International Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 19 mai 2004

2 [Audience publique]

3 --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, je vous demande de bien

6 vouloir appeler le numéro de l'affaire.

7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur

8 les Juges, il s'agit de l'affaire numéro IT-01-47-T, l'Accusation contre

9 Enver Hadzihasanovic et Amir Kubura.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

11 Je me tourne vers la nouvelle composition de l'Accusation pour lui demander

12 de bien vouloir se présenter.

13 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Madame, Monsieur

14 les Juges, et toutes les personnes présentes dans le prétoire. Mme Tecla

15 Henry-Benjamin, Daryl Mundis, et notre commis aux audiences, Hasan Younis.

16 Je dois vous préciser, Monsieur le Président, que ce matin nous

17 remplacerons M. Younis par M. Andres Vatter, plus tard dans la matinée.

18 Merci.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

20 Je me tourne vers les avocats qui sont eux tous présents.

21 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

22 Monsieur les Juges. Au nom du général Hadzihasanovic, Me Edina Residovic,

23 Me Stéphane Bourgon, assisté de Mirna Milanovic.

24 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

25 Monsieur les Juges. Au nom de M. Kubura, Rodney Dixon, Fahrudin

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1 Ibrisimovic, et Nermin Mulalic, notre assistant juridique.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre salue toutes les personnes présentes :

3 les représentants de l'Accusation, les avocats, les accusés, ainsi que tout

4 le personnel de cette salle d'audience.

5 Nous devons aujourd'hui poursuivre l'audition d'un témoin, mais avant de

6 poursuivre, la Chambre tient à indiquer aux parties concernant le problème

7 des témoins, la question suivante.

8 La Chambre a pris note de la communication du Procureur du lundi 17 mai

9 2004, laquelle le Procureur avait annoncée de ne plus vouloir présenter 19

10 témoins figurant sur sa liste de témoins. Ce sont, à partir de la liste des

11 témoins, les numéros 1, 2, 5, 30, 35, 38, 51, 58, 63, 77, 78, 85, 93, 98,

12 123, 125, 135, 136, 139.

13 La Chambre, qui a délibéré hier sur cette question, se pose la question de

14 savoir s'il y a lieu pour elle, en application de l'Article 98 du

15 règlement, et dans l'intérêt de la justice, de citer d'office un nombre de

16 ces témoins à comparaître devant la Chambre immédiatement après la fin de

17 la présentation de ses preuves par le Procureur. A titre d'exemple, il se

18 pourrait que la Chambre envisage de citer les Témoins 1, 2, 38, 77, 85,

19 123, 135, 136 et 139.

20 Avant de décider, la Chambre invite les parties à donner leur propre

21 opinion sur l'opportunité que la Chambre envisage cette démarche. Cela peut

22 se faire soit aujourd'hui soit demain. Si l'Accusation est dans la

23 possibilité de nous donner son point de vue, elle peut le faire aujourd'hui

24 ou, si elle veut réfléchir, elle nous le dira demain. Je donnerai, bien

25 entendu, la parole aux Défenseurs.

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1 A la suite des observations des parties, la Chambre prendra sa décision

2 finale dans les plus brefs délais.

3 Je me tourne vers M. Mundis. Vous avez entendu ce qui vient d'être dit.

4 Voulez-vous donner votre point de vue dès aujourd'hui ou voulez-vous vous

5 réserver une période de réflexion avant de nous donner votre sentiment ?

6 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

7 L'Accusation préférerait donner son opinion à ce propos demain.

8 Nous le ferons verbalement si cela vous agrée, de façon à ne pas perdre le

9 temps pour la Chambre de première instance.

10 Il y a deux points que je souhaite clarifier avec lesquels vous pourriez,

11 peut-être, nous aider, Madame, Messieurs les Juges de la Chambre. Le

12 premier point, c'est de savoir si les neuf témoins que vous venez de citer,

13 Monsieur le Président, s'il s'agit des seuls neuf témoins, de façon à ce

14 que je puisse faire mes commentaires à ce propos. Ou est-ce que vous

15 envisagez de citer d'autres témoins, si vous pourriez m'aider en la

16 matière ?

17 Le deuxième point concerne l'Article 98, qui autorise la Chambre à citer

18 des témoins et, bien évidemment, conformément à l'Article 85, régit le

19 cadre de la présentation des éléments de preuve et permet à la Chambre de

20 première instance de modifier l'ordre de comparution. Dans ce cas-là, et

21 dans l'intérêt de la justice, comme vous venez de le préciser, Monsieur le

22 Président, je pense que cela pourrait être dans l'intérêt des deux parties,

23 néanmoins de savoir quelles sont les intentions de la Chambre et, ce, dans

24 l'intérêt de la justice en vertu des Articles 85 et 98 bis, si vous pouviez

25 nous dire si, oui ou non, la Chambre de première instance a l'intention de

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1 changer l'ordre de comparution des témoins. Ceci modifierait quelque peu

2 les dispositions de l'Article 98 bis. Je soulève ce point, Monsieur le

3 Président, parce que l'Article 98 bis indique très clairement que, lorsque

4 l'Accusation a terminé la présentation de ses moyens, la Défense déposera

5 une requête conformément à l'Article 98. Je suppose que ceci sera le cas

6 sept jours après la fin des présentations des moyens par l'Accusation. Je

7 demande simplement si la Chambre pourrait nous éclairer et nous dire

8 comment vous allez citer ces témoins et, s'il s'agit d'appliquer l'Article

9 85, ceci aura une incidence sur nos écritures, conformément à l'Article 98

10 bis.

11 Par exemple, nous terminons la présentation de nos moyens le 10 juin, par

12 exemple, nous aurions l'obligation, en vertu de l'Article 98 bis, de

13 déposer nos écritures. Ces écritures ayant été déposées, nous serions en

14 mesure de savoir si la Chambre va appeler les Juges, conformément à

15 l'Article 98, et si l'ordre de comparution des présentations en vertu

16 l'Article 85 sera modifié. Je souhaite simplement avoir un point de

17 clarification. En tout cas, si la Chambre peut nous donner quelques

18 indications à cet égard, je pense que cela serait utile aux deux parties.

19 Je regarde le compte rendu d'audience, Monsieur le Président, page 4, ligne

20 16. Je me suis trompé, bien évidemment, puisqu'il s'agissait de citer non

21 pas les Juges, mais les témoins, à la barre.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Mundis. Sur les deux points de

23 clarification que vous souhaitez que la Chambre aborde, je viens tout de

24 suite au point le plus important, qui est la combinaison des Articles 85 et

25 98.

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1 Comme vous le savez l'Article 85 dispose que chacune des parties peut

2 appeler des témoins à la barre et présenter ses moyens de preuve. L'ordre

3 est le suivant : "preuves du Procureur"; "preuves de la Défense"; "réplique

4 du Procureur"; "duplique de la Défense." Ensuite, "moyens de preuve

5 ordonnés par la Chambre, conformément à l'Article 98". Cela, c'est la règle

6 générale.

7 Mais le (A) de l'Article 85 dit ceci : "A moins que la Chambre n'en décide

8 autrement dans l'intérêt de la justice." A ce stade, et sans prendre en

9 compte la question de l'Article 98 bis, la Chambre envisage que les neuf

10 témoins soient appelés à la fin de votre présentation des preuves, c'est-à-

11 dire, la première phase, avant les éléments de preuve éventuellement

12 présentés par la Défense.

13 Si nous prenons cette décision, ce sera parce que l'intérêt de la justice

14 le commande. Voilà la clarification concernant cette question.

15 Le problème d'une éventuelle hypothèse d'une demande d'acquittement, prévue

16 par l'Article 98 bis, est un autre cadre et il ne convient de pas mélanger

17 les cadres, bien que l'un peut découler de l'autre sans qu'il y ait une

18 nécessité de les relier directement. On est au stade où 19 témoins avaient

19 été prévus. L'Accusation veut en retirer 19. La Chambre pense que, sur ces

20 19, il y en a au moins neuf qui, dans l'intérêt de la justice, pourraient

21 être, ultimement, entendus. Avant de prendre cette décision, la Chambre

22 souhaite, évidemment, connaître la position des uns et des autres sur cette

23 question. C'est pour cette raison que, demain, vous nous direz ce que vous

24 pensez. Je donnerai la parole à la Défense concernant le premier pas, ce

25 point très particulier de faire venir neuf témoins.

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1 Il est évident que, si ces neuf témoins viennent, cela rallongera d'autant

2 les audiences, qui, normalement, d'après le planning prévisionnel, devaient

3 se terminer au milieu du mois de juin. Rappelez-vous, la Chambre, à

4 plusieurs reprises, avait indiqué que cette date était une date

5 prévisionnelle, une date qui avait été fournie à titre indicatif. Car tout

6 le monde le sait, dans un procès il y a toujours des aléas qui peuvent être

7 de nature diverse, ce qui fait que les dates prévisionnelles sont bien

8 souvent pas respectées, voire la plupart du temps, des délais

9 supplémentaires apparaissent. Ce qui est peut être le cas présent s'il y a

10 neuf témoins supplémentaires.

11 A ces neuf témoins supplémentaires, il faudra, bien entendu, rajouter un

12 témoin dont une décision a été prise hier. Cette décision écrite a été

13 adressée au Greffe; vous allez la voir. Il y a également la question des

14 archivistes que nous voulons évidemment voir également. Les deux ou trois

15 archivistes peuvent venir le même jour. Ce sera assez rapide, puisque

16 l'objectif est que les intéressés nous donnent quelques précisions. Cela ne

17 va pas durer des heures. Cela peut être assez court.

18 Se pose également la question d'éventuels témoins non prévus jusqu'à

19 présent qui va résulter de la question des bandes vidéo. A cet égard, il

20 est prévu vendredi la venue d'un témoin.

21 Je demande, à ce moment-là, à l'Accusation : est-ce que l'Accusation

22 envisage, lors de la venue de ce témoin, la diffusion de la bande vidéo,

23 puisqu'il y a un support, car il y a déjà des témoins qui sont venus.

24 L'Accusation avait la possibilité d'introduire les bandes vidéo par ce

25 témoin. Cela n'a pas été fait.

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1 Maintenant, on se trouve dans la situation où nous avons cette question qui

2 est pendante. La Chambre a indiqué qu'il serait souhaitable que nous ayons

3 les diffusions de ces bandes vidéo. Si le besoin s'en faisait sentir, à ce

4 moment-là, on appellerait les témoins desdites bandes, si la question se

5 pose. Là, également, il y a des incertitudes sur les témoins

6 supplémentaires.

7 Monsieur Mundis, si vous voulez reprendre la parole sur ce point.

8 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

9 Je souhaite simplement préciser la question des archivistes car c'est

10 quelque chose qui a été abordé par les Juges de la Chambre. Si je puis

11 suggérer la solution suivante, eu égard aux archivistes : Encore une fois,

12 l'Accusation, en vue de faire avancer la procédure plus rapidement, a

13 l'intention de présenter les éléments des archivistes en appliquant

14 l'Article 92 bis. Ensuite, de faire en sorte qu'ils puissent être entendus

15 s'il y a des questions supplémentaires posées par la Défense ou par la

16 Chambre. La suggestion que nous faisons à ce stade-ci, Monsieur le

17 Président, eu égard à la question des archivistes, est de prendre leur

18 déclaration conformément à l'Article 92 bis; s'il y a des questions

19 supplémentaires, à ce moment-là, nous pourrions, mais si vous souhaitez que

20 nous les citions, nous pourrions certainement faire cet effort-là. En vue

21 de gagner du temps, nous voulions qu'ils rentrent dans le cadre de

22 l'Article 92 bis, par conséquent, que nous vous le présentions que lors de

23 la déclaration. Bien sûr, Monsieur le Président, nous sommes obligés de

24 prendre les déclarations écrites de ces témoins; il s'agit d'une question

25 d'équité. Nous ne pouvons pas les citer, bien évidemment, si nous ne leur

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1 demandons pas de faire une déclaration écrite que nous devons remettre à la

2 Défense. Etant donné qu'il nous faut recueillir des déclarations écrites,

3 cela serait peu logique à notre sens de faire avancer les choses plus

4 rapidement et de le faire conformément à l'Article 92 bis. Ces témoins

5 seront disponibles. Ils pourront être entendus si la Défense et les Juges

6 de la Chambre souhaitent leur poser des questions supplémentaires.

