International Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 6992

1 Le lundi 10 mai 2004

2 [Audience publique]

3 --- L'audience est ouverte à 14 heures 20.

4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, pouvez-vous appeler le numéro

6 de l'affaire, s'il vous plaît.

7 M. LE GREFFIER : Affaire numéro IT-01-47-T, Procureur contre Enver

8 Hadzihasanovic et Amir Kubura.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. Je vais demander aux

10 représentants de l'Accusation de bien vouloir se présenter.

11 M. WITHOPF : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

12 Madame, Monsieur les Juges. Bonjour au conseil de la Défense. Tecla

13 Benjamin, M. Withopf et Mme Ruth Karper, commis aux audiences.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Je me tourne vers les avocats des accusés. Le

15 premier banc.

16 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

17 Madame, Monsieur les Juges. Au nom d'Enver Hadzihasanovic, M. Stéphane

18 Bourgon, co-conseil; M. Alexis Demirdjian, assistant juridique.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Le deuxième banc.

20 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Bonjour. Rodney Dixon de la part de M.

21 Kubura, et Fahrudin Ibrisimovic, et Nermin Mulalic, assistant juridique.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. La Chambre de première instance souhaite la

23 bienvenue à tous, aux membres de l'Accusation, aux conseils de la Défense,

24 aux accusés, ainsi que tout le personnel de cette salle d'audience.

25 Nous entamons notre semaine qui va se poursuivre avec l'audition de

Page 6993

1 plusieurs témoins dits internationaux, et vendredi est prévu une audience

2 qui sera consacrée à la poursuite de la question des documents.

3 Monsieur Withopf, qui avez-vous aujourd'hui, tel que vous nous l'avez

4 indiqué sur votre mémorandum ? Il s'agit de M. Baggesen; c'est bien cela ?

5 M. WITHOPF : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

6 L'Accusation va citer à la barre M. Lars Baggesen.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

8 Madame l'Huissière, pouvez-vous aller chercher le témoin ?

9 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour. Je vais d'abord vérifier que vous

11 entendez bien, dans votre langue de travail, la traduction de mes propos.

12 Si c'est le cas, dites je vous entends.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vous entends fort bien, merci.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez été cité comme témoin de

15 l'Accusation. Afin de vous faire prêter serment, je me dois de vous

16 identifier. A cette fin, je vous demande de me donner votre nom et prénom.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Lars Baggesen.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Pouvez-vous m'indiquer votre date de naissance et

19 votre lieu de naissance ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis né à Copenhague, le 22 janvier 1957.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est votre nationalité ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Danois.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est votre fonction actuelle ? Vous êtes en

24 uniforme militaire. Vous êtes dans quelle armée actuellement et quel est

25 votre rang ?

Page 6994

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis commandant d'armée danoise et pour

2 l'instant je suis officier de l'état-major du commandement danois au niveau

3 de l'état-major général. Je suis responsable de la coopération avec les

4 pays baltes.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : En 1993, quelle était votre fonction ? En 1993, il y

6 a plus de dix ans.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais un membre de la MCCE entre le mois

8 d'avril à la fin du mois de juin.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : A l'époque, quel était votre grade ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Au sein de la MCCE, il n'y avait pas de grade,

11 mais au sein de l'armée danoise, j'avais le rang de capitaine.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous déjà témoigné devant une juridiction

13 internationale ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. C'est la troisième

15 aujourd'hui.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est la troisième fois. Pouvez-vous nous indiquer,

17 autant que vous le savez, dans quel procès avez-vous témoigné. Vous étiez

18 témoin de qui; de l'Accusation ou de la Défense ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai été cité par l'Accusation pour l'affaire

20 contre le colonel Blaskic, et plus tard, dans l'affaire contre Dario Kordic

21 et Mario Cerkez.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais vous demander de bien vouloir lire la

23 prestation de serment que Mme l'Huissière va vous présenter.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

25 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

Page 6995

1 LE TÉMOIN: LARS BAGGESEN [Assermenté]

2 [Le témoin répond par l'interprète]

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Commandant, vous pouvez vous asseoir.

4 Comme il s'agit de la troisième fois que témoignez devant ce

5 Tribunal, vous avez l'habitude des témoignages. Je dois simplement vous

6 rappeler et vous donner quelques indications. Vous allez avoir à répondre à

7 des questions qui vont vous être posées par les représentants de

8 l'Accusation qui se trouvent à votre droite dans le cadre de ce qu'on

9 appelle l'interrogatoire principal.

10 A la fin de cet interrogatoire principal, les avocats des accusés,

11 qui eux sont situés à votre gauche, vous poseront des questions dans le

12 cadre de ce qu'on appelle communément en "common law" le contre-

13 interrogatoire.

14 A l'issue de cette phase, l'Accusation pourra vous reposer des

15 questions supplémentaires et, à tout moment de ces phases procédurales, les

16 trois Juges, qui sont devant vous, pourront vous poser également des

17 questions, soit aux fins de clarifier vos réponses, par rapport aux

18 questions posées, soit aux fins d'être informés sur des aspects de votre

19 témoignage qui ne seraient pas apparus en réponse aux questions posées.

20 Comme vous avez l'habitude de ce type d'audience, vous saurez qu'il

21 faut répondre de la manière la plus précise et la plus complète, puisque

22 les Juges n'ont pas en leur possession votre témoignage écrit. C'est la

23 procédure orale qui prime et ce sont vos réponses qui vont éclairer la

24 manifestation de la vérité. Si vous ne comprenez pas le sens d'une

25 question, demandez à celui qui vous pose la question de la reformuler.

Page 6996

1 Je vous signale également deux autres éléments qui sont des pures

2 hypothèses d'école. Le premier élément c'est que vous avez prêté serment de

3 dire toute la vérité, ce qui exclu un faux témoignage. En cas de faux

4 témoignage, la Chambre doit indiquer au témoin qu'il y a des peines qui

5 sont prévues lors de la commission de cette infraction de faux témoignage.

6 Par ailleurs, une autre disposition concerne les déclarations d'un témoin.

7 Ces déclarations pouvant, le cas échéant, constituer ultérieurement des

8 charges contre le témoin. De ce fait, le témoin peut refuser de répondre

9 aux questions qui seraient susceptibles de l'incriminer. La Chambre peut

10 exiger le témoin, néanmoins, à répondre. De cette hypothèse très

11 particulière, la Chambre, à ce moment-là, garantie au témoin une forme

12 d'immunité. Car le Règlement de preuve et de procédure de ce Tribunal

13 prévoit cette disposition.

14 Voilà de manière très générale l'architecture qui trace et qui

15 retrace les contours de votre témoignage. Si jamais vous éprouvez une

16 difficulté quelconque, vous pouvez en informer la Chambre. Normalement,

17 votre témoignage est prévu pour toute la journée d'aujourd'hui et, a

18 priori, il n'y a pas de raison pour que votre témoignage continue demain, à

19 la condition que personne ne perde de temps.

20 C'est pour cela que je vais tout de suite donner la parole à

21 l'Accusation, qui va commencer l'interrogatoire principal.

22 Monsieur Withopf, vous avez la parole.

23 M. WITHOPF : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

24 Interrogatoire principal par M. Withopf :

25 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur.

Page 6997

1 R. Bonjour, Maître.

2 Q. Pourriez-vous résumer votre carrière au sein de l'armée danoise en

3 insistant sur vos missions à l'étranger ?

4 R. Oui. J'ai commencé ma carrière militaire en 1976, où j'ai commencé le

5 service militaire. J'ai fait mon service militaire et je n'ai pas quitté

6 l'armée danoise.

7 J'ai été promu officier en 1978, et j'étais officier dans

8 l'infanterie. Par la suite, j'ai été formé au sein de l'école des Cavaliers

9 et l'Unité de Reconnaissance. J'ai commandé certaines unités et j'ai rempli

10 certaines fonctions au sein de l'état-major pendant toute la durée de ma

11 position en tant qu'officier. J'ai toujours été officier chargé des

12 renseignements au niveau bataillon et au niveau de la brigade, jusqu'à ma

13 position actuelle.

14 J'ai pris part à un certain nombre de missions. En 1980 à 1981, le

15 conflit en Chypre où je représentait les forces unies à Chypre, où j'étais

16 officier de l'état-major du Bataillon danois.

17 En 1993, j'étais un membre de la MCCE, comme vous le savez, en Bosnie

18 centrale, et en 2001 j'ai été G2 au sein de la KFOR au Kosovo, au sein de

19 la Brigade française et du QG de la KFOR.

20 Q. Merci beaucoup. Quel était votre grade, s'il vous plaît, en

21 1993 ?

22 R. J'étais capitaine en 1993.

23 Q. Quel est votre rôle aujourd'hui ?

24 R. Aujourd'hui, je suis commandant.

25 Q. Commandant, vous avez déjà évoqué le fait que vous avez été formé au

Page 6998

1 service de renseignements de l'armée. Pourriez-vous nous parler de ce type

2 de formation, s'il vous plaît.

3 R. Le type de formation notamment reçue, en tant qu'officier chargé de

4 renseignements était, en ce qui me concerne, ceci s'est passé pendant la

5 guerre froide. Nous avons été formés à analyser l'application du pacte de

6 Varsovie; voir quel type d'équipement ils avaient, et cetera, quelles

7 étaient leurs tactiques, et cetera.

8 Q. Sur la base de cette formation, est-il juste de dire, Commandant, que

9 vous avez été formé et que vous êtes un officier chargé de renseignements

10 et observateur militaire professionnel et expérimenté ?

11 R. Oui, je le pense.

12 Q. Vous avez déjà évoqué le fait que vous avez déjà eu un certain nombre

13 de postes de commandement au fil des ans. Pourriez-vous dire à la Chambre

14 de première instance à quel niveau vous étiez et combien de troupes vous

15 avez commandées.

16 R. Mon premier poste de commandement était un commandement de section.

17 J'avais 35 soldats. Mon dernier commandement était un commandement de

18 bataillon, où j'avais 1 700 soldats servant sous mes ordres.

19 Q. Pourriez-vous, brièvement, s'il vous plaît, décrire vos fonctions

20 actuelles au sein de l'armée danoise ?

21 R. En tant qu'officier de l'état-major, du commandement du "Home Guard",

22 au niveau de l'état-major général au sein de l'armée danoise, je suis

23 responsable de la coopération avec l'Estonie, la Lituanie, et la Lettonie;

24 les pays baltes. Je suis responsable de la coopération avec ces pays-là et

25 j'aide ces trois pays à mettre sur pied leur armée de volontaires.

Page 6999

1 Q. Dans ce contexte, Commandant, avez-vous l'intention de retourner en ex-

2 Yougoslavie ?

3 R. Je sais que l'armée a quelques projets dans ce sens, et je vais

4 retourner au Kosovo cet automne, encore une fois détaché auprès du Quartier

5 général français de la Brigade G2.

6 Q. Merci.

7 M. WITHOPF : [interprétation] Je vois mon collègue de la Défense debout.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Bourgon.

9 M. BOURGON : Au compte rendu d'audience page 7, ligne 9, j'aimerais

10 simplement confirmer le chiffre qui a été mentionné par le témoin puisque

11 je n'ai pas très bien entendu. Je vois le chiffre 1 700. J'aimerais juste

12 obtenir une confirmation qu'il s'agit bien de 1 700 ou de 700. Merci,

13 Monsieur le Président.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Il a commandé un bataillon de 1 000 ou 1 700 ou

15 700 ?

16 Monsieur le Témoin, vous nous avez dit que vous commandiez un

17 bataillon. Ce bataillon était composé de combien de soldats ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Le compte rendu d'audience est exact. Il

19 s'agissait bien de 1 700 hommes. J'ai utilisé le chiffre de cette unité.

20 C'est un bataillon que l'on appelle au sein de la "Home Guard", au sein de

21 l'armée danoise. Il s'agit, en général, de quelque chose qui est au niveau

22 d'un bataillon, mais c'est une unité très importante. Il y a 17 compagnies

23 qui la composent, y compris deux compagnies de policiers, une compagnie du

24 Quartier général, et les autres étaient des compagnies d'infanterie. Il ne

25 s'agissait pas d'un bataillon au sens strict du terme au sein de l'armée.

Page 7000

1 Il s'agissait des unités de défense volontaires de Danemark.

2 M. WITHOPF : [interprétation]

3 Q. Je vous remercie beaucoup, Commandant, pour ce point d'éclaircissement

4 et de confirmation.

5 Je souhaite maintenant passer à un autre sujet. Je souhaite évoquer votre

6 mission au sein de la MCCE en Bosnie centrale. Pourriez-vous dire à la

7 Chambre de première instance, s'il vous plaît, à quel moment vous avez été

8 envoyé en Bosnie.

9 R. J'ai été déployé en Bosnie le 21 mars, et je suis resté au Bosnie

10 centrale jusqu'à la fin du mois de juin.

11 Q. Nous parlons de la période allant du mois de mars au mois de juin

12 1993 ?

13 R. C'est exact.

14 Q. Où avez-vous été déployé en Bosnie ?

15 R. Dans la région centrale de Zenica. Nous avions notre QG international à

16 cet endroit-là, à l'hôtel Internacional.

17 Q. L'hôtel Internacional, à quelle distance se trouve cet hôtel du

18 commandement du 3e Corps en 1993 ? Quelle était la distance entre les

19 deux ?

20 R. Je ne me souviens pas de la distance exacte, mais cela devait se situer

21 à un 1 000 mètres environ, dans cet ordre d'idée.

22 Q. Pourriez-vous dire à la Chambre de première instance, s'il vous plaît,

23 quelle était la nature et l'objet de votre mission ?

24 R. La mission de la MCCE était de veiller au cessez-le-feu, le HVO,

25 l'ABiH, faire en sorte que ces deux parties coopèrent à nouveau. Nous

Page 7001

1 devions enquêter à propos des différents incidents, et cetera.

2 Q. Quel poste occupiez vous entre le mois de mars et le mois de juillet

3 1993, au sein de ce centre régional de Zenica ?

4 R. Au début, au mois d'avril et dans les premier mois, j'étais membre de

5 la commission mixte de Busovaca. Cette commission était présidée par des

6 membres de la MCCE. A Busovaca, il y avait le président, trois membres de

7 la MCCE, trois membres du HVO, et trois membres de l'ABiH.

8 Q. En sus de vos fonctions liées à la commission conjointe de Busovaca,

9 quelles étaient vos fonctions ?

10 R. Un peu de temps après, avant été nommé membre de cette commission

11 conjointe de Busovaca, la commission a été annulée et rebaptisée, et a eu

12 d'autres fonctions. J'ai été envoyé dans une autre région de Bosnie

13 centrale. J'étais promu à la tête d'une équipe dans ma zone de

14 responsabilité. Il y avait la zone de Zepce, Zavidovici, et Maglaj. Un peu

15 plus tard, mon domaine de responsabilité s'était agrandi. Il y avait

16 Kakanj, Visoko, également. Après quoi, au mois de juin - je crois il devait

17 s'agit du 10 juin - j'ai été promu président de la commission mixte dont le

18 rôle était de libérer toutes les personnes détenues en Bosnie centrale.

19 Q. Toutes ces postes que vous avez occupées, Commandant, s'agissait-il de

20 postes qui vous ont été assignées par le centre régional de la MCCE à

21 Zenica ?

22 R. C'est exact.

23 Q. A l'époque, où se trouvait le centre régional de la MCCE à Zenica ? Qui

24 dirigeait la MCCE ?

25 R. La personne qui dirigeait le centre régional de Zenica était Jean-

Page 7002

1 Pierre Thébault, de France.

2 Q. Pourriez-vous donner les noms de vos collègues qui travaillaient dans

3 ce centre régional de Zenica, s'il vous plaît ?

4 R. Le centre, comme je vous l'ai dit, était dirigé par Jean-Pierre

5 Thébault. Il y avait aussi un observateur espagnol et un grec qui faisait

6 partie de la MCCE, c'est-à-dire, Juan Valentin et Dimitrios Dagos, et la

7 commission mixte de Busovaca. La commission mixte a été présidée par un

8 observateur danois, le feu A.K.H. Petersen, et je crois que Dieter

9 Schellschmidt était également membre de la commission. Il était

10 l'observateur allemand. Je ne me souviens pas à quel moment il était membre

11 de la commission, mais je sais qu'il a été membre de la commission.

12 Ensuite, il y avait différentes équipes, différents types d'observateurs

13 qui travaillaient en étroite relation avec le centre régional. Il y avait

14 des observateurs canadiens, Remi Landry; Stovos Kinigopoulos, qui était un

15 observateur grec; un observateur danois qui s'appelait Allan Laustsen; et

16 plus tard, un nouveau observateur, fin juin, Sir Martin Garrod. Entre-

17 temps, il y avait un observateur grec, et je ne me souviens pas de son nom.

18 Il y avait également un observateur suédois, Torbjorn Junhov, à l'époque où

19 je me trouvais là; un observateur néerlandais, Henk Morsink, et un autre

20 danois qui s'appelait Bent. Je ne me souviens pas de son nom dans sa

21 totalité. Je ne me souviens pas maintenant.

22 Q. Je vous remercie beaucoup pour cette liste très exhaustive. Pourriez-

23 vous nous décrire dans le détail votre domaine de responsabilité au plan

24 géographique de ce centre régional de Zenica ? Quelle municipalité était

25 couverte par ce centre régional ?

Page 7003

1 R. Autant que je me souvienne, à l'ouest il y avait Travnik, il y avait

2 Novi Travnik un peu plus au sud; la zone de Bugojno. Je ne me souviens pas

3 si Tomislavgrad faisait partie de notre centre régional. Nous avons

4 également Kiseljak, Kakanj, Maglaj, Zepce et, bien entendu, Zenica, où se

5 trouvait notre Quartier général.

6 Q. Très bien, mon commandant. Comment décririez-vous la situation

7 militaire qui prévalait lorsque vous avez été déployé à Zenica ? J'entends

8 notamment la situation militaire par rapport au HVO et pour ce qui est

9 également du conflit HVO-ABiH.

10 R. Pendant la première partie de ma période d'affectation, j'ai vu que le

11 HVO était l'agresseur. C'est eux, en fait, qui damait le pion, et pendant

12 le conflit dans la vallée de Lasva, nous avons pu le voir.

13 Plus tard, l'ABiH a réussi à opposer une résistance, et je ne les

14 appellerais pas "les agresseurs", mais ils ont été en mesure de reconquérir

15 une partie du terrain qui avait été perdue.

16 Q. Vous parlez de l'ABiH dans la zone que vous avez décrite. Est-ce que

17 vous faites référence au 3e Corps de l'ABIH ?

18 R. C'est, effectivement, le 3e Corps qui se trouvait dans notre zone de

19 responsabilité.

20 Q. Si nous prenons en considération la déclaration que vous venez de

21 faire, peut-on dire qu'à partir de la mi-mai 1993, le 3e Corps de l'ABiH

22 était plutôt la partie qui passait à l'attaque, qui était à l'offensive

23 plutôt que sur la défensive ?

24 R. Je ne me souviens pas de la date exacte, mais il y a eu une escalade du

25 conflit lorsqu'il y a eu le massacre à Ahmici. Ensuite, l'ABiH a réussi à

Page 7004

1 prendre revanche.

2 Q. "Prendre revanche", vous voulez dire qu'ils se sont battus ?

3 R. Oui.

4 Q. Pendant que vous étiez membre de la MCCE du centre régional de Zenica,

5 savez-vous qui était le commandant du 3e Corps de l'ABiH ?

6 R. Le commandant du 3e Corps était le général Hadzihasanovic.

7 Q. Pendant que vous avez été déployé à Zenica, avez-vous eu la possibilité

8 de rencontrer le général Hadzihasanovic ?

9 R. Oui, j'ai rencontré le général à cinq, six, voire dix reprises pendant

10 ces trois mois. Je ne l'ai pas beaucoup vu au début, parce que j'étais

11 membre de la commission mixte de Busovaca. Il faut savoir que le commandant

12 adjoint du 3e Corps, M. Merdan, était normalement notre personne de contact

13 avec le corps. Lorsque j'ai été affecté à une zone de responsabilité au

14 niveau de Zepce et Maglaj ainsi que Zavidovici, j'ai dû souvent me rendre

15 auprès du commandement du 3e Corps, parce qu'on ne nous autorisait pas, par

16 exemple, à franchir un poste de contrôle, et cetera, et cetera.

17 Q. Est-ce que cela signifie que, entre la mi-mai et la fin du mois de

18 juin, vous avez eu la possibilité de rencontrer quelque dix fois

19 Hadzihasanovic ?

20 R. Oui. Je pense que dix fois, c'est un chiffre maximal.

21 Q. Où se trouvait à l'époque le quartier général du général

22 Hadzihasanovic ?

23 R. Autant que je me souvienne, chaque fois que j'ai rencontré le général,

24 cela se passait dans son bureau dans son quartier général près de la

25 scierie.

Page 7005

1 Q. Puisque vous avez eu entre six à 10 réunions avec lui, est-ce que ces

2 réunions se sont passées au quartier général du général Hadzihasanovic ?

3 R. Oui, c'est exact.

4 Q. Est-ce que les réunions avaient lieu dans son bureau ?

5 R. Si ma mémoire ne me trompe, il s'agissait de réunions brèves de 5 à 10

6 minutes, pas plus. Cela se passait en général dans son bureau.

7 Q. Pourriez-vous nous fournir quelques informations à propos de son

8 bureau ? Quel était l'aspect de ce bureau ?

9 R. Je ne me souviens pas précisément de son bureau. Je me souviens

10 toutefois que nous devions passer par le bureau de sa secrétaire avant

11 d'arriver dans son bureau. Dans son bureau, on trouvait les choses que l'on

12 s'attend à trouver dans un bureau.

13 Q. Peut-on dire que son bureau était un bureau tout à fait normal pour un

14 commandant, pour une personne ayant son grade ?

15 R. Il n'était que commandant de corps dans l'armée de la Bosnie. Je ne

16 sais pas quelles étaient les normes. Je pense que tout le matériel qui se

17 trouvait là était suffisant.

18 Q. Cela était suffisant pour lui permettre d'exercer ses fonctions en tant

19 que commandant de corps ?

