

 27   Q.  Madame le Témoin, vous avez travaillé comme journalise à la Radio

 28   Vukovar avant le début des hostilités en Croatie; est-ce exact ?


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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, vous savez tout ce que vous dites est noté par

  3   les sténotypistes et interprété par les interprètes, et pour qu'ils

  4   puissent faire leur travail correctement, ils demandent que vous fassiez

  5   une pause entre mes questions et vos réponses pour que tout ceci puisse

  6   être interprété et noté correctement.

  7   La dernière phrase de votre déclaration, l'on dit : 

  8   "Le témoin," et c'est vous-même, "se rappelle les poèmes d'amour et

  9   interviews avec Branko Kovacevic de Pacetin, qui était médecin et qui a été

 10   diffusé sur les ondes de la Radio Vukovar et qui a été publié dans

 11   Vukovarske Novine."

 12   Savez-vous qui a fait ces interviews avec le Dr Kovacevic, les interviews

 13   dont vous parlez et que l'on a diffusées sur les ondes de la radio ?

 14   R.  Moi-même.

 15   Q.  Pourriez-vous nous dire à combien de reprises vous avez interviewé le

 16   Dr Kovacevic à la radio ou à l'antenne ?

 17   R.  A plusieurs reprises, mais sans trop, sans que ce soit trop.

 18   Q.  Et ces interviews portaient sur quels sujets ? Que disait-il, quelles

 19   étaient les questions que vous lui posiez ?

 20   R.  Je lui ai posé des questions au sujet de son écriture, de ses poèmes.

 21   J'ai voulu savoir comment il se sentait en tant qu'un jeune auteur publié,

 22   je lui ai demandé s'il voulait continuer à publier, à écrire, vu qu'il

 23   était médecin et pas écrivain, et il était plein d'élans. Il avait

 24   l'intention de continuer à écrire pour toujours car il aimait cela. Il a

 25   tout de même continué à exercer son métier de médecin.

 26   Q.  Est-ce que ses poèmes ont été publiés sous quelle que forme que ce soit

 27   ?

 28   R.  Oui. Je me souviens d'un livre de poésie que l'on a publié à ses


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  1   débuts, ensuite, je n'ai pas tellement suivi son travail.

  2   Q.  Est-ce qu'il vous a aussi donné lecture de ses vers pendant cette

  3   interview ?

  4   R.  Non, non. Cela se faisait lors de soirées littéraires.

  5   Q.  Mais à l'antenne, mis à part les soirées littéraires, a-t-on lu ses

  6   vers, sa poésie, a-t-on récité ses vers ?

  7   R.  Oui, en effet, c'était un ajout d'information par rapport à l'interview

  8   et par rapport à la couverture de l'événement. Mais il fallait qu'il le

  9   fasse tout seul.

 10   M. GOSNELL : [interprétation] Je vais demander à avoir le document 1D331,

 11   qui se trouve à l'intercalaire de la Défense numéro 15.

 12   Q.  En attendant cela, je vais vous demander, Madame : est-ce que le Dr

 13   Kovacevic était bien connu en tant que poète dans la Croatie orientale, on

 14   va dire ?

 15   R.  Au départ, grâce à moi, parce que moi je voulais vraiment présenter des

 16   jeunes poètes, oui, en effet. J'ai aussi découvert Zoran Calic, je l'ai

 17   lancé alors qu'aujourd'hui c'est un écrivain bien connu et reconnu, qui

 18   reçoit toujours de très bonnes critiques, et il a été traduit dans

 19   plusieurs langues dans le monde.

 20   Mon intention a toujours été de promouvoir le bien, les bonnes intentions

 21   des gens, de leur permettre d'avancer, et c'est vrai que ce qu'il écrivait

 22   c'était vraiment bon, cela méritait d'être connu.

 23   M. GOSNELL : [interprétation] Je vais demander que l'on agrandisse cette

 24   photo, la photo sur l'écran.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, parce que là, la photo est vraiment

 26   petite.

 27   M. GOSNELL : [interprétation]

 28   Q.  En regardant cette photo, reconnaissez-vous cet homme qui porte un


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  1   costume blanc ?

  2   R.  Moi, j'ai l'impression que c'est bien Branko Kovacevic. Cela étant dit,

  3   il a dû changer, mais bon. Je ne sais pas quand cette photo a été prise et

  4   dans quelle mesure il a changé aujourd'hui, il a pris du poids, peut-être.

  5   M. GOSNELL : [interprétation] Je vais demander à obtenir une cote de ce

  6   document que je souhaite verser au dossier.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Versé au dossier.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] D203, Monsieur le Président.

  9   M. GOSNELL : [interprétation]

 10   Q.  Le paragraphe 4 de votre déclaration, vous dites :

 11   "Je ne connaissais pas Goran Hadzic avant d'inviter les représentants des

 12   partis politiques à un débat sur la radio, qui a eu lieu après Pâques 1991

 13   et après les incidents de Plitvice."

 14   Est-ce que vous avez fait cette interview de M. Hadzic cette fois-ci à

 15   l'occasion que vous mentionnez dans votre déclaration préalable ?

 16   R.  Oui. Il était présent, tout comme les autres. Il s'agissait des

 17   dirigeants des différents partis politiques actifs à Vukovar à l'époque.

 18   Q.  Mis à part les autres participants, pouvez-vous nous dire quels ont été

 19   les points de vue, les idées de M. Hadzic, ce qu'il vous a dit à cette

 20   occasion-là ?

 21   R.  Lui, il a toujours prôné le compromis, la négociation. Il n'était pas

 22   contre les avis des autres. Il ne voulait pas à tout prix qu'on suive ses

 23   points de vue et en imposer aux autres pour éventuellement obtenir un

 24   résultat qui aurait été imposé aux autres.

 25   Q.  Est-ce qu'il a donné des propositions quant à la façon de résoudre les

 26   tensions ethniques qui, à l'époque, étaient de plus en plus manifestes ?

 27   R.  Tout d'abord, il voulait qu'il n'y ait plus d'armes parce que les armes

 28   provoquent la peur.


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  1   Ensuite, il fallait mettre sous contrôle les individus qui ne se

  2   comportaient pas correctement de façon civilisée.

  3   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, merci de ces informations. Maintenant, je

  4   voudrais aborder un autre sujet, et je ne veux pas vous poser des questions

  5   au sujet de la période au cours de laquelle Vukovar était sous siège. Vous

  6   étiez à Vukovar. Je ne vais vous poser de questions à ce sujet-là. Mais je

  7   voudrais tout de même vous poser une autre question. A quel moment avez-

  8   vous quitté Vukovar pour la première fois vu que les combats faisaient rage

  9   ?

 10   Pourriez-vous répondre à ma question ?

 11   R.  Pendant la durée des hostilités, ma famille, ma famille proche - mon

 12   époux, mon fils et mon beau-frère - avec une centaine ou plus d'une

 13   centaine de civils, nous étions donc évacués de la première ligne de front,

 14   c'est la Brigade de la Garde de Belgrade qui nous a évacués, et ceci, le 12

 15   novembre 1991. On nous a amenés par des camionnettes jusqu'à un point de

 16   rassemblement qui se trouvait à l'époque à Velepromet. Il était à peu près

 17   midi.

 18   On nous a hébergés. Bon, ce n'était pas bien beau, c'était bien triste,

 19   mais bon, c'était la seule solution qu'il y avait. On dormait à même le sol

 20   sur des planches, au fait, et sur des sac de riz, et c'est comme cela qu'on

 21   était couchés parce qu'à l'extérieur, il était encore dangereux d'être

 22   dehors parce que les combats, comme je l'ai dit, faisaient rage. Tout cela,

 23   c'était juste avant la chute de Vukovar.

 24   Q.  Et à quel moment et comment avez-vous quitté Velepromet ?

 25   R.  En ce qui nous concerne, nous sommes sortis pour la première fois le

 26   14. On a dressé des listes des gens qui allaient partir, on mettait même

 27   leur destination. On a organisé le transport par des autocars. Donc, il y

 28   avait un autocar et c'est Djuro Filipovic qui était au volant. Il portait


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  1   un uniforme militaire. Et c'est lui qui s'est occupé de la liste et c'est

  2   lui qui était responsable des personnes se trouvant dans l'autocar, et il

  3   confirmait bien que la liste correspondait bien aux identités des gens dans

  4   l'autocar, et ceci, en passant par tous les points de contrôle jusqu'à Sid.

  5   Q.  Quand vous êtes arrivés à Sid, à quel moment après cela vous êtes

  6   revenus à Vukovar pour la première fois ?

  7   R.  Le 16 novembre. Car on nous a informés du poste de police de Sid que

  8   l'armée avait transporté la mère de mon mari, alors que son père était

  9   resté derrière à Vukovar. Pendant le séjour dans ce grand sous-sol où nous

 10   avons séjournés - c'était le sous-sol de Pavle Radisavljevic - nous étions

 11   séparés, donc j'étais séparé de mon beau-père et de ma belle-mère parce

 12   qu'ils étaient restés dans la ruine de leur maison. Pourquoi ? Parce que

 13   mon beau-père était pratiquement à l'article de la mort. Il avait des

 14   blessures, il saignait, on ne pouvait pas l'aider et le soigner à l'époque.

 15   Ma belle-mère m'avait dit qu'il était décédé, mais qu'elle avait pourtant

 16   demandé qu'on l'enterre, mais ce n'était pas possible de le faire à cause

 17   des combats. C'était donc le 15, c'est le 15 qu'elle nous a dit cela. Elle

 18   nous a donné l'ordre d'aller le chercher le 16, soit de l'enterrer --

 19   enfin, ce qu'elle voulait, c'est qu'on achète un cercueil à Sid et ensuite

 20   que l'on fasse venir sa dépouille à Sid.

 21   Donc, à Sid, nous sommes allés à côté du terrain de jeu, où il y avait un

 22   bureau officiel, et là, il fallait demander un laissez-passer pour pouvoir

 23   quitter Sid et aller à Vukovar, étant donné qu'il y avait toujours des

 24   combats dans ce secteur. Nous avons obtenu le laissez-passer, et ils

 25   demandaient qui partait et nous avons répondu que c'était nous. Donc, nous

 26   avons pu obtenir ce laissez-passer, qui portait nos noms, ainsi que les

 27   signatures et les tampons des personnes qui étaient de permanence à

 28   l'époque. Tous ces hommes portaient des uniformes, c'étaient des uniformes


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  1   de la JNA. Et la police militaire était là debout dans la pièce.

  2   Ensuite, nous avons regardé autour de nous pour savoir qui allait nous

  3   amener à Vukovar --

  4   Q.  Puis-je vous interrompre pendant quelques instants, s'il vous plaît,

  5   Madame Brlic-Jovanovic, et vous demander une précision. Vous dites --

  6   R.  Oui, allez-y.

  7   Q.  Vous dites que la police militaire était debout dans la pièce.

  8   S'agissait-il de la police militaire qui a signé ou estampillé des laissez-

  9   passer ?

 10   R.  Non, non. Il y avait un homme qui était assis derrière un bureau et cet

 11   homme était de permanence et la police militaire était là pour s'occuper de

 12   notre sécurité. Tout était contrôlé de façon assez stricte. En tout cas,

 13   c'est comme ça que je l'ai perçu.

 14   Q.  Et l'homme qui était assis derrière le bureau, cet homme portait-il un

 15   uniforme de la JNA ?

 16   R.  Oui.

 17   M. GOSNELL : [interprétation] Pouvons-nous afficher la pièce 1D3735, s'il

 18   vous plaît, intercalaire 11 de la Défense.

 19   Mme CLANTON : [interprétation] Pardonnez, Monsieur le Président.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Pardon, Madame Clanton.

 21   Mme CLANTON : [interprétation] Je me suis levée, parce que je

 22   constate que ces documents ne figurent pas sur la liste 65 ter de la

 23   Défense, mais sont cités dans la troisième requête en instance aux fins de

 24   modifier la liste de la Défense. Et la réponse doit être donnée

 25   aujourd'hui, et donc ceci n'a pas été déposé. Je souhaite indiquer que nous

 26   nous opposons à l'emploi de ce document, et nous pensons que cinq autres

 27   documents qui ont été fournis par le témoin n'ont pas été communiqués en

 28   temps et en heure à l'Accusation. La Défense était en possession de ces


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  1   documents pendant six semaines avant qu'ils ne les remettent. et nous ne

  2   comprenons pas d'après le résumé 65 ter ni les déclarations 92 ter comment

  3   ils ont un quelconque lien avec sa déposition.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Gosnell.

  5   M. GOSNELL : [interprétation] Tout d'abord, Monsieur le Président, nous

  6   n'avons pas l'obligation de communiquer les documents dès que nous entrons

  7   en possession desdits documents. Une telle obligation n'existe pas, donc

  8   nous n'avions pas l'obligation de communiquer les documents directement.

  9   Et cela étant dit, bien évidemment, nous avons l'obligation lorsque nous

 10   demandons une modification de notre liste 65 ter de nous assurer de fournir

 11   ces documents rapidement pour que ceci ne porte pas préjudice à

 12   l'Accusation. Tels sont les deux critères qui peuvent être adoptés.

 13   Nous avons demandé, Monsieur le Président, la traduction de ces documents à

 14   la date du 4 août 2014, et nous n'avons reçu la traduction que le 2

 15   septembre. Il est vrai que cela est trop long, et nous nous sommes rendu

 16   compte à un moment donné que ce document n'avait pas été mis sur la liste

 17   prioritaire du service de traduction. Et, d'après ce que j'ai compris, ces

 18   documents ont été communiqués peu de temps ou le jour même de la traduction

 19   desdits documents, à savoir le 2 septembre. Et, ensuite, Messieurs les

 20   Juges, une requête a été déposée concernant la liste des pièces, donc liste

 21   65 ter, cette requête a été déposée le 5 septembre 2014, à savoir il y a 17

 22   jours environ. Et quatre de ces laissez-passer que je propose d'utiliser

 23   comportent moins d'une page, ou sont des documents d'une page, recto verso,

 24   mais il y a très peu de texte dans ce document.

 25   Je dois dire également, Messieurs les Juges, que nous ne savions pas encore

 26   si nous souhaitions ajouter ces documents à notre liste 65 ter au mois

 27   d'août, car nous avons dû prendre certain nombre de décisions, entre

 28   autres, la citation à la barre de ce témoin-ci, donc nous ne savions pas


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  1   encore quel document nous allions utiliser. C'était une des raisons pour

  2   laquelle nous n'avons pas communiqué ces documents au début du mois d'août.

  3   Et j'aurais souhaité pouvoir les communiquer au début du mois d'août mais

  4   cela ne s'est pas passé ainsi.

  5   Quoi qu'il en soit, nous avons eu beaucoup de temps ou, en tout cas,

  6   l'Accusation a eu beaucoup de temps pour digérer ces documents, à savoir si

  7   oui ou non ceux-ci sont couverts ou sont abordés dans le résumé.

  8   Le résumé précise que le témoin -- peut-être que le témoin devrait enlever

  9   ses écouteurs.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Evidemment, avant que le témoin

 11   n'enlève ses écouteurs.

 12   Madame Brlic, comprenez-vous l'anglais ? Apparemment non.

 13   Est-ce que vous comprenez l'anglais, Madame Brlic ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Un petit peu, très peu. En tout cas ce

 15   qui se rapporte à la technologie moderne, oui, mais c'est tout.

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vais donc vous demander d'enlever

 17   vos écouteurs. Merci.

 18   Oui, Maître Gosnell c'est à vous.

 19   M. GOSNELL : [interprétation] Le résumé du témoin précise qu'elle se

 20   souvient de ce qu'elle a vécu, à savoir qu'elle s'est réfugiée dans un abri

 21   pour de longues périodes lors des combats autour de Vukovar aux mois

 22   d'octobre et novembre 1991. Elle est partie de Vukovar vers le 16 novembre

 23   1991, et qu'elle est revenue environ huit jours après. Et, ensuite, le

 24   texte se poursuit, mais je ne vais pas aborder ce que dit le reste de sa

 25   déclaration.

 26   Pour ce qui est de la requête portant sur la liste 65 ter de la Défense

 27   déposée le 5 septembre, il s'ensuit qu'au paragraphe 8 :

 28   "Le témoin a fourni le 28 juillet 2014 six documents qui sont des


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  1   laissez-passer, des originaux délivrés par la JNA en 1991, qui portent sur

  2   elle-même, sur elle et son mari."

  3   Je dois m'interrompre pour dire qu'il s'agit de quatre laissez-passer

  4   dont il s'agit ici, et deux documents qui proviennent d'une autre source.

  5   Et ensuite, il est précisé que :

  6   "Ces documents ont été envoyés au service de traduction et nous souhaitons

  7   que soient traduits les documents et l'autorisation fournie par les

  8   autorités militaires permettant au témoin de résider dans la zone de

  9   conflit sont des documents qui ont été présentés à l'avance."

 10   Et nous avons précisé pour nous souhaitions employer ces documents,

 11   parce qu'ils portent sur la déposition du témoin. Et, ensuite samedi soir,

 12   je crois que c'était malheureusement entre 8 et 9 heures, nous avons eu des

 13   précisions sur les dates de voyage du témoin. Ce qui aurait dû être précisé

 14   lorsque nous avons examiné les documents même si les dates ne concordent

 15   pas précisément avec le résumé du témoin.

 16   Donc, en tenant compte de tous ces éléments, nous avons averti en

 17   temps et en heure l'Accusation, qui n'a pas subi de préjudice, car

 18   l'Accusation a eu suffisamment de temps pour se préparer, et nous

 19   souhaitons ajouter ce document à notre liste 65 ter et nous allons donc

 20   poser des questions afférents auxdits documents.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Clanton.

