Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi 25 février 2011

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 14 heures 25.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous.

  7   Bon après-midi, Monsieur le Témoin.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, êtes-vous prêt à

 10   commencer votre contre-interrogatoire ? Je vois que oui. Vous pouvez y

 11   aller.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie.

 13   Bonjour, Excellence. Bonjour à tous.

 14   LE TÉMOIN : RAMIZ MUJKIC [Reprise]

 15   [Le témoin répond par l'interprète]

 16   Contre-interrogatoire par M. Karadzic :

 17   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Mujkic.

 18   R.  Bonjour.

 19   Q.  Monsieur Mujkic, je vais vous poser des questions simples. Sachez que

 20   vous pouvez répondre par oui ou par non, nous n'avons pas beaucoup de

 21   temps.

 22   N'est-il pas vrai qu'en mars 1996 vous avez fait une déclaration à l'AID à

 23   Sarajevo ?

 24   R.  J'ai fait une déclaration devant la police dans la municipalité de Novi

 25   Grad. Je ne sais pas s'il s'agissait de l'AID ou quoi, je ne l'ai pas

 26   demandé, ça ne m'intéressait pas.

 27   Q.  Bien. C'était quatre ans après les faits; c'est bien cela ?

 28   R.  Oui.


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  1   Q.  Dans cette déclaration, avez-vous décrit en détail les événements de

  2   mai et juin, et ensuite à partir d'août, les événements qui portaient sur

  3   la caserne de Rajlovac ?

  4   R.  Non, je n'ai pas parlé de la caserne de Rajlovac parce que je ne savais

  5   pas vraiment à quoi servait cette caserne, et je ne voulais pas que ma

  6   déclaration soit incomplète.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Nous allons essayer de rafraîchir

  8   votre mémoire.

  9   Pourrions-nous avoir à l'écran la pièce 22188, s'il vous plaît.

 10   Première page, afin que M. Mujkic puisse identifier ce document.

 11   Ensuite je voudrais avoir la page 7 en serbe et la page 9 en anglais à

 12   l'écran. Il s'agit des pages du prétoire électronique. Sinon, en ce qui

 13   concerne le document, ces pages sont numérotées 19 et 22.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  S'agit-il bien de votre déclaration -- non, en fait il s'agit d'une

 16   liasse 92 bis qui contient cette déclaration.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous avoir la page 19 dans le

 18   prétoire électronique; 19 pour la version en serbe et 22 pour la version en

 19   anglais. Page 22 dans la version électronique du document pour ce qui est

 20   de l'anglais, et je voudrais avoir la page correspondante en serbe aussi.

 21   Dans la version en anglais, vous trouverez le passage qui m'intéresse à peu

 22   près au milieu, parce qu'on y trouve "Apostolski" et "Karadzic". Il y a mon

 23   nom.

 24   Pourrions-nous conserver l'anglais à l'écran, et M. Mujkic aura

 25   besoin de la version en serbe. Donc page 22 pour la version en anglais, il

 26   s'agit de la numérotation dans le prétoire électronique.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Veuillez, s'il vous plaît, vous pencher sur le bas de cette page, le


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  1   dernier tiers de la page en B/C/S. Il y est écrit :

  2   "Le matin, Mile Tintor est arrivé, fils de Mirko…"

  3   Et cetera, et cetera. L'avez-vous trouvé ? C'est dans le -- l'avez-

  4   vous trouvé ? C'est au milieu de la page en anglais, en haut de la page en

  5   B/C/S.

  6   "Je l'avais vu à Ahatovici, où il se livrait au pillage de différents

  7   biens."

  8   C'est une description de la visite que ces gens vous ont rendue alors

  9   que vous étiez prisonniers à la caserne de Rajlovac ?

 10   R.  Vous me posez une question à moi ?

 11   Q.  Oui.

 12   R.  Ah, bon. Oui.

 13   Q.  Merci. Donc, ensuite, en juin 1997, vous avez fait une déclaration

 14   auprès du bureau du Procureur de ce Tribunal, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Merci. J'aimerais que nous nous penchions sur la description de cet

 17   événement dans votre déclaration.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous avoir à l'écran la pièce 22188

 19   de la liste 65 ter. Je pense que c'est le même document, il nous faudrait

 20   la dixième page en serbe et la onzième en anglais, dans le prétoire

 21   électronique. Pour ce qui est du document en tant que tel, il s'agit de la

 22   page 10 en serbe et de la page 11 en anglais. Page 10 en serbe et 11 en

 23   anglais, s'il vous plaît. Puis-je avoir la page suivante en anglais à

 24   l'écran.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Sixième paragraphe à partir du haut :

 27   "Alors que j'étais à l'hôpital…"

 28   Non, ce n'est pas ça.


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  1   "Alors que j'étais à Rajlovac le 7 août 1992, j'ai reçu la visite de

  2   Goran Lemez et du commandant Vlasto Apostolski. J'ai demandé une cigarette

  3   à Goran. Le commandant m'a dit : 'Il ne s'appelle pas Goran, c'est un

  4   'vojvoda', un duc.'

  5   "Goran avait un grand nombre de documents à propos des autres

  6   prisonniers."

  7   Ensuite, Huso Gacanovic et Asim Novalija ont été amenés à Rajlovac,"

  8   et cetera, et cetera.

  9   Avez-vous trouvé ce passage ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Est-ce bien vous qui avez fait cette déclaration ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Ensuite, vous dites qu'il faisait partie du SDS ?

 14   R.  De qui parlez-vous ?

 15   Q.  Du vojvoda.

 16   R.  Goran Lemez ? Oui, oui.

 17   Q.  Saviez-vous qu'au sein du SDS, personne n'avait de titre, ce n'était

 18   pas toléré d'ailleurs d'avoir des titres ?

 19   R.  Ecoutez, Mesdames, Messieurs les Juges, je sais exactement ce qui s'est

 20   passé. C'est ainsi qu'ils se sont présentés. Vlado Apostolski disait :

 21   Cette personne est un "vojvoda", est un duc. Pour une autre personne qu'il

 22   m'a présentée, il a dit qu'il s'agissait d'un archiduc. Je ne sais pas

 23   exactement ce qu'ils faisaient.

 24   Q.  Très bien. Donc, dans ces passages, vous dites que vous avez ces deux

 25   personnes qui vous ont rendu visite à la caserne de Rajlovac en mars 1992 ?

 26   R.  Oui, mais c'était pendant la journée.

 27   Q.  Vous avez donné une autre déclaration le 24 mars 1998, c'était la

 28   troisième fois que vous faisiez une déclaration à propos de votre séjour à


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  1   la caserne de Rajlovac ?

  2   R.  Je ne me souviens pas très bien des dates. Je ne me souviens pas des

  3   dates en ce qui concerne les déclarations. Je ne sais pas exactement quand

  4   je les ai faites.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, nous allons rafraîchir votre

  6   mémoire.

  7   Pourrions-nous avoir à l'écran la pièce 1D369. Il s'agit de la pièce

  8   1D3269.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Je vais vous en donner lecture. Vous pouvez tous suivre. Ce qui

 11   m'intéresse, c'est les trois premières phrases.

 12   "Après que j'aie été blessé et capturé le 6 août 1992, je sais que le 6

 13   août 1992 en fin de soirée, Goran Lemez est venu jusque dans ma cellule à

 14   la caserne de Rajlovac, avec le commandant de la brigade de police de

 15   Rajlovac, Vlasto Apostolovski, et m'a demandé de faire une déclaration."

 16   Est-ce bien ce qui est arrivé ?

 17   R.  C'était la deuxième personne à rentrer dans ma cellule. Le premier

 18   était Mile Stojanovic, mais Goran est venu le 7 aussi.

 19   Q.  Merci.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous demanderons ultérieurement le versement de

 21   cette pièce, lorsque nous en aurons terminé.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Après avoir fait cette déclaration auprès du bureau du Procureur le 8

 24   avril 2000, vous avez encore fait une déclaration, n'est-ce pas ?

 25   R.  Je ne me souviens pas de la date exacte. J'étais au tribunal de

 26   Nedzarici. C'est là que j'ai fait une déclaration, à deux reprises. En

 27   2004, je crois. Enfin, je ne me souviens pas très bien des dates exactes à

 28   lesquelles j'ai fait ces déclarations.


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  1   Q.  De toute façon, c'est votre déclaration que nous avons à l'écran,

  2   n'est-ce pas ?

  3   R.  Mais je ne vois pas ma signature.

  4   Q.  Il s'agit de la première page. Avez-vous fait cette déclaration ?

  5   R.  C'est très difficile à lire. Moi, je n'arrive pas à le lire. Et puis,

  6   il n'y a pas de signature.

  7   Q.  C'est le bureau du Procureur qui nous l'a communiquée et qui nous a dit

  8   qu'il s'agissait de votre déclaration.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Montrez-nous la page suivante.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais on perd du temps.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, la page suivante en B/C/S.

 12   Il s'agit de la dernière page maintenant. Je ne voudrais pas la

 13   dernière page, je veux la deuxième page.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  S'agit-il de votre écriture ?

 16   R.  Oui.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvons-nous lui montrer la dernière

 18   page ? S'agit-il de votre signature à la page 4 ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 20   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai vu la signature ici, sur cette

 22   dernière page, mais je ne l'ai pas vue sur les pages qu'on m'a montrées

 23   avant. Il n'y avait pas de signature.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Oui, mais c'est votre déclaration. De toute façon, elle a été

 26   dactylographiée. Vous avez signé, en fait, l'exemplaire que vous aviez

 27   écrit de votre propre main, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui, en effet. C'est ma signature et mon écriture.


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.

  2   Pourrions-nous maintenant avoir la pièce 1D3268, il s'agit d'une

  3   déclaration supplémentaire que vous avez faite le 28 avril 2000.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Trouvons-nous votre signature en bas de cette page ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Bien. Nous allons nous pencher à nouveau sur le deuxième paragraphe de

  8   ce document :

  9   "A propos de l'incident qui a eu lieu le 6 août 1994, lorsque j'ai

 10   été blessé et capturé par les membres des formations militaires serbes, je

 11   me souviens maintenant du déroulement chronologique. J'ai d'abord été

 12   transporté par TAM à la caserne de Rajlovac en fin d'après-midi, puis mis

 13   dans une cellule improvisée. Stojanovic, Mile, est venu pour prendre mes

 14   coordonnées plus tard. Lemez, Goran et Apostolski, Vlasto, qui était

 15   Macédonien et qui était un soldat d'active, et qui précédemment travaillait

 16   à la caserne de la JNA à Rajlovac avant la guerre en tant qu'aviateur ou

 17   membre de l'armée de l'air, avait…" et cetera, et cetera.

 18   Donc, je vous laisse lire le deuxième paragraphe.

 19   L'INTERPRÈTE : Les interprètes voudraient voir l'original.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais l'original en B/C/S est à l'écran.

 21   Les interprètes devraient arriver à trouver le passage.

 22   Veuillez, s'il vous plaît, répéter ce dont vous avez donné lecture.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Il s'agit du paragraphe suivant. Je n'ai pas lu le premier paragraphe.

 25   Donc, si nous voulions lire l'anglais, il faudrait avoir la page suivante :

 26   "Le soir suivant, Mile Tintor, qui était en civil, et Vlasto Apostolovski

 27   se sont rendus dans la cellule. Ils sont rentrés dans la cellule et

 28   lorsqu'ils m'ont vu, Tintor a parlé à Apostolovski : 'Que va-t-on faire des


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  1   blessés, Commandant ?' Et Apostolovski a commencé à secouer les épaules. Et

  2   ensuite, Tintor a répété et a dit : 'Commandant, si quelqu'un commence à

  3   toucher à Ramiz, vous verrez qui je suis et qui est Apostolovski.' Personne

  4   ne m'a frappé, mais ils s'en sont pris à Gacanovic et à Novalija…" et

  5   cetera, et cetera.

  6   Donc, vous parlez des événements, vous dites que d'abord c'est Lemez et

  7   Apostolovski qui vous ont rendu visite, et ensuite Mile et Tintor, n'est-ce

  8   pas ?

  9   R.  Ecoutez, Mile Tintor est venu dans l'après-midi. Je ne sais pas

 10   pourquoi il est écrit ici que c'était dans l'après-midi. Il faisait encore

 11   jour. Mais en août, les jours sont très longs. Il est vrai que c'est ce

 12   qu'il a dit à Vlasto, et il est vrai que personne ne m'a plus touché après

 13   cela, mais ils ont passé à tabac les deux autres; Asim Novalija et l'autre.

 14   Q.  Donc, un an et demi après la déclaration supplémentaire, vous avez

 15   rencontré les enquêteurs du bureau du Procureur de ce Tribunal, et vous

 16   avez donné une cinquième explication par rapport à ce qui s'était passé,

 17   par rapport à la déclaration que vous aviez faite en 1997; c'est cela ?

 18   R.  Je ne peux pas être certain des dates. J'aurais sans doute dû noter

 19   tout cela pour m'en souvenir. Je ne peux pas m'en rappeler, sinon.

 20   Q.  De toute façon, nous vous montrerons ces documents. Vous avez le droit,

 21   bien sûr, de vous rafraîchir la mémoire.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous avoir la pièce 22188 maintenant

 23   de la liste 65 ter, page 4 dans le prétoire électronique, page 5 en

 24   anglais. C'est le troisième paragraphe à partir du haut dans les deux

 25   versions.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  "En page 5, paragraphe 5, lignes 1 et 2 : Il est important de préciser

 28   que lorsque j'ai été arrêté et blessé sur le territoire de la municipalité


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  1   d'Ilijas, j'ai été transporté à bord d'un camion de marque TAM qui, avant

  2   la guerre, appartenait à la caserne, et que Nikola Stanisic conduisait

  3   avant la guerre. Ce jour-là, lorsqu'ils m'ont transporté avec lui jusqu'à

  4   la caserne de Rajlovac, c'est Slavisa Koprivica qui conduisait le camion."

  5   Est-ce que c'est exact ?

  6   R.  Exact.

  7   Q.  Merci. Après cela, vous avez été invité à témoigner dans le procès

  8   intenté à Momcilo Krajisnik, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Cela se passait en 2004, c'est-à-dire 12 ans après les faits et cinq

 11   ans après que vous avez fourni ces déclarations et déclarations

 12   complémentaires, n'est-ce pas ?

 13   R.  Bien, oui, c'est à peu près cela.

 14   Q.  Donc, cinq déclarations faites par vous précèdent cette déposition,

 15   cinq déclarations et déclarations complémentaires, et dans votre déposition

 16   dans le cadre du procès intenté à Momcilo Krajisnik, vous avez dit que le

 17   frère de Momcilo Krajisnik est venu vous voir dans votre prison, n'est-ce

 18   pas, à la date du 7 août, frère de Momcilo Krajisnik dont vous n'aviez

 19   jamais parlé auparavant ?

 20   R.  En effet.

 21   Q.  Est-ce que vous souhaitez que je vous montre le document pour vous

 22   rafraîchir la mémoire ?

 23   R.  Non, ce n'est pas nécessaire. J'ai tous ces souvenirs dans la tête et

 24   je peux faire dérouler le film de tout cela.

 25   Q.  Merci.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Dans ce cas, nous pouvons peut-être examiner

 27   votre déclaration consolidée qui constitue le document 65 ter numéro 90219.

 28   90219.


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  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  La question n'est pas bien interprétée, et pourtant, je parle assez

  3   lentement. Donc, ma thèse consiste à dire qu'après que vous avez fourni

  4   cinq déclarations et déclarations complémentaires, et ce, 12 ans après les

  5   faits, lorsque vous avez témoigné dans le procès intenté à Momcilo

  6   Krajisnik, c'était la première fois que vous faisiez état de cette visite

  7   dans votre prison du frère de Momcilo Krajisnik; c'est bien cela ?

  8   R.  Oui.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Penchons-nous sur ce texte qui est votre

 10   déclaration consolidée. Et je demande à présent que l'on affiche à l'écran

 11   la page 12, et, plus précisément, le paragraphe 59.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Je cite : "Première visite, Mile Stojanovic; deuxième visite,

 14   Apostolovski; et troisième visite, Tintor et Apostolovski."

 15   C'est bien cela ?

 16   R.  Non. La troisième visite était celle de Mirko et de cet homme qui était

 17   en uniforme. Il n'a pas dit un mot. Je ne le connaissais pas, et il ne m'a

 18   pas adressé la parole. Evidemment, c'est Vlasto Apostolovski qui l'a amené

 19   avec lui.

 20   Q.  Est-ce que vous avez prononcé le nom --

 21   R.  [aucune interprétation]

 22   Q.  Je vais le lire, ce paragraphe 59, de façon à ce que tous les noms

 23   soient consignés au compte rendu. Je cite :

 24   "A peu près à l'aube du 7 août 1992, j'ai reçu une troisième visite dans ma

 25   cellule cette nuit-là. Le commandant Vlasto Apostolski est arrivé. C'était

 26   le commandant de la police militaire de la Brigade de Rajlovac, et trois

 27   hommes sont arrivés derrière lui. Je connaissais Apostolski depuis avant

 28   ces événements. C'était un capitaine d'active. Il les a présentés à moi et


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  1   a dit au sujet de l'un d'entre eux : 'C'est un homme qui est supérieur à un

  2   voïvode.' Cet homme, qu'il a présenté comme étant un super voïvode, était

  3   de taille moyenne, même peut-être un peu maigre, et portait une barbe. Il

  4   portait des vêtements civils. Je me suis immédiatement souvenu de lui comme

  5   étant Nikola Poplasen, car je le voyais souvent à la télévision. Il avait

  6   aussi un accent assez particulier qui n'était pas l'accent de Sarajevo.

  7   L'un des autres hommes était Mirko Krajisnik, que j'ai reconnu, et je n'ai

  8   pas reconnu le troisième homme, qu'il n'a d'ailleurs pas présenté.

  9   Krajisnik m'a demandé de leur dire où se cachait Hasan Mujkic avec Husein

 10   Mujkic, les deux hommes étant frères. Hasan Mujkic était chef de la Défense

 11   territoriale d'Ahatovici, en raison de sa profession de policier avant la

 12   guerre. En effet, il était policier d'active avant la guerre. Ces hommes

 13   recherchaient mon fils, Elvir Mujkic, ainsi que Junuz Mujkic."

 14   Et cetera, et cetera.

 15   Alors, Monsieur Mujkic, qui vous a suggéré pour la première fois après que

 16   vous avez fourni cette déclaration et déclarations complémentaires et alors

 17   que 12 ans s'étaient écoulés depuis les faits, qui vous a suggéré de

 18   prononcer pour la première fois le nom du frère de Krajisnik ?

 19   R.  Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, personne ne me l'a

 20   suggéré. Moi, cette visite, je n'en connaissais pas le motif. Mais alors

 21   que j'étais ici devant ce Tribunal pour la première fois, j'ai eu

 22   l'occasion d'entendre une conversation entre Marko [phon] Alispahic et

 23   Mirko Krajisnik, conversation téléphonique enregistrée. Et la deuxième

 24   conversation enregistrée que j'ai entendue était une conversation entre

 25   Mirko et Momcilo Krajisnik. Et à ce moment-là, je me suis rendu compte de

 26   la raison qui les avait poussés à me rendre visite parce que toute

 27   l'histoire m'est revenue. Alispahic a dit : Dis-moi où il se cache, parce

 28   qu'ils ont tué mon fils. Dis-moi de combien d'argent que tu as besoin. Et


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  1   c'est là que la conversation s'est terminée. Mirko souhaitait voir le

  2   voïvode, et c'était Alispahic qui devait découvrir l'endroit où il se

  3   trouvait. Voilà sur le fond le motif de cette conversation. Mais la

  4   conversation entre Momcilo et Mirko Krajisnik, dans cette conversation

  5   Mirko dit à Momcilo : Je viens de recevoir un appel de Bakir, mais

  6   Alispahic me propose de l'argent. Nous avons Ramiz Mujkic à Rajlovac, qui

  7   est grièvement blessé. A ce moment-là, Momcilo répond en disant : Mais si

  8   tu n'as pas d'argent, je peux t'en donner. Il est à la recherche de nos

  9   tireurs embusqués. Mais de quel argent tu parles ?

