Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 28 août 2007

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 25.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous. Monsieur le

6 Greffier d'audience, veuillez citer l'affaire.

7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges, bonjour à

8 tous. Affaire IT-04-84-T, le Procureur contre Ramush Haradinaj et consorts.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

10 La Chambre de première instance a reçu une requête aux fins d'obtenir

11 des mesures de protection du Témoin 17, celui qui est prévu aujourd'hui.

12 Passons rapidement à huis clos partiel pour en discuter.

13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

14 le Président.

15 [Audience à huis clos partiel]

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23 [Audience publique]

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. La Chambre de première instance a

25 décidé de faire droit à la demande de mesures de protection concernant le

26 Témoin 17, la décision raisonnée suivra.

27 Nous pourrons, Monsieur Kearney, commencer l'audition de ce témoin. Il

28 faudra d'abord baisser les stores afin que ce témoin entre dans le prétoire

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1 sans qu'il soit vu, puisqu'il bénéficie notamment de la déformation des

2 traits du visage. Nous pourrons relever les stores lorsqu'il se sera

3 installé.

4 Je peux aviser les parties du fait que les suggestions faites par moi-même

5 lors de la réunion de ce matin, s'agissant de la protection des

6 déclarations faites par ce témoin en application du 92 ter, sont des

7 suggestions acceptées par mes collègues de la Chambre. La seule polémique

8 portait sur le fait de savoir ce qui était recevable ou pas dans sa

9 déclaration 92 ter, ce qui pouvait être versé au dossier. Nous avons invité

10 les parties à nous rencontrer ce matin pour ne pas perdre de temps en

11 audience afin de donner des instructions, des lignes directrices aux

12 parties en vue de résoudre ce problème.

13 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin 17. C'est en

15 effet de cette façon-là que nous allons nous adresser à vous. Vous le savez

16 peut-être, la Chambre a fait droit à la demande de mesures de protection

17 faites il y a peu par l'Accusation, vous pouvez ainsi bénéficier d'un

18 pseudonyme. Vous serez le Témoin 17 et, en dehors de ce prétoire, il ne

19 sera pas possible de voir les traits de votre visage, pas plus qu'il ne

20 sera possible d'entendre votre voix, même si la teneur même de votre

21 déposition est du domaine public. Vous allez bientôt commencer votre

22 audition, mais auparavant le Règlement exige que vous fassiez une

23 déclaration solennelle selon laquelle vous allez dire la vérité, toute la

24 vérité et rien que la vérité. On est en train de vous remettre un carton

25 sur lequel est inscrit ce texte. Veuillez le prononcer.

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

27 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

28 LE TÉMOIN: TÉMOIN SST7/17 [Assermenté]

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1 [Le témoin répond par l'interprète]

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Veuillez vous asseoir, Monsieur.

3 Nous allons maintenant relever les stores.

4 C'est d'abord M. Kearney, représentant du bureau du Procureur, qui va vous

5 poser des questions dans le cadre de l'interrogatoire principal.

6 Maître Guy-Smith.

7 M. GUY-SMITH : [interprétation] J'ai vu qu'en entrant le témoin avait une

8 espèce de serviette. Je ne sais pas s'il a amené des documents --

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, je ne sais pas si

10 vous avez amené des documents. Mais vous savez, il faut demander la

11 permission de consulter les documents si vous voulez le faire. Si vous

12 ressentez le besoin d'avoir recours à ces documents, vous devez me demander

13 la permission.

14 M. KEARNEY : [interprétation] Je pense que le témoin a un classeur dans

15 lequel se trouve la déclaration qu'il a faite initialement au titre du 92

16 ter et aussi des annexes. Je voudrais demander à la Chambre qu'il ait

17 l'autorisation de les consulter et de les avoir sous les yeux.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dites-le clairement à la Chambre si vous

19 avez l'intention de lui demander de consulter ces documents, parce que je

20 ne vois pas personnellement pourquoi ou quand il les utiliserait.

21 Vous pouvez commencer.

22 M. KEARNEY : [interprétation] Je vous remercie.

23 Interrogatoire principal par M. Kearney :

24 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin 17.

25 R. Bonjour.

26 Q. Merci d'être venu à La Haye. Je voudrais que s'affiche le document

27 1958.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que c'est le feuillet contenant

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1 le pseudonyme ?

2 M. KEARNEY : [interprétation] Oui.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce ne sera pas montré au témoin.

4 M. KEARNEY : [interprétation]

5 Q. Regardez le document qui s'affiche à l'écran. Vous y avez des

6 informations. Dites-nous, est-ce que ce sont bien vos

7 coordonnées ?

8 R. Oui.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Excusez-moi, mais je n'ai pas entendu ce

10 qu'a dit le témoin.

11 L'INTERPRÈTE : Les interprètes de la cabine anglaise précisent qu'ils n'ont

12 pas entendu le témoin.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez entendu le témoin

14 lorsqu'il a prononcé la déclaration solennelle ?

15 L'INTERPRÈTE : Uniquement par le micro installé dans le prétoire.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faudra donc veiller à ce que ce soit

17 le micro assurant la déformation de la voix qui soit branché.

18 Excusez-nous, Monsieur le Témoin, il nous faut régler ce problème

19 technique, car les interprètes ne sont pas en mesure de vous entendre. Je

20 vais vous demander de dire quelques mots pour voir si maintenant le son

21 passe.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous ai déjà dit que c'était bon

23 maintenant.

24 L'INTERPRÈTE : Les interprètes de la cabine anglaise précise qu'ils

25 sont maintenant en mesure d'entendre le témoin.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Fort bien.

27 Je vais vous demander de répéter la réponse que vous avez faite à la

28 question de M. Kearney qui vous demandait si ce qui était consigné sur ce

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1 feuillet correspondait bien à vos coordonnées.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, ces informations sont correctes.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je dois appeler votre attention

4 sur le fait qu'il y a peut-être une différence au niveau de la date de

5 naissance. Est-ce que vous voulez élucider ceci avec le témoin.

6 M. KEARNEY : [interprétation]

7 Q. On a sur ce feuillet une date de naissance; est-ce la

8 bonne ?

9 R. Non.

10 Q. Quelle est votre date de naissance, Monsieur ?

11 M. KEARNEY : [interprétation] Nous sommes toujours à huis clos partiel,

12 Monsieur le Président ?

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non.

14 M. KEARNEY : [interprétation] Pouvons-nous passer à huis clos partiel pour

15 entendre la réponse du témoin ?

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais il y a peut-être un autre problème

17 au nouveau de l'audibilité du témoin, parce que je n'ai pas entendu

18 l'interprétation de sa dernière réponse.

19 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

20 le Président.

21 [Audience à huis clos partiel]

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7 [Audience publique]

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, nous aurions dû attendre.

9 Le témoin va donc disposer d'un exemplaire de sa déclaration préalable et

10 vous allez lui dire quels passages examiner.

11 M. KEARNEY : [interprétation] Merci.

12 Q. Est-ce que vous avez un classeur contenant votre déclaration préalable

13 et ses annexes ?

14 R. Oui. Vous me demandez si je vois le document à l'écran ?

15 Q. Non, non. Est-ce que vous avez ce classeur contenant votre déclaration

16 préalable ainsi que ses annexes ?

17 R. Tout ce que je vois, c'est la dernière page de ma déclaration préalable

18 que j'ai signée.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin 17, ne vous occupez

20 pas de l'écran, on vous demande si vous avez une copie, un exemplaire sur

21 support papier de la déclaration préalable que vous avez faite. Je ne le

22 vois pas de l'endroit où je suis, mais je vais demander à Mme l'Huissière

23 de vous aider.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous parlez de celle que j'ai dans ma sacoche

25 ?

26 M. KEARNEY : [aucune interprétation]

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Kearney va vous dire à quels passages

28 vous rapporter, mais maintenant vous avez les documents sous les yeux. Fort

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1 bien.

2 Monsieur Kearney, je n'ai vu aucune des annexes. Est-ce qu'elles vont

3 apparaître uniquement à l'écran ou est-ce qu'il y a un exemplaire sur

4 support papier à l'intention des Juges de la Chambre ?

5 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

6 M. KEARNEY : [interprétation] Apparemment, il y a un envoi électronique la

7 semaine dernière et je pense que ceci - moi, j'avais cru comprendre qu'on

8 avait imprimé tout ceci à votre intention, mais peut-être que je me suis

9 trompé.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Fort bien.

11 Commencez. Mais prévoyez un peu plus de temps afin de permettre à la

12 Chambre d'examiner ce qui va s'afficher à l'écran.

13 M. KEARNEY : [interprétation] Merci.

14 Q. Monsieur le Témoin 17, prenez le quinzième paragraphe, s'il vous plaît.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

16 Q. Ici, dans ce paragraphe, vous faites état d'une réunion, de la première

17 réunion que vous avez eue avec M. Balaj et M. Haradinaj le 26 juin en 1998

18 à Jasic. Pourriez-vous d'emblée dire à la Chambre quels étaient les

19 rapports qui existaient entre Balaj, Toger et Ramush Haradinaj d'après les

20 observations que vous avez faites pendant la mission que vous avez vécue au

21 Kosovo en 1998 ?

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vu les consignes que j'ai données, je ne

23 pense pas qu'il conviendrait que le témoin fasse maintenant lecture de la

24 déclaration préalable qu'il a faite. Demandez-lui de parcourir avec vous le

25 contenu du paragraphe 15, puisque là y sont consignés des faits. Vous

26 pourrez ensuite lui parler des relations existantes entre Haradinaj et

27 Toger.

28 M. KEARNEY : [interprétation] Merci de ces instructions.

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1 Monsieur le Témoin 17, d'après les souvenirs que vous avez, à combien

2 de reprises avez-vous vu Balaj et Haradinaj ensemble pendant le temps que

3 vous avez passé en 1998 au Kosovo ?

4 R. A peu près trois ou quatre fois. Je dirais que c'est le nombre de

5 fois où je les ai vus ensemble à l'occasion de réunions que j'ai eues avec

6 eux.

7 Q. Au cours de ces réunions vous les avez vus ensemble. Dites-nous, est-ce

8 qu'ils sont arrivés ensemble, est-ce qu'ils sont arrivés séparément, est-ce

9 qu'ils sont partis ensemble ?

10 R. Je ne sais pas, mais lorsque nous avons eu des réunions avec Ramush,

11 surtout la première réunion, celle de Jasic, nous nous sommes trouvés dans

12 une pièce et ils sont venus dans cette pièce. Alors, quant à savoir comment

13 ils sont arrivés là, est-ce qu'ils ont fait le voyage dans un même véhicule

14 ou dans des voitures différentes, là je ne peux pas vous le dire.

15 Q. Pendant le temps que vous avez passé au Kosovo en 1998, est-ce qu'il

16 vous est arrivé de les voir faire des déplacements ensemble ?

17 R. Ils étaient ensemble aux réunions que nous avons eues, et moi, je

18 n'étais pas là lorsqu'ils ont effectué le déplacement pour venir à ces

19 réunions. Ce qui fait je ne suis pas du tout à même de vous en parler.

20 Q. Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre quel était leur rapport

21 hiérarchique, disons, dans la voie hiérarchique militaire; qui était le

22 subordonné, qui était le supérieur parmi ces deux hommes ou est-ce qu'ils

23 étaient sur un pied d'égalité ?

24 R. S'agissant des grades, il n'y avait aucun grade à l'époque. On ne

25 s'adressait à personne en donnant le grade de cette personne. C'était

26 plutôt en donnant la fonction. Quand Ramush est venu à Jasic pour avoir des

27 contacts avec nous, il nous a dit qu'il était commandant de la plaine de

28 Dukagjini, alors qu'Idriz Bala, surnommé Togeri, lui, il était commandant -

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1 - son subordonné, parce qu'il était commandant des Aigles noirs.

2 Q. Je voudrais une précision s'agissant de votre dernière réponse. Vous

3 avez dit que Togeri était un commandant, donc son subordonné. Togeri était

4 le subordonné de qui ?

5 R. Subordonné à Ramush, inférieur dans la hiérarchie.

6 Q. En raison des contacts que vous avez ces deux hommes, en raison de vos

7 rapports avec l'UCK au Kosovo en 1998, pouvez-vous nous dire à qui Togeri,

8 chef des Aigles noirs, faisait rapport, rendait compte ?

9 R. Il n'était pas président, il était chef des Aigles noirs. Je vous ai

10 dit qu'il était subordonné par rapport à Ramush. En d'autres termes, il

11 rendait compte à Ramush.

12 Q. Savez-vous qui avait nommé Togeri à ce poste de chef des Aigles noirs ?

13 R. Je ne sais pas. Je ne sais pas qui l'a nommé ni quand il a été nommé.

14 Mais le QG de la plaine de Dukagjini a été créé au cours du printemps 1998.

15 L'état-major a été constitué, et au sein de cet état-major des postes ont

16 été attribués. Il se peut que ce soit Ramush qui a été nommé chef de cet

17 état-major.

18 Q. Merci. Passons à un autre sujet si vous le voulez bien.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais poser quelques questions afin

20 d'obtenir des éclaircissements quant aux rapports existant entre Haradinaj

21 et Balaj. D'après ce que vous avez vu à ces réunions, qui est-ce qui, en

22 général, de ces deux hommes, présentait les positions de cette partie ? Qui

23 prenait la parole ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Ces réunions auxquelles nous assistions

25 étaient des réunions qui avaient lieu directement avec Ramush, alors

26 qu'Idriz Balaj pour sa part l'accompagnait. Il était chargé de sa sécurité

27 lorsqu'il se rendait aux réunions et qu'il en revenait.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que M. Haradinaj avait des

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1 consultations avec M. Haradinaj [comme interprété] lors de ces réunions, ou

2 simplement est-ce que M. Balaj était juste présent ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Il ne s'entretenait avec lui. En tout cas

4 pour ce que j'ai vu il n'y avait pas de consultations entre eux deux.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

6 M. KEARNEY : [interprétation]

7 Q. Monsieur le Témoin 17, lorsque vous nous dites qu'Idriz Balaj était

8 chargé de la sécurité de Ramush pendant ces déplacements à ces réunions et

9 en revenant, est-ce que vous pouvez un petit peu nous donner des détails et

10 nous expliquer plus avant quel était son rôle ?

11 R. Je ne peux dire que la chose suivante : les Aigles noirs étaient

12 l'unité spéciale de l'UCK, étaient placés sous le commandement de Ramush et

13 chaque réunion à Jasic, ensuite à Prapaqan et à Lluk, l'arrivée à Baran. Il

14 y avait des événements solennels, et à toutes ces occasions-là Idriz Balaj

15 a été présent en qualité de personne chargée de la sécurité. Car, comme je

16 le disais, les Aigles noirs étaient une unité spéciale. Donc d'après ce que

17 j'ai pu voir son rôle consistait à donner et à apporter la sécurité, être

18 chargé de la sécurité de Ramush.

19 Q. Nous venons de parler d'une réunion entre FARK et l'UCK qui s'est tenue

20 le 26 juin 1998. Je voudrais maintenant passer à un autre contact qui a eu

21 lieu entre les FARK et l'UCK qui a eu lieu le

22 4 juillet 1998 et qui figure au paragraphe 26 de votre déclaration.

