Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 4 novembre 2004

  2   [Audience publique]

  3   --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

  4   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, pouvez-vous appeler le

  6   numéro de l'affaire, s'il vous plaît.

  7   M. LE GREFFIER : Oui, Monsieur le Président.

  8   L'affaire IT-01-47-T. Le Procureur contre Enver Hadzihasanovic et

  9   Amir Kubura.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. Je me tourne vers

 11   l'Accusation pour lui demander de se présenter.

 12   M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Monsieur le

 13   Président, Madame, Monsieur les Juges, Mesdames, Messieurs. Tecla Henry-

 14   Banjamin, Daryl Mundis et Andres Vatter, notre commis aux audiences pour le

 15   bureau du Procureur.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, M. Mundis. Je me tourne vers les avocats qui

 17   sont cette fois-ci au complet.

 18   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

 19   Monsieur les Juges. Le général Enver Hadzihasanovic est représenté par

 20   Edina Residovic, Stéphane Bourgon, mon co-conseil, et Muriel Cauvin, notre

 21   conseillère juridique.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Les autres avocats.

 23   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Rodney

 24   Dixon, Fahrudin Ibrisimovic et Mulalic Nermin notre conseil juridique,

 25   représentant M. Kubura.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour cette journée d'audience, la Chambre, par mon

  2   intermédiaire salue toutes les personnes, les accusés, l'Accusation, la

  3   Défense ainsi tout le personnel de cette salle d'audience.

  4   Nous avons aujourd'hui l'audition d'un témoin mais avant cela, nous devons

  5   régler la question des documents; un versement nous a été demandé. Il y a

  6   une question résiduelle concernant ces documents. C'est le rapport de

  7   l'expert qui nous a été remis en anglais. Est-ce que la Défense a un

  8   exemplaire en B/C/S ?

  9   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Nous vous

 10   présentons nos excuses. Nous n'avions pas communiqué le rapport en B/C/S,

 11   mais uniquement la traduction qui avait été faite par le Greffe, la

 12   traduction anglaise. Je me suis adressée au témoin pour qu'il reconnaisse

 13   un certain nombre de chapitres, à présent la Défense propose remettre la

 14   version en B/C/S.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : M. Mundis, sur la version en B/C/S,

 16   y a-t-il des observations ?

 17   MR. MUNDIS : Non, Monsieur le Président.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. La Chambre va regarder le document en B/C/S.

 19   Monsieur le Greffier, pouvez-vous nous donner, cette fois-ci, les numéros

 20   définitifs des documents dont le versement a été demandé.

 21   M. LE GREFFIER : Merci, Monsieur le Président. Nous allons commencer par

 22   les premiers documents qui ont été versés à l'audience il y deux jours.

 23   Le premier document sera versé sous la référence DH1601; une version

 24   anglaise de ce document existe; puis est versé sous la référence DH1601/E.

 25   Le DH350 est versé; et sa référence anglaise sous la cote

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  1   DH350/E.

  2   Le DH351 est versé; avec une référence anglaise DH351/E.

  3   DH362; avec une référence anglaise DH362/E.

  4   DH354; avec une version anglaise DH354/E.

  5   DH356; version anglaise DH356/E.

  6   DH353; version anglaise DH353/E.

  7   DH1598; version anglaise existe, DH1598/E.

  8   DH1590; version anglaise DH1590/E.

  9   DH378; version anglaise DH378/E.

 10   DH385 existe; seule une version anglaise est soumise, il est référencé

 11   DH385.

 12   DH510; avec une version anglaise DH510/E.

 13   DH1599; version anglaise DH1599/E.

 14   DH1398; version anglaise DH1398/E.

 15   DH1004; versé au dossier avec une version anglaise DH1004/E.

 16   DH1623; avec une version anglaise DH1623/E.

 17   DH1624; version anglaise DH1624/E.

 18   DH1625; version anglaise DH1625/E.

 19   DH1626; version anglaise DH1626/E.

 20   Enfin, pour clore cette annexe, DH1627; avec une version anglaise

 21   DH1627/E.

 22   Concernant l'annexe suivante, le DH357 est versé au dossier; avec une

 23   version anglaise DH357/E.

 24   DH358; avec une version anglaise DH358/E

 25   DH359; version anglaise DH359/E.

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  1   DH363; version anglaise DH363/E.

  2   DH1589; version anglaise DH1589/E.

  3   Nous passons maintenant au versement au dossier du rapport de l'expert, qui

  4   sera référencé DH344 pour sa version en B/C/S; et la version anglaise aura

  5   la cote DH344/E.

  6   Enfin, il y avait une série de cartes, 17 au total, qui seront toutes

  7   référencées sur la référence DH345, avec le pendant pour chaque carte sous

  8   l'onglet 1 jusqu'à l'onglet 17.

  9   Je vous remercie, Monsieur le Président.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, il me semble, à lecture du

 11   transcript, qu'il manque la pièce 0350. Sur le transcript, je ne le vois

 12   pas.

 13   M. LE GREFFIER : Merci, Monsieur le Président. Si je l'ai omis je m'en

 14   excuse. Le DH350 est effectivement admis; avec une référence anglaise,

 15   DH350/E.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Si les uns et les autres vous trouverez des

 17   omissions, il sera toujours temps de faire des rectificatifs.

 18   Je me tourne vers la Défense. Nous avons trois témoins, soit les deux

 19   jours à venir. J'invite la Défense à faire en sorte que nous puissions

 20   auditionner ces trois témoins sur les deux jours, afin d'éviter que le

 21   troisième témoin reste le weekend en continuation.

 22   Je vous donne la parole.

 23   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, puisque nous avons

 24   eu une pause d'une journée, dû à notre impossibilité de faire venir le

 25   témoin pour les raisons que je vous ai déjà présentées, la Défense,

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  1   lorsqu'elle s'est préparée à l'interrogatoire de ce témoin, a essayé de se

  2   polariser sur les choses les plus importantes. Même si l'on a prévu deux

  3   heures pour la déposition du premier témoin, nous tâcherons de le faire en

  4   moins d'une heure et demie, afin de permettre à la Chambre de première

  5   instance d'entendre trois témoins cette semaine.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie. Nous allons tout de suite

  7   introduire le témoin.

  8   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. Je vais d'abord vérifier que vous

 10   entendez bien dans les écouteurs la traduction de mes propos. Si c'est le

 11   cas, vous me dites : je vous entends et je vous comprends.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous entends.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, vous avez été cité à comparaître pour la

 14   Défense pour être entendu en qualité de témoin. Avant de vous faire prêter

 15   serment, je me dois de vous identifier. Je vous demande pour cela de me

 16   donner votre nom, prénom, date de naissance et lieu de naissance.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis Sejad Jusic. Né le 16 avril 1968 à

 18   Jezerci, municipalité de Travnik.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie. Aujourd'hui, est-ce que vous avez

 20   une fonction, un emploi ? Que faites-vous aujourd'hui, sur le plan

 21   professionnel ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis né policier au poste de police de

 23   Travnik.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : En 1992, 1993, quelles étaient à l'époque vos

 25   fonctions ou qualités ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] À l'époque, j'étais policier.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous déjà témoigné devant une juridiction

  3   internationale, ou nationale, sur les choses qui se sont déroulées dans

  4   votre pays en 1992, 1993, ou c'est la première fois que vous témoignez ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Maintenant, c'est la première fois.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous été entendu par des enquêteurs du bureau

  7   du Procureur, ou vous n'avez jamais été entendu comme témoin dans le cadre

  8   d'une enquête ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que personne n'a eu d'entretiens avec

 10   moi de la part du bureau du Procureur.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Je vous demande de bien vouloir lire la

 12   prestation de serment.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 14   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 15   LE TÉMOIN: SEJAD JUSIC [Assermenté]

 16   [Le témoin répond par l'interprète]

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Vous pouvez vous asseoir. Monsieur, avant de

 18   donner la parole aux avocats qui vont vous poser des questions, je vais

 19   vous donner quelques éléments d'information, ce que je fais à chaque fois

 20   lorsqu'un témoin vient déposer, afin d'une part de mettre le témoin à

 21   l'aise et, deuxièmement, de l'informer du déroulement de la journée, qui

 22   est prévue pour son audition.

 23   Vous venez de prêter serment, de dire toute la vérité, rien que la vérité.

 24   Vous savez que ce type de serment entraîne l'obligation de ne dire que la

 25   vérité, de ne pas mentir. Etant policier, vous savez vous-même qu'un faux

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  1   témoignage est susceptible de constituer une infraction.

  2   Un deuxième élément important de notre procédure, c'est que lorsque vous

  3   répondez à des questions, sachez que tout ce que vous dites ne pourra être

  4   un jour utiliser contre vous. Vous pouvez librement répondre aux questions.

  5   Ensuite, je dois vous indiquer que vous allez devoir répondre à des

  6   questions qui vont vous être posées tant par les Défenseurs, qui ont prévu,

  7   ils me l'ont indiqué tout à l'heure une heure et demie de questions. Vous

  8   aurez ensuite à répondre aux questions qui vont vous être posées par les

  9   représentants de l'Accusation, qui sont situés à votre droite, qui

 10   normalement prennent le même temps. Il y a des chances que vous allez

 11   pendant une heure et demie répondre à des questions. Les trois Juges qui

 12   sont devant vous, pourront aussi vous poser des questions à tout moment,

 13   s'ils estiment qu'ils ont besoin de clarification, dans les réponses que

 14   vous avez faites, ou parce qu'ils constatent qu'il y a des lacunes dans

 15   votre déposition. Il est important pour les Juges de connaître ces lacunes

 16   et, à ce moment-là, nous vous poserons des questions. Une fois que nous,

 17   nous vous posons des questions, les parties sont autorisées à vous poser à

 18   nouveau des questions, afin d'apporter des complémentes aux réponses que

 19   vous avez faites aux Juges.

 20   Si la question vous paraît trop compliquée, à ce moment-là, demandez

 21   à celui qui vous la pose de la reformuler. Il faut que la question, qui

 22   vous soit posée, soit pour vous très claire, et que votre réponse, qui va

 23   nous être donnée, soit également claire, car sachez que nous n'avons aucun

 24   élément écrit car nous sommes dans une procédure orale. Etant policier,

 25   vous savez ce que signifie une procédure. Ce qui compte, c'est ce que vous

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  1   allez dire et, le cas échéant, par les documents que la Défense ou

  2   l'Accusation pourront produire, mais, au jour d'aujourd'hui, nous n'avons

  3   aucun élément écrit concernant ce que vous êtes susceptible de dire. Vu

  4   l'importance des réponses que vous allez fournir aux questions posées.

  5   Si vous éprouvez une difficulté quelconque, n'hésitez pas à nous en

  6   faire part. Nous sommes là pour cela, pour résoudre les problèmes. Voilà la

  7   manière générale dont va se dérouler cette audience, qui va prendre un

  8   certain temps et qui peut, en raison des questions multiples posées, être

  9   fatigante pour le témoin, mais rassurez-vous que des périodes de repos sont

 10   prévus. Toutes les une heure et demie, il y a un repos obligatoire d'une

 11   demi-heure pour vous permettre de vous reposer, et également pour des

 12   considérations techniques. Ce n'est pas prévu pour que les Juges se

 13   reposent, mais, évidemment, ils profitent de ces repos techniques.

 14   Sans perdre de temps, je donne la parole aux avocats.

 15   Mme RESIDOVIC : [interprétation]  Merci, Monsieur le Président.

 16   Interrogatoire principal par Mme Residovic : 

 17   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur.

 18   R.  Bonjour.

 19   Q.  En plus des avertissements importants que vous a adressés le Président

 20   de la Chambre de première instance, je vais vous en adresser un

 21   supplémentaire. Nous parlons la même langue, et vous seriez en mesure de

 22   répondre immédiatement à la question que je vous pose; cependant, ma

 23   question doit être interprétée pour que la Chambre de première instance,

 24   ainsi que les collègues présents dans le prétoire, puissent comprendre ce

 25   que je vous demande, et pour qu'ils puissent l'entendre dans la langue du

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  1   Tribunal. Donc je vous demanderais de faire une pause avant de répondre.

  2   M'avez-vous compris ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Monsieur Jusic, où vivez-vous à présent ?

  5   R.  Je vis dans la localité de Jezerci, municipalité de Travnik.

  6   Q.  Où viviez-vous au début de la guerre, en avril 1992 ?

  7   R.  Je vivais au même endroit, dans la localité de Jezerci, municipalité de

  8   Travnik.

  9   Q.  Vous avez dit à la Chambre que vous étiez policier. Pouvez-vous nous

 10   dire quelque chose sur votre scolarité ? Quelles sont les écoles que vous

 11   avez faites, où, à quel moment ?

 12   R.  L'école secondaire, je l'ai faite à Travnik. En 1991, j'ai suivi un

 13   cours pour devenir policier. Je l'ai fait à Sarajevo.

 14   Q.  Quelles ont été vos tâches professionnelles dans le cadre de votre

 15   travail, jusqu'au début de la guerre ?

 16   R.  J'ai commencé à travailler à Donji Vakuf. C'est une ville près de

 17   Travnik. C'est là que j'ai commencé comme policier apprenti. Au début de la

 18   guerre, c'est là que je me trouvais. Je suis passé à Travnik, à ce moment-

 19   là.

 20   Q.  Avant la guerre, avez-vous fait votre service militaire ? Si oui, dans

 21   les rangs de quelle armée, et avez-vous eu un grade ?

 22   R.  J'ai fait mon service militaire au sein de l'armée populaire yougoslave

 23   de l'époque et je n'avais pas de grade.

 24   Q.  S'il vous plaît, dites-moi : puisque vous venez de répondre qu'en 1992

 25   ainsi qu'en 1993, vous étiez policier, où avez-vous exercé ce travail ?

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  1   R.  A mon retour de Donji Vakuf à Travnik, j'y ai travaillé pendant peu de

  2   temps. Par la suite, puisque je ne pouvais pas me rendre au travail, de

  3   Jezerci à Travnik, j'ai été muté au poste de police de Mehurici.

  4   Q.  S'il vous plaît, dites-nous si, en tant que policier au poste de police

  5   de Mehurici, vous faisiez partie de la police civile ou de la police

  6   militaire.

  7   R.  J'étais policier civil. Je faisais partie du MUP.

  8   Q.  Monsieur Jusic, qui était votre supérieur, votre chef ? Ou plutôt,

  9   quelle était la filière hiérarchique ? Comment fonctionnait-elle ou comment

 10   était-elle établie au sein de la police civile ?

 11   R.  Le poste de police de Travnik avait son chef, son responsable

 12   commandant. En fait, le poste de sécurité publique -- excusez-moi, j'ai

 13   fait une petite erreur. Le poste de sécurité publique répondait au centre

 14   de Sécurité publique de Zenica, CSB.

 15   Q.  Vous pouvez, en fait, parler plus rapidement. Il convient simplement de

 16   faire une pause à la fin.

 17   R.  La CSB répondait à Sarajevo. C'était comme cela.

 18   Q.  A un moment quelconque pendant la guerre, l'ABiH, était-elle

 19   responsable de la police civile dans son ensemble ?

 20   R.  Non, seules des parties de la police civile ont été placées sous les

 21   ordres de l'armée, mais pas toute la police.

 22   Q.  Votre poste de police ou plutôt certains membres de votre poste de

 23   police ont-ils, à un moment donné en 1992 ou en 1993, ont-ils été placés

 24   sous les ordres d'Unité de l'ABiH ? Si tel a été le cas, pouvez-vous nous

 25   dire à quel moment.

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  1   R.  En 1993, pendant 40 voire 45 jours, on a été placé sous leurs ordres.

  2   Je ne sais pas exactement quel mois cela s'est passé. Je pense que c'était

  3   en été.

  4   Q.  Après cette période de 40 ou 45 jours à l'été 1993, où sont revenus les

  5   policiers ?

  6   R.  Ils sont revenus à leurs tâches habituelles.

  7   Q.  Quelle a été la tâche de la police civile pendant cette période-là,

  8   voire avant ?

  9   R.  Préserver l'ordre public, empêcher la commission d'actes criminels.

 10   Q.  Dans la structure de la police civile, quel est l'organe qui préparait

 11   des plaintes au pénal à l'intention des instances juridiques compétentes ?

 12   R.  Il y avait la police criminelle judiciaire qui travaillait à Travnik.

 13   Nous, de Mehurici, on les saisissait des informations qu'on avait.

 14   Q.  Concrètement, au poste de police de Mehurici, il comptait combien de

 15   policiers professionnels en 1993 ?

 16   R.  Il n'y avait que moi, en tant que policier professionnel, même si je

 17   n'ai commencé à travailler qu'en 1992.

 18   Q.  Monsieur Jusic, en plus de vous, dans ce poste de police, y avait-il

 19   d'autres policiers ? Etait-ce une police régulière ou était-ce des

 20   policiers de réserve ?

 21   R.  Ils faisaient tous partie de la réserve.

 22   Q.  Il y avait combien d'hommes à peu près dans les rangs de la police de

 23   réserve ?

 24   R.  Il me semble que c'était environ 30. Je ne suis pas sûr.

 25   Q.  Monsieur Jusic, si vous arrivez à vous en souvenir, et ce, de manière

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  1   générale, comment ont été formés ces gens qui faisaient partie des rangs de

  2   la police de réserve ? Avaient-ils eu l'occasion d'acquérir une expérience

  3   quelconque dans les affaires policières ?

  4   R.  Je les connaissais pour la plupart, c'étaient mes voisins, mais ils

  5   n'avaient aucune expérience, et il n'avait suivi aucune formation eu égard

  6   au travail de policier.

  7   Q.  Pour quelle raison, Monsieur Jusic, n'avez-vous pas invité à rejoindre

  8   les rangs de la police les gens qui étaient formés à cela ?

  9   R.  Ils ne m'appartenaient pas de prendre des décisions de ce genre, mais,

 10   à l'époque, il n'y avait pas ce genre d'hommes formés.

 11   Q.  Dans la zone où vous travailliez, Monsieur Jusic, y avait-il des Unités

 12   de l'ABiH ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Ces formations avaient-elles aussi des formations chargées d'affaires

 15   policières ou plutôt avaient-elles la police militaire ? Le savez-vous ?

 16   R.  Il y avait la police militaire dans ces zones-là, la police militaire

 17   de l'armée.

 18   Q.  Pouvez-vous me dire quelque chose au sujet des rapports entre vous et

 19   les membres de la police militaire en 1993 ? Est-ce qu'il y avait des

 20   sujets sur lesquels vous avez essayé de collaborer ?

 21   R.  Nous avons collaboré dans le cadre de plusieurs activités.

 22   Q.  Compte tenu de vos connaissances personnelles et des activités dont

 23   vous vous acquittiez ensemble, est-ce que vous pouvez nous dire si les

 24   policiers militaires de ces Unités de l'ABiH étaient suffisamment formés

 25   sur le plan du travail de police pour s'acquitter de leurs tâches à

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  1   l'époque ?

  2   R.  Je pense que non.

  3   Q.  Monsieur Jusic, quelle était la zone ou la région couverte par votre

  4   poste de police ?

  5   R.  Il s'agissait de la région de Mehurici qui recouvre plusieurs villages.

  6   Q.  A quel point était-il facile de contrôler cette région et, s'il y a eu

  7   des problèmes, dites-nous qu'est-ce qui les a provoqués ?

  8   R.  A l'époque, le poste de police de Mehurici ne disposait pas de

  9   véhicules alors que les villages étaient dispersés. Il fallait emprunter la

 10   route.

 11   Q.  Compte tenu de ces caractéristiques du terrain, est-ce que ceci avait

 12   une influence sur votre capacité de faire votre travail ?

