Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 8 juin 2010

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 09.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous.

  6   Nous avons une décision à rendre qui a déjà été rendue oralement le

  7   31 mai 2010. L'accusé a déposé cette requête aux fins d'exclure la

  8   déposition de Richard Philipps. Il a demandé à la Chambre d'exclure cette

  9   déposition de Richard Philipps parce que celle-ci ne profiterait pas à la

 10   Chambre à ce stade de la procédure. L'Accusation a déposé sa réponse en

 11   date du 2 juin 2010. La Chambre a examiné les écritures des parties et va

 12   maintenant rendre sa décision.

 13   L'accusé affirme simplement que la déposition de M. Philipps n'aidera

 14   pas la Chambre à se prononcer sur les questions en cause en l'espèce mais

 15   il ne fournit aucun fondement pour cette affirmation; cependant, il est

 16   accusé de responsabilités pour des crimes qui auraient été commis, les

 17   premiers à Sarajevo par des membres du Corps de Sarajevo- Romania, une

 18   Unité de l'armée des Serbes de Bosnie dont il est censé avoir été le

 19   commandant suprême.

 20   Selon l'Accusation, M. Philipps apportera des éléments de preuve

 21   relatifs aux commandements et aux structures dans lesquelles se faisaient

 22   les rapports au sein de la RSY. Sur la base de l'examen du rapport de M.

 23   Philipps, des tableaux et des déclarations amalgamées qui l'accompagnaient,

 24   la Chambre s'est convaincue du fait que cette déposition apporterait

 25   effectivement un certain concours aux Juges. Par conséquent, la Chambre

 26   rejette la requête de l'accusé.

 27   Ceci étant dit, nous approchons de la fin du temps imparti à l'accusé pour

 28   son contre-interrogatoire. Comme je l'ai dit hier, en déclarant que nous

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  1   reviendrons sur ce point, eu égard au temps imparti à M. Karadzic pour le

  2   contre-interrogatoire de M. Donia, et sur la base du comportement de M.

  3   Karadzic et de la façon dont il mène ce contre-interrogatoire jusqu'à

  4   présent, nous déclarons que les Juges ne sont pas convaincus que M.

  5   Karadzic ait utilisé le temps qu'il lui a été imparti de façon efficace,

  6   dans le respect des consignes données par la Chambre. Au début du contre-

  7   interrogatoire, en particulier, la Chambre a dit clairement que cette durée

  8   estimée pour le contre-interrogatoire, qui était égale à 40 heures, n'était

  9   pas une durée raisonnable. Les Juges ont demandé à l'accusé combien de

 10   temps durerait encore le contre-interrogatoire. L'accusé a souvent eu

 11   recours à des questions très générales ou encore a formulé des

 12   commentaires, a fait des affirmation, a donné lecture de portions de

 13   certain nombre de documents qui n'étaient pas extrêmement utiles. Donc la

 14   Chambre a décidé d'exiger de l'accusé qu'il mette un point final à son

 15   contre-interrogatoire de M. Donia avant demain. En d'autres termes, d'ici à

 16   demain, l'accusé disposera de 18 heures supplémentaires et la Chambre

 17   estime que ce temps est largement suffisant.

 18   S'agissant de M. Philipps, la Chambre fait remarquer que l'accusé a demandé

 19   20 heures pour le contre-interrogatoire de ce nouveau témoin. La Chambre

 20   estime également que cette estimation est tout à fait déraisonnable,

 21   notamment aux vues de l'observation faite par l'accusé lui-même selon

 22   laquelle il ne trouve pas d'avantage particulier pour la Chambre dans le

 23   cadre de ce témoin. Par ailleurs, la Chambre fait remarquer que la

 24   déposition de M. Philipps sera très précise, autrement dit, qu'elle se

 25   limitera aux commandements et aux structures d'établissement des rapports

 26   de la RSK, et la Chambre a donc du mal à voir en quoi l'accusé pourrait

 27   avoir besoin de près de 20 heures pour le contre-interrogatoire, selon les

 28   estimations faites par lui. Par conséquent, la Chambre s'attend à ce que

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  1   l'accusé n'utilise que cinq heures pour ce contre-interrogatoire de Richard

  2   Philipps.

  3   Ceci étant dit, je demande que l'on fasse entrer le témoin dans le

  4   prétoire.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je dire quelques mots ?

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Sur quel sujet, Monsieur Karadzic ?

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je dois dire que je ne suis pas suffisamment

  8   protégé face au fait que le témoin élude les questions que je lui pose, ou

  9   qu'il y répond de façon tout à fait partielle, par conséquent, les

 10   conditions indiquées ne seront pas suffisantes. Veuillez, je vous prie,

 11   revenir sur votre déclaration, aux vues de la façon dont la procédure

 12   évoluera aujourd'hui, car le procès ne pourra que souffrir de l'absence de

 13   contre-interrogatoire suffisant d'un témoin sur l'ensemble des faits

 14   concernés.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous disposez encore de deux séances.

 16   Donc veuillez procéder, et les Juges statueront à l'issue de ces deux

 17   séances.

 18   [Le témoin vient à la barre]

 19   LE TÉMOIN : ROBERT DONIA [Reprise]

 20   [Le témoin répond par l'interprète]

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Donia, toutes nos excuses pour

 22   ce désagrément lié au léger retard du début de cette audience, nous avions

 23   un point à discuter en votre absence.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends tout à fait, Monsieur le

 25   Président.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, veuillez poursuivre.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Bonjour à tous.

 28   Je demande l'affichage du document 1D181 grâce au prétoire électronique.

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  1   Contre-interrogatoire par M. Karadzic : [Suite]

  2   Q.  [interprétation] Monsieur Donia, saviez-vous qu'à la fin du mois

  3   d'août, nous avions conclu un accord selon lequel les trois parties au

  4   pouvoir devaient suivre de près l'évolution de la situation afin de réduire

  5   au maximum les tensions politiques ?

  6   Vous avez le texte sous les yeux. Je crois qu'il s'accompagne d'une

  7   traduction. Non, ce n'est pas le cas. Bon. Vous voulez que je vous donne

  8   lecture du premier paragraphe du texte ?

  9   R.  Je vous en prie.

 10   Q.  "Toutes les sections municipales du SDS --"

 11   Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois qu'il y a une traduction

 13   anglaise.

 14   Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, excusez-moi de ne pas vous l'avoir

 15   fait savoir immédiatement. Il s'agit du document 65 ter numéro 14837.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur Donia, vous verrez, dans ce texte dont je peux donner lecture

 19   -- nous voyons pour l'instant à l'écran la version serbe. C'est le premier

 20   paragraphe sur lequel j'appelle votre attention. Le reste n'a guerre

 21   d'importance aux vues du sujet dont nous discutons.

 22   Mais la traduction ne s'affiche pas, donc je dois tout de même lire le

 23   texte, je cite :

 24   "Je vous informe du fait que j'ai conclu un accord avec M. Alija

 25   Izetbegovic --"

 26   Ah, voilà, le premier paragraphe du texte anglais. Vous pouvez suivre sur

 27   la partie gauche de l'écran, je cite :

 28   "Je vous informe par la présente que j'ai conclu un accord avec M. Alija

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  1   Izetbegovic, président du Parti d'action démocratique, et avec M. Stjepan

  2   Kljujic, président de l'Union démocratique croate, selon lequel --"

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous avons la traduction anglaise,

  4   Monsieur Karadzic.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bon, très bien.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur Donia, avez-vous déjà vu ce document ?

  8   R.  Non.

  9   Q.  Saviez-vous que nous avions conclu un tel accord et mis en place cette

 10   commission conjointe ? L'auriez-vous su par d'autres sources ?

 11   R.  Non, je n'ai jamais vu le texte d'un quelconque accord, si ce texte

 12   existe, donc je ne sais pas cela non plus.

 13   Q.  Dans ce document, je dis que nous avons conclu un accord, pas que nous

 14   avons signé un accord, mais que nous nous sommes mis d'accord, que nous

 15   nous sommes convenus de faire quelque chose.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

 17   document.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] A moins qu'il y ait objection, le

 19   document est admis.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce D264, Monsieur le

 21   Président.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je demande à présent l'affichage du

 24   document 1D39.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Dans l'attente d'affichage, Monsieur Donia, je vous demande si vous

 27   savez que suite à cette crise, et après la conclusion d'un accord

 28   historique avec M. -- et après que M. Izetbegovic ait retiré sa signature

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  1   de cet accord historique, nous avons atteint un nouveau moment très

  2   important, le 11 septembre, à l'assemblée de Bosnie-Herzégovine au moment

  3   où ont été voté des conclusions, dans le cadre d'une séance de cette

  4   assemblée, conclusions dont vous verrez le texte apparaître à l'écran dans

  5   quelques instants devant vous.

  6   Connaissez-vous ces conclusions adoptées le 11 septembre ?

  7   R.  Lorsque vous dites "nous," est-ce que vous pensez au SDS ? Car vous

  8   n'étiez pas membre de l'assemblée, n'est-ce pas ?

  9   Q.  A l'époque, la Bosnie était encore un Etat intégré. Il n'y avait qu'une

 10   seule assemblée en Bosnie-Herzégovine, donc c'est de cela que je parle.

 11   R.  Mais je sais que vous n'étiez pas membre de l'assemblée. Vous n'étiez

 12   pas député à l'époque. Or, vous dites "nous," donc je suppose que, par ce

 13   "nous," vous désignez le parti.

 14   Q.  Je désigne tous les partis présents. Tous les partis ont présenté à

 15   l'assemblée. Veuillez jeter un coup d'œil à ces conclusions, à l'avant-

 16   dernier paragraphe, je cite : "L'assemblée s'engage," et cetera.

 17   Vous voyez, par la lecture de ce paragraphe, que nous nous entendons sur le

 18   fait qu'il faut une solution politique, que toutes les propositions seront

 19   considérées comme légitimes et qu'il n'y aura pas recours à la force;

 20   autrement dit que personne n'imposera rien à personne.

 21   Est-ce que vous étiez au courant de cette décision ?

 22   R.  Non.

 23   Q.  Merci.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

 25   document.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document devient la pièce D265,

 28   Monsieur le Président.

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande à présent l'affichage du document

  2   1D40.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Saviez-vous ce que faisait le Parti d'Action démocratique dans cette

  5   même période ? Avez-vous examiné de près l'action du SDA dans cette période

  6   ?

  7   R.  Oui, j'ai examiné de près les positions générales et les actions de ce

  8   parti, mais je n'ai certainement pas suivi tout cela au jour le jour.

  9   Q.  Est-ce que vous avez le document devant vous, à l'écran ? Voilà, il

 10   s'affiche dans votre langue et en serbe.

 11   Donc nous sommes à la date du 26 septembre, et le Parti d'Action

 12   démocratique a ordonné le 20 septembre, que soit suivi de près toutes les

 13   actions et tous les déplacements de l'armée populaire yougoslave avant

 14   tout; étiez-vous au courant de cela ?

 15   R.  J'ai besoin d'une minute pour lire le texte, je vous prie. D'accord,

 16   bon je vois simplement que l'évolution de la situation doit être suivie de

 17   près. 

 18   Q.  Je vous remercie.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage de la page 3, de ce

 20   document, dans les deux langues.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Trouvez-vous, dans cette page du texte, des instructions quant à la

 23   façon de procéder ? Il faut transmettre des informations, et cetera. Vous

 24   voyez ce qui est écrit dans cette page, n'est-ce pas?

 25   R.  Oui, je crois que la logique sous-tendait ce texte est explicité au

 26   troisième paragraphe dans cette page, où nous voyons que le SDS évoque le

 27   déplacement de véhicules civils qui s'est produit dans le passé récent, et

 28   qui a permis de transporter des personnels et des armes sur tout le

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  1   territoire de Bosnie. Il me semble que c'est probablement cela qui est à

  2   l'origine de cette demande de supervision.

  3   Q.  Voulez-vous dire qu'en d'autres termes, que cette activité était

  4   légale; oui ou non ?

  5   R.  Je ne sais pas si le transport de troupes et d'armement à bord

  6   d'automobile civil était légal ou pas. Je ne suis pas sûr de ce qu'il en

  7   est pour ce suivi, cette supervision. Je ne pense pas que ce soit illégal,

  8   mais je ne sais pas.

  9   Q.  Merci. Vous rappelez-vous que trois semaines avant, nous avions rendu

 10   une décision par laquelle nous nous engagions à suivre de près tous les

 11   phénomènes éventuellement pertinents ? Rappelez-vous le premier document

 12   que je vous ai montré ?

 13   R.  Il faudrait que je revoie le document en question, mais si je me

 14   souviens bien, il ne semblait pas annoncer d'autres actions de la part du

 15   parti ou des partis. Moi, j'ai interprété la teneur du premier document

 16   comme faisant référence à la nécessité de déployer des efforts pour régler

 17   les divergences entre les partis ainsi que d'autres questions de nature

 18   plus personnelle, mais je n'étais pas présent. Je n'ai pas participé à

 19   cette action, donc je ne suis pas certain de sens exact à donner à ces

 20   passages du texte.

 21   Q.  Je vous remercie. Vous avez raison. Le premier document stipulait que

 22   les trois partis devaient suivre de près toutes les évolutions sur le plan

 23   social dans le but de réduire les tensions. Mais ceci impliquait une

 24   supervision secrète de la JNA.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

 26   document.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document devient la pièce D266,

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  1   Monsieur le Président.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document 1D41.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur Donia, savez-vous que l'OSCE avait créé une cellule de Crise

  5   destinée à suivre l'évolution de la situation en Yougoslavie, et savez-vous

  6   que l'Allemagne a également créé une cellule de Crise chargée de suivre

  7   l'évolution de la situation en Yougoslavie, et ce, dans la ville de Bonn ?

  8   R.  Je serais très étonné que l'OSCE se soit servi de l'expression "cellule

  9   de Crise," mais cet acte ne me surprend absolument pas puisque je sais que

 10   l'OSCE a mis en place un organisme destiné à suivre l'évolution de la

 11   situation en Yougoslavie.

 12   Q.  L'Allemagne, comme l'OSCE, ont appelé ces organises des cellules de

 13   Crise. Savez-vous que la Croatie avait une cellule de Crise dans toutes les

 14   municipalités croates ?

 15   R.  Il semble qu'il y ait eu des cellules de Crise un peu partout, en ex-

 16   Yougoslavie. J'aurais besoin que l'on démontre que l'Allemagne et l'OSCE

 17   ont eu recours à l'emploi de l'expression "cellule de Crise," pour désigner

 18   ces organismes. Mais je ne serais pas surpris d'apprendre que des cellules

 19   de Crise aient pu exister dans le cadre d'un organe gouvernemental ou de

 20   plusieurs organes gouvernementaux, voire même au niveau municipal en

 21   Croatie. En revanche, je doute fort qu'il y ait une cellule de Crise dans

 22   toutes les municipalités.

 23   Q.  Merci. Nous verrons cela plus tard. Savez-vous que la présidence de la

 24   Bosnie-Herzégovine, elle aussi, a créé une cellule de Crise en septembre

 25   1991, et que cette cellule de Crise était dirigée par Ejup Ganic ?

 26   R.  Oui, j'en ai d'ailleurs rendu compte dans l'un des trois rapports que

 27   j'ai préparés pour utilisation par la présente Chambre.

 28   Q.  Merci. J'aimerais rapidement donner lecture d'un bref extrait de ce

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  1   texte, qui se trouve dans la colonne centrale, et où l'on voit le Pr

  2   Plavsic s'exprimer en sa qualité de présidente du Conseil chargé du

  3   maintien de l'ordre constitutionnel. Mme Plavsic déclare ce qui suit, je

  4   cite :

  5   "Lorsque j'ai été nommée à la cellule de Crise, présidée par M. Ejub Ganic,

  6   je croyais que cette cellule de Crise allait s'occuper de questions

  7   urgentes, nécessitant des solutions. Par exemple, la question de

  8   l'hébergement des réfugiés, de l'approvisionnement en vivre et question

  9   similaire; cependant, la cellule de Crise a commencé à s'occuper d'affaires

 10   qui étaient très loin de son secteur de responsabilités."

 11   Donc en s'exprimant plus avant sur ce point, Mme Biljana Plavsic

 12   souligne que la cellule de Crise a pris sur elle les responsabilités du

 13   Conseil de Défense populaire.

 14   Un peu plus bas, Biljana Plavsic déclare, je cite :

 15   "Est-ce que vous pouvez le croire ? La situation est ce qu'elle est, et le

 16   Conseil de la Défense populaire ne fonctionne pas, alors que la cellule de

 17   Crise a tout pris sur elle."

 18   Plus bas encore, Mme Plavsic déclare qu'elle est parvenue à la conclusion

 19   qu'un groupe informel dans les faits était autorisé à s'occuper des

 20   problèmes les plus délicats.

 21   Donc le Pr Plavsic et le Pr Koljevic déclarent publiquement, à l'époque,

 22   qu'Ejub Ganic a créé la cellule de Crise dans le but de contourner les

 23   Serbes membres de la présidence, et dans le but de se livrer à des actions

 24   qui ne relèvent pas des responsabilités de cette cellule de Crise.

 25   Est-ce qu'il existerait ne serait-ce qu'une seule cellule de Crise serbe le

 26   20 septembre 1991 ?

 27   R.  Je ne sais pas.

 28   Q.  Merci.

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

  2   document aux fins d'identification en attente de traduction.

  3   Mme EDGERTON : [interprétation] S'agissant de ce document, Monsieur le

  4   Président, je fais objection. On ne nous a pas montré l'article en entier.

  5   Le Dr Karadzic a donné lecture d'un petit passage de cet article. Nous

  6   n'avons pas de traduction partant de laquelle nous pourrions nous pencher

  7   sur le contexte dans lequel ces déclarations ont été faites au niveau de

  8   l'article, et pour être tout à fait sincère, la question, qui a été posée

  9   au Dr Donia, n'a absolument rien à voir avec le passage dont le Dr Karadzic

 10   a donné lecture.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, vous avez raison. Vous pouvez citer

 12   à comparaître le Pr Plavsic comme témoin si nécessaire. Nous n'allons pas

 13   verser ce document au dossier. Le Dr Donia n'a rien confirmé de ce

 14   document. Il s'agit d'une coupure de presse.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais M. Donia a confirmé qu'il avait écrit au

 16   sujet de ces cellules de Crise, et c'est un article au sujet des cellules

 17   de Crise et d'un membre de la présidence, le Dr Biljana Plavsic. Donc je

 18   vous prie de réexaminer. Le document parle de la même question. J'ai

 19   demandé au Dr Donia --

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le Dr Donia a témoigné au sujet du fait

 21   qu'il savait qu'il y avait une cellule de Crise en Bosnie-Herzégovine, et

 22   il sait que le M. Ganic était à la tête de cette cellule de Crise. Tout ce

 23   qu'il sait nous dire, mais il n'a rien à voir avec les commentaires avancés

 24   par le Dr Plavsic.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Monsieur Donia, est-ce que vous vous souvenez que Mme Plavsic avait

 27   démissionné dans cette cellule de Crise parce qu'elle avait considéré que

 28   c'était un groupe informel qui était en train de faire des choses qui

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  1   n'étaient pas censées faire ?

  2   R.  C'est possible, je ne sais pas comment elle a démissionné exactement.

  3   Elle a continué à diriger activement ce conseil pour la sauvegarde

  4   constitutionnelle, je ne sais pas quel était le nom exact, mais je crois

  5   qu'elle l'a présidé pendant encore de nombreux mois. Je peux vous le

  6   garantir, par contre ce qu'elle a fait au niveau des cellules de Crise, je

  7   ne sais pas.

  8   Q.  C'est daté du 3 octobre sa démission. Alors vous souvenez-vous du fait

  9   que cette cellule a été dissoute à la demande du Parti démocratique serbe à

 10   la date du 2 ou du 3 mars suite à ces barricades de Sarajevo suite aux

 11   meurtres d'un participant à un mariage -- invité à un mariage et il y a eu

 12   pose de barricades ? Cette cellule de Crise a été démantelée à la demande

 13   des partis politiques; vous en souvenez-vous ?

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que votre question n'a pas été

 15   traduite complètement, d'après ce que j'ai compris. C'était suite à une

 16   demande de qui ou de quoi ?

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais c'était conforme aux exigences avancées

 18   par le Parti démocratique serbe. Après la pose des barricades et pendant la

 19   pose de ces barricades, il y a eu une session de la présidence où on a

 20   confié M. Dukic, et il a présenté les demandes avancées et ça a été adopté

 21   à l'unanimité. On avait demandé -- on avait réclamé la dissolution de cette

 22   instance illégale, cette cellule de Crise, et la Dr Plavsic, le 3 octobre,

 23   a démissionné en disant qu'il s'agit là d'un organe illégal.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous parlez de deux différentes périodes ici,

 25   je crois. Pour ce qui s'est passé les 2 et 3 mars au moment des barricades,

 26   le SDS avait créé sa propre cellule de Crise à l'époque dirigée par M.

 27   Dukic car, à l'époque, si je me souviens bien, vous étiez à Belgrade, et je

 28   n'étais pas sûr de savoir si Mme Plavsic était membre de la cellule de

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  1   Crise ou pas. C'était une de ces cellules de Crise qui je crois devait

  2   exister pour 48 heures et ensuite était dissoute.

  3   A l'époque, c'était à la présidence de la Bosnie-Herzégovine de procéder à

  4   la dissolution de ces cellules de Crise, et je ne suis pas au courant de

  5   cela. Je ne crois pas que les cellules de Crise de la présidence faisaient

  6   beaucoup à l'époque, mais peut-être que je n'ai pas observé les activités

  7   qui étaient effectivement réalisées à l'époque.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Merci.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Si les Juges de la Chambre veulent bien

 11   réexaminer l'éventualité de l'adoption de ce document ou du versement au

 12   dossier de ce document.

 13   [La Chambre de première instance se concerte]

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, la réponse simple est

 15   non. Les éléments de preuve sont dans la réponse du Dr Donia. Poursuivons.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Passons au 65 ter 11311.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur Donia, on en arrive au moment crucial de votre témoignage et

 19   moment crucial dans l'acte d'accusation, il s'agit du 14 et 15 octobre

 20   1991, cette session de l'assemblée qui a adopté un mémorandum relatif à la

 21   souveraineté.

 22   Est-ce qu'on peut nous montrer ce document qui s'agit --

 23   Je voudrais qu'on nous montre la page 1 de 2 en serbe, et 116 en anglais.

 24   Est-ce que vous avez eu l'occasion de voir le PV entier de cette session de

 25   l'assemblée, Monsieur Donia ?

 26   R.  Je les ai lus, effectivement. Pas récemment, mais je les ai passés en

 27   revue, effectivement.

 28   Q.  Est-ce que vous avez lu intégralement ce que j'ai dit moi-même ce jour-

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  1   là ?

  2   R.  Oui, je l'ai fait.

  3   Q.  J'estime que pour l'acte d'accusation ce discours est d'une importance

  4   capitale et je crois qu'il faut que nous nous penchions un eu sur ce

  5   discours parce que le discours et la session constituent un événement

  6   central de la crise qui est la nôtre. Est-ce que le Procureur dispose d'un

  7   enregistrement de mon discours en entier ? Moi, je ne l'ai pas, mais on

  8   pouvait l'avoir avec le sous titrage ce serait une bonne chose. Je vais

  9   donner lecture d'une bonne partie de ce paragraphe. Il faut que j'en donne

 10   lecture.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton, est-ce que vous êtes en

 12   mesure de répondre à cette question ?

