Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 18 août 2010

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tout le monde.

  7   Et bonjour, Colonel Mole.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, poursuivez, je vous

 10   en prie.

 11   LE TÉMOIN : RICHARD MOLE [Reprise]

 12   [Le témoin répond par l'interprète]

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 14   Bonjour à tout le monde. Bonjour, Colonel.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 16   Contre-interrogatoire par M. Karadzic : [Suite]

 17   Q.  [interprétation] Hier nous avons confirmé que vous n'étiez pas d'accord

 18   avec ce qu'indiquait la presse, et j'aimerais vous rappeler à ce sujet

 19   qu'un officier pour lequel vous aviez beaucoup d'estime et que vous aviez

 20   proposé pour qu'il soit promu, j'aimerais vous rappeler donc que dans son

 21   journal de bord, ce dont vous avez convenu d'ailleurs, il se trouve de

 22   nombreux exemples de son propre désaccord à propos de ce qu'indiquaient les

 23   médias ?

 24   R.  Vous faites référence à un journal de bord que vous avez mis à ma

 25   disposition au début de la semaine. C'est la première fois que j'avais eu

 26   la possibilité de me pencher sur ce journal de bord, et donc je comprends

 27   très bien à quoi vous faites référence, exactement.

 28   Q.  Mais est-ce que vous conviendrez que vos observations ainsi que les

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  1   observations du général Morillon et de M. Henneberry étaient avancées pour

  2   essayer d'obtenir un juste équilibre dans les relations, parce que cette

  3   façon de présenter la situation de façon très partielle représentait un

  4   obstacle, une entrave à la paix ?

  5   R.  Ces avis dont vous parlez, qui étaient les points de vue de la presse,

  6   nous compliquaient la tâche en quelque sorte. C'est ainsi que nous

  7   percevions la situation. Cela nous compliquait la tâche. Je pense que vous

  8   êtes informé des détails en question et, en fait, cela compliquait la tâche

  9   des factions belligérantes également lorsque leurs intentions - et là je

 10   parle du camp serbe - lorsque les intentions du camp serbe semblaient faire

 11   l'objet en quelque sorte de commentaires retors de la part de la presse,

 12   cela leur compliquait la situation.

 13   Q.  Merci. Hier vous nous avez dit que vous n'aviez pas reçu d'information

 14   ou de renseignement de la part des journalistes qui étaient venus visiter

 15   notre camp et que vous, vous-même, craigniez d'être considéré comme un

 16   espion. Alors, est-ce que cela signifie que l'espionnage en quelque sorte

 17   aurait permis d'obtenir des renseignements à propos des Serbes, et les

 18   renseignements auraient pu être relayés à quelqu'un d'autre ?

 19   R.  Oui, ce que vous dites est tout à fait exact, car je dois dire que nous

 20   étions particulièrement conscients. Car l'une des conséquences de ces

 21   préoccupations a été que le groupe des observateurs militaires a œuvré pour

 22   garantir que si vous vous trouviez du côté de la présidence à Sarajevo,

 23   vous n'étiez jamais déployé du côté Lima, et vice-versa. Et la seule

 24   personne qui transitait entre les factions belligérantes à Sarajevo,

 25   c'était moi-même, et je dois dire que j'ai toujours fait en sorte

 26   d'expliquer à toutes les personnes que lorsque je leur demandais des

 27   renseignements, je leur demandais ces renseignements pour pouvoir

 28   m'acquitter de ma mission, mission que j'expliquais aux personnes avec qui

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  1   je m'entretenais, car je souhaitais pouvoir établir une relation de

  2   confiance pour qu'elles puissent me parler dans le contexte bien précis de

  3   la mission dont je devais m'acquitter. Moi, je n'étais pas présent sur ces

  4   lieux pour prendre le parti d'un camp ou de l'autre. Il y avait la

  5   dimension humanitaire de ma mission qui était au cœur de mes

  6   préoccupations.

  7   Q.  Merci. Donc je dois dire que vous avez pu communiquer avec le camp

  8   serbe, que vous avez obtenu certains résultats positifs, donc vous avez

  9   toujours pu obtenir tout ce que vous avez souhaité au niveau le plus élevé

 10   et la plupart de ce que vous avez demandé d'ailleurs, même en ce qui

 11   concernait les niveaux les plus subalternes. Et nous voyons le journal de

 12   bord de M. Hennebery. Nous voyons, en fait, qu'il y a quand même eu une

 13   relation de confiance, une bonne relation qui avait été établie entre la

 14   FORPRONU et les Serbes. Vous avez également confirmé que vous ne receviez

 15   absolument pas de renseignement de la part des journalistes étrangers qui

 16   revenaient du territoire serbe. S'ils vous avaient donné à vous, par

 17   exemple, ou à d'autres des renseignements qu'ils auraient obtenus dans le

 18   camp serbe, est-ce que ça aurait été perçu comme une activité d'espionnage,

 19   donc au sens que nous lui avons donné un peu plus tôt ?

 20   R.  Je pense qu'il faut préciser et nuancer le type de renseignement qui

 21   aurait pu m'être donné par des agences de presse avant justement de décider

 22   si ces informations étaient utiles par rapport aux activités auxquelles

 23   vous avez fait référence. Moi, je n'ai jamais considéré que les agences de

 24   presse disposaient de meilleurs renseignements que moi. Je disposais d'un

 25   réseau. Ce réseau me permettait de me faire une idée beaucoup plus générale

 26   des événements dans toute la Bosnie, et plus précisément à Sarajevo.

 27   Et je dois également vous expliquer qu'avant mon arrivée à Sarajevo,

 28   j'étais l'officier chef des opérations pour tout le groupe des observateurs

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  1   militaires des Nations Unies, ce qui signifie que j'assumais une

  2   responsabilité dans toute la région, région qui incluait la Serbie, la

  3   Croatie ainsi que la Bosnie. Par conséquent, je dois dire que je disposais

  4   de nombreux renseignements, d'éléments d'information. Je ne veux pas pécher

  5   par excès d'arrogance, mais je pourrais m'avancer quand même à dire que la

  6   presse aurait obtenu beaucoup plus d'informations de ma part que le

  7   contraire lors d'une discussion entre la presse et moi-même. Par

  8   conséquent, vous me présentez une suggestion, vous m'avez indiqué donc que

  9   la presse aurait pu me donner des renseignements qui auraient été utiles

 10   dans le cadre d'une activité d'espionnage, et je ne pense pas que ce soit

 11   particulièrement pertinent, parce que je pense que je disposais de ces

 12   renseignements et que les renseignements dont je disposais étaient

 13   meilleurs.

 14   Q.  Merci. Non, non, je ne suis pas en train de remettre en question le

 15   comportement des officiers des Nations Unies. Je parlais plutôt en

 16   considérant la perspective des Serbes, et je pense au comportement des

 17   parties pendant la guerre. Parce que si des correspondants de notre camp

 18   avaient obtenu, par exemple, de façon fortuite, des informations et les

 19   avaient relayées à quelqu'un de façon confidentielle plutôt que de les

 20   publier, est-ce que cela aurait fait en sorte que les Serbes soient

 21   préoccupés et soient en quelque sorte inquiétés par ces personnes ? Je ne

 22   vous parle pas du personnel des Nations Unies, mais là je vous parle des

 23   représentants de la presse, si un représentant de la presse venait à

 24   transmettre de façon secrète les renseignements qu'il avait obtenu à

 25   quelqu'un. Est-ce que vous pourriez peut-être me répondre juste par oui ou

 26   par non.

 27   R.  [aucune interprétation]

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur. J'étais en train

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  1   d'hésiter moi-même.

  2   Monsieur Hayden.

  3   M. HAYDEN : [interprétation] M. Karadzic a posé une question au témoin,

  4   mais il demande au témoin de se livrer à des conjectures en nous expliquant

  5   quels auraient été le point de vue ou les sentiments du camp serbe, et je

  6   ne pense pas que le témoin soit à même de le faire.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suis d'accord. Je ne pense pas qu'il

  8   faille demander au témoin de se livrer à des conjectures. Quelle est la

  9   véritable question que vous voulez poser ? Posez-la au témoin.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je dois dire que j'admire le point de vue du

 11   colonel Mole et de ses collaborateurs qui ont toujours essayé de ne pas

 12   être perçus comme des espions. C'est un point de vue tout à fait justifié,

 13   mais je m'interroge. Je me demande tout simplement si les autres avaient le

 14   même point de vue. Est-ce que cela constitue -- c'est la question que je

 15   posais.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, au lieu de nous

 17   présenter des points de vue, j'aimerais que vous nous posiez la question.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Donc si vous, vous aviez appris quelque chose lors de vos contacts avec

 20   nous, non pas seulement vous, mais quelqu'un d'autre, et si cette

 21   information avait été relayée à une partie tierce, est-ce que vous pensez

 22   que cela aurait été une façon de respecter les règles du jeu ?

 23   R.  Ecoutez, je m'excuse, mais je dois vous dire que je ne comprends pas

 24   votre question. Vous me demandez "si c'est une façon de respecter les

 25   règles du jeu." Je ne comprends pas.

 26   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Colonel Mole, il est évident que

 27   vous relayiez des informations à vos supérieurs hiérarchiques.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

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  1   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Donc les informations que vous

  2   obteniez étaient transmises à une partie tierce. Et je pense que le Dr

  3   Karadzic vous demande si cela faisait partie, en fait, de votre mandat, le

  4   fait de transmettre des informations à l'autre camp dans le contexte d'un

  5   conflit militaire. Vous nous avez dit que vous, vous ne le faisiez pas et

  6   vous ne vouliez surtout pas être perçu comme une personne ayant ce

  7   comportement; c'est cela ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que je peux répondre maintenant.

  9   Je vous dirais que lorsque je recevais des renseignements, quelle que fût

 10   la source de ces renseignements, j'ai toujours essayé de faire en sorte de

 11   forger une relation de confiance avec les personnes. Je souhaitais que les

 12   personnes me fassent confiance, et moi, personnellement, j'utilisais

 13   lesdites informations pour ma gouverne personnelle et pour la gouverne

 14   personnelle de mes officiers dans le cadre de ma mission. Mais je dois dire

 15   que j'ai été très sélectif lorsqu'il s'agissait de transmettre ces

 16   informations ou ces renseignements. J'ai appris beaucoup de choses que les

 17   autres observateurs militaires n'ont pas appris. J'ai également beaucoup

 18   obtenu de renseignements que je n'ai jamais relayés à mes supérieurs

 19   hiérarchiques, parce que c'étaient des renseignements que j'utilisais

 20   localement dans le contexte local pour mes propres objectifs, qui étaient

 21   les objectifs d'un observateur militaire des Nations Unies, d'où mon

 22   hésitation et mes difficultés à répondre à la question d'ailleurs, parce

 23   que ce n'était pas ainsi que j'utilisais lesdits renseignements. Alors

 24   peut-être que c'est la réponse que j'apporterais à cette question.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Merci. Une question de suivi à la suite de la question très utile posée

 27   par M. le Juge Morrison. Vous, vous ne vous êtes pas livré à ce type

 28   d'activité. Mais si quelqu'un d'autre l'avait fait, est-ce que cela aurait

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  1   été considéré comme une activité

  2   d'espionnage ?

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais il n'appartient pas au témoin de se

  4   livrer à des conjectures. Posez des questions précises, Monsieur Karadzic.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Conviendrez-vous que les Musulmans, en fait, ciblaient leurs propres

  8   quartiers dans la ville, qu'il y avait des obus qui étaient dirigés et

  9   pointés contre leurs propres quartiers, leur propre population, dans le but

 10   de faire en sorte qu'ils soient considérés comme des victimes, ce qui donc

 11   était une façon d'engendrer un sentiment de compassion internationale,

 12   ainsi que, bien entendu, l'intervention militaire à laquelle vous avez fait

 13   référence ?

 14   R.  Je dois dire que c'est une excellente question, quoique très polémique.

 15   Car j'ai déjà expliqué, ou j'ai déjà en tout cas essayé d'expliquer lors de

 16   ma déposition que lorsque des incidents font l'objet d'enquêtes, il ne faut

 17   pas oublier que nous ne nous trouvions pas dans une situation de cessez-le-

 18   feu, il ne faut pas oublier que la guerre continuait à faire rage et que,

 19   de ce fait, une analyse exhaustive légale et scientifique de tous les

 20   incidents tels que ce que nous avons pu voir dans les rapports d'incidents

 21   qui ont été examinés hier, du fait de l'état de guerre ce type d'analyse

 22   était impossible, ce type d'évaluation. Et de surcroît, des suggestions ont

 23   été présentées. Il y avait suffisamment d'incertitudes qui planaient pour

 24   que les membres de la FORPRONU puissent être assez sûrs que ce que vous

 25   avez avancé était véridique. Mais du fait de ce que je viens de dire, je ne

 26   suis pas en mesure de vous parler d'incidents bien précis parce que dans

 27   l'environnement dans lequel nous nous trouvions, je mets au défi quiconque

 28   de pouvoir mener à bien une analyse et une enquête scientifiques dignes de

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  1   ce nom afin de prouver que votre suggestion est véridique ou ne l'est pas,

  2   d'ailleurs. Donc tout ce que je peux vous suggérer c'est que nous en tant

  3   qu'observateurs militaires des Nations Unies avions un certain sentiment de

  4   malaise, parce que nous envisagions que ce que vous venez d'avancer aurait

  5   pu être vrai. Mais il faut savoir qu'il y a de nombreuses nuances qu'il

  6   faut apporter à ce que je viens de dire. Cela ne pouvait pas être établi et

  7   déterminé comme un fait, mais il y avait quand même des soupçons assez

  8   lourds qui pesaient.

  9   Q.  Merci. Dans votre déclaration harmonisée, paragraphe 121, vous nous

 10   livrez cette réflexion; vous faites état d'incidents à propos desquels vous

 11   avez posé des questions et vous indiquez que cela a engendré en vous

 12   certains soupçons à propos de l'origine des tirs. Et dans votre déclaration

 13   de l'année 1997, à la page 12, vous dites que les Musulmans avaient utilisé

 14   Sarajevo afin en quelque sorte de faire perdurer leur statut de victimes.

 15   Alors que dans l'affaire Galic, M. Henneberry indique que des enquêtes ont

 16   été menées à bien à propos de certains incidents, que ces enquêtes avaient

 17   été effectuées par les Nations Unies et que ces enquêtes l'avaient poussé à

 18   croire que pour des raisons politiques il n'avait pas été indiqué de façon

 19   catégorique que les Musulmans avaient bombardé leur propre population, mais

 20   que lui, lui-même, disposait de ce type d'information qui avait été

 21   collectée, entre autres, par les observateurs militaires, et que tout

 22   convergeait pour indiquer que les Musulmans étaient à l'origine de ces tirs

 23   et qu'à certaines occasions ils avaient même bombardé leur propre

 24   population. Il l'a dit dans l'affaire Galic lorsqu'il a présenté sa

 25   déposition du 22 mai 2002, à la page 80 734 et 80 735. Donc j'aimerais

 26   savoir si cette information qu'il nous donne correspond à la vôtre, ou en

 27   tout cas est compatible avec ce que vous pensez ?

 28   R.  Vous venez de me donner lecture d'un extrait, et je connaissais

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  1   l'officier en question et je dirais que ce qu'il a dit reprend un point de

  2   vue assez semblable de celui que je viens de vous décrire.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaiterais demander l'affichage du

  4   document 1D2226, je vous prie, pages 8 734 et 8 735, juste pour que nous le

  5   parcourions très rapidement. Il s'agit du passage en question, passage qui

  6   a été confirmé par le colonel Mole. Alors, je donne lecture :

  7   "A propos des funérailles, je ne m'en souviens pas. Il y a d'autres

  8   incidents qui ont fait l'objet d'enquêtes. Je pense que pour des raisons

  9   politiques, aucune déclaration publique catégorique n'a été faite indiquant

 10   que les Musulmans bombardaient leur propre population. Toutefois, si je

 11   peux me permettre d'utiliser le terme que cela était de 'notoriété

 12   publique,' à savoir que les enquêtes convergeaient vers le fait que les

 13   forces musulmanes ont parfois bombardé leurs civils."

 14   Est-ce que cela pourrait être versé au dossier ? Nous pourrions également

 15   d'ailleurs examiner la page suivante.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Avant que nous ne le fassions,

 17   Monsieur Hayden, je vous en prie.

 18   M. HAYDEN : [interprétation] Je ne pense pas qu'il soit judicieux de verser

 19   au dossier un extrait d'une déclaration d'un autre témoin. Car il y a des

 20   dispositions dans le Règlement qui permet d'envisager le versement au

 21   dossier de dépositions écrites de témoins. Parce qu'il faut savoir que

 22   maintenant l'extrait en question a été lu.

 23   M. TIEGER : [interprétation] Et j'aimerais rappeler à la Chambre de

 24   première instance que nous avions déjà abordé cette question, et la Chambre

 25   avait déterminé à l'époque qu'elle autoriserait l'accusé à faire référence

 26   à la déclaration d'un autre témoin, pour que l'accusé puisse poser sa

 27   question, mais la Chambre avait décidé de ne pas verser au dossier la

 28   déposition à proprement parler.

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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  2   [La Chambre de première instance se concerte]

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce que le Colonel Mole a confirmé figure

  4   déjà au dossier. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de verser au dossier

  5   cela de façon séparée. Nous sommes d'accord avec les observations de M.

  6   Tieger et de M. Hayden.

  7   Poursuivez, je vous prie.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je suis également d'accord avec cela.

  9   Parce que le compte rendu d'audience représente également ou constitue

 10   également des preuves, n'est-ce pas ?

 11   Est-ce que la page suivante -- ou plutôt, non, la page précédente pourrait

 12   être affichée. Attendez un petit moment. En fait, il s'agit, d'après moi,

 13   de la page précédente.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je dois préciser quelque chose. Cette

 15   page du compte rendu d'audience ne constitue pas des éléments de preuve en

 16   l'espèce. Il y a une procédure séparée qu'il faut suivre pour que cela soit

 17   versé au dossier.

 18   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Je pense que ce que vous entendiez,

 19   Monsieur, c'est que le compte rendu de cette affaire constitue des éléments

 20   de preuve. C'est bien cela que vous vouliez dire, n'est-ce pas ?

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui, tout à fait. Tout à fait. Ce qui

 22   figure au compte rendu d'audience, et qui a été confirmé par le témoin.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, bien sûr. Poursuivons.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ça se trouve à cette page-ci, aussi, je pense,

 25   mais il nous faut trouver le passage précis. C'est à la page qui se termine

 26   par les chiffres 34. Donc je crois qu'il nous faut la suivante.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Regardez ici à cette page :

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  1   "Les zones où il y avait des objectifs communs là où les gens faisaient la

  2   queue pour avoir des rations des Nations Unies, ou acheter le peu qu'il y

  3   avait sur les marchés. C'était les zones communes."

  4   Puis il ajoute ceci :

  5   "Comme ça, à brûle-pourpoint, je me souviens de quatre personnes qui ont

  6   déclaré que les obus avaient été tirés par les Musulmans de Bosnie et que

  7   les Musulmans avaient tiré sur les leurs, ce faisant."

