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1 Le jeudi 24 février 2005
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.
6 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Veuillez citer le numéro de l'affaire.
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour.
8 Affaire IT-01-48-T, le Procureur contre Sefer Halilovic.
9 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci beaucoup.
10 Aujourd'hui, nous allons poursuivre l'audition du témoin, suite à quoi, si
11 nous avons le temps, nous aurons éventuellement une discussion sur un point
12 de procédure.
13 Oui, Maître Morrissey.
14 Oui, Monsieur Re.
15 M. RE : [interprétation] Permettez-moi de vous signaler que l'Accusation a
16 été en mesure hier de localiser un des documents, le document MFI196 que Me
17 Morrissey avait présenté au témoin. Il s'agit du manuel de la JNA,
18 commandement et contrôle, qui a été traduit. Nous disposons, je pense de
19 l'intégralité du texte en traduction. Il a été communiqué sous forme
20 électronique à la Chambre, au Greffe ainsi qu'à la Défense.
21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci beaucoup. Il est possible que nous
22 aurons l'occasion de traiter de cette question en particulier
23 ultérieurement.
24 Maître Morrissey.
25 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui. Je peux confirmer qu'effectivement,
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1 j'ai reçu le document que vient de mentionner
2 M. Re. Je remercie l'Accusation de son aide à cet égard. Merci beaucoup.
3 LE TÉMOIN : SELMO CIKOTIC [Reprise]
4 [Le témoin répond par l'interprète]
5 Contre-interrogatoire par M. Morrissey : [Suite]
6 Q. [interprétation] Monsieur Cikotic, je voudrais parler d'un autre volet
7 de la doctrine militaire. J'aimerais avoir votre opinion en tant que
8 praticien de la chose militaire sur le terrain. On vous a posé des
9 questions au sujet de la situation d'un chef d'état-major. Maintenant,
10 j'aimerais vous interroger au sujet des commandants en second, des
11 commandants adjoints et de la manière dont un commandant en second peut
12 être amené à signer un ordre.
13 En premier lieu, j'aimerais vous poser quelques questions d'ordre général.
14 Est-il exact que lorsqu'un commandant donne un ordre à son adjoint aux fins
15 d'exercer lui-même le commandement, même un commandement au combat, est-il
16 exact, à ce moment-là, son second, suite à cette ordre, est-ce qu'à ce
17 moment-là, le commandant peut exercer ce pouvoir ?
18 R. Oui, c'est exact.
19 Q. Dans de telles circonstances, la pratique veut que le commandant en
20 second signe l'ordre en y ajoutant le mot "zastupa"
21 z-a-s-t-u-p-a; est-ce exact ?
22 R. C'est exact.
23 Q. Je vais vous montrer un certain nombre d'exemples de cette pratique
24 afin que le Tribunal puisse s'en convaincre.
25 M. MORRISSEY : [interprétation] Il faut que nous trouvions le document en
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1 question qui a déjà été versé au dossier.
2 Peut-être pourrait-on présenter au témoin la pièce MFI160 à l'écran.
3 Q. Pendant que l'on trouve cette pièce, Monsieur Cikotic, je signale qu'il
4 s'agit d'un ordre que vous n'avez peut-être pas vu. Je ne parle pas du
5 principe que vous l'ayez vu. Simplement, ce qui m'intéresse, c'est vos
6 observations au sujet de la signature et de la pratique qui existaient en
7 matière de signature de ce type de document.
8 M. MORRISSEY : [interprétation] J'aimerais que l'on présente au témoin la
9 page 2 du document en B/C/S, afin qu'il puisse y trouver les mots qui y
10 figurent jusqu'à la fin de la page.
11 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Nous rencontrons quelques difficultés
13 d'ordre technique, c'est-à-dire que nous ne parvenons pas à avoir la
14 version en anglais à l'écran.
15 M. MORRISSEY : [interprétation] Cela ne pose peut-être pas de difficulté
16 pour cette partie de mon contre-interrogatoire, parce que ce qui
17 m'intéresse, c'est d'attirer l'attention du témoin sur les termes en B/C/S,
18 le mots en B/C/S, et de demander au témoin de nous expliquer de la manière
19 qu'il le peut de quoi il retourne.
20 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Bien.
21 M. MORRISSEY : [interprétation]
22 Q. A l'écran, nous avons la première page d'un ordre en date du 16
23 septembre 1993. Soyons clairs, est-ce que vous souvenez avoir vu cet ordre
24 précédemment ?
25 R. Non.
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1 Q. Quoiqu'il en soit je vais vous montrer la page suivante pour vous
2 demander de nous faire une observation sur la formule, ou la formulation
3 qui y figure.
4 M. MORRISSEY : [interprétation] Pouvons-nous voir --
5 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
6 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
7 Juges, s'il y a problème technique, M. Cengic va aller chercher l'original,
8 on pourra ensuite le placer sur le rétroprojecteur. Parce que comme j'ai
9 déjà dit, ce n'est pas la teneur même du document qui importe, ce n'est pas
10 à ce sujet que je vais interroger le témoin. Je vais passer à un autre
11 point en attendant.
12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.
13 M. MORRISSEY : [interprétation]
14 Q. Excusez-moi, Monsieur le Témoin.
15 Pendant que nous attendons, je voudrais vous poser quelques questions
16 supplémentaires au sujet de la réunion du 5 septembre à Dobro Polje.
17 Pouvez-vous nous indiquer, approximativement, en essayant de vous en
18 souvenir le mieux possible, vous souvenez-vous de la durée de cette
19 réunion ?
20 R. Je crois que cela a peut-être duré une heure ou deux.
21 Q. S'agissant des missions qui ont été affectées, je vais vous poser des
22 questions au sujet des zones qui ont été délimitées sur la carte qui se
23 trouve derrière vous. Sur la carte qui vous a été présentée, est-ce que les
24 directions indiquées pour chacune des unités, correspondent -- ou plutôt,
25 je vais vous poser une question au sujet de vous-même d'abord.
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1 Est-ce que les directions indiquées sur cette carte correspondent à
2 des plans que vous aviez envisagés dans les semaines précédemment pour
3 avancer le long de votre axe. Est-ce que c'est bien le cas ?
4 R. Oui.
5 Q. Dans la mesure où vous pouvez nous aider à ce sujet, je voudrais savoir
6 si dans la zone de compétence du 6e Corps qui se trouvait à proximité de la
7 vôtre, savez-vous si le 6e Corps avait déjà établi, enfin, ou plutôt non,
8 pas établi, envisagé des offensives dans ces zones avant même la réunion de
9 Dobro Polje ?
10 R. J'imagine que oui, mais je ne sais pas. Je ne peux pas l'affirmer avec
11 certitude.
12 Q. Ce n'est pas grave; je ne vais pas insister.
13 En tout cas, à Dobro Polje, on n'a rien ajouté de nouveau à la carte
14 qui se trouve derrière vous. Ce qui s'est passé plutôt, c'est que l'on a
15 explicité cette carte, on a expliqué les détails concernant cette carte à
16 ceux qui allaient être engagés dans les combats, n'est-ce pas ?
17 R. Oui, c'est essentiellement ce qui s'est passé dans les grandes lignes.
18 Q. Ensuite, après cette réunion, après être retourné au commandement dans
19 votre commandement, vous n'avez pas rencontré Sefer Halilovic en personne,
20 avant qu'il ne soit arrêté le 26 octobre. Vous ne l'avez plus rencontré
21 avant son arrestation le 26 octobre 1993; est-ce bien exact ?
22 R. Oui, c'est exact.
23 Q. Vous n'étiez présent lors d'aucune réunion entre le commandant Delic et
24 le chef d'état-major Halilovic, à une discussion ayant précédé la réunion
25 de Dobro Polje; c'est bien exact ?
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1 R. C'est exact.
2 Q. Est-ce que vous avez personnellement vu le commandant Delic avant la
3 réunion de Dobro Polje lorsque, apparemment, il est venu à Jablanica et
4 Konjic ?
5 R. Non.
6 Q. Fort bien. Saviez-vous que dans les semaines suivant la réunion de
7 Dobro Polje, Delic, commandant Delic s'est trouvé à Zenica, c'est-à-dire,
8 là où se trouvait le 3e Corps et sa zone de responsabilité ?
9 R. Non.
10 Q. Je souhaite vous montrer un document que vous n'avez peut-être encore
11 jamais vu. Je vais vous le présenter, puis je vais vous poser un certain
12 nombre de questions à ce sujet, sur la forme du document également.
13 [Le conseil de la Défense se concerte]
14 Q. Nous allons essayer de trouver le document, et vous le présenter à
15 l'écran.
16 Je remarque que le document qui était perdu précédemment a ressurgi.
17 Je change un peu l'ordre de mon contre-interrogatoire. Je vais revenir à ce
18 que l'on voit à l'écran.
19 Est-ce qu'à la deuxième page on voit que le document a été apparemment été
20 signé par Stjefan Siber ?
21 R. Oui.
22 Q. Ce qui m'intéresse ce n'est pas vraiment la teneur, le contenu du
23 document. J'aimerais simplement que vous lisiez pour le compte rendu
24 d'audience les mots qui figurent à côté de la signature de M. Siber dans le
25 coin inférieur droit du document.
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1 R. Oui, je vois bien.
2 Q. Est-ce que ce qui est écrit là c'est "zastupa komandanta" ?
3 R. Oui, c'est cela.
4 Q. Qu'est-ce que signifie le mot "zastupa" tel qu'il est utilisé ici dans
5 le document ?
6 R. Cela signifie qu'il s'agit au nom du commandant; il signe ce document
7 au nom du commandant, c'est lui qui le représente.
8 Q. Mais ceci signifie pourtant que c'est un ordre contraignant pour les
9 destinataires du document, n'est-ce pas ? Vu la manière dont le document
10 est signé.
11 R. Oui.
12 Q. Très bien.
13 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Maître Morrissey, allez-vous demandé le
14 versement au dossier de ce document ?
15 M. MORRISSEY : [interprétation] Il a déjà été versé au dossier.
16 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Bien.
17 M. MORRISSEY : [interprétation] Tout ce qui m'intéresse, ce sont les
18 observations du témoin au sujet de la forme du document.
19 [Le conseil de la Défense se concerte]
20 M. MORRISSEY : [interprétation] J'aimerais que l'on présente au témoin le
21 document MFI161.
22 Q. Est-ce que vous avez sous les yeux le document en langue bosniaque ?
23 R. Oui. Mais est-ce qu'on pourrait zoomer un petit peu, afin que je puisse
24 lire le texte ?
25 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui. Est-ce qu'on pourrait zoomer, en
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1 particulier, sur la partie inférieure droite du document, là où se trouve
2 la signature ?
3 R. Oui.
4 Q. Est-ce que vous voyez que ce document est signé -- enfin, pas vraiment
5 signé, mais on y voit le titre et le nom de "Sefer Halilovic" sous la
6 mention "nacalnik," mais on voit également qu'on a utilisé le terme
7 "zamjenik komandanta." Est-ce que vous voyez que ces deux expressions
8 figurent ici sur le document ?
9 R. Oui, je vois.
10 Q. Afin que les choses soient bien claires pour vous, d'après ce que vous
11 savez, Sefer Halilovic était effectivement le chef de l'état-major
12 général ?
13 R. Oui.
14 Q. Est-ce que pour vous -- il est possible que vous ne puissiez pas
15 répondre à ma question, si vous pouvez, répondez-y s'il vous plaît -- après
16 l'ordre du 18 juillet 1993, le chef d'état-major était d'office l'un des
17 trois commandants adjoints de l'armée bosniaque, l'un étant Croate, l'autre
18 étant Serbe et l'autre Bosniaque. Est-ce que c'est ainsi que vous
19 compreniez la situation ?
20 R. Je pense que c'est ainsi que la situation se présentait. C'est de cette
21 manière que c'était interprété
22 Q. Mais soyons très clairs à ce sujet. Vous souvenez-vous avoir vu cet
23 ordre du 18 juillet qui a mis en place cet état de fait d'office ?
24 R. Non, je n'ai pas vu cet ordre.
25 Q. En signant ce document avec les mots "chef d'état-major" en lettres
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1 capitales et l'expression "zamjenik komandanta" entre parenthèses et pas en
2 capitales, et sans utilisation du mot "zastupa," est-ce que vous
3 interprétez ce document comme étant une lettre ou plutôt un ordre, signé
4 par Sefer Halilovic, à titre de chef d'état-major ?
5 R. Oui.
6 Q. Si ce document avait été signé par lui en tant que commandant adjoint,
7 vous vous seriez attendu qu'à ce moment-là, il utilise le terme de
8 "zastupa," n'est-ce pas ?
9 R. Oui, c'est vrai.
10 M. MORRISSEY : [interprétation] Ces deux documents ont déjà été versés au
11 dossier par l'Accusation, mais je souhaite simplement vous les présenter.
12 Nous venons de voir le document MFI161.
13 Nous allons maintenant voir le document MFI123.
14 Q. C'est la même procédure que je vais suivre dans les questions que
15 j'aurai à vous poser au sujet de ce document.
16 M. MORRISSEY : [interprétation] Pendant que l'on recherche le document, je
17 vais expliquer le contexte dans lequel j'ai inscrit cette question. Vous
18 vous souviendrez que lors des questions supplémentaires posées à Salko
19 Gusic, puisqu'il avait été précédemment interrogé au sujet de M. Halilovic,
20 pour savoir si M. Halilovic était chef d'état-major ou s'il s'agissait en
21 tant que commandant en second. L'éminent représentant de l'Accusation,
22 Mme Chana, lui a présenté ces deux documents puisqu'il y figurait les deux
23 titres -- ou plutôt, dans ces deux documents figuraient le mot de
24 "zamjenik," j'essayais de faire la lumière sur cette question en
25 interrogeant le témoin de la sorte.
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1 Q. Vous avez maintenant un autre document à l'écran, Monsieur le Témoin.
2 Est-ce qu'en bas à droite, on voit le nom de Sefer Halilovic, en tant que
3 chef d'état-major, mais avec, entre parenthèses, la mention de "commandant
4 adjoint" ou "en second" ?
5 Le voyez-vous ?
6 R. Oui.
7 Q. Est-ce que vous conviendrez que, comme pour le précédent document, il
8 semble qu'il s'agit d'un document que Halilovic a signé en tant que chef
9 d'état-major ?
10 R. Oui, je suis d'accord.
11 Q. S'il l'avait signé en tant que commandant adjoint, vous vous seriez
12 attendu qu'à ce moment-là, il inscrive la mention "zastupa," n'est-ce pas ?
13 R. Oui.
14 Q. Merci.
15 M. MORRISSEY : [interprétation] J'en ai terminé de ces deux documents.
16 Il y a un autre document que je souhaiterais vous présenter, un
17 document de la Défense qui devrait être dans le système, un document qui
18 n'a rien à voir avec ces questions, un document du 3e Corps, DD00.2468.