 13   Mme EDGERTON : [interprétation] Pas immédiatement, Monsieur le Président,

 14   mais je me demande pourquoi le Dr Karadzic a besoin de lire les passages

 15   alors que nous avons en fait une traduction complète du compte rendu ou du

 16   PV.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pouviez poser cette question

 18   précédemment. Mais poursuivons avec ce PV, Monsieur Karadzic.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je vais demander à ce que certaines

 20   parties soient montrées.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Par exemple, ce qui est dit ici :

 23   "Avant l'exposé des motifs de la proposition, est-ce que c'est moi

 24   qui vais faire cet exposé des motifs ou quelqu'un d'autre, je ne sais pas.

 25   Il faut que je tire quelque chose au clair, une chose qui découle de

 26   l'interprétation de ce que nous avons dit devant ce pupitre et cela se

 27   rapporte notamment à des questions de guerre ou de paix. Je dois répéter

 28   pour une centième fois que les Serbes ne menacent pas de faire la guerre.

Page 3448

  1   Les Serbes font savoir qu'ils ne pourront pas accepter quelle que décision

  2   que ce soit qui serait prise par mise en minorité à leur détriment, et que

  3   l'on ne pourra pas forcer les Serbes à vivre dans un état où ils ne veulent

  4   pas vivre. Je crois que nous les Serbes et les Musulmans, nous nous

  5   comprenons parfaitement bien. Ce que les Musulmans redoutent dans une

  6   petite Yougoslavie, une Yougoslavie Croupion, comme on a coutume de le dire

  7   maintenant, en disant qu'il serait mis en minorité d'une façon quelle

  8   qu'elle soit bien qu'il dispose d'une protection de la part de leur

  9   république qui ne fera jamais partie intégrante de la partie mais qui se

 10   trouvera être sur un pied d'égalité avec la Serbie, cela fait que les

 11   Serbes ont peur de la même chose en Bosnie-Herzégovine, à savoir de ne pas

 12   être mis en minorité maintenant ou dans quelques années. C'est égal. Je

 13   vous prie, Messieurs, de comprendre que les responsables musulmans ont

 14   clairement indiqué que s'il arrivait une catastrophe, ce serait une

 15   catastrophe en premier lieu du peuple musulman, mais ce serait une

 16   catastrophe aussi pour le peuple serbe et pour le peuple croate. Parce que

 17   nous sommes tous mélangés, alors qu'en Bosnie, les Serbes et les Croates

 18   sont assez éloignés géographiquement, exception faite des grandes villes,

 19   bien sûr."

 20   Alors est-ce que vous avez pris en considération cette partie-ci de

 21   mon discours ?

 22   R.  Qu'est-ce que vous voulez dire, "pris en considération" ?

 23   Q.  Est-ce que vous avez pris en considération la totalité de ce discours,

 24   lorsque vous avez rédigé votre rapport ?

 25   R.  Oui, effectivement.

 26   Q.  Merci. Alors je vous demande un peu de patience. Enfin, on peut lire

 27   chacun pour soi, mais je vais sauter quelques passages, et je vais dire que

 28   les Serbes ne sont jamais attaqués aux Musulmans et ils ne s'y attaqueront

Page 3449

  1   jamais. Il n'y a pas une telle disposition parmi les Serbes à l'égard des

  2   Musulmans. En version anglaise, il faut passer à la page d'après. Mais le

  3   chaos qui pourrait générer la mise en minorité, il est égal, c'est-à-dire

  4   une décision de mise en minorité ça risque de générer un chaos qui n'aura

  5   pas à être organisé par qui que ce soit. Il se déroulera par une logique

  6   intrinsèque, il ne s'agit pas d'un chaos, le chaos n'ait maîtrisé par

  7   personne. La caractéristique principale du chaos c'est que ce n'est pas

  8   généré pas en soi, il y a une logique intrinsèque qui le fait évoluer tout

  9   seul. Alors il se peut qu'il y ait des intentions erronées dans la

 10   direction musulmane, en premier lieu, pour essayer de faire quelque chose à

 11   l'avantage des Musulmans qui risqueraient d'être bon pour les Musulmans

 12   mais qui risque de ne pas être bon pour les Serbes, et cela risque de

 13   générer une situation chaotique que personne ne pourrait plus gérer ni

 14   contrôler.

 15   Entendons-nous bien, ce n'est pas le Parti démocratique serbe qui veut un

 16   chaos, et parce qu'il ne veut pas de chaos - tournez la page en serbe, s'il

 17   vous plaît - il en découle que nous nous efforçons de ne prendre aucune

 18   espèce de décision contre un peuple quel qu'il soit en Yougoslavie, voire

 19   un peuple quel qu'il soit en Bosnie-Herzégovine. Je sais que si chaos il y

 20   a, les Serbes, les Croates et les Musulmans vont souffrir, et surtout les

 21   Serbes et les Musulmans, comme un projectile ne saurait choisir la maison

 22   qu'il va percuter en Slavonie ou en Croatie, maison serbe ou une maison

 23   croate.

 24   Je vous prie de passer à la page d'après.

 25   L'INTERPRÈTE : Les interprètes précisent qu'ils n'ont pas le texte sous les

 26   yeux, et que les pages ne sont pas tournées en version serbe.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Est-ce que vous avez pris en considération ce que j'ai dit lorsque vous

Page 3450

  1   avez rédigé vos positions ?

  2   R.  Dans mon rapport, j'ai décrit ceci comme un discours passionné, et je

  3   crois que je le définirais de la même manière au vu de votre lecture

  4   aujourd'hui. Il est évident que vous êtes convaincu de cela tant quand vous

  5   l'avez lu à l'époque, quand que vous le relisez aujourd'hui.

  6   Je considère ce discours comme une déclaration très tranchée concernant la

  7   position que vous avez adoptée, c'est-à-dire la mise en minorité et le

  8   droit de veto contre toute mesure. En même temps, vous mentionnez à

  9   plusieurs reprises des protestations d'innocence et d'intentions

 10   pacifiques. Comme je disais, je n'ai aucune raison de remettre ceci en

 11   doute. Je n'ai peut-être pas saisi la totalité de l'argument que vous

 12   présentez ici, mais je pense qu'en faisant référence au discours et aux

 13   documents sur la formation de la Republika Srpska, en fait j'ai pris bonne

 14   note de ce que vous aviez dit.

 15   Q.  Merci. Au sujet de l'agressivité, on en parlera tout à l'heure. Je veux

 16   que nous nous penchions maintenant sur les phrases qui sont à quelque dix

 17   ou 12 lignes plus bas :

 18   "Il nous est ainsi possible de faire savoir qu'il n'y aura pas de guerre,

 19   et nous pouvons garantir de la sorte qu'il n'y aura pas de chaos parce que

 20   l'ordre est entre nos mains, le chaos n'est généré par personne."

 21   En version anglaise, ça commence par : "I ask you," "Je vous demande de

 22   penser à cela." C'est sept lignes à partir du bas de la page.

 23   Donc nos positions sont celles-ci : l'ordre est maîtrisé par nous et le

 24   chaos ne saurait être maîtrisé ni par nous ni par qui que ce soit d'autre.

 25   De votre avis, c'était un discours passionné qui est favorable à la guerre;

 26   c'est bien ce que vous avez compris, n'est-ce pas ?

 27   R.  Non, j'ai parlé un discours passionné de manière générale, et certaines

 28   parties étaient passionnées et émanaient d'un souhait de ne pas avoir la

Page 3451

  1   guerre. J'ai décrit la totalité du discours comme un discours passionné. Je

  2   suppose que ma réponse ne vous intéresse pas, parce que vous ne m'écoutez

  3   pas.

  4   Q.  Je vous écoute, je vous écoute, continuez. Monsieur Donia, vous voulez

  5   dire par là, que c'est un discours belliqueux. Or, je vous ai bien entendu

  6   sur ce point, et je tiens à continuer.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Laissons le témoin terminer sa réponse.

  8   Monsieur Donia, s'il vous plaît, continuez.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai décrit la totalité du discours comme

 10   un discours passionné. Je pense que vous avez été de plus en plus animé par

 11   cette passion, et vous avez parlé de plus en plus fort. Vous avez été de

 12   plus en plus passionné au fur et à mesure que vous avez prononcé ce

 13   discours jusqu'aux dernières lignes de ce discours. Comme je le disais, je

 14   n'ai aucune raison de mettre en doute la sincérité de vos propos ici, mais

 15   vous aviez des opinions très prononcées, et vous avez présenté différents

 16   points de vue.

 17   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Docteur Donia, est-ce que vous direz

 18   qu'il s'agit là d'un discours belliqueux ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Seulement tout à la fin du discours.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  J'aimerais qu'on nous montre la version anglaise, page 106 de ce

 22   document. J'en saute autant que possible, mais le compte rendu est dans son

 23   intégralité mis à la disposition des Juges de la Chambre et de

 24   l'Accusation.

 25   Alors ici il est dit : "Messieurs," "Gentlemen," dit-on. Je ne suis en

 26   train de parler comme un dieu de la guerre, ici, comme quelqu'un m'a

 27   qualifié ou selon l'épithète que quelqu'un a bien voulu m'attribuer.

 28   Attendez que je retrouve la ligne, descendez encore un peu la page 106 de

Page 3452

  1   cette version anglaise. Descendez vers le bas, s'il vous plait.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, c'est le dernier paragraphe, tout

  3   en bas de la page.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Voilà.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Alors j'ai dit, Messieurs, que je ne suis pas ici un Dieu de la guerre,

  7   comme quelqu'un a bien voulu me coller l'étiquette, quelqu'un du Parti

  8   démocratique croate. Mais à des centaines de reprises, j'ai dit que le

  9   Parti démocratique serbe n'était pas en train de créer la volonté du peuple

 10   serbe, elle ne fait que l'interpréter.

 11   Est-ce que vous prenez cela en considération ? Le peuple serbe

 12   existe. Il a sa volonté, il a ses appréhensions et le parti ne peut pas lui

 13   imposer quelque chose. Il doit se mettre au service de ce peuple.

 14   R.  Oui, et c'est ce que j'ai déjà dit, c'est-à-dire que vous avez pratiqué

 15   l'absolutisme de cette notion du peuple serbe. Vous l'avez transcendée en

 16   un concept anthropomorphique, et vous avez réduit sa volonté à ce que le

 17   Parti démocratique serbe définissait comme tel, et vous avez

 18   personnellement également défini la position du SDP. Par conséquent, vous

 19   avez d'une certaine manière personnalisé la volonté d'un groupe dont vous

 20   prétendez l'existence. Vous avez adopté cette croyance bien avant, mais

 21   vous l'avez exprimée également très clairement ici, et je pense que vos

 22   propos sont très clairs ici.

 23   Q.  Mais est-ce que vous pensez que nous l'avons inventé de toutes pièces,

 24   ou est-ce que c'est quelque chose que le peuple nous a dit, parce que avez-

 25   vous perdu de vue le fait que nous avions organisé un référendum ?

 26   R.  A ce stade, je crois que vous n'aviez pas encore organisé de

 27   référendum. Les élections avaient eu lieu, bien sûr, mais je ne crois pas

 28   qu'un référendum avait déjà été organisé à l'époque.

Page 3453

  1   Q.  Mais seriez-vous d'accord avec moi pour dire qu'il y avait 86 Serbes

  2   dans le parlement ? 72 étaient membres du Parti démocratique serbe. Vous

  3   souvenez-vous aussi que, sur les 86, 83 Serbes étaient des députés qui

  4   étaient favorables à ce qui est dit ici ?

  5   R.  Je pense que nous avons déjà parlé des résultats de ces élections. Je

  6   voudrais simplement mentionner les votes qui ont eu lieu pour la

  7   présidence. Les deux candidats du SDS sur les quatre candidats serbes ont

  8   reçu -- les candidats serbes ont reçu 78 % des votes. Je crois qu'il y

  9   avait 558 000 votes pour M. Koljevic et 570 000 pour Mme Plavsic. M.

 10   Kecmanovic a obtenu 500 000 votes. Il n'était pas membre du SDS, et M.

 11   Pejanovic a reçu environ 350 000 votes. Il n'était pas non plus membre.

 12   Donc je suis d'accord avec vous quant au nombre de délégués en faveur de

 13   votre position au parlement, à l'assemblée, mais ceci n'enlève pas le fait

 14   qu'il y a 90 % des votes qui avaient été pour des candidats représentants

 15   le parti.

 16   Q.  Mais, Monsieur Donia, nous étions moins de 32 % dans la population

 17   générale, et nous avons obtenu 31 % des votes. C'est sur cela que je me

 18   base. Mais restons sur le point que vous avez évoqué. Je ne parle pas de la

 19   présidence. Les députés de Kecmanovic étaient également favorables à ce que

 20   j'ai avancé. Il y avait la totalité des députés serbes qui étaient pour,

 21   exception faite de trois députés. Donc 4 % ou 5 % s'étaient abstenus. Trois

 22   s'étaient abstenus. Les autres, les 83 ont voté pour, et il n'y avait pas

 23   que le Parti démocratique serbe à être pour.

 24   En a-t-il été ainsi ou pas, le parlement serbe se composait et se

 25   compose encore de 83 députés ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Merci.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais qu'on nous montre la page en

Page 3454

  1   anglais numéro 108.

  2   Je dis ici, c'est un discours qui est aussi crucial que l'autre, et je vous

  3   demande un peu de patience. Voilà ce qui est dit :

  4   "Nous ne voulons pas interdire que vous présentiez une initiative visant à

  5   modifier la constitution."

  6   Attendez que je retrouve le passage. C'est la page 106. Ça doit être la

  7   page d'avant. Excusez-moi. C'est peut-être la page 105, vers le bas de la

  8   page 105. Non, 107. Alors :

  9   "Nous --"

 10   Ce n'est pas bien traduit ici.

 11   "We do not object," en anglais, ou en français :

 12   "Nous ne nous opposons pas à ce que vous présentiez une initiative

 13   visant à modifier la constitution de la Bosnie-Herzégovine, mais ça ne se

 14   passe pas ainsi. Il faut passer par une commission constitutionnelle, puis

 15   par la chambre des citoyens et puis, ensuite, voter à ce sujet. Mais vous

 16   ne pouvez pas vous aventurer dans une matière qui est réglementée par la

 17   constitution fédérale. Moi, de la façon la plus pacifiste possible,

 18   j'essaie de vous le dire aussi. Le peuple serbe sait parfaitement bien ce

 19   que vous voulez. Vous voulez aboutir à La Haye à la création d'une

 20   troisième ou quatrième république qui ne souhaiterait pas vivre en

 21   Yougoslavie. Or, vous ne pouvez pas le faire. Nous, nous voulons vivre en

 22   Yougoslavie. Vous pouvez parler pour vous. Les peuples souverains en

 23   Bosnie-Herzégovine peuvent parler pour eux. Les autres peuples ne peuvent

 24   pas le faire, et c'est la conclusion que nous avons tirée à cette

 25   assemblée, ne pas imposer la volonté à autrui. Donc nous allons présenter

 26   ce fait à l'opinion publique mondiale en disant que c'est une violence

 27   constitutionnelle à l'égard des autres, et suite à la violence

 28   constitutionnelle, il y aura d'autres violences qui s'en suivront, et on ne

Page 3455

  1   nous pose pas la question de savoir si on le veut ou pas.

  2   "Et c'est ce qui a été dit à cent reprises devant ce micro. Alors si

  3   nous aboutissons à une situation qui sera celle de la Slovénie et de la

  4   Croatie, et surtout la Croatie, parce que en Bosnie-Herzégovine cet enfer

  5   serait mille fois plus grave et il n'y aurait aucun moyen de faire stopper

  6   les choses."

  7   Est-ce que je suis sur la bonne page ? Et un peu plus bas :

  8   "I ask you --"

  9   "Je vous demande une fois de plus, je ne vous menace pas, je vous

 10   prie de prendre au sérieux l'interprétation de la volonté politique du

 11   peuple serbe."

 12   Peut-être aurait-il fallu traduire par "Je vous supplie" ?

 13   La phrase qui est un peu plus bas :

 14   "Comprenez les choses au sérieux. Ce n'est pas une bonne chose que vous

 15   êtes en train de faire. C'est une voie que vous voulez faire emprunter à la

 16   Bosnie-Herzégovine. C'est la même autoroute de l'enfer et de la souffrance

 17   qui a déjà été empruntée par la Slovénie la Croatie. Ne pensez pas que vous

 18   allez pouvoir prendre la Bosnie-Herzégovine vers l'enfer et peut-être faire

 19   disparaître le peuple musulman, parce que le peuple musulman ne saurait se

 20   défendre si guerre il y a ici."

 21   Un passage plus bas :

 22   "Je vous prie d'une chose. Peut-être sont-ce là de grands mots, mais les

 23   grandes situations demandent les grands mots. Comment allez-vous empêcher

 24   une situation ou les uns tuerait les autres en Bosnie-Herzégovine ?"

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Est-ce que vous comprenez ceci comme étant un discours de quelqu'un qui

 27   est un va-t'en-guerre, Monsieur Donia ?

 28   R.  Comme je l'ai mentionné lorsque le Juge Baird m'a posé la question, je

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  1   pense que la dernière partie de votre discours est va-t'en-guerre. Les cinq

  2   ou six dernières phrases que vous avez lues, en replaçant ceci dans le

  3   contexte de l'époque avec des références répétées à des violences à des

  4   républiques parallèles où des guerres avaient fait rage ou étaient encore

  5   en train de faire rage, et la manière dont le discours a été prononcé a

  6   rendu ce discours pour sa dernière partie très brève comme un discours va

  7   t'en guerre; sinon, le reste du discours ne l'était pas. Je dois dire que

  8   je devrais partager la réponse du président Izetbegovic qui a pratiqué la

  9   litote lorsqu'il a dit que le message que vous aviez transmis et la manière

 10   dont vous aviez fait passer ce message avait donné de bonne raison de se

 11   demander si nous - et je pense donc qu'il parlait de la Bosnie - pouvions

 12   rester en Yougoslavie.

 13   Q.  Mais vous souvenez-vous du fait qu'à l'occasion de la session

 14   précédente de l'assemblée, Muhamed Filipovic avait proféré les mêmes

 15   propos. Il a dit :

 16   "Si ça continue ainsi, mon peuple va disparaître."

 17   Vous avez bien gardé en mémoire cette phrase-là ?

 18   R.  Non, je n'ai pas vu cette phrase.

 19   Q.  Bon. Merci. Mais c'est la session précédente de l'assemblée, vous

 20   pouvez vous y référer. Je veux revenir au début. Le début c'est en fait la

 21   fin du discours, quand j'ai dit qu'il fallait que nous tirions au clair. En

 22   page 116, version anglaise. D'un élément qui découle de l'interprétation de

 23   ce que nous allons dire devant cette assemblée, c'était une question qui

 24   était relative à la guerre ou à la paix. Nous répétions que les Serbes ne

 25   menaçaient pas de guerre mais qu'ils ne pouvaient pas accepter une décision

 26   qui serait prise par vote de minorité.

 27   Alors, Monsieur Donia, est-ce que vous pensiez que je devais faire passer

 28   pour dupe le parlement de Bosnie-Herzégovine, et leur dire : Allez de

Page 3457

  1   l'avant, les Serbes vont finir par accepter; alors que je savais

  2   pertinemment bien que les Serbes n'allaient pas l'accepter ?

  3   R.  Bien, vous parliez c'est évident au nom du SDS et ce que vous

  4   considériez comme le peuple serbe, et vous parliez devant une instance dont

  5   vous n'étiez pas membre. Par conséquent, il est évident que vous étiez

  6   présent là-bas en qualité de président d'un parti politique, et vous

  7   transmettiez un message au nom du parti -- ou plutôt, parce que vous

  8   pensiez qu'il s'agissait selon vous d'une opinion quasi unanime du peule

  9   serbe. Je ne pense pas que vous essayez de duper qui que ce soit avec ces

 10   discours. Je crois que vous étiez fermement convaincu de ce que vous disiez

 11   et que vous faisiez passer, par conséquent, votre point de vue de manière

 12   très tranchée, quelquefois avec un peu de colère, mais que ceci était tout

 13   à fait honnête.

 14   Q.  Merci. Monsieur Donia, voyez-vous, si le Parti démocratique serbe avait

 15   bénéficié de 51 % du soutien du peuple serbe, elle aurait quand été le

 16   représentant légitime de ce peuple. Mais, moi, j'avais le soutien de 83

 17   députés sur un total de 86 députés serbes. 83 c'est plus des deux tiers de

 18   cette assemblée, n'est-ce pas ?

 19   R.  Plus des deux tiers des Serbes, ou --

 20   Q.  Non, c'est plus d'un tiers du total des députés de 240, le tiers c'est

 21   80. Moi, j'avais le soutien de 83 délégués lorsque j'ai proféré ces propos,

 22   n'est-ce pas ?

 23   R.  A ce moment-là, je crois que c'est vrai, effectivement.

 24   Q.  Moi, j'ai dit 240. Le compte rendu dit 248. Merci de rectifier. Moi, je

 25   ne parle pas du Parti démocratique serbe. Moi, je parle du peuple serbe

 26   parce que j'ai le soutien de 83 députés. Qui dix jours avant cela avaient

 27   dissocié leur groupe pour créer une assemblée serbe. Est-ce qu'on peut

 28   demander ceci --

Page 3458

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que ceci n'a pas déjà été versé

  2   au dossier ?

  3   Mme EDGERTON : [interprétation] Les PV ou les comptes rendus de la version

  4   audience de ce discours ont déjà été versés au dossier, pour ce qui est de

  5   la bande audio complète de ce discours c'est le document de la liste 65 ter

  6   ou la pièce de la liste 65 ter 45005.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] 45005.

  8   Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, et ceci a également fait l'objet d'une

  9   transcription, et si nous nous limitons aux termes abordés dans ce discours

 10   j'ai cru comprendre que le Dr Karadzic parlait en fait du fichier audio de

 11   toute cette séance et nous essayons de trouver ceci dans nos dossiers. Je

 12   vous prie de m'excuser si j'ai mal compris. Quoi qu'il en soit, les trois

 13   minutes que nous avons fait écouter durant l'interrogatoire principal du Dr

 14   Donia ont été versées au dossier sous la pièce P959.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais ceci ne contient que les dernières

 16   parties de ce compte rendu.

 17   Mme EDGERTON : [interprétation] C'est exact.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document 45005 contient la totalité

 19   du discours de M. Karadzic.

 20   Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, mais pour être vraiment sûre, je vais

 21   demander à un collaborateur de vérifier de façon à nous assurer que rien ne

 22   manque au début ou à la fin de ce discours, et je pourrais le faire assez

 23   rapidement.

 24   [La Chambre de première instance se concerte]

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Etant donné que M. Karadzic voulait nous

 26   présenter la vidéo, nous souhaiterions pouvoir accepter la vidéo ainsi que

 27   le compte rendu. Quelle est la pratique habituelle ici ? Est-ce que nous

 28   allons verser tout ceci avec une seule cote ? Ou est-ce que nous allons

Page 3459

  1   avoir plusieurs cotes ? Je vais demander au Greffier.

  2   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc la vidéo avec le compte rendu sera

  4   versé.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Juste pour préciser, le document de la

  6   liste 65 ter 45005 deviendra la pièce D267.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien sûr, ceci avec la traduction

  8   anglaise.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Effectivement, Monsieur le Président.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Gardez ceci à l'esprit, Monsieur

 11   Karadzic. Avec l'aide du bureau du Procureur, vous devriez donc verser le

 12   CD qui contient la totalité de la vidéo en question pour les besoins des

 13   Juges de la Chambre.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. J'espère que je vais pouvoir l'obtenir,

 15   parce que l'Accusation ne m'a fait parvenir que la partie qui a pu être

 16   utilisée contre moi, or, moi, je voudrais que les Juges de la Chambre aient

 17   la possibilité de voir la totalité du discours.

