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1 Le mardi 18 janvier 2005
2 [Audience publique]
3 --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.
4 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le nom de l'affaire.
6 M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Affaire
7 numéro IT-01-47-T, le Procureur contre Enver Hadzihasanovic et Amir Kubura.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
9 Je demande à l'Accusation de bien vouloir se présenter.
10 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour, Madame,
11 Monsieur les Juges, conseil de la Défense, toutes les personnes présentes
12 dans le prétoire. Mathias Neuner, Daryl Mundis ainsi que Janet Stewart,
13 notre commis à l'affaire aujourd'hui pour l'Accusation. Merci.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Je demande à la Défense de bien vouloir se
15 présenter.
16 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,
17 Monsieur les Juges. M. le général Enver Hadzihasanovic est défendu par
18 Edina Residovic et Alexis Demirdjian, aujourd'hui présents dans le
19 prétoire.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Les autres avocats.
21 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,
22 Monsieur les Juges. Rodney Dixon, Fahrudin Ibrisimovic, et Mulalic Nermin,
23 notre assistant juridique pour M. Kubura.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.
25 La Chambre salue toutes les personnes présentes pour cette audience du
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1 mardi, 18 janvier. Je salue les représentants de l'Accusation, les avocats.
2 Je salue les accusés ainsi que tout le personnel de cette salle d'audience.
3 Nous avons commencé l'audience avec sept minutes de retard en raison de
4 l'installation de nouveaux instruments qui permettra apparemment de mieux
5 travailler. La Défense semble se poser quelques interrogations, nous
6 verrons bien à l'usage.
7 Quoi qu'il en soit, j'ai devant moi un clavier d'ordinateur, ce qui est
8 quelque chose de tout à fait nouveau.
9 Nous devons aujourd'hui entendre un témoin, le témoin doit être à la
10 disposition de la Chambre. Je vais demander à Mme l'Huissière de bien
11 vouloir aller chercher le témoin.
12 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. Je vais d'abord vérifier que vous
14 entendez bien dans votre langue la traduction de mes propos. Si c'est le
15 cas, dites : Je vous entends et je vous comprends.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous entends et je vous comprends.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur, vous avez cité comme témoin par la
18 Défense. Avant de vous faire prêter serment, je me dois de vous identifier.
19 Pour ce faire, je vous demande de me donner votre nom, prénom, et date de
20 naissance.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis Serif Kadric, né le 28 août 1948 dans
22 un village près de Pjelavaje [phon], Crna Gora.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Aujourd'hui, avez-vous une profession ? Que
24 faites-vous aujourd'hui ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Actuellement, je suis officier à la retraite,
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1 officier de l'armée de la Fédération de Bosnie-Herzégovine.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous êtes officier à la retraite. Vous avez quel
3 grade ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Celui de colonel.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : En 1992, 1993, aviez-vous à l'époque une fonction
6 militaire ? Si oui, laquelle et dans quelle unité ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] En 1992, j'étais officier de l'état-major
8 régional de la Défense territoriale de Zenica. J'étais commandant adjoint
9 chargé du Moral, de l'Information et des Questions religieuses. Au début de
10 la création du corps d'armée, je suis passé au corps d'armée pour occuper
11 le même poste.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous étiez donc au 3e Corps.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous déjà témoigné devant une juridiction
15 internationale ou une juridiction nationale sur les faits qui se sont
16 déroulés dans votre pays en 1992, 1993, ou c'est la première fois que vous
17 témoignez ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Aujourd'hui, c'est la première fois.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous demande de lire le serment que Mme
20 l'Huissière va vous présenter.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
22 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
23 LE TÉMOIN: SEFIR KADRIC [Assermenté]
24 [Le témoin répond par l'interprète]
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Vous pouvez vous asseoir.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de donner la parole à la Défense qui va vous
3 poser des questions, tout d'abord, je voudrais vous demander doit-on vous
4 appeler mon colonel ou monsieur ? Que préférez-vous qu'on vous appelle ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas général. Je suis monsieur et
6 colonel.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, c'est une erreur de traduction. Je n'avais pas
8 parlé de "général", mais de "colonel". Je demande aux interprètes d'être
9 vigilants dans la traduction. Donc, je vais vous appeler "monsieur".
10 Alors, Monsieur, vous allez devoir répondre à des questions qui vont vous
11 être posées par des défenseurs qui sont situés à votre gauche. Vous les
12 connaissez, vous les avez vus déjà et rencontrés dans le cadre de la
13 préparation de cette audience.
14 A l'issue des questions qui vont vous être posées, qui sont des questions
15 qui ne seront pas directrices mais des questions neutres, l'Accusation qui
16 est située à votre droite vous posera pendant la même durée de temps des
17 questions dans le cadre du contre-interrogatoire. Mais en revanche les
18 questions qu'eux vont vous poser pourraient être des questions suggestives,
19 c'est-à-dire, induire une réponse. C'est la procédure accusatoire qui a
20 instauré ce système de questions non directrices et des questions
21 suggestives.
22 A l'issue de cette phase, les avocats de la Défense pourront vous poser des
23 questions supplémentaires en relation directe avec les questions qui vous
24 ont été posées par l'Accusation.
25 Les trois Juges qui sont devant vous pourront, le Règlement le permet, vous
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1 poser des questions à tout moment. Mais les Juges préfèrent attendrent la
2 fin des questions des parties pour vous poser des questions. Les Juges vous
3 posent des questions soit pour éclaircir des points qui ont été évoqués
4 lors des questions et des réponses, soit parce qu'ils estiment, dans
5 l'intérêt de la justice, qu'il convient que vous apportiez des
6 éclaircissements et un point qui font l'objet du débat.
7 Le Juge ayant en espèce aucun parti pris d'autant plus que nous ne
8 savons pas sur quoi vous allez déposer, ce que vous allez dire, car nous
9 n'avons aucun élément concernant votre témoignage.
10 Dans ces conditions, vous comprenez que votre témoignage oral est
11 important puisqu'il va être transcrit dans la procédure, c'est pour cela
12 que vous avez devant vous un écran sur lequel apparaît en anglais la
13 traduction des propos des uns et des autres.
14 Si vous ne comprenez pas le sens d'une question qui va vous être
15 posées pas les uns ou les autres, demandez à celui qui vous pose la
16 question de la reformuler.
17 Je me dois également d'appeler votre attention sur deux points qui
18 sont importants et que j'ai rappelé à tous les témoins. Vous venez de
19 prêter serment de dire toute la vérité, ce qui exclut tout faux témoignage
20 est une infraction qui peut être poursuivi, sanctionné par une peine de
21 prison.
22 Le deuxième élément, c'est que, lorsqu'un témoin estime, à ce niveau,
23 que la réponse qu'il peut apporter à une question, pourrait le cas échéant
24 un jour constituer des éléments à charge contre lui, il peut refuser de
25 répondre. Alors de cette hypothèse qui est vraiment exceptionnelle, la
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1 Chambre peut inviter le témoin à répondre néanmoins en lui garantissant une
2 immunité. Bien, je rappelle cela pour mémoire car c'est une disposition qui
3 est inscrite dans notre règlement de procédures. Si vous éprouvez un
4 problème quelconque, une difficulté, n'hésitez pas à nous en saisir afin
5 que le problème soit tranché.
6 Je vais donc donner la parole à la Défense qui va commencer votre
7 interrogatoire.
8 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
9 Interrogatoire principal par Mme Residovic :
10 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Kadric.
11 R. Bonjour.
12 Q. En plus des avertissements très importants que vient de vous adresser
13 le Président de la Chambre de première instance, je vais y ajouter un de
14 plus.
15 Nous parlons la même langue et il vous sera possible de répondre à mes
16 questions immédiatement dès que vous les entendez. Cependant, à la fois, ma
17 question et votre réponse doivent être traduite pour que la Chambre et nos
18 collègues puissent suivre la tenue de notre conversation. Je vais vous
19 demander donc d'attendre quelques secondes après ma question avant d'y
20 répondre et, moi-même, je vais faire la même chose. M'avez-vous comprise ?
21 R. Oui. Je vous remercie.
22 Q. Monsieur Kadric, dites-moi, s'il vous plaît : quel est le poste que
23 vous occupiez au moment du début de la guerre, le 6 avril 1992, lorsque la
24 JNA et les forces serbes ont attaqué la Bosnie-Herzégovine.
25 R. A ce moment-là, j'étais commandant adjoint de l'état-major régional de
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1 la Défense territoire de Zenica. J'étais chargé du Moral, de l'Information
2 et des Questions religieuses.
3 Q. Monsieur Kadric, est-ce que vous aviez un grade, à ce moment-là ?
4 R. Oui, j'étais capitaine de réserve, capitaine de première classe.
5 Q. S'il vous plaît, pourriez-vous dire à la Chambre quelle a été votre
6 formation, à ce moment-là, et où avez-vous fait vos études, où êtes-vous
7 allé à l'école ?
8 R. Je suis du corps enseignant. J'ai travaillé cinq années dans
9 l'éducation et, entre temps, après avoir fait mon service militaire, j'ai
10 eu le grade d'officer de réserve.
11 En 1973, j'ai quitté l'éducation et je suis passé dans la Défense
12 territoriale, plus précisément, dans l'état-major municipal de la Défense
13 territoriale de Kakanj et c'est là que je suis resté pendant dix ans. Au
14 bout de cette décennie, en 1983, je suis passé à l'état-major régional,
15 donc le commandement supérieur pour y occuper un poste et c'est là que je
16 suis resté jusqu'au début de l'agression contre mon pays.
17 Q. Le Président de la Chambre, Monsieur Kadric, vous a demandé une chose
18 et vous avez dit qu'après la création du 3e Corps, vous êtes venu y
19 travailler. Dites-nous à quel moment. Quel était exactement le poste que
20 vous êtes venu occupé dans le 3e Corps ?
21 R. Il me semble que c'était précisément le 16 novembre, la date où je suis
22 passé au 3e Corps, et j'étais commandant adjoint du Corps chargé du Moral,
23 de l'Information et des Questions religieuses.
24 Q. Monsieur Kadric, qui était votre supérieur au sein du corps lui-même ?
25 Est-ce que vous étiez ou attaché à l'état-major ou au commandant lui-même ?
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1 R. Je répondais directement au commandant. J'étais son assistant, je
2 n'étais pas l'assistant du chef d'état-major ou d'un autre officer faisant
3 partie de l'état-major.
