Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi 28 janvier 2011

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous. Bonjour, Maître

  7   Robinson.

  8   M. ROBINSON : [interprétation] Bonjour.

  9   Je voudrais vous présenter Wu Yi, qui est chinoise et qui travaille à

 10   l'Université de Corée.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Monsieur Kalbarczyk. Est-ce que

 12   vous pouvez prononcer la déclaration solennelle.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 14   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 15   LE TÉMOIN : JANUSZ KALBARCZYK [Assermenté]

 16   [Le témoin répond par l'interprète]

 17   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 18   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Sutherland.

 20   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci.

 21   Bonjour, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les Juges.

 22   Interrogatoire principal par Mme Sutherland :

 23   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, est-ce que vous pourriez décliner

 24   votre identité, s'il vous plaît ?

 25   R.  Je m'appelle Janusz Kalbarczyk.

 26   Q.  [aucune interprétation]

 27   R.  Né le 16 juin 1946.

 28   Q.  Je voudrais vous poser quelques questions concernant votre parcours.


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  1   Vous êtes un officier de l'armée de l'air polonaise en retraite, n'est-ce

  2   pas ?

  3   R.  C'est exact.

  4   Q.  Et vous avez pris votre retraite au grade de colonel après 25 ans de

  5   service, n'est-ce pas ?

  6   R.  En fait, 30 ans de service, parce que mes années d'études sont incluses

  7   dans mes années de service.

  8   Q.  En quelle année avez-vous pris votre retraite ?

  9   R.  En 1996.

 10   Q.  En avril 1995, vous avez été détaché de l'armée de l'air polonaise aux

 11   Nations Unies pour servir en Bosnie en tant qu'observateur militaire

 12   pendant un an, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui, c'est exact.

 14   Q.  Et dans le contingent des Nations Unies, vous avez occupé le grade de

 15   commandant, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Le 13 avril 1995, vous avez été déployé au secteur Sarajevo l'équipe

 18   SE-1 à Pale, qui était du côté des Serbes de Bosnie, n'est-ce pas ?

 19   R.  Le 13 avril, je suis arrivé à la mission à Zagreb. J'étais à Sarajevo

 20   environ une semaine plus tard, après avoir subi une formation.

 21   Q.  Quel type de formation avez-vous effectuée ?

 22   R.  On m'a donné des informations sur le secteur en question. On m'a donné

 23   des informations également sur les soins de première urgence, sur les

 24   principes liés aux patrouilles, sur les règles et règlements, et tout ce

 25   qui avait trait aux observateurs militaires des Nations Unies.

 26   Q.  Est-ce que vous pourriez nous décrire votre rôle en tant qu'observateur

 27   militaire des Nations Unies ?

 28   R.  Eh bien, tout d'abord, en tant que membre de l'équipe à laquelle


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  1   j'avais été détaché, mon rôle était d'observer pour également m'assurer que

  2   les règles étaient respectées. C'est qu'on appelait être en garde radio. On

  3   m'a également demandé de suivre toutes les recommandations qui étaient

  4   celles du secteur. J'étais également responsable -- comme je le disais,

  5   j'étais également responsable de faire état de tout incident qui était

  6   important ou considéré comme étant important ou qui n'entrait pas dans le

  7   cadre des réglementations en vigueur.

  8   Q.  Est-ce que vous observiez également les tirs effectués dans un sens

  9   comme dans l'autre ?

 10   R.  Durant les tirs, je n'ai jamais eu la possibilité d'observer quoi que

 11   ce soit, mais je me suis rendu dans les autres endroits où des tirs avaient

 12   été effectués, où des cibles avaient été prises à partie.

 13   Q.  Et de quels endroits cela s'agit-il ?

 14   R.  Je me souviens précisément d'un endroit qui est sur les hauteurs à

 15   l'extérieur de Sarajevo, où des canons et des pièces de mortier étaient

 16   positionnés, ainsi que des obusiers. Et de ces positions, on pouvait très

 17   bien voir Sarajevo. J'étais donc surpris qu'il était si facile de tirer des

 18   obus en direction de la ville, mais je ne peux pas non plus prouver que des

 19   tirs ont été effectués à partir de ces positions.

 20   Q.  Je reviens à votre rôle en tant qu'observateur militaire. Est-ce que

 21   vous portiez des armes ou est-ce que des membres de votre équipe en

 22   portaient ?

 23   R.  Non, jamais. Aucun des membres de notre équipe ne portait des armes, et

 24   je n'ai jamais vu d'autres observateurs militaires des Nations Unies

 25   portant des armes.

 26   Q.  Je voudrais revenir à des événements qui ont commencé le 26 mai 1995.

 27   Combien de membres de votre équipe étaient d'astreinte ce jour-là ?

 28   R.  Attendez une seconde que je réfléchisse. Je crois qu'au total nous


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  1   étions cinq : moi-même, Evans, Kozusnik, Dmitri et Pepe, qui était

  2   espagnol. Donc, au total on était cinq. Et notre chef d'équipe était en

  3   permission à l'époque. J'étais revenu la veille de ma permission. Donc le

  4   25, nous étions cinq ou six, et je vous ai donné les noms des personnes.

  5   Q.  Au milieu de la matinée le 26 mai, que s'est-il passé, si quelque chose

  6   s'est passé ?

  7   R.  Le 26 mai, j'étais de garde radio. Il faisait beau. Je me suis levé

  8   environ à 7 heures ou 8 heures, je me suis lavé et j'ai fait rapport pour

  9   prendre mon tour de garde au QG de Sarajevo. On m'a simplement demandé si

 10   tout allait bien, et j'ai répondu que oui, que tout allait bien, que tout

 11   était calme dans les environs. Et entre 8 heures et 9 heures, des sirènes

 12   ont commencé à retentir à Pale. J'étais désorienté, je ne savais pas ce qui

 13   se passait, mais j'ai vu des gens qui partaient en courant dans les

 14   différentes rues, qui essayaient de se cacher.

 15   Q.  Est-ce que cela s'est passé dans le courant de la matinée ?

 16   R.  Non. Ensuite, tout était silencieux. Puis ensuite, un peu plus tard,

 17   environ 30 minutes plus tard, j'ai entendu le bruit des moteurs d'un avion,

 18   et ensuite une explosion a retenti au sud-est de Pale. J'ai vu de la fumée

 19   et j'ai observé les signes d'une explosion, une odeur d'explosion, qui est

 20   arrivée jusqu'à l'endroit où nous logions.

 21   Q.  Et après, est-ce que quelqu'un est venu vous voir dans le bâtiment où

 22   vous vous trouviez ?

 23   R.  Après cette explosion, environ 30 ou 40 minutes plus tard -- rien ne

 24   s'est passé pendant ces 30 ou 40 minutes dans le bâtiment. J'ai fait

 25   rapport de cette explosion à mon secteur à Sarajevo. On nous a donné

 26   l'instruction de rester à l'intérieur, dans le bâtiment où nous étions

 27   positionnés, donc de ne pas quitter le bâtiment et de faire rapport de tout

 28   nouvel incident.


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  1   Après environ 40 minutes, un véhicule est arrivé à proximité de notre

  2   bâtiment. Il y avait trois officiers de police à bord de ce véhicule. Ils

  3   sont entrés dans notre bâtiment. L'officier responsable de cette équipe

  4   portait un pistolet, armé. Il l'a dirigé vers nous. Les autres officiers de

  5   police avaient des kalachnikov, et l'officier en question nous a demandé de

  6   lever les mains et il nous a informés que nous étions en état

  7   d'arrestation. Il nous a également menacés en nous disant que s'il y avait

  8   d'autres frappes aériennes, il nous tuerait.

  9   Après dix minutes --

 10   Q.  Je vous arrête là, s'il vous plaît. Lorsqu'il vous a dit que s'il y

 11   avait d'autres frappes aériennes, il vous tuerait, est-ce que c'est lui qui

 12   vous a dit cela ou qui d'autre vous a dit cela ? Qu'est-ce qu'il vous a dit

 13   exactement ?

 14   R.  Il nous a dit, en fait, qu'il avait un ordre exigeant qu'il nous tue

 15   s'il y avait d'autres frappes aériennes.

 16   Q.  Est-ce que vous avez eu d'autres visites ce matin-là ?

 17   R.  Après dix minutes, l'officier a quitté le bâtiment. Seuls deux

 18   officiers de police sont restés. Ils nous ont permis de baisser les mains.

 19   Mes interprètes ont commencé à négocier avec ces officiers de police. Ils

 20   nous ont proposé du café. Ils voulaient, en fait, que la tension retombe.

 21   Et donc c'est ce qui s'est passé, tout le monde s'est servi en thé ou en

 22   café.

 23   Et après environ 40 minutes, deux véhicules se sont arrêtés devant le

 24   bâtiment. Des soldats de l'armée des Serbes de Bosnie sont descendus des

 25   voitures. Il y avait un jeune officier qui assurait le commandement, qui

 26   avait 32, 33 ans peut-être, et ils sont entrés dans le bâtiment. Les

 27   officiers de police et les soldats ont commencé à discuter. L'officier

 28   commandant a commencé à parler aux officiers de police, et d'après ce que


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  1   j'ai compris, les policiers ont essayé d'expliquer à l'officer que nous

  2   étions sous leur contrôle. Et l'officier, d'un ton univoque, a dit qu'à

  3   partir de ce moment-là, c'est lui qui était responsable. Il a dit qu'à

  4   partir de ce moment-là, nous étions pris en otage par la VRS.

  5   Q.  En version anglaise, vous avez parlé de "BAS" et de "BSA".

  6   L'INTERPRÈTE : La cabine française a toujours interprété par "VRS", ou

  7   "armée des Serbes de Bosnie".

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Ils s'appelaient, en fait, les officiers de

  9   l'armée des Serbes de Bosnie.

 10   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 11   Q.  Et donc, à ce moment-là, les militaires et la police sont entrés en

 12   discussion. Est-ce que vous êtes restés dans le même bâtiment ? Et si tel

 13   n'est pas le cas, où êtes-vous allés ?

 14   R.  Tout ceci s'est passé en notre présence. La discussion a eu lieu dans

 15   la même pièce où nous nous trouvions.

 16   Les soldats qui accompagnaient l'officier se sont servis parmi nos effets

 17   personnels. Ils ont pris nos crayons, nos couteaux, rien de valeur. Mais

 18   après ces discussions et ces échanges entre les différents protagonistes,

 19   on nous a donné deux minutes pour prendre nos effets personnels. On nous a

 20   également conseillé de prendre des vêtements chauds. Et ensuite, on nous a

 21   fait sortir du bâtiment et on nous a placé des menottes. Nous avons été

 22   menottés deux par deux. J'ai été menotté avec Zlatko Kozusnik, et nous

 23   avons été placés dans les voitures. Avant cela, l'officier nous a demandé

 24   de remettre les clés des voitures des Nations Unies.

 25   Dans la voiture, j'étais donc menotté. Assis à côté de moi, il y

 26   avait donc Kozusnik, il y avait un chauffeur militaire qui conduisait la

 27   voiture, et puis il y avait un autre soldat avec une kalachnikov. Les

 28   autres étaient dans les autres voitures.


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  1   Q.  Quand vous parlez de "tous les autres", est-ce que vous parlez d'Evans

  2   et de la personne que vous avez surnommée Pepe ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Est-ce que vous connaissez le nom de famille de ce soldat espagnol qui

  5   s'appelait Pepe ?

  6   R.  Je ne me souviens pas. En général, on utilisait les prénoms. Peut-être

  7   que c'était Romero, mais je n'en suis pas sûr. Dans nos langues

  8   maternelles, on utilise les prénoms quand on se parle.

  9   Q.  Vous avez donc été placés à bord de deux véhicules, tous les membres de

 10   votre équipe, et où est-ce qu'on vous a emmenés ?

 11   R.  Non, on est montés à bord de quatre véhicules : deux voitures, c'était

 12   des voitures qui étaient utilisées par les militaires, et les deux

 13   véhicules des Nations Unies qui ont été confisqués. Je ne sais pas comment

 14   les autres membres de l'équipe étaient répartis, mais au total ils avaient

 15   quatre véhicules à leur disposition. Donc, dans le véhicule à bord duquel

 16   je me trouvais, il n'y avait que moi-même et Kozusnik.

 17   Nous avons donc quitté le bâtiment où nous nous trouvions et nous sommes

 18   allés en direction du centre de Pale. Et là, tous les véhicules ont marqué

 19   le pas dans le centre-ville. Les portières se sont ouvertes, les soldats

 20   ont quitté la voiture. Nous étions à proximité d'un marché. Il y avait pas

 21   mal de civils, mais il y avait également des soldats qui étaient présents.

 22   Certains étaient assez animés. Ils semblaient se réjouir d'une certaine

 23   victoire, du moins c'est ce que j'ai compris. Ils se moquaient de nous, ils

 24   rigolaient, ils nous ont insultés, ils nous ont insultés verbalement, et un

 25   des civils s'est même approché de moi et m'a craché au visage. C'était un

 26   incident très dangereux. Cette agression que nous avons pu observer, tout

 27   le monde n'y a pas participé, mais l'agression est devenue de plus en plus

 28   prenante.


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  1   Q.  Et vous êtes restés à Pale pendant combien de temps ?

  2   R.  Environ dix ou 15 minutes.

  3   Q.  Et ensuite ?

  4   R.  Ensuite, on a pu voir très clairement, du moins c'est l'impression que

  5   j'ai eue, qu'ils avaient reçu un ordre de quitter cet endroit rapidement.

  6   Nous sommes allés en direction d'un endroit que je mentionnerais dans une

  7   minute.

  8   Nous sommes allés dans la direction où nous avions observé

  9   l'explosion. Ensuite, j'ai appris qu'on nous avait emmenés dans un endroit

 10   où il y avait un dépôt d'armes qui avait été touché à Pale.

 11   Q.  Quand vous dites que vous êtes allés en direction de cette explosion

 12   importante, est-ce que c'est en direction de l'explosion que vous aviez

 13   observée un peu plus tôt dans la journée ?

 14   R.  Oui, tout à fait, il s'agissait de la même explosion.

 15   Lorsque nous sommes arrivés à proximité de cet endroit, j'ai retrouvé

 16   mes collègues qui étaient arrivés un peu plus tôt probablement. Il

 17   s'agissait d'une vallée, d'un canyon escarpé, où il y avait un dépôt de

 18   munitions, un dépôt d'armes, mais secret. Je ne sais pas exactement ce

 19   qu'il y avait à l'intérieur.

 20   Q.  Est-ce que vous savez si cet endroit avait un nom ?

 21   R.  Jahorinski Potok ou Canyon, je crois.

 22   Q.  Vous avez mentionné que vous avez retrouvé des collègues. De qui

 23   s'agissait-il ?

 24   R.  Autant que je me souvienne, c'était un observateur militaire des

 25   Nations Unies russe; et Patrick, du poste Lima 7. Il y avait également un

 26   collègue tchèque de Lima 7, qui s'appelait Olek [phon]. Il était enchaîné à

 27   une porte en métal de ce bâtiment de stockage.

 28   Nous allions en direction du canyon, et Kozusnik a dû sortir du véhicule --


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  1   Q.  Je vous demande de vous arrêter un instant.

  2   Vous avez mentionné une personne répondant au nom de Patrick. Je sais qu'en

  3   général, vous vous adressez avec vos prénoms. Mais est-ce que vous vous

  4   souvenez peut-être de son nom de famille ?

  5   R.  Rechner, c'était un Canadien, un observateur militaire canadien, si je

  6   m'en souviens bien.

  7   Q.  Et l'observateur militaire tchèque dont le prénom était Olek, est-ce

  8   que, à tout hasard, vous vous souviendriez de son prénom ou de son nom de

  9   famille ? Je ne sais pas si Olek est le prénom ou le nom de famille.

 10   R.  Tout le monde l'appelait "Olek", mais je ne me souviens pas

 11   de son nom de famille. Vous savez, la règle c'est qu'on n'avait pas besoin

 12   vraiment de connaître les noms de famille. Tout le monde utilisait les

 13   prénoms, et c'est simplement sur nos documents d'identité que nous avions

 14   nos noms réels. Quelquefois on utilisait des surnoms, des sobriquets.

 15   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je voudrais présenter maintenant un clip

 16   vidéo. C'est un document de la liste 65 ter 40202A.

 17   Est-ce qu'on pourrait visionner la partie au compteur de 30:52 à 32:46,

 18   s'il vous plaît.

 19   Q.  Monsieur Kalbarczyk, je vous demande de consulter votre écran pour

 20   visionner cette vidéo.

 21   [Diffusion de la cassette vidéo]

 22   Mme SUTHERLAND : [aucune interprétation]

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a un Russe de Lima 7.

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] -- à 31:06.

 25   Est-ce qu'on peut continuer, s'il vous plaît.

 26   [Diffusion de la cassette vidéo]

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est Patrick Rechner. Il est Canadien.

 28   Du poste de Lima 7.


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  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation] On a fait un arrêt sur image à 31:40.

  2   On peut continuer maintenant.

  3   [Diffusion de la cassette vidéo]

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact, c'est bien de Patrick qu'il

  5   s'agit.

  6   C'est Olek, ressortissant de la République Tchèque. Il a été enchaîné à

  7   cette porte en métal de cet entrepôt, et vous pouvez voir le badge qu'il

  8   porte sur son uniforme.