 18   Mme EDGERTON : [interprétation] Non, Monsieur le Président, Madame et

 19   Monsieur les Juges. Le document 65 ter 45005 a été communiqué en 2009.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais apparemment il y a un problème pour

 21   remettre la main dessus, mais quoi qu'il en soit je suis convaincu que Mme

 22   Edgerton aura l'obligeance de vous aider en la matière.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Monsieur Donia, nous sommes ici au 14 et 15 octobre, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Or, ceci se produit dans une série d'événements après tout ce que nous

 28   avons parcouru déjà, l'époque préélectorale, les élections, le partage du

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  1   pouvoir et les premiers mois de l'exercice du pouvoir, cet accord

  2   historique ou tentative d'accord et d'établissement d'un accord historique

  3   entre les Serbes et les Musulmans, 11 septembre, un accord visant à ne pas

  4   imposer des solutions à autrui, et le 145 et le 15, nous avons une mise en

  5   minorité nous concernant. Alors est-ce que vous pensez que nous pouvons

  6   prendre des décisions constitutionnelles ou liées à la constitution de

  7   façon contraire à cette constitution ?

  8   R.  Je dois dire que je ne suis pas vraiment très au clair quant à ce que

  9   dit la constitution, concernant les actions qui ont été ou les mesures qui

 10   ont été prises par la suite. Je pensais toujours qu'il s'agissait d'une

 11   question relevant des règles de fonctionnement de l'assemblée plutôt que de

 12   la constitution, mais je ne sais pas vraiment si c'est le cas, et je ne

 13   prétendrais pas interpréter cela. Je peux certainement vous dire que vous

 14   l'avez considéré comme une question qui était anticonstitutionnelle et, par

 15   conséquent, illégale. Ceci a été très clair, d'autres n'ont pas fait de

 16   commentaires à ce sujet, ou pensaient que ceci était conforme à la

 17   constitution. Il y a eu beaucoup de controverses, mais de là à savoir si

 18   c'était anticonstitutionnel ou pas, je ne peux pas vraiment me prononcer.

 19   Q.  J'aimerais qu'on nous montre le 1290. Est-ce que vous avez entendu

 20   prononcer le nom de Rasim Kadic ?

 21   R.  Oui. Je crois qu'il s'agit de Rasim Kadic. Il y a une erreur sur le

 22   compte rendu d'audience. Si c'est la bonne personne, il était président du

 23   club des délégués du SDA. Je crois qu'il était membre de l'assemblée, et

 24   qu'il parlait -- il représentait le SDA.

 25   Q.  Non, non, c'est le Dr Naim Kadic. Vous avez une très bonne mémoire.

 26   Mais c'est Rasim Kadic, c'est un autre Musulman, il se trouve être

 27   président d'un parti libéral qui est issu de l'alliance des jeunesses, à

 28   l'époque.

Page 3461

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crains fort que ce n'est pas le document que

  2   nous avons demandé. 1290, j'ai demandé 1290, il s'agit d'un échange entre

  3   moi-même et ce M. Rasim Kadic, à la date du 16 octobre, où Rasim Kadic

  4   m'informe du fait qu'il n'avait pas voté, que son parti n'avait pas voté en

  5   faveur de ce mémorandum relatif à la souveraineté, et il a dit que

  6   désormais, la voie était ouverte pour des comportements extra

  7   institutionnels.

  8   Je crois que le bureau du Procureur dispose d'une traduction. Oui,

  9   c'est cela. La première page n'a pas beaucoup d'importance. On peut nous

 10   montrer la page d'après. Montrez-nous la page d'après, tant dans la version

 11   serbe que dans la version anglaise.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Voilà. Rasim Kadic, à la troisième case à partir du haut :

 14   "Je ressens le besoin, après ce qui s'est passé, de vous rencontrer dans

 15   une espèce de délégation du parti dans les quelques journées qui viennent."

 16   Moi, je dis :

 17   "Oui, nous pouvons nous rencontrer."

 18   Rasim Kadic dit :

 19   Radovan Karadzic, je suis convaincu du fait que vous savez que tout

 20   ce qui s'était fait est illégal, et que ça n'a rien à voir, cette honte que

 21   j'ai laissé entendre devant le micro, personne en Europe ne saurait la

 22   tolérer."

 23   Rasim Kadic dit :

 24   "Oui, moi, j'ai dit ce que je pensais, je n'ai pas participé au vote, et je

 25   ne veux pas participer à celui-ci."

 26   Moi, je dis : 

 27   "Vous n'avez pas participé au vote, n'est-ce pas ?"

 28   Rasim Kadic dit :

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  1   "Bien sûr. Vous n'avez qu'à lire les journaux d'aujourd'hui," et ainsi de

  2   suite. "Je veux que vous tiriez les choses au clair au niveau du pouvoir."

  3   Moi, je dis :

  4   "Même nous, pendant trois mois, on parlait d'autres choses. M. Izetbegovic

  5   et moi, on était près d'un accord, nous avions pu en terminer, que les

  6   peuples en Bosnie-Herzégovine puissent souffler, que chacun ait sa partie

  7   de la Bosnie-Herzégovine, non pas départagée par des clôtures, mais que

  8   chacun, du point de vue institutionnel, ait quelque chose, comme du temps

  9   des Turcs. On sait que, par exemple, Taslihan, c'est là-bas."

 10   Taslihan, c'était le quartier serbe de Sarajevo, pendant l'occupation

 11   ottomane; le saviez-vous cela, Monsieur Donia ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Alors, le quartier turc; le quartier latin, donc, là où il y avait les

 14   catholiques, est là-bas, chacun vaque à ses affaires, et nous avons des

 15   affaires en commun. On aurait pu le faire, quelqu'un serait en Yougoslavie

 16   jusqu'aux chevilles, d'autres jusqu'aux genoux, et d'autres jusqu'au cou.

 17   Mais c'était une solution unique, en Europe, ça aurait ressemblé à la

 18   solution suisse, mais pas ceci. Tout à coup, tous ces échanges, et après

 19   tous ces entretiens, il y a un papier qu'on nous sert qui est tout à fait

 20   différent, c'est scandaleux -- enfin.

 21   Maintenant, Rasim Kadic dit -- je vous prie de nous passer la page

 22   d'après pour ne pas avoir à lire le tout. Page d'après maintenant. Oui,

 23   c'est la page d'après.

 24   Alors M. Rasim Kadic dit, il n'a pas l'intention de servir d'intermédiaire,

 25   mais c'est de voir que -- la possibilité d'aboutir à un apaisement de la

 26   situation. Puis il dit - il faut retrouver le passage - il a dit que cela

 27   ouvrait la voie -- voilà, c'est le troisième passage. Il est évident que

 28   les erreurs mènent à une solution extra institutionnelle à la crise, ça ne

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  1   convient à personne. Donc c'est un Musulman, président du Parti libéral,

  2   qui n'a pas voté, pour -- il m'appelle avec des sympathies, et il m'apporte

  3   son soutien, le lendemain, pour essayer de trouver une voie -- une issue,

  4   une solution, et il dit que ce type de façon de procéder ouvrait la voie à

  5   des comportements extra institutionnels. Est-ce que vous avez déjà eu

  6   l'occasion de voir ces extraits d'échanges ?

  7   R.  Non.

  8   Q.  Merci.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais que ceci soit versé au dossier.

 10   C'est une conversation interceptée -- à des fins d'identification, parce

 11   que c'est une conversation interceptée.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous allons lui donner une

 13   cote provisoire.

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D268, cote provisoire,

 15   Monsieur le Président.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais qu'on nous montre le 65 ter 6416.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur Donia, ceci a constitué une espèce de point de culmination

 19   dans la vie politique, qui a commencé par la création de ces partis, ou par

 20   la mise en place d'une démocratie pluripartite. Je voudrais maintenant que

 21   nous nous penchions -- non, ce n'est pas ce que j'ai demandé. Le 6416. 6416

 22   de la liste 65 ter.

 23   Je voudrais, de façon brève, parcourir cet état de conscience de Radovan

 24   Karadzic, entre juillet 1990, et plus tard, pour voir ce que pensait,

 25   disait, et en faveur de quoi s'employait le dénommé Radovan Karadzic

 26   jusqu'au moment qui est celui de la date du 15 octobre.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde, Monsieur Karadzic. Avant de

 28   procéder à la lecture d'un document, vous devriez expliquer au témoin,

Page 3464

  1   ainsi qu'aux Juges de la Chambre, de quoi il s'agit. Vous dites que c'est

  2   le point d'orgue ou le point culminant.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le point culminant, Excellence, c'est le 15

  4   octobre, date à laquelle il y a eu toutes ces conversations qui sont

  5   tombées à l'eau, et les députés s'en vont, ils créent une assemblée serbe,

  6   donc lorsque sont tombées à l'eau, les chances de voir les choses

  7   s'organiser autrement, et on avait pu présager de la chose en fin mars

  8   déjà.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ma question est de savoir s'il

 10   s'agissait de votre entretien.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, c'est -- je me suis trompé. Le 6146, c'est

 12   une interview que j'ai accordée le 20 juillet 1990.

 13   Mon intention, c'est de parcourir, par l'élaboration de ce sujet, le mens

 14   rea, c'est-à-dire l'état de conscience, l'état d'âme de Radovan Karadzic,

 15   jusqu'à -- depuis la création du parti jusqu'au 15 octobre, et je crois que

 16   M. Donia a dû en avoir eu connaissance. Je crois qu'il en a parlé ces

 17   jours-ci, notamment le premier jour de son témoignage -- le premier jour de

 18   son contre-interrogatoire. Alors je crois que tout le monde dispose de

 19   ceci, et le Procureur doit disposer de la chose. Moi, je vous renvoie à la

 20   page 10 de la version anglaise.

 21   Alors le numéro est le numéro 68.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] De quelle publication cela est tiré ?

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait passer à la

 24   première page ?

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  C'est le magazine "Nin."

 27   R.  D'accord.

 28   Q.  L'hebdomadaire le plus respecté de l'ex-Yougoslavie.

Page 3465

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde, s'il vous plaît.

  2   Monsieur le Témoin, est-ce que vous êtes satisfait de la réponse ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je suis d'accord.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors passons à la première page.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Alors en page 67, le journaliste me demande : Est-ce que vous parlez

  7   d'une réconciliation ? Karadzic, répond : La réconciliation est

  8   indispensable. Les Serbes doivent se réconcilier avec les autres, et

  9   pardonner le plus possible. Nous ne devons pas forcer les autres à se

 10   repentir. La personne qui se repent doit avoir la motivation et la force

 11   morale de le faire; sinon, ce n'est pas -- ça ne sert à rien. Les Serbes

 12   doivent se réconcilier avec eux-mêmes. La guerre civile parmi les peuples

 13   serbes doit prendre fin, parce que ça nous a apporté pas mal de mal. Je

 14   parle du conflit entre les royalistes et les républicains, c'est-à-dire les

 15   communistes à l'époque, n'est-ce pas ? C'était donc un conflit entre les

 16   Serbes eux-mêmes, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui. Vous aviez les partisans et les Chetniks, c'est ce que vous

 18   suggérez, n'est-ce pas ?

 19   Q.  C'est cela, justement. Alors la première partie parle de la

 20   réconciliation, de notre réconciliation avec les autres peuples, n'est-ce

 21   pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Merci. Alors maintenant je vous renvoie à la page 69. Je dis,

 24   cependant, la réconciliation, ça ne veut pas dire que le vaincu devienne,

 25   puisse devenir un vainqueur, mais -- et entraîné le vainqueur vers les

 26   tréfonds, où nous avions gardé les vaincus à l'époque. Parce que cela ne

 27   signifierait qu'une continuation de la guerre civile. Les vainqueurs et les

 28   vaincus doivent quitter leur tranchée et se trouver à mi-chemin quelque

Page 3466

  1   part. Est-ce que vous vous souvenez du fait que j'avais demandé que les

  2   Serbes cessent d'être des Chetniks ou des partisans mais de devenir un

  3   peuple moderne sans ces espèces de division entre eux ?

  4   R.  Oui, c'était votre position en juillet 1990, et c'était, je dois dire,

  5   le Radovan Karadzic que j'appréciais, qui exprimait je crois une évaluation

  6   réaliste et sobre de la situation au sein des partis politiques, ainsi

  7   qu'une évaluation du besoin des Serbes de mettre de côté ou d'abandonner

  8   ces affrontements du passé entre les Chetniks et les partisans. A l'époque,

  9   je n'affirmerais pas que vous étiez, vous aviez le type d'animosité ou vous

 10   aviez des positions extrêmement tranchées que vous aviez adoptées à

 11   l'époque, mais que vous avez ensuite adoptées plus tard dans le conflit.

 12   J'étais d'accord avec vous, lorsque vous vouliez vivre au sein des

 13   Musulmans, et vous aviez un coiffeur musulman, c'était cette période de

 14   votre vie et là, je n'avais vraiment aucun problème avec vos positions et

 15   avec ce que vous mentionnez ici.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Sur ça, nous allons faire une pause de

 17   20 minutes.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] On peut verser au dossier le texte de

 19   l'interview.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D269, Monsieur le

 22   Président.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, pour ce qui est de

 24   votre requête concernant un témoin qui devrait déposer à la fin du mois,

 25   j'ai cru comprendre que vous avez demandé une autorisation de répondre à la

 26   réponse de l'accusé. Nous vous l'avons accordé, je me demandais si vous

 27   pouviez faire ceci avant la fin de la journée.

 28   M. TIEGER : [interprétation] Oui. Je pense qu'il n'y a aucune raison de

Page 3467

  1   procéder différemment, nous informerons les Juges de la Chambre

  2   immédiatement.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Ceci est accordé.

  4   Pause de 20 minutes.

  5   --- L'audience est suspendue à 10 heures 27.

  6   --- L'audience est reprise à 10 heures 51.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, veuillez poursuivre.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Est-ce qu'on peut nous montrer le 65 ter

  9   31805 au prétoire électronique ?

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Alors je tiens à vous informer de ce que je voudrais vous montrer

 12   maintenant, Monsieur Donia. Nous allons nous pencher -- enfin, les

 13   interviews sont assez nombreuses; je pense que vous avez dû en voir pas mal

 14   déjà, et que tout va dans ce sens-ci jusqu'en février 1991. A un moment

 15   donné, je vais demander le versement au dossier de tout ceci mais, moi, je

 16   voudrais qu'on approfondisse le sujet de la paix et de la guerre pour ce

 17   qui est des événements politiques.

 18   Alors ici nous avons une conversation interceptée entre moi et Vitomir

 19   Zepinic. Alors c'est intéressant. Nous allons revenir sur cette

 20   conversation sur d'autres sujets à aborder, parce qu'on voit que je ne le

 21   connaissais pas. Que je ne connaissais pas le dénommé Mandic, et cetera, on

 22   y reviendra le moment venu.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pour le moment ce qui m'intéresse c'est la page

 24   13 de la version anglaise.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Alors j'attire votre attention et je crois que, pour les interprètes la

 27   variante -- la version serbe est importante aussi. Alors je recommande à

 28   votre attention le commencement de ce qui débute par "Tomorrow." Demain

Page 3468

  1   c'est la question du sort de la Bosnie-Herzégovine. Je n'ai pas --

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez attendre quelques

  3   secondes, car les interprètes veulent également que la version en B/C/S

  4   s'affiche à l'écran ?

  5   Entre-temps, Monsieur le Témoin, est-ce que vous savez qui était M. Zepinic

  6   ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 10   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Maintenant, on a les deux versions en B/C/S.

 12   Est-ce qu'on peut montrer une version anglaise et une version B/C/S ?

 13   Alors pour participer -- pour informer les autres participants, Vitomir

 14   Zepinic est le plus haut des représentants des Serbes au ministère de

 15   l'Intérieur dans la police. Des Musulmans ont eu le poste de ministre, et

 16   les Serbes ont eu le poste du ministre adjoint, et nous avions présenté la

 17   candidature de ce Vitomir Zepinic, qui était un expert, qui n'était pas un

 18   membre du parti que je n'ai pas connu d'ailleurs avant tous ces événements.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste une seconde. Monsieur le Témoin,

 20   est-ce que vous êtes d'accord avec cela ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, ceci était conforme à l'accord inter

 22   partite qui avait été conclu par le gouvernement en janvier 1991.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, même si vous êtes

 24   sincère dans l'exposé de ces faits, ceci ne constitue pas une déposition.

 25   La déposition ne doit passer par le truchement des témoins. Veuillez

 26   poursuivre.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Moi, je me dépêche pour être plus

 28   informatif, mais je ne veux pas que ce soit mal fait.

Page 3469

  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Alors, moi, je dis à Zepinic :

  3   "Et bien, demain se jouera le sort de la Bosnie-Herzégovine. Je n'ai aucune

  4   opportunité ni moyen de changer quoi que ce soit. Ni le peuple ni les

  5   députés n'accepteraient quelque divergence que ce soit. La Bosnie va rester

  6   en Yougoslavie jusqu'à ce que l'un quelconque des peuples constitutifs en

  7   décide différemment. On le verra demain de façon claire. Si le système

  8   politique venait à tomber à l'eau, ce serait la fin, nous n'y pouvons rien.

  9   Mais nous, nous avons les mains propres."

 10   Ensuite bien son commentaire.

 11   Karadzic dit :

 12   "Nous n'avons aucune chance. Je peux prendre la parole au parlement

 13   pour dire que j'accepte une Bosnie souveraine --"

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde, s'il vous plaît. Les

 15   interprètes suivent très bien, mais le système électronique du prétoire ne

 16   montre pas la page en B/C/S appropriée, d'après ce que j'ai compris.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je crois que c'est la page 9 en

 18   B/C/S. Page 9 de ce même document.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poursuivre.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Alors je dis :

 23   "En deux heures on aura le chaos en Bosnie."

 24   Parce que, moi, je dis :

 25   "Quand bien même que j'accepterais tout ceci, ça ne donnerait rien du

 26   tout parce que dans l'espace de deux heures on aurait le chaos en Bosnie."

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous montrer la page d'après,

 28   s'il vous plaît ?

Page 3470

  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Puis je dis :

  3   "Je n'ai ni le droit ni le pouvoir effectif parce que cela donnerait en

  4   l'espace de deux heures un chaos en Bosnie-Herzégovine."

  5   Alors, moi, j'informe ici le ministre adjoint du fait quand bien même

  6   j'accepterais, quand bien même Karadzic dirait qu'il accepte une Bosnie

  7   souveraine, il y aurait sur le terrain une situation chaotique et des

  8   processus incontrôlables.

  9   Est-ce que vous avez déjà eu l'occasion de voir cette conversation

 10   interceptée, Monsieur ?

 11   R.  Oui, effectivement.

 12   Q.  Merci.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que ce soit versé au dossier de la

 14   même façon que nous avons fait pour les autres conversations interceptées.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous allons lui donner une

 16   cote provisoire.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D270, cote

 18   provisoire MFI, Monsieur le Président.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Nous sommes encore au mois de juin 1991.

 20   J'aimerais qu'on nous montre maintenant le 65 ter 30055, il s'agit d'une

 21   conversation avec Radoslav Vukic, un docteur originaire de Banja Luka, qui

 22   se trouve être le responsable régional du SDS là-bas, et les autres parties

 23   nous allons les examiner plus tard. Mais ce que je voudrais maintenant

 24   c'est la page 2, et la page 3 pour ce qui est de la version serbe. Nous en

 25   sommes encore à la question relative à la guerre et à la paix.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, j'interviens

 27   rarement, mais pour ce qui est de l'interception précédente, est-ce que

 28   vous avez en fait lu toute l'interception, mais vous avez posé qu'une seule

Page 3471

  1   question pour savoir s'il avait vu cette interception. Quel était

  2   l'objectif de donner lecture de la totalité de ce document pour ne poser

  3   qu'une seule question ? Gardez ceci à l'esprit pour la suite de votre

  4   contre-interrogatoire.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pars du principe que M. Donia a réalisé ses

  6   rapports d'expert sur la base de tout ce qu'il a vu personnellement, donc

  7   ce qui m'intéresse c'est de savoir s'il a vu tout cela. S'il a vu tout

  8   cela, et qu'il y a réfléchi nous devons constater l'incidence que cela a pu

  9   avoir sur la rédaction de ses travaux d'expert.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Posez la question au témoin.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Monsieur Donia, vous voyez ici, en page 2 de ce document, que j'informe

 14   M. Vukic, en lui disant que :

 15   "A mon avis il apparaît désormais clairement que M. Izetbegovic souhaite

 16   faire la guerre."

 17   Un peu plus bas, il évoque M. Babic, et après quoi je déclare, je cite :

 18   "Pour l'essentiel, il accomplit des actions favorables à l'option de

 19   guerre."

 20   Je parle donc Izetbegovic. Vous rappelez-vous que j'ai toujours

 21   combattu contre les actions de Babic en Krajina de Bosnie actions qui

 22   allaient dans le sens d'une division de la Bosnie-Herzégovine ? Je pense

 23   que vous l'avez déjà dit, n'est-ce pas ?

 24   R.  Ceci n'est pas absolument exact. Je crois qu'à l'époque, où vous l'avez

 25   fait intervenir à l'appui de vos initiatives; et à d'autres moments

 26   également, en réalité, la plupart du temps, vous-mêmes ainsi que M.

 27   Milosevic avez trouvé en lui un homme loyal qui agissait dans le sens de

 28   vos projets. Je crois que ce dont vous parlez ici, c'est de cette

Page 3472

  1   initiative qui faisait jour à l'horizon et qui était celle des Serbes de la

  2   Krajina de Bosnie, mais également de la Krajina de Croatie, qui

  3   souhaitaient proclamer l'unité des deux Krajina. C'était un projet qui

  4   était censé s'accomplir vers la fin du mois de juin. Donc il me semble

  5   qu'il est raisonnable de dire que vous étiez en train de discuter avec M.

  6   Vukic, dans le cadre du début de ces efforts déployés par vous pour diriger

  7   cette unification qui se profilait à l'horizon.

  8   Vous avez poursuivi d'ailleurs dans ce sens à l'aide d'efforts assez

  9   nombreux et, finalement, lorsque la chose devait être proclamée, rien ne

 10   s'est fait par simple négligence. Mais le rôle de Babic, qui était très

 11   manifestement provocateur, consistait à promouvoir en voyageant vers Banja

 12   Luka dans le cadre de représentations officielles de la Krajina croate. Ce

 13   rôle consistait à favoriser la liaison entre la Krajina de Croatie et

 14   certains de vos hommes, les dirigeants du SDS de Banja Luka, pour préparer

 15   la proclamation de cette unification, et je crois que vous deviez savoir

 16   que la communauté internationale allait trouver cela véritablement

 17   désagréable et dangereux.

 18   Q.  Je vous remercie.

 19   Sur la base de cela, peut-on estimer que j'étais contre la guerre et que

 20   j'estimais que M. Izetbegovic souhaitait faire la guerre et que les

 21   provocations de M. Babic ne pouvaient que justifier les actions de M.