20 R. Je ne me souviens pas avoir vu du matériel radio, par exemple, dans son

21 bureau. Il y avait des téléphones, un téléphone tout à fait normal, par

22 exemple, ce genre de choses. Je pense que lorsqu'il devait commander ses

23 troupes, il ne pouvait pas le faire à partir de son bureau. Probablement à

24 partir d'un poste de commandement qui se trouvait quelque part d'autre dans

25 son quartier général. Je n'ai vu que son bureau.

Page 7006

1 Q. Mon Commandant, pourriez-vous dire à la Chambre de première instance

2 quel était l'objectif des différentes réunions que vous avez eues avec le

3 général Hadzihasanovic ?

4 R. Normalement, lorsque nous nous adressions à ces échelons supérieurs,

5 cela venait du fait, par exemple, que dans notre zone de responsabilité,

6 dans le cadre de notre mission, si on nous refusait de passer à un poste de

7 contrôle, il fallait présenter des griefs et déposer une plainte. En

8 général, on le faisait directement auprès du général ou auprès de son chef

9 d'état-major s'il se trouvait là, parce que nous essayions d'obtenir cette

10 liberté de mouvement pour la MCCE. A chaque fois qu'elle nous était

11 refusée, nous nous plaignions. Il y avait un endroit dont je ne me souviens

12 pas du nom d'ailleurs, il s'agit d'un poste de contrôle. A plus d'une

13 reprise, on nous a refusé le passage par ce poste de contrôle. Il fallait

14 que nous présentions une plainte en l'occurrence.

15 Q. Après avoir rencontré le général Hadzihasanovic à plusieurs reprises,

16 mon Commandant, quelles étaient, d'après vous, les compétences du général

17 Hadzihasanovic ? Quelles impressions en avez-vous dégagées ?

18 R. Compte tenu de mes antécédents à l'époque, j'ai été d'avis que le

19 général Hadzihasanovic était un officier compétent. Il me semblait qu'il

20 avait une bonne vision d'ensemble de la situation. Il me semblait qu'il

21 avait tout à fait la capacité et l'aptitude pour commander son unité. En

22 comparaison avec le camp opposé, je pense au colonel Blaskic, il y avait

23 une différence assez importante pour ce qui est de ces deux commandants.

24 Q. Pourriez-vous expliquer la différence entre ces deux commandants ?

25 R. Normalement, lorsque nous avions une réunion avec le général

Page 7007

1 Hadzihasanovic, il semblait très calme. Il semblait maîtriser la situation,

2 avoir une vision d'ensemble, alors que lorsque nous avions une réunion avec

3 le très, très jeune colonel Blaskic, il n'était pas calme. Il semblait être

4 assez stressé, par exemple, nerveux.

5 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, je vois mon éminent

6 confrère debout.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Bourgon.

8 M. BOURGON : Je crois qu'il y a une erreur au compte rendu d'audience à la

9 page 14, ligne 25. La version anglaise dit : "In cooperation to the

10 opposite part." Je crois que le mot mentionné par le témoin était "en

11 comparaison avec la partie opposée." Merci, Monsieur le Président.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est "en comparaison" ou en "coopération" ? Oui,

13 c'est en comparaison plutôt.

14 Commandant, regardez la ligne numéro 15. Vous voyez qu'en anglais, la

15 phrase commence : "In cooperation." Est-ce que ce n'est pas "en

16 comparaison" que vous avez voulu dire ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit "comparé à", "en comparaison." Si

18 vous voulez comparer ces deux officiers.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Poursuivez.

20 M. WITHOPF : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

21 Mon Commandant, vous étiez en train de nous dire que le très jeune colonel

22 Blaskic n'était pas calme, était très nerveux, et cetera. En comparaison,

23 vous avez décrit le général Hadzihasanovic comme étant une personne qui

24 semblait être très calme, une personne qui semblait dominer et maîtriser la

25 situation.

Page 7008

1 R. Oui, c'est exact. Je pense que le général avait beaucoup plus

2 d'expérience que l'officier du camp opposé.

3 Q. Vous aviez un certain nombre de collègues, mon Commandant, qui se

4 trouvaient au centre régional de la MCCE à Zenica. Est-ce que d'autres

5 observateurs de la MCCE à Zenica ont également eu des contacts ou des

6 réunions avec le général Hadzihasanovic à l'époque où vous vous trouviez à

7 Zenica ?

8 R. Oui. Nous avons tous eu des réunions. Certains ont eu également des

9 réunions avec le général Hadzihasanovic. Je me souviens, par exemple,

10 qu'une fois, d'un de mes collègues, un canadien, c'était Rémi Landry.

11 C'était peut-être lui qui connaissait le mieux le général.

12 Q. Comment vous êtes-vous rendu compte que votre collègue, Rémi Landry,

13 était la personne qui connaissait le mieux le général Hadzihasanovic ?

14 Pourquoi ?

15 R. Je sais qu'ils allaient à la pêche. Ils sont allés à la pêche une fois

16 ensemble. De toute façon, Rémi Landry était l'observateur qui avait le plus

17 d'expérience. Très souvent, il avait des réunions avec le commandement du

18 3e Corps. Je pense qu'il avait su établir des liens professionnels avec le

19 général.

20 Q. Cette relation qui avait été établie, la relation j'entends entre Rémi

21 Landry et le général Hadzihasanovic. Est-ce que ces liens étaient les liens

22 les plus proches qui avaient été forgés entre quelqu'un de la MCCE et le

23 général Hadzihasanovic ?

24 R. Il se contentait d'aller à la pêche avec lui. Je ne sais pas si mes

25 autres collègues avaient également eu des contacts sociaux en quelque sorte

Page 7009

1 avec le général.

2 Q. Ils allaient à la pêche, nous dites-vous. Pourriez-vous éclairer ma

3 lanterne, mon Commandant. Comment est-il possible que le général

4 Hadzihasanovic qui livrait une guerre sur deux fronts, comment se fait-il

5 que le général Hadzihasanovic avait le temps d'aller à la pêche pendant la

6 période comprise entre avril et

7 juin 1993 ?

8 R. Je le sais par expérience. Parfois en tant que commandant, vous

9 ressentez véritablement le besoin de vous décontracter. S'il y a une

10 accalmie dans les combats, il faut faire autre chose. Je peux tout à fait

11 imaginer que cela était l'une des raisons. Si vous êtes commandant, que

12 vous avez un bon commandant adjoint ou un bon chef d'état-major, cette

13 personne peut assurer la relève pendant une période de temps très brève. Je

14 pense que c'est tout à fait normal qu'il soit allé à la pêche.

15 Q. Vous nous dites qu'en cas d'accalmie dans les combats, un commandant

16 peut avoir envie de se décontracter. Pendant la période de temps où vous

17 avez été à Zenica, est-ce qu'il y a eu justement ce genre d'accalmies

18 pendant les combats ?

19 R. C'était une époque très tendue. Parfois, les tensions étaient plus

20 aiguës qu'à d'autres moments. Il y a eu quelques jours où il y avait des

21 accalmies sans incidents importants.

22 Q. Mon Commandant, avez-vous également eu des contacts avec l'adjoint du

23 général Hadzihasanovic ?

24 R. Très souvent, j'ai eu la possibilité d'avoir des réunions avec le

25 général Merdan qui était le commandant adjoint du 3e Corps. Il était un

Page 7010

1 membre à grade élevé de l'ABiH, au niveau de la commission mixte de

2 Busovaca. Plus tard, il a été membre de la commission mixte de Travnik.

3 Ensuite, j'ai également travaillé de concert avec lui lors d'une enquête

4 portant sur un enlèvement.

5 Q. Avant que nous ne parlions de ces différents enlèvements, pourriez-vous

6 nous dire après que vous avez eu un certain nombre de réunions avec M.

7 Merdan et M. Hadzihasanovic, pouvez-vous nous dire s'ils étaient proches

8 l'un de l'autre ?

9 R. Je pense qu'ils travaillaient véritablement de concert l'un avec

10 l'autre. Je pense que Merdan était un officier très loyal au général

11 Hadzihasanovic. Chaque fois que nous demandions quelque chose à Merdan,

12 chaque fois que nous lui demandions d'attirer l'attention du général sur un

13 fait, nous avions la réponse le même jour ou le lendemain. Je pense qu'ils

14 avaient de très bonnes relations de travail.

15 Q. Mon Commandant, vous avez déjà évoqué la question des enlèvements.

16 Pourriez-vous indiquer à la Chambre de première instance quand et comment

17 avez-vous entendu parler de ces enlèvements ?

18 R. Nous avions un contact pour le colonel Blaskic, le commandant du HVO en

19 Bosnie centrale. Il a dit à notre QG que quatre de ses officiers avaient

20 été enlevés tout près de la ligne de front dans la région de Travnik. Il a

21 demandé aux membres de la MCCE de mener à bien une enquête sur la question.

22 Q. Quant avez-vous obtenu ces renseignements à propos de cet enlèvement ?

23 R. Si je ne me trompe, je ne me souviens pas véritablement de la date

24 exacte. Je pense que cela s'est passé au début du mois d'avril, la première

25 semaine du mois d'avril ou peut-être la deuxième semaine du mois d'avril

Page 7011

1 1993.

2 Q. Outre cet enlèvement, avez-vous été mis au courant d'autres

3 enlèvements ?

4 R. Oui. Il y a eu en tout trois enlèvements qui se sont passés. Il y a eu

5 plus tard un autre enlèvement qui a eu lieu; un commandant d'une brigade du

6 HVO, je pense qu'il s'appelait Totic, il a été enlevé à Zenica. Ce

7 commandant de brigade est tombé dans une embuscade avec quatre de ses

8 gardes du corps. Ses quatre gardes du corps ont été tués. Le témoin

9 oculaire a également été tué. Le commandant de brigade a, ensuite, été

10 enlevé de son véhicule.

11 Q. Mon Commandant, vous nous avez décrit deux enlèvements, mais vous nous

12 avez dit qu'il y a eu en tout trois enlèvements. Pourriez-vous nous donner

13 des détails à propos du troisième enlèvement ?

14 R. Le troisième enlèvement qui s'est passé pendant cette période, s'est

15 passé au niveau de la station de radio locale. C'était une station de radio

16 qui s'appelait Radio CD. Si je ne m'abuse, je pense qu'elle avait été

17 montée par les Américains. Il y avait deux ou trois personnes dans cette

18 station de radio. Il y avait deux journalistes et des techniciens. Je ne me

19 souviens pas très bien d'ailleurs quelles étaient leurs fonctions, mais ils

20 ont tous été enlevés.

21 L'INTERPRÈTE : Question inaudible de M. Withopf.

22 M. WITHOPF : [interprétation] Je m'excuse.

23 Q. Mon Commandant, avez-vous reçu des renseignements officiels en tant

24 qu'observateur de la MCCE à propos des auteurs responsables des enlèvements

25 que vous venez de nous décrire ?

Page 7012

1 R. Non, pas au début. Au début, le colonel Blaskic a demandé à la MCCE de

2 diriger l'enquête relative à cet enlèvement. Une équipe composée de

3 l'observateur espagnol, Juan Valentin et moi-même ainsi que M. Merdan et

4 l'adjoint du HVO, Franjo Nakic. Voilà comment était constituée cette petite

5 équipe chargée de mener à bien l'enquête. Au début, nous ne savions pas

6 très bien par où commencer. Le colonel Blaskic du HVO nous a dit que

7 c'était la 7e Brigade musulmane qui était responsable de cet enlèvement.

8 Q. Comment se fait-il que l'adjoint du général Hadzihasanovic, Merdan, a

9 participé à cette équipe qui menait à bien une enquête à propos de cet

10 enlèvement ?

11 R. Je ne sais pas pourquoi il s'agissait de M. Merdan, mais je pense que

12 mon QG avait décidé, pour ce qui est de cette enquête, qu'il était

13 nécessaire d'avoir un officier à grade supérieur du HVO, et un homologue,

14 un officier également à grade supérieur de l'ABiH. Je pense que c'est pour

15 cela que les deux adjoints des deux corps faisaient partie de l'équipe

16 chargée de mener à bien l'enquête.

17 Q. Lorsque vous avez commencé cette enquête avec M. Merdan et avec le

18 représentant du HVO, quelles étaient les allégations à propos de cet

19 enlèvement et qui était censé être responsable de ces enlèvements ?

20 R. Le colonel Blaskic nous avait dit que c'était la 7e Brigade musulmane

21 qui était responsable de cet enlèvement. Je dois dire que, à chaque fois

22 qu'il y avait un incident, à chaque fois que l'ABiH avait fait quelque

23 chose, le HVO indiquait toujours que c'était la 7e Brigade musulmane qui

24 était responsable. Mais je dois vous dire que, dans la zone bien précise où

25 ont été enlevés les quatre officiers, il s'agissait de la zone de

Page 7013

1 responsabilité de la 7e Brigade musulmane. Il se peut que ce soit la 7e

2 Brigade qui était responsable de cet enlèvement.

3 Q. Pendant l'enquête, je pense non seulement à l'enquête afférente à

4 l'enlèvement des quatre officiers du HVO mais je pense également à

5 l'enlèvement du commandant Totic, est-ce qu'à un moment donné vous avez

6 reçu des informations de la part des auteurs de l'enlèvement ?

7 R. Oui. Après plusieurs jours pendant lesquels nous avons essayé de voir

8 si nous pouvions retrouver les officiers qui avaient été enlevés, nous

9 avons reçu deux messagers qui faisaient partie des Moudjahiddines. Ils sont

10 arrivés à notre quartier général avec une lettre dans laquelle il était

11 indiqué que les Moudjahiddines - c'est ainsi qu'ils s'appelaient, ou "le

12 groupe arabe" - étaient responsables de l'enlèvement de ces quatre

13 enlèvements. Maintenant, je ne me souviens pas s'ils ont mentionné Totic

14 dans la même lettre, mais ils nous ont dit qu'ils avaient les personnes qui

15 avaient été enlevées, et ils souhaitaient que certains de leurs frères

16 musulmans qui avaient été placés en détention par le HVO soient libérés.

17 Q. Les deux messagers qui faisaient partie de ce que vous avez appelé "les

18 Moudjahiddines" ou "le groupe arabe", étaient-ils étrangers ? Est-ce qu'il

19 s'agissait d'Arabes ?

20 R. Ils portaient des vêtements arabes. Ils portaient une sorte de tunique.

21 Je ne sais pas s'ils avaient l'air Arabes, je ne m'en souviens pas en tout

22 cas. Mais lorsque nous parlions d'eux ou de cet incident, nous disions que

23 c'étaient des Arabes qui étaient venus avec une lettre. Je ne m'en souviens

24 pas, moi-même, personnellement, mais je me souviens des discussions qui

25 avaient eues lieu et il ne s'agissait pas de personnes ressortissant de la

Page 7014

1 Bosnie.

2 Q. Vous souvenez-vous de ce qui était écrit dans la lettre ? Avez-vous vu

3 la lettre vous-même ?

4 R. Oui, j'ai vu la lettre. Il y avait deux lettres; une qui était écrite

5 en anglais, et l'autre qui était écrite en allemand. Le texte des deux

6 lettres était identique. Je sais que la date avait été écrite en caractères

7 arabes. Ce n'était pas marqué avril 1993, mais une autre date. C'était une

8 date du calendrier musulman. Il y avait beaucoup de louanges pour Allah. En

9 fait, ils rendaient la MCCE responsable de l'échange des prisonniers, et il

10 était indiqué que si l'échange ne pouvait pas avoir lieu, nous serions

11 responsables de la mort de ces officiers. Je peux me souvenir que la lettre

12 était signée, mais que la signature avait été écrite en caractères arabes.

13 M. WITHOPF : [interprétation] Avec l'autorisation de la Chambre de première

14 instance, j'aimerais montrer au témoin la lettre qui est le seizième

15 document de la liste de l'Accusation des documents contestés, et cette

16 lettre va apparaître grâce au système Sanction, sur vos écrans.

17 Q. Commandant, je vous demanderais de consulter cette lettre manuscrite.

18 S'agit-il de la lettre dont vous venez de nous parler ? S'agit-il de la

19 lettre que vous avez reçue des Moudjahiddines qui indiquaient qu'ils

20 étaient responsables de ces enlèvements et, ensuite, ils vous ont demandé

21 d'essayer de trouver une solution ?

22 R. Oui, c'est exact. Mais autant que je m'en souvienne, il y avait

23 également une version allemande.

24 Q. Tout simplement pour préciser, vous avez reçu la lettre identique qui

25 était rédigée à la fois en anglais et en allemand ?

Page 7015

1 R. C'est exact.

2 Q. La lettre que vous avez sous vos yeux à présent, est-ce que c'est bien

3 la lettre qui était rédigée en anglais ?

4 R. C'est exact. C'est la version anglaise de la lettre.

5 Q. Les versions anglaise et allemande, étaient-elles identiques ?

6 R. Oui, puisque nous avons comparé les deux lettres pour voir s'il y avait

7 des différences, mais il n'y en avait pas.

8 Q. Aviez-vous quelqu'un au sein de la MCCE à Zenica qui parlait allemand

9 ou qui était allemand ?

10 R. Il y avait un observateur allemand, Dieter Schellschmidt, qui était,

11 bien entendu, capable de parler allemand. Il y avait quelques autres

12 personnes qui pouvaient également parler allemand.

13 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

14 Juges, l'Accusation souhaite verser au dossier cette lettre manuscrite.

15 Pour le moment, ce document était contesté.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : La Défense, que nous dit-elle ?

17 M. BOURGON : Pas d'objection, Monsieur le Président, à ce que la version

18 manuscrite soit introduite au dossier. Merci, Monsieur le Président.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Dixon.

20 M. DIXON : [interprétation] Non, Monsieur le Président, compte tenu de ce

21 que vient de dire le témoin dans sa déposition, nous n'avons pas

22 d'objection à soulever pour que ce document soit versé au dossier. Merci.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, pouvez-vous nous donner un

24 numéro.

25 M. LE GREFFIER : Monsieur le Président, cette pièce est versée sous la

Page 7016

1 référence P109.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : P109.

3 M. WITHOPF : [interprétation] Merci bien, Monsieur le Président.

4 Q. Pendant que la MCCE à Zenica s'occupait de la question de l'enlèvement

5 des officiers du HVO, à quelle fréquence les Moudjahiddines se sont ils

6 rendus à la MCCE ?

7 R. Je ne peux pas me rappeler de la fréquence ou du nombre de ces visites,

8 car je n'ai pas pris part à ces entretiens moi-même, mais à plusieurs

9 reprises.

10 On a procédé à la constitution d'un organe pour tenter de résoudre ce

11 problème et pour mener des négociations. Parmi ces participants, il y

12 avait, bien entendu, des membres de la MCCE. Pour autant que je puisse m'en

13 souvenir, il y avait aussi des membres de la Croix rouge internationale et

14 des représentants du HVO. Je ne me souvienne pas exactement s'il y avait

15 des représentants de l'ABiH, mais si mes souvenirs sont bons, on les a

16 invité à y prendre part. Pendant ces négociations, la Croix rouge

17 internationale souhaitait obtenir une autorisation pour pouvoir se rendre

18 en visite aux otages, mais ceci a été refusé de la part des Moudjahiddines.

19 Finalement, il y a eu un accord consistant à autoriser les otages à

20 envoyer des lettres, et je pense qu'il y a eu une bande vidéo, également,

21 qu'ils ont eu droit d'envoyer aux membres de leurs familles et à leurs

22 commandants, pour que les autres puissent apercevoir du fait qu'ils étaient

23 toujours en vie.

24 Q. Vous venez de mentionner des réunions qui se sont tenues à répétition.

25 Est-ce qu'elles se sont passées à l'hôtel Internacional de Zenica ?

Page 7017

1 R. Oui, pour autant que je m'en souvienne. Oui, c'est là qu'elles ont eues

2 lieu.

3 Q. De quelle manière les Moudjahiddines ont-ils pu se rendre à l'hôtel

4 Internacional de Zenica ? Etait-ce en voiture ou était-ce à pied ?

5 R. Je me souviens que lorsque les premiers messagers sont arrivés, c'était

6 en voiture. Je me souviens que plus tard, nous avons reconnu la même

7 voiture à un autre endroit. Quant à savoir comment se sont ils rendus aux

8 réunions à d'autre reprises, je ne le sais pas, parce que je n'étais pas

9 toujours présent lorsqu'ils étaient là. Je me souviens qu'au départ, ils

10 étaient armés, que nous ne voulions pas avoir des soldats armés ou de

11 mercenaires dans notre enceinte. Malheureusement, les policiers civils de

12 Bosnie-Herzégovine, qui essayait d'assurer la sécurité de leur QG, et ils

13 disparaissaient toujours lorsque les Moudjahiddines arrivaient. Parfois ils

14 avaient des armes à l'intérieur, et à d'autres reprises, ils se

15 présentaient sans armes.

16 Q. De quelles armes parlez-vous ? Quelles étaient les armes qu'ils

17 avaient ?

18 R. Normalement, c'était des AK-47, des Kalachnikovs.

19 Q. C'est un fusil automatique, n'est ce pas, de toute évidence ?

20 R. Oui.

21 Q. Parlons maintenant de cette voiture, à bord laquelle ils arrivaient au

22 début pour négocier au sujet de la libération des otages tenus par les

23 Moudjahiddines. D'après ce que j'ai compris, les Moudjahiddines sont

24 arrivés pour la première fois à l'hôtel Internacional de Zenica, à savoir,

25 le centre régional de la MCCE, à peu près à la mi-avril, la deuxième moitié

Page 7018

1 du mois d'avril 1993 ? Est-ce exact ?

2 R. Oui, c'est exact. C'était bien des jours après le début de l'enquête.

3 Je ne me souviens pas exactement combien de temps s'était passé, peut-être

4 dix jours après le début de l'enquête, et c'est à ce moment-là que nous

5 avons eu un premier contact avec les Moudjahiddines.

6 Q. Vous venez de dire, il y a quelques minutes plus tard, "nous avons

7 reconnu la même voiture à un autre endroit." Pourriez-vous, s'il vous

8 plaît, dire à la Chambre de première instance où, et si vous rappelez, à

9 quel moment, vous avez vu ou reconnu cette même voiture ?

10 R. Je me souviens que plus tard on en a parlé, et ce, parce que cette même

11 voiture qui avait été utilisée par deux Moudjahiddines avait été remarqué

12 au QG de la 7e Brigade musulmane. Je ne me souviens pas très bien si

13 c'était au QG précisément ou à l'endroit où ils étaient cantonnés à l'école

14 de musique de Zenica, ou était-ce à Rostovo; mais c'était l'un de ces deux

15 endroits. C'est là qu'on a remarqué ce véhicule devant le bâtiment.

