Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 13 avril 2005

  2   [Audience publique]

  3   --- L'audience est ouverte à 9 heures 55.

  4   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous sommes en audience publique. Monsieur le

  6   Greffier, pouvez-vous appeler le numéro de l'affaire ?

  7   M. LE GREFFIER : Merci, Monsieur le Président. Affaire numéro IT-01-47-T,

  8   le Procureur contre Enver Hadzihasanovic et Amir Kubura.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

 10   Je vais demander à l'Accusation de bien vouloir se présenter.

 11   M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour à toutes

 12   les personnes présentes dans ce prétoire. Pour l'Accusation, Matthias

 13   Neuner et Daryl Mundis, avec Andres Vatter, notre commis à l'audience.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais demander aux avocats présents de bien

 15   vouloir se présenter.

 16   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame et

 17   Monsieur les Juges. Pour le général Enver Hadzihasanovic, Edina Residovic,

 18   conseil; et Stéphane Bourgon, mon co-conseil.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Les autres avocats.

 20   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Pour la Défense de M. Kubura, Rodney

 21   Dixon et Fahrudin Ibrisimovic, et Nermin Mulalic, notre assistant.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : En cette journée du 13 avril 2005, 208e jour

 23   d'audience, je salue toutes les personnes présentes. Je salue les

 24   représentants de l'Accusation, les avocats ainsi que le général

 25   Hadzihasanovic et le général Kubura. Je n'oublie d'associer également dans


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  1   mes salutations toutes les personnes dans cette salle d'audience ainsi que

  2   celles qui sont à l'extérieur de cette salle d'audience.

  3   La Chambre invite les avocats s'ils sont d'accord - pas maintenant, mais

  4   après peut-être la pause et dans les jours suivants - à changer de position

  5   puisque les avocats du général Kubura sont ceux qui posent les questions et

  6   qu'il vaudrait mieux que vous soyez en avant pour avoir le contact avec le

  7   témoin et que nous soyons plus près de vous. Après la pause, cela n'est pas

  8   nécessaire maintenant. Enfin, on pense que cela serait préférable plutôt

  9   que de voir très loin. Voilà.

 10   Ceci étant dit, je vais demander à M. le Greffier de passer en audience à

 11   huis clos.

 12   M. LE GREFFIER : Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur le Président.

 13   [Audience à huis clos partiel]

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 10   [Audience publique]

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors en audience publique, je demande à M.

 12   l'Huissier d'aller chercher le témoin.

 13   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. Je vais d'abord vérifier que vous

 15   entendez bien la traduction de mes propos dans votre langue. Si c'est le

 16   cas, dites je vous comprends.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous comprends.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur, vous avez été cité comme témoin par

 19   les conseils du général Kubura. Avant de vous faire prêter serment, je dois

 20   vous identifier. Pouvez-vous nous donner votre nom, prénom, date de

 21   naissance et lieu de naissance.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Dzemail Ibranovic, fils de Zina

 23   [phon]. Je suis né le 22 octobre 1966.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est votre profession actuelle, si vous avez

 25   une profession ou une activité.


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je travaille à la madrasa de la communauté

  2   islamique de Travnik. Je suis un religieux.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : En 1992 et 1993, à l'époque, aviez-vous une

  4   activité ? Si oui, laquelle ? Si vous étiez dans l'ABiH, pouvez-vous nous

  5   indiquer dans quelle unité étiez-vous affecté ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme tous les autres officiers du culte, je

  7   me suis trouvé au début de la guerre dans le Djuma à Brajici. J'ai rejoint

  8   la 7e Brigade musulmane.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous déjà témoigné devant un Tribunal

 10   international ou un tribunal national sur les faits qui se sont déroulés

 11   dans votre pays en 1992, 1993 ? Ou c'est la première fois que vous

 12   témoignez ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Ceci est la première fois que je témoigne.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Pouvez-vous lire le serment que nous vous

 15   présentons ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 17   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 18   LE TÉMOIN: DZEMAIL IBRANOVIC [Assermenté]

 19   [Le témoin répond par l'interprète]

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous pouvez vous asseoir.

 21   Avant de donner la parole aux avocats qui vont commencer l'interrogatoire,

 22   je vais vous fournir quelques éléments d'information sur la façon dont va

 23   se dérouler cette audience. Vous allez dans un premier temps devoir

 24   répondre à des questions que les avocats du Général Kubura vont vous poser.

 25   Les avocats, que vous avez dus certainement rencontrer avant la tenue de


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  1   cette audience, nous ont indiqué qu'ils auront besoin d'environ une heure

  2   et demie de temps pour vous poser des questions. Peut-être moins, mais

  3   c'est un temps indicatif. A l'issue de cette phase de questions, vous devez

  4   répondre à des questions qui vont vous être posées par les représentants du

  5   Procureur, qui sont situés à votre droite.

  6   Les représentants du Procureur vous poseront également des questions,

  7   dont ce qu'on appelle dans notre procédure, le contre-interrogatoire et ils

  8   auront la même durée de temps que ceux qui vous ont en premier posé des

  9   questions. A l'issue de cette phase, les avocats, qui vous ont posé les

 10   questions en premier, pourront vous poser des questions supplémentaires.

 11   Les trois Juges, qui sont devant vous, peuvent à tout moment vous

 12   poser des questions, mais les Juges préfèrent laisser aux parties le soin

 13   de poser toutes les questions utiles, et nous intervenons en vous posant

 14   des questions qu'afin d'avoir des éclaircissements sur des réponses que

 15   vous avez apportées, ou parce que nous constatons qu'il manque des éléments

 16   importants dans l'intérêt même de la justice dans les réponses que vous

 17   faites aux questions posées.

 18   C'est dans ces conditions que nous pourrions être amener à vous poser des

 19   questions. Je dois également vous informer de deux autres éléments, qui

 20   sont relatifs à notre procédure, à savoir, comme vous venez de prêter

 21   serment, cela exclut tout faux témoignage, mais cela vous le comprenez de

 22   vous-même. Par ailleurs, il y a une disposition qui est assez compliquée,

 23   mais que je dois rappeler aux témoins qui viennent déposer. Si vous estimez

 24   que vous n'avez pas à répondre à une question, parce que le contenu de la

 25   réponse pourrait un jour constituer des éléments qui pourraient être


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  1   utilisés contre vous, à ce moment-là, vous pourrez refuser de répondre.

  2   Mais dans cette hypothèse que nous n'avons nous jusqu'à présent jamais

  3   rencontré, la Chambre peut vous inviter, néanmoins, à répondre en

  4   garantissant au témoin une immunité. 

  5   Nous sommes dans une procédure anglo-saxonne, qui est une procédure

  6   quasiment orale, d'où l'importance des propos que vous allez tenir. Lorsque

  7   vous parlez, vos propos sont enregistrés et sont traduits en anglais. C'est

  8   pour cela que, devant vous, il y a un écran où apparaît la traduction des

  9   propos en anglais de tous ceux qui interviennent dans cette salle

 10   d'audience.

 11   Indépendamment de ce que vous pouvez dire, il se peut que des documents

 12   vous soient présentés, afin que vous reconnaissiez ces documents ou que

 13   vous apportiez des commentaires sur des documents. Si les questions vous

 14   paraissent trop compliquées ou nébuleuses, n'hésitez pas à inviter celui

 15   qui vous pose la question à la reformuler. Par ailleurs, s'il y a une

 16   difficulté au cours de l'audience, n'hésitez pas à nous en faire part, nous

 17   sommes là pour résoudre ce type de difficulté éventuelle.

 18   Nous serons amenés au cours de l'audience, dans environ 1 heure 25 à

 19   faire une pause, afin d'une part de vous permettre de vous reposer car vous

 20   allez vous rendre compte que répondre à des questions sans arrêt, cela peut

 21   être fatigant, et donc il y a en règle générale, une pause de 20 à 30

 22   minutes. Puis à l'issue de cette pause, nous reprendrons nos travaux pour

 23   une nouvelle période d'une heure et demie. Normalement, si tout le monde

 24   respecte le timing qui est prévu, vous n'auriez pas à rester à La Haye

 25   jusqu'à demain, en continuation de l'audience, en espérant que votre


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  1   audition puisse terminer aujourd'hui.

  2   Sans perdre de temps, maintenant, je vais donner la parole à l'avocat

  3   du général Kubura, qui va commencer à vous poser des questions.

  4   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  5   Étant donné l'heure qu'il est, et le fait que nous avons commencé un

  6   peu plus tard avec notre audience, je vais essayer de me baser surtout sur

  7   la période couverte par l'acte d'accusation, mis à part les quelques mots

  8   introductifs. 

  9   Interrogatoire principal par M. Ibrisimovic : 

 10   Q.  [interprétation] Monsieur Ibranovic, à la demande du Président de la

 11   Chambre, vous avez déjà répondu qu'en 1992, vous étiez devenu membre de la

 12   7e Brigade musulmane; c'était pendant quelle période, s'il vous plaît ?

 13   R.  Au fur et à mesure que la situation évoluait, on n'a commencé à créer

 14   ces brigades, nous n'étions pas prêts à une guerre, et en tant qu'officier

 15   du culte également, je ne pensais pas du tout que la situation allait être

 16   évoluée ainsi. Ce qui avait commencé au tout début, c'était les gardes

 17   villageoises, et j'avais rejoint, dès le début, dans le cadre du Djuma,

 18   communauté religieuse.

 19   Q.  À quel moment vous devenez exactement membre de la 7e Brigade

 20   musulmane ?

 21   R.  Au moment où la 7e Brigade musulmane s'est créée, c'est un moment où je

 22   me trouvais dans la région de Travnik.

 23   Q.  Était-ce au mois de novembre 1992 ?

 24   R.  Oui, en 1992, je pense qu'il s'agissait là de la deuxième moitié de ce

 25   mois. Il faisait froid. C'était un temps où nous avions des lignes de front


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  1   que nous devions tenir. C'était après la chute de Jajce, c'était une

  2   période très mouvementée.

  3   Q.  Est-ce que vous étiez devenu membre du 1er Bataillon de la 7e Brigade

  4   musulmane ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Est-ce que dans ce 1er Bataillon, vous aviez une place définie par

  7   l'organigramme ?

  8   R.  L'adjoint du commandant chargé des questions de moralité -- pour le

  9   moral. J'étais au 1er Bataillon.

 10   Q.  Vous souvenez-vous à quel moment vous étiez devenu l'adjoint du

 11   commandant, chargé des questions de moral et des questions religieuses ?

 12   R.  Je pense que c'était au mois de mars.

 13   Q.  Pour le compte rendu d'audience, pourrez-vous nous dire en quelle

 14   année ?

 15   R.  C'était au mois de mars de 1993.

 16   Q.  Votre tâche, votre poste, vous étiez l'adjoint du commandant chargé des

 17   questions de moral et des questions religieuses. Est-ce que vous pourriez

 18   nous dire quelles étaient vos tâches dans ce cadre-là ?

 19   R.  Je pense qu'il est déjà connu que cette unité était liée aux Règles de

 20   l'islam et notre but était de familiariser tous les combattants avec les

 21   Règles de base, à savoir, la propreté physique, également la propreté

 22   spirituelle. En fait, on ne demandait pas seulement aux combattants de

 23   savoir faire un rythme, mais aussi comment se protéger de la jalousie, de

 24   l'envie, de la haine, parce que le temps était réellement difficile. Mon

 25   travail comportait des conférences qui parlaient de la religion et, bien


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  1   sûr, il fallait que je passe mon temps parmi les soldats, ce qui était très

  2   important. Parfois, le fait même qu'apparaisse un homme qui fait un tel

  3   travail était d'une grande importance pour le soldat même sans que vous

  4   disiez un mot.

  5   Q.  Monsieur Ibranovic, vous venez d'évoquer, maintenant, des conférences.

  6   Tout ce que vous venez d'évoquer, maintenant, nous en avons déjà parlé

  7   entre nous. Vous étiez un officier du culte. Quelle a été votre formation ?

  8   R.  Juste avant la guerre, j'ai eu mon diplôme à la faculté des Sciences

  9   islamiques à Sarajevo. A l'époque, cela s'appelait la Faculté théologique

 10   islamique. Auparavant, j'avais commencé avec un autre travail qui était

 11   aussi du type religieux et c'était l'apprentissage du coran par cœur.

 12   Après, j'ai obtenu mon diplôme à l'université.

 13   Q.  Actuellement, vous avez obtenu quel type de formation ?

 14   R.  Après la guerre, j'ai fait une maîtrise et, actuellement, je suis en

 15   train de préparer un doctorat. Je vais écrire sur une thèse qui existe dans

 16   l'islam qui concerne le mouvement des Sufi.

 17   Je viens de la Bosnie centrale où cette tradition est profondément ancrée,

 18   cela s'appelle des Nex Appendi [phon], ce sont des communautés, des

 19   fratries, et c'est quelque chose qui correspond à ma vision de la

 20   spiritualité.

 21   Q.  Je viens de poser cette question parce que je pense que vous êtes tout

 22   à fait à même, que vous êtes qualifié de parler devant la Chambre d'un

 23   manuel rédigé pour un commettant musulman. Je voudrais que vous fassiez des

 24   commentaires là-dessus. Je vais vous les montrer et je voulais savoir tout

 25   l'œuvre; est-ce que vous avez vu ce livret avant que je ne vous le montre ?


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  1   R.  Oui. J'ai pu le voir pendant la guerre comme j'en ai pu voir tant

  2   d'autres. Pendant la guerre, on ne donnait pas d'avis professionnels sur

  3   telle ou telle chose. Tout le monde pouvait écrire ce qu'il voulait. Il

  4   s'agissait de quelque chose qui n'était pas obligatoire de lire. Je puis

  5   vous dire également, d'un point de vue purement scientifique, puisque je

  6   fais de la recherche actuellement.

  7   Si je devais faire un compte rendu de ce livre, je pourrais y trouver

  8   beaucoup de lacunes. Pour que quelque chose puisse être considérée comme

  9   étant un travail de recherches tout à fait sérieux, comme étant une étude

 10   scientifique, il faut d'abord jeter les base et il faut qu'il y ait une

 11   bibliographie et ici, cela n'existe pas. N'importe qui pouvait écrire ce

 12   qui lui plaisait et donner son point de vue, lequel point de vue, n'oblige,

 13   bien sûr, personne.

 14   Q.  En tant que religieux, ou qu'adjoint du commandant pour les questions

 15   de morale et des questions religieuses, est-ce que vous avez tenu des

 16   conférences qui étaient basées sur un tel livret, sur ce livret-là ?

 17   R.  Quelqu'un qui a un diplôme de la Faculté de théologie va se baser, dans

 18   ces conférences, sur des livres et non pas sur de telles brochures non

 19   scientifiques. Si j'avais agi de la sorte, cela aurait seulement démontré

 20   les lacunes de ses connaissances et une mauvaise éducation.