4 Q. Puisque tout au long de l'année 1992, vous êtes resté à l'état-major
5 régional de la Défense territoriale chargé du Moral, de l'Information et
6 des Questions religieuses.
7 J'aimerais savoir si vous êtes en mesure de nous dire une chose. Quelle
8 était la situation générale qui y prévalait, quels étaient les problèmes
9 auxquels se trouvait confronté le commandant Hadzihasanovic lorsqu'il est
10 arrivé à Zenica ?
11 R. Zenica était une ville qui a reçu beaucoup de réfugiés qui se sont vus
12 chasser de différentes régions, de Bosnie orientale ou de Bosnie centrale,
13 pratiquement, de toute part en Bosnie. C'est là qu'ils ont trouvé refuge.
14 Ils ont cherché à s'installer -- à résoudre les problèmes qui étaient à
15 leur statut.
16 Alors, à Zenica, on prenait en charge les blessés, il me semble, de 83
17 municipalités diverses, donc à l'hôpital de Zenica. Il y avait plus de 100
18 unités subalternes à Zenica elle-même et on sait ce que c'est de commander,
19 de contrôler autant d'unités, comme il est difficile d'assurer une filière
20 de commandement et de contrôle et ce n'était pas seulement à Zenica qu'on
21 voyait cette situation. C'était pratiquement, plus ou moins, dans toutes
22 les municipalités de la zone de responsabilité de l'état-major région qui
23 fonctionnait encore. Ensuite, avec l'arrivée et nous ne savions -- nous ne
24 nous connaissions pas encore.
25 Avec l'arrivée d'Enver Hadzihasanovic et de l'homme qui allait devenir le
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1 chef d'état-major, la politique locale ou sur la scène locale, on n'était
2 pas très satisfait de cela. Avec la création du corps d'armée, ils
3 espéraient avoir l'un de leurs commandants locaux nommés à ce poste, ou les
4 commandants locaux espéraient être nommés eux-mêmes. Donc, tels sont les
5 problèmes auxquels s'est trouvé confronté et allait être confronté par la
6 suite, le commandant du
7 3e Corps ainsi que ses officiers qui lui étaient subordonnés.
8 Q. Merci.
9 Mme RESIDOVIC : [interprétation]
10 A présent, j'aimerais qu'on distribue à toutes les parties présentes un jeu
11 de documents. Il s'agit de documents dont je me servirai pendant
12 l'interrogatoire de ce témoin.
13 Q. Monsieur Kadric, je vais vous demander d'examiner le document qui
14 figure dans le premier jeu, la première section, à savoir : "Moral,
15 information et la propagande." Le document numéro 2, il porte le numéro
16 0701. Il s'agit d'un document qui émane de l'état-major du commandement
17 Suprême. Il s'agit d'un document qui est adressé au 3e Corps et qui porte
18 la date du 2 février 1993. C'est le troisième paragraphe qui m'intéresse.
19 Pourriez-vous me dire si vous étiez au courant d'un certain nombre de
20 reproches ou de remarques, ou comment dirais-je ? Est-ce que vous saviez
21 qu'il y avait méfiance vis-à-vis du commandant au moment où il a commencé à
22 exercer ses fonctions ?
23 R. Ce que je n'ai pas dit à l'instant, c'est qu'à Zenica, en plus de tant
24 de problèmes, il y avait aussi pas mal de présidences de Guerre des
25 différentes municipalités. Parfois, on n'était pas certain du président --
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1 de la présidence qui était la bonne. Ils voulaient tous avoir des positions
2 et ils voulaient tous commander des unités, et Dieu sait quoi d'autre. Ici,
3 on a l'impression, dans ce texte, qu'ils se plaignent de ne pas pouvoir
4 établir une forme de coopération, mais je ne vois pas de quelle
5 collaboration qu'ils parlent. Ce que je sais, en tant qu'assistant du
6 commandant, je sais cela pour tous les autres, nous étions à leur
7 disposition 24 heures sur 24. Nous étions tout à fait disponibles pour
8 parler de tous les problèmes liés à l'armée naturellement, et pas d'autres
9 problèmes. Je ne vois pas pour quelle raison ils iraient se plaindre de qui
10 que ce soit, encore moins du commandant du 3e Corps à ce sujet.
11 Q. Monsieur Kadric, vous étiez dans la Défense territoriale pendant que
12 les textes portant sur la défense populaire généralisée étaient en vigueur,
13 et les autorités civiles avaient toutes les compétences sur la Défense
14 territoriale. Alors, dites-moi : est-ce que ceci a à voir avec la perte de
15 compétences des autorités civiles sur l'armée, ou est-ce que l'armée ne
16 voulait pas coopérer avec les organes civils ?
17 R. A Zenica, nous, on s'appuyait sur la législation héritée de l'ex-Etat,
18 de l'ex-Fédération yougoslave. Par la suite, on a eu de nouveaux textes de
19 loi, et là, pendant cette période-là, parce qu'on s'est trouvé coupé de
20 Sarajevo, on ne connaissait pas les nouvelles lois. Vous voyez, ici, les
21 organes de pouvoir souhaitent commander, souhaitent nommer, souhaitent
22 renvoyer des gens, ce qui n'était pas conforme à la lettre de la nouvelle
23 loi. Mais, nous, on ne connaissait pas les nouvelles lois. Donc, ils
24 envoyaient ce genre de lettre à l'état-major du commandement -- au chef
25 d'état-major du commandement Suprême, et ils rendaient encore plus complexe
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1 par là les problèmes auxquels on se trouvait confronté, non seulement à
2 Zenica, mais dans d'autres municipalités du canton, et plus tard, dans la
3 zone de responsabilité du 3e Corps d'armée.
4 Q. Puisque le commandant et le chef d'état-major du 3e Corps d'armée sont
5 venus de Sarajevo où ce texte de loi était adoptée et publiée, et où le 1er
6 Corps venait d'être créé, vous, en tant qu'officier, est-ce que vous avez
7 accepté le fait que l'armée devait se conformer aux lois de son propre
8 pays ?
9 R. Oui, précisément, c'est tout à fait cela. On voulait structurer le
10 commandement, c'est-à-dire le corps d'armée, de telle sorte pour que le
11 commandement et le contrôle fonctionnent, pour que la chaîne de
12 subordination existe, pour qu'on sache qui occupe quelle place, et qu'on se
13 charge de notre tâche dans la défense du pays. Hélas, on avait aussi ce
14 genre de problème, ce genre de remarque. Je tiens à souligner un fait de
15 plus : le commandant du corps et le chef d'état-major, moi-même, et de
16 nombreuses autres personnes, nous étions, soit des officiers d'actif, soit
17 de réserve de l'ex-système. Je pense que nous savons tous que ce système-
18 là, où la Ligue des communistes était au pouvoir, a proclamé qu'il n'y
19 avait de Dieu. De nouveaux partis nationaux sont venus au pouvoir, et du
20 jour au lendemain, ils ont dit Dieu existe. Du jour au lendemain, il a
21 fallu s'y adapter, et je suppose que ceux qui ont su s'y adapter aussi
22 rapidement ont connu moins de problèmes. Alors, de nombreux étaient ceux
23 qui voyaient en nous des agents de l'ex-système, des agents qui ne sont pas
24 venus aider, mais j'émets et il fallait se prouver. Il fallait faire ses
25 preuves par son travail, et il fallait acquérir une nouvelle position --
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1 autorité auprès, non seulement de son commandant, mais de tous les
2 officiers du corps d'armée.
3 Q. Monsieur Kadric, merci. Dans votre secteur, quelles auraient été les
4 tâches principales que vous deviez exécuter ? Quels auraient été vos
5 devoirs principaux ?
6 R. Le secteur chargé du Moral, de l'Information, de la Propagande, et des
7 Questions religieuses, telle est son appellation entière, et devait, avant
8 tout, informer les membres de l'armée, le cas échéant, les combattants du
9 3e Corps d'armée, des événements véritables tels qu'ils se produisaient,
10 des activités de notre présidence d'Etat, des activités sur la scène
11 internationale, la communauté internationale, du commandement Suprême, sur
12 les activités de combat en Bosnie-Herzégovine. Il fallait, en particulier,
13 se pencher sur les activités dans la zone de responsabilité du 3e Corps
14 d'armée car, sinon, si on n'avait pas fait cela, il y aurait eu des
15 désinformations et des mensonges qui auraient désorienté les combattants.
16 Ils n'auraient pas un moral qui convient pour combattre car, il y avait
17 beaucoup de facteurs négatifs qui étaient en jeu, et il fallait qu'on les
18 informe en temps utile. Bien entendu, compte tenu de ces informations qu'on
19 diffusait, par le biais de ces informations, on diffusait nos positions,
20 les positions de notre présidence, notre tâche, notre mission. On se
21 servait de bien d'autres méthodes. Dans le cadre de notre secteur, on avait
22 un service chargé d'Information et de Propagande. On avait des
23 journalistes. Ce n'étaient peut-être pas les journalistes les plus
24 professionnels. Maintenant, avec le recul, on peut peut-être juger avec
25 plus d'objectivité leur niveau. On avait des psychologues. On avait des
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1 "caméraman" de guerre, ou des centres de presse. On avait aussi un service
2 qui était chargé des Questions sociales, et il a joué, d'une manière
3 importante, sur le moral et le comportement des combattants. Donc, ce
4 service chargé des Questions sociales avait un officier chargé des
5 questions de logement et des questions sociales. Car, si vous avez un
6 soldat qui est envoyé sur la ligne de front, et ses proches, sa famille, ne
7 disposent pas d'un minimum existentiel pour la survie, c'est évident que,
8 sur la ligne, il ne va pas pouvoir se concentrer vraiment sur le combat,
9 mais il va se demander comment aider les membres de sa famille. Il faut
10 savoir qu'il allait aussi chercher à apporter quelque chose à sa famille.
11 Q. Permettez-moi de vous interrompre un instant. Vous avez parlé des
12 questions sociales, et vous avez dit qu'elles étaient très importantes pour
13 le moral des combattants. Dites-moi : dans quelle mesure est-ce qu'elles
14 ont entravé, ces questions, ces problèmes, ont entravé le fonctionnement de
15 votre secteur ?