  9   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 10   Q.  Lorsque vous parlez de "badge", vous voulez dire ce qu'il portait

 11   sur l'uniforme ?

 12   R.  Oui, tout à fait. Mais je reconnais également très bien son visage. Il

 13   était jeune.

 14   Mme SUTHERLAND : [interprétation] On a fait un arrêt sur image à 32:02.

 15   On peut continuer maintenant.

 16   [Diffusion de la cassette vidéo]

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà, ça, c'est la vitesse à laquelle nous

 18   roulions. Nous nous enfoncions dans le canyon.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci.

 20   Q.  Donc vous avez vu le Russe et M. Rechner qui étaient menottés à des

 21   poteaux, et vous avez aussi vu l'observateur tchèque, Olek, qui, lui, était

 22   enchaîné à la porte en fer du dépôt de munitions. J'aimerais savoir si

 23   Kozusnik et vous êtes restés avec les trois OMNU ?

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] J'aimerais d'abord demander le versement

 25   de cette séquence.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Ce sera admis et recevra une

 27   cote en P.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Elle recevra la cote P2153.


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je me demande si la Chambre de première

  2   instance a la transcription de ce que dit le journaliste, puisque le

  3   journaliste est en train de dire que ce sont des personnes qui sont

  4   soupçonnées d'avoir guidé les aéronefs de l'OTAN dans leurs frappes

  5   aériennes vers des cibles serbes. Donc il serait bon quand même que l'on

  6   ait la transcription de ces mots, de ce commentaire.

  7   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui. De toute façon, nous reverrons cela

  8   avec le témoin de mardi prochain, et c'est lui -- c'est avec celui-là qu'il

  9   y aura la transcription --

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, là, vous avez dit que vous le

 11   montriez au témoin pour identifier les OMNU; c'est ça ?

 12   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Tout à fait, oui. Il était dans la

 13   voiture. Il n'a pas entendu ce qui s'est dit dans la vidéo, de toute façon.

 14   C'est pour cela que je n'ai pas utilisé la transcription avec ce témoin.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Poursuivez.

 16   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 17   Q.  Monsieur Kalbarczyk, je vous ai posé une question. Je vous ai demandé

 18   si vous étiez ensuite resté avec les trois observateurs que nous avons vus.

 19   R.  Nos véhicules sont passés devant ces trois observateurs, et on a

 20   poursuivi en s'enfonçant dans le canyon. Après 200 mètres, Kozusnik a dû

 21   sortir de la voiture, et lui aussi a été menotté à un poteau ou à la porte

 22   d'un dépôt - je ne me souviens plus très bien - et moi, j'ai poursuivi en

 23   voiture en m'enfonçant encore plus loin dans le canyon vers le site de

 24   l'explosion. Moi, j'ai été menotté au dernier bâtiment qui restait à

 25   proximité de l'énorme cratère qui avait été créé par l'explosion. Il y

 26   avait aussi des petites explosions légères, des explosions de munitions, et

 27   on entendait de temps en temps des explosions.

 28   J'ai été menotté à un poteau d'éclairage. Les soldats ont effectué tout


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  1   cela rapidement. Ils étaient sans doute pressés.

  2   Q.  Sur le compte rendu en anglais, on lit que vous êtes menotté à la

  3   "route d'éclairage", alors vous êtes-vous trompé ? C'est sans doute le

  4   poteau d'éclairage que vous vouliez dire, "rod", et non pas "road" ?

  5   R.  Mais non, en fait, c'est la ligne qui emmenait le courant. En fait,

  6   c'était plutôt les fils électriques, les câbles qui couraient au sol.

  7   Q.  Bien. Vous avez mentionné qu'il y a eu des explosions mineures, des

  8   explosions de munitions. C'est arrivé alors que vous étiez menotté à ce

  9   câble électrique ?

 10   R.  Oui, tout à fait.

 11   Q.  Et à quelle distance étaient les explosions ?

 12   R.  De 60 à 80 mètres, donc cela menaçait ma vie. Cela dit, à l'époque, je

 13   n'y accordais pas beaucoup d'importance.

 14   Q.  D'après vous, pourquoi vous avait-on menotté à cette installation ?

 15   R.  C'est facile à deviner; les Serbes s'attendaient à une nouvelle frappe

 16   aérienne et nous étions utilisés comme boucliers humains pour protéger ces

 17   installations qui étaient stratégiques pour les Serbes. A mon avis, c'était

 18   la raison. Et c'est ainsi que j'ai interprété les choses à l'époque.

 19   Q.  Combien de temps êtes-vous resté menotté à ce câble électrique ?

 20   R.  A peu près quatre heures et demie. En plein soleil. Au bout de deux

 21   heures, deux soldats m'ont apporté un peu de pain et puis une boîte de

 22   conserve, mais sans ouvre-boîte. Et ils n'ont pas apporté d'eau, alors que

 23   j'avais besoin d'eau. A 10 mètres de moi, il y avait un petit ruisseau, et

 24   j'entendais l'eau. Ils m'ont donné cette nourriture, mais ils étaient

 25   pressés de partir, de déguerpir, si je puis dire, le plus vite possible.

 26   Au bout d'encore deux heures ou deux heures et demie, puisqu'en tout j'ai

 27   passé quatre heures et demie enchaîné, les deux soldats sont revenus en

 28   voiture.


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  1   Q.  Veuillez faire une pause. Lorsqu'on vous a emmené à ce câble électrique

  2   où on vous a enchaîné, est-ce qu'on vous a filmé à ce moment-là ? Est-ce

  3   que vous avez été filmé ?

  4   R.  Oui. Lorsqu'on était en train de me menotter et de m'enchaîner, un

  5   officier avec une caméra est arrivé. Il filmait la scène, donc il me

  6   filmait en train de me faire enchaîner à ce câble là où j'étais, et sans

  7   dire un mot, bien sûr.

  8   Q.  Vous nous dites que vous y êtes resté quatre heures à quatre heures et

  9   demie. Pouvez-vous nous décrire un peu votre état d'esprit pendant ces

 10   quatre heures et demie ?

 11   R.  J'étais très stressé. J'étais prêt à mourir. Je pensais que les frappes

 12   aériennes allaient se poursuivre. Elles pourraient très bien se poursuivre,

 13   et dans ce cas, j'avais de grandes chances de ne pas survivre.

 14   Q.  Vous dites que deux soldats sont arrivés en voiture  ensuite ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Avez-vous quitté le dépôt où vous étiez ?

 17   R.  Oui. Ils ont enlevé mes chaînes. Ils m'ont fait monter à bord de la

 18   voiture. Et sur la route du retour, ils ont aussi récupéré Rechner;

 19   Patrick. Mais les deux autres sont restés là où ils avaient été enchaînés.

 20   Donc on est partis en direction de Pale, en voiture, et on s'est arrêtés au

 21   point de contrôle, le point de contrôle qui est entre la sortie de Pale

 22   vers Sarajevo. La voiture s'est arrêtée, et là on nous a bandé les yeux. Le

 23   chauffeur de la voiture était un militaire. Il y avait aussi un caméraman

 24   dans la voiture, qui était civil. J'imagine que c'était un journaliste

 25   quelconque. Et il y avait encore un soldat, qui avait un masque, et qui

 26   tenait une kalachnikov.

 27   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Nous allons voir une nouvelle vidéo. La

 28   pièce 40557C.


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  1   [Diffusion de la cassette vidéo]

  2   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pourrions-nous faire une pause. Nous

  3   avons donc fait une pause à l'horodatage 21.8 [comme interprété] à l'écran.

  4   Q.  Avez-vous reconnu quoi que ce soit dans la séquence que nous venons de

  5   voir ?

  6   R.  Oui, je me reconnais, moi. Je ne sais pas qui est en face de moi, de

  7   l'autre côté, mais j'imagine que ça doit être Patrick.

  8   Q.  Que portez-vous ?

  9   R.  Un uniforme d'été, puisque j'étais de service lorsqu'on m'a arrêté.

 10   Q.  [aucune interprétation]

 11   R.  C'était un uniforme bleu. Chemise bleue, pantalon bleu.

 12   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pouvons-nous poursuivre la séquence.

 13   [Diffusion de la cassette vidéo]

 14   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pouvons-nous nous arrêter.

 15   Q.  Monsieur le Témoin, vous a-t-on dit où on vous emmenait avant que l'on

 16   vous bande les yeux ?

 17   R.  A partir du moment où on a enlevé nos chaînes, là où on a enlevé nos

 18   chaînes, personne ne nous a rien dit, personne ne nous a dit où on allait,

 19   pourquoi on y allait. Personne ne disait un mot. Lorsqu'on m'a bandé les

 20   yeux, on ne m'a même pas dit pourquoi.

 21   Q.  Et quel était votre état d'esprit lorsque vous étiez en voiture et que

 22   vous sortiez du canyon ?

 23   R.  Moi, j'imaginais le pire. Je pensais qu'on nous emmenait dans un site

 24   où ils allaient nous exécuter, en filmant le tout d'ailleurs. Patrick aussi

 25   était très inquiet, je m'en rendais bien compte rien qu'en le voyant.

 26   La route que nous avons empruntée était une route de montagne, très

 27   cabossée. Donc le véhicule cahotait. C'était une route de montagne, très

 28   peu carrossable.


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  1   Q.  Vous avez dit que Patrick était très inquiet, que vous le voyez qu'en

  2   le regardant. Ça, c'est, bien sûr, avant que vous n'ayez les yeux bandés ?

  3   R.  Oui, évidemment. Je voyais bien que ni lui ni moi n'avions la moindre

  4   idée d'où on nous emmenait. Ensuite, on nous a mis le bandeau sur les yeux,

  5   et là on était encore plus inquiets.

  6   Q.  Lorsqu'on vous a enlevé les bandeaux, saviez-vous où vous étiez ?

  7   Qu'est-ce que vous avez vu ?

  8   R.  Je n'avais aucune idée d'où j'étais. Bien, je savais que j'étais en

  9   haut d'une montagne. Il restait encore un peu de neige, d'ailleurs. J'ai vu

 10   de grosses antennes sphériques. J'avais extrêmement soif. J'ai demandé un

 11   peu d'eau, et on m'a donné de l'eau d'ailleurs. Alors que je buvais cette

 12   eau, un journaliste civil est venu près de moi et m'a dit, Ne t'inquiète

 13   pas, il ne va rien vous arriver ici, on ne va faire que vous filmez. Là,

 14   c'était vraiment -- c'est là où les choses ont changé, c'était pratiquement

 15   la fin de notre angoisse, parce que moi, je l'ai cru.

 16   Q.  Monsieur Kalbarczyk, pourriez-vous vous arrêter là.

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je voudrais demander le versement de la

 18   dernière séquence vidéo.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P2154.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 22   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 23   Q.  Bon, vous avez dit que le journaliste a dit que vous alliez être

 24   filmés. Est-il arrivé quoi que ce soit entre ce moment où il vous a dit où

 25   vous alliez être filmés et au moment où vous avez été bel et bien filmés ?

 26   R.  Oui. Je savais tout cela, j'avais mon sac avec moi que j'avais pris à

 27   partir de mon POB, mon poste d'observation, et donc j'ai décidé de me

 28   changer d'uniforme, mettre mon uniforme de terrain, parce que c'est celui


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  1   qu'on doit mettre normalement pour ce type d'exercice. Et donc on voit sur

  2   les images que je porte bel et bien cet uniforme de service. J'avais

  3   l'uniforme bleu précédemment, mais après dans les images, on a vu que

  4   j'avais mon uniforme de service.

  5   Q.  Une fois que vous avez changé d'uniforme, que vous avez donc mis cet

  6   uniforme de terrain, où êtes-vous allé ?

  7   R.  Une fois que j'ai changé d'uniforme, on m'a emmené aux antennes qui

  8   étaient sur un socle de béton. Ils m'ont enchaîné à quelque chose. Derrière

  9   moi, il y avait un soldat en armes avec un fusil. Je n'ai pas accepté de

 10   donner d'interview. Le journaliste m'a demandé de lui raconter rapidement

 11   ce qui était arrivé, ce que j'ai fait. Je me suis dit c'est maintenant que

 12   je peux dire au QG quelle est la situation, de leur faire connaître notre

 13   situation. Puisqu'à partir du moment où nous avons été détenus, nous

 14   n'avons plus eu de contact avec le secteur.

 15   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je vais vous demander de regarder encore

 16   une séquence vidéo. La pièce 40202B. Pourrions-nous avoir cette vidéo à

 17   partir de 37:20 à 38:15 [comme interprété].

 18   [Diffusion de la cassette vidéo]

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Mesdames, Messieurs les Juges, en ce qui

 20   concerne la traduction, j'aimerais que les interprètes traduisent en

 21   anglais ce que l'on entend.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. On peut leur demander

 23   éventuellement.

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui.

 25   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 26   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 27   Q.  Monsieur le Témoin, avez-vous reconnu ce que l'on a vu à l'écran ?

 28   R.  Oui. On me voit. Je suis menotté, menotté à un tuyau quelconque, un


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  1   tuyau de métal quelconque. Donc j'étais là, assis, enchaîné, je regardais

  2   ce qui se passait en contrebas, et j'ai vu Patrick qui était debout près

  3   d'une voiture. Et j'ai vu deux autres UNMO, qui étaient à 50 mètres de moi

  4   environ, à ma gauche, et eux, ils étaient assis dans l'herbe. Ils étaient

  5   menottés et ils étaient dos contre dos. L'un avait la peau blanche, et

  6   l'autre, la peau foncée.

  7   Q.  Vous souvenez-vous du nom de ces deux observateurs militaires des

  8   Nations Unies ?

  9   R.  Je ne me souviens pas de leurs noms. Je ne me souviens pas du nom de

 10   l'Africain, mais celui qui avait la peau blanche, je crois que c'était un

 11   Tchèque. Mais je ne me souviens pas son nom. Il me semble bien que c'était

 12   un Tchèque, un Tchécoslovaque.

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pouvons-nous repasser la vidéo, et les

 14   interprètes vont essayer de traduire les propos.

 15   [Diffusion de la cassette vidéo]

 16   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 17   "Les membres de la FORPRONU ont aussi été positionnés sur d'autres

 18   installations stratégiques importantes qui pouvaient être visées par les

 19   frappes aériennes de l'OTAN.

 20   Le reporter : Avez-vous peur ?

 21   Le soldat : Oui, bien sûr.

 22   Le reporter : Pourquoi ?

 23   Le soldat : Je ne sais pas ce qu'ils vont me faire.

 24   Le reporter : Avez-vous peur des frappes de l'OTAN ?

 25   Le soldat : Oui, j'ai peur. Je ne sais pas quand ils pourraient venir.

 26   Le reporter : C'est la communauté internationale et ses décisions qui ont

 27   fait que cette situation est telle qu'elle est. Leur survie va dépendre des

 28   actions de l'OTAN."


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  1   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

  2   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pourrais-je demander le versement au

  3   dossier de cette pièce ?

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Elle recevra la cote P2155.

  6   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur le Témoin, combien de temps êtes-vous resté menotté à ce

  8   radôme ?

  9   R.  Le temps que l'on filme la scène, environ 15 minutes.

 10   Q.  Et, d'après vous, pourquoi vous avait-on menotté à ce radôme ?

 11   R.  C'est facile à deviner. Les Serbes voulaient montrer au monde entier,

 12   au commandement de l'OTAN, que toute frappe aérienne supplémentaire

 13   pourrait très mal se terminer pour nous. Donc c'était pour leur faire

 14   comprendre qu'il y avait des boucliers humains à l'emplacement de toutes

 15   les cibles stratégiques, et donc qu'ils voulaient protéger leurs cibles.

 16   Q.  Après les 15 minutes que vous avez passées là, où vous a-t-on emmenés ?

 17   R.  Ecoutez, avec la même équipe, on est revenus en voiture. On a descendu

 18   la route de montagne. On s'est arrêtés près d'un bâtiment qui était assez

 19   moderne mais qui s'intégrait bien au paysage. On aurait dit un reste de

 20   bâtiment olympique. Là, ils nous ont invités à déjeuner, enfin on nous a

 21   donné à manger, quoi.

 22   Q.  Et où avez-vous passé la nuit ?

 23   R.  Dans ce bâtiment dont je vous ai parlé -- non. On est restés à peu près

 24   90 minutes là, et ensuite on est retournés à Pale, à la base, où il y avait

 25   une caserne, un bâtiment de deux étages, et c'est là que nous avons passé

 26   la nuit. A 20 heures, tout était terminé. J'ai retrouvé tous mes collègues,

 27   et j'ai aussi rencontré des collègues que je n'avais jamais vus

 28   précédemment. On était 11 dans la caserne à ce moment-là.


Page 10849

  1   Q.  Un officier vous a-t-il parlé ce soir-là pour vous expliquer ce qui

  2   allait vous arriver ?