 22   Izetbegovic ?

 23   R.  Je pense, dans un certain sens, qu'il existe des déclarations assez

 24   anodines et générales qui correspondent à la position que vous venez de

 25   définir quant à ce que M. Babic s'apprêtait à faire. Mais je n'admets pas

 26   l'hypothèse de base, selon laquelle ceci, de façon générale, reflète ce que

 27   vous estimez être une option favorable à la guerre chez M. Izetbegovic, de

 28   même que chez M. Babic. Je n'irais pas aussi loin. Je pense que, dans le

Page 3473

  1   contexte de vos discussions avec M. Vukic que nous voyons transcrites par

  2   écrit ici, tout ceci concerne la question très précise de l'unification des

  3   deux Krajina.

  4   Q.  Je vous remercie.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais le versement au dossier de cette

  6   écoute téléphonique, et j'y reviendrais lorsque j'aborderais d'autres

  7   sujets plus tard.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons l'enregistrer aux fins

  9   d'identification pour le moment.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce D270, avec cote MFI,

 11   Monsieur le Président.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande à présent l'affichage du document 65

 13   ter numéro 3181.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Il s'agit d'une autre écoute téléphonique où j'interviens. La date est

 16   celle du 24 juin 1991. C'est donc une conversation entre MM. Karadzic,

 17   Zepinic et Mandic.

 18   Momcilo Mandic est l'un des responsables du ministère de l'Intérieur.

 19   C'était un candidat serbe, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Bien.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande à présent l'affichage de la page 2

 23   dans la pagination de la version serbe du document sur les écrans.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  A ce niveau de la conversation, je parle avec M. Zepinic. Je lui dis

 26   que je suis allé à Nevesinje et que des paramilitaires musulmans ont roué

 27   de coups trois jeunes gens; eux étaient une vingtaine, et ils étaient

 28   armés. Ils ont donc roué de coups ces trois jeunes gens, et j'indique qu'il

Page 3474

  1   importe que là-bas ils n'entreprennent aucune action illégale.

  2   "Qu'ils les rouent de coups et que les victimes de ces coups

  3   supportent ce qu'il leur arrive."

  4   Trois lignes plus basses dans le texte, je dis :

  5   "Parce que, moi, je sais ce qui se cache derrière tout cela."

  6   Un peu plus loin, je dis :

  7   "Derrière tout cela apparaît la nécessité de réagir."

  8   Mon interlocuteur dit :

  9   "Aux provocations ?"

 10   Je dis :

 11   "Oui, des provocations qui ne sont commises que lorsque les Serbes sont la

 12   population majoritaire, donc dans les endroits où les Serbes ont la

 13   majorité."

 14   Je dis qu'il importe de laisser les choses se développer. Je parle de

 15   Visegrad, et je dis que ce qui s'est passé à Visegrad a été une véritable

 16   honte :

 17   "Cela fera pression sur Izetbegovic."

 18   Nous sommes toujours à la page 2, et un peu plus loin dans la

 19   conversation, je dis qu'un prêtre orthodoxe de Visegrad a été tiré par la

 20   barbe. Puis nous continuons à parler de ce qui s'est passé à Visegrad en

 21   indiquant que c'est vraiment une honte.

 22   Je rappelle que Visegrad se trouve dans la province autonome à la

 23   frontière de la Serbie.

 24   Est-ce que vous avez déjà vu cette écoute téléphonique pendant les

 25   séances de récolement ?

 26   R.  Je ne l'ai pas vu avant de travailler à la rédaction de mon rapport.

 27   Mais depuis, je l'ai vu.

 28   Q.  Est-ce que l'on peut constater, sur la base de cette écoute

Page 3475

  1   téléphonique, que je plaidais auprès de mes interlocuteurs pour leur dire

  2   qu'il fallait qu'ils continuent de souffrir, qu'ils supportent toutes les

  3   souffrances qu'ils subissaient, y compris les coups, simplement pour

  4   préserver la paix ?

  5   R.  Encore une fois, je pense qu'étant donné le contexte de l'époque,

  6   j'aurais tendance à attribuer à tout cela une signification plus limitée à

  7   ces déclarations que vous faites dans cette conversation téléphonique. Tout

  8   ceci se passait à une époque de troubles assez généralisés, tout cela dans

  9   le cadre d'une agitation provoqué par M. Vucurevic dans l'est de

 10   l'Herzégovine. Il y avait des rassemblements populaires, beaucoup de

 11   discours mettant en avant de la rhétorique nationaliste de la part des

 12   Serbes, et la situation était [imperceptible] de menaces. Donc certains

 13   représentants musulmans de la région ont fait le voyage jusqu'à la

 14   présidence de Sarajevo pour dire leur inquiétude, car ils craignaient de

 15   devoir être contraints d'émigrer hors de cette zone à cette époque-là. Je

 16   suppose que ce que l'on entend ici fait partie de votre désir de rassurer

 17   les deux populations, mais il y aurai beaucoup à dire quant au fait que le

 18   parti avait pour but d'apaiser la situation, quant au fait en particulier

 19   que le parti aurait eu de bonnes intentions s'agissant de cette question de

 20   la guerre et de la paix.

 21   Q.  Je vous remercie.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

 23   document.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, s'agissant des

 25   demandes de versement relatives à des écoutes téléphoniques qui ont eu lieu

 26   à plusieurs reprises, j'aimerais obtenir des précisions de votre part.

 27   Quelle est votre façon d'aborder ces écoutes téléphoniques ? Car, pour ma

 28   part, je crois savoir que, de façon générale, vous êtes opposé au versement

Page 3476

  1   au dossier d'écoutes téléphoniques. Donc votre position consiste-t-elle à

  2   dire que vous les admettez en tant qu'éléments de preuve uniquement lorsque

  3   se sont des écoutes téléphoniques dont la demande de versement émane de

  4   vous, ou que vous ne vous opposez pas à l'admission des écoutes

  5   téléphoniques en tant qu'éléments de preuve de façon générale ?

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, à mon avis, les écoutes

  7   téléphoniques sont avant tout des preuves démontrant que les autorités

  8   musulmanes interceptaient illégalement des conversations entre

  9   représentants des autorités serbes. Pourquoi illégalement ? Parce que ceci

 10   ne pouvait se faire en l'absence d'une décision judiciaire et de l'accord

 11   de la présidence. Or, dans les deux cas, il n'y a -- or, ces deux éléments

 12   manquent, et le procureur général de Bosnie-Herzégovine était serbe. Il

 13   n'était pas membre du SDS, mais il a été nommé à ce poste lorsque je

 14   présidais le SDS. Donc ceci n'est qu'un élément démontrant que les

 15   conversations entre nous étaient mises sur écoute car nous étions

 16   considérés comme des associés qui n'étions pas loyaux au pouvoir. Voilà,

 17   donc l'objection générale que j'exprime.

 18   Je ne sais pas si vous admettrez ou pas cette écoute téléphonique. Je tiens

 19   simplement à demander de montrer ce qui était la réalité, à savoir quelle

 20   était ma position que l'on peut entendre dans les conversations

 21   téléphoniques auxquelles je participais, alors que je ne savais pas que

 22   j'étais sur écoute, ou que ces écoutes allaient devenir des éléments de

 23   preuve dans un tribunal.

 24   Toutefois, si aucune de ces écoutes n'est versée au dossier, alors

 25   nous sommes devant un problème différent.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous en resterons là pour le moment,

 27   veuillez poursuivre.

 28   Nous enregistrons ce document aux fins d'identification.

Page 3477

  1   M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce D272 enregistrée avec

  2   cote MFI, Monsieur le Président.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie. Je demande l'affichage du

  4   document 65 ter, numéro 07288.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Alors vous avez sans doute le document sous les yeux à l'écran devant

  7   vous. Il s'agit d'un procès-verbal sténographique, d'une réunion de

  8   l'assemblée du SDS de Bosnie-Herzégovine tenue le 12 juin 1991, la journée

  9   de Saint-Pierre et Saint-Paul pour que vous sachiez exactement de quoi il

 10   s'agit. Donc page 133, version anglaise sur les écrans, je vous prie.

 11   C'était la première assemblée qui s'est tenue après la création du SDS, un

 12   an avant, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Alors vous voyez, page 108 [phon], de la version serbe, 133 de la

 15   version anglaise, je cite --

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est la page 118 de la version serbe que je

 17   voudrais voir afficher sur les écrans. Deux pages plus loin de la version

 18   anglaise, page 118, voilà.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Donc nous lisons : "Vous voyez --" je cite :

 21   "Vous voyez que ce combat a lieu au parlement. Tout va bien tant que

 22   le combat se déroule au parlement et pas dans la rue --"

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde et toutes mes excuses pour

 24   cette interruption. La page en B/C/S devrait correspondre à la page en

 25   anglais, voilà, maintenant cela va mieux. Veuillez poursuivre.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai l'impression que vous parlez déjà serbe,

 27   Excellence.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]

Page 3478

  1   Q.  Donc je cite :

  2   "Vous voyez que ce combat se déroule au parlement, c'est une bonne

  3   chose qu'il se déroule au parlement et pas dans la rue. Nous ne ferons rien

  4   pour contribuer à ce que ce combat s'étende jusqu'à la rue."

  5   Un peu plus loin, je dis :

  6   "C'est la raison pour laquelle nous n'avons pas besoin de cela ou de quoi

  7   que ce soit d'autre que du renforcement de la JNA, qui malheureusement est

  8   la seule institution dans laquelle nous avons confiance."

  9   Donc vous voyez que le 12 juillet 1991, déjà nous défendions une position

 10   très ferme qui était opposée au combat de rue.

 11   R.  Pour moi, ceci est un très long discours de votre part, suivi par

 12   d'autres participants dans lequel on trouve pas mal de positions

 13   différentes exprimées sur toute sorte de questions très diverses. Ce qui

 14   est intéressant ici c'est de voir que pour l'essentiel, vous rejetez toutes

 15   les institutions fédérales hormis l'armée populaire yougoslave, ce qui

 16   permet de se poser des questions quant à l'importance que l'on peut

 17   accorder aux phrases prononcées par vous précédemment. Donc je vois que

 18   vous faites également des remarques au sujet de M. Markovic et de M. Mesic,

 19   dans la suite de votre discours. Or, il s'agissait de deux représentants du

 20   premier ministre fédéral et de deux représentants des autorités officielles

 21   de l'époque, à savoir du premier ministre de la Fédération et du président

 22   de la présidence. Donc on a du mal à comprendre de quel parlement

 23   exactement vous êtes en train de parler. Quel est ce parlement de la

 24   Yougoslavie fédérale, quel est le parlement de la Bosnie-Herzégovine ? Il

 25   ne fait aucun doute qu'il s'agit d'une déclaration indiquant votre désir de

 26   contenir les affrontements dans les limites des frontières du parlement.

 27   Mais je crois que ceci n'est qu'une nuance par rapport aux remarques que

 28   vous faites dans le reste de votre discours.

Page 3479

  1   Q.  Je vous remercie. Je parle, dans ce discours, du parlement de la

  2   Bosnie-Herzégovine. Vous l'avez compris. Nous pouvons reparler plus tard de

  3   la JNA. Ce que je me contente de faire dans ce discours, ce que démontre ce

  4   discours, c'est ce que vous avez compris vous-même, à savoir que nous

  5   souhaitions que les combats ne débordent pas hors du parlement.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

  7   document.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il n'a pas encore été admis, bien. Il

  9   est donc admis maintenant.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce D273, Monsieur le

 11   Président.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande à présent l'affichage du document 65

 14   ter, numéro 31843, 31843. Nous n'avons pas de traduction malheureusement,

 15   peut-être y en a-t-il eu une.

 16   Mme EDGERTON : [interprétation] Il devrait y avoir une traduction dans le

 17   prétoire électronique.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Encore une fois, merci, Madame. Oui, le

 19   texte s'affiche à l'écran.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Dans ce document, en date du 26 juillet, je parle avec Dragan

 23   Djokanovic, qui est président du Parti démocrate fédéraliste. C'est un

 24   petit parti politique qui n'a pas eu de représentant élu au parlement mais

 25   qui défendait une position assez ferme, favorable au maintien de la

 26   Fédération.

 27   N'est-ce pas, vous vous souvenez de Dragan Djokanovic ? Vous avez

 28   enregistré ce nom, n'est-ce pas ?

Page 3480

  1   R.  Je ne me souviens pas des positions qui étaient les siennes, pas plus

  2   que du parti dont il était membre, non.

  3   Q.  Mais avez-vous déjà entendu parler du Parti démocrate fédéraliste ?

  4   R.  Oui, j'en ai entendu parler mais je ne sais pas exactement quel était

  5   son programme ou quoi que ce soit d'autre.

  6   Q.  Merci. Donc dans cette conversation, je dis à un certain moment, je

  7   cite :

  8   "Parce qu'Alija n'a nulle part où aller, c'est un cul de sac, toutes les

  9   questions juridiques sont entre nos mains, et s'il faisait une bêtise

 10   maintenant, or il est possible qu'il la fasse, parce que les Musulmans --"

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Là, nous passons à la page suivante. Je demande

 12   l'affichage de la page suivante en anglais.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  "Parce que les Musulmans qui sont contre les intentions de guerre

 15   d'Alija… qui ne veulent pas faire la guerre, ils ont une république, ils

 16   ont la Yougoslavie, personne d'intelligent ne souhaite la guerre. Alija

 17   aimerait que la guerre éclate pour transformer tout cela, et à présent,

 18   Alija est incapable d'expliquer à la population musulmane pourquoi il veut

 19   faire la guerre, et s'il fait quelque chose d'idiot, il dira c'est la

 20   raison pour laquelle  nous devons faire la guerre."

 21   Donc j'explique ici à M. Djokanovic qui préside un petit parti politique,

 22   les raisons pour lesquelles je suis opposé à quelques actes un peu idiots

 23   que la population a commis, et j'indique que de tels actes vont dans le

 24   sens des désirs d'Alija Izetbegovic qui souhaite que la guerre éclate.

 25   Puis j'ai besoin maintenant de l'affichage de la page suivante.

 26   Je poursuis en disant qu'il a besoin, qu'il cherche un alibi pour faire

 27   éclater la guerre et que nous ne devrions pas lui apporter notre aide.

 28   Alors est-ce que vous vous rappelez qu'à ce moment-là, le 26 juillet, les

Page 3481

  1   préparatifs étaient en cours pour la signature d'un accord historique avec

  2   Zulfikarpasic et Filipovic, et que ces préparatifs étaient très avancés

  3   avec ces Musulmans auxquels je fais référence dans cette conversation ?

  4   R.  Oui, je pense que ceci dresse bien le contexte dans lequel se situe

  5   cette conversation. Il était à l'époque où, je crois, se préparait

  6   l'initiative de Belgrade. C'est comme cela qu'on l'appelait, je crois, ou

  7   encore peut-être, l'accord majeur ou l'accord historique entre les Serbes

  8   et les Musulmans. En tout cas, tous ces efforts étaient en cours et vous-

  9   même ainsi que M. Milosevic aviez décidé de faire de votre mieux pour saper

 10   à la base les habiletés d'Izetbegovic et le contraindre ou, en tout cas,

 11   influer d'une certaine façon sur lui pour que cet accord finisse par se

 12   conclure. C'était surtout l'idée de Milosevic d'organiser toute une série

 13   de réunions ou de rassemblements en Bosnie. Je crois que le premier s'est

 14   tenu le 8 ou le 10 juillet, et il y en avait un autre qui étai prévu pour

 15   le 2 août. Ces rassemblements -- ces manifestations étaient désignés comme

 16   des rassemblements et des manifestations pour la paix. Mais ce qui est

 17   moins claire à mes yeux c'est où cette réunion devait se faire, où ce

 18   rassemblement devait se faire. Moi, je connais celui qui a eu lieu à

 19   Sarajevo mais, en tout cas, pour aller dans le sens de cet accord, vous-

 20   même et M. Milosevic souhaitiez désespérément la conclusion de cet accord

 21   pour la Bosnie -- pour l'ensemble de la Bosnie, afin que celle-ci puisse

 22   dans son intégralité demeurer à l'intérieur de la Yougoslavie au moment où

 23   d'autres républiques se séparaient de la Yougoslavie. Donc ceci fait partie

 24   de l'effort déployé par vous pour mettre en œuvre les ambitions du parti

 25   qui était, à ce moment-là, tout à fait pacifique, et vous, vous alliez --

 26   vous vous associez l'un à l'autre pour vous opposer à quiconque était

 27   favorable à la guerre.

 28   Q.  Je vous remercie. Mais laissons M. Milosevic de côté, qui -- M.

Page 3482

  1   Milosevic, qui allait dans notre sens, mais est-ce que vous pensez que,

  2   compte tenu de l'identité de ceux qui étaient à l'origine de ce projet

  3   d'accord, tous les honneurs de cet accord devraient allés à Zulfikarpasic

  4   et à Filipovic ?

  5   R.  M. Zulfikarpasic et le Pr Filipovic ont été les initiateurs de cette

  6   proposition, qu'ils vous ont soumise dans votre bureau, si j'ai bien

  7   compris.

  8   Q.  Vous vous souvenez qu'ils ont déclaré que moi-même ainsi que le Pr

  9   Koljevic avons accepté cette proposition avec grand plaisir. C'est ce qui

 10   est écrit dans le livre relatif à Filipovic -- le livre dont Filipovic est

 11   l'auteur, n'est-ce pas ?

 12   R.  Je ne me souviens pas de cela, mais je n'en doute pas du tout. Ce que

 13   je veux dire, c'est que ces deux hommes étaient également membres d'un

 14   parti mineur qui n'avait pas de grande importance, à l'issue des élections,

 15   et qu'à l'époque, ils faisaient toutes sortes de choses pour essayer de

 16   gagner le soutien de la population ou, en tout cas, faire en sorte que le

 17   soutien dont bénéficiait le SDA se réduise, et donc qu'ils critiquaient

 18   d'une certaine façon s'efforçaient de marginaliser Izetbegovic, et même

 19   s'ils coopéraient avec lui dans certains domaines, tout ceci illustre assez

 20   bien leur tentative d'attirer l'attention principalement sur leur parti, et

 21   ils étaient très désireux de voir cet arrangement se conclure avec vous-

 22   même et M. Milosevic lorsqu'ils sont venus à Belgrade.

 23   Q.  Merci, Monsieur Donia. Conviendrez-vous que cet accord conclut à

 24   Sarajevo l'a été et que le travail a donc été fait, mais que Belgrade s'est

 25   associée finalement à cet accord parce que Zulfikarpasic souhaitait une

 26   base plus large; oui ou non ?

 27   Est-ce que les principaux protagonistes de l'accord étaient le SDS et le

 28   MBO à Sarajevo ?

Page 3483

  1   R.  Ce n'est pas ce que j'ai compris. Lorsque l'idée a été évoquée pour la

  2   première fois, lorsqu'ils ont entré dans votre bureau et que vous les avez

  3   rencontrés, je crois, au siège du SDS, vous êtes allé dans la pièce

  4   voisine, vous avez appelé M. Milosevic et vous avez fait en sorte que

  5   Zulfikarpasic, en tout cas, puisse le rencontrer le lendemain. Ils ont eu

  6   donc le lendemain une conversation dans laquelle il a proposé pas mal de

  7   choses destinées à garantir la signature de cet accord --

  8   Q.  [aucune interprétation]

  9   R.  -- Mais, écoutez, j'essaie de répondre à vos questions. J'essaie

 10   d'écouter attentivement vos questions et j'espère que vous ferez preuve de

 11   la même intention en écoutant mes réponses.

 12   Par la suite, vous avez été en contact avec M. Milosevic, mais en fait il

 13   vous a délégué à vous et à d'autres responsables de Bosnie le gros de la

 14   responsabilité eu égard à la conclusion de cet accord, c'est-à-dire sa

 15   rédaction, et à son libellé, après quoi il n'a fait que revoir les termes

 16   de l'accord.

 17   Q.  Monsieur Donia, pour ma part, je vous vois, je vous écoute, mais je lis

 18   en même temps le texte de votre réponse.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de cette

 20   écoute téléphonique dans les mêmes conditions que la précédente.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] D'accord. Merci.

 22    M. LE JUGE KWON : [interprétation] L'écoute téléphonique sera enregistrée

 23   aux fins d'identification.

 24   M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce D274 enregistrée sous

 25   cote MFI, Monsieur le Président.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je demande l'affichage du document 65

 27   ter 31849 à présent.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]

Page 3484

  1   Q.  Nous sommes déjà à la date du 1er août, et avant de vous poser ma

  2   question principale, je vous demande si vous vous rappelez que

  3   Zulfikarpasic et Filipovic se rappellent que nous sommes allés ensemble

  4   chez Milosevic et que Milosevic a demandé que nous poursuivions le travail

  5   sur cet accord et il a même dit qu'il avait perdu la confiance des Serbes

  6   et qu'il était donc préférable que ce soit le MBO qui se charge de ce

  7   travail.

  8   R.  C'est à peu près ce que j'ai compris, effectivement. Je ne répondrais

  9   peut-être pas à ce que vous venez de dire mots pour mots, mais, oui, sur

 10   l'ensemble c'est à peu près ainsi que l'on peut définir l'accord que vous

 11   avez conclu avec lui.

 12   Q.  Je vous remercie.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage de la page 4 de la

 14   version anglaise du texte, qui correspond à la page 4 de la version serbe,

 15   dont je demande également l'affichage.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Donc c'est une conversation du 1er août, c'est moi qui parle avec M.

 18   Krajisnik. Il me demande si je suis allé à la conférence de la commission.

 19   Je réponds, "Oui," et je dis que nous avons transmis le texte qui est prêt

 20   pour signature, et que dès lors que les populations se seront rassemblées

 21   et auront fait ce qu'il faut pour voir le texte, et lui me dit : "Alija."

 22   Hein.

 23   Je réponds que je n'ai pas discuté avec lui de cela, et un peu plus

 24   loin, je dis : Mais voilà, le journal "Politika," a publié qu'il avait dit

 25   qu'ils allaient se battre si la guerre éclatait, et que les Musulmans

 26   allaient se battre du côté des Croates.

 27   Krajisnik dit : Ah, ah; et je rétorque : Je crois que c'est vraiment

 28   quelque chose de terrible.

Page 3485

  1   Un peu plus loin dans la conversation, je dis :

  2   "Il faut maintenant que nous disions aux Musulmans qu'il importe de

  3   vérifier si ce que dit Alija est exact."

  4   Alors est-ce que vous voyez que dans cette conversation il est indiqué

  5   qu'Alija a déclaré que si la guerre éclatait les Musulmans allaient se

  6   battre au côté des Croates ?

  7   R.  Si je suis ceci correctement, je crois que ceci a été publié dans

  8   "Politika," n'est-ce pas, et dans ce cas-là, je ne sais pas si cela est un

  9   gage de fiabilité : "Nin" était une publication de qualité à l'époque mais

 10   "Politika," était devenu une publication qui était à la botte du régime de

 11   Milosevic.

 12   Q.  Mais il ne fait pas l'ombre d'un seul doute que j'ai lu la chose et

 13   j'ai commenté j'ai dit que c'était terrible qu'il fallait qu'on s'adresse

 14   aux Musulmans pour leur demander si ce qu'Alija avait dit était bien vrai.

 15   Vous êtes d'accord avec moi ?

 16   R.  Oui, effectivement.

 17   Q.  Merci.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais le versement au dossier de ce

 19   document.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons lui donner une cote

 21   provisoire.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D275, cote provisoire

 23   MFI.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous montrer le 65 ter 30136

 25   maintenant. 30136, 65 ter. Ça, c'est Karadzic et Krajisnik. C'est daté du 7

 26   août. S'agissant des autres aspects, on en parlera une autre fois.

