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2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous.
7 Je demanderais au témoin de bien vouloir prononcer la déclaration
8 solennelle.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
10 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
11 LE TÉMOIN : KDZ310 [Assermenté]
12 [Le témoin répond par l'interprète]
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
14 Madame Uertz-Retzlaff, avant que vous ne commenciez. J'ai quelques propos à
15 échanger avec le témoin.
16 Monsieur, nous nous félicitons de votre présence ici aujourd'hui en vue de
17 témoigner dans la présente affaire, et je tiens à vous dire que la Chambre
18 a été informée des quelques soucis et difficultés que vous avez évoqués en
19 rapport avec votre déposition.
20 J'aimerais, cependant, commencer par vous informer du fait que des mesures
21 de protection vous ont été accordées par le passé, qui continuent à valoir
22 en l'espèce et que, par conséquent, votre identité, en tant que témoin
23 devant ce Tribunal, ne sera pas connue du public. Au cas où à quelque
24 moment que ce soit pendant votre déposition ou après votre déposition, vous
25 devriez estimer que ces mesures de protection n'ont pas été suffisamment
26 efficaces, il vous appartient de nous en informer, par le truchement de la
27 Section chargée des Victimes et des Témoins.
28 Puis en deuxième lieu, le Tribunal s'efforce de veiller à ce que votre
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1 témoignage se déroule dans les conditions les moins stressantes qui soient,
2 et la Section chargée des Victimes et des Témoins est prête à vous aider en
3 cas de problèmes à cet égard quelle que soit la nature de ce problème.
4 Mais, comme vous le savez certainement, le procès qui se déroule ici est un
5 procès pénal important, et l'Accusation, tout comme l'accusé, M. Karadzic,
6 sont en droit de vous poser des questions, auquel il vous appartient de
7 répondre au mieux de vos possibilités de la façon la plus concise possible.
8 Nous espérons achever votre audition aujourd'hui, mais il est possible que
9 celle-ci doive se poursuivre demain après-midi.
10 Madame Uertz-Retzlaff, vous avez la parole.
11 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,
12 Messieurs les Juges.
13 Interrogatoire principal par Mme Uertz-Retzlaff :
14 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur. Monsieur, pendant votre déposition,
15 chacun s'adressera à vous en utilisant votre pseudonyme, à savoir KDZ310,
16 personne ne connaîtra donc votre nom.
17 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je demande que le document 65 ter
18 numéro 90143 s'affiche sur les écrans, mais sans diffusion hors du
19 prétoire, première page du document, je vous prie.
20 Q. Monsieur, je vous prierais, de prendre connaissance du contenu de cette
21 page et je vous demande si au bas de la page c'est bien votre nom que l'on
22 voit ainsi que votre date de naissance ?
23 R. Oui.
24 L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète : remplacer au bas de ce document
25 par dans ce document.
26 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]
27 Q. Au bas de du document, est-ce que l'on voit votre signature ainsi que
28 la date à laquelle a été établie cette déclaration consolidée ?
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1 R. Oui.
2 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, je demanderais
3 que nous passions à huis clos partiel pour un bref instant.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
5 Voilà, nous sommes à présent à huis clos partiel.
6 [Audience à huis clos partiel]
7 (expurgé)
8 (expurgé)
9 (expurgé)
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1 (expurgé)
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7 (expurgé)
8 (expurgé)
9 [Audience publique]
10 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]
11 Q. Les informations que vous avez fournies lors de votre rencontre avec le
12 bureau du Procureur ainsi que durant la déposition qui vient d'être
13 évoquée, ont été consolidées en une seule déclaration, et nous venons d'en
14 voir la première page, n'est-ce pas ?
15 R. Oui, c'est exact.
16 Q. Avez-vous eu la possibilité de relire cette déclaration et de la signer
17 hier ?
18 R. Oui, je l'ai lue hier, quelques mots ont été changés, quelques
19 corrections apportées au texte, et après quoi j'ai signé cette déclaration
20 consolidée.
21 Q. Pouvez-vous confirmer que la déclaration consolidée en question rend
22 bien compte de tous les renseignements fournis par vous par le passé ?
23 R. Oui.
24 Q. Monsieur le Témoin, apporteriez-vous les mêmes réponses à des questions
25 que le Tribunal vous poserait aujourd'hui sur les mêmes sujets ici même ?
26 R. Oui.
27 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
28 Juges, je demande le versement au dossier du document 65 ter numéro 90143
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1 au titre de l'article 92 ter du Règlement.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document devient la pièce P1937, à
4 conserver sous pli scellé.
5 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
6 Juges, nous allons déposer une version publique expurgée très rapidement
7 étant donné la nécessité pour ce document d'être conservé sous pli scellé.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Cette version expurgée
9 recevra le numéro de pièce à conviction P1938.
10 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je vous remercie.
11 Avec l'autorisation de la Chambre, je m'apprête maintenant à lire un bref
12 résumé de la déposition du témoin, telle que déjà admise.
13 Pendant la période pertinente, le témoin résidait à Sarajevo et était
14 soldat au sein du Corps de Sarajevo-Romanija.
15 Le témoin a eu connaissance, alors que l'armée populaire yougoslave et la
16 JNA se retiraient de Slovénie et de certaines parties de la Croatie, que
17 des quantités importantes d'armes et de munitions étaient transportées en
18 Bosnie-Herzégovine et que, dès le mois de septembre 1991, des armes étaient
19 livrées aux membres du Parti démocratique serbe dans la caserne de la JNA.
20 Il a constaté que la JNA avait établi des positions d'artillerie dans les
21 environs de Sarajevo à la date du 6 avril 1992.
22 Le témoin a rappelé l'existence de tensions politiques à Sarajevo avant le
23 conflit. Selon ses constatations, les discours des représentants
24 politiques, y compris les discours de l'accusé, et la propagande anti-
25 musulmane et anti-croate avait des effets sur les citoyens de base et
26 provoquait de la haine contre les non-Serbes. Les non-Serbes étaient
27 décrits comme une menace par rapport aux Serbes et il était dit que des
28 divisions ethniques étaient nécessaires.
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1 Le témoin a constaté que les Serbes ont pris le contrôle de Grbavica à la
2 mi-mai 1992 sans la moindre résistance, et que des non-Serbes ont fait
3 l'objet de mesures restrictives et discriminatoires, de divers abus et ont
4 été victime de crimes. Ils ont été expulsés, leurs appartements ont été
5 pillés.
6 Selon les constatations du témoin 2817, la chaîne de commandement militaire
7 et les communications au sein du Corps de Sarajevo-Romanija fonctionnaient
8 correctement. Le témoin a constaté le déploiement de soldats avec des
9 missions de tireur d'élite dans diverses positions de Grbavica. Ces soldats
10 utilisaient des équipements très performants. Le témoin a eu connaissance
11 du fait qu'ils prenaient des civils pour cible.
12 Le témoin a constaté le pilonnage de la ville à partir de positions
13 d'artillerie et de mortier, et vu que ces pilonnages prenaient souvent pour
14 cible des secteurs civils de façon non sélective.
15 Selon le témoin, les détenus du centre de détention de KPD Kula Butmir ont
16 été contraints à creuser des tranchées sur le front. Certains de ces
17 détenus ont été tués.
18 Monsieur le Président, c'est ainsi que se termine le résumé de la
19 déposition du témoin, et j'aimerais maintenant poursuivre avec quelques
20 questions que je lui poserai.
21 Q. Monsieur, dans votre déclaration, et je fais référence ici aux
22 paragraphes 3 à 6 de cette dernière, vous décrivez les tensions qui
23 s'accroissent entre les différents groupes ethniques en 1991 et 1992; vous
24 vous rappelez cela ?
25 R. Oui, je me le rappelle.
26 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je demanderais maintenant que le
27 document 65 ter numéro 11 928 soit affiché sur les écrans, document qui
28 peut être diffusé à l'intention du public.
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1 J'indique, avant que le texte n'apparaisse sur les écrans, qu'il s'agit
2 d'un article de presse dont le titre est : "Mémorial aux âmes de
3 l'innocence," érigé le 25 [comme interprété] janvier 1991 et qui a rapport
4 avec une cérémonie qui s'est déroulée dans le village de Vrhpraca, au pied
5 de la montagne de Jahorina, pendant la Seconde Guerre mondiale.
6 J'aimerais que l'on agrandisse à l'écran le texte en B/C/S, qui constitue
7 la légende de la première photo. Très bien.
8 Q. Monsieur le Témoin, avez-vous eu la possibilité d'examiner ce document
9 avant de vous présenter dans ce prétoire ce matin ?
10 R. Oui, hier.
11 Q. Etes-vous au courant du fait --
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde, Madame Uertz-Retzlaff.
13 Je suppose que ce témoin bénéficie également de la mesure de déformation de
14 la voix.
15 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc il importe que les autres micros
17 que celui du témoin soient éteints lorsque ce dernier s'exprime, de façon à
18 éviter les interférences. Je sais que c'est un peu difficile mais, Monsieur
19 le Témoin, je vous demanderais avant de commencer à parler de vérifier
20 qu'aucun des autres micros de la salle n'est allumé, c'est-à-dire que vous
21 ne voyiez aucune petite lumière rouge sur l'un quelconque des autres
22 micros. A ce moment-là, vous pouvez parlez. Est-ce que vous avez compris,
23 Monsieur le Témoin ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Où se trouve cette lumière rouge ?
25 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Vous voyez, par exemple, la lumière
26 rouge de mon micro se trouve ici lorsque mon micro est allumé.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] D'accord, d'accord.
28 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]
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1 Q. Monsieur le Témoin, cette cérémonie, est-ce que vous saviez que cette
2 cérémonie aurait lieu, ainsi que d'autres du même genre en 1991 ?
3 R. Oui.
4 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] J'aimerais que s'affiche la deuxième
5 page de la version anglaise. Pour ce qui est de la version serbe, celle qui
6 est déjà à l'écran peut y rester.
7 Q. Nous voyons dans cette deuxième page en anglais que M. Karadzic
8 prononce lui aussi une allocution pendant cette cérémonie et parle des
9 Serbes comme étant le seul peuple du monde qui a été persécuté et assassiné
10 du simple fait de son existence, et il ajoute que : "C'est la raison pour
11 laquelle nous n'allons plus leur permettre de nous dominer et de nous
12 éliminer peu à peu."
13 Alors, Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez entendu M. Karadzic parler,
14 à un moment ou à un autre, dans des termes similaires à ceux que je viens
15 de citer ?
16 R. Oui.
17 Q. Est-ce que les propos que je viens de citer et l'organisation d'une
18 telle cérémonie ont eu un effet sur les personnes avec lesquelles vous avez
19 eu des contacts ?
20 R. Oui, cela a eu un effet qui a consisté à nuire aux rapports entre les
21 différents groupes ethniques, et si vous le souhaitez, je peux m'expliquer
22 plus en détail.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Désolé, je n'ai pas entendu le témoin en serbe.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne vous ai pas entendu, Monsieur
25 Karadzic; pourriez-vous répéter ?
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'entends pas l'interprétation serbe dans
27 mes écouteurs. Je n'ai pas entendu ce qu'a dit le témoin en serbe.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Réessayons. Auriez-vous l'amabilité de
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1 répéter votre question, Madame Uertz-Retzlaff, après quoi le témoin pourra
2 répéter sa réponse ?
3 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]
4 Q. Monsieur le Témoin, ce genre d'événement et les propos qui ont été
5 tenus pendant ce genre de cérémonie, ont-ils eu un effet sur les rapports
6 interethniques ? Si oui, pouvez-vous expliquer de quelle façon ?
7 R. Oui, cela a eu un effet et, le cas échéant, je peux donner davantage de
8 détails en expliquant quels ont été les différents effets provoqués.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.
10 Nous venons d'entendre M. Karadzic dire qu'il n'entendait pas ce qui
11 se disait en serbe.
12 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'entends que d'interprétation, or le témoin
14 est présent dans la salle.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous pourrions peut-être suspendre
16 brièvement.
17 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Réessayons.
19 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]
20 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur Karadzic, est-ce que vous m'entendez
22 maintenant ?
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous entends. Merci.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Alors je peux commencer.
25 L'INTERPRÈTE : Signe affirmatif de la tête de M. Karadzic.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, est-ce que vous
27 pensez qu'il faut que soient répétées les dernières questions réponses ?
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Non. Merci beaucoup.
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1 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]
2 Q. Monsieur, pourriez-vous décrire un peu plus dans le détail le genre
3 d'effet que ceci a eu ?
4 R. Voyez-vous, il est dit dans ce discours que le peuple serbe est le seul
5 qui, pendant la Seconde Guerre mondiale, a été assassiné, persécuté, et
6 cetera. Or, les trois peuples ont subi un certain nombre de victimes, et
7 ont été persécutés et subi des tortures. Je ne saurais pas vous donner de
8 nombre exact aujourd'hui, mais dans ce texte, le nombre des victimes est
9 précisé.
10 Voilà donc de quelle façon les choses sont dites, ce qui ne peut
11 qu'alimenter la haine interethnique. C'est le résultat que peut avoir le
12 fait de dire que les membres du groupe ethnique serbe ont été les seuls à
13 subir des victimes et à donner le nombre précis de ces victimes. Donc c'est
14 un exemple. Je vais vous en donner un autre. M. Josipovic, président actuel
15 de la Croatie, et le président serbe, M. Tadic, se sont rendus à Vukovar,
16 et ont rendu honneur aux victimes d'une façon tout à fait différente, d'une
17 façon qui, en fait, est susceptible d'ouvrir la voix à la réconciliation
18 entre les deux peuples. Des excuses ont été présentées, étant donné les
19 victimes qui ont péri, et les Croates n'étaient pas seuls présents à cette
20 occasion. Dans le cas dont nous parlons ici, des Serbes ont pris la parole
21 pour parler des victimes serbes, et ce seul fait, incite à la haine
22 interethnique et ne rend pas possible une coexistence, une vie ensemble.
23 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le
24 versement au dossier de ce document.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur le Témoin, est-ce que "Javnost"
26 est un journal ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que c'est un quotidien, enfin comme
28 "Borba." Je crois que c'est un quotidien de Belgrade.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que le témoin pourrait voir le
2 coin supérieur gauche, dans la page.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vois écrit : "Javnost." Il est
4 probable que ce soit un quotidien mais, moi, je ne le connais pas.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
6 Le document est admis.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Et devient la pièce P1939, Monsieur le
8 Président, Messieurs les Juges.
9 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
10 Je demanderais maintenant l'affichage du document 65 ter, numéro 01009,
11 document qui peut également être diffusé à l'attention du public.
12 Pendant que nous attendons qu'il apparaisse à l'écran, j'indique qu'il
13 s'agit d'une interview de M. Karadzic, par "Nasa Borba," en date du 16 mars
14 1992.
15 Q. Maintenant que le document est à l'écran, Monsieur, je vous demande si
16 vous connaissez cette publication dont le titre était "Nasa Borba," et si
17 cette publication était un journal ?
18 R. Je pense aussi qu'il s'agit d'un quotidien.
19 Q. Alors nous voyons qu'il s'agit d'une interview en date du 16 mars 1992.
20 Monsieur, avez-vous eu l'occasion d'examiner, de lire ce document, après
21 votre arrivée ici ?
22 R. Oui, j'ai eu la possibilité de le faire, hier.
23 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Peut-on déplacer un peu la version en
24 B/C/S, de façon à voir la première colonne dans son intégralité.
25 Q. Monsieur, vous constaterez, n'est-ce pas, que M. Karadzic dit dans ce
26 texte que :
27 "…les Serbes ne trouveront jamais la paix tant qu'ils n'auront pas
28 réalisé leur aspiration séculaire, de vivre tous dans un seul et même
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1 état."
2 Monsieur le Témoin, aviez-vous connaissance de cette aspiration des
3 Serbes, qui souhaitaient tous vivre dans un seul et même état ?
4 R. Oui.
5 Q. Avez-vous entendu M. Karadzic dire des choses comme celle-là ?
6 R. Oui.
7 Q. Est-ce que ce genre de propos avait un effet sur les relations
8 interethniques parmi les personnes qui vous entouraient ?
9 R. Oui.
10 Q. Dans quel sens ?
11 R. Voyez-vous, M. Karadzic était à l'époque une personnalité charismatique
12 pour le peuple serbe. Les gens croyaient ce qu'il disait, et donc les gens
13 pensaient que l'idée exprimée par lui était réalisable.
14 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je demande l'affichage de la page 2
15 en anglais, alors qu'en serbe, on peut en rester à cette première page.
16 Q. Dans le paragraphe suivant, M. Karadzic parle d'une tendance au chaos
17 et au désordre qui pourrait conduire à une guerre interethnique et à une
18 guerre de religion avec des centaines et des centaines de morts et des
19 villes entières qui risqueraient d'être détruites.
20 Monsieur le Témoin, avez-vous entendu M. Karadzic prononcer de tels propos
21 ?
22 R. Oui.
23 Q. Pourriez-vous citer un exemple de cela ? Avez-vous un exemple précis en
24 mémoire ?
25 R. Il a donné de nombreux entretiens, mais également il a fait pendant une
26 session de l'assemblée nationale, il a dit ce qui risquait de se produire
27 en cas de guerre. L'opinion le sait. Il a déclaré que ce qui risquait de se
28 produire, c'était la disparition d'un peuple, puisque soi-disant les Serbes
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1 et les Croates n'étaient pas tellement mélangés, et que les Serbes et les
2 Musulmans l'étaient au point qu'un peuple risquait de disparaître. Cela a
3 constitué une menace très importante à la paix, en Bosnie-Herzégovine.
4 Q. Il pensait à quel peuple, lorsqu'il a évoqué la disparition ?
5 R. C'étaient aux Musulmans qu'on s'y réfère.
6 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je vais demander l'affichage de la
7 troisième page en anglais, la page en B/C/S est toujours la bonne.
8 Q. C'est en haut de la page que M. Karadzic parle des cartes. Il dit que
9 puisque la moitié du territoire appartient aux Serbes, même s'ils ne
10 constituent pas la majorité de la population. Puis dans la suite, il évoque
11 de manière plus précise les chiffres correspondant à la population.
12 Est-ce que vous vous souvenez de ces propos relatifs aux cartes, à l'époque
13 ?
14 R. Oui.
15 Q. Au sujet de Sarajevo, pourriez-vous nous dire si -- et si oui, de
16 quelle manière a-t-on parlé de la carte de Sarajevo ?
17 R. Oui, au sujet de Sarajevo, ces cartes correspondaient assez à la
18 division qui allait être opérée au terme des accords de Dayton.
19 Q. S'agissant de la division du territoire, est-ce que ces cartes ont eu
20 un impact sur la population ?
21 R. Oui, ça a eu une influence, surtout lorsqu'il s'agit de la population
22 qui résidait à l'extérieur des parties qui allaient revenir à tel ou tel
23 peuple, par exemple les Serbes, qui se voyaient à l'extérieur d'un
24 territoire qui allait revenir éventuellement aux Serbes. Bien là, ils ont
25 été inquiétés.
26 Les autres groupes ethniques; qu'en est-il de l'incidence que cela a eu sur
27 eux ?
28 R. Mais bien sûr qu'il y a eu des effets négatifs sur les Croates et sur
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1 les Musulmans lorsqu'ils se voyaient résider sur des territoires qui
2 allaient revenir à un autre groupe, si les Croates se voyaient résider sur
3 un territoire serbe, et vice versa. Bien sûr que cela a inquiété les gens,
4 ils se sont sentis plongés dans l'insécurité, dans l'anxiété, ils ne
5 savaient pas ce qui allait advenir d'eux. Puis on a commencé à dire qu'une
6 guerre allait éclater, mais on ne savait pas de quelle guerre il allait
7 s'agir. Les gens avaient peur, avaient peur pour leurs proches, pour leur
8 vie. Vous savez, ce sont des choses terrifiantes. Que ce soit les Croates
9 ou les Musulmans, ils avaient peur et les Serbes aussi. Tout le monde avait
10 peur.
11 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Passons, s'il vous plaît, à la page 7
12 dans la version anglaise. Pour ce qui est du texte en B/C/S, il nous faudra
13 la deuxième page, c'est-à-dire la fin de la deuxième page. Je pense qu'on
14 devrait pouvoir voir la fin de l'entretien.
15 Q. Dans le dernier paragraphe, M. Karadzic évoque le fait qu'avec les
16 Croates il n'y a pas beaucoup de problèmes qui n'ont pas été résolus, mais
17 que les Musulmans et les Serbes ne sauraient pas vivre ensemble. Est-ce que
18 vous l'avez entendu proférer ce genre de propos ?
19 R. La politique dans son ensemble qu'il a menée en tant que le numéro 1 du
20 Parti démocrate serbe n'a mené qu'à ça; à savoir démontrer aux deux peuples
21 que leur coexistence n'était plus possible. Mais il n'est pas compétent
22 pour décider qui va vivre avec qui, pour décider qui préservera son mariage
23 avec une Musulmane ou avec une Croate, ce n'était pas à lui de séparer les
24 familles, de briser les relations de bon voisinage entre les gens. Ces
25 relations étaient déjà suffisamment éprouvées, il ne fallait pas attiser le
26 feu. Il aurait fallu laisser les gens décider pour eux-mêmes s'ils
27 voulaient continuer de vivre ensemble ou non.
28 Parce que nous avions vécu ensemble pendant des années, donc nous
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1 aurions pu continuer. Il n'y avait pas que lui, il y avait Izetbegovic,
2 Kljujic et d'autres, et aucun d'entre eux n'aurait dû avoir la possibilité
3 de décider qui allait vivre avec qui. Ils auraient dû se consacrer à
4 l'amélioration de notre niveau de vie. Nous aurions pu avoir des
5 compétitions sur le plan sportif ou autres, et non pas chercher à
6 s'entretuer.
7 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je demande le versement de ce
8 texte, Monsieur le Président.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P1940.