 22   Mme CLANTON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Simplement, je

 23   souhaite répondre à quelques éléments présentés par le conseil de la

 24   Défense. Comme il l'a précisé, si nous regardons le résumé de la

 25   déclaration du témoin, il est précisé que le témoin va parler de son départ

 26   et de son retour. Il n'est pas mentionné que les autorités de Sid ou que ce

 27   soit la JNA ou la police militaire qu'il y ait eu un bureau à cet endroit.

 28   Et ensuite, par rapport à ce qui a été fourni samedi entre 20 heures


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  1   et 21 heures, ce que nous avons reçu c'est un document manuscrit en B/C/S.

  2   Il n'y a pas de traduction, et cela renvoie au paragraphe 4 de la note de

  3   récolement qui précise que le témoin a fourni une chronologie de ses

  4   déplacements entre Sid et Vukovar entre le 12 et le 26 novembre 1991. Il

  5   n'est pas précisé ce que contient ce texte, puisque cela est rédigé de

  6   façon manuscrite en B/C/S. L'Accusation n'a pas, entre 21 heures samedi et

  7   dimanche, la possibilité de comprendre de quoi il s'agissait et n'a pas

  8   reçu non plus de traduction comme il convient du document fourni la

  9   Défense. C'est la raison pour laquelle nous estimons que ces documents ne

 10   doivent pas être ajoutés, car cela porte préjudice à l'Accusation.

 11   [La Chambre de première instance se concerte]

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell, alors, il s'agit de

 13   cinq documents environ. Ai-je raison ? Cinq documents que vous souhaitez

 14   ajouter à votre liste 65 ter ?

 15   M. GOSNELL : [interprétation] Il y a six documents qui ont été suggérés.

 16   Alors, le document -- alors, ce dont nous parlons maintenant, c'est que

 17   cela porte sur quatre documents, un cinquième qui porte sur autre chose, et

 18   le sixième, je ne vais pas l'utiliser.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Alors, s'agissant de ces quatre

 20   documents, le document manuscrit en B/C/S qu'a cité Mme Clanton, cela fait

 21   partie des documents, des mêmes documents ?

 22   M. GOSNELL : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Alors, pour être

 23   précis, ce document-là a été fourni par le témoin samedi soir en ma

 24   présence, et moi, j'ai jugé qu'il convenait, conformément aux Règlements,

 25   de fournir tout élément avant la déposition du témoin. Donc, j'ai

 26   communiqué ce document-là à l'Accusation. Et nous n'avons absolument pas

 27   l'intention d'utiliser ce document.

 28   Mme CLANTON : [interprétation] Monsieur le Président, d'après ce que j'ai


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  1   compris eu égard aux arguments de la Défense, le document dont nous

  2   parlons, les quatre documents, eh bien, ceux-ci peuvent être compris à la

  3   lumière des informations fournies par le témoin samedi soir. E nous ne

  4   pouvons pas estimer avoir été avertis et avoir la possibilité de lire ces

  5   quatre documents parce que nous ne pouvons pas les lire.

  6   [La Chambre de première instance se concerte]

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'objection est rejetée. Les quatre

  8   documents peuvent être ajoutés à la liste 65 ter.

  9   Veuillez poursuivre, Maître Gosnell.

 10   M. GOSNELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 11   Pouvons-nous donc afficher maintenant, s'il vous plaît, le 1D3735, qui

 12   correspond à l'intercalaire 11 de la Défense.

 13   Q.  Madame Brlic --

 14   M. GOSNELL : [interprétation] Pardonnez-moi, le témoin n'a pas ses

 15   écouteurs.

 16   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, si vous regardez l'écran que vous avez sous les

 17   yeux, du côté gauche, s'agit-il là du document dont vous venez de nous

 18   parler, vous dites l'avoir reçu le 16 novembre à Sid ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Vous étiez sur le point de poursuivre --

 21   M. GOSNELL : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

 22   document, s'il vous plaît.

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ce document sera versé au dossier et

 24   recevra une cote.

 25   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce D204, Messieurs

 26   les Juges.

 27   M. GOSNELL : [interprétation]

 28   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, avant de vous interrompre, vous étiez sur le


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  1   point de parler de la manière dont vous êtes rentrés à Vukovar. Quel moyen

  2   de transport avez-vous utilisé pour rentrer à Vukovar ?

  3   R.  Il n'y avait pas de transport civil et on ne pouvait pas y aller à pied

  4   non plus. Dans le cas où on possédait un laissez-passer, et ce n'est

  5   seulement dans ce cas-là que l'on pouvait être transportés à bord d'un

  6   véhicule militaire. C'était la seule possibilité. Et nous étions à bord de

  7   ce véhicule, arrêtés à tous les postes de contrôle, et ce, jusqu'à Vukovar,

  8   et ensuite il fallait montrer à nouveau son laissez-passer.

  9   Q.  Alors, nous allons laisser de côté les détails de ce que vous avez fait

 10   à Vukovar lorsque vous êtes rentrés le 16. Pourriez-vous nous dire à quel

 11   moment vous avez quitté Vukovar, vous êtes reparti de Vukovar ?

 12   R.  Nous n'avons pas réussi à accomplir la mission qui nous avait été

 13   confiée par ma belle-mère, soit d'enterrer, soit de trouver le corps et le

 14   ramener. Nous n'avions aucune raison de rester. Une Jeep nous a fort

 15   heureusement ramenés jusqu'à Sid. Cependant, il y avait un couvre-feu et

 16   nous avons été arrêtés à Negoslavci. C'est là que nous avons passé la nuit

 17   avec la famille Ore, la famille de Petar Ore.

 18   Le lendemain matin, nous avons été transportés à bord d'un véhicule de

 19   blindés de transport de troupes ou quelque chose comme ça, et nous sommes

 20   rentrés à Sid. Nous sommes restés là, mais avant cela, je dois ajouter

 21   quelque chose que j'ai omis de mentionner. Lorsque nous sommes arrivés à

 22   Sid, nous avons été hébergés à Adasevci. Nous sommes restés avec la famille

 23   de mon mari. Et lorsque nous sommes rentrés à Sid, nous avons passé

 24   quelques jours à Adasevci. Et ensuite, ma belle-mère a insisté pour que

 25   nous repartions à nouveau en nous enjoignant de retrouver à tout prix le

 26   corps de son mari décédé.

 27   Q.  Et quand êtes-vous retourné à Vukovar la fois d'après, pour autant que

 28   vous vous en souvenez ?


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  1   R.  Une pression très forte a été exercée par la famille pendant quelques

  2   jours. Et ensuite, le 24, nous avons décidé de nous rendre à nouveau à

  3   Vukovar. Nous avons dû faire la même chose, adopter la même procédure, il

  4   fallait avoir des laissez-passer, mais c'est à cette occasion-là il n'y

  5   avait que mon mari et moi-même qui sommes partis.

  6   Encore une fois, c'était la même procédure. Et la route ou le chemin

  7   emprunté était le même. Nous avons encore une fois été amenés à Velepromet

  8   car telle était, à ce moment-là, notre adresse officielle, c'était la seule

  9   que nous avions. Nous ne pouvions pas entrer dans la ville et nous ne

 10   pouvions pas atteindre nos maisons non plus parce qu'il y avait des gens

 11   qui surveillaient la situation et qui s'occupaient de la sécurité des

 12   civils. Et les gens de ces services-là nous ont dit que nous ne pouvions

 13   pas accéder du tout à notre quartier.

 14   Ensuite, mon mari a insisté auprès des autorités militaires de mettre à

 15   disposition leurs hommes.

 16   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, veuillez vous arrêter pendant quelques

 17   instants.

 18   M. GOSNELL : [interprétation] Et demander à ce que le 1D3728, intercalaire

 19   8 soit affiché à l'écran, s'il vous plaît.

 20   Q.  Ce document, celui qui se trouve à gauche de l'écran, était-ce bien le

 21   document que vous avez reçu le 24 à Sid pour pouvoir rentrer à Vukovar ?

 22   R.  Oui.

 23   M. GOSNELL : [interprétation] Puis-je demander le versement au dossier de

 24   ce document, s'il vous plaît.

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ce document sera versé au dossier et

 26   recevra une cote.

 27   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce D205, Messieurs

 28   les Juges.


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  1   M. GOSNELL : [interprétation]

  2   Q.  Vous ai-je bien compris, était-ce bien le 24, à savoir le même jour où

  3   vous avez reçu le laissez-passer et que vous vous êtes rendus de Vukovar à

  4   Sid ?

  5   R.  Tout devait être fait tout de suite car nous n'avions aucun endroit où

  6   loger.

  7   Q.  Et ce voyage qui a donc commencé le 24, eh bien, lors de ce voyage qui

  8   a commencé le 24, combien de jours avez-vous passé à Vukovar avant de

  9   repartir à nouveau ?

 10   R.  Nous avons demandé de l'aide. En réalité, mon mari a demandé de l'aide

 11   à l'armée. Cependant, lorsqu'il est parti accompagné de plusieurs soldats,

 12   on nous a dit que dans des cas comme cela, lorsqu'une maison avait été

 13   incendiée de la sorte, on ne retrouve aucun reste humain.

 14   Q.  Et combien de temps après ces actions, le cas échéant, avez-vous quitté

 15   Vukovar ?

 16   R.  Je ne peux pas vous répondre avec certitude mais je pense que nous

 17   sommes retournés … et ensuite, nous avons parlé avec ma belle-mère et nous

 18   avons essayé une nouvelle fois de faire quelque chose par nous-mêmes.

 19   Q.  Y a-t-il eu une autre occasion par la suite où vous avez demandé à

 20   pouvoir vous rendre à nouveau de Vukovar depuis Sid ?

 21   R.  Oui, il fallait demander l'autorisation à chaque fois, et je me suis

 22   rendue dans le même bureau. La procédure était toujours la même.

 23   M. GOSNELL : [interprétation] Pouvons-vous nous afficher, s'il vous plaît,

 24   le 1D3729. Il s'agit de l'intercalaire 9 de la Défense.

 25   Q.  Il s'agit là d'un permis permettant de résider de façon provisoire dans

 26   les zones de combat, et la date du document est celle du 26 novembre 1991.

 27   Et le nom cité est celui de Radoslav Jovanovic. Qui est Radoslav Jovanovic

 28   ?


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  1   R.  C'est mon mari, mon feu mari au jour, actuellement.

  2   Q.  Vous souvenez-vous avoir reçu ce document ?

  3   R.  Oui.

  4   M. GOSNELL : [interprétation] Je demande que ce document soit versé au

  5   dossier, Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Admis et marqué.

  7   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit du document D206.

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

  9   M. GOSNELL : [interprétation] Peut-on afficher à l'écran le document

 10   1D3730.

 11   Q.  Il s'agit, une fois de plus, d'un permis autorisant la résidence à

 12   titre provisoire dans la zone des opérations de combat, il est daté du 21

 13   décembre 1991. Madame Brlic-Jovanovic, vous souvenez-vous avoir reçu ce

 14   document à cette date ou autour de cette date ?

 15   R.  Oui. Car nous avions l'intention de décider où nous allions habiter, et

 16   nous voulions revenir à Vukovar à tout prix. Donc, on a cherché à savoir

 17   comment on devait s'y prendre, nous n'avions plus de maison, nous n'avions

 18   rien à manger, pas de vêtements, et nous voulions trouver une solution à

 19   tous ces problèmes d'une façon ou d'une autre sur notre territoire.

 20   Q.  Est-ce que ce document a été émis suivant la même procédure et par les

 21   mêmes autorités que ce que vous avez décrit dans vos documents précédents ?

 22   R.  Ce document a été émis de la même façon, mais le lieu était différent.

 23   Il n'a pas été émis par le bureau qui se trouvait près du parc

 24   d'attractions, mais à l'endroit qui se trouvait dans le parc. En fait,

 25   c'était une auberge de chasse qui devait appartenir aux chasseurs ou à

 26   l'association de chasse locale.

 27   Mais pour tout le reste, c'était aussi strict qu'auparavant.

 28   Q.  Et les personnes qui se trouvaient dans ce bureau, s'agissait-il des


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  1   mêmes personnes qui avaient émis les laissez-passer précédents ? C'est pas

  2   forcément les mêmes personnes, mais des personnes portant les mêmes

  3   uniformes ou qui correspondaient à la même description.

  4   R.  Oui, c'est exact.

  5   Q.  Etes-vous revenus à Vukovar à cette date ou autour de cette date,

  6   c'est-à-dire le 21 décembre 1991 ?

  7   R.  Oui.

  8   M. GOSNELL : [interprétation] Je demande à verser ce document au dossier.

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Admis et marqué.

 10   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit du document D207.

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 12   M. GOSNELL : [interprétation]

 13   Q.  Où avez-vous logé cette fois-ci lorsque vous êtes revenus à Vukovar en

 14   décembre ?

 15   R.  Chez des parents, il s'agissait du cousin de mon mari qui était revenu

 16   un ou deux jours avant nous. Il avait pu rentrer chez lui dans sa maison

 17   qui était endommagée, mais dans laquelle on pouvait passer la nuit. Il y

 18   avait des matelas qui colmataient les fenêtres, il n'y avait plus de

 19   fenêtres. On a reçu de la nourriture de la Croix-Rouge. On a dormi par

 20   terre. Il faisait froid, c'était très inconfortable. Il n'y avait pas d'eau

 21   du tout, ni d'électricité. Donc nous sommes restés très proches les uns des

 22   autres, en fait, tous dans la même chambre.

 23   Et, le lendemain, quand on est allés voir s'il y avait des bureaux qui

 24   pourraient nous dire ce qui allait advenir de nous, en fait, on ne pouvait

 25   pas se déplacer à pied dans la ville. Il fallait par ouï-dire apprendre où

 26   la personne qui est à côté de vous s'était rendue pour savoir où aller.

 27   C'est comme ça que l'on a fait, et tout s'est bien passé.

 28   Q.  Avez-vous cherché à trouver un logement, vous et votre mari, à un


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  1   endroit où vous pouviez habiter ?

  2   R.  Non, nous ne l'avons pas fait. Nous avons attendu que d'autres

  3   personnes trouvent une solution à ce problème pour nous. Les maisons où il

  4   n'y avait pas eu tant de combat ou les combats s'étaient arrêtés plus tôt,

  5   avaient déjà été occupés par des gens qui s'en étaient emparées. Et, comme

  6   nous, on arrivait plus tard, il n'y avait plus rien, et c'est donc on

  7   attendait qu'on nous dise : Voilà, vous pouvez aller ici ou là, et qu'ils

  8   nous indiquaient où on pouvait aller.

  9   Q.  Et après tout cela, où est-ce que vous avez atterri ?

 10   R.  D'abord, nous avons logé avec le cousin de mon mari pendant tout ce

 11   temps, avec lui et son épouse, et on est allés voir pendant ce temps la

 12   Croix-Rouge pour avoir des vêtements et des rations, c'est-à-dire de la

 13   nourriture de base comme de la farine, de l'huile, ainsi que du savon pour

 14   laver les vêtements, des conserves.

 15   Quand on est partis pour Vukovar, on a réussi à convaincre nos parents que

 16   si nous, on était en mesure de le faire, eux aussi ils pouvaient revenir.

 17   C'est ainsi que mon beau-frère est parti chercher un endroit pour lui-même

 18   et pour sa femme, il a obtenu un espèce de certificat l'autorisant à

 19   nettoyer une zone donnée, parce qu'on voulait être proche les uns des

 20   autres et de ne pas être trop éparpillés parce que la situation était

 21   vraiment effroyable. Il a réussi à obtenir une maison qui n'avait pas été

 22   endommagée à l'extérieur et, à l'intérieur, seul le rez-de-chaussée pouvait

 23   être utilisé, c'est-à-dire entre 70 et 80 % pouvait être utilisé. Les

 24   fenêtres ont dû être colmatées avec des chiffons.

 25   Q.  Permettez-moi de vous interrompre, Madame Brlic-Jovanovic. Est-ce que

 26   j'ai bien compris que vous parlez là de la maison dans laquelle vous avez

 27   fini par habiter ?

 28   R.  Oui.


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  1   Q.  Et a-t-il fallu obtenir une autorisation pour que vous puissiez habiter

  2   dans cette maison ?

  3   R.  Oui, il y avait une autorisation pour habiter cette maison, et cette

  4   autorisation a été donnée à mon beau-frère. Elle était en son nom, et il

  5   l'avait demandée.

  6   Je dois dire que pendant les jours qui ont suivi, il est arrivé à plusieurs

  7   reprises que des patrouilles militaires passent de façon inopinée. Je dis

  8   des patrouilles militaires parce que c'étaient des hommes en uniforme,

  9   j'étais extrêmement préoccupée, j'avais peur. Je ne savais pas et je ne

 10   comprenais pas pourquoi ça les intéressait, mais ils ont essayé de me

 11   rassurer, ils m'ont dit qu'il n'y avait pas de quoi s'inquiéter. Ils m'ont

 12   dit que ceux qui étaient dans la ville à ce moment-là procédaient ainsi,

 13   qu'on n'avait pas de raison de craindre pour notre propre sécurité, qu'on

 14   pouvait laisser la porte non verrouillée. D'ailleurs, il était impossible

 15   de verrouiller la porte, il n'y avait plus de verrou, et souvent il n'y

 16   avait plus de porte.

 17   Dans cette maison, même les toilettes étaient complètement endommagées, le

 18   mur extérieur avait été à moitié détruit, mais il y avait quand même des

 19   murs avec un toit qui nous abritait.  

 20   M. GOSNELL : [interprétation] Je demanderais que soit affiché le document

 21   1D3736, intercalaire 12 de la Défense.