19 Je pense qu'il s'agit du document portant la cote MFI201 et je vais
20 ensuite demander le versement au dossier de ce document par le truchement
21 de ce témoin.
22 Q. Fort bien. Avez-vous sous les yeux un document sur lequel figure, en
23 lettres manuscrites, en haut à droite, la mention "D535" ?
24 R. J'ai ici un document au numéro D535.
25 Q. Un instant, M. Cikotic. Je souhaiterais dire quelques mots à la Chambre
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1 de ce document.
2 M. MORRISSEY : [interprétation] Ce document, Monsieur le Président, nous
3 l'avons obtenu dans les archives et apparemment, la photocopie qui a été
4 remise à la Défense comporte deux ordres. Pour que les choses soient bien
5 claires pour l'Accusation ainsi que pour les Juges, vous voyez qu'ici, nous
6 avons le premier ordre, l'audio, qui s'arrête au milieu de la page et
7 ensuite, on voit un ordre qui n'a rien à voir, un ordre que je ne vais pas
8 utiliser, mais qui figure sur le document parce que nous ne voulions pas
9 modifier ce qui nous avait été communiqué. Ce que nous avons trouvé dans
10 les archives, ce qui nous a été remis, c'est une photocopie sur laquelle
11 figure deux documents. Je vais m'appuyer sur le premier document, et pas
12 sur le deuxième, qui n'a rien à voir.
13 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Ce document n'apparaît pas sur la liste
14 qui nous a été remise.
15 M. MORRISSEY : [interprétation] Non, parce que nous avons décidé de nous y
16 référer à peu près 20 minutes avant d'entrer dans le prétoire.
17 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Et la traduction ? Qui a fait la
18 traduction de ce document ?
19 M. MORRISSEY : [interprétation] Il a été traduit depuis longtemps puisque
20 la Défense dispose de ce document depuis très longtemps. Mais nous nous
21 sommes décidés très récemment à le présenter à ce témoin, pour une raison
22 qui va paraître évidente bientôt.
23 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.
24 M. MORRISSEY : [interprétation] Il s'agit d'une traduction du CLSS, pour
25 répondre à votre question.
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1 Q. Cet ordre -- plutôt, cette lettre ou cette demande était signée par
2 Zulfikar Alispago, Zuka et adressé au commandant
3 Rasim Delic en personne avec l'intitulé "3e Corps," avec la date du
4 15 septembre [comme interprété] 1993.
5 Ma question est tout d'abord la suivante : quelle raison peut expliquer
6 qu'une lettre ait été adressée à Rasim Delic au 3e Corps ? Vous vous
7 souviendrez que précédemment, je vous ai posé une question au sujet du
8 commandant Delic de sa présence à Zenica. Vous avez dit que vous n'étiez
9 pas au courant, que vous ne saviez pas. Mais êtes-vous en mesure de
10 m'expliquer comment une telle lettre a pu être adressée au 3e Corps, alors
11 qu'elle semble être adressée en personne au commandant Rasim Delic ?
12 R. Il est probable que le commandement du 3e Corps était le centre de
13 communication le plus proche, le centre de transmission le plus proche et
14 le mieux à même de transmettre ce document au commandant Rasim Delic.
15 Q. Peut-être pourrais-je vous poser la question suivante : dans la vie
16 pratique, dans la vie du champ de bataille, les commandants se déplacent
17 souvent et parfois, il faut essayer d'aller à leur recherche, à la chasse
18 au commandant, en passant par différents postes de commandement afin
19 d'essayer de leur transmettre des messages; est-ce que c'est bien le cas ?
20 R. Oui, c'est arrivé effectivement.
21 Q. Est-ce que ce document vous semble être un simple rapport de combat
22 avec une demande précise qui concerne un hélicoptère, une demande
23 supplémentaire ?
24 R. Oui. D'après ce que je lis ici, parce que le document n'est pas très
25 lisible, je pense qu'effectivement, il s'agit de cela.
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1 Q. Je ne veux pas vous placer dans un position difficile, mais est-ce que
2 cela vous aiderait si on zoomait sur le document, si on l'agrandissait à
3 l'écran ?
4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
6 M. MORRISSEY : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait agrandir le texte
7 pour le témoin ?
8 R. Maintenant, je ne vois plus le document dans son intégralité.
9 Q. Mais peut-être pourrait-on d'abord regarder la partie supérieure du
10 document et ensuite, on pourra passer à la partie inférieure dès que vous
11 en aurez terminé de vos observations au sujet de la première partie du
12 document.
13 M. Cikotic, est-ce que vous avez lu le document du mieux que vous
14 pouviez ?
15 R. Oui.
16 Q. Est-ce que vous avez besoin qu'on apporte des modifications à ce qu'on
17 voit à l'écran ?
18 R. Non, non.
19 Q. Très bien.
20 R. Je vois bien maintenant.
21 Q. Est-ce que vous confirmez que ce que nous voyons ici, c'est un rapport
22 de combat venant de Zulfikar Alispago à l'intention du commandant Delic, en
23 date du 15 septembre 1993, un rapport de combat qui comporte également une
24 demande séparée aux fins de fournir un hélicoptère afin de transporter des
25 soldats blessés ?
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1 R. Oui, c'est exact.
2 Q. D'après ce que vous voyez, ceci est passé par le centre de transmission
3 du 3e Corps et vous étiez membre de ce 3e Corps ?
4 R. C'est exact.
5 M. MORRISSEY : [interprétation] Je souhaiterais demander le versement au
6 dossier de ce document.
7 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Des objections ?
8 M. RE : [interprétation] L'Accusation est un petit peu préoccupée par le
9 versement au dossier de ce document. Le témoin que nous avons ici n'est
10 sans doute pas le témoin idoine pour produire ce document. On voit que
11 c'est un document qui vient de
12 M. Alispago Zulfikar et qui est adressé en personne à Rasim Delic. Le
13 témoin est tout à fait en droit de faire une observation au sujet du
14 rapport de manière générale. Mais sur quelle base demande-t-on ici le
15 versement au dossier de ce document ?
16 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Maître Morrissey.
17 M. MORRISSEY : [interprétation] Le lien, c'est le 3e Corps et son centre de
18 transmission, puisque notre témoin était membre du 3e Corps et c'est par le
19 truchement de son organisation que ce document a été transmis. J'ai un peu
20 de mal à répondre à l'objection faite par le Procureur parce que Rasim
21 Delic et Zulfikar Alispago étaient tous deux des témoins à charge jusqu'à
22 encore un mois. Mais maintenant, ces deux témoins ont été retirés de la
23 liste des témoins à charge au tout dernier moment. Bien entendu,
24 l'Accusation est en droit de le faire, elle a demandé l'autorisation de la
25 Chambre et cette autorisation lui a été donnée. Nous ne demandons nullement
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1 que cette autorisation soit annulée. Cependant, quoi qu'il en soit, quelle
2 que soit la perspective adoptée, ce document a, indéniablement, une grande
3 pertinence quant aux responsabilités du commandement et le fait que M.
4 Zulfikar Alispago relevait du commandant Rasim Delic. C'est un document
5 qui, manifestement, est pertinent.
6 Quelles que soient les circonstances, s'il devait y avoir
7 contestation de l'authenticité du document, cela serait une autre paire de
8 manches, mais ce n'est pas l'objection qui est soulevée par mon éminent
9 confrère. Etant donné que ce document a été transmis par le 3e Corps, que
10 c'est un document militaire qui figure dans les archives, je pense que, à
11 moins qu'il n'y ait un élément qui donne une grande importance à son
12 origine, je pense que ce document est le seul document par le truchement
13 duquel le document peut être -- ou ce témoin est le seul par lequel on peut
14 verser ce document parce que le témoin vient du 3e Corps, il n'a pas dit
15 avoir vu personnellement le document, mais il peut nous dire que c'est un
16 document classique qu'on recevait.
17 M. RE : [interprétation] Je retire mon objection.
18 M. MORRISSEY : [interprétation] Comme il plaira à la Chambre.
19 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Re.
20 A mon avis, le contenu de ce document est totalement sans pertinence,
21 dans le cadre de cette affaire.
22 Mais compte tenu du fait que nous pouvons le verser
23 au dossier en raison de sa forme et compte tenu de sa chaîne de
24 transmission, nous allons l'admettre.
25 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira du document de la Défense
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1 D201.
2 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vous remercie.
3 M. RE : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que vous avez dit
4 que le document est totalement sans pertinence. Est-ce que vous avez bien
5 dit cela ou vous avez dit qu'il était "tout à fait pertinent" ?
6 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je parlais du contenu qui porte sur la
7 demande d'hélicoptères. Cela n'a rien à voir avec notre affaire; c'est pour
8 cette raison que je considère qu'ils sont pertinents dans le cadre de notre
9 affaire. Mais la Défense le verse au dossier non pas en raison du contenu.
10 Ce qui est plus important, c'est la chaîne de sa transmission et la
11 responsabilité du commandant y est impliquée. De ce point de vue-là, c'est
12 pertinent et c'est à cause de cela que nous allons l'admettre.
13 M. RE : [interprétation] Je souhaitais simplement que l'on clarifie cela
14 car dans le compte rendu d'audience, il est écrit "totalement pertinent,"
15 alors que j'avais entendu "sans pertinence".
16 M. LE JUGE LIU : [interprétation] D'accord. Merci beaucoup.
17 Poursuivez.
18 M. MORRISSEY : [interprétation] Très bien. Excusez-moi, j'en parlerai tout
19 à l'heure.
20 Q. Merci beaucoup, Monsieur Cikotic. C'est tout ce que je voulais vous
21 demander au sujet des adjoints.
22 Je souhaite que l'on traite maintenant de ce qui s'est passé après Dobro
23 Polje. En effet, vous attendiez une sorte de signal pour commencer votre
24 partie de l'opération au nord, dans la partie nord de cette zone
25 d'opérations militaires; est-ce exact ?
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1 R. Oui.
2 Q. Je vais vous poser, maintenant, quelques questions concernant le temps
3 auquel cette opération s'est déroulée, la manière dont elle s'est déroulée.
4 M. MORRISSEY : [interprétation] Mais tout d'abord, je souhaite vous montrer
5 le document MFI149 qui n'a toujours pas été versé au dossier mais le
6 Procureur a indiqué qu'il n'allait pas s'y opposer. Il s'agit de l'un des
7 documents qui a été présenté par la Défense au commandant Gusic.
8 Q. Pendant que l'on attend que ceci apparaisse à l'écran, Monsieur
9 Cikotic, je vais vous expliquer qu'il s'agit-là d'un rapport du commandant
10 du bataillon indépendant de Prozor, Enver Buza.
11 Est-ce que vous avez devant vous un exemplaire de ce rapport en langue
12 bosniaque ?
13 R. Oui.
14 Q. Très bien. Veuillez m'excuser, s'il vous plaît, pendant que je trouve
15 mon exemplaire.
16 Excusez-moi.
17 Est-ce qu'il s'agit là d'un rapport -- examinez-le, prenez le temps qu'il
18 vous faudra. Est-ce qu'apparemment il s'agit d'un document adressé au
19 commandement du 6e Corps d'armée et émanant du Bataillon indépendant de
20 Prozor ?
21 R. Oui, il s'agit d'un rapport du commandant du Bataillon indépendant de
22 Prozor soumis au commandant du 6e Corps d'armée.
23 Q. Oui. Je souhaite attirer votre attention au premier paragraphe où il
24 est dit : "A la base de l'ordre d'attaque OP numéro 01/1500-27 du 11
25 septembre 1993." Est-ce que vous voyez ce paragraphe ?
Page 18
1 R. Oui.
2 Q. Est-ce que vous pourriez expliquer, devant ce Tribunal, comment un
3 rapport de ce type pouvait faire référence à la référence d'un ordre
4 d'attaque ?
5 R. Puisqu'il s'agit d'un rapport de combat, je pense que ceci implique
6 qu'il est question dans ce rapport de l'exécution de la mission confiée
7 dans ledit ordre.
8 Q. Lorsque l'on fait référence au numéro opérationnel de l'ordre, l'auteur
9 du rapport indique que les tâches accomplies ont été accomplies
10 conformément à cet ordre en particulier; est-ce exact ?
11 R. Oui.
12 Q. Est-ce que cet ordre indique, toujours dans ce même premier paragraphe,
13 que "le Bataillon indépendant de Prozor s'est infiltré sur le territoire de
14 l'ennemi pendant la nuit du 13 au 14 septembre" ?
15 R. Oui.
16 Q. En général, dans les paragraphes qui suivent, est-ce que l'auteur de ce
17 rapport indique que les opérations de combat se sont déroulées dans la
18 matinée suite à cette infiltration ?
19 R. Oui, ce serait logique.
20 Q. Merci. Excusez-moi, puis-je vous demander,
21 Monsieur Cikotic, de nous dire si l'ensemble du rapport en langue bosniaque
22 est contenu dans la page que l'on voit à l'écran ou est-ce qu'il est
23 réparti en deux pages ?
24 R. Une page.
25 M. MORRISSEY : [interprétation] Je souhaite indiquer simplement à la
Page 19
1 Chambre de première instance que la version anglais contient deux pages.
2 Peut-être il va falloir maintenant se pencher sur la
3 page 2. Je demanderais que l'on repasse à la page précédente en anglais.
4 Maintenant, je vais traiter de certains aspects supplémentaires de ce
5 rapport.
6 Q. Est-ce que vous remarquez un paragraphe où il est dit que : "Les unités
7 suivantes ont participé à l'attaque; deux pelotons de la 1ère Compagnie,
8 deux pelotons de la 2e Compagnie, un peloton de la
9 3e Compagnie, un de la 4e Compagnie, la police militaire, une partie des
10 forces du MUP de Prozor." Ensuite, on fait référence à d'autres commandants
11 de compagnie, et cetera. Vous voyez ce paragraphe ?
12 R. Oui.
13 Q. Est-ce qu'il était courant que le MUP, donc la police civile
14 participe ?
15 R. [réponse inaudible]
16 Q. Voici ma question : lorsque l'on utilisait le MUP, le
17 M-U-P, la police civile, dans le cadre d'une opération, est-ce qu'il était
18 nécessaire que l'on subordonne de manière concrète ces unités au commandant
19 de l'armée avant que celui-ci ne puisse les commander ? C'est une question
20 générale qui fait appel à vos connaissances.
21 R. Le commandant de l'unité du MUP commandait d'habitude les unités du
22 MUP, mais ces unités étaient subordonnées à l'armée de l'ABiH dans le cadre
23 de l'opération ou de l'action dans laquelle ils étaient utilisés.
24 Q. Comment est-ce que l'on procédait à cette subordination, par le biais
25 d'un ordre ? Si oui, qui devait émettre cet ordre avant que l'on puisse
Page 20
1 resubordonner la police civile à l'armée ?