16 R. En particulier, en 1992 et aussi en 1993, cela a été la principale
17 préoccupation de ce secteur et d'une bonne partie des officiers du corps
18 d'armée. Nous tous avons cherché des solutions pour s'assurer qu'il y ait
19 des colis régulièrement envoyés par l'entremise des organes du pouvoir, par
20 le biais des organisations humanitaires, pour garantir, par exemple, des
21 enterrements décents, quel que soit le rite pratiqué de nos combattants
22 pour que les proches de ces combattants puissent être pris en charge après
23 leurs morts, pour qu'on essaie de les installer quelque part, et pour que
24 le combattant et sa famille puisse avoir un logement. Ce sont les problèmes
25 auxquels on a dû faire face. Pendant un moment, c'est devenu pratiquement
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1 notre priorité.
2 Q. Lorsque vous parliez des questions sociales, vous avez dit que si la
3 famille d'un soldat n'avait pas les moyens nécessaires pour survivre, un
4 soldat, à ce moment-là, quittait la ligne de front. Lorsqu'on regarde la
5 situation avec du recul, s'agissait de quelque chose qui était une
6 expérience quotidienne. Dans quelle mesure est-ce que cet aspect social
7 était également une question pour établir un système de combat et de
8 contrôle qui fonctionnait pour tous les combattants ?
9 R. Cette question sociale était l'une des questions-clé du point de vue
10 sécurité dans un secteur pour ce qui est du moral. Si 20 soldats sur 30
11 abandonnaient la ligne, vous pouvez imaginer quelle sorte de situation cela
12 pouvait avoir pour résultat. Je ne serais pas en mesure de tenir la ligne.
13 Si un soldat savait que sa ligne n'avait pas, par exemple, de quoi se
14 chauffer et que l'hiver approchait, c'étaient des problèmes qu'il fallait
15 que nous traitions de différentes manières. D'une certaine façon, nous
16 parvenions à résoudre ces difficultés. Mais les difficultés en question
17 sont devenues un problème croissant. Le blocus qui était imposé par
18 l'Herceg-Bosna, parce qu'en fait, nous étions l'objet d'un blocus, et nous
19 ne pouvions pas faire entrer quoi que ce soit. Malheureusement, nos voisins
20 à Zenica en 1992 avaient également commencé à faire payer pour le passage
21 des véhicules et des personnes par Herceg-Bosna. A Zenica, il fallait
22 payer, il fallait dépenser cinq, dix ou 50 marks convertibles, ce qui
23 ferait à peu près 50 euros si nous voulions partir ou entrer de Bosnie-
24 Herzégovine.
25 Q. Monsieur Kadric, vous avez mentionné les problèmes de logement. Un peu
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1 plus tôt, vous avez dit qu'un grand nombre de réfugiés étaient arrivés
2 d'autres parties du pays. Qui s'occupait des problèmes de logement
3 qu'avaient les combattants et les réfugiés ? De qui était-ce la
4 responsabilité ? Est-ce que vous aviez des tâches particulières dans ce
5 domaine ?
6 R. La question d'hébergement a également eu un effet négatif sur le moral
7 des combattants. Nous essayons de résoudre ces difficultés de façon aussi
8 efficace que possible. Les autorités civiles étaient responsables des
9 questions d'hébergement, puis la responsabilité de l'organe municipal, dont
10 la compétence était de régler ces questions, et de façon que ce soit fait
11 conformément aux lois et règlements qui avaient été adoptés à ce sujet en
12 ce qui concernait les logements abandonnés, les appartements abandonnés.
13 Au niveau du corps d'armée, une sous-commission avait été formée par ordre
14 du Grand état-major. Je devais m'occuper de certaines affaires. J'étais le
15 président d'une sorte de sous-commission qui établissait une liste de ceux
16 qui devaient se voir octroyer des appartements ou des logements pour ce qui
17 est du 3e Corps, des familles, des hommes qui avaient été tués, était
18 prioritaire, puis les invalides et cetera. Cette liste était fournie par la
19 municipalité, et la municipalité pouvait à ce moment-là trouver des
20 solutions temporaires pour que les personnes puissent à ce moment-là
21 prendre ces appartements, et pas seulement des appartements mais également
22 des maisons privées qui avaient été abandonnées. Ces maisons étaient mises
23 à leur disposition, et les autorités les mettaient à la disposition de
24 différentes personnes. Je pense que c'était une façon correcte de procéder
25 parce que si personne ne venait habiter une maison, les criminels possibles
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1 se livreraient au pillage, et la maison elle-même finirait par être
2 détruite ou tombée à la véridiction.
3 Q. Vous avez mentionné les maisons abandonnées, les biens abandonnés, mais
4 les appartements qui auraient été loués, est-ce qu'ils étaient également
5 abandonnés ou est-ce que c'étaient des appartements qui étaient en cours de
6 construction à Zenica à l'époque ?
7 R. C'étaient des appartements qui avaient été abandonnés. Lorsque la JNA a
8 quitté Zenica, nous savons qu'un très grand nombre de Serbes sont partis
9 avec l'armée ou, plus exactement, des habitants de nationalités serbes. Par
10 la suite, la présidence de Guerre de la municipalité de Zenica, de façon à
11 parvenir ensemble à réunir des familles, a autorisé les habitants de Zenica
12 de différentes nationalités à partir et tous ces appartements ont été
13 déclarés abandonnés et, ensuite, ont fait l'objet d'une distribution ou
14 d'une allocation aux personnes qui se trouvaient sur la liste.
15 Q. Je vous remercie. Je voudrais que vous jetiez un coup d'œil à un
16 document. Donc, après le paragraphe 3, c'est un document qui existe
17 seulement en B/C/S. Pourriez-vous lire, s'il vous plaît, le préambule,
18 l'introduction, le titre de ce document où il y a l'article 9. Il s'agit de
19 la loi dont vous avez parlé, la loi concernant les maisons et les logements
20 abandonnés, et les biens abandonnés.
21 R. Il s'agit d'un décret qui s'applique aux appartements abandonnés.
22 L'article 9 dit que si quelqu'un peut donner un appartement abandonné pour
23 un usage temporaire, l'autorité compétente, l'organe municipal, pour les
24 questions de logement, et dans les municipalités où cet organe ne
25 fonctionne pas, l'organe compétent et le ministère de la Planification
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1 urbaine, de l'occupation des sols pour la construction et la protection de
2 l'environnement. Quant aux appartements des membres de l'ancienne JNA, le
3 ministère de la Défense est compétent. Nous avions un certain nombre
4 d'appartements à Zenica. Le ministère procédait aux distributions. Je crois
5 qu'il y en avait 92 à Zenica et environ 100 à Travnik. Ces appartements
6 étaient loués par la Commission du ministère de la Défense. Comme vous
7 pouvez le voir, tous les autres appartements étaient à louer par l'organe
8 municipal qui en était responsable.
9 Q. Je vous remercie. Pour le compte rendu d'audience, le document est le
10 419.
11 Puisque vous avez mentionné cette question du moral et des sentiments de
12 patriotisme chez les soldats il y a un instant, vous avez dit que ceci
13 était fait sur la base de la plate-forme de la présidence. Pourriez-vous,
14 s'il vous plaît, jeter un autre coup d'œil au document DH209, et me dire si
15 ceci est bien la plate-forme qui constituait la base sur laquelle
16 fonctionnait l'organe auquel vous apparteniez. Naturellement, il s'agit des
17 politiques du 3e Corps d'armée dans la région.
18 R. Oui. C'était bien la plate-forme pour le fonctionnement de la Bosnie-
19 Herzégovine en condition de guerre. Tout ce qui était indiqué ici,
20 c'étaient les directives qui devaient être suivies, et c'est cela que nous
21 voulions, c'est ce que voulait le plus les citoyens de Bosnie-Herzégovine.
22 Q. Monsieur Kadric, dans le cadre des affaires dont vous étiez
23 responsable, est-ce que parfois vous avez établi le rapport, informé des
24 unités subordonnées ou fourni des renseignements à vos supérieurs en ce qui
25 concerne l'état du moral, et l'état général des troupes dans le secteur de
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1 votre corps d'armée ?
2 R. Oui. Le secteur, chargé du Moral, de l'Information, et de la Propagande
3 et des Affaires religieuses, c'était dans nos attributions. C'était notre
4 responsabilité de fournir régulièrement des rapports écrits à nos unités
5 qui étaient placées sous notre responsabilité sur la base des
6 renseignements reçus du secteur chargé du Moral appartenant à l'état-major
7 principal, et sur la base des décisions et la base des activités de notre
8 présidence, nous leur fournissions des informations concernant ce qui se
9 passait au niveau de l'état, de ce que faisait la communauté internationale
10 parce qu'à l'origine, nous pensions que la guerre en Bosnie-Herzégovine ne
11 durerait que quelques mois. Puisqu'ils nous ont désarmés, puisque nous nous
12 trouvions l'objet d'un blocus des deux côtés, nous pensions que les
13 communautés internationales mettraient fin à la guerre et aux effusions de
14 sang ainsi qu'à la destruction particulière d'un peuple qui est celui qui a
15 le plus souffert.
16 Cela a été donc notre devoir, sur la base des renseignements reçus
17 des unités subordonnées et sur la base de nos renseignements, ainsi que sur
18 la base d'autres renseignements reçus d'organes du commandement, d'établir
19 des rapports et de les transmettre à notre commandement supérieur de façon
20 à ce qu'ils puissent être informés de la situation et de façon à ce qu'ils
21 puissent donner des ordres aux fins de prendre les mesures qui étaient
22 nécessaires afin de renforcer le sentiment patriotique, le moral de combat,
23 et protéger l'image de l'ABiH.
24 Q. Voyez-vous, s'il vous plaît -- regardez ce document numéro 5, portant
25 le numéro 0879. Nous n'avons pas, malheureusement, de traduction de ce
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1 problème donc vous pouviez, s'il vous plaît, lire le nom de la personne qui
2 a rédigé ce document, le titre du document, et si vous voulez bien lire
3 quelques paragraphes du document en question. Je voudrais ensuite que vous
4 me parliez de la question pour savoir s'il s'agit bien de l'un des
5 documents que vous avez rédigés concernant les activités de votre secteur
6 et de votre domaine.