 22   Q.  Quel est nom de votre beau-frère ?

 23   R.  Milovan Jovanovic.

 24   Q.  Il s'agit d'un document qui indique en haut, à gauche :

 25   "District serbe de Slavonie, Baranja, et Srem occidental."

 26   Il est indiqué :

 27   "C'est un certificat qui atteste que Milovan, fils de Veljko, s'est

 28   présenté devant ce service et nous demandons que l'appartement situé à


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  1   cette adresse soit déblayé et nettoyé dans l'attente d'une décision finale

  2   de cette commission."

  3   Vous souvenez-vous que ce beau-frère ait reçu ce document, ou l'avez-vous

  4   vu, vous souvenez-vous de l'avoir vu ?

  5   R.  Oui. Il était très fier d'avoir pu obtenir un endroit où vivre. Il

  6   s'agit du frère cadet, et il avait réussi à assurer un abri pour sa

  7   famille.

  8   Q.  Par la suite, avez-vous quitté cette maison, la maison de Milovan, et

  9   avez-vous trouvé un autre endroit où habiter ?

 10   R.  Ce logement n'était pas adéquat pour deux personnes, loin de là. Des

 11   personnes d'âge différents, une mère âgée, moi-même, il n'y avait pas la

 12   place de mettre des lits, et le toit fuyait. Donc, lorsqu'il y avait des

 13   intempéries, je passais toute la journée à essayer d'éponger la pluie car

 14   il n'y avait pas vraiment de toit. J'essayais de faire en sorte que tout

 15   soit sec et qu'on puisse rester au rez-de-chaussée avec une bougie et un

 16   petit poêle pour faire le chauffage.

 17   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, j'aimerais revenir à la question que je vous ai

 18   posée, est-ce que vous avez fini par quitter cette maison et êtes-vous

 19   aller loger ailleurs ? Vous pouvez répondre par un oui ou par un non.

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Avez-vous reçu un document comme celui-ci, vous ou votre mari, un

 22   document, donc, concernant un logement et vous autorisant à emménager dans

 23   un logement ?

 24   R.  Il s'agissait du même document. Mon mari et son frère sont partis pour

 25   recevoir ce document. Je ne suis pas allé avec eux, donc, je ne sais pas où

 26   ils se sont rendus ou où se trouvait le service qui était chargé de

 27   résoudre ce type de problèmes.

 28   Q.  Est-ce que vous comprenez que ce document, qui a pour titre certificat,


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  1   vous autorisait à vivre de façon permanente dans cette habitation ?

  2   R.  Non, non, pas du tout. Tout le monde comprenait qu'il s'agissait de

  3   solution provisoire, quelle qu'ait pu être la commission qui a émis le

  4   document. Je pense que la propriété privée est inviolable. J'en suis

  5   persuadée toujours aujourd'hui et jamais je ne changerai d'avis sur cette

  6   question.

  7   M. GOSNELL : [interprétation] J'aimerais verser au dossier le document

  8   1D3736.

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] S'agit-il de l'un des quatre

 10   documents ?

 11   M. GOSNELL : [interprétation] Vous avez parfaitement raison, Monsieur le

 12   Président. Je vous prie de m'excuser. J'aimerais demander que ce document

 13   soit ajouté à la liste 65 ter. Il s'agit de l'un des documents qui a fait

 14   l'objet de notre requête du 5 septembre 2014.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Clanton.

 16   Mme CLANTON : [interprétation] Nous n'avons pas d'objection à soulever à ce

 17   que ce document soit ajouté.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ce document est donc admis et versé à

 19   la liste 65 ter et marqué en tant que tel.

 20   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit du document D208, merci.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 22   M. GOSNELL : [interprétation] Je n'ai plus de questions à poser.

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Gosnell.

 24   Etes-vous prête, Madame Clanton ?

 25   Mme CLANTON : [interprétation] Oui.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous prie de commencer.

 27   Contre-interrogatoire par Mme Clanton : 

 28   Q.  [interprétation] Bonjour, Madame Brlic-Jovanovic.

 


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  1   R.  Bonjour.

  2   Q.  Je m'appelle Sarah Clanton, et je vais poser les questions pour

  3   l'Accusation. Si mes questions ne sont pas claires ou si vous ne les avez

  4   pas bien comprises, veuillez me demander de les préciser.

  5   Tout d'abord, j'aimerais vous poser quelques questions sur vos antécédents.

  6   Je vois dans votre déclaration que vous avez été à l'école à Vukovar et que

  7   vous viviez à Vukovar à l'époque; est-ce exact ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Je vois que vous êtes journaliste et que vous étiez avec Radio Vukovar

 10   depuis 1972; est-ce exact ?

 11   R.  Oui, j'ai commencé le 2 juin 1972.

 12   Q.  Vous dites dans votre déclaration que vous êtes née à Osijek. Quand

 13   est-ce que vous êtes allée vivre à Vukovar ?

 14   R.  Oui. Avant ma naissance, mon père a été muté au musée de Lasnica, et

 15   j'aurais dû être née là. Mais ma mère avait des parents qui avaient une

 16   maison à Osijek et, donc, elle est allée voir sa famille et c'est là

 17   qu'elle a accouché et, donc après, je suis allée à Varazdin, quand j'avais

 18   à peu près un an. Et à ce moment-là, donc j'avais un an, mon père a été

 19   muté à Bjelovac, où il était responsable du musée. Après cela, une décision

 20   a été prise concernant la création d'un musée à Vukovar, à l'initiative du

 21   Dr Antun Bauer, et donc, mon père a été nommé directeur du musée de la

 22   ville de Vukovar, c'était dans les années '50. Et c'est à ce moment-là que

 23   ma mère et moi-même nous sommes allés vivre à Vukovar.

 24   Et depuis lors, j'ai toujours habité à Vukovar. Toutes les années pendant

 25   lesquelles j'étais employée étaient auprès de Radio Vukovar et Vukovarske

 26   Novine. Il s'agit d'un journal de Vukovar, qui avait un seul bureau

 27   éditorial jusqu'aux événements de 1991.

 28   Q.  Vous avez dit tout à l'heure que votre feu mari, qui s'appelait


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  1   Radoslav Jovanovic, pouvez-vous nous dire de quelle ville il était

  2   originaire ?

  3   R.  Mon mari est né à Vukovar. Il n'a jamais habitué ailleurs qu'à Vukovar.

  4   Nous étions au lycée ensemble. Par la suite, il a fait des études

  5   d'agronomie à Osijek, et il s'est spécialisé dans la mécanisation de

  6   l'agriculture. Par la suite, il a obtenu un poste à Vupik.

  7   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, vous avez dit tout à l'heure qu'il y avait une

  8   maison qui appartenait à des parents à Sid. C'était une maison qui

  9   appartenait à la famille de votre mari ou à votre famille ?

 10   M. GOSNELL : [interprétation] Non, pas à Sid.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'était pas à Sid, mais à Adasevci,

 12   près de Sid.

 13   M. GOSNELL : [interprétation] C'était l'objet de mon objection, Monsieur le

 14   Président.

 15   Mme CLANTON : [interprétation]

 16   Q.  Je voudrais préciser, s'agit-il d'une maison qui appartenait à la

 17   famille de votre mari, celle qui se trouvait à Adasevci ?

 18   R.  Adasevci. Oui, c'est exact.

 19   Q.  Est-il exact que c'est une maison qui appartenait à la famille de votre

 20   mari ?

 21   R.  Adasevci, ça se trouve à peu près à 4 ou 5 kilomètres de Sid. Donc,

 22   c'est un gros village. C'était une maison que ma belle-mère avait héritée

 23   de ses grands-parents. Elle s'était mariée à Vukovar, et son frère cadet

 24   est resté sur place, il habitait cette maison.

 25   Q.  Est-ce que votre mari était Serbe d'origine ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Je vois à la première page de votre déclaration que vous êtes vous-même

 28   d'origine croate; est-ce exact ?


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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Pendant la période dont il est question, c'est-à-dire au début 1991,

  3   pendant l'été de la même année jusqu'à l'autonome de la même année, lorsque

  4   vous étiez à Vukovar, pouvez-vous nous dire si votre mari faisait partie

  5   d'une quelconque formation militaire ou force armée ?

  6   R.  Non. Car, après le recrutement, en fait, il avait été dispensé de

  7   service militaire pour des raisons de santé. Donc, il n'a pas rempli, ne

  8   serait-ce qu'une journée d'obligation militaire. Il était vraiment dispensé

  9   à titre permanent de toute obligation auprès de l'armée après tous les

 10   examens médicaux qu'il a dû subir à Zagreb, et ceci à plusieurs reprises.

 11   Et cela a été bien confirmé par l'état de sa santé, enfin les conclusions

 12   de ses examens médicaux ont tout à fait été confirmés par ce qui s'est

 13   passé, parce qu'il a eu deux AVC, il avait un niveau de sucre dans le sang

 14   trop élevé. Il souffrait d'hypertension artérielle, il a eu la gangrène, et

 15   il était en fait invalide. Il devait se déplacer en chaise roulante. Il

 16   voulait à tout prix rester chez lui, rester près de sa famille et rester à

 17   son poste à Vupik, où il était responsable de la pharmacie agricole. Il a

 18   dû se rendre plusieurs fois à l'hôpital de Vukovar pour des soins.

 19   Q.  Permettez-moi de vous interrompre. Je comprends que pour des raisons de

 20   santé, votre mari n'a eu aucune obligation militaire et n'a fait partie

 21   d'aucune formation militaire. Je veux que ce soit parfaitement clair. Est-

 22   ce qu'il a soutenu un groupe de volontaires ou a-t-il travaillé à titre

 23   volontaire lui-même pendant cette période ?

 24   R.  Non. Il ne voulait pas être membre d'un parti politique quel qu'il

 25   soit, il n'a jamais rien eu à voir avec tout cela. Il n'a jamais rien

 26   soutenu.

 27   Q.  Lorsque vous avez été interrogée par mon collègue, on vous a montré un

 28   permis en date du 21 décembre 1991. Et à en juger d'après ce permis, je


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  1   crois comprendre que c'est à ce moment-là que vous êtes revenus à Vukovar

  2   de façon plus ou moins permanente ?

  3   R.  C'était la décision que nous avons prise en tant que famille.

  4   Toutefois, il nous fallait trouver un logement, un endroit où habiter, le

  5   nettoyer, le remettre en état, et nous avons décidé de rester sur place, de

  6   ne pas aller ailleurs. Et c'est pour ça qu'on s'est présentés pour obtenir

  7   des rations, des soins de santé, et pour un éventuel travail qu'on pourrait

  8   obtenir à Vukovar.

  9   Mme CLANTON : [interprétation] Je vois que l'heure est arrivée.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame Clanton.

 11   Madame Brlic-Jovanovic, nous allons donc faire une pause de 30 minutes, et

 12   nous reprendrons à 11 heures.

 13   La séance est levée.

 14   --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.

 15   --- L'audience est reprise à 11 heures 01.

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Madame

 17   Clanton

 18   Mme CLANTON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, avant la pause, je vous ai demandé si vous et

 20   si votre famille, si vous êtes revenus à peu près le 21 décembre à Vukovar

 21   et que vous y êtes restés par la suite, et vous avez dit que vous avez pris

 22   cette décision en tant que famille, que vous étiez à Vukovar à l'époque et

 23   que vous vouliez nettoyer la maison, la maison dans laquelle vous habitiez.

 24   Donc, vous étiez bien habitante de Vukovar, vous résidiez à Vukovar ?

 25   R.  On s'est rendus encore à plusieurs reprises chez mon oncle pour

 26   chercher de la nourriture, pour faire le linge parce qu'on ne pouvait pas

 27   le faire à la maison. Donc, on s'est rendus dans la maison de mon oncle,

 28   c'est là que l'on s'est lavés et qu'on lavait le linge. On se procurait de


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  1   la nourriture, et ensuite on pouvait rentrer chez nous parce qu'on était

  2   déjà en hiver. Et puis les fêtes de Noël catholique, nous les avons passées

  3   à Vukovar. Et je peux vous dire que j'ai été surprise agréablement de voir

  4   que certains gens que je connaissais m'ont souhaité Joyeux Noël. A moi,

  5   toute seule, évidemment.

  6   Q.  Quand vous dites que vous vous laviez, ensuite, vous retourneriez à

  7   Vukovar, là où vous habitiez; c'est bien cela ?

  8   R.  Oui, oui, oui, bien sûr, oui.

  9   Q.  Merci. Et dans votre déclaration, il est dit que vous avez recueilli --

 10   enfin, vous avez pu partir à la retraite en 2008; est-ce exact, que vous

 11   avez réuni à ce moment vos droits à la retraite ?

 12   R.  Oui, j'avais 60 ans à l'époque, c'était mon 60e anniversaire à

 13   l'époque, c'était la loi en Croatie. Donc, j'ai pu partir à la retraite à

 14   cause de mon âge. Aujourd'hui, cela a changé.

 15   Parce qu'entre-temps, je ne sais pas si cela vous intéresse, mais

 16   depuis 1991, je n'ai jamais travaillé où que ce soit parce que mon époux

 17   était malade, parce que notre situation n'était pas réglée. Ensuite, il est

 18   tombé malade. Ensuite, mon beau-frère a disparu. On ne l'a pas retrouvé au

 19   jour d'aujourd'hui.

 20   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, vous avez deviné la question suivante. Donc,

 21   vous n'avez pas travaillé en tant que journaliste après 1991; est-ce exact

 22   ?

 23   R.  Oui, c'est exact. Le dernier jour de mon travail en tant que

 24   journaliste a eu lieu le 24 août 1991. Et donc, mon dernier jour de travail

 25   a eu lieu le 31 août 1991, et c'est ce qui est noté dans mon livret de

 26   travail.

 27   Q.  A l'époque, si j'ai bien compris et je vais vous demander de en mesure

 28   confirmer cela, vous n'aviez pas de liens sociaux ou personnels avec Hadzic


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  1   ?

  2   R.  Depuis que je l'ai vu en 1991, je ne l'ai plus jamais revu et je

  3   n'avais aucune raison d'avoir des contacts avec lui. Si quelqu'un avait

  4   besoin de moi, il pouvait me trouver. Mais non, cela n'a pas eu lieu.

  5   Q.  Merci. Vous avez mentionné le mois d'avril 1991, et je voudrais parler

  6   de cela avec vous.

  7   Vous avez parlé de cela dans votre déclaration, vous avez dit que vous avez

  8   fait une interview de M. Hadzic après l'interview [comme interprété] de

  9   Plitvice. Et voici ma question : est-ce que vous êtes d'accord avec moi

 10   pour dire qu'à l'époque l'ambiance était plutôt tendue ?

 11   R.  Absolument, oui. Cela étant dit, tout le monde était encore là. Il y

 12   avait encore une chance qu'un accord soit obtenu, que la situation n'empire

 13   pas et ne se détériore pas. A l'époque, mon souhait était, et je le

 14   souhaite encore au jour d'aujourd'hui, eh bien, qu'en dépit de ce que l'on

 15   a vécu, eh bien, qu'on puisse résoudre le problème dans une entente,

 16   compréhension, entraide. Et c'est dans ce sens que j'ai appelé les

 17   représentants de tous les partis politiques. Ils sont tous venus, ils se

 18   sont exprimés de façon cultivée, ils ne se sont pas insultés entre eux.

 19   Moi, j'ai aimé la façon dont Goran Hadzic s'est tenu. Il était tout à fait

 20   poli, il ne parlait pas trop.

 21   Mme CLANTON : [interprétation] Je vais demander à la Greffière à m'aider.

 22   Je vais demander la pièce 65 ter --

 23   Q.  Est-ce que vous êtes bien ?

 24   R.  Oui. De temps en temps, je perds le son. Et c'est pour ça que j'ajuste

 25   mes écouteurs. Mais je pense que j'entends tout. Tout va bien.

 26   Q.  Si vous avez des difficultés, vous pouvez toujours le dire.

 27   R.  Oui, oui, c'est pour ça que j'ajuste mes écouteurs, mais très bien,

 28   très bien, je vais le faire.


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  1   Q.  Est-ce que vous vous souvenez qu'à l'époque des ministres, y compris le

  2   ministre d'affaires intérieures croate et son adjoint, Degoricija, sont

  3   venus à Vukovar justement pour dissiper les tensions dont on a parlé ?

  4   R.  Oui, je me souviens de cela parce que j'ai été présente. Il ne

  5   s'agissait pas là vraiment de négociations et je n'étais pas présente au

  6   moment des négociations menées par M. Boljkovac. J'ai passé toute l'après-

  7   midi dans une pièce voisine en compagnie d'autres journalistes en attendant

  8   de voir quelles seraient les conclusions de ces négociations parce qu'on ne

  9   pouvait pas être présents au moment des négociations. Et des représentants

 10   des villages serbes avaient posé leurs conditions, pour ainsi dire. Et moi,

 11   j'ai demandé à M. Boljkovac de permettre --

 12   Q.  Excusez-moi de vous interrompre.

 13   Mme CLANTON : [interprétation] Je vais demander à la greffière de montrer

 14   la pièce 1D02191 [comme interprété], qui se trouve à l'intercalaire 12.

 15   Je ne pense pas que c'est le bon document. Le document 1D02122 [comme

 16   interprété].

 17   Q.  Donc, Madame, je voudrais vous poser quelques questions au sujet de ce

 18   que vous venez de nous dire. Je vais vous demander d'examiner avec moi cet

 19   article et dites-moi si vous réussissez à lire quelque chose ici.

 20   R.  Non, même avec la loupe, je n'arrive pas. Mais peut-être si je pouvais

 21   regarder le document papier, cela va m'aider. Vous savez, je ne vois

 22   vraiment pas très bien. Donc, si jamais si je pouvais voir le document

 23   papier, peut-être que ceci serait plus facile parce que même avec la loupe,

 24   je ne vois pas.