  8   Puis la dernière réponse de cette page :

  9   "Ici je parle de la ville à l'intérieur des confins de Sarajevo et bien à

 10   l'intérieur de ce qu'on appelle la ligne de confrontation à l'intérieur de

 11   la partie musulmane. Je ne peux pas vous donner d'adresse pour le moment.

 12   C'est tout simplement parce que j'ai oublié ce détail."

 13   C'est ce que M. Henneberry disait, et ceci est bien conforme à vos

 14   connaissances, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Merci.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous n'avons plus besoin de ce document.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Conviendrez-vous que certaines enquêtes menées, enquêtes militaires

 20   s'entend, ne correspondaient pas tout à fait aux critères qui exigent une

 21   enquête judiciaire ?

 22   R.  Pourriez-vous poser une question plus précise ? Parce que vous parlez

 23   de "certains avis, de certaines enquêtes menées, sur le plan militaire."

 24   Pourriez-vous expliciter votre propos ? Vous parlez de quelles armées, de

 25   quelles enquêtes, avant que je ne puisse vous dire si ce type d'enquêtes

 26   ont répondu à tous les critères ou pas ?

 27   Q.  Je vais le faire.

 28   Hier, nous avons vu que les observateurs avaient pour tâche au fond de

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  1   consigner le nombre d'explosions qu'il y avait eu. Il était impossible de

  2   déterminer qui avait tiré et où était tombé l'obus. Nous avons également vu

  3   que se sont présentés certains cas, un bon nombre d'entre eux pour

  4   lesquels, lorsqu'il y a eu constat sur les lieux, on a compris qu'il était

  5   impossible de déterminer l'origine des tirs. C'est cela que je voulais

  6   dire. Je parle de la façon dont les enquêtes militaires ont été menées.

  7   Est-ce qu'elles répondaient à certains critères, ou est-ce que c'étaient

  8   des critères différents ? C'est de cela que je veux parler.

  9   R.  Vous soulevez plusieurs questions. J'ai déjà essayé de donner une

 10   explication sur certaines de ces questions. Peut-être n'ai-je pas été

 11   suffisamment clair.

 12   La Mission des observateurs ne consistait pas à recenser le nombre d'obus

 13   tirés. Les observateurs militaires étaient sur place pour procéder à une

 14   évaluation de la situation, pour fournir un soutien militaire, entre autres

 15   tâches que j'ai déjà mentionnées. Nous avions notamment pour tâche de voir

 16   comment évoluait le conflit. Le groupe des observateurs militaires n'avait

 17   pas pour mandat de mener des enquêtes pour tous les obus qui sont tombés,

 18   de voir où ils sont tombés. Il n'avait pas non plus pour tâche de

 19   déterminer ce qui était juste ou injuste sur les conflits ou le conflit se

 20   déroulant sur la ligne de front.¸

 21   Vous supposez, je pense, vous partez du postulat selon lequel les

 22   observateurs militaires et/ou la FORPRONU étaient compétents pour mener une

 23   enquête sur chacun des incidents survenus. Non, nous n'avions pas ce

 24   pouvoir. Si les gens avaient vécu dans la ville, comme moi je l'ai fait --

 25   excusez-moi.

 26   Q.  Merci. Je pense que ceci suffira. Puis-je vous demander ceci : êtes-

 27   vous d'accord pour dire qu'il y a eu, effectivement, des cas, des

 28   situations d'abus infligées par les Musulmans à des prisonniers serbes pour

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  1   obtenir les corps de Musulmans qui avaient été tués ? Vous en avez parlé à

  2   la page 17 de votre déclaration de 1997. Inutile d'en parler de façon

  3   détaillée. Mais pourriez-vous confirmer ce que vous avez qualifié à

  4   l'époque de comportement criminel, je parle de sévices infligés à des

  5   prisonniers à ces fins ?

  6   R.  Lorsqu'on procédait à un échange de corps, le camp de la présidence a

  7   dû procéder à l'échange de deux corps. Et je pense que c'est à ceci que

  8   vous pensez, s'il s'agit de personnes qui avaient déjà été inhumées. On a

  9   emmené leurs corps au bâtiment de la poste, au PTT, où moi j'ai supervisé

 10   l'échange des corps. Et c'est au cours de cet échange que des prisonniers

 11   ont été utilisés pour déplacer les corps restitués au camp serbe. J'ai été

 12   présent. J'ai formulé des observations et des objections à ceux qui

 13   représentaient le camp de la présidence lors de cet échange.

 14   Q.  Merci. Vous avez parlé de ceci dans votre déclaration de synthèse, au

 15   paragraphe 122, puis au paragraphe 128, et aussi lorsque vous avez déposé

 16   le 3 juillet 2002 dans le procès Galic, page 11 109 du compte rendu

 17   d'audience Galic. Ceci étant, êtes-vous d'accord pour dire que l'armée

 18   musulmane a souvent utilisé à des fins abusives des lieux civils pour y

 19   placer leurs pièces d'artillerie ? C'est vrai, par exemple, pour l'hôpital

 20   Kosevo. C'est ce que vous dites au paragraphe 123 de votre déclaration de

 21   synthèse, et vous le dites à la page 12 de la déclaration de 1997 aussi.

 22   Pourquoi le faisaient-ils, c'était pour attirer les tirs des Serbes, et de

 23   cette façon, on pouvait accuser les Serbes. Dans vos rapports d'octobre et

 24   de décembre 1992, vous confirmez que vos observateurs se sont rendus sur

 25   les lieux pour constater les dégâts. Ils sont donc allés dans deux

 26   hôpitaux. Vous avez déclaré que vous n'étiez pas satisfait de ce genre de

 27   comportement, lorsque des pièces d'artillerie, des véhicules blindés sont

 28   placés dans le périmètre d'un hôpital. Vous avez dit que c'est quelque

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  1   chose que vous n'acceptiez pas, mais qui s'était effectivement passé,

  2   n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Merci.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense que c'est déjà une pièce déposée par

  6   l'Accusation en tant que pièce relevant d'une autre déclaration. Il s'agit

  7   du numéro 65 ter 10864. On pourrait voir aussi la suivante, 10865.

  8   Est-ce que ces documents ont déjà été versés en tant que pièces à charge

  9   d'ailleurs ?

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Puisque ceci a été confirmé, inutile de

 12   présenter ces documents.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Mais vous en êtes d'accord ? Etes-vous d'accord pour dire que dans

 15   votre déclaration de synthèse, paragraphes 125 et 126, vous apportez la

 16   confirmation du fait que souvent l'hôpital a été touché par, disons, des

 17   tirs de riposte ?

 18   Et là, j'aimerais que nous tirions une chose au clair vous et moi :

 19   "…réponse militaire, parce que le mortier qui était plus mobile, plus

 20   aisément déplaçable, était déplacé peu de temps après avoir tiré."

 21   Etes-vous d'accord pour dire qu'ici la partie qui riposte, à savoir le camp

 22   serbe, ne doit pas nécessairement savoir que le mortier a déjà été déplacé;

 23   ce qui veut dire que ça aurait pu être qualifié de réponse militaire

 24   davantage que de tir de représailles ?

 25   R.  Imaginons que nous sommes dans un conflit. Si une des parties au

 26   conflit a l'impression qu'elle doit répondre à une action militaire, par

 27   exemple, l'utilisation de mortiers qui sont placés dans un endroit précis.

 28   Si, en réponse à une telle action, vous avez recours à la force mais que

Page 5897

  1   cette force est tout à fait disproportionnée par rapport à la force qu'il

  2   faudrait employer pour détruire cet objectif, si les tirs sont tels qu'ils

  3   sont à ce point dispersés et généralisés, ce qui veut dire que vous n'avez

  4   pas vraiment tenu compte de la source initiale du tir, à ce moment-là, je

  5   dirais que c'est pour ces raisons qu'on a souvent pensé que c'était une

  6   réaction excessive, et que le temps qui s'est écoulé entre le premier

  7   contact et la réponse, ce temps était tel qu'il était peu probable que la

  8   pièce qui avait tiré se trouve encore sur place.

  9   Puisque j'étais commandant, j'essayerais de nuancer ma réponse pour

 10   plusieurs raisons : peut-être qu'on essayait d'économiser des munitions et

 11   que ce faisant, on provoquait des dégâts collatéraux excessifs. Parce que

 12   si on essaye d'anéantir l'ennemi, il est vraiment inutile, ça ne sert à

 13   rien de répondre par des tirs. Et c'est ce que nous avons observé. Nous

 14   avons observé, si vous voulez, ces espèces de mauvais équilibres entre

 15   action et réponse, et c'est après ces observations, que nous nous sommes

 16   prononcés sous forme d'évaluations.

 17   Q.  Merci. Si l'on fait un usage abusif du lieu civil à ces fins, est-ce

 18   que c'est, à votre avis, constitutif d'infraction ?

 19   R.  Je pense que cette tactique précise a effectivement été utilisée à

 20   l'intérieur de Sarajevo.

 21   Q.  Merci. Dans votre déclaration de synthèse, mais aussi dans les rapports

 22   de novembre et de décembre, qui ont d'ailleurs déjà été versés au dossier

 23   en tant que pièces à charge, vous admettez et vous confirmez que l'armée

 24   musulmane a fait un usage abusif des lieux qui se trouvaient à proximité de

 25   la FORPRONU pour lancer des attaques contre les Serbes et pour provoquer

 26   une réponse des Serbes, là je parle des installations des Nations Unies.

 27   Vous avez aussi confirmé, au paragraphe 68 de votre déclaration de

 28   synthèse, qu'il arrivait qu'ils prennent délibérément pour cible un

Page 5898

  1   bâtiment à l'aide de chars, et il n'y avait que les Musulmans qui avaient

  2   des chars dans la zone.

  3   Etes-vous d'accord pour dire que souvent vous et les autres représentants,

  4   les représentants de la FORPRONU, avez demandé aux Musulmans de déplacer

  5   d'au moins 500 mètres leurs pièces d'artillerie pour les éloigner davantage

  6   des installations occupées par les Nations Unies ?

  7   R.  J'ai connu personnellement cette situation que vous venez de décrire,

  8   et à de nombreuses reprises, je le précise, nous avons demandé ceci à la

  9   présidence, nous avons dit que si la présidence voulait procéder à un

 10   engagement contre les Serbes, qu'elle le fasse plus loin par rapport aux

 11   installations occupées par les Nations Unies. Donc c'est un vécu personnel

 12   que je vous relate ici.

 13   Q.  Merci. Dans le journal de M. Henneberry, page 1 060 853, voici ce qu'il

 14   dit :

 15   "Les tirs sur le bâtiment des PTT venaient de la position Papa 4."

 16   Etes-vous d'accord avec cette conclusion qui se trouve dans la déclaration

 17   de -- ou dans le journal de M. Henneberry ? Et dans le rapport de décembre

 18   1992, rapport versé par le parquet, il est dit que le 18 décembre 1992 on a

 19   ouvert le feu sur un véhicule des observateurs, ce fut des tirs de

 20   mortiers, ce qui a occasionné un accident de circulation dans lequel un

 21   chauffeur serbe avait été touché. Vous vous en souvenez ?

 22   R.  Oui, je me souviens de cet incident, mais je dois apporter certaines

 23   corrections significatives.

 24   Regardez sur la carte où se trouve Papa 4. Je pense que la position

 25   est telle qu'il est impossible de voir de là le bâtiment des PTT ni la zone

 26   qui l'entoure. Vous citez quelqu'un qui se trouvait du côté Lima. Donc il

 27   était du côté serbe, à l'extérieur de la ville. Et je ne sais pas d'où il

 28   tient ces informations que vous venez de me transmettre. Mais si je me

Page 5899

  1   souviens bien, il n'y a aucune trace où que ce soit de quelque chose

  2   qu'aurait dit la position Papa 4, ou cette position devait avoir

  3   connaissance des tirs sortants, trace qui dirait que des tirs avaient été

  4   dirigés sur le bâtiment des PTT ou sur la zone l'entourant. Là, je ne peux

  5   pas accepter ce que dit ce monsieur dans son journal comme étant quelque

  6   chose qui reflète la vérité.

  7   Q.  Mais voyons ce qu'il y a dans vos rapports de décembre 1992, et ça se

  8   retrouve dans le journal de M. Henneberry, page

  9   01 062 856, s'agissant du fait que fut pris pour cible le véhicule des

 10   observateurs, ce qui a provoqué un accident de la circulation avec un

 11   véhicule serbe. Vous l'avez confirmé, n'est-ce pas ?

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Hayden.

 13   M. HAYDEN : [interprétation] Précisons une chose pour le compte rendu. Je

 14   pense que nous parlons de deux incidents différents. Le témoin répondait au

 15   premier, et maintenant M. Karadzic pose une question sur le second. Est-ce

 16   qu'on peut rendre cette différence plus claire.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 18   Avec cette réserve étant exprimée, êtes-vous maintenant en mesure de

 19   répondre à la question, Colonel ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 21   Je pense que j'ai déjà répondu à la question concernant les tirs

 22   apparemment venus de la position Papa 4.

 23   S'il y a un accident de la circulation parce qu'il y a une collision

 24   entre deux véhicules, je dirais que personne ne saura d'où venaient les

 25   tirs de départ. Si vous êtes dans le véhicule, je ne pense pas que vous

 26   serez particulièrement intéressé par la question. Ça voudrait dire que pour

 27   savoir ce qu'il en est, quelqu'un aurait prêté une attention toute

 28   particulière à ce qui se passait dans son ensemble. J'essayais d'expliquer

Page 5900

  1   quelles étaient les activités militaires quotidiennes, et je vous ai dit

  2   que pour s'intéresser à un incident précis comme celui-ci, pour essayer de

  3   déterminer l'origine d'un tir précis, essayez d'imaginer la vie telle

  4   qu'elle se passait à ce moment-là. Je vous dirais qu'essayer de déterminer

  5   un seul cas, c'était quelque chose d'impossible et quelque chose qui

  6   n'avait pas vraiment d'importance.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  N'empêche que ce véhicule des observateurs se trouvait du côté serbe, à

  9   Nedzarici, me semble-t-il. Et dans votre rapport de décembre 1990, vous

 10   laissez entendre que le tir venait du côté musulman car les Serbes n'ont

 11   pas tiré sur des quartiers serbes, n'est-ce pas ?

 12   R.  Je maintiens ce que je viens de dire.

 13   Q.  Merci.

 14   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Pourriez-vous apporter une précision

 15   à mon intention, à l'intention du Tribunal.

 16   Vous avez parlé de mortiers utilisés par la présidence, des mobiles

 17   embarqués. Mais est-ce qu'il y avait des bases embarquées, mais fixes, ou

 18   plus exactement des bases fixes d'où on utilisait toujours certains

 19   mortiers ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] En général, ce n'était pas le cas. Permettez-

 21   moi de revenir à l'accord concernant l'aéroport. Si on utilisait des

 22   mortiers sur des positions fixes, en fonction, bien sûr, de la taille de

 23   ces positions, mais si on parle de positions fixes, il s'agissait de

 24   mortiers de plus gros calibre, et manifestement ces mortiers de plus gros

 25   calibre auraient été englobés par l'accord portant sur l'aéroport et

 26   auraient été surveillés. Pour répondre à votre question, je dirais que moi,

 27   je n'ai aucun souvenir personnel de ce genre de situation que vous venez

 28   d'évoquer. Les attaques au mortier que j'ai vues ou dont j'ai le souvenir,

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  1   c'étaient des mortiers plus mobiles et de plus petit calibre.

  2   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Une question supplémentaire : est-ce

  3   que vous avez observé des armes d'artillerie à long tube ? Je ne parle pas

  4   de chars. Je parle de canons à propulsion autonome.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai une connaissance personnelle d'armes

  6   antiaériennes utilisées dans des tirs directs. Il y avait des armes

  7   lourdes, et elles étaient surveillées, par exemple, du côté serbe, mais

  8   même si elles étaient surveillées, ça n'empêchait pas qu'elles pouvaient

  9   être utilisées. Nous savions tout simplement où elles se trouvaient. Elles

 10   auraient dû rester dans un périmètre bien déterminé. Mais ce n'est pas tout

 11   à fait comme ça que ça s'est passé, parce que finalement, nous,

 12   observateurs, trouvions plus commode de voir comment évoluait la guerre en

 13   voyant où se trouvaient ces points de regroupement des armes. C'était plus

 14   facile pour les observateurs, mais ça ne voulait pas dire que ces armes

 15   n'étaient plus utilisées.

 16   Je pense qu'il y a ici une perception erronée des choses. On pensait que

 17   parce que ces armes étaient surveillées, elles n'étaient pas utilisées.

 18   Non. Elles ont été utilisées. C'était vrai pour le camp serbe, mais c'était

 19   tout à fait la même chose pour le camp de la présidence.

 20   Est-ce que je réponds assez à votre question, Monsieur le

 21   Juge ?

 22   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui, je vous remercie.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien. Merci.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie vivement de ces précisions que

 25   vous venez d'apporter.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Dans votre déclaration, vous dites que vous avez fait des observations

 28   pour le mont Igman : un véhicule blindé transporteur de troupes, deux

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  1   obusiers, deux obusiers 122, quatre canons de

  2   105-millimètres, et ceci, à la page 11 et à la page 12 de votre déclaration

  3   de 1997. Vous avez observé aussi la présence de six mortiers de 120-

  4   millimètres. Tout ce matériel a bien été utilisé depuis le mont Igman et

  5   chacune des parties tenues par les Serbes à Sarajevo, voyez-vous, pouvait

  6   subir des tirs depuis le mont Igman, n'est-ce pas ?

  7   R.  Permettez-moi de répondre par la fin. Oui, effectivement, les armes se

  8   trouvant sur le mont Igman pouvaient avoir un effet direct sur toute unité

  9   se trouvant autour de Sarajevo. Quant à savoir la composition précise des

 10   forces de la présidence sur le mont Igman, ça n'a jamais été qu'une

 11   évaluation à quelque époque que ce soit. Nous avions des officiers

 12   d'artillerie chevronnés parmi les observateurs militaires des Nations

 13   Unies, et ceux-ci ont pu procéder à des évaluations. Mais on ne saurait,

 14   sans se tromper, dire précisément combien exactement il y avait d'armes sur

 15   le mont Igman.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il vous reste 15 minutes pour procéder à

 17   la fin du contre-interrogatoire.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Avec l'aide du colonel Mole, et pour peu

 19   que je parvienne à formuler mes questions de façon à ce qu'il puisse y être

 20   répondu par un oui ou par un non, je réussirai peut-être à en terminer en

 21   15 minutes. Mais il serait regrettable que ce témoin parte d'ici sans nous

 22   avoir donné une idée complète de la situation.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Vous avez dit, Colonel, dans votre déclaration amalgamée que les

 25   Musulmans possédaient deux chars T-54, et qu'ils avaient également des

 26   armes antiaériennes qu'ils utilisaient comme s'il s'agissait d'armes de tir

 27   direct, et encore une fois dans l'affaire Galic, le 3 juillet 2002, en page

 28   11 097 du compte rendu d'audience, vous avez également dit dans votre

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  1   déposition que les Musulmans pilonnaient l'aéroport à partir de Butmir.