 13   R.  Oui. Ceci a eu un impact sur nous tout comme les conditions générales.

 14   Q.  Je vais vous poser une autre question à laquelle vous connaissez peut-

 15   être la réponse puisque vous êtes policier. Quels sont les organes, les

 16   instances d'Etat qui sont en charge des étrangers ? Quel était le cas

 17   pendant la guerre et avant la guerre aussi ?

 18   R.  Cela a toujours été la police civile.

 19   Q.  A l'époque, quel était l'organe en particulier de la police qui

 20   s'occupait de ce genre de choses ?

 21   R.  Je pense que c'était un organe qui existait au sein du CSB, centre des

 22   services de Sécurité.

 23   Q.  Est-ce que vous, dans votre poste de police, aviez pour tâche

 24   d'enregistrer et surveiller ou soumettre des rapports à vos instances

 25   supérieures concernant toute présence ou déplacement des étrangers dans

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  1   votre région ?

  2   R.  Oui, nous avons remarqué l'arrivée des étrangers. Nous avons écrit et

  3   envoyé des rapports au sujet de cela au poste de police à Travnik.

  4   Q.  Vous avez déjà parlé des personnes qui ont travaillé dans votre poste

  5   de police. Est-ce que vous pouvez nous dire quelque chose au sujet de vos

  6   équipements ? Quelles étaient les armes dans la police civile disposée en

  7   1993 ?

  8   R.  La plupart d'entre nous avaient des fusils. Mais si une personne

  9   souhaitait intégrer la police, elle devait venir avec son propre fusil car

 10   nous n'en n'avions plus.

 11   Q.  Vous venez de dire que toute personne qui souhaitait être recrutée par

 12   la police devait venir avec son propre fusil. Où obtenait-on des fusils ?

 13   R.  Je suppose que les gens les achetaient au marché noir.

 14   Q.  En répondant à la question préalable, vous avez dit que vous avez

 15   remarqué dans votre région un certain nombre d'étrangers et que vous avez

 16   écrit des notes au sujet de cela, que vous avez envoyé à vos supérieurs au

 17   poste de sécurité publique à Travnik. Dites-moi, s'il vous plaît : quand

 18   avez-vous remarqué ces étrangers, et qui étaient-ils ?

 19   R.  Je pense que c'était vers la fin de l'année 1992. Je n'en suis pas sûr.

 20   Mais il s'agissait des personnes originaires des pays arabes d'après leur

 21   aspect physique et d'après leur tenue vestimentaire.

 22   Q.  On vous a dit que c'est à cela qu'ils ressemblaient, que vous avez dit

 23   cela d'après leur aspect physique. Que voulez-vous dire par là ?

 24   R.  Ils portaient des pantalons courts et des tuniques que j'avais vus

 25   seulement à la télévision.

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  1   Q.  Vous avez dit que vous avez terminé votre école secondaire, et

  2   qu'ensuite vous avez suivi un cours pour les policiers.

  3   Dites-nous : avant la guerre, saviez-vous quoi que ce soit au sujet des

  4   Moudjahiddines ?

  5   R.  Non.

  6   Q.  Est-ce qu'à ce moment-là, dans votre entourage, on a parlé de ces

  7   personnes-là, qui ils étaient, où ils étaient ? Est-ce que vous saviez

  8   qu'autour de vous, on parlait des Moudjahiddines, que ce soit à Travnik ou

  9   là où vous viviez vous-même ?

 10   R.  Non.

 11   Q.  Compte tenu du fait qu'avant les élections en 1990, en Bosnie-

 12   Herzégovine, existait un système qui était sévère vis-à-vis de toute

 13   manifestation des aspirations nationalistes, savez-vous, tout d'abord, quel

 14   était le rapport des instances de pouvoir envers toute manifestation et

 15   activité nationaliste ?

 16   R.  Il s'agissait d'un délit. C'était interdit.

 17   Q.  Est-ce que cette attitude a changé quelque peu après les élections en

 18   1990 ? Si oui, dites-nous de quelle manière, si vous le savez.

 19   R.  Oui. Certains partis politiques ont été créés qui jouaient la carte

 20   nationaliste.

 21   Q.  Avez-vous pu remarquer certains excès nationalistes, et est-ce que vous

 22   pouvez nous dire quelque chose de plus en détail, dans votre région,

 23   notamment ?

 24   R.  Je me souviens, par exemple, du Parti radical serbe.

 25   Q.  Monsieur Jusic, vous avez vécu à Jezerci, et vous avez travaillé à

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  1   Mehurici. Vous avez remarqué un certain nombre d'étrangers là-bas. Saviez-

  2   vous pour quelle raison ils venaient dans cette région, ou avez-vous parlé

  3   -- avez-vous réfléchi aux raisons pour lesquelles les étrangers pouvaient

  4   être attirés vers cette région ?

  5   R.  À l'époque, je n'y réfléchissais pas.

  6   Q.  A la fin de 1992, lorsque, comme vous dites, vous avez remarqué leur

  7   présence, saviez-vous où étaient stationnés ces étrangers, où étaient-ils

  8   hébergés ?

  9   R.  Je sais que, pendant un certain temps, ils étaient à l'école primaire

 10   de Mehurici. Par la suite, lorsqu'un détachement de l'ABiH a été créé, je

 11   ne suis pas sûr s'ils sont partis eux-mêmes ensuite, ou s'ils ont été

 12   expulsés, mais de toute façon, ils ne sont plus restés à l'école.

 13   Q.  Monsieur Jusic, savez-vous où ils sont partis ensuite ?

 14   R.  Ils sont allés à la localité de Poljanica, au terrain qui appartenait à

 15   la famille Savic [phon], et c'est là qu'ils ont créé une espèce de camp.

 16   Q.  Vous, en tant que policier, avez-vous pu remarquer si ce camp était

 17   sécurisé, ou si on pouvait avoir libre accès à ce camp ?

 18   R.  Le camp était sécurisé, et pour autant que je le sache, personne ne

 19   pouvait y entrer, sauf ceux qui étaient leurs membres, même pas les

 20   policiers.

 21   Q.  Quelles étaient les données dont vous pouviez disposer au sujet de ces

 22   étrangers ? Saviez-vous quel était leur nombre, d'où ils venaient, et

 23   cetera, ce genre de choses ?

 24   R.  Au début, lorsqu'ils ont commencé à venir, nous avons essayé de

 25   vérifier leurs pièces d'identité. Nous ne connaissions pas la langue, mais

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  1   on essayait de nous faire comprendre. Certains d'entre eux se sont

  2   présentés, mais ils ne nous ont jamais montré de documents. Ils disaient

  3   qu'ils n'en avaient pas. Cela, c'était au début.

  4   Après, la situation était telle qu'un jour on voyait une personne et,

  5   après, on ne l'a revoyait jamais, donc il était très difficile de savoir

  6   quel était leur nombre.

  7   Q.  En tant que policier, avez-vous remarqué que, d'une certaine manière,

  8   ils s'approchaient de la population locale, ou restaient-ils toujours

  9   enfermés dans leur camp ?

 10   R.  D'une certaine manière, ils se rapprochaient de la population locale.

 11   Ils avaient de l'argent. Ils donnaient des colis à certaines familles. Ils

 12   armaient parfois des jeunes hommes. Je suppose qu'ils les faisaient venir

 13   chez eux. Ils épousaient parfois des jeunes filles de la région et ils

 14   créaient ainsi des liens plus stables avec leur famille.

 15   Q.  D'après vous, quelle était leur influence, notamment sur la population

 16   constituée des réfugiés et la population en général ? Est-ce qu'ils étaient

 17   accueillis avec sympathie auprès des gens ? Est-ce que l'on considérait

 18   qu'ils posaient des problèmes ? Pouvez-vous nous dire quelque chose à ce

 19   sujet ?

 20   R.  Il y avait des personnes qui s'opposaient à eux. Il faut savoir aussi

 21   qu'il y avait beaucoup de réfugiés dans cette région, des gens qui

 22   n'avaient pas leur propre foyer. Ils leur venaient en aide. Ils leur

 23   donnaient de la nourriture. Je suppose que la personne qui recevait de

 24   l'aide et de la nourriture éprouvait certainement de la sympathie envers

 25   eux.

Page 11123

  1   Q.  Avez-vous pu remarquer quelles étaient les armes de ces personnes ?

  2   Quelles étaient les armes qu'ils fournissaient à ceux qui avaient rejoint

  3   leurs rangs ?

  4   R.  Ils étaient bien armés. Ils avaient beaucoup de véhicules. Ils armaient

  5   leurs nouvelles recrues. Si mes souvenirs sont bons, ils subvenaient aux

  6   besoins des familles de leurs hommes aussi, et surtout pendant la période

  7   pendant laquelle les besoins étaient réels et grands.

  8   Q.  Compte tenu de votre devoir vis-à-vis de l'ordre public, avez-vous pu

  9   remarquer un certain nombre d'incidents qui auraient été provoqués par ces

 10   étrangers ou par ceux qui avaient rejoint leurs rangs ? Si oui, avez-vous

 11   essayé de mener une enquête au sujet de ce genre d'incidents ?

 12   R.  Il y a eu plusieurs situations de ce genre. Il y avait des restaurants

 13   et des cafés dans notre région qui versaient de l'alcool, et eux, ils

 14   faisaient souvent irruption dans ce genre de café ou restaurant et ils

 15   cassaient tout. S'ils y voyaient une femme ou une jeune fille qui n'était

 16   pas habillée de manière appropriée, selon eux, ceci posait problème

 17   également. Nous avons essayé de résoudre cela, mais ils ne voulaient même

 18   pas discuter avec nous. Nous avons écrit des notes au sujet de cela. Mais

 19   de toute façon, nous ne pouvions pas avoir accès aux personnes

 20   responsables. Ils se retiraient dans leur camp, et nous ne pouvions rien

 21   faire.

 22   Q.  Dans ce genre de situation, pouviez-vous entrer dans le camp pour mener

 23   une enquête au sujet de ce qui s'est réellement passé ?

 24   R.  Non.

 25   Q.  Vous, en tant que policier, pouviez-vous utiliser la force et attaquer

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  1   le camp pour essayer de vous acquitter de vos tâches fondamentales par la

  2   force ?

  3   R.  A l'époque, ceci n'était pas possible. Je pense qu'ils étaient plus

  4   nombreux, eux que nous, et ils étaient armés. A ce moment-là, nous avons eu

  5   tellement de conflits et tellement de problèmes qu'on a essayé de les

  6   éviter à tout prix, car on avait déjà --

  7   Q.  Qu'est-ce que vous aviez déjà ?

  8   R.  Tellement de pertes et tellement de victimes.

  9   Q.  Mis à part le fait que vous n'aviez pas suffisamment de forces --

 10   S'il vous plaît, veuillez répéter la réponse à la question précédente, car

 11   les interprètes de la cabine anglaise n'ont pas entendu la réponse, et

 12   veuillez parler un petit peu plus fort. Je vous ai demandé -- oui, vous

 13   avez dit que vous ne pouviez pas les attaquer, qu'ils étaient mieux armés

 14   que vous, mieux équipés, et à ce moment-là, vous souhaitiez éviter tout

 15   conflit. Vous avez dit quoi d'autre ?

 16   R.  Nous savions qu'un certain nombre de policiers ont été tués au mont

 17   Vlasic et nous avons reçu des instructions d'essayer d'éviter ce genre de

 18   situation pour éviter d'avoir de nouvelles pertes.

 19   Q.  Merci. Compte tenu de ce que vous saviez au sujet de la situation et

 20   compte tenu du fait qu'une partie de la population locale les accueillait

 21   avec de la sympathie, est-ce qu'une décision de lancer une attaque armée

 22   contre eux pouvait être prise dans un poste de police ou dans une

 23   administration de police de petite envergure dans cette région-là ? Ou

 24   fallait-il avoir des approbations émanant d'un niveau plus élevé pour ce

 25   faire ?

Page 11125

  1   R.  Nous ne pouvions certainement rien faire à ce sujet. Il fallait

  2   résoudre cela à un niveau supérieur.

  3   Q.  Merci. Monsieur Jusic, je vais maintenant vous poser des questions à un

  4   autre sujet. Est-ce que dans la région dans laquelle fonctionnait votre

  5   poste de police et dans l'ensemble de la région entre Travnik et Zenica, y

  6   avait-il d'autres postes de police et où étaient-ils ?

  7   R.  Il y a un poste de police à Han Bila, un autre à Mosur [sic], et je ne

  8   me souviens pas de la date exacte, mais je sais qu'à un moment donné, il y

  9   a un poste de police également à Ovnak. Nos anciens collègues croates ont

 10   créé leur propre poste de police. C'étaient des personnes qui avaient

 11   travaillé avec nous au préalable. Mais là, je ne me souviens pas de la date

 12   exacte.

 13   Q.  Avez-vous remarqué, en 1992-1993, que mis à part les unités de l'ABiH,

 14   il y avait d'autres unités dans cette région-là et, si oui, lesquelles ?

 15   R.  Il y avait des formations du HOS et du HVO.

 16   Q.  Avez-vous remarqué à un certain moment que ces formations militaires se

 17   comportaient d'une manière qui avait un impact sur la sécurité de la

 18   population et sur l'ordre public dans votre région ?

 19   R.  Souvent, il y avait des situations, par exemple, un homme, qui

 20   souhaitait aller à Zenica ou à Travnik, était arrêté par leurs membres, les

 21   membres du HOS ou du HVO. D'après les plaintes portées par ces personnes,

 22   par la suite, on leur confisquait leur véhicule parfois ou on prenait leur

 23   argent. Il y a même eu certaines disparitions.

 24   Q.  Dites-nous, Monsieur Jusic, quelles étaient les routes par le biais

 25   desquelles il était possible de sortir de la vallée de la Bila pour aller

Page 11126

  1   vers Travnik, Zenica ou Vitez ? Qui occupait ces routes ?

  2   R.  Il s'agissait des routes qui passaient par Maline et Guca Gora. A Guca

  3   Gora, se trouvait un point de contrôle du HVO. Ensuite, la route par Stara

  4   Bila vers Vitez, et là aussi, il y avait un point de contrôle du HVO. Il y

  5   avait la route vers Zenica où il y avait également un point de contrôle à

  6   la fois du HVO et de la police civile.

  7   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, à la page 19, ligne

  8   3, il est écrit ici : "Les personnes qui parlaient," alors qu'il faudrait

  9   écrire : "Qui portaient les insignes du HVO ou du HOS." Je demande que l'on

 10   procède à une correction du compte rendu d'audience. Merci.

 11   Q.  Permettez-moi de poursuivre. Vous avez dit que le HVO ou la police

 12   civile croate était à ce point de contrôle. Vous, en tant que policier,

 13   avez-vous eu une certaine expérience de ce genre-là, liée au fait que les

 14   gens étaient arrêtes et malmenés aux points de contrôle tenus par le HVO ?

 15   R.  Je ne me souviens pas de la date exacte, mais à un moment donné, je

 16   suis parti en tant que policier de permanence, et j'ai été arrêté à Cukle

 17   par les membres des formations croates. Je ne sais pas exactement

 18   lesquelles. J'étais avec quatre ou cinq autres Musulmans. Cependant, moi-

 19   même, j'étais policier, je portais un uniforme de police, et j'ai entendu

 20   parler d'un incident dans un village près de Cukle, et je suis allé me

 21   rendre là-bas. Ils m'ont arrêté, ils m'ont détenu pendant quatre ou cinq

 22   heures, et ils ont confisqué mon pistolet, qu'ils ne m'ont jamais rendu, de

 23   même que mon fusil.

 24    Q.  Savez-vous si la police civile et l'armée, si vous disposez des

 25   informations au sujet de cela, s'ils essayaient de calmer la situation

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  1   après chaque incident de ce genre, et comment réagissait le HVO après ce

  2   genre d'effort ?

  3   R.  Je sais que nos chefs du poste de Sécurité publique, donc nos

  4   commandants, nous ont dit d'éviter tout conflit avec le VHO, à tout prix,

  5   de les informer toujours avant d'entreprendre quoi que ce soit. Cela

  6   c'était l'ordre que nous avons reçu en tant que policier, et je pense que

  7   les membres de l'armée avaient reçu le même type d'ordre.

  8   Q.  Je vais vous poser des questions au sujet de ce que vous savez

  9   concernant certains événements concrètement parlant. Où étiez-vous le 24

 10   avril 1993 ? Est-ce que vous vous souvenez de cette date ?

 11   R.  Je me souviens. J'étais à Mehurici Ce jour-là, je ne me souviens pas si

 12   j'ai travaillé ou si j'étais à Mehurici par hasard, ou de passage, mais, à

 13   un moment donné, j'ai vu que ces Moudjahiddines ont escorté, à travers

 14   Mehurici, plusieurs personnes à la fois, croates et musulmanes de Miletici,

 15   et ils ont emmené dans la direction du camp de Poljanica. La plupart

 16   d'entre nous, qui étions sur place, ne comprenaient pas ce qui s'était

 17   passé.

 18   Q.  Dites-nous, s'il vous plaît : est-ce qu'à un moment donné, vous étiez

 19   témoin du fait que le commandement de l'ABiH, qui était sur place, essayait

 20   de résoudre ce problème ?

 21   R.  Vous parlez du problème lié à Miletici ?

 22   Q.  Le fait que certaines personnes des Bosniaques, des Musulmans et des

 23   Croates ont été emmenées de Miletici. Avez-vous pu remarquer qu'au sein du

 24   commandement du bataillon, qui était sur place, l'on essayait de trouver

 25   des moyens visant à libérer ces personnes-là, ou vous n'avez pas participé

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  1   à cela ?

  2   R.  Je n'ai pas participé à cela, mais, puisque le commandement était à

  3   l'école, j'ai pu remarquer via l'école.

  4   Q.  Avez-vous appris, à un moment donné, que ces personnes ont été libérées

  5   de Poljanice, effectivement ?

  6   R.  Oui, j'ai appris qu'ils ont été libérés, mais je ne suis pas sûr pour

  7   ce qui est de date. Je sais qu'au bout d'un certain moment, ils ont été

  8   transportés à bord des véhicules de la FORPRONU  à Novo Bila. Je pense

  9   qu'il y avait une commission conjointe du HVO et de la police militaire --

 10   du HVO et de l'ABiH qui s'est rendue au site, et la police civile n'a pas

 11   participé à cela.

 12   Q.  Est-ce qu'à un moment donné, vous avez eu certaines tâches qui

 13   concernaient la population qui est restée dans le village de Miletici ?

 14   R.  Je me souviens que, par la suite, une vieille femme et son mari sont

 15   restés à Miletici, je ne me souviens plus de leur nom et, tous les jours,

 16   nous avions pour tâche de rendre visite à cette famille, parler avec eux et

 17   voir s'ils avaient des problèmes ou pas. Mais c'est ce que l'on faisait. Je

 18   pense que le prénom de l'homme était Zdravko, mais sa femme, je ne me

 19   souviens pas.

 20   Q.  [aucune interprétation]

 21   R.  [aucune interprétation] 

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Je voudrais signaler aux interprètes que nous

 23   n'entendons pas la traduction.

 24   L'INTERPRÈTE : Est-ce que vous entendez maintenant ?

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.

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  1   L'INTERPRÈTE : Le témoin a répondu, en disant qu'il rendait souvent visite

  2   à cette famille.

  3   Mme RESIDOVIC : [interprétation]

  4   Q.  Vous avez commencé à répondre, vous avez dit : "Je rendais souvent

  5   visite à cette famille."

  6   R.  Je rendais souvent visite à cette famille. Je parlais avec eux. Ils me

  7   disaient que les voisins de Miletici, des Musulmans, venaient leur voir, et

  8   leur demandaient ce qu'ils mangeaient, comment ils vivaient. Ils ont

  9   répondu en disant que les Musulmans leur ont apporté de la nourriture.