 25   Mme CLANTON : [interprétation] Eh bien, j'ai aussi un exemplaire papier. Je

 26   pourrais demander à l'huissier de le donner au témoin. Tout ce que j'ai

 27   ajouté sur ce document, c'est le numéro 65 ter.

 28   Q.  Ce que je veux vous demander de confirmer, c'est ce que vous avez dit


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  1   au sujet des journalistes qui attendaient dans la pièce à côté, et vous

  2   attendiez d'entendre les résultats des négociations, et cet article parle

  3   des mêmes événements, n'est-ce pas ?

  4   R.  A deux reprises, j'ai assisté à une réunion avec le sommet de la JNA,

  5   il fallait se rendre à Borovo Selo. Et M. Stane Brovet, un officier de son

  6   Etat, était présent. Ma mémoire est plus fraîche par rapport à cet

  7   événement parce que la question s'est posée de savoir qui avait le droit de

  8   venir et qui n'avait pas le droit de venir. Moi, je ne pouvais pas m'y

  9   rendre, mais j'ai appris que les choses se sont bien passées. C'est pour

 10   cela que j'ai écrit à ce sujet.

 11   En ce qui concerne M. Boljkovac, cette réunion à laquelle il a assisté,

 12   j'ai parlé avec lui tout seul à la fin de toutes les réunions quand une

 13   initiative a été faite. Et moi j'ai préféré lui poser la question au sujet

 14   des conclusions plutôt que de tirer mes propres conclusions. Et M.

 15   Boljkovac a accepté qu'une fois tous les participations aux négociations

 16   sortis, eh bien, qu'il donne son point de vue en utilisant un magnétophone.

 17   Jusuf Cehajic, mon collègue, a manipulé le magnétophone. Il est mort entre-

 18   temps au cours d'un pilonnage.

 19   Et M. Boljkovac a perdu ce document, ils étaient en train de le chercher,

 20   et moi j'ai demandé si moi, si je pouvais le trouver, et il m'a donné la

 21   permission de le faire. Et j'ai réussi à le trouver dans la poche de sa

 22   veste. Je n'ai pas eu le temps de lire ce qui était écrit sur ce document

 23   mais on l'a enregistré en train de nous raconter les événements. Après

 24   cela, je suis restée en bons termes avec M. Boljkovac. J'avais même son

 25   numéro de téléphone à Zagreb, je pouvais l'appeler si j'avais besoin de

 26   quoi que ce soit.

 27   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, sur la base de tout ce que vous venez de nous

 28   dire au sujet de votre présence après ces négociations et pendant les


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  1   négociations, je voudrais vous demander de confirmer ce qui est écrit ici,

  2   c'est quelque chose qui a été publié dans le journal Vukovarske Novine.

  3   R.  Oui, c'est à peu près cela.

  4   Q.  Dans cet article, on parle des différentes possibilités pour baisser

  5   les tensions, pour prendre des mesures pour arrêter des individus qui

  6   provoquent le désordre. Est-ce aussi cohérent par rapport à vos souvenirs ?

  7   R.  Oui.

  8   Mme CLANTON : [aucune interprétation]

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Gosnell.

 10   M. GOSNELL : [interprétation] Eh bien, en anglais, il est écrit que la

 11   "deuxième page manque". Je ne dis pas qu'à cause de cela la première page

 12   n'est pas admissible mais je voudrais quand même ajouter cela, surtout par

 13   rapport à l'avant-dernière réponse du témoin.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Nous l'avons maintenant couché au

 15   compte rendu d'audience.

 16   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le document est versé au dossier. Il

 18   va recevoir une cote.

 19   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] P3264.

 20   Mme CLANTON : [interprétation]

 21   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, nous avons entendu dire que vous avez travaillé

 22   jusqu'au 24 août 1991. Et maintenant, je voudrais vous demander de

 23   confirmer si certaines personnes - je vais vous donner leurs noms - s'ils

 24   étaient bien vos collègues pendant la période allant entre le 4 mai 1991 et

 25   le 24 août 1991.

 26   Donc, je vais vous donner leurs noms, et vous pouvez tout simplement dire

 27   si c'étaient bien vos collègues à l'époque c'était une ville croate [comme

 28   interprété], Vukovar.


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  1   R.  Est-ce que je peux ajouter des informations concernant ces personnes à

  2   l'époque, hein, ce je savais à leur sujet ? Je peux vous expliquer pourquoi

  3   je souhaite faire cela.

  4   Q.  Malheureusement, nous n'avons pas beaucoup de temps aujourd'hui, donc

  5   je vais vous demander tout simplement de répondre par un oui ou par un non.

  6   R.  Très bien, très bien.

  7   Q.  Donc, Zdravko --

  8   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu le nom de famille.

  9   Mme CLANTON : [interprétation]

 10   Q.  Est-ce que vous vous souvenez de lui ?

 11   R.  Seremet, Seremet. S avec un diacritique, e-r-e-m-e-t.

 12   Q.  Oui, je n'ai pas bien prononcé son nom. Zdravko Seremet était-il

 13   employé de la Radio croate de Vukovar ?

 14   R.  Oui. C'est le ministre Hitrec qui l'a nommé à ce poste. On a corrigé le

 15   nom qui a été mal noté dans le télégramme qui est arrivé avant la décision

 16   portant sa nomination.

 17   Q.  La deuxième personne, peut-être que je ne vais pas bien prononcer son

 18   nom, Josip Esterajher --

 19   R.  E-s-t-e-r-a-j-h-e-r, Esterajher, c'est comme cela que nous prononçons

 20   cela. Vous voulez que j'ajoute quelque chose ? Parce que je le connaissais.

 21   Oui. Il a été nommé au poste --

 22   Q.  Donc, il a bien travaillé pour la Radio croate de Vukovar ?

 23   R.  Oui.

 24   Mme CLANTON : [interprétation] J'ai demandé au témoin s'il était bien

 25   membre de la Radio croate à l'époque, s'il était employé de la Radio croate

 26   à l'époque.

 27   Q.  Et maintenant, je voudrais vous poser la question au sujet d'une autre

 28   personne. Sinisa Glavasevic était-il membre de la Radio croate de Vukovar,


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  1   ou employé, plutôt ?

  2   R.  Oui. C'était mon technicien.

  3   Q.  Et Branko Polovina --

  4   R.  Oui. Tous les deux, ils ont travaillé dans la même équipe. Ils ont

  5   travaillé pour moi tous les deux. Après, c'est Sinisa qui était responsable

  6   de la radio. Quand je suis partie, il est resté derrière moi.

  7   Q.  Pourriez-vous attendre que je termine la question posée, parce que

  8   sinon nous avons un problème avec l'interprétation.

  9   Ensuite, la personne suivante, Vesna Vukovic. Vous souvenez-vous si elle

 10   travaillait pour la radio elle aussi ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Et Alenka Mirkovic ?

 13   R.  Alemka, oui.

 14   Q.  Et Stjepan Penic, est-ce que lui aussi il a travaillé là-bas?

 15   R.  Oui, mais il a été tué avant tous les autres qui, à l'époque, n'étaient

 16   pas encore là. Ce nom que vous avez mentionné, en fait, ils ont commencé à

 17   travailler à la radio plus tard.

 18   Q.  Et Svejtlana Polovina, la dernière personne, est-ce que vous vous

 19   souvenez d'elle ?

 20   R.  Oui, oui. C'était [inaudible], et c'était l'épouse de Branko.

 21   Est-ce que je peux ajouter quelque chose ? En ce qui concerne la période --

 22   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, permettez-moi de poursuivre avec les questions. 

 23   R.  Vous avez d'autres questions ? Très bien.

 24   Q.  Vous venez de dire que M. Penic a été tué avant que les autres ne

 25   viennent travailler. Ce que j'ai voulu savoir, vous savez qu'il a été tué,

 26   et est-ce que vous savez qu'il existait un membre de la Défense

 27   territoriale de Dalj qui se vantait d'avoir tué Penic, Stjepan Penic ?

 28   R.  Stjepan Penic habitait Dalj, il m'a appelée en dernier à l'antenne.


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  1   Après, on a appris que Stjepan a été tué, parmi d'autres. Nous, nous

  2   l'appelions Stevo. Il a été tué et brûlé, et j'ai été chargée d'organiser

  3   un rassemblement commémoratif à Vukovar en son honneur. Et, la veille, j'ai

  4   été avec Sinisa Glavasevic et Branko Polovina, on s'est rendus à une

  5   commémoration à Osijek qui a été organisée par la Voix de Slavonie.

  6   Q.  Il y a un instant, vous avez mentionné Sinisa Glavasevic, est-ce que

  7   vous savez ce qui lui est arrivé après ?

  8   R.  Non, je l'ai appris plus tard. Enfin, il n'y a pas longtemps, bien de

  9   temps plus tard. Pendant très longtemps, je ne savais pas quel a été son

 10   sort et le sort de mes collègues en général.

 11   Mme CLANTON : [interprétation] Je vais demander à la Greffière de nous

 12   montrer la pièce 65 ter 6660, qui se trouve a l'intercalaire 30.

 13   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, est-ce que vous voyez la photo sur l'écran ?

 14   R.  Oui, c'est Sinisa.

 15   Q.  Quel est son nom de famille ?

 16   R.  Glavasevic.

 17   Q.  Madame, ici on dit qu'il est dans un studio improvisé dans Vukovar

 18   encerclé. Est-ce qu'à l'époque vous travailliez là-dedans ?

 19   R.  Non. Jusqu'au 20 août, j'ai été dans la rédaction officielle de la

 20   Radio Vukovar, jusqu'au 24 août précisément, mais après, je ne sais pas ce

 21   qui s'est passé.

 22   Mme CLANTON : [interprétation] Je vais demander que cette photo soit versée

 23   au dossier.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ce document va être versé au dossier,

 25   il va recevoir une cote.

 26   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce à conviction

 27   P3265.

 28   Mme CLANTON : [interprétation]


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  1   Q.  Il y a un instant, vous avez dit que pendant très longtemps vous ne

  2   saviez pas quel a été le sort de vos collègues. Est-ce que vous savez

  3   aujourd'hui ce qui lui est arrivé à Sinisa Glavasevic et à Branko Polovina

  4   ?

  5   R.  Oui, mais je ne sais pas quand, je ne sais pas pourquoi, je ne sais pas

  6   comment. Je n'ai pas d'information à ce sujet.

  7   Q.  Savez-vous qu'ils ont été tués à Ovcara ?

  8   R.  Cela, je l'ai appris. Mais je ne peux pas vous dire quand exactement,

  9   mais il s'agit là d'information plus récente. Il y a eu toutes sortes de

 10   commémorations qui ont été organisées, et lorsque son jeune fils, Bojan,

 11   était déjà adulte.

 12   Q.  Je souhaite maintenant revenir à la période où Mirko Stankovic était le

 13   rédacteur en chef de Radio Vukovar. Premier paragraphe de votre

 14   déclaration.

 15   Savez-vous, Madame Brlic-Jovanovic, qu'après son départ de Radio Vukovar,

 16   il est allé travailler pour Politika, qui était un journal basé à Belgrade,

 17   me semble-t-il ?

 18   R.  Je ne sais pas où il a travaillé, mais je sais qu'il a continué à

 19   travailler en qualité de journaliste pour les médias.

 20   Mme CLANTON : [interprétation] La Greffière d'audience, peut-elle m'aider à

 21   afficher le numéro 65 ter 6659.

 22   Il s'agit d'un article extrait d'un journal, et compte tenu de sa taille,

 23   je vais demander à remettre un exemplaire dudit article au témoin. Puis-je

 24   avoir l'aide de l'huissier, s'il vous plaît.

 25   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, vous avez précisé que vous connaissiez Mirko

 26   Stankovic, que vous savez qu'il a continué à travailler en tant que

 27   journaliste. Il s'agit d'un article qui a été publié au mois de septembre

 28   1992, me semble-t-il, dans Vukovarske Novine.


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  1   Je souhaite vous poser cette question-ci : cet article précise, voici le

  2   titre : "Commandant ici". Savez-vous qui est Stanko Vujanovic, et son nom

  3   est Stanko Vujanovic. Savez-vous qui est Stanko Vujanovic ?

  4   R.  Je n'ai pas vu ce document auparavant.

  5   L'INTERPRÈTE : Commandant au chapeau melon. Note de l'interprète.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors je ne savais pas qu'il y avait ce

  7   journal de Vukovarske Novine. Je pensais qu'il n'y avait plus rien qui

  8   fonctionnait après la chute de Vukovar. Je ne connaissais pas ce journal.

  9   Je ne savais pas que ce journal continuait à être imprimé, et dans le cas

 10   où cela s'est effectivement passé ainsi, je n'ai reçu aucun exemplaire de

 11   ce journal et, très honnêtement, je m'en souciais peu.

 12   Mme CLANTON : [interprétation]

 13   Q.  Reconnaissez-vous ici le nom de l'auteur qui, je crois, si vous

 14   regardez la page de droite, au-dessus de la photographie ici, veuillez nous

 15   dire qui est l'auteur de cet article ?

 16   R.  Eh bien, l'article a été signé de la main de Mirko Stankovic, et M ici,

 17   cela veut dire M, c'est son prénom.

 18   Q.  Et, d'après ce que j'ai compris, vous n'avez pas vu cet article

 19   auparavant. Savez-vous qui est Stanko Vujanovic ?

 20   R.  C'était un chauffeur de taxi à Vukovar avant la guerre. Mais je ne

 21   savais rien à son sujet, et il y avait aucune raison pour que cet homme

 22   soit important à mes yeux, en tout cas.

 23   Q.  Et depuis que vous êtes rentrée à Vukovar, pendant la guerre et après,

 24   avez-vous jamais appris que Stanko Vujanovic était le commandant adjoint de

 25   la TO, qu'il faisait partie de la Défense territoriale de Petrova Gora ?

 26   R.  Non.

 27   Q.  Avez-vous jamais appris qu'il a été condamné en 2005 et condamné à 20

 28   ans d'emprisonnement pour les meurtres commis à Ovcara ?


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  1   R.  J'ai entendu des récits. Et lorsque des documents ont été publiés par

  2   d'anciens citoyens, il y avait des commentaires au sujet du fait que les

  3   gens savaient. Moi, je ne savais pas, je n'avais aucun contact avec lui.

  4   Q.  Avez-vous eu des contacts avec Mirko Stankovic en 1992 ou 1993 ?

  5   R.  Lorsque nous étions à Sid, j'avais son adresse. Son autre adresse. Car

  6   la première adresse, c'était l'adresse de la maison de la mère du directeur

  7   Radio Sid. Mirko Stankovic a provoqué un incendie. On l'a chassé et,

  8   ensuite, on a mis à sa disposition un autre logement. Cet homme était

  9   excellent. Il disséminait la propagande et il était très bon en cela. Je ne

 10   suis pas en train de dire que ce qu'il a écrit n'a rien à voir avec la

 11   réalité.

 12   Q.  Madame, alors, je souhaite que vous regardiez la première colonne qui

 13   se trouve à gauche, le paragraphe du bas, en cyrillique. Et moi, ce qui

 14   m'intéresse, c'est la partie qui commence par -- pardonnez-moi, ce récit,

 15   on commence, donc : "Il a suivi cette voie-là…"

 16   R.  Je commence à lire à partir d'où ?

 17   Q.  Le paragraphe qui commence par : "Ce récit va dans ce sens-là."

 18   Le paragraphe qui se lit.

 19   R.  Oui, oui.

 20   Q.  Alors, ce qu'on peut lire :

 21   "Nous, nous allons vous aider à découvrir quelque chose que vous ne saviez

 22   pas au sujet d'un de nos autres héros qui venait de cette région, Stanko

 23   Vujanovic."

 24   Et ensuite, la deuxième partie que je souhaite que vous regardiez, dans la

 25   version de votre langue, cela se trouve sur la page de droite. Veuillez

 26   regarder la partie qui se trouve à droite, à la colonne du milieu.

 27   R.  C'est ici ? C'est cela que je dois regarder, c'est là que je le trouve,

 28   c'est cela ?


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  1   Q.  Oui, je souhaitais simplement attirer votre attention là-dessus, ce

  2   qu'a dit Mirko Stankovic lorsqu'il a présenté M. Vujanovic. Et maintenant,

  3   si vous le pouvez -- bon, je me rends compte du fait qu'il s'agit d'un

  4   article qui est assez long, et je vous demande de bien vouloir regarder la

  5   deuxième page, la partie qui se trouve à droite, et ensuite dans la colonne

  6   du milieu, le premier paragraphe au milieu, donc, premier paragraphe

  7   entier. Et ici, nous avons une citation qui est de Stanko Vujanovic, où on

  8   peut lire :

  9   "Ces deux peuples ne peuvent plus être ensemble. Et tout contact à l'avenir

 10   entre ces deux peuples signifierait une nouvelle guerre, la destruction" --

 11   R.  Est-ce que quelqu'un peut m'aider à trouver le passage en question ? Je

 12   n'arrive pas à retrouver cet endroit.

 13   Q.  Madame, alors, je souhaite vous aider. Veuillez regarder la page de

 14   droite, s'il vous plaît, puisque vous avez vu que ça a été scotché

 15   ensemble. Et ici, sur la partie de droite, si vous regardez la partie qui

 16   se trouve à droite, c'est ce que vous avez sous les yeux, la page qui se

 17   trouve à droite.