 21   Q.  Ce manuel ou cette brochure, était-ce de la lecture obligatoire pour un

 22   membre de la 7e Brigade musulmane ?

 23   R.  Bien sûr que non.

 24   Q.  Monsieur Ibranovic, je souhaite, maintenant, aborder un autre sujet.

 25   Etant donné que l'année 1993, vous l'avez passée à Travnik.


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  1   Ma première question est la suivante : avez-vous entendu parler du village

  2   de Miletici ?

  3   R.  Le village de Miletici se trouve à une quelque quinzaine de kilomètres

  4   du Djuma, de ma communauté religieuse, ma communauté religieuse dans

  5   laquelle je travaillais. A l'époque, je ne connaissais pas du tout de ce

  6   hameau. Vous savez, ce n'était pas nécessaire, je n'avais aucun lien avec

  7   ce hameau. Ce n'est qu'après tous ces événements que l'information m'était

  8   parvenue et j'ai appris qu'il s'y était passé, ce qui s'y était passé.

  9   Q.  Quand les événements sont arrivés à Miletici - et je vais être

 10   tendancieux là - je dirais que c'était le 24 avril 1993. Où étiez-vous à ce

 11   moment-là ?

 12   R.  J'étais dans mon Djuma à Alihodza.

 13   Q.  Quand vous êtes arrivé dans le village d'Alihodza, est-ce que

 14   quelqu'un, qui était membre de la 7e Brigade musulmane, était là, pas loin

 15   de votre maison ?

 16   R.  Avant d'y arriver, j'ai passé une période qui était relativement

 17   longue, à peu près un mois, peut-être un peu plus, j'étais soit à Bijelo

 18   Buca, soit sur la première ligne de front, soit en village même et à

 19   Travnik. Je devais partir pour une période de repos et les événements qui

 20   avaient commencé avec Ahmici sont les événements dont j'avais appris

 21   pendant mon séjour à Travnik. Après avoir parlé avec mon épouse au

 22   téléphone, elle m'avait appris qu'autour de mon village, la situation

 23   commençait à devenir de plus en plus difficile. Ceci m'avait incité à

 24   rentrer. Je suis rentré avec quelques jeunes hommes qui étaient originaires

 25   de ces villages-là.


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  1   Q.  Vous avez dit que vous êtes rentré. Pouvez-vous nous dire où et où sont

  2   rentrés ces jeunes hommes ?

  3   R.  Je suis arrivé à Alihodza et quelque chose que vous pourriez voir sur

  4   une carte également c'est qu'à côté d'Alihodza, vous avez un autre village

  5   qui s'appelle Kljaci. Dans ce village-là, il y avait une vingtaine de

  6   membres de notre bataillon. Je parle ici d'une période qui se situe après

  7   les événements d'Ahmici et avant les événements de Miletici.

  8   Q.  Est-ce que ces membres de la 7e Brigade, qui étaient dans votre

  9   village, étaient armés ?

 10   R.  C'était une Règle que de laisser les armes, soit sur la ligne de front,

 11   ou au siège du commandement. C'était en fonction des activités qu'il

 12   fallait faire.

 13   Q.  Je pense qu'on a déjà consigné cela au compte rendu d'audience. Vous

 14   nous avez dit que le village d'Alihodza et le village de Kljaci sont situés

 15   côte à côte. Pourriez-vous nous dire quelle est la distance entre ces deux

 16   villages, et à quelle distance se trouvent ces deux villages par rapport à

 17   Mehurici.

 18   R.  Je pense quelques sept ou huit kilomètres.

 19   Q.  Est-ce que, dans votre village ou village de Kljaci, ou dans la vallée

 20   Biljanska, il y avait une autre unité, qui y était organisée ?

 21   R.  Non. Ce n'était pas quelque chose d'organiser. C'étaient des jeunes

 22   gens qui venaient de ce village qui arrivaient à Travnik, par la suite, on

 23   les mobilisait.

 24   Q.  Ils étaient de retour dans leur village ?

 25   R.  Oui.


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  1   Q.  C'était au moment où ils étaient en repos ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Pourriez-vous nous dire pendant combien de temps avez-vous resté dans

  4   votre village d'Alihodza et, si vous savez les autres militaires, combien

  5   de temps ils restent dans les villages environnants ?

  6   R.  Pendant tout ce temps jusqu'à ce que le conflit n'éclate, je me

  7   trouvais dans mon Djuma, dans ma communauté religieuse, ainsi que ces

  8   jeunes hommes. Les gens n'étaient pas habitués à faire la guerre. Ils

  9   avaient peur. Par ailleurs, ma famille se trouvait là-bas également et,

 10   tout simplement, j'ai pris part avec eux dans la construction d'une ligne

 11   de front en amont du village d'Alihodza car, en amont de ce village-là, le

 12   HVO était déjà en train d'établir ses lignes de front.

 13   Q.  Pouvez-vous nous situer dans le temps pour parler de cette période. Si

 14   j'ai bien compris vous parliez de la mi-avril et pour rester jusqu'à quand

 15   dans le secteur ?

 16   R.  Pendant tout le temps jusqu'à réception d'un ordre portant départ pur

 17   le Kiseljak. Cela signifiait un terme mis aux opérations qui se déroulaient

 18   dans ce secteur. Je pourrais vous situer pour dire, dans le temps pour

 19   dire, que c'était vers la mi-juin.

 20   Q.  Quand est-ce que vous revenez à Travnik pour une première fois ?

 21   R.  Bien. Je suis de retour lorsque j'ai reçu la nouvelle. J'ai été pris de

 22   cours en fait par surprise devant -- de chez moi lorsque je devais me

 23   rendre à Kiseljak. Cela m'a fait plaisir en quelque sorte s'il s'agissait

 24   de mon pays natal. Une fois venu à Travnik, j'ai pu apprendre comment se

 25   présentait le déroulement des événements.


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  1   Q.  Pendant cette période-là, pendant quelle période là vous dites que vous

  2   étiez avec d'autres militaires, est-ce que le 24 avril vous vous êtes rendu

  3   dans le village de Miletici et est-ce que vous vous êtes rendu dans ce

  4   village du tout au cours de cette période ?

  5   R.  Qui parle d'Alihodza parle d'un hameau où il n'y a plus d'une quinzaine

  6   de foyers ou une vingtaine, disons. Au début, étant donné que nous étions

  7   si peu nombreux, nous devions tenir la ligne de front pendant huit heures

  8   d'affilé. Par conséquent, il n'y avait guère besoin de parler, de circuler

  9   ou de se mouvoir ou quoi que ce soit, à regarder la carte on voit très

 10   aisément que cette route-là qui mène depuis Alihodza vers la ligne de

 11   front, en amont vers la montagne, se trouvait sous le contrôle des snipers,

 12   et les gens se faisaient tuer très facilement. Par conséquent, on ne

 13   pouvait circuler que la nuit, ou peut-être le jour lorsqu'il y avait du

 14   brouillard.

 15   Q.  Mais, dites-moi, vous parlez de vous-même, mais pour ce qui est des

 16   autres militaires qui étaient dans le village de Klajci, est-ce que vous

 17   savez qu'ils se seraient peut-être aventurer, d'aller dans le village de

 18   Miletici, en cette date-là du 24 avril ?

 19   R.  Nous étions littéralement clouer au seuil de notre maison, chacun. Il a

 20   fallu défendre son propre foyer.Il serait illogique - chose que ma femme

 21   m'a demandé également par ce coup de téléphone - illogique de rester là

 22   quelque part, alors qu'on risquait de voir les troupes du HVO pénétrer dans

 23   notre village et on tirait des gens dessus dans notre village.

 24   Q.  Ce conflit en escalade au début juin 1993, vous surprend-elle dans

 25   votre village même ?


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  1   L'INTERPRÈTE : Réponse affirmative par la tête du témoin.

  2   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] 

  3   Q.  Est-ce qu'à un moment donné, vous avez appris que les membres de la 7e

  4   Brigade musulmane, en début juin 1993, aurait pris une part active dans de

  5   telles actions et opérations ?

  6   R.  Etant donné que j'étais pratiquement lié à cette ligne de front, il me

  7   serait difficile maintenant et cela prendra beaucoup trop de temps pour

  8   descendre dans le détail, pour le raconter. J'ai trouvé, dans mon Djuma, ma

  9   communauté des gens qu'on m'a présenté comme étant les organes d'autorité,

 10   mais pour ce qui est de la guerre, on ne l'a pas vraiment ressenti pour de

 11   bon, jusqu'en ce moment-là. Or, toute l'assistance, qui aurait été la

 12   mienne sur place, consistait à aider, à creuser les tranchées, à établir la

 13   ligne.

 14   Q.  Je crois que nous ne sommes très bien compris. Ma question était la

 15   suivante : est-ce qu'à un moment donné après cela, vous avez pu apprendre

 16   où se trouvait le 1er Bataillon et comment opérait-il, au début juin ?

 17   R.  Avec la fin des opérations, étant donné qu'il n'y avait plus de

 18   communications, les communications étaient coupées, ils ne pouvaient pas

 19   venir à Travnik. Moi non plus, je ne pouvais pas y aller. J'ai pu

 20   apprendre, par la suite, comment le tout se déroulait lorsque seulement

 21   nous avons dû être au départ pour Kiseljak.

 22   Q. Pouvez-vous peut-être nous citer les noms des personnes, avec qui vous

 23   vous êtes entretenu, qui vous ont relaté cela ?

 24   R.  Un de nos officiers, chef de compagnie, Suad Jusovic, nommément m'en a

 25   parlé.


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  1   Q.  C'est Suad Jusovic qui vous a dit où opérer dans des activités de

  2   combat, le 1er Bataillon ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Que vous a-t-il dit ?

  5   R.  Il s'agit d'un secteur plutôt limité de Travnik. Il s'agissait de

  6   l'accès de Travnik même, nommé Hajdareve Njive, le secteur de Sibicara.

  7   Ensuite, évidemment les opérations sont déroulées en direction de Mjavin

  8   [phon] Jajce.

  9   Q.  Où se trouve très exactement Hajdareve Njive ?

 10   R.  À l'entrée même de Travnik. Lorsque vous venez de Sarajevo, c'est à

 11   droit que vous observez un versant, une pente où le HVO avait établi ses

 12   lignes.

 13   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Juste pour le compte  rendu d'audience,

 14   ma question n'a pas été consignée dans le compte rendu d'audience. Ma

 15   question était très facile. Je voulais savoir où se trouvait Hajdareve

 16   Njive et voilà que nous entendons le témoin y répondre.

 17   Q.  Vous avez évoqué le nom d'une localité, Sibicara, c'est là aussi avez-

 18   vous dit que des activités de combat ont été menées. Où se trouve Sibicara,

 19   de quel secteur de la municipalité du territoire municipalité de Travnik il

 20   s'agit ?

 21   R.  Il s'agit d'un emplacement tout à fait contraire par rapport à

 22   Hajdareve Njive, donc à l'entrée de Travnik, Hajdareve Njive se trouve à

 23   votre droite, Sibicara serait à votre gauche. C'est un secteur qui tient ce

 24   nom depuis la période austro-hongroise, il y avait une usine où on

 25   fabriquait des allumettes. Sibicara, il s'agit, en fait, géographiquement


Page 18368

  1   parlant, de deux versants, très près l'un de l'autre.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites que les localités mentionnées ne sont pas

  3   orthographiées par les sténotypistes. Pouvez-vous demander au témoin soit

  4   de répéter le nom de la localité ou d'épeler le nom de la localité.

  5   M. IBRISIMOVIC : [interprétation]

  6   Q.  Monsieur Ibranovic, vous venez d'entendre la question de Monsieur le

  7   Président. On vous demande d'épeler de dire comment se présente la

  8   désignation de cette localité, Sibicara ?

  9   R.  S-I-B-I-C-A-R-A.

 10   Q.  Lorsque vous dites la façon dont a désigné ces localités, il s'agit

 11   enfin de synonyme d'une usine où on fabriquait, n'est-ce pas, des

 12   allumettes ?

 13   Votre réponse n'a pas été consignée dans le compte rendu d'audience.

 14   Lorsqu'on parle de la localisation même de Sibicara, vous avez parlé de

 15   cette usine d'allumettes de Travnik ?

 16   R.  Oui, puis dans ce secteur là, pour parler proprement du secteur, non

 17   loin de cette usine, il s'agit là de parler de la ligne tenue par les

 18   troupes du HVO.

 19   Q.  Monsieur Ibranovic, puis-je vous demander comme suit : à Travnik ou

 20   dans ses alentours, vous est-il arrivé de rencontrer des étrangers, dits

 21   par les uns comme étant les Moudjahiddines, par d'autres combattants, de

 22   pays Afro-asiatique. Avez-vous eu l'occasion de les rencontrer vous ?

 23   R.  Oui, j'en voyais.

 24   Q.  Vous-même, avez-vous eu de contact avec de tels étrangers ?

 25   R.  Pour les gens du cru, leur venue a été plutôt considérée comme chose


Page 18369

  1   intéressante. Pourtant, très bientôt, on s'est avéré que la façon de voir

  2   certaines questions qui étaient la nôtre, respectivement diverger. Un

  3   homme, qui est doté d'une formation en matière de théologie, ne saurait

  4   accepter les raisons avancées par un manœuvre, peu importe son pays

  5   d'origine.

  6   Cela dit, je me permets de parler de certaines appréhensions et

  7   d'interprétations de l'islam, qui n'ont pas été sans causer de graves

  8   problèmes dans nos Djuma, nos communautés. Etant donné que, moi aussi, en

  9   ma qualité d'officier du culte, j'ai travaillé dans l'un de ces Djuma, or,

 10   je ne pouvais pas, en tant que tel, en cette qualité-là, admettre de tel

 11   phénomène. Par conséquent, voilà que nous nous sommes vite séparés au

 12   niveau de l'appréhension de toutes ces questions. Par conséquent, nos

 13   contacts étaient tout à fait rares et lâches.

 14   Q.  Lorsque vous parlez de contact, s'agit-il de parler de ce qui vous

 15   touche de très près ou s'agit-il de parler de ce qu'il vous a fallu faire

 16   en tant que commandant adjoint chargé du moral des questions religieuses ?

 17   R.  Je parle plutôt de choses qui tiennent de la religion. Par exemple,

 18   pour tout ce qui est ablution, et lorsque, par exemple, avant une prière,

 19   et si je dis qu'il faudra s'occuper du cou également, alors que l'autre me

 20   dit que ceci est interdit. Alors que je ne suis pas sans savoir quels

 21   seraient ces arguments à l'appui, de toute évidence, il est normal qu'on ne

 22   trouverait pas si aisément un langage commun. Je vous dis cela à titre

 23   d'exemple, parmi tant d'autres, sans parler encore du fait que dans

 24   l'appréhension de l'islam, proprement dite, tous ceux qui traitent de

 25   l'islam savent que différentes sont les idées là-dessus, c'est-à-dire,


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  1   peut-on parler de gens, tels Sufi, dont le caractère serait moins

  2   rigoureux ? Or, j'ai déjà évoqué tout à l'heure le fait que je viens de ce

  3   terrain là et il y en a d'autres qui appartiennent à une aile plutôt à

  4   l'extrême qui, d'ordinaire, viennent d'Orient. Par conséquent, ces deux

  5   façons d'appréhender et de voir l'islam jurent d'être mises ensemble.

