Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 22 février 2011

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 17.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous.

  6   Bonjour, Docteur Subotic.

  7   Y a-t-il des points à soulever ?

  8   Oui, Maître Robinson.

  9   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Président. En ce qui

 10   concerne la déposition de M. Zecevic, tout d'abord, je voudrais demander

 11   aux Juges de la Chambre -- ou plutôt, attirer l'attention des Juges de la

 12   Chambre sur un différend entre l'Accusation et la Défense, consistant à

 13   savoir quelle est la partie de la déposition relèvera d'un témoin de fait,

 14   et quelle partie relèvera d'un témoin expert.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] En fait, nous avons été informés

 16   rapidement, et nous aimerions en fait rendre une décision à cet effet.

 17   M. ROBINSON : [interprétation] Très bien. Dans ce cas-là, je n'en dirais

 18   pas plus.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Maître Robinson.

 20   Avant de faire entrer le témoin, nous allons aborder la question de ce

 21   témoin. Comme vous le savez, les Juges de la Chambre ont rendu une

 22   ordonnance pour que le Dr Zecevic comparaisse en tant que témoin viva voce

 23   plutôt que conformément à l'article 92 ter. Cependant, nous avons remarqué

 24   que les documents concernant l'avis de comparution qui avait été déposé par

 25   l'Accusation, une déclaration fournie par le témoin en 2008, était recensée

 26   comme étant un rapport d'expert, qui devait être versé en tant que tel.

 27   Après avoir examiné le contenu de cette déclaration d'expert, et étant

 28   conscient que Me Robinson a déjà fait part de son objection à son


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  1   versement, en tant que rapport d'expert, les Juges de la Chambre sont

  2   d'avis qu'il ne serait pas approprié que cette déclaration soit versée en

  3   tant que rapport d'expert et, effectivement, le contenu de cette

  4   déclaration est plutôt factuelle concernant des aspects que le Dr Zecevic a

  5   observé durant la période où il était employé. Par conséquent, Monsieur

  6   Gaynor, si vous souhaitez que ces éléments soient versés au dossier, vous

  7   devrez obtenir ces éléments viva voce par le truchement du témoin.

  8   Deuxièmement, je crois savoir, Maître Robinson, que vous avez également

  9   formulé une objection concernant le versement d'un rapport intitulé en

 10   anglais : "Study circumstances," et cetera, donc "Etudes sur les

 11   circonstances," et les causes du massacre au marché de Markale, le 5

 12   février 1994. Vous avez une objection à ce rapport soit versé en tant qu'un

 13   rapport d'expert; cependant, après avoir examiné le contenu de ce rapport,

 14   les Juges de la Chambre considèrent que ce document a été établi par le Dr

 15   Zecevic et par d'autres, en tant qu'expert dans le domaine de la

 16   balistique, afin de donner un avis d'expert concernant l'incident Markale

 17   I. Par conséquent, nous considérons que ce rapport remplit les critères

 18   d'un rapport d'expert plutôt qu'un rapport établissant des faits

 19   conformément à d'autres rapports de police qui ont été précédemment versés

 20   à ce dossier.

 21   Monsieur Gaynor, j'espère que vous étiez au courant du fait que vous deviez

 22   poser des questions concernant les éléments qui figurent dans la

 23   déclaration de 2008 et ceci viva voce par le truchement du témoin et que

 24   vous êtes donc prêt à commencer votre interrogatoire principal avec ce

 25   témoin.

 26   M. GAYNOR : [interprétation] Oui, je peux commencer mon interrogatoire

 27   principal, Monsieur le Président.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je voudrais aborder d'autres points.


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  1   Vous n'êtes pas sans savoir qu'en raison de l'état de santé du Dr Zecevic,

  2   nous allons avoir une audience relativement modifiée par rapport à

  3   l'habitude. Même si nous avons cinq minutes ou dix minutes déjà de

  4   d'audience dans le cadre de la première séance, je voudrais m'en tenir au

  5   programme prévu, c'est-à-dire que nous aurons une pause de cinq minutes à

  6   14 heures 40. Durant les pauses, je demande à tous protagonistes de rester

  7   dans le prétoire. Les Juges quitteront le prétoire ainsi que le Dr Zecevic,

  8   qui pourra se lever et qui pourra également évoluer librement dans le

  9   prétoire.

 10   Je vous demande donc votre coopération pour s'assurer que ces pauses

 11   ne durent pas plus de cinq minutes.

 12   Maintenant, je me demande si le point suivant devrait être abordé en

 13   présence du témoin. On m'a informé que les parties sont disposées à changer

 14   l'audience de demain après-midi à demain matin étant donné qu'il y aura

 15   audience demain après-midi dans ce prétoire. Quant à jeudi et vendredi,

 16   est-ce qu'il serait possible d'avoir donc des audiences de 13 heures 30 à

 17   19 heures, c'est-à-dire des séances prolongées de 90 minutes chacune.

 18   M. GAYNOR : [interprétation] Oui, c'est d'accord du côté de

 19   l'Accusation, Monsieur le Président.

 20   M. ROBINSON : [interprétation] Nous sommes également d'accord, Monsieur le

 21   Président.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous pouvons maintenant faire

 23   entrer le témoin dans le prétoire.

 24   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien évidemment, nous aurons donc une

 26   séance avec les horaires habituels demain, de 9 heures 30 à 13 heures 45.

 27   Bonjour, Professeur. Je vous demande de lire la déclaration solennelle.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour. Je déclare solennellement que je


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  1   dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  2   LE TÉMOIN : BERKO ZECEVIC [Assermenté]

  3   [Le témoin répond par l'interprète]

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Veuillez prendre place et prendre

  5   vos aises.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci beaucoup.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dès que vous en avez besoin faites-le-

  8   nous savoir si vous avez besoin d'une pause, Docteur Zecevic.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je voulais vous demander si je pouvais me

 10   lever sans avoir à vous donner un préavis.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien sûr.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de commencer, Docteur Zecevic, je

 14   vous remercie pour la coopération dont vous avez fait montre auprès du

 15   Tribunal, c'est-à-dire que vous avez accepté de témoigner aussi longuement

 16   que possible alors que vous n'aviez demandé qu'avoir une comparution de

 17   trois heures.

 18   A ce stade, je voudrais attirer votre attention sur le fait que M. Karadzic

 19   jouit d'un droit fondamental de procéder à un contre-interrogatoire de tout

 20   témoin qui est présenté à charge, et ceci est le cas étant donné les crimes

 21   graves dont il est accusé.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis à votre disposition et ceci aussi

 23   longtemps que vous souhaiterez que je comparaisse ici.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Docteur.

 25   Monsieur Gaynor, c'est à vous.

 26   M. GAYNOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 27   Interrogatoire principal par M. Gaynor :

 28   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.


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  1   R.  Bonjour.

  2   Q.  Pourriez-vous décliner votre identité, s'il vous plaît, aux fins du

  3   compte rendu d'audience ?

  4   R.  Berko Zecevic.

  5   Q.  Docteur Zecevic, à moins qu'il y ait des objections, je voudrais passer

  6   en revue certains aspects de votre parcours universitaire et professionnel,

  7   et je voudrais que vous confirmiez tout cela. D'août 1975 à 1992, vous avez

  8   travaillé à l'usine Pretis à Vogosca ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Cette usine fabriquait des munitions pour des lance-roquettes et pour

 11   des pièces d'artillerie ainsi que pour des bombes aéroportées ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Vous avez travaillé dans le centre de Recherche et de Développement et

 14   aux principaux domaines d'activité étaient les moteurs de propulsion de

 15   roquettes ainsi que le développement de nouveaux projectiles à monter sur

 16   des roquettes ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Durant 17 ans à Pretis, vous avez eu accès à des documents qui

 19   émanaient de Pretis, ou qui avaient été reçus par Pretis, et qui

 20   concernaient la fabrication et la livraison de munition et d'armes, n'est-

 21   ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  En même temps, vous avez, depuis 1976, été membre de la faculté de

 24   l'Université de Sarajevo pour le Génie mécanique, tout d'abord au niveau du

 25   département pour la mécanique et ensuite au sein du département pour la

 26   Technologie en matière de défense, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Vous êtes actuellement le chef du département de la technologie en


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  1   matière de défense à la faculté de Génie mécanique de l'Université de

  2   Sarajevo, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Entre 1980 et aujourd'hui, vous êtes l'auteur d'une cinquante d'études

  5   universitaires ainsi que de plusieurs livres dans différents domaines

  6   concernant la balistique, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  J'aimerais que vous expliquiez, aux Juges de la Chambre, dans quelle

  9   mesure vous connaissez le fonctionnement des unités de mortier de 120

 10   millimètres utilisés par la VRS.

 11   R.  Vous voulez dire les projectiles utilisés ?

 12   Q.  Tout à fait.

 13   R.  Oui, je connais bien ces projectiles puisque cette usine pour laquelle

 14   je travaillais fabriquait des projectiles de mortier de 120 millimètres, et

 15   ensuite ces fabrications ont été prises en charge par une usine en Croatie,

 16   Licki Osik. Mon rôle était de me concentrer sur ces explosifs de 120

 17   millimètres, et également de diffuser la propagande quant à l'effet et la

 18   force de frappe de ces explosifs. L'objectif était en fait de saper le

 19   moral des troupes ennemies, compte tenu du fait que ce nouveau projectile

 20   de mortiers de 120 millimètres était utilisé. Par conséquent, je connais

 21   très bien tous les détails de la fabrication de ces projectiles de mortier

 22   de 120 millimètres, avec ses caractéristiques, son cahier des charges, et

 23   cetera. Est-ce que vous voulez que je rentre plus dans les détails ?

 24   Q.  Non. J'attendais simplement la fin de l'interprétation de la cabine

 25   anglaise.

 26   Est-ce que vous pourriez nous expliquer, et expliquer aux Juges de la

 27   Chambre, quels sont les éléments que vous connaissez qui portent sur ces

 28   bombes aériennes ou aéroportées modifiées, que vous avez décrits dans un de


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  1   vos rapports d'expert, mais ceci en quelques phrases, si possible ?

  2   R.  En 1994, j'ai pu étudier les sous-systèmes de roquettes. Le 29 janvier

  3   1994, pour être plus précis, lorsque des tirs ont été effectués dans la

  4   zone de Zuc, qui est dans les hauteurs de Sarajevo, on m'a demandé en fait

  5   d'essayer d'identifier ces différents éléments. Avant la guerre, j'étais

  6   abonné à un magasine international en matière de défense et je m'étais

  7   intéressé à des produits de type   N. En 1995, ces projectiles modifiés

  8   sont tombés à 500 mètres de chez moi. Par conséquent, je voulais savoir

  9   quels étaient ces dispositifs. Est-ce que ceci mettrait en danger la

 10   sécurité de ma famille, de mes amis, du quartier dans lequel j'habitais, et

 11   cetera ?

 12   Par conséquent, je me concentrais plus particulièrement sur ce

 13   domaine d'activité lorsque le juge m'a demandé d'identifier le type de

 14   projectile qui était tombé sur les antennes de télévision de Sarajevo, et

 15   avec l'aide de deux collègues nous avons fait une expertise.

 16   Ensuite, l'Accusation, dans le procès contre le général Milosevic,

 17   m'a demandé de rédiger un rapport à cet effet.

 18   Q.  Merci. Avant le conflit, est-ce que vous pourriez nous décrire dans

 19   quelle mesure vous connaissiez ces bombes aériennes, et plus

 20   particulièrement ces bombes aériennes à carburant atmosphérique ?

 21   R.  Avec mon ami, le colonel Vladan Tomic, nous avons travaillé pendant

 22   plus de 15 ans à Pretis. Lui était le responsable du développement de ces

 23   bombes aériennes. Ensuite il est parti à Belgrade, mais pendant son séjour

 24   à Sarajevo, nous étions voisins. Nous passions pas mal de temps ensemble.

 25   C'était un expert de stature exceptionnelle. Nous échangions nos notes, et

 26   j'ai eu la possibilité également de me rendre dans un institut nucléaire,

 27   et nous avons donc rendu visite au Dr Zoran Maksimovic, qui était

 28   responsable de la création des carburants pour les bombes aériennes et qui,


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  1   auparavant, avait fait des études spécialisées aux Etats-Unis. J'étais en

  2   train de préparer mon doctorat, et le Dr Maksimovic m'a proposé d'être mon

  3   directeur de thèse. Nous avons réalisé des expériences à Sarajevo au sein

  4   de l'usine Pretis. Malheureusement, cette expérience et ces tests n'étaient

  5   pas très prometteurs, et nous avons donc abandonné ce détail spécifique

  6   pour ma thèse. Voilà donc un bref résumé de ces activités.

  7   Q.  Merci. Est-ce exact de dire qu'en 1992 et en 1993, vous avez travaillé

  8   au sein de l'armée de Bosnie-Herzégovine ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Est-ce que vous pourriez nous donner les dates précises de vos

 11   activités au sein de l'ABiH ?

 12   R.  Je crois que le 10 avril, lorsque des attaques plus prononcées et les

 13   provocations ont commencé à Sarajevo, je me suis enrôlé au sein de la

 14   Défense territoriale et j'ai participé beaucoup plus de mon propre chef, et

 15   avec des étudiants de la faculté de Génie mécanique et avec un autre

 16   groupe, nous avons essayé de gérer et d'organiser la production de

 17   technologies de guerre qui aurait la meilleure force de frappe dans des

 18   conditions de guerre. Ce groupe a été constitué avec un groupe de

 19   bénévoles, et ensuite un autre groupe a fusionné avec le nôtre, et ceci a

 20   permis de créer ce centre spécialisé pour l'industrie militaire. Notre

 21   objectif était de fournir -- malgré les coupures d'électricité, de fournir,

 22   comme je le disais, une méthode qui permettrait d'avoir -- de faire usage

 23   de projectiles lancés par des roquettes et de grenades. C'était notre

 24   principale activité. Etant donné qu'il était difficile de se procurer des

 25   explosifs à Sarajevo compte tenu du siège, j'ai lancé l'initiative visant à

 26   utiliser des projectiles qui n'avaient pas explosés et que l'on retrouvait,

 27   par exemple, un kilogramme d'explosifs qui avait été lancé hors de Sarajevo

 28   et qui avait donc touché Sarajevo. De cette manière, il y avait ainsi un


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  1   système d'échange qui s'était mis en place.

  2   Q.  Je vous demanderais d'être aussi succinct que possible dans vos

  3   réponses et, si nécessaire, je vous demanderai de nous donner plus de

  4   détails, le cas échéant.

  5   J'aimerais que vous confirmiez la date de fin de votre mission au sein de

  6   l'ABiH.

  7   R.  A la mi-juillet 1993, l'unité dont je faisais partie a cessé d'exister,

  8   et à partir de ce moment-là jusqu'au moment où la situation a changé,

  9   c'est-à-dire en septembre 1993, j'étais à la disposition de l'armée de

 10   Bosnie-Herzégovine sans pour autant avoir de mission précise, et ceci, de

 11   septembre à décembre 1993.

 12   Q.  Dans votre réponse concernant la collecte de projectiles qui n'avaient

 13   pas explosés, je voudrais vous poser des questions plus précises à ce

 14   sujet. J'aimerais savoir si vous avez jamais retrouvé des projectiles de

 15   mortier de 120 millimètres qui n'avaient pas explosés, et si tel était le

 16   cas, est-ce que vous avez été en mesure d'utiliser le stabilisateur qui

 17   était monté sur ce projectile ?

 18   R.  Je me souviens qu'à un moment donné, j'ai pu obtenir des mortiers de

 19   120-millimètres, mais je n'ai pas eu besoin d'utiliser des stabilisateurs

 20   de ce projectile, parce que la totalité de mon activité portait sur des

 21   grenades montées sur des fusils, et des grenades à main.

 22   Q.  Mais compte tenu de votre connaissance d'expert, est-ce que vous

 23   pourriez nous dire s'il est possible de récupérer le stabilisateur d'un

 24   stabilisateur d'un projectile de mortier de 120-millimètres qui aurait donc

 25   tombé, qui aurait fait ricochet, et qui serait tombé sans pour autant

 26   exploser ?