23 Dans ce paragraphe, vous décrivez quel conflit a eu lieu entre quatre

24 soldats de la FARK, Toger, Ramush et d'autres membres de l'UCK à Gllodjan

25 ce jour-là. Je voudrais vous poser la question suivante : Monsieur le

26 Témoin 17, est-ce que cet incident a eu une incidence sur les relations

27 entre l'UCK et les FARK à partir de ce moment-là, et si tel a été le cas,

28 comment ?

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1 M. GUY-SMITH : [interprétation] Si vous me permettez d'intervenir, c'est la

2 première fois que l'on évoque les FARK dans cette déclaration publique,

3 peut-être faudrait-il apporter une clarification quant à savoir précisément

4 que sont les FARK de manière à ce que l'on comprenne bien quelles étaient

5 les implications, le terme FARK n'a pas été mentionné ou l'organisation n'a

6 pas été mentionnée précédemment. M. Kearney l'a évoqué dans sa question.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, en même temps, nous travaillons

8 sur la base de la déclaration en vertu du 92 ter, ce qui, bien sûr, nous

9 donne des éléments au sujet des FARK et comment ils sont entrés au sein du

10 Kosovo.

11 [La Chambre de première instance se concerte]

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kearney, à la page 16, à la

13 ligne 16, vous parlez le représentant d'une réunion en disant : "Maintenant

14 nous venons de parler d'une réunion …"

15 Alors, nous n'avons pas parlé de cette réunion du tout. Est-ce que

16 vous voulez bien, s'il vous plaît, nous présenter ou nous donner des

17 informations présentant cette réunion, nous le décrire. Pour ce qui

18 concerne le FARK sur la Chambre a déjà reçu un certain nombre d'éléments

19 concernant le FARK. Il est expliqué au paragraphe précédent de la

20 déclaration au titre de l'article 92 ter, donc ce n'est pas la peine

21 d'apporter des clarifications supplémentaires à ce sujet.

22 Vous pouvez poursuivre.

23 M. KEARNEY : [interprétation]

24 Q. Monsieur le Témoin, pour donner des éléments de contexte, le premier

25 contact que vous avez décrit plus tôt entre vous-même,

26 M. Haradinaj et M. Balaj a eu lieu le 26 juin 1998 à Jasic; est-ce exact ?

27 R. Oui.

28 Q. Alors généralement, bien sûr, on ne va pas répéter tout ce qui figure

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1 dans la déclaration au titre de l'article 92 ter. Est-ce que vous pouvez

2 juste nous donner dans les grandes lignes, de nous expliquer quelle était

3 cette réunion, de quoi a-t-il été question, quel en était l'objet et

4 combien de temps a-t-il duré, je vous prie ?

5 R. Je peux vous dire que l'objet de cette réunion était la suivante : les

6 unités opérationnelles de l'UCK passées sous le commandement du ministère

7 de la Défense de la République du Kosovo étaient déjà entrées en territoire

8 kosovar. Puisque l'UCK était déjà opérationnelle au Kosovo et effectuait un

9 certain nombre d'activités et puisque le QG de la plaine de Dukagjin était

10 déjà opérationnel, il y a eu des frictions entre les deux éléments du point

11 de vue des institutions et du point de vue organisationnel également. A cet

12 égard, l'arrivée de Ramush à cette réunion a été précisément de nous dire

13 qu'il y avait une organisation qui était présente et qui devait devenir

14 partie intégrante de notre organisation. Nous avions aussi notre

15 commandement, le commandement du ministère de la Défense de la République

16 du Kosovo, et en tant que soldats professionnels, il était très difficile

17 de changer nos ordres du jour, de changer nos plans et nos itinéraires.

18 Donc nous voulions lui dire clairement que cela n'était pas grave, que nous

19 étions arrivés ici pour effectuer la mission dans les différentes phases

20 qui avaient été déterminées en prêtant serment le 21 juin et cela s'était

21 passé à Tropoje en Albanie. Ramush nous a expliqué quelles étaient les

22 caractéristiques de l'UCK, quelle était son activité sur la plaine de

23 Dukagjini et dans le territoire où nous nous trouvions, et il nous a dit

24 que nous devions maintenant systématiquement faire partie intégrante de

25 leur commandement. Comme je le disais, nous avions déjà notre propre

26 commandement, donc ce n'était pas facile d'abandonner ces commandements-là

27 et d'être placés sous le commandement d'une autre instance.

28 Q. Pendant cette première réunion, Monsieur le Témoin 17, est-ce qu'un

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1 accord a été signé entre votre commandement et le commandement de Ramush ?

2 R. Nous n'avons pas été en mesure de trouver un accord intégral;

3 néanmoins, nous avons dit clairement que nous étions au Kosovo pour

4 effectuer des activités militaires et que nous respecterions les plans et

5 la stratégie militaire définis dans les différentes phases et que la

6 première, la deuxième et la troisième phase devraient être réalisées. Donc

7 il n'y a pas eu d'accord concret, je dirais.

8 M. KEARNEY : [interprétation] Messieurs les Juges, si vous pensez que ces

9 éléments de contexte suffisent, maintenant nous pourrons peut-être

10 poursuivre.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Merci. Vous pouvez poursuivre. Je

12 dois m'excuser tout d'abord, parce que je n'ai peut-être pas été très juste

13 lorsque je disais que vous n'aviez pas parlé d'une réunion, nous n'avons

14 parlé de cette réunion du 26 juin en tant que réunion entre l'UCK et le

15 FARK. C'était une réunion entre deux organisations. Donc ce que j'ai dit

16 n'était pas tout à fait juste.

17 Alors, vous pouvez poursuivre. Mais juste avant, une toute dernière

18 question.

19 Vous avez dit que Ramush a parlé des caractéristiques de l'UCK et de son

20 activité. Qu'avez-vous pu observer qui vous a permis d'expliquer pourquoi

21 un accord n'a pas pu être trouvé? Est-ce que les objectifs étaient

22 différents ? Qu'est-ce qui vous a empêché d'arriver à tomber d'accord ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] L'objectif était le même. Nous souhaitions

24 touts, les deux parties, la libération du Kosovo. Et là, il n'y avait pas

25 de différends ou des désaccords à la matière. A mon sens, enfin, d'après ce

26 dont je me souviens, on nous a dit que nous étions arrivés tardivement dans

27 la guerre et que la guerre avait déjà commencé au Kosovo, et si on disait

28 que la date de l'attaque sur Prekaze était le début de la guerre. Donc il

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1 s'était écoulé un certain temps et on nous avait dit que nous sommes

2 arrivés tardivement, nous avons rejoint les rangs tardivement pour faire la

3 guerre, qu'une armée était déjà en place et que nous ne devions pas

4 accepter d'autres commandements de l'étranger qui décidaient d'envoyer des

5 unités, d'organiser des opérations au Kosovo depuis l'étranger, et que bien

6 que des opérations du Kosovo devaient être gérées depuis l'intérieur, nous

7 devions rejoindre l'organisation qui existait au Kosovo, d'ores et déjà.

8 Voilà quelles étaient les différences. Nous avions notre propre

9 commandement et nous ne pouvions pas abandonner, laisser de côté les ordres

10 de notre propre commandement et commencer à mettre en œuvre les ordres d'un

11 autre commandement, alors que l'UCK voulait que nous soyons placés sous son

12 contrôle, et voilà pourquoi nous n'avons pas pu trouver un accord.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si je vous comprends bien, ça veut dire

14 qu'il y avait une sorte de concurrence entre qui, entre vous deux, quant à

15 savoir qui devait être chargé du commandement des forces armées. Je vois.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, on peut dire les choses comme cela. On

17 peut dire que cela existait.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Monsieur

19 Kearney.

20 M. KEARNEY : [interprétation]

21 Q. Est-ce que Ramush ou une autre personne au sein de l'UCK vous a dit

22 pourquoi est-ce qu'ils voulaient que vous, "vous," c'est-à-dire le FARK

23 soit placé sous leur contrôle ?

24 R. Oui. J'ai déjà dit cela si vous souhaitez que je répète ce que j'ai

25 dit. Bien, voilà, on nous a dit que nous étions arrivés tardivement dans la

26 lutte, que la guerre avait déjà commencé et que nous avions déjà une

27 organisation, qu'il y avait un état-major qui était opérationnel dans la

28 zone de Dukagjin et que les autres devaient gonfler les rangs de ce

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1 commandement et être placés sous son commandement au QG.

2 Q. Maintenant, Monsieur le Témoin 17, nous avons à parler un petit plus

3 tôt d'un conflit qui a eu lieu, qui a commencé entre les soldats du FARK et

4 de l'UCK le 4 juillet 1998 à Gllodjan et qui figure dans le détail au

5 paragraphe 26 de votre déclaration. Je voudrais vous demander si ce

6 différend qui s'est produit, qui a commencé à cette date-là, a eu une

7 incidence sur les relations entre le FARK et l'UCK à partir de ce moment-là

8 ?

9 R. Oui, cela est certain, parce que des incidents comme ceux qui se sont

10 produits le 4 juillet ont une incidence tout à fait négative sur les

11 relations entre nous. Mais nous avons essayé de détendre ces relations et

12 de continuer à aller de l'avant, mais une fois de plus, nous leur avons dit

13 tout à fait ouvertement que ce type d'incidents était intolérable,

14 inacceptable, et qu'il ne faudrait pas qu'il se reproduise.

15 Q. Est-ce que cet incident a eu des conséquences sur les mouvements du

16 FARK dans la zone de Dukagjin ?

17 R. Il a eu une incidence négative au sens où il a pesé sur le moral des

18 soldats, car ils avaient été tenus au courant de ce qui s'était passé le 4

19 juillet, de ce qui s'était passé ave ces quatre soldats du FARK. Tous les

20 soldats souhaitaient aller au Kosovo et se battre dans cette guerre contre

21 l'ennemi, plutôt que de savoir qu'il y avait des dissensions entre nous.

22 Donc d'une certaine manière, oui, ils avaient des incidences négatives;

23 mais de l'autre côté cela a créé une sorte d'incertitude parmi les soldats.

24 Si nous devions les envoyer quelque part pour une opération, bien, ils ne

25 savaient pas ce qui pourrait leur arriver.

26 Q. Est-ce que vous pourriez nous expliquer plus avant ce que vous voulez

27 dire lorsque vous nous parlez de cette incertitude que cela a suscitée

28 parmi les soldats ?

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1 R. Un sentiment d'insécurité, c'est le terme que j'ai employé, étant donné

2 ce qui s'était passé lors de cet incident. Les soldats étaient sceptiques

3 et se demandaient ce qui allait se passer dans le courant de leur travail,

4 lorsqu'ils effectueraient leur travail. Donc cette insécurité, cette peur

5 était là. Ils pensaient que s'ils étaient envoyés quelque part pour faire

6 un travail, ils feraient peut-être face à des obstacles, qu'ils ne seraient

7 pas en mesure d'effectuer ce travail.

8 Q. Des obstacles qui seraient soulevés par qui, Monsieur le Témoin 17 ?

9 R. Nous parlons des incidents -- de l'incident qui s'était produit entre

10 les soldats des FARK et des militaires du QG à Gllogjan car cet incident

11 s'était produit à Gllogjan.

12 Q. Je voudrais vous parler maintenant d'un autre différend qui a eu lieu

13 entre les soldats du FARK et de l'UCK et qui a eu lieu le 10 juillet 1998 à

14 Prapaqan. Vous nous donnez des détails de cet événement au paragraphe 41 de

15 votre déclaration. A la troisième phrase entière de votre déclaration, vous

16 dites, et je cite :

17 "J'ai remarqué un groupe d'environ 15 soldats de l'UCK qui étaient habillés

18 en noir et qui étaient dans la cour, debout, qui pointaient leurs armes

19 vers l'entrée de la caserne et qui avaient l'air d'être prêts à combattre."

20 Je vais maintenant vous demander : quelle était l'unité dont les soldats

21 portaient du noir ?

22 R. C'était l'unité spéciale de l'UCK, les Aigles noirs.

23 Q. Ce jour-là à Prapaqan, c'est-à-dire le 10 juillet 1998, et quel était

24 leur chef ?

25 R. Ils sont arrivés avec Togeri et Ramush, et comme je l'ai dit plus tôt,

26 le responsable c'était Togeri.

27 Q. Monsieur le Témoin 17, j'aimerais maintenant attirer votre attention à

28 la deuxième phrase, à la deuxième phrase avant-dernière du paragraphe où

Page 7571

1 vous nous dites, je cite : "Lui," c'est-à-dire Ramush, "nous a accusés

2 d'être des collaborateurs de Milosevic et a déclaré, "Et bien, vous avez

3 maintenant -- officiers, vous avez

4 30 minutes pour quitter cet endroit ou alors il y aura un fratricide.'"

5 Je voudrais vous demander si vous avez eu l'occasion d'entendre Ramush à

6 une autre occasion utiliser le terme de "collaborateur" ?

7 R. Vous me posez la question de savoir si ça s'est produit le même jour ou

8 un autre jour ?

9 Q. Un autre jour. Parmi la vingtaine de fois au cours de laquelle vous

10 avez eu des contacts avec M. Haradinaj pendant la période où vous étiez au

11 Kosovo, est-ce qu'il a exprimé une préoccupation au sujet de collaborateurs

12 ?

13 R. Non, non. A cette occasion-là, le 10 juillet lorsqu'il est venu à la

14 caserne de Prapaqan, c'est le jour où ce terme de collaborateur a été

15 utilisé. A ce moment-là, Ramush n'était pas lui-même. Il était hors de

16 lui. Il était frustré et je ne sais pas quelle en était la raison, qu'elles

17 en étaient les raisons, donc il a dit ce qu'il a dit. Autrement dit, on

18 nous a donné un ultimatum pour quitter la caserne dans la demi-heure qui

19 suivait. Et le prétexte de cela c'était une dispute qui avait lieu entre

20 lui et Tahir Zemaj dans la cuisine, car nos soldats, c'est-à-dire les

21 soldats du FARK, l'avaient salué la main ouverte, alors que les soldats de

22 l'UCK qui étaient déjà organisés en tant qu'armée avant que nous arrivions,

23 saluaient avec le poing fermé. Et à cause de cela, à cause de ces

24 différences entre le salut qui avait été donné, bien, une dispute a éclaté

25 et l'incident s'est produit entre Ramush et Tahir, et s'est poursuivie dans

26 la caserne, comme cela est décrit à la déclaration au paragraphe 41.

27 Q. Dans ce paragraphe, Monsieur le Témoin 17, vous parlez de d'incident

28 "fratricide". C'est ce dont Ramush vous menace ce jour-là. Est-ce que c'est

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1 le terme qu'il a vraiment utilisé lorsqu'il vous a parlé ?

