Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le vendredi 22 octobre 2004

2 [Audience publique]

3 --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

4 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, pouvez-vous appeler le numéro

6 de l'affaire.

7 M. LE GREFFIER : Merci, Monsieur le Président. Affaire IT-01-47-T, le

8 Procureur contre Enver Hadzihasanovic et Amir Kubura.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

10 Je vais demander à l'Accusation de bien vouloir se présenter.

11 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour,

12 Messieurs, Madame les Juges. Je salue toutes les personnes présentes dans

13 la Chambre. Pour l'Accusation, nous avons Mme Henry-Benjamin, M. Mundis et

14 M. Vatter.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais demander aux avocats de bien vouloir se

16 présenter.

17 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

18 Madame et Monsieur les Juges. Pour la défense du général Enver

19 Hadzihasanovic, Edina Residovic, conseil, Mirna Milanovic Lalic, assistant

20 juridique, et Muriel Cauvin, assistante juridique.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Les autres avocats.

22 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Pour la

23 défense de M. Kubura, Rodney Dixon, Fahrudin Ibrisimovic, et Nermin

24 Mulalic, notre assistant juridique.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Je salue toutes les personnes présentes. Nous nous

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1 retrouvons dans cette salle numéro II qui est beaucoup plus conviviale

2 parce que nous sommes plus prêts les uns des autres.

3 Monsieur le Greffier, vous deviez exécuter un travail, et nous faire à

4 l'occasion des modifications par rapport au transcript d'hier. Vous avez la

5 parole.

6 M. LE GREFFIER : Merci, Monsieur le Président. Le travail a été effectué.

7 On est en train, malheureusement, la session s'est terminée assez tard,

8 hier. Le travail est en cours en ce moment de vérification. Si vous me le

9 permettez, je peux clarifier les points, si nécessaire, après la deuxième

10 pause dans la journée. Je pense, encore une fois, que le transcript sera

11 amendé suivant les informations que j'ai pu données aux interprètes, hier

12 soir.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Nous vérifierons cela après la deuxième

14 pause.

15 Nous allons introduire le témoin. Monsieur l'Huissier, pouvez-vous aller

16 chercher le témoin.

17 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. J'espère que vous nous entendez.

19 Si c'est le cas, dites : Je vous entends.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour. Je vous entends très bien.

21

22

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Sans perdre de temps, je me tourne vers la Défense

24 pour la continuation.

25 LE TÉMOIN: REMZIJA SILJAK [Reprise]

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1 [Le témoin répond par l'interprète]

2 Interrogatoire principal par Mme Residovic : [Suite]

3 Q. [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour, Monsieur Siljak.

4 Hier, sur la carte vous avez tracé les emplacements où étaient déployées

5 les unités de l'ABiH, les forces de la Republika Srpska et celles du HVO.

6 Je vais maintenant passer aux questions qui touchent aux relations entre la

7 306e Brigade et l'ABiH, s'agissant du territoire où était déployée votre

8 brigade. Je vais passer aussi à des questions liées au conflit survenu

9 entre ces unités.

10 Ma question est la suivante : lorsque vous nous avez montré le déploiement

11 de certaines unités, vous avez montré la route reliant cette région avec

12 Travnik et Zenica. Veuillez m'indiquer, je vous prie, Monsieur Siljak, de

13 quelle route s'agit-il ? Quelle est son importance pour la population et,

14 en particulier, j'aimerais savoir si elle revêtait de l'importance pour

15 l'ABiH et votre brigade ?

16 R. Cette route relie Zenica en passant par Guca Gora, Han Bila et Ovnac

17 pour arriver à Travnik. La route principale reliant Zenica et Travnik était

18 la route nationale allant jusqu'à Lasva puis de Lasva à Zenica. Cependant,

19 pour la majeure partie de cette période-là, elle n'a pas été praticable,

20 non pas parce qu'elle était inutilisable mais parce qu'il y avait des

21 points de contrôle du HVO, notamment ce point de contrôle à Okuca, cet

22 espèce de carrefour pour aller à Nova Travnik. C'est la raison pour

23 laquelle la route n'a pas été utilisée, à savoir les membres de nos unités

24 pouvaient difficilement l'utiliser.

25 L'autre route qui reliait Zenica et Travnik était une route également

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1 nationale et passait par Vitez pour aller, via Vjetrenice, en direction de

2 Zenica. L'ABiH l'utilisait également assez peu. Mais en passant par Guca

3 Gora, on arrivait à la vallée de la Bila et ensuite Zenica et Travnik.

4 Celle route-là, étant donné qu'au début de sa création, la 306e Brigade

5 prenait appui sur le QG municipal de la défense et ceci à Travnik. Cette

6 route, c'était la route empruntée par moi-même, par le commandant pour

7 aller au travail, c'était une sorte de route de transit pour des milliers

8 de personnes déplacées, pour la population qui allait de Travnik vers

9 Zenica et en direction de la vallée de Bila.

10 Q. Veuillez m'indiquer de quelle façon les unités, qui faisaient partie de

11 cette région, à savoir la 312e, la 314e et les autres, quelle est la route

12 qu'elles pouvaient emprunter pour arriver jusqu'aux positions de combat

13 face aux effectifs serbes ?

14 R. La 314e Brigade motorisée était installée à Zenica mais leurs positions

15 se trouvaient sur le territoire de la municipalité de Travnik face à

16 l'agresseur serbo-monténégrin dans le secteur de Meokinje. En se déplaçant

17 vers ces positions, il fallait aller vers Zenica, en passant par Ovnak

18 jusqu'à Han Bila, puis continuer en passant par Mehurici, Pula, Pukavica,

19 jusqu'à ces positions. Le point de contrôle du HVO, établi à Ovnak,

20 fonctionnait tout le temps indépendamment des négociations, des

21 pourparlers, et cetera.

22 On n'a jamais pu faire en sorte que ces points de contrôle soient

23 éliminés parce qu'il y a eu des concertations, de part de d'autre, pour

24 passer par des commandements conjoints et éliminer tous ces points de

25 contrôle des routes. Mais ce point de contrôle-là n'a jamais éliminé. Je

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1 sais que des unités, se dirigeant vers leurs positions face à l'agresseur

2 serbo-monténégrin, ne pouvaient pas emprunter cette route. En plus, pour ce

3 qui est de l'axe de Zenica vers les positions, il y avait la 7e Brigade

4 musulmane et pour aller vers ses positions, il fallait passer par Ovnak,

5 Han Bila, Guca Gora, pour arriver à Travnik. Les membres des unités de la

6 7e Brigade musulmane avaient aussi des problèmes sur cette route parce que

7 parfois, même l'autorisation d'un commandement supérieur du HVO n'était pas

8 valide ou suffisamment bonne. Ils arrêtaient les gens, les malmenaient et

9 les renvoyaient vers leur point de départ.

10 Q. Monsieur Siljak, étant donné qu'étiez chef de l'état-major de cette

11 306e Brigade, dites-moi s'il y avait sur ce territoire-là une Brigade du

12 HVO, quelle qu'elle soit, et si oui, quel était son nom. Veuillez aussi

13 m'indiquer quels étaient les rapports entretenus entre vos unités

14 respectives. J'aimerais savoir aussi s'il y a eu escalade pour déboucher à

15 un conflit, à un moment donné.

16 R. Au tout début de la création de la 306e Brigade sur le territoire à

17 partir duquel l'on a complété nos effectifs, il y avait eu un bataillon de

18 la Brigade de Travnik du HVO. Vers le début du mois d'avril, elle avait son

19 siège à Guca Gora. C'est ensuite mis en place une autre Brigade, la

20 Frankopan. Le siège de la Brigade se trouvait à Guca Gora et il y avait des

21 unités à Cukle, Grahovcici, Maline, Guca Gora, c'est-à-dire sur ces

22 territoires de la vallée de la Bila, habités par une population croate.

23 Dans cette phase initiale, pour ce qui est des relations entre les

24 commandements de l'une et de l'autre des brigades en présence, je dirais

25 qu'un bon nombre de facteurs a influé sur ces relations. Surtout la

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1 situation sur les territoires autres, à savoir sur les territoires des

2 municipalités avoisinantes. A l'occasion de la création de la 306e Brigade,

3 il s'est posé des problèmes à Novi Travnik et cela s'est répercuté sur la

4 situation au niveau de la vallée de la Bila. Ce que je sais, en arrivant,

5 c'est que le HVO, à ce moment-là, a mis en place des positions face aux

6 villages habités par une population musulmane, notamment, les villages de

7 Radonjici et Mala Bukovica. De l'autre côté, pour ce qui est de Saricici et

8 Banovici.

9 En janvier 1993, il y a, à nouveau, eu des conflits, des incidents

10 sur le territoire d'autres municipalités et cela s'est tout de suite

11 répercuté sur notre territoire également. Cela se traduisait par

12 l'occupation de côtes élevées sur les montagnes et l'installation de points

13 de contrôle pour justement contrôler tous les déplacements. Ce qui fait

14 qu'on n'a pas pu aller et venir sans autorisations et si on n'avait pas

15 d'autorisation, on risquait d'avoir des problèmes. Je dirais que cela

16 provoquait des réactions du côté des villages bosniens. Je vous ai dessiné

17 sur la carte comment les choses se présentaient au niveau de la position de

18 ces villages. A Guca Gora, à l'entrée et à la sortie de Guca Gora, il y

19 avait un point de contrôle du HVO. De même à l'entrée, à l'accès de la

20 route vers Maline, les habitants de Maline, la population bosnienne pour

21 leur sécurité, non pas qu'il y ait eu un ordre de la part de l'armée mais

22 ces gens-là ont, de leur propre initiative, mis en place des points de

23 contrôle à eux.

24 Q. Merci. Dites-moi ces blocus de route, l'impossibilité de passer vers

25 les positions de combat au front des différentes unités, comment s'est-il

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1 répercuté sur la chaîne de commandement et dites-nous aussi où se trouvait

2 le commandement de votre brigade ?

3 R. J'ai dessiné hier sur la carte un poste de commandement de brigade,

4 c'est-à-dire, le poste de commandement principal. J'ai indiqué que cela se

5 trouvait dans les locaux de la mine de Bila. C'est un endroit où il y

6 avait, notamment une population croate, et le village de Baje qui se

7 trouvait juste à côté des bâtiments de la direction de la mine. C'étaient

8 des Croates là. Je ne sais pas comment vous faire une appréciation de la

9 situation, parce que si notre intention était celle de ne pas avoir peur de

10 se battre ensemble contre l'ennemi, nous avions envisagé un poste de

11 commandement, mais nous n'avions pas envisagé le HVO et les Croates en tant

12 qu'ennemis. C'est la raison pour laquelle nous avons mis ce poste de

13 commandement là, autrement on l'aurait mis ailleurs. Conformément à

14 l'évolution de la situation sur le territoire, la vallée de la Bila devient

15 subdivisée en plusieurs secteurs. On ne pouvait pas circuler entre les uns

16 et les autres, à savoir, je veux dire que le secteur à partir duquel l'on

17 complétait cette

18 306e Brigade n'était pas une entité, mais c'étaient des sortes d'enclaves

19 entre lesquelles il était impossible de circuler. Il était difficile

20 d'arriver au poste de commandement. Les unités avaient du mal à exécuter

21 leur mission telle qu'ordonnée. Face à l'agresseur serbo-monténégrin, on ne

22 pouvait pas réaliser certains ordres en raison de la situation vis-à-vis du

23 HVO. Ce qui fait que les commandants des brigades étaient un peu dissociés

24 du commandement supérieur. A un moment donné, ils étaient disséminés sur

25 six sites différents, ces officiers supérieurs de la brigade. Je précise

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1 que c'était juste avant les conflits où l'on n'a plus pu circuler.

2 Q. On va y revenir, Monsieur. En raison de toutes ces tensions, le HVO

3 s'est-il, à quelque moment que soit, attaqué aux positions occupées par

4 l'ABiH, et ces situations ont-elles pour issue des pertes de vie humaines ?

5 Je voudrais savoir quelles sont les relations entre la 306e et, en général,

6 l'ABiH, concernant les tentatives d'éviter les conflits avec le HVO.

7 R. Le premier incident avec perte de vie humaine, avec des conséquences

8 fatales, a été celui où un civil a été tué à Maline, la journée de la fête

9 de l'armée. Il s'agissait de Daoutovic Sakib. Cela s'est passé le 15 avril

10 1993. Dès qu'une chose de cette nature survient, il y a d'autres incidents,

11 il y a une situation de tension et des mauvais traitements à l'égard des

12 uns ou des autres. Bon nombre de rapports nous sont parvenus depuis le

13 terrain pour ce qui est de personnes arrêtées à des points de contrôle du

14 HVO, confiscation d'objets appartenant à des civils ou à des soldats. Il y

15 a eu même une attaque ouverte de la part du HVO en direction du poste de

16 commandement de la 306e Brigade avec des victimes humaines. Il s'agissait,

17 notamment de deux membres de la police militaire. Il y a eu des activités

18 déployées par le HVO en direction de Zukici, Karahodze --

19 L'INTERPRÈTE : D'autres localités dont l'interprète n'a pas saisi le nom.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela s'est passé au quotidien. Il y a eu des

21 victimes humaines, des tirs de tireurs isolés. De l'autre côté, j'ai essayé

22 de vous montrer le village Ricice, à savoir, Brankovac. On nous appelait à

23 l'aide depuis là-bas, parce qu'ils étaient encerclés, on ne les lassait pas

24 sortir de leurs maisons. On les menaçait. Il y avait des appels à l'aide de

25 Velika Bukovica aussi, qui se trouvait également encerclé. Le village de

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1 Radojcici, vers la fin mai, a également été attaqué à l'arme d'artillerie

2 et à l'arme d'infanterie.

3 Mme RESIDOVIC : [interprétation]

4 Q. Monsieur Siljak, je vais vous demander, à présent de, -- je vais

5 demander à l'Huissier de vous remettre les documents que vous aviez entre

6 les mains hier.

7 L'INTERPRÈTE : Les interprètes profitent de cette césure pour demander au

8 témoin de donner les noms des localités un peu plus lentement.

9 Mme RESIDOVIC : [interprétation]

10 Q. S'agissant de ce que vous venez de nous dire, j'aimerais que vous vous

11 penchiez sur le chapitre "Relation avec le HVO", en allant du numéro 1 au

12 numéro 17. J'aimerais que vous les examiniez d'abord, et que vous me

13 disiez, en premier lieu, si vous les reconnaissez en leur qualité de

14 documents de la 306e Brigade, à savoir, documents adressés au commandement

15 de la 306e. S'agissant de ces documents, je me propose de vous poser des

16 questions.

17 Vous avez pu les examiner, ces documents ?

18 R. J'en suis au douzième. J'ai examiné ces documents. Je les reconnais.

19 Pour l'essentiel, il s'agit de rapports opérationnels et rapports au

20 quotidien qui ont été établis par cette autorité opérationnelle et

21 éducative qui se trouvait rattachée à l'état-major.

22 Q. Le document qui porte le 0674 se trouve au numéro 1 dans votre

23 classeur. Je voudrais que vous nous indiquiez, compte tenu des incidents

24 dont vous parliez tout à l'heure, les attaques lancées par le HVO ainsi que

25 des attaques avec des conséquences mortelles, j'aimerais savoir quelles

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1 sont les mesures qui sont déployées par la 306e conformément aux ordres

2 émanant du commandant du corps et de l'état-major du commandant suprême.

3 Est-ce que vous ripostez ou est-ce que vous vous comportez d'une façon

4 autre ?

5 R. D'après ce que l'on peut voir dans ce document, le commandement de la

6 306e accomplit les ordres de la 306e Brigade et s'efforce de calmer la

7 situation, d'éviter les incidents, et d'éviter les conflits. On voit, à

8 partir de ces documents, que les hauts placés au commandement de la brigade

9 s'emploient pour informer le personnel, la troupe. On dit qu'il a été donné

10 des ordres, que le chef d'état-major de la 306e et l'assistant chargé des

11 affaires opérationnelles éducatives se rendent sur le terrain aux fins de

12 réaliser les ordres. Comme il y a eu des problèmes sur les lignes face à

13 l'agresseur serbo-monténégrin, non pas parce que celui-ci attaquait, mais

14 il y a eu là aussi des incidents dans la vallée de la Bila où des familles

15 de combattants qui se trouvaient sur leurs positions face aux agresseurs

16 serbo-monténégrin, c'est la raison pour laquelle le chef d'état-major a eu

17 pour mission de se rendre au poste de commandement avancé expliquer la

18 situation dans ces localités afin d'éviter toute escalade et toute

19 aggravation aux fins de parvenir à une situation pacifique.

20 Q. Je vous demande de vous pencher maintenant sur le document numéro 3.

21 C'est la pièce 797 de la Défense. Est-ce que ce document nous parle de

22 l'une de ces situations nombreuses au sujet desquels vous avez témoigné

23 tout à l'heure ?

24 R. J'ai dit tout à l'heure qu'il y a eu plusieurs situations de ce type

25 avec des conséquences mortelles pour certains particuliers. C'est l'un des

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1 problèmes dont j'ai parlé, à différence près que la date et le numéro de ce

2 document sont erronés. Cela s'est passé le 28 mai, juste avant l'éclatement

3 du conflit.

4 Q. Merci. Je vous demande de vous pencher maintenant sur le document

5 numéro 4. S'agit-il ici aussi de l'un des documents qui montre qu'il y a

6 attaque de la part du HVO, et qui parle d'incidents occasionnés à

7 l'encontre de votre brigade ?

8 R. Ce document indique également qu'il y a des relations tendues, qu'il y

9 a des incidents, des tensions. Certes, cela le montre. Mais cela montre

10 aussi les problèmes que nous avons eus pour ce qui est des transmissions

11 vis-à-vis du commandement supérieur et le commandement supérieur vis-à-vis

12 de nous. Très souvent, nous avons eu des problèmes de transmissions entre

13 le commandement et le Groupe opérationnel Zapad.

14 Q. Je vous ai montré, hier, un document datant du mois de février où vous

15 avez parlé des moyens mis à votre disposition. Maintenant, si vous vous

16 penchez sur l'alinéa 2, "Nos effectifs," la deuxième ligne. J'aimerais que

17 vous nous disiez si la situation au niveau de l'approvisionnement de votre

18 brigade, entre autres, en raison de cet état d'encerclement et du

19 comportement de la part du HVO, donc, cette situation s'améliorait-elle ou

20 se détériorait-elle par rapport à la situation de la brigade au mois de

21 février ?

22 R. Nous espérions une amélioration. Mais comme on le voit, ici, la

23 situation se détériorait. Cela allait de mal en pis. Ce qu'on avait,

24 s'estompait, c'est-à-dire, se consommait, et les moyens ou des

25 approvisionnements nouveaux ne pouvaient nous arriver en raison de ce

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1 blocus du territoire. Nous avions sollicité de la part du commandement

2 supérieur d'essayer de le faire. Sur les routes, il y a eu des véhicules

3 confisqués, des véhicules qui appartenaient aux membres de la brigade ou

4 autre personnel de la brigade qui allait accomplir différentes missions.

5 Q. Je vous demanderais maintenant de vous pencher sur le document numéro

6 5.

7 R. C'est le rapport de l'organe chargé des renseignements. C'est l'adjoint

8 du commandement, donc mon adjoint qui a fait l'évaluation des forces du HVO

9 après l'établissement de la brigade de Frankopan. Sur la base de ce

10 rapport, nous pouvons voir où ont été déployées les forces de la brigade

11 Frankopan. D'ailleurs, j'ai essayé de montrer cela sur la carte, hier.

12 Q. Dans ce document, à la page 2, l'on parle également du fait qu'un

13 certain nombre de territoires ont été occupés. Est-ce que ce document

14 reflète ce dont vous avez parlé hier, à savoir que le HVO entourait l'ABiH

15 dans la vallée de la Bila ?