 27   R.  En théorie, ceci est possible, mais en pratique, tout projectile qui

 28   fait ricochet était exposé à des déformations ainsi qu'à une déviation de


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  1   la trajectoire. Par conséquent, personne ne pourrait utiliser ce

  2   projectile, et l'aurait utilisé parce que ceci signifie qu'il y aurait une

  3   probabilité beaucoup plus importante d'une explosion à l'intérieur du canon

  4   avant la phase de lancement. Ceci signifie qu'on ne pourrait, par

  5   conséquent, pas lancer ce projectile de manière correcte.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Gaynor, nous devons faire notre

  7   pause maintenant. Une pause de cinq minutes.

  8   --- La pause est prise à 14 heures 41.

  9   --- La pause est terminée 14 heures 46.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poursuivre.

 11   M. GAYNOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 12   Je souhaite maintenant passer à la question de l'usine de Pretis à Vogosca.

 13   Q.  Pouvez-vous nous expliquer en quelques phrases l'importance relative de

 14   l'usine Pretis, eu égard à l'industrie de défense à l'intérieur de la SRFY,

 15   avant le conflit en Bosnie ?

 16   R.  L'usine Pretis était une excellente usine, voire peut-être même une des

 17   usines les plus importantes d'Europe, qui fabriquait des roquettes et

 18   autres missiles. Sa capacité était de 750 missiles de différents calibres,

 19   allant de 76 à 105-millimètres, et de 1986 à 1990, l'usine a fabriqué

 20   quelque 350 pièces d'artillerie et projectile de roquettes.

 21   Q.  Est-ce qu'une partie de cette production était destinée à l'exportation

 22   ?

 23   R.  Oui, 60 % de la production étaient destinés à l'exportation, et 35 à 40

 24   % étaient destinés à la JNA, l'armée populaire yougoslave.

 25   Q.  Est-ce que vous savez pourquoi des munitions aussi importantes, ces

 26   installations, cette usine était située en Bosnie -- plutôt, par exemple,

 27   qu'en Serbie ?

 28   R.  Lorsque l'idée avait été lancée de développer l'industrie militaire,


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  1   dans la Fédération et après la République socialiste de Yougoslavie, il

  2   avait été dit que la partie centrale en Yougoslavie -- les usines devaient

  3   être établies à l'endroit qui permettait; il fallait donc placer ces usines

  4   au centre de la Yougoslavie. Elle devait pouvoir continuer à produire,

  5   qu'il y ait une invasion ou non de la part de l'Union soviétique ou de

  6   l'OTAN. Avoir de bonnes capacités de défense en Yougoslavie était quelque

  7   chose d'important, et la plupart des usines étaient du reste basées en

  8   Serbie, en Bosnie-Herzégovine.

  9   Q.  Très bien. Dans l'usine Pretis, est-ce que vous aviez l'habitude de

 10   stocker les matières premières destinées à la fabrication des munitions ?

 11   R.  Oui. La pratique voulait que les choses soient faites ainsi. Cela

 12   n'était pas une obligation. Une partie de la production devait être dédiée

 13   à la fabrication des pièces, sans pour autant que ces pièces ne soient

 14   assemblées. Il s'agissait de les assembler plus tard en fonction des

 15   besoins logistiques.

 16   Q.  Etes-vous en mesure de nous donner une estimation des stocks de matière

 17   première qu'il y avait dans l'usine Pretis, en avril 1991 ?

 18   R.  Ecoutez, moi, je ne suis pas en mesure de faire de telles estimations.

 19   Il y a un expert technologique qui s'occupait de cela. Il y avait un stock

 20   représentant une année, et un stock de matières premières, et je parle ici

 21   de pièces métalliques qui étaient destinées à quelque 350 ou 400

 22   projectiles, et ce, sur une base annuelle.

 23   L'INTERPRÈTE : L'interprète précise que, lors de la réponse précédente du

 24   témoin, cette usine Pretis fournissait 350 pièces d'artillerie et

 25   projectiles pour roquettes par an.

 26   M. GAYNOR : [interprétation]

 27   Q.  J'aimerais maintenant passer au jour où vous avez cessé de travailler

 28   pour l'usine Pretis. Souvenez-vous du jour en question ?


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  1   R.  Oui, je m'en souviens c'était un triste jour en ce qui me concerne,

  2   c'était le 17 avril 1992.

  3   Q.  Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre pourquoi vous avez cessé de

  4   travailler pour cette usine ?

  5   R.  Dans la période qui a précédé cette date, la situation était fort

  6   tendue. Il y avait des barricades, des barrages à Sarajevo. A un moment

  7   donné, l'on pensait que la raison allait l'emporter. Certaines personnes

  8   qui travaillaient dans l'usine Pretis sont venues travailler, et moi, je

  9   faisais partie de ces gens-là. Je me souviens que, ce jour-là, il y a eu

 10   environ un des tiers du personnel qui est venu travailler. Dans le bâtiment

 11   où je travaillais, à savoir dans les services chargés du Projet et

 12   Développement, nous étions 15 ou 20, et j'étais, ce jour-là, complètement

 13   seul parce que aucun de mes collègues n'était venu. Donc j'étais assis,

 14   j'étais seul, et à un moment donné, il y avait un silence désagréable. Pour

 15   essayer de comprendre comment fonctionnait cette usine Pretis, nous avions

 16   une série d'usines, il y avait 10 000 personnes en général qui venaient

 17   travailler tous les jours. Il y avait des machines qui fonctionnaient sans

 18   cesse, qui faisaient du bruit, et cela faisait partie de ma vie au

 19   quotidien. Tout à coup, j'ai entendu que ces personnes ne fonctionnaient

 20   pas, c'était le silence qui régnait.

 21   J'ai vu des personnes qui quittaient l'usine par groupe, et j'ai

 22   appelé le gardien dans la guérite. Je lui demandais de quoi il s'agissait.

 23   Il m'a dit simplement que tout le monde partait, ce qui faisait régner un

 24   climat très désagréable. J'ai rassemblé quelques documents qui étaient les

 25   miens, sur lesquels j'avais fait des recherches, des livres et j'ai pensé

 26   que c'était [inaudible], et que cela allait durer 15 à 20 jours et que je

 27   reviendrais. Mais une fois parti, je n'ai pas pu revenir dans cette usine

 28   avant le mois de février 1996.


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  1   Q.  Pourquoi, en une phrase, n'avez-vous pas pu revenir avant le mois de

  2   février 1996 ?

  3   R.  Parce que les routes étaient bloquées. Il y avait des barrages qui

  4   avaient été érigés le long des routes. Les fusillades ont commencé. J'ai

  5   entendu dire à la télévision que l'armée populaire yougoslave, comme elle

  6   s'appelait encore à ce moment-là, était entrée dans l'usine. J'ai appelé

  7   Radomir Ecimovic, qui dirigeait les services de Projet et Développement --

  8   pardonnez-moi, et il voulait lui demander --

  9   Q.  Ecoutez, j'étais sur le point de vous poser la question, je vous

 10   remercie de nous avoir fourni tous ces détails. Je souhaite nous concentrer

 11   sur l'élément suivant : Est-ce que l'usine est tombée sous le contrôle de

 12   l'une ou de l'autre partie au conflit ?

 13   R.  Les gens ne pouvaient pas se déplacer librement et venir à l'usine. Ils

 14   en étaient empêchés. Il n'y avait que des officiers de la JNA qui pouvaient

 15   venir, et des gens en quelque sorte qui appartenaient au groupe ethnique

 16   serbe.

 17   Q.  Donc ceux, qui n'avaient pas d'appartenance ethnique serbe, n'étaient

 18   pas autorisés à venir travailler dans l'usine Pretis ?

 19   R.  Pour atteindre le [inaudible] de Pretis, il fallait emprunter ces 8

 20   kilomètres qui les séparaient de Sarajevo. Le long de la route, il y avait

 21   des multiples obstacles, à l'extérieur du cercle et à l'intérieur, il y

 22   avait des hommes armés. Donc tout n'était qu'incertitude et insécurité. En

 23   d'autres termes, il n'était pas possible de voyager normalement et

 24   atteindre l'usine Pretis.

 25   Q.  Pendant le conflit, cette usine, était-elle placée sous le contrôle de

 26   l'ABiH ou de la VRS ?

 27   R.  Cette usine a été complètement sous le contrôle de l'armée de la

 28   Republika Srpska, et d'après les informations dont je disposais, il y avait


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  1   quelques 700 personnes qui travaillaient dans cette usine. C'est le chiffre

  2   moyen annuel.

  3   Q.  Donc la partie suivante de mon interrogatoire principal porte sur

  4   l'incident Markale I. Je vais vous montrer quelques vidéos et quelques

  5   photographies.

  6   Ma première série de question tentera de recueillir de vous une brève

  7   réponse, et ensuite je vais vous demander d'expliquer les différentes

  8   positions avec davantage de détails.

  9   R.  Tout à fait.

 10   Q.  Avez-vous pris part à une enquête concernant l'explosion qui s'est

 11   déroulée au marché de Markale, le 4 février 1994 ?

 12   R.  Je travaillais aux côtés de trois de mes collègues, mais nous avons

 13   lancé cette enquête un jour après l'incident. C'est moi qui étais à

 14   l'initiative de ces travaux, parce que j'estimais que les déclarations qui

 15   avaient été recueillies la vielle n'étaient pas exactes et que, d'après

 16   eux, il eut été impossible de déterminer l'origine, la provenance du tir.

 17   Donc avec certains de mes collègues, j'ai essayé de fournir d'autres

 18   éléments d'information. Le juge d'instruction, qui était sur place, m'a

 19   autorisé ainsi que d'autres de mes collègues à préparer ces analyses, et

 20   nous avons préparé ces analyses dans les 36 heures qui ont suivi.

 21   Q.  Je vais maintenant vous montrer une vidéo, c'est le P1711 que vous

 22   allez voir à l'écran, dans quelques instants. La première séquence commence

 23   à 6 minutes 39 secondes, et nous allons visionner ces images jusqu'à ce que

 24   le compteur indique 7 minutes, et regardez ceci, s'il vous plaît.

 25   [Diffusion de la cassette vidéo]

 26   M. GAYNOR : [interprétation] Pourriez-vous vous arrêter là, s'il vous plaît

 27   ?

 28   Nous sommes arrêtés à 7 minutes et 13 secondes.


Page 12170

  1   Q.  En quelques phrases, veuillez nous dire ce que vous avez vu il y a

  2   quelques instants. J'avais besoin d'expliquer ça est très détaillé, à ce

  3   stade.

  4   R.  Sur cette vidéo je ne vois que les fragments d'un projectile à terre,

  5   sur le sol, et je vois qu'on a tenté d'établir l'arc de trajectoire.

  6   Q.  La deuxième séquence commence à 8 minutes 32 secondes, et nous allons

  7   la visionner pendant 15 secondes.

  8   [Diffusion de la cassette vidéo]

  9   M. GAYNOR : [interprétation] Nous sommes arrêtés à 8 minutes et 46

 10   secondes.

 11   Q.  Pourriez-vous nous décrire ce que vous avez vu dans cette séquence ?

 12   R.  Je ne peux que supposer qu'il s'agit là sans doute du point d'impact du

 13   projectile sur le sol et c'était une surface goudronnée.

 14   Q.  Pourriez-vous décrire plus en détail cette surface au marché de Markale

 15   où le projectile est tombé ?

 16   R.  Est-ce que vous souhaitez que je vous réponde compte tenu de ces images

 17   que je viens de voir ou compte tenu de ce que j'ai fait moi-même ?

 18   Q.  Compte tenu de ce que vous avez fait vous.

 19   R.  Lorsque je suis arrivé sur les lieux, je savais qu'un soldat de la

 20   FORPRONU avait fait sortir du sol l'ailette, et je me suis rendu à cet

 21   endroit-là en particulier et pour aller voir. J'ai demandé à ce que cet

 22   appui de l'ailette me soit apporté, et ensuite regardez l'orifice ou

 23   l'endroit où devait se trouver le stabilisateur, et j'ai essayé de remettre

 24   le système d'appui dans l'orifice en question. J'ai sorti quelques cailloux

 25   qui étaient tombés dedans, et je n'ai eu aucun mal à y placer le support.

 26   Après quoi, j'ai ressorti le support à nouveau, j'ai mesuré la profondeur

 27   de cet orifice en question, j'ai dessiné un croquis, et ensuite j'ai remis

 28   le support de l'ailette à sa place. Si je puis le dire ainsi, j'ai essayé


Page 12171

  1   de calculer l'angle de chute -- ou plutôt, l'angle de pénétration de

  2   l'ailette dans le sol. Donc voici les mesures auxquelles je me suis livrées

  3   qui m'ont permis de faire mes analyses.

  4   Q.  Pourriez-vous nous décrire, s'il vous plaît, la nature du sol sur

  5   lequel le projectile est tombé, comment le décririez-vous ?

  6   R.  C'est une surface comportant du gravier.

  7   Q.  Est-ce qu'il y a des éléments de surface et quelque chose en dessous ?

  8   Pourriez-vous nous le décrire ?

  9   R.  C'est très simple. C'était une surface goudronnée à l'époque où

 10   l'exclusion a eu lieu, et suite à la détonation qui a une incidence sur cet

 11   endroit et les fragments, le goudron a sauté et il y avait des fragments

 12   qui s'étaient déposés dans la zone au-delà et tout autour du point

 13   d'impact. A même le sol, parce que l'ailette avait pénétré en profondeur.

 14   Le sol donc avait formé quelque chose comme un canal de 220 millimètres.

 15   Q.  Je souhaite vous montrer une autre séquence vidéo.

 16   Le compteur est 8 minutes et 54 secondes.

 17   [Diffusion de la cassette vidéo]

 18   M. GAYNOR : [interprétation] Oui. Nous sommes arrêtés à 9 minutes et 21

 19   secondes.

 20   Q.  Pourriez-vous brièvement nous décrire ce que vous venez de voir ?

 21   R.  Alors ce que nous voyons ici c'est la partie avant de l'appui de

 22   l'ailette qui sort du sol, et tout autour, on peut voir des cailloux et

 23   sans doute des morceaux de goudron.

 24   Q.  Nous avons vu quelqu'un en train de creuser lorsque nous avons vu ces

 25   images. Est-ce que c'était le soldat que vous avez cité un peu plus tôt

 26   dans votre témoignage ?

 27   R.  Je suppose que oui. Je me suis servi de cette vidéo-ci en particulier

 28   pour faire mon analyse, et j'ai appris que cet appui d'ailette s'était


Page 12172

  1   fiché dans le sol.

  2   Q.  Je vais maintenant passer à 19 minutes et 4 secondes.

  3   [Diffusion de la cassette vidéo]

  4   M. GAYNOR : [interprétation] Pourriez-vous vous arrêter là maintenant, s'il

  5   vous plaît ?

  6   Q.  Est-ce que vous savez qui a dessiné l'aide d'une craie le cercle autour

  7   de la zone d'impact ?

  8   R.  C'est moi qui ai fait cela, et je me suis servi d'une craie.

  9   Q.  Est-ce que nous pouvons maintenant passer à 22 minutes et 9 secondes,

 10   s'il vous plaît ?

 11   [Diffusion de la cassette vidéo]

 12   M. GAYNOR : [interprétation] Nous pouvons vous arrêter là, donc 22 minutes

 13   et 26 secondes.

 14   Q.  Veuillez nous dire quelle est cette inscription que nous voyons au

 15   niveau du sol.

 16   R.  Il y a une flèche qui est dirigée vers le nord, et l'autre flèche, qui

 17   est dirigée vers l'éventuelle position du mortier, autrement dit, la

 18   direction du projectile, avec un système de mesures très simples, en

 19   prenant un angle de 18 degrés entre le nord et l'est, et en utilisant une

 20   méthode tout à fait classique, une méthode militaire, nous avons fait nos

 21   calculs sur la base de cette surface goudronnée qui convenait tout à fait

 22   au calcul de la direction et de l'arc de trajectoire, et d'après mes

 23   estimations, l'origine probable du tir était de 18 degrés plus ou moins

 24   avec un écart de cinq degrés. Je parle de la direction du projectile.

 25   Veuillez remplacer, s'il vous plaît, "l'appui de l'ailette" par "le porte

 26   empennage" ou "la fixation de l'empennage."

 27   --- La pause est prise à 15 heures 10.

 28   --- La pause est terminée à 15 heures 15.


Page 12173

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Gaynor.

