Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le lundi 21 février 2005

2 [Audience publique]

3 --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

5 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Veuillez citer le numéro de l'affaire,

6 s'il vous plaît, Madame la Greffière d'audience.

7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour. Il s'agit de l'affaire IT-01-

8 48-T, le Procureur contre Sefer Halilovic.

9 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci beaucoup.

10 Bonjour, Mesdames et Messieurs. Je crois que les parties ont reçu les notes

11 de récolement s'agissant du témoin suivant de l'Accusation et la

12 déclaration sous serment soumise par l'enquêteur du bureau du Procureur, de

13 même que le rapport soumis par l'Unité chargée des Victimes et des Témoins.

14 Maître Morrissey, est-ce que vous avez quelque chose à ajouter à ce stade ?

15 M. MORRISSEY : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Nous avons reçu

16 les rapports et, sur la base de ceux-ci, je vais interroger le témoin. Je

17 ne vais pas demander que vous modifiez votre décision à ce stade, mais je

18 souhaite dire que le Procureur a forcé la main de ce Tribunal à plusieurs

19 reprises, et le Tribunal ne peut pas renvoyer facilement les allégations

20 selon lesquelles les menaces ont été proférées à l'encontre d'un témoin,

21 car peut-être ces menaces peuvent être réalisées.

22 Visiblement, le Procureur en fait une pratique, ce qui accroît le danger.

23 Ceci met la Défense également dans une position impossible, et il n'est pas

24 acceptable que le Procureur soulève ce genre de problèmes à un stade aussi

25 tardif. Je pense que cela devient clair sur la base des documents que vous

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1 avez devant vous. Il aurait fallu en parler il y a deux semaines. Donc, je

2 ne vous propose pas, en raison de cela, de modifier votre décision. Je vais

3 contre-interroger ce témoin.

4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci beaucoup de votre coopération, qui

5 est tout à fait appréciée. Je suis d'accord avec vous pour dire que, si un

6 témoin demande des mesures de protection, il faut le faire savoir aussi

7 vite que possible.

8 Donc, nous avons pris nos décisions concernant les mesures de protection

9 pour le témoin suivant, et ces mesures ne vont pas être modifiées.

10 Peut-on faire entrer le témoin, s'il vous plaît.

11 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

13 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

14 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Veuillez lire la déclaration solennelle,

15 s'il vous plaît.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

17 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

18 LE TÉMOIN: TÉMOIN D [Assermenté]

19 [Le témoin répond par l'interprète]

20 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci beaucoup. Veuillez vous asseoir.

21 Oui, Madame Chana.

22 Mme CHANA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

23 Je souhaite que l'on remette au témoin la feuille avec le pseudonyme.

24 Interrogatoire principal par Mme Chana :

25 Q. Bonjour, Monsieur le Témoin, est-ce que vous voyez cette feuille qui

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1 est devant vous ?

2 R. Oui, je vois.

3 Q. Est-ce que votre nom, votre date de naissance, et lieu de naissance y

4 figurent ?

5 R. Oui.

6 Q. Merci, Monsieur le Témoin.

7 Mme CHANA : [interprétation] Peut-on verser cela au dossier de manière

8 confidentielle, s'il vous plaît ?

9 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je crois qu'il n'y a pas d'objections de

10 la part de la Défense.

11 Oui, ce document est versé au dossier.

12 Mme CHANA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

13 Avec votre permission, Monsieur le Président, je vais poser quelques

14 questions directrices au témoin.

15 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La feuille avec le pseudonyme sera la

16 pièce à conviction de l'Accusation P183, versée de manière confidentielle.

17 Mme CHANA : [interprétation]

18 Q. Avant la guerre, vous viviez à Sarajevo; est-ce exact ?

19 R. Oui.

20 Q. Vous avez travaillé comme garçon de café ?

21 R. Oui.

22 Q. Vous avez terminé votre école secondaire et vous avez fait des études

23 dans l'hôtellerie et la restauration pendant quatre ans.

24 R. Oui.

25 Q. De 1987 à 1988, vous avez fait votre service militaire au sein de la

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1 JNA, l'armée populaire yougoslave, en tant que cuisinier.

2 R. Oui.

3 Q. Le 6 avril 1992, vous avez rejoint les rangs de la Défense territoriale

4 dans la vieille ville, Stari Grad de Sarajevo, la municipalité de Stari

5 Grad.

6 R. Oui.

7 Q. Vous faisiez partie d'un groupe de 30 personnes constitué surtout des

8 voisins qui gardaient les familles et patrouillaient dans les rues de la

9 ville.

10 R. Oui.

11 Q. En mai 1992, vous êtes devenu membre de la 1re Brigade de Sandzak.

12 R. Oui.

13 Q. Qui était le commandant de cette brigade ?

14 R. Merdzo Haznadar [phon].

15 Q. Est-ce que vous pouvez me dire, Monsieur le Témoin, à la fin de 1992 et

16 le début de 1993, qu'avez-vous fait ?

17 R. Fin 1992, début 1993, nous avons quitté la Brigade de Sandzak et nous

18 avons commencé à servir dans l'Unité de la Police militaire dont le

19 commandant était Ramiz Delalic. Elle était à l'école de Vratina.

20 Q. Comment s'appelait cette brigade ?

21 R. Il s'agissait de l'unité de la police militaire. Par la suite, sur la

22 base de cette Unité de la Police militaire, on a créé une brigade qui

23 s'appelait la 9e Brigade motorisée.

24 Q. Vous avez dit que le commandant était Ramiz Delalic.

25 R. Non, pas de la 9e Brigade motorisée. Ramiz Delalic était l'adjoint du

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1 commandant, et le commandant était Suljovic.

2 Q. Est-ce que vous étiez dans une unité en particulière de cette 9e

3 Brigade ?

4 R. J'étais dans le Détachement d'assaut.

5 Q. Combien de soldats faisaient partie de ce détachement d'assaut dans le

6 cadre de votre brigade ?

7 R. Environ 50 à 60.

8 Q. Quelle est la fonction et le but d'une Unité d'assaut ?

9 R. Le but et la fonction de l'unité d'assaut était de servir dans le cadre

10 des opérations de combats, donc seulement les actions et non pas les

11 tranchées et le maintient des lignes.

12 Q. Est-ce que vous étiez bien équipés ?

13 R. Qu'est-ce que vous voulez dire par là ? Nous étions équipés en tant

14 qu'unité. Nous avions plutôt des armes appropriées.

15 Q. Quelles armes aviez-vous ?

16 R. Nous avions des lances-mines [phon], des fusils automatiques, des RPG.

17 Q. Que faisiez-vous en septembre 1993 ? Là, je parle de cette unité, de

18 cette brigade, dont vous faisiez partie.

19 R. Au mois de septembre, plus exactement le 7 septembre, le commandement

20 de notre brigade, dans la rue de Trampina, nous a transmis l'ordre

21 donné par le commandement Suprême, avec

22 M. Sefer Halilovic à sa tête, que nous devions aller à Mostar pour lever le

23 blocus dans le cadre de l'opération Neretva. C'est ce jour-là que

24 nous avons reçu cet ordre, et dans l'après-midi, nous sommes partis.

25 Nous avons pris des voitures jusqu'au tunnel, nous avons traversé le

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1 tunnel --

2 Q. Excusez-moi de vous interrompre, Monsieur le Témoin. Je souhaite que

3 l'on traite de cela plus lentement. Est-ce que vous pourriez nous

4 dire ce que vous voulez dire par "nous avons reçu l'ordre" ?

5 R. Notre brigade a reçu l'ordre du commandement Suprême, de l'état-major,

6 avec M. Sefer Halilovic à la tête. Cet ordre existe par écrit encore

7 aujourd'hui, c'est à Sarajevo; vous avez certainement un homme qui

8 viendra déposer de cela, selon lequel il fallait que l'on aille lever

9 le blocus de Mostar dans le cadre de l'opération Neretva.

10 Q. Est-ce que quelqu'un vous a parlé de cet ordre, ou est-ce que chacun de

11 vous l'a reçu personnellement ?

12 R. Non. On nous en a parlé au sein de la brigade. Dans le commandement,

13 ils nous ont alignés avant notre départ et ils nous ont dit que nous

14 avons reçu l'ordre selon lequel il fallait que l'on aille en

15 Herzégovine.

16 Q. Qui vous a dit cela ? Quel est le nom de la personne ?

17 R. Avant notre départ, ce jour-là, est venu M. Vahid Karavelic, le

18 commandant du corps d'armée, puis notre adjoint du commandant, et le

19 commandant de la Brigade, Suljo Imsirevic, donc Ramiz Delalic, son

20 adjoint, et ce sont eux qui ont lu cet ordre en question.

21 Q. Est-ce que Celo était là ?

22 R. Oui, Ramiz Delalic.

23 Q. Combien de soldats étaient regroupés lorsque l'on vous a dit cela ?

24 R. Environ 50 à 60 soldats. Mais 25 ou 30 de ces soldats faisaient partie

25 de notre détachement d'assaut.

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1 Q. Les autres, ils venaient de quelles unités ?

2 R. Notre brigade, mais d'autres bataillons. Parce que notre brigade avait

3 5 000 soldats donc il n'était pas possible de connaître tout le monde. Il y

4 avait des soldats qui faisaient partie de la brigade et qui sont devenus

5 commandants de ces bataillons.

6 Q. Donc ils faisaient tous partie de la 9e Brigade motorisée; c'est

7 exact ?

8 R. Oui, tous.

9 Q. Qu'est-ce qui vous a été dit exactement, aux personnes réunies ?

10 R. Nous avons reçu l'information qu'il fallait qu'on aille en Herzégovine

11 afin de lever le blocus de Mostar. Quant à la suite, nous allions

12 l'apprendre une fois en Herzégovine. Nous allions faire partie d'une autre

13 zone de responsabilité donc notre commandant n'allait pas nous commander,

14 mais Zulfikar Alispago. Nous allions être placés sous son commandement, et

15 le chef de cette opération allait être le commandant Sefer Halilovic.

16 Q. Quel était le nom de cette opération ?

17 R. L'opération Neretva.

18 Q. C'est ce qu'on vous a dit; est-ce exact ?

19 R. Oui.

20 Q. Vous alliez dans la zone de responsabilité de qui ?

21 R. Du 4e ou du 6e Corps d'armée. Je ne suis pas sûr, car ils se sont reliés

22 à un moment. Il y avait le commandant du 6e Corps d'armée, Salko Gusic, et

23 puis le commandant du 4e Corps d'armée, je pense que c'était M. Drekovic.

24 Q. Connaissiez-vous déjà Sefer Halilovic ?

25 R. Oui.

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1 Q. Comment le connaissiez-vous ?

2 R. Il venait dans notre brigade, notre commandement, notre état-major. Il

3 visitait cette brigade.

4 Q. Qui était-il ?

5 R. Il était le chef d'état-major. Il n'était pas le commandant en chef de

6 l'armée, mais le chef d'état-major, car avant l'arrivée de M. Rasim Delic,

7 cette fonction, d'après la structure réglementaire, n'existait pas.

8 Q. Est-ce qu'il avait d'autres fonctions ?

9 R. Je ne le sais pas.

10 Q. Pouvez-vous me dire ce qui s'est passé ensuite ?

11 R. Que voulez-vous dire par là ? Après que nous sommes partis de la

12 brigade ?

13 Q. Oui. Là, vous avez parlé du 7 septembre. Est-ce que vous êtes partis le

14 même jour ?

15 R. Oui. Le même jour, nous sommes partis dans la soirée, vers 7 heures du

16 soir, car il était risqué de passer par Dobrinja à cause des tirs. Il était

17 risqué d'arriver jusqu'au tunnel. Nous sommes partis, nous avons pris une

18 petite voiture. Il y avait plusieurs soldats dans chaque voiture. Nous

19 sommes arrivés jusqu'au tunnel, nous avons traversé le tunnel, et puis

20 ensuite, nous sommes arrivés à Hrastici où nous avons été accueillis par

21 Fikret --

22 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu le nom de famille.

23 R. Ensuite, il était censé nous organiser le transport jusqu'à Jablanica.

24 Mme CHANA : [interprétation]

25 Q. Qui a voyagé avec vous, lesquels des commandants ?

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1 R. Seulement Ante Delalic [phon] et le commandant du peloton.

2 Q. Qui était-ce ?

3 R. Malco Rovcanin, Nihad Vlahovljak, mon commandant de peloton, Nezad

4 Sabanovic, et puis d'autres dont je ne me souviens plus des noms. Les

5 soldats qui étaient avec nous, je connais quelques noms. Je peux vous les

6 dire, si vous voulez.

7 Q. Oui. Est-ce que vous pouvez nous dire les noms des soldats dont vous

8 vous souvenez.

9 R. Nedzad Mihajlovic, Erdin Arnautovic, Nevzet Sabanovic, Lito Stamje

10 [phon], Samir Pilica, Jasmin Mendic [phon], Hukelic Ertan, Rovcanin Malco

11 et d'autres.

12 Q. Etes-vous arrivés jusqu'à un certain village tôt dans la matinée ?

13 R. Le 8 octobre, nous arrivons à Donja Jablanica, placé sous le

14 commandement de Zulfikar Alispago; c'était là son commandant. Lui, il nous

15 a accueillis là-bas. C'était 7 heures ou 8 heures à peu près. Nous y avons

16 pris notre petit déjeuner, et Zuka a dit qu'il allait nous installer dans

17 ce village de Grabovica.

18 Après, nous avons monté à bord de ces camions, les mêmes camions que nous

19 avions pris depuis Hrasnica, et nous sommes allés dans le village de

20 Grabovica et il nous a installés là-bas. Il y avait des civils croates du

21 côté droit, et du côté gauche, il y avait des réfugiés musulmans.

22 Q. Avez-vous passé par un point de contrôle ? Est-ce que quelque chose

23 s'est passé --

24 M. MORRISSEY : [interprétation] Objection. Vous vous souviendrez, Monsieur

25 le Président, que mes éminents collègues de l'Accusation, M. Re et M.

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1 Weiner, ont déjà essayé de poser des questions directrices concernant ce

2 point de contrôle avec plusieurs autres témoins. Je pense que c'est

3 complètement sans pertinence. Ceci ne concerne aucun fait matériel donc je

4 fais objection, car ceci est sans pertinence.

5 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je ne pense pas. Je pense que le témoin

6 précédent a déjà déposé au sujet de ce point de contrôle.

7 M. MORRISSEY : [interprétation] Peut-être. Cela dépend du point de contrôle

8 en question. Peut-être mon éminente collègue pourrait expliquer cela.

9 Car j'ai déjà fait objection au point de contrôle qui était pertinent.

10 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui. Je pense qu'il faut expliquer.

11 Mme CHANA : [interprétation] Merci.

12 Q. Est-ce que vous êtes allés à un point de contrôle pendant votre voyage

13 avant d'arriver à Grabovica ?

14 M. MORRISSEY : [interprétation] Je souhaite clarifier les choses. Je ne

15 fais pas objection à ce que l'on pose des questions au sujet des points de

16 contrôle après Jablanica, sur la route de Grabovica. Visiblement, que c'est

17 pertinent. Mais ce qui s'est passé entre Hrasnica et Jablanica fait l'objet

18 de certaines controverses. Peut-être mon éminente collègue pourrait

19 clarifier cela.

20 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui. Veuillez clarifier cela.

21 Mme CHANA : [interprétation]

22 Q. Je parle du village de Pazaric.

23 M. MORRISSEY : [interprétation] En ce qui concerne Pazaric, c'est ce qui

24 s'est passé avant l'arrivée de Grabovica donc je fais objection, car c'est

25 sans pertinence.

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1 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Quelle est la pertinence de ce point de

2 contrôle ?

3 Mme CHANA : [interprétation] La pertinence de ce point de contrôle concerne

4 le comportement des soldats, et c'est directement pertinent dans le cadre

5 de cette affaire.

6 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Est-ce que vous avez d'autres questions

7 concernant cela ?

8 Mme CHANA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

9 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Peut-être nous allons voir nous-mêmes si

10 c'est pertinent ou pas.

11 Mme CHANA : [interprétation] Oui.

12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Madame Chana.

13 Mme CHANA : [interprétation] Merci.

14 Q. Vous avez parlé d'un point de contrôle. Est-ce que vous êtes arrivés à

15 un point de contrôle avant d'arriver là-bas ?

16 R. A Jablanica ou avant ?

17 Q. Avant.

18 R. Avant Jablanica, il y avait un point de contrôle à Pazaric. Je ne me

19 souviens pas de l'endroit tout à fait. Il y avait un point de contrôle à

20 l'endroit où la route bifurque vers Igman et puis la route principale vers

21 Hadzici. Il y avait un point de contrôle. Il y avait de la police

22 militaire, et ils nous ont arrêtés. C'était tôt dans la matinée, 3 heures,

23 peut-être.

24 M. MORRISSEY : [interprétation] Attendez, je fais objection.

25 A moins que mon éminente collègue indique que Sefer Halilovic était à cet

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1 endroit et était au courant de cela, je maintiens mon objection, car ceci

2 est sans pertinence et il ne revient pas à l'Accusation de prouver, dans le

3 cadre de cette affaire, qu'un certain comportement a eu lieu et qu'une

4 certaine ambiance existait, à moins que Sefer Halilovic n'était pas là, et

5 n'était au courant de cela.

6 Donc, si l'Accusation maintient qu'il était au courant de ce qui

7 s'est passé au point de contrôle de Pasaric, il faut le dire; sinon, c'est

8 sans pertinence.

9 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

10 Mme CHANA : [interprétation] Monsieur le Président, avec tout le respect

11 que je vous dois, ceci fait partie de la tête de l'Accusation, le

12 comportement de ce soldat, et la manière dont il se comportait sur la

13 route.

14 Je ne vois pas pourquoi il serait important de dire que Sefer

15 Halilovic était là, et pourquoi nous ne pourrions pas, à moins de dire

16 cela, traiter de ce genre de situation, car ceci porte sur l'ambiance dans

17 laquelle sont partis ces soldats pour mener cette opération de combat.

18 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je ne pense pas qu'il s'agit-là d'une

19 partie de la déposition très importante, mais je pense que ceci peut être

20 utile également pour la Défense à l'avenir. Donc, je vais vous permettre de

21 poursuivre.

22 Mme CHANA : [interprétation] Merci.

23 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire ce qui s'est passé à ce point de

24 contrôle ?

25 R. Tout d'abord, je dois dire que ce point de contrôle existait dès le

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1 début de la guerre. Il s'agissait d'une certaine frontière vers Hadzici et,

2 dès le début de la guerre et la libération d'Igman, il y avait ce point de

3 contrôle. Puis il y a eu un petit incident à ce point de contrôle à cause

4 d'un certain désaccord entre mes collègues combattants et les soldats qui

5 étaient à ce point de contrôle. Peut-être ils étaient ivres ou nerveux. Ils

6 ne souhaitaient pas nous laisser passer, et ils nous ont demandé des

7 laissez-passer spéciaux car, à ce moment-là, les soldats de l'ABiH fuyaient

8 la Bosnie-Herzégovine.

9 Q. Mais qui était ivre et nerveux ?

10 R. Les soldats qui se trouvaient au point de contrôle, qui le gardaient.

11 Q. Qu'est-ce qui s'est passé ?

12 R. Il y a eu un certain conflit et, après, ils nous ont laissé passer.

13 Q. Est-ce qu'on a tiré des coups de feu dans le cadre de ce conflit ?

14 R. Je ne sais pas. Je ne me souviens pas.

15 Q. Très bien. Poursuivons. Vous êtes allé à la base de Zuka, vous avez

16 dit. Qui avez-vous rencontré là-bas ?

17 R. Il y avait M. Zuka, qui était responsable de nous reprendre notre unité

18 et, en fait, nous faisions partie de son commandement. Nous relevions de

19 son commandement.

20 Q. Qui est Zuka ? Est-ce que vous le connaissiez déjà ?

21 R. Je connaissais Zuka depuis 1992, le mois de novembre, lorsque nous

22 sommes allés à Igman. Une offensive devait avoir lieu à Junavica [phon]. Il

23 y avait un entrepôt militaire, plusieurs entrepôts militaires avec des

24 armes là-bas, et les agresseurs y étaient. Donc, je l'ai rencontré Zuka là-

25 bas. Nous y avons passé environ 15 à 20 jours et, ensuite, nous sommes

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1 rentrés â Sarajevo car il y avait beaucoup de neige.

2 Q. Vous avez déjà dit aux Juges que Zuka allait devenir votre commandant

3 dans le cadre de cette opération.

4 R. Oui.

5 Q. Mais savez-vous qui était le commandant de Zuka ?

6 R. Je ne sais pas exactement. Est-ce que c'était Salko Gusic, ou le

7 commandant du 4e Corps, Drekovic ? Ces deux corps ont été réunifiés plus

8 tard et, à partir de cette date-là, c'est M. Sefer Halilovic qui a eu la

9 responsabilité de l'opération.

10 Q. Donc, il était le commandant de Zuka, n'est-ce pas ?

11 M. MORRISSEY : [interprétation] Ecoutez, vous voyez sur quoi je vais faire

12 objection. Le témoin dépose et mon estimé consoeur, exactement dans une

13 question directrice, lui pose une question qui n'est pas du tout autorité.

14 Objection.

15 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je pense, effectivement, Madame Chana,

16 que votre question est de nature à guider le témoin, dans une certaine

17 mesure.

18 Mme CHANA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

19 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Madame Chana.

20 Mme CHANA : [interprétation]

21 Q. Qui était le commandant de l'opération à laquelle vous aviez

22 participé ?

23 R. Le commandant principal de l'opération est Sefer Halilovic. Il s'agit

24 de l'opération Neretva.

25 Q. Vous avez dit vous êtes rendus à Grabovica. Pouvez-vous nous dire ce

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1 qui s'est passé lorsque vous êtes trouvés sur les lieux ?

2 R. Nous sommes partis en camion, et rien ne s'est passé. Tout de suite,

3 nous sommes arrivés à ce village. On nous a donné des couvertures. Nous

4 avons été reçus par les civiles de la localité, qui nous ont accueillis

5 comme si on était des leurs, de leurs familles. C'est comme cela que nous

6 avons passé toute la journée, jusqu'à l'après-midi du 9.

7 Q. Il y avait des civils -- d'abord, de quel l'appartenance ethnique était

8 ces civils ?

9 R. Les civils chez qui on a été logé étaient des Croates.

10 Q. Mais, mis à part ces civils, qui avez-vous vu ?

11 R. Dans ce village, il y avait des réfugiés musulmans. Dans une maison, en

12 fait, je pense qu'il y en avait quatre. Je ne suis pas plus précis. Oui,

13 oui, je suis sûr qu'il y en avait quatre.

