Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 2 mars 2011

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous. Oui, Monsieur Tieger.

  6   M. TIEGER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Pardonnez-moi

  7   si je commence par quelque chose d'aussi trivial que des problèmes de

  8   calendrier mais je préfère les évoquer tout de suite. J'en ai parlé un peu

  9   plus tôt avec M. Robinson. Donc il y a différentes questions sur lesquelles

 10   je souhaite attirer l'attention des Juges de la Chambre, et j'espère que si

 11   nous anticipons dessus, nous allons pouvoir trouver une solution.

 12   Les Juges de la Chambre se souviendront certainement du fait que le

 13   témoignage de M. Banbury doit non pas commencé le 14 mais le 15 et la

 14   question de son entretien avec l'accusé est une question qui a été abordée

 15   déjà avec la Défense et -- et maintenant compte tenu du fait que nous

 16   n'allons pas siéger le 14, qui était la raison pour laquelle ce témoin va

 17   être entendu maintenant le 15. Maintenant, d'après ce que j'ai compris,

 18   nous allons siéger le 14.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non. Est-ce qu'il est prévu que nous

 20   siégeons le 14 ?

 21   M. TIEGER : [interprétation] C'est ce que j'ai compris du greffe hier.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci a été prévu, les Juges de la

 23   Chambre ne peuvent pas siéger le 14. Je pense que ce message n'a pas été

 24   transmis de façon claire au greffe.

 25   M. TIEGER : [interprétation] Donc ceci écarte un problème donc je suis ravi

 26   qu'il ait été évoqué. Donc une question qui est liée à cette première

 27   question, nous essayons de prévoir la comparution des témoins pour un

 28   certain nombre de raisons, la première est de savoir si, oui ou non, il


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  1   nous restera des témoins qui n'ont pas encore témoigné. Quelque chose que

  2   j'ai évoqué avec Me Robinson. La seconde est de savoir s'il n'y a pas de

  3   témoin il faut des longues périodes entre ces auditions pour trouver des

  4   témoins. Donc je vous demande deux choses. Premièrement, si les Juges de la

  5   Chambre peuvent nous donner le temps -- une estimation de temps pour le

  6   contre-interrogatoire du Témoin KDZ182 et M. Banbury dès que possible, et

  7   de savoir s'il est possible d'avoir des volets d'audience qui seraient

  8   prolongés peut-être demain ou mardi de la semaine prochaine, ce qui permet

  9   d'éliminer la possibilité que les témoins soient dans l'antichambre à

 10   attendre alors que les témoins prévus sont cités à la barre.

 11   Merci, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre va se pencher sur la

 13   question.

 14   A mois qu'il n'y ait d'autres questions, nous allons faire rentrer le

 15   témoin, M. Muracevic.

 16   [Le témoin vient à la barre]

 17   L'INTERPRÈTE : Précision de l'interprète pour M. Tieger. Une des

 18   questions consiste à savoir si les témoins doivent attendre dans

 19   l'antichambre parce que des témoins prévus sont cités à la barre.

 20   M. TIEGER : [interprétation] Pardonnez-moi, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, oui.

 22   M. TIEGER : [interprétation] Alors enquête supplémentaire, comme vous

 23   savez, si vous regardez le calendrier, il a été noté, c'est une erreur que

 24   nous allions siéger le 14 mais également nous ne siégeons pas le 18, je ne

 25   savais pas que les Juges de la Chambre --

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous passerons de mardi à vendredi.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Muracevic.

 28   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, notre temps est précieux. Veuillez

  2   poursuivre, Monsieur Karadzic.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour à tous. Bonjour votre Excellence.

  4   Madame le Juge Lattanzi, je suis ravi de vous revoir dans le prétoire, ce

  5   qui signifie que vous allez mieux.

  6   LE TÉMOIN : ESET MURACEVIC [Reprise]

  7   [Le témoin répond par l'interprète]

  8   Contre-interrogatoire par M. Karadzic : [Suite]

  9   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, Monsieur Muracevic, comment allez-

 10   vous ?

 11   R.  Je vais très bien, merci.

 12   Q.  Hier, nous avons un petit peu avancé avec les événements en question,

 13   donc un moment qui est essentiel eu égard aux événements de Svrake. Alors

 14   jusqu'au 2 mai, il n'y avait quasiment pas de guerre, et il n'y avait que

 15   des tensions et un manque de confiance mutuelle, une méfiance mutuelle.

 16   R.  On pourrait le dire ainsi. Pour ce qui est du départ des Serbes de

 17   notre village, ceci n'avait pas seulement, n'était pas seulement dû au fait

 18   qu'ils souhaitaient passer une nuit calme à l'extérieur du village, mais il

 19   y avait une fusillade de l'endroit où ils étaient à partir de fusils

 20   automatiques. C'est la raison pour laquelle les habitants de mon village

 21   étaient inquiets.

 22   Q.  Est-ce qu'on a tiré votre village ou est-ce qu'on tirait simplement en

 23   l'air ?

 24   R.  Il y a eu des tirs en l'air, mais quelquefois une balle perdue

 25   atteignait notre village également.

 26   Q.  Quelqu'un a-t-il été touché ?

 27   R.  Non, pas lors de ces fusillades qui ont précédé en date du 2 mai.

 28   Q.  Merci. Alors je fais valoir que 170 Serbes au total au milieu de 1 080


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  1   Musulmans devaient se rendre dans d'autres villages pour y passer la nuit,

  2   dans des conditions peu confortables parce qu'ils avaient peur de vos

  3   gardes, non pas pour tirer sur votre village.

  4   R.  Ceci n'est pas exact, Monsieur Karadzic. Les habitants de mon village

  5   qui vivaient au centre du village et dont les maisons se trouvaient aux

  6   abords du village, étaient des personnes qui ne dormaient pas dans des

  7   conditions peu confortables. Ils dormaient dans leur propre maison, parce

  8   que bon nombre de ces personnes sur les pentes de la colline de Paljevo

  9   avaient fait construire des maisons plus tard dans le centre du village,

 10   comme la famille Cetkovic.

 11   Q.  Merci. Aviez-vous des rapports étroits et une collaboration étroite

 12   avec votre poste de police ?

 13   R.  Etant donné que notre poste de police avait une antenne en quelque

 14   sorte au niveau de notre communauté locale, on peut dire, effectivement,

 15   que nous avions des rapports étroits, parce qu'une partie de la force de

 16   police de Vogosca avait été déployée dans ma communauté locale. Je veux

 17   parler des réservistes de la police, quand ils avaient la charge.

 18   Q.  Je marque une pause, et vous savez certainement pourquoi. Je vous

 19   demande de marquer une pause avant de répondre également.

 20   Ces deux télégrammes du 12 et du 29 avril, ces télégrammes contenaient-ils

 21   une quelconque information sur l'attaque contre la JNA ?

 22   R.  Il faudrait peut-être que je regarde ce télégramme. Je ne pense pas que

 23   quiconque de la police ne m'ait notifié de cela.

 24   Q.  Nous avons vu ce document hier, mais nous pouvons le regarder à

 25   nouveau. Je crois que -- attendez, je vais vérifier le numéro du document.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous montrer le D400 au témoin, pour

 27   qu'il puisse se rafraîchir la mémoire ?

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


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  1   Q.  C'est le deuxième télégramme qui précède votre crise, le D44.

  2   R.  Je ne l'ai pas sur mon écran.

  3   Q.  Alors appuyez sur la touche prétoire électronique.

  4   R.  Je n'ai pas eu l'occasion de voir ce document avant l'éclatement du

  5   conflit dans mon village. Comme je vous l'ai dit hier, j'ai vu ce document

  6   pour la première fois ici dans ce prétoire.

  7   Q.  Merci. Pourriez-vous, s'il vous plaît, regardez la date qui est celle

  8   du 29 avril ? On peut y lire au centre de service de Sécurité, tous les

  9   centres de Sécurité, SJB, et le secrétaire du SUP de Sarajevo, et ensuite

 10   on peut lire :

 11   "Ordre sur l'application de la décision de la présidence de la

 12   République de Bosnie-Herzégovine," suivi du numéro de l'ordre.

 13   On peut lire : "Le 27 avril, la décision a été prise.

 14   Ensuite au point 1, il est ordonné de mener à bien le blocage entier

 15   et massif de tous les croisements des différentes artères sur le territoire

 16   de la République de Bosnie-Herzégovine, sur lesquelles se situent les

 17   Unités de l'ex-JNA; commencez à retirer les moyens matériels et thermiques,

 18   et ce, en coordination avec le MUP. Organisez ce blocus sur la région au

 19   sens large où se trouvent les installations militaires, où on tente de

 20   retirer ou des tentatives sont faites pour retirer les moyens matériels et

 21   thermiques de différentes façons, et tentez d'assurer la sécurité des

 22   barrières naturelles pour les Unités de la Défense territoriale de la

 23   République de Bosnie-Herzégovine. Les convois qui n'ont pas été annoncés,

 24   des Unités de l'ex-JNA, et ceux qui ne sont pas escortés par le MUP doivent

 25   être interdits de quitter la caserne et de communiquer avec le territoire

 26   de la République de Bosnie-Herzégovine. Après avoir procédé aux différents

 27   préparatifs et engagé des actions de combat sur l'ensemble du territoire de

 28   la République de Bosnie-Herzégovine, et après avoir coordonné ces actions


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  1   avec le QG de la Défense territoriale de la région du district de la

  2   République de Bosnie-Herzégovine, dans le cadre des actions de combat,

  3   prendre toutes les mesures permettant de protéger la population, les moyens

  4   matériels et techniques des citoyens de la République de Bosnie-

  5   Herzégovine, le ministre de l'Intérieur, Alija Delimustafic.

  6   Par conséquent, cela ne fait pas l'ombre d'un doute que notre poste de

  7   police avait reçu ceci. Pourquoi ne vous ont-ils pas informé de ces

  8   préparatifs pour les préparations de guerre contre la JNA ?

