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1 Le mercredi 30 juin 2004
2 [Audience publique]
3 --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.
4 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, je vous donne la parole pour
6 annoncer le numéro de l'affaire.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Il s'agit
8 de l'affaire IT-01-47-T, le Procureur contre Enver Hadzihasanovic et Amir
9 Kubura.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. Je me tourne vers les
11 représentants de l'Accusation.
12 M. MUNDIS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,
13 Madame le Juge, Monsieur le Juge. Je salue toutes les personnes présentes
14 dans ce prétoire et à l'extérieur. Mme Benjamin, Daryl Mundis, et notre
15 commis aux audiences, Andres Vatter, au nom de l'Accusation.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Mundis.
17 Je me tourne vers les bancs de la Défense qui sont dégarnis.
18 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,
19 Madame et Monsieur les Juges. Pour la Défense du général Hadzihasanovic,
20 Edina Residovic et Alexis Demirdjian, notre assistant juridique.
21 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame et
22 Monsieur les Juges. Pour la Défense de M. Kubura, Me Ibrisimovic et M.
23 Mulalic, notre conseil assistant.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. La Chambre salue toutes les personnes
25 présentes, je salue les représentants de l'Accusation, les avocats, les
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1 accusés, ainsi que toutes les personnes de cette salle d'audience, ainsi
2 que les interprètes qui sont à l'extérieur de la salle d'audience.
3 Nous devons aujourd'hui poursuivre nos travaux par l'audition d'un témoin,
4 mais, avant d'introduire le témoin, je voudrais simplement faire une petite
5 précision concernant les calendriers des semaines à venir. A partir de
6 demain, nous sommes au mois de juillet. Il y a encore quelques témoins à
7 faire venir. J'informe d'ores et déjà l'Accusation qu'elle disposera des
8 jours à venir jusqu'au vendredi 23, qui sera le dernier jour où il pourra y
9 avoir une audience puisqu'après, la Chambre sera requise pour l'assemblée
10 plénière du Tribunal et, ensuite, il y a les périodes de vacances du mois
11 d'août. A partir de là, postérieur à vendredi 23 juillet, la première
12 audience utile, qui pourrait se tenir, sera le lundi 30 août. Par ailleurs,
13 dans le mois de juillet, il y a également deux jours où la Chambre ne
14 siègera pas. Ce sera le 19 et 20 juillet.
15 Que l'Accusation prenne ces dispositions étant précisé, qu'au départ, la
16 fin de présentation des éléments de preuve aurait dû intervenir début juin
17 et, en raison de circonstances particulières, nous n'avons pas encore
18 terminé cette phase du procès.
19 Pour me résumer, vous avez 23 jours pleins, mais, impérativement, le
20 dernier jour, ce sera le vendredi 23, et le 19 et 20, il n'y aura pas
21 d'audience. Nous reprendrons mercredi 21. Le cas échéant, s'il y avait un
22 témoin qui est indisponible pendant 15 jours, je pense que c'est lui qui
23 risque de poser problème, à savoir à quel moment il sera là.
24 Est-ce que, concernant ce calendrier, Monsieur Mundis, vous avez un point à
25 faire valoir ?
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1 M. MUNDIS : [interprétation] Merci de me donner la parole, Monsieur le
2 Président. Vous le savez, Madame et Messieurs les Juges, nous n'avons plus
3 que très peu de témoins, mais, comme vous venez de le dire, Monsieur le
4 Président, un de ces témoins ne pourra pas venir pendant au moins deux
5 semaines. La section des Victimes et des Témoins essaie d'établir une
6 communication avec les autres témoins. Nous allons bien sûr veiller à nous
7 conformer à l'ordonnance portant calendrier que vous venez de rendre.
8 Je pense qu'il serait utile pour les deux parties d'avoir les premières
9 idées, les premières réflexions de la Chambre, s'agissant des
10 argumentations fournies en application du 98 bis. Vous savez que,
11 normalement, le délai commence à courir à partir de la fin de la
12 présentation des moyens à charge, mais il serait quand même peut-être utile
13 d'avoir déjà vos premières réflexions.
14 Bien sûr, il sera pour avoir entendu l'avis de la Défense, mais il serait
15 peut-être utile de savoir ce que pense la Chambre, s'agissant du dépôt des
16 argumentations en application du 98 bis, mais je pense que ce que vous avez
17 proposé est tout à fait gérable pour nous, pour autant bien sûr que nous
18 ayons réglé toute la question des documents et que nous ayons aussi ces
19 témoins, les derniers qui seraient à comparaître.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Je vais donner la parole à la Défense pour
21 qu'elle nous fasse part de ses observations. Dans le calendrier qui vient
22 d'être indiqué, comme je l'ai indiqué, le dernier jour d'audience utile
23 serait le 23 juillet. Le 98 bis ne peut entrer en application que lorsqu'il
24 y a la fin de la présentation des moyens de preuve. Si j'extrapole votre
25 pensée, en tout état de cause, vous nous dites que le témoin, qui sera dans
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1 les 15 jours, vous serez en mesure de conclure, au plus tard avant le 23
2 juillet. C'est bien cela, Monsieur Mundis ?
3 M. MUNDIS : [interprétation] Pas de problèmes, en tout cas, que nous
4 prévoyons à ce propos.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Je me tourne vers la Défense. Vous avez entendu ce
6 qui a été dit. L'Accusation aimerait avoir des éclaircissements concernant
7 le 98 bis car, comme vous le savez, lorsque les moyens de preuve et que
8 l'Accusation indique formellement qu'elle a fini ses moyens de preuve, vous
9 disposez d'un délai de sept jours, délai qui peut, le cas échant, être
10 prolongé. Par ailleurs, il serait peut-être souhaitable que vous nous
11 indiquiez, à ce stade : est-ce que vous avez déjà réfléchi au problème ?
12 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Nous vous
13 remercions de nous avoir indiqué quelles sont les périodes où il peut y
14 avoir des audiences en plénière et, après la présentation des éléments de
15 preuve de l'Accusation, viendra le moment où il faudra que nous nous
16 préparions pour ce 98 bis. D'après ce que j'ai cru comprendre, du côté des
17 confrères de l'Accusation, ils auraient déclaré devant la Chambre de
18 première instance, qu'ils comptaient terminer la présentation des éléments
19 de preuve, non seulement après l'audition des témoins, mais après avoir
20 entendu la décision de la Chambre pour ce qui est de l'admissibilité des
21 documents. Il est évident que nous ne pourrons pas évaluer aujourd'hui, la
22 date exacte.
23 Mais nos réflexions pour ce qui est de la présentation des écritures, nous
24 allons profiter de ce droit, bien entendu, le règlement dit que cela devra
25 se faire au moins huit jours après la présentation des moyens à charge et,
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1 dans la pratique de ce Tribunal, il est accordé à la Défense une période
2 d'environ trois semaines. Nous nous attendons à ce que la Chambre ait de la
3 compréhension pour ce qui est de cette période minimum nécessaire pour la
4 Défense afin qu'elle puisse présenter ses écritures à elle.
5 Nous pensons qu'à peu près à cette même période ou je ne sais pas quelle
6 sera la période décidée par la Chambre, pour ce qui est de la possibilité
7 accordée à l'Accusation de répondre par ses écritures à elle. Nous tenons
8 compte du fait que le mois d'août c'est une période de vacances, non
9 seulement pour le personnel du Tribunal et nous, qui allons travailler aux
10 préparatifs de la Défense, nous allons quand même œuvrer pendant cette
11 période, mais pour les témoins aussi, il convient de les contacter à cette
12 période précise. Aussi aimerions-nous que la Chambre, une fois qu'elle
13 présentera son plan, tienne compte de ce mois où la Défense ne pourra pas
14 fonctionner comme il se doit et qu'il nous soit permis de procéder à nos
15 préparatifs à nous, pour ce qui est de la Défense.
16 D'après la pratique de ce Tribunal, après la présentation des éléments à
17 charge et décharge, il est habituel que la Chambre fournisse deux ou trois
18 semaines de délai pour ce qui est des préparatifs de présentation de ses
19 éléments où elle doit aussi avoir des propos liminaires. Nous n'avons pas
20 de propositions précises, mais nous estimons que la Chambre de première
21 instance, lorsqu'elle établira une projection des activités de l'Accusation
22 et de la Défense, tiendra compte des suggestions que nous avons présentées
23 et des réflexions que nous venons à l'instant de vous présenter. Merci.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci pour les observations que vous avez formulées.
25 Les autres avocats.
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1 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous
2 n'aurions rien à ajouter comme commentaire par rapport à ce que notre
3 consoeur, Madame Residovic, vient de dire.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : La Défense nous dit qu'à la fin de la présentation
5 des moyens de preuve, elle estime, conformément à la pratique générale,
6 qu'il faudra lui accorder au moins trois semaines pour ses écritures. La
7 Défense nous indique également que cela va tomber pendant la période dite
8 des vacances judiciaires et qu'elle aussi doit tenir compte de cela, et que
9 c'est un élément aussi à prendre en compte.
10 Par ailleurs, il est évident qu'une fois que les écritures seront déposées,
11 l'Accusation disposera également d'un temps, la pratique c'est de donner un
12 temps équivalent pour que l'Accusation puisse également répondre.
13 Si je fais une addition très rapide, trois semaines plus trois semaines,
14 cela devrait nous amener, grosso modo, vers mi-septembre à peu près, grosso
15 modo, voilà. Nous allons, les Juges, en délibérer entre nous et nous vous
16 donnerons un calendrier futur, mais, à ce stade, on a pris bonne note de ce
17 que vous nous avez dit, de manière très raisonnable, les uns, les autres.
18 Monsieur Mundis, est-ce que, compte tenu de ce que nous a dit la Défense,
19 vous voyez quelque chose à rajouter ?
20 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Rien à ajouter.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Ce qui comptera, évidemment, c'est de
22 savoir le jour précis où les moyens de preuve sont terminés et à partir de
23 là ce fameux délai courra. On va en reparler entre nous et on vous
24 informera le plus tôt possible car nous savons que vous avez aussi des
25 dispositions à prendre et qu'il vaut mieux prévoir largement à l'avance
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1 plutôt que d'être mis devant les faits accomplis.
2 J'avais cru comprendre hier que Me Bourgon voulait faire une intervention
3 sur des problèmes de documents, mais il n'est pas là, vous n'intervenez
4 pas. Me Bourgon nous avait dit qu'il ferait quelques représentations, mais
5 il n'est pas là. S'il n'a pas laissé des consignes --
6 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Comme vous le savez, suivant le partage
7 des tâches, cela fait partie des responsabilités de Me Bourgon. Aussi, s'il
8 estime nécessaire de s'adresser à la Chambre, il pourra le faire demain. Je
9 vous remercie.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous apprenons avec plaisir qu'il sera là demain. On
11 lui donnera la parole dès qu'il sera là pour qu'il nous dise ce qu'il
12 voulait nous dire.
13 S'il n'y a plus d'autres points à l'ordre du jour, qui voudraient être
14 évoqués par les uns et les autres, je vais demander à M. l'Huissier d'aller
15 chercher le témoin.
16 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, me permettez-vous, en
17 attente du témoin, de dire, aux fins du compte rendu d'audience, ce que
18 nous avons déjà dit. Apparemment, c'est un témoin de la Défense qui va
19 comparaître. Les questions, que nous allons poser, se limiteront à l'un des
20 points évoqué par l'ordonnance de la Chambre, le 17 mai 2004.
21 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. Je vais d'abord vérifier que vous
23 entendez bien dans vos écouteurs la traduction dans votre langue les propos
24 que je tiens. Si c'est le cas, dites : je vous entends et je vous
25 comprends.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] J'entends en anglais.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Il entend en anglais. Est-ce que vous entendez dans
3 votre langue ? Bien que la langue anglaise est tellement facile que tout le
4 monde peut la comprendre. Vous l'entendez dans votre langue.
5 Je voulais vous indiquer que vous avez été cité comme témoin par
6 l'Accusation. J'y reviendrai tout à l'heure. Etant cité comme témoin, on
7 doit prêter serment. Avant de prêter serment, je me dois de vous
8 identifier. Je vous demande de me donner votre nom, prénom, date de
9 naissance et lieu de naissance.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Senad Selimovic. Je suis né le 31
11 décembre 1956, à Zenica, Bosnie-Herzégovine.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est votre fonction ou qualité actuelle ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] En ce moment, je suis membre de l'armée de la
14 Fédération de Bosnie-Herzégovine, en retraite.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous êtes militaire à la retraite. Quel était votre
16 dernier grade avant de partir à la retraite, et vous êtes parti à la
17 retraite quelle année, quel mois ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] J'avais un grade de brigadier dans cette armée
19 de la Fédération. Je suis parti à la retraite le
20 30 mai 2004.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Brigadier. Est-ce que dans l'échelle des grades,
22 cela correspond à un grade d'officier ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est le grade d'officier le plus élevé.
24 Au-dessus, ce sont des grades de généraux.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Votre grade est en dessous du grade du général, où
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1 on doit vous appeler "mon Général".
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui -- non, non.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans toutes les armées du monde, en dessous du
4 général, c'est colonel.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] A dire vrai, je ne sais pas pourquoi cela est
6 ainsi. Dans certaines armées, ce grade existe. On a fait une espèce d'étape
7 intermédiaire. Dans d'autres armées, en effet, cela correspond au grade de
8 colonel.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais vous appeler mon Colonel. Ce sera beaucoup
10 plus simple.
11 Quand vous êtes parti à la retraite, vous étiez en fonction dans quelle
12 unité, juste avant votre départ à la retraite en 2004 ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais membre de ce commandement conjoint de
14 l'armée de la Fédération.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Dernière question avant de vous faire
16 prêter serment. En 1993, étiez-vous militaire ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous étiez dans quelle unité et avec quel grade ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais membre du 3e Corps de l'ABiH. J'avais
20 pour grade celui qui avait été le grade de la JNA, capitaine de première
21 classe.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : En 1993, vous étiez capitaine.
23 Est-ce que vous avez déjà témoigné devant un tribunal international ou un
24 tribunal national sur les faits qui se sont déroulés en Bosnie en 1993, ou
25 c'est la première fois que vous témoignez ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la première fois aujourd'hui.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie. Je vais vous demander de lire le
3 serment.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
5 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Vous pouvez vous asseoir.
7 LE TÉMOIN: SENAD SELIMOVIC [Assermenté]
8 [Le témoin répond par l'interprète]
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Colonel, vous avez été, comme je l'ai indiqué,
10 cité comme témoin par l'Accusation. Vous avez été cité comme témoin parce
11 que la Chambre doit résoudre une question relative à des documents. Votre
12 venue s'inscrit dans des aspects techniques liés à des documents.
13 Nous avons appris, au cours des audiences antérieures, que vous étiez un
14 témoin qui avait été prévu par la Défense. Ce n'est que récemment qu'on a
15 découvert que vous étiez un témoin de la Défense, alors même que,
16 maintenant, vous êtes cité par l'Accusation. Vous aurez à répondre
17 uniquement à des questions techniques concernant les documents et ce que
18 vous faisiez sur le plan technique. On n'abordera pas des questions de fond
19 concernant d'autres aspects.
20 Ce qui fait que l'Accusation va vous poser des questions. Une fois que
21 l'Accusation, qui est située à votre droite, vous aura posé ses questions,
22 d'ailleurs, vous les avez rencontrés, il y a quelque temps dans votre pays,
23 les avocats de la Défense, qui sont sur votre gauche, vous poseront des
24 questions dans le cadre de ce qu'on appelle un contre-interrogatoire. Le
25 cas échéant, l'Accusation reprendra la parole pour vous poser des questions
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1 supplémentaires. Les trois Juges, qui sont devant vous, vous poseront, à
2 l'issue de cette phase, également des questions et nous vous poseront des
3 questions concernant les aspects techniques sur les transmissions, les
4 documents, et cetera. Peut-être que nous aurons moins de questions à vous
5 poser en fonction des questions des uns et des autres. Lorsque nous posons
6 des questions, c'est pour éclaircir des réponses que le témoin à apporter
7 ou parce que les Juges estiment qu'il reste encore des lacunes qu'il
8 convient de combler et d'éclaircir certains éléments. C'est dans ces
9 conditions que nous vous poseront des questions.
10 Vous avez prêté serment de dire toute la vérité. Vous vous engagez à dire
11 la vérité car, comme vous le savez, lorsqu'on prête serment, si on ment, on
12 peut être poursuivi pour faux témoignage. Il y a également un autre aspect
13 que je vous indique, mais qui n'a pas normalement lieu à s'appliquer à
14 votre cas. C'est qu'un témoin peut refuser de répondre à des questions qui
15 seraient susceptibles de contenir des éléments qui pourraient être utilisés
16 un jour contre lui à charge. Dans cette hypothèse, la Chambre peut lui
17 demander quand même de répondre, et elle lui garantit une immunité pénale.
18 Essayez de répondre de manière claire et précise. Comme vous avez été
19 officier, vous savez ce que cela veut dire. Il faut que votre réponse soit
20 assez claire pour que nous comprenions. Car, si nous ne comprenons pas,
21 cela ne sert à rien qu'il y ait des questions et des réponses, d'où
22 l'importance de votre témoignage. Si vous ne comprenez pas le sens de la
23 question, demandez à celui qui vous la pose de la reformuler, et s'il y a
24 une difficulté quelconque, vous nous dites. Vous êtes là pour témoigner
25 surtout sur des aspects d'ordre purement technique, ce qui fait que vous
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1 devez être relax et absolument pas inquiet sur les questions qui vont vous
2 être posées.
3 Je me tourne vers M. Mundis et je lui cède la parole.
4 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
5 Interrogatoire principal par M. Mundis :
6 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur. En réponse à une question liminaire
7 posée par la Chambre, vous avez dit que vous aviez fait partie de la JNA.
8 Quand avez-vous rejoint les rangs de l'armée populaire yougoslave ?
9 R. J'ai rejoint les rangs de la JNA à compter du
10 1er juin 1978, une fois que j'ai terminé l'académie militaire de l'armée de
11 l'air à Rajlovac. C'est à proximité de Sarajevo.
12 Q. Lorsque vous avez obtenu votre diplôme de l'académie de l'armée de
13 l'air, est-ce que vous avez suivi d'autres formations ? Est-ce que vous
14 vous êtes spécialisé dans d'autres disciplines ?
15 R. Dans la JNA, après avoir terminé ma formation et que j'ai commencé à
16 travailler à l'aéroport de Bihac, l'endroit d'affectation qui était le
17 mien, j'ai suivi des stages militaires de perfectionnement. J'ai d'abord
18 fait un stage de commandant de Compagnie pour charger des transmissions.
19 Pour l'essentiel, il n'y avait plus rien d'autre dans la JNA.
20 Q. Pourriez-vous nous parler de la branche ou de service parmi les
21 effectifs de la JNA dans laquelle vous avez servi ?
22 R. J'ai été promu officier chargé des transmissions, ce qui fait qu'en
23 tout temps, j'ai été appelé à intervenir dans ce domaine, dans les
24 effectifs chargés de transmission.
25 Q. Vous dites pendant toute cette période. Pourriez-vous préciser cette
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1 période ? Pendant combien de temps avez-vous été spécialiste en matière de
2 transmission ?