14 Excusez-moi, c'était des réfugiés, et ils avaient été accueillis par les

15 Croates de la localité, qui avaient partagé leurs demeures avec eux.

16 Q. Mais est-ce qu'il y avait d'autres soldats sur les lieux à votre

17 arrivée à Grabovica ?

18 R. Il y avait le 2e Bataillon indépendant de Solakovic. Il y avait les

19 hommes de Zuka, les Loups de Celo et, un peu plus loin, il y avait les

20 soldats de la Division Handzar.

21 Q. Vous, où avez-vous réussi à vous loger ?

22 R. J'étais logé dans une maison désaffectée, qui n'avait pas de toit à

23 l'époque et n'a toujours pas aujourd'hui. Il y a eu des maisons qui ont été

24 reconstruites, mais celle-là est restée désaffectée. Il l'était à l'époque

25 -- elle était dans un état assez négligée.

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1 Mme CHANA : [interprétation] Monsieur le Témoin, je vais vous montrer la

2 pièce P4. C'est une photographie qui va s'afficher a l'écran. Là voici.

3 Q. Est-ce que vous le voyez ?

4 R. Oui.

5 Mme CHANA : [interprétation] Je vais demander au témoin d'indiquer

6 l'emplacement de certaines maisons. Je vais demander qu'on lui présente un

7 exemplaire, une copie papier.

8 Q. Je vais vous demander de faire ceci, Monsieur le Témoin. Je vais vous

9 demander d'entourer d'un cercle la maison où vous avez été logés, et je

10 vais vous demander d'y apposer le chiffre "1".

11 R. [Le témoin s'exécute]

12 Q. Pourriez-vous nous dire qui était logé dans la même maison que vous ?

13 R. Il y avait Arnautovic Erdin, Malco Rovcanin et Ramiz Delalic, qui ont

14 passé une nuit dans cette maison. Moi aussi, j'ai été logé. C'est lorsque

15 les enfants se sont enfuis du village, avant le massacre.

16 Q. Je vais vous demander de regarder cette question, une fois de plus,

17 pour nous dire où les autres soldats avaient été logés. Pourriez-vous nous

18 dire de quelle maison vous vous souvenez, et qui était les hommes qui

19 avaient été logés ? Si vous les repérez sur la photo, tracez un cercle et

20 apposez le chiffre "2".

21 R. Dans cette maison-ci, c'est là qui était logé le

22 2e Bataillon indépendant. Les hommes de Solakovic, qui était le commandant

23 de ce Bataillon indépendant et, dans cette maison-ci que je trace

24 maintenant, il y avait Hasid Basovic, Fikret Kraljevic, Hota Mustafa.

25 Q. Y avait-il d'autres maisons ?

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1 R. Il y avait une maison ici, mais on la voit pas vraiment, ou plusieurs.

2 Q. Oui.

3 R. Voilà au numéro 4. Sulejman Lujinovic avait été logé à cet endroit

4 ainsi qu'un certain Crni - je ne connais pas son nom de famille - et Nedzad

5 Muhanovic, qui, en fait, se sont déplacés dans le village. Nihad

6 Vlajhovljak peut-être a logé ici avec d'autres combattants.

7 Mme CHANA : [interprétation] Je ne sais pas si les annotations sont très

8 claires, Messieurs les Juges. On voit bien 1, 2, 3, 4 --

9 Q. Très bien. Merci.

10 R. [Le témoin s'exécute]

11 Q. Est-ce que vous reconnaissez sur cette photo d'autres maisons ?

12 R. Il y avait une autre maison ici.

13 [Le témoin s'exécute]

14 C'est là que les hommes de l'Unité de Génie dormaient. Il y avait une Unité

15 de Génie sur place et c'est là que ces hommes dormaient.

16 Q. Ce serait numéro 6 ?

17 R. Oui. Puis il y avait les maisons où habitaient les civils qui

18 habitaient le village, mais il y avait une autre maison en sur plan de la

19 voie ferrée.

20 Q. Toutes ces maisons que vous avez indiquées. Elles étaient occupées par

21 qui ? Qui y habitaient ?

22 R. C'étaient des Croates qui habitaient dans toutes ces maisons. C'étaient

23 les habitants du village. Avant il y avait eu des Unités de la JNA qui

24 avaient libéré le village, mais cela c'était passé quelques mois plus tôt.

25 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

Page 18

1 Mme CHANA : [interprétation] Je vais demander le versement de cette pièce,

2 Monsieur le Président.

3 M. MORRISSEY : [interprétation] Pas d'objection.

4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] La pièce est déclarée reçue au dossier.

5 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce de l'Accusation P184.

6 Mme CHANA : [interprétation] Merci.

7 Q. Monsieur, après vous être rendu dans cette maison, qu'avez-vous fait ?

8 R. Lorsque je suis arrivé dans cette maison, et tous ceux qui

9 m'accompagnaient, qui étaient avec moi, je les ai nommés et qui ont dormi

10 dans la même maison n'étaient pas là. J'étais seul. J'ai nettoyé la maison

11 toute la journée de façon à ce que nous puissions avoir un endroit où

12 dormir.

13 Q. Vous avez nettoyé cette maison et qu'avez-vous fait ?

14 R. Je suis allé dans la maison qui était juste de l'autre côté -- pas en

15 contrebas de la route -- là où nous avons pris un café. J'y étais avec

16 d'autres combattants et certains habitants du coin.

17 Q. Vous êtes allés dans la maison de qui ?

18 R. Dans cette maison, il y avait un homme qui y vivait, un homme âgé, qui

19 avait cette maladie. Je ne sais pas, vous savez on a peu la tremblette.

20 Q. Mis à part ce vieux monsieur, qui avait-il dans cette maison ?

21 R. Il y avait des réfugiés musulmans, un homme, sa femme et deux enfants

22 et ces enfants devaient avoir 12 ou 13 ans. Il y avait Mustafa, Fikret

23 Kraljevic, Nevzet Sabanovic. En fait, on y était tous. On était assis,

24 attablés, on prenait un café et on faisait des plaisanteries.

25 Q. Mis à part tout cela, le fait d'être attablé, de vous entretenir avec

Page 19

1 ces gens, qu'avez-vous fait dans cette maison ?

2 R. Etant donné que de ces jours-là, on avait rien de bon à manger, les

3 habitants de la localité nous ont offert de l'agneau, en fait, ils nous ont

4 donné leur mouton afin que nous puissions avoir quelque chose à manger ce

5 jour-là.

6 Q. Qu'est-ce que vous avez fait à ce moment-là ?

7 R. Je suis retourné à la maison où j'ai continué à nettoyer parce qu'elle

8 était vraiment en très mauvais état cette maison.

9 Q. Où avez-vous dormi ? Ou avez-vous passé cette nuit-là ?

10 R. Erdin Arnautovic a dormi à l'extérieur parce qu'on a passé plus de

11 temps à l'extérieur qu'à l'intérieur, parce qu'à l'intérieur il faisait

12 très sale et cela puait. Les autres soldats ont dormi dans les autres

13 maisons où là ils ont été, bon vu les circonstances, assez bien logés.

14 Q. Est-ce que vous avez entendu quelque chose pendant la nuit ?

15 R. Il ne s'est rien passé pendant la nuit. Il n'y avait aucune action de

16 meurtres, d'assassinats pendant toute la nuit du 8 au 9, tout est resté

17 très paisible.

18 Q. Que s'est-il passé le lendemain ? Qu'est-ce que vous avez fait le

19 matin ?

20 R. Le lendemain, nous nous sommes levés, nous avons pris un café, on a

21 parlé, on a conversé jusqu'à midi. A ce moment-là, Vehbija Karic, Sefer

22 Halilovic, et Zuka, et d'autres commandants du commandement Suprême, qui

23 étaient présents, sont venus. Ils nous ont alignés toutes les unités qui

24 étaient là, ces personnes ont dû se placer devant la maison où j'avais

25 dormi parce que là, disons qu'il y avait une espace plat et dégagé où il

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1 était possible d'organiser l'alignement des effectifs.

2 Q. Je vais vous demander de faire preuve de patience et de reprendre ces

3 éléments lentement. Karic et Sefer Halilovic, avez-vous dit, et Zuka sont

4 venus, donc Ramiz, ainsi que Ramiz Delalic.

5 M. MORRISSEY : [aucune interprétation]

6 M. LE JUGE LIU : [aucune interprétation]

7 M. MORRISSEY : [interprétation] Il n'a pas parlé de Ramiz Delalic.

8 Mme CHANA : [interprétation] Excusez-moi.

9 Q. Est-ce que Ramiz Delalic était là ?

10 M. MORRISSEY : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

11 Messieurs les Juges, je m'excuse de voir dire ces choses élémentaires, mais

12 j'en suis dans l'obligation. Soufflez la réponse qu'on attend du témoin par

13 ce genre de questions c'est quelque chose de très grave dans un procès

14 comme le nôtre. Ce n'est pas là un écart de langage, un oubli, c'est

15 inautorisable[phon].

16 Je ne veux pas ici vouloir faire objection toutes les 30 secondes à ce

17 genre de chose. Je ne voudrais pas le répéter. Je ne peux rien faire

18 d'autre. Je dois le faire chaque fois que cela se présente, mais je vous

19 demande de tenir compte de ce qui semble être quelque chose de systématique

20 dans la façon de poser les questions, d'où l'objection.

21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Madame Chana. Oui, Madame Chana, on

22 arrive là à la pièce de résistance à la partie la plus importante de cette

23 déposition. Veillez au grain lorsque vous posez des questions.

24 Mme CHANA : [interprétation] Oui, excusez-moi. Je tiens compte de ce que

25 vous dites. J'avais entendu le témoin dire cela. Mais je vais le vérifier

Page 21

1 sur le compte rendu.

2 M. LE JUGE LIU : [aucune interprétation]

3 Mme CHANA : [interprétation]

4 Q. Pourriez-vous nous donner le nom de toutes les personnes que vous avez

5 vu venir, un a un, s'il vous plaît ?

6 R. Sefer Halilovic, Vehbija Karic, Zulfikar Alispago. Ramiz Delalic

7 n'était pas là. Il est venu plus tard, lorsqu'on a trouvé les enfants. Je

8 le souligne parce qu'on a eu quelques difficultés avec l'homme à qui j'ai

9 fait une déclaration, à ce Nikolai. Je ne sais pas ce qui s'est passé, à ce

10 moment-là, parce que Ramiz Delalic est venu après que tous ces meurtres,

11 tous ces événements se sont passés, après tout ce qui s'est passé à

12 Grabovica, tout s'est passé en dehors de sa présence. Il est venu seulement

13 au moment où les enfants étaient amenés.

14 Il y avait d'autres commandants sur les lieux. Ils étaient assis sur

15 une bordure devant la maison où j'ai dormi. Ils étaient assis sur la

16 bordure, Sefer est assis sur une chaise. Les autres étaient sur cette

17 bordure de béton, ou étaient accroupis.

18 Il y avait 100, 150 hommes. Les commandants des unités ont fait venir

19 ses hommes. Ils leurs ont parlé de ce qu'allait être l'offensive. Il y

20 avait cette opération Neretva, qui devait lever le siège de Mostar. M.

21 Sefer Halilovic a pris la parole.

22 Q. Je vous interrompe, parce que je voudrais que nous parcourions

23 ces éléments lentement, et je vais vous répondre à mes questions, et tout

24 sera dit en temps utile.

25 Mis à part les trois commandants que vous avez mentionné par --

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1 nommément, qui étaient les autres ? Parce que vous avez dit qu'il y en

2 avait six. Vous les connaissez ?

3 R. Il y avait Salko Gusic, et il y avait les Loups de Celo. Je ne

4 sais pas comment le commandant s'appelait. Il y avait la Division Handzar.

5 Je ne connaissais pas le nom du commandement. Je ne connaissais pas leur

6 nom, mais je pense que les Loups de Cedo avait à leur tête M. Sadic. Je

7 pense que c'est cela, son patronyme.

8 Q. Est-ce que vous connaissiez Vehbija Karic avant de le voir ce

9 jour-là ?

10 R. Je me souviens très bien de Vehbija Karic par les médias avant le

11 début de l'agression contre la Bosnie-Herzégovine. Lorsqu'on a déployé des

12 canons au-dessus de Sarajevo, c'était un artilleur -- artillerie.

13 Vehbija Karic, lorsqu'on lui a demandé pourquoi les canons étaient

14 placés comme ils l'étaient, il a dit que c'était à cause de la Défense de

15 la ville. Je sais qu'il était le commandant de l'artillerie dans la ville.

16 C'est comme cela que je le connais, même si franchement ce n'était pas

17 véritablement une artillerie, pour vous dire la vérité.

18 Q. Mais est-ce que vous personnellement, mis à part ce que vous en saviez

19 pas les médias, est-ce que vous l'aviez déjà vu ?

20 R. Oui, j'avais coutume de le voir dans les différentes cantines à l'état-

21 major lorsqu'il est venu voir différentes unités.

22 Q. Ces gens, comment sont-ils arrivés là ?

23 R. Ils ont été amenés en jeep. Je veux dire, ils ont été amenés à

24 Grabovica en jeep. Ils venaient de la direction de Jablanica. Je ne sais

25 pas d'où ils étaient partis.

Page 23

1 Q. Qui conduisaient ces jeeps ?

2 R. C'était un homme que je connaissais très bien qui conduisait le

3 véhicule de Sefer. Cet homme s'appelait -- plutôt, son surnom, c'était

4 Mesko. Je ne connais pas son nom. L'autre jeep a été conduite par Dino.

5 Q. J'aimerais vous montrer la pièce P7. Monsieur le Témoin, vous allez

6 voir, c'est une photographie.

7 M. MORRISSEY : [interprétation] Auparavant, j'aimerais une précision de

8 l'identité de cette personne, de ce Dino, parce que nous avons déjà eu un

9 Dino. Je me demande --

10 M. LE JUGE LIU : [aucune interprétation]

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Edin Arnautovic, surnommé Dino.

12 Mme CHANA : [interprétation] Monsieur le Témoin, veuillez examiner la

13 photographie, la pièce P7. Pourriez-vous entourer d'un cercle l'endroit où,

14 d'après vous, s'est tenu cette -- ce rassemblement auquel sont venu les

15 commandants ?

16 R. Voyez, ces arbres n'existaient pas à l'époque. Il y avait que cet

17 espace plat. Les commandants se sont réunis, c'est là qu'ils étaient assis

18 tous. Je vous indique ici d'un cercle l'endroit où se trouvait l'armée. A

19 ce moment-là, ce n'était pas boisé. Sefer, Vehbija Karic, Zuka, Gusic, et

20 les autres commandants qui étaient présents là étaient assis. Sefer était

21 ici, à peu près. Je vous montre l'angle, à peu près -- ou le coin.

22 Lorsqu'ils sont arrivés, ils ont salué tous les soldats, leur on demandé

23 comment ils avaient été logés, puis ils ont commencé à parler de

24 l'offensive Neretva.

25 Q. J'aimerais d'abord en terminer de cette photo.

Page 24

1 Mme CHANA : [interprétation] Je demande le versement de cette photo,

2 Monsieur le Président.

3 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

4 M. MORRISSEY : [interprétation] Pas d'objection, mais je ne sais pas si la

5 copie annotée par le témoin s'est arrêtée par rapport au récit qu'il a fait

6 assez vite. Apparemment, il a raconté quelque chose qui n'a pas été

7 répercuté à l'image. Je ne sais pas si c'est le cas aussi pour

8 l'Accusation.

9 Apparemment, Mme l'Huissière nous dit que nous avons la même chose.

10 Donc, pas d'objection.

11 Mme CHANA : [interprétation]

12 Q. Une précision. Vous avez tracé un cercle. Est-ce là le lieu où a eu

13 lieu le rassemblement, ou est-ce que vous voulez ajouter quelque chose à

14 propos de cette photographie ?

15 R. Je voulais simplement dire qu'ici vous voyez ce bosquet, ou ce groupe

16 d'arbres. Ils n'existaient pas à l'époque. Manifestement, ces photos ont

17 été pris au fin de l'été, lorsque les arbres sont encore feuillus. Il y

18 avait un endroit qui faisait 10 mètres sur 15 ou 50 plus exactement, et je

19 vous ai indiqué l'endroit comme étant l'endroit où se trouvait les --

20 Q. Oui. Donc, c'est tout à fait clair maintenant. Les arbres ne s'y

21 trouvaient pas, donc c'était une espèce de pré, ou d'espace de cacher.

22 Mme CHANA : [interprétation] Je me demande le versement --

23 M. LE JUGE LIU : [interprétation] D'accord.

24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pièce 185.

25 M. LE JUGE LIU : [interprétation] La pièce est versée au dossier.

Page 25

1 Mme CHANA : [interprétation]

2 Q. Commandement Supz de vous remémorer ce qui s'est passé lorsque les

3 commandants sont arrivés. Qui est-ce qui s'est trouvé là, lorsqu'ils sont

4 arrivés. Pourriez-vous le dire aux Juges ?

5 R. Moi-même, Nezad Sabanovic et d'autres soldats se trouvaient là. On

6 était assis, et on préparait le repas de midi.

7 Q. Pourriez-vous nous dire combien il y avait de soldats présents lorsque

8 ces commandants sont arrivés, vous y compris ?

9 R. Nous étions cinq ou six. Je ne me souviens pas du nom de chacun d'entre

10 nous.

11 Q. Lorsqu'ils sont arrivés, qu'est-ce que vous avez fait, tout d'abord ?

12 R. On était en train de préparer le repas. Tout près, il y avait une

13 petite maison d'où j'ai pris un peu de miel. Nous avons salué tous les

14 commandants. Nous nous sommes serrés la main. Nous avons serré la main de

15 Sefer Halilovic et des autres, puis ils sont venus, et se sont assis sur

16 cette dalle de béton devant la maison. Je leur ai offert un peu de mile

17 qu'ils ont accepté. Ils ont conversé entre eux attendant que les soldats se

18 rassemblent.

19 Q. Les soldats sont venus, mais lesquels ?

20 R. Toutes les unités qui étaient là, les Loups de Cedo, le

21 2e Bataillon indépendant, la Division Handzar, les hommes de Zuka et tous

22 les autres. En tout, cela faisait de 100 à 150 hommes -- soldats.

23 Q. Pourriez-vous maintenant nous dire ce qui s'est passé après que tous

24 ces soldats se sont rassemblés, mais auparavant ? Donc, je pense que vous

25 avez déjà répondu à la question que j'allais vous poser. Dites-nous

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1 maintenant : ce qui s'est passé précisément lorsque tous les soldats se

2 sont rassemblés, qui a été le premier à prendre la parole ?

3 R. Lorsque tous les soldats se sont assemblés, c'est Sefer Halilovic qui a

4 d'abord parlé en tant que commandant de l'opération, et il a dit très clair

5 à tous les soldats qui étaient présents, il a dit que c'étaient lui qui

6 commandait l'opération Neretva, que la bataille allait être après pour

7 lever le siège de Mostar, que personne ne savait combien de temps cela

8 durerait, et qu'on ne rentrerait sans doute pas tant que Mostar ne serait

9 pas libéré à tout pris. Donc, nous allions rester sur place jusqu'au moment

10 où nous allions pouvoir nous emparer de Mostar.

11 Q. Oui, et comment les soldats ont-ils réagi à ce discours de Sefer

12 Halilovic ?

13 R. Ils ont gardé le silence parce que le commandant de l'armée s'adressait

14 à eux, le responsable de l'opération s'adressait à eux. Il y a peut-être eu

15 quelques mouvements, mais personne n'a fait de commentaire. Les soldats

16 avaient beaucoup de respect pour lui, et personne n'a dit des mots.

17 Q. Qui a été le suivant qui a pris la parole ?

18 R. Cela a été M. Vehbija Karic, il était assis à coté de Sefer. Lorsqu'ils

19 ont fini d'expliquer la nature de l'opération, lorsqu'ils nous ont dit

20 qu'on allait partir le lendemain dans la soirée, Vehbija Karic s'est enquis

21 du logement, nous a demandé si tout était en ordre dans le village. Un

22 soldat a pris la parole et a dit que tout n'allait pas sans problème, qu'il

23 y avait eu -- qu'il y avait des critiques à adresser à la population. C'est

24 à ce moment-là que Vehbija Karic a dit : "Et bien, on va les exécuter

25 sommairement, jetez les tous dans la rivière."

Page 27

1 Q. Essayez de vous souvenir de façon précise des mots prononcés par

2 Vehbija Karic; est-ce que vous pourriez vous en souvenir ?

3 R. Il a dit ceci, Vehhija Karic : " Procédure sommaire, il faut tous les

4 jeter dans la rivière." Je ne sais pas pourquoi il a dit cela, mais Sefer

5 après a dit : "Mais est-ce que tu es fou ?" Mais Vehbija Karic a fait un

6 signe négatif de la tête et il a dit : "C'est ce qu'ils nous ont fait à

7 Ahmici."

8 Q. Qui est le soldat qui s'est plaint des conditions de logement ?

9 R. Je ne sais pas son nom. Je sais que c'était un soldat, mais je ne me

10 souviens rien de précis.

11 Q. De quoi se plaignait-il? De qui se plaignait-il ?

12 R. Je crois que ces gens étaient un peu fous, malades dans leurs têtes

13 parce que les civils-là, les gens du cru qui habitaient le village, étaient

14 très aimables, très accommodants et peut-être que certaines de ces

15 personnes avaient perdu un membre de leur famille, et peut-être ils

16 voulaient se venger.

17 Q. Lorsque Karic a prononcé ces mots, de qui voulait-il parler ?

18 R. Il voulait parler des civils croates, pas des soldats de l'ABiH.

19 Q. Halilovic a fait cette remarque; pourriez-vous, s'il vous plaît, redire

20 quelle a été sa remarque pour que je ne sois pas accusé de vous tirer les

21 mots de -- vous faire prononcer des mots que vous n'avez pas prononcés.

22 R. M. Halilovic a dit : "Est-ce que vous n'êtes pas fou ?" Il a fait un

23 geste de la tête, et il a dit : "La même chose nous est arrivé à Ahmici."

24 Ainsi, il précisait que cet ordre se referait à des Croates civils, les

25 personnes âgées, les femmes et les enfants.

Page 28

1 Q. Est-ce que Sefer Halilovic a répondu à cela ou a réagi à cela ?

2 R. Comme je viens de le dire, il a fait un geste de la tête et a dit :

3 "Mais est-ce que tu n'es pas fou?" C'est tout ce qu'il a fait.