16 Q. S'il vous plaît, si vous vous en souvenez, pourriez-vous nous donner

17 quelques précisions au sujet de cette même voiture qui a été utilisée par

18 les Moudjahiddines pour arriver au centre régional de la MCCE à Zenica pour

19 négocier au sujet de la libération des prisonniers tenus par les

20 Moudjahiddines et au sujet des otages membres du HVO. Est-ce que vous vous

21 rappelez, au sujet de cette voiture, si elle a été aperçue devant le QG de

22 la 7e Brigade musulmane ou le commandement de la 7e Brigade ? Est-ce que

23 vous pouvez vous rappeler à peu près à quel moment cette voiture a été vue

24 à cet endroit ?

25 R. Je ne me rappelle pas la date exacte, mais je me rappelle qu'on en a

Page 7019

1 parlé, parce que nous essayons de trouver un lien entre la 7e Brigade

2 musulmane et les Moudjahiddines. Le HVO affirmait que les Moudjahiddines

3 étaient une partie de la 7e Brigade musulmane, mais nous ne voyons pas de

4 lien. Le seul lien que nous avons pu identifier, c'était cette voiture

5 parce qu'elle a été vue devant l'un de leur QG.

6 Q. Etait-ce avant la libération des otages, vous en rappelez vous ?

7 R. Je n'arrive pas à me souvenir de cela. Je ne me souviens pas le moment

8 exact.

9 Q. Etait-ce pendant que vous-même, vous étiez à Zenica ? En d'autres

10 termes, était-ce entre les mois d'avril et fin de juin 1993 ?

11 R. Oui, oui.

12 Q. Commandant, pourriez-vous dire, s'il vous plaît, à la Chambre de

13 première instance, quels sont les efforts qui ont été déployés, si

14 toutefois il y a eu de tels efforts de la part de la MCCE afin de résoudre

15 le problème des otages, et comment ce problème s'il a été résolu.

16 R. Après beaucoup de négociations, nous sommes parvenus à résoudre le

17 problème en mai. A l'époque, je pense que ceci a duré à peu près un mois,

18 ou voire plus. On a trouvé un accord, comme je l'ai déjà dit, parce que je

19 n'étais pas membre de ce groupe de travail, mais j'ai pris part au

20 processus pendant que nous essayons de faire relâcher les otages. Notre

21 groupe et le HVO se sont mis d'accord pour qu'il y ait libération du côté

22 du groupe arabe. Ils ont relâché les quatre officiers du HVO, ainsi que le

23 commandant de la brigade, et je pense que le journaliste qui avait été

24 enlevé a été libéré, lui aussi. L'accord qui a été placé était que cette

25 libération devait se produire à trois endroits différents, et j'étais

Page 7020

1 responsable de la libération à Travnik, où les quatre officiers du HVO

2 devaient être libéré par les Moudjahiddines. Mon collègue néerlandais, Henk

3 Morsink, je pense, était responsable de la libération à côté de l'aciérie,

4 ou quelque chose de ce genre, parce qu'il y avait une usine entre Vitez et

5 Zenica, dans cette zone. Il était responsable de la libération à cet

6 endroit-là. Il devait y avoir une libération à Zenica aussi, où tous les

7 étrangers, tous les membres arabes de Moudjahiddines devaient être

8 relâchés.

9 On devait coordonner l'ensemble de cela. Au trois endroits, cela

10 devait se passer au même moment. Pendant que j'étais à Travnik, j'étais là

11 avec une escorte armée du Bataillon britannique de Vitez, j'étais

12 accompagné par un Moudjahiddine qui parlait allemand. Je pouvais

13 communiquer avec lui. Dans son ensemble, cette opération a été remise à

14 plus tard, à plusieurs reprises, me semble-t-il. Elle a été planifiée. La

15 libération devait se produire à midi, cela a été reporté à plusieurs

16 reprises. Je pense que, finalement, cela s'est produit dans l'après-midi.

17 Q. Vous étiez vous-même à Travnik d'après ce que j'ai compris. Qui était

18 le membre de la MCCE qui était responsable de l'opération à Zenica ?

19 R. Je pense que mon collègue allemand était l'une des personnes

20 responsables de l'ensemble de l'opération. C'était mon collègue Dieter

21 Schellschmidt. Pour autant que je m'en souvienne, il s'occupait de cette

22 affaire-là à Zenica.

23 Q. Du côté du HVO, Commandant, qui a été échangé contre les

24 Moudjahiddines, si vous le savez ?

25 R. Qui a été libéré ?

Page 7021

1 Q. Est-ce que vous savez qui a été libéré par les Moudjahiddines ?

2 R. Oui. Ils ont libéré, à Travnik, les quatre officiers. Je ne me souviens

3 pas où a été libéré Totic, s'il a été libéré à Zenica ou à un autre

4 endroit.

5 Q. Commandant, qu'avez-vous appris au sujet de la libération qui s'est

6 produite à Zenica, au sujet de tous les aspects de cette libération ?

7 R. Puisque j'étais à Travnik, moi-même, je n'ai pas pu le surveiller

8 personnellement. Plus tard, mon collègue allemand, Dieter Schellschmidt,

9 m'a parlé de la situation qui était celle de Zenica, de la manière dont les

10 choses se sont passées à Zenica. Il m'a dit que beaucoup de Moudjahiddines

11 sont arrivés dans ce secteur devant l'hôtel. Il m'a dit que la police

12 locale a disparu lorsque les Mujahed armés sont arrivés. Il m'a dit qu'il y

13 avait un camion, qu'à bord de ce camion il y avait une mitrailleuse lourde.

14 Il m'a dit aussi que par la suite, le HVO a libéré toutes les personnes

15 détenues, que les personnes détenues ont quitté le secteur ensemble avec

16 les Moudjahiddines et qu'il y a eu beaucoup de tirs en l'air.

17 Q. Commandant, savez-vous si l'observateur de la MCCE, Schellschmidt,

18 votre collègue au centre général de Zenica, s'il a rédigé un rapport au

19 sujet de cette opération de Zenica ?

20 R. Oui, il l'a fait. Une fois que l'opération a été terminée, il a rédigé

21 un rapport où il a présenté de manière chronologique comment se sont

22 déroulés les différents incidents.

23 Q. Est-ce que vous avez pu prendre connaissance de ce rapport à l'époque,

24 à Zenica ?

25 R. Oui, j'ai eu l'occasion de voir ce rapport et d'avoir un exemplaire de

Page 7022

1 ce rapport.

2 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite présenter

3 au témoin la pièce de l'Accusation, 155. Il s'agit du rapport du centre

4 régional de Zenica, d'un rapport de la MCCE, en date du 19 mai 1993.

5 Q. Je vous prie, Commandant, de prendre connaissance de ce document.

6 Commandant, s'agit-il bien là du rapport rédigé par Dieter

7 Schellschmidt, du rapport que vous venez de mentionner ?

8 R. Oui, c'est exact. La version anglaise, la version traduite, n'a

9 pas été produite par la MCCE, semble-t-il.

10 Q. Commandant, je souhaite attirer votre attention sur le paragraphe 4 qui

11 figure en première page. La deuxième partie de ce paragraphe où on peut

12 lire la chose suivante :

13 "L'échange n'a pu avoir lieu que grâce à une coopération très étroite entre

14 toutes les parties impliquées. C'étaient : La Croix rouge internationale,

15 le FORPRONU, le HVO et l'ABiH, le groupe arabe (Mujahedin) et la MCCE, en

16 tant que médiateur. Les représentants de toutes ces organisations étaient

17 présents aux trois endroits pendant l'échange."

18 C'est ce qui est écrit dans ce rapport. Pour autant que vous connaissez la

19 situation, est-ce que cela est exact ? Est-ce que

20 M. Schellschmidt reprend de manière exacte dans son rapport ce qui s'est

21 passé ?

22 R. Comme je n'ai pas pris part à ces trois événements, je ne suis pas la

23 personne qui était présente aux différentes réunions, à toutes les

24 réunions. Pour ce qui est de Travnik, pour ce qui est de ceux dont j'étais

25 responsable, moi-même, je ne me souviens pas qu'il y ait eu autres que du

Page 7023

1 HVO ou des représentants de l'ABiH ou de la Croix rouge internationale.

2 Pour autant que je m'en souvienne, c'était uniquement la FORPRONU qui nous

3 a fourni une escorte armée. Je me souviens d'un représentant des

4 Moudjahiddines qui était présent lui aussi.

5 Q. Commandant, avez-vous une raison quelle qu'elle soit de ne pas prêter

6 foi à ce qui est rédigé dans le rapport de

7 M. Schellschmidt ?

8 R. Non. Dans l'ensemble, les rapports qui étaient produits par la MCCE,

9 ils étaient aussi signés par d'autres personnes que l'auteur. Normalement,

10 nos rapports étaient des rapports d'équipe. Ils étaient signés par deux

11 observateurs. En règle générale, c'était la règle qui s'appliquait aussi à

12 d'autres rapports. Il faillait qu'il y ait des personnes qui soient

13 capables de confirmer la teneur du document. Comme je n'ai pas pris part à

14 ces réunions, je ne suis pas capable de vous dire qui était présent.

15 Q. Je comprends, Commandant. Si je puis à présent attirer votre attention

16 sur le paragraphe 6 de la première page. Vous avez déjà déposé au sujet de

17 cet aspect, en particulier. Ici, il est dit : "A Zenica, devant l'hôtel

18 International, des Moudjahiddines se sont montrés. Il y avait au moins 100

19 soldats masqués et lourdement armés. C'étaient probablement des membres de

20 la 7e Brigade musulmane."

21 Dans vos débats avec M. Schellschmidt, est-ce qu'on a fait référence à

22 cela ? Est-ce qu'il vous a parlé de cela ?

23 R. Je me souviens que nous avons dit qu'il y avait beaucoup de soldats

24 armés, qu'il y avait des armes lourdes, qui se sont trouvés devant l'hôtel.

25 Je ne me souviens pas qu'on ait dit que c'étaient uniquement des membres de

Page 7024

1 la 7e Brigade musulmane. Pour autant que je m'en souvienne, c'étaient des

2 membres qui étaient des Moudjahiddines. Parfois, il est très difficile de

3 voir la différence entre les uns et les autres, parce que parfois un membre

4 de la 7e Brigade musulmane portait les mêmes vêtements que ceux que nous

5 voyons généralement comme étant des vêtements que portaient des

6 Moudjahiddines. A d'autres occasions, il y avait des Moudjahiddines qui

7 portaient un uniforme. Il était très difficile de savoir si c'était

8 quelqu'un qui était membre de la 7e Brigade ou s'il était membre des

9 Moudjahiddines. Très souvent, il fallait peut-être voir son visage ou

10 entendre la langue qu'il parlait, quelle était sa langue maternelle.

11 Q. Commandant, je vous prie de vous reporter en page 3, à l'annexe B.

12 C'est le paragraphe 6 qui m'intéresse où il est dit : "Le RC de Zenica a

13 informé immédiatement le QG de la MCCE, le 3e Corps de l'ABiH, la police

14 civile de Bosnie-Herzégovine, le QG du HVO de Vitez, et cetera, d'autres

15 organisations." Est-ce que vous avez une raison quelle qu'elle soit de ne

16 pas prêter foi à ce qui figure à cette déclaration qui est faite dans le

17 rapport ?

18 R. Non.

19 Q. Je vous prie de vous reporter au paragraphe 10 de l'annexe B. La

20 deuxième partie de ce paragraphe où il est dit : "Les Moudjahiddines ont

21 été également informés par le RC de la proposition émanant du HVO. Cette

22 fois-ci, ils ont répondu qu'ils souhaitaient avoir une réunion avec le HVO,

23 le 3e Corps de l'ABiH, la 7e Brigade musulmane, la MCCE, la Croix rouge

24 internationale, la FORPORNU, afin de discuter de l'échange et de l'ensemble

25 du problème qui concerne les étrangers." Je vois que mon collègue souhaite

Page 7025

1 prendre la parole.

2 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président. Monsieur le Président, la

3 Défense voudrait bien laisser toute la latitude nécessaire à mon confrère

4 de poser ses questions qui sont directement des questions liées à du ouï-

5 dire, de l'information qu'il aurait pu recevoir de d'autres personnes.

6 Cette question a été discutée devant la Chambre à maintes reprises. Nous

7 savons que le ouï-dire est une forme de preuve qui peut être acceptée dans

8 certaines circonstances. Toutefois, il faut bien vérifier la question de la

9 fiabilité de la source, mais aussi de savoir si la source est disponible,

10 et si la source pourrait venir témoigner. En l'occurrence, Monsieur le

11 Président, l'auteur du document est un témoin qui sera entendu devant la

12 Chambre. Je ne vois pas la pertinence de demander à ce témoin de voir s'il

13 croit ou pas son collègue alors que le collègue sera ici pour nous dire

14 toute la vérité. Merci, Monsieur le Président.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur Withopf, vous avez entendu la Défense

16 qui indique que les questions que vous posez, vous allez pouvoir les poser

17 à l'auteur même du document. Est-ce bien nécessaire de lui demander à

18 celui-ci de confirmer ce qui est dans un document dont on aura la

19 confirmation par le scripteur du document. Vous avez certainement une bonne

20 raison. Pouvez-vous répondre à l'objection faite par la Défense ?

21 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que

22 l'Accusation a une raison valable de poser cette question au témoin. En

23 réalité, nous avons plusieurs raisons. Tout d'abord, au premier point, ce

24 rapport est un résumé pour ce qui est d'un certain nombre d'échanges de

25 prisonniers. M. Schellschmidt a rédigé son résumé en se référant aux

Page 7026

1 questions auxquelles il a pris part lui-même, aussi pour ce qui est des

2 choses qui concernent d'autres personnes, par exemple, le témoin que nous

3 avons ici. Le témoin, aujourd'hui, a déjà informé la Chambre de première

4 instance du fait que jusqu'à un certain point, il a pris part à ce

5 processus de réception de lettres émanant des Moudjahiddines, et a pris

6 part à l'échange des otages qui avaient été détenus par les Moudjahiddines.

7 Ce témoin est certainement, en plus de l'auteur du rapport, en position de

8 formuler des commentaires au sujet de ce qui constitue la teneur du

9 rapport.

10 Deuxième point. L'Accusation estime que le témoin qui n'est pas auteur d'un

11 rapport, peut corroborer ce qui est rédigé dans un rapport et s'il le

12 corrobore, je prends tout à fait en compte le commentaire qui a été fait

13 par mon éminent collègue de la Défense, car un certain nombre d'égards, il

14 peut simplement déposer au sujet de ce qu'il a entendu de la bouche de M.

15 Schellschmidt. Cependant, l'Accusation estime qu'un élément de preuve

16 corroboré par plusieurs témoins, par un certain nombre d'autres témoins,

17 est renforcé, que ces éléments de preuve se trouvent renforcés. Je pense

18 que nous avons tout à fait raison à poser ces questions, et que nous

19 poserons d'autres questions à M. Schellschmidt.

20 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais redonner la parole à Me Bourgon. Pour

21 résumer la position de l'Accusation, l'Accusation nous dit

22 qu'effectivement, il y a un rapport émanant d'un témoin qui comparaîtra

23 prochainement, que dans la mesure où ce témoin a lui-même participé au

24 départ à la question de l'échange des prisonniers, ce témoin peut répondre

25 à des questions relatives à cet échange. Par ailleurs, il peut par ce qu'il

Page 7027

1 dit, conforter encore plus la teneur du rapport établi par le futur témoin.

2 Maître Bourgon, que voulez-vous dire avant qu'on interrompre pour la

3 pause ?

4 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président. Rapidement, sur le premier

5 point, effectivement, le témoin a participé à cet échange. Il peut tout à

6 fait relater les faits auxquels il a pris part personnellement. Ce qu'il a

7 fait, ce qu'il a vu, ce qu'il a entendu, mais pas sûr à savoir s'il croit

8 son collègue.

9 Sur le deuxième point, Monsieur le Président, une corroboration c'est

10 lorsqu'on emporte quelque chose pour soutenir. Ici, de dire croyez-vous ou

11 non ce qui est écrit dans le rapport, ne permet pas de soutenir

12 l'affirmation principale. S'il dit j'ai vu tel geste commis par une

13 personne qui est également dans le document, c'est une corroboration. Mais

14 pas de dire avez-vous des raisons de croire que ce qui est dans le document

15 est faux ou vrai. De l'avis de la Défense, Monsieur le Président, il ne

16 s'agit pas là d'une corroboration, mais simplement de savoir si oui ou non,

17 le témoin, l'auteur du document, M. Schellschmidt, est crédible ou pas.

18 Merci, Monsieur le Président.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous reprendrons à l'issue de la pause. Il est 4

20 heures moins quart. Nous reprendrons à 4 heures et quart.

21 --- L'audience est suspendue à 15 heures 46.

22 --- L'audience est reprise à 16 heures 21.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.

24 La Chambre, qui a évoqué la question posée suite à l'objection de Me

25 Bourgon -- la Chambre est d'avis que, compte tenu de l'importance du

Page 7028

1 document, l'Accusation est fondée à poser toute question utile au dit

2 témoin.

3 Poursuivez, Monsieur Withopf.

4 M. WITHOPF : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Madame,

5 Monsieur les Juges.

6 Q. Commandant, si je puis revenir sur ce document, et il s'agit là du

7 dernier point que je souhaite aborder eu égard au contexte de ce document.

8 Avant la pause, nous avons parlé du paragraphe 10 en l'annexe B, où

9 il est précise : "Cette fois-ci, ils ont répondu qu'ils souhaitaient

10 organiser une réunion avec la réunion [comme interprété] du HVO du 3e Corps

11 de l'ABiH, de la 7e Brigade musulmane, de la MCCE, du CICR et de la

12 FORPRONU, pour parler des étrangers."

13 Commandant, avez-vous des raisons de ne pas croire ce qui est écrit ici au

14 paragraphe 10 ?

15 R. Non.

16 Q. Merci, Monsieur.

17 M. WITHOPF : [interprétation] Nous allons retirer cette pièce.

18 Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, il y a trois autres

19 points que je souhaite poser. Pour vous-mêmes et pour le conseil de la

20 Défense, j'ai prévu quelque 20 minutes pour ce faire -- 20 à 25 minutes.

21 Q. Commandant, un peu plus tôt, vous avez précisé que vous avez appris

22 l'existence de l'école de musique de Zenica. D'après vous, quelle unité

23 militaire était cantonnée dans l'école de musique de Zenica ?

24 R. A l'école de musique de Zenica, il y avait quelque chose comme un QG

25 des Unités de la 7e Brigade musulmane.

Page 7029

1 Q. Qu'est-ce que cela signifie lorsque vous dites, "une sorte de QG de

2 l'Unité de la 7e Brigade musulmane" ? Qu'est-ce que vous entendez par là ?

3 R. Je ne me souviens pas s'il s'agissait du QG de la brigade ou peut-être

4 du QG d'un bataillon, mais c'était, en quelque sorte, un QG, mais je ne me

5 souviens pas à quel niveau cela se situait.

6 Q. Qu'avez-vous appris, Monsieur, à propos de la 7e Brigade musulmane ?

7 R. J'ai eu l'occasion de rencontrer la brigade à plusieurs reprises, la

8 première fois au cours de l'enquête et de l'enlèvement

9 -- de cet incident. Plus tard, lorsque je présidais à cette commission

10 mixte, où j'ai accès à l'école de musique, j'ai eu l'occasion de rencontrer

11 des soldats qui faisaient partie de cette unité, encore une fois.

12 Q. Si je puis suivre un petit peu, à quels endroits et dans quelles

13 régions avez-vous rencontrés les membres de la 7e Brigade musulmane ?

14 R. La première fois, au cours de l'enquête dans le cadre de l'enlèvement.

15 Nous avons organisé cette réunion à l'hôtel -- je ne sais pas si je le

16 prononce correctement -- Ravno Rostovo, et c'était un hôtel d'une ancienne

17 station de sports divers. Nous avons rencontré les commandants locaux.

18 Lorsque je dis "commandants locaux", chacun se présentait comme étant un

19 commandant, à ce moment-là. C'est très difficile de savoir s'il s'agissait

20 d'un commandant de bataillon ou de brigade, mais je ne me souviens pas du

21 nom de la personne -- de la personne qui était le plus haut gradé. Lorsque

22 nous nous sommes rendus sur les lieux, ce jour-là, nous à montrer

23 l'enceinte et, après quoi, nous lui avons expliqué les raisons de notre

24 venue. Nous lui avons dit que nous aimerions visiter l'hôtel pour voir si

25 les otages se trouvaient bien à cet endroit. Ils ont été très polis. Le

Page 7030

1 commandant nous a fait visiter les lieux, et nous avons pu voir toute

2 l'enceinte.

3 Q. Un point de clarification, s'il vous plaît, Commandant. Etait-ce

4 Merdan, le commandant adjoint du 3e Corps de l'ABiH, qui a suggéré que vous

5 vous rendiez à cet endroit ? Pouvez-vous confirmer qu'il s'agit bien de

6 Ravno Rostovo ? Est-ce bien Merdan qui a suggéré que vous vous rendiez à

7 cet endroit où la 7e Brigade musulmane avait quelque chose comme un QG ?

8 R. Oui, c'est exact.

9 Q. Cette visite que vous avez faite à Ravno Rostovo, était-ce dans le

10 cadre d'une enquête que vous deviez menée sur l'enlèvement des officiers du

11 HVO par les Moudjahiddines ?

12 R. A ce moment-là, nous ne savions pas qu'il s'agissait des

13 Moudjahiddines, qui étaient à l'origine de cet enlèvement. Nous avions

14 entendu les rumeurs, d'après le colonel Blaskic, qu'il pouvait s'agir de la

15 même Brigade musulmane qui était responsable. C'est la raison pour laquelle

16 nous nous sommes rendus à cet endroit-là.

17 Q. Dans quelle zone, Commandant, se trouve ce village de Ravno Rostovo ?

18 Quelle est la ville la plus proche ?

19 R. Si je me souviens bien de la géographie des lieux, cela se situait au

20 sud-ouest de Novi Travnik, près de Bugojno.

21 Q. Avez-vous remarqué, à ce QG de la 7e Brigade musulmane à Ravno Rostovo,

22 près de Bugojno, avez-vous remarqué des insignes ou des drapeaux

23 militaires ?

