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1 Le jeudi 31 mars 2005
2 [Audience publique]
3 --- L'audience est ouverte à 9 heures 05
4 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, pouvez-vous appeler le numéro
6 de l'affaire.
7 M. LE GREFFIER : Merci, Monsieur le Président. Affaire numéro IT-01-47-T,
8 le Procureur contre Enver Hadzihasanovic et Amir Kubura.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais demander à l'Accusation de bien vouloir se
10 présenter.
11 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour, Madame,
12 Monsieur les Juges, conseil de la Défense et aux personnes présentes dans
13 le prétoire. Pour l'Accusation, Matthias Neuner et Daryl Mundis, avec
14 Andres Vatter, notre commis à l'affaire aujourd'hui. Merci.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Je me tourne vers les avocats.
16 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,
17 Monsieur les Juges. Le général Hadzihasanovic est représenté par Edina
18 Residovic, conseil; Stéphane Bourgon, co-conseil; et Muriel Cauvin,
19 assistante juridique. Merci.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Les autres avocats.
21 M. DIXON : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
22 Juges, M. Kubura est représenté aujourd'hui par
23 M. Rodney Dixon, avec Nermin Mulalic qui est mon assistant. Merci.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : En cette journée de jeudi, je salue toutes les
25 personnes présentes. Je salue les représentants de l'Accusation, je salue
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1 notre témoin expert qui, je l'espère, sera là pour la dernière fois, mais
2 cela dépendra des avocats. Je salue tous les avocats présents et je salue
3 le général Hadzihasanovic et le général Kubura. Je n'oublie pas de saluer
4 également, au nom de la Chambre, toutes les personnes présentes dans cette
5 salle d'audience, qu'elles soient à l'intérieur ou à l'extérieur de cette
6 salle d'audience. Nous devons, comme je l'ai indiqué, terminer l'audition
7 du témoin expert et j'ai une série de questions à lui poser. Après lui
8 avoir posé ces questions, je donnerai la parole à l'Accusation et à la
9 Défense afin qu'on puisse clôturer cette semaine de témoignages de
10 l'expert.
11 LE TÉMOIN : VAHID KARAVELIC : [Reprise]
12 [Le témoin répond par l'interprète]
13 Questions supplémentaires de la Cour :
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Quelques questions préliminaires sur vous-même. De
15 l'annexe 1 qui figure dans votre rapport, vous avez indiqué que vous aviez
16 été aux Etats-Unis en 1997, 1998 et 1999. A la lecture de cette annexe,
17 j'ai cru comprendre que vous aviez suivi une école militaire américaine.
18 Pouvez-vous nous apporter quelque sorte éléments d'information sur ce stage
19 aux Etats-Unis ?
20 R. Les deux tiers du temps passés aux Etats-Unis, j'ai séjourné au Texas,
21 dans la ville de Los Angeles, et dans le centre de Formation américain pour
22 qui fournit un enseignement de l'anglais, qui assure un enseignement de
23 l'anglais. Le reste du temps, je l'ai passé à l'école des Etudes post
24 universitaires de la Marine à Monterey, entre Los Angeles et San Francisco.
25 J'ai ai suivi un cours sur les ressources matérielles, plus précisément,
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1 sur l'emploi et la distribution, l'utilisation, la planification des
2 ressources matérielles de l'Etat, aux fins d'assurer la défense de l'Etat.
3 En suivant cette formation, ce cours, j'ai aussi effectué une visite d'une
4 durée de 15 à 20 jours à Washington, D.C., une visite aux instances de
5 l'Etat, et à New York, on s'est rendu au siège des Nations Unies.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Hier, en répondant à une question, vous avez indiqué
7 que vous faisiez actuellement une thèse de doctorat. Quel est le sujet de
8 votre thèse de doctorat ? Est-ce que c'est un doctorat qui porte la matière
9 militaire ou sur un autre sujet ?
10 R. Lorsque j'ai soutenu mon mémoire de ma thèse de maîtrise, comme je l'ai
11 déjà dit, c'était des préparatifs politiques et militaires, de l'agression
12 contre la Bosnie-Herzégovine et l'agression telle qu'elle a été lancée au
13 nord-est de la Bosnie. Naturellement, ceci englobait tous les aspects
14 politiques et militaires, le statut de l'ex-Yougoslavie pendant les années
15 qui ont précédé la guerre, démantèlement, l'effondrement de la Yougoslavie
16 et l'agression elle-même sur la Bosnie-Herzégovine. A présent, ce que
17 j'essaie - puisque, dans le cadre de ce thème, je n'ai pas abordé Sarajevo,
18 la capitale - j'essaie de me faire autoriser, comme sujet, le sujet qui
19 serait : "Le rôle et la place de Sarajevo," en comparant ceci évidemment
20 avec les aspects politiques et diplomatiques pour éventuellement pouvoir
21 soutenir ma thèse de doctorat de troisième cycle pour compléter -- pour
22 contribuer à ce qu'on comprenne la situation politique et militaire en
23 Bosnie-Herzégovine et en particulier à Sarajevo pendant la guerre.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Dernière question concernant vous-même. Dans
25 l'Annexe 52 de votre rapport, il y a une référence à une page 133. C'est
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1 une foot note où la note de bas de page est intitulée : "Agression du la
2 Bosnie-Herzégovine." Cette page qui figure dans votre rapport, est-ce que
3 c'est tiré d'un article ou est-ce que c'est tiré d'un livre ?
4 R. Excusez-moi, il faut que je revoie quel est le paragraphe ?
5 M. LE JUGE ANTONETTI : L'annexe 52.
6 R. Oui. En fait, c'est ma déclaration qui figure dans le livre que j'ai
7 publié, qui figure dans sa formulation originale. La déclaration que j'ai
8 faite, à l'occasion de tous les événements qui vont à partir du moment où
9 l'agression sur la République de Slovénie a été lancée puisqu'à ce moment-
10 là, en 1991, j'étais en poste à Ljubljana, la capitale de la Slovénie, et
11 j'étais commandant du Bataillon motorisé là-bas. Après que cette situation
12 militaire s'est terminée en Slovénie, sur ordre émanant de Belgrade, avec
13 mon bataillon au complet, avec nos moyens faisant partie de notre brigade,
14 j'ai été muté, redéployé de Ljubljana en Bosnie-Herzégovine, dans la
15 caserne de Zenica, le 20 août 1991.
16 Par la suite, deux mois plus tard, le 20 octobre 1991, de la même manière,
17 de Belgrade, j'ai été redéployé de Zenica. Avec mon bataillon au complet,
18 les effectifs, les moyens, j'ai été redéployé à la caserne de Tuzla, au
19 nord-est de la Bosnie. Mon affection était d'attaquer avec mon bataillon la
20 République de Croatie, plus précisément la ville de Vukovar - j'en ai déjà
21 parlé, à ce moment-là, il y a quelques jours j'en ai parlé - puisque mes
22 officiers subordonnés, des Macédoniens, des Croates, des Slovènes, des
23 Musulmans de Bosnie, des Albanais avaient déjà déserté pour la plupart
24 d'entre eux jusqu'à ce moment-là, et j'avais beaucoup de soldats qui
25 avaient déserté également.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Général, votre livre est-ce qu'il a été traduit en
2 anglais, ou il n'est que dans votre langue ?
3 R. En ce moment-là, il n'existe qu'en langue bosniaque. On est en train de
4 voir si ceci ne peut pas être traduit; avec un peu de chance, ce sera
5 traduit.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Je passe maintenant à d'autres sujets. En tant que
7 commandant de corps, pouvez-vous nous décrire une journée type d'un
8 commandant de corps? En commençant par le matin jusqu'en fin d'après-midi,
9 que fait un commandant de corps dans une journée ? Pouvez-vous scinder cet
10 exposé en deux parties ? En phase où calme, il ne passe rien, ou une
11 journée en phase d'opération, soit opération offensive ou défensive, afin
12 qu'on puisse prendre connaissance de l'activité d'un commandant de corps
13 dans une journée type X.
14 R. Comme vous venez de le dire, vous-même, il serait souhaitable de
15 distinguer au moins deux temps. Tout d'abord, ce que fait le commandant de
16 corps en situation de paix, un deuxième temps, ce que fait le commandant de
17 corps en situation de guerre, avec quelques sous catégories, d'éventuelles
18 actions de combat offensives ou défensives.
19 En temps de paix, le commandant de corps, naturellement, comme tous les
20 autres officiers, lorsqu'ils ne sont pas en état de guerre, en situation de
21 guerre, il se rend à son travail comme tous les autres officiers, comme
22 tous les autres employés ou travailleurs dans les usines où que ce soit. Il
23 arrive à son poste, et il doit recevoir le rapport, lorsqu'il arrive à la
24 caserne, là où est le siège de son commandement où est son bureau, dont
25 l'une des casernes où sont stationnées ses unités, puisque le corps est
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1 grand, il possède un grand nombre de casernes, un grand nombre d'unités.
2 Quelque part au centre du stationnement de ces unités, au centre est situé
3 le siège du commandement et le bureau du commandant du corps. Il est briefé
4 par l'officier de permanence dès qu'il arrive à la caserne. Il lui fait
5 rapport avec une unité alignée, la garde, éventuellement la police
6 militaire. Donc l'officier de permanence lui fait rapport sur la situation
7 qui prévaut dans le corps tout entier, pour les 24 heures écoulées. C'est-
8 à-dire --
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce rapport de l'officier de permanence, est un
10 rapport oral ou un rapport écrit également ?
11 R. Les deux, l'un comme l'autre. D'abord, il lui fait rapport oralement le
12 matin --
13 M. LE JUGE ANTONETTI : A quelle heure ?
14 R. Cela dépend du début de la journée ouvrable, 7 heures,
15 8 heures, donc, à l'heure où le commandant du corps est censé se rendre. Il
16 doit être très ponctuel, si c'est à 8 heures, cela doit être à 8 heures, il
17 doit être au portail. C'est là que l'officier de permanence l'attend avec
18 l'unité alignée.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Cela se passe dans tous les corps de la Bosnie-
20 Herzégovine, ou c'était spécial au 1er Corps ?
21 R. Maintenant, je vous parle du commandant de corps en temps de paix.
22 Aucun commandant de corps n'a eu l'occasion de procéder ainsi si ce n'est
23 qu'après la guerre. Je vous parle du commandant de corps dans la JNA, en
24 temps de paix. Après j'aborderais la question du commandant de corps en
25 temps de guerre, et le cas des commandants de corps de Bosnie. Donc,
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1 commandant de corps de la JNA en temps de paix, il se rend à la caserne, il
2 reçoit le rapport oral, on l'informe de la situation telle qu'elle a été
3 pendant les 24 heures passées dans le corps, dans sa totalité. Cela prend
4 jusqu'à dix minutes. Il passe en revue brièvement l'unité, la garde.
5 Ensuite, naturellement, il se rend dans son bureau. Une fois arrivé dans
6 son bureau, il y trouve le rapport écrit, précisément ce que vous veniez de
7 demander. Sur son bureau, il trouve le rapport beaucoup plus détaillé,
8 approfondi, plus exhaustif. La première chose qu'il fait, il prend ce
9 rapport, il en prend connaissance, il le lit. En lisant le rapport en même
10 temps, il prend connaissance de tout ce qui est bien, et là il constate que
11 c'est bien. Pour les choses qu'il considère qu'elles ne sont pas bien, il
12 les signale sur le document lui-même, il écrit en donnant les instructions
13 pour qu'on remédie à des faiblesses, des lacunes qui auraient été
14 remarquées pendant les 24 heures passées.
15 Après avoir lu cela, le commandant du corps, généralement si la journée
16 commence à 8 heures, donc, à 8 heures 30 ou à 9 heures, il rassemble ses
17 assistants, ceux qui font partie du commandement du corps. Cela dépend de
18 la structure du commandement de corps, cela peut faire sept, huit, neuf,
19 jusqu'à dix personnes, dix assistants. Ils se rendent dans son bureau.
20 C'est la réunion de travail matinale où l'on précise les tâches
21 journalières, les obligations pour la journée. Qu'est-ce qu'on a fait
22 pendant la période passée, ce qu'il convient de continuer à faire au cours
23 de la journée qui est devant nous, ou éventuellement de nouvelles tâches
24 pour commencer une nouvelle action en fonction des différentes tâches pour
25 la période à venir.
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1 Cette réunion dure au moins quoiqu'on fasse, jusqu'à 1 heure. Entre-
2 temps, et pendant cette réunion, le commandant de corps, conformément au
3 rapport qu'il a eu, attribue des tâches, en fonction des problèmes qui ont
4 apparu, d'après les différents secteurs. Il s'adresse à ses assistants pour
5 leur confier des missions. Si c'est le moral, les questions juridiques,
6 logistiques, il a ses assistants pour chacun de ces segments. Il leur donne
7 des obligations, des tâches pour qu'il remédie à ces problèmes pendant la
8 journée et à la fin de la journée, il va les rassembler encore une fois,
9 pour recevoir leur rapport.
10 Après avoir lu le rapport du matin, le commandant de corps est tenu
11 tous les matins, de prendre contact avec ses commandants qui sont ses
12 subalternes directs. Donc si la journée commence à 8 heures 00, à partir de
13 8 heures 30, pendant cette journée ou cette réunion, ou éventuellement
14 après la réunion, jusqu'à 10 heures 00, le commandant de corps doit
15 recevoir les appels, donc ce n'est pas lui qui appelle, mais tous les
16 commandants de brigade, s'ils sont directement attachés à lui, ou des
17 commandants de division ou de groupe opérationnel, cela dépend de la
18 structure du corps, ils doivent l'appeler et lui faire rapport. En plus de
19 ce rapport, ils doivent l'informer éventuellement de ce qui est important,
20 et qui ne figure pas dans le rapport qui a été fourni par l'officier de
21 permanence.
22 En même temps, par ce contact avec les commandants des brigades qui sont
23 ses subordonnés, dans cette même conversation, il leur donne un certain
24 nombre de tâches précises, des lignes directrices, des obligations, soit
25 pour la journée, soit pour plus de journées à venir, ceci dépend de la
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1 nature des missions. Généralement, après 10 heures, une fois que ces
2 activités sont terminées, le commandant de corps, tous les jours, je pense
3 qu'il est difficile -- enfin, un commandant de bataillon n'y arrive pas, je
4 ne vois pas comment un commandant de brigade y arriverait, donc, encore
5 moins un commandant de corps, il est difficile de trouver une journée qui
6 ne soit pas complètement remplie par des différentes activités, et ces
7 activités sont prévues dans les plans mensuels qui sont établis sur ordre
8 du commandant de corps. Par la suite, à partir de 10 heures, disons jusqu'à
9 14 heures, pendant ces heures de travail, le commandant de corps d'après le
10 plan est engagé quelque part, soit on a prévu par avance des réunions dans
11 les différentes structures civiles avec des acteurs civils, où il est tenu
12 d'être en soi, il peut être engagé à faire des conférences en tant que
13 commandant de corps, à venir parer dans ses unités où ailleurs en
14 coopération étroite avec d'autres acteurs. Il peut y avoir aussi des
15 inspections, des contrôles des unités parce que le commandant de corps le
16 souhaite et c'est pour cela que cela a été inscrit dans les plans, ou il
17 peut travailler sur la prise de décisions, l'élaboration des documents, des
18 plans à court terme, à moyen termes, à long termes. Ce sont des tâches très
19 volumineuses.
20 Que faire pendant le mois à venir, pendant l'année à venir, et que faire
21 pendant les cinq années à venir, car le commandement du corps c'est une
22 unité opérationnelle, on emploie toujours ce terme-là. Ce commandement est
23 très étroitement lié au sommet, à la direction militaire de l'Etat, donc,
24 le ministère de la Défense et le Commandement principal qui élabore ces
25 plans. Le sommet ne peut pas élaborer les plans sans la contribution des
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1 commandements de corps. Ils sont parmi les protagonistes clés de ces
2 activités lorsqu'il s'agit de l'élaboration de ces plans. Un plan à court
3 terme ne pose pas un problème pour un mois, pour trois mois ou six mois,
4 enfin cela change, voire même un plan annuel, mais des plans à plus long
5 termes [imperceptible] de l'aménagement du territoire, de l'évolution de
6 l'armement, de l'équipement militaire, du point de vue scientifique, du
7 point de vue formation et l'amélioration de la formation et de
8 l'entraînement. Cela se sont des questions très complexes, exigeantes, qui
9 demandent que l'on travaille sans arrêt sur les publications aussi bien
10 nationales qu'étrangères, internationales, pour que le commandant doit
11 suivre ce qui ce fait. Je dirais qu'il doit vraiment se tenir au courant de
12 tout ce qui représente le plus haut niveau d'évolution, de développement
13 dans le monde.
14 Nous, on recherche tous à imiter celui qui est le meilleur. Tout comme
15 aujourd'hui, on cherche à atteindre la doctrine militaire, l'évolution de
16 l'équipement de l'OTAN, de certaines armées des pays européens, de l'armée
17 américaine, et cetera, et cetera. Je pourrais vous énumérer --
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Maintenant, en situation en état de guerre.
19 R. La situation en état de guerre à la différence de la première, dans 90
20 % des cas, il y a des activités régulières qui sont celles du commandant de
21 corps en situation de paix. En situation de paix dans 90 % de cas, on sait
22 par avance qu'elles seront les activités du commandant de corps. En
23 situation de guerre, c'est tout autre chose, à l'opposé de ce que faisait
24 le commandant en situation de paix, pour la simple raison que le commandant
25 de corps ne peut pas prévoir ce qui peut se produire ou risque de se
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1 produire pendant la journée à venir, et c'était, en particulier, difficile
2 en Bosnie-Herzégovine pour de nombreuses raisons. Tout d'abord, la chose
3 principale, il n'y avait pas d'heures ouvrables ou d'heures de travail. En
4 tant que commandant de corps pendant quatre années, j'ai dormi partout sauf
5 chez moi, dans ma maison. Je ne sais pas si vous me croirez, mais c'est la
6 vérité. En quatre ans, pendant les quatre années de guerre, je n'ai pas
7 passé chez moi plus de 20 ou 30 nuits, donc j'arrivais en vitesse,
8 j'arrivais très tard la nuit et je repartais très tôt le lendemain matin
9 pour me rendre sur le terrain.
10 Pendant tout ce temps, j'ai dormi dans mon bureau où je commandais parce
11 que j'avais un lit dans mon bureau. Si je n'étais pas dans mon bureau, je
12 me rendais dans les différentes unités et je dormais dans les bureaux de
13 mes subordonnés et commandant des groupes opérationnels ou des commandants
14 de brigades, où éventuellement à des postes de commandement avancé. Mais
15 pendant les actions de combat, le plus souvent je passais la nuit à ciel
16 ouvert dans les bois en tant que commandant de corps et je précise en tant
17 que commandant de corps. Normalement il ne devrait pas faire cela, mais
18 tous les commandants de corps plus ou moins ont vécu comme cela. Alors,
19 décrire la journée du commandant de corps en situation de guerre, comment
20 faire ? Tout d'abord, il y a des attaques, il y a des surprises de la part
21 de l'ennemi. Dans 90 % des cas, cela se passe tôt le matin, dans les
22 premières heures de la matinée. L'objectif principal est de surprendre
23 l'ennemi, l'adversaire par son attaque.
