Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le lundi 2 avril 2007

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 2 heures 22.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous. Madame la

6 Greffière, voulez-vous citer l'affaire.

7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,

8 Messieurs les Juges. C'est l'affaire IT-04-84-T, le Procureur contre Ramush

9 Haradinaj et consorts.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

11 La première chose que j'aimerais faire, cela ne devrait pas prendre trop de

12 temps, est de traiter des pièces à conviction qui ont été amenées pour le

13 dernier témoin, la pièce D1727 jusqu'à D1730.

14 Je vais demander à Mme la Greffière de bien vouloir en donner la

15 liste. Ce sont ces quatre dernières pièces seulement dont j'aimerais

16 traiter en ce moment.

17 Y a-t-il une objection ?

18 M. RE : [interprétation] On vient de me donner la liste alors que j'entrais

19 dans le prétoire. Puis-je, s'il vous plaît, les examiner ?

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous donnerez votre réponse après

21 la prochaine pause.

22 J'aimerais passer à huis clos partiel.

23 [Audience à huis clos partiel]

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17 [Audience publique]

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

19 M. RE : [interprétation] S'agissant de la déclaration consolidée du témoin

20 dont la déposition s'est conclue hier. Nous avons envoyé un exemplaire de

21 cette déclaration à la Défense hier soir, lorsqu'elle a été terminée. J'ai

22 la version signée. Je l'ai envoyée par courrier électronique à la Défense.

23 Je suis désolé, je pensais qu'elle aurait été parvenue plus tôt, mais ce

24 n'était pas le cas. J'ai demandé également si la Défense faisait objection

25 au fait qu'un exemplaire de cette déclaration soit également communiqué à

26 la Chambre de première instance. J'ai des exemplaires de cette déclaration

27 pour les Juges ici, avec moi. Si la Défense souhaite obtenir l'exemplaire

28 papier signé, ils peuvent l'obtenir sans attendre et s'ils en sont

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1 d'accord, nous communiquerons ce document également à la Chambre de

2 première instance.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Nous allons voir si la Défense est

4 d'accord. Nous procèderons à la communication de ces pièces.

5 Nous allons faire une pause, et nous reprendrons à 15 heures 25.

6 --- L'audience est suspendue à 15 heures 01.

7 --- L'audience est reprise à 15 heures 28.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous sommes en audience publique. Les

9 mesures de protection qui ont été demandées pour le témoin à venir de la

10 part de l'Accusation ont été accordées. Les motifs de cette décision seront

11 présentés à l'oral à un stade ultérieur.

12 Monsieur Re, le pseudonyme de ce témoin sera 23 ou un autre numéro ?

13 M. RE : [interprétation] 60.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] 60, oui en effet, 23, c'est le

15 numéro de comparution. Très bien. Maître Emmerson.

16 M. EMMERSON : [interprétation] Très brièvement, une question en

17 audience à huis clos partiel, si vous me le permettez.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, nous passons à huis clos

19 partiel.

20 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, nous sommes à huis

21 clos partiel.

22 [Audience à huis clos partiel]

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9 [Audience publique]

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

11 [Le témoin introduit dans le prétoire]

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais rappeler aux parties de bien

13 vouloir éteindre leurs micros au moment où le témoin répond à leurs

14 questions.

15 Bonjour Témoin 60, puisque c'est ainsi que je vais vous appeler. En effet,

16 la Chambre a décidé que vous témoigneriez sous pseudonyme et vous

17 bénéficieriez d'une déformation des traits de vos visages et de la voix de

18 manière à ce que personne n'entende votre voix ni ne reconnaisse votre

19 visage à l'extérieur de ce prétoire. Nous vous appellerons, "Témoin 60."

20 Témoin 60, avant que ne débutiez votre contre-interrogatoire, le Règlement

21 de procédures et de preuve exige que vous prononciez une déclaration

22 solennelle selon laquelle vous direz la vérité, toute la vérité et rien que

23 la vérité. Mme l'Huissière vous tend le texte à lire. J'aimerais que vous

24 prononciez cette déclaration.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

26 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez vous asseoir, Témoin 60. C'est

28 d'abord, M. Re qui va vous interroger pour le compte du bureau du

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1 Procureur.

2 Monsieur Re, allez-y.

3 LE TÉMOIN: TÉMOIN SST7/60 [Assermenté]

4 [Le témoin répond par l'interprète]

5 Interrogatoire principal par M. Re :

6 Q. [interprétation] Bonjour, Témoin 60. M'entendez-vous bien ?

7 R. Bonjour à tous et à toutes. Oui, je vous entends bien.

8 Q. J'aimerais d'abord vous montrer une feuille de papier qui porte votre

9 nom et votre prénom ainsi qu'un certain nombre d'informations vous

10 concernant.

11 M. RE : [interprétation] Peut-on repasser peut-être en audience à huis clos

12 ?

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, en général, cette feuille est

14 présentée au témoin et la question à poser est de savoir si ce qui figure

15 sur cette feuille de papier est bien le nom et la date de naissance du

16 témoin. On lui demande ensuite de confirmer ou d'infirmer.

17 M. RE : [interprétation] Non, non, je me demandais seulement s'il fallait

18 que nous passions à huis clos, du fait de ce que l'on voit à l'écran ?

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non, on ne dira rien à l'écran.

20 Cette feuille sera montrée au témoin, c'est tout.

21 M. RE : [interprétation] Très bien.

22 Q. Regardez à l'écran la pièce 1216 --

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, quelle sera la cote

24 de ce document ?

25 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agira de la

26 pièce P37 enregistrée aux fins d'identification.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, et déposée sous pli scellé

28 également.

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1 Le témoin voit-il ce document à l'écran ? Une seconde, Monsieur.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne vois rien.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La voyez-vous maintenant ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

5 M. RE : [interprétation]

6 Q. Est-ce bien vous, ces informations correspondent-elles ?

7 R. Oui, mais l'année de naissance n'est pas la bonne.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons passer à huis clos partiel

9 dans ce cas.

10 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, nous sommes à huis

11 clos partiel.

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19 [Audience publique]

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

21 Veuillez poursuivre, Monsieur Re.

22 M. RE : [interprétation]

23 Q. Témoin 60, où résidiez-vous avez votre famille en janvier, février,

24 mars, avril 1998 ?

25 R. Dans le village de Dasinovac.

26 Q. Quelle est l'appartenance ethnique de votre famille ?

27 R. Serbe.

28 Q. Combien de familles ou de foyers serbes y avait-il à Dasinovac au début

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1 de l'année 1998 ?

2 R. Une dizaine de maisons, peut-être sept, huit maisons serbes.

3 Q. Combien de familles ou de foyers albanais résidaient dans le même

4 secteur à partir de janvier 1998 ?

5 R. Il y en avait pas mal, 200 à 300 maisons, sans doute.

6 Q. Comment décririez-vous la propriété de votre famille à Dasinovac en

7 1998 ? S'agissait-il d'une maison ? D'une ferme ou d'une autre forme

8 d'habitation ?

9 R. Nous possédions huit hectares de terre arable à peu près. Nous avions

10 une maison, des étables. Nous avions du bétail, des porcs, des boeufs, des

11 moutons. Nous faisions pousser du maïs. Nous vivions une vie d'agriculteur.

12 Nous avions aussi des abeilles.

13 Q. Combien de têtes de bétails possédiez-vous, à peu près ?

14 R. Nous avions 30 à 40 bovins, une vache, un cheval, 30 poules, cinq porcs

15 et 20 ruches.

16 Q. Aviez-vous un verger ?

17 R. Nous avions un grand verger avec de nombreux arbres fruitiers, des

18 pommiers, des noisetiers.

19 Q. Qu'en était-il des machines agricoles ?

20 R. Nous avions de vieilles machines que nous n'utilisions plus guère. Nous

21 travaillions la terre manuellement avec l'aide de notre cheval.

22 Q. Depuis quand votre famille possédait-elle cette propriété ?

23 R. D'après ce que je sais, c'est peu à peu après la Seconde Guerre

24 mondiale que mon grand-père s'est installé sur cette terre. Excusez-moi,

25 peu de temps après la Première Guerre mondiale, sans doute peu après 1918.

26 Q. Je vais maintenant vous interroger au sujet des éléments survenus à

27 Dasinovac et dans les environs à la fin de l'année 1997 et début de l'année

28 1998. Connaissiez-vous une organisation qu'on appelait l'Armée de

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1 libération du Kosovo, l'UCK, à cette époque-là ?

2 R. Oui, nous en avions entendu parler, et nous savions qu'il y avait les

3 membres de cette organisation sur notre terrain.

4 Q. Qu'avez-vous entendu dire au sujet de l'UCK et quand en avez-vous

5 entendu parler pour la première fois ?

6 R. Nous en avons entendu parler pour la première fois entre 1997 et 1998 à

7 une époque où ils arrêtaient les gens sur les routes et on a commencé à

8 beaucoup parler d'eux. Il y a eu des attaques contre la police qui ont

9 commencé également. Il y a un poste de police non loin de notre maison.

10 Nous avons été au courant de l'action de ce groupe.

11 M. EMMERSON : [interprétation] Excusez-moi d'interrompre. J'aimerais

12 rappeler à M. Re que lorsqu'il demande au témoin des éléments de cette

13 nature, il devrait identifier la source de ce genre de renseignements.

14 M. RE : [interprétation] C'est la question que je m'apprêtais à poser

15 d'ailleurs.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, écoutons la question.

17 Veuillez poursuivre.

18 M. RE : [interprétation]

19 Q. Je voudrais que vous soyez un peu plus précis au sujet des sources des

20 renseignements dont vous venez de faire état. Vous avez dit que vous aviez

21 entendu parler de groupe au moment où il a commencé à gens sur les routes.

22 Qu'est-ce que vous avez attendu à leur sujet exactement et qui vous l'a

23 dit ?

24 R. Au printemps de 1978 ou 1979, ils ont arrêté Dragoslav Stojanovic par

25 exemple, qu'ils recherchaient. Ils lui ont fait subir des exactions avant

26 de le relâcher. C'est lui qui me l'a dit personnellement. C'est de cette

27 façon que j'ai su qu'il avait été intercepté.

28 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Peut-on vérifier l'année ?

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1 M. RE : [interprétation]

2 Q. Vous venez de dire, en tout cas c'est ce que les interprètes nous ont

3 dit, "1978 ou 1979". C'est bien ce que vouliez dire ?

4 R. Non, excusez-moi, 1977. Enfin, je voulais dire entre 1977 et 1978.

5 Q. Ne pensez-vous pas à 1997 et 1998, plutôt ?

6 R. Oui.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a dix ans, et non il y a 30 ans.

8 C'est bien cela ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'était il y a à peu près dix ans.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

11 M. RE : [interprétation]

12 Q. En dehors du fait qu'ils ont intercepté Dragoslav Stojanovic, avez-vous

13 entendu dire que l'UCK avait intercepté d'autres personnes également ?

14 R. D'après mon souvenir, non.

15 Q. Avez-vous vu de vos yeux des membres de l'UCK intercepter qui que ce

16 soit avant le mois d'avril 1998 ?

17 R. Non, je n'ai vu personne.

18 Q. Que savez-vous de l'attaque du poste de police de Rznic, éventuellement

19 par l'UCK ? Savez-vous quand cette attaque a eu lieu ? Est-ce que vous y

20 avez assisté personnellement ? Est-ce que vous en avez entendu parler ? Si

21 oui, qui vous en a parlé et qu'avez-vous entendu ?

22 R. J'en ai entendu parler au printemps de 1998. Il en était pas mal

23 question, et la presse a écrit des articles à ce sujet. La télévision a

24 également mentionné ce fait.

25 Q. En janvier, février et mars 1998, que saviez-vous personnellement d'une

26 éventuelle présence de l'UCK dans la zone de Dasinovac ?

27 R. On racontait qu'ils se trouvaient à Glodjane, qu'ils avaient là-bas un

28 quartier général. En dehors d'attaques contre la police, il y a eu cette

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1 interception de Dragoslav dont j'ai déjà parlé, mais personnellement, je ne

2 les ai pas rencontrés, je ne les ai pas vus du tout.

3 Q. Que disaient les gens au sujet de la présence éventuelle de l'UCK à

4 Gllodjan, avec un quartier général de l'UCK là-bas ? Je sais que pas mal de

5 temps s'est écoulé depuis, mais essayez d'être aussi précis que possible.

6 R. En mars dans mon village et les villages environnants, les gens

7 commençaient à partir parce qu'ils avaient peur de l'UCK. Ils avaient peur

8 parce qu'il y avait pas mal de voitures qui circulaient dans nos villages

9 de nuit. D'ailleurs à ce moment-là, la police ne venait même plus dans nos

10 villages.

11 Q. Comment avez-vous su que les personnes qui partaient, partaient par

12 crainte de l'UCK ? Sur quoi fondez-vous cette affirmation ?

13 R. La peur régnait. D'ailleurs, ils ont même essayé de nous convaincre de

14 partir. Mais mon père était malade à ce moment-là. D'ailleurs, il est

15 décédé un peu plus tard, le 8 avril. Pour cette simple raison, puisque nous

16 étions très occupés par la maladie de mon père, nous avons ignoré toutes

17 les rumeurs qui circulaient. Nous avions de très bons rapports avec nos

18 voisins dans notre village.