  3   R.  Vers 21 heures, une heure après notre arrivée là-bas, après s'être

  4   entretenu les uns les autres et avoir parlé entre nous, un officier, un

  5   commandant, est arrivé. Il avait l'air assez grave, sérieux. Il avait une

  6   bonne cinquantaine, peut-être 55 ans. Enfin, il nous a fait bonne

  7   impression. Il était très calme et très professionnel. Il nous a dit qu'il

  8   n'y avait pas de menace la nuit, mais il ne pouvait pas nous dire autre

  9   chose. Il ne pouvait pas nous dire ce qui allait arriver le lendemain. Mais

 10   il nous a dit qu'au moins, on pouvait dormir sur nos deux oreilles cette

 11   nuit-là, ce qui nous a plu, parce qu'on avait vraiment envie de savoir ce

 12   qui allait se passer même si ce qui allait se passer allait être pénible.

 13   On voulait savoir ce qui se passait. Au moins, on a pu lui poser des

 14   questions, mais il a répondu toujours -- il ne nous a dit qu'une chose. On

 15   savait ce qui allait se passer la nuit, mais on ne savait pas ce qui allait

 16   se passer plus tard.

 17   Q.  A-t-il dit quoi que ce soit à propos de ce qui vous arriverait si les

 18   frappes aériennes perduraient ?

 19   R.  Oui, il nous l'a dit. Il nous a dit que notre statut n'allait pas

 20   changer tant que les parties n'avaient pas trouvé d'accord, c'est-à-dire

 21   qu'ils attendaient une déclaration très claire de la part du commandement

 22   de l'OTAN comme quoi les frappes aériennes allaient cesser.

 23   Q.  Et sinon, qu'allait-il vous arriver ?

 24   R.  Leurs tactiques étaient transparentes, en tout cas on les trouvait

 25   transparentes. Les Serbes voulaient que nous soyons le plus près possible

 26   des sites, ce qui leur était essentiel. Ils voulaient toujours pouvoir nous

 27   enchaîner à ces cibles stratégiques le plus rapidement possible, et c'est

 28   exactement ce qui est arrivé.


Page 10850

  1   Le lendemain, on s'est réveillés. On a pu se laver. On a pu prendre notre

  2   petit-déjeuner, et ensuite on nous a acheminés vers un nouvel endroit, un

  3   endroit où nous n'étions jamais allés précédemment. Pour y aller, nous

  4   avons dû emprunter une route bituminée très étroite. A un moment ou à un

  5   autre, il y a eu une barrière, avec une espèce de cabane sur le côté où se

  6   trouvait une pièce où nous pouvions tenir à 11. Nous avons été détenus dans

  7   cette pièce, cette casemate.

  8   Nous, on avait compris que dès qu'ils recevraient un signal du commandement

  9   général de la VRS, ils nous emmèneraient depuis là jusqu'à un emplacement

 10   inconnu. Or, ce n'est jamais arrivé.

 11   Q.  Mais selon vous, vous a-t-on jamais dit quoi que ce soit d'explicite à

 12   ce sujet ?

 13   R.  Non. Dans ce nouvel endroit, personne ne nous a dit quelle était la

 14   finalité de notre présence sur place. Nous en étions réduits à deviner ce

 15   que cela pouvait être en nous fondant sur ce que nous avions entendu de la

 16   bouche des officiers la nuit précédente.

 17   Q.  Et pendant combien de temps avez-vous été maintenus captifs dans ce

 18   bâtiment ?

 19   R.  Eh bien, ici, ma mémoire me fait défaut, mais il me semble que c'est

 20   probablement une nuit que nous avons passée dans cette construction. En

 21   effet, je me souviens d'une chose -- enfin, je ne me rappelle pas avoir

 22   passé une seconde nuit dans cette même casemate où nous avons passé la

 23   première nuit. Je ne me rappelle pas que cela ait été le cas après que nous

 24   ayons pris le chemin du retour. Ensuite, nous avons été transférés à

 25   l'autre bâtiment, où nous avons passé tout le reste du temps jusqu'au

 26   moment de notre libération.

 27   Q.  Et cet autre bâtiment où vous avez été transférés jusqu'à votre

 28   libération, est-ce qu'il faisait partie de la caserne à Pale où vous aviez


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  1   été emmenés la première fois ?

  2   R.  Oui, oui, c'était un bâtiment qui appartenait à la même base que celle

  3   à laquelle appartenait la caserne; ceci dit, c'était un bâtiment plus

  4   proche de la grille d'entrée et plus petit. Cependant, le bâtiment dont je

  5   parle à cet instant-ci n'était pas sur la zone de la base elle-même, il

  6   était à l'extérieur. Il est très probable que nous y ayons passé toute la

  7   journée et toute la nuit. Nous y avions passé la nuit. Nous avions nos

  8   effets personnels avec nous; nous étions donc en mesure d'y passer la nuit.

  9   Nous n'avions pas de lits. Je crois que nous nous sommes simplement

 10   allongés par terre.

 11   Q.  Alors, vous avez dit précédemment avoir probablement passé une nuit

 12   dans ce bâtiment, parce que lorsque vous êtes revenus -- c'est ce que vous

 13   disiez, puis vous avez fait une pause. Où avez-vous été emmenés à la date

 14   du 22 [comme interprété] mai 1995 ?

 15   R.  Le 27 mai, comme je l'ai dit précédemment, eh bien, nous avons passé

 16   toute la journée dans ce bâtiment. A mon avis, il s'est passé quelque chose

 17   d'important à ce moment-là, parce que c'était la seconde fois que les mêmes

 18   Serbes venaient sur place à bord d'un véhicule pour m'emmener moi ainsi que

 19   Harley, le Brésilien. On nous a emmenés jusqu'au même endroit où j'avais

 20   déjà été filmé, juste à côté du radôme.

 21   Q.  Très brièvement, pourriez-vous décrire pour les Juges de la Chambre ce

 22   qui s'est passé lorsqu'on vous a emmené avec Harley jusqu'au poste radar ?

 23   R.  Je ne savais pas où nous allions lorsqu'on nous a emmenés, mais puisque

 24   je connaissais la route en question, la route que l'on prend lorsqu'on

 25   quitte Pale dans la direction de Sarajevo, je suis en mesure de dire que

 26   c'était cette route-là où nous nous sommes arrêtés à un poste de contrôle

 27   serbe. Ensuite, on nous a bandé les yeux. Je suppose que nous avons

 28   continué dans la même direction. J'ai essayé de garder mon sang-froid en


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  1   pensant à mon collègue, en essayant de lui venir en aide à lui afin que lui

  2   reste calme également. Je lui disais de ne pas être inquiet, que nous

  3   étions probablement emmenés au même endroit pour y être à nouveau filmés.

  4   En effet, cela était bien le cas, ça s'est avéré exact. Nous sommes arrivés

  5   au même endroit, j'ai été enchaîné à l'antenne radio, Harley a été enchaîné

  6   à un autre élément sur cette même route, et nous avons tous les deux été

  7   filmés.

  8   J'ai profité de cette occasion pour exprimer mes sentiments lorsque le

  9   journaliste m'a posé une question. Sachant que ma famille verrait ces

 10   images, j'ai dit que j'allais bien, que j'avais de quoi manger et où

 11   m'abriter pendant la nuit. C'était intentionnellement que je faisais cela,

 12   parce que je savais que ce serait une façon de faire passer des

 13   informations pour rassurer ma famille. Je connaissais bien la réaction

 14   prévisible de ma femme, et je savais qu'elle ferait confiance à ce qu'elle

 15   entendrait de ma bouche.

 16   Ensuite -- cela a pris dix à 15 minutes, la prise de ces images, puis

 17   on nous a fait revenir par la même route pour rejoindre nos collègues.

 18   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je voudrais maintenant que l'on affiche

 19   le 40202D, qui est un clip vidéo. De 14:45 [comme interprété] pour le

 20   compteur à 43:20.

 21   [Diffusion de la cassette vidéo]

 22   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Et je voudrais que l'on fasse un arrêt

 23   sur image. Je voudrais demander aux interprètes de traduire ce qui est dit.

 24   [Diffusion de la cassette vidéo]

 25   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 26   "A ces endroits où la VRS les a laissés, ils sont placés sous garde

 27   et ils ne rencontrent aucun problème. Parallèlement, les avions de l'OTAN

 28   continuent à patrouiller et la menace plane toujours de bombardement. A


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  1   présent, il revient à la communauté internationale de faire un geste, parce

  2   que ce qu'elle a montré jusqu'à présent, c'est qu'elle était capable

  3   uniquement de viser la population civile serbe. Maintenant, elle doit

  4   savoir qu'elle touchera également les membres de ses propres forces envoyés

  5   sur place.

  6   Le reporter : Capitaine Harley, est-ce que vous avez toujours peur

  7   aujourd'hui ?"

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  9   Q.  Monsieur Kalbarczyk, est-ce que vous reconnaissez la personne qui

 10   apparaît dans ces images ?

 11   R.  Oui, c'est l'observateur brésilien que nous appelions "Harley". C'est

 12   la façon dont on s'adressait à lui couramment.

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Alors, nous nous étions arrêtés à 41:18.

 14   Je voudrais que nous poursuivions.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourquoi ne reprendrions-nous pas à

 16   41:15 pour que les interprètes puissent suivre.

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 18   [Diffusion de la cassette vidéo]

 19   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 20   "Les avions de l'OTAN font toujours planer la menace de bombardement. La

 21   communauté internationale, jusqu'à présent, a prouvé qu'elle était capable

 22   de bombarder la population civile serbe. Nous allons maintenant voir si

 23   elle est capable de continuer en touchant les membres de ses propres forces

 24   sur le terrain.

 25   Capitaine Harley, est-ce que vous avez toujours peur aujourd'hui ?"

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous pourrions faire une

 27   pause lorsque, manifestement, les interprètes ont dû arrêter d'interpréter

 28   avant de poursuivre.


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  1   J'indiquerai aux interprètes le moment où il conviendra de reprendre.

  2   Veuillez poursuivre.

  3   [Diffusion de la cassette vidéo]

  4   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  5   "Jusqu'à présent, la communauté internationale a prouvé qu'elle était en

  6   mesure et qu'elle n'hésitait pas à bombarder la population civile serbe.

  7   Nous allons maintenant voir si elle est capable également de bombarder les

  8   membres de ses propres forces envoyés sur place.

  9   Capitaine Harley, est-ce que vous avez toujours peur aujourd'hui ?"

 10   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci. Est-ce que nous pourrions

 11   maintenant poursuivre avec l'interprétation.

 12   [Diffusion de la cassette vidéo]

 13   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 14   "Capitaine Harley : Bien sûr.

 15   Le reporter : De quoi avez-vous peur ?

 16   Capitaine Harley : J'ai peur pour nous tous. Nous sommes dans une posture

 17   très mauvaise. La situation est très mauvaise, et nous en sommes désolés.

 18   Nous en sommes profondément désolés.

 19   Le reporter : Avez-vous un message à adresser à votre propre peuple, à ceux

 20   qui guident ces avions, qui les dirigent, pour les pilotes de l'OTAN, par

 21   exemple ?

 22   Capitaine Harley : J'ai essayé de croire en le bon sens des hommes

 23   politiques et des responsables qui prennent les décisions relatives à la

 24   suite des événements pour l'avenir. Il faudrait qu'ils s'arrêtent. C'est

 25   une guerre absurde.

 26   Le reporter : Est-ce que vous avez rencontré la moindre difficulté avec les

 27   soldats serbes ?

 28   Capitaine Harley : Non, aussi bien les soldats que leurs commandants se


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  1   comportent de façon très correcte et professionnelle."

  2   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pouvons-nous maintenant faire une pause.

  3   Nous sommes arrêtés à la cote 42:46. Nous voyons donc que nous sommes

  4   arrivés à la fin de l'entretien avec Harley.

  5   Q.  Qu'est-ce que vous voyez à présent en image fixe à   l'écran ?

  6   R.  Je peux me voir moi-même dans mon uniforme de cérémonie. Comme je l'ai

  7   dit précédemment, j'ai fait une brève déclaration à ce journaliste. Je

  8   donne mon avis concernant le comportement de l'armée serbe à notre égard,

  9   et je pense que l'on peut qualifier cette attitude et ce comportement de

 10   positifs. Je relaie des informations à ma famille également afin que cette

 11   dernière ne s'inquiète pas.

 12   Q.  Merci. Pourrions-nous poursuivre, s'il vous plaît.

 13   [Diffusion de la cassette vidéo]

 14   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 15     "Je n'ai pas rencontré de difficulté avec l'armée serbe. Je souhaite dire

 16   à ma famille qu'elle ne s'inquiète pas, tout va bien.

 17   Le reporter : Avez-vous à boire et à manger ?

 18   Kalbarczyk : Oui, j'ai à manger, à boire, et de l'eau pour me laver aussi.

 19   Le reporter : Ce sont les paroles mêmes des membres des forces des Nations

 20   Unies qui se trouvent sur place dans les installations de l'armée serbe.

 21   Leur avenir dépend des actions futures de l'OTAN et de la communauté

 22   internationale."

 23   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je voudrais rappeler qu'il s'agit ici de

 25   la pièce à conviction numéro P2143, que nous avons déjà visionnée mercredi

 26   dernier. Donc ce clip, qui porte la cote 40202D sur la liste 65 ter, est,

 27   en fait, la pièce P2143.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Lorsque nous avons versé la pièce


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  1   2143, nous n'avons pas versé également la piste audio. Par conséquent, nous

  2   allons recharger cette pièce et la remplacer par la présente version.

  3   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Président.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  5   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  6   Q.  Monsieur le Témoin, je voudrais que nous -- nous en avons terminé, en

  7   fait, avec cette vidéo.

  8   Où vous-même et Harley aviez été emmenés ?

  9   R.  Vous voulez dire où avons-nous été emmenés après avoir été filmés ?

 10   Q.  Oui.

 11   R.  On nous a conduits au bâtiment où nous avions été le premier jour. On

 12   nous y a ramenés. Là-bas, on nous a proposé un déjeuner. En fait, un

 13   mariage était en cours, un mariage serbe. Il y avait une famille serbe qui

 14   était présente là, et il s'est avéré que l'un des soldats serbes était la

 15   personne qui avait organisé cette réception, ce mariage. C'était un homme

 16   âgé, et il m'a reconnu parce qu'il m'avait rencontré lors de l'une de mes

 17   patrouilles où j'avais rendu visite à son poste.

 18   Q.  Est-ce que vous avez fini par vous rendre à nouveau à la caserne ? Vous

 19   avez dit précédemment que vous n'étiez pas tout à fait sûr d'être revenus à

 20   cet autre bâtiment qui était à l'extérieur du complexe de la caserne. A un

 21   autre moment, vous avez dit que vous étiez bien retournés à la caserne.

 22   R.  En fait, personne ne nous a dit où l'on nous faisait revenir, mais j'ai

 23   compris, et j'avais supposé d'ailleurs, que l'on nous ferait rejoindre nos

 24   collègues. Et nous sommes revenus là où nos collègues se trouvaient, là où

 25   ils étaient retenus. Il ne s'agissait pas de la base militaire, mais de la

 26   caserne où l'on nous avait déjà emmenés dans la matinée du 28.

 27   Q.  Mais dans votre déposition, vous indiquez avoir été ramenés dans un

 28   bâtiment plus petit qui se trouvait près de la grille d'entrée du complexe


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  1   de la caserne; est-ce exact ?

  2   R.  Pas tout à fait, parce que cela, ça s'est passé le 29. Je me rappelle

  3   que nous étions trop nombreux par rapport au nombre de lits disponibles

  4   dans ce nouveau bâtiment. Il n'y avait que huit lits dans ce bâtiment. On

  5   ne pouvait, par conséquent, y loger que huit personnes, et c'est la raison

  6   pour laquelle il a été proposé que les observateurs russes soient

  7   transférés ailleurs. On m'a également demandé si je souhaitais être

  8   transféré ailleurs. Je crois que c'est Patrick qui m'a dit, à ce moment-là,

  9   qu'ils étaient censés être transférés au Bataillon ukrainien. Alors, était-

 10   ce exact ou non, je ne peux pas vous le confirmer, je n'ai pas donné mon

 11   accord à ce transfert. J'ai dit que je souhaitais rester là où se trouvait

 12   mon équipe, et c'est bien ce qui s'est passé. Les Russes sont partis, et

 13   l'un d'entre nous est parti également, mais je ne me rappelle plus qui

 14   c'était. Donc nous étions huit à rester sur place.

 15   Et le 29, nous avons été transférés vers un nouveau bâtiment dans le

 16   complexe de la base, là, en fait, où nous avions passé notre première nuit

 17   après le 26.

 18   Q.  Et c'était là le bâtiment de plus petite taille qui se trouvait

 19   près de l'entrée de la caserne, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui, c'était un petit bâtiment situé peut-être à une quinzaine de

 21   mètres de l'entrée principale. D'un point de vue militaire, je dirais qu'il

 22   aurait pu s'agir d'une casemate pour les gardes chargés de surveiller

 23   l'entrée. Il y avait deux pièces, deux dortoirs en fait, une salle de bain,

 24   et puis une pièce commune avec un poste de télévision.

 25   Q.  Est-ce que vous pouviez voir l'extérieur depuis ce  bâtiment ?

 26   R.  Oui. Nous pouvions voir une partie du complexe de la base par la

 27   fenêtre. Nous pouvions également voir les véhicules qui entraient et

 28   sortaient par la grille d'entrée, les personnes également qui circulaient.


Page 10858

  1   Tout ça nous pouvions le voir depuis nos fenêtres. Pendant toute une

  2   semaine, on nous a interdit de quitter ce bâtiment.