 10   Q.  Merci. Monsieur Jusic, pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, où

 11   vous étiez le 8 juin, nous dire combien de temps vous étiez à cet endroit-

 12   là avant le 8 juin ?        

 13   R.  Le 8 juin, j'étais chez moi à Jezerci. Je ne peux pas vous donner la

 14   date exacte, mais la situation était-elle d'abord -- je devrais vous parler

 15   du village qui était de composition mixte, des Croates et Musulmans. La

 16   situation était telle que l'on ne pouvait pas quitter son village pendant

 17   quelques jours. Il y avait des coups de feu, on avait tiré sur mon village

 18   et on ne pouvait pas sortir pour des raisons de sécurité. Je suis resté

 19   chez moi pendant deux ou trois jours, et je n'ai pas pu aller travailler.

 20   Q.  Qui attaquait votre village ? Ou plutôt qui attaquait cette route que

 21   vous deviez emprunter pour aller travailler ?

 22   R.  Bien c'est difficile à dire -- c'est difficile de dire d'où venaient

 23   les coups de feu, mais je crois que c'était d'un endroit qui s'appelle

 24   Balte. Je crois que les coups de feu venaient de là, c'était nos routes qui

 25   surplombaient le village de Zelce.

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  1   Q.  Étant donné que vous étiez Jezerci, avez-vous remarqué que l'ABiH, à

  2   l'époque, avant le 8 juin, lançait elle-même des attaques contre les

  3   positions du HVO ?

  4   R.  L'armée ne se trouvait pas dans le village de Jezerci, à l'époque. Il y

  5   avait des personnes âgées qui avaient des fusils de chasse. Je ne suis pas

  6   au courant de ce genre de chose.

  7   L'INTERPRÈTE : Demande à ce que le témoin parle un peu plus fort.

  8   Mme RESIDOVIC : [interprétation]

  9   Q.  Pourriez-vous me dire, lorsque vous étiez dans le village au cours de

 10   cette période, lorsque vous ne pouviez pas aller travailler, comme vous

 11   l'avez dit, saviez-vous s'il y avait d'autres attaques sur d'autres

 12   villages musulmans dans la vallée de la Bila ?

 13   Parlez un peu plus fort, Monsieur le Témoin, s'il vous plaît, car les

 14   interprètes vous entendent mal.

 15   Avez-vous eu des éléments d'information sur les attaques, sur des villages

 16   où la population musulmane était majoritaire dans la vallée de la Bila et,

 17   si oui, à quel moment, s'il vous plaît ?

 18   R.  J'ai entendu parler d'un endroit qui s'appelle Ricice et Velika

 19   Bukovica. J'ai également entendu dire que Velika Bukovica avait été attaqué

 20   et que des femmes avaient été envoyées à Busovaca. Nous avons entendu

 21   parler ou entendu dire que les gens de Cukle ne pouvaient pas quitter leur

 22   village. Avant le 8, quelques obus de mortier sont tombés sur le village

 23   Jezerci. Je n'ai pas la date exacte.

 24   Q.  Avez-vous un Motorola ou toute forme d'un instrument de

 25   télécommunication, quelque chose qui aurait permis de sortir des éléments

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  1   d'information ?

  2   R.  Non. Mais la nuit, quelqu'un venait dans notre village et nous donnait

  3   ces renseignements, ou quelqu'un de l'armée rentrait chez lui pour aller

  4   prendre un bain et cette personne nous fournissait ces renseignements.

  5   C'est comme cela que l'on renseignait, il n'y avait pas d'électricité dans

  6   nos villages.

  7   Q.  Si je vous ai bien compris, le 8 juin 1993, vous étiez à Jezerca.

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Quand êtes-vous allé à Mehurici pour la première fois ?

 10   R.  Un ou deux jours plus tard, je ne souviens pas du moment exact et notre

 11   Commandant à l'époque était le commandant du poste de Sécurité publique.

 12   Les communications avaient été coupées, il ne pouvait s'y rendre. Deux

 13   jours plus tard, les policiers se sont rencontrés à Mehurici et nous sommes

 14   partis travailler à nouveau. Quelqu'un est venu de Travnik qui m'a nommé

 15   commandant de Mehurici qui se trouvait là-haut.

 16   Q.  Si je vous ai bien compris, quelques jours après ces événements, vous

 17   avez été nommé Commandant de ce poste de poste de police; est-ce exact ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Lorsque vous vous y êtes rendu, quelques deux ou trois jours plus tard,

 20   qu'avez-vous découvert -- qu'avez-vous appris -- avez-vous remarqué que

 21   certaines personnes avaient été amenées à Mehurici ?

 22   R.  Bien oui. Nous avons appris qu'il y avait un certain nombre de civils à

 23   Mehurici qui étaient dans la salle de sport de l'école primaire, il y avait

 24   quelques hommes en âge de porter les armes qui s'y trouvaient également et

 25   l'armée nous a dit qu'il fallait monter la garde devant ces hommes. Notre

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  1   tâche consistait à monter la garde devant ces hommes pour s'assurer qu'il

  2   n'y ait pas d'incidents. Les personnes, qui étaient détenues dans l'école,

  3   étaient de nationalité croate.

  4   Q.Avez-vous rempli cette tâche que vos supérieurs hiérarchiques de Travnik

  5   vous ont donnée.

  6   R.  Oui.

  7   Q.  M. Jusic, avez-vous appris pourquoi ces civils avaient été emmenés à

  8   Mehurici et détenus dans cette école primaire ?

  9   R.  De ce que j'ai entendu dire de la part des soldats de l'armée, ils

 10   étaient placés dans cette école pour des raisons de sécurité car il y avait

 11   des Moudjahiddines qui se déplaçaient dans le village, ils auraient pu

 12   faire quelque chose.

 13   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Mes collègues viennent de me signaler

 14   qu'entre l'anglais et le français, la question -- "a été emmené à Mehurici

 15   et placé dans l'école primaire." En français, on a utilisé le terme "place

 16   en détention". Je voulais simplement m'assurer qu'il y a une différence ici

 17   au niveau du terme utilisé.

 18   Q.  Qui s'est occupé de l'hébergement de ces gens dans l'école primaire et

 19   qui était responsable de leur approvisionnement en nourriture ?

 20   R.  La protection civile.

 21   Q.  Pourquoi ces personnes ont-elles été placées dans la salle de sport et

 22   dans l'école primaire ?

 23   R.  Parce qu'il n'y avait d'autre endroit pour eux, à l'époque. Il n'y

 24   avait pas de meilleur endroit pour les loger à l'époque.

 25   Q.  Y avait-il un motel ou quelque chose ou un hôtel à Mehurici ou tout

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  1   autre bâtiment qui aurait pu être utilisé pour héberger quelques 200, 300

  2   personnes ? Cela correspond au nombre de personnes qui avaient été placées

  3   dans cette école primaire.

  4   R.  La salle de sport était l'endroit le plus grand, il n'y avait pas

  5   d'hôtel à l'époque. En ce sens, c'était le seul endroit disponible à

  6   l'époque.

  7   Q.  M. Jusic, combien de policiers montaient la garde ou assuraient la

  8   sécurité de ces personnes ?

  9   R.  Nous nous occupions de ces personnes, nous n'avions pas véritablement

 10   d'astres tâches.

 11   Q.  Dans l'exercice de cette fonction alors que vous vous occupiez ou vous

 12   vous préoccupiez de la sécurité de ces personnes dans l'école primaire,

 13   avez-vous entendu parler de personnes qui auraient été mal traitées, pas de

 14   façon correcte et, si oui, avez-vous pris des mesures à cet effet ?

 15   R.  Les femmes, les enfants et les personnes âgées étaient placées dans

 16   l'école; si ces personnes souhaitaient sortir, elles pouvaient sortir pour

 17   fumer une cigarette et tout leur argent et objets de valeur, ils les

 18   portaient sur eux à l'époque; il n'y avait pas eu partage ou de sélection,

 19   mais l'un d'entre nous pouvait chercher quelque chose, s'il le souhaitait.

 20   On pouvait aller leur acheter quelque chose. L'un d'entre eux m'a parlé

 21   d'un mauvais traitement ou de problèmes qui étaient survenus dans l'école.

 22  C'était quelqu'un qui s'appelait (expurgee), s'ils avaient besoin de quelque

 23   chose, ils s'adressaient à elle et ce qui pouvait être fait était fait.

 24   Nous mangions tous la même chose.

 25   Q.  Il y a quelques instants vous avez dit que les Moudjahiddines étaient à

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  1   Savica Kuca et Poljanice, ce sont des villages. Pourriez-vous me dire si

  2   les -- vos collègues vous ont jamais parlé des Moudjahiddines qui avaient

  3   tenté de rentrer dans la salle de sport. Si oui, que s'était-il passé, à ce

  4   moment-là ?

  5   R.  A une occasion, je ne sais pas s'il y avait un seul Moudjahiddine ou

  6   s'ils étaient plusieurs, ils ont tenté de rentrer dans la salle de sport,

  7   mais le policier ne les a pas laissé entrer. Ils ont sorti leurs armes,

  8   mais ils n'ont pas réussi à rentrer. Je ne sais ce qu'ils voulaient.

  9   Q.  A aucun moment, vous a-t-on dit d'un soldat qui se comportait de façon

 10   inappropriée ? Si oui, savez-vous quelles mesures ont été prises contre un

 11   tel soldat ?

 12   R.  Oui, je me souviens de quelque chose comme cela. Je me souviens d'un

 13   frère d'un des soldats qui est mort dans le conflit l'opposant aux Croates,

 14   et il y avait un prisonnier dont on pansait les blessures tous les jours.

 15   Un soldat le frappait, alors qu'on l'emmenait pour panser ses blessures.

 16   Pour autant que je m'en souvienne, le commandant a été placé en détention

 17   pendant 15 jours. Je ne me souviens pas exactement. Je sais simplement que

 18   la police militaire l'a emmené.

 19   L'INTERPRÈTE : Je demande au témoin de bien vouloir parler un peu plus

 20   fort, s'il vous plaît.

 21   Mme RESIDOVIC : [interprétation]

 22   Q.  Etant donné que le terme "prisonnier" a été utilisé ici, s'agissait-il

 23   de quelqu'un qui se trouvait dans la salle de sports ou s'agissait-il de

 24   membres du HVO qui se trouvaient dans les autres pièces ?

 25   R.  J'entends les hommes en âge de porter des armes dans les autres pièces.

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  1   Un soldat blessé du HVO à qui l'on pansait les blessures tous les jours. Je

  2   ne connaissais pas son nom. A cette occasion, vous avez parlé d'un membre

  3   de l'armée qui l'a frappé, alors qu'il se rendait à l'infirmerie.

  4   Q.  Très bien. Vous dites que la police militaire l'a emmené et qu'il a été

  5   puni. Ceci a été enregistré.

  6   R.  Oui, pour autant que je m'en souvienne.

  7   Q.  Pourriez-vous me dire si vous aviez connaissance du fait qu'au cours

  8   d'une quinzaine de jours, il y avait des représentants des organisations

  9   humanitaires, des membres de la Croix rouge ou des observateurs de la

 10   commission européenne ? Est-ce que de telles personnes se sont présentées ?

 11   R.  Je sais que des représentants de la Croix rouge sont venus, et je crois

 12   que des observateurs européens sont venus aussi. Ils n'ont pas soulevé

 13   d'objections particulières. Ils ont constaté quelle était la situation. Ils

 14   se sont rendus compte qu'ils ne pouvaient pas améliorer la situation.

 15   Q.  Il y a quelques instants, vous dites qu'ils avaient gardé leurs effets

 16   personnels sur eux. Quels types d'objets avaient ces civils et les membres

 17   du HVO qui étaient détenus dans une autre région ?

 18   R.  Lorsque la police civile a commencé à s'occuper d'eux pour qu'il ne

 19   leur arrive rien, ils avaient de l'argent, ils avaient des sacs sur eux.

 20   Personne n'y a touché, et pour ce qui est des hommes en âge de porter les

 21   armes, ils n'avaient pas beaucoup d'effets sur eux, mais ils avaient de

 22   l'argent qu'ils avaient dans les poches.

 23   Q.  Lorsqu'ils sont partis, ont-ils emporté tous leurs effets personnels ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Monsieur Jusic, pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, pendant tout

Page 11136

  1   le temps où ils étaient à cet endroit-là ou jusqu'au moment où ils sont

  2   partis avec les représentants du HCR ou d'autres personnes, quelle était la

  3   situation dans la vallée de la Bila ?

  4   Y avait-il des combats ou la paix avait-elle été rétablie, à ce moment-là ?

  5   R.  Je crois qu'il y avait des activités de combat à ce moment-là, pas

  6   vraiment dans le voisinage de Mehurici, mais un peu plus loin dans la

  7   direction de Nova Bila.

  8   Q.  Vous faisiez partie de la police, et dans de telles conditions, vous

  9   étiez en mesure d'emmener ces personnes dans leur village pour assurer la

 10   sécurité ?

 11   R.  Non, pas vraiment. Nous n'étions pas vraiment en sécurité. Nous ne

 12   pouvions pas garantir la sécurité de ces personnes.

 13   Q.  Dites-moi, qu'est-il arrivé aux personnes dont vous assuriez la

 14   sécurité ? Où ces personnes sont-elles allées ?

 15   R.  Les civils ont été échangés. Je ne sais pas combien de jours après. Les

 16   hommes en âge de porter les armes, lorsque les routes étaient suffisamment

 17   sûres, ces hommes ont été emmenés à la maison de correction, le KP Dom. Ils

 18   ont été emmenés à cet endroit-là. C'était risqué de les emmener via Ovnak.

 19   Dès que nous avons eu l'occasion de les emmener à Zenica sans risquer quoi

 20   que ce soit, ils ont été emmenés au KP Dom.

 21   L'INTERPRÈTE : L'interprète précise que le témoin marmonne, et qu'il est

 22   difficile de l'entendre.

 23   Mme RESIDOVIC : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur Jusic, n'avez-vous jamais appris que certains de ces hommes ou

 25   pourriez-vous nous dire si on ne vous a jamais parlé du fait que certains

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  1   de ces hommes, qui ont été emmenés de Maline pour être conduit à Mehurici,

  2   ont été emmenés quelque part ? Si oui, avez-vous appris qui les avaient

  3   emmenés ?

  4   R.  Plus tard, lorsque les gens sont rentrés à Mehurici sous l'escorte de

  5   la police militaire, il est apparu que les Moudjahiddines avaient séparé

  6   certaines personnes à Poljanica. Personne ne savait ce qu'ils voulaient, ce

  7   que voulaient les Moudjahiddines qui les avaient séparées. C'est ce que les

  8   gens disaient.

  9   Q.  Vous avez parlé de vos obligations à ce poste. Teniez-vous un registre

 10   officiel ? En avez-vous informé les officiers ou vos supérieurs

 11   hiérarchiques à Travnik ? Leur avez-vous rapporté cet événement ?

 12   R.  Il est vrai que cet élément d'information n'avait pas été vérifié, mais

 13   que nous avons concilié ceci dans un registre. Pour autant que je m'en

 14   souvienne ceci a été transmis. Il se peut que les Moudjahiddines aient

 15   emmené certaines personnes et les aient faits sortir de la colonne. On ne

 16   savait rien à propos de ces gens-là. On ne savait pas ce qui c'était passé.

 17   Q.  Eu égard à cet événement, avez-vous pu vous rendre dans le camp des

 18   Moudjahiddines pour pouvoir obtenir d'autres éléments d'information et

 19   savoir ce qui s'était passé ?

 20   R.  Non. Nous n'avons pas pu entrer dans le camp.

 21   Q.  En réponse à une question que je vous ai déjà posée, vous avez dit

 22   qu'au cours de l'été, vous avez été resubordonné à l'ABiH ? A quelle

 23   brigade avez-vous été resubordonné ?

 24   R.  J'ai été resubordonné à la 306e Brigade.

 25   Q.  Avez-vous été resubordonné avant ou après que votre voisin croate soit

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  1   parti dans le cadre d'un échange ?

  2   R.  Ceci est arrivé après, après l'échange.

  3   Q.  Pendant combien de temps avez-vous été affecté à des activités de

  4   combat ?

  5   R.  Quarante-cinq jours environ.

  6   Q.  Monsieur Jusic, étant donné que vous avez dit que votre tâche et rôle

  7   consistaient à garantir la sécurité des personnes et à maintenir l'ordre

  8   public, dites-moi, avez-vous remarqué que des biens étaient pillés dans des

  9   maisons croates abandonnées ? Si oui, avez-vous pris certaines mesures à

 10   cet égard ?

 11   R.  Les maisons abandonnées par les voisins croates étaient souvent

 12   pillées. Certaines d'entre elles étaient incendiées. Certaines personnes y

 13   mettaient le feu. Nous avons traité ces cas-là, mais c'était difficile, sur

 14   le moment, de découvrir qui en étaient les auteurs, car il y avait beaucoup

 15   de réfugiés dans la région. C'étaient des personnes que nous ne

 16   connaissions pas. Il y avait des soldats. Si nous trouvions des objets,

 17   nous les confisquions, mais nous ne savions pas à qui ces objets

 18   appartenaient. Il y avait beaucoup d'objets que la police de Mehurici avait

 19   confisqués, mais on ne pouvait pas rendre ces objets à leur propriétaire,

 20   car on ne savait pas à qui ils appartenaient. Ces objets ont été, de façon

 21   générale, perdus. Pendant 45 jours, nous n'avions pas d'autres tâches. Nous

 22   étions sur le front.

 23   Q.  Si je vous ai bien compris, vous dites que même lorsque vous avez

 24   trouvé des maisons qui avaient été pillées, vous ne saviez pas qui étaient

 25   les auteurs de ces pillages. Pourquoi pas ?

Page 11139

  1   R.  Parfois, mes policiers se trouvaient près de ces maisons et on

  2   connaissait le propriétaire. A ce moment-là, on connaissait, on savait qui

  3   était la partie lésée. Très souvent, on ne savait qui était le

  4   propriétaire.

  5   Q.  Vous avez également dit que vous avez gardé ces objets et que la police

  6   les avait gardés dans un entrepôt, quelque chose de la sorte. Dites-moi,

  7   pourquoi, si vous connaissiez le nom des propriétaires, pourquoi n'avez-

  8   vous pas restitué ces biens et ne pouviez-vous pas protéger ces maisons et

  9   empêcher qu'elles ne soient pillées à nouveau ?

 10   R.  Nous avons gardé ces objets au poste de police, mais si nous les

 11   remettions dans les maisons, des gens seraient venus les piller à nouveau,

 12   car c'était une région assez étendue, et la police ne pouvait pas tout

 13   contrôler.

 14   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Page 31, ligne 18, il a été traduit que je

 15   vous ai demandé si on pouvait identifier les auteurs. Or, je vous ai

 16   demandé si on pouvait identifier les victimes. Il ressort de la réponse du

 17   témoin que le témoin a répondu à ma question, à savoir qu'il était

 18   difficile d'identifier les victimes.  Je demanderais que l'on corrige cela.

 19   Q.  Monsieur Jusic, à ces endroits où vous conserviez ces choses, est-il

 20   arrivé qu'il y ait des victimes qui s'adressent à vous et qui vous

 21   demandent la restitution de leurs biens ? Est-ce que cela s'est produit en

 22   1993 ?

 23   R.  Non, ceci ne s'est pas produit 1993, que quelqu'un s'adresse à nous

 24   pour nous demander la restitution des choses.