  2   Est-ce que vous le confirmez ici aujourd'hui ?

  3   R.  Je n'ai pas cette déclaration sous les yeux actuellement. Mais si c'est

  4   ce qui est écrit dans cette déclaration, je le maintiens.

  5   Q.  Je vous remercie. Puis dans votre déclaration amalgamée, au paragraphe

  6   104, vous confirmez que vous avez déclaré le 26 novembre 1992 que les

  7   Musulmans avaient pilonné aux mortiers le poste de transformation

  8   électrique de Blazuj, ce qui a entraîné une coupure de l'adduction d'eau,

  9   coupure qui a été leur réplique par rapport au fait que les Serbes avaient

 10   coupé l'eau à Hrasnica. Conviendrez-vous que le poste de transformation

 11   électrique et la possibilité de disposer de courant électrique était

 12   crucial vis-à-vis de la fourniture d'eau à Sarajevo ?

 13   R.  Lorsque nous organisions des missions de service public - excusez-moi,

 14   mais je ne suis pas électricien - et donc j'ai considéré, sur la base de

 15   mes lectures, que les missions de service public étaient destinées à être

 16   réalisées par les ingénieurs de la FORPRONU à partir du quartier général.

 17   Donc je ne saurais commenter ce que fait un poste de transformation

 18   électrique vis-à-vis de la fourniture d'eau.

 19   Q.  Mais ceci figure dans votre déclaration amalgamée, paragraphe 104.

 20   Rappelez-vous, Bacevo était la principale source d'eau du côté serbe, et

 21   elle recevait l'électricité à partir du poste de transformation. Alors si

 22   les Musulmans touchaient ce poste de transformation particulier,

 23   l'adduction d'eau en était automatiquement interrompue. Est-ce que vous

 24   vous rappelez cela ?

 25   R.  Si c'est écrit dans ma déclaration, alors je m'en tiens à cela et je

 26   réponds oui.

 27   Q.  Merci. Dans votre déclaration consolidée, aux paragraphes 131 et 132,

 28   nous lisons que les Musulmans ont tiré profit de la situation qui prévalait

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  1   à Sarajevo pour attirer la sympathie, et que c'est à cette fin qu'ils

  2   faisaient obstacle à la circulation des civils dans la ville et qu'ils

  3   gardaient la population de Sarajevo à l'intérieur de la ville. Voilà ce qui

  4   est écrit dans ces deux paragraphes de votre déclaration consolidée. Est-ce

  5   que vous êtes d'accord avec cela ?

  6   R.  Oui, j'ai ces deux paragraphes sous les yeux.

  7   Q.  Merci. Conviendrez-vous que pendant la période où vous vous êtes trouvé

  8   là-bas, il se trouvait à Sarajevo environ 60 000 Serbes qui étaient dans

  9   les quartiers contrôlés par les Musulmans dans la ville, et que par le

 10   truchement du général Morillon, ainsi que par la voie d'appels publics,

 11   nous, et moi personnellement, nous sommes efforcés de veiller à ce que la

 12   liberté de déplacement des civils soit garantie et que les civils aient le

 13   droit de partir pour une partie du territoire où ils s'estimaient davantage

 14   en sécurité ?

 15   R.  A l'intérieur de Sarajevo, il y avait une population très mélangée sur

 16   le plan ethnique. Je n'ai pas les chiffres exacts en tête, même si j'ai

 17   peut-être pu les citer dans des interventions précédentes. Mais oui, il y

 18   avait un nombre important de Serbes à l'intérieur de Sarajevo.

 19   Q.  Merci. Dans certains passages de votre déclaration, vous avez confirmé

 20  que le 1er Corps était stationné à Sarajevo, et que sur 70 000 membres de ce

 21  1er Corps la moitié environ se trouvait dans Sarajevo intra muros. Vous avez

 22   confirmé également avoir entendu dire que Juka Prazina et d'autres

 23   criminels avaient leurs propres brigades, n'est-ce pas ?

 24   R.  C'est exact.

 25   Q.  Conviendrez-vous que tout cela ne pouvait que constituer une

 26   provocation de la part de la partie adverse, que cela créait une pression

 27   médiatique sur les Serbes, et j'évoquerai également l'attitude partiale des

 28   journalistes, y compris de certains responsables politiques dont vous avez

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  1   parlé hier qui, effectivement, avaient une attitude anti-serbe. Alors

  2   conviendrez-vous que tous ces éléments nous éloignaient toujours davantage

  3   de la paix ? Pourriez-vous citer le nom d'un seul politicien dont

  4   l'attitude et les positions sont arrivées jusqu'à vos oreilles ?

  5   R.  En ma qualité de soldat et y compris de soldat à la retraite, je ne me

  6   sens pas très à l'aise pour répondre à cette question.

  7   Q.  Dans ce cas, nous vous épargnerons la peine de prononcer ces noms. Mais

  8   ce qui importe c'est l'idée et le concept que vous avez remarqué, concept

  9   qui était effectivement présent tout comme tous les autres concepts que

 10   vous avez remarqués et observés personnellement.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande à présent l'affichage du document

 12   1D2227.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Vous avez dit qu'il existait des indications très claires, comme on

 15   peut le lire dans cette déclaration, que, je cite :

 16   "Encore une fois, ceci indique clairement qu'il n'existait pas de structure

 17   de commandement unifié ou bien coordonné d'un côté ou de l'autre."

 18   Ça c'est ce qu'on lit dans le document 1D2227. Nous en avons dit quelques

 19   mots hier.

 20   Conviendrez-vous que le Corps de Sarajevo-Romanija a hérité ce qui

 21   existait déjà dans le cadre de l'armée présente jusqu'à ce moment-là dans

 22   ce territoire, y compris au niveau municipal, et que tous les responsables

 23   depuis le général Sipcic jusqu'au général Milosevic, ont éprouvé de graves

 24   problèmes à mettre en place une structure de commandement unifié

 25   susceptible de diriger ces unités locales ?

 26   R.  Ceci a sans aucun doute représenté une difficulté significative que

 27   j'ai constatée des deux côtés. Ce n'est pas une réalité qui n'existait que

 28   du côté serbe. Donc je comprends ce que vous dites. Et j'éprouvais pas mal

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  1   de compassion par rapport à cette situation, et je suis d'accord avec

  2   l'appréciation que vous venez de faire.

  3   Q.  Merci.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

  5   document.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] A moins qu'il n'ait déjà été admis,

  7   bien, nous admettons ce document.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Qui devient la pièce D540, Monsieur le

  9   Président, Madame, Messieurs les Juges.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande à présent l'affichage du document 65

 11   ter numéro 11575.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Ce document date de l'époque du général Sipcic -- non, non, non, du

 14   général Galic. Et c'est le colonel Marcetic qui écrit ce document dans

 15   lequel il indique que des dirigeants locaux et leurs partisans sont devenus

 16   incontrôlables dans certaines zones, et que ces difficultés se retrouvent à

 17   tout moment, à commencer par Sipcic qui les éprouve et qui a été confronté

 18   à la pire situation dans les premiers jours, après la création de la VRS.

 19   Mais que, y compris au mois de novembre, le commandement de corps est

 20   confronté au même problème. Est-ce que ceci correspond à ce que vous ave

 21   confirmé il y a quelques instants ?

 22   R.  Je vous remercie. Je n'ai pas vu ce document, évidemment, mais il

 23   concorde tout à fait à ce que nous avons pu constater nous-mêmes dans cette

 24   situation. Donc oui, je comprends votre position.

 25   Q.  Je vous remercie.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que ce document peut être versé au

 27   dossier.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourquoi nous n'avons qu'une traduction

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  1   partielle de ce document ?

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est une traduction qui date de l'affaire

  3   Galic. Nous n'avons pas de moyen suffisant pour faire traduire nous-mêmes

  4   l'intégralité de ce document, mais nous n'avons rien contre qu'une

  5   traduction complète soit réalisée.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Hayden, si cette traduction

  7   vous suffit, nous admettrons le document en l'état. Dans le cas contraire,

  8   nous l'enregistrerons aux fins d'identification.

  9   M. HAYDEN : [interprétation] S'il pouvait être enregistré aux fins

 10   d'identification. Nous en reparlerons plus tard avec vous, Monsieur le

 11   Président.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Bien, nous l'enregistrerons aux

 13   fins d'identification dans l'attente d'une traduction complète.

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document devient la pièce D541,

 15   enregistrée aux fins d'identification, Monsieur le Président, Madame,

 16   Messieurs les Juges.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Donc dans ces conditions, alors que la partie serbe subissait une

 20   pression importante de tous les côtés, pourrait-on dire, et en l'absence

 21   d'une structure de commandement unifié, est-ce qu'il est permis de penser

 22   que les salves d'obus ou les tirs ne signifiaient pas nécessairement que

 23   les autorités serbes, à commencer par les commandants supérieurs, auraient

 24   ordonné ou ourdi certains incidents ? Est-ce que vous conviendrez qu'il

 25   serait tout à fait déraisonnable, et même incompréhensible, voire tout à

 26   fait impossible à imaginer que la partie serbe, qui avait un nombre

 27   important d'officiers entraînés, se mettent tout d'un coup à se tirer des

 28   balles dans le pied jour après jour ?

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  1   R.  Ceci est sans aucun doute une question à laquelle il est impossible de

  2   répondre par un oui ou par un non. Vous déclarez que la partie serbe

  3   souffrait d'une absence totale de commandement unifié Rien ne serait être

  4   plus éloigné de la vérité. Toute formation militaire capable de lancer une

  5   mission de tir sur un secteur aussi concentré qu'Otes, en s'appuyant sur un

  6   groupe disparate qui est géographiquement avec une répartition géographique

  7   des armes lourdes, un peu partout dans une ville ne saurait illustrer

  8   l'expression absence de commandement unifié. Par conséquent, si l'on

  9   supprime cette partie de votre commentaire, de votre dernier commentaire de

 10   cette déclaration, bien, je pourrais me dire d'accord avec le reste.

 11   Q.  Je suis d'accord avec vous en ce qui concerne les opérations, mais

 12   peut-être n'ai-je pas été assez clair tout à l'heure dans ma question. Ce

 13   que j'avais à l'esprit c'était les incidents. Par exemple, vous êtes

 14   intervenu par rapport à un certain nombre d'incidents, et le commandement

 15   Suprême a immédiatement rétabli les choses. Je parlais d'incidents lorsque

 16   j'ai parlé de coups de feu. Est-ce que vous êtes d'accord que lorsque nous

 17   nous sommes rencontrés nous nous sommes mis d'accord sur le fait qu'il y

 18   avait trop d'armes en Bosnie-Herzégovine, qu'il était trop facile de s'en

 19   procurer par voie d'acquisition ? Et que je pense que vous vous en

 20   souviendrez, lorsque nous nous sommes rencontrés nous avons parlé du fait

 21   qu'il y avait trop de vols d'armement également à Sarajevo ? Lorsque je

 22   parle de vols d'armes ou d'armement, je parle de vols d'armes qui étaient

 23   la propriété de particuliers, donc je parle d'un mauvais contrôle exercé

 24   par les unités locales, étant donné le grand nombre d'incidents, et je ne

 25   pensais pas à des opérations militaires bien planifiées. Alors,

 26   conviendrez-vous qu'il existe une distinction entre les deux ?

 27   R.  Je diviserais ma réponse en deux parties.

 28   Une guerre faisait rage. Et la guerre c'est quelque chose de continu. Les

Page 5909

  1   incidents se rejoignaient les uns les autres. Ils n'étaient pas divisibles,

  2   on ne pouvait pas déclarer que tel ou tel incident avait été provoqué par

  3   une série bien déterminée d'événements. Les choses sont loin d'être simples

  4   dans une guerre. Je ne saurais vous expliquer cela, puisque vous n'êtes pas

  5   soldat et que vous n'avez pas été engagé dans des activités de cette

  6   nature, plus clairement que ce que j'essaie de faire maintenant, à savoir

  7   que la situation n'était pas une situation maîtrisée; il s'agissait d'une

  8   guerre en pleine évolution. Donc chaque incident succédait à un incident

  9   précédent et l'ensemble de ces incidents constituait un tout indivisible.

 10   On ne pouvait pas plus reprocher tel incident à telle personne que

 11   reprocher l'incident suivant à telle autre personne, et les Nations Unies

 12   n'avaient pas la possibilité d'expliquer, comme vous vous êtes efforcé de

 13   le faire à l'instant, les difficultés que vivaient les combattants.

 14   Quant à votre commentaire au sujet des armes qui étaient propriété de

 15   particuliers, oui, bien sûr, il y en avait, mais soyons tout à fait clairs

 16   sur ce point. Les armes lourdes n'étaient pas la propriété de particuliers.

 17   Toutes les armes lourdes qui se trouvaient dans les environs de Sarajevo

 18   que nous avons vues ou contrôlées étaient dans des mains autres que celles

 19   de particuliers. C'était une partie de la structure des forces dont

 20   disposaient les Serbes dans les environs de Sarajevo.

 21   Mais ce que vous avez dit au sujet de la difficulté d'exercer le

 22   commandement et le contrôle par rapport aux tentatives qui ont pu être

 23   faites pour renforcer ce commandement et ce contrôle, ce commentaire est

 24   tout à fait juste. Il y avait des difficultés au niveau géographique. Il y

 25   avait des difficultés structurelles. Il y avait des difficultés

 26   interpersonnelles. Il y avait l'histoire à laquelle vous avez fait allusion

 27   en laissant entendre que certaines zones avaient été défendues par leur

 28   population locale qui avait été absorbée par la structure militaire serbe.

Page 5910

  1   J'espère avoir expliqué les éléments que j'ai pu expliquer dans ces

  2   domaines de la façon dont vous auriez souhaité que je l'explique.

  3   Donc nous étions tout à fait conscients des difficultés et de la

  4   nature de la structure existante, mais je dois vous corriger sur les points

  5   qui ont fait l'objet du début de ma réponse s'agissant du commandement et

  6   du contrôle d'armes entre les mains de particuliers.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera votre dernière question,

  8   Monsieur Karadzic.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ne serait-il pas possible d'en poser deux,

 10   Excellences ? Voilà ce que je voulais encore demander au colonel :

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Est-ce que vous avez pu consulter le manuel militaire britannique,

 13   Colonel, et est-ce que vous conviendrez que c'est un manuel qui existe dans

 14   toutes les armées du monde et que toutes les armées sont censées respecter

 15   ?

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle est votre question, Monsieur

 17   Karadzic ?

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Lorsque nous avons rencontré le colonel, nous

 19   lui avons fourni quelques extraits tirés d'un manuel militaire de l'armée

 20   britannique, que nous utiliserons un peu plus tard durant la présente

 21   procédure, et dans ce manuel on voit que des experts expliquent le sens à

 22   donner aux expressions; cibles militaires, tirs de tireurs embusqués,

 23   cibles légitimes, et cetera, et cetera. Je voulais simplement demander au

 24   colonel s'il connaît ce manuel et s'il est au courant du fait que ce manuel

 25   présente les règles fondamentales qui régissent le comportement de l'armée

 26   britannique. Après quoi, je lui poserai ma question suivante.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais j'aimerais mieux comprendre de quel

 28   document vous parlez exactement. Est-ce qu'il s'agit des règles de conflit

Page 5911

  1   ou bien du manuel sur la Loi militaire, de quoi parlez-vous exactement ?

  2   J'ai lu pas mal de livres dans ma carrière militaire.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  C'est le chapitre 5 du manuel militaire britannique que nous vous avons

  5   remis, si vous vous en souvenez. Nous vous avons remis des extraits de

  6   l'ouvrage intitulé, Manuel militaire britannique. Est-ce que vous êtes

  7   d'accord quant au fait qu'il s'agit d'un manuel qui présente les règles que

  8   l'armée est tenue de respecter, donc les règles de base de l'armée ?

  9   R.  Merci. Oui, maintenant je comprends de quel ouvrage vous parlez. Oui,

 10   oui, celui dont nous avons discuté, je m'en souviens, oui.

 11   Q.  En page 25, ligne 5 -- ou plutôt, page 24, ligne 5 du compte rendu

 12   d'aujourd'hui en anglais. Il semblerait que vous auriez dit : "Je ne

 13   pourrais être d'accord," alors que vous avez dit, en réalité : "Je peux

 14   être d'accord."

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais qu'une correction soit apportée

 16   au compte rendu.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Puis j'en arrive à ma dernière question --

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne pense pas que le colonel Mole

 20   puisse faire dérouler le compte rendu sur les écrans à l'envers. Mais j'ai

 21   écouté attentivement, et je crois pouvoir dire que le colonel a déclaré :

 22   "Je ne saurais être d'accord." Parce que c'est une réponse qu'il vous a

 23   faite en vous disant : "Rien ne saurait être plus éloigné de la vérité," eu

 24   égard à l'absence totale de commandement unifié. A la fin de votre réponse,

 25   il a dit :

 26   "Par conséquent, si vous retirez cette partie de commentaire de votre

 27   déclaration, je ne saurais être d'accord avec le reste de ce que vous avez

 28   dit."

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ce que je voulais dire, Monsieur, je

  2   vous remercie.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est ce qu'il a dit.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je croyais avoir compris que si l'on retirait

  5   cette partie du commentaire, vous étiez d'accord avec le reste. Mais il

  6   doit s'agir ici d'une barrière linguistique entre nous.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Alors, dans votre déclaration de 1997, page 14, vous avez déclaré que

  9   vous n'aviez jamais eu le sentiment que Karadzic ou Mladic avait une

 10   implication directe dans :

 11   "…les événements de Sarajevo au jour le jour."

 12   Autrement dit, que nous n'avons jamais eu une intervention directe dans les

 13   événements de Sarajevo au quotidien, étant donné le travail que nous

 14   avions, les contacts avec les étrangers, nos voyages, et cetera. Est-ce

 15   bien ce que vous avez déclaré dans votre déclaration ?

 16   R.  Oui, et ceci est tout à fait compréhensible. C'est la raison pour

 17   laquelle le général Galic commandait le corps d'armée, et c'est la raison

 18   pour laquelle vous faisiez le travail que vous faisiez. Bien entendu, ce

 19   qui venait de l'extérieur et à quoi le général Galic réagissait c'étaient

 20   des pressions politiques, et pour le général Mladic, il est permis de

 21   penser qu'il s'agissait de pressions militaires ou de directives qui lui

 22   étaient données par des gens situés plus haut que lui. Mais c'est tout à

 23   fait juste, au quotidien, tout ceci était la mission du Corps de Sarajevo-

 24   Romanija [comme interprété].

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Colonel.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Hayden, je pense que vous

 28   pouvez poursuivre.

Page 5913

  1   M. HAYDEN : [interprétation] Nous avons encore un peu de temps avant la

  2   pause, Monsieur le Président ?

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui --

  4   M. HAYDEN : [interprétation] Je n'en aurai que pour cinq minutes, en tout

  5   cas moins de dix.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez procéder, et nous ferons la

  7   pause ensuite.