  3   Quant à ce que j'ai vu, eh bien, j'ai pu observer de nombreux mouvements de

  4   véhicules militaires, notamment dans la soirée. Le soir, je pouvais voir

  5   des camions entiers, à bord desquels se trouvaient des soldats, quitter la

  6   base, et je suppose qu'ils se rendaient en mission, pour ne revenir qu'au

  7   matin. J'ai également noté la venue d'un certain nombre de véhicules à bord

  8   desquels se trouvaient des commandants, des officiers de certains postes de

  9   commandement. La rumeur a également circulé que le Dr Karadzic, le général

 10   Mladic et d'autres commandants étaient venus en personne sur place; ceci

 11   dit, je n'ai pas eu l'occasion de voir le Dr Karadzic à  la base.

 12   Q.  Avez-vous vu dans cette base militaire le général Mladic ?

 13   R.  Oui, une seule fois. Je crois qu'après deux ou trois jours après que

 14   nous avons été logés dans ce nouveau bâtiment, j'ai vu quelques personnes

 15   en civil, qui, en fait, sont venus nous rendre visite. Elles sont venues se

 16   rendre compte par elles-mêmes des conditions dans lesquelles nous étions

 17   logés.

 18   Plus tard, lorsque nous avons reçu l'autorisation de regarder la

 19   télévision, j'ai pu me rendre compte que l'un de ces civils avait été le

 20   général Mladic. Parce que quand nous avons commencé à regarder la

 21   télévision, je l'ai vu en uniforme, et j'ai reconnu que c'était là la même

 22   personne que j'avais vue en civil auparavant.

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pourrions-nous avoir la pièce P00653 à

 24   l'écran, s'il vous plaît.

 25   Q.  Monsieur Kalbarczyk, est-ce que vous voyez la photographie qui

 26   s'affiche à l'écran ? Est-ce que vous reconnaissez quelqu'un sur cette

 27   photographie ?

 28   R.  Oui. Au premier plan, je reconnais le général Mladic.


Page 10859

  1   Q.  Est-ce que c'est bien là la personne que vous avez vue en tenue civile

  2   dans la caserne où vous vous trouviez ?

  3   R.  La première fois que je l'ai vu dans la caserne où nous étions, il

  4   portait une tenue civile, et c'est à la télévision que je l'ai vu en

  5   uniforme. Alors, je ne suis pas sûr que, lorsque je l'ai vu en uniforme à

  6   la télévision, il portait exactement le même uniforme que celui que nous

  7   voyons là, mais je me rappelle très bien les traits caractéristiques de son

  8   visage.

  9   Q.  Combien de temps Mladic est-il resté à la caserne la fois où vous l'y

 10   aviez vu ?

 11   R.  Sa visite a duré une trentaine de minutes. Pendant ce temps, mon

 12   collègue, Evans, ainsi qu'Olek de l'équipe Lima 7, et un autre observateur,

 13   sans compter un observateur tchèque également, ont été invités à

 14   s'exprimer. Mais moi, je n'ai pas participé à cette conversation. Après que

 15   nous avons quitté la caserne, j'ai appris qu'on leur avait demandé s'ils

 16   étaient en mesure de guider les aéronefs de l'OTAN, s'ils avaient les

 17   moyens de le faire.

 18   Q.  Et qui posait ces questions, qui voulait savoir cela ?

 19   R.  Je l'ignore. Comme je vous l'ai dit, je n'ai pas participé à cette

 20   conversation. On m'a également rapporté qu'une question leur avait été

 21   posée me concernant. On leur avait demandé s'ils avaient le moindre élément

 22   concernant ma propre éventuelle capacité à guider des aéronefs.

 23   Q.  Quand vous dites "eux", ou "ils", vous voulez dire Evans et Olek ?

 24   R.  Oui, c'était Evans et Olek. Les personnes qui étaient en tenue civile

 25   sont reparties à un moment donné et nous avons discuté entre nous après

 26   leur départ. Nous avons également été filmés par des caméramans. Nous

 27   n'avions pas pu nous raser pendant plusieurs jours, nous avions des barbes.

 28   Et ils ne nous ont pas demandé d'interview, et à ce moment-là, j'ai


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  1   remarqué également que M. Karadzic n'a pas été filmé.

  2   Q.  M. Karadzic ou le général Mladic ?

  3   R.  Non, c'était M. Mladic, excusez-moi.

  4   Q.  Est-ce que parmi les observateurs des Nations Unies, il y en avait qui

  5   nécessitaient des soins médicaux, une assistance médicale ? Et si c'est le

  6   cas, avez-vous pu voir un médecin ?

  7   R.  Pepe, l'Espagnol, est celui qui était dans l'état le plus préoccupant

  8   de nous tous. Mais heureusement, deux semaines après cette date du 26 --

  9   excusez-moi, je dois rectifier. C'était plus tôt. Je crois que c'était le 3

 10   ou le 4 juin que des représentants de la Croix-Rouge, deux femmes, si je me

 11   rappelle bien, sont venues nous voir, et à cette occasion, nous avons pu

 12   demander un certain nombre de choses. Des effets de première nécessité; par

 13   exemple, des brosses à dents, de la pâte dentifrice, des sous-vêtements

 14   dont nous manquions. Nous avons également exprimé le désir d'être examinés

 15   par un médecin. C'est également à cette occasion que j'ai pu écrire et

 16   adresser une lettre à ma famille, à mon épouse. Et j'ai demandé à ces

 17   femmes qui sont venues nous rendre visite d'envoyer cette lettre en

 18   Pologne. Qui y est bien arrivée d'ailleurs.

 19   Deux jours après le départ des représentantes de la Croix-Rouge, un médecin

 20   est venu nous voir dans notre bâtiment. Nous avons été examinés. Il s'est

 21   entretenu avec nous, et il a déclaré que mon collègue espagnol était en

 22   mauvaise santé, qu'il avait des problèmes cardiaques. Le médecin a décidé

 23   que, par conséquent, ce collègue devait être relâché. Et c'est bien ce qui

 24   s'est passé. Pepe a été le premier observateur des Nations Unies à être

 25   relâché.

 26   Q.  Quand vous a-t-on déclaré que vous alliez être libérés ?

 27   R.  Pendant toute cette période, on ne cessait de nous dire que cela

 28   prendrait du temps. Mais entre-temps, certains collègues avaient déjà été


Page 10861

  1   libérés. Je ne me rappelle pas l'enchaînement exact des événements, mais

  2   c'est le 13 juin, dans la matinée, qu'on m'a informé par le biais du

  3   capitaine Vojvodic, qui était notre officier de liaison. J'ai emballé mes

  4   affaires, et je les ai transférées à Pale. C'était un poste de police à

  5   Pale. Et pour la deuxième fois, j'ai rencontré le même officier qui

  6   assurait notre détention le premier jour. A cet endroit-là, nous avons

  7   attendu que les bus arrivent, et les bus nous ont ensuite amenés à Novi

  8   Sad.

  9   Q.  Je vous arrête là, Monsieur le Témoin. Vous avez dit que c'était au

 10   niveau du poste de police, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Est-ce qu'on vous a emmené ailleurs avant de vous faire monter à bord

 13   de ces bus ?

 14   R.  A côté du poste de police, il y avait un conteneur. Et une fois qu'ils

 15   ont vérifié mes coordonnées, ils m'ont ensuite enfermé dans ce conteneur.

 16   En fait, il y avait beaucoup de personnes qui avaient transféré en plus de

 17   moi.

 18   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je peux m'arrêter là, Monsieur le

 19   Président.

 20   J'ai un certain nombre de documents ainsi que quelques vidéos à faire

 21   visionner après la pause.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

 23   Nous allons faire la pause et nous reprendrons dans une demi-heure, c'est-

 24   à-dire à 11 heures 03.

 25   --- L'audience est suspendue à 10 heures 33.

 26   --- L'audience est reprise à 11 heures 03.

 27   M. ROBINSON : [interprétation] Je vous présente Chelsea Sayles, qui est

 28   avocate aux Etats-Unis et qui est présente dans le prétoire aujourd'hui.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Maître Robinson.

  2   Oui, Madame Sutherland.

  3   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   Q.  Monsieur Kalbarczyk, avant la pause, vous nous avez dit que vous avez

  5   été enfermé dans un conteneur après avoir été acheminé en direction du

  6   poste de police. Que s'est-il passé lorsque vous êtes sorti de ce conteneur

  7   ? Ou, tout d'abord, comment est-ce que vous étiez détenu dans ce conteneur

  8   ?

  9   R.  Oui. Il s'agissait, en fait, d'un seul conteneur, et nous avons passé

 10   trois ou quatre heures dans cet endroit. C'était un espace assez restreint.

 11   Il y avait énormément de personnes qui s'y trouvaient.

 12   Après quelques heures, on nous a autorisés à sortir de ce conteneur.

 13   Ils nous ont demandé de nous mettre en rang deux par deux, et c'est à ce

 14   moment-là que j'ai vu que nous étions entourés de soldats qui portaient des

 15   bérets rouges. Ils devaient nous acheminer vers Novi Sad. Ils ont donné

 16   lecture d'une liste de noms et nous avons embarqué à bord de bus.

 17   Lorsqu'ils ont terminé de donner la lecture de ces noms, le convoi a été

 18   formé et nous sommes donc partis.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci. Est-ce que je pourrais demander

 20   l'affichage du document de la liste 65 ter 11722, s'il vous plaît. Il

 21   s'agit d'un document qui porte la date du 13 juin 1995. C'est un ordre de

 22   M. Karadzic concernant les soldats des Nations Unies qui avaient été

 23   capturés.

 24   Q.  Il est mentionné :

 25   "A 11 heures le 13 juin 1995, libérez tous les soldats des Nations

 26   Unies capturés et informez dès qu'ils sont libérés et qu'ils peuvent

 27   reprendre les fonctions qui étaient les leurs au moment de l'incident qui

 28   les a amenés à être capturés.


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  1   "Remettez à M. Jovica Stanisic tous les soldats de la FORPRONU

  2   capturés et les observateurs militaires, y compris les Français, les

  3   Britanniques, deux Polonais et les autres soldats, mis à part 15

  4   observateurs militaires qui resteront en détention à Pale jusqu'au dimanche

  5   13 juin 1995. Rendez-leur leurs effets personnels ainsi que leurs armes, et

  6   ceci est donc à l'attention des soldats de la FORPRONU et des observateurs

  7   militaires."

  8   Tout d'abord, est-ce que ceci correspond à ce que vous avez vécu ?

  9   Est-ce que deux officiers polonais ont été libérés ce jour-là ?

 10   R.  Oui. Dans le conteneur, j'ai rencontré mon collègue, le commandant

 11   Wojtasiak. Il y avait une autre personne de notre équipe qui nous a

 12   rejoint, Zlatko. Pour ce qui est des autres observateurs militaires qui

 13   étaient présents avec moi à la base, je ne sais pas ce qu'il est advenu

 14   d'eux.

 15   Q.  Ce dénommé Zlatko, son nom de famille c'était Kozusnik, n'est-ce pas,

 16   de la République tchèque ?

 17   R.  C'est exact, Zlatko Kozusnik de la République tchèque.

 18   Mme SUTHERLAND : [hors micro]

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P2156.

 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Est-ce que je pourrais vous faire

 22   visionner cette vidéo, liste 65 ter 40202C, de 2:11:13 à 2:13:08.

 23   [Diffusion de la cassette vidéo]

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Peut-on faire une pause à 2:11:31 au

 25   compteur.

 26   Q.  Vous avez mentionné il y a quelques instants qu'il y avait des

 27   personnes portant des bérets rouges qui devaient vous escorter en direction

 28   de la Serbie, en direction de Novi Sad. Est-ce que vous voyez à l'écran un


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  1   soldat portant un béret rouge qui est debout devant le bus ?

  2   R.  Oui, je le vois.

  3   Q.  Est-ce que c'est ce que vous entendiez par là lorsque vous avez parlé

  4   "de soldats portant des bérets rouges" ?

  5   R.  Je n'en vois qu'un seul sur l'arrêt sur image. Il y en avait beaucoup

  6   plus, une vingtaine environ. Nous étions environ 20 à bord du bus; il y

  7   avait beaucoup plus de soldats que cela.

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation] On peut donc continuer à visionner.

  9   [Diffusion de la cassette vidéo]

 10   Mme SUTHERLAND : [interprétation] On va s'arrêter au compteur à 2:11:42

 11   Q.  Est-ce que vous reconnaissez, Monsieur le Témoin, ce qui est

 12   représenté sur cet arrêt sur image ?

 13   R.  Oui, c'est moi à bord de ce bus. Cela signifie qu'on a dû appeler mon

 14   nom puisque je suis donc déjà à bord de ce bus.

 15   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Nous allons poursuivre le visionnage.

 16   [Diffusion de la cassette vidéo]

 17    L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 18   "Nous avons passé 18 jours ici. Nous avons été très bien traités, et

 19   pas de plaintes."

 20   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation] On va faire une pause ici.

 22   Q.  Est-ce que vous reconnaissez la personne qui apparaissait juste avant,

 23   à l'écran ? Voilà, nous la voyons maintenant à l'écran. Est-ce que vous

 24   reconnaissez cette personne qui porte des lunettes ?

 25   R.  Oui, parce qu'un peu plus tard j'ai officié au sein de la même équipe à

 26   Dubrovnik, c'est un observateur militaire des Nations Unies suédois, Gunnar

 27   Westlund.

 28   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Est-ce que je peux verser cette vidéo au


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  1   dossier.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  3   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P2157.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Encore une fois, j'espère que les Juges de la

  5   Chambre ont reçu une transcription de cette vidéo.

  6   Mme SUTHERLAND : [interprétation] La traduction a été lue par les

  7   interprètes. C'était les propos de M. Westlund.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je me souviens avoir entendu une bande

  9   audio, mais ce n'est pas sur le compte rendu d'audience. Mais veuillez

 10   continuer.

 11   Mme SUTHERLAND : [interprétation] La transcription de cette vidéo est

 12   également sur le prétoire électronique.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 14   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je voudrais que l'on présente maintenant

 15   une brève vidéo qui porte le numéro de la liste 65 ter 40387B.

 16   [Diffusion de la cassette vidéo]

 17   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 18   "Avec nous, nous avons 26 membres du Bataillon franco-britannique et

 19   deux membres du Bataillon polonais, un Suédois, un Russe, un Tchèque et un

 20   Norvégien.

 21   Nous allons les remettre, comme la dernière fois, au QG de Belgrade.

 22   Il y en a 15 hommes qui restent, et nous espérons que durant les deux ou

 23   trois jours à venir, nous pourrons les reprendre. Comme je l'ai déjà dit,

 24   pour des raisons techniques, nous n'avons pas été en mesure de les

 25   remettre. Nous sommes ravis que la mission ait été menée à bien. Nous avons

 26   déjà mentionné que pour des raisons politiques et de sécurité, c'était une

 27   mission très complexe."

 28   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]


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  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci.

  2   Q.  Est-ce que vous reconnaissez la personne qui était interrogée sur la

  3   vidéo ?

  4   R.  Non, je ne me souviens pas de cette personne, et je ne me souviens pas

  5   non plus de cette déclaration, parce que lorsque nous avons été mis à bord

  6   des bus, tout ce qu'on a fait, c'est qu'on a donné lecture de ces noms, et

  7   nous avons été placés à bord de ces bus. Je ne me souviens pas des

  8   personnes qui sont sur la vidéo.

  9   Q.  Encore une fois, est-ce que ceci correspond à ce qui s'est passé ce

 10   jour-là, à savoir qu'il y avait deux Polonais sur la liste des personnes

 11   qui ont été libérées ce jour-là ?

 12   R.  Autant que je sache, il y avait deux membres polonais dans un

 13   bataillon. Et je n'étais pas membre d'un bataillon polonais. Je n'étais pas

 14   membre d'une mission. J'étais membre des observateurs militaires, donc je

 15   ne comprends pas ce qui a été mentionné dans la vidéo.

 16   Mme SUTHERLAND : [aucune interprétation]

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Ceux qui étaient mentionnés comme appartenant

 18   à un bataillon français étaient peut-être membres d'un bataillon français.

 19   Quant à moi, je n'étais pas membre de quelque bataillon national que ce

 20   soit; j'étais simplement observateur militaire.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur le Témoin.

 22   Ce sera la pièce P2158.

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur le Témoin, lorsque vous êtes arrivé à Novi Sad, où vous a-t-on

 25   emmené ?

 26   R.  A Novi Sad, on nous a emmenés dans ce qu'on pourrait appeler un camp de

 27   vacances. Nous avons tous reçu une chambre avec une salle de bain, et on

 28   nous a donné à manger le soir. C'était donc la fin de la journée. Lorsque


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  1   les bus sont arrivés à Novi Sad, nous avons été réceptionnés par le consul

  2   polonais de Belgrade ainsi que quelques ressortissants polonais. Ils nous

  3   ont félicités. Ce camp de vacances s'appelait "Sloboda", ce qui veut dire

  4   "Liberté". On avait l'impression qu'on avait été libérés, mais en fait, on

  5   était toujours sous le contrôle de l'armée serbe. Nous n'avions pas notre

  6   liberté de mouvement, puisque nous ne pouvions pas sortir de ce camp de

  7   vacances.