2 R. Cet incident aurait très bien pu aboutir à une guerre, entre frères, et

3 un véritable bain de sang.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je peux vous demander

5 d'écouter avec soin la question posée par M. Kearney. M. Kearney ne vous a

6 pas demandé quelles auraient pu être les conséquences, mais est-ce que le

7 terme de "fratricide" a été utilisé tel quel par M. Haradinaj à ce moment-

8 là. Voilà quelle était la question. Est-ce que vous voulez bien y répondre,

9 je vous prie. Votre déclaration est très claire à cet égard. M. Kearney

10 souhaite juste vérifier par rapport à votre souvenir de ce qui s'est passé

11 quel était le terme exact qui a été utilisé à ce moment-là. Si vous ne vous

12 en souvenez plus, dites-le-nous.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous me demandez si le terme a été

14 effectivement utilisé par Ramush, il est difficile de dire maintenant neuf

15 ans plus tard. Mais le simple fait qu'il ait tiré avec sa Kalashnikov en

16 l'air et le simple fait que cet ultimatum qu'il nous a été donné nous

17 montre au moins que nous étions proches d'un événement fratricide. Mais je

18 ne peux pas dire avec certitude qu'il ait prononcé ce mot-là.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Monsieur

20 Kearney.

21 M. KEARNEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

22 Q. Monsieur le Témoin 17, je voudrais maintenant aborder un autre sujet,

23 il s'agit de la discussion qui est décrite au

24 paragraphe 45 de votre déclaration, particulièrement à la fin du

25 paragraphe. Je pense que c'est la dernière phrase. Je vais vous la citer

26 pour vous demander vos commentaires, je cite :

27 "Tahir Zemaj recevait du courrier des villageois tous les jours, qui se

28 plaignaient des comportements de l'UCK, aussi dans notre AOR," j'imagine

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1 que ça veut dire la zone de responsabilité, "ainsi que dans les zones de

2 responsabilité de l'UCK. J'ai vu et j'ai lu ses courriers."

3 Je voudrais vous demander, Monsieur le Témoin 17, si vous pouvez nous

4 donner plus détails concernant la teneur de ces lettres. Autrement dit,

5 quel était le type de plaintes formulées par les villageois au sujet de

6 l'UCK ?

7 R. Les lettres décrivaient les incidents qui avaient eu lieu, et c'étaient

8 les incidents qui ressemblaient à ceux que nous avons décrits auparavant.

9 Car la population locale connaissait bien ce type d'incidents et c'est cela

10 qui engendrait un manque de confiance parmi la population. Et dans les

11 lettres, ils ont demandé au commandant que le commandement de la région de

12 Dukagjin soit sous le commandement de Tahir Zemaj et c'était une demande

13 faite par le QG territorial des villages se trouvant dans la région où

14 Tahir avait ses unités opérationnelles.

15 Q. Témoin 17, lorsque vous dites --

16 M. GUY-SMITH : [interprétation] Excusez-moi.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Guy-Smith.

18 M. GUY-SMITH : [interprétation] C'est simplement pour souligner une

19 objection au manque de fondement, sources d'information imprécises. Je ne

20 sais pas si M. Kearney peut nous produire les sources ou les documents qui

21 permettent de lier les dires du témoin avec ces derniers.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Kearney est invité à donner le plus

23 de détails que possible. L'objection est rejetée dans la mesure où nous

24 n'allons pas empêcher M. Kearney de poser d'autres questions au témoin sur

25 cette question et ceci ne résultera pas la non-admission des lignes qui

26 viennent d'être citées par M. Kearney.

27 Veuillez poursuivre, je vous prie, Monsieur Kearney.

28 M. KEARNEY : [interprétation]

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1 Q. Témoin 17, vous dites que ces lettres décrivent les incidents qui se

2 sont déroulés dans cette région tout comme les incidents que nous avons

3 décrits un peu plus tôt. Pourriez-vous nous relater, je vous prie, de quels

4 types d'incidents ces lettres faisaient-elles état ?

5 R. Ce que je disais, c'est que dans leurs lettres, ils demandaient que le

6 commandement de la zone de Dukagjini soit placé sous Tahir Zemaj et que les

7 officiers professionnels, militaires, soient ceux qui commandent aux

8 unités. Et les incidents que nous avons mentionnés un peu plus tôt qui

9 étaient le fait que nous nous étions rendus à Jasic et que nos forces

10 avaient été bloquées à cet endroit-là, le fait de ne pas avoir pu passer

11 par Junik, c'était également un problème. Ensuite, l'autre incident était

12 celui lors duquel que les quatre soldats avaient été passés à tabac le 4

13 juillet, ensuite il y a eu un autre incident le 10 juillet. Tout ceci avait

14 exacerbé la population locale, et toute cette frustration et exacerbation a

15 fait en sorte qu'ils se sont mis d'accord pour écrire ces lettres. Nous ne

16 pouvons pas avoir de document appuyant chaque parole, chaque mot, mais il y

17 a des documents à l'appui de mes dires. Je l'avais remis à Hashim Thaqi, et

18 ce document démontre que les incidents tels que j'en ai parlé ont eu lieu

19 et que ceci a causé une frustration parmi la population.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Emmerson.

21 M. EMMERSON : [interprétation] Je me demande si le témoin pourrait enlever

22 ses écouteurs, je vous prie.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faut d'abord établir si le témoin

24 comprend l'anglais.

25 Monsieur le Témoin 17, est-ce que vous comprenez l'anglais ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends l'anglais, mais pas très bien.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne sais pas quel est le type

28 d'objection que vous voulez soulever, Monsieur Emmerson.

Page 7575

1 M. EMMERSON : [interprétation] Je m'en remets aux mains de cette Chambre,

2 Monsieur le Président, pour statuer sur cette objection. Je formule mon

3 objection sur la base du fait qu'on dit - enfin, on en a parlé pendant la

4 réunion de ce matin. Maintenant,

5 M. Kearney essaie d'obtenir des réponses du témoin à l'appui de ce dont

6 nous avons parlé.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. En fait, je vais demander une

8 précision.

9 Monsieur le Témoin 17, dans votre déclaration vous avez déclaré que les

10 villageois se plaignaient du comportement de l'UCK, et lorsqu'on a posé des

11 questions sur les incidents dont on fait référence dans la lettre, pour

12 cette référence plutôt aux incidents qui, tout du moins, à prime abord,

13 n'étaient pas des incidents impliquant les villageois, mais plutôt les

14 soldats du FARK et que c'étaient eux qui étaient plutôt frustrés par ces

15 incidents. Est-ce que c'est de ça que parlaient les villageois, du fait que

16 cela occasionnait une frustration, une exacerbation auprès des soldats du

17 FARK, ou bien est-ce qu'il s'agissait d'autre chose ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme j'ai dit un peu plus tôt, et je vais

19 répéter de nouveau. Ces lettres sont arrivées du QG régional de la Défense

20 territoriale des villages, parce que chaque village avait sa propre Défense

21 territoriale et le QG de sa propre Défense territoriale. Cette

22 préoccupation existait. Je le dis pour ce qui est des villageois, mais ces

23 villageois étaient liés étroitement au QG. Ils connaissaient les incidents,

24 ils savaient que des incidents étaient survenus par le biais de ces QG

25 régionaux, et c'est pourquoi ils nous ont écrit ces lettres dans lesquelles

26 ils ont demandé que Tahir Zemaj soit le commandant en chef de la zone

27 opérationnelle en question.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que c'étaient des lettres des

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1 villageois ou des personnes qui étaient chargées de choses plus

2 importantes. En fait, est-ce que c'étaient les membres du QG qui

3 demandaient que Tahir Zemaj devienne le commandant ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est tout à fait juste.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous souvenez-vous combien de lettres

6 approximativement avez-vous pu voir ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] A la dernière réunion à Broliq, la dernière

8 réunion que nous avons eue, j'ai personnellement pris ces lettres de Tahir

9 Zemaj et je les ai remise à Fadil Haderxhonaj qui était chargé, qui était

10 le responsable dans la brigade de Tahir Zemaj, et je lui ai demandé de

11 prendre ces lettres et de les emmener au responsable de l'état-major

12 principal de l'UCK. Ces lettres ont été par la suite emmenées à Hashim

13 Thaqi. Quand ce dernier a vu ces lettres, il les a lues. Il n'en a gardé

14 qu'une, les autres, il les a jetées. Il les a d'abord déchirées en petits

15 morceaux, et par la suite, il les a jetées par terre dans la pièce.

16 Je ne me souviens pas du nombre de lettres qu'il y avait exactement, mais

17 je dirais qu'il y avait une douzaine de lettres.

18 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

19 M. KEARNEY : [interprétation]

20 Q. Témoin 17, vous avez parlé de deux termes : "Défense territoriale," et

21 l'autre c'était "villageois locaux." Pourriez-vous nous dire, s'il vous

22 plaît, si selon vous c'est la même chose, ou bien est-ce qu'il s'agissait

23 de deux choses différentes ? Pourriez-vous nous expliquer le lien entre ces

24 deux groupes, s'il vous plaît ?

25 R. Ce n'était pas des groupes séparés. Les villageois étaient des

26 personnes ordinaires qui avaient pris part à l'organisation des unités dans

27 leurs propres villages, appelée Défense territoriale. D'autre part, il y

28 avait des personnes âgées et vous pouviez avoir des hommes entre 35 ans et

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1 60 ans. Ils étaient tous impliqués dans la défense de leur propre village.

2 D'autres personnes étaient plus jeunes. Ils avaient plus de 18 ans et ils

3 étaient soit les membres de l'UCK ou les membres du FARK. Donc, lorsqu'on

4 parle de villageois locaux et de Défense territoriale, nous pouvons donner

5 ce type d'explication. La différence n'est que dans l'âge.

6 Q. S'agissant de ces dizaines de lettres dont vous avez fait référence, y

7 a-t-il jamais été mention d'activités criminelles auxquelles les membres de

8 l'UCK s'adonnaient ?

9 R. Non. Je n'ai pas vu de telles lettres.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson.

11 M. EMMERSON : [interprétation] Dans ces circonstances-là, eu égard à la

12 réponse du témoin, nous souhaiterions formuler une objection quant à ceci.

13 Nous renouvelons la même objection que tout à l'heure.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, nous allons y réfléchir et revenir

15 là-dessus.

16 M. KEARNEY : [interprétation]

17 Q. Témoin 17, j'aimerais maintenant passer à la réunion qui s'est déroulée

18 entre M. Haradinaj soit le 10 ou le 11 juillet 1998, réunion à laquelle a

19 plutôt assisté Haradinaj et qui est étalée au paragraphe 50 de votre

20 déclaration. Dans la deuxième phrase de ce même paragraphe --

21 M. EMMERSON : [interprétation] Objection à la forme de l'interrogatoire

22 pour ce qui est de la façon dont M. Kearney fait référence à la déclaration

23 92 ter, et je souhaiterais faire une objection quant au fait qu'il attire

24 notre attention sur la deuxième phrase du paragraphe 50. Le paragraphe 50

25 devrait être lu dans son ensemble et devrait tenir un lien avec le

26 paragraphe 40 si l'on veut procéder à un interrogatoire correct.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Je vais en

28 prendre connaissance.

Page 7578

1 Monsieur Kearney, si vous voulez obtenir des éléments du témoin quant

2 au paragraphe 50, ne référez pas le témoin à ce paragraphe. Si vous voulez,

3 vous pouvez faire une référence au fait qu'une réunion a eu lieu le 10

4 juillet, ensuite vous pouvez demander au témoin s'il se rappelle quels

5 étaient les sujets soulevés lors de cette réunion.

6 M. KEARNEY : [interprétation] Monsieur le Président, je faisais mention

7 justement, répondant à une question quant au paragraphe 50 de lui demander

8 pourquoi est-ce que M. Haradinaj a demandé de licencier …"

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Alors, si vous voulez, vous

10 pouvez poser une question. Mais si vous voulez obtenir d'autres précisions

11 ou d'autres informations quant à ces événements, alors je vous prierais de

12 ne pas vous servir textuellement du texte, des mots - dans la déclaration

13 c'est peut-être une introduction - en fait, on induit en erreur peut-être

14 le témoin en lui demandant de faire, que de lire des parties de certains

15 paragraphes sans lui en avoir donné lecture préalable de l'ensemble du

16 paragraphe.

17 M. KEARNEY : [interprétation] Très bien. Merci.

18 Q. Témoin 17, le 10 ou le 11 juillet 1998, dans le village de Luka, est-ce

19 que vous avez demandé à Ramush Haradinaj de licencier ou de réprimander M.

20 Toger ?

21 R. Oui, d'une certaine façon, oui. J'ai attiré son attention sur cette

22 problématique, car la veille il y avait eu un incident qui s'était déroulé

23 au croisement entre Prilep et Gllogjan, et c'était un incident entre moi-

24 même et Idriz Balaj. Je me rendais à l'hôpital militaire pour rendre visite

25 à un ami qui était blessé. Au cours des premières opérations à Loxha,

26 Togeri m'a demandé si j'avais un laissez-passer ou un permis me permettant

27 de me déplacer. J'ai plutôt réagi à cela comme si c'était une blaque.

28 Ensuite, il a insisté et j'ai réagi en lui disant : Est-ce que tu sais qui

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1 je suis, ce que je fais ? Il m'a dit : Non, je ne te connais pas. Je lui ai

2 rappelé la réunion de Jasic -- et ensuite quelqu'un -- j'ai ensuite essayé

3 de lui donner certains détails pour lui faire rappeler que j'étais là,

4 j'étais présent dans cette pièce lors de cette réunion. Ensuite, je lui ai

5 montré un fusil automatique et quelques grenades à main, et cela a causé

6 l'incident. Ensuite, je lui ai dit que j'étais le commandant de la brigade

7 et que j'avais la permission de me déplacer librement, que personne ne

8 pouvait m'empêcher de me rendre à l'hôpital militaire pour rendre visite à

9 un ami. C'est pourquoi j'ai demandé à Ramush de soit le discipliner ou de

10 le licencier, car ce genre d'incident pouvait mener ou occasionner d'autres

11 conséquences plus fâcheuses.

12 Q. Est-ce que vous portiez un uniforme lorsque vous avez eu ce contact

13 avec Toger ?

14 R. Oui, je portais toujours mon uniforme, en tout temps.

15 Q. De quel type de permis s'agissait-il ? Que vous demandait Idriz Balaj

16 exactement ?

17 R. Je ne le sais pas vraiment. Il m'a simplement demandé une autorisation,

18 de lui montrer une autorisation ou un permis ou un laissez-passer qui me

19 permettrait d'être là, d'être présent sur ce territoire. Mais pour vous

20 dire bien franchement, je ne sais pas du tout à quoi il faisait allusion

21 car nous n'avons pas eu un entretien long. Il a demandé si j'avais un

22 permis, je lui ai dit que le fait d'avoir un fusil automatique et des

23 grenades à main constituait un permis. Je lui ai dit que ces derniers je

24 les avais pris lors du combat Loxha. Je lui ai expliqué très clairement que

25 je devais me rendre à l'hôpital militaire et rendre visite à un officier

26 supérieur qui était blessé.

27 Q. Lorsque vous dites que de tels contacts tels que vous les avez eus avec

28 Idriz Balaj pouvaient mener à des incidents plus fâcheux, qu'est-ce que

Page 7580

1 vous voulez dire par là ?

2 R. Bien, de tels incidents créaient une frustration parmi nous. Et vous

3 savez, lorsque l'on est frustré on ne peut pas mener ces activités de façon

4 adéquate, on ne peut pas mener à bien les tâches qui nous sont confiées

5 dans une zone précise. Et ce genre de frustration ne peut que grandir et

6 mener vers quelque chose de plus fâcheux.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kearney, je regarde l'heure et

8 je me rends compte que ce serait peut-être le moment de prendre une pause.

9 Est-ce que cela vous conviendrait ?

10 M. KEARNEY : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

12 Nous prenons une pause maintenant, nous reprendrons à

13 onze heures et quart.