 25   Q.  Monsieur Jusic, à Mehurici ou dans les alentours, aviez-vous une

Page 11140

  1   possibilité, quelle qu'elle soit, d'entreposer ces affaires de telle sorte

  2   que leur état ne soit pas détérioré avec le temps, qu'elles ne soient pas

  3   endommagées ?

  4   R.  Non, on n'avait pas cela. On n'avait que deux pièces, la police n'en

  5   avait que deux.

  6   Q.  Je vous remercie, Monsieur Jusic.

  7   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'en ai terminé

  8   avec mon interrogatoire.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Maître. Vous avez parfaitement respecté le

 10   temps que vous nous aviez promis. Il est, par ailleurs, l'heure de faire la

 11   pause. Nous allons nous arrêter et nous reprendrons pour le contre-

 12   interrogatoire à 11 heures.

 13   --- L'audience est suspendue à 10 heures 33.

 14   --- L'audience est reprise à 11 heures 03.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Je me tourne vers l'Accusation pour le contre-

 16   interrogatoire du témoin.

 17   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,

 18   Mesdames, Messieurs, Monsieur Jusic.

 19   Contre-interrogatoire par Mme Henry-Benjamin : 

 20   Q.  [interprétation] Je suis Tecla Henry-Benjamin et je représente le

 21   bureau du Procureur en l'espèce. Comme ceci vous a déjà été dit de la part

 22   du Président de la Chambre de première instance, je vais vous poser des

 23   questions. Je tiens à préciser que, si jamais une question n'est pas

 24   claire, vous avez le droit de me demander de la reformuler et de répéter.

 25   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Monsieur le Président, la Défense de

Page 11141

  1   M. Kubura n'avait pas de questions. On devrait peut-être le consigner au

  2   compte rendu.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai oublié de leur -- est-ce que les Défenseurs de

  4   l'autre accusé avaient des questions à poser ? Excusez-moi, je vous ai

  5   oublié, mais vous êtes tellement loin que je vous ai oublié.

  6   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Nous n'avons pas de questions, Monsieur

  7   le Président.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Alors, Madame Benjamin, Je vous remercie de

  9   la remarque que vous aviez faite. Vous avez la parole.

 10   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 11   Q.  Monsieur Jusic, au début de l'interrogatoire principal, vous avez fait

 12   -- vous avez apprécié, à l'intention de la Chambre de première instance, le

 13   rôle que vous avez joué en tant que commandant de la police à Mehurici à

 14   l'époque. Vous avez précisé quelles ont été vos tâches. Pouvez-vous nous

 15   dire à quel moment précisément vous êtes devenu chef de la police -- de

 16   poste de police de Mehurici ?

 17   R.  Je ne connais pas la date exacte, mais, après les conflits entre les

 18   Musulmans, c'est-à-dire, l'ABiH et le HVO, quelques jours après cela.

 19   Q.  Aurais-je raison de dire qu'avant cela, vers le 10 juin, vous avez

 20   travaillé en tant que policier ordinaire au poste de police de Mehurici;

 21   ai-je raison de dire cela ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Le rôle que vous avez joué, en tant que policier ordinaire au poste de

 24   Mehurici et à partir du moment où vous êtes devenu commandant -- chef,

 25   était, au fond, le mêmes, donc vous avez joué le rôle; ai-je raison ?

Page 11142

  1   R. Oui, mais je recevais directement des ordres de Travnik, et les

  2   transmettais aux policiers.

  3   Q.  Très bien.

  4   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Monsieur le Président, si vous m'y

  5   autorisez je tiens à montrer au témoin la pièce P204, s'il vous plaît.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, Monsieur le Greffier, P204.

  7   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation]

  8   Q.  Avez-vous pu examiner le document ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Très bien. Au fond ce document à avoir avec votre rattachement, la 306e

 11   Brigade. Corrigez-moi si je me trompe, au fond ce qu'on trouve dans ce

 12   document, ce sont les obligations et les fonctions du MUP, ai-je raison ?

 13   R.  Je recevais des ordres de l'administration policière de Travnik, et à

 14   un niveau supérieur, ils ont vraisemblablement décidé ceci, ils ont décidé

 15   que les choses allaient être comme cela.

 16   Q.  Je suis tout à fait d'accord avec vous parce que vous voyez il est dit

 17   clairement ici quelles sont les tâches, les obligations. Il est dit, par

 18   exemple, au point 3, que vous devez assurer des patrouilles quotidiennes

 19   dans les agglomérations qui ont été vidées de leur population, que vous

 20   devez empêcher l'incendie et le pillage, et que vous devez vous servir de

 21   poste de contrôle mobile contrôler les routes d'importance secondaire. Au

 22   point 7, il est dit que le déplacement à titre individuel de personnes

 23   armées, doit être arrêté. Ces personnes doivent être désarmées et que leur

 24   nom doit être consigné. Est-ce que vous voyez ici, qu'une partie de vos

 25   obligations était de protéger l'ordre publique, et la prévention du crime

Page 11143

  1   également, elle faisait partie de vos devoirs, vous le voyez au point 7 ?

  2   R.  Oui, à peu près c'est cela.

  3   Q.  Merci.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Benjamin.

  5   Monsieur le Témoin, sur la question, ce document que l'Accusation

  6   vous montre, dont je vois que le MUP à Mehurici, a été destinataire

  7   puisque, dans la liste des destinataires au numéro 7, il y a MUP Mehurici.

  8   Est-ce que vous avez eu vous connaissance de ce document ?  

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Vraisemblablement oui.

 10   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation]

 11   Q.  En répondant aux questions de mon éminente collègue, vous avez dit qu'à

 12   un moment donné, vous avez vu des étrangers arrivés dans la zone de

 13   Mehurici. Ai-je raison ? Vous devriez répondre pour le contre rendu

 14   d'audience.

 15   R.  Oui, c'est vrai.

 16   Q.  Merci. A l'attention de Chambre de première instance, pouvez-vous s'il

 17   vous plaît, nous donner le chiffre pour la population de Mehurici, à peu

 18   près pendant la période qui nous intéresse, à savoir janvier 1993 jusqu'en

 19   1994 à peu près.

 20   R.  Je pense qu'il y avait plus de 10 000 personnes. Plus de 10 000.

 21   Q.  Pourriez-vous nous dire aussi, quel a été le nombre de ces étrangers

 22   dont vous avez remarqué la présence à Mehurici à ce moment-là ?

 23   R.  A quel moment plus précisément ? En 1993, 1994, ou avant cela ?

 24   Q.  Je voudrais savoir à quel moment vous avez commencé de voir ces gens-

 25   là, à Mehurici, et si leur nombre a accru avec le temps, dites-le nous ?

Page 11144

  1   R.  Ils ne sont pas tous arrivés en même temps. Ils arrivaient un par un,

  2   par groupe, je ne sais pas moi. Au début, il y en avait un ou deux, ou

  3   plusieurs, puis c'est comme cela que le nombre a augmenté. Mais on n'a

  4   jamais pu établir précisément, je veux dire nous la police, quel était leur

  5   nombre exact.

  6   Q.  Je sais que c'était à la police d'évaluer leur nombre exact, mais à

  7   quelle police vous vous référez quand vous dites cela ?

  8   R.  Je pense à la police civile, donc le MUP.

  9   Q.  Vous ne faisiez pas partie du MUP ?

 10   R.  Si.

 11   Q.  En étant membre du MUP et, par la suite, en étant chef du poste de

 12   police de Mehurici, et compte tenu du grand nombre d'étrangers qui ont été

 13   vus sur place, c'est dans ce contexte-là que je vous ai posé ma question.

 14   Je voulais savoir si vous pouviez nous donner une estimation du nombre de

 15   ces personnes dans la zone, fin 1992 jusqu'en 1994, il y avait combien de

 16   personnes ?

 17   R.  Je ne saurais pas vous le dire. Tout d'abord, comment pourrais-je

 18   m'exprimer ? Pour moi, ils étaient tous pareils d'après leur aspect

 19   extérieur. Je ne pourrais pas vous donner leur nombre.

 20   Q.  Vous nous avez dit que vous saviez qu'il y avait à peu près 10 000

 21   habitants à Mehurici; est-ce exact ?

 22   R.  Oui, à peu près, mais il faut savoir qu'à l'époque il y avait beaucoup

 23   de mouvement de population, des réfugiés arrivaient, repartaient, ce nombre

 24   n'a jamais été constant.

 25   Q.  Je vois. Ma question est la suivante. Pensez-vous que, s'il y avait eu

Page 11145

  1   10 000 étrangers qui étaient arrivés, vous auriez été en mesure de

  2   l'apprécier, de l'évaluer. Diriez-vous que leur nombre se vantait à 10

  3   000 ?

  4   R.  Non, pas autant il y en avait moins.

  5   Q.  Précisément c'est cela qui m'intéresse. Diriez-vous qu'il y en avait 1

  6   000 ?

  7   R.  Peut-être.

  8   Q.  Au moins nous avons maintenant une évaluation sur laquelle nous pouvons

  9   nous baser. D'après votre appréciation, il y avait à peu près 1 000

 10   étrangers qui sont arrivés à Mehurici d'après vous, et nous avons une

 11   population d'à peu près 10 000 personnes. Ce chiffre n'était pas stable à

 12   cause des déplacements, est-ce vrai ?

 13   R.  Peut-être qu'ils n'étaient pas en nombre de 1 000, mais enfin voilà, je

 14   ne connais pas leur nombre, cela c'est sûr.        

 15   Q.  On ne s'attend pas à ce que vous nous disiez le chiffre exact, mais

 16   diriez-vous qu'ils étaient au même nombre que la population ? Etaient-ils

 17   moins nombreux ou plus nombreux ?

 18   R.  Ils étaient moins nombreux, ils étaient la minorité.

 19   Q.  A partir du mois de janvier 1993, et ce jusqu'au milieu de 1994,

 20   comment décririez-vous la situation qui prévalait à Mehurici ?

 21   R.  Qu'est-ce qui vous intéresse précisément là-dedans ?

 22   Q.  Avec tous mes respects, il faut bien que je vous pose des questions,

 23   d'accord ? Ma question est la suivante : comment décririez-vous la

 24   situation qui a prévalu à partir du mois de janvier 1993, et ce jusqu'à la

 25   mi-mars 1994, à Mehurici ? C'est tout.

Page 11146

  1   R.  Pour ce qui est de Mehurici et aux alentours, il y a plusieurs villages

  2   autour de Mehurici, des villages croates et aussi musulmans. La population

  3   majoritaire, ce sont quand même des Musulmans. A Mehurici, on a constitué

  4   ce camp. Les Moudjahiddines. à Poljanica, ont créé un camp. Nous, en tant

  5   que police dans cette situation de guerre, on s'acquittait à peu près de

  6   nos tâches, mais c'était difficile.

  7   Q.  Je vous entends, mais je ne sais pas si vous avez bien compris ma

  8   question. Quels étaient les rapports entre les différents groupes ethniques

  9   à Mehurici ? Ces relations étaient-elles idylliques et y avait-il des

 10   tensions pendant cette période-là à Mehurici ?

 11   R.  Quant aux relations entre les Musulmans et les Croates dans ce secteur,

 12   avant, dans ma déposition, j'ai dit qu'on a dressé des postes de contrôle.

 13   Mehurici était - comment dirais-je - séparée de Travnik, de Vitez et Zenica

 14   et, nous, de Mehurici, quand on se déplaçait sur les routes, on tombait

 15   toujours sur des postes de contrôle qui avaient été dressés par la partie

 16   croate. Il est arrivé qu'on arrête nos hommes.

 17   Q.  Puis-je vous interrompre ? Si vous deviez utiliser un terme pour

 18   décrire la situation, quel serait ce mot que vous emploieriez ?

 19   R.  La situation était difficile. Je ne sais vraiment pas quel terme. Tout

 20   était enchevêtré, compliqué.

 21   Q.  Pourrait-on qualifier cette situation de tendue ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Très bien. Aurais-je raison de dire que l'apparition de ces étrangers

 24   faisait partie de ces tensions qui se faisaient sentir à Mehurici ?

 25   R.  Oui, cela a eu un impact également.

Page 11147

  1   Q.  C'est leur présence qui a attisé le feu; ai-je raison ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Merci. Alors vous, en tant que commandant du MUP, de la police civile,

  4   vos devoirs consistaient, essentiellement, en l'obligation de protéger

  5   l'ordre public et d'assurer la prévention de crimes, de protéger vos

  6   concitoyens, les civils, indépendamment de leur appartenance ethnique.

  7   Comment envisagiez-vous le rôle que vous deviez jouer eu égard aux

  8   étrangers qui sont arrivés ?

  9   R.  Quand ils ont commencé à peine à venir, on n'arrivait pas à bien se

 10   comprendre avec eux. Il fallait trouver quelqu'un pour nous traduire, et

 11   cela c'était difficile. Ils n'avaient aucune pièce d'identité sur eux. Au

 12   départ, ils se sont installés à l'école de Mehurici.

 13   Q.  En tant que policier et en tant que chef de la police, vous aviez un

 14   certain nombre d'attributions, de pouvoir, n'est-ce pas ? Par exemple,

 15   entre autres, la capacité d'arrêter quelqu'un.

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Monsieur, pouvez-vous me dire pour quelle raison vous vous êtes abstenu

 18   d'arrêter ces étrangers ou de vous occuper de ces étrangers, qui étaient

 19   minoritaires à Mehurici et qui, d'après vous, semblaient être une grande

 20   source de trouble ? Alors pourquoi, vous personnellement, en tant que

 21   commandant, et pourquoi vos hommes qui étaient sous vos ordres, n'ont rien

 22   fait ?

 23   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaiterais que

 24   mon éminente collègue, afin d'éviter de confondre le témoin, précise la

 25   période. Sa question concerne-t-elle le moment où il était policier

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  1   ordinaire ou la période qui a suivi. Parce que, de la manière dont elle a

  2   précisé la période, elle est très longue. Cela couvre une période d'un an

  3   et demi. Il me semble que la question n'est pas très claire. Du moins,

  4   c'est notre avis. Je ne sais pas, peut-être le témoin peut-il répondre.

  5   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Avec tous mes respects, Monsieur le

  6   Président, je pense que, dès le départ, j'ai dit clairement que le témoin

  7   était tout d'abord policier ordinaire et que, par la suite, il est devenu

  8   commandant. Pendant cette période de 18 mois, il était policier, même s'il

  9   n'était que débutant, et par la suite, il est devenu commandant. C'est en

 10   jouant ces deux rôles que je souhaiterais qu'il me réponde, et je pense

 11   qu'il est tout à fait prêt à répondre.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous avez entendu la question.

 13   Vous répondez à la question qui est très précise.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Quand ils ont commencé à apparaître, ils n'ont

 15   posé aucun problème, quand ils étaient en petit nombre. Ils ne touchaient à

 16   rien, personne. Ils se sont installés à l'école, ils se rendaient à la

 17   mosquée. Ils entraient en contact un petit peu avec la population locale,

 18   enfin avec ceux qui étaient plus portés à la religion. Il n'y avait pas de

 19   problème avec eux. Donc, il n'y avait pas lieu, dès le départ, d'arrêter ou

 20   quoi que ce soit de ce genre. On a informé les nôtres au siège, à Travnik,

 21   qu'ils étaient arrivés. On nous a dit qu'on devait essayer de savoir de qui

 22   il s'agissait, qui étaient ces gens et d'où ils étaient venus. Cela,

 23   c'était difficile. Ils n'avaient pas de pièces d'identité, ou s'ils en

 24   avaient, ils ne nous les montraient pas.

 25   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Nous allons retourner en arrière

Page 11149

  1   maintenant, vu ce qui en était de la période où ils ne posaient pas

  2   problème. Nous allons aborder la question qui concerne la période où ils

  3   ont posé problème mais avant cela, j'aimerais savoir si pourriez dire à

  4   l'intention de la Chambre de première instance, qui a donné la permission à

  5   ces gens de s'installer à l'école de Mehurici ?

  6   R.  Cela, je ne le sais pas. Je n'étais pas responsable de l'école. Nous

  7   avions nos bureaux, les bureaux de la police à un autre endroit qui était

  8   séparé, autre endroit distinct de l'école. Je ne sais pas comment ils en

  9   sont venus à s'installer à l'école.

 10   Q.  Savez-vous comment ils ont passé par les postes de contrôle du HVO ?

 11   Comment sont-ils arrivés jusqu'à chez vous à Mehurici ?

 12   R.  Je ne sais comment ils y sont parvenus mais il y a eu des cas qu'on les

 13   repère, qu'on les retrouve, je connais un cas à Zukica. Cela était au

 14   début, quand ils ont commencé à arriver. On en a trouvé un de tué près de

 15   la localité de Zukica Most, le pont. Quant à savoir comment cela est

 16   arrivé, je ne sais pas.

 17   Q.  M. Jusic, j'affirme qu'ils auraient peut-être, pu faire partie de

 18   l'ABiH ?

 19   R.  Pour autant que je le sache, non.

 20   Q.  Vous, en tant que membre de la police civile, qui est censé protéger

 21   l'ordre publique et qui est censé faire appliquer la loi, vous laissez un

 22   groupe d'étrangers, qui d'après vos explications refusent de montrer leur

 23   pièce d'identité et très probablement, ils n'en avaient même pas, ils

 24   étaient illégaux, vous, en tant que commandant, vous n'avez jamais estimé

 25   qu'il était nécessaire d'agir autrement, d'entreprendre quelque chose à

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  1   leur égard. Vous ne pensiez pas qu'il aurait été sage ou bien avisé de le

  2   faire ?

  3   R.  J'ai informé notre siège à Travnik. Je n'avais pas la possibilité de

  4   faire quelque chose tout seul. A mon sens, il fallait que ce soit résolu à

  5   un niveau supérieur ou la police civile de Mehurici ne pouvait résoudre

  6   cela.

  7   Q.  Je suppose que vous allez être d'accord avec moi pour dire qu'après

  8   avoir examiné tous les moyens possibles, vous serez d'accord avec moi si je

  9   dis qu'ils étaient certainement, ils faisaient certainement partie de cette

 10   armée. Il y avait certainement un lien avec quelqu'un, ai-je raison, Maître

 11   Residovic ?

 12   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, cette question a

 13   déjà été posée et le témoin a déjà répondu à cette même question.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Mme Henry Benjamin, vous lui avez posé la question

 15   et il a dit qu'il ne savait pas. Ce n'est pas la peine de lui reposer une

 16   deuxième fois la même question, alors qu'il a dit que, pour lui, il ne

 17   pouvait dire s'ils étaient intégrés dans l'armée ou pas.

 18   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Excusez-moi --

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Sinon, cela pourrait être interprété comme du

 20   harcèlement de témoin, ce qui n'est pas votre objectif.

 21   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Ceci n'est pas mon intention, Monsieur le

 22   Président. Peut-on montrer, s'il vous plaît, la pièce à conviction P775,

 23   s'il vous plaît.

 24   Q.  Je souhaite attirer votre attention au paragraphe 2, notamment ligne 9.

 25   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président.

Page 11151

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, vous avez la parole.

  2   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Mon éminente collègue vient de soumettre

  3   un document. Quant aux questions qui peuvent posées au sujet de ce

  4   document, je pense qu'il serait possible seulement si elle établit que le

  5   témoin a déjà vu ce document auparavant ou qu'il était au courant de cela

  6   car on ne peut pas poser des questions au sujet de son contenu sans établir

  7   ce genre de fondement.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Benjamin.

  9   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 10   Q.  Le 20 juin 1993, étiez-vous rattaché à la 306e Brigade ?

 11   R.  Nous y avons été rattachés mais je ne sais si c'était la date que venez

 12   de dire. C'était effectivement pendant 45 jours.

 13   Q.  Le 20 juin 1993 ferait partie de cette période de 45 jours, n'est-ce

 14   pas ?