19 Q. Vous avez dit que la terreur régnait. Est-ce que vous pourriez dire aux

20 Juges de la Chambre en quoi résidait cette peur ? Quelle était la source de

21 cette peur ? Pourquoi est-ce que les gens avaient peur ? Qu'est-ce qui leur

22 faisait peur ?

23 R. Ils avaient peur de la présence de l'UCK là où nous habitions, parce

24 qu'il y avait de fréquentes attaques contre le poste de police, et je ne

25 sais pas, moi. Nous aussi avions peur. Mais nous sommes restés tout de même

26 assez longtemps dans notre village.

27 Q. Ils avaient peur de quoi ?

28 M. EMMERSON : [interprétation] C'est la troisième fois que M. Re demande au

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1 témoin d'exprimer une opinion sans aucun fondement pour les questions qu'il

2 pose. J'hésitais à interrompre, mais je pense qu'il n'est pas acceptable

3 que de telles questions soient posées au témoin si elles ne sont pas

4 fondées. Si l'on peut demander au témoin la source des renseignements dont

5 il dispose, il n'est pas acceptable de lui demander son avis dans ces

6 conditions, son avis personnel.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, ce que vient de dire Me

8 Emmerson est tout à fait exact. J'ai laissé vos questions se dérouler

9 quelques temps pour voir quelle serait la question suivante qui,

10 éventuellement réglerait le problème. Mais cela n'a pas été le cas,

11 veuillez poursuivre.

12 M. RE : [interprétation]

13 Q. De quelles personnes parlez-vous, ces personnes qui avaient peur ?

14 R. A l'époque, quelqu'un attaquait une maison, et d'autres ont dit que

15 c'était à cause de la présence de l'UCK à Glodjane. Une grenade a été jetée

16 sur une maison qui se trouvait non loin de l'école du village, pratiquement

17 au cœur même du village. La maison de Malesa Culafic.

18 Q. Les maisons de qui étaient attaquées ?

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, il faudrait que vous vous

20 efforciez d'obtenir d'abord de la bouche du témoin la source du

21 renseignement qu'il vous donne de façon à ce que les Juges sachent de quoi

22 il parle.

23 Monsieur le Témoin, comment avez-vous appris que la maison de Malesa

24 Culafic avait été attaquée ?

25 M. EMMERSON : [interprétation] Excusez-moi, mais je pense que peut-être

26 nous devrions déterminer le nom exact, car ce n'est pas le nom que j'ai

27 entendu pour ma part. Il serait peut-être bon de vérifier.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

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1 Monsieur Re.

2 M. RE : [interprétation] Je vais tirer ce problème au clair.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Tirez ce problème au clair, et

4 revenez peut-être sur ce que le témoin vous a dit en affirmant, je cherche

5 ce qu'il a dit exactement en affirmant "Qu'ils avaient même essayé de les

6 contraindre à partir." Nous ne savons pas qui est ce "ils."

7 M. RE : [interprétation]

8 Q. Monsieur le Témoin, à qui appartenait la maison qui a été attaquée à

9 Ratis ? Je vous demande simplement le nom ?

10 R. Malesa Culafic.

11 Q. Est-ce que vous en avez entendu parler ou est-ce que vous l'avez vu ?

12 R. Les voisins sont venus chez nous, et ils nous l'ont dit. C'était au

13 début. Ensuite, je suis allé voir sur place ce qui s'était passé pour

14 essayer de proposer mon aide, si la famille en question avait besoin

15 d'aide. Mais dès après cet incident, la famille était partie. Elle a quitté

16 le village.

17 Q. Etait-ce une famille serbe ou une famille albanaise ?

18 R. C'était une famille serbe.

19 Q. Vous a-t-on dit qui avait attaqué cette maison à l'aide d'une grenade ?

20 R. Ce qu'on disait, c'est que quelqu'un avait attaqué la maison, mais on

21 ne savait pas exactement qui. Dans les journaux, il a été question d'une

22 attaque terroriste visant une maison. C'est tout.

23 Q. Il y a quelques instants, vous avez dit qu'une grenade avait été lancée

24 sur la maison. D'où tenez-vous ce renseignement ?

25 R. J'ai entendu l'épouse de Malesa Culafic qui l'a dit. Elle a dit qu'une

26 grenade avait d'abord été lancée sur l'arrière de la maison, et qu'ensuite

27 on avait tiré au mortier sur la maison et qu'elle était restée en vie par

28 miracle.

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1 Q. Page 31 du compte rendu de l'audience d'aujourd'hui, vous avez dit :

2 "Au mois de mars des gens de notre village et des villages avoisinants ont

3 commencé à quitter la région par crainte de l'UCK. Les gens avaient peur,"

4 avez-vous dit.

5 Voici la question que j'aimerais vous poser : quelles sont les

6 personnes qui ont quitté ces villages et comment savez-vous qu'ils sont

7 partis ?

8 R. Ce sont les Serbes qui quittaient les villages. La première famille qui

9 est partie a quitté le village de Ratis, c'était la famille Culafic

10 justement; après quoi les Stijovic sont partis; et peu à peu les Serbes

11 sont pratiquement tous partis. Ils ont quitté mon village et les villages

12 environnants.

13 Q. Page 31 du compte rendu d'audience un peu plus bas, vous avez dit : "La

14 peur régnait. Ils ont même essayé de nous convaincre de partir."

15 Je vous ai posé la question suivante : "Comment saviez-vous que

16 toutes ces personnes sont parties par crainte de l'UCK ?" Vous avez répondu

17 : "La peur régnait. Ils ont même essayé de nous convaincre de partir, mais

18 mon père était malade à l'époque."

19 Qui a essayé de vous convaincre de partir et qu'ont fait ces

20 personnes qui ont essayé de vous convaincre de partir ?

21 R. Ils essayaient de nous convaincre, nous les Serbes, de partir. Ils

22 disaient qu'il était risqué de rester là où nous étions après l'attaque de

23 la maison des Culafic, ensuite Slobo Prascevic, un ancien policier, a subi

24 une attaque du même genre et Pavle Djukic est parti après cela, ainsi

25 qu'une autre famille. Ils nous disaient : Il n'est pas sûr de rester ici,

26 vous voyez que toutes sortes de choses sont en train de se passer, il

27 serait sans doute préférable que vous trouviez un endroit plus calme pour

28 habiter.

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1 Q. Mais qui a essayé de vous convaincre de partir ? Qui vous a dit qu'il

2 serait plus sûr d'aller habiter ailleurs ?

3 R. Des voisins serbes de notre village et des villages avoisinants.

4 Q. Vous venez de parler d'une attaque visant la maison des Culafic.

5 J'aimerais que vous disiez aux Juges de la Chambre ce que vous savez à ce

6 sujet et dans quelles conditions vous l'avez appris, ou plutôt, d'abord

7 dans quelles conditions vous l'avez appris et ensuite ce vous saviez.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, le témoin vient de nous

9 dire qu'il en a entendu parler par des voisins d'abord, et qu'ensuite il

10 est allé dans la maison lui-même où il a entendu quelqu'un lui parler de la

11 grenade. Je pense que le témoin en a déjà dit pas mal et que la source est

12 tout à fait claire.

13 M. RE : [interprétation] Excusez-moi, mais le nom n'était pas le même.

14 C'est bien le même nom ?

15 M. EMMERSON : [interprétation] C'est le même nom effectivement, c'est la

16 raison pour laquelle j'ai demandé que l'on demande au témoin de répéter le

17 nom.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Re.

19 M. RE : [interprétation]

20 Q. Vous avez ensuite parlé d'une attaque contre la maison de Slobo

21 Prascevic. Je vous pose la même question à ce sujet : qui vous en a parlé ?

22 Qu'avez-vous appris ? Est-ce que vous avez vu cela ? Est-ce que vous étiez

23 présent ? A quel moment cela s'est passé ?

24 R. Je n'étais pas présent. Je n'ai pas vu cela de mes yeux. La seule chose

25 que je sais c'est ce que Pavle Djukic a raconté à ce sujet. Il a dit que

26 cela s'est passé tout près de sa maison et qu'il a vu cinq ou six hommes

27 armés portant une tenue noire, et il a dit avoir reconnu Xhevdet Sadikaj.

28 Ce que je sais à ce sujet est très limité, très, très limité.

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1 Q. Vous a-t-on dit quand cela s'est passé ?

2 M. EMMERSON : [interprétation] Excusez-moi, mais il y a stipulation au

3 sujet du moment où cet incident s'est produit.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, il y avait un ou deux jours de

5 différence après quoi les parties se sont entendues sur l'évènement en

6 question et la date de cet évènement qui, je crois, était une attaque

7 visant une voiture. Si je me souviens bien, la date était le 22 ou le 23

8 mars.

9 M. EMMERSON : [interprétation] Le 2 mars.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le 2 mars, bien. Veuillez poursuivre,

11 Monsieur Re.

12 M. RE : [interprétation]

13 Q. Vous habitiez à Dasinovac avec votre mère, votre père, votre frère et

14 votre belle-sœur en janvier, février, mars 1998 jusqu'au 10 avril 1998,

15 date du décès de votre père. C'est bien cela ?

16 R. Oui.

17 Q. A quel moment votre belle-sœur a-t-elle quitté la maison ?

18 R. Je crois que c'était le 17 ou le 18 avril.

19 Q. Pourquoi a-t-elle quitté la maison ?

20 R. Elle avait des problèmes de santé, donc moi-même et mon frère cadet

21 avons dû l'emmener chez le médecin à Pec.

22 Q. Quelque chose de particulier s'est-il passé lorsque vous êtes allés à

23 Pec, sur le chemin ?

24 R. Oui. A Ljubarda, nous étions en voiture, nous nous dirigions vers Pec,

25 et sur la route, sur la gauche dans un pré il y avait une dizaine de

26 personnes. Une de ces personnes s'est avancée, a brandi un pistolet et a

27 tiré dans notre direction.

28 Q. Vous rappelez-vous quelle était la tenue vestimentaire de ces

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1 personnes ?

2 R. Je ne sais pas. J'ai eu l'impression qu'ils portaient tous des

3 vêtements noirs, mais c'était peut-être parce que j'avais peur que j'ai eu

4 cette impression, je ne sais pas.

5 Q. Etait-ce des hommes, des femmes ou les deux ?

6 R. Non non, c'était un groupe composé uniquement d'hommes.

7 Q. Avez-vous reconnu l'un ou l'autre des ces hommes, connaissiez-vous l'un

8 ou l'autre de ces hommes ?

9 R. Non, personne.

10 Q. Etes-vous restés à Dasinovac après avoir emmené votre belle-sœur à

11 Pec ?

12 R. Oui, nous y avons vécu jusqu'au 22 ou 23 avril.

13 Q. Que s'est-il passé quelques jours avant le 22 ou le 23 avril ?

14 R. J'ai commencé à craindre pour notre sécurité. Nous n'avions plus aucun

15 voisin serbe dans les environs, je suis allé m'enquérir dans le village de

16 Dasinovac, mais personne n'a voulu sortir de chez lui pour parler avec moi.

17 Je n'ai rencontré que des femmes et des enfants. Le même jour, Isuf

18 Sadikaj, un voisin, est venu me voir. Il m'a dit : Je sais par les voisins

19 que tu m'as cherché, je ne peux rien te dire. Simplement, restez chez vous

20 à la maison. Ne prenez pas la route pour Decani parce que la route est

21 contrôlée par les gens de Glodjane.

22 Quand j'ai demandé qui contrôlait cette route, qui étaient ces gens,

23 il m'a dit : N'ayez crainte, restez chez vous à la maison, c'est nous qui

24 nous occuperons de vous.

25 Q. Lorsque vous l'avez entendu parler de "ces gens de Gllogjan",

26 qu'avez-vous compris exactement ?

27 R. Je n'ai pas cessé de l'interroger. Je lui ai dit : Qui sont ces gens ?

28 Il m'a répondu : Arrête, ne pose pas de questions. Restez chez vous à la

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1 maison, ne sortez pas de la maison, en aucun cas ne prenez la route de

2 Decani.

3 Q. Mais ces gens de Gllogjan, en dehors de ce que ce voisin vous a dit,

4 d'après vous, qui étaient ces gens de Gllogjan ? Qu'est-ce que vous avez

5 compris ?

6 R. J'ai pensé que dans tous les cas il était plus sûr de lui obéir parce

7 qu'il était venu en disant en quelque sorte qu'il était un dirigeant du

8 village. Donc j'ai pris au sérieux ce qu'il a dit. Je suis rentré à la

9 maison, nous n'avons même pas fait la moindre tentative pour quitter notre

10 maison ou notre propriété.

11 Q. Vous avez dit il y a un instant que quelques jours avant le 22 ou le 23

12 avril, "vous avez commencé à vous inquiéter pour votre sécurité." Pour

13 quelle raison avez-vous commencé à vous inquiéter? Quelles étaient vos

14 craintes ?

15 R. Ma maison se trouve dans une rue étroite, et tout près de notre maison

16 il y a un relief et une route qui part de Dasinovac vers le village de

17 Bardonici. Nous avons commencé à voir des hommes en armes circuler sur

18 cette route, et la nuit il n'y avait pas mal de voitures qui passaient à

19 toute vitesse, de sorte que nous n'avons même pas essayé de les approcher

20 ou d'entrer en contact avec eux.