24 R. Lorsque nous sommes arrivés au début, il y avait des soldats à

25 l'extérieur qui vous ont accueillis. Ils étaient en train d'hurler quelque

Page 7031

1 chose qui comportaient le terme "Allah", c'était peut-être en arabe, et ils

2 tenaient des étendards verts, sur lesquels on pouvait voir des signes en

3 arabe. Il y avait des signes en arabe sur le drapeau qu'ils avaient

4 également.

5 Q. Je souhaite maintenant parler de la visite que vous avez faite à

6 l'école de musique de Zenica. Vous souvenez-vous si -- de la date, environ,

7 à laquelle vous avez visité l'école de musique de Zenica ?

8 R. Je me suis rendu à l'école de musique de Zenica à une époque qui

9 n'était pas celle de l'enquête à propos des otages. C'était lorsque j'étais

10 président de cette commission mixte. Nous avions entendu les rumeurs en

11 vertu de quoi il y avait des personnes détenues dans cette école de

12 musique, et avant de relâcher les prisonniers -- non pas des prisonniers ou

13 des personnes détenues -- nous voulions visiter tous les lieux où nous

14 avons entendu dire qu'il y avait des gens qui étaient détenus. Il ne

15 s'agissait que des rumeurs, c'est la raison pour laquelle nous sommes

16 rendus à l'école de musique.

17 Normalement, nous n'aurions pas eu accès à une école de musique, mais,

18 parce que j'étais le président de cette commission mixte, j'avais une

19 lettre signée sur moi. Je ne me souviens pas qui avait signé cette lettre,

20 mais elle était signée. C'était au niveau de l'état-major, et c'était au

21 dessus du niveau du corps. C'était le général qui avait signé cette lettre,

22 et cette lettre nous permettait d'accéder à tous les lieux que nous

23 voulions visiter en Bosnie centrale.

24 Q. Qui était avec vous lorsque vous avez visité l'école de musique de

25 Zenica ?

Page 7032

1 R. Lorsque nous avons visité l'école de musique de Zenica, il y avait des

2 autres membres, tous les autres membres de la commission mixte, qui étaient

3 présents, mais, pour autant que je m'en souvienne, j'étais le seul qui

4 pouvait accéder à l'intérieur de l'école de musique. Je pouvais aller à

5 l'intérieur, et visiter l'intérieur. Au début, on ne nous a pas permis

6 d'entrer dans l'école de musique. J'ai dû établir un contact avec un membre

7 du 3e Corps et, si je me souviens bien, je suis entré en contact avec M.

8 Merdan, et il est intervenu en ma faveur, et j'ai pu pénétrer dans l'école

9 de musique. Les représentants locaux de la 7e Brigade musulmane ne

10 voulaient pas que des membres du HVO entre dans cette école de musique et,

11 pour essayer de trouver une solution à ce problème, nous sommes tombés

12 d'accord, et nous avons convenu que j'allais entrer dans l'école de musique

13 sans les autres membres de la commission.

14 Q. Qui vous a empêché d'entrer dans l'école de musique ?

15 R. C'était l'homme qui était le commandant, l'homme qui était responsable

16 de cette enceinte ou de cette unité qui se trouvait à l'intérieur de

17 l'école.

18 Q. Combien de temps, Commandant, avez vous dû attendre avant de pouvoir

19 entrer et avoir l'autorisation de Merdan et du 3e Corps de l'ABiH et de son

20 commandant adjoint d'entrer dans l'école ?

21 R. Pour autant que je m'en souvienne, je crois que j'ai dû attendre une

22 heure, environ, quelque chose comme cela.

23 Q. Est-ce que c'est quelque chose qui vous semblait habituel, que d'être

24 obligé d'attendre avant de pouvoir entrer quelque part pour ce qui est des

25 locaux où se trouvait le 3e Corps ?

Page 7033

1 R. Généralement parlant, nous n'avions aucune difficulté à accéder à des

2 unités ou à des enceintes qui appartenaient à l'ABiH. De l'autre côté, nous

3 avions souvent des difficultés avec le HVO, mais, en générale, avec l'ABiH,

4 nous n'avions jamais aucun problème.

5 Q. Pour ce qui est des lieux où se trouvaient des détenus, et pour ce qui

6 est de ces lieux ou de ces centres de détention contrôlés ou dirigés par

7 les Unités du 3e Corps de l'ABiH, est-il juste de dire que c'était

8 exceptionnel, et qu'il s'agissait de quelque chose tout à fait

9 exceptionnel ?

10 R. Oui, parce que, normalement, nous avions accès à l'enceinte, mais,

11 cette fois ci, on ne nous a pas permis d'entrer, et une heure plus tard,

12 nous avons pu entrer.

13 Q. Je souhaite maintenant repartir à ma question de départ. Vous souvenez-

14 vous du moment ou de la date à laquelle vous avez visité l'école de musique

15 de Zenica ?

16 R. Cette commission mixte a commencé à travailler. Je crois que cela

17 devait être le 10 juin 1993, et c'était immédiatement après, et c'était

18 peut-être le 11 ou le 12, peut-être.

19 Q. Avez-vous vu des prisonniers dans l'école de musique ?

20 R. Non. J'étais autorisé à visiter l'école de musique dans son ensemble. A

21 une accession près, il y avait une pièce où se trouvaient leurs matériels

22 de mission de transmission et, généralement parlant, nous visitions des QG.

23 Il ne souhaitait pas que l'on voie quel type d'équipement de signaux qu'ils

24 avaient. A l'entrée, il y avait des câbles, en fait - peut-être qu'ils

25 fournissaient l'électricité - et des câbles d'antenne. Lorsqu'ils nous ont

Page 7034

1 dit qu'on ne pouvait pas rentrer, je ne m'en suis pas beaucoup inquiété,

2 car cela me paraissait tout à fait normal. Il s'agit, en fait, d'un centre

3 de transmission, alors qu'on visite un QG, c'est tout à fait normal, et on

4 est accusé souvent d'être des espions. Nous ne voulions pas nous présenter

5 sous cette forme, et comme étant perçu comme étant des espions qui

6 voulaient voir l'intérieur de cette pièce. Nous avons acquiescé.

7 Q. Était-il normal ou une expérience normale, commandant, que les deux

8 factions belligérantes en Bosnie centrale, à savoir, le HVO et le 3e Corps

9 du l'ABiH tentaient de cacher leurs équipement ou leurs systèmes de

10 transmissions ?

11 R. Oui. C'est tout à fait normal, et toutes armées seraient enclines à le

12 faire.

13 Q. Pour les besoins du compte rendu d'audience, on vous a permis

14 d'accéder, d'après vous, à toutes les pièces dans l'école de musique de

15 Zenica, hormis cette pièce que vous avez décrit comme étant la salle de

16 transmission.

17 R. Oui. Ils ont expliqué qu'il s'agissait de leur salle de transmission.

18 Q. Avec l'autorisation de la Chambre de première instance, est-ce que l'on

19 peut montrer au témoin, s'il vous plaît, la pièce portant le numéro P8 ?

20 Vous allez, Commandant, également voir ce document à fichier et à l'écran.

21 D'après vous, avez-vous jamais vu cette pièce, que vous voyez, représentée

22 dans la photographie devant vous actuellement ?

23 R. Cela semble être une pièce en sous-sol, mais je ne souviens pas avoir

24 vu cette pièce, en particulier.

25 Q. Merci beaucoup.

Page 7035

1 M. WITHOPF : [interprétation] Est-ce que l'on peut maintenant enlever le

2 document ? Pour les besoins du compte rendu d'audience, on vient de montrer

3 au témoin, Lars Bagessen, la pièce P28, une photographie qui montre le

4 sous-sol de l'école de musique de Zenica, et le témoin dit qu'il ne se

5 souvient d'avoir vu cette pièce.

6 Q. Combien de temps, Commandant, êtes-vous resté, ce jour-là, dans

7 la deuxième moitié du mois de juin 1993 dans l'école de musique de Zenica ?

8 R. Je ne me souviens pas combien de temps j'y suis resté mais on m'a fait

9 faire le tour de l'école de musique, et après ma visite de cette école,

10 j'ai pu esquisser un croquis, car j'étais le premier, à ma connaissance, à

11 avoir visité cette école. Nous n'avions aucun croquis montrant l'école.

12 Pour ce qui est du sous-sol, nous savions que ce sous-sol existait. J'ai

13 dit qu'il y avait une salle à laquelle nous n'avons pas eu accès, puisqu'il

14 s'agissait de la salle de transmission. Je crois que, si on ne nous a pas

15 permis de visiter le sous-sol, je crois que ceci m'aurait rendu -- ceci

16 aurait éveillé mes soupçons, mais je ne me souviens pas de cette image. Je

17 me souviens avoir dit bien cette pièce correspond au sous-sol.

18 Q. Lorsque vous avez visité l'école de musique de Zenica eu juin 1993,

19 avez-vous remarqué l'existence d'étrangers dans cette école de musique, des

20 Moudjahiddines ?

21 R. Au cours de notre visite, on a pu voir des soldats en uniforme et des

22 soldats portant des vêtements arabes. Nous n'avons pas eu l'occasion de

23 parler avec toutes les personnes présentes. Mais je crois que certaines des

24 présentes, qui se trouvaient là, n'étaient peut-être pas des Bosniens, mais

25 c'était difficile à voir. C'était difficile de conclure qu'il s'agissait

Page 7036

1 d'hommes arabes si nous nous n'étions pas entretenus avec lui. Comme je

2 l'ai dit un peu plus tôt, quelquefois, on a pu constater que le visage

3 comporte des traits arabes, mais je me souviens simplement qu'il y avait

4 des soldats en uniforme et des soldats qui portaient des vêtements arabes,

5 qui sont les vêtements que portent habituellement les soldats arabes, à

6 savoir, les Moudjahiddines.

7 Q. Commandant, je souhaite passer maintenant au point suivant. C'est un

8 point que je vais aborder, de façon très succincte. Il s'agit des capacités

9 de transmission. Vous avez déjà précisé que les deux parties au conflit, à

10 savoir, le HVO et le 3e Corps de l'ABiH, ont tenté de cacher leurs

11 équipements de transmission et leur capacité de transmission aux

12 observateurs internationaux. Deux questions brèves. A votre connaissance, à

13 l'époque, où vous vous trouviez à Zenica, qui contrôlait le bâtiment des

14 PTT à Zenica ?

15 R. Je ne sais pas si c'était le 3e Corps qui contrôlait le bâtiment

16 du PTT, mais c'était placé sous le contrôle des habitants musulmans.

17 Q. Le deuxième point par rapport à ce même contexte. Avez-vous jamais su

18 si le 3e Corps de l'ABiH utilisait des systèmes de communication mobiles ?

19 R. Nous savions qu'ils utilisaient d'autres systèmes de communication car,

20 quelquefois, ils pouvaient communiquer dans des régions où, en général, les

21 lignes fixes avaient été coupées. On ne voyait pas des téléphones

22 portatifs, cela nous n'avons pas vu de visu. Mais, plus tard, j'ai appris

23 qu'ils étaient en possession de matériels de communication assez

24 sophistiqués, mais, à l'époque, je ne l'ai pas vu.

25 Q. Poursuivons. Commandant, je souhaite aborder ce troisième point avec

Page 7037

1 vous, à savoir, les quartiers de détention à Mehurici, quartiers de

2 détention de l'ABiH. Avez-vous visité le centre de détention de l'ABiH à

3 Mehurici ?

4 R. Oui, j'ai visité ce centre qui se trouvait dans l'école au cours des

5 travaux entrepris avec la commission mixte. Nous avons constaté qu'un bon

6 nombre de civils avaient été détenus dans cette école et il y avait plus de

7 200 civils détenus dans cette école. La plupart d'entre eux étaient des

8 femmes et des enfants, voire même des bébés. Il y avait quelques personnes

9 âgées parmi ces détenus également.

10 Q. Vous venez d'évoquer le fait que près de 200 civils, y compris des

11 femmes, des enfants et des bébés, étaient détenus dans une école. Dans

12 quelle région, d'après vous, se situe cette école dans laquelle ils étaient

13 détenus ?

14 R. Ils étaient détenus dans le gymnase ou la salle de sports.

15 Q. Quel était l'objet de votre visite lorsque vous avez visité l'école de

16 Mehurici ?

17 R. Dans le cadre de mes activités au sein de la commission mixte

18 humanitaire, nous devions nous rendre dans tous les endroits où nous avions

19 entendu dire qu'il y avait des personnes détenues par le HVO et par l'ABiH.

20 C'est la raison pour laquelle nous nous sommes rendus à Mehurici.

21 Q. Avez-vous participé aux négociations visant la mise en liberté des

22 civils qui étaient détenus dans l'école de Mehurici ?

23 R. Oui. Après que nous avons eu une vision d'ensemble à propos de toutes

24 les personnes qui étaient détenues dans les deux camps, nous avons

25 justement amorcé les négociations pour mettre en liberté toutes ces

Page 7038

1 personnes détenues. Il était convenu au sein de la commission que nous

2 devrions justement avoir cette possibilité d'examiner ce qui se passait

3 avant de commencer à mettre en liberté les prisonniers -- en fait, non pas

4 les prisonniers, mais les personnes qui avaient été détenues. Il avait été

5 décidé qu'il aurait des libérations dans les deux camps, mais à des

6 périodes de temps différentes.

7 Q. Les parties de la commission à laquelle vous faites allusion étaient le

8 HVO et l'ABiH ?

9 R. C'est exact.

10 Q. Quel camp ou quelle partie a pris la décision pour ce qui est de la

11 mise en liberté des détenus civils de l'école à Mehurici ?

12 R. Bien entendu, cela a fait l'objet de discussions avec les deux membres

13 de l'ABiH, qui faisaient partie de la commission et, bien entendu, ils

14 avaient obtenu un mandat de la part du 3e Corps.

15 Q. Je vous remercie, mon Commandant.

16 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

17 Juges, j'en ai terminé avec l'interrogatoire principal.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie, Monsieur Withopf.

19 Je me tourne vers les avocats pour leur donner la parole. Maître Bourgon.

20 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président.

21 Contre-interrogatoire par M. Bourgon :

22 Q. [interprétation] Bonjour, mon Commandant. Nous avons eu le grand

23 plaisir de faire votre connaissance ce matin avec mon confrère, Rodney

24 Dixon, qui représente l'accusé, Amir Kubura. Mais j'aimerais, aux fins du

25 compte rendu d'audience, me présenter à nouveau. Je m'appelle Stéphane

Page 7039

1 Bourgon et, cet après-midi je suis accompagné de Me Edina Residovic et de

2 M. Alexis Demirdjian. Nous défendons l'accusé, le général Hadzihasanovic,

3 comme vous le savez, qui était le commandant du 3e Corps en Bosnie

4 centrale.

5 Commandant, ma question que -- j'aimerais, dans un premier temps, vous

6 poser des questions d'ordre général, avant de passer à des questions plus

7 précises, telles que, par exemple, les questions que vous avez abordées

8 avec l'Accusation, notamment, les enlèvements, les échanges de prisonniers,

9 aussi que quelques questions qui porteront sur les visites que vous avez

10 faites à l'école de musique de Zenica et à Mehurici.

11 Dans un premier, mon Commandant, j'aimerais confirmer que vous avez apporté

12 votre déposition, dans l'affaire Blaskic et dans l'affaire Kordic, en tant

13 que témoin à charge.

14 R. C'est exact.

15 Q. Il y avait, en fait, une déclaration écrite que vous avez fournie aux

16 enquêteurs de l'Accusation en 1996, déposition qui a été faite, je suppose,

17 en août 1996, et cela a formé la base de vos dépositions.

18 R. Je me souviens que c'était en 1996, mais je ne me souviens pas du mois.

19 Q. Ensuite, vous avez été contacté à nouveau par le bureau du Procureur,

20 et vous avez, en février 2001, fourni une autre déclaration, une autre

21 déposition, qui portait plus précisément sur cette affaire; est-ce bien

22 exact ?

23 R. C'est exact.

24 Q. Lorsque vous vous êtes rendu en Bosnie, vous avez passé trois mois en

25 Bosnie centrale, de la fin du mois de mars jusqu'au premier jour de

Page 7040

1 juillet.

2 R. C'est exact.

3 Q. A l'époque, vous étiez capitaine de l'armée danoise, mais, si je ne

4 m'abuse, vous aviez 36 ans, et c'est un âge qui est un peu plus avancé que

5 l'âge normal pour un capitaine. Pourriez-vous nous fournir des explications

6 à ce sujet ? Est-ce qu'il y a des raisons qui expliquent cela -- des

7 raisons de votre carrière militaire ?

8 R. Non. Dans l'armée danoise, c'est un âge tout à fait normal pour être

9 capitaine. J'ai été promu au grade de commandant à l'âge de 38 ans, ce qui

10 est d'ailleurs était un âge très précoce pour ce faire.

11 Q. A l'âge de 36 ans, pensez-vous que vous aviez une plus ample expérience

12 que d'autres capitaines, des capitaines du BritBat, par exemple, que vous

13 auriez rencontrés pendant votre période d'affectation en Bosnie ?

14 R. A l'époque, au sein de l'armée danoise, il fallait que vous soyez

15 capitaine pendant dix années avant de pouvoir être promu au grade de

16 commandant. En tant que capitaine, j'avais une certaine expérience si vous

17 mettez cela en parallèle avec des capitaines qui venaient d'autres pays.

18 Q. Je vous remercie, mon Commandant. Nous allons poursuivre. Pendant votre

19 période d'affectation en Bosnie, vous étiez avec la MCCE, et vous étiez, en

20 quelque sorte, affecté au centre régional de Zenica.

21 R. C'est exact.

22 Q. Puis-je dire que la mission de la MCCE en Bosnie centrale consistait à

23 faire en sorte que la paix et la stabilité soit maintenues dans cette

24 région et faire en sorte de prévenir et d'empêcher des conflits éventuels

25 au sein de la Bosnie-Herzégovine ? En cas de conflit, puisque c'est le cas,

Page 7041

1 la Mission d'observation permettrait d'établir les faits pour éviter que la

2 situation ne se détériore. Est-ce que c'est ainsi que l'on peut résumer

3 votre mission -- la mission de la MCCE ?

4 R. C'est exact. C'est d'ailleurs même plus exact que la réponse que j'ai

5 apportée plus tôt, mais je n'aurais pas pu formuler cela de cette façon

6 éloquente.

7 Q. C'est tout à fait compréhensible, mon Commandant, parce que j'ai

8 extrait cela d'un document que j'aimerais vous montrer d'ailleurs et qui

9 est, en fait, le document portant à la création de la MCCE en Bosnie-

10 Herzégovine. Nous avons suffisamment d'exemplaires pour tout le monde, pour

11 que nous puissions comprendre quel était le mandat ou la mission de la

12 MCCE.

13 M. BOURGON : Nous avons quelques documents à déposer qui ne sont pas

14 disponibles dans la langue de l'accuse. Toutefois, ces documents ont été

15 discutés -- ont été présentés et discutés avec les accusés, mais le manque

16 de ressources fait qu'il nous est impossible de traduire tous les documents

17 que nous utilisons.

18 Q. [interprétation] Commandant, pourriez-vous prendre l'article premier,

19 qui est intitulé "Mandat", et pouvez-vous confirmer que ce dont je viens de

20 vous donner lecture correspond au mandat de la Mission d'observation de la

21 Communauté européenne à laquelle vous apparteniez ?

22 R. Je m'excuse. Je n'ai pas compris la première partie de votre question.

23 Q. Je vais la répéter. Pourriez-vous prendre l'article premier, qui se

24 trouve à la première page, et confirmer que cela correspond exactement à la

25 Mission d'observation de la Communauté européenne à laquelle vous

Page 7042

1 apparteniez ?

2 R. Oui, c'est exact.

3 Q. Je vous remercie, Commandant.

4 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Withopf.

6 M. WITHOPF : [interprétation] C'est une question tout à fait secondaire et

7 essentiellement technique, et cela ne porte peut-être que sur l'exemplaire

8 que nous avons, mais, en tout cas, dans l'exemplaire que nous avons, la

9 page 1 et la page 2 font défaut, étant donné que le document commence par

10 "les parties participantes". Je pense, en fait, qu'il y aurait dû avoir un

11 autre paragraphe au début du document.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Maître Bourgon.

13 M. BOURGON : Monsieur le Président, à notre connaissance, c'est un document

14 que nous avons obtenu au cours de notre enquête, et le document commence

15 exactement, c'est la première page. Nous avons un préambule, et le

16 préambule est suivi des articles qui se suivent, de l'Article 1, le mandat;

17 Articles 2, 3, 4, 5 et, à la suite jusqu'à la fin. Toutefois, Monsieur le

18 Président, nous ne déposons ce document que pour assister la Chambre afin

19 de bien comprendre la mission de la MCCE. S'il y a des objections, nous

20 allons retirer le document tout simplement, Monsieur le Président.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Continuez.

22 M. BOURGON : Nous aimerions obtenir un numéro et déposer ce document,

23 puisque le témoin a reconnu que c'était bien là la mission de la MCCE.

24 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur Withopf, la Défense veut verser ce

25 document, qui est signé par le président Izetbegovic, l'ambassadeur qui a

Page 7043

1 représenté l'Union européenne. Dans le document que j'ai, en revanche, je

2 n'ai pas la signature du secrétaire fédéral aux Affaires étrangères, M.

3 Budimir Loncar. Il n'y a pas de signature. Il doit y avoir une raison.

4 Apparemment, ce document, il y a le préambule et il y a des articles.

5 Quelle est la position de l'Accusation sur ce document ?

6 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, nous n'avons pas

7 d'objections. Toutefois, j'aimerais souligner qu'il y a des parties qui

8 font défaut. Dans le document, nous avons également des passages qui ont

9 été écrits à la main, mais, toutefois, cela ne représente pas une objection

10 de la part de l'Accusation à ce que ce document soit versé au dossier.

11 M. LE JUGE ANTONETTI : On va donner un numéro aux fins d'identification. Si

12 la Défense nous donne, ultérieurement, un document plus précis, plus --

13 M. BOURGON : Monsieur le Président, c'est le seul document que nous avons,

14 si vous souhaitez donner un numéro pour identification, je retire tout

15 simplement le document. C'était pour assister la Chambre et non pas pour --

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Compte tenu de l'importance de ce document, et si

17 vous nous dites que vous ne pouvez pas avoir un autre document, on va le

18 prendre.