 10   Donc voilà, c'est à ce moment-là que je me suis rendu compte du motif

 11   qui les avait poussés à me rendre visite, et cela a fini par me revenir

 12   alors que j'étais à l'hôpital. Je ne sais pas s'il y avait une autre

 13   personne impliquée. Mais c'est la raison pour laquelle je n'en avais pas

 14   parlé jusqu'à ce moment-là. Je ne pensais pas que c'était important.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mujkic, les interprètes n'ont

 16   pas réussi à vous suivre intégralement, donc pourriez-vous répéter ce que

 17   vous avez dit à partir du moment où vous déclariez ne pas savoir s'il y

 18   avait une autre personne impliquée.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'avais pas entendu dire, je ne savais pas

 20   qu'il y avait quelqu'un d'autre à qui on avait implanté un fixateur en

 21   1992, durant ce conflit sanglant, qui malheureusement a eu lieu à l'époque

 22   dans le village d'Ahatovici, et d'ailleurs je peux aussi mentionner un

 23   autre village, celui de Rakovica, qui est limitrophe. Dans cette

 24   municipalité de Vogosca, c'est le village de Svrake.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Mais Monsieur Mujkic, on implante un fixateur à quelqu'un qui a une

 27   fracture osseuse. Pourquoi est-ce qu'on aurait implanté un fixateur à

 28   quelqu'un d'autre ? Est-ce que vous essayez de dire que nous ne soignions


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  1   pas les blessés ?

  2   R.  Moi, je sais que j'étais à l'hôpital à Blazuj. J'ai vu des Serbes

  3   blessés qui venaient et qui me considéraient comme quelqu'un qui n'était

  4   pas vraiment blessé. Donc j'ai dit tout ce que je savais et j'ai dit que je

  5   ne pouvais rien confirmer d'autre.

  6   Q.  Je vous remercie. Qui vous a suggéré de mentionner le nom de Mirko

  7   [comme interprété] Poplasen en sus de celui de Mirko Krajisnik ?

  8   R.  Est-ce que vous pensez vraiment que je suis fou, vous pensez que j'ai

  9   besoin que quelqu'un me dise de quoi je dois parler ? Je peux vous dire que

 10   je peux vous raconter à chaque instant de la journée ce que j'ai vécu et

 11   traversé.

 12   Q.  Monsieur Mujkic, la Défense doit vous interroger pour explorer les

 13   raisons pour lesquelles vous n'avez pas dès le début mentionné ces deux

 14   noms, alors que vous aviez déjà fourni une première et une deuxième, une

 15   troisième, une quatrième et une cinquième déclaration ainsi qu'une

 16   déclaration complémentaire. Pourquoi est-ce que ces noms vous sont revenus

 17   tout d'un coup ? Pourquoi l'idée de parler de Mirko Krajisnik vous est

 18   venue si tard, ainsi que celle de parler de Mirko [comme interprété]

 19   Poplasen ? Est-ce que quelqu'un vous a rappelé le nom de Poplasen en vous

 20   rappelant qu'il était commissaire à Vogosca ?

 21   R.  Vogosca n'est pas à des kilomètres. Je savais tout ce qui s'y est

 22   passé. Mais je vous dis encore une fois qu'il n'était pas besoin que

 23   quiconque me suggère de mentionner tel ou tel nom. Je voyais Nikola

 24   Poplasen à la télévision quand j'étais chez moi. Toutes ces réunions qui

 25   avaient lieu avant la guerre, il était épaule contre épaule des plus hauts

 26   représentants du SDS à l'époque.

 27   Q.  Monsieur Mujkic, quand est-ce que vous avez vu M. Poplasen à la

 28   télévision ?


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  1   R.  Vers la fin 1991 et au début de 1992. Je ne l'ai pas vu une seule fois;

  2   je l'ai vu pratiquement tous les jours.

  3   Q.  Quelles étaient les fonctions de Nikola Poplasen à l'époque ?

  4   R.  Je ne suis pas journaliste pour vous dire exactement quelles étaient

  5   les fonctions de Nikola Poplasen, je ne les connais pas. Mais ce que je

  6   sais c'est qu'il était sur un pied d'égalité avec les plus hauts

  7   responsables quand on le voyait à la télévision lorsqu'il diffusait les

  8   réunions.

  9   Q.  Quelle était la télévision qui retransmettait ces réunions ?

 10   R.  A l'époque, nous n'avions que la télévision de Sarajevo.

 11   Il n'y avait pas d'autres stations de télévision que nous pouvions capter.

 12   Mais en fait, il y avait la télévision de Belgrade aussi, mais moi j'ai vu

 13   ces images à la télévision de Sarajevo.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais maintenant que l'on affiche sur les

 15   écrans le document 65 ter numéro 22191. C'est le compte rendu de votre

 16   déposition dans l'affaire Krajisnik, page 8 084 et 85 du compte rendu

 17   d'audience grâce au prétoire électronique.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Donc vous vous en tenez à votre déclaration selon laquelle vous

 20   connaissiez Nikola Poplasen pour l'avoir vu à la télévision, et ceci dans

 21   le cadre d'activités politiques de l'époque ?

 22   R.  Je ne le connaissais que pour l'avoir vu à la télévision. Je ne le

 23   connaissais pas personnellement; c'est la vérité, ça. Et j'ai fait une

 24   déclaration ici en disant que j'allais dire la vérité; c'est donc la

 25   vérité.

 26   Q.  Je vous remercie.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous nous pencher sur la ligne 3, c'est

 28   une question qui se lit comme suit, je cite :


Page 12405

  1   "Connaissez-vous le nom Nikola Poplasen ?"

  2   A ce moment-là, vous répondez :

  3   "Pas jusqu'à ce moment-là, mais c'est un homme qui était président de la

  4   République serbe et le président Petric l'a remplacé à son poste."

  5   Ensuite, il y a une nouvelle question. Je cite :

  6   "Est-ce que vous avez vu Nikola Poplasen à quelque moment que ce soit en

  7   août 1992 ?"

  8   Et vous répondez : 

  9   "Je n'ai vu personne, simplement les gens qui m'ont rendu visite dans ma

 10   cellule."

 11   Donc vous n'avez pas vu Nikola Poplasen entrer dans votre cellule en

 12   compagnie de ces hommes. Je vous demande maintenant, encore une fois --

 13   R.  L'interprétation est si peu claire et si vague que je ne parviens pas à

 14   établir un lien entre ce que vous dites et ce que j'entends. Pourriez-vous

 15   répéter ?

 16   Q.  Je vais répéter. Je cite : "Je n'ai vu que les gens qui sont venus me

 17   rendre visite dans ma cellule, donc non."

 18   R.  Alors vous dites "Non." Monsieur le Président, Madame, Messieurs les

 19   Juges, il faut me dire d'où sort cette citation.

 20   Q.  C'est M. Gaynor, le même Procureur que celui qui vous interroge ici,

 21   qui vous a interrogé durant votre déposition dans l'affaire Krajisnik, qui

 22   se trouve en page 5 --

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde, je vous prie. Monsieur

 24   Mujkic, ce qui est en train d'être cité vient d'une transcription de votre

 25   déposition faite dans le cadre du procès intenté à M. Momcilo Krajisnik,

 26   donc c'est une partie de votre déposition. Je vais vous la relire.

 27   Je cite :

 28   "Question : Connaissez-vous le nom de Nikola Poplasen ?"


Page 12406

  1   Et vous répondez :

  2   "Je ne le connaissais pas jusqu'à ce moment-là, mais cet homme était

  3   président de la République serbe, et c'est le président Petric qui a pris

  4   sa place plus tard.

  5   "Question : Avez-vous vu Nikola Poplasen à quelque moment que ce soit

  6   pendant le mois d'août 1992 ?

  7   "Réponse : Je n'ai vu personne, je n'ai vu que les gens qui m'ont rendu

  8   visite dans ma cellule, donc non."

  9   Voilà une transcription de votre déposition dans cette affaire Krajisnik.

 10   Pouvez-vous ajouter un commentaire aujourd'hui ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis vraiment surpris d'entendre une telle

 12   déclaration, car il n'est pas possible que j'aie fait cette déclaration.

 13   Ceci n'est pas logique, car je connaissais Nikola Poplasen pour l'avoir vu

 14   à la télévision, donc je le connaissais. Il est venu me voir dans ma

 15   cellule. Quant au fait qu'il ait été président de la Republika Srpska, cela

 16   ça concerne la période d'après la guerre. J'ai l'impression que les choses

 17   sont emmêlées, là, donc je ne peux pas admettre ce que je viens d'entendre

 18   comme étant une déclaration venant de moi.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Est-ce que vous souhaitez que nous demandions la diffusion des images

 21   de votre déposition dans l'affaire Krajisnik ce jour où vous avez déposé ?

 22   R.  Il n'est pas possible que j'aie dit quelque chose comme cela, parce que

 23   voyez-vous, il manque une logique à cette déclaration. La séquence n'est

 24   pas la bonne, il est indiqué le nom de Petric là, mais ça, c'était après la

 25   guerre. A cette époque-là, je ne m'intéressais pas à lui.

 26   Q.  Qui vous a suggéré de prononcer le nom de Nikola Poplasen ? Le

 27   Procureur vous a demandé si vous le connaissiez et s'il est venu vous voir

 28   dans votre cellule, et vous avez répondu par la négative. Alors qui, par la


Page 12407

  1   suite, vous a dit de prononcer le nom de Nikola Poplasen en même temps que

  2   celui de Mirko Krajisnik ?

  3   R.  Je déclare catégoriquement ici que personne ne m'a suggéré de prononcer

  4   son nom. Ce que j'ai dit était le fruit de mon vécu. Malheureusement, c'est

  5   cela que j'ai vécu. Je connais les trois hommes qui sont venus me voir.

  6   Nikola Poplasen et Mirko Krajisnik sont venus me voir, ainsi que ce

  7   troisième homme qui était de taille moyenne et qui portait une barbe et ne

  8   m'a rien demandé. Vous me demandez ici pour la troisième fois qui m'a

  9   suggéré de prononcer ce nom, ce qui impliquerait que je sois en train de

 10   mentir. Or, ce que je dis n'est pas un mensonge.

 11   Q.  Monsieur Mujkic, savez-vous qui était Nikola Poplasen avant la guerre ?

 12   R.  Je pense qu'il était professeur.

 13   Q.  Savez-vous qu'avant la guerre Nikola Poplasen ne jouait aucun rôle dans

 14   la vie politique locale, et il n'était pas non plus membre du SDS ?

 15   R.  Je ne m'intéresse pas à tout cela. Je n'ai pas gardé précisément le

 16   souvenir de qui était membre ou qui n'était pas membre du SDS. Mais

 17   j'aurais bien voulu voir un Serbe qui n'était pas membre du SDS à l'époque.

 18   Q.  Si je devais vous dire que nulle part avant la guerre et dans le cadre

 19   d'aucune réunion à laquelle je participais ou d'une quelconque autre

 20   réunion Nikola Poplasen n'était présent, qu'est-ce que vous répondriez ?

 21   R.  Je vous dirais que vous ne dites pas la vérité.

 22   Q.  Savez-vous à quel parti appartenait Nikola Poplasen ?

 23   R.  Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les Juges, serait-il

 24   possible que de telles questions ne me soient pas posées ? J'ai simplement

 25   dit que Nikola Poplasen était venu me rendre visite dans ma cellule. Ce

 26   qu'il faisait avant la guerre, cela ne m'intéressait pas.

 27   Q.  Mais vous avez dit que vous l'avez vu assis à mes côtés ?

 28   R.  Oui, je l'ai vu à la télévision, mais je ne sais pas quelles étaient


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  1   ses fonctions ou quel était son poste.

  2   Q.  Je vais vous apporter mon concours, Monsieur Mujkic. Nikola Poplasen

  3   était un éminent professeur à la faculté de sciences politiques. Il ne

  4   participait à aucune activité politique, il n'avait aucune vie publique

  5   avant la guerre. Etant donné sa réputation, il lui a été demandé de se

  6   rendre à Vogosca pour apporter son concours aux autorités locales de

  7   Vogosca. Mais autrement, il était président du Parti radical serbe, et en

  8   tant que président de ce Parti radical serbe, il a gagné les élections.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous n'êtes pas en train de témoigner.

 10   Je pense que la question a été posée et a reçu réponse. Passez à autre

 11   chose.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Ce que je vous demande, c'est est-ce que vous niez cela ? Est-ce que

 14   vous niez que Nikola Poplasen était président du Parti radical ?

 15   R.  Monsieur, tout cela ne m'intéresse pas. Je n'ai jamais parlé des

 16   fonctions qui étaient les siennes avant la guerre. Je l'ai vu à vos côtés,

 17   et je sais qu'il était président de la municipalité de Vogosca pendant la

 18   guerre. Après la guerre, il était président de la Republika Srpska, et

 19   c'est Petric, le haut représentant, qui l'a démis de ses fonctions pour les

 20   raisons que vous avez indiquées, qui sont tout à fait exactes, la

 21   magnifique réputation qu'il avait. Nous savons très bien ce qu'il en est et

 22   ce qu'il en était.

 23   Q.  Voyons un peu comment il se fait que tout d'un coup vous ayez fait

 24   référence à cela pendant les séances de récolement.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document 65 ter

 26   numéro 22619. La page du compte rendu dans l'affaire Krajisnik que nous

 27   avons vue tout à l'heure. Je demande le versement au dossier de ce document

 28   ainsi que de toutes les pages précédentes que nous avons déjà vues.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous voulez dire l'intégralité du

  2   document ?

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pas nécessairement, simplement les pages dont

  4   nous avons demandé l'affichage et qui ont fait l'objet de commentaires de

  5   la part du témoin.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Puis-je vous entendre, Monsieur Gaynor ?

  7   M. GAYNOR : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Je ne me rappelle pas quelle

  9   était la longueur de ces déclarations, mais nous admettons au dossier les

 10   pages pertinentes. Si le passage n'est pas trop long, il n'y a aucun

 11   problème à l'admettre. En tout cas, nous admettons les pages que nous avons

 12   vues. Peut-on donner un numéro de pièce à conviction à ces documents, en

 13   commençant par la déclaration au titre de l'article 92 bis.

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] La déclaration au titre de l'article 92

 15   bis du Règlement qui constitue le document 65 ter numéro 22188 reçoit le

 16   numéro de pièce à conviction D1101. La déclaration de 1998, qui constitue

 17   le document 1D3269 reçoit le numéro de pièce à conviction D1102. Et la

 18   déclaration de l'an 2000 devient la pièce à conviction D1103. Il s'agit du

 19   document 1D3268 sur la liste 65 ter. Quant à la page de compte rendu,

 20   document 65 ter numéro 22191, elle devient la pièce à conviction D1104.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Voyons dans quelles conditions vous vous êtes tout à coup rappelé tout

 24   cela avant de témoigner dans l'affaire Krajisnik.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document 22190,

 26   document 65 ter.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Il s'agit des renseignements complémentaires que vous avez fournis au


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  1   Procureur avant de témoigner dans l'affaire Krajisnik. Troisième tiers de

  2   la page à l'écran, je vous prie. Je vais citer le passage --

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il serait préférable que vous décriviez

  4   la nature de ce document au préalable. Quel est exactement ce document ?

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Monsieur le Témoin, vous avez fourni au Procureur des renseignements

  7   complémentaires portant sur vos déclarations antérieures et sur les

  8   événements qui ont suivi le moment où vous avez été fait prisonnier et

  9   incarcéré dans la prison de cette maison sur le mont Planjo. Je vous

 10   demande pour commencer si vous vous rappelez que le 1er novembre 2004, vous

 11   avez fourni, juste avant votre déposition dans l'affaire Krajisnik, une

 12   déclaration complémentaire ?

 13   R.  Je ne peux pas vous dire exactement quelle déclaration j'ai faite à

 14   quel moment, car je n'ai pas tenu de journal intime à ce sujet, mais si

 15   c'est écrit, c'est exact.

 16   Q.  Vous n'êtes pas cité dans ce passage, mais M. Gaynor paraphrase vos

 17   propos. Je vais vous donner lecture de ce texte, vous le commenterez

 18   ensuite. Je cite :

 19   "Pendant sa détention dans la maison de Planjo, il a été témoin d'un

 20   certain nombre d'autres actes de cruauté et d'humiliation commis par des

 21   Chetniks et des gardes de prison. En particulier, il a vu un détenu

 22   contraint de manger des mégots de cigarette et de pratiquer une fellation

 23   sur un autre détenu homme en présence des gardes et d'autres détenus; il a

 24   vu aussi des détenus contraints de plonger à partir d'une clôture de haute

 25   dimension sur un sol en béton."

 26   Alors dans ce document, vous décrivez un certain nombre d'événements dans

 27   le détail et vous portez des accusations graves contre un certain nombre de

 28   personnes. C'est tout à fait effrayant. Mais vous n'avez jamais parlé de


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  1   tout cela dans vos cinq déclarations préalables faites devant les autorités

  2   de Bosnie-Herzégovine et devant le représentant du bureau du Procureur du

  3   TPIY. Vous n'avez jamais évoqué tout cela. Donc tout d'un coup cela vous

  4   revient en mémoire juste avant que vous ne témoigniez contre Momcilo

  5   Krajisnik; c'est bien cela, n'est-ce pas ?

  6   R.  Ce n'est pas exact. Personne ne m'a demandé de parler de tout cela. Les

  7   choses sont très simples. Au début, mon souhait était d'effacer tout cela

  8   de ma mémoire et j'aurais voulu être témoin d'autres événements que ceux-

  9   ci, mais ce que j'ai dit correspond à la vérité. J'étais avec un enquêteur,

 10   je pense que c'était un Australien. Il est arrivé dans la maison de Planjo.

 11   J'ai vu une photographie mardi dernier dans le cadre des séances de

 12   récolement, on m'a montré une photographie de cette maison de Planjo. Et il

 13   y avait aussi cette photographie d'un autobus qu'on m'a montrée qui

 14   concernait le massacre de Sapna [phon]. L'enquêteur m'a demandé quel était

 15   au moment des faits le comportement des gardes à l'égard des détenus. Alors

 16   j'ai raconté ces horribles choses -- excusez-moi. Tout cela était

 17   absolument atroce, tout ce que je lui racontais. C'est terrible, voyez-

 18   vous, de voir quelqu'un sauter de si haut à l'endroit où nous étions, comme

 19   s'il devait nager. Donc ce sont des déclarations que j'ai faites par la

 20   suite et qui ont été intégrées à mes déclarations antérieures.

 21   Q.  Je vois. Donc vous avez été incité à dire ce que vous avez dit par

 22   l'enquêteur australien ?

 23   R.  Non, Monsieur. Il ne m'a incité à rien. Il m'a simplement demandé quel

 24   était le comportement des gardes à l'égard des détenus. Il ne m'a pas forcé

 25   à dire quoi que ce soit. Il m'a simplement demandé de dire ce qui s'était

 26   passé. Vous transformez les choses.

 27   Q.  Pourquoi est-ce que vous n'avez pas dit cela dans vos premières

 28   déclarations devant les autorités de Bosnie-Herzégovine ?