21 Q. Pourriez-vous décrire ces hommes en armes qui circulaient sur la

22 route ?

23 R. C'était - comment est-ce que je pourrais dire ? C'est assez loin de la

24 maison mais quand même on les voyait, on voyait des groupes quelquefois

25 composés de deux hommes, quelquefois de trois hommes et on voyait qu'ils

26 portaient un fusil sur l'épaule.

27 Q. Quelle était leur tenue vestimentaire ?

28 R. J'ai eu l'impression qu'ils étaient toujours vêtus de noir. Mais enfin,

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1 avec la distance je vous dirais que je ne pouvais pas voir le moindre

2 détail de ce qu'ils portaient sur eux.

3 Q. Etait-ce pour vous quelque chose de courant ou quelque chose

4 d'inhabituel de voir des hommes en armes circuler non loin de votre maison

5 avec un fusil ?

6 R. Je vous dirais que je ne pouvais pas voir le moindre détail de qu'ils

7 portaient sur eux.

8 Q. Etait-ce pour vous quelque chose de courant ou quelque chose

9 d'inhabituel de voir des hommes en arme circuler non loin de votre maison

10 avec un fusil ?

11 R. C'était inhabituel parce qu'il y a très peu de chasseurs dans ce

12 village. D'ailleurs la majorité des chasseurs étaient Serbes, même s'il y

13 avait quelques chasseurs Albanais. Mais ces hommes-là étaient inconnus dans

14 la région.

15 Q. Pourquoi est-ce que cela a suscité la peur chez vous ?

16 R. Nous avons commencé à ressentir de la peur à cause de tout ce qui était

17 en train de se passer chez nous, l'attaque contre la maison de Slobo

18 Prascevic, et ce qui s'était passé à Ratis, ce n'est pas loin de ma maison.

19 Puis ces hommes et mon voisin Sufak [phon] qui m'a dit ce qu'il m'a dit.

20 Ses paroles m'ont tout de même pas mal effrayé. Donc nous avons commencé à

21 ressentir une peur assez intense.

22 Q. J'aimerais vous demander de préciser de quel mot vous parlez lorsque

23 vous avez dit "les mots prononcés par notre voisin."

24 R. Je parle des paroles prononcées par Isuf Sadikaj. Je vais répéter, il a

25 dit : Ne sortez pas de votre maison, restez dans votre maison, nous allons

26 nous occuper de vous.

27 Q. Connaissiez-vous ou avez-vous reconnu l'un ou l'autre de ces hommes qui

28 passaient non loin de votre maison une arme à la main ?

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1 R. Non.

2 Q. Savez-vous d'où venaient ces hommes ou où ils allaient, pour quelle

3 raison ils circulaient sur cette route ?

4 R. Non. Ils étaient là simplement comme s'ils patrouillaient entre le

5 cimetière disons, et la direction de Bardonici que je pouvais voir de chez

6 moi. Ils arpentaient ce secteur à de nombreuses reprises, et je les ai vus

7 souvent.

8 Q. Que s'est-il passé le 22 avril 1998 ? Etiez-vous chez vous à la

9 maison ?

10 R. Oui.

11 Q. Que faisaient vos voisins ?

12 R. Je ne vois pas très bien ce que vous voulez dire.

13 Q. Y avait-il quelqu'un qui s'appelait Nrec Hajdare ou Gjon Hajdare ?

14 R. Oui. Ce sont nos voisins les plus proches.

15 Q. Les avez-vous vus faire quelque chose de particulier ? Si oui, que

16 faisaient-ils ?

17 R. Oui. Ce jour-là vers 4 heures, peut-être un peu plus tard, j'ai vu Nrec

18 Hajdare, accompagné de Gjon Hajdare sortir de la cave de leur maison avec

19 une grosse mitrailleuse. Il y avait un troisième homme avec eux vêtu de

20 noir et portant un couvre-chef noir. Ce troisième homme avait l'air de se

21 hâter et Gjon lui a demandé de ralentir. Il l'a tiré en arrière en lui

22 disant : Ecoute, tu n'as pas besoin d'aller si vite.

23 Quelque temps plus tard, nous avons entendu une quatrième voix,

24 quelqu'un qui disait : Ne faites rien si je ne vous en donne pas l'ordre.

25 Quelqu'un d'autre, à ce moment-là, a pris la parole et a

26 dit : Allons-y, nous allons tous les intercepter, nous allons tous les

27 capturer et les tuer. Allons-y.

28 Quelques instants plus tard, j'ai entendu comme un coup de feu

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1 étouffé, comme un coup tiré par un fusil à pompe assez sourd. J'ai vraiment

2 commencé à avoir peur pour ma famille et mon voisin. J'ai demandé à tout le

3 monde de prendre la direction de la forêt pour se mettre à l'abri. La peur

4 à ce moment-là était très intense au moment où le coup de feu a été entendu

5 et de nombreuses personnes ont pris le chemin de notre maison.

6 Q. Revenons sur vos derniers propos un instant. Vous avez

7 dit : "Nous allons tous les capturer et tous les tuer." D'après vous, de

8 qui s'agissait-il lorsque vous avez entend cela ?

9 R. Nous étions là, la famille, le voisin, nous étions les seuls Serbes, je

10 pense qu'ils pensaient probablement à nous.

11 Q. Qui étaient ces nombreuses personnes qui se dirigeaient vers chez vous

12 ?

13 R. Des Albanais. Il y avait même certains de nos voisins, mais je n'ai vu

14 aucun de mes voisins avec des armes.

15 Q. Y avait-il des gens dans ce groupe qui portaint des armes ?

16 R. Oui, il y avait des gens avec des armes, des armes à canon long. Il y

17 en avait quelques-unes sur les gens de ce groupe.

18 Q. Que portaient-ils ?

19 R. Certains portaient des parties d'uniforme et d'autres des vêtements

20 civils; le haut étant une veste de camouflage et le bas en pantalons

21 civils. Certains étaient habillés de noir. Comme j'avais très peur, ils

22 m'ont paru très, très nombreux. Nous étions très apeurés, et nous sommes

23 partis nous réfugier dans les bois.

24 Q. Quand vous dites "nous", vous parlez des membres de votre famille ?

25 R. Oui, des membres de ma famille et mon voisin qui était là avec son

26 épouse et son enfant d'un an. Ils étaient chez nous pour nous rendre visite

27 au moment où tout ceci est arrivé.

28 Q. Connaissiez-vous ou avez-vous reconnu l'un quelconque de ces hommes

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1 armés ?

2 R. Non, pas le moindre.

3 Q. A quelle distance se sont-ils approchés de votre famille avant que vous

4 décidiez de fuir, de courir vers les bois pour y trouver refuge ?

5 R. Croyez-moi, nous avions très peur, et ce n'est pas sur ce genre de

6 chose que je m'arrêtais. Mais dès que nous avons entendu les coups de feu,

7 nous avons couru vers les bois pour nous y abriter.

8 Q. Pouvez-vous nous donner une estimation du nombre de gens qui

9 constituait ce groupe et combien vous ont paru armé ?

10 R. C'était un groupe assez important. Il m'est difficile de dire de

11 combien de personnes il s'agissait. J'avais trop peur. Je ne pensais pas à

12 cela, je n'arrivais même pas à regarder derrière moi pour voir ce qui se

13 passait dans la maison. Nous avons fini par arriver à ce bosquet près de

14 chez nous, et nous y avons passé toute la nuit. Autour de ce bosquet, on

15 entendait des voix qui s'exprimaient en Albanais et qui riaient. On a même

16 entendu quelqu'un s'approcher de chez nous en voiture, tourner, et ce genre

17 de chose, et des bruits également.

18 Q. Parliez-vous l'albanais et pouviez-vous lire et écrire en Albanais à

19 l'époque.

20 R. Oui. A l'époque je parlais l'Albanais assez couramment, et j'étais

21 capable de lire en albanais et d'écrire en albanais.

22 Q. Est-ce que c'est là que vous et votre famille et vos voisins avez dormi

23 cette nuit-là ?

24 R. Nous avons passé toute la nuit dans les bois. Il faisait extrêmement

25 froid, et le petit bébé pleurait. Le père du bébé a même essayé de

26 l'étouffer à un moment donné, mais nous avons réussi à l'en empêcher. Nous

27 avons essayé d'aller vers les bois vers Ratis, mais tout au bout du bois,

28 nous nous sommes rendu compte qu'il y avait des hommes qui se tenaient

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1 debout et qui étaient en train de fumer. Il y en avait trois ou quatre, ce

2 qui nous a fait changer d'avis et faire demi-tour pour revenir là où nous

3 étions juste avant. Nous avons passé toute la nuit dans les bois, et à

4 l'aube à peu près, nous avons décidé de rentrer à la maison et de voir ce

5 qui était arrivé.

6 Q. Qu'est-il arrivé lorsque vous êtes rentré chez vous ?

7 R. Une fois revenus à la maison, nous nous sommes rendu compte que

8 personne n'était entré chez nous la veille. Nous y sommes restés. Ma mère

9 nous a fait du café, mais à un moment donné nous avons manqué de bois. Ma

10 mère a dit : Je vais sortir chercher du bois. Je lui ai dit: S'il te plaît,

11 ne sort pas. C'était l'aube déjà, il faisait jour, et je lui ai dit : Ne

12 sort pas, quelqu'un risque de te voir. Elle a répondu : Ne t'inquiète pas

13 pour moi, rien ne va m'arriver.

14 Dès qu'elle est sortie, nous avons entendu quelqu'un dire en serbe :

15 Bonjour. A ce moment-là trois de nos voisins sont rentrés èa sa suite.

16 Q. Qui était-ce ?

17 R. Azir Sadikaj a été le premier à rentrer, puis il y a eu Gjon Hajdare,

18 ensuite Fazlija et Qaus -- excusez-moi, pas Qaus, Qamil Romaj [phon]. Ils

19 portaient des vêtements civils. Ils étaient préoccupés et se sont montrés

20 amicaux à notre égard.

21 Q. Etaient-ils armés ?

22 R. Non, aucun n'avait d'armes.

23 Q. Pourquoi sont-ils venus chez vous ?

24 R. Dès qu'ils sont arrivés, ils ont dit : Ecoutez, voisins, la situation

25 est mauvaise, très mauvaise. Ces hommes de Glodjane sont venus et ont pris

26 le contrôle du village, ou plutôt, sont dans le village. Nous avons réussi

27 à les persuader la nuit dernière d'assurer votre sécurité. La situation est

28 très mauvaise, et on dirait qu'il va falloir que vous quittiez le village

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1 sans attendre.

2 Q. Aviez-vous des armes chez vous ?

3 R. Oui.

4 Q. Vous ont-ils dit quoi que ce soit à propos de ces armes ?

5 R. Oui, ils nous ont dit qu'ils avaient convaincu les hommes de Glodjane,

6 et je dois dire qu'ils utilisaient toujours cette expression: "Ceux de

7 Glodjane ou l'armée de Glodjane." En échange de notre libération, ces

8 hommes exigeaient que nous restituions nos armes et que nous les rendions

9 au milieu du village.

10 Q. Vous dites "ils", mais de qui parlez-vous ? En échange de votre

11 libération, ils ont demandé à ce que vous leur remettiez des armes. Parlez-

12 vous de ces trois voisins ou quelqu'un d'autre ?

13 R. D'après nos voisins, c'est ceux de Glodjane qui avaient exigé que nous

14 remettions nos armes au centre du village.

15 Q. Qu'avez-vous répondu quand ils vous ont dit cela ?

16 R. D'abord, nous avions des préoccupations. Nous leur avons demandé ce qui

17 s'était passé. Pourquoi un groupe d'hommes aussi important s'était

18 précipité vers nous la veille ? Ils ont dit que cela n'avait été que

19 temporaire, qu'ils avait réussi à les calmer rapidement, et que maintenant

20 ils nous autorisaient à partir, et qu'ils étaient même prêts à se porter

21 garant de notre sécurité. Nous pouvions donc quitter le village sans

22 encombre, mais si nous remettions nos armes.

23 Par la suite, ces trois hommes sont partis, et une demi-heure plus tard à

24 peu près, mon frère cadet et moi-même avons enterré un vieux pistolet et un

25 vieux fusil dans le jardin. Lorsque les trois hommes sont revenus, ils ont

26 dit : Dépêchez-vous, nous n'avons pas beaucoup de temps. Ne prenez pas

27 d'objets de valeur avec vous, comme de l'or, de l'argent ou ce genre de

28 chose. Il ne doit rien y avoir dans le coffre de votre voiture, à part les

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1 deux fusils que vous devez remettre au milieu du village, pour que les

2 hommes qui s'y trouvent les voient clairement.