24 En gros, si je puis faire une évaluation, sur les quatre années de guerre,
25 les deux années au moins deux années, sinon plus, sont des années où le
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1 matin j'ai été informé, tout d'abord, du fait qu'il y avait une attaque,
2 attaque du nord de Sarajevo est, sud, ouest, sur Sarajevo; attaque sur les
3 lignes de front à l'extérieur de la ville de Sarajevo, Olovo, Visoko,
4 Vojnica, Tarcin, et cetera. Nous n'avons pas la maquette ici pour que je
5 puisse vous montrer cela.
6 Le commandant de corps où qu'il se trouve, il se lève sur le champ et il
7 tente de voir ce qui c'est passé et il essaie de prendre contact. Est-ce
8 qu'il se trouve loin de l'endroit où il y a attaque, donc il essaie
9 d'établir des contacts.
10 Naturellement, il y a des contacts, il y a des communications et tout ce
11 que nous avions était loin de ce qu'ont des armées moyennes sur le plan
12 international, sans même comparer cela à des armées modernes et leurs
13 moyens sophistiqués de transmission.
14 Tout d'abord, le commandant du corps essaie d'établir les communications et
15 essaie de déterminer quel type d'attaque est en cours, et à quel endroit
16 l'ennemi essaie de percer les lignes. Le commandant du corps alors examine
17 le statut de sa zone, combien de ses unités sont proches de ce secteur,
18 combien d'entre elles pourraient aider les unités sur le terrain. Le
19 problème principal dans nos unités était le fait que nous avions toujours
20 très peu d'unités dans les casernes prêtes à intervenir. Nous travaillons
21 toujours par équipe, par relève. Il y avait trois relèves par jour; un
22 tiers des hommes étaient sur les lignes; un tiers en réserve, si possible;
23 un tiers était en permission. Mais en raison du manque de vivres, de lieux
24 d'hébergement, l'ennemi avait détruit toutes nos installations et les
25 avaient incendiées complètement, et c'est la raison pour laquelle nous ne
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1 disposions pas des lieux nécessaires pour héberger nos unités. C'est pour
2 cela que nous avons dû laisser partir nos hommes pour qu'ils passent du
3 temps avec leurs familles. Dans de telles circonstances, il était très
4 difficile de rassembler nos hommes en vue d'une intervention rapide.
5 Disons que le matin lorsqu'une attaque avait commencé, une attaque
6 violente, un commandant de corps se trouvait dans une situation que
7 j'essaie de décrire, mais c'est difficile d'expliquer cela et de vous dire
8 exactement ce qui ce passait dans une telle situation. Généralement, je me
9 trouvais à mon poste de commandement principal à Sarajevo où il y avait
10 beaucoup de civils qui venaient dans mon bureau pour essayer d'obtenir un
11 laissez passer pour le tunnel, pour obtenir de la nourriture pour leur
12 enfants et, s'ils ne recevaient pas ce laissez-passer, cette autorisation,
13 ils se plaignaient aussitôt auprès des politiciens, se plaignaient du
14 commandant du corps qui ne leur avait pas donné d'autorisation.
15 Mais je dois dire qu'il n'appartenait pas au commandant du corps de faire
16 cela. Le commandant était chargé des attaques, il essayait de défendre la
17 ville. Il ne s'occupait pas de savoir si quelqu'un pouvait traverser le
18 tunnel afin d'obtenir de la nourriture. J'essaie de vous décrire la journée
19 la plus complexe que j'ai vécue. Le Dr Vahid Kljajic, qui est toujours
20 enseignant à l'école de Sciences politiques pendant la guerre, il était
21 président du comité chargé de la Distribution de l'aide humanitaire à
22 Sarajevo. Il s'agit de l'aide humanitaire qui a été larguée par avion à
23 l'aéroport de Sarajevo. A un moment donné, l'aide humanitaire et les
24 filières de distribution de l'aide humanitaire ont eu des problèmes et il
25 m'a fait rapport en tant que commandant du corps car je collaborais
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1 étroitement avec lui. Vers 10 heures, il m'a signalé qu'il n'y avait plus
2 de nourriture et qu'il ne pouvait rien me donner ce jour-là.
3 Je lui ai répondu : "Mais comment est-il possible que tu ne puisses rien me
4 donner ?" Je vous raconte simplement notre conversation. Peut-être que je
5 ne devrais pas dire les choses ainsi dans ce cadre. Je lui ai dit : "Mais
6 je vais te tuer. Il faut que tu me donnes de la nourriture." Par la suite,
7 j'ai réalisé qu'il ne pouvait pas me donner de nourriture car il n'y avait
8 aucune nourriture. J'ai dit au Dr Kljajic : "Il faut que j'obtienne le
9 dernier gramme de nourriture. Si quelqu'un doit mourir de faim, cela doit
10 être les vieillards. C'est à eux de mourir, leur tour est venu, mais les
11 derniers qui doivent mourir ce sont les soldats, ceux qui défendent les
12 lignes autour de la ville de Sarajevo." C'est exactement là la teneur de la
13 conversation que nous avons eue. La nourriture devait être sécurisée pour
14 les membres de la présidence de Bosnie-Herzégovine et pour la police. Il
15 s'agit là des trois organes qui devaient recevoir à tout prix de la
16 nourriture.
17 Voilà le type de conversations que nous avons eu dans ces circonstances et
18 c'est usant pour tout le monde, cela perturbe l'équilibre de n'importe
19 quelle personne aussi raisonnable qu'elle soit, tout à coup --
20 M. LE JUGE ANTONETTI : -- problème typiquement militaire. En période de
21 guerre, le commandant du corps va-t-il dans la salle d'opération où, en
22 principe, il doit y avoir les maquettes, les plans, et autres ? Est-ce qu'à
23 ce moment-là, le commandant de corps voit de visu, enfin constate de visu
24 la situation sur le terrain à partir des plans ? Comment vous-même
25 procédiez-vous ?
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1 R. Absolument. Lorsque j'ai dit que le commandant du corps essaie
2 d'établir des communications avec les unités qui essuient l'attaque, il le
3 fait depuis le centre des opérations, c'est-à-dire, s'il se trouve à son
4 poste de commandement principal. Si tel n'est pas le cas, s'il se trouve
5 ailleurs, il va au centre des Opérations ou au poste de commandement de ses
6 unités subordonnés, et depuis cet endroit, il s'efforce d'établir des
7 communications par le biais de ses officiers subordonnés. Il essaie de
8 contrôler la situation. La première personne à être contactée est le
9 commandant de la brigade ou deux commandants de brigades qui sont chargés
10 des lignes par lesquelles l'ennemi essaie de faire une percée.
11 Si la situation est très difficile ou si les lignes ont déjà été percées,
12 le commandant du corps établit des contacts avec d'autres commandants
13 d'unités et demande de l'aide. En fonction de la distance, il ordonne aux
14 unités d'être engagées, d'avancées vers le secteur en question afin d'aider
15 ces commandants de brigades. Ce faisant, il rencontre de nombreux
16 problèmes, manque de carburant, manque de véhicules et manque de troupes,
17 qui pourraient être rapidement déployées. S'il rencontre des problèmes
18 insurmontables, ce qui était souvent le cas, le commandant du corps doit se
19 rendre sur les lieux -- le commandant du corps devait tout faire, mais si
20 on regarde cela du point de vue humain, ce n'est pas possible, mais un
21 commandant du corps devait tout faire, c'est ce qu'on attendait de lui.
22 La plupart des officiers n'était pas formé, n'était pas professionnel,
23 n'était pas suffisamment compétent. Ils n'avaient pas les capacités
24 requises pour commander leurs unités et ils n'avaient pas la capacité de
25 réagir rapidement, et c'est la raison pour laquelle tout était transmis
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1 vers le commandant du corps. C'est à ce moment-là que le commandant du
2 corps -- et je me suis retrouvé tout seul dans de nombreux cas, j'ai dû me
3 rendre directement sur les lignes à 100 mètres des forces ennemies.
4 J'allais voir tous les soldats pour leur donner un petit coup sur les
5 épaules, pour les encourager, pour les assurer qu'ils recevraient des
6 munitions, de la nourriture, et des renforts.
7 Que fait un commandant de corps dans une telle situation ? Tout d'abord, il
8 contacte ses subordonnés et leur demande d'essayer d'empêcher une avance
9 supplémentaire de l'ennemi. Lorsque cela se produit, soit ce jour-là, soit
10 les jours suivants, car l'attaque peut durer sept ou dix jours, après cela,
11 il y a des activités continues, quotidiennes, visant à préparer de nouveaux
12 soldats de qualité qui participeraient à une contre-attaque afin de
13 reconquérir le territoire qui aurait pu être perdu pendant l'attaque.
14 Lorsque nous parlons --
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Si vous constatez qu'au niveau de la brigade, du
16 commandant de la brigade, il y a des problèmes de communication, soit parce
17 que les transmissions passent mal ou il y a des problèmes entre vous et la
18 brigade, qu'est-ce que vous faites, à ce moment-là ?
19 R. Dans des circonstances normales, un commandant de brigade aurait tous
20 les moyens nécessaires à sa disposition et dans une telle situation le
21 commandant du corps serait dans une situation plus facile. Mais en Bosnie,
22 chaque commandant de corps savait qu'aucun commandant de brigade ne
23 disposait du minimum requis en matière de transmissions, de munitions,
24 d'armes, d'équipements, de nourriture, et ainsi de suite. Un commandant de
25 corps devrait être en mesure de dire à ses subordonnés, notamment, un
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1 commandant de brigade : vous devez, vous, en occuper, point. Mais de deux
2 tiers -- ou jusqu'en 1994, la plupart des commandants de brigade dans toute
3 l'ABiH étaient des gens qui étaient auto-désignés à ces fonctions. Je peux
4 vous dire, en toute responsabilité ici, qu'il y avait une responsabilité
5 formelle dans la chaîne de commandement, mais si le commandant de la
6 brigade reçoit un ordre du commandant du corps, si cet ordre est contraire
7 à sa propre compréhension de la situation, il n'exécutait pas l'ordre en
8 question. En tant que commandant de corps dans une telle situation, je
9 devais me poser la question de savoir, si je devais remplacer ce
10 commandant.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Le 3e Corps, est-ce que vous avez décelé ce type de
12 situation, où le commandant du 3e Corps avec ses brigades, pouvait avoir
13 des problèmes, est-ce que vous avez constaté cela au niveau du 3e Corps. Je
14 ne parle pas au niveau du 1er Corps, mais dans le champ de votre étude du 3e
15 Corps, est-ce que vous avez décelé quelque disfonctionnement ?
16 R. Bien sûr. L'un des documents que le commandant du corps, le général
17 Hadzihasanovic, lorsqu'il a été nommé à ce poste, l'un des rapports qu'il a
18 envoyé à l'état-major général, je pourrais retrouver ce document pour vous,
19 et vous vous rendrez compte par vous-même, que ce document reflète très
20 bien mes propos.
21 Il dit dans ce document, qu'il ne pouvait pas commander les brigades
22 qui existaient déjà, et il parle de l'influence des structures civiles sur
23 les commandants de brigade. Le fait que les commandants de brigade avaient
24 tendance à écouter les instances civiles davantage que le commandant de
25 corps, car ils pouvaient obtenir de la nourriture, auprès de ces instances.
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1 Il dit dans ce document, qu'il y a beaucoup de gens en Bosnie, appelés Celo
2 et Caco. Je pense que j'ai parlé de Celo et Caco contre qui j'ai engagé des
3 poursuites le 26 octobre 1996, afin de les placer sous mon commandement.
4 Caco était exécuté à ce moment-là.
5 Je crois que ce document a été émis vers la fin du mois de
6 novembre ou début du mois de décembre 1992. Dans ce document, le général
7 Hadzihasanovic parle d'un certain nombre de personnes de ce genre en
8 Bosnie-Herzégovine, il dit dans ce même document, qu'il était très
9 difficile pour lui de relier toutes ces unités, car il n'avait pas les
10 moyens de transmission nécessaire, il n'avait pas suffisamment d'officiers,
11 et les officiers qui lui ont été envoyés par l'état-major général de
12 Sarajevo, ont été envoyés, parce que quelqu'un voulait se débarrasser
13 d'eux. Lorsque ces personnes sont arrivées à Zenica, le général
14 Hadzihasanovic ne pouvait pas les utiliser pour quoique ce soit. Ces
15 personnes n'étaient pas compétentes, n'avaient aucune connaissance pour
16 être officiers.
17 J'essaie simplement de résumer un rapport composé de deux pages. Il y a de
18 nombreux autres documents de ce type dans lequel le général Hadzihasanovic
19 a parlé de problèmes similaires.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Concernant ces difficultés que vous venez d'exposer,
21 est-ce qu'entre le commandant du corps, le 1er, 2e, 3e, 4e, et cetera, est-ce
22 qu'entre vous, vous aviez des réunions entre vous-mêmes ou, compte tenu de
23 la situation de guerre, vous ne vous voyiez pas, sauf par contact
24 téléphonique ?
25 R. Jusqu'au mois d'août 1993, nous ne sommes jamais rencontrés. La raison
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1 principale en est le fait que le tunnel n'avait pas été creusé, sous
2 l'aéroport de Sarajevo. Lorsque ce tunnel a été construit, j'ai pu quitter
3 Sarajevo, mais j'ai fait cela même avant la construction du tunnel. J'ai
4 traversé en courant la route principale contre l'ordre expressément donné
5 par la FORPRONU. Ils ont tiré sur moi, mais je devais quitter Sarajevo pour
6 sauver le mont Igman, à proximité de Sarajevo, c'était en été 1993.
7 Le tunnel a été construit en août 1993; avant cela, aucun des commandants
8 de corps ne s'était rencontré. Après le mois d'août 1993, jusqu'à la fin de
9 la guerre, de temps en temps, il y a eu des rencontres occasionnelles entre
10 les commandants de corps jusqu'à la fin de l'année 1995, il y a eu peut-
11 être quatre, cinq, ou six réunions de ce genre, je ne sais pas combien
12 exactement. Mais le commandant du 5e Corps n'était jamais là.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais remonter vers le haut, vers l'état-major.
14 Vous-même, vous nous avez indiqué que vous étiez à Sarajevo en revanche,
15 les autres commandants de corps n'étant pas dans cette localité, comment
16 faisait l'état-major pour avoir des contacts avec eux ? Est-ce que cela se
17 passait par téléphone, par courrier, par message fax ? A votre
18 connaissance, comment l'état-major pouvait distiller ou instiller son
19 action ?
20 R. Au début de la guerre, en 1992, il est très difficile de dire comment
21 nous avons réussi à maintenir les communications. Les appareils de
22 transmission étaient de médiocre qualité, il y en avait de différents
23 types, mais, par la suite, au cours des trois dernières années de la
24 guerre, nous avons essayé d'établir des relais sur les sites, qui se
25 trouvaient sous notre contrôle. Nous avons utilisé des communications par
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1 parquet, c'est-à-dire, par système informatique. Nous avions nos propres
2 codes, pour nous assurer que l'ennemi ne pourra pas intercepter nos
3 conversations ou les déchiffrer.
4 Plus tard, ces types de transmission fonctionnaient plutôt bien, mais
5 c'était là le niveau le plus élevé, nous parlons des communications entre
6 l'état-major principal et les commandants de corps, mais un commandant de
7 corps n'avait pas de telle communication avec ses groupes opérationnels, ce
8 type de communication est cher, coûteux, et nous n'avions pas suffisamment
9 d'hommes.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : A votre connaissance, est-ce que l'état-major avait
11 un bon contrôle des commandants de corps ? Je ne parle pas de vous, puisque
12 vous étiez dans la même ville, mais à l'égard des commandants de corps qui
13 étaient à l'extérieur, comme celui du 3e Corps, est-ce que l'état-major
14 avait une vue générale de l'activité du corps, qu'est-ce que vous en
15 pensez ?
16 R. Permettez-moi de dire tout d'abord que, mon poste de commandement
17 principal était situé à Sarajevo. Mais, en même temps, le poste de
18 commandement principal de l'état-major principal se trouvait à Sarajevo,
19 car c'est ce qui était requis par la présidence de Bosnie-Herzégovine. Mon
20 poste de commandement avancé et le poste de commandement avancé de l'état-
21 major principal, après le tunnel de Sarajevo a été creusé, se trouvaient à
22 Visoko, un certain nombre d'officiers ont été déployés du poste de
23 commandement principal vers les postes de commandement avancés. Lorsqu'un
24 commandant de l'état-major principal a été à Sarajevo, je me trouvais à
25 l'extérieur de Sarajevo. Si j'étais à l'extérieur de Sarajevo, c'était le
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1 commandement de l'état-major principal qui était à Sarajevo. C'était là une
2 condition. Dans ce cas-là, on a le contrôle. Je vais vous donner un
3 exemple.
4 Il m'est difficile de dire combien de contrôle ils avaient. Au début, après
5 mon arrestation à Tuzla, le 27 avril 1992, lorsque j'étais emmené à
6 Belgrade, j'ai été remplacé par le colonel Zeljko Knez, en tant que
7 commandant de l'état-major de district. Peu de temps après, en tant que
8 commandant du 2e Corps de l'ABiH, il a été nommé par la présidence, par le
9 ministère de la Défense de la République fédérale de Yougoslavie. C'est un
10 Croate, un commandant de corps de l'ABiH.
11 En 1992, les choses se sont passées tranquillement. Je ne sais quand la
12 passation du pouvoir a eu lieu en 1993. Quand la passation du pouvoir a eu
13 lieu, il semble que les communications entre le commandement de l'état-
14 major principal et le commandant du 2e Corps fonctionnaient bien.
15 Toutefois, par la suite, nous avons appris que Zeljko Knez était en contact
16 direct avec Franjo Tudjman et il y a des preuves à l'appui de cela. Il a
17 contribué à la défense de la Bosnie du nord-est. Les choses auraient dû se
18 passer différemment, mais c'est ce qu'on a appris par la suite. Par la
19 suite, lorsque, par la suite Zeljko Knez a été remplacé car les gens se
20 sont rendus compte que les choses ne se passaient pas bien, que la
21 situation était mauvaise et sous couvert, il travaillait pour les intérêts
22 de Franjo Tudjman. Il a fui vers la Croatie et n'est jamais rentré en
23 Bosnie.
24 Là, je vous donne cet exemple pour décrire la situation. Tous les autres
25 commandants de corps étaient Bosniens. Il y avait des Serbes et des Croates
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1 à des échelons inférieurs mais pas énormément. Ces commandants de corps --
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Axez sur l'état-major. Pouvez-vous nous indiquer le
3 nom du commandant Suprême avec qui vous étiez, vous, en relation ?