2 R. Cela dépendait du niveau auquel on procédait à la
3 resubordination. De toute façon, une personne ayant ce genre de compétence
4 pouvait procéder à ce type de resubordination.
5 Q. L'ordre qui a été donné aux unités du MUP visant à les resubordonner à
6 l'armée, devait émaner de quelqu'un au sein du ministère de l'Intérieur.
7 Autrement dit, l'un de leur propre commandant devait les resubordonner
8 avant qu'ils puissent être transférés.
9 R. Oui. En général, c'était le cas. Cependant, je pense, qu'en réalité,
10 parfois les unités étaient engagées sur la base d'un accord, par exemple,
11 entre le MUP Prozor et le Bataillon indépendant de Prozor.
12 Q. Oui. Lors de telles situations, ce qui se passe, ou plutôt c'est à vous
13 de me le dire, dans une telle situation les unités du MUP vont se battre au
14 côté des unités de l'ABiH, alors que l'ABiH n'aurait pas de pouvoir formel
15 lui permettant de commander ces unités; est-ce exact ?
16 R. Le commandant de l'unité militaire qui commande l'opération, commande
17 également l'unité du MUP qui fait partie de cette opération.
18 Q. Oui. Mais s'il n'y pas de resubordination concrète, légale de l'unité
19 du MUP à l'ABiH, dans ce cas-là, sur le plan légal, le commandant n'a pas
20 de pouvoir lui permettant de commander cette unité; est-ce exact ou pas ?
21 M. RE : [interprétation] Peut-être il faudrait clarifier la question. Mon
22 éminent collègue a parlé d'une "subordination légale". Cependant, la
23 Chambre de première instance sait que la subordination ou le contrôle de
24 fait, peut être soit de fait ou de jure. Si l'on emploie le mot "légal",
25 ceci induit en erreur, puisqu'on ne sait pas s'il fait référence à l'un où
Page 21
1 à l'autre ou au deux.
2 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Si je comprends bien, lorsqu'il dit
3 "légal", il souhaite dire conformément aux règles de l'armée. Peut-être il
4 faudrait clarifier cela, mais je ne pense pas qu'il faudrait rendre le
5 témoin perplexe en employant les termes légaux comme de facto ou de jure.
6 Vous savez, c'est parfois pas bien compris par ceux qui ne sont pas
7 professionnels dans notre domaine.
8 M. MORRISSEY : [interprétation] Je suis d'accord, mais le témoin est
9 compétent pour faire un commentaire concernant les règles de l'armée.
10 Q. C'est cela qui m'intéresse, Monsieur Cikotic. Je ne souhaitais pas
11 induire en erreur qui que ce soit dans ce prétoire. Lorsque j'utilise le
12 terme "légal," je veux dire conformément aux règles de l'armée, d'après la
13 manière dont vous le comprenez.
14 Je vais revenir à ma question dans ce contexte. Sans ordre concret de
15 resubordination portant sur les unités du MUP, est-ce qu'il est vrai que le
16 commandant de l'armée n'a pas de pouvoir conformément aux règles lui
17 permettant de commander les unités du MUP ?
18 R. C'est exact.
19 Q. Pour parler du cas qui nous intéresse concrètement ici,
20 personnellement, vous ne pouvez pas faire un commentaire au sujet de la
21 question de savoir si Enver Buza avait de fait ou de jure un quelconque
22 pouvoir par rapport à la police civile de Prozor qui a prétendument
23 participé à cette attaque; est-ce exact ?
24 R. C'est exact.
25 Q. Je souhaite maintenant attirer votre attention à la fin de ce document.
Page 22
1 M. MORRISSEY : [interprétation] Peut-on montrer la page 2 de la version en
2 anglais à l'écran. Merci.
3 Q. Pour ce qui est -- est-ce que vous remarquez qu'il y a un paragraphe
4 intitulé : "Conclusion. Ce rapport et toutes les données ont été mis à la
5 disposition de Sefer Halilovic, colonel
6 Vehbija Karic et le colonel Suljevic, qui a surveillé l'opération depuis le
7 poste d'observation." Puis, c'est signé Commandant Buza.
8 D'après la manière dont vous comprenez ce texte, et compte tenu les
9 fonctions de Sefer Halilovic dans le cadre de la coopération de cette
10 opération, est-ce qu'il était nécessaire qu'Enver Buza soumette les
11 rapports de combat de ce genre à Sefer Halilovic, n'est-ce pas ?
12 R. Si ceci portait sur la force du 6e Corps d'armée, il aurait été
13 suffisant qu'il soumette cela à son commandant.
14 Q. Oui. Ici, l'on voit qu'il a envoyé le rapport de combat, ce rapport de
15 combat au commandement du 6e Corps d'armée. Egalement, il a mis les données
16 dans leur ensemble à Sefer Halilovic. Vous êtes d'accord avec cela ?
17 R. Oui.
18 Q. Vous êtes d'accord également pour dire que l'ordre auquel Buza fait
19 référence dans le premier paragraphe, et dont on mentionne le numéro
20 d'identification, peut être facilement retrouvé en raison de cette
21 référence. L'on voit sur la base de ce document que Buza a obéi aux ordres
22 lorsqu'il a commencé la bataille.
23 R. C'est exact.
24 Q. Merci.
25 M. MORRISSEY : [interprétation] Peut-on montrer maintenant au témoin un
Page 23
1 autre document.
2 Peut-on montrer au témoin le document MFI152.
3 Q. Encore une fois, en attendant que l'on voit le document, je vais
4 vous dire que je ne vais pas vous demander de faire des commentaires au
5 sujet de quoi que ce soit ici, sauf la forme du document et le numéro en
6 particulier.
7 Est-ce que vous avez devant vous maintenant la version en langue
8 bosniaque d'un ordre d'attaque en particulier ?
9 R. Oui, je vois.
10 Q. Est-ce que vous voyez que cet ordre a un numéro opérationnel qui
11 correspond au numéro que nous avons vu dans le rapport de Buza, à savoir,
12 01/1500-27 ?
13 R. Oui.
14 Q. D'après vous, ou plutôt, je vais reformuler ma question. Apparemment,
15 vous voyez que le rapport de Buza fait référence à cet ordre ici, qui
16 comporte ce numéro en haut du document; est-ce exact ?
17 R. Oui, c'est exact.
18 Q. Oui. Merci. Ce sont les questions que j'ai au sujet de ces documents.
19 Maintenant, je vais vous poser quelques questions en sujet de ce qui s'est
20 passé au moment du début de l'attaque. Vous, personnellement, au bout de 11
21 ans et demi, vous ne vous souvenez pas de la date exacte de l'attaque que
22 vous avez lancée; est-ce exact ?
23 R. C'est exact.
24 Q. Cependant, ce que vous pouvez dire, c'est que vous avez commencé la
25 bataille en coopération avec la 317e Brigade placée sous le commandement
Page 24
1 d'Enver Zejnilagic; est-ce exact ?
2 R. Oui.
3 Q. Vous pouvez dire également que le premier jour de l'opération, vous
4 avez atteint votre objectif, à savoir, l'occupation du village de Vilica
5 Guvno; est-ce exact ?
6 R. Oui.
7 Q. Les troupes de Zejnilagic ont reçu pour tâche d'occuper un mont appelé
8 Crni Vrh; est-ce exact ?
9 R. Je ne pense pas que ce soit la tâche de Zejnilagic. Peut-être il
10 assistait à cette tâche. Je pense que c'était la tâche confiée au 6e Corps
11 d'armée. C'est la manière dont je comprenais les choses.
12 Q. Oui, je comprends.
13 Les unités du 6e Corps d'armée qui ont reçu pour tâche d'occuper Crni
14 Vrh, ont, pour autant que vous le sachiez, réussi à faire cela le premier
15 jour de l'opération, n'est-ce pas ?
16 R. Pour autant que je m'en souvienne, le premier jour, ils n'ont pas
17 rempli leurs tâches.
18 Q. Est-ce que vous vous souvenez que ceux qui avaient reçu pour
19 tâche d'occuper cette région, ne recevaient pas l'assistance du Bataillon
20 indépendant de Prozor, alors que ceci aurait dû être le cas, lorsque l'on
21 parle de ce premier jour de l'opération ?
22 R. La situation dans cette partie du front n'était pas claire à ce
23 moment-là, non plus. Je sais que les attaques ne se déroulaient pas
24 conformément aux ordres ou conformément aux atteintes.
25 Q. Lorsque vous dites, "ils n'ont pas fait de progrès dans cette région,"
Page 25
1 vous parlez du fait que le Bataillon indépendant de Prozor, placé sous le
2 commandement d'Enver Buza, n'avait pas fait de progrès conformément à ce à
3 quoi l'on s'attendait; est-ce exact ?
4 R. Oui, je fais surtout référence au Bataillon de Prozor.
5 Q. Oui. Je comprends que vous étiez très pris dans vos activités et tâches
6 dans votre zone. D'après les renseignements que vous avez reçus et les
7 nouvelles que vous receviez du front, du champ de bataille, est-ce que vous
8 pouvez confirmer que vous avez entendu, qu'à ce moment-là, l'on a dit au
9 Bataillon indépendant de Prozor qu'il devait s'acquitter de leurs tâches et
10 ils ont reçu l'ordre de faire cela pendant la nuit et le matin du jour
11 suivant; est-ce exact ?
12 R. Oui, j'ai reçu les informations selon lesquelles on allait reporter
13 quelque peu l'exécution de cette tâche, mais que ceci allait être exécuté.
14 Q. Oui, je comprends.
15 Ensuite, vous avez vu que le commandant du Bataillon indépendant de
16 Prozor dit qu'il s'est infiltré pendant la nuit du 13 et le matin du 14, il
17 s'est battu dans le hameau de Uzdol. Voici ma question : vous n'avez pas de
18 raison de douter de l'exactitude de cette date en particulier, n'est-ce pas
19 ?
20 R. Non.
21 Q. Nous allons revenir en arrière, si le Bataillon indépendant de Prozor
22 est allé se battre, de manière tardive, dans la matinée du 14, est-ce que
23 cela veut dire que votre unité avait commencé son action la veille, c'est-
24 à-dire le 13 ou deux jours avant le 12 ?
25 R. Je pense que c'était la veille.
Page 26
1 Q. Très bien. Je comprends que vous ne savez pas quelle était la date
2 exacte, mais compte tenu du rapport de Buza et ce que vous savez au sujet
3 de ces incidents, il serait possible de dire que
4 le 13 septembre, les troupes qui se trouvaient dans la partie nord de cette
5 ligne, que l'on voit sur la carte, ont commencé leur bataille à l'exception
6 du Bataillon indépendant de Prozor et ensuite, le 14, le Bataillon
7 indépendant de Prozor a commencé son action de manière tardive. Est-ce que
8 ceci, à votre avis, reflète la situation telle qu'elle s'est déroulée dans
9 la réalité, compte tenu du rapport et compte tenu de votre déposition
10 jusqu'à présent ?
11 R. Je crois que ceci était sans doute le cas dans la partie nord.
12 Q. Oui. Après que le Bataillon indépendant de Prozor -- je retire cela.
13 Pour autant que vous le sachiez, les troupes qui devaient recevoir le
14 soutien de Buza et du Bataillon indépendant de Prozor, ne pouvaient pas
15 réellement tenir le mont Crni Vrh; est-ce exact ?
16 R. Je le crois.
17 Q. En fait, la raison en était que le flanc de cette montagne essuyait des
18 tirs du HVO, alors que d'après le plan, le HVO, dans ce secteur, devait
19 être entraîné dans d'autres opérations par Buza; est-ce exact ?
20 R. Je ne peux que supposer que c'était le cas, mais je ne connais pas les
21 détails.
22 Q. Pour que la Chambre de première instance puisse comprendre la stratégie
23 de l'ABiH, je vais dire qu'à l'époque, le HVO avait un avantage sur l'ABiH
24 en ce qui concerne les chars, les obus, les équipements et le matériel;
25 est-ce exact ?
Page 27
1 R. Oui, c'est exact.
2 Q. Votre avantage, c'était votre supériorité en nombre et éventuellement,
3 votre supériorité compte tenu de la connaissance du terrain de la part de
4 vos soldats ?
5 R. C'est exact.
6 Q. En termes généraux, parlant de la stratégie de l'armée bosniaque, elle
7 lançait des attaques de manière coordonnée sur plusieurs petits fronts.
8 R. C'est exact.
9 Q. De cette manière, elle détournait l'attention du HVO et faisait en
10 sorte qu'ils doivent étirer leurs forces, à plusieurs endroits différents ?
11 R. C'est exact.
12 Q. Mais pour ce faire, il fallait faire un très bon travail de
13 coordination à un niveau supérieur afin de s'assurer que toutes les
14 attaques se déroulent en même temps ?
15 R. C'est exact.
16 Q. C'est pour cela que l'on avait besoin de Sefer Halilovic, Zucro
17 Suljevic, Rifat Bilajac et Vehbija Karic, qui étaient actifs dans ce rôle
18 de coordination, car il était nécessaire d'avoir des personnes calmes et
19 expérimentées qui avaient déjà eu l'expérience de bataille, est-ce exact ?
20 R. Oui, c'est exact.
21 Q. D'accord. Maintenant, excusez-moi. J'ai --
22 M. MORRISSEY : [interprétation] J'en ai terminé pour ce qui est de ce
23 document. Merci beaucoup.
24 Q. Vous avez dit, Monsieur Cikotic, que vous avez rempli votre mission de
25 fait au bout des deux ou trois premiers jours de l'opération; est-ce
Page 28
1 exact ?
2 R. Oui. [comme interprété]
3 Q. Après cela, votre mission consistait à garder le contrôle de la zone
4 que vous aviez occupée, n'est-ce pas ?
5 R. Oui.
6 Q. Dans cette zone, il y avait un certain nombre de villages qui étaient
7 anciennement occupés, mais qui n'étaient pas vides;
8 est-ce exact ?
9 R. Non. Dans cette zone, il n'y avait pas de hameaux habités.
10 Q. À Vilica Guvno, il n'y avait pas d'habitants ?
11 R. Vilica Guvno n'est pas un village, c'est un élément topographique.
12 Q. Excusez-moi. Excusez-moi, Monsieur Cikotic, c'est moi qui ai fait une
13 erreur.
14 Je souhaiterais que l'on parle de ce qui s'est passé après. Si l'on suppose
15 en partant de l'ordre de Buza, si l'on suppose que vous avez lancé
16 l'attaque le 13, diriez-vous que votre offensive s'est terminée vers le 15
17 ou le 16, environ ?
18 R. L'offensive s'est terminée le premier jour et dans le courant de la
19 deuxième journée, il s'agissait plutôt d'activités défensives, dans ce
20 secteur.