16 R. Ce document parle de plusieurs éléments. Malheureusement, je ne peux

17 pas montrer cela maintenant sur le relief, car le HVO avait capturé tous

18 les points dominants sur le territoire, notamment, le col entre Zenica et

19 Travnik. Ensuite, la vallée où se trouvait Han Bila, un village musulman.

20 Ensuite, si vous allez vers Travnik, le col suivant est celui de Trava.

21 C'est là que se trouvait Guca Gora. Ensuite, si on va vers Vlasic et Hum,

22 et vers Greba et Pokrajcici, il y a au sud le village de Rajdocici.

23 Ensuite, au sud, il y a encore un col qui s'appelle Postulje, qui

24 représente le dernier col vers Travnik. Encore une fois, c'était contrôlé

25 par le HVO. Tous les points dominants étaient contrôlés par le HVO. Ils

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1 avaient leurs points de contrôle, donc, ils coupaient toute communication

2 sans qu'ils donnent leur accord et leur approbation.

3 Q. Veuillez examiner maintenant le document 6, paragraphe 3, intitulé le

4 "HVO" et dites-moi, s'il vous plaît, est-ce que ce rapport que vous avez

5 soumis au commandement du 3e Corps d'armée et le Groupe opérationnel ouest,

6 que vous avez soumis à vos supérieurs directs, reflète exactement ce que

7 vous avez dit par rapport à l'établissement des points de contrôle et le

8 comportement des membres du HVO qui se trouvaient à ces points de

9 contrôle ?

10 R. Exactement. On parle ici de ces points de contrôle. Mais je souhaite, à

11 ce stade, soulever un autre point, car il y avait un point de contrôle que

12 nous avions organisé, et à ce point de contrôle, 22 membres du HVO ont été

13 désarmés, car leur passage n'était pas annoncé, et ils rentraient de leur

14 position à Turbe. Par la suite, leurs armes ont été rendues. Je souligne

15 cela, car nous avions reçu l'ordre de notre commandement supérieur d'éviter

16 à tout prix le conflit et d'essayer de trouver une solution plus paisible à

17 tous ces problèmes. Lorsque cet incident a eu lieu, moi, personnellement,

18 j'ai reçu l'ordre de me rendre au point de contrôle pour résoudre ce

19 problème. Il n'était pas facile de résoudre ce problème, car chez-nous, à

20 ce moment, le commandement ne fonctionnait pas vraiment, mais il fallait

21 persuader ces subordonnés. J'ai parlé avec ces personnes pour les persuader

22 de rendre les armes aux membres du HVO, et j'ai réussi, car notre but

23 principal était de trouver une solution paisible pour que l'on puisse se

24 tourner ensemble vers notre ennemi commun.

25 Q. Veuillez maintenant examiner le document 8 qui porte sur le rapport

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1 avec le HVO, qui est en date du 6 mai 1993.

2 R. Comme je l'ai déjà dit, tous les jours il y avait des incidents. Ce

3 document, d'ailleurs, corrobore cela.

4 Q. Veuillez, s'il vous plaît, maintenant examiner le document numéro 9 du

5 7 mai. Est-ce que vous êtes au courant de cet événement ?

6 R. Oui, je suis au courant également. Ils revenaient et ils n'ont pas pu

7 passer le point de contrôle. Puis, nous avons essayé de contacter le

8 commandement du corps d'armée, mais ceci n'était pas possible. Notre lien

9 de communication physique avec eux a été rompu.

10 Q. Veuillez maintenant examiner, s'il vous plaît, le document 10, en date

11 du 9 mai.

12 R. Ce qu'on voit, il s'agit d'un rapport portant sur nos informations par

13 rapport aux activités du HVO. Ils continuaient à confisquer des véhicules.

14 Ils ont confisqué un camion qui appartenait à la mine de Bila. Cela, c'est

15 seulement l'un des documents d'une série de documents que vous allez

16 certainement trouver qui portent sur ces incidents-là.

17 Q. Le document numéro 11 en date du 12 mai.

18 R. Dans ce document également, on parle de la même chose que ce dont on a

19 parlé dans le document précédent, c'est-à-dire, on arrête les gens aux

20 points de contrôle, on tirent, on confisquent des véhicules, et cetera.

21 Puis, on a un exemple concret d'une telle confiscation de la part d'Edhem

22 Lukovic. C'est un civil qui n'était pas membre de la 306e Brigade. Puis,

23 dans la région de Konska, les membres du HVO ont confisqué deux fusils.

24 Konska se trouve au-dessus de Radovici et Guca Gora, autrement dit, près de

25 Velika et Mala Bukavica.

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1 Q. Monsieur Siljak, conformément aux règlements régissant les activités

2 d'une armée, une armée qui subit une attaque a le droit de riposter. Mais

3 vous avez dit que vous ne vouliez pas avoir recours à ce droit, afin

4 d'éviter que le conflit n'éclate. Dites-moi, s'il vous plaît, est-ce que la

5 dernière phrase du premier paragraphe porte justement sur vos efforts de ne

6 pas riposter avec autant de force, mais d'essayer d'éviter un conflit ?

7 R. Oui, ceci porte sur cela. Mais le fait est que de Rudinik [phon] Bila,

8 lorsque le commandement conjoint est établi avec le HVO et le FORPRONU et

9 les membres de la communauté internationale, lorsqu'ils sont venus nous

10 dire que la personne chargée des transmissions pour nous a été tuée --

11 Q. Excusez-moi, je n'ai pas bien compris ce que vous avez dit. Qu'est-ce

12 qui s'est passé ?

13 R. Ce jour-là, la réunion du commandement conjoint de l'armée et du HVO

14 devait avoir lieu, et les représentants de la communauté internationale,

15 les observateurs internationaux, les représentants de la 306e Brigade et du

16 HVO, de même que de la FORPRONU, ils sont venus à la mine de Bila, au

17 commandement. Lorsqu'ils s'approchaient, le HVO a ouvert le feu sur les

18 véhicules de la FORPRONU, et à ce moment-là, une personne chargée des

19 transmissions au sein de la 306e Brigade a été tuée. Mais même ceci ne nous

20 a pas poussé à riposter fermement. Nous avons continué à collaborer. Je me

21 souviens que, suite à cette réunion, j'ai écrit aux unités subordonnées en

22 leur demandant de mettre en œuvre les conclusions de la réunion.

23 Q. S'il vous plaît, examinez maintenant les documents 12, 13 et 14. Dites-

24 moi, s'il vous plaît, quel est l'événement qui fait l'objet des

25 commentaires contenus dans ces documents-là.

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1 R. En ce qui concerne cet événement-là, je n'y ai pas assisté

2 personnellement. Cependant, il était triste d'entendre les membres du

3 commandement de la brigade lorsqu'ils nous ont informés de l'événement qui

4 s'est déroulé, à savoir, une partie des commandants de la brigade allaient

5 vers Mehurici, car leur maison s'y trouvait, et ils devaient être de repos.

6 Ils ont été arrêtés par les membres du HVO au village de Baje, et ils ont

7 été désarmés. Certaines parties de leur vêtements ont été enlevées, et les

8 membres du HVO leur ont dit s'agenouiller et de manger de l'herbe.

9 Q. Est-ce que vous vous souvenez qui était parmi ces commandants de la

10 brigade ?

11 R. Je pense que l'adjoint chargé de la sécurité était Delalic. Ensuite,

12 Halim Husic, l'adjoint chargé des questions de moral, car ces personnes-là

13 ont parlé de cela par la suite, lors de la réunion d'information.

14 Q. Il s'agissait d'une attaque extrêmement humiliante contre le

15 commandement. Est-ce que vous avez riposté suite à cela, ou est-ce que vous

16 avez essayé de surmonter les difficultés ?

17 R. Ce que nous avons fait, c'est que nous avons fait part de notre

18 protestation auprès de la Brigade de Frankopan, car nous étions en contact

19 avec eux tous les jours. Même, une équipe opérationnelle conjointe avait

20 été créée, qui devait résoudre tous les incidents qui survenaient sur le

21 terrain. Cette équipe opérationnelle était constituée de deux membres de la

22 306e Brigade et deux membres de la Brigade de Frankopan. Par le biais de

23 ces personnes-là, nous avons essayé de résoudre la situation. Mais nous

24 n'avons pas riposté sur le plan militaire.

25 Q. Veuillez examiner maintenant, s'il vous plaît, le document numéro 15.

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1 R. C'est un document qui parle, encore une fois, des activités du HVO à

2 partir de ces positions-là qu'ils avaient traitées avec leurs génies

3 militaires et depuis lesquelles ils agissaient. Ce document porte sur les

4 problèmes que nous avons rencontrés dans le village de Recice, car le

5 village était entouré, et ils n'arrêtaient pas de lancer des cris d'appel

6 afin que l'on vienne en aide à leurs habitants. Il y avait quelques

7 familles bosniennes. A Stara Bila aussi, il y en avait. Ils ont commencé à

8 venir vers nous, car ils avaient été expulsés de leur foyer.

9 Q. Veuillez maintenant examiner le document numéro 16, et dites-moi, s'il

10 vous plaît, si vous reconnaissez ce document et si vous reconnaissez

11 l'écriture.

12 R. Je reconnais le document et je reconnais l'écriture, car je l'ai écrit

13 moi-même. Ceci porte sur dont j'ai parlé tout à l'heure, à savoir, l'ordre

14 que j'ai rédigé après que notre homme chargé des transmissions a été tué,

15 lorsque l'on avait ouvert le feu sur les transporteurs de la FORPRONU. Je

16 souhaite ajouter que la FORPRONU avait riposté aux tirs du HVO contre les

17 transporteurs, et suite à cela, le HVO a tiré sur la 306e Brigade. Ici, je

18 fais part de ce qui s'est passé pendant la réunion.

19 J'écris ici quelles sont les mesures qui doivent être prises afin que

20 les conclusions de cette réunion puissent être mises en œuvre. Si l'on lit

21 ce document, nous pouvons voir que vraiment nous avons de bonnes intentions

22 et que nous souhaitons de résoudre tous nos conflits mutuels pour que l'on

23 puisse nous tourner ensemble vers notre ennemi commun. La mission des

24 membres du commandement et des commandants de bataillons était de réaliser

25 cela sur le terrain. La seule possibilité était de mettre cela en œuvre sur

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1 le terrain avec les efforts déployés par les combattants des deux camps.

2 Q. Merci. C'est ce que je souhaitais que l'on clarifie, à savoir, les

3 rapports avec le HVO immédiatement avant le conflit du mois de juin.

4 Monsieur Siljak, est-ce que vous pourriez nous dire maintenant ce qui s'est

5 passé vers la fin du mois de mai et au début du mois de juin, est-ce que

6 l'ABiH a lancé une attaque contre les villages croates dans votre région ?

7 R. J'ai parlé des incidents qui devenaient de plus en plus nombreux --

8 Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président,

9 j'ai été vraiment patiente avec ma collègue. Je pense que tout le monde

10 sait qu'il y avait plusieurs armées dans cette zone. Lorsqu'elle dit :

11 "Est-ce que l'armée a attaqué les villages croates dans votre région," je

12 pense qu'elle devrait parler plus concrètement, car elle pose des questions

13 directrices. Elle lui fournit des informations, ensuite, le témoin répond.

14 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je vais être plus précise.

15 Q. Est-ce que l'ABiH et ses unités, notamment la 306e Brigade dont vous

16 étiez le chef d'état-major, pour autant que vous le sachiez, est-ce qu'elle

17 a attaqué les territoires croates et les villages croates ? Est-ce qu'elle

18 a organisé des attaques lourdes contre ces villages ?

19 R. Pour répondre à cette question, je dois vous expliquer à quoi

20 ressemblait la situation avant le conflit ouvert. Sur la base de ces

21 documents, vous avez pu voir que le village Ricice était encerclé et qu'il

22 demandait de l'aide pour qu'on résoudre leur situation. Les membres de

23 notre brigade ou les hommes aptes à combattre émanant du village de Ricice

24 appartenaient à notre brigade. Nous nous sentions responsables pour leurs

25 familles. Pareillement, dans la région de Velika Bukovica, nous avions une

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1 situation équivalente, à savoir, le village était encerclé de tous les

2 côtés par les unités du HVO. Eux aussi, ils demandaient de l'aide. Ensuite,

3 depuis Travnik, ici, je parle du début du mois de juin, peut-être le

4 3 juin, on a commencé à entendre des coups de feu. Nous n'avions pas

5 d'information concernant un conflit ouvert, mais nous pouvions entendre des

6 coups de feu et constater que des combats se déroulaient à Travnik dans la

7 vallée de la Lasva. Autour de Travnik, on pouvait entendre des bruits qui

8 nous faisaient comprendre qu'il y avait des combats. La situation

9 ressemblait à cela. Je pense que je dois expliquer quelle était la

10 situation dans laquelle s'est retrouvée la 306e Brigade, de même que le

11 commandement pour pouvoir répondre à cette série de questions.

12 Q. Merci, vous m'avez rappelé que j'avais oublié de vous poser une

13 question. Compte tenu d'une situation assez dramatique dont vous faites

14 part de manière tout à fait calme devant cette Chambre de première

15 instance, nous pouvons très bien comprendre à quel point ceci était

16 dramatique. Est-ce que vous pourriez nous dire, est-ce qu'au cours du mois

17 de mai, après tous les rapports que vous avez soumis, est-ce que le

18 commandement du 3e Corps d'armée a réagi en donnant l'ordre pour dire de

19 quelle manière les brigades devaient se comporter, et est-ce que suite à

20 cet ordre, vous avez pris un certain nombre de mesures ?

21 R. Je souhaite dire, tout d'abord, que sur le territoire de la

22 municipalité de Travnik, afin de calmer la situation et de trouver une

23 solution paisible, le commandement conjoint de l'ABiH et du HVO a été créé.

24 Je souhaite également dire que sur le terrain, ils essayaient de calmer la

25 situation. Suite à toutes les protestations que nous avons lancées par

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1 rapport au comportement du HVO, également suite aux protestations du HVO

2 par rapport au comportement de notre brigade, nous faisions part de tout

3 cela à ce commandement conjoint à Travnik.

4 Ce commandement conjoint réagissait. Je pense qu'il est important également

5 de dire que moi, j'ai participé à l'une de ces dernières réunions. Je suis

6 intervenu s'agissant de la région de Bila afin d'essayer d'éviter un

7 conflit. Il faut savoir qu'afin de l'éviter, il fallait qu'une réunion ait

8 lieu le 30 mai à Bila, assistée par la FORPRONU, les observateurs européens

9 et les commandants de la 306e Brigade et de la Brigade de Frankopan. A ce

10 moment-là, à Travnik, afin de calmer la situation, on avait créé la

11 présidence de la municipalité de Travnik à laquelle participait et les

12 Bosniens et les Croates. Donc, il y avait des représentants et bosniaques

13 et croates là-dedans. Il s'agissait d'une structure politico-militaire qui

14 pouvait avoir des discussions pour essayer de résoudre les problèmes. En ce

15 qui concerne cette réunion à Guca Gora, je suis venu en transporteur de la

16 FORPRONU depuis Bila, car je ne pouvais pas rentrer au commandement à cause

17 du blocus du territoire après le 27 lorsque cet ordinateur a été confisqué.

18 Ce jour-là, je suis allé à cette réunion et j'ai participé au travail.

19 Cette réunion n'a abouti à rien. Je me souviens qu'à la fin de la réunion,

20 j'ai demandé quelque chose. Je ne pouvais pas vraiment, activement,

21 assister à cette réunion, mais à la fin, compte tenu du fait qu'un

22 collègue, quelqu'un qui avait été à l'école avec moi, Franjo Lujanovic, qui

23 était membre de la Brigade de Frankopan, nous étions ensemble à l'école

24 depuis l'âge de 8 ans. Nous avons fait l'école des enseignants ensemble.

25 J'ai dit : Ecoute, Franjo, nous pouvons nous rendre ensemble sur la

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1 position de l'armée et de la Brigade de Frankopan pour que l'on mette en

2 œuvre sur le terrain ce dont on parle aujourd'hui. J'ai fait confiance à

3 mon collègue Franjo Lujanovic. Lui, il peut dire, s'il le souhaite, au nom

4 du HVO, que nous pouvons aller ensemble pour faire cela ensemble. Franjo

5 Lujanovic a fait part de son respect vis-à-vis de moi. Il a dit à ce

6 moment-là : Je ne peux pas faire les mêmes promesses que vous aujourd'hui.

7 Il n'a pas vraiment dit qu'il n'avait pas de "mandat", mais cela allait

8 dans ce sens. Je ne suis pas autorisé à promettre cela et à m'engager. A ce

9 moment-là, cette réunion a été interrompue. Nous sommes allés déjeuner

10 ensemble, mais ceci n'a abouti à rien.

11 Maintenant, je souhaite revenir à la question liée à la question de savoir

12 si nous avions reçu l'ordre de notre commandement supérieur par rapport à

13 cette situation --

14 Q. Je veux tout d'abord vous demander de vous pencher sur la partie

15 contenant la pièce à conviction et d'examiner le document numéro 1. Il

16 s'agit de la pièce à conviction de l'Accusation,

17 numéro 418. S'il vous plaît, dites-nous si vous reconnaissez ce document et

18 l'écriture, et dites-moi également, enfin, répondez-moi à la question que

19 je vous ai posée en s'appuyant sur ce document, s'il vous plaît.

20 R. Il s'agit ici du rapport extraordinaire concernant l'exécution de la

21 mission en date du 19 mai. Moi-même, je l'ai écrit à la main, car nous

22 avions seulement une machine à dactylographier dans le commandement de la

23 brigade. Il nous était difficile de dactylographier tous les documents.

24 Ceci constitue le rapport conformément à l'ordre donné par le 3e Corps

25 d'armée portant sur la date du 18 mai. Car le 18 mai, nous avons reçu

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1 l'ordre de procéder à l'évaluation de la situation, car la situation sur le

2 terrain était telle qu'il y avait sans arrêt des incidents. A ce moment-là,

3 nous avons recueilli des informations par le biais de nos services de

4 renseignement, qu'ils avaient des contacts entre le HVO et la partie serbe

5 dans la région de Vjetrenice, et que les membres du HVO rencontraient les

6 membres des forces serbes. Ensuite, ils revenaient de ces réunions. Tous

7 les soldats trouvaient cela bizarre. Suite à ces informations-là, nous

8 avons reçu la mission de procéder à une évaluation et de planifier le

9 déploiement et l'engagement de nos troupes, mais seulement en cas d'une

10 attaque contre la brigade, la 306e Brigade. Il ne s'agit pas d'une

11 planification d'une attaque, mais d'une planification de la riposte

12 éventuelle à une attaque des forces serbes sans intervention du HVO, ou une

13 attaque combinée des forces serbes et du HVO. Ici, nous parlons de

14 plusieurs variantes d'engagement de nos forces en cas d'attaque contre la

15 306e Brigade; ces positions et les territoires qu'elle contrôlait.

16 Q. Dites-moi, maintenant, ce que vous disiez, ce que vous avez déjà

17 commencé à dire par rapport à ce qui s'est passé avant le conflit. Vous

18 avez dit qu'il y avait cette réunion à Guca Gora avec tous ces

19 représentants, et vous avez dit que cette réunion n'a pas abouti. Est-ce

20 que vous pouvez nous dire où se trouvait, à ce moment-là, le commandement

21 de la brigade et où étiez-vous ?