7 Si ce n'est pas l'intention de la Chambre de première instance de nous

8 suivre sur cette voie, nous allons, à ce moment-là, repenser tout ceci.

9 Eu égard au témoin de vendredi, il n'est pas encore arrivé à La Haye. J'en

10 ai parlé avec M. Withopf. Le témoin qui est prévu pour vendredi n'a jamais

11 vu les cassettes vidéo. Il sera peut-être difficile de lui montrer cette

12 vidéo dans la salle d'audience, puisqu'il s'agit d'authentifier cette

13 cassette vidéo.

14 Le témoin a rencontré au cours de sa carrière professionnelle des

15 Moudjahiddines en Bosnie centrale, et y a fait allusion à un entretien

16 qu'il a eu avec un de ces Moudjahiddines au moins. Ceci a été filmé dans

17 une de cette vidéo. Il ne s'agit pas de la même cassette vidéo que celle à

18 laquelle fait référence le témoin dans sa déclaration, en tout cas,

19 conformément aux informations qui sont à ma disposition jusqu'à ce jour. Je

20 vais certainement aborder cette question avec lui dès son arrivée à La

21 Haye. Je peux me tromper, mais à ce stade, rien ne semble indiquer que ce

22 témoin ait vu ces cassettes en question.

23 Nous sommes en train de recueillir des éléments d'information sur les

24 cassettes vidéo qui se trouvent sur la liste des pièces consolidées, de

25 façon à ce qu'elles puissent être diffusées en public. Nous essayons de

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1 comprendre quelle est la longueur exacte de ces cassettes vidéo. Certaines

2 constituent des compilations, certaines sont assez longues. Je serai mieux

3 en mesure d'en parler à la Chambre de première instance et du temps requis

4 pour visionner ces cassettes vidéo à l'avenir. C'est une des nombreuses

5 questions sur lesquelles travaille l'Accusation à ce moment-là. Nous

6 n'avons pas encore vu de décisions écrites, mais nous appliquons ici la

7 décision orale qui a été rendue, puisque vous nous avez fait part de ces

8 questions, Monsieur le Président, en début de semaine.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Concernant la question de l'application de l'Article

10 92 bis pour les archivistes, la Chambre examinera ce problème dans le

11 courant de l'après-midi, et nous vous dirons demain ce que nous pensons de

12 votre proposition. Il est vrai que l'Article 92 bis peut présenter une

13 utilité, mais il est vrai également que la Défense peut demander que,

14 nonobstant 92 bis, le témoin soit soumis également à des questions. A ce

15 moment-là, la procédure peut être inefficace, puisqu'en tout état de cause,

16 les témoins viennent.

17 Le fait même de faire venir les témoins, cela peut présenter une économie

18 judiciaire dans la mesure où il n'y a pas besoin d'une procédure préalable

19 d'un témoignage écrit. On va en délibérer. Nous verrons ce problème, et

20 nous vous dirons ce que nous décidons en définitive.

21 Par ailleurs, vous nous avez indiqué que concernant les neuf témoins, vous

22 allez nous donner votre position demain. Il conviendra que la Défense nous

23 donne demain son point de vue, mais après de vous avoir écouté. Ce n'est

24 pas la peine de les faire intervenir, alors même qu'à part les chiffres

25 qu'ils ont, ils n'ont pas d'autres éléments. On reverra ce problème lors du

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1 début de l'audience de demain.

2 Nous devons passer maintenant à l'audition du témoin. Y a-t-il des mesures

3 qui sont demandées ?

4 Madame Benjamin.

5 Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

6 M. LE JUGE ANTONETTI : Aucune mesure de protection n'a été demandée.

7 On va introduire le témoin.

8 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. Je vais d'abord vérifier que vous

10 entendez bien par le service de la traduction, nos propos qui sont traduits

11 dans votre langue.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, absolument.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez été cité en qualité de témoin par

14 l'Accusation. Afin de vous faire prêter serment, je me dois de vous

15 identifier. Pour ce faire, pouvez-vous me décliner votre nom et prénom et

16 date de naissance ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Ulf Henricsson. Je suis né le 1er

18 février 1942.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous êtes dans quelle ville ou village et quelle est

20 votre nationalité ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis suédois, et je suis né à Stockholm.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est actuellement votre profession ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis un officier dans l'armée et je suis

24 actuellement chef du département responsable du commandement à l'Ecole

25 nationale de Défense suédoise.

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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Quel est votre grade dans l'armée ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis général de division.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : En 1993, quel était votre grade et vos fonctions en

4 Bosnie-Herzégovine ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais colonel et je commandais le 1er

6 Bataillon nordique numéro 2, de la mi-septembre jusqu'au début du mois

7 d'avril 1994.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous déjà témoigné devant un tribunal

9 international ou national sur les faits qui se sont déroulés en Bosnie-

10 Herzégovine au cours de l'année 1993 et 1994 ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, absolument.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans quel tribunal ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était ici à La Haye, devant ce Tribunal.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans quel procès, si vous vous en souvenez ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Ceci était lié à cet événement, ce qui

16 s'est produit dans la ville de Vares, une semaine avant cet événement que

17 nous allons aborder aujourd'hui. Je ne me souviens pas exactement. Je crois

18 que c'était en 1996, et c'était l'affaire contre Ivica Rajic.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous étiez un témoin de l'Accusation ou un témoin de

20 la Défense ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] De l'Accusation.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais vous demander de bien vouloir lire la

23 prestation de serment que M. l'Huissier va vous présenter.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : S'il vous plaît, allez-y.

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

2 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, mon Général. Vous pouvez vous asseoir.

4 LE TÉMOIN: ULF HENRICSSON [Assermenté]

5 [Le témoin répond par l'interprète]

6 M. LE JUGE ANTONETTI : Comme vous avez déjà témoigné, vous avez l'habitude

7 de la procédure, mais je vais vous la rappeler en mémoire. Vous êtes un

8 témoin de l'Accusation, vous allez devoir répondre à des questions qui vont

9 vous être posées par le représentant de l'Accusation. Je présume que c'est

10 Mme Benjamin, qui est située à votre droite, qui se trouve derrière le

11 pupitre transparent qui vous posera des questions dans le cadre de

12 l'interrogatoire principal.

13 Une fois que les questions auront été posées, les avocats des accusés qui

14 eux, se trouvent à votre gauche, vous poseront des questions dans le cadre

15 du contre-interrogatoire.

16 Les questions de la Défense, vous le verrez, sont de nature un peu

17 différentes de celles qui vous seront posées dans le contre-interrogatoire.

18 Au terme du règlement de procédure de ce Tribunal, elle vise à vérifier

19 votre crédibilité et également apporter des éléments sur le contexte dans

20 lequel se sont déroulés ces faits.

21 A l'issue de cette première phase de l'interrogatoire principal et contre-

22 interrogatoire, l'Accusation a le droit de vous poser des questions

23 supplémentaires. Les trois Juges qui sont devant vous peuvent aussi vous

24 posez des questions. Le règlement prévoie qu'ils peuvent poser des

25 questions à tout moment, mais règle générale les Juges préfèrent que les

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1 questions soient d'abord posées par les parties avant qu'eux interviennent.

2 Lorsque les Juges posent les questions, la Défense et l'Accusation peuvent

3 également à nouveau reposer au témoin des questions aux fins de

4 clarification de ces réponses apportées aux Juges.

5 Voilà, de manière très générale, comment se déroulent les questions qui

6 vont vous être posées, dans quelles perspectives tout cela doit être placé.

7 Par ailleurs, je dois vous indiquer deux autres éléments. Vous avez prêté

8 serment de dire toute la vérité, ce qui exclut le faux témoignage. Le

9 deuxième élément qui ne devrait pas s'appliquer à vous, résulte du fait que

10 lorsqu'un témoin répond à des questions, si sa réponse peut constituer des

11 éléments à charge, le témoin peut refuser de répondre. Dans cette hypothèse

12 qui est quand même assez exceptionnelle, les Juges peuvent à ce moment-là,

13 obliger le témoin à répondre et le témoin se voit garantir une forme

14 d'immunité accordée par la Chambre.

15 Voilà de manière très synthétique les indications que je tenais à vous

16 apporter pour le bon déroulement de cette procédure et de votre audition.

17 Essayez de répondre dans la mesure du possible de manière précise et

18 synthétique. Il est vrai que l'on peut vous poser des questions sur des

19 faits qui se sont déroulés il y a 10 ans, et vous ne pouvez peut-être pas

20 vous souvenir parfaitement. Si c'est le cas, indiquez-le à la Chambre. Par

21 ailleurs, s'il y a une difficulté quelconque n'hésitez pas à l'évoquer car

22 les Juges sont également là pour retrancher toute difficulté qui peut

23 apparaître.

24 Il est 9 heures 35. Nous avons jusqu'à 10 heures 30 avant la pause. On a

25 une petite heure pour l'interrogatoire principal.

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1 Sans perdre de temps, je vais donner la parole à Mme Benjamin qui va

2 commencer le contre-interrogatoire.

3 Madame Benjamin, vous avez la parole.

4 Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,

5 Madame, Monsieur les Juges, bonjour.

6 Interrogatoire principal par Mme Henry-Benjamin :

7 Q. [interprétation] Bonjour, Général.

8 Général, vous avez indiqué à la Chambre de première instance quel était

9 votre grade actuel et quel était le grade que vous aviez lorsque vous étiez

10 en Bosnie. Pourriez-vous brièvement relater à la Chambre de première

11 instance votre carrière militaire ?

12 R. Oui. Je suis devenu officier en 1969 et là, pendant les années 70, j'ai

13 suivi une carrière normale et j'ai été dans les écoles militaires

14 appropriées. Ensuite, j'ai été officier d'état-major pendant six années,

15 j'ai été commandant de bataillon et j'ai travaillé dans le cadre du

16 programme des blindés de l'armée suédoise pendant quelques années en 1991.

17 Je suis devenu commandant de brigade et je suis, d'ailleurs, resté

18 commandant de brigade jusqu'en 1994. Pendant cette période de temps, j'ai

19 été justement commandant en Bosnie et ce dans le Bataillon nordique. J'ai

20 été commandant de division dans la partie est de la Suède en 1999, ensuite,

21 pendant deux ans, j'ai été responsable du Département militaire à Sarajevo

22 et, depuis 2002, je suis responsable du Département de la direction au

23 niveau du collège de Défense nationale suédois.

24 Q. Merci. Pourriez-vous nous dire, en tant que commandant et chef du

25 NordBat 2 en Bosnie, quelles étaient vos fonctions et vos devoirs ?

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1 R. Parmi les fonctions et mes devoirs pour ce Groupe tactique, nous

2 devions, en fait, apporter notre soutien à l'aide humanitaire. Nous devons

3 également faire en sorte qu'il y ait une liberté de mouvement et nous

4 devions également essayer de négocier le cessez-le-feu dans cette zone.

5 Nous devions également faire en sorte que l'environnement soit sécurisé et,

6 dans la zone -- ou plutôt ma zone de responsabilité, allait depuis le nord

7 partant du fleuve de la Sava jusqu'au sud à Vares, à quelques 100

8 kilomètres. Ensuite, à l'est, il y avait la Drina qui faisait -- qui

9 marquait la délimitation de ma zone de responsabilité. Il y avait, en fait,

10 une ligne nord-sud qui passait par Doboj. Il s'agissait d'un secteur de

11 quelques 5 000 kilomètres carrés et j'avais 1 300 soldats pour accomplir ce

12 travail, ce qui correspondait plus ou moins à une mission impossible.

13 Q. Merci. Pendant votre période d'affectation en Bosnie, en fait,

14 pourriez-vous nous dire quelle a été la durée de cette période

15 d'affectation en Bosnie ?