21 Q. Oui, parce que le HVO n'était pas particulièrement satisfait de votre
22 victoire et a essayé de vous chasser de ce secteur, n'est-ce pas ?
23 R. Oui.
24 Q. Si j'ai bien compris, vous n'étiez pas le commandant de l'opération
25 Neretva 93, mais vous avez passé beaucoup de temps sur le terrain dans
Page 29
1 cette zone. Pour autant que vous le sachiez, les efforts visant à soulager
2 Mostar se sont poursuivis dans le courant de l'année 1994, n'est-ce pas ?
3 R. Oui, fin 1993 et début 1994.
4 Q. Au cours de cette période, d'après vos souvenirs, les opérations,
5 telles qu'elles ont été décrites sur la carte qui est derrière vous, se
6 sont poursuivies, opérations menées par l'ABiH afin de libérer Mostar,
7 n'est-ce pas ?
8 R. Oui.
9 Q. Ces actions se sont poursuivies après l'arrestation de Sefer Halilovic,
10 le 26 octobre 1993, n'est-ce pas ?
11 R. Oui.
12 Q. Pour autant que le sachiez, après son arrestation
13 le 26 octobre 1993, vous n'avez jamais entendu dire que
14 Sefer Halilovic avait exercé un quelconque commandement au sein de l'armée,
15 après cela ?
16 R. C'est exact.
17 Q. Pour arrêter cette opération particulière, pour y mettre un terme, deux
18 personnes, selon moi, avaient le pouvoir nécessaire d'y mettre fin : Rasim
19 Delic, commandant de l'armée et auteur de cette carte et Alija Izetbegovic,
20 président; ce sont les deux personnes qui avaient le pouvoir nécessaire
21 pour mettre fin à cette opération, n'est-ce pas ?
22 R. Je ne sais pas si Alija Izetbegovic commandait directement l'opération,
23 mais Rasim Delic, lui, oui.
24 Q. Rasim Delic avait le pouvoir nécessaire pour mettre fin à cette
25 opération s'il souhaitait prendre une telle décision, n'est-ce pas ?
Page 30
1 R. Oui.
2 Q. Sefer Halilovic, chef d'état-major de l'état-major général ne disposait
3 pas du pouvoir nécessaire pour mettre fin, de sa propre initiative, à cette
4 opération, n'est-ce pas ?
5 R. C'est exact.
6 Q. Je souhaiterais vous présenter la thèse suivante : lorsque je vous ai
7 parlé d'Alija Izetbegovic, tout à l'heure, je ne voulais pas semer la
8 confusion dans votre esprit. Il est clair qu'il ne dirigeait pas
9 directement l'opération. Mais selon vous, est-ce qu'Alija Izetbegovic, en
10 tant que chef de la présidence bosniaque, était-il le commandant suprême de
11 toutes les forces armées, au sens formel du terme ?
12 R. Oui.
13 Q. Monsieur Cikotic, je vous demanderais de bien vouloir m'accorder
14 quelques instants.
15 M. MORRISSEY : [interprétation] Messieurs les Juges, il est inutile de
16 suspendre l'audience, mais il y a quelques points que je souhaiterais
17 soumettre à mes collègues. J'aurais besoin de quelques minutes, s'il vous
18 plaît. Je vais parler de certaines choses avec
19 M. Dzambasovic et avec mon co-conseil, mais j'en ai quasiment terminé de
20 mon contre-interrogatoire.
21 Merci.
22 [Le conseil de la Défense se concerte]
23 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
24 Juges, j'en ai terminé avec le contre-interrogatoire.
25 Monsieur Cikotic, merci de votre patience.
Page 31
1 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci beaucoup.
2 Des questions supplémentaires, Monsieur Re ?
3 Nouvel interrogatoire par M. Re :
4 Q. Monsieur Cikotic, s'agissant de la dernière question qui vous a été
5 posée par Me Morrissey au sujet du rôle joué par Rasim Delic dans
6 l'opération Neretva, savez-vous, personnellement, ce que Rasim Delic a fait
7 ou n'a pas fait à propos de cette opération, hormis le fait d'apposer sa
8 signature en haut, à gauche de la carte ?
9 R. Non, je n'ai aucune connaissance au sujet de sa participation à
10 l'opération.
11 Q. Pour être tout à fait clair, vos connaissances se limitent au fait que
12 sa signature est apposée en haut, à gauche de la carte, là où il est
13 indiqué "Opération Neretva" ?
14 M. MORRISSEY : [interprétation] Je m'opposerais à ce que les questions
15 directrices soient posées lors des questions supplémentaires.
16 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Il s'agissait d'une question qui
17 découlait de questions posées précédemment.
18 Monsieur Re, vous pouvez poursuivre.
19 M. RE : [interprétation] Merci.
20 Q. Ma question était la suivante : pour nous permettre de mieux comprendre
21 vos réponses précédentes, vous nous dites que tout ce que vous savez au
22 sujet du rôle joué par Rasim Delic se limite au fait qu'il a apposé sa
23 signature sur cette carte ?
24 R. Oui, c'est exact.
25 Q. Me Morrissey vous a également posé un certain nombre de questions il
Page 32
1 vous a présenté des documents signés par M. Halilovic en différentes
2 qualités, en tant que chef d'état-major et en tant que commandant adjoint
3 ou commandant en second. En votre qualité de commandant d'un groupe
4 opérationnel au sein du 3e Corps, si vous aviez reçu un ordre ou un
5 document qui aurait été signé par Sefer Halilovic, que ce soit en sa
6 qualité de chef d'état-major ou en sa qualité de commandant adjoint de
7 l'ABiH, auriez-vous obéi à cet ordre ?
8 M. MORRISSEY : [interprétation] Je m'oppose à la formulation de cette
9 question. Mon confrère peut poser des questions qui découlent du contre-
10 interrogatoire, certes; il évoque des questions que j'ai posées afin de
11 mieux comprendre ce qu'est une signature d'un commandant adjoint. J'ai posé
12 notamment des questions au sujet du terme "zastupa" en B/C/S. Mon confrère
13 peut être autorisé à poser des questions qui découlent de ces questions,
14 mais pas des questions qui guident le témoin dans ses réponses ou qui
15 conduiraient le témoin à faire des suppositions. Il pourrait lui poser la
16 question suivante : Quel serait l'effet d'un ordre signé par M. Halilovic
17 dans telle ou telle capacité ? En utilisant le terme "adjoint," "commandant
18 adjoint," cela déforme les questions que j'ai posées précédemment. Je n'ai
19 pas d'objections à ce que l'on pose des questions pour obtenir des
20 éclaircissements concernant les réponses données par le témoin au sujet
21 d'un ordre. Mais je m'oppose quant à la formulation de cette question.
22 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je ne vois aucun problème à ce que
23 l'Accusation pose une telle question.
24 Vous pouvez poursuivre, Monsieur Re.
25 M. RE : [interprétation]
Page 33
1 Q. Est-ce que vous comprenez la question que je vous ai posée tout à
2 l'heure, Monsieur Cikotic ?
3 R. Oui, oui, je m'en souviens et je comprends votre question. J'obéirais
4 un ordre signé par le chef de l'état-major dans la situation que vous avez
5 décrite.
6 Q. Si M. Sefer Halilovic avait signé ce document en tant que chef d'état-
7 major ou en tant que commandant adjoint de l'ABiH, est-ce que cela aurait
8 eu la moindre incidence sur l'exécution de cet ordre par vous-même ?
9 R. A l'époque, je pense que cela n'aurait fait quasiment aucune
10 différence.
11 Q. Est-ce qu'il y aurait une différence entre un ordre donné verbalement
12 ou un ordre donné par écrit, bien que votre réponse est la même ?
13 R. Ma réponse est la même.
14 Q. Avez-vous discuté, à quelque moment que ce soit, avec
15 M. Halilovic de la qualité en laquelle il signait des documents, en tant
16 que commandant adjoint ou en tant que chef d'état-major ?
17 R. Non.
18 Q. Hier, Me Morrissey vous a montré trois livrets, trois documents
19 militaires de la JNA, trois manuels, intitulés respectivement :
20 "Introduction à la théorie du contrôle militaire," "Règlement relatif aux
21 divisions des forces terrestres" et "Règlement du Corps." Les traductions
22 de ces documents figurent au compte rendu d'audience d'hier, il vous en a
23 lu des extraits qui concernaient la doctrine militaire de la JNA et vous a
24 posé des questions au sujet de la manière dont elle pouvait être appliquée
25 au sein de l'ABiH en 1993.
Page 34
1 Il vous a posé des questions, également, au sujet des groupes
2 opérationnels et de leur fonctionnement au sein de l'ABiH. Vous avez
3 déclaré que vous étiez officier de carrière au sein de la JNA et que vous
4 aviez servi, je pense, sept années avant de rejoindre les rangs de l'ABiH,
5 vous aviez servi sept années auparavant au sein de la JNA. Pour autant que
6 vous le sachiez, y avait-il une différence entre un groupe opérationnel
7 d'après la doctrine militaire de la JNA et un groupe opérationnel d'après
8 la doctrine de l'ABiH, en 1993 ?
9 R. Je ne saurais vous parler de la manière dont fonctionnaient les groupes
10 opérationnels d'après la doctrine en vigueur au sein de la JNA car je n'ai
11 pas eu l'occasion d'étudier cette doctrine avant la guerre. Toutefois,
12 étant donné que la doctrine appliquée par l'ABiH était directement héritée
13 de celle appliquée par la JNA, je pense que les conditions de
14 fonctionnement étaient les mêmes.
15 Q. Lorsque vous dites que "les conditions de fonctionnement étaient
16 similaires," est-ce que vous voulez parler de l'importance des unités, du
17 type d'unités qui étaient incorporés dans un groupe opérationnel de la zone
18 couverte ou autre ?
19 M. MORRISSEY : [interprétation] Il s'agit d'une question qui guide le
20 témoin.
21 M. RE : [interprétation] Très bien, je vais éclaircir ma question.
22 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je pense, effectivement, qu'il s'agit
23 d'une question qui guide le témoin. Vu le contexte, nous pourrions obtenir
24 des éclaircissements.
25 Veuillez poursuivre, Monsieur Re.
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1 M. RE : [interprétation] Très bien.
2 Q. Afin de formuler ma question dans des termes plus généraux, et pour
3 préciser votre réponse précédente lorsque vous avez parlé "d'organisation
4 similaire", est-ce que vous voulez parler de la taille des unités, du type
5 d'unités qui composaient les groupes opérationnels de la zone couverte par
6 ces groupes opérationnels, du type de commandement ou d'autre chose ?
7 R. Je voulais surtout parler de la structure des unités, qui comprenaient
8 des effectifs particuliers et couvraient des territoires précis dans
9 lesquels ces unités étaient engagées.
10 Q. Me Morrissey vous a également montré un document, le document MFI146,
11 qui mentionne "l'équipe des inspecteurs". Ce document était daté du 30 août
12 1993. Vous souvenez-vous du document en question, ou est-ce que vous
13 souhaitez que je vous le présente de nouveau ? Me Morrissey vous a posé un
14 certain nombre de questions sur plusieurs passages de ce document et sur la
15 composition de ce que l'on appelle "l'équipe des inspecteurs". Est-ce que
16 vous voulez revoir ce document, ou est-ce que vous vous en souvenez ?
17 R. Je pense que je me souviens de la teneur de ce document.
18 Q. Me Morrissey vous a posé de nombreuses questions au sujet de ce
19 document. Quand avez-vous vu ce document pour la première fois ?
20 R. Je l'ai vu ici il y a trois jours.
21 Q. N'aviez-vous jamais entendu parler de l'existence de ce document avant
22 de venir témoigner à La Haye ?
23 R. Au cours des deux ou trois dernières années, je pense avoir entendu
24 parler de ce document, mais à l'époque, je n'avais pas connaissance de ce
25 document.
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1 Q. S'agissant du terme "équipe des inspecteurs", est-ce que vous n'en avez
2 jamais entendu parler ? N'avez-vous jamais entendu dire que M. Halilovic
3 était membre d'une équipe des inspecteurs en 1993 ?
4 R. Je ne me souviens pas qu'il ait présenté son rôle de cette manière.
5 D'après mes souvenirs, il disait que son rôle consistait à coordonner les
6 activités de combat sur le terrain.
7 Q. D'après vous, est-ce que cette expression, "équipe des inspecteurs" est
8 utilisée dans la doctrine de la JNA ou dans la doctrine de l'ABiH ?
9 R. Oui, ce terme existait.
10 Q. Est-ce que "l'équipe d'inspecteurs" est également chargée de la
11 coordination des activités de combat ?
12 M. MORRISSEY : [interprétation] Objection. Mon confrère ne précise pas ici
13 s'il pose au témoin une ou deux questions. Est-ce qu'il lui pose une
14 question au sujet des équipes d'inspecteurs telles que leur rôle est décrit
15 dans les manuels ou est-ce qu'il parle de l'interprétation de ce document
16 et de la signification de termes "équipe d'inspecteurs" dans le cadre de ce
17 document ?
18 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Veuillez préciser votre question, Maître
19 Re.
20 M. RE : [interprétation]
21 Q. Monsieur Cikotic, excusez-moi, ma question n'était pas suffisamment
22 précise. Je veux parler de la doctrine militaire. Selon cette doctrine,
23 est-ce que le terme "équipe d'inspecteurs" englobe la coordination des
24 activités de combat ou d'autres fonctions ?
25 R. Cela dépend des missions confiées à l'équipe d'inspecteurs. En
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1 principe, une équipe d'inspecteurs pouvait avoir des attributions assez
2 larges, y compris la mise à pied des membres du corps d'armée, ou
3 l'engagement des troupes dans des activités de combat.
4 Q. Est-ce que vous pourriez élaborer un peu plus votre réponse ? Je ne
5 veux pas vous guider. D'après votre expérience et selon la doctrine
6 militaire en vigueur, quelle était la portée des pouvoirs dont disposait
7 une équipe d'inspecteurs ?
8 R. Je vous dirais une fois de plus que cela dépend de la décision du
9 commandant ou de l'autorité qui décide de mettre en place une équipe
10 d'inspecteurs et de l'envoyer sur le terrain.
11 Q. Vous avez parlé de l'engagement des troupes dans des activités de
12 combat. Est-ce que cette équipe d'inspecteurs est également habilitée à
13 donner des ordres de combat ?
14 R. Là encore, je pense que ceci dépend du rôle attribué à l'équipe
15 d'inspecteurs qui peut disposer de tels pouvoirs.
16 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
17 M. RE : [interprétation]
18 Q. M. Morrissey vous a également posé des questions précises au
19 sujet des unités du MUP et de leur déploiement dans le cadre d'activités de
20 combat. Est-ce que le Groupe opérationnel Zapad ouest n'a jamais eu recours
21 à des unités du MUP, ou plutôt je vais reformuler ma question.