  2   M. GAYNOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   Q.  Mes deux prochaines questions vont porter sur la mesure de la

  4   profondeur du projectile dans le sol avant qu'il ne s'arrête. Est-ce que

  5   vous comprenez ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Je vais vous montrer un dernier extrait vidéo, au minutage 26 minutes

  8   et 50 secondes.

  9   M. GAYNOR : [interprétation] Pourriez-vous lancer la vidéo, s'il vous plaît

 10   ?

 11   [Diffusion de la cassette vidéo]

 12   M. GAYNOR : [interprétation] On va s'arrêter ici. On s'arrête à 27 minutes

 13   et 28 secondes.

 14   Q.  Avant d'arriver à la trajectoire du projectile, j'aimerais vous poser

 15   deux questions sur ce clip. Premièrement, est-ce que ce clip correspond à

 16   une détonation du projectile lorsqu'il entre en contact avec le sol ou bien

 17   lorsqu'il entre en contact avec le toit du stand du marché ?

 18   R.  C'est un cas typique d'impact de projectile en contact avec le sol, et

 19   vous voyez l'effet.

 20   L'INTERPRÈTE : On demande au témoin de répéter sa réponse.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Le projectile ne peut pas avoir été détonné à

 22   un niveau plus élevé ou au moment où il est entré en contact avec le toit.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Docteur, pourriez-vous répéter votre

 24   réponse ? Les interprètes n'ont pas pu suivre.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que nous avons vu dans ce clip est un

 26   exemple typique d'un projectile à explosion haute et de son impact

 27   lorsqu'il entre en contact avec le sol.

 28   M. GAYNOR : [interprétation]


Page 12174

  1   Q.  J'aimerais vous poser une question plutôt théorique. Pas besoin d'une

  2   explication détaillée. Mais si quelqu'un se rendait en haut de ce bâtiment

  3   d'où a été pris cette vidéo et lançait un projectile de mortier 120

  4   millimètre à terre, est-ce que ce projectile exploserait ?

  5   R.  Pour qu'un tel projectile explose, il faudrait intervenir sur le

  6   détonateur. Le détonateur devrait être armé et être prêt à se déclencher

  7   et, généralement, ceci n'arrive que lorsque le projectile sort du baril et

  8   est à une certaine distance. Si quelqu'un était assez fou pour procéder

  9   comme vous le suggérez et lançait un projectile du toit, il devrait

 10   s'assurer que ce projectile n'a pas de rotation, et que, donc, c'est la

 11   tête du projectile qui touche le sol en premier, et ça on ne peut pas le

 12   garantir. Outre cela, il faudrait que la personne, au moment où elle lance

 13   le projectile, sache qu'elle est exposée, qu'elle s'expose à un risque

 14   puisqu'elle pourrait être blessée ou tuée. Donc, c'est un scénario peu

 15   réaliste. On ne voit ce genre de choses que dans les films d'actions et les

 16   films de science-fiction.

 17   Q.  J'aimerais vous montrer maintenant une photo du cratère. On va projeter

 18   P1970, et on va regarder deux photos. J'aimerais maintenant qu'on regarde

 19   la photo 8, s'il vous plaît.

 20   Monsieur le Témoin, pourriez-vous nous dire si, lorsque vous avez mesuré la

 21   distance de trajectoire du stabilisateur avant qu'il ne s'arrête, vous avez

 22   mesuré à partir du haut de la surface du marché, ou bien du haut de cette

 23   indentation de la surface que nous voyons ici ? Est-ce que vous comprenez

 24   ma question ?

 25   R.  Je comprends, je suis un professionnel. Donc j'ai mesuré à partir du

 26   niveau du sol du marché, c'est-à-dire la surface goudronnée du sol du

 27   marché, et jusqu'au centre, j'ai mesuré au centre du cratère une profondeur

 28   de 250 millimètres. Si nécessaire, je peux faire un diagramme pour vous


Page 12175

  1   montrer à partir de quels points j'ai pris mes mesures, et je peux

  2   également me servir des diagrammes que j'ai ici avec moi. A vous de

  3   choisir.

  4   Q.  Vous me devancez. Nous avons effectivement un diagramme dans l'un de

  5   vos rapports. Il s'agit du rapport de 2008, que je ne vais pas verser.

  6   M. GAYNOR : [interprétation] Mais j'aimerais simplement que nous voyions le

  7   diagramme 10 815, qui se trouve en page 41 de la version B/C/S. Nous

  8   n'avons pas besoin de la version anglaise. Peut-on zoomer sur le diagramme

  9   qui se trouve au centre de la page ? On peut peut-être zoomer sur la partie

 10   gauche, s'il vous plaît.

 11   Q.  Est-ce que cela vous aide à expliquer la distance que vous avez

 12   mesurée, et si tel est le cas, pourriez-vous indiquer à l'écran la distance

 13   de trajectoire du projectile -- pardon, du stabilisateur avant qu'il ne

 14   s'arrête ?

 15   R.  [Le témoin s'exécute]

 16   Q.  Pourriez-vous peut-être inscrire la lettre A ?

 17   R.  [Le témoin s'exécute]

 18   Q.  Tant que nous avons ce diagramme devant nous, j'aimerais vous demander

 19   -- vous poser une question technique pour que vous nous expliquiez pourquoi

 20   parfois le stabilisateur vient s'enclaver dans le sol alors que parfois il

 21   ricoche à partir du point de détonation ? Pourriez-vous nous décrire cela

 22   en sachant que nous ne sommes pas des experts, donc pourquoi le

 23   stabilisateur parfois se fiche-t-il dans le sol et parfois pas ?

 24   R.  C'est une caractéristique des projectiles de mortier 120 millimètres.

 25   Il y a trois scénarios possibles. Premièrement - et c'est ce que l'on voit

 26   ici au diagramme A - à savoir quand le projectile d'un mortier arrive à

 27   grande vitesse et touche sa cible, chaque élément de ce projectile a la

 28   même vitesse. Au moment de l'explosion, il y a donc une détonation qui a


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  1   lieu, qui est très brève, et qui cause la fragmentation du corps du

  2   projectile. Si la vitesse du rebond du stabilisateur est moins importante

  3   que la vitesse du projectile, à ce moment-là, le stabilisateur va pénétrer

  4   dans le sol, se ficher dans le sol. C'est un des indicateurs qui nous

  5   permet d'évaluer la zone probable de lancement de ce projectile. Voulez-

  6   vous que je poursuive sur les deux autres possibilités ?

  7   Q.  Oui, s'il vous plaît.

  8   R.  Dans le deuxième cas de figure, lorsque le projectile -- la vitesse du

  9   projectile est plus ou moins la même que celle du rebond, pour un

 10   projectile à mortier de 120 millimètres, ce rebond est de 170, plus ou

 11   moins 20 mètres, à ce moment-là, lorsque la vitesse de rebond et la vitesse

 12   du projectile sont plus ou moins similaires, 170 mètres, plus ou moins 20

 13   mètres, à ce moment-là, on retrouve le stabilisateur très proche du lieu

 14   d'explosion, et cela nous indique la position de lancement du projectile.

 15   Le troisième scénario est celui dans lequel la vitesse du projectile est

 16   inférieure à la vitesse du rebond ou du ricochet du stabilisateur. A ce

 17   moment-là, le stabilisateur se trouve à plusieurs mètres en arrière, et ce,

 18   dans la direction d'où est arrivé le projectile. Ceci, une fois de plus,

 19   nous permet d'évaluer la provenance du projectile.

 20   Ce sont des lois de la mécanique. Cela ne dépend de moi ou de qui que ce

 21   soit d'autre. C'est quelque chose que l'on peut déterminer de façon exacte.

 22   Q.  Concernant le marché de Markale, il y a eu un incident, et vous dites

 23   que vous avez créé -- rédigé un rapport sur cet incident. J'aimerais

 24   appeler -- pardon. Puis-je vous demander de signer ce document et d'y

 25   inscrire votre nom et la date d'aujourd'hui ?

 26   R.  [Le témoin s'exécute] Aujourd'hui, nous sommes le 22, n'est-ce pas ?

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, le 22.

 28   M. GAYNOR : [interprétation] J'aimerais verser cette pièce.


Page 12177

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce 2316.

  3   M. GAYNOR : [interprétation]

  4   Q.  Nous devrions voir à l'écran le rapport que vous avez rédigé concernant

  5   cet incident du marché de Markale. Il s'agit de la pièce 10676. Nous

  6   pourrions peut-être passer à la page 13 en B/C/S, et 8 en anglais, qui

  7   comporte un certain nombre de signatures, pourriez-vous confirmer qui sont

  8   les auteurs de ce rapport et ce que couvre ce rapport ?

  9   R.  Il s'agit de notre analyse à la demande du juge d'instruction, et c'est

 10   une analyse à laquelle j'ai pris part, avec mes collègues, Omerovic, Ahmed,

 11   et Amir Kurtovic, et Zijo Pekic, qui ont également pris part à la rédaction

 12   de l'analyse mais il n'était pas présent lorsque nous l'avons terminé donc

 13   il n'a pas signé ce rapport, puisque à l'époque, il était à Dobrinja.

 14   Q.  J'aimerais me concentrer sur deux des conclusions, que l'on trouve sur

 15   cette page du rapport. Je crois que nous avons couvert la conclusion numéro

 16   5. Vous avez dit que vous avez mesuré la trajectoire, la provenance du

 17   projectile, avec un angle de 18 degrés, plus ou moins, cinq degrés, n'est-

 18   ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  J'aimerais maintenant que nous nous concentrions sur la conclusion

 21   numéro 7, c'est-à-dire l'angle de descente estimé du projectile de 55 à 65

 22   degrés, la traduction anglaise comporte une erreur. Qui a mesuré cet angle

 23   de descente ?

 24   R.  C'est moi.

 25   Q.  Comment l'avez-vous mesuré ?

 26   R.  J'ai placé l'emplenage [phon] du stabilisateur dans le tunnel créé par

 27   sa pénétration. J'ai pris un appareil, un équipement d'artillerie, que nous

 28   utilisons pour déterminer l'angle d'un canon, d'une arme ou d'autre chose.


Page 12178

  1   Je l'ai placé sur la partie avant du stabilisateur, et j'ai mesuré un angle

  2   de 60 degrés. Il serait prétentieux de ma part de prétendre que cet angle

  3   de 60 degrés est parfaitement correct, puisqu'il est toujours possible

  4   d'avoir une certaine déviation au moment de la pénétration, donc j'estime

  5   qu'une fourchette de 55 à 65 degrés est plus raisonnable et c'est ce que

  6   ferait de toute façon tout professionnel dans ce type de mesure. Donc cet

  7   angle est correct, en tout cas cette fourchette est correcte pour cette

  8   mesure de l'angle.

  9   Q.  Lorsque vous avez replacé le stabilisateur dans le trou qui avait

 10   formé, pourriez-vous nous dire s'il rentrait juste ou bien s'il y avait une

 11   marge de mouvement ? Pourriez-vous nous dire lorsque vous avez replacé ce

 12   stabilisateur dans le trou s'il y avait de la place ou pas ?

 13   R.  Je suis à 100 certain que je l'ai positionné dans la bonne position,

 14   que je l'ai placé dans la bonne position, il n'y a pas eu de déviation

 15   possible. Pour une raison. Les calculs ultérieurs qui sont accessibles par

 16   tout le monde concernant la pénétration dans un obstacle mou indique que la

 17   vitesse de pénétration probable du stabilisateur était de 60 plus ou moins

 18   20 mètres par seconde. Alors cela ne veut peut-être pas dire grand-chose

 19   pour vous. Mais 60 mètres par seconde ça représente 200 kilomètres heure.

 20   Voilà la vitesse avec laquelle l'aileron du stabilisateur a pénétré dans

 21   cet obstacle. Vous savez ce qui se passe, lorsqu'une voiture heurte un

 22   obstacle à 200 kilomètres à l'heure, elle se déforme complètement; la

 23   voiture est totalement détruite. Ce stabilisateur a pénétré cette barrière

 24   a exactement à cette vitesse-là, ou en tout cas, cette surface, ce sol.

 25   Q.  Pourriez-vous faire la distinction, avant que nous n'allions plus loin,

 26   entre la vitesse à laquelle le stabilisateur a pénétré dans le sol et la

 27   vitesse à laquelle le projectile lui-même se déplaçait au moment de

 28   l'impact, pour nous expliquez s'il y a ou non une distinction ?


Page 12179

  1   R.  Si la vitesse de pénétration est de 60 mètres plus ou moins 20 mètres

  2   par seconde, avec donc une marge d'erreur, et si la vitesse du rebond du

  3   stabilisateur est de 170 plus ou moins 20 mètres par seconde, les analyses

  4   ultérieures auxquelles j'ai procédé indiquaient que, la vitesse minimale du

  5   projectile était de 200 mètres par seconde, il s'agit là de la vitesse

  6   minimale, ce qui nous indique automatiquement, au vu de la vitesse

  7   d'impact, que les zones de lancement devaient se trouver à cinq kilomètres,

  8   ou à plus ou moins 5,4 ou 6,4 kilomètres du point d'explosion. Si nous

  9   avions trouvé le stabilisateur près de l'explosion où vers ou en arrière

 10   par rapport à l'angle d'arrivée.

 11   C'est quelque chose de très clair pour n'importe lequel ingénieur expert en

 12   mécanique, c'est quelque chose de très clair. J'ai déterminé les zones, pas

 13   le point exact de lancement, mais les zones à partir desquelles ce

 14   projectile a pu être lancé.

 15   Q.  C'est certainement ma dernière question avant la pause. Pourriez-vous

 16   très brièvement nous décrire comment vous êtes abouti à la conclusion que

 17   la vitesse minimum d'arrivée du projectile était de 200 mètres par seconde

 18   ?

 19   R.  J'ai essayé de l'expliquer tout à l'heure. Si la vitesse de pénétration

 20   est de 60 mètres et la vitesse de ricochet est de plus ou moins 20 mètres,

 21   la vitesse de rebond du stabilisateur au point d'explosion, est de 170,

 22   plus ou moins 20 mètres. On pourrait avoir 40 mètres, on pourrait avoir 50

 23   mètres d'un côté ou de l'autre ce qui nous amène à 190 mètres par seconde

 24   d'un côté, à 240 mètres par seconde. Donc en moyenne à peu près 200 mètres

 25   par seconde. Là, je vous parle en fonction de la vitesse du projectile, de

 26   la vitesse de pénétration, et de la vitesse du rebond.

 27   Donc voilà le calcul, je l'ai estimé à 200 mètres. Il pourrait s'agir de

 28   190 mètres ou 210 mètres ou 205 mètres, par seconde. Moi, j'ai estimé que


Page 12180

  1   c'était au moins 200 mètres et à partir de là, cela m'a permis de

  2   déterminer la zone à partir de laquelle ce projectile avait

  3   vraisemblablement été lancé.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si cela vous convient, nous allons faire

  5   une pause.

  6   Nous allons prendre une pause d'une demi-heure, et nous reprendrons à 16

  7   heures 10.

  8   --- L'audience est suspendue à 15 heures 40.

  9   --- L'audience est reprise à 16 heures 11.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Robinson.

 11   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, je crois que nous arrivons au stade où

 12   l'Accusation va demander de verser le rapport de l'incident de Markale au

 13   dossier. Etant donné que vous n'aviez pas l'objection consignée au compte

 14   rendu d'audience, je voudrais la faire maintenant. Notre objection est la

 15   suivante : rien ne montre que ce témoin est un expert en balistique plutôt

 16   qu'un expert en fabrication. Il n'a jamais réalisé d'analyse de cratère. Il

 17   n'y a rien qui nous montre qu'il sait remplacer un stabilisateur ou que la

 18   technique qu'il emploie est appropriée. Ses activités n'ont pas fait

 19   l'objet d'un examen par ses pairs. De plus, il n'est pas impartial.

 20   Vous savez que, dans certaines affaires, le Tribunal spécial pour

 21   Sierra Leone ainsi que le TPIR ont décidé de récuser certaines personnes

 22   qui n'étaient pas considérées comme des experts en raison de leur absence

 23   d'impartialité. Je fais référence ici à une décision dans l'affaire contre

 24   Charles Taylor ainsi qu'une affaire devant le TPIR, du 9 mars 1998 --

 25   L'INTERPRÈTE : -- dont le nom n'a pas été saisi par l'interprète.

 26   M. ROBINSON : [interprétation] --c'est pour ces raisons que nous avons une

 27   objection à ce que ce rapport d'expert soit versé au dossier en tant que

 28   rapport d'expert. Merci.