22 R. Après cette réunion, nous sommes allés tout ensemble à Krpeljici, à la

23 fois les représentants croates et les représentants de notre brigade. Là-

24 bas, nous avons continué nos discussions de manière officieuse. Ils nous

25 ont dit qu'il fallait quand même trouver une solution à tout cela. Ce jour-

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1 là, nous nous sommes séparés. Il est difficile de le croire peut-être, mais

2 voici comment les choses se sont passées. Le commandement était constitué

3 seulement d'un petit nombre de personnes qui sont restées dans la mine. Ils

4 ne pouvaient pas être remplacés par qui que ce soit, et ne pouvaient pas

5 partir où que ce soit. A Krpeljici, j'ai trouvé le commandant de la

6 brigade, l'adjoint chargé des questions de morale et l'adjoint chargé du

7 matériel et de l'approvisionnement. Avec moi, on était quatre.

8 Une partie du commandement de la brigade, à ce moment-là, était dans

9 le village dont ils émanaient, par exemple, deux, trois membres étaient à

10 Kljaci, à Karahodze pareil, à Han Bila. Il y avait un certain nombre de

11 membres de la brigade à Han Bila également. Puis, une partie du

12 commandement de la brigade se trouvait à Mehurici. Ils ne pouvaient passer

13 nulle part. Notre tâche était, conformément à la situation, d'essayer

14 d'aider à la défense de ces villages.

15 Q. Excusez-moi. Pour mieux comprendre, veuillez nous montrer ces endroits-

16 là, les endroits dans lesquels se trouvaient, à ce moment-là, les membres

17 du commandement de la brigade. Veuillez montrer cela sur cette carte. Même

18 si je connais bien le terrain, il m'est difficile de suivre si vous ne

19 faites que parler sans montrer cela sur la carte.

20 R. J'aurais aimé pouvoir indiquer les territoires où se trouvait la 306e

21 Brigade avec ses unités et où se trouvaient les membres du commandement. Le

22 poste de commandement de base était ici dans la mine de Bila. Ici, nous

23 avions le commandement du

24 2e Bataillon à Krpeljici. C'est là que je me suis retrouvé avec le

25 commandant de la brigade et les deux adjoints du commandant de la brigade.

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1 Dans le village de Mosor, se trouvait l'un des membres de commandement de

2 la brigade. Donc, un peu plus loin. A Mehurici, où se trouvait le poste de

3 commandement du 1er Bataillon, se trouvait une partie du commandement de la

4 brigade. C'étaient les personnes qui habitaient dans cette région-là.

5 C'était une région exclusivement bosnienne. Le village de Podovi, d'après

6 ce qui est écrit sur cette carte, se trouvait une partie du commandement.

7 Ici, se trouvaient deux membres. Dans le village de Kljaci se trouvaient

8 deux ou trois membres de la brigade. Le commandement de la brigade était

9 disséminé un peut partout. Ce territoire, Kljaci, la mine, donc cette

10 partie que j'ai entourée, c'était une partie qui n'avait aucune

11 communication avec les autres. Pourquoi ? Parce que cette route-là qui

12 passait par Sarici et qui descendait dans la vallée de la Bila et qui

13 allait vers Grahovici par le biais de Baje. Ici Baje, un point de contrôle

14 existait; il n'était pas possible de se déplacer vers Han Bila.

15 Une partie de Brajkovici et de Pode, cette partie-là, c'était un

16 autre ensemble qui n'avait rien à voir et qui n'avait aucune communication

17 avec la mine de Kljaci. Dans le village de Cukle, c'était pareil; ils

18 étaient totalement encerclés. Ils n'étaient même pas une entité où Vranic

19 [phon] non plus parce qu'ils étaient totalement isolés. Ici, Han Bila,

20 Podovi, il n'était pas possible de passer à Mehurici, car dans la région de

21 Lopostinje et Puslje, dans cette région-là, un point de contrôle du HVO

22 avait été établi et on ne pouvait pas passer.

23 Q. Monsieur Siljak, avant de vous asseoir, veuillez nous montrer

24 encore deux endroits sur cette carte.

25 R. Tout d'abord, Recice dont vous avez parlé à plusieurs reprises et

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1 Velika Bukovica. Vous nous avez dit que la couleur verte indique les

2 régions croates, peuplées par la population croate. C'est ici que se

3 trouvait le village de Recice alors que Velika Bukovica, vous savez ici,

4 c'était la partie vers Vlasic. Mala Bukovica était ici. Radonjici était

5 ici alors que ce village-là, c'était Velika Bukovica qui était coupé de

6 cette partie. La partie bosnienne, elle était coupée de tous les côtés.

7 Q. Merci, vous pouvez vous rasseoir. Veuillez poursuivre ce dont

8 vous étiez en train de parler, à savoir, veuillez nous expliquer de quelle

9 manière un conflit a fini par éclater dans une situation où les membres du

10 commandement de la brigade sont disséminés et où le commandement et la

11 population sont sous un blocus.

12 R. Je viens de vous indiquer des positions, des villages, des

13 régions. La 306e n'était pas présente. Je m'explique, il n'y avait pas le

14 1er Bataillon ni le second, la 1e Compagnie, ni la

15 2e Compagnie dans le cadre de cette brigade. Tous ces villages, au moment

16 du conflit, sont devenus des champs de bataille, des unités en tant que

17 telles, sont devenues des unités. Ni le commandant de la compagnie -- il

18 n'y en avait pas de toute façon, mais il y avait une espèce de chef de

19 village qui devenait le commandant. Il y avait des accords qui étaient

20 conclus entre eux avec des propositions pour ce qui est des membres des

21 brigades ou des bataillons qui se trouvaient être dans le village. C'est

22 dans ce sens, c'étaient les instructions que nous leur avions données. Nous

23 avions Kljaci, Alihodze, Zukici et une partie de Purici près de la mine de

24 Bila. C'est une entité, l'autre entité c'était Han Bila, Pode et une partie

25 de la localité de Brajkovici où habitaient des Bosniens. Une troisième

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1 entité était celle de Maline, village qui n'avait aucun lien avec d'autres

2 endroits.

3 Q. Je crois que ceci nous a déjà été expliqué. Dites-nous ceci, à

4 Krpeljici, est-ce qu'il y avait un poste de commandement à cet endroit, où

5 se trouvait-il et quelles étaient les informations reçues du terrain?

6 R. Le commandant et les autres membres qui se trouvaient être sur place,

7 dormaient dans deux maisons; des maisons de particuliers. Je vous l'ai dit,

8 le commandant du 2e Bataillon s'y trouvait. Ce bataillon ne se trouvait pas

9 en un seul endroit, parce qu'il y avait des représentants du commandement

10 de Maline, qui ne pouvaient pas venir car il fallait organiser aussi la

11 défense de Mosor. Il y avait des hommes à Mosor aussi. C'étaient des unités

12 autonomes, indépendantes. Il y avait un centre de communication qui se

13 trouvait dans un garage. Nous n'avions pas de poste de commandement pour la

14 306e. Nous nous sommes servis uniquement des transmissions qu'avait le 2e

15 Bataillon pour transmettre des rapports ou des appels à l'aide à la mine où

16 se trouvait le poste de commandement principal. Ils étaient censés

17 transmettre les informations qu'ils recevaient de là, les relayer.

18 Q. Qu'avez-vous appris s'agissant des attaques menées par le HVO et des

19 combats tels qu'ils se présentaient début juin dans la région ?

20 R. J'ai commencé à parler de cela. On entendait le bruit d'explosions, des

21 combats dans la vallée de la Lasva, là où nous étions, mais nous ne savions

22 pas ce qui se passait. Nous avons envoyé des instructions au commandement

23 du 3e Corps, car nous n'avions aucune communication avec le Groupe

24 opérationnel de Bosanska Krajina ou de la Lasva. Nous avons envoyé des

25 rapports pour essayer de savoir ce qui se passait, et nous avons demandé de

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1 l'aide pour les villages qui étaient menacés, à savoir, Recice et Velika

2 Bukovica. Nous avons d'abord reçu un rapport du village de Recice.

3 Apparemment, ils avaient été chassés, expulsés de ce village; nous ne

4 savions pas comment. Ils avaient dû partir sans leurs biens. Heureusement,

5 il n'y a pas eu de victimes.

6 Le 4 juin, dans l'après-midi, début de soirée, nous avons reçu un rapport

7 concernant Velika Bukovica. Apparemment, d'après ces rapports, ce village

8 était encerclé et avait reçu un ultimatum exigeant qu'ils se rendent -- que

9 les habitants, que les personnes se rendent et remettent leurs armes, ce

10 qui a été refusé. Dans le courant de la journée, une attaque a été

11 déclenchée sur Velika Bukovica. Il était normal, il était qu'humain que

12 d'aider. Nous, nous subordonnions plutôt les habitants de ce village. Le

13 commandant du

14 2e Bataillon, puisque les gens de la région, les hommes de la région

15 avaient été mobilisés dans ce 2e Bataillon. Ce commandant a été prié

16 d'envoyer une unité, de dépêcher une unité à Velika Bukovica. Il nous a

17 envoyé un rapport disant qu'il n'était pas à même de le faire, parce que le

18 HVO bloquait la voie d'abord, à Velika Bukovica.

19 Regardez la carte. Vous voyez le village à gauche de Radonjici, qui

20 se trouve au-dessus du village de Krpeljici, alors que Mala Bukovica se

21 trouve devant Velika Bukovica. Donc, il n'était pas possible puisque la

22 zone était contrôlée, d'envoyer de l'aide.

23 Plus tard, nous sommes intervenus du côté de Mehurici. Nous avons demandé à

24 ce qu'il y ait une intervention à partir de Mehurici. Nous leur avons

25 demandé de s'approcher de Bukovica et de fournir l'assistance voulue.

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1 Les nouvelles étaient très alarmantes le lendemain. Il y avait eu 18 tués

2 et six blessés à Velika Bukovica. Or, c'est un petit village, minuscule.

3 C'était là des pertes énormes qui avaient été subies. Nous avons contacté

4 le commandement du 3e Corps pour demander au commandement d'envoyer des

5 membres de la FORPRONU pour voir ce qui se passait, parce qu'il s'y

6 trouvait des civils aussi bien que des soldats. Nous avons fait

7 l'impossible, mais il n'y a pas eu de réponse de la FORPRONU. Je pense

8 qu'ils ont dit qu'ils n'étaient pas en mesure de le faire, qu'il fallait

9 informer les observateurs internationaux, et que c'est seulement après ce

10 contact qu'ils pourraient aider. Nous avons réussi à établir une

11 communication avec Mehurici. Après un certain temps, nous avons demandé à

12 ce que la situation soit examinée telle qu'elle se présentait sur le

13 terrain, et pour essayer d'apporter de l'aide d'où qu'elle vienne. Car les

14 habitants de Velika Bukovica devaient être aidés. Pour défendre Velika

15 Bukovica, il fallait engager des combats actifs contre certaines positions

16 du HVO afin que le rapport des forces s'améliore à Velika Bukovica.

17 Q. Est-ce qu'il y avait des forces qui étaient disponibles, des effectifs

18 qui pouvaient se livrer à des combats de défense des positions de la 306e

19 si celle-ci était attaquée ? Que saviez-vous à ce propos, et quand avez-

20 vous appris si des mesures avaient été prises ?

21 R. Nous avons insisté que quelque chose soit fait le plus vite possible,

22 car le système de transmission était très mauvais. Si on parvenait à

23 établir une communication, ce n'était que sous forme de télégramme.

24 C'étaient des moments très brefs, parce que le matériel de transmission

25 venait de l'ex-JNA. Il était facile pour le HVO d'intercepter les messages

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1 que nous envoyions. Quand on faisait les préparations ensemble, il y avait

2 un équipement. Je ne comprends pas, mais il était possible de brouiller les

3 transmissions ou de faire des interceptes. Nous avons demandé aux forces de

4 Mehurici d'intervenir le plus vite possible. Nous ne savions pas si elles

5 allaient pouvoir le faire ni quand. Nous étions furieux, parce que nous

6 recevions sans cesse des appels à l'aide de Bukovica.

7 Le matin du 8 juin, on a commencé à tirer de partout. Nous croyions

8 que nous étions attaqués. Le commandant Sipic a demandé à quelqu'un du

9 poste de commandement principal de lui envoyer de l'aide, parce qu'il y

10 avait une attaque qui venait de partout. Pourquoi est-ce que nous avions ce

11 sentiment ? Parce que, ce matin-là, le HVO a attaqué Bandol qui est un

12 village au sud de Krpeljici et Guca Gora. C'est là que nous étions. Ils

13 savaient sans doute qu'une partie du commandement était installée à

14 Krpeljici. On a attaqué Bandol. Puis, il y a eu pilonnage à l'artillerie de

15 Krpeljici. Une maison où nous étions installés a essuyé des tirs d'obus. Un

16 obus a provoqué la destruction complète, ce qui a semé la panique. On ne

17 savait pas qui attaquait, on ne savait pas si on était vraiment attaqué.

18 Plus tard, nous avons appris que pendant l'attaque de Bandol, des

19 forces de Mehurici se sont mises en route pour aider, apporter de l'aide à

20 Velika Bukovica.

21 Q. Ces forces sont parties dans quelle direction ? Puisqu'il y a un

22 instant, vous avez dit qu'il y avait des rapports qui disaient que ces

23 forces ne pouvaient pas passer par Vrlete [phon]. Est-ce qu'elles sont

24 parties vers Bukovica ou vers d'autres positions du HVO ?

25 R. Je ne savais pas, à ce moment-là, dans quelle direction ces forces

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1 étaient parties. Plus tard, j'ai appris qu'elles avaient suivi la rive

2 droite de la rivière Bila vers Maline, vers Guca Gora et vers Radonjici.

3 L'idée, c'était de limiter, de réduire le front vers Velika Bukovica et de

4 prendre la hauteur de Hum qui surplombe Radonjici et Velika Bukovica.

5 Q. Vous étiez chef d'état-major. Nous l'avons vu dans les documents. Vous

6 vous êtes rendu constamment sur le terrain, les forces dont vous disposiez

7 sont parties vers Maline et Guca Gora de Mehurici. Est-ce que ce sont des

8 zones où le HVO avait aussi des positions ?

9 R. Je pense avoir dit qu'en 1992, au moment des affrontements de Novi

10 Travnik, le HVO s'était emparé de certaines positions faisant face à des

11 villages bosniaques. Avant ces affrontements, il y avait aussi des

12 opérations conjointes avec des forces qui se rendaient sur le terrain, et

13 des membres de ces équipes conjointes, c'étaient des représentants de la

14 306e, ont fait rapport sur les positions du HVO. D'après l'ordre conjoint,

15 il fallait déterminer comment on allait occuper ces tranchées. Il y avait

16 des tranchées partout dans ces zones. Il y avait des ordres d'activité de

17 combat sur le territoire où se trouvaient des Bosniens.

18 Q. Monsieur Siljak, lorsque vous étiez au poste de commandement et lorsque

19 vous avez compris ce que faisaient vos unités venant de Mehurici, tout

20 d'abord, de qui avez-vous obtenu ces informations, et puis quelles mesures

21 avez-vous prises ?

22 R. Le premier à venir à Krpeljici, à notre poste de commandement, c'était

23 le chef du peloton de reconnaissance et de sabotage. On l'appelait Zenga

24 [phon]. C'était une section de la Brigade de la Krajina. Parce qu'il avait

25 peut-être participé à la guerre en Croatie, et en général, ceux qui avaient

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1 fait la guerre en Croatie, on les appelait comme cela, des Zenga. Il a été

2 le premier arrivé. En vertu de la décision de commandement conjoint de

3 l'ABiH et du HVO, il avait été décidé de planifier une action conjointe

4 contre l'agresseur serbo-monténégrin.

5 Sa section, elle avait déjà été envoyée dans la zone de Vlasic pour

6 engager des actions avec la section de reconnaissance et de sabotage pour

7 faire des activités de reconnaissance, et pour voir s'il était possible de

8 mener des actions conjointes. Au moment du conflit, cette section se

9 trouvait à Travnik et dans la vallée de la Bila. Je vous ai dit que c'est

10 lui qui a été le premier à venir. Il nous a dit que nos effectifs avaient

11 mené une attaque et qu'il était venu à Krpeljici.

12 Q. Vous avez reçu ces informations. Qu'avez-vous dû faire après ?

13 R. Le commandant m'a dit d'aller dans la zone au-dessus du village de

14 Radonjici. C'est une zone qui s'appelle Sarici. Je devais y établir un

15 contact avec les officiers du commandement qui étaient à Mehurici, ou

16 plutôt qui avaient un poste de commandement avancé mobile. Ce que cela veut

17 dire, c'est que, tout simplement, ce sont des gens ordinaires avec des

18 Motorolas, mais les piles étaient à plat. Je devais aller voir sur place

19 jusqu'où nos forces s'étaient avancées. Il a pu me dire ce qu'il avait vu

20 au cours de son déplacement, mais nous n'avons pas reçu d'autres

21 renseignements.

22 Je suis allé sur place, j'ai rencontré l'adjoint du chef d'état-major

23 chargé des opérations et des formations. J'ai essayé d'obtenir des

24 informations sur les positions qu'avaient prises nos forces. Il m'a dit que

25 nos forces s'étaient arrêtées devant Sarici, qu'ils avaient pénétré la

Page 10538

1 ligne à Simulje [phon], et vers Maline. Il a dit que c'est là qu'on avait

2 percé les lignes. Il ne savait pas jusqu'où nos forces étaient arrivées. Ce

3 sont là les renseignements que nous avons reçus à ce moment-là.

4 J'avais aussi comme tâche d'établir un contact. Je devais aller au sommet

5 des hauteurs de Hum qui se trouvait en surplomb du premier endroit où je

6 devais établir un contact avec un membre de la compagnie du 4e Bataillon

7 qui était engagée, aussi, dans des combats dans la zone pour éviter qu'il y

8 ait confusion et mélange des unités, et toute méprise.

9 Q. Vous aviez reçu des appels à l'aide dans votre territoire. Est-ce qu'il

10 y a des unités qui sont arrivées de territoires plus vastes de la

11 municipalité, et est-ce qu'au cours de la journée, vous avez pu avoir des

12 contacts avec des unités de l'ABiH ?

13 R. Je ne sais plus exactement quand cela s'est passé. Était-ce ce jour-là

14 ou le 9, je ne me rappelle plus mais j'ai rencontré des unités de la 17e de

15 Krajina. Pourquoi ? Parce qu'il y avait un problème. Les unités n'avaient

16 pas de liens entres elles, de transmissions. La 17e n'avait pas du tout de

17 communication avec la 306e. J'étais sur la hauteur de Hum, et j'avais pour

18 mission d'aller, une fois de plus, voir cette unité pour recevoir la 17e

19 qui venait de positions en face de l'agresseur serbe. La 17e avait pris la

20 ligne qui avait été abandonné par le HVO.

21 Cette unité venait comme renfort à Velika Bukovica parce qu'à ce

22 moment-là, on ne savait pas quel sort avait été réservé à la population

23 civile de Velika Bukovica. Les hommes en âge de combattre étaient venus

24 d'Obric. Les unités étaient arrivées à Velika Bukovica, mais nous n'avions

25 pas d'autres informations. Ce jour-là, c'était vraiment très dangereux

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1 parce que les membres de la Brigade de Krajina ne nous connaissaient pas.

2 Nous avons quand même réussi à établir un contact et notre mission commune

3 était d'aller en direction de Velika Bukovica. Je vous l'ai dit, notre

4 mission principale c'était de nous occuper de la population civile de

5 Velika Bukovica.

6 Q. Est-ce que le lendemain ou les jours suivants, vous avez rencontré des

7 membres de l'ABiH ? Si c'est le cas, est-ce que vous avez appris ce qui

8 était advenu de la population civile de Velika Bukovica et aussi de

9 Bandol ?

10 R. Je peux vous parler dans un ordre chronologique. Je peux vous dire à

11 quel moment j'ai rencontré les unités qui étaient sorties de Velika

12 Bukovica. Depuis Travnik, depuis le nord, nord-est de Travnik, il y a une

13 montagne ou plutôt la Bukovica qui doit faire quelque chose comme 1 006 ou

14 1 008 mètres alors que l'eau de Travnik se trouve à peu près à 504 ou 514

15 mètres au-dessus du niveau de la mer. Il n'est pas facile de grimper là-

16 haut. Les premières unités arrivées de Travnik, c'étaient les unités mixtes

17 de la 312e et du MUP qui avait à sa tête Zijadk Sulejman. C'était le chef

18 de la 312e. Je l'ai rencontré cet homme ce jour-là. Puis, il a été tué ce

19 jour-là. C'est pour cela que je me suis souvenu de cette date. Zijad Selman

20 était originaire du même village que moi. Nous étions voisins. Je m'en

21 souviens parfaitement.