3 R. Depuis le début dans la JNA, j'ai été commandant de peloton et de
4 Compagnie chargée des transmissions, puis j'ai été chargé des transmissions
5 à l'aéroport de Bihac. C'est de l'ordre de la taille d'une brigade. Ce sont
6 là les fonctions que j'ai accomplies au sein de la JNA. Pour ce qui est de
7 l'ABiH, j'ai accompli des fonctions de directeur des transmissions au QG de
8 Zenica jusqu'à la création du
9 3e Corps. A partir de la création du 3e Corps, j'ai assumé les fonctions de
10 chef de département des transmissions au sein de ce
11 3e Corps, et j'ai été commandant adjoint de l'état-major des forces
12 chargées des transmissions.
13 Après la guerre, j'ai été nommé aux fonctions d'adjoint suppléant du
14 commandant des transmissions de l'armée de la Fédération -- l'armée
15 conjointe de la Fédération. Ce sont là les fonctions que j'ai accomplies
16 jusqu'à ma mise à la retraite.
17 Q. Merci de cette réponse. Est-ce que je peux la prendre comme point de
18 départ pour dire que, pendant plus de 25 ans, vous vous êtes occupé de
19 questions de transmissions dans l'armée ?
20 R. Tout à fait.
21 Q. Je reviens un peu en arrière. Je vous demande d'étoffer la réponse que
22 vous venez de nous donner à l'instant. Vous nous avez dit qu'à Bihac, quand
23 vous étiez dans les forces de l'air de la JNA, vous étiez commandant d'une
24 brigade des transmissions; c'est cela ?
25 R. Oui. En réalité, j'ai été d'abord commandant d'une Compagnie chargée
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1 des transmissions à l'aéroport de Bihac. C'est une base aérienne, qui ne
2 connaissait pas l'état des choses, relevait d'un rang de brigade. J'avais
3 deux fonctions. J'étais commandant d'une Compagnie chargée de transmissions
4 et j'étais commandant de ces transmissions pour ce qui est du niveau de la
5 brigade.
6 Q. Pourriez-vous nous dire la date approximative à laquelle vous avez
7 quitté la JNA ?
8 R. Avril 1992.
9 Q. Vous avez quitté la JNA. Dans quelles forces armées avez-vous aussitôt
10 après servi, après avoir quitté cette JNA ?
11 R. J'ai pris mes enfants avec moi pour aller à Zenica au mois d'avril
12 1992, j'entends. Par la suite, je n'ai pu retourner à Bihac où je résidais
13 jusque-là. C'est le 30 avril que je me suis présenté au QG régional chargé
14 de la défense à Zenica. C'était la Défense territoriale. C'était le QG
15 régional de cette Défense territoriale à Zenica.
16 Q. Je tiens à préciser une chose. Aux fins du dossier de l'audience, vous
17 vous êtes présenté le 30 avril, avez-vous dit, mais quelle année ?
18 R. 1992.
19 Q. Vous êtes resté combien de temps à l'état-major au QG général de la
20 Défense territoriale de Zenica ?
21 R. Je suis resté tout le temps jusqu'à la création de ce commandement du
22 3e Corps. Tout simplement, une fois ce corps créé, j'ai été réaffecté aux
23 fonctions de responsable de ces transmissions au sein du 3e Corps.
24 Q. A partir du 30 avril 1992 jusqu'au moment de la constitution du 3e
25 Corps d'armée, au cours de cette période, vous étiez à l'état-major
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1 régional de la Défense territoriale de Zenica. Quelles étaient vos
2 attributions, vos responsabilités ?
3 R. Dans ce QG régional, j'ai effectué les fonctions de responsable des
4 transmissions au sein de ce QG régional de Zenica.
5 Q. Monsieur Selimovic, est-ce que vous vous souvenez, approximativement,
6 de la date la constitution du 3e Corps ?
7 R. Novembre -- fin novembre 1992. Oui.
8 Q. Vous avez dit que vous aviez pour mission d'être adjoint ou assistant.
9 Est-ce que vous pourriez repréciser vos fonctions précises au sein du 3e
10 Corps d'armée ?
11 R. Dans le cadre de ce QG, j'ai été adjoint du directeur des
12 transmissions. C'est, en fait, les fonctions du responsable des
13 transmissions au sein du 3e Corps. Très souvent, ces fonctions-là ont des
14 appellations différentes, mais cela se résume à une seule et même chose.
15 Q. Etant donné la fonction que vous occupiez, serait-il exact de dire de
16 vous, que vous étiez le chef des transmissions ou l'officier le plus haut
17 gradé pour ce qui est des transmissions au sein du 3e Corps d'armée ?
18 R. Oui.
19 Q. Pourriez-vous dire aux Juges combien de temps vous avez passé au 3e
20 Corps d'armée ?
21 R. Je suis resté au 3e Corps, à la fin, pratiquement jusqu'à la fin de la
22 guerre, j'y suis resté tout ce temps-là. En 1997, me semble-t-il -- oui, en
23 1997, je suis passé dans ce commandement conjoint de l'armée de la
24 Fédération.
25 Q. Pendant toute cette période, qui va de la constitution du 3e Corps,
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1 est-ce que vous étiez attaché à cette unité jusqu'au moment où vous en avez
2 été détaché un peu de temps après la guerre ? Est-ce que vous avez conservé
3 cette fonction de chef des transmissions ?
4 R. Oui.
5 Q. En tant que chef des transmissions, qui aviez-vous comme supérieur
6 hiérarchique immédiat ?
7 R. Au sein du 3e Corps vous voulez dire ?
8 Q. Tout à fait.
9 R. Mon supérieur hiérarchique était Mekic Muradif, le chef de l'état-major
10 de ce commandement du 3e Corps. C'était mon premier supérieur hiérarchique.
11 Q. Mekic Muradif, combien de temps a-t-il été votre supérieur
12 hiérarchique, en tant que chef d'état-major ?
13 R. Je ne sais pas. Je n'arrive plus à me souvenir exactement. Mais,
14 pendant qu'il était chef d'état-major, c'était là des fonctions, en fait,
15 je ne me souviens vraiment pas des dates. Il me semble que c'était fin
16 1992, depuis le mois de novembre jusqu'à, disons, la mi-1993 ou peut-être
17 l'automne. Je n'arrive plus à me situer au juste.
18 Q. Vu vos réponses, je suppose qu'en tant que chef des transmissions, vous
19 faisiez rapport directement au chef d'état-major.
20 R. Oui, le plus souvent, oui.
21 Q. Pourriez-vous nous parler des échelons supérieurs de la voie
22 hiérarchique ? Je veux dire à partir de l'échelon constitué par le chef
23 d'état-major au sein du 3e Corps d'armée.
24 R. Si vous me le permettez, j'indiquerais d'abord que le commandant du 3e
25 Corps avait été le général Hadzihasanovic. Son adjoint, il avait une
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1 fonction de suppléant du commandant, à l'époque, et c'était Dzemal Merdan,
2 à ce moment-là. Je dirais aussi qu'en troisième position, à mon avis, il y
3 avait le dénommé Muradif Mekic, mais cette fonction de suppléant du
4 commandant, existait dans certaines unités et n'existait pas dans d'autres.
5 Là où il n'y avait pas de suppléant du commandant, c'était le chef d'état-
6 major qui était l'homme numéro deux sur le plan hiérarchique.
7 Q. Pour que tout soit clair, dans le 3e Corps d'armée, au sommet, on avait
8 le commandant, suivi du commandant en second, lequel était lui-même suivi
9 du chef d'état-major.
10 R. Je pense qu'il en a été ainsi, en effet.
11 Q. Pourriez-vous parler davantage aux Juges des responsabilités, de ce
12 qu'elles représentaient en tant qu'officier chargé des transmissions dans
13 le 3e Corps d'armée.
14 R. Dans le cadre de l'état-major, ce Département de transmissions a
15 constitué une instance administrative chargée de la planification, qui
16 avait pour vocation, justement, la planification et l'organisation de tout
17 ce qui faisait partie des transmissions au sein du commandement.
18 Q. Pourriez-vous nous expliquer davantage ce que représente la
19 "planification et l'organisation des transmissions" ?
20 R. J'avais été l'organe professionnel, l'organe technique du chef d'état-
21 major qui assumait les responsabilités pour le fonctionnement de tout ce
22 qui faisait partie des transmissions. J'avais pour mission de planifier et
23 organiser le système des transmissions au sein de ce commandement du 3e
24 Corps. Pour ce qui est de ces instances chargées de l'administration et de
25 la planification, je n'avais pas la possibilité de donner des ordres.
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1 J'étais une espèce d'instance qui avait pour vocation de donner des
2 conseils et d'aider à organiser le système des transmissions.
3 Q. Vous nous avez dit que vous n'aviez pas la capacité, l'autorité
4 nécessaire pour donner des ordres. Mais est-ce que vous savez, plus ou
5 moins, comment on donnait des ordres, quels étaient les réglementations et
6 autres règlements qu'ils appliquaient pour ce qui est de l'émission
7 d'ordres ? Quelles en étaient les modalités ?
8 R. Pour l'essentiel, l'on mettait en œuvre certains aspects de ces
9 processus d'organisation. Des fois, cela mettait un peu plus de temps. Des
10 fois, cela se faisait assez vite. C'est là, un processus où le commandant
11 prenait les décisions, au niveau de ce qui se passait. Dans l'ensemble des
12 processus, en ma qualité de responsable, j'ai certainement pris part à la
13 formulation des propositions pour ce qui est de donner, par la suite, des
14 ordres afférents au fonctionnement de ces transmissions.
15 Q. Je reviens en arrière. Je vais vous poser d'autres questions à ce
16 propos dans un instant. Est-ce qu'il y avait des règlements en vigueur qui
17 précisaient la façon dont on devait préparer ces ordres, enfin qui
18 précisaient toutes ces modalités ?
19 R. Nous nous sommes servis de ce que nous savions à ce jour. Les
20 officiers, qui avaient été des officiers de carrière auparavant, s'étaient
21 servis des expériences de la JNA qui avait réglé ces différents points,
22 pour ce qui est de la façon dont doit se présenter un ordre, quelle est la
23 forme qui devait lui être donnée. Par conséquent, il y avait, si vous
24 voulez des matrices, des formulaires type qui devaient expliquer la façon
25 dont devait se présenter un ordre. C'est cela, ce que vous nous dites ?
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1 R. Oui.
2 Q. Vous avez brièvement parlé de la façon dont les ordres étaient rédigés.
3 Pourriez-vous nous donner des détails quant à la mise en pratique de tout
4 ceci ? Comment est-ce qu'on procédait pour rédiger un ordre ?
5 R. Les ordres ont été rédigés suivant des modalités différentes. Des fois,
6 c'était un individu, disons un professionnel dans un domaine déterminé.
7 Maintenant, si l'ordre portait sur ce domaine concret, c'était le
8 professionnel qui élaborait la présentation de l'ordre en question. Il y
9 avait la possibilité de le faire dans un processus organisationnel ou de
10 procéder, de façon abrégée, avec la participation de plusieurs individus, à
11 la définition des éléments constituants de l'ordre en question. Notre
12 directeur, voire son commandant ou l'un des adjoints, pouvaient le rédiger
13 eux-mêmes.
14 Q. Je vais vous demander d'être le plus précis possible, Monsieur le
15 Témoin, sur cette question. Je voudrais savoir qui avait l'autorité
16 nécessaire à l'émission d'ordres.
17 R. D'abord, c'était le commandant du 3e Corps, le général Hadzihasanovic.
18 En quelque sorte, il y avait aussi le suppléant, à savoir, le général
19 Dzemal Merdan et le chef d'état-major, M. Mekic Muradif.
20 Q. Vous nous avez parlé de la procédure permettant, quelquefois, que
21 plusieurs individus participent à l'élaboration d'un ordre. Est-ce que ces
22 individus prenaient eux-mêmes l'initiative, ou est-ce qu'ils exécutaient
23 des instructions données par les officiers supérieurs du 3e Corps d'armée ?
24 R. Le plus souvent, on suivait les instructions fournies par les
25 supérieurs et pour l'essentiel, cela était le cas, en effet.
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1 Q. Pouvez-nous donner des exemples concrets où vous avez, par exemple, un
2 officier d'état-major qui va prendre l'initiative d'élaborer -- de rédiger
3 un ordre ?
4 R. Parfois, nous avions des situations où la chose ne concernait que le
5 domaine couvert par l'individu concerné, par ses fonctions à lui et les
6 ordres donnés avaient moins d'importance. Il s'agissait de réglementer
7 certains aspects et, dans le cas où il n'y aurait pas de supérieurs de
8 présent parce que ces supérieurs étaient très souvent sur le terrain, à des
9 postes de commandement avancé ou en train d'inspecter des unités sur le
10 terrain. Il se pouvait, dans des situations analogues, que cela soit fait,
11 mais il se pouvait aussi que l'un des supérieurs quelconque donne
12 instruction de rédiger un ordre pour telle ou telle unité et à quelqu'un,
13 qui est un professionnel en la matière, parce que le commandant ou le chef
14 d'état-major ne pouvait pas connaître tous les détails, ce qui fait qu'il
15 demandait, et très souvent il le faisait d'ailleurs, demandait les
16 opinions, les propositions concrètes de la part de leurs subordonnés.
17 R. Qui avait le pouvoir de signer les ordres écrits au nom du 3e Corps
18 d'armée ?
19 R. Pour autant que je m'en souvienne et pour autant que je le sache, cela
20 était le commandant, et le suppléant du commandant et le chef d'état-major.
21 C'était en gros les trois fonctions qui en avaient la capacité. Il arrivait
22 que ce soit là un officier relevant d'un département professionnel, qui
23 venait faire figure de numéro 4, disons, dans la hiérarchie et,
24 éventuellement, dans certains domaines -- certaines branches d'activités,
25 pour ce qui est de domaines qui ne nécessitaient pas l'émission d'ordres
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1 importants, si je peux les qualifier ainsi, c'étaient des ordres
2 d'importance mineure.
3 Q. Monsieur le Témoin, vous nous avez dit que ce suppléant ou l'adjoint ou
4 encore le chef d'état-major, ces autres officiers étaient habilités à
5 signer des ordres. Est-ce qu'ils le feraient si le commandant était présent
6 ? Est-ce que ces individus donneraient des ordres si le commandant était
7 présent au QG ?
8 R. Je ne pense pas, pas des ordres écrits. De toute manière parce que cela
9 relevait des droits du commandant et, pour l'essentiel, c'est lui qui le
10 faisait.
11 Q. Si tout est clair cela veut dire que, si le commandant était présent,
12 il signait les ordres, mais en son absence qui
13 signait ?
14 R. Le plus souvent c'était les deux personnes que j'ai indiquées, le
15 suppléant, le général Merdan, et le chef d'état-major, Mekic Muradif.
16 Q. Si le général Merdan était présent, alors que M. Hadzihasanovic était
17 absent, est-ce que c'était le chef d'état-major qui signait un document ?
18 R. Je vous ai déjà dit que cette fonction, enfin, parfois, nous ne savions
19 plus si c'était le chef d'état-major ou le suppléant du commandant qui
20 était en position numéro 2 et, très souvent, nous n'arrivions pas à faire
21 cette distinction. Mais, en gros, l'un et l'autre pouvaient signer lorsque
22 le commandant n'était pas là ou lorsque deux sur les trois n'étaient pas
23 là. Il y avait des situations de ce genre aussi.
24 Q. Est-ce qu'il y a eu des situations où les trois hommes étaient absents
25 ? A ce moment-là, qui signait les ordres pour le 3e Corps d'armée ?
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1 R. Je pense -- dans des cas d'exception, je crois que c'était plus rare
2 cela, mais disons que ce devait être l'officier opérationnel ou le chef du
3 département -- le chef du département personnel.
4 Q. A votre connaissance, Monsieur, est-ce qu'il y avait des ordres
5 permanents dans le 3e Corps d'armée, qui déterminaient les personnes
6 habilités à signer les documents en l'absence des officiers supérieurs ?
7 R. Je n'arrive pas à me rappeler d'avoir vu un ordre de ce genre, mais
8 c'est une règle, peut-être pas une règle écrite, mais une règle, disant que
9 c'était là les personnes dont les fonctions étaient de nature à leur
10 permettre de signer des ordres.
11 Q. Ceci, en fait, découle du bon sens et de la formation militaire. Il
12 faut toujours qu'il y ait quelqu'un qui soit responsable même en l'absence
13 du commandant, de son adjoint et du chef d'état-major ?
14 R. Oui, vous avez tout à fait raison.
15 Q. Je vais maintenant passer à la question des préparatifs, de la façon
16 concrète dont on préparait un ordre écrit. Vous avez déjà dit que dans
17 certains cas, c'était un processus un peu collectif impliquant plusieurs
18 personnes qui participaient à la rédaction de l'ordre. Comment s'y
19 prenaient-ils ? Comment est-ce qu'ils s'y prenaient pour rédiger un ordre ?
20 R. En bref, le commandant donnait l'idée, disait de quelle façon devait à
21 peu près se présenter la teneur de ce document, de l'ordre, et les
22 instances professionnelles, les adjoints du chef d'état-major, les
23 officiers supérieurs de l'état-major se mettaient à l'œuvre et ils
24 proposaient des points qui faisaient partie de l'ordre relevant de leur
25 domaine d'intervention et qui devaient figurer dans l'énoncé de l'ordre. A
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1 la fin le commandant acceptait ou rejetait ces éléments des ordres élaborés
2 par ses adjoints, voire par le suppléant placé sous ses ordres.
3 Q. Ces ordres étaient-ils manuscrits ? Est-ce qu'ils étaient rédigés à la
4 main ou est-ce qu'on se servait d'une machine à écrire pour les rédiger,
5 pour les taper ? Comment les produisait-on ces ordres ?
6 R. Au début, les ordres ont essentiellement été rédigés à l'aide d'une
7 machine à écrire, ce n'est que par la suite qu'on s'est servi de
8 l'ordinateur. Le plus souvent, cela a été un ordinateur pour ce qui est, du
9 moins, du commandement du 3e Corps, les ordres ont été rédigés sur
10 ordinateur, et passés par l'imprimante.
11 Q. Qu'advenait-il du document qui était imprimé ? Une fois qu'il sortait
12 de l'imprimante, quelle était la procédure suivie ?
13 R. Cela avait été d'habitude porté vers le commandant pour qu'il signe.
14 Q. Une fois qu'il avait signé ce document, cet ordre, le commandant, que
15 se passait-il ?
16 R. L'ordre partait ensuite vers le Département administratif de l'état-
17 major où l'on enregistrait cet ordre, où l'on apposait le sceau nécessaire
18 à côté de la signature du commandant, voire de la personne qui a signé ce
19 document.
20 Q. Vous dites "certifié". Pourriez-vous étoffer votre propos ? Comment
21 est-ce que cela se passait ?
22 R. Le premier des visas, c'est la signature de la personne qui est
23 habilitée à signer; dans ce cas concret, c'est le commandant, son suppléant
24 ou le chef d'état-major. Par la suite, on appose un cachet qui certifie que
25 c'est bien cette personne dans cette unité. Il s'agit d'un cachet rond, qui
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1 est là à certifier l'authenticité de la signature qui s'y trouve.
2 Q. Qui se chargeait de cette opération, qui certifiait ?
3 R. Pour l'essentiel, dans ce personnel administratif, c'était les gens qui
4 y travaillaient. Il y avait là trois ou quatre individus qui se relayaient
5 au fil du temps. C'étaient eux qui étaient chargés de cette partie-là du
6 travail.