  8   Q.  Je vais vous présenter certains documents, et je vais vous demander si

  9   certains aspects de ce document représentent l'expérience que vous avez

 10   vécue.

 11   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Est-ce que je pourrais avoir le document

 12   à la liste 65 ter 18931, s'il vous plaît. Il s'agit d'un document qui porte

 13   la date du 14 juin. Il s'agit d'un rapport quotidien des Nations Unies à

 14   l'intention du Conseil de sécurité, c'est-à-dire un rapport émanant de M.

 15   Akashi à l'intention de M. Annan sur la libération des otages et le fait

 16   que les convois du HCR des Nations Unies pour les enclaves ne pouvaient pas

 17   obtenir l'autorisation de procéder.

 18   Q.  Il est mentionné :

 19   "Vingt six otages ont été libérés et sont actuellement à Novi Sad, en

 20   attendant d'être remis aux autorités serbes."

 21   Dans le premier paragraphe, il est également mentionné que le Dr Karadzic a

 22   annoncé que 15 otages seraient libérés un peu plus tard pour des raisons

 23   techniques.

 24   Est-ce que cela correspond à votre expérience, à savoir que certains de vos

 25   collègues observateurs étaient retournés à la caserne militaire de Pale et

 26   n'avaient donc pas été libérés ?

 27   R.  Comme je l'ai dit, effectivement, le 13 durant la matinée, vers 10

 28   heures, j'ai été le premier à quitter cette caserne. Après environ une


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  1   heure, Kozusnik m'a rejoint, mais personne d'autre de mon équipe ne nous a

  2   rejoints. Donc ce jour-là, seulement deux personnes ont été libérées; moi-

  3   même et Kozusnik. Et un peu plus tard, après ma libération, j'ai appris que

  4   les autres membres de notre équipe étaient toujours détenus par des Serbes,

  5   mais les circonstances ne m'ont pas permis de suivre ces événements. Je

  6   n'étais pas donc en mesure de savoir s'ils étaient toujours dans le même

  7   lieu de détention ou s'ils avaient été transférés ailleurs, parce qu'après

  8   ma libération, j'ai dû m'occuper d'autres choses et je n'ai pas donc suivi

  9   l'évolution de leur détention.

 10   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je souhaiterais verser cette pièce au

 11   dossier.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera la pièce P2159.

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur le Témoin, le 14 juin 1995, vous êtes partis de Novi Sad en

 15   direction de quel endroit ? Très rapidement, s'il vous plaît.

 16   R.  Le matin, nous étions à Novi Sad et nous avons été transportés vers

 17   l'aéroport à Belgrade, et là, un avion nous attendait. Et nous avons

 18   atterri à Zagreb, suite à quoi nous avons été libérés.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je voudrais afficher à l'écran le

 20   document de la liste 65 ter 21111.

 21   Monsieur le Président, je voudrais avoir l'autorisation d'utiliser ce

 22   document et le suivant. J'en ai parlé à Me Robinson, qui n'a pas

 23   d'objection.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous faisons droit à votre demande.

 25   Veuillez continuer, Madame Sutherland.

 26   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 27   Q.  Ce document est un document du 14 juin 1995. Il est intitulé : otages,

 28   libération le 13 juin 1995. C'est un document qui émane du commandant de la


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  1   force à Belgrade.

  2   Est-ce que l'on pourrait passer au premier paragraphe. Il est mentionné :

  3   "Veuillez trouver la liste des 26 personnes libérées venant de sept pays, y

  4   compris huit OMNU."

  5   Deuxièmement :

  6   "Ils seront probablement remis aux instances idoines à 12 heures le 14 juin

  7   1995."

  8   Est-ce que l'on pourrait passer à la troisième page, s'il vous plaît.

  9   Monsieur le Témoin, vous avez déjà vu ce document hier en préparation de

 10   votre déposition. Est-ce que vous voyez le nom qui est joint à cette liste,

 11   le nom qui est le vôtre ?

 12   R.  Oui, c'est au numéro 25.

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais verser

 14   cette pièce au dossier.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera la prochaine pièce à charge.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce P2160.

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Est-ce que je pourrais avoir le document

 18   de la liste 65 ter 21112. Il s'agit d'un autre document datant du 14 juin,

 19   encore une fois émanant du représentant spécial du commandant de la force à

 20   Belgrade, qui parle de la remise de personnes détenues le 14 juin 1995. Il

 21   est mentionné au paragraphe 1 que le personnel des Nations Unies a été bien

 22   traité, mais qu'ils sont préoccupés du devenir de leurs collègues qui sont

 23   encore détenus.

 24   Je voudrais qu'on passe à la page suivante du document, s'il vous plaît. Au

 25   paragraphe 3, il est mentionné :

 26   "J'ai transmis des informations concernant 15 otages qui n'ont pas encore

 27   été libérés. La liste figure à l'annexe B."

 28   Et au paragraphe suivant, il est mentionné qu'ils seront libérés avant la


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  1   fin de la semaine.

  2   Est-ce qu'on peut passer à la page suivante, s'il vous plaît. Vous voyez

  3   ici une liste recensant les 15 personnes travaillant pour les Nations

  4   Unies.

  5   Q.  Nous voyons qu'il y a neuf observateurs des Nations Unies qui ont été

  6   vus pour la dernière fois à Pale le 13 juin 1995 par les observateurs qui

  7   ont été libérés le 13 juin 1995 à une caserne de la VRS située à 2

  8   kilomètres au sud-est de Pale. Et vous avez donc Rechner, Zidlik, Evans,

  9   Gelissen, Alves, Al Lawwama, Laine, Schandeler et Niagi; ce sont les noms

 10   de famille des différents officiers qui sont recensés ici avec des grades

 11   différents. 

 12   Lorsque vous avez dit il y a quelques instants que certains de vos

 13   collègues étaient restés à la caserne lorsque vous avez quitté Pale, est-ce

 14   qu'il s'agit des personnes que vous avez mentionnées ou auxquelles vous

 15   pensiez ?

 16   R.  Je vois le nom de Rechner, Patrick; Zidlik, c'est Olek; Evans. Je ne

 17   sais pas s'il s'agit de Harley, le capitaine Alves, si c'est le Brésilien.

 18   Je vois c'est marqué "Alves", mais je ne connais pas un brésilien qui

 19   répondait à ce nom. Comme je vous le disais, je ne connaissais pas les noms

 20   de familles de certains de mes collègues. Mais il y a les trois personnes

 21   que j'ai mentionnées en haut, et pour ce qui est des autres noms, je ne

 22   reconnais pas ces noms de famille.

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je souhaiterais verser cette pièce au

 24   dossier.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Donc P2161.

 27   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Le dernier document que je souhaiterais

 28   vous présenter est le document de la liste 65 ter 23077.


Page 10872

  1   Q.  Monsieur le Témoin, la carte qui va apparaître à l'écran est une carte

  2   qui a été préparée par le bureau du Procureur en utilisant le document de

  3   la liste 65 ter 19082. Ceci montre les différents sites où vous avez été

  4   détenu en Bosnie durant votre période de détention du 26 mai au 13 juin

  5   1995. Vous avez eu la possibilité d'examiner cette carte en préparation de

  6   votre déposition, et vous avez demandé d'inclure une mention supplémentaire

  7   sur la carte à l'endroit qui s'appelle Jahorinski Potok, lorsque vous avez

  8   été acheminé là-bas le 26 mai 1995.

  9   En considérant cette carte, est-ce que vous pouvez confirmer que cela

 10   reflète fidèlement vos mouvements durant la période où vous avez été détenu

 11   par les forces des Serbes de Bosnie ?

 12   R.  Oui, effectivement. Cela pourrait être une bonne représentation

 13   graphique de mes mouvements, y compris le retour vers Novi Sad.

 14   Q.  Et ceci montre les différentes lignes et les flèches, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui, cela reflète exactement ce qui est mentionné ici.

 16   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je voudrais verser cette pièce au

 17   dossier.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce 2162.

 20   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 21   Q.  Et pour conclure, Monsieur le Témoin, pourriez-vous dire aux Juges de

 22   la Chambre comment ces avatars du 26 mai au 6 juin ont eu un impact sur

 23   votre vie ?

 24   R.  Eh bien, c'est difficile à décrire ou à exprimer ceci verbalement. Je

 25   ne souhaite à personne ce type d'expérience, que ce soit la mienne ou celle

 26   de mes collègues.

 27   Quant à l'impact sur ma vie, le côté positif c'est que ma vie a changé.

 28   J'ai commencé à mieux comprendre l'importance de la vie en général. Et


Page 10873

  1   après avoir quitté l'armée, j'ai visiblement été beaucoup plus ouvert à la

  2   souffrance d'autrui. C'est tout.

  3   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas

  4   d'autres questions, et je n'ai pas de pièces associées à verser.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Madame Sutherland.

  6   Merci, Monsieur le Témoin. Vous allez maintenant répondre aux

  7   questions de M. Karadzic dans le cadre du contre-interrogatoire.

  8   Monsieur Karadzic, c'est à vous.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 10   Bonjour à tous.

 11   Contre-interrogatoire par M. Karadzic :

 12   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

 13   R.  Bonjour.

 14   Q.  Je voudrais que nous examinions brièvement votre déclaration juste pour

 15   nous remémorer ce que vous avez donné comme indication en novembre 1995.

 16   A la première page, vous dites que cinq jours avant la date du 26

 17   mai, vous avez reçu un certain nombre d'ordres --

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste un instant, Monsieur

 19   Karadzic.

 20   Est-ce que nous disposons d'une copie de cette déclaration ?

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Eh bien, je m'attendais à ce que le bureau du

 22   Procureur en ait demandé le versement et que nous en disposions dans le

 23   prétoire électronique. Alors, j'ignore sous quelle cote.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce n'est pas le cas.

 25   Mme SUTHERLAND : [interprétation] 90208 est la bonne cote, Monsieur le

 26   Président, sur la liste 65 ter.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Madame Sutherland.

 28   Alors, il faut que vous présentiez le document pertinent au témoin


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  1   également si vous comptez poser des questions à son sujet. Affichons-le

  2   donc dans le prétoire électronique.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Dans ce cas-là, je demande

  4   l'affichage du document numéro 90208 de la liste 65 ter.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland, on m'informe que nous

  6   n'avons pas encore la possibilité de charger le document dans le prétoire

  7   électronique. Nous n'avons pas encore la main, donc M. Reid est en train de

  8   s'en charger.

  9   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Ceci pourrait prendre un certain temps,

 10   je suggère donc à M. Karadzic de peut-être poser une autre question en

 11   attendant.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, je suppose que vous

 13   avez une version papier. Nous pourrions peut-être la placer sur le

 14   rétroprojecteur afin que tout un chacun puisse suivre en même temps. Et en

 15   attendant, vous pouvez poser votre question au témoin.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Voilà, une copie papier.

 17   Alors, très brièvement, la première page d'abord, avant de passer à la

 18   suite. Merci.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Donc, dans le troisième paragraphe de la première page de cette

 21   déclaration datée du 22 novembre 1995, vous déclarez bien ce que nous avons

 22   sous les yeux. C'est bien de cette déclaration qu'il s'agit, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous avoir la page suivante.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Alors, je voudrais que vous portiez votre attention sur le troisième

 27   paragraphe, je cite :

 28   "Environ cinq jours avant le 26 mai 1995…"


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  1   Vous dites avoir été l'objet de restrictions imposées à votre liberté

  2   de mouvement, vous n'aviez plus l'autorisation de patrouiller et vous aviez

  3   l'obligation de rester cantonnés là où vous étiez logés. Vous n'aviez que

  4   le droit d'aller vous approvisionner à Pale, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Est-ce qu'à l'époque, vous saviez déjà qu'il y aurait des frappes

  7   aériennes de l'OTAN --

  8   R.  Non, je l'ignorais, et notre chef d'équipe ne nous en avait pas

  9   informés. Nous n'avions plus le droit de nous déplacer. On nous avait dit

 10   que nous ne pouvions qu'aller chercher des produits de première nécessité,

 11   et ceci, uniquement pendant la matinée et en début d'après-midi, et nous ne

 12   pouvions pas nous déplacer partout. Notre liberté de circulation était

 13   limitée.

 14   Q.  Merci. Avez-vous reçu des informations vous expliquant pourquoi ceci

 15   était intervenu, pourquoi ce changement aux conditions de déplacement qui

 16   étaient les vôtres ?

 17   R.  Non, nous n'avons rien reçu de tel. Je voudrais ici ajouter que dans la

 18   déclaration, il est indiqué "environ cinq jours avant le 26 mai." Pendant

 19   ces cinq jours, on m'a donné une permission. C'était la première qu'on

 20   m'accordait. Et il m'est difficile de vous dire s'il y avait la moindre

 21   information supplémentaire qui ait été fournie à notre équipe concernant

 22   les restrictions imposées à notre liberté de circulation. Je suis revenu de

 23   permission à la date du 25 mai, c'est-à-dire un jour avant les événements

 24   concernés.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, je voulais simplement

 26   vous informer que nous avons pu avoir accès au système, que le document

 27   est, par conséquent, maintenant disponible à l'écran.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Nous avons maintenant votre déclaration


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  1   à l'écran.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Par conséquent, ces cinq journées qui ont précédé le 26 mai, vous étiez

  4   en permission, mais vous avez entendu dire que des restrictions avaient été

  5   imposées à votre liberté de mouvement, n'est-ce pas ?

  6   R.  Pas tout à fait. J'étais en permission et je l'ai été pendant trois ou

  7   quatre jours au maximum, pour être tout à fait précis.

  8   Q.  Merci. Est-ce qu'à l'époque, vous saviez que depuis presque un mois

  9  déjà, l'offensive musulmane du 1er mai était en cours et que le 15 mai, elle

 10   s'était considérablement intensifiée autour des positions serbes autour de

 11   Sarajevo, retirée autour de Pokosalj [phon] ?

 12   R.  Non, je n'étais pas au courant de cela. Je me concentrais sur les

 13   missions à accomplir dans mon secteur.

 14   Mais je vous prie de ne pas oublier que cela ne faisait que trois semaines

 15   que j'étais sur place dans ce secteur. J'étais toujours en train de me

 16   familiariser avec le terrain. Cela ne faisait que trois semaines. J'étais

 17   arrivé à Zagreb le 13 avril. J'y ai alors été formé avant d'être transféré

 18   à Sarajevo, où j'ai passé trois jours et où j'ai reçu une formation

 19   supplémentaire. Ce n'est qu'après qu'on m'a transféré à Pale. En fait, à

 20   Pale, j'y suis arrivé, je pense, vers le 20 avril. Enfin, quand je dis

 21   Pale, je veux dire le lieu où j'étais en poste d'observateur des Nations

 22   Unies.

 23   Q.  Vers le milieu du dernier paragraphe, il est indiqué :

 24   "… mais l'officier qui était responsable de cela nous a dit qu'à partir de

 25   ce moment, nous étions sous la garde de la VRS. Personne n'a essayé de nous

 26   maltraiter."

 27   Alors, aujourd'hui, à l'une des pages du compte rendu, en répondant à l'une

 28   des questions de l'interrogatoire principal, vous avez évoqué ceci en


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  1   suggérant qu'on vous avait déclaré que vous étiez des otages. Cela se

  2   trouve -- je ne vois pas exactement dans quelle page. Mais quelle est la

  3   formulation exacte qui a été utilisée ? Est-ce que ce qui figure ici est

  4   exact, à savoir que vous étiez placés sous la garde de la VRS en tant que

  5   captifs; est-ce exact ?

  6   R.  Eh bien, la signification de ces paroles était que nous étions pris en

  7   charge par eux, alors que c'était la police qui nous retenait jusque-là.

  8   Cet officier de l'armée a prononcé ces mots. Je ne suis pas sûr des mots

  9   exacts qu'il a prononcés ni de la façon adéquate de le dire, mais ce qu'il

 10   a dit, c'est que nous étions arrêtés par l'armée de la Republika Srpska et

 11   que nous étions transférés du contrôle de la police à leur contrôle.

 12   Q.  Merci. Mais il n'a pas parlé "d'otages", n'est-ce pas ?

 13   R.  Non. Le mot "d'otage" n'a pas été utilisé à ce moment-là.

 14   Q.  Merci.

 15   R.  Mais très rapidement, nous avons appris que c'était le cas.

 16   Q.  Nous y reviendrons.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous avoir la page suivante de ce

 18   document, s'il vous plaît.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Quelle a été votre expérience par rapport à l'attitude qui était celle

 21   de l'armée, de la police, et de la population civile à votre égard tout au

 22   long de ces trois semaines ? Est-ce que vous avez noté la moindre hostilité

 23   ? Je parle non seulement de vous-même, mais également de vos collègues.

 24   R.  Concernant les civils, je ne peux que vous parler que de cet incident

 25   au centre de Pale, lorsque l'on nous transférait pour la première fois vers

 26   l'endroit où ils souhaitaient nous menotter afin de nous utiliser comme des

 27   boucliers humains. La plupart des civils à ce moment-là étaient très

 28   hostiles. Je ne dis pas que tous avaient une attitude hostile. Quant aux


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  1   officiers de l'armée et aux policiers, je dirais que la plupart d'entre eux

  2   avaient un comportement très correct. Il y avait un très petit nombre de

  3   personnes qui manifestait de l'animosité envers nous.