4 R. Il y avait le chef d'état-major, Hasan Efendic, le chef de l'état-major
5 de la Défense territoriale et fin mai 1992; il a été remplacé par Sefer
6 Halilovic. Le 8 juin 1993, Rasim Delic a remplacé Sefer Halilovic et il est
7 resté à ce poste jusqu'à la fin de la guerre.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Le commandant Suprême, en l'espèce, à partir du mois
9 de juin, c'est Delic ? Est-ce qu'il a un contact quotidien avec ses
10 commandants de corps ? Par téléphone, notamment, par téléphone ? Est-ce
11 qu'il y a des contacts quotidiens entre le commandant Suprême et ses
12 commandants de corps ?
13 R. En fonction des Règlements, il aurait dû avoir des contacts quotidiens
14 avec eux. Mais, je vais vous parler de mon propre cas. Je n'avais pas de
15 contact quotidien. Toutefois, la période la plus longue au cours de
16 laquelle je n'ai pas eu de contact avec le commandant suprême était de deux
17 ou de trois jours. A moins que le commandant suprême ait quitté la Bosnie-
18 Herzégovine en raison de certains engagements. Mais, là, j'aurais eu des
19 contacts avec ses adjoints.
20 Pourquoi je n'avais pas contacts quotidiens avec l'état-major principal ?
21 Parce que je ne pouvais rien obtenir. Je ne pouvais pas, en tout cas,
22 obtenir la quantité d'armes et de munition que je souhaitais surtout en
23 1992 et en 1993. En 1994 et en 1995, la situation s'est quelque peu
24 améliorée de ce point de vue là. Dans le courant de l'année 92 et de
25 l'année 93 et en partie pendant l'année 1994, l'état-major principal était
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1 plus ou moins exclu des plans d'activités de combat. C'est le corps qui,
2 essentiellement, se chargeait de la planification d'activités de combat.
3 Ils se chargeaient de leur propre approvisionnement sur les territoires où
4 ils se trouvaient.
5 La situation était telle que les commandants de corps devaient agir de
6 façon indépendante dans une large mesure. Mais un commandant de corps ne
7 refusait jamais d'obéir à un ordre donné par l'état-major principal, par le
8 commandant de l'état-major principal car ces gens étaient tous des
9 officiers, tous les commandants de corps venaient de la JNA et savaient
10 parfaitement que --
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais aller à un niveau supérieur issu du
12 commandant Suprême. Il y a un ministre de la Défense. En 1993, qui était
13 ministre de la Défense ?
14 R. Je ne suis pas sûr de savoir les dates exactes mais c'était Jerko Doko,
15 qui était le ministre de la Défense en 1992, au début de la guerre. Puis,
16 lui a succédé, je ne sais pas si c'était le ministre ou le ministre
17 adjoint, c'était toujours un Bosnie ou un Croate, je n'arrive pas à me
18 rappeler de son nom. Pendant une certaine période, il y a eu Hasan Cengic,
19 je ne sais pas s'il était ministre ou ministre adjoint ou vice-ministre. Je
20 ne suis pas sûr, c'était en 1993. Puis, ensuite, quelqu'un de Visoko, dont
21 le nom était --
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Pendant le temps que vous étiez à la tête du 1er
23 Corps, est-ce que le ministre de la Défense est venu sur le terrain vous
24 voir ? Puisque, vous-même, vous nous avez dit que, vous, vous alliez sur la
25 ligne pour réconforter les soldats. Est-ce que le ministre de la Défense
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1 venait vous voir, vous-même, pour se rencontre compte de ce que vous
2 faisiez et l'état de la situation ? Est-ce que vous l'avez rencontré le
3 ministre de la Défense ?
4 R. Le commandant de l'état-major principal venait, mais le ministre de la
5 Défense, aucune ministre de la Défense, tout au long de la guerre, n'est
6 jamais venu trouver l'armée -- visiter l'armée. Je peux vous dire que le
7 ministre de la Défense est un commandant supérieur, donc pas mon commandant
8 direct, mais c'est un commandant supérieur indirect à un autre niveau et je
9 n'avais aucune forme de contact, aucune type de contact avec le ministère
10 de la Défense, absolument pas. Mais il m'est difficile de dire cela --
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Au paragraphe 282 de votre rapport, vous indiquez le
12 principe de la subordination du militaire au gouvernement, c'est au
13 paragraphe 282 et, plus loin au paragraphe 287, vous indiquez que
14 l'exercice de commandement des généraux est effectué sous le contrôle de la
15 présidence et du commandement Suprême. Vous venez de me dire que le
16 ministre de la Défense vous ne l'avez vous-même jamais vu. Comment un
17 contrôle politique s'exerçait-il sur l'autorité militaire qui d'après vous
18 était soumis au contrôle de l'autorité civile et donc du politique ?
19 Comment la présidence pouvait exercer un contrôle si elle ne venait pas sur
20 place ? Avez-vous une explication à nous donner ?
21 R. Il y a un moment, j'ai dit que le ministre de la Défense n'est jamais
22 venu sur le terrain. Mais le président de Bosnie-Herzégovine l'a fait, la
23 présidence. A d'innombrables occasions, Alija Izetbegovic, président de la
24 Bosnie-Herzégovine, est venu rendre visite à des unités de mon corps. Il
25 est venu voir le commandement de mon corps et il est même allé au front,
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1 sur la ligne de front, le président Izetbegovic. Dans le voisinage ou à
2 quelques centaines de mètres de la ligne de front. Il est même allé sur le
3 front, proprement dit, à l'usine Zuc de Sarajevo. Il est allé rendre visite
4 aux soldats dans les premières tranchées. Je peux également affirmer que
5 cela a été également le cas pour le deuxième membre de la présidence de la
6 Bosnie-Herzégovine, qui était Mirko Pejanovic. Il est également allé voir
7 le commandant du corps à de très nombreuses occasions. Il n'est pas allé
8 jusqu'à la ligne de front si souvent que cela, mais il l'a fait plusieurs
9 fois quand même, plus d'une fois. Le troisième membre de la présidence, le
10 Croate, Kljujic, avait également faire cela --
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.
12 Le président Izetbegovic vous a rendu visite quelquefois. En tant qu'une
13 partie de votre responsabilité de commandant du corps, vous aviez le
14 sentiment ou l'impression que l'autorité politique suprême était
15 parfaitement informé de ce qui ce passait sur le terrain ?
16 R. Je ne peux pas confirmer cela. Je ne dirais pas qu'ils étaient
17 parfaitement informés. S'ils avaient été parfaitement informés, ils ne
18 seraient pas venus visiter l'unité. Les raisons de ces visites c'était en
19 général de voir quelle était la situation au sein des unités pour essayer
20 de découvrir la vérité concernant la situation. Le commandement Suprême
21 était peut-être informé, en fait, son général en termes généraux, en ce qui
22 concerne cette situation en Bosnie-Herzégovine, et ses relations avec les
23 organes internationaux. Mais en ce qui concerne la situation sur les lignes
24 de front en Bosnie-Herzégovine, le commandement Suprême obtenait ce type
25 d'information par l'état-major principal.
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1 Très souvent des groupes de différentes personnes étaient formés. Il y
2 avait un membre de la présidence à sa tête et ils allaient à ce moment-là
3 voir les unités ou le corps, et plus particulièrement en 1994, et 1995, où
4 il y avait des membres du grand état-major avec eux et il y aurait des
5 commandants du corps et ses assistants. Il y avait des visites de ce genre-
6 là.
7 La présidence de la Bosnie-Herzégovine et en tant que commandement Suprême
8 de l'armée avait des contacts avec le premier ministre. Le premier
9 ministre, sa tâche au sens qu'il devait obtenir des vivres pour l'armée
10 civile, mais en ce qui concerne les questions militaires c'était le
11 commandement Suprême qui était en contact avec le commandement du grand
12 état-major et avec les commandants de corps.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Si vous voulez je vais descendre maintenant au
14 niveau du terrain. Sur le terrain d'opérations, il y a plusieurs
15 situations. Il y a une opération offensive, il peut y avoir une opération
16 défensive, où un opération de maintien de la ligne face à l'ennemi, donc il
17 y a plusieurs situations. Si un événement survient quelque part, par
18 exemple, l'ennemi attaque, l'unité qui est sur le terrain, qui en termes
19 militaires, accrochée par l'ennemi, va-t-elle, comment fait-elle un rapport
20 de la situation à son autorité supérieur, comment pouvez-vous décrire ce
21 qui doit ce passer dan la circulation de l'information vers l'intérieur,
22 enfin vers le sommet ? Prenez une situation où une unité de base, une
23 section d'une compagnie est attaquée par l'ennemi. Qu'est-ce qui va ce
24 passer ?
25 R. Nous parlons d'une attaque mineure de l'ennemi. Dans une attaque de ce
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1 genre, le commandant de section ou de peloton, s'il est attaqué, rend
2 compte à son commandant de compagnie, parce qu'il n'y a aucun moyen pour
3 lui de faire rapport à qui que ce soit d'autre. Le commandant de la
4 compagnie fait à ce moment-là un rapport au commandant du bataillon, au
5 chef du bataillon. C'était très inhabituel qu'un commandant de compagnie
6 puisse rendre compte à qui que ce soit d'autre, sauf si c'était au chef de
7 la municipalité, alors il y avait des cas particuliers les premiers mois de
8 la guerre.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Mais si c'est une attaque d'envergure qui est
10 susceptible d'effectuer un percement de la ligne, et qu'à ce moment-là, il
11 y a des dangers de contamination sur d'autres unités, est-ce que le
12 commandant du corps va être alerté ? Comment cela se passe ?
13 R. Si l'attaque est sur une échelle plus grande, ce qui veut dire que
14 toute une brigade a été attaquée, ou même plus d'une brigade, à ce moment-
15 là, c'est une situation très grave et le commandant de corps doit être
16 informé de cette situation parce que ceci va exiger un engagement beaucoup
17 plus grand de toutes les parties du corps. L'attaque en l'espèce impliquera
18 une ligne plus grande et engagera plus d'une brigade. Le commandant du
19 corps, à ce moment-là, va alerter l'ensemble de sa chaîne de commandement,
20 tous ses subordonnés et il doit commencer à réfléchir au niveau
21 opérationnel.
22 Par exemple, si ceci c'était passé à Turbe près de Travnik dans le secteur
23 du 3e Corps et, si, par exemple, Travnik et Bugojno avaient été attaqués,
24 le commandant du corps immédiatement doit commencer à réfléchir où une
25 autre attaque pourrait s'ensuivre parce que, lorsque l'ennemi lance une
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1 attaque, cela ne se passe seulement sur un axe. L'attaque sera graduelle et
2 tentera d'engager tout le corps.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Le corps qui lui-même fait une action offensive,
4 c'est-à-dire, il fait bouger ses unités vers l'avant pour prendre des
5 positions qui étaient tenues par l'ennemi et c'est une opération
6 d'envergure. A la fin de l'opération, à quel moment va-t-il y avoir une
7 évaluation des gains, des pertes, comment cela se passe ?
8 R. Au moment où la personne qui a donné l'ordre de commencer l'attaque ou
9 l'assaut, lorsque cette personne donne un ordre d'arrêter une opération de
10 ce genre, c'est le moment où l'évaluation commence, ceci dépendant de
11 l'échelle de cette attaque qui pourrait durer de quelques heures à quelques
12 semaines. Quand ceci prend fin, quand l'attaque doit être arrêtée, à un
13 moment donné, à ce moment-là, il y a une évaluation des résultats du point
14 de vue du succès de l'opération.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : L'évaluation, elle se fait par un contact entre le
16 commandant du corps et le commandant de la brigade, est-ce que qu'il y a
17 une réunion de débriefing, comment cela se passe concrètement ?
18 R. Oui, plus ou moins, c'est la façon dont s'est fait. Après la fin d'une
19 attaque de ce genre, le commandant du corps réuni un certain nombre de ses
20 adjoints assistants, et le commandant des unités qui ont participé à
21 l'attaque, ils sont réunis. Il y a un débriefing. Ce débriefing suit les
22 modèles suivants. Je vais commencer l'attaque à telle heure, l'attaque a
23 duré deux heures. J'ai pris certaines installations ou j'ai suivi une
24 certaine ligne ou j'ai pris une certaine ligne. Il y a également les
25 assistants qui suivent tout cela. Ils notent toutes ces données, toutes ces
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1 informations. Ils les inscrivent sur les cartes qui se trouvent au centre
2 d'Opération. J'ai eu tel problème, et pour finir les commandants, qui ont
3 participé à l'attaque, viennent présenter un certain nombre de demandes, de
4 requêtes.
5 Par exemple, ils demandent un certain nombre d'hommes de plus parce que
6 j'ai eu tant de tués ou de blessés. Je demande que l'on nous redonne des
7 vivres, des munitions, du carburant, ainsi de suite.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans le cas où dans le cadre de cette action, il a
9 des dommages collatéraux, et notamment des dommages aux civils. Est-ce
10 qu'il y a une évaluation des dommages collatéraux, et y a-t-il de la part
11 du commandant du corps, des interrogations sur la survenance des ces
12 dommages collatéraux ? Est-ce qu'à ce moment-là, dans ce débriefing, on
13 aborde ces questions ou on ne les aborde pas ? Les dommages collatéraux,
14 cela peut être des maisons incendiées, des obus qui sont tombés quelque
15 part, des victimes des civils qui ont été tués par des balles au cours de
16 l'affrontement, est-ce qu'il y a une prise en compte de ce qu'on appelle
17 les dommages collatéraux ?
18 R. Dans la plupart des cas, oui. Si les dommages collatéraux ont été
19 remarqués et enregistrés, oui.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Je voudrais aborder un autre problème qui concerne
21 parce qu'on a vu des documents où il y avait des volontaires étrangers, pas
22 uniquement des volontaires qui venaient des pays arabes ou africains, mais
23 est-ce qu'à votre connaissance, en Bosnie-Herzégovine, pendant cette
24 période, il y a eu des étrangers venant de toute part qui sont venus pour
25 apporter leur concours à l'ABiH, vous-même, dans votre corps ? Est-ce que
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1 vous aviez des étrangers qui servaient au sein des unités dont vous aviez,
2 vous, la responsabilité ?
3 R. Dans mon corps, je n'avais pas de gens de ce genre. Quiconque portait
4 des armes, quiconque était engagé dans une forme quelconque avec mon unité,
5 sous mon commandement, non. Je n'avais pas de gens comme cela, d'homme
6 comme cela.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans les autres corps, est-ce que vous avez eu
8 connaissance de la possibilité que des étrangers d'origine diverse aient pu
9 intégrer des unités régulières combattantes ? A titre d'exemple, il y a un
10 témoin qui est venu, qui nous a - mais je dis de mémoire - indiqué qu'il y
11 avait un médecin russe, qui faisait office de médecin dans une unité; est-
12 ce qu'il y avait des étrangers qui pouvaient servir dans l'armée ?
13 R. Maintenant que vous avez posé cette deuxième question, je peux vous
14 dire que je n'étais pas exact dans ma première réponse. Lorsque j'ai dit
15 qu'il n'y avait pas d'hommes de ce genre dans mon corps, qu'il n'y avait
16 pas de groupe portant de cinq à dix, mais j'avais un cas dans mon corps,
17 toutefois, en 1992, un allemand est venu, soit par la FORPRONU - ou enfin
18 je ne sais pas comment il est venu - mais c'était un Allemand qui est venu
19 à Sarajevo, qui est devenu membre de la 102e Brigade motorisée, dans cette
20 autre partie ouest de Sarajevo. Il a combattu comme pendant un an avec
21 nous. Après cela il a été tué, et nous savons exactement où se trouve sa
22 tombe à Sarajevo. C'était des cas individuels, isolés, auquel je n'attribue
23 pas de signification particulière.
24 Ce que je voulais vous dire lorsque je vous ai fait ma première réponse,
25 c'est qu'il n'y avait pas de groupe de quelque dimension que ce soit
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1 d'homme de ce genre. Il n'y avait pas de groupe important, que ce soit dans
2 le 1er, le 2e, le 4e ou le 5e Corps, la seule exception étant le 3e Corps.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Au paragraphe 104, vous listez l'armement type de la
4 JNA, par exemple, au niveau des tanks, vous dites que la JNA avait 2 100
5 tanks. L'artillerie, 8 000 pièces d'artilleries, et cetera. Au paragraphe
6 331 de votre rapport, vous abordez également encore cette question de
7 l'armement, vous le faites également au paragraphe 111. Mais dans votre
8 rapport, nous n'avons pas de chiffre très précis, nous n'avons même
9 quasiment aucun chiffre sur l'armement dont avait l'ABiH à sa disposition.
10 De manière très rapide, est-ce que l'ABiH avait des chars ? A votre
11 connaissance, est-ce qu'il y avait des chars ?
12 R. Je voudrais vous faire une brève introduction, et je vais passer au
13 char. Lorsqu'il s'agit de la JNA, les armes, l'armement de l'ABiH, j'ai
14 utilisé certaines sources, comme je l'ai fait également, lorsque j'ai parlé
15 de l'ABiH. Je ne sais pas si ces renseignements sont précis, si ces données
16 sont précises, et si les sources étaient fiables, exactes.
17 Deuxièmement, l'ABiH, enfin j'y pensais au moment où je rédigeais ce
18 rapport, et j'avais une vue générale de l'armement de l'ABiH et j'avais
19 pris l'année 1993 comme exemple, et j'avais, plus particulièrement, choisi
20 le 3e Corps. Toutefois, il est très difficile pour moi de vous donner des
21 chiffres de mémoire. Maintenant, en ce qui concerne les chars, l'ABiH avait
22 des chars, mais, si nous regardons la situation dans les différents corps,
23 le
24 1er Corps, qui avait plus de 70 ou 75 000 hommes tout au long de la guerre,
25 n'avait pas plus de cinq chars. Je n'avais pas plus de cinq chars.
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1 J'ai également pris sept chars.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, pas plus que cinq chars ?
3 R. On pouvait en utiliser trois, mais deux étaient inutilisables.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : J'y reviendrai tout à l'heure. Au paragraphe 369,
5 vous évoquez un problème lié à la 5e Colonne. C'est quoi la cinquième
6 colonne ?
7 R. Historiquement parlant, la cinquième colonne, on en parlait, pendant la
8 Deuxième guerre mondiale, voire avant. Mais d'un point de vue historique,
9 je crois que les livres d'histoire disent que la cinquième colonne a
10 d'abord existé dans l'ex-Yougoslavie, au nord de Belgrade. A l'époque, la
11 cinquième colonne voulait dire des personnes qui collaboraient directement
12 avec les soldats nazis. Cette idée existe encore en Bosnie-Herzégovine.
13 Lorsque nous parlons de la cinquième colonne, nous voulons dire des gens ou
14 des groupes de personnes ou des individus qui collaborent avec l'ennemi et
15 qui peuvent être trouvés dans le secteur de responsabilité de l'ABiH ou
16 sous la direction des différents corps de l'armée.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : En passant, vous avez expliqué la situation sur le
18 terrain qui, à titre personnel, j'ai constaté qu'elle était très complexe.
19 Vous avez cité, à un moment donné, l'existence d'un dénommé Fikret Abdic.
20 C'était qui cette personne-là ? Que représentait-elle comme menace ? Parce
21 que c'était la première fois que le voyait apparaître. On en est à plus de
22 200 jours d'audience et la première fois, donc, j'ai entendu ce nom
23 apparaître. Qui était cette personne ?