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  1   R.  Devant les autorités de Bosnie-Herzégovine, pour vous dire la vérité,

  2   je ne savais pas à l'époque jusqu'où les choses iraient, et personne ne m'a

  3   vraiment demandé quoi que ce soit. Ils étaient au courant des tortures que

  4   nous avions subies. Monsieur, vous savez tout cela très bien, sauf que vous

  5   essayez d'éluder la vérité. Une prison de Dieu ne serait pas une bonne

  6   prison sans parler d'une prison de Serbes. Je ne dis pas que des prisons

  7   sont meilleures que d'autres, je veux dire, elles sont toutes pareilles.

  8   Q.  Les prisons musulmanes ?

  9   R.  Si la prison de Dieu n'est pas une bonne prison, aucune prison n'est

 10   bonne.

 11   Q.  Très bien. Voyons ce que vous avez dit dans votre déclaration

 12   consolidée qui constitue le document 65 ter --

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ou plutôt, je demande le versement au dossier

 14   de ce document.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Gaynor.

 16   M. GAYNOR : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Mais à quel moment, Monsieur

 18   Mujkic, avez-vous dit à l'enquêteur australien tout ce qui s'était passé

 19   d'horrible pendant votre détention ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous en prie, ne me prenez pas au mot au

 21   sujet des dates, mais en tout cas c'était avant que je vienne ici pour la

 22   première fois en 2004. Nous étions en été, et je suis venu en octobre et

 23   novembre 2004 pour la première fois ici. Donc je ne sais pas exactement

 24   quelle était la date, mais en tout cas c'était l'été et il faisait chaud.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 26   Le document est versé au dossier et devient la pièce D1105.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur Mujkic, est-ce que vous étiez membre de la cellule de Crise


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  1   d'Ahatovici ?

  2   R.  Non. Je n'étais pas membre de la cellule de Crise, je le dis en toute

  3   responsabilité. Mais c'est sur les ordres de la cellule de Crise que je

  4   suis resté dans la caserne de Butile jusqu'au 9 mai. Le 9 mai, je me suis

  5   enfui parce qu'ils voulaient me faire endosser un uniforme et me délivrer

  6   des armes et j'étais empêché de rentrer chez moi. Le 9 mai, il y a eu une

  7   attaque parce que ce jour-là n'a pas été un jour normal à la caserne de

  8   Butile.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie. Revenons sur ce sujet.

 10   Je demande l'affichage du document 65 ter numéro 22188, page 16, grâce au

 11   prétoire électronique.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Il s'agit de votre déclaration faite à l'AID en 1996, n'est-ce pas, AID

 14   étant la police secrète de la partie musulmane de la Bosnie, n'est-ce pas ?

 15   R.  J'ai fait une déclaration au siège de la police. Je veux dire, les

 16   choses sont très simples, je ne m'intéressais pas à savoir qui était qui.

 17   Quant à l'AID, je ne sais pas qui représente l'AID. Les hommes qui étaient

 18   devant moi étaient pour la plupart habillés en civils.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est la page 18 dans la version anglaise et la

 20   page 16 de la version serbe que je voudrais afficher à l'écran.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne suis pas sûr que les interprètes

 22   aient suivi la dernière partie de votre question et de la réponse du

 23   témoin.

 24   Bien, merci.

 25   Veuillez poursuivre.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Donc je demande l'affichage de la page 16 en

 27   serbe et de la page 18 de la version anglaise de cette déclaration, les

 28   deux pages correspondant l'une à l'autre.


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  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Si vous regardez la page serbe, veuillez regarder Delimustafic, je

  3   crois que c'est à la ligne 15. Ça vous permettra de trouver la page en

  4   lettres majuscules. Et ici en anglais, cela se trouve au milieu :

  5   "Le commandant de la TO dit : J'ai informé le commandant de la TO,

  6   Hasan Mujkic, de ceci, à savoir qu'il travaillait sous l'ordre d'Alija

  7   Delimustafic, qui était alors ministre de l'Intérieur. Et il m'a montré un

  8   message reçu par télécopie qui précisait que la caserne de l'armée de

  9   Butile ne devait pas être attaquée. Une information est arrivée quelques

 10   jours plus tard qui précisait que Butile devait être pris. C'était trop

 11   tard parce que nous avons découvert qu'entre-temps les unités

 12   d'intervention des volontaires serbes, appelées les Aigles blancs, étaient

 13   arrivées sur les lieux."

 14   Voyons comment vous expliquez tout ceci dans votre déposition dans

 15   l'affaire Krajisnik. La même chose se produit.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Souvenons-nous de cette page, et maintenant

 17   regardons le numéro 65 ter 22191. Alors 22191, page 150 dans le prétoire

 18   électronique, au niveau du compte rendu d'audience c'est la page 9 240.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Alors regardons la ligne 14 :

 21   "Question : Vous conviendrez avec moi, Monsieur Mujkic, que vous ne

 22   dites rien dans ce texte à propos de cet ordre émanant de Delimustafic, à

 23   savoir que la caserne de l'armée de Butile doit être prise ou on doit en

 24   prendre le contrôle, il s'agissait simplement d'une rumeur qui circulait et

 25   qui avait été circulée par les femmes ?

 26   "Réponse : Cela n'est pas dit ici, mais c'est la vérité, parce que je n'ai

 27   pas vu la deuxième télécopie et la déclaration ne dit rien à ce sujet, que

 28   je l'ai vue.


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  1   "Question : Cette dernière phrase : 'Il était déjà trop tard parce que nous

  2   avons découvert entre-temps.' Qui correspondait à "nous" ?

  3   "Réponse : Toujours la cellule de Crise."

  4   Avez-vous dit cela ?

  5   R.  Je ne me souviens pas si j'ai dit cela ou non. Je ne m'en souviens pas,

  6   c'est un membre de la cellule de Crise. Cependant, je souhaite expliquer

  7   quelque chose et préciser quelque chose devant les Juges de cette Chambre.

  8   Je n'ai dit cela nulle part, et je ne l'ai pas dit auparavant. Six soldats

  9   sont restés dans la caserne de Butile, c'étaient des Albanais de souche.

 10   Ils n'ont pas réussi à quitter la caserne. Un Croate est resté là et je ne

 11   savais pas qu'il était Croate, sinon je l'aurais fait sortir parce que

 12   j'avais réussi à faire sortir cinq Croates.

 13   Pendant la nuit, parce que c'était mon messager, j'étais mécanicien

 14   et la boulangerie à Butile devait fonctionner normalement, et ce messager

 15   venait me voir toutes les fois que cela lui était possible et il

 16   m'apportait des nouvelles sur ce qui se passait. Ensuite il a dit : La

 17   caserne peut être prise parce que Nikola Soput, son unité est partie et il

 18   ne reste que quelques réservistes soûls. J'en ai parlé à Hasan Mujkic. Il a

 19   envoyé une télécopie à Delimustafic. La télécopie est revenue en disant :

 20   "Ne touchez pas à la caserne de Butile." Nous avons vu cela, et je vous

 21   assure que c'est ainsi que les choses se sont passées.

 22   Peu de temps après, trois, quatre, voire cinq jours plus tard, Hasan

 23   m'a appelé et m'a dit qu'une télécopie était arrivée, qu'il fallait prendre

 24   la caserne. Un soldat n'a pas pu venir me voir après cela. Moi j'ai dit :

 25   Je n'y retourne plus. Et voilà, ça s'est arrêté là.

 26   Q.  Merci. La cellule de Crise d'Ahatovici, est-ce qu'elle a placé des

 27   barrages routiers ?

 28   R.  Nous n'avons pas érigé de barrages routiers, mais nous avions trois


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  1   tranchées en face de nous, parce que Ahatovici et Dobrosevici sont séparés

  2   par une route, et nous sommes à 50 mètres de la route. C'est là que nous

  3   avions trois tranchées où il y avait des armes. Les gens venaient là par

  4   équipes, les armes restaient sur place, mais nous n'avions pas de barrages

  5   routiers, non.

  6   Q.  On peut lire ici que vous avez bloqué l'accès à Ahatovici et

  7   Dobrosevici, et ceci suite à un ordre émanant de la cellule de Crise ?

  8   R.  Non, ceci n'est pas exact, parce que Dobrosevici était surtout habité

  9   par les Serbes, donc je n'aurais pas pu placer un barrage routier devant

 10   une maison serbe.

 11   Q.  Bien. Alors, regardons ceci maintenant ---

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir un numéro pour

 13   cette page du compte rendu d'audience que nous venons d'afficher, page de

 14   compte rendu d'audience de l'affaire Krajisnik, 9 240.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Souhaitez-vous en demander le versement

 16   ?

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, s'il vous plaît.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous devons l'ajouter au

 19   compte rendu d'audience qui existe déjà ou souhaitez-vous le verser

 20   séparément ?

 21   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons l'ajouter au document

 23   précédent, qui est le D1104.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Vous dites que vous n'avez pas bloqué l'accès à Ahatovici et

 26   Dobrosevici parce que Dobrosevici était majoritairement habité par des

 27   Serbes; c'est exact ?

 28   R.  J'ai dit que je ne faisais pas partie de la cellule de Crise. Je ne


Page 12418

  1   pouvais rien faire de plus. Pour ce qui est des barrages routiers, je ne

  2   sais pas. Ma maison se trouve à l'entrée d'Ahatovici, et de l'autre côté en

  3   face se trouve la localité de Dobrosevici. Mes voisins de l'autre côté de

  4   la route étaient des Serbes. Ma maison se trouvait sur la droite. Il n'y

  5   avait pas de barrages routiers à cet endroit-là, hormis deux barrages

  6   routiers qui se trouvaient à Reljevo et Bojnik, au niveau de ces ponts.

  7   C'étaient les grandes artères qui menaient la ville. Alors quelle est

  8   l'utilité des barrages routiers si on ne peut pas se rendre en ville ?

  9   Pourquoi irais-je à Dobrosevici ?

 10   Q.  A la ligne 21 -- page 21, ligne 26 du compte rendu d'audience

 11   d'aujourd'hui, vous avez dit :

 12   "Il ne m'était pas possible de me rendre devant les maisons serbes et d'y

 13   placer un barrage routier."

 14   Regardons ce que vous avez dit dans votre déclaration de 1996. Il s'agit du

 15   même numéro 65 ter 22188, à la page 15 et page 17 en anglais. 65 ter 22188.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons demander le versement

 17   au dossier de la page 16 ? Nous pouvons l'ajouter au même document ayant la

 18   même cote, page 16 où nous vous avons parlé de Delimustafic.

 19   M. GAYNOR : [interprétation] Monsieur le Président, compte tenu du fait que

 20   l'accusé présente un certain nombre de pages de cette déclaration au

 21   témoin, je fais valoir que la chose la plus aisée serait de verser la

 22   déclaration dans son intégralité et les déclarations préalables qui ont été

 23   montrées au témoin par l'accusé.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il me faudrait beaucoup plus de temps pour mon

 25   contre-interrogatoire dans ce cas, parce qu'à ce moment-là il faudrait que

 26   je jette la lumière sur d'autres aspects de sa déposition. Si vous

 27   m'accordez plus de temps, cela ne me pose pas problème, tout ce qui

 28   m'intéresse c'est ce que je cite dans le prétoire.


Page 12419

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Ecoutez, nous n'avons pas admis

  2   tant de pages jusqu'à présent, donc nous allons poursuivre de cette

  3   manière. Cette page sera ajoutée.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors regardons la page 17 de l'anglais, s'il

  5   vous plaît, de façon à ce que chacun puisse voir cette page et voir ce dont

  6   il s'agit. En serbe, cela devrait être la page 17; page 3 de la

  7   déclaration. Ce que je vois ici c'est la page 5, en réalité. Cela devrait

  8   être en page 3 dans la version serbe, et dans la version anglaise -- en

  9   réalité, c'est la page 15 dans le prétoire électronique en serbe, page 15

 10   en serbe. En anglais, page 17 dans le prétoire électronique.

 11   Merci, alors affichons la page qui correspond en anglais. Page 17

 12   dans le prétoire électronique, c'est en réalité la page 4 de la déclaration

 13   en tant que telle. Oui, ce sont les mêmes pages qui ont été affichées.

 14   Le dernier paragraphe en anglais, et nous allons voir à quel endroit

 15   ceci se trouve dans le texte en serbe. Le un tiers du bas. On peut lire :

 16   "Des Serbes armés ont érigé des barrages routiers le long des routes au

 17   début du mois de mars déjà en guise d'introduction à des activités de

 18   guerre, et ils contrôlaient la circulation ainsi que les passagers en les

 19   maltraitant constamment. En guise de réponse à leurs actions, nous avons

 20   également mis en place des postes de contrôle dans les villages d'Ahatovici

 21   et Dobrosevici…"

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Avez-vous dit cela, Monsieur ?

 24   R.  Ecoutez, je n'aurais pas pu dire quelque chose de la sorte parce que je

 25   ne faisais pas partie de la cellule de Crise. Ahatovici n'est pas

 26   simplement l'endroit où se trouve ma maison, c'est une région au sens plus

 27   large du terme, et il serait inutile de mettre en place des postes de

 28   contrôle à Dobrosevici parce qu'il y avait des barrages routiers déjà sur


Page 12420

  1   les deux ponts les plus importants. Toute personne qui passait par là

  2   serait maltraitée, et toutes les entrées et les sorties étaient contrôlées.

  3   Q.  Mais dans votre déclaration, vous dites avoir érigé un barrage routier

  4   devant Dobrosevici. Est-ce que quelqu'un a modifié ces déclarations, est-ce

  5   que vous maintenez ce que vous dites ici ?

  6   R.  C'est impossible que ceci soit érigé à Dobrosevici. C'est serbe de

  7   Dobrosevici à Ahatovici, il n'y a que des maisons serbes. Et comme je l'ai

  8   dit avant, je ne peux pas me placer devant une maison serbe et y ériger un

  9   barrage.

 10   Q.  Bien. Alors nous allons voir un peu plus tard comment tout ceci a

 11   évolué.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors regardons le numéro 65 ter 90219, et est-

 13   ce que nous pouvons ajouter cette page, s'il vous plaît ?

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci a déjà été versé au dossier, n'est-

 15   ce pas ? Ou non ? Une partie seulement.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne pense pas.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous nous donner le numéro de

 18   la page en question de ce document que nous avons déjà versé au dossier ?

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous avons demandé le versement au dossier de

 20   la page 16 en serbe et de la page 18 en anglais. Et maintenant, nous avons

 21   la page 15 en serbe et la page 17 en anglais. M. LE JUGE KWON :

 22   [interprétation] Donc, nous verserons au dossier les pages 16 à 18. Cela

 23   étant dit, je ne vois pas en quoi ceci pose un quelconque problème. Nous

 24   allons accepter le versement au dossier de ces pages.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons regarder le numéro 65

 26   ter 90219. Il s'agit de votre déclaration consolidée, paragraphes 35 à 38

 27   en anglais. Oui, cette déclaration consolidée est en anglais. Numéro 65 ter

 28   90219, déclaration consolidée de M. Mujkic, paragraphes 35 à 38.


Page 12421

  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Ici, vous décrivez les événements de Gornja Bioca. Vous vous souvenez

  3   avoir décrit ces événements à cette page de votre déclaration ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Alors, regardons le paragraphe 36. On peut lire :

  6   "Malheureusement, nous n'avons pas pu rejoindre notre groupe. Au lieu de

  7   cela, j'ai rencontré les Serbes près du village de Gornja Bioca, dont le

  8   village avait été pris et qui maintenant avançait vers le nord. Il

  9   s'agissait des voix des soldats serbes qui quittaient Ilijas. D'après leur

 10   accent et les jurons qu'ils proféraient, je réalisais qu'il s'agissait de

 11   l'armée serbe."

 12   Donc ici, vous affirmez devant ce Tribunal, dans cette déclaration, que

 13   vous étiez personnellement à cet endroit-là à ce moment-là et que vous en

 14   avez conclu que c'étaient des soldats serbes parce qu'ils proféraient des

 15   jurons ?

 16   R.  Je sais tout à fait comment les soldats serbes s'expriment. J'y suis

 17   né. J'avais 44 ans et j'y avais vécu toute ma vie, donc je connais fort

 18   bien cette façon de parler.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] La réponse commence par "Oui," aux fins du

 20   compte rendu d'audience. Est-ce que nous pouvons remarquer que le témoin a

 21   tout d'abord dit "Oui," au début de sa réponse.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Est-ce exact ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Les autres soldats ne jurent pas; c'est cela ?

 26   R.  Madame, Messieurs les Juges, je peux m'expliquer. Par exemple,

 27   quelqu'un qui prononce le mot "pain" d'une autre façon ne dirait pas

 28   "hleb", mais dirait "leb". C'est quelque chose que j'ai entendu lorsque je


Page 12422

  1   suis arrivé à cet endroit-là, et je le savais parce qu'ils ne prononçaient

  2   pas les H. Les maisons étaient vides et il n'y avait personne à cet

  3   endroit-là. Bioca avait été occupée la veille, donc ces forces ont commencé

  4   à se déplacer d'Ahatovici en direction du nord.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons nous faire une pause, si

  6   cela vous convient.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Une simple question pour que je puisse en

  8   terminer avec ce sujet.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Dans votre déposition --

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous demander le versement au dossier

 12   de ce document, s'il vous plaît ?

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci correspond à la déclaration

 14   consolidée me semble-t-il ?

 15   M. GAYNOR : [interprétation] Oui, c'est la pièce P124 [comme interprété].

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous voir le numéro 65 ter maintenant,

 17   22191, de façon à ce que nous puissions voir ce que vous avez déclaré dans

 18   l'affaire Krajisnik. Numéro 65 ter 22191, page 25 du prétoire électronique.

 19   Et au compte rendu d'audience, cela se trouve à la page 7 946, ligne 10 :

 20   "Le 22 août, je suis venu de l'hôpital de Zica Blazuj, la municipalité

 21   d'Ilijas, à Planjina Kuca, la --."

 22   "Question : Maintenant, Monsieur, vous avez dit que la population de Gornji

 23   Bioca avait été emmenée à l'école de Donja Bioca. Qui les a emmenés ?"

 24   "Réponse : Messieurs les Juges, je ne peux pas vous le dire -- ou plutôt,

 25   sur la base de ce qui m'ont dit et d'après ce qui a été fait par les

 26   soldats serbes, d'après eux, les unités de la municipalité d'Ilijas, en

 27   réalité -- je ne peux faire aucun commentaire et je ne peux donner aucune

 28   assurance, je ne l'ai pas vu moi-même. Mais ce que j'ai vu…"


Page 12423

  1   Et cetera.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Donc rien n'est dit ici à propos de jurons ou du fait que vous avez

  4   entendu cela et que vous avez pu reconnaître la façon dont parlaient les

  5   soldats serbes ?

  6   R.  Madame, Messieurs les Juges, on ne peut pas en parler de cette façon.

  7   Trois mois après cela, j'ai entendu ces jurons; le 31 mai 1992. Je ne suis

  8   pas tout à fait sûr de la date.

  9   Mais pour ce qui est des personnes à Semizovac, en prison --

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

 11   Monsieur Gaynor.

 12   M. GAYNOR : [interprétation] En fait, je peux vous poser cette question

 13   lors des questions supplémentaires, mais si l'accusé va présenter cette

 14   partie-là de la déclaration au témoin, il devrait aller un peu plus loin,

 15   retrouver la réponse et présenter le reste de ce passage au témoin. Je

 16   pense qu'il sait de quoi je parle. Tout simplement les trois phrases

 17   suivantes, s'il peut les présenter au témoin pour être juste envers le

 18   témoin.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, regardons cela :

 20   "Ce que j'ai vu et ce qui m'est arrivé, eh bien, ces soldats serbes

 21   qui avaient déjà déblayé Bioca et qui s'étaient dirigés en direction

 22   d'Ahatovici. Il y avait un ordre à cet effet. Je n'ai pas vu cela à

 23   proprement parler, mais d'après ce qu'ils disaient, oui, parce que la 3e

 24   unité n'était pas là, l'unité qui aurait pu faire cela."