 18   M. GOSNELL : [interprétation] Alors moi, je ne m'y opposerais pas si le

 19   Procureur souhaite surligner le passage en question.

 20   Mme CLANTON : [interprétation] Merci beaucoup, oui. Je peux effectivement

 21   faire ça.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, oui, oui. Oui, ce serait vraiment

 23   très utile pour moi. Ne perdons pas de temps. Que quelqu'un surligne le

 24   passage en question, ce serait parfait.

 25   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète de la cabine B/C/S : Nous ne voyons la

 26   page qui correspond n'est pas affichée à l'écran non plus, la bonne page

 27   n'est pas affichée.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, permettez-moi simplement de lire cet


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  1   article que je sache de quoi il s'agit.

  2   Mme CLANTON : [interprétation]

  3   Q.  Oui. Madame Brlic-Jovanovic, la question que je souhaitais vous poser

  4   concerne ce passage où Stanko Vujanovic est cité, ses propos sont cités.

  5   Pour que le compte rendu d'audience soit précis, c'est le passage où il

  6   précise que : "Ces deux peuples ne peuvent plus être ensemble", et il parle

  7   des Oustachi, du fait que si les Oustachi posent le pied sur la terre

  8   serbe, et que s'il y a un contact à l'avenir entre ces deux peuples, cela

  9   signifie qu'il y aura une nouvelle guerre. Voyez-vous ce passage ?

 10   R.  Oui, je le vois.

 11   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que ce journaliste, M.

 12   Stankovic, ainsi que cet article dans Vukovarske Novine, présente M.

 13   Stankovic comme un héros, comme une personne importante à Vukovar ?

 14   R.  Alors, moi je n'avais pas d'information à cet effet, je ne savais pas

 15   qu'il était aussi important, et je savais que Mirko Stankovic avait lancé

 16   une guerre de propagande, je ne pense pas que ce soit étrange que l'on

 17   parle de quelque chose de laid et d'affreux, et que l'on ait consigné ceci

 18   par écrit.

 19   Mme CLANTON : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

 20   document, s'il vous plaît.

 21   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète : Veuillez remplacer le nom à la page

 22   44, ligne 3 par Stanko Vujanovic.

 23   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] P3265, Monsieur les Juges.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 25   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pardonnez-moi, il s'agit de la pièce

 26   P3266.

 27   Mme CLANTON : [interprétation]

 28   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, alors, un peu plus tôt aujourd'hui, vous avez


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  1   évoqué la poésie avec mon éminent confrère, ainsi que la poésie que l'on

  2   lisait à Radio Vukovar. Tout d'abord, je souhaite vous poser cette

  3   question-ci : d'après votre déclaration, vous animiez une émission qui

  4   s'appelait "Le dimanche à dix heures". Est-ce la seule émission que vous

  5   animiez à Radio Vukovar ? Je parle de la période qui allait de 1985 à 1990.

  6   R.  Alors, j'avais l'obligation de faire cela, mais je préparais des

  7   reportages pour d'autres émissions et pour l'actualité télévisée.

  8   Q.  Alors, j'ai quelques questions à vous poser au sujet de pièces qui ont

  9   été versées, ainsi que votre déclaration.

 10   Mme CLANTON : [interprétation] Il s'agit du document 1D00456, s'il vous

 11   plaît. Il s'agit de la pièce de la Défense qui comporte l'intercalaire

 12   numéro 1. Pardonnez-moi, il s'agit de l'intercalaire numéro 2. Et numéro

 13   d'intercalaire de l'Accusation, c'est le numéro 8.

 14   Messieurs les Juges, je demande à ce que l'huissier nous apporte son

 15   concours pour remettre une copie, une version papier au témoin, s'il vous

 16   plaît.

 17   R.  Bien.

 18   Q.  Alors, moi ce qui m'intéresse, c'est le bas de la page, le bas de la

 19   page. Alors, ce que nous avons maintenant à l'écran, c'est un programme de

 20   Radio Vukovar, et cela correspond à la période qui va de l'année 1990 au

 21   mois de mars 1991.

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Alors, si nous regardons ce programme qui correspond à la journée du

 24   dimanche, on voit les émissions qui ont été diffusées enter 8 heures et 11

 25   heures du matin; voyez-vous cela ?

 26   R.  Alors, je cherche.

 27   Q.  Je crois qu'on voit l'ensemble des émissions pour dimanche, lundi,

 28   mardi --


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  1   R.  Oui, ça y est, j'ai trouvé le passage en question.

  2   Q.  Alors, si vous regardez les autres jours de la semaine, de lundi à

  3   samedi, il semblerait que les émissions ici sont des émissions diffusées

  4   enter 13 heures 30 et 17 heures; voyez-vous cela ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Alors, la question que j'ai à vous poser est celle-ci : qu'est-ce que

  7   l'on diffusait à la radio en dehors de ces heures-là ? On voit ici le

  8   programme des émissions, qui correspond à trois, cinq heures par jour.

  9   Alors, moi ce qui m'intéresse, c'est de savoir ce qui était diffusé pendant

 10   le reste du temps.

 11   R.  Il y avait beaucoup de musique. A mon époque, il y avait différents

 12   genres, surtout de la musique classique, de la musique populaire, de la

 13   musique folklorique. Nous avions l'obligation d'établir une liste car nous

 14   étions en contact avec l'agent de l'auteur et, donc, il fallait verser les

 15   droits d'auteur.

 16   Q.  Donc, vous nous avez dit qu'on lisait de la poésie lors de votre

 17   émission; 'est exact ?

 18   R.  Non, il n'y avait pas simplement de la lecture de poésie, cela

 19   dépendait. Vous voulez parler du "Dimanche à dix heures" ?

 20   Q.  Non. Il y avait d'autres émissions que vous animiez ?

 21   R.  Non. Lors de l'actualité télévisée, il y avait quelques fois quelques

 22   reportages qui étaient diffusés après que ce soient produits certains

 23   événements. On disait qu'il s'était passé quelque chose et, ensuite, le

 24   lendemain, on disait que telle et telle chose s'était passée. Et si cela

 25   valait vraiment la peine, on diffusait une version réduite. Et à ce moment-

 26   là, il s'agissait d'un reportage assez court.

 27   A une occasion, il y avait un Rajka Dobronic, un artiste célèbre, Rajka

 28   Dobronovic, qui souhaitait qu'il y ait un reportage sur elle. Et je


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  1   souhaitais que l'on puisse avoir ou diffuser un enregistrement audio de son

  2   concert. Donc, tout ceci était bref où il fournissait des éléments

  3   d'informations. Même s'il s'agissait de poésie, par exemple, bon, on disait

  4   : Hier soir, à tel et tel endroit, un livre a été publié. Et nous avions un

  5   auditoire important. Le meilleur endroit, c'était tel et tel endroit. En

  6   tant qu'auteur, eh bien, l'auteur devait accepter de venir, et ensuite on

  7   demandait à l'auteur de lire un passage, et on le remerciait que c'était --

  8   Q.  Alors, si j'ai bien compris, on lisait de la poésie lors de l'émission

  9   que vous animiez, mais il y avait aussi d'autres éléments, comme

 10   l'actualité, d'autres choses, comme l'actualité ?

 11   R.  Alors, c'était obligatoire de diffuser l'actualité, mais l'actualité

 12   comme ça parce qu'il s'agissait, en fait, d'une radio locale. Il fallait

 13   informer le public et il fallait parler de tout et il fallait parler des

 14   choses importantes et des décisions prises par les organes locaux. Et il ne

 15   restait que très peu de temps pour parler d'autres choses, et encore moins

 16   de choses qui étaient purement de l'amusement.

 17   Q.  Alors, vous avez parlé d'autres éléments, vous abordiez d'autres

 18   choses, pas seulement l'actualité locale, alors vous avez parlé de la

 19   poésie en particulier, les lectures de poèmes à la radio. Alors à quelle

 20   fréquence cela se faisait-il ?

 21   R.  Il y avait peu de lectures de ce genre. Les gens ne s'intéressaient pas

 22   à la poésie. Les gens préféraient les émissions sportives et le sport

 23   faisait partie de chaque journal télévisé. Et l'actualité télévisée était

 24   en général courte, c'était une version abrégée que l'on diffusait. S'il y

 25   avait autre chose, bon, je ne sais pas, quelque chose à ce moment-là serait

 26   mentionné dans les différentes langues et différents groupes ethniques. Et

 27   c'étaient mes collègues, en fait, qui s'occupaient de cela, qui

 28   appartenaient à un groupe ethnique particulier. Moi, je ne pouvais pas


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  1   parler toutes ces langues-là. Je n'étais pas le rédacteur en chef et eux

  2   n'étaient pas obligés de me fournir des traductions ou quelque chose de ce

  3   genre. Il y avait des Ruthènes, il y avait le ruthénien, l'ukrainien, et

  4   cela faisait partie de la rédaction. Nous avions également des émissions en

  5   hongrois. Et voilà, donc ça c'était le programme, c'était l'actualité pour

  6   la journée. Il y avait une personne qui faisait cela à mi-temps. Alors,

  7   nous avions également le slovaque.

  8   Q.  Alors, si je comprends bien, vous dites qu'il y avait des programmes

  9   dans différentes langues. Vous venez de dire qu'avec votre programme, votre

 10   émission, il y avait un contenu qui était mixte.

 11   Alors, ma question maintenant, c'est s'agissant des autres journalistes,

 12   avaient-ils des émissions à Radio Vukovar et quelqu'un avait-il une

 13   émission qui était purement dédiée à la poésie ?

 14   R.  Non. Personne ne faisait quelque chose de particulier. Nous préparions

 15   l'actualité ensemble et, ensuite, des différents journalistes s'occupaient

 16   de différentes choses. Il y avait un journaliste qui s'occupait du sport.

 17   Moi, j'avais mon émission à dix heures, et mon émission était une émission

 18   qui parlait de tout. C'était un pot-pourri, et tout ce qui pouvait

 19   intéresser les auditeurs, eh bien, je l'incluais dans mon émission. Il y

 20   avait ensuite un reportage, et ensuite on entendait une chanson ou un

 21   chant.

 22   Q.  Alors, Madame Brlic-Jovanovic, avez-vous jamais entendu dire que

 23   d'autres présentateurs ou animateurs ou journalistes lisaient de la poésie

 24   à la manière dont vous l'avez précisé, et qu'ensuite il y avait un

 25   reportage, et ensuite une chanson ou un reportage ou ensuite une autre

 26   présentation sur autre chose ?

 27   R.  Non, personne d'autre ne faisait cela.

 28   Q.  Mais vous êtes d'accord, n'est-ce pas, pour dire que les autres


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  1   journalistes animaient d'autres émissions à la radio et que leurs émissions

  2   comportaient un certain nombre de choses différentes, par exemple, de la

  3   musique l'actualité, des interviews, et cetera, lors de leurs émissions ?

  4   R.  Non, je n'entends pas l'interprétation.

  5   Q.  Madame, avez-vous entendu ma question ? Bon, si tel n'est pas le cas,

  6   nous pouvons demander à l'huissier --

  7   R.  Alors, les autres n'avaient pas des émissions qui étaient leurs propres

  8   émissions, ce n'étaient pas les auteurs de leur propre émission comme mon

  9   émission, "Le dimanche à 10 heures". Ils préparaient simplement les

 10   éléments d'actualité pour une émission d'actualité, ou s'il s'agissait

 11   d'une émission pour enfants. Ces journalistes-là ne préparaient que de

 12   courtes présentations ou reportages mais n'avaient pas leur propre émission

 13   et ne pouvaient pas dire : Voilà, ça c'est mon émission qui sera uniquement

 14   consacrée à la poésie ou à autre chose, comme moi je l'avais. Moi, j'avais

 15   donc ce temps d'antenne qui était le mien, et à ce moment-là j'étais

 16   responsable de ce que je faisais.

 17   Q.  Alors, Madame Brlic-Jovanovic, s'agissant des autres personnes qui

 18   travaillaient à Radio Vukovar avaient également des émissions qu'elles

 19   animaient, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Et vous avez dit -- bon, je vous ai demandé si vous avez entendu dire

 22   que d'autres présentateurs ou animateurs avaient ou lisaient de la poésie

 23   lors de leurs émissions. Vous dites que vous n'avez jamais entendu parler

 24   de cela. Mais la question que je vous pose aujourd'hui, c'est de savoir si

 25   on diffusait de la poésie à la radio, cette poésie était saucissonnée entre

 26   d'autres éléments et d'autres émissions ?

 27   M. GOSNELL : [interprétation] Alors, cela appelle à la conjecture.

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell.


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  1   M. GOSNELL : [interprétation] Il y a déjà deux questions qui ont été posées

  2   dans ce sens. Il semblerait que l'Accusation n'aime pas beaucoup les

  3   réponses qu'on lui donne.

  4   Mme CLANTON : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite

  5   simplement que les réponses du témoin soient claires. Je peux reformuler ma

  6   question.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous en prie.

  8   Mme CLANTON : [interprétation]

  9   Q.  Est-ce que j'ai bien compris, Madame Brlic-Jovanovic, alors, les

 10   émissions que l'on diffusait à Radio Vukovar étaient des émissions qui

 11   avaient un contenu mixte, c'est-à-dire que vous-même, vous pouviez dire que

 12   vous animiez une émission qui comportait différents éléments; c'est cela ?

 13   M. GOSNELL : [interprétation] Ligne 13, la question a été posée et ligne

 14   19, la réponse a été fournie.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Clanton, c'est exact.

 16   Mme CLANTON : [interprétation] Alors, si je puis poser la question au

 17   témoin, si je peux lui demander si c'était le cas des autres personnes qui

 18   travaillaient à Radio Vukovar.

 19   M. GOSNELL : [interprétation] Encore une fois, même question, ligne 13 et

 20   ligne 19, la même question. La question qui portait sur d'autres personnes,

 21   et non pas sur le témoin directement.

 22   Mme CLANTON : [interprétation] Monsieur le Président, alors je comprends

 23   que mon confrère soulève une objection parce que ceci peut conduire le

 24   témoin à se livrer à des conjectures. Mme Brlic-Jovanovic, qui a travaillé

 25   depuis 1972, connaît bien la manière dont fonctionne Radio Vukovar, et la

 26   question que je lui pose porte simplement sur le fait de savoir si les

 27   autres émissions avaient également un contenu mixte. Pour autant qu'elle le

 28   sache.


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  1   M. GOSNELL : [interprétation] L'objection à ce stade, Monsieur le

  2   Président, eh bien, porte sur le fait que la question a été posée et que la

  3   réponse a été donnée.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Veuillez passer à autre chose, Madame

  5   Clanton.

  6   Mme CLANTON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  7   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, vous avez précisé qu'outre les émissions que

  8   nous avons pu voir sur le programme que je vous ai montré, que Radio

  9   Vukovar fonctionnait en permanence et que l'on entendait de la musique;

 10   c'est exact ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Pouvait-on entendre de la publicité aussi ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Donc, le fait de diffuser à Radio Vukovar, d'après le programme, on

 15   constate qu'il y avait de cinq [comme interprété] à 12 émissions que l'on

 16   complétait avec de la publicité et de la musique; c'est ça ?

 17   R.  Oui, c'est ça, exactement.

 18   Q.  Et vous avez déclaré que vous savez que lorsque quelqu'un publie

 19   quelque chose ou si quelqu'un a reçu un prix, que la poésie de cette

 20   personne sera lue à la radio. Vous souvenez-vous de cette partie-là de

 21   votre déposition ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Et est-ce que vous dites dans votre déposition que c'est le seul moment

 24   où la poésie ou d'autres œuvres littéraires étaient lues à la radio ?

 25   R.  Je dirais oui. Peut-être est-ce seulement un problème pour vous -

 26   comment le dire ? - peut-être qu'il faut simplifier cette idée de ce que

 27   c'est qu'une programmation, une émission. C'est le rédacteur en chef qui

 28   décidait du programme. C'était la procédure habituelle et l'émission type


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  1   faisait l'objet de certaines critiques parce que les gens trouvaient que

  2   c'était ennuyeux, parce qu'ils savaient exactement quand ils allaient

  3   entendre certaines émissions. Et pour que ce soit un petit peu moins

  4   monotone, du moins c'est comme ça que je m'y prenais dans mon émission "A

  5   10 heures", d'essayer d'amener un petit peu plus de couleur dans

  6   l'émission. Alors que les autres émissions étaient consacrées exclusivement

  7   à un domaine, et ils étaient vraiment tenus de faire des reportages sur

  8   certains sujets. Nous n'avions pas d'émission en tant que telle qui était

  9   consacrée uniquement à la poésie, par exemple, ou à la musique, où on ne

 10   faisait que diffuser de la musique pendant toute la durée de l'émission.

 11   C'était impossible. Il n'y avait pas de tel créneau.

 12   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, lorsque vous n'étiez pas au bureau, quand vous

 13   n'étiez pas sur votre lieu de travail, est-ce que vous écoutiez la journée

 14   [comme interprété] toute la journée ?

 15   R.  Le rédacteur en chef était tenu de le faire, les directeurs aussi.

 16   D'ailleurs, par la suite, il y a eu des personnes qui ont été limogées

 17   parce qu'elles ne donnaient pas d'informations exactes. Il était très

 18   strict sur cette question, ce qui fait qu'il ne serait venu à l'esprit de

 19   personne de modifier la programmation sans d'abord consulter le rédacteur

 20   en chef.

 21   Q.  Donc, si j'ai bien compris ce que vous dites, c'est le rédacteur en

 22   chef qui avait le pouvoir de décider de la programmation, et c'est aussi le

 23   rédacteur en chef qui avait la responsabilité d'écouter les émissions tout

 24   le temps ?

