Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le vendredi 25 mai 2007

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 08.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, pouvez-vous appeler

7 l'affaire, s'il vous plaît.

8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,

9 Messieurs les Juges. Il s'agit de l'affaire IT-04-84-T, le Procureur contre

10 Ramush Haradinaj et consorts.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame l'Huissière [comme

12 interprété]. Pour des raisons personnelles et urgentes, le Juge Bjorn Stole

13 n'est pas en mesure d'être ici aujourd'hui. Les autres Juges de cette

14 Chambre estiment que dans l'intérêt de la justice ils sont en mesure de

15 continuer et de poursuivre l'audience d'aujourd'hui. Le Juge Stole sera de

16 retour à la première session suivant celle d'aujourd'hui.

17 Monsieur Krasniqi, j'aimerais vous rappeler que vous êtes toujours lié par

18 la déclaration solennelle que vous avez faite hier au début de voter

19 témoignage. Ceci est-il bien clair pour vous ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Di Fazio, vous pouvez

22 continuer avec votre interrogatoire principal.

23 M. DI FAZIO : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. LE TÉMOIN:

24 DED KRASNIQI [Reprise]

25 [Le témoin répond par l'interprète]

26 Interrogatoire principal par M. Di Fazio : [Suite]

27 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Krasniqi. Monsieur Krasniqi,

28 j'aimerais vous poser des questions, un certain nombre de questions

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1 concernant votre fils, Pal Krasniqi. Quand il est parti pour aller à

2 Jablanica, était-il à l'époque marié ou était-il célibataire ?

3 R. Il était célibataire.

4 Q. Savez-vous si à l'époque il avait des contacts, il fréquentait une

5 femme serbe ou Rom ou avait fréquenté par le passé une femme serbe ou Rom ?

6 R. Je ne sais pas et je ne crois pas qu'il ait fréquenté une personne

7 serbe ou Rom.

8 Q. Merci. J'aimerais vous poser d'abord une question, et je vais vous la

9 poser de la manière suivante : ne répondez que si vous êtes sûr de la

10 réponse, et je vous prie de ne pas vous livrer à des spéculations. Savez-

11 vous si ce qu'il portait la dernière fois que vous l'avez vu, le 10 juillet

12 1993 -- pardon, je me reprends, 1998 ?

13 R. Il portait des chaussures de sport, un tee-shirt rayé et il avait un

14 col avec rayures rouges.

15 Q. Qu'entendez-vous par des chaussures de sport, en anglais le mot était

16 "trainers," qu'entendez-vous par cela ?

17 R. Des chaussures de sport qui étaient blanches à teinte un peu bleu ciel.

18 [Le Conseil de l'Accusation se concerte]

19 M. DI FAZIO : [interprétation]

20 Q. Vous utilisez toujours le terme "trainers," est-ce que ce sont des

21 chaussures dont vous parlez ?

22 R. C'était des chaussures de sport, ce n'était pas des vraies chaussures.

23 Q. Merci. Est-ce que si vous savez si en juillet 1998 votre fils --

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Guy-Smith.

25 M. GUY-SMITH : [interprétation] En fait, je sentais qu'il allait y avoir

26 une question directrice, donc je me suis levé avant qu'elle ne soit posée.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne sais pas si c'est ce que M. Di

28 Fazio voulait faire. Bien sûr, M. Guy-Smith est tout à fait autorisé à

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1 s'opposer à une question directrice s'il y a un bon fondement à cela, et si

2 vous pensez que quelqu'un va poser une question directrice, vous pouvez la

3 poser avant qu'elle ne soit poser, bien entendu, mais tentons, si possible,

4 de ne pas trop anticiper les choses.

5 M. GUY-SMITH : [interprétation] En fait, je ne pensais pas la poser

6 uniquement parce qu'il a dit "Savez-vous s'il a," c'est à cause de la

7 question qu'il avait posée avant que je me suis levé.

8 M. DI FAZIO : [Hors micro]

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et bien, vous savez, il y a 200

10 questions différentes qui pourraient commencer de cette manière et qui ne

11 seraient pas forcément des questions directrices.

12 M. GUY-SMITH : [interprétation] Très bien, et alors --

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous prie de bien vouloir poursuivre.

14 M. GUY-SMITH : [interprétation] -- sur le fondement de mon expérience.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie, poursuivez, Monsieur Di

16 Fazio.

17 M. DI FAZIO : [interprétation] Merci. Je ne pense pas qu'il va y avoir de

18 problème.

19 Q. Je suis sûr que votre fils possédait un pantalon, une sorte de pantalon

20 d'une façon ou d'une autre en 1998 ?

21 R. Ecoutez, je vous dis ce que je sais. Ils s'échangeaient les pantalons

22 et les tee-shirts et leurs chemises avec des amis.

23 Q. Je comprends. Ce que je voulais simplement avoir comme réponse c'était

24 une simple réponse par oui ou par non, de façon - et vous pouvez répondre

25 très rapidement - votre fils possédait un pantalon en juillet 1998, n'est-

26 ce pas ?

27 R. Non.

28 Q. Est-ce que vous connaissez le village de Bardosan ?

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Di Fazio, c'est un peu bizarre

2 la façon de poser des questions. Pourquoi vous laissez les choses comme ça;

3 c'est un peu mystérieux pour l'instant.

4 M. DI FAZIO : [interprétation] Si vous souhaitez que je continue avec ce

5 sujet --

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, je ne le sais pas exactement

7 quelle est l'importance de cela; cela pourrait avoir une importance tout à

8 fait pertinente. Si j'étais à votre place, je poserais la question - il est

9 tout à fait évident sans qu'on pose la question, la réponse semblait assez

10 évidente et du coup la réponse m'a un peu surpris.

11 Monsieur Krasniqi, votre fils est-ce qu'il portait normalement un pantalon

12 ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, habituellement un pantalon, mais à

14 l'époque il portait un survêtement, pantalon de sport, en fait, ils les

15 appelaient "sports trainers."

16 M. DI FAZIO : [interprétation]

17 Q. Merci. De quelle couleur étaient-ils ?

18 R. Bleus avec une bande blanche.

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1 (expurgé)

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3 (expurgé)

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5 Q. Quel âge a t il -- quel âge avait-il lorsqu'il est venu chez vous pour

6 s'entretenir avec vous ?

7 R. Je ne sais pas, je ne connais pas son nom exactement, il était marié et

8 il avait à peu près 35 ans --

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Guy-Smith.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] L'interprète de la cabine anglaise a dit son

11 âge, une correction en disant son âge.

12 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je crois qu'il devait y avoir --

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois qu'il devait y avoir une

14 expurgation. Monsieur Guy-Smith, vous êtes en train de parler au moment où

15 le témoin était encore en train de parler, ce qui fait que je n'ai pas

16 entendu ce que vous avez dit.

17 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vous prie de bien vouloir m'excuser. Je

18 me demande si nous ne devrions pas être plutôt à huis clos partiel ou peut-

19 être qu'il faudrait qu'il y ait expurgation.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Enfin --

21 M. DI FAZIO : [interprétation] Pouvons-nous passer à huis clos partiel très

22 brièvement ?

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Passons à huis clos partiel.

24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

25 [Audience à huis clos partiel]

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13 Pages 4791-4795 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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1 [Audience publique]

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation]

3 Monsieur Di Fazio, la Chambre, bien entendu, a reçu en plus de la

4 déclaration des renseignements supplémentaires concernant le témoin, et il

5 est fait état d'une animosité entre le témoin, son fils et Ukshini.

6 Monsieur, je peux imaginer que vous estimez qu'il s'agit là de

7 renseignements pertinents et que, peut-être, ceci pourrait jeter un jour

8 supplémentaire, faire un peu plus la lumière sur ce qui s'est passé;

9 néanmoins je n'ai rien entendu à ce sujet. Bien sûr, il se peut que ce soit

10 intentionnellement que vous ayez laissé cela pour contre-interrogatoire,

11 mais bien entendu, si la Chambre reçoit des renseignements que

12 j'appellerais dans l'abstrait des renseignements concernant certaines

13 circonstances qui pourraient jeter une lumière différente sur ce qui semble

14 être l'essentiel des éléments de preuve que présente l'Accusation en ce

15 moment, bien sûr, je me demande si ceci ne devrait pas être exploré d'une

16 façon ou d'une autre, de façon à ce que vous puissiez soit exclure cette

17 question d'animosité comme étant une explication possible d'événements qui

18 ne sont pas encore connus de façon détaillée ou bien si ceci pourrait être

19 pris comme une possibilité, une possibilité sérieuse qui permet d'expliquer

20 les choses qui ont eu lieu et donc tout simplement.

21 M. DI FAZIO : [interprétation] Je --

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je me demande simplement si ceci mérite

23 qu'on y prête attention, oui ou non, et si vous souhaitez vous-même y

24 consacrer quelque attention ou si vous êtes sûr que de l'attention sera

25 prêtée de toute manière à cette question lors d'un contre-interrogatoire.

26 M. TROOP : [interprétation] Monsieur le Président --

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, écoutez, je voudrais tout d'abord

28 entendre -- s'il vous plaît, je pense que -- enfin peut-être, il ne s'agit

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1 pas de répondre à M. Di Fazio mais d'ajouter quelque chose.

2 M. TROOP : [interprétation] Oui, je voudrais ajouter quelque chose,

3 Monsieur le Président, c'est tout simplement ceci, c'est que la Chambre

4 évidemment a lu la déclaration de témoin, d'où il ressort que ce témoin, je

5 dirais que je vous demande de bien regarder le paragraphe 18 où il y a les

6 éléments de déposition par rapport à ce témoin, cela a trait à ce passage-

7 là.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

9 M. TROOP : [interprétation] La Chambre notera également que la déposition

10 faite par le témoin est un développement très grand de ce qui a été

11 précédemment dit dans la déclaration écrite et également un développement

12 abondant sur ce que ce témoin a précédemment dit, d'après ce que nous avons

13 compris.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, veuillez poursuivre.

15 M. TROOP : [interprétation] La préoccupation que j'ai en ce qui concerne

16 ces séances de récolement ou de ce qui s'est passé au cours des séances de

17 récolement, parce que la Chambre notera, la Chambre a vu qu'il y avait une

18 note qui avait été enregistrée par l'Accusation concernant certains

19 éléments, de ce qui a dit le témoin Hamez Ukshini, sur lequel le témoin

20 vient juste de déposer en disant que c'était un ennemi.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

22 M. TROOP : [interprétation] Maintenant, tout simplement, nous ne sommes pas

23 au courant, nous ne savons pas ce que ce témoin a dit à l'Accusation. On a

24 l'impression qu'il y a eu une forme de séance de récolement avec ce témoin

25 qui serait tout au moins suffisante pour causer certaines préoccupations

26 dont il faudrait tenir compte.

27 J'évoque cette préoccupation parce qu'à la fin même de la déposition

28 de ce témoin, nous nous trouvons confrontés à de nouveaux éléments que nous

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1 n'avions pas remarqués précédemment ou qui ne semblent pas avoir été en

2 aucune manière indiqués d'une façon détaillée sur ce que ce témoin peut

3 avoir dit ou non au cours d'une séance de récolement qui a peut-être eu

4 lieu ou non.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Bien entendu, dans une

6 certaine mesure, il s'agit là de spéculation et d'hypothèse. Il se peut

7 qu'il ait eu une séance de récolement très brève, des séances de récolement

8 ne sont pas - enfin, je voudrais dire que je ne m'attende certainement pas

9 à ce que la Défense puisse être d'avis que les séances de récolement sont

10 obligatoires.

11 M. EMMERSON : [interprétation] Pourrais-je dire également pour

12 éclaircir les choses, et nos informations est que la position est bien

13 consignée au compte rendu, dans toute la mesure du possible, dire

14 clairement que ni Me Troop ni Me Harvey pour le compte de

15 M. Brahimaj n'était présent. Moi-même et Me Guy-Smith avons eu une

16 conversation avec M. Di Fazio concernant la genèse de la note en question,

17 à laquelle vous vous êtes référé, Monsieur le Président. Nous avons reçu

18 des explications de sa part sur la façon dont cette note a été établie. Je

19 n'étais pas au courant du fait que Me Troop allait évoquer cette question,

20 mais nous avons reçu une explication de M. Di Fazio.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Est-ce que vous êtes disposé,

22 enfin, je comprends que l'explication n'est pas telle que vous vouliez

23 immédiatement vous associer aux préoccupations de

24 Me Troop.

25 M. EMMERSON : [interprétation] Et bien --

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne sais pas si vous voulez --

27 M. EMMERSON : [interprétation] Je suis sûr que M. Di Fazio peut expliquer

28 la position en ce qui le concerne. Je ne voudrais pas que l'on puisse

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1 penser que je suis resté là assis en gardant le silence pour m'associer

2 avec la suggestion qui maintenant que je ne sais rien des circonstances

3 dans lesquelles cette note a été établie, alors qu'en fait je le sais, je

4 ne voudrais pas qu'on ait cette impression que je ne le savais pas.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, au moment présent, je ne suis

6 pas tellement intéressé sur la façon dont la séance de récolement s'est

7 déroulée. Je suppose que des informations pertinentes seront données si

8 quelque chose de nouveau se fait jour au cours de ces séances de

9 récolement. Je trouve une note dans laquelle il y a, en tous les cas, au

10 moins un élément nouveau et ma préoccupation pour le moment était de

11 savoir, bien qu'il y ait des informations là qui d'après ce qu'on voit

12 n'excluaient pas la possibilité que cela puisse être pertinent pour

13 comprendre pleinement les événements, et néanmoins on n'en a pas traité

14 d'une façon ou d'une autre au cours de l'interrogatoire. Alors, bien sûr,

15 la Chambre souhaiterait comprendre la déposition, le contexte aussi bien

16 que possible.

17 Maintenant je voudrais suggérer que pendant la prochaine suspension

18 d'audience, Me Emmerson, vous communiquez avec Me Troop, d'abord, au sujet

19 de toutes les explications que vous avez données et s'il y a une question

20 qui reste, alors la Chambre souhaiterait en entendre parler.

21 D'abord, Monsieur Di Fazio, retournons à la question que j'ai évoquée,

22 c'est-à-dire les renseignements qui semblent être pertinents. Est-ce que

23 c'est intentionnellement que vous ne les avez pas évoqués ou est-ce que

24 vous vous attendiez à ce que la Défense le fasse ? Là, bien sûr, je serais

25 satisfait --

26 M. DI FAZIO : [interprétation] C'est plus une question de ne pas considérer

27 que ceci est d'une grande importance. Mais je suis tout à fait prêt à

28 envisager la question et à clarifier les choses par le témoin dans toute la

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1 mesure du possible en ce qui concerne ce point. A ce moment-là tout serait

2 clair et chacun saura exactement quelle est sa déposition sur ce point.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne sais pas si ce sera clair, mais au

4 moins ç'aura été évoqué ou traité.

5 M. DI FAZIO : [interprétation] C'est bien cela. Cela ne constitue pas un

6 problème. Je suis tout à fait prêt à le faire.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, faisons-le, mais en essayant de

8 ne pas le faire -- je ne demande pas une explication très longue de la

9 question, mais je voulais simplement savoir quel renseignement --

10 M. DI FAZIO : [interprétation] Il n'y a aucun problème.

11 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

12 M. DI FAZIO : [interprétation] -- je peux le faire.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin a mis ces écouteurs.

14 M. Di Fazio avait encore une ou deux questions à vous poser, Monsieur

15 Krasniqi.

16 M. DI FAZIO : [interprétation]

17 Q. Monsieur Krasniqi, je voudrais que vous expliquiez à la Chambre de

18 première instance quelles étaient vos relations avec la personne nommée

19 Ukshini, et je voudrais que vous disiez à la Chambre de première instance

20 quelle était votre relation avec cet homme en juillet 1998 et comment est-

21 elle maintenant. Commençons d'abord avec le juillet 1998. Est-ce que vous

22 le connaissiez ? Comment le connaissiez-vous ? Comment le considériez-vous

23 ?

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

25 M. EMMERSON : [interprétation] Je suis sûr que M. Di Fazio avait cela à

26 l'esprit, mais la note fait état d'un problème concernant les relations

27 avec le fils du témoin.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais --

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1 M. DI FAZIO : [Hors micro]

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson, ceci était vraiment

3 trop tôt. Je veux dire on peut introduire cette question de la relation

4 avec votre fils en posant d'abord la question. Enfin, il aurait fallu

5 laisser M. Di Fazio continuer ses questions.

6 Monsieur Di Fazio.

7 M. DI FAZIO : [interprétation] De sorte que je vais traiter de cela

8 aussi si vous voulez.

9 Q. Ma première question est la suivante : en 1998, quelle était votre

10 relation avec Ukshini et qu'est cette relation maintenant, qu'est-elle

11 devenue maintenant ?

12 R. Dès qu'Ukshini a été un étudiant, je l'ai connu. Il y avait son père

13 Ukshin Besa. Nous avions une bonne relation. On se rendait visite, on

14 échangeait des visites à certaines occasions, donc nous nous connaissions

15 bien.

16 Quand mon fils a été impliqué là-dedans et que Luz a eu quelque chose

17 à voir avec cela, j'ai essayé de le trouver. J'ai demandé après lui.

18 Ensuite, je vous ai relaté les conversations que nous avons eues, mais de

19 lui, je n'ai rien appris.

20 Q. Je vous remercie. Je ne suis pas tout à fait au clair par rapport à la

21 réponse que vous avez faite de savoir si vous aviez ou non une bonne

22 relation avec lui en 1998. Pouvez-vous nous dire s'il était le cas ?

23 R. Nous avions une très bonne relation avec son père, parce que cette

24 personne, cette autre personne était très jeune pour ce qui est de rester

25 avec nous, adultes, lorsque nous nous réunissions, par exemple, pour une

26 cérémonie ou quelques célébrations avec son père. Oui, il lui était jeune.

27 Comme je l'ai dit, je suis allé le rechercher, le trouver.

28 Q. Je vous remercie. Est-ce que je peux considérer, d'après votre réponse,

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1 vous me corrigerez si je me trompe, je suis certain que vous n'êtes pas en

2 train d'essayer de faire des suggestions, mais je voudrais juste savoir

3 est-ce que vous connaissiez son père mieux que vous connaissiez Hamez

4 Ukshini ? Est-ce que c'est cela que je comprends d'après votre réponse,

5 c'est exact ?

6 R. Oui.

7 Q. Quel était l'âge d'Ukshini en 1998 ? Avait-il à peu près l'âge de votre

8 fils ou était-il plus jeune ou plus vieux ?

9 R. Il était deux fois plus âgé que mon fils.

10 Q. Je vous remercie. C'est tout ce que je veux vous demander en ce qui

11 concerne votre relation avec lui. Mais pouvez-vous nous dire quelles

12 étaient les relations entre votre fils et Hamez Ukshini en juillet 1998, si

13 vous le savez ? Ne faites pas de supposition, mais si vous pouvez faire

14 quelque commentaire sur la nature et l'état de ces relations, veuillez nous

15 le dire, s'il vous plaît.

16 R. Je ne crois pas qu'il l'ait connu dans ce camp ou ce qu'on pourrait

17 l'appeler. Je ne sais pas s'ils se connaissaient avant que mon fils n'aille

18 là-bas comme soldat.

19 Q. Je vous remercie.

20 M. DI FAZIO : [interprétation] Monsieur le Président, pour les besoins de

21 l'Accusation, je n'ai pas besoin d'aller plus loin dans cet aspect des

22 choses. Je suis tout à fait prêt à aider la Chambre de première instance si

23 vous voulez que j'approfondisse encore, mais…

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne crois pas que nous ayons besoin de

25 poser des questions supplémentaires au témoin. Il semble que les notes dont

26 nous aurions besoin, enfin, les notes de récolement ou ce bref message

27 n'est plus très compréhensible -- disons que -- posons directement la

28 question, peut-être, au témoin.

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1 Avez-vous connaissance de problèmes que votre fils pourrait avoir eu avec

2 Hamez Ukshini ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils ne se connaissaient pas, Monsieur le

4 Président, ils ne pouvaient pas avoir de problèmes.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Parce que les Juges de la Chambre

6 ont reçu des renseignements -- d'abord, ont reçu votre déclaration

7 précédente, votre déclaration écrite, mais la Chambre a aussi une notre

8 très brève concernant une conversation que vous avez eue avec M. Di Fazio,

9 et à un des endroits sur cette note, sur une ligne on lit ceci :

10 "Pendant cette conversation, j'ai informé M. Di Fazio du fait que

11 Hamez Ukshini était l'ennemi de mon fils."

12 Donc, il a été rendu compte à la Chambre de ce que vous avez dit à M. Di

13 Fazio. Alors, est-ce que c'est une erreur ou …

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'est pas une erreur; c'est vrai.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, pourriez-vous, s'il vous plaît,

16 nous expliquer, alors que vous venez de nous dire qu'ils ne se

17 connaissaient pas l'un l'autre, néanmoins Ukshini était l'ennemi de votre

18 fils. Pouvez-vous expliquer cela ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ou est-ce que c'est simplement que vous

21 avez exprimé votre point de vue sur les événements qui ont eu lieu et que

22 de cela, cela fait qu'Ukhini est un ennemi. Est-ce que c'est comme ça que

23 nous devons comprendre les choses ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est cela que je voulais dire.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

26 Donc, pour le contre-interrogatoire, qui souhaite commencer pour contre-

27 interroger M. Krasniqi ?

28 M. EMMERSON : [interprétation] Avec votre permission, Monsieur le

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1 Président, c'est Me Troop qui va contre-interroger ce témoin pour

2 commencer.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

4 Maître Troop.

5 M. TROOP : [interprétation] Je suis reconnaissant aux autres conseils de la

6 Défense de me permettre d'être celui qui commence.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krasniqi, vous allez maintenant

8 être contre-interroger par Me Troop, qui est le conseil de M. Brahimaj.

9 Vous avez la parole.

10 Contre-interrogatoire par M. Troop :

11 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Krasniqi.