4 Q. Est-ce que les soldats eux-mêmes ont réagi en une réaction quelconque à

5 cette remarque ?

6 R. Non, personne n'a rien dit, ils se sont simplement demandés s'il

7 n'avait pas perdu le sens. J'ai eu du mal à comprendre pourquoi il avait

8 dit cela, je veux parler de Vehbija Karic.

9 Q. Comment est-ce que cous avez perçu une telle remarque ?

10 R. J'ai pensé que c'était une plaisanterie, une blague. Je ne pouvais pas

11 la prendre au sérieux parce qu'il s'agissait simplement de civil ordinaire.

12 Ce n'était pas des soldats, nous n'étions pas dans une situation de

13 combats. Les civils ne doivent pas être tués, notamment, si ce n'est pas au

14 combat, dans tous les cas, pas des personnes âgés, des femmes et des

15 enfants.

16 Q. Que s'est-il passé après cette réunion, ou ce rassemblement ?

17 R. Après cette réunion, ces hommes se sont levés et sont partis dans la

18 direction de Jablanica. Les soldats allaient et venaient, ils parlaient

19 entre eux jusqu'au crépuscule, jusqu'au moment où la nuit a commencé à

20 tomber. Il était vers 18 heures lorsque le premier meurtre a été commis

21 dans une maison, dans la maison de M. Pero Maric. J'étais un témoin

22 oculaire de cela. Je me trouvais-là et j'ai vu un homme qui arrivait, un

23 soldat qui est entré dans la maison et a tué M. Pero Maric. Sa femme a

24 commencé à pousser des cris et il a tué également cette femme.

25 Q. Qui d'autres se trouvaient dans cette maison au moment où cela s'est

Page 29

1 passé ?

2 R. M. Nihad Vlahovljak était logé dans cette maison avec ces camarades

3 combattants.

4 Q. Est-ce que vous savez le nom des autres qui étaient présent ?

5 R. C'étaient ces hommes, ils appartenaient à une autre unité. Je ne

6 connaissais pas bien cette unité, je ne connaissais aucun personnellement.

7 Je ne les connaissais que de vue. Je ne peux pas vraiment m'en souvenir

8 avec précision. Tout ce que je sais c'est que Nihad Vlahovljak était le

9 chef de cette unité.

10 Q. Combien de soldats étaient présent dans la maison avec

11 M. et Mme Maric ?

12 R. Dix hommes -- de six à dix hommes. Nous étions là assis en train de

13 prendre du café -- de boire du café.

14 Q. Ce soldat, est-ce que vous savez son nom, ce soldat qui était entré et

15 qui a tiré ?

16 R. Non.

17 Q. Est-ce que vous voudriez dire à la Chambre : lorsqu'il est entré dans

18 la maison, combien de temps s'est écoulé avant qu'il ne commence à tirer ?

19 R. A peu près 20 secondes.

20 Q. Sur qui a-t-il tiré en premier ?

21 R. Il a d'abord tué l'homme, M. Pero Maric. Sa femme a commencé à pousser

22 des cris. Elle était souffrante. Elle a commencé à crier : "Que se passe-t-

23 il ? Qu'arrive-t-il ?" Il est allé dans la pièce suivante et il l'a tuée

24 également.

25 Q. A quel endroit est-ce que Pero Maric a été tué ?

Page 30

1 R. Dans sa maison.

2 Q. Où dans sa maison ?

3 R. Dans le couloir.

4 Q. Sa femme a été tuée où ?

5 R. Dans la chambre, la pièce.

6 Q. Quelle a été la réaction des soldats qui se trouvaient dans la maison ?

7 R. Quand ce soldat est parti de la maison avec son fusil automatique,

8 Nihad a dit : "Mais que se passe-t-il ? Est-ce que tu es fou ?" Il a dit

9 quelque chose comme, " Ne dis rien, sinon je serai bien capable de te tuer

10 aussi."

11 Q. Qu'est-ce que vous-même vous avez fait ?

12 R. Rien. Je me suis tu. Cet homme était fou. Il n'était pas normal. Je

13 pense qu'il était fou.

14 Q. Est-ce qu'il est parti immédiatement après avoir tiré, après la

15 tuerie ?

16 R. Oui. Après ce qu'ils ont dit, bon il s'est retourné et il est parti.

17 Q. Qu'est-ce que vous avez fait après cela ?

18 R. Je suis resté sur place pendant quelques minutes puis je suis retourné

19 à la maison où j'étais logé.

20 Q. Qu'est-ce que vous y avez fait, dans cette maison, et quelle heure

21 était-il lorsque vous y êtes retourné ?

22 R. C'était le crépuscule, il était vers 7 heures du soir. De là, je suis

23 allé à l'endroit où se trouvait Sulejman Lujinovic. Nous sommes restés

24 assis là, parlant pendant un moment, en commentant tous ces événements. Je

25 suis rentré dans la maison, c'est-à-dire, dans la maison où j'étais logé,

Page 31

1 et je suis allé dormir.

2 Q. Qu'est-ce qui s'est passé le lendemain ?

3 R. Le lendemain, lorsque je me suis levé, c'était vers 8 ou 9 heures du

4 matin, je ne suis pas absolument sûr. J'ai vu, près de la route, qu'il y

5 avait des cadavres et du sang. Pendant toute la nuit, ces meurtres avaient

6 été perpétrés. Personne n'avait pu les empêcher -- ou plutôt, personne

7 n'avait fait attention, s'était rendu compte. Tous ces commandants qui

8 s'étaient trouvés là n'avaient rien fait pour empêcher que ce crime n'ait

9 lieu.

10 Q. Est-ce que, vous, vous savez qui a commis ces crimes ?

11 R. Je sais qui c'était. C'étaient les soldats, et deux hommes ont avoué et

12 ont d'ailleurs été jugés à Sarajevo. Ils ont été poursuivis pour quatre

13 meurtres. Je ne sais pas exactement combien de civils ont été tués en tout.

14 Q. Qui sont les soldats qui ont commis ces crimes ?

15 R. Mustafa Hota et cet autre homme dont je ne connais pas le nom. Je ne

16 connais même pas son nom.

17 Q. Y a-t-il d'autres soldats que vous connaissiez ?

18 R. Je ne sais pas.

19 Q. Alors, vous avez dit que vous aviez vu des cadavres qui étaient le long

20 de la route. Pourriez-vous nous dire combien il y en avait ?

21 R. Depuis la maison où j'ai dormi et le 2e Bataillon indépendant, il y

22 avait un cadavre, et il y avait des traces de sang sur le sentier; c'était

23 le long de la rive droite de la Neretva. C'est là que se trouvaient les

24 cadavres.

25 Q. Qu'est-ce que vous avez fait alors ?

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1 R. Rien. Je ne sais pas ce que j'aurais bien pu faire.

2 Q. Est-ce que d'autres choses ont eu lieu ce jour-là ?

3 R. Ce jour-là, le dernier meurtre a été perpétré. Nous étions là assis.

4 Vers 3 heures de l'après-midi, il y a eu ce dernier meurtre. Il y avait cet

5 homme, Zulfikar Alispago, connu également sous le nom de Zuka, le

6 commandant de l'unité à Jablanica, qui est arrivé avec ses hommes et qui a

7 établi un poste de contrôle devant les maisons. Il a constitué, en fait,

8 deux points de contrôle, un à l'entrée de Grabovica et l'autre à la sortie.

9 Il a dit que personne ne pouvait quitter Grabovica, aucun soldat ne pouvait

10 quitter Grabovica sans son approbation. Il a fait prendre tous ces cadavres

11 qui se trouvaient sur le bord de la route, les a fait charger sur un

12 camion, et ils ont été emportés quelque part, mais je ne sais pas où.

13 Q. A quel moment est-ce que Zuka est venu avec ses hommes ?

14 R. C'était probablement vers 3 heures de l'après-midi.

15 Q. Combien d'hommes sont venus avez lui, et comment est-il venu ?

16 R. Il est venu dans un camion. C'est une sorte de camion. Mais ce n'était

17 pas un très grand véhicule. Il y avait deux soldats qui gardaient chaque

18 point de contrôle. C'étaient ses hommes qui gardaient ces points de

19 contrôle, de sorte que personne ne pouvait quitter Grabovica et personne

20 n'a pu, en fait, savoir ce qui s'était passé par rapport à ces crimes. Il a

21 fait chargé ces corps et il les a emportés avec les camions ailleurs.

22 Combien d'hommes est-ce que Zuka avait exactement avec lui, je ne le sais

23 pas.

24 Q. Est-ce que quelqu'un d'autre est venu ce jour-là ?

25 R. Ramiz Delalic est venu avec les deux enfants, oui, deux garçons. Après

Page 33

1 Zuka, il a amené ces deux enfants. Leurs parents avaient été tués, leur

2 mère, leur père, leur grand-mère, leur grand-père, et leur petite sœur. On

3 les avait trouvé sur la route de Jablanica. Delalic Ramiz les a amenés avec

4 lui à Grabovica. Il a fait s'aligner tous les hommes de notre unité et il a

5 sorti son pistolet de sa fonte, et a dit aux enfants d'identifier les

6 personnes qui avaient tué leurs parents. Il a dit qu'il tuerait le soldat

7 qui avait commis ce crime, si les enfants l'identifiaient. Mais il y avait

8 des soldats qui étaient absents dans cet alignement, plusieurs hommes qui

9 ne se trouvaient pas là. Les enfants sont allés examiner chaque soldat, les

10 ont regardés dans les yeux, et pour finir, n'ont pas identifié les auteurs

11 de ces crimes, c'est-à-dire les assassins de leurs parents.

12 Q. Est-ce que Celo est arrivé avant Zuka ou après Zuka ? Qui est arrivé le

13 premier ?

14 R. Celo est arrivé après Zuka.

15 Q. Y avait-il encore des cadavres à Grabovica à ce moment-là ?

16 R. Non, Zuka avait fait emporter tous les corps.

17 Q. Que --

18 R. Je ne sais pas. Peut-être qu'il y aurait pu se passer quelque chose le

19 long de la rive de la Neretva. Je ne sais pas combien de civils ont été

20 tués.

21 Q. Combien de corps est-ce que vous avez personnellement vus de vos yeux

22 ce jour-là ? Est-ce que vous pourriez nous donner une idée du nombre, s'il

23 vous plaît.

24 R. Cinq ou six.

25 Q. Que s'est-il passé aux points de contrôle après que les hommes de Zuka

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1 aient emmené les cadavres ? Est-ce qu'ils sont restés en place, ou est-ce

2 qu'ils ont été emmenés ?

3 R. Cette nuit-là, nous sommes partis pour aller au combat, et les points

4 de contrôle à Grabovica sont restés en place, à l'entrée et à la sortie du

5 village. Ce n'était pas sur la M17, la route principale, mais sur la route

6 qui conduisait à Grabovica. Ces deux points de contrôle sont restés.

7 Pendant la nuit, nous sommes allés au combat et nous ne sommes pas revenus

8 à Grabovica par la suite.

9 Q. Dites-moi : combien de soldats ont été alignés par Celo ?

10 R. Notre unité, l'ensemble de la brigade. Je pense qu'il y en avait à peu

11 près 50 ou 60 de toute la brigade qui étaient partis, peut-être qu'il n'y

12 en avait que 45. Il y avait des gens qui n'étaient pas là. Je ne peux pas

13 être très précis, mais certains étaient absents.

14 Q. Lorsque vous parlez de "brigade," pouvez-vous me dire de quelle brigade

15 vous voulez parler ?

16 R. Je veux parler de la 9e Brigade motorisée.

17 Q. Est-ce que, vous-même, vous avez fait partie des soldats alignés ?

18 R. Oui.

19 Q. Vous avez dit, à la Chambre, que personne n'a été identifié par les

20 deux jeunes garçons. Est-ce que vous savez pour quelle raison ?

21 R. Parce que les auteurs du meurtre n'étaient pas là.

22 Q. Est-ce que vous saviez cela vous-même, que les auteurs de ces meurtres

23 n'étaient pas à l'alignement ?

24 R. Oui.

25 Q. Comment --

Page 35

1 R. Parce que les enfants ne nous les ont pas identifiés, ce qui veut dire

2 qu'ils n'étaient pas là.

3 Q. Est-ce que, vous-même, vous saviez que les auteurs de ces meurtres

4 n'étaient pas là ?

5 R. Non.

6 Q. Alors que s'est-il passé après cela ?

7 R. Après cela, Celo a fait monter les enfants dans une voiture, et avec

8 Erdin Arnautovic, il est parti en direction de Jablanica, où on a amené ces

9 enfants. Ce qui leur est arrivé par la suite, cela, je ne le sais pas. Tout

10 ce que je sais, c'est qu'ils sont encore en vie. Si quelqu'un de notre

11 unité, qui avait à sa tête Ramiz Delalic, ou Celo, avait voulu le faire, il

12 aurait pu tuer ces deux enfants sur place. Ramiz Delalic a certainement

13 sauvé la vie à ces enfants. Parce que je suis sûr qu'il y a des témoins qui

14 viendront déposer ici et qui diront qu'un ordre a été donné pour que ces

15 deux enfants soient tués. Je ne vais pas en parler, mais ce témoin vous

16 dira certainement cela. C'est un commandant, un chef.

17 Q. Mais vous-même, personnellement, est-ce que vous êtes resté à Grabovica

18 ou est-ce que vous êtes parti à un moment donné ?

19 R. Nous sommes restés à Grabovica pendant environ deux heures. Celo est

20 revenu après cela. L'unité a été alignée, on a fait s'aligner les hommes.

21 Dès que la nuit a commencé à tomber, nous nous sommes mis en route vers le

22 village de Dreznica. Nous nous sommes déplacés dans l'obscurité parce que,

23 sur la M17, il y avait des tirs qui provenaient d'une hauteur. Je ne sais

24 pas. Donc, nous avons profité de la nuit, et nous sommes allés au village

25 de Dreznica.

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1 Q. Après cela, où êtes-vous allés ?

2 R. Nous sommes allés à Dreznica. Nous y sommes restés jusqu'à 10 heures.

3 Puis, il y a eu une attaque sur une hauteur qui était dénommée Antena

4 [phon], je crois, c'était dans la direction de Vrdi, ou quelque chose comme

5 cela, en Herzégovine.

6 Q. Est-ce que l'on ne vous a jamais posé des questions concernant ces

7 meurtres à Grabovica à un moment quelconque ?

8 R. Lorsque je suis revenu à Sarajevo, revenu de Herzégovine, à savoir un

9 mois ou un mois et demi plus tard, nous avons été attaqués. Il y a eu une

10 opération qui s'est déroulée, qui s'appelait opération Trebevic, et M.

11 Sefer Halilovic a été mis aux arrêts à domicile. Le 26 octobre, ils nous

12 ont arrêtés et ils nous ont détenus dans la prison centrale de Sarajevo. Je

13 me suis trouvé dans la prison centrale pendant quatre mois et demi à cinq

14 mois, et j'ai été interrogé à propos des crimes à Grabovica une seule fois

15 pendant ce temps-là. Le Juge d'instruction était le juge Spoljaric. Après

16 cela, on ne m'a plus rien demandé, jusqu'en 1998, lorsque j'ai reçu un

17 appel de M. Nikolai à la caserne du KNT de Sarajevo.

18 Q. Maintenant, je voudrais revenir à Sarajevo, si vous le voulez bien.

19 Lorsque vous étiez là-bas, quelles étaient vos fonctions en 1993 lorsque

20 vous vous trouviez à Sarajevo ? Qu'est-ce que vous aviez à faire ?

21 R. J'étais un simple soldat de la brigade et j'allais au combat. Il y

22 avait trois ou quatre attaques par jour. Il y avait un assaut ici, un

23 assaut là. Nous allions tous nous battre pour protéger nos maisons. Il n'y

24 a rien d'autre à signaler.

25 Q. Que faisiez-vous à Sarajevo, proprement dit ? Est-ce que vous aviez un

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1 rôle à Sarajevo lorsque le siège était en cours ?

2 R. Non, je n'avais pas de rôle.

3 Q. Est-ce que c'étaient vous-même et votre brigade ou seulement vous dont

4 vous parlez ?

5 R. Je ne parle que de moi.

6 Q. Est-ce que vous vous trouviez à Sarajevo ou près de Sarajevo lorsque

7 vous vous acquittiez de vos fonctions sur place ?

8 R. Non. C'était seulement dans notre secteur de responsabilité, sur notre

9 ligne depuis Mrkovic à Poljine, mais nulle part ailleurs.

10 Q. De quelle ligne voulez-vous parler lorsque vous dites "notre ligne" ?

11 R. C'était dans le secteur de responsabilité de notre brigade, à savoir la

12 9e Brigade motorisée.

13 Q. Est-ce que vous saviez, à l'époque, si des soldats de votre brigade

14 étaient en train de commettre des crimes ?

15 R. En ce qui concerne notre brigade, dans l'ensemble de notre secteur de

16 responsabilité, aucun crime n'a été commis pour autant que je sache; aucun

17 meurtre de civils et aucun meurtre de personnes d'origines ethniques

18 différentes, à Sarajevo proprement dit.

19 Q. Ailleurs ?

20 R. Je ne sais pas. Je vous prie de me croire. Lorsque nous avons été

21 arrêtés en 1993, j'ai entendu parler d'un endroit dénommé Kazani, mais je

22 n'en ai entendu parler que par les médias. Des procès ont eu lieu

23 concernant des personnes qui avaient commis ces crimes et qui sont encore

24 en prison à Sarajevo aujourd'hui.

25 Q. Quelle était la réputation de la 9e Brigade, si vous le savez ?

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1 R. [aucune interprétation]

2 Q. Je n'ai pas entendu votre réponse.

3 R. Je ne sais pas.

4 Q. Bien. Je voudrais maintenant que nous passions au mois de mai 1998,

5 s'il vous plaît. Je voudrais vous demander de dire aux membres de la

6 Chambre ce qui s'est passé à ce moment-là.

7 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

8 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, il n'est pas

9 possible, d'après les déclarations qui ont été faites précédemment, de

10 poser des questions de ce genre. Je ne suis pas sûr de ce que ma consoeur a

11 à l'esprit pour le moment, mais, à moins que ce soit quelque chose qui soit

12 directement pertinent et admissible, quelque chose dont peut parler

13 vraiment le Procureur, je voudrais dire clairement que je vais élever des

14 objections.

15 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Bien --

16 M. MORRISSEY : [interprétation] Je pense, enfin j'espère.

17 M. LE JUGE LIU : [interprétation] En ce qui concerne la question, je ne

18 vois pas exactement dans quel sens veut aller l'Accusation donc je vais

19 permettre à l'Accusation de poursuivre pendant un moment.

20 Mme CHANA : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

21 Q. Est-ce que vous vous rappelez cette date ? Qu'est-ce que vous faisiez à

22 l'époque, en mai 1998 ?

23 R. Ceci a trait à la déclaration que j'ai faite à M. Nikolai. Il agissait

24 pour le compte du TPI, du Tribunal, c'est cela qu'il a dit.

25 Q. Il faut que je vous interrompe, Témoin. Je ne vous parle pas de la

Page 39

1 déclaration de Nikolai. Je vous demande : qu'est-ce que vous faisiez du

2 côté du mois de mai 1998 ? Pourriez-vous d'abord répondre à cela, s'il vous

3 plaît ?

4 R. En mai 1998 ?

5 Q. Où travaillez-vous ?

6 R. Je ne peux pas m'en souvenir précisément. En mai 1998 ? Est-ce que

7 voulez dire que j'ai rencontré M. Vehbija Karic, qui a fait des

8 commentaires sur la déclaration que j'avais fait, et qui a dit : "Comment

9 est-ce que tu peux dire quelque chose comme cela ?"

10 Q. Que s'est-il passé ? Pourriez-vous nous dire -- est-ce que vous

11 rappelez cette époque ?

12 R. Je n'avais pas de travail à l'époque. Je ne travaillais pas, j'étais

13 assis dans un café qui s'appelait le café Park, près d'un grand magasin. Je

14 me trouvais là avec des amis, en train de prendre du café, et M. Vehbija

15 Karic est arrivé. Il s'est approché de moi. Il a dit : "Est-ce que tu n'as

16 pas honte d'avoir fait une déclaration comme cela ? Comment peux-tu dire

17 quelque chose comme cela ?" Il veut parler de ce qu'il avait dit à

18 Grabovica. Il a dit qu'il pourrait y avoir des conséquences. Il a ri et a

19 tourné sur ses talons et il est parti.

20 Q. De quelle déclaration voulait-il parler, Monsieur Karic ?

21 R. La déclaration, je suis sûr, que j'ai fait au ministère de l'Intérieur

22 à Sarajevo en 1993. Nous avons fait des déclarations au centre de Sécurité.

23 Certains journaux -- les médias venaient. Ce journal demandait toujours des

24 déclarations concernant Grabovica.

25 Q. Donc, à votre avis, toutes les déclarations que vous dites avoir

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1 faites, y compris à la presse, est-ce que vous avez fait un même récit ?

2 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

3 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, là encore, on ne

4 peut pas avoir une question de ce genre qui vise à confirmer ce point.

5 C'est une question qui relève du contre-interrogatoire, pour poser des

6 questions concernant une déclaration antérieure.

7 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Laissons d'abord le témoin répondre et,

8 ensuite, vous poserez la question que vous voulez faire en contre-

9 interrogatoire.

10 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui, mais je --

11 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Parce que --

12 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui. Comme la Chambre voudra. Oui.

13 Mme CHANA : [interprétation]

14 Q. Oui. Monsieur le Témoin, pourriez-vous me donner une réponse ? Est-ce

15 que les récits étaient cohérents ? Est-ce que vous avez fait le même récit

16 dans chaque cas ?

17 R. Oui. J'ai toujours fait le même récit. La seule différence qui

18 existait, c'était dans la déclaration qui était recueillie par

19 M. Nikolai parce qu'il ne nous a pas permis de la lire, ou quoi que ce

20 soit. Il tapait sur un ordinateur portable, un laptop, et il a dit qu'il

21 allait envoyer ceci directement au Tribunal de La Haye, et il n'y avait

22 rien à signer. Il n'y avait même pas d'interprète présent, en tous les cas,

23 très peu de temps.

24 Mme CHANA : [interprétation] Monsieur le Président, ceci conclut mon

25 interrogatoire principale de ce témoin.

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1 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vous remercie.

2 Je pense que le moment est venu de suspendre la séance. Nous

3 reprendrons à 11 heures et, à ce moment-là, pour en commencer le contre-

4 interrogatoire.

5 --- L'audience est suspendue à 10 heures 29.

6 --- L'audience est reprise à 10 heures 58.

7 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Vous souhaitez procéder au contre-

8 interrogatoire ?