  9   R.  Ecoutez, il y avait certains éléments de la police dans mon village,

 10   donc je peux vous dire en toute connaissance de cause que j'ai dit hier

 11   déjà, que j'ai vu ce document pour la première fois, hier. Avant que le

 12   conflit n'éclate dans ma communauté locale, personne ne m'a parlé de la

 13   teneur de ce document.

 14   Q.  Ecoutez, j'aimerais vous croire, mais pensez-vous qu'il convient au

 15   secrétaire de la communauté locale d'être notifié des préparatifs qui

 16   avaient commencé dans la caserne de Semizovac ?

 17   R.  Les différentes actions de la police avaient été menées concernant la

 18   caserne de Semizovac, mais cela n'était pas utile, parce que l'armée avait

 19   déjà distribué les armes de Semizovac aux Serbes du cru déjà depuis

 20   longtemps. Personne ne m'en a informé, mais ils auraient dû le faire. Comme

 21   je vous l'ai dit hier, je ne savais rien. Je vois ce document pour la

 22   première fois et je n'en avais pas connaissance, avant cette date. Mais je

 23   n'étais pas au courant de ce document, et personne ne m'en a informé non

 24   plus, avant hier.

 25   Q.  Merci. Vous souvenez-vous du fait que dans une de vos dépositions, qui

 26   se trouve dans le document 1D3349, dans votre déposition dans l'affaire

 27   contre Dragan Damjanovic, devant la cour d'Etat de Bosnie-Herzégovine.

 28   Lorsqu'on vous a posé la question, si vous avez été attaqué par la JNA,


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  1   vous avez répondu par la négative :

  2   "Ce sont nos voisins serbes qui étaient cantonnés sur les

  3   installations ou l'enceinte des [inaudible] -- le site des installations de

  4   la JNA."

  5   C'est ce que vous avez répondu donc.

  6   Je vais, pour commencer, vous poser cette question : Etes-vous

  7   d'accord que les Slovènes, les Croates, les Musulmans n'ont pas répondu à

  8   l'appel, à la mobilisation des forces de réserve de la JNA ?

  9   R.  Je sais que certaines personnes n'ont pas répondu à cet appel, mais

 10   pour autant que les actions menées par les Serbes du cru et la JNA ont

 11   rapport avec la caserne de Semizovac, je peux vous dire, en toute

 12   connaissance de cause, que les Serbes dans la région étaient appuyés par la

 13   JNA qui était cantonnée dans la caserne de Semizovac qui, jusqu'à 1991, et

 14   jusqu'à l'éclatement du conflit, passait progressivement sous le contrôle

 15   des autorités serbes. Donc, d'une certaine façon, la caserne de Semizovac

 16   était en quelque sorte une enceinte dans laquelle des armes étaient

 17   distribuées, les Serbes du cru y étaient entraînés au maniement des armes,

 18   et lorsque tous ces barrages routiers ont été érigés, cette caserne a

 19   fourni un appui logistique important aux Serbes du cru, parce que toutes

 20   les ressources ou atouts de la JNA avaient été mis à leur disposition dans

 21   cette caserne de Semizovac. Donc, les Serbes et les membres de la JNA qui

 22   se trouvaient dans la caserne de Semizovac ont agi de concert contre mon

 23   village.

 24   Q.  Alors essayons de prendre ceci à l'envers. Moi, je vous dis que non

 25   seulement les Serbes locaux ou du cru disposaient de l'appui des Serbes qui

 26   étaient dans la région, mais c'était l'inverse également, et les Serbes du

 27   cru ont répondu à l'appel à la mobilisation, et les Musulmans et les

 28   Croates n'ont pas répondu à cet appel.


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  1   R.  Je ne peux pas confirmer cela, parce que, moi, je ne faisais pas partie

  2   de la structure de la JNA. Je ne sais pas quel a été le taux de réponse à

  3   cette mobilisation. Ce que je vous dis ne se fonde que sur ma propre

  4   expérience en tant que secrétaire de la communauté locale, parce que ma

  5   communauté locale avait une excellente coopération avec Pero Crnogorac, le

  6   commandant de la caserne, la caserne elle-même, en termes de coopération

  7   culturelle et toute autre forme de coopération, avec les autres unités de

  8   la TO qui avaient été rattachées, et nous avions -- et nous n'avions pas de

  9   problème de communication ou de compréhension avec la caserne de Semizovac

 10   avant la guerre. Par conséquent, il était inutile que les personnes de la

 11   caserne soient inquiétées par les villageois, les habitants du village

 12   Svrake, parce que pendant de nombreuses années qui ont précédé, la

 13   population n'avait jamais menacé la sécurité des soldats. Après tout, la

 14   JNA était l'armée de notre pays en commun et de notre état en commun, et

 15   nous estimions que c'était également notre armée.

 16   Q.  Etes-vous d'accord pour dire que jusqu'au 2 mai 1992, la JNA avait eu

 17   une terrible expérience au niveau de leurs casernes en Slovénie et Croatie;

 18   il y avait eu des bains de sang, il y avait un blocus, des soldats avaient

 19   été tués, les approvisionnements en électricité et en eau et les lignes

 20   téléphoniques avaient été coupés, ils avaient été humiliés, et que cette

 21   menace pesait sur la population locale de ces républiques ?

 22   R.  D'après les médias, je savais ce qui s'était passé, mais la caserne de

 23   Semizovac n'avait pas -- n'était pas confronté à ce genre de problèmes. En

 24   tant que commandant, il y avait mon ami, Dobrica Stojanovic, qui était mon

 25   ami, et en tant que secrétaire de la communauté locale et des représentants

 26   de ma communauté locale et représentants du pouvoir exécutif au moment où

 27   ces événements se sont déroulés en Slovénie et en Croatie, nous nous sommes

 28   rendus à la caserne, nous allions leur rendre visite, échanger nos


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  1   expériences, parler de la fusillade qui s'était déroulée pendant la nuit

  2   autour de nos villages, et nous avons demandé à la JNA de nous aider à

  3   calmer la situation et essayer de réduire la fusillade à l'époque. En

  4   d'autres termes, les Musulmans de ma communauté n'allaient pas menacer la

  5   sécurité de la caserne de la JNA à Semizovac d'une manière ou d'une autre,

  6   cette crainte n'existait pas, et leur commandant --

  7   L'INTERPRÈTE : Précision de l'interprète : La coopération citée plus tôt

  8   avec le commandant de la caserne est la même personne Pero Crnogorac.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] -- et ses collaborateurs nous avaient prévenu

 10   que notre comportement -- quelque chose dû à notre comportement pourrait

 11   peut-être compromettre leur sécurité.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Pouvons-nous nous concentrer sur vos réponses, parce que je ne pense

 14   pas que vous souhaitiez rester là demain, et vous n'allez -- ce que je vais

 15   vous dire ne va peut-être pas vous plaire.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Sutherland.

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] La question précédente posée par M.

 18   Karadzic portait sur la Slovénie et la Croatie, et j'étais sur le point de

 19   demander quelle était la pertinence de cette question. Maintenant, il

 20   demande au témoin de se concentrer là-dessus, alors que c'est lui qui a

 21   posé la question, et le témoin est revenu à la question de sa communauté.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Poursuivons, Monsieur Karadzic.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Alors permettez-moi de vous dire que la pertinence est la suivante :

 26   L'armée avait déjà vécu ce genre de choses et ils avaient raison d'avoir

 27   des craintes, ils avaient intercepté ces télégrammes que j'avais sur mon

 28   bureau le jour où les Musulmans m'ont envoyés ces télégrammes, donc ils


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  1   étaient également au courant de cela. Donc, si je vous pose la question,

  2   Monsieur Muracevic, êtes-vous d'accord que la caserne de Semizovac était --

  3   servait surtout de dépôt de munitions, de carburant pour la JNA ? Diriez-

  4   vous "oui" ou "non."

  5   R.  Je crois que la caserne de la JNA de Semizovac, ainsi que celle de

  6   Misoca était une des casernes qui servait de dépôt de carburant, de

  7   lubrifiant, et cetera, donc c'était davantage un dépôt, oui.

  8   Q.  Merci.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous maintenant regarder le 1D3349 ? Je

 10   ne le vois pas sur l'écran.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Alors, il s'agit d'un compte rendu d'audience de votre déposition dans

 13   l'affaire Damjanovic.

 14   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pardonnez-moi si j'interromps une

 15   nouvelle fois, Monsieur le Président. Il s'agit d'un résumé de la

 16   déposition de ce témoin. M. Karadzic dispose de la déposition de ce témoin

 17   dans son intégralité, et c'est la pièce 1D03350. Je crois qu'il est

 18   préférable de demander au témoin de se pencher sur sa déposition dans son

 19   intégralité, plutôt qu'un résumé de sa déposition.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous voulez parler du compte rendu ou de

 21   l'extrait ?

 22   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Le document que vient de citer M.

 23   Karadzic est un résumé de la déposition du témoin. Nous disposons de la

 24   déposition dans son intégralité de ce témoin, c'est le numéro 1D03350, et

 25   je crois que si le Dr Karadzic pose des questions au témoin, à mon sens, il

 26   devrait poser des questions sur l'ensemble de sa déposition, et non pas sur

 27   un résumé du compte rendu de sa déposition.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Moi, je suis d'accord avec la remarque


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  1   que vient de faire Mme Sutherland.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Alors est-ce que nous pouvons avoir ce

  3   numéro ?

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est le numéro 65 ter suivant. C'est le

  5   1D3350. Ce document figure sur votre liste.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. C'est là, mais pour gagner du temps, il

  7   eut été plus facile pour moi.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Est-ce exact qu'en réponse à la question : "Avez-vous été attaqué

 10   par la JNA," vous avez répondu dans le cadre de cette procédure pendant le

 11   contre-interrogatoire à la question de l'avocat Stojanovic et vous avez dit

 12   que ce n'était pas la JNA mais les Serbes du cru; est-ce exact ?