3 Q. Que s'est-il passé ensuite ?

4 R. Nous les avons écoutés. Nous n'avons rien pris de ce qui nous

5 appartenait, à part nos cartes d'identité - je parle de mon frère et de

6 moi. Nous avons mis les deux fusils dans le coffre de la voiture, et ni moi

7 ni mon frère n'avions remarqué alors que mon voisin qui était avec nous

8 avait mis dans le coffre un petit sac qui contenait des affaires pour les

9 bébés, comme des couches et autres choses. Nous les avons suivis jusqu'au

10 village. L'un des voisins, celui qui était devant nous et celui qui était

11 derrière nous, pendant que ma famille et le troisième voisin étaient dans

12 la voiture. Le premier homme avait quelque chose de jaune à la main, on

13 aurait dit une serviette, et il l'agitait en guise de signe de

14 reconnaissance ou quelque chose de semblable.

15 Q. Lorsque votre famille est partie de chez elle ce jour-là, que n'a-t-

16 elle pas pris ?

17 R. Nous avons tout laissé, tout ce qui avions, le bétail, les biens, tout

18 est resté sur place. Je dois dire que mon frère et moi n'avons rien pris

19 d'autre que nos papiers d'identité lorsque nous avons quitté le village.

20 Q. Où êtes-vous allés ensuite avec ces trois voisins dans la voiture de

21 votre frère ?

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10 R. Nous sommes allés de Rausic à Decani, et nous nous sommes rendus au

11 poste de police de Decani pour expliquer tout ce qui nous était arrivé. De

12 Decani, nous sommes ensuite allés à Pec. Nous avons passé deux ou trois

13 jours chez ma sœur avec quelques amis également. Ensuite, nous sommes

14 repartis à Decani et nous avons essayé de trouver un endroit où nous loger

15 dans le voisinage du monastère de Decani.

16 Q. Avez-vous trouvé un endroit où vous loger ?

17 R. Oui. Nous avons trouvé un endroit, un vieux lieu de vacances près de

18 Decani.

19 Q. Pourriez-vous décrire cet endroit brièvement ?

20 R. C'était un camp de vacances ou un lieu de vacances d'une entreprise de

21 Djakovica. Il y avait des bungalows en bois préfabriqués. Il y avait aussi

22 d'autres familles serbes qui s'y trouvaient. Je me souviens même d'une

23 famille musulmane qui y logeait également. Par la suite ils sont partis,

24 mais je ne sais où ils sont allés. Tous les gens qui logeaient dans ces

25 bungalows étaient des Serbes.

26 Q. Pourquoi ces familles serbes se trouvaient-elles là ? Vous ont-elles

27 dit pourquoi elles logeaient dans ces bungalows ?

28 R. Toutes ces familles avaient quitté leurs villages du fait des activités

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1 terroristes qui avaient cours dans notre municipalité à l'époque. Certains

2 d'entre eux étaient arrivés avant nous, d'autres après, mais tous venaient

3 de villages situés dans le secteur dont j'étais originaire. Il y avait des

4 gens de Papracani, de Ratis, de Gornji Ratis, de Dasinovac, et de Ljubarda.

5 Q. Sans nous dire où vous êtes allés, dites-nous simplement pendant

6 combien de temps vous et votre famille êtes restés dans ce lieu de refuge.

7 R. Nous sommes restés à Decani jusqu'en 1999, mais je dois vous dire que

8 nous n'y avions passé que des séjours sporadiques. La plupart du temps,

9 nous étions chez ma sœur à Pec. Je suis également allé à Podgorica; je

10 travaillais sur la côte. J'ai passé beaucoup de temps au monastère aussi

11 parce que j'y travaillais.

12 Q. Si toutefois vous vous en souvenez, quand avez-vous quitté ce lieu de

13 séjour finalement ?

14 R. Je crois que c'était à la mi-juin 1999, tout à la fin de la campagne de

15 bombardement.

16 Q. Quand par la suite êtes-vous retournés voir votre terrain à Dasinovac,

17 alors que vous l'aviez quitté dans les conditions que vous venez de

18 décrire, le 23 avril 1998 ?

19 R. J'y suis retourné pour la première fois en septembre ou plus

20 probablement en octobre de cette même année. J'y suis retourné après avoir

21 demandé à des policiers : Est-ce que c'est sûr d'aller à Dasinovac ? Ils

22 ont répondu : Pourquoi cela ne le serait pas ? Tu peux y aller sans

23 encombres. Donc, mon frère cadet et moi, un voisin, et une femme, nous

24 sommes allés chez nous. Ensuite, nous sommes allés chez eux. Nous avons

25 passé au total une dizaine de minutes dans chacune des maisons. Ensuite,

26 nous sommes repartis.

27 Q. Pourquoi n'y êtes-vous pas retournés avant, soit septembre soit octobre

28 1998 ? Y avait-il quelque chose qui vous en empêchait ?

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1 R. Je dois vous dire qu'à l'époque il y a eu des forts combats. Je ne sais

2 pas comment vous le dire. A de nombreuses reprises, chaque fois que j'ai

3 voulu rentrer chez moi, là où j'habitais de Pec, il y avait des barrages

4 routiers. Parfois, il fallait deux à trois jours avant d'arriver à Decani

5 de Pec.

6 Q. Ces barrages routiers, qui les avait érigés ?

7 R. L'UCK. Il y avait des informations officielles selon lesquelles l'UCK

8 avait attaqué la police et l'armée. Il y avait des tirs. Les gens disaient

9 que la situation n'était pas sûre. Même la police ne nous autorisait pas à

10 aller de Pec à Decani parce que ce site était risqué.

11 Q. Avez-vous vu vous-même ces barrages routiers de l'UCK ou est-ce quelque

12 chose que l'on vous a raconté ?

13 R. Non, je ne les ai jamais vus moi-même ces barrages routiers. Je ne

14 voulais pas prendre de risques tout simplement. Si quelqu'un me dit de ne

15 pas aller quelque part parce que c'est dangereux, je me conforme à ses

16 ordres.

17 Q. Si c'est la police serbe qui vous disait de ne pas emprunter cet axe,

18 n'est-ce pas ?

19 R. Oui.

20 Q. Il y a un instant, vous avez dit qu'il y avait eu de forts combats.

21 Combats entre qui ?

22 R. Entre les terroristes albanais et très probablement la police. Croyez-

23 moi, je n'ai jamais voulu me mêler de ce genre de chose. Je ne suis pas ce

24 type de personne. Je vivais tout à fait paisiblement à Pec au cours de

25 cette période-là.

26 Q. J'aimerais que vous nous décriviez dans quel état vous avez retrouvé

27 votre propriété lorsque vous y êtes retournés en septembre ou en octobre

28 1998 avec votre frère cadet. Qu'avez-vous vu ?

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1 R. Toute la propriété était détruite. Il y avait environ deux hectares sur

2 lesquels nous faisions du blé. La récolte n'avait pas eu lieu. Les écuries

3 et les étables étaient complètement détruites. Je parle de l'étable que

4 nous utilisions pour les moutons, pour les vaches, pour les chevaux.

5 Certaines dépendances avaient été aussi détruites. La maison avait été

6 complètement démolie. Il n'y avait plus ni portes ni fenêtres. Nous n'avons

7 retrouvé aucune de nos possessions personnelles dans la maison. Les outils

8 que nous avions avaient complètement disparu. Le puits avait été détruit.

9 Les arbres avaient été coupés complètement.

10 Q. Votre bétail était-il là ?

11 R. Non. Nous ne l'avons pas retrouvé, aucune tête.

12 Q. Les autres animaux ? Vous avez parlé des chevaux. Vous avez dit que

13 vous aviez une vache, vous aviez cinq cochons, vous aviez des poules.

14 R. Non. Il n'y avait plus rien. Nous n'avions rien retrouvé. L'endroit où

15 il avait les ruches avant était vide. Les étables avaient été détruites. Il

16 ne restait rien du bétail ni des animaux que nous avions avant. Nous

17 n'avons rien retrouvé.

18 Q. Vous avez dit que votre maison avait été entièrement démolie. Pouvez-

19 vous nous décrire la scène que vous avez vue lorsque vous vous êtes rendus

20 sur les lieux ? Qu'entendez-vous par "démolie" ?

21 R. La maison était complètement vide. Il n'y avait qu'un tas de débris

22 dans l'une des pièces. Il n'y avait plus ni portes ni fenêtres. Ils avaient

23 même arraché tous les fils électriques des murs. Il n'y avait plus

24 d'ampoules, il n'y avait plus de prises, il n'y avait plus rien. La maison

25 était couverte de graffitis, UCK et d'autres choses également.

26 Q. Avait-elle encore un toit ?

27 R. Le toit avait été détruit, mais ils n'avaient pas incendié la maison.

28 Il manquait un bout de toit. Le reste du toit était encore là, comme si

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1 quelqu'un avait retiré les tuiles les unes après les autres.

2 Q. Vos effets personnels, vêtements, photos, restaient-ils quoi que ce

3 soit de ce genre ?

4 R. Nous avions tout laissé, nos papiers, les photos de mon père, nos

5 vêtements. Nous n'avons rien retrouvé lorsque nous sommes revenus sur les

6 lieux.

7 Q. Par la suite, n'avez-vous jamais retrouvé quoi que ce soit que vous

8 aviez laissé chez vous le 23 avril 1998 ou aux environs de cette date ?

9 R. Non.

10 Q. Vous avez dit y être retourné pour la première fois en septembre ou

11 octobre 1998, quand par la suite avez-vous pu y revenir ?

12 R. La fois d'après où je suis retourné, c'était en 2001. J'y suis allé

13 accompagner de soldats italiens de la KFOR. Ensuite, nous y sommes

14 retournés en 2003. Nous étions accompagnés de soldats de la KFOR et de la

15 police albanaise.

16 Q. Votre famille possède-t-elle toujours cette propriété ?

17 R. Oui, nous sommes propriétaires, oui.

18 Q. Le jour où vous êtes revenu sur place où vous avez passé, avez-vous dit

19 dix minutes par propriété ? Vous nous avez dit que vous vous êtes rendus

20 dans deux autres en réalité. A qui appartenaient-elles et qui avez-vous

21 vu ?

22 R. Nous sommes allés chez Radun Dabetic d'abord. Sa maison à lui aussi

23 avait été détruite. On y a retrouvé quelques vêtements et des vieux objets.

24 Novak Stijovic, lui aussi, avait une maison là-bas, mais elle était

25 complètement vide et complètement détruite, comme la mienne.

26 Q. J'aimerais que nous parlions d'Adzija Redzaj, excusez ma prononciation,

27 elle n'est peut-être pas très bonne. C'était un de vos voisins. Vous lui

28 avez parlé en 1998 après avoir quitté votre maison ?

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1 R. Après quitté le village en 1998, deux ou trois mois plus tard peut-

2 être, par hasard nous nous sommes rencontrés près de Pec. Nous nous sommes

3 salués. Nous étions en bons termes. Je lui ai demandé de m'accompagner pour

4 prendre un verre. Je lui ai dit : Viens voisin, il y a un café serbe pas

5 loin. Sans réfléchir, il m'a accompagné.

6 Nous nous sommes assis. Je lui ai demandé s'il allait bien, si les

7 membres de sa famille allaient bien. Il m'a dit : Ne me demande rien là-

8 dessus. Je lui ai demandé : Comment cela va dans le village ? Il a

9 répondu : Je ne sais pas. J'ai dû quitter le village comme vous. Je lui ai

10 dit : Pourquoi, qu'est-ce qui est arrivé à notre propriété et à notre

11 bétail ? Il a répondu : Voisin crois-moi, je n'en sais rien. Après ton

12 départ du village un peu plus tard peut-être, Ramush Haradinaj est venu au

13 village. Il a commencé à crier sur Isuf et le reste d'entre nous du

14 village. Il a dit : Pourquoi les avez-vous laissé partir ? Pourquoi sont-

15 ils partis ?

16 Ensuite, je lui ai demandé pourquoi il avait dû partir du village. Il

17 a répondu : Ne m'en parle pas. J'ai dû quitter tout ce que j'avais. J'ai dû

18 quitter le village. J'avais rassemblé tous mes biens dans un seul sac en

19 plastique. Je lui ai demandé : Pourquoi il criait ? Il a répondu : Ne me

20 demande pas. Nous avons eu des problèmes parce que nous vous avons laissés

21 partir.

22 Q. J'aimerais d'abord vous demandez quelque chose s'agissant de Ramush

23 Haradinaj et du fait qu'il ait commencé à crier contre Isuf. Lorsque vous

24 dites Isuf, est-ce que vous parlez d'Isuf Sadikaj ?

25 R. Oui.

26 Q. Vous avez dit, les autres dans le village, pourquoi les avez-vous

27 laissés partir ? Pourquoi sont-ils partis ? Est-ce que Adzija Redzaj vous a

28 dit de qui parlait Ramush Haradinaj lorsqu'il a dit : "Pourquoi les avez-

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1 vous laissés partir ?"

2 R. Non, il a dit simplement qu'il avait hurlé contre Isuf et les autres.

3 Il n'a pas dit précisément pourquoi il avait crié. Il n'a pas dit non plus

4 ce qui s'est produit ensuite. Il a simplement dit que lorsqu'il était venu,

5 il était très en colère. Il avait dit que personne d'autre ne devait partir

6 soit de notre village, soit des villages environnants.

7 Q. Il y a un moment, vous avez dit qu'il avait dit : Ne me demande rien.

8 J'ai dû laisser derrière moi tous mes biens et quitter le village. Là vous

9 parliez de qui, de votre ami Adzija Redzaj, qui vous aurait dit : Ne me

10 demande rien, ne me pose pas de questions. C'est lui qui vous a dit cela ?