  8   M. HAYDEN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  9   Nouvel interrogatoire par M. Hayden :

 10   Q.  [interprétation] Colonel Mole, ce matin, nous parlions des observations

 11   faites par le capitaine Patrick Henneberry durant sa déposition. Vous avez

 12   fait remarquer en page 15 du compte rendu de l'audience d'aujourd'hui que,

 13   le 8 septembre en tout cas, il travaillait du côté Lima, c'est-à-dire du

 14   côté des Bosno-Serbes. Pendant votre tournée, est-ce qu'il a jamais

 15   travaillé du côté Papa ?

 16   R.  Non.

 17   Q.  Et pourquoi cela ? Pourquoi pouvez-vous dire avec certitude que s'il

 18   travaillait du côté Lima le 8 décembre, il n'aurait pas pu travailler du

 19   côté Papa ?

 20   R.  Comme je l'ai déjà expliqué, lorsque vous étiez observateur des Nations

 21   Unies et que vous étiez envoyé à Sarajevo, la dernière fois que vous voyiez

 22   les gens avec lesquels vous arriviez à Sarajevo, si eux se trouvaient de

 23   l'autre côté, c'est au moment de quitter la réunion d'information dans

 24   l'immeuble des PTT. Puis une fois que vous alliez du côté Lima ou une fois

 25   que vous restiez à l'intérieur de la ville, vous poursuiviez jusqu'à son

 26   terme votre tournée d'inspection.

 27   Q.  Est-ce que le capitaine Henneberry ou des officiers qui se trouvaient

 28   du côté Lima participaient aux enquêtes menées du côté Papa par les

Page 5914

  1   observateurs militaires des Nations Unies ?

  2   R.  Absolument pas. Non, Monsieur.

  3   Q.  Est-ce qu'ils connaissaient les communications officielles qui venaient

  4   du côté Papa ?

  5   R.  Il peut y avoir une nuance à ma réponse, parce qu'il existait tout de

  6   même des postes de radio qui fonctionnaient, donc tout le monde pouvait

  7   entendre ce qui se passait d'un côté et de l'autre à la radio. Mais

  8   n'oublions pas que le réseau radiophonique était un système physique qui

  9   était utilisé au quotidien dans un certain nombre d'activités et qu'il

 10   n'avait rien à voir avec des décisions politiques ou autres.

 11   Est-ce que ceci répond à votre question ?

 12   Q.  Merci. Si un poste d'observation -- par exemple, d'observation des tirs

 13   musulmans sur l'immeuble des PTT en ville avait existé, est-ce que ceci

 14   aurait été enregistré dans les rapports de situation quotidiens dont vous

 15   étiez l'auteur ?

 16   R.  Oui, Monsieur, oui.

 17   Q.  Colonel, en page 39 de votre déclaration consolidée, vous discutez des

 18   armes que vous avez vues en possession de la présidence du côté Papa. Hier

 19   vous avez décrit la forte dispersion des bombardements de la ville. A votre

 20   connaissance, est-ce que les armes décrites au paragraphe 39 de votre

 21   déclaration pouvaient être responsables de cette très importante dispersion

 22   des attaques sur la ville de Sarajevo ?

 23   R.  Non, les seuls équipements qui étaient à portée de la ville et qui

 24   pouvaient être responsables de ce genre de tirs et d'autres fortes

 25   explosions qui se sont produites dans la ville appartenaient à ceux qui

 26   étaient à l'extérieur de la ville.

 27   M. HAYDEN : [interprétation] Je demanderais l'affichage de la pièce D537,

 28   Monsieur le Greffier.

Page 5915

  1   Q.  Colonel Mole, c'est la carte que vous avez annotée hier au cours du

  2   contre-interrogatoire à la demande du Dr Karadzic. Vous vous rappelez avoir

  3   inscrit le chiffre "3" à l'endroit où se trouve Ilidza, ou en tout cas la

  4   partie serbe d'Ilidza, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui, Monsieur, oui.

  6   Q.  Hier, page 5 833 du compte rendu d'audience, le Dr Karadzic a appelé

  7   votre attention sur le paragraphe 84 de votre déclaration, où vous discutez

  8   de l'attaque d'Otes, et vous déclarez que :

  9   "En dehors de l'attaque d'Otes, des obus sont tombés un peu partout

 10   ailleurs dans la ville."

 11   Puis à partir de la page 5 835 du compte rendu d'audience, sur deux pages,

 12   le Dr Karadzic discute du contenu d'un article de journal transmis par

 13   l'agence France Presse, qui a été versé au dossier et constitue désormais

 14   la pièce D535. J'aimerais rafraîchir votre mémoire sur une partie de

 15   l'article qu'il a soumise à votre attention et qui se lit comme suit :

 16   "Les combats menés mardi autour de l'aéroport ont commencé lorsque les

 17   unités d'infanterie bosniennes ont attaqué les forces serbes stationnées

 18   dans la ville d'Ilidza, qui est limitrophe de l'aéroport. Les Serbes ont

 19   réagi par des tirs d'artillerie intenses qui ont secoué tout le secteur. Le

 20   commandant Barry Frewer, un porte-parole des troupes des Nations Unies à

 21   Sarajevo, a déclaré cela mercredi."

 22   Le Dr Karadzic vous a demandé si vous connaissiez le commandant Frewer et

 23   vous a dit ensuite :

 24   "Conviendrez-vous que parallèlement aux combats pour Otes et Zuc, il y

 25   avait des combats qui se menaient dans d'autres parties de la ville

 26   également ?"

 27   Et vous avez répondu que vous n'aviez remarqué aucune différence par

 28   rapport à ce que vous considériez comme des actions normales sur les autres

Page 5916

  1   parties du front.

  2   Alors, Colonel Mole, en admettant que ce qui est dit dans l'article du

  3   journal est exact, à savoir qu'il y avait des combats à Ilidza qui avaient

  4   commencé par une offensive des Musulmans de Bosnie, est-ce que ceci

  5   permettrait d'expliquer les obus dont vous dites dans votre déclaration

  6   qu'ils, je cite, "tombaient un peu partout dans la ville" ?

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle est votre objection, Monsieur

  9   Karadzic ?

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien, il s'agit ici de conjectures. La question

 11   est une question directrice qui, par ailleurs, demande au témoin des

 12   conjectures. Le témoin ne peut pas spéculer sur les intentions et les

 13   origines d'un tir, et il ne saurait établir un lien entre tel ou tel tir et

 14   tel ou tel autre événement, même si le colonel Mole a bien dit qu'une

 15   guerre était un tout indivisible. Donc nous ne parlons pas de Sarajevo,

 16   mais de toute la Bosnie-Herzégovine. Et je pense que cette question n'est

 17   pas acceptable.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, je ne suis pas d'accord avec vous,

 19   Monsieur Karadzic. C'est une question qui découle de votre question et qui

 20   ne demande pas au colonel Mole de spéculer.

 21   Est-ce que vous avez terminé votre question, ou est-ce que vous pouvez

 22   répondre maintenant, Monsieur Mole ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur, je pense que je peux répondre.

 24   J'aimerais revenir à la carte. Pourrait-on l'afficher à nouveau sur les

 25   écrans ?

 26   M. HAYDEN : [interprétation] Il s'agit de la pièce D537.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci. Je la vois qui apparaît.

 28   Si selon les observateurs une menace importante existait dans le secteur

Page 5917

  1   d'Otes, qui était donc la cible des forces serbes -- est-ce que je peux

  2   annoter la carte ?

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, vous pouvez l'annoter, mais

  4   séparément. Il faudrait que cela constitue un document distinct.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Attendez une minute, je vous prie.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous pouvons donc utiliser la couleur

  9   bleue.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis daltonien, alors…

 11   Je vais annoter la carte ici [Le témoin s'exécute]. D'après ce que je

 12   savais, les intentions nourries par les Serbes consistaient à chasser la

 13   présidence du secteur correspond au numéro "2," à savoir de l'enclave qui

 14   se trouve ici jusqu'à la ligne qui se trouve là, ce qui leur aurait permis,

 15   comme on peut le voir à l'examen de cette carte, de tracer une ligne

 16   géographique à partir de l'aéroport ou d'Ilidza ou du numéro "3" sur la

 17   carte jusqu'à la route que j'ai annotée en bleu - et donc je continuerai la

 18   ligne bleue - jusqu'ici [Le témoin s'exécute]. En dehors du problème perçu

 19   par les Serbes par rapport à Ilidza qu'ils considéraient comme dû à Otes,

 20   il y avait là aussi une espèce d'objectif tactique.

 21   Donc je reviens à votre question. Il importe, je pense, que toute action

 22   qui survienne dans le secteur numéro "2" ait immédiatement des

 23   répercussions dans la zone toute proche, donc toute attaque provenant de

 24   Butmir ou d'Ilidza, disons, ou de n'importe où ailleurs à Ilidza, aurait

 25   provoqué une réaction compréhensible par rapport à ce qui s'est passé dans

 26   le secteur d'Otes.

 27   Ce dont je suis en train de parler ici c'est ma réponse à la question du Dr

 28   Karadzic quant au niveau d'activité qui existait dans les autres quartiers

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  1   de la ville, et je crois que vous m'avez demandé de parler également des

  2   zones situées plus à l'est dans les secteurs que j'ai annotés ici. Par

  3   conséquent, le front encerclait complètement Sarajevo, et il y avait sur ce

  4   front une tension légèrement accrue, bien entendu, mais également des

  5   explosifs qui tombaient en beaucoup plus grand nombre à partir de

  6   l'extérieur de la ville et pour lesquels nous ne voyions aucun rapport avec

  7   les événements que je viens d'essayer de décrire.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Colonel.

  9   Pourriez-vous apposer votre signature et inscrire la date

 10   d'aujourd'hui au bas de ce document.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait. [Le témoin s'exécute]

 12   M. HAYDEN : [interprétation] Pas d'autres questions, Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous admettons une nouvelle fois cette

 14   carte qui constituera désormais une nouvelle pièce à conviction.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P1436, Monsieur le

 16   Président.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 18   Le Juge Morrison a quelques questions supplémentaires à vous poser.

 19   Questions de la Cour : 

 20   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Une seule, Colonel Mole.

 21   Le réseau radiophonique qui était partagé par les positions Papa et Lima,

 22   était-il crypté ou public ?

 23   R.  Il était public, Monsieur, donc chacun pouvait y avoir accès. En fait,

 24   tellement ouvert que nous fournissions des postes de radio qui avaient la

 25   même fréquence pour les officiers de liaison serbes qui travaillaient avec

 26   nous dans l'immeuble des PTT et les officiers de liaison de la présidence

 27   qui travaillaient avec nous également, notre intention étant de montrer que

 28   nos activités étaient tout à fait ouvertes.

Page 5919

  1   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Je vous remercie.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Votre déposition est arrivée à

  3   son terme. Merci d'être venu à La Haye pour témoigner.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pouvez maintenant vous retirer.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  7   [Le témoin se retire]

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons faire une pause de 20

  9   minutes et reprendrons à 11 heures. Un peu plus de 20 minutes.

 10   --- L'audience est suspendue à 10 heures 40.

 11   --- L'audience est reprise à 11 heures 04.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à vous, Messieurs Gaynor et

 13   Subotic.

 14   Je suppose que le témoin suivant sera M. Higgs, n'est-ce pas ?

 15   M. GAYNOR : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour ce qui est de la durée du contre-

 17   interrogatoire, la Chambre de première instance avait indiqué aux parties

 18   hier que M. Karadzic disposera de trois heures pour son contre-

 19   interrogatoire de M. Higgs. La Chambre estime que trois heures est une

 20   durée raisonnable pour le contre-interrogatoire de M. Higgs, et c'est une

 21   décision que nous avons prise compte tenu des critères que nous avions

 22   énoncés précédemment, et notamment au vu du fait que les éléments de preuve

 23   qui vont être présentés par M. Higgs sont quand même assez limités.

 24   Puisqu'il n'a pas mené à bien l'enquête de départ à propos des différents

 25   incidents de bombardement dont il est question dans son rapport d'expert,

 26   il fournit plutôt une analyse et il dégage ses propres conclusions compte

 27   tenu de l'examen qu'il a fait de ses rapports et en vertu de ses

 28   observations à propos des incidents en question. Donc la Chambre estime que

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  1   trois heures suffiront amplement pour contre-interroger ce témoin à propos

  2   de sa méthodologie, une méthodologie qu'il a utilisée pour dégager ses

  3   propres conclusions, et trois heures suffiront amplement donc pour lui

  4   poser des questions et pour contester ses propres conclusions.

  5   Toutefois, comme nous l'avions déjà indiqué précédemment, si au cours du

  6   contre-interrogatoire l'accusé venait à démontrer qu'il a besoin d'un temps

  7   supplémentaire, et que surtout ce temps supplémentaire est justifié, la

  8   Chambre se penchera à nouveau sur cette question.

  9   A moins qu'il n'y ait d'autres questions de procédure, je pense que nous

 10   pouvons faire entrer le témoin.

 11   Monsieur Gaynor.

 12   M. GAYNOR : [interprétation] Oui, une question de procédure, la Défense et

 13   l'Accusation sont parvenues à un accord à ce sujet, il s'agit justement du

 14   rapport de M. Higgs, l'incident intitulé, Incident G-16, qui figure à la

 15   page 12 et qui se poursuit --

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, à la page 13 à 17; c'est cela ?

 17   M. GAYNOR : [interprétation] Oui.

 18   La Défense allait présenter une requête aux fins d'exclusion de cette

 19   partie du rapport. Nous, nous acceptons que cette partie du rapport ne soit

 20   pas versée au dossier et ne soit pas retenue comme élément de preuve par

 21   rapport à l'ensemble des éléments de preuve qui vont être présentés par M.

 22   Higgs.

 23   Toutefois, nous réservons la position que nous avions établie dans notre

 24   requête du 31 août 2009, et que nous avons répétée d'ailleurs dans la

 25   notification qui a accompagné l'acte d'accusation modifié en l'espèce. Nous

 26   estimons qu'il va dans l'intérêt de la justice que dans certains cas, la

 27   Chambre de première instance entende des éléments de preuve à propos

 28   d'incidents qui ne font plus partie de l'acte d'accusation conformément à

Page 5921

  1   l'article 73 bis. Et entre autres, nous allons nous appuyer sur la décision

  2   de la Chambre d'appel dans l'affaire Seselj, décision du 9 janvier 2008.

  3   Donc je n'ai peux pas en dire davantage pour le moment, mais nous nous

  4   réservons le droit d'intervenir à ce sujet.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  6   Quoiqu'il en soit, ces extraits, ces parties qui ne seront pas

  7   versées au dossier, est-ce qu'elles vont faire l'objet

  8   d'expurgation ?

  9   M. GAYNOR : [interprétation] Non. Nous n'avons pas encore pris cette

 10   mesure, mais --

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous allez la prendre cette mesure,

 12   n'est-ce pas ?

 13   M. GAYNOR : [interprétation] Oui, tout à fait.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Je vous remercie pour nous avoir

 15   présenté cet accord, et je souhaiterais que l'on fasse entrer le témoin.

 16   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Monsieur Higgs.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Auriez-vous l'amabilité de prononcer la

 20   déclaration solennelle.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 22   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 23   LE TÉMOIN : RICHARD HIGGS [Assermenté]

 24   [Le témoin répond par l'interprète]

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, et je vous demanderais

 26   de bien vouloir prendre place.

 27   Monsieur Gaynor.

 28   M. GAYNOR : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

Page 5922

  1   Interrogatoire principal par M. Gaynor:

  2   Q.  [interprétation] Est-ce que vous pourriez décliner votre identité aux

  3   fins du compte rendu d'audience ?

  4   R.  M. Richard James Higgs.

  5   Q.  Est-ce que vous êtes de nationalité britannique ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Vous avez fait partie de l'armée britannique pendant 22 ans, entre

  8   l'année 1980 jusqu'à l'année 2002 ?

  9   R.  C'est exact.

 10   Q.  En fait, entre 1987 et 2002, est-ce que vous pourriez indiquer à la

 11   Chambre de première instance quelle était la nature de vos fonctions

 12   pendant cette période ?

 13   R.  A partir de l'année 1987, j'ai travaillé dans le domaine des mortiers

 14   précisément. J'ai commencé par enseigner au sein d'une institution de

 15   formation. Donc il s'agit d'enseignement de mortiers à différents niveaux

 16   de compétence. Il s'agit de soldats de l'armée britannique auxquels j'ai

 17   enseigné. Il y avait également des étudiants internationaux. Je leur

 18   enseignais le déploiement opérationnel. Je leur fournissais des

 19   informations techniques ainsi que tactiques et leur transmettait les

 20   connaissances balistiques de l'époque.

 21   Puis j'ai eu un rôle de conseiller auprès de nos forces cantonnées en

 22   Allemagne et j'étais responsable de toute la formation, et là encore il

 23   s'agissait de fournir un enseignement tactique, technique et balistique. Je

 24   les aidais au cas où il y aurait eu des incidents de sécurité auxquels il y

 25   aurait eu une enquête à propos de mortiers. C'était moi qui me chargeais de

 26   cela en leur nom. Je leur fournissais des conseils en bonne et due forme

 27   pour garantir que tout était fait correctement et pour mener l'enquête s'il

 28   y a eu un incident pour savoir quelle avait été la cause de l'incident, par

Page 5923

  1   exemple.

  2   Puis j'ai eu un rôle assez semblable, mais cette fois-ci je

  3   travaillais de façon beaucoup plus générale, car je ne conseillais pas

  4   seulement l'armée britannique mais également des armées étrangères à

  5   propos, une fois de plus, de l'utilisation opérationnelle des mortiers et

  6   de leur capacité balistique et technique. Puis je me suis également

  7   intéressé à la mise au point de mortiers. Puis mon dernier rôle en tant

  8   qu'instructeur et formateur de l'armée britannique, je suis devenu l'expert

  9   du domaine des mortiers, de la division des mortiers. Donc je suis devenu

 10   l'expert technique, s'il en fût, des mortiers, et en tant que tel, j'ai

 11   fourni des conseils à l'armée britannique une fois de plus dans le domaine

 12   de la formation. Il s'agissait également de conseils à propos de critères

 13   tactiques et opérationnels. Mais j'ai dirigé et j'ai enseigné également

 14   dans le domaine de la sécurité balistique. Ma spécialité, en fait, ou mes

 15   responsabilités consistaient à m'assurer que tous les tirs étaient

 16   effectués en toute sécurité en suivant la méthodologie et la bonne

 17   procédure. J'ai également fourni des conseils pendant cette période à

 18   plusieurs pays étrangers et toujours à propos des mêmes domaines de

 19   compétence.

 20   Q.  Alors, je suppose que vous avez assisté à un grand nombre d'exercices

 21   de tir pendant votre carrière. Est-ce que vous pourriez indiquer le nombre

 22   d'exercices de tir auxquels vous avez participé ?