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Eh bien, c'est toute la réponse et elle est différente de ce que

 27   vous avez dit au paragraphe 36 de la déclaration consolidée, n'est-ce pas ?

 28   R.  Vous avez mélangé beaucoup de choses ici. Je comprends que c'est dans


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  1   votre intérêt de mélanger les choses, mais vous ne pouvez pas mélanger les

  2   choses, parce que je vais tout donner dans un ordre chronologique en

  3   fonction des dates et à la manière dont les événements se sont déroulés.

  4   J'ai vécu cela, c'est ma vie. Personne ne m'a couché ceci sur papier pour

  5   que je l'apprenne par cœur.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Votre Excellence, il me faut vraiment du temps

  7   supplémentaire, je suis très frustré par ce manque de temps. Nous pouvons

  8   faire la pause maintenant, mais je souhaite avoir un volet d'audience

  9   entier, s'il vous plaît.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons ajouter cette page à la

 11   pièce 1104.

 12   Et nous allons faire une pause de 20 minutes, et nous reprenons à 16 heures

 13   07.

 14   --- L'audience est suspendue à 15 heures 41.

 15   --- L'audience est reprise à 16 heures 10.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Karadzic.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 18   D'après le document 22188, numéro 65 ter, est-ce que nous pouvons

 19   afficher les pages --

 20   L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine anglaise demande à l'accusé de

 21   bien vouloir répéter le numéro des pages.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Numéros de pages, s'il vous plaît.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il s'agit des pages du prétoire électronique 19

 24   et 22, en serbe et en anglais respectivement. La deuxième partie est le

 25   numéro 10 et 11, en serbe et en anglais respectivement.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avez-vous dit que vous souhaitiez

 27   demander le versement au dossier de ces pages ?

 28   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]


Page 12425

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ces pages seront ajoutées au document

  2   qui porte une cote.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur Mujkic, vous êtes né en 1948; est-ce exact ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Etes-vous né à Ahatovici ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Ahatovici était-ce dans la municipalité de Rajlovac à l'époque, ou est-

  9   ce que c'est le district de Rajlovac, qui ensuite a été transformé en

 10   municipalité ?

 11   R.  D'après ce que je sais, nous faisions partie de la municipalité de Novo

 12   Sarajevo. Mais lorsque la municipalité de Novi Grad a été créée, qui est à

 13   une dizaine de kilomètres de Sarajevo nord, nous avons à ce moment-là fait

 14   partie de Novi Grad, étaient rattachés à Novi Grad.

 15   Q.  Savez-vous que jusqu'à 1958, lorsque vous aviez 10 ans, Rajlovac était

 16   une municipalité, et Ahatovici faisait partie de cette municipalité ?

 17   R.  Je ne m'en souviens pas. Un enfant de 10 ans ne sait pas forcément dans

 18   quelle municipalité ou district il habite.

 19   M. GAYNOR : [interprétation] Je soulève une objection. Ceci n'a aucune

 20   pertinence.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je afficher le document 1D03259.

 22   Votre Excellence, je souhaite vous rappeler que Donia, ainsi que d'autres

 23   témoins, y compris ce témoin-ci, se sont opposés à l'établissement de la

 24   municipalité serbe de Rajlovac. Nous faisons valoir que c'était une

 25   municipalité, que cette municipalité a été supprimée et est devenue très

 26   pauvre parce que toutes les ressources de la municipalité ont été déplacées

 27   et laissées à Novi Grad.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


Page 12426

  1   Q.  Alors, qu'est-ce qu'on peut lire sur votre acte de naissance ?

  2   R.  Que je suis né à Ahatovici, dans ce village, et que j'étais un citoyen

  3   de la Bosnie-Herzégovine.

  4   Q.  Et de quelle municipalité ?

  5   R.  De la municipalité de Novi Grad. Il est vrai qu'il y avait un bureau

  6   d'Etat civil à Rajlovac et que tous les dossiers ont été déplacés à Pale.

  7   Je sais cela parce que je travaillais à Novi Grad, dans cette municipalité,

  8   et je connais la procédure adoptée. Même la FORPRONU a dû intervenir pour

  9   que ces dossiers soient renvoyés à la municipalité de Novi Grad, où ces

 10   dossiers devaient être.

 11   Q.  La municipalité de Rajlovac n'a jamais existé.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, qu'est ce document ?

 13   Pourquoi n'avons-nous pas de traduction anglaise de ce document ?

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous n'avons pas eu le temps de le faire

 15   traduire, Votre Excellence. Nous avons fait traduire tout l'entretien, mais

 16   je souhaitais demander à l'interview si M. Mujkic savait que la

 17   municipalité de Rajlovac avait existé jusqu'à 1958.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Il y avait un centre de distribution, une usine, un Sarajevo Gaz, gaz

 20   de Sarajevo, ainsi que d'autres entreprises importantes sur le plan

 21   économique.

 22   R.  De ce que je sais, Orao se trouve dans le périmètre de la caserne de

 23   Rajlovac et faisait partie de l'enceinte militaire, donc ne relevait jamais

 24   des autorités civiles. Le centre de distribution a été construit dans les

 25   années 1980. C'était une coopérative agricole, et il n'y avait que des

 26   champs et il y avait environ 50 maisons à cet endroit-là, et la terre qui

 27   avait été prise aux agriculteurs, conformément au décret de Tito, ces

 28   terres avaient été remises à la coopérative.


Page 12427

  1   Q.  Vous pouvez dire ce que vous voulez, cette municipalité est redevenue

  2   une municipalité février 1992, avant la guerre.

  3   R.  Cher Monsieur, il y avait des barrages à l'époque. Les premiers

  4   barrages ont été érigés au mois de janvier sur le pont de Raljevo, et aucun

  5   Musulman ne pouvait passer. Il n'y a que 300 mètres qui séparent le pont du

  6   centre de distribution, où se trouvait votre municipalité en temps de

  7   guerre. En tant que secrétaire de la commune locale en 1986, j'avais moi-

  8   même un bureau dans ce centre de distribution. Parce que tout ce qui était

  9   de l'autre côté du pont avait été détruit, et il était impossible de se

 10   déplacer en raison des mines antipersonnel, et jusqu'à ce qu'une équipe

 11   déclare qu'il n'y avait aucune mine antipersonnel.

 12   Q.  Vous niez qu'il s'agissait d'une municipalité, ce texte dit le

 13   contraire.

 14   R.  C'était la guerre. Je ne pouvais pas m'y rendre. Je n'en ai jamais

 15   parlé, je ne souhaite pas en parler.

 16   Q.  Vous dites que la société Orao n'était pas une société civile ?

 17   R.  Orao faisait partie d'une structure militaire. Elle se trouvait dans le

 18   périmètre de la caserne de Rajlovac.

 19   Q.  Dans votre déclaration du 22 juin 1997, à la page 2, vous avez dit

 20   qu'Oaro était une entreprise civile dirigée par les militaires.

 21   R.  Eh bien, c'est une seule et même chose, c'est simplement exprimé

 22   différent. Et cela faisait partie de la caserne, et personne n'y avait

 23   accès hormis -- oui, on devait passer par le portail central où les gens

 24   qui y entraient pour y travailler et en ressortaient.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Donc, nous allons demander le versement au

 26   dossier de cette interview et demander une cote provisoire, que ce document

 27   soit marqué aux fins d'identifications.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Lorsque je vous ai demandé pourquoi nous


Page 12428

  1   n'avons pas de traduction anglaise de ce document, vous nous avez dit que

  2   vous souhaitiez poser la question au témoin, question qui n'a absolument

  3   rien à voir avec cette interview ici. A maintes reprises, les Juges de la

  4   Chambre vous a-t-on averti du fait qu'il est important que vous deviez

  5   avoir des traductions de tous les documents que vous présentez dans le

  6   prétoire. Je crois que nous avons fait preuve de beaucoup de générosité.

  7   Nous vous avons permis jusqu'à présent d'utiliser des documents qui n'ont

  8   pas été traduits, et je vous conseille de mieux organiser votre équipe et

  9   d'utiliser le système de traduction du Tribunal, vous permettant de

 10   retrouver les documents traduits également.

 11   Veuillez tenir compte de mes conseils, car la prochaine fois, nous

 12   vous empêcherons peut-être d'utiliser des documents qui n'ont pas été

 13   traduits.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. J'entends bien et je l'admets, mais je

 15   dois dire que le rythme qui est le mien est difficile à maintenir et tout

 16   va très vite.

 17   A savoir si la municipalité de Rajlovac a été créée pour des raisons

 18   politiques ou économiques est quelque chose qui a été soulevé par

 19   l'Accusation dans le cadre de la déposition du témoin Donia, et ce témoin-

 20   là en a également parlé. Je crois que l'Accusation a estimé que ce n'était

 21   ni agréable ni acceptable.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et à cet égard, est-ce que le témoin a

 23   dit quelque chose à ce sujet ?

 24   Monsieur Gaynor.

 25   M. GAYNOR : [interprétation] Je suis d'accord, Monsieur le Président.

 26   Je ne suis pas en mesure de commenter ceci. Je ne sais pas ce que dit cet

 27   article, mais je ne pense pas que le témoin a dit quelque chose permettant

 28   de confirmer la teneur de cet article.


Page 12429

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Poursuivons.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur Mujkic, vous travailliez en tant que civil dans l'armée

  5   populaire yougoslave; est-ce exact ?

  6   R.  Oui, à partir du 1er octobre 1967.

  7   Q.  Merci. Et en tant que salarié de la JNA, aviez-vous des obligations

  8   envers cette armée en matière de loyauté, confidentialité, et cetera ?

  9   R.  Oui, tant que c'était l'armée populaire yougoslave.

 10   Q.  A quel moment avez-vous décidé qu'il ne s'agissait plus de l'armée

 11   populaire yougoslave et que vous ne leur deviez plus aucune allégeance ou

 12   que vous deviez respecter les règles de service ?

 13   R.  Lorsque la Yougoslavie commençait à être démantelée, tout d'abord, cela

 14   s'appelait la Yougoslavie tronquée, et le comportement des officiers, des

 15   membres de l'armée, des soldats, était complètement perturbé. Lorsqu'ils

 16   ont enlevé l'étoile à cinq branches et qu'ils l'ont remplacée par le signe

 17   de l'armée serbe, ce n'était plus l'armée populaire yougoslave, à mes yeux.

 18   Q.  Etait-ce en septembre 1991 ?

 19   R.  Je sais que vous aimez citer des dates, mais je ne peux pas vous le

 20   confirmer. C'était vers la fin de l'année 1991.

 21   Q.  Avez-vous, en septembre 1991, convaincu votre fils de déserter la JNA ?

 22   R.  Oui, j'ai réussi à le faire sortir de Sremska Mitrovica. C'était ma

 23   troisième tentative pour le faire sortir, parce qu'il conduisait les hommes

 24   de Seselj en direction de Vukovar et Vinkovci et il était l'objet de toutes

 25   les risées parce qu'il avait une drôle d'apparence avec sa cocarde. En

 26   septembre 1991, personnellement, je l'ai fait sortir de l'armée.

 27   Q.  En septembre 1991, les Serbes portaient des cocardes -- les hommes de

 28   l'armée populaire yougoslave portaient des cocardes ?


Page 12430

  1   R.  En Croatie, oui.

  2   Q.  Ça, c'est quelque chose que je viens d'apprendre, Monsieur Mujkic.

  3   R.  Je pense que vous savez cela très bien.

  4   Q.  Et pourquoi ne l'avez-vous pas évoqué plus tôt ? Plutôt, pourquoi

  5   l'avez-vous persuadé de quitter la JNA en septembre ?

  6   R.  Il servait dans l'armée à Topci [phon], à Belgrade, et ensuite, il a

  7   quitté le convoi de 18 kilomètres. Je ne l'ai pas vu personnellement. Je

  8   l'ai vu à la télévision seulement. Son unité était cantonnée à Sremska

  9   Mitrovica. Il s'agissait d'opérations de combat contre la Croatie et

 10   Vukovar. Je ne sais pas qui permettrait à son propre fils d'aller se battre

 11   dans l'intérêt d'autres personnes.

 12   Q.  A ce moment-là, la Bosnie faisait toujours partie de la Yougoslavie et

 13   aucune décision n'avait été prise pour faire sécession, et ce pays n'avait

 14   pas été reconnu ?

 15   R.  Je ne faisais pas partie de la présidence de Bosnie, donc je ne

 16   souhaite pas me rappeler tout ceci. Je n'ai pas participé à cela. Je ne

 17   souhaite pas répondre à cette question.

 18   Q.  Dans cette même déclaration de 1997, à la page 3, vous dites ceci

 19   lorsque vous travaillez à la caserne :

 20   "Parce que j'étais Musulman, j'essayais de ne pas remarquer trop de choses,

 21   mais à plusieurs reprises j'ai vu des gens arriver à bord de véhicules, et

 22   ce, à dix occasions."

 23   Est-ce que vous avez fait exprès de remarquer le moins de choses possible ?

 24   R.  Conformément à un ordre émanant de la cellule de Crise, je suis resté

 25   dans la caserne jusqu'au 9 mai. Et pour votre gouverne, je ne figurais pas

 26   sur le bulletin de salaire pour les mois de mars et avril parce que nous

 27   recevions nos salaires en argent liquide et cela ne transitait pas par la

 28   banque ou sur un compte épargne. Je suis resté là parce que je souhaitais


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  1   voir ce qui se passait. La caserne de Butile était juste à côté et tout

  2   avait l'air normal jusqu'à ce que Nikola Soput arrive, l'unité de la Police

  3   militaire, et à ce moment-là tout a commencé à aller à volo.

  4   Q.  Conformément à l'ordre de la cellule de Crise, vous êtes resté là pour

  5   pouvoir espionner l'armée pour laquelle vous travailliez en tant que civil

  6   ?

  7   R.  Dès qu'ils ont retiré leur étoile à cinq branches, cela n'était plus

  8   l'armée pour laquelle je travaillais. L'armée est devenue une armée serbe à

  9   partir de ce moment-là. Pour votre information, c'est quelque chose que

 10   vous savez fort bien, les soldats et officiers croates ont quitté l'armée

 11   et les gens du Kosovo ont également quitté l'armée pour autant que cela

 12   soit possible pour eux, parce qu'il leur était difficile d'atteindre le

 13   Kosovo. Les Musulmans quittaient l'armée en masse également, et je

 14   connaissais un électricien qui travaillait à la boulangerie, Nikola Soput,

 15   il m'a dit personnellement : Assure-toi du fait qu'il y ait assez de pain

 16   pour chaque soldat et pour le reste, ne t'en préoccupe pas. C'est ce que je

 17   déclare.

 18   Q.  Monsieur Mujkic, il y a un instant, vous avez dit que vous êtes resté

 19   sur un ordre de la cellule de Crise et c'est quelque chose que vous avez

 20   répété dans votre déclaration de 1996, vous avez dit que l'objet de ceci

 21   était d'informer la TO d'Ahatovici de l'évolution de la situation dans la

 22   caserne; c'est exact ?

 23   R.  Eh bien oui, c'est cela, et je ne m'en cache pas.

 24   Q.  Merci. Vous avez dit que les gens d'Ahatovici, en février 1992, ce qui

 25   veut dire avant les élections et avant les barrages, ont instauré des

 26   contrôles de nuit et qu'ils se préparaient à la guerre. Ils n'avaient pas

 27   suffisamment d'armes, mais néanmoins, vous disposiez de positions

 28   permanentes, de tranchées et prés autour des villages.


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  1   R.  Vous avez énuméré tellement de choses, je ne me souviens pas d'avoir

  2   dit quelque chose dans ce sens. Mais il est vrai qu'il y avait trois

  3   tranchées en face d'Ahatovici avec des fusils automatiques et des personnes

  4   qui se relevaient, parce que les armes qui restaient étaient des armes de

  5   chasse ou des fusils improvisés avec des tuyaux d'eau. Pour ce qui est de

  6   ces abris ou de ces casernes, je ne sais rien à ce sujet.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir cette

  8   déclaration, qui est le numéro 65 ter 22188 de 1997. C'est à la page 3 dans

  9   la version papier. Je ne sais pas à quelle page cela correspond dans le

 10   prétoire électronique.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  En attendant, Monsieur Mujkic, est-ce que nous pouvons être d'accord

 13   pour dire que le premier barrage a été érigé le 1er ou le 2 mars 1992 ?

 14   R.  Vous pensez à quel barrage ? Parce que vous allez à gauche et à droite,

 15   je ne sais pas exactement ce que vous voulez dire. De quel barrage voulez-

 16   vous parler ?

 17   Q.  Le premier barrage érigé par les Serbes, le 1er mars, après l'assassinat

 18   d'un membre, d'un Serbe lors d'un mariage à Sarajevo.

 19   R.  Je ne souhaite pas parler de Sarajevo. Je devais me rendre dans la

 20   ville. Ma maison se trouvait sur la rive gauche de la rivière. Je ne me

 21   suis pas rendu dans la ville ces jours-là parce que c'était risqué et, par

 22   conséquent, je ne vais pas répondre à cette question.

 23   Pour ce qui est des barrages au niveau du pont, il est vrai que ces

 24   barrages ont été érigés, et au début on pouvait encore passer. Mais plus

 25   tard, les bus et les transports publics arrêtaient les gens, et il y avait

 26   des contrôles d'identité.

 27   Q.  Les contrôles se faisaient au mois d'avril, après la guerre à Sarajevo,

 28   n'est-ce pas ?


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  1   R.  Oui. C'était au mois de mars aussi, Monsieur. En février, le barrage au

  2   niveau du pont de Raljevo avait déjà été érigé. Mais comment vais-je vous

  3   le dire ? Aucun Musulman ne pouvait passer à ce niveau-là.

  4   Q.  Et pourquoi il n'y a jamais eu de rapport officiel dans les médias ou

  5   autres là-dessus, qu'il y avait les barrages, Monsieur Mujkic ? Comment se

  6   fait-il qu'il n'y ait aucun barrage ?

  7   R.  Je vous l'ai déjà dit. Je vous ai déjà dit où je travaillais, et j'y

  8   travaillais en tant qu'électricien. Je n'étais pas journaliste, je n'étais

  9   pas censé envoyer des rapports ou des reportages aux médias.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Numéro 65 ter --

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Essayons la page 8.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Cela se trouve dans la liasse de documents 92

 13   bis 22198.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je voulais parler du B/C/S et la page

 15   suivante en anglais; c'est cela ?

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, merci.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Je vous demande de bien vouloir regarder ceci :

 19   "Les personnes du village d'Ahatovici…"

 20   Le quatrième paragraphe à partir du haut : 

 21   "Les personnes du village d'Ahatovici ont introduit, en février 1992, des

 22   patrouilles de nuit après que les réservistes serbes aient érigé un poste

 23   de contrôle le long de la Bosna à côté de la caserne."

 24   Y avait-il des réservistes serbes à cet endroit-là en février 1992 ou

 25   s'agissait-il dans ce cas de la JNA de façon tout à fait légitime en

 26   Bosnie, puisque la Bosnie faisait partie de la Yougoslavie ?

 27   R.  Eh bien, les soldats qui faisaient leur service militaire ont été

 28   prolongés de trois mois, et de six mois, parce que de nouveaux soldats


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  1   n'arrivaient pas. A l'époque, des réservistes sont venus et ces réservistes

  2   étaient armés. Certains sont restés à la caserne. Les tireurs isolés sont

  3   allés à l'extérieur de la caserne, on leur a remis des uniformes de

  4   camouflage et des fusils de précision, et ils ont quitté la caserne. Et je

  5   crois que je peux dire en toute connaissance de cause que ces réservistes,

  6   à la fin du mois de février, étaient là, et au début du mois de mars dans

  7   la caserne de Butile.

