Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 9 février 2011

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous.

  6   Bonjour, Maître Robinson. Vous vouliez prendre la parole.

  7   M. ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  8   Bonjour à tous.

  9   M. Tieger et moi-même nous nous sommes entretenus sur la question de

 10   l'article 70 et le fait de savoir si cela s'appliquait à la déposition du

 11   général Smith compte tenu des événements qui se sont produits le 27 mai, et

 12   je pense que nous devrions, par conséquent, passer à huis clos partiel pour

 13   cette partie de notre audience d'aujourd'hui.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, allons-y.

 15   Voilà, nous y sommes.

 16  [Audience à huis clos partiel] [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] En fait, je voulais vous informer que la

 18   Juge Lattanzi n'était pas présente aujourd'hui, compte tenu de questions

 19   urgentes qui sont survenues.

 20   Oui, Maître Robinson.

 21   M. ROBINSON : [interprétation] Vous vous souviendrez qu'hier, concernant

 22   l'incident pour Vrbanja le 27 mai 1995, nous nous sommes demandés s'il

 23   fallait entendre la déposition du témoin à huis clos partiel. Ce matin, M.

 24   Tieger nous a transmis une lettre qui avait été envoyée le 5 février 2010,

 25   et il est possible que cela soit également utile aux Juges de la Chambre,

 26   et si nécessaire, je peux vous transmettre mon exemplaire. Dans cette

 27   lettre, il est mentionné que la déclaration de témoin de Rupert Smith, du

 28   22 octobre 2009, nous a été communiquée. Il y a une condition qui est liée


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  1   à cette communication, au paragraphe 134 de cette déclaration, ce

  2   paragraphe en fait ne peut pas être communiqué aux autres parties. Je ne

  3   l'ai pas encore vu cette déclaration, mais je suppose que le paragraphe 134

  4   porte sur les incidents qui se sont produits sur le pont Vrbanja. Nous ne

  5   pensons pas, pour commencer, que cela signifie que toute déposition qui

  6   serait donnée par le général Smith concernant ce sujet est couverte ou

  7   relève de cet article 70.

  8   Nous avons également reçu une déclaration consolidée un peu plus tôt dans

  9   l'année, et ceci porte sur plusieurs paragraphes concernant les incidents

 10   du pont Vrbanja, et aucune condition n'a été apportée à la communication de

 11   ces éléments.

 12   De plus, les incidents sur le pont Vrbanja sont repris dans plusieurs

 13   documents que nous avons l'intention d'utiliser durant notre contre-

 14   interrogatoire et ils nous ont été transmis par les Nations Unies sans pour

 15   autant les assortir des conditions de l'article 70; par conséquent, nous

 16   n'avons pas l'intention d'utiliser les déclarations qui sont couvertes dans

 17   l'article 70, et peut-être que ces questions pourraient être posées à huis

 18   clos partiel.

 19   Mais en même temps, nous ne souhaiterions pas que toute discussion portant

 20   sur les incidents du pont Vrbanja soient abordée à huis clos partiel. Si

 21   tel était le cas, nous pensons que ceci irait à l'encontre des droits de

 22   l'accusé, et nous demanderions d'exclure la déposition du général Smith en

 23   résultat de cela, parce que nous pensons que ceci signifie que vous

 24   permettait d'entendre des éléments concernant la prise d'otages par les

 25   Serbes de Bosnie et, par contre, vous ne voulez pas entendre, en public ou

 26   en audience publique, des éléments concernant des Serbes qui auraient été

 27   faits prisonniers et comment également la négociation aurait eu lieu pour

 28   leur échange. Donc nous pensons que ceci ne serait pas équitable, et que ce


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  1   serait une présentation qui nous serait donc pas juste des différents

  2   éléments tant en audience publique qu'en audience à huis clos partiel

  3   concernant le Chef d'accusation numéro 11.

  4   Merci.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait avoir un

  6   exemplaire de cette lettre, s'il vous plaît ?

  7   Oui, Monsieur Tieger.

  8   M. TIEGER : [interprétation] En fait, je pense que ce problème est

  9   relativement simple, et n'est que compliqué par la Défense.

 10   Quelques points de précision, tout d'abord.

 11   Tout d'abord, ce n'est pas un accord en vertu de l'article 70. Les

 12   informations ont été transmises sur cette base, et vous savez que les Juges

 13   de la Chambre ne sont pas sans savoir que ces informations communiquées en

 14   vertu de l'article 70 sont assorties de condition.

 15   De plus, il s'agit d'un procès, et non d'effort de relations publiques quel

 16   qu'il soit, ce qui signifie que les Juges de la Chambre seront pleinement

 17   informés de tous les événements qui se sont produits, dans la mesure où ce

 18   sera possible de le faire par le truchement de témoins, et c'est la raison

 19   pour laquelle ces informations ont été communiquées de façon à ce qu'elle

 20   puisse être abordées avec les Juges de la Chambre, même si ceci se fait à

 21   huis clos partiel.

 22   Le distinguo que fait Me Robinson entre la nature de la communication

 23   concernant la déposition du témoin est en fait une distinction ou un

 24   distinguo qui est plutôt spécieux. A la lecture de ceci, nous sommes tout à

 25   fait conscients que ces informations relèvent d'un élément très limité dans

 26   la déposition, mais relève, cependant, de restrictions qui ont été

 27   demandées par le fournisseur de ces informations.

 28   Quoi qu'il en soit, l'impact sur l'équité de ce procès n'est pas seulement


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  1   négligeable, mais elle n'existe pas, pour ainsi dire.

  2   Comme Me Robinson l'a dit, cet incident est important, puisqu'il va

  3   être également abordé par la Défense. Ils vont pouvoir en parler. Ils

  4   n'auront qu'une restriction quant à la manière dont ils vont aborder ce

  5   sujet. Le témoin devra fournir des informations aux Juges de la Chambre, et

  6   les Juges de la Chambre pourront se fier à cette déposition dans la mesure

  7   où ils la considéreront utile. Il est possible que certains éléments soient

  8   fournis par le témoin à huis clos partiel. Maintenant, la Défense peut tout

  9   à fait aborder ceci et alerter le public dans son ensemble. La seule

 10   restriction est le fait que l'on ne peut pas citer les dépositions du

 11   témoin qui sont frappées de cet article 70 en public.

 12   Comme les Juges de la Chambre le savent, le Tribunal se connaît de

 13   problèmes de ce type régulièrement, et tout ce qui est mentionné, par

 14   exemple, dans les mémoires en clôture ou dans les réquisitoires ou dans les

 15   plaidoiries qui aurait trait à des dépositions entendues à huis clos

 16   partiel, doivent également être abordés à huis clos partiel.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne suis pas sûr de vous suivre dans

 18   la totalité de vos arguments. J'aimerais savoir quelles sont les

 19   informations qui ont été transmises conformément à l'article 70

 20   M. TIEGER : [interprétation] Ce témoin est un témoin relevant de l'article

 21   70 --

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne comprends pas ce que vous entendez

 23   par là. Est-ce que ce témoin nous est "prêté", entre guillemets, par les

 24   Nations Unies ?

 25   M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Par conséquent,

 26   nous devons avoir l'autorisation des Nations Unies pour faire déposer un

 27   témoin de ce type, et la seule restriction est celle que nous venons de

 28   vous mentionner. D'autres restrictions auraient pu être imposées par ceux


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  1   qui avaient fourni ces informations, mais ils ne l'ont pas fait. Ces

  2   restrictions auraient pu être beaucoup plus importantes que celle qui est

  3   relativement limitée à l'heure actuelle, et qui est donc imposée par les

  4   Nations Unies.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Par conséquent, si je vous comprends

  6   bien, afin d'entendre la déposition de ce témoin, vous avez dû obtenir

  7   l'autorisation des Nations Unies, et les Nations Unies ont imposé cette

  8   condition; est-ce exact ?

  9   M. TIEGER : [interprétation] Oui.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez, si vous

 11   voulez, répéter la condition qui a été imposée par les Nations Unies ?

 12   M. TIEGER : [interprétation] Cela porte sur les informations concernant la

 13   détention de quatre personnes par la FORPRONU.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Parce que nous n'avons pas la

 15   déclaration devant nous, ni le paragraphe en question.

 16   M. TIEGER : [interprétation] Si vous voulez, il s'agit d'informations qui

 17   concernent la détention de ces quatre personnes et ces informations

 18   figurent dans ce paragraphe, et ce paragraphe est beaucoup plus vaste ou

 19   couvre plus d'aspects que celui-ci, et dans la déclaration, milieu de

 20   paragraphe, il est mentionné :

 21   "Nous avons détenu quatre prisonniers serbes de Bosnie," et cetera,

 22   et cetera.

 23   Il y a également d'autres informations dans le paragraphe qui ne font

 24   pas l'objet de cette restriction en vertu de l'article 70.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez préciser ce que

 26   vous entendez par là, lorsque vous dites : "Il n'y a pas de restriction à

 27   aborder, ceci, dans la mesure où ils sont au courant de cet incident" ?

 28   M. TIEGER : [interprétation] La Défense peut poser des questions à d'autres


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  1   témoins concernant cet incident si ces autres témoins ne sont pas frappés

  2   de restrictions quant à l'étendue ou au périmètre de leur déposition. Il

  3   n'y a pas de restrictions ni d'obstacles qui seraient imposés à la Défense

  4   en la matière.

  5   Maintenant, pour ce qui est du document qui a suscité ces discussions ou

  6   qui a déclenché ces discussions, ce document a été fourni à la condition

  7   qu'il soit utilisé à huis clos partiel.

  8   Pour ce qui est d'autres témoins, qui ne seront pas frappés de

  9   restrictions telles que celui-ci, la Défense peut poser toutes les

 10   questions qu'elle souhaite. Me Robinson a déjà mentionné qu'il est déjà au

 11   courant du fait qu'il y a des documents qui ne sont pas frappés des mêmes

 12   restrictions.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que la déclaration du

 14   témoin du 22 octobre est sur le prétoire électronique ? Et si tel n'est pas

 15   le cas, est-ce que vous pouvez la télécharger ou nous transmettre un

 16   exemplaire ?

 17   M. TIEGER : [interprétation] Je crois que cette déclaration figure déjà sur

 18   le système de prétoire électronique.

 19   A l'attention du Greffier d'audience, il s'agit du document de la

 20   liste 65 ter 22686.

 21   [La Chambre de première instance se concerte]

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce document porte la date des 25 et 26

 23   juin, ainsi que du 21 septembre. Il ne semble pas qu'il y ait de

 24   commentaire concernant le pont Vrbanja.

 25   M. TIEGER : [interprétation] Oui. Je voulais en fait apporter une précision

 26   à cela, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

 27   Il n'y a pas de restrictions qui ont été apportées sur les discussions

 28   concernant l'incident du pont Vrbanja. Vous avez tout à fait raisons;


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  1   cependant, la restriction porte sur ces quatre personnes qui ont été

  2   détenues. Mais il est difficile en fait d'enlever uniquement cela. Il est

  3   possible en fait de poser des questions à des personnes qui n'ont pas fait

  4   l'objet de restrictions dans leur déposition, des questions concernant

  5   l'incident du pont Vrbanja. Mais si l'on pose des questions à des personnes

  6   qui sont frappées de restrictions dans le cadre de leur déposition, des

  7   questions qui seraient accessoires à l'incident du pont Vrbanja, ceci

  8   pourrait emmener le témoin à parler de cet incident précis et, par

  9   conséquent, il est difficile de limiter le témoin dans ses réponses pour

 10   lui éviter d'aborder la question de ces quatre personnes détenues dans le

 11   cadre de l'incident du pont Vrbanja. En fait, il serait quasiment

 12   impossible pour les témoins de parler de l'incident du pont Vrbanja sans

 13   pour autant en même temps parler de l'incident concernant ces quatre

 14   personnes détenues.

 15   Mais je pense que les Juges de la Chambre ont raison, il y a une

 16   distinction. Mais en même temps, d'un point de vue pratique, ce sera très

 17   difficile de faire la part des choses.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'ai du mal à comprendre quelle est la

 19   condition qui a été imposée. Mais j'aimerais savoir pourquoi les Juges de

 20   la Chambre n'ont pas été informés des conditions qui étaient imposées avant

 21   d'entendre la déposition de ce témoin ? Pourquoi ne pas avoir informé les

 22   Juges de la Chambre ? Parce que nous aurions pu avoir la possibilité

 23   également de ne pas du tout faire déposer ce témoin, dans ce cas-là, si les

 24   Juges de la Chambre avaient l'impression que ceci n'allait pas dans le sens

 25   de l'intérêt de la justice.

 26   M. TIEGER : [interprétation] Je vous ai déjà fait part de nos arguments

 27   concernant le procès équitable. Nous pensions que ce sera la Défense qui se

 28   serait manifestée, étant donné qu'ils ont eu ces éléments depuis environ un


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  1   an. Et nous ne pensions pas qu'il y aurait eu un problème et nous ne

  2   pensions pas qu'il aurait dû y avoir un problème en la matière.

  3   Mais je suis d'accord avec vous, dans d'autres circonstances, les

  4   Juges de la Chambre auraient pu se saisir de cette question. Mais nous ne

  5   pensions pas que ce problème serait survenu. Je maintiens que, selon moi,

  6   il ne s'agit pas d'un problème d'une telle importance qui ne puisse pas

  7   être réglé de cette manière. En d'autres termes, les préoccupations de la

  8   Défense nous ont été mentionnées que très récemment.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'après cet échange entre

 10   l'Accusation et la Défense, et j'en donne lecture :

 11   "Veuillez être informé du fait que la déclaration de ce témoin est

 12   fournie avec les conditions qui portent sur l'information concernant la

 13   détention de quatre personnes par les forces de la FORPRONU. Ces

 14   informations figurent au paragraphe 134 de cette déclaration, dudit

 15   témoin."

 16   Pour ce qui est de ces quatre personnes et de l'incident associé à

 17   ces quatre personnes, les discussions devraient être régies par les

 18   conditions de l'article 70. C'est tout ce qui a été mentionné par les

 19   Nations Unies. Par exemple, vous avez cette première phrase, et ensuite la

 20   deuxième phrase.

 21   M. TIEGER : [interprétation] Oui, c'est exact.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Robinson.

 23   M. ROBINSON : [interprétation] Je pense que l'on devrait avoir pris

 24   connaissance des échanges de lettres entre les Nations Unies et

 25   l'Accusation.

 26   Nous ne comprenons pas exactement quelles sont les conditions qui ont

 27   été exigées par le fournisseur de ces informations en vertu de l'article

 28   70. Donc nous aimerions savoir quel est le périmètre de la condition et


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  1   ensuite nous pourrions décider savoir si ceci signifie qu'il ne s'agit pas

  2   d'un procès équitable.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Comme Me Robinson vient de le

  4   mentionner, ces conditions ont été imposées à la déposition de ce témoin,

  5   elles ne semblent pas être vraiment très claires. Est-ce que vous pourriez

  6   nous rappeler quelles sont ces conditions exactement ?

  7   M. TIEGER : [interprétation] Cela porte sur l'information concernant les

  8   détentions de quatre personnes par la FORPRONU durant cette période. Comme

  9   vous le voyez au paragraphe sus mentionné, Monsieur le Président, Messieurs

 10   les Juges, et donc la communication de ces informations devrait se limiter

 11   à l'accusé, aux conseils et aux experts juridiques de l'accusé ainsi qu'au

 12   Tribunal. Elles ne pourront pas être transmises à d'autres parties, quelle

 13   qu'elle soit. Dans le cas où ces éléments seraient abordés dans la

 14   déposition du témoin, cela ne devrait pas faire partie des éléments publics

 15   de ce procès.

 16   C'est la raison pour laquelle nous souhaitions passer à huis clos

 17   partiel pour cette partie de la déposition.

 18   [La Chambre de première instance se concerte]

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous ne comprenons pas personnes

 20   exactement, peut-être que la Défense ou l'Accusation pourrait nous aider.

 21   Nous aimerions savoir comment l'incident du pont de Vrbanja est lié à la

 22   détention des ces quatre personnes.

 23   M. TIEGER : [interprétation] Je crois que vous comprendrez le

 24   contexte. Dans la déclaration consolidée du témoin, il s'agit d'un incident

 25   durant lequel les soldats serbes de Bosnie ont attaqué des soldats français

 26   qui se trouvaient sur le point Vrbanja. Durant cet incident, des soldats

 27   français ont été blessés, d'autres ont été tués. Le contrôle du pont a été

 28   donc repris des Serbes de Bosnie, et durant cette reprise du contrôle du


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  1   pont, certains soldats serbes de Bosnie ont été détenus. Comme Me Robinson

  2   a mentionné, cela s'est produit le 27 mai, et durant cette conversation

  3   téléphonique entre les témoins et le général Mladic, le 28 mai, que nous

  4   avons commencé à étudier hier, par le biais du document de la liste 65 ter

  5   0315, on mentionne cet incident et on mentionne également ces soldats

  6   bosno-serbes.

  7   [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, est-ce que l'on peut

  9   aborder le paragraphe 128 en audience publique ?

 10   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, je comprends ce que les

 11   Juges de la Chambre souhaitent aborder ici. Je me suis penché là-dessus, et

 12   j'ai envisagé toutes les possibilités. Je pense qu'il serait injuste de

 13   laisser penser que le fournisseur de ces informations a abordé la question

 14   du paragraphe 134, et que ce faisant, il ne souhaitait pas inclure d'autres

 15   références concernant la même information. Je comprends que cela puisse

 16   paraître comme une incohérence, mais en même temps, je pense qu'on pourrait

 17   juger logique que compte tenu du fait qu'ils ont vraiment mis l'accent sur

 18   les informations qui devaient être abordées à huis clos partiel, on devrait

 19   également incorporer celles-ci. Cela devrait donc s'étendre à d'autres

 20   informations même si celles-ci n'ont pas été mentionnées nommément par le

 21   fournisseur de l'information.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous nous demandez donc d'entendre cette

 23   partie de la déposition du témoin à huis clos partiel ?

 24   M. TIEGER : [interprétation] Je pense que ceci permettrait de nous

 25   conformer aux restrictions qui ont été imposées par le fournisseur de ces

 26   informations.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 28   [La Chambre de première instance se concerte]


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous devons faire montre de notre

  2   déception compte tenu du fait que nous avons été informés tardivement des

  3   conditions imposées à sa déposition, ce qui nous empêche de prendre des

  4   mesures au préalable, mais nous considérons que, pour des raisons

  5   pratiques, les Juges de la Chambre donc considèrent qu'il est préférable de

  6   se conformer à ces conditions qui ont été imposées, et toutes questions et

  7   réponses concernant l'incident du pont de Vrbanja sera traité à huis clos

  8   partiel. Ensuite nous verrons s'il est possible de rendre public certaines

  9   parties de sa déposition a posteriori, par exemple, les parties du compte

 10   rendu d'audience qui ne mentionneront pas le fait que quatre Bosno-Serbes

 11   ont été détenus par la FORPRONU. Nous verrons donc si l'on peut régler cela

 12   ultérieurement.

 13   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Monsieur Tieger, est-ce que c'est

 14   simplement le fait que quatre soldats bosno-serbes ont été détenus et que

 15   ceci n'était pas connu du public qui était important ?

 16   M. TIEGER : [interprétation] Oui, effectivement.

 17   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Donc le fait que quatre personnes

 18   étaient détenues, et la période de leur détention, était dans le domaine

 19   public à l'époque ?

 20   M. TIEGER : [interprétation] Oui, cela fait peut-être partie déjà des

 21   documents publics dans cette affaire.

 22   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui, c'était en fait ce à quoi je

 23   pensais. Mais il faudra vérifier si cela est le cas.

 24   M. TIEGER : [aucune interprétation]

 25   M. LE JUGE MORRISON : [aucune interprétation]

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je présume que les intentions des Juges

 27   sont claires pour toutes les parties.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais juste dire une chose pour le compte


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  1   rendu d'audience, s'il vous plaît.

  2   Il me semble que ceci est un cas flagrant de "quod licet iovi, quod licet

  3   bovi" et je ne suis pas satisfait de la décision qui a été prise.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, on ne vous interdit

  5   pas de poser des questions. Mais concernant cette partie de la déposition

  6   du témoin ceci devrait être fait à huis clos partiel.

  7   Revenons maintenant en audience publique.

  8   [Audience publique]

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, je

 10   répète que nous siégeons aujourd'hui en application de l'article 15 bis, en

 11   l'absence de la Juge Lattanzi, qui a dû s'absenter suite à des événements

 12   urgents.

 13   Faisons maintenant entrer le témoin, s'il vous plaît.

 14   Alors nous sommes en audience publique, Monsieur Karadzic. Voici ce qui est

 15   tout à fait clair concernant ce sujet, vous pouvez l'aborder en public avec

 16   tout autre témoin que celui-ci, avec ce témoin-ci vous n'avez pas le droit

 17   de le faire. C'est tout. Ce qui a à dire sur cette condition.

 18   [Le témoin vient à la barre]

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Général. Désolé pour ce

 20   désagrément. Nous avions des questions importantes et urgentes à aborder en

 21   votre absence.