 13   R.  Nous avons été attaqués en coordination avec les Serbes du cru et des

 14   membres de l'armée yougoslave qui étaient là, parce que les Serbes du cru

 15   étaient en grand nombre cantonnés de toute façon à la caserne de Semizovac.

 16   Lorsque je parle des Serbes du cru, cela laisse entendre que c'était les

 17   Serbes du cru qui avaient reçu des consignes très claires à ce moment-là,

 18   et qui étaient cantonnés déjà à la caserne de Semizovac. Donc l'attaque des

 19   Serbes du cru contre mon village avait été coordonnée avec les moyens dont

 20   disposaient les Serbes à la caserne de Semizovac. Le feu a été ouvert

 21   contre Semizovac et depuis les installations de la JNA.

 22   Q.  Mais vous avez dit que ce n'était pas la JNA mais les voisins serbes.

 23   Je vous demande un petit peu de patience. Je pensais que le résumé

 24   allait nous permettre d'avancer plus rapidement. Maintenant, nous allons

 25   avoir la bonne page.

 26   C'est à la page 33 du serbe. On voit votre réponse tout en haut, je cite :

 27   "Non, pas la JNA mais nos voisins serbes de Semizovac, Krivoglavci et les

 28   habitants serbes de Svrake, donc ils ont utilisé les capacités de l'ex-


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  1   armée populaire yougoslave, plus précisément de la caserne de Semizovac qui

  2   était, jusqu'à ce moment-là, la caserne de l'armée populaire yougoslave, et

  3   ils ont même utilisé l'aviation."

  4   Est-ce que les paysans de cette région et de Semizovac avaient de

  5   l'aviation ?

  6   R.  S'agissant des villages, les paysans, est-ce qu'ils avaient de

  7   l'aviation ? On peut dire qu'ils n'en avaient pas, mais un représentant du

  8   groupe ethnique serbe de mon village était pilote au sein de l'armée

  9   populaire yougoslave, de la JNA, et pendant l'attaque, les forces aériennes

 10   de la JNA ont été utilisées contre mon village et, plus précisément, un

 11   certain nombre de bâtiments ont été endommagés par des bombes et des bombes

 12   aériennes ont été larguées sur mon village, qui n'ont pas explosé. Plus

 13   tard, les Serbes de la région, à la chute du village, se sont saisis de

 14   certaines de ces bombes aériennes qui n'avaient pas explosé pour les

 15   emporter afin de faire sauter des bâtiments qui appartenaient à des

 16   particuliers ou des bâtiments publics. De cette façon, d'ailleurs, ils ont

 17   fait sauter ma maison ainsi que la mosquée de Svrake et un bâtiment

 18   commercial dans une autre communauté locale. Une partie des dépositions

 19   faites devant ce Tribunal indiquent que nous avons été attaqué par les

 20   Serbes de la région, qui ont utilisé tous les moyens à leur disposition et

 21   tous les moyens dont disposait la JNA dans la caserne de Semizovac.

 22   Q.  Pouvons-nous nous mettre d'accord sur un point, je vous prie ?

 23   Pourrions-nous peut-être écouter des réponses plus succinctes de votre part

 24   ? Monsieur Muracevic, est-ce que vous connaissez ce pilote de votre village

 25   ?

 26   R.  Oui, je le connais. Il s'appelait Predrag Cetkovic.

 27   Q.  Est-ce qu'il était stationné à Sarajevo ?

 28   R.  Je ne sais pas où il était stationné, mais avant le conflit, j'ai eu la


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  1   possibilité de le rencontrer un jour où il a atterri en hélicoptère sur le

  2   stade de ma communauté locale. J'ai donc eu la possibilité de le rencontrer

  3   en personne au moment où il sortait de l'hélicoptère. Il n'était pas là

  4   parce qu'il faisait un voyage en tant que pilote mais parce qu'il était

  5   venu rendre visite à sa famille dans sa maison.

  6   Q.  Très bien. Je vous remercie. Mais est-ce que vous savez s'il a

  7   participé à l'action dont nous parlons ou pas ?

  8   R.  Je ne saurais le confirmer. Depuis le sol, on ne voit pas qui est aux

  9   commandes d'un avion qui vole, et il n'y avait pas un seul avion en vol à

 10   ce moment-là mais plusieurs. Donc s'il était un des pilotes aux commandes

 11   de ces avions, je ne saurais pas vous le dire.

 12   Q.  Précisons ce point, je vous prie. Est-ce que cette action menée par les

 13   forces aériennes était une action menée par la JNA officiellement, ou est-

 14   ce que c'était une action engagée par un particulier, autrement dit, un de

 15   vos voisins ?

 16   R.  Jusqu'à ce que les forces aériennes commencent à fonctionner, en fait,

 17   je ne savais pas qu'il y avait un particulier qui avait un avion de guerre

 18   et qui était membre des formations des forces aériennes de la JNA. Je ne

 19   savais pas qu'il avait un avion en sa possession. Plusieurs avions ont

 20   bombardé mon village et plusieurs d'entre eux étaient, cela dit, des avions

 21   de la JNA. Ils faisaient partie de l'arsenal de la JNA, ces avions. Mais je

 22   ne sais pas qu'un particulier pouvait être propriétaire privé d'un tel

 23   avion de combat.

 24   Q.  Je vous remercie. Il est vrai que la mosquée a été endommagée lors

 25   d'une action menée plus tard par une bombe qui n'a pas explosé, ou bien

 26   est-ce qu'elle a été touchée par un avion ?

 27   R.  La mosquée de Svrake a été considérablement endommagée au moment du

 28   largage sur elle d'une bombe aérienne qui n'a pas explosé.


Page 12739

  1   Q.  Très bien. Je vous remercie. Donc elle n'a pas été touchée par une

  2   bombe aérienne, n'est-ce pas ?

  3   R.  Comprenez bien que le minaret de la mosquée n'a pas été détruit pendant

  4   l'attaque de notre village mais il a été détruit plus tard, au moment où

  5   une bombe aérienne qui n'avait pas explosé au moment de sa chute a été

  6   activée.

  7   Q.  Pouvez-vous me dire combien de personnes ont été tuées durant cette

  8   action, qui s'est prolongée du 2 au 4 mai ?

  9   R.  Une personne a été tuée et quatre ont été blessées dans ma localité.

 10   Q.  Dans votre déclaration consolidée - je vérifie le numéro du paragraphe

 11   - en tout cas, vous dites qu'un certain nombre de personnes ont été tuées.

 12   Pourquoi est-ce que vous vous efforcez, dans vos déclarations récentes, de

 13   présenter les Serbes sous un jour de plus en plus mauvais ?

 14   R.  J'aimerais que vous me montriez cette déclaration. Pour autant que je

 15   le sache, j'ai toujours dit qu'une personne avait été tuée et quatre

 16   blessées. Peut-être est-il indiqué que plusieurs personnes ont été

 17   blessées.

 18   Q.  Penchons-nous sur le paragraphe 13 de votre déclaration consolidée, où

 19   nous lisons, je cite :

 20   "Il y a eu des tués. Une personne a péri et l'autre s'est tuée."

 21   Donc il ressort de la lecture de ce passage que des gens ont été tués et

 22   blessés. Comment se fait-il que vous avez utilisé cette expression

 23   plusieurs et générale "des gens ont été tués et blessés," alors qu'il n'y a

 24   eu qu'un seul mort ?

 25   R.  Monsieur Karadzic, de toute évidence, vous n'avez pas lu ce que j'ai

 26   dit. Une personne a été tuée, cela signifie qu'une personne a été tuée à ce

 27   moment-là. A ce moment dans le temps, il était impossible de déterminer si

 28   la personne avait été tuée par -- elle s'était, elle-même, infligée une


Page 12740

  1   blessure ou est-ce qu'elles avaient été tuées à cause de tirs venant d'une

  2   autre personne ? Donc une personne a été tuée, quatre personnes ont été

  3   blessées, et dans ma déclaration de l'époque, j'étais incapable de préciser

  4   si cette personne avait été tuée par une balle provenant d'un fusil serbe

  5   ou si elle avait trouvé la mort suite a une blessure qu'elle s'était elle-

  6   même infligée. Donc je répète, une personne a été tuée, quatre blessées. Il

  7   n'y avait pas deux personnes tuées.

  8   Q.  Mais il est dit dans ce document que je vous soumets que des gens ont

  9   été tués et blessés. Pourriez-vous me dire pourquoi vous utiliser le

 10   pluriel alors qu'une personne seulement a été blessée ?

 11   R.  Je n'étais pas présent lorsque la personne a été blessée, mais la

 12   personne en question présentait une blessure. Lorsque j'ai pu rencontrer

 13   cette personne, après m'être rendu à son domicile, j'ai vu effectivement

 14   qu'elle avait une blessure à la poitrine. Etant donné que des types de

 15   munition tout à fait variés ont été utilisés pendant l'action qui a été

 16   mené contre mon village, notamment des balles à fragmentation et des balles

 17   dum-dum, je ne pouvais vraiment pas dire si la personne avait été touchée

 18   par des tirs provenant des Serbes de la région ou si peut-être cet homme

 19   portait sur lui une arme qu'il avait utilisée contre lui. Donc dans ma

 20   déclaration, il n'est pas indiqué précisément que la personne en question a

 21   été tuée parce que des tirs ont été tirés par des Serbes ou parce qu'elle

 22   s'est, elle-même, blessée. Je n'ai pas été capable d'établir les conditions

 23   dans lesquelles cette personne était décédée.

 24   Q.  Monsieur Muracevic, croyez-moi, tout cela peut être dit beaucoup,

 25   beaucoup plus rapidement et de façon beaucoup, beaucoup plus concise.