7 R. Il s'agit d'un rapport sur la détérioration des relations au sein du
8 HVO, qui a été transmis à toutes les unités subordonnées, le 17 avril 1993.
9 Il y a quelques indications qui y figurent.
10 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, jeter un coup d'œil à la page 2, à
11 partir des mots : "En même temps, les attaques impliquant le HVO."
12 Pourriez-vous, s'il vous plaît, lire le paragraphe qui dit que : "Les deux
13 parties ont subi -- ont eu beaucoup de blessés et de tués" ? Pourriez-vous,
14 s'il vous plaît, lire cette partie et me dire si ceci est l'une des façons
15 dont vous informiez vos propres unités et les combattants.
16 R. Oui, voilà ce qui est dit : "En même temps que ces attaques avaient
17 lieu, le HVO a commencé à diffuser une propagande et à s'engager dans la
18 guerre psychologique et a déclaré que l'ABiH était responsable de toutes
19 les victimes et de tous les conflits. La vérité est bien autre parce que
20 les représentants de l'armée ont transmis un certain nombre de demandes de
21 coopération et de négociations; toutefois, les commandants du HVO ont
22 répondu à tous ces appels en s'engageant dans une agression brutale. A
23 Ahmici, un véritable massacre a été commis contre une population innocente
24 qui se trouvait là dormant dans ce village, en même temps que le village
25 voisin de Nadioci a été incendié et détruit. Environ 150 membres de ce
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1 village ont trouvé refuge en fuyant jusqu'à Zenica. Ils étaient déjà
2 arrivés à Zenica, et on s'est occupé d'eux. Un crime incroyable, un crime
3 absolument atroce a été commis dans la ville de Vitez, et le HVO a
4 également pris pour cible d'innocents civils qui s'y trouvaient, en
5 particulier ceux qui appartenaient à des mariages mixtes et ceux qui
6 avaient un lien quelconque avec l'armée de la République de Bosnie-
7 Herzégovine."
8 Q. Je vous remercie beaucoup. Puisque ce passage dit que l'armée a fait
9 tout ce qu'elle pouvait pour éviter un conflit avec le HVO, et puisque
10 c'est ce que vous dites concernant ce passage, quel type de politiques est-
11 ce que le 3e Corps d'armée suivait en ce qui concerne le conflit avec le
12 HVO, et quelle sorte de mesures étaient prises pour éviter des conflits de
13 ce genre ?
14 R. L'ABiH et le 3e Corps d'armée, je crois, ont pris toutes les mesures
15 qu'ils pouvaient -- qui auraient pu être prises, et je pense que les uns et
16 les autres faisaient tout ce qu'ils pouvaient pour éviter des conflits. De
17 nombreux officiers ont fait tout ce qu'ils pouvaient pour éviter les
18 conflits avec le HVO. Dans une certaine mesure, c'était, en quelque sorte,
19 au-dessous de leur dignité, mais ils ont accepté une telle procédure.
20 Toutefois, les politiques suivies, les politiques -- le HVO, représentant
21 l'élément de l'armée du HDZ, leurs politiques étaient telles qu'ils
22 voulaient prendre le territoire qu'ils estimaient être le leur,
23 conformément au plan Vance-Owen. Conformément à ce plan, ils pensaient que
24 ce territoire était le leur. Ils voulaient faire tout ce qu'ils pouvaient
25 pour réinstaller une partie de leur population d'autres secteurs, d'autres
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1 zones. Ils voulaient avoir des régions ethniquement pures. Tout comme le
2 commandant du corps d'armée, en tant que commandant du corps d'armée, j'ai
3 également eu connaissance d'une certaine forme de propagande qui était une
4 propagande digne de Goebbels. Au HTV à Zagreb, on avait montré des photos
5 qui étaient des montages de Croates qui auraient été pendus, environ une
6 trentaine d'entre eux, à Zenica. Ils étaient pendus à l'église de Zenica où
7 nous avions célébré la fête de Notre-Dame, et les combattants voulaient
8 nous trouver, ils voulaient évidemment nous battre. Ils disaient : nous
9 nous battons, et voyez ce que vous avez fait à Zenica.
10 C'étaient donc les problèmes qui constituaient de véritables problèmes pour
11 le commandement du corps d'armée et pour nous tous. Nous continuions de
12 négocier. Nous continuions de disputer. La commission qui a été formée pour
13 surveiller l'application des accords, formée à Busovaca et à Vitez par la
14 suite, les points de l'accord, qu'ils étaient respectés. Mais jusqu'à
15 l'accord paix, ces problèmes ont été de plus en plus présents, de plus en
16 plus réels. C'est cela le type de domaine que s'occupait le corps d'armée.
17 Nous avions un front, nous devions ouvrir un autre front, et c'était la
18 situation dans laquelle nous restions. Je ne sais pas comment nous avons
19 réussi à y survivre.
20 Q. Monsieur Kadric, indépendamment du fait que cette propagande avait un
21 tel effet sur le moral de nos combattants, veuillez me dire, à l'époque,
22 est-ce que vous aviez également à faire face à de la propagande ayant pour
23 but d'effrayer sa propre population ? Est-ce qu'il y avait des idées
24 concernant la réinstallation des personnes, et quelle sorte d'attitude a
25 été celle du 3e Corps d'armée par rapport à de telles tentatives, s'il y a
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1 eu de telles tentatives, pour affecter, en ce qui concernait son propre
2 peuple et pour s'assurer que leur propre population était déplacée à
3 d'autres secteurs ?
4 R. Je viens de dire que la politique du HDZ était de diviser la Bosnie.
5 Ils voulaient avoir un territoire ethniquement pur pour eux-mêmes, au
6 premier stade. Je ne sais pas quelles étaient leurs intentions par la suite
7 -- au stade suivant.
8 Dans leur propagande, ils suggéraient que la réinstallation de
9 groupes humains de population soient effectuée et que la population
10 d'origine ethnique croate, sur les territoires qui n'appartenaient pas à ce
11 qu'ils appelaient le Herceg-Bosna devait être paisiblement réinstaller, et
12 qu'ils allaient également réinstaller la population musulmane, comme ils
13 l'appelaient. Aujourd'hui, on appellerait cela la population bosnienne.
14 Ainsi, il y aurait eu un échange de population d'ethnies différentes. Mais
15 comme ceci n'a pas réussi, ils ont expulsé nos gens de leurs domiciles, en
16 les brûlant, en les livrant au pillage. Bien entendu, les gens se sont
17 enfuis à Zenica et dans d'autres secteurs où ils ne faisaient pas l'objet
18 d'une menace aussi grave de la part du HVO.
19 Le commandement du 3e Corps a continué à expliquer, dans tous ces ordres à
20 toutes les unités, quelle était la situation, et a insisté pour qu'il y ait
21 une attitude humaine et correcte à l'égard de la population, de leurs
22 biens, de leurs maisons ou même de la foi qu'ils professaient, leur
23 religion, les prêtres, les chefs religieux. Nous avons toujours essayé de
24 prouver que nous pouvions vivre ensemble et que la Bosnie, en tant que pays
25 internationalement reconnu, était une Bosnie qui appartenait à trois peuple
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1 égaux, les Serbes, les Croates, et les Musulmans, et que c'était la seule
2 façon dont une Bosnie pourrait survivre. Nous avons fait tout ce qui était
3 dans notre pouvoir à cet égard, même si nos hommes sous nous le
4 reprochaient. Ils se demandaient pourquoi nous cédions à tel point,
5 pourquoi nous nous comportions ainsi, alors que les autres ne se
6 conduisaient pas bien, ne se conduisaient de la même manière.
7 Ainsi, notre commandant a continué à expliquer que c'était comme cela que
8 cela devait être, que si nous oublions une Bosnie unifiée dans l'esprit de
9 la plate-forme indiqué par la présidence, c'était comme cela que nous
10 devions nous comporter.
11 Q. N'avez-vous jamais entendu parler d'Anto Valenta ?
12 R. Oui. Je pense que j'ai entendu parler d'Anto Valenta. Je pense que je
13 l'ai rencontré, personnellement, parce que, pendant un certain temps, il a
14 été membre d'une commission à Busovaca qui avait été créée après la
15 signature de l'accord. Donc, je ne sais pas si c'était le 28 janvier 1993,
16 je pense qu'il était l'un des idéologues qui avait proposé les re-
17 installations prétendument humaines ou s'il était porte-parole d'une
18 certaine politique. Je le connais, personnellement, mais c'est un homme qui
19 ne lit pas grand-chose mais qui fait ce qu'il a à faire.
20 Q. J'aimerais maintenant vous demander de regarder le document numéro 6,
21 il s'agit d'un document adressé à M. Thébault. Vous savez qui est M.
22 Thébault ?
23 R. Je pense que c'était un des membres de la Mission de surveillance. Je
24 ne suis pas sûr, mais je crois que oui.
25 Q. Il s'agit d'un document envoyé par Anto Valenta à
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1 M. Thébault. Pourriez-vous, s'il vous plaît, y jeter un coup d'œil ? Est-ce
2 que ceci constitue la plate-forme de ce qu'on avait appelé la
3 "réinstallation de la population" dont vous venez de parler.
4 R. Je pense que c'est bien cela, et je crois que c'est la politique du
5 HDZ, dont il s'agit. Je n'ai pas ce document, je n'ai jamais vu ce
6 document, je n'ai pas eu le temps de la lire et ce que je peux voir, en
7 jetant un coup d'œil en diagonale, c'est que oui, c'est bien cela. Le plan
8 Vance-Owen devrait être mis en œuvre et les trois groupes ethniques
9 auraient leur province dans lesquelles ils constitueraient leur majorité.
10 Tel était le but.
11 Q. Je vous remercie. Comme vous avez dit que l'armée voulait que la
12 Bosnie-Herzégovine reste une patrie conjointe pour les peuples en question,
13 où les peuples en question avaient vécu depuis des siècles, pourriez-vous,
14 s'il vous plaît, maintenant, regarder le document qui porte le numéro 8 ?