 22   M. TIEGER : [interprétation] Peut-être qu'on installe le témoin, Monsieur

 23   le Président, peut-être pourrais-je soulever deux questions en réponse à

 24   celle mis en avant par les Juges de la Chambre hier ?

 25   Tout d'abord, vous avez posé une question lors du versement de ce document

 26   numéro 04754 de la liste 65 ter, à savoir l'agenda ou le carnet de notes de

 27   l'année 1995. Vous avez proposé que ce carnet soit versé dans son

 28   intégralité et vous avez demandé si le numéro 65 ter correspondant


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  1   comprenait bien l'ensemble de ces carnets. Il semblerait que le document

  2   21460 de la liste 65 ter corresponde à l'année 1994. Le 21459 de la liste

  3   65 ter à l'année 1996, et le premier numéro 65 ter que j'ai donné plus haut

  4   aux années 1994 et 1996. Donc je voulais juste fournir ces précisions en

  5   réponse à ce que vous posez comme question hier.

  6   Deuxièmement, vous avez demandé quelle était la date d'un document, je

  7   voudrais également vous répondre si les informations fournies à ce stade

  8   vous suffisent concernant les autres pièces à conviction.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Soit.

 10   M. TIEGER : [interprétation] Il s'agissait du document 0315 [comme

 11   interprété] de la liste 65 ter versé sous la cote P2249. C'était un

 12   document de l'état-major général. Au compte rendu d'audience on a indiqué

 13   qu'il s'agissait de la date du 28. Mais j'ai vérifié le document dans ces

 14   différentes versions donc tant qu'en B/C/S que, dans la traduction

 15   anglaise, et dans les deux cas, la date pertinente est celle du 26 mars.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous ne sommes pas dans l'obligation de

 17   verser les autres carnets que celui qui a été examiné pour le moment. Nous

 18   le ferons lorsque vous le demanderez.

 19   En tout cas, je vous remercie. Veuillez poursuivre, Monsieur Tieger.

 20   M. TIEGER : [interprétation] Merci.

 21   LE TÉMOIN : RUPERT SMITH [Reprise]

 22   [Le témoin répond par l'interprète]

 23   Interrogatoire principal par M. Tieger : [Suite]

 24   Q.  [interprétation] Bonjour, Général Smith.

 25   R.  Bonjour.

 26   M. TIEGER : [interprétation] Messieurs les Juges, à ce stade, je crois

 27   qu'il serait prudent de passer à huis clos partiel.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Soit.


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  1   Avant de ce faire, donnons la parole à Me Robinson.

  2   Maître Robinson.

  3   M. ROBINSON : [interprétation] Oui. Une fois que nous serons à huis clos

  4   partiel.

  5   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

  6  [Audience à huis clos partiel] [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

  7   M. ROBINSON : [interprétation] Je voudrais juste demander l'exclusion de la

  8   déposition du général Smith et que ceci soit consigné clairement au compte

  9   rendu d'audience à ce stade.

 10   Je voudrais également demander que l'on donne pour instruction au Procureur

 11   de s'adresser à nouveau aux Nations Unies pour obtenir des précisions quant

 12   aux restrictions imposées et à la façon dont il convient de traiter le

 13   compte rendu d'audience. L'attitude que nous avons pu constater jusqu'à

 14   présent de la part des Nations Unies a toujours été très raisonnable dans

 15   tous les procès dont j'ai pu avoir connaissance donc il n'est pas exclu que

 16   les restrictions imposées puissent être levées.

 17   Ceci dit, si ceci ne peut pas être obtenu, et si la déposition ne

 18   peut pas se poursuivre en audience publique, nous estimons que c'est le

 19   droit du Dr Karadzic a bénéficié d'un procès public qui est ici compromis,

 20   et qu'il faudrait par conséquent exclure la déposition du général Smith.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Sauf le respect que je vous dois,

 22   Maître, je dois dire que votre requête arrive bien tard.

 23   Poursuivons, en tout cas.

 24   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 25   Je voudrais que l'on affiche maintenant le document numéro 01345 de

 26   la liste 65 ter.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, Monsieur Tieger.

 28   Pour être tout à fait clair, vous n'êtes pas en train de suggérer, Maître


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  1   que nous ajournions le procès pour nous pencher sur votre requête ?

  2   M. ROBINSON : [interprétation] C'est ce que je préférais en fait. Je pense

  3   qu'il serait préférable de suspendre au moins temporairement la déposition

  4   de ce témoin, tant que cette question n'aura pas été résolue. La question

  5   de savoir si la source qui a fourni l'information insiste ou non pour

  6   maintenir ces restrictions. Je pense que ce serait une très bonne idée, en

  7   effet.

  8   [La Chambre de première instance se concerte]

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, souhaitez-vous répondre

 10   ?

 11   M. TIEGER : [interprétation] Là, je ne savais pas s'il était indispensable

 12   de répondre. Je constate avec satisfaction que je n'ai pas eu à répondre

 13   immédiatement, je peux répondre de façon plus posée. Je dirais que c'est

 14   une requête dont la portée est étrangement large.

 15   Parce que la question se pose de savoir s'il est même possible de contacter

 16   la source qui a fourni cette information compte tenu du décalage horaire

 17   avant la fin de l'interrogatoire principal de l'Accusation.

 18   Nous sommes toujours prêts à répondre aux demandes des Juges de la Chambre.

 19   Nous avons déjà demandé par ailleurs que l'on se re-penche sur la question

 20   de ces restrictions. La question de savoir si l'on pouvait s'attendre ou

 21   non à ce que ceci soit soulevé, et présent au compte rendu d'audience

 22   public et les conséquences que cela pouvait avoir du point de vue de la

 23   source, c'est donc une question tout à fait différente. Mais il est

 24   difficile de voir quel bénéfice qu'il serait possible de retirer de cette

 25   façon de procéder qui consisterait à ne pas poursuivre l'interrogatoire du

 26   témoin, de la façon qui a été proposée par les Juges de la Chambre, qui est

 27   tout à fait pragmatique, qui consiste donc à laisser de côté ce qui ne doit

 28   pas être rendu public jusqu'à ce que l'on puisse vérifier avec certitude


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  1   s'il est possible ou non de lever certaines restrictions, et s'il est

  2   possible ou non de rendre intégralement public les éléments concernés.

  3   Ce que je souhaite en tout cas, mettre en avant, c'est que de notre point

  4   de vue, il s'agirait là d'une perte inutile de temps. Je crois qu'une

  5   requête visant à exclure l'ensemble de la déposition du témoin sur le seul

  6   fondement de cette restriction extrêmement ciblée, est extrêmement loin

  7   d'être justifiée, sans parler de la question de savoir quelles en sont les

  8   motivations sous jacentes.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les Juges de la Chambre vont se

 10   consulter pendant un quart d'heure, pour prendre position sur cette

 11   question. Nous reprendrons nos débats à 10 heures.

 12   [Le témoin quitte le prétoire]

 13   --- La pause est prise à 9 heures 43.

 14   --- La pause est terminée à 10 heures 09.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Passons à huis clos partiel. Nous y

 16   sommes déjà, apparemment.

 17   C'est mon collègue le Juge Baird qui m'a dit qu'il n'y a pas de moment

 18   difficile et qu'on ne s'ennui pas du tout.

 19   Alors la Chambre s'est penchée sur les arguments avancés par la Défense et

 20   doit dire qu'elle est surprise par la nature des restrictions imposées par

 21   les Nations Unies sur cette partie de la déposition du général Smith,

 22   notamment en ce qui concerne cette information des quatre Serbes qui

 23   avaient été faits prisonniers puisque cette information fait déjà partie du

 24   domaine public. Par conséquent, elle est peut-être au compte rendu public

 25   d'autres affaires et elle pourrait se retrouver au compte rendu de l'espèce

 26   également dans sa version publique.

 27   Alors j'invite donc le Procureur à se mettre en relation immédiatement avec

 28   les Nations Unies pour obtenir des précisions quant à la nature de cette


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  1   restriction ou pour demander si elle ne pourrait pas être levée.

  2   Ceci dit, à ce stade, la Chambre n'a pas d'autre choix que d'accepter la

  3   déposition de ce témoin avec la restriction en application de l'article 70

  4   telle qu'elle existe actuellement donc, ou à l'opposé, d'exclure la

  5   déposition de ce témoin s'il devait s'avérer que le droit à un procès

  6   équitable à véritablement été compromis. Mais pour le moment, les Juges de

  7   la Chambre ne sont pas d'avis que cette position est défendable. Par

  8   conséquent, la requête de la Défense est rejetée et nous allons poursuivre

  9   avec la déposition du général Smith.

 10   Cependant, comme je l'ai dit, une fois que la déposition sera menée à son

 11   terme, les Juges de la Chambre se repencheront sur le compte rendu

 12   d'audience et consulteront l'Accusation afin de voir s'il ne serait pas

 13   possible de rendre publiques certaines de ces portions, celles qui seront

 14   considérées comme se prêtant à cet exercice.

 15   Nous espérons également, sincèrement, que les Nations Unies consentiront à

 16   lever les restrictions initialement imposées sur certaines parties de la

 17   déposition du général Smith, et nous demandons à M. le Procureur de bien

 18   vouloir transmettre aux Nations Unies toute la préoccupation qui est la

 19   nôtre sur cette question. Si la restriction en application de l'article 70

 20   pouvait être levée, le compte rendu d'audience sera rendu public dans son

 21   intégralité.

 22   Monsieur Tieger, nous attendrons les informations que vous serez en mesure

 23   de nous communiquer quant à l'évolution de vos échanges avec les Nations

 24   Unies.

 25   Ceci étant dit, nous repassons en audience publique et je voudrais que l'on

 26   fasse entrer à nouveau le témoin.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à nouveau en audience

 28   publique, Monsieur le Président.


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  1   [Audience publique]

  2   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

  3   [Le témoin vient à la barre]

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nos excuses encore une fois, Monsieur le

  5   Témoin. Veuillez vous installer confortablement.

  6   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Général Smith, nous sommes désolés

  7   de ce retard. Peut-être que vous comprendrez avec moi que ce n'est pas

  8   uniquement dans l'armée britannique que l'on se bat la nuit, sous la pluie,

  9   et dans des passes de montagnes difficiles.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] En effet.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.

 12   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 13  [Audience à huis clos partiel] [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 14   M. TIEGER : [interprétation] Je voudrais qu'on affiche le

 15   document 01345 de la liste 65 ter, s'il vous plaît.

 16   Interrogatoire principal par M. Tieger : [Suite]

 17   Q.  [interprétation] En attendant l'affichage de ce document, Général, je

 18   voudrais simplement vous signaler que nous avons discuté déjà de la prise

 19   d'otages, que nous avions abordée précédemment, ainsi que d'un certain

 20   nombre de conversations téléphoniques que vous avez eues pendant toute

 21   cette période. Alors nous allons maintenant nous pencher sur un

 22   enregistrement de ces conversations téléphoniques, une conversation

 23   téléphonique du 28 mai 1995 notamment.

 24   Alors je voudrais que nous passions quelques instants à huis clos partiel

 25   en raison d'une restriction particulière qui s'impose à votre déposition --

 26   qui est imposée à votre déposition mais qui, pour le moment, n'aura pas

 27   d'incidence. Il s'agit de la détention de quatre prisonniers bosno-serbes,

 28   qui se présentera sans doute à nouveau en temps utile. Alors, pour le


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  1   moment, je voudrais que nous parlions de cette conversation téléphonique

  2   entre vous-même et le général Mladic, conversation que vous avez eue le 28

  3   mai 1995.

  4   Alors je voudrais que l'on avance d'une page.

  5   Juste quelques éléments. Nous voyons que c'est vous qui avez été à

  6   l'origine de cet appel téléphonique de 35 minutes et de cette conversation

  7   avec le général Mladic. C'est vous qui l'avez donc appelé. Parmi les

  8   différents éléments qui ont fait l'objet de votre discussion, nous

  9   retrouvons les menaces proférées par les bosno-serbes, menaces consistant à

 10   dire qu'ils tueraient les soldats français à moins que les quatre Serbes

 11   détenus suite à l'incident du pont de Vrbanja ne soient relâchés. D'après

 12   ce document, nous voyons que vous avez discuté -- ou plutôt, que vous avez

 13   dit que vous accepteriez une discussion sur un échange de toutes les

 14   personnes détenues de part et d'autre pourvu que Mladic mette un terme à

 15   ces menaces de meurtre à l'encontre des soldats des Nations Unies et que

 16   vous obteniez une preuve que ces mêmes soldats des Nations Unies n'étaient

 17   plus utilisés comme bouclier humain.

 18   Alors au troisième paragraphe, vous voyez que Mladic semble reconnaître

 19   qu'à différents endroits des membres du personnel des Nations Unies étaient

 20   bien détenus en tant qu'otages. Il s'agissait de cibles potentielles. Plus

 21   loin dans cette discussion, on fait référence à Gorazde, et le général

 22   Mladic semble appeler de ses voeux des lettres de sympathie ou même de

 23   condoléances, et nous trouvons, je cite :

 24   "Si vous les envoyez, ces lettres, vous donnerez une chance de survie

 25   aux soldats britanniques à Gorazde."

 26   Enfin, vers la fin de la discussion, on remarque également que vous donnez

 27   une explication au général Mladic. Vous lui indiquez que vous n'êtes pas le

 28   commandant de l'OTAN, que vous ne donnez aucune instruction à l'OTAN, mais


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  1   que vous êtes l'une des personnes qui a la responsabilité de recommander

  2   telle ou telle cible dans le cas d'une attaque.

  3   Alors, Général, je voudrais juste me concentrer sur les points essentiels.

  4   Conformément à ce dont vous vous souvenez, est-ce que ce que je viens de

  5   dire est un résumé exact des points principaux de cette discussion ?

  6   R.  Oui.

  7   Enfin je voudrais être tout à fait clair sur un terme que vous avez

  8   employé. Vous avez parlé de "bouclier des Nations Unies;" est-ce que vous

  9   avez voulu dire que des membres du personnel des Nations Unies ou les

 10   Nations Unies elles-mêmes étaient utilisées comme bouclier ?

 11   Q.  Je crois avoir dit qu'il s'agissait de soldats des Nations Unies, et

 12   qu'il fallait s'assurer qu'ils n'étaient pas utilisés comme bouclier.

 13   R.  Très bien.

 14   Q.  Mais je me référais en tout cas au document. Je crois que c'était une

 15   référence qui apparaissait au milieu du paragraphe 2, où il est écrit, je

 16   cite :

 17   "Le général Smith a réitéré son offre de discuter d'un échange de tous les

 18   hommes qui étaient détenus, une fois qu'il pourrait s'assurer que Mladic

 19   avait cessé de menacer, de tuer les soldats des Nations Unies, et une fois

 20   qu'il aurait reçu des preuves que les observateurs des Nations Unies et les

 21   autres n'étaient plus utilisés comme bouclier humain."

 22   R.  C'est exact. J'étais simplement en train d'essayer de retrouver ce

 23   passage.

 24   Q.  Alors puisque ceci a fait l'objet de toute une discussion, quel était

 25   cet incident du pont de Vrbanja exactement ?

 26   R.  Dans les premières heures de la matinée de ce jour, je crois que

 27   c'était à ce moment-là, un certain nombre d'hommes des forces des Serbes de

 28   Bosnie déguisés en uniforme français. J'ai cru comprendre que ces uniformes


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  1   avaient été pris à des soldats précédemment capturés, se sont approchés de

  2   la position française située au pont de Vrbanja et l'ont attaqué, par

  3   surprise ils ont réussi à prendre cette position et à faire prisonniers un

  4   certain nombre d'hommes. Ensuite il y a eu une contre-attaque, je ne me

  5   rappelle pas combien de temps il a fallu pour lancer cette contre-attaque.

  6   Je crois me rappeler que deux soldats français ont été tués à cette

  7   occasion, et que deux Serbes de Bosnie également ont été tués. Il y a eu un

  8   certain nombre de blessés et, parmi eux, deux ont été faits prisonniers,

  9   deux des Serbes de Bosnie, et deux autres Serbes de Bosnie qui n'avaient

 10   pas été blessés ont été capturés. Je crois que cela nous donne le total de

 11   quatre que vous mentionnez.

 12   Encore un peu plus tard au cours de cette même journée, on nous fait part

 13   de cette menace de tuer les soldats français à moins que les soldats bosno-

 14   serbes faits prisonniers ne soient relâchés. C'est dans ce contexte, suite

 15   à la réception de cette menace qu'intervient cet appel téléphonique.

 16   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaiterais

 17   demander le versement de ce document sous pli scellé.

 18   M. ROBINSON : [interprétation] Nous ne nous opposons pas au versement de ce

 19   document, qui à vrai dire a déjà été versé en tant que document public sous

 20   la cote P342, dans l'affaire Dragomir Milosevic. Donc, en fait, nous

 21   estimons que ce document ne devrait pas être versé sous pli scellé, mais

 22   nous admettons évidemment la décision qui sera la vôtre, nous l'acceptons.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste une précision.

 24   Puisqu'à huis clos partiel -- c'est à huis clos partiel que nous avons

 25   abordé ces éléments, je ne crois pas qu'il devrait avoir le moindre

 26   problème à verser ce document en tant que document public.

 27   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, encore une fois, je

 28   suis tout à fait conscient du manque de cohérence apparent que ceci


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  1   présente, mais ce document est assorti d'une condition particulière, et

  2   ceci est indépendant de la déposition en elle-même. Je pensais revenir sur

  3   ce point également.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce que je voulais dire c'est qu'il n'y a

  5   pas de compte rendu d'audience public indiquant que le général Smith se

  6   soit exprimé publiquement sur ce point. Mais lorsque d'autres témoins

  7   viendront déposer, par exemple, le Témoin A ou le Témoin B, leur serait-il

  8   possible d'aborder ce document en audience publique ?

  9   M. TIEGER : [interprétation] Non, Monsieur le Président, pas à ce stade.

 10   J'ai essayé de faire une distinction claire entre les deux questions qui

 11   doivent être abordées séparément du point de vue de la source, à savoir le

 12   document d'une part, la déposition de d'autre part.

 13   Soit dit en passant, j'ai cru comprendre que les Juges de la Chambre

 14   encouraient l'Accusation à considérer ces deux questions conjointement.

 15   C'est ce que nous prévoyions de faire.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous nous re-pencherons sur ce

 17   point, mais je vais vous donner un exemple peut-être un peu radical.

 18   Imaginons que le général Mladic vienne déposer. Cela signifierait

 19   qu'il ne pourra pas aborder en audience publique ce document.

 20   Enfin, nous nous re-pencherons sur cette question. Poursuivons.

 21   Pour le moment, nous versons pour le moment ce document sous pli

 22   scellé et nous nous re-pencherons ultérieurement sur son statut.

 23   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document recevra la cote P2269,

 24   et il est temporairement versé sous pli scellé, Monsieur le Président.

 25   M. TIEGER : [interprétation] Je crois qu'il convient maintenant de

 26   repasser en audience publique, Monsieur le Président.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Soit.

 28   [Audience publique]


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous sommes maintenant en audience

  2   publique.

  3   M. TIEGER : [interprétation] Je voudrais qu'on affiche maintenant le

  4   document 21984 de la liste 65 ter.

  5   Q.  Général Smith, ce document est daté du 29 mai 1995. Il porte votre

  6   signature. Il s'agit apparemment d'instructions à appliquer suite aux

  7   frappes aériennes, après ces dernières. Au premier paragraphe, nous voyons

  8   que c'est dans deux buts que vous avez rédigé ces instructions : Tout

  9   d'abord, pour donner une idée du débat qui était en cours, et deuxièmement,

 10   pour fournir des instructions.

 11   Alors, Général, vous avez sous les yeux ce document, est-ce que vous

 12   pourriez dire aux Juges de la Chambre de quoi il s'agit ?

 13   R.  Je me rappelle de ce document. Juste après les frappes aériennes ou

 14   juste après une frappe -- juste après les frappes aériennes, il y a eu les

 15   prises d'otages. Tout un débat a eu lieu à Zagreb, à New York et dans

 16   toutes les capitales des états qui avaient leurs soldats sur le terrain, et

 17   qui étaient concernés par ces événements. Nous avons entendu un [inaudible]

 18   de l'OTAN s'en est également saisi. Alors je n'étais évidemment pas au fait

 19   de tout, de l'intégralité de ce débat mais j'étais conscient de ce qui se

 20   passait et je recevais beaucoup d'informations à ce sujet. J'essayais de

 21   voir comment on pourrait avancer. Ce document que nous avons sous les yeux

 22   m'a sans doute servi en premier lieu à me rendre, à me permettre d'avoir

 23   des idées plus claires sur ce sujet, ensuite je l'ai diffusé.

 24   Je crois que j'ai utilisé le mot "about," c'est-à-dire autour de nous dans

 25   différents sens, aussi bien dans le sens autour de nous, autour de la

 26   FORPRONU et en Bosnie-Herzégovine. Ensuite c'est également devenu une façon

 27   de fournir aux personnes des instructions quant à la façon dont ils

 28   devaient procéder dans l'immédiat.