22 En ce qui concerne les autres unités, le lendemain, à partir de Travnik en

23 passant par la route empruntée par la 312e, certaines unités du 7e Bataillon

24 étaient passées par là aussi. J'ai été préoccupé par l'évolution de la

25 situation. Je n'avais pas reçu véritablement d'informations. Il y a eu

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1 d'autres actions de combat et l'unité de la 7e Brigade musulmane avait

2 participé, -- il y avait une attaque contre Gostunj qui n'avait pas été

3 libérée. Mais à ce moment-là, on ne pouvait pas utiliser la route Travnik-

4 Guca Gora.

5 Q. Avant la pause, je vous demande ceci. Première question : quand est-ce

6 que ces membres du commandement se sont-ils rencontrés et à quel moment la

7 totalité du commandement de la 306e s'est-elle rencontrée ?

8 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense qu'il y a

9 une erreur au niveau du compte rendu d'audience.

10 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Je ne pense pas que le transcript soit

11 tout à fait correct. Le témoin a dit qu'il avait rencontré des officiers,

12 des soldats de la 312e, et puis le lendemain, il a rencontré des membres

13 d'une partie de la 7e Brigade. D'après ce que le témoin a dit, car il

14 n'avait pas de renseignements à ce moment-là, il a dit que, cette unité,

15 elle était engagée dans une autre zone. Je pense que, là, le transcript, le

16 compte rendu d'audience est tout à fait erroné. Ligne 18, page 29. Si

17 besoin est, nous allons apporter des éclaircissements si le problème se

18 pose au niveau du compte rendu d'audience seulement.

19 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être serait-il

20 préférable de demander au témoin de nous redire quand est-ce qu'il a

21 rencontré certaines parties de la 7e Brigade musulmane et à quel endroit.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit un jour plus tard, à savoir le 12,

23 une partie de l'unité du 1er Bataillon de la 7e Brigade musulmane est sortie

24 de l'axe à partir duquel est arrivée une unité mixte de la 312e et du MUP.

25 On est passé par la Krpelj à Bukovica. C'est ce jour-là que je les ai

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1 rencontrés parce que nous devions, ensemble, envisager les opérations de

2 combat pour ce qui est des effectifs où prenait part cette partie-là du 1er

3 Bataillon à Gostunj. Gostunj, c'est un col. En allant de Travnik, c'est le

4 premier des cols à emprunter sur la route en direction du village Bandol,

5 là où il y avait les inscriptions Bandol sur la carte.

6 Mme RESIDOVIC : [interprétation]

7 Q. Je vous avais juste demandé de nous donner cette réponse avant la

8 pause. Qu'avez-vous trouvé à Velika Bukovica et Bandol, et quand est-ce que

9 ce commandement de votre brigade s'est-il rassemblé ?

10 R. Avec mon unité, je suis entré à Velika Bukovica et Velika Bukovica

11 avait déjà été abandonné. Velika Bukovica et Mala Bukovica étaient

12 abandonnés. Velika Bukovica a été incendié jusqu'aux fondations presque. Ce

13 qu'il y a eu de cadavres, suite au combat, ce sont nos unités de Travnik

14 qui sont arrivées avant nous et qui les ont emportés. Ils sont arrivés

15 avant nous à Velika Bukovica, et une grande partie des unités a procédé au

16 ratissage du terrain. Nous ne savions pas du tout ce qui avait été fait

17 auparavant. Nous sommes passés par Velika Bukovica pour déboucher sur un

18 site qui s'appelle Grabovica.

19 Maintenant, pour ce qui est de Bandol, pour ce qui est de regarder

20 dans toutes les directions possibles, on pouvait voir tout ce qui s'était

21 passé. Je ne pense pas qu'il y ait eu une maison qui n'a pas été incendiée

22 et la mosquée a été détruite jusqu'aux fondations. C'est ce jour-là que

23 j'ai appris qu'un homme avait brûlé dans sa maison. La majeure partie de la

24 population a réussi à fuir avec les combattants qui avaient défendu Bandol.

25 Ces gens s'étaient repliés vers Krpeljici.

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1 Q. Veuillez aussi m'indiquer où est-ce que vous avez rencontré, pour

2 la première fois, une partie du commandement, et quand est-ce que le

3 commandement se regroupe-t-il dans son ensemble.

4 R. J'ai dit que la partie du commandement qui n'avait pas tellement

5 fonctionné n'avait pas besoin de présenter de rapports, parce que nous

6 étions, nous, en contact direct. Il y avait le chargé du moral et le

7 responsable de l'état-major. Le 12, nous avons tenu une réunion avec les

8 autres parties du commandement, et je dirais que cela a été la première des

9 réunions de ce commandement de la 306e, au sens restreint du terme. Le

10 commandement de la brigade a donné l'ordre à tout un chacun de venir, afin

11 que ce commandement commence à fonctionner en sa qualité d'entité à

12 Krpeljici, pas ailleurs, mais à Krpeljici. Cela se passe vers le 20, peut-

13 être le 19, voire le 21, mais c'est à peu près vers ces dates-là du mois de

14 juin.

15 Q. Merci.

16 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que

17 l'heure se prêterait à une pause, et par la suite, je me propose de poser

18 des questions au témoin sur ce qu'il sait nous raconter au sujet de

19 Miletici, Maline et Guca Gora, ainsi que des mesures qui ont été déployées.

20 M. LE JUGE ANTONETTI : Il vous faudra combien de temps encore ?

21 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, comme je vous

22 l'ai annoncé hier, nous avons pensé que nous aurions besoin de la totalité

23 des six heures, et d'après nos calculs, j'ai tiré profit de trois heures et

24 cinq minutes hier. J'ai réussi à diminuer la longueur de mon interrogatoire

25 principal d'une demi-heure. Je pense avoir besoin d'encore une heure.

Page 10543

1 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience reprendra à 11 heures.

2 --- L'audience est suspendue à 10 heures 32.

3 --- L'audience est reprise à 11 heures 02.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez la parole.

5 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

6 Q. Monsieur Siljak, lorsque vous nous avez dessiné, hier, les emplacements

7 des agglomérations à population bosnienne ou croate, vous avez mentionné

8 Miletici. J'aimerais que vous nous disiez si vous savez ce qui s'est passé

9 vers la fin du mois d'avril 1993, à Miletici ? Si vous avez connaissance de

10 quoi que ce soit, dites-nous comment vous en êtes venu à le savoir, et

11 qu'avez-vous su ?

12 R. S'agissant des événements du village de Miletici, j'en ai eu

13 connaissance lorsque j'étais alité, lorsque j'étais malade. J'étais à Daci

14 [phon]. Je vais vous dire que le commandement du 3e Corps nous a confié la

15 mission d'aller avec une partie de la 314e lancer une attaque en direction

16 d'un site, à partir duquel l'artillerie du HVO avait été utilisée par cette

17 artillerie. Cela se trouvait à la limite entre Travnik et Vitez, cela

18 s'appelait Stozerik. Notre mission consistait à lancer une attaque sur ce

19 site.

20 Nous l'avons fait le 17 avril, le jour après l'attaque sur Ahmici.

21 Nous avons réalisé cette mission avec succès, nous n'avons pas eu de pertes

22 de notre côté. Nous n'avons rencontré aucun cadavre de soldats croates là-

23 bas. Je suppose qu'ils s'étaient retirés de cet endroit, en raison de

24 l'attaque surprise. Je crois que vers la fin de cette journée, j'ai pris

25 froid, et le lendemain je me suis senti vraiment mal. J'ai eu une

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1 pneumonie. C'est dans une infirmerie improvisée, que je recevais des

2 piqûres, et je suis resté le reste du temps chez moi. Je me suis fait

3 administrer 26 piqûres, une au matin, une au soir, deux par jour.

4 Etant donné que cette position de Stozerik, était censée être

5 sécurisée par des unités de la 306e, il y avait une route à côté de ma

6 maison, en passant par Han Bila, on aboutissait sur Stozerik. A l'occasion

7 de notre déplacement, vers les positions de combat, des membres du

8 commandement à savoir Ribo Sulejman qui a fait des écoles des instituteurs

9 avec moi, et lui a enseigné à Mehurici, c'est lui qui m'a dit ce qui

10 s'était passé, et ce que j'ai ouï dire, c'est que des Moudjahiddines sont

11 entrés dans le village, et qu'il y a eu un incident à l'intérieur du

12 village où un Croate a été tué, un Croate de ce village, puis a été tué

13 l'un des Moudjahiddines. On m'a dit ultérieurement, que ce n'était pas un

14 étranger, mais que c'était une personne de rue qui s'était jointe aux

15 Moudjahiddines.

16 Toute la population de ce village de Miletici a été emmenée par des

17 Moudjahiddines vers leur camp de Mehurici. Cela m'a intéressé, en

18 particulier, parce que mon adjoint chargé du renseignement, était

19 originaire de ce village précisément. On m'a raconté qu'ils avaient lié son

20 père et son oncle et avec d'autres Croates, ils ont été emmenés vers le

21 camp de Poljanice. Les représentants, à savoir le fils de cet homme, mon

22 adjoint chargé du renseignement, et Ribo Suljo auraient pris part à des

23 négociations pour convaincre les Moudjahiddines de relâcher cette

24 population civile. Ce n'est qu'après, je ne sais combien de temps, qu'ils

25 ont réussi à les convaincre de relâcher la population vers Zagradje. Ils

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1 sont allés s'installer vers Ribo Sulejman et un cousin à lui pour se

2 protéger, pour ne plus être attaqués. Or, dans le village même, il y a eu

3 cet affreux massacre de quatre civils croates en âge de combattre. Les

4 Moudjahiddines les ont emprisonnés. Ils ont emmené la population et ils tué

5 et massacré quatre Croates qui sont restés à Miletici.

6 Q. Avant que de passer à l'autre question, des Moudjahiddines dont vous

7 venez de parler, ce sont ceux qui sont allés de l'école vers des maisons

8 non-serbes de Poljanice et vers les étables de là-bas ?

9 R. Je ne sais pas si ce sont les mêmes personnes. Ce sont des gens du même

10 groupe, oui, maintenant de là à savoir si c'est exactement les mêmes, ils

11 allaient et venaient. Il est difficile de faire la différence, d'après

12 leurs visages, j'avais du mal à les distinguer les uns des autres.

13 Q. A Miletici, vous étiez malade, mais vous avez obtenu des informations à

14 ce sujet. Dites-moi, est-ce que la 306e Brigade avait un rapport de

15 supérieur hiérarchique par rapport à ces Moudjahiddines ?

16 R. Pendant que j'étais dans cette 306e de tout temps, il n'y a jamais eu

17 une chaîne de commandement à l'égard des Moudjahiddines. Ils n'ont été ni

18 subordonnés, ni en position de supérieur hiérarchique par rapport à la

19 306e.

20 Q. Est-ce que quelqu'un est venu enquêter sur ce qui s'est passé dans ce

21 village ?

22 R. On m'a dit à ce moment, ils sont peut-être passés chez moi deux ou

23 trois jours plus tard. Je ne l'ai pas appris le même jour. Je n'ai pas

24 appris le même jour ce qui s'était passé, mais on m'a dit par la suite que

25 des représentants de la communauté internationale, et des membres d'une

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1 commission conjointe sont allés là-bas. Ce que j'ai retenu, c'est que du

2 côté de l'armée, il y avait le général Merdan dans cette commission.

3 Q. Le général Merdan était quoi ?

4 R. Il était membre du commandement conjoint du HVO et de l'ABiH.D'abord

5 c'était cela s'appelait commission, mais il était lui l'adjoint du

6 commandant du 3e Corps.

7 Q. Très bien, merci. Vous nous avez décrit dans le détail comment se sont

8 déroulés les événements depuis le début juin jusqu'à la première réunion de

9 ce commandement au sens restreint, en date du 12 juin. Dites-moi, est-ce

10 que vous avez appris à cette époque-là, qu'il y a eu de tristes événements

11 à l'époque du 8 juin sur le territoire où était censée intervenir votre

12 brigade. Si c'est le cas, j'aimerais savoir ce que vous avez appris ?

13 R. Dans mon exposé plus tôt, j'ai essayé de vous parler des activités qui

14 étaient les miennes à l'époque. Ma préoccupation première se rapportait au

15 combat ainsi qu'à des jonctions avec les effectifs de Velika Bukovica. Mais

16 plus bas Bandol était en train de brûler près de Radojcici. Au sud-est de

17 Guca Gora, dans le courant de l'attaque du HVO contre Bandol et la mise à

18 feu de ce village, les combattants qui avaient défendu Radojcici s'étaient

19 retirés, ont pris peur. Je devais opérer la jonction entre les effectifs

20 arrivant de Vlasicici et les effectifs qui étaient censés poursuivre les

21 combats. Je vous ai précisé que j'ai rencontré mon adjoint, chargé des

22 affaires opérationnelles et éducatives, et il m'avait parlé de la situation

23 sur le plan opérationnel pour m'indiquer jusqu'où nos effectifs étaient

24 arrivés. A ce moment-là, je n'avais pas d'information contre de tristes

25 événements éventuels.

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1 La première fois où j'ai appris qu'il y avait des indices de tels

2 événements, c'était au moment où le commandement restreint s'était réuni.

3 Lorsque des rapports ont été présentés, il a été précisé qu'ils avaient

4 obtenu des informations disant que certains membres du 1er Bataillon de la

5 306e, lorsque des civils et autres populations aptes à combattre ont été

6 emmenés de l'école, il y a eu emprisonnement de certains Croates par des

7 Moudjahiddines. On ne savait pas ce qu'il était advenu, mais on se doutait

8 qu'ils les avaient tués. Le commandement de là-bas a donné l'ordre à son

9 adjoint de diligenter une enquête pour savoir qui est-ce qui avait fait

10 tout ceci. Il me semble que dans le rapport opérationnel, nous en avons

11 informé le commandement du 3e Corps.

12 Q. C'est à plusieurs reprises que vous nous avez indiqué que votre adjoint

13 chargé du renseignement ou l'adjoint chargé des opérations est intervenu.

14 Le responsable chargé de la sécurité était-il également subordonné au chef

15 d'état-major ? Je voudrais savoir ce que vous avez appris suite aux ordres

16 du commandant portant sur l'enquête à diligenter à ce sujet ?

17 R. L'appellation "d'adjoint chargé de la sécurité" vous dit que c'est

18 quelqu'un qui n'est pas subordonné au chef d'état-major, mais c'est

19 quelqu'un qui se trouve au même niveau que le chef d'état-major. Il est

20 subordonné au commandant de la brigade. Il a pour devoir d'informer le

21 commandant de la brigade. C'est le commandant de la brigade qui lui donne

22 des ordres. S'agissant des informations recueillies par ses soins, il n'a

23 pas à les communiquer aux autres membres du commandement. Ce qui fait que

24 ce que j'ai pu apprendre, c'est ce qui s'était dit à la présentation des

25 rapports, à titre ordinaire. Si c'était destiné à un auditoire plus large,

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1 on nous le disait. Ce qui n'était pas destiné à un auditoire plus large,

2 c'était dit dans les rapports au commandant de la brigade, en direct, ou

3 suivant une filière professionnelle à l'intention du chef chargé de la

4 sécurité, au supérieur direct.

5 Q. Compte tenu du système que vous venez de nous décrire, avez-vous

6 connaissance si oui ou non, les instances chargées de la sécurité au niveau

7 de la 306e ont diligenté une enquête, ou ont procédé à des vérifications

8 quant à ces informations ? Avez-vous des renseignements vous disant qui

9 est-ce qui aurait enlevé des personnes dans cette colonne qui était

10 escortée par la 306e ?

11 R. Je ne sais pas quand est-ce que cela s'est passé. Je ne sais pas la

12 date, mais l'adjoint du commandement chargé de la sécurité, le dénommé

13 Delalic, à l'occasion d'un rapport qu'il a présenté, a dit qu'il avait

14 confié une mission à son adjoint chargé de la sécurité au niveau du 1er

15 Bataillon de la 306e, et que ce dernier, lui a fait savoir que des soldats

16 à lui avaient emmené des Croates lorsque ceux-ci se dirigeaient vers

17 Mehurici, et que ces Croates avaient été enlevés par des Moudjahiddines en

18 armes et des hommes masqués. D'après ce récit, certains étaient des Arabes,

19 d'après leur apparence physique. Il y avait en leur compagnie des gens qui

20 étaient masqués, qu'on ne pouvait pas reconnaître. Ils ont été menacés des

21 armes à la main. Ils ont pointé leurs armes vers eux pour prélever dans le

22 groupe des personnes et les ont emmenées dans une direction inconnue.

23 Q. Attendez. Vous nous avez dit tout à l'heure qu'ils n'ont jamais été

24 placés sous le commandement de la 306e. C'est l'étranger qui se trouvait à

25 Mehurici et ailleurs. Dites-moi, la 306e Brigade ou quelque autre autorité

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1 de l'ABiH, avait-elle, oui ou non, des compétences ou des responsabilités

2 pour ce qui est d'enquêter au niveau du comportement ou d'une situation

3 quelconque au sujet d'individus faisant partie d'autres effectifs armés,

4 indépendamment du fait de savoir si ceux-ci se trouvaient sur leur zone ou

5 leur territoire au cas où lesdits effectifs ne feraient pas partie de votre

6 brigade ou de l'ABiH ? Aviez-vous des compétences ou des responsabilités à

7 cet égard ? En d'autres termes, vis-à-vis de qui aviez-vous à assumer des

8 responsabilités ?

9 R. En bref, je dirais que nous n'avions des attributions ou des

10 responsabilités que pour ce qui est d'enquêter au sujet du comportement de

11 nos subordonnés. Sur le territoire contrôlé par la 306e Brigade, je dirais

12 qu'il y avait en vertu des documents en vigueur et de la législation, le

13 HVO était également illégal. Nous étions censés également enquêter à leur

14 égard. Une décision de la présidence disait que l'ABiH constituait une

15 troupe régulière. Le HVO n'était pas dans ce cas. Dans ce territoire, nous

16 avions une brigade, enfin, des effectifs de la 312e, de la 314e. Maintenant,

17 ceux qui n'étaient pas partie intégrante de notre brigade, nous n'avions

18 pas d'ingérence. Il y a des autorités compétentes, il y a des postes de

19 sécurité publique, des postes de police à Travnik, à Mehurici. Nous avons

20 été informés par l'adjoint chargé de la sécurité du fait que ce n'était pas

21 des membres de notre brigade qui avait été auteur de ces méfaits. Il n'y a

22 pas eu de procédure d'entreprise parce que nous n'avions ni mandat, ni le

23 droit de le faire. En plus, il était impossible d'accéder dans ce camp de

24 Poljanice où se trouvaient les Moudjahiddines.

25 Q. Je vais vous poser une autre question. Je me réfère à la page 38, ligne

Page 10550

1 7. Je tiens à dire que vous avez précisé que des documents officiels

2 disaient que les membres du HVO étaient également des éléments illégaux. On

3 n'a pas traduit la phrase où vous avez précisé que vous étiez censé

4 également mettre aux arrêts des membres du HVO dans le cas où vous auriez

5 compétence.

6 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je tiens à préciser que le témoin a

7 apporté une réponse plus étoffée que cela n'a été transmis par le compte

8 rendu d'audience.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Poursuivez, s'il vous plaît.