  6   Dans ce sens, dans cet ordre d'idées, si Dieu le veut, j'ai voulu notamment

  7   travailler pour préparer ce doctorat qui traitera de cette lignée de Sufi.

  8   Q.  Monsieur Ibranovic, peut-on dire que vous étiez fréquemment ou en

  9   permanence en contact avec les soldats, les troupes de la 7e Brigade

 10   musulmane ?

 11   R.  Autant que les circonstances me l'ont permis parce que tout comme la

 12   majeure partie de nos combattants, je devais être un peu partout, c'est-à-

 13   dire, j'avais ma famille à moi aussi, comme d'autres combattants, mais

 14   aussi j'avais mon Djuma également. Il y avait mes combattants à voir, donc,

 15   je ne sais pas si j'ai pu y arriver partout mais c'était le temps où cela

 16   s'avérait nécessaire.

 17   Q.  Avez-vous su que de tels étrangers combattants, d'origine étrangère, se

 18   relayaient à Mehurici ?

 19   R.  J'ai entendu dire qu'ils rodaient par là. Ils se trouvaient dans ce

 20   secteur, donc, c'était des gens en mouvement permanent. Ils n'étaient pas

 21   pour ainsi dire stationnés dans un secteur, liés à un endroit, tels des

 22   gens qui auraient des difficultés pour se faire mettre sous contrôle d'un

 23   système établi.

 24   Q.  Pour parler du 1er Bataillon de la 7e Brigade musulmane, a-t-il eu quoi

 25   que ce soit de common avec ce camp de Mehurici ?


Page 18371

  1   R.  Non. Nous avions notre commandement à nous. Par conséquent, tout ce

  2   dont nous avions besoin, pour régler nos problèmes, nous avons dû le faire

  3   par le biais de notre commandement.

  4   Q.  Ma question est pour le bien du compte rendu d'audience, étant donné

  5   que la question n'a pas été consignée, était la

  6   suivante : votre 1er Bataillon est bataillon de la 7e Brigade musulmane; a-

  7   t-il eu quoi que ce soit de commun avec le camp de Mehurici ? Mais, pour ce

  8   qui est de votre réponse, elle y est consignée, merci.

  9   Monsieur Ibranovic, passons à un autre sujet. Je crois que nous l'avons

 10   épuisé celui-ci.

 11   En novembre 1993, étiez-vous dans la ville de Vares ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Pouvez-vous dire à l'intention de la Chambre de première instance

 14   quelles étaient les raisons pour lesquelles vous y êtes allé et comment

 15   vous y êtes allé ?

 16   R. Après le massacre perpétré par le HVO à Stupni Do, nous avons reçu

 17   l'ordre de partir en cette direction-là. Une brigade entière y a été

 18   dépêchée et nous, nous avançons depuis Breza. Nous avons pris notre

 19   campement dans le village de Strijezevo. Mon bataillon, le 1er Bataillon

 20   avançait le long de la vallée. Il n'y avait pas de combat du fait que le

 21   HVO s'était retiré. Nous avons pu y entrer sans combattre, entrer dans la

 22   ville même.

 23   Q.  Vous-même, personnellement, étiez-vous, êtes-vous allé à Vares ?

 24   R.  Oui.

 25  Q.  Combien de soldats du 1er Bataillon y a-t-il eus qui sont entrés dans la


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  1   ville de Veres ou sont-il entrés du tout dans la ville de Vares, ces

  2   soldats du 1er Bataillon ?

  3   R.  Nous étions aux abords, à l'entrée de la ville qu'on appelait An ou

  4   Majdan, je ne me souviens plus. Quelques-uns d'entre nous, membres du

  5   commandement du 1er Bataillon également, nous étions là pour y entrer. Bien

  6   entendu, ce qui m'intéressait c'était la mosquée parce que de la partie

  7   basse du bazar de la ville, je me suis rendu à pieds vers le haut de la

  8   ville. Pour parler des soldats, il y avait peut-être une cinquantaine de

  9   soldats.

 10   Q.  Comment se présentait l'aspect de la ville de Vares à votre entrée dans

 11   la ville ?

 12   R.  La ville donnait l'impression d'une ville abandonnée. J'y ai trouvé

 13   quelques représentants de la police du pays même, local, donc police

 14   locale. Dans la partie haute de la ville, deux maisons étaient en feu, de

 15   construction récente je crois. Pour parler des civils, je n'en ai pas

 16   vraiment vus. Je n'ai vu personne.

 17   Q.  Ce groupe de soldats et, vous-même - vous avez dit une cinquantaine de

 18   soldats - si j'ai bien compris votre réponse, d'après le compte rendu

 19   d'audience, pendant combien de temps êtes-vous restés dans la ville de

 20   Vares ?

 21   R.  Pendant très de temps, je dirais. Avant la tombée de la nuit, avant

 22   même le crépuscule, nous sommes sortis de la ville pour regagner

 23   Strijezevo.

 24   Q.  Qu'en est-il du restant des troupes du 1er Bataillon, pourquoi ne sont-

 25   ils pas entrés dans la ville de Vares ?


Page 18373

  1   R.  La police militaire a été mise en place en vue d'une régularisation des

  2   entrées, sorties et passages. Probablement, moi non plus, je n'aurais pas

  3   été autorisé à y entrer si je n'étais pas membre du commandement.

  4   Q.  Ce point de contrôle dressé par la police, il y était là encore au

  5   moment où vous êtes sortis de la ville de Vares ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Est-ce qu'à ce point de contrôle les policiers effectuaient un contrôle

  8   à l'intention des troupes de soldats ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Avez-vous pu observer ou remarquer que ces soldats, qui y sont entrés ?

 11   L'INTERPRÈTE : Nous n'avons pas capté la fin de la question de Me

 12   Ibrisimovic et l'interprète français demande à ce que

 13   M. Ibrisimovic parle plus dans le micro.

 14   M. IBRISIMOVIC : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur le Témoin, lorsque vous êtes entré dans la ville de Vares,

 16   est-ce que vous avez pu voir que des soldats, des troupes de la 7e Brigade

 17   musulmane auraient pillé ou volé des biens et propriétés de la ville ?

 18   R.  Que pouvaient-ils faire, un soldat, pour mettre quoi que ce soit dans

 19   son bardas, chose délicate ? Il est vrai que chez nous, en Bosnie centrale,

 20   on ressentait la famille déjà. Mais chose que j'ai pu voir, moi-même, c'est

 21   le fait que la ville de Vares abondait en vivres, en aliments surtout.

 22   Juste pour une seconde peut-être, ai-je pu avoir le sentiment que c'est de

 23   la nourriture que nous avions beaucoup plus besoin que d'une arme ?

 24   Si jamais quelqu'un ait pu être porter sur quoi que ce soit à

 25   prendre, c'est juste quelque chose qui pourrait tenir dans un bardas d'un


Page 18374

  1   soldat, dans sa sacoche à vous d'en juger pour dire ce qu'on pouvait

  2   prendre.

  3   Q.  Vous évoquez les vivres, la "nourriture"; dites-nous à quoi vous

  4   référez vous ?

  5   R.  Je parle de vivres. Je parle farine, d'huile, sucre, et autres

  6   victuailles de base. Tel un souvenir, ai-je pris un décapsuleur et que j'ai

  7   perdu entre-temps pour ouvrir des bouteilles.

  8   Q.  A la sortie de la ville de Vares, peut-on dire que la police militaire

  9   fouillait des gens pour voir si quelqu'un aurait été porté à prendre ceci

 10   ou cela, ou accaparé tel ou tel bien de la ville de Vares ?

 11   R.  Oui. C'était normal parce que, dès le début du conflit qui nous

 12   opposait au HVO, la Bosnie se trouvait fermer et dans certains secteurs,

 13   dans certains territoires, on ressentait déjà le fait qu'il y avait une

 14   carence de vivres, et cetera. Il y avait beaucoup de contrebande et on

 15   pouvait s'attendre à tout normalement.

 16   Q.  La police militaire empêchait-elle de tels phénomènes et

 17   manifestations ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Merci.

 20   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous n'avons plus

 21   de questions à poser dans le cadre de l'interrogatoire principal de ce

 22   témoin.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Est-ce que les autres avocats veulent

 24   intervenir ?

 25   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Nous avons


Page 18375

  1   quelques questions à poser à M. Ibranovic. Ces questions portent

  2   essentiellement sur des points d'éclaircissement concernant des réponses

  3   données à mon éminent confrère.

  4   Pourrait-on présenter au témoin, je vous prie, la pièce à conviction DH52.

  5   Il s'agit d'une carte. Ceci aidera la Chambre à mieux comprendre où se

  6   situent les différents endroits mentionnés, donc DH52 et pas 852, comme

  7   cela apparaît au compte rendu d'audience.

  8   J'ai la carte sous les yeux. D'autres témoins l'ont annotée et je ne

  9   souhaiterais pas que le témoin fasse des commentaires à ce sujet, mais

 10   peut-être pourrait-il indiquer différents lieux sur cette carte. Pourrait-

 11   on placer cette carte sur le rétroprojecteur.

 12   Contre-interrogatoire par Mme Residovic : 

 13   Q.  [interprétation] Monsieur Ibranovic, tandis qu'on place cette carte sur

 14   le rétroprojecteur, je souhaiterais vous dire que les questions que je vais

 15   vous poser seront peut-être quelque peu différentes de celles qui vous ont

 16   été données par mon éminent confrère. Je suis autorisée à vous poser des

 17   questions directrices. Vous pouvez y répondre par un simple oui ou non. Si

 18   vous souhaitez ajouter quoi que ce soit, bien entendu, vous pouvez le

 19   faire.

 20   En réponse à une question qui vous a été posée par mon confrère, vous avez

 21   déclaré que quelque temps après les événements d'Ahmici le 16 avril, vous

 22   et votre groupe de combattants, membres du 1er Bataillon, et originaires du

 23   village d'Alihodza, étiez arrivés au village d'Alihodza.

 24   Pourriez-vous, s'il vous plaît, indiquer, à l'aide du pointeur qui vous est

 25   remis, sur la carte l'endroit où se trouvent les villages d'Alihodza et de


Page 18376

  1   Klajci, villages que vous avez mentionnés lorsque vous avez parlé de votre

  2   présence, à l'époque, dans ces villages.

  3   R.  Ici, on peut voir le village de Klajci et, de l'autre côté sur la

  4   carte, on peut lire "Brajici", mais ceci concerne trois hameaux. L'un

  5   d'entre eux est indiqué ici, "Karahodze"; au milieu, nous avons "Alihodza"

  6   et au-dessus, "Zolote". Il s'agit de trois anciennes tribus, si l'on peut

  7   s'exprimer ainsi, qui vivent dans ces endroits depuis des siècles. Cet

  8   endroit est connu sous le nom d'Alihodza parce qu'une ancienne famille

  9   bosniaque Alihodza y habitait.

 10   Lorsque les Autrichiens sont arrivés ici, ces trois hameaux ont été appelés

 11   Brajici.

 12   Q.  Si je vous ai bien compris, vous avez déclaré que vous et vos co-

 13   combattants étaient arrivés dans ce village ou dans les environs, et que

 14   vous vous y trouviez le 24 avril lorsque les événements de Miletici ont eu

 15   lieu; est-ce exact ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Pourriez-vous nous indiquer sur la carte où se trouve Miletici par

 18   rapport à votre village ?

 19   R.  [Le témoin s'exécute]

 20   Q.  C'est là que cela se trouve. Monsieur Ibranovic, si je vous ai bien

 21   compris, vous avez déclaré que, même si vous travaillez dans votre

 22   communauté à Alihodza avant la guerre, vous n'étiez jamais allé au village

 23   de Miletici et vous n'en connaissiez pas l'existence; est-ce exact ?

 24   R.  Oui, c'est exact.

 25   Q.  Est-il également exact de dire que, dans votre village, dans le village


Page 18377

  1   d'Alihodza, non loin de Klajci, vous étiez là-bas au moment des combats

  2   début juin 1993 ?

  3   R.  Oui.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Un instant, le transcript ne reprend pas les noms de

  5   localité. Page 23, ligne 1, "from Klaka --"

  6   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Oui. J'ai demandé s'il serait exact de

  7   dire ou plutôt si j'avais bien compris le témoin.

  8   Q.  Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez dit que vous étiez dans le

  9   village d'Alihodza, dans les environs du village d'Alihodza ? Est-ce que

 10   vous étiez dans ce secteur tout le temps, dans le courant des activités de

 11   combat dans la vallée de la Bila, début juin ? Est-ce que je vous ai bien

 12   compris ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Comme vous nous avez expliqué où se trouvent Hajdareve Njive et

 15   Sibicara, pourriez-vous indiquer sur la carte où se trouvent, exactement,

 16   Hajdareve Njive et Sibicara ?

 17   R.  A l'entrée même de Travnik, on trouve Dolac. C'est indiqué en rouge

 18   ici. A droite lorsqu'on entre à Travnik, il y a une colline, une pente qui

 19   s'appelle Hajdareve Njive. Le HVO avait ses lignes à cet endroit. A gauche,

 20   en contrebas, se trouve une petite colline, une petite pente. Le HVO avait

 21   ses lignes à cet endroit également. En dessous, nous avons Sibicara. Les

 22   gens appellent toujours cet endroit, Sibicara, aujourd'hui encore.

 23   Q.  Monsieur Ibranovic, est-ce là la position tenue par le

 24   1er Bataillon de la 7e Brigade musulmane, comme on vous l'a expliqué par la

 25   suite, le chef de la compagnie, M. Jusovic ?


Page 18378

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Je vous remercie. Maintenant, je comprends bien votre position, et

  3   celle de certains membres du 1er Bataillon.

  4   J'ai quelques questions à vous poser au sujet de votre fonction de

  5   commandant adjoint chargé du moral et des questions religieuses. Etes-vous

  6   d'accord avec moi, Monsieur Ibranovic, pour dire que l'ABiH avait des

  7   Règles très claires en ce qui concerne la liberté de culte de ses membres ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Bien entendu, cela concernait les catholiques, les orthodoxes, les

 10   juifs, les musulmans, en tant que religieux instruit. Pouvez-vous confirmer

 11   que l'islam en Bosnie-Herzégovine était une religion de tolérance en

 12   Bosnie-Herzégovine, depuis des siècles, une religion qui prônait l'harmonie

 13   entre les personnes de différents cultes et de différentes confessions

 14   religieuses dans la région ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Monsieur Ibranovic, pouvez-vous également confirmer le fait que les

 17   gens ordinaires, les personnes qui n'étaient pas pratiquantes et des

 18   personnes pratiquantes également, ont été surprises par le sort cruel

 19   réservé aux édifices religieux ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Dans le cadre de vos fonctions et en tant que simple citoyen, avez-vous

 22   jamais reçu des ordres stricts en vertu desquels, vos soldats et la

 23   population, en général, ne devaient pas se livrer à des représailles, ne

 24   devaient pas réserver aux autres édifices religieux non islamiques, le même

 25   sort que ce qui avait été réservé aux édifices islamiques dans la région ?