11 R. Oui, c'est ce que Adzija m'a dit, oui.

12 Q. Avez-vous, à un moment quelconque de votre vie, rencontré Ramush

13 Haradinaj?

14 R. J'ai été à l'école primaire pendant quatre ans à Rznic, et son père

15 avait une boutique à 200 mètres à peu près de l'école. J'y allais souvent.

16 Son père s'appelait Hilmi, si je me souviens bien, Hilmi. C'était un vieux

17 très gentil. Nous allions chez lui dans son magasin pratiquement tous les

18 jours. Il est possible, je pense que c'est quelque chose qui se passait en

19 réalité. Son fils venait aussi au magasin, Ramush Haradinaj. J'étais très

20 jeune à l'époque et je ne faisais pas attention. Je pense le connaître

21 depuis que j'ai été à l'école à Rznic.

22 Q. A votre avis, quand pour la dernière fois l'avez-vous vu en personne ?

23 R. Je ne m'en souviens pas. J'avais peut-être 14 ou 15 ans à l'époque. Je

24 ne sais pas.

25 Q. J'aimerais vous poser des questions sur - un instant s'il vous plaît -

26 Milos Radunovic. Connaissez-vous cet individu ?

27 R. Oui, oui, c'est un voisin qui vivait à Dasinovac, à un kilomètre de

28 chez moi peut-être.

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1 Q. Quand l'avez-vous vu pour la dernière fois ce Milos Radunovic ?

2 R. La veille de mon départ de chez moi.

3 Q. Où l'avez-vous vu ?

4 R. Il est venu après 3 heures pour me voir, chez moi. Après 3 heures, un

5 moment donné pour me voir, moi et ma famille.

6 Q. Il est resté combien de temps ?

7 R. Entre 30 et 45 minutes, je dirais.

8 Q. Comment se déplaçait-il ?

9 R. Il avait un vélo.

10 Q. Après ces 30 ou 45 minutes, où est-il allé ?

11 R. Il a dit qu'il allait voir Slobodan Radosevic.

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1 Q. Qu'avez-vous entendu dire s'agissant de ce qui était arrivé à Milos

2 Radunovic --

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Attendez, Monsieur Re, nous allons

4 passer en audience à huis clos partiel.

5 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous y sommes.

6 [Audience à huis clos partiel]

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24 [Audience publique]

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, de combien de temps vous faut-il,

26 Monsieur Re ?

27 M. RE : [interprétation] Je dirais environ 15 minutes. Il faudrait qu'au

28 cours de ces 15 minutes, nous procédions à l'enregistrement pour

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1 identification de certaines pièces.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, effectivement. J'aimerais que vous

3 en ayez terminé en 10 minutes à peu près, que nous fassions la pause, et

4 qu'après la pause nous permettions à la Défense de mener à bien le contre-

5 interrogatoire du témoin. Veuillez poursuivre.

6 M. RE : [interprétation]

7 Q. Qu'avez-vous entendu dire s'agissant de ce qui était arrivé à Milos

8 Radunovic ?

9 R. Entre Dasinovac et Decani, le jour où je suis parti de chez moi,

10 Xhevdet Sadikaj et moi-même sommes allés jusqu'à Rausic ensemble. Xhevdet

11 m'a dit que des gens de Decani avaient attrapé Miroslav Radunovic au moment

12 où il passait devant chez moi en bicyclette. Ils l'ont fait descendre de

13 son de vélo. Ils lui ont demandé : où étais-tu ? Nous t'avons cherché.

14 Xhevdet a dit que lui et son père avaient essayé d'aider Milos, mais qu'ils

15 les avaient écartés et qu'ils leur avaient dit de ne pas s'en mêler, que

16 cela ne les regardait pas. Ils se sont ensuite dirigés vers la maison de

17 Milos. Ils ont ouvert le coffre de la voiture. Ils ont dit à Milos :

18 Qu'est-ce que tu peux nous raconter ? Ce sont des armes que nous avons

19 trouvées chez Milos Radunovic. Ensuite, Xhevdet a dit qu'ils avaient dit :

20 Mous allons maintenant attraper Slobo. Ils sont allés chez Slobo Radosevic.

21 Ensuite, Xhevdet a dit qu'il avait entendu des tirs, mais Xhevdet a dit

22 ensuite que 10 à 15 minutes plus tard il était à l'intersection entre

23 l'endroit où se trouvaient les maisons de Slobo et de Xhevdet et la route

24 de Decani -- en fait la route qui mène à Decani et la route qui mène à

25 Glodjane, il a dit qu'il avait vu Slobo et Milos qui avaient déjà été faits

26 prisonniers. Milos avait été blessé au bras et ils les emmenaient vers

27 Glodjane.

28 Q. Quand pour la dernière fois - excusez-moi, je retire cette partie de ma

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1 question. Connaissiez-vous Slobodan Radosevic ?

2 R. Oui.

3 Q. Quand l'avez-vous vu pour la dernière fois ?

4 R. Peut-être sept à huit jours avant que je parte du village.

5 Q. Il y a un instant vous avez dit avoir entendu des tirs. J'aimerais

6 savoir très précisément ce que vous avez entendu. Où vous trouviez-vous ?

7 D'où provenaient les tirs et à quelle heure tout ceci s'est-il produit à

8 peu près ?

9 R. C'était la veille de notre départ. Milos était parti avant nous, 10 à

10 15 minutes; après sont départ, il y a eu beaucoup de tirs de la maison de

11 Slobo Radosevic, de cet endroit. Cela a duré environ 10 à 15 minutes. Nous

12 ne savions pas à l'époque ce qui se passait exactement.

13 Q. Qu'est-ce que Xhevdet Sadikaj vous a dit d'autre au sujet de sa propre

14 situation ?

15 R. Xhevdet a dit : Je suis également dans cette armée, mais je ne suis pas

16 d'accord avec ses décisions. Je ne suis pas en faveur d'un tel traitement.

17 Je suis en faveur d'une solution pacifique. Nous allons t'aider à en

18 sortir. Il avait également dit que nous avions Milka et Mika la veille,

19 qu'ils allaient bien et dès qu'il nous aurait amené à Rausic il

20 retournerait pour les aider à sortir du village aussi.

21 Q. Bien. J'y viendrai dans un instant. A quelle armée avez-vous pensé

22 qu'il faisait référence quand il a également dit : Je fais également partie

23 de cette armée, mais je ne suis pas d'accord avec la décision ?

24 R. Il ne m'a pas dit lui-même, mais j'ai compris par moi-même qu'il

25 faisait partie de l'Armée de libération du Kosovo.

26 Q. Qu'est-ce qui vous a permis de déduire cela ?

27 R. C'était la seule armée qu'il y avait dans la région à cette époque,

28 paramilitaire je veux dire, dans ma région.

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1 Q. Vous a-t-il dit quoi que ce soit au sujet d'Isuf Sadikaj ?

2 R. Il a dit : Je me porte garant pour lui, tout ira bien, je suis d'accord

3 avec Isuf. Il n'y a pas eu d'accord entre moi et Isuf Sadikaj mais à part

4 sa promesse, nous ne te ferions pas de mal, que nous devions rester à la

5 maison et que le village s'occuperait de nous.

6 Q. Vous a-t-il dit ou avez-vous pu comprendre quel qu'était le poste de

7 Xhevdet Sadikaj au sein de cette armée ?

8 R. Non. Il n'a rien dit, et je n'ai pas pu en déduire quoi que soit. La

9 seule chose qu'il ait dite, c'est qu'il était là à la place d'Isuf Sadikaj.

10 Isuf Sadikaj est un jeune homme très aimable, de la même génération que

11 moi. Nous nous voyions, et je ne pourrais rien dire de négatif à son sujet,

12 ni maintenant ni à l'époque.

13 Q. D'après ce que vous avez compris, quel était le poste ou la position

14 d'Isuf Sadikaj au sein de cette armée ? Comment avez-vous compris ce qu'il

15 a dit quand il a dit : Je suis là à sa place ?

16 R. Il a dit je suis là à sa place, c'est tout ce qu'il a dit, et croyez-

17 moi, je ne savais pas très bien comment le comprendre.

18 Q. Il y a un moment, vous avez fait allusion - excusez-moi un instant - à

19 Milka et Mika. Qui était-ce ? Seulement leurs noms, s'il vous plaît, rien

20 d'autre. Quels sont les noms à Milka et Mika ?

21 R. Vous voulez que je vous dise leurs noms de famille ?

22 Q. Oui.

23 R. Milka Markovic et Mika Radunovic.

24 Q. Les connaissiez-vous ?

25 R. Oui, je les connaissais.

26 Q. Quand les avez-vous pour la dernière fois ?

27 R. Je ne me souviens pas quand j'ai vu Mika la dernière fois, mais j'ai vu

28 Milka dix jours avant de quitter mon village.

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1 Q. Que vous a dit Xhevdet Sadikaj au sujet des deux, c'est-à-dire quand il

2 les avait vues pour la dernière fois ?

3 R. Il m'a assuré ce jour-là les avoir vues. Il a dit : Je les ai vues

4 hier. Très bien. Je vais essayer de les faire sortir du village aussi. Dès

5 que je te dépose là, je retournerai les chercher, ne t'inquiètes pas au

6 sujet de ces deux personnes. Je suis sûr que je vais me débrouiller.

7 J'ai dit : Alors, qu'en est-il des autres ? Il a répondu : Je ne veux

8 pas te dire, mais dès que je te dépose là, je retournerai chercher ces deux

9 personnes.

10 M. RE : [interprétation] Je voudrais demander un huis clos partiel, mais

11 avant de ce faire, je vais sortir un instant pour demander au témoin de

12 marquer une carte.

13 Q. Avant que nous fassions cela, pourriez-vous éclairer quelque chose.

14 Vous avez parlé de sept ou huit --

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous informer la greffière

16 parce que cela prend un peu de temps de charger une carte sur le prétoire

17 électronique.

18 M. RE : [interprétation] Je vais le faire, il s'agit de la pièce 10.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, très bien, merci.

20 M. RE : [interprétation]

21 Q. Vous avez dit qu'il y avait sept ou huit familles serbes dans votre

22 village. Je vous en demanderai les noms dans quelques instants, mais

23 voulez-vous bien dire très brièvement aux Juges de la Chambre (expurgé)

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27 (expurgé) Tous ceux qui sont restés dans

28 le village n'en sont jamais sortis, les Radunovic et les Radosevic.

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1 M. RE : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait passer à huis clos

2 partiel, s'il vous plaît, et montrer au témoin la pièce P10, s'il vous

3 plaît.

4 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

5 Juges, nous sommes huis clos partiel.

6 [Audience à huis clos partiel]

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26 [Audience publique]

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

28 A vous, Monsieur Re.

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1 M. RE : [interprétation]

2 Q. Témoin 60, après avoir quitté votre maison, avez-vous été à quelque

3 moment que ce soit mobilisé ou avez-vous participé à des opérations

4 policières ou paramilitaires contre des civils albanais ?

5 R. Non.

6 M. RE : [interprétation] J'en ai terminé de mon interrogatoire principal,

7 Monsieur le Président.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

9 M. RE : [interprétation] Nous avons demandé le versement d'une pièce. Est-

10 ce qu'elle doit être versée en bonne et due forme plutôt que de rester

11 enregistrée aux fins d'identification.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, en général, c'est l'étape suivante.

13 Maître Emmerson.

14 M. EMMERSON : [interprétation] Une petite question, si vous me le

15 permettez.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

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22 [Audience publique]

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière. Le conseil

24 de la Défense pourrait-il me dire de combien de temps il aura besoin ?

25 Maître Emmerson -- non, c'est vous, Maître Dixon.

26 M. DIXON : [interprétation] Monsieur le Président, merci. J'aurais

27 certainement besoin du temps qui reste jusqu'à la fin de l'audience

28 d'aujourd'hui, c'est-à-dire jusqu'à 19 heures.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, ce qui signifie que vous aurez

2 besoin d'un peu plus d'une heure ?

3 M. DIXON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'autre conseil ?

5 M. GUY-SMITH : [interprétation] Cinq minutes, si je pose des question,

6 Monsieur le Président.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cinq minutes.

8 Maître Harvey.

9 M. GUY-SMITH : [interprétation] Peut-être aurai-je besoin de sept minutes

10 pour être tout à fait sûr.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

12 M. HARVEY : [interprétation] Je n'aurai sans doute pas de questions en

13 contre-interrogatoire.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

15 Maître Dixon, pourriez-vous peut-être terminer sept minutes avant la

16 fin de l'audience d'aujourd'hui ?

17 M. DIXON : [interprétation] Je vais essayer, Monsieur le Président.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

19 Monsieur Re, page 1 411, vous trouvez la stipulation en ligne 12 par

20 rapport au 2 mars, accord entre les parties concernant la pièce P22. Cela

21 s'est fait en présence de votre collège M. Kearney.

22 Nous faisons une pause jusqu'à 17 heures 45.

23 --- L'audience est suspendue à 17 heures 22.

24 --- L'audience est reprise à 17 heures 47.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Dixon, êtes-vous prêt à contre-

26 interroger le Témoin 60 ?