 25   R.  Oui, c'était pour lui une obligation car il devait savoir ce qui était

 26   diffusé, c'était sa responsabilité. Car, autrement, ce ne serait pas du

 27   tout sérieux s'il ne savait pas quel était le contenu des émissions. Il

 28   était rédacteur en chef. Moi j'étais responsable de ma propre émission et


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  1   le rédacteur du programme d'information était responsable de l'actualité.

  2   Et nous nous efforcions de respecter le journalisme véridique et objectif,

  3   et nous nous efforcions de donner des informations exactes.

  4   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, pendant la période de 1985 à 1990, vous n'avez

  5   jamais été directrice ou éditrice en chef de Radio Vukovar ?

  6   R.  Non, non. D'abord, j'ai été journaliste débutante, ensuite journaliste,

  7   ensuite journaliste adjointe, et ensuite rédactrice. Il fallait des années

  8   avant d'arriver à ces statuts, d'accéder à ces responsabilités.

  9   Q.  Vous avez dit tout à l'heure que vous pensiez que c'était une bonne

 10   chose d'essayer de promouvoir ce que les gens faisaient du point de vue de

 11   leurs intérêts personnels ou leurs hobbys, et que vous y efforciez de le

 12   faire dans le cadre de votre émission.

 13   J'aimerais savoir si tous les poètes que vous avez fait connaître sur

 14   les ondes étaient tous aussi bien connus à Vukovar, avaient-ils tous la

 15   même réputation ?

 16   R.  Vukovar n'est pas une grande ville, n'oubliez pas la taille de cette

 17   ville. Il pouvait arriver qu'aux manifestations littéraires, on voyait le

 18   même public. Si cela concernait les arts figuratifs, pareil, on voyait

 19   toujours le même public. Pour un public musical, c'était pareil.

 20   Q.  Permettez-moi, je vais vous interrompre quelques instants. Vous avez

 21   évoqué, en particulier, Zoran Calic --

 22   R.  Calic, Zoran Calic.

 23   Q.  Et mon confrère vous a posé des questions sur Branko Kovacevic, qui est

 24   également poète. N'est-il pas vrai que certains de ces poètes étaient plus

 25   connus que d'autres pour leur activité poétique ?

 26   R.  Non, Branko, il en était à ses débuts. Et Zoran Calic était encore plus

 27   jeune. Quand j'ai parlé de Calic, c'était 3 ou 4 ans auparavant, mais quand

 28   je l'ai présenté sur les ondes pour la première fois, ça faisait déjà 20


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  1   ans. Et pendant cette période, il avait reçu des prix, il avait été

  2   reconnu. Mais au départ, c'étaient des jeunes qui ont eu le courage

  3   d'essayer de faire quelque chose, et nous, on voulait essayer de porter

  4   ceci à la connaissance du public pour que notre auditoire sache ce qu'ils

  5   faisaient. Il y en avait encore un autre, je ne me souviens plus exactement

  6   de son nom, mais il avait un surnom, on l'appelait Seki. Et ça a été pour

  7   lui vraiment un tremplin pour prendre son essor. Comme ça, il a trouvé du

  8   soutien, il a trouvé des gens qui ont contribué à ce qu'il faisait, et

  9   c'est vrai qu'on a été les premiers à parler de lui. Il n'y avait personne

 10   d'autre pour se faire connaître. Et c'est moi qui ai écrit la première

 11   critique de ses écrits à l'époque.

 12   Et jusqu'à récemment, ils avaient tous gardé un très bon souvenir de leur

 13   premier pas dans leur carrière et de cette époque où on citait leur nom de

 14   façon publique pour la première fois. Alors, peut-être qu'il y en avait

 15   d'autres qui n'avaient pas le courage de commencer comme ça et qui sont

 16   allés ailleurs. Nous avions une coopération quotidienne. Il s'agissait de

 17   la Voix de la Slavonie et Radio Osijek. C'était feu Stjepan Penic qui était

 18   responsable de ces émissions.

 19   Q.  Je crois que nous avons obtenu une réponse suffisante, et j'aimerais

 20   passer à la question suivante.

 21   J'aimerais savoir si vous connaissez un poète de Vukovar qui s'appelle Ivan

 22   Baranjek ?

 23   R.  Baranjek, non, je ne connaissais ce nom. Vous voulez peut-être me poser

 24   une question sur Baranjek, M. Baranjek ?

 25   Q.  Oui, la prononciation de ce nom est un peu difficile.

 26   R.  Oui, je le connaissais. Il s'entendait très bien avec mon père, et il

 27   était souvent présent à différentes manifestations culturelles. Mais pour

 28   parler tout à fait franchement, je ne me souviens pas de ses écrits ni du


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  1   format dans lequel il les a publiés, d'ailleurs je ne les ai pas lus. Car

  2   quand j'ai commencé à travailler dans les médias, j'ai suivi différents

  3   domaines lorsque l'on m'a donné la responsabilité, et donc je me consacrais

  4   à ce qu'on m'avait donné comme responsabilité, et je ne m'intéressais pas

  5   trop aux autres domaines. Et puis, d'ailleurs je n'avais pas d'obligation

  6   de le faire, et j'irais même jusqu'à dire que je n'avais pas le droit de le

  7   faire.

  8   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, si je comprends bien votre réponse, vous savez

  9   qui M. Baranjek est, et vous avez dit qu'il était parfois présent lors de

 10   manifestations culturelles. Saviez-vous qu'Ivan Baranjek soutenait les

 11   efforts des personnes qui s'intéressaient à la poésie ?

 12   R.  Non.

 13   Q.  Alors qu'Ivan Baranjek avait déjà publié trois ouvrages consacrés à la

 14   poésie à l'époque, et vous nous avez dit que vous ne connaissiez pas ses

 15   écrits. J'aimerais vous poser la question suivante : saviez-vous qu'il

 16   avait un studio d'enregistrement dans son jardin, où il invitait ses amis,

 17   et d'autres férus de poésies à venir parler de la poésie ?

 18   R.  Non, non, je ne le savais pas du tout. Et puis, je ne savais pas où il

 19   habitait, ni ce qu'il avait chez lui comme matériel, et s'il avait ce que

 20   vous décrivez, je pense qu'il le faisait de façon discrète, c'est-à-dire ce

 21   n'est pas de notoriété publique. Quoi qu'il en soit, moi, je n'étais pas au

 22   courant.

 23   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, vous savez que Baranjek était quelqu'un qui,

 24   lui-même, était auteur de vers, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui. Mais quant au contenu de sa poésie, ça, je ne la connaissais pas.

 26   Q.  Et savez-vous que ses vers étaient lus sur les ondes sur Radio Vukovar

 27   ?

 28   R.  Pas pendant que moi j'avais l'obligation de faire ce genre de travail.


Page 11719

  1   Peut-être était-ce avant mon arrivée à la radio ou lorsque j'ai été

  2   responsable d'autres programmes. Donc je n'ai pas de commentaire à faire à

  3   ce propos.

  4   Q.  Est-ce que vous dites donc dans votre témoignage que sa poésie n'a

  5   jamais été lue dans le cadre de vos émissions ?

  6   R.  Non, elle n'a pas été lue dans le cadre de mes émissions.

  7   Q.  Quand avez-vous entendu parler pour la première fois d'un poète

  8   originaire de Pacetin qui s'appelle Branko Kovacevic ?

  9   R.  Je ne peux pas vous dire en quelle année c'était. Je peux seulement

 10   vous dire qu'il est plus jeune que moi, et qu'il était, comment vous dire,

 11   qu'il avait beaucoup insisté, c'est-à-dire il s'était proposé lui-même pour

 12   figurer dans nos émissions, et il avait envoyé des invitations. Moi, je le

 13   connaissais parce qu'il était camarade de classe de mon frère. Elle était

 14   ma meilleure amie à un moment donné, et donc j'y ai jeté un coup d'œil.

 15   C'était bien organisé, toute la ville était au courant. Ils sont venus au

 16   musée, tout a été fait comme si on s'apprêtait à accueillir un invité

 17   éminent. Et donc, j'ai décidé de faire un reportage de façon appropriée.

 18   Dans des lieux comme ça, on avait, par exemple, des célébrations pour la

 19   promotion de livres. Pour vous donner un exemple, il y avait Djordje

 20   Radosevic, qui était originaire de Vukovar et qui est maintenant un

 21   écrivain qui réside à Belgrade, et il avait reçu toutes sortes de prix --

 22   Q.  Je vous prie de m'excuser, mais je crois que nous sommes allées au-delà

 23   de ma question, et je note que l'heure est venue pour la deuxième pause.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Brlic-Jovanovic, nous avons

 25   maintenant notre deuxième pause, qui durera également 30 minutes. Nous

 26   reprendrons à midi 45.

 27   La séance est levée.

 28   --- L'audience est suspendue à 12 heures 15.


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  1   --- L'audience est reprise à 12 heures 47.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'Accusation, vous avez la parole.

  3   Mme CLANTON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, j'aimerais revenir sur une question dont on

  5   parlait avant la pause. Nous parlions du poète de Vukovar qui s'appelle

  6   Ivan Baranjek. Je vous avais demandé si vous saviez que sa poésie était

  7   parfois lue sur Radio Vukovar. Je me réfère à ce qui a été dit à la page 55

  8   du compte rendu d'audience. Et vous avez répondu : "Je n'avais pas

  9   l'obligation de faire ce genre de travail."

 10   Y avait-il une époque à laquelle vous n'étiez pas en mesure de savoir ou

 11   vous n'étiez pas obligée de faire le genre de travail qui consisterait, par

 12   exemple, à diffuser l'œuvre d'un poète comme Ivan Baranjek sur les ondes de

 13   Radio Vukovar ?

 14   R.  Ça pouvait seulement être lorsque j'étais en congé de maternité pendant

 15   un an, après la naissance de mon fils. C'était en 1975 et en 1976

 16   également.

 17   Q.  Dans la réponse que vous avez donnée tout à l'heure, vous avez dit :

 18   "Peut-être avant que je ne vienne à Radio Vukovar ou lorsque j'étais

 19   chargée d'autres départements…"

 20   Pouvez-vous nous confirmer qu'à une époque vous étiez chargée d'autres

 21   départements ?

 22   R.  Oui. Est-ce que vous voulez que je passe en revue toute la chronologie

 23   de ma carrière ? Est-ce que ça vous intéresse ?

 24   Q.  Ce que je voulais demander, c'est que vous avez dit qu'il y avait un

 25   moment donné où vous vous étiez chargée d'autres départements et où vous

 26   n'auriez pas été en mesure --

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame le Témoin, nous vous demandons

 28   de bien vouloir ne pas interrompre l'Accusation tant que la question n'a


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  1   pas été complétée car sinon, il y a un problème d'interprétation du fait de

  2   la superposition des propos.

  3   Mme CLANTON : [interprétation]

  4   Q.  Je reviens à ma question, sans passer en revue toute la chronologie de

  5   votre carrière, je voulais confirmer que vous avez bien dit qu'à un moment

  6   donné vous étiez chargée d'autres départements et qu'il est donc possible

  7   que la poésie d'Ivan Baranjek ait été lue sur les ondes de Radio Vukovar à

  8   ce moment-là ?

  9   R.  Je ne sais pas.

 10   Q.  Nous parlions de Branko Kovacevic avant la pause. Je vous ai demandé

 11   quand est-ce que vous avez connu son travail pour la première fois et que

 12   vous ne pouviez pas vous souvenir de l'année.

 13   Mme CLANTON : [interprétation] J'aimerais maintenant, avec l'aide de la

 14   greffière d'audience, demander que l'on se reporte à l'intercalaire 9 de la

 15   pièce 1D00484. Et j'ai un exemplaire papier pour le témoin.

 16   Q.  Donc, vous nous avez dit que vous ne vous souveniez pas en quelle année

 17   vous avez connu pour la première fois le poète Branko Kovacevic. Le

 18   document que je vous montre actuellement vient de l'une de vos

 19   publications, et on y trouve son nom qui figure dans différentes

 20   collections de vers. Je vous reporte au document où il est dit que :

 21   "Il est coauteur de plusieurs collections de vers."

 22   Et quatre collections sont citées. Toutes ont été publiées entre 1981 et

 23   1983. Le premier est intitulé -- vous voyez le titre.

 24   Voyez cette bibliographie limitée de ce poète, et est-ce qu'en regardant

 25   cette liste cela vous permet de vous remémorer l'époque à laquelle vous

 26   avez pris connaissance de l'existence du poète Branko Kovacevic ?

 27   R.  Ce premier recueil m'est vaguement familier, j'entends son premier

 28   ouvrage de poésie publié de façon indépendante.


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  1   Q.  C'est celui qui apparaît sous le nom de --

  2   L'INTERPRÈTE : Inintelligible.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je me souviens de ce titre. Ça vous

  4   rappelle quelque chose.

  5   Mme CLANTON : [interprétation]

  6   Q.  Nous n'avons pas la date de la publication de ce recueil, mais

  7   j'aimerais vous poser la question suivante : est-ce que ces autres

  8   publications qui sont parues au début des années '80 vous aident à vous

  9   remémorer le fait que vous connaissiez effectivement ce poète à cette

 10   époque-là ?

 11   R.  Ces titres ne me disent pas grand-chose. Le seul dont j'ai un

 12   quelconque souvenir est celui qui porte le titre "L'enthousiasme de la

 13   pousse". Il me semble pouvoir associer le titre avec le nom, mais sinon,

 14   non.

 15   Q.  Est-ce que vous saviez que Goran Hadzic et Branko Kovacevic étaient

 16   amis ?

 17   R.  Non. C'est la première fois que j'entends dire cela.

 18   Q.  Dans votre déclaration, vous parlez de certaines obligations

 19   professionnelles qui étaient les vôtres, et on en a parlé, et parmi ces

 20   responsabilités, il y avait celles de suivre l'assemblée municipale de

 21   Vukovar; est-ce exact ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Dans votre déclaration, vous dites que la première fois que vous avez

 24   fait connaissance de Goran Hadzic, c'est lorsqu'il était représentant

 25   auprès du conseil ou l'assemblée municipale de Vukovar, représentant le

 26   Parti démocrate serbe; est-ce exact  ?

 27   R.  Oui. J'aimerais rajouter quelque chose, si vous me le permettez. Je ne

 28   l'ai pas rencontré, mais je l'ai remarqué.


Page 11723

  1   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, la période à laquelle je me réfère est celle

  2   avant l'incident à Borovo Sel, en mai 1991. Et vous avez dit aujourd'hui,

  3   et ceci se trouve au compte rendu d'audience à la page 7, que vous avez

  4   interviewé Goran Hadzic et d'autres dirigeants éminents d'autres partis

  5   politiques après les événements à Plitvice.

  6   Vous souvenez-vous des noms des autres personnes ?

  7   R.  A Plitvice.

  8   Q.  Merci. Vous souvenez-vous du nom des autres personnes qui ont parlé

  9   dans le cadre de cette émission avec Goran Hadzic à l'époque ?

 10   R.  Slavko Dokmanovic. Mercep. Je ne peux pas répondre avec certitude quant

 11   aux autres.

 12   Q.  Est-ce que Goran Hadzic a été présenté comme étant membre du

 13   représentant du Parti démocrate serbe ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Est-ce qu'il a été présenté comme étant membre du Conseil national

 16   serbe ?

 17   R.  Je ne peux pas vous le dire, non.

 18   Q.  Au moment où vous avez réalisé cette interview avec M. Hadzic, M.

 19   Dokmanovic et M. Mercep, étaient-ils de notoriété que Goran Hadzic avait

 20   été arrêté à Plitvice ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Donc, vous connaissez M. Hadzic à l'époque comme étant un homme

 23   politique en 1991, et non pas comme un poète; est-ce exact ?

 24   R.  Il n'en avait pas l'allure.

 25   Q.  Dans votre déclaration, vous avez dit au paragraphe 4 que vous ne savez

 26   pas si Goran Hadzic écrivait des vers. Est-ce que vous vous souvenez avoir

 27   dit ceci dans le cadre de l'enquête en réponse a à une question qui vous a

 28   été posée pour la Défense ?


Page 11724

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Et ce matin, je vous ai demandé, est-il exact que vous n'aviez pas de

  3   relation personnelle ou sociale avec Goran Hadzic, soit dans les années

  4   1990 ou maintenant, et vous avez dit que vous n'aviez pas, vous n'aviez

  5   aucune relation avec lui. Vous souvenez-vous avoir dit cela dans le cadre

  6   de votre témoignage ?

  7   R.  Non.

  8   Q.  Je vais poser la question autrement, la couper en deux. Je suis

  9   désolée, parce que ce n'était pas très clair.

 10   Donc ce matin, je vous ai demandé si vous fréquentiez Goran Hadzic, et si

 11   vous le connaissiez personnellement. Est-ce que vous vous souvenez que je

 12   vous ai posé cette question-là ?

 13   R.  Non. Oui.

 14   Q.  Et quand je vous ai posé cette question, vous avez dit que vous n'aviez

 15   pas de contact personnel ou vous ne fréquentiez pas Goran Hadzic. Est-ce

 16   que vous vous souvenez de cela ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Madame, est-il exact de dire qu'à l'époque en 1991, vous ne saviez

 19   quels étaient les intérêts personnels de M. Hadzic, ses passe-temps, et

 20   cetera ?

 21   R.  Oui, je ne le connaissais pas.

 22   Q.  Par exemple, vous ne saviez pas qu'il faisait du karaté, que cela

 23   l'intéressait, le karaté ?

 24   R.  Non.

 25   Q.  Et vous ne saviez pas qu'il entraînait des chiens ?

 26   R.  Non.

 27   Q.  Est-ce que vous saviez qu'il assistait aux lectures de poésies de

 28   Branko Kovacevic ? Je parle de Goran Hadzic.


Page 11725

  1   R.  Non.

  2   Q.  Est-ce qu'il est vrai que vous ne savez pas qu'il assistait à ces

  3   lectures de poésies, parce que Branko Kovacevic l'a invité à le faire ?