 15   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, le  témoin vient de

 16   répondre de nouveau. Il a dit qu'il était rattaché à la 306e Brigade,

 17   cependant, si je vois bien ce document émane de la 7e Brigade musulmane. Je

 18   ne vois pas quel est le lien entre cela et la réponse que le témoin a

 19   donnée jusqu'à présent.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Il faut laisser l'Accusation terminer ses questions

 21   car il y a un lien qui est évident, dans la mesure que le document P204,

 22   daté du 18 juin 1993, le rattache à la 306e et qu'on a un document du 20

 23   juin 1993, émanant de l'autorité militaire qui fait une référence à un

 24   détachement et au MUP, où lui-même faisant partie du MUP. Il peut peut-être

 25   élucider pourquoi ce document du 20 juin mentionne le MUP, étant précisé

Page 11152

  1   que le 18 juin, le MUP de Mehurici est rattaché à la 306e.

  2   Mme Benjamin, posez-lui la question concernant la ligne 9, dans le

  3   paragraphe que vous vouliez lui poser.

  4   Allez-y.

  5   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  6   Q.  Je vous ai dit au départ qu'il s'agissait de la ligne 9 mais compte

  7   tenu de l'objection de mon éminente collègue de la Défense, je souhaite que

  8   l'on se penche sur la 3e ligne du paragraphe 2 pour établir le fondement.

  9   Ici, il est question : "Des 15 membres du MUP qui sont placés sous le

 10   commandement du 2e Détachement." Est-ce que ce document vous montre que le

 11   MUP a été impliqué dans cette situation ?

 12   R.  Je n'ai pas vu ce site jusqu'à présent. Quant à la région mentionnée,

 13   Bijelo Bucje, c'est une question qui n'est pas du tout près de Mehurici.

 14   Dans le cadre de poste de sécurité publique de Travnik, il y avait d'autres

 15   postes de police, mais ce poste de police n'est pas celui dans lequel je

 16   travaillais moi-même.

 17   Q.  Je sais cela, mais, simplement, je souhaitais que l'on voie que le MUP

 18   a été impliqué dans cela car vous étiez dans le cadre du MUP, n'est-ce pas

 19   ?

 20   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président --

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Que vouliez-vous dire ?

 22   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Le témoin vient de dire qu'il n'y avait

 23   pas de lien entre lui et cette région. Si le témoin ne connaît pas le

 24   document, s'il n'a jamais été dans cette région, et la région de Travnik

 25   est énorme, je ne vois pas comment mon éminente collègue peut continuer à

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  1   poser ces questions. Nous voyons tous bien le mot "MUP", mais cela n'a rien

  2   à voir avec ce témoin.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Benjamin, le témoin a dit que le document

  4   P775 ne peut le concerner puisque le rattachement du MUP, dans la région de

  5   Bijelo Buca, n'était pas son secteur à lui. Mais vous, vous en concluez-

  6   vous que le MUP avait pu être associé à la

  7   7e Brigade, mais pas, en tout cas, avec ce témoin. C'est ce que la Défense,

  8   à juste titre, fait valoir.

  9   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Monsieur le Président, je suis

 10   absolument d'accord avec cela. Mais la raison pour laquelle l'on utilise ce

 11   document maintenant est contenu dans la ligne 9. J'attirais son attention à

 12   la ligne 3 également pour que mon éminente collègue puisse réaliser que le

 13   MUP, partout, était subordonné à la 306e Brigade dans des régions

 14   différentes. La question ne concerne pas un bataillon qui était dans cette

 15   zone. Mais si elle me permet de poursuivre, elle va voir ce que je souhaite

 16   établir.

 17   Puis-je poursuivre ?

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de donner la réponse. Concernant la 306e

 19   Brigade, dans ce document P775, sauf erreur de ma part, je ne vois, à aucun

 20  moment, mentionnée la 306e Brigade. Il y a la 312e et la 7e, mais je ne vois

 21   pas la 306e dans ce document.

 22   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Monsieur le Président, comme je l'ai

 23   déjà dit, le document n'est pas présenté par rapport à la brigade à

 24   laquelle le témoin a été subordonné, mais le document est présenté afin de

 25   montrer ce qui est contenu dans la ligne 9. Il s'agit là des questions

Page 11154

  1   liées à ma question concernant laquelle mon éminente collègue m'a accusé

  2   d'avoir posé et reposé la même question. Je souhaite montrer ce document au

  3   témoin pour que l'on établisse si ma conclusion a été correcte en ce qui

  4   concerne la ligne 9 et les étrangers.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : La ligne 9 de quel paragraphe ?

  6   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Du paragraphe 2, Monsieur le

  7   Président. Avant cela, j'ai posé au témoin la question de savoir si, compte

  8   tenu de tout ce qui s'est passé, s'il était d'accord avec moi pour dire que

  9   les Moudjahiddines, en raison de tous les pouvoirs dont ils bénéficiaient

 10   apparemment, étaient subordonnés, éventuellement, à l'ABiH ? Il a dit non.

 11   Je souhaitais attirer son attention sur la ligne 9 pour obtenir son opinion

 12   à ce sujet. Ceci n'a rien à voir avec la question de savoir à qui, lui, il

 13   était subordonné.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : La ligne 9, je la traduis. Il est indiqué que,

 15   durant l'action, quatre soldats, citoyens étrangers arabes, ont été tués,

 16   ainsi que trois autres soldats de la 312e. C'est cela la ligne 9. Vous

 17   vouliez lui poser la question de savoir s'il savait que des étrangers --

 18   que quatre soldats étrangers ont été tués ?

 19   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] S'ils l'ont fait, alors qu'ils

 20   agissaient aux côtés de la 312e Brigade motorisée.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, mais lui, il n'appartient pas à la 312e.

 22   Comment peut-il répondre à la question, alors qu'il ne fait pas partie de

 23   la 312e ? Il est de la 306e, lui.

 24   La Défense.

 25   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Effectivement, Monsieur le Président. A

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  1   deux ou trois reprises déjà, vous avez essayé d'expliquer cela à mon

  2   éminente collègue. Tout d'abord, il ne s'agit pas ici d'un témoin qui est

  3   en mesure de répondre à cette question. Deuxièmement, sur la base de ce

  4   document, nous pouvons voir que l'on fait référence ici à un autre ordre

  5   qui n'est pas l'ordre qui a été montré par mon éminente collègue.

  6   Troisièmement, nous avons fait venir ici deux membres de la 312e Brigade,

  7   et si mon éminente collègue souhaitait parler de cela, elle avait

  8   l'occasion de faire cela. Ce témoin ne peut pas dire plus par rapport à ce

  9   qu'il a déjà dit en répondant aux questions de mon éminente collègue.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Benjamin, vous avez pris note de ce que vous

 11  ai dit, de ce que la Défense dit. Ce témoin n'est pas de la 312e, donc il ne

 12   peut pas répondre à une opération où la 312e est censée être concernée

 13   puisque, lui, il n'aurait été rattaché que pendant quelques jours à la

 14   306e. Poursuivez.

 15   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Je ne vais plus parler de cette

 16   question.

 17   Avec tout le respect que je vous dois, Monsieur le Président, peut-on

 18   montrer au témoin la pièce à conviction de l'Accusation, P430.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Allez-y.

 20   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 21   Q.  Monsieur le Témoin, vous nous avez dit qu'autour de la date de ce

 22   document, vers le 24 juin 1993, vous étiez commandant au poste de police à

 23   Mehurici et vous avez été rattaché à la 306e Brigade. Ai-je raison de dire

 24   cela ?

 25   R.  Je ne sais pas exactement quelle était la date de notre rattachement.

Page 11156

  1   Mais si vous citez un événement, cela m'aidera à situer cela dans le temps.

  2   Q.  Vous vous souvenez peut-être du document P204 qui vous a été montré et

  3   que vous avez reconnu. C'était un document en date du 18 juin qui porte sur

  4   le rattachement. Le 24 juin est une date ultérieure à la date du 18 juin

  5   donc je suppose que vous y étiez rattaché à ce moment-là, n'est-ce pas ?

  6   Merci.

  7   Je souhaite que vous examiniez maintenant de plus près le paragraphe 2.

  8   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Excusez-moi. Mon éminente collègue a posé

  9   une question, alors que je n'ai pas entendu le témoin répondre à la

 10   question précédente.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.

 12   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation]

 13   Q.  Je vous ai dit que, sur la base de la pièce à conviction de

 14   l'Accusation P204 en date du 18 juin 1993, concernant le rattachement, que

 15   P430 était un document en date du 24 juin donc vous étiez certainement

 16   rattaché, à ce moment-là ?

 17   R.  Je suppose.

 18   Q.  Il n'est pas nécessaire de dire je suppose.

 19   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Peut-on montrer au témoin le document

 20   P204, le premier document qui a été montré au témoin.

 21   Q.  Si vous examinez le haut de ce document, il y est écrit, "le 18 juin

 22   1993"; ai-je raison ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Si vous examinez le point 1 de "l'ordre". D'accord. Examinez la pièce

 25   P430, veuillez examiner la date.

Page 11157

  1   R.  Le 24 juin.

  2   Q.  Le 24 est une date ultérieure à celle du 18, et donc vous étiez déjà

  3   rattaché; ai-je raison ? D'accord, nous pouvons poursuivre.

  4   R.  Très bien.

  5   Q.  Examinons le paragraphe 2. Avez-vous lu l'ensemble du paragraphe 2 ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  A la lumière de la réponse que vous avez donnée à mon éminente

  8   collègue, à savoir, lorsque vous avez dit que vous êtes allé à l'école de

  9   Mehurici vous-même et que votre devoir était de protéger les civils là-bas,

 10   est-ce qu'à la lumière du paragraphe 2, vous pouvez nous expliquer ce à

 11   quoi l'on fait référence ici car, apparemment, quelque chose nous manque ?

 12   Est-ce que vous pourriez nous éclaircir ce point ?

 13   R.  La police civile sécurisait, à la fois, les civils à l'école et les

 14   prisonniers de l'armée du HVO, qui étaient dans les deux garages. En ce qui

 15   concerne le harcèlement, aucun civil n'a porté plainte auprès de moi au

 16   sujet de cela, ni les soldats d'ailleurs. Je me souviens d'un événement

 17   lors duquel un Moudjahiddine, ou peut-être deux, souhaitaient entrer dans

 18   la salle où étaient placés les civils, mais la police les a empêchés.

 19   Q.  Serait-il exact de dire -- et corrigez-moi si je me trompe, peut-on

 20   dire que les civils à l'école de Mehurici ont reçu un traitement approprié,

 21   ou est-ce qu'il ne serait pas exact de dire cela ?

 22   R.  Compte tenu des conditions qui prévalaient à l'époque, je peux dire

 23   qu'ils mangeaient la même chose que moi. Nous, nous ne pouvions pas leur

 24   fournir de meilleures conditions que cela. Je pense que nous leur avons

 25   fourni ce que nous étions en mesure de leur fournir.

Page 11158

  1   Q.  Il s'agit là des propos extrêmement fermes. "Ils sont dans un risque de

  2   mort." Est-ce que vous savez à quoi on fait référence lorsque l'on parle de

  3   la "brigade de la mort" ?

  4   R.  Je l'ignore.

  5   Q.  Pourquoi pensez-vous que les membres de la commission chargée des

  6   prisonniers étaient préoccupés pour le sort des 247 civils croates dans la

  7   salle de sport ? Pourquoi étaient-ils préoccupés si, effectivement, comme

  8   vous le dites, les civils recevaient un traitement approprié ? Pourquoi

  9   exprimeraient-ils leur préoccupation ?

 10   R.  Je ne sais pas pourquoi ils étaient préoccupés. Je ne sais pas comment

 11   répondre à cette question. Je sais à quoi ressemblait mon rapport envers

 12   eux, et le rapport de mes collègues. Notre rapport envers ces civils était

 13   certainement correct, et encore aujourd'hui, je rencontre les civils qui y

 14   avaient séjourné.

 15   Q.  Ai-je raison de dire que l'école de Mehurici était gardée par la police

 16   militaire ? Ai-je raison de dire cela ?

 17   R.  Peut-être au début, mais nous, les policiers civils, nous avons repris

 18   le contrôle de cela; cependant, nous avons collaboré avec la police

 19   militaire.

 20   Q.  Si je dis que ces étrangers dont vous nous avez parlé, qui sont venus à

 21   Mehurici, si je vous disais qu'eux aussi ils gardaient l'école, est-ce que

 22   j'aurais raison de dire cela ?

 23   R.  A l'époque, non.

 24   Q.  Pourriez-vous nous dire à quel moment ils gardaient l'école ?

 25   R.  Je sais simplement qu'au début ils étaient installés dans l'école, et

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  1   par la suite, ils sont allés au camp de Poljanica et ils n'étaient plus à

  2   l'école. Mais je suis au courant d'un incident lors duquel un Arabe est

  3   venu. Il souhaitait entrer dans la salle dans laquelle se trouvaient les

  4   civils, et je sais que les policiers ne lui ont pas permis cela. Je pense

  5   qu'à ce moment-là, des membres de la police militaire ont accouru, eux

  6   aussi, et tout s'est bien terminé, donc cet étranger n'est pas entré dans

  7   la salle. D'ailleurs, une note existe à ce sujet, note qui a été envoyée

  8   aux autorités de Travnik.

  9   Q.  Compte tenu du fait qu'il s'agissait là de votre zone de

 10   responsabilité, pour ainsi dire, je suppose que, lorsque vous nous dites

 11   que les étrangers, les Moudjahiddines, n'avaient absolument rien à voir

 12   avec le contrôle de l'école de Mehurici, je suppose que vous voulez dire

 13   que c'est ainsi que les choses se sont passées à l'époque.

 14   Très bien. En répondant à la question de mon éminente collègue, vous

 15   avez dit que la Croix rouge -- ou est-ce que vous pourriez répondre.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, allez-y.

 17   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation]

 18   Q.  Est-ce que vous pouvez confirmer ma suggestion, à savoir que, dans

 19   votre zone de responsabilité, en tant que commandant du poste de police de

 20   Mehurici, vous saviez que les Moudjahiddines ne contrôlaient pas l'école et

 21   n'étaient pas du tout responsables pour la garde des civils à l'école ?

 22   R.  Oui, je le savais.

 23   Q.  En répondant à la question de mon éminente collègue, vous avez dit que

 24   la Croix Rouge n'avait pas d'objection par rapport à la manière dont les

 25   civils étaient traités; ai-je raison de dire cela ?

Page 11160

  1   R.  J'ai dit que je ne sais pas. Je ne suis pas au courant de tels

  2   reproches. C'est ce que je dis.

  3   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Peut-on montrer, s'il vous plaît,

  4   Monsieur le Président, la pièce à conviction de l'Accusation P740, s'il

  5   vous plaît.

  6   Q.  À partir de la ligne --

  7   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, avant que ma

  8   consoeur ne passe à la ligne 12 ou 13, comme elle a précisé, il serait

  9   encore une fois utile de connaître pour laquelle elle souhaite poser des

 10   question à ce témoin à propos de ce document. Je crois qu'il faut demander

 11   au témoin s'il connaît le document, et on doit lui demander d'où vient ce

 12   document, à qui il appartient.

 13   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Avec tout le respect que je vous

 14   dois, Monsieur le Président, ceci, afin que le témoin puisse -- si le

 15   témoin avait comparé ces déclarations avec un autre document, il n'a pas

 16   besoin de savoir d'où vient le document ou s'il connaît le document ou à

 17   qui il appartient. La question qui suit -- la question qui va être posée

 18   est un lien direct avec ce qui précède. Il a dit que la Croix rouge, pour

 19   autant qu'il était au courant à l'époque, n'a soulevé aucune objection. Il

 20   s'agit d'un document de la Croix rouge. Je crois que je peux poursuivre. Je

 21   n'ai pas besoin de poursuivre.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Il y a un petit problème concernant les dates. Ce

 23   document date du 4 novembre, et la mention à l'intérieur du document, elle

 24   concerne quelle période ?

 25   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Il est daté du 4 novembre 1993. Je

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  1   crois qu'il évoque -- dans une lettre, le 16 octobre 1993 est précisé, donc

  2   cela doit être au tour de cette période. Si ma consoeur avait fait

  3   attention, au début de ma question, j'ai demandé -- la question que j'ai

  4   posée, précisément, au témoin était le --concerne le temps au cours duquel

  5   il exerçait ce rôle-là. Il a commencé par dire que c'était un jeune

  6   officier de police au début, et qu'ensuite, il a été nommé commandant et,

  7   ensuite, rattaché au MUP pendant 40 jours. Tout ceci couvre la période au

  8   cours de laquelle il était commandant. Je voulais simplement vérifier qu'il

  9   s'agissait de la personne -- de la même personne dont il parlait.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : La Défense.

 11   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne vois aucun

 12   rapport entre le témoignage de ce témoin et le document en question. La

 13   question posée par ma consoeur se rapportait aux civils qui étaient dans

 14   l'école primaire jusqu'au 24 juin. Ce document ne porte pas sur cet

 15   événement-là, ni sur la manière dont les personnes ont été traitées.

 16   Deuxièmement, le témoin a dit que la Croix rouge n'a soulevé aucune

 17   objection lorsqu'elle a rendu visite à ces écoles. Ce document est daté du

 18   mois de novembre et il vient du HVO de la Croix rouge. Il faut comprendre à

 19   qui ce document a été transmis. Nous ne constatons pas que ce document a

 20   été transmis au témoin, et si le témoin doit répondre à une quelconque

 21   question, il faut établir un lien entre ce témoin et le témoignage du

 22   témoin et le document. Si c'est cela que ma consoeur souhaite démontrer. Je

 23   ne vois pas qu'il y a un tel lien et je ne pense pas que des questions

 24   peuvent être posées à propos de ce document.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Le problème que je vois : il nous a dit il a été

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  1   rattaché à la 306e pendant 40 jours. Si le début du rattachement est le

  2   mois de juin, en octobre ou novembre, il n'est plus rattaché à la 306e.

  3   L'acte d'accusation, concernant les civils détenus à l'école élémentaire de

  4   Mehurici, s'arrête au 24 juin. La période de ce document n'est pas

  5   concernée par le chef 3 de l'acte d'accusation, donc là on ne sait pas,

  6   mais sauf si vous lui avez posé la question : est-ce que des gens ont été à

  7   l'école ? Mais je vais lui poser. Comme cela, cela va résoudre le problème.

  8   Monsieur, en octobre, autant que vous vous en souvenez -- parce qu'il est

  9   très difficile de se souvenir des dates -- en octobre ou en  novembre, est-

 10   ce que, d'après votre connaissance et vos souvenirs, il y a eu des civils

 11   qui auraient été protégés, gardés dans l'école élémentaire de Mehurici,

 12   d'après votre souvenir ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, pas au mois de novembre.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, il n'y en avait pas ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Jusqu'à quelle date ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Jusqu'au moment de l'échange, jusqu'à

 18   l'échange. Jusqu'à ce qu'ils soient échangés. Je ne connais pas la date

 19   exacte.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Cet échange serait intervenu vers quelle date

 21   d'après vous ? Juillet, août ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être un mois après qu'on les ait emmenés

 23   de Bila. Peut-être un mois après -- avant l'échange.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Cela a été fini ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, il n'y avait personne.

Page 11163

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc il n'y a eu plus personne.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, l'Accusation, il est difficile de faire un

  4   lien entre le témoin, ce qu'il dit, et le contenu de ce document qui --

  5   concernant les supposées personnes qui auraient été détenues à Mehurici.

  6   Cela serait octobre, novembre. Le témoin dit qu'il n'y avait personne à

  7   l'école. Telle fut notre hypothèse, mais qui va -- il va y répondre.