15 Il est marqué DH162. Pourriez-vous me dire si c'est bien un des documents
16 qui reflète, ou traduit la façon dont le 3e Corps d'armée a traité la
17 question de la coexistence de tous les groupes ethniques en Bosnie-
18 Herzégovine dans leurs propres maisons, les trois peuples en l'occurrence ?
19 R. Il s'agit d'un document qui a été établi par le commandement du 3e
20 Corps, le 18 juin 1993. On lit, par exemple, que nous avons des
21 renseignements selon lesquels le but politique général autour de Mate
22 Boban, après la défaite politique de ces concepts concernant ce qu'il a
23 appelé, ou ce qu'on a appelé la Herceg-Bosna, en tant qu'Etat national à
24 une seule nation. La création d'une telle situation sur le terrain,
25 essentiellement du point démographique, qui réaliserait le plan de paix
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1 pour la Bosnie-Herzégovine, ceci rendrait cette réalisation impossible et
2 servirait de prétexte pour son partage selon des critères ethniques et
3 ainsi de suite. Le commandant ordonne alors --
4 Q. Très bien. Je vous remercie. Si je vous ai bien compris, c'était l'une
5 des façons dont la politique du 3e Corps d'armée était exprimé en ce qui
6 concerne l'ensemble des nations dont il s'agissait et le droit de chacun de
7 ces peuples de rester chez eux.
8 R. C'est cela précisément.
9 Q. Vous avez récemment parlé de ce que vous aviez fait dans le domaine de
10 l'information. Quels moyens avez-vous utilisé pour transmettre
11 l'information à vos sous unités subordonnées, aux soldats mais également au
12 public pour informer le public. Quelle sorte de média avez-vous utilisés ou
13 aviez-vous à votre disposition ?
14 R. Nous utilisions différents moyens. Il y avait, par exemple, un moyen
15 important qui étaient les conférences de presse dans lesquelles le service
16 d'information et de propagande avait l'information qui arrivait des centres
17 opérationnels sur la base des renseignements qui nous provenaient de nos
18 unités ou plutôt nos organes dans ces unités et ceci, basé sur les
19 informations que nous avions recueillies à partir d'autres organes
20 compétents, tel que le Centre des services de sécurité. Nous organisions
21 des conférences de presse pour annoncer et informer le public de temps à
22 autre de ce qui se passait et de ce qui était effectué, de ce qui se
23 passait sur le terrain. A ces conférences de presse, il arrivait parfois
24 que les représentants du commandement y prisent part, je me rappelle que
25 l'une des premières de presse a eu lieu lorsque le commandement du 3e Corps
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1 a expliqué au public que le 3e Corps avait été créé et a présenté une
2 partie des officiers de l'état-major et a expliqué quelles étaient leurs
3 missions, leurs fonctions.
4 Il y avait eu Jasmin Jaganjac, Ante Prkacin et d'autres officiers qui sont
5 arrivés et qui travaillaient à la question à établir entre le HVO et
6 l'armée et ils également été présentés au public. Les communiqués étaient
7 une autre méthode pour diffuser l'information. Au niveau du 3e Corps, nous
8 avions, nous imprimions un journal patriotique, le "Patriotski List".
9 C'était un journal qui présentait quelle était la situation dans le pays et
10 quelles étaient les activités de notre président, ce qu'il se passait dans
11 les unités subordonnées, ce qui était positif, ce qui était négatif,
12 l'anniversaire de notre reconnaissance. Mais nous parlions également des
13 phénomènes ou événements négatifs.
14 Q. Vous avez mentionné des communiqués destinés au public sur la base de
15 quoi ? Est-ce que ces communiqués publics étaient-ils établis, qui les
16 rédigeait et dans quelle mesure est-ce le commandant du corps avait à
17 connaître les renseignements en question, et dans quelle mesure,
18 s'étendaient, dans quelle mesures est-ce qu'ils influençaient la tenir de
19 ces communités ?
20 Q. Les communiqués, dans la plupart des cas, étaient rédigés par des
21 journalistes, des gens qui, des personnes qui étaient des professionnels
22 dans ce domaine et ces communiqués étaient publiés sur la base
23 d'information certaine, de renseignements certains. Par exemple, je me
24 souviens d'un communiqué dans lequel M. Zivko Totic avait été relevé et je
25 ne sais pas quel terme utilisé, exactement, et notre centre de Presse du 3e
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1 Corps d'armée a immédiatement diffusé un communiqué public pour condamner
2 cet acte. Lorsque nous préparions ces communiqués, j'ai parfois participé à
3 leur rédaction, le commandait participait seulement lorsque nous le citions
4 personnellement par ce que nous voulions qu'ils autorisent, qu'il autorise
5 les citations.
6 Dans la majorité des cas, toutefois, c'était des professionnels du centre
7 de Presse qui faisaient ces communiqués sur la base des renseignements et
8 des idées que nous avions -- qui étaient rédigés dans ces communiqués.
9 Q. En plus de le "Patriotski List" dans lequel vous pouviez y lire des
10 renseignements, est-ce que vous compreniez aussi des renseignements dans ce
11 journal concernant des événements négatifs et ce qui se passait dans
12 l'armée ? Le but était de développer une conscience patriotique chez les
13 hommes ?
14 R. Oui. Dans l'ensemble, la teneur avait un côté positif, affirmative, de
15 façon à renforcer le moral, à renforcer la motivation et la préparation au
16 combat parce qu'il faut que je dise qu'au fur et à mesure que la guerre se
17 déroulait et que nous commencions à perdre confiance, à perdre foi durant
18 le fait que la communauté internationale ferait quoi que ce soit pour
19 arrêter le conflit. Les hommes et les soldats commençaient à se demander :
20 "Mais quelle est la nature de cette guerre ? Nous voulons la Bosnie.
21 D'autres ne la veulent pas. Que se passe-t-il ?" Ils étaient tout
22 simplement perdus, ils étaient dans la confusion. Il fallait qu'on les
23 informe. Il fallait que nous leur disions qu'il fallait qu'on fasse
24 confiance nous-même, que nous nous fondions sur nos propres forces et que
25 nous conduisions la Bosnie jusqu'à la liberté. En revanche, tout le monde
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1 savait quel était le code de conduite pour l'armée, et il y avait
2 évidemment des événements négatifs. Quand il y en avait, nous les
3 mentionnions. Je dois mentionner qu'en plus de la Liste patriotique, toutes
4 nos unités subordonnées avaient leurs photographes, leurs reporteurs, leurs
5 journalistes, et qu'ils avaient des bulletins internationaux qui parlaient
6 de la vie et des missions de leurs unités.
7 Q. Monsieur Kadric, puisque nous parlons de ces communiqués, est-ce que
8 vous pourriez examiner le document qui figure à l'intercalaire 13 et,
9 notamment, le document figurant aux intercalaires 14, 15 et 16. Le document
10 qui m'intéresse à l'intercalaire 13 porte le numéro 1372. Est-ce que vous
11 pourriez nous dire si vous reconnaissez ces documents et s'il s'agit bien
12 là de l'un des documents dans lequel vous évaluez l'état du moral au sein
13 des troupes ?
14 R. Il s'agit d'un document émanant du commandement du 3e Corps du service
15 chargé du Moral, de l'Information, de la Propagande et des Affaires
16 religieuses. Il s'agit d'un document évaluant le moral au sein du 3e Corps.
17 Nous savons que le moral est l'un des éléments cruciaux s'agissait de
18 l'état de préparation des troupes au combat, car si la motivation et le
19 moral des troupes n'est pas bon. S'ils ne sont pas bien armés, ils ne
20 seront pas en mesure d'effectuer leurs missions.
21 Q. Est-ce que vous pourriez examiner la page 7 de ce document, ligne 3, et
22 nous dire si la politique du 3e Corps, à l'égard de ceux qui ne
23 respectaient pas le règlement et qui n'obéissaient pas ordres, si la
24 politique du 3e Corps, était de poursuivre ces personnes et dans quelle
25 mesure est-ce que cette politique était importante pour le moral des
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1 troupes ?
2 R. Dans ce document, nous résumons la situation s'agissant du moral au
3 sein des unités, nous avons proposé un certain nombre de mesures qui
4 devaient être incluses dans d'autres ordres. Je souhaiterais lire en quoi
5 consistaient ces mesures. On peut lire ici : "Chercher de façon urgente une
6 solution afin d'améliorer le statut moral des hommes et de leurs familles."
7 J'ai déjà expliqué l'importance du statut social des hommes.
8 Deuxièmement : "Accélérer la création et le renforcement de la camaraderie
9 militaire, de la discipline militaire, et du moral au sein des troupes."
10 Troisièmement : "Renforcer les fonctions disciplinaires et criminelles à
11 l'égard de soldats qui ont violé ou enfreint les normes de comportement et
12 le code militaire et de l'armée de la République de Bosnie-Herzégovine."
13 "Garantir que les organes des autorités civiles exécutent les tâches
14 relevant de leurs compétences."
15 Voilà les mesures que nous avons proposées.
16 Q. Monsieur Kadric, est-ce que vous pourriez examiner les documents
17 suivants, document 0859 à l'intercalaire 14; 1159 à l'intercalaire 15; et
18 1131 à l'intercalaire 16 ? Vous avez parlé de communiqués. Sans entrer dans
19 le détail, est-ce que vous pourriez nous dire s'il s'agit là de communiqués
20 diffusés par votre centre de Presse qui relevait de votre secteur de
21 compétence ? Il s'agissait là des communiqués dont vous avez parlé plus en
22 détail tout à l'heure ?
23 R. Oui, il s'agit de communiqués diffusés par le centre de Presse du 3e
24 Corps.
25 Q. Monsieur Kadric, outre les questions d'information, d'évaluation du
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1 moral, du renforcement du moral, de développement de l'esprit patriotique,
2 et ainsi de suite, et hormis les questions consistant à résoudre les
3 problèmes sociaux, de quelles autres activités s'occupait votre service ?
4 R. Le service chargé du Moral, de l'Information et de la Propagande et des
5 Questions religieuses s'occupait également, entre autres, de l'organisation
6 et du fonctionnement des questions religieuses. A partir d'avril 1994, je
7 pense que nous nous sommes également occupés de l'échange des prisonniers
8 de guerre. Nous avons organisé des activités culturels et de
9 divertissements. Il s'agit là de question de traiter ce service, et ce,
10 avec le but d'informer, de renforcer l'esprit patriotique et de protéger
11 l'image de nos soldats conformément aux règlements en vigueur.
12 Q. Vous avez déclaré que vous vous occupiez des questions d'échange.
13 Pourquoi avez-vous commencé à vous occuper de ces questions d'échange ? Qui
14 s'en occupait ? De quelle manière s'occupait-on de ces questions ?