9 Oui, Maître Morrissey.

10 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président.

11 Contre-interrogatoire par M. Morrissey :

12 Q. [interprétation] (expurgée)

13 Monsieur le Témoin, je souhaite vous suggérer une chose, vous êtes l'un des

14 tueurs, n'est-ce pas ?

15 R. Non.

16 Q. Vous étiez-là, au moment des meurtres ?

17 R. Oui,

18 Q. Vous aviez une arme a feu sur vous, n'est-ce pas ?

19 R. Oui.

20 Q. Vous avez tiré de cette arme à feu à plusieurs reprises pendant votre

21 séjour à Grabovica, n'est-ce pas ?

22 R. Non, je tirais simplement dans le cadre des opérations d'offensives,

23 dans les actions en dehors de Grabovica, il y a eu certaines actions au

24 cours de cette période dans le cadre de l'opération Neretva.

25 Q. Pendant de nombreuses années, vous racontez une histoire qui a fait

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1 malhonnête afin de camoufler votre proximité aux meurtres et,

2 notamment, pour ce qui est du meurtre de Pero Maric, êtes-vous

3 d'accord avec cela ?

4 R. Je n'ai pas bien compris la question.

5 Q. Dans de nombreuses déclarations que vous avez faites, dans de nombreux

6 récits vous n'avez jamais avoué que vous étiez là bas au moment où --

7 que vous étiez présent au moment où Pero Maric a été abattu, est-ce

8 exact ?

9 R. Tout d'abord, votre client --

10 Q. Tout d'abord, répondez à la question; est-ce exact ?

11 R. Oui, tout à fait -- tout d'abord, votre client, mon commandant, le

12 commandant de l'opération Neretva avant la guerre, et de l'opération

13 Trebevic, était mon commandant estimé et apprécié, il camouflait ces

14 meurtres, il ne souhaitait pas dire quels étaient les auteurs de

15 crimes, qui a fait cela, et cetera. C'est seulement au cours de ces

16 dernières années qu'on commence à clarifier ces actes.

17 Q. La réponse à ma question est oui, vous avez menti à de nombreuses

18 reprises concernant votre présence lorsqu'on a tiré et tué Pero

19 Maric; est-ce exact ou pas ?

20 R. Non, je ne mentais pas. Nous avions reçu des ordres que nous ne disions

21 rien dire. Il faut poser des questions aux autres. Aux personnes plus

22 haut placés à Sarajevo qui nous ont interrogé le 26 octobre cette

23 question a été posée et il faut savoir qui avait l'intérêt d'éviter

24 que l'on clarifie ces questions, donc après les évènement on a

25 procéder à une opération de camouflage de tout cela.

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1 Q. Vous-même vous saviez depuis toujours que vous étiez vraiment sur

2 place, juste à coté au moment où on a abattu Pero Maric; est-ce

3 exact ?

4 R. Oui, je le savais mais nous n'osions pas en parler car c'était les

5 ordres donnés pendant qu'on était en prison. Il nous a été dit que

6 nous ne devions rien dire à ce sujet. Nous avions l'interdiction et

7 il nous a été dit que nous risquions une peine capitale-- une peine

8 de prison à perpétuité si nous parlions de cela, et c'est ce qui est

9 venu du commandement Suprême et de la Cour.

10 Q. Que voulez-vous dire par ce que vous dites au sujet du fait que c'est

11 venu de la Cour ?

12 R. Ils avaient commencé à nous interroger et puis après ils ont arrêté de

13 le faire. Donc ils ont reçu les instructions du commandement Suprême.

14 Quelqu'un trouvait qu'Il n'était pas dans son intérêt que l'On

15 procède à la clarification de la situation. En ce qui concerne cette

16 opération de camouflage, vous dites que c'est ce qu'on vous a dit

17 après votre arrestation le 26 octobre 1993 dans le cadre de

18 l'opération Trebevic; est-ce exact ?

19 R. Au milieu de la peine que je purgeais, j'ai passé quatre ou cinq mois

20 en prison. Au bout des quatre à cinq mois de mon emprisonnement, ils

21 ont arrêté cette procédure. Un procès verbal concernant cela existe

22 certainement dans la Cour.

23 Q. Monsieur, au cours de ces derniers mois, vous avez appris qu'Enes

24 Sakrak allait venir déposé au sujet du fait que lui-même il a été présent

25 au moment où Pero Maric a été abattu; est-ce exact ?

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1 R. Tout d'abord, je ne connais pas cet homme.

2 Q. Voici ce que je vous suggère : vous avez réalisé à ce moment-là que vos

3 mensonges allaient être démasqués et dévoilés; est-ce exact ?

4 R. Je ne mens pas. Je ne dis que la vérité.

5 Q. Vous saviez, à l'époque, qu'un témoin oculaire du meurtre de Pero Maric

6 était capable de vous situer, vous, (expurgée), dans cette situation,

7 sur place; est-ce exact ?

8 R. Que voulez-vous dire par sur place ?

9 Q. Ce que je veux dire --

10 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

11 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, je pense qu'il

12 faudra procéder à l'expurgation. Maintenant, je comprends ce que l'on a

13 essayé de me dire. Excusez-moi de cela.

14 Q. (expurgée)- le conseil prononce de nouveau le nom du témoin -

15 Monsieur le Témoin, voici ce que je suggère : c'est que vous avez appris,

16 très bien, que votre présence, lors de l'incident lors duquel M. Pero Maric

17 a été abattu, allait être dévoilé devant ce Tribunal. Vous l'avez appris,

18 n'est-ce pas ?

19 R. Je l'ai dit. Je n'avais pas le droit. Je n'osais pas, je ne pouvais pas

20 dire cela à Sarajevo, par exemple. En raison de toutes les pressions et des

21 menaces dont j'ai pris part ici aujourd'hui et, encore aujourd'hui, je ne

22 sais pas comment rentrer dans cette ville personnellement compte tenu de

23 ces menaces. Pendant que je suis ici à La Haye, je continue à recevoir des

24 menaces et je continue à recevoir des messages des membres de ma famille,

25 de mon frère, par exemple, me parlant des menaces. Peut-être je ne serai

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1 pas vivant demain. Peut-être vous avez devant vous dans ce prétoire l'homme

2 qui a approuvé tous ces meurtres, alors que j'étais un simple mortel, alors

3 que cet homme était un général. A l'époque, il était le commandant de

4 l'armée, en fait, il était le chef d'état-major à l'époque car il n'y avait

5 encore de poste de commandant en chef. Pourquoi il n'est pas venu tout

6 seul ? Pourquoi il ne s'est présenté tout seul pour se dénoncer soi-même ?

7 Maintenant, vous demandez à moi, un simple mortel, un simple soldat dans

8 une ville, de faire quelque chose ? Je ne peux rien faire, je n'ai pas le

9 souhait de faire ce genre de chose. Vous savez on parle de la Bosnie et non

10 pas de l'Europe.

11 Q. Monsieur le Témoin D, je ne souhaite pas qu'il y ait un malentendu. Ce

12 que je vous suggère, et ce que je dis c'est que vous êtes un meurtrier.

13 Vous comprenez cela ?

14 R. Je ne suis pas un meurtrier.

15 Q. Ensuite, pour la première fois, lorsque vous avez parlé à mon éminent

16 collègue de l'Accusation ici, après votre arrivée à La Haye, vous avez

17 dévoilé la vérité ou une partie de la vérité, à savoir que vous avez

18 assisté au moment où Pero Maric a été abattu et que vous avez vu plusieurs

19 cadavres dans le village. Est-ce que vous êtes d'accord avec cela ?

20 R. Oui. Je l'ai dit avant je n'avais pas la possibilité de dire cela, ni

21 d'interlocuteurs car, dans cet Etat, ceci tourne seulement autour de

22 l'argent et de la corruption, et ceux qui n'ont pas d'argent n'ont aucune

23 importance. Tout ce qui se passe aujourd'hui, le fait qu'on jette la

24 lumière sur tout cela, on aurait pu le faire à Sarajevo pour éviter que le

25 tout se passe devant ce Tribunal aujourd'hui. Donc, on aurait pu clarifier

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1 cela il y a dix ans.

2 Q. Vous avez dit au Procureur ici que vous avez reçu les menaces mêmes

3 depuis que vous êtes ici à La Haye ?

4 R. Oui.

5 Q. A quel membre du bureau du Procureur avez-vous dit cela ?

6 R. J'ai dit cela aux messieurs chargés des témoins. Je ne sais pas comment

7 ils s'appellent et quelle est leur fonction. C'est à elles que j'ai dit

8 cela et ils ont assisté à la situation lorsqu'on m'a appelé au téléphone.

9 Après une personne chargée de la sécurité, un chef de sécurité, ou je ne

10 sais pas comment s'appelle sa fonction, ni quel est son nom, mais hier j'ai

11 parlé avec lui dans ma Chambre.

12 Q. Vous avez continué, je suppose, à dire que votre famille fait l'objet

13 de menaces; est-ce exact ?

14 R. Oui.

15 Q. Etes-vous allé voir la police à Sarajevo concernant cet incident ?

16 R. Non. Je ne suis pas allé. Je n'avais pas de raison. Vous savez, notre

17 police ne fonctionne pas, que vous portiez plainte ou pas, cela ne produit

18 pas d'effet.

19 Q. Ce que suggère c'est que vous allez accusé qui que ce soit et faire

20 porter le chapeau à qui que ce soit dans l'espoir que votre propre

21 culpabilité ne sera jamais dévoilé; est-ce exact ?

22 R. Tout d'abord, si j'étais vraiment coupable, si j'avais commis un acte

23 concernant Grabovica, maintenant en ce moment, j'aurais avoué, j'aurais dit

24 voilà j'ai fait ceci, cela, cela, pour en terminer une fois pour toute dans

25 la vie parce que je pense qu'un homme qui fait cela et qu'il a une âme, il

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1 ne peut pas vraiment supporter cela, dormir tranquillement et son esprit

2 est malade, et peu importe quelle sera la peine, s'il s'agira d'un jour

3 d'emprisonnement ou de cinq ans ou de toute la vie.

4 Q. Quelles sont les personnes qui ont commis ces crimes, (expurgée)?

5 Quels sont leurs noms ?

6 R. Je ne sais pas.

7 Q. N'avez-vous pas dit à Mme Chana, pendant le récolement, la chose

8 suivante : "Moi-même, j'ai parlé avec ces soldats qui ont tué et je leur ai

9 demandé comment ils ont pu faire cela. Ils ont tous parlé de cela comme

10 s'ils avaient versé un verre d'eau. Ils n'avaient pas du tout de remords de

11 manifester. Je ne peux pas vous dire les noms de ces soldats puisque j'ai

12 peur des conséquences." C'est ce que vous avez dit à Mme Chana, il y a

13 juste quelques jours, n'est-ce

14 pas ? Vous avez dit que vous ne pouviez pas dire leurs noms car vous avez

15 peur des conséquences; est-ce exact ?

16 R. Oui. Oui.

17 Q. Ne vous préoccupez pas des conséquences. Dites-nous leurs noms, s'il

18 vous plaît.

19 R. Non.

20 M. MORRISSEY : [interprétation] Je demanderais que l'on passe à huis clos

21 partiel.

22 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Nous allons passer à huis clos partiel,

23 s'il vous plaît.

24 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

25 [Audience à huis clos partiel]

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1 (expurgée)

2 (expurgée)

3 [Audience publique]

4 M. MORRISSEY : [interprétation] Très bien.

5 Q. Je vais répéter la question. Nous sommes en audience publique. Vous

6 avez mentionné une personne à Sarajevo qui possédait un document, un ordre,

7 qu'il allait apporter ici, devant ce Tribunal. Qui est cette personne ?

8 R. Il existe un ordre concernant cette opération, l'opération Neretva.

9 Q. Merci. Quel est son nom ?

10 R. Tous les commandants de ces brigades qui ont reçu l'ordre de Sefer

11 Halilovic ont ce document. Tous ces commandants qui ont reçu l'ordre, ils

12 ont tous ce document concernant l'opération Neretva.

13 Q. Qui est la personne à laquelle vous avez fait référence au cours de

14 votre déposition ?

15 R. C'est bien, par exemple, Ramiz Delalic. Il possède, lui aussi, cet

16 ordre.

17 Q. Vous savez que Ramiz Delalic viendra déposer ici avec cet ordre, car

18 vous avez parlé avec lui de cette procédure, n'est-ce pas ?

19 R. Nous n'avons pas parlé de cela. Mais, puisque vous le mentionnez

20 tellement, je sais que certainement il viendra déposer ici et il va

21 certainement apporter tous ses documents, tous les documents qu'il a; même

22 une cassette vidéo qui montre les assistants de la défense de Sefer, les

23 gens qui m'ont demandé de changer ma déclaration pour dire que Sefer

24 Halilovic n'était pas le commandant de cette opération.

25 Q. Comment savez-vous qu'il a une telle cassette ?

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1 R. Il ne s'agit pas d'une cassette vidéo, mais simplement d'une cassette

2 audio.

3 Q. Comment vous savez qu'il l'a ?

4 R. Car, en la présence de l'avocat, Azem Mehonjic, il m'a appelé et m'a

5 demandé simplement de dire la vérité et rien que la vérité.

6 Q. Vous voulez dire que vous avez parlé avec M. Delalic au sujet de ce

7 procès ou pas ?

8 R. En ce qui concerne le procès, nous n'avons pas parlé de cela, mais il

9 m'a dit simplement de dire la vérité, de dire ce qui s'est passé, la vérité

10 et rien d'autre.

11 Q. En ce qui concerne cette cassette, est-ce que vous en avez parlé avec

12 le bureau du Procureur ? Est-ce que vous avez dit cela au Procureur ?

13 R. Oui.

14 Q. A quelle personne avez-vous dit cela ?

15 R. J'ai dit cela depuis que je suis ici à La Haye.

16 Q. A qui ?

17 R. C'était pendant l'entretien. Je l'ai dit à M. Bernard Brun, que j'ai

18 appelé. J'ai demandé si je pouvais prendre de l'argent pour prouver cela au

19 cours de la déposition. Il m'a dit que ce n'était pas une bonne idée que

20 j'apporte de l'argent avec moi.

21 Q. Est-ce que vous avez dit cela à l'une quelconque personne qui est

22 présente ici aujourd'hui pendant votre récolement ?

23 R. Je ne sais pas. Je ne me souviens pas.

24 Q. Vous avez eu trois sessions de récolement, n'est-ce pas, avec Mme

25 Chana, qui est présente ici dans ce prétoire et qui vous a posé des

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1 questions dans le cadre de l'interrogatoire principal; est-ce exact ?

2 R. Ce n'est pas exact.

3 Q. Vous avez eu deux sessions alors ?

4 R. Ce n'est pas vrai que j'avais trois sessions. J'ai eu une session. Je

5 suis venu le 15. Deux séances de récolement. Une fois pendant quelques

6 heures, et puis, une autre fois ce n'était pas vraiment une séance de

7 récolement, mais simplement on a parlé de ces menaces proférés contre moi,

8 de ce qui se passe à Sarajevo et de ce qui se passe maintenant, avant mon

9 retour à Sarajevo.

10 Q. Avez-vous dit --

11 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Maître Morrissey, je dois vous avertir à

12 ce stade, ce témoin est un témoin protégé.

13 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président.

14 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

15 Mme CHANA : [interprétation] Monsieur le Président, le fait de dire le nom

16 du témoin, comme cela vient d'arriver au moins six fois, j'espère que c'est

17 vraiment par manque de précaution et pas délibéré.

18 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Normalement, nous évitons d'avertir les

19 parties. Nous ne souhaitons pas que ceci fasse partie au compte rendu

20 d'audience. J'espère, Maître Morrissey, qu'à l'avenir, vous allez accepter,

21 de manière sérieuse, nos avertissements.

22 M. MORRISSEY : [interprétation] Je souhaite dire que je l'accepte de

23 manière tout à fait sérieuse, et vous avez pu le constater vous-même au

24 sujet de plusieurs témoins jusqu'à présent. Je suis désolé que ceci soit

25 passé ainsi.

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1 Q. Maintenant, c'est réglé. Revenons à ma question. Vous voyez Mme Chana

2 présente dans ce prétoire. Est-ce que vous lui avez dit cela à elle ou pas,

3 concernant cette cassette ?

4 R. Je ne sais pas. Je ne me souviens pas, croyez-moi. Vraiment, vous

5 faites tout pour que j'aie le plus de problèmes. J'ai demandé d'être un

6 témoin protégé, alors que, vous, vous mentionnez mon nom et vous faites

7 tout cela. Bon, d'accord. Vous, vous êtes ici en train de défendre un homme

8 qui a fait tout cela, organisé tout cela, et vous, vous faites votre

9 travail, vous essayez de monter les choses de manière contraire à la

10 vérité.

11 Q. Je ne souhaite pas entendre un discours concernant mon rôle. J'ai une

12 autre affirmation plus générale. Vous et M. Ramiz Delalic -- je reformule.

13 Ramiz Delalic, par le biais de son agent, à savoir vous, est en train de

14 soumettre des documents devant ce Tribunal dans le seul but de détourner

15 l'attention des meurtriers de la 9e Brigade et afin de focaliser

16 l'attention sur l'accusé,

17 M. Halilovic. Est-ce que vous êtes d'accord avec cela ou pas ?

18 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, Madame Chana.

19 Mme CHANA : [interprétation] Je fais objection à cette question car il

20 s'agit d'une spéculation concernant ce que fait Ramiz Delalic.

21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui. Il ne s'agit pas d'une question

22 appropriée, Maître Morrissey.

23 M. MORRISSEY : [interprétation] Veuillez relire la question, car je pense

24 que j'ai le droit de confronter le témoin avec mon affirmation, mon

25 allégation.

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1 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je pense que, dans cette situation, vous

2 devez faire cela graduellement.

3 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, c'est vrai, mais il

4 s'agit ici d'un contre-interrogatoire. Mais, je vais traiter de cela de

5 manière différente.

6 Q. Vous avez parlé avec M. Delalic à de nombreuses reprises l'année

7 dernière, n'est-ce pas ?

8 R. Est-ce une question que vous me posez, s'il vous plaît ?

9 Q. Oui.

10 R. Je n'étais pas en bons termes avec M. Ramiz Delalic depuis 1996. Pour

11 ce qui est de Ramiz Delalic, Celo, tout ce que je peux vous dire, c'est que

12 c'est un homme qui a sauvé ces enfants. Je ne suis l'agent de personne ici.

13 Je ne suis qu'un témoin venu devant ce Tribunal pour confirmer ce qui s'est

14 passé, alors que maintenant, vous dites que je suis l'agent de quelqu'un.

15 Q. Ecoutez ma question, s'il vous plaît. Vous l'avez rencontré à plusieurs

16 reprises ces douze derniers mois, n'est-ce pas ?

17 R. Non.

18 Q. Est-ce qu'il vous est arrivé de le rencontrer une seule fois au cours

19 de ces 12 derniers mois ?

20 R. Au cours des 12 derniers mois, disons que cela fait maintenant cinq

21 mois que ce monsieur est en prison. Pour ce qui est du reste de la période,

22 cet homme, il était à l'étranger, hors de portée des autorités de Bosnie-

23 Herzégovine. Je ne lui ai jamais parlé. Je ne l'ai jamais vu. Je ne suis

24 pas allé à l'étranger, sauf en Croatie.

25 Q. Est-ce que vous lui avez parlé au téléphone ?

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1 R. Non.

2 Q. Vous ne lui avez pas parlé, à Ramiz Delalic, du tout, depuis 12 mois ?

3 C'est cela ce que vous dites ?

4 R. Une seule fois, quand Azem Mehonjic, l'avocat, était là présent. Il m'a

5 dit que Ramiz disait que je devais dire la vérité et non pas que Sefer

6 Halilovic n'avait pas été commandant de l'opération Neretva. C'est à ce

7 moment-là que l'avocat a téléphoné à Ramiz, et Ramiz m'a dit au téléphone,

8 "Tu dois dire la vérité." C'est tout.

9 Q. Qu'est-ce que Ramiz avait à voir là-dedans ? Pourquoi est-ce qu'il

10 fallait que vous parliez à Ramiz de la question ?

11 R. Mais comment voulez-vous que je le sache ? Il se peut qu'il ait eu peur

12 que j'allais être influencé ou mis sous pression par quelqu'un. Mais je le

13 répète, cet homme m'a uniquement dit de ne dire que la vérité.

14 Q. Fort bien. Témoin D, maintenant, nous allons revenir au début de votre

15 participation à ces faits. En août 1993, vous faisiez partie de la 9e

16 Brigade motorisée et, plus exactement, de la section d'assaut dans cette

17 brigade, n'est-ce pas ?

18 R. Oui.

19 Q. Vous vous trouviez dans le peloton, ou la section, sous le commandement

20 de qui ?

21 R. Le chef de ma section, du Détachement d'assaut, s'appelait Malco

22 Rovcanin.

23 Q. Mais il y avait trois commandants de section se trouvant sous les

24 ordres de Rovcanin, n'est-ce pas ?

25 R. Oui. Oui.

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1 Q. Comment s'appelaient-ils ces hommes ?

2 R. Nezad Sabanovic, Samir Pilica, et je ne connais pas le nom du

3 troisième.

4 Q. Ramiz Delalic, c'était un commandant qui était très strict pour ce qui

5 est de l'utilisation de drogues et d'alcool, n'est-ce pas ?

6 R. Oui.

7 Q. Il ne tolérait pas un tel comportement de la part de ses effectifs,

8 n'est-ce pas ?

9 R. Il a puni ses hommes si ceux-ci prenaient des stupéfiants. Il les

10 attachait à des radiateurs. Il les empêchait de sortir. Il a fait tout ce

11 qu'il a pu pour les empêcher de se droguer. Il les a même emprisonnés.

12 Q. Mais ce qu'il n'a pas fait, c'est faire rapport de ces hommes à la

13 police. Il s'est occupé lui-même de régler la question.

14 Mme CHANA : [interprétation] Objection, une fois de plus. Parce que Me

15 Morrissey demande à ce témoin ce qu'une tierce personne a fait ou n'a pas

16 fait.

17 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Pour je ne vois pas de problèmes si on

18 agit de la sorte. Le témoin peut répondre par l'affirmative ou la négative,

19 vous savez. Je ne vois pas de problèmes.

20 Poursuivez, Maître Morrissey.

21 M. MORRISSEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

22 Q. Témoin D, c'est un fait, n'est-ce pas, Ramiz Delalic s'est occupé lui-

23 même de ces questions de façon interne sans la participation de la police

24 militaire ou civile, n'est-ce pas ?