  8   A votre connaissance, en octobre ou novembre, est-ce que, dans la

  9   ville de Mehurici, il y aurait pu y avoir des lieux où auraient pu être

 10   détenues des personnes ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas. Peut-être, s'il y avait

 12   quelqu'un dans le camp des Moudjahiddines, c'est la seule chose qui me

 13   vient à l'esprit. Pour ce qui est des autres endroits, je ne sais pas.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, votre réponse ce serait que, s'il y avait des

 15   gens qui étaient détenus, ce serait dans le camp des Moudjahiddines, mais

 16   pas dans l'école. Bien.

 17   Madame Benjamin, dans ces conditions, nous perdons notre temps sur ce

 18   document.

 19   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vais

 20   tourner les choses ainsi.

 21   Q.  Nous allons simplement vérifier la période autour de laquelle vous

 22   étiez commandant des forces de police civile dans la région de Mehurici.

 23   Quand avez-vous cessé d'être commandant dans la région de Mehurici ?

 24   R.  Je n'y suis pas resté longtemps, deux mois peut-être.

 25   Q.  Nous savons que vous avez commencé au mois de juin. Quand vous dites

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  1   "deux mois environ", cela correspond à quoi ?

  2   R.  J'ai été nommé commandant à cet endroit-là, de façon provisoire, car

  3   ils devaient envoyer quelqu'un qui avait plus d'expérience. Lorsqu'on

  4   pouvait de nouveau emprunter les routes, un nouveau commandant est arrivé

  5   de Travnik. J'ai été commandant pour quelques deux ou trois mois, mais je

  6   ne me souviens pas exactement.

  7   Q.  Merci. Je suppose qu'après avoir abandonné -- remis votre portefeuille

  8   de commandant, vous ne saviez absolument pas ce qui se passait dans la

  9   région de Mehurici.

 10   R.  J'ai continué à travailler au poste de police. J'étais policier, ou

 11   plutôt adjoint.

 12   Q.  Vous avez continué à travailler comme policier ou adjoint, alors que

 13   vous n'étiez plus commandant. Combien de temps avez-vous été adjoint ?

 14   R.  Jusqu'en 1990, peut-être -- je ne sais pas.

 15   Q.  Jusqu'en 1990.

 16   R.  J'essaie -- j'essaie de --

 17   Q.  Puis-je vous aider ? Était-ce jusqu'à la fin de 1993 ? Etiez-vous

 18   commandant adjoint jusqu'à la fin de 1993, jusqu'au mois de mars 1994, dans

 19   la région de Mehurici ? Jusqu'à quand ? Jusqu'à la fin de l'année, jusqu'au

 20   début de l'année suivante ?

 21   R.  J'ai été au poste de police. J'ai travaillé au poste de police. J'ai

 22   été là tout le temps, jusqu'en 1995 et 1996. Je ne sais pas si cela est

 23   très important, à savoir si j'étais assistant ou commandant adjoint. Je ne

 24   peux pas être suffisamment précis à cet égard.

 25   Q.  Merci. La question que je vous pose, en tant que commandant adjoint :

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  1   au cours de cette période, au mois de novembre 1993, auriez-vous entendu

  2   parler de détenus dans l'école de Mehurici ? Il s'agissait bien de votre

  3   secteur.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Il a déjà répondu à cette question. Il a dit qu'il

  5   n'y en avait pas.

  6   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Merci.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Il serait plus judicieux de lui demander : vous

  8   dites que vous êtes devenu commandant adjoint, qui était, à ce moment-là,

  9   le commandant ? Qui était le chef, puisque vous, vous étiez adjoint ? Vous

 10   avez le nom de la personne qui a été nommée pour remplir les fonctions de

 11   commandant à compter du mois de septembre, octobre, novembre ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois qu'il s'appelait Hamed Mesanovic.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Au moins comme cela, nous progressons.

 14   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 15   Q.  Connaissez-vous le magasin du ferronnier à Mehurici ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Pourriez-vous nous dire ce que vous avez entendu dire à propos de ce

 18   magasin de ferronnier à Mehurici pendant que vous étiez en poste ?

 19   R.  Je ne comprends pas votre question.

 20   Q.  Savez-vous s'il y avait des détenus logés chez le ferronnier à

 21   Mehurici ?

 22   R.  Je sais. Je sais qu'il y avait des membres du HVO qui ont été détenus à

 23   cet endroit-là. Je ne sais pas combien il y en avait, mais je sais qu'ils

 24   étaient logés dans deux pièces. Chacun appelait cela l'atelier du maréchal-

 25   ferrant, mais il y avait deux garages en face l'un de l'autre, pas très

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  1   loin du poste de police. Il s'agissait des locaux de la police civile.

  2   Q.  L'atelier du maréchal-ferrant, d'après vous, était près des locaux de

  3   la police civile; c'est exact ?

  4   R.  [aucune réponse verbale]

  5   Q.  C'est là où vous travailliez vous-même; c'est exact ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  En tant que membre de la police chargée du maintien de l'ordre public,

  8   ne pensez-vous pas que vous auriez dû aller enquêter et aller voir ce qui

  9   se passait dans l'atelier du maréchal-ferrant ?

 10   R.  Notre responsabilité consistait à protéger les détenus, les prisonniers

 11   de guerre, de façon à ce qu'on puisse empêcher qu'on leur fasse du mal. Je

 12   ne sais pas combien de personnes -- des organes de la sécurité militaire

 13   avaient l'autorisation de rentrer, et peut-être faire sortir quelqu'un. Je

 14   ne sais pas si quelqu'un est venu. On les interrogeait, on faisait des

 15   déclarations auprès des officiers chargés de la sécurité; sinon, ils

 16   étaient protégés par des membres de la police civile.

 17   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que

 18   l'on peut montrer au témoin la pièce de l'Accusation portant le numéro

 19   P660, s'il vous plaît.

 20   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Avant de montrer ce document au témoin, je

 21   crois que la façon dont cette dernière réponse a été traduite n'est peut-

 22   être pas très claire. Je demanderais à ma consoeur, peut-être, de réitérer

 23   sa question. J'ai entendu le témoin dire que c'était à eux de s'occuper des

 24   prisonniers et de les emmener à l'école -- dans le bâtiment de l'école où

 25   les officiers de la sécurité les interviewaient -- les questionnaient. Cela

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  1   a été retranscrit de telle façon à ce qu'on ne comprend pas très bien qui

  2   faisait quoi.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Reposez la question pour qu'on y voit clair sur la

  4   question de la forge.

  5   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] C'était, effectivement, ce qu'est

  6   sous-entendu par la question.

  7   Q.  Pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, Monsieur, qui était chargé de

  8   surveiller les détenus à la forge ?

  9   R.  Cela incombait au poste de police, au MUP; autrement dit, mes hommes,

 10   la police civile.

 11    M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, il y a deux avocats --

 12   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Oui, je vois qu'il y a deux conseils

 13   debout.

 14   Monsieur le Président, je souhaite encore comprendre le rapport qui

 15   existe entre ce témoin et le document, avant que d'autre question ne soit

 16   posée là-dessus.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez la parole aussi.

 18   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Même question que précédemment. Ce

 19   document est un document militaire qui remonte à la période où le témoin

 20   travaillait au sein du MUP. Il n'était pas rattaché à la 306e Brigade;

 21   autrement dit, nous avançons qu'il ne doit rien dire à ce sujet. On ne doit

 22   pas recueillir ses commentaires ici.

 23   Q.  Je crois que, dans ce témoignage, le témoin a évoqué le corps d'un

 24   étranger qui a été découvert sur cette route et je crois qu'il est très

 25   important pour la Chambre de première instance, ainsi que pour l'Accusation

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  1   et la Défense, de pouvoir faire la clarté là-dessus, et comprendre ce qu'il

  2   entendait par là. Les questions, que j'aurais aimé lui poser, si je pouvais

  3   lui poser la question concernant le deuxième paragraphe, à la page 2,

  4   s'agissait-il de la même personne ou du même incident que vous avez évoqué

  5   un peu plus tôt, lors de l'interrogatoire principal ?

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Vous pouvez poser la question, puisque là

  7   il y a un lien. Il a, effectivement, parlé d'un étranger qui a été tué,

  8   donc posez-lui la question. Bien reposez-lui la question, parce que je

  9   crois qu'il n'a pas très bien compris.

 10   Q.  Monsieur Jusic, un peu plus tôt, dans une réponse que vous avez fournie

 11   à ma consoeur, vous avez précisé qu'on avait découvert un corps à Zukija

 12   Most sur cette route. Vous en souvenez-vous ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  La question que je vous pose est la suivante, lorsque vous lisez le

 15   paragraphe qui se trouve à la page 2, est-ce bien cela que vous évoquez

 16   lorsque vous avez répondu à ma consoeur.

 17   R.  Puis-je d'abord lire ceci, s'il vous plaît.

 18   Q.  Bien sûr.

 19   R.  Ceci est arrivé en 1992. Ce que j'ai dit à propos de cet étranger, de

 20   l'enquête menée par la brigade criminelle, je ne sais pas quoi vous dire

 21   d'autre.

 22   Q.  Il s'agit de l'année 1993, donc il s'agit de quelque chose qui est

 23   complètement différent, d'après vous.

 24   R.  Un instant s'il vous plaît, j'aimerais pouvoir lire ceci. Je ne sais

 25   pas s'il s'agit de la même chose ou pas, cela aurait pu être la fin de

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  1   l'année 1992 ou le début de l'année 1993, mais je vous ai dit tout ce que

  2   je savais déjà à propos de cela.

  3   Q.  Mais vous êtes d'accord avec moi pour dire que, corrigez-moi si je me

  4   trompe, que certains de ces étrangers portaient un uniforme qui ressemblait

  5   à l'uniforme des soldats de l'ABiH, est-ce exact ?

  6   R. Je ne sais pas. Tous les uniformes se ressemblaient à ce moment-là, les

  7   étrangers portaient des uniformes différents. Ils portaient quelque chose

  8   qui ressemblait plutôt à leur habit traditionnel.

  9   Q.  Merci. L'avant dernière question que je souhaite vous poser, ou du

 10   moins j'aimerais recueillir votre commentaire à cet égard. Vous en tant que

 11   commandant des forces de police de Mehurici, et en tant que membre des

 12   forces de police qui jurent de faire respecter la loi et de protéger les

 13   citoyens, est-ce que vous vous sentez d'une manière ou d'une autre

 14   responsable pour la situation catastrophique et chaotique qui a pu être

 15   engendrée par les étrangers qui sont venus dans votre pays ?

 16   R.  Nous avons connu -- rencontré un certain nombre de problèmes avec les

 17   Croates avant même l'arrivée des Moudjahiddines. Pour autant que je m'en

 18   souvienne, en tant que policier, j'ai été capturé à un endroit appelé

 19   Cukle, à une époque, où je pensais qu'il n'y avait pas d'étrangers dans la

 20   région. J'ai également dit que l'arrivée des étrangers a simplement fait

 21   empirer les choses, mais les problèmes existaient déjà avant, avant leur

 22   arrivée, dans la région de Mehurici.

 23   Q.  Je crois que vous n'avez pas très bien compris ma question, donc je

 24   vais la reposer. Est-ce que vous estimez que vous avez manqué à votre

 25   devoir en tant que commandant de la police, vous aviez le devoir de

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  1   protéger les habitants de Mehurici, est-ce que vous pensez ne pas avoir

  2   rempli vos obligations ?

  3   R.  Nous travaillions dans un poste de police où les Musulmans et les

  4   Croates travaillaient ensemble. Ensuite, les Croates sont partis et, après

  5   cela, nous contrôlions beaucoup moins ou plus difficilement les villages

  6   habités par les Croates. Je ne sais pas si je suis coupable de cela ou pas,

  7   c'est à vous d'en décider.

  8   Q.  Est-ce que vous estimiez, qu'à la lumière du fait que vous avez porté à

  9   l'attention de la Chambre de première instance, que les Moudjahiddines sont

 10   venus dans la région de Mehurici, pendant que vous étiez en poste, vous

 11   avez indiqué qu'ils étaient minoritaires, est-ce que vous estimez qu'on

 12   avait laissé tomber en quelque sorte la population et que l'armée et la

 13   police n'avaient pas fait le nécessaire. Est-ce que vous estimez que les

 14   choses se sont passées ainsi ?

 15   R.  Pourriez-vous répéter votre question, s'il vous plaît ?

 16   Q.  Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que les Moudjahiddines étaient

 17   autorisés à faire tout ce qu'ils entendaient ou voulaient, alors pendant

 18   votre mandat ?

 19   R.  Ils n'étaient pas autorisés à agir, mais certains faisaient que nous ne

 20   pouvions pas empêcher. Le problème c'est que ces questions-là devaient être

 21   traitées à un niveau beaucoup plus élevé, et c'est la police militaire qui

 22   aurait dû intervenir, et non pas -- ce n'était pas nous à intervenir au

 23   niveau du poste de police.

 24   Q.  Est-ce que, d'après vous, il y avait une raison peut-être pour laquelle

 25   on n'avait pas traité cette question ?

Page 11171

  1   R.  Les Moudjahiddines, il est vrai, recueillaient la sympathie de certain

  2   nombre d'habitants de la région, pas tous, bien sûr. Ils avaient épousé des

  3   jeunes filles de la région, je ne sais pas. Je parle des Moudjahiddines qui

  4   étaient là. Ils ont aidé les gens, mais ils ont également demandé à ces

  5   gens de respecter certain code au niveau vestimentaire, par exemple,

  6   certains étaient plus religieux que d'autres. Il m'était assez difficile

  7   d'expliquer tout ceci.

  8   Par exemple, après avoir établi ces liens étroits entre différentes

  9   familles, j'arrêtais, par exemple, le beau-frère de mon voisin, par

 10   exemple, qui avait épousé quelqu'un de cette famille, de la famille des

 11   Moudjahiddines.

 12   Q. Pour finir la dernière question que je souhaite vous poser, seriez-vous

 13   d'accord avec moi pour dire que les civils ne contrôlaient pas ou

 14   n'arrivaient pas à assurer le maintien de l'ordre public, que c'est, en

 15   fait, la police et l'armée qui assuraient cela ?

 16   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Peut-être que le témoin a compris la

 17   question posée par ma consoeur, mais je ne l'ai pas comprise que la

 18   question porte sur des civils.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est quand même très compliqué.

 20   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation]

 21   Q.  Il y a quelques instants, en réponse à une question que je vous avais

 22   posée précédemment, vous avez répondu, en disant qu'il était difficile de

 23   traiter la question des Moudjahiddines à cause des liens qu'ils avaient en

 24   quelque sorte établis avec la population locale. La question que je vous

 25   posais était la suivante : qui a assurait le maintien de l'ordre public ?

Page 11172

  1   Etait-ce les civils ou la police et l'armée ? Qui assurait le maintien de

  2   l'ordre public ?

  3   R.  La police, la police militaire, mais je ne sais pas comment expliquer

  4   ceci. Il y avait des lignes de front de part et d'autre. Il y avait

  5   d'autres difficultés qui se greffaient là-dessus aussi, et à partir du

  6   commandement du MUP, ou au commandement du MUP, nous recevions des

  7   instructions, nous demandant de ne pas attiser le conflit, et d'essayer au

  8   contraire d'aplanir les choses.

  9   Nous ne recherchions pas difficulté particulière et il fallait calmer

 10   le jeu. Nous avons rempli notre rôle au mieux, étant donné les

 11   circonstances. Puisque nous étions en temps de guerre, ce n'est pas la même

 12   chose que lorsqu'on est en temps de paix. Vous auriez dû y vivre pour

 13   comprendre. Je ne sais pas comment vous l'expliquez autrement.

 14   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation]   Merci beaucoup,

 15   J'en ai terminé avec le contre-interrogatoire.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : -- à la Défense. Il nous restera après la reprise

 17   trois quart d'heure. Théoriquement, il peut y avoir des questions

 18   supplémentaires, et les Juges vous font savoir qu'ils avaient des

 19   questions. Alors, concernant les questions supplémentaires, il vous faut

 20   combien de minutes ?

 21   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Pas plus que cinq minutes, Monsieur le

 22   Président.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Les autres défenseurs ?

 24   M. IBRISIMOVIC : [interprétation]  Monsieur le Président, si nous avons des

 25   questions, cela ne durera pas plus que cinq minutes.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. La Défense aura besoin de dix minutes, ce qui

  2   nous amènera à 1 heure 10. Il faudra que les Juges synthétisent leur

  3   question pour que l'audience se termine à 13 heures 45 parce que,

  4   n'oublions pas, que demain nous avons deux autres témoins. L'audience est

  5   suspendue, elle reprendra vers 12 heures 55.

  6   --- L'audience est suspendue à 12 heures 13.

  7   --- L'audience est reprise à 12 heures 59.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais donner la parole à la Défense pour les

  9   questions supplémentaires.

 10   Nouvel interrogatoire par Mme Residovic : 

 11   Q.  [interprétation] Monsieur Jusic, en tant que policier, en tant que

 12   commandant du poste de police, en 1993, en cette qualité-là,  ou plutôt

 13   quelle a été votre attitude à l'égard de la protection des civils ?

 14   Faisiez-vous une distinction quelconque d'après leur appartenance ethnique

 15   ou religieuse ?

 16   R.  Non, on ne faisait aucune différence.

 17   Q.  Monsieur Jusic, mon éminente collègue vous a présenté un document, le

 18   document P204. C'est le document du 18 juin 1993.

 19   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je demanderais que l'on fournisse au

 20   témoin, encore une fois, ce document.

 21   Q.  Monsieur Jusic, en répondant aux questions de mon éminente collègue,

 22   vous avez dit qu'à un niveau supérieur, on s'était mis d'accord pour vous

 23   rattacher à la 306e Brigade. Ma collègue vous a cité quelques paragraphes

 24   de cet ordre. A la fin de l'ordre, il est dit qui sont les destinataires de

 25   cet ordre de la 306e Brigade. Pourriez-vous nous dire si les obligations,

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  1   qui figurent aux points allant de 1 à 10, vous concernent uniquement ou si

  2   cela concerne tous ceux qui sont énumérés dans ce document ?

  3   R.  Cela concerne tous ceux qui y figurent.

  4   Q.  A ma question et, par la suite, à une question posée par mon éminente

  5   collègue, vous avez répondu en disant qu'à un moment, pendant 45 jours,

  6   vous avez été affecté à des tâches de combat. Pourriez-vous nous dire à

  7   quel endroit vous avez été déployé aux tâches de combat pendant ces 45

  8   jours ?

  9   R.  Vous voulez savoir l'endroit précis ?

 10   Q.  Oui. Etait-ce une ligne de défense, des positions de combat, ou était-

 11   ce les tâches que l'on voit figurer ici ?

 12   R.  On a été déployé sur la ligne de défense.

 13   Q.  Dites-moi dans quelle mesure une nouvelle tâche, qui vous a été confiée

 14   au moment de votre rattachement et qui consistait à vous affecter à la

 15   défense contre l'ennemi, dans quelle mesure cette tâche a eu un impact sur

 16   les obligations qui figurent ici ?

 17   R.  L'impact a été très grand.

 18   Q.  En tout, quel est le nombre de policiers qui sont restés au poste de

 19   police après votre déploiement sur les lignes de front ? Combien de

 20   policiers étaient en mesure de s'acquitter des obligations qui relèvent du

 21   maintien de l'ordre public, et cetera ?

 22   R.  Seuls deux policiers qui devaient surveiller les locaux, et qui

 23   devaient noter s'il y avait quoi que ce soit.

 24   Q.  En répondant aux questions de mon éminente collègue, vous avez répondu

 25   que pour comprendre la situation, il aurait fallu avoir été à votre place

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  1   ou à Mehurici pour voir ce qui était possible de faire. Dites-moi, s'il

  2   vous plaît, à l'époque et aujourd'hui en particulier, qu'en pensez-vous ?