12 R. Bonjour.

13 Q. Je suis le conseil de M. Brahimaj, qui est assis derrière moi. Je

14 souhaiterais vous poser des questions concernant les événements qui ont

15 lieu en juillet 1998, plus particulièrement au moment où vous-même, votre

16 fils, et Mahir Dema ont décidé de rejoindre l'Armée de libération du

17 Kosovo, l'UCK.

18 R. Mahir Dema est venu chez moi à Peje parce qu'il connaissait mon fils.

19 Mahir avait dit à mon fils qu'ils avaient achevé de construire la maison

20 sur le mont Burimi et qu'ils voulaient y apporter des provisions. Il a dit

21 à mon fils qu'il avait été laissé seul, ses amis l'avaient abandonné. Donc,

22 il était venu emmener mon fils pour y aller ensemble.

23 Mon fils a dit : Non, je ne peux pas y aller sans demander la

24 permission de mon père. Alors, nous avons parlé, et ce Mahir m'a supplié de

25 permettre à mon fils d'aller avec lui parce qu'il a dit : Tous les autres

26 ont rejoint. Donc, j'ai dit : Bon, d'accord, vas-y, mais fais attention

27 jusqu'à ce que tu arrives à Jabllanice.

28 Q. Je voudrais vous arrêter là. J'ai une question à vous poser. Je

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1 voudrais simplement vous demander quelque chose concernant ce qu'a dit M.

2 Dema.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Troop, d'habitude il vaut mieux

4 que vous posiez simplement une question au témoin, parce que si vous

5 annoncez une série de questions, le témoin qui écoute cela va commencer à

6 s'exprimer. Il serait peut-être plus efficace que vous lui posiez

7 simplement une seule question.

8 M. TROOP : [interprétation] Je vous suis reconnaissant, Monsieur le

9 Président.

10 Madame la Greffière, pourrait-on, s'il vous plaît, présenter la pièce

11 3D010056 ?

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que cette pièce a déjà une

13 cote ?

14 M. TROOP : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, pouvez-vous, s'il

16 vous plaît, attribuer une cote à ce document ?

17 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agira de la

18 pièce à conviction numéro D89, cote provisoire pour identification.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière.

20 M. TROOP : [interprétation] Pourrions-nous passer à la deuxième page du

21 document en question ?

22 Est-ce qu'on pourrait remonter un peu le texte pour voir mieux le

23 paragraphe 2, s'il vous plaît.

24 M. DI FAZIO : [interprétation] Excusez-moi, mais quelle est la date de

25 cette déclaration ?

26 M. TROOP : [interprétation] Il s'agit de la déclaration de Mahir Dema --

27 M. DI FAZIO : [interprétation] Oui.

28 M. TROOP : [interprétation] -- datée du 23 avril 2007.

Page 4806

1 M. DI FAZIO : [interprétation] Je vous remercie.

2 M. TROOP : [interprétation]

3 Q. Je vais vous lire quelque chose que Mahir Dema a dit à l'Accusation,

4 Monsieur Krasniqi. Il déclare, je cite :

5 "Je ne me rappelle pas à quel moment ou à quelle date j'ai décidé de

6 rejoindre l'UCK. C'était en 1998. Pal Krasniqi m'a dit qu'il savait de

7 quelle manière le faire soit parce qu'il avait été dans la zone de l'UCK

8 deux semaines plus tôt, soit parce qu'il y était resté là-bas pendant deux

9 semaines. Je ne suis plus très sûr de ce qu'il m'a dit."

10 Alors, Monsieur Krasniqi, vous ne connaissiez pas la façon d'aller à

11 Jablanica, n'est-ce pas ?

12 R. Si, parce que je suis de la région.

13 L'INTERPRÈTE : Est-ce que le témoin pourrait parler plus près du microphone

14 ?

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krasniqi, pourriez-vous, s'il

16 vous plaît, vous rapprocher au microphone lorsque vous répondez aux

17 questions.

18 M. TROOP : [interprétation]

19 Q. Monsieur Krasniqi, est-ce que vous savez si votre fils avait été à

20 l'UCK à Jablanica avant son départ le 10 juillet ?

21 R. Je n'en ai jamais entendu parler, et je ne crois pas que c'était le

22 cas.

23 Q. Donc la fois suivante lorsque vous avez entendu dire par votre fils le

24 lendemain à 6 heures, le 11 juillet, lorsque vous avez entendu des

25 nouvelles de votre fils; c'est bien cela, n'est-ce pas, le 11 juillet à 6

26 heures ?

27 R. Le 10, pas le 11 juillet.

28 Q. Il vous a appelé le lendemain matin, n'est-ce pas ?

Page 4807

1 R. Oui.

2 Q. Il a dit qu'il avait été arrêté au point de contrôle à Krusha e Madhe ?

3 R. Oui.

4 Q. Il vous a dit qu'il avait été battu par la police à ce point de

5 contrôle avec son ami Mahir Dema ?

6 R. Oui.

7 Q. Il vous a aussi dit qu'il avait été emmené au poste de police à Klina,

8 n'est-ce pas ?

9 R. Oui.

10 Q. Et qu'il avait à nouveau été battu par la police au poste de police ?

11 R. Oui.

12 Q. Lui et Mahir Dema avaient tous les deux été très fortement battus,

13 d'après ce qu'il vous a dit ?

14 R. Oui.

15 Q. Il vous a appelé exprès pour vous demander de l'aide, n'est-ce pas ?

16 R. Oui.

17 Q. Alors, vous lui avez dit que vous ne pouviez pas l'aider, n'est-ce pas

18 ?

19 R. Oui.

20 Q. La raison pour laquelle vous ne pouviez pas venir à son aide, c'est

21 parce que la police vous recherchait ?

22 R. Oui.

23 Q. Pourriez-vous expliquer pourquoi la police vous recherchait à ce

24 moment-là ?

25 R. Parce que j'ai été en prison, et Milutin Prascevic et le frère et les

26 fils de la personne que j'ai tuée en 1982 essayaient de me trouver.

27 Q. Je vais vous poser des questions à ce sujet de façon un plus détaillée

28 un peu plus tard, mais je souhaite continuer sur ce sujet-ci pour le

Page 4808

1 moment.

2 M. TROOP : [interprétation] Madame la Greffière d'audience, pourrais-je

3 vous demander de bien vouloir faire apparaître le document U007 --

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Troop. Mais j'ai d'abord à

5 poser une question. Est-ce que vous avez l'intention de demander le

6 versement du document que vous venez de lire ?

7 M. TROOP : [interprétation] Non, pas à ce stade, Monsieur le Président.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon. Peut-être que ce serait bon que

9 vous indiquiez cela lorsque vous présentez un document soit qu'il s'agit

10 simplement de s'y référer ou de le lire, et qu'il n'est donc pas nécessaire

11 de lui attribuer un numéro.

12 Madame la Greffière, je ne sais pas si on peut dénuméroter [phon] cette

13 pièce, mais nous sommes à un stade tellement précoce que je pense que nous

14 pouvons réserver ce numéro ou cette cote pour un autre document.

15 Maintenant, le document suivant que vous souhaitez voir à l'écran, est-ce

16 un document dont vous avez l'intention de demander le versement au dossier

17 ?

18 M. TROOP : [interprétation] Pas à ce stade, Monsieur le Président.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas à ce stade. Si vous voulez – il est

20 clair que si vous le citez - je ne sais pas de quel type de document il

21 s'agit --

22 M. TROOP : [interprétation] C'est la déclaration du témoin, la déclaration

23 que le témoin a faite à l'Accusation, ce témoin-ci.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour ce témoin-ci, oui. Vous allez en

25 lire des parties pertinentes, tout au moins vous avez l'intention de les

26 présenter au témoin.

27 Alors, allez-y.

28 M. TROOP : [interprétation] Je vous remercie.

Page 4809

1 Madame la Greffière, il s'agit du document U0079712.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ça c'est la déclaration du 29 février

3 2004 ?

4 M. TROOP : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon. Allez-y.

6 M. TROOP : [interprétation] Pourriez-vous passer à la page 3 du document et

7 agrandir le paragraphe 13 ? Il me semble que pour la version albanaise

8 c'est à la page suivante.

9 Q. Monsieur Krasniqi, j'aimerais vous lire un passage d'une déclaration

10 que vous avez faite à l'Accusation. Vous avez dit à l'Accusation, je cite :

11 "Après la guerre, une fois qu'elle a été terminée, j'ai cherché mon fils,

12 et j'ai rencontré Mahir deux fois …"

13 Pouvez-vous simplement confirmer que vous avez rencontré Mahir Dema deux

14 fois différentes ?

15 R. Je l'ai rencontré, mais je ne le cherchais pas. Nous nous sommes

16 rencontrés à Peje. Il m'a dit que tant que le Kosovo sera totalement

17 libéré, je n'oserais pas parler librement du sujet. Donc je ne l'ai jamais

18 revu depuis.

19 Q. Combien de fois l'avez-vous rencontré, une fois ou deux fois ?

20 R. Je l'ai rencontré une fois, puis une fois j'ai envoyé ma femme et mon

21 neveu à sa maison. Mais je ne l'ai pas écrit dans ma déclaration.

22 Q. Mahir Dema vous a dit certaines choses concernant votre fils.

23 M. TROOP : [interprétation] Pouvons-nous voir à l'écran le paragraphe 9 de

24 la déclaration, s'il vous plaît.

25 Q. Vous avez dit à l'Accusation que Mahir Dema vous avait dit que :

26 "Lorsqu'ils sont arrivés à Jablanica, Mahir a été emmené à l'hôpital pour

27 être soigné, parce qu'il avait été frappé très durement, alors que mon fils

28 s'est vu remettre un uniforme …"

Page 4810

1 Est-ce que c'est ce que vous a dit Mahir ?

2 R. Oui.

3 Q. Au paragraphe suivant, au paragraphe 10 de votre déclaration, vous avez

4 dit que Mahir Dema avait dit :

5 "…après une semaine environ à Jablanica, mon fils est allé à

6 l'hôpital pour voir Mahir…"

7 Cela est-il exact ?

8 R. Oui.

9 Q. Vous avez également dit à l'Accusation que Pal était allé l'hôpital

10 accompagné de deux soldats, de deux autres soldats. Est-ce cela que vous a

11 dit Mahir ?

12 R. Oui.

13 Q. J'aimerais vous poser une question concernant votre rencontre avec

14 Alush Agushi concernant -- en fait, vous connaissiez Alush Agushi parce

15 qu'il était le commandant de l'UCK à Jablanica, n'est-ce pas ?

16 R. Oui.

17 Q. Vous l'avez rencontré au poste de police à Klina ?

18 R. Oui.

19 Q. Vous avez expliqué hier ce qu'Alush Agushi vous a dit, n'est-ce pas ?

20 R. Oui.

21 Q. Vous vous souvenez avoir dit qu'Alush Agushi vous avait dit que votre

22 fils avait été un soldat avec lui jusqu'à la première offensive en

23 septembre, n'est-ce pas ?

24 R. Oui.

25 Q. Ai-je raison de penser que vous ne pouvez pas savoir personnellement

26 quand les offensives ont eu lieu autour de Jablanica ?

27 R. Je ne sais pas, parce que j'étais à Peje.

28 Q. Pourrais-je -- en fait, puis-je expliquer -- si je puis vous dire que

Page 4811

1 la première offensive à Jablanica, cela a en fait eu lieu au début du mois

2 d'août 1998, et que la deuxième offensive, dans le secteur de Jablanica, a

3 eu lieu vers la fin du mois d'août, au début du mois de septembre 1998, et

4 que je vous pose une question à ce sujet; ne seriez-vous pas d'accord pour

5 dire que cela n'a pas de sens de parler de la première offensive et de dire

6 qu'elle a eu lieu en septembre, parce qu'en fait la première offensive a eu

7 lieu en août, au début du mois d'août, n'est-ce pas ?

8 R. C'est ce que j'ai entendu dire, mais moi-même je n'en sais rien.

9 Q. C'est soit une erreur commise par vous-même ou par Alush Agushi

10 concernant l'offensive dont il parlait effectivement ?

11 M. DI FAZIO : [interprétation] Je n'ai rien contre la question. Je ne fais

12 pas une objection. Je ne veux pas empêcher mon collègue de poser des

13 questions, mais il me semble qu'il faut rendre les choses claires et qu'on

14 est en train de dire au témoin que c'est lui qui s'est trompé lorsqu'il dit

15 au travers de sa déclaration lorsqu'il parle du mois de septembre en

16 d'autres termes --

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, il y a deux possibilités. Soit

18 il y a une erreur concernant le mois --

19 M. DI FAZIO : [interprétation] Oui.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- ou la chronologie des offensives qui

21 serait erronée. Tout cela part du principe qu'il y avait eu plus

22 d'offensives et qu'elles avaient eu lieu plus tôt que le mois de septembre.

23 Tout cela dépend, en fait, de l'hypothèse.

24 Je ne pense pas que le témoin ne puisse pas nous aider, mais je ne

25 m'attends pas à ce qu'il soit en mesure de le faire. Bien sûr, vous pouvez

26 lui poser la question, bien entendu.

27 Monsieur Krasniqi, une de ces questions qui se pose, c'est que lorsque vous

28 nous avez dit, lorsque vous avez dit à l'Accusation et à nous-mêmes que

Page 4812

1 voter fils était avec Alush Agushi jusqu'à la première offensive en

2 septembre, M. Troop émet des doutes quant au fait de savoir si en septembre

3 c'était la première offensive ou si peut-être, ce n'était pas le cas, ce

4 n'était pas en septembre mais à un autre moment, que l'offensive ait eu

5 lieu à un autre moment.

6 Concentrons-nous d'abord sur ce que M. Agushi vous a dit. A-t-il

7 utilisé -- a-t-il cité septembre comme étant le moment jusqu'auquel votre

8 fils était avec lui ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit que ce n'était pas mon fils qui m'a

10 cité. Alush Agushi qui m'a dit que jusqu'à la fin du mois de septembre il

11 était avec nous et qu'il est quelque part.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Serait-il possible -- est-ce que vous

13 vous souvenez qu'il vous a dit également que c'était jusqu'à la première

14 offensive, et qu'en fait votre souvenir ne serait peut-être pas très précis

15 et que ce n'est pas exactement cela qu'il ait pu dire offensive et non pas

16 première offensive ? Etes-vous bien sûr de cela ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous savions que lorsque l'offensive a

18 commencé, ils ont attaqué Jablanica et tout le monde est allé dans l'église

19 de Gllogjan, et c'était la première offensive, et également Alush m'en a

20 parlé.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous prie de continuer, Monsieur

22 Troop.

23 M. TROOP : [interprétation] Je vous remercie pour cette précision, Monsieur

24 le Président.

25 Q. Vous avez également dit qu'Alush Agushi avait dit que pendant

26 l'offensive ils étaient entourés, encerclés par les Serbes et qu'ils ont dû

27 se retirer, n'est-ce pas ?

28 R. Oui.

Page 4813

1 Q. Et qu'il avait dit à ses soldats de partir dans n'importe quelle

2 direction pour se mettre à l'abri, n'est-ce pas ?

3 R. C'est ce qu'on m'a dit.

4 Q. Par la suite, vous avez signalé la disparition à la MINUK, l'unité

5 chargée des personnes disparues, l'OMPF, n'est-ce pas ?

6 R. Oui, je comprends.

7 M. TROOP : [interprétation] Madame l'Huissière [comme interprété],

8 j'aimerais que le document 928 de la liste 65 ter apparaisse à l'écran ?

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous allez la verser au

10 dossier, Monsieur Troop ?

11 M. TROOP : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Bien, si elle n'a pas encore reçu

13 de cote, cette pièce doit en recevoir une à présent.

14 [La Chambre de première instance et l'Huissier se concertent]

15 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit donc de la pièce D89, cote

16 provisoire attribuée aux fins d'identification.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

18 M. TROOP : [interprétation] Pouvons-nous voir la page 3 du document, s'il

19 vous plaît ?

20 Q. Monsieur Krasniqi, malheureusement, ce document n'a pas été traduit. Je

21 vais en lire certains passages qui vont vous être traduits, mais vous

22 pouvez voir le document à l'écran devant vous.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Troop, je pense qu'au moins

24 nous pourrions peut-être passer à la page 3, tout de moins.

25 M. TROOP : [aucune interprétation]

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La page a plusieurs langues mais pas la

27 3. Je vais vous demander de lire lentement le passage.

28 M. TROOP : [interprétation]

Page 4814

1 Q. Monsieur Krasniqi, il semblerait qu'il s'agisse d'un formulaire

2 d'identification des victimes relatif à votre fils, Pal Krasniqi. Vous

3 voyez certainement son nom en haut de la page, "Krasniqi Pal." Est-ce que

4 vous voyez cela ?

5 R. Non, je ne vois pas parce que je ne vois pas très bien.

6 M. TROOP : [interprétation] Peut-être que nous pourrions agrandir le haut

7 de la --

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être que de grossir pourrait nous

9 aider.

10 M. TROOP : [interprétation]

11 Q. Pouvez-vous le voir à présent, Monsieur Krasniqi ?

12 R. Oui, oui, maintenant je peux le voir.

13 M. TROOP : [interprétation] Pouvons-nous à présent passer à la partie

14 inférieure de ce document, s'il vous plaît ?

15 Q. Au bas de ce document, il semble qu'il y ait une signature d'une

16 personne de l'OMPF, et on voit qu'il était écrit

17 3 décembre 2001. Voyez-vous cela dans la partie inférieure droite de ce

18 document ?

19 R. Oui, c'est en "décembre 2001."

20 Q. En fait, je crois même qu'il y est dit le 3 décembre 2001.

21 R. Oui, le 3 décembre 2001.

22 Q. Vous souvenez-vous avoir signalé la disparition de votre fils à l'OMPF

23 ?

24 R. Où cela a-t-il eu lieu ?

25 L'INTERPRÈTE : Les interprètes de la cabine anglaise demandent que le

26 témoin parle dans le micro.

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me souviens pas où c'était et où je l'ai

28 --

Page 4815

1 M. TROOP: [interprétation]

2 Q. Ce n'est pas clair dans le document, mais c'est possible que cela ait

3 eu lieu à Peje.

4 R. Si c'est la Croix-Rouge internationale à Krusha e Madhe, ils sont

5 venus, et on a fait une déclaration chez nous. On leur a fait une

6 déclaration de chez nous.

7 Q. Vous souvenez-vous, Monsieur Krasniqi, avoir fait une déclaration à

8 quelqu'un à peu près à cette époque, aux alentours du

9 3 décembre 2001 ?

10 R. Je ne me souviens pas, mais c'était une déclaration à la Croix-Rouge

11 internationale. Il y a deux hommes et trois femmes et c'était à Krusha e

12 Madhe que je leur ai faite cette déclaration.

13 Q. Monsieur Krasniqi, j'aimerais vous poser des questions que je vais lire

14 en anglais et qui vont vous être traduites à partir de ce document. Au

15 point 4 de ce document, il y est dit la chose suivante, je cite : "Le

16 village où MP," en anglais "missing person," "la personnes disparue a été

17 vue en dernier." Et juste à côté, on voit écrit : "Nepolje" --

18 M. DI FAZIO : [interprétation] Je ne fais pas d'objection, mais je veux que

19 les choses soient bien claires. Ce que nous voyons ici à l'écran, s'agit-il

20 de la déclaration faite le 3 décembre 2001 ? C'est de cela que vous êtes en

21 train de parler ?

22 M. TROOP : [interprétation] C'est un document qui enregistre le fait que --

23 M. DI FAZIO : [interprétation] Oui, je n'ai pas de problème avec ça, mais

24 je veux être bien sûr ce que nous voyons ici c'est la déclaration, ce que

25 M. Troop mon éminent collègue appelle la déclaration; c'est cela n'est-ce

26 pas, ce n'est pas un autre document.

27 M. TROOP : [interprétation] Je suis désolé, s'il y a une confusion, ce dont

28 je suis en train de vous parler c'est le document qu'il y a à l'écran.

Page 4816

1 M. DI FAZIO : [interprétation] Je vous remercie. Je vous remercie d'avoir

2 précisé les choses.

3 M. TROOP : [interprétation]

4 Q. Monsieur Krasniqi, est-ce que vous vous souvenez de la question ou est-

5 ce que vous souhaitez que je la répète ?

6 R. Je le lis, mais je ne comprends pas ce qui se passe. J'ai oublié.

7 Q. Je vais vous la relire de façon à vous rendre les choses plus claires -

8 -

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, Monsieur Troop, vous n'avez pas

10 posé de question au témoin. Vous avez simplement lu quelque chose, donc le

11 témoin ne peut pas se souvenir d'une question qui ne lui a pas été posée.

12 Je vous en prie, poursuivez.

13 M. TROOP : [interprétation]

14 Q. Monsieur Krasniqi, ce document dit que l'endroit/le village, le dernier

15 endroit, le dernier village où la personne disparue, Pal Krasniqi, a été vu

16 était à Nepole. Est-ce que vous vous souvenez d'avoir dit à qui que ce soit

17 que c'est là le dernier endroit où votre fils a été vu ?

18 R. Je ne me souviens pas, mais j'ai dit qu'ils sont allés ensemble avec

19 des amis à Nepole pour acheter des cigarettes et de l'alimentation. Qu'ils

20 étaient cinq, et que c'étaient ses amis qui m'avaient dit qu'ils avaient vu

21 mon fils, qu'ils l'avaient vu acheter des choses, puis qu'ils étaient allés

22 à Jablanica.

23 Q. Pourquoi est-il enregistré ici, sur le fondement de renseignements qui

24 semblent avoir été donnés par vous, que le dernier endroit où votre fils a

25 été vu était Nepole ?

26 R. Je ne crois pas avoir dit cela, mais les gens ont dit qu'il avait été

27 vu à Nepole et qu'il a disparu juste après ça. Quelqu'un a dit qu'il était

28 allé à Gllogjan et qu'il n'était jamais revenu. Il y a beaucoup de rumeurs

Page 4817

1 qui circulent, mais je n'y crois pas parce que je n'étais pas sur place.

2 Q. La partie suivante de ce formulaire indique que votre fils a été vu par

3 la dernière fois en septembre 1998 ?

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Troop, pour éviter toute

5 confusion, j'aimerais commencer par dire que les questions concernant ce

6 formulaire qui ne semble pas porter la signature du témoin, du moins

7 d'après ce que j'ai cru comprendre, bien que vous n'ayez pas des questions

8 à ce sujet, viennent, en fait, de la personne qui a enregistré cette

9 demande. La question est de savoir où la personne qui a disparu a été vue

10 en dernier, pourrait être tout simplement quand avez-vous vu la personne

11 disparue pour la dernière fois ou autant que vous le sachiez, il a été vu

12 par quelqu'un. En fait, je vous prie de bien vouloir garder cela à

13 l'esprit, parce que le témoin, d'après la réponse précédente qu'il a

14 donnée, va peut-être confondre les choses et j'aimerais autant que possible

15 qu'il n'y ait pas de confusion.