11 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]
12 Q. Monsieur le Témoin, dans votre déclaration, vous décrivez la prise de
13 Grbavica à la mi-mai 1992, et vous dites que l'on a infligé des mauvais
14 traitements aux non-Serbes, vous parlez également de la peur. Et vous
15 parlez de cela dans les paragraphes 14 ainsi que 18 à 21.
16 Alors est-ce que vous pouvez nous dire à quel moment il y a eu ces mauvais
17 traitements infligés aux non-Serbes de Grbavica et des expulsions ?
18 R. Mais cela a commencé d'emblée; dès que les soldats sont arrivés à
19 Grbavica.
20 Q. Est-ce qu'à un moment donné cela s'est arrêté ?
21 R. Non.
22 Q. Vous parlez de soldats, vous dites à partir du moment où les soldats
23 sont arrivés; mais donc est-ce que ce sont les soldats ou est-ce la police
24 qui a procédé à ces expulsions de non-Serbes, ou d'autres individus ?
25 R. A la fois les militaires et la police, tant civile que militaire.
26 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Merci.
27 Monsieur le Président, j'en ai terminé avec l'interrogatoire principal, je
28 demande que les pièces associées mentionnées dans la déclaration consolidée
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1 soient versées au dossier. Pour certains d'entre eux, ces documents doivent
2 être versés sous pli scellé, et je vais les énumérer : Il s'agit du
3 documents 20266, qui doit être versé sous pli scellé. Il s'agit de la
4 feuille comportant le pseudonyme.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suppose que cela concerne l'ensemble
6 des documents, sauf le document 40292B.
7 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui. Nous n'avons pas besoin de les
8 énumérer tous.
9 Nous allons également fournir une version expurgée de toutes les
10 photos et des cartes, parce que nous devons procéder aux expurgations des
11 signatures.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc il s'agira de versions expurgées
13 pour des photocopies --
14 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je m'en remets au greffier --
16 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui.
17 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
18 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Il s'agira surtout des photographies
19 et des cartes.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.
21 S'il n'y a pas d'objections, des cotes seront attribuées et les exemplaires
22 seront remis aux parties.
23 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
25 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] C'est moi, Monsieur le Président.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic.
27 Avant que vous ne preniez la parole, j'ai oublié de préciser que nous
28 siégeons aujourd'hui en application de l'article 15 bis, en l'absence de
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1 Mme le Juge Lattanzi qui a dû s'absenter pour une raison urgente.
2 Aujourd'hui nous continuerons le travail jusqu'à 14 heures 30, si
3 nécessaire, et nous aurons deux pauses de 30 minutes.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie.
5 Bonjour à toutes et à tous. Trois semaines se sont écoulées, j'espère nous
6 ne nous sommes oubliés pendant ce laps de temps.
7 Contre-interrogatoire par M. Karadzic :
8 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.
9 R. Bonjour.
10 Q. Pour commencer, je tiens à dire à quel point nous respectons tous les
11 témoins et vous préciser que vous n'avez aucune raison de vous inquiéter,
12 d'être tendu. Nous n'attaquons jamais les témoins. Nous souhaitons
13 uniquement profiter de la présence du témoin pour faire une distinction
14 entre ce qu'ils savent effectivement et ce qui était considéré comme
15 généralement connu de l'opinion. Donc c'est uniquement pour préciser
16 exactement quelles sont les informations que vous connaissez directement.
17 La représentante de l'Accusation vous a posé toute une série de
18 questions politiques, et à ce titre ce qui m'intéresse c'est de savoir ce
19 qui vous permet de connaître ce genre de choses. Avez-vous fait partie d'un
20 groupe de négociateurs, étiez-vous membre d'un parti politique, ou aviez-
21 vous d'autres sources d'informations ?
22 R. Non, je n'ai jamais été membre d'un parti politique, qu'il soit
23 national ou pas, et les informations, elles proviennent de mon vécu. C'est
24 là que j'ai résidé. J'ai essayé de m'informer de manière impartiale, j'ai
25 essayé d'articuler mon opinion en me fondant sur les médias à la fois de
26 Zagreb, de Belgrade et de Sarajevo, tant dans les conversations avec les
27 Musulmans que dans les conversations avec les Serbes et les Croates.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur, là, nous avons un problème
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1 supplémentaire. Il n'y a pas seulement la lumière qui doit s'éteindre sur
2 les microphones, mais aussi je vais vous demander de faire une pause avant
3 de répondre, parce que les interprètes doivent interpréter vos propos. Donc
4 pourriez-vous, s'il vous plaît, faire une petite pause, et pendant celle-ci
5 les questions pourront être traduites dans leur intégralité.
6 Nous pouvons poursuivre à présent.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie. J'ai compris. Mais je ne
8 vois pas la lumière qui s'allume sur le micro de M. Karadzic.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors je vais pouvoir vous aider de la
10 manière suivante, vous pouvez suivre la transcription qui s'affiche. A
11 partir du moment où celle-ci s'arrête, cela signifie que la question a été
12 traitée.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien. Je vois. Je vous remercie. Merci.
14 M. KARADZIC : [interprétation] Merci.
15 Q. Est-ce que vous avez eu accès à des documents confidentiels de quelque
16 parti que ce soit ou de quelque instance de l'Etat que ce soit ?
17 R. Non, non. Je suis un homme de la rue. Je n'ai jamais travaillé pour des
18 organes de l'Etat, pour des institutions de l'Etat, jamais. Je n'étais que
19 le commun des mortels résidant dans cette ville.
20 Q. Je vous remercie. Moi aussi, je vais faire des pauses, et je vous le
21 dis pour que vous ne soyez pas surpris.
22 R. Merci.
23 Q. Vous n'avez pas observé cette situation politique d'un point de vue
24 d'un expert. Vous n'aviez pas pour objectif d'en faire une analyse de ce
25 type-là. C'est en fait en tant que citoyen que vous recueilliez des
26 informations dans les médias; ai-je raison ?
27 R. Partiellement, vous avez raison partiellement. Comme je l'ai dit, mes
28 impressions et mes informations je ne les ai pas trouvées uniquement dans
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1 les médias. Je les ai eues grâce à des conversations, comme je viens de
2 vous le dire, avec des gens. Et parfois c'étaient des individus qui s'y
3 connaissaient assez dans la politique. A l'époque, moi je n'y étais pas
4 très versé, et d'ailleurs je dois dire que je ne le suis pas aujourd'hui
5 non plus, je ne fais pas de politique.
6 Q. Merci. Je pense qu'il serait bien plus précieux dans le cadre de cette
7 affaire de vous interroger sur ce que vous avez vu directement, donc je
8 vais moins me consacrer à des sujets politiques et davantage sur des
9 événements auxquels vous avez assisté directement; êtes-vous d'accord avec
10 cela ?
11 R. Oui, je suis d'accord.
12 Q. Toutefois, avant d'aborder ces questions-là et avant d'aborder toute
13 une série de questions générales, je vais vous demander la chose suivante :
14 Pendant la période communiste, vous souvenez-vous que l'on ait interdit
15 toute pratique confessionnelle sur des lieux de mémoire datant de la
16 Seconde Guerre mondiale, donc là où il y a eu des victimes dues à des actes
17 de violence sur des bases d'appartenance ethnique ?
18 R. Il n'y a pas eu d'interdiction explicite. Mais sur ces lieux de
19 mémoire, lorsqu'on s'y rendait pour rendre hommage à ce type de victimes,
20 les cérémonies ne se déroulaient pas sur ce ton-là. Je suis d'accord avec
21 vous. Mais je dois dire que toutes les victimes étaient placées sur un pied
22 d'égalité, qu'il s'agisse de Croates, de Serbes ou de Musulmans, les uns
23 comme les autres.
24 Q. D'accord. Merci. Mais peut-on être d'accord sur le fait que certes,
25 tous les peuples ont compté des victimes ? Mais êtes-vous d'accord pour
26 dire que pendant la Deuxième Guerre mondiale, la Bosnie-Herzégovine s'est
27 trouvée partie intégrante de l'Etat indépendant de Croatie ?
28 R. Une partie importante de la Bosnie-Herzégovine, oui, est devenue partie
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1 de l'Etat indépendant de Croatie.
2 Q. Je vous remercie. Je pense que cela concerne toute la Bosnie-
3 Herzégovine. Vous avez raison lorsque vous dites que tous ont eu des
4 victimes. Mais êtes-vous d'accord pour dire que seul l'Etat indépendant de
5 Croatie avait une législation raciste qui a légalisé le meurtre ou
6 l'assassinat des Serbes, des Juifs et des Rom, et que de tous les pays
7 allemands, seules l'Allemagne et la Croatie se sont dotées d'une telle
8 législation, de la législation qui autorisait des crimes racistes ?
9 R. Je vais vous dire qu'Ante Pavelic et Milan Nedic ont versé les pensions
10 à tous les citoyens qui résidaient sur leur Etat, or dans votre Etat, les
11 Musulmans de Grbavica ne recevaient pas leurs pensions. Alors là, ne
12 s'agirait-il pas d'une loi raciste ?
13 Q. Mais ce n'est pas la question que je vous pose. Les Serbes eux ne
14 recevaient pas de pensions non plus.
15 R. Ce n'est pas exact.
16 Q. Etes-vous d'accord ou est-ce que vous rejetez cette affirmation que je
17 viens de faire, à savoir au sujet de mon allocution lors de cette
18 commémoration, lorsque j'ai dit que les Serbes ont été des victimes
19 uniquement à cause de leur appartenance ethnique, est-ce que vous êtes
20 d'accord pour dire que l'Etat indépendant de Croatie a légalisé les
21 meurtres sur des bases racistes des Serbes, des Roms et des Juifs ?
22 R. Je sais qu'il est arrivé qu'on tue des Serbes, mais je ne sais pas si
23 cela a été légalisé, donc si c'était introduit dans les textes de lois. Je
24 n'exclus pas. Peut-être que c'est le cas, je ne le sais pas.
25 Q. Merci. Au sujet de cet entretien accordé au journal "Borba," avez-vous
26 remarqué que la date de cet entretien est celle du 16 mars 1992, à savoir
27 deux jours avant le 18 mars, donc avant l'acceptation de l'accord de
28 Lisbonne de la part des Serbes, des Croates et des Musulmans de Bosnie ?
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1 R. Je n'ai pas prêté attention à la date.
2 Q. Merci. A ce moment-là, les Serbes vivaient-ils tous dans un seul et
3 même Etat ?
4 R. Non.
5 Q. Les Serbes, les Croates et les Musulmans, ainsi que les Slovènes, les
6 Macédoniens, ne vivaient-ils tous pas au sein d'un seul et même Etat ? Tous
7 les peuples constitutifs de l'ex-Yougoslavie ?
8 R. Non.
9 Q. Mais en Yougoslavie, vivaient-ils dans un seul et même Etat ?
10 R. En Yougoslavie, oui, mais ils n'étaient pas tous dans un seul et même
11 Etat.
12 Q. Mais la Yougoslavie c'était un Etat.
13 R. Oui.
14 Q. Faisons les pauses, s'il vous plaît.
15 Mais la seule chose que je vous demande c'est de savoir si en 1918 les
16 Serbes ont atteint cet objectif. Les Croates, les Musulmans et tous les
17 autres, donc est-ce qu'en 1918 ils se sont dotés d'un seul Etat pour y
18 vivre ?
19 R. Je ne suis pas certain que c'était l'objectif de tous ces peuples.
20 Q. Merci. Vous parlez de mon allocution, et à cette occasion vous dites
21 que j'ai annoncé la disparition des Musulmans. C'est un discours du 14 ou
22 15 octobre, c'est le moment où on vote l'indépendance, et ce, contrairement
23 à l'avis des Serbes. Ai-je formulé des menaces, ou est-ce que j'ai plutôt
24 averti de l'existence de ce danger pour les Musulmans parce que les Serbes
25 et les Croates, si jamais il allait y avoir une guerre, les Musulmans
26 n'allaient pas pouvoir se défendre contre eux; en est-il ainsi ?
27 R. Non.
28 Q. Attendez. Je vous dis : est-ce que vous faites référence à ce discours-
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1 là que j'ai prononcé ?
2 R. Oui, je pense à ce discours-là.
3 Q. Juste une question de plus qui découle de l'interrogatoire principal :
4 Vous avez dit que les Musulmans et les Croates, qui résideraient sur un
5 territoire revenu aux Serbes, qu'ils se sentiraient mal à l'aise du fait
6 que ce serait une entité administrative serbe. Ça je le comprends. Mais
7 est-ce que vous pouvez comprendre que 1 500 000 Serbes se sentent mal à
8 l'aise parce qu'ils sont séparés de la Yougoslavie et parce qu'ils sont
9 emmenés à vivre dans une Bosnie-Herzégovine d'Alija, donc c'est le même
10 sort qui leur est réservé et ce sont les mêmes émotions que vous identifiez
11 bien chez les Croates et les Musulmans.
12 Donc est-ce que vous admettez que 1 500 000 Serbes se sentiraient
13 exactement de la même façon s'ils se trouvaient séparés du reste de leur
14 peuple et s'ils résidaient au sein d'une Bosnie-Herzégovine unitariste ?
15 R. Ecoutez, jamais personne n'avait dit à ce moment-là que la Bosnie-
16 Herzégovine serait unitariste, ce n'était que vos opinions très
17 pessimistes. D'ailleurs, il ne s'agit pas d'une Bosnie-Herzégovine
18 appartenant à Alija Izetbegovic, il n'en est pas le propriétaire, il ne
19 peut pas se comporter comme tel. Il n'est pas le propriétaire des trois
20 peuples qui y résident. Donc c'est simplement vos mauvais présages. On
21 rencontre toute une série de problèmes au cours d'une vie et les problèmes
22 sont là pour qu'on les résolve.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je dois intervenir. Je vous remercie.
24 Le témoin a dit qu'il savait que les Serbes n'étaient pas d'accord
25 avec une structure unitariste pour la Bosnie-Herzégovine. Cela ne figure
26 pas au compte rendu d'audience.
27 M. KARADZIC : [interprétation]
28 Q. Est-ce que vous pouvez confirmer cela ?
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1 R. Oui, je peux le confirmer.
2 Q. Je vous remercie. Alors est-ce que vous pouvez admettre que le 16 mars,
3 donc deux jours avant la signature de l'accord, nous nous plaçons déjà à un
4 moment où pendant dix mois des négociations ont eu cours, des négociations
5 sur l'avenir de la Bosnie-Herzégovine et que nous avons accepté et que la
6 Bosnie-Herzégovine se sépare de la Yougoslavie à condition de ne pas se
7 doter d'un système unitariste ?
8 R. Ecoutez, c'est la première fois que j'entends dire que vous auriez
9 accepté le départ de la Bosnie-Herzégovine de la Yougoslavie à condition
10 donc qu'elle ne soit pas unitariste. Ecoutez, je suis désolé, mais c'est la
11 première fois que je l'entends.
12 Q. Mais c'est pour cela que j'ai estimé que vous interroger sur des
13 questions politiques n'était pas juste envers vous, parce que vous ne vous
14 y connaissez pas vraiment.
15 Mais est-ce que vous êtes d'accord pour dire qu'en substance l'accord de
16 Lisbonne signifiait que la Bosnie-Herzégovine serait indépendante, mais
17 qu'elle compterait trois entités constitutives en son sein ?
18 R. Monsieur Karadzic, je ne m'y connais pas suffisamment en les choses de
19 la politique et je ne saurais pas vous donner une réponse claire à cela.
20 Q. Je vous remercie. Mais on vous a interrogé surtout là-dessus, sur des
21 questions très pointues, politiques. Ce sont les questions qu'on vous a
22 posées pendant l'interrogatoire principal, donc on vous a invité à formuler
23 ou à donner vos opinions, les opinions que vous avez formulées grâce aux
24 médias et grâce à tout ce que vous avez pu recueillir comme information.
25 Donc est-ce que --
26 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste une seconde.
28 Oui, Madame Uertz-Retzlaff.
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1 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] En fait, les questions que j'ai
2 posées se sont concentrées sur les conséquences que ces discours et ces
3 débats sur les cartes tantôt sur la population. Je n'ai pas vraiment posé
4 des questions éminemment politiques.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, cela est vrai, mais le témoin a
6 mentionné le discours de Karadzic prononcé devant l'assemblée. Donc je
7 pense que le témoin peut répondre à la question.
8 M. KARADZIC : [interprétation]
9 Q. Donc je répète. Monsieur le Témoin, vous avez suivi les débats
10 parlementaires et vous avez également suivi tous les médias, et c'est sur
11 cette base-là que vous avez interprété les événements ?
12 R. Là, vous limitez ma réponse aux médias, puis vous ajoutez maintenant la
13 question des débats parlementaires. Mais je suis quelqu'un qui est très
14 ouvert. J'ai discuté avec tout le monde, avec les Serbes, et les Croates,
15 et les Musulmans, avec des gens qui comprenaient mieux la politique que
16 moi, là vous êtes en train de dire que je me suis fait une opinion sur la
17 base des médias. Or, on sait qu'à l'époque les médias ont contribué à la
18 dégradation des relations entre les peuples. Il fallait vraiment faire le
19 tri entre ce que les médias diffusaient.
20 Q. Je vous remercie. Est-ce que vous avez suivi les séances de l'assemblée
21 du 24 et 25 janvier, donc c'était avant que le référendum ne soit organisé
22 ?
23 R. Je ne vois pas de quelles sessions parlementaires vous parlez. Parfois
24 j'ai suivi les débats en direct, mais je ne peux pas dire que je les ai vus
25 tous. Je ne peux pas non plus dire que j'ai vu l'intégralité des débats que
26 j'ai suivis. Vous pouvez peut-être me rafraîchir la mémoire si vous évoquez
27 un événement particulier, peut-être que je me rappellerai.
28 Q. Mais c'est un moment connu parce que Cengic et moi-même avons pris la
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1 parole ensemble et nous avons pu passer un accord qui n'a duré que pendant
2 deux heures; vous vous en souvenez ?
3 R. Oui.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] D87, s'il vous plaît. Est-ce qu'on peut
5 afficher ce document qui comporte ce discours que j'ai prononcé à ce
6 moment-là, en serbe, page 104; page 100, en anglais.
7 M. KARADZIC : [interprétation]
8 Q. Nous allons bientôt voir ce document, mais je vous demande déjà ceci :
9 Vous vous souvenez que j'avais proposé d'attendre qu'on organise un
10 référendum, d'attendre la régionalisation de la Bosnie, que nous pourrions
11 seulement après avoir le référendum, et des Serbes étaient d'accord là-
12 dessus, y compris Cengic, le premier ministre ?
13 R. Je me souviens qu'il a marqué un accord dans ce sens. Mais je ne me
14 souviens plus exactement de la teneur de la proposition, mais je pense que
15 vous étiez sur le point à ce moment-là de parvenir à un accord. Je m'en
16 souviens.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Voyons la page 106 en serbe, 102 en anglais,
18 c'est le début du discours.
19 M. KARADZIC : [interprétation]
20 Q. Je vais lire à partir du deuxième paragraphe :
21 "Il est impossible de justifier votre souhait de nous imposer une Bosnie-
22 Herzégovine indépendante, alors que ce serait vous qui faisiez la loi, car
23 nous, nous ne vous imposons rien. Nous ne vous demandons pas de rester au
24 sein de la Yougoslavie. Nous demandons une transformation de la Bosnie de
25 façon à ce que les Serbes conservent des liens forts avec la Yougoslavie,
26 de façon à ce que les Croates n'aient aucun lien avec la Yougoslavie mais
27 bien avec la Croatie, et afin que les Musulmans entretiennent des liens
28 avec la Croatie et la Yougoslavie dans la mesure où ils le souhaitent; ça
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1 peut être une fédération serbe. Ça ne doit pas nécessairement porter le nom
2 de Yougoslavie.
3 "Je crois que notre offre ne peut pas être plus juste que ceci. Je pense
4 que chaque nation peut décider des liens qu'elle souhaite avoir avec les
5 autres nations, qu'elles soient autonomes pour que chacune aussi préserve
6 et conserve sa souveraineté."
7 N'est-ce pas ici une position raisonnable qui ouvre la voie à une
8 résolution du conflit qui ne soit pas un conflit armé ?
9 R. C'est vrai que les trois partis en présence avaient fait des
10 propositions. Malheureusement, elles n'ont débouché sur rien. C'étaient des
11 propositions positives, mais je pense que vous auriez pu délibérer pendant
12 encore trois ans sans parvenir à un accord.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Prenons la page 103 en anglais, ce sera la page
14 107 en serbe.
15 Q. Je poursuis la lecture :
16 "Nous n'allons rien imposer aux autres. Nous n'allons pas cesser. Nous
17 allons travailler sans arrêt jusqu'au moment où nous aurons un Etat dont la
18 structure permettra aux trois nations constitutives d'y souscrire. Et à ce
19 moment-là on pourra avoir un référendum et ça peut se faire en l'espace de
20 deux semaines. Mesdames et Messieurs, c'est la seule façon d'éviter les
21 effets délétères qui risquent de se produire pour que les gens puissent
22 revenir à une vie normale enfin. Croyez-moi, nous n'avons aucun effet, nous
23 n'avons aucun pouvoir de décision sur la question de savoir si ce sera la
24 guerre ou la paix. La situation échappe à notre contrôle, impossible de
25 maîtriser une situation.
26 "Tout le monde, moi y compris, peut s'imaginer ce qui se passera si, il
27 faudrait éviter ceci à tout prix, si on commençait à faire des
28 arrestations, s'il y avait un début de guerre interethnique, chacun se
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1 retrancherait sur ses terres. Il y aurait des tirs, les villes seraient
2 bouleversées. Et où est-ce que nous nous retrouverions ? Les Serbes se
3 trouveraient dans des terres serbes, les Croates dans des terres croates,
4 les Musulmans dans des terres musulmanes, ce serait parfaitement homogène.
5 Et qu'est-ce qu'il faudrait faire une fois de plus ? S'asseoir à une table
6 de négociations pour parvenir à un accord signé par les trois partis, car
7 sans cet accord il n'y a pas de solution en Bosnie-Herzégovine."