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  1   Q.  Est-ce que vous avez identifié des objectifs à court terme, à moyen

  2   terme, et des possibilités à long terme dans ce document ?

  3   R.  Je crois, en effet. En tout cas, pour le court et le moyen terme, je

  4   crois que c'est un exercice auquel je me suis en effet livré dans ce

  5   document.

  6   M. TIEGER : [interprétation] Pourrions-nous passer à la page 2 et à la page

  7   3 ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Pourrions-nous agrandir un petit peu, s'il

  9   vous plaît ?

 10   M. TIEGER : [interprétation]

 11   Q.  Général, n'hésitez pas à demander que l'on fasse défiler la page si

 12   vous en avez besoin.

 13   R.  Vous voyez dans ce paragraphe 5 qu'on y trouve un exemple de ma façon

 14   de voir les choses, à savoir que l'argument est avancé ici que quelque

 15   chose se passe derrière notre dos et bien au-dessus de nous.

 16   Puis vous voyez, au paragraphe 7, que j'ai reçu une consigne très claire et

 17   que l'exécution du mandat qui m'a été confié est indiqué comme étant

 18   secondaire par rapport à la nécessité de garantir la sécurité du personnel

 19   des Nations Unies.

 20   Puis nous poursuivons la lecture du texte, et un peu plus loin, on trouve

 21   une série de propositions faites par moi pour le court terme quant à ce

 22   qu'il convient de faire.

 23   Ensuite il y a une troisième page, et j'énumère un certain nombre

 24   d'instructions.

 25   Je fais part d'une décision que j'ai déjà prise pour mon compte personnel,

 26   à savoir qu'il importe que nous nous exposions moins désormais, à savoir

 27   que nous pratiquions moins l'envoi de détachements isolés sur le territoire

 28   bosno-serbe, et j'autorise les hommes à abandonner leurs positions si de


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  1   telles circonstances surviennent. Je ne me souviens pas de leur nombre

  2   exact, mais je sais que nous avions un certain nombre de détachements peu

  3   nombreux à ce moment-là, qui étaient toujours immobilisés dans les centres

  4   regroupement des armes, ou ils étaient en fait encerclés. Donc je commence

  5   déjà à créer une force de réaction - ce n'est pas le nom que cet élément

  6   portait à l'époque, mais c'est bien ce que cet élément est devenu par la

  7   suite - vous voyez donc que je dis aux différents secteurs ce qu'il

  8   convient qu'ils fassent, je dis notamment au secteur sud-ouest qu'il

  9   importe qu'il mette en place un groupe de combat formé à partir de ses

 10   propres forces et placées sous son propre commandement, dans la mission

 11   particulière consisterait à se préparer à agir au cas un centre de

 12   regroupement des armes serait encerclé. Puis finalement, j'indique qu'il

 13   appartient à chacun de maintenir la pression sur le gouvernement bosniaque

 14   pour qu'il ne tire pas profit du caractère particulier des circonstances du

 15   moment en donnant lieu à une escalade supplémentaire.

 16   A moyen terme, je tiens beaucoup à rétablir la liberté de circulation, au

 17   moins une certaine liberté de circulation, et je dis au secteur constituant

 18   le QG d'élaborer des plans destinés à mettre en place des forces

 19   particulières qui au cas où certains événements se produiraient pourraient

 20   être utilisées pour y répondre.

 21   Ensuite on passe à la page suivante.

 22   Je reparle des enclaves de l'est, et j'indique que leur existence impose

 23   une tension très importante aux troupes, étant donné que les nations qui

 24   contribuent à l'envoi de ces troupes doivent acquérir l'expérience de

 25   commandement nécessaire, et les différents commandants venus des différents

 26   pays accordent une grande importance au capital envoyé par elle, capital

 27   humain qui m'importe à moi autant qu'à eux, et je termine en disant très

 28   clairement que nous sommes interdépendants vu les circonstances et que même


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  1   si, à ce moment précis, nous sommes un peu sur la défensive, il importe que

  2   nous nous préparions à être plus offensif à l'avenir.

  3   M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie, Général.

  4   Monsieur le Président, avant de poursuivre, je sais que notre emploi du

  5   temps est un peu bouleversé aujourd'hui. Mais je ne sais pas exactement

  6   jusqu'à quelle heure la Chambre souhaite que je poursuive, est-ce que nous

  7   reprenons l'horaire normal ou est-ce que nous poursuivons dans l'horaire

  8   modifié.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Peut-être que nous pourrions bientôt

 10   faire une pause de 20 minutes. Donc nous ferons une pause dans cinq minute.

 11   M. TIEGER : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président. Je vous

 12   remercie.

 13   Général -- Monsieur le Président, je demande le versement au dossier du

 14   document précédent.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Qui est admis.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il devient la pièce P2270, Monsieur le

 17   Président, Messieurs les Juges.

 18   M. TIEGER : [interprétation]

 19   Q.  Général, vous avez indiqué qu'au paragraphe 7 on trouve mention d'un

 20   certain nombre de consignes qui vous ont été données, et il est indiqué que

 21   l'exécution de votre mandat était secondaire par rapport à la nécessité

 22   d'assurer la sécurité du personnel des Nations Unies. Est-ce que ceci était

 23   une façon de répondre à la prise d'otage, et à votre avis, est-ce que ceci

 24   signifiait que la prise d'otage avait réussie ?

 25   R.  Je réponds, oui, à vos deux questions.

 26   Q.  Vous avez indiqué hier que vous aviez été informé dès le départ et

 27   pendant toute la durée de l'événement que les soldats des Nations Unies qui

 28   avaient été faits prisonniers seraient tués si les frappes aériennes se


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  1   poursuivaient. Est-ce que, d'après vous, ceci signifiait que tel serait

  2   également le sort de tous les hommes des Nations Unies qui étaient faits

  3   otages, ou que pensez-vous de ce qu'il risquait d'advenir de ces hommes ?

  4   R.  Je ne sais rien de précis. J'ai transmis l'expression de ces menaces au

  5   niveau hiérarchique supérieur du commandement.

  6   Q.  Est-ce que vous avez compris que c'est ce message que les autorités

  7   bosno-serbes s'efforçaient de vous transmettre ?

  8   R.  Je n'ai aucun doute quant au fait que des menaces avaient été

  9   proférées, ça, en effet.

 10   M. TIEGER : [interprétation] J'aimerais que nous nous penchions rapidement

 11   sur deux pièces. La première est le document 65 ter numéro 30892. Ces deux

 12   documents sont des écoutes.

 13   Le premier donc de ces deux documents est une écoute d'une

 14   conversation à laquelle participent Momcilo Vinkovic et M. Krajisnik le 3

 15   juin 1995. A la première page de la transcription, nous voyons que Vinkovic

 16   déclare, je cite :

 17   "Tant que vous avez des otages, vous avez un atout dans votre main.

 18   Dès que vous n'aurez plus d'otages, il en sera fini de cet atout."

 19   Puis plus loin dans la page nous lisons, je cite :

 20   "Je pense que ceci a joué un rôle important parce qu'ils ont commencé

 21   ouvertement par écrit, et verbalement, à déclarer qu'ils ne peuvent rien

 22   contre vous aussi longtemps que vous détenez des otages. Ils ne peuvent pas

 23   élaborer un plan normal qu'ils suivraient par la suite, parce que tout plan

 24   qu'ils souhaitent suivre implique le recours à la force militaire et ils ne

 25   peuvent pas recourir à cette force puisque cela risquerait de mettre la vie

 26   des otages en danger. Par conséquent, les otages sont d'une importance

 27   vitale pour vous, nonobstant ce que d'autres pourraient vous dire."

 28   Krajisnik déclare, je cite :


Page 11414

  1   "Mon cher, nous en avons laissé partir certains et nous en avons capturé

  2   d'autres."

  3   Vinkovic déclare, je cite :

  4   "Continuez dans ce sens. C'est très bien, mais l'important c'est d'avoir

  5   des otages à tout moment."

  6   Krajisnik répond, je cite :

  7   "Pas de problème. C'est ce qui va se passer, sans aucun doute."

  8   En page suivante, Vinkovic encore déclare, je cite :

  9   "Mais, écoutez, tenez vos otages. C'est un atout fantastique. N'oubliez pas

 10   que Saddam a été démoli lorsqu'il a relâché les otages."

 11   Krajisnik ajoute, je cite :

 12   "En effet, en effet. C'est ce que nous faisons. Nous avons une méthode

 13   excellente. Nous avons toujours un atout dans notre manche."

 14   Rapidement, avant la pause, j'aimerais vous soumettre le document 65 ter

 15   numéro 30890. Je demanderai le versement au dossier des deux documents aux

 16   fins -- avec enregistrement aux fins d'identification, Monsieur le

 17   Président, dans un instant.

 18   Penchons-nous sur le document 30890.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je dire un mot sur ce sujet ?

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Au sujet de l'admission de ces documents,

 22   j'espère que vous me donnerez l'occasion, avant de rendre votre décision,

 23   d'exprimer mon avis sur cette écoute.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 25   M. TIEGER : [interprétation] Passons à la page 2. Nous voyons en haut de la

 26   page qu'il est fait mention de Kozirjev et que son interlocuteur déclare -

 27   il s'agit de M. Krajisnik - je cite :

 28   "Oui, vous avez enchaîné les casques bleus au pont…" et cetera, et cetera.


Page 11415

  1   Puis, au milieu de la page, Momcilo insiste pour que l'on négocie de tout

  2   et pas uniquement de la question des otages, je cite :

  3   "La prise d'otages est une nouvelle façon de mener la guerre. Vous détenez

  4   des otages à titre de protection. Ne croyez aucune promesse que l'on vous

  5   fait. Ils ont menti par le passé, ils mentiront encore à l'avenir. Par

  6   conséquent, les otages sont une garantie…" et cetera.

  7   Enfin, passons à la page suivante rapidement, vers le bas de la page, je

  8   cite :

  9   "J'ai vu un [inaudible] de la FORPRONU enchaîné."

 10   C'est Momcilo qui parle. Il poursuit, je cite :

 11   "Ils lui ont demandé comment ils étaient traités, et l'autre a répondu

 12   'Très bien." Il a dit qu'on les emmenait dormir quelque part la nuit et

 13   qu'ils étaient remmenés le matin pour la durée de la journée. En fait, il a

 14   dit à l'OTAN que les cibles n'étaient pas protégées la nuit et que l'OTAN

 15   pouvait frapper à ce moment-là."

 16   Momcilo répond, je cite :

 17   "Oui, oui, mais demain nous allons…" et cetera.

 18   Un peu plus loin, je cite :

 19   "Ecoute, crée des équipes de huit heures parmi eux. Ils sont pourris, ils

 20   ont toujours des possibilités de bombarder la nuit."

 21   Momcilo [comme interprété] réplique, je cite :

 22   "Bien. Je pense qu'ils ont bien compris ce qui allait leur arriver, donc il

 23   faudra qu'ils fassent attention."

 24   Q.  Général, est-ce qu'ils vous ont dit que les frappes aériennes ne

 25   cessaient pas ?

 26   R.  Oui, en effet, que les choses continuaient.

 27   M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ces deux

 28   documents, Monsieur le Président, au titre d'identification pour le moment,


Page 11416

  1   bien entendu.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic ou Maître Robinson.

  3   Oui, Monsieur Karadzic.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] D'abord, je tiens à dire qu'en dehors de la

  5   position bien connue qui est la nôtre au sujet des écoutes, je pense qu'il

  6   serait très utile que M. Tieger nous informe de l'identité des

  7   interlocuteurs et de la nature officielle ou pas de telle ou telle

  8   conversation. Ceci est d'importance cruciale. Il est important de savoir

  9   qui M. Krajisnik s'efforce d'impressionner et qui sont donc les

 10   interlocuteurs de ces personnes écoutées. Si nécessaire, je peux apporter

 11   mon aide pour le déterminer.

 12   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai aucun problème

 13   à recevoir des renseignements de M. Karadzic par le biais de M. Robinson.

 14   Toutefois, nous ne sommes pas au moment de la discussion du poids à

 15   accorder à ces écoutes. Elles devraient être versées de la façon

 16   habituelle, et l'accusé aura toute liberté au moment opportun de discuter

 17   de sa position quant au poids qu'il convient de leur accorder.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je suis d'accord avec vous,

 19   Monsieur Tieger. Mais il importe de déterminer qui sont les interlocuteurs,

 20   et nous aurons donc de l'aide pour le savoir, mais cela ne se fera pas en

 21   ce moment même.

 22   Nous allons enregistrer ces documents à titre d'identification, tous les

 23   deux.

 24   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ils deviennent les pièces MFI P2271 et

 25   P2272 respectivement, Monsieur le Président.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous faisons la pause et reprendrons à

 27   11 heures 05.

 28   --- L'audience est suspendue à 10 heures 45.


Page 11417

  1   --- L'audience est reprise à 11 heures 07.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, c'est à vous.

  3   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   Nous passons maintenant au document 65 ter numéro 19294.

  5   Q.  Général, j'aimerais appeler votre attention sur ce PV de réunion à

  6   laquelle ont participé le général Janvier et le général Mladic le 4 juin

  7   1995.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur Tieger, je pense que ce document

  9   n'est pas encore téléchargé. Il faudra le faire.

 10   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 11   Q.  Général, vous avez maintenant, sous les yeux, ce document est -- on y

 12   voit, dès le début, qui seront développés un certain nombre d'arguments du

 13   commandant de la force dans le corps du texte au-dessous de ce titre. Il

 14   est indiqué que quatre sujets seront discutés : Le personnel des Nations

 15   Unies pris en otage; la relève des troupes dans les enclaves orientales;

 16   l'influence des Nations Unies; ainsi que l'espace aérien serbe. J'aimerais

 17   appeler votre attention rapidement sur certains de ces sujets avant de vous

 18   poser des questions.

 19   En première page, on voit que le général Janvier traite de la question des

 20   otages qui ont été pris parmi les troupes des Nations Unies, il dit dès le

 21   début qu'il s'agit d'un acte inacceptable; et dans le deuxième paragraphe,

 22   il indique au général Mladic que les Bosno-Serbes se coupent presque

 23   totalement en agissant de la sorte de la communauté international. Il

 24   rappelle que ces actes auront des conséquences, directes et irréversibles,

 25   à savoir l'arrivée imminente d'une Brigade multinationale chargée d'assurer

 26   la Sécurité des casques bleus; et dans le paragraphe suivant, il discute de

 27   l'impact tout à fait négatif de cet acte et établit une comparaison entre

 28   son interlocuteur et Saddam Hussein.


Page 11418

  1   Nous pouvons maintenant passer à la page suivante sur les écrans.

  2   Le général Janvier continue à parler des otages, mais il passe également au

  3   deuxième sujet, à savoir la relève des troupes dans les enclaves

  4   orientales, il indique que les enclaves en question ont besoin

  5   d'approvisionnement urgent :

  6   "La situation y est devenue intolérable. Elles ont besoin de carburant et

  7   de vivre."

  8   Dans le dernier paragraphe, il insiste sur l'urgence compte tenu des

  9   circonstances et sur la nécessité d'un progrès rapide, en indiquant plus

 10   particulièrement au bas de la page, je cite :

 11   "C'est une question d'une telle urgence qu'un progrès significatif doit

 12   être accompli dans les deux ou trois jours qui se suivent."

 13   Ensuite vient la discussion du troisième sujet, intitulé : "Influence des

 14   Nations Unies," où il évoque les centres de Regroupement des armes lourdes

 15   comme étant un problème à discuter dans le cadre de ce sujet global, en

 16   indiquant que le retrait des armes de la part des Bosno-Serbes à partir des

 17   positions qu'ils occupent est irréversible, mais que les armes doivent être

 18   sorties de la zone d'exclusion.

 19   Puis arrive le quatrième sujet, à savoir l'espace aérien.

 20   A la page suivante, Général, nous remarquons que sont énumérées les

 21   positions du général Mladic qui seront discutées plus en détail dans le

 22   reste du document.

 23   Le général Mladic souligne dès le début de son intervention, selon ce

 24   document, la nécessité d'obtenir des garanties en matière d'espace aérien

 25   et la nécessité que les frappes aériennes cessent, pas seulement

 26   provisoirement, mais de façon permanente.

 27   En continuant la lecture jusqu'au bas de la page, nous voyons à l'avant-

 28   dernier paragraphe dans cette page. Le général Mladic insiste sur la levée


Page 11419

  1   des sanctions imposées à tous les Serbes du monde, sur la nécessité de

  2   libérer tous les prisonniers, de débloquer les installations, et cetera.

  3   Alors, Général Smith, je vous demanderais d'abord si vous aviez

  4   connaissance de cette rencontre précise et des débats qui s'y sont déroulés

  5   à l'époque.

  6   R.  J'ai eu connaissance de l'existence de cette rencontre j'ai su qu'elle

  7   allait avoir lieu et qu'elle avait eu lieu.

  8   Q.  Est-ce que les positions définies dans ce document concordent avec ce

  9   que vous pensiez des positions des Nations Unies et du général Mladic ou

 10   des positions défendues par les Bosno-Serbes à l'époque ?

 11   R.  Oui.

 12   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le versement

 13   --

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Ou, plutôt, oui, oui, oui, ces positions

 15   concordent.

 16   M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

 17   document, Monsieur le Président.

 18   M. HAYDEN : [interprétation] Il est admis.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce P2273, Monsieur le

 20   Président, Monsieur les Juges.

 21   M. TIEGER : [interprétation] J'aimerais maintenant compte tenu de la

 22   nécessité urgente de réapprovisionner les enclaves et d'assurer la

 23   poursuite de l'acheminement de convois en levant les restrictions imposées

 24   à ces convois, j'aimerais que nous examinions rapidement deux documents qui

 25   datent de la fin du mois de juin. Le premier de ces deux documents est le

 26   65 ter numéro 11339.

 27   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète, remplacez chaque fois que l'expression

 28   a été utilisée, relève des troupes, par réapprovisionnement.


Page 11420

  1   M. TIEGER : [interprétation] Peut-être qu'on pourrait essayer le document

  2   de la liste 65 ter 11338. Merci.

  3   Q.  Il s'agit d'un document, d'un mémo interne, qui porte la date du 26

  4   juin 1995, et qui parle d'une réunion que vous avez eue avec le colonel

  5   Meille, et il vous a expliqué qu'un convoi français avait été pris à partie

  6   par un canon serbe et par un char serbe sur le mont Igman, ensuite il y a

  7   une description, il est mentionné donc que :

  8   "Les Serbes semblaient être déterminés à nous empêcher d'utiliser cet

  9   itinéraire en harcelant nos convois."

 10   Une discussion concernant une réponse possible, et les limites que l'on

 11   pourrait apporter à cette réponse.

 12   M. TIEGER : [interprétation] Est-ce qu'on peut passer à la page suivante ?

 13   Q.  Général, je ne sais pas si vous vous souvenez de cet incident précis,

 14   mais est-ce que vous pourriez nous dire si cela rentre dans le cadre des

 15   problèmes que vous avez décrits, à savoir les efforts visant à ravitailler

 16   et à fournir une aide humanitaire à la population civile des enclaves ?

 17   R.  Oui. En juin, après les frappes aériennes, le seul itinéraire que l'on

 18   pouvait emprunter pour se rendre à Sarajevo afin de ravitailler la ville

 19   passait par le mont Igman, c'est donc et itinéraire que nous employions et

 20   nous assurions les escortes des convois du HCR des Nations Unies. Je ne me

 21   souviens pas exactement quand cela a commencé, mais durant le mois de juin,

 22   il y a eu de plus en plus d'incidents où des convois ont été pris à partie

 23   par des positions bosno-serbes. C'était principalement au niveau du QG du

 24   secteur sud-ouest, donc au niveau du QG français, et nous avons eu des

 25   discussions, pour savoir quelles seraient les méthodes que l'on pourrait

 26   utiliser.

 27   On parle des deux groupes de bataille UNTF, A et B, c'est donc ces groupes

 28   que j'avais; ils avaient préconisé la formation. On m'a présenté les


Page 11421

  1   documents avant la pause.

  2   Q.  Merci, Général.

  3   M. TIEGER : [interprétation] Je souhaiterais verser cette pièce au dossier.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera la pièce P2274.

  5   M. TIEGER : [interprétation] Désolé, cette pièce a déjà été versée au

  6   dossier. Il s'agit déjà de la pièce qui porte la cote P2116.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  8   M. TIEGER : [interprétation]

  9   Q.  Général, nous allons passer aux événements de la fin juin, du début du

 10   mois de juillet. Je voudrais vous poser des questions concernant les

 11   restrictions, concernant l'aide humanitaire et les convois de

 12   ravitaillement.