14 --- L'audience est suspendue à 10 heures 50.

15 --- L'audience est reprise à 11 heures 19.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kearney, vous pouvez continuer.

17 M. KEARNEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

18 Q. Témoin 17, avant la pause, nous parlions d'une réunion à laquelle vous

19 étiez présent et que vous avez eue d'ailleurs avec M. Haradinaj le 10 ou le

20 11 juillet 1998, à Luka. Ce jour-là ou lors de cette réunion, est-ce que

21 vous avez demandé à M. Haradinaj de discipliner Togeri à la suite de ce qui

22 s'était passé à Loxha, après la première bataille, à Loxha ?

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il semblerait que le témoin n'a pas

24 interprétation. En fait, il faut dire quelque chose pour voir si le témoin

25 entend.

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'entends pas l'interprétation, je

27 n'entends rien.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon.

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, en fait, je vous entends maintenant, oui.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous pourriez peut-être répéter votre

4 question, s'il vous plaît.

5 M. KEARNEY : [interprétation]

6 Q. Avant la pause, nous parlions d'une réunion que vous avez eue avec M.

7 Haradinaj le 10 ou le 11 juillet 1998 à Luka, dans laquelle vous avez

8 demandé à M. Haradinaj de discipliner ou de licencier Togeri. Pourriez-vous

9 me dire, je vous prie, que vous a répondu M. Haradinaj après avoir posé

10 cette question-là, après lui avoir demandé cela, que vous a-t-il répondu ?

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Emmerson.

12 M. EMMERSON : [interprétation] Pourrait-on d'abord établir quelle était la

13 raison pour laquelle ce témoin a demandé une action disciplinaire, ou sur

14 quelle base est-ce qu'il s'est appuyé pour poser cette question, pour

15 demander cela ?

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'est pas vraiment nécessaire de

17 faire cela, ce n'est vraiment pas nécessaire que ceci soit établi par M.

18 Kearney. Si vous voulez, je vais laisser cela aux soins de M. Kearney pour

19 approfondir ou essayer d'établir les bases à une étape ultérieure.

20 M. KEARNEY : [interprétation] Certainement. Je serais fort heureux de

21 préciser cette question.

22 Q. Témoin 17, pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, pourquoi est-ce

23 que vous avez demandé que Togeri soit discipliné ou soit licencié ?

24 R. Parce que j'ai estimé que ce n'était pas une bonne façon de se

25 comporter. Il ne s'est pas très bien comporté lors de l'incident d'Isnik.

26 Lorsque c'était arrivé, nous n'étions pas étrangers, nous étions déjà

27 rencontrés à plusieurs reprises. Préalablement, nous nous connaissions très

28 bien, et il savait très bien quel rôle je jouais et quelle position

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1 j'occupais dans cette région. C'est pourquoi j'ai trouvé son comportement

2 irrationnel.

3 Q. Qu'est-ce que Togeri avait fait d'incorrect, selon vous ?

4 R. C'était une provocation de sa part. Il m'a provoqué alors que j'avais

5 une certaine mission à accomplir. Il savait très bien que j'étais un

6 opérationnel, que j'étais commandant d'une brigade et que j'étais sur le

7 terrain avec mon unité. C'est pourquoi j'ai compris cet affrontement comme

8 une provocation, à savoir le fait qu'il me posait des questions, pourquoi

9 que j'étais là, et me demandant de lui montrer un laissez-passer, alors que

10 je lui avais déjà expliqué que j'allais me rendre à l'hôpital pour rendre

11 visite à un collègue qui avait été blessé pendant la bataille de Loxha.

12 Q. Que vous a dit Ramush -- vous lui avez parlé du comportement de Togeri,

13 vous lui avez demandé de la discipliner. Comment a-t-il réagi ?

14 R. Il a souri. Et il m'a dit : Oui, je sais. Toger m'a relaté l'incident.

15 Mais ce n'était pas bien de lui montrer ton arme. C'est ce qu'il a dit.

16 Q. Sur la base de vos propres observations après cette réunion avec Toger

17 et Ramush, est-ce que vous savez si Toger a jamais été discipliné pour

18 l'affrontement que vous avez eu avec lui, pour la façon dont il s'est

19 comporté avec vous ?

20 R. Non, je n'ai aucune connaissance de cela.

21 Q. Témoin 17 --

22 M. GUY-SMITH : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

23 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je n'allais pas formuler d'objection, mais

24 on demande au témoin de se livrer à des conjectures, puisqu'il nous dit

25 maintenant qu'il n'a aucune connaissance de cela. Maintenant, de lui poser

26 des questions si la personne a été disciplinée ou pas, ou s'il y a eu une

27 base pour établir les raisons pour lesquelles cette personne aurait dû être

28 disciplinée, et cetera, ce n'est pas une question appropriée.

Page 7583

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais M. Kearney voulait simplement

2 savoir si des mesures disciplinaires avaient été prises contre M. Togeri.

3 C'est ce qu'il voulait savoir.

4 Veuillez poursuivre, je vous prie, Monsieur Kearney. L'objection est

5 rejetée.

6 M. KEARNEY : [interprétation]

7 Q. Après la discussion que vous avez eue au début du mois de juillet 1998

8 avec M. Haradinaj, de vos propres dires, M. Togeri est resté commandant des

9 Aigles noirs, n'est-ce pas, il a gardé la position qu'il avait eue

10 préalablement ?

11 R. Oui.

12 Q. Est-ce que vous avez jamais demandé à M. Haradinaj ultérieurement de

13 discipliner Togeri ?

14 R. Plus tard, il y a eu une réunion entre Tahir et Ramush lorsque le

15 commandement opérationnel du plateau de Dukagjini a été créé, et c'est à ce

16 moment-là que nous avons parlé de ces problèmes.

17 Q. Est-ce que vous vous souvenez approximativement quand la conversation

18 avec M. Haradinaj a eu lieu ?

19 R. C'est lorsque l'on a procédé à la création du commandement du plateau

20 de Dukagjini autour du 21 juin 1998.

21 Q. Concernant justement cette date, le 21 juin, Témoin 17, est-il exact

22 que vous n'êtes pas arrivé au Kosovo qu'après cette

23 date ?

24 R. Oui, je souhaiterais apporter une précision. Je me suis trompé. Je

25 parlais du 21 août, car nous parlons du mois de juillet pour l'instant. Ce

26 que je voulais dire, c'est que je me suis trompé, et je voulais parler du

27 mois d'août, du 21 août.

28 Q. Lorsque vous avez demandé à M. Haradinaj de discipliner Togeri,

Page 7584

1 pourquoi est-ce que vous lui aviez demandé cette fois-là de le discipliner

2 ? Qu'avait-il fait d'incorrect selon vous ?

3 R. On disait que son comportement n'était pas adéquat pour les activités

4 qui se déroulaient. Par le biais des lettres que nous avions reçues, nous

5 savions qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas bien.

6 Q. Qu'est-ce que vous aviez appris de ces lettres qui n'allaient pas ? A

7 quoi faites-vous référence ?

8 R. Je vous l'ai dit, ces incidents et les contacts qu'il avait eus dès le

9 début jusqu'à ce moment-là. On avait dit, au vu de tout cela, que le

10 comportement de Togeri était particulier par rapport au comportement des

11 autres commandants et des combattants. D'ailleurs la population était aussi

12 irritée par son comportement.

13 Q. Mais de quel type de comportement particulier parlez-vous ?

14 R. Je vous ai relaté les incidents survenus jusqu'alors. Je vous ai parlé

15 des lettres que nous avons reçues du QG de Tahir Zemaj. Tahir lui aussi a

16 eu des entretiens en privé avec d'autres personnes, ce qui lui a permis

17 d'apprendre que Togeri ne se comportait pas bien.

18 Q. [aucune interprétation]

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Guy-Smith.

20 M. GUY-SMITH : [interprétation] Objection, vu ce type de déclaration.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez être plus

22 précis, Monsieur le Témoin. Vous dites, et je relis ce que vous avez

23 déclaré : "Tahir avait également eu des conversations privées avec d'autres

24 personnes."

25 Est-ce que vous avez assisté aux conversations qu'il a eues ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'étais pas présent lorsqu'il a parlé

27 à ces gens-là. Mais en vertu de la hiérarchie militaire et du commandement,

28 nous avons parlé ensemble de ces questions. Si je n'étais pas au même

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1 endroit que lui, ça ne voulait pas lire pour autant que nous n'avions pas

2 des contacts quotidiens. Nous avions des contacts quotidiens.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce que vous voulez dire, c'est qu'au

4 cours de ces conversations que vous avez eues avec lui, il vous a rapporté

5 ce dont il avait parlé avec ces autres personnes. Est-ce que j'ai bien

6 compris ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il vous a dit à qui il avait

9 parlé de la sorte ? Est-ce que c'étaient des citoyens ordinaires ? Ou est-

10 ce que c'étaient des personnes qui occupaient des postes particuliers ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, c'était des villageois ordinaires qui

12 avaient vécu toutes sortes de choses, par exemple, des gens dont les

13 membres de leurs familles avaient été maltraités, avaient été frappés, ou

14 des gens qui ne savaient pas où se trouvaient des parents à eux. C'étaient

15 des gens originaires de ces villages dont des parents avaient été portés

16 disparus.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Au cours de ces conversations, comment

18 ces villageois ordinaires ont-ils pu établir un lien entre Toger et ces

19 parents portés disparus ? Parce que c'est ce que vous avez dit. Vous avez

20 dit qu'on se plaignait du comportement de Toger. Comment ces gens ont-il

21 expliqué que Toger avait été partie prenante à tout cela ? Est-ce que tout

22 d'abord ces personnes l'ont dit ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Tahir avait dit que si quelqu'un avait été

24 arrêté et envoyé à Gllogjan, si on ne savait pas où cette personne se

25 trouvait, ceci était à cause de Toger qui avait procédé à ces arrestations.

26 C'est pour ça que les villageois étaient intéressés, c'est pour ça qu'ils

27 ont donné à Tahir ces informations parce qu'il y avait quelque chose qui

28 n'était pas correct. On avait dit que les personnes portées disparues, les

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1 personnes qui avaient été arrêtées et qui après avaient été portées

2 disparues, que ces personnes avaient été envoyées à Gllogjan.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant, vous dites, je vous relis.

4 Vous avez dit que si Sahir avait dit que si quelqu'un avait été arrêté, la

5 responsabilité en était attribuée à Togeri. Est-ce qu'il vous explique

6 pourquoi il rendait Toger et non pas quelqu'un d'autre responsable de cela

7 ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Il est parvenu à ces conclusions, il a

9 recueilli ces renseignements en parlant à ces personnes. Je ne sais pas de

10 façon détaillée de quoi il a parlé avec ces gens qui sont allés le voir

11 dans les installations militaires, mais il disposait bien de ce genre de

12 renseignement.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez.

14 M. KEARNEY : [interprétation] Je vois que Me Emmerson veut intervenir.

15 M. EMMERSON : [interprétation] Oui, ce n'est toujours pas clair dans mon

16 esprit. A un échange de réponses et questions qui vient de précéder ceci,

17 est-ce que le témoin dit qu'on a fait part d'infractions bien précises à

18 l'occasion de cette réunion, que ceci aurait été rapporté à M. Haradinaj et

19 qu'on aurait dit que certains faits étaient le fait de Idriz Balaj; en

20 d'autres termes, est-ce que le témoin est à même de rapporter des

21 allégations précises ?

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous auriez pu aborder cette question au

23 contre-interrogatoire. Monsieur le Témoin, lorsqu'on a dit que le

24 comportement de Toger n'était pas correct, est-ce que c'est à l'occasion de

25 questions précises qui se sont posées au cours de ces réunions, ou est-ce

26 qu'il y avait, disons, un grief général, est-ce qu'on accusait de façon

27 générale Toger d'être responsable de quelque chose en particulier ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, il n'y a pas eu mention d'incidents

Page 7587

1 particuliers. Nous avons parlé de tout cela de façon générale.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

3 Poursuivez, Monsieur Kearney.

4 M. GUY-SMITH : [interprétation] Puis-je intervenir ?

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

6 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vois les réponses qui ont été données.

7 Vous savez qu'il y a un élément qui est des plus pernicieux, c'est la

8 rumeur. Alors, je ne sais pas dans quelle mesure la Chambre voudra donner

9 du poids à une rumeur. Pratiquement, il me sera impossible de contre-

10 interroger ce témoin face à de telles allégations.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est limpide, Maître, et vous devez

12 avoir déjà compris maintenant que la Chambre, tout comme les parties,

13 s'efforce de tirer le fin mot de l'histoire lorsqu'il s'agit d'allégations,

14 de savoir si elles sont fondées. Plus les sources sont faibles, moins

15 l'élément obtenu aura de valeur probante. Je l'ai dit à diverses occasions

16 et je l'ai redit ce matin lors de notre réunion, l'appréciation,

17 l'évaluation ultime des éléments de preuve sera faite une fois que le

18 dossier complet aura été constitué, mais lorsque la Chambre est saisie

19 d'éléments de preuve précis, au fur et à mesure elle essaie de se faire une

20 idée la plus précise possible de la solidité ou de la faiblesse de

21 l'élément présenté.

22 M. GUY-SMITH : [interprétation] J'ai bien compris, Monsieur le Président.

23 Merci.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kearney.

25 M. KEARNEY : [interprétation]

26 Q. Peut-on prendre le paragraphe 109 de votre déclaration préalable, là où

27 vous parlez de la réunion que vous avez eue, vous et M. Zemaj, avec

28 Haradinaj. Deuxième phrase de ce paragraphe voici ce que vous déclarez.

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1 Vous avez dit à M. Haradinaj que des membres du l'UCK, Maliq Ndrecaj, Faton

2 Mehmetaj et Idriz Balaj, devraient être retirés de son QG du Dukagjini,

3 parce qu'on disait que ces hommes avaient commis des crimes sur des civils;

4 est-ce exact ? Est-ce que vous avez dit à M. Haradinaj que ces hommes se

5 rendaient coupables de crimes à l'encontre de civils ?

6 R. Lorsque le QG ou le commandement conjoint de la plaine de Dukagjini a

7 été constitué après l'accord du 21 août il y a eu une réunion conjointe,

8 mais il n'y avait pas dans ce commandement ces personnes, à l'exception de

9 Faton Mehmeti qui restait là. C'est pour ça que Tahir et moi avons dit très

10 clairement que les personnes qui auraient participé à ce genre d'incidents

11 ne devraient pas faire partie du commandement. Il y a eu ensuite le cas de

12 Sanije, là nous avons appris que cette femme était portée disparue. Nous

13 avons recueilli des renseignements sur des circonstances de sa disparition,

14 depuis sa détention jusqu'au moment où elle a perdu la vie. A partir de

15 renseignements de ce genre, nous avons demandé que ce genre de personnes ne

16 fasse pas partie du commandement.

17 Q. Au cours de cette réunion, vous avez demandé à M. Haradinaj de démettre

18 ces personnes de leurs fonctions dans son commandement, qu'est-ce qu'il

19 vous a répondu ?

20 R. Il a répondu qu'il était au courant des rumeurs qui circulaient à

21 propos de Toger et de ses agissements. Il a dit qu'il allait en parler à

22 d'autres, je ne sais pas s'il l'a fait. Mais nous sommes restés témoins de

23 cette situation, elle a perduré. Nous avons des gens qui occupaient

24 certaines fonctions dans la structure militaire et qui ont continué de les

25 occuper, il n'y a pas eu de modification d'après ce que nous avons vu.