  3   Le recours à la force envers ces étrangers ou ces individus est-ce que ceci

  4   aurait pu, à votre avis, aurait pu ouvrir un nouveau front de combat ?

  5   R.  Ce que je peux vous dire aujourd'hui, c'est compte tenu de la situation

  6   au mont Vlasic, là, il y avait des positions serbes. Tout de suite, de

  7   l'autre côté, on avait des positions croates. Personne ne se serait

  8   aventuré là-dedans. Je pense que ceci aurait été notre fin si on avait

  9   amorcé quoi que ce soit avec les Moudjahiddines. Plus tard, je ne sais plus

 10   à quel moment, je ne sais plus quelle année, on a estimé que le moment

 11   était venu de faire quelque chose sur le plan des Moudjahiddines. Mais je

 12   pense que cela aurait été une grosse erreur de le faire à ce moment-là. On

 13   n'avait même pas suffisamment d'effectifs pour les lignes de front. Comment

 14   aurait-on pu régler la situation avec les Moudjahiddines.

 15   R.  Monsieur Jusic, vous avez essayé d'apprécier leur nombre, d'évaluer

 16   combien ils étaient. Vous avez dit jusqu'à 1 000 peut-être en 1993. Dites-

 17   nous, s'il vous plaît, en quoi consistait leur puissance. C'était

 18   l'armement ou c'étaient d'autres éléments qu'il fallait évaluer avant

 19   d'entreprendre des mesures plus énergiques à leur encontre ?

 20   R.  A l'époque, il y avait des informations selon lesquelles dans notre

 21   zone, on voyait arriver également des étrangers d'Herzégovine qui faisaient

 22   peur aux Musulmans. Avec l'arrivée des Moudjahiddines, un certain nombre de

 23   Musulmans les acceptaient. Ils se sentaient plus en sécurité grâce à leur

 24   présence, tandis que d'autres n'étaient pas du même avis. C'est là,

 25   précisément à mon sens, qu'il y avait un problème. Ils avaient des

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  1   équipements, ils avaient de l'argent. Ils donnaient des armes aux jeunes

  2   hommes. Un certain nombre d'entre eux, ils les ont enrôlés.

  3   Q.  Excusez-moi. Si je vous ai bien compris, est-il exact que vous ne

  4   pouviez pas en réalité évaluer les conséquences que ceci aurait, le fait de

  5   prendre d'autres mesures à leur égard ? Ma question, même si vous avez

  6   répondu, est la suivante : qui devait prendre ce genre de décisions compte

  7   tenu de la situation ? Était-ce un problème qui relevait de la police, de

  8   l'armée ou des instances politiques ?

  9   R.  Des instances politiques, je pense. 

 10   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je vous remercie. Je n'ai pas d'autres

 11   questions.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Les autres avocats.

 13   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Deux

 14   questions seulement au sujet du même document que le témoin a sous les

 15   yeux.

 16   Contre-interrogatoire par M. Ibrisimovic : 

 17   Q.  [interprétation] Au numéro 2, s'il vous plaît, pouvez-vous examiner ce

 18   qui est écrit ici dans le document : "Dresser les postes de contrôle aux

 19   endroits suivants : 'Lager, Ovnak, Han Bila, Gornji Puticevo, entrée et

 20   sortie de Guca Gora.'" A-t-on respecté ce qui figure au point 2 ?

 21   R.  Je pense qu'à peu près, oui.

 22   Q.  Au point 3, s'il vous plaît. A-t-on respecté l'ordre pour ce qui

 23   concerne des patrouilles journalières, et pour ce qui concerne la sécurité

 24   de ces endroits ?

 25   R.  Il a été difficile de respecter cela. Il y avait beaucoup de localités.

Page 11177

  1   Il y avait peu de membres de la police que ce soit civile ou militaire.

  2   Q.  Je vous remercie.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Je vais donner la parole aux Juges qui vont

  4   vous poser des questions.

  5   Questions de la Cour :

  6   Mme LE JUGE RASOAZANANY : Est-il arrivé d'être saisi pour des crimes

  7   ou des délits en tant que policier à l'époque ?

  8   R.  Je n'arrive pas à me rappeler sur-le-champ. Vous faites référence à

  9   toute la durée de mon travail au sein de la police ou uniquement à la

 10   période de 1993 ?

 11   Mme LE JUGE RASOAZANANY : La période 1993. Vous avez fait des enquêtes sur

 12   des crimes ou des délits ?

 13   R.  A l'époque, j'étais policier et plus tard j'étais commandant. J'avais

 14   deux années d'expérience en sein de la police, enfin je ne sais pas

 15   exactement. Je n'arrive pas à me souvenir de cela, qu'il y ait eu ce genre

 16   de plaintes.

 17   Mme LE JUGE RASOAZANANY : Quelle personne était habilitée à vous saisir ?

 18   Les autorités militaires, les autorités civiles ? Le Procureur ? On n'avait

 19   jamais fait des enquêtes sur des crimes ?

 20   R.  Tout individu, tout particulier, pouvait s'adresser à nous pour

 21   rapporter un événement. On était tenu d'agir par la suite, informer la

 22   police judiciaire de Travnik, c'est là qu'il y avait le service compétent.

 23   Mme LE JUGE RASOAZANANY : Revenons à l'école militaire de Mehurici. Est-ce

 24   qu'il y avait des Moudjahiddines qui avaient occupé le 3e étage de l'école

 25   lorsque les Croates étaient détenus dans cette école ?

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  1   R.  Non.

  2   Mme LE JUGE RASOAZANANY : Vous confirmez qu'il y avait des Moudjahiddines

  3   avant l'arrivée des détenus croates dans cette école ?

  4   R.  Ils étaient stationnés à l'école, mais, avant cela, je ne sais pas la

  5   date. Je pense que c'était au moment où on a constitué un Bataillon de

  6   Mehurici. A ce moment-là, ils sont partis. Ils ont constitué leur camp à

  7   Poljanice. Ils n'étaient pas là, même avant l'arrivée des personnes de

  8   nationalité croate, au gymnase de cette école.

  9   Mme LE JUGE RASOAZANANY : Combien de jours vous avez monté la garde devant

 10   l'école lorsqu'il y avait les détenus croates dans cette école ?

 11   R.  On a monté la garde pendant toute la période jusqu'à l'échange. On n'a

 12   fonctionné pas tout de suite. C'était peut-être un ou deux jours après le

 13   conflit qu'on les a amenés. La police les a rassemblés et on a entrepris

 14   d'assurer leur garde. Là aussi au garage, là il y avait la forge, et ces

 15   soldats-là.

 16   Mme LE JUGE RASOAZANANY : Étiez-vous au courant de ce qui s'était passé

 17   dans cette école ? Des témoins ont comparu devant nous, et ces témoins ont

 18   déclaré qu'il y avait des passages à tabac sur les prisonniers, quelques

 19   prisonniers croates, êtes-vous au courant de cela ?

 20   R.  Je n'étais pas au courant de cela. Je n'ai pas reçu d'information à ce

 21   sujet par qui que ce soit. Il y avait une femme médecin qui s'adressait à

 22   nous. Si on avait besoin de quoi que ce soit pour quelqu'un à l'école, elle

 23   pouvait se déplacer. A ce moment-là, s'il y avait besoin, elle s'adressait

 24   à nous mais au nom de ces gens-là, elle ne s'est pas adressée à nous pour

 25   dire que quelqu'un avait besoin de quelque chose. Je ne me souviens pas que

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  1   quelqu'un aurait été passé à tabac et qu'elle nous en aurait informé.

  2   Mme LE JUGE RASOAZANANY : Vous nous avez dit, enfin, changeons de sujet.

  3   Vous nous avez dit que vous avez été appelé lorsqu'il y avait des pillages

  4   dans les maisons de Croates. Vous nous avez dit aussi que vous n'avez pas

  5   pu identifier les auteurs de ces pillages. Vous n'avez pu arrêter

  6   personne ? Vous n'avez pu arrêter aucun individu quand ils étaient pris en

  7   flagrant délit ?

  8   R.  Pour autant que je m'en souvienne, de la part du MUP, il y a eu des

  9   plaintes au pénal, à l'encontre de quelques individus, pour pillages de

 10   biens croates mais aussi, ce dont je me souviens, c'est que lorsque la

 11   police militaire agissait de concert avec nous, le commandant décidait une

 12   détention pour l'individu qui était pris en flagrant délit.

 13   Cependant, lorsque nous arrêtions quelqu'un qui était en train de

 14   transporter des biens pour lesquels on suspectait qu'ils découlaient d'un

 15   acte criminel et qu'ils appartenaient aux Croates mais on ne savait à qui

 16   cela appartenait. On ne savait pas qui était la victime, donc on prenait

 17   les biens, pour la plupart ils se détériorés, ils sont restés chez nous,

 18   jamais la victime ne s'est manifestée.

 19   Mme LE JUGE RASOAZANANY : Une dernière question. A la question de Me

 20   Residovic, afin de savoir pourquoi vous n'avez pas essayé de maîtriser les

 21   Moudjahiddines lorsque ces derniers exerçaient des exactions parmi les

 22   populations, vous nous avez dit que vous n'avez pas voulu parce que -- vous

 23   n'avez pas voulu que ce qui s'est passé au mont Vlasic se renouvelle. Est-

 24   ce que vous pourriez donner un peu plus d'explications explicitées ?

 25   Qu'est-ce qu'il s'est passé au mont Vlasic ?

Page 11180

  1   R.  Peut-être me suis-je mal exprimé. Au mont Vlasic, il y a eu pas mal de

  2   victimes parmi les policiers lorsqu'on défendait le relais. Je ne sais pas

  3   si vous le savez, en mai 1992. Je voulais dire cela, à ce moment-là, pour

  4   qu'il n'y ait pas de victimes, de pertes parmi les nôtres. On nous a dit de

  5   ne pas entrer en conflit avec eux. Si on pouvait régler à l'amiable les

  6   choses par un compromis, de le faire, mais sinon de ne pas exacerber les

  7   tensions parce qu'en fait c'est peut-être à ce sujet-là que j'ai mentionné

  8   le mont Vlasic et non pas pour autre chose. Merci, Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Un autre juge va vous poser des questions.

 10   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Monsieur le Témoin, pendant que je vous

 11   écoutais, je souhaitais poser quelques questions, qui ont été répondues

 12   dans une grande partie entre-temps, mais il y en a qui sont restées sans

 13   réponses.

 14   Tout d'abord, en ce qui concerne votre rattachement, je sais qu'il y a

 15   quelques minutes vous avez répondu en partie à cela. Je souhaite vérifier

 16   si j'ai bien compris, lorsque vous nous parliez des enquêtes, au sujet des

 17   pillages et des maisons incendiées. Vous nous avez parlé de cette période,

 18   mais ceci n'était pas la raison de votre rattachement, n'est-ce pas ? Ceci

 19   s'est passé pendant une période différente.

 20   R.  Je n'ai pas compris votre question.

 21   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Je vais répéter ma question. Vous nous

 22   avez dit que vous avez été rattaché à la 306e Brigade et, après la pause,

 23   vous avez dit que vous êtes allé au front. Vous avez dit cela en réponse à

 24   une question de la Défense. Ce matin, vous nous avez dit que, pendant que

 25   vous étiez à Mehurici, que vous avez participé aux activités visant à

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  1   enquêter au sujet des pillages et des maisons incendiées afin d'empêcher ce

  2   genre de situation. Voici ma question : ces activités-là ne se déroulaient

  3   pas au cours de la période pendant laquelle vous étiez rattachés. Il

  4   s'agissait d'une période différente, n'est-ce pas ? Ai-je bien compris vos

  5   propos ?

  6   R.  Pendant une période de 45 jours, nous étions rattachés. Deux personnes

  7   seulement étaient restées au poste de police. La police civile, à l'époque,

  8   ne pouvait pas être chargée de ce genre d'enquêtes car ces hommes-là

  9   gardaient simplement nos locaux. Nous, nous étions actifs dans le cadre de

 10   telles enquêtes, et avant et après notre rattachement et aussi pendant que

 11   nous étions rattachés.

 12   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Même si vous étiez au sein de l'armée,

 13   vous aviez suffisamment de temps vous permettant de mener des enquêtes

 14   concernant les pillages et les incendies imposés aux maisons car vous venez

 15   de dire que vous avez fait cela à la fois pendant que vous étiez rattachés

 16   et après, donc je n'ai pas tout à fait compris.

 17   R.  Au moment de notre rattachement, pendant une période, il y avait 45

 18   jours que nous avons passé aux lignes de front, tous les policiers. A ce

 19   moment-là, bien sûr, nous ne pouvions pas être actifs ailleurs. C'était la

 20   police militaire qui s'occupait de ce genre de choses. Mais cela, c'était

 21   uniquement pendant cette période-là.

 22   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Avez-vous été rattachés à plusieurs

 23   reprises ?

 24   R.  Je ne me souviens pas. Je pense que c'était l'unique occasion. Je ne

 25   sais pas.

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  1   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Je vous pose cette question en raison

  2   du fait que le document qui vous a été montré, P204, suggère que vous étiez

  3   rattachés afin de mener des enquêtes avec d'autres personnes, des incidents

  4   liés aux pillages, incendies des maisons, et cetera. Mais je n'en suis pas

  5   sûr, et c'est la raison pour laquelle je vous ai posé cette question.

  6   R.  C'est vrai. Lors de ce rattachement, comme je l'ai déjà dit, une fois,

  7   nous étions tous sur les lignes de front, car il n'y avait pas suffisamment

  8   d'effectifs là-bas. A ce moment-là, nous ne pouvions pas nous acquitter de

  9   ce genre de tâches, car nous n'avions pas suffisamment de policiers libres

 10   pour faire ceci.

 11   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Je souhaite vous poser quelques

 12   questions concernant les événements qui se sont déroulés à Miletici en

 13   avril. Vous avez dit que vous n'avez pas participé directement aux

 14   négociations visant à libérer les prisonniers des Moudjahiddines, et vous

 15   avez dit que, par la suite, vous avez reçu l'ordre d'aller à Miletici afin

 16   de rendre visite à un couple de personnes âgées afin de vérifier si tout se

 17   passait bien en ce qui les concerne. Est-ce que vous avez également parlé

 18   avec cet homme et cette femme ?

 19   R.  Chaque fois que l'on y est allé, nous étions tenus de parler avec eux.

 20   Ils étaient supposés nous parler de problèmes, s'il y en avait.

 21   M. LE JUGE SWART : [interprétation Est-ce qu'ils vous ont raconté ce qu'il

 22   leur est arrivé en avril ?

 23   R.  Nous avons parlé surtout des questions liées à la manière dont ils

 24   vivaient là-bas. Ils nous ont dit qu'il y avait également des Musulmans à

 25   Miletici, que ces gens-là leur apportaient de la nourriture. Nous

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  1   souhaitions savoir si au cours de cette période-là, si quelqu'un les

  2   malmenait ou harcelait après les événements. En ce qui concerne les

  3   événements, nous n'en n'avons pas parlé avec eux.

  4   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Est-ce qu'ils ont parlé des événements,

  5   des personnes qui ont été tuées, ou est-ce qu'ils gardaient le silence au

  6   sujet de cela ?

  7   R.  Ils étaient nos voisins. Vous savez, nous n'avons pas parlé avec eux de

  8   cela. Eux, non plus, ils ne se sont pas mis à parler de cela de leur propre

  9   gré.

 10   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Est-ce que vous aviez d'autres

 11   informations qui vous permettaient d'établir quelles étaient les personnes

 12   qui avaient été tuées lors de cet événement ?

 13   R.  J'étais à Mehurici au moment où les Moudjahiddines ont fait passer les

 14   gens de Miletici. Après, il y avait des rumeurs. Je n'étais pas sur place

 15   au moment du travail de la commission conjointe. Je sais simplement que

 16   j'ai reçu pour tâche d'aller voir ce couple de temps en temps et de parler

 17   avec eux. Si jamais il y a avait quoi que ce soit, d'envoyer un rapport au

 18   poste de police à Travnik et même aux organes militaires.

 19   M. LE JUGE SWART : [interprétation] En ce qui concerne la situation, vous

 20   avez écrit des rapports et vous les avez envoyés à Travnik, au MUP ou au

 21   procureur de la République ?

 22   R.  Une note officielle a été rédigée qui résumait ce que l'on savait

 23   concernant cette affaire, mais nous ne sommes pas allés sur le terrain afin

 24   de mener une enquête.

 25   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Cette note, c'était vous qui l'avez

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  1   écrite ou le commandant à l'époque, ou qui d'autre ?

  2   R.  Je ne sais pas qui l'a fait en ce moment, mais je sais que la note

  3   officielle a été écrite et envoyée à Travnik.

  4   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Les informations contenues dans le

  5   rapport, dans la note, sur quoi se fondaient-elles ? Quelles étaient les

  6   sources des informations qui ont été utilisées dans ce rapport ?

  7   R.  Il s'agissait des résultats du travail opérationnel que nous avons

  8   accompli sans nous rendre sur le terrain. Nous avons vu nous-mêmes, il y

  9   avait un grand nombre de personnes qui ont vu ce cortège de Musulmans et de

 10   Croates qui ont été escortés par les Moudjahiddines vers le camp de

 11   Poljanice. Il s'agissait là des informations qui ont été contenues dans ce

 12   rapport que nous avons envoyé à Travnik.

 13   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Vous avez écrit dans ce rapport ce que

 14   d'autres personnes, des membres de la population, vous ont dit à vous en

 15   tant que police. Vous avez écrit également ce que les membres de l'armée

 16   vous ont raconté; est-ce exact ?

 17   R.  Oui, plus ou moins.

 18   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Excusez-moi. J'ai encore quelques

 19   questions concernant Maline. Vous avez dit que vous avez rédigé un rapport

 20   que vous avez envoyé à Travnik. Je souhaite vous poser quelques questions à

 21   ce sujet. S'agissait-il d'un long rapport ou bref ? Est-ce que vous pouvez

 22   nous dire quelque chose au sujet de la longueur et du contenu de ce

 23   rapport ?

 24   R.  Je ne me souviens pas en ce moment.

 25   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Est-ce que vous pourriez vous rappeler

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  1   quelles étaient vos sources d'informations concernant ce rapport ? Qui vous

  2   a fourni les informations que vous avez intégrées dans votre rapport ?

  3   R.  Vous parlez de Maline ou de Miletici ?

  4   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Je parle maintenant de Maline.

  5   R.  C'était pareil. Par la suite, après le conflit avec les Croates, l'on

  6   savait que certains Moudjahiddines avaient fait sortir un certain nombre de

  7   personnes de la colonne, qu'ils les ont emmenées quelque part et que ces

  8   personnes croates étaient portées disparues. Personne ne savait où ils

  9   étaient. C'était l'information que l'on avait reçue. On a appris que ces

 10   personnes étaient emmenées dans la direction du camp de Poljenice, mais

 11   nous n'avions pas d'information plus précise que cela.

 12   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Vous avez dit que les gens savaient que

 13   les Moudjahiddines avaient fait sortir certaines personnes. Ma question

 14   suivante : qui vous a dit cela ? Est-ce qu'il s'agissait des témoins

 15   oculaires ou des personnes qui en avaient entendu parler ? Est-ce que vos

 16   sources étaient directes ou pas ?

 17   R.  J'ai entendu parler de cela beaucoup plus tard, beaucoup plus tard par

 18   rapport à la date à laquelle ceci est arrivé, peut-être même un mois plus

 19   tard.

 20   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Avez-vous parlé avec les témoins

 21   oculaires, les personnes qui ont vu cet événement de leurs propres yeux ou

 22   avec d'autres personnes ?