  4   R.  Est-ce que vous pouvez répéter la dernière question, s'il vous plaît.

  5   Q.  Saviez-vous que Goran Hadzic a assisté à une lecture de poésie de

  6   Branko Kovacevic, après que Branko Kovacevic l'a invité à venir ?

  7   R.  C'est tout à fait possible.

  8   Q.  Mais vous ne le saviez pas à l'époque, vous n'étiez pas sûre de cela ?

  9   R.  Non.

 10   Q.  Et, Madame Brlic-Jovanovic, saviez-vous que Goran Hadzic lisait de la

 11   poésie avec sa petite amie ?

 12   R.  Non, non.

 13   Q.  Ensuite, la question suivante concerne le rôle de la radio pendant le

 14   siège de Vukovar. Pendant que vous écriviez pour la Radio croate de

 15   Vukovar, êtes-vous d'accord avec moi pour dire que la radio était un moyen

 16   de diffusion de l'information qui était très important ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que pendant l'été 1991, qu'il

 19   était connu qu'il y avait la Radio croate de Vukovar qui fonctionnait et

 20   émettait à Vukovar ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Et vous êtes d'accord avec moi pour dire que Zagreb était au courant de

 23   cela ?

 24   R.  Nous étions obligés d'informer Zagreb de notre programme, de nos

 25   émissions, et cela, de façon quotidienne. Et puis, si l'on pensait qu'il y

 26   avait des informations importantes pour tout le pays, on était obligés de

 27   partager cela avec la Radio croate de Zagreb, et on annonçait cela en

 28   disant : "Information qui vient du studio croate de Vukovar pour le studio


Page 11726

  1   croate de Zagreb".

  2   Q.  Donc, est-ce qu'on peut dire qu'à Belgrade, on était au courant de cela

  3   aussi ?

  4   M. GOSNELL : [interprétation] Objection. On demande au témoin de se livrer

  5   à des conjectures.

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Clanton.

  7   Mme CLANTON : [interprétation] Je peux poser la question autrement.

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Faites donc.

  9   Mme CLANTON : [interprétation]

 10   Q.  Madame, est-ce que vous avez déjà confirmé qu'à Zagreb on savait que

 11   vous faisiez des émissions, que votre radio fonctionnait et émettait des

 12   émissions ? Est-ce que vous savez si à Belgrade aussi, si on était au sujet

 13   de cela ?

 14   R.  Je ne peux pas le savoir. Je ne peux pas savoir qui a écouté quoi et

 15   où. Mais pourquoi pas ? Les communications étaient ouvertes, ces

 16   communications étaient libres et ouvertes, et moi, je dirais qu'il serait

 17   logique que l'on puisse suivre cela partout et écouter cela partout.

 18   Q.  Est-il exact qu'une personne disposant d'une radio dans la zone de

 19   Vukovar pouvait capter le signal venu d'une autre région s'il ne s'agit pas

 20   d'un signal trop faible ou d'une région trop éloignée ?

 21   R.  On suivait toujours la portée des ondes de la Radio Vukovar parce que

 22   dans une période antérieure aux années '90, on avait renouvelé la

 23   technologie. Il y avait donc des régions où l'on pouvait suivre les

 24   programmes de la Radio Vukovar et d'autres où l'on ne pouvait pas suivre

 25   ces programmes. Là, vous me posez une question technique parce que moi, je

 26   ne sais pas exactement à quel endroit on pouvait bien suivre, bien entendre

 27   les ondes de la Radio Vukovar.

 28   Mme CLANTON : [interprétation] Je vais demander à avoir le document 65 ter


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  1   6662, intercalaire 32.

  2   Q.  Ce document, nous ne l'avons qu'en anglais, c'est pour cela que je vais

  3   vous donner lecture de ce qui est écrit ici et cela va vous être traduit.

  4   Ce document, c'est un rapport qui vient de la Radio Belgrade, et le titre

  5   du document est : "Radio concernant les attaques synchronisées croates". Il

  6   s'agit d'un rapport du 26 août 1991.

  7   Vous avez cessé de travailler deux jours plus tôt, le 24 août, n'est-ce

  8   pas. Ce qui m'intéresse, Madame, c'est que dans ce texte, on voit que la

  9   Radio Belgrade fait un rapport sur les informations qui ont été diffusées

 10   par Ilija Kojic, ministre de la Défense territoriale dans le gouvernement

 11   de la SBSO. Et donc, la radio diffuse des informations concernant les

 12   attaques menées contre certains villages.

 13   Mme CLANTON : [interprétation] Et je voudrais vous lire le troisième

 14   paragraphe. Voici ce qu'on peut lire :

 15   "Les informations et les programmes diffusés par la Radio croate de Vukovar

 16   ne sont pas seulement incorrectes mais aussi ils rajoutent de l'huile sur

 17   le feu. Par exemple, cette radio dit que l'on a détruit jusqu'à présent

 18   neuf chars de l'armée populaire yougoslave, c'est un pur mensonge vu que

 19   l'on n'a détruit jusqu'à présent qu'un seul char qui a été mis hors service

 20   et on l'a déjà réparé. La Radio Vukovar appelle aussi les femmes à faire

 21   une barrière vivante pour arrêter les unités de l'armée populaire

 22   yougoslave."

 23   Fin de la citation.

 24   Q.  Madame, voici ma question, je voudrais vous demander, sur la base de

 25   l'information que je viens de vous lire, est-ce que vous pouvez arriver à

 26   la conclusion si l'on diffusait dans les médias ce que diffusait la Radio

 27   croate de Vukovar ?

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell.


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  1   M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin n'a pas vu

  2   le document dans sa propre langue. Il faudrait au moins lui donner la date.

  3   Mme CLANTON : [interprétation] Mais j'ai dit quelle était la date. C'était

  4   bien le 26 août 1991.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, en effet, vous l'avez fait.

  6   M. GOSNELL : [interprétation] Je vous présente mes excuses.

  7   Mme CLANTON : [interprétation]

  8   Q.  Madame, dois-je répéter la question ?

  9   R.  Non. Après le 24 août, ma dernière journée au travail, je n'ai plus

 10   aucune information quant aux émissions des uns et des autres. Cependant, je

 11   dispose des informations concernant la période où je travaillais encore là-

 12   bas, jusqu'au moment où j'ai été blessée grièvement à la jambe. Donc, je

 13   sais qu'il est arrivé de diffuser des désinformations. Pourquoi ? Eh bien,

 14   pour la propagande, pour diffuser de la propagande. Et à l'appui, je peux

 15   vous dire que le chef de la direction de la police de Vukovar, M. Stipo

 16   Pole, a même demandé de n'envoyer personne chercher les rapports officiels

 17   concernant la situation sur le terrain. Il voulait que j'aille les chercher

 18   personnellement, qu'ils me les donnent en main propre, parce qu'autrement

 19   il y avait des problèmes sur le terrain. Et il y a eu des problèmes au sein

 20   de son service. Et c'est pour cela qu'il m'a même laissé son numéro de

 21   téléphone dans le tiroir de son bureau si jamais, si j'avais besoin des

 22   informations supplémentaires, il préférait que je l'appelle directement

 23   parce qu'il ne faisait plus confiance à personne. Et moi, je lui ai dit que

 24   si moi-même, si je n'arrivais pas à arriver à obtenir des informations --

 25   Q.  Excusez-moi, je n'ai pas beaucoup de temps --

 26   R.  Je suis arrivée à la fin.

 27   Q.  Madame, je sais que vous avez cessé de travailler le 24 août et vous

 28   avez dit que vous n'aviez pas ces informations après cette date-là quant


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  1   aux émissions diffusées par les uns et les autres. Je vous ai donné lecture

  2   de ce rapport venu de Belgrade pour vous le citer en tant qu'exemple et

  3   pour vous demander si vous étiez d'accord qu'au courant du mois d'août

  4   1991, pendant que vous travailliez encore à la radio, eh bien, vous

  5   demander si vous saviez que l'on diffusait des informations concernant les

  6   émissions de la Radio Vukovar ?

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Gosnell.

  8   M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, tout d'abord, la

  9   question n'est pas claire. Et ensuite, on utilise le document comme base de

 10   la question de l'information, mais je ne suis vraiment pas sûr que l'on ait

 11   étayé la base pour poser cette question. Parce que là, nous avons une

 12   source, mais je ne suis pas sûr de comprendre, je ne sais pas quelle est la

 13   source du rapport.

 14   Mme CLANTON : [interprétation] Monsieur le Président, le rapport vient d'un

 15   certain Branko Pjetlovic. C'est la personne qui a lu le rapport et qui

 16   était chargée de diffuser ce rapport sur les ondes de la Radio Belgrade.

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Un instant, Monsieur Gosnell,

 18   j'essaie de comprendre.

 19   Oui, Monsieur Gosnell.

 20   M. GOSNELL : [interprétation] Mais dans les cinq premières lignes, on dit

 21   clairement d'où vient l'information, mais nous ne savons pas du tout où se

 22   trouvait cette personne à l'époque, à savoir M. Kojic, où était-il au

 23   moment où l'on a diffusé l'information sur les ondes de la radio.

 24   Mme CLANTON : [interprétation] Monsieur le Président, moi, j'ai bien dit

 25   que c'était une citation qui était attribuée à M. Kojic et que cela

 26   concernait l'attaque coordonnée menée contre ces villages.

 27   M. GOSNELL : [interprétation] Mais ce n'est pas cela le problème. La

 28   question qui se pose porte sur la question, à savoir on lui a demandé si on


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  1   suivait ailleurs ce qu'on entendait sur les ondes de cette radio-là. Et, je

  2   pense que là, on a la réponse déjà dans la question. Mais on n'a pas

  3   vraiment établi cela comme étant sûr. Il ne s'agit là que d'une conjecture.

  4   Mme CLANTON : [interprétation] Mais c'est pour cela que je lui ai posé la

  5   question, et je lui demande si ce document peut l'aider pour arriver à la

  6   conclusion que l'on diffusait sur les autres radios les informations

  7   diffusées sur la Radio Vukovar.

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] N'a-t-elle pas répondu à la question

  9   ?

 10   Mme CLANTON : [interprétation] Avec toutes les excuses que je vous dois,

 11   Monsieur le Président, je ne le pense pas.

 12   M. GOSNELL : [interprétation] Moi, je pense que oui.

 13   Mme CLANTON : [interprétation] Monsieur le Président, je peux passer à

 14   autre chose.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Justement c'est la voie que je veux

 16   vous proposer.

 17   Mme CLANTON : [interprétation] Merci.

 18   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, savez-vous qu'au mois de juin 1991, la radio

 19   serbe de la SBSO a été créée, une radio serbe donc ?

 20   R.  Je ne sais pas.

 21   Q.  Avez-vous jamais entendu dire que Mirko Stankovic était à la tête de la

 22   Radio serbe ou la Radio des Serbes, créée à la fin du mois de juin 1991 ?

 23   R.  Où était le siège de cette nouvelle radio, si vous me permettez la

 24   question ?

 25   Q.  Madame le Témoin, je peux vous montrer un document.

 26   Mme CLANTON : [interprétation] Et je vais demander à voir le document

 27   1D0065 [comme interprété], qui se trouve à l'intercalaire 36, s'il vous

 28   plaît. Et j'aurais besoin de montrer l'exemplaire papier au témoin.


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  1   Q.  Alors, mais permettez-moi ou, en tout cas, non --  j'ai placé des

  2   crochets autour de ce paragraphe, est-ce que vous les voyez ?

  3   R.  Oui, je vois mais c'est un peu flou, je n'arrive pas à lire. Alors

  4   j'essaie --

  5   Mme CLANTON : [interprétation] Alors à la page 2 de l'anglais, s'il vous

  6   plaît.

  7   Le dernier paragraphe, le tout dernier paragraphe de l'article que je

  8   viens d'afficher que j'ai remis au témoin. Puisqu'elle a du mal à le lire,

  9   mais permettez-vous de lire ce court paragraphe au témoin.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous en prie, allez-y.

 11   Mme CLANTON : [interprétation]

 12   Q.  Madame, alors cet article précise ce qui suit :

 13   "Un reportage de la Radio serbe de Borovo Selo a réussi à atteindre Vukovar

 14   en utilisant une route indirecte. La station est faible mais envoie ses

 15   informations par l'intermédiaire d'une autre station de radio plus

 16   puissante. D'après ces informations, la vie à Borovo Selo était normale

 17   aujourd'hui, en d'autres termes, n'a été exposée qu'à des tirs de tireurs

 18   embusqués, pendant que les armes lourdes se taisaient. Borovo Selo a

 19   rapidement évalué les dégâts provoqués lors de trois jours d'attaques

 20   répétées contre Borovo Naselje. D'après la Radio serbe, de nombreuses

 21   maisons ont été endommagées, en particulier dans la partie sud du village."

 22   Madame Brlic-Jovanovic, vous m'avez posé des questions au sujet de cette

 23   région où se trouvait la station radio du SBSO. Cet article laisse entendre

 24   qu'ils envoyaient leur reportage depuis Borovo Selo, et j'essaie de savoir

 25   si ceci vous permet de vous rafraîchir la mémoire concernant la création de

 26   la Radio serbe de Slavonie, Baranja et Srem occidental ?

 27   R.  Non, je ne sais pas, je ne connais pas. Enfin, je ne suis pas au

 28   courant de ce détail-là.


Page 11733

  1   Mme CLANTON : [interprétation] Monsieur le Président, je sais que je suis

  2   un petit peu à court de temps, il me reste une question sur ce sujet, et

  3   ensuite j'ai encre une brève question à poser au témoin. Avec votre

  4   permission, Messieurs les Juges, me permettez-vous de poursuivre ?

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous en prie, allez-y.

  6   Mme CLANTON : [interprétation]

  7   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, vous souviendrez-vous du fait que je vous ai

  8   posé des questions ce matin, je vous ai posé des questions au sujet de

  9   collègues, y compris Vesna Vukovic et Sinisa Glavasevic. Vous avez précisé

 10   que ces personnes travaillaient à la Radio croate de Vukovar pendant l'été

 11   1991; vous souvenez-vous de cette partie-là de votre déposition ?

 12   Pardonnez-moi, Madame, votre réponse n'a pas été consignée dans le compte

 13   rendu d'audience.

 14   L'INTERPRÈTE : Le témoin attend l'interprétation.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Me permettez-vous de répondre ?

 16   C'étaient des assistants qui étaient des personnes supplémentaires qui sont

 17   venus travailler pour ce bureau de la Radio croate à Vukovar. Ils sont

 18   arrivés un jour, et ont dit simplement : Eh bien, à partir d'aujourd'hui,

 19   nous allons travailler avec vous. Ensuite, il y avait ces deux filles

 20   aussi. Alors, si vous voulez leurs noms, écoutez, je ne m'en souviens pas.

 21   Mais il y avait également les journalistes qui étaient employés de façon

 22   permanente, qui étaient là et qui faisaient partie de l'équipe de la

 23   rédaction vers laquelle on pouvait se tourner en cas de besoin. Mais il n'y

 24   avait pas de concurrence ou quelque chose comme ça. Je ne sais pas comment

 25   ces personnes outre -- ou à l'exception de Sinisa Glavasevic, qui était

 26   recruté en raison d'une décision prise au préalable par la commission.

 27   Vesna Vukovic est simplement venue, et on a dit qu'il s'agirait

 28   d'assistants qui sont venus aider les journalistes plus anciens qui étaient


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  1   là, et les deux filles qui n'étaient pas là depuis longtemps.

  2   Q.  Je crois que vous avez répondu à ma question.

  3   Est-il exact de dire que souvent Vesna Vukovic et Sinisa Glavasevic

  4   travaillaient ensemble et formaient une équipe ?

  5   R.  Je sais qu'à l'époque lorsque j'y travaillais toujours, l'équipe était

  6   constituée de Branko Polovina et de Sinisa Glavasevic, qui s'occupaient de

  7   la logistique, si je puis le dire ainsi. Alors, comment les tâches ont été

  8   réparties par la suite, qui s'occuperait de quoi et qui aiderait qui, eh

  9   bien, ça c'est quelque chose dont je ne suis pas au courant. La seule chose

 10   que je sais avec certitude, c'est que Sinisa Glavasevic et Branko se

 11   rendaient à Zagreb, même lors des premières frappes aériennes, et ils

 12   avaient emporté avec eux les enregistrements --

 13   Q.  Alors, je vais vous arrêter là parce que je crois que vous avez répondu

 14   à ma question. Je souhaite vous montrer un passage d'un livre, et le

 15   narrateur est Vesna Vukovic.

 16   Mme CLANTON : [interprétation] Je vais demander à la greffière d'audience

 17   de bien vouloir afficher le numéro 65 ter 6658, qui se trouve à

 18   l'intercalaire numéro 28. Et j'ai une copie papier pour le témoin, si

 19   l'huissier veut bien la lui donner.

 20   Alors, est-ce que nous pouvons afficher la deuxième page en B/C/S, s'il

 21   vous plaît, ainsi que la page suivante de l'anglais aussi.

 22   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, le passage que j'ai entouré d'un cercle -- bon,

 23   étant donné que vous disposez d'une copie, je ne vais pas vous le lire.