8 Est-ce que ceci s'est effectivement passé, n'ai-je pas dit à l'assemblée
9 que ceci allait se passer s'il n'y avait pas d'accord ?
10 R. Ce genre de choses s'est passé, mais je ne vois pas trop pourquoi vous
11 avez été aussi pessimiste, pourquoi avoir pensé qu'il y aurait un tel bain
12 de sang, tant de morts. Est-ce que ceci ne veut pas dire que vous aviez
13 déjà une idée de ce qui allait se passer ?
14 Q. Mais seriez-vous d'accord avec moi pour dire qu'un homme politique doit
15 anticiper l'événement, doit imaginer ce qui se peut se passer sur le plan
16 politique pour faire des prévisions ? Est-ce qu'on peut être politique sans
17 avoir la capacité de prévoir, je ne pense pas simplement à la Seconde
18 Guerre mondiale, je pense au climat qui régnait dans les masses ?
19 R. Ça c'est une chose. Mais ici vous êtes très pessimiste, vous parlez de
20 tueries à grande échelle, ça c'est autre chose. Je n'ai pas entendu les
21 deux autres partis évoquer une situation aussi négative.
22 Q. Merci. Oui, j'ai oublié que je devais faire une pause lorsque vous avez
23 terminé.
24 N'êtes-vous pas d'accord pour dire que c'est la guerre qui a un peu apaisé
25 les choses au début de ce mois et c'est ça qui m'a donné l'idée de ce qui
26 pourrait se passer en Bosnie, où la Bosnie avait une population bien plus
27 diverse et bien plus mixte qu'ailleurs, et ça m'a donné une idée de ce qui
28 pourrait se passer s'il y avait une guerre en Bosnie ? Là je pense à la
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1 guerre en Croatie qui s'était un peu apaisée début janvier ou février 1992.
2 R. Oui, et c'est pour ça que vous auriez dû vous concentrer, concentrer
3 toutes vos forces pour empêcher que cette guerre ne se produise.
4 Q. Oui, d'accord. Je suis d'accord avec vous là-dessus.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Voyons la page 104 en anglais, la page 108 en
6 serbe.
7 M. KARADZIC : [interprétation]
8 Q. "Par conséquent, créons une Bosnie-Herzégovine qui soit faisable, dans
9 laquelle les Croates --"
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Faut-il vraiment lire tous ces
11 paragraphes. Nous sommes à même de les lire, tout comme le témoin. Vous
12 pourriez peut-être résumer la teneur. Pensez à une meilleure méthode qui
13 permettra de réduire le temps consacré à la lecture.
14 Mais poursuivez.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Excellence. Je voulais simplement lire
16 ce paragraphe qui exprime bien mon avis à propos des Croates, car je dis
17 que :
18 "Il faut créer une Bosnie-Herzégovine de façon faisable, dans laquelle les
19 Croates à tout moment ne perdent pas les liens perdus avec la Croatie, dans
20 laquelle ils auraient des représentants à Zagreb et la Croatie aurait des
21 représentants à Sarajevo."
22 M. KARADZIC : [interprétation]
23 Q. Est-ce que les Croates ne pouvaient pas voter en Croatie comme en
24 Bosnie-Herzégovine ?
25 R. Je ne pense pas.
26 Q. Mais ce droit, les Croates ne l'ont-ils pas exercé même si vous pensez
27 que ce n'était pas un droit correct si ce n'était pas ce qu'il fallait
28 faire ?
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1 R. C'est peut-être ce qu'ils ont fait, mais ça ne veut pas dire pour
2 autant que ce soit juste.
3 Q. Terminons sur ce sujet : Ici on essaie de parvenir à une solution, vous
4 l'avez dit vous-même ? Les trois dirigeants - vous pensez au trois partis,
5 aux trois communautés ethniques - est-ce qu'elles n'ont pas essayé de
6 parvenir à une solution, d'autant que Muhamed Cengic, vous l'avez dit vous-
7 même, avait accepté, et on était sûr qu'il y aurait d'abord une
8 régionalisation suivie seulement alors du référendum ?
9 R. Veuillez répéter votre question.
10 Q. A la fin, Cengic dit ceci :
11 "Oui, nous avons obtenu cet accord et concluons ensemble qu'il faut le
12 faire devant toutes ces personnes."
13 Puis M. Cengic accepte, il y a une pause, puis quelqu'un intervient pour
14 faire capoter l'accord.
15 Si nous étions parvenus à régionaliser la Bosnie-Herzégovine et si nous
16 avions organisé ensemble un référendum, si nous avions accepté ce qu'avait
17 proposé Cutileiro, c'est ce qui a été d'ailleurs accepté en fin de compte à
18 Dayton, est-ce que cette solution aurait pu se trouver sans bain de sang,
19 sans guerre ?
20 R. Je ne sais pas. Je ne suis pas sûr.
21 Q. Je vais maintenant passer à des choses que vous avez peut-être vues.
22 Vous avez passé 11 mois dans la JNA, n'est-ce pas ?
23 R. Oui.
24 Q. Est-ce que vous êtes cuisinier, est-ce que c'est votre seule
25 spécialité, en avez-vous d'autres ?
26 R. Qu'est-ce que vous voulez dire, V-e-s, c'est quoi cette spécialité ?
27 Q. Je ne sais pas. N'est-ce pas la fonction que vous exerciez dans l'armée
28 ?
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1 R. Non, j'étais intendant. Je faisais partie du service de l'intendance.
2 Q. Mais normalement dans le "Ves" vous étiez cuisinier, cuistot ?
3 R. Non, non, je n'ai pas été cuisinier dans l'armée.
4 Q. C'est ce que j'avais lu quelque part.
5 N'est-il pas vrai qu'au cours des 11 mois passés dans la JNA vous avez
6 suivi une formation générale qui a duré trois ou cinq mois ?
7 R. Nous avons suivi une formation de trois mois, et là effectivement pour
8 moi c'était une formation de cuisinier. Là vous avez raison.
9 Q. Est-ce que vous avez suivi un entraînement militaire, une formation
10 physique, professionnelle, et politique ?
11 R. Non, nous n'avons pas eu de formation physique.
12 Q. En matière de formation, il y avait le maniement des armes individuel
13 et collectif jusqu'au niveau de la section de la compagnie, formation
14 tactique, actions des individus au combat, puis formation spécialisée pour
15 ce qui est de certaines fonctions spécialisées ?
16 R. Oui, oui, nous avons eu une courte formation en infanterie, appris le
17 maniement des armes, puis aussi appris l'art de la cuisine.
18 Q. Dans le cadre de votre formation politique, vous avez étudié le système
19 sociopolitique, les relations internationales, et la morale ?
20 R. Je ne sais pas. Je pense que c'était ce qu'on appelait la formation
21 morale et politique. Sans doute y avait-il toutes ces choses-là, mais je ne
22 m'en souviens pas.
23 Q. Dans ce cadre, vous avez étudié aussi les relations internationales, le
24 droit international humanitaire, le droit de la guerre, n'est-ce pas ?
25 R. Non.
26 Q. Alors je suppose que vous étiez la seule unité à ne pas avoir suivi
27 cette formation dans la JNA ?
28 R. Je ne me souviens pas de formations, de conférences ou cours donnés sur
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1 le droit international humanitaire ou sur les relations internationales.
2 Q. Et est-ce que vous avez reçu le Règlement de service de la JNA ?
3 R. Vous pensez à quoi précisément ?
4 Q. Est-ce qu'après avoir suivi cette formation vous avez reçu un livret
5 contenant le règlement que reçoit tout conscrit, que doit connaître tout
6 militaire ?
7 R. C'est quoi un livret ?
8 Q. Un petit manuel de formation.
9 R. Non, on n'a rien reçu de ce genre.
10 Q. Sans doute étiez-vous une exception là aussi.
11 R. Nous étions 80 dans la compagnie. Je ne suis pas le seul à ne pas avoir
12 reçu ce livret, ce règlement. Mais vous, vous parlez d'un Règlement de
13 service que personne d'entre nous n'a reçu. Je pense que je m'en serais
14 souvenu si je l'avais eu.
15 Q. Est-ce que vous connaissez le Règlement de service qui s'appliquait
16 pendant votre service dans la JNA ?
17 R. On en parlait plus ou moins. Mais je ne pourrais pas vous le dire
18 exactement. On en parlait souvent en tout cas, c'était souvent mentionné.
19 Q. Monsieur le Témoin, un soldat modèle et son comportement sur les
20 Règlements de service, si le règlement est violé, ceci s'assortit de
21 conséquences. Vous deviez savoir quel était le règlement s'appliquant dans
22 la JNA ?
23 R. Sans doute qu'on nous en a parlé. On a appris ces Règlements de
24 service, même si les commandants eux-mêmes ne les respectaient pas à la
25 lettre et de façon parfaite, ce qu'on aurait pu attendre.
26 Q. Puis vous avez été muté dans les forces de réserve. Vous avez reçu
27 votre carnet militaire, et vous avez reçu une affectation de guerre sans
28 pour autant être repris dans des activités spéciales ?
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1 R. Oui. Heureusement, d'ailleurs.
2 Q. Des gens étaient souvent appelés à effectuer des manœuvres, et ces gens
3 emportaient leurs uniformes, leurs masques à gaz, et parfois leurs armes
4 d'infanterie ?
5 R. Je ne sais pas si les gens conservaient leurs armes. En général, elles
6 étaient conservées dans la caserne. Et pour le reste, l'uniforme, le masque
7 à gaz, en général oui, je pense que chaque homme les gardait à la maison.
8 Mais je ne pense pas qu'on gardait ces armes chez soi.
9 Q. Vous vous êtes présenté à Grbavica, est-ce qu'à ce moment-là vous avez
10 présenté votre carnet militaire, et est-ce que celui-ci a été gardé
11 quelques jours, après quoi il vous a été restitué ?
12 R. Exact.
13 Q. Merci. Le carnet militaire le disait clairement, vous étiez soldat,
14 vous aviez fait une formation et vous apparteniez aux forces de réserve ?
15 R. Est-ce que vous pourriez répéter votre question ?
16 Q. Lorsque ces autorités ayant examiné votre carnet militaire, elles
17 avaient compris que vous aviez été formé en tant que soldat et que vous
18 aviez été muté dans les forces de réserve ?
19 R. Oui, le carnet le montrait. Il y avait un cachet qui disait que j'avais
20 fait mon service dans la JNA. C'était visible. On voyait le poste
21 militaire, le lieu où j'avais fait mon service.
22 Q. Merci. Diriez-vous avec moi -- non, d'abord je vais vous poser une
23 autre question.
24 Les partis nationaux n'ont-ils pas réussi à éliminer du pouvoir le
25 communisme en s'alliant, en organisant une coalition entre eux, et seriez-
26 vous d'accord pour dire qu'il y avait eu un accord préélectoral entre ces
27 trois partis ?
28 R. Excusez-moi. M'accorderez-vous une petite pause ?
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1 Excusez-moi. Est-ce que vous auriez l'obligeance de répéter votre question,
2 Monsieur Karadzic ?
3 Q. N'est-il pas vrai que les trois partis se sont présentés aux élections
4 en vue de modifier le système, et qu'ils ont ainsi mis fin au communisme ?
5 R. Je n'ai pas bien compris les objectifs poursuivis par ces partis
6 nationalistes. Moi, personnellement, ça ne me plaisait pas beaucoup déjà de
7 dire qu'on était national ou nationaliste.
8 Q. Soyons plus précis. A votre avis, pour quelle raison y a-t-il eu une
9 escalade des tensions à l'assemblée comme dans la vie politique ? Quel fut
10 l'événement clé qui a entraîné la montée des tensions ?
11 R. Il n'y a pas eu un seul événement clé, à mon avis, un moment
12 particulier qui a provoqué la montée des tensions. Ces tensions, elles
13 avaient monté pendant de nombreuses années. Ça ne s'est pas passé du jour
14 au lendemain. Ce n'est pas comme si tout d'un coup il y avait eu des
15 tensions. Elles existaient en Yougoslavie depuis l'arrivée au pouvoir en
16 Serbie de Slobodan Milosevic. Ça a été la première fois qu'on a vu ces
17 tensions, il y a eu des désaccords, des différends, des divergences
18 d'opinion, et cetera.
19 Q. Merci. Je pourrais dire qu'il est arrivé au pouvoir parce qu'il y avait
20 des tensions avant lui, mais je ne vais pas aborder ce sujet.
21 R. Ça ce n'est pas vrai.
22 Q. Je vous demande ceci, Monsieur le Témoin : La Slovénie, la Croatie, ces
23 deux républiques, puis ensuite la Bosnie-Herzégovine, leur sécession, est-
24 ce que ça n'a pas été le principal sujet des discussions à l'assemblée, je
25 parle ici de la sécession ?
26 R. Vous avez oublié de dire qu'avec l'arrivée au pouvoir de Slobodan
27 Milosevic, l'existence de deux provinces autonomes socialistes s'est
28 terminée. Parce que la constitution de la RSFY dit clairement comment se
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1 compose la RSFY. Il y avait ces républiques, deux provinces autonomes. Donc
2 l'équilibre était déjà rompu.
3 Q. Là nous avons des sujets politiques. Nous ne voulons pas aborder --
4 R. Mais c'est vous qui parliez de politique. Vous avez promis de ne pas en
5 parler, et vous vous revenez sans arrêt.
6 Q. Fort bien. La mobilisation des forces de réserve en 1991 n'était-elle
7 pas liée à la guerre qu'il y a eu en Slovénie et en Croatie ?
8 R. Quelque part, c'est vrai, parce que ceci a eu un effet en Bosnie-
9 Herzégovine, où il y a eu une détérioration des rapports interethniques.
10 Q. Merci. Est-ce que ce n'étaient pas surtout les Musulmans et les Croates
11 qui ont refusé de répondre aux appels à mobilisation ou à manœuvre commune,
12 est-ce que ce n'est pas seulement la communauté serbe qui est restée loyale
13 envers la JNA ?
14 R. Mais les Serbes de la ville ont refusé de rejoindre la JNA. Il n'y a
15 que ceux de la campagne qui ont rejoint l'armée. Les Serbes de Sarajevo ne
16 voulaient pas participer à ces manœuvres, n'ont pas répondu à la
17 mobilisation. Certains l'ont fait, d'autres pas. La plupart d'entre eux ne
18 l'ont pas fait.
19 Q. Il y a un dicton qui le résume très bien : "Si on est riche, on envoie
20 un bœuf à l'armée; si on est pauvre, on envoie son fils."
21 R. Oui. Excusez-moi. Je croyais avoir éteint mon micro et je ne l'ai pas
22 fait, mais je vais le faire maintenant.
23 Q. Est-ce qu'il n'a pas fallu retirer énormément d'effectifs et de
24 ressources de la JNA, d'abord de la Serbie, et puis de la Croatie,
25 pratiquement des deux tiers de la Croatie ?
26 R. Oui, la JNA s'est retirée.
27 Q. Elle s'est retirée dans ce qui restait de la Yougoslavie, là où la JNA
28 pensait qu'elle devait défendre ce territoire, cette partie-là de la
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1 Yougoslavie ?
2 R. Je ne sais pas ce qui a motivé ce retrait de la JNA.
3 Q. Enumérons maintenant les installations et l'infrastructure qu'avait la
4 JNA à Sarajevo et dans son voisinage. Nous verrons ainsi pourquoi il y
5 avait autant de ressources, autant d'installations de la JNA. Vous pourrez
6 confirmer ce que vous savez, et si vous ne savez pas, dites-le tout
7 simplement.
8 Est-ce qu'il n'y avait pas le QG du commandement de la 2e Région militaire
9 ?
10 R. Exact.
11 Q. Il y avait le commandement du 4e Corps, la caserne de Lukavica, la
12 caserne Viktor Bubanj. Moi, je vais vous les citer, vous me direz quand
13 vous dites non. Donc, la caserne de Viktor Bubanj, la caserne Halilovic et
14 la caserne du maréchal Tito, la caserne de Jajce, la caserne de Butile, de
15 Pale, de Pazarici, des usines militaires à Vogosca, l'usine Famos de
16 Hrasnica, l'usine Famos de Pale, l'usine ORAO à Orahovac [phon], et des
17 ateliers de réparation à Hadzici, et la JNA possédait en partie une usine
18 qui s'appelait Zrat. N'étaient-ce pas des infrastructures de la JNA à
19 Sarajevo et dans la région ?
20 R. Oui. Oui, mais ça c'était pas le problème. Là où le [inaudible], c'est
21 que les armes, elles ont été retirées de la Slovénie et de la Croatie, et
22 elles ont été distribuées uniquement aux Serbes avant le début de la
23 guerre. C'est ce que j'ai appris pendant la guerre de ceux qui étaient avec
24 moi. C'est là le problème.
25 Q. Nous viendrons à ce sujet plus tard. Est-ce que la JNA ne manquait pas
26 d'effectifs vu le nombre d'armes qu'elle avait ? Ne fallait-il pas qu'elle
27 donne aussi des armes aux réservistes qu'elle avait ? Vous en faisiez
28 partie. Et la JNA devait veiller à avoir suffisamment de réservistes
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1 qu'elle pouvait appeler à la rescousse en temps de besoin.
2 R. Je n'ai pas eu cette impression-là.
3 Q. Certains Croates et certains Musulmans ont répondu à l'appel à la
4 mobilisation, et ceux qui ont répondu ont reçu une arme. Le saviez-vous ?
5 R. Non.
6 Q. Deux Croates occupaient des fonctions élevées dans le commandement du
7 Corps de Sarajevo-Romanija, jusqu'à la fin de la guerre d'ailleurs ?
8 R. C'est bien possible.
9 Q. Merci. Vous dites que l'anarchie régnait à Grbavica.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que c'est le moment de faire la pause,
11 Monsieur le Président ?
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si ce moment vous convient, nous pouvons
13 faire la pause maintenant.
14 Nous allons faire une pause d'une demi-heure et nous reprendrons nos débats
15 à 11 heures. L'audience est suspendue.
16 --- L'audience est suspendue à 10 heures 27.
17 --- L'audience est reprise à 11 heures 03.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant la reprise de nos débats, je
19 voudrais vous demander, Monsieur, si vous avez quelque chose à dire à la
20 Chambre.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Mais je demanderais, si la chose est
22 possible, que nous passions à huis clos car M. Karadzic dans ses propos
23 dévoile mon identité et mon appartenance ethnique alors qu'au début de
24 l'audience il était entendu que cela ne se ferait pas.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous pourrions peut-être passer à huis
26 clos partiel.
27 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui, je vous en prie, Monsieur le
28 Président.
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1 M. LE GREFFIER : [aucune interprétation]
2 [Audience à huis clos partiel]
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23 [Audience publique]
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Nous sommes maintenant en audience
25 publique.
26 Veuillez continuer, Monsieur Karadzic.
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie.
28 M. KARADZIC : [interprétation]
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1 Q. Alors explorons les choses un peu plus en détail. Nous étions en train
2 de parler de cette période de chaos, peut-on dire, dans votre voisinage.
3 Est-ce que ce quartier fait partie de la municipalité de Novo Sarajevo ?
4 R. Oui.
5 Q. Merci. Vous avez dit que certaines personnes avaient répondu
6 positivement à l'appel à la mobilisation, donc au versement dans les forces
7 de réserve, et que d'autres n'avaient que prétendu le faire et s'étaient
8 mis à porter l'uniforme comme si elles faisaient partie des forces de
9 réserve alors que ce n'était pas le cas, n'est-ce pas ?
10 R. Oui, il y a eu des cas de ce genre.
11 Q. Ceux qui ont fait semblant d'obtempérer, est-ce qu'ils avaient aussi
12 des armes ?
13 R. Oui.
14 Q. Je vous remercie. Est-il vrai qu'en Bosnie, bien avant la guerre déjà,
15 il était assez peu coûteux de se procurer une arme personnelle ?
16 R. Qu'entendez-vous exactement par "arme personnelle" ?
17 Q. Je veux parler d'un revolver, d'un fusil, d'un fusil semi-automatique
18 ou automatique, ce genre de chose.
19 R. Bien, ce n'était tout de même pas si simple que cela. On ne le trouvait
20 pas sous le sabot d'un cheval, d'après ce que je sais.
21 Q. Merci. Alors voyons un peu de quelle source pouvaient provenir toutes
22 ces armes en dehors de la JNA et de la Défense territoriale bien sûr.
23 Est-il exact que nos entreprises collectives, nos fermes coopératives,
24 avaient toutes leur propre Défense territoriale et avaient leurs propres
25 armes ?
26 R. Elles avaient leurs armes, mais ces armes dépendaient de la Défense
27 territoriale. Elles ne se trouvaient pas dans les entrepôts de
28 l'entreprise, mais dans les dépôts d'armes de la Défense territoriale.
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1 Q. Je vous remercie. Est-il exact tout de même qu'il y avait un peu de
2 trafic et que l'on pouvait se procurer un fusil automatique, un fusil semi-
3 automatique ou un fusil semi-automatique avec dispositif d'optique assez
4 facilement ?
5 R. Non, il n'est pas vrai que des fusils à lunette se soient trouvés si
6 facilement que cela. En tout cas, pas les armes dont vous venez de parler
7 et pas les fusils automatiques ou fusils automatiques à lunette. Je sais
8 qu'il y avait des Serbes qui vendaient les armes qui leur étaient
9 distribuées officiellement, mais ce n'était pas si facile que cela.
10 Q. Vous avez parlé d'un groupe qui était en possession de mortiers. Avez-
11 vous dit que les membres de ce groupe portaient des cocardes en tant
12 qu'insigne ?
13 R. Je ne me rappelle pas avoir vu des cocardes. Je me rappelle qu'ils
14 portaient un uniforme, mais je ne suis pas sûr d'avoir vu la cocarde.