 26   R.  Cela dépend de vous, Monsieur Karadzic.

 27   Q.  Très bien. Donc vous dites qu'à ce moment-là, vous ne saviez pas si la

 28   personne avait été tuée en raison d'une action commise par elle ou si elle


Page 12741

  1   avait été tuée par des balles tirées par des Serbes. L'aviez-vous déterminé

  2   lorsque vous avez fait votre déclaration consolidée ? Est-ce qu'il a été

  3   précisé que cette personne était morte suite à une blessure qu'elle s'était

  4   infligée elle-même avec son propre revolver de fortune, bricolé ?

  5   R.  Nous avons pu constater cela plus tard. Lorsque cette personne a été

  6   tuée, aucune enquête criminelle n'a été menée dans le but d'établir les

  7   causes de la mort. Le corps était resté sans sépulture pendant plusieurs

  8   jours, et c'est seulement après quelques jours qu'il a été inhumé dans le

  9   cimetière local.

 10   Q.  Très bien. Très bien. Je ne vous ai pas demandé où et quand la personne

 11   a été enterrée. Veuillez, je vous prie, vous pencher sur le document 3354.

 12   Est-ce que votre mémoire est meilleure aujourd'hui qu'elle ne l'était en

 13   1992 ?

 14   R.  S'agissant de ma mémoire et de la précision de mes souvenirs au sujet

 15   de cet événement, je ne saurais dire si cette personne a été tuée par des

 16   soldats serbes ou par une blessure qu'elle s'est infligée elle-même à

 17   l'aide de l'arme qu'elle portait sur elle. J'ai pensé à cette possibilité,

 18   j'ai pensé que cet homme avait probablement été tué par une blessure qu'il

 19   s'était infligé lui-même, et étant donné le contexte de l'époque, et ce, en

 20   dépit de l'absence d'enquête. Mais c'était ma conviction personnelle --

 21   Q.  Je vous remercie, je vous remercie. Monsieur, vous vous êtes évadé le 5

 22   décembre, et le 6, vous avez fait votre première déclaration. Veuillez

 23   répondre par "oui" ou par "non," je vous prie. Cela nous suffira.

 24   R.  Oui, le 6 décembre.

 25   Q.  Veuillez vous pencher sur la page 3 de cette déclaration affichée à

 26   l'écran dont vous êtes l'auteur.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous avons vu la page 1, mais j'aimerais que

 28   l'on affiche la page 3 en version serbe. Je crois qu'elle correspond sans


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  1   doute à la page 3 également en version anglaise. Premier paragraphe de

  2   cette page 3. Je le cherche. Voilà.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans cette déclaration, j'ai émis l'hypothèse

  4   que la personne aurait pu mourir d'une blessure qu'elle se serait infligée

  5   à elle-même car elle était en possession d'une arme bricolée qui aurait pu

  6   être la cause de la blessure qu'elle présentait. Donc étant donné le

  7   contexte, j'ai conservé cette hypothèse en tête, à savoir que cette

  8   personne s'était blessée elle-même et que peut-être elle n'avait pas été

  9   tuée par le tir d'un Serbe de la localité.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Voyons ce que vous dites au début de votre déclaration. Vous dites, je

 12   cite :

 13   "Je me suis dirigé vers la gare routière de Vogosca où j'ai réussi à monter

 14   à bord d'un autocar de Centrotrans avec Semizovac comme destination, en me

 15   cachant à son bord, ce faisant j'ai augmenté l'aptitude au combat des

 16   unités de la Défense territoriale et de la réserve de la police, et j'ai

 17   appelé la population à prendre toutes les mesures de précaution nécessaires

 18   et à utiliser les abris," et cetera, et cetera.

 19   Donc vous avez réussi, dites-vous, à augmenter l'aptitude au combat des

 20   unités. Pourquoi avez-vous fait cela, Monsieur Muracevic ?

 21   R.  A la lecture du passage que vous venez de citer, vous voyez pourquoi.

 22   Si je n'avais pas fait cela, si je n'avais pas emmené les habitants jusqu'à

 23   un lieu sûr, je suppose qu'il y aurait eu beaucoup plus de victimes dans

 24   mon village qu'il y en avait eu jusqu'à ce moment-là, parce que pendant des

 25   jours avant cette action, on entendait le bruit des armes autour de notre

 26   village, et ce, plus particulièrement depuis le début de l'année 1992. Donc

 27   d'une certaine façon, nous vivions dans une peur permanente d'une attaque

 28   prochaine tout à fait envisageable, attaque qui a d'ailleurs été tentée les


Page 12743

  1   3 et 4 avril 1992, parce que dans cette communauté locale --

  2   Q.  Merci, merci. Croyez-moi, je vous remercie --

  3   R.  Excusez-moi, mais, Monsieur Karadzic, Monsieur le Président, j'aimerais

  4   préciser --

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je vous en prie, Monsieur

  6   Muracevic.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Depuis des mois donc déjà avant l'attaque

  8   contre mon village, le village et communauté locale voisin de Krivoglavci,

  9   où se trouvait le champ de tir de la JNA, ainsi que de la Défense

 10   territoriale et toutes les autres installations, c'est là qu'ils

 11   vérifiaient le fonctionnement des armes. Donc depuis plusieurs jours, sur

 12   ce terrain de tir, les Serbes de la région, ainsi que des volontaires

 13   arrivés des théâtres d'opération de Slovénie et de Croatie, se trouvaient

 14   là. Un jour, entre le 3 et le 4 avril 1992, à partir de la route reliant

 15   Zenica à Sarajevo, où il y avait un poste de police à Krivoglavci, ils ont

 16   essayé d'attaquer mon village. Ils ont même ouvert le feu. Mais grâce aux

 17   patrouilles de garde que nous avions organisées, ils n'ont pas réussi à

 18   pénétrer dans le village. Donc d'une certaine façon, avant le 2 mai, date

 19   de l'attaque effective contre mon village, cela faisait déjà des mois que

 20   ce genre de chose se produisait, qu'il y avait des provocations, avec tir

 21   au fusil, et puis il y avait tout ce qui se passait sur ce terrain

 22   d'exercice de Krivolgavci, tous ces gens qui nous ne connaissions pas qui

 23   arrivaient sur ce champ de tir pour essayer toutes sortes d'armes. Nous

 24   avions peur, d'une certaine façon, et nous nous attendrions à ce que

 25   quelque chose de mauvais arrive à notre village.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Monsieur Muracevic, vous n'avez rien dit de ces incidents et de ces

 28   attaques contre votre village avant le 2 mai, pas un seul mot dans vos


Page 12744

  1   déclarations antérieures, n'est-ce pas ?

  2   R.  Ce n'est pas exact. Peut-être vous n'avez pas eu la possibilité de lire

  3   toutes les déclarations venant de moi qui sont évoquées dans les notes en

  4   bas de page. Mais lorsque nous parlions de la population serbe qui avait

  5   quitté notre village au début de 1992, et comme dans mes déclarations j'ai

  6   parlé de gardes serbes armés qui circulaient autour de notre village, et de

  7   toutes les tranchées qui avaient été creusées aux environs de notre

  8   village, cela signifiait sans nécessité de le dire, qu'il était possible

  9   que toute sorte de chose arrive à ma communauté locale.

 10   Q.  Monsieur, allez sans dire n'est pas synonyme de relation d'un fait

 11   réel. Est-ce un fait que vous n'avez jamais déclaré qu'un Serbe vous aurait

 12   attaqué avant le 2 mai ?  Est-ce que vous pourriez nous montrer une seule

 13   déclaration venant de vous, dans laquelle vous auriez dit que vous-même

 14   l'auriez vu ou qu'il y aurait eu une plainte déposée au pénal à ce sujet

 15   avant la date du 2 mai.

 16   Mais voyons cela. Vous saviez que le 6 décembre, quelqu'un avait été tué

 17   parce qu'il s'était blessé lui-même, et lorsque vous avez élaboré votre

 18   déclaration consolidée, vous avez dit que des gens avaient été blessés et

 19   tués. Alors dites-nous aujourd'hui, est-ce que lorsque vous avez dit cela,

 20   est-ce que c'était un lapsus de votre part ou est-ce que c'était volontaire

 21   ?

 22   R.  Ce n'était pas un lapsus dans ma déclaration. C'est un fait qu'une

 23   personne a été tuée pendant l'attaque de mon village. Est-ce que cette

 24   blessure de la personne blessée lui avait été infligée par elle-même ou par

 25   des Serbes, ce n'est pas particulièrement important vu le contexte. Mais

 26   c'est un fait qu'une personne a perdu la vie dans cette période.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Sutherland.

 28   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, comme M. Karadzic


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  1   le sait fort bien, le témoin n'élabore pas lui-même les déclarations

  2   consolidées. C'est le bureau du Procureur qui le fait en s'appuyant sur

  3   toutes les déclarations antérieures des témoins concernés.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais il a lu un passage --

  5   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Il a relu sa déclaration consolidée, mais

  6   ce n'est pas lui qui l'a élaborée, qui l'a confectionnée, si je puis

  7   utiliser ce terme. Par rapport au paragraphe 9, si M. Karadzic a lu le

  8   passage, on voit que le témoin déclare qu'il y a eu pas mal de tir et que

  9   parfois les armes visaient le village de Svrake. Donc ce genre de

 10   renseignement figure déjà dans des déclarations antérieures du témoin, et

 11   par rapport au fait que le témoin a dit que "des gens avaient été blessés

 12   et tués," la note en bas de page relative à cette phrase bien particulière

 13   indique bien que quatre personnes ont été blessées et une personne tuée.

