Affaire n° : IT-01-47-PT

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE II

Composée comme suit :
M. le Juge Wolfgang Schomburg, Président
Mme le Juge Florence Ndepele Mwachande Mumba
M. le Juge Carmel Agius

Assistée de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Décision rendue le :
25 septembre 2003

LE PROCUREUR

c/

ENVER HADZIHASANOVIC
AMIR KUBURA

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DÉCISION RELATIVE À LA REQUÊTE CONJOINTE DE LA DÉFENSE AUX FINS DE LA CERTIFICATION DE LA DÉCISION CONCERNANT L’ACCÈS AUX ARCHIVES DE LA MISSION D’OBSERVATION DE L'UNION EUROPÉENNE, RENDUE LE 12 SEPTEMBRE 2003

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Le Bureau du Procureur :

M. Ekkehard Withopf
M. David Re

Les conseils des accusés :

Mme Edina Residovic et M. Stéphane Bourgon pour Enver Hadzihasanovic
MM. Fahrudin Ibrisimovic et Rodney Dixon pour Amir Kubura

 

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE II (la « Chambre de première instance ») du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (le « Tribunal »),

VU la requête conjointe déposée par la Défense aux fins de la certification de la décision concernant l’accès de la Défense aux archives de la Mission d'observation de l'Union européenne, rendue le 12 septembre 2003 par la Chambre de première instance (Confidential Joint Defence Application for Certification of the Trial Chamber’s Decision on Defence Access to EUMM Archives of 12 September 2003), la « Requête », déposée par la Défense le 18 septembre 2003,

VU la demande d’accès de la Chambre de première instance aux archives de la Mission d'observation de l'Union européenne (Request for Access to EUMM Archives) en date du 28 mars 2003,

VU la lettre datée du 9 mai 2003 par laquelle la Mission d'observation de l'Union européenne répondait, entre autres, que la communication intégrale de l’ensemble de ses archives mettrait en péril la sécurité de certains de ses observateurs, mais qu’elle continuerait à fournir volontairement à la Défense des documents précisément définis et pertinents, à condition que les procédures régies par l’article 70 du Règlement de procédure et de preuve (le « Règlement ») soient appliquées séparément pour chaque document,

VU la rencontre du 24 juillet 2003 entre l’Accusation et le chef de la Mission d'observation de l'Union européenne qui, à cette occasion, a fait part de ses préoccupations concernant la sécurité de la Mission d'observation de l'Union européenne si la Défense devait se voir accorder un accès général aux archives ou si les restrictions de l’article 70 du Règlement venaient à être levées « en bloc », et s’est notamment inquiété du risque que pourraient courir la mission de la Mission d'observation de l'Union européenne et les observateurs sur le terrain et d’une éventuelle utilisation abusive des documents de la Mission d'observation de l'Union européenne,

VU la lettre du 14 août 2003 adressée par la Défense au Juge Schomburg (la « Lettre de la Défense »), la réponse à cette lettre déposée à titre confidentiel par l’Accusation le 28 août 2003, et la requête conjointe de la Défense aux fins d’autorisation de déposer une réplique à la réponse de l’Accusation à la Lettre de la Défense (Joint Defence Application for Leave and Reply to the Prosecution Response to Defence Letter of 14 August 2003) déposée à titre confidentiel le 1er septembre 2003,

VU la « Décision concernant l’accès de la Défense aux archives de la Mission d'observation de l'Union européenne», la « Décision », rendue par la Chambre de première instance le 12 septembre 2003,

ATTENDU que la Défense soutient dans la Requête que les archives de la Mission d'observation de l'Union européenne « sont manifestement pertinentes pour certaines questions en jeu en l’espèce et Squ’Cil est injuste d’empêcher la Défense de les consulter »,

ATTENDU également que la Défense soutient dans la Requête que, selon le principe de l’égalité des armes, « lorsque l’Accusation a eu accès à des archives pertinentes, la Défense devrait également y avoir accès pour préparer le procès »,

ATTENDU que le principe de l’égalité des armes n’implique pas automatiquement que la Défense devrait avoir accès aux mêmes documents que l’Accusation et que, par exemple, l’article 70 B) du Règlement autorise expressément des exceptions,

ATTENDU, en outre, que bien qu’elle ne jouisse pas d’un accès illimité à l’ensemble des archives de la Mission d'observation de l'Union européenne, la Défense n’est toutefois pas empêchée de les consulter puisque la Mission d'observation de l'Union européenne a clairement dit qu’elle était prête à lui fournir des documents précisément définis et pertinents,

ATTENDU, comme il est dit dans la Décision, que la demande de documents de la Défense est très générale, qu’elle n’indique pas aussi clairement que possible les documents ou la nature des documents dont la communication est demandée et qu’elle ne démontre pas dans quelle mesure il est probable, ou à tout le moins fort possible, qu'une telle communication l’aide matériellement dans la préparation de sa cause,

ATTENDU donc que la Décision donne déjà à la Défense des indications précises sur la façon de demander accès à des documents pertinents des archives de la Mission d'observation de l'Union européenne,

ATTENDU que la Défense n’a pas prouvé avoir ne serait-ce que tenté d’identifier les documents concernés et d’y avoir accès conformément aux indications fournies,

ATTENDU que la Défense a ainsi clairement omis d’expliquer en quoi « l’équité ou la rapidité du procès, ou son issue » pouvaient être compromises, comme l’exige l’article 73 B) du Règlement,

ATTENDU que, dans ces circonstances, la Requête est considérée comme abusive,

REJETTE la Requête de la Défense.

 

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le Président de la Chambre de première instance
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Wolfgang Schomburg

Le 25 septembre 2003
La Haye (Pays-Bas)

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