19 On va donner un numéro. Monsieur le Greffier, un numéro définitif.

20 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cette pièce est versée au dossier, à la

21 référence DH166.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Poursuivez.

23 M. BOURGON :

24 Q. [interprétation] Commandant, j'aimerais poursuivre en vous montrant un

25 autre document, qui est, en fait, un organigramme de la structure de la

Page 7044

1 MCCE. J'aimerais que vous consultiez ce document et j'aimerais que vous

2 m'indiquiez que cela correspond à la mission de la MCCE, notamment, pour ce

3 qui est du centre régional de Zenica, et les passages y référant.

4 R. Oui. Il faut savoir qu'à l'époque où la commission humanitaire mixte a

5 été établie, la commission de Busovaca n'existait pas. Il ne s'agissait pas

6 de la MMUE, mais de la MCCE. Le nom de la mission était la Mission de

7 contrôle de la Communauté européenne. Au début, nous avions le centre

8 régional de Zenica qui était relié. Ensuite, il y a eu la commission mixte

9 de Busovaca, mais il faut savoir que, plus tard, il y a la commission

10 humanitaire mixte, mais ils n'ont pas été créés en même temps.

11 Pendant que nous avions la commission mixte de Busovaca, nous

12 n'avions pas le centre régional à Travnik. Il a été établi ultérieurement.

13 Nous avions le CC Travnik et non pas le CR Travnik. Nous avions le CC

14 Travnik, le CC Tuzla et le CC Mostar. Il s'agissait des centres de

15 coordination. Nous avions également des équipes au niveau de ces centres de

16 coordination. Il faut savoir qu'avant l'établissement du centre de

17 coordination à Travnik, Victor I et Victor II dépendaient du centre

18 régional de Zenica. Les équipes dont il y avait Tango 1, Tango 2, Victor 1

19 à Victor 4 et Mike 1 à Mike 4.

20 Q. Merci, Commandant. Puis-je dire que, si je commence à partir du centre

21 régional, nous pouvons voir qu'il y avait la commission mixte de Busovaca

22 qui existait en premier et qui, ensuite, a été remplacée par --

23 R. Non.

24 Q. -- et, plus tard.

25 R. La commission mixte de Busovaca n'a pas été remplacée par la commission

Page 7045

1 mixte humanitaire. La commission mixte de Busovaca a été remplacée par le

2 commandement mixte à Travnik, et il faut savoir que la commission mixte de

3 Busovaca était dirigée par la MCCE. Le commandement mixte à Travnik était

4 un commandement mixte du HVO et l'ABiH, et la MCCE faisait office

5 d'observateur pour justement superviser la coopération. Nous n'en étions

6 pas membres.

7 La commission humanitaire mixte est une commission mixte qui a été

8 instituée dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu qui a été signé en

9 juin, le 10 juin il me semble.

10 Q. merci beaucoup, Commandant.

11 R. Mais --

12 M. BOURGON : Puisque le témoin, Monsieur le Président, apporte

13 plusieurs corrections, plusieurs modifications, je n'entends pas produire

14 le document. Toutefois, nous allons reproduire le document en trois

15 documents par étapes et le présenter avec un prochain témoin, encore une

16 fois Monsieur le Président, dans le but d'assister la Chambre pour avoir

17 l'image exacte de la situation avec la mission.

18 Q. [interprétation] Vous êtes en mesure de nous confirmer, mon Commandant,

19 que, vous-même, vous étiez responsable et redevable et que vous présentiez

20 des rapports directement au centre régional de Zenica ?

21 R. Je m'excuse, je n'ai pas entendu le début de votre question parce que

22 vous avez commencé à intervenir -- je n'ai pas entendu, en fait, le début

23 de votre intervention.

24 Q. Je m'excuse. Vous êtes en mesure de confirmer, mon Commandant, que,

25 vous-même, vous étiez -- vous dépendiez du centre régional de Zenica auquel

Page 7046

1 vous présentiez directement vos rapports ?

2 R. Oui. Je l'ai fait pendant que j'étais membre de la commission mixte de

3 Busovaca. Je l'ai fait pendant que j'étais chef d'équipe de Victor 1 ou de

4 Victor 2, parce qu'à l'époque, ils étaient placés directement sous le

5 centre régional de Zenica et, par la suite, lorsque j'ai présidé la

6 commission humanitaire mixte. Là, une fois de plus, je présentais mes

7 rapports directement au centre régional de Zenica.

8 Q. Je vous remercie.

9 Pendant votre période d'affectation de trois mois en Bosnie, puis-je

10 dire que vous vous êtes absenté pendant une période de dix jours

11 approximativement au mois de mai ? Ai-je raison d'avancer cela ?

12 R. Oui. J'ai dû m'absenter au mois de mai. C'était à la fin du mois de

13 mai, en fait, que je suis allé au Danemark et que j'étais en congé.

14 Q. C'était une procédure normale pour les états qui envoyaient des

15 participants à des missions de faire en sorte que ses membres de la mission

16 puissent rentrer dans leur pays au moins une fois pendant leur période

17 d'affectation ?

18 R. C'est exact.

19 Q. Ai-je le droit d'avancer que la plupart des pays, à l'époque,

20 envoyaient leurs représentants pour des séjours de six mois, mais que votre

21 pays a décidé que ces séjours ne seraient que de trois mois du fait des

22 circonstances particulièrement difficiles de cette mission précise.

23 R. C'est exact de dire que le Danemark envoyait ses observateurs pour des

24 périodes de trois mois. Je ne me souviens pas d'ailleurs de la durée de la

25 période d'affectation des représentants des autres pays. Mais pour nous,

Page 7047

1 pour les Danois, c'était trois mois. Par la suite, cela a été prolongé à

2 six mois.

3 Q. A l'époque, vous partiez trois mois seulement du fait de la nature

4 particulièrement difficile de cette mission ?

5 R. Oui.

6 Q. Pour nous, mon Commandant, puis-je affirmer que cette mission a été une

7 mission particulièrement difficile sur le plan physique, mais également sur

8 le plan moral, et que c'est la raison pour laquelle vous avez rédigé un

9 journal de guerre pour que vous puissiez tout simplement donner ce journal

10 de guerre à vos amis, plutôt qu'à avoir à leur expliquer, à maintes

11 reprises, ce que vous aviez vu et toutes les choses horribles que vous

12 aviez vues ?

13 R. C'est exact. C'est vrai que j'ai conservé un journal de guerre. C'était

14 mon journal de bord, mon journal privé. Je l'ai rédigé, non pas pour faire

15 un rapport officiel, mais, pendant les nuits, je me rappelais de certains

16 événements que j'avais vus parce que nous avons vu de nombreux meurtres et

17 des choses de ce genre. En fait, il faut pouvoir réfléchir à ces choses-là.

18 C'est la raison pour laquelle j'ai conservé ce journal de guerre. Lorsque

19 je suis revenu au Danemark, j'ai réécrit, sur mon ordinateur, de façon

20 quasiment littérale, ce que j'avais écrit à la main et, ensuite, j'ai donné

21 un exemplaire de mon journal à mes collègues, aux membres de ma famille, à

22 mes amis, pour ne pas avoir à relater à chaque fois les choses difficiles

23 que j'avais vues.

24 Q. Je vous remercie, mon Commandant.

25 J'aimerais maintenant parler de la commission mixte de Busovaca.

Page 7048

1 Etes-vous en mesure de confirmer que cette commission a été créée le 27

2 janvier lors d'une réunion qui fut présidée par le général Gordy Simpson de

3 la FORPRONU ? A cette réunion, le colonel Blaskic du HVO était présent,

4 ainsi que M. Merdan de l'ABiH. Pouvez-vous confirmer cela ? Est-ce que vous

5 savez cela ?

6 R. Je sais que la commission mixte de Busovaca a été créée avant mon

7 arrivée sur le théâtre des opérations. Je sais que l'accord fut signé à

8 Busovaca d'où le nom de cette commission, commission mixte de Busovaca,

9 mais, ceci étant dit, je ne sais pas qui a participé à cette réunion. Je ne

10 sais pas non plus qui a signé l'accord.

11 Q. Je vous remercie, mon Commandant.

12 Vous savez que cette commission mixte de Busovaca devait se réunir

13 quotidiennement et devait également recevoir les griefs et les plaintes

14 présentés par les deux camps pour ce qui est des infractions aux cessez-le-

15 feu ou de toutes autres infractions qui se seraient produites dans l'un ou

16 l'autre camp ?

17 R. C'est exact. Nous avions une réunion tous les matins, et cela se

18 passait à 7 heures ou à 8 heures du matin, si je m'en souviens bien. Nous

19 avions une réunion dans une maison qu'avait louée la MCCE à Vitez. Bien

20 entendu, cette réunion était présidée par la MCCE. Il y avait des

21 représentants du HVO et de l'ABiH. M. Merdan était le représentant de

22 l'ABiH et, pour ce qui est du HVO, il était représenté par Franjo Nakic.

23 Tous les matins, nous commencions par faire le point des incidents qui

24 étaient survenus au cours des 24 dernières heures. Ensuite, nous avions une

25 discussion brève, et nous nous scindions en petits groupes -- en petites

Page 7049

1 équipes composées d'un observateur, d'un interprète, d'un membre du HVO et

2 d'un membre de l'ABiH. Ensuite, nous nous rendions sur les lieux pour

3 constater les faits. Là, souvent, la constatation des faits se fondait sur

4 des bruits qui couraient.

5 Très souvent, nous nous sommes rendus dans certains endroits pour

6 constater les faits. Il n'y avait que des bruits qui couraient. Il n'y

7 avait pas eu de pillages, il n'y avait pas de maisons incendiées, il n'y

8 avait pas eu de morts. Nous nous rendions compte que ce n'était pas des

9 bruits qui couraient et que cela correspondait à la réalité, et qu'il y

10 avait des tireurs d'élite qui avaient opérés dans le secteur, et qu'il y

11 avait des personnes qui avaient été tuées, par exemple, ou autres choses de

12 ce genre.

13 Q. Puis-je dire, Commandant, que la commission mixte de Busovaca

14 présentait ses rapports à un comité de coordination mixte, qui se

15 réunissait deux fois par semaine à un niveau assez élevé, et qu'à ces

16 réunions participaient le général Morillon, par exemple, le général

17 Petkovic, le général Halilovic, M. l'Ambassadeur Thébault, qui faisait

18 partie de votre MCCE, et le colonel Stewart, qui était le commandant du

19 BritBat ?

20 R. C'est exact de dire que le colonel Stewart était le commandant du

21 BritBat au début de la période où je faisais partie de la commission mixte

22 de Busovaca.

23 Par la suite, il a été remplacé. La commission mixte de Busovaca

24 était -- avait, dans son sein, des représentants de la MCCE, et nous

25 présentions un rapport au centre régional de Zenica. Le centre régional de

Page 7050

1 Zenica était redevable à d'autres -- face à d'autres instances dans le

2 système. Mais notre rapport, le rapport qui émanait de la commission mixte

3 de Busovaca allait directement au centre régional de Zenica.

4 Q. Mais vous êtes en mesure de confirmer, Commandant, l'existence de ce

5 comité de coordination à un niveau supérieur.

6 R. Je ne m'en souviens pas. Je ne me souviens pas de cette commission, de

7 ce comité.

8 Q. Merci. Si nous passons -- si nous envisageons la mort, si je peux me

9 permettre d'utiliser cette expression, de la commission mixte de Busovaca,

10 est-ce que vous pouvez confirmer que cela s'est passé en avril, et du fait

11 de certains incidents, dont le plus important a été l'attaque sur Ahmici ?

12 R. Je ne me souviens pas des raisons qui ont engendré la "mort" de la

13 commission mixte de Busovaca. Autant que je me souvienne, nous considérions

14 le nouveau QG mixte comme un pas qui a été fait dans la bonne direction,

15 puisque c'est un peu plus que la commission qui était présidée par la MCCE.

16 Il s'agissait d'un nouvel organe où les deux parties pouvaient coordonner

17 le travail accompli pour la paix dans ce secteur. Mais il est exact de dire

18 qu'après le massacre -- que cela s'est fait après le massacre d'Ahmici.

19 Mais je ne me souviens pas si cela a été la raison qui a fait que cette

20 nouvelle commission --

21 Q. Mais, mon Commandant, pour ce qui est des évènements relatifs à Ahmici,

22 à ce moment donné en avril, il est vrai de dire que cela -- qu'il y a eu,

23 en fait, reprise des hostilités entre les deux parties, et que les parties

24 ne pouvaient plus coopérer l'une avec l'autre, et que cela, en fait, a été,

25 en quelque sorte, l'arrêt de mort de la commission.

Page 7051

1 R. Je suis un peu sceptique à propos des dates. En fait, je ne me souviens

2 pas de la date à laquelle il a été mis un terme aux activités de la

3 commission mixte de Busovaca, et date à laquelle la nouvelle commission

4 mixte a été établie. Je ne me souviens pas des dates par rapport à Ahmici.

5 Je sais qu'Ahmici, c'est -- en fait, je ne me souviens pas si Ahmici s'est

6 passé pendant l'existence de la commission mixte de Busovaca ou pendant la

7 période où existait le commandement mixte.

8 Q. Merci. Si je vous disais qu'en tant que membre de la commission mixte

9 de Busovaca, vous avez reçu de nombreuses plaintes, et qu'en fait, vous

10 étiez littéralement inondés de plaintes qui venaient d'un peu partout, est-

11 ce bien exact ?

12 R. C'est exact.

13 Q. Comme vous l'avez déjà indiqué, un certain nombre de ces plaintes se

14 fondaient sur des rumeurs, des bruits qui couraient. Puis-je dire que, la

15 plupart du temps, les plaintes qui étaient déposées par le HVO n'étaient,

16 en fait, que des bruits qui couraient ?

17 R. Je pense que la majorité des plaintes qui ne se vérifiaient pas

18 émanaient du HVO.

19 Q. Puis-je dire qu'en dépit de la cadence incroyable des opérations

20 pendant votre période d'affectation, vous avez toujours bénéficié d'une

21 très bonne coopération de la part de l'ABiH et, notamment, de la part de M.

22 Merdan ?

23 R. C'est exact. Comme je l'ai déjà dit auparavant aujourd'hui, nous étions

24 d'avis qu'il y avait une coopération très étroite entre M. Merdan et le

25 commandant de son corps. M. Merdan semblait d'ailleurs être très compétent,

Page 7052

1 il était en mesure de prendre des décisions sur-le-champ. S'il n'était pas

2 en mesure de prendre des décisions sur-le-champ, il réglait les problèmes

3 très rapidement, il prenait contact avec son quartier général, nous

4 pouvions, en général, résoudre les problèmes.

5 Q. Merci, Commandant.

6 J'aimerais revenir sur la question de l'enlèvement des quatre

7 officiers du HVO qui a été mentionné auparavant. Vous avez dit, auparavant,

8 que c'était Blaskic qui vous avait informé -- qui a indiqué que les

9 officiers du HVO avaient été enlevés, et qu'ils avaient été enlevés près de

10 la ligne de front de Travnik.

11 R. C'est exact.

12 Q. J'avance que M. Ambassadeur Thébault a immédiatement constitué cette

13 équipe mixte afin de mener à bien une enquête à propos de cet incident ?

14 R. C'est exact.

15 Q. Cette équipe était composée de l'observateur Juan Valentin, de

16 l'Espagne, je suppose ?

17 R. Oui, de l'Espagne.

18 Q. De M. Merdan, de M. Nakic et de vous-même.

19 R. C'est exact.

20 Q. Comme vous venez de le dire, c'était le HVO qui estimait que c'était la

21 7e Brigade qui était responsable de cet enlèvement.

22 R. Oui.

23 Q. Le HVO vous a même fourni un nom, le nom de l'homme pour lequel il

24 pensait qu'il était au volant du véhicule utilisé par les personnes qui ont

25 fait cet enlèvement.

Page 7053

1 R. C'est exact.

2 Q. Lorsque vous avez vérifié cette information, il s'est révélé qu'elle

3 n'était pas exacte -- qu'elle n'était pas fondée, parce que cet homme avait

4 déjà été arrêté par le HVO.

5 R. Oui. Plus tard, il a été remis en liberté. Mais, au moment où

6 l'enlèvement s'est produit, cet homme était déjà détenu par le HVO.

7 Q. En fait, le seul lien entre la 7e Brigade à l'époque et l'enlèvement

8 était le fait que l'enlèvement s'était produit près de Ravno Rostovo.

9 R. Oui. C'est ce que je pense, et aussi parce qu'ils agissaient dans

10 cette zone. C'était la raison pour laquelle il pouvait dire que c'était la

11 7e Brigade.

12 Q. Lorsque vous --

13 R. Si vous me permettez, je souhaite ajouter que c'était tout à fait

14 normal qu'à chaque fois qu'il y avait un incident le HVO affirmait que

15 c'était un incident pour lequel était responsable la 7e Brigade musulmane,

16 parce que je pense que le HVO avait beaucoup de respect pour cette unité,

17 et je ne sais pas si elle leur faisait peur, mais en tout cas, il savait

18 que cette unité était peut-être mieux équipée et mieux formée que d'autres

19 unités de l'ABiH.

20 Q. C'était la chose à dire à chaque fois qu'il y avait un problème qui se

21 posait. Tout simplement, on disait que c'était la 7e Brigade musulmane qui

22 en était responsable.

23 R. C'était tout à fait habituel.

24 Q. Que ce soit vrai ou non, c'était la chose à dire, c'était la chose que

25 le HVO était en droit de dire.

Page 7054

1 R. Oui, oui.

2 Q. Lorsque vous êtes allés à Ravno Rostovo, vous avez rencontré l'officier

3 en charge du commandement devant l'hôtel. C'est exact ?

4 R. C'est exact.

5 Q. A l'époque, il portait des vêtements civils, mais c'était des vêtements

6 du genre afghan.

7 R. Oui.

8 Q. Vous avez vu des drapeaux verts hissés devant l'hôtel. C'est bien

9 cela ?

10 R. Oui.

11 Q. Vous avez vu que ces drapeaux étaient verts et qu'il y avait une sorte

12 d'écriture arabe sur les drapeaux. Mais vous n'avez jamais pu savoir si

13 c'était vraiment le drapeau de la 7e Brigade ou non.

14 R. Non.

15 Q. Cela aurait pu être l'étendard de la 7e Brigade.

16 R. Cela aurait pu être le vrai étendard de cette brigade.

17 Q. Vous ne savez pas quelle est la partie de la 7e Brigade qui était

18 stationnée à Ravno Rostovo.

19 R. Non.

20 Q. Vous ne savez pas si c'était un bataillon, une compagnie ou quel

21 élément de la 7e Brigade, vous ne savez pas.

22 R. Non.

23 Q. Lorsque vous êtes entré dans l'hôtel, on vous a permis de circuler à

24 votre choix.

25 R. C'est exact.

Page 7055

1 Q. Vous avez vu beaucoup de soldats. La plupart de ces soldats portaient

2 des vêtements civils. Il y en avait beaucoup qui avait une barbe.

3 R. Oui, mais c'était normal pour que les membres de la

4 7e Brigade montrent leur religion, montrent leur appartenance religieuse en

5 faisant pousser leur barbe.

6 Q. Vous ne vous êtes adressé à aucun des soldats qui se trouvaient à

7 l'intérieur, mis à part le commandant.

8 R. Je ne me rappelle pas si on a parlé à des soldats. Peut-être à

9 quelques-uns d'entre eux, parce qu'on nous a vraiment très bien reçus. On

10 nous a invité à prendre un café, manger des dattes et des choses comme

11 cela. Il y avait aussi d'autres membres de la brigade qui étaient présents.

12 Ils ont pris part à la conversation que nous avons eue. Je ne me souviens

13 pas de la langue que nous ayons parlée, une langue étrangère.

14 Q. Pouvez-vous confirmer cette chose que vous avez dit dans votre

15 déclaration préalable, à savoir que vous avez eu l'impression que cette

16 unité ne cherchait pas à vous cacher quoi que ce soit ?

17 R. C'est exact, parce qu'ils nous ont tout montré, tout ce que nous

18 voulions voir.

19 Q. D'un point de vue militaire, Commandant, que ce site très précis, à

20 savoir, l'hôtel de Ravno Rostovo, était un site très important d'un point

21 de vue militaire, parce qu'il y avait là une route qui menait à Bugojno et

22 une autre qui menait vers un secteur tout aussi important, que c'était tout

23 à fait normal pour l'ABiH de cantonner une unité à cet endroit très précis.

24 Pouvez-vous confirmer cela ?

25 R. Je pense que de ce point de vue-là, effectivement, il était nécessaire

Page 7056

1 d'avoir une unité cantonnée dans ce secteur pour contrôler celui-ci. C'est

2 exact.

3 Q. Lorsque vous vous êtes arrêtés pendant votre recherche des kidnappeurs,

4 quand vous vous êtes arrêtés la prochaine fois, c'était à Novi Travnik.

5 Vous avez briefé le commandant du HVO sur l'issue de votre visite à Ravno

6 Rostovo.

7 R. C'est exact. Parce que, pour autant que je m'en souvienne, il y avait

8 des officiers de cette brigade. C'étaient des officiers de cette brigade

9 qui avaient été kidnappés. Sur notre voie de retour, nous sommes allés le

10 voir pour lui dire ce que nous avons pu constater. Nous lui avons dit que

11 nous nous étions rendus pour rendre visite à cette de la 7e Brigade

12 musulmane, et que nous n'avons rien pu trouver.

13 Q. Vous dites que c'est à ce moment-là que la police militaire du HVO est

14 entrée. Ils voulaient arrêter Merdan. Vous leur avez dit que Merdan se

15 trouvait placé sous votre protection. Le résultat de cette action a été que

16 vous trois, vous avez été arrêtés par le HVO. C'est exact ?

17 R. Oui. Nous trois, nous étions dans ce bureau, au bureau du commandant de

18 la brigade. Juan est entré, notre interprète, moi-même, M. Nakic et M.

19 Merdan. C'est exact de dire que le commandant de la police militaire du HVO

20 a dit que la seule solution était d'arrêter M. Merdan. A ce moment-là,

21 comme vous l'avez dit, nous lui avons répondu que M. Merdan était placé

22 sous notre protection. Il a dit qu'il avait à nous arrêter aussi. C'est ce

23 qu'il a fait.