16 R. Je suis arrivé en Bosnie, où j'y ai été quasiment de façon permanente.

17 D'ailleurs, à partir de ce moment-là, je suis arrivé à la mi-septembre 1993

18 et je pense y être resté jusqu'au 7 avril 1994.

19 Q. A votre arrivée en Bosnie, pourriez-vous indiquer à l'intention des

20 Juges quel fut votre rôle immédiat ? Qu'avez-vous fait et comment avez-vous

21 commencé votre période d'affectation en Bosnie ?

22 R. Pourriez-vous m'expliquer ce que vous entendez par cette question ?

23 Q. Lorsque vous êtes arrivé en Bosnie à la mi-septembre, pourriez-vous

24 nous dire comment vous avez commencé votre période d'affectation ? Qu'avez-

25 vous fait ?

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1 R. Bien entendu, je me suis disposé à m'acquitter de ma tâche et remplir

2 mes fonctions. En septembre, pendant deux semaines, nous nous sommes

3 déplacés dans cette région pour apprendre à la connaître, pour également

4 rencontrer des commandants à différents niveaux et pour apprendre à

5 connaître mon commandement supérieur ou plutôt mon commandant qui se

6 trouvait à Kiseljak et nous avons également préparer le déploiement du

7 Groupe tactique qui devait commencer à se déployer le 1er octobre qui venait

8 de Scandinavie et qui est resté jusqu'en février 1994.

9 Q. Merci. Comment pourriez-vous décrire Vares lorsque vous êtes arrivé ?

10 Vares faisait partie de votre zone de responsabilité, comment pourriez-vous

11 décrire cette zone de Vares ?

12 R. Je vais commencer par décrire la ville de Vares. Il s'agit d'une

13 vieille ville minière qui est vraiment un tapis dans une vallée, une vallée

14 qui a la direction nord-sud et, en fait, les activités minières ont cessé

15 avant la guerre dans cette ville et c'est une ville où il y avait une

16 majorité croate. Je pense qu'il y avait environ quelques 15 000 habitants,

17 je pense que les Croates représentaient, grosso modo, deux tiers de la

18 population.

19 Autour de Vares, le terrain était un terrain de collines, un terrain

20 montagneux, et il est extrêmement important -- ou plutôt cette ville est

21 extrêmement importante pour des raisons militaires et des raisons civiles

22 parce que Vares était la seule voie de ravitaillement dans la zone de

23 Tuzla, ou jusqu'à Tuzla. Qui plus est, c'était assez proche de la ligne de

24 front des Serbes donc, du point de vue stratégique, Vares était essentiel.

25 Q. Pour ce qui est des unités, et je parle de l'armée de Bosnie, combien

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1 d'unités de cette armée avez-vous rencontrées à Vares ?

2 R. Vares se trouvait dans la zone de responsabilité du 2e Corps de la

3 Fédération de Bosnie-Herzégovine et la zone de Vares était placée sous la

4 responsabilité de la Brigade Bobovac qui était une brigade assez unique.

5 C'était une Brigade croate placée sous le commandement d'un Corps bosnien.

6 Nous savions qu'il existait des tensions, que Vares était considéré comme

7 un point chaud lorsque nous sommes arrivés, et c'est la raison pour

8 laquelle j'ai déployé la première compagnie, qui est arrivée à Vares

9 justement. Je dois vous dire que nous avions une bonne coopération avec la

10 Brigade Bobovac, ainsi qu'avec le maire de la ville. Vers le 20 octobre

11 environ, la Brigade Bobovac ainsi que la ville ont été -- on commencé à

12 être contrôler par des extrémistes croates qui avaient dit et, d'ailleurs,

13 cella a été prouvé également à Kiseljak et à Kakanj. Il s'agissait d'un

14 homme qui répondait au nom d'Ivica Rajic, il s'agissait d'un ancien

15 commandant de la JNA qui assumait le commandement, ce qui fait que la

16 situation a changé du tout au tout. La coopération, que nous avions

17 établie, a disparu, s'est évanouie. Je dois dire que la situation est

18 devenue beaucoup plus ardue et, en fait, les Bosniens ont eu des problèmes,

19 ils ont été emprisonnés et cela s'est terminé par le massacre de Stupni Do,

20 qui est, en fait, l'autre affaire à laquelle j'ai fait allusion

21 préalablement.

22 Q. Pourrais-je dire, Général, que la situation à Vares n'était pas

23 normale ?

24 R. Je dirais, en fait, qu'il s'agissait d'une situation relativement

25 normale pour la Bosnie à l'époque.

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1 Q. Merci. Vous avez été mis au courant du premier assaut vers la fin du

2 mois d'octobre ?

3 R. Vous voulez dire le premier assaut de la part des Croates, oui, il

4 s'agissait du 23 octobre, il me semble.

5 Q. Est-ce que vous pourriez expliquer à la Chambre de première instance ce

6 qui s'est passé ? Quel fut votre rôle ?

7 R. Voilà ce qui s'est passé. Dans cette zone, la première attaque a eu

8 lieu le 21 octobre et c'est là que le village de Kopjari, dans la partie

9 sud où se trouvait la Brigade de Bobovac, a été pris d'assaut. Les

10 habitants croates ont été expulsés. Il y a eu des assassinats, la ville a

11 été incendiée et cela s'est passé le 21.

12 Q. A ce moment-là, avez-vous pensé qu'il était nécessaire de demander du

13 renfort ? Pensiez-vous que la situation a été devenue de plus en plus

14 complexe ?

15 R. Je ne l'ai pas demandé, je ne l'ai pas fait parce qu'il n'y avait pas

16 de renfort à obtenir à ce moment-là.

17 Q. Mais la situation est devenue plus en plus tendue. Est-ce bien exact ?

18 R. Oui.

19 Q. La deuxième attaque est survenue. Vous avez été informé à ce sujet.

20 Pourriez-vous indiquer à la Chambre de première instance comment cela a pu

21 changer toute la situation à Vares ?

22 R. Oui. Cela s'est passé le 23 octobre. Les Croates extrémistes ont lancé

23 une attaque sur le village de Stupni Do qui était un village bosnien à

24 quelques kilomètres de Vares. J'ai négocié avec eux, avec le commandant de

25 ma compagnie. Nous avons demandé à avoir accès au village pour pouvoir

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1 constater ce qui s'y était passé. A l'époque, nous avions également des

2 communications avec l'armée de Bosnie, avec le Groupe opérationnel qui se

3 trouvait à Dabravine.

4 Q. Commandant, permettez-moi de vous interrompre, mais j'aimerais, en

5 fait, savoir quelles furent les conséquences de cet événement sur Vares

6 pendant votre période d'affectation ?

7 R. Cela a eu des conséquences pour Vares parce que, bien entendu, les

8 Bosniens étaient terrorisés, ils ont fui la ville, et nous nous sommes

9 retrouvés avec des centaines de Bosniens dans nos camps. Dans notre camp,

10 il y avait également beaucoup d'hommes bosniens qui ont été emprisonnés

11 dans deux écoles à Vares. Les Bosniens, en fait, ont commencé à attaquer

12 pour pouvoir avoir toute la ville de Vares, et c'est, à ce moment-là, que

13 j'ai commencé à négocier avec le Groupe opérationnel de Dabravine parce

14 qu'ils me disaient ce que les Croates avaient fait, et ils disaient qu'ils

15 allaient les tuer, et qu'ils allaient détruire la ville de Vares. J'ai

16 réussi à les convaincre, je leur aurais dit qu'il fallait, qu'il voudrait

17 mieux essayer de voir, de vérifier ce qui s'était passé. Je leur aurais

18 demandé de me laisser avoir accès au village de Stupni Do afin de pouvoir

19 vérifier quelle était la situation, et afin de pouvoir établir un lien,

20 entre le Groupe opérationnel et les Croates, pour éviter d'autres bains de

21 sang. Nous avons réussi à le faire pendant quelques jours, et peut-être que

22 cela, en fait, a été une accalmie qui a permis aux Bosniens de se préparer

23 aux opérations. Je n'en sais rien.

24 Q. Est-ce qu'il y a des unités différentes qui sont arrivées à Vares ?

25 Est-ce que vous avez vu d'autres unités arrivées à Vares ?

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1 R. Je n'ai pas vu d'autres unités à Vares avant le 4 novembre. Bien

2 entendu, pendant cette période, qui était chaotique, nous avons vu non pas

3 des unités, mais des militaires, par exemple, des Serbes

4 -- des officiers serbes qui se rendaient au QG de Bobovac, et cetera, mais,

5 pour ce qui est des unités, je n'en ai pas vu avant le 4 novembre, ce qui

6 était la première fois.

7 Q. Pourriez-vous nous dire de qui il s'agissait ?

8 R. Je vais vous dire pourquoi je les ai rencontrés parce que j'avais

9 obtenu du renfort de la part d'un Bataillon français. Je devais rencontrer

10 le commandant de la compagnie dans la partie sud de Vares. Il y avait des

11 unités bosniennes, elles n'avaient pas l'air très sûr d'elles. Je me suis

12 arrêté, je leur aurais parlé, je leur aurais demandé : "Qui était le

13 commandant ?" Il y a un homme qui m'a répondu sans aucune hésitation, il

14 m'a dit : "C'est moi qui suis le commandant." Je lui ai demandé d'où il

15 venait, il m'a dit : "Nous faisons partie de la 7e Brigade musulmane." Nous

16 avons eu, ensuite, une conversation assez brève. Je lui ai relaté ce qui

17 s'était passé auparavant à Vares. Je lui ai dit qu'il fallait qu'il prenne

18 en considération ses responsabilités et qu'il donne le bon exemple, et

19 qu'il évite de faire ce qu'avait fait les Croates et qu'il fallait qu'il

20 respecte le droit humanitaire international. Sur quoi, il a répondu par

21 l'affirmatif, et, ensuite, j'ai poursuivi ma route vers le sud pour

22 rencontrer la Compagnie française.

23 Q. Savez-vous si vos instructions ont été respectées ?

24 R. Comme je l'ai dit, je ne faisais que passer par la ville. Lorsque je

25 suis revenu plus heures plus tard, je me suis rendu compte qu'il ne s'était

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1 absolument pas soucié de ce que je lui avais dit ou, en tout cas, qu'il

2 n'avait pas pu assumer le contrôle parce qu'il y avait eu des activités de

3 pillage à Vares.

4 Q. Diriez-vous que la situation s'était dégradée et détériorée à votre

5 retour ?

6 R. Oui. Le chaos régnait. Il n'y avait aucun contrôle. Il y avait des gens

7 qui tiraient dans l'air. Il y avait des cris et des activités de pillage

8 dans la ville.

9 Q. Pourriez-vous nous donner une description de la ville, par exemple, les

10 bâtiments, quel était leur état ?

11 R. A ce moment-là, il faut savoir que la ville est divisée en partie par

12 la vieille ville. Il y a des bâtiments beaucoup plus élevés, qui ont été

13 construits dans les années 1960 ou dans les années 1970, et certains de

14 bâtiments avaient été incendiés par les Croates quelques jours plus tard.

15 Il y avait eu également des activités de pillage. Mais là, cette fois-là,

16 c'était une situation très chaotique. Il y avait de nombreuses fenêtres qui

17 avaient été brisées, les soldats volaient ce qu'ils trouvaient. Ils

18 essayaient de voler, par exemple, des véhicules, ils se sont rendus dans

19 les magasins, par exemple, et cela dans toute la ville.

20 Q. Lorsque vous dites "les soldats", pourriez-vous indiquer à la Chambre

21 de première instance à quelle unité vous faites allusion ?