Page 18379

  1   R.  Les préceptes de l'islam sont très clairs à ce sujet. Il y a 1 400 ans,

  2   il a été dit clairement que les femmes et les enfants et les personnes, qui

  3   ne pouvaient pas se défendre, devaient être épargnés. C'est Mustafa Ahmed

  4   qui l'a dit. En ce qui concerne la tolérance, dans ma région, elle a été

  5   très importante. En tant que membre du courant de pensée Sufi, il y avait

  6   des éléments réservés à la prière dans une maison catholique, il y a l'eau.

  7   Q.  Monsieur Ibranovic, la Chambre a entendu des témoignages, vu des

  8   éléments de preuve indiquant qu'en Bosnie centrale, les mosquées étaient

  9   détruites. Etant donné que la 7e Brigade musulmane était composée de

 10   combattants qui étaient des personnes religieuses, vous, en tant que

 11   commandant chargé du moral, avez-vous dit aux soldats qu'ils ne devaient

 12   pas endommager les édifices religieux ? N'avez-vous jamais constaté que les

 13   membres de la 7e Brigade musulmane avaient endommagé des bâtiments

 14   appartenant à d'autres groupes ethniques, comme des églises ou des

 15   cimetières ?

 16   R.  Ils connaissaient le code de déontologie, s'ils avaient commis de tels

 17   actes, ils savaient qu'ils en seraient tenus responsables, et sanctionnés

 18   en conséquence.

 19   Q.  Est-ce que vous avez reçu des ordres clairs de votre commandement

 20   supérieur, en vertu desquels les édifices religieux et les officiers du

 21   culte devaient bénéficier d'une protection particulière ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  En ce qui vous concerne, est-ce que les membres de la

 24   7e Brigade musulmane avaient entendu ces ordres, et savaient qu'ils

 25   devaient les respecter ?


Page 18380

  1   R.  [aucune interprétation]

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : [aucune interprétation]

  3   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Il ne

  4   s'agit pas d'une objection, mais les membres de la 7e Brigade musulmane ne

  5   sont pas accusés d'avoir commis de tels actes contre des édifices

  6   religieux. C'est ce que je voulais souligner.

  7   Mme RESIDOVIC : [interprétation] C'est ce que ce n'était pas mon intention,

  8   je ne voulais pas suggérer qu'ils avaient été accusés d'acte de ce genre.

  9   Mais je voulais entendre de la bouche d'un imam instruit, quelle était

 10   l'attitude des religieux, des croyants, sachant qu'il n'y avait pas que des

 11   croyants au sein de la 7e Brigade musulmane. Vous avez essayé de répondre à

 12   cette question, donc allez-y, je vous en prie.

 13   R.  Pour autant que je le sache, il n'y a pas eu de tels accès. On les

 14   avait avertis, nous savions tous cela, vu notre éducation.

 15   Q.  Merci. J'ai quelques questions à vous poser au sujet de votre tâche de

 16   commandant adjoint chargé du moral et des questions religieuses. Vous avez

 17   dit à la Chambre de première instance que vous traitiez des questions

 18   religieuses, des instructions religieuses. Vous avez dit qu'il était très

 19   important de passer du temps avec les soldats car votre présence parmi eux

 20   renforçait le moral des troupes. Vous leur avez dit de ne pas éprouver de

 21   haine, de ne pas avoir peur. Est-ce que vous avez essayé d'instiller des

 22   pensées patriotiques parmi les troupes, de les encourager à défendre leur

 23   pays, leur peuple ?

 24   R.  Il n'était pas nécessaire de leur parler de cela. Nous connaissions

 25   tous très bien la situation dans laquelle nous nous trouvions. Il fallait


Page 18381

  1   décider si nous voulions rester dans des tentes, comme des Palestiniens, ou

  2   défendre notre patrie, avec l'aide de Dieu, pour que nos enfants puissent

  3   être libres

  4   Q.  Monsieur Ibranovic, dites-moi : si, dans le secteur chargé du moral,

  5   vous avez participé, vous avez traité de questions sociales, de l'aide aux

  6   blessés, aux familles, de l'aide aux officiers du culte, par exemple, ou

  7   est-ce que vous vous occupiez uniquement d'instruction religieuse ?

  8   R.  Tout ce qui avait trait à l'aide aux blessés ou aux familles ou aux

  9   familles de ceux qui étaient morts, nous allions rendre à ces familles, si

 10   possible, nous les aidions de notre mieux. Normalement, nous leur

 11   fournissions des vivres.

 12   Q.  En encourageant la patriotisme chez les soldats, en s'occupant des

 13   blessés, des familles des hommes qui avaient été tués, en fait, s'agissait-

 14   il de tâches que vous deviez faire au sein du 1er Bataillon ?

 15   R.  Oui.

 16   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci.

 17   Monsieur le Président, je n'ai pas d'autres questions à ce témoin.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Il est 11 heures 20. Je pense que le mieux c'est de

 19   faire la pause et l'Accusation fera son propre interrogatoire après la

 20   pause. Il est 11 heures 20, nous reprendrons aux environs de midi moins 10.

 21   --- L'audience est suspendue à 11 heures 20.

 22   --- L'audience est reprise à 11 heures 50.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise. Je donne la parole aux

 24   avocats de l'Accusation.

 25   M. NEUNER : [interprétation] Merci beaucoup.


Page 18382

  1   Contre-interrogatoire par M. Neuner : 

  2   Q.  [interprétation] Bonjour, je m'appelle Matthias Neuner et, avec mes

  3   confrères, je représente l'Accusation. Je vais vous poser quelques

  4   questions.

  5   Si vous ne comprenez pas mes questions, demandez-moi de les répéter. Je le

  6   ferai et je suis également prêt à reformuler mes questions, si nécessaire.

  7   Est-ce que vous m'avez bien compris ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Je souhaite que nous parlions de Vares. A la page 18 du compte rendu,

 10   vous avez déclaré : "Nous avons reçu l'ordre d'avancer dans cette

 11   direction," c'est-à-dire, vers Vares. Fin 1993, qui vous a donné l'ordre

 12   d'avancer en direction de Vares ?

 13   R.  Nous dépendions du commandement de la brigade, et nous agissions

 14   conformément aux ordres donnés par le commandement de la brigade. Il a été

 15   dit que le 1er Bataillon de la 7e Brigade musulmane devait avancer en

 16   direction de la ville de Vares.

 17   Q.  Qui a donné cet ordre ? Etait-ce le commandant de votre bataillon ou le

 18   commandant de la brigade ?

 19   R.  Le commandant de la brigade donne des ordres qui sont transmises au

 20   commandant du bataillon. Ce dernier transmet, ensuite, les ordres aux

 21   différents services, par exemple, le service chargé du moral, de façon à ce

 22   que les troupes puissent être informées de la situation et nous exprimons

 23   ensuite notre point de vue au sujet de la situation en matière de moral des

 24   troupes et nous indiquons si nous sommes en mesure d'exécuter la mission

 25   confiée, ou si d'autres préparatifs sont nécessaires.


Page 18383

  1   Q.  Connaissez-vous le nom du commandant qui a donné cet ordre ?

  2   R.  Je peux vous parler de mon échelon, de l'échelon du bataillon.

  3   Q.  S'il vous plaît.

  4   R.  Junozovic était, à l'époque, commandant du 1er Bataillon.

  5   Q.  Lorsque vous êtes arrivé dans la région de Vares, quelle heure était-

  6   il ? Essayez de vous en souvenir.

  7   R.  C'était à l'automne.

  8   M. IBRISIMOVIC : [interprétation]  Merci, Monsieur le Président. Il y a une

  9   erreur au compte rendu d'audience. Il est dit : "Jusovic", page 29. On

 10   devrait lire "Junozovic", à la ligne 6, page 29.

 11   M. NEUNER : [interprétation]

 12  Q.  Pourriez-vous répéter le prénom et le nom du commandant du 1er Bataillon

 13   qui a donné l'ordre ?

 14   R.  Safet Junozovic.

 15   Q.  Merci. Pourriez-vous épeler ce nom aux fins du compte rendu d'audience.

 16   R.  J-u-n-o-z-o-v-i-c.

 17   Q.  M. Junozovic --

 18   R.  En un mot. L'orthographe n'est pas exacte. En fait, maintenant,

 19   l'orthographe est correcte.

 20   Q.  M. Junosovic était le commandant du 1er Bataillon de la

 21   7e Brigade musulmane, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  A quelle heure êtes-vous arrivé dans la région de Vares en 1993 ?

 24   R.  C'était au mois d'octobre.

 25   Q.  Fin octobre ?


Page 18384

  1   R.  Il pleuvait. Je ne sais pas quelle journée il était, je ne veux pas me

  2   livrer à des devinettes.

  3   Q.  Vous avez parlé de Strijezevo. S'agit-il d'un hameau situé à proximité

  4   du mont Trebijas [phon], à quelques sept kilomètres au sud de Vares ?

  5   R.  Il s'agit d'un village qui se trouve à l'entrée de Vares, près de

  6   Breza. Peut-être que c'est là la distance que vous avez mentionnée. C'est à

  7   gauche de la route. Je ne connaissais pas très bien ce secteur, ou plutôt

  8   je le connaissais un peu parce que lorsque je faisais mes études

  9   secondaires, j'ai passé quelque temps dans un village à proximité de

 10   Strijezevo en 1982. J'étais en deuxième année de l'école religieuse de la

 11   madrasa.

 12   Q.  A Strijezevo, avant de décider de vous rendre à Vares, est-ce que vous

 13   avez rencontré quelqu'un du commandement de la 7e Brigade musulmane ?

 14   R.  Le commandement du 1er Bataillon était situé dans une résidence

 15   secondaire, une maison de vacances. Compte tenu des contacts que j'avais

 16   avec les membres du commandement, il y avait le commandant adjoint chargé

 17   du moral, Suljeman Kurtanovic. Les commandants adjoints du bataillon, nous

 18   avons eu des réunions avec lui. Nous avons parlé de l'évolution de la

 19   situation et de ce qu'il convenait de faire et de la manière dont il

 20   convenait de le faire.

 21   Q.  Qu'est-il ressorti de ces discussions ? Pourriez-vous l'indiquer à la

 22   Chambre de première instance ?

 23   R.  La plupart des personnes présentes était surprise car la ville avait

 24   été prise sans combat. Comme il y avait beaucoup de vivres dans la ville,

 25   et que les soldats avaient besoin de ses vivres, c'est de cela que nous


Page 18385

  1   avons parlé.

  2   Q.  Les soldats avaient besoins de vivres, vous en avez parlé. Est-ce que

  3   vous pourriez en dire davantage ? Qu'avez-vous décidé de faire ?

  4   R.  Nous étions surpris. Je l'ai déjà dit. Même si à ce moment-là on

  5   voulait assurer l'approvisionnement des soldats, nous ne disposions pas de

  6   l'infrastructure nécessaire. Nous n'avions pas de camions à notre

  7   disposition pour transporter la nourriture. Donc, nous avons parlé de ce

  8   genre de choses.

  9   Q.  Quelle solution avez-vous choisie ? Est-ce que vous avez décidé de

 10   réquisitionner des camions ? Car vous avez déclaré que vous n'en n'aviez

 11   pas à l'époque, est-ce que vous avez organisé la mise à disposition de ces

 12   camions ?

 13   R.  Pour autant que je le sache, très peu, car nous sommes arrivés dans

 14   cette région depuis Zenica, nous sommes arrivés en train à Visoko, me

 15   semble-t-il, ensuite, nous avons circulé en autocar pendant une partie du

 16   trajet, puis nous avons marché. Nous sommes arrivés du côté opposé, de

 17   l'autre côté de la colline. Vous avez mentionné le nom de cette montagne

 18   tout à l'heure.

 19   Nous arrivions de l'endroit où se trouvait l'appui logistique. Nous avions

 20   très peu d'appui logistique avec nous. Il y avait peut-être une petite

 21   voiture, une petite camionnette, mais, en gros, nous y sommes arrivés à

 22   pied.

 23   Q.  Vous avez marché jusque-là et vous nous avez décrit cela. Est-il exact

 24   de résumer votre déposition en disant que vous avez emprunté l'axe

 25   principal en provenance du sud, en passant par Majdan pour arriver à


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  1   Vares ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Combien y avait-il de véhicules, de camions avec vous, ou est-ce que

  4   vous êtes simplement arrivés à pied ?

  5   R.  S'il y avait des véhicules, il n'y en avait qu'un seul qui appartenait

  6   au commandement du bataillon. J'ai pu voyager à bord de ce véhicule.

  7   Souvent, nous avions une jeep. Je ne sais pas combien de temps, ou sur

  8   quelle distance moi-même j'ai voyagé à bord de ce véhicule, mais je sais

  9   que je suis entré en ville à pied. La situation n'était pas très sûre et il

 10   fallait être vigilant car il y aurait pu y avoir des tirs. Nous étions

 11   prudents. Nous avons été surpris de voir qu'il n'y avait pas de tirs. Mais

 12   il était manifeste que les entrepôts étaient remplis de nourriture. Voilà.

 13   Q.  Est-ce que vous ou les officiers qui vous accompagnaient avez inspecté

 14   certains de ces entrepôts, après être entré dans la ville de Vares ?

 15   R.  Je me souviens que la route est très étroite. Là il s'agit d'une

 16   ravine, donc c'est très étroit. Il y a des bâtiments le long de la route.

 17   Lorsqu'on marche sur cette route principale, on peut voir les portes de

 18   certains caves, donc j'ai ouvert des portes et on pouvait voir quelle était

 19   la situation.

 20   Q.  Quelle situation voulez-vous parler ? De caves étaient remplies de

 21   vivres. Quelle était la situation ? Combien de caves avez-vous vues ?

 22   R.  Mon objectif principal était de vérifier l'état dans lequel se trouvait

 23   la mosquée, donc, il faut marcher depuis la partie basse de la ville

 24   jusqu'à la partie haute. On traverse le centre-ville. J'ai vu peut-être une

 25   case ou deux en chemin. Je n'étais pas particulièrement curieux, je n'avais


Page 18387

  1   pas la possibilité d'emporter quoi que ce soit qui se trouvait de toute

  2   façon. On pouvait jeter un coup d'œil pour on pouvait jeter une coup d'œil

  3   pour voir pour voir quelle était la situation et c'est tout.