24 R. Je vais essayer d'être très bref et précis. Fikret Abdic était une
25 personne engagée dans des questions politiques avant la guerre, au tout
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1 début de la guerre. Lors de l'élection qui a eu lieu en 1990, il a obtenu
2 une majorité de voix, et il était censé être élu à la place d'Alija
3 Izetbegovic. Lorsque Alija Izetbegovic a été pris à Lukavica, près de
4 Sarajevo, lors de son retour des négociations à l'étranger, à ce moment-là,
5 il voulait effectuer un "putsch", faire un "putsch" dans cet Etat, un coup
6 d'Etat.
7 Son intention était de faire en sorte que la Bosnie-Herzégovine reste au
8 sein d'une grande Serbie bien qu'il soit Musulman bosnien, selon ses
9 origines ethniques. Après cela, il a été éliminé de la présidence de l'ABiH
10 et il est retourné à la sa Krajina native qui est dans la partie nord-ouest
11 de la Bosnie-Herzégovine, le nom du lieu étant Velika Kladusa, dans la
12 partie nord-ouest de la Bosnie-Herzégovine.
13 Avant la guerre, c'était un notable, c'était une personne importante dans
14 son domaine. C'était un homme d'affaires connu, mais comme il n'était pas
15 d'accord avec Alija Izetbegovic et ses politiques, lui, en tant que
16 Musulman de Bosnie, avait créé sa propre armée qui était constituée de
17 Musulmans de Bosnie et il proclamait que cette partie du territoire était
18 sa propre région autonome, qu'il appelait la Bosnie occidentale.
19 Je parle de la partie nord-ouest qui a été colorée d'une façon différente
20 dans l'une de mes annexes. C'était dans le secteur de responsabilité du 5e
21 Corps de l'ABiH qui avait son quartier général à Bihac. Fikret Abdic a
22 collaboré avec Slobodan Milosevic à Belgrade et avec Franjo Tudjman à
23 Zagreb. Il était en contact direct avec ces deux personnes et il
24 travaillait de concert avec la Republika Srpska et le HVO. Il a établi,
25 créé une armée, comme je l'ai déjà dit, et il avait plusieurs milliers
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1 d'hommes. Je ne sais pas exactement combien, peut-être plus que je ne le
2 pense que c'était le cas.
3 Au cours de la période de 1993, lorsqu'il y avait des combats en Bosnie
4 centrale avec le HVO et l'armée de la Republika Srpska, il a également fait
5 intervenir ses troupes. A Krajina, il voulait devenir le troisième ennemi
6 de l'ABiH. Je peux vous dire que lorsqu'il était engagé dans des combats
7 contre le 5e Corps de l'armée de l'ABiH, plusieurs milliers d'hommes ont
8 été tués des deux côtés. Fikret Abdic avait également créé des camps de
9 détenus, des camps de détention. Après la guerre, lorsque la guerre était
10 finie, il est allé en Croatie. Il a pris la nationalité croate et il l'a
11 fait avec l'appui du président croate, Franjo Tudjman. Il y avait des
12 accusations criminelles et chefs d'accusation contre lui. Au Tribunal de La
13 Haye, ils estimaient que Fikret Abdic devrait être jugé en Croatie, à
14 Karlovac.
15 Il y a quelques années, il a été condamné à une peine de prison de 20 ans.
16 Il y a quelques mois, il y a eu une audience en appel et je crois que sa
17 condamnation a été réduite de vingt ans à quinze ans en prison et pour le
18 moment, il est en train de purger sa peine dans la république de Croatie.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Il est 10 heures 32. On va faire la pause. Après la
20 pause, je n'aurais juste que deux questions ce qui permettra aux uns et aux
21 autres de reprendre la parole. Nous reprendrons aux environ de 11 heures.
22 --- L'audience est suspendue à 10 heures 32.
23 --- L'audience est reprise à 11 heures 03.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai encore quelques questions, mais cela va être
25 très rapide.
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1 Mon Général, au paragraphe 312, vous avez mentionné le fait que le poste de
2 commandement avancé du commandement Suprême, au mont Igman avait été
3 capturé. Cela figure au paragraphe 312. Pouvez-vous nous indiquer un poste
4 de commandement avancé, il est constitué de combien d'éléments. Est-ce à
5 dire qu'on met un poste de commandement le plus près possible de l'ennemi
6 et est-ce que l'objectif c'est d'avoir un poste de commandement avancé pour
7 recueillir des éléments d'information utiles ? Première question. Quand
8 celui, qui était au mont Igman, a été capturé et disparu, il a été
9 transféré où ce poste de commandement ? La deuxième question. Pouvez-vous
10 nous décrire comment se situait un poste de commandement, il y avait
11 combien de personnes et/ou toute autre indication utile ?
12 R. Vous venez de fournir une bonne partie de la réponse à la question que
13 vous avez posée. Tout ce que vous venez de dire est pour la majeure partie
14 exacte. Tout commandant, à quelque échelon que ce soit, constitue le poste
15 de commandement avancé précisément pour les raisons que vous venez
16 d'évoquer dans votre question. Les raisons principales sont les suivantes :
17 le poste de commandant avancé en question doit rapprocher un groupe
18 d'officiers du commandement donné de la ligne de front, pour que ce poste
19 de commandement avancé lui permette d'avoir une bonne perception de la
20 situation, l'évolution de la situation et que ce groupe puisse diriger les
21 actions de combat dans leur ensemble sur le territoire donné, le territoire
22 qui est couvert par ce poste de commandement avancé.
23 Le numéro un, le premier officier de ce poste de commandement avancé, le
24 plus souvent, il est en contact direct avec le commandant de l'unité qui
25 l'a affecté à ce poste de commandement avancé. Si le commandant du corps
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1 créé un poste de commandement avancé, alors le commandant de ce poste de
2 commandement avancé est en contact direct avec le commandant du corps.
3 Puisqu'au paragraphe 312, je parle d'un de ces postes de commandement
4 avancé en 1992 au mont Igman, il convient d'employer uniquement le terme
5 poste de commandement avancé, conformément à la terminologie militaire,
6 mais, du point de vue des effectifs et vu la méthode et les possibilités
7 qui étaient ceux de ce petit groupe de trois officiers, de trois hommes, on
8 pourrait difficilement dire que ce poste relevait de la catégorie de poste
9 de commandement avancé, car un poste de commandement avancé demanderait un
10 peu plus de moyens. Au moins il faudrait qu'il y ait au moins un officier
11 de chacun des segments représentant chacun des acteurs du commandement du
12 corps, si c'est le commandement du corps qui crée ce poste de commandement
13 avancé.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant dernière question, mais la question elle est
15 assez longue. Le cas échéant, prenez note des paragraphes que je vais
16 citer. Elle est presque aussi longue que les questions que Me Bourgon vous
17 a posées, mais je ne pense pas qu'elle sera plus longue. Voilà.
18 Au paragraphe 625, vous indiquez trois événements qui sont survenus,
19 l'enlèvement de Totic à la mi-avril 1993. Le meurtre de cinq Croates à
20 Miletici et le kidnapping et le meurtre de plusieurs personnes, le 8 juin
21 1993, qui étaient escortées par la 306e Brigade. C'est ce que vous indiquez
22 au paragraphe 625.
23 Au paragraphe 629, vous expliquez que le commandant de corps n'est pas
24 responsable des activités de groupes d'individus. Plus loin, vous expliquez
25 ce que doit faire le commandant du corps. Au paragraphe 634, vous expliquez
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1 que le commandant du corps doit obtenir le maximum d'information sur les
2 individus, armes, ressources, et cetera.
3 Au paragraphe 635, vous indiquez que le commandant du corps doit informer
4 les supérieurs de la présence de ces individus. Au paragraphe 639, vous
5 indiquez également que si les activités de ces individus affectent la
6 mission du corps, le commandant doit en consultation avec son commandant
7 supérieur, prendre les mesures proportionnées au problème ciblé. Concernant
8 les trois événements, Totic, Miletici, et le 8 juin 1993, vous indiquez que
9 concernant Totic au paragraphe 644, ordre a été donné à la police militaire
10 de coopérer avec la police militaire du HVO, de la police civile de Zenica.
11 Concernant Miletici, vous nous indiquez au paragraphe 646 que des mesures
12 ont été prises pour obtenir des renseignements sur leurs activités et que
13 le commandant du corps en avait fait part au commandement Suprême lors
14 d'une rencontre.
15 Concernant Maline au paragraphe 647, vous indiquez que le 13 juin, le
16 général Hadzihasanovic a écrit un rapport au commandement Suprême dans
17 lequel il relate la présence des Moudjahiddines. Vous indiquez qu'il
18 recevra l'ordre en retour de les désarmer ou de les envoyer au mont Igman.
19 Ma question est la suivante : concernant ces trois événements, Totic, les
20 cinq Croates de Miletici, et les personnes qui ont été kidnappées, le 8
21 juin 1993, vous indiquez dans votre rapport -- mais peut-être que vous
22 l'avez fait ailleurs, mais j'aimerais avoir cette précision -- à aucun
23 moment, une possible intervention de l'autorité civile. Dans ces trois
24 événements, l'autorité civile n'a pas été associée, donc peut-être à
25 l'exception de Totic, où la police civile avec la police militaire va faire
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1 une enquête. Mais dans les deux autres cas, l'autorité civile n'est pas
2 mentionnée.
3 Est-ce une omission de votre part, ou c'était dû à quelle circonstance du
4 fait qu'une autorité civile n'a pas été évoquée dans votre rapport ? Est-ce
5 que vous voyez une explication ? Vous-même, quand vous avez dans votre zone
6 de responsabilité, est-ce qu'il vous est arrivé, vous, d'avoir des contacts
7 avec l'autorité civile pour faire des enquêtes sur certains agissements ?
8 Comment analysez-vous cette situation ?
9 R. Pour ce qui est des événements où il y a eu intervention des autorités
10 civiles ou de la police civile, là c'est mentionné, cela figure dans le
11 texte et c'est un exemple positif et c'est bien en tant qu'illustration du
12 fonctionnement de l'ensemble du système, du système de la défense de l'Etat
13 de Bosnie-Herzégovine, ou du système social.
14 Dans les cas ou dans les événements où ceci n'a pas été mentionné, ou si je
15 puis dire où on le mentionne au passage parce que, par exemple, à Mehurici,
16 il y avait un poste de police avancé, si je puis l'appeler ainsi, mais il
17 était littéralement uniquement un observateur passif. Dans les autres
18 événements, on ne les a même pas mentionnés parce qu'il n'y en avait pas.
19 Ce n'est que très court après lorsqu'on a créé des commissions si quelqu'un
20 des organes civils ou des instances civiles a pris part aux travaux d'une
21 commission pour établir l'existence des conséquences après l'événement,
22 donc à Miletici à Maline, par exemple. Ceci précisément constitue le
23 problème.
24 Le fait que les ressortissants étrangers, tels qu'ils étaient, sortaient
25 des attributions du cadre des attributions du 3e Corps de l'ABiH, ils
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1 étaient présents sur le territoire, dans la zone de responsabilité du 3e
2 Corps, mais, à un moment, ce que j'ai dit, c'est que, d'un point de vue
3 militaire, le corps ne couvrait pas tout le territoire. Non seulement il
4 n'est pas responsable de l'apparition de ces groupes, ces groupes
5 d'étrangers, il n'est pas non plus responsable de la police civile, la
6 protection civile, les instances ou les institutions politiques, et cetera,
7 pour ce qui est de leurs activités.
8 D'autre part, les autorités civiles, le pouvoir politique, qui a à sa
9 disposition un instrument, la police civile, ses autorités civiles sont
10 restées plus ou moins passives, dans ce cas-ci, pour ce qui est des
11 combattants étrangers. La question que l'on se pose est de savoir pourquoi.
12 Si je devais évaluer ou apprécier la situation, je ne sais pas si
13 j'arriverais à être impartial. Je pourrais être suggestif parce que je n'ai
14 pas de vraies informations. Si je n'ai pas ces informations, c'est parce
15 que pour moi c'est toujours un mystère. De par leur nom et leur prénom, ces
16 étrangers, ces ressortissants étrangers qui étaient-ils ? D'où étaient-ils
17 originaires ? Quels étaient leurs vrais noms ? Quel a été leur objectif
18 lorsqu'ils sont arrivés en Bosnie-Herzégovine ? Que voulaient-ils ? Qui les
19 a envoyés ? Où sont-ils aujourd'hui, du moins pour la plupart d'entre eux ?
20 C'est encore un grand mystère dans toute la Bosnie-Herzégovine, voire au-
21 delà.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci pour cette réponse. Ma dernière question est
23 la suivante : plusieurs témoins, qui sont venus avant vous, ont mentionné
24 qu'il y a eu des enquêtes menées avec succès concernant des individus qui
25 s'étaient livrés à la commission d'infraction, notamment, des témoins ont
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1 cité trois exemples. Un exemple concernant la Légion verte, où c'était des
2 membres de la
3 314e Brigade, des éléments de la 7e Brigade, qui faisaient partie de ce qui
4 a été appelé par un témoin : "La Guérilla de Montagne." On a également
5 évoqué : "La Guérilla turque," qui était des membres des étrangers qui
6 s'étaient livrés à la commission de crimes ou délits. Les témoins nous ont
7 expliqué que la police militaire, grâce à des enquêtes et grâce à une
8 logistique militaire, ait permis l'arrestation de ces individus, et
9 notamment ceux de la Guérilla turque, qui étaient semble t-il des individus
10 armés qui ont été neutralisés.
11 Vous avez, vous, répondant à une question, dit que l'armée n'était pas en
12 mesure de procéder à une opération militaire contre les Moudjahiddines.
13 Alors même que vous-même à la tête du 1er Corps, vous nous avez expliqué que
14 vous aviez vu mener une opération militaire à l'encontre de deux brigades,
15 de responsables de deux brigades. La question est la suivante : en terme
16 strictement militaire, en terme militaire, or de toute considération
17 politique ou autre, mais en terme militaire, est-ce que l'ABiH dans le
18 courant de l'année 1993, était-elle en mesure de neutraliser quelque
19 dizaines d'individus, voire quelque centaines, le cas échéant, si ces
20 individus n'avaient en leur possession que matériel d'armement léger, style
21 fusils, fusils d'assaut, revolvers, divers ? Est-ce que l'ABiH pouvait
22 neutraliser ou pas ces individus ? Il semblerait que vous nous aviez dit,
23 il y a quelques jours, que ce n'était pas possible. Pouvez-vous nous dire
24 en terme militaire, était-ce possible ou pas possible. Tout à l'heure, vous
25 aviez dit que l'armée avait cinq tanks. Tout le monde connaît les dégâts
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1 que peut occasionner un tank, militairement. Est-ce que l'armée pouvait
2 neutraliser ces individus ou pas ou est-ce que le problème était de toute
3 autre nature ?
4 R. C'est une question très complexe.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est la raison dont je vous ai posé la question.
6 R. Avant tout, si je puis ajouter un point, je souhaite répliquer, je ne
7 pense pas que j'ai dit de manière catégorique que l'ABiH n'a pas été en
8 mesure de prendre des mesures à l'encontre des ressortissants étrangers. Je
9 pense que ce que j'ai dit, c'est que compte tenu des circonstances, il
10 était très difficile que le
11 3e Corps ou l'armée entreprenne quoique ce soit. J'ai l'impression que je
12 n'ai pas été aussi catégorique comme le thème que vous avez employé dans
13 votre question.
14 Pour être tout à fait clair, l'armée de la République de Bosnie-
15 Herzégovine, en 1993, a trois corps d'armée. Si je puis répéter, le 1er à
16 Sarajevo, le 2e à Tuzla, le 3e à Zenica, le 4e à Mostar, et le 5e à Bihac.
17 Jusqu'en été de l'année 1994, il n'y avait absolument aucune possibilité,
18 et il n'y avait pas non plus une coopération quelle qu'elle soit, ou
19 entraide entre les unités d'un corps vis-à-vis d'un autre corps.
20 C'est un point, un fait très important. Pour plus de raisons, c'était
21 impossible, et on ne l'a pas fait du tout. Ce n'est qu'à partir de l'été
22 1994 et au cours de l'année 1995, que la possibilité a existé, que si un
23 corps se lançait dans une opération plus complexe, qu'un autre corps lui
24 donne ou qui lui est déjà donné, un certain nombre de ces unités pour
25 l'aider. Mais en 1993 pendant toute cette année-là, ceci n'était pas
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1 faisable, c'était impossible et on ne l'a pas fait. Si je dis cela, c'est
2 pour montrer qu'automatiquement, on emploie toujours le terme "l'ABiH",
3 mais maintenant on ne parle que du 3e Corps, de sa zone de responsabilité
4 et de ses unités, les unités qu'il avait. Il ne pouvait pas se faire aider
5 de qui que ce soit, en 1993, ne serait-ce que pour avoir un soldat
6 supplémentaire, un fusil supplémentaire, un char.
7 Un deuxième point, vous venez de dire que l'ABiH avait sept, autrement dit,
8 cinq chars. Non, pas l'armée, mon corps. L'un des corps de l'armée les
9 avait ces chars. C'est ce que j'ai dit. Cinq chars sur les cinq, trois
10 fonctionnaient et les sept, je les ai capturés, mais cela c'était
11 uniquement en 1994 que je les ai capturés. Mais les chars que j'avais en
12 1993, trois, c'est-à-dire, cinq en tout, ils étaient dans la ville de
13 Sarajevo. Ils ne signifiaient absolument rien au terme du 3e Corps. Ils ne
14 pouvaient pas sortir de Sarajevo. Je ne sais pas combien de chars avaient
15 là-dessus 3e Corps, très peu, quelques-uns.
16 Donc, que cela soit des chars ou d'autres armements en la possession du 2e
17 Corps, ce n'était pas accessible au 3e Corps et celui-ci, conformément à la
18 situation, en général, telle qu'elle était, j'ai essayé de vous la
19 présenter sur la maquette et aussi à l'aide des diapositives ou des images
20 que je vous ai montrées. C'était précisément l'année la plus difficile où
21 le 3e corps faisait la guerre face aux unités de l'armée de la République
22 serbe.
23 Il y avait de nombreuses enclaves du HVO à l'intérieur de cette zone de
24 responsabilités. Il y avait une cinquième colonne important à l'intérieur
25 de cette zone de responsabilité et, de plus, à un niveau plus élevé, au
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1 niveau de l'armée, il avait le problème de Fikret Abdic en Bosnie de
2 l'ouest.
3 J'ai fait des choses à Sarajevo à l'encontre de mes deux brigades, mais,
4 lorsque j'en ai parlé, j'ai été très précis. Ceci a été beaucoup plus
5 facile pour moi parce que mes deux brigades à Sarajevo, elles couvraient un
6 quarter de la ville et je savais précisément où était leur commandement ou
7 étaient les commandement de leurs bataillons, de leurs unités subalternes,
8 de leurs compagnies faisant partie de leur bataillon, et cetera. J'avais
9 toutes ces informations, absolument toutes les informations. Lorsque j'ai
10 lancé l'attaque, c'était sur une zone réduite et cela m'a donné la
11 possibilité d'agit et en plus j'ai dit que j'avais suffisamment de soldats
12 à Sarajevo, même plus, même trop.