15 R. Je pense que la Chambre et tout le monde ici sait qu'après l'agression
16 contre la Bosnie-Herzégovine, une commission d'état a été créé, commission
17 qui disposait de commissions à un échelon inférieur au niveau des districts
18 ou des municipalités. Puisque nous faisions partie de l'armée, nous les
19 appelions des commissions civiles. Ces commissions civiles étaient tenues
20 de garder une trace, de suivre l'évolution des échanges, notamment des
21 corps des personnes qui avaient été tuées, soldats et civils, et il
22 s'agissait, ensuite, de procéder à l'échange de ces corps. L'armée n'était
23 sans doute pas satisfaite de l'efficacité de ces commissions s'agissant de
24 l'échange des membres de l'ABiH. Nous recevions souvent les corps de ceux
25 qui avaient été tués. Dans les camps de prisonniers de guerre des deux
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1 côtés, il y avait des actes de torture, et les conditions étaient très
2 difficiles, et il y avait des pressions très importantes qui étaient
3 exercées sur nous par les familles de ces soldats. Il a été décidé au
4 niveau de l'armée que nous devions, nous aussi, établir une Commission
5 chargée des Echanges.
6 Le 21 avril 1993, je pense, une commission chargée des échanges a été créée
7 au sein du 3e Corps. Le président de cette commission s'est chargé de
8 certaines questions relevant du service de l'Information, de la Propagande,
9 du Moral et des Questions religieuses. Ils travaillaient dans l'esprit dans
10 règlements en vigueur et en coopération avec les commissions civiles.
11 Q. Monsieur Kadric, dans la partie concernant le chiffre III intitulé
12 "échange," figure un certain nombre de documents. Pourriez-vous examiner
13 les documents figurant aux intercalaires 1 et 2, et me dire s'il s'agit là
14 des documents parlant du début des activités de cette commission chargée
15 des prisonniers de guerre. Ce document est un peu difficile à trouver. Il
16 s'agit du document portant le chiffre romain III.
17 R. Oui, j'ai trouvé ce document.
18 Q. Est-ce que vous pourriez examiner les documents figurant aux
19 intercalaires 1 et 2. Le premier de ces documents porte la référence
20 DH163/1. C'est un document manuscrit. Le document suivant porte le numéro
21 de référence 1447.
22 R. Oui. Il s'agit bien de ces documents.
23 Q. Monsieur Kadric, vous avez dit que vous aviez coopéré avec la
24 commission d'Etat dans l'exécution de ces tâches. Pourriez-vous nous dire
25 comment vous avez collaboré, quels problèmes vous avez rencontrés afin de
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1 garantir des soldats qui avaient été tués ou emprisonnés ?
2 R. S'agissant de l'échange des prisonniers de guerre ou des corps des
3 soldats qui avaient été tués, nous avions de nombreux problèmes. Tout
4 d'abord, nous devions nous assurer que nous disposions d'une liste précise
5 de ces prisonniers de guerre et de ces personnes tuées. Nous devions
6 comparer ces listes avec celles de la commission d'Etat. Nous devions créer
7 des conditions nécessaires pour l'échange. Nous devions collaborer de façon
8 directe et immédiate avec la Croix Rouge internationale. Lorsque ces
9 éléments étaient en place, on pouvait procéder à un échange et à la
10 sécurisation de la zone dans laquelle l'échange aurait lieu. Il fallait
11 mettre en place un cessez-le-feu, faire en sorte des que des représentants
12 et corps médical soient présents. Lorsque tout cela a été fait, l'échange
13 pourrait avoir lieu. Un certain nombre d'échanges n'ont pas eu lieu. Je me
14 souviens d'un exemple, en particulier.
15 En janvier 1993, lorsque le premier accord a été conclu avec le HVO, nous
16 avons convenu, dans le cadre de cet accord, qu'il devait y avoir, non
17 seulement un cessez-le-feu, mais un échange de tous les prisonniers de
18 guerre. Ceci devait avoir lieu immédiatement à Kacuni, sur le pont où se
19 trouvait un poste de contrôle de la FORPRONU. Toutefois, le HVO n'a pas
20 communiqué de liste, et je pense que
21 M. Fleming a ensuite déclaré que le 3e Corps avait respecté l'accord, avait
22 communiqué toutes les listes. La Croix Rouge internationale avait reçu ces
23 listes, mais le HVO avait pris du retard, si bien que l'échange n'a pu
24 avoir lieu que plus tard. Il y a d'autres exemples de ce genre.
25 Q. En ce qui concerne la pression exercée sur la commission d'Etat, vous
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1 deviez convenir avec la partie adverse d'un certain nombre de choses dans
2 le cadre d'un échange. Donc, s'il y avait de telles pressions, pourriez-
3 vous nous en parler plus en détail.
4 R. Lorsqu'un soldat du HVO ou un membre de l'armée de la Républika Srpska,
5 que nous voyions parfois avant la guerre à Zenica, si ce soldat passait de
6 l'autre côté après le conflit, ils mentionnaient le prénom et le nom de
7 famille des personnes qui devaient être échangées. Notre commission devait
8 uniquement échanger les soldats, les membres de l'armée. Mais à plusieurs
9 reprises, nous avons dû informer les femmes, les enfants, les sœurs, les
10 mères, les filles de ces officiers. Il s'agissait de mettre en place un
11 certain nombre de conditions. Ils nous disaient, par exemple : si vous
12 voulez cinq officiers, vous devez faire ceci et cela; sinon, il n'y aura
13 pas d'échange. Puisque nous savions quelles étaient les conditions en
14 vigueur dans ces camps, et étant donné que les familles des hommes qui
15 avaient été emprisonnés exerçaient des pressions constantes, nous avons
16 convenu avec la commission d'Etat que nous devions établir des listes, et
17 nous avons été contraints de participer à ces échanges. Vous savez, sans
18 cela -- autrement, nous aurions eu des problèmes avec nos soldats dont les
19 frères ou les membres de la famille étaient détenus dans ces camps. Nous ne
20 savions pas s'ils allaient venir ou pas. Ces problèmes pesaient largement
21 sur les activités de la commission.
22 Q. Vous avez parlé de coopération avec la Croix Rouge internationale. Est-
23 ce que, dans votre service, des mesures ont été prises pour expliquer
24 l'importance du respect des conventions de Genève et du droit international
25 humanitaire ? Est-ce que ceci a été expliqué aux unités, aux soldats ? Si
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1 tel est le cas, comment avez-vous procédé à cette information ?
2 R. Je peux dire que la plupart des officiers de l'ABiH étaient des
3 officiers d'active dans l'ancien JNA ou des membres de la Défense
4 territoriale qui avaient été formés dans des écoles, qui avaient suivi des
5 formations. Lors de ces formations, ils étaient informés de la teneur des
6 conventions de Genève. Ils étudiaient les conventions de Genève et le droit
7 international. Je ne sais pas tout à fait certain de cela, mais je pense
8 que nous avions des copies des conventions de Genève au début. Nous n'avons
9 pas pu les communiquer à nos unités subordonnées, mais dans tous les ordres
10 émanant de nos commandants, quelque soit les activités, nous précisions la
11 manière dont les prisonniers de guerre, la population civile, les biens
12 religieux et les membres de l'église devaient être traités. Nous précisons
13 cela dans les ordres que qu'on donnait.
14 Je me souviens que, lorsque les combats ont commencé, en mai ou en juin -
15 je ne me souviens pas la date précise - je sais que les commandants ont
16 informé, dans un document précis, qu'il y avait des combats près de
17 Kraljevo, qu'il était nécessaire de protéger le monastère de Kraljevo. Deux
18 soldats se sont comportés de façon stupide. Ils ont été sanctionnés par la
19 suite. Ils avaient volé des biens se trouvant dans un véhicule. Ils avaient
20 volé un véhicule. Ils avaient été sanctionnés par la suite. Mais le
21 monastère a été préservé et il n'y a pas eu de problème après cela. Je
22 pense que le commandant -- le commandement du corps a fait tout ce qui
23 était en son pouvoir pour éviter de tels incidents malheureux. Je ne sais
24 pas si nous avons réussi à faire cela, mais nous avons puni les auteurs de
25 crimes et de délits qui ont été portés à notre connaissance.
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1 Q. Merci. Est-ce que vous pouvez examiner, à présent, le document se
2 trouvant au numéro 3, 4, 5 et 6, et me dire si ces documents sont des
3 documents qui ont été utilisés pour informer les combattants des règlements
4 en vigueur et de la nécessité de protéger les biens.
5 R. Oui. Le 26 juin 1993, nous avons reçu, de l'état-major du commandement
6 suprême, un extrait -- un décret de loi portant adoption du droit pénal
7 s'agissant de crimes de guerre commis contre la population civile. Ceci
8 fait partie des conventions de Genève. Si -- en cas de manquement -- en cas
9 de non respect de ces règlements, la personne mise en cause serait
10 sanctionnée. Nous avons communiqué cette information à toutes les unités
11 subordonnées afin de garantir que le droit international humanitaire soit
12 respecté et que la population allait bien -- serait protégée.
13 Q. Le deuxième document porte la référence 1695. S'agit-il également d'un
14 document en rapport avec le butin de guerre, et est-ce que, dans ce
15 document, il est expliqué aux combattants ce qu'est un butin de guerre ?
16 Deuxièmement, est-ce que ce document a également pour but de protéger la
17 population et les biens et d'empêcher quiconque de commettre des crimes ?
18 R. Oui, il s'agit là de l'un des nombreux documents dans lequel le
19 commandant du corps explique ce qu'est un butin de guerre, et tout ceci a
20 été communiqué afin de garantir que les conventions de Genève et les droits
21 internationaux humanitaires seraient respectés.
22 Q. Document numéro 5, référence 0771, est-ce que le commandement du corps
23 rédigeait des ordres simplement ou est-ce qu'il souhaitait également être
24 informé de la manière dont ces ordres étaient exécutés ?
25 R. Au sein de l'armée, il est facile de rédiger une loi ou un ordre sans
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1 surveiller l'exécution de cet ordre, sans prendre sanction. Mais si tel est
2 le cas, les ordres n'ont absolument aucune raison d'être. Dans certains
3 cas, lorsque nous avions les informations nécessaires, les organes
4 compétents prenaient des mesures contre les individus qui enfreignaient les
5 règles de comportement.
6 Q. Document suivant 0917, est-ce que ceci concerne également les mesures
7 que vous avez prises et le commandant du 3e Corps afin de garantir que les
8 règlements seraient respectés ?