 14   C'est une déclaration qui a été recueillie déjà en 1996.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Sauf votre respect, Madame Sutherland, nous

 16   faisons objection aux déclarations consolidées parce que c'est le bureau du

 17   Procureur qui en est l'auteur. Puis nous avançons dans le temps, plus leur

 18   qualité est mauvaise, s'agissant de ce qui est au sujet des Serbes. Le 6

 19   décembre 1992, ce témoin déclare sans le moindre doute que Sacir Fejzovic

 20   s'est tué lui-même, en raison d'un mauvais fonctionnement de l'arme qu'il

 21   avait sur lui. Donc plus le temps passe, plus le bureau du Procureur créée

 22   des déclarations de plus en plus éloignées de la réalité, et qui présentent

 23   les Serbes sous un jour de plus en plus mauvais.

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] S'agissant des déclarations consolidées,

 25   Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, le bureau du Procureur

 26   a reçu les consignes de la Chambre de première instance d'élaborer une

 27   déclaration consolidée par témoin, ou de soumettre en tout cas une

 28   déposition de témoin. Ce témoin-ci n'a pas témoigné avant devant le


Page 12746

  1   Tribunal.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avançons.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Pouvons-nous nous mettre d'accord sur le fait que la population avait

  6   été avertie par la JNA, de chercher à s'abriter et de prendre soin d'elle,

  7   parce que des opérations allaient avoir lieu?

  8   R.  La population de Svrake n'avait pas été avertie par la JNA que des

  9   opérations étaient en cours ou auraient lieu; à savoir que la population de

 10   mon village n'avait reçu aucune information de la JNA indiquant que des

 11   opérations étaient en cours.

 12   Q.  Mais qui a parlé à la population par haut-parleur pour l'avertir de

 13   déposer les armes, et qui a dit à la population que des opérations allaient

 14   se produire ?

 15   R.  Ce sont les Serbes de la région, les Serbes. Ils ont utilisés un haut-

 16   parleur, et on lançait des avertissements. Il y a eu toute sorte de menaces

 17   qui ont été proférées également. Quoi qu'il en soit, les Serbes de la

 18   région appelaient la population à quitter le village, et dans les menaces

 19   qu'ils proféraient, ils n'ont pas dit que la JNA attaquerait le village ou

 20   quoi que ce soit de ce genre. Ils ont simplement appelé la population à

 21   quitter le village. Quant à la population, pourquoi est-ce qu'elle aurait

 22   souhaité quitter son domicile de son plein gré, sans aucune raison

 23   particulière ?

 24   Q.  Voyons un peu ce que vous dites dans le document 1D3350.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Donc je demande une nouvelle fois l'affichage

 26   sur les écrans. Page suivante à présent, je vous prie, sur les écrans. La

 27   page suivante.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


Page 12747

  1   Q.  Vous rappelez-vous qu'il a été montré hier, que deux de vos

  2   représentants avaient participé à des pourparlers, qu'ils avaient reçu des

  3   assurances d'autorisation de départ en toute sécurité, et qu'une partie de

  4   la population à ce moment-là, a quitté le village. Un groupe donc a pu

  5   partir et l'autre a été arrêté, a été empêché de partir ?

  6   R.  Oui, nous en avons longuement parlé hier, et c'est inexact de dire

  7   qu'il y a eu deux groupes. Il y a eu en fait un seul et même groupe, qui a

  8   pris le départ, et à un certain moment ce groupe a été coupé en deux; la

  9   fin du groupe étant empêchée de partir. Donc ce n'est pas qu'il y a eu deux

 10   groupes mais un seul.

 11   Q.  Bien. Mais, hier, nous avons bien vu que les choses ne se sont passées

 12   ainsi. En effet, nous avons pu vérifier que ces deux hommes qui ont

 13   participé aux pourparlers ne vous ont pas informé des résultats de ces

 14   pourparlers, et que vous n'êtes pas parti immédiatement avec les premières

 15   personnes qui ont pris le départ. C'est la raison pour laquelle vous n'avez

 16   pas pu terminer votre trajet, avec le début du groupe. Donc vous avez été

 17   averti au haut-parleur que la population pouvait chercher à s'abriter

 18   pendant le déroulement des opérations, n'est-ce pas ?

 19   R.  Ce n'est pas exact, Monsieur Karadzic, vous êtes en train de

 20   paraphraser de façon erronée le contenu de notre discussion d'hier. Nous

 21   n'avons pas dit cela hier. Les deux hommes dont nous parlons, ceux qui ont

 22   participé aux pourparlers avec les Serbes de la région, m'ont informé des

 23   accords qui avaient été conclus. Mais ces deux hommes n'ont pas informé

 24   tous la population, des conditions de ces accords. Toutefois, je suis allé

 25   avec mes collaborateurs, avertir le reste de la population du village au

 26   sujet de ces accords et leur dire que nous allions quitter le village de

 27   façon organisé.

 28   C'est un fait que ces deux hommes ainsi qu'une partie de la colonne a bien


Page 12748

  1   quitté le village avant leur limite, à savoir avant que le village tout

  2   entier soit prêt à partir. Donc le début de la colonne, parce qu'au début,

  3   il y avait une colonne, et elle a simplement été coupée en deux. Une partie

  4   de la colonne réussit à partir et l'autre est emmenée à la caserne de

  5   Semizovac. Il n'a pas été fait mention hier d'une colonne qui aurait partie

  6   et d'une autre qui aurait su ce qui allait se passer. C'est toute la

  7   colonne d'habitants, constituée d'habitants du village, qui était

  8   impliquée.

  9   Q.  Voyons ce qui s'est passé réellement dans la caserne. Il y avait là à

 10   peu près 400 personnes, n'est-ce pas ?

 11   R.  A peu près.

 12   Q.  Le lendemain, une fois que vous avez passé une nuit sur le terrain de

 13   la caserne, les femmes, les enfants, les personnes âgées et les civils ont

 14   été renvoyés dans leur village.

 15   R.  Je faisais partie des premiers qui sont sortis de la caserne, et je

 16   n'ai découvert que quelques jours plus tard que les femmes et les enfants

 17   avaient été emmenés au village et que les hommes qui se trouvaient dans la

 18   caserne de Semizovac avaient été transférés dans le garage de Naka, tout

 19   près de la "flyover" de Vogosca, et que plus tard, ils sont rentrés à

 20   Svrake, mais qu'en fait ils étaient censés se présenter à la maison de

 21   Planjo. Plus tard, cette maison a été transformée en lieu de détention pour

 22   ces personnes; 28 villageois habitant mon village ont été emmenés dans une

 23   direction inconnue, à la mi-juin, à partir de cet endroit, et à ce jour,

 24   personne ne sait ce qu'il est advenu de ces 28 personnes sauf pour trois

 25   d'entre elles dont les restes ont été découverts après la guerre dans la

 26   rivière Bosna, non loin de Visoko.

 27   Q.  Monsieur Muracevic, ceci faisait partie des questions que j'avais

 28   l'intention de vous poser plus tard. Mais revenons sur un point précis qui


Page 12749

  1   est très important. Donc vous étiez avec les personnes qui étaient dans le

  2   garage de Naka, et est-il exact que vous avez passé 33 jours dans ce

  3   garage, ou est-ce que vous avez immédiatement été transféré ?

  4   R.  J'ai immédiatement été transféré au bunker, mais un jour ils m'ont fait

  5   sortir du garage de Naka pendant la nuit et je suis resté hors du garage

  6   aussi presque la moitié de la journée. En fait, ce jour-là, ils m'ont

  7   emmené depuis le bunker jusqu'au garage de Naka. J'y ai passé la nuit. J'ai

  8   eu la possibilité de voir, par conséquent, dans ce garage de Naka, qu'il y

  9   avait 150 personnes à peu près, ou plus de 150 habitants de mon village là.

 10   Q.  Je vous remercie. Donc neuf d'entre vous ont été placés en détention

 11   dans le bunker. Vous avez dit, ou en tout cas vous admettez que les Serbes

 12   savaient ce que vous étiez en train de faire à ce moment-là. Aujourd'hui,

 13   nous avons lu que vous augmentiez l'aptitude au combat des vôtres dans cet

 14   endroit. Hier, nous avons relu des mots venant de vous et indiquant que

 15   vous aviez acquis, de façon irrégulière, illégale, un mortier et des

 16   munitions pour ce mortier. Mais vous dites que sur les neuf personnes dont

 17   vous faisiez partie, il y en avait pour lesquelles vous ne saviez pas

 18   pourquoi elles étaient détenues dans le bunker. Est-ce que vous essayez de

 19   dire qu'une vengeance personnelle serait à la clé de certaines

 20   arrestations, parce qu'un de ces hommes était enseignant et qu'il y avait

 21   un élève qui lui en voulait ? Est-ce que vous essayez de dire cela ? Parce

 22   que s'il ne s'agissait pas d'une vengeance personnelle dans votre cas - il

 23   ne s'agit pas de cela, n'est-ce pas, puisque vous avez participé à la

 24   préparation de la défense - mais qu'en était-il des autres ?

 25   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, M. Karadzic

 26   utilise quatre ou cinq déclarations du témoin et déclare ensuite que le

 27   témoin essaie de dire ceci ou cela et qu'il devrait le dire plus

 28   rapidement. Il faut qu'il pose une question pour obtenir une réponse.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Tout ceci a à voir avec le temps qui

  2   passe, Monsieur Karadzic. Vos capacités auraient dû s'améliorer. Donc point

  3   par point, et des questions simples, je vous prie.

  4   Pourriez-vous, Monsieur, répondre à la question ou est-ce que je dois

  5   demander à l'accusé de la reformuler ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, puisque M. Karadzic a

  7   dit un certain nombre de choses qui n'étaient pas exactes en reprenant mes

  8   propos, je tiens à dire que je n'ai pas acquis illégalement un mortier.

  9   Nous l'avons saisi aux Serbes de la région au niveau du barrage routier.

 10   Comment se fait-il que les Serbes possédaient ce mortier ? Je ne sais pas.

 11   Mais, moi, je n'ai rien acquis illégalement. Acquérir illégalement, cela

 12   signifie que vous achetez et revendez des objets pour votre profit

 13   personnel.