13 Lorsqu'on a creusé le tunnel, tous les jours en passant par le tunnel, j'ai
14 pu sortir les soldats pour qu'ils combattent dans le pourtour externe de
15 Sarajevo. Parce que j'avais une population importante dans la ville.
16 J'avais beaucoup plus de soldats dans la ville qu'il y en avait à
17 l'extérieur. J'ai pu le faire, mais le commandement du 3e Corps, son
18 problème, en 1993, il avait ses effectifs très étendus. A cause de tous
19 ceux qui l'attaquaient et compte tenu de la longueur de la ligne de front,
20 près de 400 kilomètres, 300 pour l'ABiH et 100 pour le HVO, et compte tenu
21 du nombre de soldats qu'il avait dans son corps, ils ne pouvait même pas
22 garantir la ligne de front en plaçant un soldat tous les dix mètres le long
23 de la ligne de défense et il ne pouvait pas se faire aider par personne.
24 Qui plus est, vous voyez, il n'y avait pas de coopération, je ne peux pas
25 dire aucune, mais il y en avait très peu, entre le 3e Corps et la police
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1 civile.
2 Enver Hadzihasanovic, en tant que commandant du corps, avait très peu
3 d'informations sur les ressortissants étrangers. Précisément, je ne vais
4 pas énumérer toutes les questions que je viens de soulever, qui ils sont,
5 d'où ils sont, où ils sont, que font-ils ? Un groupe apparaît à Mehurici et
6 un groupe apparaît à Miletici puis un groupe à Zenica. Ils essaient
7 d'enlever Totic puis il y a un groupe qui apparaît à Travnik. Cela c'est
8 une situation très complexe du point de vue du commandant de corps.
9 L'armée, c'est un instrument qui exige la pureté pour pouvoir entreprendre
10 une action. L'armée, les commandants des unités ne doivent s'engager dans
11 aucune aventure, à l'aveugle. D'après moi, si je puis ajouter juste une
12 phrase et d'après mois, précisément, le fait de se lancer dans cette
13 recherche, engager un grand nombre de policiers militaires, engager des
14 unités, des compagnies, des détachements pour les arrêter, pour les
15 capturer sur un espace aussi vaste de Zenica à Travnik, ceci aurait demandé
16 des forces très importantes, une énergie très importante ainsi que des
17 moyens sans savoir quelle en sera l'issue. Qu'adviendra-t-il s'il perd
18 beaucoup de soldats alors qu'il n'a pas reçu le feu vert du commandement
19 Suprême ou de la politique, comme moi, je l'ai eu à Sarajevo.
20 A savoir pourquoi ce commandement Suprême, comme il me l'a ordonné à moi, à
21 Sarajevo, d'agir ensemble avec la police civile, qu'eux le fassent d'eux-
22 mêmes.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous venez de mentionner le feu vert du commandement
24 Suprême que vous, vous avez eu à Sarajevo. Au paragraphe 648, vous faites
25 état de l'ordre qui a été envoyé par le commandement Suprême, soit de les
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1 envoyer les Moudjahiddines au mont Igman, soit de les désarmer. Espace vert
2 a une action contre eux ou, comment vous analyser cet ordre ? Vous l'avez
3 lu cet ordre puisque vous le mentionnez au paragraphe 648. Comment vous
4 l'analysez, est-ce que c'est un feu vert ou est-ce que c'est un pré ordre
5 qui appelle un e réaction. En termes militaires, comment vous analysez ce
6 document ?
7 R. Tout d'abord, je n'ai pas ce document ici. Je souhaiterais vous le
8 montrer mais je ne l'ai pas, je l'ai à Sarajevo. L'ordre que j'ai reçu de
9 l'état-major du commandement Suprême alors que j'étais sensé envoyer mes
10 deux brigades le 26 octobre 1993. Il s'agit d'une situation tout à fait
11 différente par rapport à l'ordre qui a été donné au commandant du 3e Corps
12 par le commandement Suprême, ordre visant, soit à désarmer les étrangers
13 soit les envoyer au mont Igman.
14 Comment est-ce que j'ai compris cet ordre. D'après ce que j'ai compris,
15 j'essaierai d'être concis, pourquoi est-ce que le commandement Suprême a
16 donné cet ordre ?
17 Parce que le commandant du 3e Corps s'est plaint à plusieurs reprises et a
18 demandé de l'aide. Il a demandé que le problème des ressortissants
19 étrangers soit réglé par la police civile avant tout; cependant, ceci n'a
20 abouti à rien. Il a noté tout cela sur papier également, mais je pense
21 qu'il ne l'a pas fait volontairement car il a parlé de quelque chose qui ne
22 faisait pas partie de sa mission mais cela lui posait énormément de
23 problèmes pour accomplir sa mission. En raison du manque d'information
24 concernant les ressortissants étrangers, information que l'on aurait dû
25 avoir pour pourvoir régler le problème en question, dans le document que le
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1 commandant du
2 3e Corps a envoyé à l'état-major principal et il manque d'information. Sur
3 la base de ces quelques informations insuffisantes, le commandement Suprême
4 a envoyé ce document au commandant du 3e Corps, le document dont vous
5 parlez, c'est ainsi que j'analyse le document en question.
6 Le problème des ressortissants étrangers n'a pas été pris au sérieux, je
7 pense. Non pas parce que le commandant de l'état-major principal n'était
8 pas quelqu'un de sérieux mais pace personne n'avait de renseignements
9 exacts concernant la gravité du problème. Comme je l'ai dit l'autre jour,
10 cet ordre ressemblait ou m'a paru être un ordre de pure forme et c'est
11 ainsi qu'il a été rédigé par le commandant de l'état-major principal. Il a
12 ordonné au commandant du 3e Corps de désarmer ces gens ou de les envoyer à
13 Igman. J'interprète cela comme étant une situation où deux personnes se
14 rencontrent à un feu et n'ont pas le temps de discuter d'une question en
15 détails. Ils se disent quelque chose en passant, ils pensaient probablement
16 que ces gens n'étaient pas nombreux, mais c'était faux.
17 En outre le commandant de l'état-major principal n'aurait pas dû assumer la
18 responsabilité de donner un tel ordre. Il aurait dû demander au
19 commandement Suprême de le faire où à la présidence de la Bosnie-
20 Herzégovine de le faire. Il aurait dû attendre pour que ces organes-là
21 donnent un ordre à la police civile, et à lui-même et, ensuite, la police
22 civile avec le service de Sécurité du 3e Corps ensemble auraient dû
23 rassembler des informations, auraient dû retrouver ces gens, et ainsi de
24 suite. Après cela, l'ordre aurait dû être donné et des actions lancées en
25 conséquence afin d'éliminer ces gens. Mais ceci aurait pris beaucoup de
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1 temps.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci pour cette réponse. Je vais demander,
3 maintenant, à l'Accusation si elle souhaite vous posez des questions et,
4 ensuite, je donnerai la parole en dernier à la Défense.
5 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous avons
6 quelques questions supplémentaires à poser, questions qui découlent de
7 celles que vous avez posées au témoin.
8 Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Mundis :
9 Q. [interprétation] Mon Général, ce matin page 14, lignes 3 et 4 du compte
10 rendu d'audience, vous avez répondu à une question concernant la qualité,
11 le niveau de formation et le professionnalisme des soldats de l'ABiH. Vous
12 avez répondu notamment, je cite : "La plupart des officiers n'étaient pas
13 formés, n'étaient pas professionnels, n'étaient pas compétents."
14 Ma question est la suivante : est-ce que vous incluez le général
15 Hadzihasanovic parmi les officiers qui n'étaient pas formés, qui n'étaient
16 pas professionnels, et qui n'étaient pas compétents ?
17 R. Non.
18 Q. Le général de brigade Kubura, est-ce que vous le considérez comme
19 faisant partie des officiers qui n'étaient pas formés, professionnels, ni
20 compétents ?
21 R. Non, mais une petite remarque en passant. Tous les deux étaient
22 relativement jeunes pour le poste qu'ils occupaient. Ils avaient
23 suffisamment de connaissances acquises dans une armée. Il me faudrait
24 procéder à un calcul pour me rendre compte de l'âge qu'avait M. Kubura
25 lorsqu'il a été nommé Général de brigade. Je pense qu'il avait une
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1 trentaine d'années. Il était très jeune.
2 Dans l'ancienne armée, pour être nommé commandant de brigade, ce n'était
3 pas possible si on avait pas au moins 40 ans. Il en va de même pour le
4 général Hadzihasanovic. A cet égard, ils manquaient d'expérience pour
5 exercer des activités de commandement. Moi-même, j'étais dans la même
6 situation. Je suis même plus jeune que le général Hadzihasanovic, mais
7 c'est d'eux que je parle.
8 Voilà de quoi nous manquions. Nous manquions d'expérience mais nous avons
9 acquis de l'expérience pratique, si je puis m'exprimer ainsi. Je parlais en
10 termes généraux. J'ai dit que "non" parce que nous tous les officiers nous
11 avons été formés au sein de l'ABiH. Les officiers, comme moi, ne
12 constituent que 2,5 % de la totalité des effectifs de l'ABiH. Si, en tant
13 que commandant de corps, j'étais l'exemple même du professionnalisme, il
14 n'en allait pas de même pour le reste des officiers, mais, sans le soutien
15 de mes officiers subordonnés, je n'aurais rien pu faire tout seul.
16 Je vais vous donner un exemple. J'avais deux commandants de brigades à
17 Sarajevo, à Dobrinja, et plus tard, l'un des commandants de brigades de
18 Hrasnica est devenu commandant de division à Sarajevo où j'ai établi trois
19 divisions au sein de mon corps. Une est à Sarajevo et deux à l'extérieur de
20 Sarajevo. Cette personne à Sarajevo, Fikret Prevljak, et Ismet Hadzic, le
21 commandant de brigade de sa division étaient des civils. Un autre était un
22 policier avant la guerre, Fikret Prevljak, quant à Ismet Hadzic, il faisait
23 partie de l'église. Ils n'étaient pas allés plus loin que les études
24 secondaires.
25 Mais pendant la guerre, il s'est avéré qu'ils étaient de très bons
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1 combattants, qu'ils étaient capables de diriger des troupes dans la défense
2 de la ville. Les brigades ont été constituées et par la suite j'ai eu des
3 problèmes avec eux lorsque je leur ai donné des postes de commandement car
4 ils ne pouvaient pas exécuter mes ordres comme je le souhaitais. Ils
5 avaient des contacts directs avec le président de la Bosnie-Herzégovine ou
6 d'autres personnes. Ils me contournaient. En 1995, à un moment donné, ils
7 ont fait une grave erreur, une erreur telle que moi-même en tant que
8 commandant de corps, j'ai décidé de les mettre à pied. Que ce soit Fikret
9 Prevljak et Ismet Hadzic, donc je l'ai fait avec l'autorisation et
10 l'approbation de Rasim Delic. J'ai engagé des poursuites pénales contre ces
11 deux personnes auprès du tribunal militaire de district de Sarajevo. En
12 même temps, j'ai donné un ordre par lequel des personnes ont été nommées en
13 tant que commandants par intérim jusqu'au moment où je pourrais désigner
14 d'autres commandants.
15 Deux jours plus tard, le président Izetbegovic a demandé que mon ordre soit
16 considéré comme nul et non avenue. Mon ordre de mise à pied de ces
17 personnes sur ordre du président Izetbegovic, le général Delic a annulé ma
18 décision car il pouvait le faire. Il était en droit de le faire. Ces
19 personnes ont retrouvé leurs fonctions respectives, mais, cependant, les
20 poursuites pénales que j'ai engagées contre eux auprès du tribunal
21 militaire de district n'ont pas pu être annulées car cela relevait de mon
22 pouvoir discrétionnaire. Pour que ce soit annulé, et pour que ces personnes
23 ne soient pas poursuivies par le tribunal militaire de district, j'aurais
24 dû être relevé de mes fonctions de commandant de corps; et cela a été fait
25 un mois plus tard lorsque j'ai été remplacé par un nouveau commandant. Il a
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1 décidé d'annuler les poursuites pénales devant le tribunal militaire de
2 district. Je vous donne juste un exemple qui est corroboré par tous les
3 documents pertinents qui se trouvent dans les archives de l'ABiH.
4 Q. Merci, mon Général, j'apprécie votre réponse et les exemples que vous
5 avez fournis. Je pense que nous tous dans ce prétoire souhaitons que vous
6 rentriez chez vous le plus tôt possible. Je vous demanderais de bien
7 vouloir répondre de façon aussi concise que possible car, quand j'en aurai
8 terminé les deux équipes de la Défense auront peut-être également des
9 questions à poser. Si j'ai besoin d'exemple, je vous demanderai si vous en
10 avez un à nous fournir.
11 Mais pour ce qui est de la situation au sein du 3e Corps, que ce soit dans
12 votre rapport écrit, ou dans votre déposition, vous avez décrit les
13 conditions extrêmement complexes et extrêmement difficiles qui prévalaient
14 au sein du 3e Corps, pendant l'année 1993. Ma question est la suivante : la
15 situation en 1993, en Bosnie centrale dans la zone de responsabilité du 3e
16 Corps, est-ce que cette situation s'est dégradée de façon irrémédiable ?
17 R. C'est une très bonne question si je puis dire cela. A mon sens, au
18 cours de l'été 1993, la situation en Bosnie centrale était comme elle
19 était. En fait, il y avait une espèce de pyramide à l'égyptienne, que ce
20 soit en terme politique ou en terme militaire, il y avait une pyramide.
21 C'était juste une question de temps pour qu'un événement militaire ou
22 politique permette de modifier la situation. Finalement, la situation a
23 changé au mieux.
24 Q. C'est ce que je voulais dire précisément, mon Général. Le fait que le
25 3e Corps avait en son sein, comme vous nous l'avez dit des officiers qui
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1 n'étaient pas pleinement formés, qui manquaient d'expérience, qui
2 manquaient de compétence, donc le fait que le 3e Corps de l'ABiH ne s'est
3 pas effondrée en 1993 et a réussi à défendre son territoire, le territoire
4 qu'il contrôlait pendant toute l'année 1993, malgré le fait qu'au sein de
5 ces corps, il y avait des personnes qui manquaient d'expérience, de
6 formation professionnelle suffisante, le 3e Corps ne s'est pas effondré,
7 n'est-ce pas ?
8 R. Oui, mais il y a deux raisons claires à cela. Premièrement, le fait que
9 ces officiers, le commandant du corps et les autres personnes situées dans
10 la chaîne de commandement, ces personnes avaient eu connaissance de la
11 situation, et savaient que c'était là le somment de la pyramide. C'était un
12 tournant pour la situation. Ces gens travaillaient 24 heures sur 24. Ainsi,
13 ces personnes travaillaient énormément, faisaient des sacrifices
14 considérables. Je n'ai pas de parti pris, lorsque j'ai dit cela.
15 Deuxièmement, le 3e Corps à l'époque, s'est rendu compte qu'il se trouvait
16 au sommet de la pyramide, et a décidé de faire tout ce qu'il fallait pour
17 résoudre la situation avec le HVO. Si cela n'avait pas été fait, s'il ne
18 leur avait pas demandé si le HVO était un ennemi ou un allié, si cela
19 n'avait pas été fait en Bosnie centrale, si la situation n'avait pas été
20 clarifiée, si les nouvelles lignes de défense face au HVO et à l'armée de
21 la Republika Srpska n'avaient pas été établies, c'est là que la situation a
22 commencé à s'améliorer petit à petit, pour le mieux.
23 Q. Mais ce que je voulais dire, Monsieur, c'est que le
24 3e Corps, en raison de tous ces problèmes de la complexité de la situation,
25 a gardé le territoire conquis. La plus grande partie de la zone de
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1 responsabilité du 3e Corps n'est pas tombée entre les mains ni du HVO, ni
2 de l'armée de la Republika Srpska en 1993 ?
3 R. Tout à fait. Dans l'une de mes annexes, il y a quelques jours, j'ai
4 évoqué l'objectif de l'armée de la Republika Srpska en 1993, ainsi que
5 l'objectif recherché par le HVO. Vous avez vu les couleurs qui changeaient.
6 L'armée de la Republika Srpska, dans le courant de l'année 1993, s'est
7 engagée de concert avec le HVO de se concentrer sur la Bosnie orientale du
8 sud au nord, de Bijeljina à Dubrovnik, Trebinje. C'est ce qu'ils ont fait.
9 Comme vous l'avez vu, dans le courant de l'année 1993, vous avez vu le
10 territoire occupé par l'armée de la Republika Srpska dans la partie est de
11 la Bosnie-Herzégovine, territoire qu'ils ont repris de la ABiH.
12 Gorazde et Zepa, ainsi que Srebrenica sont devenus des enclaves, dans le
13 courant de l'année 1993. Nous avons conclu un accord avec le HVO, selon
14 lequel le HVO devait opérer dans la partie centrale de la Bosnie, car nous
15 partagions le même objectif et le HVO a essayé de faire cela dans la partie
16 centrale de la Bosnie et il faut reconnaître que le commandant du 3e Corps,
17 s'est rendu compte de cela. L'armée de la Republika Srpska n'a pas attaqué
18 le 3e Corps de façon significative car ils avaient envoyé leur force en
19 Bosnie orientale et tenaient des lignes à cet endroit-là. Mais le HVO
20 devait se concentrer sur le territoire de la Bosnie centrale, la zone de
21 responsabilité du 3e Corps. C'est la raison pour laquelle j'ai dit qu'il
22 faut reconnaître que le commandant du 3e Corps a réagi sans qu'une décision
23 a été prise par les dirigeants de l'Etat, afin d'essayer de régler la
24 situation, et a réussi en partie.
25 Q. Pour enchaîner, vous dites qu'il faut reconnaître que le commandant du
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1 3e Corps a réagi sans qu'une décision a été prise par les dirigeants de
2 l'Etat, afin de régler la situation. Est-ce que ceci ne représente pas une
3 action autonome du type de celle que l'on pourrait attendre de la part d'un
4 commandant du corps, à savoir, ne pas attendre de directive des
5 dirigeants ?
6 R. Si quelqu'un meurt, si quelqu'un se noie, si quelqu'un est en train de
7 se noyer et essaie désespérément d'obtenir d'avoir de l'oxygène pour
8 respirer, en fait, je compare les deux situations car c'est un peu
9 semblable. Les dirigeants politiques et militaires, en avril 1992, ont
10 déclaré que le HVO faisait partie intégrante des forces armées de la
11 Bosnie-Herzégovine. Le HVO a dit : "Nous ne reconnaîtrons pas la Défense
12 territoriale et les forces armées du gouvernement légal de l'Etat de
13 Bosnie-Herzégovine." Malgré cela, en août 1992, le président Izetbegovic
14 est allé voir Tudjman à Zagreb. Le président de la République de Croatie et
15 le président de la Bosnie-Herzégovine sont parvenus à un accord. Tudjman
16 devait ordonner au HVO en Bosnie-Herzégovine de prendre part en tant que
17 composante à part entière des forces armées de Bosnie-Herzégovine, et il
18 devait se trouver sous le contrôle du gouvernement de Bosnie-Herzégovine.