  8   Q.  -- et Karavelic ? Je ne sais pas, est-ce qu'il était toujours au

  9   commandement du 2e District région militaire ou du 4e Corps de Sarajevo ?

 10   R.  Je ne sais pas à propos de Karavelic. Il y avait Enver et pour votre

 11   information, je vais vous dire que c'est moi ai fait sortir sa voiture. Il

 12   avait une nouvelle Skoda T' cette voiture n'avait que 2 000 miles au

 13   compteur. Il s'est éloigné du portail et il n'y avait pas de gardien. Mais

 14   devant la rivière Bosna, je lui ai remis sa voiture, nous nous sommes dits

 15   au revoir et je ne l'ai jamais revu. Je ne sais rien au sujet des autres.

 16   Je ne suis pas allé les voir.

 17   Q.  Merci. Veuillez regarder ce même paragraphe, c'est ce que vous dites --

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Page suivante pour l'anglais, s'il vous

 19   plaît.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Au niveau de ce même paragraphe, vous dites :

 22   "Après le mois d'avril 1992, les Musulmans n'étaient pas autorisés à passer

 23   du tout."

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Page précédente, page 3 --

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est la même chose en serbe. C'est le même

 26   paragraphe.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  "Le village d'Ahatovici…"


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  1   Est-ce que vous voyez cela :

  2   "Tout d'abord, ils ne contrôlaient personne. Ensuite, ils ont

  3   commencé à procéder à des vérifications aléatoires. A partir du mois

  4   d'avril 1992, les Musulmans n'étaient pas autorisés à passer par là du

  5   tout. Les Serbes, néanmoins, pouvaient passer des postes de contrôle à tout

  6   moment. Ce poste de contrôle ne m'a pas empêché d'atteindre mon lieu de

  7   travail, mais je n'ai pas pu atteindre Sarajevo."

  8   Est-ce que vous saviez qu'après le 5 avril, des lignes de front ont

  9   été établies à Sarajevo, et c'est la raison pour laquelle vous n'avez pas

 10   pu atteindre Sarajevo ?

 11   R.  Je le dis maintenant et je vais le redire : je n'avais pas besoin de me

 12   rendre à Sarajevo, parce que la caserne n'était qu'à 2 kilomètres de chez

 13   moi sur la rive gauche de la Bosna. Donc je n'avais pas besoin de passer

 14   par ce poste de contrôle, et pour ce qui est de Sarajevo, lorsque les

 15   lignes de front ont été établies, c'est quelque chose que vous devriez

 16   savoir parce que c'est vous qui avez organisé cela.

 17   Q.  Nous allons laisser de côté vos remarques. Regardons le paragraphe

 18   suivant.

 19   "Nous avons fait des patrouilles et les patrouilles n'étaient

 20   effectuées que la nuit."

 21   Regardez maintenant ce qui est écrit ici :

 22   "Il n'y avait aucune coordination avec les unités plus grandes, elles

 23   étaient mal armées, elles n'avaient pas de position permanente autour du

 24   village."

 25   Donc la TO n'était pas bien armée mais elle avait quelques positions

 26   permanentes autour des villages, des tranchées. On avait construit tout

 27   cela dans le but de faire la guerre ?

 28   R.  Il n'y avait absolument pas de tranchées ou de -- il y avait des


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  1   tranchées, d'accord, mais pas de bunker. Tout le monde sait ce qu'est une

  2   tranchée, on peut mettre une bâche au-dessus de la tranchée pour qu'il ne

  3   pleuve plus dessus. Ça, je veux bien, mais en tout cas les obusiers, les

  4   mortiers, et cetera, nous n'avions pas ce type d'armes.

  5   Q.  Mais qu'est-ce que vous saviez alors, Monsieur Mujkic ? Que saviez-vous

  6   que d'autres personnes ne savaient pas ? Pourquoi avez-vous envoyé votre

  7   fille en Allemagne en avril 1992 ?

  8   R.  Je l'ai fait parce que je regardais la télévision tous les soirs.

  9   Q.  Vous avez envoyé votre fille en Allemagne et votre fils, lui, est resté

 10   dans la Défense territoriale, n'est-ce pas ?

 11   R.  Je l'ai supplié, mais il m'a dit : Ecoute, les Chetniks vont venir, tu

 12   ne sais pas à quoi ressemblent les Chetniks, ils m'ont mis une cocarde sur

 13   la tête, et cetera. Et sachez que je ne sais même pas encore où sont ses

 14   ossements à l'heure actuelle. Je n'ai toujours pas retrouvé ses restes.

 15   Q.  Très bien. Les gens ont-ils envoyé leurs enfants à l'extérieur du pays,

 16   les civils ?

 17   R.  Quand on avait des parents en Allemagne, oui, on le faisait. On y

 18   envoyait ses enfants, surtout s'ils étaient mineurs. Je suis très heureux,

 19   parce que moi, j'ai encore ma fille à l'heure actuelle. Sinon, je ne sais

 20   pas ce qui serait arrivé si elle était restée.

 21   Q.  Sur la même page en anglais et en serbe, il est écrit :

 22   "L'attaque sur Ahatovici a commencé le 29 mai 1992 à 3 heures de

 23   l'après-midi et a duré jusqu'à 9 heures du soir."

 24   C'est bien cela ?

 25   R.  Oui, le 29, c'est un vendredi, vers 3 heures de l'après-midi. Le

 26   premier obus du char est tombé sur la partie supérieure d'Ahatovici à

 27   partir de la caserne de Rajlovac. Ma maison était un petit peu protégée par

 28   une colline, donc ils n'ont pas pu frapper ma maison à partir de la caserne


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  1   de Rajlovac. Et ça, c'est la vérité.

  2   Q.  Très bien. Mais si je vous dis que presque deux mois se sont écoulés,

  3   50 jours en fait, à partir du moment où la guerre a éclaté à Sarajevo, vous

  4   n'aviez toujours eu aucun conflit avec les Serbes qui vous entouraient ?

  5   R.  Oui, on peut le dire, en effet.

  6   Q.  Merci. Peut-on dire que vous avez bel et bien attaqué la partie serbe

  7   de la commune le 29 et que les Serbes ont répondu le 30 ? Je parle du mois

  8   de mai, bien sûr.

  9   R.  La vérité, c'est le contraire de ce que vous venez de me dire.

 10   Q.  Bien, nous allons nous pencher là-dessus dans ce cas, Monsieur Mujkic.

 11   Voici un article de presse qui date du 3 mai. Voici ce qui est écrit :

 12   "Lundi le 3 mai 1992, à 10 heures 15, la roquette a été lancée par les

 13   Bérets verts en direction de Visoko et Breza. Simultanément, il y a eu une

 14   attaque d'infanterie contre le village serbe de Dobro. A cette occasion,

 15   d'ailleurs, huit Serbes ont trouvé la mort".

 16   Et cetera, et cetera.

 17   Etiez-vous au courant de tout cela ?

 18   M. GAYNOR : [aucune interprétation]

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, pendant toute la guerre, je ne peux

 20   pas vous parler de toute la guerre. Messieurs les Juges, je ne veux pas

 21   répondre à des questions de ce type. Ça n'a rien à voir avec ma

 22   déclaration. Je ne suis pas au courant de tout cela. Je n'en ai jamais

 23   parlé. Vous voulez que je vous dise ce que se passait à Pale aussi à

 24   l'époque ?

 25   M. GAYNOR : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais demander à

 26   l'accusé de nous dire exactement quel est cet article du 3 mai auquel il

 27   fait référence afin que nous puissions suivre ses propos.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Etant donné que la citation n'était pas


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  1   très longue, j'ai laissé l'accusé parler plutôt que de voir à nouveau un

  2   journal en serbe non traduit à l'écran. Vous avez parlé d'un article de

  3   presse donc si vous posez la question, je veux bien que vous le fassiez,

  4   mais il faut que vous montriez ce document au témoin, surtout si vous

  5   voulez donner lecture de ce document.

  6   Poursuivez.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ça vient d'une agence de presse.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Monsieur Mujkic, je n'ai plus de temps. Voici ce que je vais vous

 10   affirmer. Ce sera à vous de me dire si vous êtes d'accord ou non. Je ne

 11   vous en tiendrai pas rigueur.

 12   Ceci c'est un article de presse qui vient d'une agence de presse. Je

 13   n'ai pas de traduction, --

 14   R.  Pourquoi est-ce que c'est écrit en cyrillique ?

 15   Q.  Est-ce important, Monsieur Mujkic ?

 16   R.  Oui, parce que si c'est en cyrillique, moi, je n'y crois pas, ce n'est

 17   pas la vérité.

 18   Q.  Très bien. Donc, pour vous, tout ce qui est écrit en cyrillique, ce

 19   sont des mensonges ?

 20   R.  Eh bien, je veux bien que ce soit écrit en cyrillique, mais pas à

 21   l'époque, en tout cas. A l'époque, en cyrillique, c'étaient des mensonges.

 22   Q.  Très bien. Je vais vous parler de ma thèse. Ne vous énervez pas, s'il

 23   vous plaît. Vous n'avez qu'à répondre par oui, non, je ne sais pas.

 24   Donc, voici ma thèse : la commune locale de Dobrosevici comprenait le

 25   village d'Ahatovici, pratiquement 90 % de la population était musulmane, et

 26   il y avait ensuite Vojnik, Mihajlevici, Dobrosevici. Ça, ce sont des

 27   villages qui sont soit entièrement serbe soit à majorité serbe; c'est bien

 28   cela ?


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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Merci. Je vais maintenant vous parler d'un livre, mais je ne peux pas

  3   encore le verser au dossier. Il est écrit par Vahid Karavelic et un autre

  4   auteur. Vous avez entendu parler de ce livre ? L'avez-vous lu ?

  5   R.  Je ne l'ai pas lu. Je ne veux pas en parler. Je ne sais rien à ce

  6   propos.

  7   Q.  Très bien. Voici ce qu'ils ont écrit -- bon, je ne sais pas ce qu'ils

  8   faisaient à partir du 1er avril, mais ils disent dans ce livre qu'Ahatovici

  9   était d'une importance stratégique pour les Musulmans. En effet, le plan

 10   était de relier Sarajevo à la Bosnie centrale en passant, justement, par ce

 11   village d'Ahatovici et Visoko. Oui ou non ?

 12   R.  Je ne veux pas parler de cela. Je n'ai pas lu ce livre. Ahatovici,

 13   géographiquement, est en effet sur la route de Visoko.

 14   Q.  Merci. Et à l'été 1991, Hasan Cengic s'est rendu très souvent à

 15   Ahatovici, donc c'est quand même un des dirigeants principaux du SDA; puis

 16   Alispahic était né dans le même village, et ils faisaient tous les deux

 17   parties des forces conjointes de la police, n'est-ce pas, ils étaient des

 18   hauts gradés au sein de cette entité ?

 19   R.  Je suis surpris que vous n'ayez pas parlé d'Alija Izetbegovic, que vous

 20   ne dites qu'il serait venu aussi.

 21   Q.  Mais Delimustafic y est allé. Qu'en est-il de ces trois ?

 22   R.  Ecoutez, je ne fais pas partie de la cellule de Crise. Je sais que les

 23   gens ne venaient pas ici pour s'amuser, c'est sûr. S'ils venaient, ils

 24   venaient rendre visite à des gens de la cellule de Crise. Et moi, je ne

 25   peux pas faire de commentaires à tout ce propos, car je n'étais au courant

 26   de rien.

 27   Q.  Merci. Qu'en est-il des gardes du village ? Est-ce qu'ils

 28   fonctionnaient au sein de votre Défense territoriale, au moins jusqu'au 29


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  1   mai 1992 ?

  2   R.  Oui, bien sûr. Il y avait des patrouilles de nuit et toutes les

  3   patrouilles, oui.

  4   Q.  Y avait-il des combats violents à Vogosca, Ilidza, entre Rajlovac et

  5   Sokolje pendant 50 jours, il y avait quand même des combats violents

  6   partout, sauf dans votre village ?

  7   R.  Mais écoutez, vous savez très bien ce qui s'est passé. Vous connaissez

  8   le scénario par cœur. Vous n'aviez pas suffisamment de forces pour tout

  9   prendre d'un coup, donc vous, vous avez décidé d'y aller village par

 10   village. Nous, on était isolés, en fait, comme l'eau dans ce verre. On

 11   était complètement isolés de Sarajevo et de Visoko aussi. On était

 12   exactement comme ça.

 13   Q.  Oui, je ne vous demande -- je vous demande s'il y avait des combats

 14   dans votre village, c'est tout. Il y avait quand même de nombreuses

 15   réunions entre Musulmans qui ont eu lieu dans votre commune de mars jusqu'à

 16   la fin mai 1992, et lors de la dernière réunion de ce type, à la fin mai

 17   1992, il y a bien eu cette réunion, n'est-ce pas ?

 18   R.  Si j'avais été président de la cellule de Crise, je l'aurais su, mais

 19   je n'étais pas à la cellule de Crise.

 20   Q.  Mais il y a eu une réunion de citoyens quand même, et vous participiez

 21   à la réunion de citoyens ?

 22   R.  Non, ça, je peux vous le dire en toute responsabilité.

 23   Q.  Bien, mais moi, je peux vous dire qu'il y a eu cette réunion, et nous

 24   allons bientôt savoir qui a participé à cette réunion, mais Hasan Mujkic

 25   s'est rendu à cette réunion, un peu plus tard, certes, escorté de deux

 26   personnes. Tout le monde était en uniforme de camouflage, équipé d'armes

 27   automatiques. Et il a interrompu la réunion, et il a demandé que l'on mette

 28   en place des postes de contrôle conjoints. Et Stojan Dzino était d'accord


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  1   du moment que les Musulmans soient de Bojnik et pas d'un autre village.

  2    R.  Madame, Messieurs les Juges, s'il vous plaît, je voudrais ne plus

  3   avoir à répondre à ce type de questions, parce que c'est une mascarade

  4   maintenant. Nous sommes ici dans un Tribunal, et je voudrais que vous

  5   fassiez cesser cette mascarade.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, posez des questions

  7   simples, posez des questions directes. Vous ne posez pas de questions. Vous

  8   faites de grands discours compliqués qui ne nous amènent nulle part, qui

  9   plus est, Monsieur Karadzic.

 10   Monsieur Mujkic, l'accusé étant accusé de chefs extrêmement graves, il a le

 11   droit, quand même, de vous poser toutes ces questions.

 12   Mais Monsieur Gaynor, vous étiez debout pour quoi ?

 13   M. GAYNOR : [interprétation] Oui, je pense que vous avez répondu, vous avez

 14   anticipé les propos, en fait, mais vous n'avez pas répondu à l'observation

 15   du témoin qui a quand même dit qu'il n'était pas à la réunion, et ensuite

 16   l'accusé a continué pour lui parler de ce qui s'est soi-disant passé à

 17   cette réunion et ça ne servait à rien.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien, Monsieur Gaynor. Poursuivez.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous avons démontré que cette personne faisait

 20   partie de la cellule de Crise. Il l'a confirmé d'ailleurs lorsqu'il a

 21   témoigné devant ce Tribunal.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Mais Monsieur Mujkic, vous avez dit que ces 512 civils ont été échangés

 24   et se sont rendus à la ville de Sarajevo. Et qu'est-ce que les Serbes ont

 25   eu en échange pour ces 512 civils musulmans ?

 26   R.  A l'époque, j'étais dans la forêt avec Huso Gacanovic, qui était

 27   blessé. Je ne savais pas ce qui se passait. On n'avait pas de radio, on

 28   était au courant de rien. On essayait juste de survivre, c'est tout. Quant


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  1   à savoir ce que les Serbes ont obtenu en échange, je n'en ai aucune idée.

  2   Q.  Monsieur Mujkic, ils n'ont rien obtenu en échange, mais ils ont laissé

  3   vos civils rentrer à Sarajevo. Vous appelez ça un échange de civils. Alors,

  4   expliquez-moi quels sont les civils que nous avons obtenus en échange pour

  5   ces 512 que vous avez eus, vous ? C'est un drôle d'échange, quand même,

  6   quand on --

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, vous êtes en train d'entrer

  8   avec une controverse avec le témoin alors que le témoin vous dit très bien

  9   qu'il ne savait même pas qu'il y avait eu échange.

 10   Avez-vous encore besoin de temps ?

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, Excellence, il a parlé d'"échange"

 12   dans sa déclaration. A plusieurs reprises, il dit que ces civils ont été

 13   échangés, et moi, je ne suis pas d'accord avec la terminologie "échange de

 14   civils". Ce n'est pas un échange. Ce sont des civils uniquement qui ont eu

 15   le droit d'aller à Sarajevo. Rien de plus. M. Mujkic dit qu'il n'en sait

 16   rien, qu'il ne sait pas qu'un échange a eu lieu. Il dit juste que ces gens

 17   sont entrés à Sarajevo.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, parmi ces 512 civils, il y avait ma

 19   femme, ma mère, et elles m'ont dit qu'elles avaient été échangées.

 20   Echangées pour qui ? Je n'en sais rien. Echangées pour quoi ? Je n'en sais

 21   rien non plus. Je ne peux pas vous répondre. Je ne peux pas répondre. A

 22   l'époque, j'étais dans la forêt. Je ne savais absolument pas ce qui se

 23   passait.

 24   M. KARADZIC : [interprétation] Merci.

 25   Q.  Vous avez passé deux mois dans la forêt ?

 26   R.  Oui, deux mois et quatre jours.

 27   Q.  A l'époque vous étiez armés, vous étiez en groupe. Mais qui faisait

 28   partie de votre groupe ?


Page 12444

  1   R.  Le 3 juin 1992, j'ai trouvé Huso Gacanovic, il était blessé. C'était un

  2   jeune homme, 22 ans. Je l'ai emmené dans la forêt avec moi ce soir-là. Nous

  3   sommes restés seuls pendant 11 jours, et le douzième jour, j'ai rencontré

  4   Asim Novalija, un homme plus âgé. Il devait avoir 65 ou 66 ans à l'époque.

  5   Fort malheureusement, il est mort il y a environ quatre ans. C'était un

  6   homme qui était devenu presque fou, parce qu'il s'était retrouvé absolument

  7   tout seul. Nous n'étions que tous les trois. Ce n'était pas un groupe, il

  8   n'y avait pas de contacts avec personne et pas de réunions. Nous nous

  9   sommes juste rencontrés; d'abord avec Huso Gacanovic, et ensuite, on a

 10   rencontré le troisième larron, Asim Novalija.

 11   Q.  Mais il y avait des escarmouches avec les Serbes à l'époque, des

 12   escarmouches avec des armes ?

 13   R.  Non, absolument pas. Je n'ai rencontré personne. Je ne voulais même

 14   rencontrer absolument personne. Ce jeune homme qui était avec moi était

 15   blessé et je ne voulais pas qu'il lui arrive quoi que ce soit. Il était là

 16   avec moi. Qu'est-ce qui lui serait arrivé si --

 17   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu la fin de la phrase du témoin.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Avez-vous utilisé votre arme ?

 20   R.  Oui. J'ai tiré un chargeur lorsque j'étais blessé, un chargeur entier.

 21   Je voulais, en fait, me suicider pour ne pas être pris vivant, mais bon, je

 22   n'ai pas réussi à bien utiliser le chargeur. Je ne sais pas ce que j'ai

 23   fait. Le deuxième chargeur est resté plein. J'ai en effet tiré alors que

 24   j'étais blessé.

 25   Q.  Merci.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mujkic, je crois que les

 27   interprètes n'ont pas réussi à entendre la fin de votre réponse. Je vais

 28   vous lire le début de cette réponse et vous nous direz ce qui manque.


Page 12445

  1   Il s'agissait de la question à propos des escarmouches avec les

  2   Serbes. Donc, la question était :

  3   "Avez-vous eu des escarmouches avec les Serbes, escarmouches armées ?