 14   S'agissant de cette question qui m'a été posée, à savoir est-ce qu'un motif

 15   de vengeance personnelle aurait existé s'agissant de ce groupe de neuf

 16   hommes qui étaient originaires de Svrake, nous n'avions avec nous aucun

 17   enseignant. Manifestement, l'enseignant dont parle M. Karadzic c'est

 18   l'homme qui a été emmené beaucoup plus tard, mais il ne faisait pas partie

 19   de ce groupe de neuf hommes originaires de Svrake, dont je faisais partie

 20   moi-même. Mais je ne dirais pas que le motif de vengeance personnelle

 21   existait, rien de tel. Très simplement, cette action a été coordonnée par

 22   les Serbes de la région. Par exemple, avant l'attaque de mon village, Jovan

 23   Tintor, qui était le chef de la cellule de Crise, pratiquement un jour

 24   avant l'attaque de mon village, a émis un ordre relatif à l'auberge de

 25   Kontiki, que l'on connaît mieux sous le nom d'auberge de Kod Sonja. Il a

 26   déclaré que c'était son affaire, c'est-à-dire c'est lui qui voulait s'en

 27   occuper, mais on ne savait pas ce qu'il voulait faire. Ils y ont emmené un

 28   certain nombre de personnes qui étaient arrêtées dans le bunker, et c'est


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  1   dans ces conditions que j'ai fait partie de ce groupe.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Je vous remercie, Monsieur le Témoin. Mais je vais vous dire une chose.

  4   Il y a un instant, j'ai récapitulé ce que vous avez déclaré hier, à savoir

  5   que vous étiez -- que vous pratiquiez la contrebande. Mais quand je parlais

  6   de contrebande, je ne parlais pas de vente à votre profit personnel. Vous

  7   avez réussi à faire entrer un mortier dans la ville de Sarajevo en

  8   traversant les lignes serbes, à l'insu des personnes concernées, et vous

  9   avez également fait entrer un certain nombre de munitions pour ces

 10   mortiers.

 11   Vous avez parlé de Jovan Tintor il y a un instant. Est-ce que vous êtes

 12   d'accord ou est-ce que nous devrions revoir le document, sur le fait que

 13   Jovan Tintor venait de se voir remettre ce bâtiment par le ministère de la

 14   Justice, et que la prison c'est quelque chose dont s'occupe le ministère de

 15   la Justice et pas Jovan Tintor ?

 16   R.  S'agissant des installations qui ont été utilisées pour mettre en

 17   détention les habitants non-serbes, on peut les diviser en plusieurs

 18   catégories, si je puis dire. Jovan Tintor, en tant que président de la

 19   communauté locale et de la section locale du SDS de Vogosca, et en tant que

 20   président de la cellule de Crise, avait de l'influence sur les autorités

 21   locales et la mise en place des instances dirigeantes --

 22   Q.  Je vous en prie. C'est une question précise que je viens de vous poser.

 23   Vous avez parlé de Jovan Tintor, vous avez dit qu'il avait décidé de placer

 24   un certain nombre de personnes en détention et qu'il avait l'intention

 25   d'utiliser la maison de Planjo à cette fin, qu'il avait dessiné la maison

 26   de Planjo à cette fin. Vous avez dit que Jovan Tintor était un

 27   fonctionnaire de la région, qu'il avait été à son poste par le ministère de

 28   la Justice. Est-ce que la maison de Planjo était sous la responsabilité du


Page 12752

  1   ministère de la Justice, du département chargé des sanctions pénales ? Est-

  2   ce que c'était un lieu de détention destiné à héberger des détenus ?

  3   R.  Monsieur Karadzic, vous essayez sans arrêt de me mettre des mots dans

  4   la bouche qui ne sont pas les miens. J'ai dit que, par l'ordre qu'il a

  5   donné, M. Jovo Tintor a placé Kontiki et le bunker parmi les installations

  6   servant de lieux de détention. Quant à la maison de Planjo, c'est une

  7   maison qui avait servi de lieu de détention pendant toute la période. Je

  8   pense qu'à la mi-juillet 1992 à peu près les autorités locales ont rédigé

  9   un ordre par lequel ils mettaient cette maison de Planjo à la disposition

 10   du ministère de l'Intérieur, et déjà avant la rédaction de cet ordre, la

 11   maison de Planjo était utilisée comme lieu de détention pour les habitants

 12   de Svrake.

 13   Q.  J'aimerais que nous regardions le document 1D3351. Le 6 décembre, il

 14   est tout à fait clair que Sacir a été tué dans des conditions bien

 15   déterminées, et le 26 décembre -- j'aimerais la page suivante à l'écran,

 16   1D3351. C'est votre déclaration de 1992, page 3 à l'écran, je vous prie. La

 17   première phrase complète se lit comme suit, je cite :

 18   "Suite à cette opération, Sacir Fejzovic a été tué, c'était le fils de

 19   Smajo, et quatre personnes ont été blessées."

 20   A la page précédente, nous lisons que la JNA a bombardé Svrake à l'aide de

 21   deux avions, et que Sacir Fejzovic a été tué suite à ce bombardement. C'est

 22   seulement deux semaines plus tard que vous avez totalement transformé cette

 23   histoire et que vous avez attribué cette attaque aux Serbes. Pourquoi avez-

 24   vous fait cela ?

 25   R.  Le fait est que Sacir Fejzovic a été tué pendant ces opérations

 26   guerrières. Dans ma déclaration précédente, je n'ai fait que préciser les

 27   choses en indiquant que je n'étais pas sûr de savoir s'il avait été tué par

 28   une balle tirée par des Serbes ou suite à un mauvais usage de l'arme qu'il


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  1   portait sur lui. Donc je ne me prononçais pas sur ce point particulier. Je

  2   souhaitais simplement indiquer qu'une personne avait été tuée, et quatre

  3   blessées. Je ne vois rien qui puisse être contesté dans ce que j'ai dit,

  4   puisque j'ai indiqué simplement qu'il était possible que cet homme se soit

  5   lui-même une blessure mortelle.

  6   Q.  Mais dans cette page, où il est question de Hajrudin Djulovic et de

  7   Senad Kevla, il est indiqué qu'ils ont conclu un accord, mais n'en ont pas

  8   informé la population, et que le 5 mai, les gens ont commencé à quitter le

  9   village de façon désorganisée, de sorte que les forces ennemies ont laissé

 10   passer une partie de cette population. Donc, nous en avions terminé sur ce

 11   point.

 12   Quand vous étiez dans le bunker, est-ce que vous parlez bien du bunker

 13   situé à côté du restaurant de Sonja ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Je vous remercie. Est-ce qu'il y avait une clôture autour de cet

 16   endroit ?

 17   R.  Vous parlez du bunker ou de l'ensemble de l'auberge Kontiki ?

 18   Q.  L'endroit où vous vous trouviez, est-ce que l'ensemble de ce bâtiment

 19   était entouré d'une clôture ?

 20   R.  Du côté qui donnait sur la route, je pense qu'il y avait une haie, et

 21   il y avait des gardes qui avaient été placés là par la direction de la

 22   prison. Donc, du côté route, la route reliant Semizovac à Vogosca, il y

 23   avait cette espèce de haie, et peut-être aussi une clôture, mais je n'en

 24   suis pas sûr. Il est possible que la clôture ait été cachée par la

 25   végétation. Puis il y avait un portail qui donnait sur la cour, et de

 26   l'autre côté, du côté des rails de chemin de fer, il n'y avait pas de

 27   clôture.

 28   Q.  Donc une haie a besoin d'un certain temps pour pousser, n'est-ce pas ?


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  1   R.  Je suppose. Je ne sais pas quel était son aspect par le passé.

  2   Q.  Il n'y avait pas de clôture ou de fil de fer, et lorsque vous êtes

  3   sorti, vous n'étiez pas emprisonné, vous vous trouviez dans un lieu assez

  4   vaste ?

  5   R.  Quand nous sortions du bunker, il n'y avait pas de fil de fer ou de

  6   clôture, mais c'est l'ensemble de l'installation, bâtiment plus terrain,

  7   qui était clôturé, ou plutôt qui était limité d'un côté par les rails de

  8   chemin de fer, et de l'autre côté par la haie longeant la route. Donc, il y

  9   avait une barrière physique, et puis, il y avait ce portail qui conduisait

 10   au restaurant.

 11   Q.  Je vous remercie. A un certain moment, les Serbes ont apporté des

 12   matelas de la salle de sport pour que vous puissiez dormir sur ces matelas,

 13   et ces matelas ont été inondés par la pluie, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Est-il exact que les détenus se voyaient offrir de l'agneau rôti en

 16   brochette chaque fois que des délégations venaient leur rendre visite, par

 17   exemple une délégation de la FORPRONU ?

 18   R.  Les détenus du bunker étaient souvent invités à sortir pour effectuer

 19   un certain nombre de travaux, y compris préparer de l'agneau à la broche

 20   chaque fois qu'il y avait des fêtes, et quand je dis fête, je veux parler

 21   aussi de la visite de la FORPRONU.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez ménager une pause entre les

 23   questions et les réponses, je vous prie. Vous rendez la vie de Mme le Juge

 24   Lattanzi et des interprètes assez difficile. Il arrive souvent que les

 25   interprètes de cabine française doivent s'appuyer sur ceux de la cabine

 26   anglaise. Donc, il faudra que vous ralentissiez.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Une raison supplémentaire pour que je

 28   m'applique.


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  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Est-ce exact que certains détenus allaient au puits pour aller chercher

  3   de l'eau, et qu'ils ramassaient également des poires en chemin ?

  4   R.  Effectivement, certains détenus étaient emmenés au puits qui était à

  5   proximité de l'auberge de Kontiki. Maintenant, de là à savoir s'ils

  6   ramassaient des poires en chemin ou pas, je suppose que oui.

  7   Q.  Est-ce qu'on les emmenait là-bas, ou est-ce qu'on les envoyait au puits

  8   pour aller chercher de l'eau ?