10 Mme RESIDOVIC : [interprétation]

11 Q. Pour ce qui est de cette situation où vous précisez qu'il y avait un

12 poste de police à Mehurici et ainsi de suite, j'aimerais que vous nous

13 disiez si vous avez connaissance, conformément à la législation de la

14 Bosnie-Herzégovine, même avant la guerre et pendant la guerre de même,

15 quelles sont les instances censées de vaquer aux questions afférentes au

16 déplacement des étrangers et aux informations qui apporteraient des

17 éclaircissements sur l'identité de ces étrangers ?

18 R. J'ai travaillé au QG de la TO à l'époque. Ce QG de la TO se trouvait

19 dans le même bâtiment que le poste de sécurité publique de Travnik. C'est

20 partant de là que je sais que s'agissant des étrangers, il y avait un

21 département particulier au niveau du MUP, qui veillait à surveiller les

22 déplacements, les allées et venues d'étrangers. Cela ne faisait pas partie

23 des attributions des unités militaires.

24 Q. Tout à l'heure, vous nous avez précisé que ces Croates enlevés ont été

25 enlevés quand ils se trouvaient parmi des membres de votre unité, lorsque

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1 ceux-ci escortaient cette population civile vers Mehurici. S'agissant de

2 cette période-là, avez-vous recueilli des informations pour ce qui est de

3 savoir les raisons du déplacement de cette population vers Mehurici depuis

4 Maline ?

5 R. Au moment des événements, je ne savais même pas que cela se passait.

6 Par la suite, à partir des rapports présentés et à partir des informations

7 portant sur la situation générale au niveau de ce territoire, territoire

8 embrasé par des conflits, je dirais que Maline se trouvait pratiquement en

9 première ligne de combat. C'était là l'endroit où des combats avaient lieu.

10 Toute unité a pour mission de protéger la population civile. Dans le cas

11 concret, la seule localité où l'on pouvait assurer une protection, c'était

12 de faire partir la population de là où ils se trouvaient. Le seul endroit

13 où l'on pouvait les placer, c'était l'école de Mehurici.

14 Peut-être ayant tiré des renseignements de Miletici concernant

15 l'existence de groupes informels qui intervenaient indépendamment des

16 commandements et de l'autorité des structures civiles, quelles qu'elles

17 soient, il y avait une nécessité qui était celle de protéger cette

18 population civile qui, au cas où elle resterait chez elle, se verrait créer

19 des difficultés, des problèmes de la part des Moudjahiddines. C'est ce

20 qu'on m'a dit. Je n'étais pas présent. Je ne peux pas vous parler de cela

21 avec plus de précision. Je crois savoir que les gens de Maline ont eux-

22 mêmes demandé à être évacués pour être protégés.

23 Q. Dites-nous, d'abord, si vous avez vous-même visité l'école où on les a

24 installés, ou êtes-vous à même de nous dire quel est le traitement qu'on

25 leur a assuré, qui est-ce qui a assuré leur sécurité, qui est-ce qui leur a

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1 fourni des vivres ?

2 R. Je n'ai pas visité cette école. Les informations que j'ai recueillies

3 proviennent des rapports présentés au commandant, c'est-à-dire, les

4 rapports présentés par ses adjoints chargés du moral ou de la sécurité ou

5 d'autre chose. C'est de là que j'ai appris qu'ils ont été installés dans

6 une salle de cette école primaire de Mehurici. La sécurité était assurée

7 par la police civile, le poste de police de Mehurici. Ces gens ont demandé

8 des renforts auprès du

9 1er Bataillon de la 306e Brigade, précisément en raison des problèmes

10 survenus du fait de la présence des Moudjahiddines. L'alimentation a été

11 organisée par le QG de la protection civile de Mehurici en demandant, bien

12 entendu, de l'aide de la part du QG municipal et de la protection civile.

13 Q. Vous nous avez déjà parlé de ces étrangers dans votre secteur et les

14 problèmes qu'ils avaient engendrés auprès de la population civile. Vous

15 dites qu'ils n'ont été subordonnés en aucune façon à la 306e. J'aimerais

16 que vous nous disiez si vous savez si la 306e Brigade ou une autre unité de

17 l'ABiH, aurait apporté un soutien logistique à l'intention de ces

18 étrangers. En d'autres termes, leur ont-ils donné des armes, des vivres,

19 des équipements, et ainsi de suite ?

20 R. J'ai déjà dit que les Moudjahiddines ne nous ont créé que des

21 difficultés. Il n'y a pas eu de rapport de subordination ou de

22 commandement. Il n'y a eu d'aide ni logistique, ni autre de la part de la

23 306e Brigade. Je crois bien qu'il n'y en a pas eu de la part des autres

24 unités. Pour les autres, je ne peux rien affirmer, mais pour la 306e, je

25 puis le faire.

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1 Q. Vous-même, au commandement de la brigade ou vous en personne, avez-vous

2 su combien ils étaient, d'où ils venaient, quels étaient leurs noms, qui

3 était leur commandant ? Aviez-vous à leur sujet, des informations plus

4 précises aux fins d'être à même de fournir des renseignements plus précis à

5 votre commandement supérieur ?

6 R. Je ne sais pas si qui que ce soit avait disposé de renseignements

7 précis à leur sujet. A dire vrai, ces renseignements ne nous intéressaient

8 pas trop; cela ne faisait pas partie de notre domaine d'intérêt. Nous

9 n'avons pas demandé des renseignements. Nous n'avons pas veillé à leur

10 présence ou à leur occupation. Nous ne savions pas s'ils avaient un

11 commandant. A mes yeux, c'étaient des genres de passages qu'on voyait ça et

12 là, et dont on cherchait, notamment à se dissimuler, se mettre à l'écart,

13 parce qu'on pouvait s'attendre à des désagréments et à rien d'autre

14 lorsqu'on les rencontrait.

15 Q. Votre brigade a-t-elle donné des ordres à quelque moment que ce soit à

16 l'intention de ces hommes, ou ces hommes-là, lui ont-ils présenté un

17 rapport quelconque ?

18 R. Pour autant que je sache, pendant que j'étais dans la 306e, s'agissant

19 d'ordres de cette nature, j'étais censé être au courant. Nous ne leur avons

20 jamais donné d'ordres et eux non plus ne nous ont jamais envoyé de rapports

21 de leur côté.

22 Q. Je voudrais a présent vous demander ce qui suit : étant donné que dans

23 le cadre de ces combats, comme vous l'avez indiqué sur la carte, Krpeljici

24 et Guca Gora sont très près l'un de l'autre. Savez-vous nous dire ce qui

25 fait de Guca Gora un endroit si connu ?

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1 R. Je suis résident de cette municipalité de Travnik. Guca Gora a toujours

2 été connu par le monastère de Guca Gora. C'était le symbole de Guca Gora.

3 On disait que Guca Gora était le village le plus évolué de cette

4 municipalité, puisque c'est là qu'on avait le plus de gens avec une

5 éducation supérieure.

6 Q. Pouvez-vous nous dire quelle était l'attitude de cette population de

7 Guca Gora et des environs à l'égard des bâtiments religieux des autres

8 groupes ethniques, et quels étaient les ordres du commandement supérieur

9 s'agissant de l'attitude à adopter vis-à-vis de ces sites religieux et

10 édifices religieux ?

11 R. Les ordres, d'une manière générale, concernant le comportement des

12 combattants de l'ABiH à l'égard de la population, des prisonniers, des

13 bâtiments religieux ou des prêtres, nous avons reçu des ordres dès la

14 création. Je crois que c'était dès la fin 1992 ou début 1993. C'est vers

15 cette période-là que des ordres ont commencé à nous parvenir dans ce sens.

16 Des ordres analogues ont été donnés vis-à-vis de nos unités subordonnées à

17 nous.

18 Sur le terrain, nous nous sommes efforcés de réaliser cet objectif au

19 travers de l'entraînement. Vous m'avez montré un document. Nous n'avons pas

20 fait davantage de commentaires concernant l'entraînement et la formation.

21 Mais le commandement du 3e Corps a donné l'ordre dans le cadre de cette

22 mobilisation, de procéder à une formation desdites unités. Or, la formation

23 ne pouvait pas être faite avec une unité complète, parce qu'une partie de

24 l'unité devait forcément occuper des positions au front. Nous procédions à

25 la formation au fur et à mesure que les membres des unités étaient

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1 disponibles et libres. On peut peut-être retrouver des documents pour ce

2 qui est de la planification et de la réalisation de cette formation. La

3 formation a été planifiée par le commandement de la brigade. Nous

4 procédions à des préparatifs pour ce qui est des commandants des

5 bataillons. Les commandants des bataillons procédaient à des préparatifs à

6 l'intention de leurs chefs de compagnie. Les chefs de compagnie procédaient

7 à des préparatifs à l'égard des chefs de peloton, et ainsi de suite. Chacun

8 procédait à une formation à l'égard de ses subordonnés. C'était ce mode

9 d'organisation que nous avions au niveau de la Défense territoriale, et

10 c'est le même modèle d'organisation que nous avons utilisé à ce moment-là.

11 Dans l'élaboration des plannings de formation et d'entraînement, nous

12 avons envisagé la réalisation de mesures qui découlaient des ordres

13 afférents à tout ce qui relevait du droit de guerre international et des

14 conventions de Genève, et ceci, aux fins de rapprocher ces instructions du

15 personnel, de la troupe. Nous avions des assistants chargés du moral des

16 troupes. Même au niveau d'une compagnie il y avait un adjoint du commandant

17 chargé du moral.

18 Q. Je vais vous interrompre. Dites-moi, s'il vous plaît, dans l'exécution

19 de ces ordres du commandement du corps d'armée visant à procéder à

20 l'entraînement de tous les soldats et de tous les membres du commandement,

21 est-ce que dans la mise en place de ces programmes, des étrangers ont

22 participé, à savoir, les Moudjahiddines ? Autrement dit, est-ce que les

23 Moudjahiddines ont procédé à l'entraînement de vos membres à n'importe quel

24 moment ?

25 R. Non, jamais. J'ai énoncé qui a organisé l'entraînement, qui l'a mené et

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1 de quelle manière ceci était réalisé.

2 Q. Très bien. Dites-moi maintenant, mis à part ces ordres, est-ce que vous

3 savez si le monastère à Guca Gora était endommagé, qui a provoqué les

4 dégâts et quelles ont été les mesures prises par la 306e Brigade si des

5 mesures ont été prises ?

6 R. Comme je vous ai dit, à ce moment-là, j'étais engagé dans une autre

7 direction, mais j'étais au courant compte tenu de la réunion d'information

8 du 12 juin. Grâce à cette réunion, j'ai appris qu'un groupe de

9 Moudjahiddines était entré dans le monastère et qu'ils avaient dévasté

10 l'intérieur de ce monastère. Je ne me souviens pas des détails et de

11 l'ampleur de cela, mais je sais que le commandant de la 306e Brigade avait

12 envoyé ses membres de brigade afin de protéger les gens au monastère. Je ne

13 sais pas de quelle manière l'on a réussi à renvoyer les Moudjahiddines du

14 monastère, et des policiers militaires de la 306e Brigade, je ne sais plus

15 s’il s’agissait d’un détachement ou d’un groupe, ont réussi à y entrer et à

16 à assurer la sécurité du monastère. Pour le peuple bosnien, un établissement

17 religieux est protégé. Ils seraient empêchés de provoquer des dégâts, au

18 moins dans la partie de la Bosnie dont j'émane. Je sais que par la suite une

19 partie du bataillon de la police militaire du 3e Corps d’armée y a été

20 envoyée, avec la même mission et qu’à un certain moment, ils assuraient

21 la sécurité du monastère aux côtés d’hommes appartenant à la police militaire

22 de la 306e…ils l’ont protégé contre tout assaillant éventuel et l’ont

23 conservé intact.

24. Q. Merci. Dites-nous

25 maintenant, s'il vous plaît, vous avez dit que les opérations de combat

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1 se sont poursuivies et que le commandement s'est réuni vers le 12 juin. Est-ce

2 que vous avez remarqué dans la région vaste de la vallée de la Bila que

3 l'on commença à procéder à des pillages ? Si l'on a incendié un certain

4 nombre de bâtiments, qui l'a fait, si oui, qui est en charge des hommes

5 qui se sont rendus coupables de cela et quelles sont les mesures prises

6 par la 306e Brigade afin d'identifier les auteurs et de les sanctionner ?

7 R. Au début des activités de combat et par la suite, parfois, il y a un

8 petit nombre de bâtiments, de maisons qui ont été incendiées. En ce

9 concerne Guca Gora et les villages qui sont plus proches de la ligne du

10 front, ce sont des villages qui sont dans des zones de combat, il y a sans

11 cesse des activités de combat, il y a souvent des bâtiments qui sont

12 incendiés car l'on utilisait des balles incendiaires, des obus également.

13 Par la suite, lorsque la route qui passe par Gostunj a été libérée, la

14 route qui va vers Zenica, vers la libération de cette route, il est devenu

15 possible de passer vers Zenica et du coup, au jour le jour, des milliers de

16 réfugiés et de voyageurs passaient par là; tout le monde passait par là, il

17 était très difficile de contrôler cela. Pour ce qui est des pillages, j'ai

18 l'impression que tout le monde y a participé. Les civils, mais je ne sais

19 pas très exactement qui a participé mais il était impossible de les

20 contrôler. Je ne peux pas dire maintenant qui était le responsable car il y

21 avait des réfugiés de Zenica Travnik, des réfugiés de Travnik aussi, donc

22 il y avait des mouvements de population venant de toutes les directions.

23 En ce qui concerne la 306e Brigade et la protection du territoire et des

24 installations, c'était la police militaire qui était chargée de cela.

25 L'adjoint chargé de la sécurité pourrait nous dire plus à ce sujet. C'est

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1 lui qui organise les mesures à prendre et je m'occupais des opérations de

2 combat car tous les jours, il y avait des contre-attaques, dans les

3 opérations de combat, vous avez toujours l'attaque et la contre-attaque. Il

4 faut toujours organiser la défense de la ligne. D'après mes connaissances

5 concernant la 306e Brigade, elle a engagé la police militaire pour

6 s'assurer de la protection conformément à ses moyens. Il y avait un poste

7 de police à Mosor, qui contrôlait cette partie du territoire, qui devait

8 protéger ce territoire car les unités de combat procédaient aux opérations

9 de combat. Pour autant que je le sache également, l'état-major de la

10 protection civile a formé des unités chargées de la protection, par

11 exemple, du bétail, ensuite visant la terre abandonnée et également

12 sécuriser les maison abandonnées pas les Croates. On a quand même essayé

13 d'atteindre également -- conformément à la mission confiée par la

14 présidence de guerre, l'état-major municipal de la police civile a créé des

15 commissions visant à organiser l'hébergement des réfugiés dans des maisons

16 croates abandonnées car il était considéré que c'était le seul moyen de

17 protéger ces maisons-là. Il y avait un procès-verbal concernant cet

18 hébergement pour constater quel était l'état des lieux et pour constater

19 également que la personne qui entrait dans une maison était responsable de

20 tout ce qui était à l'intérieur mais parfois les gens s'installaient dans

21 des maisons de leur propre gré.

22 Q. Vous avez dit que le peloton de la police militaire avait également

23 pour tâche d'empêcher les pillages et de punir les responsables des

24 pillages. Quelles étaient les ingérences de la police militaire de la 306e

25 Brigade ? Est-ce ceci portait sur tous ces groupes de personnes qui

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1 traversaient la région ou non ? La compétence de cette police militaire

2 portait sur qui ?

3 R. Tout à l'heure, j'ai déjà dit que l'unité ou le commandement de la

4 police militaire était chargé seulement de l'unité dont elle faisait

5 partie, ses subordonnés et non pas la population civile. Pour ce qui est de

6 la population civile, comme je l'ai déjà dit, il y avait la force de

7 sécurité publique à Travnik et des postes de police.

8 Q. Devant ce Tribunal, on entend souvent parler du concept de la zone de

9 responsabilité. Est-ce que vous pouvez nous dire, compte tenu du

10 déploiement de la 306e Brigade, est-ce que vous pouvez nous dire comment on

11 déterminait quelle était la zone de responsabilité de votre brigade et est-

12 ce que vous étiez responsable pour l'ensemble du territoire que vous nous

13 avez indiqué ici sur cette carte.

14 R. Nous pouvons vérifier les ordres, peut-être, mais pour ce qui est des

15 ordres émanant complètement du corps d'armée, s'agissant d'une zone de

16 responsabilité, ceci était déterminé en fonction des opérations de combat.

17 L'ABiH a confié la tâche à la 306e Brigade de défendre la ligne détenue à

18 l'encontre des forces de l'agresseur serbo-monténégrin et il devait

19 planifier les opérations de combat afin de libérer le territoire occupé.

20 Pour ce faire, la zone de responsabilité a été déterminée avec une

21 frontière à gauche et à droite et ces frontières ont été déterminées de la

22 manière suivante : il y avait un point dans la profondeur et puis il y

23 avait un point sur la ligne de démarcation, la ligne qui nous séparait des

24 forces ennemies. Les autres points étaient en profondeur du territoire de

25 l'ennemi ou plutôt du territoire temporairement occupé par l'ennemi,

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1 c'était la zone dans laquelle où il fallait commencer les opérations. Il

2 fallait défendre la ligne que nous détenions et ensuite avancer dans le

3 territoire temporairement occupé par l'ennemi afin de les libérer.

4 Q. Merci, je pense que les choses sont devenues un peu plus claires pour

5 moi. Revenons maintenant à la police militaire et les mesures qu'elle a

6 prises. Est-ce que la police militaire était en contact avec le chef

7 d'état-major ou le commandant ?

8 R. Le chef d'état-major est normalement en contact avec tout le monde mais

9 au fond, c'est le commandant qui commande tout le monde. Sur le plan

10 professionnel, ils étaient reliés au chef chargé de la sécurité et non pas

11 le chef d'état-major.

12 Q. Merci. Vous avez parlé de plusieurs réunions du commandement, vous avez

13 dit que la réunion se tenait à des intervalles réguliers. Est-ce que vous

14 pouvez nous dire si, à un moment donné, vous avez appris que certains

15 ordres ont été donnés pour protéger les civils et les bâtiments civils.

16 Est-ce que votre commandant a donné un tel ordre ? Est-ce qu'il a donné un

17 ordre concernant les mesures à prendre contre les auteurs de crimes et de

18 délits ? Est-ce que vous savez si le commandant de la 306e Brigade a pris

19 certaines mesures et si oui, lesquelles ?

20 R. En ce concerne les ordres émanant du commandement supérieur et la

21 transmission de ces ordres aux subordonnés, j'ai dit déjà que lorsque la

22 306e Brigade a été formée, nous avons commencé à recevoir ce genre d'ordres.

23 Je pense que cela a commencé au début de l'année 1993 et ce genre d'ordres,

24 émanant du commandement supérieur, arrivait très fréquemment. Je me

25 souviens, par exemple, qu'il y en avait en février et en avril, par la

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1 suite également, je me souviens, en juin aussi. Nous transmettions ces

2 ordres-là à nos subordonnés et nous demandions que des mesures soient

3 prises. Je n'écrivais pas moi-même ces ordres mais ces ordres étaient

4 d'habitude transmis et repris par le chef chargé de la sécurité mais je

5 suis au courant de leur existence.

6 Q. Puisque vous étiez en charge des soldats qui pouvaient être engagés

7 dans le tableau des opérations de combat, est-ce que dans le cadre de vos

8 fonctions, vous saviez si un certain nombre de membres de la 306e Brigade a

9 été traîné en justice ? Est-ce qu'une procédure judiciaire ou disciplinaire

10 a été lancée contre des membres de votre brigade ? Est-ce que parfois des

11 mesures draconiennes ont été prises à l'encontre de certains membres de

12 votre brigade afin de punir les pillages et afin d'empêcher ce genre

13 d'actes criminels ?