24 Q. C'est ce que vous nous avez dit ce matin, parce que cela ne figure pas

25 dans votre déclaration, que la situation n'était pas très drôle, parce que

Page 7057

1 c'était une situation vraiment très tendue.

2 R. C'est exact, parce qu'il y avait un garde armé à côté de nous. Il avait

3 son arme. Il était armé. Il aurait pu ouvrir le feu avec cette arme.

4 Q. Commandant, aujourd'hui, dans ce prétoire, vous êtes le seul militaire

5 mis à part les deux accusés. Pourriez-vous nous confirmer que le fait

6 d'avoir une arme chargée pointée sur vous, est quelque chose qu'on ne peut

7 oublier pour le reste de sa vie, que c'était en effet une situation très

8 grave.

9 R. Oui. Nous avions l'impression que la situation était très grave.

10 Q. Ai-je droit de dire, Commandant, que lorsque vous les avez informés,

11 après avoir passé des coups de fil, que le HVO allait venir pour vous

12 prendre, que vous avez, effectivement, été menacés, que si la FORPRONU

13 venait et vous prenait pour vous chercher, qu'ils allaient ouvrir le feu

14 sur la FORPRONU.

15 R. C'est exact, parce que ce jour-là, il a été possible de passer des

16 coups de fil de Novi Travnik à Zenica. Nous avions fait un coup de fil à

17 notre QG. Nous leur avons demandé de prendre contact avec nos bataillons

18 britanniques basés à Vitez, de leur demander de venir nous chercher, de

19 nous sortir de cette situation. Lorsque nous avons dit cela au commandant

20 de la police militaire, il a dit que si les unités de la FORPRONU se

21 présentent à Novi Travnik, que son unité allait ouvrir le feu sur ces

22 unités.

23 Q. Commandant, il a fallu que Blaskic intervienne pour que vous trois

24 soyez relâchés.

25 R. C'est exact. Il y avait même son adjoint, Nakic, l'adjoint de Blaskic,

Page 7058

1 qui était là. Il n'a pas été en mesure de commander la police militaire. Il

2 n'a été en mesure de rien faire. Après que le colonel Blaskic se soit

3 adressé au commandant de la police militaire, nous avons été remis en

4 liberté.

5 Q. Commandant, vous savez que le résultat de l'enlèvement de quatre

6 officiers du HVO a été que la route entre Travnik et Gornji Vakuf a été

7 barrée par Blaskic.

8 R. Je me souviens que la route a été barrée. Cela a été le résultat du

9 fait que les Croates du coin, ils ont pensé que la solution ne se

10 présentait pas suffisamment vite; ils voulaient couper la route. Le fait

11 qu'on coupe la route, la conséquence en a été que la FORPRONU n'a pas pu

12 l'emprunter, que la MCCE n'a plus pu circuler sur cette route. Je ne me

13 rappelle pas si c'était Blaskic qui a donné l'ordre ou c'était à un niveau

14 local que la décision a été prise.

15 Q. C'était la conséquence de l'enlèvement.

16 R. C'est exact.

17 Q. Je vais aborder la question de l'enlèvement de Zivko Totic. Vous avez

18 reçu cette information du centre régional de Zenica. Ils vous ont dit que

19 l'enlèvement venait de se produire. Est-ce exact ?

20 R. C'est exact.

21 Q. C'est votre collègue, Allan Laustsen, qui a été chargé de s'intéresser

22 à cet incident impliquant Totic. Il s'est rendu sur les lieux du crime.

23 R. C'est exact.

24 Q. Le HVO a tourné une bande vidéo sur les lieux du crime.

25 R. C'est exact. Cette vidéo m'a été montrée pendant l'affaire Blaskic.

Page 7059

1 Q. Pouvez-vous confirmer que tout au long de cette enquête, il y a eu une

2 coopération très étroite entre la police civile, du côté du HVO et du côté

3 musulman afin d'essayer de résoudre ce problème ?

4 R. Je ne sais pas s'il y a eu une coopération entre ces deux forces de la

5 police. Normalement, les forces de la police des deux côtés étaient très

6 inefficaces, parce qu'elles n'étaient pas formées pour s'acquitter des

7 tâches qui sont celles de la police. Je ne me souviens pas s'il y a eu une

8 coopération en l'espèce.

9 Q. Vous savez que le résultat de l'enlèvement de Totic a été que toutes

10 les sorties de Zenica ont été coupées, qu'on a dit à l'armée de se replier

11 dans les casernes, à savoir, le HVO et l'ABiH, que seule la police civile

12 avait encore l'autorisation de circuler dans la ville à ce moment précis.

13 R. Je n'arrive pas à me souvenir de cela. Je pense qu'à l'époque, parce

14 qu'il y avait deux brigades du HVO à Zenica qui avaient été désarmées, je

15 ne me souviens pas exactement à quel moment elles ont été désarmées. Je

16 pense que c'était avant l'incident que cela s'est passé, mais je n'en suis

17 pas sûr.

18 Q. Oui, je vais vous présenter les documents plus tard.

19 R. Très bien.

20 Q. Pour que vous puissiez vous replacer dans le contexte, pour ce qui est

21 des dates, parce que je comprends qu'il vous est peut-être difficile de

22 vous rappeler la séquence chronologique des événements. Cependant,

23 pourriez-vous confirmer que d'un point de vue militaire, l'ABiH n'avait

24 rien à gagner par cet enlèvement des quatre officiers du HVO ou

25 l'enlèvement de Zivko Totic ?

Page 7060

1 R. C'est exact. Parce qu'il est tout à fait évident que c'était un

2 enlèvement par lequel les Moudjahiddines souhaitaient obtenir quelque

3 chose. Je ne pense pas, comme nous en avons parlé pendant les enquêtes,

4 nous ne pouvions pas voir pourquoi l'ABiH aurait perpétré un enlèvement de

5 ce genre.

6 Q. C'était tout à fait clair aussi que c'était une opération terroriste

7 tout comme l'enlèvement des deux journalistes de la radio, de la Radio CD.

8 R. Oui. Je me souviens qu'on en a parlé, qu'on a parlé des raisons de ces

9 enlèvements des membres de l'équipe de la Radio CD, que c'était peut-être

10 parce qu'ils avaient peur du fait qu'ils étaient en mesure de se servir de

11 la radio, que ceci pouvait peut-être être utilisé pour l'artillerie ou

12 quelque chose de ce genre. Parce que de temps à autres, les Croates

13 pilonnaient Zenica. Ils avaient peur que ces Croates qui se trouvaient à la

14 Radio CD, qu'ils se servent des diffusions par la radio pour diriger le feu

15 ou pour leur donner les résultats, de leur dire quels ont été les impacts

16 des obus et des choses semblables.

17 Q. Très bien. Avançons maintenant à la question de l'échange. Vous avez

18 dit que le 19 avril, deux Moudjahiddines sont arrivés au bureau de la MCCE

19 à Zenica, que vous les avez vus arriver en vêtements civils, vêtements du

20 genre afghan.

21 R. C'est exact.

22 Q. Vous avez dit qu'ils ne ressemblaient pas à des Bosniens du cru même si

23 vous n'avez pas eu l'occasion de leur parler.

24 R. C'est exact.

25 Q. Vous avez dit qu'ils vous ont donné deux exemplaires d'une lettre

Page 7061

1 rédigée à la fois en anglais et en bosnien. Vous en avez déjà parlé. Vous

2 avez dit qu'elle avait été aussi en allemand. Est-ce qu'elle existait

3 également en version française, est-ce possible ?

4 R. Non, ce n'était pas en bosnien, c'était en allemand.

5 Q. En allemand, excusez-moi.

6 R. Oui.

7 Q. En anglais et en allemand.

8 R. Oui.

9 Q. J'ai fait une erreur en relisant mes notes.

10 R. C'est exact qu'il y avait peut-être aussi un exemplaire en français. Je

11 ne l'ai pas mentionné, parce que j'avais des doutes là-dessus. Il se peut

12 qu'il y ait eu une version en français également.

13 Q. Mon collègue de l'Accusation vous a montré la lettre aujourd'hui. Il a

14 attiré votre attention sur la partie manuscrite. C'est le seul document que

15 vous n'ayez jamais lu, à savoir, la partie manuscrite.

16 R. Oui.

17 Q. La version dactylographiée, s'il y en avait une, vous ne l'avez jamais

18 vue ?

19 R. Je ne vous ai pas compris.

20 Q. Vous n'avez jamais vu la même lettre dactylographiée ?

21 R. C'est exact.

22 Q. Ils vous ont également donné un nom de contact, ou du moins, que ce

23 soit à vous ou à quelqu'un d'autre de la MCCE. Le nom qu'ils vous ont donné

24 était Abu Haris. Ils vous ont également donné un numéro de téléphone. C'est

25 exact ?

Page 7062

1 R. C'est exact.

2 Q. Ce numéro de téléphone n'avait rien à voir avec les numéros de Zenica ?

3 R. Je ne sais pas, parce que je n'ai pas pris part aux entretiens où ils

4 s'apprêtaient à avoir toutes ces négociations. Je me rappelle le nom de

5 contact. Il y avait également un numéro de téléphone, mais je ne sais pas

6 si c'était un numéro de téléphone de Zenica ou d'ailleurs. Je ne me

7 souviens pas de cela.

8 Q. C'est très bien. Nous avons d'autres témoins qui peuvent déposer à ce

9 sujet.

10 R. Oui.

11 Q. Je vous remercie de m'avoir répondu. Le HVO vous a informé de la

12 situation. Vous avez également été informé de la chose par la police civile

13 et par la Croix rouge internationale. Par la suite, on a demandé au HVO de

14 fournir des noms des Moudjahiddines, du moins, c'est ce que vous avez mis

15 dans votre rapport, des citoyens étrangers qu'ils tenaient entre leurs

16 mains, qui étaient détenus par eux, parce que la Croix rouge internationale

17 voulait rendre visite à ces gens. C'est exact ?

18 R. C'est exact. Nous avions une liste de noms du groupe arabe. Nous avons

19 demandé au HVO de dresser une liste pour voir qui étaient les détenus

20 qu'ils avaient entre leurs mains, qui étaient les détenus étrangers, des

21 ressortissants étrangers. Je me souviens que par la suite, nous avons dû

22 faire une synthèse entre ces deux listes pour les comparer pour voir si la

23 liste arabe était semblable à la liste du HVO pour voir s'il était exact

24 que ces gens --

25 Q. Que c'étaient bien les mêmes personnes ?

Page 7063

1 R. Oui. Je me souviens qu'il y ait eu un petit débat au sujet des noms des

2 détenus.

3 Q. Vous êtes en mesure de confirmer, Commandant, qu'il y avait une

4 différence entre les Moudjahiddines et les ressortissants étrangers ?

5 R. Oui. C'est la raison pour laquelle cela prête à confusion, parce que

6 parfois, nous disons Moudjahiddines, parfois nous disons membres du groupe

7 arabe, parfois nous disons ressortissants étrangers.

8 Q. Ce n'est pas nécessairement la même chose qu'on entend en le disant.

9 Parfois, ces termes peuvent être utilisés sans vraiment se référer à un nom

10 et à une personne, en particulier. C'est exact ?

11 R. Oui.

12 Q. Lorsque le HVO vous a fourni cette liste, lorsque la Croix rouge a

13 essayé de se rendre auprès de ces gens, le HVO l'a accepté, mais les

14 Moudjahiddines l'ont refusé.

15 R. C'est exact. Si je m'en souviens, c'est parce que j'ai lu par la suite

16 le rapport rédigé par Dieter Schellschmidt. Je n'ai pas pris part, moi-

17 même, aux négociations et à ces réunions. Il m'est difficile de dire si

18 c'est vrai ou non. Je ne le connais que grâce aux rapports.

19 Q. Cela figure dans votre déclaration. Vous pouvez confirmer qu'il y a eu

20 un échange de lettres et une vidéo qui a été remise à la MCCE, parce que

21 les Moudjahiddines avaient refusé.

22 R. C'est exact.

23 Q. Dans votre déclaration, vous mentionnez le fait que les lettres pour

24 les quatre officiers ont été remises à quelqu'un de Travnik qui les a

25 rapportées à la MCCE?

Page 7064

1 R. C'est vraisemblablement exact.

2 Q. Vous dites que ces lettres-là, eu égard à Totic, que c'étaient deux

3 lettres; une adressée à Blaskic et une adressée à quelqu'un d'autre, que

4 les deux lettres étaient destinées à la MCCE et remises à la MCCE.

5 R. Exact.

6 Q. Vous avez dit que pendant ces préparatifs, il y a eu des Moudjahiddines

7 et des membres du HVO qui se sont rendus au bureau de la MCCE à de

8 nombreuses reprises ?

9 R. Exact.

10 Q. Vous avez également dit qu'à une occasion, seul Allan Laustsen a eu à

11 s'occuper de ces Moudjahiddines.

12 R. Oui. Je me rappelle une réunion avec un représentant du groupe arabe;

13 Allan Laustsen s'est occupé de cet homme. Je me rappelle cela, parce que

14 tous les observateurs de la MCCE, avaient devant eux la carte d'identité,

15 ou plutôt nous les portions autour du cou. Nous étions très fiers d'être

16 des observateurs danois. Nous avions aussi le drapeau danois, non pas sur

17 la face de la carte, mais sur le revers de notre carte d'identité. Soudain,

18 Allan Laustsen, sa carte s'est retournée de telle sorte que les

19 Moudjahiddines ou les arabes ou un membre du groupe arabe a vu le drapeau

20 danois. Il a pu s'adresser à lui, parce qu'il était capable de dire

21 quelques mots en danois. Traduits en anglais, c'était du genre : "Bon sang,

22 es-tu danois ?" Il n'a -- il n'était pas capable de dire que quelques mots

23 en danois.

24 Q. Commandant, vous avez mentionné quelque chose auparavant. Vous avez dit

25 que, d'une part, vous n'avez pas participé à toutes ces réunions, mais vous

Page 7065

1 avez dit aussi que vous saviez que, lorsque les Moudjahiddines

2 apparaissaient devant l'hôtel où vous étiez stationné, l'hôtel

3 Internacional, que la police civile de Bosnie-Herzégovine disparaissait et

4 que c'est la raison pour laquelle parfois ils ont pu se rendre dans cette

5 pièce armés de leurs propres armes.

6 R. C'est exact. La police locale avait peur de ces Moudjahiddines.

7 Q. Pouvez-vous confirmer, Commandant, qu'à la fois la police locale et la

8 population dans son ensemble avaient très peur de ces gens.

9 R. C'est exact.

10 Q. En fait, vous pouvez confirmer, Commandant, que les soldats avaient

11 peur, ainsi que tous les membres de la communauté internationale. Vous ne

12 vous sentiez pas à l'aise si vous voyiez l'un de ces gens dans les parages.

13 Est-ce exact ?

14 R. On ne se sentait pas en sécurité lorsque nous étions dans des secteurs

15 où nous savions que les Moudjahiddines opéraient. Parfois, ils dressaient

16 leurs propres points de contrôle qui n'agissaient pas en coordination avec

17 le 3e Corps. Parfois, c'étaient uniquement des postes de contrôle

18 temporaires. Parfois, ils couvraient leur tête de bandeaux, et nous avez

19 entendu des rumeurs qu'ils arboraient ces cagoules lorsqu'ils étaient en

20 mission spéciale, faisant des choses vraiment pas bien.

21 Q. Lorsque vous pensiez à ces gens-là, Commandant, ai-je droit de dire que

22 le mot qui vous venait à l'esprit était le mot "terroriste" et pas le mot

23 "soldat" ?

24 R. Nous ne les percevions pas comme des soldats; c'étaient plutôt des

25 terroristes. Il semblait que les Moudjahiddines échappaient au contrôle,

Page 7066

1 qu'ils menaient leur propre guerre au sein de la guerre qui était en cours.

2 Je me souviens que le général Hadzihasanovic l'a mentionné, puisqu'il en a

3 parlé brièvement pendant une réunion. Il a dit, les Moudjahiddines font du

4 tort aux Bosniens, les Moudjahiddines, a-t-il dit, combattent en menant

5 leur propre guerre. Il a dit qu'il était difficile pour l'ABiH de contrôler

6 leurs actions, les actions des Moudjahiddines.

7 Q. Passons maintenant à l'échange, Commandant. Pouvez-vous confirmer que,

8 tel qu'il a été conçu, le plan de la MCCE était de procéder simultanément à

9 l'échange à Travnik, à Kaonik et Zenica ?

10 R. C'est exact.

11 Q. Vous avez dit que, vous-même, vous étiez à Travnik, et que vous étiez

12 chargé de recevoir les quatre officiers du HVO, de les prendre des mains

13 des Moudjahiddines et de les emmener pour les remettre à Blaskic ?

14 R. C'est exact. Lorsqu'ils ont été remis en liberté, nous les avons pris à

15 bord d'un véhicule armé appartenant au Bataillon britannique, et nous les

16 avons emmenés à l'hôtel Vitez où il y avait le QG du colonel Blaskic.

17 Q. Lorsque vous avez remis ces quatre officiers au colonel Blaskic, il a

18 fait un grand tapage médiatique et il vous a félicité ostensiblement devant

19 tout le monde, en disant : "M. Baggesen, merci," et cetera.

20 R. Oui. Je crois qu'il s'en est servi pour ses relations publiques.

21 Q. M. Morsink, qui déposera ici également, il était à Kaonik ? Vous pouvez

22 confirmer cela ?

23 R. Oui.

24 Q. A Zenica --

25 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président.

Page 7067

1 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur Withopf.

2 M. WITHOPF : [interprétation] Je souhaite demander à mon éminent collègue

3 de la Défense de ne mentionner aucun nom de témoins susceptibles de venir

4 déposer à un moment ultérieur ici.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

6 Nous allons, de toute façon, interrompre, parce qu'il faut faire la

7 pause. Il est 18 heures moins 20. Nous reprendrons aux environs de 18

8 heures 05, et nous irons jusqu'à 19 heures.

9 --- L'audience est suspendue à 17 heures 44.

10 --- L'audience est reprise à 18 heures 07.

11 M. LE JUGE ANTONETTI : Il nous reste un autre 55 minutes. J'espère que Me

12 Bourgon procédera rapidement, parce qu'il se peut que les Juges ou

13 l'Accusation auront les questions à poser.

14 Poursuivez, Monsieur Bourgon.

15 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président.

16 Q. [interprétation] Commandant Baggesen, avant la pause nous avons évoqué

17 rapidement l'échange de Zenica, mais vous avez confirmé que vous n'étiez

18 pas présent lors de l'échange.

19 R. C'est exact.

20 Q. Quoi que vous ayez entendu à propos de cet échange concernant les

21 mitrailleuses et les armes utilisées, les personnes qui s'y trouvaient,

22 vous n'avez rien vu de tout cela ?

23 R. Non, j'ai simplement entendu parler de cela de collègues et de Dieter

24 Schellschmidt.

25 Q. Vous ne savez pas si l'observateur Landry se trouvait à Zenica ou non ?

Page 7068

1 R. Je ne me souviens pas où il se trouvait ce jour-là.

2 Q. Vous vous souvenez que toute cette question des échanges était une

3 situation très tendue qui a mobilisé toute l'attention des membres de la

4 MCCE tout au cours de la journée.

5 R. C'est exact.

6 Q. Je veux maintenant aborder un autre sujet; lorsque vous êtes nommé

7 président de la commission humanitaire mixte. Aie-je raison de dire que

8 cette commission a été créée le 10 juin et est une partie intégrante d'un

9 accord de cessez-le-feu.

10 R. C'est exact.

11 Q. L'ambassadeur Thébault vous a demandé de présider cette commission ?

12 R. C'est exact.

13 Q. Dans ce cas, on vous a demandé de visiter tous les centres de détention

14 de la région ?

15 R. C'est exact.

16 Q. Je ne vais pas parler de l'école de musique. Nous en avons entendu

17 parler aujourd'hui, mais j'aimerais vous demander, en tant que président de

18 cette commission, certaines allégations vous avaient été communiquées par

19 le HVO, en vertu de quoi il y avait une autre école ou une autre école

20 d'ingénieurs où l'ABiH détenait un certain nombre de personnes, que vous

21 vous y êtes rendu et que ceci n'était absolument pas fondé ?

22 R. C'est exact. Je ne me souviens pas -- c'était quelque chose comme une

23 école. Je ne me souviens pas exactement, mais je crois qu'il est exact de

24 dire que cela s'appelait "l'école d'ingénieurs" ou quelque chose comme

25 cela. C'était une école à Zenica. Nous nous y sommes rendus, et rien ne

Page 7069

1 semblait témoigner de l'existence des détenus.

2 Q. Le HVO vous a également parlé de personnes qui avaient été détenues à

3 Mehurici. Vous vous y êtes rendus le 23 juin, accompagné d'une escorte du

4 BritBat, est-ce exact ?

5 R. C'est exact. Nous y sommes allés, escortés par le BritBat. Je ne me

6 souviens pas si c'était à bord de ce véhicule qui s'appelle "Warrior," mais

7 je sais, en tous cas, qu'il s'agissait d'un véhicule blindé.

8 Q. Vous pouvez confirmer, commandant, qu'en route vers Mehurici, il y

9 avait deux membres du HVO, membres de votre commission, qui ont été pris

10 dans une embuscade sur le territoire du HVO, près de Vitez, et qu'un des

11 deux hommes a été tué et l'autre a été blessé. Pouvez-vous confirmer cela ?

12 R. C'est exact.

13 Q. On vous a dit et vous pensez que les Moudjahiddines étaient à l'origine

14 de cela, car cela se situait sur le territoire du HVO ?

15 R. C'est exact. C'était l'opinion du HVO et qui pensait que cette

16 embuscade contre les membres de la commission avait été organisée par les

17 Moudjahiddines et perpétré par les Moudjahiddines.

18 Q. Lorsque vous êtes arrivé à Mehurici, vous avez visité l'école en

19 présence de l'officier qui commandait cette école. Il y avait un certain

20 nombre de civils qui s'y trouvait, et vous avez précisé dans votre

21 déclaration que le commandant vous a dit qu'il souhaitait garder ces civils

22 à cet endroit-là pour les protéger des Moudjahiddines.