15 Q. Bon, c'est écrit dans votre déclaration écrite mais, enfin, ce n'est
16 pas capital. Nous y reviendrons si nous avons le temps. Dans votre
17 déclaration de 1997, en page 4, si je ne me trompe, vous avez dit que :
18 "Aucune" - je cite - "préparation sérieuse pour une guerre en Bosnie
19 n'avait été faite," bien que - et vous le dites aussi en page 4, je cite :
20 "Tous les événements de Croatie aient eu une influence directe sur la
21 situation prévalente en Bosnie. Par ailleurs, il était clair que les
22 autorités n'étaient pas très conscientes de ce qui était en train de nous
23 arriver, ni des graves conséquences qui pouvaient s'en suivre. C'est la
24 raison pour laquelle aucun préparatif sérieux pour la guerre n'a eu lieu."
25 Est-ce que vous saviez qu'en dépit de cela, des préparatifs importants ont
26 été menés à bien, sinon par l'état, au moins par le SDA en tant que parti
27 politique ?
28 R. Non, je ne suis pas au courant de cela.
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1 Q. Bon.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document 1D28070.
3 M. KARADZIC : [interprétation]
4 Q. Vous avez dit, n'est-ce pas, Monsieur, que les Serbes se sont emparés
5 de Grbavica sans tirer une seule balle; c'est bien cela ?
6 R. Oui.
7 Q. Lorsque vous vous êtes présenté, vous avez reçu un uniforme, n'est-ce
8 pas ?
9 R. Non.
10 Q. Mais vous avez reçu des armes et des insignes ?
11 R. J'ai reçu un fusil semi-automatique. Par "insigne," vous pensez à quoi
12 ?
13 Q. Est-ce que vous avez reçu un objet permettant de savoir à quel groupe
14 vous apparteniez ?
15 R. Non.
16 Q. Mais il me semble que, quelque part dans le texte, vous avez dit que
17 vous aviez reçu un insigne représentant un drapeau.
18 R. Ça, c'était plus tard, mais pas au moment où j'ai reçu mon arme. Je
19 pense que cet emblème avec un drapeau serbe, nous l'avons reçu plus tard.
20 Q. Merci.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Donc affichage du document 1D28070.
22 M. KARADZIC : [interprétation]
23 Q. Si je devais vous dire que dans la seule municipalité de Novo Sarajevo
24 il y avait près de 2 000 Bérets verts de la Ligue patriotique organisés
25 déjà avant le début de la guerre, que répondriez-vous ?
26 R. Je ne suis pas au courant.
27 Q. J'indique bien qu'il s'agit de Novo Sarajevo. Je le dis pour le compte
28 rendu d'audience.
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1 Alors, Monsieur, je vous demanderais de vous pencher sur la première page
2 de ce document, qui peut être diffusé à l'intention du public.
3 Vous constaterez que dans ce document le général Delic inspecte les forces
4 patriotiques de résistance qui étaient déjà en place au moment où
5 l'agression a commencé, pour reprendre les termes utilisés par lui.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Maintenant, j'aimerais qu'on affiche la page 5
7 de ce document. Pour l'anglais, tout va bien.
8 M. KARADZIC : [interprétation]
9 Q. Je vous demanderais, Monsieur, d'examiner plus particulièrement la
10 partie du texte qui est dans l'encadré, où il est question de :
11 "L'état-major régional de la Ligue patriotique à Sarajevo."
12 Je cite :
13 "L'état-major régional de la Ligue patriotique de Bosnie-Herzégovine et les
14 Bérets verts dans la région de Sarajevo se sont renforcés et reliés sur le
15 plan organisationnel et, en même temps, ils ont été hiérarchisés, les
16 forces organisées de la Ligue patriotique de Bosnie-Herzégovine et des
17 Bérets verts qui ont été créés dans toutes les municipalités de la région.
18 Au niveau municipal, ces unités, depuis le niveau de l'escadron jusqu'au
19 niveau de la compagnie et du détachement, ont été subordonnées aux états-
20 majors municipaux qui dirigeaient leurs actions."
21 Donc nous avons ici une évaluation de la situation pour les différentes
22 municipalités de la ville.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Page suivante à l'écran, je vous prie. Je crois
24 qu'en anglais tout va bien. Non, en fait, il faut aussi la page suivante en
25 anglais.
26 M. KARADZIC : [interprétation] Donc, là, il est question de la municipalité
27 de Novo Sarajevo, je cite :
28 "Composition d'état-major municipal de la Défense territoriale de Novo
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1 Sarajevo le 18 avril 1992."
2 "23 officiers d'active et de réserve."
3 Et : "1 730 soldats."
4 Total : 1 753.
5 "Quatre détachements.
6 "Trois compagnies indépendantes.
7 "Trois pelotons indépendants."
8 Quant aux armes, il est fait état dans ce document de 450 armes
9 d'infanterie.
10 Alors est-ce que vous pensez que ceci ne justifiait pas suffisamment
11 l'inquiétude des Serbes ?
12 R. Je n'étais pas dans l'armée, je ne saurais vous parlez de cela. Vous
13 savez, j'étais à Grbavica, qui était un quartier. Ce qui se passait là, je
14 le sais, mais je ne sais pas ce qui se passait du côté serbe, puisque je
15 n'y suis pas allé. Je ne saurais pas parler de ce qui s'est passé de
16 l'autre côté.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde.
18 Huis clos partiel quelques instants.
19 [Audience à huis clos partiel]
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2 [Audience publique]
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience,
4 Monsieur Karadzic, le document 65 ter de ce document est 1D2807 et pas
5 28070, et je ne vois pas le nom du général Delic dans ce document.
6 Veuillez poursuivre.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous avez raison, Excellence. Ce document était
8 envoyé à Delic. C'est un rapport de Delic, qu'il a demandé à recevoir au
9 moment où s'écrivait l'histoire de l'armée dont il faisait partie.
10 M. KARADZIC : [interprétation]
11 Q. Mais vous voyez, Monsieur le Témoin, à la date du 18 avril, il est
12 question ici des préparatifs globaux des Bérets verts et de la Ligue
13 patriotique. Préparatifs qui ont commencé le 31 mars 1991, puis il y a eu
14 le 13 avril. Ensuite cette réunion publique du 10 juin, si je ne me trompe,
15 10 juin 1991. Donc, là, je parle aussi bien de leur camp que du nôtre. Je
16 parle de la municipalité de Novo Sarajevo, dans sa totalité, et nous allons
17 nous pencher sur le plan de la région un peu plus tard mais, là, nous
18 parlons de Novo Sarajevo, y compris Grbavica.
19 Est-ce que vous pensez que tout ceci pouvait être source d'inquiétude
20 ?
21 R. S'il est écrit ici qu'il y a 1 730 soldats disponibles avec simplement
22 450 fusils, ce ne sont pas des hommes réellement bien armés. Il semble
23 qu'un soldat sur trois seulement avait une arme.
24 Q. Vous vous rappelez que le travail se faisait en équipe ? Si vous étiez
25 sur les lignes pendant 12 heures, vous aviez un repos de 24 heures ensuite;
26 c'est à peu près ce qui se passait, n'est-ce pas ?
27 R. La plupart du temps. Mais pas toujours.
28 Q. Donc si le fusil reste dans la tranchée, les soldats, qui viennent dans
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1 la tranchée, ont toujours un fusil, n'est-ce pas ? Un tiers des soldats
2 sont sur la ligne et deux tiers sont en permission, n'est-ce pas ?
3 R. Mais dans ce cas, 450 soldats armés étaient disponibles, et pas 1 730.
4 Q. Merci. Monsieur le Témoin, tout ça c'était avant le début de la guerre.
5 Avant la création de l'armée. Donc c'était une Unité de la Défense
6 territoriale avant la création officielle de l'armée le 14 avril [comme
7 interprété].
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier du document.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Uertz-Retzlaff.
10 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin a
11 déjà dit qu'il ne savait rien de ce qui se passait dans l'autre camp, de ce
12 que l'autre camp avait en sa possession et de sa façon de s'organiser, donc
13 je ne vois pas comment il peut servir de base au versement de ce dossier.
14 Par conséquent, objection de la part de l'Accusation.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais ce document évoque les affirmations du
16 témoin et ce qu'il dit savoir. S'il ne le sait pas, alors il n'aurait pas
17 dû faire les déclarations qui figurent dans son texte écrit. Son texte
18 porte assez souvent sur ce genre de sujets qui ont été abordés au cours de
19 l'interrogatoire principal. Cela montre clairement qu'il évalue l'effet sur
20 la population, il dit que les Serbes n'avaient aucune raison de
21 s'inquiéter, que ces inquiétudes ne reposaient sur rien de vrai. Par la
22 suite, nous verrons qui combattait, et nous verrons qu'il y a eu à Grbavica
23 des combats très intenses que le témoin, Dieu merci, n'a pas vus de ses
24 yeux.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Posez votre question par rapport au
26 document, tout ce qui a été dit jusqu'à présent est au compte rendu, vous
27 aurez d'autres possibilités d'en demander le versement. Donc je ne pense
28 pas que ce témoin soit le meilleur vecteur pour faire admettre ce document
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1 au dossier. Vous connaissez la pratique.
2 Avançons.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.
4 M. KARADZIC : [interprétation]
5 Q. Alors, Monsieur le Témoin, est-ce que vous vous rendez compte que si
6 vous ne saviez pas que la Ligue patriotique comptait près de 2 000 soldats
7 dans votre municipalité, vous avez raté quelque chose d'important ?
8 R. Comme je l'ai dit, vous parlez de 2 000 soldats, mais il n'y en avait
9 que 450 en armes. Lorsque je dis "soldat," je pense à un soldat qui porte
10 un fusil.
11 Q. Je souhaitais simplement vous demander si votre position aurait été un
12 peu différente au cas où vous auriez su que la Ligue patriotique était en
13 train de s'organiser secrètement.
14 R. De quelle position vous parlez, très précisément ?
15 Q. Je lis ce qui figure en page 4 du compte rendu. Vous pensiez qu'aucun
16 préparatif à la guerre n'était en cours, alors que la Défense affirme que
17 ces préparatifs étaient en cours, préparatifs pour la guerre, et qu'ils ont
18 eu cours dans 103 municipalités. Sur 109, dans 103 municipalités, il
19 existait des états-majors municipaux de la Ligue patriotique qui étaient
20 déjà créés au début de 1991 et 100 000 soldats environ avaient été placés
21 officiellement sous un commandement déterminé.
22 En page 14 de votre déclaration, vous dites qu'il n'y a eu aucune
23 résistance à Grbavica, que Grbavica a été prise sans qu'un seul coup de feu
24 ait été tiré. Or, la Défense se doit de vous poser des questions sur la
25 réalité de la situation. J'évoque vos déclarations, et j'aimerais vous
26 donner la possibilité de vous rendre compte de ce qu'était en fait la
27 réalité.
28 Donc je vous demande si vous vous êtes rendu compte que dans votre propre
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1 municipalité, il y avait une organisation en cours de ce qu'on appelait la
2 Ligue patriotique et les Bérets verts qui se faisait dans le secret, et que
3 la quantité d'armes n'a guère d'importance par rapport à cela.
4 R. Je peux vous dire, en toute responsabilité, qu'à Grbavica il n'y a eu
5 aucun combat, aucun signe de résistance avant l'arrivée des forces serbes.
6 Je suis sûr de cela à 100 %. Je l'ai constaté de mes propres yeux. Grbavica
7 fait partie de Novo Sarajevo.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.
9 Je demande l'affichage du document 1D2781.
10 M. KARADZIC : [interprétation]
11 Q. Voilà, le texte apparaît à l'écran. C'est une annonce qui émane d'une
12 agence de presse en date du 14 avril et qui indique que le bâtiment de la
13 sécurité publique dans la municipalité serbe de Novo Sarajevo a été
14 transféré dans l'enceinte de l'école de foresterie sur la promenade de la
15 Jeunesse :
16 "L'objectif de ce regroupement des hordes militaires intégristes consiste à
17 contrôler tous les carrefours entre Bratstvo et Jedinstvo et Omladinsko
18 Setaliste" - c'est-à-dire la promenade de la Jeunesse - "carrefours situés
19 à la gare de tramway de Pofalici et dans les environs du quartier de
20 Grbavica."
21 En prenant de telles positions, le MUP musulman a obtenu la possibilité
22 d'ouvrir le feu à l'aide de fusils à lunette sur des appartements serbes et
23 des appartements occupés par des militaires dans les quartiers de Grbavica
24 et autres ?
25 R. Mais vous parlez de Novo Sarajevo, la municipalité de Novo Sarajevo ?
26 Q. Oui.
27 R. Oui.
28 Q. Est-ce que vous voyez que des policiers musulmans ont été transférés
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1 dans la partie musulmane de la municipalité de Novo Sarajevo et qu'ils ont
2 créé un nouveau poste dans le but de contrôler ces carrefours, et que c'est
3 une situation qui a duré jusqu'à la fin de la guerre, n'est-ce pas ?
4 R. Ce n'est pas exact. L'ancien poste de sécurité publique était toujours
5 sur le territoire qui était sous leur contrôle pendant la guerre. C'était
6 le cas déjà lorsque la guerre a éclaté, c'est-à-dire que les deux sièges du
7 poste de sécurité publique étaient de l'autre côté de la Miljacka.
8 Q. Mais cela signifie que les Serbes n'ont pas pris ce que ces hommes
9 avaient laissé derrière eux ou abandonné, n'est-ce pas ?
10 R. Non, ils ne l'ont pas pris.
11 Q. Merci.
12 Le compte rendu ne rend pas compte du fait que vous avez confirmé que Novo
13 Sarajevo était une municipalité où la majorité de la population était
14 serbe. Donc est-ce que vous pourriez le confirmer une nouvelle fois ?
15 R. Je pense que la majorité de la population était serbe et que pendant
16 ces premières élections dites démocratiques, le Parti démocratique serbe a
17 obtenu la majorité dans la municipalité de Novo Sarajevo.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
19 Je demande le versement au dossier du document.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Encore une fois, nous n'avons aucun
21 fondement pour admettre ce document par le biais de ce témoin, Monsieur
22 Karadzic.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
24 Affichage du document 1D2782 à présent. La Défense estime que ce document
25 évoque les mêmes sujets, mais qu'il montre par ailleurs que des combats ont
26 eu lieu dans ces quartiers et que la situation est bien différente de ce
27 que le témoin dit avoir observé.
28 M. KARADZIC : [interprétation]
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1 Q. Alors examinez ce document, Monsieur le Témoin. Le 21 avril, voici ce
2 qu'affirme la "SRNA," je cite :
3 "La 'SRNA' a découvert que des combats intenses avaient eu lieu
4 depuis ce matin à Sarajevo. Le point central du conflit se situait
5 précédemment dans la zone de Grbavica et s'est déplacé plus tard vers
6 d'autres quartiers de la ville. Les forces paramilitaires musulmanes ont
7 ouvert le feu sur les positions des défenseurs serbes, là où ceci se
8 trouvait."
9 Est-ce que vous avez entendu cela à Novo Sarajevo, qu'il y avait eu
10 des tirs de tireurs d'élite, qui ont touché les quartiers de Vraca et
11 d'autres ?
12 R. Je ne suis pas au courant de cela.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Donc ce document, Excellence, vous
14 n'allez pas l'admettre non plus ?
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Affichage du document 1D2783 à présent.
17 C'est un document, ou plutôt, une dépêche d'agence de presse en date du 25
18 avril, je cite :
19 "L'agence 'SRNA' a découvert que plus de 1 000 paramilitaires musulmans ont
20 lancé une attaque sur le quartier serbe de Vraca à partir de Zlatiste et de
21 Colina Kapa à 19 heures 45. De nombreuses unités musulmanes sont également
22 en train de pénétrer à partir de Grbavica. Ces unités, dans leur attaque
23 féroce, ont détruit des maisons serbes dans un secteur situé autour du
24 cimetière juif, ainsi que dans un secteur surplombant le quartier de
25 Kovaci."
26 M. KARADZIC : [interprétation]
27 Q. Est-ce que vous voyez que Grbavica était aux mains des Musulmans à ce
28 moment-là et que les Musulmans ont attaqué Vraca à partir de Grbavica, et
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1 que Colina Kapa et Zlatiste étaient également aux mains des Musulmans ?
2 Colina Kapa était sous contrôle musulman pendant toute la guerre, n'est-ce
3 pas ?
4 R. Non, ce n'est pas exact. Je ne suis pas au courant du fait que Zlatiste
5 aurait appartenu à Grbavica. Peut-être ceci se trouve-t-il dans la
6 municipalité de Sarajevo, mais ce n'est pas Grbavica. Vous le savez
7 parfaitement bien. Zlatiste n'est pas Grbavica. Colina Kapa n'est pas non
8 plus Grbavica. Vous essayez de multiplier les mentions de différents
9 quartiers pour les mettre tous dans "Grbavica," mais ce n'est pas le cas.
10 Q. Peut-être ai-je parlé trop vite, je n'ai pas prêté attention à la
11 vitesse de mon débit. Le quartier serbe de Vraca, vous êtes d'accord que
12 c'était bien un quartier serbe ?
13 R. Non, nous ne sommes pas d'accord. Pourquoi est-ce que Vraca aurait été
14 un quartier serbe ?
15 Q. Est-ce que Vraca était habité par plus de 80 % de Serbes ?
16 R. Non, surtout pas depuis la construction des quartiers neufs dans le
17 quartier de la rue de Petrovacka. Il n'est vraiment pas vrai qu'il y aurait
18 eu là-bas plus de 80 % de Serbes à Vraca.
19 Q. Mais alors que diriez-vous de 50 %? Est-ce qu'il avait plus de 50 % de
20 Serbes à Vraca ?
21 R. C'est possible.
22 Q. Ce que je dis, en me fondant sur cette dépêche de presse, c'est que
23 l'attaque a eu lieu à partir de Zlatiste et de Colina Kapa, et à partir de
24 Grbavica. Je ne dis pas que Colina Kapa et Zlatiste font partie de
25 Grbavica, mais vous êtes d'accord que Colina Kapa est resté entre les mains
26 des Musulmans pendant toute cette période ?
27 R. Oui, mais il n'y a jamais eu d'attaques à partir de Grbavica. Ça ce
28 n'est pas vrai. Il y a eu des attaques à partir de la rive de la Miljacka,
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1 en face, c'est ce que vous dites, mais ce n'est pas vrai.
2 Q. Est-ce que le quartier aurait pu être attaqué à partir du stade, peut-
3 être ?
4 R. Peut-être, mais cela n'a pas été le cas.
5 Q. Est-ce que tous ces quartiers se trouvent bien sur la rive gauche de la
6 Miljacka, là où se trouvait le quartier serbe de la ville ?
7 R. Vous parlez du quartier de Strojorad ?
8 Q. Et du quartier du stade Zeljo ?
9 R. Oui.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que ce document va être admis au dossier
11 ?
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur le Témoin, mis à part la
13 composition ethnique de ces quartiers, est-ce que vous étiez au courant de
14 cette attaque lancée par 1 000 paramilitaires musulmans sur Vraca depuis la
15 direction de Zlatiste et de Colina Kapa ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a eu des combats là-bas, mais comme je
17 disais, cela ne fait pas partie de Grbavica, et je n'étais pas sur place.
18 Je ne peux pas parler de ce que je n'ai pas vu. Dans le secteur de
19 Zlatiste, il y a eu des combats. Au début de la guerre, Zlatiste était
20 placé sous le contrôle de l'ABiH, et plus tard ce sont les Serbes qui se
21 sont emparés de ce coin.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous pensons que les bases suffisantes
23 n'ont pas été jetées permettant le versement de ce document.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.
25 Alors le document 1D2806 à présent. Nous verrons une conversation
26 interceptée, une conversation par téléphone entre le général Milutin
27 Kukanjac et le général Mandzic, cela se situe à la date du 21 avril. Je ne
28 sais pas si nous avons une traduction. Nous n'avons pas de traduction pour
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1 le moment, donc j'en donnerai lecture lentement, nous voyons comment se lit
2 le texte :
3 "Ici Mandzic."
4 Puis il est mis en communication avec le général Kukanjac. Puis au milieu,
5 il dit :
6 "Mais je vais te dire, c'est depuis ce matin que j'écoute ces explosions,
7 et mon pote, je ne peux pas…"
8 Puis suit une insulte, puis Kukanjac dit :
9 "Mais tout le monde tire."
10 Puis Mandzic répond :
11 "Autre chose. J'ai là-bas en bas des retraités et des membres de ma famille
12 dans ce quartier-là, et d'après ce qu'ils ont dit, ils ont attaqué depuis
13 la rive gauche, depuis Miljacka."
14 Kukanjac dit : "Oui."
15 Mandzic : "Leur objectif est de s'emparer d'eux. Je pense que c'est une
16 manière de résoudre par la force la question du partage de Sarajevo."
17 Est-ce qu'on peut tourner la page, s'il vous plaît.
18 Puis l'autre profère des insultes, le général Mandzic :
19 "Mais que peut-on faire pour mettre fin à cela ? Ça me fait du mal de
20 voir cela…"
21 Puis il dit :
22 "C'est du banditisme, du terrorisme de la pure espèce."
23 Puis Kukanjac qui répond et il dit :
24 "J'ai appelé Koljevic et Karadzic, et voilà, j'ai appelé tous ces
25 dirigeants musulmans. C'est depuis Hum que les Musulmans tirent. Ils tirent
26 également depuis Crni Vrh, depuis Marin Dvor, depuis Zlatiste, puis ceux de
27 Vraca ils ont fait irruption dans la ville. C'est atroce."
28 Puis plus loin, Kukanjac qui poursuit :
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1 "Mais ce Karic, il ment à la radio, il dit n'importe quoi, il dit que nous
2 avons des chars là-bas en bas, mais ça n'a rien à voir, il n'y a pas de
3 chars là-bas."
4 Puis Kukanjac qui dit à Grbavica [phon], Mais oui, c'est un gros menteur,
5 c'est un crétin :
6 "Donc Karic était placé sous le commandement de Kukanjac jusqu'à très
7 récemment, puis il a quitté. Voyez maintenant ce que dit Kukanjac --
8 Mandzic demande :
9 "Mais ça, ça me semble clair. Est-il possible qu'il y ait là des
10 hommes à Seselj ?"