  4   Réponse :

  5   "Non. Je n'ai jamais rencontré personne. Je faisais en sorte de ne

  6   rencontrer personne, parce que ce jeune homme qui était avec moi était

  7   blessé et je ne voulais pas qu'il lui arrive quoi que ce soit. Enfin, il

  8   était là. Qu'est-ce que j'aurais pu faire si c'était arrivé ?"

  9   Avez-vous dit autre chose ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit, pour répondre à la question

 11   lorsqu'on m'a dit est-ce que vous avez tiré avec votre arme, j'ai dit que

 12   j'avais tiré, que j'utilisais mon arme lorsque j'étais blessé. Et lorsque

 13   je me suis rendu compte de ce qui se passait dans la direction d'où

 14   venaient les tirs, j'ai riposté --

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] -- j'ai tiré 30 munitions.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  C'était ma question. Je voulais savoir si vous aviez tiré. Maintenant

 19   j'ai ma réponse.

 20   R.  Mais après la chute d'Ahatovici, je n'ai pas tiré la moindre cartouche.

 21   Q.  Mais comment vous êtes-vous nourri pendant ces deux mois ? Comment vous

 22   êtes-vous alimenté ?

 23   R.  Ecoutez, dans la forêt, une forêt que je connais bien d'ailleurs, je

 24   connaissais tous les sentiers de cette forêt. J'étais chez moi. Donc la

 25   nuit, je savais très bien où j'étais et où aller. En surplomb, dans les

 26   prairies qui sont au-dessus, il y avait une cabane, un petit chalet de

 27   week-end. Enfin, il y avait des chalets de week-end, et certains avaient la

 28   porte d'entrée qui avait été ouverte par effraction. Les soldats serbes qui


Page 12446

  1   avaient pris le hameau de Bioca y passaient souvent la nuit, et ensuite ils

  2   allaient vers Ahatovici. Donc là, parfois, je trouvais sur place un peu

  3   d'huile, un peu de sucre, un kilo de farine ici ou là, quoi. C'était une

  4   bonne année, de toute façon. La récolte avait été bonne. C'était la

  5   meilleure récolte dont je puisse me souvenir. Il y avait beaucoup de fruits

  6   partout. Donc, je n'ai pas eu faim.

  7   Q.  Mais quels sont les fruits qui poussent en juillet, qui sont mûrs en

  8   juillet ? Il n'y a guère que les cerises.

  9   R.  Mais non, il y avait des poires, il y avait des poires hâtives, des

 10   pommes de terre. Enfin, vous savez très bien de quoi je parle.

 11   Q.  Mais où est-ce que vous avez cuit les pommes de terre ? Et la farine ?

 12   Comment est-ce que vous vous êtes débrouillé pendant ces deux mois ?

 13   R.  Ecoutez, j'avais pris dans les chalets de week-end des "camping gaz" et

 14   on s'est servi de ça pour la cuisine. Il y avait aussi un petit four qu'on

 15   avait aussi un peu chapardé dans la maison de week-end. Donc, on arrivait à

 16   y -- on l'a utilisé pour faire du pain, pour faire cuire des haricots.

 17   Enfin, on se débrouillait, quoi. C'était l'été. C'était facile.

 18   Q.  Et qu'en est-il de l'eau ?

 19   R.  Il y a trois sources naturelles dans ma forêt que je connais bien. Il y

 20   a même un tuyau qui reste là, qui est toujours là. Et la source n'était

 21   qu'à dix mètres de la tente où nous résidions.

 22   Q.  Voici un document qui vous a été montré dans l'affaire Krajisnik. Il

 23   s'agit d'une pièce de l'Accusation P374. Il est écrit que les Bérets verts

 24   et d'autres formations paramilitaires musulmanes ont attaqué une partie de

 25   Dobrosevici "hier" le 29 mai, ils ont été repoussés à partir de l'école à

 26   Dobrosevici et du village de Bioca dans la municipalité d'Ilijas, et

 27   ensuite ont été encerclés à Ahatovici. Ensuite, l'armée serbe a donné un

 28   ultimatum. Il s'agit de la pièce 65 ter 2981 -- donc, la pièce 65 ter 298,


Page 12447

  1   page 1.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Si elle n'a pas encore été versée au dossier,

  3   pourrions-nous verser cette page, qui est la page qui m'intéresse et qui

  4   est à l'écran à l'heure actuelle ?

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Des pages 8 à 9 du prétoire

  6   électronique seront rajoutées à la pièce D1101.

  7   Vous avez encore besoin de beaucoup de temps, Monsieur Karadzic ?

  8   Vous avez presque terminé.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais ce témoin raconte tellement de choses que

 10   je n'arrive même pas à aborder un cinquième de ses propos. Je n'ai pas le

 11   temps. Je n'ai absolument pas le temps et je pense que cela met en péril

 12   tout mon procès. Je n'ai pas assez de temps pour ce témoin. J'ai à peu près

 13   le tiers ou le quart du temps dont j'aurais besoin, en fait.

 14   [La Chambre de première instance se concerte]

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation]

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous aurez 20 minutes supplémentaires

 17   pour votre contre-interrogatoire, Monsieur Karadzic.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 19   Puis-je simplement dire aux fins du compte rendu d'audience et pour votre

 20   information également que nous ne recevons pas tous les documents à temps

 21   nous permettant de faire la traduction. Mais en revanche, des déclarations

 22   fort généraux des témoins nous font réfléchir sur ce qui doit être contesté

 23   et ce qui ne doit pas l'être, parce que le temps que nous avons pour

 24   présenter notre thèse est insuffisant.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Monsieur Mujkic, veuillez regarder ce second paragraphe qui parle

 27   des "Bérets verts et des formations paramilitaires musulmanes qui ont été

 28   attaquées hier, le 29…"


Page 12448

  1   Vous dites que vous avez attaqué le village de Bjelovici [phon],

  2   Mihajlovici et Bjelugovici.

  3   R.  Je ne sais pas ce que dit ce document, mais c'est un pur mensonge.

  4   Q.  Eh bien, ceci n'est pas écrit en cyrillique mais avec l'alphabet latin.

  5   C'est un rapport de police. Et la propagande de la --

  6   R.  Un rapport de quelle police ?

  7   Q.  Eh bien, même ça c'est un problème. Il s'agit de la police serbe.

  8   R.  Eh bien, Monsieur, vous connaissez fort bien la langue de haine car

  9   vous-même avez employé cette langue. C'est aussi la pierre d'achoppement

 10   ici. Le HOS et les Bérets verts nous gênaient et ont toujours été cités,

 11   toutes les fois qu'une attaque était alléguée.  Mais dans tous les

 12   rapports, dans toutes les exhumations, il n'y avait personne de l'extérieur

 13   et surtout pas du HOS, parce que leur nom est croate, leur prénom et nom de

 14   famille. Tout ceci est inventé de toutes pièces. Je ne sais pas comment

 15   vous le décrire. Il s'agit purement et simplement de mensonges.

 16   Q.  En fait, ce sont les policiers qui informent leur supérieur

 17   hiérarchique dans ce cas-ci. Ceci n'est pas à l'attention des médias. Tout

 18   ce que je vous demande c'est de faire particulièrement attention à ce qui

 19   est écrit ici. Est-ce qu'il n'est pas dit ici qu'un ultimatum avait été

 20   préparé ou adressé à la date du 30 mai 1992 ?

 21   R.  Le 30 mai 1992, le pilonnage a duré 24 heures. Il a commencé le 29 mai.

 22   Qui aurait pu sortir sous la pluie d'obus ?

 23   Q.  Une seule question : est-ce qu'on ne peut pas dire ici que l'armée

 24   serbe a adressé un ultimatum à ces formations paramilitaires dans le

 25   village d'Ahatovici pour que ces personnes se rendent "aujourd'hui" avant -

 26   - le texte nous dit-il ceci ou pas ?

 27   R.  Tout ce que je sais, c'est que le procureur du ministère public et moi-

 28   même, nous avons écarté cela. Ceci n'est pas dit dans ma déclaration. Pour


Page 12449

  1   ce qui est des déclarations, cela ne nous intéresse pas.

  2   Q.  En fait, c'est votre déclaration. Veuillez la regarder au paragraphe

  3   27.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il s'agit de quelle déclaration ? La

  5   déclaration consolidée; oui ?

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Paragraphe 27 : 

  9   " -- au paragraphe 5 d'un document, 65 ter 1698, qui déclare que c'est

 10   Tesanovic a tenté de recueillir l'accord du président en 1992, le 30 mai,

 11   pour pouvoir commencer le pilonnage à 18 heures. Ceci coïncide avec la

 12   référence faite au pilonnage d'Ahatovici le 30 mai 1992."

 13   M. GAYNOR : [interprétation] Pour que ceci soit clair, le témoin a déposé

 14   lorsqu'il a parlé de sa déclaration, qu'il était d'accord avec sa

 15   déclaration. Ce paragraphe en particulier est un paragraphe qu'il souhaite

 16   retirer de sa déclaration. Je ne suis pas en train de dire que l'accusé ne

 17   peut pas le contre-interroger dessus, je voulais simplement que les Juges

 18   de la Chambre soient au courant du fait que ceci ne figure pas dans la

 19   déclaration consolidée telle qu'admise par le témoin.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie de ce rappel.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je avoir le numéro 65 ter 1698.

 22   Il n'y avait pas eu de pilonnage avant 14 heures le 30 mai, et nous voyons

 23   que l'ultimatum expirait le 30 mai à 18 heures.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Numéro 65 ter 1698 dans le prétoire

 25   électronique, s'il vous plaît.

 26   Et M. Gaynor vient de nous donner une nouvelle preuve de tout ce que l'on

 27   peut faire avec une déclaration. On peut la modifier un petit peu par-ci et

 28   un petit peu par-là.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci est une déclaration inappropriée.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, regarder ce document qui émane de

  4   l'AID, document des services secrets musulmans, strictement confidentiel,

  5   classé secret, à la date du 8 octobre 1996.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela étant dit, ceci ne faisait-il pas

  7   partie des documents connexes, Monsieur Gaynor ?

  8   M. GAYNOR : [interprétation] Le document précédent que nous avons regardé -

  9   -

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, je parle de celui-ci, 1698.

 11   M. GAYNOR : [interprétation] J'ai informé le Greffe par un courriel ce

 12   matin que ceci n'a pas été versé par l'Accusation en tant que preuve

 13   connexe, parce que ce document était rattaché au paragraphe 26 de la

 14   déclaration consolidée, qui n'a pas été admise par le témoin. Donc, nous

 15   n'avons pas demandé le versement au dossier de ce document en tant que

 16   document connexe.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Soit.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous afficher la page 5, s'il vous

 19   plaît. C'est un document complémentaire qui parle d'une conversation

 20   téléphonique interceptée de Tesanovic, ou alors c'est son journal. Est-ce

 21   que nous pouvons voir la page 5, s'il vous plaît.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation]

 23   Q.  Tesanovic, à 17 heures 45 :

 24   " -- le président pour ce qui est les tirs de mortier qui doivent être

 25   tirés à 18 heures."

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Donc, je vous soumets ceci en même temps que

 27   les documents précédents, la chronologie des événements, un ultimatum avait

 28   été adressé et prenait fin à 18 heures le 30 mai, parce que les forces


Page 12451

  1   musulmanes ont conduit une attaque le 20 mai et Tesanovic demande

  2   l'autorisation de pouvoir ouvrir le feu.

  3   Est-ce que nous pouvons verser au dossier ce document, s'il vous plaît ?

  4   M. GAYNOR : [interprétation] Pas d'objection au niveau du versement --

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous n'avez pas besoin de poser une

  6   question au témoin à propos de ce document.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ceci est contraire aux propos du témoin. Moi,

  8   je prétends que vous avez attaqué le 29 et que les Serbes ont riposté le

  9   30. Nous voyons que c'est une question que vous avez abordée au paragraphe

 10   27, et vous avez dit que ceci coïncidait avec le début du pilonnage. Je

 11   parle du paragraphe 27 de votre déclaration consolidée. Je souhaite que

 12   ceci soit à nouveau versé au dossier en tant que pièce à conviction de la

 13   Défense.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, ceci ne

 15   correspond pas à la vérité. Dans toutes mes déclarations, j'ai dit et je

 16   m'en tiens à cela, que le vendredi 29 mai, à 15 heures, un premier char a

 17   tiré depuis Rajlovac sur Ahatovici, ce qui a été comme un signal pour que

 18   les tirs de mortiers commencent. Chaque mortier avait pris pour cible un

 19   groupe de maisons. Il n'y a pas eu un seul quartier où les obus ne sont pas

 20   tombés. Pour ce qui est de ce texte, ceci a été rédigé pour et convenait

 21   aux intérêts d'aucuns.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Et pendant ces 24 heures de pilonnage, combien de personnes sont mortes

 24   ?

 25   R.  Fort heureusement, il n'y a eu que deux personnes qui sont mortes. Nous

 26   avons eu de la chance parce qu'il y a eu les premiers combats en 1992 et

 27   ceux qui tiraient les mortiers n'avaient pas beaucoup d'expérience. Si cela

 28   avait été en 1993, le nombre de victimes aurait été beaucoup plus élevé.


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois que nous avons des raisons de faire

  2   verser ceci au dossier, parce qu'une fois que vous avez admis cela --

  3   L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine anglaise : veuillez marquer une

  4   pause entre les questions et les réponses, s'il vous plaît.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que nous pouvons poursuivre.

  6   Monsieur Gaynor, souhaitiez-vous dire quelque chose ?

  7   M. GAYNOR : [interprétation] Simplement, je souhaitais faire remarquer que

  8   ce document à l'origine a été versé au dossier. Nous ne nous opposons pas

  9   au versement au dossier de cette pièce par l'accusé. Je me remets entre les

 10   mains des Juges de la Chambre.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, pour comprendre le contexte de la

 12   déposition de ce témoin, je crois que nous devrions accepter le versement

 13   au dossier de la page 1 et de la page 5. C'est un document qui comporte 41

 14   pages --

 15   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation] 

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] -- et nous allons admettre au dossier la

 17   page 1 et la page 5 et donner une cote.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] 1106, Mesdames, Messieurs les Juges.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il vous reste dix minutes. Neuf minutes,

 21   très exactement.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Monsieur Mujkic, pendant que vous étiez dans les bois et que vous étiez

 24   un combattant, ce qui mérite l'estime des Serbes, vous avez dit à Gornja

 25   Bioca que les Serbes avaient relâché les femmes et les enfants ainsi qu'un

 26   homme pour qu'ils puissent aller traire les vaches et s'occuper des

 27   chevaux; c'est exact ?

 28   R.  Oui. Cela s'est passé le 31 mai ou le 1er juin, je ne sais pas


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  1   exactement. Je ne connais pas la date. J'avoue que je ne m'en souviens pas.

  2   J'ai vu cet homme qui était un parent proche, et je dis "était" parce que

  3   son corps a été exhumé d'une fosse commune dans la municipalité d'Ilijas.

  4   Mais c'est tout. Personne d'autre n'a été autorisé à quitter l'école et les

  5   autres ont été emmenés dans la maison de Planjo, où j'ai été emmené moi-

  6   même le 2 septembre.

  7   Q.  Restons-en aux civils. Les civils étaient dans l'école et vous n'avez

  8   pas vu qu'il y avait des soldats pour assurer leur garde, n'est-ce pas ?

  9   R.  Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, l'école se trouve à

 10   Donja Bioca. Quant à Gornja Bioca, c'est un village qui est tout près du

 11   nôtre, à la limite entre Ilijas et Novi Grad, entre ces deux municipalités

 12   d'Ilijas et de Novi Grad. Il n'y avait pas moyen pour moi de me rendre à

 13   l'école, parce qu'il aurait fallu que je passe par des espaces exposés.

 14   Donc, je ne suis allé qu'à Gornja Bioca, et c'est là-bas que j'ai vu les

 15   gens dont je parle. J'ai vu une femme en train de traire une vache et j'ai

 16   vu un homme qui faisait sortir un cheval. Après cela, je suis rentré à

 17   Ahatovici et je ne sais pas qui exactement se trouvait dans l'école de

 18   Bioca. Je pense que je n'ai pas donné ce détail où que ce soit.

 19   Q.  C'est ce que vous avez dit dans l'affaire Krajisnik le 3 novembre, page

 20   7 946 du compte rendu d'audience. Vous avez dit, je cite : "Des femmes

 21   circulaient librement pour traire les vaches et il y avait là un homme qui

 22   est sorti pour relâcher un cheval."

 23   Monsieur Mujkic, ce que je soutiens, c'est que les civils se sont vu

 24   proposer un abri à Gornja Bioca, qu'il n'y a eu aucune personne mise en

 25   détention, et ensuite relâchés le 13 juin, et que ces personnes sont allées

 26   à Sarajevo. Est-ce que vous avez la moindre preuve du contraire ?

 27   R.  S'agissant de l'école de Bioca, je n'en ai pas parlé. Je ne voudrais

 28   pas en parler parce que je ne sais rien au sujet de cette école. Quant à


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  1   l'échange qui a eu lieu tout près de la station service, échange dont ma

  2   mère et mon épouse ont été partie prenante, je ne sais pas ce qui s'est

  3   passé à ce moment-là. Je n'en ai entendu parler que plus tard. Voilà ce

  4   qu'il en est.

  5   Q.  A Ahatovici, vous aviez des combattants venus de Bratunac aussi, n'est-

  6   ce pas ?

  7   R.  Ce n'était pas des combattants, c'étaient des prisonniers qui avaient

  8   été échangés à Pale et qui sont arrivés à Visoko. Ils avaient de la famille

  9   à Sarajevo et, en chemin, ils sont passés par Ahatovici. Mais ils n'ont pas

 10   pu poursuivre leur voyage, ils n'ont pas pu traverser la rivière Bosna. Ils

 11   étaient six qui venaient de Bratunac au total. Voilà ce que j'ai dit, et

 12   c'est la vérité. Et vous, vous aimez les appeler des Bérets verts, et

 13   cetera, et cetera.

 14   Q.  Mais vous avez dit qu'ils étaient 12. Vous avez même dit que 12

 15   personnes venues de Bratunac avaient été tuées.

 16   Regardez votre déclaration écrite et votre déposition orale dans

 17   l'affaire Krajisnik le 3 novembre 2004, page 7 990 du compte rendu

 18   d'audience.

 19   Est-ce que vous aviez peur que ces personnes soient capturées une

 20   deuxième fois par l'armée serbe ? Est-ce que vous aviez peur qu'il leur

 21   arrive quelque chose de mauvais ou de contraire aux conventions de Genève ?

 22   R.  Eh bien, vous savez que les conventions de Genève garantissent la

 23   protection à pas mal de gens.

 24   Q.  Est-ce que c'est ce que vous avez dit ? Est-ce que vous avez dit que

 25   vous aviez peur pour la vie de ces personnes car elles risquaient d'être

 26   capturées une deuxième fois ?

 27   R.  Je n'ai pas dit cela. J'avais simplement des craintes pour ma famille.

 28   Eux avaient peur parce qu'ils avaient été capturés une deuxième fois. Moi,


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  1   je n'avais pas de raison d'avoir peur, mon cher Monsieur. Je n'avais peur

  2   que pour ma famille.

  3   Q.  Je vous remercie. Savez-vous que le fait que nous ayons fait

  4   prisonniers à plusieurs reprises des combattants musulmans échangés était

  5   la raison pour laquelle je les ai envoyés dans des pays étrangers plutôt

  6   que de les faire prisonniers de façon répétitive ?

  7   R.  Si je ne vous connaissais pas comme étant ce tigre assoiffé de sang que

  8   l'on voyait à la télévision, je penserais aujourd'hui que vous êtes un

  9   véritable agneau, à voir comment vous vous dépeignez.