22 Est-ce que votre groupe opérationnel, le Groupe opérationnel
23 Zapad ouest n'a jamais utilisé des unités dans le cadre d'activités de
24 combat ou pour d'autres activités ?
25 R. Oui.
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1 Q. A combien de reprises avez-vous eu recours à des unités du MUP dans le
2 cadre d'activités de combat ?
3 R. Plusieurs fois, me semble t-il.
4 Q. Quelle était la procédure suivie, procédure par laquelle ces unités
5 étaient placées sous votre commandement dans le cadre d'opérations de
6 combat ?
7 R. J'étais en contact avec le chef du MUP, dont je souhaitais utiliser
8 l'unité. Le chef donnait son aval pour l'engagement de cette unité.
9 Ensuite, je pouvais agir comme bon me semblait.
10 Q. Quelle était la procédure suivie lorsque vous deviez rendre, en quelque
11 sorte, cette unité au chef du MUP, transférer cette unité au chef du MUP ?
12 Comment cela se passait-il ?
13 R. La plupart du temps, lorsque j'informais le commandant de l'unité en
14 question que la mission était terminée, le commandant rendait compte à son
15 chef, et cela mettait fin à l'engagement de son unité au sein de la mienne.
16 Q. Est-ce que cela se faisait verbalement, par écrit ou les deux ?
17 R. Les deux.
18 Q. Qu'en est-il de la subordination des unités du MUP à votre unité dans
19 le cadre d'activités de combat ? Est-ce que cette subordination était
20 confirmée verbalement, par écrit ou les deux ?
21 R. Cela pouvait se faire également des deux manières.
22 Q. D'après vos connaissances, est-ce qu'en ex-Yougoslavie, les différentes
23 armées engagées dans des activités de combat avaient recours à des unités
24 du MUP ?
25 R. Oui, en principe, ces unités faisaient partie intégrante des forces
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1 armées pendant la guerre.
2 Q. Me Morrissey vous a également posé une question au sujet de la
3 puissance du HVO et de la puissance de l'ABiH. Il a procédé à une
4 comparaison entre les deux, et a laissé entendre que le HVO avait un
5 avantage certain sur l'ABiH pour ce qui est des chars, des obus, du
6 matériel alors que l'ABiH avait une supériorité en nombre.
7 A votre avis, d'où le HVO obtenait-il ses chars ?
8 M. MORRISSEY : [interprétation] Cette question ne découle absolument pas du
9 contre-interrogatoire.
10 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je suis d'accord avec vous. Cela dépasse
11 le champ du contre-interrogatoire.
12 M. RE : [interprétation] Il me reste encore peut-être dix minutes pour mes
13 questions supplémentaires. Je remarque l'heure. Peut-être que nous
14 pourrions faire une pause toute suite.
15 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Nous allons faire une pause, et nous
16 reprendrons nos travaux à 11 heures.
17 --- L'audience est suspendue à 10 heures 28.
18 --- L'audience est reprise à 11 heures 02.
19 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Monsieur Re.
20 M. RE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.
21 Q. Monsieur le Témoin, hier, Me Morrissey vous avez interrogé au sujet de
22 la participation du 6e Corps et de ses unités à l'opération Neretva. La
23 question qu'il vous a posée est la suivante, je cite : "A votre
24 connaissance, Salko Gusic a continué à participer à cette opération en tant
25 que chef du 6e Corps tout au long de cette opération, n'est-ce pas ?" Vous
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1 avez répondu : "C'est ce que j'ai compris, effectivement." Ceci figure à la
2 page 57 du compte rendu d'audience d'hier, selon ma version et mon listing.
3 J'ai quelques questions à vous poser au sujet de cette réponse. Avez-vous
4 eu des contacts personnellement avec Salko Gusic pendant ces journées où
5 vous avez participé à l'opération de combat Neretva ?
6 R. Non, aucun contact avec lui.
7 Q. Est-ce que vous savez, personnellement, ce que lui il faisait, lui en
8 personne, ce qu'il faisait concrètement pendant ces journées pendant
9 lesquelles vous avez participé au combat de l'opération Neretva ?
10 R. Non.
11 Q. Au cours de cette même période, savez-vous s'il y avait quelqu'un qui
12 donnait des ordres directement aux unités qui étaient sous son contrôle au
13 sein du 6e Corps avant l'opération Neretva tout du moins ?
14 R. Je ne le savais pas. Lors de la réunion au cours de laquelle on m'a ma
15 confié ma mission, Salko Gusic s'est vu confié sa propre mission. J'imagine
16 qu'ensuite, il a continué à exercer son rôle de commandant du 6e Corps.
17 Q. Me Morrissey vous a interrogé au sujet de la subordination des unités
18 du 6e Corps et des missions qui leur ont été confiées comme confié à votre
19 unité, page 53 du compte rendu d'audience d'hier. Il vous a demandé, je
20 cite : "Vu les principes militaires que vous connaissez, s'il y avait eu
21 une infraction commise par les soldats du 6e Corps, ceci aurait dû faire
22 l'objet d'une enquête par la sécurité militaire du 6e Corps, au bout du
23 compte et au départ, par la brigade ?" A quoi vous avez répondu :
24 "Effectivement."
25 Est-ce que vous savez si l'opération Neretva impliquait également des
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1 unités chargées de la sécurité militaire ou de la police militaire ?
2 M. MORRISSEY : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. D'après
3 la manière dont j'ai compris les éléments de preuve présentés, il n'y a pas
4 de tel détachement lors des opérations. La question est de savoir si M.
5 Halilovic, si son équipe ou si le poste de commandement avancé bénéficiait
6 du rattachement de telles unités, plutôt que d'unités rattachées à une
7 opération.
8 M. RE : [interprétation] Je suis tout à fait prêt à corriger ma question.
9 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Allez-y.
10 M. RE : [interprétation]
11 Q. Est-ce que vous avez entendu la question explicitée, Monsieur Cikotic,
12 à savoir, est-ce que vous savez si M. Halilovic, son équipe ou le poste de
13 commandement avancé, qui, selon l'Accusation, participait à l'opération
14 Neretva, bénéficiait du rattachement des services de sécurité militaire ou
15 de la police militaire ? Est-ce qu'il y avait des unités de ce type qui
16 leur étaient attachées ?
17 R. Non, je n'en avais pas connaissance.
18 Q. S'agissant des sanctions, de la discipline et des mesures
19 disciplinaires ou de la responsabilité en matière d'enquête sur des
20 infractions et pour reprendre la question posée par M. Morrissey au sujet
21 du 6e Corps, sur ceux qui devraient procéder aux enquêtes en cas
22 d'infraction commise au sein du 6e Corps, je voudrais, moi-même, vous poser
23 la question suivante : en tant que commandant du groupe opérationnel, si
24 les unités vous étaient subordonnées dans le cadre d'une opération bien
25 particulière, je voudrais savoir qui serait responsable de procéder à une
Page 42
1 enquête, s'il y avait infraction alléguée de la part d'unité qui vous était
2 subordonné à vous, en tant que commandant du groupe opérationnel, pendant
3 la période durant laquelle ces unités vous sont subordonnées ?
4 R. En fait, vous me posez une question hypothétique ?
5 Q. Non, cela peut également être une question pratique, concrète. Si, par
6 exemple, il y avait eu des infractions commises par votre unité, à savoir
7 la 317e Brigade, est-ce qu'il vous appartenait, en tant que commandant du
8 groupe opérationnel, est-ce que c'était votre responsabilité de procéder à
9 une enquête et de prendre des mesures disciplinaires contre les
10 responsables, contre vos subordonnés qui se seraient rendus coupables de ce
11 type d'action ?
12 M. MORRISSEY : [interprétation] Il faudrait préciser la chose. Maintenant,
13 on nous dit qu'il d'agit d'une question concrète. Est-ce que mon éminent
14 confrère avance que ceci s'est effectivement produit, que ces unités ont
15 commis des infractions ? Puisqu'on est en train de poser une "question
16 concrète". Il faudrait savoir si c'est une question hypothétique ou
17 concrète.
18 M. RE : [interprétation] Je pense que cela n'a aucune importance, parce que
19 si cela a eu lieu, je voudrais savoir ce que le témoin a fait et ce qu'il
20 aurait dû faire et si cela ne s'est pas produit, je voudrais savoir qui
21 était responsable. C'est une question hypothétique, mais s'il peut répondre
22 en nous donnant des exemples précis, il peut le faire.
23 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Peut-être vaudrait-il mieux s'en tenir à
24 une question hypothétique.
25 M. RE : [interprétation]
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1 Q. Sur la base de votre connaissance de la doctrine et du droit militaire,
2 je voudrais que vous me disiez si le commandant du groupe opérationnel
3 était responsable, en cas d'infractions commises par les unités placées
4 sous son contrôle personnel, de prendre des mesures disciplinaires et
5 d'enquêter.
6 R. Oui.
7 Q. Si vous receviez vos ordres de M. Halilovic pour cette opération, comme
8 vous nous l'avez dit et vous vous trouviez toujours organiquement au sein
9 du 3e Corps, mais cependant sous le commandement de M. Halilovic, dans le
10 cadre de cette opération particulière, si vous personnellement, Monsieur
11 Cikotic, avait commis une infraction - si, par exemple, vous aviez
12 assassiné un prisonnier de guerre ou tiré sur des civils - est-ce que M.
13 Halilovic aurait eu la responsabilité d'enquêter ou est-ce que quelqu'un
14 d'autre aurait eu la responsabilité d'enquêter sur ces actions criminelles
15 et de vous sanctionner ?
16 M. MORRISSEY : [interprétation] J'ai plusieurs objections à soulever ici,
17 mais je vais m'en tenir à l'objection principale, à savoir que cette
18 question ne découle pas du contre-interrogatoire. Elle contient un certain
19 nombre de termes qui peuvent induire le témoin en erreur, sur lesquels je
20 ne vais pas m'appesantir. D'autre part, cette question contient des
21 présupposés que le témoin n'a pas approuvés, précédemment. Il y a une
22 question à laquelle je ne m'opposerais pas -- je ne veux pas, ici, insulter
23 mon confrère. Je ne m'oppose pas à ce que des questions soient posées au
24 sujet de la responsabilité de la police militaire et des enquêtes
25 militaires, s'agissant des unités subordonnées dans le cadre de Neretva 93.
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1 On a dit que la responsabilité se trouvait au sein du 3e Corps. Mais si mon
2 éminent confrère veut poser la question suivante : si le témoin avait tiré
3 une balle dans la tête d'une personne, qu'est-ce qui se passerait ? Cela ne
4 me gênerait pas. Mais la façon dont la question est posée peut induire en
5 erreur et la réponse ne sera d'aucune utilité. J'ai une objection à la
6 manière dont les choses sont posées.
7 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Peut-être pourriez-vous poser votre
8 question de manière différente ?
9 M. RE : [interprétation] Oui, tout à fait. Je suis tout à fait prêt à
10 essayer de le faire, si cela peut permettre aux Juges de la Chambre de
11 mieux me suivre.
12 Q. Hier, Monsieur le Témoin, Me Morrissey vous a interrogé directement au
13 sujet d'une enquête sur des crimes éventuellement commis par vos soldats.
14 Je vous répète la question, page 52 dans la version du compte rendu
15 d'audience d'hier. Je cite : "Je souhaiterais vous présenter toute une
16 série de conclusions au sujet de la resubordination des structures
17 organiques du 3e Corps. S'agissant du 3e Corps, il y a ces relations et ces
18 responsabilités par rapport au 3e Corps ont toujours été maintenues, n'est-
19 ce pas ?"
20 Pour cela encore, vous avez répondu : "Oui."
21 Question, ensuite : "Si un de vos soldats avaient commis une
22 infraction pendant cette période, vous, en tant que commandant, auriez dû
23 procéder à une enquête ?"
24 Ce à quoi vous avez répondu : "La Brigade dans laquelle relevait la
25 personne ayant commis ce crime aurait dû enquêter."
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1 Je voudrais savoir si M. Halilovic commandait cette opération et vous a
2 donné des ordres ?
3 M. MORRISSEY : [interprétation] Un instant, je vous prie. Il n'a jamais été
4 dit que M. Halilovic avait commandé cette opération, bien que c'est ce que
5 le Procureur essaierais de prouver et d'entendre depuis longtemps. Ce n'est
6 pas ce que le témoin a dit. Il a dit qu'il assurait la coordination. Je
7 pense que maintenant, on voit où le Procureur veut en venir. On ne procède
8 pas ici à des questions supplémentaires. Le Procureur essaie de poser des
9 questions complètement nouvelles, de tenter sa chance, une fois encore.
10 M. RE : [interprétation] En fait, non. Je demande une précision au sujet de
11 la subordination des soldats. Je voudrais savoir si les hommes de M.
12 Cikotic étaient subordonnés à M. Halilovic, étaient sous sa responsabilité.
13 Ici, on va au cœur des questions posées dans l'acte d'accusation et ceci
14 découle forcément du contre-interrogatoire parce que Me Morrissey a posé
15 une question semblable. Je veux clarifier la chose.
16 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Mais vous pouvez poser ce genre de
17 questions sans mentionner de nom, afin de savoir de manière complètement
18 certaine qui était responsable de punir les infractions éventuellement
19 commises.
20 M. RE : [interprétation]
21 Q. Si vous-même aviez commis un crime, si des hommes placés sous votre
22 commandement avaient commis un crime, comme cela vous a été demandé par Me
23 Morrissey, hier, nous trouvons toujours, cependant, dans le cadre de
24 l'organisation du 3e Corps, mais dans le cadre également d'ordres donnés
25 par M. Halilovic pour cette opération, je voudrais savoir, dans ce
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1 contexte, qui aurait été responsable de vous punir ? Le commandant du Corps
2 ou la personne vous ayant donné les ordres ?
3 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, vous avez été très
4 clair. Vous avez dit très clairement le type de questions qui pouvaient
5 être posées ou pas. Or, cette question, manifestement, est une des
6 questions qui ne devraient pas être posées.
7 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, ne mentionnez aucun nom.
8 M. RE : [interprétation] Bien.
9 Q. Oublions les noms. Je vous demande simplement, Monsieur le Témoin, qui
10 aurait été responsable d'enquêter sur vous et de vous punir.
11 M. MORRISSEY : [interprétation] Non, mais ici, on est en train de se livrer
12 à des petits jeux puisqu'il repose exactement la même question.
13 M. RE : [interprétation] L'objection qui m'a été faite avait trait aux
14 noms; je demande simplement qui, je ne peux pas être -- me conformer plus
15 aux consignes de la Chambre --
16 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Laissez Me Morrissey finir. Laissez-le
17 finir.