11 Kukanjac qui répond : "Non."
12 Mandzic qui dit : "Ah…"
13 Kukanjac qui répond :
14 "Mais non, je ne crois pas. Tu sais, pour eux, pour justifier, ils trouvent
15 que le plus simple c'est de dire que ce sont des hommes à Seselj ou à
16 Arkan. Mais il n'y en a pas du tout à Sarajevo."
17 M. KARADZIC : [interprétation]
18 Q. Donc est-ce que vous comprenez que ces deux généraux confirment que les
19 explosions s'entendent de partout et qu'il y a un feu nourri de partout ?
20 Les Musulmans tirent depuis Marin Dvor, depuis Crni Vrh, depuis Zlatiste,
21 et les Serbes tirent de Vraca ?
22 R. Cela n'est absolument pas exact. Je vivais à Grbavica moi-même, et
23 autour de mon immeuble on n'a vu atterrir aucun obus et il n'y avait pas
24 non plus de tirs de tireurs embusqués, rien du tout à ce moment-là.
25 Q. Très bien. Mais Vraca ne semble pas loin, donc on entend les
26 explosions. Ce jour-là, avez-vous entendu des explosions ?
27 R. Oui, on entend des explosions, mais si on ne voit pas de ses propres
28 yeux, il est très difficile de savoir s'il s'agit d'obus tirés qui sont
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1 venus exploser à Vraca ou si ça a été tiré de Vraca et que cela explose
2 l'autre côté. Mais je n'ai pas vu ces obus tomber. On ne peut pas les
3 cacher, vous savez, les obus, et je n'en ai pas vus, moi.
4 Q. Très bien.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, est-ce qu'on peut voir la page suivante,
6 s'il vous plaît ?
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, là, c'est un très bon
8 exemple de perte de temps de votre part. Le témoin vous a dit que, d'après
9 lui, ce n'était pas ça la situation, et le fait de donner lecture de cette
10 conversation interceptée ne vous permet pas de présenter des éléments de
11 preuve en votre défense.
12 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]
13 M. KARADZIC : [interprétation]
14 Q. Donc dites-nous : quelle est la distance entre Vraca et Grbavica ?
15 R. Depuis l'endroit où je vis, c'est à 600, 700, voire 800 mètres.
16 Q. Grbavica, en fait, touche Vraca, n'est-ce pas ?
17 R. Oui.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors je ne demande pas le versement de cette
19 pièce. Je le ferai à un autre moment.
20 M. KARADZIC : [interprétation]
21 Q. Nous avons là deux confirmations nous montrant que le 21 avril il y a
22 eu un combat intense que vous n'avez pas remarqué.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous afficher à présent la pièce 65 ter
24 30 714 ?
25 Nous avons là une traduction également.
26 Donc nous avons là une conversation interceptée entre moi-même et un autre
27 Radovan, Radovan Pejic, qui est un haut fonctionnaire du MUP. Donc, je
28 demande :
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1 "S'agit-il de Vraca ?"
2 Ils me répondent, et Karadzic dit, voilà :
3 "Bonjour. Nous sommes en train de négocier. Nous sommes en plein travail."
4 Il me répond en disant :
5 "La situation est calme pour le moment."
6 Puis il dit :
7 "Mais nous sommes déployés sur les positions car il y a un certain nombre
8 d'indices nous disant qu'en bas là-bas, sur Grbavica, ils sont en train de
9 s'organiser."
10 Prenons la page suivante s'il vous plaît.
11 "Ils continuent de s'organiser à Grbavica."
12 Il dit :
13 "Comme il y a eu des attaques depuis en bas la veille, on se prépare juste
14 pour pouvoir se défendre si jamais ils lançaient une attaque."
15 Puis, moi, je réponds :
16 "C'est aujourd'hui qu'on est censé signer ce cessez-le-feu, donc en fait on
17 ne devrait nulle part commencer, et eux, ils ne devraient pas."
18 Est-ce que vous voyez cela ? C'est une conversation interceptée,
19 enregistrée et interceptée par la police musulmane. Voyez-vous que la
20 police musulmane sait qu'ils sont en train de s'organiser à Grbavica pour
21 attaquer Vraca ?
22 R. Monsieur Karadzic, je vivais à Grbavica et jamais n'ai-je vu à Grbavica
23 ne serait-ce qu'un seul soldat faisant partie de la Ligue patriotique, des
24 Bérets verts, de l'armée. Je ne sais pas quelles étaient leurs différentes
25 appellations. Cela n'est donc pas exact.
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons montrer la page
27 suivante s'il vous plaît.
28 M. KARADZIC : [interprétation]
Page 9225
1 Q. M. Pejic affirme ici que Karadzic demande :
2 "Avez-vous eu des dégâts ?"
3 M. Pejic dit :
4 "Le bâtiment F a fait l'objet de tirs hier et avant-hier, donc le 20 avril,
5 et à cause des détonations, toutes les vitres sont brisées dans la cantine,
6 donc tout est en feu."
7 Est-ce que vous savez où se situe l'école de la police à Vraca ?
8 R. Oui, je le sais.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que cette conversation interceptée peut
10 être versée au dossier s'il vous plaît ?
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Sur la base du fait que le témoin
12 connaît l'emplacement de l'école ? Je ne sais pas, je ne vois pas de
13 fondement. Nous ne voyons pas de fondement, Monsieur Karadzic.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. 1D2805 à présent, s'il vous plaît.
15 M. KARADZIC : [interprétation]
16 Q. C'est un rapport du ministère de l'Intérieur qui s'adresse aux chefs du
17 gouvernement en date du 30 avril. Voyons ce qu'il en est du texte lorsqu'il
18 parle des membres.
19 "Les membres de la TO de BiH, depuis le secteur du stade de Grbavica
20 où se concentre la plupart de ces forces, ont agit pendant toute la nuit en
21 ouvrant le feu d'armes automatiques et de fusils à lunette sur des
22 installations du ministère serbe des Affaires intérieures."
23 D'après vous, est-ce que cela correspond à la réalité ?
24 R. Ici, on ne nous dit pas où se situent les locaux du ministère serbe de
25 l'Intérieur. Où se situent-ils, pour qu'on puisse savoir si les Musulmans
26 ont tiré dessus ? Où à Grbavica ?
27 Q. Dans l'école.
28 R. L'école de Vraca ? Mais pendant quelle période ? A quelle date ?
Page 9226
1 Q. C'est le 30 avril 1992.
2 R. Je ne suis pas au courant de cela.
3 Q. Merci. Est-ce que vous voyez que c'est depuis l'école élémentaire Ivan
4 Goran Kovacic, place de Pere Kosorica, on tire depuis les armes
5 automatiques, des Zolja et des fusils à lunette, qu'on a visé le MUP serbe
6 et également le Parc commémorial Vraca ? Savez-vous où cela se situe ?
7 R. Oui. Si vous le savez également, vous devriez savoir que, depuis cette
8 école, on ne peut pas se servir de Zolja pour tirer sur Vraca, puisque si
9 vous êtes dans l'école ou sur le toit de l'école, vous avez devant vous les
10 tours élevées de la place Pere Kosorica, donc vous ne pouvez absolument pas
11 toucher Vraca. Et d'ailleurs, avec les Zolja, on n'a pas la portée
12 nécessaire pour toucher Vraca depuis l'école d'Ivan Goran Kovacic.
13 Q. Très bien. Alors on laisse cela de côté.
14 A quel moment est-ce que vous avez reçu votre affectation ? Vous nous avez
15 dit qu'il était dangereux de se rendre à cet endroit et qu'il était
16 dangereux également de passer entre les tours. Alors j'aimerais savoir si,
17 pendant que vous étiez à Grbavica, donc jusqu'à la (expurgé), est-ce qu'il y
18 a eu là des obstacles, des conteneurs, voire même des rideaux constitués de
19 couvertures tirés dans les rues pour empêcher les tireurs embusqués de
20 viser ?
21 R. Oui.
22 Q. Je souhaite que l'on examine à présent une carte, un plan de Sarajevo,
23 de Novo Sarajevo, pour que tous les participants puissent se rendre compte
24 de l'aspect de cette municipalité.
25 En attendant, Monsieur le Témoin, donc vous contestez, n'est-ce pas, le
26 fait qu'à l'époque, pendant cette période-là, il y a eu des combats qui
27 font l'objet des rapports que nous venons de voir ?
28 R. Encore une fois, je ne conteste pas. Je ne suis pas au courant du fait
Page 9227
1 qu'il y a eu des combats. Je ne me suis pas trouvé à Zlatiste, pas plus
2 qu'à -- comment s'appelle cet autre emplacement dans les hauteurs par
3 rapport à Grbavica ? Je ne me suis pas trouvé là-bas. Je sais qu'à
4 Zlatiste; cependant, il y a eu des combats. Ça, j'en ai entendu parler et
5 je les ai entendus. J'ai entendu des tirs.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] P815, s'il vous plaît. C'est une carte.
7 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, vous servir du stylet ? Le service
8 compétent vous montrera comment on peut faire. Est-ce que vous pouvez
9 tracer un cercle autour de Novo Sarajevo, s'il vous plaît ? Après je vais
10 vous demander d'annoter d'autre chose.
11 R. [Le témoin s'exécute]
12 Q. Donc cela s'étend jusqu'au sommet du Hum, n'est-ce pas ?
13 R. Je dois dire que j'ai du mal à m'orienter sur cette carte. Est-ce qu'on
14 pourrait agrandir un petit peu ? Car je n'arrive vraiment pas à voir.
15 Q. Mais on peut agrandir le centre. Vous voyez ce qui est écrit :
16 "Municipalité de Novo Sarajevo" ?
17 R. Oui, je vois où cela est écrit.
18 Q. Voyez-vous les frontières qui sont tracées ?
19 R. Oui, je le vois.
20 Q. Vous n'avez peut-être pas besoin de tracer quoi que ce soit là-dessus.
21 Donc au nord, par rapport à la partie habitée, au nord vers le Hum, est-ce
22 que vous voyez la zone serbe quasiment 100 % serbe de Pofalici ?
23 R. Oui, c'est le quartier de Pofalici.
24 Q. Est-ce que vous pouvez tracer la lettre P à cet endroit, s'il vous
25 plaît ?
26 R. [Le témoin s'exécute] Etes-vous d'accord avec moi pour dire que cela
27 correspond au quartier de Pofalici ici ?
28 Q. Oui. Alors jusqu'au 15 mai au plus tard, savez-vous qu'on a tué entre
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1 250 et 300 Serbes et qu'on a incendié quasiment la totalité des maisons
2 serbes ?
3 R. Je ne sais pas combien de Serbes ont été tués et je ne sais d'ailleurs
4 pas s'il y a eu des meurtres là-bas, et je ne sais pas s'il y a eu des
5 incendies de maisons parce que je n'étais pas sur place.
6 Q. Mais tous les médias en ont parlé. Est-ce que vous l'avez appris par
7 les médias que tous les Serbes qui sont restés dans ce secteur que tous ces
8 Serbes ont été tués et déracinés ?
9 R. Cela est possible, mais pour autant que je sache, ce n'est pas tout à
10 fait certain que ces gens aient été tués ainsi.
11 Q. Mais est-ce que vous savez qu'il y a eu des Serbes de tués dans
12 Pofalici ?
13 R. Je ne sais pas, je n'étais pas sur place. Parmi mes connaissances, mes
14 amis, parmi les personnalités ont vu, je ne sais pas s'il y a eu des Serbes
15 qui ont péri là-bas. J'ai dit dans ma déclaration une seule chose, à savoir
16 pour Grbavica qu'il n'y a pas eu de combat à Grbavica au moment de l'entrée
17 des forces de la VRS dans ce quartier, donc qu'il n'y a pas eu de combat
18 lorsque l'armée de la Republika Srpska y est rentrée. Quant à Pofalici je
19 ne peux en parler que d'après ce que j'en ai entendu dire. Je ne sais pas
20 comment les choses se sont passées là-bas, vous comprenez, je ne vivais pas
21 là-bas.
22 Q. Très bien. Alors là, sur cette carte, nous voyons Grbavica, nous voyons
23 les lignes de front, nous voyons les arrières de Grbavica, et l'ensemble de
24 cette zone correspond aux villages serbes, n'est-ce pas ?
25 R. Mais de quel quartier parlez-vous, de ces villages derrière Grbavica ?
26 Q. Est-ce que vous pouvez tracer deux lettres, G pour Grbavica, et V pour
27 Vraca, s'il vous plaît ?
28 R. [Le témoin s'exécute]
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1 Q. Donc G correspond à Grbavica et puis sur les pentes, un peu en
2 surplomb, on trouve Vraca, donc le V pour Vraca.
3 R. Oui.
4 Q. Etes-vous d'accord pour dire que l'on voit ici aussi Lukavica,
5 Trebevic, et les villages serbes qui sont les villages qui sont quasiment à
6 100 % Serbes ?
7 R. Oui, c'est surtout une population serbe. Je ne pense pas que ce soit à
8 100 % serbe mais effectivement la majorité de ces localités sont serbes;
9 cependant, il y avait là également quelques Croates et Musulmans.
10 Q. Mais dans les hauteurs il y a des familles, Trivkovici, Petrovic --
11 R. Zivkovici --
12 Q. Surtout des Serbes ?
13 R. Pandurevic, oui, surtout des Serbes.
14 Q. Alors est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît, tracer la lettre L pour
15 nous indiquer où se trouve Lukavica ?
16 R. Est-ce que c'est ici ? Est-ce que vous êtes d'accord ? [Le témoin
17 s'exécute]
18 Q. Oui. Merci. Inscrivez la date d'aujourd'hui et vos initiales, s'il vous
19 plaît, avant de passer à la carte suivante.
20 Juste un chiffre.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Attendez un instant. Votre pseudonyme
22 est KDZ310.
23 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]
24 M. KARADZIC : [interprétation]
25 Q. Inscrivez la date, s'il vous plaît. Vous avez écrit le 29.
26 R. [Le témoin s'exécute]
27 Q. Merci.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on peut verser au dossier ce
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1 document ?
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D83.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Un autre document qui date du mois de juin,
5 s'il vous plaît. Il s'agit du document 1D2792. Nous passerons à huis clos
6 par la suite pour voir de manière plus détaillée la carte.
7 M. KARADZIC : [interprétation]
8 Q. Voyons le document 1D2792. Monsieur le Témoin, savez-vous que le 8 juin
9 une offensive généralisée a commencé, c'était une offensive musulmane
10 déclenchée dans le secteur de Sarajevo ? Savez-vous que partout dans la
11 ville dans tous les quartiers sur tous les fronts les combats furent
12 féroces ?
13 R. Je ne le savais pas.
14 Q. Regardez cette dépêche venant d'une agence de presse. Je la lis :
15 "Selon les informations reçues l'attaque a commencé le matin et elle s'est
16 poursuivie dans l'après-midi."
17 La dernière phrase dit ceci :
18 "Selon cette même source, à Grbavica 2, il y a des combats d'infanterie."
19 Est-ce que ce quartier Grbavica 2 -- est-ce à ce point éloigné du vôtre
20 pour que vous ne sachiez pas qu'il y avait des combats là ?
21 R. Il n'y a pas eu de combat, j'en suis certain.
22 Q. Fort bien. A ce moment, nous n'allons pas demander le versement de ce
23 document.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Passons à huis clos complet car je vais
25 demander au témoin d'indiquer certains endroits sur une carte détaillée,
26 plus détaillée que celle-ci.
27 Je demande l'affichage du document 09390C. C'est un document de la liste 65
28 ter et nous aimerions que s'affiche la carte numéro 11.
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1 Ici nous avons la carte numéro 9, nous aimerions avoir la carte numéro 11.
2 Est-ce que nous sommes à huis clos ?
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pas encore.
4 Passons à huis clos, s'il vous plaît.
5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui. Nous sommes maintenant à huis clos
6 partiel.
7 [Audience à huis clos partiel]
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26 [Audience publique]
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Karadzic.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
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1 Numéro 1081 de la liste 65 ter, s'il vous plaît.
2 M. KARADZIC : [interprétation]
3 Q. Vous avez fort bien décrit cette situation chaotique, anarchique qui a
4 régné. Depuis le début du mois d'avril jusqu'au milieu du mois de mai,
5 personne pratiquement ne savait qui avait le pouvoir à Grbavica ?
6 R. Il n'y avait pas d'effectifs à Grbavica. Je ne savais donc pas si
7 c'était tenu par les Serbes, par les Musulmans, je veux dire par l'armée de
8 Bosnie-Herzégovine.
9 Q. Merci. Conviendrez-vous que c'est à ce moment-là que les criminels
10 avaient comme ça une chance d'intervenir et que le crime et la criminalité
11 régnaient à Grbavica ?
12 R. Pas d'accord. Il n'y avait pas de crimes à Grbavica.
13 Q. Il n'y a pas eu de pillages du tout ?
14 R. Pas de pillage, pas d'expulsion des gens de leur domicile. Pas de
15 pillage. On ne prenait pas la voiture des gens. C'est tout simplement pas
16 vrai.
17 Q. Nous y reviendrons. Mais je ne demande pas jusqu'au 15 mai, mais de
18 façon générale. Est-ce qu'il y avait des criminels qui sévissaient ? Est-ce
19 que vous vous souvenez que les criminels avaient découvert une nouvelle
20 activité, un nouveau [inaudible], le fait de faire passer des gens d'un
21 côté à l'autre ?
22 R. Vous voulez parler de la période qui a précédé le moment où Grbavica a
23 été prise par la VRS ?
24 Q. Mais avant aussi. En général.
25 R. Avant que les Serbes ne viennent à Grbavica, tout le monde pouvait s'il
26 le voulait traverser, franchir le Miljacka, donc il n'aurait pas pu être
27 question de faire du transfert, du passage de gens d'une rive à l'autre.
28 Q. Quand vous dites "les Serbes sont venus," vous dites quoi ?
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1 R. Je parle de l'armée.
2 Q. Donc vous parlez d'une armée organisée; est-ce que la JNA s'est
3 toujours trouvée à Lukavica, en transit ?
4 R. Avant la prise de Grbavica, vous voulez dire ?
5 Q. Oui.
6 R. Il y avait effectivement des Unités de la JNA, d'après ce que je sais.
7 Q. Merci. Regardez ce document. C'est un rapport destiné au commissaire de
8 la municipalité de Novo Sarajevo, de la cellule de Crise. Il fait rapport
9 au président de la présidence de la République serbe de Bosnie-Herzégovine,
10 et il dit :
11 "Ces deux derniers mois sur le territoire de la municipalité de Novo
12 Sarajevo, voici les activités qui ont été menées :
13 "Il y a eu création d'une cellule de Crise…"
14 Puis on indique quelles sont les communautés locales qui en font partie :
15 Lukavica, Tilava, Brdo, Hrasno Brdo, et cetera, et :
16 "Cette cellule de Crise exerce les fonctions de l'assemblée municipale en
17 temps de guerre."
18 Regardez 3(a), "Logements." Est-ce que vous voyez ce paragraphe ?
19 R. Oui.
20 Q. C'est en rapport avec la nécessité de loger des gens sans domicile.
21 3(b) :
22 "Approvisionnement.
23 "Les communautés locales ont établi des listes de civils, noms et prénoms,
24 et on a donné des vivres aux familles de combattants et de réfugiés venant
25 de territoires occupés."
26 Passons à la page suivante.
27 Est-ce que vous voyez ici "l'approvisionnement de l'armée," et puis on
28 parle des soins médicaux, du corps médical. Une infirmerie a été
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1 transformée en centre d'urgence, le centre de santé compte quelque 15
2 employés ? Regardez maintenant ceci, cette phrase :
3 "Dans les communautés locales, 19 véhicules (des cadets et des camions de
4 cinq tonnes) ont été affectés au corps médical, qui doit les utiliser comme
5 l'a ordonné le chef du corps médical."
6 Vous avez dit un moment donné que les soldats avaient demandé une voiture.
7 R. Ils n'avaient pas demandé une voiture. Ils avaient demandé les clés
8 pour emmener la voiture.
9 Q. Merci. Est-ce que vous savez, en temps de guerre, on peut
10 réquisitionner des véhicules de particuliers pour les besoins de l'armée ?
11 R. J'en suis conscient, mais pas en partant de caractère ethnique, pas
12 uniquement pour réquisitionner des véhicules appartenant à des Musulmans et
13 des Croates.
14 Q. Est-ce que vous savez combien de véhicules ont été saisis et quelle
15 était l'appartenance ethnique de leurs propriétaires ?
16 R. Je ne sais pas exactement. Je ne sais pas combien de véhicules ont été
17 réquisitionnés. En tout cas, les propriétaires faisaient partie de la
18 population non-serbe.
19 Q. Avez-vous connaissance de Serbe dont le véhicule aurait été saisi ?
20 R. Non.
21 Q. Vous affirmez qu'aucun véhicule appartenant à un Serbe n'a été saisi ?
22 R. Je n'en ai pas connaissance.
23 Q. Regardez le point F.
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26 (expurgé)
27 R. Ils m'ont demandé.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vois, je vois. Est-ce qu'on peut supprimer ?
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1 Je suis désolé.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, c'est ce que nous allons faire.
3 M. KARADZIC : [interprétation]
4 Q. Au point F, voyez-vous que le Comité exécutif a posé des limites aux
5 prix des vivres ?
6 R. Vous parlez du F ?
7 Q. Oui. Vous voyez sous F, donc il s'agit de :
8 "Commerces qui sont placées sous le contrôle du Conseil exécutif, et
9 les prix sont plafonnées, ils sont déterminés par le Conseil exécutif.
10 Donc cela est fait pour éviter tout trafic, toute contrebande.
11 R. Oui, ça a duré pendant quelques semaines, et après, il n'y a plus
12 eu de supermarché là-bas du tout.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut tourner la page, s'il vous
14 plaît ?