25 R. Ecoutez, je vous le dis. Il les a remis à la police militaire à la

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1 prison centrale. Il les a envoyés en prison pour ce genre de chose. Il ne

2 s'est pas occupé seul de cette question. Ce n'était pas un juge.

3 Q. Non. Je --

4 R. [aucune interprétation]

5 Q. Mais quelles sont les autorités qui auraient attaché ces hommes à un

6 radiateur ?

7 R. Quelles autorités. Ceux qui sont venus. Il y avait des gens qui

8 traversaient une espèce de crise. Je ne sais pas ce qu'est ce genre de

9 sentiment, mais il faut les surveiller jusqu'à la venue de la police. Il

10 faut les calmer. Je ne voulais pas dire qu'on les attachait à des

11 radiateurs comme des animaux ou des chiens, comme vous venez de

12 l'interpréter.

13 Q. Je n'interprète rien, Monsieur le Témoin D. Je vous pose uniquement des

14 questions à propos des faits.

15 Mais poursuivons. D'après ce que vous avez pu voir et constater, Ramiz

16 Delalic inspirait beaucoup de loyauté, n'est-ce pas, à ses soldats ?

17 R. On était des simples soldats. Mais, lui aussi, se comportait en simple

18 soldat. Il ne se comportait pas comme un commandant le fait. Nous avions

19 notre chef de brigade qui, lui aussi, était comme un simple soldat. Ramiz

20 Delalic, Celo, n'a jamais fait comme s'il était différent des autres. Nous

21 étions tous des soldats ensembles.

22 Q. Mais, si Ramiz donnait un ordre, d'après ce que vous avez pu constater

23 dans vos rangs, dans la 9e Brigade, s'il donnait un ordre, on y obéissait,

24 n'est-ce pas ?

25 R. Il recevait ces ordres de quelqu'un et les transmettait; et nous, nous

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1 devions faire ce qu'il fallait faire. Il fallait appliquer les ordres.

2 Q. Oui, mais écoutez ma question et répondez. Si Ramiz Delalic donnait un

3 ordre, d'après ce que vous avez constaté, la 9e Brigade, elle obéissait à

4 ces ordres, n'est-ce pas ?

5 R. Il a uniquement donné des ordres de combat, rien d'autre, ceux qu'il

6 recevait du commandement Suprême. Il a reçu toutes sortes d'ordres des

7 hommes qui se trouvaient au commandement Suprême et il nous disait quels

8 étaient ces ordres.

9 Q. Au mois de juillet 1993, il y a eu un incident, un affrontement entre

10 certains des soldats de la 9e Brigade et des membres de la police

11 militaire; est-ce exact ?

12 R. Oui, j'en ai entendu parlé, mais je n'étais pas présent, je n'étais pas

13 partie prenante.

14 Q. S'agissant de cet incident, ce que, vous, vous savez, parce que vous

15 étiez là, à Sarajevo à l'époque, c'est que les membres de la police civile

16 ont été désarmés par certains membres de la 9e Brigade pendant une brève

17 période de temps, et puis ils ont été relâchés, ces hommes; est-ce exact ?

18 R. D'après ce que je sais, effectivement, ils ont été relâchés. Mais je ne

19 sais pas pourquoi cela s'est produit ni comment cela s'est passé.

20 Q. Pas de problème. Je ne vais pas vous poser de questions à propos des

21 motifs. Mais, suite à cette confrontation, un certain Fikret Muslimovic a

22 été démis de ses fonctions à la sécurité militaire, et le chef du 1er Corps

23 d'armée a été, lui aussi, remplacé, n'est-ce pas, un certain Talijan; est-

24 ce exact ?

25 R. Je ne sais pas.

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1 Q. Fort bien. Ramiz Delalic n'était pas présent lors des meurtres commis à

2 Grabovica, n'est-ce pas ?

3 R. Non.

4 Q. Une chose dont vous êtes certain, c'est que, si ou quand il était

5 présent, les soldats se comportaient fort bien, n'est-ce pas ?

6 R. Il est arrivé à Grabovica seulement au moment où il a amené ces

7 enfants. Tous les soldats avaient peur, ceux qui avaient été alignés,

8 j'entends. Parce que je suis certain qu'il aurait tué l'homme ou les hommes

9 qui avaient commis ces crimes, s'ils s'étaient trouvés dans cet alignement,

10 j'en suis sûr.

11 Q. Répondez simplement à ma question et nous pourrons avancer plus

12 rapidement. Mais la vérité, c'est que, quand Delalic était là à Grabovica,

13 mais ailleurs aussi, les soldats se comportaient correctement, n'est-ce pas

14 ?

15 R. Oui.

16 Q. Ce que vous dites également à propos de M. Delalic, c'est que, d'après

17 ce que vous avez dit, il a vraiment, de bonne foi, essayé de découvrir

18 l'identité des tueurs ?

19 R. Oui, oui. Il a demandé aux enfants d'essayer de reconnaître les tueurs.

20 Q. D'après ce que, vous, vous avez vu, à ce moment-là, M. Delalic, il ne

21 dissimulait pas ces crimes, il essayait de les dévoiler ?

22 R. Mais oui.

23 Q. Pourquoi est-ce que, vous, vous n'avez pas dit à Delalic qui étaient

24 ces criminels ?

25 R. Parce que les hommes n'étaient pas présents. Ils sont tous partis pour

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1 Jablanica après cela. Celo est parti avec les enfants, et M. Halilovic,

2 Vehbija Karic, et Zuka, quand ils se sont réunis, ils ont sans doute parlé

3 de tout cela, et là, ils ont dissimulé. Le commandement Suprême était

4 présent dans son complet. Le chef d'état-major, votre client, était là.

5 Pourquoi est-ce que, lui, il n'a pas pris de sanctions ? Pourquoi est-ce

6 qu'il n'a pas fait revenir cette unité et fait ce qu'il aurait du faire

7 pour que les crimes soient mis à jour ? Maintenant, vous me demandez de

8 dire quelque chose qui ne s'est pas passé, parce que c'est lui qui aurait

9 dû le faire. Ramiz Delalic n'était pas capable de le faire, moi non plus.

10 Ils auraient pu tuer toute l'unité et cela aurait été la fin de tout.

11 Q. Oui. Mais revenez à ma question. Vous, vous connaissiez l'identité des

12 véritables tueurs. Pourquoi, dès lors, ne vous être pas adressé à Ramiz

13 Delalic pour lui transmettre ces informations que vous avez ?

14 R. Je ne sais pas. Je ne me souviens pas.

15 Q. Est-ce que c'est parce que, vous, vous étiez un de ces tueurs ?

16 R. Non, non. Je n'ai pas tué. Je vous l'ai dit, si j'avais tué, je

17 l'avouerais aujourd'hui.

18 Q. Fort bien. Lorsque vous êtes parti le 7 septembre de la base de la rue

19 Trampina, Sefer Halilovic n'était pas sur les lieux, n'est-ce pas, il

20 n'était pas présent ?

21 R. Non. M. Karavelic était là.

22 Q. C'est M. Karavelic qui s'est adressé à vous pour vous dire quelle était

23 la nature de l'opération, n'est-ce pas ?

24 R. Oui, opération Neretva. Il a dit que le commandant suprême de

25 l'opération, c'était Sefer Halilovic, et c'était bien le cas.

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1 Q. Il vous a dit que Sefer Halilovic, c'était le chef de l'état-major ou

2 pas ?

3 R. Mais je savais qu'il était chef d'état-major. Il n'était pas,

4 cependant, le commandant de l'armée. Pendant toute la guerre, il a été chef

5 d'état-major. Dès le premier jour où il a rejoint les rangs de l'armée, il

6 a été chef d'état-major.

7 Q. Vous, vous pensez qu'il a toujours gardé le même poste, le poste qu'il

8 avait au début de la guerre, à savoir celui de chef d'état-major ? C'est

9 comme cela que vous comprenez les choses ?

10 R. Oui, je pense que oui. Peut-être qu'il avait une position plus élevée à

11 la fin. De l'eau a coulé sous les ponts, l'armée n'était plus simplement

12 des groupes de dix à 20 soldats qui se trouvaient dans la rue. On a

13 constitué des brigades, et tout ceci se trouvait sur son commandement.

14 Q. Mais vous saviez pertinemment qu'il avait été remplacé, début juin

15 1993, par Rasim Delic, au poste de chef de l'armée. Vous le saviez, n'est-

16 ce pas ?

17 R. Non, ce n'est pas vrai. Rasim Delic ne l'a pas remplacé. Lui, il a été

18 nommé à un poste organique qui n'avait pas été rempli, commandant de

19 l'armée. Sefer Halilovic était chef de l'état-major général, et sur le plan

20 organique, Sefer Halilovic n'a jamais été chef de l'armée.

21 Q. D'après vous, est-ce qu'on vous a dit que votre unité allait être

22 commandée par Zuka ? Est-ce que, selon vos dires, c'est ce qu'on vous a dit

23 à la caserne de la rue Trampina ?

24 R. Oui, mais c'est une autre zone de responsabilité, c'est celle d'un

25 autre corps. C'est quelque chose de tout à fait différent.

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1 Q. Vous avez mentionné un certain Gusic. Est-ce qu'on vous avait dit que

2 le commandant immédiatement supérieur à Zuka allait être Salko Gusic ?

3 R. Salko Gusic était là. Il y avait le 4e Corps et le 6e Corps. Je ne sais

4 pas si, à ce moment-là, ils avaient déjà été fusionnés. A ce moment-là,

5 Gusic commandait le 6e Corps, mais il y avait aussi le 4e Corps. Je ne sais

6 plus quand ces deux corps ont fusionné et à quel moment il n'y a eu qu'un

7 commandant. Salko Gusic était là --

8 Q. Est-ce qu'on vous a dit, à la rue Trampina, que l'unité de Zuka se

9 trouvait sous les ordres de Gusic ?

10 R. Non.

11 Q. Est-ce qu'on vous a dit si Gusic allait participer d'une quelconque

12 façon, toujours au moment ou vous vous trouviez à la caserne de la rue

13 Trampina ?

14 R. Ils n'ont pas mentionné d'autres commandants, mis à part Sefer

15 Halilovic qui était mentionné par M. Karavelic. Il a dit: "Notre chef

16 d'état-major, le commandant de l'opération Neretva, sera M. Sefer

17 Halilovic, et c'est lui qui va donner tous les ordres, tout comme il a

18 donné un ordre de retrait après deux jours."

19 Q. Il faut que je vous pose une question. Non, je vais m'y prendre d'une

20 autre façon. Ce que vous relatez, c'est que Ramiz n'était pas le commandant

21 de l'unité qui est partie en camion, c'est cela que vous dites ?

22 R. Non. Nous étions commandés par Alispago, Zulfikar, surnommé Zuka, et en

23 fait il n'y avait aucun lien avec Ramiz Delalic, Celo.

24 Q. Pourtant il est avec vous, dans ce camion qui vous menait à Jablanica ?

25 R. Oui.

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1 Q. Est-ce qu'ici en déposant devant ce tribunal, vous essayez de protéger

2 Ramiz Delalic ?

3 R. Non.

4 Q. Est-ce que vous êtes certain qu'il n'avait aucune fonction, aucun lien,

5 pas le moindre lien avec vos effectifs, cette fois-là ?

6 R. Non, il n'avait pas d'ordre.

7 Q. Est-ce qu'il est arrivé à Jablanica avec vous ?

8 R. Oui.

9 Q. En fait, pour une brève période de temps, est-ce qu'il est venu se

10 joindre à vous, dans le village de Grabovica ?

11 R. Il est venu avec les enfants, mais cela c'était le 9, vers 3 heures de

12 l'après-midi.

13 Q. Est-ce que là, la seule fois où vous l'avez vu à Grabovica ?

14 R. Oui, la seule.

15 Q. Est-ce qu'il s'est installé ou a pris position dans la maison blanche,

16 où vous étiez logé ?

17 R. Seulement plus tard, lorsqu'on est passé à l'action. Je ne sais pas

18 s'il a passé la nuit du 9 au 10 à cet endroit, lorsqu'on est passé à

19 l'action.

20 Q. Très bien. Lorsque vous êtes arrivé à Jablanica, c'est un fait n'est-ce

21 pas, quand je dis "Zuka", je parle d'Alispago. Zuka est venu rencontrer

22 votre groupe, et s'est adressé à vous, n'est-ce pas ?

23 R. Oui, il nous a trouvé où nous loger, c'était devant sa base à Donja

24 Jablanica. Il a dit qu'il allait trouver des lieux où nous loger, de quoi

25 manger, et tout ce dont on avait besoin.

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1 Q. Mais un peu plus que cela, qu'il a dit, n'est-ce pas, il a dit qu'en

2 fait, les questions de logement étaient déjà réglées, pour vous à

3 Jablanica, n'est-ce pas ?

4 R. Mais je suis sûr qu'il était d'accord pour ce qui est du logement, je

5 ne sais pas.

6 Q. Par la suite, vous avez été emmenés, escortés, par trois ou quatre des

7 soldats de Zuka, à Grabovica, n'est-ce pas ?

8 R. Oui, il nous a donné des couvertures, des espèces de matelas, sur

9 lesquels dormir.

10 Q. A combien d'hommes a-t-il donné matelas et couverture ?

11 R. A ceux qui n'en avaient pas. Ils sont venus au camion, et cela a été

12 distribué. Ceux qui avaient besoin de matelas, et de couverture, et en ont

13 pris, s'il n'y en avait pas dans les maisons où ils étaient logés.

14 Q. Est-ce que vous étiez escortés à Grabovica par un soldat de Zuka,

15 surnommé Spaga ?

16 R. Je ne sais pas, je n'en ai parlé de Spaga, cela me dit quelque chose.

17 Oui, je connaissais cet homme, mais je ne sais pas s'il était présent.

18 Q. Que tout soit clair, s'agissant de la date. Vous êtes parti de Sarajevo

19 le 7. Vous êtes arrivé à Jablanica dans la matinée du 8. C'est juste cela,

20 n'est-ce pas ?

21 R. Oui.

22 Q. Vous êtes installé dans une maison vide, de couleur blanche, n'est-ce

23 pas ?

24 R. Oui.

25 Q. Est-ce que vous êtes installé avec Dino Arnautovic, qui était

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1 responsable de la logistique dans votre compagnie ?

2 R. Oui, mais on n'est pas rentré parce qu'il y faisait sale. Il fallait

3 nettoyer cette maison parce que cela a été négligé pendant longtemps, donc,

4 devant la maison, en fait.

5 Q. Est-ce que Malco Rovcanin avait été aussi, avait reçu pour instruction

6 d'aller s'installer dans cette maison-là ?

7 R. Oui.

8 Q. Est-ce qu'à ce moment qui était au début de ce qui allait se passer,

9 Ramiz Delalic était aussi censé aller dans cette maison ?

10 R. Je ne sais pas s'il était censé y être installé, mais, quand il est

11 arrivé avec ces enfants, il s'est trouvé devant cette maison-là, mais il

12 n'y a pas du tout dormi.

13 Q. Je parle du moment où vous êtes arrivés. Vous dites que Ramiz Delalic -

14 -

15 R. Non. Non, il n'était pas avec nous.

16 Q. Mais vous n'avez jamais dit, à qui que ce soit, qu'il s'est trouvé dans

17 cette maison ?

18 R. Non, qu'il s'y soit trouvé, ou qu'il y ait dormi cette nuit-là.

19 Q. Il régnait une grande puanteur dans cette maison, n'est-ce pas ?

20 R. Oui, c'était très sale.

21 Q. Il faisait très sale, mais cela puait aussi, n'est-ce pas ?

22 R. Oui.

23 Q. En plus de l'odeur, il n'y avait pas d'électricité, n'est-ce pas ?

24 R. Non.

25 Q. Ni d'eau courante, n'est-ce pas ?

Page 66

1 R. Non.

2 Q. Donc, en amont c'était comme si vous aviez écopé de la plus mauvaise

3 des maisons du village ?

4 R. Mais c'était la seule qui restait.

5 Q. A votre connaissance, est-ce que d'autres soldats avaient des maisons,

6 où il y avait le chauffage, l'eau courante, l'électricité, et de quoi

7 manger; est-ce exact ?

8 R. On n'a pas dû chercher à manger, on a eu des vivres de Zuka, il y avait

9 aussi dans toutes les maisons. On n'avait pas besoin de chauffage, parce

10 que c'était l'été, et nous avons fait obtenir l'électricité d'une maison

11 voisine, c'était la guerre, et on avait vécu à Sarajevo pendant longtemps,

12 sans électricité, sans eau, sans vivres, et on pouvait dormir à la belle

13 étoile.

14 Q. Oui, mais avançons un peu dans le temps. Vous dites qu'il y avait un

15 soldat qui s'était plaint des conditions de logement.

16 R. Oui.

17 Q. Est-ce que c'était vous, Monsieur le Témoin D, qui vous étiez trouvé

18 dans les pires conditions de logement dans ce village ?

19 R. Non, ce n'était pas moi qui étais le plus mal logé. J'étais satisfait,

20 je nettoyais la maison, je savais qu'on n'avait pas à y passer beaucoup de

21 temps, il faisait beau, je pouvais dormir dehors.

22 Q. Pourquoi nettoyer la maison, si vous pouviez dormir dehors ?

23 R. Pour des raisons d'hygiène personnelle.

24 Q. D'accord. C'est donc la première journée. La première soirée que vous

25 passez à Grabovica, vous avez dit au bureau du Procureur que vous étiez

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1 allé voir d'autres personnes, et que finalement vous étiez allé vous

2 coucher tranquillement.

3 R. Oui.

4 Q. Pendant l'après-midi, et la soirée du 8, vous n'avez entendu aucun cri

5 de civil terrorisé ?

6 R. Non.

7 Q. Vous n'avez-vous vu personne, que ce soit des membres de la 9e Brigade

8 ou d'autres unités, qui aurait tiré sur des civils, c'est cela que vous

9 nous dites ?

10 R. Non, pas cette nuit-là.

11 Q. Vous n'avez vu personne qui essayait de s'échapper du village, de

12 fuir ?

13 R. Pas cette nuit-là.

14 Q. Vous n'avez pas entendu de soldats ivres, qui chantaient et faisaient

15 la fête ?

16 R. On n'a pas bu cette nuit-là, il n'y avait pas de soldats ivres, je ne

17 sais pas. En tout cas, moi --

18 Q. Est-ce que vous avez vu que cette nuit-là, la nuit du 8, il y aurait eu

19 de l'alcool qui était bu dans le village ?

20 R. Non. Les gens qui buvait dans le village.

21 Q. Dans la nuit du 8, Mehanovic, où était-il ?

22 R. Oui. Il était dans le village avec nous. Il a dormi dans une maison qui

23 était plus haut que celle où Musa était. Je pourrais vous le montrer, si

24 vous voulez.

25 Q. Oui. Nous allons revenir sur ces photos dans un instant.

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1 M. Arnautovic, est-ce qu'il a passé cette nuit là dans la même maison que

2 vous ?

3 R. Oui. Il est avec nous, et il a dormi dehors à belle étoile.

4 Q. Est-ce qu'il avait un véhicule ?

5 R. Non.

6 Q. Il n'avait pas de jeep de couleur brune, avec un toit blanc ?

7 R. Non, je ne sais pas.

8 Q. Est-ce qu'il n'a pas fait des allés et venus entre là et Jablanica pour

9 aller chercher de quoi s'approvisionner ?

10 R. On recevait de la nourriture du QG de Zuka pour les trois repas de la

11 journée, tous dont on avait besoin. C'est un soldat de Zuka -- les soldats

12 de Zuka qui apportaient cela. A part Dino, il n'a rien apporté sauf des

13 rations de cigarettes.

14 Q. Mais il est venu déposer ici, et je vais devoir vous demander un

15 commentaire. Il a déclaré sous serment qu'il a fait des allés et venus à

16 plusieurs reprises, le 8 jusqu'à Jablanica, alors que vous, vous affirmez

17 que vous pouvez dire qu'il était sans voiture avec vous dans ce village,

18 n'est-ce pas ?

19 R. Franchement, je ne sais pas. Je ne peux ni confirmer, ni affirmer. Je

20 ne sais pas.

21 Q. Pourquoi ne vous -- pouvez vous pas affirmer, vu ce que vous venez de

22 dire il y a deux minutes ?

23 R. Mais il est avec moi; quant à savoir s'il est parti ou pas, je ne sais

24 pas. Je ne sais pas s'il est parti ou pas. Je ne me souviens pas des

25 détails. Vous savez, il y a beaucoup de temps qui s'est passé. Est-ce qu'il

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1 était chargé des vivres ou pas, ou est-ce que les vivres vous ont arrivé en

2 retard ou pas.

3 Q. Est-ce que vous êtes prêt, chaque fois que vous avez l'impression qu'un

4 de vos amis est en danger ? Est-ce que vous êtes prêt à ajuster votre

5 déposition en fonction de cela ?

6 R. Non.

7 Q. Fort bien. Je vais vous présenter une hypothèse générale, Monsieur le

8 Témoin D, celle-ci. Ce qui s'est passé dans l'après-midi du 8, c'est un

9 vérité ceci : certains d'entre vous ont commencé à tuer, à maltraiter les

10 civils croates à Grabovica. Vous avez commencé vers 18 heures, et ces

11 sévices, la terreur, la tuerie, a continué à partir de ce moment-là, alors

12 que les soldats étaient ivres. Vous êtes d'accord ?

13 R. Non.

14 Q. [aucune interprétation]

15 R. Pas à ma connaissance.

16 Q. Que toute la clarté soit faite sur une chose, vous n'avez eu des cessez

17 de dire que la première journée -- la première nuit, s'était passé

18 tranquillement, sans problème. C'est toujours ce que vous avez dit.

19 R. Oui. Du 8 au 9, c'est bon.

20 Q. Mais est-ce que vous sauriez par hasard que M. Mehanovic dit la même

21 chose, à savoir que le journée du 8, et la nuit 8 au 9, ce sont passés

22 tranquillement. Est-ce que vous savez que c'est précisément ce que dit M.

23 Mehanovic aussi ?

24 M. LE JUGE LIU : [aucune interprétation]

25 Mme CHANA : [interprétation] Objection, parce que Me Morrissey se sert de

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1 la déposition d'un autre témoin. Donc, je fais objection face aux

2 modalités. Est-ce qu'il dit -- est-ce que vous savez que

3 M. Mehanovic dit ceci ? D'accord, ceci est déjà devenu une pièce à

4 conviction, mais si on utilise ce document, il faut le faire de la bonne

5 façon. Alors, ce n'est pas bon de dire à ce témoin que

6 M. Mehanovic a tenu tel ou tel propos. Il faut formuler la question de

7 façon différemment, en faisant référence au contre rendu d'audience.