 23   R.  Nous n'avons pas parlé avec les témoins oculaires, mais il s'agissait

 24   des rumeurs qui circulaient au sein de la population. Comme je l'ai dit,

 25   j'ai entendu parler de cela peut-être un mois après les faits.

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  1   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Il s'agissait de quelque chose qui

  2   ressemblait à des rumeurs. Il vous était difficile d'étayer cela. Est-ce

  3   que c'est bien cela que vous nous dites ?

  4   R.  Oui.

  5   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Après que vous aviez écrit votre

  6   rapport, vous l'avez envoyé à Travnik. Est-ce que vous pourriez nous dire à

  7   quelle instance à Travnik vous l'avez envoyé ?

  8   R.  Tous les rapports doivent être envoyés par les postes de police au

  9   commandant de poste de sécurité publique.

 10   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Est-ce que vous avez également envoyé

 11   un exemplaire, je ne sais pas si d'ailleurs c'était la pratique courante au

 12   sein de votre organisation, mais est-ce que vous avez envoyé votre rapport

 13   également au procureur, procureur de la République ou une autre autorité

 14   judiciaire ?

 15   R.  L'administration de la police avait des contacts seulement avec le

 16   poste de sécurité publique. Comme je l'ai déjà dit, le service criminel, la

 17   brigade criminelle avait des relations avec les organes judiciaires et le

 18   bureau du Procureur.

 19   M. LE JUGE SWART : [interprétation] N'avez-vous jamais remarqué ou reçu des

 20   réactions de la part des autorités compétentes à Travnik ?

 21   R.  Je ne sais rien au sujet de l'aboutissement de tout ceci. Je n'ai

 22   jamais reçu d'information là-dessus.

 23   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Je pense que la même chose est valable

 24   pour votre rapport rédigé sur Miletici au mois d'avril. Vous n'avez jamais

 25   entendu parler de quoi que ce soit ou sur des mesures prises par les

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  1   autorités compétentes à Travnik, n'est-ce

  2   pas ?

  3   R.  Non. Je sais qu'une commission mixte est allée enquêter sur site. Il

  4   s'agissait d'une commission mixte comprenant la police et des membres de

  5   l'ABiH. On nous avait dit que cela était du ressort de l'armée. Cela était

  6   le cas. 

  7   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Cela est vrai, effectivement. Cela nous

  8   le savons également.

  9   Vous avez dit à deux reprises, je crois, ce matin, que cela ne

 10   rentrait pas dans vos responsabilités; autrement dit, vous n'aviez pas la

 11   possibilité de mener des enquêtes criminelles. 

 12   R.  Je n'avais pas la possibilité de mener des enquêtes criminelles

 13   moi-même. J'étais le seul professionnel de l'équipe à Mehurici, et nous

 14   n'avions pas les moyens à notre disposition pour faire cela.

 15   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Lorsque vous pensiez que les

 16   personnes étaient suspectes, vous faisiez un rapport là-dessus et vous

 17   l'envoyiez aux autorités compétentes de Travnik; c'est exact ?

 18   R.  Oui, grossièrement, c'est ainsi que les choses s'étaient passées à ce

 19   moment-là pour ce qui est de Miletici et Maline.

 20   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Je vous pose cette question, car

 21   théoriquement, vous auriez pu imaginer d'autres mesures. Par exemple, vous

 22   auriez pu avoir interviewé des témoins éventuels à l'école de Mehurici;

 23   vous auriez pu vous rendre à Maline et interviewer des personnes sur place;

 24   vous pouviez vous retourner vers l'armée et dire : "Ecoutez, connaissez-

 25   vous quelque chose à ce sujet ?"

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  1   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Vous avez déjà dit qu'il était

  2   impossible d'interviewer un Moudjahiddine. Ces autres mesures que vous

  3   auriez pu prendre, étaient-elles impossibles également ?

  4   R.  A ce moment-là, pour ce qui est des soldats du HVO qui étaient détenus

  5   à cet endroit-là et des civils, je ne sais pas. Je ne suis pas tout à fait

  6   sûr à propos des civils. Pour ce qui est des membres de l'armée, les

  7   interviews ont été menées par les organes ou les instances, les autorités

  8   de la Brigade chargée de la Sécurité. Il s'agissait des hommes qui

  9   faisaient partie de l'armée et qui étaient chargés de la sécurité. On nous

 10   a simplement demandé de monter la garde. Rien de plus.

 11   M. LE JUGE SWART : [interprétation] N'avez-vous jamais envisagé de demander

 12   à l'armée de vous aider pour interviewer les Moudjahiddines qui auraient pu

 13   prendre part à ces événements ?

 14   R.  Non, je n'ai jamais demandé à l'armée de faire cela.

 15   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Pourquoi ne leur avez-vous pas

 16   demandé ?

 17   R.  Quelquefois, on essayait d'entrer en contact avec les Moudjahiddines,

 18   mais ils refusaient de nous parler. Nous essayions de coopérer avec

 19   l'armée, c'est-à-dire, avec la police militaire qui se trouvait au sein de

 20   l'armée, mais pas avec les Moudjahiddines.

 21   M. LE JUGE SWART : [interprétation] La police militaire ou l'armée, ne vous

 22   a-t-elle jamais proposé son aide pour vous aider à mener vos enquêtes au

 23   sujet de découvrir ce qui s'était passé ?  

 24   R.  La police civile n'a jamais mené d'enquêtes, eu égard à ces événements;

 25   c'était la sécurité au sein de l'armée.

Page 11189

  1   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Effectivement, cela correspond à ce que

  2   vous avez dit précédemment.

  3   J'ai une ou deux questions à vous poser à propos de personnes qui ont

  4   été enfermées à l'école élémentaire, qui sont restées pendant un certain

  5   temps. Quelqu'un ne vous a-t-il jamais posé, demandé, ou quelqu'un n'a-t-il

  6   jamais demandé à un autre policier civil d'être relâché ?

  7   R.  A ma connaissance, non. Je sais qu'ils ont demandé à des policiers de

  8   leur apporter des photographies de leurs maisons, des maisons dans

  9   lesquelles ils habitaient.

 10   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Si quelqu'un vous aurait posé la

 11   question et vous aurait demandé : "Laissez-moi partir."

 12   Est-ce que vous auriez autorisé cela ?

 13   R.  Je ne sais pas comment j'aurais réagi à l'époque.

 14   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Aviez-vous le pouvoir de le faire, ou

 15   deviez-vous vous tourner vers une instance supérieure ?

 16   R.  Non, je n'avais pas l'autorité pour prendre de telles décisions.

 17   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Qui était l'instance compétente qui

 18   aurait pu pendre une décision à l'égard de la mise en liberté de ces

 19   personnes ?

 20   R.  A ce moment-là, on m'avait ordonné de les protéger des Moudjahiddines

 21   et de toutes autres personnes qui pouvaient leur faire du mal. Nous étions

 22   rattachés au commandement de la 306e. Ils auraient pu se présenter ou peut-

 23   être que ces personnes chargées de la Sécurité auraient pu venir ou peut-

 24   être même quelqu'un occupant une position plus importante. Notre rôle

 25   consistait simplement à les protéger des Moudjahiddines, par exemple, les

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  1   empêcher de faire quelque chose. Il y avait des gens qui avaient souffert

  2   aux mains des Croates. En conséquence, ils souhaitaient agir et faire

  3   quelque chose.

  4   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Vous dites que ces décisions étaient

  5   des décisions qui étaient prises par l'armée, et c'était à l'armée de

  6   décider si, oui ou non, ces personnes devaient être relâchées ou non. Je ne

  7   suis pas très sûr ou très certain de ce que vous entendez par là.

  8   R.  Je ne sais pas. Personne n'a jamais demandé à être relâché. Lorsque le

  9   moment est venu pour les échanger, ils ont décidé à les échanger. C'est

 10   tout ce que je peux dire. Mon rôle consistait simplement à assurer la

 11   sécurité de ces personnes.

 12   M. LE JUGE SWART : [interprétation] Merci beaucoup pour vos réponses.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai très peu de questions pour vous. Au début, vous

 14   avez dit que vous étiez policier à Travnik, vous faites quoi actuellement ?

 15   Vous avez un grade ? Qu'est-ce que vous faites dans la police ?

 16   R.  Je suis sergent de police à Travnik.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Dernière question. Vous avez dit tout à l'heure que

 18   vous étiez, à un moment donné, rattaché à la 306e. Quand vous étiez

 19   rattaché, est-ce que vous aviez la possibilité, néanmoins, d'adresser des

 20   rapports à l'autorité civile qui était à Travnik, ou qu'il fallait que ce

 21   soit la 306e qui transmette les rapports ?

 22   R.  Pour autant que je m'en souvienne, nous ne transmettions jamais nos

 23   rapports à la 306e. Bien que tout en étant rattaché à la 306e, nous

 24   envoyions toujours nos rapports à Travnik au quartier général du poste de

 25   sécurité publique.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

  2   La Défense a-t-elle des questions ? Il nous reste cinq minutes.

  3   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Nous n'avons pas de questions.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Les autres défenseurs ?

  5   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Nous n'avons pas de questions non plus.

  6   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Nous avons trois questions.

  7   Contre-interrogatoire supplémentaire par Mme Henry-Benjamin : 

  8   Q.  [interprétation] En réponse à la question posée par le Juge Swart, vous

  9   avez répondu en disant que votre responsabilité consistait à empêcher les

 10   Moudjahiddines de faire quoi que ce soit. Pourriez-vous nous dire comment

 11   est-ce que vous étiez censé les empêcher d'agir ? Qu'est-ce que vous deviez

 12   faire ?

 13   R.  Nous montions devant le bâtiment. Nous étions à l'extérieur, et nous

 14   avions le devoir de les protéger, de les protéger, des Moudjahiddines et de

 15   toutes autres personnes qui souhaitaient leur faire du mal. C'était notre

 16   devoir d'empêcher quoi que ce soit. Je crois qu'à une occasion, un

 17   Moudjahiddine a tenté de rentrer. Mes collègues étaient sur place. La

 18   situation était assez tendue, mais ils ont empêché, et non pas permis à cet

 19   homme de rentrer.

 20   Q.  En réponse à une question posée par Mme le Juge Rasoazanany et, je

 21   pense, Me Residovic, vous avez parlé d'un incident à Vlasic. Vous avez dit

 22   que vous avez demandé d'éviter tout conflit. Vous dites qu'ils se sont

 23   arrangés avec les Moudjahiddines. Pourriez-vous nous dire, lorsque vous

 24   avez dit qu'ils se sont arrangés avec les Moudjahiddines, comment ont-il

 25   fait ceci ? Qu'ont-ils fait ?

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.

  2   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Pardonnez-moi, mais ma consoeur a cité le

  3   témoin, et il a dit qu'il s'était arrangé avec les Moudjahiddines. Mais,

  4   pour ce qui est de l'incident de Vlasic, j'apprécierais si ma consoeur

  5   pouvait nous signaler à quel moment le témoin a dit ceci. Je ne me souviens

  6   pas que ceci ait été évoqué devant la Chambre de première instance.

  7   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Page 67, ligne 2 du transcript.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, que vouliez-vous poser comme question ?

  9   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation]

 10   Q.  Je crois que ma consoeur ne se souvenait peut-être pas que vous avez

 11   précisé que ces soldats sont morts. Suite à cela, vous deviez éviter tout

 12   conflit dans la mesure du possible; est-ce exact ?

 13   R.  Oui. Pour autant que je m'en souvienne. J'ai répondu à cette question,

 14   et j'ai dit qu'on nous avait demandé de ne pas entrer en conflit avec eux.

 15   On nous a demandé de gérer la situation et de calmer le jeu. J'ai mentionné

 16   Vlasic, et j'ai parlé de la police civile qui montait la garde devant la

 17   borne de relais de Vlasic. Il y avait des gens qui ont été tués. Nous

 18   n'avions pas suffisamment de policiers bien formés. Est-ce que cela vous

 19   suffit ?

 20   Q.  Oui. Vous avez poursuivi en disant : "Nous nous sommes arrangés avec

 21   eux." Je pense qu'ici, vous faisiez référence aux Moudjahiddines ?

 22   R.  Je n'ai peut-être pas dit que nous nous sommes arrangés avec eux.

 23   Comment puis-je vous le dire ? Ils ne respectaient pas, à proprement

 24   parler, la loi, mais je ne me souviens pas exactement en quelle année. Un

 25   bon nombre d'entre eux ont été arrêtés. Un certain nombre d'entre eux ont

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  1   été chassés, mais, je ne sais pas ce que j'entendais par là. Mais c'est

  2   quelque chose que j'ai évoquée.

  3   Q.  Merci. Maintenant, c'est ma dernière question. Je crois que vous avez

  4   encore devant vous la pièce P204, numéro 7. En vertu de cet ordre, tout

  5   mouvement individuel de personnes armées doit être arrêté. Ces personnes

  6   doivent être désarmées et enregistrées. Pourriez-vous élaborer ou clarifier

  7   ceci, s'il vous plaît ? Est-ce qu'on considérait que les Moudjahiddines

  8   étaient des personnes armées et faisaient parti de ce groupe de personnes ?

  9   Est-ce qu'ils tombaient dans cette catégorie ?

 10   R.  Ils auraient dû tomber dans cette catégorie. Donc, oui.

 11   Q.  Oui. Ils auraient dû tomber dans cette catégorie. Je suis d'accord avec

 12   vous. Ont-ils été désarmés ? A-t-on suivi l'ordre donné ?

 13   R.  En règle générale, nous tentions de les arrêtes. Mes hommes tentaient

 14   de les arrêter, mais, en général, ils refusaient de s'arrêter et

 15   poursuivaient leur chemin.

 16   Q.  Autrement dit, l'ordre n'a pas été suivi à la lettre ?

 17   R.  Il y a un instant, j'ai dit que pour ce qui est de ces gens-là, on nous

 18   avait demandé d'éviter d'entrer en conflit avec eux.

 19   Q.  Merci.

 20   Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] J'en ai terminé, Monsieur le

 21   Président.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : La défense.

 23   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Si j'ai bien

 24   suivi les débats, les dernières questions peuvent être posées par la partie

 25   qui a cité le témoin. Si vous m'y autorisé, j'ai une question.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Allez-y.

  2   Mme RESIDOVIC : [interprétation]

  3   Nouvel interrogatoire par Mme Residovic : 

  4   Q.  [interprétation] Monsieur Jusic, pour ce qui est de la dernière

  5   question qui vous a été posée par mon éminente collègue, et eu égard au

  6   point, je voudrais savoir si vous avez répertorié cela, si vous en avez

  7   informé vos supérieurs de l'administration de la police à Travnik, donc sur

  8   les mouvements de ces étrangers ?

  9   R.  Dans la mesure de nos possibilités, oui, on l'a fait.

 10   Q.  Maintenez-vous votre réponse au sujet des raisons que vous avez

 11   énoncées ? Vous avez dit pour quelles raisons vous n'avez pas pu recourir à

 12   la force.

 13   R.  Oui, je maintiens cette réponse.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, sur cette dernière question, votre témoignage

 15   aujourd'hui vient de se terminer. Je vous remercie d'avoir contribué, par

 16   les réponses apportées aux questions, à éclairer les Juges. Je vous

 17   souhaite un bon voyage de retour, et je vais demander à Mme l'Huissière de

 18   bien vouloir vous raccompagner à la porte de la salle d'audience.

 19   [Le témoin se retire]

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, je vais me tourner vers la Défense pour la

 21   journée de demain. Il y a deux témoins. Quel est le timing qui est prévu,

 22   afin de faire en sorte que nous terminions nos travaux à 13 heures 45

 23   demain ?

 24   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, jusqu'à présent, je

 25   ne vous ai jamais dit que la durée de la déposition des témoins dépendrait

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  1   de la durée du contre-interrogatoire. Mais comme vous avez pu le voir vous-

  2   même, nos éminents collègues du bureau du Procureur ont interrogé pendant

  3   plus longtemps que nous. Ce que je peux dire, c'est que, pour répondre à

  4   vos questions, il me faudrait aussi connaître les estimations de mes

  5   éminents collègues de l'Accusation, pour l'un comme pour l'autre des

  6   témoins. Je pourrais essayer d'abréger l'interrogatoire principal d'une

  7   demi-heure. Par conséquent, ces témoins ont été prévus, chacun, pour une

  8   heure et demie. J'essaierais de faire en sorte que leur interrogatoire

  9   principal ne dépasse pas une heure. Mais il serait utile d'entendre la

 10   réaction de nos collègues pour voir si on peut en terminer demain. Si ceci

 11   n'est pas possible, je n'abrégerais pas mon interrogatoire principal.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien, Je vous remercie. Je me tourne vers

 13   l'Accusation. Vous avez entendu exposés les problèmes. La Défense peut, sur

 14   chacun des deux témoins, demain, utiliser une heure. Mais évidemment, il

 15   faut que l'Accusation ne prenne qu'une heure car une heure et une heure,

 16   cela fait deux heures, multiplié par deux, cela fait quatre heures. Comme

 17   vous le savez, nous n'avons que trois heures 45 d'utiles. Il y a déjà --

 18   sauf si vous allez tous à l'essentiel, à ce moment-là, on doit être terminé

 19   de l'audience de demain.

 20   Alors, Monsieur Mundis.

 21   M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. L'Accusation

 22   fera en sorte, bien entendu, de ne pas dépasser, pendant son contre-

 23   interrogatoire, le temps qui a été utilisé pour l'interrogatoire principal.

 24   Mais comme vous le savez parfaitement, Monsieur le Président, c'est très

 25   difficile de prévoir quelle sera la durée d'un contre-interrogatoire, à la

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  1   fois, parce que nous recevons très peu d'information au sujet du sujet qui

  2   sera abordé par un témoin pendant sa déposition, et aussi, parce que nous

  3   avons des résumés très brefs en application de l'Article 65 ter, l'Annexe B

  4   au point 1.

  5   Un deuxième point, bien entendu, c'est que le témoin peut prendre une

  6   heure pendant l'interrogatoire principal, une pendant le contre-

  7   interrogatoire, mais il est très difficile de prévoir quelle sera la durée

  8   des questions supplémentaires posées par la Chambre, donc telle est la

  9   difficulté inhérente à ces prédictions -- ces appréciations. Nous allons --

 10   nous faisons du mieux pour agir en fonction des informations que nous avons

 11   avant la déposition.

 12   Je voudrais aussi vous poser une question, Monsieur le Président,

 13   pour ce qui est de la planification du calendrier. La Chambre, estime-t-

 14   elle que nous devions en terminer avec ces deux témoins demain ? Si vous

 15   l'estimez, dites-nous, s'il vous plaît : quelles sont les prévisions pour

 16   les audiences, par la suite ? Parce que nous avons, par exemple, travaillé

 17   jeudi dernier plus longtemps.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Si, par hasard, le deuxième témoin de demain ne

 19   pourrait pas terminer à 13 heures 45, il faudra renvoyer à lundi la suite

 20   de son interrogatoire. Actuellement, la Défense, que prévoit-elle pour la

 21   semaine prochaine ?

 22   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, peut-on passer à

 23   huis clos partiel, s'il vous plaît ?

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous passons à huis clos partiel.

 25   [Audience à huis clos partiel]

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 23   [Audience publique]

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : En audience publique, j'informe que l'audience

 25   de ce jour est terminée. Nous reprendrons le cours de l'audience demain par

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  1   l'audience qui débutera à 9 heures. Je vous remercie et je vous invite à

  2   revenir pour demain 9 heures.

  3   --- L'audience est levée à 14 heures 20 et reprendra le vendredi le 5

  4   novembre 2004, à 9 heures 00.

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