  4   Q.  Vous avez déclaré précédemment qu'une cinquantaine de soldats vous

  5   accompagnaient lorsque vous êtes entré dans la ville de Vares. Est-ce

  6   qu'ils sont restés avec vous lorsque vous vous rendus dans la mosquée ou

  7   sont-ils allés ailleurs, à un autre endroit de la ville ?

  8   R.  Pour autant que je m'en souvienne, ils sont restés dans la partie basse

  9   de la ville. J'ai vérifié l'état de ma mosquée, tout était en ordre. Je

 10   suis retourné, je suis rentré. Je les ai retrouvés dans la partie basse en

 11   face de nous et il y avait des gens de la FORPRONU qui avaient des

 12   véhicules blindés, des chars, nous y faisions face. L'une de ces personnes

 13   est venue nous trouver, je m'en souviens assez bien, car ces deux bâtiments

 14   de construction récente, que j'ai mentionnés, étaient en flammes. La

 15   situation était chaotique et cet homme a dit que ce n'était rien

 16   d'inhabituel. Il m'a dit : "C'est votre pays, vous devez veiller à sa

 17   sécurité." Il pensait que nous allions peut-être détruire quelque chose,

 18   mais nous sommes restés très peu de temps. Nous sommes entrés dans la ville

 19   dans l'après-midi et, au crépuscule, nous étions déjà partis.

 20   Q.  Vous souvenez-vous du nom ou de la nationalité de cet homme de la

 21   FORPRONU qui a parlé à votre groupe, ce jour-là ?

 22   R.  Non, non, je ne peux pas me souvenir de cela.

 23   Q.  Ce jour-là, que vous nous avez décrit depuis les premières heures de la

 24   matinée jusqu'au crépuscule, s'agissait-il du 3 novembre ou du 4 novembre

 25   ou d'un autre jour ? Je veux parler de l'année 1993.


Page 18388

  1   R.  Ce dont je me souviens clairement, du moins, c'est comme cela que nous

  2   avons vécu les choses. Comme il s'agissait de la première ville libérée de

  3   notre point de vue, notre service travaillait sur un programme que nous

  4   voulions réaliser dans cette mosquée. Nous voulions fournir un soutien

  5   moral et inciter la population à revenir et à poursuivre une vie normale.

  6   Ce jour-là, je sais que c'était un vendredi, je le sais avec certitude car

  7   c'est le jour de Djuma et après ce Djuma, nous avons entreprise de réaliser

  8   ce programme. Tout cela est facile à vérifier. Si vous regardez le

  9   calendrier, après Djuma, un représentant du ministère s'est adressé à nous,

 10   Rusmir Mahmutcehajic, et des autres dignitaires du cru.

 11   Q.  Pourriez-vous préciser un point ? Vous êtes entré dans Vares et vous

 12   avez quitté un jeudi, mais cette célébration, ce Djuma, dont vous venez de

 13   parler, a eu lien le lendemain, un vendredi. Vous êtes retourné à Vares

 14   pendant une brève période de temps pour assister à cette Djuma. Est-ce que

 15   vous pourriez clarifier cela ?

 16   R.  Oui, mais je crois qu'il n'y avait pas de forces armées sur place car

 17   elles avaient dû partir, il y avait du une cérémonie marquant la libération

 18   de la ville et nous voulions simplement que la population se rende compte

 19   que c'était l'occasion de reprendre ne vie normale.

 20   Q.  Vous venez de mentionner un représentant du ministère : "Et j'ai trouvé

 21   un article publié dans le bulletin de la 37e Brigade légère musulmane, le

 22   1er janvier 1995. Cet article est intitulé : 'Suivant le chemin de Fatih'."

 23   Je souhaiterais citer un passage de cet article : "Après s'être

 24   reposée, l'unité se prépare en vue d'une inspection par Alija Izetbegovic."

 25   Le lieu n'est pas mentionné dans l'article dont vous êtes de l'auteur, je


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  1   pense, et je souhaiterais obtenir un éclaircissement. S'agit-il d'une

  2   inspection menée à Zenica par Alija Izetbegovic ou d'une inspection menée

  3   ailleurs ?

  4   R.  Oui, c'était à Zenica, après Vares. Pour être plus précis, c'était

  5   peut-être entre le 5 et 7 décembre, pour autant que je m'en souvienne.

  6   C'est exact, je suis l'auteur de ce texte. C'était un article décrivant les

  7   événements qui s'étaient déroulés là bas.

  8   Bien entendu, je n'étais pas présent à chaque occasion, mais j'ai parlé aux

  9   commandants, également.

 10   Q.  Donc, vous étiez présent lors de cette inspection menée par Alija

 11   Izetbegogic à Zenica ? Je pense que c'était au gymnase de Zenica mais est-

 12   ce que vous pourriez préciser cela ?

 13   R.  J'étais présent. Je pense que c'était un gymnase.

 14   Q.  Je vous remercie. Est-ce que vous voulez quelque chose ?

 15   Q.  Des prix ont été distribués, des récompenses ont été données à certains

 16   combattants. Donc, il fallait nous préparer à cela c'était assez difficile.

 17   Q.  Pourrions-nous revenir un instant sur cet article. Il est dit ici, je

 18   cite : "Suite à un ordre," en fait, je pense qu'il s'agit d'un autre

 19   incident. Je cite : "Suite à un ordre, bien entendu, de Bjelovac, le

 20   bataillon se dirige vers Fojnica, en passant par le mont Zahor. A l'entrée

 21   de Fojnica, Izetbegovic passe en revue l'unité."

 22   Je pense que vous parlez du 1er Bataillon de la 7e Brigade, n'est-ce pas ?

 23   Pourriez-vous préciser cela ?                                                                                      

 24    R.  Oui, c'est mon secteur, c'est de là que je viens.

 25   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être que je ne


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  1   suis pas autorisée à poser une question à ce stade, mais je constate que

  2   les questions posées par mon confrère n'ont rien à voir avec les questions

  3   posées par les autres équipes de la Défense, n'ont rien à voir avec l'acte

  4   d'accusation, et n'ont rien à voir avec la déposition du témoin jusqu'à

  5   présent. Peut-être qu'il devrait être clarifié; est-ce que cela vient de

  6   nulle part, ou est-ce que cela est en rapport avec les faits que

  7   l'Accusation cherche à prouver ?

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : L'Accusation.

  9   M. NEUNER : [interprétation] Le témoin vient de dire que

 10   M. Izetbegovic avait passé en revue la 7e Brigade musulmane à Zenica, entre

 11   le 3 et le 5 décembre 1993, et j'essaie d'établir un lien entre ce passage

 12   en revue et le passage mentionné dans l'article. Donc, comme c'est l'auteur

 13   de l'article, je pense qu'il pouvait nous éclairer sur ce point.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce que je ne perçois pas bien, c'est le lien entre

 15   la visite d'Izetbegovic en décembre et Vares.

 16   Oui, la Défense.

 17   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Oui. Mon éminent confrère a cité un

 18   article. Je ne sais pas si c'est une pièce à conviction de l'Accusation ou

 19   non. Peut-être qu'il pourrait nous en dire davantage, de façon à ce que

 20   nous puissions suivre s'il s'agit d'un nouveau document, la Chambre devra

 21   statuer. L'Accusation devra se conformer aux instructions de la Chambre.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, ce document qu'il a écrit, est-ce un nouveau

 23   document ?

 24   M. NEUNER : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation ne demande

 25   pas le versement au dossier de ce document à ce stade. Il s'agit


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  1   effectivement d'un nouveau document, il a été communiqué aux deux équipes

  2   de la Défense lundi, donc bien avant le délai de 24 heures que l'Accusation

  3   est tenue de respecter.

  4   Conformément à votre décision, s'agissant de rafraîchir la mémoire

  5   des témoins, je demande au témoin s'il peut nous dire quelque chose au

  6   sujet de ce qu'il a écrit le 1er janvier. C'est tout ce que l'Accusation

  7   cherche à établir. Nous n'avons pas l'intention de demander le versement au

  8   dossier de cet article.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Poursuivez.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai mentionné qu'il s'agissait là de mon

 11   village natal. Nous sommes passés par là, pourquoi on mentionne le Sultan

 12   Fatih, parce qu'en 1443, il est passé par là, il s'y trouvait là, la

 13   résidence du roi de Bosnie était à cet endroit-là et il avait permis aux

 14   gardiens du couvent de Fojnica et il y a donné un document qui permettait

 15   de pratiquer librement sa religion. C'est pour cela que je me suis décidé

 16   d'appeler cet article ainsi.  

 17   En tout cas, étant donné qu'à peu près à l'époque le HVO avait attaqué en

 18   direction de Fojnica, qui avait pris nos lignes de front, nous avons reçu

 19   un ordre nous demandant de nous rendre immédiatement à Fojnica. Nous sommes

 20   --

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : La Défense, s'il vous plaît.

 22   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je pense

 23   qu'il y a ici une erreur au compte rendu d'audience, ligne 32. On demande,

 24   il a donné l'autorisation au monastère militaire, en fait, il a expliqué

 25   que c'étaient aux gardiens du couvent qu'il avait accordé l'autorisation de


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  1   pratiquer libéralement la foi. Le témoin rajoute, c'était en 1463.

  2   M. NEUNER : [interprétation]

  3   Q.  Si vous me permettez je vais poser une toute dernière question. Vous

  4   parlez de Fojnica et dans cet article, il est dit qu'à l'entrée de Fojnica,

  5   Izetbegovic avec son entourage avait passé en revue cette unité. Est-ce que

  6   vous-même, vous étiez présent pendant ce passage en revue de troupes par

  7   Izetbegovic ? Si oui, à quel moment cela avait eu lieu ?

  8   R.  Oui, j'étais présent. Mais il faut savoir que nous sommes partis de

  9   Zenica, et restés à Fojnica. Nous sommes passés -- nous avons traversé les

 10   montagnes à pied, il y avait de la neige. Quand nous sommes arrivés là-bas,

 11   c'était à ce moment-là qu'Alija Izetbegovic nous aurait rejoint avec son

 12   escorte. Il était content de nous voir parce qu'au moment où nous sommes

 13   rentrés à Fojnica, la ville était déjà vide. Les gens avaient pris la

 14   fuite. Pour les gens qui étaient restés, ils étaient très contents de nous

 15   voir. Je me souviens une femme avait sorti des fruits, Alija était en train

 16   de nous faire des signes de la main depuis sa jeep. Ils ont continué en

 17   direction vers Fojnica et, par la suite, ils ont traversé Igman, je

 18   suppose, pour se diriger vers Sarajevo. Nous nous  sommes rencontrés à

 19   Fojnica, nous avons déployés nos lignes de défense, là où il y a la

 20   montagne dans le nom m'échappe à l'instant. Nous avons arrêté la

 21   progression du HVO, et après, un cessez-le-feu a été signé.

 22   Q.  Je souhaite maintenant aborder un autre sujet. En 1993, vous avez été

 23   adjoint du commandant pour des questions du moral et vous avez fait

 24   différents rapports à votre commandant, dont vous avez déjà donné son nom.

 25   Est-ce qu'en même temps, vous devez rédiger des rapports pour le


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  1   commandement de la 7e Brigade musulmane de Montagne en 1993 ?

  2   R.  C'était quelque chose qui arrivait de temps à autre. Ils me donnaient

  3   certains ordres également. Je vous ai mentionné les événements de Vares,

  4   puis il y avait Sulejman Kurtanovic. La communication aurait pu être plus

  5   étroite, mais nous avons été physiquement séparés. On était dans deux

  6   villes différentes et nous étions presque à tout moment, en train de

  7   participer à des activités militaires.

  8   Q.  Puis-je vous demander le nom de l'adjoint du commandant pour les

  9   questions de moral et de questions religieuses, est-ce qu'il s'appelait

 10   Ahmet Adilovic ? 

 11   R.  Non, il s'appelait Sulejman Kurtanovic.

 12   Q.  Il se trouvait donc au commandement de la brigade, de la

 13   7e Brigade musulmane de Montagne en 1993 ?

 14   R.  Sulejman Kurtanovic, oui, tout à fait nous étions ensemble à Vares. Je

 15   l'ai dit il y a quelques instants.

 16   Q.  Vous avez parlé de votre carrière militaire, qui précédait votre entrée

 17   à la 7e Brigade musulmane, en novembre 1992. Ce qui m'intéresse, est-ce que

 18   vous avez servi au sein d'une autre unité avant de venir à la 7e Brigade

 19   musulmane, je pense ici à l'année 1992 ?

 20   R.  Le début de la guerre était une période très confuse. Les unités se

 21   formaient au quatre coins de la Bosnie. Pour la plupart les membres de ces

 22   unités, c'étaient des volontaires qui ne voulaient pas fuir, ils voulaient

 23   prendre les armes. Quand j'ai entendu qu'une telle unité était en train de

 24   se former et qu'une partie de cette unité allait avoir des caractéristiques

 25   religieuses, je trouvais que cela me convenait puisque j'étais religieux,


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  1   je me suis renseigné et, par la suite, j'ai rejoint cette unité-là.

  2   Q.  Pourriez-vous nous donner le nom de l'unité en question ?

  3   R.  C'était les "forces musulmanes".

  4   Q.  A quel moment en 1992 avez-vous rejoint les forces musulmanes ?

  5   R.  Au début du mois juin, je pense. Le 5 ou le 6 juin.

  6   Q.  Est-ce exact que vous parliez ici des forces musulmanes, les

  7   "Muslimanske Snage" à Travnik ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Je voudrais, maintenant, que vous portiez votre attention en l'année

 10   1993 quand l'adjoint du commandant de la 7e Brigade musulmane -- donc,

 11   quand vos étiez adjoint du commandant et vous nous avez dit que vous étiez

 12   dans la vallée de la Bila entre la mi-avril et la mi juin 1993. N'avez-vous

 13   jamais entendu parler de ces incidents qui avaient été provoqués par les

 14   membres de la 7e Brigade musulmane de Montagne dans la vallée de Bila ?

 15   A l'époque, il n'y avait pas de membres de la 7e Brigade musulmane de

 16   Montagne. Je pense ici que vous vous référez à des ressortissants

 17   étrangers.

 18   R.  Non, pas nécessairement. J'ai pensé plutôt à tous les membres de la 7e

 19   Brigade musulmane, n'importe quel membre. Je n'avais pas du tout mentionné

 20   les ressortissants étrangers.

 21   Q.  Est-ce qu'un membre quelconque de la 7e Brigade musulmane avait

 22   provoqué des incidents de la période qui nous intéresse.

 23   R.  J'ai déjà mentionné qu'il y avait un groupe de soldats de Travnik.

 24   C'était après Ahmici et avant Miletici. Nous avons rejoint la Défense au

 25   niveau régional. Nous avions notre QG et on savait exactement où nous nous


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  1   trouvions. On était sous son commandement.