16 Je vous prie de poursuivre.

17 M. TROOP : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

18 Q. Monsieur Krasniqi, l'OMPF a enregistré, et vraisemblablement sur le

19 fondement de renseignements que vous leur avez donnés, que votre fils a été

20 vu en dernier par quelqu'un en septembre 1998. Est-ce que c'est vous qui

21 avez donné ce

22 renseignement ?

23 R. Je ne sais pas. Je ne crois pas que j'ai dit cela parce que ce

24 renseignement je ne le possédais pas. Maintenant, je sais ce que je suis en

25 train de vous dire. Mon frère est allé à Jablanica avec des villageois, des

26 gens de notre village, pour poser des questions sur mon fils, et ils leur

27 ont dit qu'il est allé soit à Peje, soit à Klina. Ce n'est pas moi qui ai

28 fait cette déclaration. Ce renseignement a peut-être été fourni par

Page 4818

1 quelqu'un d'autre, mais pas par moi.

2 Q. Je vais passer à autre chose, Monsieur Krasniqi. Monsieur Krasniqi, je

3 crois comprendre que vous avez une sœur dont le nom eset Marijana, n'est-ce

4 pas ?

5 R. Non, ce n'est pas ma sœur.

6 Q. Quel est le lien de parenté entre vous et Marijana ?

7 R. Je ne sais pas. C'est la première fois que j'entends cela.

8 Q. Monsieur Krasniqi, puis-je vous poser la question de savoir si vous

9 connaissez quelqu'un du nom de Dede Deda ?

10 R. Oui, oui.

11 Q. Si je comprends bien - à moins que je me trompe - c'est votre neveu,

12 n'est-ce pas ?

13 R. Oui.

14 Q. C'est le fils de votre soeur ?

15 R. Oui.

16 Q. Lui et votre fils, bien qu'il y ait eu une légère différence d'âge

17 entre eux, étaient amis, n'est-ce pas ?

18 R. Oui.

19 Q. Ils se retrouvaient, ils se rencontraient environ deux fois par semaine

20 jusqu'à ce que le conflit ou à ce que les combats commencent ?

21 R. Oui, mon fils allait chez lui et lui venait chez nous.

22 Q. Ils se connaissaient très bien, n'est-ce pas ?

23 R. Oui, oui, parce qu'ils sont de la même famille.

24 M. TROOP : [interprétation] Madame la Greffière, je vous demande de bien

25 vouloir afficher à l'écran la pièce 3D01-0017.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Souhaitez-vous verser ce document au

27 dossier, s'il vous plaît ?

28 M. TROOP : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

Page 4819

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Il faut une cote qui lui soit

2 attribuée.

3 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit de la

4 pièce D90, cote provisoire attribuée aux fins d'identification.

5 M. TROOP : [interprétation]

6 Q. Monsieur Krasniqi, je vais vous demander de bien vouloir vous reporter

7 à une déclaration qui a été faite par Dede Deda, votre neveu.

8 M. TROOP : [interprétation] Il s'agit d'un document qui ne nous a été

9 communiqué qu'en anglais, nous n'avons pas de traduction.

10 Q. J'aimerais vous lire certains paragraphes et vous poser des questions

11 concernant ces paragraphes. Si vous me permettez.

12 M. TROOP : [interprétation] Pouvons-nous avoir le paragraphe à la page 2,

13 s'il vous plaît ?

14 Q. Dede Deda a dit la chose suivante concernant votre fils, je cite :

15 "On me pose une question concernant la personne du nom de Pal Krasniqi, je

16 puis dire la chose suivante : Pal était le fils de mon oncle du côté de ma

17 mère. Bien qu'il était un peu plus jeune que moi, nous avions de très bons

18 rapports. En dehors du fait "--

19 R. Oui.

20 Q. -- "bien que nous ayons eu une relation, parce que nous étions de la

21 même famille, je le considérais également comme étant un très bon ami et

22 nous faisions beaucoup de choses ensemble."

23 R. Oui.

24 Q. "Nous nous retrouvions environ deux fois par semaine jusqu'à ce que le

25 conflit commence."

26 R. Oui.

27 Q. Ces renseignements sont exacts, n'est-ce pas ?

28 R. Oui.

Page 4820

1 Q. Monsieur Krasniqi, j'aimerais vous lire à présent un autre paragraphe

2 et vous demander si vous êtes au courant ou pas de ces renseignements. Je

3 vais vous demander de bien vouloir attendre la question, mais je vais

4 commencer par lire lentement les paragraphes.

5 Dede Deda a dit la chose suivante :

6 "Le dernier contact que j'ai eu avec lui était au début de 1998. C'était

7 aux alentours du jour férié catholique qui est célébré le 15 août. Pal m'a

8 appelé à la maison et m'a dit qu'il était à Jablanica. Il m'a dit qu'il

9 avait beaucoup d'argent sur lui et qu'il voulait me retrouver à Gjakove.

10 Comme point de rencontre, nous sommes convenus d'un endroit où nous avions

11 l'habitude de jouer au billard. Nous avons décidé de nous retrouver le jour

12 même. Pal ne m'a rien dit de plus pendant cette conversation."

13 Ensuite, le paragraphe suivant :

14 "Après avoir reçu cet appel, je suis allé à l'endroit convenu; mais Pal

15 n'est pas venu. A ce moment-là, je n'avais aucun moyen de le contacter donc

16 je suis rentré chez moi. Je n'ai jamais eu de nouvelles de lui depuis et

17 j'espérais qu'il soit toujours en vie quelque part."

18 Donc, la question que j'aimerais vous poser à ce sujet est de savoir : si

19 Dede Deda vous a parlé de cette conversation qu'il a eue avec votre fils au

20 milieu du mois d'août ?

21 R. Oui.

22 Q. Monsieur Krasniqi, j'aimerais revenir à quelque chose que vous avez dit

23 il y a déjà pas mal de temps dans votre témoignage --

24 M. TROOP : [interprétation] Monsieur le Président, je remarque qu'il est

25 déjà 10 heures 30. Peut-être que le moment serait adéquat pour faire une

26 pause.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si cela est le bon moment pour vous,

28 nous allons faire une pause et dans la mesure où il nous faut faire des

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1 expurgations, nous allons faire une pause d'une demi- heure et nous

2 reprendrons à 11 heures.

3 Est-ce que vous pouvez nous donner une idée de combien de temps, il vous

4 faut encore ?

5 M. TROOP : [interprétation] Environ 15 ou 20 minutes, Monsieur le

6 Président.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

8 Et les autres conseils de la Défense ?

9 M. EMMERSON : [interprétation] Vraiment très peu de temps et peut-être même

10 pas du tout.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Guy-Smith ?

12 M. GUY-SMITH : [interprétation] Pareil.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, je suis en train de penser au

14 prochain témoin qui est censé intervenir pour une heure. Y a-t-il une

15 possibilité que les parties décident pendant la pause suivante si

16 l'Accusation va poser des questions supplémentaires et sur quel sujet. Mais

17 si ce n'est pas possible --

18 M. EMMERSON : [interprétation] Je puis dire pour l'instant que je suis tout

19 à fait d'accord sur n'importe quelle question supplémentaire concernant ce

20 témoin.

21 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

22 M. EMMERSON : [interprétation] Le contre-interrogatoire de ce témoin ne

23 sera pas court, à moins que vous n'imposiez une limite de temps.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La seule chose que je souhaite c'est que

25 nous continuons ce témoignage avec le plus de précision possible mais

26 également aussi rapidement que possible.

27 M. EMMERSON : [interprétation] Très bien.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous reprendrons à

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1 11 heures 00.

2 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

3 --- L'audience est reprise à 11 heures 02.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous écoute, Monsieur Troop. Veuillez

5 continuer.

6 M. TROOP : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

7 Q. Monsieur Krasniqi, je vais vous poser encore quelques questions

8 brièvement. D'abord, dites-moi, j'aimerais vous poser une question

9 concernant quelque chose que vous avez déclaré avant la pause. Vous avez

10 dit "mon frère est allé à Jablanica avec d'autres membres du village,

11 d'autres personnes du village pour demander où se trouvait mon fils et ils

12 lui ont dit qu'il était soit allé à Peje ou Klina.

13 De quel frère s'agit-il ? Quel était le nom de ce frère en question ?

14 R. Il est mort le jour de Nouvel an, il s'appelait Hil.

15 Q. Je suis vraiment navré, mes condoléances, Monsieur Krasniqi. Est-ce que

16 vous vous rappelez quand il est allé à

17 Jablanica ?

18 R. Lorsque les forces serbes ont pilonné notre village, toutes les

19 personnes étaient parties des villages pour aller à Jablanica ou vers les

20 montagnes. Ils sont allés là où ils pouvaient aller.

21 Q. Vous souvenez-vous de quelle année il s'agissait, Monsieur Krasniqi ?

22 R. C'était un dimanche, le 12 juillet, lorsqu'ils ont lancé une attaque

23 contre notre village et qu'ils ont incendié notre village, qu'il a été rasé

24 au sol.

25 Q. Est-ce que c'était en 1999 ?

26 R. Non. C'était en 1998.

27 Q. Pour apporter quelques précisions concernant votre fils. Vous dites

28 qu'il est parti le 10 juillet 1998 et que votre frère est allé demander où

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1 Pal se trouvait. Donc, logiquement il aurait fallu que ce soit après le 10

2 juillet 1998, n'est-ce pas ?

3 R. Je crois que c'était après cela, car j'avais entendu qu'ils étaient

4 allés à Jablanica et qu'ils ne pouvaient pas le rencontrer.

5 Q. Il vous a dit que Pal était allé soit à Peje ou Klina; est-ce que c'est

6 exact ?

7 R. Non, non, vous ne m'avez pas très bien compris. Lorsqu'ils ont demandé

8 où il se trouvait, on leur a expliqué qu'ils allaient essayer de trouver là

9 où il était, car ils ont dit : Nous avons Pal Krasniqi à Jablanica. Ils

10 sont allés dans les villages de Zhabel et Grgoc, et plusieurs soldats ont

11 reçu l'information selon laquelle mon frère qui était âgé de 56 ans à

12 l'époque, on leur a dit que mon frère avait été emmené à Peje. Mais nous,

13 les Albanais, nous savons très bien ce que cela veut dire lorsqu'on dit :

14 "Va à Peje," que quelqu'un était à Peja.

15 Q. Permettez-moi maintenant de vous ramener au début des années 1990 --

16 [comme interprété]

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Troop, j'aimerais que vous

18 approfondissiez ce que vient de dire le témoin. Nous aimerions savoir ce

19 que les Albanais veulent dire par "Allez à Peje."

20 M. TROOP : [interprétation] Excusez-moi. Je n'ai pas posé cette question,

21 car on m'a appris de ne jamais poser de questions si je ne savais pas déjà

22 la réponse à cette question. Voulez-vous peut-être poser la question,

23 Monsieur le Président ?

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, certainement.

25 Monsieur Krasniqi, lorsque les Albanais disent "Va à Peje ou "allez à

26 Peje," qu'est-ce qu'ils entendent par là ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis vraiment désolé, Monsieur le

28 Président, je dois le dire en ces mots. Ce sont des mots très banals. C'est

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1 une expression peut-être un peu banale.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous ne sommes pas étonnés. Ne vous en

3 faites pas. Nous ne serons pas offusqués par cette explication, puisque

4 nous savons très bien que ce n'est pas vos propres propos. Alors, pourriez-

5 vous nous expliquer ce que cela veut dire ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a deux façons d'interpréter cette

7 expression. Lorsqu'on leur a dit : Votre cousin a, soit été emmené à Peje

8 ou à Klina, l'expression : "Et va à Peja, va te faire foutre." Ce sont les

9 deux explications, enfin ce sont les deux interprétations.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous employez le mot que vous auriez

11 employé vous-même dans votre village. Dites-nous, qu'est-ce que cela veut

12 dire : "Allez à Peje," exactement ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Un militaire allemand peut prendre cette

14 expression comme étant vraiment un endroit où la personne est allée, mais

15 dans le contexte, cette expression aurait aussi pu être interprétée comme

16 voulant dire que votre parrain a disparu pour ne plus jamais revenir.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous ai-je bien compris, lorsque vous

18 nous dites que cela veut dire qu'il est allé quelque part à un endroit d'où

19 il ne reviendrait plus jamais ? --

20 M. EMMERSON : [interprétation] Je suis vraiment navré de vous interrompre,

21 Monsieur le Président. Il y a peut-être une question linguistique ici, à la

22 page 38, ligne 14. Je ne sais pas si vous voyez les mots : "Allez à Peje,

23 allez vous faire foutre."

24 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

25 M. EMMERSON : [interprétation] Donc je ne sais pas si vous comprenez

26 l'expression "Allez vous faire foutre," en anglais, "sod- off ?"

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. En fait, je ne comprends pas très

28 bien. Je ne sais pas si vous pourriez nous l'expliquer.

Page 4826

1 M. EMMERSON : [interprétation] Je ne sais pas comment je pourrais vous

2 expliquer.

3 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Est-ce que c'est : Allez vous faire

4 foutre, foutez le camp ?

5 M. EMMERSON : [interprétation] Oui. C'est un peu plus fort que ça.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Merci beaucoup.

7 Alors, maintenant nous avons compris. Nous allons pouvoir comprendre nous

8 aussi ce que cela voulait dire.

9 M. TROOP : [interprétation]

10 Q. Donc on a dit à votre frère d'aller se faire foutre; est-ce que c'est

11 cela, pour employer le terme du langage de la place ?

12 R. Mon frère et plusieurs autres personnes ont reçu pour information que

13 mon fis et mon frère avaient été envoyés soit à Peje ou à Klina. Est-ce que

14 cela veut dire qu'ils ont acheté un billet à sens unique, qu'ils sont

15 partis sans plus jamais revenir.

16 Q. Monsieur Krasniqi, je souhaiterais vous ramener aux événements vous

17 rapportant au début des années 1980. Si j'ai bien compris, vous aviez un

18 voisin à l'époque qui s'appelait Miodrag Saric, n'est-ce pas ?

19 R. Oui.

20 Q. Et en 1982, il avait blessé votre frère Prenk [phon] avec une hache;

21 est-ce que c'est exact ?

22 R. Oui.

23 Q. Il y avait, en fait, une discussion entre vous deux, et il s'agissait

24 du pâturage des animaux ?

25 R. Oui.

26 Q. Est-ce que l'appartenance ethnique de Miodrag Saric était serbe ou

27 monténégrine ?

28 R. Cette personne était originaire de Bosnie-Herzégovine.

Page 4827

1 Q. A quel groupe ethnique appartenait-il ?

2 R. Sa mère était originaire du Monténégro, et lui il était originaire de

3 Bosnie-Herzégovine. Il était venu de là.

4 Q. Et à la suite de cette discussion, vous avez pris un fusil et vous lui

5 avez tiré dessus, n'est-ce pas ?

6 R. Oui, mais est-ce que vous m'avez appelé en tant que témoin pour me

7 parler de cela ? Je suis vraiment désolé de devoir le dire.

8 Q. Je suis vraiment désolé, Monsieur Krasniqi, mais je voulais expliquer

9 le contexte. Je voulais expliquer aux Juges de la Chambre la raison pour

10 laquelle les Serbes vous cherchaient plusieurs années plus tard. C'était

11 simplement pour replacer le tout dans son contexte.

12 Vous avez été accusé, n'est-ce pas, par un tribunal et vous aviez

13 reçu une peine de 15 ans d'emprisonnement; est-ce que c'est exact ?

14 R. Oui.

15 Q. J'imagine qu'à l'époque, vous vous souvenez qu'on en a parlé dans les

16 médias, à la radio, dans les journaux --

17 R. Oui.

18 Q. Vous ne le savez peut-être pas, mais dans la presse internationale, on

19 en a également entendu parler. Est-ce que vous saviez que c'était le cas ?

20 R. Oui, les médias faisaient part de cet événement. A la radio on

21 entendait également, je l'avais tué et j'avais été jugé sans respecter la

22 loi exactement.

23 Q. Je comprends. Vous avez purgé votre peine, vous avez passé presque

24 l'ensemble de votre peine en prison ?

25 R. Oui, j'ai purgé une peine de 12 ans.

26 Q. Lorsque vous êtes sorti de prison, même si vous aviez purgé une peine,

27 on en avait encore parlé de cet incident du fait que vous aviez tué Miodrag

28 Saric. On en a parlé de nouveau dans les médias, n'est-ce pas ?

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1 R. Oui.

2 Q. On pouvait savoir ce qui s'était passé plusieurs années auparavant,

3 n'est-ce pas, enfin, tout le monde le savait ?

4 R. Oui.

5 Q. Pourriez-vous nous expliquer qui est Milutin Plascevic, [comme

6 interprété] s'il vous plaît ?

7 R. Je connaissais son père ainsi que son grand-père. Il était le

8 commandant de la région, y compris Gjakove. Il donnait des ordres selon

9 lesquels on devait tuer des Albanais, ainsi de suite.

10 Q. Vous dites qu'il était commandant, il était commandant de quoi

11 exactement ? Quel était son grade ?

12 R. Il était le commandant de la région de Gjakove pour ce qui est de

13 l'ensemble des territoires de la région de Gjakove.

14 Q. Est-ce qu'il était commandant de la police, des forces policières ?

15 R. C'était le commandant des forces policières de l'armée et personne

16 n'osait s'opposer à lui.

17 Q. Vous avez dit que les frères et les fils de Miodrag Saric ont également

18 essayé de vous retrouver en 1998; est-ce que c'est exact ?

19 R. Oui.

20 Q. En fait, ils vous cherchaient pendant assez longtemps, n'est-ce pas ?

21 R. Ils m'ont cherché à Klina, alors que j'avais quitté Klina et je m'étais

22 installé à Peje. Ils avaient donné l'ordre à la police de Klina de me

23 capturer. Ils ont appelé Peje, mais ils ne me connaissaient pas à Peje. Et

24 c'est comme cela que j'ai pu m'échapper. Je restais à Peje sans une adresse

25 qui était connue du grand public.

26 Q. Vous aviez des problèmes avec les policiers ou la police dans cette

27 région pendant longtemps ?

28 R. En 1998, il y a eu des meurtres, mais à compter -- jusqu'à 1999, tout

Page 4829

1 le monde avait déjà quitté Peje, moi, j'étais encore là. Donc je me suis

2 rendu à la gare et je suis sorti de Peje pour me rendre à Klina dans le

3 village de Krusheva, et c'est là que je suis resté chez les parents de ma

4 femme jusqu'à la fin de la guerre.

5 Q. Ce n'est pas seulement la police, il y avait également les frères et

6 les fils de Miodrag Saric qui vous cherchaient; ils voulaient se venger,

7 n'est-ce pas ?

8 R. Oui.

9 Q. Les policiers savaient très bien qui vous étiez, n'est-ce pas, tous les

10 policiers, en fait, de cette région ?

11 R. Oui, oui, tout le monde savait qui j'étais.

12 Q. Lorsque Pal a été détenu au poste de police, les 10 et

13 11 juillet 1998, les policiers savaient très bien que c'était votre fils,

14 n'est-ce pas ?

15 R. Oui, oui, ils le savaient.

16 Q. Incontestablement votre fils avait des problèmes simplement parce que

17 c'était le fils de quelqu'un qui avait tué un Serbe, Miodrag Saric; est-ce

18 que c'est exact ?

19 R. Oui. Oui.

20 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Ne mentionnez pas, je vous prie,

21 l'appartenance ethnique --

22 M. TROOP : [interprétation] Excusez-moi, je vous remercie de m'avoir

23 rappelé de ceci.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, outre ceci, il y a peut-être

25 nécessité d'établir une base pour ce qui est de ce qui s'était passé au

26 poste de police le 10 et 11 juillet. Je ne sais pas si le témoin pourrait

27 établir des bases ou d'expliquer ce qui, à prime abord, semble être plutôt

28 une conjecture.

Page 4830

1 Je ne sais pas si vous pourriez peut-être établir ceci, si vous le

2 pouvez.

3 [Le conseil de la Défense se concerte]

4 M. TROOP : [interprétation]

5 Q. Monsieur, vous vous êtes entretenu avec Pal Krasniqi tôt dans la

6 matinée les 10 et 11 juillet 1998, n'est-ce pas, donc tôt le matin, soit le

7 10 ou le 11 juillet 1998 ?

8 R. Oui.

9 Q. Il vous a dit qu'il avait été détenu par la police serbe au sein au

10 poste de police de Klina, n'est-ce pas ?

11 R. Oui.

12 Q. Il vous a également expliqué qu'il avait été interrogé, qu'on lui a

13 posé des questions, à savoir qui il était et où il voulait aller ?

14 R. Non, ce n'est pas ce qu'il a dit, mais on m'a parlé de ceci

15 ultérieurement.

16 Q. Ça aurait été …

17 R. En fait, il m'a demandé de le faire sortir de là, de l'aider à sortir,

18 à partir.

19 Q. Est-ce qu'il vous a expliqué si la police savait qui il était, que

20 c'était votre fils ?

21 R. Oui, il savait que c'était lui, que c'était mon fils. La police le

22 connaissait.

23 Q. Lorsque vous dites que la police le connaissait, vous voulez dire qu'au

24 sein de la police on savait que c'était votre

25 fils ?

26 R. Oui.

27 Q. Permettez-moi de m'entretenir avec mon collègue quelques instants, je

28 vous prie.

Page 4831

1 [Le conseil de la Défense se concerte]

2 M. TROOP : [interprétation]

3 Q. Je vous remercie, Monsieur Krasniqi. Je n'ai plus d'autres questions.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. J'aurais besoin d'une petite

5 précision concernant ces quelques dernières questions.

6 Monsieur Krasniqi, lorsque vous avez dit que les policiers savaient qui

7 était votre fils et qu'il s'agissait bel et bien de votre fils, lors de

8 cette conversation téléphonique ou au cours des conversations ultérieures

9 que vous avez eues avec Mahir, est-ce qu'ils vous ont expliqué plus en

10 détail de ce qu'ils savaient exactement concernant votre fils et son père ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque mon fils était à l'école primaire,

12 c'était à Klina, et à cause des désaccords entre les Albanais et les Serbes

13 à l'école, il se disputait avec eux et il savait qu'à l'époque j'étais en

14 prison.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que votre fils vous a dit

16 concrètement que les policiers soit le 10 ou le 11 juillet lui ont parlé de

17 votre passé, du fait que vous vous étiez vu trouver coupable d'avoir tué M.