 13   Hier, nous avons parlé ou vous avez parlé d'un certain nombre de réunions

 14   que vous avez eues avec le Dr Karadzic ou avec le général Mladic. Réunions

 15   durant lesquelles la question des restrictions imposées aux convois ou à la

 16   liberté de mouvement a été abordée. Je pense au document 11321, nous avons

 17   consulté une partie d'une directive du commandement suprême datant de mars

 18   1995, émanant du Dr Karadzic, qui présentait la politique de restriction

 19   des convois de ravitaillement de la FORPRONU et d'aide humanitaire à

 20   l'intention de la population musulmane, et vous avez dit :

 21   "C'est clairement un ordre qui venait d'en haut."

 22   Ce que je voulais vous demander c'est si c'était une instance politique ou

 23   militaire qui était responsable de cette politique concernant les

 24   restrictions imposées aux convois.

 25   R.  A l'époque, je pensais qu'il s'agissait du général Mladic, et la

 26   personne qui était en contact avec le général Mladic, ce n'était pas moi.

 27   En raison des otages qui avaient été pris, c'était donc le général Janvier,

 28   qui était en contact direct avec le général Mladic. Si je me souviens bien,


Page 11422

  1   en raison ou suite à la réunion que nous avons abordée, ou suite à une

  2   autre réunion, un convoi a été mis en place et parti de Serbie à

  3   destination des enclaves. Peut-être que ça s'est produit plus tard, mais je

  4   crois que cela s'est passé en juin.

  5   Q.  Quant aux nombreuses réunions que vous avez eues avec le Dr Karadzic,

  6   quel était l'objectif de ces réunions et, selon vous, quel était son rôle

  7   dans la question des restrictions liées aux convois ?

  8   R.  Non, je ne me souviens pas de l'avoir rencontré en juin.

  9   Q.  Non, excusez-moi. Je faisais référence à la totalité de votre période.

 10   Je faisais référence aux discussions d'hier, aux réunions que vous avez

 11   eues et dont vous avez parlé hier, et j'aimerais savoir si vous avez abordé

 12   la question de la restriction qui était imposée, ou des restrictions qui

 13   étaient imposées aux convois. Je parle de toute votre période.

 14   R.  Nous avons, bien sûr, parlé de la question du ravitaillement des

 15   enclaves. Quand je dis "nous," je parle du Dr Karadzic et de moi-même. Si

 16   j'avais cru comprendre, à l'époque, que la politique venait des dirigeants

 17   bosno-serbes, y compris donc du président et de Mladic, en même temps les

 18   restrictions opérationnelles étaient imposées par les forces qui assuraient

 19   le contrôle, et par conséquent, il fallait traiter avec le général Mladic.

 20   Q.  La manière dont vous avez formulé votre réponse ne la rend pas très

 21   claire. Donc je vais m'assurer que nous avons bien compris. Est-ce que vous

 22   confirmez que la politique -- cette politique venait du plus haut niveau

 23   des Serbes de Bosnie, à savoir le Dr Karadzic et que le général Mladic

 24   était la branche exécutive de cette politique, la personne qui met en œuvre

 25   cette politique, qui venait d'en haut; est-ce exact ?

 26   R.  Oui, effectivement. Si vous voulez, le point de contact pour les

 27   convois était le général Mladic.

 28   Q.   Merci, Général.


Page 11423

  1   M. TIEGER : [interprétation] J'aimerais maintenant passer au document de la

  2   liste 65 ter 01356.

  3   Q.  Comme vous le voyez à l'écran, Général, il s'agit d'une lettre du 26

  4   juin 1995, à l'attention du général Mladic. Vous en êtes le signataire, et

  5   vous mentionnez que vous rédigez cette lettre suite à une lettre signée par

  6   votre chef d'état-major, concernant Srebrenica, et vous souhaitez exprimer

  7   votre préoccupation grandissante concernant une série d'incidents graves.

  8   Vous faites référence au paragraphe 2, du fait que pratiquement tous

  9   les jours, vous recevez des rapports concernant le bombardement de zones

 10   résidentielles de Bihac, de Srebrenica, de Gorazde et de Sarajevo. Vous

 11   faites référence également à ce qui s'est passé la veille à Sarajevo,

 12   c'est-à-dire un incident où neuf civils dont cinq enfants ont été tués en

 13   raison de tirs embusqués ou de bombardement.

 14   Vous rappelez également le régime de zones de sécurité conformément à

 15   une résolution du Conseil de sécurité, et vous faites part également plus

 16   de votre préoccupation vis-à-vis des attaques contre la population civile.

 17   Vous mentionnez une augmentation du nombre de rapports faisant état d'une

 18   prise à partie directe de troupes de la FORPRONU, à des endroits où ils

 19   sont cantonnés mais également contre leurs véhicules sur certains sites.

 20   Est-ce que vous vous souvenez avoir envoyé cette lettre et les

 21   circonstances de l'époque ? Est-ce que vous vous souvenez de la réponse que

 22   vous avez reçue du général Mladic ?

 23   R.  Je ne me souviens pas, ou du moins, je me souviens avoir envoyé cette

 24   lettre, mais je ne me souviens pas de la réponse que j'aie eue ou que

 25   j'aurais reçue. Je crois que j'ai essayé de saisir tous les éléments d'une

 26   situation telle qu'elle existait à la fin de ce mois-ci en une seule

 27   lettre, en un seul document. Je voulais être très clair même si nous nous

 28   trouvions dans des circonstances où les résolutions concernant les zones de


Page 11424

  1   sécurité ne pouvaient pas être respectées pleinement, cela ne signifiait

  2   pas que des attaques continues contre les personnes vivant dans ces zones

  3   de sécurité étaient autorisées.

  4   Q.  Général, je comprends très bien que compte tenu du temps qui s'est

  5   écoulé, vous ne pouvez pas nécessairement vous souvenir de la réponse

  6   précise du général Mladic à cette lettre. Mais je vais vous poser la

  7   question suivante : Est-ce que vous vous souvenez avoir reçu quoique ce

  8   soit du général Mladic en réponse au fait que vous avez exprimé vos

  9   préoccupations concernant ces événements graves ? Est-ce que l'on vous

 10   informait que la situation changerait notamment en ce qui concerne les

 11   attaques contre la population civile et contre des soldats ou des sites de

 12   la FORPRONU ?

 13   R.  Non. Je ne me souviens pas que cela se soit passé, pas du tout, non.

 14   M. TIEGER : [interprétation] Je souhaiterais verser cette pièce au dossier.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P2274.

 17   M. TIEGER : [interprétation] Merci.

 18   Q.  Général, nous passons maintenant à juillet. Cela signifie que nous

 19   approchons des événements de Srebrenica. D'après ce que j'ai compris, vous

 20   étiez en congé ou en permission au début du mois de juillet.

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Mais vous étiez en contact radio, n'est-ce pas, même si vous n'étiez

 23   pas présent sur le théâtre des opérations, tout du moins, au début du mois

 24   de juillet ?

 25   R.  Non.

 26   Q.  Est-ce que vous vous souvenez comment vous avez été informé de ce qui

 27   se passait à Srebrenica au début du mois de juillet et lorsque nous nous

 28   sommes approchés de la date de l'attaque de l'enclave et de la prise de


Page 11425

  1   Srebrenica par les bosno-serbes ?

  2   R.  Je me souviens que l'on a réduit ma période de permission puisque, au

  3   départ, j'étais prévu pour deux semaines, et on m'a rappelé pour me rendre

  4   à Genève, et ceci, durant le week-end entre les deux semaines de

  5   permission. Nous nous sommes rendus à Genève, où le secrétaire général a

  6   abordé le rapport de la FORPRONU sur les Balkans.

  7   Durant cette réunion, je crois, presque à l'issue de cette réunion, on nous

  8   a dit qu'une attaque était en préparation contre Srebrenica et qu'un soldat

  9   de nationalité néerlandaise avait été tué. D'après ce que l'on nous a dit,

 10   nous pensions qu'il s'agissait d'une attaque locale en réponse à une

 11   attaque menée par les Bosno-musulmans, la veille ou l'avant-veille, attaque

 12   durant laquelle des bosno-serbes avaient été tués et du bétail, je crois,

 13   des moutons avaient été volés. On m'a expliqué que je n'avais pas besoin de

 14   revenir sur le théâtre des opérations, et donc j'ai continué ma deuxième

 15   semaine de permission.

 16   Puis, à un moment donné durant le lundi suivant - je crois que c'était le

 17   10, de mémoire - les choses avaient évolué de telle manière que je recevais

 18   régulièrement des coups de fils radio. Le 11, j'ai donc écourté ma période

 19   de permanence et j'ai commencé un long voyage pour revenir à Sarajevo, et

 20   je crois que je suis arrivé au petit matin du 13.

 21   Je crois que c'est le matin ou durant la soirée du 11 que j'ai reçu

 22   beaucoup de coups de fils, parce que je me trouvais à Split à l'époque.

 23   Peut-être que je me trompe sur les dates, mais c'est dans ces heures-là.

 24   Q.  Je ne sais pas si cela vous permettra de mieux vous souvenir des

 25   ces événements. De toute façon, nous vérifierons les dates. Mais dans votre

 26   déclaration consolidée, vous mentionnez que vous êtes arrivé au

 27   commandement de Bosnie-Herzégovine au début de la soirée du 12 juillet.

 28   Mais comme vous le disiez, c'est dans ces heures-là.


Page 11426

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Général, j'aimerais vous présenter maintenant un document provenant du

  3   QG du commandement de la FORPRONU, qui porte la date du 9 juillet. Il

  4   s'agit du document de la liste 65 ter 03923.

  5   Il semble qu'il s'agisse d'un CapSat à l'attention du général Mladic et que

  6   ceci serait en fait transformé en une déclaration, en communiqué de presse.

  7   Si vous tournez la page vous voyez que la page suivante est intitulée :

  8   "Alerte à l'attention des bosno-serbes, attaque contre la zone de sécurité

  9   de Srebrenica."

 10   On peut lire :

 11   "L'armée bosno-serbe a repris les attaques contre Srebrenica le 7 juillet

 12   1995, qui est un vendredi, en ouvrant le feu en direction de la zone de

 13   sécurité et en prenant directement à partie des sites des Nations Unies, ce

 14   qui a occasionné la mort de plusieurs civils."

 15   Ensuite vous avez une description de ce qui s'est produit par la suite,

 16   c'est-à-dire une attaque concertée contre le poste d'observation des

 17   Nations Unies à Zeleni Jadar le 8, et cetera, et cetera.

 18   Puis le deuxième paragraphe mentionne que :

 19   "Cette attaque contre les Nations Unies et contre une zone de

 20   sécurité qui avait donc été déclarée comme telle par les Nations Unies est

 21   totalement inacceptable et représente une escalade très grave du conflit."

 22   On exige que l'avance des troupes bosno-serbes s'arrête là et qu'ils

 23   se retirent du périmètre de la zone démilitarisée.

 24   Le document porte en fait un code temporel, il y a un horaire qui est

 25   mentionné en haut à gauche, à savoir 22 heures 20, ce qui signifie donc 10

 26   heures 20 du soir, n'est-ce pas ? Mais il y a également un autre code

 27   horaire au niveau du fax, qui porte une autre heure, 22 heures 32.

 28   Général, est-ce que vous étiez au courant du fait que le bosno-serbes


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  1   avaient été alertés de cette manière, à cette date-là et à cette heure-là ?

  2   R.  Je ne suis pas sûr d'avoir été mis au courant de ces communications

  3   radio.

  4   Q.  Cela fait partie du processus qui permettait de recevoir des

  5   informations et de répondre durant la période que vous avez décrite, n'est-

  6   ce pas ?

  7   R.  Oui, effectivement.

  8   M. TIEGER : [interprétation] J'aimerais verser cette pièce au dossier.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P2275.

 11   M. TIEGER : [interprétation] Je vous prie de m'excuser un instant.

 12   Je voudrais attirer votre attention sur un événement qui s'est produit

 13   pratiquement simultanément le 9 juillet, en vous présentant le document de

 14   la liste 65 ter 01903.

 15   Q.  Ce document porte également la date du 9 juillet. Comme vous pouvez le

 16   voir, cela vient de l'état-major principal de l'armée, signé par le général

 17   Tolimir, ou tout du moins, le nom du général Tolimir apparaît en bas de

 18   page. Il y a également en haut de la page qui reprend la date du 9 juillet,

 19   avec un code horaire 23 heures 50, donc cela correspond à peu près à la

 20   même période que le document précédent. C'est envoyé au commandement du

 21   Corps de la Drina. Il mentionne que le président de la Republika Srpska a

 22   été informé des opérations de combat qui ont été menées à bien, il est

 23   mentionné que le président est satisfait du résultat obtenu suite à ces

 24   opérations de combat, et ces combats ont permis aux membres du Corps de la

 25   Drina d'occuper la ville même de Srebrenica; il accepte de poursuivre les

 26   opérations pour la prise de Srebrenica, de désarmes les gangs terroristes

 27   musulmans, et de procéder à la démilitarisation totale de l'enclave de

 28   Srebrenica.


Page 11428

  1   Ensuite nous avons une description de l'ordre présidentiel concernant les

  2   opérations de combat de suivies, y compris la protection des membres de la

  3   FORPRONU et des populations musulmanes civiles, et le fait également

  4   d'éviter de détruire des cibles civiles sauf si on ne peut pas faire

  5   autrement, et cetera, et cetera.

  6   Tout d'abord, Général, est-ce que vous vous souvenez si le commandement de

  7   la FORPRONU était au courant peut-être pas de ce document à proprement

  8   parler, mais du moins du fait que les opérations continuaient et allaient

  9   bien au-delà de l'occupation de la ville même de Srebrenica ?

 10   R.  A l'époque, je ne pense pas que l'on ait compris, au sein de mon QG,

 11   que cette attaque amènerait à la chute complète de cette poche ou de cet

 12   enclave, comme on l'appelai.

 13   Q.  Merci, Général.

 14   M. TIEGER : [interprétation] Je voudrais verser cette pièce au dossier.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Robinson.

 16   M. ROBINSON : [interprétation] Nous n'avons pas d'objection.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous pouvons verser cette

 18   pièce au dossier.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P2276.

 20   M. TIEGER : [interprétation]

 21   Q.  Général, avant de passer à un autre document, je vois qu'en bas du

 22   document, nous voyons que le général Tolimir dit :

 23   "Conformément à un ordre du président de la Republika Srpska, vous devez

 24   donner un ordre pour garantir la sécurité maximum et permettre également à

 25   toutes les unités subordonnées de traiter la population civile et les

 26   prisonniers de guerre conformément aux conventions de Genève, du 12 août

 27   1949."

 28   La question que je souhaiterais vous poser est la suivante : Afin de se


Page 11429

  1   conformer aux conventions de Genève, nous voyons que les commandants donc

  2   souhaitent que ces conventions de Genève soient respectées --

  3   M. ROBINSON : [interprétation] Je vous prie de m'excuser pour cette

  4   interruption.

  5   Mais nous demandons au témoin de répondre en qualité de témoin expert, et

  6   ce n'est pas en qualité de témoin expert que l'on a demandé à ce témoin de

  7   comparaître ici, puisque il s'agit d'un point de droit qui est abordé en ce

  8   moment.

  9   [La Chambre de première instance se concerte]

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, est-ce que vous

 11   souhaitez répondre ?

 12   M. TIEGER : [interprétation] Sans pour autant m'arroger le rôle joué par

 13   les Juges de la Chambre, je pense que ce témoin, compte tenu des faits qui

 14   sont venus à sa connaissance et de son expérience, pourrait jeter toute la

 15   lumière sur ces événements et sur les documents qui y sont associés. Je

 16   pense que ceci rentre dans le cadre de la jurisprudence.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Par conséquent, pas en qualité de témoin

 18   expert. Nous pensons donc, en tant que Juges de cette Chambre, que le

 19   témoin peut exprimer son opinion à ce sujet.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne pense pas que ce soit particulièrement

 21   remarquable que de donner une instruction, visant à se conformer aux

 22   conventions de Genève, et cela ne semble pas inhabituel que de voir ceci

 23   dans un ordre de ce type, et j'aurais plusieurs exemples à vous donner. En

 24   même temps, un ordre n'est qu'un ordre, et cet ordre doit être exécuté et

 25   mené à bien et il faut s'assurer que celui-ci est exécuté.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 27   M. TIEGER : [interprétation] Merci.

 28   Pourrait-on passer au document de la liste 65 ter 21119 ?


Page 11430

  1   Q.  Général, comme vous le voyez, il s'agit d'un document qui porte la date

  2   du 13 juillet 1995, ce document parle d'une réunion que vous avez eue avec

  3   le premier ministre Silajdzic le 13 juillet, c'est-à-dire durant la

  4   situation qui se déroulait à Srebrenica, vous avez parlé de la crise des

  5   réfugiés, et des rapports qui n'avaient pas été vérifiés concernant les

  6   atrocités.

  7   Je voudrais attirer votre attention sur le point 6 qui figure dans ce

  8   document. On voit que le premier ministre et le ministre Muratovic ont fait

  9   part de leur préoccupation concernant ces rapports qui n'avaient pas encore

 10   été confirmés concernant les atrocités dans la zone de Srebrenica, et tout

 11   particulièrement le viol de jeunes femmes à Vlasenica ainsi que le fait que

 12   tout un bus de réfugiés aient été tués. Il était mentionné également qu'il

 13   y avait des réfugiés qui étaient en fait divisés en groupes, des hommes de

 14   16 à 60 ans qui étaient envoyés dans des sites différents par rapport aux

 15   autres passagers de ces bus."

 16   Général, est-ce que vous vous souvenez à l'époque avoir entendu déjà des

 17   préoccupations qui se sont faites voix concernant des atrocités; est-ce que

 18   vous avez également eu vent d'information concernant le fait que les hommes

 19   en âge de combattre étaient séparés du reste des civils ?

 20   R.  Effectivement. Nous commencions à entendre ce genre de témoignages, et

 21   nous avions également d'autres rapports qui sont arrivés sur nos bureaux,

 22   mis à part celui que vous me présentez.

 23   M. TIEGER : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait verser cette pièce au

 24   dossier ?

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P2277.

 27   M. TIEGER : [interprétation] Est-ce que nous pourrions passer maintenant au

 28   document de la liste 65 ter 0689 [comme interprété], s'il vous plaît.


Page 11431

  1   Il s'agit de votre évaluation et de vos recommandations en tant que

  2   commandant de la FORPRONU.

  3   Est-ce que l'on pourrait passer à la page suivante ?

  4   Il s'agit donc de votre évaluation suite à la chute de Srebrenica, et vous

  5   mentionnez, suite à la chute de Srebrenica, différents problèmes sont

  6   survenus, notamment la réception et la prise en charge des réfugiés, et

  7   également la récupération des soldats du Bataillon néerlandais.

  8   Au paragraphe 2, vous parlez du fait que :

  9   "Les bosno-serbes ont l'intention d'avancer rapidement afin de

 10   présenter un fait accompli. Ils souhaitent se débarrasser des enclaves et,

 11   notamment, libérer les zones arrières ou les secteurs arrières, et ceci

 12   permettrait en fait de jeter leur dernière carte et probablement également

 13   de s'opposer à la force de réaction rapide."

 14   Au paragraphe 3, vous mentionnez que les bosno-serbes ont procédé, et je

 15   vous cite :

 16   "…au nettoyage de Srebrenica, mais pour l'instant, ça n'a pas encore été

 17   confirmé. Les amendages [phon] de combattre sont séparés des autres

 18   réfugiés."

 19   A la page suivante, vous parlez du besoin de gérer le Bataillon néerlandais

 20   et son départ, et ensuite vous abordez différentes possibilités.

 21   Est-ce que l'on peut faire descendre le document sur l'écran de façon à ce

 22   que le Général puisse lire la totalité de cette page. Ensuite on peut

 23   passer à la page suivante, qui est une brève synthèse de ce document.

 24   Q.  Général, n'hésitez pas à nous demander de vous afficher d'autres pages

 25   du document pour à nouveau vous familiariser avec son contenu. Mais, tout

 26   d'abord, j'aimerais savoir si, autant que vous vous en souveniez, cela

 27   reflète bien la situation à l'époque.

 28   R.  Oui. Est-ce que je pourrais revoir la page de couverture ? Si je me


Page 11432

  1   souviens bien, je l'avais dicté ce document dans la soirée du 13, assez

  2   tard dans la soirée, juste avant minuit.

  3   En fait, cela arrive à l'issue de la première journée qui a suivi mon

  4   retour de Srebrenica, et j'essayais donc de faire la synthèse de la

  5   situation, d'essayer de voir quelles mesures nous allions prendre, et je

  6   m'adressais, bien sûr, à M. Akashi, au commandant de nos forces, et cetera,

  7   et cetera, et je voulais donc lui faire part de la situation et des

  8   principales préoccupations immédiates qui avaient vu le jour suite à ce qui

  9   s'était passé.

 10   Le message que je voulais faire passer était le suivant, à savoir que le

 11   gouvernement bosno-musulman allait nous demander de prendre en charge leurs

 12   réfugiés et que nous allions devoir constituer une base pour prendre en

 13   charge ces réfugiés. Mais pour l'instant, nous ne savions pas -- ou à

 14   l'époque, nous ne savions pas encore de combien de personnes il s'agissait.