8 M. LE JUGE LIU : [interprétation] La Défense est tout à fait en doit de se

9 servir des dires dans témoins précédents, afin de mettre en cause ou de

10 contester la déposition du présent témoin, mais il se peut que la question

11 n'est pas nécessairement bien été libellée.

12 M. MORRISSEY : [interprétation] Est-ce que vous pourriez la formuler d'une

13 autre façon ?

14 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, j'espère que je l'ai

15 formulé comme il faut. Lorsque vous évoquez la possibilité d'un problème,

16 puisque vous l'évoquez, je vais la poser d'une façon différente. Mais je ne

17 voudrais pas que ma consoeur fasse des objections comme cela. Ce n'était

18 pas une objection justifiée. Mais comme vous le verrez, ceci commençait

19 d'une certaine manière, puis cela se termine autrement. Ce n'est pas une

20 façon convenable d'élever une objection toutefois.

21 S'il y a quelque manque de clarté, ceci n'aide pas la Défense, et je ne

22 vais pas insister avec cette question, si cela soit soulevé, ce type de

23 problème.

24 Non, Monsieur le Président. Je voudrais que l'on continue donc avec ce qui

25 est inscrit au compte-rendu. Est-ce que je pourrais juste aller au compte

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1 rendu ?

2 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

3 M. MORRISSEY : [interprétation] Vous comprenez, Monsieur le Président, et

4 la Chambre comprends, que je suis en train d'évoquer une possibilité de

5 collusion. Je suis en train de suggérer qu'un accord a été conclu, donc

6 cette question a directement trait à ce problème. En fait, c'est la seule

7 façon dont on puisse vous poser cette question.

8 Je pense que peut-être il y a une autre façon, car je vais essayer de voir,

9 ou j'ai pensé que je pourrais traiter de la manière suivant :

10 Q. Témoin D, vous étiez d'accord pour votre récit en ce qui concerne cette

11 première nuit, et pour dire que c'est de façon paisible avec vos amis,

12 Mehanovic et Arnautovic, n'est-ce pas ? Vous êtes mis d'accord sur cela, il

13 y a des nombreuses années. Oui ou non ?

14 R. Non.

15 Q. Bien. Alors, est-ce que vous avez une explication pour dire pourquoi M.

16 Mehanovic dit la même chose que vous, à savoir que la première nuit s'est

17 déroulée de façon tranquille et paisible ?

18 R. Je n'ai pas d'explication pour cela. En fait, je n'ai aucune idée de

19 pourquoi M. Mehanovic a fait une telle déclaration. Je n'étais pas là, et

20 je n'ai pas lu les déclarations faites par

21 M. Mehanovic ou que ce soit, mais je n'ai pas posé des questions à son

22 sujet en ce qui concerne le type de déclaration qu'il a pu faire --

23 Q. Bien --

24 R. -- ou que cela ait été. D'ailleurs, cela ne m'intéressait pas.

25 Q. Bien. Je peux comprendre cela. Est-ce que vous savez pourquoi, ou est-

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1 ce que vous avez une question à donner des raisons pour lesquelles M.

2 Arnautovic dit la même chose que vous, à savoir que cette nuit du 8 au 9

3 s'est déroulé de façon paisible ?

4 R. Je vous prie de me croire, je n'en sais rien, et ceci également pour M.

5 Arnautovic. Tout comme je l'ai dit, en ce qui concerne une question

6 précédente, une question antérieure, je n'ai aucune idée de la zone dans

7 laquelle il y a eu aucun accord, non, peu m'importe de savoir d'ailleurs ce

8 qu'ils ont pu déclarer.

9 Q. Donc, au-delà de ce que vous venez juste de dire, vous n'avez aucune

10 autre explication nous offrir, les raisons vos trois amis sont en train de

11 faire un récit, le même récit totalement faux; est-ce exact ?

12 R. Je sais qu'il s'agit d'un compte rendu exact, et d'un récit exact.

13 Maintenant, vous pouvez soutenir le contraire.

14 Q. Bien. Alors, votre thèse -- vous affirmez, en fait, que cette réunion à

15 laquelle Karic a fait ses commentaires concernant les Croates, a eu lieu

16 vers l'heure du déjeuner le jour suivant; est-ce exact ? Est-ce cela que

17 vous affirmez ?

18 R. Oui. En présence de M. Sefer, Zuka, Vehbija Karic, Salko Gusic, et

19 quelques autres commandants que je ne connais pas, Sadic et d'autres. Oui,

20 c'est cela que j'affirme et c'est vrai.

21 Q. Bien. Ce que je voudrais maintenant vous suggérer, cet une chose tout à

22 fait différent. Comme hypothèse, je vous dis qu'un groupe d'officiers

23 d'état-major est venus dans l'après-midi du 8, l'après-midi même où vous

24 étiez arrivé, et je voudrais vous poser comme hypothèse que ces officiers

25 d'état-major étaient Vehbija Karic, Zicro Suljevic, Rifat Bilajac, Namik

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1 Dzankovic, et Huso Alic, de l'Unité de Zuka, et ce que je vous dis, c'est

2 qu'ils ne sont pas arrivés non pas le 9, et pas après une nuit paisible,

3 mais peu de temps après, quelques heures plus tard, après votre arrivée à

4 Grabovica; êtes-vous d'accord, ou pas d'accord ? Est-ce que vous en

5 convenez ou non ?

6 R. Je n'en conviens pas, je ne suis pas d'accord, ils sont arrivés le 9.

7 Q. Je vous dis qu'ils n'ont pas fait de rassemblement immédiat, et qu'ils

8 n'ont pas fait s'aligner des soldats de la manière que vous avez décrite;

9 est-ce que vous êtes d'accord ou non ? Vous en convenez ?

10 R. Il n'y avait pas d'alignement, tous étaient assis, Sefer s'est adressé

11 au groupe, mais cela n'avait rien à voir avec le fait d'aligner des gens,

12 au sens strict. Tous étaient assis, çà et là. Il y avait du gazon là, et on

13 leur disait ce qu'ils étaient censés faire, ce qu'ils allaient avoir à

14 faire.

15 Q. Oui, et est-ce que vous utilisez le terme "alignement" comme vous

16 l'avez fait plus tôt dans votre déposition, lors de l'interrogatoire

17 principal ou non ?

18 R. Mais je ne sais pas, je ne me souviens pas.

19 Q. Oui, bien. Alors est-ce que M. Karic avait son fils avec lui ?

20 R. M. Karic, non. Je ne connais pas non plus son fils.

21 Q. Non, bon. Mais vous savez si son fils est à moitié croate, ou non ?

22 R. Je ne sais pas.

23 Q. Voyez, à votre connaissance, Vehbija Karic était un officier d'état-

24 major très expérimenté, n'est-ce pas ? Il avait beaucoup d'expérience.

25 R. C'était qu'un artilleur.

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1 Q. C'était quelqu'un qui avait beaucoup d'ancienneté dans l'ABiH, c'est

2 exact ? Dans l'armée de Bosnie; est-ce exact ?

3 R. Certainement. Assurément.

4 Q. Bien. Il avait comme surnom, Amidza, c'est-à-dire, oncle, A-m-i-d-z-a;

5 est-ce exact ?

6 R. Je n'ai pas connaissance de son surnom. Je n'ai jamais entendu son

7 surnom le concernant, personne ne me l'a appris, ou m'en a parlé.

8 Q. Bien. Maintenant à la page 19 du compte rendu de la déposition que vous

9 avez faite aujourd'hui, n'avez-vous pas dit ceci à la page 19, ligne 3, je

10 commence pour être juste avec vous, à la ligne 2 : "A ce stade, Vehbija

11 Karic, Sefer Halilovic, Zuka, et d'autres commandants du commandement

12 Suprême, qui étaient là, sont venus. Ils ont fait s'aligner toutes les

13 unités qui se trouvaient là. Ces unités se sont alignées juste devant la

14 maison, là où je dormais, parce que c'était une plaine, un plateau, où tout

15 le monde pouvait se rassembler." Bon. Alors, est-ce que c'est bien ce que

16 vous dites dans votre déposition, et à environ une heure, qu'il y avait eu

17 un "alignement"; c'est bien ce que vous avez dit aux membres de la Chambre,

18 lorsque vous avez dit aligner, trois fois dans le même paragraphe ?

19 R. Pour commencer, Sefer Halilovic et Vehbija Karic n'ont pas fait

20 s'aligner les soldats. Ce sont les commandants des pelotons ou sections, ou

21 plutôt les unités qui ont appelé les soldats pour qu'ils viennent se

22 présenter. Ils ont dit que cette unité devrait être là, que l'unité doit

23 être présente, et après cela, tous se sont assis sur place. Ce n'est pas

24 Sefer, ni Vehbija qui les a fait s'aligner. Ils étaient tous rassemblés, se

25 sont assis, et c'est à ce moment-là qu'on leur a parlé de l'opération

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1 Neretva. Donc il y avait des unités de la 9e Brigade motorisée, les Loups

2 de Cedo, les hommes de Zuka, le Bataillon indépendant, et toutes ces unités

3 représentaient 100 à 150 soldats.

4 Q. Oui, bien. Alors, Témoin D, ce que vous affirmez c'est ceci. Que cet

5 alignement, ou plutôt le fait que ces soldats se soient assis ou en tout

6 cas ce qui s'est passé à midi, ou est-ce que cela eu lieu à 15 heures ?

7 Qu'est-ce que vous dites à ce sujet ?

8 R. Je ne sais pas si c'est trois heures font vraiment une différence, je

9 n'avais pas de montre, je n'ai pas pu y prêter attention, je n'ai pas prêté

10 attention à l'heure. Je sais que c'était près de midi, quant à savoir s'il

11 était vraiment midi, ou 12 heures, ou s'il était 13 heures, ou 14 heures,

12 ou 15 heures de l'après-midi, je ne sais pas.

13 Q. Bien. Est-ce que la raison pour laquelle vous ne savez pas, c'est parce

14 que vous avez inventé complètement ce rassemblement, et cette réunion, et

15 que vous pouvez, à ce moment-là, donner le tableau général, mais sans vous

16 rappeler les détails ? Est-ce que c'est cela la situation ?

17 R. Je n'ai rien inventé. Je vous ai dit ce qui s'est passé, et je suis sûr

18 qu'ils, et je veux dire par "ils" ces commandants qui se trouvaient là, ils

19 savaient quel avait été le cours des événements, mais ils ont tout

20 simplement refusé de le dire.

21 Q. Quel est le nom des six camarades, qui étaient assis avec vous, lorsque

22 ces commandants sont arrivés dans les jeeps ?

23 R. Je ne sais pas. Moi-même, Dino, Nezad Sabanovic, Sulejman Lujinovic. Je

24 ne sais pas. Je ne peux pas me rappeler leur nom, c'était il y a longtemps,

25 1993, puis en 1998. Je ne peux pas me rappeler tous les noms, mais je suis

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1 sûr des gens qui s'y trouvaient. Je connaissais ces hommes.

2 Q. Bien. Donc, d'après vos souvenirs, vous dites que vous êtes là, vous,

3 puis Sabanovic, excusez-moi. Vous-même, Sabanovic, Dino Arnautovic -- et,

4 excusez-moi, je viens d'oublier. Est-ce que vous avez mentionné une autre

5 personne, Sulejman Lujinovic; c'est bien cela ? Vous étiez assis là,

6 lorsque ces gens sont arrivés dans leur jeep; c'est exact ?

7 R. Nous étions en train de préparer de déjeuner et, à ce moment précis,

8 j'étais en train de prendre du miel et c'est à ce moment-là que j'ai offert

9 du miel au commandant, qui venait juste d'arriver.

10 Q. Bien. Mais même sur ces questions de détail, Monsieur le Témoin, il

11 faut que je vous demande : est-ce que vous n'avez pas dit, à la Chambre

12 plus tôt, que Dino Arnautovic était l'un des conducteurs de ces jeeps ?

13 Ceci était à la page 12 -- attendez une seconde. Je vais regarder le compte

14 rendu, pour qu'il n'y ait pas d'injustice à votre égard, donc à la page 22

15 --

16 R. Oui, c'est ce que j'ai dit.

17 Q. Attendez une seconde voilà. Donc c'est cela que nous voulons dire,

18 c'était à la ligne 6, de la page 22 : "L'autre jeep était conduite par

19 Dino." Alors, le Procureur a posé une autre question, M. Morrissey a

20 soulevé une objection. L'objection était : "Je me demande si mon ami

21 souhaiterait clarifier l'identité de cette personne qui est appelé Dino

22 ici, parce que nous avons un Dino qui a fait une déposition." Le Président,

23 lui aurait : "Oui." Vous avez dit, alors : "Dino Arnautovic," également

24 connu sous le nom de "Dino." Est-ce que vous vous rappelez avoir dit cela à

25 votre déposition ? Ce n'est pas une question difficile, pourriez-vous, s'il

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1 vous plaît --

2 R. Non, c'était Dino Arnautovic. Je l'ai mentionné comme étant mon

3 camarade, dans la brigade. Il était là, il est arrivé avec eux, et il est

4 resté avec nous. C'était avant que tous les militaires soient arrivés, plus

5 tard.

6 Q. Je vois. Donc ce que vous dites, c'est que Dino était là avec vous,

7 avant que les militaires n'arrivent. Il est ensuite parti, et il les a

8 ramenés dans une jeep, c'est cela que vous affirmez, n'est-ce pas ? C'est

9 ce que vous affirmez maintenant ?

10 R. Non. Il était venu avec ces messieurs, et c'est pour cela que je l'ai

11 compté. Je l'ai compté comme se trouvant là, avant que l'ensemble des

12 soldats ne se réunissent. De sorte qu'il n'était pas assis avec les

13 commandants, il était là avec nous. Il les avait amenés jusque-là, et se

14 trouvait là avec nous, tout comme d'autres hommes de ma compagnie jusqu'à

15 ce que tous les soldats soient réunis.

16 Q. Bien. Bien sûr, les autres deux personnes dont vous dites qu'ils

17 étaient là, est-ce que c'était des personnes qui venaient de la même maison

18 que M. Lujinovic ?

19 R. Je ne sais pas précisément de quelle maison il venait. Je sais

20 seulement que Nezad Sabanovic se trouvait dans la même maison que celle

21 dans laquelle je dormais.

22 Q. Très bien. Alors, est-ce que vous avez dit à Mme Chana, ma consoeur,

23 lors du récolement, que cette réunion avait eu lieu à 15 heures ? Vous vous

24 souvenez de ce petit rassemblement ?

25 R. C'est possible. Je ne sais pas leur exacte. Je vous ai dit que c'était

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1 vers midi. Je n'ai pas précisé l'heure parce que je ne savais pas quelle

2 était l'heure exacte de leur arrivée.

3 Q. Oui. Alors, je voudrais être bien au clair de ceci. Est-ce que vous

4 avez dit -- est-ce que vous avez précisé quelle heure il était à ma

5 consoeur, Mme Chana, je cite : "A 15 heures, les commandants sont venus à

6 Grabovica." ? Avez-vous précisé 15 heures à Mme Chana qui est ici

7 maintenant dans cette salle d'audience ?

8 R. Il est possible que j'aie dit que c'était à trois heures de l'après-

9 midi.

10 Q. Bien. La question n'est pas de savoir si c'est simplement possible.

11 Est-ce que c'est cela que vous lui avez dit. C'est cela que vous lui avez

12 dit, n'est-ce pas ?

13 R. Bien. Oui, j'ai dit cela, mais je ne sais pas exactement l'heure. C'est

14 il y a 12 ans. Je suppose que vous pouvez comprendre. Je ne peux pas me

15 rappeler -- j'ai du mal déjà à me rappeler ce qui s'est passé hier, alors

16 si vous pensez il y a 10 ans.

17 Q. Pourquoi ne pouvez-vous pas vous rappeler ce qui s'est passé hier ?

18 Avez-vous une mauvaise mémoire ?

19 R. Ce n'est pas que j'ai une mauvaise mémoire. Mais vous posez des

20 questions concernant chaque élément d'information qui est mauvais et vous

21 êtes constamment aux aguets pour trouver un motif pour lequel --

22 Q. Bien. Je vais en venir à d'autres détails désormais.

23 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je crois que l'heure est venue de

24 suspendre la séance avant de revenir aux autres précisions.

25 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, j'étais juste en

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1 train de me demander si oui, bien. Effectivement, Monsieur le Président,

2 c'est l'heure.

3 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Bien. Nous allons suspendre et nous

4 reprendrons à une heure moins le quart.

5 --- L'audience est suspendue à 12 heures 18.

6 --- L'audience est reprise à 12 heures 44.

7 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, Maître Morrissey. Passons maintenant

8 aux éléments précis ou aux précisions.

9 M. MORRISSEY : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

10 Q. Je vous remercie, Témoin D.

11 Mais, Témoin D, juste avant la suspension, je pouvais des questions

12 concernant la réunion que vous avez décrite, le moment où M. Karic a

13 prononcé ces mots, cette proposition altérée de sang, et je vais vous poser

14 la question suivante : sur les personnes qui se trouvaient là, vous avez

15 dit que les commandants de peloton de sections avaient effectivement été

16 cherchés des soldats ou les avaient fait venir. Donc, je comprends de cela

17 que Nihad Vlahovljak était présent à cette réunion; est-ce exact ?

18 R. Oui.

19 Q. Vous connaissez aussi d'autres personnes qui avaient un lien avec

20 Vlahovljak, qui avaient les surnoms Dzigi, Klos, et Hajre; c'est bien

21 cela ?

22 R. Oui.

23 Q. Ils étaient aussi à cette réunion d'après vous; est-ce exact ?

24 R. Oui.

25 Q. Vous pourriez dire, qu'au moment de cette réunion dont vous avez parlé,

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1 au moment où celle-ci a eu lieu, ils n'étaient pas assis autour d'une table

2 dans la maison de Pero Maric, avec Enes Sakrak; est-ce exact ?

3 R. Cette réunion avec Vehbija Karic, Sefer Halilovic, et les autres ? Est

4 ce que c'est de cela que vous voulez parler ?

5 Q. C'est bien cela.

6 R. A ce moment-là, tous les soldats se trouvaient sur le pré, à

7 l'extérieur de cette maison dans laquelle M. Sefer, Vehbija Karic, et les

8 autres étaient assis.

9 Q. Oui. Parce que, selon vous, ceci, c'était une réunion très importante

10 avec le chef d'état-major et l'ensemble des membres de l'armée de Bosnie

11 qui étaient présent; est-ce exact ?

12 R. Sefer Halilovic était là. Il parlait de l'opération Neretva et du fait

13 qu'ils ne reviendraient, à aucun prix, tant que le siège de Mostar n'aurait

14 pas été levé, ou quelque chose dans ce genre, jusqu'à ce que le siège de

15 Mostar ne soit levé.

16 Q. Oui. Alors, maintenant je voudrais vous dire ceci : c'est que le compte

17 rendu donné par M. Sakrak est, selon moi, celui qui est le vrai, et que

18 c'est lui et ses camarades, y compris Vlahovljak, qui ont passé l'après-

19 midi dans la maison de Pero Maric, avec Pero Maric, et sans que ces

20 réunions, telles que celles que vous avez décrites, aient eu lieu. Etes-

21 vous d'accord avec cela ?

22 R. Cette réunion a eu lieu le 8 et non le 9, Maître. Nous sommes en train

23 de parler d'une réunion qui a eu lieu le 9, et non pas le 8. Parce que la

24 nuit du 8 a été très paisible, et rien ne s'est passé. Je vous parle d'une

25 réunion qui a eu lieu dans les heures de l'après-midi du 9, où ces

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1 officiers et les commandants étaient présents.

2 Q. Oui. Oui, je comprends que c'est cela votre déposition. Maintenant --

3 très bien. Je voudrais en venir à des questions concernant le meurtre de

4 Pero Maric. Combien de temps, avant qu'il ait été tué, vous êtes-vous

5 trouvé dans la maison de Pero Maric ?

6 R. Mais je n'étais pas du tout dans sa maison. J'étais devant la maison où

7 il y avait une table.

8 Q. Oui. Mais la question est la suivante : combien de temps avant le

9 meurtre êtes-vous arrivé là ?

10 R. Peut-être une heure plus tôt. J'étais en train de prendre un café avec

11 Nihad et d'autres qui se trouvaient là.

12 Q. Qui d'autre se trouvait là ?

13 R. Ses soldats qui étaient membres de son unité. Nous n'étions pas

14 vraiment très proches. Je connaissais seulement vraiment Nihad Vlahovljak,

15 et d'autres que je connaissais seulement de vue.

16 Q. Oui. Ceci comprenait Klos, n'est-ce pas ? K-l-o-s ?

17 R. Je ne sais pas. Je vous prie de me croire, je ne connaissais pas leurs

18 noms. Si je les avais vus, peut-être que j'arriverais à vous dire qu'un tel

19 et un tel étaient là.

20 Q. Un instant, s'il vous plaît. Vous aviez été membre de la compagnie

21 d'assaut de la 9e Brigade depuis sa fondation, n'est-ce pas ?

22 R. Oui.

23 Q. En fait, avec votre ami Nedzad Mehanovic, vous aviez rejoint la brigade

24 qui avait précédé la 9e Brigade, le 22 juillet de l'année précédente, le

25 même jour que M. Mehanovic, n'est-ce pas ?

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1 C'est bien cela ?

2 R. Oui. Nous avons été mutés de la 1ère Unité de Sandzak à l'Unité de la

3 Police militaire à l'époque, mais ce n'était pas encore une brigade.

4 Q. Bien. Donc, vous connaissiez tous ceux qui faisaient partie de cette

5 unité, vous connaissiez leurs noms ?

6 R. Oui.

7 Q. Ces personnes, c'étaient Dzigi, Hajre, Pedja, et Klos; est-ce exact ?

8 R. Je vous prie de m'excuser, mais j'ai l'impression que vous parlez d'une

9 unité tout à fait différente. Cette unité se trouvait sous un commandement

10 différent. Il y avait la 3e Brigade de Montagne qui a fusionné avec une

11 autre et qui a ensuite formé la 9e Brigade motorisée. Nous étions, à

12 l'époque, dans la police militaire, sous le commandement de Nedzvjerovic

13 [phon], de sorte que ceci était un peloton, une compagnie de 30 hommes qui

14 avait été constituée à l'école --

15 Q. Bien --

16 R. Il n'y avait pas d'école là. Il n'y avait pas non plus de Dzigi --

17 Q. Bien. La 9e Brigade aurait été, pendant plusieurs mois, un peloton, au

18 moment que vous dites, en septembre 1993; c'est cela ?