22 R. A l'époque, je le pensais et je continuais à le penser, il s'agissait

23 de la 7e Brigade musulmane. Je n'ai pas vu d'autres unités. Lorsque j'ai

24 parlé au Groupe opérationnel à Dabravine, parce que j'y suis retourné,

25 lorsque j'ai vu ce qui se passait à Vares, parce qu'en fait, ce qui s'est

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1 passé était de la responsabilité de mon commandant de compagnie, je suis

2 reparti au Groupe opérationnel pour leur dire qu'il fallait qu'ils assument

3 le contrôle de la situation. Ils m'ont dit oui, ils ont envoyé des Unités

4 de Police militaire. Ils sont venus, ils n'étaient pas très, très nombreux,

5 mais ils ont essayé au moins de faire quelque chose. Cela s'est terminé par

6 certains soldats bosniens, qui ont été, en fait, tués par leur propre

7 police militaire.

8 Q. Général, entre le mois de septembre 1993 et peut-être jusqu'à la fin du

9 mois de novembre 1994, comment -- quelle fut votre impression de ce qui

10 s'est passé dans ces zones de Vares ? Comment pourriez-vous décrire cela ?

11 R. Bien entendu, il y avait des combats pour essayer de contrôler la route

12 stratégique vers le nord de la Bosnie. Il ne s'agissait pas seulement de

13 stratégie militaire, mais il s'agissait également de stratégie économique

14 parce qu'il y avait de nombreux poste de contrôle, et les gens devaient

15 payer pour pouvoir passer par ces postes de contrôle. C'était une zone

16 importante, une zone de contrebande, de marché noir à l'époque. C'était

17 très important du point de vue militaire, mais cela était extrêmement

18 important pour la criminalité organisée.

19 Q. J'aimerais corriger le compte rendu d'audience. A la ligne 12, page 21,

20 il est dit : "Fin du mois de novembre 1994", et je souhaiterais rectifier,

21 en disant qu'il s'agit de la fin de novembre 1993.

22 R. 1993.

23 Q. Merci.

24 Hormis la situation économique du point de vue d'un civil, est-ce que vous

25 pourriez dire que la zone était une zone particulièrement tendue à

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1 l'époque ?

2 R. Comme je l'ai déjà dit, il s'agissait en fait d'une ville à majorité

3 croate. Il y a eu les extrémistes croates, qui dans un premier temps ont

4 menacé leurs propres populations s'ils ne quittaient pas Vares. A un moment

5 donné, les extrémistes sont partis. Ils disaient que si la population ne

6 partait pas d'ici au 2 ou 3 novembre, ils seraient tous tués par les

7 Bosniens. Il y a eu beaucoup de personnes - des centaines, peut-être des

8 milliers - qui sont parties. Ensuite, lorsque les Bosniens ont pris le

9 contrôle de Vares, la majorité a changé. Il y a beaucoup de Musulmans ou de

10 Bosniens qui sont arrivés dans la ville. Après ou vers la mi-novembre,

11 c'est une ville qui est devenue une ville à majorité bosnienne. Le maire

12 était devenu un maire bosnien. La défense a été assurée par les Bosniens

13 également.

14 Q. A ce moment-là, vous nous dites que Vares a retrouvé le calme ?

15 R. Oui, si on compare cela à la situation préalable. En tout cas, il y a

16 eu une certaine stabilisation.

17 Q. Je pense que l'une de vos fonctions que vous avez décrite consistait à

18 faire en sorte d'établir la paix dans la mesure du possible entre les

19 partis. Est-ce bien exact ?

20 R. Oui.

21 Q. Je pense que dans le cadre de vos devoirs, vous avez essayé de

22 démilitariser la ville. Etes-vous parvenu à vos fins ?

23 R. Non. Nous n'y sommes pas parvenus. En fait, ce que nous voulions faire,

24 c'était assumer la sécurité et la défense de la ville, mais les partis

25 n'étaient pas trop intéressés. Nous avons fait cette proposition, et nous

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1 leur avons demandé, le 5 novembre, il me semble. Le 2e Corps et le maire de

2 Tuzla sont venus négocier avec nous. Ils voulaient qu'une zone tampon soit

3 établie entre le 2e et le 3e Corps. Bien entendu, nous n'étions pas

4 intéressés par cela, parce que notre tâche ne consistait pas à faire écran

5 ou tampon entre les deux. Cela ne s'est pas soldé par un succès. Les

6 parties n'étaient pas intéressées et, bien entendu, Vares a été pris par

7 les Bosniens. Je peux comprendre qu'ils préféraient cette solution.

8 Q. Merci beaucoup, Général.

9 Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Monsieur le Président, Madame,

10 Monsieur les Juges. J'en ai terminé avec mon interrogatoire principal.

11 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie, Madame Benjamin. Vous avez été

12 assez rapide puisque vous n'avez utilisé qu'une demi-heure.

13 Je me tourne vers les Défenseurs pour leur donner la parole.

14 [Le conseil de la Défense se concerte]

15 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

16 Contre-interrogatoire par Mme Residovic :

17 Q. [interprétation] Bonjour, Général Henricsson. Je m'appelle Edina

18 Residovic, et je représente le général Hadzihasanovic. Je voudrais vous

19 poser un certain nombre de questions.

20 Vous nous avez dit qu'en tant que commandant du Bataillon nordique, vous

21 vous êtes trouvé en Bosnie-Herzégovine depuis le

22 1 septembre 1993 jusqu'au 6 avril, dans la zone de responsabilité du 2e

23 Corps; est-ce exact ?

24 R. Oui.

25 Q. Lorsque vous vous êtes rendu en Bosnie-Herzégovine, la guerre avait

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1 commencé depuis une année et demie, à peu près, n'est-ce pas ?

2 R. Oui.

3 Q. Vous étiez conscient du fait que l'ABiH était la force armée légitime

4 de la Bosnie-Herzégovine ?

5 R. Oui.

6 Q. Pendant votre affectation, vous avez appris beaucoup de choses

7 concernant le 2e Corps, et votre connaissance du 2e Corps était bien

8 meilleure que votre connaissance des structures, des responsabilités, et

9 des missions des autres Corps de l'ABiH; est-ce exact ?

10 R. Oui.

11 Q. En fait, comme vous venez de le témoigner, dans la zone de

12 responsabilité du 2e Corps et à l'intérieur de l'ABiH, il y avait un

13 certain nombre de brigades du HVO qui avait accepté le commandement du 2e

14 Corps et de l'ABiH conformément aux lois du pays la Bosnie-Herzégovine.

15 Est-ce que vous en étiez conscient ?

16 R. Oui.

17 Q. Est-ce qu'il est vrai de dire, Général, que d'autres unités du HVO, en

18 particulier dans la zone de la Herzégovine et en Bosnie centrale, étaient

19 en lutte contre l'ABiH, et surtout le long de la vallée de la Neretva, la

20 ville de Mostar, Jablanica, Konjic, et la vallée de la Lasva.

21 R. Oui, j'en étais conscient.

22 Q. Vous avez déjà dit, Général, que la seule route qui reliait les zones

23 des 1e, 6e et 2e était la route qui traversait Vares et, comme vous l'avez

24 dit vous-même, c'est pour cela que du point de vue de la population civile,

25 et de même qu'en termes militaires, il s'agissait là d'une zone qui avait

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1 une importance stratégique cruciale, n'est-ce pas ?

2 R. Oui.

3 Q. Si cette voie de communication était rompue, ou si des forces aux

4 ennemis ont l'emparé, à savoir, le HVO où l'armée de la Republika Srpska,

5 il y aurait eu une rupture de communications totale entre le reste du pays

6 et la partie nord et nord-est de Bosnie; est-ce exact ?

7 R. Oui.

8 Q. A l'époque vous saviez déjà que le conseil de Défense de la Croatie, et

9 son commandement à Grude, Vitez et Kiseljak, coopéraient déjà avec le VRS

10 dans le combat contre l'ABiH. Cela était très manifeste lorsqu'il y a eu

11 l'attaque sur Travnik, Bugojno, et Zepce. Vous avez pu également voir qu'il

12 y avait des officiers de la VRS à Vares, où il y avait également la Brigade

13 Bobovac du HVO. Vous en étiez conscient ?

14 R. Je ne connaissais pas la coopération avec le conseil de la Défense. Je

15 l'ai appris plus tard, mais il est exact de dire qu'il y avait des

16 officiers de l'armée serbe qui se rendaient à l'état-major de la Brigade

17 Bobovac après la prise de Rajic Ivica. Oui.

18 Q. Général, du point de vue militaire, est-ce qu'il n'est pas tout à fait

19 normal pour que l'ABiH soit préoccupée par le fait que le Brigade Bobovac,

20 et surtout les nouvelles forces qui sont arrivées à Vares, refusaient de se

21 soumettre au commandement du 2e Corps, et étaient à nouveau resubordonnés

22 au commandement de Kiseljak ?

23 R. Oui.

24 Q. Vous croyez que c'était normal que plusieurs corps aient coopéré et

25 préparé un plan pour s'emparer de Vares en tant que point stratégique qui

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1 reliait les forces de l'ABiH ?

2 R. Oui. Etant donné les circonstances, c'était tout à fait normal.

3 Q. A l'époque ou plus tard, vous avez sans doute appris que les opérations

4 visant à s'emparer de Vares avaient été faites en coopération par trois

5 corps.

6 R. A l'époque, je ne savais pas qu'il y avait trois corps. D'après ma

7 vision des choses, le 1e Corps était impliqué, mais je ne savais pas que le

8 2e Corps était impliqué. Je pensais que c'était le 3e et le 2e Corps, en

9 partie le 1er Corps, celui que j'avais rencontré à Dabravine, le 1er Corps.

10 Q. Nous avons entendu un témoin dans ce prétoire, M. Birger Hakan, qui a

11 décrit les événements qui se sont produits avant. Il a dit que l'attaque

12 des unités de l'armée sur Kopjari constituait une opération de combat très

13 bien exécutée en termes militaires, et qu'après les accusations faites par

14 le HVO qu'il y avait eu un crime perpétré à Kopjari. Il y a eu une enquête

15 menée par les forces internationales, qui ne révélait aucune preuve qu'un

16 crime ait été commis dans ce village. Est-ce que vous êtes d'accord avec

17 cette affirmation qui a été faite devant cette Chambre ?

18 R. Oui. Birger Hakan était la personne qui était présent à Kopjari. Je ne

19 l'étais pas, donc je fais confiance à ce qu'il dit.

20 Q. Merci. Vous avez affirmé dans votre déposition que le

21 23 octobre, vous avez appris des membres de l'ABiH que Stupni Do venait

22 d'être attaqué. Il s'agit d'un village qui se trouve pas loin de Vares, qui

23 est habité par des Musulmans bosniens. Est-ce que vous avez appris cette

24 chose ?

25 R. Je l'ai appris du Groupe opérationnel à Dabravine, du

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1 1er Corps. Le 23 octobre, ils ne savaient pas exactement ce qui s'était

2 passé. C'était plus ou moins une rumeur à l'époque. C'est pour cela, comme

3 je l'ai déjà dit, j'ai négocié avec eux, et j'ai promis de vérifier

4 exactement ce qui s'était produit.

5 Q. Après avoir eu ces informations, vous avez demandé au commandement du

6 HVO d'avoir accès à Stupni Do. En dépit de vos demandes répétées, vous

7 n'avez pas eu cette permission,

8 n'est-ce pas ?

9 R. Oui, c'est exact.

10 Q. D'une distance d'à peu près un kilomètre et demi, vous avez pu observer

11 Stupni Do. Vous avez vu que ce village avait été incendié, était en feu.

12 Etant donné la fumée et la distance, vous ne pouviez pas véritablement voir

13 ce qui s'y passait.

14 R. Oui.

15 Q. Vos unités, très peu de temps après, ont rencontré des réfugiés qui

16 s'échappaient de Stupni Do. Le commandant vous a informé que les réfugiés

17 étaient en état de choc et qu'ils ne pouvaient pas vous parler, à

18 l'exception de deux jeunes femmes qui vous ont dit qu'il y avait des

19 pillages, des incendies, des viols à Stupni Do, et que ces deux jeunes

20 femmes de 20 ans avaient elles aussi été violées. N'est-ce pas, on vous a

21 dit cela ?