18 M. MORRISSEY : [interprétation] La situation, je la comprends de la manière
19 suivante, le Procureur a le droit de faire la chose suivante : je reprends,
20 ici, la question qui est posée précédemment, il a droit de poser la chose
21 suivante : si un groupe opérationnel subordonné à un commandant dans le
22 cadre d'une opération, qui est responsable de punir des infractions ? Voici
23 l'autre genre de questions hypothétiques qui peuvent être posées et que mon
24 confrère, apparemment, essaie de poser. On peut poser la question de
25 manière tout à fait neutre et, à ce moment-là, je n'aurai pas d'objections.
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1 M. RE : [interprétation] Je remercie beaucoup mon confrère parce que j'ai
2 posé la question exactement de cette manière.
3 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.
4 M. RE : [interprétation]
5 Q. Si un groupe opérationnel était subordonné à un commandant dans le
6 cadre d'une opération bien précise, qui serait responsable de la sanction
7 de crimes éventuellement commis ?
8 R. Si on regarde le commandement Suprême, c'est le commandement du 3e
9 Corps à ce moment-là.
10 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
11 M. RE : [interprétation]
12 Q. Oui, mais je parle plus précisément d'autres choses. Je voudrais savoir
13 si votre réponse avait trait au commandant du groupe opérationnel et non,
14 au commandant de la structure organique dont vous faisiez partie parce que
15 je parle du commandant du groupe opérationnel.
16 M. MORRISSEY : [interprétation] Mon éminent confrère, effectivement, vise
17 ce commandant du groupe opérationnel, il l'a fait très clairement savoir,
18 mais la réponse me paraît très claire également. C'est une chose de vouloir
19 obtenir des précisions, mais essayer d'obtenir la réponse que l'on
20 souhaite, comme vient de le faire le Procureur pour la neuvième fois, cela
21 c'est autre chose. On voit très clairement où il veut en venir.
22 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Afin que la question soit résolue, je
23 vais permettre au Procureur d'essayer une neuvième fois.
24 M. RE : [interprétation]
25 Q. Est-ce que vous comprenez la précision que j'essaie d'obtenir suite à
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1 votre dernière réponse ? Est-ce que vous parliez du commandant du groupe
2 opérationnel au moment où le crime est commis ou du commandant du 3e Corps,
3 s'agissant de crimes commis par les personnes, par les soldats appartenant
4 au groupe opérationnel pendant cette période ? Voilà où je veux en venir.
5 R. S'il y a crimes commis au sein du groupe opérationnel, à ce moment-là,
6 c'est l'unité pertinente du groupe opérationnel qui est chargée d'enquêter
7 sur ce crime ou pour ce qui est du commandement Suprême, c'est le
8 commandement du 3e Corps qui entre en jeu, s'il y a eu un crime commis au
9 sein du groupe opérationnel dont j'étais commandant.
10 Q. Vous avez dit, précédemment, que parfois, des unités vous étaient
11 subordonnées, des unités du MUP, des unités appartenant au ministère de
12 l'Intérieur. S'il y avait eu crimes commis par ces unités du MUP placées
13 sous votre commandement, dans ces conditions, qui aurait dû enquêter sur
14 ces crimes commis par ces hommes, alors qu'ils se trouvaient sous votre
15 commandement, dans le cadre de ces opérations de combat ? Est-ce que c'est
16 vous qui auriez été, à ce moment-là, chargé d'enquêter sur ces crimes ? Ou
17 est-ce que cela aurait été quelqu'un d'autre ?
18 R. J'aurais été responsable d'initier cette enquête; mais les organes du
19 MUP participeraient, ce serait eux qui seraient responsables de l'enquête
20 en tant que telle.
21 [Le conseil de l'Accusation de concerte]
22 M. RE : [interprétation] Je n'ai plus de questions.
23 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vous remercie.
24 [La Chambre de première instance se concerte]
25 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Monsieur le Juge El Mahdi.
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1 Questions de la Cour :
2 M. LE JUGE EL MAHDI : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
3 [en français] Monsieur le Témoin, c'est une petite clarification,
4 s'il vous plaît, pour être sûr que je vous ai bien compris. Vous avez dit
5 que M. Halilovic vous a dit que son rôle était de coordonner les activités
6 de combat sur le terrain. Quand est-ce qu'il vous a dit ceci ?
7 R. Je crois qu'il me l'a dit lors de la première réunion à Jablanica ou
8 peut-être en chemin de Jablanica à Konjic, quand nous étions dans son
9 véhicule.
10 M. LE JUGE EL MAHDI : Est-ce qu'à la réunion de Dobro Polje, il a réitéré
11 cette affirmation ?
12 R. Je ne m'en souviens pas.
13 M. LE JUGE EL MAHDI : Pour vous, comment vous avez compris cette formule de
14 coordonner le combat sur le terrain ? Comment vous avez compris le sens que
15 vous avez compris de cette phrase ?
16 R. La manière dont je l'ai compris, c'est qu'il avait l'autorité pour
17 confier et distribuer des missions particulières sur le terrain et engager
18 les unités de manière bien précises et que derrière toute cette idée, il y
19 avait l'état-major principal ou le commandant de l'état-major principal, M.
20 Delalic, qui était derrière tout cela.
21 M. LE JUGE EL MAHDI : Mais pour vous, votre conviction c'était qui ? Qui
22 commandait cette opération ?
23 R. Pour être concret, j'ai reçu mes ordres et je me suis présenté à M.
24 Sefer Halilovic, je relevais de M. Sefer Halilovic.
25 M. LE JUGE EL MAHDI : Oui, mais vous étiez convaincu que c'était M.
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1 Halilovic qui était le commandant ?
2 R. Je n'étais confronté à aucun dilemme. S'agissant de ses fonctions, il
3 était chef d'état-major. Cependant, je pense qu'en cette qualité, il était
4 en mesure de me donner des ordres sur le terrain et j'étais tenu, j'avais
5 l'obligation de lui faire rapport de l'exécution des ordres qu'il avait
6 donnés.
7 M. LE JUGE EL MAHDI : Mais alors, pourquoi il vous a donné une explication
8 de sa fonction en disant que son rôle était de coordonner le combat ? Est-
9 ce que pour un commandant, cela nécessitait une explication ? S'il était
10 commandant, cela allait sans doute parce qu'il avait son point de vue, son
11 autorité pour émettre n'importe quel ordre ? Pourquoi il a dit ce qu'il a
12 dit à votre avis ? C'est pour expliquer quoi ?
13 R. Je ne sais vraiment pas pourquoi quel était son objectif. Je crois
14 qu'il voulait m'expliquer son rôle à moi en tant que participant aux
15 opérations précédentes.
16 M. LE JUGE EL MAHDI : Est-ce que vous trouvez cela normal venant d'un
17 commandant d'expliquer son rôle ? Est-ce que ce n'aurait pas été suffisant
18 qu'il exerce son autorité ? Est-ce qu'il aurait besoin d'expliquer en quoi
19 consiste sa mission ?
20 R. Très probablement, M. Halilovic sait pourquoi il a fait ce qu'il a
21 fait. Je pense, qu'à l'époque, il y avait une grande confusion qui régnait.
22 M. LE JUGE EL MAHDI : Je vous demande votre opinion personnelle, ce que
23 vous avez vous-même compris, que vous avez senti.
24 R. Je crois, qu'à l'époque, il régnait une grande confusion au sujet de
25 beaucoup de choses sur le terrain. Il faut notamment préciser que quelques
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1 mois auparavant, M. Delalic avait été nommé au commandement, à la tête de
2 l'état-major principal. Je crois que parmi les soldats qui se trouvaient
3 sur le terrain, régnait une certaine confusion au sujet du nouveau rôle du
4 commandant ainsi que de l'ancien rôle du chef d'état-major. La manière dont
5 j'ai compris cela, c'est que M. Halilovic essayait d'expliquer sa situation
6 aux commandants avec qui il est entré en contact à l'époque. C'est dans ce
7 sens, c'est pour cela qu'il l'a fait.
8 [La Chambre de première instance se concerte]
9 M. RE : [interprétation] Je vous prie de m'excuser d'interrompre. A
10 plusieurs reprises, est apparu au compte rendu d'audience la mention
11 "Delalic" alors que je crois que le témoin a dit "Delic".
12 M. LE JUGE EL MAHDI : Vous avez entendu le représentant de l'Accusation, le
13 nom que vous avez dit, c'est M. Delic ou
14 M. Delalic ?
15 R. Delic.
16 M. LE JUGE EL MAHDI : Je passe à une autre demande de clarification. Il
17 s'agit de ce que vous avez dit à propos de recours aux forces du MUP, de la
18 police. Vous avez bien expliqué que c'était le commandant de l'unité de se
19 mettre en accord avec le chef du MUP, le chef local, régional. Ma question
20 est la suivante : est-ce que dans ce cas-là, les fonctionnaires supérieurs,
21 militaires, je veux dire, sont en connaissance, vous avertissez vos
22 supérieurs militaires de ce fait ou vous vous contentez de l'entente ou
23 l'accord entre vous étant commandant et le chef de la police civile ?
24 R. En général, cela devrait être le cas. Dans la pratique, souvent les
25 situations étaient telles qu'il n'y avait pas suffisamment de temps ni de
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1 moyens de communication. C'est à cause de cela que plus souvent cela a été
2 fait directement en contact avec la police locale plutôt que de passer par
3 l'approbation des supérieurs dans le cadre de la police de l'armée.
4 M. LE JUGE EL MAHDI : Vous n'avertissez pas vos supérieurs militaires ?
5 C'est-à-dire, si vous avez eu recours à ce procédé, il se peut que ces
6 unités agissent dans le cadre de votre unité sans que vos supérieurs
7 militaires aient connaissance de la chose ?
8 R. Concrètement, c'est ce qui se passait en 1993 alors qu'en 1994 la
9 situation était déjà différente.
10 M. LE JUGE EL MAHDI : Merci, Monsieur le Témoin.
11 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge El Mahdi. Moi-
12 même, j'ai quelques questions qui découlent des vôtres.
13 Tout d'abord, Monsieur le Témoin, vous avez dit au Juge El Mahdi que vous
14 avez envoyé des rapports de combat à
15 M. Halilovic. Ma question est de savoir où envoyiez-vous ces rapports, et
16 où est-ce que M. Halilovic pouvait être contacté vers la mi-septembre 1993
17 ou dans la première moitié du mois de
18 septembre 1993 ?
19 R. Du poste de commandement avancé, j'envoyais mes rapports au
20 commandement de la 317e Brigade. D'après les informations dont je
21 disposais, à ce poste de commandement se trouvait Messieurs, je pense,
22 Suljevic et Bilajac. De cet endroit-là, par le biais des moyens de
23 transmissions, ils communiquaient avec M. Sefer Halilovic alors que je ne
24 savais pas où M. Sefer Halilovic était à ce moment-là.
25 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Bien sûr, vous saviez qu'il y avait un
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1 poste de commandement avancé. Pourquoi n'avez-vous pas envoyé vos rapports
2 directement à ce poste de commandement avancé ?
3 R. Poste de commandement avancé de qui ?
4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Vous ne savez pas du tout qu'il y avait
5 un poste de commandement avancé à Jablanica à cette époque-là ?
6 R. Je ne savais pas qu'il y avait un poste de commandement avancé là-bas.
7 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Ma question suivante : vous avez dit dans
8 votre déposition que M. Sefer Halilovic pouvait donner des ordres dans
9 l'esprit des lignes directrices générales. Quelles étaient ces lignes
10 directrices ?
11 R. Je voulais dire par là, conformément à l'idée de la défense active et
12 des missions des unités visant à libérer les régions. Je pense également
13 aux ordres donnés par le commandement Suprême ou l'état-major principal à
14 certaines unités ou à certains commandements.
15 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Monsieur le Témoin, au cours de votre
16 déposition, vous avez parlé de "l'état-major" et "du commandement Suprême"
17 à plusieurs reprises. S'agit-il des organes différents au sein de l'ABiH ?
18 R. Selon la manière dont je comprends les choses, le commandement Suprême
19 ou le commandant en chef, c'était la présidence de la Bosnie-Herzégovine,
20 alors que l'état-major était son organe professionnel par le biais duquel
21 les combats se déroulaient sur le plan professionnel, et par le biais
22 duquel l'on commandait les forces armées au niveau de la République de
23 Bosnie-Herzégovine.
24 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.
25 Y a-t-il des questions qui découlent des questions des Juges ?
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1 M. RE : [interprétation] Une seule. Merci.
2 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, Monsieur Re.
3 Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Re :
4 Q. [interprétation] En faisant suite à la question que le Président Liu
5 vous a posée tout à l'heure, vous avez dit que vous ne savez pas s'il y
6 avait un poste de commandement avancé à Jablanica. Voici ma question :
7 Géographiquement ou physiquement, à quelle distance étiez-vous par rapport
8 à Jablanica, au cours de cette période en septembre 1993 ?
9 R. Physiquement, c'était une distance de moins de
10 100 kilomètres sur le terrain. Cependant, pour que je puisse venir à
11 Jablanica, il m'aurait fallu deux jours dans la pratique pour que j'y
12 arrive depuis mon poste de commandement avancé.
13 Q. Merci.
14 M. LE JUGE LIU : [interprétation] La Défense n'a pas de questions ?
15 M. MORRISSEY : [interprétation] Pas de questions.
16 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.
17 Y a-t-il des documents que les parties souhaitent verser au dossier.
18 Maître Re ?
19 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
20 M. RE : [interprétation] Je vais juste vérifier avec notre commis
21 d'audience, car je ne suis pas sûr si un document que j'ai mentionné a déjà
22 été versé au dossier ou qu'il était marqué aux fins d'identification.
23 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.
24 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
25 M. RE : [interprétation] Je comprends que les trois documents auxquels j'ai
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1 fait référence ont déjà été versés au dossier.
2 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci beaucoup.
3 Maître Morrissey ?
4 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui. La Défense souhaite verser au dossier
5 les documents qui ont été proposés pour le versement au cours du contre-
6 interrogatoire. Je crois que ceux qui ont été simplement marqués aux fins
7 d'identification, étaient les manuels militaires, 195, 196, 197, et les
8 parties de 198. Ces documents ont été répartis en plusieurs parties,
9 notamment 198, 199, 200. Là, il s'agissait de pages différentes. Je propose
10 le versement au dossier de ces documents.
11 Je crois que M. Cengic a fourni une liste des documents auxquels nous
12 avons fait référence hier. Je souhaite également dire que mon éminent
13 collègue, M. Re a dit que le Procureur a trouvé la traduction de l'un de
14 ces documents, peut-être après la discussion avec le Procureur. Nous
15 pouvons ajouter cela en tant que pièce. Je ne souhaite pas le faire dès à
16 présent car je n'ai pas pris ma décision encore.
17 Pour terminer, le document D201 est déjà versé au dossier. En fait, ce sont
18 des manuels militaires que je souhaite verser au dossier.
19 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.
20 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Y a-t-il des objections ?