 23   R.  Il m'est difficile de fournir un chiffre exact. Mais lorsque j'étais

 24   formateur, je dirais, que pendant des semaines, de longues semaines, nous

 25   avions des exercices de tir, trois ou quatre fois par semaine. Lorsque je

 26   me trouvais en Allemagne, je visitais à raison de trois à quatre jours des

 27   sites où se produisaient des exercices de tir. Donc cela représente non pas

 28   des centaines mais des milliers de tirs pour chaque journée d'exercice de

Page 5924

  1   tir.

  2   Q.  Est-ce que vous pourriez indiquer le nombre d'analyses de cratère que

  3   vous avez effectuées lors de votre carrière ?

  4   R.  Pendant la partie formation de mes activités, je dirais, que nous

  5   enseignions l'identification de la direction de ce que nous appelions une

  6   batterie hostile. Il s'agit de savoir quelle est la provenance des tirs. A

  7   ce sujet, à cet égard, j'ai étudié des centaines de cratères parce que cela

  8   faisait partie de la formation. Pour ce qui est des enquêtes à proprement

  9   parler, lorsqu'il y avait eu incident - une fois de plus, je vous dirais

 10   qu'il m'est difficile de vous fournir un chiffre exact - mais je dirais que

 11   j'ai participé à des dizaines, pour ne pas dire à des centaines d'enquêtes.

 12   Q.  Dans votre rapport, vous faites référence à un certain nombre de cas où

 13   il y a des cibles prérépertoriées [phon]. J'aimerais que vous nous

 14   indiquiez brièvement ce que cela signifie. Comment est-ce que fonctionne en

 15   quelque sorte une cible prérépertoriée dans le contexte d'une ville

 16   assiégée ?

 17   R.  Pour que les tirs de mortiers soient plus exacts pour éviter une perte

 18   de temps ainsi qu'une perte de munitions, d'ailleurs, il faut essayer

 19   d'ajuster, de pointer les tirs vers les cibles. Cela représente un gain de

 20   temps. Et si la cible est prérépertoriée, cela représente un énorme gain de

 21   temps. Pour cela, on peut opérer de différentes façons. Mais en

 22   prérépertoriant une cible, les personnes qui se trouvent sur la position du

 23   mortier connaîtront l'orientation exacte, l'élévation et les informations

 24   nécessaires qui permettront de toucher la cible de façon beaucoup plus

 25   exacte dès le premier tir. Donc plus vous vous trouvez longtemps sur une

 26   position, donc si vous avez un mortier qui se trouve sur une position

 27   pendant une longue période de temps, plus vous pouvez établir une liste de

 28   cibles prérépertoriées sur une zone assez importante, ce qui signifie que

Page 5925

  1   s'ils doivent cibler une cible dans cette zone, ils auront beaucoup plus de

  2   probabilité de toucher la cible sans pour autant devoir l'ajuster

  3   auparavant.

  4   Q.  Vous avez déjà témoigné devant ce Tribunal dans l'affaire contre

  5   Stanislav Galic ainsi que dans l'affaire contre Dragomir Milosevic.

  6   R.  C'est exact.

  7   Q.  Et vous avez préparé un rapport harmonisé dans lequel se trouvent des

  8   renseignements pertinents à des incidents qui nous occupent dans cette

  9   affaire; est-ce exact ?

 10   R.  Oui, tout à fait.

 11   M. GAYNOR : [interprétation] Est-ce que je pourrais demander l'affichage du

 12   document 11 144 de la liste 65 ter.

 13   Q.  Vous voyez ce document sur votre écran. Est-ce qu'il s'agit du rapport

 14   que vous avez présenté ?

 15   R.  Oui, tout à fait.

 16   Q.  Vous avez eu la possibilité de vous pencher sur ce rapport au cours des

 17   derniers jours ?

 18   R.  Oui, tout à fait.

 19   Q.  Est-ce que vous souhaitez y apporter des corrections ?

 20   R.  Non.

 21   Q.  Est-ce que vous considérez que ce rapport peut faire partie des

 22   éléments de preuve que vous présentez en l'espèce ?

 23   R.  Oui, tout à fait.

 24   M. GAYNOR : [interprétation] Je souhaiterais demander le versement au

 25   dossier de ce rapport sans oublier, bien entendu, l'expurgation de la

 26   partie du rapport portant sur le G-16, l'incident G-16.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P1437.

Page 5926

  1   M. GAYNOR : [interprétation] Monsieur le Président, je vous propose de

  2   présenter 12 documents au témoin ainsi qu'un extrait vidéo, et seuls

  3   certains de ces documents font l'objet de référence dans le rapport. Je

  4   souhaiterais que le document de la liste 65 ter 18178 soit affiché à

  5   l'écran, je vous prie.

  6   Q.  Monsieur Higgs -- nous allons passer au document suivant.

  7   M. GAYNOR : [interprétation] J'aimerais demander l'affichage du document

  8   11378, je vous prie.

  9   Q.  Voyez le document qui se trouve sur la gauche de votre écran, vous

 10   voyez qu'il s'agit d'un document qui est adressé au QG de la FORPRONU à

 11   Zagreb. Est-ce que vous pourriez confirmer qu'il s'agit du document auquel

 12   vous faites référence dans votre rapport lorsque vous évoquez un incident

 13   qui a eu lieu le 12 juillet 1993 ?

 14   R.  Oui, c'est exact.

 15   Q.  Est-ce que nous pourrions examiner la troisième page de ce document.

 16   Comme vous pouvez le voir, dans le dernier paragraphe qui se trouve sur la

 17   gauche de votre écran, vous voyez qu'il est indiqué, je cite :

 18   "Cet obus aurait pu être tiré à partir du couloir entre Nedzarici et le

 19   nord d'Ilidza."

 20   R.  Oui, tout à fait.

 21   Q.  Qu'avez-vous à nous dire à ce sujet ?

 22   R.  A propos de cet incident, d'après les informations dont je disposais

 23   dans les différents rapports, notamment dans ce rapport, l'obus a atterri

 24   de telle façon que l'on n'a pas pu déterminer la portée et on n'a pas pu

 25   confirmer non plus la direction. Ce qui fait que dans les deux rapports ils

 26   font état des meilleures informations dont ils disposaient, mais ils

 27   utilisaient les informations obtenues sur les lieux et estiment donc -- ou

 28   font état d'une direction approximative dont est provenu l'obus, et c'est

Page 5927

  1   ce qui est indiqué dans ce rapport pour ce qui est de la zone.

  2   Q.  Je vous remercie.

  3   M. GAYNOR : [interprétation] J'aimerais que le document 11394 soit affiché.

  4   On me dit qu'il y a une autre cote pour le document que nous avions essayé

  5   d'afficher il y a un petit moment. Donc je vais vous donner cette autre

  6   cote. En fait, ce document va être affiché par la suite -- non, je

  7   m'excuse. Troisième page de ce document, je vous prie, pour la version

  8   anglaise.

  9   Q.  Vous voyez la référence. Est-ce que vous pourriez confirmer qu'il

 10   s'agit d'un document que vous avez utilisé pour préparer votre rapport ?

 11   R.  Oui, tout à fait.

 12   Q.  Je sais qu'il est assez difficile de déchiffrer tout cela, mais vous

 13   verrez au bas du document qu'il est indiqué :

 14   "L'expert en balistique a trouvé des restes d'un obus d'artillerie,

 15   probablement un obus de mortier de 82-millimètres, qui a été très

 16   probablement tiré à partir de Nedzarici."

 17   Avez-vous quoi que ce soit à nous dire à ce sujet ?

 18   R.  Je dirais une fois de plus, qu'étant donné qu'il y avait peu de données

 19   sur les lieux - parce qu'en fait il faut savoir que l'obus avait touché une

 20   personne - donc ils n'ont pu que confirmer le calibre de l'arme et la

 21   direction de la provenance. Il s'agissait d'un calibre de 80-millimètres.

 22   Et nous voyons que la provenance, la direction est la même que celle que

 23   nous avions vue dans le document précédent, à savoir la zone de Nedzarici.

 24   Q.  Bien.

 25   M. GAYNOR : [interprétation] Bien. J'aimerais passer au document suivant,

 26   le document 15051. Il s'agit d'un document qui porte sur l'incident G-6.

 27   Q.  Dans votre rapport à propos de l'incident G-6, vous faites référence,

 28   Monsieur Higgs, à certaines différences à propos de cet indicent justement,

Page 5928

  1   et j'aimerais que nous examinions ces différences dans le rapport.

  2   M. GAYNOR : [interprétation] Est-ce que la deuxième page de la traduction

  3   anglaise du document pourrait être affichée.

  4   Q.  Vous voyez qu'il s'agit d'une compilation d'un certain nombre de

  5   documents; est-ce exact ?

  6   R.  Oui, tout à fait.

  7   M. GAYNOR : [interprétation] Page suivante de ce document.

  8   Q.  Dans l'avant-dernier paragraphe, vers la fin du paragraphe, nous voyons

  9   qu'il est indiqué :

 10   "Le type de destruction du site d'explosion indique qu'il s'agissait d'un

 11   obus de mortier de 82-millimètres tiré à partir de la position ouest où se

 12   trouvait la position de l'ennemi au niveau de l'institut pour les aveugles

 13   à Nedzarici. Ensuite il est indiqué : le stabilisateur de l'obus n'a pas

 14   été retrouvé sur le site de l'explosion."

 15   Page suivante, je vous prie, troisième paragraphe, vous voyez qu'il est

 16   indiqué - une fois de plus, il s'agit d'une référence au type de

 17   destruction puisqu'il est indiqué :

 18   "Le type de destruction sur les lieux de l'explosion indique que l'obus

 19   était un obus de mortier de 82-millimètres tiré à partir de l'ouest, où se

 20   trouvait la position d'ennemi au niveau de l'institut pour les aveugles à

 21   Nedzarici. Un stabilisateur d'obus de 120-millimètres a été trouvé près du

 22   site de l'explosion."

 23   Avez-vous quoi que ce soit à nous dire à ce sujet ?

 24   R.  Il y a eu une première enquête qui a été menée à bien sur les lieux de

 25   l'explosion et c'est là où s'est rendue la première équipe. Ils ont évalué

 26   les dégâts, les dégâts matériels et ils ont donc trouvé cet obus de 82-

 27   millimètres. Et il faut savoir qu'en l'occurrence, les obus étaient tombés

 28   sur la rue et il y avait l'empennage qui, d'après leur examen, n'avait rien

Page 5929

  1   à voir avec ces deux obus qui étaient tombés. Donc c'est un empennage qui

  2   remontait à une période précédente. Puis dans le rapport, il est indiqué

  3   qu'ils ont également trouvé un obus de 120-millimètres qui était tombé dans

  4   un lieu différent, qui n'avait provoqué d'ailleurs aucune victime.

  5   M. GAYNOR : [interprétation] Document suivant, je vous prie, il s'agit du

  6   document 19725.

  7   Vous avez les premières pages d'un document dont l'original est en

  8   français, et pour ce qui est de la traduction en anglais, c'est à la page

  9   5.

 10   Peut-on passer à la page 5 du document. Page suivante, s'il vous plaît.

 11   Q.  Est-ce que vous reconnaissez ce document, Monsieur Higgs ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Et qu'est-ce qu'il représente ?

 14   R.  C'est un rapport de synthèse établi par l'officier français le

 15   lendemain de l'incident. M. Verdy, c'était le nom de l'officier français.

 16   Q.  On peut voir ici :

 17   "D'après mon estimation, les coups viennent sans doute d'une zone

 18   contrôlée par les Serbes de Bosnie," est-il dit.

 19   Est-ce que vous avez quelque chose à dire à propos de cette phrase ?

 20   R.  Pour parvenir à cette conclusion partant des rapports, on a tenu compte

 21   de la direction qu'on estimait être la bonne, l'est [comme interprété], à

 22   savoir que ceci situait l'origine dans la zone de Nedzarici contrôlée par

 23   les Serbes de Bosnie. C'est de cela que vient cette estimation.

 24   Q.  Est-ce que vous avez des raisons de croire le contraire ?

 25   R.  D'après ce que j'ai vu dans les deux rapports, non.

 26   M. GAYNOR : [interprétation] Page suivante, s'il vous plaît.

 27   Q.  Point E, on précise :

 28   "Type de munition," et l'on dit : "Mortier, 120-millimètres de calibre."

Page 5930

  1   Au D, on dit qu'il y a eu trois coups, trois obus de tirés. Avez-vous

  2   quelque chose à dire à ce propos ?

  3   R.  Comme je le dis dans mon rapport à moi, c'est là qu'il y a une

  4   différence entre le premier examen scientifique, qui avait conclu

  5   l'existence d'un obus de 120-millimètres et de deux de

  6   82-millimètres. Quel est le problème qu'a rencontré le capitaine Verdy,

  7   c'est qu'il a mené son enquête le lendemain de l'incident et n'a pas pu

  8   disposer de tous les éléments qu'avait l'équipe qui avait effectué le

  9   constat la veille. C'est pour ça qu'il suppose que c'étaient tous des obus

 10   de 120-millimètres.

 11   Q.  A votre avis, quel est le rapport sur les deux qui est le plus exact ?

 12   R.  Je serais enclin à croire que celui qui a été fait le jour même c'est

 13   vraiment la meilleure façon d'effectuer le constat, parce que plus tôt on

 14   s'y prend, mieux c'est.

 15   M. GAYNOR : [interprétation] 09623, c'est le document dont je demande

 16   l'affichage maintenant. Nous parlons ici d'un autre incident.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pourriez répéter le numéro du

 18   document ?

 19   M. GAYNOR : [interprétation] Je le répète volontiers. Il s'agit du document

 20   09623.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 22   M. GAYNOR : [interprétation]

 23   Q.  Ceci concerne le pilonnage de la place du marché de Markale survenu le

 24   5 février 1994. On le désigne parfois comme étant l'incident de "Markale

 25   I."

 26   Est-ce que vous vous êtes servi de ce document pour préparer votre rapport

 27   ?

 28   R.  Oui.

Page 5931

  1   M. GAYNOR : [interprétation] Page suivante, s'il vous plaît.

  2   Q.  Au troisième paragraphe, on nous montre, Monsieur Higgs --  plutôt, le

  3   dernier paragraphe de la page, il y est fait référence à "l'axe transversal

  4   de l'ellipse qui était en direction nord-nord-est." Qu'est-ce que ça veut

  5   dire exactement ?

  6   R.  Quand on a examiné la forme du cratère formé dans le sol, on a vu qu'il

  7   désignait une direction nord-nord-est. Plus loin dans le rapport, on a, en

  8   fait, procédé à des mesures et on a pu déterminer l'angle.

  9   M. GAYNOR : [interprétation] Page suivante.

 10   Q.  Fin du premier paragraphe de la page, on lit ceci :

 11   "Il s'agissait d'un angle de 18 degrés nord vers est, avec un écart

 12   possible de cinq degrés qu'on peut ajouter à la valeur différentielle de

 13   l'angle."

 14   Une explication, s'il vous plaît ?

 15   R.  Après avoir examiné la forme du cratère dans le sol, l'équipe a procédé

 16   à un examen et à des mesures. Il fut ainsi calculé que la direction à

 17   partir du point d'impact au sol, de l'origine, c'était un gisement de 18

 18   degrés, un angle de 18 degrés à cinq degrés près dans un sens ou dans un

 19   autre.

 20   Q.  Et de quel genre de projectile s'agissait-il ?

 21   R.  C'était un projectile de 120-millimètres, et ça pu être prouvé ici,

 22   parce que l'empennage se trouvait toujours dans le cratère et a pu servir

 23   aux fins de l'enquête.

 24   Q.  Est-ce que ce rapport tire des conclusions quant à la portée, quant à

 25   la distance parcourue par le projectile ?

 26   R.  Non.

 27   M. GAYNOR : [interprétation] Document suivant, 09630.

 28   Q.  Dans votre rapport d'expert, vous dites ceci : le rapport de la

Page 5932

  1   FORPRONU mentionné au point B confirme ce rapport présenté au point A avec

  2   les mêmes conclusions. Il y a une seule divergence au niveau des

  3   conclusions - c'est ce que dit notamment M. le Capitaine Verdy - mais ceci

  4   est rectifié un peu plus loin dans le rapport.

  5   Et j'ai quelques questions à vous poser à ce propos. Qu'est-ce que vous

  6   voyez sur cette page que vous avez sous les yeux ?

  7   R.  Vous avez une partie du rapport établi par le capitaine Verdy.

  8   M. GAYNOR : [interprétation] Peut-on afficher la page 8.

  9   Q.  Vous avez ici la première page d'une télécopie. Et à la page suivante,

 10   vous voyez le document qui s'intitule : Rapport d'enquête de la FORPRONU

 11   après une explosion survenue le 5 février 1994 au marché de Sarajevo. Est-

 12   ce que vous avez examiné ce document dans le cadre de la préparation de

 13   votre propre rapport ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Sautons une page pour passer à la page d'après. Paragraphe 17, fin de

 16   paragraphe :

 17   "Il n'y a pas suffisamment d'éléments de preuve concrets pour prouver

 18   quelle est la partie qui a tiré cet obus de mortier."

 19   Un commentaire ?

 20   R.  Lorsqu'il fut procédé à l'analyse du cratère, on a pu calculer

 21   l'orientation de l'obus et on a pu déterminer un angle approximatif, angle

 22   auquel l'obus a touché le sol. Le problème que posent les mortiers, c'est

 23   qu'ils ont un système de charge numérique, et vous aurez le même angle pour

 24   toutes les charges propulsives au moment de toucher le sol. Ce qui veut

 25   dire qu'on aurait un grand paramètre si la distance est courte et on aurait

 26   effectivement une portée maximale pour indiquer d'où aurait pu être tiré

 27   l'obus. C'est la raison pour laquelle on l'a écrit ici, ce qui pouvait être

 28   confirmé à l'époque.

Page 5933

  1   M. GAYNOR : [interprétation] Je voudrais qu'on passe à un endroit du

  2   rapport qui se trouve neuf pages plus loin.

  3   Q.  On y voit des conclusions au point C. Il est question de :

  4   "…une orientation située entre 0330 et 0420 mils."

  5   Avez-vous une explication ?

  6   R.  Beaucoup d'équipes se sont penchées sur ces lieux. Je pense qu'il y a

  7   eu au moins dix équipes qui ont établi un rapport. L'équipe médicolégale

  8   utilise des degrés, nous l'avons déjà dit, et ils nous ont donné, ces

  9   experts scientifiques, un angle de 18 degrés. Dix-huit degrés, ça fait

 10   environ 320 mils, donc c'est tout à fait conforme à beaucoup d'autres

 11   rapports qui parlent d'un angle allant de 0320 à 0420.

 12   M. GAYNOR : [interprétation] Peut-on voir le tableau qui se trouve cinq

 13   pages avant celle-ci.

 14   Q.  Regardez le point 2. Il est dit qu'en tout dix analyses de cratère ont

 15   été effectuées.

 16   M. GAYNOR : [interprétation] Page suivante.

 17   Q.  Regardez le paragraphe intitulé "Orientation" ou "Jugement." Il dit

 18   dans sa partie ultime ceci, s'agissant du capitaine Verdy :

 19   "Mais il semble avoir commis une erreur mathématique, ce qui a entraîné une

 20   erreur au niveau des calculs définitifs. Même si sa méthode était correcte,

 21   en raison des chiffres utilisés, les résultats ne le sont pas."