Page 12181

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Gaynor.

  2   M. GAYNOR : [interprétation] Vous avez déjà pris une décision, en tant que

  3   Chambre de première instance, donc je voudrais donc donner les motifs de

  4   l'Accusation. Ce témoin a été reconnu en tant qu'expert dans les affaires

  5   Galic et Slobodan Milosevic, pour l'incident de Markale. Il a également été

  6   reconnu comme expert de manière générale dans l'affaire contre Momcilo

  7   Krajisnik et dans l'affaire contre Dragomir Milosevic. Les points soulevés

  8   par Me Robinson sont des domaines qui pourraient être creusés dans le cadre

  9   d'un contre-interrogatoire et ne pourraient pas considérer la récusation

 10   d'un témoin en tant que témoin expert. Par conséquent, et je pense d'après

 11   le parcours du témoin, il est un des mieux à même de faire des

 12   commentaires, puisqu'il a travaillé pour le secteur de la défense, en ex-

 13   Yougoslavie, et il peut donc parler de l'impact d'un projectile de mortier

 14   de 120-millimètres dans un endroit précis à Sarajevo. Nous pensons que

 15   c'est une des rares personnes qui est en mesure de faire les observations

 16   qu'il a déjà faites dans le cadre de sa déposition.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Gaynor.

 18   Effectivement, Maître Robinson, nous sommes d'accord pour dire que les

 19   motifs avancés ne sont pas suffisants pour récuser ce témoin en tant que

 20   témoin expert. Nous pouvons donc faire entrer le témoin à nouveau dans ce

 21   prétoire.

 22   [Le témoin vient à la barre]

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez prendre vos ailes, Monsieur le

 24   Témoin.

 25   Oui, Monsieur Gaynor, allez-y, c'est à vous.

 26   M. GAYNOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 27   Q.  Monsieur le Témoin, j'aimerais passer à une page précise de votre

 28   rapport concernant l'incident de Markale I.


Page 12182

  1   Et je vous demande donc d'afficher les pages 7 en anglais et 10 en

  2   B/C/S sur les écrans.

  3   A cette page de votre rapport, vous parlez de ces distances possibles

  4   pour un angle d'impact de 55 degrés, et si distance possible pour un angle

  5   d'impact de 65 degrés; est-ce exact ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  En fait, nous n'avons pas besoin de la version en anglais. La version

  8   en B/C/S suffit. Tout d'abord, pourriez-vous nous dire de combien de temps

  9   vous avez disposé pour compiler ce rapport ?

 10   R.  Je dirais environ 36 heures. La situation était extrêmement compliquée.

 11   Tout le monde était très pressé, et on nous avait demandé de rendre notre

 12   rapport aussi rapidement que possible, et nous avons fait de notre mieux,

 13   compte tenu des circonstances.

 14   Q.  Le chiffre qui apparaît sur ces deux colonnes est en mètre, n'est-ce

 15   pas ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  La première colonne de gauche mentionne la portée des charges 1, 2, 3,

 18   4, 5 et 6, n'est-ce pas ?

 19   R.  C'est exact.

 20   Q.  Compte tenu de la déposition que vous avez déjà faite devant ce

 21   Tribunal, est-ce que vous excluez certaines des distances que vous avez

 22   envisagées dans ce rapport ?

 23   R.  J'exclus la possibilité que les projectiles aient pu être lancés en

 24   utilisant les charges numéro 1, 2 et 3.

 25   Q.  Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre pourquoi vous

 26   n'envisagez pas ces possibilités-là ?

 27   R.  Ceci est lié au fait que la vitesse de lancement de ces projectiles, en

 28   fait, ces vitesses sont inférieures aux vitesses de référence d'un


Page 12183

  1   projectile au moment de l'impact. Les tableaux de balistique nous montrent

  2   que la vitesse au moment de l'impact n'est jamais égale à la vitesse au

  3   moment de lancement. C'est la raison pour laquelle nous pensons que la

  4   vitesse minimale, à ce moment-là, était de 200 mètres par seconde. Pour la

  5   première charge, c'était 123 mètres; pour la deuxième, 173 mètres; et pour

  6   la troisième, 211 mètres. En d'autres termes, la seule possibilité c'est

  7   d'avoir eu les charges numéro 4, 5 ou 2 qui ont été utilisées pour le

  8   lancement de cet obus qui a touché Markale.

  9   Q.  Je vais vous poser la question suivante : Si le stabilisateur ne

 10   s'était pas encastré dans le sol à la profondeur que nous avons observée,

 11   quelle aurait été la conséquence de ceci sur vos conclusions ?

 12   R.  Dans ce cas-là, on aurait pu également inclure la charge numéro 3,

 13   c'est-à-dire que cela correspond donc à une [inaudible] de 4 120 mètres à 3

 14   622 mètres à partir du point de l'explosion.

 15   Q.  Mais vous avez dit que le stabilisateur s'était encastré à une distance

 16   d'environ de 150 millimètres dans le sol. Dans quelle mesure ceci a-t-il

 17   une importance sur le fait que vous excluez la possibilité que ce

 18   projectile a été tiré à une distance inférieure à 4 500 mètres ?

 19   R.  En fait, très rapidement, ce que l'on peut dire, on peut arriver à deux

 20   conclusions. Pour ce qui est de la deuxième charge ou de la troisième, tout

 21   dépend, bien sûr, de l'altitude à laquelle le projectile a été lancé,

 22   c'est-à-dire l'altitude par rapport au niveau de la mer. En ce qui concerne

 23   le point de l'explosion, on pourrait trouver le stabilisateur à proximité

 24   de l'endroit de l'explosion. A partir du moment où le stabilisateur se

 25   fiche dans le sol, on peut parler d'une zone qui correspondrait à la charge

 26   numéro 3. Plus le stabilisateur se fiche en profondeur, et si cela atteint

 27   une distance de 250 millimètres, on peut dire que ceci exclu les charges

 28   numéro 4, 5 et 6. Donc si vous me le permettez, je dirais que quelle que


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  1   soit la profondeur, que ce soit 60, 50, 70, 200, 250 ou 150, ça n'a pas

  2   vraiment d'importance. La seule chose importante c'est de savoir si le

  3   stabilisateur s'est fiché dans le sol ou s'il a été retrouvé à proximité du

  4   point de l'explosion ou du point d'impact, ou s'il a été retrouvé entre

  5   l'endroit où il a été lancé et l'endroit où il est tombé. Ce sont les seuls

  6   paramètres qu'il faut prendre en compte pour déterminer les zones de

  7   lancement possibles.

  8   M. GAYNOR : [interprétation] Je voudrais donc verser ce rapport au dossier,

  9   Monsieur le Président.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 11   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, vous avez déjà rendu

 12   une décision, donc je n'ai rien à rajouter.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous avons pris bonne note de votre

 14   objection. Donc ce document sera versé au dossier.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P2317.

 16   M. GAYNOR : [interprétation]

 17   Q.  Monsieur Zecevic, je voudrais maintenant passer à la question des

 18   bombes d'avion modifiées. Est-ce que l'on pourrait passer au document de la

 19   liste 65 ter 08347, s'il vous plaît ?

 20   Je voudrais vous rappeler que, si vous avez l'intention de consulter quoi

 21   que ce soit d'autre mis à part l'exemplaire du rapport concernant ces

 22   bombes d'avion modifiées, vous devez en informer les Juges de la Chambre.

 23   L'INTERPRÈTE : Le témoin fait signe que non.

 24   M. GAYNOR : [interprétation]

 25   Q.  Très bien. Alors, maintenant, j'aimerais que vous nous disiez de quel

 26   document il s'agit. Je parle du document qui s'affiche à l'écran devant

 27   nous.

 28   R.  Il s'agit d'une analyse que j'ai réalisée pour l'Accusation dans


Page 12185

  1   l'affaire contre le général Milosevic. Il s'agit d'utilisation de bombes

  2   d'avion modifiées durant le siège de Sarajevo en 1994 et 1995.

  3   M. GAYNOR : [interprétation] Je vais poser des questions concernant ce

  4   document, mais j'aimerais déjà le verser au dossier, Monsieur le Président.

  5   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Cette pièce sera versée.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P2318.

  8   M. GAYNOR : [interprétation] Merci. Est-ce que l'on pourrait passer à la

  9   page 68 du rapport en B/C/S. C'est la page 74 en anglais. Mes premières

 10   questions vont se concentrer sur les facteurs qui ont une influence sur

 11   l'exactitude et la précision de ces bombes d'avion modifiées. En fait, il

 12   ne s'agit pas des pages que je demandais, donc je vous demande un instant

 13   de patience, s'il vous plaît.

 14   Est-ce que l'on pourrait afficher la page 76 en B/C/S, s'il vous plaît ?

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il s'agit de la page 82 en

 16   anglais ?

 17   M. GAYNOR : [interprétation] En fait, la pagination est différente dans la

 18   version papier de la version du prétoire électronique.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous redonner

 20   la référence, dans ce cas-là ?

 21   M. GAYNOR : [interprétation] Voilà, la page que je souhaite aborder est à

 22   l'écran. Est-ce que l'on pourrait se concentrer sur la représentation

 23   graphique de ce projectile ?

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais nous avons besoin de la version

 25   anglaise également. Il s'agit de la page 87.

 26   M. GAYNOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 27   Q.  Est-ce que vous pourriez rapidement confirmer qu'il s'agit d'une

 28   représentation graphique d'une bombe d'avion modifiée de type FAB 250 ?


Page 12186

  1   R.  Il s'agit d'une représentation graphique d'une bombe d'avion FAB 250

  2   avec trois stabilisateurs.

  3   L'INTERPRÈTE : L'interprète de cabine anglaise demande au témoin de répéter

  4   sa réponse.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Cette représentation graphique est basée sur

  6   les fragments qui ont été retrouvés à Sarajevo.

  7   M. GAYNOR : [interprétation] Nous pouvons conserver cette page à l'écran. 

  8   Q.  Dans un autre paragraphe de votre rapport, vous décrivez certains

  9   facteurs qui ont des conséquences sur la stabilité et la précision de ces

 10   bombes d'avion modifiées. C'est à la page 87 de votre rapport en anglais,

 11   page 79 en B/C/S, et vous mentionnez :

 12   "Un des premiers facteurs est qu'il n'avait pas, en fait, des dispositifs

 13   d'assemblage complexes pour le contrôle des phases individuelles dans les

 14   différentes actions que l'on pouvait escompter d'une bombe de ce type."

 15   Je voudrais que vous vous concentriez sur la phase d'amorçage. Est-ce que

 16   vous pourriez expliquer, aux Juges de la Chambre, quelles sont les

 17   conséquences sur la trajectoire du projectile si l'une des fusées ou des

 18   roquettes est mise à feu un peu plus tard que les deux premières ?

 19   R.  Chacun de ces systèmes était doté de trois moteurs de roquette

 20   indépendants qui devaient être mis à feu simultanément. D'après les

 21   documents que j'ai eu à ma disposition, l'assemblage de ce système d'arme a

 22   été réalisé en utilisant, principalement, des moteurs de roquette de 122 ou

 23   des moteurs de roquettes de ce type 128 ou des moteurs de type 127 utilisés

 24   sur des missiles autoguidés de type K-15. Le problème que l'on peut

 25   envisager c'est que ces moteurs de roquette se désolidarisent les uns des

 26   autres ce qui peut avoir des conséquences sur la combustion, et cela

 27   signifie que, durant la trajectoire, il peut y avoir une déviation par

 28   rapport à la direction qui était l'objectif du tir de cette roquette, et


Page 12187

  1   que, par conséquent, la cible ne sera pas nécessairement atteinte.

  2   Q.  Vous avez mentionné un autre facteur, à savoir que ces projectiles

  3   modifiés n'avaient pas de moyen de rééquilibrer la pression de la

  4   combustion à l'intérieur des différents moteurs de ces trois roquettes.

  5   Est-ce qu'il s'agit d'un facteur différent de celui que vous venez de

  6   décrire ?

  7   R.  Oui, je comprends ce que vous voulez dire. Dans le premier système

  8   d'arme que j'ai retrouvé en janvier 1994, les moteurs de la roquette

  9   étaient reliés les uns aux autres de façon à égaliser la pression de

 10   combustion, ce qui permettait de compenser les différences de pression au

 11   sein de ces différents moteurs. Ces moteurs qui étaient en trois parties

 12   n'avaient pas de dispositif de compensation de pression, ce qui avait des

 13   conséquences sur la trajectoire de ces projectiles.

 14   Q.  A un autre endroit dans votre rapport, vous mentionnez que le système

 15   de recentrage des axes des moteurs des roquettes et de la structure même

 16   des roquettes n'étaient pas satisfaisants. Est-ce que vous pourriez

 17   expliquer rapidement aux Juges de la Chambre quelle conséquence cela

 18   pouvait avoir sur la fiabilité et sur la précision de ces projectiles ?

 19   R.  Ces trois systèmes de moteurs de roquette constituent une version peu

 20   évoluée d'un système de roquette. Une technologie améliorée consisterait à

 21   doter le projectile de quatre moteurs, ce qui a été utilisé au début du

 22   mois de janvier 1994. Cet autre dispositif avait été fabriqué sans utiliser

 23   ou sans prendre en compte les capacités de la société Petris. En d'autres

 24   termes, ça n'avait pas été fabriqué aux normes qui s'appliquaient

 25   d'habitude dans la société. Cela signifie qu'à tout moment ces systèmes

 26   pouvaient faire preuve de performances inégales, et cela signifie que la

 27   probabilité d'atteindre les cibles prévues était très limitée.

 28   Q.  Vous avez parlé du fait que les moteurs de roquette n'étaient pas


Page 12188

  1   parallèles. Est-ce que vous pourriez vous concentrer là-dessus et nous dire

  2   comment ceci peut avoir une conséquence sur la trajectoire et la

  3   progression donc de ces projectiles ?

  4   R.  Cela signifie qu'il y a une déviation latérale de la trajectoire mais

  5   ceci est assez complexe. Cela signifie que le projectile peut faire un

  6   écart par rapport à la trajectoire prévue ou un écart également, soit, au

  7   niveau latéral, soit, au niveau horizontal. Mais ce n'était pas uniquement

  8   les moteurs de roquette qui étaient des éléments-clés du système. Les

  9   systèmes de stabilisation n'étaient également pas du tout bien conçus pour

 10   permettre une bonne stabilité de la trajectoire, et ceci pouvait également

 11   créer des déviations par rapport à la trajectoire prévue.

 12   Q.  En anglais, il est souvent mentionné CEP, à savoir probabilité d'une

 13   erreur circulaire; qu'est-ce que cela signifie exactement ?

 14   R.  Il s'agissait d'un paramètre statistique qui définissait donc le rayon,

 15   et ceci signifiait que, sur 120 projectiles, 50 tomberaient dans une zone

 16   donnée. Si vous prenez l'exemple d'un obus de 155 millimètres, cette valeur

 17   CEP a une distance de 24 kilomètres serait de 360 mètres de diamètre. Cela

 18   signifie que vous aviez une zone au sein de laquelle 150 projectiles

 19   allaient tomber, et 50 tomberaient hors de cette zone. Il a été mentionné

 20   très clairement que des roquettes ne bénéficiant pas d'un dispositif

 21   d'autoguidage ou des armes d'artillerie ne peuvent pas prendre à partie des

 22   cibles multiples. On ne peut en fait avoir qu'une seule cible, par exemple,

 23   un terrain de football. Par conséquent, il n'y a pas de système de roquette

 24   unique ou un système d'artillerie unique qui peut frapper une maison se

 25   trouvant à une distance 8 à 10 kilomètres. C'est aussi simple que cela.

 26   M. GAYNOR : [aucune interprétation]

 27   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 28   --- La pause est prise à 16 heures 37.


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  1   --- La pause est terminée à 16 heures 45.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Gaynor.

  3   M. GAYNOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   Q.  Vous avez expliqué juste avant la pause ce qui est la probabilité d'une

  5   erreur circulaire. Pourriez-vous nous donner la probabilité d'une erreur

  6   circulaire de bombes aériennes modifiées, les FAB utilisées contre Sarajevo

  7   pendant le conflit ?