7 Q. Comment est-ce qu'on s'y prenait pour déterminer l'authenticité de la
8 signature avant d'apposer ce cachet sur l'ordre ?
9 R. Il fallait qu'ils connaissent l'aspect de la signature, celle du
10 commandant ou de la personne qui était habilitée à signer. Je pense qu'ils
11 en savent davantage à ce propos.
12 Q. Vous nous avez dit que l'officier administratif devait connaître
13 l'apparence, l'aspect de la signature. Est-ce que vous avez des
14 informations quelles qu'elles soient quant aux connaissances qu'auraient
15 ces personnes s'agissant de l'aspect de la signature ?
16 R. Je pense qu'ils étaient tenus de déposer la signature de la personne
17 habilitée à utiliser le sceau. Je ne sais pas si cette mesure était déjà en
18 vigueur à l'époque. Je crois que c'est probable.
19 Q. Après avoir entendu votre réponse, je crois comprendre que puisque vous
20 parlez de déposer la signature, il devait exister une liste des signatures
21 autorisées et qu'ensuite, un responsable comparait les signatures pour
22 établir si la personne était habilitée ou pas ?
23 R. Je crois que c'était bien cela. Je crois que c'est de cette façon que
24 les choses se passaient.
25 Q. Une fois que l'ordre écrit était signé, certifié et qu'on y avait
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1 apposé un sceau, qu'advenait-il de cette ordre écrit ?
2 R. Puisque les transmissions répondaient à une planification, à ce moment-
3 là, nous avions des transmissions par radio, qui étaient planifiées, des
4 transmissions par câble, des transmissions par estafette. On définissait la
5 façon dont l'acte en question, enfin l'ordre, la plupart du temps, cela se
6 passait grâce à une estafette, parce que le système de transmissions par
7 câble n'était pas mesure d'assurer l'expédition d'un document composé de
8 plusieurs pages. Dès lors que nous parlons de transmissions classiques,
9 elles étaient utilisées pour des messages courts, de deux pages au maximum,
10 disons. Un ordre de cette espèce était transmis le plus souvent par
11 estafette.
12 Q. Les ordres transmis par estafette comportaient-ils tous des signatures
13 originales et le sceau original, ou les exemplaires originaux signés
14 demeuraient-ils au QG du 3e Corps ?
15 R. Il y avait diverses façons de procéder. De façon générale, ces
16 documents étaient signés, enfin, disons tous les exemplaires étaient signés
17 par le commandant. Après quoi, on y apposait ce sceau circulaire. Il
18 arrivait quelquefois, il me semble, à cause de la procédure ou parce qu'il
19 fallait agir vite, que le commandant ne signe qu'un seul document de base
20 qui restait dans les archives, et que ce document sur lequel figurait sa
21 signature soit photocopié. Après quoi, on apposait le sceau sur la
22 signature. Eventuellement, on signalait que la chose avait été faite sur la
23 base de la signature certifiée et agréée du commandant.
24 Il y avait deux façons différentes d'agir. Il était possible, y compris
25 d'apposer un sceau sur ce que j'appellerais la signature photocopiée du
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1 commandant, mais sur la base d'un document authentique établi au préalable.
2 Q. J'aimerais à présent vous poser quelques questions qui découlent de ce
3 que vous venez de nous dire. Ayant entendu vos réponses, je crois
4 comprendre que, dans certaines circonstances ou dans certaines situations,
5 des exemplaires multiples d'un ordre pouvaient être imprimés, et qu'ils
6 étaient tous signés par le commandant et certifiés grâce à un sceau, des
7 exemplaires, par exemple, des copies d'un ordre du commandant ?
8 R. Oui, il y avait des cas où les choses se passaient ainsi. Comme je l'ai
9 déjà dit, il y avait des cas également où un seul exemplaire de l'acte
10 était signé de façon originale. Après quoi, ce document signé était
11 photocopié, par exemple, avec la signature du commandant. Dans ces cas-là,
12 c'était sur la photocopie que l'on apposait le sceau, qui confirmait que le
13 document était authentique.
14 Q. Pour que tout soit clair, Monsieur, si le document devait être
15 photocopié, en tout cas, reproduit d'une façon ou d'une autre après que le
16 commandant l'ai signé, on apposait, néanmoins sur cette photocopie un sceau
17 de façon à certifier que la photocopie était bien une photocopie de
18 l'original, et le sceau y était apposé avant l'expédition de ce document
19 vers l'unité destinataire ?
20 R. Oui, le plus souvent, oui.
21 Q. Quelle couleur était utilisée par les responsables administratifs
22 s'agissant du sceau qui était apposé sur les documents ?
23 R. Le plus souvent, la couleur était bleue.
24 Q. Vous nous avez dit également, Monsieur, que le document en question,
25 une fois qu'il avait été expédié, je vais reformuler.
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1 L'original de l'ordre demeurait-il au QG du 3e Corps ?
2 R. Oui, le plus souvent, oui.
3 Q. Qu'advenait de cet original ? Où était-il conservé ? Quel traitement
4 subissait-il ?
5 R. Le plus souvent, cet exemplaire était destiné à ce que j'appellerais
6 les archives. Enfin, cela a changé avec le temps. Le plus souvent, on
7 l'envoyait aux archives. Je dirais que c'était le premier exemplaire qui
8 demeurait auprès de la personne qui, disons, avait traité l'ordre en
9 question, avait fait le travail. Il s'agissait parfois du commandant.
10 Parfois, comme je l'ai déjà dit, le suppléant ou le chef d'état-major. Ce
11 document pouvait se trouver auprès de ces personnes. Au bout d'un certain
12 temps, il se retrouvait tout de même dans ce que j'appellerais les
13 archives. Ce n'était pas de véritables archives. A cette époque-là, en
14 général, nous restituions, en tout cas, nous placions ce document dans les
15 archives. Pour être plus précis, je dirais que c'était le responsable
16 administratif qui était chargé de ces archives et qui se retrouvaient avec
17 ce document.
18 Q. Le Département administratif du 3e Corps avait des archives où étaient
19 conservés les documents originaux ?
20 R. Le plus souvent, oui.
21 Q. J'ai omis un peu plus tôt de vous poser une question que je vais vous
22 poser à présent. C'était au moment où nous parlions des individus autres
23 que le commandant qui signait le document original. Pourriez-vous nous
24 dire, s'agissant de ce bloc de signatures informatique ou autre qui
25 comportait la signature du commandant, informatisées ou dactylographiées,
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1 quel était le nom de la personne qui apparaissait sur ce bloc ?
2 R. Le plus souvent, c'était celui du général Hadzihasanovic, c'est-à-dire,
3 le commandant du 3e Corps d'armée.
4 Q. Qu'en est-il des cas ou une autre personne que le général
5 Hadzihasanovic signait le document ? Quel était le nom dactylographié qui
6 apparaissait sur ce bloc ? Etait-ce toujours le nom du commandant ou était-
7 ce le nom de la personne qui signait, effectivement ?
8 R. Le plus souvent, c'est-à-dire, dans la majorité des cas, on y lisait le
9 nom et le prénom du commandant, je pense, c'est-à-dire, du général
10 Hadzihasanovic. C'est toujours son nom que l'on trouvait dactylographié en
11 bas de la page sur le document qui était soumis à signature.
12 Q. Dans les cas où c'était quelqu'un d'autre que le commandant qui signait
13 le document, tel que, par exemple, le suppléant ou le chef d'état-major ou
14 un responsable du Département administratif, lorsque c'étaient ces
15 personnes qui signaient le document, y avait-il sur le document une
16 indication signalant que c'était une autre personne que le commandant qui
17 avait signé le document ?
18 R. Parfois, la chose était signalée grâce à l'emploi du mot "Za", qui
19 signifie "au nom de", le suppléant, au nom du commandant, et on trouvait la
20 signature de cette personne, c'est-à-dire que, sous forme dactylographiée,
21 on trouvait le nom et le prénom du général Hadzihasanovic et, en dessous,
22 on trouvait la signature de la personne autre que le commandant dont je
23 suis en train de parler, c'est-à-dire, une personne choisie parmi trois au
24 maximum, dirais-je, et ce, avec la mention "Za" ou sans la mention "Za."
25 Q. Ce que vous nous dites, Monsieur, c'est qu'il était possible que l'on
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1 ne trouve pas la mention "Za", c'est-à-dire, "au nom de", sur tous les
2 documents lorsque quelqu'un d'autre que le commandant les signait.
3 R. Oui, cela se passait. Enfin, cela arrivait avec ces documents pour
4 autant que je m'en souvienne, effectivement.
5 Q. Encore une fois, dans l'intérêt de ceux, d'entre nous, qui,
6 malheureusement, ne parlent pas la langue bosniaque, je vous demanderais de
7 bien vouloir épeler le mot qui signifie "au nom de" dans votre langue enfin
8 qu'il soit consigné au compte rendu d'audience.
9 R. Z-A. Z-A, en anglais.
10 Q. Merci beaucoup, Monsieur Selimovic. J'aimerais que nous revenions un
11 instant à la question de la transmission des ordres écrits vers des
12 destinations situées sur le terrain. Vous nous avez déjà dit que, de façon
13 générale, si un document était assez long, il était expédié par estafette,
14 mais que s'il était plus court, il était transmis par d'autres moyens. Je
15 vous demande, de façon générale, de nous dire ce qu'il en était des moyens
16 de transmissions disponibles au sein du 3e Corps d'armée, lorsqu'il
17 s'agissait de transmettre des ordres écrits pendant l'année 1993.
18 R. J'en ai déjà parlé quelque peu. Les transmissions par radio, les
19 transmissions par câble et les transmissions par estafette étaient
20 comprises, étaient évoquées dans le plan. Il existait un plan. Je vais
21 donner quelques détails complémentaires. Lorsque nous parlons de
22 transmissions radio, il s'agissait surtout de transmissions "HF", c'est-à-
23 dire, haute fréquence, et "VVF", très haute fréquence. Si nous parlons de
24 transmissions haute fréquence, elles étaient effectuées par des dispositifs
25 d'amateurs en 1993. Lorsque nous parlons de très haute fréquence, elles
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1 étaient utilisées pour des transmissions à des distances plus réduites.
2 Nous avions des équipements qui nous venaient de l'ex-JNA. Il était très
3 difficile pour nous d'entretenir, puisque nous manquions de pièces
4 détachées, nous manquions d'électricité, et cetera. Il s'agissait
5 d'équipement assez ancien.
6 C'étaient des équipements qui étaient utilisés pour des transmissions entre
7 les formations militaires. Nous utilisions certains équipements des PTT,
8 des services publics pour les transmissions où tout n'était pas encore
9 détruit. Dans certains territoires nous pouvions utiliser ces équipements,
10 dirais-je. Je répète que nous utilisions également des estafettes.
11 Q. Encore une fois, Monsieur, je vais vous poser une question qui découle
12 de la réponse que vous venez de fournir. Pourriez-vous nous dire de quelle
13 façon on utilisait un système radio haute fréquence ou très haute fréquence
14 pour transmettre des ordres
15 écrits ?
16 R. Ce système permettait d'abord de transmettre des paroles. Dans cette
17 période, nous avons fait l'acquisition, en tout cas, nous avons obtenu un
18 certain nombre de modems radio qui, une fois couplé à ces dispositifs,
19 pouvaient être reliés à un ordinateur. L'information, qui devait être
20 transmise, était d'abord écrite pour passer dans cette structure
21 d'ordinateur modem et équipement radio, et ce message est arrivé à un
22 système composé de ces trois éléments, c'est-à-dire, radio, modem,
23 ordinateur. Nous avions également des programmes de cryptage qui
24 permettaient à ces documents écrits d'arriver là où ils devaient arriver, à
25 leur point de destination, sous forme écrite, c'est-à-dire, sous la même
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1 forme que celle que le document avait, à son expédition.
2 Q. Pourriez-vous nous dire un peu plus, au sujet des communications par
3 câble, quels étaient les systèmes utilisés et quelles étaient les
4 dénominations de ces systèmes et de ces équipements ?
5 R. J'ai déjà dit que nous utilisions des parties. Par exemple, lorsque
6 nous voulions contacter la Brigade de Kakanj ou une Unité de Kakanj, dans
7 ce cas, je sais que c'étaient les transmissions par câble qui
8 fonctionnaient. Nous utilisions un système très comparable, sauf que là,
9 c'était un téléphone qui était couplé à un modem téléphonique et un
10 ordinateur au point de départ et qu'au point d'arrivée, je me répète, nous
11 avions le même équipement composé de ces trois éléments lorsqu'ils
12 existaient. Là encore, une information écrite pouvait être expédiée, comme
13 d'ailleurs, c'est le cas aujourd'hui. Les matériels utilisés aujourd'hui
14 sont assez semblables.
15 Q. Monsieur, vous avez également parlé du recours aux moyens de
16 télécommunication, des PTT. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce
17 sujet ?
18 R. Le système en question avait été considérablement détruit pendant les
19 opérations militaires, de sorte, je le répète, que nous utilisions des
20 parties de ce système. Il y avait des endroits où le central téléphonique
21 local fonctionnait encore. Dans ce cas, nous utilisions ces capacités pour
22 assurer des communications téléphoniques, le plus souvent, dans les locaux
23 en question. S'agissant de communications entre les villes, qui sont dans
24 la direction de Kakanj, ces communications téléphoniques fonctionnaient le
25 plus souvent. Ce sont des lignes à deux câbles qui sont très semblables aux
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1 lignes téléphoniques.
2 Q. Monsieur, connaissez-vous le système connu sous le nom de système par
3 paquet ?
4 R. Oui, oui.
5 Q. Le 3e Corps, possédait-il un système par paquet et, si oui, à quel
6 moment le 3e Corps a disposé, pour la première fois, d'un tel système ?
7 R. C'est un système qui est développé, dirais-je, sur les liaisons radio
8 très haute fréquence. En fait, c'est un moyen de communication amateur, qui
9 était utilisé par les radios amateurs et qui a été mis en place à ce
10 moment-là. Suite à la constatation qu'un tel système pouvait, y compris,
11 permettre de transmettre des documents écrits, nous nous sommes tout
12 simplement mis à organiser un tel système. Le 3e Corps possédait un tel
13 système, étant entendu que c'était un système en cours de développement.
14 Son développement a commencé en 1993 et a continué à se développer au fil
15 du temps, c'est-à-dire qu'au fil du temps, il a été de plus en plus
16 utilisé. Parce que, comme je l'ai déjà dit, il faut deux équipements
17 complets pour que ces transmissions puissent être assurées de cette façon,
18 au point de départ et au point d'arrivée. Il n'était pas toujours possible
19 de disposer de tous les éléments nécessaires du système au point de
20 destination, mais, dans notre cas, au 3e Corps d'armée, le commandant
21 possédait ces trois éléments.
22 Q. Je vous ai entendu dire que le système a fait son apparition au cours
23 de 1993, je crois pouvoir en déduire, qu'au fil du temps, ce système par
24 paquet est devenu plus largement utilisé par les unités subordonnées du 3e
25 Corps, n'est-ce pas ?
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1 R. Oui. Mais je vous dirais une nouvelle fois que nous avons développé ce
2 système assez lentement parce que nous n'avions pas d'ordinateurs. Nous
3 n'avions pas assez d'équipement. Nous n'avions pas assez de modems. Nous
4 étions encerclés et, finalement, ces modems sont arrivés de Croatie ou par
5 d'autres moyens. Ce système était limité faute de moyens. Il était parfois
6 limité également par le fait qu'il fallait former, à son utilisation, les
7 personnes censées le faire fonctionner au point de départ et au point
8 d'arrivée. Nous avions besoin de l'ensemble des éléments, des dispositifs
9 techniques, des deux côtés.
10 Bien sûr, il y avait des communications entre le commandant du corps et un
11 certain nombre d'unités sur le terrain. Par la suite, ce système s'est
12 développé pour fonctionner de façon très efficace. Comme je l'ai dit, tous
13 les moyens nécessaires ont fini par être obtenus parce qu'au départ, il y
14 avait limitation de l'emploi du système en raison du fait qu'il fallait,
15 qu'au point d'arrivée, l'ensemble des dispositifs nécessaires existent, ce
16 qui créait un obstacle.
17 Q. Pouvez-vous nous en dire un peu plus au sujet du document, de l'ordre
18 dont nous parlons ? Quel était son aspect au point d'arrivée, c'est-à-dire,
19 au point de destination ? Quelles étaient les différences éventuelles que
20 présentait ce document par rapport à l'ordre original qui était conservé
21 dans les archives au QG ?
22 R. La différence résidait dans le point suivant. C'est-à-dire que, sur la
23 deuxième page, il était impossible d'expédier la signature. Nous ne
24 pouvions pas transmettre la signature électronique de la personne qui avait
25 signé le document original, de sorte que, sur la deuxième page du document,
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1 la teneur de la deuxième page était identique à celle de l'original, mais
2 il manquait la signature et le sceau. Simplement, le nom et le prénom du
3 général Hadzihasanovic, le commandant du 3e Corps, par exemple, figuraient
4 sous forme dactylographiée simplement, sur cette deuxième page.
5 Q. Monsieur, ayant entendu votre réponse, je crois pouvoir comprendre que
6 la technologie du système des transmissions par paquet n'était pas
7 identique à la technologie du télécopieur. Ce n'était pas une technologie
8 qui permettait de scanner un document et de recevoir, au point d'arrivée,
9 un document identique comportant les mêmes signatures, les mêmes
10 caractères, les mêmes sceaux que le document original, n'est-ce pas ?
11 R. Oui, vous avez raison. Il n'y avait ni la signature ni le sceau. Il y
12 avait simplement transmission de ce que l'ordinateur avait permis de taper
13 sur le document.
14 Q. Si vous le pouvez, rapidement, Monsieur, parce que nous en arrivons à
15 l'heure de la pause, pourriez-vous nous en dire un peu plus quant à la
16 façon dont cet ordre écrit, qui avait été certifié, signé, sur lequel le
17 sceau avait été apposé, et cetera, comment cet ordre signé entrait-il dans
18 le système par paquet destiné à assurer sa transmission en direction des
19 unités sur le terrain ? Comment cela se passait, puisque le document
20 n'était pas scanné pour entrer dans l'ordinateur ou dans le système ?
21 R. J'ai déjà dit que les documents étaient établis sous forme
22 dactylographiée, à la machine à écrire, et le document passait, ensuite,
23 par la procédure de certification, de signature et, s'il devait être
24 transmis par le système de transmission, le Département administratif le
25 transmettait au centre de Transmissions du 3e Corps. Ce centre de
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1 Transmissions, lorsque nous avons développé le système par paquet,
2 disposait d'un ordinateur, d'un modem et quelquefois d'un poste de radio,
3 quelquefois d'un modem téléphonique. L'acte en question, sous sa forme
4 originale, avec le sceau et la signature arrivait au centre de
5 Transmissions. Dans une première étape, il était re-dactylographié, je ne
6 sais pas exactement comment cela se passait, quelquefois, c'était très
7 rapide et grâce au recours à l'ordinateur et c'est sous forme de diskette
8 que le centre de Transmissions recevait le contenu du document avec
9 également le document original comportant la signature et le sceau. Le
10 responsable du centre de Transmissions, chargé de s'occuper de cela,
11 ouvrait un nouveau fichier sur l'ordinateur, vérifiait l'authenticité du
12 document, par comparaison avec l'original et, ensuite, le document était
13 transmis. Il était d'abord crypté et ensuite expédié vers sa destination.