 15   Puis il y avait la question également du Bataillon néerlandais, qui se

 16   retrouvait au milieu de ces personnes détenues par les bosno-serbes. Puis

 17   vous aviez également un autre bataillon qui était à Sarajevo, il fallait

 18   savoir comment les [inaudible], et le commandant de ce bataillon n'était

 19   pas vraiment en mesure de négocier leur départ étant donné qu'il était -

 20   j'ai utilisé cette expression - "il parle de derrière les barreaux" et, par

 21   conséquent, n'a pas vraiment une grande marge de manœuvre.

 22   Q.  [aucune interprétation]

 23   R.  Ensuite j'ai décrit les différentes possibilités qui étaient les

 24   nôtres, et j'expliquais que si nous ne prenions pas les devants. Cela

 25   signifie que nous ne pourrions être que dans une situation [inaudible].

 26   Q.  Je crois que cette référence du fait que votre commandant parlait de

 27   derrière les barreaux est la troisième phrase du paragraphe 4.

 28   Général, vous avez mentionné il y a quelques instants que, dès le 13, vous


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  1   aviez commencé à entendre parler de témoignages d'atrocité et du fait que

  2   les amendages de combattre étaient séparés des autres réfugiés. Vous

  3   mentionnez, je vous cite :

  4   "Nous avions reçu des rapports, mis à part celui que je vous ai présenté."

  5   Est-ce que vous vous souvenez de ces autres rapports ?

  6   R.  Je fais référence aux rapports du Bataillon néerlandais, qui

  7   n'arrivaient que sporadiquement, mais c'est une autre source, mis à part le

  8   gouvernement bosno-musulman, qui nous fournissait ces rapports.

  9   Q.  Mais à la fin de la journée du 13 juillet, est-ce que, d'après les

 10   informations que vous aviez reçues, vous avez pu déterminer qu'il y avait

 11   eu de nouveaux éléments qui s'étaient produits ?

 12   R.  Oui, je crois que c'était le cas, mais à savoir qu'il y avait eu un

 13   groupe qui s'était détaché, un groupe qui avait décidé de se défendre.

 14   Effectivement, je sais qu'il y avait un groupe d'environ 2 000

 15   personnes, et nous savons qu'ils avaient été transférés vers un terrain de

 16   foot, et ceci s'est peut-être produit dans les 24 heures qui s'en sont

 17   suivies. Mais je ne me souviens pas exactement de l'ordre de ces

 18   événements.

 19   Q.  Vous avez mentionné ces 2 000 personnes; est-ce que vous vous souvenez

 20   où ils ont été transportés ?

 21   R.  Je crois que c'était à Bratunac.

 22   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

 23   souhaiterais verser ce document au dossier.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P2278.

 26   M. TIEGER : [interprétation]

 27   Q.  Général, je voudrais maintenant passer à la journée du 15 et je

 28   voudrais parler de ce que nous retrouvons dans les carnets du général


Page 11434

  1   Mladic concernant une réunion avec le général Mladic, le président

  2   Milosevic, ainsi que d'autres personnes. C'est la pièce P1488, page 4 pour

  3   la version anglaise, et page 6 pour la version originale en B/C/S.

  4   Général, nous voyons qu'il s'agit d'une réunion intitulée : "Réunion avec

  5   les Nations Unies et Milosevic." Les personnes présentes, samedi 15 juillet

  6   1995, étaient M. Stoltenberg, M. Akashi, M. Bildt, le général De Lapresle,

  7   et vous-même. Est-ce que vous vous souvenez avoir participé à une réunion

  8   où il y avait le général De Lapresla et le général Smith ?

  9   R.  Oui, je m'en souviens.

 10   M. TIEGER : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait faire descendre ce

 11   document sur l'écran. Et je vais vous poser certaines questions. Enfin, je

 12   vous prie de m'excuser. Je voudrais en fait qu'on passe à la page suivante.

 13   Q.  Voyez-vous qu'il est mentionné ici :

 14   "Permettre l'accès à tous les prisonniers pour le CICR."

 15   Est-ce que vous-même ainsi que les autres responsables des Nations Unies

 16   faisiez pression pour que le CICR ait accès à tous ces prisonniers ?

 17   R.  Oui. Nous voulions que le HCR des Nations Unies et le CICR puissent

 18   avoir accès à toutes les personnes détenues.

 19   Q.  Vous avez transmis cette doléance au général Mladic à l'époque, durant

 20   cette réunion ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Un peu plus bas, à la même page, vous voyez votre nom mentionné, et on

 23   vous prête certains propos. Vous parlez du traitement des populations à

 24   Srebrenica et à Zepa, et le fait qu'il y aurait des rumeurs concernant des

 25   atrocités, des massacres ainsi que des viols.

 26   Un peu plus bas sur cette page -- à la page suivante :

 27   "Il serait souhaitable de permettre au HCR des Nations Unies et au CICR ou

 28   à la Croix-Rouge internationale d'avoir accès à ces prisonniers aussi


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  1   rapidement que possible."

  2   Général, j'aimerais savoir si vous-même ou d'autres participants à cette

  3   réunion ont fait part de vos préoccupations concernant l'information que

  4   vous avez reçue. Vous parlez donc de préoccupation concernant des

  5   massacres, des atrocités contre les Bosno-musulmans et les pressions que

  6   vous exerciez de façon à ce que le CICR puisse avoir accès à ces

  7   prisonniers; est-ce que ceci était cohérent ?

  8   R.  Oui. Je crois que c'est ce que nous avons fait, et je suis sûr de ne

  9   pas avoir utilisé le terme de "rumeur." Il est beaucoup plus probable que

 10   j'ai dit : "Il semble que," ou "J'ai reçu des rapports laissant penser …"

 11   M. TIEGER : [interprétation] Merci. Je voudrais maintenant que l'on passe

 12   au document suivant, s'il vous plaît, numéro 01690 de la liste 65 ter.

 13   Q.  Alors, ici, il s'agit d'un message daté du 17 juillet 1995, un câble

 14   crypté. Parmi les points abordés, lors de cette réunion -- enfin, certains

 15   des points qui avaient été discutés à la réunion y sont repris et on trouve

 16   également l'indication que vous-même et Mladic avez eu une longue

 17   discussion bilatérale.

 18   Alors pouvons-nous passer à la page suivante.

 19   Je m'intéresse au quatrième point dans la section intitulée : "Srebrenica,"

 20   il est dit, je cite :

 21   "Le CICR doit avoir immédiatement accès aux 'prisonniers de guerre' afin

 22   d'évaluer la façon dont ils sont pris en charge, les enregistrer afin de

 23   vérifier les procédures appliquées au centre de réception bosno-serbe, et

 24   de s'assurer qu'elles sont conformes aux conventions de Genève."

 25   Alors nous avons encore là une autre indication qui nous montre qu'il était

 26   nécessaire de permettre au CICR d'avoir accès. Cela nous montre toute

 27   l'importance que vous-même et d'autres représentants des Nations Unies

 28   attachaient à cette possibilité qui devait être donnée au CICR d'avoir


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  1   accès aux prisonniers, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Alors une des choses qui sont dites ici également suggère qu'il devait

  4   avoir une liste ou un registre de dressé, répertoriant toutes les personnes

  5   qui étaient détenues là-bas, afin qu'on puisse assurer un suivi, n'est-ce

  6   pas ?

  7   R.  Oui.

  8   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais demander le

  9   versement de ce document.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote P2279, Messieurs les

 11   Juges.

 12   M. TIEGER : [interprétation] Pouvons-nous maintenant passer au document

 13   suivant, le numéro 03892, de la liste 65 ter ?

 14   Alors pouvons-nous passer à la page suivante, s'il vous plaît.

 15   Q.  Général, nous avons ici le résumé d'une réunion que vous avez eue avec

 16   le général Mladic, le 19 juillet 1995, au restaurant Jela, à Han Kram. Nous

 17   allons examiner un certain nombre de réunions que vous avez eues avec

 18   Mladic aux mois de juillet et d'août. Mais, ici, nous trouvons tout d'abord

 19   l'indication suivante : le général Tolimir et le colonel Indic

 20   accompagnaient Mladic. On a parlé du retrait de Zepa, de la liberté de

 21   circulation, du Bataillon néerlandais et de son retrait.

 22   Alors passons maintenant plus bas, à la partie de la discussion qui

 23   concerne le projet d'accord.

 24   Au premier paragraphe, on parle des :

 25   "…des prisonniers de guerre ou détenus, je cite, ils ont tout

 26   référence à eux a été retirée, puisqu'il n'y avait pas eu d'accord compte

 27   tenu des exigences des uns et des autres. Il a également été décidé qu'il

 28   ne serait pas correct que les généraux passent un accord quant à ce que le


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  1   CICR devait faire à Srebrenica et Zepa."

  2   Ensuite nous avons un point qui apparaît à la page suivante. Vous

  3   soulignez, une fois encore, l'importance qu'il y a pour le HCR d'avoir -- à

  4   avoir accès immédiatement à Srebrenica.

  5   Donc la communauté internationale, la FORPRONU et d'autres

  6   n'essayaient-ils pas toujours de permettre au HCR d'avoir accès à

  7   Srebrenica, afin que ce dernier évalue la situation des prisonniers ?

  8   R.  Oui, en effet. Je crois que nous voyons également ici refléter les

  9   fonctions différentes de ces deux instances. Ce qui ne veut aucunement dire

 10   qu'elles aient poursuivi des objectifs différents.

 11   Q.  Merci, Général. Alors nous avons un sous titre, "Srebrenica." Je vois

 12   que M. le Greffier a déjà fait défiler la page. En substance, vous avez

 13   demandé au général Mladic de rendre compte des activités de la VRS juste

 14   après la chute de Srebrenica. Le général Mladic a affirmé que la "situation

 15   à Srebrenica," - entre guillemets - "avait été terminée et finie de façon

 16   correcte."

 17   Est-ce que vous avez donc soulevé cette question de la façon dont la

 18   VRS avait procédé après la chute de Srebrenica ?

 19   R.  Je ne savais pas ce qu'il en était à l'époque. J'essayais de découvrir

 20   ce qui s'était passé.

 21   Q.  Quelles étaient vos préoccupations principales ? Quelles informations

 22   receviez-vous ?

 23   R.  Il y avait des rapports précédents qui ne rendaient pas compte de la

 24   situation dans son ensemble. Des réfugiés commençaient à arriver à Tuzla,

 25   et ce que l'on a appris par leur intermédiaire n'a fait que s'ajouter aux

 26   préoccupations que nous avions. Nous avons été informés, à ce moment-là,

 27   qu'environ 2 000 hommes avaient été triés, séparés et emmenés. Personne ne

 28   savait où ils se trouvaient, ni n'avaient accès à eux. Nous avions -- c'est


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  1   prendre en compte les réfugiés dans le décompte, nous avions perdu la trace

  2   d'un certain nombre d'hommes et nous ne savions absolument pas où ils

  3   étaient ni ce qu'ils faisaient. Mais au fur et à mesure, nous prenions en

  4   compte de plus en plus de personnes dans notre décompte.

  5   Q.  Alors passons au dernier paragraphe de la page suivante concernant

  6   Srebrenica, je cite :

  7   "Mladic a décrit la façon dont dans la nuit du 10/11 juillet 1995, un grand

  8   nombre de soldats de l'ABiH ont opéré une percée à travers les lignes dans

  9   la direction de Tuzla. Il a expliqué qu'il avait ouvert un corridor afin de

 10   permettre le passage de ces troupes. Il a reconnu qu'il y avait eu quelques

 11   escarmouches, avec des blessés des deux côtés, et que celle-ci ne

 12   représentait que 'de petits incidents regrettables'."

 13   Alors vous avez relevé précédemment ou plutôt nous avons vu dans le résumé

 14   que le général Mladic était gêné aux entournures lorsqu'il a affirmé que

 15   tout s'était terminé correctement à Srebrenica. En dehors de cette façon

 16   qu'il a eu de reconnaître la survenue d'incidents mineurs, le général

 17   Mladic a-t-il essayé de vous décrire ce qui s'était passé à Srebrenica ? Si

 18   oui, l'a-t-il fait de façon précise et exhaustive ? A-t-il rendu compte des

 19   prisonniers dont la communauté internationale ignorait le sort ou ignorait

 20   encore l'existence ?

 21   R.  Non. Un très grand nombre d'hommes étaient toujours impossibles à

 22   localiser, et aucune des explications ou des raisons qu'il avançait me

 23   permettait de comprendre ce qui leur était arrivé, en dehors du fait qu'il

 24   a parlé d'un groupe de ces hommes qui se seraient déplacés ou qui auraient

 25   été sur place depuis déjà un certain temps, entre Srebrenica et la partie

 26   nord ou la zone nord-ouest en direction de Tuzla. Alors compte tenu du

 27   nombre de rapports du volume d'information que nous recevions à ce stade

 28   qui vous indiquaient que des personnes avaient été tuées en grand nombre et


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  1   qui faisaient état d'autres actes également ces explications avancées par

  2   Mladic n'étaient certainement pas suffisantes.

  3   Q.  Alors, est-ce que vous pourriez fournir un peu plus d'explication :

  4   "Le général Mladic était donc gêné aux entournures lorsqu'il a dit que tout

  5   c'était terminé correctement à Srebrenica."

  6   Mais est-ce que vous diriez que le message donné par Mladic consistait à

  7   dire que la communauté internationale n'avait pas à se montrer préoccupée

  8   ni à agir en quelque façon que ce soit pour découvrir ce qui s'était passé

  9   ?

 10   R.  Je n'emploierai pas nécessairement -- je ne serais pas nécessairement

 11   aussi diserre [phon] mais probablement ce que j'ai compris.

 12   M. TIEGER : [interprétation] Je souhaiterais demander le versement de ce

 13   document.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Soit.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote P2280, Messieurs les

 16   Juges.

 17   M. TIEGER : [interprétation] Maintenant je voudrais passer au document

 18   suivant le 03728 de la liste 65 ter, qui concerne une autre réunion tenue

 19   le 26 juillet.

 20   Q.  Général, nous avons ici le résumé d'une réunion qui s'est tenue à la

 21   date du 25 juillet, au même endroit, le restaurant Jela à Han Kram.

 22   Apparemment, vous avez été l'initiateur de cette réunion. La réunion a été

 23   marquée avant tout par la discussion portant sur Zepa, il est également

 24   indiqué que vous avez passé quatre heures à Zepa en compagnie du général

 25   Mladic. Je voudrais attirer votre attention tout d'abord sur une mention

 26   qui figure vers le bas de cette page mention de la réunion précédente et

 27   des discussions que vous y aviez eues.

 28   Encore une fois, la question du CICR et de l'accès qu'il avait ou qu'il


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  1   n'avait pas, a-t-elle été mise sur la table ? Est-ce qu'à ce moment-là, le

  2   CICR s'était vu autoriser l'accès à Srebrenica ? Quelle était votre

  3   position d'une part et quelle était celle de Mladic d'autre part ?

  4   R.  Dans mon souvenir, nous avons examiné le document, le CICR n'avait pas

  5   rendu visite à ces personnes et n'avait pas reçu l'autorisation d'accéder à

  6   elle à ce stade-là.

  7   Q.  Vous essayez toujours de découvrir quel avait été le sort de ces

  8   personnes ?

  9   R.  Nous ignorions toujours ce qui s'était passé à Srebrenica.

 10   Q.  A cette étape-là, donc vers la fin du mois de juillet, quelle était

 11   votre compréhension des événements survenus juste après la chute de

 12   Srebrenica ?

 13   R.  J'ai entendu la version du général Mladic et j'ai été également en

 14   possession d'information émanant du Bataillon néerlandais. A mon sens,

 15   enfin j'avais compris que la défense s'était avérée beaucoup moins

 16   résistante que ceux dont nous avions estimé les Bosniens capable dans

 17   l'enclave de Srebrenica, la défense avait vu ses lignes se rompre, et

 18   avaient pu s'échapper dans la direction du nord-ouest, et à ce moment-là,

 19   des personnes entraient sur le territoire bosnien en traversant les lignes

 20   de front pour passer dans le territoire de Tuzla. Bien que nous n'ayons

 21   jamais pu nous rendre auprès d'eux, nous avons commencé à entendre parler

 22   de cette percée ou de cette échappée qu'ils avaient opérée.

 23   Alors j'avais également vu l'image de ces hommes qui s'étaient échappés et

 24   qui ensuite ont été pourchassés par les Bosno-serbes en direction des

 25   lignes de front, qu'ils avaient ensuite eu à traverser. Donc dans une

 26   certaine mesure, cela me donnait une idée de leurs localisations, et de la

 27   raison pour laquelle les rapports mentionnaient tant de blessés et tant

 28   d'autres situations graves. Mais à ce stade, quelqu'un nous avait informé


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  1   que des corps avaient été observés le long de la route. Ce qui ne rendait

  2   toujours pas compte de tous les chiffres. Il y avait toujours au moins 2

  3   000 personnes dont nous ignorions totalement le sort et nous ne savions pas

  4   où elles se trouvaient.

  5   Q.  D'où les pressions constantes que vous avez exercées pour que le CICR

  6   puisse accéder à Srebrenica, n'est-ce pas

  7   R.  Oui.

  8   Q.  A ce moment-là, cette autorisation n'avait toujours pas été accordée au

  9   CICR ?

 10   R.  En effet.

 11   M. TIEGER : [interprétation] Je voudrais demander le versement de ce

 12   document, Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Soit.

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote P2281, Messieurs les

 15   Juges.

 16   M. TIEGER : [interprétation] Je voudrais maintenant qu'on passe au document

 17   03492 de la liste 65 ter.

 18   Nous avons affaire ici à un câble crypté émanant de M. Akashi et adressé

 19   aux Nations Unies à New York. M. Akashi rend compte de différentes

 20   questions, y compris celle qui est évoquée en bas de page, à savoir Zepa.

 21   Il est dit au début, je cite :

 22   "L'armée des Serbes de Bosnie a pénétré dans la ville de Zepa hier et

 23   assure en ce moment le contrôle de la quasi intégralité des villes et

 24   villages se trouvant à l'intérieur de l'enclave."

 25   Alors si l'on passe à la page suivante, on verra que -- excusez-moi, je

 26   cite :

 27   "Les hommes en âge de combattre ne se sont pas encore rendus. Leur sort

 28   fait l'objet de négociations toujours en cours sous les [inaudible] de la


Page 11442

  1   FORPRONU, tant à l'échelon local à Zepa que de façon centralisée à

  2   Sarajevo."

  3   Ceci se réfère à certains des propos que vous avez échangés avec le général

  4   Mladic à vos négociations des jours précédents. Je voudrais vous poser une

  5   question spécifique concernant une partie de ce document, qui figure au

  6   point petit (b), je cite :

  7   "A une réunion portant sur les échanges de prisonniers de guerre, les

  8   Serbes insistent sur un échange d'après le principe 'tous contre tous,'

  9   mais refusent de fournir des détails quant aux hommes qui ont été faits

 10   prisonniers à Srebrenica."

 11   Q.  Alors je me demandais si vous ne seriez peut-être pas en mesure de nous

 12   fournir une explication. Est-il exact de dire que, malgré cette insistance

 13   de leur part pour que soit appliqué le principe d'échange "tous contre

 14   tous," les Serbes de Bosnie refusaient toujours de fournir des détails

 15   quant au sort de ces hommes à Srebrenica ?

 16   R.  Je me rappelle qu'il y avait une instance chargée des échanges de

 17   prisonniers qui se réunissait, il me semble, à l'aéroport, la Commission

 18   des Echanges de prisonniers de guerre. Mais l'ensemble de ce processus

 19   était au point mort déjà depuis que l'accord portant sur la cessation des

 20   hostilités avait commencé à se [inaudible]. Je ne me rappelle pas tous les

 21   détails du débat correspondant. J'ai considéré à l'époque qu'il s'agissait

 22   davantage d'une tentative de faire capoter les choses et de les bloquer, de

 23   bloquer ce qui se passait, de figer ce qui se passait autour de Zepa,

 24   plutôt que de faire avancer les choses. Quant à la question de savoir si

 25   dans ce principe "tout contre tout," on comprenait également les

 26   prisonniers de Srebrenica, c'est une autre question.

 27   M. TIEGER : [interprétation] Je voudrais demander le versement de ce

 28   dossier.


Page 11443

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Soit.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote P2282.

  3   M. TIEGER : [interprétation] Pourrions-nous maintenant passer au document

  4   numéro 03492 de la liste 65 ter ?

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Pouvez-vous répéter le numéro du document

  6   ?

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est le numéro du document que nous

  8   venons de voir, Monsieur Tieger.

  9   M. TIEGER : [interprétation] Vous avez raison. Excusez-moi.

 10   Le numéro du document dont je souhaite demander l'affichage maintenant est

 11   le 03895 de la liste 65 ter. Alors je crois que c'est bien là le document

 12   que je souhaitais afficher, mais j'aimerais procéder par ordre

 13   chronologique, et je vais donc me tourner vers M. Reid pour vérifier juste

 14   un point.