 27   Maintenant je voudrais que l'on se penche sur la question liée à la guerre

 28   et à la paix, page 2.

Page 3486

  1   J'attends. Oui, le voilà.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Karadzic et Krajisnik, 7 août. Page 2 maintenant. Je suis en train de

  4   parler et je dis qu'il est toujours question de l'accord. Je précise vers

  5   le milieu de la page :

  6   "Je pense que nous éperviers, nos faucons vont regretter qu'ils y soient

  7   allés. Il y a des gens de chez nous --"

  8   Page 2 de la version anglaise, page 2 version serbe. Oui, page 2 de la

  9   version serbe.

 10   R.  Je suis désolé, je ne vois pas le passage que vous venez de -- ah si,

 11   voilà.

 12   Q.  Sous Zulfikarpasic, ce qui est entre guillemets.

 13   "Il y en a des nôtres qui disent : 'Qu'ils y aillent'."

 14   Puis ils injurient leurs mères, et puis :

 15   "Qu'on en finisse une bonne fois pour toute."

 16   Je suis en train de citer nos faucons.

 17   Krajisnik dit :

 18   "Oui, une bonne fois pour toute."

 19   "Ça fait que les nôtres seront déçus aussi si nous autres on se met

 20   d'accord au final avec les Musulmans."

 21   Krajisnik dit :

 22   "Tu sais ce qu'ils disent nos faucons ? Ils ne vont pas être d'accord pour

 23   sûr."

 24   Moi, je dis :

 25   "Ils ne seront pas d'accord. Non, ils ne seront pas d'accord."

 26   Puis, ensuite, page 4 version anglaise et page 3 version serbe. Page 3

 27   version anglaise et page 4.

 28   "On ne va plus se battre avec toi. Si vous partez, on va votre contre, mais

Page 3487

  1   on ne se battra plus."

  2   Alors il dit que, nous, on est en train de se concerter avec Adil et que

  3   nous sommes en train de vaquer à nos affaires, qu'on avait d'autres chats à

  4   fouetter. Puis on parle de notre position vis-à-vis de la Yougoslavie, qui

  5   est celle de votre contre, qu'on n'allait pas se battre et que ceux qui

  6   voulaient s'en aller, quitter la Yougoslavie, n'avaient qu'à la quitter.

  7   Est-ce que vous le voyez cela ?

  8   R.  Non, désolé.

  9   Q.  En version serbe, c'est la sixième ligne à partir du haut. Et en

 10   anglais, c'est la première à partir du haut.

 11   R.  Ah, oui, je vois ce passage, effectivement.

 12   Q.  Merci. Est-ce que ceci confirme la position que nous avions avancée, à

 13   savoir qu'il ne fallait pas faire la guerre mais qu'il fallait voter ?

 14   R.  Sans examiner ceci plus en profondeur, je dois dire que je ne peux pas

 15   vraiment me prononcer. Je ne comprends pas bien les différents échanges. Je

 16   ne sais pas s'il s'agit encore d'une de ces déclarations qui avait été

 17   diffusée pour la bonne cause ou si cela faisait référence à une situation

 18   bien précise dans une partie de la Bosnie, ou si cela relevait de certains

 19   efforts visant à recentraliser le SDS. Je suis d'accord avec ce qui est

 20   mentionné ici, mais en même temps je ne suis pas en mesure de replacer ceci

 21   dans un contexte plus important, quelqu'il soit.

 22   Q.  C'est dans le contexte de ce qui est dit précédemment, à savoir que nos

 23   faucons - c'est dans la phrase précédente du même document - nos faucons,

 24   parce que les faucons musulmans, eux aussi, on le dit bien à la page

 25   d'avant. C'est la page 2 de la version anglaise, et on dit que le SDA ne

 26   dirait rien. Nikola m'a fait savoir que Filipovic, à la télévision de

 27   Belgrade, était plus convainquant encore. Il a présenté une centaine

 28   d'arguments en faveur de l'accord. Puis je précise que je les comprenais

Page 3488

  1   bien, parce que nos faucons aussi allaient être contre l'accord, et je

  2   termine en disant que notre position était celle de voter contre mais de ne

  3   pas aller nous battre avec qui que ce soit.

  4   Est-ce que vous voyez maintenant le contexte dans lequel ceci est dit ?

  5   R.  Oui, je vois un peu plus le contexte. Je vois en haut de la page en

  6   anglais "Tunjo," qui est une référence à Filipovic. Il est mentionné qu'il

  7   aurait 40 % aux élections suivantes, et il dit des votes musulmans, et il

  8   utilise cet accord potentiel de façon à galvaniser son parti dans toute

  9   campagne électorale future. Donc je pense que cela, effectivement, relève

 10   d'un des efforts dont vous faisiez l'effort, de façon à ce que toute

 11   personne qui était contre cet accord était un "va-t-en-guerre" ou considéré

 12   comme tel.

 13   Q.  Merci.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut demander le versement au

 15   dossier de ce document ?

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Même chose que pour le précédent

 17   document.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P276, cote MFI.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Je vous rappelle, Monsieur le Professeur, que j'étais en train de

 21   m'occuper que des éléments qui sont liés à l'état de conscience concernant

 22   la paix et la guerre. Les autres aspects, on se penchera dessus

 23   ultérieurement.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Maintenant, je voudrais qu'on nous montre une

 25   autre pièce, qui est le 30161 du 65 ter. Il s'agit d'une conversation

 26   téléphonique entre un dénommé Nenad Stevandic, un jeune étudiant en

 27   médecine à l'époque, et Karadzic. C'est daté du 18 août. Tout ceci se passe

 28   encore au mois d'août. En version serbe, c'est la page 2 et c'est la page 1

Page 3489

  1   de la version anglaise.

  2   Alors, il est dit :

  3   "Dites-leur donc qu'ils ne faut pas qu'ils fassent de bêtise."

  4   Page 1 de la version anglaise, disais-je.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est le bas de la page.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, en effet. Ça commence par "Tell them".

  7   Alors :

  8   "Dites-leur donc de ne faire aucune espèce de bêtise, parce que ces

  9   bêtises, après, font qu'on nous accuse de ces mêmes bêtises, et dites donc

 10   aussi -- il faut leur transmettre qu'Alija n'a aucun argument contre les

 11   Serbes. Il ne peut pas dire aux Musulmans "Nous ne voulons pas nous mettre

 12   d'accord avec les Serbes, mais il ne peut pas dire non plus pourquoi ils ne

 13   veulent pas. Donc il ne faut pas lui donner d'argument."

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez attendre un

 15   moment, s'il vous plaît ? Nous devons voir la page suivante.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, c'est la page suivante de la version

 17   anglaise, en effet.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Poursuivez.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Alors il dit aux Musulmans : "Nous ne voulons pas nous mettre

 21   d'accord avec les Serbes," mais il ne peut pas leur dire non plus pourquoi

 22   ils ne veulent pas se mettre d'accord avec les Serbes. Il faut donc ne pas

 23   lui laisser d'argument en main.

 24   Donc, vous voyez que ce jeune homme, je lui demande d'influer sur la

 25   nécessité d'empêcher les bêtises et de ne pas faire en sorte que vienne à

 26   être renforcé le segment musulman qui s'opposerait à l'accord ?

 27   R.  Non. Je dois dire que j'interprète ceci différemment. Il me semble que

 28   vous avez ici du mal à gérer les dirigeants de la Krajina de Bosnie, c'est-

Page 3490

  1   à-dire les ZOBK, les communautés ou les Associations de Municipalités de la

  2   Krajina de Bosnie, qui avaient été mis en exergue suite à la proclamation

  3   des deux Krajina, à la fin du mois de juin, avec une décision qui a été

  4   prononcée, lors d'un meeting que vous avez mentionné dans votre discours,

  5   lors de la journée de Saint-Pierre et Saint-Paul. Vous avez parlé de la

  6   régionalisation, vous avez évoqué une série d'efforts, de menaces

  7   également, si l'on peut s'exprimer ainsi, par les dirigeants de la Krajina

  8   de Bosnie, pour déclarer une instance politique séparée qui revêtirait une

  9   forme quelconque.

 10   Donc vous essayez d'utiliser cet étudiant en médecine -- je ne sais pas

 11   s'il avait un poste politique concret, mais vous avez essayé de l'utiliser

 12   de façon à ce que les populations de Banja Luka se taisent, jusqu'à ce que

 13   l'accord soit conclu et signé, et je crois que vous pensiez que cet accord

 14   serait signé très rapidement.

 15   Q.  Ce jeune homme, pour votre information, c'était un membre du comité du

 16   Parti démocratique serbe à Banja Luka, et il l'était dans la Krajina aussi.

 17   Il était contre toute déchirure, toute scission, ou toute chose qui

 18   contribuerait à l'augmentation des tensions. Vous avez bien senti la chose.

 19   Alors, moi, je lui demande d'empêcher les têtes brûlées de faire des

 20   erreurs.

 21   Alors, allons de l'avant, page 2 de la version anglaise, et page -- version

 22   serbe, c'est la page 2 aussi.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde, ne veuillez pas déposer

 24   sans que le témoin puisse répondre.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Monsieur le Témoin, est-ce que vous étiez d'accord ?

 27   R.  Oui, je suis d'accord. C'est ce que j'ai compris également.

 28   Q.  Merci. Est-ce qu'on peut nous montrer la page 2 de la version anglaise,

Page 3491

  1   et on voit Karadzic dire :

  2   "Oui. Par conséquent, pourquoi irait-on nous l'aider maintenant ? Il n'a

  3   qu'à se débrouiller, il n'a qu'à couler, et Zulfikarpasic est en train de

  4   le faire couler, les autres aussi. Il doit expliquer aux Musulmans pourquoi

  5   il veut la guerre avec les Serbes. Il faut qu'il explique si eux font une

  6   bêtise là-bas, il pourra dire, voilà pourquoi nous autres, on veut la

  7   guerre contre les Serbes."

  8   Ça va dans la même filière, c'est dans la même -- le même ordre

  9   d'idées que ce qu'on a dit jusqu'à présent ?

 10   R.  Oui, tout est du même acabit, c'est-à-dire que les efforts visent à

 11   miner Izetbegovic et sa position, et essayer de considérer que ce jeune

 12   homme est un combattant en guerre, qui utilise un prétexte pour refuser cet

 13   accord, et l'objectif est également de calmer les Serbes au sein des

 14   instances dirigeantes de la Krajina de Bosnie, qui voulait, en fait, une

 15   autonomie qui leur serait propre.

 16   Q.  Merci. Mais est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire que je ne

 17   veux pas miner Izetbegovic, moi ? Mais je veux miner un éventuel alibi de

 18   sa part, ou pour ce qui le concerne, d'aller en guerre; je ne veux pas lui

 19   fournir de motif d'explication aux Musulmans pour ce qui est des raisons

 20   qui l'animeraient pour aller en guerre contre les Serbes.

 21   R.  Non. Je pense que ceci rentre dans le cadre des efforts visant à miner

 22   la position d'Izetbegovic, et d'une certaine manière, de le forcer à

 23   accepter cet accord en agissant contre lui, tant par le truchement des

 24   Musulmans que des Serbes qui seraient dans cet ordre d'idées.

 25   Q.  Merci.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, justement, peut-on demander le versement

 27   de ce document au dossier, comme de coutume ?

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

Page 3492

  1   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cote MFI D277.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais maintenant le 30242 de la liste 65

  3   ter.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Alors il s'agit d'une conversation entre Karadzic et Vojo Kupresanin,

  6   datée du 18 septembre 1991, comme on peut le voir en page 1, et on se -- on

  7   va passer à la page 3 de la version serbe, et à la page 2 de la version

  8   anglaise.

  9   Ici, Radovan Karadzic s'emploie en faveur de la nécessité de répondre aux -

 10   - de la nécessité de faire en sorte que les conscrits de la JNA répondent

 11   aux appels sous les drapeaux, et vous verrez pourquoi je le demande. Il

 12   s'avère maintenant que d'urgence, il faut que tous aillent dans les

 13   communautés locales, afin qu'il y ait une réponse passive, parce qu'il en

 14   dépendra du fait de savoir s'il y aura une paix, et si l'on -- ou si l'on

 15   poursuivra dans le sens de la guerre.

 16   Donc qu'ils remplissent les casernes, il faut qu'ils répondent à

 17   l'appel sous les drapeaux. Mais un peu plus bas, il dit, oui, oui.

 18   Il faut que les casernes soient remplies de la façon la plus massive. Il

 19   faut que les effectifs de l'armée soient au complet pour montrer à

 20   l'Europe, et qu'on leur prouve que la seule issue, c'est la paix, et qu'il

 21   ne faut pas qu'ils aillent en guerre.

 22   Alors vous voyez que nous nous employons en faveur de la nécessité d'une

 23   mobilisation qui servirait d'éléments -- pour éléments dissuasifs vis-à-vis

 24   de la guerre.

 25   R.  Je pense que ceci remonte à un élément fondamental de 1990, durant

 26   lequel le président Milosevic avait dit que les Serbes ne devaient pas

 27   organiser leur propre armée, mais qu'au contraire, ils devraient soutenir

 28   et rentrer dans les rangs de la JNA, dans le cadre de différents appels de

Page 3493

  1   mobilisation, afin que le régime de Milosevic et que ses alliés puissent

  2   conserver les services de la JNA qui était, et de loin, la force militaire

  3   la plus importante de la région.

  4   Je pense que ceci a été une décision fatidique ou fatale, parce que la JNA

  5   s'est trouvée dans une position où elle devait soutenir les différents

  6   mouvements politiques serbes, hors de la Serbie à proprement parler. Cela

  7   me semble être tout à fait conforme à votre position, c'est-à-dire que vous

  8   vouliez vous assurer que les dirigeants de la Krajina de Bosnie ne

  9   s'organisent pas en tant qu'armée serbe séparée, et dans cette situation,

 10   vous voulez plus précisément éviter qu'ils avancent indépendamment vers la

 11   Croatie, pour soutenir un soulèvement serbe ou un combat serbe contre les

 12   forces de sécurité croates. Ceci est devenu un problème très important, à

 13   l'époque, et je crois que c'était très important, tant pour vous que pour

 14   Milosevic, de garder le contrôle du parti dans cette zone --

 15   Q.  Merci --

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non, Monsieur Karadzic. Vous avez

 17   interrompu le témoin. Veuillez continuer, Monsieur le Témoin.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que cette interception de la

 19   conversation reflète très bien la position dans laquelle vous vous trouviez

 20   à l'époque, et c'est la raison pour laquelle je suis d'accord avec ce que

 21   vous avez dit au sujet de la paix. Je ne sais pas si cela rime à quelque

 22   chose que de procéder à une mobilisation et à renforcer les rangs d'une

 23   armée, par conséquent, augmenter l'état de préparation de notre armée alors

 24   qu'en même temps, nous sommes engagés vers une voie pacifique. Mais ce sont

 25   vos propos et encore une fois, je n'accepte pas ceci comme une déclaration

 26   de vos intentions pacifiques ad vitam eternam, mais j'accepte qu'à ce

 27   moment-là, vous ne voulez pas que ces personnes se rendent indépendamment

 28   en direction de la Croatie et qu'elles rajoutent des difficultés à la

Page 3494

  1   collaboration que vous aviez avec la JNA à ce moment-là.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Merci. Mais vous allez être d'accord pour dire que, vers la mi-

  4   septembre, la JNA c'était la force armée légale et légitime et que les

  5   efforts que nous avons déployés aux fins de faire en sorte que les gens

  6   répondent aux appels sous les drapeaux, c'était aussi une façon de

  7   contrecarrer la création de formations paramilitaires. Vous venez de nous

  8   le confirmer.

  9   Donc est-ce que la JNA c'était une force légitime, une force armée

 10   légitime en Bosnie, à ce moment-là ?

 11   R.  Oui, c'était une force légitime, mais elle s'engageait dans certaines

 12   activités à l'époque, et certaines personnes en Bosnie considéraient qu'il

 13   ne s'agissait pas d'activités légitimes. Mais en tant que force armée dans

 14   son ensemble, effectivement c'était l'armée populaire yougoslave et, par

 15   conséquent, une force militaire légitime dans toutes les républiques.

 16   Q.  Merci.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant demander le

 18   versement au dossier ?

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la cote provisoire MFI D278.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous montrer le 30335, du 65

 22   ter maintenant ?

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Il s'agit d'une conversation interceptée de mon entretien avec un

 25   écrivain, Gojko Djogo. C'est quelque chose de connu et de compliqué. Nous

 26   allons maintenant nous pencher sur la page qui se rapporte à la guerre, et

 27   j'aimerais qu'on nous montre la version serbe et la version anglaise, page

 28   2. Pour ne pas que je lise, je demande à tous les intervenants de prêter

Page 3495

  1   attention à ceci, alors c'est Alija Izetbegovic qui a pris la parole à deux

  2   ou trois reprises au parlement. Puis on verra ce que j'ai dit moi-même.

  3   J'ai dit que nous les laissions faire, et cetera. J'informe mon ami, Djogo,

  4   du fait ou de ce que nous faisions à l'assemblée. Nous nous efforcions donc

  5   d'éviter la guerre, et nous précisions que ce sont eux qui sortiraient les

  6   marrons du feu en temps de guerre, et s'ils engagent une guerre, il faudra

  7   leur coller une raclée. J'ai dit qu'ils risquaient de disparaître de la

  8   surface de la terre, et que la seule chance pour eux, c'était ce que nous

  9   avions proposé à leur intention, et c'était déjà beaucoup. On leur avait

 10   proposé plus que les Serbes n'oseraient ou ne devaient proposer. Vers le

 11   bas, le bas de la page, on dit, ils n'ont qu'à aller au parlement de la

 12   Yougoslavie pour essayer de réaliser cela là-bas. Il n'y avait aucune

 13   chance pour eux d'aboutir ici.

 14   Alors vous souvenez-vous du fait que nous avions déterminé que la

 15   présidence fédérale avait adopté une procédure visant à une séparation ou

 16   une sécession vis-à-vis de la Yougoslavie, qui se trouverait être conforme

 17   à la constitution; cela a été fait à l'assemblée de la Yougoslavie ?

 18   R.  Docteur Karadzic, comment pouvez-vous citer cette conversation en

 19   parlant d'intention pacifique sans replacer cette conversation dans son

 20   contexte ? Vous avez décrit cette destruction apocalyptique du peuple

 21   musulman, vous ne pourrez pas rester indifférent au fait que vous avez tout

 22   d'abord, proféré des commentaires très positifs en vue de la paix, et

 23   ensuite vous avez conçu ou imaginé ces scénarios destructeurs qui

 24   semblaient faire fi des premiers commentaires que vous avez proférés dans

 25   cette conversation.

 26   Q.  Nous allons faire les qualifications ou avancer des qualificatifs

 27   ultérieurement. Mais ça c'est une conversation interceptée qui est souvent

 28   mentionnée à mes torts, à mes dépends, je veux qu'on le montre.

Page 3496

  1   Alors, eux, ils se préparent pour la guerre. Ils vont essayer de

  2   faire la guerre ici. Nous sommes toujours en train de parler de la question

  3   relative à la paix et à la guerre. Donc nous sommes maintenant vers la

  4   moitié de la deuxième page. Nous les laissons faire ce qu'ils veulent.

  5   Djogo dit :

  6   "Messieurs, vous faites maintenant ce que vous voulez," et moi, je

  7   dis : "On les laisse faire," et je l'ai convié à aller au parlement de la

  8   Yougoslavie, pour demander une sécession constitutionnelle vis-à-vis de la

  9   Yougoslavie.

 10   Il est vrai de dire que j'avais prévu qu'en cas de guerre, pour eux,

 11   ce serait la chose la plus dure, et ça a été le plus dur pour eux, parce

 12   qu'ils se sont battus contre les Serbes, contre les Croates et contre

 13   Abdic. Pourquoi voulez-vous que j'aie souhaité la chose. Moi, je mets en

 14   garde, j'ai dit que cela se passerait ainsi. Est-ce que je veux la guerre,

 15   non. Moi, je veux les dissuader de cette éventualité d'avoir une guerre.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que vous répondiez, Monsieur

 17   le Témoin, je suppose que vous vous souvenez du contexte de cette

 18   conversation interceptée. Parce que nous n'avons pas en fait pu visionner

 19   toutes les parties de cette conversation.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Alors dans ce cas-là,

 22   vous pouvez répondre à la question.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Désolé.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non, allez-y continuer.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous parlez comme quelqu'un qui contrôle

 26   totalement la situation. Vous dites à votre interlocuteur que vous allez

 27   permettre aux Musulmans d'emprunter cette poste de sortie, et s'ils

 28   n'empruntent pas cette porte de sortie, certaines choses vont se produire,

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  1   à leur encontre, si l'on peut dire. Et en fait, il s'agit d'une destruction

  2   quasi-totale, la question de la guerre ou de la paix, vous dites en fait

  3   que c'est entre leurs mains, en fonction de leur comportement. Dans la

  4   première partie de ce paragraphe, ceci est très clair. Vous dites que vous

  5   allez dans votre grande largesse leur permettre de faire ce que vous pensez

  6   qu'ils devraient faire; sinon, les conséquences seront dramatiques.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Ecoutez, soyons précis. Est-ce que je suis en train de dire qu'eux se

  9   préparent pour la guerre, et que nous sommes en train de proposer une

 10   solution politique; oui ou non ? Ce sont eux qui se préparent pour la

 11   guerre. Ce sont eux qui allaient essayer de faire une guerre. Vous, vous

 12   voyez cela en page 2 de la version anglaise.

 13   R.  Vous dites : "Laissons-les faire, mais ils se préparent pour la

 14   guerre." Oui, effectivement.

 15   Q.  Avant cela, Djogo dit qu'ils fassent ce qu'ils veulent, alors, moi, je

 16   dis : Moi, je les laisse faire mais ils ne veulent pas aller au parlement.

 17   Ils veulent se préparer pour la guerre. Moi, je ne contrôle rien du tout

 18   ici. Je dis qu'il y aura une guerre s'ils se préparent pour la guerre, et

 19   si cela se produit ce serait une catastrophe. Alors est-ce que vous savez

 20   cette chose : Le premier jour, vous semblez ne pas le savoir, à savoir que

 21   la présidence de Yougoslavie avait adopté une méthodologie pour faire en

 22   sorte qu'il y ait une séparation ou une sécession légale et

 23   constitutionnelle à l'égard de la Yougoslavie ? Vous avez cela dans les

 24   faits légaux admis.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Tout d'abord, Monsieur le Témoin, est-ce

 26   que vous êtes d'accord avec l'interprétation de ce propos "we let them,"

 27   "laissons-les faire" ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, mon interprétation est quelque peu

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  1   différente. Mais c'était ses propos et je ne suis pas sûr de -- où comment

  2   dire -- je ne peux pas me mettre à sa place à l'époque pour savoir ce qu'il

  3   entendait par là.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, Monsieur le Témoin, veuillez

  5   répondre à la question qui vous a été posée -- ou aux questions qui vous

  6   ont été posées.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors la question est de savoir si une

  8   méthodologie avait été adoptée par la présidence de la Yougoslavie. Je ne

  9   sais pas. Si je me souviens bien, il y a quelques jours vous avez dit

 10   qu'une proposition avait été soumise mais n'avait pas été adoptée.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, nous allons faire

 12   maintenant la pause, une pause d'une demi-heure.

 13   --- L'audience est suspendue à 12 heures 04.

 14   --- L'audience est reprise à 12 heures 33.

 15   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 16   M. KARADZIC : [interprétation] Merci.