14 Q. Monsieur, j'ai encore quelques questions découlant de vos réponses que
15 j'aimerais vous poser avant la pause. La première est la suivante : de
16 façon à ce que tout soit clair, il y avait deux séries d'équipement qui
17 étaient nécessaires pour qu'un document puisse être transmis par le moyen
18 du système par paquet, mais, avant cela, il était dactylographié une
19 deuxième fois par le responsable du Département administratif, qui
20 disposait devant lui de l'exemplaire signé et certifié, n'est-ce pas ?
21 R. C'est au centre de Transmissions que cela se faisait, ce que vous venez
22 d'appeler la deuxième dactylographie de l'acte. Très rapidement, nous avons
23 reçu un deuxième ordinateur qui nous a permis d'établir immédiatement
24 l'acte sans avoir besoin de le dactylographier une deuxième fois -- de le
25 taper une deuxième fois parce que cela prenait beaucoup de temps. Nous
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1 avons accéléré le processus, le texte était tapé directement à l'ordinateur
2 et arrivait sous forme de diskette, dans ce cas-là, au centre de
3 Transmissions, ce qui permettait de l'expédier plus rapidement.
4 Q. Monsieur, dans les deux cas, dans le cas où il fallait le taper une
5 deuxième fois ou dans le cas où on partait d'une diskette, je vous demande
6 si la personne, qui envoyait l'ordre, grâce au système par paquet, était
7 tenue de confirmer que le texte expédié correspondait en tous points à un
8 exemplaire original comportant la signature et le sceau avant de l'expédier
9 ?
10 R. Oui.
11 Q. Merci beaucoup. Je n'ai plus de temps, Monsieur le Président.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Vous allez continuer tout à l'heure. Est-ce que
13 vous avez l'intention de présenter au témoin des documents ? Oui.
14 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai encore deux ou
15 peut-être trois domaines à couvrir dans mes questions. Ensuite, nous avons
16 l'intention de soumettre au témoin quatre documents contestés originaux
17 pour lui demander de formuler un bref commentaire au sujet de ces
18 documents. J'en ai informé d'ailleurs la Défense ce matin.
19 Bien sûr, manipuler les documents risque de prendre un peu de temps, mais
20 j'essaierai d'en terminer en 30 minutes. Il est possible que je n'y
21 parvienne pas. J'ai des exemplaires.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Vous avez les numéros des documents que vous
23 allez présenter ?
24 M. MUNDIS : [interprétation] Oui. J'ai également un certain nombre
25 d'exemplaires et je peux remettre aux Juges ces exemplaires maintenant, si
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1 cela paraît plus facile aux Juges. J'ai déjà remis des exemplaires aux deux
2 équipes de Défense ainsi qu'aux deux accusés mais je dispose également d'un
3 nombre suffisant d'exemplaires pour les Juges, bien entendu. Il s'agit,
4 comme je l'ai déjà dit, de quatre documents. Dans la liasse que je viens de
5 remettre, on trouvera un grand nombre de documents. Je pense que la
6 distribution de ces documents peut se faire, grâce à l'aide de l'Huissier.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous pose cette question pour que la juriste de
8 la Chambre cherche les originaux qui devraient y être. Vous avez les
9 originaux.
10 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, je peux peut-être
11 accélérer les choses. Hier, j'ai déjà signé la garde officielle de ces
12 documents auprès du Greffe. C'est moi qui ai, en ma possession, les
13 originaux de ces documents. J'ai signé hier.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous allez montrer les originaux au témoin.
15 M. MUNDIS : [interprétation] Absolument.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est interrompue. Elle reprendra aux
17 environs de 11 heures.
18 --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis, vous pouvez poursuivre.
20 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
21 Q. Tout juste avant la pause, nous parlions de la façon dont les ordres
22 étaient transmis aux unités se trouvant sur le terrain. Je voudrais
23 reprendre une question connexe. Lorsque l'ordre, l'ordre écrit était
24 transmis à une unité ou des unités subordonnées, vous nous avez dit que
25 l'original, il était conservé au QG du 3e Corps; c'est bien cela ?
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1 R. Oui.
2 Q. Est-ce qu'il y avait des mentions qui auraient été apportées à
3 l'original pour indiquer que ce document a bien été expédié ou transmis ?
4 R. Cela dépendait de la façon dont l'ordre était envoyé. Si c'était envoyé
5 par une estafette. Dans cette unité, il y a quelqu'un qui a signé pour
6 confirmer qu'il l'a bien reçu. Il doit y avoir une trace. Si cela s'est
7 passé par les moyens de transmission, sur l'original, l'on apposait un
8 cachet rectangulaire avec inscription de renseignement concernant
9 réception, expédition et heure de transmission en direction d'une autre
10 unité. Ce cachet-là comporte plusieurs rubriques, indiquant que cela a été
11 envoyé à tel endroit, à telle heure et, par ailleurs, à destination. Il
12 doit y avoir un emplacement où l'on enregistre l'heure de réception, et
13 cetera.
14 Q. Je vais vous parler des documents qui sont réceptionnés, mais ici nous
15 parlons des documents qui sont expédiés à partir du QG du 3e Corps d'armée.
16 Vous avez parlé de ces mentions, est-ce qu'on les applique sur les
17 documents qui sont envoyés ? Est-ce qu'il y a, effectivement, ce cachet
18 et/ou une signature, indiquant l'envoi ?
19 R. Oui, si cela a été envoyé par estafette. Maintenant, si cela a été
20 expédié par les systèmes de transmission, en raison de la technique elle-
21 même, on ne peut pas faire figurer la signature, à savoir, le cachet. Ce
22 n'est pas un télécopieur. Il n'y a que la partie rédigée du texte qui se
23 fait sur ordinateur, qui est expédiée.
24 Q. Je vais essayer d'aborder la question, de façon différente, pour
25 assurer que tout est clair. Lorsqu'un ordre était envoyé par estafette,
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1 est-ce qu'il y avait des indications apportées à l'ordre original, qui
2 était conservé au QG afin de prouver que l'ordre avait été expédié par
3 estafette ?
4 R. Le plus souvent, c'était le même document que celui qui était envoyé
5 vers l'autre unité. Ces documents sont plus ou moins identiques, il y avait
6 très souvent la signature en original du signataire. Dans le cas où les
7 documents étaient tous identiques, il y avait juste une petite différence
8 au coin gauche du bas, pour ce qui est de la liste des unités qui était
9 censée le recevoir, si cela était destiné à plusieurs unités. En troisième
10 ligne, en haut à droite, il devait être fait mention du destinataire
11 concret de cet exemplaire-là. C'est ce qui se passait lorsque le document
12 était envoyé par estafette.
13 Maintenant si cela était envoyé par les systèmes de transmission, au coin
14 bas à gauche il y avait la liste des unités qui était censée recevoir ce
15 texte, et sur le revers de la page, on inscrivait, soit par ordinateur soit
16 à la main, le moment où ladite unité a reçu, effectivement, le document
17 concerné. On a fait indication de l'unité et de l'heure parce qu'il y
18 pouvait avoir plusieurs unités à recevoir le même ordre.
19 Q. Evoquons rapidement la question de l'unité qui reçoit cet ordre. Est-ce
20 que cette unité va apposer une indication à l'ordre, pour autant qu'elle
21 reçoive cet ordre par estafette ?
22 R. Il se peut qu'il y ait eu des cas, je dis bien, il se peut. Il y a eu
23 des cas où, sur l'exemplaire qui était censé être archivé, il y avait une
24 feuille d'appoint où pouvait être fait le listing de toutes les unités qui
25 avaient reçu cet ordre. Cela, on pouvait le faire à titre complémentaire.
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1 Avec le même ordre, une feuille distincte était adjointe. Cela était
2 fonction du temps, la situation variait. Je crois que c'est ainsi que l'on
3 pouvait voir la signature d'une personne au niveau de la filière, de la
4 chaîne pour confirmer que le service, qui était chargé de ce travail, à
5 savoir, le Département administratif d'une unité subordonnée, qui l'aurait
6 reçu. Il y avait là, par exemple, l'homme de permanence, qui se trouvait au
7 niveau de ce QG, peut-être était-ce directement le commandant de l'unité
8 concernée ?
9 Il y avait là des situations ou des modalités variées, selon lesquelles
10 cela pouvait se passer, mais les services fonctionnaient. Le document
11 arrivait dans l'unité. L'unité avait ce Département administratif qui
12 recevait le document en question et cela a été signé par l'un quelconque
13 des supérieurs -- des officiers pour confirmer que le document a bel et
14 bien été reçu et, une fois archivé, cela était renvoyé avec l'original, à
15 savoir, le premier des exemplaires de l'ordre qui était remis.
16 Q. En vertu des règlements et des pratiques en vigueur, l'unité qui
17 recevait l'ordre par estafette, est-ce qu'elle a noté l'ordre lui-même pour
18 indiquer le jour et l'heure de réception de ce document émanant de niveau
19 supérieur ?
20 R. Je n'ai pas très bien compris votre question. Est-ce que vous pouvez la
21 répéter ? Je m'excuse.
22 Q. Prenons un exemple. Le commandant du corps envoie un ordre écrit au QG
23 d'un commandement de brigade par estafette. Dans le service administratif
24 du QG de la brigade, il y a quelqu'un qui reçoit -- qui réceptionne cet
25 ordre de l'estafette. Est-ce que c'est comme cela que cela se passait
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1 jusque-là ?
2 R. Oui. Parfois c'était ce service d'estafette qui s'en chargeait entre
3 les unités. Des fois, les estafettes c'étaient des officiers qui faisaient
4 partie de l'état-major qui profitaient de l'opportunité pour inspecter
5 l'unité sur place et distribuer les ordres eux-mêmes au niveau de ces
6 unités. Des fois, c'étaient des officiers de l'état-major. Des fois,
7 c'était quelqu'un qui très souvent faisait partie du département
8 opérationnel du Département chargé des opérations. C'était très souvent cet
9 homme-là qui faisait office d'estafette. Parfois, c'était un simple soldat
10 qui ne faisait que cela dont cela fût la tâche unique que de transporter le
11 courrier d'un endroit vers l'autre.
12 Q. D'accord. Je reprends un autre exemple. Lorsque le service
13 administratif du QG de la brigade reçoit l'ordre écrit émanant du QG du
14 corps d'armée par le truchement de l'estafette, conformément aux règlements
15 et aux pratiques en vigueur à l'époque, est-ce que ce service administratif
16 apportait une mention -- une indication quelconque sur l'ordre qui venait
17 d'être reçu, afin de montrer le jour et l'heure de réception ?
18 R. Pour autant que je m'en souvienne, oui, il y avait une inscription à
19 eux qui confirmait que l'ordre était bel et bien reçu. Je crois que cela
20 était forcément enregistré au niveau de ce commandement concerné en tant
21 que courrier réceptionné. Il se pouvait qu'il y ait des situations autres,
22 dans cette situation chaotique et désordonnée. Il pouvait en être
23 autrement. C'est ainsi, en effet, que les choses étaient censées se passer
24 et très souvent c'est bien ainsi que cela se passait.
25 Q. Parlons maintenant de documents qui sont reçus par le système, par
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1 paquet ou par un autre moyen électronique. Lorsque ces documents étaient
2 reçus, ces ordres étaient reçus, vous nous avez dit qu'on les imprimait et
3 la teneur de ce document était identique à l'original sans la signature et
4 sans le cachet; c'est bien cela ?
5 R. De l'autre côté, de la partie qui réceptionnait, oui, mais la partie,
6 qui envoyait le document, avait l'original et avait l'enregistrement
7 électronique sur diskette.
8 Q. Oui. Maintenant, ce qui m'intéresse, c'est la partie qui reçoit ce
9 document. Cette unité qui vient de recevoir un ordre écrit par voie
10 électronique, est-ce qu'elle apporte une mention quelconque à ce document
11 pour indiquer qu'elle l'a bien réceptionnée, conformément aux règlements et
12 aux pratiques en vigueur ?
13 R. Oui. Dans cet autre unité, il a été réglementé l'utilisation d'un
14 cachet analogue de forme rectangulaire avec des renseignements analogues à
15 ceux qui figuraient dans l'unité qui l'expédiait, sauf que là, on
16 remplissait les rubriques de réception pour ce qui est d'indiquer l'heure
17 de réception et ce qui s'ensuit. C'est ainsi que les choses se passaient,
18 du moins, c'est ainsi que cela devait se passer.
19 Q. Monsieur Selimovic, passons à un sujet quelque peu différent. En début
20 de matinée, vous nous avez dit que les ordres écrits étaient préparés à
21 partir d'un certain modèle type. Pourriez-vous dire aux Juges de la
22 Chambre, en quelques mots, ce qu'était ce modèle type ? Quels en étaient
23 les éléments qui le constituaient ? Quelles caractéristiques ce modèle
24 présentait ?
25 R. Si je dois vous décrire l'entête pour ce qui est du modèle type de
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1 l'ordre, je dirais qu'en haut à gauche, il devait y avoir le nom de
2 l'unité, le numéro d'enregistrement du document, l'heure de
3 l'enregistrement, la date et l'heure. A droite, il devait y avoir
4 inscription de confidentialité ou de secret militaire. En deuxième ligne,
5 comment dirais-je, il devait y avoir l'objet de l'ordre, un résumé du
6 sujet, et à droite dans la même ligne, on disait quel était le destinataire
7 de l'ordre. Très souvent, si c'était une seule unité, on l'indiquait. Si on
8 avait la place d'indiquer deux ou trois unités, on le faisait, on énumérait
9 la totalité des unités qui étaient destinataires du courrier. Il y avait
10 une espèce d'avant-propos, disons, au sujet de telle chose ou suivant ordre
11 de tel commandement supérieur. Il y avait cet avant-propos très bref. Il y
12 avait le mot "ordre" d'inscrit et, dans la suite, venait la partie
13 principale du document, à savoir, la teneur entière de l'énoncé de cet
14 ordre, et venait en bas, à gauche, les initiales de la personne qui a
15 frappé ou qui a rédigé le document. Sous ces initiales, toujours en bas à
16 gauche, on indiquait les unités qui devaient réceptionner ce courrier. Dans
17 la partie droite, il y avait le commandant -- inscription le commandant, le
18 nom et le prénom du commandant; si c'est un original, sa signature; et si
19 ce ne l'est pas, on mettait au verso, le nom et le prénom du commandant.
20 Q. Monsieur Selimovic, nous avons longuement parlé des différentes
21 procédures, qui étaient utilisées dans les règlements régissant
22 l'utilisation d'ordres écrits. Vous avez dit aussi que la situation était
23 un peu chaotique. Ces procédures, que vous avez décrites à notre intention,
24 est-ce qu'elles ont été toujours appliquées ? Est-ce qu'il y avait toujours
25 ces éléments qui étaient présents dans chaque ordre ?
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1 R. La plupart des documents, dirais-je, avaient cela. Il est certain et je
2 me souviens de certains documents -- du reste, vous me l'avez montré, des
3 documents auparavant, où cela avait été fait autrement, on pouvait le voir.
4 Certains se servaient de leurs connaissances préalables, des instructions
5 qui avaient été déjà en place, certains individus avaient modifié la façon
6 de procéder et il y avait toute sorte de choses qui se passaient. Les
7 documents pouvaient avoir une apparence autre où certains segments,
8 certains éléments de ce documents étaient tout simplement omis.
9 Q. Vous nous avez dit qu'il arrivait que des gens fassent usage de
10 connaissances antérieures. Est-ce qu'il y a d'autres raisons expliquant des
11 différences qui pouvaient se présenter entre des ordres émanant du 3e Corps
12 d'armée ?
13 R. Je dois avouer que la question n'est pas tout à fait claire pour moi.
14 Je m'excuse, mais je n'ai pas très bien compris.
15 Q. Je vais reformuler ma question. Vous nous avez dit qu'il se pouvait
16 qu'il y ait quelques variations, des différences au niveau des documents,
17 qu'il y avait peut-être des éléments manquant, alors qu'on s'attendait à
18 les trouver dans tels ou tels documents. Vous avez expliqué qu'entre autre,
19 c'était peut-être parce que certains avaient des connaissances antérieures
20 qu'ils avaient appliquées.
21 Y a-t-il d'autres raisons qui expliqueraient pourquoi ces systèmes,
22 réglementations en place, n'ont pas nécessairement été toujours respectés à
23 100 % en 1993 dans le 3e Corps d'armée ?
24 R. Le plus souvent, cela était en corrélation directe avec le personnel
25 qui était composé de professionnels, de qui certains savaient comment un
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1 ordre devait se présenter, et il y en avait d'autres qui les voyaient, pour
2 la première fois, cette tâche de rédaction d'un ordre. C'est la raison pour
3 laquelle il y a eu des divergences, mais je crois peut-être que c'est là
4 l'essentiel.
5 Peut-être, des fois, le problème se résumait-il à dire que le système de
6 transmission aurait peut-être pu influé sur la situation, où il y aurait
7 eu, par exemple, coupure dans la réception et on recevait l'acte ou le
8 document par fragment. Cela pouvait arriver aussi. Mais je crois que la
9 première raison est la raison principale parce que le système électronique
10 veillait à ce qu'au point de départ, l'apparence du document soit tout à
11 fait la même qu'à l'endroit de réception -- je parle, bien entendu, de sa
12 teneur.
13 Q. La cadence des opérations de combat a-t-elle eu un effet sur le respect
14 des procédures à appliquer s'agissant d'ordres
15 écrits ?
16 R. En tout état de cause, les cadences influaient sur le fait de voir les
17 ordres rédigés suivant une procédure abrégée. Il se pouvait qu'une seule et
18 même personne s'occupe de la totalité de l'ordre en question. Il se peut
19 aussi une notre raison, à savoir qu'il y a eu des raccourcissements, à
20 savoir, des omissions de certaines parties. Mais, dans l'ensemble, la
21 pensée devait y être, l'idée devait y être, à savoir, l'essentiel de cet
22 ordre devait être acheminé vers l'autre partie.
23 Q. Vu la durée de vos fonctions, je parle de vos fonctions d'officier
24 chargé des transmissions au 3e Corps en 1993. Savez-vous s'il y a eu des
25 cas où des ordres, qui n'étaient pas autorisés, auraient été transmis -- je
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1 parle d'ordres qui n'auraient pas été approuvés par le commandant avec
2 lesquels il n'était pas d'accord ?
3 R. Je ne peux pas me souvenir, à présent, de situations de ce genre. Je
4 vous l'ai déjà dit, il y avait des gens qui faisaient leur apparition et
5 nous autres, en contrebas, nous comprenions qu'ils avaient été envoyés là
6 par quelqu'un. Tout d'un coup, ces gens-là se mettaient à apposer des
7 signatures. Je peux, par exemple, vous parler d'un cas concret.
8 Q. Je vais vous poser cette question dans un instant, mais serait-ce là le
9 seul cas dont vous avez le souvenir ?
10 R. Je crois avoir dit que, parfois, ces gens du Département opérationnel
11 venaient à signer les documents. A mon avis, peut-être n'étaient-ils pas
12 censés le faire, mais cela arrivait. Il est vrai qu'il s'agissait plutôt de
13 rapports. L'officier de permanence au niveau opérationnel savait aussi
14 signer, mais, très souvent, c'étaient moins des ordres, plutôt des
15 rapports. Mais des individus faisaient la confusion, et il leur arrivait de
16 signer des ordres.