14 R. Je sais cela, car j'avais parfois des problèmes concernant la rotation

15 des unités. Ceci était lié au fait que notre unité de détention était

16 horrible, et il n'y avait pas suffisamment d'unités qui pouvaient prendre

17 la relève. Parfois, je disais que le commandant pouvait éventuellement

18 relâcher certains détenus afin de nous permettre de remplir nos rangs. Au

19 moment du conflit avec le HVO, nous avions un ensemble de la ligne, une

20 ligne extrêmement longue, et nous avons ouvert une nouvelle ligne dans la

21 direction du HVO. Ceci était un fardeau immense sur les épaules de ces

22 hommes. Pendant les réunions, beaucoup de choses ont été dites concernant

23 les mesures qui ont été prises, concernant les poursuites qui ont été

24 lancées. Il y a eu des rapports criminels. Il y a eu des mesures

25 disciplinaires qui ont souvent été imposées. Le commandant, souvent,

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1 décidait d'une peine d'emprisonnement de deux mois pour ces hommes qui ont

2 commis des délits. Les hommes du bataillon militaire faisaient cela

3 également, mais je ne sais pas quels étaient les actes concernés. Il y

4 avait des actes de désobéissance, et cetera. Je sais que tout a été fait

5 afin de faire en sorte que le code de conduite soit appliqué.

6 Q. Compte tenu de la gravité du problème, et compte tenu du fait que tous

7 les civils et tous les soldats étaient concernés par ces actes, en raison

8 de leur ampleur, est-ce que le commandement du corps d'armée a déployé des

9 efforts supplémentaires afin de renforcer les équipes qui ont participé aux

10 enquêtes et les équipes qui ont participé à la procédure disciplinaire ?

11 Est-ce que de nouvelles unités ont été formées ? Est-ce que le commandement

12 a pris le contrôle de la situation sur le territoire de votre brigade ?

13 R. Lorsque la route Travnik-Zenica a été ouverte, et lorsqu'il a été

14 possible d'évaluer mieux la situation, je pense que le commandement du

15 groupe opérationnel --

16 Q. Quel groupe opérationnel ?

17 R. Groupe opérationnel de Bosanska Krajina. Je pense que ce commandement a

18 constaté qu'il fallait renforcer les organes de polices militaires afin de

19 pouvoir exercer le contrôle. Car, même les soldats qui rentraient chez eux

20 de leurs positions, même peut-être ces personnes-là, à des moments pareils,

21 étaient responsables d'un certain nombre d'actes illicites. Je sais, par

22 exemple, que j'ai reçu un ordre visant à envoyer un groupe de cinq à sept

23 policiers armés de la 306e Brigade, c’est-à-dire de notre peloton de la police

24 militaire,il a fallu qu'ils se rendent et rejoignent les rangs de la compagnie

25 de la police militaire du Groupe opérationnel de Bosanska Krajina. Une

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1 compagnie de police militaire a été ainsi formée au sein du Groupe opérationnel

2 de Bosanska Krajina. Nous y avons envoyé cinq membres. Ensuite, il nous a été

3 dit que la compagnie de la police militaire allait être une sorte de centre

4 d'entraînement des policiers militaires, où l’on enseignerait aux hommes à

5 s’acquitter des devoirs qui

6 incombent à un policier militaire avant de les renvoyer dans leurs unités, pour

7 que nous disposions de policiers militaires bien formés. Donc, une compagnie

8 de police militaire a été crée au sein du groupe opérationnel de la Krajina.

9 Q. Monsieur Siljak, je m'approche de la fin de l'interrogatoire principal.

10 Je souhaite maintenant vous montrer d'autres documents contenus dans le

11 classeur. Ils font partie de la partie intitulée "Autres documents", "Other

12 documents." Veuillez les examiner, et veuillez nous dire brièvement si vous

13 êtes au courant de ces documents, et de quoi s'agit-il dans ces documents-

14 là ? Il s'agit des documents qui sont précédés par un papier où il est

15 écrit "Other documents," "Autres documents." R. Je ne connais pas

16 la langue anglaise. Vous parlez de l'endroit où il est écrit "O-t-h-e-r" ?

17 Q. Oui, c'est cela. Est-ce que vous pouvez maintenant examiner les

18 documents ? Le premier document, est-ce que vous pouvez nous dire si vous

19 reconnaissez ce document, et pouvez-vous nous dire quelque chose à son sujet ?

20 R. A ce moment-là, le 18 août 1992, je faisais partie de l'état-major

21 municipal de la Défense territoriale. Je suis au courant de ce document par

22 le 1er Bataillon de Krajina, formé à Krajina. Dans le premier ordre

23 concernant ce bataillon, il a été dit qu'il était subordonné à l'unité de

24 l'état-major de la Défense territoriale de Travnik. Par la suite, lorsqu'on

25 a rédigé les ordres et planifié les opérations de combat, on les envoyait

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1 également à ce 1er Bataillon. Cependant, par la suite, ce bataillon est

2 devenu directement lié à l'état-major du district de la Défense

3 territoriale de Zenica.

4 Q. Merci. Est-ce que vous pourriez maintenant examiner le document numéro

5 2 ?

6 R. C'est l'un des premiers documents du commandement du 3e Corps d'armée

7 dont j'ai peut-être déjà parlé. Il s'agit d'un ordre concernant le fait

8 qu'il fallait empêcher que l'on procède à des pillages, que l'on incendie

9 des maisons des civils, et cetera. Comme je l'ai déjà dit, il existait une

10 série innombrable de documents de ce genre au cours de cette période.

11 Q. Merci. Est-ce que vous pourriez maintenant examiner le document numéro

12 3 ? Le numéro est 0711.

13 R. Ceci montre la manière dont la 306e Brigade a agi, suite à l'ordre

14 donné par le commandement supérieur, en ce qui concerne les ordres liés au

15 respect du droit international humanitaire. Ici, il s'agit plus

16 concrètement du fait de capturer des civils, d'incendier des maisons, des

17 pillages, et cetera, et de la manière dont il fallait faire face à cela.

18 Q. Est-ce que vous pourriez maintenant examiner le document 4, s'il vous

19 plaît ? Le numéro de la Défense est 0913. S'agit-il d'un document que votre

20 brigade a reçu ?

21 R. Oui. C'est un ordre émanant du 3e Corps d'armée. Sur la base de ce

22 document, vous pouvez voir que la brigade a reçu ce document. Ceci est

23 reflété par le cachet.

24 Q. Est-ce que vous pourriez maintenant examiner les documents qui font

25 partie de la partie "Exhibits", pièces à conviction. Je vais vous expliquer

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1 le mot "exhibit" en anglais, cela veut dire pièce à conviction, et les

2 lettres DH indiquent qu'il s'agit là des pièces à conviction de la Défense.

3 Je ne vais pas me lancer dans plus de détails concernant cela.

4 Veuillez simplement, s'il vous plaît, examiner le document numéro 1 qui est

5 en date du 29 mai 1993. C'est un document du 3e Corps d'armée. Ici, dans

6 l'intitulé, nous voyons que la municipalité de Travnik est mentionnée. Est-

7 ce que vous pourriez examiner cela, et nous dire si, à l'époque, vous étiez

8 au courant de ces événements-là, et si oui, de quelle manière ?

9 R. Ce jour-là, j'étais à Travnik, car le 27 mai, j'ai quitté le

10 commandement de la brigade. Je suis allé vers Travnik, et j'ai été arrêté

11 au point de contrôle illicite à Gostunj. On a pris mon ordinateur, et je ne

12 pouvais plus rentrer au commandement de la brigade. En ce qui concerne les

13 sections des tireurs embusqués, j'ai pu constaté cela moi-même dans la

14 ville. Puis, lorsque l'on dit que la route Travnik, Guca Gora et Han Bila

15 était impraticable, cela aussi, j'ai pu le constater moi-même car je ne

16 pouvais rentrer au commandement. Je suis au courant du document,

17 l'information qui y est contenue se fonde sur nos rapports, soit des

18 rapports des unités de Travnik, ou de la 306e Brigade.

19 Q. En ce qui concerne l'ordinateur qui vous a été confisqué en mai, est-ce

20 que vous pouvez nous dire si cet ordinateur était un appareil qui

21 permettait à la 306e Brigade d'avoir des communications avec le

22 commandement supérieur ?

23 R. Cet ordinateur, nous l'avons reçu vers le 10 mai. Nous étions très

24 contents, nous nous disions enfin nous aurons des communications par paquet

25 avec notre commandement supérieur. On a commencé à faire fonctionner cet

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1 ordinateur. Parfois, on rencontrait certains problèmes, mais afin de

2 résoudre ces problèmes-là, il a fallu qu'on l'amène à Travnik pour une

3 réinstallation, ou quelque chose comme cela, pour que l'on puisse

4 l'utiliser. Nous l'avions à peine 10 jours, vous savez chez nous les gens

5 diraient, c'était vraiment longtemps la période pendant laquelle vous avez

6 pu l'utiliser. Oui, on souhaitait l'utiliser pour avoir des communications

7 par paquet avec notre commandement supérieur.

8 Q. Veuillez examiner le document suivant, s'il vous plaît, dont le numéro

9 est 157/2. Pour ce qui est d'un certain nombre de faits contenus dans ce

10 document, est-ce que vous avez des connaissances personnelles concernant

11 cela ?

12 R. Ce que je peux dire avec certitude, c'est que là où j'étais, à savoir

13 qu'un lance-roquettes multiples agissait contre Krpeljici ce jour-là, mais

14 je ne sais pas pour ce qui du reste. On entendait des tirs, mais en ce qui

15 concerne le lance-roquettes multiples, cela je peux le confirmer avec

16 exactitude.

17 Q. Est-ce que vous pourriez maintenant examiner le document numéro 3. Il

18 s'agit encore une fois d'une pièce à conviction de la Défense, attendez, je

19 vais juste vérifier quelque chose, document de la Défense 280, je pense,

20 non 270, excusez-moi, DH270. Veuillez, s'il vous plaît, examiner ce

21 document, et veuillez me dire si vous êtes au courant de cet événement,

22 est-ce que vous étiez témoin oculaire de cet événement décrit dans le

23 document ?

24 R. Dans le cadre de mon travail, les informations recueillies concernant

25 le travail des unités subordonnées, l'officier opérationnel s'est rendu sur

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1 le terrain afin de rendre visite à nos unités. Sur la base de cela, il

2 écrivait un rapport, il s'agissait-là d'une manière normale de recueillir

3 les informations pour le rapport soumis au commandant du corps concernant

4 la situation dans les unités. En tant que chef d'état-major de la 306e

5 Brigade, je suis allé avec cet officier opérationnel du commandement du

6 corps d'armée, je me suis rendu sur les lignes de front, et j'ai visité les

7 unités. Ce rapport a été rédigé par cet officier opérationnel du camp de

8 commandement du corps d'armée et, effectivement, il a souhaité nous

9 informer de ses observations, la tâche qu'il avait reçue était de faire

10 face à toutes les faiblesses.

11 Q. Est-ce qu'à un moment donné vous avez dit aux membres du commandement

12 du 3e Corps d'armée quels étaient les problèmes que vous avez rencontrés

13 par rapport aux étrangers dans votre zone, et est-ce que vous avez pu voir

14 les bâtiments dans lesquels ces étrangers étaient hébergés ?

15 R. J'ai informé l'officier opérationnel du 3e Corps d'armée de son

16 commandement concernant les problèmes provoqués par ces étrangers et, sur

17 la base de mes informations, il a écrit ses propositions par rapport à ce

18 qui devait être entrepris. Il n'était pas possible pour tout le monde

19 d'avoir accès aux bâtiments, ce que j'ai pu faire, c'était d'utiliser les

20 renseignements que j'avais obtenus sur le terrain, de sources de services

21 de Renseignement également, et sur la base de ce que je pouvais entendre,

22 de la part de ceux qui les avaient rencontrés, qu'il s'agisse des membres

23 de notre brigade ou des autres personnes qui souhaitaient trouver une

24 solution au problème, mais les étrangers n'obéissaient à personne, ils ne

25 faisaient que provoquer des problèmes.

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1 Q. Vous avez dit qu'ils n'obéissaient à personne. Est-ce que vous, en tant

2 que brigade, aviez une autorité par rapport à eux. Est-ce que vous pouviez

3 leur donner des ordres ?

4 R. Je pense que j'ai déjà dit plusieurs fois que nous n'avions pas une

5 telle autorité, un tel pouvoir, nous n'avons même jamais essayé de le

6 pratiquer.

7 Q. Je souhaite que l'on revienne maintenant au début. Un document que nous

8 n'avions pas encore vu, est un document qui constitue l'information sur la

9 306e Brigade, et c'est le document numéro 1. C'est le premier document dans

10 la série, qui figure tout au début. Est-ce que vous savez ce que représente

11 cette décision ?

12 R. C'est là le libellé du serment que nous avons reçu. Les membres de

13 toutes les unités étaient censés prêter serment. Ils étaient censés

14 également signer le texte de ce serment.

15 Q. Après avoir prêté serment, est-ce que les hommes devenaient membres de

16 l'ABiH ?

17 R. Mais bien sûr. Je pense que ceci s'est fait après la proclamation de

18 l'état de guerre, lorsqu'il n'y avait plus de volontaire, tout le monde

19 avait des devoirs de défendre et de protéger l'Etat. Après cela nous avons

20 reçu le texte du serment officiel, et nous avons utilisé et appliqué ces

21 mesures dans nos propres unités, les membres de la Défense territoriale qui

22 nous rejoignaient prêtaient ce serment.

23 R. Est-ce que dans la 306e Brigade, vous avez veillé à ce que ce serment

24 soit suivi des faits, à savoir qu'il y avait formation idoine, que des

25 mises en garde étaient données. Est-ce qu'en d'autres termes, vous avez

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1 essayé de transformer ces villageois en véritable armée ?

2 R. Ce serment, il a été prêté et fait par tous les membres qui se

3 trouvaient dans les unités, à l'époque. Plus tard, lorsque les nouvelles

4 générations ont grandi, et ont été appelées sous les drapeaux, ces hommes

5 ont prêté serment dans les unités dans lesquelles ils ont été mobilisés.

6 Nous avons toujours eu pour objectif de leur faire connaître les règlements

7 militaires, et ce texte du serment n'en était qu'une partie.

8 Q. Vous avez été très calme au moment où vous avez relaté ce que vous avez

9 vécu en 1992 et en 1993. Mais aujourd'hui lorsque vous repensez à tout

10 cela, pensez-vous que le commandement de votre brigade a fait tout ce qui

11 était en son pouvoir pour constituer, pour créer une armée pour défendre le

12 territoire et pour protéger la population ?

13 R. Si l'on tient compte des moyens dont disposait le commandement, je

14 parle ici des officiers de commandement au niveau de la brigade, de

15 l'unité. Si l'on tient compte de l'équipement, du matériel, qui était à

16 leur disposition, si l'on tient compte aussi des attentes énormes qu'eux-

17 mêmes avaient et qu'ils avaient des autres, je persiste à croire que nous

18 n'aurions pu faire plus pour ce qui est de la formation et de la

19 constitution des unités et des brigades.

20 Pendant que moi, je me suis trouvé dans la 306e, je peux vous dire

21 que le processus de constitution n'était pas encore achevé. Plus tard, j'ai

22 été officier supérieur, au commandement du 7e Corps d'armée, et je peux

23 vous dire à propos de la 306e Brigade, qu'elle n'a jamais existé en tant

24 que brigade de montagne, sans doute parce que les ambitions que nous avions

25 à l'époque étaient excessives. Nous ne connaissions pas suffisamment bien

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1 la situation, ce qui veut dire que nous n'avons pas bien jaugé ni jugé la

2 situation. C'est la raison pour laquelle la 306e Brigade de Montagne a été

3 transformée en brigade d'infanterie légère. C'est une différence d'ordre

4 structurelle que celle qui était apportée. Je persiste à affirmer que,

5 jusqu'à la fin de la guerre, la 306e Brigade de Montagne n'avait pas encore

6 été établie de façon organique, dans le respect de toutes les attentes et

7 de tous les règlements.

8 Q. Est-ce parce que vous ne souhaitiez pas la constituer, ou que vous ne

9 saviez pas comment vous y prendre ? Ou est-ce que les conditions qui

10 étaient les vôtres étaient telles qu'il était impossible de le faire ?

11 R. Nous tenions absolument à y parvenir. C'était un souhait très vif, mais

12 les conditions ne nous le permettaient pas.

13 Q. Merci.

14 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'en ai terminé.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Je donne la parole aux autres avocats. Le juriste de

16 la Chambre m'indiquera la totalité de la durée, hier et aujourd'hui, des

17 premiers Défenseurs.

18 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai quelques

19 questions pour ce témoin.

20 Contre-interrogatoire par M. Ibrisimovic :

21 Q. [interprétation] Monsieur Siljak, je reculerais me référer à quelques

22 documents, et je me réfère notamment au rapport extraordinaire du 19 mai.

23 Il s'agit d'une pièce à conviction de l'Accusation, la P418, je l'ai dit

24 pour le compte rendu d'audience.

25 R. Je l'ai trouvé.

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1 Q. Veuillez vous référer au point 3.2 où on parle de : "Variante ou

2 d'alternative en cas d'attaque du HVO." On y parle : "D'une partie de la 7e

3 Brigade, d'une partie des effectifs de la 2e Brigade, qui parle d'attaques

4 en direction de Mehurici, Crni Vrh, Carda Kov et Guca Gora. Maîtrisez la

5 ligne Maline, Radonjici, Krpeljici, Velika Bukovica," et cetera.

6 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent à M. Ibrisimovic de lire plus

7 lentement.

8 R. Je viens d'en prendre lecture.

9 Q. Cette variante en cas d'attaque des unités du HVO, a-t-elle été

10 réalisée ou pas ?

11 R. S'agissant de l'axe qui est mentionné dans cette variante, cela n'a pas

12 été réalisé, pas plus que ne s'est réalisée la composition des effectifs

13 censés intervenir. Cette variante n'a jamais été réalisée dans le courant

14 des opérations de combat.

15 Q. Pouvez-vous étoffer votre propos et dire si les effectifs mentionnés

16 dans cette variante, je pense vous avoir bien compris, n'ont pas tous été

17 intégrés à l'attaque.

18 R. Lors de la planification du recours à certains effectifs, s'agissant

19 des territoires à partir desquels l'on a complété la 306e, il y avait à peu

20 près une compagnie de la 314e Brigade, un bataillon qui était commandé par

21 Mihat Puric. C'est quelqu'un originaire du village de Purici. Je l'ai

22 indiqué sur la carte. C'est juste à côté du commandement de la brigade de

23 ce village. C'est son unité qui a participé, en date du 17 avril, à la

24 libération de la colline Stozerak, aux côtés des effectifs de la 306e.

25 C'est pour cela qu'on nous avait dit qu'il fallait compter sur cette unité

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1 pour ce qui est de la planification du recours aux effectifs. On nous a

2 également indiqué, à ce moment-là j'entends, de prévoir une partie des

3 effectifs de la 7e Brigade musulmane qui se trouvait à Poculica, dans des

4 opérations de combat en direction de Vitez. Nous pouvions compter sur eux

5 parce qu'en passant par Stozerak, qui se trouvait entre les deux, une fois

6 Stozerak libérée, on pouvait compter sur cette partie des effectifs.

7 Cependant, s'agissant de la réalisation même, elle n'a pas eu lieu.

8 Q. Si je vous ai bien compris, pour ce qui est de maîtriser cet axe

9 Maline-Radonjici-Krpeljici-Velika Bukovica, il n'y a pas eu de

10 participation de la part de la 7e Brigade.