19 Je pense qu'il y a même un document qui existe dans ce sens.
20 Mais il ne s'agissait que de promesses vides. Il s'agissait d'une tentative
21 de la part des dirigeants croates de gagner du temps. Par la suite, les
22 dirigeants de la Bosnie-Herzégovine ont estimé qu'ils ne pouvaient pas
23 déclarer que la Croatie ou le HVO était en agresseur parce qu'à ce moment-
24 là les dirigeants politiques de la Bosnie-Herzégovine et l'ABiH auraient
25 été entièrement encerclés. Il n'aurait fallu que quelques jours pour que
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1 l'armée, les dirigeants politiques et l'État de Bosnie-Herzégovine
2 disparaissent. Donc, ils n'auraient pas pu dire au commandant de l'état-
3 major principal ou au commandant du 3e Corps qu'il convenait de considérer
4 désormais le HVO comme un agresseur sur lequel on pouvait tirer. Car cela
5 aurait nui à leurs propres intérêts, ils se seraient en quelque sorte
6 condamnés eux-mêmes à mort.
7 C'est la raison pour laquelle le commandant du 3e Corps a essayé à tout
8 prix d'éviter un conflit avec le HVO. Il a fait tout ce qu'il pouvait pour
9 éviter un tel conflit. Il ne voulait pas tirer sur le HVO, même si les
10 forces du HVO tiraient sur lui, et après cela, après le crime d'Ahmici, il
11 y a eu des crimes atroces, des gens ont été brûlés, réduits en pièces, et
12 après cet événement, le commandant du 3e Corps n'a pas pris -- n'a pas
13 engagé d'action. Il ne pouvait pas se lancer dans un conflit avec le HVO
14 lorsque les choses se sont aggravées, ont atteints leur paroxysme au cours
15 de l'été 1994, lorsque le HVO a déclaré ses intentions ouvertement, nous
16 avons pu voir ce que le HVO voulait. Il voulait occuper la Bosnie et la
17 diviser et se la partager avec l'armée de la Republika Srpska, et là
18 c'était la goutte qui a fait déborder le vase. Le 3e Corps a essayé de
19 régler la situation, de sauver le corps, et de l'empêcher de s'effondrer.
20 Q. Merci. Passons à un autre sujet. Ce matin, page 22, lignes 20 à 23, en
21 réponse à une question posée par le Président de la Chambre, vous nous avez
22 dit que le président Izetbegovic s'était rendu sur certaines positions
23 détenues par des unités du 1er Corps.
24 Ma question est la suivante : à votre connaissance, est-ce que le président
25 Izetbegovic s'est rendu dans la zone du 3e Corps au cours de la période
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1 allant de fin 1992 à 1993 ?
2 R. J'ai dit que je savais qu'en 1993, il a rendu visite au 1er Corps, qui
3 était le mien. Le président Izetbegovic est parti de Sarajevo et est revenu
4 à Sarajevo très fréquemment sans que je le sache, à mon insu. Je ne sais
5 pas s'il faut le dire ou pas, si c'est quelque chose à dire ou pas, mais ce
6 n'est pas un secret, il l'a fait avec Fikret Prevljak, probablement parce
7 que le président n'avait pas pleinement confiance en moi, le président
8 Izetbegovic. Par la suite en 1994 et 1995, il est venu rendre visite à tous
9 les corps, à l'exception du 5e Corps. Ceci n'a jamais été caché. C'était
10 des renseignements qui étaient toujours relayées par la télévision, la
11 radio. Des renseignements et des informations également que l'on avait lors
12 de la visite du président de l'Etat de façon à soutenir le moral des
13 combattants. Il y avait des visites de ce genre. Je ne peux pas vraiment
14 vous dire quand et où, mais il y a eu des visites de ce genre. Mais en 1994
15 et 1995, elles étaient particulièrement fréquentes.
16 Q. Mon Général, j'ai posé cette question parce que vous avez dit dans
17 votre rapport que vous aviez eu accès à des pièces à conviction présentées
18 par l'Accusation et que l'une de ces pièces à conviction était, en fait,
19 une séquence vidéo qui avait été ensuite gravée sur un CD. Est-ce que vous
20 avez vu l'une quelconque de ces séquences vidéos ou de la documentation qui
21 vous a été fournie par la Défense ?
22 R. J'ai vu des enregistrements vidéos de certaines conversations ou
23 entretiens dans lesquels des dirigeants étrangers participaient, mais je ne
24 suis pas très sûr de quoi vous voulez parler.
25 Q. Bon, je vais passer à autre chose, Monsieur le Témoin. Vous avez parlé
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1 dans -- nous sommes maintenant dans le dernier domaine, je pense que je
2 n'ai plus que quelques questions à vous poser. Vous avez dit un peu plus
3 tôt qu'à quelques reprises, il y a été question des postes de commandement
4 avancé. En passant, je crois que vous avez mentionné un poste de
5 commandement avancé du commandement Suprême à Kakanj, et je me demande si
6 vous pourriez nous dire quelque chose au sujet de ce poste de commandement
7 avancé qui avait été établi, je crois, d'après vos souvenirs.
8 R. Je sais de façon certaine que tout au long de l'année 1992, et je pense
9 jusqu'à l'été 1993, il y avait eu un poste de commandement avancé du
10 commandement de l'état-major Suprême à Visoko. Ensuite, après que le tunnel
11 ait été percé le 1er août 1993, je crois qu'après cette date, au cours de la
12 deuxième moitié de 1993, ou vers la fin de 1993, ce poste de commandement
13 avancé à Visoko a été transféré à Kakanj et un certain nombre d'officiers
14 du commandement Suprême -- de l'état-major Suprême à Sarajevo si sont
15 rendus en empruntant le tunnel, mais il a été établi à Kakanj et au cours
16 de la deuxième moitié de 1993, ou plus tard. Je ne peux pas vous dire la
17 date exacte. Je ne sais pas le mois exact.
18 Q. Je vous remercie, mon Général. L'Accusation n'a pas d'autres questions
19 à vous poser.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.
21 Maître Bourgon.
22 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président.
23 Nouvel interrogatoire supplémentaire par M. Bourgon :
24 Q. [interprétation] Mon Général, je voudrais revenir sur certaines des
25 questions qui vous ont été posées par le Juge, Président de la Chambre, en
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1 l'espèce. La première question que je voudrais évoquer est celle des
2 activités d'un commandant de corps pendant une journée typique ou normale
3 d'un commandant de corps.
4 Ma première question a trait au temps de paix, lorsque vous dites qu'un
5 commandant de corps arrive à son travail, et après avoir eu un rapport
6 verbal, puis un rapport écrit qui l'attend sur son bureau, réunit ses
7 adjoints. Je voudrais avoir confirmation de votre part si ces adjoints ou
8 assistants sont ces commandants ou chefs de service, ou est-ce que ce sont
9 les principaux officiers de son état-major, à savoir, G1, G2, G3, G4, et
10 G5. Qui sont ces assistants ?
11 R. Ces derniers -- bon, les assistants et les commandants sont deux choses
12 différentes. Les commandants d'unités sont des commandants d'unité. Un
13 commandant de brigade peut être très éloigné de l'endroit où se trouve le
14 commandant du corps. Ce que je disais, je parlais de cette réunion que le
15 commandant du corps tient dans la matinée avec ses assistants qui viennent
16 à son commandement pour les -- bon, il y a différents assistants pour les
17 questions juridiques, les questions morales, le chef d'état-major, les
18 assistants pour la mobilisation, et d'autres assistants, donc l'assistant
19 pour la logistique, et cetera.
20 Q. Dans votre rapport, mon Général, les questions des annexes 97, 98, 99
21 et 100, vous décrivez le rôle des activités de G1, G2, G3, G4 et G5. Ma
22 première question, c'est l'emploi de ces baptêmes ou ces codes G1 à G5.
23 Quand est-ce que cela a commencé ? Est-ce que c'était déjà en usage en
24 1993 ? Est-ce qu'on s'en servait déjà ?
25 R. Non, ce n'était pas employé en 1993. Nous avons commencé à employer
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1 cela suivant les critères de l'OTAN, seulement après la guerre.
2 Q. L'utilisation de ces baptêmes de G1 à G5, est-ce que c'est un usage
3 standard, par exemple, à l'OTAN, lorsque vous avez dit vous essayez
4 d'obtenir tout ce que vous pouviez, le mieux possible de l'OTAN, des
5 militaires de l'OTAN ?
6 R. Oui, exactement.
7 Q. Vous avez dit que vers 10 heures, le commandant vraisemblablement
8 serait contacté par ses commandants, ou chefs de service. Vous avez parlé
9 de commandant de brigade, commandant de division, ou commandant d'un groupe
10 opérationnel. Je voudrais que vous me confirmiez afin que les membres de la
11 Chambre de première instance soient bien au clair, quelle était
12 l'organisation à l'origine lorsque le 3e Corps a été créé. Quelle était la
13 structure des unités. Il y a une modification avec la création des groupes
14 opérationnels, et dans votre rapport, vous mentionnez que par la suite des
15 groupes opérationnels ont été remplacés par des divisions.
16 Pourriez-vous nous dire d'année en année, qu'elle était exactement la
17 structure dans l'ABiH afin que les membres de la Chambre soient bien au
18 clair de cet aspect.
19 R. En 1992, et peut-être en partie en 1993, l'ensemble des corps était
20 organisé en brigade, ce qui veut dire qu'il était composé de brigades et
21 d'autres unités indépendantes plus petites, ayant moindres effectifs en
22 contact avec le commandement du corps.
23 Les commandants du corps avaient un contact direct avec les
24 commandants de brigade, ils avaient un contact direct avec le commandant du
25 corps.
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1 Au cours de 1993, en partie en 1994, les groupes d'opération ont été
2 créés de façon temporaire, ce qui veut dire que, dans chaque groupe
3 opérationnel, il y avait un certain nombre de brigades, trois, quatre, cinq
4 ou six brigades, et chaque corps avait en gros deux, trois ou quatre
5 groupes opérationnels. Dans ce système dans cette structure d'organisation,
6 les commandants des groupes opérationnels étaient en contact direct avec le
7 commandant du corps, ou plutôt c'était le commandant du corps dans ce
8 système d'organisation, qui avait un contact direct avec les commandants
9 des groupes opérationnels, mais pas avec les commandants des brigades parce
10 qu'eux se trouvaient à un niveau inférieur. En 1994 et 1995, les groupes
11 opérationnels ont été transformés et sont devenus des groupes permanents,
12 appelés des divisions.
13 Rien de très particulier n'a été changé. Dans le contexte que j'ai
14 décrit, les rapports entre les commandants de division et commandants de
15 corps sont demeurés les mêmes. Le commandant de corps avait toujours un
16 contact direct avec les commandants de division, et ce système est resté en
17 place jusqu'à la fin de la guerre, à l'exception du 5e Corps qui était un
18 corps ayant moindres effectifs et qui était organisé d'une façon quelque
19 différente. Mais tous les autres corps, ce système a été organisé et a
20 persisté.
21 Q. Je vous remercie, mon Général, je voudrais simplement qu'il soit bien
22 clair, pendant que vous êtes ici, parce que je voudrais être sûr que les
23 membres de la Chambre comprennent la différence entre un groupe
24 opérationnel et un groupe tactique. Pourriez-vous expliquer la différence
25 entre les deux, pour les membres de la Chambre ?
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1 R. Nous parlons de groupes opérationnels et groupes tactiques, c'est bien
2 cela votre question ?
3 Q. Ma question est la suivante, vous avez décrit à la Chambre de première
4 instance, vous avez dit qu'à un moment donné un groupe tactique avait été
5 formé au sein du 3e Corps, pour lancer des opérations, des activités de
6 combat dans un secteur précis, dans la région d'Ovnak. Ce groupe tactique a
7 été formé à ce moment-là, et donc où se situe t-il dans la structure, si
8 vous pouviez donner un maximum de renseignements aux membres de la Chambre.
9 R. Groupe tactique, est-ce que nous excluons les formations, telles que
10 les brigades, les groupes opérationnels, divisions et des corps ? C'est une
11 structure dont l'organisation verticale pour l'ensemble de l'organisation
12 de l'ABiH. Un groupe tactique est analogue ou similaire à ces autres
13 organes du point de vue de l'organisation, mais un groupe tactique est
14 formé pour des missions, les tâches particulières de façon à pouvoir
15 effectuer une tâche particulière. Une fois cette tâche a été effectuée,
16 toutes les unités, qui ont été formées au sein du groupe tactique,
17 retournent à leur formation ou unité d'origine. Un groupe tactique peut
18 être formé par un commandant d'un groupe opérationnel ou un commandant de
19 division, et peut également être formé par un commandant de corps ou par le
20 commandant du Grand état-major. Ceci dépend de savoir qui forme ce groupe
21 tactique, à quel niveau il est formé ce groupe tactique. Mais ceci dépend
22 évidemment de savoir qui le forme aux différents niveaux des unités qui
23 vont composer ce groupe tactique.
24 Les dimensions d'un groupe tactique peuvent varier. Un groupe tactique peut
25 être créé par un ordre d'un commandant, ou d'un commandant de groupe, d'un
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1 bataillon qui peut faire partie d'un groupe tactique, ou de brigade. Le
2 commandant d'un groupe tactique, à ce moment-là, désigné, peut avoir un
3 certain nombre d'hommes provenant de diverses unités, des officiers
4 capables et, à ce moment-là, peut-être qu'un poste formé. Le commandant des
5 unités dans le groupe tactique rend compte au commandant du groupe
6 tactique. Il reçoit des missions ou des tâches de combat et, ensuite, ceux
7 qui l'ont effectué, à partir du moment la formation, ceci est envoyé à la
8 personne qui avait créé le groupe tactique, et ce rapport lui est envoyé
9 lorsque la mission a été effectuée.
10 Q. Je vous remercie, mon Général. Maintenant, je voudrais passer au
11 scénario en temps de guerre. Une journée typique d'un commandant. Vous avez
12 mentionné que la différence essentielle était le fait qu'un commandant d'un
13 corps en temps de guerre, ne sait pas ce qu'il va avoir à faire le
14 lendemain. Vous avez également dit que vous avez donné de nombreux
15 renseignements concernant les lieux où vous aviez dormi au cours des quatre
16 années où vous étiez commandant de corps.
17 Ce que j'aimerais savoir de vous, c'est combien d'heures, la nuit, en tant
18 que commandant de corps, est-ce qu'un commandant de corps peut dormir en
19 temps de guerre ? Lorsque vous dites que le commandant ne sait pas ce qu'il
20 aura à faire le lendemain, est-ce qu'on peut ramener cela à dire qu'un
21 commandant ne saura pas ce qu'il aura à faire dans les deux heures qui
22 viennent ? Approximativement ? Est-ce que l'on pourrait ramener cela à une
23 telle formule ?
24 R. Cela dépend de l'activité des combats et de l'intensité, le degré. Très
25 souvent, un commandant de corps va se trouver dans une situation dans
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1 laquelle il ne s'est pas ce qu'il aura à faire dans les quelques heures qui
2 suivent. Cela est une situation commune et lorsque je regarde ce que j'ai
3 fait, et là, je vais revenir à la question du sommeil, aux problèmes de
4 sommeil. J'ai passé beaucoup de temps à dormir dans divers véhicules, dans
5 un jeep qui était notre "command car", notre véhicule de commandement.
6 J'étais constamment en mouvement pour aller d'une unité à l'autre, je
7 dormais dans le véhicule ou, si j'étais en route vers la Bosnie centrale,
8 je pouvais dormir dans l'hélicoptère de Zenica à Tarcin. Cette zone était
9 accessible par hélicoptère. Je dormais, en fait, où je pouvais.
10 Q. Je vous remercie, mon Général. Maintenant, en ce qui concerne l'emploi
11 du temps d'un commandant de corps en temps de guerre, vous avez dit que le
12 commandant du corps devait rencontrer des civils qui venaient le trouver à
13 son bureau ou qui venaient se plaindre à des personnalités politiques. Même
14 si le commandant de corps n'était pas responsable des problèmes qu'ils lui
15 soumettaient.
16 Sur la question des civils, est-ce qu'il vous est arrivé ou est-ce que vous
17 avez eu à rencontrer des fonctionnaires internationaux, des représentants
18 des communautés internationales et est-ce que ceci vous a pris beau coup de
19 temps en tant que commandant de corps ?
20 R. Je voudrais vous donner un exemple. Dans une partie de votre question,
21 vous avez parlé des relations entre les civils et le commandant du corps.
22 Par exemple, en juillet, août 1993 lorsque je devais être désigné comme
23 commandant du 1er Corps, j'étais occupé par des activités de combat sur le
24 mont Igman et je ne savais pas que j'allais être nommé commandant de corps.
25 Je l'ai appris par la radio, j'ai été pris par surprise, cela m'a surpris.
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1 Avant cela, j'ai vu une liste que mon prédécesseur avait, celui qui
2 souhaitait quitter son poste de commandant de corps. Cette liste contenait
3 une vingtaine de noms et avait été établie par quelqu'un du grand état-
4 major ou par des personnalités politiques et j'étais le vingtième de la
5 liste, le dernier sur la liste et les 19 noms précédents étaient des
6 civils, des hommes politiques, des présidents de municipalité, des
7 ministres et ainsi de suite. Plus tard, j'ai appris qu'aucune des 19 civils
8 figurant sur cette liste ne voulait prendre la responsabilité d'être
9 commandant du 1er corps. Puis, un ordre a été donné disant : Karavelic,
10 c'est vous. Voilà, comment les choses se sont passées. En vérité.
11 Plus tard, un certain nombre de ces personnes, qui s'occupaient de
12 politique ou qui siégeaient ou qui étaient assis à leur bureau ou dans les
13 caves, ont fait ce que j'ai mentionné comme exemple. Par exemple, le
14 président de municipalité donnait de l'argent à leur brigade respective en
15 me court-circuitant, J'ai rencontré des civils, ils souhaitaient avoir des
16 réunions avec moi ou ils souhaitaient me rencontrer. Je faisais des
17 réunions de ce genre mais elles étaient sans aucune utilité. Aucun résultat
18 n'était tiré de ce genre de réunion. J'ai également eu un très, très grand
19 nombre de réunions avec des membres des organes internationaux et des
20 personnes qui représentaient des organisations internationales. A Sarajevo
21 en 1994 et 1995, j'ai rencontré un très grand nombre d'ambassadeurs qui
22 étaient à Sarajevo et qui sont venus dans mon bureau pour me rencontrer.
23 J'ai eu de nombreuses réunions avec des attachés étrangers, des membres
24 d'ambassades.