26 Q. Une question de suivi concernant les activités de l'UCK sur les civils.

27 Il y a une liste de personnes recherchées. Vous en parlez au paragraphe 57

28 de votre déclaration.

Page 7589

1 M. KEARNEY : [interprétation] Peut-on afficher la première annexe, le

2 numéro 757 de la liste 65 ter. Si vous me le permettez, Messieurs les

3 Juges, je vais demander que soit affiché la page 13 en anglais. Je pense

4 que le témoin dispose d'un exemplaire en albanais.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce qui va apparaître à l'écran ne

6 devrait pas être montré en dehors de ce prétoire.

7 M. KEARNEY : [interprétation] Merci de me le rappeler. Merci. Peut-on faire

8 défiler le texte ?

9 M. GUY-SMITH : [interprétation] Une précision. Vous dites, Monsieur

10 Kearney, que le témoin a ses notes d'origine. Je suppose que ce sont des

11 notes manuscrites de sa main, ou que ce sont, en fait, des documents qui

12 ont été créés sur ses instructions, n'est-ce pas ?

13 M. KEARNEY : [interprétation] Oui, et j'aurais dû le préciser. Le document

14 qu'il examine en albanais est un exemplaire photocopié de notes manuscrites

15 rédigées en 1998 au moment des faits.

16 Q. J'aimerais savoir à quel moment vous avez obtenu ces informations et de

17 quelle façon vous avez consigné celles-ci dans vos notes - je parle ici de

18 la liste des personnes recherchées. Dites-nous de quelle façon vous avez

19 obtenu des renseignements.

20 R. Je vais essayer de vous l'expliquer. Vers le 12 juillet, l'unité

21 opérationnelle a été établie à Baran e Vogel. Nous avons organisé une

22 réunion à Vranovc, nous les commandants de Lugu i Baranit. C'est comme ça

23 que c'était appelé à l'époque, Din Krasniqi, avait leur réunion avec

24 certains commandants de village que moi je ne connaissais à l'époque. Au

25 cours de cette réunion, on m'a remis cette liste, et dans mon journal, j'ai

26 fait cette note le lendemain, le 13, lorsque nous faisions une inspection

27 du terrain, à la recherche du meilleur endroit possible pour installer les

28 structures militaires. Nous nous sommes dits à Baran e Vogel, que l'école

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1 sera l'endroit qui conviendrait le mieux. Ce que j'essaie de dire, c'est

2 que je n'ai pas confectionné moi-même cette liste, mais qu'elle m'a été

3 remise pendant la réunion.

4 Q. Est-ce que vous savez qui vous remis cette liste ?

5 R. Je ne le sais pas, mais il est possible que Din Krasniqi ou quelqu'un

6 d'autre en tout cas, quelqu'un qui était le procès-verbaliste [phon] ait

7 fourni cette liste.

8 Q. Est-ce que c'est quelqu'un de l'UCK qui vous a remis cette liste ?

9 R. C'était une réunion que nous avions avec des représentants de l'UCK.

10 Nous avions Krasniqi pour Lugu i Baranit et il y avait aussi les

11 commandants de village. Donc si vous regardez cette liste, vous verrez que

12 ce sont les personnes qui auraient déjà cette liste et qui me l'ont

13 communiquée.

14 Q. Lorsque vous avez rédigé ces notes, lorsque vous avez fait une

15 transcription de cette liste, est-ce que ces noms vous disaient quelque

16 chose.

17 M. KEARNEY : [interprétation] Je précise, Messieurs les Juges, qu'il y a

18 une deuxième page dans cette liste de personnes recherchées. Peut-être

19 peut-on la montrer.

20 Q. Il y a dix noms dans cette liste. Est-ce que ces noms signifiaient

21 quelque chose pour vous lorsque des membres de l'UCK vous ont remis cette

22 liste ?

23 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je pense qu'on déforme les propos du

24 témoin. Ce n'est pas ce que le témoin a déclaré lorsqu'on lui a demandé,

25 qui lui avait remis la liste. Il a répondu qu'il ne savait pas, qu'il a dit

26 simplement que ça pouvait venir de commandants de village ou --

27 M. KEARNEY : [interprétation] Je dirais que ça revient au même.

28 M. GUY-SMITH : [interprétation] Pas du tout, et Monsieur Kearney le sait

Page 7591

1 bien.

2 M. KEARNEY : [interprétation] Objection à cette dernière remarque de Me

3 Guy-Smith.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Effectivement. Vous sembleriez dire

5 qu'en fait c'est intentionnellement que M. Kearney voulait déformer les

6 propos du témoin ou l'induire en erreur, je pense que ceci est hors de

7 propos.

8 M. KEARNEY : [aucune interprétation]

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Attendez, Monsieur Kearney avant de

10 reprendre. Je veux relire la teneur de la réponse pour m'assurer que

11 j'avais bien compris.

12 Monsieur le Témoin, vous avez déjà dit que c'était une réunion que

13 vous aviez avec les représentants de l'UCK pour Lugu i Baranit, Din

14 Krasniqi et des commandants de village. C'étaient des commandants de quel

15 type, ces personnes ? Est-ce que c'étaient des civils, des gens qui avaient

16 des responsabilités ? Est-ce que c'étaient des commandants de l'UCK pour

17 ces villages ? Qu'est-ce que vous vouliez dire exactement ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] C'étaient des commandants, des représentants

19 de ces villages pour l'UCK. Lorsque nous sommes arrivés sur place, il y

20 avait dans presque tous les villages un représentant qu'on appelle le

21 commandant de village.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous ai-je bien compris ? Quand vous

23 dites "commandant" vous parlez de ceux qui commandaient l'UCK dans un

24 village donné; c'est bien cela ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. C'était les commandants qui avaient

26 la responsabilité de leurs villages respectifs. C'est eux qui avaient cette

27 responsabilité.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais maintenant vous laissez de côté un

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1 élément que j'avais repris dans ma question. Vous dites que c'étaient les

2 gens qui avaient -- les responsables. Est-ce que vous établissez

3 nécessairement un lien avec les activités de l'UCK ou est-ce que ces

4 personnes avaient ces responsabilités indépendamment de l'UCK ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas parlé de façon concrète. C'étaient

6 des gens en situation de responsabilité pour leurs villages respectifs au

7 niveau de l'organisation du village. C'étaient des personnes qui avaient la

8 responsabilité d'organiser les activités du village ces commandants. Je

9 parle donc des personnes qui ont participé à cette réunion.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous voulez dire que les commandants

11 pouvaient être des individus qui n'avaient pas de poste ou de fonction

12 particulière au sein de l'UCK ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] On les appelait commandants de villages. C'est

14 comme ça que ça fonctionnait.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que ces gens portaient l'uniforme

16 ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Certains étaient en uniforme et d'autres, en

18 raison de la pénurie d'uniformes, n'en portaient pas. Tous les soldats ne

19 portaient pas d'uniformes, je parle du début de la guerre.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que ça veut dire que ceux qui

21 n'étaient pas en uniforme n'avaient pas nécessairement un poste qui était

22 différent de ceux, qui eux, étaient en uniforme ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Ceux qui ne portaient pas d'uniforme mais

24 participaient aux activités du village montaient la garde, par exemple,

25 bien, on peut les appeler membres de la Défense territoriale du village.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Kearney.

27 M. KEARNEY : [interprétation]

28 Q. Poursuivons --

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un instant. Nous avons parlé d'une liste

2 de 10 noms auparavant. Peut-on revoir la page 13, parce que là j'y trouve

3 huit noms. Et j'aimerais que nous passions à la page 14. Il y a d'abord

4 quelques phrases, puis les numéros 9 et 10. Au regard des chiffres 9 et 10,

5 a-t-on le nom de personnes qui également sont recherchées ou portées

6 disparues ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils font partie de la même liste, oui.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

9 Poursuivez, Monsieur Kearney.

10 M. KEARNEY : [interprétation] Peut-on afficher l'annexe, le numéro 724 de

11 la liste 65 ter. Je pense qu'il s'agit de certaines règles ou dispositions

12 du règlement de la police militaire.

13 Nous pourrions afficher la traduction en en anglais.

14 Q. Vous, vous avez le texte en albanais à l'annexe 14, Monsieur le

15 Témoin.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kearney, si vous faites

17 afficher l'anglais, est-ce qu'il ne serait pas préférable d'avoir

18 l'original en albanais pour le témoin; nous, nous pouvons aisément lire la

19 version en anglais.

20 M. KEARNEY : [interprétation] Comme vous voulez, Monsieur le

21 Président. Mais il a une copie sur support papier et sous les yeux.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Fort bien.

23 M. KEARNEY : [interprétation]

24 Q. Dans quelles circonstances avez-vous réceptionné ce document ?

25 R. Lorsque le commandement général a été établi dans la zone de Dukagjin

26 suite à un accord entre la FARK et l'UCK, donc au fond entre Tahir Zemaj et

27 Ramush, ce règlement a été établi parce que Tahir était l'adjoint, et ceci,

28 ce document se trouvait dans les archives à Prapaqan, où j'étais le chef de

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1 l'état-major. A Kryshec, Tahir m'a donné un exemplaire pour cette raison.

2 Q. Savez-vous dans quelles conditions au départ ce document était apporté

3 dans vos archives ?

4 R. Je ne sais pas qui a apporté ce document, mais il s'agit d'un document

5 de l'UCK, de l'état-major opérationnel de la plaine de Dukagjin, et vous

6 avez la signature du commandant Haradinaj. De quelle façon ce document

7 s'est retrouvé là, je ne sais pas. Mais je le répète, ça s'est passé peu de

8 temps après la formation du commandant conjoint. C'est peut-être à ce

9 moment-là -- il se peut que ce soit Ramush qui a apporté ce document, parce

10 que les contacts ont commencé à s'intensifier, les contacts avec Ramush.

11 Nous avons eu plus de contacts avec lui.

12 Q. Est-ce que vous reconnaissez l'en-tête en albanais quand vous dites "QG

13 opérationnel de la plaine de Dukagjin," est-ce que c'était un en-tête que

14 vous aviez déjà vu ?

15 R. Oui. Vous voyez état-major opérationnel de la plaine de Dukagjin, UCK,

16 Armée de libération du Kosovo. Ceci correspond effectivement avec tous les

17 documents élaborés par l'état-major dont Ramush Haradinaj était le

18 commandant.

19 M. KEARNEY : [interprétation] J'aimerais maintenant que nous allions au

20 troisième point sur la liste de ces règlements de police militaire.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de le faire, Monsieur Kearney, le

22 témoin nous a dit que cela était signé par Ramush Haradinaj dans

23 l'original, au moins dans l'original que je peux voir. Dans la version

24 informatique, il faudrait clarifier la chose. On pourrait peut-être faire

25 défiler pour aller jusqu'en bas dans l'original. Voilà.

26 Vous avez dit que ces documents étaient signés, Monsieur le Témoin. Je vois

27 un nom en dessous, mais je ne vois pas de signature. Est-ce que vous pouvez

28 nous donner votre réponse, et nous expliquer comment ce document a été

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1 signé ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit qu'il est écrit : "Ramush Haradinaj,"

3 mais peut-être y a-t-il eu un malentendu. Je vois qu'il n'y a pas de

4 signature, mais en tout cas son nom est écrit. En effet, il n'y a pas de

5 signature.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Monsieur

7 Kearney.

8 M. KEARNEY : [interprétation]

9 Q. Je voudrais maintenant que vous vous reportiez au troisième point qui

10 figure sur la liste de règlements de police militaire qui nous dit : "La

11 PU," ou la police militaire, "est chargée de mener des enquêtes et de faire

12 état des faits probants concernant tous ceux qui ont collaboré de toutes

13 manières avec l'ennemi."

14 D'abord, est-ce que la traduction est exacte et est-ce bien ce que dit

15 l'original en albanais ?

16 R. Je peux vous le lire en albanais. Les règlements ont été rédigés en

17 albanais, qui est la langue originale. J'ai du mal à croire que cela ait pu

18 être traduit à partir d'une autre langue en dehors de l'albanais.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kearney, vous avez fait une

20 citation en anglais et vous demandez au témoin si la traduction est exacte.

21 Donc maintenant, c'est réinterprété dans sa langue au témoin. Comment peut-

22 il répondre à cette question ? Ou est-ce que vous voulez qu'il se rapporte

23 à l'emblée ? Mais à ce moment-là, il faudrait lui demander si sa maîtrise

24 de l'anglais suffit.

25 M. KEARNEY : [interprétation] Oui. En effet, vous avez raison, Monsieur le

26 Président. Poursuivons. Je vais lui demander de paraphraser cette phrase.

27 Q. Monsieur le Témoin 17, "la police militaire était chargée de trouver

28 les personnes qui collaboraient, quelle qu'en soit la manière, avec

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1 l'ennemi."

2 Ce que je souhaite vous demander est la chose suivante : y a-t-il un

3 endroit dans ce document où il y a une définition de ce que signifie le

4 terme de "collaboration" ?

5 M. GUY-SMITH : [interprétation] Tout d'abord, avant que le témoin réponde à

6 la question, est-ce que l'on peut lire la déclaration dans son intégralité.

7 Parce qu'il y a d'autres parties qui n'ont pas été données dans la

8 citation, comme "faire des enquêtes," et cetera.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que, bien sûr, tout le monde

10 peut essayer --

11 M. GUY-SMITH : [interprétation] La raison de cette requête, Messieurs les

12 Juges, c'est que --

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

14 M. GUY-SMITH : [interprétation] -- il ne s'agit pas de quelque chose, une

15 définition interne, il est écrit : "A la tâche de mener des enquête ou de

16 découvrir des faits probants." Donc la question de ces faits probants

17 devient très importante pour voir comment on peut définir les termes de la

18 "collaboration," comme cela figure dans ce règlement.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

20 M. GUY-SMITH : [interprétation] Et je demande justement que cette question

21 soit citée dans son intégralité.

22 M. KEARNEY : [interprétation] Je l'ai fait tout à l'heure, Monsieur le

23 Président.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je crois que vous avez fait cette

25 citation dans son intégralité, ensuite vous avez demandé si la traduction

26 était bonne.

27 J'imagine que les parties auront d'autres questions concernant les

28 éléments de langue qui figurent au paragraphe 3. Mais pour l'instant,

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1 Monsieur Kearney, votre question au témoin était de savoir - et là il peut

2 répondre à ma question - que signifie le terme de collaborer ou

3 collaboration avec l'ennemi. Et je crois que c'est de voir si c'est --

4 M. KEARNEY : [interprétation] Défini.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Défini. Oui, c'est cela.

6 Là encore, Monsieur Kearney, pour ce qui est de cette question, nous

7 pouvons lire le document, pensez-vous qu'il y ait des doutes quant à savoir

8 s'il y a ou s'il n'y a pas de définition de ce terme.

9 M. KEARNEY : [interprétation] Permettez-moi de reformuler ma question.

10 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que l'état-major opérationnel de la plaine

11 de Dukagjin, à votre connaissance, a défini le terme de "collaboration" ?