18 Saric ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'en ai pas entendu parler. Je n'ai

20 pas rencontré mon fils après qu'il eût été passé à tabac, je ne sais pas ce

21 qu'on lui a dit exactement après.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'est qu'une présomption de votre

23 part, lorsque vous nous dites que les policiers devaient sans doute savoir

24 que c'était le fils d'une personne qui avait un passé comme le vôtre ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, ils savaient que c'était mon fils et la

26 police me connaissait aussi. Ils savaient qui j'étais.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Encore une fois, est-ce que c'est une

28 présomption de votre part, qui vous a dit clairement, précisément ce que la

Page 4832

1 police a demandé ou a dit soit le 10 ou le

2 11 juillet ? Qu'est-ce qui vous permettait de croire qu'ils savaient,

3 qu'ils connaissaient votre passé, qu'ils savaient qui vous étiez ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait plusieurs incidents impliquant la

5 police, lorsque j'ai été libéré de la prison, lorsque je suis sorti, les

6 jeunes personnes à l'école s'étaient divisées en deux camps, les Serbes et

7 les Albanais se battaient les uns contre les autres. C'est pour cela que je

8 croyais qu'ils savaient qui il était. Avant qu'il ne parte, je lui ai dit :

9 Fais attention, tu es jeune.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

11 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Pour reprendre cette phrase que vous

12 avez dite à votre fils, "fais attention," vous avez mentionné il y a

13 quelques instants que ceci était en relation avec un endroit où il devait

14 aller. Est-ce que je vous ai bien compris, est-ce que vous lui avez donné

15 un avertissement de faire attention car il allait à Jablanica, c'est à ce

16 moment-là que vous lui avez dit cela ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, lorsqu'il était à Klina, car lorsqu'il

18 est allé à Jablanica, je ne l'ai plus jamais revu.

19 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je veux dire juste avant qu'il ne

20 parte, est-ce que vous lui avez donné un avertissement particulier, est-ce

21 que vous lui avez dit quelque chose précisément, est-ce que c'est à ce

22 moment-là vous lui avez dit ce que vous nous dites lui avoir dit ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsqu'il se préparait pour partir avec Mahir

24 pour aller à Jablanica, je lui ai dit d'éviter les points de contrôle,

25 qu'il y avait énormément à l'époque, parce qu'il y en avait énormément à

26 l'époque. Je lui ai dit que la police le reconnaîtrait. Je lui ai dit : Ils

27 peuvent te tuer et tu es jeune. Lorsque tu feras ton voyage essaie de

28 passer par Bistrica pour te rendre à Jablanica. Malheureusement, ils ont

Page 4833

1 été détenus à un point de contrôle et c'est là qu'ils étaient coincés.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous écoute, Monsieur Troop.

3 M. TROOP : [interprétation] Monsieur le Président, simplement pour apporter

4 quelques précisions, je voulais expliquer de quelle façon le témoin savait

5 ce qui s'était passé au poste de police les

6 10 et 11 juillet. Si vous me permettez, je voudrais poser au témoin une ou

7 deux questions pour préciser ceci.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, faites.

9 M. TROOP : [interprétation]

10 Q. Monsieur Krasniqi, vous savez que votre fils était détenu au poste de

11 police de Klina les 10 et 11 juillet, il vous l'a dit au téléphone, n'est-

12 ce pas ?

13 R. Oui.

14 Q. Est-ce que plus tard vous avez parlé avec Mahir Dema concernant ce qui

15 s'était passé au poste de police impliquant Pal Krasniqi ?

16 R. Seulement lorsqu'il a été relâché, c'est après la guerre, parce que

17 dans l'intervalle je ne l'ai pas vu.

18 Q. Quand vous avez parlé à Mahir Dema sur ce qui s'était passé cette nuit-

19 là, est-ce qu'il vous a dit ce qui s'était passé, ce qu'il leur était

20 arrivé à tous les deux au poste de police ?

21 R. Oui.

22 Q. Donc cela c'est la base qui fait que vous avez compris que la police

23 l'avait reconnu et savait qui il était ?

24 R. La police savait d'avance qui il était, mais quand ils l'ont emmené à

25 Klina de nuit et lorsqu'ils ont vu leur permis de conduire, ils ont battu

26 Mahir Dema encore plus et ils lui ont demandé, ils lui ont dit : Pourquoi

27 es-tu venu ici à Klina depuis Istog. C'était un Musulman, parce qu'ils

28 évoquaient ces différences de religion qu'ils avaient contre eux. Il y

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1 avait un Serbe, un chef de grade élevé à Klina, il a reconnu mon fils,

2 parce que ceux de Belgrade ne savaient pas qui était Pal. Ils les ont

3 battus, mais ils ont frappé Mahir encore plus que mon fils, parce que cette

4 personne connaissait qui était mon fils et avait dit : Ne le tabassez pas

5 trop parce que c'est un bon gars. C'est pour cela qu'ils ont fait preuve de

6 retenue, ils ne l'ont pas battu aussi fort que Mahir.

7 Q. Je vous remercie, Monsieur Krasniqi.

8 M. TROOP : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Néanmoins, les deux questions qui me

10 viennent à l'esprit après cela. Monsieur Krasniqi, vous avez dit que

11 c'était un Serbe, un chef de rang élevé à Klina, est-ce que vous savez son

12 nom ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Lazar Zivkovic.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui vous a dit ceci, cet homme qui a dit

15 : Ne le tabassez pas trop parce que c'est un bon gars. Qui vous a dit cela

16 ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Mahir me l'a dit. Il a dit que c'était un

18 policier qui avait sauvé Pal, parce que ceux-là, ils étaient sur le point

19 de nous tuer. Ils ont dit à mon fils de rentrer chez lui et ils voulaient

20 garder Mahir, mais mon fils a dit, je ne partirai pas d'ici seul, sans

21 Mahir. Parce qu'ils avaient l'intention d'aller ensemble, là ils voulaient

22 aller, vous savez.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils ont été retenus à cet endroit-là.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson, Maître Guy-Smith, y a-

26 t-il d'autres questions que vous vouliez poser.

27 M. EMMERSON : [interprétation] Non.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Guy-Smith ?

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1 M. GUY-SMITH : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Di Fazio, est-ce que vous avez

3 des questions supplémentaires à poser au témoin ?

4 M. DI FAZIO : [interprétation] Juste une ou deux questions très brèves, si

5 vous le permettez.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, allez-y.

7 Nouvel interrogatoire par M. Di Fazio :

8 Q. [interprétation] Monsieur Krasniqi, on vous a posé certaines questions

9 qui découlaient d'une déclaration que Dede Deda a faite et je souhaiterais

10 que vous regardiez simplement certaines parties de cette déclaration.

11 M. DI FAZIO : [interprétation] Pourrait-on, s'il vous plaît, présenter à

12 l'écran la déclaration en question. Il s'agit, je crois, de la pièce D90.

13 Bien. Il s'agit de la deuxième page, c'est la deuxième page qui

14 m'intéresse, la page 2 ou 3. Je vous remercie.

15 Q. Au cours de votre interrogatoire le conseil de la Défense vous a

16 demandé la question suivante :

17 "Est-ce que Deda vous a parlé de la conversation qu'il a eue avec

18 votre fils vers la mi-août ?"

19 Vous avez répondu : "Oui."

20 On vous a montré la déclaration en question, et je voudrais savoir

21 quand vous avez parlé à Dede Deda et quand il vous a relaté cette

22 conversation qu'il avait eue avec votre fils au milieu du mois d'août 1998

23 ? Quand avez-vous parlé à Dede Deda ?

24 R. Nous avons parlé de cela après que j'ai fait ces déclarations, parce

25 qu'il était réticent pour ce qui était de me dire à l'époque, enfin,

26 entendant parler ici et là, il m'a dit ce qui s'était passé. Il m'a dit :

27 Vous savez, nous étions ensemble et je suis désolé qu'on ait aucun signe de

28 lui où que ce soit le concernant. Puis il m'a expliqué de quoi ils avaient

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1 parlé entre eux.

2 Q. Quand Dede Deda vous a relaté cela, est-ce qu'il a fourni des détails

3 sur l'endroit où Pal se trouvait apparemment lorsqu'il a donné ce coup de

4 téléphone ?

5 R. Il était à Jablanica et avec son téléphone mobile ou son walkie-talkie,

6 il a parlé en expliquant qu'il était à Jablanica en lui disant que : "J'ai

7 beaucoup d'argent et tu dois m'attendre à cet endroit-là."

8 Q. Bien. Ceux-ci, ce sont les détails de ce que vous avez dit Dede Deda ?

9 Est-ce que je vous ai bien compris ?

10 R. Oui.

11 Q. Est-ce que votre fils possédait un téléphone mobile ?

12 R. Je ne sais pas s'il avait un téléphone mobile ou si c'était un de ses

13 amis, mais Dede m'a dit qu'ils avaient parlé au téléphone. Et j'avais dit :

14 Mais c'est un secret. Attention, tu ne devrais pas en parler. Attention aux

15 civils et aux membres de l'armée.

16 Q. Pourriez-vous dire aux membres de la Chambre de première instance si à

17 un moment quelconque, je veux parler du mois d'août 1998, il y a eu des

18 connexions téléphoniques avec Jablanica ?

19 R. Il n'y avait pas de lignes fixes, mais tous ceux qui en avaient les

20 moyens achetaient des téléphones mobiles et également ceux qu'on appelle

21 des walkies-talkies. Je ne sais pas où ils les avaient trouvés.

22 Q. Est-ce que votre fils avait beaucoup d'argent sur lui lorsqu'il vous a

23 quitté le 10 juillet ?

24 R. Non, non. Il avait peut-être 50 deutschemarks.

25 Q. Quel travail faisait votre fils à l'époque ? Quelle était son

26 occupation ?

27 R. Il donnait des coups de main par-ci, par-là. Il faisait des courses ça

28 et là. Il faisait des travaux manuels, des activités pour lesquelles nous

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1 étions payés.

2 Q. Est-ce que Dede -- excusez-moi, je finirai par réussir à dire

3 correctement son nom. Est-ce que Dede Deda a fait des commentaires ou il

4 vous a fourni des renseignements sur la façon dont parlait Pal Krasniqi

5 lorsqu'il prenait contact avec les téléphones mobiles ou le walkie-talkie ?

6 R. Non, c'était une brève conversation, tout au moins c'est ce qu'il m'a

7 dit. Cela ne durait pas longtemps. Bien sûr, ils avaient peur que quelqu'un

8 puisse intercepter la conversation. C'est pour cela qu'ils ne parlaient pas

9 longtemps.

10 Q. Lorsque vous dites : "Qu'ils avaient peur que quelqu'un puisse écouter

11 et intercepter leur conversation, est-ce que c'est quelque chose qui, vous

12 pensez, était une considération dont ils tenaient compte ou est-ce que

13 c'est quelque chose qui vous a été dit comme étant la raison pour laquelle

14 ils ne parlaient pas longtemps ?

15 R. Lorsque Dede parlait à mon fils c'était très bref. C'est ce qu'il m'a

16 dit. Donc il est sorti pour attendre mon fils qui n'est jamais arrivé, il

17 n'est jamais apparu.

18 Q. Je vous remercie beaucoup.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois qu'il n'y a pas d'autres

20 questions des conseils de la Défense.

21 Monsieur Krasniqi, ceci conclut votre déposition devant cette Chambre du

22 Tribunal. Je souhaite vous remercier beaucoup d'être venu jusqu'à La Haye

23 et d'avoir répondu à toutes les questions qui vous étaient posées.

24 Attendez, je vous prie de m'excuser une seconde.

25 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Par conséquent, je vous souhaite un bon

27 voyage de retour chez vous. Avant que je demande à l'huissier d'escorter le

28 témoin hors du prétoire, je souhaiterais savoir des parties si l'huissier

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1 au retour pourrait faire immédiatement entrer le témoin suivant.

2 Monsieur Re, est-ce que le témoin suivant peut être amené dans la salle

3 d'audience directement ?

4 M. RE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, aucune mesure de

5 protection n'est nécessaire.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

7 Alors, Monsieur l'Huissier, pouvez-vous escorter M. Krasniqi hors de

8 la salle d'audience ?

9 Je vous souhaite un bon voyage de retour, Monsieur Krasniqi.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

11 [Le témoin se retire]

12 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je regarde la pendule, et je vois

14 que nous avons encore deux heures d'audience dont il faut retrancher 20

15 minutes pour une suspension de séance, ce qui veut dire 1 heure et 40

16 minutes. J'encourage les parties à utiliser le temps qui reste de la façon

17 aussi efficace que possible, de façon à voir s'il serait possible d'en

18 terminer avec le témoin aujourd'hui, de façon à ce que ce témoin puisse

19 rentrer chez lui, plus particulièrement, parce que nous ne siégeons pas

20 lundi prochain, et donc il devra rester un moment à La Haye, pour peut-être

21 pendant

22 15 ou 20 minutes. Alors, les parties sont encouragées à voir ce qu'elles

23 peuvent faire à cet égard.

24 M. EMMERSON : [interprétation] S'il y a une possibilité de le faire,

25 Monsieur le Président, au cours de la prochaine suspension, on voudrait

26 voir s'il y a quelques souplesses pour continuer éventuellement l'audience

27 au-delà de deux heures moins quart.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien sûr, nous allons faire cela. En

Page 4839

1 même temps, ce n'est pas seulement une question de temps et d'horaire pour

2 la salle d'audience, mais c'est aussi la question de savoir si on peut

3 demander aux interprètes et aux sténos.

4 M. EMMERSON : [interprétation] Je comprends.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ceci c'est limité. Je voudrais vraiment

6 encourager les parties à voir si elles pourraient même conclure avec ce

7 témoin sans présenter une demande de temps supplémentaire.

8 Dans l'intervalle, je prends le temps de dire quelques mots

9 concernant le calendrier. Le 6 juin, je crois, que ceci a déjà été annoncé,

10 nous n'allons pas siéger, parce que la Chambre d'appel a besoin de la salle

11 d'audience.

12 Je crois que précédemment j'avais annoncé que nous essaierions de

13 faire un échange pour le 15 juin, c'est-à-dire vendredi, d'habitude nous ne

14 siégions pas un vendredi. Mais si on pouvait le faire le matin et de passer

15 de l'audience de l'après-midi à celle du matin; il semblerait que ceci soit

16 possible [comme interprété].

17 Ceci veut dire que lors de cette semaine, lundi 11, nous n'allons pas

18 siéger. Nous allons siéger les 12, 13, et 14, et ce vendredi le 15 juin,

19 nous siégerons dans l'après-midi et non pas dans la matinée.

20 Ensuite, en ce qui concerne les autres vendredis du mois de juin, à

21 savoir le 8 nous n'allons pas siéger, le 22 nous n'allons pas siéger et le

22 vendredi 29 nous n'allons pas siéger non plus.

23 En juillet, le vendredi 6, nous n'allons pas siéger. Nous avons un

24 peu de temps libre au cours de cette semaine. Ceci a déjà été annoncé à la

25 suite d'une demande spécifique de Me Emmerson. Nous avons le vendredi 13,

26 je pense qu'il faudra encore que nous voyions comment les choses se

27 présentent, compte tenu de l'ensemble de cette semaine, mais nous avons

28 également l'intention de ne pas siéger le

Page 4840

1 20 juillet. Je ne sais pas si je suis en train de mélanger les choses. Il

2 faut que je vérifie.

3 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Donc vendredi,

5 20 juillet, nous ne siégerons pas. Mais pour juillet, la même chose vaut

6 que s'il y avait une nécessité particulière qui pourrait nous amener à

7 décider autrement compte tenu des circonstances à ce moment-là, et ceci,

8 plus particulièrement pour le vendredi 20 juillet, qui est l'un des

9 derniers jours avant qu'il n'y ait les vacances judicaires.

10 Bonjour, Témoin. Pouvez-vous m'entendre dans une langue que vous

11 comprenez ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Gashi, avant que vous ne

14 commenciez votre déposition le Règlement de procédure et de preuve exige

15 que vous fassiez une déclaration solennelle selon laquelle vous direz la

16 vérité, toute la vérité, et rien que la vérité. L'huissier va vous

17 maintenant tendre le texte de cette déclaration solennelle. Je vais vous

18 demander de vous lever et de faire cette déclaration solennelle.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

20 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

21 LE TÉMOIN: MEDIN GASHI [Assermenté]

22 [Le témoin répond par l'interprète]

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Gashi. M. Re

24 va vous interroger pour commencer. Il est le conseil de l'Accusation.

25 Monsieur Re, c'est à vous, s'il vous plaît.

26 Interrogatoire principal par M. Re :

27 Q. [interprétation] Bonjour, Témoin. Est-ce que votre nom est bien Medin

28 Gashi ?

Page 4841

1 R. Oui.

2 Q. Vous êtes né le 3 février 1980 ?

3 R. Oui.

4 Q. Vous êtes né à Peje au Kosovo ?

5 R. Oui.

6 Q. Est-ce que votre père était bien feu Kemajl Gashi ?

7 R. Kemajl, oui.

8 Q. En quelle année votre père est-il né ?

9 R. Je ne sais pas, excusez-moi.

10 Q. En 1998, où votre père vivait-il ?

11 R. A Peje.

12 Q. Avec qui vivait-il?

13 R. En 1998 ?

14 Q. Oui.

15 R. Avec sa famille.

16 Q. Est-ce que vous viviez avec lui ?

17 R. Nous vivions séparément en ce sens qu'il vivait dans une des pièces et

18 moi dans une autre.

19 Q. Il avait bien 43 ans cette année-là ?

20 R. Je pense que oui, oui. Je ne suis pas absolument sûr.

21 M. RE : [interprétation] Pourrait-on présenter au témoin la pièce 760 de la

22 liste 65 ter ?

23 Q. Quelle était sa profession ?

24 R. Mon père travaillait à l'usine de chaussures.

25 Q. Il fabriquait des chaussures ?

26 R. Oui.

27 Q. Etait-il membre d'une organisation politique ?

28 R. Non.

Page 4842

1 Q. Quel était son origine ethnique ?

2 R. Pouvez-vous répéter la question, s'il vous plaît ? Je ne l'ai pas

3 comprise.

4 Q. Etait-il un Albanais du Kosovo ?

5 R. Il était un Albanais du Kosovo, oui.

6 Q. Quelle était sa religion ?

7 R. Musulmane.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, quel sera le numéro

9 pour --

10 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agira de la

11 pièce à conviction numéro P325, cote provisoire aux fins d'identification.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

13 M. RE : [interprétation]

14 Q. Pourriez-vous jeter un coup d'œil à la photographie qui apparaît à

15 l'écran devant vous ? Est-ce que c'est une photographie de feu votre père,

16 Kemajl Gashi ?

17 R. Oui.

18 Q. Est-ce que vous connaissiez l'affiliation politique de votre père en

19 1998 ?

20 R. Non.

21 Q. Savez-vous s'il avait des sympathies pour les autorités serbes au

22 Kosovo ?

23 R. Je ne sais pas.

24 Q. Savez-vous s'il travaillait pour le compte ou avec les autorités serbes

25 au Kosovo en 1998 ?

26 R. D'après mes souvenirs, non.

27 Q. Que voulez-vous dire par "d'après mes souvenirs" ?

28 R. J'étais très jeune à l'époque et je ne me rappelle pas s'il y

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1 appartenait ou non.

2 Q. A quoi travailliez-vous en 1998 ?

3 R. Qui ?

4 Q. Vous.

5 R. Moi ? J'ai essayé de faire un peu de tout. Je vendais des produits au

6 bazar. Je travaillais comme mécanicien. Tout travail que je pouvais trouver

7 je le faisais.

8 Q. Au cours de l'année 1998 est-ce que vous viviez à Peje ?

9 R. Oui.

10 Q. Etiez-vous au courant de l'existence de l'UCK dans ce secteur à

11 l'époque dans la région ?

12 R. Pourriez-vous répéter la question, parce que je ne l'ai pas comprise ?

13 Q. Vous savez ce qu'est l'UCK ?

14 R. Oui.

15 Q. Est-ce que vous saviez quelque chose à leur sujet vers la moitié de

16 l'année 1998 lorsque vous travailliez et vous viviez à

17 Peje ?

18 R. Oui.

19 Q. Que saviez-vous à ce sujet ?

20 R. Que c'était une armée, notre armée.

21 Q. Que vous voulez dire "notre armée" ?

22 R. Une armée.

23 Q. Pour les Albanais kosovars, c'est cela que vous voulez

24 dire ?

25 R. Oui.

26 Q. Est-ce que vous avez sympathisé avec les objectifs de l'UCK

27 contre les autorités serbes ?

28 R. Est-ce que vous pourriez répéter votre question, s'il vous plaît.

Page 4844

1 Q. Est-ce que vous avez tendance à croire en ce qu'ils étaient en

2 train de faire en combattant les Serbes ?

3 R. Je ne comprends pas la question.

4 Q. Est-ce que vous avez rejoint l'UCK ?

5 R. Oui.

6 Q. Pourquoi aviez-vous rejoint l'UCK ?

7 R. Parce que je souhaitais le faire.

8 Q. Pourquoi souhaitiez-vous rejoindre l'UCK ?

9 R. Et bien, c'est ce que je pensais. C'est les sentiments que

10 j'avais ainsi que mes amis.

11 Q. Qu'est-ce que l'UCK avait qui vous faisait envie de les rejoindre

12 ?

13 R. [aucune interprétation]

14 L'INTERPRÈTE : Est-ce qu'on pourrait demander au témoin de répéter sa

15 réponse parce qu'elle n'a pas été comprise.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Gashi, pourriez-vous

17 répéter votre dernière réponse, parce que les interprètes ne l'ont pas bien

18 entendue.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que j'avais envie de rejoindre, de

20 la rejoindre.

21 M. RE : [interprétation]

22 Q. Pourriez-vous nous dire pourquoi vous vouliez vous joindre à

23 l'UCK. Pourriez-vous dire aux membres de la Chambre de première instance,

24 personne ici ne vous connaît, nous voudrions savoir pourquoi vous vouliez

25 rejoindre l'UCK en 1998 ?