22 R. Oui.

23 Q. Concernant maintenant le comportement du HVO, vous avez informé leur

24 commandement à Kiseljak de ces faits. Après des interventions répétées,

25 vous avez pu, le 26 octobre, vous rendre à Stupni Do, n'est-ce pas ?

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1 R. Oui.

2 Q. Puisque vous aviez également d'autres obligations, vous n'avez pas pu

3 rester très longtemps à Stupni Do. Vous avez un tour et vous avez pu

4 constater que les maisons ont été entièrement ou partiellement incendiées,

5 qu'il y avait des cadavres, des corps brûlés. Des informations plus

6 détaillées concernant le village ont été glanées plus tard par des membres

7 de votre bataillon et du Bataillon britannique, qui sont venus vous

8 assister pour sécuriser le village; est-ce exact ?

9 R. Oui.

10 Q. Vous êtes entré dans le village bien que la Brigade du HVO Bobovac ait

11 essayé de vous en empêcher en tirant sur votre bataillon. Il y avait des

12 mines, et vous avez pu les déplacer. C'est ainsi que vous avez pu témoigner

13 des crimes qui ont été perpétrés dans ce village.

14 R. Oui.

15 Q. Le 2 novembre, vous avez appris que la Brigade Bobovac du HVO avait

16 quitté Vares et avait emporté une partie de la population. Vous avez pu

17 également voir que le HVO forçait une partie de la population croate à

18 quitter cette zone. Ils exerçaient des pressions pour que ceux-ci quittent

19 la zone.

20 R. Il y avait des soldats du HVO à Vares le 3 novembre, au début du 3

21 novembre. Je n'ai jamais pu voir des unités du HVO en train d'exercer des

22 pressions. C'est quelque chose qui m'a été rapporté, mais je ne l'ai pas

23 constaté personnellement.

24 Q. Merci, Général.

25 En répondant à une question de mon éminent collègue, vos soldats auraient

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1 également vu que pendant la retraite, le HVO mettait le feu à ses propres

2 biens. Certaines maisons qui ont été endommagées à Vares et dans le

3 voisinage, étaient du à ce qu'eux-mêmes avaient fait lorsqu'ils ont pris

4 leur retraite.

5 R. Oui, c'est exact.

6 Q. Après que les membres de l'ABiH se soient emparés de Vares, vous avez

7 appris que le HVO battait retraite à travers les territoires qui étaient

8 sous le contrôle de la VRS. Il était évident pour vous que ces deux armées

9 étaient déjà parvenues à un accord sur une coopération. Est-ce que vous

10 pensez que c'est exact ?

11 R. Qu'elles ont battu retraite à travers les territoires du VRS est exact.

12 Cela ne prouve pas qu'une coopération fût en œuvre. Je n'étais pas surpris

13 à l'époque d'imaginer qu'il y avait des négociations privées, mais à un

14 niveau très inférieur. Cela ne prouvait pas qu'il y avait une coopération à

15 haut niveau.

16 Q. Merci, Général.

17 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas

18 d'autres questions pour ce témoin.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

20 Je me tourne vers les autres avocats.

21 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. De la part

22 de l'équipe de M. Kubura, nous avons effectivement à poser certaines

23 questions à ce témoin.

24 Contre-interrogatoire par M. Ibrisimovic :

25 Q. [interprétation] Général, pouvons-nous revenir au

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1 4 novembre lorsque vous êtes arrivé à Vares, et que vous avez dit que vous

2 avez remarqué des personnes appartenant à la 7e Brigade sur ce lieu. C'est

3 exact ?

4 R. Oui.

5 Q. Vous les avez reconnus, car leur commandant se présentait en tant que

6 commandant de la 7e Brigade.

7 R. Oui. D'ailleurs, il portait également l'insigne de cette brigade.

8 Q. Lorsque vous avez parlé avec mes éminents collègues de l'Accusation,

9 vous avez dit que le nombre total était d'environ

10 80 soldats, n'est-ce pas ?

11 R. Oui. A cet endroit précis, là où je les ai rencontrés pour la première

12 fois, c'était environ cela. Je ne peux pas vous dire exactement, mais c'est

13 à peu près ce dont je me souviens aujourd'hui. Il faut savoir également que

14 cette zone, que la topologie du terrain était telle qu'on ne pouvait pas

15 avoir une vue d'ensemble.

16 L'INTERPRÈTE : Il ne s'agit pas de l'Accusation. Il y a une erreur, ligne

17 13.

18 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Ligne 13, c'est le témoin qui parlait à

19 un collègue de l'équipe de la Défense et non pas de l'Accusation comme il a

20 été dit.

21 Q. A cette époque-là, la situation était à peu près paisible dans cette

22 ville ?

23 R. Non, je ne dirais pas qu'elle était paisible, du moins pas quand ces

24 unités sont arrivées. On pourrait plutôt décrire la situation comme

25 chaotique.

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1 Q. Après Vares, vous vous êtes rendu à Dabravine quelques heures plus

2 tard, si j'ai bien compris; est-ce exact ?

3 R. Tout de suite après avoir rencontré cette unité, je me suis rendu

4 directement vers le sud pour retrouver la compagnie française. Au bout de

5 quelques heures, peut-être une heure, je suis revenu à Vares. Là, la

6 situation était totalement hors de contrôle. Lorsque j'ai constaté cela, je

7 me suis rendu auprès du Groupe opérationnel à Dabravine. Je leur ai demandé

8 de reprendre le contrôle de la situation à Vares. Selon ma conception de la

9 chose à l'époque, le Groupe opérationnel n'avait pas le commandement des

10 Unités à Vares. Je pensais qu'il s'agissait du 3e Corps. Je leur ai demandé

11 de communiquer avec les commandants et les officiers qui avaient pris le

12 contrôle de Vares pour reprendre le contrôle. C'est ainsi qu'ils ont envoyé

13 une unité de police militaire.

14 Q. Vous venez de mentionner des unités, cela m'amène à ma question

15 suivante : Lorsque vous vous êtes revenu de Dabravine, vous avez trouvé là

16 beaucoup plus de soldats que les 80 que vous aviez mentionnés en tant que

17 membres de la 7e Brigade.

18 R. Oui.

19 Q. Si je vous disais qu'il y avait non seulement les membres de la 7e

20 Brigade, mais également ceux de la 110e Brigade, les membres de la TO

21 municipale de Vares de même que la 126e Brigade. Est-ce que vous seriez

22 d'accord avec moi ?

23 R. Je ne peux pas le dire. Je ne peux pas dire que tout le monde

24 appartenait à la 7e Brigade, mais je ne peux pas non plus dire qu'ils

25 venaient des unités que vous venez de mentionner. Ils auraient pu être tous

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1 de la 7e Brigade; ils auraient pu être aussi de différentes unités.

2 Q. Vous avez également mentionné la FORPRONU; il s'agissait de l'entrepôt

3 du HCR. Les membres de votre bataillon ont été chargés de la sécurité de

4 cet entrepôt, n'est-ce pas ? Le Bataillon nordique.

5 R. Ils ont pris en charge la protection de celui-ci. A l'époque, les

6 soldats de l'ABiH s'y trouvaient déjà, et nous avons été obligés de les

7 sortir de cet entrepôt.

8 Q. Pendant les événements qui se sont déroulés à Vares, vous avez rédigé

9 des rapports que vous avez fait parvenir à d'autres. Est-ce que vous les

10 avez envoyés au commandement du 3e Corps ou à un autre commandement

11 supérieur de l'ABiH ?

12 R. J'ai d'abord informé, comme je l'ai déjà dit, j'avais des

13 communications avec le Groupe opérationnel à Dabravine. J'ai communiqué

14 également avec le 2e Corps. J'avais des contacts évidemment avec mon

15 commandant, le général Briquemont, à Kiseljak. Le lien avec le 3e Corps

16 passait par le commandement de la Bosnie-Herzégovine ou par le Groupe

17 opérationnel numéro 1 de l'ABiH. J'espérais du moins qu'il y avait des

18 contacts entre les 2e et

19 3e Corps. Je ne négociais pas avec eux, et je ne rencontrais ni leurs

20 officiers, ni le commandant de ce 3e Corps.

21 Q. Le commandant du Groupe opérationnel avec qui vous aviez des contacts à

22 Dabravine ne faisait pas partie de la 7e Brigade ni un officier de celui-

23 ci, n'est-ce pas ?

24 R. Je ne pense pas qu'il l'était, non.

25 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci. Nous n'avons pas d'autres

Page 7683

1 questions, Monsieur le Président.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant les questions supplémentaires et les questions

3 des Juges, il vaudrait mieux faire la pause.

4 Il est 10 heures 25. Nous reprendrons à 11 heures moins 5.

5 --- L'audience est suspendue à 10 heures 23.

6 --- L'audience est reprise à 11 heures 00.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous sommes à la phase des questions

8 supplémentaires.

9 Madame Benjamin, avez-vous des questions supplémentaires ?

10 Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Monsieur le Président, nous n'avons

11 pas de questions supplémentaires.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Les Juges auront des questions.

13 Questions de la cour :

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, les Juges, qui sont devant vous, vont

15 vous poser une série de questions à fin de clarification de certains

16 éléments que vous avez indiqués en répondant aux questions des uns et des

17 autres, et pour combler certains points qui nous semble rester dans une

18 zone d'obscurité et que, dans l'intérêt de la justice et pour la

19 manifestation de la vérité, il conviendrait d'éclaircir.

20 Tout d'abord, je voudrais, mon Général, vous demander lorsque vous étiez

21 sur place à Vares, vous y êtes resté physiquement de quand à quand, dans la

22 ville ?

23 R. Au cours de cette période, je suis arrivé à Vares le 23 octobre, j'y

24 suis resté jusqu'au 25. Ensuite -- pardon, non -- je suis resté jusqu'au

25 24, tard dans la journée. Ensuite, je suis allé à Zvornik pour les

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1 négociations avec les Serbes le 25. Le 25 au soir, lorsqu'il y a eu des

2 violations à Vares, j'y suis retourné en fin de journée, le 25 et ce

3 jusqu'au 28, je crois. J'ai retraversé Vares le 29 et j'y suis retourné, à

4 Vares, le 3 novembre et j'y suis resté jusqu'au 5.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites que vous étiez présent à Vares du 3 au 5.

6 Vous étiez logé à quel endroit ? Car entre le 3 et le 5, il y au moins la

7 nuit du 3 au 4 et la nuit du 4 au 5. Vous résidiez à quel endroit ?

8 R. J'étais au camp, au sein de la 8e Compagnie.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce camp de la 8e Compagnie, il était situé à quelle

10 distance du centre-ville ?

11 R. A deux kilomètres.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Pendant les deux jours où vous étiez présent, le 3,

13 le 4 et le 5, avez-vous rencontré -- à part le maire de la localité, avez-

14 vous rencontré des personnalités étrangères telles que des représentants de

15 l'Union européenne ? Est-ce qu'il vous est arrivé de rencontrer ces

16 personnes-là ?

17 R. Je suis, tout à fait, certain d'en avoir rencontré, mais je ne peux pas

18 vous parler de ceci de façon précise. Je ne pas vous dire qui, exactement,

19 j'ai rencontré. Nous étions en communication constante avec le commandant

20 de l'ABiH et les services militaires des Nations Unies, ainsi que les

21 représentants de la MCCE.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Les observateurs de la MCCE, vous les avez eus par

23 téléphone, ou vous les avez rencontrés afin d'évoquer la question de la

24 ville de Vares ?

25 R. Si je leur ai parlé, c'est que je les ai rencontrés. Je leur ai parlé

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1 au téléphone pour autant que je m'en souvienne.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans les conversations que vous avez eues avec eux,

3 est-ce que vous aviez évoqué la situation que vous avez, en quelque sorte,

4 définie de chaotique ? Est-ce que vous avez évoqué avec eux cette

5 situation ?

6 R. Je ne m'en souviens pas car il s'agissait là principalement d'une tâche

7 qui incombait au commandant de ma compagnie.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Mais le commandant de votre compagnie était sous

9 votre autorité.