15 La traduction est erronée ici. Il ne s'agit pas de traitement de Musulmans
16 et de Croates. Il s'agit plutôt de l'"attitude réservée aux Musulmans et
17 aux Croates."
18 M. KARADZIC : [interprétation]
19 Q. Examinez ce paragraphe en serbe, et les autres pourront le consulter en
20 anglais :
21 "Très fréquemment des citoyens de toutes les nations se réunissent, surtout
22 à Grbavica, et c'est de manière très correcte que nous agissons
23 publiquement. Nous élisons un chef d'entrée d'immeuble pour chaque
24 immeuble, pour chaque entrée, et ils répondent de la situation de leur
25 entrée. Par la voie de la police, on traite tous ceux qui doivent faire
26 l'objet de traitements de ce type.
27 "Quant aux Musulmans, nous leur avons fait savoir qu'ils seront en sécurité
28 s'ils sont neutres sur le plan militaire.
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1 "Et puis nous nous sommes rendus au couvent de Gornji Kovacici et
2 nous faisons tout pour qu'elles soient -- ces 'nuns' soient en sécurité."
3 Est-ce que vous savez que leur situation est restée la même, c'est-à-
4 dire bonne, pendant toute la durée du temps ?
5 R. Non, pas du tout.
6 Q. Que s'est-il passé ?
7 R. Elles ont été chassées, et il n'est pas vrai non plus que l'on
8 ait désigné des responsables d'entrée de maison.
9 Q. Mais comment le savez-vous ?
10 R. Je sais parce que, dans certains immeubles, les gens se sont
11 organisés aux entrées et ils s'y tenaient au moment où l'armée serbe est
12 arrivée et a interdit cela.
13 Q. Nous avons des preuves à l'appui. Nous allons pouvoir démontrer notre
14 thèse.
15 Alors quand est-ce que les bonnes sœurs sont parties ? Qui les a chassées
16 de là ?
17 R. C'est l'armée serbe.
18 Q. Si je vous disais que ce n'est pas exact, que tous leurs biens ont été
19 sauvegardés, leur bibliothèque, que tout cela leur a été remis à la fin de
20 la guerre, tous les ouvrages théologiques, alors que me répondriez-vous ?
21 R. Je dirais que peut-être bien que la bibliothèque a été préservée, mais
22 que les bonnes sœurs ont été chassées.
23 Q. Quand, en quel mois ?
24 R. Je ne sais pas exactement, mais je sais que c'est au tout début de la
25 guerre.
26 Q. Très bien. Alors ça ne nous posera pas de problème. Nous allons
27 démontrer notre position.
28 Alors voyez-vous maintenant le point 7 ?
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1 R. Oui, je le vois.
2 Q. Donc nous avons un rapport qui fait ici faisant état de la fréquence de
3 ce phénomène, disant que "cela se reproduit, notamment pour ce qui est de
4 véhicules," et il dit qu'"ils sont quasiment impuissants, qu'ils ne peuvent
5 rien faire parce que c'est le travail qui normalement revient à la police
6 militaire et civile."
7 Donc il dit qu'il s'agit de quelque chose de très fréquent et il dit
8 qu'il est quasiment impuissant. Est-ce que vous êtes d'accord avec son
9 appréciation ?
10 R. Pendant quelle période, cela -- quelle est la période à laquelle
11 cela se réfère ?
12 Q. Avril et mai.
13 R. A partir du moment où l'armée serbe est entrée à Grbavica, il y a eu
14 des vols massifs.
15 Q. Là, vous dites que c'est l'armée qui faisait cela ?
16 R. Oui, l'armée et aussi la police, civile et militaire.
17 Q. Mais, Monsieur, vous faisiez partie de cette armée. Est-ce que vous
18 voliez vous aussi ?
19 R. Tous les soldats serbes n'ont pas volé. Vous savez, pour pouvoir
20 prendre tout dans une maison, il faut qu'on s'y prenne à plusieurs. Et pour
21 détruire les maisons, il suffit d'une personne.
22 Q. Quelles sont les unités qui ont volé ?
23 R. Les militaires, les policiers faisant partie de différentes unités ont
24 volé, qu'il s'agisse de pelotons d'interventions, qu'il s'agisse -- quelque
25 soit l'unité.
26 Q. Nous contestons cela, et nous allons démontrer qu'il n'en est pas
27 ainsi. Nous allons citer des personnes à l'appui. Si vous avez besoin d'un
28 huis clos -- et bien, à huis clos, vous pourrez dire les noms des
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1 individus, des responsables de ces vols.
2 R. Il n'y a pas eu d'ordres qui ont été donnés. On a volé simplement selon
3 sa propre initiative, comme on le voulait. Il y a eu des gens qui ont volé,
4 mais il y a eu également des soldats honnêtes qui ne l'ont pas fait. Je
5 suis certain pour certains qu'ils ne l'ont pas fait. Dans mon unité, il y
6 en a eu qui étaient honnêtes et qui ne l'ont pas fait; ils n'ont pas volé.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, le moment est venu de
8 faire une pause.
9 Nous ferons une pause de 30 minutes, et nous reprendrons à 13 heures 10. Il
10 vous restera à peu près 50 minutes par la suite pour terminer votre contre-
11 interrogatoire.
12 --- L'audience est suspendue à 12 heures 39.
13 --- L'audience est reprise à 13 heures 11.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
16 M. KARADZIC : [interprétation]
17 Q. Monsieur le Témoin, c'est l'homme qui exerce le pouvoir à ce moment-là
18 à cet endroit et il dit qu'il n'arrive pas à mettre fin au pillage, au vol.
19 Nous verrons à quel moment ils ont pu arrêter cela.
20 Alors est-ce que vous pouvez vous reporter au point 8 :
21 "Prise en charge des combattants venus d'ailleurs. Donc il s'agit de
22 combattants qui sont des réguliers dans les unités et eux ils sont
23 stationnés dans des appartements croates et musulmans abandonnés et on leur
24 donne un accord pour une utilisation temporaire de ces appartements avec
25 cette réserve près qu'ils sont obligés de préserver les biens qu'ils
26 trouvent à l'intérieur."
27 Alors est-ce que vous êtes au courant de cela ?
28 R. Cette autorisation a été donnée et quant à savoir sils ont fait
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1 attention aux biens, aux meubles trouvés sur place, ça c'est autre chose.
2 Q. Alors prenons un cas concret, une commission aurait remis, par exemple,
3 un appartement à quelqu'un pour qu'il puisse s'y installer, et est-ce qu'il
4 en a abusé par la suite ?
5 R. Donc il y a eu -- on a dressé un constat au moment de la remise de
6 l'appartement. Vous voulez que je vous cite le nom d'un individu qui aurait
7 abusé de ce droit ?
8 Q. Oui, un cas de figure où un appartement aurait été pillé après avoir
9 été remis en bonne et due forme pour un usage temporaire remis par une
10 commission.
11 R. Oui, l'appartement de Zoran Colic.
12 Q. A qui a-t-il été attribué ?
13 R. A lui, Zoran Colic a reçu un appartement dans ces conditions-là.
14 Q. Il l'a pillé ?
15 R. Oui.
16 Q. Nous allons le citer pour l'entendre là-dessus.
17 R. Vous ne pouvez pas le citer parce que cet individu n'est plus --
18 L'INTERPRÈTE : L'interprète dit inaudible. Fin de réponse inaudible pour
19 l'interprète.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous vouliez dire quelque
21 chose au sujet de M. Colic ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je voulais dire --
23 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Il faudrait peut-être passer à huis
24 clos partiel pour aborder ces questions-là.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, nous passerons à huis clos partiel,
26 si vous le souhaitez.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous passerons à huis clos partiel
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1 brièvement.
2 [Audience à huis clos partiel]
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19 [Audience publique]
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.
21 M. KARADZIC : [interprétation]
22 Q. Est-ce que vous pouvez examiner le dernier paragraphe ? Cet homme, qui
23 représente le pouvoir sur place, il dit :
24 "Nous vous demandons également de prendre en compte le caractère officiel
25 de ce rapport, nous souhaiterions que tous les membres du gouvernement le
26 comprennent ainsi, pour qu'il n'y ait pas de désinformation, de rumeurs, ni
27 de rapports erronés que ce soit de manière délibérée ou non. Tout autre
28 rapport oral concerne ceux qui l'émettent et n'a aucun caractère officiel."
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1 Alors donc cet homme dit qu'il ne dispose pas d'instrument pour mettre fin
2 aux activités illicites.
3 Page 4, revenons, s'il vous plaît, en arrière d'une page, il dit que :
4 "Il ne peut pas mettre fin à ces activités --" donc c'est le point 3 de la
5 page 4, il dit :
6 "Nous n'arrivons pas à expédier les affaires courantes car sans aucun
7 réseau dans les communautés locales nous ne pouvons arriver à rien."
8 Donc son évaluation correspond à la vôtre, il dit qu'il y a un certain
9 nombre d'activités qui se produisent mais, lui, il représente le pouvoir,
10 et il dit que les conditions ne lui permettent pas d'y mettre fin. Vous
11 venez de dire à l'instant, qu'il n'y a pas eu aucun ordre invitant les
12 militaires à se livre au pillage. Est-ce que c'est en fait à leurs heures
13 perdues que les militaires le faisaient ?
14 R. J'ai eu la sensation que les persécutions se sont faites, les
15 expulsions se sont faites sur ordre. Pour ce qui est des pillages, des
16 vols, il me semble qu'il n'y a pas eu d'ordre émis par quelque commandement
17 ou commandant que ce soit. Vous savez, on a pillé d'abord l'argent, l'or,
18 les véhicules, et puis on continué, on a volé tout ce qu'on a pu.
19 Q. Très bien.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors est-ce qu'on peut verser au dossier ce
21 document ?
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Uertz-Retzlaff.
23 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Pas d'objection.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document sera versé au dossier.
25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D885.
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
27 M. KARADZIC : [interprétation]
28 Q. Alors puisque nous parlons d'expulsions, je voudrais tirer cela au
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1 clair. D'après vous jusqu'au 15 mai, à peu près, on était libre de
2 traverser de l'autre côté, en fait, avant que les lignes ne soient établies
3 ?
4 R. Avant que l'armée serbe n'arrive à Grbavica. On a pu traverser même
5 après, mais c'est devenu plus difficile, et à la fin ce n'était plus
6 possible.
7 Q. D'accord. Donc dites-nous : à quel moment les expulsions se sont-elles
8 produites ?
9 R. C'est à partir de l'arrivée de l'armée serbe à Grbavica que cela a eu
10 lieu.
11 Q. Mais si je vous dis que pas un oiseau n'aurait pu traverser, parce
12 qu'il y avait d'abord les journalistes qui notaient tout, ensuite il y a eu
13 des coups de feu qui étaient tirés par l'armée musulmane au moment de -- où
14 on essayait de passer, comment est-ce que vous pouvez expulser des
15 expulsions en masse à partir du moment où les lignes ont été établies --
16 R. Mais si, si, c'était tout à fait possible. J'ai vu de mes propres yeux,
17 comment on a chassé les gens de la rue Radnicka des bâtiments nouveaux, le
18 long des rues Splitska et Belgrade, vers le pont Vrbanja, et vers le
19 bâtiment de Energoinvest, donc j'ai vu comment ils ont chassé les gens.
20 Q. Mais pourquoi tous les médias n'en ont-ils pas parlé, à partir du
21 moment où cette ligne était entièrement surveillée par les médias du monde
22 entier ?
23 R. Je ne sais pas si les médias en ont parlé ou non, mais j'ai vu de mes
24 propres yeux comment on a expulsé les gens, c'était des colonnes de gens
25 qui n'avaient que des baluchons, des sacs en plastique et qui partaient, et
26 jusqu'à la dernière pépite, on leur a tout volé dans leurs appartements.
27 Q. Mais il y avait des listes prévues pour le regroupement familial, des
28 organisations humanitaires internationales ont dressé ces listes.
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1 R. Il y avait un bureau chargé des échanges. C'était ça son libellé. Je
2 pense que c'était le capitaine Bulatovic qui dirigeait ce bureau.
3 Q. Alors parlons maintenant de ces colonnes, j'affirme qu'à partir du
4 moment où l'armée est arrivée, à partir du moment où les lignes de front
5 ont été établies il n'était plus possible de passer de l'autre côté, à
6 moins qu'il y ait un accord et que personne ne pouvait chasser personne.
7 Alors je vais vous montrer un document maintenant.
8 Il y a eu des listes qui ont été dressées, donc parce qu'il y a eu des gens
9 qui sont venus chercher leurs proches, et ils souhaitaient qu'ils puissent
10 passer du côté musulman; est-ce que vous êtes au courant de ces listes ?
11 R. En passant par ce bureau chargé des échanges, oui, les gens se
12 recherchaient, et après, on a fait passer les gens d'un côté comme de
13 l'autre.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher la pièce 1D2797,
15 s'il vous plaît ? C'est la page du 25 juin. Tout cela se passe en juin.
16 M. KARADZIC : [interprétation]
17 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que nous pouvons préciser les choses ? Si
18 vous avez vu la colonne avancée, qu'est-ce qui vous permet de dire que ce
19 n'est pas la colonne qui a fait l'objet d'un accord ? Comment pouvez-vous
20 affirmer qu'il s'agit de gens expulsés, parce que les lignes ont été
21 établies et à moins que ça se passe de manière organisée aucune traversée
22 n'était possible ?
23 R. Je voyais à leur visage, l'expression de leur visage que ce sont des
24 gens qui ne partaient pas de leur propre gré. C'était parce qu'ils étaient
25 forcés à le faire. Si vous voyez une femme pleurer, c'est parce qu'elle est
26 forcée à le faire. C'est parce que ce n'est pas elle qui l'a choisi. Ce
27 n'est pas elle qui a choisi de laisser tous ses biens sur place pour qu'on
28 les vole, pour qu'on les pille.
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1 Q. C'était ça votre critère ?
2 R. Entre autres.
3 Q. Quels ont été les autres critères ?
4 R. Si quelqu'un donne des coups de pied à quelqu'un dans le derrière ou
5 s'il pousse la crosse du fusil, ou s'il insulte sa mère balija, ou
6 Oustachi, ou Musulmane, alors écoutez, je vois qu'on se fait chasser, on se
7 fait expulser, on a recours à la force.
8 Q. Qui a donné des coups de pied à qui ? Si vous avez besoin de passer à
9 huis clos partiel, on va le faire, ou à huis clos, mais dites-nous : qui a
10 donné des coups de pied à qui ?
11 R. Des soldats serbes ont donné des coups à des civils croates et
12 musulmans, et aussi la police civile et militaire.
13 Q. Mais, Monsieur le Témoin, ce sont des affirmations très généralisées et
14 je ne les accepte pas.
15 Voyons maintenant ce document. Il est dit ici que :
16 "Les forces de la FORPRONU se sont trouvées surprises à leur arrivée
17 dans le quartier sarajevien de Grbavica. Elles avaient une liste et, sur la
18 base de cette liste, elles allaient emmener quelques familles croates et
19 musulmanes pour faire l'objet d'un échange. Ce sont les familles de Dervo
20 Pusina, d'Izet Tanovic, d'Alija Talic, de Drago Barbara et de la famille
21 Hadzimesic, qui ont signé qu'ils ne souhaitaient pas quitter Grbavica car
22 ils n'avaient aucune raison de le faire. En fait, ils ont confirmé à
23 l'équipe de la FORPRONU que 'les autorités serbes les traitaient tout à
24 fait correctement, qu'elles avaient tout ce qu'il leur fallait et qu'elles
25 n'avaient pas envie de partir'."
26 Elles ont demandé : comment cela se faisait que leurs noms figuraient
27 sur cette liste d'échange ?
28 Donc je vais vous demander la chose suivante maintenant. A partir du moment
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1 où la ligne de front a été établie, c'était uniquement dans le cas
2 d'échange concerté par le biais d'une organisation humanitaire qu'on a pu
3 traverser cette ligne. Alors est-ce que vous avez quelque preuve que ce
4 soit qui vous permettrait de maintenir ce que vous venez de dire ?
5 Expliquez-nous : comment quelqu'un qui a été chassé a-t-il pu traverser la
6 ligne ?
7 R. Mais tout simplement, on dit à ceux qui tiennent les positions sur le
8 front de les laisser passer, en passant par la rue Belogradska vers
9 Skenderija, vers le pont de Vrbanja. C'est ce qu'on leur disait, et c'était
10 tout à fait facile à faire. Il suffisait de le vouloir.
11 Q. Mais vous savez que ces listes ont existées ? Vous l'avez confirmé.
12 R. Non, je ne suis pas au courant de l'existence de ces listes, mais je
13 sais qu'en passant par le bureau chargé des Echanges, il y a eu parfois des
14 échanges de ce type-là, parce qu'on a fait des échanges de prisonniers et
15 également de guerre. Je sais, par exemple, pour un cas où une femme serbe
16 est passée à Belgrade et puis elle a demandé de revenir. Il y a eu toutes
17 sortes de cas.
18 Q. Bon, d'accord. Mais vous nous dites qu'on pouvait se mettre d'accord
19 sur les lignes de front pour qu'on laisse passer les gens. Mais comment
20 est-ce qu'on a pu demander cela aux Musulmans ? On aurait pu demander ça
21 aux Serbes de les laisser sortir. Mais les Musulmans se trouvent à 50
22 mètres, n'est-ce pas ?
23 R. Mais tout simplement, ils voyaient les civils arriver avec leurs
24 baluchons et ils savaient que ce sont des Musulmans et des Croates et que
25 ces gens étaient expulsés.
26 Q. Mais le monde entier l'aurait su. Les télévisions auraient diffusé cela
27 partout. On aurait accordé une telle couverture à cet événement.
28 R. Ecoutez, je vais vous dire qu'à la télévision on a pu voir la
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1 passerelle près de Bristol, et on a vu les gens expulsés en passant par
2 cette passerelle. Puis Saracevic, comment a-t-il été expulsé, on l'a su.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] M. le Témoin sait que cette Commission chargée
4 des Echanges a existé.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne pense pas que les bases ont été
6 jetées de manière appropriée. Je ne pense pas que, sur cette base-là, on
7 puisse verser ce document au dossier.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Pouvons-nous examiner à présent la
9 pièce 1D2798, s'il vous plaît ? 1D2798. Nous avons la traduction également.
10 M. KARADZIC : [interprétation]
11 Q. Vous voyez, c'est la date du 23 juin. Les médias de Sarajevo publient
12 une désinformation disant qu'un groupe de juifs de Sarajevo ont été
13 capturés et placés dans la caserne de Lukavica. Et :
14 "Blanka Romano, qui est à la tête de cette délégation qui s'est rendue
15 auprès de ces Juifs qui résident à Grbavica, déclare qu'ils se sentent tout
16 à fait en sécurité et qu'ils n'ont aucune envie de partir ailleurs."
17 Alors est-ce que vous voyez comment on a cherché à placer cette
18 désinformation dans les médias ?
19 R. Je n'ai pas vu cela, mais il est exact de dire que l'armée serbe n'a
20 pas réservé une attitude hostile aux Juifs.
21 Q. Très bien.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on peut verser au dossier ce
23 document ?
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Uertz-Retzlaff.
25 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Le témoin a parlé de la question des
26 Juifs. Par conséquent, ce document peut être déclaré recevable, à notre
27 avis.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il le sera.
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1 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D888.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on nous montrer rapidement une pièce déjà
3 versée au dossier, la pièce P998 ?
4 M. KARADZIC : [interprétation]
5 Q. Pendant la guerre, il y a eu trois commandants, trois officiers qui ont
6 commandé le Corps Sarajevo-Romanija : Sipcic, puis il y a un Galic, suivi
7 de Dragomir Milosevic. Je ne vais pas examiner chacune des périodes
8 concernées, mais vous le savez, n'est-ce pas ?
9 R. Non, je ne sais pas. Je sais que le général Galic a été commandant, le
10 général Milosevic aussi. Mais je n'ai jamais entendu parler de Sipcic.
11 Q. Très bien. Il est resté en poste jusqu'au début du mois d'août 1992.
12 Regardez ce document déjà versé au dossier. On ne va pas tout lire, mais
13 prenons le paragraphe numéro 4 :
14 "Veuillez assurer la sécurité des avions qui acheminent l'approvisionnement
15 de la population civile du côté de l'aéroport."
16 R. Je ne vois pas le numéro 4 ici.
17 Q. C'est vers le milieu du paragraphe.
18 R. Ah oui, je vois.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on afficher la page suivante en anglais ?
20 Déjà, le paragraphe 4 se trouvait à la page suivante en anglais. Prenons la
21 dernière page pour ne pas devoir tout lire, puisque ce document est déjà
22 devenu une pièce du dossier.
23 M. KARADZIC : [interprétation]
24 Q. Regardez le point 6, c'est le dernier paragraphe, plus exactement à la
25 dernière phrase du paragraphe 6 :
26 "Veillez, en particulier, ou tout particulièrement, à économiser les
27 munitions. Il faut traiter les prisonniers dans le respect des conventions
28 de Genève," et cetera.
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1 Ça concerne la Brigade de Sarajevo. C'est à Novo Sarajevo, n'est-ce
2 pas ?
3 R. Ce qui est écrit ici, je ne l'ai jamais vu ni ressenti en
4 pratique. Si c'était comme ça, pourquoi ne l'avez-vous pas dit, par
5 exemple, à la télévision ?
6 Q. Ici, il est dit que c'est "Strictement confidentiel."
7 R. Ah oui, "strictement confidentiel."
8 Q. Tous les chefs de brigade ont reçu cet ordre. Maintenant, nous sommes
9 en train de parler de l'ordre donné par le commandant militaire du RSK, et
10 c'est un document strictement confidentiel. On ne fait pas de publicité
11 autour de ce document. On dit ici ce que ces chefs sont censés faire et
12 respecter.
13 Puisque le document a déjà été versé au dossier, nous allons en
14 examiner un autre, la pièce P1000.