22 M. RE : [interprétation] Non, il n'y a pas d'objection.
23 S'agissant de la traduction ou plutôt des documents fournis hier,
24 d'un côté, nous avons la traduction intégrale du livre intitulé
25 "Rukovodjenje i komondovanje" qui contient trois extraits MFI198, 199 et
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1 200. La Chambre a la possibilité d'avoir les trois documents en anglais
2 immédiatement, pratiquement.
3 Nous n'avons pas d'objection à ce que ces documents soient versés du
4 dossier.
5 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci beaucoup de votre aide. Ces
6 documents sont versés au dossier. Nous demandons à la Défense de soumettre
7 tous ces documents au Greffe afin qu'il puisse les scanner et les
8 introduire dans le système.
9 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui, merci. Ce sera fait.
10 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci beaucoup.
11 Monsieur le Témoin, merci d'être venu déposer à La Haye.
12 Mme l'Huissière va vous escorter en dehors de ce prétoire. Nous vous
13 souhaitons un très bon voyage de retour chez vous.
14 [Le témoin se retire]
15 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Il a été décidé qu'il nous reste
16 encore un peu de temps. Par conséquent, nous souhaitons traiter des
17 arguments avancés hier par la Défense. J'ai donné des instructions aux deux
18 parties de se réunir après l'audience d'hier, et je souhaite savoir si ceci
19 aboutit aux résultats positifs ?
20 M. MORRISSEY : [interprétation] Pour clarifier les choses, nous
21 parlons de ce dont Me Mettraux a commencé à parler hier concernant
22 l'admissibilité de certains documents présentés par le biais du témoin
23 Jusuf Jasarevic.
24 Nous avons eu une discussion. Nous avons, effectivement, traité de
25 cela dans le cadre d'une discussion. S'agissant de certains autres
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1 documents qui n'ont pas fait l'objet de controverse hier, mais au cours de
2 la discussion entre moi et mon éminent collègue, nous avons constaté que
3 probablement nous allons admettre d'un commun accord par le biais de ce
4 témoin.
5 En ce qui concerne le document dont j'ai parlé hier et
6 auquel mon éminent collègue voulait objecter, nous allons, effectivement,
7 soulevé des objections à l'égard de tous ces documents à l'exception d'un,
8 notamment numéro D -- enfin numéro 163.
9 Mon éminent collègue vous en parlera plus longuement tout à l'heure. Je
10 vais vous expliquer où se trouve la controverse à ce stade. En ce qui
11 concerne la liste fournie par le bureau du Procureur, tous les documents
12 au-dessus de 150, font l'objet d'objection sur les bases suivantes, à
13 savoir, ces documents ont été fournis tardivement et ont été ajoutés à la
14 liste des pièces à conviction conformément à la décision de la Chambre.
15 Après l'objection de la Défense, la Chambre a pris sa décision concernant
16 cela.
17 Je ne souhaite pas maintenant faire référence aux procédures qui sont
18 appliquées ailleurs.
19 [Le conseil de la Défense se concerte]
20 M. MORRISSEY : [interprétation] Je souhaite simplement mentionner que la
21 Défense a soumis un mémoire au sujet de cette décision.
22 Malgré cela, nous demandons à remettre. Tout d'abord, nous
23 considérons qu'il ne faut pas les verser au dossier à ce stade.
24 Puis, la Chambre, au moment de sa décision, a proposé à la Défense encore
25 une protection, c'est-à-dire que ces documents ne doivent pas être
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1 communiqués tardivement.
2 Le Procureur, par conséquent, a eu deux possibilités soit il pourrait
3 citer à la barre ce document dès à présent et présenter ce document par le
4 biais d'un autre témoin ou il peut citer à la barre ce témoin plus tard.
5 C'était le choix qu'avait le Procureur. Il revient au bureau du Procureur
6 de prendre cette décision. Il s'agit plutôt de la convenance du bureau du
7 Procureur plutôt que de la nécessité, s'il souhaite présenter ces documents
8 dès à présent.
9 La deuxième raison, et d'ailleurs, je ne vais pas traiter de ces
10 documents un par un à ce stade, mais ce que nous pourrons dire, c'est
11 qu'aucun de ces documents ne devrait être présenté par le biais de ce
12 témoin, pas du tout. Certains de ces documents ne devraient pas être versés
13 au dossier par le biais de l'un quelconque témoin. C'est notre position
14 concernant la plupart des documents car il ne s'agit pas seulement de
15 l'ouï-dire, mais de rumeurs qu'il n'est pas du tout possible de vérifier et
16 qui, dans la plus grande partie, n'ont rien à voir avec l'acte d'accusation
17 qui nous concerne, ici. Au fond, on essaie de les présenter afin de prouver
18 que M. Halilovic était informé des événements, mais la Défense considère
19 qu'ils ne sont pas fiables et ne sont pas appropriés par rapport à ce
20 témoin. Nous faisons objection à cela et ce sont les arguments de fond que
21 nous avançons.
22 C'est la raison pour laquelle ils font l'objet de controverse entre
23 nous.
24 Je souhaite également dire quelque chose au sujet de la manière dont il
25 sera approprié de les traiter. Puisque la Défense, dans son objection,
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1 s'est focalisée surtout sur la pertinence et fiabilité, d'un côté et sur le
2 caractère inapproprié de ce témoin, M. Jasarevic, je pense qu'il faudrait
3 examiner les catégories de ces documents. Certains de ces documents émanent
4 de la police civile.
5 Puis d'autres, apparemment, sont passés par le bureau de ce témoin;
6 peut-être il serait possible de les verser au dossier. A notre avis, non,
7 mais peut-être la Chambre prendra une telle décision. Puis, peut-être
8 certains de ces documents ont déjà été vus ou cités par le témoin, lui-
9 même. Là se pose la question de la pertinence, mais là, encore une fois, la
10 catégorie est différente, s'il a déjà vu ces documents et cela peut être,
11 éventuellement, pertinent dans le cadre de sa déposition.
12 Cela serait peut-être une manière logique de traiter de ces documents
13 plutôt que de le faire un par un, car je pense que cette procédure ne
14 serait pas efficace et serait trop longue.
15 Je pense qu'il serait possible de traiter de cela ainsi, mais mon
16 éminent collègue va se prononcer.
17 Puis, nous souhaitons également dire que nous n'avons pas encore pu tester
18 la fiabilité, ni l'admissibilité d'un grand nombre de ces documents. La
19 plus grande partie de ces documents émane du service de Renseignement, ce
20 sont des rapports du service de Renseignement concernant ce que certaines
21 personnes disent au sujet d'une autre personne, parfois, au sujet de Sefer
22 Halilovic et parfois, au sujet de Ramiz Delalic.
23 A première vue, il n'est pas possible de tester leur fiabilité, mais
24 peut-être en déployant des efforts supplémentaires, nous allons détecter
25 quelque chose qui est pertinent. Puis, la question qui se pose est de
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1 savoir si ces documents sont admissibles ou pas.
2 C'est la raison pour laquelle nous considérons que la chaîne de
3 conservation de ces documents n'est pas sans pertinence. Nous considérons
4 que c'est quelque chose de pertinent car afin de pouvoir tester leur
5 fiabilité, il sera peut-être nécessaire d'effectuer un certain travail à
6 Sarajevo, également.
7 Je souhaite clarifier la chose suivante : à ce stade, je ne sais pas encore
8 comment je vais traiter de cela. Je ne peux pas dire : "Voilà ce que je
9 vais faire." Je peux simplement dire que peut-être il va falloir faire
10 certaines enquêtes supplémentaires au sujet de certains de ces documents.
11 Deuxièmement, comme mon éminent collègue l'a déjà dit, hier, nous
12 avons respecté l'ordonnance de la Chambre dans notre préparation pour les
13 dépositions des témoins. Il est vrai, lorsque le Procureur dit que ces
14 documents ne sont pas volumineux, mais nous ne pouvons pas les tester. Tout
15 simplement, nous n'avons pas suffisamment de temps car si, au milieu du
16 procès, nous devons procéder à des enquêtes, c'est vraiment difficile pour
17 nous. Il est difficile, parfois pour nous, de respecter les décisions
18 différentes de la Chambre et puisque la Chambre nous a proposé une
19 protection dans le cadre de son ordonnance, nous considérons qu'il faudrait
20 y avoir recours. C'est tout ce que je souhaite dire.
21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je souhaite vous poser une question.
22 Dans votre déclaration, vous avez dit que vous soulevez une objection à
23 l'admission de ce document. Que voulez-vous dire par là ? Car ce n'est pas
24 la même chose d'utiliser un document dans ce prétoire et de l'admettre.
25 Est-ce que vous parlez de l'utilisation ou de l'admission du document ?
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1 M. MORRISSEY : [interprétation] Les deux. Excusez-moi, je me suis mal
2 exprimé, car nous télescopons les deux notions dans le système de la
3 "common-law." En fait, je m'oppose aux deux et voici pourquoi.
4 Nous savons qu'il ne s'agit pas ici d'un procès devant un jury, mais
5 que le procès se déroule devant des Juges professionnels et expérimentés,
6 qui sont tout à fait en mesure de traiter de manière appropriée des
7 documents qui risquent de porter préjudice à notre client. Mais lorsque
8 l'on souhaite fournir ce genre de documents vagues et portant préjudice,
9 ceci ne peut pas être dans l'intérêt du client de la Défense. Bien sûr,
10 nous pouvons proposer à la Chambre de n'accorder aucun poids à ce document.
11 Cependant, ce que je souhaite dire, c'est que ces documents émanent de la
12 police et des ennemis politiques de M. Halilovic. Je ne veux pas entrer
13 dans tous les détails, mais ces documents me préoccupent. Nous savons que
14 le Procureur n'essaie pas d'empoisonner les esprits des Juges parce que
15 nous savons qu'ils ne souhaitent pas le faire et qu'ils ont des raisons
16 légitimes pour souhaiter les verser au dossier ou les présenter. Mais nous
17 considérons qu'il s'agit de documents où il y a beaucoup d'exagération. Je
18 suis sûr que la Chambre comprendra pourquoi nous le disons et c'est pour
19 cela que nous soulevons une objection à leur présentation, d'une manière ou
20 d'une autre.
21 Le Procureur, bien sûr, avancera ses propres arguments.
22 M. LE JUGE LIU : [interprétation] J'ai l'impression que vous connaissez
23 très, très bien le contenu de ces documents.
24 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui, je peux vous dire qu'effectivement, je
25 connais très bien le contenu de ces documents, ce qui ne me met pas du tout
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1 dans l'embarras. Je sais ce qui est contenu dans ces documents et dans ce
2 contexte, nous ne nous considérons pas lésés. Nous nous opposons à ce que
3 l'on essaie d'obtenir par le biais de ce document.
4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui. Et le Procureur.
5 Mme CHANA : [interprétation] Oui.
6 Le Procureur souhaite verser au dossier -- ou plutôt, je vais utiliser un
7 autre terme, montrer au témoin 22 documents. Sur ces 22 documents, 14 sont
8 nouveaux. Il ne s'agit pas de documents volumineux et mon éminent collègue
9 a déjà avoué qu'il connaissait bien le contenu de ces documents; ceci n'a
10 rien à voir avec le temps.
11 Je vais maintenant me pencher sur la décision de la Chambre qui stipule que
12 nous allons introduire les documents à un stade ultérieur. Nous considérons
13 qu'il faut faire une distinction entre le versement au dossier des
14 documents et l'invitation faite au témoin de faire des commentaires
15 concernant ces documents. Je considère que maintenant, nous nous trouvons à
16 ce stade ultérieur. Le conseil de la Défense connaît le contenu de ces
17 documents et aucun préjudice ne sera porté à la Défense si on montre au
18 témoin ces documents et si l'on invite le témoin à faire des commentaires.
19 Deuxièmement, je souhaite attirer votre attention sur ce que la Chambre a
20 dit sur l'admissibilité des documents et votre décision est en faveur de
21 l'admissibilité des documents et la Chambre décidera du poids,
22 ultérieurement.
23 Si, au cours de ce procès, il s'avère que ces documents n'étaient pas
24 vraiment admissibles, car la Défense, par exemple, présentera des preuves à
25 l'égard de cela, dans ce cas-là, la Chambre n'accordera aucun poids à ces
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1 éléments. Mais ceci peut se faire au fur et à mesure du déroulement de
2 cette affaire. Il n'est pas nécessaire de faire cela à ce stade. La Défense
3 peut continuer avec ses enquêtes et présenter tous les arguments qu'ils
4 souhaitent
5 présenter concernant l'admissibilité ou le manque de pertinence de ces
6 documents, par la suite.
7 Ce témoin est un haut officiel. Il était le chef de la police, à un moment
8 donné. Donc, il est tout à fait en mesure de faire des commentaires au
9 sujet de ces documents. Si l'on prive le bureau du Procureur de cette
10 possibilité, à ce stade, ceci aurait pour conséquence d'avoir une
11 déposition de ce témoin qui, finalement, ne sera pas tellement utile pour
12 la Chambre de première instance, alors que la Défense montrera à ce témoin
13 ses propres documents.
14 Je pense que ceci ne sera pas tellement utile pour la Chambre,
15 s'agissant de la déposition de ce témoin, pour que la Chambre puisse
16 comprendre la totalité de ce que le témoin aura à dire.
17 Monsieur le Président, jusqu'à présent, d'après la pratique dans
18 cette affaire, ce type de documents a été utilisé et j'ai montré de
19 nombreux documents de ce genre au témoin Gusic. Il s'agissait de documents
20 de catégorie semblable. Et dans le paragraphe 6 de votre décision, il est
21 dit qu'il n'est pas possible d'interdire en bloc l'admission des documents,
22 tout simplement car l'auteur n'a pas été cité à la barre ou car le document
23 n'a pas été signé ou ne comporte pas de cachet, et cetera.
24 Conformément à cela, nous considérons qu'il serait tout à fait
25 approprié et que ceci ne porterait pas préjudice à la Défense si l'on
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1 propose au témoin de faire des commentaires concernant ces documents. Les
2 Juges de la Chambre pourront, bien sûr, ignorer les commentaires faits par
3 le témoin, si ceci s'avère nécessaire, par la suite.
4 La Défense a également introduit des documents qui sont visiblement
5 pertinents et même si le témoin n'était pas au courant d'un certain
6 document, mais s'il peut confirmer la véracité de l'information contenue
7 dans ce document, cela reste pertinent.
8 Puis, mon éminent collègue dit également qu'ils n'ont pas eu
9 l'occasion de tester la fiabilité de ce document. Or, il y a une
10 distinction à faire entre la fiabilité et la pertinence et après, la
11 Défense pourra tester cette fiabilité, attirer l'attention de la Chambre
12 là-dessus.