 24   Avez-vous eu l'occasion de lire ce passage ?

 25   R.  Oui.

 26   Mme CLANTON : [interprétation] Il s'agit du paragraphe qui commence,

 27   Messieurs les Juges, par : "Cependant, au début du mois d'août…"

 28   Q.  Dans ce paragraphe, nous voyons que Vesna Vukovic parle d'une


Page 11735

  1   conversation qu'elle a eue avec Sinisa Glavasevic et ils ont vu quelque

  2   chose qui ressemblait à la contribution de Stankovic à la Télévision de

  3   Novi Sad. Madame, conviendrez-vous avec moi qu'ils parlent ici de Mirko

  4   Stankovic ?

  5   Peut-être que nous pourrions regarder le paragraphe qui se trouve au-dessus

  6   de celui que j'ai entouré d'un cercle :

  7   "Nous n'avons pas vu Mirko Stankovic," et on a su qu'il était à Borovo Selo

  8   et à Negoslavci.

  9   Veuillez écouter ma question, s'il vous plaît.

 10   Est-il exact qu'ils parlent ici de Mirko Stankovic dans ce paragraphe ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Alors, ce dont ils parlent ici, c'est un reportage de Mirko Stankovic

 13   qui est passé à la Télévision de Novi Sad. Alors, voici ma question :

 14   pendant que vous travailliez à la Radio croate de Vukovar, avez-vous jamais

 15   entendu ce qui a été diffusé à la Télévision de Novi Sad ?

 16   R.  Non.

 17   Q.  Alors, nous constatons ici que vos collègues ont pu voir ce qui a été

 18   diffusé à la Télévision de Novi Sad. Avez-vous jamais regardé la Télévision

 19   de Novi Sad ?

 20   R.  Non. Puis-je dire quelque chose ? Tout ceci, tout ce que Mirko

 21   Stankovic pouvait diffuser, faisait partie de la propagande de guerre dont

 22   je vous ai parlé au début. Et cette deuxième partie, cette conversation,

 23   est quelque chose qui est basé sur les souvenirs, et écrit par une tierce

 24   personne. C'est quelque chose que l'on raconte à nouveau. Et lorsque

 25   quelqu'un souhaite parvenir à ses fins en racontant le récit à nouveau,

 26   cette personne peut en faire ce qu'elle veut.

 27   Donc, je ne suis pas d'accord avec le deuxième et le troisième éléments

 28   ici.


Page 11736

  1   Q.  Alors, Madame Brlic-Jovanovic, vous venez de nous dire que cela faisait

  2   partie de la propagande de guerre que vous avez évoquée plus tôt, et ma

  3   question donc consiste à vous demander si les reportages ou articles de M.

  4   Stankovic qui, à vos yeux, étaient de la propagande, était-ce quelque chose

  5   dont vous étiez au courant lorsque vous travailliez encore à Vukovar ?

  6   R.  Non.

  7   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, vous nous avez dit qu'il s'agissait là de

  8   quelque chose qui avait été fait à des fins de propagande. Est-ce que vous

  9   dites que vous n'entendiez pas la propagande ?

 10   R.  Je ne l'ai pas entendue.

 11   Q.  Madame, vous avez parlé de votre émission à Radio Vukovar et en

 12   quelques mots votre carrière de journaliste. Pourquoi n'avez-vous pas

 13   travaillé comme journaliste après votre retour à Vukovar en 1991 ?

 14   R.  J'ai dû d'abord me décider et savoir où je souhaitais vivre. Je devais

 15   m'occuper de mon mari malade, de ma mère âgée, parce que le reste de ma

 16   famille et les parents proches du côté de sa famille à lui, parce que les

 17   miens n'existaient plus. Nous devions chercher un endroit pour habiter. Et

 18   mon feu mari devait être soigné. Et donc, il fallait trouver un endroit où

 19   il pouvait être soigné. Et c'est une décision personnelle que j'ai prise, à

 20   savoir de ne plus jamais faire de journalisme, car j'étais tout simplement

 21   dégoûtée de tout, de part et d'autre. Je voulais que tout se sache et

 22   qu'ensuite on décide, mais je ne souhaitais pas entendre du lavage de

 23   cerveau de la part de quelqu'un d'autre. Ma décision a été prise, et je ne

 24   voulais plus travailler comme journaliste.

 25   Et après cela, on m'a proposé une réintégration facile, on m'a proposé de

 26   travailler à nouveau dans le même secteur d'activité, mais je les ai

 27   remerciés et je leur ai dit que je ne souhaitais pas le faire. Mon mari

 28   était dans un état de santé critique. Il avait eu des attaques ou des AVC,


Page 11737

  1   certaines parties de son corps étaient gangrenées. Il avait la gangrène, il

  2   était dans un fauteuil roulant, et cetera, donc je ne souhaitais pas avoir

  3   cette obligation quotidienne et m'éloigner de la maison, et personne ne m'a

  4   contraint, de toute façon.

  5   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, vous avez dit dans votre déposition ce matin

  6   que vous étiez à Velepromet entre les 12 et 14 novembre 1991 environ. Je

  7   souhaite vous poser une question. Quelles forces armées ou groupes

  8   militaires avez-vous pu voir lorsque vous étiez à Velepromet à ces dates-là

  9   ?

 10   R.  Toutes les personnes qui travaillaient là portaient un uniforme. J'ai

 11   pu reconnaître certaines personnes que je connaissais d'avant lorsqu'il n'y

 12   avait pas la guerre. Il s'agissait de représentants de la police civile de

 13   Vukovar. Il y avait également des personnes qui portaient un uniforme

 14   militaire, et ces personnes-là, je ne les connaissais pas. J'ai reconnu le

 15   commandant - comment l'appeler ? - le directeur de Velepromet, Milovan

 16   Cvetkovic. Pardonnez-moi, je me suis trompée, Milovan Cvjeticanin, avec un

 17   J.

 18   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, avez-vous vu des personnes qui étaient

 19   habillées comme des Chetniks, des volontaires chetniks ?

 20   R.  Non.

 21   Q.  Avez-vous reconnu quelqu'un qui aurait fait partie de la Défense

 22   territoriale ?

 23   R.  Alors, je ne sais pas très bien comment j'aurais pu faire la différence

 24   entre la Défense territoriale et l'armée régulière. Je n'étais pas en

 25   mesure de reconnaître les insignes, je ne savais pas qui endossait

 26   l'uniforme de qui, parce que parfois on faisait sortir des femmes âgées des

 27   sous-sols et ces personnes n'avaient rien à se mettre sur le dos et, à ce

 28   moment-là, ces personnes s'habillaient avec des pantalons et des manteaux


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  1   en laine épaisse, ce qui peut sembler ridicule, mais ces personnes

  2   n'avaient rien. Et pour la première fois, j'ai reçu de quoi me chausser

  3   parce que dans le sous-sol, je portais des chaussons roses et il y avait

  4   une veste que l'on utilisait pour le ski, et ils m'ont trouvé des

  5   chaussures que j'ai pu chausser pour pouvoir marcher.

  6   Q.  Madame Brlic-Jovanovic, vous avez parlé de la pièce dans laquelle vous

  7   étiez lorsque vous étiez à Velepromet. Il y avait des palettes sur

  8   lesquelles vous pouviez dormir et on vous a donné du riz. Si vous vous en

  9   souvenez --

 10   R.  Non, ce la n'était pas une pièce. Cela, c'était une partie du sous-sol

 11   où les obus ne pouvaient pas atteindre les personnes qui se trouvaient là.

 12   Cela ressemblait à un entrepôt, au sous-sol d'un entrepôt. Il y avait des

 13   palettes et nous étions tous dans ce sous-sol. Nous avons reçu de bonnes

 14   couvertures, des couvertures épaisses, et il y avait un petit poêle, et

 15   c'était un endroit qui était un peu plus grand que ce prétoire. Et les gens

 16   étaient allongés les uns à côté des autres comme des sardines, et il y

 17   avait un couvre-feu, donc les gens ne pouvaient pas se déplacer comme ils

 18   le souhaitaient. Le premier soir, nous n'avons reçu aucune nourriture. Rien

 19   n'avait été organisé à cet effet.

 20   Q.  Alors, si vous me permettez de vous interrompre. Si vous vous en

 21   souvenez, la pièce -- pardonnez-moi, la partie de l'entrepôt dans laquelle

 22   vous étiez, est-ce que toutes les personnes dans cet endroit étaient des

 23   Serbes ou des Croates ?

 24   R.  C'était mélangé. De notre quartier, eh bien, de ce terrain de jeu, ils

 25   sont tous arrivés en même temps. C'était mélangé. Il y avait nos anciens

 26   voisins, il y avait même des personnes dont les enfants portaient

 27   l'uniforme de la ZNG, de la Garde nationale croate, et il y en avait

 28   d'autres qui n'étaient pas dans cette situation-là. Et tout le monde était

 


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  1   très triste et désemparé et très malheureux par rapport à ce qui s'était

  2   produit. Et nous avions notre dernière ration de nourriture, nous l'avions

  3   emportée avec nous, et il y avait de la viande que nous avons pu découper,

  4   nous l'avons emportée et emmenée avec nous parce que nous ne savions pas

  5   combien de temps tout ceci allait durer et nous ne souhaitions pas mourir

  6   de faim. Nous n'avions plus d'eau et c'était la dernière bouchée que nous

  7   avions. Si Radoslav en avait besoin, il était diabétique et ne pouvait

  8   vivre sans médicaments et sans nourriture. Donc, j'avais apporté cela et je

  9   l'ai distribué à ceux que je connaissais et ceux que je ne connaissais pas.

 10   C'est comme Jésus lorsqu'il avait trois poissons et qu'il a réussi à

 11   nourrir un nombre très important de personnes.

 12   Donc, à chaque fois qu'on voyait quelqu'un qui était en vie, on était

 13   content parce que ce sont des gens dont on ne connaissait pas la vie. Et il

 14   était peu important de savoir s'ils étaient Croates ou Serbes. Ils avaient

 15   réussi à quitter cet endroit dans le sous-sol où ils avaient été torturés.

 16   Q.  Merci.

 17   Mme CLANTON : [interprétation] Monsieur le Président, j'en ai terminé avec

 18   mon contre-interrogatoire.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame Clanton.

 20   Monsieur Gosnell, voulez-vous poser des questions supplémentaires ?

 21   M. GOSNELL : [interprétation] Oui. Je serai bref.

 22   Je demande que l'on se reporte à la pièce 1D456, à l'intercalaire 2 de la

 23   Défense.

 24   Nouvel interrogatoire par M. Gosnell :

 25   Q.  [interprétation] Madame Brlic-Jovanovic, en tout, combien d'années

 26   avez-vous passées à Radio Vukovar ?

 27   R.  J'ai commencé en 1972, très exactement le 2 juin, et j'y ai travaillé

 28   jusqu'au 24 août 1991. Avec une période d'un an juste avant la naissance de


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  1   mon fils Igor, qui est né en 1976, donc entre la mi-1975 et la mi-1976, je

  2   n'ai pas travaillé. Donc, les années que j'ai travaillées, qui m'ouvrent

  3   droit à une pension, sont un petit peu moins de 19 ans.

  4   Q.  Et pendant combien d'années avez-vous assuré la diffusion du programme

  5   diffusé à 10 heures le dimanche matin ?

  6   R.  C'était pendant les dernières années. D'autres personnes qui étaient là

  7   auparavant y avaient travaillé avant moi. Donc, je ne peux pas vous dire

  8   exactement quand j'ai commencé. Quoi qu'il en soit, dès le moment où j'ai

  9   été recrutée, on m'a posé des questions pour savoir si j'étais capable de

 10   faire le travail, d'assurer le travail.

 11   Q.  Je vous prie de m'interrompre [comme interprété], mais j'aimerais

 12   préciser, quand vous dites "quelques années", pouvez-vous nous dire si vous

 13   avez travaillé plus ou moins de trois ans sur cette émission qui était

 14   diffusée "Le dimanche à 10 heures" ?

 15   R.  Oui, c'était plus que trois ans.

 16   M. GOSNELL : [interprétation] J'aimerais maintenant que l'on regarde la

 17   grille de diffusion, dans la version en anglais, je vous reporte à la page

 18   2, et plus précisément à la programmation pour le samedi. N'ayez crainte,

 19   je ne vais pas passer en revue tous les programmes mais j'aimerais examiner

 20   quelques-uns de ces programmes.

 21   Q.  Le premier, à 13 heures le samedi, on voit : "Aperçu du programme de la

 22   journée."

 23   Est-ce qu'il y a eu des interviews de poètes locaux ou des lectures de

 24   poésie dans le cadre de cette émission ?

 25   R.  Non.

 26   Q.  Qu'en est-il pour le créneau suivant intitulé : "KALI-EPP des stations

 27   de radio locales," et il s'agissait de musique folklorique, est-ce que de

 28   la poésie a été lue dans le cadre de ce programme ?


Page 11741

  1   R.  Non, non.

  2   Q.  Créneau suivant : "Music Evergreens" en anglais, c'est un programme de

  3   musique populaire, y avait-il de la poésie lue dans le cadre de ce

  4   programme ?

  5   R.  Non, ce n'était pas possible parce que le "speaker" qui a lancé ce

  6   programme était en poste l'après-midi et il jouait de la musique ou il

  7   faisait des annonces. Il faisait tout lui-même. Donc, il n'était absolument

  8   pas autorisé à inclure le genre de rapport dont vous parlez dans le cadre

  9   de son programme.

 10   Q.  Le créneau "Actualités, information sur le marché, baromètre du

 11   marché", y avait-il de la lecture de poésie ?

 12   R.  Non.

 13   Q.  Et le programme "Ensemble le samedi" ?

 14   R.  Non. Les gens se préparaient pour le week-end, étaient déjà en cours,

 15   et il y avait d'ailleurs une émission intitulée : "Activités pour le week-

 16   end."

 17   Q.  Est-ce que vous connaissiez bien la programmation pour chacune de ces

 18   émissions, connaissiez-vous le contenu de ces émissions ?

 19   R.  Quand on préparait les émissions, il y avait des discussions au niveau

 20   de la rédaction, quand il y avait un événement, c'est toujours vers moi

 21   qu'on se tournait s'il était question des arts plastiques ou d'activités

 22   archéologiques, de recherches archéologiques, alors que d'autres

 23   s'occupaient des sports. Il y en avait qui ne voulaient pas participer, par

 24   exemple, aux émissions économiques parce qu'ils trouvaient ça ennuyeux.

 25   Mais, essentiellement, la décision ne nous appartenait pas. Nous étions

 26   invités à des conférences de presse ou des réunions et nous étions tenus de

 27   faire un reportage. On était obligés d'avoir la publicité parce que,

 28   naturellement, ça payait les émissions. Et puis, les émissions musicales


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  1   devaient se conformer à certaines conditions, certains critères. Il fallait

  2   que ça plaise à tout le monde. Il fallait, par exemple, que la musique que

  3   l'on diffusait représente tous les genres de musique de toutes les parties

  4   du monde, que ce soit la musique pop, la musique de type folklorique. Et il

  5   n'y avait pas de genre exclus, que ce soit plus vieux jeu ou plus moderne.

  6   Mais je ne pense pas qu'on jouait de la musique ganga parce que je pense

  7   que l'équipe de la rédaction n'aurait pas supporté ça. Enfin, donc, le

  8   ganga, c'était un genre de musique qu'on ne jouait jamais donc.

  9   Q.  Donc, le contenu des émissions qui figure sur cette grille faisait

 10   l'objet de discussions lors des réunions de l'équipe de la rédaction dont

 11   vous avez parlé ?

 12   R.  Pas tous les jours. Mais ces réunions n'étaient pas forcément

 13   officielles et n'étaient pas forcément annoncées en tant que telles. Mais

 14   il y avait les commentaires, il y avait des discussions entre nous, on

 15   parlait de tout ça entre nous.

 16   Q.  Et est-ce que ces émissions qui apparaissent sur cette grille et pas

 17   uniquement diffusées le samedi, mais pour les autres jours de la semaine,

 18   est-ce que ces émissions, pendant les dix dernières années de votre travail

 19   avec Radio Vukovar, ont fait figurer des interviews avec des poètes locaux

 20   ou des lectures de poésie à une heure autre que "Le dimanche à 10 heures" ?

 21   R.  Non.

 22   [Le conseil de la Défense se concerte]

 23   M. GOSNELL : [interprétation]

 24   Q.  Vous avez dit lorsque vous avez répondu aux questions de l'Accusation

 25   que Goran Hadzic n'avait pas l'allure d'un poète. Pouvez-vous nous

 26   expliquer ce que vous entendiez par là.

 27   R.  Je ne suis ni psychiatre, ni psychologue, je ne peux pas dire quelque

 28   chose de vraiment important à ce propos. C'est vraiment du domaine de la

 


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  1   conjecture. Mais je ne pense pas que je sois placée pour faire un

  2   quelconque commentaire, et je ne veux offusquer personne.

  3   Cependant, de mon point de vue, il devrait être quelqu'un qui parle plus,

  4   il devrait être comme moi, par exemple. Il devrait être plus ludique, alors

  5   qu'il était extrêmement sérieux. Il ne faut pas que je fasse ce genre de

  6   commentaire, vraiment. Je crois que j'ai fait un écart.

  7   Q.  Madame le Témoin, je vous remercie, et j'en ai terminé avec mes

  8   questions.

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Brlic-Jovanovic, nous avons

 10   terminé votre audition. Nous vous remercions d'être venue ici à La Haye

 11   pour venir en aide au Tribunal. Cette audition est terminée. Vous serez

 12   accompagnée pour quitter le prétoire.

 13   [Le témoin se retire]

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] A moins qu'il n'y ait autre chose,

 15   Monsieur Zivanovic.

 16   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Non, pas pour aujourd'hui. Notre témoin

 17   suivant sera ici demain matin.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. La séance est levée.

 19   --- L'audience est levée à 13 heures 53 et reprendra le mardi, 23 septembre

 20   2014, à 9 heures 00.

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