9 R. Oui, c'est exact.
10 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, puisque je vais
11 passer à autre chose, je souhaiterais que nous fassions une pause à
12 présent.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Avant de faire la pause, il y a peut-être une
14 erreur de traduction qui pourrait avoir des conséquences.
15 La page 27, ligne 11. Dans la traduction française, j'ai entendu le témoin
16 dire qu'il y avait des prisonniers de guerre dans des camps qui étaient
17 torturés des deux côtés, et en anglais, cela a été traduit comme cela.
18 Comme vous vous étiez debout, vous n'avez pas dû voir défiler le
19 transcript.
20 Je vous demande de bien regarder la page 27, ligne 11, de faire préciser,
21 le cas échant, au témoin ce qu'il a dit parce qu'il pourrait y avoir un
22 problème.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me souviens de ce que j'ai dit. Si vous le
24 souhaitez, je pourrai préciser cela.
25 Mme RESIDOVIC : [interprétation]
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1 Q. Oui. De quel camp parliez-vous lorsque vous avez répondu à ma
2 question ? Car là, on peut voir qu'il y avait des prisonniers de guerre
3 dans des camps des deux côtés. De quel côté parlez-vous ? De quelle partie
4 parlez-vous ? Vous avez parlé de membres de l'ABiH.
5 R. Nous avons parlé d'échange. J'ai dit qu'il y avait des abus, des
6 tortures des deux côtés. Mais je voulais parler des camps de l'armée serbe
7 du Monténégro et des camps du HVO, c'est là qu'il y avait des problèmes.
8 Sur la base de leurs requêtes, nous avons été contraints d'échanger
9 certains individus que nous n'aurions pas dû échanger.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Cette précision était importante.
11 Il est 10 heures 30. Nous allons faire la pause. Nous reprendrons à 11
12 heures moins cinq.
13 --- L'audience est suspendue à 10 heures 28.
14 --- L'audience est reprise à 10 heures 56.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, l'audience est reprise.
16 Vous avez la parole.
17 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le
18 Président.
19 Q. Monsieur Kadric, à plusieurs reprises, vous avez dit que vous vous êtes
20 occupé également des questions liées à la religion. J'aimerais savoir s'il
21 y avait une politique arrêtée ou un acte concernant l'ABiH qui était le
22 fondement de votre travail dans le domaine de la religion et quelle
23 attitude que vous réserviez à l'égard des différents membres de l'ABiH qui
24 était de religion différente.
25 R. Puisque le secteur chargé du Moral, de l'Information, de la Propagande
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1 de la Religion, dans le domaine de ses compétences, avait également ce
2 secteur-là et, compte tenu du fait que les citoyens de l'état de Bosnie-
3 Herzégovine avaient le droit d'exercer librement leur confession, de
4 pratiquer leur confession, les membres de l'ABiH avaient, eux aussi, le
5 droit de pratiquer leur religion. Dans le cadre de notre secteur, l'état-
6 major suprême nous a adressé des instructions que nous avons fait suivre à
7 toutes les unités. Conformément à leurs possibilités, conformément à leurs
8 activités de combat, elles ont suivi, elles ont pratiqué les différentes
9 religions. Bien entendu, comme il y a eu changement de systèmes, il y avait
10 beaucoup de gens qui n'étaient pas pratiquants, qui ne savaient pas ou qui
11 savaient, cela variait. Notamment, la population rurale connaissait mieux
12 les pratiques religieuses que la population urbaine. Donc, d'après
13 l'organigramme de notre organisation, on avait des secteurs, chargés de
14 Questions religieuses qui aidaient là où il le fallait, qui enseignaient
15 même aux gens, la manière de pratiquer leur religion.
16 Q. Dites-moi : est-ce qu'on a fait une différence, quelle qu'elle soit,
17 une distinction quelle qu'elle soit, parmi les membres de l'armée de
18 Bosnie-Herzégovine qui étaient de confessions diverses ?
19 R. Je pense qu'il n'y a pas un seul qui vous le confirmerait, qui vous le
20 dirait. Toutes les religions étaient placées sur un pied d'égalité, tous
21 avaient le droit de faire part de leurs convictions religieuses de la
22 manière dont ils le souhaitaient, c'est-à-dire, de la manière dont ils
23 faisaient normalement, selon leur appartenance ethnique ou leur
24 appartenance confessionnelle.
25 Q. Monsieur Kadric, vous nous avez déjà dit que la politique pratiquée au
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1 sein du 3e Corps voulait que l'on s'attache tout particulièrement aux
2 édifices destinés aux cultes, aux clergés des différents côtés. Est-ce
3 qu'il y a eu une différence dans votre attitude vis-à-vis différents
4 édifices appartenant aux différentes religions ou aux prêtres ou aux
5 différents dignitaires. Ou est-ce que vous réserviez une même attitude à
6 l'égard toutes les communautés confessionnelles.
7 R. Le commandement du corps d'armée avait la même attitude à l'égard de
8 toutes les institutions religieuses, tous les bâtiments religieux et tous
9 ceux qui travaillaient pour les différentes religions. Il y a toute une
10 série de documents, d'ordres par lesquels la commandant du 3e Corps
11 d'armée, toujours dans un paragraphe, souligne l'importance de faire
12 attention aux édifices religieux. Là, où il semble y avoir des problèmes,
13 un plus d'un ordre, on précise par un décret, une décision sur ceci, et
14 s'il y avait effectivement des problèmes, en prendre des mesures. Comme je
15 viens de le souligner, pour Kraljeva Sutjeska, il y avait deux membres qui
16 se sont emparés d'un golf, on a entrepris des mesures, on les a
17 interpellés, on les a punis pour ce comportement qui constitue une
18 infraction.
19 Q. Monsieur Kadric, conformément à cette instruction que vous avez reçue
20 du commandement Suprême, je vous prie de vous reporter à la partie II,
21 "Relations à l'égard de la religion," et je vous prie de vous référer au
22 document, au numéro 1. Est-ce que c'est bien le document que vous avez
23 mentionné lorsque vous avez répondu à ma question ? C'est la pièce du
24 Procureur, P122.
25 R. Oui, c'est ce document.
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1 Q. Je vous remercie.
2 A plusieurs reprises, en répondant à mes questions, vous avez mentionné le
3 Busovaca. Vous avez mentionné M. Fleming qui a informé d'un certain nombre
4 de choses la Commission de Busovaca et ainsi de suite. Ma question est la
5 suivante : Étiez-vous membre de la Commission de Busovaca ? Si oui, pendant
6 quelle période ?
7 R. Le 27 janvier 1993. Le commandant du corps d'armée a constitué ou
8 plutôt a adressé un groupe d'officiers en négociation à Kiseljak pour
9 s'entretenir avec M. Blaskic parce qu'à Busovaca, il y avait déjà une
10 escalade de tension, il y a eu quelques conflits. Lors de cette réunion du
11 27, j'ai été présent moi-même avec M. Merdan qui était le commandant
12 adjoint, à ce moment-là. Je ne sais pas exactement qui a présidé, je pense
13 que c'était le général Colin Simpson, je n'en suis pas sur. Lors de cette
14 réunion, nous avons mis au point un certain nombre de points d'accord mais
15 M. Blaskic, à la fin, n'a pas voulu signé cet accord car, paraît-il, reçu
16 une information lui disant de l'un de ces groupes de négociateurs a été
17 victime d'un incident du Dusina et c'est la raison pour laquelle, il n'a
18 pas signé l'accord. En fait, c'était le 26 et le lendemain, 27 lorsqu'on
19 est revenue au commandement du corps, M. Mercan a vérifié les informations
20 et il a vu que ces informations n'étaient pas exactes et le lendemain on a
21 dit qu'à Dusina, il y a eu des conflit mais que cette information et
22 l'information qu'il avait reçue n'était pas exacte et il me semble que
23 c'est jour-là qu'on a signé l'accord. On s'est mis d'accord avec un début
24 de cessez le feu de constituer un commissions mixte avec trois
25 représentants de l'armée et trois représentants du HVO ainsi qu'avec des
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1 représentants de la Communauté européenne qui, elle, devait se charger de
2 la logistique et des transports. Le siège devait être à l'hôtel Tisa. Les
3 Croates l'avaient baptisée Croatia, à ce moment-là. Il a été passé un
4 accord de se retrouver au bout de quelques jours pour voir ce qui était
5 réalisé Une deuxième réunion s'est tenus à Kiseljak, non pas à Kiseljak,
6 mais à Vitez, siège de la FORPRONU sous le présidence du colonel Stewart.
7 Ce que j'ai oublié de signaler, c'est que, lors de la dernière réunion, M.
8 Blaskic a dit : puisque le commandant du 3e Corps n'est pas présent, que
9 lui non plus ne serait pas présent à la réunion suivante, mais qu'il serait
10 représenté par M. Nakic. C'était son suppléant ou son adjoint. Lors de
11 cette deuxième réunion, il a précisé les points d'accord, le retour des
12 unités à leurs positions de départ. Le problème se posait par notre unité,
13 la 305e, qui s'était constituée à Gornji Vakuf et, naturellement, procéder
14 à un échange tous pour tous.
15 Ce dont je me souviens c'est que M. Fleming a dit, lors de cette réunion,
16 qu'un groupe s'était rendu à Dusina, que sur place, il a vu des gens
17 effrayés. Il a dit qu'il a vu des maisons endommagées. Mais il n'a pas fait
18 part de crimes de guerre qui auraient été commis. Egalement, on a informé
19 que l'armée avait établi des listes de tous les membres du HVO faits
20 prisonniers, des listes qui n'avaient pas encore été fournies, et que
21 c'était la raison pour laquelle on n'a pas pu procéder à l'échange dans le
22 secteur de Kacuni-Busovaca en temps voulu.
23 Q. Monsieur, pendant combien de temps avez-vous travaillé au sein de cette
24 commission, et en tant que membre de la commission, avez-vous fait des
25 rapports sur les travaux de la Commission au commandement du corps, des
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1 rapports sur ce que vous faisiez sur le terrain ?