13 Puis, la Défense dit que ces documents ne sont pas pertinents, non
14 plus. Le Procureur affirme qu'il s'agit clairement de documents tout à fait
15 pertinents, qui correspondent à la période du temps qui nous intéresse et
16 qui correspondent à la théorie de l'Accusation. Un grand nombre de
17 documents mentionnés par mon éminent collègue porte sur la 9e Brigade et
18 sur ce qui s'est passé au sein de cette brigade, à l'époque. Ce témoin est
19 clairement la personne qui peut en parler.
20 Nous avons réduit de manière dramatique la liste des témoins de
21 l'Accusation. Nous n'avons pas d'autres personnes qui pourraient en parler.
22 Les autres personnes, officiers chargés de la sécurité, étaient au sein des
23 brigades et ils n'ont pas la même perspective que celle qu'avait le témoin
24 en question. Sinon, préjudice sera porté à l'encontre de l'Accusation.
25 Si la Chambre de première instance souhaite accorder cela, accepter
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1 la demande de la Défense, dans ce cas-là, nous souhaitons réserver le droit
2 de rappeler ce témoin ou peut-être de ne pas l'appeler du tout. Et puisque
3 le témoin suivant ne se porte pas bien, ceci provoquerait un retard, dans
4 notre procédure.
5 Mais je pense que ceci est conforme à ce que la Chambre a dit dans sa
6 décision, à savoir qu'il faut introduire, éventuellement, ces documents, à
7 un stade ultérieur. Nous ne souhaitons pas introduire, ni verser au dossier
8 ces documents, dès à présent, mais les montrer. Je pense que nous nous
9 trouvons à ce stade ultérieur, en ce moment. Le conseil de la Défense
10 connaît le contenu. Il s'agit simplement de 14 nouveaux documents, pour la
11 plus grande partie émanant des archives de l'ABiH.
12 Voici mes arguments sur cette question, à moins que vous ne souhaitiez que
13 je vous fasse d'autres commentaires. Mais nous insistons pour avoir la
14 possibilité de présenter ces documents au témoin, pour qu'il fasse des
15 commentaires à ce sujet. Ces documents sont extrêmement pertinents et ont
16 une valeur probante certaine.
17 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Une question pour éclaircir cela. Au vu
18 de vos arguments, vous avez mentionné qu'il était impossible de présenter
19 ces documents par le truchement d'autres témoins et à un stade ultérieur.
20 Ai-je raison ?
21 Mme CHANA : [interprétation] Monsieur le Président, ce n'est pas
22 "impossible." Certains de ces documents pourraient être présentés par le
23 truchement d'un autre témoin, mais pas tous. Cependant, ces autres témoins
24 n'ont pas le même poste que ce témoin, chef de la police militaire. Pour
25 d'autres documents, nous souhaitons présenter ces documents comme nous
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1 l'avons fait pour M. Gusic, afin que le témoin en question fasse des
2 commentaires.
3 Je souhaite établir une distinction entre le versement au dossier de
4 ces documents et la présentation de ces documents au témoin, afin qu'il
5 fasse des commentaires sur les informations contenues. Certains de ces
6 documents émanent effectivement de la police, d'autres émanent d'autres
7 organes. Il est crucial que nous puissions présenter ces documents à ce
8 témoin. En d'autres termes, pour résumer les choses, nous pourrions
9 présenter certains de ces documents à d'autres témoins, mais pas tous. Et
10 l'Accusation subira un préjudice si la Chambre n'autorise pas que le témoin
11 fasse des commentaires à ce sujet.
12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.
13 Une autre question qui s'adresse à Maître Morrissey : avez-vous reçu les
14 notes de récolement de l'Accusation ?
15 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui. J'ai reçu ces notes, ce matin. Mon
16 confrère m'a appelé, hier soir, et m'a indiqué qu'elle préparait le témoin
17 de façon très prudente, conformément à ce qui lui avait été dit. J'ai
18 convenu qu'il s'agissait d'une bonne façon de procéder. Nous ne soulevons
19 aucun grief s'agissant d'un quelconque retard. Le Procureur n'est pas en
20 retard. L'Accusation a travaillé dur, jusque tard hier soir et ce matin,
21 également.
22 Nous avons reçu ces notes assez tardivement, mais le Procureur nous a
23 expliqué pourquoi et nous acceptons son explication.
24 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci. Avez-vous autre chose à ajouter ?
25 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui.
Page 67
1 Le Procureur rencontre deux problèmes essentiels, s'agissant de cette
2 demande. Tout d'abord, il y a une ordonnance qui a été rendue et qui visait
3 à protéger la Défense de tels problèmes.
4 Le Procureur cherche à contourner cette ordonnance en déclarant que
5 l'ordonnance portait sur l'admissibilité des éléments de preuve. Mais en
6 fin de compte, Mme Chana s'est corrigée en disant que cela avait trait à la
7 présentation des documents car c'est cela qui posait problème.
8 Deuxièmement, s'agissant des documents du MUP, l'Accusation cite à
9 comparaître deux personnes, Bakir Alispahic, qui a été mentionné dans des
10 dépositions de la semaine dernière et Enver Mujezinovic. Ces deux personnes
11 étaient membres du ministère de l'Intérieur. Bakir Alispahic était, entre
12 autres, le ministre de l'Intérieur, à l'époque; on ne peut pas dire qu'il
13 s'agissait d'un simple commandant ou d'un officier de rang subalterne. Il
14 était ministre de l'Intérieur. Enver Mujezinovic était un officer haut
15 gradé à l'époque.
16 Nous avons deux objections à soulever, au sujet de ces documents. Il
17 s'agit, tout d'abord, d'une objection générale : lorsque l'on cite à
18 comparaître le ministre de l'Intérieur, il s'agit là de la personne à qui
19 on peut présenter des documents émanant du ministère de l'Intérieur. Selon
20 moi, il n'y a aucun fondement laissant entendre que l'Accusation subirait
21 un préjudice si elle ne pouvait pas présenter ces documents à ce témoin.
22 Le fait que le Procureur soit autorisé à prouver que
23 M. Halilovic était au courant, il s'agit là de l'un des éléments que
24 l'Accusation doit trouver pour prouver l'infraction. Bien entendu,
25 l'Accusation est autorisée à le faire. Je ne veux pas qu'il y ait de
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1 malentendu au sujet de la teneur de notre objection. Disons que ces
2 documents ne pourront pas permettre que l'objectif soit atteint.
3 Le témoignage de ces témoins peut être pertinent à cet égard, et ces
4 témoins peuvent se voir poser des questions au sujet des faits pertinents
5 dont ils ont connaissance. On peut faire cela de façon verbale dans le
6 prétoire. S'il convient de rafraîchir leur mémoire à partir de documents,
7 très bien.
8 En outre, il s'agit de documents émanant d'experts. Si, bien sûr, ils ne se
9 souviennent pas des ces documents ou s'ils ne les ont pas vus, comme cela a
10 été le cas pour ce témoin, pour M. Gusic, on peut leur montrer ces
11 documents et leur poser des questions afin d'obtenir leurs commentaires
12 d'une façon pertinente. Le témoin qui va venir témoigner est un chef de la
13 sécurité militaire. Il n'était pas chef de la police militaire; ce n'était
14 pas le poste qu'il occupait. Il était chef des services de sécurité
15 militaire. Il s'agit d'un organe distinct au sein de l'armée.
16 La police civile relevait du ministre de l'Intérieur. Il s'agit d'un
17 organe assez différent au plan organique, organe qui relevait d'un
18 ministère distinct. Je ne pense pas que l'on puisse honnêtement contesté
19 cela.
20 Selon moi, ma confrère essaie de s'écarter des décisions qui ont été
21 rendues. Deuxièmement, il existe des témoins par le truchement desquels ces
22 documents pourraient être présentés pour versement au dossier s'ils sont
23 pertinents.
24 Le témoin en question, comme je l'ai dit, pour ce qui est de ce
25 témoin, si ce document est passé entre les mains du témoin en question, il
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1 pourrait être opportun de le lui montrer. Ces documents ne devraient même
2 pas être montrés dans le cadre de la séance de récolement. Au bout de onze
3 années, il y a un réel danger dans le fait de présenter au témoin des
4 documents dont le témoin n'avait aucune connaissance à l'époque, qu'ils
5 n'ont pas vus pour rafraîchir leur mémoire. Ceci me préoccupe énormément.
6 Quel que soit l'objectif recherché, cela ne doit pas se faire dans le
7 prétoire. Cela n'aide pas les Juges. Ce que les Juges souhaitent, c'est
8 entendre la déposition de ce témoin. Ceci ne doit pas venir d'un autre
9 organe du gouvernement dont le témoin n'a peut-être aucune connaissance.
10 Pour ce qui est des documents, je pense qu'il faut procéder au cas
11 par cas. C'est ce que je voulais dire en réponse à ma confrère.
12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.
13 Il me semble qu'il y a deux positions très distinctes entre les
14 parties. Je vois que la question n'a pas été résolue après la rencontre
15 d'hier. Je pense que la Défense a soulevé ces objections concernant
16 l'utilisation de ces documents pour deux raisons : Premièrement, le fait
17 qu'ils ont été présentés tardivement.
18 Deuxièmement, le fait que la Défense estime que le témoin n'est pas
19 le témoin approprié à qui présenter ces documents. Pour ce qui est de la
20 deuxième objection, la Chambre de première instance a des doutes importants
21 sur ce sujet, parce que nous en sommes toujours au stade de la présentation
22 des moyens à charge. Quels que soient les documents que l'Accusation
23 utilise, il s'agit de sa stratégie. Ce n'est qu'après l'utilisation de ces
24 documents, que la Chambre de première instance sera en mesure de savoir si
25 les documents en question sont pertinents ou non, et si le témoin est la
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1 bonne personne à qui présenter ces documents. Je crains que nous ne
2 puissions pas être d'accord pour ce qui est de la deuxième objection.
3 Pour ce qui est de la première objection, c'est-à-dire, la présentation
4 tardive des documents, comme l'indique le conseil de la Défense, nous avons
5 rendu une décision le 14 février 2005 à cet égard. Nous pensons qu'il est
6 dans l'intérêt de la justice et conforme aux droits de l'accusé que la
7 Défense puisse disposer de suffisamment de temps pour se préparer au
8 procès. Ce qui inclut l'interrogatoire du témoin ou l'étude des pièces à
9 conviction que l'Accusation entend utiliser au cours du procès.
10 Etant donné que nous avons déjà rendu une décision, à moins que d'autres
11 décisions ne le précisent autrement, qu'il s'agisse de décisions rendues
12 pas cette Chambre de première instance ou par la Chambre d'appel, la
13 décision que nous avons rendue doit être respectée par les deux parties
14 ainsi que par la Chambre.
15 Toutefois, il peut rester une certaine latitude. Nous avons déclaré que les
16 nouvelles pièces devraient être utilisées à un stade ultérieur. Nous
17 n'avons pas précisé, toutefois, à quel moment. Quand on compare un stade
18 ultérieur, il n'y a pas de définition bien concrète de cette expression.
19 Par conséquent, dans de telles circonstances, je souhaiterais savoir s'il
20 est possible pour nous d'entendre ce témoin lundi prochain.
21 Cet après-midi, demain et pendant le weekend, la Défense aura le temps de
22 consulter son client afin de discuter de cette question.
23 Maître Morrissey.
24 M. MORRISSEY : [interprétation] Il est possible qu'ainsi, nous n'ayons plus
25 d'objections à soulever s'agissant du calendrier. Toutefois, nous
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1 maintenons notre objection concernant l'admissibilité de ces documents. Il
2 est exact que si nous disposons de ce temps qui nous permettrait
3 d'anticiper l'interrogatoire qui aura lieu, je pense que ceci permettrait
4 de palier à l'élément de surprise et au caractère tardif de la présentation
5 de ces documents. Je pense que ceci serait bénéfique effectivement.
6 Cela étant, nous ne souhaitons pas retirer notre objection quant à la
7 présentation de ces documents au témoin quant à leur admissibilité, mais il
8 appartient aux Juges de décider de leur pertinence.
9 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Est-ce que l'Accusation est d'accord ?
10 Mme CHANA : [interprétation] Nous nous en remettons entièrement à la
11 Chambre.
12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci beaucoup.
13 Oui, Maître Morrissey.
14 M. MORRISSEY : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.
15 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.
16 M. MORRISSEY : [interprétation] Puis-je soulever un point ?
17 M. Weiner, hier, a suggéré une solution constructive. Je ne sais pas si les
18 Juges pourraient nous aider à cet égard, mais peut-être qu'ils pourraient
19 nous donner une indication. Ceci nous permettrait de traiter de façon plus
20 constructive avec les autorités compétentes.
21 Nous souhaiterions rendre visite à M. Halilovic pendant le week-end afin
22 d'accélérer la procédure. Peut-être que la Chambre pourrait glisser un mot
23 aux autorités compétentes afin de rendre cela possible.
24 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.
25 Nous avons décidé que le prochain témoin serait entendu lundi, et que tous
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1 les documents proposés par l'Accusation seront utilisés.
2 Cela ne veut pas dire pour autant que nous allons les verser au
3 dossier.
4 Nous examinerons cette question pendant la procédure et après celle-
5 ci.
6 En outre, les notes issues de la séance de récolement communiquées à
7 la Défense, l'ont été d'une façon tardive. Nous souhaitons que la Défense
8 dispose de suffisamment de temps pour étudier ces notes de récolement
9 concernant le prochain témoin. Dans l'intervalle, je ferai de mon mieux, ou
10 peut-être donnerai-je des instructions ou des directives au Greffier
11 concernant les visites du conseil de la Défense pendant le week-end que ce
12 soit samedi ou dimanche, et ce, afin que la Défense puisse voir son client
13 afin de le consulter et de discuter avec lui des questions posées par ces
14 nouveaux documents.
15 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
16 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Il en est ainsi décidé.
17 Maître Morrissey.
18 M. MORRISSEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous
19 souhaitons simplement dire que nous souhaitons voir M. Halilovic demain si
20 cela est possible. Nous resterons en contact avec les autorités compétentes
21 à cet égard. Nous sommes reconnaissants de nous avoir fourni ces
22 indications.
23 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.
24 Une autre question se pose. Si nous avons bien compris, la Défense a déposé
25 une demande de certification d'appel. Nous attendons la réponse de
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1 l'Accusation sur ce point. Est-ce que l'Accusation souhaite répondre ou
2 non ?
3 M. WEINER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Comme vous le
4 savez, nous disposons de sept jours. Notre équipe est en train de s'en
5 occuper. Notre réponse sera prête aujourd'hui ou demain.
6 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.
7 S'agissant de la décision Gusic pour ce qui est des documents, cette
8 décision sera rendue à l'issue de l'audience d'aujourd'hui.
9 Y a-t-il d'autres questions que les parties souhaitent soulever à ce stade.
10 Je crois que non.
11 --- L'audience est levée à 12 heures 17, et reprendra le lundi 28 février
12 2005, à 9 heures 00.
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