  8   R.  Je pense qu'en me fondant sur mes analyses, j'ai essayé, avec mes

  9   collaborateurs, d'établir que la surface sur laquelle tombaient ces

 10   projectiles était de 60 à 250 mètres. Je parle de la surface du sol, ce

 11   serait cela la probabilité d'une erreur circulaire que vous pouvez calculer

 12   à partir de cela. Ça doit être de l'ordre de 250 mètres, en termes de

 13   rayon.

 14   Q.  Lorsque vous étiez à Pretis, vous avez travaillé sur le développement

 15   de nouveaux systèmes d'armes, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Combien de temps environ les systèmes d'armes étaient-ils étudiés, et

 18   pendant combien de temps ce système d'arme était-il testé et développé

 19   avant d'être utilisé ?

 20   R.  En général, un nouveau système d'arme mettait cinq à sept ans avant

 21   qu'il ne soit développé. Très souvent, cela prenait dix ans. Après deux

 22   ans, il était possible d'élaborer un nouveau concept de base, et ensuite il

 23   fallait le temps restant ou le temps restant était nécessaire pour estimer

 24   la performance du système d'arme en question. Donc c'est un minimum de cinq

 25   à sept ans en général.

 26   Q.  Pouvez-vous comparer le système d'arme développé par l'usine Pretis,

 27   avant le conflit et les bombes aériennes modifiées utilisées contre

 28   Sarajevo pendant le conflit ? Veuillez faire part aux Juges de la Chambre


Page 12190

  1   de vos observations eu égard à la précision des bombes aériennes modifiées

  2   ?

  3   R.  Le développement d'un nouveau système d'arme est extrêmement complexe,

  4   et exige la participation de différents systèmes d'organisation. Si Pretis

  5   développait un nouveau système, cela signifie qu'il n'y avait personne qui

  6   travaillait à la conception, des personnes travaillant aux composants,

  7   personnes qui travaillaient sur le processus d'inspection et de production,

  8   et l'usine devait également recruter ou faire appel à des centres de test

  9   qui faisaient partie ou qui appartenaient à la JNA. Ceci permettait de

 10   mesurer la vitesse, la distance, le comportement du projectile en l'air. Il

 11   fallait également tenir compte des installations de production de roquette

 12   à combustible, d'installation de production d'engin explosif, et également

 13   des personnes qui travaillaient sur les tableaux de tir. C'était, en

 14   général, les personnes qui travaillaient pour l'Institut technique et

 15   militaire, de Belgrade dans la plupart des cas. Après quatre ou cinq ans,

 16   l'usine pouvait dire qu'elle contrôlait complètement le nouveau système

 17   ainsi que sa fabrication, et c'est à ce moment-là que l'on passait à la

 18   phase de production, et c'était le Centre technique de test qui s'occupait

 19   de cela et qui, indépendamment de l'usine, devait tester le système d'arme

 20   indépendamment de l'usine qui avait fabriqué le système en question, et

 21   ensuite ce centre remettait ses conclusions et résultats pour dire si ce

 22   nouveau système d'arme pouvait être intégré ou non. Il s'agit donc d'un

 23   processus fort complexe et qui exige la participation d'un très grand

 24   nombre de personnes, de fonds, d'équipements, et requiert beaucoup de

 25   temps.

 26   Q.  Alors, compte tenu de ce que vous avez pu établir lorsque vous avez

 27   préparé votre rapport, prenez le cas, par exemple, d'une bombe aérienne

 28   modifiée, est-ce qu'une bombe aérienne modifiée a été soumise à ce


Page 12191

  1   processus que vous venez de décrire ?

  2   R.  Non.

  3   Q.  En vous fondant sur votre analyse d'expert sur la bombe aérienne

  4   modifiée et compte tenu de votre expérience, êtes-vous en mesure de nous

  5   donner votre avis et de nous dire si l'armée de Bosnie-Herzégovine

  6   disposait de bombes aériennes modifiées pendant la guerre ?

  7   R.  Non.

  8   Q.  Donc la Bosnie-Herzégovine ne disposait pas de ce type de système

  9   d'arme ?

 10   R.  La Bosnie ne disposait pas des capacités techniques nécessaires à la

 11   production de tel système, ne disposait pas du matériel nécessaire, des

 12   ressources, des usines de production, ni la puissance nécessaire pour

 13   fabriquer de tels dispositifs.

 14   Q.  Je souhaite maintenant passer au concept de combustible, "fuel air,"

 15   par opposition au TNT. Pour ce qui est de ce que contenaient les bombes

 16   aériennes, pourriez-vous nous dire lequel des deux a une capacité

 17   destructrice plus grande, s'il s'agit d'un mélange de combustibles ou du

 18   TNT ? S'il vous plaît, veuillez le dire aux Juges de la Chambre.

 19   R.  La question n'est pas précise, mais je vais tenter de vous répondre et

 20   vous dire pourquoi la question n'est pas précise. Je peux répondre à la

 21   question, mais je peux également vous expliquer la différence qui existe

 22   entre les deux.

 23   Q.  Allez-y, s'il vous plaît.

 24   R.  Une ogive qui contient un explosif dur comme la TNT, lorsque cela

 25   touche la cible, l'amorce est activée et réagit dans un intervalle de 200 à

 26   300 millions de PPM [phon], active la détonation, et l'explosif dur se

 27   transforme en détonation gazeuse. La partie métallique du corps, à cause de

 28   la pression très élevée à l'intérieur du projectile, qui est mesurée en 2


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  1   000 à 3 000 barres - et la température est de 3 000 à 4 000 degrés - ça

  2   veut dire que la partie métallique, sous l'effet d'une telle pression,

  3   quadruple de volume. Le volume est même quelquefois cinq fois plus

  4   important. Lorsque commence le processus de fragmentation, les éléments

  5   explosifs sont projetés, ce qui crée une pression extrêmement forte,

  6   pression qui diminue très rapidement et de façon radicale au moment de

  7   l'impact. Le processus de fragmentation dure quelque 50, 60 ou 70 millions

  8   de PPM par seconde.

  9   Avec les bombes aérosols ou les projectiles, le processus est tout à

 10   fait différent. Tout d'abord, la partie métallique d'un tel projectile

 11   explose en même temps que l'engin -- la partie explosive dure, ce qui fait

 12   que le combustible se mélange avec l'air ambiant, cela s'évapore, cela

 13   s'élargit pendant des parties de seconde ou une ou deux secondes et se

 14   mélange avec l'air ambiant, ou l'aérosol avec l'air ambiant, donc il faut

 15   une source d'énergie extérieure. En général, les charges explosives sont

 16   utilisées, deux ou trois charges explosives, ce qui engrangent le processus

 17   de détonation de l'engin explosif ou l'aérosol. Dans l'intervalle,

 18   l'aérosol a grandi en taille, quelque 10 ou 20 ou 30 mètres de large. Il

 19   est devenu plus large, et ensuite il y a l'activation en tant que tel. La

 20   pression est de 20 à 30 barres. La pression ne se calcule pas en termes de

 21   centaines ou de milliers de barres, et au moment voulu, la pression au sein

 22   de l'aérosol de la bombe aérienne est beaucoup plus importante, et la bombe

 23   aérienne a un pouvoir de destruction très important sur les bâtiments qui

 24   sont pris pour cible, par exemple les personnes, les casemates, les

 25   entrepôts, les dépôts, des avions, et cetera.

 26   Q.  Puis-je vous poser cette question-ci maintenant ? Vous avez dit, dans

 27   votre rapport, que le système de combustible avait été utilisé pour

 28   déblayer la végétation au Vietnam; c'est exact ?


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  1   R.  Oui, de façon à ce que des avions qui déblayaient, le sol puisse

  2   atterrir.

  3   Q.  Pourriez-vous nous commenter, s'il vous plaît, ceci ? Le système TNT ou

  4   le système de combustible était -- convenait davantage pour la destruction

  5   des bâtiments -- ou plutôt, pour la destruction des personnes ?

  6   R.  C'est une question complexe. Si les cibles humaines sont dehors, il y a

  7   de fortes chances pour qu'un projectile TNT ait un impact sur une zone où

  8   il y a des cibles humaines, non pas à cause de la pression, mais c'est la

  9   fragmentation qui provoquera la destruction des cibles humaines. Mais si

 10   les cibles humaines sont cachées dans des casemates, ou comme dans le cas

 11   du Vietnam, dans des souterrains en sous-sol, à ce moment-là, le système de

 12   bombes aériennes est extrêmement efficace. De même, si la cible est un

 13   bâtiment, l'effet est plus important, le système aérosol ou la bombe

 14   aérienne provoque d'importants dégâts sur les structures et les cibles

 15   humaines. Mais pour réaliser cela, il faut être extrêmement talentueux pour

 16   pouvoir toucher des zones urbanisées avec des bombes aériennes. Ce n'est

 17   pas quelque chose qui existe dans une quelconque doctrine d'une quelconque

 18   armée.

 19   Q.  Dans votre rapport, vous avez fait des commentaires sur un certain

 20   nombre d'incidents, y compris l'emploi de bombes aériennes modifiées à

 21   Sarajevo en 1995. Dans la plupart de ces cas, vous estimez, d'après votre

 22   rapport, que les bombes aériennes en question contenaient du combustible à

 23   air plutôt que du TNT. Est-ce que vous pourriez dire aux Juges de la

 24   Chambre quels sont les facteurs dont vous avez tenu compte lorsque vous

 25   avez déterminé s'il y avait ce mélange de combustible et air et/ou si les

 26   bombes contenaient du TNT ?

 27   R.  Dans le cas où le système contenait un explosif de type dur comme du

 28   TNT, à ce moment-là, au moment de l'impact sur la cible, la bombe aérienne


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  1   peut peser jusqu'à 220 kilogrammes et contient quelque chose comme 90

  2   kilogrammes d'explosif. Dans ce cas, l'explosion est extrêmement forte, la

  3   pression est extrêmement forte et il y aura, dans ce cas, un nombre très

  4   important de fragments. Suite à l'éjection des engins de roquette et des

  5   stabilisateurs qui seraient éjectés à une très grande distance du point

  6   d'impact, dans le cas de tous les systèmes que j'ai analysés à Sarajevo,

  7   j'ai toujours découvert des moteurs de roquette ou des parties de roquette,

  8   de moteur de roquette, au point d'impact en présence des ailettes et

  9   stabilisateur. Ceci ne peut pas être contesté. C'est comme dans le cas des

 10   projectiles de mortier de 120 millimètres. Mais dans le cas des mortiers de

 11   120 millimètres, des obus de ce mortier, vous avez, dans ce cas, 2

 12   kilogrammes de TNT, et dans les bombes aériennes, vous avez 90 kilogrammes

 13   de TNT. Voilà la comparaison entre les deux types de projectile, le

 14   projectile type mortier, le projectile type bombes aériennes modifiées.

 15   Voilà les raisons essentielles. Il y a d'autres raisons aussi, mais elles

 16   ne sont pas aussi importantes.

 17   Q.  Ma question portait précisément sur la façon dont vous arrivez à

 18   distinguer entre une bombe aérienne contenant un mélange de combustible et

 19   une bombe aérienne modifiée contenant du TNT. Est-ce que vous avez d'autres

 20   observations à faire sur ce point ?

 21   R.  C'est très simple. Si une bombe aérienne contenait du TNT explose à

 22   proximité d'un bâtiment, la bombe aérienne contenant du TNT produit quelque

 23   7 000 fragments, plus de 7 milligrammes de masse, et donc toute la zone

 24   autour serait perforée par un nombre très important de fragments, chose que

 25   je n'ai jamais constatée. Si une bombe aérienne, contenant du TNT, touche

 26   une maison ou un bâtiment, et si l'explosion se produit à l'intérieur d'une

 27   maison avec 90 kilos de TNT, tous les murs seraient complètement détruits

 28   et l'explosion se ferait vers l'extérieur. Dans certains cas, j'ai


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  1   clairement montré que cela n'était pas le cas, qu'au milieu de la zone où

  2   il y a l'explosion, il y a toujours un mur en place parce que la bombe

  3   aérienne a agi avec une force égale, de part et d'autre, du mur et a

  4   empêché le mur de s'écrouler. Ceci s'est passé à Hrasnica. Donc toutes les

  5   analyses, qui ont été menées, ont montré qu'une bombe aérienne a été

  6   modifiée dans les deux cas à l'instar des exemples que j'ai cités dans le

  7   rapport que vous montrez maintenant.

  8   Q.  D'après ce que vous savez, et compte tenu des inspections que vous avez

  9   menées sur les sites que vous décrivez dans votre rapport, l'ABiH

 10   disposait-elle de la capacité technique pour fabriquer des bombes aériennes

 11   pendant le conflit ou des bombes aérosols ?

 12   R.  Est-ce que vous voulez une réponse courte ou une description un peu

 13   plus longue ?

 14   Q.  Je préfère une réponse courte.

 15   R.  Non.

 16   Je ne sais pas si vous souhaitez une analyse plus détaillée.

 17   Q.  Donc ceci conclut la première partie de l'interrogatoire principal.

 18   Maintenant, je souhaite vous poser des questions sur le rapport que vous

 19   avez eu l'occasion de regarder un peu plus tôt.

 20   M. GAYNOR : [interprétation] Est-ce que nous pouvons afficher la pièce

 21   15842, s'il vous plaît ?

 22   Q.  Il y a un ou deux de ces documents qui sont des documents qui

 23   concernent la fourniture de munition, me semble-t-il. C'est un document qui

 24   est assez difficile à suivre.

 25   R.  Ecoutez, j'ai quelque chose à dire. Ici on peut lire 7 milligrammes. En

 26   réalité, il s'agit d'une masse de 7 grammes. La différence est très

 27   importante, donc 7 000 fragments de 7 grammes -- de 5 grammes -- d'une

 28   masse de 5 grammes ou davantage, d'une masse de 5 grammes ou davantage.


Page 12196

  1   Q.  Je vous remercie.

  2   M. GAYNOR : [interprétation] Est-ce que nous pouvons passer à la page

  3   suivante maintenant, s'il vous plaît ?

  4   Q.  Je peux vous remettre un exemplaire papier, si vous voulez.

  5   De quoi s'agit-il, s'il vous plaît ?

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaite savoir d'où vient ce document et

  7   qui a fait des annotations sur ce document.

  8   M. GAYNOR : [interprétation] Alors, s'il y a des annotations sur ce

  9   document, Maître Zecevic, vous pouvez simplement les ignorer. Il s'agit

 10   d'annotations que j'ai faites moi-même sur le document mais je vais

 11   demander au témoin d'expliquer de quoi il s'agit, si c'est ce qui se

 12   préoccupe M. Karadzic.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Poursuivons.

 14   M. GAYNOR : [interprétation]

 15   Q.  Veuillez regarder le document, s'il vous plaît, Monsieur le Témoin.

 16   Tout d'abord, dites-nous de quoi il s'agit.

 17   R.  Il s'agit d'une liste d'éléments envoyée de bombes aériennes pesant 250

 18   kilogrammes, le 5 avril 1995, indiquant qu'à partir du 1er janvier 1994 et

 19   jusqu'au 31 décembre 1994, le ministère de la Défense de la Republika

 20   Srpska, l'état-major ou le quartier général de Pale a envoyé 95 bombes.

 21   Q.  Y a-t-il autre chose que vous souhaitiez commenter à propos des bombes

 22   aériennes qui sont évoquées dans ce document ?

 23   R.  On peut lire "FAB 250," donc il s'agit de bombes aériennes FAB au

 24   nombre de 250. Le prix de la bombe y figure mais je ne sais pas quelle est

 25   la devise ici. Puis-je vous dire que le quartier général n'était jamais à

 26   Pale ?

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Procureur, Monsieur Gaynor, avez-vous un autre

 28   témoin pour attester de l'origine de ce document parce qu'il n'a jamais eu


Page 12197

  1   de quartier général à Pale ? Le quartier général est à une cinquantaine de

  2   kilomètres de Pale.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, c'est un sujet que

  4   vous pourriez examiner pendant votre contre-interrogatoire. Ceci n'est pas

  5   à l'intention du témoin mais à l'attention de M. Gaynor.