17 De là, à savoir si le commandant avait approuvé ou pas, je ne sais pas trop
18 vous dire. Je n'arrive pas à m'en souvenir. Il se peut que, parfois, il
19 aurait donné l'autorisation verbalement de le faire ou d'autres fois, qu'il
20 leur ait dit qu'ils n'étaient pas censés le faire, mais je n'en sais pas
21 trop.
22 Q. Vous n'avez aucun souvenir de cas concrets mis à part cet exemple dont
23 vous avez parlé ?
24 R. Oui, j'ai un exemple. Je ne sais pas si c'est concrètement en
25 corrélation avec cet aspect-là, mais je crois qu'une situation de ce genre
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1 est survenue. Lorsque le général Mahmuljin a fait son apparition au niveau
2 du commandement du corps, tout à coup, c'est lui qui s'est mis à signer ces
3 ordres, et le commandant du corps se trouvait, par exemple, sur le terrain,
4 au poste de commandement avancé. Le chef d'état-major se trouvait, me
5 semble-t-il, au niveau d'un Groupe opérationnel, à ce moment-là. Le
6 suppléant, je ne sais plus où il était, mais il m'est arrivé de voir cette
7 signature émanant d'une personne pour laquelle je ne savais pas de qui il
8 s'agissait. Ce n'est que, par la suite, que j'ai appris qu'il était devenu
9 commandant, en quelque sorte, et qu'il était venu du Grand état-major. Mais
10 je ne savais pas de qui il s'agissait, à ce moment-là. Les soldats, qui
11 étaient censés envoyer cela, étaient un peu dans une sorte de perplexité.
12 Ils se demandaient ce qu'il fallait faire. Par la suite, les choses se sont
13 expliquées, mais, à un moment donné, il est arrivé qu'une telle personne
14 vienne signer à la place du commandant.
15 Sur l'inscription électronique, il y avait le nom et prénom d'"Enver
16 Hadzihasanovic", alors que la signature était celle de Mahmuljin.
17 Q. Est-ce que vous vous souvenez de la date à laquelle ceci s'est produit
18 que ce soit le mois ou l'année ?
19 R. Il me semble que cela devait se situer vers la mi-1993. Je ne peux pas
20 vous le dire au juste. Il se peut que ce soit le mois de juin, mais je n'en
21 suis pas sûr, disons, le deuxième semestre de 1993.
22 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, je vais, maintenant,
23 demander l'autorisation de soumettre des ordres originaux au témoin, et je
24 le précise à l'intention du témoin.
25 Q. Monsieur, je vais vous montrer maintenant quatre documents, un à la
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1 fois. A votre gauche se trouve un appareil qui nous permettra de suivre
2 exactement le document que vous êtes en train d'examiner. Je vais vous
3 demander d'indiquer certains de ces éléments, certaines de ces
4 caractéristiques sur le document, caractéristiques dont vous avez déjà
5 parlé.
6 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, le premier de ces
7 documents, c'est le document contesté 162. Aux fins du dossier d'audience,
8 je précise que des exemplaires ont déjà été fournis. Je vais demander que
9 ce document soit présenté au témoin. Lorsqu'il aura examiné ce document, je
10 demanderais que le document soit placé sous le rétroprojecteur.
11 Q. Monsieur le Témoin, je le répète, je ne vais pas poser de questions à
12 propos du contenu de ce document. Ce qui m'intéresse, c'est la forme, la
13 présentation et les annotations apportées à ce document.
14 Est-ce que vous avez eu l'occasion d'examiner ce document, Monsieur le
15 Témoin ?
16 R. Oui.
17 M. MUNDIS : [interprétation] Peut-on remettre un pointeur au témoin.
18 Q. Commençons par le haut du document. Il y a deux endroits où il y a des
19 chiffres qui sont entourés d'un cercle. Nous sommes là au haut du document.
20 Savez-vous ce que représentent ces mentions ? Excusez-moi, si c'est le cas,
21 en parlant de ces annotations, indiquez-les du pointeur. De cette façon,
22 nous saurons exactement de quoi vous parlez.
23 R. Ici, au sommet, on voit deux numéros qui ont été apposés
24 ultérieurement. Je puis seulement supposé qu'il s'agit là d'une heure, mais
25 je ne sais vraiment pas. C'est assez bizarre. Il se peut que ce soit
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1 l'heure de traitement, voire de réception, mais ceci, en somme, n'est pas
2 très habituel comme inscription au niveau du centre des Transcriptions.
3 Cela a dû être apposé par quelqu'un qui aurait disposé du document, mais à
4 titre ultérieur.
5 Q. Veuillez poursuivre en commençant par ce qu'on voit qui est
6 dactylographié dans le coin supérieur gauche, et dites-nous quels sont ces
7 éléments que l'on retrouve sur ce document.
8 R. Le document a certainement été rédigé au commandement du 3e Corps.
9 Voici la façon dont on procédait pour ce qui était de l'enregistrement des
10 documents. D'habitude, les deux premiers numéros au niveau de ce code
11 indiquaient la fonction de la personne qui a rédigé. C'est son numéro de
12 code qui permettra d'identifier que c'est, là, un document émanant de ce
13 département, voire de la personne, le nom de l'individu concret dont il
14 s'agit. On voit, ensuite, la date de rédaction ou de la frappe du document.
15 Comme je l'ai dit, à droite en haut, il y a le degré de confidentialité.
16 Cet élément -- je ne l'ai pas indiqué auparavant -- "urgent", indication de
17 l'urgence, ce qui signifiait qu'une fois que le centre de Transmissions
18 recevait ce document-là ou ce type de document, il était censé expédier
19 cela de la façon la plus rapide possible vers le commandement auquel cela
20 se trouvait être destiné.
21 Ici, on voit une inscription disant qu'il s'agit d'un "ordre". On ne donne
22 pas la teneur ou le résumé de sa teneur. Ici, se trouve cette espèce
23 d'avant-propos. On parle ici de l'évaluation de la situation, compte tenu
24 de l'évaluation de la situation. Il y a le texte -- l'énoncé, "il l'est
25 fait ordre", et on donne les alinéas de la teneur de l'ordre.
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1 En haut à droite, on voit une inscription -- en bas à droite, on voit le
2 signataire, "le commandant Enver Hadzihasanovic". Mais, pour autant que je
3 m'en souvienne, cette signature-ci n'est pas celle du général
4 Hadzihasanovic. Je crois encore reconnaître la sienne. C'est quelqu'un
5 d'autre qui aurait signé ici, et c'est une signature que je ne reconnais
6 pas ici. Si je puis émettre des suppositions, il se pourrait que ce soit
7 celle de Mekic Muradif, mais je n'en suis pas certain.
8 Maintenant, si vous me le permettez, je vais tourner la page. Ceci est le
9 cachet rectangulaire dont j'ai déjà parlé.
10 Q. Monsieur --
11 R. On voit que c'est arrivé au centre de Transmissions du 3e Corps. Cela
12 est enregistré dans un registre ou un journal à eux. On a souligné "remis"
13 -- le document a été remis, et on indique la date, l'année et l'heure. On
14 voit le nom et la signature de la personne qui a traité le document au
15 niveau de ce centre de Transmissions. Il me semble, ici, qu'il s'agit, en
16 haut, d'une inscription électronique figurant -- accompagnant le document.
17 Cela doit être apposé par le centre des transmissions ou l'un des
18 intervenants au niveau de ce centre. Ce numéro-ci a été apposé
19 ultérieurement. C'est peut-être le numéro des archives. Je n'en sais rien.
20 Q. J'ai quelques questions de suivi. Vous voyez ce numéro composé d'huit
21 chiffres --
22 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, mes confrères
23 viennent de me faire savoir qu'en page 46, ligne 3 -- je disais page 46,
24 ligne 3, il est noté que le témoin aurait déclaré, en parlant de la
25 signature possible sur ce document : "Alors, si je puis faire une
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1 supposition, je pourrais dire qu'il s'agit de Muradif Mekic." Il y a un
2 mot, mais il a dit qu'il n'en était pas "sûr". Pour ce qui est de mes
3 connaissances de l'anglais "concern" ne veut pas dire "certain". J'aimerais
4 que l'on demande au témoin ce qu'il a dit au juste, en répondant à cette
5 question au sujet du document concret.
6 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Maître Residovic, de cette précision en
7 ce qui concerne le compte rendu d'audience.
8 Q. Monsieur le Témoin, apparemment, il y a dans le compte rendu, en
9 anglais, une erreur. Est-ce que vous pourriez reprendre le recto de ce
10 document. Regardez non pas le bloc signature qui est dactylographié, mais
11 la signature manuscrite. Savez-vous quoi que ce soit à propos de cette
12 signature ?
13 R. Je ne sais vraiment pas de qui cela peut être la signature. Je puis
14 seulement supposer. Mais c'est une signature que je n'ai pas rencontrée. Je
15 connais les signatures –- la signature du général Hadzihasanovic parce que
16 nous avons été, ensuite, ensemble dans ce commandement conjoint. Nous y
17 avons travaillé ensemble, ce qui fait que c'est une signature que j'ai pu
18 rencontrer bon nombre de fois. J'ai rencontré celle du général Dzemal
19 Merdan parce qu'il était chargé du personnel. J'ai sa signature sur une
20 décision qui me concernait. Mais, cette signature-ci, je ne la reconnais
21 pas. Je ne puis que faire des suppositions, si tant est que l'on me le
22 permet, et je pourrais supposer qu'il s'agit de la signature de Muradif
23 Mekic, mais -- je ne sais pas si j'ai dit autre chose, mais je ne sais
24 vraiment pas de qui c'est la signature.
25 Q. Je vous remercie. Prenez maintenant le verso de ce document. Je
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1 voudrais enchaîner sur certaines questions à propos du cachet qui se trouve
2 dans la partie supérieure.
3 Vous avez dit que la première ligne montre le moment où ce document a été
4 réceptionné -- reçu au centre de Transmissions. C'est bien ce que vous nous
5 avez dit ?
6 R. Non. Dans la première ligne, il y a ce numéro de journal ou de registre
7 interne. C'est un numéro de centre de Transmission. Il y avait un registre
8 où l'on annotait le document. Ce numéro 1768, c'est précisément le numéro
9 dont on parle.
10 Q. La ligne suivante, qu'est-ce qu'elle indique précisément ?
11 R. Elle indique que c'est un document remis, en d'autres termes, expédié.
12 Predato [phon], cela veut dire "expédié". On a souligné ce mot "predato"
13 pour dire que cela a été remis.
14 A l'autre commandement, il y a ce même document et, là-bas, on a signé
15 l'autre mot, "primleno" [phon], à savoir, "réceptionné". Comme c'est un
16 cachet de type universel, là-bas, on était censé souligné le mot
17 "primleno", le mot "réceptionné". Or, ici, c'est un document du 3e Corps,
18 et on a souligné le premier mot.
19 Dans la ligne d'après, il y a la date et l'année, ainsi que l'heure de
20 l'expédition de ce document par voie électronique.
21 Q. Je veux que tout soit clair. Vous nous dites que ce cachet nous permet
22 de savoir que ce document a été expédié le 17 avril 1993 à 22 heures 45.
23 R. Oui.
24 Q. Le mot qui est souligné, signifiant "remis", cela veut dire qu'il a
25 été, en fait, envoyé.
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1 R. Oui.
2 Q. Il y a une signature à la fin. Vous la reconnaissez ?
3 R. C'est probablement l'un des intervenants au centre de Transmissions. Si
4 je puis essayer de lire. Ademovic. Ademovic, si je ne m'abuse, pour autant
5 que cela puisse être lu.
6 Q. La signature aurait été --
7 R. Il y avait, en effet, un dénommé Ademovic au centre de Transmissions.
8 Cela doit être sa signature. C'est l'homme qui était au centre de
9 Transmissions.
10 Q. Qu'est-ce qu'elle indique, cette signature ?
11 R. Cela indique que l'homme au Centre des transmissions a reçu ce document
12 et qu'il l'a réexpédié. Le signataire confirme que ce document a,
13 effectivement, été envoyé à l'heure indiquée vers le destinataire qui était
14 – qui est prévu sur ce document. Il a une responsabilité dans le -- lors
15 des fonctions qu'il exerce au niveau du centre de Transmissions et il s'en
16 est acquitté.
17 Q. Monsieur Selimovic, juste au-dessus de cette signature, on voit
18 plusieurs sigles, apparemment. Que représentent ces sigles ?
19 R. Je pense que cela fait partie du centre de Transmissions. C'est les
20 appellations électroniques données au document. Par exemple, le nom du
21 dossier, c'est en abrégé.
22 M. MUNDIS : [interprétation] Je vais demander l'aide de l'Huissier pour
23 récupérer ce document pour que soit montré le document contesté 35, au
24 témoin.
25 Q. Une fois de plus, je vais vous poser les mêmes questions. Prenez votre
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1 temps pour examiner le document. Mes questions ne porteront pas sur la
2 teneur même du document.
3 Veuillez nous indiquer certaines des caractéristiques que présente ce
4 document ?
5 R. Ici, au sommet, je ne sais vraiment pas vous dire de quoi il s'agit. Il
6 se peut que ce soit l'heure ou un numéro d'enregistrement interne au niveau
7 du service administratif ou au niveau des correspondances internes pour ce
8 qui est du suivi du déplacement d'un document. Je ne sais pas ce que cela
9 peut être. Il se peut que ce soit un numéro interne d'enregistrement.
10 Ici, en bas, on voit l'apparence classique d'un document. On voit le nom de
11 l'unité. On a la référence du courrier, de son numéro, la date. On a
12 l'inscription "secret militaire". On voit, ici, qu'il s'agit, en résumé,
13 d'une question qui est soulevée ou qui est posée à quelqu'un. On voit, à
14 droite, le destinataire de l'acte en question.
15 On voit, ici, un avant-propos et, plus bas, la teneur principale. Ici, l'on
16 voit des initiales de la personne qui a rédigé, voire tapé le document en
17 question.
18 Ici, ce que l'on voit, en bas à gauche, cela figure -- là, figurent les
19 initiales de celui qui a rédigé, et les initiales de celui qui a tapé. A
20 droite, on voit l'inscription "commandant". On voit en dessous, "Enver
21 Hadzihasanovic" et une autre signature cette fois-ci. On voit le petit mot,
22 "za", qui veut dire "pour". On a, au stylo à bille, ajouté devant le
23 commandant, le mot "za", pour dire que c'est "pour" le commandant que
24 quelqu'un d'autre a signé. On voit le cachet rond du commandement du 3e
25 Corps.
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1 Q. Avant de retourner ce document, je vous demande si vous reconnaissez
2 cette signature apposée à ce document ?
3 R. Je suis un peu confus, mais je n'arrive pas à reconnaître cette
4 signature. En tout état de cause, ce n'est pas celle du général
5 Hadzihasanovic.
6 Q. Merci. Veuillez maintenant retourner la page. On voit plusieurs
7 mentions manuscrites tout en haut du document.
8 R. Oui. Voilà cette espèce de numéro de dossier électronique. C'est ce qui
9 figure à l'ordinateur. C'est ce numéro d'enregistrement qui figure au
10 centre de Transmissions. Ceci est probablement l'heure d'expédition. On
11 voit cette espèce de cachet rectangulaire qui dit que cela a été enregistré
12 au registre des transmissions, ce numéro 2426. Ici, on voit, une fois de
13 plus, que c'est un document qui a été "expédié". C'est la raison pour
14 laquelle on a souligné le mot predato [phon]. Cela a été envoyé par les
15 transmissions en date du 12 juillet 1993, à 14 heures 08. Le document a été
16 traité, la tâche a été effectuée par -- je n'arrive pas à lire cette
17 signature -- c'est peut-être Music -- Mesic. Ici, on a cerclé le mode de
18 transmission, transmission radio. Cela est parti parce que l'on désignait
19 par paquet de transmission, et cela s'est fait par radio.
20 Q. Je vous demande, pour que tout soit clair, là, on a cette série le
21 sigles dont l'un est entouré d'un cercle, juste au dessus de la signature.
22 C'est ainsi que le centre de Transmissions indiquait la modalité d'envoi.
23 C'est cela ?
24 R. Oui.
25 Q. Pourriez-vous nous dire ce que signifient ces sigles, à commencer par
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1 la gauche ? Si vous vous en souvenez, bien entendu.
2 R. Cela est d'évidence un élément utilisé à partir de ce qui existait dans
3 la JNA, et on a indiqué toutes sortes de modes de transmission connues à ce
4 jour. "TLP", cela veut dire "teleprinter", "télex", en français. "TGR",
5 télégraphie morse. "TLF" veut dire communications téléphoniques,
6 téléphones. "RRV", relais radio, communication par relais radio. "ZV",
7 c'est peut-être "zicnaveza" [phon]; en français, transmission par fil.
8 "RV", là, on ne voit pas très bien, mais cela devrait être un "RV", un
9 radio "veza" [phon], à savoir, communication radio. Ce document concret a
10 été envoyé par paquet radio.
11 Q. Merci.
12 M. MUNDIS : [interprétation] Puis-je demander l'aide de l'Huissier pour que
13 ce document soit remis à notre table et pour que soit présenté au témoin le
14 document contesté 41 ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Ici, au sommet, c'est, probablement, comme je
16 vous l'ai dit, une espèce de cote interne au niveau du Département
17 administratif, voire du secteur des archives. Le stylo rouge, c'est plutôt
18 celui des archives. Ce numéro-là doit être un numéro d'utilisation ou
19 d'enregistrement interne au niveau des archives.
20 Ici à gauche, on voit l'énoncé classique indiquant que c'est un document
21 émanant du 3e Corps. A droite, vous voyez l'élément "secret militaire". Ce
22 numéro, je ne sais vraiment pas, cela a été apposé ultérieurement. On voit
23 qu'il s'agit d'un ordre, du communiqué. On voit à droite les destinataires
24 de ce dernier. On voit le petit avant-propos, on voit le mot "j'ordonne",
25 et on voit la teneur de l'ordre en tant que tel et viennent les initiales
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1 de celui qui l'a rédigé et ceux de celui qui a fait la frappe.
2 On voit "le commandant", c'est le commandant Enver Hadzihasanovic. On voit
3 le cachet et on voit une signature que je reconnais. C'est celle de Dzemal
4 Merdan, pour autant que je puisse la reconnaître et que je puisse m'en
5 souvenir. Ici, on voit le petit mot "za" qui veut dire "pour".
6 M. MUNDIS : [interprétation]
7 Q. Merci, Monsieur le Témoin, prenez le verso de ce document. Pouvez-vous
8 nous dire, ici aussi, ce que représentent ces mentions ?
9 R. Une fois de plus, on voit un code électronique du document, code de
10 l'ordinateur. On voit le cachet rectangulaire, une fois de plus, celui du
11 centre de Transmissions. Le numéro ici, c'est le numéro d'enregistrement
12 interne au registre des transmissions, ce 1711. On a souligné le mot
13 "expédié". C'est un document expédié depuis ce commandement du 3e Corps, en
14 date du 6 septembre 1993, à 17 heures 10. Ici, on ne voit pas du tout de
15 quelle façon le document a été expédié. Mais, comme je vous l'ai dit,
16 certains le faisaient comme il se devait et cerclaient le moyen de
17 transmission utilisé. En dessous, on voit la signature de la personne qui a
18 envoyé ledit document vers l'unité qui était le destinataire. Alic, si je
19 puis lire correctement. C'était l'un des intervenants au centre de
20 Transmissions.
21 Q. Merci.
22 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur l'Huissier, auriez-vous l'obligeance
23 de reprendre ce document et de montrer un dernier document au témoin ?