11 R. Non, d'après ce que j'ai appris. Je ne me trouvais pas là-bas, mais

12 l'agent opérationnel m'a informé que, sur cet axe, il n'y avait que des

13 unités de la 306e à avoir pris part aux activités.

14 Q. Si nous établissons la corrélation entre ce document et votre

15 témoignage d'aujourd'hui, je me réfère notamment à la page 26, lignes 1, 2,

16 3, 4, lorsque vous avez indiqué, qu'en direction de Maline et Radonjici,

17 ainsi que Guca Gora, il est intervenu des éléments disponibles. Vous aviez

18 parlé de la 306e ?

19 R. Je n'ai pas compris.

20 Q. Vous avez parlé du 8 juin aujourd'hui. Vous avez dit que certains

21 éléments disponibles, c'est une question posée par ma consoeur Residovic,

22 vous avez dit que des éléments libres de l'armée, de ces unités avançaient

23 vers Maline, Radonjici, Guca Gora. Est-ce que vous aviez à l'esprit des

24 éléments de la 306e ?

25 R. Des éléments disponibles de la 306e qui étaient planifiés, qui étaient

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1 prévus pour des cas d'interventions, comme on le dit ici, en cas d'attaque

2 de l'agresseur serbo-monténégrin en direction des lignes face à l'agresseur

3 serbo-monténégrin, ou si besoin était, d'intervenir sur des axes menacés en

4 cas d'attaque du HVO. C'est une partie du 1er Bataillon de la 306e Brigade

5 qui était constitué d'une population de personnes expulsées de Vakuf,

6 Skender Vakuf et Kotor Varos.

7 Q. Si je vous comprends bien, sur cet axe, il n'y a pas eu intervention de

8 la troupe ou d'éléments de cette 7e Brigade, n'est-ce pas ?

9 R. Non, je n'ai jamais dit quoi que ce soit d'analogue.

10 Q. Juste une petite rectification. Page 58, ligne 1, on devrait dire

11 qu'ils ne sont pas intervenus, alors que le compte rendu d'audience dit que

12 c'est le cas.

13 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Avec l'autorisation de la Chambre,

14 j'aimerais demander au témoin de nous montrer certains endroits et de

15 répondre à des questions ce faisant.

16 Q. Monsieur Siljak, nous avons pu nous rendre compte du fait que vous

17 connaissez très bien cette zone de Travnik. J'aimerais que vous

18 identifiiez, que vous marquiez l'endroit qui s'appelle les Hajdara Njiva.

19 R. Sur cette carte, il y a une cote trigonométrique 681. Dans la

20 population du coin, on appelle cela Hajdara Njiva. C'est à l'entrée est de

21 Travnik que se trouve ce Hajdara Njiva, et c'est un endroit où, lorsque je

22 faisais partie du QG de la Défense territoriale, on avait déjà installé des

23 armes antiaériennes du HVO. C'est resté là jusqu'au conflit du mois de juin

24 1993.

25 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Je demanderais à M. l'Huissier de donner

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1 un feutre à M. Siljak, afin qu'il puisse nous apposer une indication

2 dessus.

3 Q. Je vous demande de placer un petit cercle à cet endroit.

4 R. Voilà, je vais faire en sorte que l'on puisse faire la différence par

5 rapport au reste et suivre plus facilement.

6 Q. En juin 1993, vous avez eu vent d'opérations, oui ou non, dans le

7 secteur de Hajdara Njiva ?

8 R. Non, à l'époque, je ne le savais pas. Je me trouvais ailleurs. Je ne

9 savais pas. On entendait des tirs dans ce secteur, mais, à l'époque, je ne

10 le savais pas.

11 Q. Par la suite, vous avez obtenu des informations ?

12 R. Oui, par la suite, oui. Je ne puis vous dire que ce que j'ai ouï-dire,

13 à savoir que le 1er Bataillon de la 7e Musulmane, à savoir, un détachement

14 de la 7e Musulmane, qui se trouvait à Travnik, a procédé à une attaque sur

15 le site de Hajdarove Njive en même temps qu'il y a eu des combats dans ce

16 secteur.

17 Q. Pouvez-vous nous indiquer à quelle distance de Travnik se trouve

18 Hajdarove Njive ?

19 R. C'est tout de suite à l'entrée de Travnik. Ce qui fait que très souvent

20 depuis Hajdarove Njive, on a ouvert le feu en direction de la Midresje

21 [phon] et d'autres bâtiments de la ville. C'était à portée de fusil; ce

22 n'était pas plus loin que cela. Si cette carte est une carte à l'échelle

23 1:25 000, on voit que cela fait moins d'un kilomètre à vol d'oiseau.

24 Q. S'agissant de la communication en Hajdarove Njive et le village de

25 Maline, est-ce que vous pouvez nous cerner le village de Maline, je vous

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1 prie ?

2 R. [Le témoin s'exécute]

3 Q. Quelle est la distance, le savez-vous ?

4 R. Maintenant, si je compare à vol d'oiseau, ce serait peut-être erroné de

5 le faire parce que cela a l'air d'être très près. Mais entre Hajdara Njiva

6 et Maline, il fallait pour y aller, sortir sur la route en direction de

7 Guca Gora depuis Travnik, puis suivre cette route Travnik-Maline. De

8 Travnik à Guca Gora, il me semble qu'il faut compter sur 9 kilomètres, puis

9 jusqu'à Maline,

10 3 kilomètres encore. Cela fait plus, donc. Cependant, ce qu'il importe de

11 dire, c'est que si vous vous penchez sur les positions prises par le HVO,

12 le HVO a pris des positions qui s'appellent Cveti Ivan Kotol. C'est depuis

13 cet endroit-là qu'ils tiraient sur Travnik.

14 Q. Je vais vous interrompre, s'il vous plaît.

15 J'aimerais que vous marquiez en rouge - c'est la même couleur que

16 celle des lignes du HVO.

17 R. Non. On a marqué avec cette couleur. Le rouge, c'est pour les effectifs

18 serbes. C'est la couleur que nous avons utilisée. Le bleu, c'est pour

19 l'armée.

20 Q. Continuez.

21 R. J'ai dit Kotol. C'est sur cette partie que le HVO avait pris des

22 positions. Ils s'étaient emparés de Hajdara Njiva aussi. A ce moment-là,

23 il était impossible de passer par là. Ils se sont emparés de Grahova Glava,

24 1 006 mètres d'altitude, un point, une côte élevée. Puis, Mala Bukovica.

25 Ensuite, puis loin, Radonjici. Le col suivant qui passe par Guca Gora et

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1 qui relie cette région avec Pokrajcici. Voilà ce col. Ce n'est qu'après que

2 vient la localité de Maline. L'unité qui s'est attaquée, ou plutôt les

3 unités qui se trouvaient à Travnik, suivant nos estimations de l'époque,

4 faisaient en sorte qu'il était impossible de compter sur les unités de ce

5 côté-là. On ne pouvait compter que sur l'aide d'unités venant d'ailleurs.

6 Q. Si je vous ai bien compris, ils ne pouvaient atteindre Maline du tout.

7 R. Ni en théorie, ni en pratique.

8 Q. Pour ce qui est de cette voie de communication entre Hajdara Njiva, 9

9 kilomètres, et 3 kilomètres en plus, cela vous ferait un total de 12

10 kilomètres ?

11 R. Oui, je ne peux pas l'affirmer. C'est une estimation seulement. Je

12 dirais à vue de nez, 12 kilomètres.

13 Q. Autre question, Monsieur Siljak. Quand vous avez parlé de Miletici,

14 vous avez parlé de l'information sur Miletici que M. Ribo vous aurait

15 communiquée.

16 R. Oui.

17 Q. Est-ce qu'il vous aurait mentionné la participation de quelque unité

18 que ce soit de l'ABiH ?

19 R. Ni Ribo, ni qui que ce soit d'autre au niveau du commandement,

20 lorsqu'on s'est entretenu, ne m'ont dit cela. Ils n'ont parlé que de

21 Moudjahiddines; ils n'ont pas parlé d'autres unités.

22 Q. Lui ou quiconque d'autre vous aurait-il parlé de la présence de membres

23 de la 7e Brigade ?

24 R. Non.

25 Q. Merci beaucoup.

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1 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous n'avons plus

2 de questions pour ce témoin.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons faire la pause. Je demande à

4 l'Accusation il faudra combien de temps, étant précisé que nous allons

5 reprendre vers une heure moins cinq et on aura 45 minutes. Madame Benjamin.

6 Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Monsieur le Président, hier, je vous

7 ai dit qu'il nous faudrait au moins une heure, si ce n'est pas une heure et

8 demie. Je pense qu'il nous faudra maintenant plutôt une heure et demie à en

9 juger par les interrogatoires principaux. Je pense que nous pourrons

10 commencer, mais nous ne pourrons pas terminer le contre-interrogatoire.

11 C'est certain.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Malheureusement pour vous, vous avez compris, il va

13 falloir revenir mardi après-midi.

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'entends pas de traduction. Je ne sais pas

15 du tout ce que vous m'avez dit.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous dis que l'Accusation vient de nous dire

17 qu'il lui faudra une heure et demie. Il y a un problème.

18 Est-ce que vous entendez ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Plus fort, plus fort. Augmentez le volume,

20 s'il vous plaît.

21 J'aimerais que l'on augmente encore un peu le volume si c'est possible.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce vous entendez ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Là, j'entends.

24 M. LE JUGE ANTONETTI : L'Accusation a besoin d'une heure et demie pour vous

25 contre-interroger, étant précisé que les Juges auront aussi des questions à

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1 vous poser. Suite aux questions de l'Accusation, il y a tout lieu de penser

2 que la Défense voudra à nouveau, comme elle en a l'habitude, reprendre la

3 parole. Ce qui fait que malheureusement pour vous, vous allez être obligé

4 de revenir mardi après-midi. Est-ce que cela pose un gros problème pour

5 vous ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela ne pose aucun problème. Je resterai

7 autant de temps qu'il le faudra pour vous raconter tout ce que je sais.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons interrompre l'audience. Nous allons la

9 reprendre aux environs d'une heure moins cinq.

10 --- L'audience est suspendue à 12 heures 24.

11 --- L'audience est reprise à 13 heures 02.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais donner la parole à Mme Benjamin pour le

13 début du contre-interrogatoire. A 2 heures moins 20, je donnerai la parole

14 à M. le Greffier pour les rectifications.

15 Madame Benjamin, vous avez la parole.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais demander

17 qu'on augmente le volume dans mes écouteurs. J'ai eu beaucoup de mal à

18 entendre. Dès le début, je vous ai dit que j'avais des problèmes d'ouïes.

19 J'aimerais que l'on augmente le volume.

20 M. LE JUGE ANTONETTI : Si les interprètes pouvaient aussi dans sa langue

21 parler plus fort, cela rendrait service également au témoin.

22 Madame Benjamin.

23 Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le

24 Président.

25 Contre-interrogatoire par Mme Henry-Benjamin :

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1 Q. [interprétation] Bon après-midi, Monsieur Siljak. Je m'appelle Madame

2 Benjamin. Je suis l'un des substituts du bureau du Procureur en l'espèce.

3 Comme vient de vous l'indiquer, Monsieur le Président, j'ai quelques

4 questions à vous poser. Si à un moment donné je parle trop vite et si vous

5 ne comprenez pas, n'hésitez pas à m'interrompre.

6 Vous avez dit à la Chambre de première instance, que vous étiez né à

7 Travnik. Vous nous avez fait visiter toute la zone de Travnik, y compris

8 votre zone de responsabilité. Dites-moi, s'il vous plaît, avant le conflit

9 et après le conflit, vous a-t-il été possible de voir s'il y avait d'autres

10 personnes dans la zone de Travnik, autres que celles que vous aviez coutume

11 de voir ?

12 R. Si j'ai bien compris, je voudrais procéder à une petite rectification à

13 la présentation de ce qui a constitué mon témoignage jusqu'à présent, et de

14 quoi il s'agit. La zone de responsabilité qui était la nôtre était dans le

15 secteur face à l'agresseur serbo-monténégrin. Il y a deux limites ou deux

16 secteurs limites, et non pas le territoire en profondeur. Maintenant dans

17 mon témoignage, je vous ai parlé du territoire en profondeur à partir

18 desquels nous avions pris des effectifs pour compléter la 306e Brigade,

19 mais je tiens à préciser qu'il y avait des troupes d'autres unités, non pas

20 seulement de la nôtre.

21 Maintenant pour ce qui est du deuxième segment de votre question, je

22 crois avoir précisé, dans le courant de mon témoignage, le fait que étant

23 chargé du domaine opérationnel, j'étais surtout sur le terrain. C'est vers

24 la fin de l'été ou au début de l'automne que j'ai remarqué à Travnik,

25 l'arrivée de ressortissants étrangers. Il y avait des journalistes, des

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1 agents humanitaires, j'ai précisé qu'il y en avait de toutes sortes. J'ai

2 indiqué leur présence à Travnik.

3 Q. Merci, Monsieur. Dans votre zone de responsabilité, pourriez-vous

4 dire aux Juges quelle était la composante ethnique dans la population qui

5 était la composante la plus importante ?

6 R. Une fois de plus, je précise que ce n'était pas notre zone de

7 responsabilité. Le territoire de la vallée de la Bila n'a pas constitué une

8 partie de la zone de responsabilité de la 306e Brigade, c'était un

9 territoire à partir duquel l'on a complété les rangs de la 306e Brigade. Je

10 ne sais pas si je suis suffisamment clair.

11 Q. Non. Vous nous avez précisé la zone dans laquelle vous opériez, là où

12 opérait la 306e. C'est de cela que je parle. Je vous demandais ceci :

13 pouvez-vous me dire quelle était l'instance ethnique, la composante

14 ethnique qui était majoritaire dans la zone ?

15 R. Dans la partie nord-est de cette région, il y avait une majorité

16 bosnienne dans la population. Dans la partie centrale, c'était plutôt

17 mixte. Alors que Nova Bila, Stara Bila et ce secteur là étaient

18 majoritairement, ou en totalité croates. Si l'on prend en considération le

19 tout, il se peut que la population bosnienne ait été quelque peu

20 majoritaire par rapport à la population croate sur le territoire entier.

21 Q. Je vous remercie. Vos fonctions, vos obligations, vous en avez parlé en

22 réponse à une question posée par mon estimée consoeur. Vous avez dit qu'en

23 tant que chef d'état-major, votre tâche principale était la défense de la

24 ligne vous séparant des forces de l'agresseur serbe, est-ce que exact ?

25 R. La première des tâches confiée à la 306e, la première dans missions qui

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1 lui a été confiée était de défendre la ligne dans le secteur imparti face à

2 l'agresseur serbo-monténégrin, et à préparer des opérations visant à

3 libérer les territoires provisoirement occupés.

4 Q. Merci. Pourriez-vous apporter une précision : dans ces circonstances,

5 vous parlez de "l'agresseur serbo-monténégrin," de qui parlez-vous

6 précisément ?

7 R. Dans l'ABiH, l'appellation habituelle s'agissant des forces de

8 l'agresseur, c'est de dire que ce sont les forces serbes qui s'étaient

9 rangées du côté du SDS, le Parti démocratique serbe, et le reste de la JNA

10 de ceux qui étaient auparavant dans la JNA, et ceux qui étaient venus du

11 Monténégro. Nous estimons que ces forces serbo-monténégrines ont effectué,

12 ou ont lancé une agression contre la Bosnie-Herzégovine. C'est le

13 qualificatif habituel utilisé dans les unités dont je faisais partie.

14 Q. Vous étiez chef d'état-major de la 306e Brigade, en tant que tel, est-

15 ce que vous pensiez que vous étiez responsable non seulement de la défense

16 de la ligne, mais de la défense de tout et de tous ceux qui se trouvaient

17 dans votre zone de responsabilité. Que ce soit des civils, des militaires.

18 Est-ce qu'à vos yeux, c'était là la mission qui vous était confiée ?

19 R. A Travnik, il y avait un poste de sécurité publique. Il y avait une

20 police qui assumait les responsabilités pour ce qui est du contrôle et de

21 la protection du territoire. En d'autres termes, la 306e Brigade n'avait

22 pas à répondre, ou à assumer de responsabilité vis-à-vis du territoire à

23 partir duquel elle avait complété ses rangs.

24 Q. Cela me pose problème à ce propos, je crois qu'il me faut des

25 éclaircissements. Je vais essayer d'illustrer mon propos par un exemple. Si

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1 vous empruntiez la route principale à Travnik, et si vous voyiez dans cette

2 grande rue un civil qui était attaqué, est-ce que vous pensiez que vous

3 aviez pour responsabilité de répondre à cette attaque ?

4 R. Si en ma qualité d'individu, je voyais quelqu'un s'attaquer à un civil,

5 en ma qualité d'homme civilisé, je me sentirais tenu de l'aider. Mais en ma

6 qualité de chef d'état-major de la 306e, je n'avais pas l'obligation de le

7 faire. Tout ce que je pourrais faire, ce serait de le déclarer au poste de

8 police le plus proche, ou au poste de sécurité publique le plus proche, et

9 leur faire part de l'événement en question.

10 Q. Etes-vous, dès lors, en train de nous dire, corrigez-moi si je me

11 trompe, êtes-vous en train de nous dire que votre responsabilité était

12 uniquement de défendre la ligne, et que si vous constatiez la moindre

13 activité irrégulière, que vous alliez fermer les yeux, est-ce que c'était

14 là les instructions qui vous avaient été données ?

15 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est l'objection à une question sensée ?

17 Mme RESIDOVIC : [interprétation] A plusieurs reprises, le témoin a répondu

18 pour dire quelles étaient les responsabilités du commandant de la brigade

19 et de l'état-major de cette brigade. Après cette question réitérée, je

20 crois qu'il avait apporté une réponse suffisamment claire. Je crois que la

21 question est posée à trois reprises, et qu'il convient de ne pas jeter le

22 trouble dans l'esprit du témoin, notamment pas de cette façon.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Objection rejetée. Continuez vos questions.

24 Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

25 Q. Vous voyez, j'éprouve une certaine difficulté, et pour résoudre cette

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1 difficulté, il nous faut savoir exactement quel était le rôle de l'ABiH, et

2 le vôtre en particulier ? Vous nous avez indiqué en réponse à une question

3 posée par mon estimée consoeur, vous avez dit que, à un moment donné, vous

4 aviez vu qu'il y avait eu un afflux d'étrangers. C'est bien cela ?

5 R. J'ai dit que j'avais remarqué ces gens. Pour ce qui est du nombre, je

6 n'en ai pas parlé.

7 Q. D'accord. J'ai d'abord essayé d'obtenir des éclaircissements, car ma

8 question était la suivante. En tant que membre de l'armée, en effet au

9 cours de l'interrogatoire principal, vous avez dit que ces étrangers

10 commettaient des délits, échappaient à tout contrôle et n'étaient sous le

11 commandement de personne, ce sont là les termes que vous avez utilisés dans

12 le cadre de l'interrogatoire principal. Moi, je vous pose la question

13 suivante : si ce genre de choses se passaient effectivement, comme vous

14 l'affirmez, alors que vous vous étiez membre de l'armée, ne pensez-vous pas

15 que vous aviez pour obligation de vous occuper de celui qui faisait ce

16 genre de choses, de tout ce qui se passait dans votre zone ?

17 R. En répondant à ce type de question, j'ai précisé que nous avions traité

18 de cette question jusqu'au moment où le chef chargé de la sécurité, le

19 responsable chargé de la sécurité, nous a fait savoir que cela avait été

20 l'œuvre de Moudjahiddines qui ne faisaient pas partie de la 306e Brigade.

21 En d'autres termes, notre responsabilité à nous consistait à diligenter des

22 enquêtes pour ce que des membres de notre brigade à nous auraient fait.

23 Mais les Moudjahiddines, pour sûr, à aucun moment n'ont été membres de la

24 306e Brigade, du moins pendant que je m'y trouvais et autant que je sache,

25 plus tard non plus.