  2   Q.  Pourriez-vous être plus précis ? Est-ce que vous avez entendu qu'il y

  3   avait eu des incidents ou vous pensez qu'il n'y en avait pas eu du tout ?

  4   R.  Oui, comme tout le monde dans cette vallée-la, j'en avais entendu

  5   parler. On avait entendu parler que quelque chose s'était passée, mais cela

  6   n'aurait aucun sens d'établir un lien entre ces événements et les membres

  7   de la 7e Brigade musulmane ?

  8   Q.  Vous affirmez que vous avez entendu parler qu'il y ait eu des

  9   incidents, mais vous ne pouvez pas établir des liens. Est-ce que des

 10   soldats de la 7e Brigade musulmane avaient participé à ce type s'incident ?

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Ibrisimovic

 12   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je pense

 13   que ces types de questions sont en train de confondre -- de semer la

 14   confusion dans l'esprit du témoin. Si mon collègue veut en parler, il

 15   faudra préciser quels étaient les incidents et à quel moment ils avaient eu

 16   lieu.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous faites référence à quels incidents ?

 18   M. NEUNER : [interprétation] : L'Accusation ne pense pas ici à un incident,

 19   en particulier. Ce qui intéresse l'Accusation, c'est de savoir si le témoin

 20   avait entendu parler de quelque chose, d'incident isolé, peut-être, étant

 21   donné qu'il se trouvait dans la vallée de la Bila ou, plus précisément, à

 22   Alihodza, à l'entrée de la vallée de la Bila.  L'Accusation est tout

 23   simplement en train de lui poser la question : s'il avait entendu parler de

 24   quelque chose puisqu'il se trouvait sur le terrain à l'époque. S'il n'avait

 25   pas entendu parler de quoi que ce soit, c'est bon. Je ne demande pour un


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  1   incident, en particulier.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Bourgon, un nouvel incident.

  3   M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président. J'aimerais simplement, Monsieur

  4   le Président -- à maintes reprises, l'Accusation nous a rappelés qu'elle

  5   exerçait son droit de contre-interroger un témoin. Or, en l'espèce, nous ne

  6   savons pas du tout ce que l'Accusation tente de faire. Si elle tente de

  7   miner la crédibilité du témoin, elle doit lui dire : J'ai de l'information

  8   et je crois que vous avez dit le contraire ou que vous allez dire le

  9   contraire. Si l'Accusation souhaite obtenir de l'information du témoin au

 10   bénéfice de sa propre cause, elle doit le faire dans le cadre de l'Article

 11   90 du Règlement et dire : Comment, quelle est la preuve qu'elle recherche,

 12   quel est l'élément qu'elle recherche ? Donc, comme on dit en anglais : "put

 13   its case to the witness", et, ensuite, contre-interroger. Mais là,

 14   l'Accusation est dans une mission d'exploration qui ne mène absolument à

 15   rien.

 16   Merci, Monsieur le Président.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 18   L'Accusation, tenez compte de l'Article 90 du Règlement. Le témoin a

 19   dit qu'il a eu connaissance d'incidents, donc, pour gagner du temps,

 20   demandez-lui quel incident et, à ce moment-là, vous pouvez lui rafraîchir

 21   la mémoire si vous avez d'autres éléments. Là, on perd du temps, je vous

 22   l'indique.

 23   M. NEUNER : [interprétation]

 24   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, mentionner un incident dont vous auriez

 25   entendu parler et dans lequel était impliqué un membre de la 7e Brigade


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  1   musulmane de Montagne dans la vallée de la Bila en 1993, pendant que vous y

  2   étiez en tant qu'adjoint au commandant pour des questions du moral. Si vous

  3   n'avez pas du tout entendu parler d'un quelconque incident, vous nous le

  4   dites et on abordera un autre sujet.

  5   R.  Non, je n'ai pas entendu parler des incidents.

  6   Q.  Fort bien. Merci. Pendant la période pendant laquelle vous étiez

  7   l'adjoint du commandant pour des questions de morale au

  8   1er Bataillon, est-ce que vous avez entendu dire que certains soldats,

  9  appartenant au 1er Bataillon de la 7e Brigade musulmane de Montagne, avaient

 10   quitté leur unité ?

 11   R.  Voilà, cela serait une logue histoire. Après les événements qui avaient

 12   eu lieu à Visoko avant la nouvelle année 1992, nous avons dû faire face à

 13   une attaque féroce et ce qui s'est passé c'était une différenciation

 14   imperceptible parmi des individus qui n'étaient pas contents du

 15   commandement. Donc, certains individus se sont séparés. Pour un certain

 16   nombre d'entre eux, ils n'étaient même pas bons de les voir parmi les rangs

 17   de nos soldats puisqu'il s'agissait de personnes qui pouvaient agir de

 18   manière tout à fait contraire au code de conduite dont je vous ai parlé.

 19   Q.  Vous avez mentionné certains individus. Vous souvenez-vous des noms de

 20   certains de ces individus ? Pour nous apporter plus de précision, s'il vous

 21   plaît.

 22   R.  Ramo Durmis.

 23   Q.  Que savez-vous sur Ramo Durmis ?

 24   R.  D'après ce que j'ai pu comprendre sur son comportement, c'était

 25   quelqu'un qui avait envie de prendre des initiatives lui-même et à prendre


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  1   beaucoup de décisions. Mais c'est très nuisible en temps de guerre parce

  2   qu'on ne peut pas prendre certaines décisions de manière tout à fait isolée

  3   et il faut obéir aux ordres du commandant. D'après ce que j'ai pu entendre

  4   en arrivant à Visoko, il avait provoqué plusieurs incidents. Il a fait en

  5   sorte à ce qu'on soit obligé de le limoger.

  6   Q.  Vous avez dit qu'il avait participé dans les incidents à Visoko.

  7   Qu'avez-vous en arrivant à Visoko puisque vous nous avez dit que vous étiez

  8   là-bas sur place ?

  9   R.  Je faisais partie du deuxième échelon, et d'après les plans, nous

 10   devions continuer à faire ce qu'il y était fait par le premier échelon.

 11   Nous avons entendu que les lignes de front avaient été dépassées  et

 12   c'était très bien. Nous étions contents et nous sommes partis pour

 13   débloquer Sarajevo. Nous étions tout à fait conscients de la situation dans

 14   laquelle se trouvaient les gens là-bas. Mais, ce jour-là, la situation

 15   s'était complètement retournée quand je suis arrivé là-bas et je suis

 16   rentré. Je pense qu'il s'agissait soit dans un bowling ou dans un gymnase.

 17   J'ai subi un choc, appelons-le ainsi. Un grand nombre de personnes avaient

 18   péri et les gens qui se trouvaient là-bas m'en avaient parlé, entre autres,

 19   ils m'avaient parlé de ceux qui avaient été commis par Ramo Durmis. Il

 20   avait physiquement agressé certains officiers, parce qu'il considérait cela

 21   avait été de leur faute.

 22   Apparemment, il avait même saisi des armes. C'était quelque chose que

 23   ne pouvait pas être toléré d'après notre code de conduite

 24   -- afin ne pouvait pas se faire quelque soit -- dans n'importe quelle

 25   circonstance.


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  1   M. NEUNER : [interprétation] Je demanderais, maintenant, à l'Huissier

  2   d'apporter le document P610 et de le distribuer. Il s'agit d'un document

  3   qui est daté du 4 août 1993 et qui émane de M. Ahmet Adilovic. Ici, je

  4   voudrais que l'on regarde au numéro 4(b) qui figure à la page numéro 1.

  5   Q.  Je vous prie de donner lecture du texte qui suit le chiffre 4(b).

  6   R.  "Un nombre de combattants expérimentés et très vaillants se sont

  7   séparés avec Durmis Ramo et Malik Basic de notre unité. Les combattants du

  8   1er Bataillon de la 7e Brigade musulmane de Montagne demandent à ce qu'ils

  9   reviennent parmi nos rangs, si ceci est possible."

 10   Q.  Avez-vous entendu parler de cet incident, comme quoi ils avaient quitté

 11   les rangs ?

 12   R.  Oui, j'en ai entendu parler.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, la Défense.

 14   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Le témoin avait déjà répondu à cette

 15   question auparavant et le témoin avait déjà confirmé que Ramo Durmis avait

 16   quitté l'unité.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. L'Accusation, vous posez votre question parce

 18   que vous avez un objectif ? Oui, allez-y.

 19   M. NEUNER : [interprétation] En fait, il me reste qu'une seule question.

 20   Q.  Vous souvenez-vous de la période de la date du moment auquel Ramo

 21   Durmis et ses hommes avaient quitté la 7e Brigade musulmane de Montagne ?

 22   R.  Après les événements de Visoko, je ne voyais que très rarement Ramo

 23   Durmis. Je ne connais même pas les détails; à l'époque, je les ignorais.

 24   L'information m'était parvenue, au fur et à mesure, parce qu'à l'époque, je

 25   n'étais pas sur place. Mais le fait est qu'à partir de ce moment-là, son


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  1   comportement et ces incidents, les relations s'étaient refroidies. D'après

  2   ce que j'ai pu comprendre, il cherchait des personnes qui seraient du même

  3   avis que lui et avec lesquels il voulait tenter quelque chose puisqu'il

  4   était évident qu'il n'était pas content du commandement.

  5   Q.  Ce document date du mois d'août 1993. Quand a eu lieu cette opération à

  6   Visoko ? Est-ce que vous savez à quel moment ?

  7   R.  C'était juste avant le Nouvel an, en 1992.

  8   Q.  Est-ce qu'il est parti juste après la Nouvel an 1992, ou au début du

  9   mois d'août 1993, puisque ce document date du 4 août 1993 ?

 10   R.  Tout portait à croire qu'il était en train de chercher des personnes

 11   qui avaient les mêmes opinions. Il avait sans doute besoin d'une certaine

 12   période pour cela. Au mois d'août, c'était après ce qui s'était passé avec

 13   le HVO dans la vallée de la Bila. Pendant tout ce temps-là, il n'était pas

 14   sous notre commandement, d'après mes souvenirs. Ce qu'il faisait, il le

 15   faisait de sa propre initiative. Il est certain qu'il avait entraîné avec

 16   lui un certain nombre de membres de notre bataillon. 

 17   Q.  Ces membres du 1er Bataillon de la 7e Brigade musulmane de Montagne,

 18   vous souvenez-vous s'ils avaient appartenu à la 1ère, à la 2e ou à la 3e

 19   Compagnie, s'il vous plaît ?

 20   En fait, ici on lit dans le texte qu'il s'agit de "1er Bataillon"; alors,

 21   c'est à vous que je demande si vous savez de quelle compagnie du 1er

 22   Bataillon ils ont fait défection.

 23   R.  Voyez-vous, je ne suis pas en mesure de m'en souvenir parce que nous

 24   étions sans cesse en mouvement. C'était le temps où on pouvait passer d'une

 25   unité à l'autre, surtout lorsqu'il s'agissait d'unité de volontaires.


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  1   Beaucoup de gens y venaient pour voir s'ils pouvaient y rester, si

  2   l'ambiance leur correspondait ou pas. Si tel n'était pas le cas, ces gens-

  3   là partaient. Remémorer tout cela -- se rappeler de tout cela, et de parler

  4   de tous ces différents visages et non, cette chose est difficile.

  5   M. NEUNER : [interprétation] Merci d'avoir répondu à toutes mes questions.

  6   L'Accusation n'a plus de questions à poser à ce témoin.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Un nouvel interrogatoire ?

  8   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, nous

  9   n'avons que quelques questions à poser.

 10   Nouvel interrogatoire par M. Ibrisimovic : 

 11   Q.  [interprétation] Je voudrais que l'on soumette le document présenté par

 12   le conseil de la Défense, à savoir, DK29. J'ai ici les exemplaires à offrir

 13   au témoin.  Est-ce que vous pouvez consulter ce document, Monsieur. Il

 14   s'agit du document du 19 février 1993. Pouvez-vous, s'il vous plaît, vous

 15   reporter, à la fin même du texte, voir quels sont les noms des chefs de

 16   compagnie listés ?

 17   R.  Seferovic, Basic, Rusovic Podek [phon].

 18  Q.  Commençons par le chef de la 1ère Compagnie, comment se présente son nom

 19   et prénom ?

 20   R.  Seferovic Mesud.

 21   Q.  Non, c'est --

 22   R.  Non, Basic Muhamed.

 23   Q.  Ramo Durmis, il était chef de la 1ère Compagnie jusqu'au mois de

 24   novembre, ou plutôt décembre, lorsque les opérations ont été menées à

 25   Visoko ?


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  1   R.  Je crois qu'il était à la tête d'un groupe. Nous avons commencé par

  2   créer des groupes de combat. Au début des hostilités, ce fut une bande de

  3   tactique. Tant que les lignes n'auront de défense et de front, n'auront été

  4   établies, cela est quelque chose d'ailleurs dont on a hérité.

  5   Q.  Je vous demande, encore une fois, dans ce document de 19 février, peut-

  6   on lire expressément là, qu'il dit que Ramo Durmis n'était pas chef de la

  7   1ère Compagnie en février 1993 ?

  8   R.  C'est exact, c'est ce que nous lisons.

  9   M. IBRISIMOVIC : [interprétation]  Merci, Monsieur le Président, nous

 10   n'avons plus de questions à poser à ce témoin.

 11   Mais, ici dans le compte rendu d'audience, faudra t-il compléter le texte,

 12   page 48, ligne 6, manque le terme de "chef de compagnie" ?

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : L'autre équipe de la Défense.

 14   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai une seule

 15   question à poser.

 16   Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Residovic : 

 17   Q.  [interprétation] Monsieur Ibranovic, à titre d'éclaircissement, s'il

 18   vous plaît, dites-nous : en réponse à une question concernant les incidents

 19   éventuels entre membres du

 20   1er Bataillon de la 7e Brigade musulmane, vous avez répondu à la question,

 21   mais permettez de demander comme suit.

 22   Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que les membres, du

 23   1er Bataillon de la 7e Brigade musulmane, étaient tous des bosniens ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Il n'y avait pas d'étrangers dans votre bataillon ?


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  1   R.  Çà et là de tels gens faisaient apparition. Il a passé à travers nos

  2   unités, mais ils ne pouvaient nous lier en rien, n'étaient obligés à rien.

  3   Quant à nous, on en faisait rien à leur encontre.

  4   Q.  En d'autres termes, ils n'étaient pas membres combattants de la 7e

  5   Brigade musulmane ?

  6   R.  Non. Ils n'étaient pas sur nos listes.

  7   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.

  8   Questions de la Cour : 

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. J'ai quelques questions et l'une qui vient en

 10   continuation de la réponse que vous venez de faire. Vous dites qu'il y

 11   avait quelques étrangers qui passaient çà et là dans la 7e Brigade

 12   musulmane. Est-ce que vous pouvez nous donner des précisions

 13   complémentaires. C'était qui ces étrangers ? Des étrangers du nord, du sud,

 14   de l'est, de l'ouest, qu'ils venaient faire dans la 7e Brigade ?