  6   Ecoutez, ce que je vous ai dit, Monsieur Karadzic, c'est que votre

  7   intervention n'est pas particulièrement utile à ce --

  8   M. GAYNOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président - Q.  Monsieur le

  9   Témoin, pouvez-vous confirmer, s'il vous plaît - on parle d'une liste

 10   d'éléments envoyés - pourriez-vous nous dire de qui cela émane et à qui

 11   cela est destiné ?

 12   R.  Je ne peux pas vraiment vous le dire, parce que je ne sais pas vraiment

 13   qui envoie ces munitions.

 14   Q.  Bien.

 15   M. GAYNOR : [interprétation] Compte tenu de l'identification des munitions,

 16   je vais demander le versement au dossier de ce document.

 17   M. ROBINSON : [interprétation] Je crois, Monsieur le Président, compte tenu

 18   de la question d'authenticité de ce document, nous soulevons une objection.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Compte tenu du fait que le témoin n'a

 20   pas pu, je vais consulter mes collègues.

 21   [La Chambre de première instance se concerte]

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Etant donné que nous ne sommes pas

 23   convaincus du fondement lié à l'authenticité, nous n'allons pas accepter le

 24   versement au dossier de ce document.

 25   Monsieur Gaynor.

 26   M. GAYNOR : [interprétation] Bien, Monsieur le Président. Je vais donc

 27   passer au document suivant qui est le 15709.

 28   Q.  Docteur Zecevic, vous pouvez mettre de côté ce document maintenant et


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  1   regardez celui qui va s'afficher à l'écran.

  2   Pourriez-vous nous dire à quoi correspond ce document ?

  3   R.  Il s'agit d'un rapport concernant les munitions livrées par Pretis

  4   suite à deux commandes de l'état-major de l'armée de la Republika Srpska,

  5   envoyé par l'état-major du service logistique de la Republika Srpska, le 5

  6   décembre 1993; et envoyé par l'état-major au ministère de la Défense de la

  7   Republika Srpska, déclarant que pendant la période allant du 1er janvier

  8   1993 au 30 novembre 1993, les ressources suivantes ont été livrées par

  9   l'entreprise Pretis suite à des commandes par l'état-major de la VRS. Puis

 10   nous avons des numéros de commande, le type de munitions, la quantité de

 11   munitions et les unités militaires auxquelles sont destinées ces munitions.

 12   Q.  Dans ce document, il y a un certain nombre de lieux cités. Nous voyons

 13   mortier 120-millimètres MB. Pourriez-vous nous dire de quoi il s'agit ?

 14   R.  82-milllimetres, mine MB, obus de mortier et obus de mortier de 120-

 15   millimètres. Voilà ce qu'on voit. Nous avons 100 et 120 pièces, ensuite

 16   nous avons des obus de mortier 82-millimètres, 600 pièces, puis des obus de

 17   120-millimètres, 300 pièces, puis 120-millimètres, 500 pièces. Ensuite on a

 18   500 amorces. Voilà ce que je vois ici.

 19   Q.  Cette référence au mortier de 120-millimètres, est-ce qu'il s'agit du

 20   type de projectile qui a eu l'impact dont vous nous avez parlé au marché de

 21   Markale ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Un certain nombre de projectiles --

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'ai presque oublié que nous devions

 25   faire une pause.

 26   Nous allons donc nous interrompre pendant cinq minutes

 27   --- La pause est prise à 17 heures 15.

 28   --- La pause est terminée à 17 heures 20. 


Page 12199

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Gaynor.

  2   M. GAYNOR : [interprétation] Merci.

  3   Q.  La Chambre de première instance a reçu des informations concernant le

  4   marquage sur les projectiles 120 millimètres contenant les lettres KB en

  5   lettres cyrilliques, c'est-à-dire KV en alphabet latin. Est-ce que vous

  6   savez ce que cela signifie ?

  7   R.  Il s'agit du nom de code pour l'usine de munitions, qui s'appelait

  8   Krusik Valjevo.

  9   Q.  Est-ce que cela suggère que ces pièces ont été fabriquées dans cette

 10   usine de Krusik Valjevo ?

 11   R.  Aucune pièce de munition de l'ancienne Yougoslavie ne pouvait quitter

 12   l'usine sans qu'un marquage soit apposé sur ces pièces par l'usine. Il

 13   s'agissait d'un nom de code de l'usine, et cela correspond d'ailleurs à la

 14   réglementation internationale.

 15   Q.  Alors dans le document que vous venez d'examiner, il y a -- on fait

 16   mention de quantités importantes de mortiers 120 millimètres provenant de

 17   Pretis; est-ce exact ?

 18   R.  Ça je ne peux pas vous le dire. Le document dit simplement que ces

 19   munitions ont été livrées à partir de Pretis à Sarajevo-Romanija, au Corps

 20   de Sarajevo-Romanija, à la Brigade de Vogosca, et cetera. Donc,

 21   vraisemblablement, ces munitions ont été livrées à partir de cette usine

 22   parce qu'il n'y en a pas d'autre dans ce voisinage.

 23   Q.  Vous êtes en mesure de dire cela sur la base de votre expérience avant

 24   le conflit. Quelle est la relation entre Pretis et Vogosca et Krusik

 25   Valjevo, en Serbie ?

 26   R.  Avant la guerre, Krusik Valjevo était une usine qui produisait des

 27   missiles guidés et des obus de mortier 60, 82 et 120 millimètres. Elle

 28   fabriquait également des charges pour des obus de mortier. Pretis, s'il


Page 12200

  1   devait produire des obus de 120 millimètres, achetait des charges auprès de

  2   Krusik pour ses composantes. Pretis produisait des systèmes non guidés et

  3   des projectiles antichars et des bombes aériennes.

  4   M. GAYNOR : [interprétation] J'aimerais verser cette pièce au dossier.

  5   M. ROBINSON : [interprétation] Nous nous y opposons, Monsieur le Président.

  6   Nous ne pensons pas que ce témoin puisse verser cette pièce ou document.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous ne vous opposez pas à

  8   l'authenticité du document ?

  9   M. ROBINSON : [interprétation] Nous ne savons pas si ce document est

 10   authentique, mais je note qu'il a été scellé et signé en dernière page.

 11   Mais M. Karadzic n'a jamais vu ce document avant, donc il n'est pas en

 12   position de stipuler son authenticité. En tout état de cause, c'est le

 13   genre de commentaires que ce témoin a fait concernant le document lorsque

 14   l'on a accepté ce document.

 15   M. GAYNOR : [interprétation] Oui, je peux lui poser la question. Le témoin

 16   a travaillé à Pretis pendant 17 ans. Il connaît parfaitement la

 17   documentation issue par Pretis pour sa production concernant les munitions.

 18   Il a confirmé que ce document concerne la livraison de projectiles de 82

 19   millimètres et 120 millimètres à la Brigade de Vogosca et la Brigade de

 20   Rajlovac et les RSK. Il a confirmé essentiellement ce qu'est ce document.

 21   Nous pouvons lui poser la question pour authentifier le document. Je suis

 22   un peu surpris que la Défense s'oppose à ce document alors qu'elle ne s'est

 23   pas opposée à d'autres documents.

 24   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je pense que le

 25   problème est que ce témoin, le 5 décembre 1993, lorsque ce document a été

 26   émis, n'était plus lié à la VRS ou à Pretis, et donc nous ne pensons pas

 27   que le fait qu'il connaisse ce type de documents le rende admissible ou

 28   recevable.


Page 12201

  1   [La Chambre de première instance se concerte]

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre reconnaît l'authenticité du

  3   document. Etant donné que le témoin a pu donner un contexte à ce document,

  4   nous allons l'admettre.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P2319.

  6   M. GAYNOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  7   J'aimerais que nous visualisions la pièce 07720, s'il vous plaît.

  8   Q.  Tout d'abord, Monsieur le Témoin, pourriez-vous nous parler de l'en-

  9   tête et de l'apparence générale de ce document ? A votre avis, d'où

 10   provient ce document ?

 11   R.  Il s'agit d'un document standard, ou mieux dit, un document officiel

 12   émis par l'usine de Pretis, qui faisait partie du groupe UNIS. Donc vous

 13   avez le logo de UNIS et celui de Pretis, et là, on voit Pretis Sarajevo.

 14   Pretis est une abréviation de l'entreprise Tito Sarajevo. Nous avons

 15   l'adresse : 71-320 Vogosca. C'était l'adresse avant la guerre. Vous avez le

 16   nom de la rue, Igman Mars, le numéro de la rue, 24, le téléphone, 071, et

 17   le numéro de code de Sarajevo. Donc c'est une lettre en-tête tout à fait

 18   normale.

 19   Q.  Pourriez-vous maintenant nous commenter la signature et le tampon ?

 20   R.  Je ne peux rien vous dire concernant la signature. Mais je peux vous

 21   dire que Milorad Motika, un ingénieur, était un de mes collègues avant la

 22   guerre. Je le connaissais et nous nous entendions plutôt bien. Ce tampon

 23   n'est pas un tampon qui était utilisé avant la guerre. Il était plus

 24   récent, parce qu'il disait "Pretis holding Vogosca." Donc, là, il n'y a

 25   plus de logo UNIS. On voit plutôt apparaître "UNIS Pretis holding

 26   enterprise, Vogosca." Alors je ne peux pas vous garantir cela à 100 % parce

 27   que la transformation a eu lieu tout de suite avant la guerre, ce qui a

 28   mené à un changement de tampon. Mais je connais le directeur de Pretis


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  1   holding.

  2   Q.  Savez-vous quand Milorad Motika a été nommé directeur de Pretis ?

  3   R.  Après le début de la guerre.

  4   M. GAYNOR : [interprétation] Pouvons-nous enregistrer au procès-verbal que

  5   ce témoin a dit que Motika était un homme consciencieux ? Est-ce qu'on peut

  6   confirmer --

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  9   M. GAYNOR : [interprétation]

 10   Q.  Ce document dit la chose suivante. Il parle de bombes aérosol, FAB 250,

 11   et 660 donc sans stabilisateur avec une amorce de façon à compléter les

 12   moteurs de fusée de 122 millimètres.

 13   Est-ce que vous voyez cette phrase ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Etes-vous en mesure d'expliquer ce que signifie le mot "complété",

 16   "completed, en anglais ?

 17   R.  Dans ce contexte, si je comprends bien et selon mon expérience, cela

 18   signifie qu'il était nécessaire d'équiper des bombes 122 millimètres avec

 19   des amorces et avec des moteurs de 122 millimètres. Alors Pretis fabriquait

 20   des pièces supplémentaires pour compléter ce système qui permet de

 21   connecter les moteurs et les bombes aérosol. A la fin, on parle de toutes

 22   autres pièces pour les roquettes.

 23   M. GAYNOR : [interprétation] J'aimerais verser cette pièce au dossier.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce portant la cote P2320.

 26   M. GAYNOR : [interprétation] J'aimerais que nous visualisions le 65 ter

 27   numéro 15754, s'il vous plaît.

 28   Q.  Etes-vous en mesure de lire ceci ? J'ai ici une copie papier, si vous


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  1   souhaitez, je peux vous la fournir.

  2   R.  Si ce n'est pas un problème, oui. Merci.

  3   Q.  Etes-vous en mesure de nous dire ce qu'est ce document ?

  4   R.  L'état-major de la VRS, secteur logistique, 14, je crois que c'est juin

  5   1995, livre au commandement de la 27e Brigade de Logistique et au

  6   commandant de la 35e Brigade de Logistique et à Pretis. Pour information

  7   uniquement référence document officiel strictement confidentiel de 1995. Il

  8   est demandé que la 27e Brigade de Logistique -- pardon, prenne auprès de la

  9   35e Brigade logistique et auprès de Pretis 30 pièces.

 10   L'INTERPRÈTE : On demande au témoin de bien vouloir lire plus lentement les

 11   chiffres.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Les bombes seront prises -- seront chargées

 13   avec les moteurs de fusée 128 millimètres correspondants et 110 pièces

 14   seront transportées et remises à "holding" Pretis pour assemblable.

 15   Voici ce qui est écrit dans ce document.

 16   Numéro 2, assembler les bombes de la façon suivante. Dix FAB 100, qui sont

 17   des bombes aériennes de 100 kilogrammes avec trois mortiers chacune, 20 FAB

 18   100 avec un moteur immédiatement, cela a été corrigé de façon manuscrite,

 19   et on dit 30 pièces avec un moteur, et en fin, 20 pièces FAB 250 avec trois

 20   moteurs chaque. Après assemblage, les bombes aéroportées seront

 21   transportées et stockées par la 27e Base logistique. Démarrer la mise en

 22   œuvre de cette tâche immédiatement et lorsqu'elle sera terminée le

 23   commandement de la 27e Unité logistique sera informée par autorisation du

 24   chef lieutenant-colonel Miroslav Cijevetic.

 25   Q.  Alors lorsque l'on parle dans ce document de FAB 100 et de trois

 26   moteurs, très brièvement, dites-nous de quoi il s'agit.

 27   R.  Il s'agit probablement de l'assemblage de ce système de roquette avec

 28   des explosifs aérosols. En tout cas, c'est ce que je suppose.


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  1   Q.  Alors on voit que l'on parle de FAB 100 avec trois moteurs et FAB 100

  2   avec un moteur.

  3   R.  Je crois que c'est une erreur.

  4   Q.  En général, quel était le système le plus utilisé pour les FAB 100 ?

  5   R.  Les FAB 100 utilisaient un seul moteur de roquette.

  6   Q.  Et les FAB 250 ?

  7   R.  Normalement 3 ou 4. Plus vraisemblablement 3 parce que la plupart des

  8   restes trouvés indiquaient trois moteurs. Mais il existe des rapports

  9   faisant état de quatre moteurs.

 10   Q.  A la fin du premier paragraphe, on mentionne le fait que ces bombes

 11   doivent être transportées et remises à HD Pretis pour assemblable. Très

 12   brièvement, expliquez-nous ce que signifie le mot "assemblage" selon votre

 13   expérience ?

 14   R.  L'objet de ces bombes aériennes était d'être lancées à partir

 15   d'aéronefs. Dans ce cas de figure, le lien entre les bombes aéroportées et

 16   les moteurs de roquette signifiait qu'un nouveau système de roquette allait

 17   être construit à partir de charges explosives FAB 250 et de trois moteurs

 18   de roquette 128 millimètres. En d'autres termes, le système serait

 19   similaire à un bombardement à partir d'un aéronef

 20   L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète, projectiles qui ont ciblé

 21   Sarajevo en 1996.

 22   M. GAYNOR : [interprétation] Je souhaite verser cette pièce au dossier,

 23   Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour les mêmes raisons, nous recevons

 25   cette pièce.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce 2320 [comme interprété].

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il est temps de faire une pause. Nous

 28   allons faire une pause d'une demi-heure.


Page 12205

  1   --- L'audience est suspendue à 17 heures 40.

  2   --- L'audience est reprise à 18 heures 09.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Gaynor.

  4   M. GAYNOR : [interprétation] Merci.

  5   Je voulais consigner,au compte rendu d'audience, que le document qui n'a

  6   pas été versé au dossier, qui a la référence 65 ter 15842, a été saisi dans

  7   les locaux de l'usine Pretis à Vogosca, suite à la réintégration de

  8   Sarajevo.

  9   Je vais donc continuer mon interrogatoire principal.

 10   Est-ce que je pourrais demander l'affichage du document de la liste 65 ter

 11   13542 ?

 12   Q.  Je vous demande, Monsieur le Témoin, de parcourir rapidement ce

 13   document; est-ce que vous pourriez nous dire de quoi il s'agit ?

 14   R.  Il s'agit d'un document qui concerne la création d'une équipe de haut

 15   niveau suite à la décision du président de la Republika Srpska, le Dr

 16   Radovan Karadzic, et cette équipe serait composée de diverses personnes

 17   dont la mission serait de doter en matériel les forces armées et de

 18   procéder au transfert de tous les moyens issus de la République de

 19   Yougoslavie vers des sites qui auraient été convenus d'avance, et il est

 20   demandé dans ce rapport qu'un rapport soit ensuite envoyé au président de

 21   la République.

 22   Q.  Est-ce que vous reconnaissez certains des noms de ce document ? Est-ce

 23   que vous les connaissez personnellement ?

 24   R.  Je connais Branko Prodanovic, et puis j'ai également eu la possibilité

 25   de voir à la télé Momcilo Mandic. Il est également possible que je

 26   connaisse Spasoje Orasanin, le colonel Orasanin.