10 R. Oui, bien entendu.

11 M. LE JUGE ANTONETTI : Le commandant de la 8e Compagnie pourrait se

12 substituer à vous dans les relations avec les observateurs de l'Union

13 européenne ?

14 R. Il pouvait me remplacer s'il suivait les lignes directrices, ce qui me

15 paraît tout à fait normal, mais si j'étais moi-même sur les lieux. Nous

16 étions en contact avec les observateurs de la MCCE et, dans ce cas-là,

17 j'aurais pris part à la réunion, mais je ne m'en souviens pas. Je n'en ai

18 pas le souvenir aujourd'hui.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez indiqué, en réponse à une question, qu'il

20 y avait eu au niveau de l'entrepôt au Commissariat, des problèmes. Vous

21 avez indiqué qu'il a fallu sortir des entrepôts, des soldats de l'ABiH. Ces

22 entrepôts, ils étaient gardés par qui ?

23 R. Je ne me souviens pas exactement de la position de ma propre compagnie.

24 Comme je vous l'ai dit, ceci faisait partie des responsabilités du

25 commandant de cette compagnie. Lorsque le pillage a commencé à Vares, je

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1 crois qu'il devait y avoir 150 personnes déployées dans la ville et, dans

2 une ville de 50 000 habitants, on ne peut pas être partout.

3 Personnellement, je suis descendu dans l'entrepôt, le 4, accompagné de mon

4 commandant et c'est là que les soldats de l'ABiH étaient entrés dans

5 l'entrepôt. Mes soldats se trouvaient là sur les lieux. Nous avons pris les

6 choses en main, nous avons bloqué la porte avec le véhicule de transport de

7 troupes dans lequel nous étions venus. Nous avons bloqué les portes

8 d'entrée et nous avons pris les choses en main et pris le contrôle de ce

9 dépôt pour en assurer la garde.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : En quelque sorte, vous avez fait usage de la force

11 légitime pour vous opposer à la conduite de ces soldats.

12 R. Oui, nous avons agi de façon claire, nous voulions les faire sortir.

13 Nous n'avons pas utilisé nos armes ou quelque chose de la sorte.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Qu'est-ce qui vous fait dire que c'était des soldats

15 de l'ABiH ? Les personnes qui étaient dans les entrepôts, combien étaient-

16 elles ? Ils ont des uniformes, des tenues de combat, des insignes, des

17 armes, pouvez-vous nous les décrire ?

18 R. Ils portaient certainement des uniformes de combat, ils étaient armés,

19 je n'ai pas remarqué d'insigne ou de badge à ce moment-là. Ils étaient

20 assez agressifs et je crois que nous avons eu de la chance car nos soldats

21 étaient des meilleurs soldats. Nous étions mieux équipés qu'eux et nous

22 avions ces véhicules armés de transport de troupes. Ils se sont rendus

23 compte que nous avions une certaine supériorité et ils ont réalisé qu'il

24 n'était pas bon pour eux de rester dans cet entrepôt.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Dire que c'était des soldats par rapport à des

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1 bandits de grand chemin ou de personnes qui se livraient au pillage.

2 Qu'est-ce qui vous fait dire que vous aviez la conviction que c'était des

3 soldats ? Ce qui veut dire qu'ils appartenaient à une structure organisée,

4 qu'est-ce qui vous le fait dire ?

5 R. Ils portaient des uniformes, ils étaient armés, ils avaient également

6 un autocar à l'extérieur de l'entrepôt, à ce moment-là. L'un dans l'autre,

7 il devait y avoir quelques 50 soldats aux alentours. Certaines fois, je

8 dois reconnaître qu'il n'était pas toujours facile de faire la différence

9 entre les bandits de grand chemin et les soldats. Je dois dire que la

10 discipline, qui était imposée à nos unités, ainsi que le respect du droit

11 militaire, n'étaient pas, je dois dire, quelque chose qui m'a beaucoup

12 impressionné.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Les 50 individus que vous qualifiez de soldats, est-

14 ce qu'il y avait un encadrement de style sous-officier ou officier ?

15 C'était des soldates de la base ou vous avez eu l'impression que parmi eux,

16 il y avait des échelons intermédiaires de commandement ?

17 R. Je crois qu'il y en avait, mais je ne pouvais pas véritablement le

18 constater parce qu'ils n'étaient pas vraiment contrôlés. Peut-être qu'on

19 leur a assigné cette tâche, qu'on leur a demandé de piller l'entrepôt. Mais

20 je n'ai pas vu d'officier prendre le contrôle de cette unité et faire en

21 sorte qu'ils suivent les règles.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Cette confrontation avec eux, de nature pacifique,

23 puisqu'il n'y a pas eu usage d'arme, a duré combien de temps afin de vous

24 permettre de maîtriser la situation et de les faire partir ? Cela a duré

25 combien de temps, autant que vous vous en souvenez ?

Page 7688

1 R. En premier lieu, je ne dirais pas que ceci était pacifique mais c'était

2 sans l'usage des armes. A l'entrepôt lui-même, jusqu'à ce que nous ayons

3 pris le contrôle, je crois que cela a duré 15 minutes, en tout cas, avant

4 que je ne quitte les lieux et que je remette le commandement à mon

5 commandant de cette unité sur les lieux.

6 M. LE JUGE ANTONETTI : Ces événements remontent à très longtemps mais est-

7 ce que vous vous êtes rappelé, ou d'avoir dans votre souvenir, est-ce que

8 ces soldats avaient en leur possession du "walkie-talkie", des appareils de

9 transmission ? Comme vous le savez, puisque vous êtes un militaire de

10 carrière, une unité, lorsqu'elle se déplace sur le terrain, a toujours des

11 moins de transmission. Est-ce que vous vous souvenez avoir vu des moyens de

12 transmission de diverse nature ?

13 R. Je ne m'en souviens pas mais je peux dire qu'il y avait différents

14 systèmes de transmission, ils étaient rares, il n'y en avait pas beaucoup

15 dans l'armée de Bosnie, à ce moment-là. Même au niveau des compagnies et de

16 sections, il manquait de radios, ils n'en avaient pas assez. Cela, je le

17 sais fort bien car ils nous les volaient.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous voulez nous dire que le Bataillon britannique

19 ou les autres bataillons ont été victimes de vols de matériel ?

20 R. Oui.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous nous avez indiqué en réponse aux questions

22 posées, que vous vous êtes rendu au Groupe opérationnel pour justement les

23 inviter à faire cesser ce type de comportement. Vous nous avez dit qu'au

24 Groupe opérationnel, vous avez rencontré le commandant, enfin celui qui

25 exerçait l'autorité suprême. Vous ne vous rappelez pas de son nom ?

Page 7689

1 R. Non, je ne me souviens pas.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous lui avez relaté ce que vous aviez été

3 témoin, notamment le fait qu'il y avait des pillages commis apparemment par

4 des individus qu'on pouvait peut-être qualifier de soldats. Quelle

5 impression il vous a donné, puisque vous avez indiqué qu'il a envoyé la

6 police militaire. Si c'étaient des bandits de grand chemin. Il aurait dû

7 vous dire : "Prenez la tâche avec la municipalité ou avec la police

8 civile." Pourquoi, à ce moment-là,

9 va-t-il dépêcher la police militaire ? Pouvez-vous nous apporter des

10 éclaircissements sur cette situation très précise.

11 R. Oui. Je crois qu'il savait fort bien que c'étaient les unités de l'ABiH

12 qui étaient dans la ville. Ceci il ne l'a jamais nié. Il n'a jamais dit que

13 cela n'était pas quelque chose qui le concernait. Il a dit : "Nous allons

14 faire quelque chose contre cela." Effectivement, ils ont fait quelque

15 chose, puisqu'ils ont envoyé la police militaire. Je ne l'ai jamais vu sur

16 les lieux. Le 4 novembre, j'ai passé beaucoup de temps dans la ville de

17 Vares. Je n'ai jamais vu d'officiers qui tentaient de prendre le contrôle

18 de la situation.

19 Comme je vous l'ai dit un peu plus tôt, j'ai vu la police militaire. La

20 police militaire a tiré sur leurs propres soldats. Je crois qu'il y avait

21 deux ou trois morts ce jour-là. Ils ont tenté d'empêcher cela; ce qui

22 indique simplement qu'en matière de discipline, cela n'était pas très

23 impressionnant.

24 M. LE JUGE ANTONETTI : J'allais justement vous poser la question, mais vous

25 avez répondu par anticipation. Vous dites, c'est à la ligne 6 de la page 39

Page 7690

1 [comme interprété], et à la ligne 4, que la police militaire a tiré sur les

2 soldats. Cet épisode, est-ce que c'est un épisode qu'on vous a rapporté par

3 ouï-dire, ou c'est un fait où vous avez été témoin direct, à savoir que la

4 police militaire a fait usage d'armes contre d'autres soldats ?

5 R. Oui. C'était une situation tout à fait particulière, lorsqu'un véhicule

6 ne s'est pas arrêté devant le signal qui indiquait qu'il fallait s'arrêter.

7 La police militaire leur avait demandé de s'arrêter. Ils ne se sont pas

8 arrêtés. La voiture est partie, ils ont tiré dessus, et ils ne se sont pas

9 arrêtés.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : La voiture, c'était une voiture civile ou une

11 voiture militaire ?

12 R. C'était une voiture civile. Il y avait des civils à l'intérieur.

13 C'était une voiture volée.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : C'était une voiture volée.

15 Les gens qui ont été tués, qu'est-ce qui vous fait dire que c'étaient des

16 militaires qui ont été tués, puisque vous dites qu'ils étaient en civils,

17 dans la voiture civile ?

18 R. Ils portaient des uniformes. Je dirais qu'il y avait très, très peu de

19 civils dans les rues pendant ces journées-là à cause du danger que cela

20 représentait.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Il y a eu combien de tués là, lors de cet épisode ?

22 R. Comme je vous l'ai dit, j'ai vu deux corps dans la rue, moi-même, de

23 mes propres yeux. Je ne me souviens pas ce qui était consigné dans les

24 rapports par la suite. J'ai vu au moins deux corps, deux personnes. C'est

25 tout ce que je peux dire avec certitude.

Page 7691

1 M. LE JUGE ANTONETTI : A part le 8e Bataillon, il semblerait qu'il y avait

2 également une unité française. Qui était présent également sur les lieux ?

3 R. Vous voulez parler de la 8e Compagnie. Le 4, la compagnie française est

4 venue. Ils sont arrivés en retard ce jour-là. C'était une compagnie de la

5 légion d'honneur. Ils sont arrivés tard et ce n'est qu'à partir du 5 qu'ils

6 ont commencé à être opérationnels.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Etre opérationnel lorsqu'on fait partie d'une unité

8 étrangère, dans un pays étranger, cela consiste en quoi être opérationnel ?

9 Est-ce une présence physique dans la rue, armé ? Est-ce protéger des

10 bâtiments sensibles tels que les entrepôts ? C'était quoi au juste d'être

11 présent dans cette situation chaotique ? Comment vous avez essayé de

12 résoudre ce problème ?

13 R. Pour autant que je m'en souvienne, la compagnie était opérationnelle le

14 5. Ils devaient protéger -- je crois que la compagnie était très fatiguée à

15 ce moment-là. Cela faisait une semaine qu'ils étaient sur le terrain. Ils

16 ont libéré nos hommes aux points de contrôle au niveau de l'église

17 catholique pour la protéger également. Il s'agissait de protéger

18 l'entrepôt. C'était une tâche assez facile pour des soldats qui étaient

19 fort bien entraînés, puisque pour les soldats de cette compagnie, ils ont

20 commencé à accomplir leur mission le 5.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous avez quitté les lieux, est-ce que la

22 situation était stabilisée, ou elle était toujours dans le même état que le

23 4 ?

24 R. Non. En fin de journée le 5, la situation était stabilisée. En tout

25 cas, pour le moment.

Page 7692

1 M. LE JUGE ANTONETTI : A votre connaissance, est-ce qu'il y avait encore

2 une population civile croate qui était restée dans la ville malgré le fait

3 qu'une grande partie était partie. Est-ce qu'il y avait encore, présents

4 dans la ville, des Croates ?