15 Vous avez dit que la voie hiérarchique était fonctionnelle, qu'il y
16 avait une chaîne de commandement opérationnelle. Etait-ce bien vrai, à
17 votre avis ?
18 R. A certains égards, oui, à d'autres pas. Pour ce qui était des
19 opérations de combat, je pense que la chaîne de commandement devait
20 fonctionner.
21 Q. Il y a eu des violations comme ça décidées par les hommes ?
22 R. On n'a même pas cherché les responsables de ces violations.
23 Q. Voyons la dernière page de ce document, vous verrez ainsi le genre
24 d'ordres donnés par le général, en fait, le colonel à l'époque, le colonel
25 Sipcic.
26 Nous parlons ici de la dernière page, point 9 :
27 "Veillez à une organisation sans faille du système de tir, qu'il faut
28 coordonner en fonctions des obstacles. Tirez uniquement sur des cibles
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1 militaires."
2 Vous n'avez pas vu, avez-vous dit, où tombaient les obus. C'était des obus
3 tirés vers la ville, n'est-ce pas, depuis le bâtiment Transit ?
4 R. Je n'ai pas vu l'endroit où ils sont tombés, mais manifestement à
5 l'autre côté.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] On dit ici que c'est un ordre qui est donné,
7 parce qu'en fait, le temps utilisé n'est pas correct. On dit "devrait
8 ouvrir le feu," alors que c'est une interdiction qui est exprimée ici. Il
9 faudrait le montrer au niveau de la traduction et dans le compte rendu.
10 M. KARADZIC : [interprétation]
11 Q. A Grbavica, sur l'autre rive de la rivière, là où se trouvait l'armée
12 musulmane. Est-ce qu'il n'y avait que des mortiers, des camions, des chars
13 sur la ligne de front, plutôt à l'arrière ?
14 R. Plutôt en arrière.
15 Q. Si quelqu'un tire de l'arrière, s'il vous est impossible de voir le
16 point de chute des obus tirés, vous est-il possible de déduire qu'il s'agit
17 de tirs aveugles non ciblés, pas de tirs à vue, ou qu'on tire sur de telles
18 positions précises ?
19 R. Nos lignes étaient tellement près que je peux vous dire avec un degré
20 de certitude qu'on ne tirait pas sur la ligne, mais derrière les lignes,
21 donc, plus exactement là où il n'y avait pas de cibles militaires. Lorsque
22 nos mortiers étaient utilisés, souvent, on recevait des ordres par
23 téléphone disant qu'il nous fallait nous mettre à l'abri -- dans l'abri,
24 car les lignes étaient tellement proches que les obus pouvaient tomber sur
25 nous.
26 Q. Est-ce qu'il y aurait pu y avoir des tirs de représailles de la partie
27 adverse ?
28 R. Je ne pense pas que nos -- de notre côté, on pouvait tirer vraiment ces
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1 lignes de front au mortier, et eux non plus, de l'autre côté, ne pouvaient
2 pas le faire.
3 Q. Vous avez dit qu'il y avait des tirs en profondeur, de l'arrière.
4 Puisque les mortiers, les canons, les chars se trouvent à l'arrière,
5 derrière la ligne de front, pour conclure qu'on a affaire à des tirs
6 aveugles, il faudrait voir l'endroit pris pour cible ?
7 R. Mais j'ai pu le déterminer d'après le tube du canon.
8 Q. Mais à ce moment-là, on n'aura pas besoin de tableau de tirs.
9 R. Mais, moi, j'ai vu où tirait, sur quoi tirait le char. J'ai pu le voir,
10 j'ai vu qu'on ne tirait pas sur la ligne de front, mais qu'on visait
11 derrière, là où se trouvait la population civile.
12 Q. Est-ce que vous savez qu'il y avait un obusier, une batterie de
13 mortiers, un Howitzer ?
14 R. Je n'étais pas au courant.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'il est possible d'avoir le document -
16 -
17 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas saisi le numéro du document.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez le répéter.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il s'agit du document D576.
20 M. KARADZIC : [interprétation]
21 Q. Ici, nous avons le deuxième commandant, le général Galic, c'est ce
22 genre d'ordres qu'il donnait à la 30e Division, juste avant de prendre le
23 commandement du RSK. Regardez ce document :
24 "Empêcher tout acte de vol, pillage de biens privés dans la zone de
25 responsabilité des divisions à tout prix. Protéger les réfugiés, la
26 population civile, et respecter le droit international dans le traitement
27 réservé aux prisonniers de guerre. Quiconque viole cet ordre est passible
28 des sanctions civiles et militaires les plus strictes, y compris
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1 l'élimination physique."
2 Voilà le genre d'ordre donné partant du droit international.
3 Vous avez constaté des violations, mais ce n'était pas les degrés
4 supérieurs de la hiérarchie qui les donnaient, ces ordres ? Ou est-ce qu'il
5 n'était pas non plus toléré par les échelons supérieurs; avez-vous assisté
6 à des actes de pillage ?
7 R. Mais tous ces hommes étaient dans des unités. Pourquoi est-ce que M.
8 Galic n'a pas cherché à savoir si ces ordres avaient été respectés, pour
9 autant qu'il ait donné cet ordre ? Est-ce qu'il a vérifié pour voir si son
10 ordre avait été respecté, puisqu'il commandait le Corps Sarajevo-Romanija ?
11 Q. Merci. Ça, c'est le travail de la police. La police dépose un rapport,
12 lequel va au bureau du procureur militaire, et il se peut qu'une enquête
13 soit engagée ?
14 R. Mais ça n'a jamais eu lieu. Et le pillage s'est poursuivi. Les auteurs
15 de ces actes de pillage et d'autres crimes n'ont jamais, jamais été
16 poursuivis, jamais traduits en justice.
17 Q. Mais comment le savez-vous ?
18 R. Parce qu'ils sont toujours là. Ils ne sont pas en prison, ni nulle part
19 ailleurs.
20 Q. Est-ce que vous avez déposé plainte contre ces hommes ?
21 R. Non. Une fois, j'ai essayé de protéger un civil musulman, je lui donne
22 ma déclaration. J'étais au poste de police. J'ai raconté ce qui s'était
23 passé, et le policier s'est contenté de faire un geste de la main.
24 Q. Dans votre déclaration, vous parlez de tirs dirigés sur la
25 municipalité. Vous souvenez-vous qu'à la municipalité, Budo Obradovic, le
26 président du conseil exécutif a été tué, et par un Serbe, d'ailleurs ?
27 R. J'ai déjà entendu ce nom, mais je ne sais pas qui l'a tué. Je ne savais
28 même pas qu'il avait été tué.
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1 Q. Est-ce que vous savez qu'il y a eu un procès intenté à l'auteur de
2 crimes, par exemple, s'il y avait eu un Musulman et un Catholique, ou un
3 Chrétien, parce qu'ils se cachaient dans une cave, la police l'a constaté,
4 et l'auteur a été condamné à dix ans d'emprisonnement.
5 R. Je ne le savais pas. Je n'étais pas au courant.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on afficher la pièce P1008, première page,
7 P1008.
8 La voilà. Document envoyé à toutes les brigades, à tous les
9 commandements. Il y a sans doute une traduction, oui. Nous la voyons.
10 Regardez. 6 octobre 1992.
11 Peut-on afficher la page 16 en serbe, ce sera la page 11 en anglais.
12 M. KARADZIC : [interprétation]
13 Q. "Il faut tout particulièrement faire attention à la nécessité de sauver
14 les hommes. Ne permettez pas qu'il y ait des sacrifices inutiles, parce que
15 les commandements seraient mauvais, la discipline et les gens négligents.
16 Utilisez tous les moyens pour empêcher, prévenir et punir les responsables
17 de crimes de marché noir et d'indiscipline. Les incendies, le viol, les
18 exactions, le traitement inhumain des civils est strictement -- sont
19 strictement interdits, car ceci ne correspond pas, ceci est incompatible
20 avec le moral des soldats serbes."
21 Alors, ne savez-vous pas qu'il y a eu sanctions sévères ?
22 R. Pour ce qui est du traitement de la population civile, jamais je n'ai
23 entendu parler de quelqu'un qui aurait été poursuivi en justice.
24 Q. Merci. Vous souvenez-vous du fait que les gens ont dû, pour aller à
25 Grbavica, franchir des lignes en se cachant, et je parle de gens de toutes
26 sortes d'origines, s'ils voulaient venir de notre côté ?
27 R. J'ai entendu parler de ce genre de cas, mais pas pendant que j'étais
28 sur place.
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] 1D2773, affichons ce document.
2 M. KARADZIC : [interprétation]
3 Q. Est-ce que vous savez qu'il y avait une obligation de travail, ainsi
4 qu'une obligation d'activité militaire, les gens en âge de combattre
5 étaient soumis à des obligations militaires, et ce -- et je parle là des
6 civils --
7 R. Les Croates, les Musulmans, les non-Serbes. Il n'y avait pas beaucoup
8 de Serbes qui étaient obligés de travailler.
9 Q. Savez-vous que les Serbes essayaient de trouver un moyen d'être mutés
10 d'obligation militaire à l'obligation de travail ?
11 R. Je ne suis pas au courant.
12 Q. Mais n'avez-vous pas dit, dans votre déclaration, que les Musulmans et
13 les Croates ne se sentaient pas à l'aise parce qu'ils n'ont pas été
14 mobilisés, et que je crois qu'il y avait une discrimination positive à
15 l'encontre de Serbes. Pensez-vous qu'il aurait fallu mobiliser de force les
16 Musulmans et les Croates, ou est-ce que les Serbes ont bien fait au départ,
17 ils n'ont pas mobilisé les Serbes et les Musulmans, mais ils leur ont donné
18 une obligation de travail ?
19 R. A ce moment-là, personne ne savait quelle serait la nature du
20 gouvernement à venir, vous comprenez. On ne savait pas ce qui allait se
21 passer, parce qu'au sein de la JNA, nous avions l'habitude de voir des
22 unités créées avec respect de la proportionnalité entre les différents
23 groupes ethniques. Donc à ce moment-là, on était intéressé de savoir ce qui
24 allait se passer. On voulait savoir si seuls les Serbes seraient mobilisés
25 ou si la mobilisation concernerait aussi les Croates et les Musulmans.
26 Parce qu'à partir du moment où la mobilisation se réalise sur la base d'un
27 principe mono ethnique, il est possible de prévoir ce qui va se passer,
28 voyez-vous.
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1 Q. Merci. Mais ici, la question c'est qu'un Croate ou un Musulman avait le
2 droit de se battre s'il le souhaitait, et que d'ailleurs des Musulmans se
3 sont battus dans des unités complètement musulmanes. Mais dans des endroits
4 urbanisés aussi densément que celui-ci, la partie serbe avait abandonné
5 l'idée de mobiliser les Musulmans et les Croates et a laissé la décision à
6 ces Musulmans et à ces Croates pour qu'ils décident de leur propre chef.
7 Est-ce qu'ils auraient été refusés s'ils s'étaient présentés dans une unité
8 ?
9 R. Ce n'était pas une question de liberté de choix, le fait d'être
10 mobilisé ou pas.
11 Q. Est-ce que vous savez qu'un seul Musulman ou Croate aurait été refusé
12 s'il s'était présenté devant une unité serbe pour entrer dans une armée
13 serbe ?
14 R. Je ne connais aucune situation de ce genre.
15 Q. Bien, jetez un coup d'œil à ce document. Décembre 1993, et il se lit
16 comme suit, je cite :
17 "Soixante et un membres d'une brigade croate sont passés du côté serbe.
18 Toute l'équipe de l'école d'Electro-Technique est passée dans l'autre camp,
19 certains hommes étant allés rejoindre leur famille et ayant donc eu la
20 possibilité de passer du côté de Grbavica."
21 Par conséquent, le capitaine Milici, Djordje, informe ce jour-là, en
22 décembre 1993, du fait que 61 membres d'une brigade croate qui était
23 déployée à Grbavica sont passés du côté serbe."
24 Vous avez entendu parler de cela aussi, n'est-ce pas ?
25 R. [aucune interprétation]
26 Q. Vous avez confirmé ? C'est bien ce que vous avez entendu dire ? Cela
27 n'a pas été consigné au compte rendu d'audience.
28 R. A ce moment-là, je n'étais pas présent à Grbavica, parce que dans cette
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1 période, je n'étais pas sur place. Mais j'ai entendu parler de cela.
2 Q. Merci.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il n'y a pas de traduction ?
4 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Il faudra enregistrer ce document aux
5 fins d'identification pour le moment-là, uniquement.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, c'est ce que nous allons faire.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document devient la pièce D888 [comme
8 interprété] enregistrée aux fins d'identification, Monsieur le Président,
9 Messieurs les Juges.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document 1D2776.
11 M. KARADZIC : [interprétation]
12 Q. Dans la première phrase de ce document, nous lisons, je cite :
13 "Le 19 février 1994, 14 personnes ont fui vers Grbavica sur le territoire
14 serbe à partir du quartier musulman de Sarajevo. Ils ont été interrogés, et
15 à partir de leurs réponses, nous avons fait une sélection de renseignements
16 portant sur les actions actuelles des Musulmans. Nous avons leurs
17 déclarations et nous souhaitons rendre compte de l'action des Musulmans à
18 ce moment précis."
19 Vous pouvez peut-être lire le document pour voir ce qui s'est passé dans le
20 camp musulman. Et puis en note en bas de page, nous lisons, je cite :
21 "Sur le nombre susmentionné, 10 hommes sont partis, y compris un Croate,
22 quatre femmes et trois couples. Douze personnes ont été interrogées. Un
23 couple n'est pas apparu dans la présente enceinte parce que Braco Lazarevic
24 les a immédiatement emmenés une fois qu'ils sont passés de l'autre côté."
25 Est-ce que vous avez entendu parler de cela ? Est-ce que c'est dans ces
26 conditions que les gens franchissaient et passaient d'une ligne à l'autre ?
27 R. Je ne sais pas. Comme je vous l'ai dit, je n'étais pas présent pendant
28 cette période.
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1 Q. Le document tout entier évoque la façon dont été déployés les chars,
2 les mortiers, et cetera, mais je ne vais pas m'appesantir sur ce document
3 puisque vous n'étiez pas présent sur place à l'époque.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce document ne sera pas versé au dossier,
5 n'est-ce pas ?
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document 65 ter
8 numéro 1031, et je demande un peu plus de temps aujourd'hui, je vous prie.
9 Cela ne veut pas dire que je demande à ce que nous travaillions demain,
10 mais aujourd'hui, j'aimerais un peu plus de temps, s'il vous plaît.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre n'est pas très encline à vous
12 accorder un temps supplémentaire, notamment en raison du fait que le temps
13 nous manque, et vous en avez perdu pas mal. Mais étant donné que nous
14 n'avons pas d'autres témoins pour aujourd'hui, cela dépendra du temps dont
15 l'Accusation aura besoin pour ses questions supplémentaires.
16 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, 15 minutes au
17 maximum.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors j'ai 15 minutes de plus ?
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous obtenez 15 minutes de plus. Il
20 faudra que vous en ayez terminé à 14 heures 15.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
22 M. KARADZIC : [interprétation]
23 Q. Monsieur le Témoin, regardez, ce document est un ordre qui date du 22
24 avril, et à ce moment-là il n'y a toujours pas d'armée serbe sur place,
25 simplement des membres de la Défense territoriale et des dirigeants. Donc
26 c'est un ordre de la cellule de Crise qui jette les -- qui est à l'origine
27 -- qui fonde cet ordre, qui se lit comme suit, je cite :
28 "Tous les hommes aptes au service militaire ayant entre 18 et 60 ans et
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1 résidant dans la municipalité de Novo Sarajevo sont tenus de se présenter
2 dans un délai de 24 heures afin de répondre à la mobilisation. Le point de
3 rassemblement est la communauté locale de Lukavica. Ces hommes doivent
4 apporter avec eux leur livret militaire ainsi que tous les équipements et
5 matériel technique qui sont pour le moment réquisitionnés pour les besoins
6 de l'état-major principal de la Défense territoriale serbe, et toute
7 personne qui omettrait de répondre à cet appel à la mobilisation et
8 enfreindre le présent ordre sera soumis aux dispositions de la loi sur les
9 obligations militaires," et cetera, et cetera.
10 Donc vous voyez de quoi traite cet ordre. Il traite de la mobilisation et
11 de la réquisition de camions et autres équipements.
12 R. Je ne crois pas que cet ordre ait été conforme à la vérité, car il n'y
13 avait absolument aucun besoin de disposer de camions civils ou de véhicules
14 civils en les réquisitionnant étant donné que le nombre de camions et de
15 véhicules militaires suffisait. Donc je ne crois pas que cet ordre ait
16 correspondu à la réalité ou qu'il ait jamais été mis en œuvre.
17 Q. Monsieur le Témoin, savez-vous et admettez-vous que la JNA est restée
18 en Bosnie jusqu'au 20 mai et qu'à ce moment-là il était impossible de
19 réquisitionner des équipements pour l'armée ?
20 R. Je ne suis pas au courant. Je sais que j'ai vu des véhicules
21 militaires. Je n'ai pas vu de camions civils être utilisés. J'ai vu des
22 véhicules militaires qui apportaient des munitions, des vivres, et cetera.
23 Donc c'étaient de véhicules militaires, pas des camions civils au début.
24 Q. Mais voilà la question que j'aimerais vous poser. Vous distinguiez,
25 n'est-ce pas, entre la Défense territoriale avant le 20 mai, et vous savez
26 que la Défense territoriale n'avait rien à voir avec la JNA. Elle n'était
27 ni supérieure ni inférieure hiérarchiquement à la JNA. Elle était
28 subordonnée à la JNA, et ensuite, les choses ont changé.
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1 R. Je ne sais pas dans quelle mesure les hommes de la Défense territoriale
2 avaient une influence sur la JNA dans un sens ou dans l'autre.
3 Q. Est-ce qu'il n'est pas écrit ici, je cite :
4 "Les Serbes et tous les hommes aptes au service militaire" ?
5 R. Mais comment savez-vous cela ? Les ordres même n'étaient pas formulés
6 erronément, mais ils n'étaient pas exécutés. Personne ne vérifiait si ces
7 ordres aient été exécutés, et personne n'était puni en cas de défaut
8 d'exécution.
9 Q. Je vous remercie. Alors voyons ce qu'il en est de votre cas. Le 24 --
10 ou plutôt, le 22, vous étiez censé vous présenté dans un délai de 24
11 heures, donc avant le 23 avril, et vous ne l'avez pas fait et personne ne
12 l'a remarqué; c'est ça ?
13 R. Non, ce n'est pas ainsi que les choses se sont passées. Le 22 avril,
14 l'ARSK n'existait pas à Grbavica, à ce moment-là. Et des ordres de cette
15 nature ne pouvaient pas être mis à Grbavica. Il pouvait être émis à
16 Lukavica, à Vraca, et cetera.
17 Q. Mais la municipalité serbe de Novo Sarajevo, englobait Grbavica qui
18 était majoritairement peuplé de Serbes, et Budo Obradovic a été tué à
19 Grbavica, au siège, là où il travaillait.
20 R. Oui, c'était plus tard au mois de mai, ou plus tard, et ce document,
21 lui, concerne le 22 avril.
22 Q. Merci.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce
24 document.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Puis-je vous entendre, Madame Uertz-
26 Retzlaff, sur cette demande de versement.
27 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je ne vois pas en quoi il est permis
28 de penser que le témoin a confirmé les informations contenues dans ce
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1 document ou le document en tant que tel. Enfin, je n'ai pas d'objection.
2 [La Chambre de première instance se concerte]
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, nous pourrions avoir besoin de ce
4 document pour bien comprendre les réponses du témoin concernant le
5 contexte.
6 Bien. Ce document peut être utile, nous l'admettons.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il devient la pièce D888, Monsieur le
8 Président, Messieurs les Juges.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
10 M. KARADZIC : [interprétation] Vous connaissez M. Simo Sipcic, qui n'est
11 pas le général Sipcic, c'est un autre Sipcic, n'est-ce pas ?
12 R. Je l'ai vu quelques fois.
13 Q. Vous avez parlé de lui de façon positive en disant qu'il avait protégé
14 des civils, et qu'il leur avait permis de rentrer chez eux, n'est-ce pas ?
15 R. Oui.
16 Q. Merci.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document 1D2799.
18 M. KARADZIC : [interprétation]
19 Q. Il était le chef de la police militaire sur le territoire de la
20 municipalité de Novo Sarajevo, n'est-ce pas ?
21 R. Oui.
22 Q. Voilà, le document s'affiche, je ne sais pas s'il s'accompagne d'une
23 traduction, oui.
24 Bien, alors il date du 22 juillet.
25 "Dans la municipalité de Novo Sarajevo. Il est tout à fait certain
26 que l'ordre public est en train d'être rétabli. Selon la déclaration du
27 capitaine Simo Sipcic, chef de la police militaire de la municipalité serbe
28 de Novo Sarajevo, les civils respectent les autorités civiles et
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1 militaires. Toutes les difficultés éprouvées par les habitants sont
2 traitées de façon efficace quelle que ce soit leur appartenance ethnique.
3 Le nombre d'habitants qui reviennent, qui restituent des biens obtenus
4 illégalement aux autorités est de plus en plus important. En raison de
5 cela, l'état de droit et la situation du point de vue de l'ordre public se
6 rétablir progressivement mais assurément."
7 Est-ce que cela ne montre pas que les autorités elles-mêmes, à la fin du
8 mois de juillet, n'étaient pas satisfaites de la situation du point de vue
9 de l'ordre public, et souhaitaient que l'état de droit et l'ordre public
10 soient rétablis ?
11 R. Ce qui est écrit est un mensonge notoire.
12 Q. Mais ce sont les mots du capitaine Simo Sipcic qui sont cités dans ce
13 document; est-ce que vous voulez dire qu'il mente ?
14 R. Naturellement.
15 Q. Comment le savez-vous ?
16 R. Je le sais parce que la population civile était toujours maltraitée et
17 subissait des pillages.