  9   R.  On les emmenait là-bas, on les faisait sortir du bunker, mais je ne

 10   sais pas si on leur permettait, à partir du Kontiki, d'aller là-bas seuls.

 11   Mais j'ai souvent vu que ces détenus étaient accompagnés de gardes.

 12   Q.  Mais quelquefois, ils n'étaient pas escortés, et en fait, on vous

 13   envoyait au puits pour aller chercher de l'eau, et en chemin, ils

 14   ramassaient des poires et les ramenaient; est-ce exact ?

 15   R.  Ecoutez, hier, vous avez parlé de différentes questions

 16   d'interprétation ou de traduction. On disait que l'on faisait sortir ces

 17   gens du bunker pour faire certains travaux, y compris pour aller chercher

 18   de l'eau. Par conséquent, je n'étais pas en mesure de savoir si on les

 19   faisait sortir de l'auberge du Kontiki et s'ils étaient accompagnés de

 20   gardes ou pas. Mais je crois que dans la plupart des cas, ils étaient

 21   accompagnés de gardes qui assuraient la sécurité de ce centre de détention

 22   et de l'auberge du Kontiki.

 23   Q.  Après vous être échappé, est-ce que vous avez dit aux personnes qui

 24   étaient avec vous, après avoir vu le général MacKenzie, lorsqu'il est allé

 25   visiter [inaudible] ?

 26   L'INTERPRÈTE : Un endroit qui n'a pas été saisi par les interprètes de

 27   cabine anglaise.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans une déclaration faite aux représentants


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  1   de la FORPRONU ou de la communauté internationale, j'ai expliqué dans

  2   quelles circonstances j'ai vu le général MacKenzie. Cependant, après ma

  3   sortie de prison et compte tenu du contexte, j'ai fait ces déclarations.

  4   J'ai mentionné, donc, en passant, les visites faites par des représentants

  5   de la communauté internationale, et plus particulièrement de la FORPRONU.

  6   Cependant, dans mes déclarations que j'ai faites au début de l'année 1993,

  7   je n'ai pas été en mesure de confirmer que dans le contexte des visites de

  8   la FORPRONU à ces centres de détention. Il y avait, par exemple, d'autres

  9   détenus également qui avaient fait des déclarations, des membres de l'armée

 10   serbe, ainsi que Borislav Herad et Sretko Damjanovic, ainsi que des co-

 11   détenus du bunker qui avaient souvent été utilisés pour faire rôtir ces

 12   agneaux. Donc dans mes déclarations, comme je disais, que j'ai donnée en

 13   1993, au début de l'année, ce n'était pas. Je n'étais pas en mesure de

 14   confirmer que, sur la base de ce témoignage, j'avais vu la FORPRONU qui se

 15   rendait dans ces zones. Tout ce que je savais c'est que j'avais entendu de

 16   la bouche de ces co-détenus qu'ils s'étaient rendus dans ce secteur. Ils,

 17   c'est-à-dire les membres de la FORPRONU.

 18   Vers la fin de l'année 1994, je me suis ensuite souvenu d'une situation où

 19   un soldat serbe que je ne connaissais pas auparavant, parce qu'il ne

 20   faisait pas partie des forces de sécurité dans la prison. Il m'a fait

 21   sortir du bunker, et il m'a envoyé dans une direction inconnue. J'ai eu la

 22   possibilité de voir devant le restaurant des véhicules de la FORPRONU. Mais

 23   à l'époque, je n'ai pas fait le lien entre ceci et les visites de la

 24   FORPRONU, même si pendant plusieurs jours après cela la direction de la

 25   prison parlait d'une visite de représentant de la communauté

 26   internationale, et du général Mackenzie. J'avais vent de ce type de

 27   situation, et j'ai entendu des gardes disant que M. Tintor avait acquis

 28   illégalement un certain nombre de véhicules de la FORPRONU. Dans ce cas-là,


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  1   ils utilisaient un de ces véhicules pour me transporter à Pale ou ailleurs.

  2   Dans ces circonstances, j'ai remarqué un certain nombre de personnes qui

  3   portaient des uniformes de la FORPRONU, et parmi ces personnes, j'ai

  4   remarqué quelqu'un mais à l'époque je ne savais pas qu'il s'agissait du

  5   général Mackenzie. Je l'ai appris bien plus tard, lorsque j'ai vu des

  6   images à la télévision, et je me suis rendu compte qu'il était fort

  7   possible que le général lui-même ait été présent dans le secteur.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Je vais devoir demander l'obligeance, demander à la Chambre d'avoir

 10   l'obligeance de me donner un peu plus de temps demain. Parce que vous

 11   faites des réponses très longues.

 12   Est-ce exact que, dans la presse et les médias de Bosnie-Herzégovine, une

 13   campagne était lancée contre le général MacKenzie. Il était avancé que les

 14   Serbes avaient fourni des jeunes filles mineures, lui avaient fourni des

 15   jeunes filles mineures au restaurant ? Est-ce que vous vous souvenez de

 16   cette campagne ?

 17   R.  Oui, je me souviens que des déclarations de ce genre avaient été

 18   faites. Je me souviens de la possibilité que ce genre de chose se soit

 19   produit. Cependant, j'étais au Kontiki, et je savais que des représentants

 20   de la communauté internationale étaient venus nous rendre visite. Je sais

 21   que lors d'une de ces visites, on faisait rôtir des agneaux et on préparait

 22   pour ainsi dire des festins. Mais je ne pouvais pas vraiment connaître les

 23   détails. Il est vrai que des situations de ce genre se sont produites.

 24   Q.  Merci. Est-ce que vous pourriez vous borner à répondre par oui ou par

 25   non, s'il vous plaît ?  Après vous être échappé; est-ce que vous avez

 26   mentionné que vous aviez vu et reconnu le général Mackenzie, et qu'à

 27   l'époque, il y avait quatre jeunes filles qui n'étaient que peu vêtues, et

 28   vous ne pouviez pas vous imaginer qu'on pouvait s'attendre de cela d'un


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  1   général d'une telle réputation ?

  2   R.  Non, je n'ai jamais participé à ce genre d'intrique qui prenait en

  3   partie le général MacKenzie. Parce que cette visite qu'il a faite au

  4   Kontiki était discutée par les Serbes, tels que Borislav Herak et Sretko

  5   Damjanovic, qui étaient détenus avec moi.

  6   Q.  Est-ce que vous confirmez que Borislav Herak et Sretko Damjanovic ont

  7   été condamnés par des tribunaux de Bosnie-Herzégovine de meurtre de

  8   personnes qui se sont avérées être encore en vie par la suite, oui ou non ?

  9   R.  Je ne sais pas qu'elles ont été les raisons de leur condamnation. Je

 10   sais qu'une personne des personnes qui a été condamnée, je ne sais pas s'il

 11   s'agissait de Sretko Damjanovic ou de l'autre, il est vrai que pour l'un

 12   d'entre eux il semblait qu'une de ses victimes semble être encore en vie,

 13   et que par conséquent il a bénéficié d'une réduction de peine.

 14   Q.  Ou peut-être qu'il a été acquitté, parce qu'on s'est rendu compte que

 15   tout ceci avait été montré de toutes pièces et que c'était basé sur des

 16   mensonges.

 17   R.  Non, ce n'est pas le cas. Sretko Damjanovic n'a pas été acquitté. Il a

 18   été condamné à huit ans de prison, et bien sûr, étant donné qu'il avait

 19   fait de la préventive, ceci a été déduit du reste de sa peine.

 20   Q.  Est-ce que vous avez été utilisé étant que bouclier humain?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Est-ce qu'on vous a fait sortir du bunker pour faire des travaux forcés

 23   ?

 24   R.  Oui.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait maintenant consulter

 26   le document 1D3356, s'il vous plaît.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Combien de fois vous a-t-on fait sortir du bunker pour faire des


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  1   travaux forcés ?

  2   R.  A deux reprises, pendant -- je suis donc sortir à deux reprises du

  3   bunker pour réaliser des travaux forcés, pendant toute ma période de

  4   détention. Par contre, on m'a fait sortir six fois, mais que deux fois,

  5   lorsque j'étais au bunker.

  6   Q.  Très bien. Est-ce que vous pouvez consulter cet entretien que vous avez

  7   donné à Lars Nielsen, en 1994, un inspecteur de police des Nations Unies ?

  8   Est-ce que vous vous souvenez avoir fait cet entretien ou donné cette

  9   interview à ce monsieur ?

 10   R.  Oui, je me souviens lui avoir parlé.

 11   Q.  Merci. Vous lui avez dit que vous, vous étiez enfui le 5 décembre,

 12   après avoir été utilisé comme bouclier humain. Est-ce que c'est ce que vous

 13   lui avez dit ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Est-ce que l'on pourrait demander aux participants de consulter cette

 16   première page avant de passer à la page suivante ? Il est mentionné ici, et

 17   en anglais :

 18   "C'était sur cette parcelle de terrain, ils savaient qu'il y avait un puits

 19   quelque part à l'est de cette parcelle. Ils savaient que ce puits était à

 20   proximité d'un poirier. Ils le savaient parce que des gens avaient été

 21   envoyés chercher de l'eau au puits, et souvent ils rapportaient des poires.

 22   La plupart du temps, c'était Hido, Ahmed, Zornic et Zlatan, qui étaient

 23   envoyés pour aller chercher de l'eau au puits."

 24   A la page 2, il est mentionné qu'il n'y avait pas de clôture sur la partie

 25   nord de la parcelle du restaurant, que le parking était à l'est. Il y avait

 26   de la végétation, une haie, vous l'avez dit, mais qu'il n'y avait pas de

 27   fil de fer barbelé; est-ce exact ?