 22   Une explication ?

 23   R.  Dix enquêtes ont été effectuées, mais je ne sais pas pourquoi le

 24   capitaine Verdy a donné des résultats différents. Ceci a été examiné et on

 25   a conclu qu'il a dû faire une erreur mathématique quelque part, ce qui fait

 26   qu'il a donné des informations tout à fait différentes de celles qu'on

 27   trouve dans les huit autres rapports.

 28   M. GAYNOR : [interprétation] Peut-on voir la page suivante, s'il vous

Page 5934

  1   plaît.

  2   Q.  Pourriez-vous en quelques mots expliquer aux Juges comment vous

  3   analysez ce tableau que nous voyons à l'écran.

  4   R.  Vous avez ici l'énumération des dix jeux d'information obtenus grâce

  5   aux enquêtes menées. Les deux premiers rapports sont mis en cause. Vous

  6   avez le capitaine Verdy qui donne des informations différentes dans son

  7   rapport. Quant aux huit autres rapports, à partir de celui établi par le

  8   commandant Russell jusqu'au dernier, vous voyez que les résultats qui y

  9   sont rapportés sont très similaires, et ces résultats concordent avec le

 10   calcul de 18 degrés qui fut un des résultats déterminés par l'enquête de

 11   CSB.

 12   Q.  Mais qu'est-ce que ça veut dire 18 degrés par rapport aux millièmes ?

 13   R.  Bien, 18 degrés, ça fait à peu près 320 millièmes.

 14   Q.  Ce qui veut dire que le rapport établi par les autorités de Bosnie est

 15   tout à fait en concordance avec les huit rapports que nous voyons ici

 16   énumérés ?

 17   R.  Oui.

 18   M. GAYNOR : [interprétation] Peut-on maintenant examiner le document 11333.

 19   Nous passons à un autre incident. Celui qu'on a appelé l'incident de

 20   Markale II.

 21   Q.  Au regard de l'incident G-19, vous invoquez un bon nombre de documents

 22   pour établir cette analyse que vous faites de l'incident. Etes-vous en

 23   mesure de confirmer les documents au fur et à mesure qu'ils seront affichés

 24   pour confirmer que vous vous en êtes servi.

 25   Manifestement, ici, nous avons un rapport de situation quotidien établi par

 26   les observateurs militaires.

 27   M. GAYNOR : [interprétation] Page 20, s'il vous plaît.

 28   Q.  En fin de document - nous le voyons - est décrit un incident survenu

Page 5935

  1   sur la place du marché, et on dit :

  2   "Un projectile a été tiré à partir d'un chargeur de 170 et il a été

  3   confirmé qu'une personne avait été tuée."

  4   Un commentaire, s'il vous plaît ?

  5   R.  Ceci concerne l'obus trouvé dans le sol, et ceci confirme, d'après

  6   l'orientation établie ce jour-là, que l'angle de la trajectoire d'où venait

  7   cet obus était 170 degrés.

  8   Q.  Haut de la page suivante, deuxième paragraphe, je le lis :

  9   "Deux des quatre impacts demeurant ont provoqué des blessures chez cette

 10   personne (ça n'a pas été confirmé). Ces quatre obus ont été tirés à des

 11   angles différents (220 à 240 mag deg) et les impacts se trouvent plus au

 12   sud à 300 mètres de distance par rapport au projectile différent."

 13   Je vous demande une explication.

 14   R.  Ce jour-là, le jour même de l'incident précédent dont nous avons parlé,

 15   nous avons eu quatre impacts supplémentaires de mortiers de 120-

 16   millimètres, c'est dit ici, et ces obus sont tombés à une distance de 300

 17   mètres par rapport au premier, et la direction, ceci a été déterminé, était

 18   de 220 à 240. On estimait alors qu'il s'agissait d'incidents distincts.

 19   Cependant, au fil de l'enquête, beaucoup de suppositions ont été établies

 20   pour dire que ceci faisait partie de la même action de tir, ce qui a

 21   entraîné une certaine confusion ou certaines suppositions qui se sont

 22   retrouvées dans des informations fournies plus tard.

 23   Q.  Et est-il exact de dire que la personne qui a été tuée au cours de cet

 24   incident a été tuée par un obus qui est venu à un angle de 170 degrés ?

 25   R.  Oui, c'est exact.

 26   M. GAYNOR : [interprétation] Peut-on maintenant passer au document 09917.

 27   Q.  A gauche, vous le voyez au premier paragraphe, c'est une page de garde

 28   qui précède le rapport complet et définitif concernant l'incident au

Page 5936

  1   mortier survenu à Sarajevo le 28 août 1995.

  2   M. GAYNOR : [interprétation] Nous allons voir la page suivante.

  3   Q.  On parle d'"élément de preuve essentiel," "key evidence," et ce

  4   paragraphe se poursuit à la page suivante. On précise de façon sommaire ces

  5   éléments de preuve essentiels.

  6   Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre ce qu'il en est et leur

  7   fournir davantage de détails s'agissant des critères pris en compte pour

  8   savoir d'où venait le tir qui a causé la mort de ces personnes. Commençons

  9   par la première partie, si vous le voulez bien.

 10   R.  Paragraphe 3, on parle de l'analyse de l'impact. Et on confirme ici

 11   qu'il y a eu une enquête quant au point de tir. Les enquêteurs français

 12   parlaient de 220 à 240 millièmes. Ça fait à peu près 170 en degrés. Et dans

 13   le rapport des observateurs, on parlait aussi de 170 degrés. On confirme

 14   aussi que les quatre autres impacts, on a une orientation de 220 à 240

 15   degrés. Puis on commence à établir des suppositions dès la phrase suivante,

 16   et on dit :

 17   "L'enquête a cherché à faire la lumière sur cette différence apparente."

 18   On croyait à ce moment-là qu'il y avait un lien entre ces différents

 19   tirs, même s'ils sont tombés à une distance de 300 mètres. Pour des

 20   mortiers, c'est une sacrée différence qu'une distance de 300 mètres. Ce

 21   postulat a eu une incidence certaine, vous allez le voir plus tard, sur le

 22   reste du rapport.

 23   Q.  Je vous arrête un instant pour vous demander une explication. Pourquoi,

 24   à votre avis, n'est-il pas possible que les quatre obus qui sont tombés

 25   plus loin viennent du même endroit que celui qui a causé la mort ?

 26   R.  Lorsqu'un mortier engage une cible, on a une trajectoire qui va du

 27   point de départ jusqu'au point de chute, et il est possible de déterminer

 28   cette trajectoire. Mais du fait que les autres obus sont tombés 300 mètres

Page 5937

  1   plus loin, si on garde la même orientation et si on essaie de déterminer la

  2   trajectoire, bien, vous aurez une distance d'une différence de 300 mètres

  3   par rapport au premier obus. Pour que ce soit le même mortier qui ait été

  4   utilisé pour tirer un ou quatre coups, il aurait fallu le faire très vite.

  5   Tirer vite, puis remballer le mortier, le déplacer de 300 mètres pour tirer

  6   les autres coups pour avoir la même orientation par rapport à la position

  7   qu'occupait le mortier.

  8   Il y a un problème qui est mentionné dans ce paragraphe. Dans la

  9   phrase suivante, il est dit qu'on a utilisé le sillon de la fusée pour

 10   calculer l'orientation. Si on utilise les bonnes méthodologies, on ne se

 11   sert pas de ce critère pour calculer l'orientation parce qu'ils sont

 12   susceptibles d'erreur. Un enquêteur chevronné ne se servirait pas de ce

 13   critère, à moins que le sillon ne soit d'excellente qualité. Et je pense

 14   l'avoir précisé au paragraphe 10 de mon rapport.

 15   Q.  Ecartez-vous la possibilité d'un tir par ricochet, je parle du

 16   projectile ayant causé la mort. Ceci, en effet, est mentionné comme

 17   hypothèse dans la dernière phrase du paragraphe.

 18   R.  Rien dans les éléments que j'ai examinés ne confirme que l'obus

 19   aurait d'abord touché un bâtiment. Parce que si ça avait été le cas, il

 20   aurait pu exploser au contact. Et si on a pensé que l'obus avait d'abord

 21   touché un bâtiment pour se déplacer ensuite, pour être désorienté par

 22   rapport à son point d'origine, on ne comprend pas pourquoi à ce moment-là

 23   on se servirait du sillon de la fusée dans le cratère pour établir

 24   l'orientation, si on pense que l'obus a d'abord touché un bâtiment. Donc je

 25   ne pense pas qu'il y ait eu d'abord impact sur un bâtiment avant de tomber

 26   ailleurs. Rien ne le prouve.

 27   Q.  Est-ce que vous connaissez le système de radar Cymbeline ?

 28   R.  Oui.

Page 5938

  1   Q.  Expliquez-le.

  2   R.  C'est-à-dire qu'on a un radar qui détermine la position des

  3   mortiers. Il va projeter un rayon dans le ciel et il va déterminer ainsi

  4   l'origine du tir de l'obus de mortier.

  5   Q.  Et si le projectile qui a causé la mort était parti à une distance de

  6   500 [comme interprété] mètres ou moins, qu'est-ce qui se serait passé ?

  7   R.  Le rapport concernant ce radar le montre, si le tir était parti d'une

  8   distance proche du lieu de l'incident, étant donné qu'il faut une

  9   trajectoire élevée, ce radar l'aurait détectée.

 10   Q.  Au paragraphe 5 à la page que vous avez sous les yeux, il est fait

 11   référence aux postes d'observation des Nations Unies. Pourriez-vous dire

 12   aux Juges de la Chambre pourquoi l'aspect acoustique est important ?

 13   R.  Après avoir lu ce rapport comme les autres, on ne fait nulle part état

 14   de bruit de déflagration aux postes d'observation. Mais on a bien vu l'obus

 15   tomber, ce qui veut dire que d'où que vienne l'obus, et ceci, pour une

 16   raison quelle qu'elle soit, peut-être parce qu'il y avait une colline entre

 17   l'obus et le poste ou il y avait un bâtiment entre eux, on n'a pas entendu

 18   le bruit causé par le tir.

 19   Q.  Page 23 [comme interprété] de votre rapport, vous mentionnez quatre

 20   portées de tir possibles pour déterminer d'où aurait pu venir le projectile

 21   compte tenu d'un angle de 70 degrés. On a d'abord : la charge 1, 900

 22   mètres; charge 2, 1 600 mètre; charge 3, 2 400 mètres; charge 4, 3 000

 23   mètres. S'agissant du projectile qui a causé la mort sur la place du

 24   marché, à votre avis, quelle est la portée la plus probable, et sur quoi

 25   vous fondez-vous pour le dire ?

 26   R.  Sur la base des éléments reçus et sur la base de l'examen du cratère,

 27   eu égard à l'angle de l'obus qui est tombé, autrement dit, comme je le dis

 28   toujours, cela nous donne les portées éventuelles que l'on peut trouver

Page 5939

  1   dans les tableaux de portées, à cette distance courte de 900, le mortier

  2   serait parti de la ligne de front et aurait été à distance d'audition des

  3   observateurs des Nations Unies situés le plus près. A 1 600 mètres de

  4   distance, le mortier se trouve situé très près de la ligne de front et

  5   également à distance d'audition des observateurs des Nations Unies. Quand

  6   vous pensez aux charges 3 et 4, alors le mortier se situe au-delà de la

  7   ligne de front, dans les collines où dans la campagne environnante qui

  8   surplombe Sarajevo.

  9   Etant donné que nous n'avons entendu aucun bruit et que pour les raisons

 10   indiquées dans le rapport le radar Cymbeline n'a pas saisi l'angle de la

 11   trajectoire du mortier, ceci semblerait indiquer que la portée de 900

 12   mètres n'est pas l'option la plus vraisemblable. Encore une fois, je le

 13   répète, à une distance de 1 600 mètres, le fait ne pas entendre de bruit et

 14   étant donné le mauvais déploiement tactique, puisque le mortier se trouvait

 15   directement sur la ligne de front, ça permettrait d'exclure le fait que le

 16   mortier ait pu être tiré à une distance de 1 600 mètres. Encore une fois,

 17   étant donné ce qui s'est passé avec le radar Cymbeline, qui permet de

 18   penser que la charge était une charge moyenne, les portées 3 et 4, le fait

 19   que le tir n'ait pas été entendu, que le tir a eu lieu sous le radar

 20   permettent de penser que le mortier se trouvait, en réalité, dans les

 21   collines surplombant Sarajevo, ce qui permettrait de penser aux charges 3

 22   et 4, qui placent donc le mortier au-delà de la ligne de front, dans le

 23   territoire contrôlé par les Serbes.

 24   Q.  A ce stade, est-ce que vous pourriez expliquer ce concept de charge 1,

 25   charge 2, charge 3, charge 4, eu égard à l'utilisation d'un mortier ?

 26   R.  La poudre d'un mortier peut être retirée de façon à produire une portée

 27   différente. Il y a des éléments plastiques qu'on appelle des fromages, si

 28   je puis me permettre, qui situent différemment l'ailette d'un mortier, et

Page 5940

  1   la plupart des mortiers ont six ailettes au moins. Donc si vous voulez

  2   tirer à une distance plus courte, vous rajoutez un ou deux de ces éléments.

  3   Et si vous souhaitez tirer à une distance plus longue, vous enlevez un

  4   certain nombre jusqu'à six. Mais normalement, avec les mortiers, vous tirez

  5   avec une charge minimale qui vous permet de toucher la cible, parce qu'il

  6   est d'usage d'employer la charge minimale afin que la trajectoire soit

  7   moins importante, que le voyage soit moins long et qu'il y ait moins de

  8   risques que des éléments de l'équipement, tel que le radar Cymbeline,

  9   détectent l'origine du tir.

 10   M. GAYNOR : [interprétation] Je vous remercie. Nous allons être obligé de

 11   passer à autre chose, je le crains.

 12   Q.  J'aimerais que l'on affiche un document qui est un rapport de situation

 13   quotidienne des observateurs militaires des Nations Unies dont vous faites

 14   état dans votre déclaration écrite. Et j'aimerais que vous confirmiez qu'il

 15   s'agit bien de ce document; c'est bien cela ?

 16   R.  Oui.

 17   M. GAYNOR : [interprétation] Page suivante du document à l'écran, je vous

 18   prie, page 15 060.

 19   Q.  Ce document est un document émanant du Groupe numéro 2 du commandement

 20   de la FORPRONU en date du 8 septembre 1995, et il   concerne l'incident

 21   Markale II et décrit de façon détaillée le système Cymbeline.

 22   M. GAYNOR : [interprétation] Passons maintenant à la page suivante,

 23   paragraphe C.

 24   Q.  Qui se lit comme suit :

 25   "Un mortier tiré à moyenne ou longue portée aurait une trajectoire plus

 26   basse et correspondrait à une position de tir située sur le territoire

 27   contrôlé par les Serbes de Bosnie. Une trajectoire plus basse aurait permis

 28   de passer sous le faisceau du radar Cymbeline."

Page 5941

  1   Est-ce que vous êtes également d'accord avec cette analyse ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  J'aimerais maintenant vous montrer la page 15 061, où l'on voit une

  4   série de photographies prises à l'issue de l'incident Markale II par le

  5   radar Cymbeline.

  6   M. GAYNOR : [interprétation] Et je demande que l'on fasse défiler les pages

  7   à l'écran jusqu'à la page 10. Page suivante maintenant, je vous prie.

  8   Q.  Que voyez-vous là, Monsieur Higgs ?

  9   R.  Cette photo a été prise d'une position qui surplombe le cratère formé

 10   par le mortier.

 11   Q.  Pourriez-vous commenter l'origine du tir, pour commencer ?

 12   R.  A voir ce cratère avec un œil expérimenté, on constate que la majorité

 13   des marques formées par les éclats d'obus sur le tarmac se situent entre le

 14   point d'explosion sur le sol et le trottoir, donc ceci semblerait indiquer

 15   que le projectile est venu d'un bâtiment et que la direction du tir se

 16   situe approximativement à partir de l'endroit où on voit le cratère sur le

 17   sol dans la direction du bâtiment.

 18   Q.  Mais comment est-ce que l'on calcule l'angle d'impact du projectile ?

 19   R.  Dans ce cas précis, aucun des membres de l'équipe d'enquête qui était

 20   présente le premier jour sur place n'a trouvé le moindre sillon provoqué

 21   par un détonateur, à savoir le trou que l'on voit au centre du cratère --

 22   donc n'a estimé qu'aucun sillon de cette nature ne suffisait pour calculer

 23   cet angle. Par conséquent, les membres de l'équipe ont procédé à un calcul

 24   mathématique à l'aide des mesures mesurées à partir du cratère jusqu'au

 25   bâtiment et sur la base de la hauteur du bâtiment pour déterminer quelle

 26   était l'élévation minimum qui pouvait être prise en cause. Et par ailleurs,

 27   les membres de l'équipe d'enquête bosnienne ont procédé à des calculs

 28   balistiques sur l'explosion qui leur ont fourni un angle approximatif de

Page 5942

  1   descente.

  2   Q.  Qu'est-ce qu'un angle de descente ?

  3   R.  A partir du calcul balistique, ils ont déterminé un angle de 70 degrés,

  4   et le calcul mathématique jusqu'au toit de l'immeuble leur a donné un angle

  5   minimum de 67 degrés.

  6   M. GAYNOR : [interprétation] J'aimerais vous soumettre le document suivant,

  7   qui est le document 15062, à présent. Ce document est un rapport officiel

  8   du poste de sécurité publique de Sarajevo en date du 29 août 1995.

  9   11404, excusez-moi.

 10   Q.  Le document qui arrive à l'écran, Monsieur Higgs, est, si je ne me

 11   trompe, ce rapport du poste de sécurité publique de Sarajevo dont vous avez

 12   parlé --

 13   M. GAYNOR : [interprétation] Non, ce n'est pas le bon document. Le document

 14   dont je demande l'affichage est le document 11404. Bon, je vais parler

 15   maintenant d'un autre document.

 16   Q.  Monsieur Higgs, j'aimerais maintenant vous soumettre le document 15062

 17   dont je demande l'affichage. Toutes mes excuses. Pour le document

 18   précédent, on vient de m'informer que le bon numéro est le numéro 14404.

 19   M. GAYNOR : [aucune interprétation]

 20   Q.  Monsieur Higgs, comme vous le voyez il s'agit d'un rapport émanant du

 21   poste de sécurité publique de Sarajevo et qui date du 28 août 1995, n'est-

 22   ce pas ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Un peu plus bas, il est question de l'application d'un certain

 25   capitaine Higgs de Grande-Bretagne. Mais il ne s'agit pas de vous à cet

 26   endroit du texte, n'est-ce pas ?

 27   R.  Non, ce n'est pas moi.

 28   Q.  Alors page suivante maintenant sur les écrans, je vous prie, nous y

Page 5943

  1   voyons une référence à un obus de 120-millimètres,

  2   KB 9307 et MK 974. Est-ce que vous convenez qu'il est possible d'obtenir ce

  3   genre de données d'un stabilisateur ?