27 M. DIXON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Témoin 60, vous allez maintenant

Page 2258

1 entendre les questions qui vous sont posées par Me Dixon, conseil de M.

2 Haradinaj, dans le cadre de son contre-interrogatoire.

3 Veuillez procéder, Maître Dixon.

4 Contre-interrogatoire par M. Dixon :

5 Q. [interprétation] Témoin 60, est-ce que vous connaissez un responsable

6 de la MUNIK originaire de Peje, qui s'appelle Luis Perez-Segrini ?

7 R. Oui, je le connais.

8 Q. Il est exact, n'est-ce pas, qu'il vous a rendu visite en l'an 2000 pour

9 vous annoncer que vous aviez été accusé d'avoir infligé à des Albanais le

10 nettoyage ethnique en 1999, n'est-ce pas ?

11 R. Non. Je l'ai rencontré en l'an 2000 dans le monastère de Decani à

12 Visoki. Ce dont vous parlez a eu lieu en 2003 en revanche.

13 Q. Très bien. Alors en 2003, vous a-t-il dit que vous aviez été accusé

14 d'avoir infligé le nettoyage ethnique à des Albanais et que les accusations

15 affirmaient que vous étiez le chef des personnes qui avaient causé

16 l'expulsion des Albanais de la municipalité de Decani ? Ceci est-il exact ?

17 R. Oui, c'est exact.

18 Q. Pourquoi est-il venu vous annoncer cela en 2003 ?

19 R. En 2003, je suis encore une fois allé au monastère de Decani. Dans la

20 période préalable, nous avions eu d'autres discussions. Au moment de la

21 pause, il m'a fait savoir que quelqu'un avait quelque chose contre moi,

22 qu'il y avait des accusations contre moi, mais il ne m'a rien montré, il ne

23 m'a pas montré de document particulier, et il n'y a aucun procès-verbal de

24 tout cela. Il m'en a simplement parlé, et rien d'autre. Il ne m'a pas

25 interrogé. Il ne m'a posé de questions complémentaires. Rien.

26 Q. Vous dites qu'il vous a parlé d'accusations. Vous a-t-il dit quels

27 étaient les chefs d'accusation qui vous étaient reprochés ?

28 R. Non. Il m'a simplement dit qu'il y avait une espèce d'acte d'accusation

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1 contre moi selon lequel je serais la personne la plus importante parmi

2 celles qui auraient commis des actes de nettoyage ethnique dans la

3 municipalité de Decani.

4 Q. Quand il a utilisé l'expression "nettoyage ethnique," vous a-t-il dit

5 exactement de quoi vous étiez accusé, ce que vous étiez accusé d'avoir fait

6 à Decani ?

7 R. Non, il n'a rien dit de très clair ou de très précis.

8 Q. Lui avez-vous demandé sur quoi portaient également ces accusations ?

9 R. Non. J'étais tout simplement certain que je n'aurais jamais pu et que

10 je n'avais pas commis de tels actes, et je ne me suis pas renseigné plus

11 avant. Je lui ai dit que je pourrais lui présenter quelques familles

12 albanaises susceptibles de témoigner que je n'avais rien à voir avec de

13 tels actes.

14 Q. Lui avez-vous demandé quels étaient les Albanais qui portaient de

15 telles accusations contre vous, et ce que contenaient exactement ces

16 accusations ?

17 R. Non, je ne le lui ai pas demandé, parce que je sais tout simplement que

18 ceci n'est pas la vérité. Je n'avais plus envie de m'occuper de cela. Par

19 la suite, j'ai souvent rencontré Luis, qui ne m'a plus jamais parlé de

20 cela. Je suis même allé à la municipalité de Decani pour travailler avec le

21 groupe de travail chargé des retours. J'ai rencontré les Albanais de mon

22 village et des villages environnants, et plus personne ne m'a jamais dit

23 quoi que ce soit à ce sujet. Plus personne ne m'a rappelé quoi que ce soit

24 à ce sujet, et d'ailleurs moi non plus.

25 Q. Ne vous êtes-vous pas rencontrés une nouvelle fois en 2005, et à ce

26 moment-là ne vous a-t-il pas dit qu'un groupe d'Albanais était prêt à

27 confirmer votre participation à des actes de nettoyage ethnique à

28 Dasinovac ?

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1 R. En 2005, il est très probable que je l'aie rencontré, et pas une seule

2 fois mais à plusieurs reprises, mais il ne m'a jamais parlé de cela.

3 Q. Etes-vous en train de dire aujourd'hui que lorsque vous l'avez

4 rencontré en 2005, lors de l'une de vos rencontres en 2005, il ne vous a

5 pas dit qu'il y avait des gens qui étaient prêts à confirmer votre

6 participation à des actes de nettoyage ethnique ?

7 R. Non. En 2003, il a mentionné ce fait une seule fois très brièvement,

8 lors de sa conversation avec moi. Par la suite, il ne m'en a plus jamais

9 rien dit.

10 Q. Je vais essayer de raviver votre mémoire. (expurgé)

11 (expurgé) que ces accusations ont été portées à votre

12 connaissance, n'est-ce pas ?

13 R. Non. Je ne me trouvais pas à cet endroit dont vous venez de donner le

14 nom. Cela ne m'a jamais été dit.

15 M. RE : [interprétation] Avant que mon collègue de la Défense, ne poursuive

16 --

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Re.

18 M. RE : [interprétation] Avant qu'il ne poursuive son contre-

19 interrogatoire, j'aimerais appeler l'attention des Juges sur ce qui figure

20 au compte rendu d'audience.

21 Ligne 71, point 7 -- ou plutôt, point 71.7.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, veuillez poursuivre.

23 M. DIXON : [interprétation]

24 Q. Témoin 60, s'agissant de ce que je vous ai dit, à savoir que vous avez

25 eu avec lui une autre rencontre en 2005 à l'endroit dont j'ai donné le nom,

26 et qu'à ce moment-là un responsable de la MINUK vous avait dit que des

27 témoins étaient prêts à être entendus au sujet de ces accusations de

28 nettoyage ethnique, avez-vous parlé à l'Accusation de cette rencontre quand

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1 vous avez rencontré ces représentants le week-end dernier ?

2 R. J'ai effectivement rencontré Luis, mais vous avez prononcé un nom tout

3 à l'heure, c'est le nom d'un village qui est tout prêt de notre village. Je

4 ne suis jamais allé dans ce village-là. Je dirais même que je n'y ai pas

5 mis les pieds depuis 10 ans. Or, vous dites que j'ai rencontré Luis dans ce

6 village. C'est le premier point.

7 Le deuxième point, sauf ce qui s'est passé en 2003 - c'est Savdija

8 Lata [phon] qui était son interprète, qui est venue avec lui, elle est

9 originaire de Decani, il a mentionné ces faits très brièvement. Il ne m'en

10 a plus jamais parlé par la suite.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Témoin 60, je pense que vous n'avez pas

12 écouté attentivement la question. Me Dixon vous a demandé si vous aviez

13 parlé à l'Accusation de la rencontre que Me Dixon vient d'évoquer lorsque

14 vous avez rencontré les représentants de l'Accusation le week-end dernier ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai dit aux représentants du bureau du

16 Procureur qu'en 2003, quand j'avais rencontré cet homme, il avait fait ce

17 que j'ai déjà dit, à savoir qu'il m'avait très clairement et très

18 brièvement annoncé les choses, mais que par la suite il ne m'en a plus

19 jamais parlé. Je dois ajouter que l'année dernière, j'ai rencontré cet

20 homme trois ou quatre fois, peut-être même cinq fois. A aucun moment, lors

21 d'aucune de ces rencontres, il ne m'a reparlé de cette question.

22 M. DIXON : [interprétation]

23 Q. Témoin 60, je tiens à être tout à fait clair. Etes-vous en train de

24 dire que vous n'avez jamais dit aux représentants du bureau du Procureur

25 hier, c'est-à-dire dimanche, alors que vous avez rencontré les

26 représentants du bureau du Procureur, que vous ne leur avez jamais dit

27 qu'en 2005 vous aviez eu une autre rencontre avec ce responsable de la

28 MINUK qui vous avait dit que des gens étaient prêts à être entendus en tant

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1 que témoins pour confirmer votre participation à des actes de nettoyage

2 ethnique à Dasinovac en particulier ? Est-ce que vous n'avez jamais dit

3 cela aux représentants du bureau du Procureur hier; oui ou non ?

4 R. Il faut que je revienne sur ma réponse pour qu'elle soit tout à fait

5 claire. Hier, j'ai dit au Procureur que j'avais rencontré cet homme en

6 2003/2004, mais plus probablement en 2003. Cela je l'ai dit aux

7 représentants de l'Accusation hier, et pour le reste de votre question, je

8 l'ai oublié. Pourriez-vous la répéter ?

9 Q. Oui, je vais la répéter. En 2005, vous avez rencontré un responsable de

10 la MINUK qui vous a dit que des Albanais étaient prêts à être entendus en

11 tant que témoins pour confirmer votre participation à des actes de

12 nettoyage ethnique à Dasinovac. Etes-vous en train de dire que vous n'avez

13 pas dit cela à l'Accusation lorsque vous avez eu une rencontre avec ces

14 représentants hier, dimanche ? Oui ou non, je vous prie.

15 R. Non, ce n'est pas cela qui s'est passé.

16 Q. D'accord.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Dixon, votre question est

18 composite, il est parfois difficile de répondre à de telles questions par

19 oui ou par non, même si je dois dire que le témoin en ce moment ne répond

20 pas à votre question.

21 Témoin 60, ce que Me Dixon souhaite apprendre de vous, c'est si en dehors

22 du nombre d'autres réunions que vous avez pu avoir avec ce responsable de

23 la MINUK qui vous a dit qu'un groupe d'Albanais était prêt à confirmer

24 votre participation à des actes de nettoyage ethnique contre les Albanais

25 de Dasinovac. La question qui se pose maintenant n'est pas de savoir si ce

26 fait est vrai ou pas. La question c'est de savoir si vous avez dit, que ce

27 responsable de la MINUK vous avait dit cela, aux représentants de

28 l'Accusation le week-end dernier ? Voilà la question qui vous est posée.

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous avez dit aux représentants de

3 l'Accusation qu'un responsable de la MINUK vous avait annoncé qu'un groupe

4 d'Albanais était prêt à confirmer en tant que témoins votre participation à

5 des actes de nettoyage ethnique, que cette accusation soit vraie ou pas.

6 C'est cela que vous avez dit l'Accusation hier ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître Dixon.

9 M. DIXON : [interprétation]

10 Q. Témoin 60, pour que tout soit absolument clair, vous êtes en train de

11 dire en ce moment que vous avez dit à l'Accusation qu'en deux occasions

12 différentes, l'une durant l'année 2003, l'autre durant 2005, vous avez

13 annoncé à l'Accusation qu'un responsable de la MINUK vous avait parlé des

14 accusations de nettoyage ethnique qui étaient proférées à votre encontre ?

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Dixon, la question n'est pas

16 dépourvue d'ambiguïté encore une fois. Vous avez parlé de 2003, ensuite de

17 2005. Et vous dites : Vous avez dit à l'Accusation, on pourrait comprendre

18 que cela a été dit à l'Accusation en 2003 et en 2005. Après vous dites en

19 deux occasions différentes. Il est difficile d'être certains que les dates

20 que vous citez concernent les rencontres avec le représentant de la MINUK

21 ou les rencontres avec les représentants de l'Accusation.

22 M. DIXON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je vais

23 immédiatement faire la clarté sur ce point.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.

25 M. DIXON : [interprétation]

26 Q. Témoin 60, je vous parle de la rencontre que vous avez eue la nuit

27 dernière avec l'Accusation. Est-ce que vous dites en ce moment que lors de

28 cette rencontre vous avez dit aux représentants du bureau du Procureur

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1 qu'en deux occasions différentes, l'une durant l'année 2003, l'autre durant

2 l'année 2005, lorsqu'un représentant de la MINUK est venu vous voir pour

3 vous parler de ces accusations, est-ce que vous avez bien dit aux

4 représentants du bureau du Procureur que vous aviez rencontré ce

5 représentant de la MINUK à deux reprises et qu'il vous avait fait part de

6 ces accusations à deux reprises ? Vous comprenez ma question ?

7 R. Je comprends. Mais apparemment, vous ne me comprenez pas. Je tiens à

8 dire et je l'ai déjà dit très clairement que c'est une seule fois en 2003

9 que le fonctionnaire de la MINUK m'a annoncé cela. A partir de cette date-

10 là, il ne m'en a plus jamais reparlé. C'est ce que j'ai dit hier au

11 représentant du bureau du Procureur; si l'Accusation ne m'a pas bien

12 compris, je présente mes excuses. Mais c'est seulement une fois en 2003 que

13 ce représentant de la MINUK m'a parlé de cela. Depuis, il ne m'en plus

14 jamais reparlé.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Dixon, j'aimerais poser une

16 question d'éclaircissement au témoin. Monsieur le Témoin, lors de cette

17 unique fois dont vous venez de parler, ce responsable de la MINUK vous a-t-

18 il également dit qu'un groupe d'Albanais étaient prêts à témoigner pour

19 confirmer votre participation à des actes de nettoyage ethnique ? Encore

20 une fois, le problème n'est pas de savoir si cela est vrai ou pas. Mais

21 est-ce que c'est en cette seule et unique occasion qu'il vous a parlé du

22 groupe d'Albanais ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, une seule fois.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Y compris le fait qu'il y avait un

25 groupe d'Albanais qu'il y avait un groupe d'Albanais qui était prêt à

26 confirmer votre participation à de tels actes ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Il m'a simplement dit : Nous disposons de

28 renseignements selon lesquels vous seriez impliqué dans tout cela et que

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1 vous étiez sur place, mais il ne m'a pas parlé d'un quelconque acte

2 d'accusation ou d'un quelconque groupe.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître Dixon.