26 R. Je l'aimais, je souhaitais la rejoindre.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, il faut que

28 j'intervienne un instant. En lisant la déclaration du témoin, elle donnait

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1 l'impression que ce que le témoin savait au sujet de l'UCK, ce qui l'a, en

2 fait, amené à les rejoindre, et cetera, semble ne pas être l'essentiel de

3 la déposition à laquelle nous nous attendons. Bien entendu, s'il y a une

4 pertinence précise qui amène à creuser cette question de façon détaillée,

5 alors, bien sûr, je ne veux pas vous arrêter, mais cela m'a donné

6 l'impression que les événements qui se sont déroulés après qu'il ait

7 rejoint l'UCK étaient d'une importance majeure pour la déposition, plutôt

8 que les motivations et la connaissance. J'ai demandé, j'ai insisté auprès

9 des parties pour voir si elles pouvaient interroger d'une façon aussi

10 efficace que possible.

11 M. RE : [interprétation]

12 Q. Comment se fait-il que vous ayez rejoint l'UCK, qu'est-ce que

13 vous avez fait pour rejoindre l'UCK ?

14 R. Nous y sommes allés avec une femme de Klicine, c'est là que j'ai

15 rejoint l'UCK.

16 M. RE : [interprétation] Bien. On m'a dit que je ne pouvais pas poser

17 de questions directrices, sans ça j'aurais posé des questions en ce sens au

18 fur et à mesure.

19 M. EMMERSON : [interprétation] Je suis d'accord pour que M. Re pose

20 des questions directrices sur des points essentiels de ce type.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie.

22 M. EMMERSON : [interprétation] De toute façon, dès que je ne serai

23 pas satisfait de la façon dont il l'interrogera, je pourrais l'indiquer si

24 vous permettez.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

26 M. RE : [interprétation]

27 Q. Est-ce que vous avez rejoint l'UCK à Barane ?

28 R. Oui.

Page 4846

1 Q. Est-ce que vous êtes allé là en passant par le village de

2 Klicine, est-ce que vous êtes arrivé à Brelic de cette manière et qu'il y

3 avait un point de contrôle de l'UCK à Brelic ?

4 R. Oui.

5 Q. Quand vous êtes arrivé à Barane, est-ce que vous vous êtes

6 présenté au quartier général de l'UCK ?

7 R. Oui.

8 M. EMMERSON : [interprétation] Ce point-là maintenant a été atteint.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Veuillez poursuivre, Monsieur Re.

10 M. RE : [interprétation]

11 Q. Pourquoi êtes-vous allé à Barane ? Quel autre centre de l'UCK --

12 R. Je suis allé rejoindre l'UCK.

13 Q. Mais pourquoi à Barane, est-ce qu'il y avait d'autres lieux où se

14 trouvaient l'UCK auxquels vous auriez pu aller ?

15 R. Parce que c'était le plus proche de l'endroit où je vivais et je ne

16 savais pas s'il y avait un autre endroit que celui-là.

17 Q. Que s'est-il passé lorsque -- non je retire ma question.

18 Où se trouvait le quartier général de l'UCK à Barane ?

19 R. Dans un bâtiment d'école.

20 Q. Je vais essayer de vous montrer une photographie qui est la 1343 de la

21 liste 65 ter. Pendant qu'on attend qu'elle apparaisse à l'écran je vais

22 vous poser une autre question.

23 A qui avez-vous parlé lorsque vous êtes entré à l'école ?

24 R. Je suis entré au quartier général et je m'y suis présenté.

25 Q. A qui vous êtes-vous présenté et quelle a été leur réponse lorsque vous

26 vous êtes présenté là-bas ?

27 R. Le garde m'a fait entrer dans le bureau où je me suis présenté. A

28 l'origine, il ne voulait pas me prendre parce que j'étais trop jeune. Je

Page 4847

1 les ai suppliés de me prendre. Je leur ai dit que je voulais les rejoindre.

2 Finalement, ils ont cédé, ils ont accepté.

3 Q. Pourriez-vous jeter un coup d'œil à la photographie qui est sur

4 l'écran, s'il vous plaît.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Greffière, ceci portera la cote ?

6 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la cote P326 marquée aux

7 fins d'identification.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière.

9 M. RE : [interprétation]

10 Q. Est-ce que c'était cela l'école à Barane où vous êtes

11 allé ?

12 R. Oui, oui.

13 Q. Vous souvenez-vous d'être allé à une cérémonie pour prêter serment à

14 Barane au cours de l'été 1998 ?

15 R. Oui.

16 Q. Combien de temps après avoir rejoint l'UCK à Barane, cette cérémonie de

17 prestation de serment a-t-elle eu lieu, approximativement, en termes de

18 jours ou de semaines ?

19 R. Peut-être une semaine ou deux, mais je ne suis pas sûr.

20 Q. Si je vous disais que la date qui apparaît sur cette vidéo est le 20

21 juillet 1998, cela rafraîchirait-il votre mémoire ?

22 R. Non, pas vraiment.

23 Q. Lorsque vous avez rejoint l'UCK, avez-vous suivi un entraînement, une

24 formation ? Vous a-t-on donné des armes, un uniforme ?

25 R. Non pas d'uniforme. Une arme, j'en ai eu une deux semaines plus tard,

26 on nous a formés.

27 Q. Quel type d'entraînement, de formation, avez-vous reçu et où a-t-il eu

28 lieu ?

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1 R. Dans les champs aux alentours, c'est là qu'on s'entraînait. On nous

2 faisait courir et on faisait les exercices habituels.

3 Q. Dites, s'il vous plaît, aux Juges brièvement, quels étaient ces

4 exercices ordinaires, habituels ?

5 R. On courrait, on jouait au football, et cetera.

6 Q. En tant que formation militaire, avez-vous reçu une quelconque

7 formation militaire ?

8 R. Oui, mais pas beaucoup.

9 Q. Avez-vous fait des exercices de nature militaire ?

10 R. Oui, comme je l'ai dit, très peu, trois, quatre jours.

11 Q. Qui était responsable de cet entraînement ? Qui vous formait ?

12 R. C'était un militaire de Peje qui s'appelle Ardijan.

13 Q. Portait-il un uniforme, lui ?

14 R. Oui, oui.

15 Q. Avez-vous subi une formation militaire telle que de creuser des

16 tranchées, les arts martiaux ou tout autre type d'entraînement, de

17 formation militaire habituelle ?

18 R. Non.

19 Q. Vous souvenez-vous combien de temps vous êtes resté à l'UCK, un nombre

20 de jours, de semaines, de mois ?

21 R. Non, je ne sais pas. Je crois que c'était peut-être trois semaines et

22 demie ou quatre, mais je ne me souviens pas précisément.

23 Q. Quelle arme vous a-t-on donné au bout de deux semaines ?

24 R. Une Popov, 10-millimètres.

25 Q. Quel type d'arme est-ce ? Est-ce que c'est long ou c'est une arme à

26 canon court ou à canon long ?

27 R. C'est un fusil, la marque c'est Popov, 10-millimètres.

28 Q. Y avait-il d'autres recrues qui participaient à cette formation, qui

Page 4849

1 participaient à ces exercices avec vous ?

2 R. Non.

3 Q. Qui faisait l'entraînement avec vous ?

4 R. Avec des amis. C'était un certain Ardijan de Peje qui nous entraînait.

5 Q. Où logiez-vous ?

6 R. Je n'ai pas compris ce que vous venez de dire ? Est-ce que vous

7 pourriez répéter ?

8 Q. Est-ce que vous étiez logé à l'école ?

9 R. Oui, à l'école.

10 Q. Où dormiez-vous ?

11 R. Au deuxième étage de l'école.

12 Q. Combien d'autres personnes dormaient là-bas également ?

13 R. Je ne sais pas. Il y avait beaucoup de monde, mais je ne me souviens

14 pas exactement.

15 Q. Quand vous dites "beaucoup," est-ce que c'était moins de dix, plus de

16 dix, plus de 20, moins de 20, 50, 100 ? Qu'entendez-vous par là ?

17 R. Dans la chambre où nous étions il y avait peut-être 20,

18 22 personnes.

19 Q. Combien de soldats de l'UCK étaient présents dans cette école,

20 approximativement ?

21 R. Je ne sais pas.

22 Q. En termes de tâches à effectuer, vous a-t-on assigné des tâches après

23 vous avoir donné une arme, le fusil ?

24 R. Nettoyage, tour de garde et aider dans la cuisine.

25 Q. Quels étaient vos tours de garde ? Que gardiez-vous ?

26 R. J'étais un garde avec une arme, avec un fusil.

27 Q. Est-ce que vous gardiez l'école ?

28 R. Oui.

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1 Q. Qui est Musa Draga ?

2 R. Mon commandant.

3 Q. Est-ce que vous le connaissiez avant de rejoindre l'UCK à Barane ?

4 R. Non, non.

5 Q. Etes-vous allé à la cérémonie de prestation de serment à Barane ?

6 R. Oui.

7 Q. Je vais vous montrer une séquence vidéo assez brève. Il s'agit de la

8 pièce D41 qu'on voit sur "timer."

9 M. EMMERSON : [interprétation] Monsieur le Président, juste avant cela.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Emmerson.

11 M. EMMERSON : [interprétation] Juste avant que cela soit joué, j'aimerais

12 soulever une question. J'aimerais que le témoin retire son casque.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

14 Monsieur Gashi, est-ce que vous comprenez l'anglais ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je vais vous demander de retirer

17 vos écouteurs quelques instants, s'il vous plaît.

18 M. EMMERSON : [interprétation] Monsieur le Président, cette séquence a une

19 cote de la Défense, parce que nous pensions l'utiliser pour le contre-

20 interrogatoire de Rrustem Tetaj, mais en fin de compte cela n'a été fait en

21 raison des contraintes de temps.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien maintenant vous avez compris que ce

23 serait utilisé aujourd'hui.

24 M. EMMERSON : [interprétation] Pendant le contre-interrogatoire. Si M. Re a

25 l'intention de passer cette vidéo pendant son interrogatoire principal - de

26 toute façon, il se peut qu'il y ait des doublons des doublons, et pour

27 gagner du temps je voulais signaler que cette vidéo va montrer Tahir Zemaj

28 et Ramush Haradinaj qui sont debout sur une estrade et qui sont en train de

Page 4851

1 parler à un groupe de recrues, et plutôt que de prendre le temps de

2 demander à ce témoin de passer en revue les personnes qu'on voit sur cette

3 vidéo, j'aimerais simplement attirer votre attention, Monsieur le

4 Président, le fait que c'est cela que l'on montre. Puis il y aussi une

5 personne qui fait des allers-retours le long de la ligne de recrues. Peut-

6 être que ce sera utile que le témoin identifie cette personne.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Re.

8 M. RE : [interprétation] Non, non, ce n'est pas acceptable.

9 M. Emmerson vient juste d'utiliser une partie de mon temps. J'aimerais

10 montrer au témoin une minute de cette vidéo et simplement lui montrer la

11 vidéo. Je ne vais pas suivre la proposition qui est faite.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, on pourra la montrer plus tard.

13 M. RE : [interprétation] Mais il peut faire cela pendant son contre-

14 interrogatoire.

15 [La Chambre de première instance se concerte]

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Emmerson, nous allons nous

17 départir de l'ordre normal, cela est permis. Une fois que vous l'aurez

18 montrée, vous pourrez demander au témoin d'identifier une personne, la

19 personne qui est intéressée de façon à éviter de repasser cela plus tard.

20 M. RE : [interprétation] M. Emmerson a-t-il un chronomètre ? Parce que s'il

21 m'avait prévenu, bien, j'aurais pu lui apporter. J'ai, en fait, ici un

22 passage de 3 minutes 26 secondes --

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, je vous prie de bien

24 vouloir poursuivre. Montrez la vidéo au témoin. Je crois que

25 l'identification, si j'ai bien compris, des autres personnes n'est pas

26 nécessaire.

27 Je vous prie de poursuivre.

28 M. RE : [interprétation] J'aimerais montrer au témoin la vidéo, et aux fins

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1 du compte rendu d'audience je signale qu'il s'agit de la pièce D41, de la

2 minute 3:26 à la minute 4:28 [comme interprété].

3 [Diffusion de la cassette vidéo]

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Emmerson, je n'ai vu personne

5 se déplacer sur le fond de l'image.

6 M. EMMERSON : [interprétation] En fait, je peux poser la question à partir

7 de ce passage. Parce que la personne en question, bien qu'elle ne se

8 déplace pas --

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord, mais je vous laisserai faire

10 cela après que M. Re aura poser sa question à ce sujet. Oui. Et si vous

11 pouviez nous donner le moment exact, nous pourrions déjà demander qu'il

12 soit retrouvé pour votre question.

13 Monsieur Re.

14 M. RE : [interprétation]

15 Q. Monsieur Gashi, avez-vous vu cette vidéo pour la première fois, hier,

16 me semble-t-il, dans les bureaux de l'Accusation ?

17 R. Oui.

18 Q. Avez-vous visionné la vidéo dans sa totalité, qui dure environ une

19 heure et demie ?

20 R. Oui.

21 Q. Etiez-vous présent à cette cérémonie ?

22 R. Je ne me suis pas vu dessus.

23 Q. Vous souvenez-vous où vous étiez pendant la cérémonie ?

24 R. Non, je ne sais pas, parce qu'il y avait pas mal de monde. Il y avait

25 foule, donc je ne sais pas.

26 Q. Etiez-vous l'un des soldats en uniforme qui se tenaient debout pendant

27 qu'on leur parlait ?

28 R. Je n'avais pas d'uniforme.

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1 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Désolé de vous interrompre. A-t-il

2 été dit clairement par le témoin qu'il s'agit de la cérémonie à laquelle il

3 a participé lui-même ?

4 M. RE : [interprétation]

5 Q. Pour préciser les choses pour les Juges de la Chambre, vous étiez

6 là mais vous ne vous êtes pas vu sur la vidéo ?

7 R. Oui.

8 Q. Très bien.

9 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Très bien. Merci.

10 M. RE : [interprétation]

11 Q. Et vous souvenez-vous que Ramush Haradinaj s'est adressé aux soldats à

12 cette occasion ?

13 R. Je ne me souviens pas de ça.

14 Q. Le connaissiez-vous avant ça ou aviez-vous entendu parlé de lui, ou

15 l'aviez-vous déjà vu avant ce jour-là ?

16 R. Non. Uniquement à la télévision, je l'avais vu.

17 Q. Avant ou après ?

18 R. Non, non, avant quand j'étais à Peje, avant d'aller à Barane. J'avais

19 entendu les gens parler de "Ramush, Ramush", mais je ne l'avais pas vu.

20 Q. Et avez-vous fait le lien entre "Ramush, Ramush", et la personne qui

21 s'adressait aux soldats quand vous étiez là-bas ce jour-là ? En fait ma

22 question est, s'agissait-il du même Ramush ?

23 R. Oui. Oui.

24 Q. Et Tahir Zemaj, est-ce que vous vous souvenez l'avoir vu ce jour-là

25 s'adressant à la foule ?

26 R. Je ne le connaissais pas.

27 M. RE : [interprétation] Ce sont-là les questions que j'avais à poser

28 concernant la vidéo. Si M. Emmerson veut poser les siennes maintenant.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a un point qui n'est pas tout à

2 fait clair. Vous avez dit que vous aviez vu M. Haradinaj à la télévision.

3 M. Re vous a demandé si c'était avant ou après la cérémonie. Vous avez dit

4 "avant", et que vous aviez entendu des gens parler de "Ramush, Ramush".

5 Est-ce vous l'aviez déjà vu à la télévision avant la cérémonie ou est-ce

6 que vous aviez juste entendu parler de lui ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] J'avais entendu parler de lui, oui. Mais je ne

8 l'avais pas vu. Non.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et à l'époque, l'aviez-vous aussi déjà

10 vu à la télévision à ce moment-là?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Emmerson, s'il y a un passage

13 en particulier, pourriez-vous nous l'indiquer ?

14 M. EMMERSON : [interprétation] Je n'ai qu'une question, et peut-être

15 que le témoin pourra y répondre sans visionner la vidéo.

16 Donc, à la fin de ce passage de la vidéo, il y avait un homme debout sur

17 l'estrade, qui s'adressait au groupe de soldats. Permettez que je vous pose

18 la question suivante : savez-vous qui est Nazif Ramabaja ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

20 M. EMMERSON : [interprétation] Connaissez-vous l'identité de l'homme que

21 l'on voit à la toute fin de cette séquence vidéo que nous venons de voir,

22 debout, au balcon, et s'adressant aux soldats ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

24 M. EMMERSON : [interprétation] Merci.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Re.

26 M. RE : [interprétation]

27 Q. Avez-vous prêté serment avec les autres soldats au cours de cette

28 cérémonie de prestation de serment que l'on voit dans cette vidéo ?

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1 R. Oui.

2 Q. Vous a-t-on remis un certificat de membre après que vous avez prêté

3 serment ?

4 R. Oui.

5 Q. L'avez-vous toujours en votre possession ou qu'en est-il advenu ?

6 R. Non.

7 Q. Une fois que vous avez rejoint les rangs de l'UCK à Barane, êtes-vous

8 rentré chez vous pour voir votre famille pendant que vous étiez toujours

9 dans les rangs de l'UCK ?

10 R. Non, je n'y suis pas allé.

11 Q. Et votre sœur, vous avez une sœur qui s'appelle Ganimete ?

12 R. Oui. Elle était à Buqan.

13 Q. A quelle distance se trouve Buqan de Barane ?

14 R. Environ 90 minutes, une heure. Je ne sais pas.

15 Q. A pied ?

16 R. Oui, à pied.

17 Q. Est-ce que vous l'avez vue alors que vous logiez à l'école de l'UCK ?

18 R. Oui.

19 Q. Non.

20 Q. Est-ce qu'il y avait quelqu'un du nom d'Agim à l'école de l'UCK avec

21 vous ?

22 R. Oui.

23 R. Oui.

24 Q. Qui était-il ?

25 R. Un de mes collègues. On partageait une chambre.

26 Q. D'où était-il ? De quel village était-il ?

27 R. Il était de Rasuje.

28 Q. A quelle distance de Barane se trouve Rasuje ?

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1 R. Peut-être une heure.

2 Q. Vous a-t-il demandé de faire quelque chose un jour ?

3 R. A moi ? Rien.

4 Q. Vous a-t-il dit qu'il fallait que vous alliez quelque part ?

5 R. Oui. A un bureau.

6 Q. Que vous a-t-il dit concernant ce que vous deviez faire ?

7 R. Il est monté dans la chambre, et il m'a dit qu'il fallait que je

8 descende parce que Musa Draga voulait me voir. Je suis descendu.

9 Q. Où êtes-vous allé ?

10 R. Dans le bureau de Musa Draga.

11 Q. Où son bureau se trouvait-il ?

12 R. Au premier étage.

13 Q. De l'école ?

14 R. Oui.

15 Q. Et que vous a dit Musa Draga ?

16 R. Musa Draga m'a dit d'aller voir Mete.

17 Q. Qui est Mete ?

18 R. Mete Krasniqi. Avant il s'appellait Mete Vranoci.

19 Q. Quel était son poste ?

20 R. Il était officier de la police militaire. Il portait un uniforme noir.

21 Je ne sais pas quel était son grade, ni son rôle.

22 Q. Musa Draga vous a dit d'aller voir Mete. Etes-vous allé voir Mete ?

23 R. Oui.

24 Q. Où êtes-vous allé ?

25 R. Au bureau de Mete.

26 Q. Où était le bureau de Mete ?

27 R. Le bureau de Mete était à environ 100 mètres du bâtiment de l'école.

28 Q. Et on ne peut pas le voir sur la photo de l'école que je vous ai montré

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1 tout à l'heure, n'est-ce pas ?

2 R. Non, non.

3 Q. Etes-vous allé au bureau de Mete avec quelqu'un ou y êtes-vous allé

4 seul ?

5 R. Seul.

6 Q. Est-ce que Mete est en vie ?

7 R. Non.

8 Q. Qu'est-il arrivé à Mete ?

9 R. Je ne sais pas.

10 Q. Comment savez-vous qu'il est mort alors ?

11 R. C'est ce que les gens disent, qu'il est mort, mais je ne sais pas.

12 Q. Dans quel genre de bâtiment se trouvait le bureau de Mete ? Pouvez-vous

13 décrire ce bâtiment à la Chambre de première instance, en quoi était-il,

14 combien avait-il de pièces ?

15 R. Oui, il y avait deux pièces. J'ai vu un couloir et une pièce. C'était à

16 100 mètres de l'école.

17 Q. Combien d'étages y avait-il à ce bâtiment ?

18 R. C'était un bâtiment à un étage.

19 Q. Etes-vous rentré dans le bâtiment ?

20 R. Oui.

21 Q. Qui s'y trouvait ?

22 R. Mete et deux autres personnes.

23 Q. Vous avez dit il y a quelques instants, que Mete portait un uniforme

24 noir. Et les deux autres ?

25 R. Oui.

26 Q. Oui, ils portaient un uniforme noir; ou oui, ils portaient un

27 uniforme ?

28 R. Je ne leur ai pas prêté beaucoup d'attention.

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1 Q. Est-ce que vous vous souvenez s'ils portaient un uniforme ?

2 R. Non, non. Je crois que non.

3 Q. Etaient-ils armés ? Un des trois ?

4 R. Des armes, oui.

5 Q. Où se trouvait Mete quand vous êtes entré dans le bâtiment ? Vous avez

6 décrit un couloir et une pièce. Où Mete se trouvait-il ?

7 R. Dans le couloir.

8 Q. S'agissait-il d'un couloir dans lequel on entrait directement par la

9 porte par laquelle vous êtes entré ? Où était-il ailleurs ? En fait, ce que

10 je veux dire c'est, est-ce que l'on entrait directement dans un couloir ?

11 R. Oui.

12 Q. Et que vous a dit Mete -- attendez, un instant. Veuillez m'excuser. Y

13 avait-il des meubles dans ce couloir, autant que vous vous en souveniez ?