2 R. Je suis resté pendant deux mois, deux mois demi, au sein de la
3 commission. Sa tâche était surveiller la mise en œuvre de l'accord, c'est-
4 à-dire du cessez-le-feu, et de résoudre toute question en suspens. Elle
5 avait des compétences pour faire cela, pour ce qui est des échanges, pour
6 ce qui est de la mise sur pied des points de contrôles mixtes, pour ce qui
7 est d'assurer le passage libre d'un certain nombre de véhicules, en
8 particulier, des véhicules de l'aide humanitaire. Egalement, l'ordre a été
9 donné d'ouvrir la communication vers Zenica, la route vers Zenica. Le HVO
10 posait toujours sa condition, qui était le retour des unités. Il me semble
11 8 000 forces musulmanes, d'après eux, seraient arrivées à Busovaca. Donc,
12 la levée du blocus de la route a mis longtemps. La mise sur pied des points
13 de contrôle mixtes se déroulait également lentement. Donc, c'était cela les
14 questions dont s'est occupée la commission.
15 Pour ce qui est de notre méthode de travail, à l'hôtel Tisa, on se
16 réunissait toujours, on constituait des équipes, généralement trois
17 équipes, pour agir sur demande sur le terrain pour constater la situation
18 pour ce qui est des bâtiments endommagés, pour voir ce qui en était des
19 problèmes que posait le cessez-le-feu, et ainsi de suite, et ainsi de
20 suite. Naturellement, cette commission envoyait, toutes les nuits, un
21 rapport au commandement du corps. Le commandement du corps a été donc
22 informé de nos activités. Pratiquement toutes les nuits, par des
23 transporteurs, on nous amenait, sur notre territoire à Zenica, et dès le
24 lendemain, les transporteurs étaient là, et ils nous attendaient nous
25 emmener à Busovaca et on poursuivait nos travaux selon les plans des
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1 observateurs européens.
2 Q. Monsieur Kadric, c'est la section IV qui m'intéresse à présent, chiffre
3 romain IV. Il est question de la Commission de Busovaca. Dites-moi si le
4 document au point 4, le document 0681, s'il fait état de cette réunion qui
5 s'est tenue à Vitez dont vous avez parlé. J'aimerais savoir aussi ce qui en
6 est du document 0713, au numéro 5, si c'est bien l'un des rapports que vous
7 étiez tenu de rédiger.
8 R. Oui, ce sont ces rapports, ces documents qui concernent la commission
9 en question.
10 Q. Ma dernière question, Monsieur Kadric. Dites-moi : Le
11 3e Corps d'armée, ainsi que son commandant, ont-ils pris des mesures pour
12 que cet accord soit traduit dans les faits dans sa totalité ? Enfin, quel a
13 été leur politique pour ce qui est du conflit vous opposant au HVO ?
14 R. Je pense que ce rapport de M. Fleming du 30 janvier 1993 à Vitez montre
15 qu'en ces quelques jours, le commandement du corps d'armée a entrepris tout
16 et a fait preuve d'une coopération pour traduire dans les faits les
17 différents points de l'accord.
18 Un deuxième point : le commandement du 3e Corps et, je pense, l'ABiH ne
19 souhaitaient pas du tout qu'il y ait une escalade de conflit avec le HVO
20 parce que nous avions déjà un ennemi. Si on ouvrait un deuxième front, il y
21 avait un blocus des moyens et de l'équipement par le HVO, nous nous serions
22 retrouvés dans un blocus total. Mais avec ce recul, je me demande même
23 comment on a pu survivre.
24 Q. Je vous remercie, Monsieur Kadric.
25 Mme RESIDOVIC : [interprétation] J'en ai terminé, Monsieur le Président.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je vais demander aux avocats si les autres
2 avocats ont des questions à poser.
3 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, pour le moment,
4 nous n'avons pas de questions pour ce témoin.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.
6 Je me tourne vers M. Mundis pour lui laisser la parole.
7 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. L'Accusation n'a
8 pas de questions à poser à ce témoin.
9 [La Chambre de première instance se concerte]
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur, l'Accusation n'a pas de questions à
11 poser, les Juges n'ont pas de questions à poser donc, dans ces conditions,
12 votre témoignage d'aujourd'hui vient de s'achever. Nous vous remercions
13 d'être venu déposer à La Haye. Vous avez répondu aux questions des
14 Défenseurs, qui vous ont fait venir. Je vous en remercie. Je formule, au
15 nom de la Chambre, mes meilleurs vœux pour votre retour dans votre pays.
16 Je vais demander à Mme l'Huissière de bien vouloir vous raccompagner.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.
18 [Le témoin se retire]
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, je présume que le deuxième témoin est à la
20 disposition de la Chambre.
21 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous avions prévu
22 un seul témoin pour aujourd'hui. Le deuxième témoin n'est pas prêt à
23 déposer. Nous avons deux témoins pour demain. Au cours de l'après-midi, je
24 verrai ces deux témoins.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, demain nous avons deux témoins. Demain,
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1 c'est mercredi. Puis, jeudi, il restera un témoin; c'est cela ? Puisqu'il
2 nous reste trois témoins dans la semaine.
3 Comme il nous reste du temps, voulez-vous aborder d'autres points ? La
4 Défense.
5 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Pour le
6 moment, nous n'avons pas de questions supplémentaires, si ce n'est que nous
7 souhaitons proposer au versement les pièces -- les documents que nous avons
8 montrés à ce témoin.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Pouvez-vous nous lister les pièces, parce que, dans
10 le classeur, toutes les pièces n'ont pas été utilisées.
11 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Oui. Pour ce qui est de la première partie
12 du document, nous souhaitons proposer, au versement, de manière définitive,
13 le document au point 2, 0701; ensuite, le document au point 6, 0988;
14 ensuite, le document au point 13, 1372; document point 14, 0859; au point
15 15, 1159; au point 16, 1131; ensuite, dans la partie 3, le document au
16 point 2, 1447; au point 4, 1695; au point 5, 0771. Je précise que le
17 document au point 6 est déjà versé en tant que pièce DH0917, même si cela
18 ne figure pas sur notre liste.
19 Dans la partie 4, nous proposons au versement les documents au point 4,
20 0681; et au point 5, 0713.
21 Pour ce qui est du versement aux fins d'identification --
22 Excusez-moi un instant.
23 [Le conseil de la Défense se concerte]
24 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Excusez-moi. Avec du Greffe, nous avons
25 appris que nous avons des traductions des documents au points 3 et 5, donc
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1 0419 et 0879, donc nous proposons au versement ces pièces également puisque
2 nous les avons déjà communiquées au Greffe. Hélas, en nous préparant pour
3 l'audience d'aujourd'hui, je n'avais pas encore ces traductions.
4 Merci.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie.
6 Alors l'Accusation, la Défense vient de nous citer, à partir de la liste,
7 les pièces. Est-ce que vous avez des observations à faire sur ces documents
8 qui ont été reconnus par le témoin ?
9 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation n'a pas
10 d'objection quant au versement de ces documents en tant que pièces;
11 cependant, nous souhaiterions revoir, si possible, les pièces 0419 et 0879,
12 puisque ma collègue vient de nous dire que les traductions anglaises sont
13 maintenant disponibles. Nous n'avons pas pu examiner ces documents
14 précédemment, donc nous souhaitons réserver notre réponse pour ce qui est
15 de ces deux documents.
16 Pour ce qui est des autres qui sont traduits, nous n'avons pas d'objection
17 à leur versement.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. La solution c'est de donner des chiffres
19 définitifs aux pièces qui n'ont pas été contestées, et on donnera deux
20 numéros aux fins d'identification pour le 419 et le 879, dans l'attente des
21 observations de l'Accusation.
22 Alors, Monsieur le Greffier, vous avez la parole.
23 M. LE GREFFIER : Je vous remercie, Monsieur le Président.
24 Nous avons deux catégories de documents. La première catégorie de pièces
25 qui sont versées définitivement au dossier comprend les numéros suivants :
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1 le DH701; avec une version anglaise DH701/E; le DH988, avec une version
2 anglaise DH988/E; le DH1372, avec sa version anglaise DH1372/E; DH859,
3 version anglaise, DH859/E; le DH1159, avec une version anglaise, DH1159/E;
4 le DH1131, avec version anglaise, DH1131/E; le DH1447, version anglaise,
5 DH1447/E; DH1695, avec une version anglaise, DH1695/E; le DH771, sa version
6 anglaise, DH771/E; le DH681, version anglaise, DH681/E; le DH713, avec une
7 version anglaise, DH713/E.
8 Enfin, les documents DH419 et DH879 avaient déjà été versés aux fins
9 d'identification par décision orale de la Chambre le 20 octobre 2004. Il
10 reste, donc, de marquer pour identification. Merci, Monsieur le Président.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. La Chambre prend note
12 de ces numéros.
13 Ceci étant dit, est-ce que M. Mundis veut intervenir sur un autre sujet ?
14 M. MUNDIS : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président. Pour que ce
15 soit tout à fait clair de ce qui se passera demain, j'ai vérifié le
16 planning, et d'après la liste que nous avons, il y a un témoin pour demain
17 et deux pour jeudi. Mais sur la base de ce que vient de dire mon éminente
18 collègue, je suppose que le premier témoin prévu pour jeudi commencerait
19 peut-être en fin d'audience demain, et l'ordre sera respecté tel
20 qu'annoncé.
21 Aussi, si on pouvait recevoir, dès que possible, des documents des pièces
22 qui seront utilisées pour les trois témoins qui nous restent pour cette
23 semaine, ce serait très bien, puisque nous n'en avons pas encore reçu.
24 Merci.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, la Défense, l'Accusation souhaite connaître
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1 les pièces qui seront, le cas échéant, étudiées.
2 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, aujourd'hui, d'ici
3 à 15 heures, nous communiquerons à l'Accusation la liste des documents que
4 nous allons utiliser avec M. Ziko, le deuxième témoin. Pour les deux autres
5 témoins, nous n'aurons pas de documents nouveaux, des documents qui
6 n'auront pas encore été versés.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je vous remercie de ces précisions.
8 Est-ce que les autres avocats qui sont au fond veulent intervenir ? Pas
9 d'intervention. Plus d'intervention.M. Mundis non plus. Bien.
10 Alors, l'audience de ce jour vient de s'achever. Je vous inviter à revenir
11 pour l'audience de demain qui débutera à 9 heures du matin. Je vous
12 remercie.
13 --- L'audience est levée à 11 heures 22 et reprendra le mercredi 19 janvier
14 2005, à 9 heures 00.
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