4 M. DIXON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

5 Q. Encore une question au sujet de ces rencontres. Vous avez dit que vous

6 aviez rencontré de la MINUK à plusieurs reprises. Est-ce que vous l'avez

7 interrogé lors de ces réunions multiples pour savoir quelles étaient

8 exactement les accusations qui étaient portées contre vous ?

9 R. Non, non. Je ne lui ai plus jamais posé la moindre question sur ce

10 sujet.

11 Q. Bien. Merci.

12 En 1999, que faisait votre frère aîné ? Je parle bien de votre frère

13 aîné, pas de votre frère cadet. Où travaillait-il ?

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Dixon, est-ce qu'il y a un risque

15 que des éléments susceptibles de permettre l'identification du témoin

16 apparaissent ?

17 M. DIXON : [interprétation] Monsieur le Président, ce serait plus sûr de

18 passer à huis clos partiel, en effet.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Passons à huis clos partiel.

20 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, nous sommes à

21 huis clos partiel.

22 [Audience à huis clos partiel]

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10 [Audience publique]

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

12 Veuillez poursuivre, Maître Dixon.

13 M. DIXON : [interprétation]

14 Q. Vous avez dit vous être retrouvé à ce moment-là dans le secteur de

15 Dasinovac et avoir entendu des bruits de combat. Vous vous rappelez avoir

16 dit cela ?

17 R. J'étais à Dasinovac à ce moment-là. J'ai des fusillades mais je n'ai

18 pas entendu des bruits de combat contrairement à ce que vous venez de dire.

19 Si vous pensez à cette fusillade qu'on a entendue ce jour-là, la veille du

20 jour où j'ai quitté le village, des bris de coups de feu venant de Slobo

21 Radosevic.

22 Q. Non, ce n'est pas de cela que je vous parle, Monsieur le Témoin, je

23 parle de la période située aux environs du mois de septembre 1998 lorsque

24 vous vous trouviez dans le secteur de Dasinovac. Est-ce que vous n'avez pas

25 dit avoir vu dans la région un certain nombre de maisons en feu à ce

26 moment-là ?

27 R. Oui. Des bruits de combat non. Je n'ai entendu aucun coup de feu à ce

28 moment-là, tout était tranquille quand j'étais là-bas. Malheureusement

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1 quelques maisons albanaises devant lesquelles je devais passer étaient en

2 feu.

3 Q. Etaient-elles toujours en feu au moment où vous êtes passé dans cette

4 zone en septembre 1998 ?

5 R. Non, elles avaient brûlé.

6 Q. Avez-vous des forces serbes qu'il s'agisse de police ou d'armée dans le

7 secteur où vous vous trouviez ?

8 R. Non. Au moment de partir, nous nous sommes enquis de la situation de la

9 route qui sortait de Decani pour aller vers notre village et sur ce chemin-

10 là il n'y avait aucun policier, aucune formation officielle. Nous n'avons

11 rien vu de spécial.

12 Q. Lorsque vous avez posé ces questions, est-ce que vous saviez qu'une

13 offensive majeure avait été lancée par les forces serbes dans cette région

14 à la fin du mois d'août, début septembre 1998 ?

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Dixon, puis-je vous demander dans

16 quelle mesure votre question rend finalement compte de la déposition du

17 témoin ? En effet, page 49, ligne -- non c'est un peu plus tôt. Le témoin a

18 dit que c'est un septembre ou en octobre qu'il est retourné et maintenant

19 vous parlez du début du mois de septembre, ce qui nous rapproche du mois

20 d'août plutôt que du mois d'octobre.

21 M. DIXON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je lui demandais

22 simplement si, suite aux renseignements qu'il avait demandés, il savait

23 qu'il savait qu'il y avait eu une offensive serbe en cet endroit.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit, je cite : "Saviez-vous

25 lorsque vous avez posé ces questions," - or, selon ce qu'a dit le témoin,

26 les questions ont été posées juste avant qu'il ne se rende là-bas, je

27 poursuis la citation de votre question "il y avait eu une offensive majeure

28 lancée à la fin du mois d'août, début septembre par les forces serbes ?"

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1 Vous liez deux périodes d'une façon qui risque de créer la confusion dans

2 l'esprit du témoin. C'est page 49, ligne 12. Le témoin a dit, je cite : "Je

3 suis rentré là-bas pour la première fois en septembre ou plus probablement

4 octobre de cette même année."

5 M. DIXON : [interprétation] Monsieur le Président, je pourrais reformuler

6 ma question.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie.

8 M. DIXON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

9 Q. Témoin 60, quand vous êtes allé à Dasinovac en septembre et octobre à

10 peu près, vous dites que vous y avez vu un certain nombre de maisons

11 albanaises qui avaient brûlé ou qui étaient détruites. Avez-vous la moindre

12 information quant aux circonstances dans lesquelles cela s'est passé ?

13 R. Non. Je n'en avais pas et je n'en ai pas cherché. J'ai simplement

14 demandé à trois ou quatre policiers qui se trouvaient à un endroit qu'on

15 appelle Porketare qui est en fait à la sortie de Decani, je leur ai donc

16 demandé si je pouvais aller en toute sécurité jusqu'au village de Dasinovac

17 pour jeter un coup d'œil sur ce qui s'y passait. Ils m'ont dit : Pourquoi

18 pas, il n'y a aucun problème, vous pouvez y aller. Voilà pourquoi j'ai posé

19 ces questions, c'est tout.

20 Q. Merci. J'aimerais maintenant vous ramener au début de l'année 1998.

21 Vous avez dit dans vos déclarations préalables - il n'est pas indispensable

22 à moins que cela le devienne, mais pour l'instant il n'est pas

23 indispensable que ces documents vous soient soumis - donc vous avez dit que

24 vous vous rappeliez qu'un combat assez intense avait eu lieu dans le

25 village de Gllogjan et qu'un policier répondant au nom d'Otovic avait été

26 tué. C'est bien cela ?

27 R. Oui. J'ai effectivement dit cela. Les gens en parlaient pas mal,

28 d'ailleurs on l'a vu à la télévision aussi, et des articles sont parus à ce

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1 sujet dans les journaux. Mais c'est par la télévision que j'en ai entendu

2 parler pour la première fois et après j'ai lu les articles dans les

3 journaux.

4 Q. De façon à ce que nous puissions définir la date de cet événement, je

5 vous demande si ceci concerne les incidents survenus le 24 mars 1998 ?

6 R. Je ne sais pas. Croyez-moi, je ne sais pas à quelle date cela s'est

7 passé.

8 Q. D'accord. Est-ce que vous avez parlé à vos voisins albanais de cet

9 incident et que vous ont-ils dit à ce sujet ?

10 R. Non, je n'ai pas parlé de cela avec mes voisins. Nous ne commentions

11 pas ensemble ce genre de cas.

12 Q. Savez-vous que lors de ce combat intense, comme vous l'avez appelé, un

13 certain nombre d'Albanais ont été tués, que des maisons albanaises ont été

14 incendiées et qu'un certain nombre de villageois de Gllogjan se sont vus

15 contraints de fuir la région ? Est-ce que vous l'avez appris à la lecture

16 de la presse ou par une conversation avec quelqu'un ?

17 R. Non.

18 Q. L'un ou l'autre de vos voisins albanais vous aurait-il peut-être dit

19 qu'ils étaient en train de se procurer des armes pour garantir leur

20 sécurité contre d'autres attaques ultérieures similaires à celles qui

21 avaient eu lieu le 24 mars ou plutôt à ce moment-là à Glodjane dans un

22 village proche ?

23 R. Non.

24 Q. Vous dites donc dans votre déposition que vos voisins ne vous ont rien

25 dit de ce qu'ils faisaient ou de ce qui se passait dans le village ?

26 R. Non. On vivait une vie de paysans. Comme je l'ai déjà dit, mon père

27 était malade à cette époque-là, par la suite il est décédé. Nous n'avions

28 jamais de telles conversations avec les voisins albanais.

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1 Q. Mais vous avez dit que vous vous entendiez bien avec vos voisins

2 albanais. Ne leur avez-vous pas parlé de ce qui se passait dans les

3 environs et dans les villages alentours ?

4 R. Nous parlions très peu de tout cela, mais on ne parlait pas beaucoup

5 d'ailleurs. Nous étions des agriculteurs, nous faisions des travaux de la

6 ferme. Croyez-moi je n'étais, à l'époque, pas très intéressé par tout cela.

7 Sauf qu'il y avait cette peur omniprésente par la suite. Je n'ai jamais

8 posé des questions à ce sujet, pas plus qu'ils ne sont venus ni vers moi

9 pour me poser des questions sur quoi que ce soit de la sorte.

10 Q. Vous avez dit qu'il y avait cette peur. Est-ce que les Albanais dans

11 votre village vous ont dit qu'ils avaient peur de quoi que ce soit à

12 l'époque ?

13 R. Oui, mon voisin immédiat, une dame albanaise qui était la femme de

14 Fazlija, elle s'appelait Mira, elle a dit : Nous avons vraiment peur. Si la

15 police venait dans le village, est-ce que vous nous aideriez ? J'ai dit :

16 Mais oui, bien sûr, certainement. Je vous aiderais. Vous n'avez rien à

17 craindre. Tout va bien se passer.

18 Q. Elle avait peur que les policiers serbes entrent dans le village. Vous

19 a-t-elle dit ce que faisaient les gens dans le village pour essayer

20 d'empêcher que cela ne se produise ?

21 R. Non, non, nous ne parlions pas de cela ou pas plus que nous ne faisions

22 des commentaires sur tout cela.

23 Q. Savez-vous que la personne que vous avez mentionnée --

24 M. DIXON : [interprétation] Peut-être faudra-t-il que nous passions à

25 huis clos partiel à nouveau, s'il vous plaît ?

26 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

27 Juges, nous sommes à huis clos partiel.

28 [Audience à huis clos partiel]

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12 [Audience publique]

13 LE TÉMOIN : [interprétation] J'avais des armes de chasse.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

15 Veuillez-vous répéter la question, s'il vous plaît.

16 M. DIXON : [interprétation]

17 Q. Quelles armes aviez-vous chez vous ?

18 R. Des armes de chasse et un vieux pistolet qui appartenait à mon père.

19 Q. Est-ce que vous aviez une arme automatique chez vous dans votre

20 maison ?

21 R. Non, il y avait un fusil semi-automatique, mais c'était un fusil

22 uniquement destiné à la chasse. Cette arme à l'époque avait appartenu à mon

23 père.

24 Q. Vous aviez une arme semi-automatique et un pistolet. Les deux étaient

25 utilisés pour chasser avez-vous dit ?

26 R. J'avais un fusil semi-automatique et fusil à canon scié. Je ne sais pas

27 comment l'expliquer. Tout ceci était utilisé pour la chasse. Le pistolet

28 était juste exposé dans la maison comme une sorte de trophée.

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1 Q. Vous avez dit dans votre déposition le 22 avril que la veille de votre

2 départ, vous avez vu deux de vos voisins, les Hajdare sortir une arme

3 automatique de leur cave. Vous avez dit que cela s'est produit vers 16

4 heures dans l'après-midi; est-ce exact ?

5 R. C'est exact.

6 Q. Vous avez dit qu'il y avait deux autres hommes avec eux; est-ce exact ?

7 R. Un homme, il y avait d'autres gens à une certaine distance, peut-être

8 20 ou 30 mètres, mais debout tout à côté d'eux, il n'y avait qu'un homme

9 habillé en noir avec une cagoule sur la tête.

10 Q. Vous avez dit que vos deux voisins et que cet homme habillé en noir

11 étaient debout ensemble. Est-ce qu'ils se parlaient ? Est-ce qu'il y avait

12 une conversation entre eux ?

13 R. Oui, ils parlaient. Ils étaient trop éloignés pour que je puisse

14 entendre leur conversation.

15 Q. Vous avez dit que vous ne pouviez entendre ce qu'ils se disaient; est-

16 ce exact ?

17 R. Je ne pouvais pas les entendre parler, mais j'entendais le son de leurs

18 voix sans discerner les mots. J'avais trop peur d'ailleurs pour prêter

19 attention à ce qu'ils se disaient.

20 Q. Est-ce exact que vous étiez à une centaine de mètres d'eux ?

21 R. Oui, c'est exact.

22 Q. Témoin 60, vous avez dit un petit peu plus tôt, et ceci dans votre

23 déposition qui se trouve à la page 40 à la ligne 17 du compte rendu que

24 vous avez entendu mentionner quelque chose comme ils allaient partir pour

25 les attraper et les tuer tous, allons-y. Vous souvenez-vous avoir entendu

26 cela ?