12 R. Le terme "collaboration", à proprement parler, signifie ceux qui

13 travaillent avec l'ennemi et, dans tout le sens du terme, qui travaillent

14 contre les intérêts du peuple. Voilà ce que nous entendons par le terme de

15 collaborateur. Si nous parlons de coopération, nous parlons de personnes

16 qui travaillent avec l'ennemi contre les intérêts de la population. Voilà

17 ce que signifie le terme de collaboration. Concernant ce texte, je pense

18 qu'il s'agit de termes qui ont été écrits dans l'original en albanais et,

19 qui ensuite, ont été traduits en anglais. Voilà comment ce texte a été

20 rédigé à l'origine. Maintenant, quant à savoir quand il a été rédigé et par

21 qui, je ne pourrais pas vous le dire car je ne le sais pas.

22 Q. Merci de votre réponse.

23 M. KEARNEY : [interprétation] Je vais poursuivre, Messieurs les Juges, et

24 avancer car l'heure tourne. Je voudrais demander au témoin de se reporter

25 aux paragraphes 100 à 103 de sa déclaration.

26 Q. Dans ces paragraphes, Témoin 17, vous parlez en détail d'une réunion

27 qui s'est tenue à Prapaqan le 20 août 1998 à laquelle 68 commandants de

28 village ont participé. Est-ce que vous voulez bien dire à la Chambre de

Page 7598

1 première instance quel était l'objet de cette réunion importante pour ce

2 qui est du nombre de participants ?

3 R. Oui, on savait à cette époque, au début d'août jusqu'au

4 13 août, qu'il y a eu une offensive massive dans la région de Ljugu i

5 Baranit et l'objectif de l'ennemi était de détruire les unités

6 opérationnelles et l'UCK qui se trouvaient dans cette zone où elle était

7 opérationnelle. Pour cette raison, après le 10 août, Gllogjan est tombé

8 dans les mains de l'ennemi ainsi que Irzniq et que d'autres villages qui

9 sont cités dans la déclaration. Il existait une demande conjointe en ce que

10 nous savions que c'est seulement en regroupant nos forces sous un

11 commandement unifié que nous arriverions à confronter notre ennemi et lui

12 faire face ensemble. Ramush est arrivé à la conclusion que quelque chose

13 devrait être fait pour créer ce commandement conjoint. Il avait eu des

14 contacts avec Tahir, ce qui a abouti à la réunion de Prapaqan à laquelle 68

15 représentants des villages ont participé, y compris Ramush ainsi que Tahir

16 et moi-même. Donc nous avons ensemble présidé cette réunion.

17 Q. Lorsque vous dites que Ramush, Tahir et vous-même avez présidé cette

18 réunion, qu'entendez-vous par là ?

19 R. Je veux dire que nous avons expliqué en quoi consistait l'offensive et

20 comment nous en étions arrivés au stade où un grand nombre de villages

21 étaient tombés entre les mains de l'ennemi et nous avons aussi expliqué ce

22 que nous devions faire à l'avenir. Il s'agissait de procéder à une

23 réorganisation, à une restructuration des forces dans la région de telle

24 manière que nous puissions mener des opérations militaires pour pouvoir

25 faire face à l'ennemi dans ce type de batailles. Donc nous avons procédé à

26 une analyse détaillée de ce qui s'était passé jusqu'à ce moment-là, nous

27 avons fait un bilan et nous avons défini ce qui convenait d'être fait à

28 l'avenir.

Page 7599

1 Q. Au cours de cette réunion, y a-t-il eu des gens --

2 M. KEARNEY : [interprétation] Et là, peut-être, Monsieur le Président,

3 devons-nous passer à huis clos partiel pendant un petit moment.

4 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Juge, nous sommes à huis clos

5 partiel.

6 [Audience à huis clos partiel]

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7 [Audience publique]

8 M. KEARNEY : [interprétation]

9 Q. Est-ce que cette personne qui s'est levée pour prendre la parole lors

10 de cette réunion, ce membre de la FARK, a fait des déclarations que vous

11 relatez dans le paragraphe 101. Je vais faire référence à ce paragraphe un

12 petit moment. A partir de la fin, la quatrième phrase en remontant, vous

13 déclarez : "Il a demandé que l'UCK face preuve de discipline et d'arrêter

14 de commettre ces crimes."

15 Je vous demandais si ce membre de la FARK a dit au groupe ce jour-là

16 pendant cette réunion les crimes auxquels il faisait

17 allusion ?

18 R. Je ne peux pas entrer maintenant dans le détail de ce qu'il voulait

19 dire, mais il a dit que les poissons se nourrissaient de chair humaine au

20 lac Radoniq, et je fais référence au fait qu'il y avait plusieurs personnes

21 qui avaient été portées disparues et qu'il y avait des informations assez

22 détaillées sur le cas Sanije Balaj. Il n'a pas parlé précisément, il a

23 utilisé des termes généraux et il a demandé que l'on mette fin à ces

24 crimes. C'était difficile de se mettre à sa place car il n'était pas précis

25 dans son propos. Il n'a pas donné de détails, mais il a mentionné le crime

26 de cette manière que je viens de décrire.

27 Q. Lorsque vous dites qu'il demandait que l'on arrête la perpétration de

28 ces crimes, à qui en appelait-il pour qu'on mettre fin à ces crimes ? A

Page 7601

1 quelles personnes ces commentaires étaient-ils adressés ?

2 R. Il s'adressait aux personnes qui étaient membres de l'UCK, et il

3 faisait référence -- à ces personnes, et il s'est avéré ultérieurement que

4 pour toutes les personnes qui avaient été portées disparues, toutes ces

5 affaires avaient été causées par elles.

6 Q. Le commentaire qu'il a fait et que vous citez : "Le poisson du lac

7 Radoniq se nourrit de chair humaine" --

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Guy-Smith.

9 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je suis désolé de faire une objection à la

10 déclaration sur les motifs juridiques qui ont été faits par la déclaration

11 du témoin.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, les objections sont là pour arrêter

13 l'autre partie et l'empêcher de pouvoir poursuivre. Vous parlez de

14 conclusions légales, bien sûr, il est clair que la Chambre également --

15 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vous remercie.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est-à-dire pour faciliter les choses

17 -- ce serait de faciliter la rédaction d'un jugement. Il faut écouter ce

18 que le témoin a à dire, lui, il donne sa version de qui est innocent et qui

19 est coupable.

20 M. GUY-SMITH : [interprétation] J'ai entièrement confiance quant au fait

21 que ce n'est pas facile de rédiger le jugement.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre. Mais avant de ce

23 faire, Monsieur Kearney, je voudrais demander un point d'éclaircissement.

24 Vous avez dit -- le fait que le membre de la FARK avait parlé du

25 poisson du lac Radoniq. Vous avez dit : "Je fais référence à" je pense que

26 vous avez parlé des gens qui avaient été portés disparus. Est-ce qu'en

27 dehors du fait de parler du poisson, est-ce qu'il a fait référence aux

28 personnes qui avaient disparu ou qui avaient été portées disparues, ou est-

Page 7602

1 ce que c'est vous qui avez fait ce lien entre ses commentaires et ce que

2 vous avez entendu ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. A l'exception de la référence au poisson

4 du lac Radoniq il n'a rien dit de manière précise. Mais comme on me l'a

5 demandé, j'essayais d'interpréter ce qu'il voulait dire, et mon

6 interprétation découle de ce que je savais des informations qui

7 circulaient, mais je ne pouvais pas me mettre à sa place pour savoir

8 exactement ce qu'il signifiait.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Monsieur

10 Kearney.

11 M. KEARNEY : [interprétation]

12 Q. Au paragraphe 101, Témoin 17, vous dites : "Il demande que l'UCK soit

13 disciplinée et se tienne correctement et arrête de perpétrer ces crimes."

14 Ma question est maintenant la suivante : est-ce qu'il a spécifiquement

15 parlé de l'UCK lorsqu'il a parlé des poissons qui grossissaient dans le lac

16 Radoniq en se nourrissant de chair

17 humaine ?

18 R. Oui. En fait, il demandait instamment que les personnes irresponsables

19 face preuve de discipline et arrêtent de commettre des crimes. Comme je

20 l'ai dit conformément aux informations que nous avions et par rapport à ce

21 que nous savions, nous savions qui avait été placé en détention à ce

22 moment-là, dans ces endroits-là, et les personnes qui étaient détenues ont

23 fait référence à l'UCK en disant que c'étaient eux les auteurs, que c'était

24 l'UCK qui les détenait ?

25 Q. Mais lorsque sa remarque visait les personnes irresponsables qui

26 devaient faire preuve de discipline et arrêtent de commettre des crimes,

27 est-ce qu'il a spécifiquement fait référence aux personnes de l'UCK

28 présentes à la réunion ?

Page 7603

1 R. Non. Comme je l'ai déjà dit, il s'agissait d'un appel lancé aux

2 personnes irresponsables qui devaient mettre un terme à ces activités. Il

3 n'est pas entré dans les détails. Il n'a pas donné de noms. Il n'a donné

4 aucun détail.

5 Q. Donc j'ai compris qu'il n'a pas donné de noms précis, mais les

6 personnes irresponsables auxquelles il a fait référence étaient les membres

7 de quelle organisation ?

8 R. Je pense que je l'ai déjà dit tout à l'heure. Etant donné ce que nous

9 savions au sujet des personnes qui avaient disparu, les personnes dites

10 irresponsables étaient des membres de l'UCK sur le terrain.

11 Q. Lorsqu'il a fait cette déclaration, est-ce qu'il a fait cette

12 déclaration avec une voix assez forte pour qu'on l'entende bien dans la

13 salle ?

14 R. Les discussions qui ont lieu dans ce genre de réunion sont formalisées

15 et de déroulent de telle manière que tout le monde qui participe à ces

16 réunions entend ce qui y est dit.

17 Q. Quelle a été la réaction de Ramush Haradinaj, s'il y en a une, à ce

18 commentaire lorsqu'il a été fait ?

19 R. Il n'y a pas eu de réaction.

20 Q. Y a-t-il eu des objections à cette déclaration ou y a-t-il eu des gens

21 qui ont essayé de nier ces allégations faites par le membre de la FARK ?

22 R. Non, car à cette époque-là c'était un sujet extrêmement délicat, donc

23 aucun commentaire n'a été fait.

24 Q. Lorsque vous dites que c'était un sujet délicat, qu'est-ce que vous

25 entendez par là ?

26 R. Les gens avaient peur de soulever ce genre de sujets.

27 Q. Témoin 17, est-ce que vous aussi vous aviez peur de soulever ce genre

28 de sujets ?

Page 7604

1 R. Oui, d'en parler ouvertement, certainement.

2 Q. Pourquoi ?

3 R. Vous devez comprendre qu'a une telle réunion, à laquelle plus de 100

4 représentants participent, il n'est pas logique d'aborder ce genre de

5 détail, mais nous travaillons par le biais d'autres canaux pour soulever ce

6 type de questions.

7 Q. Pourquoi n'était-ce pas logique de parler ouvertement de ces détails-là

8 de cette réunion-là en particulier ?

9 R. Parce qu'il faut penser aux représailles qui pourraient suivre, et dans

10 ce sens, je crois qu'il n'était pas logique d'aborder ces questions. Il

11 fallait vraiment qu'il y ait quelque chose de tout à fait spécifique ou

12 particulier pour aborder cela. Donc nous en étions encore au stade d'une

13 enquête et nous ne pouvions pas encore faire des accusations précises. Il y

14 avait un faisceau d'indications, mais nous n'avions pas encore de faits

15 tangibles pour les corroborer.

16 Q. Lorsque vous dites qu'il y aurait pu y avoir des représailles si vous

17 parliez de cela de manière publique, ouvertement, qu'est-ce que vous voulez

18 dire par là, que des représailles pourraient d'ensuivre ?

19 R. En analysant les incidents dans lesquels nous étions impliqués depuis

20 notre entrée au Kosovo jusqu'à ce moment-là. Ce n'était pas le bon moment

21 pour aborder ces points qui auraient risqué d'aggraver les tensions, les

22 relations, en particulier au moment où précisément nous étions en train de

23 créer un commandement conjoint et nous avions commencé à travailler

24 ensemble. Et le moment n'était pas bien choisi pour étudier ces questions-

25 là, il était préférable de travailler ensemble et d'essayer de tirer des

26 conclusions ensemble.

27 Q. Je vais maintenant passer au dernier ensemble de questions que j'ai

28 pour l'instant.

Page 7605

1 M. EMMERSON : [interprétation] Excusez-moi.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

3 M. EMMERSON : [interprétation] Une question pour éclaircissement. Lorsque

4 le témoin dit "il était préférable de travailler ensemble pour tirer

5 ensemble des conclusions," j'aimerais qu'il explique un petit peu plus

6 "travailler avec qui" pour pouvoir nous faire ces enquêtes.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kearney, même si cette question

8 aurait pu être posée dans le contre-interrogatoire, en effet, je crois

9 qu'elle permettra de clarifier l'interrogatoire principal.

10 Est-ce que vous pouvez répondre à la question avec qui s'agissait-il de

11 travailler ensemble ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour moi c'était clair ce que cela signifiait,

13 mais pour les personnes qui étaient responsables au Kosovo - est-ce que

14 vous m'entendez, je ne sais pas si vous m'entendez - pour moi c'était

15 clair, pour les personnes qui s'étaient engagées dans des activités au

16 Kosovo, qu'elles n'aient pas reçu ces informations, qu'elles refusent de

17 recevoir les informations dont nous disposions. Nous avions eu une réunion

18 à Oslo avant d'aller au Kosovo et nous nous étions mis d'accord pour la

19 création d'un commandement conjoint. Cela était les 23 ou le 24 mai. Ce

20 commandement devait porter le nom de forces armées de la République du

21 Kosovo, abrégé par l'abréviation FARK, et devait comprendre toutes les

22 unités de l'UCK et de la Défense territoriale. C'était un accord auquel les

23 représentants politiques de l'UCK et le ministère de la Défense de la

24 République du Kosovo étaient tombés d'accord lors de la réunion d'Oslo.

25 Alors, je ne savais pas si cette information était arrivée à ceux qui

26 étaient responsables ou en charge au Kosovo ou s'ils avaient simplement

27 refusé d'entendre cette information. Nous avons toujours essayé par tous

28 les moyens pour faire en sorte que l'accord d'Oslo soit mis en œuvre à

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1 partir du moment où nous sommes entrés au Kosovo. C'est pourquoi je dis que

2 "ensemble" travailler ensemble ça veut dire une coopération entre la FARK

3 et l'UCK, à savoir un commandement opérationnel dans la plaine de

4 Dukagjini, où le représentant de ce commandement ou la personne chargée de

5 ce commandement était Tahir Zemaj. Tout d'abord, c'était une proposition,

6 une requête des villageois, ensuite cela a été traduit dans les faits. Donc

7 les villageois ont proposé que Tahir Zemaj devienne le commandant de

8 l'état-major de la plaine de Dukagjini.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que la question de M. Emmerson

10 était plus limitée, plus concise. Ai-je bien compris lorsque vous faites

11 référence à travailler ensemble, que vous signifiez pas travailler ensemble

12 lors de cette réunion, mais vous faisiez référence à une coopération

13 étroite à venir entre l'UCK et la FARK, et que, lorsqu'il y aurait cette

14 coopération étroite vous traiteriez de ces questions aussi. Est-ce que

15 c'est bien ce que j'ai compris ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Le commandement conjoint, après le 20 août,

17 avait justement ceci pour but, et c'était notre but à partir du moment où

18 nous sommes entrés au Kosovo jusqu'à ce moment-là et même plus tard. Les

19 désaccords, les incidents qui ont suivi, ont eu un impact négatif, et ont

20 fait en sorte que la création de cette dernière a été retardée.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'imagine que vous abordez votre dernier

22 volet de votre contre-interrogatoire.