24 C'est le document contesté 649. Je précise aux fins du dossier de
25 l'audience, que le document précédent a été remis à l'Accusation. Il
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1 s'agissait du document CD41.
2 Q. Encore une fois, Monsieur le Témoin, je vous demanderais de nous dire
3 quels sont les éléments distinctifs de ce document, si vous voulez bien.
4 R. Encore une fois, nous avons un document standard. On voit qu'il a été
5 établi au commandement du 3e Corps. On trouve le numéro de référence du
6 document, l'heure d'édition, secret militaire, c'est le degré de
7 confidentialité qui est mentionné. Ici, une synthèse de la teneur du
8 document, qui indique la nature du document. Ici, le destinataire. Ce qui
9 est souligné, c'est la dénomination de l'unité à laquelle le document est
10 destiné.
11 Ici, nous avons un sceau qui est ajouté. On y lit les mots "325e Brigade
12 de Montagne". C'est sans doute le sceau de la brigade, qui permet de
13 vérifier et de confirmer que le document est bien arrivé au sein de la
14 brigade. On y trouve un numéro de référence et l'heure d'admission du
15 document, c'est-à-dire, l'heure à laquelle le document est arrivé au sein
16 de ce commandement. Manifestement, ce document a été transmis par
17 estafette. Ici, nous avons le préambule, le mot "ordonne" et le fond même,
18 ce qui constitue le texte de l'ordre.
19 Dans ce document, nous voyons qu'il y a mention de l'objet. Ce qui figure
20 en bas du texte est sans doute le texte de l'ordre. Ici, nous voyons les
21 mots, commandant Enver Hadzihasanovic, mais pas de signature. Ceci dit,
22 puisque ce document est tout entier sur cette page, nous pouvons constater
23 que ce plan a été accepté par le chef d'état-major, Muradif Mekic. Nous
24 trouvons également ici une signature, qui est sans doute également la
25 signature de ce chef d'état-major. Je ne le connais pas particulièrement,
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1 mais, en tant que chef d'état-major, c'est lui qui a accepté ce plan.
2 Maintenant, pourquoi est-ce que ne figure pas, sur ce document, la
3 signature du commandant ? Manifestement, le commandant n'a pas eu ce
4 document sous les yeux. Ce document a dû se trouver sous les yeux du chef
5 d'état-major et ce dernier, d'une façon ou d'une autre, préparait la
6 rédaction de ce document ou, en tout cas, a participé à son élaboration ou
7 ordonné l'élaboration de ce document.
8 Ici, nous avons le plan en tant que tel, et c'est un plan qui consiste à
9 inspecter les unités.
10 Q. Monsieur, pourriez-vous, je vous prie, regarder le verso de ce
11 document, dans l'impression par ordinateur ? Est-ce que vous voyez des
12 signes distinctifs, des marques, sur le dos de ce document ?
13 R. Non.
14 Q. Pouvez-vous expliquer pourquoi ce document n'a aucune marque au verso,
15 contrairement aux trois documents que nous avons vus jusqu'à présent ?
16 R. Ce document n'est pas passé par le centre de Transmissions. On peut
17 constater qu'il n'est pas passé par le centre de Transmissions. Il a
18 probablement été envoyé par estafette. C'est l'explication la plus
19 vraisemblable.
20 Comme je le vois ici, on lit sur ce document la signature de Muradif Mekic,
21 il y a mention de son nom et sa signature. En tout cas, c'est probablement
22 la signature de Muradif Mekic, mais déterminer si le commandant a vu ce
23 texte ou pas, vraiment je n'en sais rien; en tout cas, sa signature ne
24 figure pas sur ce document. Maintenant, est-il possible que ce document se
25 soit trouvé dans l'ordinateur ? C'est possible, mais ce que je vois, en
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1 tout cas, c'est que ce document a été reçu par la 325e Brigade de Montagne.
2 Ici, on voit une indication du fait qu'il était également adressé à l'état-
3 major municipal de Vitez.
4 Q. Merci.
5 M. MUNDIS : [interprétation] Je demanderais que ces documents soient
6 restitués à l'Accusation.
7 Q. Monsieur Selimovic, je vous remercie de toutes vos réponses et de votre
8 volonté de rencontrer l'Accusation.
9 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais remercier
10 également mes collègues de la Défense qui m'ont permis de poser ces
11 questions aujourd'hui. L'Accusation n'a pas d'autres questions.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Je me tourne vers les Défenseurs pour le contre-
13 interrogatoire.
14 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous allons
15 contre-interroger le témoin uniquement au sujet des sujets qu'il a abordés
16 dans ses réponses aux questions du Procureur. Nous nous en tiendrons
17 exclusivement au thème abordé par l'Accusation dans ses questions.
18 Contre-interrogatoire par Mme Residovic :
19 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Selimovic. Nous nous connaissons
20 déjà vous et moi, mais pour le compte rendu d'audience, je vais me
21 présenter. Je m'appelle Edina Residovic et je défends le général Enver
22 Hadzihasanovic.
23 Vous avez déjà dit à l'Accusation qu'au sein de l'armée populaire
24 yougoslave, vous étiez officier avec le grade de capitaine de première
25 classe et que, pendant tout le temps que vous avez passé au sein de la JNA,
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1 vous vous êtes occupé des transmissions, n'est-ce pas ?
2 R. Oui.
3 Q. En fait, répondant aux questions de l'Accusation, vous avez confirmé
4 que vous avez, pendant toute votre carrière, travaillé dans les rangs de
5 l'armée populaire yougoslave et dans les rangs de l'ABiH et, enfin, dans
6 les rangs de l'armée de la Fédération de Bosnie-Herzégovine. Pendant toute
7 cette carrière, vous avez également été attaché au système des
8 transmissions, n'est-ce pas ?
9 R. Oui.
10 Q. Au sein du commandement du 3e Corps d'armée, en votre qualité de chef
11 des transmissions, au mois de novembre 1992, date à laquelle le
12 commandement du 3e Corps d'armée a été créé, vous êtes entré au sein de ce
13 commandement, n'est-ce pas ?
14 R. Oui.
15 Q. Vous avez déjà dit que vous étiez responsable de l'organe de
16 planification et de l'organisation des transmissions, mais je vous demande
17 s'il est exact qu'il existait également une Compagnie, chargée des
18 transmissions au sein du commandement, qui s'occupait directement de la
19 réception et de l'expédition de certains documents, de certains ordres, et
20 d'autres documents, grâce au système de transmission qui avait été mis en
21 place, n'est-ce pas ?
22 R. Oui. Oui.
23 Q. En fait, le système des transmissions a été installé dans les sous-sol
24 du commandement du 3e Corps d'armée qui, avant la guerre, dans ce bâtiment
25 qui appartenait à la scierie de Zenica, avait été créé en tant qu'abri
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1 anti-atomique, n'est-ce pas, selon les règlements en vigueur à l'époque ?
2 R. Oui. Pour autant que je m'en souvienne, c'est bien cela. Oui.
3 Q. Vous avez déjà expliqué qu'au début, vos conditions de travail étaient
4 très difficiles. La question, que je vous pose, est la suivante : est-il
5 exact qu'en tant qu'officier de métier, responsable des transmissions, vous
6 avez très rapidement mis en place un plan de transmissions destiné au 3e
7 Corps d'armée, mais qu'il a fallu plusieurs mois pour que ce plan soit
8 réalisé, et il a même fallu une année entière pour certains aspects de ce
9 plan, n'est-ce pas ? C'est bien cela ?
10 R. Oui. On peut le dire ainsi.
11 Q. Vous avez expliqué les conditions dans lesquelles vous travaillez, et
12 afin de vous poser des questions complémentaires, je vais répéter certaines
13 des difficultés que vous avez évoquées. D'abord, vous manquiez de certains
14 équipements en matière de transmissions, par ailleurs, les équipements dont
15 vous disposiez étaient très souvent désuets et vous ne disposiez pas des
16 moyens nécessaires pour les réparer. L'armée populaire yougoslave avait
17 emporté avec elle la plus grande partie des équipements de transmissions de
18 bonne qualité, et il y avait un certain nombre d'autres obstacles qui
19 empêchaient le système dont vous disposiez de fonctionner, comme il
20 l'aurait dû et ce, de façon régulière.
21 R. Oui. En terme très simple, c'est une description assez exacte de la
22 situation.
23 Q. Vous avez également déclaré que vous disposiez d'un certain nombre
24 d'émetteurs radio. Est-il exact que ces émetteurs radio, pour leur plus
25 grand nombre, se situaient dans les conditions que j'avais décrit à
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1 présent, c'est-à-dire que les équipements les plus anciens vous les aviez
2 reçus de la Défense territoriale et que d'autres équipements étaient, en
3 fait, des radios amateurs réquisitionnés, n'est-ce pas ?
4 R. Oui.
5 Q. L'Accusation vous a interrogé au sujet des communications téléphoniques
6 et du recours au système des PTT. La question que je vous pose est la
7 suivante : est-il permis de dire que durant l'année 1993, ce système était
8 encore assez peu fiable et qu'en raison des circonstances exceptionnelles,
9 à savoir, les circonstances de guerre. Il était très souvent en panne et
10 qu'en conséquence, dans votre plan, ce système des communications publiques
11 était considéré par vous comme un système peu sûr; ceci est-il exact ?
12 R. Oui.
13 Q. Répondant à une question de l'Accusation, vous avez dit qu'il y avait
14 également, parfois, des obstacles et qu'un message a dû être envoyé par
15 vous à plusieurs reprises, à moins que peut-être il ait été impossible de
16 lui faire atteindre sa destination. La question, que je vous pose, est la
17 suivante : suis-je en droit de dire qu'au début de 1993, lorsque l'ABiH et
18 le conseil croate de Défense en sont arrivés à un affrontement ouvert, un
19 système de brouillage très puissant, le fait qu'il soit demeuré entre les
20 mains du HVO, a créé pour vous de très nombreux problèmes durant l'année
21 1993 s'agissant d'intercepter ou de brouiller les transmissions, n'est-ce
22 pas ?
23 R. Oui.
24 Q. Cependant, comme vous l'avez expliqué, grâce à un effort maximum et au
25 recours à toutes vos compétences et à toutes vos connaissances, vous avez,
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1 peu à peu, réussi à mettre en place un système de transmissions fiable.
2 Dites-moi, est-ce que cela s'est passé de la façon suivante ? D'abord, vous
3 aviez au départ ces émetteurs radio et, peu à peu, vous êtes entré en
4 possession d'un certain nombre de modems et d'ordinateurs, que vous avez
5 reliés les uns aux autres, de façon à pouvoir vous en servir pour
6 transmettre des messages cryptés, grâce aux transmissions par paquet. A
7 partir du mois de mars 1993, vous aviez des possibilités de transmissions
8 par paquet avec le commandement suprême. Est-ce bien ainsi que s'est
9 développé le processus, qui vous a permis de mettre en place votre système
10 de transmissions ?
11 R. Je pense qu'au début de cette année-là, nous disposions d'un canal pour
12 communiquer avec quelqu'un au Grand quartier général. A l'époque, je ne
13 savais pas avec qui, mais c'était au Grand quartier général, effectivement,
14 au début de l'année 1993.
15 Q. C'est seulement plus tard, n'est-ce pas, à partir du moment où le
16 système de transmissions par paquet a été établi avec le commandement
17 suprême ou le Grand état-major. C'est seulement après que, peu à peu, grâce
18 à l'acquisition de modems et d'émetteurs radio, que vous remettiez à
19 certaines brigades, et c'est uniquement au moment où ces brigades ont été
20 en possession des mêmes équipements techniques que vous-même, que vous êtes
21 parvenus à établir, avec ces brigades, des transmissions par paquet, n'est-
22 ce pas ?
23 R. Oui, car les équipements étaient limités, ils étaient peu nombreux et,
24 effectivement, à ce moment-là, il fallait parvenir à acquérir un
25 ordinateur, un modem, un émetteur radio, et cetera, et établir la liaison
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1 avec quelqu'un qui savait utiliser ces équipements, qui avaient été formés
2 afin de mettre en place ce système.
3 Q. Vous l'avez déjà dit et vous venez de le répéter, mais, en dehors des
4 équipements techniques, vous manquiez également de cadres. En dehors du
5 fait que vous avez planifié le système, vous avez également procédé à la
6 formation, en tout cas, élémentaire d'un certain nombre d'hommes à
7 l'utilisation de ces équipements. Vous avez tout fait pour obtenir les
8 équipements techniques et, à côté de cela, vous avez également fait tout ce
9 que vous pouviez pour former des opérateurs à l'utilisation de ces
10 équipements techniques, n'est-ce pas ? Cependant, malgré ces efforts, il
11 est permis de dire que, jusqu'à la fin de 1993, ce système n'a pas été
12 intégralement mis en place avec toutes les brigades dépendant du 3e Corps
13 d'armée, d'une façon absolument sûre, et ne permettant aucune suspicion.
14 Ceci est-il exact ? Dès 1993, pouvez-vous dire que vous aviez déjà des
15 systèmes par paquet avec toutes les brigades ?
16 R. De façon générale, en 1993, en tout cas vers la fin de cette année-là,
17 nous avions des transmissions par paquet avec pratiquement toutes les
18 brigades, en fait, avec toutes les brigades, mais, là encore, la question
19 de la sécurité est imposée parce que ce système ne fonctionnait pas de
20 façon sûre. Il ne fonctionnait pas tous les jours -- absolument tous les
21 jours, au quotidien. Vous mettez en place le système et, le lendemain, il
22 tombe en panne. Il y a risque de destruction de l'ensemble du système à
23 cause de cette panne, notamment, au niveau de l'ordinateur, mais, dans
24 l'ensemble, le système existait.
25 Q. Merci. Puisque vous avez créé ce système, vous avez, à l'instant, dit
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1 quelques mots des problèmes que pouvaient poser des pannes de ce système.
2 Mais vous avez également dit que, même lorsque ce système existait, il ne
3 pouvait servir qu'à transmettre des messages courts, c'est-à-dire, d'une à
4 deux pages, n'est-ce pas ?
5 R. Pour que les choses soient mieux comprises, je dirais qu'à ce moment-
6 là, le nombre de pages était limité en raison de la nécessité d'une
7 transmission rapide des messages. Tout ce que nous appelions document lourd
8 -- et lourd cela signifiait l'importance -- le volume des informations,
9 c'est-à-dire, le nombre de pages, tous ces documents lourds ne pouvaient
10 pas être expédiés par ce moyen.
11 Q. Est-il permis de dire, Monsieur Selimovic, que, lorsque des deux côtés,
12 les équipements -- les appareils existaient, qu'il y avait les hommes
13 formés pour utiliser ces équipements, qu'il n'y avait pas de problèmes de
14 panne ? Est-il permis de dire que, dans ces conditions, à ces moments-là,
15 le 3e Corps d'armée pouvait transmettre pendant quelques minutes à
16 l'intention d'une brigade subordonnée, par exemple, mais qu'en raison des
17 problèmes dont vous venez de faire état, à savoir, en raison du problème
18 que parfois des pannes survenaient, il se passait souvent des heures, ou
19 même des jours entiers, pendant lesquels il était impossible pour le 3e
20 Corps d'envoyer ses messages aux brigades subordonnées, n'est-ce pas ?
21 R. En effet, c'est cela.
22 Q. Cependant, pendant toute l'année 1993, vous n'avez pas été en mesure de
23 créer un système de transmission fiable destiné à vos communications avec
24 les unités détachées auprès des brigades, à savoir, des bataillons, des
25 compagnies et des pelotons. S'agissant de ces unités-là, leur transmission
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1 reposait sur le recours à des estafettes ou sur des émetteurs radio, selon
2 la configuration du terrain et à un certain nombre d'autres circonstances
3 qui influaient sur la situation ?
4 R. Nous étions limités dans le nombre des équipements. Le nombre des
5 équipements était beaucoup plus faible. En fait, il n'y en avait pas.
6 Q. A présent, je vais vous poser une autre question. Dans le système
7 normal des communications, est-il prévu qu'une unité subordonnée envoie un
8 message à son commandement direct, et ce commandement direct retransmet le
9 message, ensuite, au commandement supérieur. Dans ce système, est-il
10 parfois arrivé qu'il y ait une panne complète des transmissions entre,
11 disons, une brigade et un Groupe opérationnel et que, dans ces conditions,
12 la brigade utilise le centre de Transmissions du 3e Corps d'armée pour
13 envoyer -- pour transmettre un message venant d'elle et adressé à son
14 commandement direct ? Vous souvenez-vous de telles situations où le centre
15 de Transmissions du 3e Corps d'armée a, en fait, suppléé au système de
16 transmission, permettant à une brigade de communiquer avec son commandement
17 direct ?
18 R. Des situations de ce genre se sont produites. Il est arrivé, par
19 exemple, que le commandement d'une brigade se trouve non loin du
20 commandement d'un Groupe opérationnel et qu'un rapport ou un autre message
21 arrive à la mauvaise adresse -- n'arrive pas à l'adresse à laquelle il
22 aurait dû arriver, c'est-à-dire qu'il ne parvienne pas au centre de
23 Transmissions de l'unité censée le recevoir, mais au centre de
24 Transmissions d'une unité de plus bas niveau et qu'ensuite, ce rapport soit
25 retransmis au niveau supérieur ou vice versa. Il y a eu de telles
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1 situations, dans la confusion générale, qui régnaient. Dans le chaos lié au
2 combat et à la pénurie d'équipements de transmission, nous avons vu de
3 telles situations.
4 Q. Répondant à plusieurs questions de l'Accusation, vous avez indiqué que
5 vous suiviez le parcours d'un document ou d'un ordre à partir du 3e Corps
6 d'armée et jusqu'à l'unité subordonnée. Le système reposait, selon les
7 documents que nous avons pu compulser, sur un parcours dans lequel un
8 document arrivait dans un Groupe opérationnel, une brigade ou un état-major
9 municipal.
10 Je vous demanderais s'il est vrai que vous n'aviez pas la possibilité de
11 continuer à suivre ce qu'il était advenu de cet ordre par la suite parce
12 que dans le centre de Transmissions du 3e Corps d'armée nous ne disposions
13 pas des moyens nécessaires pour vérifier si l'ordre était allé plus loin
14 que la brigade ou, par conséquent, si, au niveau du bataillon, du peloton
15 ou du simple soldat, l'information contenue dans cet ordre avait été
16 transmise.
17 R. En effet. C'était un problème de principe. Un supérieur s'adresse à son
18 premier subordonné et ensuite on descend le long de la chaîne de
19 commandement. Je n'avais aucune connaissance de la façon dont le document
20 descendait dans les échelons inférieurs de la chaîne de commandement.
21 Q. Répondant à une question de l'Accusation, vous avez parlé en détails du
22 fait que vos connaissances reposaient sur l'expérience acquise par vous
23 dans l'ex-JNA. Vous avez expliqué comment vous avez été formé à la
24 rédaction des ordres et des autres documents émanant d'un corps d'armée et
25 vous avez donné un certain nombre d'exemples concrets à ce sujet.
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1 A présent, je vous pose la question suivante : est-il vrai qu'il y avait
2 certaines différences entre des ordres de base, ordres de combat, par
3 exemple, l'ordre de lancer une offensive et des ordres plus spécialisés ?