27 R. Oui, oui, c'était une quatrième voix. Je ne me souviens pas de qui

28 parlait. La voix était forte et très distincte. On pouvait entendre très

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1 clairement.

2 Q. Cette quatrième voix masculine, était-ce la voix d'une personne qui

3 était à côté des trois hommes que vous avez décrits précédemment ?

4 R. Non, non, elle venait de plus loin.

5 Q. A quelle distance vous trouviez-vous de cet homme-là ?

6 R. Je ne sais pas, 130, 140 mètres, peut-être même plus.

7 Q. Cet homme-là était plus éloigné de vous que les trois hommes dont vous

8 n'arriviez pas à entendre la conversation; est-ce exact ?

9 R. Oui.

10 Q. Comment est-ce possible que vous avez pu comprendre ce que disait cet

11 homme alors que vous n'entendiez pas ce que disaient ceux qui étaient plus

12 proches de vous ? Vous n'auriez pas pu entendre les mots prononcés.

13 R. Les hommes qui étaient plus proches de moi parlaient probablement moins

14 forts. La quatrième voix, qui était la voix de cet homme plus loin, était

15 une voix forte dont j'ai pu entendre chaque mot distinctement comme si cet

16 homme criait très fort. C'était clair et fort.

17 Q. Avez-vous entendu ce quatrième homme dire quoi que ce soit d'autre ?

18 R. Non, simplement ce que je vous ai dit.

19 Q. Ce sont seulement les mots que vous venez de nous décrire que vous avez

20 entendus. Tout le reste, vous n'avez pas pu l'entendre ?

21 R. C'est exact. C'est ce qu'il a dit. En outre, il y avait le son étouffé

22 d'un coup tiré avec une arme de chasse ou un fusil. Je n'étais pas très

23 sûr. Ensuite, nous nous sommes dirigés vers notre maison. Nous avons pris

24 peur et nous nous sommes enfuis dans les bois.

25 Q. Justement, je voulais y venir. Quand vous êtes allés dans les bois qui

26 était quelque temps après 16 heures, lorsque vous avez dit avoir aperçu ces

27 hommes pour la première fois; est-ce exact ?

28 R. Oui, c'est exact.

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1 Q. Vous êtes revenus, avez-vous dit, le lendemain matin dans votre

2 village. Vos voisins vous ont parlé à nouveau. Les Hajdare se trouvaient là

3 le lendemain matin. Ils n'étaient pas armés dites-vous, et parlait avec

4 vous de la situation ?

5 R. Je suis retourné dans la maison, pas dans mon village. Lorsque je suis

6 parti, je me trouvais encore près de ma maison. C'est vrai que le lendemain

7 matin, Gjon Hajdare est venu. Il n'était pas armé. Il semblait être dans

8 une disposition très amicale à ce moment-là.

9 Q. L'homme que vous avez dit être Gjon Hajdare, c'est le même Gjon Hajdare

10 qui a pris une mitrailleuse la veille et qui faisait partie du groupe de

11 gens qui vous ont forcé à quitter votre maison et à aller dans la forêt;

12 est-ce exact ?

13 R. Oui, c'est exact. C'est la même personne.

14 Q. Bien. Vous avez dit que vous avez entendu des coups de feu tirés

15 pendant 10 à 15 minutes la veille de votre départ, coups de feu provenant

16 de la direction de la maison Radosevic. Vous souvenez-vous de cela ?

17 R. Oui, oui c'est exact.

18 Q. Où étiez-vous lorsque vous avez entendu ces coups de feu ?

19 R. Dans la cour à l'extérieur de ma maison.

20 Q. Etait-ce environ au même moment que vous avez vu les hommes prendre des

21 fusils-mitrailleurs de la cave ou non ?

22 R. Les hommes ont pris les armes dans la cave probablement 10 à 15 minutes

23 après les coups de feu.

24 Q. Très bien. Les coups de feu que vous avez entendus, Témoin 60,

25 pourriez-vous nous décrire ce que vous avez entendu ? Etait-ce des tirs

26 d'arme automatique ? Des coups de feu individuels des fusils ? Pourriez-

27 vous nous les décrire, s'il vous plaît.

28 R. Il y avait tout simplement beaucoup de coups tirés. Je ne sais pas

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1 quelles étaient les armes utilisées. Il y avait des coups de feu

2 individuels et des rafales. Je ne sais pas vraiment quelles armes ont été

3 utilisées. La distance entre ma maison et les coups de feu était

4 probablement 2 ou 3 kilomètres.

5 Q. Quand vous dites "des rafales de coups de feu", est-ce qu'il y avait

6 des tirs, ensuite un silence, ensuite de nouveaux coups de feu tirés ou

7 était-ce constant ?

8 R. Je ne m'en souviens pas très clairement, mais il y avait des brefs

9 intervalles, ensuite il y avait des rafales ainsi que des coups de feu

10 uniques, et tout ceci a continué de la même manière pendant 10 à 15

11 minutes.

12 Q. Pouviez-vous entendre des coups de feu tirés au-dessus d'autres coups

13 de feu, c'est-à-dire beaucoup de coups de feu tirés en même temps ?

14 R. Oui, mais je ne sais pas exactement ce que vous voulez dire quand vous

15 dites "de nombreux coups tirés en même temps" ? Me demandez-vous s'il y

16 avait différentes armes utilisées pour tirer les coups de feu ? A ce

17 moment-là, oui, il y avait un certain nombre d'armes qui étaient utilisées

18 dans cette série de coups de feu tirés.

19 Q. Merci.

20 M. DIXON : [interprétation] Pouvons-nous passer à huis clos

21 partiel pour la suite.

22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs

23 les Juges, nous sommes à huis clos partiel.

24 [Audience à huis clos partiel]

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17 [Audience publique]

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

19 Témoin 60, Me Guy-Smith va maintenant procéder à votre contre-

20 interrogatoire. Il représente M. Balaj.

21 M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui. Du fait de la nature du thème que je

22 vais aborder, j'aimerais que nous repassions en audience à huis clos

23 partiel. J'ai essayé de vous faire signe, mais --

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Repassons en audience à huis clos

25 partiel.

26 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous y sommes.

27 [Audience à huis clos partiel]

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15 [Audience publique]

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

17 Questions de la Cour :

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Témoin 60, vous nous avez parlé

19 d'attaques contre le poste de police de Rznic. A quelle fréquence ce poste

20 de police a-t-il fait l'objet d'attaques ?

21 R. Croyez-moi, je ne sais pas. Je ne sais pas combien de fois le poste de

22 police a fait l'objet d'attaques, mais à plusieurs reprises les médias en

23 ont parlé, et le quartier en parlait aussi. Les Serbes qui venaient me

24 rendre visite en parlaient. Par la suite, au début du mois d'avril je

25 pense, ce poste de police a été déplacé, et c'est ce que j'ai appris après

26 notre départ du village. En quelque sorte, les forces de police se sont

27 retirées de Rznic.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Le micro est allumé.

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1 Lorsque les attaques ont commencé contre le poste de police, vous n'avez eu

2 connaissance que d'une seule et pas d'autres, n'est-ce pas ?

3 R. Je sais qu'il y en a eu plusieurs, je ne sais pas combien exactement,

4 mais je n'ai jamais assisté à une quelconque de ces attaques. Il y a sept

5 kilomètres à peu près entre Rznic et chez moi.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La télévision ou les médias se sont-

7 elles fait l'écho de ces attaques ? Les ont-elles montrées ?

8 R. Croyez-moi je n'en sais rien, mais c'était dans les journaux et à la

9 télévision.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Non, je comprends. Mais qu'est-ce

11 qui vous a amené à penser qu'il y avait plus d'une attaque parce que vous

12 avez dit : J'ai entendu les médias parler d'une attaque. J'aimerais savoir

13 comment savoir comment vous avez su qu'il y en avait une autre ?

14 R. De temps en temps les journaux faisaient état d'attaques perpétrées

15 contre le poste de police. Mes voisins, lorsqu'ils venaient nous voir. Les

16 chaînes de radio de Djakovica et de Pec en parlaient aussi.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, merci.

18 Monsieur Re.

19 M. RE : [interprétation] J'ai changé d'avis, Monsieur le Président. Il

20 n'aura pas de questions supplémentaires ?

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Parfait. Ma question ne suscite pas de

22 questions supplémentaires non plus de la part de la Défense ?

23 Bien, Témoin 60, ceci conclut votre déposition devant la Chambre,

24 j'aimerais vous remercier d'être venu jusqu'à La Haye et d'avoir répondu

25 aux questions qui vous ont été posées par les parties et par les Juges

26 s'agissant d'une ou deux de ces questions.

27 Maître Emmerson.

28 M. EMMERSON : [interprétation] Je ne sais pas si vous souhaitez dire quoi

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1 que ce soit au témoin s'agissant de l'éventualité d'un rappel possible.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Avant de vous souhaiter un bon

3 voyage, j'aimerais vous informer de la chose suivante : il est possible que

4 nous ayons à vous poser des questions supplémentaires sur un certain nombre

5 de points. C'est tout à fait improbable, mais la possibilité existe

6 néanmoins.

7 Maître Emmerson, est-ce que -- en général une Chambre ne donne pas

8 d'instructions au témoin lorsque celui-ci quitte le prétoire et j'ai peur

9 que le faire en l'occurrence fasse plus de mal que de bien. Monsieur le

10 Témoin, veuillez retirer vos écouteurs quelques instants.

11 M. EMMERSON : [interprétation] Monsieur le Président, je suis à votre

12 disposition.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous demande votre position sur la

14 question. J'ai déjà dit, même si peut-être je n'ai pas été entièrement

15 compris pour le témoin, mais je pense qu'en réalité il serait plus sage

16 sans doute de ne rien faire d'inhabituel vu les circonstances.

17 M. EMMERSON : [interprétation] Je ne m'efforcerai en aucun cas de vous

18 convaincre du contraire, Monsieur le Président.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je regarde les autres conseils et je ne

20 vois pas de ferme opposition de leur part.Monsieur le Témoin, je viens de

21 vous faire savoir qu'il y avait une possibilité - je ne sais pas si elle

22 est importante ou pas - mais en tout cas je vous ai dit qu'il y avait une

23 possibilité que nous ayons à vous revoir. Cela étant, il y a également une

24 réelle possibilité que vous n'ayez pas à revenir. En tout cas, pour le

25 moment, je vous souhaite bon voyage de retour.

26 Madame l'Huissière, je vous demanderais d'escorter le témoin hors prétoire,

27 s'il vous plaît.

28 [Le témoin se retire]

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons --

2 M. EMMERSON : [interprétation] Je vois l'heure. Je ne savais pas si vous

3 aviez une ou deux questions à traiter.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, en fait je n'avais que les pièces

5 P37 et P38 sur ma liste. S'il n'y a pas d'objection, la feuille sur

6 laquelle est inscrit le pseudonyme, l'autre c'est un plan annoté, toutes

7 les deux à conserver sous pli sellé.

8 M. EMMERSON : [interprétation] Pas d'objections du côté de la Défense.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Je ne vois pas d'autres

10 objections chez les autres Défenseurs. Les pièces P37 et P38 sont versées

11 au dossier. Je n'avais rien d'autre sur ma liste pour le moment.

12 M. EMMERSON : [interprétation] Je me permettrais, car je vois que M. Re est

13 occupé en ce moment, il y a un point que j'aimerais évoquer officiellement.

14 Le témoin a fait une déposition hier qui ne correspond pas au contenu de la

15 lettre remise hier par M. Re quant aux communications entre eux. M. Re a eu

16 l'intelligence de m'indiquer ce matin que ces différences seraient

17 vérifiées à partir de l'enregistrement audio. Je me demandais si peut-être

18 nous pourrions réentendre cet enregistrement audio pour voir si le témoin

19 est en mesure de confirmer ou d'infirmer la déposition faite précédemment.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, est-ce que cela vous

21 conviendrait ? Lorsque je vous ai invité, vous avez bien entendu n'est-ce

22 pas qu'il n'était pas question de prévoir à l'avance une décision hors

23 délibération, décision qui n'a toujours pas été prise par la Chambre. Donc

24 si nous établissions cette distinction clairement est-ce que vous seriez

25 prêt à réécouter l'enregistrement audio pour vérifier si peut-être vous

26 auriez fait une erreur ou si le témoin aurait dit quelque chose de

27 différent de ce qu'il a dit durant sa déposition ?

28 M. RE : [interprétation] Pas de problème pour réentendre l'enregistrement.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Nous vous réentendrons sur ce

2 point, Monsieur Re.

3 M. RE : [interprétation] Mais je ne peux pas vous promettre que je le ferai

4 immédiatement. Je veux dire, je ne vais pas peut-être réécouter la bande

5 immédiatement.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non, non. Bien entendu nous savons

7 qu'il est impossible de demander l'impossible aux parties.

8 Nous suspendons jusqu'à demain 3 avril, 14 heures 15 dans le même prétoire,

9 salle numéro II.

10 --- L'audience est levée à 19 heures 05 et reprendra le mardi 3 avril 2007,

11 à 14 heures 15.

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