 15   Je vérifierai tout cela pendant la pause, Messieurs les Juges.

 16   En attendant, je suggère que nous passions au document suivant. En fait,

 17   j'aimerais que l'on affiche de nouveau et assez brièvement le document que

 18   nous avons déjà examiné, qui était précédemment à l'écran, et qui porte le

 19   numéro 03895 dans la liste 65 ter.

 20   Q.  Nous avons donc là un résumé de la situation à Zepa à la date du 28

 21   juillet 1995. Ceci nous indique, je cite :

 22   "L'évacuation de la population civile est pratiquement terminée."

 23   Je voudrais attirer votre attention sur un point. Il y a encore une mention

 24   de cette Commission chargée des Echanges de prisonniers. Penchez-vous sur

 25   le paragraphe numéro 2 et veuillez nous dire si, à ce moment-là, le

 26   principe de l'échange "tous contre tous" était toujours mis en œuvre, alors

 27   est-ce qu'on insistait toujours sur ce principe et, à ce stade-là, vous

 28   avait-on fourni ou non des informations concernant les hommes faits


Page 11444

  1   prisonniers à Srebrenica, connaissiez-vous ou non le sort qui avait été le

  2   leur ?

  3   R.  Nous ignorions le sort des habitants de Srebrenica, et je ne me

  4   rappelle pas que cela ait fait partie des discussions à Zepa lorsque nous

  5   avons abordé la question des prisonniers.

  6   Q.  Alors juste avant la pause, Général : Dans toute une série de documents

  7   et dans votre propre déposition, nous trouvons ce thème récurent -- des

  8   promesses récurrentes faites par le général Mladic pendant toutes ces

  9   différentes réunions, promesses au terme desquelles le CICR était censé se

 10   voir autorisé à accéder aux prisonniers de Srebrenica. Mais vers fin

 11   juillet, quel était votre point de vue quant à ces promesses ?

 12   R.  Je crois qu'à la toute fin du mois de juillet, le CICR avait pu se

 13   rendre à Bratunac, ou au moins, dans la zone de Bratunac au sens large. Je

 14   crois qu'on avait montré aux représentants du CICR un certain nombre de

 15   bâtiments vides mais qu'aucun prisonnier ne leur avait été montré. Pour ma

 16   part, je considérais que toutes ces promesses avaient été -- ou plutôt,

 17   s'étaient avérées être des promesses creuses.

 18   M. TIEGER : [interprétation] Alors je voudrais que l'on affiche le document

 19   02365 de la liste 65 ter, et plus précisément, la page 89, en rapport avec

 20   ce que vous venez de dire.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous demandez le versement de

 22   ce document, "la situation à Zepa" ?

 23   M. TIEGER : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Ce sera donc la pièce P2283.

 25   M. TIEGER : [interprétation] Alors pouvons-nous commencer par le coin

 26   inférieur droit de cette page numéro 89, dans le paragraphe 409, je cite :

 27   "De façon tout à fait représentative de la situation, le CICR ne s'était

 28   pas vu autoriser à accéder à la zone de Srebrenica, afin de se rendre


Page 11445

  1   compte du sort des personnes disparues, et ce, jusqu'à quelques jours avant

  2   la réunion de Londres. Une fois que l'accès a été permis par l'armée des

  3   Serbes de Bosnie, au camp de Batkovic, dans le nord-est de la Bosnie, le

  4   CICR n'a été en mesure d'enregistrer que 164 prisonniers originaires de

  5   Srebrenica, et 44 de Zepa. Le CICR et son représentant se sont vus dire

  6   qu'aucun autre prisonnier n'était détenu et se sont vus présenter un

  7   certain nombre de centres de détention vides dans la zone de Bratunac."

  8   Ensuite il est question du nombre de personnes toujours portées disparues

  9   au mois de novembre 1999.

 10   Q.  Alors, Général, ceci est-il cohérent avec ce dont vous nous avez fait

 11   part à l'instant ?

 12   R.  Je crois que c'est précisément ce que j'avais à l'esprit lorsque j'ai

 13   dit qu'ils ont pu se rendre à Bratunac.

 14   M. TIEGER : [interprétation] Merci.

 15   Monsieur le Président, je souhaiterais demander le versement de ce

 16   document. Je reconnais que nous n'avons abordé qu'une courte partie, un

 17   court fragment.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Il recevra la cote P2284.

 19   Alors je relève l'heure, Monsieur Tieger, il est temps de faire une pause.

 20   Mais avant de lever l'audience, je voulais vous demander : de combien de

 21   temps vous avez encore besoin pour mener à son terme votre interrogatoire

 22   principal ?

 23   M. TIEGER : [interprétation] Il y a une certaine incertitude quant à ces

 24   estimations, mais je crois être en mesure de terminer en une demi-heure.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je remercie tout le personnel qui nous

 26   assiste, qu'il s'agisse du greffe, du sténotypiste ou des interprètes pour

 27   leur indulgence et leur patience. Je crois que nous pourrons siéger plus

 28   longtemps demain et après demain.


Page 11446

  1   Nous siégerons donc jusqu'à 16 heures 30 jeudi, et jusqu'à 15 heures 45

  2   vendredi. Ce qui signifie que nous bénéficierons donc de temps

  3   supplémentaire -- ou plutôt, d'un volet d'audience supplémentaire d'une

  4   heure 45 -- nous bénéficierons d'une heure et 45 minutes de temps

  5   supplémentaire. Alors si vous avez besoin d'encore une demi-heure, cela

  6   signifie que M. Karadzic pourra utiliser un peu moins des 12 heures qui lui

  7   ont été allouées.

  8   Voilà donc où nous en sommes à ce stade, et il n'est pas à exclure que le

  9   témoin est à revenir la semaine prochaine.

 10   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, très rapidement, je

 11   sais également que les Juges de la Chambre ne souhaitent pas procéder avec

 12   précipitation et aller trop vite, c'est tout à leur honneur.

 13   Je voulais relever que les dispositions prises au titre du calendrier

 14   étaient quand même assez précises, et ne prévoyaient pas de questions

 15   supplémentaires. Bien que l'accusé ait demandé un temps considérable au

 16   titre du contre-interrogatoire en s'appuyant sur le fait qu'il s'agissait

 17   d'un témoin viva voce, et qu'il souhaitait obtenir des éléments de preuve

 18   pour la présentation -- au titre de ses propres moyens de Défense,

 19   auxquelles l'Accusation ne serait donc pas en position de répondre. Donc

 20   non seulement nous nous verrions privés en application du calendrier actuel

 21   des questions supplémentaires, telles qu'elles sont habituellement prévues,

 22   mais nous serions également privés de la possibilité de nous pencher sur

 23   tout élément nouveau que l'accusé essaiera d'obtenir du témoin. Donc je

 24   souhaiterais simplement relever que du temps devrait être prévu au titre

 25   des questions supplémentaires, et que compte tenu des circonstances, il

 26   faudrait prévoir cela de façon assez large.

 27   Je crois que nous avons déjà pu nous faire une idée du type de sujets qui

 28   pourront être abordés à la lumière de la façon dont Me Robinson a présenté


Page 11447

  1   les choses aujourd'hui. Donc je crois qu'il serait bon que les Juges de la

  2   Chambre gardent à l'esprit que certains des sujets sur lesquels le risque

  3   de s'aventurer l'accusé appelleront sans doute du temps supplémentaire, du

  4   point de vue de l'Accusation.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] En tout cas, et en l'état actuel, la

  6   Chambre a attribué 12 heures de contre-interrogatoire à l'accusé.

  7   Alors pouvons-nous passer brièvement à huis clos partiel. Je vous remercie

  8   que nous passions à huis clos partiel brièvement.

  9   [Audience à huis clos partiel]

 10  (expurgé)

 11  (expurgé)

 12  (expurgé)

 13  (expurgé)

 14  (expurgé)

 15  (expurgé)

 16  (expurgé)

 17  (expurgé)

 18  (expurgé)

 19  (expurgé)

 20  (expurgé)

 21  (expurgé)

 22  (expurgé)

 23   [Audience publique]

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons maintenant faire une pause

 25   d'une demi-heure, pour reprendre à 13 heures 05.

 26   --- L'audience est suspendue à 12 heures 36.

 27   --- L'audience est reprise à 13 heures 07.   

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger.


Page 11448

  1   M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  2   J'aimerais que nous reprenions la pièce P2282, et je demande l'affichage de

  3   ce qui, je crois, devrait la page 11 de ce document dans le prétoire

  4   électronique.

  5   Q.  Général, vous voyez que ce document porte la date du 26 juillet 1995.

  6   Si nous nous rendons au passage qui évoque les différentes réunions tenues

  7   jusqu'à ce moment-là, cette liste se trouve en page suivante. Il y est

  8   question, encore une fois, d'une rencontre que vous avez eue avec le

  9   général Mladic, réunion au cours de laquelle la situation prévalente à Zepa

 10   était discutée.

 11   J'aimerais appeler votre attention rapidement sur deux parties de ce

 12   document.

 13   D'abord, le paragraphe 6 pour lequel il va falloir afficher le bas de la

 14   page à l'écran.

 15   Il y est indiqué que vous expliquez au général Mladic que pour satisfaire à

 16   sa demande d'un échange de, tous contre tous, une rencontre devrait avoir

 17   lieu entre les deux parties. Vous prévenez également Mladic quant au fait

 18   qu'il est tout à fait indispensable que le CICR se trouve sur le terrain

 19   dans la région de Zepa dans les plus brefs délais afin d'éviter que ne

 20   soient commis certains actes présumés avoir été commis à Srebrenica.

 21   Général, est-ce que ceci rend bien compte du fait que le CICR n'avait pas

 22   encore obtenu l'autorisation de se rendre à Srebrenica, pas plus qu'à Zepa

 23   d'ailleurs à ce moment-là ? Est-ce que ceci reflète l'existence de

 24   renseignements que vous receviez au sujet de ce qui se passait à Srebrenica

 25   à ce moment-là ?

 26   R.  Oui.

 27   M. TIEGER : [interprétation] J'aimerais maintenant que nous nous pensions

 28   sur le paragraphe 10 qui se trouve en page suivante. Il est indiqué que le


Page 11449

  1   débat se poursuit. Ceci figure au haut de la page. Que participent à ce

  2   débat le général Smith, M. Mladic, M. Torlak, qui est défini comme étant le

  3   représentant civil de la population de Zepa, et le signataire de l'accord

  4   du 24 juillet 1995. Nous trouverons cette mention en haut de la page.

  5   A présent, j'aimerais que l'on fasse défiler la page à l'écran pour nous

  6   rendre jusqu'au bas du paragraphe 10.

  7   Q.  Dans ce paragraphe 10, en son centre, nous lisons, je cite :

  8   "Torlak a déclaré que si les hommes présents dans l'enclave…"

  9   Je rappelle encore une fois qu'il est question ici de l'écran de

 10   Zepa, suite de la citation :

 11   "…devaient être échangés, le sentiment de crainte s'entrouvrait

 12   immédiatement modifié."

 13   Général, pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre ce que vous entendez par

 14   ces termes "sentiment de crainte" ? Pouvez-vous indiquer quelles étaient

 15   les sources de cette crainte ?

 16   R.  Le climat général qui régnait à Zepa parmi la population était un

 17   climat marqué par la crainte. Il y avait eu quelques habitants de

 18   Srebrenica qui étaient arrivés à Zepa, qui étaient porteurs de certaines

 19   rumeurs ayant entendu pas mal de choses, et ce que j'ai compris c'est que

 20   Torlak me faisait rapport pendant son intervention orale.

 21   M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie, Général.

 22   J'aimerais que nous passions maintenant au document 65 ter numéro 03896. Ce

 23   document date du 31 juillet 1995, il évoque une autre réunion que vous avez

 24   eue avec le général Mladic. Je vous ai laissé quelques instants pour

 25   prendre connaissance de cette page.

 26   Je demanderais maintenant que l'on affiche la page suivante à

 27   l'écran.

 28   Pour arriver au paragraphe 7 où il est indiqué que :


Page 11450

  1   "Peu de progrès a été accompli sur la question de Zepa, ce qui semble

  2   indiquer clairement que ce sujet ne figure pas au premier plan des

  3   priorités de Mladic."

  4   Je crois que nous avons contacté à la lecture de la première partie du

  5   document, que la première partie de la réunion a été dominée par la

  6   description qu'a faite Mladic de la situation militaire et humanitaire à

  7   Livno, Glamoc et Grahovo suite aux offensives menées par l'armée croate et

  8   le HVO.

  9   Au paragraphe 7, petit (a) et petit (b), il est indiqué ce qui suit, je

 10   cite :

 11   "Mladic ne fera aucune concession sur un quelconque échange de prisonniers

 12   de guerre, tout échange doit s'accomplir selon ses conditions au nombre

 13   desquelles figure l'exigence que l'ABiH rende ses armes et se rendre à

 14   l'armée bosno-serbe. Il ne s'inquiète manifestement pas d'un quelconque

 15   échange de 'tous contre tous'."

 16   Je suppose, Général, que ceci rend compte du fait que l'insistance pour que

 17   l'échange se fasse sur la base du principe tous contre tous est abandonné

 18   suite aux pressions constantes exercées par les responsables des Nations

 19   Unies pour obtenir des informations sur les prisonniers de Srebrenica ?

 20   R.  Je ne suis pas sûr que cet élément soit entré dans le raisonnement. Ce

 21   qui s'est passé aussi c'est qu'il se concentrait désormais sur la crise qui

 22   avait éclaté sur l'axe Livno-Glamoc et qu'il ne pouvait pas se permettre de

 23   voir ces forces présentes dans les environs de Zepa s'y maintenir pendant

 24   longtemps.

 25   Q.  Au paragraphe B, il est indiqué que la population civile est au

 26   complet, et que l'ABiH aurait commencé à sortir de l'enclave par trois

 27   itinéraires, il est également indiqué que votre demande que la FORPRONU

 28   puisse patrouiller dans l'enclave a été rejetée. Alors je vous demande quel


Page 11451

  1   était le but de cette demande de faire pénétrer la FORPRONU à l'intérieur

  2   de l'enclave ?

  3   R.  Je souhaitais m'assurer que tous les civils étaient sains et saufs.

  4   S'il restait des soldats à l'intérieur de l'enclave, or je crois qu'il en

  5   restait, et ce, jusque dans les zones les plus montagneuses, je voulais

  6   pouvoir établir un contact avec eux.

  7   Q.  Dans la même période, est-ce que la FORPRONU a été autorisée à

  8   patrouiller dans le secteur de Srebrenica --

  9   R.  Non, non, non, nous n'y avons pas reçu cette autorisation.

 10   M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie, Général.

 11   Je demande le versement au dossier de ce document, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document est admis.

 13   M. LE GREFFIER : [interprétation] Et devient la pièce P2285.

 14   M. TIEGER : [interprétation] Je demanderais maintenant l'affichage du

 15   document 65 ter numéro 03898.

 16   Q.  Général, je vous demanderais de consacrer un instant à la prise de

 17   connaissance du contenu de ce document, qui date du 22 août 1995, et dans

 18   lequel il est encore une fois question d'une rencontre que vous avez eue

 19   avec le général Mladic.

 20   Comme il est indiqué dans ce document, cette rencontre a duré environ cinq

 21   heures, et un certain nombre de questions y ont été discutées.

 22   A présent, j'aimerais que l'on affiche la page 2, le passage qui

 23   m'intéresse se trouve au bas de la page, dans ce passage on semble indiquer

 24   que vous êtes en train d'explorer les positions et ambitions politiques de

 25   Mladic, que ce dernier insiste sur la nécessité par la communauté

 26   internationale de discuter avec les Bosno-Serbes, il déclare, en effet, je

 27   cite :

 28   "Je suis un criminel de guerre, mais vous devez discuter avec moi, puisque


Page 11452

  1   je suis le seul qui peut vous permettre de sortir de Gorazde."

  2   Il est indiqué également qu'il souhaite apporter son aide, mais tient à

  3   n'être considéré que comme un soldat, étant donné que c'est bien son rôle,

  4   et qu'il ne veut rien faire qui pourrait discréditer son gouvernement ou

  5   l'assemblée de son gouvernement.

  6   Vous rappelez-vous cette discussion, Général, vous rappelez-vous que ceci a

  7   fait partie de votre évaluation du rapport qu'entretenait Mladic avec les

  8   autres représentants de la direction politique et militaires bosno-serbes ?

  9   R.  Je me souviens de cette réunion et de la discussion qui y a eu lieu, et

 10   je me souviens en gros de ce que le général a dit pendant ce débat.

 11   Q.  Vous avez également parlé de Srebrenica durant cette réunion. Ceci est

 12   montré à la page suivante, au paragraphe 9, dont je demande l'affichage.

 13   Selon ce qui est indiqué dans ce document, dans ce paragraphe 9, vous avez

 14   évoqué les préoccupations que suscitaient des allégations d'atrocités qui

 15   auraient été commises et le refus présumé des opposés par les Bosno-serbes

 16   à un quelconque accès sur place du CICR, et l'expression "notre objectif

 17   propre" est également utilisée dans cette partie du texte.

 18   Que souhaitiez-vous dire en parlant ainsi du général Mladic, et quelle

 19   réponse avez-vous obtenue ?

 20   R.  La conversation qui a portée sur Srebrenica, si je me souviens bien,

 21   était la suite d'autres discussions centrées sur les perceptions ressenties

 22   par les Bosno-serbes, dont il est question, si je ne m'abuse, dans le

 23   paragraphe précédent de ce texte. Ce n'était pas la première fois que

 24   j'essayais de déterminer ce que ressentaient les Bosno-serbes pour savoir

 25   si leur façon de percevoir les choses était effectivement très contraire à

 26   leurs intérêts réels et si ce qu'ils en disaient n'était en fait qu'une

 27   espèce de façon malhabile de traiter leur propre image, ce qui contribuait

 28   à l'idée que le monde extérieur se faisait d'eux et, notamment, au fait que


Page 11453

  1   le monde extérieur estimait qu'ils étaient les auteurs de tous ces

  2   événements dans les Balkans auxquels ils s'intéressaient. Mais la réponse

  3   assez fréquente que j'obtenais dans le cadre de cet effort de ma part était

  4   qu'il ne s'agissait en général que d'allégations de ceux qui étaient

  5   opposés aux Bosno-serbes et que, finalement, depuis que les atrocités

  6   avaient commencées, c'est-à-dire depuis les actes commis par les Croates

  7   dans les Krajinas, les Bosno-serbes avaient quitté les Krajinas.

  8   Q.  Mais qu'en est-il des allégations selon lesquelles le CICR n'aurait pas

  9   eu l'autorisation d'entrer dans ces lieux en raison du fait que cette

 10   organisation fourmillait de "agents étrangers" ?

 11   R.  Ceci n'est pas vrai mais, encore une fois, c'était une réponse assez

 12   typique que nous recevions.

 13   Q.  Qu'en est-il de cette note que je lis ici dans le texte, à savoir le

 14   fait que Srebrenica est évoqué ? Qu'avez-vous pensé de la façon dont il a

 15   décrit la situation à Srebrenica ?

 16   R.  Je ne me souviens pas de ce qu'il a dit exactement, mais cela n'a pas

 17   été consigné au procès-verbal en tout cas. Encore une fois, en dehors des

 18   réponses consignées au procès-verbal, je n'ai aucune possibilité de me

 19   rappeler dans quels termes il exprime éventuellement un malaise par rapport

 20   à telle ou telle situation.

 21   Q.  Vous rappelez-vous s'il a essayé d'expliquer ce qui s'était passé à

 22   Srebrenica et de quelle manière il l'aurait fait ?

 23   R.  Je ne me souviens pas s'il l'a fait.

 24   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le versement

 25   au dossier de ce document.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il est admis.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il devient la pièce P2286, Monsieur le

 28   Président.


Page 11454

  1   M. TIEGER : [interprétation] Je passerai maintenant au document 65 ter

  2   numéro 13734.

  3   Q.  Général, ce document date du 22 août 1995. Il rend compte de réunions

  4   tenues avec les dirigeants bosno-serbes le 21 août. Comme indiqué au début

  5   du document, deux réunions ont eu lieu à Pale avec les dirigeants bosno-

  6   serbes, une première réunion avec Koljevic, et ensuite une deuxième réunion

  7   avec le président Karadzic et trois de ses collaborateurs : Momcilo

  8   Krajisnik, Aleksa Buha et Jovan Zametica.

  9   M. TIEGER : [interprétation] Je demanderais l'affichage de la page 3, dans

 10   le prétoire électronique.