 27   Q.  Est-ce que ces personnes travaillaient à Pretis avant la guerre ?

 28   R.  Branko Prodanovic a travaillé à l'usine Pretis pendant de nombreuses


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  1   années. Il était économiste de formation, et juste avant la guerre, il

  2   était directeur général de Pretis, et d'après ce que je sais, quelques mois

  3   après le début de la guerre, il a quitté ce poste et il est devenu

  4   représentant de la société Pretis à Belgrade.

  5   M. GAYNOR : [interprétation] J'aimerais verser cette pièce au dossier.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Robinson.

  7   M. ROBINSON : [interprétation] Nous avons une objection. Tout d'abord, en

  8   ce qui concerne la pertinence, puisque ce n'est pas lié aux bombes d'avion

  9   qui auraient été fabriquées à Pretis, d'après ce que l'on peut voir.

 10   Deuxièmement, je ne pense pas que le témoin ait suffisamment donné de

 11   détails concernant ce document pour identifier qui que ce soit, et d'après

 12   les lignes directrices de cette Chambre de première instance, le fait de

 13   simplement connaître une personne mentionnée dans un document ne suffit pas

 14   pour que ce document soit versé au dossier.

 15   M. GAYNOR : [interprétation] Si vous me permettez, Monsieur le Président,

 16   je voudrais répondre. Je remarque qu'aucune objection n'a été formulée

 17   concernant l'authenticité de ce document. Dans sa déposition, le témoin a

 18   mentionné qu'il y avait eu une coopération entre différents sites en RFY,

 19   et notamment dans les territoires tenus par les Bosno-serbes durant le

 20   conflit en Bosnie. Il a parlé de l'approvisionnement en [inaudible] détaché

 21   venant de l'usine de Krusik Valjevo en direction de Pretis et de

 22   l'assemblage de bombes d'avion modifiées à Pretis. Il a également parlé du

 23   fait que des stabilisateurs étaient fabriqués à Krusik Valjevo et que

 24   Pretis avait produit des munitions ou fabriqué des munitions. Donc il a

 25   mentionné la coopération entre les autorités en RFY et en Republika Srpska

 26   durant la période en question. Il a identifié les personnes qui

 27   travaillaient à Pretis, sur ce document.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si la Défense ne remet pas en question


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  1   l'authenticité, nous considérons que ce document est pertinent et a une

  2   valeur probante, et sur cette base et pour ces motifs nous allons verser

  3   cette pièce au dossier.

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P2322.

  5   M. GAYNOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'ai pas

  6   d'autres questions. Mais je voudrais simplement soulever une question dans

  7   les arguments oraux qui ont été formulés par Me Robinson un peu plus tôt

  8   dans cette séance. Nous pouvons le faire en l'absence du témoin.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pourrez faire part de ces

 10   commentaires après la prochaine pause.

 11   M. GAYNOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'ai donc pas

 12   d'autres questions à poser.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

 14   Comme je vous l'avais expliqué, Monsieur le Docteur Zecevic, vous

 15   allez maintenant répondre aux questions qui vont vous être posées par le Dr

 16   Karadzic dans le cadre de son contre-interrogatoire.

 17   Est-ce que vous êtes prêt à commencer, Monsieur Karadzic ?

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, tout à fait. Bonjour à tous.

 19   Contre-interrogatoire par M. Karadzic :

 20   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

 21   R.  Bonjour, Monsieur Karadzic.

 22   Q.  Je voudrais tout d'abord m'attarder sur vos opinions et sur ce que vous

 23   avez découvert au sujet de ces bombes d'avion modifiées. Est-ce que vous

 24   seriez d'accord pour dire qu'il y a une différence entre ces bombes

 25   aérosols et les bombes qui ont des charges explosives traditionnelles tel

 26   que, par exemple, du TNT, et les bombes aérosols créent une pression bien

 27   inférieure par rapport aux bombes qui ont des charges explosives

 28   traditionnelles mais la pression dure plus longtemps, n'est-ce pas ?


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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Merci.

  3   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent que les deux intervenants ménagent

  4   des pauses entre leurs questions et leurs réponses.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous n'êtes pas sans savoir que M.

  6   Karadzic et vous-même, Monsieur le Témoin, parlez la même langue. Par

  7   conséquent, il est important que vous ménagiez des pauses entre vos

  8   réponses et les questions qui vous sont posées, de façon à ce que les

  9   interprètes puissent vous suivre. Merci.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Vous vous êtes fait une opinion à ce sujet, n'est-ce pas ? Vous avez

 12   dit que c'était exact, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Merci. Pour ce qui est d'une explosion de type traditionnel, il n'est

 15   pas nécessaire d'utiliser l'oxygène environnant, n'est-ce pas ?

 16   R.  Qu'appelez-vous une explosion de type traditionnel ?

 17   Q.  Le TNT, par exemple, est un explosif traditionnel.

 18   R.  C'est exact, on n'a pas besoin d'oxygène environnant.

 19   Q.  Merci. Quant aux explosifs qui sont utilisés dans des bombes aérosols

 20   ou des bombes à détonation gazeuse, il faut en fait avoir un mélange avec

 21   de l'air, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui, cellule de Crise.

 23   Q.  Est-ce que ceci a des conséquences sur la fabrication de chacun de ces

 24   types de bombes ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Est-ce que vous êtes en mesure de nous dire rapidement quelle serait la

 27   différence dans le processus de fabrication de ces différents types de

 28   bombes ?


Page 12209

  1   R.  Pour une bombe à explosion traditionnelle, vous avez ce qu'on pourrait

  2   appeler le corps principal, vous avez la partie avant, la partie arrière,

  3   et puis vous avez le stabilisateur, et vous avez également un dispositif de

  4   ralentissement, et vous avez du TNT ou un mélange de TNT et d'aluminium qui

  5   est placé à l'intérieur du corps de la bombe.

  6   Avec les bombes à détonation gazeuse, vous avez une charge explosive

  7   primaire et vous avez un mélange explosif solide, et vous avez une deuxième

  8   charge explosive et vous avez donc un liquide qui est inséré dans le corps

  9   de la bombe. Au moment de l'impact, l'explosif primaire, la charge

 10   explosive primaire détruit le corps de la bombe d'avion. La solution

 11   gazeuse ou liquide est dégagée, elle s'évapore. Il y a un mélange qui

 12   s'opère avec l'air, et les fusées secondaires, après un certain laps de

 13   temps, qui sont parties dans différents endroits au moment de l'explosion,

 14   activent le mélange explosif.

 15   Q.  Merci d'être très concis. Est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour

 16   dire que les bombes à charge explosive traditionnelle ont un effet sur une

 17   zone plus réduite, et c'est la raison pour laquelle on voit l'apparition de

 18   cratères ?

 19   R.  Vous voulez dire l'effet de la déflagration, ou est-ce que vous voulez

 20   dire l'effet de la bombe d'avion de l'effet général ?

 21   Q.  Je parle de l'effet général d'une bombe aéroportée.

 22   R.  Une bombe aéroportée avec une charge explosive composée de TNT crée un

 23   effet destructif dans la zone de la déflagration. Elle détruit des choses

 24   dans cette zone, si vous voulez. Les fragmentations créent par la

 25   détonation peuvent causer des dégâts sur des objets dans un périmètre de

 26   plusieurs centaines de mètres autour de zone immédiate de l'explosion et

 27   peuvent également blesser des personnes.

 28   Q.  Mais un cratère est créé également, n'est-ce pas ?


Page 12210

  1   R.  Cela dépend. Si vous avez une fusée à explosion au contact avec la

  2   cible ou si vous avez un système d'amorçage avec un déclenchement à

  3   retardement. Dans ce cas-là, vous avez un cratère qui est plus important.

  4   Si vous avez un système d'amorçage qui se déclenche au contact avec la

  5   cible, l'effet est principalement un effet de fragmentation, ce qui

  6   augmente la zone qui sera endommagée par la charge explosive.

  7   Q.  Merci. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que les explosifs à

  8   détonation gazeuse ont un champ ou un rayon d'action beaucoup plus

  9   important, et ne créent pas de cratère.

 10   R.  Oui, si une fusée de contact est utilisée.

 11   Q.  Très bien. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire qu'avec des charges

 12   explosives traditionnelles, un être humain qui serait derrière quelque

 13   chose qui ferait écran pourrait survivre s'il est donc, s'il y a un écran

 14   ou s'il y a quelque chose qui le protège et qui permet de s'interposer

 15   entre la personne et l'explosif.

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que cet écran ou ce système de

 18   protection ne fournirait pas de protection dans le cas d'une bombe

 19   aéroportée ?

 20   R.  Cela dépend de la distance à laquelle se trouve la personne par rapport

 21   à la bombe.

 22   Q.  Mais s'il se trouve à la même distance, disons à 10 ou 15 mètres, dans

 23   les deux cas susmentionnés, est-ce que cette barrière de protection

 24   pourrait jouer son rôle en cas d'explosion, de charge explosive

 25   traditionnelle alors que ce ne sera pas le cas pour une bombe à détonation

 26   gazeuse ?

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Votre réponse, à cette question.

 28   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent que le témoin répète sa question.


Page 12211

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez répéter la

  2   question, s'il vous plaît, Docteur Zecevic ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vous prie de m'excuser.

  4   Si le mélange fonctionne très bien, c'est-à-dire le mélange d'aérosol et de

  5   l'air, c'est-à-dire à la même distance, c'est-à-dire à 10 à 15 mètres du

  6   centre de l'explosion, la personne ne restera pas indemne.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Cela signifie que la personne ne pourra pas survivre.

  9   R.  Cette question est complexe. Tout dépend de la charge explosive.

 10   Q.  Mais j'essaie de simplifier la manière dont vous vous êtes exprimé en

 11   utilisant une double négation. Vous avez dit, "ne pourrait pas en sortir

 12   indemne," n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui, cela signifie, je voulais dire que la personne serait blessée.

 14   Q.  Dans votre déclaration des 26 et 27 février, pour le moindre n'a pas

 15   été consigné au compte rendu d'audience; il faudrait ajouter pour le

 16   moindre.

 17   Donc vous avez dit la moindre des conséquences serait qu'il soit blessé,

 18   n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Je reprends donc. Dans votre déclaration des 26 et 27 février, vous

 21   avez dit en ce qui concerne les bombes aéroportées, j'ai tiré ces

 22   conclusions de mon propre chef.

 23   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent à l'accusé de mentionner la

 24   référence quand il donne l'auteur d'un document.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, les interprètes ne

 26   vous suivent pas. Ils vous demandent de donner la référence quand vous

 27   donnez lecteur d'un document, et de ralentir également la cadence de cette

 28   lecture.


Page 12212

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je me dépêchais parce que nous n'avons pas

  2   beaucoup de temps, et nous avons vraiment besoin de beaucoup de temps avec

  3   le témoin. Donc il s'agit du document de la liste 65 ter 09997. Il s'agit

  4   de la page 4 en version serbe, et page 4 en version anglaise également.

  5   C'est le paragraphe 6 pour la version serbe, et également le paragraphe 6

  6   en version anglaise. Donc c'est exactement au même endroit.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q. Est-ce que vous voyez ce paragraphe qui parle des bombes aéroportées ?

  9   En anglais, c'est -- je vais répéter cela :

 10   "En ce qui concerne les bombes aéroportées, je tirais mes propres

 11   conclusions. Il est évident que des explosions ont été causées par des

 12   explosifs combustibles air. Le même type d'arme a été utilisé par les

 13   Etats-Unis au Vietnam et par les Russes en Afghanistan et par les

 14   Israéliens au Moyen-Orient. Ces projectiles ont un effet de déflagration où

 15   des bombes aéroportées modifiées causent également un effet de

 16   fragmentation; est-ce que c'est ainsi que vous avez compris les choses ?

 17   R.  Veuillez me rappeler à qui j'ai donné cette déclaration, s'il vous

 18   plaît.

 19   Q.  Je crois que vous avez remis cette déclaration au bureau du Procureur.

 20   Est-ce que nous pouvons regarder la page une, s'il vous plaît, de façon à

 21   ce que M. Zecevic puisse reconnaître le document, l'identifier.

 22   R.  Oui, oui, je m'en souviens.

 23   Q.  Bien. Est-ce que nous pourrions maintenant revenir à la page 4, s'il

 24   vous plaît.

 25   Monsieur Zecevic, ceci signifie-t-il que des explosifs liquides se

 26   comportent de la même façon que du combustible, c'est-à-dire qu'il peut y

 27   avoir une combustion à l'aide de flammes, à l'aide de combustible ou alors

 28   il peut y avoir combustion lorsqu'il y a explosion ?


Page 12213

  1   R.  Non, il s'agit d'une erreur ici.

  2   Q.  Des bombes à combustible sont des explosifs combustibles air, cela n'a

  3   rien à voir avec le kérosène d'un avion. Il s'agit d'une bombe à

  4   combustible.

  5   Q.  Donc est-ce que nous pourrions regarder l'original, regardez la

  6   traduction.

  7   R.  Oui. Monsieur le Président, est-ce que je peux faire un commentaire.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Pendant toutes les dépositions pour le bureau

 10   du Procureur, toutes les fois que j'ai fait une déclaration, cette

 11   déclaration a d'abord été rédigée en anglais. Plus tard, cette déclaration

 12   a été traduite dans une de nos langues. Tout dépendait de l'attitude de

 13   l'interprète, de l'emploi des termes, de la compréhension des termes

 14   employés. Mon objection, lorsque je soulevais une objection et disait que

 15   le terme ne correspondait pas, on m'a rétorqué que mes objections n'étaient

 16   pas si importantes que cela. Donc je souhaite indiquer qu'il ne s'agit pas

 17   de kérosène d'un avion, dans ce cas-là. Il s'agit d'un problème purement

 18   linguistique ici. Je m'en tiens toujours à ce que j'ai dit. Nous parlons

 19   d'explosif aérosol, d'une arme à combustible, d'une arme explosive,

 20   combustible air.

 21   Q.  D'aucuns pourraient en parler et dire que c'est du kérosène. Il ne

 22   s'agit pas de kérosène, il s'agit de bombe aérienne à combustible, et on

 23   parle ici d'explosion due à un combustible, "avionsko gorivo" dans

 24   l'original, donc la version serbe n'est pas exact ?

 25   R.  Monsieur Karadzic, il y a une erreur au niveau des termes employés.

 26   C'est une question qui relève du Tribunal de La Haye et du bureau du

 27   Procureur. C'est le type -- le genre d'interprète et d'enquêteur qui

 28   recrute ces liasses-là.


Page 12214

  1   Q.  Pour les besoins du compte rendu d'audience,

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons faire la dernière pause pour

  3   aujourd'hui.

  4   --- La pause est prise à 18 heures 31.

  5   --- La pause est terminée à 18 heures 36.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que vous vouliez faire quelques

  7   commentaires mais nous allons vous entendre un peu plus tard.

  8   Monsieur Karadzic, veuillez poursuivre.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Monsieur le Témoin, puis-je vous demander de vous reporter dans le même

 11   document au paragraphe 7, qui est le paragraphe suivant, ligne 3. Mais

 12   avant cela, je souhaite que le compte rendu indique que le témoin a dit que

 13   les deux versions, la version anglaise et la version serbe étaient

 14   erronées.

 15   R.  Non, pas erronées, mais pas suffisamment précis en terme linguistique.

 16   C'est une différence notable.

 17   Q.  Merci. Est-il exact qu'à Zuc, sur le mont Zuc, vous avez, pour la

 18   première fois, pris connaissance des bombes aériennes. Un ami vous a emmené

 19   à cet endroit et vous avez pu voir les restes d'une bombe aérienne.

 20   R.  Non, ceci n'est pas exact. Je me suis rendu à Juce et les restes ont

 21   été apportés chez moi où se trouvait le personnel de cette unité dont le

 22   quartier général -- à l'endroit où se trouvait le quartier général de cette

 23   unité, et on m'a demandé de venir jeter un coup d'œil.

 24   Q.  Vous voulez parler de quelle unité ?

 25   R.  A vrai dire, je ne sais pas.

 26   Q.  Cela se -- cette unité était près de votre maison ?

 27   R.  A une trentaine de mètres.

 28   Q.  Merci.


Page 12215

  1   Veuillez lire ce document. Regardez ce document et lire ce qui est écrit.

  2   Le compte rendu n'a pas consigné le fait que vous avez dit que le personnel

  3   où était près de votre maison. Non pas quoi, mais que le personnel était --

  4   l'unité était près de votre maison ou le personnel.