  4   R.  Oui, ces données ont été déterminées à partir des ailettes ou du

  5   stabilisateur du projectile et peuvent être vues sur certaines des

  6   photographies prises par les membres de l'équipe d'enquête.

  7   Q.  Alors au paragraphe 2, nous lisons, je cite :

  8   "L'obus a été tiré à partir du sud à un azimut de 170 degrés, plus ou moins

  9   5 degrés, ce qui correspond à un secteur déterminé."

 10   Alors sans savoir quelles sont les positions en question, avez-vous un

 11   commentaire à faire au sujet de cet angle de 170 degrés ?

 12   R.  C'est une lecture qu'ils ont faite à l'issue de leur examen visuel, et

 13   je n'ai aucune raison de ne pas leur faire confiance.

 14   M. GAYNOR : [interprétation] Ensuite il y a quelques schémas qui se

 15   trouvent à la fin du document, quatre pages avant la fin. J'aimerais que

 16   ces schémas soient affichés à l'écran.

 17   Passons à un autre document pour le moment.

 18   Je demanderais la diffusion de la vidéo 40221, je vous prie.

 19   [Diffusion de la cassette vidéo]

 20   M. GAYNOR : [interprétation] On peut faire un arrêt sur image.

 21   Q.  Alors en vous fondant sur ce que vous savez des systèmes de mortiers de

 22   120-millimètres, est-ce que les dommages que nous venons de voir peuvent

 23   correspondre aux effets d'un seul projectile de ce genre ?

 24   R.  Oui.

 25   M. GAYNOR : [interprétation] Suite de la diffusion de la vidéo, je vous

 26   prie.

 27   Ce commentaire a été fait au point horaire 1 minute et

 28   25 secondes.

Page 5944

  1   [Diffusion de cassette vidéo]

  2   M. GAYNOR : [interprétation] Arrêt sur image, je vous prie, 1 minute 53

  3   secondes.

  4   Q.  Quel est le lieu que l'on voit sur les images de cette vidéo ?

  5   R.  La vidéo montre un quartier qui est juste devant un bâtiment dont j'ai

  6   été informé qu'il abritait un marché.

  7   Q.  Ces images se situent à quelle distance de ce marché

  8   ouvert ?

  9   R.  C'est à très courte distance de la route. Je n'ai pas mesuré cette

 10   distance précisément, mais je dirais, entre 50 et 100 mètres.

 11   Q.  Et le marché ouvert se trouve à l'endroit où ce projectile a explosé,

 12   n'est-ce pas ? C'est-à-dire c'est bien le marché de Markale I, n'est-ce pas

 13   ?

 14   R.  C'est exact.

 15   Q.  Et ceci est également le lieu où l'incident Markale II a eu lieu,

 16   n'est-ce pas ?

 17   R.  Exact.

 18   M. GAYNOR : [interprétation] Suite de la vidéo.

 19   [Diffusion de cassette vidéo]

 20   M. GAYNOR : [interprétation] Arrêt sur image, je vous prie. A

 21   3 minutes 43 secondes.

 22   Q.  Que voyez-vous sur la présente image, Monsieur Higgs ?

 23   R.  Sur la vidéo on voit maintenant l'arrivée des membres de l'équipe

 24   d'enquête française.

 25   M. GAYNOR : [interprétation] Suite de la diffusion, je vous prie.

 26   [Diffusion de cassette vidéo]

 27   M. GAYNOR : [interprétation] Arrêt sur image, je vous prie.

 28   4 minutes 37 secondes.

Page 5945

  1   Q.  Qu'est-ce que nous voyons sur l'image actuelle ?

  2   R.  L'équipe est en train de procéder à des mesures dans le cratère créé

  3   par l'obus au bord de l'immeuble. Ces mesures seront utilisées au moment du

  4   calcul de la hauteur du bâtiment pour calculer l'angle minimum relatif à ce

  5   projectile.

  6   Q.  Pour préciser votre réponse, ils sont en train de mesurer la distance

  7   entre le cratère et le bord du bâtiment, puis ils auront besoin de quelles

  8   autres mesures pour faire quoi ?

  9   R.  Ils vont ensuite mesurer la hauteur du bâtiment et utiliser une formule

 10   mathématique pour calculer l'angle.

 11   Q.  Je vous remercie.

 12   M. GAYNOR : [interprétation] Suite de la diffusion.

 13   [Diffusion de la cassette vidéo]

 14   M. GAYNOR : [interprétation] Arrêt sur image. A 5 minutes

 15   32 secondes.

 16   Q.  Qu'est-ce qui est en train de se passer à ce stade de la vidéo ?

 17   R.  A partir de la forme des marques créées par les éclats d'obus sur le

 18   tarmac, on voit que ce soldat est en train de déterminer la direction à

 19   partir de laquelle a pu venir le projectile et qu'il fait le point avec une

 20   boussole.

 21   Q.  Je vous remercie. Est-ce que vous conviendrez que ceci n'est pas un

 22   film montrant l'intégralité du processus d'enquête, qui ne se limite pas,

 23   bien sûr, à faire le point ou à mesurer des hauteurs ?

 24   R.  Il ne me semble pas que les images de cette vidéo montrent, en effet,

 25   toutes les étapes de l'enquête.

 26   M. GAYNOR : [interprétation] Suite de la diffusion, je vous prie.

 27   [Diffusion de la cassette vidéo]

 28   M. GAYNOR : [interprétation] Arrêt sur image. 6 minutes 28 secondes.

Page 5946

  1   Q.  Que se passe-t-il sur cette image ?

  2   R.  On voit les premières étapes de l'enquête sur les ailettes du

  3   projectile. C'est là que les membres de l'équipe d'enquête peuvent trouver

  4   un certain nombre de renseignements. Sur ces images de la vidéo, on voit la

  5   marque et le numéro de lot qui sont imprimés à l'arrière du projectile. On

  6   utilise donc du papier collant pour mesurer la distance entre les ailettes

  7   afin de confirmer le calibre de cet obus.

  8   Q.  Je vous remercie.

  9   M. GAYNOR : [interprétation] Suite de la diffusion, je vous prie.

 10   [Diffusion de la cassette vidéo]

 11   M. GAYNOR : [interprétation] Arrêt sur image, je vous prie.

 12   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 13   M. HAYDEN : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de

 14   questions à poser dans le cadre de l'interrogatoire principal.

 15   Mais je m'apprête à demander le versement au dossier des documents que j'ai

 16   utilisés ainsi que de la séquence vidéo, à moins que je ne doive le faire à

 17   la fin de la déposition de ce témoin, comme vous le préférerez, Monsieur le

 18   Président.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson.

 20   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 21   Nous n'avons pas d'objection par rapport à l'admission de documents

 22   sources, en vertu de la décision de la Chambre de première instance suite à

 23   la présentation de l'Accusation sur la pertinence de certains documents

 24   relatifs à la déposition de Richard Philipps le 9 juillet 2010. Mais comme

 25   vous l'avez remarqué au paragraphe 11, ces documents sur le fond ne

 26   devraient pas être pris en compte par la Chambre, c'est uniquement leur

 27   rôle d'aide à la Chambre qui peut être accepté eu égard à l'évaluation de

 28   la valeur probante de la déposition de ce témoin expert.

Page 5947

  1   M. GAYNOR : [interprétation] Monsieur le Président, nous demandons le

  2   versement au dossier de ces documents à toutes fins utiles, conformément

  3   aux directives qui ont été établies dans le cadre de la décision que vient

  4   d'évoquer Me Robinson. Ce ne sont pas simplement des documents sources qui

  5   sont admissibles. Le témoin a eu la possibilité de commenter certains de

  6   ces documents, d'expliquer leur pertinence à la Chambre. Et d'une certaine

  7   façon comme vous-mêmes, Mesdames, Messieurs les Juges, l'avez déjà dit au

  8   moment du témoignage du Témoin Donia, certains documents ont été admis à

  9   toutes fins utiles, donc nous en demandons le versement à toutes fins

 10   utiles des documents en question.

 11   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, le problème qui me

 12   vient à l'esprit, sur le principe, c'est que l'on peut comprendre que ces

 13   documents soient admis à toutes fins utiles si nous avons la possibilité de

 14   procéder à un contre-interrogatoire solide sur tous ces incidents. Mais

 15   compte tenu du temps que la Chambre a alloué au contre-interrogatoire,

 16   l'admission de ces documents de fond relatifs à l'enquête sans qu'il y ait

 17   possibilité d'interroger les personnes qui ont procédé à cette enquête

 18   créerait un réel préjudice pour la Défense étant donné le peu de temps qui

 19   lui est accordé. Par conséquent, si nous avons assez de temps pour un

 20   solide contre-interrogatoire de chacun de ces incidents, nous n'aurons pas

 21   d'objection au versement de ces documents. Mais compte tenu de la

 22   philosophie de la Chambre eu égard à la déposition de ce témoin que l'on

 23   voit illustrée dans le temps qui a été alloué au contre-interrogatoire,

 24   nous ne pensons pas qu'il serait juste que ces documents soient admis.

 25   Je vous remercie.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

 27   Nous allons faire une pause d'une demi-heure, après quoi nous rendrons

 28   notre décision.

Page 5948

  1   --- L'audience est suspendue à 12 heures 25.

  2   --- L'audience est reprise à 13 heures 00.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vais vous rendre compte de notre

  4   décision :

  5   La Chambre a pris en considération les arguments présentés par M.

  6   Robinson, qui nous a expliqué pourquoi les rapports d'enquête et les autres

  7   documents analysés par M. Higgs, documents qui lui ont permis de parvenir à

  8   ses conclusions et qui lui ont permis de préparer son rapport, devraient

  9   être versés au dossier en tant que documents sources plutôt qu'à d'autres

 10   fins, tel que l'Accusation le souhaite. Toutefois, étant donné que ces

 11   documents auxquels a fait référence le témoin lors de sa déposition

 12   l'indiquent, la situation est différente de celle de M. Philipps et des

 13   documents sources auxquels il avait été fait référence dans son rapport

 14   d'expert, mais qui n'avaient pas fait l'objet de discussion dans le

 15   prétoire avec lui.

 16   Compte tenu de ce que nous venons de dire, tel que nous l'avions

 17   indiqué pour la décision que nous avions prise à propos de la durée du

 18   contre-interrogatoire de M. Higgs, la Chambre est d'avis que les éléments

 19   de preuve présentés par M. Higgs ont une nature limitée étant donné qu'il

 20   ne peut, compte tenu de sa compétence, que nous fournir des informations

 21   sur des enquêtes menées à bien par d'autres et sur des conclusions

 22   auxquelles d'autres sont parvenus. Ce qui, d'ailleurs, a une incidence sur

 23   le poids qui sera accordé par la Chambre à ces rapports qui ont été

 24   utilisés pour la préparation de son rapport ainsi qu'aux autres documents,

 25   et nous aurions évidemment besoin d'autres éléments de preuve pour étayer

 26   cela pour que la Chambre puisse parvenir à des conclusions sur la base des

 27   documents de M. Higgs.

 28   Etant donné que ce n'est pas lui qui a rédigé ces rapports qu'il a

Page 5949

  1   utilisés, si nous accordions un temps supplémentaire pour le contre-

  2   interrogatoire de ce témoin, cela aurait un objectif très limité, et la

  3   Chambre continue a été d'avis que trois heures suffisent.

  4   La Chambre donc versera au dossier les documents qui ont été

  5   présentés au témoin et à propos desquels le témoin a fait des observations

  6   pendant sa déposition, documents qu'il a utilisés pour écrire son rapport

  7   d'expert.

  8   Voilà notre décision, et je sais que M. Gaynor et M. Tieger

  9   souhaiteraient intervenir.

 10   M. TIEGER : [interprétation] Je voulais soulever une question de calendrier

 11   dont j'ai eu la possibilité de parler avec la Défense.

 12   La Chambre saura que nous avions prévu trois témoins pour cette

 13   semaine. Si nous prenons en considération la durée prévue pour le contre-

 14   interrogatoire, la durée du contre-interrogatoire qui a déjà eu lieu, tout

 15   porte à croire que nous pourrions terminer les dépositions de ces trois

 16   témoins avant la fin de cette semaine-ci. Les parties préfèrent, d'après ce

 17   que j'ai compris lors de nos discussions pendant les vacances judiciaires,

 18   conserver le calendrier qui avait été prévu pour cette semaine, pour ces

 19   trois témoins, et nous pourrions ainsi commencer la déposition du Témoin

 20   KDZ-088 lundi.

 21   Alors, je pense que la Chambre serait peut-être d'accord avec ceci,

 22   mais je voulais alerter la Chambre de première instance pour que les Juges

 23   puissent être informés des circonstances et pour qu'ils puissent nous

 24   indiquer ce qu'ils en pensent le plus rapidement possible.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Je vous

 26   demanderais une petite minute, Monsieur Tieger.

 27   [La Chambre de première instance se concerte]

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Tieger. Merci

Page 5950

  1   de nous avoir transmis ces renseignements.

  2   Voilà ce que je voulais vous dire : ne prenons pas de dispositions

  3   définitives pour convoquer le Témoin KDZ-088 lundi. Les raisons pour ce que

  4   je dis deviendront évidentes aujourd'hui.

  5   M. TIEGER : [interprétation] Je comprends tout à fait.

  6   Et j'aimerais saisir cette occasion pour soulever une autre question,

  7   à savoir je souhaiterais encourager la Chambre de première instance, dans

  8   la mesure du possible, de fournir aux parties autant de préavis que faire

  9   se peut pour ce qui est de la durée des contre-interrogatoires. Dans la

 10   mesure du possible. Les raisons, en fait, en sont évidentes. Je comprends

 11   très bien que cela peut représenter un fardeau pour vous, mais je pense que

 12   cela serait extrêmement utile pour les parties.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 14   Je souhaiterais que l'on fasse entrer le témoin dans le prétoire.

 15   Oui, Monsieur Karadzic.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien que la Chambre de première instance ait

 17   conclu que les éléments de preuve apportés par M. Higgs doivent faire

 18   l'objet d'autres questions, je dirais que par sa déposition, les rapports

 19   dont il est question ont quand même reçu un certain sceau de légitimité.

 20   Donc j'aimerais vous demander d'examiner à nouveau cette demande de temps

 21   supplémentaire que j'ai présentée avant l'arrivée du Témoin KDZ-088. Car en

 22   fait, j'aimerais pouvoir étudier 80 incidents dont a parlé M. Higgs, il

 23   s'agit d'incidents importants. Nous n'aurons pas d'autre possibilité pour

 24   préciser la question.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre vous a donné sa décision, et

 26   nous ne souhaitons pas nous repencher là-dessus. Lisez à nouveau, je vous

 27   prie, la décision et essayez de la respecter autant que faire se peut.

 28   [Le témoin vient à la barre]

Page 5951

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous demanderais de bien

  2   vouloir commencer votre contre-interrogatoire, Monsieur Karadzic.

  3   L'ACCUSÉ : Merci.

  4   Contre-interrogatoire par M. Karadzic:

  5   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Higgs. J'aimerais vous remercier

  6   d'avoir eu l'amabilité de rencontrer l'équipe de la Défense et j'aimerais

  7   également vous remercier, car vous nous aviez promis de nous fournir une

  8   liste de vos dépositions précédentes et de la contribution que vous avez

  9   apportée dans des affaires pénales au Royaume-Uni ainsi que dans d'autres

 10   pays d'ailleurs. Donc nous demanderons de temps à autre de pouvoir faire

 11   référence à ces affaires pour pouvoir comprendre votre méthodologie.

 12   Convenez-vous dans un premier temps que ce que vous faites, en fait, votre

 13   domaine de compétence, consiste à étudier le travail effectué par d'autres

 14   équipes d'enquête, à la suite de quoi vous dressez des rapports; vous

 15   n'effectuez pas des enquêtes vous-même à propos de ces incidents ?

 16   R.  Dans ces cas, oui, mes rapports se sont fondés sur des enquêtes qui

 17   avaient été effectivement effectuées par d'autres.

 18   Q.  Merci. Mais lors de notre entretien, vous nous avez dit, je cite : "Je

 19   dois croire que les rapports sur lesquels je base mes rapports sont

 20   exacts."

 21   R.  Oui, bien sûr, je dois accorder foi à ce qui est écrit dans ces

 22   enquêtes et je dois croire que les enquêtes ont été effectuées en bonne et

 23   due forme au moment où elles ont été effectuées.

 24   Q.  Par conséquent, vous conviendrez que si nous souhaitons vérifier la

 25   véracité de vos conclusions, conclusions qui vous permettent d'apporter une

 26   crédibilité à leurs conclusions, nous n'avons qu'une seule option, à savoir

 27   il s'agit d'essayer de comprendre ces incidents avec, bien entendu, votre

 28   aide, n'est-ce

Page 5952

  1   pas ?

  2   R.  Oui. Je peux vous donner mon opinion à propos de ces différents cas, et

  3   ce, afin de vous permettre d'élucider ces questions.

  4   Q.  Merci.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que la vidéo de la liste 65 ter

  6   40221 soit présentée.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous devons passer au système

  8   Sanction à nouveau ?

  9   [Diffusion de la cassette vidéo]

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais avoir l'arrêt sur image à 1 minute

 11   25. Non, il va falloir repartir en arrière un peu, je vous prie. A 1 minute

 12   25. 1 minute 25. Voilà, c'est cela. Est-ce que vous pouvez faire un arrêt

 13   sur image maintenant.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur Higgs, est-ce que vous convenez qu'un organisme humain

 16   comporte plus de deux tiers de liquide; je pense au système lymphatique, au

 17   sang, et cetera ?

 18   R.  Ecoutez, je ne suis pas médecin. Donc oui, c'est ce que je suis porté à

 19   croire, mais évidemment, je ne peux pas vous donner une réponse absolument

 20   définitive et catégorique à ce sujet.

 21   Q.  Bien.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, est-ce que nous pourrions revoir cette

 23   image ? Où est-ce que cette image a disparu ?

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Est-ce que vous pourriez nous expliquer comment ce corps s'est retrouvé

 26   là et est-ce que vous pouvez nous expliquer comment les blessures que nous

 27   voyons ont été infligées à ce corps ?

 28   R.  Ecoutez, il est difficile de confirmer comment ce corps s'est retrouvé

Page 5953

  1   là. Moi, je ne peux voir que l'image que vous voyez vous-même. J'ai

  2   l'impression que cette personne avait été touchée par les éclats d'obus,

  3   par le souffle de l'obus, ce qui a provoqué les blessures, ensuite le

  4   souffle a poussé la personne par-dessus la barrière.

  5   Q.  Est-ce que vous pourriez nous expliquer où se trouvent alors tous ces

  6   fluides de l'organisme qui avaient quand même dû s'écouler de ce corps

  7   lorsque vous voyez ce type de blessures ? Où se trouve tout ce fluide ?

  8   R.  Ecoutez, je peux voir ce que vous voyez. Vous voyez la tache de sang à

  9   côté du corps.

 10   Q.  Le goudron qui se trouve sous le corps, il est sec; vous l'acceptez,

 11   cela.