 17   Q.  Nous en sommes encore à ce document, et je voudrais maintenant préciser

 18   que c'est une conversation interceptée que vous avez dû en prendre

 19   connaissance, Monsieur Donia, l'acte d'accusation s'investit beaucoup et

 20   investit beaucoup d'espoir dans ce document.

 21   C'est Djogo et moi qui parlons, et nous prévoyons des scénarios très

 22   graves, variés.

 23   J'aimerais qu'on nous montre la page 8 de la version anglaise maintenant.

 24   Page 8, version anglaise, et le 228 en version serbe.

 25   Ici je suis en train de dire Faletici, voilà, Faletici, eux les Musulmans

 26   ont tiré en direction d'un entrepôt non loin de Sarajevo. Djogo dit : Où ça

 27   ? Alors, moi, je dis à Faletici, c'est un peu sur les hauteurs de la

 28   vieille ville au-dessus de Vasin Hran [phon]; cependant, l'entrepôt a été

Page 3499

  1   complètement miné et ils ne peuvent passer que à présent un sentier très

  2   étroit. Il est dit qu'il est clair, même le MUP travaille contre l'armée,

  3   intervient contre eux. Ils savent exactement qui, au sein du MUP,

  4   intervient contre l'armée, ils suivent les déplacements de l'armée et ils

  5   font des évaluations et ainsi de suite. Alors, oui, ils ont préparé cela.

  6   Ils ont des armes. C'est le MUP qui leur a distribué des armes. Nous, on

  7   l'a dit à Izetbegovic, nous, ça ne nous dérange pas que les Musulmans aient

  8   des armes, mais vous serez donc fou que de l'utiliser contre les Serbes,

  9   pour les Serbes ce sera difficile mais vous allez voir comment on va

 10   riposter. Vous n'avez aucune chance. Détachez-vous des Oustachi, conduisez

 11   votre politique et prenez soin de vos problèmes, et ainsi de suite.

 12   Donc ça a été dit en public je l'ai dit publiquement, nous ça ne nous

 13   dérange pas si les Musulmans se procurent des armes pour pouvoir se

 14   défendre. Est-ce que vous vous souvenez de cette déclaration que j'ai faite

 15   au niveau des médias ?

 16   R.  Je me souviens de ce passage, effectivement, c'est après avoir parcouru

 17   ces documents.

 18   Q.  Est-ce que vous vous souvenez du fait que j'ai dit en public pour les

 19   médias que ça nous ne dérangeait pas que des Musulmans se procurent des

 20   armes pour pouvoir se défendre parce que nous n'avons pas l'intention de

 21   les attaquer ? Ce qui nous dérangerait c'est que ces armes servent à une

 22   attaque de leur part contre nous.

 23   R.  Non.

 24   Q.  Merci. Alors qu'on nous montre la page 9 en version anglaise. Où

 25   j'informe mon interlocuteur du fait que nous allions le lendemain avoir des

 26   négociations." Page 9.

 27   "Nous allons essayer de présenter une autre variante qui se

 28   trouverait être acceptable pour tout un chacun. Nous n'avons rien contre,

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  1   et quand bien même ils pourraient prendre des régions pour les dissocier,

  2   mais cela les mènera-t-il à quoi ? Ils peuvent quoi ? Ils peuvent créer une

  3   autonomie quelque peu plus grande vis-à-vis de l'Etat fédéral.

  4   "Mais nous n'allons les obliger à rien faire. Mais ils n'ont aucun moyen de

  5   procéder à une sécession. Et je crois que l'armée le sait, tout le monde le

  6   sait, j'imagine. Ça va être un massacre très sanglant, l'armée ne va pas se

  7   servir cette fois-ci que de deux avions."

  8   Je suis à la page 9. Penchons-nous maintenant sur la page 12 de la version

  9   anglaise. Est-ce qu'on nous a montré la page 12 ?

 10   L'INTERPRÈTE : Les interprètes précisent que la page en serbo-croate n'est

 11   pas affichée du tout.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Alors --

 14   "Ils ont, parce que tu ne peux pas dire qu'il n'y a pas des gens

 15   ordinaires. Il y a des gens ordinaires, et je crois qu'il faut leur tendre

 16   les deux bras, mais pour ce qui est de la direction, il n'y a aucune

 17   hésitation possible. Ils doivent savoir que s'ils veulent faire une

 18   sécession, il va falloir qu'ils engagent une guerre contre nous et il faut

 19   qu'ils nous battent, et alors là il y aura une riposte, et ça, il faut

 20   point en parler."

 21   Alors vous souvenez-vous du fait que nous autres en Bosnie nous avions ce

 22   qu'il nous fallait ? Nous avions nos territoires. Nos autorités à nous, et

 23   que si eux voulaient déclarer un Etat, ils ne pouvaient pas faire régner

 24   cet Etat à l'égard de nos régions à nous.

 25   R.  Je crois que ce que vous dites ici je considère que ceci était

 26   étroitement lié à cette diatribe de la disparition et vous en parlez dans

 27   cette conversation vous dites que les Musulmans n'ont que quelques

 28   possibilités. Vous définissez les solutions qui s'offrent à eux et qui

Page 3501

  1   seraient acceptables s'ils choisissent d'autres possibilités et qu'elles ne

  2   se conforment pas à vos conditions, aux conditions que vous avez imposées

  3   la guerre sera inévitable, et cette conflagration amènera à leur

  4   disparition. Ces propos, je les ai vus pour la première fois dans une

  5   conversation téléphonique interceptée avec M. Krajisnik, le 4 septembre, il

  6   vous a dit de faire attention, de ne pas utiliser ce type de rhétorique,

  7   parce qu'il dit : Si vous utilisez cela, nous allons tous disparaître. Si

  8   vous utilisez cette rhétorique, nous allons tous disparaître, et vous avez

  9   fait fi de ces conseils, et dans un certain nombre de conversations

 10   téléphoniques qui ont été interceptées, et il s'agit d'une de ces

 11   conversations téléphoniques, vous utilisez cette rhétorique en disant que

 12   les Musulmans vont disparaître. Que les Musulmans seraient les principaux

 13   perdants si un conflit se déclenchait, et vous avez également ce type de

 14   rhétorique dans les dernières phrases de votre discours lors de la séance

 15   de l'assemblée les 14, et 15 octobre.

 16   Donc si vous voulez, cette rhétorique est une rhétorique menaçante à

 17   l'attention des Musulmans, vous ne leur avez donné que quelques

 18   possibilités qu'ils peuvent envisager et s'ils en choisissent d'autres, des

 19   événements catastrophiques vont leur tomber dessus, si on peut dire.

 20   Q.  Alors est-ce que ce sont des propos menaçant ? Est-ce que ces propos

 21   menaçant veulent les dissuader de faire la guerre, ou les encourager à

 22   faire la guerre ?

 23   R.  Vous ne leur parlez pas directement dans cette conversation, mais les

 24   propos que vous utilisez ici, cette rhétorique a contribué à une

 25   augmentation des tensions et les a certainement beaucoup plus encouragés à

 26   se préparer à la guerre.

 27   Q.  Mais est-ce que vous êtes d'avis que quelqu'un avait le droit d'imposer

 28   une solution aux Serbes ? Est-ce que vous considérez que quelqu'un, de

Page 3502

  1   façon anticonstitutionnelle, pouvait modifier la position de la Bosnie-

  2   Herzégovine et que nous étions, nous autres, tenus de l'accepter ? Répondez

  3   donc par un oui ou par un non.

  4   R.  Je crois que vous m'avez déjà posé cette question à plusieurs reprises,

  5   et je vous ai répondu à l'époque que je ne pouvais pas faire un distinguo

  6   entre les aspects constitutionnels, c'est-à-dire le départ de la Bosnie-

  7   Herzégovine de la Fédération. Je ne sais pas si ceci relève purement de

  8   questions constitutionnelles. Je ne sais pas si c'était une méthode

  9   constitutionnelle de procéder.

 10   Q.  Merci. Mais, Professeur, voyez-vous, ici il est question du fait que

 11   nous leur laissons plusieurs variantes. Nous avons une situation qui nous

 12   arrange. Nous sommes en Yougoslavie. Eux, ils veulent de façon

 13   anticonstitutionnelle nous faire sortir de cette Yougoslavie, et ils

 14   peuvent faire ceci ou cela mais, vous autres, vous ne pouvez pas nous

 15   obliger à faire quelque chose. Voulez-vous qu'il y ait eu grief pour ce qui

 16   est du côté serbe ?

 17   R.  A qui fais-je porter le chapeau ? Je vous fais porter le chapeau,

 18   puisqu'il s'agit d'une déclaration que vous avez formulée, qui est

 19   clairement menaçante, et qui émane de quelqu'un qui pense être en plein

 20   contrôle de la situation et qui dicte aux Musulmans la marche à suivre et

 21   leurs possibilités.

 22   Q.  Mais vous allez voir maintenant, Monsieur Donia, que je suis en train

 23   de dire précisément que je pouvais accepter que les choses évoluent dans ce

 24   sens. Vous avez dû le remarquer, dans d'autres conversations interceptées

 25   avec M. Zepinic et M. Djogo et à tous les autres, que j'ai dit

 26   qu'indépendamment de ce que j'accepterais moi, en l'espace de deux heures,

 27   ça aurait été une situation chaotique.

 28   Vous croyez vraiment que je peux maîtriser un deux millions de Serbes

Page 3503

  1   là-bas, si quelqu'un essaye de les remmener à la période de l'occupation

  2   ottomane ?

  3   R.  Oui, je pense que vous contrôliez suffisamment le SDS et les

  4   partisans du parti pour procéder de cette manière.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais qu'on nous montre la page 7 de

  6   ce même document. C'est la version anglaise, page 7. Page 7, version

  7   anglaise disais-je.

  8   "Non, ils ne comprennent pas."

  9   "No, they don't understand."

 10   "Ils ne comprennent pas comment les Serbes sont en train d'être -- comment

 11   les Serbes sont en ébullition. Ils mettent du temps à s'enflammer mais ils

 12   brûlent longtemps. Donc ils n'en n'ont aucune idée. J'ai du mal à expliquer

 13   à nos partenaires musulmans qu'ils doivent comprendre que, jusqu'au dernier

 14   des Serbes, ils se battront pour l'Etat qui est le leur pour ne pas le

 15   perdre."

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Vous souvenez-vous de ce que Zufikarpasic avait dit, du temps des

 18   Turcs, les Serbes et les Croates, c'étaient des peuples de deuxième ordre ?

 19   Ce qu'ils redoutent à présent, c'est qu'ils pourraient fort bien le

 20   redevenir une fois de plus; vous souvenez-vous de ce que Zufikarpasic a dit

 21   ? On l'a lu l'autre jour cela.

 22   R.  Je pense qu'encore une fois, vous pratiquez l'absolutisme. Vous partez

 23   du principe que le peuple serbe n'est animé que d'un seul souhait et que

 24   vous en êtes l'interprète. Par conséquent, vous considérez ne pas être

 25   responsable de ces déclarations et de ces menaces, en déclarant qu'il

 26   s'agit en fait ou que ceci relève d'une réponse inévitable du peuple serbe.

 27   Je ne pense pas que ceci soit le cas. Je m'en tiens à ma théorie, à savoir

 28   que vous avez choisi de vous exprimer de cette manière, et vous avez choisi

Page 3504

  1   d'invoquer une volonté du peuple serbe imminente alors, qu'en fait, c'est

  2   vous qui étiez responsable de ces propos.

  3   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Docteur Karadzic, ceci peut-être a

  4   déjà été mentionné. Il s'agit d'un certain M. Djogo à qui vous parlez ici,

  5   mais j'aimerais savoir quel poste il occupait.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il n'avait aucune position politique. C'est un

  7   poète. C'est un ami à moi. Je lui expliquais quelle était la situation qui

  8   était la nôtre. C'est deux amis qui discutent. Il n'a aucune fonction

  9   politique lui.

 10   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui, c'est ce qui me semblait, mais

 11   je voulais obtenir une précision de votre part.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous me permettez, je crois que ce n'est

 13   pas tout à fait exact. Je suis d'accord avec ce que vous avez dit, mais il

 14   est également président de l'association des Serbes de Bosnie-Herzégovine à

 15   Belgrade, et on pourrait considérer qu'il s'agissait d'une ONG.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  C'est une association humanitaire, mais ce n'est pas un pouvoir

 18   politique. Ce sont des questions humanitaires auxquelles vaque cette

 19   association, n'est-ce pas ?

 20   R.  J'ai dit qu'il s'agissait plus ou moins d'une ONG. C'est à peu près la

 21   même chose qu'une organisation humanitaire, mais des représentants dans

 22   cette organisation prenaient la parole lors de réunions qui étaient

 23   soutenues ou financées par le SDS. Je crois qu'il a pris la parole devant

 24   une des assemblées constitutives, et il a pris la parole en tant que

 25   président de l'Association des Serbes de Bosnie-Herzégovine, basée à

 26   Belgrade.

 27   Q.  Oui. Mais vous serez d'accord avec moi pour dire que ces présidents de

 28   l'Association ont changés. Il y avait le Dr Jamagija [phon]. Enfin, ce

Page 3505

  1   n'est pas une fonction politique cela, n'est-ce pas ?

  2   R.  C'était un poste politique, car il utilisait ce poste pour exprimer des

  3   opinions politiques, et je suis tout à fait d'accord, c'était un ami de

  4   longue date, un de vos amis. Il vous a rendu de grands services, et vous

  5   également pour lui, et je suis d'accord qu'il s'agit d'une conversation

  6   entre deux amis de longue date. Par conséquent, une conversation rompue, et

  7   vous finissez en lui disant de dire bonjour à sa femme et à ses enfants.

  8   Mais il occupait un poste au sein duquel il pouvait formuler des opinions

  9   politiques, et il l'a fait.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Par pure curiosité, Monsieur le Témoin,

 11   comment savez-vous que M. Djogo et M. Karadzic sont amis de longue date ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois qu'aussi bien M. Djogo et que M.

 13   Karadzic ont écrit à ce sujet. Il y a des articles qui ont été publiés à

 14   cet effet. Il y a un livre formidable qui est intitulé : "Radovan," qui a

 15   été compilé par Ljiljana Bulatovic, avec un certain nombre de discours, des

 16   poèmes du Dr Karadzic, et ceci montre également l'entrée en politique du Dr

 17   Karadzic.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 19   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Est-ce que ce livre a été traduit en

 20   anglais ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Apparemment pas. Je suis désolé. Je pourrais

 22   vous fournir un exemplaire du livre pour que ceci soit traduit.

 23   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Je crois que ce serait une tâche

 24   beaucoup trop gigantesque. Mais je voulais simplement savoir si on pouvait

 25   obtenir une traduction. Je devrais donc, dans ce cas-là, m'en remettre à

 26   votre interprétation de ce livre.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]

Page 3506

  1   Q.  Est-ce que je peux maintenant attirer votre attention sur ce que je

  2   viens de vous lire à l'instant, où je fais la différence entre la

  3   population et les dirigeants politiques ? Vous savez qu'il y a plusieurs

  4   directions politiques, et vous savez fort bien que je m'entendais bien avec

  5   la direction du MBO et d'Abdic. Maintenant, pour ce qui est des autres

  6   dirigeants, et j'ai dit que pour ce qui est de la population, il faut leur

  7   tendre les deux bras à ces en page 12 de la version populations musulmanes.

  8   Avez-vous relevé ce que j'ai dit ? Ça se trouve anglaise.

  9   Si vous voulez, je peux vous en donner lecture.

 10   R.  Je suis désolé, je ne le vois pas à l'écran.

 11   Q.  "C'est une façon -- un discours populaire, il y a une population tout à

 12   fait ordinaire, et je crois qu'à l'égard de cette population, il faut

 13   tendre les deux bras; pour ce qui est de la direction, maintenant, il n'y a

 14   pas d'hésitation possible. Il faut qu'ils sachent ce qu'il adviendra s'ils

 15   veulent une sécession --" donc, nous, on fait  une distinction entre la

 16   direction politique et la population, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui, je crois que vous avez procédé à ce distinguo assez fréquemment,

 18   c'est-à-dire que vous avez une opinion différente des instances

 19   dirigeantes, à savoir les instances dirigeantes du SDA, et d'autre part, la

 20   population musulmane dans son ensemble.

 21   Q.  Merci. Est-ce que vous avez remarqué lorsqu'un intellectuel musulman,

 22   un dénommé Causevic, avait quitté le SDA avant l'éclatement des conflits,

 23   il a dit à Izetbegovic :

 24   "Est-ce que tu crois que les Serbes, ce sont des imbéciles qui ne

 25   comprennent pas ce que tu es en train de faire ?"

 26   Est-ce que vous avez relevé cette phrase-là ?

 27   R.  Où aurais-je relevé cette phrase ? Et quand ?

 28   Q.  Il s'agissait d'une lettre ouverte de Halid [phon]  Causevic à

Page 3507

  1   l'intention d'Izetbegovic, et il expliquait dans cette lettre pourquoi il

  2   quitte le SDA. Il lui a dit :

  3   "Est-ce que tu crois que les Serbes, c'est des imbéciles et ne voient

  4   pas ce que tu es en train de faire ?"

  5   Si vous ne l'avez pas lu, je vais vous l'apporter ici même.

  6   R.  Je n'ai pas vu cette lettre. Vous savez, ceci s'est produit au sein de

  7   tous les partis nationaux. Au départ, on se demandait qui allait être

  8   membre de ce parti et qui n'allait pas être membre. Il y a eu également des

  9   groupuscules qui se sont constitués en marge de ces partis. Donc, cela ne

 10   me surprend pas que quelqu'un fasse un commentaire de ce type lorsqu'il

 11   quittait le parti.

 12   Q.  Mais il a quitté le parti en disant qu'Izetbegovic avait une mauvaise

 13   politique à l'égard des Serbes; c'est bien cela ?

 14   Cette phrase nous montre bien que c'était la raison qu'il avait avancée

 15   pour son départ du parti. Alors, si cette phrase est bien citée, est-ce

 16   exact ?

 17   R.  Je crois que vous avez des déclarations tout aussi tranchées, si ce

 18   n'est plus, venant de M. Filipovic et de M. Zulfikarpasic. Il était

 19   mentionné qu'Izetbegovic était contre les Serbes, et ceci était assez

 20   habituel au sein de ceux qui avaient quitté le SDA pour créer de nouveaux

 21   partis distincts du SDA.

 22   Q.  Merci. Est-ce que vous avez remarqué de quelle façon Zulfikarpasic a

 23   expliqué sa divergence avec le SDA -- ses divergences avec le SDA ? Il a

 24   dit -- enfin, il a amnistié la totalité du SDA, il l'a dit -- et je le fais

 25   aussi. Il a dit que, dans le cadre du SDA, il y avait eu un noyau de

 26   conspiration constitué par de jeunes Musulmans qui faisaient tout ce qu'ils

 27   faisaient dans le dos du Parti de l'Action démocratique.

 28   R.  Oui. Je crois qu'encore une fois, c'était une critique assez habituelle

Page 3508

  1   venant du MBO de l'époque, c'est-à-dire qu'on reprochait toute une série de

  2   choses à Izetbegovic au niveau de ses politiques, par exemple, et de ses

  3   opinions.

  4   Q.  Pour votre information, je tiens à préciser que je n'avais pas

  5   d'objection à l'égard d'Izetbegovic tant que cela ne concernait que les

  6   Musulmans, mais êtes-vous d'accord avec moi pour dire que j'avais toujours

  7   dit que ça ne pouvait pas se rapporter aux Serbes ? Nous n'avons jamais été

  8   les arbitres de ce que serait le peuple musulman ou ce que serait l'Islam

  9   chez eux; vous êtes d'accord ? Notre préoccupation, c'était que cela ne

 10   vienne pas s'étendre et englober les Serbes aussi.

 11   R.  Je n'ai pas l'impression que cela corresponde à la rhétorique de cette

 12   conversation que nous avons à l'écran. Je ne doute pas que vous ayez été en

 13   bons termes avec M. Izetbegovic pendant très longtemps, et même au fur et à

 14   mesure que vos différences politiques sont allées croissantes, vous êtes

 15   resté en bons termes d'un point de vue personnel, même lorsque le conflit a

 16   éclaté. Vous vous êtes rencontrés régulièrement lors des séances de

 17   l'assemblée, et plus tard dans le cadre des activités liées à la

 18   présidence.

 19   Q.  Merci.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que cette conversation interceptée a

 21   déjà été versée par les soins de l'Accusation, ou est-ce qu'il faut que

 22   nous le versions, nous, en tant que Défense ?

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne pense pas que ce soit nécessaire.

 24   Cote provisoire.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cote provisoire D279.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Alors, est-ce que vous estimez, Monsieur le Professeur, que j'aurais

 28   été un autocrate ou est-ce que j'étais un démocrate, pour ce qui est de la

Page 3509

  1   vie au sein du parti, du Parti démocratique serbe ?

  2   R.  Ce n'est pas la question de savoir si vous étiez l'un ou l'autre. Je

  3   pense que vous avez beaucoup œuvré pour devenir l'autocrate du parti,

  4   c'est-à-dire du SDS, mais l'un a découlé de l'autre, si on peut dire, et

  5   vous avez rencontré beaucoup d'opposition, et vous avez fait preuve d'un

  6   esprit toujours constructif, et vous êtes devenu un dirigeant très puissant

  7   du parti.

  8   Je pense que tout dirigeant d'un parti politique, quel qu'il soit, qu'il

  9   s'agisse d'un parti démocratique, ou communiste, ou autre, tout dirigeant

 10   est, dans une certaine mesure, un autocrate, s'il ou elle veut être

 11   efficace. Je pense que votre réussite est imputable au fait que vous avez

 12   gagné en pouvoir au sein de ce parti. Ensuite je ne dirais pas que ceci

 13   aille à l'encontre de la démocratie. Je dirais simplement que c'est la

 14   manière dont fonctionne ce type d'organisation dans toute société, qu'elle

 15   soit démocratique ou pas.

 16   Q.  Merci. Etes-vous d'accord avec moi pour dire que cette phase de prise

 17   de décisions, c'est quelque chose qui nécessite de la démocratie, et la

 18   phase d'exécution des décisions nécessite de l'efficacité et du sens des

 19   responsabilités ?

 20   R.  Je considère qu'il s'agirait d'une déclaration de centralisme

 21   démocratique, la manière dont les décisions étaient prises durant la

 22   période communiste, avec beaucoup de discussions ouvertes, avec des débats

 23   qui étaient suivis par une mise en œuvre suivie, mais également une

 24   intolérance vis-à-vis de l'opposition ou vis-à-vis de points de vue qui ne

 25   recueillaient pas la majorité dans le cadre du processus décisionnel. Donc,

 26   je crois que la manière dont vous l'avez exprimé me semble tout à fait

 27   approprié, c'est-à-dire que vous deviez prendre des décisions qui n'étaient

 28   pas toujours démocratiques, mais une instance ayant un pouvoir exécutif

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  1   exécutait ces ordres, et je pense que ceci caractérise peut-être le

  2   centralisme démocratique qui était très présent durant la période

  3   communiste.

  4   Q.  Merci.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous montrer, maintenant, à

  6   l'affichage électronique le 65 ter 30414. Page 6 de la version anglaise,

  7   s'il vous plaît ?

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Mais c'est  relatif au plébiscite que nous étions censés organiser. Le

 10   9 et le 10 novembre, nous avons organisé un plébiscite; c'est bien cela ?