23 R. C'est, effectivement, ce qu'il nous a dit.

24 Q. Vous saviez qu'il y avait des Moudjahiddines dans la région de

25 Mehurici ?

Page 7070

1 R. Nous le savions, et plus tard dans la journée, lors de notre visite

2 dans cette région, j'ai été en contact par l'intermédiaire du walkie-talkie

3 de mon chauffeur, et il m'a dit que l'escorte du BritBat était encerclée

4 par des membres du Moudjahiddines, et ces Moudjahiddines avaient pris pour

5 cible nos véhicules et y avaient dirigé leurs RPG, leurs armes anti-chars.

6 Q. Vous avez eu cette communication au moment où vous êtes entré dans

7 l'école ?

8 R. C'est exact.

9 Q. Vous avez demandé à l'officier qui commandait l'école d'essayer de vous

10 sortir de là en parlant avec les Moudjahiddines qui avaient dirigé leurs

11 armes anti-chars contre vous ?

12 R. C'est exact. Je lui ai parlé, je l'ai demandé de faire quelque chose

13 pour nous tirer de là.

14 Q. Encore une fois, il ne s'agit pas de quelque chose monté de toutes

15 pièces, puisqu'il y avait une arme anti-char dirigée contre vous, et le

16 commandant de l'école de Mehurici avait dû négocier avec le leader des

17 Moudjahiddines pour leur demander de partir. Ceci c'est passé, de façon

18 bruyante, et l'atmosphère était très tendue ?

19 R. C'est exact.

20 Q. Lorsque vous lui avait demandé qui étaient ces gens, il vous a dit

21 qu'il s'agissait des Moudjahiddines dangereux, qu'il ne s'agissait pas de

22 ses propres soldats.

23 R. C'est exact.

24 Q. Eu égard aux personnes qui étaient détenues, puisque vous vous êtes

25 rendus dans cette école, vous confirmez dans votre déclaration que ces

Page 7071

1 personnes étaient bien traitées ?

2 R. "Bien traitées", c'est peut-être un bien grand mot, mais étant donné

3 les circonstances, nous estimons que ces personnes étaient bien traitées.

4 Nous avons parlé avec elles, et elles nous ont dit : "Nous avons quelque

5 chose à boire, quelque chose à manger. Nous pouvons aller dehors." Ils

6 avaient des difficultés avec les toilettes, ce genre de choses, mais telle

7 était la situation lorsque nous sommes arrivés sur les lieux. Généralement,

8 ces personnes étaient bien traitées. Cela aurait pu être mieux, mais cela

9 aurait pu être pire également. Mais il semble que ces personnes n'étaient

10 peut-être pas dans la meilleure condition qui soit, mais --

11 Q. Mon Commandant, vous-même et moi-même, vous conviendrez qu'il ne

12 s'agissait pas de l'hôtel "Holiday Inn", mais, étant donné les

13 circonstances, vous pouvez attester qu'ils étaient mieux traités que ce à

14 quoi on pouvait s'attendre étant donné les circonstances.

15 R. C'est exact.

16 Q. Si je me tourne vers la responsabilité d'un commandant eu égard à des

17 personnes détenues ou face à des personnes détenues, vous pouvez confirmer,

18 encore une fois, chaque commandant dans la chaîne de commandement est

19 responsable des personnes qui sont détenues ?

20 R. C'est exact.

21 Q. Le niveau de responsabilité est différent, selon le niveau

22 hiérarchique ?

23 R. Oui.

24 Q. La situation que vous avez pu voir à Mehurici, vous ne nous attendiez

25 pas à ce que le commandant du corps reprenne sa voiture et se rende lui-

Page 7072

1 même sur place, pour y découvrir ce qui s'est passé ?

2 R. Non, mais on pourrait s'attendre à ce que le commandant du corps donne

3 à son unité quelques instructions quant à la manière dont il faudrait se

4 conduire et se comporter, eu égard aux conventions de Genève et ce genre de

5 choses.

6 Q. Vous attendez à ce qu'un commandant donne des instructions pour que ses

7 hommes se conforment aux conventions de Genève, à moins qu'il n'obtienne

8 des renseignements indiquant le contraire de la part de ses subordonnés,

9 vous ne vous attendez pas à ce que ces personnes fassent attention à des

10 violations de ces conventions ?

11 R. Il est difficile pour un commandant de savoir ces choses, et de savoir

12 comment les choses se passent dans la région si personne ne le lui dit.

13 Comme vous l'avez dit, un commandant ne doit pas se rendre sur les lieux,

14 mais s'il est néanmoins responsable et peut donner des instructions, et

15 peut s'assurer que quelqu'un contrôle la situation, et que ses instructions

16 soient suivies.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Withopf.

18 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

19 Juges, je soulève une objection quant à cette série de questions. Mon

20 éminent confrère de la Défense demande au témoin, qui est un témoin de

21 faits, des questions qui devraient être posées à un expert. C'est une

22 situation très différente de celle que nous avons rencontrée par le passé,

23 lorsque nous avons demandé à un témoin de fait, sur le base de ses

24 connaissances et sur le base de ce qu'il avait vu, et ce qu'il avait

25 décrit, de tirer des conclusions. Cette fois-ci, mon éminent confrère de la

Page 7073

1 Défense pose au témoin des questions, non pas sur ce qu'il a vécu et vu,

2 lui-même, mais il pose des questions qui sont des questions auxquelles seul

3 un expert peut répondre. C'est la raison pour laquelle je soulève une

4 objection.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre a suivi la question posée. Maître Bourgon

6 a demandé au témoin, qui est un commandant - n'oublions pas que nous avons

7 un officier qui est commandant - quel est le champ de responsabilités d'un

8 commandant ? Il peut quand même répondre à ce type de questions. Monsieur

9 Withopf, je ne vois pas en quoi la question peut poser un problème dans la

10 mesure où on a un officier, qui d'ailleurs, de lui-même a parlé des

11 conventions de Genève.

12 Monsieur Baggesen, vous avez écouté le problème qui est posé. Vous êtes un

13 officier, vous êtes commandant. Imaginez la situation où vous auriez eu à

14 gérer une prison avec des soldats sous vos ordres. Est-ce que vous auriez

15 donné à vos gardiens militaires des instructions sur le respect de la

16 convention de Genève ? Voilà, le type de question qu'on peut vous poser,

17 puisque vous êtes officier. Qu'est-ce que vous me dites ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Si je devais avoir sous ma responsabilité des

19 personnes détenues, je dois m'assurer que mes subordonnés qui commandent ce

20 centre de détention se conforment aux conventions de Genève et je dois

21 m'assurer que mes hommes savent se comporter. Si je ne suis pas en mesure

22 de me rendre sur les lieux moi-même, je peux demander à quelqu'un d'autre

23 d'aller vérifier ce qui se passe dans ce centre, mais je serais, néanmoins,

24 encore responsable car je suis le commandant.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Bourgon, poursuivez.

Page 7074

1 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président.

2 Q. [interprétation] Mon Commandant, vous comprendrez que dans la position

3 de M. Hadzihasanovic, vous avez été le témoin, la responsabilité eu égard à

4 Mehurici s'applique toujours, mais votre niveau d'attente est différent par

5 rapport à ce que vous attendez d'un officier qui commande sur le terrain.

6 R. C'est exact.

7 Q. Eu égard au général Hadzihasanovic, vous avez visité le centre de

8 détention du KP Dom, n'est-ce pas ?

9 R. Oui, à Zenica.

10 Q. C'est un centre de détention au niveau du corps ?

11 R. Je pense que la personne à Zenica était quelqu'un qui était là avant le

12 conflit, et pendant le conflit. Ce centre a été utilisé par les autorités

13 locales et par le 3e Corps. Cet endroit était une prison avant la guerre.

14 Q. Fort de votre expérience, il serait normal que le général

15 Hadzihasanovic fasse plus attention au KP Dom parce qu'il y avait peut-être

16 des personnes qui pouvaient y être transférées si le besoin s'en faisait

17 sentir.

18 R. Je ne connais pas la chaîne de commandement qui s'applique dans les

19 prisons. Mais je pense que ce centre de détention devait avoir un lien

20 assez étroit avec le corps, par exemple, peut-être différent de l'école que

21 j'ai évoquée plus tôt.

22 Q. Merci, mon Commandant.

23 Je vais parler d'une autre question. Je souhaite aborder la question

24 de la situation sur le terrain et pour ce qui est de la difficulté

25 rencontrée à ce moment-là. Je souhaite, en premier lieu, aborder la

Page 7075

1 situation du 21 avril. Dans votre déclaration, vous faites état

2 d'allégations en vertu de quoi des villages avaient été attaqués. Vous vous

3 y êtes rendus avec votre collègue Junhov et le Père Stipan Radic, et vous

4 en avez conclu qu'il y avait peu de dommages, bien que quelques maisons

5 aient été pillées et que les propriétaires de ces maisons étaient partis.

6 Pouvez-vous confirmer cela ?

7 R. C'est exact.

8 Q. Pouvez-vous également confirmer qu'un certain nombre de rumeurs

9 circulaient, à ce moment-là, en vertu de quoi l'ABiH avait planifié une

10 opération à très grande échelle contre les Croates et toutes les rumeurs

11 allaient dans ce sens, et les rumeurs se propageaient partout ?

12 R. C'est exact.

13 Q. Pouvez-vous également confirmer que le 25 avril, vous-même le père

14 Stipan, avez visité le village de Janjac, Susanj, Stranjani, Dolac et

15 Konjevici en présence de Morsink, également, et vous en avez conclu que les

16 biens étaient intacts, bien que bon nombre de maisons aient été pillées ?

17 Pouvez-vous confirmer ceci ?

18 R. Je peux confirmer que j'ai visité un certain nombre de villages. Je ne

19 me souviens pas des noms, ni des dates, mais je me souviens d'avoir visité

20 un bon nombre de villages croates très tranquilles en présence de Henk

21 Morsink et du Père Stipan.

22 Q. Peut-être que je peux vous rafraîchir la mémoire. Les villageois

23 musulmans souhaitent que les Croates reviennent et vous avez pensé que la

24 situation était assez sûre et qu'ils pouvaient revenir ?

25 R. C'est exact. Une des raisons pour lesquelles nous étions accompagnés du

Page 7076

1 Père Stipan, c'est que nous voulions, par son truchement, faire en sorte

2 que ce soit lui qui établisse les faits en même temps que nous, de façon à

3 ce qu'il puisse dire aux Croates que c'était sûr et qu'ils pouvaient

4 rentrer chez eux.

5 Q. Pouvez-vous confirmer que vous avez vu la police de la BiH arrêter les

6 pilleurs et cela vous a réconforté, car ceci est quelque chose que le père

7 Stipan pouvait rapporter aux Croates ?

8 R. C'est exact.

9 Q. Pouvez-vous également confirmer que la plupart des réfugiés sont

10 effectivement revenus mais, qu'à l'origine, c'était le HVO qui avait essayé

11 de les en empêcher en tirant des coups de feux en l'air pour leur faire

12 peur et les empêcher de revenir ?

13 R. C'est exact. Au début, lorsque nous avons essayé de faire revenir tous

14 les réfugiés dans leurs villages, nous nous sommes rendus dans la région

15 dans les autocars de la Croix rouge locale. Au point de contrôle, le HVO a

16 réquisitionné nos autobus, car ils s'en servaient pour déplacer les

17 réfugiés et les emmener dans des régions à dominance croate. Je sais qu'il

18 y avait quelque 2 000 réfugiés. Nous avons réussi à faire revenir 1 600

19 réfugiés. Les autres ont été déplacés par le HVO.

20 Q. Pouvez-vous confirmer, mon Commandant, que le 28 avril, vous avez

21 visité le KP Dom en présence de votre collègue Landry et que vous avez

22 remarqué que les conditions de détention étaient bonnes, qu'un homme avait

23 été relâché, car il avait eu une intervention chirurgicale et vous avez

24 estimé que ce n'était pas bon pour lui de rester là, mais que de façon

25 générale, les gens étaient bien traités au KP Dom ? Pouvez-vous confirmer

Page 7077

1 ceci ?

2 R. Vous utilisez ces termes de "Holiday Inn." Cela n'était pas un Holiday

3 Inn, mais ils étaient traités mieux que ce à quoi on pouvait s'attendre. Il

4 est exact de dire qu'il y avait un homme plus âgé qui avait subi une

5 intervention parce qu'il avait un cancer et, parce que ce n'était pas un

6 criminel, nous avons demandé à ce qu'il soit relâché. Bien évidemment, si

7 les personnes détenues sont emprisonnées parce qu'elles sont des criminels,

8 ces personnes doivent rester en prison, mais dans ce cas-ci, il s'agissait

9 d'un Croate et cette personne n'était pas un criminel. Il a été relâché

10 sur-le-champ sans aucune difficulté.

11 Q. Pouvez-vous confirmer, mon Commandant, que vous êtes retourné plusieurs

12 fois au KP Dom ? La situation semblait toujours bonne comme celle que vous

13 venez de décrire ?

14 R. C'est exact.

15 Q. Pouvez-vous confirmer, Commandant, que ceci était très différent de ce

16 que vous avez pu voir lorsque vous avez visité les prisons du HVO, comme

17 Kaonik ?

18 R. Vous parlez de Kaonik. Je crois que c'était le pire exemple que vous

19 puissiez citer. Les personnes n'étaient vraiment pas bien traitées par

20 rapport à d'autres cas.

21 Q. Pouvez-vous confirmer, mon Commandant, c'est un extrait de votre

22 déclaration ainsi que différents rapports, qu'à Zenica, il y avait des

23 pilonnages d'artillerie à intervalles réguliers quasiment tous les jours,

24 ce qui signifie que cela était très difficile pour la population, pour

25 vous-même en tant qu'observateur, ainsi que pour le QG du 3e Corps ? Ceci

Page 7078

1 rendait la tâche très difficile.

2 R. C'étaient des conditions de travail difficiles pour nous, car nous

3 devions travailler dans ce contexte-là. Bien évidemment, c'était difficile

4 pour les civils également, parce que nous étions pilonnés quasiment tous

5 les deux jours, comme vous l'avez dit. Quelques fois, le pilonnage venait

6 du HVO. Nous n'avons pas pu prouver ceci dans l'affaire Blaskic, mais

7 d'après nos conclusions et plus tard, l'armée serbe de Bosnie a commencé à

8 pilonner cette région. L'armée serbe de Bosnie pilonnait des positions

9 croates ainsi que des positions de l'ABiH de façon à créer un conflit entre

10 ces deux parties, car il semblait, à ce moment-là, que l'ABiH pilonnait le

11 HVO et que le HVO pilonnait l'ABiH. Mais d'après nos conclusions, ce

12 n'était pas le cas, c'était en fait l'armée serbe de Bosnie.

13 Q. Pouvez-vous confirmer, mon Commandant, que des personnes sont décédées

14 à la suite de ce pilonnage et, plus particulièrement, un exemple précis,

15 lorsqu'il y a eu un pilonnage sur la place du marché, 11 personnes sont

16 mortes ?

17 R. Je puis confirmer cela. C'était la première attaque lancée au mois

18 d'avril.

19 Q. Je souhaite maintenant avancer et parler de la situation, si je puis

20 m'exprimer ainsi, de l'autre côté, pour ce qui est de ce qui se passait

21 dans les villages musulmans. Avez-vous visité des villages musulmans ?

22 R. Oui, nous l'avons fait.

23 Q. Vous êtes en mesure de confirmer que, si nous comparons le HVO et

24 l'ABiH - ce fut votre impression; nous le retrouvons dans votre déposition,

25 dans votre déclaration - ils avaient décidé, sur la base du plan Vance-

Page 7079

1 Owen, de faire en fait ce que le plan stipulait, à savoir, prendre par

2 force le terrain qui était à ce moment-là occupé par les Musulmans.

3 R. C'est exact. Il semblait, en effet, que le HVO légalisait leurs

4 opérations de nettoyage ethnique, parce qu'ils souhaitaient avoir ce

5 nettoyage ethnique des provinces à dominance croate qui devaient faire

6 l'objet de ce nettoyage ethnique.

7 Q. Mon Commandant, vous avez été mis au courant de certaines mesures

8 prises par le HVO, notamment, Ahmici, qui a été probablement le massacre le

9 plus important pendant votre période d'affectation là-bas.

10 R. Oui.

11 Q. Si je vous mentionne certaines villes, est-ce que vous vous souvenez,

12 par exemple, que le 28 avril, vous vous êtes rendu à Visoko, à la Croix

13 rouge locale ? Vous vous souvenez de cela ?

14 R. Oui. Je peux m'y souvenir.

15 Q. Dans votre déclaration de 1996, vous avez indiqué qu'il y avait des

16 milliers de réfugiés qui venaient des villes suivantes : Svinjarevo,

17 Jehovac, Gromiljak, Behrici, Gomionica, Bilalovac, pour n'en citer que

18 quelques-unes. Connaissez-vous ces noms ?

19 R. Oui.

20 Q. Les réfugiés provenaient de ces villes ?

21 R. C'est exact. Je peux me souvenir d'un rapport que j'ai rédigé, et nous

22 avions des chiffres. Nous savions combien de réfugiés venaient des

23 différentes localités.

24 Q. Le 29 avril, mon Commandant, vous vous êtes rendu avec l'équipe Z1, et

25 je cite votre déclaration : "Voilà ce que nous avons trouvé; à Polje

Page 7080

1 Visnjica, la plupart des maisons musulmanes ont été incendiées, et tous les

2 Musulmans ont quitté le village, mais il y a encore des familles croates

3 qui restent dans ce village." Vous souvenez-vous avoir indiqué cela dans

4 votre déclaration ?

5 R. Oui.

6 Q. Pour ce qui est d'Hercezi, vous dites que 14 Musulmans ont été tués

7 dans cette zone. Vous vous en souvenez ?

8 R. Oui.

9 Q. Vous vous souvenez qu'à Visnjica, 40 maisons ont été incendiées et cinq

10 hommes musulmans ont été tués. Vous vous en souvenez ?

11 R. Oui.

12 Q. A Gomionica, vous n'avez aucun problème pour parcourir le village avec

13 le HVO. Le village avait été abandonné, et toutes les maisons musulmanes

14 avaient été complètement détruites : "Pourtant, nous n'avons pas été

15 surpris de voir qu'il y avait des maisons croates qui n'avaient essuyées

16 aucun dégât dans ce village." Vous vous en souvenez ?

17 R. Oui, c'est exact.

18 Q. Vous souvenez-vous avoir vu des soldats réguliers du HVO et des tireurs

19 d'élite du HVO qui poursuivaient votre équipe pendant cette visite ?

20 R. Oui.

21 Q. En fait, là, si je ne m'abuse, Gomionica se trouve au nord de Kiseljak.

22 C'est cela ?

23 R. Oui. En fait, nous avons eu des problèmes pour nous y rendre le premier

24 jour, parce que le HVO nous avait refusé l'accès à Gomionica. Le deuxième

25 jour, le lendemain, j'ai obtenu une escorte du Bataillon canadien, et là,

Page 7081

1 le chef de section, ainsi que moi-même, nous avons essuyé des tirs à partir

2 de positions du HVO. Nous avons réussi à sortir et à nous échapper. C'est,

3 finalement, le troisième jour que nous avons pu nous rendre sans problème à

4 Gomionica. Là, nous avons vu que des patrouilles du HVO essayaient de se

5 rapprocher de nous.

6 Q. Merci, mon Commandant. Pouvez-vous vous souvenir que, lorsque vous

7 étiez en Bosnie centrale, la question des communications - et je parle des

8 PTT, en fait, parce que vous nous dites dans votre déclaration que

9 l'ingénieur avec lequel vous vous êtes entretenu était tout à fait capable

10 de rétablir les lignes téléphoniques entre Sarajevo et Zenica ou entre

11 Travnik et Zenica, par exemple, mais qu'il refusait de le faire sans avoir

12 au préalable un ordre émanant de Blaskic.

13 R. C'est exact. Nous avons eu des problèmes avec les lignes téléphoniques

14 entre Zenica et Sarajevo; les lignes des PTT. A ce moment-là, il a été

15 demandé à mon équipe d'aller constater les faits et de voir ce que nous

16 pouvions faire. Nous nous sommes rendus compte qu'a Kiseljak, l'un des

17 ingénieurs croates responsables des lignes PTT nous a dit dans un premier

18 temps, qu'elles étaient détruites parce que les PTT avaient été détruites,

19 mais nous n'avons vu aucun impact de balle sur ce bâtiment des PTT. Nous

20 avons repris la conversation avec cet homme, et il nous a dit que les

21 lignes téléphoniques entre Zenica et Sarajevo avaient été coupées et qu'il

22 ne pensait pas qu'il était nécessaire que les Musulmans de Zenica puissent

23 avoir des contacts avec les Musulmans de Sarajevo, et que la seule personne

24 qui pouvait l'autoriser à faire en sorte que les lignes soient réparées

25 était le colonel Blaskic.

Page 7082

1 Q. Merci, mon Commandant.

2 Une dernière question, et j'aimerais, rapidement, vous montrer

3 quelques documents, car vous avez dit tout à l'heure spontanément, que vous

4 avez parlé de votre conversation avec le général Hadzihasanovic. Vous avez

5 dit ce qu'il pensait des Moudjahiddines. Est-ce que vous êtes en mesure de

6 nous confirmer qu'à cette occasion, le général Hadzihasanovic vous a

7 également dit que l'ABiH n'était pas suffisamment puissante pour lutter

8 contre les Moudjahiddines ?

9 R. Je ne me souviens pas s'il a mentionné l'ensemble de l'ABiH, mais à ma

10 connaissance, autant que je m'en souvienne, je pense qu'il parlait de son

11 propre corps. Il disait qu'ils n'étaient pas en mesure de contrôler ou de

12 désarmer les Moudjahiddines.

13 Q. Merci, Commandant.

14 J'aimerais vous montrer maintenant quelques documents. Je vais, tout

15 simplement, vous demander de reconnaître ces documents, parce que nous

16 n'avons pas le temps de les examiner par le menu. Ce sont des rapports que

17 vous avez, vous-même, rédigés lorsque vous étiez observateur en Bosnie. Il

18 y a toute une série de rapports que je vous demanderais de bien vouloir

19 identifier. Il s'agit, tout simplement, de vos rapports, et il s'agit de

20 rapports établis sur ce que vous avez vu lorsque vous vous trouviez en

21 Bosnie.

22 Il y a un rapport en date du 28 avril, et il est signé "Lars

23 Baggesen." Est-ce que vous reconnaissez qu'il s'agit de l'un de vos

24 rapports?