14 R. Je ne me souviens pas.

15 Q. Que vous a dit Mete ?

16 R. Dès que je suis rentré, il m'a dit : Tu es le fils de l'espion.

17 Q. Comment vous a-t-il dit cela, sur quel ton ?

18 R. Pas très fort.

19 Q. Qu'avez-vous répondu quand il vous a dit : Tu es le fils de l'espion ?

20 R. J'ai dit : Ce n'est pas vrai.

21 Q. Que vous a-t-il dit d'autre ?

22 R. Rien d'autre.

23 Q. Est-ce que vous lui avez demandé quoi que ce soit concernant les

24 accusations ou la déclaration selon laquelle vous étiez le fils d'un espion

25 ?

26 R. Non, je ne lui ai pas posé de questions.

27 Q. Que s'est-il passé après ?

28 R. Rien ne s'est passé. J'ai demandé à partir, puis on m'a

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1 dit : Ton père a été emmené ici par une jeep de la police.

2 Q. Qui a dit cela ?

3 R. Mete. C'est Mete qui a dit cela.

4 Q. Qui étaient les personnes qui étaient avec lui ?

5 R. Je ne les connais pas.

6 Q. Vous avez dit que vous étiez déjà allé au bureau de Musa Draga. Est-ce

7 que vous savez si Musa Draga était là-bas ?

8 R. Non.

9 Q. Vous nous avez dit que Mete vous a dit que son père avait été emmené à

10 bord d'une jeep de police. Comment avez-vous interprété ce propos ?

11 R. J'ai compris par là qu'il avait été emmené en tant qu'espion.

12 Q. Pourquoi est-ce que vous avez compris cela ?

13 R. Parce que c'est qu'il m'a dit.

14 Q. Lorsque Mete a parlé d'une jeep de police, à quoi faisait-il référence

15 exactement, quel type de jeep ?

16 R. C'était une jeep de la police serbe.

17 Q. Pourquoi vous aviez cru qu'il s'agissait d'une jeep de police serbe ?

18 R. Parce que nous n'avions pas notre propre police à l'époque.

19 Q. Où était votre père lorsque vous avez eu cet entretien avec Mete ?

20 R. Dans la pièce.

21 Q. De quelle pièce parlez-vous ?

22 R. C'était dans le bureau de Mete.

23 Q. Vous avez parlé d'un couloir. Où était la pièce, cette pièce à lui, par

24 rapport à l'endroit où vous étiez ? Où étiez-vous et Mete ?

25 R. Il y avait une pièce, puis il y avait un couloir. Le couloir menait au

26 bureau de Mete, donc c'était la première pièce qui se trouvait à gauche.

27 Q. Vous dites que c'est la première pièce à gauche lorsque vous entriez ?

28 R. La pièce se trouvait à gauche, oui, du côté gauche.

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1 Q. Du côté gauche, lorsque vous entriez dans le bâtiment ou lorsque vous

2 sortiez du bâtiment ?

3 R. Oui.

4 Q. Vous voulez dire que c'était à gauche, alors que vous entriez ou à

5 gauche quand vous sortiez du bâtiment ?

6 R. Lorsqu'on entre par la porte principale, il y a un couloir et c'était à

7 gauche.

8 Q. Est-ce que cette porte avait une -- est-ce que cette pièce plutôt avait

9 une porte ?

10 R. Oui, oui, tout à fait.

11 Q. Est-ce que cette porte était ouverte ou fermée ?

12 R. Cette porte était fermée.

13 Q. Comment savez-vous alors que votre père se trouvait à l'intérieur de

14 cette pièce ?

15 R. Parce que j'ai entendu ses cris.

16 Q. Pourriez-vous décrire aux Juges de la Chambre ce que vous avez entendu.

17 R. Il ne faisait que crier.

18 Q. Est-ce que c'était fort ? Quelle était la fréquence de ses cris ?

19 R. Il ne criait pas très fort.

20 Q. Comment savez-vous que c'était votre père ?

21 R. Lorsque je suis entré, Meta m'a dit : Tu es le fils de l'espion. C'est

22 pour cela que j'ai cru que mon père était dans cette pièce.

23 Q. Est-ce que vous aviez pu reconnaître ses cris comme étant les siens ?

24 R. Oui.

25 Q. Vous avez entendu des bruits provenir de cette pièce. Est-ce que vous

26 pouviez conclure qu'il y avait d'autres personnes avec votre père ou est-ce

27 que vous aviez l'impression qu'il était le seul dans cette pièce ?

28 R. Je croyais qu'il était seul.

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1 Q. Qu'est-ce qui vous a permis de croire qu'il était seul dans cette pièce

2 ?

3 R. Car je n'ai entendu qu'une seule voix. C'est la voix qui m'a permis de

4 conclure qu'il n'y avait pas d'autres personnes avec lui.

5 Q. Est-ce que vous avez entendu d'autres cris provenir de cette pièce

6 outre les cris que vous nous avez décrits il y a quelques instants ?

7 R. [aucune interprétation]

8 --Q. Nous n'avons pas reçu de réponse.

9 R. Non.

10 Q. Est-ce que vous aviez répondu oui ou non à la question que je vous ai

11 posée ?

12 R. [aucune interprétation]

13 L'INTERPRÈTE : Le témoin a dit non.

14 M. RE : [interprétation] Merci.

15 Q. Ses cris ont duré combien de temps ?

16 R. Pendant que j'étais là j'ai entendu les cris pendant tout le temps que

17 j'y étais. Lorsque je suis parti je n'ai plus entendu de cris, bien sûr.

18 Q. Combien de temps avez-vous passé dans ce couloir ?

19 R. Je ne suis pas resté très longtemps dans le couloir, sept ou huit

20 minutes peut-être.

21 Q. Pourquoi avez-vous quitté le couloir ?

22 R. Je ne suis pas parti de moi-même. Ils sont venus me cherher.

23 Q. De qui parlez-vous lorsque vous parlez de "ils" ?

24 R. Musa Draga et Ibra.

25 Q. Est-ce que vous avez dit Ibra ?

26 R. Ibra.

27 Q. Qui est Ibra ?

28 R. C'est un collègue à moi qui s'y trouvait également.

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1 Q. Musa Draga et Ibra, qu'ont-ils fait lorsqu'ils sont venus vous chercher

2 ?

3 R. Ils m'ont emmené dans la caserne.

4 Q. Ils vous ont emmené de quelque façon ? Qu'ont-ils fait exactement ?

5 R. Ils ont dit à Mete : Nous somme venus chercher ce gars. Et Mete lui a

6 dit : C'est le fils de l'espion. J'ai répondu que ce n'était pas vrai.

7 Q. Vous ont-ils touché d'aucune manière que ce soit ?

8 R. Bien, ils m'ont pris par le bras et je les ai suivis.

9 Q. Lorsque vous nous avez montré ce geste, vous nous avez montré votre

10 bras droit. Vous ont-ils pris par le bras droit ?

11 R. Oui, ils ont pris mon bras, ils ont touché mon bras et ensuite on est

12 parti.

13 Q. Lorsque vous dites "qu'ils ont touché à votre bras," vous voulez dire

14 qu'ils vous ont simplement touché ou qu'ils vous ont emmené en vous tenant

15 sous le bras ?

16 R. Ils m'ont emmené en me tenant par le bras.

17 Q. Vous voulez dire physiquement, ils vous ont tenu et ils vous ont

18 physiquement emmené ?

19 R. Non. Je les ai accompagnés.

20 Q. Vous étiez trois à ce moment-là ?

21 R. Oui, oui.

22 Q. Où êtes-vous allé ? Où vous ont-il emmené ?

23 R. Dans ma pièce.

24 Q. Vous voulez dire dans la pièce où vous séjourniez à

25 l'école ?

26 R. Oui.

27 Q. Avant d'entendre votre père crier, d'entendre ses cris, est-ce que vous

28 pouvez nous dire quand est-ce que vous aviez vu votre père pour la dernière

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1 fois avant ses cris ?

2 R. Non, je n'ai pas du tout vu mon père.

3 Q. Vous nous avez dit avoir rejoint les rangs de l'UCK ?

4 R. Oui. Il était à Peje lorsque j'ai rejoint les rangs de l'UCK.

5 Q. Avant de rejoindre les rangs de l'UCK, quand aviez-vous vu votre père,

6 par rapport au moment où vous avez rejoint l'UCK ? Quand aviez-vous vu

7 votre père pour la dernière fois ?

8 R. Trois à trois semaines et demie.

9 Q. Après avoir entendu ses cris provenant de l'autre pièce, vous dites que

10 Mete est venu vous chercher et vous a replacé dans la pièce dans laquelle

11 vous vous trouviez, est-ce que vous entendiez toujours les cris de votre

12 père ?

13 R. Oui. Oui.

14 Q. Quand ?

15 R. Le lendemain, lorsque je suis sorti dans la cour et que j'ai allumé une

16 cigarette, je l'ai vu brièvement pendant deux ou trois secondes, il sortait

17 du bureau de Mete et il entrait --

18 Q. Pardon, il entrait où ? Vous l'avez vu faire quoi?

19 R. Je l'ai vu retourné dans le bureau de Mete.

20 Q. Etait-il accompagné de quelqu'un ?

21 R. Il était seul.

22 Q. A quelle distance vous trouviez-vous lorsque vous l'avez vu à ce

23 moment-là par rapport à lui ?

24 R. De 100 à 120 mètres, pas plus.

25 Q. Comment pouviez-vous reconnaître que c'était votre père ?

26 R. Je l'ai reconnu par sa chemise et par l'ensemble de jogging qu'il

27 portait.

28 Q. Est-ce qu'il y a une autre indication qui vous aurait permis de le

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1 reconnaître en dehors de ses vêtements ?

2 R. Non. Il portait un survêtement de sport et cette chemise que je

3 reconnaissais.

4 Q. Est-ce que vous avez revu votre père de nouveau pendant quelques

5 secondes après avoir entendu ses cris provenir du bureau de Mete ?

6 R. Non.

7 Q. Y a-t-il eu d'autres membres de votre famille qui vous ont informé de

8 l'avoir vu après cela ?

9 R. Oui.

10 Q. Que vous ont-ils dit ?

11 R. C'était ma sœur.

12 Q. Et c'est Ganimete ?

13 R. Oui.

14 Q. Que vous a-t-elle dit, Ganimette ?

15 R. Ma sœur était à Buqan, et je ne sais pas où elle l'a vu exactement, où,

16 à quel endroit elle l'a rencontré, mais il le lui a dit : Je pars. C'est

17 tout ce que je sais. C'est tout ce qu'il lui a dit.

18 Q. Où l'a-t-elle vu exactement ? Que vous a-t-elle dit ?

19 R. Je ne le sais pas, mais ma sœur était à Buqan.

20 Q. Lorsque je vous pose cette question, je voulais savoir si vous pouviez

21 nous dire si elle l'a vu dans la rue, au poste de police ou ailleurs ?

22 R. Dans la rue.

23 Q. Quand est-ce qu'elle vous a dit cela votre soeur ?

24 R. Après la guerre, alors que j'étais en Suisse.

25 Q. C'était en quelle année ?

26 R. En 2001, je crois.

27 Q. Est-ce que votre sœur vous a dit quand elle avait vu votre père ?

28 R. Non. Elle n'a pas mentionné la date. Elle m'a simplement dit qu'elle

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1 l'avait vu.

2 Q. De quelle façon est-ce que vous avez quitté l'UCK à

3 Barane?

4 R. Pardon ? Pourriez-vous répéter votre question ?

5 Q. Vous nous avez dit il y a quelques instants que vous étiez au sein de

6 l'UCK pendant trois à trois semaines et demie, n'est-ce pas ?

7 R. Oui.

8 Q. Pourquoi avez-vous quitté l'UCK ?

9 R. Parce que tout le monde était parti aussi.

10 Q. Tout le monde était parti pour aller où ?

11 R. Je ne sais pas. Tout le monde était rentré à la maison j'imagine.

12 Chacun a regagné sa demeure.

13 Q. Pourquoi ?

14 R. Parce qu'ils ont dit que les Serbes arrivaient, et ils nous ont dit :

15 Partez. Et nous sommes partis.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, je regarde la pendule. Je

17 vous demanderais de nous donner une indication du temps dont vous aurez

18 encore besoin ?

19 M. RE : [interprétation] Encore cinq minutes, peut-être.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Est-ce que vous pourriez

21 peut-être réduire ce temps à trois minutes, de cette façon-là vous resterez

22 dans le cadre que vous vous étiez accordé ou que l'on vous avait accordé,

23 le cadre temporel.

24 Monsieur Gashi, je voudrais simplement préciser un point. Vous avez dit que

25 votre sœur vous avait dit qu'elle avait vu votre père à Buqan. Elle vous a

26 dit cela quand ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Elle vous a dit cela quelques années

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1 plus tard ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qu'est-ce qui vous permet de croire que

4 votre sœur a vu votre père après que vous l'ayez vu et entendu à la caserne

5 dans le bureau de Mete ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que je l'ai vu là-bas, mais ma sœur l'a

7 vu à Buqan dans la rue. Je ne sais pas où exactement.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais ma question est la suivante : Est-

9 ce que vous savez si votre sœur l'a vu avant ou après que vous ayez vu

10 votre père dans le bureau de Mete ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne comprends pas votre question. Je suis

12 désolé.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Votre sœur vous a dit : J'ai vu notre

14 père dans le village de Buqan. Elle vous dit cela plusieurs années plus

15 tard alors que vous vivez en Suisse. Est-ce que c'était cela votre réponse

16 ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, elle l'a vu, et vous, vous avez

19 vu votre père entrer dans le bureau de Mete, vous avez entendu des cris.

20 Comment pouvez-vous nous dire avec certitude que ce que votre sœur vous a

21 dit se rapportait à une période ultérieure à la période à laquelle vous

22 avez vu votre père dans la caserne dans le bureau de Mete ? Est-il possible

23 que votre sœur ait pu le voir avant cet instant-là, avant que vous l'ayez

24 vu ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, elle ne l'a pas vu avant moi. J'étais le

26 premier à le voir.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Comment pouvez-vous le dire avec

28 certitude ? Qu'est-ce qui vous permet de croire cela ? Qu'est-ce que votre

Page 4868

1 sœur vous a dit qui vous permet de croire que c'était après que vous l'ayez

2 vu ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que nous nous sommes parlé.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais votre sœur ne savait pas que

5 vous, vous aviez vu votre père au bureau, n'est-ce

6 pas ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, elle le savait puisque je lui avais dit

8 cela.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quand vous le lui avez dit ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai dit à ma sœur.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quand ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque je l'ai rencontrée de nouveau en

13 Suisse.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qu'est-ce qui permettait à votre sœur

15 d'être si sûre que lorsqu'elle, elle l'avait vu c'était après que vous

16 l'ayez vu votre père ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Re.

19 M. RE : [interprétation]

20 Q. Je venais de vous poser une question quant au moment où vous avez

21 quitté l'UCK. Vous aviez dit que tout le monde était rentré chez eux parce

22 que les Serbes allaient arriver. Est-ce qu'il y avait une offensive lancée

23 par les Serbes ?

24 R. Oui.

25 Q. Comment savez-vous qu'une attaque serbe allait avoir lieu et avait lieu

26 ?

27 R. Mes collègues me l'ont dit. Tout le monde était parti. Je n'étais pas

28 le seul à partir.

Page 4869

1 Q. Pourquoi n'avez-vous pas regagné l'UCK après votre départ, lorsque vous

2 avez entendu qu'une attaque allait avoir lieu ?

3 R. Parce que je suis allé au Monténégro.

4 Q. Pourquoi n'êtes-vous pas retourné auprès de l'UCK ?

5 R. Je ne l'ai pas fait.

6 Q. Pourquoi pas ?

7 R. Pourquoi devrais-je regagner les rangs de l'UCK, puisque Mete m'a dit

8 que j'étais le fils de l'espion ?

9 Q. Quand Mete vous a dit que vous étiez le fils d'un espion, est-ce qu'il

10 vous a dit où votre père avait été vu alors qu'il se trouvait dans cette

11 jeep de la police serbe ?

12 R. Non.

13 Q. Est-ce que vous connaissiez Mete avant la guerre ?

14 R. Oui.

15 Q. Que faisait-il avant la guerre ?

16 R. Il avait un café.

17 Q. A Peje ?

18 R. Oui, à Peje.

19 Q. Lorsqu'il vous a dit que vous étiez le fils d'un espion serbe et que

20 les deux autres personnes étaient avec lui, comment vous êtes-vous senti ?

21 R. Je me suis senti très mal, bien sûr, car j'ai rejoint les rangs de

22 l'UCK de façon volontaire, et de l'entendre dire après cela que j'étais le

23 fils d'un espion serbe, je me sentais très mal effectivement.

24 Q. Est-ce que vous aviez peur ?

25 R. Oui.

26 Q. Pouvez-vous décrire cette peur ?

27 R. J'avais peur qu'il me passerait à tabac, qu'il me ferait du mal.

28 Q. Merci.

Page 4870

1 M. RE : [interprétation] Je n'ai plus d'autres questions.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

3 Monsieur le Témoin, pourriez-vous, je vous prie, enlever vos

4 écouteurs. Nous allons avoir une pause. En fait, je vais demander à M.

5 l'Huissier de vous escorter à l'extérieur du prétoire. Nous prendrons une

6 pause qui durera 20 minutes. Mais après cela, avant la pause, j'aurais une

7 question à aborder en l'absence du témoin.

8 [Le témoin quitte la barre]

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, une question que je

10 souhaiterais soulever. Lorsque vous avez demandé au témoin, je cite :

11 "Lorsque Mete vous a dit que vous étiez le fils d'un espion, est-ce qu'il

12 vous a dit où votre père a été vu à bord de cette jeep de police serbe ?"

13 J'ai pris des notes un peu plus tôt concernant cette jeep de police

14 serbe. J'ai pris quelques notes personnelles, car vous aviez posé la

15 question suivante aussi. Vous aviez dit, je cite : "Mete a dit que votre

16 père avait été emmené à bord d'une voiture de police serbe, une jeep

17 serbe." Et vous avez demandé : "Qu'est-ce que vous aviez compris par là ?"

18 Le témoin vous a répondu : "J'ai cru comprendre qu'il avait été emmené en

19 tant qu'espion."

20 Vous lui avez demandé : "Pourquoi est-ce que vous aviez compris ceci ?"

21 Le témoin a dit : "Parce qu'ils me l'ont dit."

22 Ensuite, vous avez posé la question suivante : "Quel type de jeep ?"

23 Le témoin vous avait dit : "Parce que c'était une jeep."

24 Je ne sais pas si j'ai bien compris, mais c'était par les personnes qui

25 étaient là. Peut-être que je n'ai pas compris, mais il me semblerait que si

26 vous voyez quelqu'un à bord d'une jeep de police serbe, que ceci peut

27 soulever un doute dans l'esprit de quelqu'un, à savoir que la personne

28 aurait pu collaborer avec les Serbes. Mais le fait de le voir emmener,

Page 4871

1 c'est le mot "emmener," vous avez dit : "Votre père été emmené ici", ou

2 "était-il accompagné avec des membres de la police serbe ? Est-il allé là-

3 bas ? L'a-t-on remis entre les mains de la police serbe ?"

4 En fait, je n'ai pas très bien saisi. Je ne sais pas si j'ai peut-

5 être compris de façon erronée ce que vous avez dit. Pourriez-vous, je vous

6 prie, nous expliquer ce que vous vouliez dire ?

7 M. RE : [interprétation] Oui, certainement, tout à fait. C'est quelque

8 chose de très important qu'il faut préciser, mais je tenais compte des

9 trois minutes que vous m'avez données.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord.

11 Alors, Monsieur Emmerson.

12 M. EMMERSON : [interprétation] Je voulais encore une fois soulever la

13 question du temps.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons prendre une pause de 20

15 minutes, et tel que promis pendant la pause, je vais voir s'il serait

16 possible - je ne sais pas si d'autres affaires seront entendues dans cette

17 salle d'audience, mais je vais voir ce qui se passe.

18 M. EMMERSON : [aucune interprétation]

19 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

20 M. GUY-SMITH : [interprétation] En fait, je ne sais pas si

21 M. Emmerson pourrait nous expliquer combien de temps a-t-il encore besoin ?

22 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

23 M. EMMERSON : [interprétation] 45 minutes à 50 minutes.

24 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

25 M. EMMERSON : [interprétation] Je pourrais peut-être raccourcir, mais --

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est à peu près 30 à 45 minutes de

27 plus. Je suis très optimiste de nature.

28 M. EMMERSON : [aucune interprétation]

Page 4872

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Guy-Smith, je vous écoute.

2 M. GUY-SMITH : [interprétation] En fait, c'est moi qui ai toujours la

3 courte paille. Je vais essayer de faire de mon mieux pour conclure mon

4 contre-interrogatoire dans le délai que l'on m'accorde.

5 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

6 M. GUY-SMITH : [interprétation] Mais je ne veux pas en piétiner sur

7 la pause. En fait, cela dépend des questions qu posera

8 M. Emmerson.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harvey.

10 M. HARVEY : [interprétation] Je n'ai pas du tout de paille. Je n'ai tiré

11 aucune paille.

12 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

13 M. EMMERSON : [interprétation] De façon générale, vous me demandez quel est

14 le temps que nous aurons besoin ?

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, je crois que je vais demander

16 encore une demi-heure après l'heure prévue. Mais je ne sais pas si c'est

17 possible ou pas, j'avais demandé une extension de 30 minutes. Nous

18 prendrons une pause jusqu'à 12 heures 15.

19 --- L'audience est suspendue à 12 heures 56.

20 --- L'audience est reprise à 13 heures 15.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suis très heureux de voir que

22 tout le monde a déployé d'énormes efforts pour nous aider. Il est

23 maintenant 13 heures 15, et on nous a permis de tenir l'audience jusqu'à 14

24 heures 15, mais pas plus longtemps, pas une minute de plus.

25 Monsieur Emmerson, vous pouvez poursuivre.

26 M. EMMERSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

27 M. Guy-Smith a été aimable, suffisamment aimable de me dire que le contre-

28 interrogatoire sera très court. Il m'a également informé qu'il ne poserait

Page 4873

1 peut-être même pas de questions.

2 Contre-interrogatoire par M. Emmerson :

3 Q. [interprétation] Monsieur Gashi, je vais vous poser des questions

4 concernant Ramush Haradinaj, mais avant cela je voulais simplement apporter

5 quelque lumière sur quelques dates. Vous avez fait une déclaration au

6 bureau du Procureur dans l'affaire en l'espèce. Le 4 août 2006, déclaration

7 dans laquelle on vous a interviewé. Vous avez eu un entretien avec un

8 enquêteur qui s'appelait Shahzada Sultan. Vous souvenez-vous d'avoir eu cet

9 entretien avec le bureau du Procureur ?