 12   R.  Ecoutez, l'image est d'une qualité qui est telle que je ne peux pas

 13   véritablement le discerner, mais bon, je ne peux pas exclure non plus qu'il

 14   y ait du sang. Je ne peux pas voir de grandes quantités de sang, ceci étant

 15   dit.

 16   Q.  Est-ce que vous remarquez l'ombre faite par le corps ?

 17   R.  Oui, je peux voir cette ombre.

 18   Q.  Merci.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on maintenant voir cette vidéo à partir du

 20   point horaire 3:43. On y voit l'arrivée de l'équipe française.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Est-ce que c'est bien cette équipe française que l'on voit à l'écran ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Est-ce que c'est l'équipe qui a été la première à se présenter sur les

 25   lieux ?

 26   R.  Je ne sais pas si ce fut la première. Enfin, la séquence vidéo ne le

 27   précise pas.

 28   Q.  Au cours de notre entretien, vous avez confirmé le fait que le meilleur

Page 5954

  1   moment qui existe pour procéder à une enquête, à un constat sur les lieux,

  2   c'est lorsqu'il est immédiatement consécutif à l'événement.

  3   R.  Oui.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on maintenant voir la séquence vidéo à

  5   partir du point horaire 4:37.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Est-ce qu'on voit ici des membres du Bataillon français qui procèdent à

  8   des mesures pour mesurer le cratère ?

  9   R.  Non, ils ne sont pas en train de mesurer le cratère. Ils mesurent la

 10   distance qu'il y a entre le cratère et le bâtiment.

 11   R.  Oui, oui, c'est ça. Ils voient où se trouve ce cratère par rapport au

 12   bâtiment ?

 13   R.  Exact.

 14   Q.  Est-ce qu'on voit clairement ce cratère à l'image ?

 15   R.  Non, pas ici. On ne le voit pas clairement.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut revenir en arrière de

 17   quelques secondes. Vous pouvez rediffuser cette partie.

 18   [Diffusion de la cassette vidéo]

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Est-ce qu'on voit mieux ici ce cratère ?

 21   R.  Oui, mais on ne le voit pas beaucoup mieux. On n'en voit pas les

 22   détails.

 23   Q.  Est-ce qu'on voit ici que les traces du cratère sont indiquées à la

 24   craie ?

 25   R.  L'image ne montre pas clairement si on utilise de la craie ou si ce

 26   qu'on voit c'est simplement le pourtour en blanc des traces de l'explosion

 27   qu'on voit dans l'asphalte.

 28   Q.  Très bien.

Page 5955

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Poursuivons la diffusion.

  2   [Diffusion de la cassette vidéo]

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ecoutons minutieusement ce que dit cet homme

  4   qui utilise la boussole. Est-ce qu'on peut visionner une fois de plus ces

  5   images.

  6   [Diffusion de la cassette vidéo]

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Arrêt sur image, s'il vous plaît. Est-ce

  8   que l'officier français n'a pas dit "2 800 millièmes" ?

  9   Est-ce que les interprètes de la cabine française pourraient nous aider ?

 10   Est-ce que l'officier a dit "2 100 millièmes" ?

 11   L'INTERPRÈTE : Les interprètes de la cabine française croient avoir entendu

 12   2 800 millièmes.

 13   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La cabine française indique qu'à son

 15   avis, elle a entendu "2 800 millièmes".

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut écouter une fois de plus pour

 17   savoir exactement ce qui s'est dit ?

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et je demanderais aux interprètes

 19   français d'interpréter ce qu'ils entendent en français.

 20   [Diffusion de la cassette vidéo]

 21   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 22   "Azimut, tu notes -- tu notes 2 800 millièmes."

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 24   Pouvons-nous passer maintenant au point horaire 6:28. Oui, là, nous

 25   sommes au bon endroit.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Monsieur Higgs, convenez-vous qu'ici sur ce stabilisateur, on ne voit

 28   aucune amorce, au détonateur ?

Page 5956

  1   R.  Le moyen utilisé pour allumer ce genre d'engin, vous le voyez à

  2   l'image. Ça se trouve au centre. C'est un percuteur qui se trouve au centre

  3   de l'empennage, et il va entraîner l'amorce de l'engin. Quand on parle de

  4   la fusée ou de l'amorce, ça se trouve de l'autre côté de l'obus, à l'autre

  5   bout de l'obus, et il va détoner, lui, sur impact.

  6   Q.  Mais si vous regardez l'endroit où on devrait trouver ce capuchon en

  7   cuivre, celui qui va actionner le moteur, la charge propulsive, pas l'obus,

  8   et c'est en cuivre en général, en tout cas il a la couleur du cuivre ou du

  9   laiton, c'est un matériau assez mou, ce n'est pas un matériau très dur ?

 10   R.  Ce percuteur n'est pas toujours en cuivre. Quelquefois, vous avez un

 11   alliage de couleur argentée. Ça dépend du type, du lot de munitions. Il

 12   arrive aussi que ce percuteur soit enlevé, se déplace une fois le tir

 13   lancé.

 14   Q.  Nous acceptons, n'est-ce pas, l'idée qu'en fait ici on ne le voit pas ?

 15   Il manque à l'image. En fait, il avait été relâché auparavant ou on ne le

 16   trouve pas, ce percuteur. Mais les détonateurs, les percuteurs -- ou les

 17   détonateurs, plutôt, de marque yougoslave, de fabrication yougoslave,

 18   savez-vous de quel matériau ils étaient composés et de quelle couleur était

 19   ce métal ?

 20   R.  Vous posez deux questions. Vous me demandez d'abord s'il est manquant :

 21   Je ne peux pas dire, il se pourrait qu'il soit encore là. La photo n'est

 22   pas suffisamment précise pour le déterminer.

 23   Pour ce qui est de la teinte, du coloris de ce type de

 24   munition : Là, je ne sais pas. Je ne dispose pas de ce genre d'information.

 25   Q.  Merci.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Continuons, s'il vous plaît.

 27   [Diffusion de la cassette vidéo]

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est bon là. Arrêt sur image.

Page 5957

  1   Je pense que la définition était meilleure pour voir le corps même du

  2   stabilisateur. Est-ce qu'on peut revenir un peu en arrière. Excellent.

  3   C'est bon.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Que dites-vous du corps de ce stabilisateur ? Est-ce qu'on voit ici des

  6   traces d'explosion ?

  7   R.  Il montre les dégâts subis en raison du mode de lancement. Vous voyez,

  8   la partie du stabilisateur qui se trouve le plus à droite a été en partie

  9   endommagée à cause du tir. Et l'empennage a dû avoir touché quelque chose

 10   après l'explosion, ce qui veut dire qu'il y a des dégâts supplémentaires

 11   occasionnés aux ailettes.

 12   Q.  Merci. Est-ce que vous voyez que là où on loge normalement le

 13   détonateur, il n'y est plus ?

 14   R.  L'image n'est pas assez claire pour le déterminer, parce que lorsque le

 15   tir a lieu, il y a compression du fait de l'amorce, et donc ce n'est pas

 16   assez clair, je ne peux pas dire oui ni non.

 17   Q.  Merci.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense que ça déjà été versé au dossier,

 19   n'est-ce pas, cette vidéo ? Est-ce que l'Accusation n'en a pas demandé le

 20   versement ?

 21   M. GAYNOR : [interprétation] Effectivement, nous croyons que ça a déjà été

 22   admis.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, pourquoi a-t-on des cotes

 24   différentes ?

 25   M. GAYNOR : [interprétation] La vidéo a été versée au dossier. Mais pour ce

 26   qui est du stabilisateur --

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, c'est le numéro 40310 pour la cote

 28   ou le numéro de la vidéo, alors qu'ici on a 40221.

Page 5958

  1   M. GAYNOR : [interprétation] Je crois que c'est un doublon, simplement, et

  2   que ce numéro-ci est le bon.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Lequel ?

  4   M. GAYNOR : [interprétation] 40221.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  6   M. GAYNOR : [interprétation] Merci.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cette vidéo a déjà été versée au

  8   dossier, et le greffier d'audience va lui donner une cote en temps utile.

  9   Ce sera sans doute la cote P1450.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. 1D2253. C'est le document dont je

 11   demande l'affichage.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourrait-on passer du système Sanction

 13   au prétoire électronique.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Donc voici la photographie que je

 15   souhaitais vous montrer. J'aimerais que sa qualité soit améliorée à

 16   l'écran, si possible.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Conviendrez, Monsieur, que l'on voit ici une photo qui montre le marché

 19   de Markale ? C'est un cliché que nous avons tiré d'une émission de

 20   télévision d'avant la guerre. Donc admettez-vous qu'il s'agit bien ici du

 21   marché de Markale et que ce marché est couvert par des plaques de toit qui

 22   sont jointives les unes par rapport aux autres ?

 23   R.  Au vu de cette photographie, il semblerait qu'il s'agit du marché, même

 24   si je ne saurais le confirmer de façon définitive sans avoir vu une photo

 25   de plus grande taille. Mais oui, oui, oui, apparemment, c'est le marché de

 26   Markale.

 27   Q.  Vous voyez les rails vers le bas, et cetera. Mais lorsque vous voyez

 28   ces plaques jointives qui constituent un toit, est-ce que vous maintenez

Page 5959

  1   votre conclusion qui reposait sur des rapports d'enquête antérieure selon

  2   laquelle il est possible, grâce à un seul tir sur ce marché, de voir l'obus

  3   atterrir sur le sol sans avoir endommagé les plaques qui constituent le

  4   toit ?

  5   R.  Oui, c'est possible, parce que le jour du tir, bien entendu, nous ne

  6   connaissions pas la position de ces plaques qui constituent le toit, et

  7   l'obus aurait facilement pu passer par un interstice entre deux de ces

  8   plaques. Mais manifestement, je ne dispose d'aucun élément de preuve ou

  9   d'information à ce sujet.

 10   Q.  Mais comme vous avez pu le constater, sans doute, au vu des documents

 11   qui vous ont été fournis par la partie musulmane, le lieu concerné est bien

 12   le même. L'aspect du marché était identique, et on le voit dans un certain

 13   nombre de photographies de Markale. On voit qu'il est recouvert. Est-ce que

 14   vous avez vu ces documents ? Est-ce qu'on vous a fourni tous les éléments

 15   documentaires nécessaires pour vous permettre de conclure ?

 16   R.  Les conclusions, bien entendu, reposent sur les rapports qui, bien

 17   entendu, constituaient des éléments de preuve préalables. A aucun moment je

 18   n'ai vu un quelconque rapport laissant entendre qu'un obus aurait traversé

 19   ou serait passé entre deux de ces éléments de couverture du toit. Il n'en a

 20   été fait mention nulle part. Si je ne me trompe, je crois avoir vu une

 21   mention du fait qu'un étal aurait été traversé, mais je n'ai pas d'élément

 22   de preuve relatif à ces couvertures du toit.

 23   Q.  Mais pour que les choses soient tout à fait claires pour ceux qui

 24   participent à la présente procédure, nous ne parlons pas de Markale I ici,

 25   n'est-ce pas ?

 26   R.  En effet.

 27   Q.  Est-ce qu'un obus qui aurait touché ces éléments de couverture du toit

 28   pourrait avoir été activé ?

Page 5960

  1   R.  Selon le matériau qui constitue ces éléments de couverture du toit,

  2   selon leur épaisseur, on peut dire, oui, c'est possible.

  3   Q.  Vous avez dit - et nous l'avons vu écrit dans un rapport des Nations

  4   Unies - que l'obus avait frappé un étal. Est-ce qu'il a été activé au

  5   moment du choc, de l'impact avec cet étal ?

  6   R.  Cela dépend, bien sûr, des conditions dans lesquelles l'étal a été

  7   frappé, touché, et quelle est la partie de l'étal qui a été touchée. Mais

  8   un étal peut permettre l'explosion d'un obus avec une force suffisante.

  9   Q.  Je vous remercie.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande maintenant l'affichage sur les

 11   écrans du document 65 ter numéro 10083.

 12   Et je demande au préalable le versement au dossier de la photographie

 13   dont nous venons de parler.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce document sera admis, à moins qu'il ne

 15   fasse l'objet d'une objection.

 16   Monsieur Gaynor.

 17   M. GAYNOR : [interprétation] Sous réserve de l'observation suivante, à

 18   savoir que nous n'avons aucune information quant au moment où cette

 19   photographie --

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Elle a été prise avant l'incident.

 21   M. GAYNOR : [interprétation] Exact. Mais en dehors de cela, nous n'avons

 22   pas de désignation d'année quant au moment où cette photographie a pu être

 23   prise.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvez-vous nous aider sur ce point,

 25   Monsieur Karadzic ?

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai vécu 50 ans dans cette ville et je la

 27   connais très bien. Donc ce qu'on voit ici, c'est l'aspect permanent du

 28   marché de Markale pendant une très longue période avant le début de la

Page 5961

  1   guerre, et même avant. Donc ici, nous avons un cliché qui a été tiré d'une

  2   émission de télévision.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quand ?

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Juste avant la guerre.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est tout ce que vous pouvez nous en

  6   dire?

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc avec cette nuance, nous admettons

  9   la photographie en tant qu'élément de preuve.

 10   M. GAYNOR : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document devient la pièce D542,

 12   Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande donc l'affichage du document 65 ter

 14   numéro 10083.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  C'est une partie de votre rapport dans laquelle vous évoquez votre

 17   visite à Mrkovici, Mrkovici étant un village qui se trouve au-delà de la

 18   ligne de confrontation du côté serbe. C'est bien cela, n'est-ce pas ?

 19   La fin de ma question n'a pas été consignée en anglais au compte rendu

 20   d'audience.

 21   Je vous ai demandé : "C'est bien cela, n'est-ce pas ?"

 22   R.  A quelle partie du rapport faites-vous référence ?

 23   Q.  Bien, il s'agit de la dernière page. Je cite : "Je me suis rendu dans

 24   le secteur de Mrkovici…" numéro ERN 0303-7515. En anglais, le passage

 25   commence par les mots "I have visited…"

 26   R.  Oui, c'est exact.

 27   Q.  Qu'entendiez-vous par l'affirmation venant de vous selon laquelle à

 28   Mrkovici, il y avait pas mal de sites qui auraient permis l'emplacement

Page 5962

  1   d'un site de mortier et qu'il existait des routes permettant de transporter

  2   ces mortiers jusqu'à Mrkovici ?

  3   R.  J'essayais de déterminer quels étaient tous les lieux possibles où le

  4   projectile aurait pu se trouver, d'où il aurait pu être tiré. Avec un

  5   mortier de 120-millimètres, nous sommes en présence d'une pièce lourde,

  6   d'une pièce importante, et certains lieux peuvent ne pas permettre de

  7   placer une telle pièce à cet endroit et de tirer à partir de cet endroit.

  8   Donc je me suis rendu dans différents sites pour voir quelle était la

  9   possibilité qu'un tel mortier s'y soit trouvé.

 10   Q.  Mais pendant la rencontre que nous avons eue vous et moi, vous avez dit

 11   qu'un mortier de 120-millimètres pouvait être démonté, n'est-ce pas, et

 12   expédié à un autre endroit pour y être remonté; c'est bien cela ?

 13   R.  Oui, c'est exact.

 14   Q.  Je vous remercie. Est-ce qu'à Mrkovici, vous avez trouvé un quelconque

 15   lieu où un mortier aussi important de taille, donc un mortier de 120-

 16   millimètres aurait pu être enterré ?

 17   R.  Non, non. Aucun des sites où il aurait pu être enterré.

 18   Q.  Je vous remercie. Est-ce que votre tournée de tous ces sites se situait

 19   entre Mrkovici et Markale ? Est-ce que vous vous êtes rendus également à

 20   d'autres endroits pour voir s'ils auraient pu constituer des sites

 21   appropriés pour un mortier ?

 22   R.  Nous avons examiné tout le secteur le long de la ligne constituant la

 23   trajectoire et nous y avons déterminé quels étaient les endroits

 24   appropriés, oui.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que nous nous penchions quelques

 26   instants sur la carte 02 du classeur des cartes. Est-ce qu'elle a été

 27   versée au dossier, la carte numéro 02, tirée du classeur des cartes de

 28   Sarajevo.

Page 5963

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne me rappelle pas le numéro 65 ter

  2   de cette photographie aérienne.

  3   M. GAYNOR : [interprétation] Nous allons le retrouver sous peu, Monsieur le

  4   Président.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui. C'est bien une photographie aérienne.

  6   M. GAYNOR : [interprétation] On m'informe qu'il s'agit du numéro 11790,

  7   Monsieur le Président.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, c'est bien celle-ci.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Pourriez-vous, Monsieur, nous montrer où se trouve Mrkovici sur cette

 11   image ?

 12   R.  Bien sûr, cela fait pas mal de temps que je ne suis pas retourné sur

 13   place, donc je n'ai plus un souvenir très précis du nom des différentes

 14   localités. Et au vu de cette image, il serait tout à fait improbable que je

 15   puisse déterminer exactement où se trouve le lieu en question sur cette

 16   photographie aérienne.

 17   Q.  En vous centrant sur la partie inférieure de la ville, la chose serait

 18   peut-être plus facile. Est-ce que vous pouvez nous montre sur cette image

 19   où se trouve Markale ?

 20   R.  La partie inférieure de la ville, bien sûr, nous montre l'emplacement

 21   de l'aéroport, et Markale est à l'autre bout de la ville.

 22   Q.  Donc du côté est de la ville, dans la partie la plus étroite, vous

 23   voyez cette rue qui commence là et qui se poursuit vers la partie ancienne

 24   de la ville ?

 25   R.  Pas clairement sur cette photographie, non, je ne le vois pas très

 26   bien.

 27   Q.  Conviendrez-vous que Markale se situe bien dans la partie la plus

 28   ancienne de la ville ?

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  1   R.  Oui, oui, dans la vieille ville.

  2   Q.  Et conviendrez-vous qu'en partant de la vieille ville, pour vous

  3   diriger vers la montagne, Mrkovici se trouve de l'autre côté de la ligne de

  4   front, donc au nord de la ligne de confrontation, n'est-ce pas ?

  5   R.  Sans vérification complémentaire sur une carte où figurent les

  6   dénominations de localités, je ne peux pas vous montrer cela sur la

  7   photographie que nous avons sous les yeux.

  8   Q.  Bon, nous allons vous montrer une carte aussi. Mais conviendrez-vous

  9   que les lignes de front dans cette partie bien précise sont très proches

 10   l'une de l'autre ?

 11   R.  Oui, l'image nous montre que les lignes de confrontation sont très

 12   proches l'une de l'autre.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, nous nous arrêterons

 14   là pour aujourd'hui.

 15   Donc nous suspendons l'audience et la reprendrons demain à 9 heures du

 16   matin.

 17   Monsieur Higgs, vous le savez sans doute parfaitement bien mais pendant

 18   toute la durée de votre déposition, vous n'êtes censé discuter de ce

 19   témoignage avec personne.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] En effet, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous nous reverrons demain

 22   matin.

 23   [Le témoin quitte la barre]

 24   --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le jeudi 19 août 2010,

 25   à 9 heures 00.

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