4 Je vais m'expliquer. Vous avez déclaré que votre travail était un travail
5 d'équipe. Un travail d'équipe, cela signifie qu'il y a un certain nombre
6 d'officiers ou de cadres formés -- expérimentés, qui travaillent ensemble
7 pour rédiger des ordres de combat ou qui comportent certaines consignes un
8 peu complexes adressées aux unités, alors que des ordres plus spécialisés
9 pouvaient être rédigés par un officier seul, n'est-ce pas ?
10 R. Oui.
11 Q. Merci. Je suis sûr que mon confrère connaît mieux la chose militaire
12 que je ne vais pas rentrer dans des détails plus précis au sujet des ordres
13 militaires. Mais j'avais le sentiment que les questions que je vous ai
14 posées jusqu'à présent étaient importantes. Il y avait des ordres qui, par
15 nature même, étaient plus complexes que d'autres ordres traitant uniquement
16 d'un secteur particulier. Par exemple, l'organisation des transmissions, au
17 sein d'une unité, pouvait donner lieu, de votre part, n'est-ce pas, à
18 l'expédition d'un message destiné à quelqu'un au sein d'une unité qui, par
19 exemple, devait recevoir l'appareil -- le dispositif technique ou qui
20 devait mettre en place un système de transmission, quelque chose de ce
21 genre ?
22 R. Oui. L'aspect technique du fonctionnement de ces équipements est tout à
23 fait particulier, notamment, lorsqu'il faut ajouter un élément ou
24 dispositif ou quelque chose de ce genre.
25 Q. Vous avez également expliqué comment des documents étaient envoyés par
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1 le centre de Transmissions. Vous avez dit qu'il existait un système
2 d'organisation interne qui prévoyait quelle était la personne qui, à chaque
3 instant, était chargée de faire fonctionner l'appareil de transmission, et
4 qu'il y avait, pour cette personne, obligation d'apposer un sceau
5 particulier sur le document, n'est-ce pas, et d'apposer sa signature afin
6 de confirmer que les renseignements contenus dans le document étaient
7 exacts ?
8 R. Oui.
9 Q. Vous avez également expliqué que la personne, au niveau réception, au
10 sein de l'unité à laquelle était destiné l'ordre, disposait d'un sceau
11 comparable -- du même sceau, sur lequel la personne recevant le message
12 apposait sa signature ?
13 R. Oui.
14 Q. Cependant, est-il vrai que cette unité n'était pas tenue de renvoyer le
15 document, sur lequel le sceau de réception avait été apposé, au
16 commandement du 3e Corps ?
17 R. En général, non.
18 Q. Vous ne pouviez être absolument certain que l'ordre avait bien été
19 reçu, que si vous pouviez vérifier auprès de l'unité en question qu'elle
20 avait, effectivement, reçu cet ordre. Dans le cas contraire, au centre de
21 Transmissions, vous ne pouviez pas être sûr que le message envoyé par vous
22 n'avait pas été intercepté ou que son parcours n'avait pas été interrompu
23 et qu'en fait, il n'avait pas été reçu ?
24 R. En effet, c'est exact.
25 Q. Vous avez également répondu à des questions de l'Accusation concernant
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1 les personnes censées signer certains ordres. Vous avez dit que le
2 commandant, le suppléant du commandant et le chef d'état-major étaient
3 habilités à signer. Dites-moi, je vous prie : y a-t-il eu des cas, où une
4 personne pouvait être spécialement habilitée par le commandant pour signer
5 un document particulier, et que cela suffisait pour que les personnes,
6 chargées de l'expédition du document au centre de Transmissions, sachent
7 que cette personne avait le droit de signer ?
8 R. Si l'homme au Département administratif a apposé un sceau sur le
9 document, celui-ci pouvait être envoyé au centre de Transmissions avec une
10 signature différente.
11 Q. Mais, je vous pose la question suivante : est-il vrai qu'au centre de
12 Transmissions, vous receviez ou acceptiez tous les documents comportant une
13 signature et un sceau parce que vous aviez le sentiment qu'une première
14 vérification avait été faite par quelqu'un d'autre ? Le centre de
15 Transmissions n'était pas l'entité chargée de la vérification de la
16 signature s'agissant de déterminer si celle-ci était bien celle d'une
17 personne habilitée à signer, n'est-ce pas ?
18 R. En effet, c'est exact.
19 Q. Ce Département administratif ou ce service de protocole, ou quel que
20 soit le nom que vous lui donniez, était le service chargé de vérifier si le
21 document était bien signé par une personne habilitée à signer, n'est-ce pas
22 ?
23 R. Oui.
24 Q. Nous avons examiné un certain nombre de documents où l'on trouvait la
25 mention "commandant Enver Hadzihasanovic", mais qui était signé par
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1 d'autres que lui. Vous avez reconnu certaines de ces autres signatures,
2 pour d'autres vous n'étiez pas sûr de les reconnaître.
3 Cependant, au centre de Transmissions, lorsque vous receviez un document,
4 c'était un document qui devait être expédié, n'est-ce pas ?
5 R. Oui.
6 Q. Toutefois, au moment où vous expédiez ce document, vous ne saviez pas
7 si le commandant l'avait eu sous les yeux ou pas, n'est-ce pas ?
8 R. Les gens de rang inférieur ne sont pas censés effectuer de telle
9 vérification. Pour eux, le document était valable dès lors qu'il était
10 signé et qu'il comportait un sceau. C'est le sceau d'ailleurs qui avait
11 sans doute la plus grande importante. Il était sans doute plus important
12 même que la signature.
13 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je vois que l'heure de la pause approche.
14 J'ai encore quelques questions à poser au témoin, Monsieur le Président,
15 mais je ne sais pas si je dois les poser maintenant ou attendre la reprise.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Il vous faut encore combien de temps ?
17 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Quelques minutes.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Le mieux c'est de faire la pause parce qu'on a fait
19 déjà une heure et demie. On va faire la pause technique. On reprendra à 12
20 heures 55, et les Juges auront des questions à poser.
21 --- L'audience est suspendue à 12 heures 31.
22 --- L'audience est reprise à 12 heures 57.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Je redonne la parole à la Défense.
24 Mme RESIDOVIC : [interprétation]
25 Q. Quand vous avez répondu à des questions de mon confrère de
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1 l'Accusation, vous avez précisé qu'au début, vous receviez des documents
2 signés, visés au niveau de votre centre de Transmissions, vous le retapiez
3 et vous l'expédiez de manière électronique. Est-ce qu'il est convient de
4 dire que cela était ce qui se passait au niveau de l'année 1993, jusqu'à
5 l'arrivée des tous premiers ordinateurs dans le corps où l'on pouvait taper
6 directement ?
7 R. Oui.
8 Q. Comme vous nous l'avez expliqué, lorsque le 3e Corps a reçu ces
9 ordinateurs, à partir de ce moment-là, en partant de l'original, vous
10 receviez une disquette où il figurait un texte de ce qui se trouvait dans
11 le document même. Ce texte, à partir de la disquette, était re-acheminé par
12 vos soins vers les unités auxquelles cela était adressé, n'est-ce pas ?
13 R. Oui.
14 Q. Comme vous nous l'avez expliqué, par voie électronique, il n'a pas été
15 possible d'envoyer la signature et le cachet, ce qui fait que le
16 destinataire ne savait pas véritablement pas qui est-ce qui a signé le
17 document. Etait-ce le commandant dont le nom figurait au bas, ou une autre
18 personne au nom du commandant ou pour le commandant; est-ce bien vrai ?
19 R. Etant donné que vous avez reçu, à un moment donné, des ordinateurs pour
20 vous faciliter le travail au niveau des officiers qui préparaient ce texte
21 des ordres, est-il exact de dire que, dans ce document, il y avait, au
22 niveau de l'ordinateur, -- comment dirais-je – des modèles de documents ou
23 d'ordres, avec en réalité, un [imperceptible], à savoir, un exemple de
24 l'ordre, un modèle, un type. Dans l'ordinateur, vous avez toujours cet
25 entête, disant qu'il s'agissait du commandement du 3e Corps, et ainsi que
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1 le signataire, le commandant. L'employé, l'intervenant qui traitait le
2 reste, y apportait le corpus du texte, et l'entête et la signature se
3 trouvaient déjà dans l'ordre, et était re-calqué sur tous les autres
4 ordres.
5 Est-ce que vous avez connaissance de ce fait, à savoir que le bloc
6 signature lui, figurait constamment au niveau de la mémoire d'ordinateur ?
7 R. Pour l'essentiel, cela se passait ainsi. Nous nous servions très
8 souvent du dossier précédent pour faire le dossier suivant, étant donné que
9 certains éléments étaient identiques. On faisait une chose qui permettait
10 d'accélérer le travail.
11 Q. Comme vous nous l'avez expliqué plus en détail, vous avez dit que le
12 service administratif, avec vos responsabilités de vérifier si
13 véritablement la personne qui a signé le document est une personne
14 habilitée à le faire, mais au-delà de cela, vous ne savez pas de quelle
15 façon, et s'il a été possible d'obtenir, par exemple, vous-même, un
16 document qui aurait été signé par une personne qui ne serait pas habilitée.
17 R. Oui. Je n'étais pas à même de vérifier. Au centre, un cachet, une
18 signature faisaient du document un document authentique, valable. Nous
19 n'avions pas à le vérifier.
20 Q. Pour ce qui est des communications avec votre Compagnie chargée des
21 transmissions, pouvez-vous nous confirmer qu'il ne pouvait pas être exclu
22 la possibilité qu'il y ait des abus de la signature ?
23 R. Pas pour les modalités, mais pour ce qui est du système, oui.
24 Q. Je ne parlais pas d'abus du point de vue de dégâts quelconque, mais où
25 il pourrait y avoir, par exemple, un document avec le nom et le prénom du
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1 commandant frappé, mais que cela ne soit pas, effectivement, signé par le
2 commandant.
3 R. Oui, cela pouvait arriver.
4 Q. Vous avez, je pense, cité des exemples lorsque vous avez remarqué des
5 signatures de personnes qui n'étaient pas autorisées à signer.
6 J'ai une autre question. Vous avez décrit dans le détail la circulation des
7 documents, à savoir, à compter de sa création, les préparatifs de sa
8 rédaction et l'exposition vers telles et telles autres unités. Ce que je
9 voudrais vous demander, c'est ce qui suit : est-il exact de dire que, ni
10 dans le système des transmissions, ni dans le 3e Corps, vous n'avez pu du
11 tout suivre l'itinéraire des documents au niveau des unités subordonnés ?
12 Je vais être plus clair. Vous ne pouviez pas les suivre parce qu'ils ne
13 vous parvenaient pas, les ordres du commandant de la brigade ou d'autres
14 compagnies, vers les unités qui leur étaient subordonnées, ou les
15 commandants des compagnies n'envoyaient pas les copies de leurs ordres vers
16 les instances subordonnés. Est-il exact de dire que vous ne receviez pas de
17 documents de cette nature ?
18 R. Pour autant que je le sache, non.
19 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je vous remercie. Monsieur le Président,
20 je n'ai plus de questions à l'intention de ce témoin.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Les autres avocats ?
22 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous
23 n'avons pas de questions de notre côté.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : M. Mundis ?
25 M. MUNDIS : [interprétation] Pas d'autres questions, Monsieur le Président.
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1 Merci.
2 Questions de la Cour :
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Mon colonel, j'ai quelques questions qui sont dans
4 le droit fil des questions qui vont être posées.
5 Vous nous avez dit, en réponse aux questions de l'Accusation, que vous
6 étiez responsable des transmissions. Est-ce que, dans votre responsabilité,
7 il n'y avait uniquement que la question des ordres qui étaient transmis aux
8 unités extérieures, ou y avait-il d'autres compétences, comme la question
9 des fréquences radio, du matériel logistique donné aux unités en matière de
10 communication ? Est-ce que votre rôle n'était pas plus important que celui
11 de s'occuper de la transmission des ordres ? Est-ce que vous pouvez nous
12 répondre ?
13 R. J'ai davantage parlé du système de transmissions, c'est la raison pour
14 laquelle je me suis placé dans ce contexte, mais j'étais chargé de
15 fonctions qui sont liées au plan et à l'organisation. Vous avez tout à fait
16 raison, j'ai accompli également des tâches relevant de l'état-major et j'ai
17 été chargé de la gestion des fréquences. C'est là l'une des fonctions qui
18 relève de l'élaboration du planning des transmissions, prévision des
19 fréquences et de l'équipement technique. Peut-être ai-je fourni une image
20 quelque peu déformée parce que de ma part, je n'ai pas œuvré à cela, ce
21 n'est pas moi qui envoyais des messages, c'était l'unité des transmissions
22 qui le faisait, et cela a été clairement défini au sein du 3e Corps. En ma
23 qualité d'organisme professionnel, j'en savais plus long au niveau de
24 système de transmissions et je m'efforçais de faire en sorte que ce système
25 de transmissions soit édifié de la meilleure des façons possibles parce que
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1 cela était vulnérable et cela avait des difficultés de fonctionnement. De
2 ce côté-là, j'en savais plus que quiconque d'autre au niveau de l'état-
3 major. J'étais plus près de ces soldats qui travaillaient dans l'Unité des
4 Transmissions et qui vaquaient à cette occupation qui consistait à envoyer
5 des messages.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Vos locaux étaient situés au quartier général. Vous
7 aviez combien d'officiers ou de soldats sous vos ordres et vous aviez
8 combien de pièces, qui vous étaient attribuées pour le fonctionnement de
9 votre mission ?
10 R. Ce chiffre variait. Le département avait un à trois hommes où j'étais
11 chef. Ce département de Transmissions, toujours dans le cadre de l'état-
12 major du 3e Corps. Maintenant, pour ce qui est des transmissions au niveau
13 des commandements, il y avait une Compagnie chargée des transmissions, qui
14 se chargeait directement de l'expédition et réception des messages dans ce
15 système des transmissions.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : La Compagnie de Transmissions, vous en étiez le
17 responsable ?
18 R. Non.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Quel était le nom du responsable de la Compagnie de
20 Transmissions ?
21 R. Pour ce qui est de la structure hiérarchique du commandement du 3e
22 Corps, étant donné que je ne pouvais commander moi-même, je n'avais pas
23 cette fonction de commandement. Je ne pouvais pas me servir de cette unité
24 moi-même. J'étais, professionnellement, lié à ce qu'elle faisait, je savais
25 ce qu'elle devait faire, mais -- comment dirais-je -- il était subordonné
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1 au chef d'état-major du 3e Corps. Très souvent, c'était à lui qu'ils
2 étaient subordonnés et cela est le cas de nos jours plus ou moins.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Pour les ordres qu'on vous a montrés tout à l'heure,
4 mais j'y reviendrai, vous aviez à votre disposition combien de personnes
5 qui, recevant les disquettes, à partir des ordinateurs, par le système
6 modem et radio, envoyaient et expédiaient les ordres à l'extérieur. Il y
7 avait combien de personnes qui dépendaient de vous et qui faisaient ce
8 travail ?
9 R. Ceux qui dépendaient de moi dans ce département, il y avait aussi le
10 service de cryptage, et ils étaient plus près du système d'expédition des
11 messages parce que cet organe devait forcément savoir comment créer un
12 système, un codage et établissement de clés de lecture. C'étaient eux, qui
13 étaient directement liés à l'Unité chargée de la réception, du recodage et
14 de la réexpédition vers une autre unité. C'est cette unité qui s'en
15 chargeait au niveau de la Compagnie de Transmissions. Or, avec mes
16 collaborateurs, j'avais la possibilité de contrôler le bon fonctionnement
17 de ces derniers, de les aider avec des connaissances si j'étais à même de
18 le faire. Voilà.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous nous avez expliqué que les ordres que vous avez
20 vus, grâce à des ordinateurs dont les services avaient été équipés, vous
21 faites parvenir l'ordre par disquette et, ensuite, les disquettes étaient
22 utilisées pour que les ordres soient transférés à l'extérieur. Les
23 ordinateurs, qui étaient en dotation au 3e Corps, vous en connaissez la
24 marque ?
25 R. Oui, je connaissais certaines marques. Je pense qu'à l'époque, il
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1 devait s'agir IBM, le 286, par exemple.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Il y avait, grosso modo, combien d'ordinateurs au
3 sein du 3e Corps ? Il y en avait combien, un chiffre approximatif ?
4 R. On a commencé avec un seul, à dire vrai. La quantité a été par la suite
5 limitée à quelques ordinateurs au début 1993. Je ne pense pas qu'il y en
6 ait eu plus de trois ou quatre de ces ordinateurs dont les configurations
7 étaient d'ailleurs assez variées. Ils ont été réquisitionnés au niveau
8 d'entreprises où il avait été possible d'en trouver.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : C'étaient des ordinateurs IBM, qui avaient été
10 réquisitionnés auprès des entreprises. Que sont devenus ces ordinateurs et
11 les disques durs ? Est-ce que vous savez ce que sont devenus ces
12 ordinateurs ?
13 R. A mesure que la technologie s'est développée et que le temps s'est
14 passé, nous recevions, au fil du temps, des appareils du type 386. Il nous
15 arrivait d'avoir des ordinateurs tout à fait récents et c'est ainsi que le
16 processus s'est déroulé.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Mais les ordinateurs, ils allaient à la poubelle.
18 Ils étaient reversés au service des domaines qui doivent exister en Bosnie.
19 Que devenaient-ils ces ordinateurs ? A votre connaissance, si vous ne savez
20 pas, dites : je ne sais pas.
21 R. Certes, ces ordinateurs ont été exploités au maximum. Ils ont été
22 exploités jusqu'à leur possibilité extrême. Je crois que certains sont
23 restés dans certains entrepôts peut-être devant être peut-être anéantis,
24 mais un certain nombre doit exister de nos jours encore. Un certain nombre
25 a péri, a été détruit suite à des opérations de combat ou a été saisi. Il
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1 est arrivé toute une série de choses.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : En suivant le cheminement de la confection d'un
3 ordre tel qu'on a compris et d'après ce que vous nous avez dit, parce que
4 pour moi c'est pas tout à fait encore très clair, un ordre est
5 confectionné, disons, par le commandement du 3e Corps, soit lui-même, soit
6 par quelqu'un qui travaille sous sa direction. Cet ordre est
7 intellectuellement confectionné et à partir de l'ordinateur, mis à la
8 disposition du commandant du 3e Corps. De cet ordinateur, il y a une
9 disquette, qui est tirée et la disquette est amenée afin que le document
10 soit édité à l'extérieur. Est-ce que vous confirmez que c'est bien comme
11 cela que cela se passe ?
12 R. Dans l'ordinateur, il y a ce "floppy", cette disquette et on l'a met
13 dans l'ordinateur, on copie sur le disque dur et c'est expédié, et la
14 disquette, elle, est renvoyée vers celui qui l'a envoyée au centre de
15 Transmissions avec le document original.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Entre le centre de Transmissions et le bureau du
17 commandant du 3e Corps, est-ce que les ordinateurs -- est-ce que tout le
18 système était en réseau ou il fallait sortir une disquette du bureau du
19 commandant du 3e Corps, amener la disquette au centre de Transmissions pour
20 la faire partir ou est-ce que tout cela était en réseau, à l'époque ?