10 R. Oui.

11 Q. Au paragraphe 9 de cette déclaration, vous avez dit que du meilleur de

12 votre souvenir, la date à laquelle vous avez rejoint l'UCK à Barane, que

13 c'était une semaine ou plus avant la prestation de serment, la cérémonie

14 dans laquelle vous avez prêté serment. Au paragraphe 11 de cette même

15 déclaration, vous avez déclaré que c'était une semaine et demie avant la

16 cérémonie de prestation de serment. Je crois que dans votre témoignage vous

17 nous avez parlé d'une semaine ou deux avant la cérémonie de prestation de

18 serment.

19 A l'examen de la cassette vidéo nous avons vu que la cérémonie de

20 prestation de serment s'est déroulée le 20 juillet. Alors, Monsieur Gashi,

21 est-ce que l'on peut conclure que la date à laquelle vous vous êtes rendu

22 au QG de Barane que c'était entre le 6 et le

23 13 juillet ?

24 R. Oui.

25 Q. [aucune interprétation]

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Gashi, pourriez-vous, je

27 vous prie, répondre à la question immédiatement après l'avoir entendue.

28 Veuillez poursuivre, Maître Emmerson.

Page 4874

1 M. EMMERSON : [interprétation]

2 Q. Au paragraphe 18 de cette même déclaration de témoin donnée au bureau

3 du Procureur, vous avez déclaré que l'incident impliquant votre père lors

4 duquel votre père a été détenu et lorsque vous l'avez entendu crier, que

5 ceci a eu lieu environ une semaine après la cérémonie de prestation de

6 serment à Barane; est-ce que c'est exact ?

7 R. Oui.

8 Q. Cela nous ramène au 27 juillet, si je ne m'abuse. Seriez-vous d'accord

9 avec moi ?

10 R. Je suis d'accord.

11 Q. Vous avez décrit de quelle façon vous avez vu votre père le lendemain,

12 vous nous avez dit, il marchait à l'extérieur de l'école de Barane ?

13 R. Oui.

14 Q. Est-ce qu'il marchait vers le bureau de Mete Krasniqi ou est-ce qu'il

15 marchait dans l'autre sens en partant du bureau de Mete Krasniqi ?

16 R. Il marchait vers le bureau de Mete Krasniqi.

17 Q. Vous avez dit qu'à l'époque il était seul; est-ce exact ?

18 R. Oui.

19 Q. Etes-vous certain d'avoir bien vu votre père ?

20 R. Oui.

21 Q. Du meilleur de vos observations, est-ce que vous pouviez nous dire s'il

22 était en détention, s'il vous a semblé être en détention de quelque façon

23 que ce soit à ce moment-là ?

24 R. Je ne le sais pas.

25 Q. Permettez-moi de vous demander la chose suivante : Pendant les semaines

26 qui ont suivi ces événements, est-ce que votre sœur vivait à Buqan ?

27 R. Non.

28 Q. Est-ce que vous lui avez rendu visite à Buqan ?

Page 4875

1 R. Une fois.

2 Q. Est-ce que vous lui avez rendu visite, parce que vous vouliez lui

3 emmener des vêtements à laver ?

4 R. Oui. Mais j'étais là seulement une fois. Je voulais lui demander de

5 laver mes vêtements et je voulais prendre un bain.

6 Q. Est-ce que vous savez que votre sœur Ganimete a fait une déclaration

7 auprès du bureau du Procureur dans cette affaire en novembre et en octobre

8 2006 ? Est-ce que vous le saviez ?

9 R. Non, je ne le sais pas.

10 M. EMMERSON : [interprétation] Je voudrais demander la

11 pièce 1D410052. Je demanderais que cette pièce soit présentée au témoin.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, de quelle cote

13 s'agira-t-il ?

14 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

15 Juges, cette cote portera la cote D91 cotée pour fins d'identification.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière.

17 M. EMMERSON : [interprétation] Cette déclaration a été prise en français,

18 car la déclaration a été prise en Suisse et nous n'avons pas de traduction

19 en albanais, mais nous avons une traduction anglaise.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'original est en français ?

21 M. EMMERSON : [interprétation] Oui, c'est cela.

22 Q. Maintenant, Monsieur Gashi, je vais vous lire quelques paragraphes

23 tirés de la déclaration de votre sœur. Je vais vous demander de nous faire

24 des commentaires. Votre sœur a décrit un incident lors duquel elle-même a

25 été interrogée s'agissant de cette allégation selon laquelle votre père

26 aurait été un espion. Est-ce que vous saviez que votre sœur avait été

27 questionnée également à ce

28 sujet ?

Page 4876

1 R. Non, je ne le savais pas.

2 Q. Au paragraphe 14 de sa déclaration de témoin, déclaration préalable,

3 elle décrit ce qui s'est passé après cet entretien, lors duquel on lui a

4 posé des questions, et après que l'on lui ait dit que votre père eût été

5 détenu en tant qu'espion et après qu'elle-même se soit fait poser des

6 questions à cet effet, elle dit au paragraphe 14:

7 "J'ai dû rester à Buqan pendant une semaine ou peut-être plus. Le fils de

8 mon voisin était également un membre de l'UCK, et il se trouvait dans la

9 même caserne que mon frère. Lorsque a découvert que j'étais là, il est venu

10 me voir deux fois pour me donner ses lessives. Conformément à ce que m'a

11 dit mon frère, mon père était encore dans la caserne et il travaillait dans

12 la cuisine."

13 Et elle poursuit pour dire :

14 "De toute façon, il ne m'a rien dit de plus à son sujet. Je dois avouer que

15 dans la maison à Buqan, nous n'avons jamais pu être seuls tous les deux."

16 Vous souvenez-vous d'avoir dit à votre sœur que votre père se trouvait

17 encore dans la caserne, qu'il travaillait dans la cuisine de la caserne ?

18 R. Non.

19 Q. Est-il possible que vous lui ayez dit ceci, mais que vous ne vous en

20 souvenez plus ?

21 R. Je ne sais pas. Je ne sais pas.

22 Q. Donc c'est possible que vous l'ayez dit cela ?

23 R. Peut-être que oui.

24 Q. Vous souvenez-vous d'avoir vu votre père dans la caserne ?

25 R. Oui.

26 Q. Qui lavait dans la cour des ustensiles de cuisine ?

27 R. Non, non, je ne l'ai pas vu s'affairer à cette tâche.

28 Q. Dans votre déclaration préalable faite auprès du bureau du Procureur,

Page 4877

1 en août 2006, au paragraphe 20, vous déclarez ceci et je cite : "Après

2 avoir vu mon père la dernière fois entrer dans le bureau de Mete, ma sœur

3 l'a vu à deux reprises dans la rue, dans le village de Buqan."

4 R. Oui.

5 Q. "Elle l'a vu deux semaines après environ," vous dites. Ensuite vous

6 avez expliqué ou décrit de quelle façon son apparence physique avait

7 changée au cours de ces deux semaines.

8 "Lorsque je l'avais vu, il portait une barbe courte, alors que

9 lorsqu'elle l'a vu il portait une barbe longue."

10 R. Oui, c'est vrai.

11 Q. Est-ce que c'était la raison pour laquelle vous aviez conclu que votre

12 sœur, quand elle a vu qu'il était en vie et qu'il se portait bien et que

13 c'était après que vous l'eussiez vu dans la caserne ?

14 R. Oui, elle l'a vu en santé, en bon état dans la rue. Je l'ai vu en

15 santé. Il se portait bien lorsque je l'ai vu dans la caserne, mais je ne

16 l'ai plus revu après.

17 Q. Lorsque vous l'avez vu dans la caserne, est-ce qu'il y avait des traces

18 de blessures ?

19 R. Il se trouvait à 120 mètres de moi. Comment est-ce que je pourrais pu

20 voir s'il avait des blessures sur lui ?

21 Q. Au paragraphe 20 de votre déclaration préalable, vous poursuivez et

22 vous dites, je cite : "Elle m'a dit qu'elle a essayé de lui parler, mais il

23 ne lui a pas parlé."

24 Je crois qu'un peu plus tôt vous nous avez dit qu'elle vous a dit que

25 votre père lui avait dit : Je m'en vais.

26 R. Oui, oui.

27 Q. Selon vous, qu'est-ce que cela voulait dire, je m'en vais, qu'il

28 partait quelque part, il partait de quelque part ?

Page 4878

1 R. Il a dit à ma sœur : Je pars. Il lui a dit : Je m'en vais, je rentre à

2 la maison. C'est tout ce qu'elle m'a dit.

3 Q. Est-ce que vous aviez eu l'impression qu'il quittait ou qu'il s'en

4 allait de la caserne de l'UCK de Barane, qu'il quittait la caserne de

5 Barane ?

6 R. Oui, mais il n'était pas seul. Il était accompagné de quatre ou cinq

7 personnes. C'est ce que ma sœur m'a dit.

8 Q. Donc il était avec quatre ou cinq personnes à ce moment-là --

9 R. Oui, c'est ce qu'elle m'a dit.

10 Q. Selon votre sœur, est-ce qu'il semblait bien se porter et est-ce qu'il

11 semblait se déplacer librement, de son propre gré ?

12 R. Je ne le sais pas. Je ne lui ai pas posé cette question-là.

13 Q. Mais vous êtes d'accord pour dire que ce qu'elle vous disait c'est que

14 votre père lui avait dit qu'il allait quitter la caserne de l'UCK et qu'il

15 allait rentrer à la maison ?

16 R. Oui.

17 Q. Monsieur Gashi, dans votre déclaration, au paragraphe 20, on lit encore

18 :

19 "Ceci veut dire que Mete a relâché mon père après l'avoir détenu

20 pendant un certain temps."

21 Est-ce que c'est ça que vous avez compris de ce que votre sœur vous a dit ?

22 R. Oui.

23 Q. Merci. Je voudrais maintenant passer à la déclaration de témoin que

24 votre soeur a faite. J'y reviens. Je voudrais juste rappeler qu'il s'agit

25 de la déclaration faite en

26 octobre/novembre 2006, décrivant cet incident. Je vais vous lire ce qu'elle

27 dit.

28 [La Chambre de première instance se concerte]

Page 4879

1 M. EMMERSON : [interprétation]

2 Q. Aux paragraphes 15 à 17 :

3 "Après une semaine, au bout d'une semaine je voulais retourner à

4 Barane pour voir mon frère malgré ma crainte des soldats. Alors que je

5 marchais sur la route de Buqan avec mon voisin j'ai entendu quelqu'un

6 derrière moi prononcer mon surnom, Ganu. Je me suis retourné et c'était mon

7 père. Là, se tenait mon père, seul. Il portait un tee-shirt, des shorts et

8 des sandales. Il avait une barbe en désordre et des cheveux assez longs. Je

9 n'ai pas vu qu'il ait eu des marques particulières sur le visage ou les

10 bras. Je lui ai demandé ce qu'il faisait là et il m'a répondu qu'il avait

11 travaillé à la cuisine de la caserne de Barane, qu'il avait donné

12 100 deutschemarks à un soldat pour lui permettre de s'échapper et qu'il

13 était en route vers Pec. Je lui ai dit que moi j'étais en train de me

14 rendre à Barane pour voir Medin. Il ne m'a pas répondu et est reparti

15 rapidement en direction de Pec."

16 Je m'arrête maintenant ici. Est-ce que c'est bien ce qu'elle vous a dit, en

17 fait ?

18 R. Non.

19 Q. Je vois. Elle déclare aussi au paragraphe 17 qu'au moment où elle a vu

20 votre père, il y avait des soldats de l'UCK dans le secteur qui lui ont dit

21 de rebrousser chemin parce qu'il y avait des bombardements. Et elle

22 poursuit en disant :

23 "Nous sommes retournés à la maison de mon voisin ou de ma voisine et

24 ce soir-là ou cette nuit-là des soldats sont venus dans les rues, ils

25 criaient que nous devions partir parce que les Serbes arrivaient."

26 Maintenant nous nous arrêtons à un moment à ce point, Monsieur Gashi. Vous

27 nous avez dit que vous-même et d'autres avez quitté la caserne de Barane,

28 parce qu'il y avait une offensive serbe qui se rapprochait de ce secteur;

Page 4880

1 c'est exact ?

2 R. Oui.

3 Q. Vous dites que ceci ça s'est passé après trois semaines et demie. Est-

4 ce que c'est exact ou est-ce que j'ai mal compris votre déposition ?

5 R. Oui, trois semaines et demie.

6 Q. Donc trois semaines et demie après que vous ayez rejoint ou après que

7 vous ayez vu votre père pour la dernière fois ?

8 R. Oui.

9 Q. Lequel des deux ?

10 R. Après que j'ai rejoint -- non, après que j'ai vu mon père, après que

11 j'ai vu mon père.

12 Q. Donc si nous pouvons remettre les choses ensemble un instant. La

13 cérémonie de prestation de serment a eu lieu le 20. Vous dites que vous

14 avez vu votre père en gros une semaine plus tard, et que c'est deux

15 semaines après cela que votre sœur l'a vu. Donc en gros ceci ferait trois

16 semaines après la cérémonie de prestation de serment.

17 R. Oui, trois semaines.

18 Q. Lorsque votre soeur a vu votre père, est-ce que c'était au même moment

19 que l'offensive serbe était en train de passer, de prendre le secteur,

20 Monsieur Gashi ?

21 R. Non, ce n'était pas au même moment.

22 Q. Je vois. Vous rappelez-vous Monsieur Gashi, le

23 13 septembre, parlant à un policier britannique et à un enquêteur albanais

24 qui procédaient à des enquêtes pour le compte de la Défense Ramush

25 Haradinaj ? Est-ce que vous vous rappelez cela ?

26 R. Oui.

27 Q. Ce que vous avez dit à ces gens, est-ce que c'était la vérité, Monsieur

28 Gashi ?

Page 4881

1 R. La vérité, la vérité, pour autant que je puisse m'en souvenir.

2 Q. Ils vous ont dit clairement, n'est-ce pas, que vous n'aviez aucune

3 obligation de leur parler si vous ne vouliez pas le faire ?

4 R. Oui.

5 Q. Vous leur avez dit que vous étiez tout à fait disposé à leur parler et

6 à leur faire une déclaration, n'est-ce pas ?

7 R. Oui.

8 Q. Vous leur avez dit que tout ce que vous aviez dit dans votre

9 déclaration, la déclaration que vous leur avez faite était exacte pour

10 autant que vous sachiez et vous puissiez vous en souvenir, n'est-ce pas ?

11 R. Oui.

12 Q. Vous avez singé cette déclaration en mettant votre signature sur chaque

13 page ?

14 R. Oui.

15 Q. Avant que vous ne la signiez, on vous en a donné lecture en albanais,

16 n'est-ce pas ?

17 R. Oui.

18 M. EMMERSON : [interprétation] Pourrait-on, s'il vous plaît, présenter à

19 l'écran le document de la Défense, 1D410025 ?

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez l'intention de

21 présenter ce document aux fins de versement au

22 dossier, Madame la Greffière ?

23 M. EMMERSON : [interprétation] Non, je vous prie de m'excuser, je vous ai

24 donné un numéro erroné. Il s'agit de 1D410047.

25 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agira de la

26 pièce à conviction D52, cote aux fins d'identification.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière.

28 M. RE : [interprétation] Serait-il possible que l'Accusation reçoive une

Page 4882

1 copie papier de ce document ? C'est extrêmement difficile de suivre huit

2 pages sur l'écran.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'il y a en une de disponible --

4 M. EMMERSON : [interprétation] Nous allons fournir une copie papier si nous

5 avons un texte sans marques.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, progressons. Je pense que

7 quelqu'un la retrouve, on la donnera immédiatement à M. Re.

8 M. EMMERSON : [interprétation] Certainement. Je ne vois rien à l'écran pour

9 le moment, excusez-moi mon écran --

10 Q. Je vais juste revoir ceci avec vous, si vous permettez, Monsieur Gashi,

11 et je vais vous lire en anglais. Je ne vais pas lire chaque paragraphe.

12 Dans le premier paragraphe vous décrivez qui vous êtes et vous décrivez les

13 circonstances dans lesquelles vous êtes amené à faire cette déclaration. Et

14 dans le deuxième paragraphe, vous dites ceci, je cite :

15 "J'ai été interrogé par un enquêteur du Tribunal pénal international

16 il y a environ un mois. Il m'a laissé sa carte et son nom était Shahzada

17 Sultan. Je l'ai rencontré." Puis, après ça il faut que l'on passe à la page

18 suivante, je cite :

19 "Je l'ai rencontré à la suite du fait que mon oncle Agim Gashi qui,

20 normalement, réside en Autriche, avait contacté le Tribunal pénal

21 international en alléguant que j'avais une participation, enfin que j'avais

22 été mêlé au fait que mon père Kemajl Gashi avait été tué."

23 Puis, vous poursuivez pour expliquer comment il se fait que vous ayez

24 une discussion avec l'enquêteur. Vous avez donné votre accord pour le

25 rencontrer à Pristina.

26 Vous décrivez au bas du paragraphe 2, certaines questions concernant

27 votre famille, vos antécédents et votre relation avec votre père. Puis si

28 on peut juste tourner la page, s'il vous plaît, à la page 3, vous dites, je

Page 4883

1 cite :

2 "En 1998," ceci est en bas de la page, "en 1998, j'ai rejoint l'UCK

3 à Lugi i Berani. Quand j'ai rejoint, j'ai été interrogé d'une façon

4 normale. Les recrues étaient toujours interrogées de cette manière et on

5 leur demandait pourquoi ils voulaient rejoindre l'UCK. Ceci était une

6 routine et j'ai été accepté pour le service auprès de l'UCK. Je n'ai pas

7 parlé d'uniforme qui n'était pas" ensuite en passant à la page suivante,

8 "ce qui n'était pas inhabituel à l'époque. Certaines personnes en portaient

9 d'autres pas." Puis vous poursuivez en décrivant les armes qui vous ont été

10 remises et vous dites que le commandant de l'ensemble de la région de

11 Barane était Tahir Zemaj. Et vous dites :

12 "Je n'ai jamais vu ou entendu que Ramush Haradinaj ait été dans

13 notre secteur, et à ce moment-là je ne le connaissais pas."

14 Dans le paragraphe suivant, vous décrivez votre sœur et votre père

15 et vous dites que tous deux avaient rejoint l'UCK; votre père ayant rejoint

16 à Barane. Vous dites qu'il était soupçonné d'être associé au MUP serbe et

17 vous dites qu'il a été interrogé et que vous l'avez vous aussi été ainsi

18 que votre sœur, Ganimete par un officier de l'UCK appelé Mete Vranoci et un

19 autre officier dont vous connaissiez le surnom, Ibra.

20 Vous poursuivez en décrivant Vranoci comme étant un homme brutal,

21 violent, dont vous saviez qu'il n'était pas un homme sans défaut, qu'il

22 n'était pas une réputation sans tache, excusez-moi.

23 Vous poursuivez dans le reste de ce paragraphe, si vous voulez bien

24 suivre sur la page suivante, la page 4 pour décrire -- excusez-moi, page 5,

25 décrire l'incident dont vous nous avez parlé. Vous faites certains

26 commentaires concernant votre sœur qui était menacée par Vranoci, ensuite

27 vous indiquez ce qui s'est passé après cela. Donc ceci est dans le deuxième

28 paragraphe principal. Pourrions-nous centrer sur cela, s'il vous plaît --

Page 4884

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Emmerson --

2 M. EMMERSON : [interprétation] Excusez-moi, je vais trop vite.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez reprendre.

4 M. EMMERSON : [interprétation]

5 Q. Vous dites ceci, Monsieur Gashi, je cite :

6 "Mon père a été autorisé à rester à l'UCK, mais on ne lui pas remis d'arme

7 quelle qu'elle soit. Il y avait deux parties au quartier général, l'une

8 c'était la partie militaire à laquelle j'étais rattaché et l'autre c'était

9 la partie de l'UCK qui dépendait de la police. Mon père travaillait dans

10 cette partie-là de sorte que nous ne nous rencontrions pas, nous ne

11 pouvions pas nous parler. Parce que mon père était autorisé à rester à

12 l'UCK, dans l'UCK, bien qu'on ne lui ait délivrer d'arme, on ne lui a pas

13 remis d'arme, j'ai pensé que les officiers les plus haut gradés de l'UCK ne

14 devaient pas être certains qu'il était un collaborateur des Serbes, bien

15 que peut-être ils avaient encore des soupçons le concernant. Parfois je

16 l'ai vu travailler dans le jardin ou laver des ustensiles de la cuisine."

17 Puis si nous passons maintenant à la page 6, s'il vous plaît, le dernier

18 passage qu'il faut que je vous lise. Il y a le premier -- non, excusez-moi,

19 c'est le dernier passage mais c'est le premier paragraphe de cette page.

20 Page 6, je vous remercie.

21 Vous dites :

22 "A ce moment-là, au cours de l'été 1998, il y a eu une vaste

23 offensive serbe dans la région de Barane et tout le monde est parti. Je

24 suis parti et je suis d'abord allé à Rosuja, où j'ai laissé mon fusil

25 auprès d'un ami, puis je me suis rendu à nouveau à Peje, je suis revenu à

26 Peje. Ma sœur Ganimete est revenue à la maison à Peje le lendemain. La

27 dernière fois que j'ai vu mon père Kemajl en vie, c'est à peu près une

28 semaine avant l'offensive serbe. C'était à Buqan où il était en train de

Page 4885

1 marcher avec d'autres soldats de l'UCK. J'ai remarqué qu'il portait un tee-

2 shirt foncé ou noir ou bleu foncé, à manches courtes et des pantalons de

3 couleur foncée. Il m'a dit : 'Je rentre à la maison.' A ce moment-là il

4 avait une barbe qui était d'une longueur moyenne. Or, il n'en avait pas

5 lorsqu'il a rejoint l'UCK, parce que mon père avait maintenant été autorisé

6 à quitter le quartier général de l'UCK et je pensais qu'on lui faisait plus

7 confiance, que les officiers supérieurs ne lui faisaient plus confiance. Et

8 je n'ai pas revu mon père depuis ce jour."