  4   Q.  Peut-être que je n'ai pas été assez précis.

  5   Est-ce qu'avant les bombardements, vous avez noté la moindre

  6   hostilité à votre égard et à l'égard de vos collègues de la part tant des

  7   soldats que de la population civile ? Y avait-il de l'hostilité avant les

  8   bombardements ?

  9   R.  Je crois que la situation était similaire à ce qui prévalait après.

 10   Dans l'ensemble, j'ai gardé en mémoire des attitudes et des comportements

 11   que je qualifierais de positifs de la part tant des soldats que de la

 12   police ou des civils. Je dirais qu'ils étaient corrects dans leur

 13   comportement, mais qu'ils n'étaient pas amicaux.

 14   Lorsque j'étais en permission, j'ai eu l'occasion de parler avec ma femme

 15   et j'ai utilisé exactement les mêmes termes. J'ai dit que je me sentais

 16   bien en Serbie, que je n'avais ressenti aucune hostilité telle que ce dont

 17   on pouvait avoir l'impression en lisant les journaux ou en regardant la

 18   télévision, compte tenu de la façon dont tout ceci avait été couvert.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je vois que le compte rendu parle de

 22   "Serbie." Je ne sais pas si c'est ce que le témoin a dit ou c'est dans

 23   l'interprétation que c'est apparu.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur le Témoin, avez-vous dit que

 25   c'était en Serbie que vous vous sentiez bien et qu'il n'y avait pas

 26   d'hostilité ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque j'ai dit "Serbie", je pensais à la

 28   zone où j'avais été déployé, c'est-à-dire la région de Pale.


Page 10879

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Je vous remercie. Mais vous pensiez peut-être à la "Republika Srpska" ?

  4   R.  Je ne suis pas sûr que cette Republika Srpska ait existé à l'époque. Il

  5   y avait une guerre en cours.

  6   Q.  Merci. Je voudrais que nous reprenions la déclaration, le milieu du

  7   second paragraphe. Je cite :

  8   "A mon avis, cet arrêt dans la rue principale de Pale était très dangereux

  9   pour nous, parce qu'il y avait de nombreux soldats et civils autour de la

 10   voiture. Les soldats sont sortis de la voiture en laissant la porte

 11   ouverte, et nous avons été menacés et insultés. Un des civils m'a craché

 12   dessus."

 13   Lorsque vous avez été arrêté, à un moment donné vous vous êtes arrêtés en

 14   centre-ville de Pale. Les bombardements avaient déjà commencé. Vous avez

 15   été reconnu par les civils et les soldats qui passaient à côté. Est-ce que

 16   c'est sur la base de votre uniforme et de votre casque de couleur bleue que

 17   vous avez été reconnu ?

 18   R.  Je ne sais pas ce qu'ils ont pu reconnaître, à la façon dont ils nous

 19   ont vus. Je me suis contenté de décrire la réaction des personnes

 20   présentes. Je considère aujourd'hui encore qu'il s'agissait là d'une erreur

 21   commise par les hommes qui nous escortaient. En effet, cet incident aurait

 22   pu se transformer en une situation extrêmement déplaisante, comme le montre

 23   cet incident où l'un des civils m'a craché dessus. On leur a permis de

 24   s'approcher très près de nous, alors qu'il s'agissait de personnes que je

 25   n'avais jamais rencontrées auparavant. C'était des personnes qui m'étaient

 26   totalement inconnues. Elles auraient pu nous frapper ou nous blesser

 27   d'autres manières. Les hommes qui nous accompagnaient ont fini par

 28   comprendre que la situation devenait dangereuse. Ils ont alors fermé les


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  1   portières du véhicule, et nous nous sommes mis en route.

  2   C'était ma compréhension de cet incident à l'époque.

  3   Q.  Merci. Ce que j'essaie de mettre en avant est ce qui suit, Monsieur le

  4   Témoin : ils ne vous connaissaient pas personnellement, ni ne vous

  5   accusaient d'avoir fait quoi que ce soit à titre personnel. C'est grâce à

  6   votre uniforme qu'ils vous ont reconnus comme membres des forces des

  7   Nations Unies, et c'était là le motif des réactions particulièrement vives

  8   et hostiles qui ont été les leurs envers vous, n'est-ce pas ?

  9   R.  Eh bien, votre raisonnement se tient peut-être, mais n'oubliez pas que

 10   c'était là des rues dans lesquelles nous avions eu l'occasion de circuler

 11   auparavant, de faire des courses. Donc, s'il s'était agi des mêmes

 12   personnes, il aurait été difficile pour elles de ne pas nous reconnaître.

 13   Précédemment, nous avions eu l'expérience d'un comportement qui était tout

 14   à fait correct. Donc d'où venait cette agressivité tout d'un coup lorsque

 15   nous nous sommes trouvés dans cette situation, je l'ignore.

 16   Q.  Dans le questionnaire que vous avez renseigné après votre libération,

 17   en page 3, vous dites que les Serbes vous ont informé du fait que, selon

 18   eux, les Nations Unies et l'OTAN étaient une seule et même chose, se

 19   confondaient, n'est-ce pas ?

 20   R.  Nous avons très souvent entendu soulever cette objection contre nous-

 21   mêmes, observateurs des Nations Unies, à savoir que les Nations Unies et

 22   l'OTAN ne sauraient être distingués, que c'était une seule et même chose,

 23   et que nous collaborions. Nous n'acceptions pas ces arguments, et nous

 24   essayions de nous distancier de ce type de raisonnement.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 26   Je voudrais maintenant que l'on avance de trois pages. Avançons encore

 27   d'une page, s'il vous plaît. Voilà, le numéro ERN se termine par 624.

 28   Merci.


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  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Voyez la fin du second paragraphe, vous dites, je cite :

  3   "Dans ce nouveau bâtiment, l'atmosphère était meilleure, nous avions de

  4   bons rapport avec les officiers de la VRS. Nous avions de l'eau chaude. Je

  5   crois que nous ne pouvions pas sortir, parce qu'ils avaient peur de

  6   possibles provocations de la part de soldats de la VRS qui se seraient

  7   trouvés à passer près de notre bâtiment. Après environ une semaine, on nous

  8   a permis de sortir, et je suis resté là-bas jusqu'à ma libération."

  9   Pensez-vous que ces officiers serbes craignaient des provocations de la

 10   part de soldats qui se seraient trouvés à passer à proximité et que c'était

 11   là la raison pour laquelle on ne vous a pas autorisés à partir ? Lorsque

 12   vous dites "ils avaient peur que," à qui pensez-vous exactement ?

 13   R.  Eh bien, je pensais à ceux qui nous maintenaient en détention, et sous

 14   la responsabilité de qui nous étions placés. En tant qu'officier, j'étais

 15   conscient du fait que parfois, lorsque des soldats revenaient de patrouille

 16   de nuit ou revenaient au petit matin, lorsqu'ils étaient en fin de mission,

 17   il n'était pas exclu qu'ils se trouvaient dans une disposition ou dans une

 18   humeur tout à fait différente. Lorsqu'ils nous voyaient à l'extérieur, ils

 19   pouvaient adopter un comportement tout à fait différent. C'était en tout

 20   cas mon raisonnement; s'ils nous voyaient à l'extérieur ils risquaient

 21   d'adopter un comportement différent. C'est la raison pour laquelle j'ai

 22   déclaré ceci.

 23   Alors avec le temps, la situation a évolué, et après une semaine environ,

 24   nous avons été autorisés à sortir parce que la situation s'était

 25   stabilisée.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 27   Pourrions-nous revenir en arrière de quelques pages jusqu'à celle dont le

 28   numéro ERN se termine par 622, donc trois pages plus haut. Merci.


Page 10882

  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  L'avant-dernière page du troisième paragraphe dit, je cite :

  3   "Lorsque nous nous sommes arrêtés, le civil m'a dit de ne pas m'inquiéter,

  4   et que personne ne souhaitait me nuire. Lorsqu'il m'a déclaré ceci, je me

  5   suis senti mieux, parce que je m'attendais à ce qu'ils nous fusillent."

  6   Aujourd'hui, en page numéro 20 du compte rendu d'audience, vous avez

  7   indiqué qu'on ne vous avait pas dit qu'une condition à votre libération

  8   serait l'arrêt des bombardements, mais plutôt qu'il fallait pour cela

  9   qu'une solution soit trouvée afin qu'il y ait un arrêt des hostilités avec

 10   l'OTAN, que c'était là la condition à votre libération; est-ce exact ?

 11   R.  J'ai pris les mots prononcés par le journaliste pour argent comptant,

 12   et je les ai mis en rapport avec la situation dans laquelle je me trouvais.

 13   Quelle était cette situation ? On m'avait transféré jusqu'à cette hauteur

 14   en un lieu inconnu de moi, et j'ignorais tout de ce qui m'attendait. Donc

 15   j'ai tout simplement mis en rapport ce qu'on m'a dit avec la situation dans

 16   laquelle je me trouvais. Lorsqu'il m'a dit : N'ayez pas peur, rien ne vous

 17   arrivera. Je l'ai compris par rapport à ma propre situation en cet endroit

 18   même. J'ai compris que je n'allais pas être exécuté. Je ne pouvais pas non

 19   plus anticiper davantage que cela. Je me suis contenté de me sentir soulagé

 20   et heureux compte tenu de ce que j'avais déjà traversé. C'est la façon dont

 21   je m'en souviens.

 22   Parce qu'on nous avait bandé les yeux, on ne nous avait pas informés de

 23   notre destination ni de la raison pour laquelle nous étions transférés là-

 24   bas. Donc, jusqu'au moment où nous sommes arrivés et jusqu'au moment où ces

 25   mots ont été prononcés, j'ignorais tout de la raison de mon transfert, et

 26   tout le trajet a été marqué par un stress très important.

 27   Q.  Merci. Alors aujourd'hui, vous avez déclaré en page 20 que selon les

 28   informations qui vous ont été transmises, la condition placée à votre


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  1   libération n'était pas l'arrêt des bombardements, mais une solution

  2   d'ensemble permettant d'aboutir à un arrêt des hostilités avec l'OTAN.

  3   Autrement dit, une solution entre la Republika Srpska et l'OTAN, est-ce

  4   exact ?

  5   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Madame, Monsieur les Juges, serait-il

  6   possible que M. Karadzic cite avec exactitude les mots qui ont été

  7   prononcés par le témoin ?

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je n'ai pas réussi à retrouver ce

  9   passage en page 20 du compte rendu d'audience.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Eh bien, je m'efforce moi aussi de retrouver la

 11   bonne page. Je rencontre des difficultés techniques dans l'utilisation du

 12   prétoire électronique.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Mais, en substance, vous avez déclaré aujourd'hui à la page

 15   correspondante qu'on ne vous avait pas dit qu'un simple arrêt des

 16   bombardements permettrait votre libération et en constituait une condition,

 17   mais qu'il fallait pour cela trouver une solution au conflit avec l'OTAN

 18   dans son ensemble, n'est-ce pas, parce qu'on recherchait des solutions à

 19   cet effet ?

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Sutherland.

 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

 22   Mais je dois me rallier à ce que vous venez de dire, je ne retrouve nulle

 23   part les termes que M. Karadzic attribue au témoin, alors je suppose qu'il

 24   s'est contenté de paraphraser le témoin. En tout cas, je ne retrouve pas

 25   ces termes exacts.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] En effet. Je suppose que l'accusé est en

 27   train d'essayer de retrouver le passage correspondant.

 28   Mais en attendant, Monsieur le Témoin, pourriez-vous répondre ?


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Ceux qui nous ont maintenus captifs n'ont

  2   jamais parlé de notre libération. Donc j'ai cité les paroles de cet

  3   officier à la date du 26, le premier jour, à 21 heures, lorsqu'il est venu

  4   nous voir. Il nous a dit que l'évolution de la situation dépendrait, nous

  5   concernant, de la façon dont les choses et les événements se

  6   développeraient. Cela dépendait de la question à savoir si un accord serait

  7   ou non trouvé et si un terme serait mis ou non aux frappes aériennes. Mais

  8   cela n'était pas du tout évoqué en relation avec notre libération, plutôt

  9   en relation avec la nature de notre séjour et de notre captivité dans cette

 10   base. Lorsque nous étions dans cette base, nous étions des otages, des

 11   boucliers humains pendant toute la durée de notre présence. Ils pouvaient

 12   vouloir nous utiliser au cas où la moindre information leur parviendrait

 13   concernant la reprise des frappes aériennes. Mais personne n'a évoqué notre

 14   libération.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, ce que le témoin a

 16   dit en page 20 est la chose suivante - je ne sais pas si ça vous aidera -

 17   mais je cite :

 18   "Il a dit que notre position et notre statut ne changeraient pas tant

 19   que les parties ne parviendraient pas à un accord."

 20   Est-ce que c'est bien le passage auquel vous vous référez ? Je poursuis, je

 21   cite :

 22   "En d'autres termes, il doit y avoir une déclaration univoque de la part du

 23   commandement de l'OTAN indiquant que les frappes aériennes cesseront."

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie.

 25   Pourrions-nous maintenant avoir la pièce P2621 à l'écran, s'il vous plaît.

 26   Elle a été versée il y a quelques instants.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur Kalbarczyk, est-ce que vous saviez que les Nations Unies


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  1   détenaient également un certain nombre de Serbes ?

  2   R.  Non, je ne disposais pas de cette information.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous reviendrons à ce document plus tard.

  4   Mais pourrions-nous avoir la pièce P2621, s'il vous plaît. A la page 2.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Veuillez, s'il vous plaît, lire le paragraphe 2 :

  7   "Les autorités serbes ont exprimé constamment qu'ils exigeaient que

  8   quatre Serbes de Bosnie, otages par les Nations Unies, soient relâchés. Je

  9   leur ai dit que la décision dépendait, en fait, de l'envoyé du secrétaire

 10   général des Nations Unies, mais il était à Genève à l'époque, mais il en

 11   serait informé le plus rapidement possible…"

 12   Et cetera, et cetera.

 13   Donc vous ne saviez pas que les forces des Nations Unies et la Republika

 14   Srpska étaient mutuellement engagées dans la capture de prisonniers ?

 15   R.  Lorsque j'étais prisonnier de guerre, nous n'avions aucune information

 16   de ce type. Je n'ai jamais eu vent de ce document. C'est totalement

 17   impossible. Ce document a été publié le 14 juin, bien après tous ces

 18   événements.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je remarque que M. Karadzic fait encore

 20   mauvais usage de ce document. Il ne le cite pas correctement. Il n'est pas

 21   écrit dans ce document que les Nations Unies et la Republika Srpska se sont

 22   engagées dans un exercice réciproque de détention de prisonniers. Ce n'est

 23   absolument pas écrit.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Passons à autre chose. Nous pouvons lire

 25   le document. Nous en sommes tous capables.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

 27   Mais enfin, avec tout le respect que je vous dois, cela fait partie

 28   de ma question. Je voulais savoir si le témoin savait que de l'autre côté,


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  1   on faisait aussi des prisonniers, et qu'au 14 juillet, ils n'avaient pas

  2   encore été relâchés.

  3   Enfin, pourrions-nous revenir au document précédent. Document précédent,

  4   s'il vous plaît. Le document dont la page ERN se termine par le 6623.

  5   Nous l'avons à l'écran. Bien.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Vous nous avez dit qu'il y avait un mariage en cours à l'époque.

  8   Veuillez, s'il vous plaît, prendre connaissance du dernier paragraphe :

  9   "Nous avons quitté le radar et nous nous sommes arrêtés dans un autre

 10   bâtiment olympique, où se tenait un mariage. Nous avons été invités à nous

 11   restaurer. Et un grand nombre de personnes sont venues nous voir pour nous

 12   dire de ne pas nous inquiéter. Le père du marié se souvenait de moi, il

 13   m'avait vu lors de patrouilles précédentes, et il s'est aussi entretenu

 14   avec moi. Nous sommes restés là à peu près une heure et demie."

 15   Ensuite, un peu plus loin :

 16   "J'ai demandé au journaliste d'appeler ma femme et de lui dire que j'allais

 17   bien. Plus tard, j'ai appris qu'il avait bel et bien appelé ma femme et

 18   qu'il lui avait dit que j'étais sain et sauf."

 19   Donc ils vous ont invité à vous joindre à la fête; est-ce que vous avez

 20   accepté leur invitation ?

 21   R.  Non, je n'ai pas accepté l'invitation. Ça aurait été étrange -- étant

 22   donné la situation dans laquelle nous nous trouvions et le stress que nous

 23   vivions, ça aurait bizarre de nous voir filmés en train de nous amuser lors

 24   de cette réception de mariage. Mais je peux confirmer que les gens, en

 25   effet, étaient très amicaux, ils ont été très gentils, ce qui nous a

 26   beaucoup aidés. Ça nous a permis de nous détacher un peu de la situation et

 27   des moments difficiles que nous venions de vivre; on nous emmenait en haut

 28   de cette montagne, sans savoir très bien ce qui allait nous arriver. Et je


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  1   suis très reconnaissant au journaliste, car, en effet, il a tenu sa

  2   promesse. Par la suite, mon épouse m'a dit qu'elle n'avait pas vraiment

  3   bien compris, mais le serbe étant assez proche du polonais, elle a compris

  4   ce qu'il voulait lui dire. Il lui disait, Ne vous inquiétez pas, tout va

  5   bien, votre mari est en vie, il envoie ses salutations, et il sera bientôt

  6   de retour. Ça, elle l'a compris.