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1 Q. M. Siljak, excusez-moi mais ma difficulté perdure, d'où le besoin de

2 demander des éclaircissements. J'ai peine à comprendre. Dites-moi lorsque

3 vous y réfléchissez, j'ai peine à comprendre ce qui se passait. Disons

4 avoir un conflit. Vous, vous êtes l'armée, vous faites des patrouilles dans

5 la zone, vous êtes là pour vous occuper des citoyens, des habitants de

6 votre zone de responsabilité. Et voilà une bande de délinquants qui

7 chamboulent la vie de toute une ville, qui terrorisent tous ses habitants,

8 est-ce que vous dites que l'armée vous avait donné des instructions pour

9 dire de fermer les yeux et de ne vous occuper que de la ligne de front et

10 d'ignorer le reste ? C'est bien cela ?

11 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je m'excuse. Dans

12 la question posée par ma consoeur, il y a une affirmation, à savoir que le

13 témoin aurait dit que sa responsabilité consistait à veiller à la

14 protection de la population. Or, le témoin n'a jamais rien dit de la sorte.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Benjamin.

16 Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Sauf le respect je que vous dois, je

17 n'ai pas dit que c'était effectivement le cas. Je lui ai soumis cette

18 hypothèse, je lui dis, est-ce qu'en membre de l'armée, est-ce qu'il ne

19 pensait pas qu'il avait cette obligation ? Q. Pourriez-vous répondre,

20 Monsieur le Témoin ?

21 R. Sur le territoire de la municipalité de Travnik de tout temps, durant

22 la situation de guerre, je dirais qu'avant la guerre et pendant la

23 situation de guerre, il y avait des autorités politiques civiles. Il y

24 avait une présidence de Guerre de la municipalité de Travnik qui a exercé

25 le rôle de l'assemblée municipale. Pour ce qui concerne le contrôle du

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1 territoire, la protection de la population, il y avait un poste de sécurité

2 publique à Travnik avec des postes de police à Turbe, deux postes de police

3 à Travnik, un poste de police à Mehurici. Leurs tâches à eux consistaient à

4 exercer un contrôle du territoire et exercer une protection vis-à-vis de la

5 population.

6 La mission de l'ABiH et la mission de la 306e, leur mission

7 principale était de se défendre de l'ennemi, c'est ce que j'ai dit, et

8 exercer un contrôle et veiller sur ce que faisait les membres de ses unités

9 à elles.

10 Q. Lorsque vous vous occupiez du segment de Guca Gora, de ce volet-là,

11 vous avez dit qu'il vous est arrivé de demander l'assistance de la police

12 militaire. Est-ce que j'ai bien compris ?

13 R. Je n'ai rien dit de tel dans ma déposition.

14 Q. Est-ce qu'il vous est arrivé de devoir demander l'assistance de la

15 police militaire ?

16 R. Non.

17 Q. La 306e Brigade n'a jamais travaillé main dans la main avec la police

18 militaire de quelque façon que ce soit ?

19 R. Peut-être n'ai-je pas bien compris votre question. La 306e Brigade,

20 dans ses rangs, avait un peloton de police militaire.

21 Q. Oui, et il vous a fallu demander l'assistance de ces hommes de la

22 police militaire, n'est-ce pas ?

23 R. Le supérieur, l'officier compétent pour ce qui est du recours à la

24 police militaire au niveau du commandement de la brigade, c'était le

25 responsable chargé de la sécurité, à savoir, l'adjoint du commandant chargé

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1 de la sécurité, non pas l'adjoint du chef d'état-major. Donc, le chef

2 d'état-major n'avait rien à voir avec ce personnel-là au sein de la

3 brigade.

4 Q. Cela, je le comprends mais je vous demande s'il y a eu des cas où,

5 d'après vous, le chef d'état-major aurait demandé l'utilisation de la

6 section de police militaire. Il y a bien des cas, des moments où cela s'est

7 présenté, n'est-ce pas ?

8 R. Je ne sais, il se peut que vous ayez mal compris ce que j'ai déclaré

9 jusqu'à présent. J'ai participé à des réunions où il a été débattu de cela,

10 j'ai des information concernant l'utilisation, le recours à la police

11 militaire, mais pour ce qui me concerne personnellement, en ma qualité de

12 chef de l'état-major, je n'ai pas demandé de recours à la police militaire.

13 Q. Il faut peut-être que j'explique de qui je parle quand je dis vous. Je

14 ne parle pas de vous en personne, je parle, quand je dis vous, de la 306e

15 Brigade. Il y a bien des moments où cette section de la police militaire de

16 la 306e a été appelée à la rescousse, ou pour porter assistance ?

17 R. Maintenant, nous nous entendons mieux. J'ai cru comprendre que vous

18 vous adressiez à moi en ma qualité de chef d'état-major. Non seulement

19 parfois la 306e avait fait appel à la police militaire, mais je dirais

20 qu'elle a souvent fait appel à sa police militaire.

21 Q. Nous arrivons précisément à cette idée-là, vous les avez utilisés à

22 Guca Gora lorsqu'il y a eu incendies volontaires et pillages ?

23 R. A Guca Gora, nous avons fait appel à eux lorsqu'il s'agissait de

24 sécuriser le monastère de Guca Gora. On s'est servi d'eux aussi parce que

25 cela se trouvait à proximité immédiate du poste de commandement. Il

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1 s'agissait de sécuriser le poste de commandement. La police militaire est

2 destinée à la sécurisation du poste de commandement. Elle doit exercer le

3 contrôle à l'égard de ce que faisaient les membres de la 306e et le

4 personnel, la troupe. Dans ce cas-là, il s'agissait de sécuriser ce

5 monastère de Guca Gora. Aux fins de protéger ce monastère, nous avons fait

6 installer une partie de la police militaire là-bas.

7 Q. Rétrospectivement, pensez-vous qu'il eut été possible que ces même

8 hommes de la patrouille de la police militaire auraient pu être utilisés

9 dans d'autres cas pour mieux maîtriser ces éléments échappant à tout

10 contrôle, qui se livraient à toutes sortes de choses dans les rues ? Est-ce

11 cela aurait été possible de le faire ?

12 R. Tout d'abord, à l'époque -- je m'efforçais, pour cette époque, de vous

13 parler de la complexité de la situation. Le peloton de la police militaire

14 était engagé au poste de commandement avancé de le 306e Brigade face à

15 l'agresseur serbo-monténégrin pour sécuriser ce poste de commandement. Une

16 partie de la police a sécurisé le monastère, une partie y a sécurisé le

17 poste de commandement. Une autre partie de cette police, vu le manque de

18 personnel ou de troupes, avait pris part au combat.

19 Mis à part ce fait, la police militaire n'a pas ingérence pour ce qui

20 concerne les structures civiles, parce que si la police militaire venait à

21 patrouiller, elle devait patrouiller et contrôler seulement ce que

22 faisaient les membres de la 306e Brigade.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : A ce stade, j'ai une question à vous poser. Je vais

24 demander M. l'Huissier de vous présenter ce document qui a été produit par

25 la Défense. C'est le numéro 704. Présentez le document à l'intéressé. C'est

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1 la Défense qui a produit ce document.

2 Lisez ce document. C'est un ordre du commandant du 3e Corps

3 concernant la question des prisonniers civils, des pillages, des

4 destructions. Vous notez qu'au paragraphe 1, il est demandé -- lisez, dans

5 votre langue, le paragraphe numéro 1.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] "Toutes les unités de l'ABiH, dans la zone de

7 responsabilité du 3e Corps d'armée, interdire strictement d'arrêter les

8 civils non armés. Le pillage et le fait d'incendier des bâtiments civils,

9 les commandants, à tous les niveaux, doivent prendre toutes les mesures

10 possibles afin d'empêcher les actes illicites. Si ceci n'est pas possible,

11 ils vont faire l'état des lieux, identifier les auteurs et prendre des

12 mesures afin que les sanctions soient imposées contre les auteurs

13 conformément à la loi."

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Au paragraphe 2 qui suit, que dit-il, le paragraphe

15 2 ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] "S'il y a pillage ou si l'on incendie ou

17 attaque des civils non armés et que les commandants supérieurs ne prennent

18 pas de mesures appropriées, dans ce cas-là, il faut sanctionner les auteurs

19 de crimes par le biais des polices militaires et des commandants de

20 brigades. Les commandants d'unités vont donner des ordres interdisant ce

21 genre d'actes illicites, et --

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Cet ordre, qui date du 3 février 1993, est-ce que la

23 306e Brigade en a eu connaissance ? Est-ce que vous avez eu connaissance de

24 cet ordre ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque j'ai parlé de cet ordre, j'ai dit que

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1 nous l'avons reçu.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous l'avez reçu, quand on lit les paragraphes

3 1 et 2, est-ce qu'on n'en tire pas la conclusion que, bien entendu, il est

4 interdit à quiconque de faire des civils des prisonniers, de porter

5 atteinte à la propriété privée ou de la détruire ?

6 Le paragraphe 2 semble indiquer que si jamais une autorité militaire

7 ou civile fait défaut, il incombe à ceux qui sont sur place, de prendre des

8 mesures nécessaires. A ce moment-là, cela recoupe la question qui vous a

9 été posée tout à l'heure. Quelle interprétation vous faites de l'ordre

10 formel que vous avez eu ?

11 Est-ce que si on voit des individus piller ou commettre quelque infraction,

12 est-ce que d'après cet ordre il n'incombait pas, à ce moment-là, à

13 l'autorité civile ou militaire d'agir ? C'est ce que dit l'ordre. Qu'est-ce

14 que vous en tirez comme conclusion ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] En tant que soldat, lorsqu'on a reçu cet

16 ordre, dans une telle situation, le soldat, d'abord étudie la mission et la

17 comprend. En faisant cela, nous avons conclu que ceci portait sur les

18 membres de l'unité, que nous étions responsables pour les membres de

19 l'unité qui étaient responsables de ces actes. Nous avons rédigé un ordre

20 qui fait partie de ce classeur, et qui a été envoyé à toutes les unités qui

21 faisaient partie de la

22 306e Brigade, mais nous n'étions pas responsables pour les actes commis par

23 des civils. Ceci n'était pas notre compétence, mais la compétence des

24 organes civils, car la police civile et le MUP de la Bosnie-Herzégovine

25 existaient.

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1 M. LE JUGE ANTONETTI : La page 2 semble dire sous la plume du commandant du

2 3e Corps, que si les personnes compétentes n'agissent pas, il incombe aux

3 autres d'agir. C'est cela que dit le deuxième paragraphe. Cet ordre est, en

4 réalité, envoyé à l'autorité militaire, c'est-à-dire, aux commandants de

5 brigade ainsi qu'à l'autorité civile puisque le destinataire est aussi

6 l'autorité civile. C'est en haut à droite. Ce n'est pas dans la lecture que

7 vous faites ? Bon, nous prenons acte de ce que vous nous dites.

8 Monsieur l'Huissier, pouvez-vous récupérer le document, puisque cette

9 pièce, le versement nous en avait été demandé, donc je la récupère.

10 Poursuivez, Madame Benjamin.

11 Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

12 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président --

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais vous donner la parole un peu plus tard.

14 Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation]

15 Q. Monsieur Siljak, j'allais justement vous montrer un document qui va

16 dans le même sens que celui qui vous a été présenté par le Président. Il

17 s'agit de la pièce à conviction de l'Accusation, 158/E. C'est un ordre

18 émanant du commandement. Ce qui m'intéresse, c'est la deuxième ligne où il

19 est écrit : " Pendant et après les opérations de combat dans votre zone de

20 responsabilité, des pillages et des incendies de grande ampleur à

21 l'encontre de la population a eu lieu. De telles actions horrifient

22 l'ensemble du monde et donne lieu à des interprétations erronées concernant

23 notre lutte armée."

24 L'impression que j'ai sur la base de cela, est que les soldats

25 croates ne sont pas les seuls qui ont subi ce genre d'acte illicite, mais

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1 aussi des civils, des soldats. C'est la raison pour laquelle je vous ai

2 posé la question tout à l'heure, car il ne s'agissait pas seulement d'un

3 groupe de personnes qui procédait à la destruction des biens, mais il

4 s'agissait d'un groupe de personnes qui échappaient à tout contrôle et qui

5 détruisaient les biens. Voici ma question : de quelle manière la 306e

6 Brigade a répondu à cela ?

7 R. Je n'ai pas vu ce document. Il s'agit d'un document qui devait être

8 soumis au commandant de la 306e Brigade. S'agissant de l'utilisation de la

9 police militaire, le commandant traitait de ces questions avec le chef

10 chargé de la sécurité ou l'adjoint du chef chargé de la sécurité et avec la

11 police militaire de la 306e Brigade.

12 Q. Je crois bien que vous n'avez pas vu ce document. Je souhaite soulever

13 le point que l'on a pris en considération; la sécurité de la population.

14 C'est sur ce point-là que je souhaitais attirer votre attention. Mais je

15 crois bien que vous ne l'avez pas vu.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est presque l'heure. Il nous faut quelques minutes

17 pour régler des questions de documents.

18 On poursuivra, Monsieur, le contre-interrogatoire, puis la semaine

19 prochaine, les questions des Juges. Puis, il y aura des questions de la

20 Défense. Je vous souhaite de passer un bon séjour ici même, à moins que

21 vous retourniez dans votre pays. D'ici là, vous n'avez pas à avoir de

22 contacts avec personne puisque ayant prêté serment maintenant, vous

23 n'appartenez plus à aucune des parties. Nous nous retrouverons mardi pour

24 l'audience de 14 heures 15.

25 Je vais demander à M. l'Huissier de bien vouloir vous raccompagner.

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1 [Le témoin se retire]

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, pouvez-vous nous faire les

3 rectificatifs des documents qui ont été versés.

4 M. LE GREFFIER : Merci, Monsieur le Président. J'essaierai d'être bref,

5 mais lent.

6 Il y a effectivement deux séries de commentaires. Le premier sur le

7 transcript français. Le numéro DH511, dont la version anglaise a été omise

8 lors de l'audience d'hier, la version anglaise de ce numéro se voit

9 attribuer la référence DH511/E.

10 Le document DH1098, la version anglaise de ce document est erronée, est

11 donc le DH1098/E, et non le DH10983/E.

12 Le DH826 a été admis, et non le DH821, comme indique le transcript.

13 Evidemment, la copie anglaise de ce document suit la logique.

14 Le DH826 se voit attribuer en version anglaise le DH826/E.

15 Le DH782 a été admis, et non le DH582, comme indique le transcript.

16 Sa version anglaise également est affectée par ce changement. Donc, elle se

17 lit DH782/E.

18 Le DH640 dont la version anglaise dont la version anglaise est 640/E,

19 et non DH643E, comme indique le transcript.

20 Enfin, dans ce transcript français, le DH830 a été omis apparemment.

21 Sa version anglaise évidemment est le DH830/E.

22 A présent, le transcript anglais : DH511, la version anglaise ne mentionne

23 pas effectivement le DH511. Donc, le DH511 se voit attribuer la référence

24 DH511/E.

25 Le DH603 est référencié au dossier sous la référence DH603/E, et non

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1 DH603/1.

2 Le DH613 dont la version anglaise est évidemment le DH613/E, et non

3 DH613 sans rien derrière, comme indique le transcript.

4 Le DH826 est versé au dossier, et non le DH821, comme indique le

5 transcript. La version anglaise est évidemment affectée. La version

6 anglaise de DH826 est le DH826/E.

7 Le DH782 est versé au dossier, et non le DH582. La version anglaise

8 du DH782 avec un 7, donc le DH782/E.

9 Le DH1044 est versé au dossier, et non le DH104, comme indique le

10 transcript. La version anglaise est également affectée. Ce document est

11 versé au dossier en version anglaise sous la référence DH1044/E.

12 Le DH830 dont la version anglaise est évidemment DH830/E, et non

13 DH83/E, comme indique le transcript.

14 Enfin, le DH582 est versé au dossier, et non 582 sans le préfixe DH

15 devant. La version anglaise suit la logique. La version anglaise de ce

16 document DH582 est donc DH582/E.

17 J'en ai terminé, Monsieur le Président. Merci.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie, Monsieur le Greffier. Je suppose

19 que la Défense va demander également le versement de toutes les pièces.

20 Monsieur le Greffier, vous aurez tout le week-end pour travailler sur la

21 numérotation de ces pièces. Mardi, nous aurons le plaisir de vous entendre

22 nous énumérer les bons chiffres, mais en prenant votre temps. Car on vient

23 de se rendre compte que c'est la rapidité qui a entraîné les erreurs.

24 Maître Residovic, vous avez la parole.

25 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, compte tenu du

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1 règlement de ce Tribunal et de la pratique que nous comprenons bien, à

2 savoir qu'aucune des parties ne peut contacter le témoin jusqu'à nouvelle

3 comparution devant la Chambre de première instance, je souhaite néanmoins

4 attirer votre attention sur la pratique de ce Tribunal, permettant d'avoir

5 l'aide du Greffe et de l'Unité chargée des Témoins et des Victimes afin

6 d'essayer de faire en sorte que le témoin fasse un certain effort pour que

7 l'on ait un fondement pour le fondement pour le versement au dossier d'un

8 certain nombre de documents. La Défense s'est entretenue avec l'Accusation.

9 Nous prions la Chambre de première instance de bien vouloir nous permettre

10 soit aujourd'hui, dans l'après-midi ou à un autre moment, avec la présence

11 des représentants du Greffe, de l'Unité des Témoins et des Victimes, et de

12 l'Accusation, que le témoin vienne dans le prétoire pour que l'on mettre un

13 transparent sur la carte pour que le témoin puisse y inscrire tout ce dont

14 il a parlé aujourd'hui. Puisque ce qui figure déjà sur la carte ne veut pas

15 être accepté par la Défense en tant que pièce à conviction puisque ceci a

16 déjà été fait dans l'affaire Galic. Puisque l'Accusation est d'accord avec

17 cette proposition, nous nous adressons à la Chambre pour permettre au

18 témoin de faire une image qui reflèterait ses propos devant ce Tribunal.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Si j'ai bien compris, le témoin va revenir cet

20 après-midi, et à partir d'un film transparent, va repositionner ce qu'il

21 avait indiqué, et ce, en présence du Greffier et de l'Accusation.

22 Monsieur Mundis, vous avez donné votre accord à cette procédure ?

23 M. MUNDIS : [interprétation] Effectivement, Monsieur le Président.

24 Cependant, je n'avais pas compris que nous devions le faire cet après-midi,

25 mais nous pouvons certainement voir. Si la Chambre est d'accord, nous

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1 pourrons discuter avec la Défense, l'Unité des Témoins et des Victimes et

2 le Greffe, pour voir à quel moment nous pouvons simplement assister à cela

3 afin de pouvoir observer le témoin.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : Du moment que les deux parties sont d'accord sur la

5 procédure. Encore faut-il que le témoin soit d'accord parce qu'il a peut-

6 être autre chose à faire. Il va peut-être faire du vélo ou je ne sais pas.

7 Il faut quand même lui dire qu'il va être obligé de travailler encore cet

8 après-midi.

9 En ce qui concerne la Chambre, il n'y a pas d'objections à ce que

10 l'intéressé vienne revoir cette carte en votre présence tous les trois. De

11 notre point de vue, il n'y a pas de problèmes.

12 L'interdiction, c'est l'hypothèse où une partie, dans le dos de la Chambre,

13 viendrait discuter avec le témoin pour modifier. Ce n'est pas le cas,

14 puisque-là, ce sera simplement un travail de précision et d'écriture. Pas

15 de problèmes.

16 Je vous remercie, et je vous invite à revenir après ce week-end un peu

17 prolongé à revenir pour mardi, 14 heures 15.

18 --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le mardi 26 octobre

19 2004, à 14 heures 15.

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