19 R. Je n'ai pas compris votre question. Plusieurs mois avant quoi ?

20 Q. Le peloton d'assaut existait depuis plusieurs mois avant ces meurtres

21 dont vous avez été le témoin; oui ou non ?

22 R. Oui.

23 Q. Vous connaissiez, par leurs noms, les membres de ce peloton d'assaut;

24 est-ce exact ?

25 R. Oui.

Page 83

1 Q. Vous connaissiez les personnes dont j'ai donné les noms il y a un

2 instant, Dzigi -- bon, je vais les nommer -- non, je retire ma question.

3 Vous connaissiez Dzigi, n'est-ce pas ?

4 R. Cet homme ne faisait pas partie de mon détachement d'assaut. Il se

5 trouvait dans une unité appartenant à un bataillon complètement différent.

6 Q. -- et il était là assis à table lorsque Pero Maric a été tué d'un coup

7 de feu ?

8 R. Je ne connaissais pas cet homme et je ne sais pas s'il était assis à

9 côté de moi.

10 Q. Mais vous connaissiez une personne du nom de Hajre; est-ce exact ?

11 R. J'ai rencontré Hajre le même jour et je me le rappelle jusqu'à ce jour.

12 Q. -- et il était assis à la table aussi, n'est-ce pas ?

13 R. Oui, Hajre l'était.

14 Q. -- une personne du nom de Pedja.

15 R. Non.

16 Q. Est-ce que vous connaissiez une personne du nom de Galic, d'origine

17 serbe ?

18 R. Non.

19 Q. Vous connaissiez Nihad, et il était assis à la table; c'est exact ?

20 R. Nihad Vlahovljak ?

21 Q. Oui. Il était assis à la table, n'est-ce pas ?

22 R. Oui. Oui, je le connaissais.

23 Q. Oui. Vous connaissiez un homme appelé --

24 R. Il était là. Il prenait du café avec moi.

25 Q. Vous connaissiez un home du nom de Prasovic, qui avait également un

Page 84

1 surnom, le surnom de Klos, et il se trouvait également assis à table; c'est

2 exact ?

3 R. Je ne sais pas.

4 Q. Ces gens, ils étaient tous là à table avant que vous n'y soyez arrivé;

5 c'est exact ?

6 R. Je ne sais pas. Je n'ai pas fait de déclaration en ce sens. Je ne le

7 sais pas. Je ne connaissais pas ces personnes du tout. Il s'agit de deux

8 brigades qui ont fusionné, et ces personnes n'étaient pas membres de mon

9 détachement d'assaut.

10 Q. Bien. Vous dites qu'un individu est entré et a tiré. Il est entré, et

11 dans les 20 secondes qui ont suivi, il a tiré sur Pero Maric et qu'il l'a

12 tué; est-ce exact ? C'est bien cela votre déposition ?

13 R. Oui. Je suis entré dans la maison. Nous étions --

14 Q. Est-ce que Pero Maric était assis à la table lorsqu'il a été tué ?

15 R. Non.

16 Q. Est-ce que vous êtes arrivé avec l'homme qui est entré et qui a tiré ?

17 R. Non.

18 Q. Est-ce que vous dites que vous êtes arrivé seul ?

19 R. Seul.

20 Q. Oui. Il n'est pas arrivé avec vous, n'est-ce pas ?

21 R. Il n'est pas arrivé avec moi. Je suis arrivé avant lui.

22 Q. Vous n'avez pas pris un paquet de cigarettes dans la poche du mort,

23 n'est-ce pas ?

24 R. Non. J'avais suffisamment de cigarettes à moi. Je n'avais pas besoin de

25 le faire.

Page 85

1 Q. Bon, je vois. Est-ce que vous avez vu quelqu'un faire cela ?

2 R. Non.

3 Q. Où dites-vous que Pero Maric se trouvait lorsqu'il a été frappé par ce

4 coup de feu ? Il était assis à la table ou il était ailleurs, à un autre

5 endroit ?

6 R. Il était dans sa maison. C'est ce que j'ai déjà dit dix fois. Je ne

7 veux pas me répéter.

8 Q. Bien. Etait-il debout ou assis ?

9 R. Je ne sais pas. Je n'ai pas vu cela. Je sais seulement qu'il était dans

10 sa maison. Je ne connaissais même pas son nom jusqu'au moment où j'ai parlé

11 aux personnes qui se trouvaient au local de l'ONU à Sarajevo.

12 Q. Très bien. Après que vous ayez vu -- peut-être que je vais vous poser

13 la question suivante : est-ce que vous avez vu le moment même où ce coup de

14 feu a été tiré ou pas ?

15 R. Non.

16 Q. Ce que vous dites, c'est que vous étiez assis à table prenant du café,

17 mais que vous n'avez pas vu tirer; est-ce exact ?

18 R. Comment aurais-je pu voir alors que cela a eu lieu dans la maison ?

19 Sans cela, j'aurais dit que je l'avais vu.

20 Q. Est-ce que vous avez vu celui qui a tiré entrer dans la maison ?

21 R. Oui. Il est entré dans la maison. Je ne savais pas ce qui allait se

22 passer.

23 Q. Vous êtes sûr que c'est la vérité ? Vous ne saviez pas ce qui allait se

24 passer ?

25 R. Oui, je suis certain de cela.

Page 86

1 Q. Qu'est-ce que vous avez vu ? Qu'est-ce qui s'est passé lorsque celui

2 qui a tiré est entré dans la maison ?

3 R. Rien. J'ai seulement entendu un coup de feu, rien d'autre.

4 Q. Est-ce qu'il a fermé la porte derrière lui lorsqu'il est entré dans la

5 maison ou pas ?

6 R. Je ne sais pas.

7 Q. Mais vous étiez là. Qu'est-ce que vous avez vu ? Est-ce qu'il a fermé

8 la porte ou pas ?

9 R. Je ne sais pas.

10 Q. Qu'est-ce que vous avez vu alors que vous étiez en train de regarder ?

11 R. Mais je ne regardais pas du tout. J'étais assis à cette table. Je ne

12 m'attendais pas du tout à ce qu'un meurtre ait lieu. Vous me posez des

13 questions auxquelles je ne peux tout simplement pas répondre.

14 Q. Est-ce que vous avez vu le corps ?

15 R. Non.

16 Q. Est-ce que vous avez jamais vu le corps ?

17 R. Le corps de Pero Maric ? Non.

18 Q. Est-ce que le corps de Pero Maric est un de ceux qui ont été emmenés

19 dans les camions conduits par les soldats de Zuka, Monsieur le Témoin D ?

20 R. Vous devriez poser la question à Zuka à ce sujet. Je n'en sais rien.

21 Q. Je vous pose la question suivante. Vous accusez Zuka d'avoir emporté

22 les cadavres dans des camions, et je vous pose la question : est-ce que la

23 victime de ce meurtre, alors que vous étiez tout près, a été emmenée dans

24 l'un de ces camions, oui ou non ?

25 R. Je ne sais pas. Je ne m'occupais pas de ramasser les cadavres,

Page 87

1 c'étaient les hommes de Zuka qui ont fait cela. Je n'ai jamais vu les

2 cadavres à Grabovica parce que, moi-même, je ne les ai pas ramassés et je

3 n'étais pas au courant du fait que quelqu'un s'occupait de les ramasser.

4 Q. Je vais vous poser une autre question au sujet de cela : est-ce que

5 vous êtes sûr que vous n'étiez pas l'une des personnes parmi celles qui

6 étaient les plus impliquées dans l'enterrement des cadavres suite à ces

7 crimes ?

8 R. Non, je n'ai jamais creusé de tombes et je n'ai jamais enterré qui que

9 ce soit là-bas. Je ne savais pas que les gens étaient enterrés à Grabovica.

10 Je sais simplement ce que je dis, c'est qu'ils ont été tués, mais je ne

11 sais pas où ils ont été enterrés.

12 Q. Très bien. Est-ce que vous saviez que quelqu'un avait été abattu à

13 l'intérieur de la maison, ou plutôt, comment le saviez-vous ?

14 R. Parce qu'un homme est sorti, et Vlahovljak lui a dit : "Mais qu'est-ce

15 que tu fais ?" L'autre lui a répondu de la même manière.

16 Q. Quels mots a-t-il employés lorsqu'il a répliqué d'une certaine

17 manière ?

18 R. Nihad lui a dit : "Qu'est-ce que tu fais ? Es-tu devenu fou ?" L'autre

19 a dit : "Attention, sinon le même sort te sera réservé à toi, le même que

20 celui qui a été réservé à cet autre homme, Pero Maric." Il s'est retourné

21 et il est parti.

22 Q. Est-ce que vous êtes allé à l'intérieur afin de voir ce qui était

23 arrivé à l'autre homme ?

24 R. Je ne suis pas allé à l'intérieur, mais les autres l'ont fait. Nihad

25 est entré, et puis ensuite il est sorti et il nous a dit que l'homme était

Page 88

1 mort.

2 Q. Qu'en est-il de la femme ? Est-ce qu'il vous a dit cela aussi ?

3 R. Oui, il a dit que l'homme avait été tué, de même que la femme. Il a dit

4 : "Ce sot [phon] a tué l'homme et la femme."

5 Q. Si cette femme a été tuée à ce moment-là, personne n'aurait pu

6 l'entendre pleurer et crier pendant la nuit après que Pero Maric a été

7 abattu, pleurer et crier dans sa chambre; est-ce exact ?

8 R. Je ne le sais pas. Je n'étais pas là, car à ce moment-là, je suis

9 rentré à la maison dans laquelle j'étais logé, et nous faisions des

10 commentaires concernant la folie qui régnait et concernant la manière dont

11 tout ceci avait été provoqué par les mots proférés par Vehbija Karic.

12 Q. Très bien. Combien de temps êtes-vous resté dans la maison de Maric

13 avant que vous ne rentriez dans votre maison ?

14 R. Je ne suis jamais entré dans la maison, je vous l'ai déjà dit. Je suis

15 resté là-bas pendant dix minutes peut-être. Ensuite, je suis retourné à la

16 maison dans laquelle je dormais. Ce n'était pas ma maison, c'était la

17 maison dans laquelle je dormais.

18 Q. Dans ces dix minutes, est-ce que vous avez demandé d'avoir des détails,

19 de la part de ceux qui avaient été à l'intérieur et qui avaient vu des

20 cadavres, d'après ce qu'ils disaient ?

21 R. Non. Simplement, ils sont sortis et ils ont dit qu'un homme et une

22 femme avaient été tués. C'est tout.

23 Q. Est-ce quelqu'un a pris les cigarettes du cadavre de l'homme ?

24 R. Je ne suis pas entré, je vous l'ai dit. Je ne sais pas si quelqu'un a

25 pris des cigarettes ou pas.

Page 89

1 Q. Est-ce que vous avez parlé avec Nihad ? Est-ce que vous avez dit :

2 "Qu'est-ce que nous allons faire au sujet de cela ?"

3 R. Non.

4 Q. Avez-vous parlé avec les autres en demandant : "Qu'est-ce nous allons

5 faire au sujet de cela ?"

6 R. Personne n'a parlé de cela et personne n'a rien entrepris.

7 Q. Pourquoi n'avez-vous pas dit aux autres : "Quel événement dégouttant et

8 horrifiant. Qu'allons-nous faire ?"

9 R. Je ne sais pas. Personne ne disait rien. Tous les soldats étaient là-

10 bas. Tous les soldats le savaient. Je ne sais pas.

11 Q. Pourquoi n'avez-vous pas dit : "Allons parler avec Ramiz. On vient de

12 commettre un meurtre de civils ?"

13 R. Je pense que Nihad Vlahovljak, en tant que commandant, aurait dû faire

14 cela, voir qui était responsable et tout cela. Il aurait dû entreprendre

15 quelque chose, car c'était la maison dans laquelle il dormait.

16 Q. Qui était votre commandant ?

17 R. Nevzet Sabanovic.

18 Q. Est-ce que vous lui avez raconté cela ?

19 R. Il était dans une action de reconnaissance vers le relais près de ce

20 village de Vrdi ou Verda, je ne suis pas sûr du nom.

21 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire comment vous épelez son nom ?

22 R. Nevzet Sabanovic.

23 Q. Oui, je comprends. Le relais au mont Vrdi, est-ce que c'est l'endroit

24 où vous êtes allés après participer à une action de combat ?

25 R. Oui.

Page 90

1 Q. Très bien, donc M. Sabanovic est parti dans le cadre de cette mission

2 de reconnaissance afin de faire le repérage des lieux de la bataille; est-

3 ce exact ?

4 R. C'était suite à l'ordre donnée par Sefer Halilovic, les hommes chargés

5 de la reconnaissance devaient être envoyés pour connaître le terrain

6 puisque, c'est un terrain qui était complètement inconnu de nous, nous

7 n'avions jamais eu d'action en Herzégovine avant.

8 Q. Je comprends. Vous avez dit qu'il était parmi les personnes qui étaient

9 sur place lorsqu'on offrait du miel à Vehbija Karic; est-ce exact ?

10 R. Oui, lorsqu'ils sont arrivés.

11 Q. Je comprends, donc vous voulez dire qu'ils ont été envoyés dans cette -

12 - dans le carde de cette mission de reconnaissance après ce moment-là; est-

13 ce exact ?

14 R. Après la réunion qui a eu lieu le 9 oui.

15 Q. Très bien.

16 Q. Vous êtes sûr lorsque vous dites que M. Sabanovic a été envoyé dans

17 l'après-midi du 9; est-ce exact ?

18 R. Oui, il est parti dans l'après-midi, et il nous a attendu dans le

19 village de Dreznica d'où nous sommes partis en action.

20 Q. Très bien et qui était le commandant de votre peloton en sont absence ?

21 R. Personne.

22 Q. Pourquoi n'avez-vous pas dit cela à Malco Rovcanin ?

23 R. Je ne sais pas je pense que Malco n'était pas du tout au moment du

24 premier meurtre.

25 Q. Ce genre de chose ne se passait pas tout les jours, à savoir qu'on tire

Page 91

1 sur un civil innocent et on le tue dans sa propre maison et que ceci est

2 fait par un membre de votre brigade, donc je vais répéter ma question:

3 Pourquoi n'avez-vous pas raconté cela à quelqu'un ? Pourquoi n'avez-vous

4 entrepris quelque chose ? Pourquoi au moins vous n'avez pas discuté de cela

5 avec les personnes présentes qui étaient assises, à ce moment-là ?

6 R. Je n'ai rien fait, car cela ne relevait pas de mes responsabilités, et

7 vous vous représentez ici la personne qui aurait du faire quelque chose,

8 pourquoi il ne l'a pas fait quelque chose ce même jour ? Pourquoi est-ce

9 qu'il a passé tout cela sous silence ?

10 Q. Pourquoi n'êtes-vous pas allé voir Sefer Halilovic ?

11 R. Parce que -- [aucune interprétation]

12 Q. Pourquoi n'êtes-vous pas allé à Jablanica, pourquoi est-ce que vous ne

13 lui ave pas dit cela ?

14 R. Comment en vélo, à pied ?

15 Q. N'est-il pas vrai que certains réfugiés ont dus y aller à pieds, n'est-

16 ce pas vous le savez ?

17 R. Je ne sais pas vraiment parce qu'il y avait des réfugiés musulmans de

18 l'autre côté ?

19 Q. Vous savez très bien qu'il y avait des gens qui avaient 70 ans et plus

20 et quelques réfugiés croates fuyaient le village à cause des meurtres et

21 ils ont dus marcher à Jablanica, alors qu'ils avaient autour de 70 ans ?

22 R. Je ne le sais pas.

23 Q. N'est-il pas vrai en fait qu'à partir du moment où Pero Maric a été tué

24 vous avez commencé à camoufler votre propre rôle là-dedans. A partir de ce

25 moment-là, jusqu'à ce jour ?

Page 92

1 R. Tout le monde camouflait cela, à commencer par Sefer Halilovic, tout le

2 monde savait ce qui s'était passé. Je ne sais pas pourquoi je devrais être

3 coupable de cela ?

4 Q. Quand Ramiz -- pourquoi avez-vous mentionné Sefer Halilovic, à ce

5 moment-là, Monsieur le Témoin ?

6 R. Car il était le numéro un, il était responsable de tout cela. Il était

7 le commandant de l'opération et le commandant chargé de l'ensemble de cette

8 région. C'était le commandant, Sefer Halilovic, qui était en charge de

9 toute cette région, à l'époque.

10 Q. Oui, mais la question de savoir pourquoi avez-vous mentionné son nom

11 au cours de votre déposition, à ce moment-là ?

12 Peut-être je peux vous faire une suggestion, à chaque fois que vous vous

13 sentez mis sous la pression ce que vous dites : "C'est que Sefer Halilovic

14 était le commandant, c'est lui qui aurait du faire quelque chose et c'est

15 lui qui a camouflé cela;" est-ce votre stratégie car c'est vous le tueur ?

16 Est-ce exact ?

17 R. Vous m'accusez sans preuve, trouvez les preuves et si j'étais le

18 meurtrier je l'aurais avouer, mais la personne qui est coupable est

19 responsable de tout cela est assise devant vous, c'est Sefer Halilovic.

20 Q. Pour être tout à fait correcte vis-à-vis de vous, je vais vous dire

21 quels sont les éléments de preuves auxquels je vais faire référence. Nous

22 considérons que vous avez nié votre rôle de manière malhonnête depuis le

23 début et vous avez minimisé votre rôle et caché votre présence au moment de

24 la mort de Pero Maric et d'autres actes criminels car, vous-même, vous

25 étiez l'auteur de ces actes. Est-ce que vous comprenez ce que je vous

Page 93

1 affirme ?

2 R. Je n'étais pas l'auteur de tout cela et je sais pourquoi cela s'est

3 passé. Mais tout ces gens, qui étaient là-bas, ils ont commis ces crimes,

4 et ils camouflaient cela tous, Là, je parle à partir du commandement

5 Suprême jusqu'au dernier soldat ordinaire, il faut clarifier cela, que ce

6 n'était pas dans l'intérêt du commandement Supérieur qu'on jette de la

7 lumière là-dessus. Au cours de toute cette période à partir du 13

8 septembre, par la suite, dans un délai de mois, ils auraient pu clarifier

9 tout cela. On savait tout, je ne sais pas pourquoi ils gardaient le

10 silence. Il faut leur poser la question à eux.

11 Q. [aucune interprétation]

12 R. Je ne sais pas qui aurait pu aller voir Sefer Halilovic, et dire :

13 "Voici, Monsieur le Commandant, voici ce qui se passe," -- attendez, vous

14 m'avez demandé de parler --

15 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Maître Morrissey, je pense que ces

16 questions prennent de plus en plus la forme d'arguments.

17 M. MORRISSEY : [interprétation] Vous avez sans doute raison, Monsieur le

18 Président. Je vais les poser d'une manière différente à partir de

19 maintenant.

20 Q. Monsieur le Témoin D, en 1995 vous avez appris par le biais d'un

21 article de presse publier à Oslobodjenje et qui a été repris dans d'autres

22 publications par la suite, vous avez donc appris que Sefer Halilovic a

23 demandé publiquement qu'une enquête soient lancé au sujet du crime de

24 Grabovica; est-ce que vous êtes d'accord ?

25 R. Non, j'ai entendu beaucoup de choses. Sefer Halilovic a reçu l'ordre du

Page 94

1 commandant de l'armée, Rasim Delic, c'est ce que j'ai appris par le biais

2 des médias à Sarajevo, que Rasim Delic lui a demandé d'assumer la

3 responsabilité pour lancer une enquête concernant ce qui s'était passé à

4 Grabovica. Lorsque celui-ci lui a donné ce papier, lui, il a pris le papier

5 et l'a déchiré, mais a demandé à ce monsieur pourquoi.

6 Q. Veuillez répondre à la question que je vous pose, en 1995

7 --

8 R. J'ai répondu.

9 Q. Attendez, en 1995 vous avez appris que Halilovic a lancé un appel pour

10 qu'une enquête soit lancée, oui ou non ?

11 R. Non.

12 Q. Est-ce que vous contesté que, dans un article publié dans Oslobodjenje

13 en 1995, Sefer Halilovic a lancé un appel pour une enquête ? Est-ce que

14 vous contestez cela ou vous ne le savez pas ?

15 R. Je ne sais pas.

16 Q. Est-ce que ceci ne vous préoccupe pas vous et d'autres membres de la 9e

17 Brigade de savoir que Sefer Halilovic a demandé une enquête publique

18 concernant Grabovica ? Ceci ne vous préoccupait pas ?

19 R. Cela ne me préoccupait pas car je ne suis coupable de rien. Je ne vois

20 pas pourquoi j'aurais du être préoccupé par cela, Ce sont les auteurs de

21 crimes qui devraient s'en préoccuper mais quant à ce qui s'est passé là,

22 c'est lié à un conflit entre Sefer Halilovic, Rasim Delic, l'un était le

23 commandant et l'autre non. Sefer Halilovic avait crée l'armée; ensuite,

24 Rasim Delic est arrivé et donc c'est là qu'un conflit au sommet du

25 commandement à éclaté entre eux.

Page 95

1 Q. L'homme qui a tué Pero Maric, c'était Mustafa Hota -- Musa Hota ?

2 R. Je ne sais pas.

3 Q. Excusez-moi.

4 R. Je ne sais pas.

5 Q. Vous étiez prêt à donner le nom de Musa Hota, en tant que violeur en

6 puissance dans la première déclaration que vous avez fournie à la police le

7 31 octobre 1993, n'est-ce pas ?

8 Mme CHANA : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que nous

9 étions à huis clos partiel, lorsque j'ai posé ces questions au témoin car

10 le témoin estimait qu'il pouvait être compromis en donnant certains noms.

11 Je pense que cela a des noms. Est-ce que nous pourrions passer à huis clos

12 partiel, si des noms vont être cités ? C'est pour cette raison que nous

13 sommes passés à huis clos partiel, la dernière fois, où nous avons parlé

14 d'auteur de méfaits.

15 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Ce Tribunal, vous le savez, s'inquiète du

16 statut réservé au témoin. Si une personne va témoigner dans ce Tribunal, il

17 faut veiller à protéger son identité. Mais, si vous dites que ceci est en

18 rapport aux coordonnées personnelles d'une personne, cela peut être une

19 raison suffisante.

20 Est-ce que vous êtes d'accord pour que nous passions à huis clos partiel ?

21 M. MORRISSEY : [interprétation] Non, je ne suis pas d'accord avec cette

22 idée. Franchement, l'identité du meurtrier, elle n'est pas en cause, on le

23 sait bien. Cet homme a déjà plaidé coupable, il est en train de purger une

24 peine.