  7   Q.  Merci.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous avoir la page suivante. La page

  9   qui se termine par l'ERN 624, donc la page précédente. Merci.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Donc, au paragraphe du milieu, qui commence par les mots : "Rien n'est

 12   arrivé pendant toute cette période…", il est écrit, et je cite :

 13   "Les 2 et 3 juin, le général Mladic nous a rendu visite, en civil, avec

 14   d'autres personnes qui étaient aussi en civil. Ils voulaient savoir comment

 15   nous allions. A ce moment-là, je ne savais pas qu'il s'agissait de Mladic,

 16   mais maintenant que je l'ai vu à la télévision, je sais que c'était bel et

 17   bien lui."

 18   Et cetera, et cetera.

 19   Ensuite, vous poursuivez et vous parlez d'interrogatoire, et vous dites que

 20   vos deux amis ont été interrogés à propos des circonstances, on leur a

 21   demandé si les observateurs militaires des Nations Unies étaient en mesure

 22   de donner des informations aux aéronefs pour les guider sur leurs cibles ?

 23   R.  Oui, oui, tout à fait, je peux le confirmer. Je n'ai pas assisté à

 24   cette conversation, mais je reprends les propos que m'a tenus Evans, ainsi

 25   qu'Olek, l'OMNU tchèque, qui avait été interrogé. Dans la déclaration de

 26   témoin, on parle "d'interrogatoire". Mais ce n'est pas vraiment un

 27   interrogatoire en bonne et due forme. Disons que c'était plutôt un

 28   entretien avec les personnes qui étaient venues nous voir.


Page 10888

  1   Et d'après ce que l'on m'a dit, j'ai compris que les civils ont demandé si,

  2   par hasard, avec les équipements dont nous disposions, nous pouvions guider

  3   les aéronefs de l'OTAN pour déterminer les cibles à viser. Il s'agissait de

  4   pilotes, après tout, et c'est pour ça qu'ils ont été choisis. Et mes

  5   collègues m'ont dit qu'on leur avait posé des questions à propos de moi,

  6   parce qu'ils savaient que moi aussi je faisais partie de l'armée de l'air

  7   polonaise. Mais ils ont expliqué que j'étais professeur à l'école de l'air,

  8   pilote à l'école de l'air polonaise. Donc ils ont décidé de ne pas

  9   m'interroger, de pas me poser de questions. En tout cas, c'est ce que m'ont

 10   rapporté mes collègues.

 11   Q.  Merci. Mais le chef de votre équipe, Griffith Evans, du Ghana, faisait

 12   aussi partie de l'armée de l'air. D'ailleurs, il était pilote dans sa

 13   propre armée de l'air, n'est-ce pas ?

 14   R.  En effet. En effet, il nous l'a dit, d'ailleurs.

 15   Q.  Merci. Et Olek Zidlik était-il aussi membre de l'armée de l'air

 16   polonaise -- tchèque ?

 17   R.  Bien, c'est ce qu'ils m'ont dit, mais je n'ai pas vu de documents

 18   officiels prouvant qu'ils étaient bel et bien pilotes. Je n'ai jamais eu ce

 19   type de documents. Mais ils me l'ont dit, et d'autres collègues m'ont aussi

 20   dit que c'était des pilotes au sein de leur propre armée de l'air.

 21   Q.  Merci. Savez-vous si d'autres membres de votre poste d'observation à

 22   Pale, donc d'autres membres de votre équipe, étaient aussi pilotes ou

 23   membres de l'armée de l'air ?

 24   R.  Non, je n'en sais rien. On ne m'a parlé que de ces deux-là. J'imagine

 25   que les autres venaient d'autres armées.

 26   Q.  Savez-vous qu'à Kasindol, et ailleurs aussi, il y avait des pilotes qui

 27   servaient d'observateurs militaires, donc ils étaient pilotes dans leur

 28   propre armée de l'air dans leur propre pays ?


Page 10889

  1   R.  C'est la première fois que j'entends parler de Kasindol, donc je ne

  2   sais absolument rien à ce propos.

  3   Q.  Très bien. Nous allons d'abord nous occuper de la première page, et

  4   ensuite nous reviendrons sur ces entretiens à propos du guidage des

  5   aéronefs et des réponses de vos collègues. Nous y reviendrons.

  6   Paragraphe suivant, donc le capitaine Vojvodic a pris son véhicule

  7   personnel et vous a emmenés sur votre lieu d'hébergement. Et je crois que

  8   vous avez aussi dit que vous avez aussi été autorisés à deux ou trois

  9   reprises à vous rendre à votre hébergement où vous étiez précédemment,

 10   l'endroit où vous étiez cantonnés ?

 11   R.  Ce qui est écrit exactement, c'est la chose suivante : tout d'abord,

 12   nous sommes allés au poste où était hébergée l'équipe d'Echo 1. On y a

 13   récupéré nos effets personnels restants, et sur la route du retour, nous

 14   sommes allés aussi à Lima 7, d'où venaient Patrick et Olek, car c'est là

 15   qu'il y avait une connexion satellite. Et le capitaine Vojvodic nous a

 16   autorisés à utiliser le téléphone satellitaire afin d'appeler. C'est la

 17   première fois que j'ai pu appeler mon épouse, mes collègues aussi. Je ne me

 18   souviens plus combien nous étions; peut-être il y avait deux autres

 19   collègues, peut-être un seul, je ne m'en souviens pas bien. Mais donc

 20   l'endroit où se trouvait ce téléphone satellitaire n'était pas mon

 21   cantonnement régulier. C'était une autre équipe qui était cantonnée là.

 22   Q.  Merci. Au paragraphe suivant, vous dites qu'après quelques jours, et

 23   non pas deux semaines, vous avez reçu la visite de la Croix-Rouge

 24   internationale, suite à quoi un médecin vous a examinés. Et vous dites :

 25   "J'ai demandé à recevoir des vitamines et je les ai reçues le jour suivant.

 26   Romero était dans un mauvais état de santé, et à cause du diagnostic posé

 27   par le médecin, il a été le premier à être relâché."

 28   N'est-ce pas ?


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  1   R.  Oui. Enfin, pas tout à fait. Tout d'abord, nous avons reçu la visite de

  2   la Croix-Rouge, et après le départ de la Croix-Rouge, donc un ou deux jours

  3   après la visite de la Croix-Rouge, nous avons reçu la visite du médecin que

  4   nous avions demandé lors du passage de la Croix-Rouge. Et le docteur a

  5   examiné tout le monde, et il a déclaré que l'Espagnol, Pepe, devait être

  6   hospitalisé, parce qu'il n'était pas en bonne santé, et les médecins ont

  7   déclaré qu'il fallait l'hospitaliser le plus vite possible. Moi, j'ai

  8   uniquement demandé des vitamines, et je les ai obtenues le lendemain. C'est

  9   tout.

 10   Q.  Merci. Mais je sais qui sont ces deux médecins, et vous dites que l'un

 11   d'entre eux était professeur à l'université ? C'est ce qui est écrit ici,

 12   je cite : "L'un d'entre eux était un professeur." N'est-ce pas ?

 13   R.  En tout cas, c'est ainsi qu'il s'est présenté. Il était extrêmement

 14   poli.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 16   Je voudrais maintenant que nous examinions ensemble ce que nous pouvons

 17   trouver dans les déclarations de votre collègue Evans au sujet de ces

 18   événements. Est-ce que nous pourrions avoir quelques instants le document

 19   1D3060 à l'écran, qui est sa déclaration à lui.

 20   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Il s'agit de la pièce P00051.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. J'imagine que le

 22   numéro 65 ter est 1D3060. Allons-y, Monsieur Karadzic.

 23   Il s'agit d'une déclaration qui a été versée au dossier en application de

 24   l'article 92 bis, n'est-ce pas ?

 25   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Tout à fait.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous maintenant - et je vous remercie

 28   - avoir la page numéro 5 de ce document.


Page 10891

  1   C'est bien la page 5. La page 5 du document à proprement parler, c'est ce

  2   qui m'intéresse. Est-ce qu'on peut reculer ou avancer d'une page à cette

  3   fin, s'il vous plaît. Il faut qu'on retrouve du texte sur cette page.

  4   Alors, juste un instant, s'il vous plaît.

  5   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je pense que nous trouvons cela avec le

  6   numéro ERN se terminant par 082.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, il s'agit de la page 9.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. 

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Veuillez vous pencher sur ce paragraphe qui commence par : "Le 1er juin

 11   1995…" :

 12   "… nous avons reçu la visite de l'état-major général, et j'ai été

 13   appelé par un commandant, qui était à la tête de l'état-major général, afin

 14   d'avoir un entretien à part."

 15   Alors, il vous explique qu'en substance, ils souhaitaient obtenir la

 16   confirmation de la façon dont l'OTAN procédait à la visée de ses cibles.

 17   Ils souhaitaient obtenir une confirmation quant aux rumeurs selon

 18   lesquelles les aéronefs étaient guidés vers leurs cibles par les

 19   observateurs des Nations Unies.

 20   Mais alors, est-ce que vous êtes d'accord pour dire que vous n'avez pas

 21   reconnu Mladic, que vous n'avez pensé que plus tard que c'était Mladic. Et

 22   votre collègue non plus ne l'a pas reconnu; il pensait au départ que

 23   c'était un commandant, n'est-ce pas ?

 24   R.  Je ne sais pas. Tout ce que je vous dis, c'est ce que moi, j'ai

 25   ressenti. Quant à savoir si eux, ils ont reconnu Mladic ou pas, je n'en

 26   sais rien, je ne leur ai pas demandé. Mais je tiens à dire qu'Evans a dit,

 27   avec justesse d'ailleurs, qu'il s'agissait, en fait, d'un entretien privé,

 28   même d'une conversation. Ce n'était pas du tout un interrogatoire. Ils ont


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  1   demandé s'il y avait une possibilité qu'en tant qu'observateurs militaires,

  2   nous étions en mesure de faire du guidage aérien et de repérer des cibles.

  3   C'est ce que je sais.

  4   Q.  Merci. Alors, voyons ce que dit cet officier de l'armée tchèque à ce

  5   sujet.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous avoir le document 1D3061 à

  7   l'écran. Je suppose que cela a été versé, mais je ne sais pas sous quelle

  8   cote.

  9   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Ça n'a pas encore été admis. Mais

 10   j'aimerais que la page de garde ne soit pas diffusée. En effet, il y a les

 11   coordonnées du témoin sur cette page.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous, dans ce cas-là, passer

 13   directement à la page 3 de ce document, paragraphe numéro 6. La cote est

 14   donc 1D3061, page 3.

 15   Je ne crois pas que ceci soit la page 3. Pouvons-nous avoir la page

 16   précédente, s'il vous plaît.

 17   Juste un instant, s'il vous plaît. Parce que, là, il faut reculer encore

 18   d'une page. C'est la troisième, mais en comptant également la page de

 19   garde. Peut-on reculer d'une page, s'il vous plaît.

 20   Mme SUTHERLAND : [interprétation] C'est la page suivante.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 22   M. KARADZIC : [interprétation] Voyons ce qui est dit ici au paragraphe

 23   numéro 6 :

 24   "Le septième jour de notre captivité, deux d'entre nous ont été interrogés

 25   par des officiers chargés de la sécurité de la caserne de Lukavica. J'ai

 26   été interrogé par un officier qui s'est présenté comme étant le commandant

 27   Bukova."

 28   Je suppose que c'était, en fait, Bukva. Je le connais. Enfin, je suis


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  1   en train de faire un commentaire. Ce n'est plus la citation. Je pense que

  2   c'était Bukva, n'est-ce pas ? Je reprends la citation : 

  3   "Ils nous ont présenté des listes qui comprenaient des tableaux de tirs,

  4   des tableaux contenant les différentes cibles. Il nous a dit qu'il

  5   s'agissait là d'informations récupérées d'un ordinateur de la Mission

  6   d'observation des Nations Unies. Je considérais cette liste comme étant un

  7   faux. Il nous a dit que c'était nous qui guidions les aéronefs de l'OTAN

  8   vers leurs cibles. Il ne savait rien de ce sujet particulier, et il

  9   ignorait même tout des fondamentaux du guidage des aéronefs. Je n'ai pas

 10   été menacé. Il ne m'a pas référé auprès de ces commandants supérieurs."

 11   Alors, est-ce que vous conviendrez que ce collègue, en fait, n'a jamais

 12   considéré qu'il se soit agi Mladic?

 13   R.  J'ai du mal à me repérer dans ce que vous venez de lire et ce que vous

 14   venez de dire. Parce que je n'ai jamais entendu autant de détail à propos

 15   de tout cela. Ce que j'ai lu ici est assez surprenant, pour moi en tout

 16   cas. Cela dit, c'est peut-être ainsi. Moi, tout ce que je savais, c'est que

 17   la conversation avait bel et bien eu lieu, mais je n'en ai jamais parlé, ni

 18   avec Olek ni avec Evans. Donc, en ce qui concerne cette question, je ne

 19   sais pas grand-chose. Je ne savais pas qu'il y avait des données ou des

 20   cibles dans l'ordinateur. On ne me l'avait pas dit.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je voudrais vous prier d'examiner

 22   maintenant ce que Gunnar Westlund, ressortissant suédois, a déclaré à ce

 23   sujet. C'est le document D309 dont il s'agit. Pouvons-nous afficher

 24   quelques instants cette pièce à l'écran.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Alors, bien que vous ne vous soyez pas trouvé depuis très longtemps sur

 27   place, est-ce que vous étiez, peut-être, malgré tout, au courant de

 28   l'existence de personnel à bord des véhicules des Nations Unies, qui, en


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  1   fait, n'étaient pas des personnels des Nations Unies à proprement parler;

  2   en d'autres termes, que certaines personnes utilisaient abusivement tant

  3   les véhicules que les uniformes des Nations Unies ?

  4   R.  Comme je vous l'ai déjà dit, j'étais OMNU depuis peu de temps à

  5   l'époque et je ne suis pas resté très longtemps sur place, donc je n'étais

  6   pas au courant de ce genre de détail. Je ne sais pas absolument pas ce qu'a

  7   bien pu dire Gunnar Westlund. Mais lorsque nous étions à Dubrovnik, par la

  8   suite, après l'incident de Pale, il m'a dit la même chose. Nous avons été

  9   transférés à Dubrovnik ensemble, donc je peux confirmer qu'il m'a bel et

 10   bien raconté cette histoire, qu'il m'a raconté cela lorsque nous avons été

 11   transférés à Dubrovnik. Il m'a dit qu'il s'est retrouvé dans une situation

 12   de ce type, mais moi, ça ne m'est jamais arrivé, et je n'ai aucune

 13   information à ce propos.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, je ne pense pas que

 15   nous ayons à l'écran le document auquel vous avez fait référence. Avez-vous

 16   vérifié le numéro 65 ter ?

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président --

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis tout à fait d'accord avec vous,

 19   Monsieur le Président.

 20   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Il s'agit, en fait, de la pièce D306. Il

 21   s'agit d'informations supplémentaires qui ont été fournies par Gunnar

 22   Westlund.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce "6" s'est effectivement retourné en un "9".

 25   Je vous remercie. Pouvons-nous avoir maintenant la pièce D306, à l'écran,

 26   s'il vous plaît.

 27   Alors, c'est bien Gunnar Westlund dont il s'agit. Je voudrais la page

 28   suivante.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Page suivante.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Point numéro 3, je cite:

  4   "En avril 1995, à un moment, j'ai regardé par la fenêtre et j'ai vu un

  5   véhicule des Nations Unies à bord duquel apparemment aucun observateur des

  6   Nations Unies ne se trouvait. Le véhicule était à 200 mètres de notre

  7   bâtiment. Les observateurs des Nations Unies étaient toujours très

  8   prudents, ils faisaient attention à nous prévenir à chaque fois que nous

  9   avions à quitter les zones auxquelles nous étions assignés pour entrer les

 10   zones couvertes par une autre équipe. Cependant, aucune équipe ne nous

 11   avait contacté pour nous prévenir d'une visite dans notre propre zone."

 12   Et ensuite, il décrit comment cette équipe s'est éloignée. Et en dernière

 13   phrase, il dit :

 14   "D'autres observateurs des Nations Unies ont fait rapport concernant des

 15   incidents de même nature."

 16   Alors, est-ce que vous seriez d'accord pour dire que la partie serbe devait

 17   être particulièrement attentive et prudente concernant ce type d'abus des

 18   véhicules et des insignes des Nations Unies, qui semblaient procéder à des

 19   reconnaissances et se trouvaient parfois à franchir les lignes serbes,

 20   alors qu'aucun personnel des Nations Unies ne se trouvait effectivement à

 21   leur bord ? C'est bien ce que vous avez entendu dire de la bouche de

 22   Westlund, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui, théoriquement, c'était possible, mais je suis au courant d'aucun

 24   incident de la sorte.

 25   Q.  Merci. Saviez-vous que certains soldats canadiens et britanniques

 26   agissaient en qualité d'éclaireurs aériens ou de contrôleurs chargés du

 27   guidage des aéronefs de l'OTAN vers leurs cibles ?