  5   Alors, je vais vous lire ce que dit ce document.

  6   "Il m'a montré les restes d'engins ou de moteurs de fusée qui les avaient

  7   propulsés, ils étaient -- il y avait un tuyau long de 3 mètres et demi, et

  8   de 5 millimètres de diamètre qui a été retrouvé à l'endroit même. En

  9   revanche, le givre n'a pas été retrouvé, mais après avoir analysé l'arrière

 10   du projectile j'ai remarqué qu'il ne s'agissait pas d'un dispositif

 11   improvisé mais de quelque chose d'éminent professionnel. Quelque chose que

 12   je pouvais en déduire d'après la finition. Le projectile disposait de 4

 13   moteurs de fusée russe de 120 millimètres, M21, de type Grad, et au milieu

 14   il y avait un conteneur où se trouvait un parachute.

 15   Est-ce bien ce que vous avez déclaré à cette occasion-là ?

 16   R.  Par les grandes lignes, oui. Mon rapport qui est très précis est entre

 17   les mains du bureau du Procureur, et vous pouvez y trouver le rapport et la

 18   terminologie précise qui a été utilisée. Je répète, encore une fois, que la

 19   méthode utilisée, à savoir comment on procède à l'interview de témoins, et

 20   les termes que j'ai utilisé et les termes qui ont été utilisés par les

 21   personnes qui m'ont traduit et comment la déclaration a été préparée, ceci

 22   ne correspondait par à 100 % à ce que j'ai dit, mais pour l'essentiel,

 23   c'est la même chose.

 24   Q.  Merci. Dans ce cas, regardons ce rapport, votre rapport, le numéro 65

 25   ter 08347. 08347. Regardons tout d'abord la première page.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous avoir la version anglaise

 27   également ?

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


Page 12216

  1   Q.  S'agit-il du rapport que vous venez d'évoquer ?

  2   R.  Non. Il s'agit du rapport qui date du mois de février 1994. Et cela

  3   fait partie intégrante de ce rapport. Ceci fait partie intégrante de ce

  4   rapport. C'est à la fin.

  5   Q.  Bien. Est-ce que nous pouvons regarder ce rapport ? Regardons la page 6

  6   en serbe. Je crois que c'est la même page en anglais. Alors s'il s'agit de

  7   la page 6 -- est-ce la page 6 ? On voit qu'il est écrit page 2. Donc c'est

  8   à la page 6 en serbe. Nous verrons quelle est la page correspondante en

  9   anglais. Une page en arrière peut-être dans le prétoire électronique. Le

 10   paragraphe 2, s'il vous plaît. Voyons le paragraphe 2, ligne 5, à la page 6

 11   du prétoire électronique. Maintenant, cela correspond page 2 du rapport et

 12   page 6 dans le prétoire électronique. Regardons ceci maintenant.

 13   Quelque part au milieu du paragraphe on peut lire, ligne 5 à partir du

 14   haut, au paragraphe 2 :

 15   "J'ai examiné les fragments du projectile qui étaient composés de quatre

 16   moteurs de fusée de 122 millimètres de type Grad, et un cinquième conteneur

 17   pour un système de parachute. Les moteurs de la fusée étaient raccordés

 18   ensemble à l'avant du système pour que la pression de combustion soit égale

 19   à l'intérieur des chambres et avaient été fixés sur une plaque en

 20   aluminium. Ceci permettait de recentrer ou de centrer les moteurs de fusée

 21   et faciliter ce raccordement, ce lien avec la partie où il y avait l'ogive

 22   et le projectile, la fusée en tant que tel."

 23   R.  Pardonnez-moi, je ne vois pas à l'écran ce que vous lisez.

 24   Q.  Bien. Il nous faut la page suivante en serbe, paragraphe 2, ligne 5 :

 25   "J'ai examiné --"

 26   R.  Oui.

 27   Q.  En anglais -- nous l'avons en anglais; est-ce que vous voyez maintenant ?

 28   R.  Oui. Je l'ai trouvé maintenant.


Page 12217

  1   Q.  "Et du côté des moteurs de fusée il y avait une partie où il y avait

  2   les stabilisateurs du projectile, qui comprend l'endroit où l'engin est

  3   assemblé, où le moteur est assemblé. La couleur des moteurs de fusée et les

  4   inscriptions sur l'injecteur correspond tout à fait au type utilisé par

  5   l'armée russe."

  6   C'est ce qui est écrit ici ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Est-ce que vous -- pourriez-vous nous expliquer pourquoi vous n'avez

  9   pas décrit ce tuyau de 500 millimètres de diamètre et de 300 mètres de long

 10   ?

 11   R.  Il s'agit d'un tuyau de 500 millimètres. Ceci a été mal interprété.

 12   Ceci devrait correspondre à une ogive de 500 millimètres, et le système

 13   d'appui qui relie l'ogive au liquide propulseur du moteur qui a un diamètre

 14   de 500 millimètres. C'est très simple.

 15   Q.  Mais ils n'ont pas trouvé l'ogive ?

 16   R.  Oui. Cela est logique, parce que l'ogive a explosé. C'est la raison

 17   pour laquelle ils m'ont apporté des fragments pour que je les analyse.

 18   Q.  Cependant, la pression permettant l'équilibrage du système est évoqué

 19   et vous n'en parlez pas dans votre déclaration au préalable.

 20   R.  Monsieur Karadzic, il s'agit d'un rapport qui est extrêmement précis et

 21   extrêmement technique que j'ai fourni, alors que vous parlez ici de cette

 22   déclaration à propos de laquelle un enquêteur m'a posé des questions que

 23   j'ai donné en février 1996. En d'autres termes, le rapport très technique

 24   que j'ai préparé et que j'ai signé en tant qu'expert est digne de mérite et

 25   reflète les observations techniques que j'ai faites. Pour l'essentiel, à

 26   l'exception de cette explication que j'ai fournie au niveau des termes

 27   utilisés, ceci correspond parfaitement à ce qui est contenu dans la

 28   déclaration que j'ai donnée au bureau du Procureur. Il n'y a pas de


Page 12218

  1   déclaration contradictoire. Mes déclarations et certaines parties de mes

  2   déclarations ont sans doute été mal interprétées, mais cela ne change rien

  3   au style ni à la substance même de mon rapport.

  4   Q.  Merci. Est-ce que cela signifie que nous devrions nous en tenir à votre

  5   rapport plutôt qu'à votre déclaration ?

  6   R.  Je ne peux pas vous répondre sur ce point. Je maintiens simplement que

  7   l'un n'exclu pas l'autre. Il y a des erreurs linguistiques dans les deux.

  8   Q.  Merci. Dans vos rapports, vous prétendez que Sarajevo a été prise pour

  9   cible par des bombes aériennes. Ces bombes ressemblaient-elles à celles

 10   qu'on vous a apportées de Zuc ?

 11   R.  Non.

 12   Q.  Quel type de bombes aériennes a été utilisé pour prendre pour cible

 13   Sarajevo ?

 14   R.  C'est une version simplifiée d'un système de bombes aériennes si on

 15   compare avec ce qui a été trouvé à Zuc.

 16   Q.  Merci. Nous allons essayer d'être plus précis. Vous prétendez que

 17   Sarajevo a été pris pour cible par deux types de bombes, le FAB 100 et le

 18   FAB 250; c'est exact ?

 19   R.  Non seulement je le prétends, j'ai joint des photographies d'un engin

 20   non explosé d'une bombe de 100 millimètres que j'ai remis aux enquêteurs.

 21   Q.  Laquelle de ces bombes est une bombe aérosol, une bombe aérienne ?

 22   R.  Le FAB 250.

 23   Q.  Donc ce sigle FAB correspond à quoi ?

 24   R.  En Russe, cela veut dire une bombe à vocation générale. En Russe, une

 25   bombe qui produit une déflagration ?

 26   Q.  Vous pensez toujours qu'il s'agit là d'une bombe aérienne ?

 27   R.  Monsieur Karadzic, ce n'est pas ce que je pense; je le sais.

 28   Q.  Fort bien. A votre avis, qu'est une fusée de contact ? Est-ce une fusée


Page 12219

  1   de contact ?

  2   R.  Oui, une fusée de contact, c'est le moment où vous avez un dispositif

  3   non explosé sur une pile et que vous activez tout ça. Vous créez un

  4   d'amorce -- ou une détonation et une fusée de contact dont le but essentiel

  5   est de provoquer là des dégâts et de la destruction, ce qui ne constitue

  6   pas son rôle premier.

  7   Q.  Dans votre rapport - et nous allons l'afficher - c'est le 0037. C'est

  8   le 1D3202 -- 3282. 1D3282.

  9   Pendant que nous attendons. Pourriez-vous me dire, d'après vous, d'après ce

 10   que vous savez, où étaient fabriquées les bombes aérosols ?

 11   R.  Vous parlez de bombes aérosols ?

 12   Q.  Oui.

 13   R.  Le développement des bombes aérosols a démarré à Pretis avant la

 14   guerre. A un moment en 1987, sa première phase de développement s'est

 15   terminée. Après 1998, le colonel Vladan Tomic est allé à Belgrade, il

 16   devait être chef de projet, et il a emporté avec lui l'ensemble des

 17   documents liés au développement de ces bombes aérosols. D'après ce que je

 18   sais, parce que j'ai personnellement vu ces bombes aérosols, il y a deux ou

 19   trois mois, puisque l'agence du Krusik m'a désigné pour être la personne --

 20   l'expert chargé de déterminer comment détruire 24 bombes aérosols non

 21   explosées, stockées en Bosnie-Herzégovine, et 34 roquettes bombes assistées

 22   par roquette qui ont été produites par Krusik en 1994. Donc comme je l'ai

 23   dit, j'ai personnellement vu ces bombes ainsi que des bombes assistées par

 24   roquette avec des moteurs fusés qui sont pour l'instant stockés par les

 25   forces armées de Bosnie-Herzégovine.

 26   Q.  Pouvons-nous maintenant nous pencher sur la page 21 de ce document.

 27   Vous dites ici qu'elles étaient produites en Serbie; est-ce correct ?

 28   R.  Monsieur Karadzic, je crois que les termes que vous utilisez ne sont


Page 12220

  1   pas précis. Je vous ai donné mon interprétation concernant les bombes

  2   aérosols. Maintenant, si vous me posez une question sur les bombes aérosols

  3   à propulsion à roquette, là, je peux vous donner une autre réponse.

  4   Q.  Allez-y.

  5   R.  Les bombes aérosols lancées par roquette étaient assemblées totalement

  6   et mécaniquement à Pretis. C'est là que le châssis de la bombe était

  7   fabriqué et que les pièces d'assemblable étaient fabriquées pour assembler

  8   l'ensemble du moteur fusé, on produisait également les stabilisateurs et

  9   l'ensemble de ces parties étaient ensuite livrées à l'une des unités

 10   logistiques ou à l'état-major de la VRS où les bombes étaient chargées.

 11   Alors comment étaient chargés ces explosifs aérosols, ça je ne peux pas

 12   vous le dire parce que je n'ai pas cette information.

 13   Q.  Merci. Où étaient fabriquées les bombes aérosols ?

 14   R.  Les bombes aérosols, en général, ou bien est-ce que vous parlez d'une

 15   période spécifique ?

 16   Q.  Les bombes aérosols que vous prétendez ont été lancées sur Sarajevo, où

 17   étaient-elles fabriquées ?

 18   R.  J'ai dit que les bombes aérosols lancées par roquette ont été utilisées

 19   pour cibler Sarajevo, et pour utiliser des bombes aérosols, il faudrait

 20   utiliser un avion pour les lancer. Maintenant, si vous me posez la

 21   question, concernant les bombes aérosols lancées par roquette, une version

 22   de ces bombes était fabriquée ou, en tout cas, assemblée à Pretis, parce

 23   que les bombes aérosols FAB 250, étaient fabriquées avant la guerre et

 24   livrées à la JNA. On voit, dans les documents, que ces bombes aérosols et

 25   ces moteurs fusés, 122 ou 128 ont été renvoyés à Pretis pour l'assemblable

 26   d'un modèle de système de lance-roquettes improvisé était en cours, et qui

 27   consistait dans ces explosifs aérosols.

 28   Q.  Je n'ai toujours pas reçu de réponse à ma question, où étaient


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  1   fabriquées ces bombes aérosols ?

  2   R.  Monsieur Karadzic, je répète ma réponse qui était claire et précise :

  3   L'assemblable complet de système avec lancement par roquette qui était

  4   composé d'une bombe aérosol, FAB 250, une connexion à un moteur fusé, et un

  5   stabilisateur, était fabriquée à Pretis. Le chargement de la charge

  6   explosive de la bombe aérosol ne se faisait pas à Pretis, parce qu'à mon

  7   avis, et selon mon expérience, seuls les instituts militaires techniques de

  8   Belgrade étaient en mesure de le faire ou bien les gens de l'Institut

  9   nucléaire de Vinca.

 10   Q.  Merci. En d'autres termes, vous ne savez pas où elles étaient

 11   produites. Vous supposez que c'était quelque part en Serbie.

 12   R.  Je ne sais pas si vous voulez que je vous répète encore et encore la

 13   même histoire.

 14   Q.  Merci. Comment vous êtes-vous procuré des informations selon lesquelles

 15   Pretis livrait des bombes sans explosif pour les réserves de guerre vous

 16   dites au paragraphe 12 de votre rapport -- non, il s'agit d'un autre

 17   rapport. Il s'agit du 65 ter 08347, 08347.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il s'agira de la dernière question de la

 19   journée. Voyons la pièce P2318.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Page 88 de la version serbe, je crois, et sur la version papier, il

 22   s'agit de la page 84. En anglais, nous avons besoin de la page 97. Alors

 23   voyons le paragraphe 12.1. Vous dites ici que l'usine de Pretis développait

 24   des bombes aériennes aérosols, et les premières 50 bombes ont été

 25   fabriquées, et cetera, et cetera. Pourriez-vous, s'il vous plaît, lire ce

 26   paragraphe et nous dire où vous avez obtenu ces informations selon

 27   lesquelles Pretis livrait des bombes sans charge ?

 28   R.  Je crois que nous ne comprenons pas. En 1988, l'armée yougoslave a


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  1   introduit les bombes aérosols dans son artillerie, et elles étaient

  2   développées à Pretis avant la guerre, et nous disposions des normes pour

  3   développer ces bombes aérosols, FAB 275. Ce que vous voyez ici c'est que

  4   Pretis -- l'usine de Pretis développait les bombes aérosols, et les

  5   premières 50 bombes devaient être fabriquées en 1990, et que la phase

  6   suivante devait porter sur 1991 et 1992, pour la production en série. On

  7   parle de bombe de 275, j'ai des photographies de ces bombes FAB 275, et 24

  8   d'entre elles se trouvent actuellement dans les entrepôts des forces armées

  9   de Bosnie-Herzégovine. Il faut les détruire parce qu'elles représentent un

 10   danger, en mettant en péril la vie de la population de Bosnie-Herzégovine.

 11   Là, je ne parle pas de FAB de 250.

 12   Q.  Mais les bombes qui ciblaient Sarajevo, vous dites qu'il s'agissait de

 13   bombes de 100 et 250; est-ce correct ?

 14   R.  Oui. Il s'agissait de bombes aérosol lancées par roquette, 250

 15   modifiées ou improvisées, donc de bombes de fortune qui étaient lancées sur

 16   Sarajevo en 1995.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, on en restera là pour

 18   aujourd'hui.

 19   Donc, Docteur Zecevic, avez-vous été informé du fait que, demain matin,

 20   nous siégerons le matin, à partir de 9 heures; est-ce que cela vous pose

 21   problème ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est un problème pour moi. Vous aurez

 23   constaté que je marche ou que je me lève depuis 5 heures. Il faudrait que

 24   je me repose. Mais, en tout cas, je serai là demain matin.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'apprécie beaucoup votre esprit de

 26   coopération. Donc nous reprendrons demain matin à 9 heures.

 27   --- L'audience est levée à 19 heures 03 et reprendra le mercredi 23 février

 28   2011, à 9 heures 00.