 15   R.  Ce qu'on pouvait apprendre en ayant des contacts avec eux, c'est qu'ils

 16   se présentaient soit en qualité de gens qui travaillaient pour l'aide

 17   humanitaire, soit comme des gens qui étaient venus pour porter secours,

 18   pour aider. Mais ce dont j'ai parlé tout à l'heure, dans cet ordre d'idée,

 19   nous a permis de voir qu'il y avait eu des divergences car tu ne peux venir

 20   me porter secours et pour autant accaparer mon cœur.

 21   Autrement dit, tu veux m'assister, alors que je dois maintenant agir ainsi

 22   que tu le veux, et comme tu agis, toi. Voilà la raison pour laquelle ils

 23   nous ont causé tant de problèmes dans nos différents Djuma, communautés

 24   religieuses. Les gens ont fini par se séparer les uns des autres, parce que

 25   ces gens-là nous ont appris une interprétation de l'islam qui ne


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  1   corresponde ni à notre région, notre pays, non plus à nos traditions.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Ces personnes ont causé des problèmes, et elles ont

  3   causé des problèmes parce qu'elles étaient militaires dans les Unités de la

  4   7e Brigade, où elles étaient à l'extérieur de la 7e Brigade ?

  5   R.  Ces gens-là n'appartenaient à aucune des brigades. Ils ne se trouvaient

  6   lier par rien. Ils sont tantôt ici, tantôt là. Ils étaient toujours en

  7   mouvement, circuler à travers la Bosnie. Or, pour parler de problème, voilà

  8   de quel problème il s'agit. Pour juger de la façon dont ils procédaient,

  9   voilà comment l'affaire se présente. Je veux t'aider, mais toi, tu dois

 10   pour autant changer de tradition en matière de foi, de religion, changer de

 11   façon de réfléchir, changer de pratique. C'est dans cet ordre d'idée-là que

 12   nous avons connu des divergences.

 13   Car vous vous trouviez en situation, où, par exemple, un fils d'untel ou

 14   untel serait prêt à suivre l'exemple, le conseil de ces gens de l'aide

 15   humanitaire, parce qu'ayant reçu de l'argent ou de la nourriture, et

 16   cetera, et ce fils d'untel ou untel serait venu en conflit avec ses parents

 17   parce que pratiquant le culte suivant les préceptes propres aux Arabes.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Ces individus, est-ce que vous avez eu, vous,

 19   l'occasion de vous entretenir avec eux -- de discuter avec

 20   eux ?

 21   R.  Oui.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Sur le plan religieux, est-ce que vous aviez le

 23   sentiment qu'ils avaient une formation religieuse équivalent à la vôtre, ou

 24   c'étaient des personnes qui n'avaient pas eu des formations théologiques de

 25   la nature de celle que vous avez eue, vous-même ?


Page 18405

  1   R.  D'après la façon qui est la mienne de voir cette affaire, il s'agit de

  2   quelqu'un qui serait venu de chez lui pour y apporter l'ambiance de son

  3   foyer à lui, qu'il veut maintenant pratiquement infiltrer, incruster dans

  4   mon foyer à moi.

  5   Tout à l'heure, lorsque j'ai fait référence à ce livret, je voulais dire

  6   que, dans le domaine de la science pour chaque phénomène que l'on veut

  7   prouver, évidemment, il faut avoir des preuves à l'appui. Etant donné qu'il

  8   s'agit des gens de profile fort varié, professionnellement parlant, même

  9   jusqu'à aller pour parler de manœuvre, vous pouvez imaginer la situation,

 10   ou vous devez vous mettre, vous asseoir à discuter avec un tel homme des

 11   affaires évidemment et des questions de religion.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Une autre question. Vous-même, en tant que religieux

 13   quand vous étiez au sein de la 7e Brigade, est-ce que vous aviez, vous, un

 14   uniforme militaire, ou vous étiez en civil ou en tenue religieuse, ou

 15   aviez-vous un uniforme et portiez-vous, le cas échéant, une arme ?

 16   R.  Moi-même, je portais un uniforme réglementaire tout à fait simple,

 17   propre à tout soldat et comme le faisaient tous les soldats. Pendant le

 18   temps que j'ai passé dans l'armée, nous n'avions pas de grades non plus qui

 19   auraient permis de spécifier et permettre une distinction entre nous. Pour

 20   parler d'armes, j'avais un pistolet.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : D'après votre connaissance, qui était, d'après vous,

 22   le commandant de la 7e Brigade ?

 23   R.  Il y avait des changements, d'après ce qui arrivait jusqu'à nous, sous

 24   forme d'information, quand je dis "nous", lorsque nous étions à Travnik au

 25   début, ceci était -- ou devait être Asim Koricic. Après quoi, soudainement,


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  1   celui-ci était parti quelque part en voyage, dont les détails me sont

  2   inconnus. Ils sont inconnus de moi parce que j'ai été pratiquement lié au

  3   terrain, à l'armée, aux soldats. Par la suite, viendra Kubura à cette

  4   fonction. Il y avait de fréquents changements ainsi que le dictait le temps

  5   et les circonstances. De même en est-il pour parler de fonctions au niveau

  6   du bataillon.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Dernier sujet, je reviens à Vares. D'après ce qu'on

  8   a compris, vous avez pénétré dans Vares. Vous ne pouvez pas être certain

  9   sur la date parce que vous avez dit au départ au mois d'octobre, puis après

 10   on a évoqué le mois de novembre. Il y a un certain floue sur la date exacte

 11   selon laquelle vous êtes rentré dans Vares. Mais quand vous êtes rentré

 12   dans Vares, étiez-vous, vous et les autres soldats qui étaient avec vous,

 13   les seuls soldats de l'ABiH, ou y avait-il d'autres unités de l'armée ?

 14   R.  Ce que j'ai pu constater, trouver sur place, il s'agissait d'éléments

 15   qui appartenaient à la police du pays, du cru, ces gens-là qui étaient

 16   pratiquement liés aux autorités locales. Par la même occasion, avons-nous

 17   pu recevoir des informations comme quoi, du côté du nord, le second corps

 18   d'armée s'avançait. Nous les appelions des gens de Tuzla, encore que je

 19   n'ai pas eu l'occasion de les rencontrer vraiment. C'est pour un très bref

 20   moment que nous y sommes restés.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que les premiers soldats de l'ABiH, qui

 22   avaient pénétré dans Vares, étaient ceux de votre unité ? Est-ce que vous

 23   étiez premier à être entré dans Vares ?

 24   R.  Pour ce qui est de notre unité, il y avait moi avec quelques autres

 25   membres du commandement. Je suis passé tout le long de la ville, je l'ai


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  1   fait à pied. Je vous ai déjà dit, il y avait une cinquantaine de gars avec

  2   nous, qui se sont trouvés rester quelque part au niveau de la ville parce

  3   que, lorsque je suis allé dans la haute partie de la ville pour descendre

  4   vers la partie basse de la ville, je ne me suis pas retrouvé dans la zone

  5   où se trouvait la FORPRONU, ce dont je vous ai déjà parlé. Or, là-bas, et

  6   excepté ces policiers du pays qui je ne sais pas par quel miracle ils se

  7   sont trouvés là, je ne sais pas comment ils se sont trouvés là. Je n'ai

  8   plus rencontré personne.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous êtes rentré avec les 50 hommes, étiez-

 10   vous, j'allais dire, le plus gradé ou la personne responsable, ou y avait-

 11   il un autre officier qui avait l'autorité supérieure à la vôtre, ou c'était

 12   vous le responsable des 50 soldats ?

 13   R.  Non. Il y avait le chef du bataillon, Junozovic, de par son nom de

 14   famille et que j'ai évoqué. Cela dit, je répète une fois de plus, je me

 15   suis rendu vers la partie haute de la ville, où j'ai pu voir que deux

 16   bâtiments étaient en feu, pour faire le tour de la mosquée et pour

 17   reprendre le chemin de la partie basse de la ville où se trouvaient nos

 18   combattants.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Comment pouvez-vous expliquer qu'il y avait deux

 20   bâtiments en feu ? Qui avait mis le feu à ces bâtiments ? Car, apparemment,

 21   vous dites que quand vous êtes rentré dans Vares, la ville était quasiment

 22   déserte puisqu'il n'y avait pas de combattants du HVO, donc qui a mis le

 23   feu à ces bâtiments ?

 24   R.  D'après une information que nous avons pu recevoir, c'est le HVO qui

 25   tout en battant la retraite y a mis le feu.


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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous avez quitté Vares, à votre connaissance,

  2   y avait-il eu d'autres bâtiments en feu, ou vous n'avez de souvenir que de

  3   ces deux bâtiments ?

  4   R.  Non. Il n'y a que ces deux bâtiments-là que j'ai pu voir.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'Accusation.

  6   Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Neuner : 

  7   Q.  [interprétation] Juste quelques questions à titre d'éclaircissements à

  8   apporter à quelques réponses.

  9   Le Juge, Président de la Chambre de première instance, vous a posé une

 10   question concernant la présence de chefs officiers hauts gradés dans Vares

 11   ou dans la région de Vares. Au mieux de vos souvenirs, s'il vous plaît,

 12   dites-nous où se trouvait le commandement de la brigade, notamment, le

 13   commandant de la brigade lors de l'opération dans Vares ? Etait-il en

 14   dehors de la ville, en ville, au mieux de vos souvenirs ?

 15   R.  Lui se trouvait à Strijezevo, un village un peu plus important par sa

 16   taille où nous avons pris campement.

 17   Q.  Tôt le matin, lorsque vous et ces 50 soldats étiez partis vers Vares,

 18   le commandant de la brigade était resté à Strijezevo ?

 19   R.  Tout au moins, c'est ce que je suppose. C'était bien le cas car nous

 20   n'avons pas eu l'occasion de nous rencontrer jusqu'à un prochain rapport à

 21   faire. Lorsque pratiquement la situation s'est trouvée établie, les troupes

 22   du HVO se sont enfuies, la ville était déserte, pas d'opération, pas

 23   d'activité de combat, et que faire.

 24   Q.  Vous dites que vous l'avez rencontré le commandant, que lors du rapport

 25   suivant à faire, pouvez-vous nous dire quand est-ce vous avez pu surtout


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  1   descendre la partie basse de Vares, quelques heures après ou quelques jours

  2   après, par rapport à votre départ pour Vares ou quand ?

  3   R.  Il faisait plutôt sombre ou nuit lorsque nous devions prendre position

  4   dans Vares. Il a fallu pratiquement en marchant zigzaguer vers le camion,

  5   en descendant, dévalant la pente étant donné les circonstances, il était

  6   vraiment peu possible de voir quoi que ce soit ou de faire une observation

  7   minutieuse. Lorsque nous sommes descendus, la route a été minée, mais voilà

  8   que ceci n'a pas été -- les mines n'ont pas été amorcées.

  9   Pour parler de cette voie de communication, cette route-là, nous nous

 10   trouvions à une intersection des routes. Il y avait une maison de

 11   Musulmans, c'est là que nous sommes arrêtés dans l'attente d'un ordre, mais

 12   les gens qui, évidemment, ont entendu parler de notre venue, ils nous ont

 13   rejoint. C'est directement depuis cette intersection de route, je ne sais

 14   pas comment cela s'appelait ce carrefour, c'est à partir de ce lieu-là, que

 15   nous sommes rendus vers la ville et la maison.

 16   Q.  Majdan, parle des faubourgs, des banlieues de Vares, n'est-ce pas ?

 17   R.  Je ne sais pas. Il s'agit là d'une intersection de route. A gauche,

 18   mène une route pour Vares et l'autre route à droite, je ne sais pas où elle

 19   mène, ce n'est pas difficile de te retrouver d'ailleurs.

 20   Q.  Permettez-moi de me rallier à la question de tout à l'heure. J'ai voulu

 21   vous poser des questions sur la base des questions posées par, Monsieur le

 22   Juge Président, quant au officier chef le plus haut gradé et quant à la

 23   possibilité de rencontrer le commandant, était-ce lors de votre départ,

 24   depuis Strijezevo ? Voulez-vous nous apporter un éclaircissement, s'il vous

 25   plaît, j'ai mal compris votre réponse.


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  1   R.  Où est-ce que je l'ai rencontré la première fois, il m'est difficile de

  2   m'en souvenir. Donc, nous avons pris position là-haut dans ce secteur, le

  3   commandement de mon bataillon, je me souviens bien qu'il se trouvait dans

  4   une maison, seconde résidence, appartenant à un directeur de l'hôtel. Il y

  5   avait une communication. Il devait y avoir une communication parce que nous

  6   n'étions pas très loin d'ailleurs, l'un de l'autre, mais dire quand c'était

  7   une dernière fois où nous nous sommes rencontrés, il m'est difficile d'être

  8   précis. 

  9   Q.  Vous parlez de commandant de votre bataillon, vous ne parlez pas de

 10   commandant de la 7e Brigade musulmane, vous dites "le commandant de mon

 11   bataillon" - nous sommes à la page 55, ligne 12 du compte rendu d'audience.

 12   Vous ne parlez que "du commandant de votre bataillon," que vous avez vu une

 13   dernière fois avant de vous rendre à Vares.

 14   R.  J'ai pensé que vous me posez une question au sujet du commandant de la

 15   brigade.

 16   Q.  Mais, oui, c'est exactement là-dessus que portait ma question. Or, dans

 17   votre réponse, page 55 du compte rendu, vous dites, "commandant du

 18   bataillon", était dans une maison résidence secondaire. Ma question

 19   concernait le commandant de la brigade. Quand est-ce que vous l'avez vu une

 20   dernière fois avant de partir pour Vares ?

 21   R.  Ce n'est pas quelque chose qui correspond à mon niveau. Je suis plutôt

 22   en communication avec le bataillon, c'est plutôt le chef du commandant

 23   adjoint, qui lui est en communication avec la brigade.

 24   Q.  Une dernière question au sujet de Vares. Page 55, ligne 8 du compte

 25   rendu d'audience, que nous lisons, nous permet de dire que vos propos


Page 18411

  1   concernaient votre retour de Vares. Or, je vous ai demandé à quel moment

  2   vous avez revu le commandant, page 54, ligne 8 du compte rendu d'audience,

  3   je vous cite» : "Nous n'avons pas pu nous rencontrer jusqu'à un rapport

  4   suivant."

  5   Est-ce que cela veut dire que vous avez fait rapport à qui que ce soit lors

  6   de votre retour de Vares ?