23 M. KEARNEY : [interprétation] Oui.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faudrait peut-être, puisque cela

25 prendra encore un peu de temps, à moins que vous ne me dites que vous

26 n'aurez besoin que trois ou quatre minutes, sinon nous prendrons une pause

27 maintenant.

28 M. KEARNEY : [interprétation] En fait, je n'aurai besoin que trois ou

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1 quatre minutes encore.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, il est plus naturel de faire

3 une pause entre l'interrogatoire et le contre-interrogatoire. Veuillez

4 poursuivre, je vous prie, et je vous prie de faire un effort pour terminer

5 dans trois ou quatre minutes.

6 M. KEARNEY : [interprétation]

7 Q. Témoin 17, je voudrais appeler votre attention au paragraphe 66 de

8 votre déclaration. Dans ce paragraphe, vous dites, je cite :

9 "Autour de cette période, du mois de juillet 1998, j'ai commencé à entendre

10 ce qui se disait entre la population et l'UCK, à savoir qu'il y avait des

11 personnes qui étaient envoyées à Gllogjan. J'avais compris à la suite de

12 ces discussions que les personnes qui étaient envoyées à Gllogjan ne

13 revenaient que rarement de là."

14 J'aimerais vous demander, pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre où

15 est-ce que vous avez entendu pour la première fois, cette expression "être

16 envoyées à Gllogjan." D'abord, dites-nous cela.

17 R. Je me suis rendu sur l'ensemble dans la région après mon arrivée au

18 Kosovo. Je m'étais rendu aux quartiers généraux régionaux des villages, et

19 chacun des commandants, dans chacun des états-majors avait été informé par

20 moi-même quant au but de notre présence sur le terrain. Je les informais

21 également de la façon dont l'armée était organisée, des missions futures,

22 de la façon dont l'armée était structurée. Au cours de ces réunions que

23 moi-même j'avais eues avec ces représentants des unités opérationnelles,

24 j'ai entendu ces informations quant à ce que j'ai mentionné dans ma

25 déclaration. Je ne peux pas vous parler en termes plus concrets, puisque je

26 venais d'arriver dans cette région. A ce moment-là je ne connaissais pas

27 énormément de personnes, outre ces deux personnes-là avec lesquelles

28 j'avais des contacts. Mais avec le temps, j'ai commencé à mieux connaître

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1 les personnes, les habitants de la région -- ou les personnes qui se

2 trouvaient dans la région. C'était l'atmosphère générale qui régnait là-

3 bas, et nous parlions de ce genre de choses de façon générale. Mais de

4 nouveau, je souhaiterais souligner que nous n'en avions pas parlé en des

5 termes bien concrets.

6 Q. Mais cette expression "être envoyé à Gllogjan," c'étaient les

7 représentants des unités opérationnelles de l'UCK qui vous l'on dit, n'est-

8 ce pas ?

9 R. C'étaient des personnes qui avaient fait partie des commandements

10 régionaux jusqu'à ce moment-là.

11 Q. Combien de temps aviez-vous entendu cette phrase, les personnes dans

12 les commandements villageois à être envoyées à Gllogjan ? Cette expression,

13 combien de fois est-ce que l'avez entendue ?

14 R. Pour ce qui me concerne, il ne me suffisait que de l'entendre une fois;

15 mais je ne peux pas vous dire combien de fois je l'ai entendue. En d'autres

16 mots, j'aimerais dire que j'ai entendu cette expression à au moins une

17 reprise.

18 Q. Dans la deuxième partie de votre déclaration de ce même paragraphe,

19 vous dites : "Sur la base de ces discussions j'ai compris que les personnes

20 qui étaient envoyées à Gllogjan ne revenaient presque jamais." Où est-ce

21 que vous aviez appris cela ?

22 R. Je vous ai déjà répondu un peu plus tôt que j'ai obtenu cette

23 information lorsque je m'étais rendu dans les villages, puisque je

24 maintenais les contacts avec la zone de cette responsabilité. Il s'agissait

25 de contacts quotidiens dépendamment, bien sûr, des activités de combat,

26 mais je peux vous dire que je me rendais au moins à un village par jour.

27 Q. Cette expression ou cette information, à savoir que les gens ne

28 revenaient presque jamais de Gllogjan lorsqu'ils y étaient envoyés, est-ce

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1 que vous pourriez expliquer aux Juges de la Chambre combien de fois est-ce

2 que vous avez entendu cette information alors que vous vous rendiez dans

3 ces villages ?

4 R. Je vous ai déjà dit que je ne peux pas vous donner le nombre de fois,

5 mais peut-être au moins une fois.

6 Q. Lorsque vous parlez "d'une fois," est-ce que vous parlez de plus que

7 d'une fois, ou bien est-ce que ce n'était qu'une fois ?

8 M. GUY-SMITH : [interprétation] Objection. On demande au témoin d'émettre

9 des conjectures. On lui a reposé la même phrase à plusieurs reprises.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kearney, "à au moins une

11 reprise," ça veut dire possiblement plus qu'une fois, mais pas

12 nécessairement. Donc on a déjà répondu à votre question.

13 M. KEARNEY : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus d'autres

14 questions pour ce témoin à ce moment-là.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je souhaiterais obtenir une ou deux

16 petites précisions.

17 Monsieur, vous avez dit que vous aviez compris que les personnes qui

18 avaient été envoyées à Gllogjan ne revenaient presque jamais, ce qui

19 voudrait suggérer que vous aviez obtenu de l'information des personnes qui

20 ne revenaient pas, mais pas toujours. C'est-à-dire que, est-ce que vous

21 vous souvenez d'avoir entendu que certaines personnes aient pu revenir de

22 Gllogjan ? Y a-t-il eu des cas où elles sont revenues ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De quelle façon avez-vous appris qu'il y

25 avait des personnes qui revenaient ? S'agissait-il d'une conversation ?

26 Vous souvenez-vous de cela ? Avec qui vous entreteniez-vous, si vous vous

27 en souvenez ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai obtenu cette information de mes personnes

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1 contacts telles Din Krasniqi. Il était le commandant de Llugu i Baranit

2 avant que l'unité opérationnelle n'arrive sur place. Il s'agissait d'un

3 certainement Zenun, qui avait été envoyé et grâce à mon intervention, car

4 j'avais demandé que rien ne lui arrive et que cette personne soit renvoyée

5 pour qu'elle puisse revenir. Je sais que rien ne lui est arrivé et,

6 qu'effectivement, cette personne ait pu retourner.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous vous êtes jamais

8 entretenu avec qui que ce soit qui avait envoyé été à Gllogjan ou avec des

9 personnes qui connaissaient des personnes qui avaient été envoyées à

10 Gllogjan soit, par exemple, vous a-t-on dit : Mon père a été envoyé à

11 Gllogjan ou mon frère a été envoyé à Gllogjan ? De façon générale, est-ce

12 que vous vous êtes entretenu avec des personnes qui avaient été envoyées à

13 cet endroit-là ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai eu de tels entretiens. Par exemple,

15 je me suis entretenu avec le frère de Sanije Balaj qui était venu au

16 commandement à plusieurs reprises, car il essayait de savoir où se trouvait

17 sa sœur. Lors de certaines discussions il disait : Je voudrais simplement

18 savoir où se trouvent ses ossements pour que je puisse l'enterrer

19 conformément à nos traditions. Donc ce genre de discours, je l'ai entendu à

20 plusieurs reprises.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais un peu plus tôt vous faisiez

22 référence à une certaine catégorie de gens qui avaient été envoyés à

23 Gllogjan. Est-ce que c'est quelque chose que vous aviez entendu lors de

24 cette conversation-là, ou bien est-ce que vous parlez d'une personne qui

25 n'est pas nécessairement liée au fait d'avoir été envoyée à Gllogjan ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai dit, pas concrètement, puisque

27 lorsque je me suis rendu dans ces villages au début de mes activités, je ne

28 connaissais pas beaucoup de personnes, donc je ne pouvais pas simplement

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1 commencer à parler avec des personnes que je ne connaissais pas. Je ne

2 pouvais pas avoir une conversation approfondie avec des personnes que je ne

3 connaissais. Mais lorsqu'on a établi des unités opérationnelles, il y avait

4 une personne qui était nommée, chargée de cette mission, c'est-à-dire de

5 recueillir des éléments d'information de par les conversations avec les

6 gens.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Lorsque vous avez parlé de son frère --

8 lorsque vous avez parlé de ce frère qui essayait de savoir où se trouvait

9 sa sœur, est-ce que vous avez eu des conversations semblables lors

10 desquelles on vous aurait dit que quelqu'un a disparu, ou est-ce que l'on

11 vous a réinformé du fait qu'un telle et telle personne avait été envoyé à

12 Gllogjan indépendamment des termes qu'il employait, mais est-ce qu'il a des

13 conversations ressemblant à celle-ci ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, à l'exception de Sanije Balaj, c'est-à-

15 dire de son frère qui est venu assez très souvent, essayant de la trouver.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

17 M. EMMERSON : [interprétation] Monsieur le Président, concernant une

18 question que vous avez posée relative à l'incident de Sanije Balaj et de

19 son frère. Je n'ai pas très bien saisi ni en lisant la déclaration du

20 témoin 92 ter ni en écoutant la réponse du témoin lorsqu'il a dit que le

21 frère de Sanije Balaj lui avait dit qu'elle avait été envoyée à Gllogjan.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, en fait. C'est une question que

23 l'on peut poser au témoin, bien sûr.

24 M. EMMERSON : [interprétation] En fait, la raison pour laquelle je pose

25 cette question, c'est qu'on aurait cru de par votre question qu'il aurait

26 pu y avoir d'autres exemples de ce type.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vois ce que vous voulez dire.

28 Lorsque le frère de Sanije Balaj est venu vous voir, est-ce qu'il a

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1 simplement demandé où se trouvait sa sœur, ou bien est-ce qu'il a dit :

2 J'aimerais savoir où elle se trouve, car elle avait été envoyée à Gllogjan

3 ? J'ai cru comprendre qu'il n'a pas nécessairement employé cette expression

4 d'avoir été envoyée à Gllogjan plutôt qu'elle était disparue. Est-ce que je

5 vous ai bien compris ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais expliciter, mais je souhaiteras que

7 l'on passe à huis clos partiel, car je vais évoquer certains noms. Je ne

8 voudrais pas les évoquer en audience publique.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Fort bien. Je demanderais que l'ont

10 passe à huis clos partiel, mais après la pause.

11 M. EMMERSON : [interprétation] Dans le cadre du contre-interrogatoire, je

12 pourrai faire cela.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, vous pouvez le faire dans le cadre

14 du contre-interrogatoire. Le témoin aura le temps de se reposer.

15 M. EMMERSON : [interprétation] Oui, je vais poser ce genre de questions.

16 M. KEARNEY : [interprétation] Il est tout à fait clair que le témoin

17 souhaite donner une explication approfondie aux Juges de la Chambre. Je

18 propose qu'il le fasse avant que le contre-interrogatoire ne débute.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, effectivement. C'est peut-être la

20 bonne façon de procéder, mais bien sûr après la pause.

21 Témoin 17, nous allons maintenant prendre une pause jusqu'à

22 13 heures 10, et par la suite nous reprendrons nos travaux à huis clos

23 partiel, ce qui vous permettra d'expliquer de façon plus approfondie ce que

24 vous vouliez nous dire.

25 --- L'audience est suspendue à 12 heures 47.

26 --- L'audience est reprise à 13 heures 12.

27 [Audience à huis clos partiel]

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13 Page 7613 expurgée. Audience à huis clos partiel.

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1 (expurgé)

2 (expurgé)

3 [Audience publique]

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

5 Témoin 17, les contre-interrogatoires vont commencer.

6 Est-ce que vous alliez bien commencer, Maître Emmerson ?

7 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez commencer.

9 Contre-interrogatoire par M. Emmerson :

10 Q. [interprétation] Si vous le permettez, je vais vous poser quelques

11 questions préliminaires concernant les premiers moments de l'entrée au

12 Kosovo des officiers dont vous faisiez partie avec Tahir Zemaj --

13 R. J'ai dit Tahir Zemaj, pas Limaj.

14 Q. Je pensais avoir bien dit, Zemaj et pas Limaj, mais excusez-moi.

15 D'après ce que vous avez compris, un accord avait été conclu à Oslo

16 dans le courant du mois de mai entre les représentants du gouvernement en

17 exil, et des gouvernements du Grand état-major de l'UCK; est-ce exact ?

18 R. Je ne pense pas, mais je peux affirmer ici qu'il y a bien eu un accord,

19 parce que je participais de façon indirecte à cette réunion.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez à bien débrancher votre micro

21 avant que ne commence le témoin, parce que vous savez qu'il y a déformation

22 de la voix.

23 M. EMMERSON : [interprétation]

24 Q. Est-ce que vous connaissiez les personnes qui composaient le Grand

25 état-major de l'UCK ?

26 R. Vous parlez de la réunion d'Oslo de façon générale ?

27 Q. Non, de façon générale. Est-ce que vous étiez au courant de la

28 composition du Grand état-major de l'UCK au moment de cette réunion d'Oslo

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1 ?

2 R. Je l'ai déjà dit, il y avait un représentant politique de l'UCK qui

3 représentait l'UCK à Oslo, il s'agissait de M. Adem Demaqi. Il y avait

4 également un membre du Grand état-major de l'UCK connu sous le surnom de

5 Zekaj. Ces deux personnes ont eu des entretiens avec Ahmet Krasniqi,

6 ministre de la Défense et son adjoint, Agim Mehmeti, réunion qui a eu lieu

7 à Oslo entre le 22 mai et le

8 24 mai 1992. Zekaj, c'était le surnom d'une personne dont je peux vous

9 donner l'identité complète, il s'agissait de Xhavit Haliti.

10 Q. Mis à part Adem Demaqi et Xhavit Haliti, quelle était la structure de

11 ce qu'on a appelé le Grand état-major de l'UCK, le saviez-vous ?

12 R. Nous parlons ici de l'accord d'Oslo, des pourparlers qui se sont

13 déroulés du 22 mai au 24 mai 1998. A l'époque, je ne connaissais pas du

14 tout la composition du Grand état-major de l'UCK, à l'exception de cette

15 personne qui avait été l'origine de cette réunion et qui y avait participé.

16 Q. Donc mis à part les interventions de ces deux personnes à la réunion,

17 vous n'aviez aucun moyen de savoir si ces hommes étaient représentatifs des

18 forces de l'UCK sur le terrain, ou si ces hommes étaient en contact avec

19 les forces de l'UCK sur le terrain même; est-ce exact ?

20 R. Ce n'est pas comme ça que je le dirais, car cette réunion avait été

21 organisée par des gens qui avaient des responsabilités et qui connaissaient

22 aussi bien Adem Demaqi que Ahmet Krasniqi, et c'est par le truchement de

23 ces personnes que cette réunion, qui s'est conclue par un accord, avait été

24 organisée.