9 Alors, Monsieur Gashi, ce sont des extraits là que je viens de vous lire de

10 votre déclaration que vous avez signée. Est-ce que ceci représente bien vos

11 souvenirs les plus précis de ce qui s'est passé de l'époque où vous avez

12 été interrogé par l'enquêteur de la Défense, comme étant vraiment la

13 situation ?

14 R. Oui.

15 M. EMMERSON : [interprétation] Pourriez-vous, s'il vous plaît, aller au bas

16 de la page ?

17 Q. Regardez le bas de la page. Est-ce que vous reconnaissez votre

18 signature du côté gauche ?

19 R. Oui, oui.

20 Q. [aucune interprétation]

21 M. EMMERSON : [interprétation] Pour finir, pourriez-vous revenir à la page

22 2, au premier grand paragraphe.

23 Q. Dans ce passage, vous faites un commentaire sur la déclaration que vous

24 avez faite à l'enquêteur de l'Accusation juste après avoir été informé du

25 fait que les restes de votre père avaient été identifiés de façon certaine

26 et vous déclarez ceci :

27 "J'ai fait une déclaration à l'enquêteur que j'ai signée. Toutefois,

28 cette déclaration ne contenait pas tout ce que je sais et était inexacte à

Page 4886

1 certains égards. La déclaration que je fais maintenant est exacte et

2 véridique d'après tous mes souvenirs des événements qui ont eu lieu en 1998

3 et 1999."

4 Vous avez aussi signé cette page, Monsieur Gashi. Alors, est-il vrai que

5 vous aviez omis un certain nombre de choses dans la déclaration de témoin

6 que vous aviez faite à l'Accusation, que ce soit délibérément ou par erreur

7 ?

8 R. C'était sans intention de le faire.

9 M. EMMERSON : [interprétation] Mais c'était là les questions que je voulais

10 poser.

11 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je n'ai pas de questions.

12 M. HARVEY : [interprétation] Je n'ai pas de questions.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être qu'avant que je ne donne la

14 possibilité à M. Re de poser des questions supplémentaires au témoin, je

15 pourrais demander ceci : Monsieur Gashi, la déclaration que vous avez faite

16 au bureau du Procureur n'est assurément pas la même que la déclaration que

17 vous avez faite aux enquêteurs de la Défense. Lorsque les enquêteurs de la

18 Défense se sont présentés comme ils étaient censés le faire, comme les

19 enquêteurs de l'équipe de Défense de Haradinaj --

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- est-ce que ceci vous a d'une façon

22 quelconque fait hésiter à donner une déclaration qui soit tout à fait

23 conforme à la vérité, sachant qu'ils étaient venus vous voir pour le compte

24 de la Défense ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Gashi, j'ai bien compris que

27 vous savez qu'un Procureur et un conseil pour la Défense n'ont pas le même

28 objectif. Vous comprenez cela ?

Page 4887

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais vous poser la question

3 suivante : premièrement, un élément important de la déclaration que vous

4 avez faite aux enquêteurs du TPIY concernait votre père soupçonné d'être un

5 espion et vous l'avez entendu, bien que vous ne l'ayez pas vu à ce moment-

6 là, vous l'avez entendu crier ?

7 M. EMMERSON : [interprétation] Bien, Monsieur le Président, si vous

8 regardez - peut-être que vous recherchez la page 5, en haut de la

9 déclaration du témoin --

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est-à-dire, que je regarde --

11 M. EMMERSON : [interprétation] Dans la déclaration faite à la Défense, page

12 5, quatre lignes du bas de la page, on lit : "Je pouvais entendre mon père

13 crier."

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. La page 5, quatre lignes avant le

15 bas de la page --

16 M. EMMERSON : [interprétation] Non. Excusez-moi. Quatre lignes en

17 descendant à partir du début de la page.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Oui, je vois que cette partie de

19 votre déclaration on la trouve également dans la déclaration que vous avez

20 faite à l'enquêteur de la Défense. Est-ce que les Juges de cette Chambre

21 peuvent être sûrs, comme vous l'avez déclaré dans ces deux déclarations,

22 est-ce que la Chambre peut être bien sûre que ceci a eu lieu, que vous avez

23 entendu votre père

24 crier --

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

26 M. EMMERSON : [interprétation] Je vous prie de m'excuser.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

28 M. EMMERSON : [interprétation] Je suis désolé, avec tout le respect que je

Page 4888

1 vous dois, d'objecter à cette forme de la question, cette formulation. Est-

2 ce que le témoin peut être sûr que --

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, bien sûr. Je pense que du point de

4 vue linguistique vous avez raison.

5 Témoin, la Chambre vous demande si la Chambre peut être sûre que vous vous

6 exprimez de façon conforme à vos souvenirs les plus précis lorsque vous

7 dites que personnellement, vous-même, lorsqu'on vous a appelé à entrer dans

8 ce bureau, vous avez entendu votre père crier dans le bureau qui se

9 trouvait à côté de l'endroit où vous vous trouviez, ou tout au moins dans

10 la pièce qui était à côté de celle où vous vous trouviez ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, est-ce qu'il est nécessaire

13 - bon, je comprends votre correction. Maître Emmerson, c'est exact. Mais je

14 pense que la nouvelle formulation répond peut-être à votre préoccupation.

15 Monsieur Re.

16 M. RE : [interprétation] Bien, si on pouvait me donner un instant pour que

17 je puisse digérer ceci. Vous comprenez la difficulté dans laquelle

18 l'Accusation se trouve placée, lorsqu'elle reçoit une déclaration au beau

19 milieu d'un contre-interrogatoire. J'aurais simplement besoin d'un moment

20 pour lire cela et comparer ce qui est dit avec la déclaration d'origine.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je comprends bien. Je peux informer

22 les parties du fait que les Juges de la Chambre se fondent sur - enfin,

23 préparent une décision sur le moment où les pièces à conviction de la

24 Défense devraient être …

25 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En attendant, Monsieur Re, la

27 Chambre, les Juges vont utiliser la possibilité qui leur est donnée pour

28 poser une question. Monsieur Gashi, tout à l'heure, vous nous avez dit

Page 4889

1 aujourd'hui que vous n'aviez pas vu votre père après l'avoir vu, après cet

2 épisode des cris ou simplement à distance pendant quelques secondes alors

3 qu'il se dirigeait vers un bureau. Alors, dans cette déclaration, vous nous

4 dites que vous l'aviez vu à Buqan après. Vous venez de nous dire également

5 que cette déclaration que vous avez signée est le reflet de la réalité.

6 Maintenant, dites-nous, laquelle de ces deux choses est la vérité ? L'avez-

7 vous vu à Buqan ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La déclaration qui vous a été lue dit la

10 chose suivante :

11 "La dernière fois que j'ai vu mon père en vie, mon père Kemajl en

12 vie, était environ une semaine avant l'offensive serbe. C'était à Buqan,

13 alors qu'il défilait avec d'autres soldats de l'UCK."

14 Donc, est-ce que vous l'avez vu là-bas ou pas ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourquoi avez-vous fait cette

17 déclaration détaillée aux enquêteurs de la Défense, que vous avez signée,

18 dans laquelle vous dites que vous l'avez vu là-bas et qu'il vous a dit : Je

19 rentre à la maison. Pourquoi avez-vous fait cela ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ma sœur qui l'avait vu là-bas. Puis

21 après, en fait, j'ai tout mélangé. Voilà pourquoi cela apparaît dans cette

22 déclaration.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez également fait une déclaration

24 à l'époque selon laquelle

25 "De temps en temps je le voyais travailler dans le jardin, nettoyer

26 du matériel de la cuisine." Cela est-il la vérité ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourquoi avez-vous dit aux enquêteurs de

Page 4890

1 la Défense que de temps en temps vous le voyiez travailler dans le jardin,

2 qu'il nettoyait des machines de la cuisine alors que vous nous dites à

3 présent que cela n'est pas vrai ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne pouvais pas leur dire que mon père était

5 un espion.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Etait-il vrai que votre père était un

7 espion ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela, je ne le sais pas.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Vous leur avez dit :

10 "De temps en temps je le voyais travailler dans le jardin, qu'il

11 nettoyait du matériel de la cuisine."

12 Pourquoi avez-vous signé une telle déclaration, alors que vous nous dites à

13 présent que ce n'était pas la vérité ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai signée.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant vous nous dites que ce n'est

16 pas la vérité.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Laquelle n'est pas vraie.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vous relire la

19 chose :

20 "Je le voyais de temps en temps," c'est-à-dire votre père,

21 "travaillant dans le jardin, qu'il nettoyait les machines de la cuisine."

22 C'est ce que vous avez dit aux enquêteurs de la Défense.

23 Ma question était donc : "Cela était-il la vérité ?" Et vous venez de dire

24 --

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'est pas vrai.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourquoi avez-vous signé une déclaration

27 affirmant cela ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être parce que je n'avais pas bien

Page 4891

1 compris quand ça m'a été lu avant que je signe.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une partie de votre déclaration

3 est la suivante, je cite : "Ma "sister" Ganimete a également rejoint les

4 rangs de l'UCK." Cela fait partie de la déclaration que vous avez signée.

5 Cela est-il la vérité ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'est pas vrai.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit, je cite : "Mon père

8 Kemajl, lui aussi a rejoint les rangs de l'UCK à Barane."

9 Cela est-il vrai ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'est pas vrai.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous venez de témoigner que tout dans

12 cette déclaration qui vous a été lue et que vous avez signée était, autant

13 que vous vous en souvenez, conforme à la réalité. Je vous pose à présent

14 quelques questions la concernant, et à presque toutes ces questions vous

15 répondez que ce n'est pas la vérité.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Saviez-vous cela, qu'il y a dix minutes

18 M. Emmerson a lu de longs passages de cette déclaration et vous a demandé

19 si c'était la vérité, et là vous avez répondu, "Oui."

20 LE TÉMOIN : [interprétation] La plupart des choses qu'on y lit sont vraies,

21 mais certaines d'entre elles ne le sont pas.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certains des passages que je viens de

23 vous lire avaient été lus par M. Emmerson également. A ce moment-là vous

24 aviez dit que c'était vrai; et quand c'est moi qui vous lis les mêmes

25 passages et qui vous pose la même question, vous dites que ce n'est pas la

26 vérité. Pourriez-vous faire un commentaire à ce sujet ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas quoi dire.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous dites à un moment alors que des

Page 4892

1 passages vous sont lus, que c'est la vérité, et que

2 15 minutes plus tard vous dites que ce n'était pas la vérité, êtes-vous

3 d'accord pour dire avec moi que l'une de vos réponses est un mensonge ?

4 R. Oui.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Etes-vous également conscient du fait

6 que si l'une des deux réponses, la première ou la deuxième, n'est pas

7 conforme à la vérité, et lorsque vous dites que l'une d'entre elles est un

8 mensonge, que mentir alors que vous avez fait une déclaration solennelle

9 selon laquelle vous alliez dire la vérité, toute la vérité et rien que la

10 vérité, est une infraction pénale grave ?

11 Monsieur Guy-Smith.

12 M. GUY-SMITH : [aucune interprétation]

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je sais. Mais ce que je crois être la vérité,

14 je l'ai dit, mais lorsque je ne connais pas la vérité, je ne le dis pas, et

15 cette déclaration a été faite il y a longtemps. Cette déclaration a été

16 faite par ma sœur et je n'étais pas au courant.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais l'autre déclaration de votre

18 sœur, ce n'est pas cela que je suis en train de parler à présent.

19 Oui, Monsieur Guy-Smith.

20 M. GUY-SMITH : [interprétation] Monsieur le Président, concernant comment

21 se passent ces questions et ces réponses, peut-être que ce témoin devrait

22 avoir un avocat avant que nous poursuivions et je pense qu'il faut qu'il

23 soit prudent. Je suis, je vous rappelle, un avocat de la Défense. Et sur le

24 fondement de ce que je viens de dire jusqu'à maintenant, il est clair que

25 cet homme a besoin d'un conseil juridique au vu de ce qui est en train de

26 se passer.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends votre inquiétude et je vous

28 en remercie. Mais avant que nous poursuivions.

Page 4893

1 Monsieur Re, y a-t-il -- j'ai essayé de régler, de voir ce qu'on pouvait

2 faire concernant ce qui semblait être un point important du contre-

3 interrogatoire. Y a-t-il des questions supplémentaires à poser à ce témoin

4 ?

5 M. RE : [interprétation] Oui, mais je ne souhaite pas empiéter sur le

6 terrain qui vient d'être abordé par M. Guy-Smith.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On va laisser cela de côté pour

8 l'instant. Si vous posez d'autres questions, vous allez les poser, mais

9 malgré cela, j'aimerais que nous respections tout de même l'horloge. Il est

10 clair à quel point il est important que la Chambre réponde le plus

11 rapidement possible à la requête que vous avez faite de recevoir les

12 documents le plus rapidement possible, ceux qui seront utilisés pendant le

13 contre-interrogatoire. Je ne peux que souligner à quel point il faut que

14 nous fassions ça le plus rapidement possible.

15 Je vous prie de poursuivre, Monsieur Re.

16 M. RE : [interprétation] Monsieur le Président, je ne peux pas faire cela

17 en cinq minutes. Il faut que je lui pose des questions, mais cela ne va pas

18 prendre cinq minutes.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Guy-Smith.

20 M. RE : [aucune interprétation]

21 M. GUY-SMITH : [interprétation] Monsieur le Président, je vous prie de bien

22 vouloir m'excuser. Mais si vous pensez à des questions supplémentaires, il

23 faut que cette personne reçoive l'aide d'un avocat.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Guy-Smith, nous allons

25 laisser cela de côté pour l'instant.

26 Monsieur Re, posez vos questions, s'il vous plaît.

27 M. RE : [interprétation] Je vais lui poser un certain nombre de questions

28 concernant les circonstances dans lesquelles ces déclarations ont été

Page 4894

1 faites. Mes questions ne porteront pas sur son témoignage.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Poursuivez.

3 Nouvel interrogatoire par M. Re :

4 Q. [interprétation] Monsieur Gashi, j'aimerais vous poser une question

5 concernant la déclaration que vous avez faite à l'Accusation et la

6 déclaration que vous avez faite à la Défense. Pour commencer, lorsque vous

7 avez fait votre déclaration et que l'enquêteur M. Sultan vous a parlé, vous

8 a-t-il laissé une copie de votre déclaration ?

9 R. Non.

10 Q. Quand avez-vous reçu une copie de votre déclaration à l'Accusation en

11 albanais ?

12 R. Je ne me souviens pas, sincèrement, cela a été trois ou quatre mois

13 plus tard.

14 Q. Est-ce que c'est cette année, à un moment de cette année, que quelqu'un

15 vous a donné une copie de votre déclaration en

16 albanais ?

17 R. Oui.

18 Q. Ce qui veut dire que vous n'aviez pas de copie de votre déclaration

19 lorsque la Défense vous a abordé, vous a parlé l'année dernière, n'est-ce

20 pas ?

21 R. Non.

22 Q. C'est-à-dire, la déclaration de l'Accusation ?

23 R. Non, je ne l'avais pas.

24 Q. Lorsque l'enquêteur de la Défense vous a parlé, qui pensez-vous qu'ils

25 étaient ?

26 R. Je ne sais pas. Je ne sais pas.

27 Q. Où étiez-vous quand ils ont parlé avec vous ?

28 R. J'étais à la maison, chez moi.

Page 4895

1 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Dans quel pays ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Chez moi, dans ma chambre à Peje. C'est-à-

3 dire, vous voulez dire quand j'ai fait cette déclaration ?

4 M. RE : [interprétation]

5 Q. Oui, c'est exact, la déclaration, la deuxième, celle que

6 M. Emmerson qui est là-bas, celle sur laquelle M. Emmerson qui est là-bas

7 vous a posé des questions.

8 Est-ce que quelqu'un vous a téléphoné avant que le témoin --

9 R. Oui.

10 Q. Est-ce que quelqu'un vous a téléphoné ou vous a contacté avant que ces

11 personnes viennent chez vous ou sont-ils simplement arrivés comme ça ?

12 R. Oui, ils m'ont appelé.

13 Q. Est-ce que quelqu'un vous a contacté à l'avance ou est-ce qu'ils sont

14 juste venus chez vous et ont frappé à la porte ?

15 M. GUY-SMITH : [interprétation] Bien, il vient juste de répondre à la

16 question. Monsieur le Président, il a dit, ils m'ont appelé.

17 M. RE : [interprétation] Je n'ai entendu que oui dans mes écouteurs.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils ont dit qu'ils allaient venir. J'ai

19 attendu qu'ils viennent et ensuite ils sont allés à Pristina et c'est là

20 que j'ai fait une déclaration.

21 M. RE : [interprétation]

22 Q. Qu'ont-t-ils dit quand ils ont téléphoné, quand ils vous ont appelé ?

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a une confusion. Est-ce que les

24 enquêteurs de la Défense vous ont appelé avant qu'ils prennent votre

25 déclaration, en septembre 2006 ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, ils m'ont appelé.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ils vous ont amené à Pristina ou est-ce

28 qu'ils sont restés chez vous et qu'ils vous ont interviewé là-bas?

Page 4896

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, nous sommes allés à Pristina.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suis un peu inquiet. Il me semble

3 qu'il y a une confusion entre les deux interviews, il y a une différence de

4 temps. Je vais vous demander de retirer vos écouteurs pendant quelques

5 instants.

6 Je demande aux parties, elles doivent savoir, est-ce que cette interview a

7 eu lieu chez lui ou dans un bureau à Pristina ?

8 M. EMMERSON : [interprétation] Je vais vérifier --

9 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

10 M. EMMERSON : [interprétation] -- mais il me semble que l'Accusation a

11 interviewé M. --

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous parle de votre interview.

13 M. EMMERSON : [interprétation] Je crois qu'elle a eu lieu à Pec.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et vous, Monsieur Re, quel renseignement

15 avez-vous, j'ai l'impression que c'était à Pristina.

16 M. RE : [interprétation] Au bureau, hors siège, de Pristina.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bureau, hors siège, de Pristina. Très

18 bien.

19 Donc, il y a peut-être une confusion quant à savoir qui l'a appelé et

20 qui a emmené qui, où ça.

21 M. EMMERSON : [interprétation] J'aimerais simplement indiquer à la Chambre

22 la déclaration du témoin commence par quelque chose d'inaudible et sur la

23 deuxième page, il explique que l'autre déclaration a été faite à Pristina.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il semble assez clair qu'il peut

25 facilement avoir confusion.

26 [La Chambre de première instance se concerte]

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai dit tout à l'heure que nous allions

28 conclure à 14 heures 15. Bien entendu, nous voyons ici que nous ne

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1 souhaitons pas conclure le témoignage d'un témoin de cette manière. La

2 Chambre estime également qu'elle a besoin d'entendre des requêtes

3 concernant le besoin ou pas de rappeler ce témoin. Mais il me semble que --

4 [La Chambre de première instance se concerte]

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Au moment présent, la Chambre décide que

6 le témoin devrait être excusé. La Chambre se réserve le droit de rappeler

7 ce témoin ultérieurement.

8 M. RE : [interprétation] Le témoin, je demande qu'il ne soit pas renvoyé

9 chez lui, et je n'ai pas besoin de beaucoup de temps, j'ai besoin de 15 ou

10 20 minutes pour terminer.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai fait un accord très clair sur les

12 personnes en disant que nous allons simplement rajouter une demi-heure.

13 M. RE : [interprétation] Je ne parle pas d'aujourd'hui. Je parle de mardi

14 prochain. Je n'ai pas terminé avec ce témoin. Nous avons besoin de pouvoir

15 répondre à ses chefs d'accusation dans la mesure où nous n'avions pas cela

16 avant de venir à l'audience aujourd'hui, dans la mesure où cela prend un

17 peu plus longtemps que prévu.

18 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

19 M. RE : [interprétation] Je demande simplement qu'on ne le renvoie

20 pas chez lui, --

21 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

22 M. RE : [interprétation] -- je ne demande pas plus de temps pour

23 aujourd'hui.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'est pas la Chambre qui renvoie les

25 témoins. Nous allons étudier votre requête, nous vous en informerons cet

26 après-midi à la Section d'Aide aux Victimes et aux Témoins, indiquant si la

27 Chambre souhaite continuer à entendre le témoignage de ce témoin mardi

28 prochain ou si la Chambre souhaite entendre un témoignage supplémentaire de

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1 ce témoin à un moment où il serait rappelé.

2 Nous allons lever l'audience. Avant cela, Monsieur Gashi, j'aimerais

3 vous dire la chose suivante : pour l'instant, c'est le terme de votre

4 déposition - Oui, excusez-moi.

5 Pour l'instant, nous arrivons au terme de votre témoignage. Je pense

6 que vous comprenez très bien que la partie, tout au moins la partie finale

7 de votre témoignage, a soulevé un certain nombre de problèmes parce qu'il y

8 avait confusion. Cet après-midi nous vous informerons par l'intermédiaire

9 de la Section d'Aide aux Victimes et aux Témoins quant à savoir si nous

10 souhaitons vous revoir mardi prochain ou si nous vous permettrons de

11 rentrer chez vous à présent. Si nous vous permettons de rentrer chez vous

12 pendant le week-end, cela ne signifie pas pour autant qu'il est certain que

13 la Chambre ne souhaitera pas ou les parties ne vous demanderont pas de

14 réapparaître dans ce prétoire.

15 Vous avez deux options : soit vous reviendrez mardi prochain et votre

16 interrogatoire continuera, ou alors vous pourrez rentrer chez vous, mais

17 cela ne signifie pas pour autant que vous ne serez pas obligé de revenir.

18 Vous saurez, par la suite, si nous souhaitons vous faire revenir ou pas, et

19 c'est la Section d'Aide aux Victimes et aux Témoins qui vous en informera.

20 [La Chambre de première instance se concerte]

21 J'aimerais vous indiquer que dans la mesure où il est possible que votre

22 témoignage se poursuivra, je vous demande de ne parler avec personne ni

23 avec la Défense, ni avec l'Accusation, ni avec aucune autre personne du

24 témoignage que vous venez de faire, et du témoignage que vous allez peut-

25 être faire.

26 L'audience est levée jusqu'au mardi 29 mai à 14 heures 15 en salle

27 d'audience numéro II.

28 --- L'audience est levée à 14 heures 20 et reprendra le mardi 29 mai 2007,

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1 à 14 heures 15.

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