 10   Q.  Je vais laisser cette remarque de côté.

 11   R.  Vous n'aimez pas entendre la vérité, ça c'est sûr, mais vous le savez

 12   parfaitement bien, que ce que j'ai dit est vrai.

 13   Q.  Est-ce que c'est le fruit de votre expérience personnelle avec moi ?

 14   Est-ce que vous me connaissez ? Est-ce que nous nous sommes rencontrés par

 15   le passé ?

 16   R.  Non, mais je vois en vous l'assassin de mon fils. Tout le bain de sang

 17   qu'il y a eu en Bosnie-Herzégovine a été le fruit des trois objectifs

 18   poursuivis par vous : d'abord, préserver ce qui restait de la Yougoslavie;

 19   deuxièmement, créer une Grande-Serbie; et troisième, créer une République

 20   serbe. Donc, tout cela, c'était dans l'intérêt des Serbes, et seulement des

 21   Serbes, et tout le sang qui a été versé à cette fin est le fruit des trois

 22   objectifs qui étaient les vôtres.

 23   Q.  Monsieur Mujkic, est-ce que vous vous rendez compte que la crise a été

 24   produite en raison de la tentative de sécession de la Bosnie-Herzégovine,

 25   contrairement à la volonté de la population serbe ?

 26   R.  J'ai entendu parler de cela à la télévision, mais vous savez que je

 27   n'étais pas avec Izetbegovic, ce qui m'aurait permis de savoir un certain

 28   nombre de choses que vous m'imputez à tort.


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que nous voyons à l'écran le

  2   document 1D3339 de la liste 65 ter. C'est une proclamation faite à la

  3   population musulmane le 12 juin 1992.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Donc, vous ne savez rien de M. Izetbegovic, mais vous savez tout de

  6   moi; c'est bien cela ?

  7   R.  Eh bien, chez nous, on dit qu'il ne faut pas dire du mal des morts.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellences, je suis désolé que ce document

  9   n'ait pas encore été traduit, parce que nous recevons vraiment des

 10   documents en très grand nombre à la 25e heure. Nous venons de recevoir un

 11   certain nombre de documents relatifs au témoin qui sera auditionné lundi.

 12   Donc, nous avons ici un article de l'agence de presse "SRNA" du 12 juin.

 13   J'aimerais que la page 3 de ce document soit affichée à l'écran.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, il est temps que vous

 15   posiez votre dernière question.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  C'est mon avant-dernière question : Monsieur, pouvez-vous regarder

 18   cette dépêche de l'agence SRNA. J'admets qu'elle est rédigée en cyrillique,

 19   mais je m'adresse, dans cette dépêche, à la population musulmane en disant

 20   ce qui suit, je cite :

 21   "Dans notre patrie commune, une guerre féroce se mène, une guerre qui a

 22   pris la vie de milliers de personnes et détruit un grand nombre de biens.

 23   Peu de gens sont aussi interdépendants que nous le sommes. Notre histoire

 24   est identique. Nous avons un seul et même pays que nous ne pouvons pas

 25   quitter. Nous n'avons nulle part ailleurs où aller. Même si nous

 26   souhaitions le faire, personne ne voudrait de nous, pas plus de vous que de

 27   nous. Nous parlons la même langue et nous pouvons lui donner le nom que

 28   nous voulons, mais elle ne doit pas être le motif de combat entre nous.


Page 12458

  1   Nous prions Dieu de façons différentes, c'est vrai, mais cela ne doit pas

  2   être la cause d'un conflit entre nous."

  3   R.  Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, est-ce que je peux

  4   lui poser une question ?

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, Monsieur, vous ne pouvez pas.

  6   Quelle est votre question, Monsieur Karadzic ?

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Voici mon avant-dernière question : Monsieur Mujkic, est-ce que vous

  9   savez que nous avons fait de notre mieux pour éviter la guerre, tout sauf

 10   admettre une Bosnie uniquement sous le contrôle des Musulmans ?

 11   R.  Je ne sais rien de cela, mais je vous ai regardé, j'ai vu les images du

 12   moment où, devant l'assemblée de Bosnie-Herzégovine, vous avez dit que si

 13   la guerre éclatait sur notre territoire, la population musulmane serait

 14   exterminée. Je pensais que c'est cela que vous vouliez citer comme l'une

 15   des consignes intelligentes que vous avez données aux Musulmans.

 16   Q.  C'était un discours antiguerre que j'ai prononcé, et je les suppliais

 17   de ne pas se laisser entraîner dans la guerre.

 18   Voici ma dernière question : vous avez vu la mosquée d'Ahatovici, elle a

 19   été détruite ? Vous vous êtes rendu sur les lieux et vous avez vu tous les

 20   débris éparpillés tout autour, n'est-ce pas ?

 21   R.  Malheureusement, j'ai été le premier à atteindre l'emplacement de la

 22   mosquée démolie. C'était le quatrième ou le cinquième jour des pilonnages.

 23   J'étais dans le bois avec l'homme dont j'ai déjà parlé. Il y a eu une

 24   détonation très forte et j'ai dit la mosquée était détruite. Et quand on

 25   est arrivés sur les lieux, j'ai vu que le minaret avait été soufflé par la

 26   détonation. Et quand la nuit est tombée, je suis retourné là-bas et,

 27   malheureusement, c'est la vérité, Monsieur --

 28   Q.  Vous avez dit qu'il y avait des débris tout autour, n'est-ce pas. Est-


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  1   ce qu'il y avait des débris et où étaient-ils ?

  2   R.  A une centaine de mètres de la mosquée, il y avait une poutre qui était

  3   encastrée dans le sol. Et si nous parlons des toits de tuile et des

  4   briques, il y en avait tout autour de la mosquée. On ne pouvait pas

  5   s'approcher de la mosquée à 50 mètres. Même les fondations étaient

  6   déformées, donc vous imaginez la puissance de la détonation.

  7   Q.  Monsieur Mujkic, vous avez décrit une explosion venue de l'intérieur.

  8   Personne ne serait assez fou pour consommer autant de munitions et

  9   d'explosifs qu'il en fallait pour faire sauter une mosquée. Voilà ce qui se

 10   passe quand on place des explosifs à l'intérieur d'un magasin, par exemple.

 11   Est-ce que c'est bien les conditions dans lesquelles l'explosion a eu

 12   lieu ? Vous aviez stocké des explosifs à l'intérieur de la mosquée, n'est-

 13   ce pas ?

 14   R.  Il y a une minute, j'ai dit que la vérité était une équation dont le

 15   nombre d'inconnus était trop important pour vous.

 16   Q.  Mais dites-moi simplement cela. Nous pouvons en apporter facilement la

 17   preuve.

 18   R.  Non, non, ce n'est pas vrai. Il n'y avait pas de soldats dans la

 19   mosquée. Vous ne pouvez même pas imaginer une telle chose. Vous êtes le

 20   seul à pouvoir affirmer des choses de ce genre.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je dois dire que je regrette de ne pas disposer

 22   d'un temps suffisant pour interroger complètement ce témoin. Il y a de

 23   nombreuses déclarations --

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs les

 25   Juges, le cas échéant, je suis tout à fait près à passer encore un mois

 26   ici, et je continuerai à répéter tout ce que j'ai dit aujourd'hui, parce

 27   que c'est l'histoire de ma vie.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Mujkic.


Page 12460

  1   Monsieur Gaynor, si nous pouvions terminer en 10 ou 15 minutes de vos

  2   questions supplémentaires, ce serait bien. Vous pouvez procéder.

  3   M. GAYNOR : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

  5   M. GAYNOR : [interprétation] D'accord.

  6   Nouvel interrogatoire par M. Gaynor :

  7   Q.  [interprétation] D'abord, j'aimerais avec vous que nous précisions un

  8   point, Monsieur le Témoin, qui concerne les soldats que vous avez vus dans

  9   le village de Gornja Bioca.

 10   Vous avez, un peu plus tôt durant votre déposition aujourd'hui,

 11   déclaré que vous aviez entendu, d'après leur accent, qu'il s'agissait

 12   d'hommes venus de Serbie, n'est-ce pas ?

 13   R.  J'ai dit que c'étaient des soldats serbes. Je n'ai pas dit qu'ils

 14   venaient de Serbie. Parce que c'était la nuit et on m'a envoyé chercher de

 15   l'aide à Visoko. En tout cas, c'est comme ça qu'on m'avait dit les choses.

 16   J'ai pensé que c'est ce qui se passait à ce moment-là, parce que j'ai

 17   entendu du bruit. Mais en tout cas, moi, j'étais dans les bois, je me

 18   cachais et cet homme est passé tout près de moi. D'après son accent, je me

 19   suis rendu compte qu'il ne faisait pas partie des nôtres et j'ai été saisi

 20   de panique. Je ne suis pas allé plus loin. J'ai attendu que le jour se

 21   lève, et juste avant que le jour ne se lève, je suis arrivé à Donja Bioca

 22   et j'ai vu ce que j'ai vu.

 23   S'agissant de ce qui s'est passé dans ces maisons de week-end, on

 24   entendait des gens crier dans chacune de ces maisons. C'étaient des soldats

 25   qui s'étaient emparés de Bioca. Ils ont passé la nuit dans Bioca, puis

 26   ensuite ils ont poursuivi leur chemin le matin.

 27   Q.  Mais votre attention a été attirée, et c'est un point dont vous parlez

 28   dans votre déposition dans l'affaire Krajisnik, donc votre attention a été


Page 12461

  1   attirée par des unités dans la municipalité d'Ilijas. Vous vous rappelez

  2   cela ?

  3   R.  Oui, oui. Oui, des soldats serbes se trouvaient là. Ils venaient de la

  4   municipalité d'Ilijas, mais ça, c'est au nord. C'était, pour nous, au nord,

  5   et la prison, elle, était à Ahatovici. Je vous ai montré mon verre tout à

  6   l'heure et je vous ai dit qu'on était là comme l'eau dans ce verre,

  7   complètement coupés de tout.

  8   Q.  Donc, est-ce que vous dites dans votre déposition qu'il y avait des

  9   soldats serbes venus de la municipalité d'Ilijas et des soldats serbes qui

 10   étaient venus d'ailleurs; c'est bien cela ?

 11   R.  Monsieur, je vous dis que c'était la nuit, et je me suis rendu compte,

 12   d'après la façon dont ils prononçaient le H et d'après la façon dont ils

 13   parlaient en général, d'après leur accent, je me suis rendu compte que

 14   c'étaient des soldats serbes. Mais je ne pouvais pas sortir de là où

 15   j'étais et dire à ces hommes : D'où est-ce que vous venez ? On m'aurait

 16   tiré dessus. Mais en tout cas, c'étaient des forces qui étaient arrivées

 17   d'Ilijas.

 18   Q.  Je souhaite vous poser encore une ou deux questions au sujet de ce

 19   moment où vous êtes allé dans la maison de Planjo. Vous avez dit avoir reçu

 20   la visite d'un enquêteur venu d'Australie. Vous dites ça en page 22 du

 21   compte rendu d'audience d'aujourd'hui. Quand le Président de la Chambre

 22   vous a demandé des détails complémentaires à ce sujet, vous avez dit que

 23   vous pensiez l'avoir rencontré en 2004, pendant l'été, et qu'il faisait

 24   chaud. Vous vous rappelez cela ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Est-ce qu'en compagnie de cet enquêteur vous avez visité d'autres lieux

 27   que la maison de Planjo ce jour-là ?

 28   R.  Nous sommes allés à Sokolje, où le massacre bien connu a eu lieu, et


Page 12462

  1   c'est là que les gens ont été tués dans un autobus.

  2   M. GAYNOR : [interprétation] Je demande l'affichage du document 65 ter

  3   numéro 22189.

  4   Q.  Monsieur Mujkic, ceci est uniquement écrit en anglais, mais je peux

  5   vous en lire un passage. D'ailleurs, nous voyons maintenant qu'il en existe

  6   une traduction, et je demande qu'elle reste sur la droite de l'écran.

  7   Je cite :

  8   "Le 4 juillet 2004, en compagnie de l'avocat Magde Karagiannakis et de

  9   l'interprète Darko Bartula, j'ai discuté avec le témoin dans l'affaire

 10   Krajisnik, Ramiz Mujkic."

 11   Et un peu plus loin, nous voyons encore votre nom apparaître, je cite :

 12   "Mujkic nous a ensuite emmenés dans divers lieux indiqués ci-dessous. Des

 13   photos numériques ont été prises dans chacun de ces lieux par moi-même.

 14   Mujkic a expliqué quels étaient ces lieux."

 15   Alors, si nous passons maintenant à la page 14 de ce document dont je

 16   demande l'affichage, et que nous faisons un zoom avant sur la photographie

 17   du haut de la page 14.

 18   Je vous demande si vous voyez la photographie en haut de l'écran à

 19   présent ?

 20   R.  Si vous me posez la question à moi, je vous réponds, oui, je la vois.

 21   Q.  C'est ce que je vous demandais. Pouvez-vous nous dire qui  --

 22   R.  Oui, oui.

 23   Q.  Est-ce que vous vous reconnaissez sur cette photographie ?

 24   R.  Oui, c'est moi qu'on voit sur cette photographie en haut de l'écran.

 25   M. GAYNOR : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche la dernière page

 26   du document et que l'on se concentre sur la photographie qui se trouve dans

 27   la deuxième moitié de la page en la faisant tourner de 90 degrés, Monsieur

 28   le Greffier, je vous prie, avec agrandissement de la photographie.


Page 12463

  1   Q.  Quel est le bâtiment que l'on voit sur cette photographie, Monsieur

  2   Mujkic ?

  3   R.  Ce bâtiment, c'est la maison de Planjo, où j'ai passé deux mois et cinq

  4   jours en compagnie d'autres prisonniers.

  5   Q.  Est-ce que vous vous êtes rendu sur place en compagnie de l'enquêteur

  6   australien ?

  7   R.  Oui, oui. Je crois que c'est lui qui a pris cette photo.

  8   Q.  Avez-vous décrit à cet enquêteur un certain nombre de choses qui ont eu

  9   lieu dans cette maison; c'est bien cela, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui. Dieu fasse que je n'aie pas vu ce que j'ai vu, mais je l'ai vu.

 11   M. GAYNOR : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

 12   document, Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, le document est admis au dossier.

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] Et devient la pièce P2343, Monsieur le

 15   Président, Madame, Messieurs les Juges.

 16   M. GAYNOR : [interprétation] Enfin, je demande l'affichage de la carte qui

 17   constitue la pièce P2327.

 18   Q.  Elle apparaîtra à l'écran dans un instant, Monsieur Mujkic. Il s'agit

 19   d'une carte qui a déjà été versée au dossier et constitue donc désormais

 20   une pièce à conviction, et je crois que c'est une carte qui a été élaborée

 21   par vos soins avant que vous ne témoigniez dans l'affaire Krajisnik. Je

 22   devrais indiquer que vous avez placé des stickers sur cette carte avant de

 23   témoigner dans l'affaire Krajisnik. J'aimerais simplement vous entendre

 24   confirmer ce fait.

 25   L'INTERPRÈTE : Signe affirmatif de la tête du témoin.

 26   M. GAYNOR : [interprétation]

 27   Q.  Pouvons-nous maintenant passer à la deuxième page sur les écrans, je

 28   vous prie. Et je vous prierais, Monsieur, de vous concentrer sur ces


Page 12464

  1   stickers de couleur rouge que l'on voit dans la partie inférieure de la

  2   carte.

  3   Dans la légende que vous avez fournie en même temps que cette carte,

  4   Monsieur Mujkic, vous voyez que le numéro 10 désigne la maison de Momcilo

  5   Krajisnik. Pourriez-vous le confirmer, je vous prie.

  6   R.  Oui, Monsieur.

  7   Q.  Mirko Krajisnik était-il originaire de cette localité ou venait-il

  8   d'une autre région ?

  9   R.  Les Krajisnik avaient une grande maison, elle était d'ailleurs vieille,

 10   où vivaient leurs parents. Je pense que Mirko et son frère ont construit

 11   ensemble cette grosse bâtisse.

 12   Q.  Les stickers 3, 4 et 5 indiquent le village d'Ahatovici et ses

 13   environs, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui. C'est un hameau qui fait partie d'Ahatovici.

 15   Q.  A quelle distance à peu près se trouvait la maison Krajisnik du hameau

 16   d'Ahatovici ?

 17   R.  A vol d'oiseau, cette distance n'était pas supérieure à 2 ou 3

 18   kilomètres. Mais comme le terrain est pentu, vous voyez à quel point les

 19   routes zigzaguent, la distance entre Rajlovac et Ahatovici était de 6

 20   kilomètres par la route. Quant à Zabrdje, puisque Rajlovac se trouve ici,

 21   la distance était de 6 à 7 kilomètres par la route. Mais à vol d'oiseau, de

 22   2 ou 3 kilomètres.

 23   Q.  Depuis combien d'années connaissiez-vous Mirko Krajisnik avant 1992 ?

 24   R.  Bien, je vais vous dire. Tout ça, c'est le même secteur. Je veux dire,

 25   si on prend un cercle et qu'on situe le centre de ce cercle, enfin c'est un

 26   cercle d'un diamètre de 3 à 6 kilomètres, tout ce secteur, et si on plaçait

 27   exactement le cercle de cette image. Nous, on circulait en autobus et on se

 28   connaissait depuis les années 1960, 1970. Je le voyais souvent avec son


Page 12465

  1   père, et Mirko était de l'autre côté de son père. Je les ai vus à un

  2   enterrement en 1991, début mai, le père entouré de ses deux fils.

  3   Q.  Depuis combien de temps à peu près connaissiez-vous Mirko Krajisnik ?

  4   R.  Je connais Mirko Krajisnik depuis que j'avais 20 ans, mais nous

  5   n'avions aucuns rapports professionnels. Nous nous disions simplement salut

  6   au passage, et c'était tout.

  7   Q.  Vous avez témoigné devant la Chambre de première instance en disant

  8   avoir vu Mirko Krajisnik dans la caserne de Rajlovac le 7 août 1992. Est-ce

  9   que vous vous en souvenez ?

 10   R.  Vous avez dit "Ahatovici" ? Oui.

 11   Q.  Non. J'aurais peut-être dû parler plus lentement. Vous avez dit dans

 12   votre déposition devant la Chambre de première instance avoir vu Mirko

 13   Krajisnik dans la caserne de Rajlovac le 7 août 1992. Vous en souvenez-vous

 14   ?

 15   R.  Oui, Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, c'est ce que

 16   j'ai dit, et je le maintiens.

 17   Q.  Combien de temps avez-vous eu pour l'observer ce jour-là, à ce moment-

 18   là ?

 19   R.  A cette époque-là, une minute pour moi durait une année, parce que

 20   j'avais la mâchoire cassée, j'avais aussi une blessure à la jambe. Personne

 21   ne s'est approché de moi pour m'apporter les moindres soins, mais Mirko

 22   n'est pas resté plus de cinq minutes sur place. Moi, je ne pouvais pas lui

 23   parler et il ne s'est pas approché de moi. Mais Nikola Poplasen a dit à

 24   Vlasto Apostolski : Donne-lui une feuille de papier et un stylo, il sait

 25   écrire. Je le vois d'après son visage. Alors qu'il écrive tout cela noir

 26   sur blanc et qu'il me le remette. Ensuite, ils sont sortis de la pièce.

 27   Q.  Est-ce qu'il y avait le moindre doute dans votre esprit qu'il

 28   s'agissait bien de Mirko Krajisnik ce matin-là, le 7 août 1992 ?