25 Q. Vous pensiez que devait se créer une force intégrée portant le nom et

26 arborant l'insigne de l'UCK au moment de votre entrée au Kosovo; est-ce

27 exact ?

28 R. Un commandement conjoint devait être créé qui s'appellerait les forces

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1 armées de la République du Kosovo, sachant que l'UCK constituerait

2 l'essentiel de cette force. Et en vertu de cet accord, il était envisagé de

3 ne pas changer le nom de l'UCK, car c'est un nom qui évoquait quelque chose

4 à la population. La guerre était déjà engagée et le commandement conjoint

5 était censé être le commandement conjoint d'une force dont l'essentiel

6 serait constitué par l'UCK.

7 Q. Donc dans la manière dont vous l'aviez envisagé au moment où vous êtes

8 entré au Kosovo sur le terrain, il ne devait pas y avoir de distinction

9 entre les deux parties de cette force. Elles étaient toutes les deux

10 censées s'appeler l'UCK et faire partie de l'UCK; est-ce bien exact ?

11 R. En vertu de l'accord d'Oslo, après l'accord concernant l'état-major des

12 forces armées du ministère de la Défense qui a été créé à Tirana et sous

13 l'égide de cet état-major, il était censé y avoir des représentants du

14 Grand état-major de l'UCK ?

15 Q. Vous deviez savoir, lorsque vous êtes entré au Kosovo dans la zone où

16 vous avez pénétré, c'est-à-dire le Kosovo occidental ou la zone de

17 Dukagjini, n'est-ce pas ?

18 R. Oui.

19 Q. D'après ce que vous savez, est-ce que Tahir Zemaj ou un autre des

20 commandants les plus hauts placés a envoyé un émissaire de manière à ce

21 qu'il ait des communications qui se tissent avec les responsables de l'UCK

22 qui étaient déjà opérationnels sur le terrain dans cette zone-là ?

23 R. Ceci faisait partie des attributions du ministre de la Défense du

24 Kosovo, Ahmet Krasniqi et Adem Demaqi qui, à l'époque, restaient sous le

25 couvert de l'anonymat puisqu'ils vivaient à Pristina. Ils avaient la tâche

26 d'informer les groupes qui étaient opérationnels au Kosovo d'informer les

27 personnes concernant les différentes modalités et la teneur de cet accord.

28 Q. Il est vraisemblable que vous n'avez pas d'information de quelle que

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1 nature qu'elle soit concernant le fait que ces deux personnes aient

2 finalement informé les gens au sujet de cet accord sur le terrain au Kosovo

3 Occidental ?

4 R. Je crois que j'ai dit aujourd'hui, si je me souviens bien, que pour

5 nous il n'était pas clair que cet accord ait été répercuté à chacune des

6 personnes qui étaient chargées des forces dans les diverses zones, du fait

7 qu'il y avait eu un accord entre les unités du ministère de la Défense et

8 l'UCK. Mais peut-être ne voulaient-ils pas que cet accord soit mis en

9 œuvre. Je parle de cette époque-là, évidemment pas maintenant.

10 Q. Oui, pour que ce soit clair, toutes les questions que je vous pose

11 portent sur vos connaissances de cette époque-là, Témoin 17. Doit-on

12 comprendre des réponses que vous nous avez données, que personne n'a été

13 envoyé par Tahir Zemaj ou par les commandants des officiers qui étaient

14 censés entrer au Kosovo lors de la deuxième partie du mois de juin, que

15 personne n'a été envoyé par eux pour prendre contact et pour communiquer

16 auprès des commandants de l'UCK dans les zones où vous étiez censé aller ?

17 R. Selon nous, ce n'était pas la peine qu'il y ait des doublons et

18 d'envoyer d'autres personnes en plus de celles qui avaient été précisément

19 chargées de se rendre dans toutes les zones pour les informer de la teneur

20 de l'accord. Nous ne voulions pas sortir des cadres de ce qui avaient fait

21 l'objet de l'accord à la réunion. Tout au contraire, nous essayions de

22 faire de notre mieux de mettre en œuvre chacune des modalités qui

23 figuraient à cet accord.

24 Q. Je crois que dans votre témoignage par écrit, vous mentionnez trois

25 réunions préalables qui ont eu lieu. Je voudrais vous rappeler ces

26 réunions. Tout d'abord, vous nous dites - et il s'agit toutes de réunions

27 qui ont eu lieu avant que vous alliez à Jasic - que vous parlez d'une

28 réunion à Jasic le 25 juin au cours de laquelle Sali Veseli et Naim Maloku

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1 vous ont parlé à vous et à Tahir Zemaj; est-ce exact ?

2 R. Oui.

3 Q. Et vraisemblablement à partir de ce qu'ils vous ont dit, ils ne

4 semblaient pas être au courant de l'existence de cet accord d'Oslo; est-ce

5 exact ?

6 R. Mais d'après la conversation avec Tahir Zemaj au sujet des personnes

7 qui étaient responsables à l'époque au Kosovo, c'est-à-dire Sali Veseli et

8 Naim Maloku, il s'avère qu'ils ont déclaré qu'ils n'avaient connaissance

9 d'aucun accord ni de l'arrivée d'unités opérationnelles au Kosovo. Mais ils

10 ont déclaré qu'ils allaient se tenir informés de cet accord et de cette

11 nouvelle structure.

12 Q. La réunion suivante que vous décrivez a eu lieu le lendemain, le 26

13 juin, à Jasic, au cours de laquelle M. Haradinaj était présent et Sali

14 Veseli et Naim Maloku y étaient encore présents, et là, il y a eu d'autres

15 discussions à ce sujet; est-ce exact ?

16 R. Oui. Les discussions se sont poursuivies et cela est imputable au

17 désaccord qui existait concernant notre entrée dans le Kosovo et la manière

18 dont cela a été mal interprété par certaines personnes qui travaillaient

19 dans la région de Dukagjini. C'est pourquoi nous avons poursuivi nos

20 discussions à cet égard.

21 Q. Vous dites dans votre témoignage, vous décrivez

22 M. Haradinaj, lors de cette réunion le 26 juin, comme étant posé et

23 extrêmement sous contrôle. Est-ce que c'est une description qui vous paraît

24 bien traduire la réalité ?

25 R. Absolument, très fidèle. Il a été parfaitement constructif, très modéré

26 dans ses propos, c'est l'impression que j'en ai retenu.

27 Q. Le président Orie vous a posé quelques questions concernant la nature

28 de ce désaccord. Est-ce que c'est ce que M. Haradinaj disait : Nous avons

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1 des forces qui sont déjà sur le terrain, qui sont déjà là et qui défendent

2 des villages, et ce dont nous avons besoin, c'est que vous répartissiez vos

3 officiers et vos soldats de manière à consolider ces deux forces, à savoir

4 que les moyens de défense qui sont déjà présents ?

5 R. Le différend portait sur la chose suivante : il a demandé que les

6 officiers supérieurs soient répartis dans les unités opérationnelles et

7 dans les différents villages de manière à effectuer leurs tâches dans le

8 cadre de la structure de l'état-major opérationnel de Dukagjini. Mais nous

9 étions déjà une structure militaire qui était déjà bien établie, placée

10 sous le commandement du ministère de la Défense. Donc il y avait des

11 frictions qui se sont poursuivies. Nous n'étions pas en mesure de faire

12 cela pour que des officiers supérieurs viennent détruire notre propre

13 structure en entrant dans les villages.

14 Q. En résumé, Témoin 17, ces deux premières réunions qui se sont tenues le

15 25 et le 26, même s'il y a eu, bien sûr, des divergences d'opinion entre

16 les deux parties, ont constitué des discussions constructives quant à

17 savoir comment aller de l'avant et comment intégrer les nouvelles forces,

18 n'est-ce pas exact ?

19 R. Bien sûr, nous n'étions pas fous. Les deux parties étaient disposées à

20 trouver un accord; néanmoins, chaque partie campait sur ses positions et

21 personne n'était disposé à s'en départir.

22 Q. Maintenant, dans votre témoignage, vous parlez aussi d'une autre

23 réunion qui s'est tenue à Junik le 30 juin, à laquelle vous avez participé

24 ainsi que d'autres, pour le compte de cette nouvelle force qui venait

25 d'arriver et Sali Veseli était également présent pour le camp de l'UCK.

26 Vous souvenez-vous de cette réunion ?

27 R. Oui, je m'en souviens.

28 Q. Dans votre déclaration au paragraphe 18, vous déclarez que dans le

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1 courant de cette réunion, donc vous personnellement avez donc déclaré que

2 si qui que ce soit faisait obstruction à votre marche sur Izniq - et là

3 dans les termes que vous utilisés - il faudrait agir en vertu des règles

4 militaires. Est-ce ce que vous avez dit ?

5 R. Je transmettais le message de mon commandant, à savoir que nous étions

6 entrés dans Kosovo et que nous étions en train de mettre en œuvre la

7 deuxième phrase. La première étant de nous rendre à Jasic et la deuxième

8 d'aller a Izniq, alors que la troisième était d'établir des casernes ou une

9 caserne. Donc je ne pouvais que transmettre son message, à savoir qu'il

10 nous faut mettre en œuvre ces ordres et entamer la deuxième phase, et que

11 s'il y avait quelque obstacle que ce soit, il fallait réagir.

12 Q. Lorsque vous dites qu'il fallait réagir, vous voulez dire que si vous

13 rencontriez un obstacle, vous aviez la possibilité de tirer sur ces

14 personnes ?

15 R. Je ne sais pas de quelle façon vous interprétez mes propos, mais j'ai

16 essayé de faire en sorte qu'ils comprennent tout à fait clairement que nous

17 devions à tout prix entamer notre deuxième phrase, ce qui ne voulait pas

18 nécessairement dire que nous allions ouvrir le feu, mais que l'armée avait

19 pour devoir de mener à bien cette mission et de s'assurer que les plans

20 soient établis. Donc je voulais simplement leur dire que nous devions aller

21 là-bas pour entamer la deuxième phrase et la mettre en œuvre, et qu'il

22 serait souhaitable qu'il n'y ait pas d'incidents accompagnant la deuxième

23 phase. Par la suite il n'y a pas eu d'incidents. Tout s'est déroulé

24 correctement. Il n'y a pas eu d'incidents lorsque nous nous sommes rendus

25 de Junik à Isniq.

26 Q. Je comprends, mais j'aimerais vous demander la chose suivante : vous

27 dites que, dans votre déclaration, que M. Veseli vous a spécifiquement dit

28 que s'il y avait un obstacle dans le cadre de votre passage militaire, que

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1 vous pouviez prendre des mesures militaires nécessaires pour remédier à ce

2 problème ?

3 R. Je peux essayer d'être plus clair. On nous a dit très clairement de

4 s'intégrer aux structures existantes au Kosovo, ou de retourner, car il

5 n'était nul besoin que l'on soit là. Sinon, c'est pour cela qu'il était

6 nécessaire de nous assurer qu'ils aient bien compris que nous avions un

7 accord, un commandement, un but précis, et que nous étions en train de

8 mettre en œuvre une phase ou d'entamer une phase qui devait être complétée,

9 que nous allions nous rendre à destination. Et c'est en termes militaires.

10 Donc ça veut dire que selon le langage militaire, cela voulait dire que

11 nous avions un ordre et que cet ordre devait être exécuté.

12 Q. J'espère que je vais pouvoir vous poser une question assez claire.

13 Répondez par oui ou par non. Je vais vous citer vos propos dans votre

14 déclaration, lorsque vous nous avez dit ce que vous avez dit à M. Veseli.

15 Vous avez dit, je cite, vous avez dit : "Si jamais quelqu'un constituait un

16 obstacle que nous allions nous comporter conformément aux règles

17 militaires."

18 Donc ma question est la suivante : s'il y avait eu des activités

19 menaçantes, vous alliez vous plier aux règles militaires. Est-ce que vous

20 étiez en train de menacer les gens et de leur dire que vous alliez prendre

21 une action militaire ?

22 R. Ce n'était pas une menace, c'était plutôt une explication détaillée.

23 Nous voulions démontrer aux personnes, aux forces existantes au Kosovo,

24 pourquoi nous étions là, qui nous avait envoyés sur place. Donc ce n'était

25 pas une menace, mais plutôt une explication.

26 Q. Cette nuit-là, dans la nuit du 30 juin, la marche avait eu lieu

27 effectivement, et en d'autres mots pendant la nuit, vous et les soldats

28 avec qui vous avez traversé de Jasic à Izniq, vous aviez fait cette marche,

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1 n'est-ce pas ?

2 R. Oui.

3 Q. Pour être tout à fait clair, avant ce moment-là, vous nous avez dit que

4 l'UCK avait menacé d'employer la force militaire, n'est-ce pas ?

5 R. Nous avions un ultimatum soit de nous joindre à eux ou bien de

6 retourner.

7 Q. Vous nous avez décrit dans votre déclaration qu'il y a eu une réunion

8 le 2 juillet à Izniq, donc le 2 juillet à Izniq. Un homme appelé Rrustem

9 Tetaj était présent également. M. Haradinaj était également présent, n'est-

10 ce pas ?

11 R. Je ne sais pas où vous avec obtenu le nom de M. Haradinaj comme étant

12 une personne présente à la réunion.

13 Q. Je vais revenir à votre déclaration dans quelques instants. C'est peut-

14 être la façon dont j'ai lu la déclaration, mais vous vous souvenez, n'est-

15 ce pas, qu'au paragraphe 24 de votre déclaration, vous avez dit M. Tetaj,

16 vous avez dit lors de cette réunion du

17 2 juillet que le commandement conjoint de Dukagjin -- que l'état-major de

18 Dukagjin de l'UCK avait été créé le 2 juillet. Il avait été créé à

19 Jabllanice le 23 mai 1998. Donc soit que vous vous êtes trompé de la date

20 ou vous confondez deux réunions. Car nous avons eu des documents parlant de

21 deux réunions, soit l'une au mois de mai l'autre en juin. Donc j'aimerais

22 d'abord vous dire que l'état-major de Dukagjin avait été créé le 23 mai à

23 Gllogjan, et non pas à Jabllanice. Est-ce que vous seriez d'accord avec moi

24 qu'il se peut que vous vous étiez trompé dans ce passage ?

25 R. Je disais ce que Rrustem Tetaj m'avait dit à l'époque. Il m'avait dit

26 qu'une réunion avait eu lieu et que l'état-major avait été créé à

27 Jabllanice ce jour-là. Maintenant, à savoir si ceci coïncide, ou bien est-

28 ce que c'était planifié pour que cela se soit ce jour-là, donc si ça

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1 coïncide avec la date de la réunion à Oslo entre les représentants de l'UCK

2 et les représentants du ministère de la Défense.

3 Q. Oui. Très bien. Ce qui me préoccupe plutôt, c'est l'endroit, n'est-ce

4 pas. Avant la déclaration que vous avez faite, vous aviez eu accès au

5 carnet de notes qui est annexé à votre déclaration. Si je vous disais que

6 lorsque vous nous avez parlé de la réunion, vous nous avez dit que la date

7 de la réunion était le 23, mais vous ne nous avez pas donné la date de la

8 réunion.

9 [Problème technique]

10 --- L'audience est levée à 13 heures 51 et reprendra le mercredi 29 août

11 2007, à 9 heures 00.

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