25 R. Oui.

Page 7083

1 Q. Si vous preniez la page suivante, il y a également un autre rapport

2 quotidien en date du 29 avril, et là, nous voyons "salutations, Allan

3 Laustsen". C'était votre collègue, est-ce bien exact ?

4 R. C'est exact.

5 Q. Il est indiqué, au paragraphe 4, que la conclusion de l'équipe, et je

6 cite : "Il est évident qu'il y a une opération de nettoyage ethnique dans

7 la zone." Est-ce que vous pouvez confirmer que vous parlez du HVO ?

8 R. Exact.

9 Q. A la page suivante, il s'agit d'un rapport du 9 mai 1993. Une fois de

10 plus, il est signé par vous-même. En tout cas, il est indiqué votre nom,

11 "Lars Baggesen", et votre collègue, Stavros Kinigopoulos.

12 R. Oui, il est mon collègue grec. C'est exact.

13 Q. Il s'agissait de votre enquête sur l'origine des pilonnages à Dusina.

14 R. Oui.

15 Q. Ensuite, vous avez le 12 mai. Là il est encore question de la situation

16 qui prévoit sur le terrain ?

17 R. Oui.

18 Q. Je vais passer au prochain rapidement. Le 16 mai, à la page suivante,

19 une fois de plus c'est signé par vous-même, Lars Baggesen et Bent Faerge.

20 Je ne sais pas d'ailleurs qui est cette personne. Pouvez-vous nous dire de

21 qui il s'agit ?

22 R. Oui. Bent Faerge est un observateur danois.

23 Q. Pouvez-vous confirmer que M. Merdan et M. Skopljak se sont convenus de

24 libérer toutes les personnes de l'ABiH qui ont été emprisonnées à Busovaca

25 et de libérer également tous les prisonniers qui se trouvent à Kaonik et

Page 7084

1 Zenica, et que tous les membres du HVO emprisonnés à Zenica après le 17 mai

2 devraient être libérés.

3 R. C'est exact.

4 Q. Est-ce que vous confirmez qu'en fait l'ABiH a mis en liberté tous les

5 Croates mais que le HVO n'a pas mis en liberté tous les membres de l'ABiH.

6 Vous vous souvenez de ce fait ?

7 R. Je ne me souviens pas de ce fait.

8 Q. Si je passe au rapport suivant, en date du 18 mai, là vous voyez qu'il

9 est question de Maglaj. Il s'agit en fait d'un rapport de deux pages, signé

10 une fois de plus par vous-même. Vous vous trouviez à Maglaj et dans la zone

11 Zepce-Maglaj ainsi qu'à Zavidovici. Est-ce bien exact ?

12 R. C'est exact.

13 Q. Etes-vous en mesure de confirmer que, d'un point de vue stratégique, il

14 s'agissait d'une zone particulièrement importante qui aurait dû attirer

15 l'attention d'un commandant de corps, tout simplement parce que s'il

16 perdait cette zone, il était complètement isolé du nord ?

17 R. C'est exact. La situation était particulièrement tendue d'ailleurs

18 parce que toute la zone était encerclée par l'armée serbe de Bosnie. Il y

19 avait des attaques quotidiennes et l'armée de Bosnie était très près de

20 parvenir à ses fins, à savoir, d'isoler cette zone du reste de la zone qui

21 était placée sous la responsabilité du corps.

22 Q. Etes-vous en mesure de confirmer qu'au départ, il y a eu coopération

23 entre le HVO et l'ABiH et le problème important en juin venait du fait que

24 le HVO se retirait et qu'il y avait des signes ou des indices de

25 coopération entre le HVO et le VRS, ce qui fait que la situation du général

Page 7085

1 Hadzihasanovic était particulièrement difficile ?

2 R. Il est exact de dire qu'il y avait une bonne coopération entre le HVO

3 et l'ABiH. Il nous semblait en tout cas que cette coopération était bonne.

4 Nous avons entendu des rumeurs qui circulaient. Je pense que cela a été

5 appuyé par des faits qu'il y avait une coopération entre le HVO et l'armée

6 serbe de Bosnie. Cela a engendré des tensions pour ce qui est de la

7 coopération entre le HVO et l'ABiH.

8 Q. La coopération entre le HVO et le VRS, cette coopération vous en étiez

9 conscient ?

10 R. Je ne savais pas qu'il y avait une coopération entre le HVO et comment

11 vous avez appelé le VRS ?

12 Q. Oui, les Serbes.

13 R. Oui.

14 Q. Le HVO, parce qu'il y avait des indices qui indiquaient qu'il y avait

15 une coopération, et en fait, le HVO se retirait de la ligne, ce qui fait

16 que la situation du général Hadzihasanovic devenait assez difficile.

17 R. Nous savons qu'ils remplaçaient certaines des unités HVO dans cette

18 zone et qu'il y a eu une organisation qui a été faite dans d'autres

19 endroits.

20 Q. Si nous prenons votre dernier rapport en date du 26 juin, c'est le

21 dernier rapport. Ce rapport d'ailleurs fait partie de la commission

22 humanitaire mixte. Est-ce que je peux attirer votre attention sur le

23 paragraphe 3, pour ce qui est du nombre de prisonniers qui ont été mis en

24 liberté. Etes-vous en mesure de confirmer que seul 190 Musulmans ont été

25 mis en liberté par opposition à 453 Croates ?

Page 7086

1 R. Non, ce n'est pas le document suivant. C'est deux documents après celui

2 qu'on ait ici. C'est le document du 26 juin.

3 Q. Oui.

4 R. Oui. La raison c'est qu'il y avait plus de Croates qui étaient détenus

5 que de Musulmans. Je peux me souvenir d'une discussion qui a eu lieu. En

6 fait, les deux membres de l'ABiH qui faisaient partie de la commission

7 humanitaire mixte craignaient pour leur vie, parce qu'ils avaient reçu des

8 menaces, leur famille avait été menacée, et parce que la commission mettait

9 en liberté plus de Croates que de Musulmans. L'un des membres de l'ABiH

10 était croate de naissance et il a été menacé par les personnes du cru.

11 Q. Mon Commandant, une dernière question à propos de ce document : le

12 dernier paragraphe de la première page, il est mentionné qu'un certain

13 Stjepan Siber de l'ABiH, alors ils étaient tous les deux croates, vous

14 aviez le représentant du HVO et vous aviez également le représentant de

15 l'ABiH qui était croate, et c'est la raison pour laquelle M. Siber voulait

16 libérer tous les Croates. C'est aussi la raison pour laquelle il y a eu

17 plus de Croates mis en liberté. Pouvez-vous le confirmer ?

18 R. Non. Je pense qu'il y a eu plus de Croates libérés que de Musulmans

19 parce qu'il y avait plus de Croates détenus --

20 Q. Merci beaucoup, mon Commandant.

21 M. BOURGON : Monsieur le Président, j'aimerais verser au dossier la série

22 de documents sous un seul numéro, étant donné que le témoin a identifié ces

23 rapports comme étant ses propres rapports.

24 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Withopf, sur les rapports du témoin ?

25 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

Page 7087

1 Juges, l'Accusation n'a pas d'objection. Toutefois, j'aimerais faire

2 remarquer que mon estimé confrère a omis le document du 23 juin 1993, et

3 pour ne pas trop compliquer la situation, l'Accusation ne soulève aucune

4 objection à ce que ce document également soit versé au dossier.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, donnez-moi un numéro, s'il

6 vous plaît.

7 M. LE GREFFIER : Pièce versée au dossier sous la référence DH167, Monsieur

8 le Président.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Il reste un quart d'heure, Maître Bourgon.

10 M. BOURGON : J'ai terminé. C'était ma dernière question.

11 Q. [interprétation] Merci beaucoup, mon Commandant.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Dixon.

13 M. DIXON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

14 Contre-interrogatoire par M. Dixon :

15 Q. [interprétation] Commandant Baggesen, je n'ai que quelques questions à

16 formuler au nom de M. Kubura. Est-il exact de dire que vous ne vous

17 souvenez pas si vous avez eu la possibilité de rencontrer M. Kubura, qui

18 était le commandant en exercice de la 7e Brigade pendant votre période

19 d'affectation ?

20 R. C'est exact.

21 Q. Vous avez rencontré des soldats de la 7e Brigade, ce que vous avez dit

22 lors de l'interrogatoire principal. Vous les avez rencontrés dans l'école

23 de musique; est-ce bien exact ?

24 R. Oui.

25 Q. Vous avez également dit qu'aucun de ces soldats ne parlait de langue

Page 7088

1 étrangère, et ils ne parlaient, notamment, l'arabe.

2 R. Nous ne parlions qu'à des personnes qui pouvaient s'exprimer en

3 bosnien.

4 Q. Vous n'avez jamais entendu la langue arabe parlée dans l'école de

5 musique ?

6 R. C'est exact.

7 Q. Les soldats vous ont autorisé d'inspecter toute l'école de musique à

8 l'exception d'une pièce qui était réservée aux transmissions.

9 R. Oui.

10 Q. Vous avez eu des câbles qui entraient et sortaient de cette salle ?

11 R. Oui.

12 Q. Une fois que vous avez entendu cela et que vous avez vu ces câbles,

13 peut-on dire que vous avez compris, dans une certaine mesure, pourquoi vous

14 aviez eu des problèmes à avoir accès à l'école de musique du fait du

15 matériel de transmission qui s'y trouvait.

16 R. Non, je ne pense pas que c'était la raison pour laquelle l'accès nous a

17 été refusé. Je pense que le commandant local n'a pas eu le courage et n'a

18 pas assumé la responsabilité pour nous donner l'accès ou plutôt. Je pense

19 qu'il avait besoin, en fait, d'un ordre émanant d'un grade supérieur. Il

20 avait besoin d'un document stipulant que je pouvais avoir accès à tous les

21 endroits où je voulais me rendre en Bosnie. Je pense qu'il a fallu qu'il

22 confirme cela.

23 Q. Il voulait s'en assurer. Le soldat dont vous parlez, il voulait

24 s'assurer de cela.

25 R. Oui.

Page 7089

1 Q. Vous êtes en mesure de confirmer qu'il y avait cette salle de

2 transmission et que cela était un élément sensible pour toutes les

3 parties ?

4 R. Oui.

5 Q. Vous avez dit lors de l'interrogatoire principal que si l'on ne vous

6 avait pas montré une pièce en particulier, à l'exception de la pièce des

7 transmissions, cela aura éveillé vos soupçons ?

8 R. C'est exact.

9 Q. Vous avez, par conséquent, supposé que vous aviez vu toutes les pièces

10 de l'école de musique, depuis le sous-sol jusqu'à tous les étages ?

11 R. C'est exact.

12 Q. Commandant Bagessen, cela ne vous surprendrait pas de savoir que

13 l'école de musique n'était pas, en fait, le QG de la 7e Brigade ? Leur QG

14 se trouvait dans un endroit qui s'appelle Bilmiste.

15 R. Cela ne me surprendrait pas, parce que, normalement, lorsque nous

16 avions des réunions avec des personnes, s'il s'agissait d'une réunion avec

17 quelqu'un qui venait de la 7e Brigade musulmane ou d'une autre brigade,

18 tout le monde s'appelait commandant, mais vous pouviez être commandant à

19 différents niveaux. Les commandants avaient leur QG. Il y avait, par

20 exemple, le QG de la 7e Brigade musulmane qui se trouvait à l'école de

21 musique. Ce n'était pas forcément un grand quartier général, cela pouvait

22 être le QG d'une compagnie, par exemple. Je sais, par exemple, que les

23 sections n'ont pas ce genre de QG, cela aurait pu être leur poste.

24 Q. Vous saviez que le QG de la brigade se trouvait à Bilmiste, à

25 l'époque ?

Page 7090

1 R. Je ne me souviens pas du lieu où se trouvait le QG de cette brigade.

2 Q. Vous n'avez jamais eu de raisons d'aller dans ce quartier général pour

3 rencontrer la 7e Brigade ?

4 R. Je n'avais pas de raison de le faire, et d'ailleurs je ne sais pas si

5 certains de mes collègues se sont rendus à ce quartier général de brigade.

6 Q. Vous n'avez jamais rencontré de commandant de la 7e Brigade au QG du

7 Bilmiste, n'est-ce pas ?

8 R. Je n'ai jamais été dans ce quartier général, mais j'ai rencontré

9 d'autres commandants, des commandants de bataillon, par exemple, mais je ne

10 me souviens pas de leurs noms.

11 Q. A l'école de musique, une fois que vous avez inspecté le bâtiment, vous

12 n'avez pas trouvé de personnes qui étaient détenues, dans cette école de

13 musique ?

14 R. Non.

15 Q. D'après vous, l'unité de la 7e Brigade représentait l'une des forces

16 les plus disciplinées qui opérait en Bosnie centrale, n'est-ce pas ?

17 R. A mon avis, oui.

18 Q. Toutefois, le HVO indiquait qu'il y avait des liens entre ces forces,

19 les Moudjahiddines et les enlèvements dont vous avez parlés, aujourd'hui ?

20 R. C'est exact.

21 Q. Lors de votre interrogatoire principal, vous avez dit que vous que vous

22 n'avez pas vu de liens entre le 7e Brigade et les Moudjahiddines.

23 R. Le seul lien, que nous avons vu, a été la discussion à propos de ce

24 véhicule. Puis plus tard, des messagers ont utilisé ce véhicule. Ensuite,

25 on l'a vu devant l'un des bâtiments, l'un des complexes où se trouvait la

Page 7091

1 7e Brigade. Je ne peux pas utiliser le mot "quartier général", mais cela

2 avait été remarqué. Je ne me souviens pas, d'ailleurs, s'il se trouvait

3 devant l'école de musique ou devant leur enceinte à Ravno Rostovo.

4 Q. Ce véhicule que vous n'avez pas vu, vous avez eu une discussion avec

5 vos collègues à ce sujet ?

6 R. Je ne me souviens pas si j'ai vu moi-même de visu le véhicule, mais je

7 me souviens avoir eu une discussion à ce sujet. Je ne sais pas si je l'ai

8 vu moi-même.

9 Q. Bien que cela soit secondaire à propos de ce qui se passait à l'époque,

10 vous n'êtes pas en mesure de confirmer, aujourd'hui, que vous avez vu le

11 véhicule en question dans différents endroits ?

12 R. Pour autant que je m'en souvienne, nous avons eu une discussion à

13 propos de ce véhicule. Le dit véhicule a été observé à deux endroits, mais

14 je ne me souviens pas si je l'ai vu moi-même, ou si c'est quelque chose que

15 j'ai entendu lors de la discussion.

16 Q. Si nous poursuivons et que nous continuons à étudier cette allégation

17 de lien, alors je ne sais pas si vous le savez, mais M. Totic lui-même a

18 témoigné, dans le cadre de ce procès en audience publique, à propos des

19 enlèvements. Est-ce que vous l'avez jamais interrogé après l'incident ?

20 R. Non.

21 Q. D'après ce que vous saviez à l'époque, et compte tenu des documents que

22 nous avons vu aujourd'hui, il serait exact de dire que les Moudjahiddines

23 étaient véritablement la force motrice de ces échanges. Ce sont eux qui

24 présentaient la demande; ce sont eux, également, qui dressaient la liste

25 des personnes qui allaient faire l'objet d'échange; ce sont eux qui

Page 7092

1 participaient aux réunions ainsi qu'aux négociations et à l'échange, à

2 proprement parler ?

3 R. C'est exact, échange qui s'est passé au mois de mai ?

4 Q. A une question qui a été posée par l'Accusation, où il s'agit d'un

5 rapport préparé par M. Schellschmidt. Au paragraphe 10 de ce rapport, je ne

6 vais pas vous redonner ce document, mais vous avez confirmé que c'était les

7 Moudjahiddines qui avaient demandé une réunion avec le HVO, la 7e Brigade,

8 et un certain nombre d'autres organisations à Zenica ?

9 R. C'est exact.

10 Q. Les allégations présentées par le HVO se sont avérées, tout à fait,

11 inexactes, et, en fait, la 7e Brigade n'a absolument pas participé à ces

12 enlèvements.

13 R. Nous n'avons pas vu de liens entre la 7e Brigade musulmane et les

14 enlèvements.

15 Q. Je vous remercie, commandant Bagessen, je n'ai plus de questions à vous

16 poser.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Withopf, avez-vous des questions

18 supplémentaires ?

19 M. WITHOPF : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. J'ai un certain

20 nombre de questions à formuler à la suite du contre-interrogatoire. Je suis

21 conscient du temps. Je ne sais pas si vous penserez que nous pouvons

22 poursuivre aujourd'hui et reprendre cela demain, ou est-ce que nous pouvons

23 tout laisser pour demain matin.

24 M. LE JUGE ANTONETTI : Pour poursuivre, combien de temps vous faut-il ?

25 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais aborder

Page 7093

1 cinq thèmes, je suppose que j'aurais besoin de 20 minutes pour ce faire.

2 [La Chambre de première instance se concerte]

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Malheureusement, il faudra continuer demain parce

4 que si vous allez pendant 20 minutes, cela risque de susciter, de la part

5 de la Défense, d'autres questions.

6 Mon commandant, malheureusement, vous allez être obligé de rester ce soir.

7 Les Juges auraient aussi quelques questions à vous poser. Nous n'avons pas

8 pu terminer votre audition. Je vous invite à revenir demain pour l'audience

9 de 9 heures.

10 Je vais demander à Mme l'Huissière de bien vouloir vous raccompagner

11 à la porte. D'ici à demain, bien entendu, vous n'avez aucun contact avec

12 personne.

13 Monsieur Withopf.

14 [Le témoin se retire]

15 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

16 Juges, la semaine dernière, vous avez demandé aux parties de discuter des

17 documents qui ont été présentés par la Défense à l'expert militaire.

18 L'Accusation souhaite verser ces documents comme un pièce à conviction de

19 l'Accusation. Nous avons étudié la question, nous en avons débattue, et

20 nous sommes d'accord pour dire que ces documents devraient être versés au

21 dossier, mais devrait être versés comme pièces à conviction de la Défense

22 pour l'accusé Hadzihasanovic.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

24 Maître Bourgon, sur ce problème, c'était des mémoires DH153 à DH164.

25 Je peux me tromper, mais je cite cela de mémoire.

Page 7094

1 M. BOURGON : Monsieur le Président, il s'agit de DH154, qui traitait

2 de l'onglet numéro 1 dans le classeur, aller jusqu'à DH163.

3 Toutefois, Monsieur le Président, il y a deux corrections à apporter

4 avant de déposer ces documents. Tout d'abord, dans la pièce DH156, il faut

5 retirer un document qui a déjà été introduit en preuve, ce qui est le

6 document DH66. Il s'agit d'un document qui date du 8 juin 1993. Le document

7 porte le numéro 19-8/02-230-150. Le document est adressé au "District

8 Military Prosecutor", et ce document a été admis en preuve lors du

9 témoignage du témoin Ivkic, le 18 mars 2004. Il faudra, Monsieur le

10 Président, retirer ce document de l'onglet numéro 3.

11 Concernant la pièce DH163 ID -- pardon, il y a un document

12 additionnel qui n'a pas reçu de numéro, qui se retrouvait dans l'onglet 11

13 du classeur. A l'onglet 11 du classeur, Monsieur le Président, il y avait

14 une série de documents qui étaient déjà en preuve, qui avaient été admise

15 lors du témoignage de M. Ivkic, mais il y avait un document additionnel

16 sous l'onglet 11. Il s'agit d'un document du 11 mars 1993. C'était un

17 intitulé, "The request for information on criminal charges". L'expéditeur

18 était le 3e Corps, le quartier général, et le document était envoyé à

19 toutes les unités. Le document portait le numéro 04/739-1. Ce document,

20 Monsieur le Président, nous aurions besoin d'un numéro additionnel pour

21 pouvoir le déposer.

22 Enfin, Monsieur le Président, j'aimerais simplement noter que ces

23 documents, comme nous l'avons mentionné la semaine dernière, sont déposés

24 de consentement, sans préjudice à la position de la Défense concernant les

25 arguments que nous avons présentés sur l'admissibilité des documents.

Page 7095

1 C'est-à-dire qu'en l'état, nous, nous proposions d'attendre certains

2 témoins avant de les introduire en preuve, mais puisqu'ils sont introduits

3 de consentement, nous n'y voyons absolument aucune objection. Merci,

4 Monsieur le Président.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans les documents qui avaient eu un numéro aux fins

6 d'identification, il y a un consensus pour que ces documents soient

7 définitivement admis, à l'exception du document qui doit être retiré

8 puisqu'il a déjà été versé. C'est le DH66.

9 En revanche, dans l'onglet 11, il y a un document daté du 11 mars

10 1993 où vous voulez qu'il y ait un numéro additionnel. Ce sera le numéro

11 DH165.

12 Monsieur le Greffier, pour le document additionnel, ce sera quel

13 numéro ?

14 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, la référence sera

15 DH168, selon mes sources.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Le document additionnel, 168. Les autres qui étaient

17 aux fins d'identification deviennent définitifs.

18 Demain, nous poursuivrons avec ledit témoin et, puis, il y aura un

19 autre témoin qui est à la disposition de la Chambre.

20 Il y avait un petit problème de locaux. Normalement, nous sommes

21 programmés pour la salle d'audience numéro II, et la salle d'audience

22 numéro II est prévue pour toute la semaine. Est-ce que, vis-à-vis de la

23 Défense, il y avait un problème par rapport à la fameuse maquette ?

24 M. BOURGON : Monsieur le Président, nous n'utilisons pas la maquette

25 avec le témoin qui sera là jeudi, mais nous voulons utiliser la carte. Il

Page 7096

1 serait préférable, si cela était possible, d'être dans la salle III ou

2 encore la salle I, de façon à utiliser la carte.

3 Merci, Monsieur le Président.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : Pour demain, il n'y aura pas de problème. J'invite

5 M. le Greffier, Mme la Greffière, à voir si on ne pourrait pas basculer en

6 salle III, alors qu'on doit être, normalement, en salle II. Il faudrait que

7 vous voyiez cela avec les autres greffiers. Je ne connais pas la situation.

8 Je crois que c'est l'affaire Blagojevic. Il faudrait que vous régliez cela

9 entre greffiers.

10 S'il n'y a plus de questions, je vous invite tous à revenir pour l'audience

11 qui débutera demain à 9 heures.

12 --- L'audience est levée à 19 heures 05 et reprendra le mardi 11 mai 2004,

13 à 9 heures 00.

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25