18 Q. Donnez-nous un exemple ?
19 R. Je vais vous donner l'exemple de la famille Balvanovic, qui résidait à
20 Grbavica. Cette famille a été emmenée à l'été 1992, dans les premières
21 heures de la matinée. Il s'agissait de deux frères, de leurs épouses et de
22 leur mère. Ces cinq personnes ont été amenées, les épouses ont survécu, et
23 les trois hommes ont été tués.
24 Q. Qui a fait cela ?
25 R. Veselin Blagojevic [comme interprété], surnommé Batko.
26 Q. Mais c'est bien celui qui est sur le point d'être jugé en Bosnie,
27 n'est-ce pas ?
28 R. Exact.
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1 Q. Qu'est-ce que ces autorités ont à voir avec Veselin Vlajovic, surnommé
2 Batko ? Nous parlons ici de la position défendue par les autorités. Il y
3 aura toujours des criminels partout, mais qu'est-ce que les autorités ont à
4 voir avec un homme qui a été expulsé et qui contre lequel des mesures
5 graves étaient sur le point d'être prises au moment de sa fuite ?
6 R. Oui, ils souhaitaient agir, mais ils n'ont jamais rien fait.
7 Q. Mais alors il a juste disparu de Grbavica.
8 R. Pendant que j'étais sur place, oui, il a disparu.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce
10 document.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne vois aucun fondement permettant
12 d'admettre ce document au dossier, Monsieur Karadzic. Même si vous vous
13 êtes vu accorder 15 minutes supplémentaires, j'aimerais que vous vous
14 concentriez de façon plus précise votre contre-interrogatoire.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
16 M. KARADZIC : [interprétation]
17 Q. Alors je pensais vous soumettre un document concernant la vie
18 quotidienne et sa normalisation à Sarajevo, mais je n'ai pas l'intention
19 d'en demander le versement au dossier. Donc je ne vais pas vous le
20 présenter pour gagner du temps.
21 Veuillez me dire, je vous prie, s'agissant du problème des départs, et
22 cetera…
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous devons parler à huis clos
24 partiel ? J'annoncerais le moment où je pense que cela est nécessaire.
25 M. KARADZIC : [interprétation]
26 Q. Dites-moi, je vous prie : vous avez déclaré à un certain moment que
27 personne ne vous avait jamais dit ce qu'il fallait que vous fassiez une
28 fois que vous auriez reçu vos armes et des renseignements au sujet des
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1 personnes devant qui vous deviez vous présenter, et des positions où vous
2 deviez vous rendre. On ne vous a rien dit d'autre ?
3 R. Pas d'information précise, rien de très précis. On m'a simplement dit
4 qu'il fallait que je surveille ce qui se passait de l'autre côté, et que
5 finalement quelqu'un apparaîtrait, tirait des coups de feu et cetera. Mais
6 nous n'avons reçu aucun ordre précis quant à la façon dont ils nous
7 appartenaient de nous conduire, et cetera.
8 Q. Merci. Vous avez dit que quelqu'un vous avait annoncé qu'à un moment où
9 à un autre, il y aurait un mouvement en face, et que quelqu'un se mettrait
10 à tirer. Mais est-ce que c'était une -- est-ce qu'il y avait une garde
11 permanente ?
12 R. Nous avions l'ordre de tirer sur quelle que personne que ce soit qui se
13 déplacerait de l'autre côté. On peut décrire cela dans les termes qu'on
14 veut. Je ne suis pas sûr des termes exacts qui sont les plus opportuns.
15 Q. Est-ce que vous vous êtes, à quel que moment que ce soit, trouvé sur
16 une ligne au moment où une attaque a été lancée précisément contre
17 l'endroit où vous vous trouviez ?
18 R. Les lignes n'ont jamais bougé pendant que j'étais sur place, il n'y a
19 pas eu d'attaque.
20 Q. Ozrenska, Milinkladska -- les rues Ozrenska et Milinkladska, à cet
21 endroit-là, les lignes passaient entre les maisons, n'est-ce pas ?
22 R. Exact.
23 Q. Vous avez dit que les soldats, lorsqu'ils n'étaient de service
24 dormaient dans une maison ou une autre, n'est-ce pas ?
25 R. Oui.
26 Q. Donc d'une certaine façon, ces maisons servaient de caserne temporaire,
27 n'est-ce pas ?
28 R. Oui, d'une certaine façon, lorsque les soldats y passaient la nuit,
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1 alors qu'ils n'étaient pas sur les positions, oui.
2 Q. Je vous remercie. C'est la situation qui présidait de l'autre côté,
3 dans les lignes d'en face, n'est-ce pas ?
4 R. Comment est-ce que je pourrais savoir ce qui se passait là-bas ?
5 Q. Mais les soldats devaient faire eux-mêmes la cuisine, ils avaient
6 quelque part où manger, ils avaient des vivres qui leur étaient apportés.
7 Ils pouvaient dormir quelque part, lorsqu'ils n'étaient pas de service.
8 R. Nous recevions des vivres mais nous n'avions pas à cuisiner nous-mêmes.
9 Q. Très bien. Merci. A votre avis. Si une unité de 10 ou 20 soldats
10 dorment dans une maison, est-ce que cela transforme la maison en cible
11 légitime ?
12 R. Je ne sais pas.
13 Q. Très bien.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce n'est pas une question admissible.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Je retire ma question.
16 M. KARADZIC : [interprétation]
17 Q. Si vous aviez rendu votre livret militaire, est-ce que les gens que
18 vous auriez eu en face de vous auraient compris clairement qu'ils avaient
19 en face d'eux un soldat qui avait subi un entraînement militaire et qui
20 savait exactement ce qu'il devait faire et ce qu'il ne devait pas faire ?
21 R. Non, ce n'était pas clair à leurs yeux.
22 Q. Comment le savez-vous ?
23 R. Ils ne prêtaient pas attention à ce genre de chose. Ils nous donnaient
24 simplement des fusils et ils auraient pu s'intéresser à ce genre de chose.
25 Ils auraient pu vérifier. Ils auraient pu poser trois ou quatre questions
26 pour voir si quelqu'un avait de l'expérience ou pas mais ils ne le
27 faisaient pas.
28 Q. Combien de temps conservaient-ils votre carnet militaire ?
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1 R. Quelques jours.
2 Q. Vous pensez que les services de Renseignement militaires n'auront
3 jamais procédé à la moindre vérification pour voir quel était votre passé ?
4 R. Je ne suis pas au courant de cela.
5 Q. Est-ce que vous avez tiré sur quelque chose qui bougeait à quelque
6 moment que ce soit ?
7 R. Je n'ai jamais vu de soldat en face. Pas plus que de civil d'ailleurs.
8 Q. Juste une question, s'il vous plaît. Vous étiez au rez-de-chaussée, et
9 de temps à autre les tireurs embusqués venaient se placer où, à quel étage
10 ?
11 R. Aux étages supérieurs d'où on pouvait mieux voir de l'autre côté. Mais
12 je ne sais pas exactement de quels étages il s'agissait parce qu'ils
13 opéraient à plusieurs étages. Il y a eu des endroits où ils ont creusé de
14 fausses ouvertures dans des murs. Donc je ne sais pas exactement d'où ils
15 ont effectivement opéré.
16 Q. Très bien. Merci. Est-ce que vous avez vu qu'ils aient tué qui que ce
17 soit ?
18 R. Non.
19 Q. Merci.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaite que l'on passe à huis clos, s'il
21 vous plaît.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
23 Oui, nous sommes à huis clos partiel.
24 [Audience à huis clos partiel]
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10 [Audience publique]
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez la parole, Monsieur Karadzic.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. 1D1207, s'il vous plaît.
13 M. KARADZIC : [interprétation]
14 Q. Seriez-vous d'accord avec moi pour confirmer qu'en face de vous, en
15 face de Grbavica, était déployée la 1ère Brigade motorisée, et qu'en face
16 de Grbavica, directement en face, il y avait les positions du HVO ?
17 R. Voulez-vous répéter, s'il vous plaît ?
18 Q. Du côté musulman, la zone de responsabilité correspondait à celle de la
19 1ère Brigade motorisée, n'est-ce pas ?
20 R. Je ne sais pas.
21 Q. Vous ne saviez pas qui se trouvait devant vous ?
22 R. Pour nous, c'était l'ABiH ou les Musulmans, vous pouvez les appeler
23 comme vous voulez. Quant au nom de cette unité, je l'ignore.
24 Q. Très bien. Alors, prenons maintenant ce document, c'est l'ordre
25 exécutif aux fins d'activités offensives dans le secteur de Grbavica. La
26 date du document est celle du 2 janvier 1993. Donc c'est le lendemain du
27 jour de l'an, n'est-ce pas ?
28 R. Que voulez-vous que je vous confirme là ?
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1 Q. Est-ce que vous savez qu'à ce moment-là on a donné l'ordre pour lancer
2 une attaque sur Grbavica ?
3 R. Mais, Monsieur, je vivais à Grbavica et pas à Marin Dvor. Comment
4 voulez-vous que je le sache. Je ne vivais pas non plus avec Zlatko
5 Lagumdzija; comment voulez-vous que je puisse le savoir ?
6 Q. Mais il donne l'ordre d'attaquer Grbavica, n'est-ce pas ?
7 R. Mais vous voulez dire qu'à partir du moment où il en aura donné
8 l'ordre, il va m'en informer pour que je puisse être au courant; c'est ça ?
9 Mais je ne peux pas le savoir.
10 Q. L'attaque sur Grbavica a-t-elle eu lieu ?
11 R. Je ne le sais pas. Non.
12 Q. Voyez en quoi consiste la mission.
13 "Attaquer le long de l'axe, 11 bleus, du côté sud du stade Grbavica,
14 Palma Shopping et Strojorad. Les quatre grands tours, briser les lignes
15 ennemis et s'emparer des bâtiments les plus importants."
16 Alors, êtes-vous au courant de cet axe ?
17 R. Je connais les emplacements, oui.
18 Q. Merci.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais l'affichage, s'il vous plaît, de
20 la page 4. Page 4, voyez juste cet encadré en bas.
21 "Puisque s'emparer d'une citée aussi fortifiée ça aurait été
22 impossible sans détruire ou incendier les -- sans que l'on détruise ou
23 incendie les bâtiments. Vu, qui constitue en même temps des fortifications
24 très importantes. Il convient de tout détruire. Ne faire confiance à aucune
25 personne capturée qui a quelques armes que ce soit sur elle.
26 M. KARADZIC : [interprétation]
27 Q. [aucune interprétation]
28 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu la fin de la question de M.
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1 Karadzic.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, est-ce que vous
3 pouvez répéter ?
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais devoir demander une minute de huis clos
5 partiel ou huis clos. Mais je demande au témoin quelles sont les intentions
6 de ses ennemis de l'époque, n'est-ce pas ?
7 M. KARADZIC : [interprétation]
8 Q. Ne s'agit-il pas de détruite et d'incendier tout ce qu'ils trouvent sur
9 leur chemin, de ne faire confiance à personne, que ces gens soient armés ou
10 pas ? Donc, qu'entendez-vous par l'expression "ne faire confiance à
11 personne ?"
12 R. Je ne sais pas ce qu'on voulait dire par là.
13 Q. Je vous remercie.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on peut passer à huis clos partiel
15 pendant une minute, s'il vous plaît ?
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Nous sommes à huis clos partiel.
17 [Audience à huis clos partiel]
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10 [Audience publique]
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Karadzic.
12 Oui, Madame Uertz-Retzlaff, vous avez la parole.
13 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
14 Nouvel interrogatoire par Mme Uertz-Retzlaff :
15 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, M. Karadzic a évoqué l'expulsion
16 dont vous avez parlé et il a essayé de jeter le doute sur ce que vous avez
17 dit. Il a dit ce qui s'était passé, on leur a appris, on en a parlé
18 partout.
19 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] J'aimerais à cet effet faire afficher
20 le document 45 135 de la liste 65 ter. C'est une séquence vidéo.
21 Puisqu'elle va être diffusée, précisons de quoi il s'agit. C'est un
22 reportage de TV Belgrade sur une conférence de presse organisée par le chef
23 adjoint de la Mission de la FORPRONU à Belgrade. Nous allons voir ces
24 images. J'espère que nous allons les voir.
25 [Diffusion de la cassette vidéo]
26 L'INTERPRÈTE : Les interprètes précisent qu'ils ne disposent pas de la
27 transcription, il leur est donc impossible --
28 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Il nous faut l'interprétation.
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1 L'INTERPRÈTE : Les interprètes précisent qu'ils ne disposent pas de la
2 transcription et que le débit des intervenants est particulièrement rapide.
3 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Nous n'avons pas la transcription,
4 mais c'est seulement la toute première phrase qui est prononcée qui nous
5 intéresse. Peut-être pourrions-nous reprendre depuis le début ? J'espère
6 que, maintenant, l'objet de la conversation en intervention deviendra plus
7 clair. C'est une affaire de quelques secondes.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Rediffusez depuis le début.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Permettez-moi de demander à Mme Uertz-Retzlaff
10 de nous communiquer la date à laquelle s'est tenue cette conférence de
11 presse. En effet, si quelqu'un a subi des tirs, comme il est dit ici au
12 début par le présentateur, à ce moment-là, il nous faut voir à quel moment
13 cette entité, cette autorité a été établie avant cela.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle est la date ?
15 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je n'ai pas la date précise, mais le
16 reportage vous le montrera clairement. C'est le général Morillon qui se
17 plaint ici. Or, il a servi de septembre 1992 à juillet 1993. Alors je ne
18 sais pas exactement de quoi il parle, mais je pensais que le témoin,
19 précisément, pouvait nous le dire.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.
21 [Diffusion de la cassette vidéo]
22 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
23 "A Grbavica, il y a eu un nettoyage ethnique lorsque environ 300
24 personnes ont été chassées de l'hôtel Bristol alors qu'ils étaient la cible
25 des tirs, ce qui a fait l'objet d'une protestation présentée par le général
26 Morillon à Radovan Karadzic."
27 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]
28 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Merci aux interprètes.
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1 Q. Est-ce que vous saviez que 300 personnes qui se trouvaient à l'hôtel
2 ont été chassées, à l'hôtel Bristol ? Est-ce que vous le savez ?
3 R. Oui. Ils n'ont pas été chassés jusque dans l'hôtel parce qu'ils se
4 trouvaient sur la ligne de front. Ces personnes ont dû emprunter le pont
5 réservé aux piétons, qui était juste à côté de l'hôtel Bristol. Donc ils
6 ont été poussés en direction de cet hôtel.
7 Q. Est-ce que vous vous souvenez de la date, ne serait-ce que de la date
8 approximative à laquelle ceci s'est passé ?
9 R. Ça s'est passé au cours de l'été 1992. Je n'en suis pas tout à fait
10 sûr, mais je pense que j'ai raison.
11 Q. Ici, c'est la télévision de Belgrade qui en fait état. Est-ce que vous,
12 personnellement, vous avez vu -- vous avez regardé la télévision de
13 Belgrade ? Est-ce qu'il vous arrivait de voir ce genre de reportage ?
14 R. On recevait des chaînes de Belgrade quand on avait de l'électricité,
15 donc on n'a pas eu souvent l'occasion de voir ces émissions. Mais je ne me
16 souviens pas vraiment d'avoir vu ce genre de reportage sur les chaînes de
17 la télévision de Belgrade. Impossible de le confirmer. On regardait la
18 télévision de Belgrade quand on avait du courant.
19 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je demande le versement de cette
20 séquence.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel est le numéro 65 ter ?
22 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] 45 135.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Le document est versé au dossier.
24 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P1951.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais il faudrait quand même qu'on nous donne la
26 date.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais nous avons entendu ce que vient de
28 dire Mme Uertz-Retzlaff.
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1 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, j'ajouterais
2 que je me souviens du fait que le Témoin Doyle ou Abdel-Razek, enfin, un
3 des deux, Abdel-Razek en a parlé. Il s'agit ici d'une protestation émise
4 par la FORPRONU et c'est une pièce du dossier. Je vous promets de faire une
5 recherche pour fournir l'information demandée plus tard, mais je ne suis
6 pas en mesure de le faire en ce moment même.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
8 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Est-il possible de diffuser une autre
9 séquence ? Elle sera, elle aussi, très courte. C'est le numéro 40171H de la
10 liste 65 ter, le compteur se trouve à 31:12: 32. Vous allez voir que cette
11 fois-ci ce sont des images de TV Sarajevo, qui relate ce moment où des gens
12 sont expulsés de Grbavica.
13 [Diffusion de la cassette vidéo]
14 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
15 "Le MUP de Bosnie-Herzégovine a annoncé que deux groupes d'environ 500
16 citoyens ont traversé en territoire libre de Grbavica. D'après ces
17 informations, ces gens ont été chassés de chez eux sans préavis ce matin.
18 La clé des appartements a été confisquée, et ces gens se sont entendus dire
19 qu'une explication leur sera donnée de l'autre côté. Le MUP nous dit qu'il
20 y a eu une réunion du SDS ce matin-là au cours de laquelle il a dit --"
21 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]
22 L'INTERPRÈTE : Les interprètes précisent que c'est très difficile et que
23 c'est très rapide.
24 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Mais ce que vous avez fait nous
25 suffit, je demande alors au témoin ceci.
26 Q. Etes-vous au courant de cette expulsion-ci ?
27 R. Je ne sais pas à quel moment ceci s'est passé. Je ne me souviens pas de
28 la date, ni même du mois, ou de l'année. Il y a eu plusieurs expulsions.
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1 Impossible de vous confirmer la date précise de cette expulsion-ci.
2 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] D'après mes informations, ceci a dû
3 se passer le 30 septembre 1992. C'est ce qui est mentionné dans l'émission,
4 dans le reportage --
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Posez la question au témoin. Si c'était
6 le 30 -- est-ce que ça s'est bien passé le 30 septembre 1992, si cette
7 expulsion c'est bien passé ce jour-là, pourriez-vous dire quoi que ce soit
8 à son propos ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous l'ai dit, je ne me souviens pas, je ne
10 connais pas ces dates à vous, impossible de confirmer qu'il y a eu deux
11 groupes de 500 habitants de Grbavica qui ont été expulsés, je ne sais pas
12 quel jour. Je sais qu'il y a eu des expulsions, je sais qu'il y a des
13 groupes de citoyens qui ont été expulsés, mais je ne connais pas les dates.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. Parce que ça c'est de la propagande
15 faite par la télévision musulmane, et il était impossible de procéder à des
16 échanges si on n'avait pas la permission de ces bureaux chargés des
17 échanges de population à l'époque.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais ce n'était pas un échange de population.
19 Ici c'était de l'expulsion. Il y a eu des expulsions, et il n'y a pas eu de
20 Serbes qui sont venus de l'autre côté.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous n'êtes pas censé intervenir
22 maintenant.
23 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Si j'ai bien compris les
24 informations, on donne la date dans cet extrait. Je n'ai pas entendu
25 maintenant.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais le témoin a dit qu'il n'était pas
27 en mesure d'apporter de confirmation.
28 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]
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1 Q. Alors je vous demande ceci : Est-ce que, vous, vous avez vu de vos
2 propres yeux, sur place ce qui a été montré dans ces images ?
3 R. Oui.
4 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je demande le versement de cet
5 extrait.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je demande aux interprètes si la date a
7 été mentionnée ? Peut-on rediffuser la bande son ?
8 [Diffusion de la cassette vidéo]
9 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
10 "Nous avons reçu une annonce du MUP de Bosnie-Herzégovine disant
11 qu'aujourd'hui, deux groupes comptant chacun 500 citoyens sont passés en
12 territoire libre. Et ces personnes ont été chassées de leur appartement
13 sans préavis. La clé de leur appartement leur a été prise, et on leur a dit
14 qu'ils en sauraient plus une fois qu'ils seraient de l'autre côté. D'autres
15 informations parlent d'une réunion organisée par le SDS
16 les Croates et tous les Musulmans devaient être chassés de ce secteur."
17 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]
18 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je pourrais peut-être apporter des
19 précisions plus tard
20 L'INTERPRÈTE : Les interprètes la seule mention temporelle c'était "dans,"
21 "aujourd'hui." La date n'a pas été précisée.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais il faudrait appeler à la barre ce policier
23 pour qu'il témoignage et pour qu'il vous dise qu'il y avait des hommes de
24 Seselj ou d'Arkan à Grbavica. Il n'y avait pas de telle personne à
25 Grbavica. Ceci n'aura pas été possible. Peut-être qu'on pourra verser ce
26 document lorsque viendra à la barre le policier qui dit qu'il y avait des
27 hommes de Seselj ou des hommes d'Arkan à Grbavica.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Peut-être pourrez-vous demander le
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1 versement plus tard ?
2 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je demande une cote provisoire, et
3 j'essaierai d'en savoir plus pour connaître la date de diffusion de ce
4 reportage.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.
6 [La Chambre de première instance se concerte]
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Même si c'est en réponse à une question
8 directrice, le témoin a confirmé qu'il avait vu de ses propres yeux ce que
9 ces images montraient. C'est la raison pour laquelle, ce document reçoit
10 une cote provisoire, en attendant de recevoir des précisions de la part du
11 bureau du Procureur en ce qui concerne la date à laquelle ces images ont
12 été filmées.
13 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Merci.
14 Je n'ai pas d'autres questions supplémentaires.
15 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce MFI
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci met fin à votre déposition. Merci
17 d'être venu témoigner à La Haye, Monsieur le Témoin. Vous pouvez disposer.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous devez attendre quelques
20 instants, le temps que les stores soient baissées.
21 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que nous allons nous retrouver
23 pour la prochaine audience le 7 décembre. Ce sera le Témoin Konings ?
24 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Exactement, Monsieur le Président.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] L'audience est levée.
26 [Le témoin se retire]
27 --- L'audience est levée à 14 heures 32 et reprendra le mardi 7 décembre
28 2010, à 9 heures 00.