  7   R.  Nous autres, adjoints au commandant, lorsque nous sommes chargés du

  8   moral de troupes, nous parlons du bataillon, nous avons eu une rencontre

  9   avec l'adjoint au commandant de la brigade. Celui-ci étant chargé du moral

 10   des troupes et du reste. C'est à ce moment-là, de nos rencontres de nos

 11   entretiens, et de transfert d'informations des uns aux autres, quant au

 12   plan des opérations à mener, et cetera.

 13   Q.  Savez-vous de quoi vous avez fait et sur quoi vous avez fait rapport

 14   une fois de retour, quel était le rapport fait par vous sur la situation

 15   dans Vares ?

 16   R.  La ville était bien achalandée. Il y avait même des choses qui

 17   n'étaient pas si nécessaires en ce qui nous concerne, par exemple, boisson

 18   alcoolisée, des cigarettes. Mais demeure toujours le problème lié à la

 19   logistique, à savoir, comment ravitailler, assurer les combattants en vue

 20   d'opération, activité de combat poursuivre, notamment faute de véhicule,

 21   moyen de transport.

 22   Q.  Mais comment l'avez-vous tranché cette question, avez-vous réglé ce

 23   problème de transport, lors de cette réunion --

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : La Défense. 

 25   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Ma toute


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  1   première remarque, c'est que cela va en dehors des questions posées par

  2   vous. Secondo, les mêmes questions que vient de poser mon honorable

  3   collègue, il les a déjà posées dans le cadre du contre-interrogatoire, et

  4   le témoin y a répondu.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous avez entendu l'observation. Je n'ai pas

  6   abordé les questions de transport. Est-ce qu'il y a une autre question.

  7   M. NEUNER : [interprétation]

  8   Q.  Je vais passer à un autre sujet. Le Juge Président de la Chambre de

  9   première instance vous a posé des questions concernant vos rencontres avec

 10   des étrangers. Vous avez dit, en effet, qu'occasionnellement, il vous est

 11   arrivé d'en rencontrer. Je voudrais vous poser la question suivante,

 12   approximativement : pouvez-vous nous dire avec combien d'étrangers vous

 13   avez pu vous entretenir au cours de l'année 1993 ?

 14   R.  Vous êtes intéressé à un certain nombre de personnes ?

 15   Q.  Oui, pour essayer d'apporter un éclaircissement -- ma question ce n'est

 16   pas que je suis intéressé à vos rencontres avec des gens de la FORPRONU non

 17   plus qu'avec des gens qui sont venus de Croatie, je me réfère à ce qu'on

 18   appelle les Moudjahiddines, qui étaient des personnes étrangères et que les

 19   gens du cru considéraient comme de Moudjahiddines. Je voudrais vous poser

 20   la question de savoir avec combien de cette catégorie là vous avez pu

 21   rencontrer en 1993 ?

 22   R.  Je ne suis pas capable de vous avancer un chiffre précis. J'ai été

 23   pratiquement rivé au terrain, c'est-à-dire, tout ce qui était les

 24   événements propres à la ville; c'est-à-dire, ce qui se passait en ville,

 25   cela est passé à coté de moi. Par conséquent, le gros de ces informations


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  1   passait là-dessus, je ne les ai apprises que ces derniers temps, après la

  2   guerre.

  3   Q.  Vous vous êtes référés également à l'arrière pays, je suppose que

  4   référence a été faite à la vallée de la Bila où vous vous êtes retrouvé en

  5   1993. Combien de Moudjahiddines étrangers avez-vous pu rencontrer dans la

  6   vallée de la Bila en 1993 ?

  7   R.  Pour parler du secteur où ils circulaient eux ? Il s'agit de Mehurici.

  8   A regarder la carte, vous verrez qu'il s'agit de sept à huit kilomètres par

  9   rapport à Alihodza. Physiquement parlant, nous avons été déparés. Or, cet

 10   effort risquait de se mouvoir parmi eux et ne serait-ce que faire une

 11   tentative dans ce sens là.

 12   Q.  Chose que je comprends fort bien mais vous avez répondu à la question

 13   posée par le Juge Président de la Chambre de première instance que vous

 14   avez en effet rencontré de ces Moudjahiddines. Où c'est que ces rencontres

 15   ont eu lieu ?

 16   R.  Il ne s'agit pas de rencontres qui ont dû être fixées ou entendue

 17   préalablement. Il s'agit de rencontres dans tel ou tel village, au beau

 18   milieu de la route. Il s'agissait d'échanges de vues, d'idées sur telle ou

 19   telle question. Je vous ai dit que parlant là-dessus que nous n'avons pas

 20   pu trouver un langage commun en cette matière. Nous n'avons pas pu partager

 21   cette version, je dirais, pousser à l'extrême quant à l'interprétation de

 22   l'islam. Ils étaient prêts à vous dire "il y a quelque chose qui cloche

 23   avec votre foi, votre foi, votre religion n'est pas bonne; alors, là, vous

 24   finissez pas conclure qu'il n'y a plus de dialogue du tout".

 25   Q.  Vous nous parlez des différentes perceptions de la religion. Ces


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  1   étrangers que vous avez rencontrés étaient-ils du courant sunnite ou

  2   chiite.

  3   R.  Il s'agit essentiellement de sunnites, il y avait quelques Chiites,

  4   mais je ne vais peut-être pas rentrer dans les détails historiques

  5   maintenant, ce qui compte c'est la chose suivante, en fait : c'est

  6   l'origine de tous les problèmes que nous voyons aujourd'hui. Il s'agit

  7   d'une attitude particulière. Les Musulmans qui habitent en Europe,

  8   manifestement, apportent avec eux leur propre culture, telle qu'elle est,

  9   leur religion, et quelqu'un qui vit à l'Est a son propre point de vue.

 10   Lorsque ces deux groupes distincts se rencontrent, bien entendu, cela cause

 11   des problèmes. Il faut tenir compte de cela, il y a des gens qui viennent

 12   d'Orient et ils veulent nous aider mais s'ils causent plus de problèmes,

 13   c'est difficile.

 14   Q.  Serait-il juste de dire que la majorité des étrangers que vous avez

 15   rencontrés dans la vallée de la Bila étaient des Sunnites ? Ces gens que

 16   vous avez rencontrés occasionnellement ?

 17   R.  Dans ma --

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.

 19   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je pense que la question n'a pas été bien

 20   formulée car le témoin a déjà répondu et qu'il pouvait rencontrer ces gens

 21   dans la rue. Il n'a jamais parlé de la vallée de la Bila. Par conséquent,

 22   la question telle qu'elle est formulée ne reflète pas vraiment les réponses

 23   données par le témoin aux questions précédentes.

 24   M. NEUNER : [interprétation] Je suis prêt à retirer ma question.

 25   Q.  Vous souvenez-vous de certains noms, surnoms, que ces gens se


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  1   donnaient, "Abu", et ainsi de suite, ces gens avec qui avez parlé.

  2   R.  Oui, je me souviens de certains noms. Mais, ce que vous dites je l'ai

  3   appris par la suite, il s'agit de noms de code en réalité car ils cachaient

  4   leur véritable identité et ceci tend à corroborer le fait que ces mélanges

  5   semaient la confusion.

  6   Q.  Pourriez-vous nous donner certains de ces noms ?

  7   R.  J'ai assisté à une autopsie après un événement survenu à Ahmici ou dans

  8   les environs. L'un de ces Arabes avait été tué. Il s'appelait Abu Sahar.

  9   Son corps a été retrouvé près de ma communauté. Un petit détail à ce sujet.

 10   Apparemment, il était encore en vie, il est décédé en chemin vers

 11   l'hôpital. Une commission d'enquête a été mise en place afin d'enquêter sur

 12   cette affaire, j'étais membres de cette commission. Nous avons examiné le

 13   corps et il présentait sept balles de pistolet. Il avait été tué à bout

 14   portant. Il s'appelait Abu Sahar.

 15   Q.  Est-ce que vous avez d'autres noms en tête. Au début de la guerre, j'ai

 16   rencontré Abu Sahar ou Abu Supe [phon], je ne me souviens pas de son nom

 17   exactement. C'est la première personne que j'ai rencontrée, il a été tué à

 18   Visoko en 1992 dans le courant de l'été 1992, en juillet ou en août, c'est

 19   ce que j'ai entendu. La ligne se trouvait à un endroit, la ligne se

 20   trouvait à Karazici [phon].

 21   Q.  Est-ce que vous pourriez le nom de l'endroit où le corps a été

 22   retrouvé ?

 23   R.  Cekrcic. C'est un peut difficile. C-e-k-r-c-i-c.

 24   Q.  Pour les besoins du compte rendu d'audience, pourriez-vous nous

 25   indiquer l'endroit où Abu Sahar a été retrouvé. Vous avez dit près de votre


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  1   communauté; est-ce que vous pourriez nous dire à quel endroit au juste ?

  2   R.  Tout à l'heure, nous avons regardé la carte. Ma communauté est composée

  3   de trois parties : Zolote, Alihodza et Karahodze.

  4   Près de Karahodze, se trouve un pont qui est appelé le pont de Zukic. Il a

  5   été jeté sur le bas côté de la route enveloppé dans une couverture. L'une

  6   des personnes qui travaillait dans les champs a remarqué cela et l'a

  7   signalé.

  8   Q.  Vous avez déclaré que vous faisiez partie d'une commission d'enquête

  9   chargée de se pencher sur cet incident. Vous nous avez parlé de l'autre

 10   cadavre retrouvé près de Visoko. Avez-vous trouvé des documents, des

 11   papiers sur les corps de ces étrangers décédés ?

 12   R.  En ce qui concerne Abu Sahar à Visoko, j'ai simplement entendu des

 13   informations à son sujet. Donc, je ne sais pas exactement. On m'a parlé de

 14   l'endroit, pour ce qui est d'Abu Sahar, j'étais présent. Aucun papier n'a

 15   été retrouvé sur lui. Je crois que tout ce qu'il avait sur lui avait été

 16   emporté. J'ai eu l'impression qu'on l'avait dépouillé.

 17   Q.  Tout à l'heure en réponse à une question du Président de la Chambre,

 18   vous avez déclaré que vous aviez rencontré quelques Moudjahiddines. Vous

 19   nous avez parlé de deux incidents qui impliquaient des Moudjahiddines. Mais

 20   je vois mon confrère qui est debout.

 21   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Cette série de questions peut semer la

 22   confusion dans l'esprit du témoin. Lorsque mon confrère a posé ces

 23   questions, il a demandé si le témoin avait entendu parler d'incidents dans

 24   lesquels des membres de la 7e Brigade musulmane étaient impliqués, alors

 25   que, maintenant, ceci n'a aucun rapport avec la question qu'on avait posé


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  1   précédemment.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.

  3   M. NEUNER : [interprétation]

  4   Q.  Il s'agit d'une question qui découle des questions posées par le

  5   Président de la Chambre. Il s'agit des contacts que ce témoin avait avec

  6   des Moudjahiddines. Je n'enchaîne pas sur des questions que j'ai posées

  7   dans le cadre de mon contre-interrogatoire. Avec l'autorisation de la

  8   Chambre de première instance, je souhaiterais poser une dernière question

  9   au témoin au sujet de rencontres éventuelles.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Vous pouvez poursuivre.

 11   M. NEUNER : [interprétation]

 12   Q.  Vous souvenez-vous de quelques noms que ce soit de Moudjahiddines que

 13   vous avez rencontré, alors qu'ils étaient encore vivants, si je puis

 14   m'exprimer ainsi.

 15   R.  Celui qui est mort à Visoko, je l'ai rencontré quand il était encore en

 16   vie, Abu Zuher [phon] car lorsqu'il est arrivé vers la mi-juin, il

 17   s'agissait d'un événement assez inhabituel en Bosnie. Compte tenu de la

 18   situation dans laquelle nous nous trouvions. Tous ces meurtres, toutes ces

 19   persécutions avaient lieu et, tout à coup, quelqu'un nous venait en aide.

 20   Comme les gens de chez nous sont accueillants et beaux de nature, ils

 21   étaient prêts à accueillir quelqu'un qui était venu les aider. C'était vers

 22   la mi-juin. Il est arrivé à Visoko en août, je pense. Voilà les

 23   informations dont je dispose.

 24   M. NEUNER : [interprétation] Puis-je poser une dernier question, Monsieur

 25   le Président.


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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : "Your last question."   

  2   M. NEUNER : [interprétation] Merci beaucoup. 

  3   Q.  En réponse à une question posée par le Président de la Chambre tout à

  4   l'heure, vous avez mentionné les différentes pratiques religieuses des

  5   étrangers qui étaient venus en Bosnie et des gens du cru. Vous avez parlé

  6   de courant Sufi, de courant Sunnite, et de courant Chiite. Est-ce que le

  7   courant fait partie du courant Sunnite ou Chiite ?

  8   R.  Sunnite.

  9   M. NEUNER : [interprétation] Merci. L'Accusation n'a plus de questions.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : La Défense.

 11   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Nous n'avons pas de questions, Monsieur le

 12   Président.

 13   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, juste une question

 14   pour que les choses soient bien claires.

 15   Q.  En réponse à une question posée au témoin par le Président de la

 16   Chambre, page 49, ligne 24, vous avez dit que ces combattants étrangers

 17   n'étaient pas membres de la brigade ?

 18   R.  C'est exact.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur, votre audition vient de se terminer.

 20   Au nom des Juges de la Chambre, je vous remercie d'être venu à La Haye pour

 21   témoigner à la demande du Général Kubura. Je formule au nom des Juges nos

 22   meilleurs vœux pour que votre retour dans votre pays s'effectue dans les

 23   meilleures conditions possibles. Je vais demander à M. l'Huissier de bien

 24   vouloir vous raccompagner à la porte de la salle d'audience.

 25   [Le témoin se retire]


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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Avant de clôturer cette audience, parce que je

  2   pense qu'on doit arriver au bout de la bande audio, pour demain la Défense,

  3   est-ce que le témoin sera à la disposition de la chambre ?

  4   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Le témoin

  5   qui doit comparaître demain est prêt et si tout se passe bien, je pense que

  6   nous serons en mesure de terminer avec sa déposition demain, et il sera

  7   inutile d'avoir une audience vendredi. Merci.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Mais, de toute façon, il ne pouvait pas y

  9   avoir d'audience vendredi parce que nous avons pris acte de votre désir

 10   qu'il n'y ait pas d'audience le vendredi. Dans les quelques minutes qui

 11   restent, est-ce que les parties voudraient soulever un problème

 12   quelconque ?

 13   Monsieur Mundis. Pas de problèmes ? Pas de questions ?

 14   M. MUNDIS : [interprétation] Pas de problèmes. Pas de questions, Monsieur

 15   le Président.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Concernant la Défense, cela doit être pareil ? Bien.

 17   Alors je vous remercie.

 18   Mme RESIDOVIC : [interprétation] C'est pareil.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous invite à revenir pour l'audience qui

 20   débutera demain à 9 heures.

 21   --- L'audience est levée à 13 heures 35 et reprendra le jeudi 14 avril

 22   2005, à 9 heures 00.

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