5 R. Il y avait encore des Croates dans la ville. C'est en tout cas

6 l'impression que j'en ai retenue. Je ne peux pas vous donner de chiffre. Il

7 y avait des gens encore en ville, et il y en a toujours.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Cette population n'éprouvait pas d'inquiétude

9 particulière ? Est-ce qu'ils ont fait part d'une demande de protection de

10 ce qui pouvait leur arriver ? Quelles étaient d'ailleurs les relations que

11 vous avez eues avec cette population croate ?

12 R. Nous avions de bonnes relations avec tous les civils de Vares. A ce

13 moment-là, les Croates souhaitaient être protégés. Nous avons fait de notre

14 mieux pour les protéger, de la même manière que nous avons essayé de

15 protéger les Bosniens lorsque les Croates les gênaient. C'était la raison

16 de notre présence à cet endroit-là.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie, mon Général.

18 [La Chambre de première instance se concerte]

19 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Nous n'avons plus d'autres questions.

20 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous

21 n'avons pas d'autres questions non plus.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Benjamin.

23 Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] C'est la même chose pour

24 l'Accusation. Nous n'avons pas d'autres questions.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, vous avez compris que votre

Page 7693

1 interrogatoire vient de se terminer, puisque aucune partie ni les Juges

2 n'ont des questions à vous poser. Nous vous remercions d'être venu à La

3 Haye pour témoigner sur ces événements qui se sont déroulés pendant votre

4 mission que vous accomplissiez dans cette région de Bosnie-Herzégovine en

5 septembre, octobre, novembre 1993. Nous vous remercions pour la

6 contribution que vous avez apportée à la manifestation de la vérité. Nous

7 vous souhaitons un bon voyage de retour. Nous vous formulons, bien entendu,

8 nos meilleurs vœux dans la fonction que vous occupez actuellement dans ce

9 collège militaire.

10 Je vais demander à M. l'Huissier de bien vouloir vous raccompagner à la

11 porte de la salle d'audience.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

13 [Le témoin se retire]

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis, je vais vous donner la parole.

15 Avant de vous donner la parole, je voulais juste clarifier une petite

16 question concernant le fait que la Chambre envisage, après avoir recueilli

17 vos observations, la venue de plusieurs témoins.

18 Vous avez posé la question de savoir si ces témoins doivent comparaître

19 avant la fin des présentations des éléments de preuve d'un Procureur ou

20 après, et vous avez fait le lien avec l'Article 98 bis. Pour éclaircir ce

21 qui a été dit, la Chambre envisage de citer d'office un nombre de neuf

22 témoins avant la fin de la présentation de ses éléments de preuve par le

23 Procureur. Il faut lire avant, puisque dans la procédure de l'Article 85,

24 les éléments de preuve sont présentés par le Procureur. C'est dans le cadre

25 de ce schéma que les témoins cités d'office par la Chambre rentrent. Ce

Page 7694

1 n'est qu'après que, le cas échéant, l'Article 98 bis, à la fin de la

2 présentation des éléments de preuve, peut entrer en application. Voilà,

3 c'est dans cette phase.

4 Monsieur Mundis, vous vouliez intervenir. Je vous donne bien volontiers la

5 parole.

6 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

7 L'Accusation n'avait pas prévu d'autres témoins pour aujourd'hui. Le témoin

8 prévu demain sera disponible dès demain matin.

9 Toutefois, je souhaitais dire qu'étant donné que nous avons encore beaucoup

10 de temps aujourd'hui, je me permets de faire les suggestions suivantes :

11 pendant la pause, nous avons eu la possibilité de réfléchir aux neuf

12 témoins que la Chambre de première instance souhaiterait appeler. Nous

13 aimerions pouvoir vous présenter nos points de vue à propos de ces neuf

14 témoins. Toutefois, je souhaiterais, à propos de deux de ces trois témoins,

15 vérifier certaines choses. Si nous pouvions avoir une pause de quelque 45

16 minutes maintenant, nous serions en mesure de vous présenter le point de

17 vue de l'Accusation à propos de ces neuf témoins.

18 Monsieur le Président, j'hésite à ajouter cela, mais par rapport à ce que

19 j'avais dit auparavant, à propos de l'interaction entre l'Article 85 et

20 l'Article 98 bis, je souhaiterais également pouvoir en parler avec mes

21 collègues de la Défense, et ce, pour les deux accusés. L'Accusation se

22 réserve le droit, pour le moment, de revenir sur l'ensemble de cette

23 question, à savoir, l'interaction entre l'Article 85 et l'Article 98 bis.

24 Je suppose que nous pourrons revenir sur cette question une fois que

25 j'aurai la possibilité d'en parler avec mes collègues de la Défense.

Page 7695

1 Monsieur le Président, si vous souhaitez avoir le point de vue de

2 l'Accusation à propos de ces neuf témoins, je pense que nous pourrons tout

3 à fait vous donner notre opinion vers midi quinze.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : Par ailleurs, la Chambre a évoqué tout à l'heure la

5 question du témoin de vendredi. Nous avions évoqué la question de la vidéo.

6 Je voudrais à nouveau appeler l'attention de l'Accusation. Il y a un

7 certain nombre de vidéos qui sont listées dans votre liste. Comme vous le

8 savez, la Chambre, avant de prendre une décision finale sur l'ensemble de

9 ces documents ou pièces diverses, a demandé à l'Accusation d'accomplir

10 plusieurs diligences. Concernant les vidéos, notamment la vidéo qui

11 pourrait être introduite vendredi par ailleurs le témoin, j'invite

12 l'Accusation à bien faire le tri entre les vidéos et, notamment d'envisager

13 la question de la vidéo qui fait l'objet d'un transcript qui est sous le

14 numéro 00818539. Si ce transcript résulte d'une vidéo, il serait

15 souhaitable dans l'intérêt de la justice que la vidéo puisse, surtout si

16 elle n'est pas très longue, puisse être diffusée et qu'ensuite le témoin

17 puisse être interrogé ultimement.

18 Par contre, il y a effectivement une autre vidéo qui concerne les

19 Moudjahiddines, qui est un autre problème. Il y a une vidéo qui semble

20 correspondre parfaitement au témoin qui sera là vendredi. Je vous demande

21 de bien regarder cette question pour éviter qu'à la suite de l'audition de

22 ce témoin, on ait à le faire revenir, puisque nous avions décidé que les

23 vidéos devraient, de toute façon, faire l'objet d'une diffusion publique.

24 Vous avez demandé 45 minutes. Nous reprendrons aux environs de midi 15,

25 midi 20.

Page 7696

1 --- L'audience est suspendue à 11 heures 35.

2 --- L'audience est reprise à 12 heures 35.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise avec quelques minutes de

4 retard.

5 Avant de donner la parole aux uns et aux autres, la Chambre tient à

6 resituer la problématique, issu du problème qui a été évoqué tout à l'heure

7 dans le cadre plus général, qui est le suivant : il y a quelque temps,

8 l'Accusation nous avait demandé le versement dans la procédure d'un

9 centaine de documents. Suite à cette demande, la Défense avait fait valoir

10 des observations tirées du motif que certains de ces documents pourraient

11 être introduit en présence d'un témoin.

12 Par la suite, l'Accusation nous a indiqué qu'elle comptait retirer - et ce,

13 il y a quelques jours - 19 témoins d'une liste de témoins qui avait été

14 déterminé par la Chambre, conformément à l'Article 73 bis du règlement.

15 L'Accusation nous demande le retrait de ces témoins, sans nous fournir des

16 explications sur les motifs qui entraînent le retrait de ces témoins, alors

17 même que ces témoins avaient été prévus lorsque la Chambre avait déterminée

18 le nombre des témoins et la durée des témoins.

19 La Chambre constate que, parmi les témoins retirés, un certain nombre de

20 témoins pourraient, notamment, authentifier certains documents qui sont

21 pour le moment en suspens et que, pour répondre au souci de l'Accusation de

22 voir verser ces moyens de preuve, et les soucis de la Défense de vouloir

23 authentifier certains documents par les témoins, il peut être envisagé

24 qu'un certain nombre de témoins - la Chambre en avait déterminée neuf -

25 puisse venir dans les prochains jours et dans les prochaines semaines,

Page 7697

1 avant la fin de la clôture des moyens de preuve.

2 Voilà. La Chambre tenait à vous indiquer cela puisque ces témoins avaient

3 été déjà prévus. Ce ne sont pas des témoins supplémentaires, ce ne sont pas

4 des témoins qui viennent à l'appui des moyens de preuve supplémentaires.

5 C'étaient des témoins qui étaient déjà prévus, et dont les documents

6 pouvaient être référenciés par rapport à ces témoins. Voilà pour la Chambre

7 à quel stade se pose le problème.

8 Le Juge Swart va rajouter quelque chose.

9 M. LE JUGE SWART : [interprétation] La question, qui a été soulevée par

10 votre communication de lundi est comme suit : est-ce que le fait d'éliminer

11 19 témoins correspond à une décision judicieuse ? Seriez-vous disposé à

12 réexaminer cela, notamment pour ce qui est des neuf témoins ?

13 M. MUNDIS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,

14 Madame, Monsieur les Juges, et merci de m'avoir donné la possibilité de

15 vous répondre.

16 Avant de répondre à la question posée par M. le Juge Swart, j'aimerais

17 replanter le contexte et les antécédents, et ce, à l'intention de la

18 Défense et des Juges de la Chambre de première instance, car nous

19 souhaiterions parler du devoir des accusés et des crimes qui sont visés par

20 l'acte d'accusation.

21 La requête préalable au procès, notamment, le mémoire préalable au procès

22 présenté par l'Accusation, ainsi que les propos liminaires de l'Accusation,

23 ont été, en fait, dépassés en quelque sorte par certains des moyens de

24 preuve qui ont été présentés parce que, lorsque nous avons commencé le

25 procès, et lorsque nous avons déposés notre ensemble de mesures préalables

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1 au procès, conformément à l'Article 65 ter, notamment, pour ce qui était de

2 la liste des témoins, il y avait certains éléments que l'Accusation

3 souhaitait établir, et ce, à partir de plusieurs angles. En fait, nous

4 souhaitions avoir une approche particulièrement sécurisée.

5 A la suite des moyens de preuve qui ont été présentés par la Défense,

6 notamment, lors du contre-interrogatoire de l'expert, du général Reinhardt,

7 l'Accusation a considéré que, pour ce qui était des mesures prises par

8 l'accusé, et compte tenu également du rapport du général Reinhardt, nous

9 souhaitons indiquer que les questions relatives à cette affaire ont été en

10 quelque -- sont beaucoup moins nombreuses. En d'autres termes, nous sommes

11 de l'avis suivant : nous pensons que le devoir d'un commandant de l'ABiH

12 consistait à diligenter des enquêtes et à transférer ces affaires aux

13 tribunaux militaires du district.

14 Nous pensons que l'Accusation, ainsi que les Juges, ne seront en mesure que

15 d'ajouter des moyens de preuve limités, le cas échéant, aux questions qu'il

16 va falloir que vous tranchiez, alors qu'avant le procès, nous essayons de

17 prouver que ce qui avait été fait, au niveau des tribunaux militaires,

18 était tel qu'il aurait fallu prendre en considération ce qui avait été fait

19 au niveau des procureurs et des Juges dans le cas des tribunaux miliaires,

20 et dans le cas des tribunaux civils qui fonctionnaient. Nous pensons

21 maintenant que, puisque les obligations des commandants y sont claires, et

22 qu'il s'agissait, en fait, de mener à bien une enquête et de transférer ces

23 témoins, cela n'est pas forcément considéré comme probant, alors que nous

24 le pensons avant le procès.