25 Q. Je vous remercie, mon Général. En ce qui concerne les activités de
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1 commandant de corps. Bien entendu, ceci comprenait les activités de
2 commandement, proprement dites, du corps, et l'expert de l'Accusation, le
3 général Reinhardt, d'après ce que je lis dans sa déposition, indiquait
4 qu'il y avait des activités du 3e Corps lorsque, fondamentalement, il y
5 avait des questions de routine au cours de 1993.
6 Je voudrais savoir s'il y avait des moments où on pouvait reprendre des
7 activités de routine au commandement du 3e Corps ?
8 R. Si j'ai bien compris votre question, je peux dire que de temps à autre,
9 dans d'autres corps, il y avait des moment creux de ce genre où
10 d'activités réduites ou pas d'activité de combat. Dans le corps que je
11 commandais, le 1er Corps, ceci était extrêmement rare, se produisait
12 rarement, se produisaient très rarement, si rarement qu'on ne devrait même
13 pas en parler parce qu'il y avait constamment des combats, autour de
14 Sarajevo et dans Sarajevo, et ceci pendant des années. Même s'il y avait
15 des périodes un peu creuses ou d'activités réduites, chaque commandant de
16 corps priait pour que des moments de répits de ce genre puissent exister
17 afin qu'ils puissent exécuter des tâches pour lesquelles il n'avait pas le
18 temps, pendant la périodes de combat et ceci avait trait à des questions de
19 manœuvre ou de déploiement d'unités, de problèmes logistiques pour ces
20 unités, et ainsi de suite.
21 Q. Ma question à cet égard, mon Général, c'est que je souhaiterais avoir
22 votre opinion, en tant qu'expert, sur la base de la documentation que vous
23 avez examinée et de savoir quelle était la situation au commandement du 3e
24 Corps. Si vous pouvez le dire, d'après les documents que vous avez vus, y
25 avait-il des périodes de calme ou de répits où on pouvait en quelque sorte
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1 rattraper le temps ?
2 R. C'est très difficile de dire cela. Pour que ma réponse soit vraiment
3 précise, il faudrait que je lise tous les rapports du commandement du corps
4 adressé depuis le centre opérationnel tous les jours au cours de ces quatre
5 années. Je n'ai pas lu ces rapports. Ils couvrent des périodes de 24 heures
6 et rendre compte de ce qui s'est passé au cours des derniers 24 heures. Je
7 pense qu'il y a dû y avoir des périodes d'activités réduites ou de répits.
8 Il y en a certainement eu, mais même lorsqu'il y avait des moments brefs de
9 calme, le commandant de corps et tous les autres commandants à des grades
10 subalternes, à des échelons subalternes essayaient d'utiliser ce temps de
11 façon à pouvoir régler bien d'autres problèmes qui avaient directement
12 trait à la mission. Que soit que le corps avait reçu, soit une unité
13 particulière avait reçu, ceci avait à voir avec les questions logistiques,
14 l'amélioration des transmissions de communications au sein du corps, des
15 conversations et des contacts avec les organes civils et institutions
16 civiles, les réunions et briefings avec leurs subordonnés au commandement
17 et dans les commandements subordonnés, la formation, l'entraînement, le
18 renouvellement des denrées, des vivres, des munitions, des armes, et ainsi
19 de suite.
20 Je voudrais vous donner un exemple. En 1993, j'ai donné un ordre selon
21 lequel un groupe a été créé qui devait aller dans Sarajevo pour enlever
22 tous les signaux de la circulation, et les grilles de métal qui se
23 trouvaient autour du centre sportif appelé Skenderija. Je voulais utiliser
24 ces barres de métal pour recouvrir et en faire faire des grenades à mains.
25 Il fallait également que je m'occupe de questions de ce genre, en tant que
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1 commandant de corps, et il y avait des situations analogues ailleurs, cela
2 dépendait du secteur. Souvent d'autres avaient les mêmes choses à faire.
3 Q. J'avais encore quelques questions à vous poser avant la suspension de
4 l'audience, mais je voudrais clarifier un point parce que vous avez dit
5 quelque chose du fait que vous n'aviez pas lu ces rapports. Je suis un peu
6 surpris parce qu'un grand nombre de ces rapports vous ont été remis. Quels
7 sont ceux que vous n'avez pas lus ? Est-ce que vous pourriez éclaircir ce
8 point ? Peut-être que je n'ai pas bien compris l'interprétation.
9 R. Je ne lisais pas tous les rapports qui provenaient du central opération
10 du commandement du 3e Corps.
11 Q. Vous n'avez pas lu -- enfin, vous avez lu ceux que vous aviez reçus,
12 mais il y en avait certains que vous n'aviez pas reçus ? Je ne comprends
13 pas. Je voudrais que vous clarifiiez s'il y en avait ceux que vous ne --
14 certains rapports que vous n'aviez pas, ou que vous n'avez pas pu lire les
15 documents que vous aviez, les rapports que vous aviez ?
16 R. C'est précisément ce que vous dites. Lorsque vous m'avez demandé
17 combien de périodes de faible activité ou de répit il y avait eu au 3e
18 Corps, je vous ai répondu qu'il faudrait que je consulte les rapports émis
19 depuis le 1er janvier jusqu'au 31 décembre 1993. Je serais, à ce moment-là,
20 en mesure de vous dire quelles étaient les périodes pendant lesquelles il
21 n'y avait pas d'activités de combat ou d'engagements, engageant le 3e
22 Corps. C'est cela que je vous ai dit et c'est pour cela que je vous ai dit
23 que je ne pouvais pas répondre à votre question parce que ce ne serait que
24 ces rapports quotidiens sur 24 heures qui pourraient me donner une réponse
25 à cela.
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1 Q. Je vous remercie, mon Général.
2 M. BOURGON : [interprétation] Je pense, Monsieur le Président, que le
3 moment est venu pour une autre suspension. Après la suspension, je n'aurai
4 besoin que de 30 minutes.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Après la pause, nous aurons seulement 45 minutes et
6 vous dites que vous aurez besoin de 30 minutes. Dans ce cas-là, j'espère
7 que Me Dixon n'a pas besoin de plus de 15 minutes.
8 M. DIXON : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je n'aurai besoin
9 que de deux minutes. Il n'y a qu'un point que je souhaite éclairer.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Nous reprendrons à 1 heure moins 5.
11 --- L'audience est suspendue à 12 heures 30.
12 --- L'audience est reprise à 12 heures 56.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Bourgon, pour 30 minutes.
14 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président. J'ai parlé à mes généraux à la
15 pause -- plutôt j'ai parlé à mon client, et mon général, et je vais essayer
16 de couper court à mes questions.
17 Q. [interprétation] Mon Général, l'on arrive à la dernière ligne droite.
18 Je voudrais vous poser une question au sujet de ce que vous avez dit
19 concernant la possibilité qu'a un commandant du corps de se rendre sur le
20 terrain. Vous avez mentionné le fait que, vous-même, vous vous êtes rendu
21 très près des lignes de front, que vous vous êtes adressé aux soldats. A ce
22 sujet, j'aimerais savoir si vous pouvez nous dire s'il y a une différence
23 entre la situation qui était celle du 1er Corps à ce sujet, et la
24 possibilité qu'avait le commandant du 3e Corps de se rendre sur les lignes
25 de front. Dans ce sens, j'aimerais que vous nous parliez de la taille de la
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1 zone du corps, et ce qu'est même plus important, la différence pour ce qui
2 est de la liberté de circuler, à savoir, est-ce qu'il était possible pour
3 le commandant du 3e Corps de se rendre sur la ligne de front et aussi, si
4 vous pouviez parler du risque, à savoir, est-ce qu'il est mieux que le
5 commandant du corps se rende lui même à ces endroits, ou s'il vaut mieux
6 qu'il envoie des gens qui vont le représenter, compte tenu du risque qu'il
7 y a pour le commandant de se faire capturer ?
8 R. En principe les commandants et, en particulier, les commandants des
9 unités opérationnelles, tel qu'un corps d'armée, devraient passer la
10 plupart de leur temps à leur poste de commandement principal. On n'exclut
11 pas la possibilité que le commandant du corps se rende dans ses unités qui
12 lui sont directement subordonnées, pour une raison quelle qu'elle soit.
13 Toutefois, ce qui arrive très rarement dans des circonstances un peu plus
14 normales, que le commandant du corps se rend, par exemple, dans les
15 brigades ou, encore plus bas, dans les bataillons, les compagnies, les
16 détachements. Cela non.
17 Cependant, pendant la guerre, en Bosnie-Herzégovine les circonstances
18 étaient telles, et là je parle pour moi, qu'il y a eu un nombre
19 incalculable de situations où j'ai été obligé de le faire. Si je ne l'avais
20 pas fait, les conséquences en auraient été catastrophiques. Vraiment, je
21 l'ai fait de mon propre chef, personne ne me l'a demandé. Tout simplement,
22 je voyais que c'était nécessaire, qu'il fallait que je le fasse. Souvent,
23 j'envoyais aussi des gens pour me représenter; cependant, si souvent des
24 échelons inférieurs le long de la filière de commandement exigent que ce
25 soit le numéro 1, que ce soit le commandant, donc un représentant ne peut
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1 pas faire le travail auquel on s'attend de sa part. En même temps, il n'est
2 pas très populaire et, militairement il n'est pas correct que le commandant
3 du corps se déplace de son gré, où il veut, comme il veut, en particulier,
4 qu'il le fasse sous sa propre initiative et qu'il s'expose, ce faisant au
5 danger de se faire tuer, qu'un sabotage soit fait de la part de la
6 cinquième colonne, je ne sais pas, qu'il se fasse capturer ou qu'il soit
7 arrêté à un poste de contrôle de la part de qui que ce soit. Dans le cas
8 échéant, ceci placerait le commandant du corps dans une telle situation,
9 qu'il ne pourrait pas agir. Le corps se retrouverait sans son commandant.
10 En guerre, c'était une situation dangereuse. Le Règlement militaire
11 ne prévoit pas que le commandant du corps s'expose à de tel risque de tel
12 danger; cependant, en Bosnie-Herzégovine pendant cette guerre, il y a
13 beaucoup de choses qui ont échappé à des normes, des Règles et, entre
14 autres, moi aussi, je l'ai fait, j'ai été obligé de le faire. D'autres
15 commandants ont dû agir pour la grande partie, de cette manière-là, ou de
16 manière comparable, plus ou moins. Moi-même, je l'aurais peut-être fait
17 davantage, mais c'était un grand problème de sortir de Sarajevo, cela a
18 toujours posé un grand problème.
19 Si je sortais de Sarajevo, il fallait que ce soit de nuit,
20 exclusivement. En passant par le tunnel sous l'aéroport de Sarajevo, devant
21 il y a une pente pour arriver au mont Igman, l'ennemi a toujours tiré avec
22 toutes ses armes disponibles là, pas un oiseau ne pouvait passer par là. Le
23 commandant du 3e Corps, avait les postes de contrôle du HVO, en
24 particulier, lorsque le conflit a éclaté avec le conseil croate de défense.
25 Tous ces postes de contrôle constituaient un danger potentiel pour le
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1 commandant du corps. Il pouvait y être capturé ou ce qui aurait pu arriver,
2 c'est ce qui est arrivé à Totic à Zenica, cela aurait pu arriver à un autre
3 endroit. Cela n'aurait pas certainement été bien pour le commandement du
4 corps.
5 Q. Merci, mon Général. Une question pour enchaîner là-dessus. En répondant
6 à une question qui vous a été posée par le président de la Chambre, vous
7 avez dit qu'il n'était pas possible pour les commandants de corps se réunir
8 avant le mois d'août 1993, plus précisément vous avez dit que le commandant
9 du 5e Corps n'a jamais pu être présent. Très brièvement, pouvez-vous nous
10 dire pourquoi le commandant du 5e Corps ne pouvait-il pas venir ?
11 R. Parce que d'un point de vue territorial, physique, il était
12 complètement coupé, séparé du territoire des autres quatre corps. Le 5e
13 Corps, il avait sous son contrôle, Bihac et les environs de Bihac, cinq ou
14 six municipalités, après Fikret Abdic a pris trois municipalités.
15 Physiquement, il n'avait aucun moyen de s'y rendre, si ce n'est à bord d'un
16 hélicoptère des forces internationales.
17 Q. Merci, mon Général. Est-ce que vous pouvez confirmer que cette réunion
18 des commandants de corps, au mois d'août 1993, la réunion que vous avez
19 mentionnée, qu'elle s'est tenue sur initiative du général Hadzihasanovic,
20 et que la création du 7e Corps est quelque chose qui a été discutée lors de
21 cette réunion ?
22 R. De quelle réunion parlez-vous, s'il vous plaît ?
23 R. La réunion des commandants de corps, celle que vous avez mentionnée en
24 répondant à une question posée par le président de la Chambre, la réunion
25 du mois d'août 1993. Vous souvenez-vous qui a pris l'initiative de
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1 convoquer cette réunion et est-ce qu'on a discuté de la création du 7e
2 Corps à cette occasion ?
3 R. Je pense que c'est cette seule réunion qui s'est tenue en août à
4 Zenica. Cela a été de fait la première réunion et lors de celle-ci les
5 commandants de corps, en l'absence du commandant du 5e Corps, ont fait un
6 rapport au commandant du Grand état-major au sujet de tous les éléments
7 relatifs à l'aptitude au combat, chacun pour ce qui est de son propre
8 corps, pour faire un tour de la situation d'un point de vue politique et
9 militaire, afin de déterminer les éléments et les objectifs pour la période
10 à venir. Je suppose que cette réunion a été convoquée sur l'initiative du
11 commandant du Grand état-major, en d'autres termes, ou je pense que c'était
12 comme cela, cette réunion s'est tenue à Zenica, dans un des bâtiments de
13 Zenica.
14 Q. Merci, mon Général. Je passe maintenant à la question des
15 communications, c'est un sujet qui a été abordé par le président de la
16 Chambre. La question avait à voir avec la manière qu'avait l'état-major du
17 commandement Suprême pour contacter les commandements de corps.
18 Vous avez répondu en expliquant comment ceci ce passait. Ma question est la
19 suivante : vous avez vu beaucoup de communication ou plutôt de rapports qui
20 ont été échangés entre le commandement Suprême et le corps. Mais un témoin
21 est venu déposer devant cette Chambre, un spécialiste des transmissions ou
22 de communications, Zivko Sakib et il a dit pour ce qui est des
23 communications par Paket que vous avez mentionnées, qu'il a été
24 régulièrement nécessaire de faire dix tentatives avant de parvenir à passer
25 un message de cette manière. Est-ce quelque chose qui vous est familier ce
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1 genre de situation ?
2 R. Plus ou moins, oui. Précisément parce que les liens et les
3 communications n'étaient pas de bonnes communications. Je vous ai dit quels
4 sont les relais qui ont été installés, où, sous quels angles, quelle était
5 la possibilité de les atteindre, quelle était leur force, quelle était la
6 réception des signaux par radio. Cela posait des problèmes énormes et en
7 plus si on y ajoute l'influence intentionnelles et planifiée de l'ennemi
8 afin de brouiller et de gêner les communications, de temps à autre, on a
9 connu des problèmes énormes, voire une interruption totale de transmission
10 ou de communication, et cetera.
11 Q. Je vais vous poser une question très importante, mon Général. Dans les
12 documents qui vous ont été communiqués, il y a un certain nombre de
13 feuilles qui constituent les documents échangés entre le 3e Corps et le
14 commandement Suprême. En votre qualité d'expert, et en tant que quelqu'un
15 qui a vécu cette situation, j'aimerais que vous nous disiez quelle est la
16 conclusion que nous devons tirer en nous fondant sur le nombre d'échange
17 entre le
18 3e Corps et le commandement Suprême ? Est-ce que cela signifie qu'il y en a
19 eu autant qu'ils l'auraient souhaité, ou ce que vous avez vu n'est que la
20 pointe de l'iceberg, en termes de ce qui aurait dû ce passer entre le
21 commandement Suprême et le 3e Corps ?
22 R. Je dirais plutôt que c'était peu ces échanges entre le commandement
23 Suprême et le 3e Corps. J'ai été dans une situation bien meilleure.
24 Souvent, en tant que commandant de corps, pendant que j'étais à Sarajevo,
25 je pouvais me rendre auprès du commandant du Grand état-major, ou auprès
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1 des membres du commandement Suprême, pour avoir des consultations, pour
2 avoir des entretiens, et cetera.
3 En disant cela, je veux dire que pour ce qui est des transmissions ou des
4 communications, un contact direct entre deux commandants, un supérieur, un
5 subalterne, est la meilleure façon de communiquer et la façon la plus sûre.
6 Même si ce contact lui aussi peut ce passer soit par une communication
7 physique, en présence physique ou par téléphone. Le commandant du 3e Corps,
8 il n'avait ni l'un, ni l'autre. Physiquement, il ne pouvait que rarement
9 voir le commandant Suprême et je pense que c'est la première fois en août,
10 le 20, 21 août, lorsqu'il y a eu cette réunion à Zenica. Par téléphone,
11 même s'il lui est arrivé d'avoir une communication par téléphone, il ne
12 pouvait pas parler au commandant du Grand état-major en évoquant des
13 problèmes importants graves, des problèmes relatifs à la sécurité
14 précisément, parce que tous les téléphones étaient passés sous écoute. Par
15 téléphone, on ne peut pas évoquer des questions militaires d'importance, et
16 encore moins des opérations militaires. Donc, ce qu'il avait à sa
17 disposition, finalement, c'était les communications par écrit, mais,
18 littéralement, on ne peut jamais exprimer tout ce qu'on peut parvenir à
19 exprimer lors d'un contact direct, lorsqu'on est directement présent.
20 Q. Je vous remercie, mon Général. Le président de la Chambre vous a posé
21 une question au sujet des paragraphes 283 et 287 de votre rapport pour
22 savoir comment c'est exercé le contrôle politique.
23 En vous fondant sur votre rapport, j'aimerais que vous nous confirmiez une
24 chose. Il y a une différence entre le principe de subordination de l'armée
25 à l'Etat, et l'exercice du commandement et du contrôle sur les unités
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1 militaires. Est-ce que vous seriez d'accord avec moi si vous vous fondez
2 sur votre rapport ?
3 R. Pourriez-vous répéter votre question, s'il vous plaît ?
4 Q. Je vais le dire encore une fois. Le principe de subordination d'une
5 armée à l'Etat, si on fonde sur votre rapport, signifierait que l'armée ne
6 décide pas, l'armée fait ce que l'Etat veut qu'elle fasse. Dans votre
7 rapport, vous parlez aussi du contrôle effectif et de l'exercice du
8 commandement et du contrôle sur des unités militaires. Est-ce qu'il s'agit
9 là de deux choses différentes ?