 28   R.  Non, je n'étais pas au courant de cela, et d'ailleurs cela ne


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  1   m'intéressait pas du tout. Moi, c'était ma mission qui m'intéressait.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, je regarde la

  3   pendule. Afin d'organiser le reste de la journée, j'ai besoin de savoir de

  4   combien de temps vous avez encore besoin ?

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense être en mesure de finir en une

  6   quinzaine de minutes.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais le maximum de la bande audio

  8   c'est une heure 40, donc il va nous falloir faire une pause.

  9   Nous reprendrons à 13 heures.

 10   --- L'audience est suspendue à 12 heures 33.

 11   --- L'audience est reprise à 13 heures 01.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  On vous a dit que vous étiez sous la supervision de la VRS. Est-ce que

 16   vous étiez détenus en tant que prisonniers de guerre ? Est-ce que quelqu'un

 17   a mentionné cette appellation ?

 18   R.  Non, personne n'a mis un nom sur notre statut.

 19   Q.  Merci.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais que l'on consulte maintenant le

 21   document 1D3059 pour mieux comprendre ce que Harley Alves a dit dans sa

 22   déclaration.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Harley Alves était avec vous, n'est-ce pas ?

 25   R.  Quelle était sa nationalité ? Parce que vous parlez de Harley -- est-ce

 26   que c'était le Brésilien ?

 27   Q.  Je crois qu'il était Brésilien.

 28   R.  Si c'est le même Harley que j'ai mentionné précédemment, qui était donc


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  1   Brésilien, eh bien, j'ai fait sa connaissance parce qu'il était présent

  2   avec moi à la caserne, et je vous ai parlé des contacts que nous avons eus

  3   précédemment.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait consulter maintenant

  5   la page 3 de ce document, s'il vous plaît.

  6   Un instant, s'il vous plaît. C'est peut-être la page 2. Ah non, c'est

  7   ici.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Au dernier paragraphe : 

 10   "Ils ont apporté des journaux espagnols. Par conséquent, nous savions que

 11   nous étions considérés des prisonniers de guerre par ce qu'ils appelaient

 12   la Republika Srpska. Ensuite, nous avons essayé de nous organiser en tant

 13   que prisonniers de guerre, et nous avons donné une lettre avec des

 14   doléances à l'attention de Vojvodic. Nous voulions être en mesure d'entrer

 15   en contact avec nos familles, de regarder les nouvelles, et de bénéficier

 16   d'une visite du CICR, de médecins, et nous voulions également être en

 17   contact avec Koljevic. Nous avons également demandé de sortir pour pouvoir

 18   prendre une douche."

 19   Votre collègue avait très clairement mentionné que son statut était le

 20   statut de prisonnier de guerre. Est-ce que c'est bien ce que votre collègue

 21   mentionne dans sa déclaration ?

 22   R.  Dans ma déclaration, je n'ai pas mentionné cela. Mais le cinquième ou

 23   le sixième jour, dans la caserne où nous avons été détenus lors de la fin

 24   de notre détention, nous avons décidé de rédiger une lettre de doléances

 25   concernant l'endroit où nous étions détenus. Nous avons préparé une liste

 26   de doléances, et nous avons transmis cela à l'officier qui était

 27   responsable. Il s'appelait Vojvodic. Je ne me souviens pas ce qui était

 28   mentionné exactement dans la liste de doléances, mais je peux confirmer ce


Page 10898

  1   qui s'est passé, c'est-à-dire que nous avons demandé à pouvoir entrer en

  2   contact avec notre famille et d'avoir des contacts avec la Croix-Rouge.

  3   C'est peut-être après cette lettre que la Croix-Rouge est arrivée, et les

  4   sanctions étaient moins strictes, et nous avons pu sortir de l'endroit où

  5   nous étions détenus et nous avons pu marcher à l'extérieur dans une zone

  6   bien délimitée. C'est ce dont je me souviens.  

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  8   Est-ce que l'on pourrait maintenant consulter le document 1D3058.

  9   Zlatko Kozusnik, voilà, c'est sa déclaration. Voyons voir ce qu'il avait à

 10   dire.

 11   Pourrions-nous passer à la page 5 de sa déclaration, s'il vous plaît.

 12   Deuxième phrase du quatrième paragraphe :

 13   "Personnellement, je voudrais dire que je me sentais beaucoup plus en

 14   sécurité qu'au SE-1, parce que la population locale était en colère en

 15   raison des frappes aériennes de l'OTAN."

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Etes-vous d'accord avec ce que Zlatko Kozusnik dit dans sa déclaration

 18   ?

 19   R.  Oui, je suis d'accord. Et si vous me le permettez, je souhaiterais

 20   rajouter que nous essayions de nous réconforter, pour des raisons

 21   pratiques. Nous avons pu déterminer qu'il y avait des discussions en cours

 22   et que notre situation serait résolue d'une manière ou d'une autre, mais

 23   cela n'a pas changé le fait que si les discussions évoluaient dans la

 24   mauvaise direction, nous reviendrions au point de départ.

 25   Q.  Au moment des faits, vous étiez un officier d'active, n'est-ce pas,

 26   vous étiez un militaire et un membre de l'OTAN -- ou plutôt un membre des

 27   Nations Unies ?

 28   R.  Vous parlez de la totalité de ma mission, à quel moment dans le temps ?


Page 10899

  1   Vous parlez de ma mission en tant que militaire ou au moment où les

  2   problèmes ont commencé ? Veuillez préciser.

  3   Q.  Je parle du moment où vous avez été arrêté. Vous étiez militaire et

  4   vous serviez au sein des forces des Nations Unies, n'est-ce pas ?

  5   R.  Lorsque je disais que j'étais militaire, mon rôle principal était

  6   d'être en contact avec le QG de Sarajevo. Comme je le disais, j'étais de

  7   garde radio, j'étais également responsable des contacts radio entrants,

  8   c'est-à-dire de tous ceux qui cherchaient à entrer en contact avec notre

  9   équipe. Voilà donc ma mission, à l'époque, alors que d'autres collègues

 10   pouvaient également mener à bien d'autres activités, peut-être des choses

 11   personnelles ou d'autres choses.

 12   Q.  Mais vous étiez tous des militaires au sein des forces Nations Unies,

 13   n'est-ce pas ?

 14   R.  A ma connaissance, oui, nous étions tous des militaires d'active dans

 15   nos forces nationales respectives, et détachés aux Nations Unies.

 16   Q.  Mais vous étiez également militaire au sein des forces des Nations

 17   Unies lorsque vous avez été arrêtés, n'est-ce pas ?

 18   R.  Bien sûr. La procédure fonctionnait de la manière suivante : les forces

 19   armées du pays d'origine de chacun de ces observateurs militaires des

 20   Nations Unies devaient détacher ses militaires à la mission des Nations

 21   Unies; les documents étaient signés, et nous prenions nos consignes auprès

 22   du commandement des Nations Unies, en d'autres termes, le secrétaire

 23   général des Nations Unies. A un moment donné, par exemple, mes supérieurs

 24   hiérarchiques en Pologne n'étaient plus de facto mes supérieurs.

 25   Q.  Merci. Nous parlons des observateurs des Nations Unies, mais également

 26   d'autres personnes ayant d'autres missions. Est-ce que vous vous souvenez

 27   de nous en avoir parlé aux pages 39 et 40, est-ce que vous vous souvenez

 28   d'un document que Mme Sutherland vous a présenté avec une liste de 26


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  1   hommes qui avaient été placés en état d'arrestation ? Est-ce que vous vous

  2   souvenez que sur cette liste il y en avait que huit qui étaient des

  3   observateurs militaires des Nations Unies, alors que les 18 autres

  4   n'étaient pas observateurs militaires ? Est-ce que vous vous souvenez de ce

  5   document ou est-ce que vous voulez que je l'affiche à nouveau ?

  6   R.  J'ai vu ce document hier, et je l'ai revu aujourd'hui. Et j'ai

  7   mentionné les noms des personnes que je connaissais. Quant aux autres, je

  8   ne les connais pas, je ne sais pas où est-ce qu'elles travaillaient. C'est

  9   sur la base de ce document que j'ai découvert qu'il ne s'agissait pas

 10   d'observateurs militaires des Nations Unies. C'est tout ce que je sais à ce

 11   sujet.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci beaucoup, Colonel. Je suis désolé qu'au

 13   moment des hostilités avec l'OTAN, vous vous soyez retrouvé dans la zone en

 14   question, mais je suis ravi que les choses se soient finalement bien

 15   passées pour vous. Je vous remercie, et je n'ai pas d'autres questions à

 16   poser.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland, avez-vous des

 18   questions supplémentaires.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur le Témoin, ceci met un terme à

 21   votre déposition. Au nom du Tribunal et de mes collègues, nous vous

 22   remercions d'être venu déposer. Vous pouvez maintenant disposer, nous vous

 23   souhaitons un bon retour chez vous.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Mesdames,

 25   Messieurs les Juges.

 26   [Le témoin se retire]

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, je suppose qu'il n'y a

 28   pas d'autre témoin à comparaître aujourd'hui.


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  1   M. TIEGER : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que l'on peut passer à huis clos

  3   partiel, très rapidement, s'il vous plaît.

  4  [Audience à huis clos partiel] [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour ce qui est du troisième témoin

  6   prévu pour la semaine prochaine, Monsieur Zecevic, les Juges de la Chambre

  7   sont au courant des efforts consentis par le Greffe, et remercient le

  8   Greffe d'avoir accéléré le processus de présentation de l'assignation à

  9   comparaître pour le témoin. Mais tant que cette assignation n'est pas

 10   signifiée et que nous n'avons pas de réaction du témoin quant à cette

 11   assignation à comparaître -- je vous demande une seconde, s'il vous plaît.

 12   Est-ce que les choses ont évolué ?

 13   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, je viens de prendre

 15   lecture des informations, j'aimerais savoir si vous avez quelque chose à

 16   rajouter. Je suppose que la Défense n'a pas encore été informée.

 17   Oui, Monsieur Tieger.

 18   M. TIEGER : [interprétation] Je suppose que les Juges de la Chambre

 19   consultent l'information qui a été fournie à 13 heures 09. Je n'ai pas

 20   d'information supplémentaire depuis. Je pourrais peut-être fournir aux

 21   Juges de la Chambre des précisions, parce que j'ai été en mesure de suivre

 22   tout cela, donc il y a peut-être des éléments qui ne sont pas encore

 23   complètement clairs.

 24   Je ne sais pas ce que les Juges de la Chambre souhaitent faire --

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde. Il n'y a pas de raison de

 26   ne pas informer la Défense de cette évolution.

 27   M. TIEGER : [interprétation] Je pense qu'ils seront tout à fait au courant

 28   du reste.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors dans ce cas-là, je vais donner

  2   lecture de ce que nous avons reçu pour information, à l'attention de M.

  3   Karadzic et de Me Robinson.

  4   C'est un e-mail du Greffe à l'attention de l'équipe du bureau du Procureur.

  5   "Le témoin a informé la Section d'Aide aux Victimes et aux Témoins

  6   que l'assignation à comparaître a été signifiée aujourd'hui à 18 heures 33.

  7   M. Zecevic a répondu à la Section des Témoins et des Victimes que, étant

  8   tout à fait conscient des conséquences de sa décision, il a décidé de ne

  9   pas comparaître devant les Juges de la Chambre dans l'affaire Karadzic à La

 10   Haye, ni par visioconférence, avec la raison principale le fait qu'il ne

 11   souhaite pas être un témoin à charge et en raison secondaire son état de

 12   santé qui n'est pas très bon."

 13   Est-ce que vous avez quelque chose à rajouter, Monsieur   Tieger ?

 14   M. TIEGER : [interprétation] Eh bien, en fait, il y a deux éléments qui

 15   peuvent être soulevés.

 16   Avant de recevoir ceci, je crois que les choses étaient encore moins

 17   claires qu'elles ne le sont maintenant, et nous avions décidé que nous

 18   avertirions les Juges de la Chambre et la Défense d'un autre témoin qui

 19   pourrait comparaître si ce troisième témoin décidait de ne pas comparaître,

 20   ce qui est le cas maintenant. Bien sûr, pour diverses raisons, les

 21   informations que les Juges de la Chambre viennent de lire constituent une

 22   confirmation de ce que nous savions déjà, à savoir que le témoin ne

 23   souhaite pas venir comparaître de son propre chef, et il est également

 24   mentionné son état de santé. Il semble que nous aurions des informations

 25   supplémentaires puisque des documents médicaux ont été transmis. Par

 26   conséquent, la position de l'Accusation reste inchangée. Nous avons demandé

 27   une assignation à comparaître pour les raisons mentionnées, et ceci ne fait

 28   que confirmer les informations que nous avons reçues. Nous voulons aller de


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  1   l'avant, et nous espérons que ceci aura lieu aussi rapidement que possible.

  2   La Section des Témoins et des Victimes avait laissé penser qu'il n'y

  3   aurait pas de traitement de documents liés aux visas en raison de la

  4   situation du témoin. Je ne sais pas si ça a vraiment du sens, mais peut-

  5   être que vous voulez le faire pour vous assurer que cette assignation à

  6   comparaître est pleinement en vigueur, donc qu'il est possible que ce

  7   problème survienne. Mais deuxièmement, l'Accusation a fait tout ce qui

  8   était en son pouvoir pour répondre à cet imprévu, à savoir que ce témoin ne

  9   comparaisse pas et, dans ce cas-là, qu'il ne soit pas présent pour déposer

 10   mercredi matin.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si j'ai bien compris, vous allez donc

 12   faire de votre mieux pour régler cette situation.

 13   M. TIEGER : [interprétation] Nous essayons de le faire et nous allons

 14   continuer à le faire, mais nous ne pouvons pas faire plus que ce que nous

 15   faisons. Je crois que c'était implicite dans notre assignation à

 16   comparaître. Nous nous en tiendrons à la position qui figure dans notre

 17   demande d'assignation à comparaître, et nous espérons que cette assignation

 18   à comparaître sera appliquée pleinement.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous pourrions demander à la

 20   [comme interprété] juriste de la Chambre de consulter avec moi-même et mes

 21   collègues.

 22   [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien. Nous revenons en audience

 24   publique.

 25   Maître Robinson, est-ce que vous avez un commentaire à faire avant de

 26   repasser en audience publique ?

 27   M. ROBINSON : [interprétation] Nous ne sommes pas préoccupés par

 28   l'application de l'assignation à comparaître, mais tant que l'on ne fait


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  1   pas une injonction au témoin de comparaître, la question serait prématurée

  2   de savoir comment on fait appliquer pleinement l'assignation à comparaître.

  3   Donc, si mercredi le témoin n'est pas là à comparaître, nous pourrons

  4   traiter de cela à ce moment. Je pense au calendrier, mais je ne pense pas

  5   qu'il y aura beaucoup de témoins qui pourraient faire l'objet d'un contre-

  6   interrogatoire, compte tenu du préavis qu'on vient de nous donner. Il y a

  7   peut-être une ou deux personnes qui auraient des dépositions assez limitées

  8   et qui nous permettraient de traiter un contre-interrogatoire la semaine

  9   prochaine. Mais étant donné que nous sommes à l'orée du week-end, il est

 10   très difficile de préparer un contre-interrogatoire de quelqu'un que nous

 11   ne connaissons pas encore.

 12   Et je peux également mentionner, ou peut-être qu'on pourrait passer

 13   en audience publique.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans ce cas-là, passons en audience

 15   publique.

 16   Nous sommes en audience publique.

 17   [Audience publique]

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Poursuivez, Maître Robinson.

 19   M. ROBINSON : [interprétation] Pour ce qui est du calendrier de la semaine

 20   prochaine, je voulais attirer votre attention sur le fait qu'étant donné

 21   que le procès recommençait le 13 janvier, nous avons reçu environ 18 ou 19

 22   lots de communication de documents en vertu de l'article 68 et 68(a) [comme

 23   interprété]. Il s'agit de centaines de documents qui doivent être consultés

 24   par les membres de notre équipe pour savoir s'ils seront pertinents pour le

 25   témoin à venir ou si cela fait l'objet de cette requête de violation pour

 26   non-communication.

 27   Deux requêtes ont été déposées aujourd'hui. Il y en a deux autres

 28   qui, je crois, seront déposées lundi et peut-être encore une autre la


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  1   semaine prochaine, mais nous accusons énormément de retard pour examiner

  2   les différents documents issus de ces communications et, par conséquent, il

  3   est difficile de garder la cadence et de nous préparer aux différents

  4   contre-interrogatoires. Si, en fait, nous avons une ou deux journées la

  5   semaine prochaine où il n'y aura pas d'audience, je peux vous assurer que

  6   nous mettrons ce temps à profit et que ce ne sera pas du tout une perte de

  7   temps compte tenu des problèmes que nous rencontrons au vu de ces

  8   communications tardives ou ces violations aux conditions de communication

  9   d'information à la Défense.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 11   Nous levons l'audience pour aujourd'hui, et nous reprendrons lundi, à

 12   9 heures. Je vous prie de m'excuser, à 14 heures 30. De 14 heures 30 à 18

 13   heures 30.

 14   Merci.

 15   --- L'audience est levée à 13 heures 27 et reprendra le lundi 31

 16   janvier 2011, à 14 heures 30.

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