25 Monsieur le Président, l'Accusation est en train d'examiner le cas de ces

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1 témoins, que je qualifierais de témoins juridiques, car je ne trouve pas

2 véritablement de mots plus idoines, et cela est valable pour sept des neuf

3 témoins dont vous avez parlés. L'Accusation a quelques problèmes par

4 rapport à certains de ces témoins, et ce, du fait du témoignage de certains

5 témoins qui ont déjà été cités, et d'autres témoins qui vont comparaître

6 ici, en ce sens que nous ne pensons pas que cela nous permettra de prouver

7 ce que nous souhaitons prouver ici devant cette Chambre de première

8 instance, et nous ne pensons pas que cela constituera des éléments de

9 preuve qui auront une valeur probante. Voilà pour ce qui est de mes

10 remarques d'ordre général.

11 Pour ce qui est maintenant des exemples que je souhaiterais vous fournir,

12 Monsieur le Président, je souhaiterais que nous passions à huis clos

13 partiel.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, nous passons à huis clos

15 partiel.

16 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

17 [Audience à huis clos partiel]

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25 [Audience publique]

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1 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, pour ce qui est du

2 Témoin numéro 77, Jason Medley, M. Medley fait partie de l'armée

3 britannique. A l'heure actuelle, il se trouve à l'ambassade britannique à

4 Washington. Nous avons été d'avis que le témoignage de M. Medley serait un

5 témoignage supplémentaire parmi les témoignages des personnes ayant

6 participé aux brigades qui ont d'ores et déjà témoigné ici. De ce fait et

7 du fait que nous avons prévu que son interrogatoire principal ne durerait

8 que quelques 45 minutes, nous avons été d'avis qu'il -- nous sommes d'avis

9 plutôt que, pour des raisons d'économie de toutes sortes, il ne serait pas

10 utile -- nécessaire de faire comparaître M. Medley aux frais du Tribunal,

11 vu des circonstances que je viens d'évoquer.

12 Monsieur le Président, je crois que j'en ai ainsi maintenant terminé avec

13 la présentation du point de vue de l'Accusation à propos de ces neuf

14 témoins.

15 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Je dois dire que je suis encore en tant

16 soit peu perplexe. Je ne comprends pas très bien dans quelle mesure les

17 choses ou la présentation de vos moyens à charge a été modifiée. Vous avez

18 parlé de la déposition du général Reinhardt et des documents qui ont été

19 présentés par la Défense, mais nous avons un point de vue différent.

20 Que reste-t-il ? Qu'est-ce qui a disparu ? Vous nous avez parlé de certains

21 thèmes en règle générale, mais j'ai quelques problèmes à comprendre votre

22 pensée.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Justement, je voulais intervenir sur ce point et on

24 va repasser en audience à huis clos.

25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant en audience

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1 publique -- huis clos partiel.

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12 [Audience publique]

13 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

14 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, hier, le conseil de

15 la Défense a examiné les questions que vous avez soulevées, les suggestions

16 que vous avez faites. Selon le programme que vous avez proposé, nous avions

17 pensé que l'Accusation et le conseil de la Défense auraient pu présenter

18 leurs positions demain. Etant donné des circonstances actuelles, notre

19 position ne peut pas être exprimée véritablement de manière très précise

20 concernant toutes ces questions très importantes qui ont été soulevées

21 aujourd'hui. La position de la Défense doit à tous les moments tenir compte

22 du principe fondamental dans ce type de procédures, à savoir, les droits de

23 l'accusé.

24 Il s'agit du droit de réponse pour l'accusé de répondre à tout ce qui est

25 présenté par l'Accusation devant cette Chambre de première instance,

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1 également l'obligation principale de l'Accusation qui consiste à prouver

2 ses moyens à charge.

3 Après les commentaires que je viens d'entendre provenant de mon éminent

4 collègue, la Défense n'est plus très sûre quant à la position qu'elle doit

5 adopter, car nous n'avons pas vu un acte d'accusation amendé, étant donné

6 que l'acte d'accusation mentionne une forme de responsabilité en matière de

7 commandement extrêmement étendue selon laquelle l'accusé n'aurait pas pris

8 les mesures qu'il fallait pour prévenir et punir, et cetera.

9 Je tiens compte de ces droits de l'accusé. J'applique également les règles

10 de cette Chambre. Après la conclusion des moyens à charge par l'Accusation,

11 la Chambre devra prendre une décision selon le règlement de cette Chambre.

12 Evidemment, la Défense pense qu'il est tout à fait exact de procéder de

13 cette manière-là. Cela a déjà été mentionné par nos éminents collègues.

14 Il me semble quant à nous que la Chambre de première instance devrait dire

15 si elle considère que l'Accusation a pu être en mesure d'étayer ses moyens

16 à charge.

17 D'un autre côté, nous avons également essayé de savoir si la jurisprudence

18 de ce Tribunal en la matière, à l'exception d'un cas qui n'est pas encore

19 terminé, qui est toujours pendant, nous n'avons pas rencontré une situation

20 similaire quant à cette situation concernant les témoins.

21 Certains des témoins inclus dans la liste sont également des témoins

22 potentiels de la Défense, et pourraient être appelés lorsque la Défense va

23 présenter ses moyens.

24 C'est pour cela que, comme vous l'avez dit, Monsieur le Président, la

25 Chambre peut commander qu'une partie présente certains moyens à n'importe

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1 quel moment, ou étant donné que la Chambre peut également faire appeler des

2 témoins si cela est dans l'intérêt du droit, étant donné aussi que nous ne

3 sommes pas sûrs si la Chambre va procéder de la manière après la

4 présentation des moyens de preuve par l'une ou l'autre des parties et étant

5 donné que nous pensons que, quelle que soit la décision, à savoir, de faire

6 en sorte que ces moyens soient présentés ou si la Chambre demande que ce

7 témoin soit appelé, quoi qu'il en soit, ce sont les droits de l'accusé dont

8 il faut tenir compte. Nous pensons également que l'Accusation doit

9 également étayer ces moyens à charge.

10 Nous n'avons pas de position véritablement définitive à cet égard, mais

11 nous aimerions que la Chambre considère les arguments présentés par nos

12 éminents collègues de l'Accusation et également nos propres positions,

13 qu'elle prenne une décision. Lorsqu'elle le fera, tenir compte des droits

14 de l'accusé.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

16 Maître Dixon.

17 M. DIXON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Monsieur et

18 Madame les Juges, j'ai seulement un point à faire. Bien sûr, nous

19 respectons le droit de l'Accusation à essayer d'étayer ses moyens à charge

20 de la manière qu'elle considère la plus apte et de faire usage des moyens

21 de preuve qu'elle considère aptes, mais en même temps, d'après le

22 règlement, vous avez, dans la Chambre, un pouvoir discrétionnaire, à savoir

23 que vous pouvez ordonner aux parties d'appeler certains témoins.

24 La question, c'est de savoir si cela doit être fait et quand. Cela doit-il

25 être fait après la présentation des moyens ou entre une partie et l'autre ?

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1 Nous n'avons pas, pour l'instant, des arguments à présenter. C'est à vous,

2 Messieurs et Madame les Juges, d'en décider.

3 Il se peut que cela soit à l'Accusation d'appeler ces témoins s'ils vont

4 être utilisés comme moyen à charge. C'est, évidemment, à la Chambre d'en

5 décider puisqu'il s'agit d'une partie des moyens de l'Accusation. Ce serait

6 peut-être la meilleure solution que ce soit eux qui appellent ces témoins

7 pour les besoins de l'authentification des documents. Merci. Messieurs,

8 Madame les Juges.

9 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Je voudrais poser deux questions à M.

10 Mundis concernant ce que M. Dixon a dit.

11 Les discussions concernant les témoins devant la Chambre pour les besoins

12 de faire verser des documents au dossier, la Défense a exprimé très

13 clairement le désir de faire admettre des moyens par le truchement d'un

14 témoin.

15 Si vous allez réduire votre liste de 19 témoins, cela va rendre la chose

16 plus difficile. On aimerait savoir votre opinion à cet égard.

17 La deuxième chose, une deuxième question que je me pose depuis lundi, c'est

18 ceci : Si vous réduisez votre liste de 19 témoins, cela constitue un

19 amendement considérable de votre liste du moins. J'en conclus que votre

20 opinion est que vous pouvez utiliser librement votre liste de témoins, de

21 l'épuiser complètement ou non, que c'est simplement à vous d'en décider.

22 Est-ce que c'est, à votre avis, un bon résumé de votre position à cet

23 égard ?

24 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Juge Swart, je vais commencer avec

25 votre première question.

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1 En ce qui concerne le besoin de témoins qui doivent authentifier les

2 documents, l'Accusation dirait que les neuf témoins dont nous avons parlé

3 ce matin, ne seraient pas les bons témoins pour authentifier plus qu'une

4 poignée, on va dire, des centaines de documents contestés. D'ailleurs, je

5 ne vois pas très bien ce lien entre ces neuf témoins et l'authentification.

6 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Vous avez, par exemple, soumis des

7 documents concernant le greffe des juridictions de Travnik et Zenica.

8 M. MUNDIS : [interprétation] Oui. Un certain nombre de documents pourraient

9 être authentifiés par les témoins, mais la grande majorité de ces

10 documents, à mon avis, ne font pas partie de cette catégorie.

11 Je vais y revenir peut-être demain si vous le permettez.

12 Maintenant, pour votre deuxième question, d'après mon souvenir de la

13 pratique à la fois devant cette Chambre, mais également d'autres Chambres

14 de première instance, que l'une ou l'autre des parties peut retirer un

15 témoin ou simplement ne pas les appeler; toutefois en avertissant la

16 Chambre. A plusieurs occasions, nous avons en effet procédé de la sorte;

17 nous n'avons pas appelé certains témoins. D'ailleurs, l'Accusation pense

18 qu'il est principalement aux parties d'en décider. L'une des raisons

19 spécifiques pour qu'existe l'Article 98, c'est précisément cela, qu'ils

20 puissent appeler les témoins qu'ils veulent entendre, que ces témoins

21 apparaissent ou non sur la liste préalable. L'Article 85 met en place un

22 ordre, disons par défaut, pour que dans la présentation des témoins, pour

23 que ces témoins soient entendus à la fin de la procédure.

24 Notre avis, est que c'est à l'Accusation de déterminer quels sont les

25 témoins qu'elle veut appeler, de même que pour la Défense, lorsque chacun,

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1 de son côté, fait valoir ses moyens.

2 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Merci. Je voulais connaître votre

3 position.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre a pris note de ce que l'Accusation nous a

5 dit, a pris également note de la position de la Défense sur ce problème de

6 retrait de témoins. Nous allons, comme je l'ai déjà indiqué ce matin, en

7 délibérer après avoir écouté les uns et les autres. Nous rendrons notre

8 décision sur la question des

9 19 témoins, sauf si la Défense veut, d'ici demain, réintervenir, puisque la

10 Défense nous a dit qu'il fallait qu'elle réfléchisse. Dans la mesure où les

11 témoins retirés ne peuvent que satisfaire la Défense, je ne vois pas ce que

12 la Défense peut rajouter.

13 Est-ce que, Maître Residovic, vous voulez vous garder du temps pour nous

14 éclairer à nouveau demain ?

15 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous n'aurons pas

16 d'autres affirmations à faire demain. C'est pour cela que je vais laisser à

17 la Chambre de première instance le droit de prendre la décision en la

18 matière.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est ce que je pensais que vous vouliez dire.

20 M. DIXON : [interprétation] Oui, je suis tout à fait d'accord avec Mme

21 Residovic à cet égard. Nous n'aurons pas, non plus, d'autre chose à faire

22 valoir sur cette question.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Il est quasiment à quelques dizaines de minutes

24 l'heure de conclure. Y a-t-il un autre point que vous vouliez aborder ?

25 S'il n'y a pas de points -- je vois que Me Bourgon est bien silencieux, il

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1 n'a rien à nous demander. Il n'y pas de représentations nouvelles. M.

2 Mundis non plus.

3 Dans ces conditions, je vais lever l'audience. Je vous invite demain à

4 revenir pour l'audience qui commencera à 9 heures demain matin.

5 --- L'audience est levée à 13 heures 24 et reprendra le jeudi 20 mai 2004,

6 à 9 heures 00.

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