21 R. Le commandant du corps ne pouvait avoir d'ordinateur. Il n'y avait
22 qu'un seul ordinateur au niveau du centre. Eventuellement, dans les
23 premières journées d'existence du corps, il y en avait peut-être un dans le
24 bureau le plus proche du bureau chargé de la dactylographie, enfin, du
25 Département administratif. Il y avait un intervenant qui était là pour
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1 taper, pour assurer la frappe, pour aider à placer le texte sur
2 l'ordinateur. Nous n'avions pas la possibilité, et bon nombre d'entre nous
3 ne savaient même pas ce que c'était, à l'époque.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Toujours pas très clair. L'ordinateur qui, semble-t-
5 il, au départ, était unique, il se trouvait où cet ordinateur ?
6 R. Au centre de Transmissions du 3e Corps.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Si je comprends bien, la secrétaire ou le secrétaire
8 du commandant du 3e Corps tapait sur sa machine à écrire un texte. Ensuite,
9 ce texte était amené à l'ordinateur qui se trouvait au centre de
10 Transmissions, et c'est à partir de là que le texte basculait sur une
11 disquette, ensuite, via le modem, cela repartait à l'extérieur; c'est bien
12 cela ?
13 Vous dites oui de la tête, dites-le --
14 R. Oui, vous avez raison. Je tiens à préciser que c'était au départ, au
15 tout début, à l'époque où il n'y avait pas au commandement un deuxième
16 ordinateur pour accélérer le processus de confection des documents. Dès que
17 nous avons reçu un deuxième ordinateur, il a été mis en fonction. Il a été,
18 si vous le voulez, le deuxième, et il en est venu un troisième. Au tout
19 début, il y en avait qu'un seul au centre de Transmissions. On n'avait pas
20 besoin de disquette à ce moment-là, on allait directement sur le disque dur
21 et on assurait la frappe tout de suite, en direct, parce que l'ordinateur
22 était un moyen de communication à ce moment-là, comment dirais-je, qu'il
23 était destiné aux besoins de l'administration, et il était affecté aux
24 besoins des communications.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Je voudrais qu'on vous redonne les documents qu'on
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1 vous a présentés. Le document 649. Là, vous pouvez le mettre sous le
2 rétroprojecteur.
3 Vous avez le document 649 sous les yeux. Vous voyez en haut et à gauche la
4 date 11 mars 1993. Au-dessus, il y a le numéro 02/742. Les trois autres
5 documents qu'on vous a présentés, il y avait 02/33. Est-ce que dans ce
6 document on n'a pas oublié le numéro 33 ? Car les trois autres documents,
7 on peut vous les montrer, portent 02/33, plus un chiffre. Alors 02, cela
8 doit correspondre au commandant du
9 3e Corps. Le chiffre 33, cela correspond à quoi ? On va vous présenter le
10 numéro 41.
11 Posez le 41.
12 Vous voyez le document suivant, il y a toujours 02, mais là, il y a 33. Le
13 33 on ne le retrouve pas dans le deuxième document. Pour vous, c'est quoi
14 ce chiffre 33 ?
15 R. Je ne suis pas un expert. En réalité, ce n'est pas moi qui ai accompli
16 ces tâches. C'était l'autre service qui s'en chargeait. Il y avait des
17 instructions pour ce qui est du fonctionnement administratif qui
18 définissaient les choses.
19 En tout état de cause, ici, pour ce qui est de ce numéro d'enregistrement
20 et pour autant que je m'en souvienne, les deux premiers chiffres, comme par
21 exemple, le 02, je crois que c'était la désignation du corps. Pour
22 indiquer, cela a été fait au corps. Cela était modifié de temps en temps.
23 Cela changeait lorsque les gens lisaient quelque chose et en apprenaient
24 plus, ils changeaient. Le 33, cela pouvait avoir un lien quelconque avec
25 une fonction déterminée ou avec le type de documents dont il s'agissait,
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1 étant donné qu'il y avait des ordres d'une part, des rapports d'autre part,
2 et des avertissements peut-être, que sais-je.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous ne pouvez pas répondre à cette question. Dans
4 la mesure où ces documents, vous voyez il y a des numéros 742, 2 041.
5 [comme interprété] Tous les documents ont des numéros. Est-ce à dire que si
6 on suit l'ordre chronologique, à savoir, le 1er janvier 1993, cela doit être
7 le numéro 1. Dans le disque dur de l'ordinateur, on devrait retrouver pour
8 peu que cela a été tapé sur un ordinateur, l'ensemble de tous ces
9 documents.
10 R. Cela devrait pouvoir être retrouvé sur l'ordinateur, tous ces
11 documents. Du moins cela devrait être le cas soit dans les archives, soit
12 dans l'ordinateur, mais, dans l'ordinateur, on peut aussi biffer ce que
13 l'on a écrit.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Effectivement, on peut biffer, mais on ne peut pas
15 enlever d'un disque dur ou quoi que ce soit.
16 On va vous présenter le document 162. Je voudrais que vous regardiez le
17 tampon qui est à la page 2 de ce document.
18 Vous nous avez expliqué l'avant-dernière ligne, "TLF", télex, "TGH", et
19 cetera. Comment se fait-il que, sur ce document, il n'y ait -- on ne sait
20 pas par quel moyen, ce document part ? Il n'y a pas de cercle autour.
21 Quelle explication pouvez-vous donner ?
22 Vous voyez au --
23 R. Vous avez raison. La règle voudrait que celui qui a signé ait au
24 préalable cerclé les modalités d'expédition. Il a omis de façon évidente
25 d'apporter ce détail. Il n'a pas accompli sa tâche jusqu'au bout.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : L'homme radio, Monsieur Ademovic, qui signe, comment
2 va-t-il faire lui, pour envoyer ce document ? Est-ce qu'il va l'envoyer par
3 téléphone, par télex, par radio, radio sans fil, radio amateur ? Comment
4 va-t-il se débrouiller dans la mesure où il n'y a aucune indication sur la
5 façon dont ce document doit être expédié ?
6 R. Il était une règle non écrite disant que la communication à établir
7 devait être celle qui permettait au document d'arriver le plus vite
8 possible à destination. A ce moment-là, on se sert du premier des modes de
9 transmission qui permettrait de le faire de la façon qualitativement la
10 meilleure.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Il est 22 heures 45. Il n'y a certainement pas un
12 coursier ou un porte-pli à cette heure-là. A ce moment-là, comment va-t-il
13 faire pour envoyer cet ordre ? Est-ce qu'il va utiliser le téléphone ? Va-
14 t-il utiliser le télex ? Qu'est-ce qui va se passer dans cette situation ?
15 Car cela a bien été envoyé à 22 heures 45, mais on ne sait pas par quelle
16 voie.
17 R. L'intervenant n'a pas fait son travail jusqu'au bout. Il n'a pas
18 indiqué quelle est la voie utilisée. Je suppose, pour ma part, que cela a
19 été envoyé par paquet, voire par modem téléphonique. Il fallait que je voie
20 un peu concrètement de quelle unité il s'agit en guise de destinataire. Je
21 crois que c'est parti par paquet radio.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Cela a été envoyé à un groupe, le groupe Krajina
23 opérationnel.
24 R. Oui, par paquet.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Par paquet.
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1 R. C'est le dernier des sigles qui figure dans la ligne, mais ce n'est pas
2 assez lisible.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Si l'ordre a été envoyé à 22 heures 45, il y a tout
4 lieu de penser que l'ordre a été confectionné intellectuellement dans
5 l'heure qui a précédé ou dans la demi-heure ou les cinq minutes
6 précédentes. Quand on envoie à une heure aussi tardive, c'est qu'il y a une
7 certaine urgence ou pas ?
8 Ma question, elle est déjà, la réponse est dans le document parce que je
9 vois il y a le mot "urgent" en première page. Regardez.
10 Vous, qui avez été un officier supérieur, est-ce que, pour vous, ce type
11 d'ordre a été fait tout au moins dans les minutes qui précédaient 22 heures
12 45 vu l'urgence ?
13 R. Je pense qu'avant d'être envoyé, le document a dû être rédigé une heure
14 ou deux avant. Il y a toute une procédure pour ce qui est du cheminement
15 interne d'un document : frappe, signature, visa, position du cachet,
16 acheminement par estafette. Il arrivait que le document reste quelque temps
17 au niveau de la personne qui l'a rédigé aussi.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que ce n'est pas celui qui rédige et qui
19 signe de déterminer la façon par laquelle l'ordre doit être transmis ? Est-
20 ce que ce n'est pas à celui qui rédige normalement dans les usages de
21 l'armée de dire téléphone, télex, pli ? Dans ce cas, pourquoi il n'y a pas
22 une mention sur la page 1 ?
23 R. J'ai déjà précisé que nous étions en train d'édifier un système. Nous
24 imaginions savoir comment le système devait fonctionner. Nous voulions que
25 cela fonctionne avec le sérieux nécessaire. Il est évident, toutefois, que
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1 tout n'a pas été fait convenablement. Il y a des omissions pour ce qui est
2 de l'indication de la voie à suivre pour envoyer ce document. En principe,
3 pour ce qui est des documents courts, le système des transmissions pouvait
4 assurer l'expédition de ces messages. Maintenant, pour ce qui est des
5 documents longs, nous savions d'avance que c'était plutôt problématique que
6 de les expédier. Le rédacteur du document, sachant que tels documents
7 étaient plus importants que d'autres ou sachant qu'il y avait possibilité
8 de mise sur écoute, il était parfois plus sûr d'envoyer un tel document par
9 estafette que de procéder autrement.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous aviez l'impression que vous pouviez parce que
11 la Défense vous a posé sur des questions sur le brouillage et autre. Vous
12 avez répondu, en disant qu'effectivement, il y avait du brouillage. Vous
13 avez dit qu'on peut être sous écoute. Est-ce que vous pensez que vos ordres
14 qui n'étaient pas cryptés pouvaient être par le HVO, connus ?
15 R. Les soldats, qui intervenaient au niveau du centre de Transmissions,
16 savaient qu'ils n'avaient pas l'autorisation d'envoyer les ordres par voie
17 de communications non cryptées, les documents autres. En mettant en place
18 ce système et disposant d'un système de codage au niveau des
19 communications, nous nous servions de celui-ci. Parfois, nous pouvions
20 envoyer des documents, même avec un degré de confidentialité militaire,
21 pouvaient être envoyés par ce système des transmissions également.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Par le système paquet, notamment, ceux qui partaient
23 par télex, est-ce que l'armée avait son propre réseau, ou vous étiez
24 obligés de passer par le réseau des postes et des télécommunications, qui
25 est le réseau normal ? Est-ce que vous n'étiez pas dépendants du réseau
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1 civil, ou vous aviez votre propre réseau ?
2 R. Nous nous servions de certains segments; des télécoms, à savoir, des
3 PTT. J'ai précisé, je pense, que jusqu'à Kakanj, nous avions ce type de
4 communications-là, à savoir, le système de communications par fil. A ce
5 moment-là, à partir de là, les documents étaient envoyés par modem
6 téléphonique. Pour ce qui est, par exemple, de Bosanska Krajina,
7 pratiquement durant toute cette période-là, nous n'avons pas disposé de
8 communications par fil. La seule communication que nous avions, dirais-je,
9 c'était cette communication par paquet. Ce sont des informations écrites
10 rédigées que nous pouvions ainsi expédiées ailleurs.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Si j'ai bien compris, vous étiez le responsable de
12 tout le système de communications du 3e Corps.
13 R. Oui, j'étais la personne la plus responsable pour ce qui était du
14 fonctionnement de ce système des transmissions.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce système de transmissions, est-ce qu'il
16 fonctionnait 24 heures sur 24 ? Y avait-il un officier de permanence au
17 niveau des transmissions ?
18 R. Oui. Cette Unité chargée des Transmissions, cette Compagnie de
19 Transmissions avait des centres de Transmissions en fonctionnement
20 ininterrompu au poste de commandement et au poste de commandement avancé.
21 Nous assurions un fonctionnement planifié de 24 heures sur 24. Les équipes
22 se relevaient, plutôt le personnel qui était appelé à intervenir se
23 relevait. Le processus fonctionnait de façon ininterrompue sur 24 heures,
24 des fois sur 12 heures. Cela dépendait de la situation. Le processus,
25 disais-je, était le processus de fonctionnement habituel.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : L'officier en permanence aux transmissions, il avait
2 un registre ou il indiquait tout ce qui se passait s'il recevait un télex,
3 un appel téléphonique. Est-ce qu'il y avait un registre sur lequel il
4 mentionnait tout ce qui se passait ? Si une unité qui était sur le terrain
5 appelait à 2 heures du matin pour expliquer qu'il y avait des tirs qui
6 avaient commencé, est-ce que cet officier marquait tout ?
7 R. Oui. Au centre de Transmissions, il y avait un officier ou un sous-
8 officier, en général, qui était chargé du fonctionnement du centre de
9 Transmissions, ceci de la meilleure des façons possibles, à ce moment-là.
10 Il avait un grade plus élevé que l'intervenant lui-même. Cela faisait
11 partie intégrante du système opérationnel. Cela se trouvait juste à côté du
12 centre opérationnel où il y avait un officier en charge qui venait parfois
13 vers le centre de Transmissions pour recevoir des messages, ou il les
14 recevait, ces messages au niveau de son centre opérationnel à lui. Il se
15 pouvait qu'il reçoive une information écrite, même à une heure tardive qui
16 lui serait parvenue. C'était à lui de décider s'il fallait réveiller le
17 commandant. Si le commandant était en train de dormir à cette heure-là, si
18 tant est qu'il était endormi, disais-je, il se pouvait qu'il prenne lui-
19 même la décision nécessaire parce qu'en parallèle avec ce système de
20 transmissions, il y avait des centres opérationnels.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Les Juges ont terminé leurs questions. Est-ce que la
22 Défense veut reprendre la parole ?
23 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, juste quelques
24 questions.
25 Contre-interrogatoire supplémentaire par Mme Residovic :
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1 Q. [interprétation] Monsieur, en répondant à l'une des questions du
2 président de la Chambre, vous avez parlé de documents écrits. Pour moi, il
3 demeure quelque peu obscur des éléments de votre réponse, et j'aimerais
4 obtenir quelques éclaircissements.
5 Est-ce que je vois juste si je dis, quand vous décrivez la façon dont il
6 est rédigé un document, il a été question d'une phase de préparation. Ai-je
7 bien compris là que la plupart de ces ordres, en tant que proposition à
8 l'intention du commandant, sont préparés et tapés par l'un quelconque des
9 officiers d'état-major, n'est-ce pas ?
10 R. Oui, c'est très souvent le cas.
11 Q. Si j'ai bien compris, il est très rare que le commandant lui-même,
12 dicte à la secrétaire la teneur d'un ordre. En général, on lui communique
13 des projets d'ordre ou des propositions d'ordre que vous avez rédigés suite
14 à des idées de sa part ou suite à une initiative de votre part. Cela est
15 porté, mis sur papier pour faire l'objet d'un document ?
16 R. Dans la plupart des cas, c'était le cas.
17 Q. Merci. La question suivante portait sur ces numéros. Il se peut qu'au
18 niveau du commandement du corps, il y ait eu des renseignements ou un
19 registre, pour ce qui est des différents chiffres ou codes. On saurait en
20 consultant ce registre, ce que signifiaient le 01, le 02, et cetera ?
21 R. C'est exact.
22 Q. Ma question suivante porte sur ce que vous venez d'expliquer. Ce
23 système de transmissions intervenait 24 heures sur 24, tout comme le centre
24 opérationnel au niveau de ce 3e Corps, n'est-ce pas ?
25 R. Oui, il y avait des équipes, un personnel qui intervenait au sein de ce
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1 centre.
2 Q. Auparavant, vous nous avez expliqué que très souvent, il y a eu des
3 pannes de transmissions. Etant donné que ces gens travaillaient sans
4 interruption, s'il y avait panne, il se pouvait que des documents soient
5 envoyés la nuit, alors que ces documents leur seraient parvenus dix heures
6 plus tôt ou un jour plus tôt. Mais ils ne pouvaient pas leur expédier avant
7 qu'il y ait rétablissement des communications, n'est-ce pas ?
8 R. C'est tout à fait exact.
9 Q. Dans ces circonstances de guerre, est-il exact de dire que la nuit, les
10 transmissions se rétablissaient mieux et fonctionnaient mieux que dans le
11 courant de la journée ?
12 R. Cela n'est pas forcément toujours le cas. Je ne pense pas que cela ait
13 quoi que ce soit à voir avec la période de la journée ou de la nuit.
14 Q. Autre chose au sujet de ces transmissions et de ce système. Vous nous
15 avez expliqué des voies de transmissions. Etant donné que ce centre de
16 Transmissions fonctionnait la nuit entière, les estafettes de la Compagnie
17 de transmissions, elles aussi étaient disponibles 24 heures sur 24. A tout
18 moment, lorsqu'il s'agissait de porter un message, ils pouvaient le faire
19 si cela était urgent ?
20 R. Oui, si cela ne pouvait pas être envoyé par le système des
21 transmissions normales.
22 Q. Merci.
23 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président. Je n'ai plus de
24 questions.
25 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
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1 Nous n'avons pas de questions.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis.
3 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, pas de
4 questions; cependant, je demanderais qu'on nous remette le document
5 contesté 162.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : On va vous rendre tous les documents.
7 Mon Colonel, votre audition vient de se terminer, puisque vous avez répondu
8 à l'intégralité des questions posées par l'Accusation, la Défense et les
9 Juges. Nous vous remercions d'être venu à La Haye. Nous vous souhaitons un
10 bon voyage de retour en formulant nos meilleurs vœux pour votre retraite.
11 Je vais demander à M. l'Huissier de bien vouloir vous raccompagner à moins
12 que M. Mundis ait quelque chose à dire par rapport au témoin.
13 M. MUNDIS : [interprétation] Avec votre permission, je pense que la
14 situation est sans précédent, puisqu'il est fort probable que ce témoin va
15 revenir en tant que témoin à décharge. Même si, manifestement, il a prêté
16 serment, nous ne verrions pas d'inconvénient à ce que la Défense communique
17 avec lui. On peut considérer que maintenant il n'est plus sous le coup de
18 ses déclarations. Je voulais simplement l'acter.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Comme je viens de l'indiquer, votre audition est
20 terminée. Vous pouvez voir qui vous voulez, la Défense, bien entendu. Il
21 n'y a aucun problème. Peut-être que nous aurons le plaisir de vous revoir
22 dans le futur, mais cela ne dépend de nous. Je vous souhaite un bon voyage
23 de retour. Je vais demander à Monsieur l'Huissier de bien vouloir vous
24 raccompagner.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
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1 [Le témoin se retire]
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis, je vous redonne la parole pour la
3 présentation de jeudi et de vendredi. Où en est-on ?
4 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Pouvons-nous
5 passer à huis clos partiel l'espace de quelques instants.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, nous passons à huis clos
7 partiel.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur
9 le Président.
10 [Audience à huis clos partiel]
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24 [Audience publique]
25 M. LE JUGE ANTONETTI : En audience publique, je déclare la fin de cette
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1 audience, puisque nous avons terminé l'audition du témoin. L'audience de
2 demain reprendra non pas à 9 heures, mais à
3 11 heures. J'invite tous les participants à revenir pour l'audience qui
4 débutera demain, à 11 heures du matin.
5 --- L'audience est levée à 13 heures 51 et reprendra le jeudi 1er juillet
6 2004, à 11 heures 00.
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