Page 12466

  1   R.  Pas le moindre doute. C'est la vérité et rien que la vérité.

  2   M. GAYNOR : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions à poser au

  3   témoin, Monsieur le Président.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Mujkic, ceci

  5   met un point final --

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux poser simplement une

  7   question qui ne découle pas du contre-interrogatoire ? Dans le contre-

  8   interrogatoire il n'a pas été fait mention de l'autobus, Or M. Gaynor a

  9   parlé de l'autobus dans ces questions supplémentaires. Moi, je n'ai pas

 10   parlé de l'autobus dans mon contre-interrogatoire. Donc simplement une

 11   question.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, il n'en est pas question. Le

 13   récolement a été évoqué pendant le contre-interrogatoire, donc il était

 14   tout à fait légitime pour l'Accusation de revenir sur des questions

 15   évoquées pendant le récolement et de parler de cette visite sur les lieux.

 16   Ceci met un point final à votre déposition, Monsieur Mujkic. Je vous

 17   présente encore une fois toutes nos excuses pour avoir dû attendre la fin

 18   de l'audition d'un autre témoin alors que votre audition avait déjà

 19   commencé, et j'apprécie votre compréhension. Au nom du Tribunal et de la

 20   Chambre, je tiens à vous remercier d'être venu à La Haye pour témoigner.

 21   Vous pouvez maintenant vous retirer, et la Chambre vous souhaite un bon

 22   voyage de retour chez vous.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,

 24   Madame, Monsieur les Juges. Je répondrai toujours favorablement à quelque

 25   appel provenant du Tribunal, car je pense qu'il importe que la vérité soit

 26   connue. Merci.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 28   [Le témoin se retire]


Page 12467

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je saisis l'occasion pour rendre

  2   une décision qui concerne la requête de l'Accusation sur un certain nombre

  3   de pièces à conviction déposées le 28 janvier de cette année.

  4   La Chambre considère qu'il est opportun d'admettre en tant que pièce

  5   à conviction la pièce P51 et de la conserver sous pli scellé, et sa version

  6   publique sera soumise à la Chambre après obtention des documents originaux

  7   nécessaires. A cet égard, la Chambre ne rendra pas de décision au sujet de

  8   la demande du Procureur tant que celui-ci n'aura pas fourni les documents

  9   originaux, ce qui doit être fait dans les plus brefs délais.

 10   Nous allons maintenant suspendre pendant une demi-heure et

 11   reprendrons à 18 heures 15.

 12   --- L'audience est suspendue à 17 heures 45.

 13   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 14   --- L'audience est reprise à 18 heures 18.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour Monsieur le Témoin. Veuillez,

 16   s'il vous plaît, faire la déclaration solennelle.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 18   Je déclare solennellement que je dirai la vérité, toute la vérité et rien

 19   que la vérité.

 20   LE TÉMOIN : KDZ020 [Assermenté]

 21   [Le témoin répond par l'interprète]

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 23   Veuillez vous mettre à l'aise.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Madame Edgerton.

 25   Mme EDGERTON : [interprétation] Bonjour, Madame, Monsieur les Juges.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est à vous.

 27   Interrogatoire principal par Mme Edgerton :

 28   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, pourriez-vous nous confirmer


Page 12468

  1   quelques éléments, s'il vous plaît.

  2   Vous avez fait des déclarations et donné des informations au bureau du

  3   Procureur de ce Tribunal en 1998, en 2005 et en 2007; c'est bien cela ?

  4   R.  En effet.

  5   Q.  Vous avez aussi témoigné devant ce Tribunal à deux reprises; une fois

  6   dans l'affaire Momcilo Krajisnik en 2005, et très récemment en 2010 dans

  7   l'affaire contre Mico Stanisic et Stojan Zupljanin. C'est bien vrai ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Au début de ce mois de février, vous a-t-on lu dans votre propre langue

 10   une autre déclaration qui consolide différents éléments venant des

 11   déclarations que vous avez faites par le passé ?

 12   R.  En effet.

 13   Q.  Si je vous reposais les mêmes questions aujourd'hui, questions qui vous

 14   ont été posées précédemment et qui ont résulté dans les éléments qui sont

 15   maintenant dans cette déclaration consolidée, y répondriez-vous de la même

 16   façon ?

 17   R.  Oui, exactement de la même façon.

 18   Mme EDGERTON : [interprétation] Mesdames, Messieurs les Juges, ce document

 19   consolidé est le document 90226 de la liste 65 ter. Pourrions-nous avoir

 20   une cote en P pour ce document sous pli scellé ?

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P2344, sous pli scellé.

 23   Mme EDGERTON : [interprétation] Je vais maintenant lire un résumé de la

 24   déclaration de ce témoin.

 25   Ce témoin donne des éléments de contexte à propos de la configuration

 26   géographique, économique, militaire, politique et ethnique de la

 27   municipalité de Vogosca. Il identifie aussi différentes personnalités qui

 28   sont impliquées dans ces domaines que je viens d'énoncer et va témoigner à


Page 12469

  1   propos de sa relation avec ces personnalités éminentes et les conversations

  2   qu'il a eues avec ces personnes. Il explique aussi la façon dont ces

  3   différentes régions ont été affectées dans la période menant à la guerre de

  4   Bosnie-Herzégovine. Il parle de la formation de la cellule de Crise des

  5   Serbes de Bosnie à Vogosca dès septembre 1991, cellule de Crise qui était

  6   dirigée par Jovan Tintor.

  7   Ce témoin connaît bien la structure et les fonctions des bureaux et

  8   du personnel du ministère de l'Intérieur de Bosnie-Herzégovine. Il en

  9   explique la structure, d'ailleurs, et il s'attache plus principalement à la

 10   municipalité de Vogosca. Il parle des efforts du SDS visant à influencer le

 11   recrutement au sein des forces de police locale, plus particulièrement à la

 12   fin de l'été et au début de l'automne 1991. Il a fait des commentaires sur

 13   un certain nombre de conversations téléphoniques interceptées et a

 14   authentifié d'ailleurs celles-ci, et a fait des commentaires à propos de

 15   ces conversations et à propos d'autres incidents et d'autres questions.

 16   Le témoin parle de la distribution d'armes depuis la caserne de

 17   Semizovac, armes qui ont été distribuées aux Serbes dans la municipalité de

 18   Vogosca. En janvier 1992, il a observé des camions militaires qui étaient

 19   arrivés à la caserne en remorquant des canons qui sont allés vers Paljevo.

 20   On lui a dit que c'était pour la Défense territoriale serbe.

 21   Un dirigeant local du SDS, Rajko Koprivica, lui a dit : Qu'est-ce que

 22   ça peut te faire ? De toute façon, c'est une histoire de Serbes. Ça ne te

 23   regarde pas, parce que de toute façon, vous allez tous disparaître.

 24   Le témoin va évoquer aussi le démantèlement des autorités locales

 25   municipales lorsque le SDS a décidé de quitter l'assemblée municipale.

 26   A plus d'une reprise, les dirigeants du SDS local lui ont dit que les

 27   Musulmans, de toute façon, allaient disparaître, et qu'ils seraient

 28   détruits s'ils ne partaient pas de leur propre chef.


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  1   Le témoin parle en détail de la séparation ethnique des forces de

  2   police à Vogosca. Il parle aussi des conditions de sécurité qui se sont

  3   détériorées dans la municipalité et de l'augmentation d'incidents de

  4   violence sur une base ethnique, y compris une attaque armée du poste de

  5   police de Vogosca qui aurait été effectuée par les forces serbes.

  6   Le témoin parle aussi des informations dont il disposait à propos de

  7   la situation à Vogosca au cours du conflit, informations qu'il avait

  8   obtenues de la part de Musulmans du cru qui avaient été échangés ou qui

  9   avaient quitté Vogosca. De par ces contacts, il a appris qu'il y avait eu

 10   détention et sévices de la population musulmane dans trois installations de

 11   détention auxquelles il est fait référence sous les noms de Kontiki,

 12   bunker, et maison de Planjo.

 13   J'en ai terminé avec ce résumé. Madame, Messieurs les Juges, je n'ai que

 14   quelques questions à poser au témoin.

 15   Q.  En fait, ce sont des questions qui vont nous permettre de clarifier la

 16   chronologie des événements qui sont consignés dans votre déclaration

 17   consolidée que nous venons de verser au dossier. Je vais donc commencer par

 18   vous demander de vous référer au paragraphe 59 de votre déclaration écrite,

 19   où vous dites qu'en mars 1992 les délégués du SDS ont quitté la séance de

 20   l'assemblée municipale de Vogosca en disant qu'ils allaient organiser leur

 21   propre municipalité serbe. Ensuite, au paragraphe 71, vous dites que la

 22   dernière séance de l'assemblée municipale de Vogosca a eu lieu au début

 23   avril 1992.

 24   Voici ma question : est-ce que cela signifie que l'assemblée

 25   municipale a continué à se réunir même après que les députés du SDS l'aient

 26   quittée ?

 27   R.  Oui, tout à fait. Vous avez raison, c'est bien ça. L'assemblée

 28   municipale comportait 51 délégués ou représentants; 18 d'entre eux venaient


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  1   du SDA, 15 du SDS, et 18 étaient dans l'opposition. Lorsque le SDS a quitté

  2   l'assemblée, l'assemblée a continué à fonctionner normalement étant donné

  3   qu'il y avait 18 députés qui représentaient le SDA et 18 qui représentaient

  4   l'opposition. Il y avait donc une majorité de deux tiers. Il y avait un

  5   quorum, donc l'assemblée pouvait encore fonctionner. Une fois les délégués

  6   du SDS partis, lorsqu'ils ont quitté la municipalité, eh bien, la

  7   municipalité serbe de Vogosca a été créée. C'est ainsi que les choses se

  8   sont passées.

  9   Q.  Très bien. Je vais poursuivre sur le même sujet pour toujours essayer

 10   de trouver quelle est la bonne chronologie. Au paragraphe 64 de votre

 11   déclaration écrite, vous parlez d'une dépêche qui venait de Momcilo Mandic

 12   en date du 31 mars 1992.

 13   Mme EDGERTON : [interprétation] Je tiens à dire qu'il s'agit de la pièce

 14   P01116.

 15   Q.  J'aimerais savoir si les députés du SDS ont quitté l'assemblée avant

 16   l'arrivée de cette dépêche ou après ?

 17   R.  Je pense -- non, je sais, d'ailleurs, que c'était au cours de la

 18   semaine où la dépêche de Momcilo Mandic est arrivée. Donc, la dépêche est

 19   arrivée, et une semaine après, les députés ont quitté l'assemblée.

 20   Q.  Dans votre déclaration, aux paragraphes 68 à 69, vous parlez de

 21   l'attaque du poste de police par les forces des Serbes de Bosnie.

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Vous souvenez-vous si c'était avant ou après la dépêche, donc après le

 24   31 mars 1992 ?

 25   R.  Je m'en souviens très bien. Je ne peux pas l'oublier. Comment oublier

 26   ce jour ? C'était après l'arrivée de la dépêche de Momcilo Mandic.

 27   L'attaque a eu lieu après l'arrivée de la dépêche de Momcilo Mandic.

 28   Q.  Les forces de la police à Vogosca à l'époque, lorsqu'il y a eu


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  1   l'attaque sur le commissariat, étaient-elles déjà séparées ?

  2   R.  Après l'arrivée de la dépêche de Momcilo Mandic, qui était adjoint du

  3   ministre et qui donnait ordre très explicitement de mettre sur pied un MUP

  4   serbe, il fallait que les Musulmans et les Croates qui se trouvaient sur

  5   place soient subordonnés au MUP serbe, d'après cet ordre. Nous avons

  6   organisé une réunion au poste de police et lors de cette réunion, nous

  7   avons pris quelques décisions importantes. La plus importante étant que

  8   jusqu'à nouvel ordre, on resterait au poste de police et on travaillerait

  9   ensemble pour éviter, dans la mesure du possible, qu'il y ait effusion de

 10   sang. Il fallait qu'on reste au poste de police. Donc, de facto, le poste

 11   de police n'était pas divisé, mais de jure, il l'était déjà, étant donné

 12   que les Serbes ne voulaient écouter que les Serbes, les Croates ne

 13   voulaient obéir qu'aux Croates, et les Musulmans ne voulaient obéir qu'aux

 14   Musulmans.

 15   Q.  Lorsqu'il y a eu l'attaque sur le poste de police, les forces de police

 16   de Vogosca avaient-elles été séparées physiquement, déjà ? Y avait-il eu

 17   division déjà au niveau, par exemple, de leurs bureaux ? Y avait-il des

 18   bureaux séparés, des bâtiments séparés ?

 19   R.  Non, non, il n'y avait toujours pas eu de séparation physique. On

 20   travaillait toujours dans le même bâtiment, dans les mêmes bureaux.

 21   Lorsqu'il y avait un incident, lorsqu'il se passait quelque chose, on

 22   partait en patrouille ensemble. Enfin, on luttait ensemble contre le crime.

 23   Serbes, Musulmans, Bosniens, Croates, on était encore tous ensemble.

 24   D'ailleurs, même au cours de l'attaque du poste de police organisée par

 25   Boro Radic, nous étions encore ensemble.

 26   Q.  Et après cette attaque, que s'est-il passé ? Les forces de police sont-

 27   elles restées toutes dans le même bâtiment ?

 28   R.  Oui, oui. Même après l'attaque, lorsqu'on est retournés au poste de


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  1   police, ce sont les Serbes et les Bosniens qui sont retournés au poste de

  2   police, et on a continué à travailler côte à côte.

  3   Q.  Jusqu'à quand ?

  4   R.  A peu près encore deux ou trois semaines, on a continué à travailler

  5   côte à côte. Ensuite, au bout de deux ou trois semaines, il y a eu cette

  6   séparation physique des forces de police.

  7   Q.  Merci.

  8   Revenons-en à cette attaque du poste de police --

  9   Mme EDGERTON : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît,

 10   passer à huis clos partiel pour cette question, Monsieur le Président ?

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous sommes maintenant à huis

 12   clos partiel.

 13   [Audience à huis clos partiel]

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  7   [Audience publique]

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'imagine que vous allez demander le

  9   versement des pièces jointes.

 10   Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, bien sûr.

 11   Il y en a certaines sur cette liste qui ont déjà fait l'objet d'un

 12   versement. Par exemple, la pièce P01166 [comme interprété] et la pièce

 13   P00045. Si je puis, j'aimerais demander le versement de toutes les autres

 14   pièces. Un grand nombre de ces pièces sont des conversations téléphoniques

 15   interceptées, donc je vais demander qu'elles soient admises sous cote

 16   provisoire MFI.

 17   M. ROBINSON : [interprétation] Nous avons une objection à propos de ces

 18   conversations interceptées.

 19   Lorsque l'on regarde la déclaration consolidée et qu'on la compare

 20   ensuite à tous les documents qui demandent à être versés par le truchement

 21   de cette déclaration consolidée, mis à part le fait que parfois le témoin

 22   reconnaît les voix, il n'y a pas grand-chose d'autre que le témoin peut

 23   nous apporter. On voit qu'il parle de Sarajevo, certes, ou qu'il parle

 24   d'une personne, mais nous ne considérons pas que ces éléments apportés par

 25   le témoin suffisent pour autoriser un versement. C'est peut-être utile pour

 26   que l'Accusation puisse ensuite démontrer que c'est une conversation

 27   interceptée véridique, ils pourront le faire lorsqu'ils feront venir un

 28   témoin qui servira à cela, mais le fait que quelqu'un ait dit : "Oui, je


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  1   reconnais cette voix", sans connaître le contenu, ça ne suffit pas. Je

  2   pense pour que l'on verse au dossier une conversation interceptée et

  3   surtout la teneur de cette conversation interceptée.

  4   Quatre de ces conversations interceptées impliquent M. Mandic, et je

  5   pense que ce n'est pas juste que l'Accusation n'ait pas demandé à verser

  6   ces conversations téléphoniques interceptées au cours du témoignage de ce

  7   M. Mandic, parce que maintenant c'est trop tard et on ne pourra pas faire

  8   de contre-interrogatoire. Donc, c'est sur ces bases que nous soulevons

  9   notre objection. En plus, le témoin n'a absolument rien dit à ce propos

 10   aujourd'hui.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton.

 12   Mme EDGERTON : [interprétation] Concernant la première objection, je n'ai

 13   pas demandé à ce que ces conversations interceptées soient versées dans

 14   tous les buts. J'ai demandé qu'elles soient juste versées au dossier sous

 15   cote provisoire. Le témoin a quand même reconnu les voix parce qu'il

 16   connaît les interlocuteurs, et nous considérons que c'est quand même

 17   essentiel. Ça devrait suffire pour que ces conversations soient admises.

 18   Bien sûr, elles seront authentifiées plus tard par d'autres témoins.

 19   En ce qui concerne la deuxième base de cette objection, étant donné

 20   que M. Tieger est derrière moi et que c'est lui qui a interrogé M. Mandic,

 21   peut-être pourrait-il répondre.

 22   M. TIEGER : [interprétation] Vous devez savoir que lorsque nous avons

 23   interrogé M. Mandic il n'était pas possible, pratiquement, de présenter à

 24   tous les témoins tous ces documents qui sont associés à chaque conversation

 25   interceptée. Enormément d'informations ont été présentées par le truchement

 26   de M. Mandic. Ç'aurait été entièrement inefficace si on lui avait montré

 27   chaque conversation téléphonique interceptée. Je pense qu'au vu de

 28   l'ampleur de notre affaire, il est normal que les Juges de la Chambre


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  1   entendent les éléments de preuve qui viennent de différentes sources à

  2   différents moments, mais il faudra que la décision soit prise, bien sûr,

  3   une fois que la totalité des éléments de preuve seront présentés au

  4   dossier, en tout cas, pour savoir s'il convient de les admettre ou non.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je n'ai pas apporté, de toute façon, mes

  6   notes, donc nous rendrons notre décision demain, non -- plutôt lundi matin,

  7   d'ailleurs.

  8   Cela dit, Monsieur Karadzic, êtes-vous prêt à commencer votre contre-

  9   interrogatoire ?

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, sachez tout d'abord qu'on ne nous a

 11   prévenu qu'hier que ce témoin témoignerait. On pensait qu'il témoignerait

 12   lundi. La deuxième chose, c'est que Mme Edgerton a interrogé le témoin

 13   pendant un temps inférieur à ce qui avait été annoncé, donc nous ne sommes

 14   véritablement prêts à entamer l'audition de ce témoin immédiatement. Donc

 15   au vu de tous ces éléments et au vu de mon état d'épuisement en raison du

 16   contre-interrogatoire vécu il y a quelques instants, je pense que la

 17   meilleure voie serait celle d'une suspension d'audience pour une reprise

 18   des débats lundi.

 19   La notification datant d'hier constitue le document D467.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez une observation,

 21   Madame Edgerton ?

 22   Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

 23   Juges, le Dr Karadzic n'a peut-être pas bien compris les choses, car la

 24   notification dont nous parlions avait un rapport avec notre liste de

 25   témoins pour la semaine prochaine et indiquait simplement que nous pensions

 26   que l'audition de ce témoin se poursuivrait lundi. Son audition a toujours

 27   été notifiée comme devant commencer cette semaine, donc je suis certaine

 28   que le Dr Karadzic a mal compris les choses.


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  1   S'agissant du temps annoncé par nous préalablement, je n'ai demandé qu'une

  2   heure et demie pour commencer, Monsieur le Président, et j'ai interrogé

  3   pendant 15 minutes, donc je ne pense pas que ce soit très long.  

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est une question de 20 minutes. Nous

  5   allons suspendre aujourd'hui.

  6   Monsieur le Témoin, l'audience d'aujourd'hui va être suspendue pour la

  7   semaine, et nous reprendrons nos débats lundi prochain à 9 heures. Je vous

  8   souhaite un bon week-end.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci beaucoup. Je vous souhaite également un

 10   bon week-end.

 11   [Le témoin quitte la barre]

 12   --- L'audience est levée à 18 heures 41 et reprendra le lundi 28 février

 13   2011, à 9 heures 00.

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