 11   R.  Le 9 et le 10 novembre, effectivement.

 12   Q.  Alors ceci est une conversation entre Radovan Karadzic et Vojo

 13   Kupresanin.

 14   Je vous prie de nous montrer la page 6 de la version anglaise. C'est la

 15   bonne page en anglais, et c'est la page 6 de la version serbe aussi.

 16   Il est dit ici -- alors il n'y a pas à discuter, on parle de la

 17   "Grande-Bretagne," puis, au milieu, on dit :

 18   "L'assemblée serbe a adopté une décision, samedi et dimanche, de 7 à

 19   19 heures. Et personne ne saurait le modifier, ni Karadzic, ni Milosevic,

 20   ni Dieu le Père. De 7 à 19, c'est ce qu'a décidé l'assemblée. Cette

 21   assemblée dont il est membre et que Vukic en est membre aussi, il faut que

 22   tout un chacun la respecte; il n'y a pas d'autre solution."

 23   Puis une réponse plus bas -- ou une réplique plus bas :

 24   "Si l'assemblée le décide, qui suis-je, donc, pour pouvoir le

 25   changer. Je suis un pion qui est au service de cette assemblée, au service

 26   du parti et du peuple serbe. Je ne suis pas une espèce de grand chef qui

 27   peut changer quelque chose comme bon lui semble, et lui non plus. Personne

 28   d'entre nous ne l'est. Nous sommes ici au service de cette assemblée."

Page 3511

  1   Donc on voit que cette autorité qui était la mienne s'était liée à

  2   l'exécution des décisions, et non pas à la prise des décisions. Est-ce que

  3   vous avez remarqué qu'à un endroit, que nous avons précisé que le Parti

  4   démocratique serbe ne prend pas de décisions, mais trouve des solutions ?

  5   Vous avez même remarqué que M. Krajisnik a toujours cherché à ce que les

  6   choses soient faites à l'unanimité, s'il y avait un qui était contre, il

  7   cherchait à savoir pourquoi pour essayer de faire en sorte que tous soient

  8   d'accord, et que la phase, le processus de prise de décisions chez nous a

  9   toujours été très long et très ardu ?

 10   R.  Je crois qu'en général, les discussions étaient longues et

 11   laborieuses, et quelquefois, assez houleuses. Mais lorsque vous procédiez à

 12   un vote, les résultats étaient presque toujours unanimes. Et j'ai toujours

 13   considéré que cela faisait preuve de votre autorité en tant que dirigeant

 14   de ce parti, vous appliquiez une certaine discipline lorsqu'on procédait au

 15   vote, contrairement aux discussions qui étaient à bâtons rompus. Tout le

 16   monde pouvait prendre la parole, et vous aviez des discours qui étaient

 17   très critiques à votre endroit, à l'attention de M. Krajisnik ou de M.

 18   Milosevic. Donc il s'agissait d'un débat très libre. Par contre, les

 19   décisions étaient unanimes ou quasi-unanimes.

 20   Q.  Etes-vous d'accord ou est-ce que vous avez remarqué que la

 21   décision a été modifiée au fil de la discussion, et qu'elle n'a jamais été

 22   celle qui avait été avancée au départ ? Et c'est la raison pour laquelle

 23   les décisions étaient prises à l'unanimité, parce que vous avez remarqué

 24   qu'à un moment donné, Krajisnik lui a demandé, à un député, pourquoi il

 25   était contre, et quand il a expliqué les raisons qui l'animaient, on a

 26   modifié la décision pour que tout le monde soit d'accord, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui, j'ai cité cet exemple effectivement, et je pense que cela

 28   montre bien comment vous recherchiez l'unanimité dans ce processus

Page 3512

  1   décisionnel. Bien sûr, à l'époque, et pour revenir à cet exemple que vous

  2   venez de citer, nous parlons d'une séance où M. Krajisnik a fait preuve de

  3   beaucoup de frustration, et il a décidé de lever la séance, il a quitté la

  4   salle, et un vice-président de séance a repris le flambeau et les débats

  5   ont repris. Vous vous êtes entretenu avec lui et vous avez parlé de votre

  6   frustration réciproque pour cette procédure démocratique ouverte, et je

  7   crois que vous avez proposé de donner plus d'orientation aux ministres du

  8   gouvernement qui était en phase d'être constitué de façon à ce qu'ils

  9   préparent beaucoup plus les débats et les propositions.

 10   Q.  Merci. Mais c'est la chose qu'on fait d'habitude, n'est-ce pas ?

 11   Le gouvernement envoie des propositions et c'est l'assemblée qui se

 12   prononce.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais est-ce qu'on peut faire verser au

 14   dossier la conversation interceptée de tout à l'heure, je vous prie.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la cote D280 MFI.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous montrer le  31839 --

 18   31893, en application du 65 ter -- 31839.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Il s'agit d'une conversation entre Miodrag Simovic, le vice-premier

 21   ministre, et moi-même.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je me demande si Mme Edgerton et M. Reid

 23   pourraient nous aider.

 24   Mme EDGERTON : [interprétation] Nous pourrions le faire, mais pas

 25   immédiatement.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Nous en sommes encore sur le sujet de l'attitude qui était la mienne à

Page 3513

  1   l'égard des aspects liés à la responsabilité, aux devoirs, et à la

  2   démocratie. Par exemple, ici, à la page 1, 2, 3, page 3, au bas de la page.

  3   J'exprime mon mécontentement du fait de ce que Vito faisait de son plein

  4   gré, et Zepinic aussi. Et je suis en train de parler du dénommé Simovic. Ce

  5   ne sont pas des lieux privés, j'ai posé la question à 50 personnes au sujet

  6   de Simovic. Ils m'ont tous dit que Simovic, c'était quelqu'un d'excellent.

  7   Puis, on tourne la page, et Simovic est excellent, donc, il devient vice-

  8   premier ministre.

  9   "Vous n'êtes pas mon cousin germain, et je n'ai eu aucun calcul à

 10   titre privé pour ce qui est de vous nommer à ce poste. Mais nous nous

 11   sommes rendus compte de vos qualités." C'est ce qu'il dit à la page

 12   d'après. Ici, on est au bas de la page. Vous pouvez lire l'autre langue,

 13   vous ?

 14   J'ai posé la question au sujet de Simovic à 50 personnes, et ils ont dit :

 15   Simovic, c'est quelqu'un de très bien. Et c'est la raison pour laquelle

 16   Simovic a été élu, et non pas parce que je l'aurais recommandé. Je ne le

 17   connaissais même pas.

 18   Alors, penchons-nous maintenant sur la page 2. Ici, on dit en page 2 :

 19   "Oui," vers le bas -- ou plutôt, vers le milieu, c'est moi qui parle,

 20   dernière phrase :

 21   "Ce n'est pas moi qui conduis la politique serbe de tête. Je fais venir les

 22   vieillards, les sages, j'ai fait venir à l'Académie des sciences pour leur

 23   poser la question et vérifier mes idées."

 24   Est-ce que vous saviez que notre conseil politique, c'était quelqu'un

 25   de très puissant, parce qu'il se référait à l'élite serbe, aux hommes de

 26   sciences, aux artistes et autres, pour les compter dans ses rangs ?

 27   R.  Si vous me posez une question concernant le conseil politique, vous

 28   venez de mentionner l'Académie des sciences, et vous avez dit que vous

Page 3514

  1   l'aviez organisé. En fait, je crois que vous avez nommé certains des

  2   membres de l'Académie des sciences de Bosnie-Herzégovine, et que vous les

  3   avez nommés également à des postes au sein du conseil politique. Certains

  4   étaient tout à fait d'accord avec les idées que vous aviez formulées et

  5   vous ont été de bons conseils. D'autres ne vous ont pas suivi dans vos

  6   politiques, y compris Slavko Leovac, le président, qui est resté à Sarajevo

  7   durant le siège de la ville, et qui a renoncé à appliquer vos politiques ou

  8   à les adopter en août 2000 -- ou en août 1992.

  9   Donc je suis d'accord. Il y avait un groupe de penseurs et

 10   d'intellectuels qui avaient été nommés au sein du conseil politique, et

 11   certains étaient issus de l'Académie des sciences.

 12   Q.  Merci. Alors, moi, j'ai parlé de l'académie de façon métaphorique et

 13   j'ai parlé des vieillards, c'est-à-dire des sages. Je n'ai pas fait venir

 14   toute l'académie. Il y avait des académiciens, et c'est une façon

 15   métaphorique de ma part pour ce qui est de la façon dont je me suis

 16   exprimé, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui, je comprends bien.

 18   Q.  Alors, pour ce qui est de feu professeur Leovac, je précise qu'il est

 19   resté un certain temps dans Sarajevo, puis il a réussi à sortir pour aller

 20   à Belgrade. Il était critique, mais il n'a jamais renoncé à ce que nous

 21   avions décidé de faire. Il est toujours resté du côté de notre conseil

 22   politique et de la politique que nous avions mise en exergue; est-ce que

 23   vous êtes d'accord avec moi ?

 24   R.  Non.

 25   Q.  Tous savent que j'ai raison, ceux qui connaissent la situation chez

 26   nous. Le professeur Leovac était un grand ami. Mais comme c'était quelqu'un

 27   de beaucoup plus âgé que nous, nous avions prêté une oreille attentive à ce

 28   qu'il disait, et c'était quelqu'un de souvent très critique, n'est-ce pas ?

Page 3515

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que c'est une question, Monsieur

  2   Karadzic ?

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'était une question. J'ai dit : "Est-ce que…"

  4   j'ai dit : "N'est-ce pas…" en finissant ce que j'ai -- ma phrase de tout à

  5   l'heure.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis d'accord, vous l'avez écouté durant la

  7   période que nous mentionnons ici, c'est-à-dire durant l'automne 1991,

  8   effectivement.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Est-ce qu'on peut demander le versement

 10   de cette conversation interceptée au dossier ?

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton.

 12   Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, Madame et Messieurs

 13   les Juges, je n'ai pas d'objection, étant donné qu'il s'agit d'une

 14   déclaration qui couvre la période en question, mais pour ce qui est de la

 15   question qui a été posée par le Dr Karadzic, cela n'a rien à voir avec le

 16   passage qu'il a cité de cette conversation.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons accorder une cote provisoire

 18   à ce document. Merci, Madame Edgerton.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira, donc, de la cote provisoire

 20   D281.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Ici, c'est une partie des conversations interceptées qui illustrent ou

 24   qui peuvent illustrer mon attitude vis-à-vis de la prise de décisions et

 25   vis-à-vis de l'exécution de ces décisions. Probablement, ai-je posé

 26   quelques questions à gauche et à droite du sujet, mais bon ?

 27   Monsieur le Professeur, est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour ce qui

 28   est de parcourir rapidement un sujet qui est intitulé : "Régionalisation,"

Page 3516

  1   pour voir comment la thématique s'est développée du point de vue mental et

  2   du point de vue politique quant aux activités qui étaient celles de Radovan

  3   Karadzic ? Vous êtes d'accord ?

  4   R.  Oui, et j'espère que dans le cadre de ces questions, nous pourrons

  5   également nous pencher sur une partie de mon rapport qui est intitulé :

  6   "Régionalisation," et nous pourrons y voir différentes déclarations que

  7   vous avez faites. Il s'agit donc de ce rapport avec vos extraits.

  8   Q.  Si on nous accorde suffisamment de temps - parce que véritablement,

  9   vous êtes l'un des principaux témoins dans cette affaire - si on a donc

 10   suffisamment de temps, nous allons placer chaque chose dans son contexte

 11   pour l'éclairer sous tous ses angles.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous montrer le 65 ter 06457.

 13   06457 ?

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Je vous informe qu'il s'agit là de déclarations faites par des

 16   présidents de différents partis. Il y a du Izetbegovic. Il y a du Karadzic.

 17   Il y en a plusieurs, vous le verrez bien. C'est traduit, la partie

 18   notamment qui se rapporte -- mes propos sont traduits. Alors, est-ce que

 19   vous voyez cette date ? C'est celle du 26 juillet 1990. C'est deux semaines

 20   après la création, la fondation du Parti démocratique serbe, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui, qui a été dûment constitué, effectivement.

 22   Q.  On voit régionalisation municipale : 

 23   "La population serbe en Bosnie-Herzégovine n'est pas satisfaite. Il

 24   ne s'agit pas d'une régionalisation du point de vue de la réalisation de

 25   l'exercice des droits ethniques, mais du point de vue lié au

 26   développement."

 27   Est-ce que vous voyez cette phrase ? Est-ce qu'on peut lever un peu

 28   le texte en serbe.

Page 3517

  1   En version anglaise, ça commence par : "Serbian people are not

  2   satisfied," "…ne sont pas satisfaits."

  3   Donc ça se trouve vers le milieu du paragraphe central pour ce qui

  4   est de cette décentralisation ou régionalisation, et il ne s'agit pas de

  5   réaliser des droits nationaux, mais il s'agit de l'aspect lié au

  6   développement.

  7   Alors, est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire que, très tôt, nous

  8   avions évoqué ce point-là dans notre programme en estimant que c'est notre

  9   droit le plus légitime pour ce qui est, donc, de faire examiner la question

 10   ?

 11   R.  Oui, tout à fait.

 12   Q.  Merci.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut demander le versement au

 14   dossier de ce texte.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il s'agit d'un journal

 16   "Oslobodjenje" ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, effectivement. Il s'agissait du journal

 18   de la ville de Sarajevo, et à ce stade, il s'agissait d'une publication de

 19   qualité.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Nous pouvons verser cette pièce

 21   au dossier.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D282.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Est-ce qu'on peut nous montrer

 24   maintenant le 65 ter 13 -- non, 31793. En version anglaise, ce sera la page

 25   2, et en version serbe, la page 2 aussi.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Alors, en passant, je voudrais vous demander si vous aviez entendu dire

 28   que la Vojvodine avait obtenu une indépendance financière, le droit de

Page 3518

  1   gérer ses propres biens, et de pouvoir disposer de ses propres revenus ? Ça

  2   s'est fait ces jours-ci. Est-ce que vous en avez entendu parler ?

  3   R.  Oui, effectivement.

  4   Q.  Alors penchons-nous sur ce que j'avais dit, et c'est Momir, puis il est

  5   dit :

  6   "Nous devons préparer une réglementation légale pour que les régions

  7   puissent disposer de leur sous, et que la république, pour les besoins de

  8   la république, reçoivent une partie de ces revenus, et non pas de tout

  9   centraliser, puis, ensuite distribuer."

 10   Puis quelque trois répliques plus bas, Karadzic dit :

 11   "Non, ils vont donner à la république, mais ils ne veulent pas que sur 100

 12   dinars de revenus, on leur rende 18."

 13   Est-ce que vous ne savez pas que la Krajina de Bosnie avait formulé des

 14   objections ? Ils disaient qu'ils envoyaient 100 dinars à la république, au

 15   niveau de la république, et qu'il n'y avait que 18 dinars qui leur étaient

 16   restitués pour satisfaire à leurs besoins.

 17   R.  Quelle est votre question ?

 18   Q.  Alors ne saviez-vous pas que dans ce socialisme qui est un système

 19   distributif, qui faisait que tout était rassemblé au niveau de la

 20   république et que la république, ensuite, redistribuait comme bon lui

 21   semblait ?

 22   R.  Non, je crois que ce n'est pas une description fidèle de la manière

 23   dont les choses fonctionnaient. Les communautés -- ou plutôt, les

 24   associations de municipalités avaient un rôle financier, mais ce rôle était

 25   très limité, comme je l'ai dit précédemment, d'ailleurs; ils étaient

 26   responsables de l'assainissement, de l'approvisionnement en eau, dans

 27   certains cas, de la politique en matière d'éducation. Le mot d'ordre qui

 28   était utilisé par toutes les populations dans le cadre de ce débat en 1991,

Page 3519

  1   c'est que les objectifs étaient culturels, économiques et à des fins

  2   d'information. C'étaient les trois grands rôles des associations de

  3   municipalités. Quant aux municipalités, à proprement parler, elles étaient

  4   à l'origine de la collecte d'impôts, et par conséquent, de sources de

  5   revenus pour les deniers publics. Tout ceci était réglementé par la

  6   république, et en même temps, ils produisaient une partie de leurs revenus.

  7   Pour ce qui est de ces 18 dinars par rapport à 100 dinars, ceci

  8   relève de l'invention. Il n'y a aucune preuve, et comme M. Jaksic l'a dit,

  9   en mars ou en avril 1991, aucun chiffre n'étaie ces allégations qui

 10   faisaient état soi-disant d'une répartition très discriminatoire des

 11   deniers publics.

 12   Q.  Mais êtes-vous d'accord pour dire que M. Jaksic qui n'était pas membre

 13   du SDS, lui, s'était employé en faveur d'une plus grande décentralisation

 14   financière, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui, c'est évident. Il était, pour ainsi dire, le principal architecte

 16   de cette proposition.

 17   Q.  Merci. Etes-vous d'accord avec moi pour dire qu'il n'avait rien à voir

 18   avec le Parti démocratique serbe, et que c'était une chose qu'il

 19   préconisait depuis longtemps ?

 20   R.  Je ne suis pas d'accord avec vous pour dire qu'il n'avait rien à voir

 21   avec le SDS. Je crois qu'il a été amené à travailler avec le parti, mais il

 22   est vrai qu'il avait préconisé ses positions depuis assez longtemps, c'est

 23   vrai.

 24   Q.  Merci. Est-ce qu'on peut nous montrer la page 3 maintenant, page 3 en

 25   version anglaise. On peut garder la page serbe.

 26   Je suis en train de dire que ce serait une bonne chose que d'accélérer les

 27   choses afin que la région sente bien qu'elle peut disposer de ses sous et

 28   qu'on puisse y développer une vie culturelle à elle.

Page 3520

  1   Un peu plus bas, je dis, au niveau de la municipalité, tout ce qui se

  2   trouve au niveau municipal, la bibliothèque, et cetera, et cetera, et au

  3   niveau de la région, il y a ce qui revient à la région, les théâtres et

  4   tout le reste. Puis un peu plus bas encore, je dis : Leur restituer ou leur

  5   faire garder afin qu'ils puissent disposer de tout ceci, et qu'eux envoient

  6   des fonds vers la république.

  7   C'est ça la démocratie. Il ne s'agit plus du système socialiste de

  8   redistribution, tout ramasser, et puis ensuite distribuer comme bon nous

  9   semble.

 10   Donc l'objection que nous avions formulée, c'est celle de dire que cette

 11   oligarchie socialiste ou communiste consistait à prendre toutes les

 12   ressources financières pour les restituer ensuite. Notre recette

 13   démocratique, c'était de faire en sorte que les petites unités envoient

 14   vers la république ce qui lui est dû, et c'est ça la différence entre les

 15   démocrates et les socialistes, du point de vue de cette décentralisation

 16   financière. C'est ce que je dis ici. Je parle du socialisme re-distributif.

 17   Etes-vous d'accord avec moi pour dire qu'il en avait été ainsi ?

 18   R.  Je ne suis pas sûr de connaître la date de cette conversation

 19   téléphonique interceptée. Ce n'est peut-être pas important, mais j'aimerais

 20   savoir à quand cela remonte.

 21   Q.  C'est le 8 juin, on peut le voir en page 1. Le 8 juin, je suis en train

 22   de m'entretenir avec Momir, et j'imagine que c'est feu Momir Jungic, qui

 23   n'était pas, lui non plus, un membre du parti, mais il était directeur de

 24   l'établissement républicain chargé de la protection des monuments culturels

 25   de la Bosnie-Herzégovine. Donc, c'était quelqu'un qui intervenait dans le

 26   domaine de la culture.

 27   Ma question était celle de savoir si vous êtes d'accord qu'il y a là une

 28   différence, si la république collecte les ressources, et puis les restitue,

Page 3521

  1   et par opposition à la façon démocratique de voir les municipalités et

  2   régions envoyer vers la république son dû et garder le reste pour elles.

  3   R.  Je dirais qu'en adoptant cette position, c'est une manière assez

  4   édulcorée de décrire ce qui se passait dans l'association des municipalités

  5   de la Krajina de Bosnie, puisque vous aviez un conseil municipal qui

  6   essayait de trouver différents moyens de couper tout soutien financier vis-

  7   à-vis du gouvernement central, et ils essaient également de saisir toutes

  8   les propriétés économiques qui étaient basées au sein du territoire qu'ils

  9   revendiquaient.

 10   Effectivement, ceci rentre dans le cadre du concept de départ que vous avez

 11   décrit, mais sur le terrain, les choses étaient très différentes. La

 12   Krajina de Bosnie avait, en fait, décidé de saisir des biens, et de saisir

 13   le pouvoir dans cette partie de la république, et ceci n'avait pas vraiment

 14   à faire avec ces mesures tout à fait inoffensives que vous laissez entendre

 15   ici.

 16   Q.  Est-ce que vous savez --

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, pourriez-vous répéter

 18   le nom de cet homme pour le compte rendu d'audience ?

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Momir Jungic.

 20   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Mais, Monsieur Donia, le 8 juin, ce dont vous parlez n'est pas encore

 23   fait. La Slovénie même, me semble-t-il, acquittait encore des impôts à la

 24   fédération. Et vous vous souviendrez peut-être que la Slovénie a cessé de

 25   payer ces impôts à la fédération la première, et qu'elle a, ensuite, été

 26   suivie par la Croatie, alors que la Krajina ne l'a fait qu'en 1992, n'est-

 27   ce pas ?

 28   R.  Nous parlons bien du 8 juin 1991 ?

Page 3522

  1   L'INTERPRÈTE : Signe affirmatif de la tête de M. Karadzic.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Ceci est faux. La Krajina -- enfin, j'ai déjà

  3   parlé de ces réunions des conseils -- dans les PV de ces réunions des

  4   conseils que chacun peut consulter pour vérification. Nous voyons que, dès

  5   que l'Association des Municipalités a été créée officiellement, à savoir

  6   dès le 25 avril, le conseil durant ces réunions suivantes a discuté

  7   exactement des sujets que je viens d'indiquer, et du recrutement aussi d'un

  8   grand nombre de membres de ces municipalités pour combattre la JNA en

  9   Croatie. Donc il se trouve que ceci se passe précisément le jour où les

 10   Serbes de Croatie lancent une action pour incursion armée, en Bosnie et

 11   c'est le jour où ils entrent dans la ville de Drvar où ils ont accueilli

 12   par le maire SDS de la ville.

 13   Donc le sujet en question était tout à fait brûlant, si vous voulez que je

 14   le dise ainsi, et les efforts destinés à affaiblir ou même à paralyser mais

 15   en tout cas à contester le gouvernement de Bosnie-Herzégovine dans le cadre

 16   de la stratégie de régionalisation ou dans le cadre de ce que j'ai appelé

 17   la stratégie municipale du SDS. C'était vraiment un sujet brûlant.

 18   Q.  Mais, savez-vous, Monsieur Donia, que aujourd'hui encore un combat se

 19   déroule au sujet de la restitution de certaines propriétés aux

 20   municipalités pour qu'elles puissent décider de ce qu'elles feront de ces

 21   propriétés comme cela se passe partout ailleurs en Europe et que nos

 22   municipalités encore aujourd'hui ne jouissent pas des propriétés qui sont

 23   les siennes, alors que par le passé elles le faisaient ?

 24   R.  Je pense que c'est effectivement le cas. Ce que vous dites c'est

 25   qu'elles avaient ses propriétés à l'époque socialistes, et qu'au moment où

 26   ces actifs ont été confisqués par diverses formations politiques elles ont

 27   perdu le droit à ce genre de propriété et que la restitution de ces biens a

 28   été un processus long et difficile, pas seulement en Bosnie mais également

Page 3523

  1   ailleurs dans l'ex-Yougoslavie.