10 R. Encore une fois je ne suis pas certain d'avoir vraiment compris ce que
11 vous vouliez me demander. Tant qu'il y avait l'état-major du commandement
12 Suprême, les mots, eux-mêmes, "l'état-major du commandement Suprême," dit
13 qu'il s'agit de l'état-major qui avait cette fonction d'état-major, une
14 fonction opérationnelle au nom du commandement Suprême des forces armées de
15 Bosnie-Herzégovine. Plus tard, précisément, on a procédé à une
16 réorganisation. On a rebaptisé l'état-major du commandement Suprême pour
17 créer, pour nommer le Grand état-major ou l'état-major général de Bosnie-
18 Herzégovine justement pour lui donner plus d'attributions au niveau de la
19 direction et le contrôle des unités faisant partie de l'ABiH. Donc, le
20 commandement Suprême, en tant que la présidence de Bosnie-Herzégovine, est
21 l'autorité militaire suprême avec des attributions, des compétences pour
22 émettre des ordres dans le sens politique, en transformant les directives
23 politiques, émanant du commandement Suprême, donc, c'est précisément
24 l'état-major du commandement Suprême, c'est-à-dire, le Grand état-major de
25 Bosnie-Herzégovine, transforme ses directives en ordres militaires et les
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1 transmet vers les échelons inférieurs. Entre le commandement Suprême, la
2 présidence de la Bosnie-Herzégovine et le Grand état-major ou l'état-major
3 général, le nom de vertical, vous avez le gouvernement de Bosnie-
4 Herzégovine et le ministère de la Défense, qui fait partie du gouvernement
5 de Bosnie-Herzégovine, les compétences qui sont les siennes.
6 Q. Merci, mon Général. Une question qui a également été abordée par le
7 Présidence de la Chambre c'est celle des pertes civiles ou des pertes
8 collatérales, suite à des opérations de combat.
9 Je souhaiterais savoir de votre part, en tant qu'expert, lorsqu'il y a des
10 activités de combat, s'il y a des personnes chargées de rassembler ou de
11 recueillir ces informations ou si c'est quelque chose que le commandant du
12 corps doit rechercher avant d'obtenir des rapports de la part de personnes
13 qui sont chargées de recueillir ces informations ?
14 R. Au sein du commandement du corps et au sein du corps dans l'ensemble,
15 il n'y a personne qui soit spécifiquement chargée de rassembler des
16 informations au sujet des pertes collatérales. Les pertes collatérales ne
17 sont pas particulièrement un sujet d'intérêt pour le commandement qui n'est
18 pas sensé demander des rapports à ce sujet. S'il y a des pertes
19 collatérales importantes qui sont observées, les commandements des unités
20 sur le terrain doivent faire rapport sur cela.
21 Q. Le Président de la Chambre vous a posé une question au sujet des
22 ressortissants étrangers qui sont arrivés en Bosnie. Je vais donner en
23 français les termes exacts utilisés "concours à l'ABiH".
24 Au sein du 1er Corps, il y a un Allemand qui est arrivé, qui est devenu
25 membre du 1er Corps, qui est resté pendant une année et qui est parti
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1 ensuite. Pardon, vous avez dit qu'il avait été tué. Ensuite, vous avez dit
2 qu'il n'y avait pas de groupes importants de ce type à l'exception du 3e
3 Corps.
4 Ma question est la suivante : savez-vous qu'il y avait des étrangers à
5 Tesanj dans la zone du 3e Corps, à Bacilja [phon] dans la zone du 2e Corps,
6 à Guzin [phon] dans la zone du 5e Corps et dans d'autres secteurs, d'autres
7 régions de la Bosnie-Herzégovine ?
8 R. Maintenant, que vous en parlez, oui, je m'en souviens mais ce que vous
9 avez dit à propos du 2e Corps, c'est quelque chose qui, selon moi,
10 concernait le 3e Corps de la Bosnie centrale, même si c'est un secteur qui
11 divise le territoire ou la zone du 1er et du
12 2e Corps. J'ai entendu quelque chose de ce type à propos du 5e Corps, mais
13 je n'ai pas d'information fiable à cet égard.
14 Q. Lorsque vous dites que le 3e Corps constituait une exception et je
15 compare cela avec votre rapport, est-ce que vous vouliez dire par là que
16 ces groupes collaboraient ou coopéraient avec l'armée ou, comme vous le
17 dites dans votre rapport, qu'ils ne coopéraient pas avec l'armée ? Je
18 voudrais simplement clarifier ce que vous avez dit dans votre réponse
19 lorsque vous avez dit que la seule exception était dans la zone du 3e
20 Corps. Qu'entendiez-vous par là ?
21 R. Je voulais dire que le 3e Corps couvre la plupart du territoire de la
22 Bosnie-Herzégovine, voire tout ce territoire. En même temps, ce territoire
23 était propice pour obtenir des informations au sujet de ces volontaires
24 étrangers. Ils étaient essentiellement concentrés en Bosnie centrale et
25 c'est là que se trouvait leur sanctuaire en quelque sorte. C'est pour cela
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1 que j'ai dit cela.
2 Q. Il y avait des groupes de volontaires étrangers sur le territoire du 3e
3 Corps, mais pas au sein des Unités du 3e Corps car le Président de la
4 Chambre vous a demandé si ces groupes faisaient partie des effectifs, des
5 Unités du 3e Corps ?
6 R. Non, je ne voulais pas dire qu'ils faisaient partie des unités du 3e
7 Corps, je n'affirme pas cela. Ils ne faisaient pas partie des Unités du 3e
8 Corps.
9 Q. A présent, je souhaiterais que l'on parle des armes et, notamment, des
10 chars. Bien entendu, si on veut utiliser un char, on a besoin de carburant
11 et de munitions. Par exemple, un dénommé Ribo Haso, témoin en l'espèce, a
12 déclaré qu'à n'importe quel moment, il ne pouvait pas avoir suffisamment de
13 carburant pour qu'un véhicule puisse rouler pendant plus d'une heure. Est-
14 ce que vous disposiez de munitions et de carburant nécessaires pour que les
15 chars du 1er Corps soient opérationnels ?
16 R. Permettez-moi d'ajouter quelque chose, juste une minute ou deux même si
17 nous n'avons pas beaucoup de temps qui nous reste.
18 Au cours des quatre ou cinq dernières années, j'ai eu des problèmes très
19 importants avec les enquêteurs du Tribunal de La Haye. Car ils sont venus à
20 Sarajevo pour essayer, coûte que coûte, de trouver des chars car ils
21 avaient obtenu des informations de la part des Serbes. Sur la base de ces
22 rapports qui ont été dirigés à l'époque pendant la guerre, ils sont allés à
23 Sarajevo et pendant un nombre incalculable de fois, ces enquêteurs sont
24 venus à Sarajevo, j'ai du leur montrer différents lieux à Sarajevo et leur
25 expliquer qu'il n'y avait pas plus de cinq chars à Sarajevo. Ils ne
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1 comprenaient pas cela. Ils avaient d'autres informations de la partie
2 adverse et c'est compréhensible. Mais ces cinq chars ne pouvaient pas être
3 utilisés car nous n'avions pas de pièces détachées et pour ce qui est des
4 autres, ils demeuraient sur des positions de tir. Nous les gardions à
5 certaines positions car nous n'avions pas de carburant pour ces chars. Si
6 je voulais déplacer ce char, par exemple, je le faisais peut-être une fois
7 par mois ou une fois tous les deux mois sous réserve d'avoir obtenu
8 suffisamment de carburant pour le faire.
9 En 1993, notamment, en tant que commandant de Corps, j'ai passé la plupart
10 du temps à me déplacer dans une voiture de type Golf, et le carburant
11 utilisé venait de poste de transformation, dans tous ces postes, ils
12 avaient 20, 30 ou 100 litres de fuel, il y avait un certain nombre de
13 stations de ce type à Sarajevo, c'est que nous utilisions pour les Golf, ce
14 qui s'est avéré très convenable et qui a beaucoup aidé pour la guerre en
15 Bosnie-Herzégovine.
16 Q. Merci, mon Général. Vous avez dit au paragraphe 513 et 514, que l'armée
17 n'était pas suffisamment dotée en armement, qu'il y avait environ en
18 moyenne une arme pour trois soldats, et en qui concerne les munitions, la
19 période la plus difficile était l'année 1993. Est-ce que vous maintenez ce
20 que vous avez dit dans votre rapport ? Est-ce que vous pouvez nous le
21 confirmer ?
22 R. Absolument. Ce fut le cas dans mon corps et la situation n'était pas
23 meilleure dans les autres corps d'armée. En moyenne, nous avions un fusil
24 pour trois hommes, ou même plus en ce qui concerne les munitions et
25 d'autres équipements, l'année 93 a la plus difficile, car rien n'arrivait
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1 de l'extérieur de la Bosnie-Herzégovine. Le HVO avait fermé toutes les
2 frontières et contrôlait les routes, les axes routiers. C'est pourquoi,
3 c'est le problème que le commandant du 3e Corps, le 3e Corps d'armée dans
4 son ensemble et toute l'armée au cours de l'été 1993, c'est un problème qui
5 a concerné le sommet de la pyramide que j'ai mentionné tout à l'heure. La
6 production locale n'était pas suffisante.
7 Q. Merci. Paragraphe 638 de votre rapport. On peut voir une question qui a
8 été soulevée par le président de la Chambre. J'attends un instant pour que
9 vous retrouviez ce paragraphe 638.
10 R. 138 ?
11 Q. Non, 638. Dans ce paragraphe, vous dites que : "Si des individus
12 inconnus;" ensuite, vous avez dit que cela incluait les combattants
13 étrangers : "Si des groupes d'individus se trouvent dans la zone de
14 responsabilité sans être placés sous la direction et le commandement du
15 corps, le commandant de ce corps n'est pas responsable de leurs actions."
16 Vous avez déclaré cela, d'autres témoins l'ont confirmé également. Je
17 souhaiterais que vous nous fassiez un commentaire au sujet du paragraphe
18 642, où vous nous dites que : "Tous les éléments mentionnés ci-dessous
19 démontrent que la présence, d'individus ou de groupes d'individus qui
20 n'étaient pas placés sous la direction ou le commandement du corps, n'est
21 pas une question qui doit empêcher un commandant de corps d'accomplir sa
22 mission." Ensuite, vous dites : "Au contraire, à l'inverse, conformément
23 aux principes reconnus du combat armé, ce que l'on attend d'un commandant
24 de corps, dans de telles circonstances, et que simplement la plus grande
25 attention du temps et des ressources nécessaires afin de s'assurer que la
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1 présence de tels éléments n'aura pas d'incidence négative sur
2 l'accomplissement de la mission qui a été confiée au corps."
3 Est-ce que vous pourriez en dire davantage sur ce paragraphe, en quelques
4 mots ?
5 R. A mon avis, la dernière phrase de ce paragraphe 642, est la phrase clé
6 qui explique tout. Un commandant de corps, ne peut pas et n'a pas à
7 s'occuper de quelque chose qui n'a aucune incidence directe sur
8 l'accomplissement de sa mission. Si un problème se pose du genre du
9 problème des étrangers, au fur et à mesure, que ce problème devient de plus
10 en plus grave, et selon la façon dont il peut affecter la manière dont la
11 mission du corps sera exécutée, en l'occurrence, le commandant du corps
12 commence à s'occuper du dit problème et ceci évidemment il s'y intéresse de
13 plus en plus, de sorte que ceci dépend de la mesure dans laquelle les
14 personnes en question posent une menace, constituent une menace pour la
15 mission du corps.
16 Si la menace devient de plus en plus grave, le commandant du corps va
17 devoir faire attention au problème, de plus en plus attention.
18 Q. Je vous remercie, mon Général. Ma question suivante concerne encore un
19 problème évoqué par le Juge, Président de la Chambre, ainsi que par mon
20 confrère, et c'est à savoir : Si le
21 3e Corps avait bien accompli sa mission, est-ce qu'il avait été couronné de
22 succès, ou s'il avait juste survécu et avait évité le désastre de 1993 ?
23 R. Si vous voulez une réponse très brève, je vous dirais alors qu'il a
24 tout juste survécu et a réussi à éviter une catastrophe encore plus grave.
25 Q. Ma dernière question est la suivante : A savoir que quelque chose qui a
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1 assuré qu'une catastrophe ait été évitée, est-ce que le général
2 Hadzihasanovic, à votre avis d'expert, dans votre opinion d'expert, a
3 exercé son commandement de façon responsable, et a-t-il négligé l'un
4 quelconque de ses devoirs en tant que commandant de corps ?
5 R. Connaissant le général Enver Hadzihasanovic, je ne pourrais même pas
6 imaginer une chose pareille. Je ne pourrai même pas imaginer qu'il ait agi
7 de façon irresponsable ou qu'il n'ait pas agi de la façon voulue, avec le
8 sérieux voulu. De même je ne saurais imaginer que le général
9 Hadzihasanovic, étant donné son caractère, ce serait permis d'agir d'une
10 façon qui a été en infraction des Règlements en dépit du fait où malgré le
11 fait, sans tenir compte du fait, qu'il y avait des tâches qu'il devait
12 accomplir, et pour lesquelles il devait respecter tous les Règlements,
13 lorsqu'il les exécutait.
14 Q. Je vous remercie beaucoup mon Général, je n'ai pas d'autres questions.
15 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président. Ceci termine mes questions
16 supplémentaires émanant des questions de la Cour.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.
18 Maître Dixon.
19 M. DIXON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Madame, Messieurs
20 les Juges.
21 Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Dixon :
22 Q. [interprétation] Mon Général, juste une question. Vous avez dit que le
23 poste de commandement avancé du commandement Suprême avait été déplacé à
24 Kakanj. Est-ce que vous savez à quel endroit dans cette ville il a été
25 réinstallé ?
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1 R. Le poste de commandement avancé a été déplacé, et réinstallé, il y
2 avait trois bâtiments, trois immeubles. Il y avait un bâtiment DC, il y
3 avait des locaux, un espace de bureau, et c'est là que le matériel et les
4 fournitures étaient conservés dans la ville de Kakanj et, de l'autre côté
5 de la route, il y avait un bâtiment où se trouvait une station de service,
6 ceci dans le courant de 1993 et l'année 1994, et il y a eu de nombreuses
7 réunions dans ce bâtiment et, par la suite, cela a été dans le motel
8 Sretno. Je ne suis pas sûr des dates exactes, donc il s'agit en
9 l'occurrence, si on regarde le pâté de maisons que cela représente, ou le
10 quartier, cela fait à peu près un cercle de 200 à 300 mètres de rayon.
11 Q. Je vous remercie, mon Général. Juste pour le compte rendu, le motel
12 dont vous venez de parler, est-ce que vous pourriez nous épeler son
13 orthographe de façon à ce qu'on puisse l'enregistrer au compte rendu.
14 R. Le motel c'était le S-r-e-t-n-o. Le motel Sretno.
15 Q. Je vous remercie, mon Général.
16 M. DIXON : [interprétation] Monsieur le Président, Madame et Monsieur les
17 Juges, je n'ai pas d'autres questions.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, votre déposition vient de se terminer.
19 Vous avez passé deux semaines à La Haye afin de répondre aux questions de
20 la Défense et vous avez répondu aux questions également de l'Accusation,
21 ainsi qu'à mes propres questions.
22 Je vous remercie pour l'apport que vous avez apporté à la manifestation de
23 la vérité. Je formule au nom de la Chambre mes meilleurs vœux pour votre
24 retour dans votre pays, et je vais demander à M. l'Huissier de bien vouloir
25 vous raccompagner.
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1 [Le témoin se retire]
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de clôturer, je me dois d'évoquer deux
3 questions. Le problème résultant de procédures en cours concernant
4 l'Article 92 bis, j'ai cru comprendre que la procédure n'était pas tout à
5 fait achevée, qu'il y a des problèmes de traduction et d'après ce qui m'a
6 été rapporté, vous ne serez en possession des déclarations que vendredi
7 prochain. Vendredi prochain, c'est la date à laquelle vous nous
8 transmettrez votre requête. A partir de là, se pose évidemment la question
9 de la position de l'Accusation, et j'ai cru comprendre qu'il n'y avait pas
10 d'obstacles, et avant d'entreprendre l'audition des témoins du général
11 Kubura, il faudra que la Chambre prenne une décision sur le versement dans
12 la procédure de ces déclarations au titre de l'Article 92 bis. S'il n'y a
13 pas d'opposition de l'Accusation, mais elle va nous le dire. Nous pourrions
14 juste avant l'audition du premier témoin du Général Kubura rendre, à ce
15 moment-là, une décision orale car nous n'avons pas manifestement le temps
16 de rendre une décision écrite entre le vendredi et le lundi.
17 Monsieur Mundis, quelle est la position de l'Accusation en l'état ?
18 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. On nous a fourni
19 des exemplaires d'un certain nombre de déclarations de témoins 92 bis. Nous
20 avons dit à la Défense que nous n'avons pas d'objection à ce que ces
21 déclarations 92 bis soient admises pour être versées au dossier et nous ne
22 demandons pas non plus que la Chambre nous autorise à citer ces témoins aux
23 fins d'un contre-interrogatoire.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. La Défense est à même de nous confirmer
25 que vendredi prochain nous aurons tout.
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1 M. BOURGON : Tout à fait, Monsieur le Président. Si nous pouvons passer en
2 session à huis clos pour quelques minutes, s'il vous plaît.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier.
4 M. LE GREFFIER : Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur le Président.
5 [Audience à huis clos partiel]
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24 [Audience publique]
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, l'audience publique. Ils l'ont prévu que nous
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1 attendrons le cours de nos travaux à côté, pas de lundi, tu veux dire, mais
2 de lundi prochain.
3 Maître Dixon, pouvez-vous nous confirmer que tous les témoins seront à la
4 disposition de la Chambre ?
5 M. DIXON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Nous avons déjà
6 remis à notre liste de témoins aux membres de la Chambre et l'Accusation
7 pour la première semaine. Ils vont tous arriver la semaine prochaine, donc
8 ils seront disponibles, à la disposition, et je dois préciser que nous
9 demandons à faire une déclaration liminaire, lundi le 11 avril, après que
10 les questions, qui ont trait à -- ont été définitivement mises au point. Je
11 ne pense pas que ce sera une introduction -- une déclaration très longue,
12 mais elle pourra prendre un petit peu de temps, alors que l'on puisse
13 commencer le premier témoin lundi et probablement continuer le mardi. Je
14 vous remercie, Monsieur le Président.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai tout mon temps parce qu'à 2 heures 15, j'ai une
16 autre audience. Est-ce que vous voulez aborder d'autre point ? Mais il va
17 falloir conclure, Monsieur Bourgon, très vite.
18 M. BOURGON : Rapidement, Monsieur le Président, nous avons oublié de
19 déposer ce document avec le témoin. Je ne sais pas si mon confrère a une
20 objection, puisque le témoin ne l'aura pas signé, c'est la table -- tableau
21 du témoin.
22 M. MUNDIS : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. M. le Greffier, pourrait-on avoir un
24 numéro de cote pour ce document, s'il vous plaît ?
25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Cette
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1 pièce, comme pièce à décharge de la Défense, sous la côte DH2089, et
2 j'imagine que nous avons une version anglaise. Seulement un document, donc
3 DH2089. Merci, Monsieur le Président.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. S'il n'y a plus de questions, je vous invite à
5 revenir à l'audience qui débutera lundi prochain, l'autre lundi, à 14
6 heures 15. Je vous remercie.
7 --- L'audience est levée à 13 heures 49 et reprendra le jeudi 11 avril
8 2005, à 14 heures 15.
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