 11   Q.  Alors, Général, comme nous l'avons vu à la lecture du document

 12   précédent, et comme vous nous l'avez expliqué lorsque vous avez rencontré

 13   le général Mladic, c'est-à-dire le lendemain, vous avez essayé de lui faire

 14   valoir vos positions le plus complètement possible, et en particulier,

 15   l'incidence que risquait d'avoir l'inquiétude internationale croissante au

 16   sujet de ce qui se passait à Srebrenica. Vous avez tenté de lui faire

 17   valoir, à ce moment-là, à quel point cette incidence pouvait avoir un effet

 18   négatif et des conséquences négatives. Ici, il est indiqué que vous

 19   rappelez à Karadzic, conformément aux directives figurant dans la

 20   résolution 1010 des Nations Unies relative à des violations graves

 21   présumées du droit international humanitaire par les Serbes à Srebrenica et

 22   dans ses environs, vous lui rappelez que le secrétaire général lui avait

 23   écrit le 12 août pour demander à ce que la FORPRONU puisse accéder à la

 24   zone et apporter son concours aux enquêtes menées quant à ces infractions

 25   présumées. Au jour de la réunion, le secrétaire général n'avait reçu aucune

 26   réponse de Karadzic, qui n'avait pas non plus réagi de façon positive à

 27   cette demande.

 28   Combien de temps cet effort visant à obtenir un accès au lieu pour la


Page 11455

  1   FORPRONU a-t-il duré, et quel a été son degré d'intensité depuis la chute

  2   de Srebrenica ?

  3   R.  Comme vous le constatez, du côté militaire, les efforts ont commencé

  4   très certainement au moment de la réunion de Belgrade le 15 du mois

  5   précédent. C'est depuis ce moment-là que nous n'avons cessé de demander

  6   l'accès au lieu pour la FORPRONU en insistant sur cette demande chaque fois

  7   que l'occasion s'en présentait. Je ne saurais dire avec certitude ce qui se

  8   passait à Zagreb, quelle était la fréquence de la présentation de cette

  9   demande, mais je sais que la demande ne cessait d'être présentée. Dans ce

 10   document, nous voyons qu'au mois d'août il écrit une lettre, donc le 12

 11   août. Il est permis de penser que cette lettre n'est pas sortie du néant.

 12   Elle a certainement dû être précédée par d'autres demandes répétées à

 13   intervalle régulier.

 14   M. TIEGER : [interprétation] Je m'interromps un instant et demanderais à M.

 15   le Greffier d'afficher le document 65 ter numéro 1372.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document précédent n'a pas été versé

 17   au dossier. Nous l'admettons, donc.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il devient la pièce P2287, Monsieur le

 19   Président, Messieurs les Juges.

 20   M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi. Bien. Je poursuis.

 21   Q.  Ce document, Général, est un document qui date du 14 août 1995. Il

 22   émane de M. Akashi. Il est adressé à M. Annan et porte sur l'objet suivant,

 23   je cite : "Population disparue de Srebrenica."

 24   Ceci, ce document rencontre des efforts déployés pour obtenir que des

 25   représentants internationaux puissent accéder aux lieux afin de déterminer

 26   le sort qui a été celui des personnes détenues suite à la prise de

 27   Srebrenica, ainsi que de Zepa et le sort qui a été fait à certaines

 28   promesses.


Page 11456

  1   Paragraphe 2, par exemple, il se lit comme suit, je cite :

  2   "Outre les efforts divers qui ont été déployés sur le terrain pour que la

  3   FORPRONU puisse entrer dans les lieux, accompagnés d'autres, afin

  4   d'enquêter les personnes disparues à Srebrenica, j'ai envoyé la lettre

  5   jointe en annexe au Dr Karadzic. Tous nos efforts jusqu'à présent ont

  6   échoué à produire les résultats souhaités. Un fait simple existe, à savoir

  7   en l'absence d'un consentement des Bosno-serbes, ni la FORPRONU ni le CICR,

  8   ni le HCR, ni une quelconque autre organisation ne pourra obtenir

  9   l'autorisation d'entrer dans le secteur pour enquêter sur les personnes

 10   détenues ou se rendre sur les sites où il est présumé qu'existent des

 11   fosses communes. Le consentement indispensable a peu de chance d'être

 12   obtenu en particulièrement s'agissant de se rendre sur les sites de fosses

 13   communes."

 14   Maintenant, nous passons à la page suivante. Nous voyons que cette lettre a

 15   été envoyée et qu'elle exprime une préoccupation profonde de la part du

 16   Conseil de sécurité, en particulier, par rapport aux allégations

 17   d'existence de fosses communes identifiées par le gouvernement des Etats-

 18   Unis, et que dans cette lettre, cette question devient une question

 19   urgente. Je veux parler de la nécessité pour la FORPRONU de coopérer aux

 20   enquêtes et d'obtenir immédiatement l'accès pour ses représentants ainsi

 21   que ceux du CICR et d'autres institutions internationales aux lieux

 22   concernés.

 23   Ceci, Général, fait partie des pressions exercées par la communauté

 24   internationale à partir du moment où l'inquiétude se fait jour par rapport

 25   au sort qui a été celui d'habitants de Srebrenica, n'est-ce pas, et par

 26   rapport à la nécessité d'essayer d'entrer sur place ?

 27   R.  Oui, en effet.

 28   M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce


Page 11457

  1   document, Monsieur le Président. 

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il est admis.

  3   M. LE GREFFIER : [interprétation] Et devient la pièce P2288, Monsieur le

  4   Président.

  5   M. TIEGER : [interprétation] Revenons rapidement sur la pièce P2287, page

  6   3, dont je demande l'affichage.

  7   Q.  Après avoir rappelé à M. Karadzic l'existence de la directive des

  8   Nations Unies, et la demande précise du secrétaire général, pour que M.

  9   Karadzic accorde les autorisations demandées très rapidement, quelle

 10   réponse avez-vous obtenue ?

 11   R.  Je ne peux lire que qu'est-ce qui figure dans ce document. Je n'étais

 12   pas présent.

 13   Q.  Désolé. Quelle réponse a été faite ? Toutes mes excuses.

 14   R.  Nous n'avons pas obtenu de réponse.

 15   Q.  D'accord. Ce document indique, je cite :

 16   "Karadzic a expliqué qu'il avait été préoccupé par la crise à Banja

 17   Luka et dans d'autres secteurs, et qu'il promettait de se pencher sur la

 18   question."

 19   Général, la réponse, que vous voyez consignée ici dans ce document,

 20   correspond-elle aux réponses que vous avez reçues du général Mladic et

 21   d'autres dirigeants, quant à ce qui s'était passé ?

 22   R.  Mladic n'a fait aucune promesse -- c'est Mladic qui avait fait cette

 23   promesse, mais il ne respectait jamais -- mais il ne l'a tout simplement

 24   jamais respecté. Il n'a jamais prétendu qu'il n'avait accordé aucune

 25   intention à la demande. Mais le résultat prouve que rien n'a été fait.

 26   M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Au fait, est-ce que ce rapport n'est pas

 28   dû au général Smith ?


Page 11458

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

  2   M. TIEGER : [interprétation] Il est écrit par --

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Affichons la première page.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] L'auteur en est mon nouveau conseiller

  5   politique.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense d'ailleurs que c'était son premier

  8   voyage à Pale.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Le sigle "COM"

 10   signifie, "chef de mission" n'est-ce pas ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 12   M. TIEGER : [interprétation] Passons maintenant au document 65 ter, numéro

 13   03899.

 14   Q.  Général, j'aimerais vous parler, dans les quelques minutes qui me

 15   restent, d'un événement survenu dans la deuxième quinzaine du mois d'août

 16   1995, à Sarajevo.

 17   M. TIEGER : [interprétation] Je vous prie de m'excuser, Monsieur le

 18   Président, Messieurs les Juges, je vous demande un instant.

 19   Est-ce que nous pourrions passer à la page suivante -- ou plutôt, à la

 20   troisième page de ce document, s'il vous plaît.

 21   Q.  Général, il est mentionné une série de conversations téléphoniques

 22   entre vous et le général Mladic, le 28 août 1995, à commencer par une

 23   conversation à 14 heures 13, puis une autre à 18 heures 23, et puis une

 24   autre conversation qui semble avoir eu lieu le 29 août à 10 heures du

 25   matin. Dans la première conversation que vous avez eue avec le général

 26   Mladic, vous avez parlé pendant environ dix minutes d'un incident de

 27   bombardement à Sarajevo, ce matin-là. Vous avez mentionné qu'entre 11

 28   heures 10 et 11 heures 25, six obus sont tombés à proximité du marché,


Page 11459

  1   faisant plus d'une trentaine de victimes, et en blessant plus de 40.

  2   Général, est-ce que vous pouvez parcourir rapidement ces différentes

  3   conversations ? Je crois que, particulièrement que l'on appelle maintenant

  4   l'incident de Markale II; est-ce que vous vous souvenez donc du contenu de

  5   ces conversations et de ces notes ?

  6   R.  Oui, oui, je me souviens de ces conversations. Elles portaient sur cet

  7   incident, Markale II, le bombardement de ce marché, et les événements qui

  8   se s'en sont suivis.

  9   Q.  A l'attention des Juges de la Chambre, pourriez-vous nous décrire ce

 10   qui s'est produit, et quelle a été la teneur des échanges que vous avez eu

 11   avec le général Mladic, ce que vous avez fait de lui transmettre comme

 12   message et vice versa ?

 13   R.  Cet incident s'est produit suite auquel une trentaine de personnes ont

 14   été tuées. Un tir de mortier a touché ce marché, c'est ce que l'on peut

 15   considérer comme le début de cet incident.

 16   Vous avez le premier appel, c'est là où j'essaie de rentrer en contact avec

 17   lui. En fait, je vais peut-être revenir en arrière. Je dirais que, depuis

 18   la Conférence de Londres, qui s'était tenue à la fin du mois de juillet,

 19   les règles avaient quelque peu changé, puisqu'en fait, ce n'est pas

 20   uniquement les commandants militaires qui étaient à l'origine de demande de

 21   frappes aériennes; en fait, les frappes aériennes étaient menées à bien

 22   jusqu'au rétablissement des zones d'exclusion, de plus, toute attaque de ce

 23   type déclenchait ce type d'incident.

 24   On avait expliqué tout cela à Mladic et, je crois que le président

 25   Karadzic, suite à une visite de hauts responsables des Britanniques, des

 26   Français et des Américains, le président Karadzic donc avait reçu cette

 27   information également. Mais j'ai essayé également de savoir ce qui s'était

 28   passé sur le terrain par le biais d'analyse de personnes de terrain, et


Page 11460

  1   nous avons décidé de nous rappeler dans l'après-midi.

  2   L'enquête s'est déroulée durant toute l'après-midi, et lors de notre

  3   conversation téléphonique suivante, je lui ai fait part des résultats

  4   préliminaires de cette enquête. En même temps, il y avait des tirs qui

  5   étaient échangés, même si c'était au niveau de la ligne de front, la ligne

  6   de confrontation donc.

  7   Le général Mladic voulait une commission mixte, mais je n'étais pas en

  8   faveur de cela, parce que ça n'aurait fait que prolonger le processus, et

  9   nous devions jeter toute la lumière sur cet incident le plus rapidement

 10   possible. J'ai donc convenu avec lui de le rappeler le lendemain, avant-

 11   midi.

 12   Vous voyez donc la teneur de cette conversation téléphonique, où nous

 13   avions déterminée, au-delà de tout doute raisonnable que les obus

 14   provenaient de positions de l'armée bosno-serbe et qu'il s'agissait, par

 15   conséquent, d'une attaque imputable aux Serbes de Bosnie. A ce stade,

 16   j'avais pour ainsi dire appuyer sur le bouton et j'avais donc demandé à

 17   l'OTAN de lancer l'opération qui était prévue si ce type d'incident se

 18   produisait.

 19   Q.  Je voudrais vous poser quelques questions supplémentaires.

 20   Tout d'abord, est-ce que la demande de cette enquête mixte n'avait pas

 21   recueilli votre assentiment compte tenu de ce qui était selon vous

 22   l'objectif ou l'utilisation finale de cette enquête mixte ou conjointe ?

 23   R.  Mais de toute façon s'il y avait eu enquête conjointe, il aurait fallu

 24   également impliquer le gouvernement bosno-musulman, et il n'allait pas être

 25   d'accord, cela signifie que nous aurions passé énormément de temps à faire

 26   valoir les arguments d'un côté et de l'autre et cela signifie que cela

 27   aurait occasionné des retards supplémentaires.

 28   Q.  Est-ce que l'importance de cette attaque a eu des conséquences sur


Page 11461

  1   votre détermination à vous assurer que vous receviez les meilleures

  2   informations possibles et pour vous assurer également que les résultats

  3   nécessaires allaient être appliqués ?

  4   R.  En fait, je voulais m'assurer exactement de ce qui s'était passé, nous

  5   voulions savoir quelles étaient les circonstances, d'où les obus avaient

  6   été tirés, tout cela compte tenu des décisions de la Conférence de Londres.

  7   Q.  Est-ce que vous vous souvenez de certains des facteurs qui vous ont

  8   permis de déterminer avec certitude que ces obus avaient été tirés par les

  9   forces bosno-serbe ?

 10   R.  Il y avait toute une série de critères qui permettaient de déterminer

 11   cela. Vous aviez tout d'abord l'examen des cratères laissés par les obus.

 12   Même si la direction générale était en fait nord-sud, ceci ne nous a pas

 13   donné suffisamment de précision. Ensuite l'enquête nous a permis de

 14   préciser que tous les obus aberrants permettaient de tendre vers la même

 15   conclusion.

 16   Puis les observateurs militaires des Nations Unies se devaient de mener une

 17   enquête, mais cet incident se trouvait dans la zone de responsabilité du

 18   secteur Sarajevo. C'étaient mes subordonnés, et eux aussi ont mené une

 19   enquête. C'est là où nous avons en fait reçu deux rapports légèrement

 20   différents, mais comme je l'ai dit, nous avons pu en fait aplanir les

 21   différences entre ces deux rapports. Ces deux enquêtes portaient sur les

 22   cratères qui avaient été laissés par les obus et par les dégâts qui avaient

 23   été causés à proximité de ces cratères, non seulement nous voulions avoir

 24   des rapports d'expert, mais nous voulions également utiliser tous les

 25   autres systèmes qui nous permettaient de mener cette enquête, c'est-à-dire

 26   les radars, les détecteurs acoustiques, les postes d'observation, et

 27   cetera, tout ce que nous avions dans la zone. Ce que cela nous a permis de

 28   déterminer, c'est que personne n'avait entendu la détonation de ces obus


Page 11462

  1   dans les zones environnantes de Sarajevo. Parce qu'en général, les

  2   populations entendaient la déflagration et ensuite l'explosion, ou

  3   l'endroit où à partir duquel on tirait un obus et l'endroit où cet obus

  4   atterrissait, et ceci nous a permis de peaufiner notre analyse et nous a

  5   permis de déterminer que ces obus avaient été tirés d'une zone qui se

  6   trouvait à l'extérieur de Sarajevo et provenaient par conséquent d'un

  7   territoire qui était contrôlé par les Serbes de Bosnie.

  8   Q.  Merci, Général. Pour ceux qui n'ont pas l'habitude de s'être retrouvé

  9   dans une zone ou des tirs d'obus sont effectués; est-ce que vous pourriez

 10   peut-être nous expliquer comment on peut déterminer l'origine ?

 11   R.  Vous avez un obus de mortier, et lorsqu'on tire cet obus de mortier,

 12   cela fait un bruit très important. Lorsque vous voyez les opérateurs qui

 13   effectuent des tirs de mortier, en général ils ont des dispositifs pour

 14   protéger leurs oreilles. Vous les voyez également qui se baissent très

 15   rapidement au moment où l'obus est tiré de façon à éviter le plus gros des

 16   ondes et pour éviter également le choc de l'explosion.

 17   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Général.

 18   Monsieur le Président, Monsieur les Juges, compte tenu de l'heure, ceci

 19   conclut mon interrogatoire principal. Je vous remercie.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 21   Est-ce que nous versons la dernière pièce au dossier ?

 22   M. TIEGER : [interprétation] Oui, bien sûr.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il s'agira donc de la pièce P2289.

 24   Merci, Monsieur Tieger.

 25   Monsieur Karadzic, c'est à vous pour votre contre-interrogatoire du général

 26   Smith.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 28   Bonjour à tous.


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  1   Contre-interrogatoire par M. Karadzic :

  2   Q.  [interprétation] Bonjour, Général.

  3   R.  Bonjour.

  4   Q.  Je suis ravi de vous voir en pleine forme, et je vois que le temps ne

  5   vous a pas rattrapé, et que votre mémoire ne vous défait pas.

  6   Tout d'abord, j'aimerais savoir si vous avez pu vous rafraîchir la mémoire

  7   de ces événements par des notes que vous auriez prises à l'époque ?

  8   R.  Vous avez bien sûr, le processus de récolement qui m'a rafraîchi la

  9   mémoire, et vous êtes au courant de ce qui s'est passé, n'est-ce pas.

 10   Q.  Oui, et je vous remercie d'avoir accepté de rencontrer mon conseiller

 11   juridique, Me Robinson; cependant, vous avez mentionné quelque chose à un

 12   moment donné.

 13   Est-ce que vous aviez pris des notes, ou est-ce que vous aviez un carnet ou

 14   un journal que vous avez tenu à l'époque ?

 15   R.  Non.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je dois dire que cela me rend perplexe, car

 17   nous avons des informations à ce sujet.

 18   Pourrais-je demander l'affichage de la pièce 1D315 sur le prétoire

 19   électronique -- 1D3195.

 20   Voilà, nous y sommes. Est-ce que l'on pourrait demander l'affichage de la

 21   page 9, s'il vous plaît, page 9 en version anglaise il s'entend ?

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Voilà. Je vous demande de vous concentrer sur le début du paragraphe

 24   34. Vous avez reconnu ce document, n'est-ce pas ?

 25   R.  [hors micro]

 26   Q.  Est-ce que vous vous souvenez d'avoir donné ou d'avoir répondu à des

 27   questions de l'Institut néerlandais ?

 28   R.  Oui.


Page 11464

  1   Q.  Je vous demande donc de lire --

  2   "…tout ce dont il dispose ce sont des copies de câbles codés, ainsi qu'un

  3   journal de format A5, un carnet de format A5."

  4   Est-ce qu'il serait possible d'avoir accès à ces notes ?

  5   R.  Je ne me souviens pas d'un carnet de format A5. Ce dont je me souviens

  6   c'est que j'avais un agenda de poche. Donc je viens de vous montrer celui

  7   que j'ai pour cette année-ci, quant à ce carnet, je n'ai aucune idée de ce

  8   qui est mentionné ici et encore moins d'une version révisée de celui-ci. Je

  9   ne sais pas ce que cela signifie, peut-être qu'ils l'ont saisi, je ne sais

 10   pas, ou je leur ai donné une copie.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 12   Est-ce que l'on pourrait maintenant demander l'affichage de la pièce

 13   1D3137, s'il vous plaît. La pièce est le 1D3137.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Il s'agit encore une fois de documents émanant cette fois, je crois, du

 16   parlement néerlandais, et qui concernent Srebrenica.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] En attendant cet affichage, peut-être que l'on

 18   pourrait utiliser le rétroprojecteur pour nous permettre d'afficher ne

 19   serait-ce qu'un bref passage de ce document qui nous intéresse.

 20   Voilà nous avons maintenant le document qui s'affiche dans le prétoire

 21   électronique.

 22   Alors pourrions-nous maintenant avoir à l'écran la page numéro 10 ? Je

 23   souhaiterais que l'on agrandisse un peu.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Dans la colonne de droite, il y a une réponse de votre part, puis au

 26   milieu, je cite :

 27   "Cela ne figure même pas dans mon journal, parce que cela avait cessé

 28   d'être quelque chose dont il fallait que je me souvienne."


Page 11465

  1   C'est la colonne de droite, là où se trouve votre réponse la plus longue,

  2   et la fin du premier paragraphe constituant ce bloc vers le milieu.

  3   Est-ce que vous avez pu le retrouver ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Vous parlez ici encore de votre journal, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui, mais en l'espèce, je me réfère encore une fois, et comme je l'ai

  7   dit à un agenda de poche, je n'ai pas la moindre idée de la question de

  8   savoir si c'est une seule et même chose dont je parle ici et dont il est

  9   question dans l'entretien que nous avons vu précédemment. Je n'ai pas la

 10   moindre idée à ce sujet. Alors je me rappelle que cet entretien a eu lieu,

 11   par ailleurs mais je ne suis pas sûr du moment, de la date, je crois que

 12   c'était vers 1999.

 13   Q.  Merci. Nous y reviendrons. En tout cas, vous avez pris votre poste de

 14   commandement à Sarajevo vers la fin du mois de janvier. Nous sommes

 15   d'accord pour dire qu'à ce moment-là, cela faisait déjà un mois que

 16   l'accord connu sous le nom d'accord du président Carter était en vigueur,

 17   n'est-ce pas, l'accord de cessez-le-feu ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  A ce moment-là, vous avez déjà remarqué que cet accord avait été remis

 20   en question, et que les violations et le début du délitement de cet accord

 21   avait été le fait de la partie bosno-musulmane, n'est-ce pas, la partie

 22   bosnienne, comme vous aimez à l'appeler ?