  2   Q.  Je vous rappellerais ce qui s'est passé. En page 2 de ce texte, dans

  3   les premières lignes dont j'ai donné lecture, et je parle avec ce monsieur

  4   au téléphone, je vous le rappelle, il est directeur du bureau chargé de la

  5   protection des monuments historiques, et je lui dis que nous devons

  6   préparer un certain nombre de réglementations, et de texte législatif,

  7   quand je dis "nous," c'est nous en Bosnie-Herzégovine, au sein de

  8   l'assemblée conjointe, parce qu'à l'époque nous avions encore une assemblée

  9   conjointe, les régions pourraient ainsi dis-je contrôler l'argent qui est

 10   les leurs plutôt que de tout envoyer dans un seul centre avant

 11   redistribution au niveau régional.

 12   Donc ce que je vous dis c'est que, le 8 juin 1991, nous avons encore cette

 13   assemblée conjointe. Un directeur de l'une des institutions conjointes

 14   s'entretient avec moi quant à la façon de faire avancer le développement

 15   culturel des régions et je propose que les régions se voient accorder un

 16   certain pouvoir. Vous constaterez ici que nous discutons de cela sur le

 17   plan culturel mais aussi sur le plan économique, et donc pas seulement sur

 18   au niveau d'un seul groupe ethnique. C'était le 8 juin.

 19   R.   Oui, c'était le cas, et avant cela également, au début du mois

 20   d'avril, l'assemblée a suspendu une réunion qui au moment où les débats

 21   portaient sur la création des associations de municipalités dans la Krajina

 22   de Bosnie, donc en fait cette proposition a été soumise à l'assemblée pour

 23   que l'assemblée puisse maîtriser totalement le processus, et le SDS s'est

 24   opposé à cela et en fait a procédé de façon unilatérale en défendant ce

 25   qu'il considérait comme un projet unilatéral de son parti uniquement, donc

 26   le SDS a agi ainsi avec l'opposition de tous les partis nationaux et des

 27   gens comme Milorad Dodik, qui étaient membres d'un parti d'opposition,

 28   n'ont pas été pris en compte, le SDS l'a fait pour créer cette association

Page 3524

  1   de municipalités en dehors de tout processus réglementaire ou de toutes

  2   consignes ou instructions venant de l'assemblée.

  3   Je ne peux que lire les soumissions faites par vous, ici nous voyons des

  4   déclarations que vous faites à votre interlocuteur et je ne les considère

  5   pas sincères parce que vous avez eu la possibilité de faire exactement ce

  6   que vous proposez ici un mois avant et vous n'aviez pas utilisé cette

  7   possibilité.

  8   Q.  Ce n'est pas ainsi que les choses se sont passées, Professeur, vous le

  9   constaterez plus tard.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

 11   document.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Nous verrons -- nous en arriverons à discuter de ce que vous avez

 14   évoqué, à savoir les débats à l'assemblée. Nous verrons ce qui a été dit

 15   lors de ces débats à l'assemblée de Bosnie-Herzégovine.

 16   Est-ce que cette conversation interceptée est admise comme les autres ?

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce que je vous dis une nouvelle fois,

 18   Monsieur Karadzic, c'est que vous devriez vous abstenir des commentaires

 19   que vous faites à la fin d'une série de questions et réponses comme celle-

 20   ci, quand vous dites :

 21   "Ce n'est pas ainsi que les choses se sont passées, Professeur. Vous le

 22   verrez plus tard."

 23   Vous n'êtes pas celui qui témoigne ici. Donc une déclaration de ce genre

 24   est totalement superflue.

 25   Nous enregistrons le document aux fins d'identification.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce D283 avec vote

 27   temporaire, Monsieur le Président.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis d'accord avec vous, mais le Pr Donia

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  1   est en train de répondre de façon très large à des questions très

  2   circonscrites et je ne peux pas laisser cela en l'état sans faire un

  3   commentaire.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document 65 ter

  6   numéro 6225.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Pendant que nous attendons que le texte apparaisse à l'écran, Monsieur

  9   Donia, je vous rappelle que vous savez, n'est-ce pas, ce que l'assemblée a

 10   adopté, des textes législatifs, des résolutions, des déclarations, des

 11   décisions constitutionnelles, des conclusions et des recommandations ? Donc

 12   on a la hiérarchisation de ces actes qui est indiqué dans ce document, et à

 13   la fin nous trouvons des recommandations en dessous de cette liste

 14   hiérarchisée, n'est-ce pas ?

 15   R.  Je sais certainement qu'il y avait une hiérarchisation. Mais,

 16   franchement, je ne sais pas exactement en quoi elle consistait. Cela étant,

 17   je n'ai aucune raison de douter du fait que ce sont bien des

 18   recommandations que l'on voit en bas de ce document.

 19   Q.  Merci. Donc ceci est le journal officiel de Bosnie-Herzégovine. Je ne

 20   sais pas si ce passage a été traduit. Il est possible qu'il l'ait été. Donc

 21   journal officiel de Bosnie-Herzégovine, édition du 18 avril, et ici nous

 22   voyons que l'assemblée de Bosnie-Herzégovine fait des recommandations aux

 23   municipalités en leur demandant de s'abstenir d'adopter des décisions sur

 24   la régionalisation ou sur la réunification de plusieurs municipalités au

 25   sein d'une association de municipalités. Donc l'assemblée ne fait pas

 26   interdiction d'agir ainsi. Elle ne condamne pas les municipalités qui l'ont

 27   fait. Elle ne fait que recommander, et c'est en fait la recommandation

 28   c'est la forme d'intervention la moins stricte de la part de l'assemblée.

Page 3526

  1   Il n'y a pas de forme d'intervention de l'assemblée qui soit plus douce que

  2   celle-là.

  3   Est-ce que vous pouvez lire le texte ? Donc l'assemblée adopte cette

  4   recommandation, et elle poursuit en expliquant quelle est la nature de la

  5   recommandation. Je peux vous donner lecture du passage, je cite :

  6   "L'assemblée de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine recommande

  7   aux assemblées municipales de cesser d'adopter des décisions relatives aux

  8   Associations de Municipalités tant que les négociations sur la solution

  9   constitutionnelle de la crise et l'avenir de l'ordre constitutionnel de la

 10   Yougoslavie n'est pas résolu de façon définitive."

 11   Donc l'assemblée ne fait interdiction de rien. Elle recommande simplement

 12   que les municipalités cessent de se regrouper.

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Merci.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de la page

 16   de couverture de ce journal officiel.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton.

 18   Mme EDGERTON : [interprétation] Pas d'objection, mais nous n'avons jamais

 19   reçu annonce préalable de l'utilisation de ce document.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle est votre explication, Monsieur

 21   Karadzic ?

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] M. Donia a dit que l'assemblée l'avait

 23   contesté, et j'ai donc été contraint de le faire afficher. Ce document

 24   était au départ sur la liste des documents du bureau du Procureur, donc je

 25   pensais qu'il n'était pas nécessaire d'aviser à l'avance le Procureur de

 26   son utilisation. Ce document est le document 65 ter numéro 6225. Par

 27   ailleurs, je n'avais pas l'intention d'en demander le versement au dossier.

 28   Mais M. Donia a parlé de la régionalisation, a dit quelle était sa position

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  1   sur ce sujet, et c'est ce qui m'a poussé à le faire.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Avançons. Nous enregistrons

  3   ce document aux fins d'identification dans l'attente d'une traduction.

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce D284, Monsieur le

  5   Président, avec cote temporaire.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Toutes nos excuses aux interprètes et

  7   aux sténotypistes, mais avec notre indulgence, je me demandais si nous

  8   pourrions poursuivre jusqu'à 14 heures. C'est accepté. Bien.

  9   Poursuivez.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Certainement.

 11   Mme EDGERTON : [interprétation] Et si vous me le permettez, Monsieur le

 12   Président, sur ce dernier document, puisque nous devons en assurer la

 13   traduction, j'aimerais obtenir quelques consignes quant à la procédure à

 14   suivre.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Uniquement de ce document. Est-ce que

 16   nous avons besoin d'autre chose ? C'est un journal officiel, donc nous

 17   n'avons besoin que de la portion pertinente de ce journal. Il importe donc

 18   de traduire uniquement la portion pertinente, la référence qui a été faite.

 19   Mme EDGERTON : [interprétation] Le numéro du passage est le numéro 120, si

 20   je ne me trompe.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que c'est le cas, oui. Numéro

 22   120, Monsieur Karadzic ? Oui.

 23   Veuillez poursuivre.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis d'accord pour poursuivre jusqu'à 14

 25   heures.

 26   Affichage, je vous prie, du document 65 ter numéro 30 045.

 27    M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Voyons ce que disent MM. Brdjanin et Karadzic sur le même sujet. Donc

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  1   nous lisons ce qui suite. C'est Karadzic qui parle. Je cite :

  2   "Dites-moi, je vous prie, il vous faut vous préparer. Est-ce que vous êtes

  3   déjà prêts ? Vous devez vous occuper du fond consacré à la culture. Je

  4   pense que c'est l'option la plus réaliste."

  5   Brdjanin dit :

  6   "Oui.

  7   Karadzic dit :

  8   "Donc, ce fond consacré à la culture est créé et les sommes qu'il abrite

  9   seront transmises des municipalités jusqu'au fond régional, et le fond

 10   régional adressera ensuite cet argent au niveau des républiques, au

 11   bénéfice des institutions des républiques. Vous êtes tous d'accord là-

 12   dessus."

 13   Donc c'est une position tout à fait cohérente. Nous préconisions que ces

 14   sommes soient envoyées au niveau de la république, ces sommes ne se

 15   limitant pas uniquement à l'argent qui revenait à la république et qui,

 16   lui, bénéficiait aux municipalités et aux associations de municipalités.

 17   R.  Oui. Je pense que ceci montre comment devait fonctionner le fond

 18   consacré à la culture, qui était un fond nouvellement créé ou même qui

 19   n'était pas encore créé, un fond qui était donc financé à partir de sommes

 20   provenant des municipalités, réunies au niveau régional. Donc ensuite il

 21   importait, il fallait décider comment cet argent serait transmis à la

 22   république. Ce passage me permet de penser que nous sommes ici en présence

 23   d'un segment du processus plus global qui consistait à redéfinir le pouvoir

 24   des régions, pouvoir qui était repris au gouvernement central.

 25   Q.  Vous rappelez-vous que auparavant nous avions dit que les municipalités

 26   devaient avoir des bibliothèques mais qu'il était impossible que chaque

 27   municipalité ait un théâtre ? Ces Associations de Municipalités pouvaient

 28   avoir un théâtre, alors qu'une république, elle, avait des institutions en

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  1   nombre plus important. Donc une municipalité pouvait financer une

  2   bibliothèque, mais toutes les municipalités, chaque municipalité ne pouvait

  3   pas financer un théâtre, n'est-ce pas ? Voilà quelle était notre motivation

  4   : le fait qu'une association de municipalités pouvait posséder un théâtre

  5   alors que la république, elle, devait avoir des institutions plus

  6   nombreuses et qu'elle devait donc recevoir sa part. Mais cette part

  7   provenait des régions et des municipalités, n'est-ce pas ? C'était ce qui

  8   était prévu.

  9   R.  Je pense que j'ai déjà indiqué hier quels étaient les motifs qui vous

 10   ont poussé, vous et M. Kupresanin, à créer ces assemblées de municipalités.

 11   Il l'a dit très clairement à l'époque. Vous l'avez dit clairement par la

 12   suite, en juillet 1992.

 13   Je ne vous reproche pas de m'avoir interrompu lorsque je lisais le

 14   paragraphe 179 de l'un de mes rapports, parce que vous ne souhaitiez

 15   certainement pas entendre vos propres propos réfuter l'hypothèse tout à

 16   fait anodine que vous êtes en train de présenter ici quant aux motivations

 17   qui étaient les vôtres.

 18   Q.  Monsieur Donia, ma thèse est la suivante : Si la Bosnie était demeurée

 19   au sein de la Yougoslavie, c'est là que les choses se seraient arrêtées.

 20   Les régions auraient été un peu plus indépendantes, elles auraient exercé

 21   une maîtrise un peu plus importante sur leur argent. Rien d'autre ne se

 22   serait passé, et c'est bien ce qui avait été convenu avec Zulfikarpasic,

 23   n'est-ce pas ?

 24   R.  Je pense que vous changez de référence temps là. Nous sommes en train

 25   de parler du mois d'avril. Enfin, nous étions en train de parler du mois

 26   d'avril 1991, ou disons du mois de mai, date à laquelle le processus

 27   d'intervention, des Associations municipales régionalisées, en particulier

 28   en Krajina de Bosnie, était destiné à paralyser le gouvernement de Bosnie,

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  1   et ce processus était déjà largement en cours, mais il n'était certainement

  2   pas irrévocable. Il aurait pu être renversé si des accords s'étaient fait.

  3   En fait, c'était le premier message que M. Milosevic a envoyé à

  4   Zulfikarpasic à Belgrade. Il lui disait :

  5   "Nous sommes en train de procéder à la régionalisation, et nous faisons

  6   cela dans le but de faire pression sur les Musulmans, mais nous sommes

  7   prêts à interrompre ce processus si vous le demandez et que nous nous

  8   entendons les uns avec les autres."

  9   Donc en fait, vous avez peut-être raison sur ce point, mais détrompez-vous

 10   quant à la date, parce que cela se passait aux mois de mai et juin 1991.

 11   Les Associations de Municipalités ont été utilisées très précisément pour

 12   s'emparer d'actifs financiers et donc pour resserrer son pouvoir, augmenter

 13   son pouvoir dans la région, s'emparer des stations d'essence, des

 14   [imperceptible] de télévision et promulguer des réglementations destinées

 15   de façon générale à renforcer le pouvoir régional au dépend du gouvernement

 16   central de Bosnie-Herzégovine.

 17   Q.  Je vous remercie.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

 19   document.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il sera enregistré aux fins

 21   d'identification comme tout à l'heure.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce D285, avec cote

 23   temporaire.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est le document 1D01355 dont je demande

 25   maintenant l'affichage sur les écrans.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Docteur, j'ai remarqué à plusieurs

 27   reprises que vous étiez distrait par les gestes de l'accusé qui consulte

 28   son conseil juridique, mais ne perdez pas de vue que vous êtes en train de

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  1   répondre aux Juges de la Chambre.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, Monsieur.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Toutes mes excuses également, mais croyez-moi,

  4   je suis le compte rendu d'audience sur l'écran en même temps que j'écoute.

  5   Ce qui m'intéresse avant toute chose, c'est de bien entendre ce qui est

  6   dit.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Alors, est-ce que nous voyons bien ici un appel qui est fait aux

  9   municipalités non-serbes, entre guillemets, un appel à nous rejoindre ?

 10   R.  J'ai simplement remarqué, et je rappellerais que vous avez toutes

 11   capacités à accomplir en même temps des tâches multiples.

 12   Q.  Est-ce que vous voyez ce titre, entre les guillemets : "Appel aux

 13   municipalités non-Serbes de nous rejoindre" ? C'est le passage qui est

 14   entouré d'un cercle. Non, le deuxième passage annoté. J'aimerais que l'on

 15   affiche le bon passage à l'écran. Donc, vous voyez, il y a un premier

 16   passage entouré d'un cercle de couleur rouge, dont je demande

 17   l'agrandissement. Dernier paragraphe, page 2 de la version anglaise.

 18   Alors les dirigeants de la Krajina, Kupresanin, Brdjanin, Dragan

 19   Knezic, et cet homme de Drvar s'expriment, et voilà ce qu'ils disent, je

 20   cite :

 21   "Toutefois, si les doutes quant aux motivations économiques

 22   favorables à ce regroupement ont peut-être parfois été justifiés parce que

 23   les arguments scientifiques et autres manquaient peut-être de persuasion,

 24   ces doutes devraient se dissiper après l'invitation que les députés de

 25   Banja Luka ont adressée pendant la dernière réunion de l'assemblée

 26   municipale en appelant toutes les autres municipalités de la Krajina de

 27   Bosnie demeurées hors de l'assemblée régionale des municipalités, à les

 28   rejoindre pour quelque motif que ce soit. Donc la Krajina de Bosnie devrait

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  1   finalement sortir de la misère et de la pauvreté."

  2   Conviendrez-vous que ceci illustre toujours une rivalité entre Banja Luka

  3   et Sarajevo et que la Krajina se considérait appauvrie parce que Sarajevo

  4   était le centre financier principal ?

  5   R.  Ceci est un extrait d'un journal du parti SDS, "Javnost", je crois,

  6   n'est-ce pas ?

  7   Q.  Oui, mais c'est un rapport, un PV de la conférence, la conférence qui a

  8   réuni des dirigeants de la Krajina.

  9   R.  Je crois que c'est seulement dans un journal officiel du SDS que ce

 10   genre de récit pouvait être diffusé, parce que c'est un récit purement

 11   unilatéral de ce qui était en train de se passer, et il est clair que je

 12   suis tout à fait d'accord quant au fait que les dirigeants de la Krajina de

 13   Bosnie étaient en train d'inviter toutes les autres municipalités de la

 14   région à les rejoindre. En fait, ils l'ont même proposé dans des termes

 15   assez autoritaires, mais la vraisemblance que les personnes interpellées

 16   réagissent positivement au moment où cet article a été publié était

 17   pratiquement inexistante, parce que les autres partis et représentants des

 18   autres partis non nationaux ont considéré cette invitation comme un pur

 19   exercice de forme de la part du pouvoir et aucune de ces municipalités qui

 20   avait moins qu'un pourcentage approchant la majorité absolue n'aurait eu la

 21   moindre idée d'accepter cette offre. Le seul moment où les municipalités

 22   ont fini, à une époque ultérieure, par rejoindre les organismes qui ont

 23   succédé à ces associations de municipalités, organismes qui, dès lors,

 24   étaient baptisés régions autonomes de Krajina, et lorsque donc d'autres

 25   assemblées municipales ont rejoint cette Région autonome de Krajina, c'est

 26   au moment où les municipalités séparatistes serbes ont fait paraître un

 27   document en octobre 1991.

 28   Q.  Non, ce n'était pas exactement octobre, enfin, on pourra y revenir.

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  1   R.  Ah, oui, oui. Excusez-moi, excusez-moi. C'était en décembre. Merci de

  2   m'avoir repris.

  3   Q.  Ce n'était donc pas en septembre. C'était en décembre.

  4   R.  Décembre.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais le versement au dossier de ce

  6   passage.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Et je vous pose la question suivante : est-ce que vous distinguez entre

  9   un journal officiel et une autre publication ? Ceci n'est pas un journal du

 10   SDS, mais c'est le SDS qui a créé ce journal.

 11   R.  Je pense qu'il y a de nombreux éléments, y compris des déclarations

 12   prononcées devant l'assemblée des Serbes de Bosnie et dans diverses

 13   réunions du SDS, qui indiquent que ce journal était publié par vos

 14   collaborateurs les plus proches, qui se vantaient des réalisations du parti

 15   dans ce journal et présentaient les positions du parti dans ce journal. Je

 16   ne pense pas qu'il y ait la moindre question quant au fait que c'était le

 17   journal officiel du SDS. Le SDS l'a créé et il rendait très fidèlement

 18   compte des positions du SDS dans ses diverses parutions. Mais il y a une

 19   différence entre le journal officiel, qui est le journal dans lequel sont

 20   publiés les décisions, décrets, et cetera, et le fait qu'un parti publie

 21   son journal représentatif.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Ce document est admis en tant que

 23   pièce D286. Dernière question pour aujourd'hui, Monsieur Karadzic.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document 1D1418.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Vous voyez que c'est là le point de vue des Musulmans par rapport à la

 27   décision de créer une nouvelle municipalité. On discute donc du chef-lieu

 28   qu'est Banja Luka et une décision est prise quant au fait que cette

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  1   municipalité devrait rejoindre ou pas l'assemblée des municipalités de la

  2   Krajina de Bosnie. Donc, les actions entreprises suivent trois axes :

  3   "Premièrement, adopter une décision politique préalablement à la création

  4   de la municipalité Banja Luka-Stari Grad.

  5   "Deuxièmement, adopter une décision politique quant à la nécessité

  6   d'adhérer à la municipalité Banja Luka-Stari Grad pour faire partie de la

  7   région de la Krajina bosniaque.

  8   "Troisièmement, assurer la défense économique de la municipalité de Banja

  9   Luka-Stari Grad."

 10   Alors, c'est un texte qui vient du Parti de l'Action démocratique de Banja

 11   Luka. J'aimerais que nous l'examinions, que nous voyions à quelle date ce

 12   document a été rédigé. Septembre. Oui, septembre 1991. Est-ce que vous

 13   saviez que le SDA avait déjà une activité propre allant dans ce sens à

 14   cette époque-là ?

 15   R.  Oui. Le SDA a proposé de créer et a créé, je crois, trois ou quatre

 16   municipalités dans les zones ou régions majoritairement peuplées de Serbes.

 17   Je crois que cela s'est passé à Janja, à Ilijas, à Sarajevo et ici, dans le

 18   secteur indiqué dans ce document également. Banja Luka, donc, faisait

 19   partie d'un plan de restructuration des municipalités, plan très vaste. La

 20   municipalité de Banja Luka était très importante en superficie, elle avait

 21   130 représentants à l'assemblée, si je ne me trompe, et donc, il était

 22   possible de créer cinq nouvelles municipalités à partir de cette

 23   municipalité de Banja Luka. Deux devaient être serbes, si je ne me trompe,

 24   une musulmane et une autre, autre chose. Il est possible que je me trompe

 25   dans les chiffres.

 26   Mais en tout cas, la réaction a été vive par rapport à ces projets du SDS

 27   de proclamer la création de régions autonomes serbes, et les choses ne sont

 28   pas allées très loin. Aucun de ces projets n'a réellement vu le jour,

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  1   contrairement à la politique des municipalités locales mise en œuvre par le

  2   SDA.

  3   Et très franchement, je suis ébahi de trouver cette référence à la région

  4   de la Krajina de Bosnie, mais il est possible que cette mention que l'on

  5   voit ici qui est faite donc de la Région autonome de Krajina de Bosnie,

  6   soit une référence à une ancienne forme d'association qui n'était plus à

  7   l'ordre du jour, en tout cas, d'après les Serbes, mais il est possible

  8   aussi que ceci fasse référence à l'Association des Municipalités de Bihac,

  9   qui est une association créée avant le début de cette campagne de

 10   régionalisation au début de 1991.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais poser une question supplémentaire.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Est-ce que vous vous rendez compte que dire Région autonome de Krajina,

 14   ce n'est pas la même chose que dire Région autonome serbe, ce n'est pas une

 15   SAO. La SAO c'est une chose, région autonome serbe. Mais ici, nous parlons

 16   d'une région autonome de Krajina qui n'a pas le qualificatif de serbe, donc

 17   c'est autre chose.

 18   R.  Vous avez raison, ce n'est pas le cas. Je ne sais pas vraiment à quoi

 19   cela fait référence.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous allons terminer pour

 21   aujourd'hui. Je remercie tous ceux qui nous ont assistés, qui nous ont

 22   aidés dans le prétoire pour leur patience, et nous allons pouvoir verser

 23   cette pièce au dossier.

 24   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D287.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous reprendrons nos débats demain à 9

 26   heures.

 27   --- L'audience est levée à 14 heures 03 et reprendra le mercredi 9 juin

 28   2010, à 9 heures 00.