25 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je ne parle pas ici du meurtrier. Je

Page 96

1 parle de l'incident, lorsque vous dites que quelqu'un est un violeur.

2 M. MORRISSEY : [interprétation] Si c'est une question qui se pose ici,

3 alors que la personne n'est pas présente, et elle n'est pas représentée par

4 un avocat, effectivement, ceci peut être entaché d'iniquité, c'est une

5 raison qui me pousse à penser, qu'effectivement, nous pouvons passer à huis

6 clos partiel, mais la réponse ne doit pas être nécessairement à huis clos

7 partiel.

8 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Nous verrons.

9 Passons à huis clos partiel.

10 Nous sommes à huis clos partiel, maintenant.

11 [Audience à huis clos partiel]

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24 [Audience publique]

25 M. MORRISSEY : [interprétation]

Page 98

1 Q. Le lendemain, quand vous vous êtes réveillé, vous saviez que Musa Hota,

2 avait tué Pero Maric, n'est-ce pas ?

3 R. Non, je ne le savais pas.

4 Q. Vous ne saviez pas. Vous ne savez pas qui a tué cet homme, c'est cela

5 vous dites ?

6 R. Mais comment vous le dire ?

7 Q. Vous étiez là, vous l'avez vu entrer dans la maison, et avec un fusil.

8 R. C'était un soldat.

9 Q. Mais vous savez à quoi ressemble Musa Hota, vous le connaissez cet

10 homme, non ?

11 R. Je n'ai pas du tout parlé de Musa Hota.

12 Q. Mais vous le connaissiez Musa Hota, vous connaissiez son aspect ?

13 R. Oui, je connais Musa Hota.

14 Q. Vous dites que la personne qui est entrée dans la maison, et a tué Pero

15 Maric, ce n'était pas Musa Hota, c'est cela que vous dites ?

16 R. Je n'ai pas de réponse à toute question.

17 Q. Si vous n'avez pas de réponse à cette question, c'est parce qu'en fait,

18 c'est une concoction de mensonge que vous êtes venu dire ici du début à la

19 fin ?

20 R. Non. Je tiens à ma propre sécurité. Pour savoir qui est passé aux

21 aveux, qui est en prison maintenant, cela c'est autre chose. Si vous me

22 demandez qui a tué Pero Maric, alors qu'on m'a demandé quelque chose

23 d'autre.

24 M. MORRISSEY : [interprétation] Peut-on montrer une photo, qui constitue la

25 pièce P4 ?

Page 99

1 Q. Monsieur le Témoin, on va vous montrer une pièce à conviction, c'est

2 une photographie, et je vais vous demander d'annoter cette photographie. Je

3 vais vous demander de faire ceci, d'indiquer les corps, les cadavres, que

4 vous avez vus le lendemain de l'assassinat de Pero Maric, d'indiquer

5 l'endroit où se trouvaient les cadavres. N'indiquez de croix; indiquez

6 simplement des chiffres à côté de chacun des cadavres que vous avez vu,

7 pour indiquer où ils étaient.

8 R. [Le témoin s'exécute]

9 Ils étaient le long de la route. Il y en avait un ici en haut, et le reste,

10 était le long de la route.

11 Q. Sincèrement, vous affirmez à ce Tribunal que, ce jour-là, vous avez vu

12 six cadavres ?

13 R. C'était le 10, le matin, quand je me suis livré, vers 9 heures.

14 Q. Donc d'après vous, ce jour-là, c'était le jour qui a suivi l'assassinat

15 de Pero Maric ?

16 R. Oui. Pero Maric, a été tué dans l'après-midi, alors qu'il commençait à

17 faire nuit.

18 Q. [aucune interprétation]

19 R. [aucune interprétation]

20 M. MORRISSEY : [interprétation] Je demande le versement de ce document.

21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je suppose qu'il n'y a pas d'objection ?

22 Mme CHANA : [interprétation] Non.

23 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci. La pièce est versée au dossier.

24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce de la Défense, 186.

25 M. MORRISSEY : [interprétation]

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1 Q. Conservez ces documents. Est-ce que vous avez dit à Mme Chana, qui

2 représente le bureau du Procureur, que vous aviez vu -- et je vais vous

3 donner lecture des notes de récolement. Est-ce que vous avez dit à Mme

4 Chana que : "Le lendemain, le 10 septembre en l'occurrence, j'ai vu" -

5 dites-vous - "beaucoup de corps, au moins dix, lorsque j'ai fait un tour

6 dans le village ?" Est-ce que c'est bien ce que vous avez dit il y a

7 quelques jours à peine à l'Accusation ?

8 R. Ce jour-là, j'en ai vu cinq ou six cadavres. Peut-être qu'il y en avait

9 plus. Sans doute les ont-ils descendus, parce qu'il y avait du sang sur la

10 route, et tout le long de la route, il y avait des traces de sang, et il y

11 avait cinq ou six cadavres. Mais enfin, je n'ai pas fait un décompte

12 précis.

13 Q. [aucune interprétation]

14 R. Je ne sais pas combien de gens ont été tués.

15 Q. D'accord. J'insiste. Est-ce que vous avez dit à Mme Chana ce que je

16 viens de vous dire, à savoir que vous avez vu -- un instant, s'il vous

17 plaît, Monsieur, avant de répondre. Attendez. "J'ai vu beaucoup de

18 cadavres, au moins dix, dans le village lorsque je suis parti faire un

19 tour."

20 R. Cinq, six, dix. Ils étaient le long de la route, uniquement ceux qui se

21 trouvaient le long de la route. Je ne sais pas où se trouvaient les autres

22 dans le village.

23 Q. Ecoutez la question que je vous pose : est-ce que vous avez parlé de

24 dix cadavres à Mme Chana, qui a fourni ces notes de récolement ? Est-ce que

25 vous avez dit à Mme Chana avoir vu "beaucoup de cadavres, au moins dix,

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1 dans le village ?" Est-ce bien ce que vous lui avez dit ?

2 R. Oui, c'est ce que j'ai dit. Mais j'ai dit "jusqu'à dix." Peut-être cinq

3 ou six. Je n'y ai pas fait le compte en marchant, ce n'était pas ma

4 mission. Je n'avais pas pour mission de faire le décompte des victimes.

5 Q. Ce que vous dites s'agissant des commentaires formulés à Mme Chana,

6 c'est que vous avez dit "cinq ou six, au maximum dix ?" Est-ce que c'est ce

7 que vous avez dit, et c'est honnête, d'après vous ?

8 R. Oui, tout à fait.

9 M. MORRISSEY : [interprétation] Je vais demander à l'Accusation

10 confirmation, puisque nous avons ce document, et je ne veux pas placer le

11 témoin dans une situation qui serait inéquitable.

12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Est-ce vraiment nécessaire ? Cela ne

13 l'est pas à mon avis parce que vous avez les notes de récolement.

14 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui.

15 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Donc, cela ne pose pas de problème.

16 M. MORRISSEY : [interprétation] Comme vous voulez, Monsieur le Président.

17 Très bien.

18 Q. S'agissant du nombre de cadavres que vous avez vus, avez-vous déclaré,

19 en 1998, dans une déclaration recueillie par Dragan Mijokovic, et qui porte

20 la date du 20 mars 1998, que - et je cite un passage qui se trouve vers la

21 fin de la page 2, Messieurs les Juges, Madame le Procureur - avez-vous dit

22 ceci : "Pendant la journée, j'ai vu le corps d'un civil de sexe masculin

23 qui devait avoir une cinquantaine d'années. Il était en contrebas de la

24 route menant vers la Neretva. Je sais qu'il y avait plusieurs cadavres tout

25 près de la Neretva, même si je ne les ai pas vus personnellement ?"

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1 Est-ce bien ce que vous avez déclaré le 20 mars 1998, que vous aviez vu un

2 corps ?

3 R. Je ne me souviens pas. Mais vous venez de dire qu'il y avait plusieurs

4 autres cadavres, cinq ou six, comme je le dis maintenant. Mais je ne me

5 souviens pas de ce que j'ai dit il y a sept ans.

6 Q. Mais pourquoi avoir dit à Dragan Mijokovic, dans la déclaration en

7 question, que vous n'aviez vu qu'un cadavre ? Pourquoi lui avoir dit cela ?

8 R. Bien. Vous venez de lire que j'ai vu aussi plusieurs autres cadavres.

9 Q. Je vais évacuer tout doute, et je ne veux pas être injuste envers vous.

10 Je vais relire cette citation : "Pendant la journée, j'ai vu le corps d'un

11 civil de sexe masculin - je pense qu'il devait avoir 50 ans - en contrebas

12 de la route menant vers la Neretva. Je sais qu'il y avait, près de la

13 Neretva, plusieurs corps, même si personnellement je ne les ai pas vus."

14 Pourquoi avoir dit cela ?

15 R. Même si je ne les ai pas vus moi-même, d'autres les ont vus. Moi,

16 personnellement, je ne les ai pas vus de mes propres yeux. J'ai dit que ce

17 n'était pas moi qui les avais vus, que d'autres personnes les avaient vus.

18 Q. Fort bien. Dans une autre déclaration que vous avez faite au tribunal

19 cantonal le 30 novembre 1998, avez-vous dit ceci, je vous cite - page 4 sur

20 5, un premier passage en haut de la page, et un deuxième passage, dix

21 lignes à partir du début, six ou dix lignes. Avez-vous dit ceci, je cite :

22 "Avec Lujinovic, je me suis levé, et près de l'angle de la maison, sur la

23 route, j'ai vu une trace de sang, comme si un corps avait été traîné dans

24 la poussière et avait laissé une trace de sang. Lujinovic est allé vers le

25 lieu où il était logé, et moi, je suis allé vers la maison où était logé

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1 Nihad Vlahovljak étant donné que mon ami Mehanovic était là aussi. Dans le

2 bosquet près de la maison, en marchant là, j'ai vu le corps d'un homme, un

3 homme assez âgé qui devait avoir entre 50 et 60 ans."

4 Est-ce bien ce que vous avez déclaré au tribunal cantonal, et disiez-vous,

5 à ce moment-là, la vérité, que vous étiez allé à pied jusqu'à la maison où

6 était Vlahovljak, et qu'en route, vous aviez vu un corps ?

7 R. Je ne me souviens pas.

8 M. MORRISSEY : [interprétation] Peut-on montrer au témoin la pièce qui

9 vient d'être versée au dossier. C'est la pièce P186. Je vous remercie.

10 C'est une pièce à conviction qui a été marquée.

11 Q. Témoin D, est-ce que vous avez déjà ceci devant vous ? Témoin D,

12 pourriez-vous, s'il vous plaît, nous dire quand vous aurez cette image

13 devant vous.

14 R. Oui. Oui.

15 Q. Bien. En regardant cette photographie, est-ce que vous voyez la maison

16 blanche sans toit dans laquelle vous avez été logé, selon ce que vous avez

17 dit ? Vous voyez cette maison ?

18 R. Oui.

19 Q. Bien. Et --

20 R. Oui.

21 Q. Est-ce que vous voyez, partiellement caché par la fumée bleue, la fumée

22 de bois, un tout petit aperçu de la maison de Pero Maric parmi la verdure ?

23 R. Oui. Oui.

24 Q. Bien. Sur la carte que vous avez marquée ici dans cette salle

25 d'audience, vous n'avez rien dit à propos d'un corps sur le sentier qui va

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1 de la maison où vous vous trouviez jusqu'à la maison de Pero Maric. Avez-

2 vous pu dessiner cela sur ce que vous avez déjà marqué ? Est-ce que vous

3 êtes d'accord avec cela ?

4 R. Je ne suis pas d'accord avec vous. Toutes ces déclarations ont été

5 faites et ont été transcrites par la suite, et ensuite, ils ont écrit tout

6 ce qui leur convenait. Ce que je dis ici, c'est la vérité. Ce que j'ai dit

7 à l'époque, c'est que nous n'avons pas été bien traités, nous avons été

8 maltraités. Nous avons été enfermés et passés à tabac par deux hommes très

9 forts. Ensuite, il a fallu que nous disions ce qu'ils voulaient que nous

10 disions, et ils ont fabriqué une histoire de la façon qui leur convenait.

11 C'est-à-dire, c'était au MUP, au CSB, enfin, ce que j'ai dit là-bas, cela

12 ne vaut rien. Ce que je dis ici est vrai.

13 Q. Oui. Mais alors, votre déposition concernant la déclaration que vous

14 avez faite devant le tribunal cantonal, c'est que vous avez dit la vérité

15 et qu'ils l'ont transcrit de façon erronée ? Ou est-ce que c'est que vous

16 avez été passé à tabac par deux hommes très forts, de sorte que vous avez

17 dit des contrevérités ? Lequel des deux ?

18 R. Pour commencer, ils ne nous ont jamais laissés lire la déclaration. Il

19 nous ont tout simplement dit : "Signez ici." Quelque soit la déclaration

20 que j'ai faite au MUP ou au CSB, je n'ai jamais été autorisé à la lire ni à

21 y jeter un coup d'œil, ne serait-ce que cinq ou dix minutes, et je n'ai

22 vraiment pas pu la lire. Tout ce qu'on m'a dit, c'était de signer cette

23 déclaration. Tout ceci a été un coup monté. Ils ont écrit ce qu'ils

24 voulaient.

25 Q. C'était un coup monté si vous mentionnez que Sefer Halilovic était

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1 présent en tant que commandant de l'opération Neretva 93, ou est-ce que

2 c'était vrai ?

3 R. C'était vrai. Il était le commandant, il le sait bien --

4 Q. Oui.

5 R. -- de l'opération Neretva.

6 Q. Je sais. Mais si cette information s'est glissée dans l'une de ces

7 déclarations, est-ce qu'il s'agit d'éléments d'information que l'on vous a

8 obligé à dire, avec des coups, ces deux hommes très costauds et, ensuite,

9 ceci a été écrit sans votre consentement ? Ou est-ce que ce sont des

10 renseignements exacts ? Est-ce que vous avez honnêtement dit la vérité, et

11 que ceci a été correctement enregistré ? Lequel des deux ?

12 R. Pour commencer, toutes ces déclarations qui ont été faites, cela n'a

13 jamais été quelqu'un d'origine ethnique de Bosnie qui faisait les

14 interrogatoires. Ils avaient désigné les Croates et les Serbes pour le

15 faire, et ils écrivaient ou rédigeaient ce qu'ils voulaient. Ils ne

16 visaient pas Sefer Halilovic en disant : "Ceci est vrai. Ceci est vrai."

17 Ils ajoutaient ceci et cela. Quiconque l'a fait, aucune de ces personnes

18 n'étaient des Bosniens. Parmi tous ceux qui ont recueilli nos déclarations

19 à l'époque, cela n'a jamais été un Bosnien qui a interrogé un membre de

20 l'armée ou de la 9e Brigade.

21 Q. Lors de cette audience devant le tribunal cantonal, le 30 novembre

22 1998, avec ce Juge d'instruction, Ibrahim Hadzic, de quelle origine

23 ethnique était-il ? Ceci est à la page 1 de cette déclaration. De quelle

24 origine ethnique était le Juge Ibrahim, ce uge d'instruction ou ce juge

25 enquêteur ?

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1 R. Je n'ai jamais fait de déclaration devant cette personne. C'était

2 Vladimir Spoljaric, et c'est à lui que j'ai fait ces déclarations. Il est

3 handicapé, il a perdu un œil. Mais je n'ai jamais fait de déclaration à la

4 personne que vous dites. Vladimir Spoljaric, 1993, le 26 octobre jusqu'au

5 mois de novembre, c'était lui qui était chargé de cette procédure, il

6 s'occupait de l'ensemble.

7 Q. Bien. Puisque l'on voit, au tout début du compte rendu de cette

8 audience, un témoin, le 30 novembre 1998, on voit qu'il est écrit : "Juge

9 chargé de l'enquête, Ibrahim Hadzic, et Greffier, Edina Djurdjevic." Est-ce

10 que vous maintenez votre déposition selon laquelle vous avez été interviewé

11 par des Croates et des Serbes, ou est-ce que vous voudriez maintenant

12 revenir sur votre affirmation ?

13 R. Non, non. Tout ce que je sais, c'est que j'ai simplement fait une

14 déclaration à M. Vladimir Spoljaric et à Mijokovic.

15 Q. Très bien. Dans votre déclaration à Miodrag Mijokovic, est-ce que vous

16 n'avez pas dit que vous étiez assis à cette table en train de prendre du

17 café lorsque Pero Maric a été tué d'un coup de feu, n'est-ce pas ? Vous

18 n'avez jamais admis cela devant lui ?

19 R. Personne n'était intéressé à clarifier les choses concernant cette

20 affaire. Personne ne vous posait ces questions, dans le genre "Est-ce que

21 vous avez tué quelqu'un ?" Personne n'a demandé qui étaient les meurtriers.

22 Je vous le dis pour la centième fois.

23 Q. Mais est-ce que vous n'avez pas avancé cette histoire complètement

24 fausse - et je vais vous la lire de façon complète pour vous poser les

25 questions - ceci est à la page 1, et puis ensuite se poursuit sur la page

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1 2. Cela commence par une description à laquelle vous dites -- à la suite de

2 la visite de M. Karic et de Sefer Halilovic. Vous avez dit que c'était

3 après avoir indiqué ce que Karic a dit et ce que Halilovic avait dit. Vous

4 poursuivez en disant ceci, je cite : "Dans le début de la soirée de cette

5 journée, Ramiz Delalic, Malco Rovcanin, et Fikret Kraljevic ont quitté le

6 village et sont allés faire quelque chose à Jablanica. Erdin Arnautovic,

7 également connu sous le nom de Smrk [phon], et moi-même, sommes restés dans

8 la maison. Vers 23 heures, nous sommes, tous les deux, allés nous coucher.

9 Nous nous sommes endormis, et vers 9 heures, nous nous nous sommes levés."

10 Maintenant, est-ce que vous êtes d'accord avec ceci : vous avez tout

11 simplement omis la partie cruciale, à savoir que vous étiez présent lors du

12 meurtre brutal et insensé qui a eu lieu ? Est-ce que vous êtes d'accord que

13 vous avez délibérément omis de dire cela ?

14 R. Mais personne n'a posé de questions à ce sujet. Personne n'a insisté

15 sur ce point, de sorte que ceci a été omis. Qui a dit, dans une déclaration

16 quelconque, avoir tué quelqu'un ou que quelqu'un avait été tué ?

17 Q. Vous poursuivez, je vous cite : "Vers environ 9 heures, nous nous

18 sommes levés. Sulejman Lujinovic est venu nous trouver. Il nous a demandé

19 ce qui s'était passé la nuit précédente. Dino et moi-même étions encore au

20 lit et lui avons demandé ce qui s'était passé. Il a répondu que tous les

21 habitants du village avaient été tués dans la soirée."

22 Est-ce que c'est exact ? Est-ce que ceci a eu lieu ou non ?

23 R. Oui, c'est vrai. Entre le 9 et le 10, cette nuit-là, tous les civils

24 ont été tués, oui.

25 Q. Non, non, non, non. Est-ce que, vous-même, vous avez été réveillé par

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1 M. Lujinovic avec ces nouvelles épouvantables ?

2 R. Non. Nous étions déjà réveillés, mais nous ne savions pas que tous les

3 civils avaient été tués. Nous savions ce qui était arrivé pour Pero Maric,

4 mais nous ne savions rien des autres civils. Lorsqu'ils sont venus et que

5 nous avons vu ces traces de sang, c'est à ce moment-là qu'ils nous ont dit

6 que tous les civils avaient été tués. Pero Maric avait été tué un jour plus

7 tôt, la veille, le 9, le 10 dans l'après-midi, ou plutôt au crépuscule.

8 Q. Est-ce que vous avez poursuivi en disant ceci : "Dino et moi-même

9 étions encore au lit et nous lui avons demandé ce qui s'était passé. Il a

10 répondu que tous les habitants du village avaient été tués dans la soirée.

11 Nous nous sommes levés tous les deux. Nous lui avons demandé les détails.

12 Il nous a dit que trois hommes en uniforme, avec le visage masqué, étaient

13 venus dans la maison où il dormait et dans laquelle les propriétaires de la

14 maison se trouvaient et avaient emmené la femme et son mari, et les avaient

15 fait sortir de la maison ?"

16 Alors, est-ce que M. Lujinovic vous a vraiment dit cela ou pas ?

17 R. Non, je n'ai jamais dit cela. Je sais seulement qu'ils m'ont dit que

18 tous les civils avaient été tués cette nuit dans le village de Grabovica.

19 Q. Bien.

20 R. Quant à ceux qui seraient venus avec des cagoules sur la tête et qui

21 avaient fait sortir les civils et qui les auraient tués, cela, je ne le

22 savais pas. Non.

23 Q. Comment se fait-il que ceci se soit glissé dans la déclaration que vous

24 avez faite à Dragan Mijokovic et que vous avez signée ?

25 R. Ecoutez, laissez-moi vous dire. Ils ne vous laissaient jamais lire ces

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1 déclarations. Ils nous donnaient un morceau de papier à signer, et puis

2 c'était terminé. Voilà comment cela se passait en Bosnie. Vous ne comprenez

3 pas cela. Un homme tue un autre homme, et soudainement, il est innocent. Il

4 y a des centaines de témoins, et tous vous disent qu'il n'y a eu aucun

5 meurtre, et l'homme est acquitté. Voilà comment est la Bosnie. Vous devez

6 le savoir. Ce n'est pas l'Union européenne, ce n'est pas la communauté

7 européenne, c'est un Etat sans droit qui est gouverné et régi par des

8 personnes --

9 Q. Monsieur le Témoin D --

10 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, c'est un sujet

11 relativement nouveau que je vais maintenant aborder. Je pense que je

12 pourrais encore poser deux questions sur ce point, mais il vous appartient

13 d'en décider. Je crois que nous sommes peut-être arrivés à l'heure qui --

14 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Gardons donc cela pour demain.

15 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui.

16 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Ceci va bien pour aujourd'hui.

17 Je pense que nous allons lever la séance.

18 Monsieur le Témoin, je dois vous avertir, comme je l'ai fait pour les

19 autres témoins, à savoir que, pendant que vous êtes à La Haye, et que vous

20 déposez sous serment, vous êtes toujours tenu par ce serment. Donc, ne

21 permettez à personne de vous parler et ne parler à personne de votre

22 déposition. Est-ce que vous avez compris cela ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

24 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.

25 Nous nous verrons demain matin.

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1 L'audience est levée.

2 --- L'audience est levée à 13 heures 47 et reprendra le mardi 22 février

3 2005, à 9 heures 00.

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