 23   R.  Je me rappelle qu'il y a eu des incidents, je ne me rappelle pas qu'il

 24   ait été fait état de qui avait commencé, ni je ne me rappelle pas non plus

 25   la liste de ces incidents.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais que l'on affiche le document 22686

 27   de la liste 65 ter. Il s'agit de la déclaration consolidée du général.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


Page 11466

  1   Q.  Alors en page 7, paragraphe numéro 28, ce paragraphe nous dit très

  2   clairement que, d'après vous, c'est la partie bosnienne qui a été à

  3   l'origine de ces séries de violations et de la compromission de l'accord de

  4   cessez-le-feu.

  5   R.  Ce qui est dit c'est que l'accord qui est devenu caduque et que cela

  6   avait été largement provoqué par la partie bosnienne.

  7   Q.  Merci.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors pouvons-nous avoir la page suivante,

  9   paragraphe numéro 32 ? Je cite :

 10   "Comme je l'ai indiqué ci-dessus, vers le milieu du mois de février, il est

 11   devenu évident que la partie bosnienne et son gouvernement ne souhaitait

 12   pas d'accord de cessation des hostilités à moins que les Serbes de Bosnie

 13   n'acceptent la carte du Groupe de Contact."

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Est-ce que vous vous rappelez que cet accord de cessez-le-feu avait été

 16   limité à quatre mois, sur leur demande et non pas à notre demande ? Nous

 17   avons demandé un accord de cessez-le-feu plus long, mais eux ont demandé

 18   quatre mois seulement. Ensuite nous avons demandé ce plan du groupe de

 19   contact, qui était en fait un accord de cessez-le-feu; est-ce que vous vous

 20   en souvenez ?

 21   R.  Je n'étais pas présent lors des négociations portant sur l'accord de

 22   cessation des hostilités, mais je me rappelle qu'il devait être révisé sous

 23   quatre mois.

 24   Q.  Merci. Mais vous voyez qu'à ce moment-là déjà, vous avez pu remarquer

 25   les préparatifs de l'armée musulmane -- ou plutôt, de l'armée bosnienne, de

 26   l'armée de Bosnie-Herzégovine, préparatifs qui visaient les combats du

 27   printemps et l'offensive du printemps; n'est-ce pas exact ?

 28   R.  Oui.


Page 11467

  1   Q.  Merci. Ici, vous dites également que la partie serbe vous a informé de

  2   la façon dont l'aéroport de Tuzla avait été utilisé abusivement - mais nous

  3   reviendrons sur ce point - donc utilisation abusive de l'aéroport de Tuzla,

  4   et ce, du fait de l'ABiH et d'un certain nombre d'autres instances.

  5   Alors est-ce que vous étiez personnellement et complètement informé au

  6   sujet de l'ampleur de ces attaques dans les environs de Sarajevo, initiées

  7   par l'armée des bosno-musulmans, au sujet desquels vous avez déposé ?

  8   R.  De quelle période parlez-vous et de quels combats ?

  9   Q.  Disons de la mi-mars -- à partir de la mi-mars et au-delà, ces combats

 10   dont vous avez noté les préparatifs au paragraphe 32.

 11   R.  Au mois de mars, j'étais au courant des deux actions de l'armée

 12   bosnienne qui, à l'époque, ne concernait pas -- enfin, en tout cas, ils

 13   n'étaient pas, à l'époque, dans les environs immédiats de Sarajevo.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous maintenant avoir le document

 15   D182, qui a déjà été versé précédemment ?

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Je voudrais que nous examinions, en effet, quelques documents de la

 18   partie bosnienne. Alors nous allons d'abord nous concentrer sur

 19  l'essentiel, et notamment les initiatives les plus importantes du 1er Corps.

 20   Il s'agit en fait déjà de la 11e Division -- ou plutôt, la 12e Division en

 21   tant que partie intégrante de la BiH.

 22   Alors est-ce que vous pourriez voir le paragraphe 2, les tâches de la

 23   division, je cite :

 24   "Conduire une attaque à partir de la zone de défense de notre division le

 25   long d'axes propices et en visant des cibles pertinentes, avec pour mission

 26   d'infliger à l'ennemi les pertes les plus lourdes possibles en effectifs et

 27   en moyens matériels et techniques."

 28   Donc la mission de cette division est de se lancer à l'attaque contre nous


Page 11468

  1   avec toute leur puissance et dans le but de nous infliger le maximum de

  2   pertes.

  3   Est-ce que vous vous rappelez que la 12e Division était cantonnée à

  4   Sarajevo ?

  5   R.  Je n'arrive pas à me souvenir du cantonnement précis de toutes les

  6   unités et de toutes les formations à l'époque, quelle que soit l'armée

  7   concernée d'ailleurs, de la VRS ou de la BiH.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous avoir la page suivante ?

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Nous allons très rapidement essayer juste d'avoir une idée du

 11   contenu. Je voudrais essayer de raviver vos souvenirs.

 12   Le 1er Corps était constitué de trois divisions : la 12e, la 14e et la

 13  16e. La 12e était en ville même, alors que la 14e et a 16e Divisions étaient

 14   à l'extérieur, à l'intérieur de cet anneau extérieur à partir duquel elle

 15   nous attaquait également. N'êtes-vous pas d'accord avec cela ?

 16   R.  Je ne peux pas convenir de quelque chose que vous avancez à mon

 17   intention de cette façon. Vous me dites que ces divisions existaient et

 18   qu'elles étaient à tel et tel endroit, pour me demander ensuite de le

 19   confirmer, mais je suis dans l'incapacité de le faire parce que je ne me

 20   rappelle pas où toutes ces différentes divisions pouvaient être cantonnées

 21   dans les environs de Sarajevo. Je suis plutôt d'accord pour dire que les

 22   forces bosniennes étaient présentes à l'intérieur de Sarajevo et qu'il y

 23   avait bien eu des combats pendant cette période, mais il ne s'agissait pas

 24   là des deux principales offensives du mois de mars.

 25   Q.  Alors je vous remercie. Veuillez vous référer au point numéro 5 :

 26   "Mission des Unités." 5.1, nous savons que c'est la 101e Brigade; au point

 27   5.2, 115e Brigade. Nous avons là énuméré leurs états-majors, leurs moyens

 28   d'artillerie, et cetera.


Page 11469

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors nous allons avancer très vite. Pouvons-

  2   nous avoir la page suivante ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. Est-ce que je pourrais lire

  4   d'abord ? Est-ce que nous pourrions revenir en arrière ? Je n'ai pas pu

  5   lire, je ne peux pas lire à une telle vitesse.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Vous êtes d'accord pour dire que ces unités sont affectées dans des

  8   rues et que, par conséquent, leur mission est de mener des combats de rue ?

  9   Vous voyez les références de rue ? La 115e couvre l'université dans la rue

 10   de Belgrade. On fait référence également au bâtiment de l'ancienne

 11   brasserie, les installations de l'entreprise Metalka, et cetera. Vous voyez

 12   tout cela ?

 13   R.  Oui, je le vois.

 14   Q.  Merci.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous avoir la page suivante ?

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Alors au 5.3, nous voyons qu'il s'agit de la 152e Brigade. Vous

 18   conviendrez, n'est-ce pas, qu'on mentionne certains points en ville, comme

 19   Panjina Kula, et cetera. Ensuite, on a la 105e Brigade, avec des références

 20   topographiques, comme Panjina Kula, Mala Kula, Orlovac, Duboki Potok, et

 21   cetera pour cette 105e Brigade. Ensuite on a la 111e. Je souhaiterais

 22   simplement que vous voyiez très rapidement la façon dont elles sont

 23   réparties et affectées, et de quelles brigades il s'agit.

 24   R.  Je peux voir chacune de ces brigades s'est vue confier une zone. Je

 25   reconnais certains des noms, certains de toponymes à Sarajevo, et je vois

 26   qu'on leur donne pour mission de défendre chacune la zone correspondante.

 27   Q.  On leur demande également -- on leur ordonne également de passer à

 28   l'attaque, n'est-ce pas, non seulement de défendre mais d'attaquer ?


Page 11470

  1   R.  Non, je ne vois pas le mot "attaquer" ce qui est écrit c'est défendre

  2   la zone de défense, et cetera.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on, dans ce cas, revenir en arrière d'une

  4   page, affichons de nouveau la première page quelques instants ?

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Au point numéro 2, première ligne, je cite :

  7   "Conduire une attaque à partir de la zone de défense de notre

  8   …" - il y a une partie expurgée - "puis division, le long d'axe

  9   propice en visant des cibles pertinentes avec pour objectif d'infliger à

 10   l'ennemi les pertes les plus lourdes possibles en effectif et en moyens

 11   matériels et techniques."

 12   Donc si vous vous re-penchez sur cette première page, vous voyez, n'est-ce

 13   pas, qu'il s'agit là d'un ordre d'attaque ? C'est ce qui est écrit, mener

 14   une attaque, il s'agit d'une opération offensive. Nous n'avons affaire ni à

 15   un incident ni à une opération tout à fait isolée, mais à une opération

 16   d'attaque, n'est-ce pas ?

 17   R.  Ce que j'ai pu lire à partir des passages que vous avez signalés à mon

 18   intention, c'est que la mission de cette division n'est pas de mener une

 19   attaque mais de plutôt défendre chacune de ces zones conformément à l'ordre

 20   que le commandant envoie par la présente à ces différentes brigades. Je

 21   n'ai pas lu le document dans son intégralité, donc je ne peux pas vous

 22   expliquer pourquoi s'y trouve cette contradiction apparente.

 23   Q.  Merci.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous avoir de nouveau la page 3 ?

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Je voudrais que avec toute votre expérience de général, vous puissiez

 27   vous rendre compte de l'appui dont bénéficient ces différents effectifs.

 28   Vous voyez le point numéro 6. Conviendrez-vous, Général, que nous avons là


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  1   un régiment d'artillerie mixte avec des obusiers de 120-milimètres, il y en

  2   a deux, puis un autre obusier de 120, un autre de 130, des obusiers de 105-

  3   milimètres, une batterie de roquette, huit lance-roquettes, par ailleurs,

  4   deux chars T55. Il y a également à Mojmilo Brdo, Hum et Zmajevac des

  5   obusiers, et dans l'usine Zica, il y a un poste de commandement

  6   d'artillerie.

  7   Vous connaissez tous ces endroits, n'est-ce pas, ils sont tous situés

  8   au centre-ville, dans la partie musulmane de la ville, n'est-ce pas ?

  9   R.  J'en connais une partie, en effet, et je reconnais que ces endroits se

 10   trouvent dans le centre de Sarajevo.

 11   Q.  Le centre de Sarajevo, est-il inclus dans la zone d'exclusion totale de

 12   20 kilomètres ?

 13   R.  Oui. Alors il faudra que je puisse vérifier la liste correspondante

 14   faisant état de ce qui se trouvait dans les points de rassemblement des

 15   armes, afin d'être absolument sûr qu'il n'y a pas d'incohérence. Mais je

 16   dirais que oui, le centre de Sarajevo était bien dans la zone d'exclusion

 17   totale de 20 kilomètres.

 18   Q.  Sauf votre respect, Général, nous avons ici la liste des éléments dont

 19   dispose le commandant. Au dessus de vos têtes, donc voilà les dispositifs

 20   dont ils disposaient à votre insu, n'est-ce pas?

 21   R.  Non, je ne suis pas d'accord que tel ait été le cas. Je sais qu'il y

 22   avait un centre de regroupement des armes à Sarajevo, dans lequel se

 23   trouvaient des armes, dont certaines sont d'un type dont je reconnais le

 24   nom dans cette liste. Je ne dirais pas que cette liste a été établie à

 25   notre insu, pas du tout.

 26   Q.  Je vous remercie.  

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous nous pencher sur la pièce D184,

 28   pour voir le nombre de pièces d'artillerie dont disposait le 1er Corps


Page 11472

  1   d'armée, sans vous l'avoir fait savoir, sans rien vous avoir demandé ?

  2   Je suis pressé par le temps, donc je vais avancer un peu dans le temps. Ce

  3   document date du 16 mai.

  4  Donc 16 mai, rapport de combat régulier fourni par le 1er Corps d'armée, par

  5   son commandement. Nous voyons que ce document a été établi à 15 heures 20,

  6   et j'aimerais maintenant s'affiche la deuxième page sur les écrans. Dans ce

  7   document, on nous qualifie d'agresseurs, donc pour ce qui les concerne,

  8   nous sommes l'agresseur. Voyons maintenant donc cette page 2, à l'écran.

  9   Apparemment, c'est la dernière page de la version anglaise.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  En attendant que la [inaudible] apparaît sur les écrans, Monsieur, je

 12   vais vous poser la question suivante : Général, qui vous a fourni ces

 13   renseignements ? Qui vous renseignait, de façon générale ? Est-ce que vous

 14   étiez renseigné par vos propres observations personnelles, ou est-ce que

 15   vous aviez les services qui vous procuraient des renseignements ?

 16   R.  Lorsque vous me demandez si je me renseignais par moi-même, est-ce que

 17   vous parlez de moi uniquement ? Est-ce que vous pensez que j'aurais pu --

 18   est-ce que vous pensez également à ce qui m'accompagnait ? En tout cas,

 19   lorsque j'étais accompagné, je voyais les choses de mes propres yeux, et

 20   sinon, je m'appuyais sur des rapports de mes subordonnés.

 21   Q.  Oui, oui. Mais comment est-ce que vous receviez ces renseignements, ou

 22   encore comment est-ce que vous déduisiez certaines réalités ? Comment est-

 23   ce que vous arriviez à des conclusions au sujet de ce qui se passait à

 24   Sarajevo ? Je veux dire les évolutions qui avaient lieu à Sarajevo, je ne

 25   parle pas de Markale. Je parle de cette période de la mi-mai précisément.

 26   R.  Dans la plupart des cas, je m'appuyais sur les rapports de mes

 27   subordonnés, et de temps en temps, je me rendais sur place pour voir les

 28   choses de mes yeux.


Page 11473

  1   Q.  Je vous remercie, Général. Pourriez-vous maintenant vous concentrer sur

  2   le document qui est affiché à l'écran.

  3   Le 16 mai, par conséquent, voyez ce que l'armée musulmane utilisait alors

  4   qu'elle tirait à partir du centre-ville. La 16e Division, comme il est

  5   indiqué dans ce document, tirait sur nous à ce moment-là. Elle tirait sur

  6   nous à partir de l'extérieur de la zone d'exclusion totale, mais elle a été

  7   libérée de cette responsabilité.

  8   Alors regardez 1 560 explosions en un seul jour, sans tenir compte du

  9   paragraphe 12.7, donc uniquement des explosions.

 10   R.  Je ne vois pas ce chiffre.

 11   Q.  Il est dans le document.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde, voyons la page précédente,

 13   le bas de la page précédente, là où il est question de "consommation

 14   quotidienne."

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vois. Vous avez ajouté les projectiles de

 16   mortier --

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Revenons en arrière, à l'écran.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Maintenant je comprends.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, maintenant, page suivante à l'écran encore

 20   une fois, très bien.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Alors 120-milimères, calibre 120, 76 unités calibre 82-milimètres 466

 23   unités, et ainsi de suite et ainsi de suite. Au total, 1 560 explosions

 24   dans la partie serbe de la ville de Sarajevo.

 25   Est-ce que vous avez été informé de la ? Est-ce que l'on vous a informé du

 26   fait que les combats présentaient ce degré d'intensité ?

 27   R.  Non, nous n'avons pas reçu rapport au sujet de ceci, explosion par

 28   explosion. Mais nous étions présents et nous entendions ce qui se passait


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  1   dans la majorité des cas.

  2   Q.  Je vous remercie. Toutes ces explosions, Général, ont eu lieu dans la

  3   zone d'exclusion totale, n'est-ce pas ? Les tirs provenaient de la zone

  4   d'exclusion totale des centaines d'obus et en dehors de la zone d'exclusion

  5   totale 601 obus ont été tirés sur nous qui nous trouvions à l'intérieur de

  6   la zone, et ce, pendant une seule journée. Est-ce que ceci ne qualifie pas

  7   des tirs lourds, Général ?

  8   R.  On pourrait dire qu'il s'agit de tirs lourds ou qu'il ne s'agit pas de

  9   tirs lourds. Je n'ai pas -- je devrais connaître exactement le secteur où

 10   ces obus sont tombés pour me prononcer. Mais, oui, ces tirs ont eu lieu

 11   dans la zone d'exclusion totale, en effet.

 12   Q.  Je vous remercie.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais maintenant que nous nous penchions

 14   sur la pièce D185 pour voir ce qu'il en était à la date du 24 mai, c'est-à-

 15   dire la veille. Encore une fois, ce document est un document musulman,

 16   établit par les Musulmans, et il a été versé au dossier de l'espèce.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Donc nous voyons ici que le commandement d'une division de l'ABiH tire

 19   à partir de l'extérieur de la zone d'exclusion totale sur ce qui se trouve

 20   à l'intérieur de la zone d'exclusion totale. Sans compter les balles, il

 21   est indiqué dans ce document qu'il y a eu 1 764 explosions. Donc des tirs

 22   d'obus de calibre différent qui sont tombés sur nous.

 23   Est-ce qu'à l'époque de ces faits, vous en avez été informé ? Est-ce

 24   que vous savez pour quelle raison ils ont repris leurs armes ? Est-ce que

 25   vous savez quel genre de grand malheur ou de nécessité urgente les a

 26   poussés à récupérer les armes qu'ils avaient rendues pour les placer sous

 27   votre contrôle ?

 28   R.  Vous me parlez d'explosion, mais je ne vois pas de liste ici.


Page 11475

  1   Q.  Je vais essayer de vous aider. Grenade de fusil, 362 pièces; mortiers -

  2   -

  3   R.  Ah, je vois, je vois.

  4   Q.  Lorsque vous aurez pris connaissance de l'ensemble de la liste, je vous

  5   demanderais de vous concentrer sur les obus et leur calibre divers, 1125,

  6   et cetera.

  7   Page suivante à l'écran, à présent, je vous prie.

  8   Donc obus de 60 millimètres, 516 unités, obus de 82 millimètres, 507

  9   unités, obus de 120 millimètres, 74 unités. Le commandant de la 12e

 10   Division signe et il s'agit de Fikret Prevljak.Si vous aviez eu

 11   connaissance de tout cela; est-ce que vous auriez tout de même ordonné des

 12   frappes aériennes à l'encontre des Serbes, ou peut-être le saviez-vous et

 13   avez-vous tout de même ordonné ces frappes ?

 14   R.  J'étais présent je savais que des combats avaient lieu et, en effet,

 15   j'ai eu connaissance des événements du 16. Je pense que tout cela est en

 16   rapport avec ce dont j'ai parlé en évoquant l'incident du tunnel de Butmir.

 17   Oui, je savais ce qui se passait, et j'aurais fait ce que j'ai

 18   effectivement fait ce jour-là.

 19   Q.  Merci.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Dans votre déclaration écrite, en page 29,

 21   paragraphe 113, vous dites que vous étiez conscient des provocations qu'ils

 22   dirigeaient à notre encontre, en ajoutant que ces provocations n'étaient

 23   pas toujours manifestes, mais qu'il était clair que l'armée musulmane de

 24   Bosnie pilonnait les positions serbes à partir de l'intérieur de la ville

 25   de façon régulière.

 26   J'aimerais que nous revenions sur le document précédent à présent, le

 27   document 22686. Donc je demande l'affichage. Ce numéro est celui de la

 28   liste 65 ter. 22686, page 29, paragraphe 113.


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  1   Pourrait-on travailler cinq minutes de plus pour achever l'examen de ce

  2   sujet ? Non, ce n'est pas possible. Bon.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce n'est pas possible. Nous ne devons

  4   pas empiéter sur le temps de travail de la Chambre d'appel.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Général, voyez donc ce passage, où nous lisons, et c'est ce que vous

  8   dites, je cite :

  9   "Les provocations n'étaient pas toujours évidentes, mais il était également

 10   clair que l'armée musulmane de Bosnie pilonnait à partir de positions

 11   situées à l'intérieur de la ville de façon régulière."

 12   Est-il exact que le centre-ville se trouvait à l'intérieur de la zone

 13   d'exclusion ?

 14   R.  Elle se trouvait au centre de la zone d'exclusion.

 15   Q.  A partir de ce lieu, eux nous pilonnaient, de façon régulière, c'est-à-

 16   dire au quotidien, peut-on dire, et la FORPRONU avait pour mission de

 17   superviser le respect de cette zone d'exclusion et d'arrêter toutes

 18   attaques, si celles-ci avaient déjà débutées, et en tout cas, de tenter

 19   d'empêcher toute attaque, n'est-ce pas ?

 20   R.  La mission de la FORPRONU, consistant, avant tout, à assurer la

 21   livraison de l'aide humanitaire et puis, en deuxième lieu, à superviser la

 22   zone d'exclusion, mais il ne relevait pas de la responsabilité de la

 23   FORPRONU d'arrêter les attaques.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie, Général. Nous sommes arrivés

 25   à la fin de la journée d'aujourd'hui. Nous poursuivrons demain.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

 27   Nous suspendons pour aujourd'hui, et nous nous réunirons à nouveau demain à

 28   9 heures.


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  1   --- L'audience est levée à 14 heures 27 et reprendra le jeudi 10 février

  2   2011, à 9 heures 00.

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