 28   R.  Oui, c'est exact.


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  1   Q.  Ensuite un peu plus loin, on peut lire :

  2   "A la fin du mois de mai 1992 et au début du mois de juin 1992, cette

  3   prison comptait 40 prisonniers hommes. Ils étaient détenus dans le bunker

  4   avec une femme. Dans la caserne, il y avait quatre filles du village de

  5   Vogosca. Il ne les connaissait pas par leurs noms, mais il a reconnu leurs

  6   visages et il en a déduit qu'il s'agissait de Musulmanes."

  7   Est-ce qu'il s'agissait de serveuses ou est-ce qu'elles étaient autre chose

  8   ? Parce que vous mentionnez : "Il est parti du principe qu'elles étaient

  9   Musulmanes," donc vous n'aviez pas d'élément qui vous permettait de

 10   confirmer cela. Est-ce qu'il s'agissait de serveuses ou d'autre chose ?

 11   R.  Ces filles n'étaient pas des serveuses et, étant donné qu'à cette

 12   époque, on m'envoyait souvent vers une habitation qui était entre le bunker

 13   et l'auberge de Kontiki, j'ai eu la possibilité de voir ces filles. J'ai

 14   également eu la possibilité d'entendre Branko Vlaco, qui était le gardien

 15   de la prison, et qui donnait des ordres aux filles pour savoir comment

 16   elles devaient se comporter vis-à-vis des invités. Je ne sais pas

 17   exactement de qui il s'agissait, mais d'après ce qu'il disait, il

 18   s'agissait certainement de personnes qui n'étaient pas des personnes qui

 19   habitaient à proximité de l'auberge du Kontiki, et elles ne faisaient pas

 20   partie du personnel du restaurant de l'auberge.

 21   Q.  Est-ce que vous voulez dire que des hommes et des femmes détenus

 22   pouvaient sortir mais qu'ils étaient accompagnés de gardes armés ? Parce

 23   que là vous parlez que -- vous dites que vous avez obtenu des matelas. Puis

 24   à la page 3 on voit que vous avez identifié le général MacKenzie, et je

 25   voudrais savoir ce qui vous a laissé penser qu'il s'agissait bien de lui

 26   quand vous l'avez vu ?

 27   R.  Tout ceci figure dans le document. Je n'ai rien à rajouter, à moins que

 28   quelque chose ne figure pas dans la déclaration. Parce qu'il s'agit d'une


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  1   traduction anglaise, je ne sais pas exactement ce qui est mentionné dans ce

  2   document en anglais, mais je pense que cette personne que j'ai ensuite

  3   reconnue comme étant le général MacKenzie, cette personne portait une

  4   montre assez insolite. Elle était de taille assez importante et je n'avais

  5   jamais vu de montre aussi grosse.

  6   Il est mentionné également que : "MacKenzie portait un uniforme de combat

  7   vert."

  8   Q.  Il est mentionné que : "Il avait remonté ses manches."

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Sutherland.

 10   Mme SUTHERLAND : [interprétation] J'ai une copie de cette déclaration qui a

 11   été traduite en B/C/S, si cela peut aider le témoin. Ceci a été communiqué

 12   à la Défense il y a plusieurs années.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Ça a maintenant été téléchargé sur

 14   le prétoire électronique. Mais on peut également donner une copie papier au

 15   témoin.

 16   Est-ce que l'on devrait faire la pause maintenant, Monsieur Karadzic ?

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais savoir si les Juges de la Chambre,

 18   au vu des longues réponses qui sont données par le témoin, serait disposée

 19   à me donner un peu plus de temps ?

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] De combien de temps avez-vous encore

 21   besoin ? Car il vous reste une demie heure.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Au moins tout le prochain volet d'audience. Le

 23   témoin a fait beaucoup de déclarations, a déposé dans de nombreuses

 24   affaires, et il est donc important que les Juges de cette Chambre

 25   comprennent bien tout ce qu'a dit le témoin.

 26   [La Chambre de première instance se concerte]

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous vous donnons une heure au total

 28   pour terminer votre contre-interrogatoire.


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous reprendrons à 11 heures.

  3   --- L'audience est suspendue à 10 heures 32.

  4   --- L'audience est reprise à 11 heures 02.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Pour faire court, je vais vous demander de répondre par "oui" ou par

  9   "non" toutes les fois que cela est possible.

 10   Est-il vrai que, dans différentes déclarations, vous avez cité un nombre

 11   différent de fois où on vous a demandé d'aller accomplir des travaux dans

 12   le bunker, la casemate ?

 13   R.  C'est exact, mais la plupart du temps, ce n'était pas plus de six fois

 14   au total.

 15   Q.  Est-ce exact que vous avez dit qu'on vous a emmené deux fois, quatre

 16   fois, sept fois ?

 17   R.  Voyez-vous, lorsque nous parlons du fait d'être -- on parle du fait

 18   qu'on nous fait sortir de prison, je parle des moments les plus

 19   significatifs où on m'a fait sortir, lorsque j'ai quitté l'enceinte de la

 20   casemate. A plusieurs reprises, six fois, deux fois, quatre fois, ça

 21   c'était au moment où j'ai fait l'objet de tirs de chaque côté de la ligne

 22   de séparation, et lorsque j'accomplissais des tâches plus difficiles que

 23   l'on demandait aux prisonniers d'accomplir, c'était six fois, au maximum.

 24   Q.  Merci. Est-il exact que, dans une de vos déclarations, vous avez dit

 25   que vous n'avez jamais servi de bouclier humain ?

 26   R.  L'emploi de boucliers humains et ce qu'est un bouclier humain est

 27   quelque chose que l'on ne sait pas à moins de le vivre. Je me suis échappé

 28   de la prison, et lorsque je me suis échappé de cette prison, cela


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  1   correspond à l'emploi classique de boucliers humains. Cependant, on nous

  2   faisait sortir pour accomplir des travaux, à la manière qui pourrait être

  3   considérée comme étant utilisé comme un bouclier humain, parce que les

  4   travaux qu'on nous demandait de faire se trouvaient dans les zones où se

  5   trouvaient les armées, la zone de séparation entre l'armée serbe et l'armée

  6   de Bosnie. Le 5 décembre, lorsque je me suis évadé de prison, j'étais en

  7   réalité dans une situation, la situation de quelqu'un qui est un bouclier

  8   humain, et j'étais en face de l'armée de la Republika Srpska, en face de la

  9   JNA.

 10   Q.  Se cacher derrière le grand-père pour essayer d'être touché par l'ours,

 11   est-ce que cela signifie qu'on vous a placé directement devant les soldats

 12   serbes qui avançaient vers vous, et que vous étiez, dans ce cas, dans le

 13   rôle de quelqu'un qui était un bouclier humain ? Est-ce ainsi que les

 14   choses se sont passées ?

 15   R.  Ecoutez, la situation qui correspond le plus à ça était au moment où,

 16   le 5 décembre, je me suis évadé de prison où j'avais été -- où j'étais fait

 17   prisonnier. Les Serbes étaient placés devant nous. Nous portions des

 18   munitions, des boîtes de munitions, ils ont placé des armes lourdes sur les

 19   épaules de certains prisonniers et les poussaient devant eux. Nous

 20   marchions quasiment devant eux et donc nous serions exposés aux tirs de

 21   Bosnie-Herzégovine, et dans le cas où ils tireraient, et dans le cas où

 22   nous tombions sur une mine ou qu'un engin explosif se trouvait là, nous

 23   étions les premiers à trébucher dessus.

 24   Q.  Donc vous étiez une cible vivante ou un bouclier humain. Est-ce la même

 25   chose, à vos yeux ?

 26   R.  J'étais un bouclier humain, et en même temps, j'étais une cible vivante

 27   pour l'autre partie. On se servait de nous comme de boucliers derrière

 28   lesquels les soldats de l'armée serbe pouvaient se cacher parce que


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  1   certains d'entre nous étaient poussés vers l'avant. Ils avaient placé leurs

  2   mains sur nos épaules ainsi que des armes lourdes, et ils nous poussaient,

  3   et ils nous avaient dit que nous n'avions -- qu'ils n'avaient pas le droit

  4   de se pencher pour se protéger. Ils étaient censés se comporter comme des

  5   cibles vivantes.

  6   Q.  Dans quelle déclaration particulière, avez-vous parlé de cela ?

  7   R.  A toutes les fois que j'ai parlé de mon invasion, j'en ai parlé. J'ai

  8   dit que j'ai échappé à cette situation où j'étais utilisé comme bouclier

  9   humain.

 10   Q.  Nous allons y venir. Alors vous avez dit qu'on vous a envoyé pour aller

 11   couper des arbres et d'autres choses. Ce genre de chose, ce que ceux qui

 12   allaient travailler de la sorte prenaient obtenaient davantage de

 13   nourriture et de cigarettes.

 14   R.  Il y a différentes sortes -- différentes sortes de torture existent, et

 15   les personnes qui se trouvaient dans le camp avec moi ont fait l'objet de

 16   ce type de torture, et ceux qui sortaient pour accomplir des travaux et

 17   pour pouvoir accomplir ces tâches difficiles, on leur remettait une

 18   certaine quantité de nourriture, pour pouvoir accomplir ces travaux. Il

 19   arrivait souvent que ceux d'entre nous, qui restaient, n'obtiennent pas une

 20   quantité suffisante de nourriture, et les soldats serbes ne prêtaient que

 21   peu d'attention à nous. En revanche, ceux qui devaient accomplir des tâches

 22   en dehors de l'enceinte, ceux-là devaient couper du bois. C'est ce que j'ai

 23   fait moi-même, en particulier, on nous a demandé de creuser des tranchées,

 24   de couvrir les tranchées, toutes les fois que les lignes avançaient. Il

 25   s'agissait surtout de travaux qui impliquaient, qui signifiaient qu'il

 26   fallait creuser des tranchées entre la ligne de séparation des deux armées,

 27   et l'armée des Serbes avançait en direction de l'armée de la Bosnie-

 28   Herzégovine. Dans ce cas, les prisonniers étaient relâchés dans cette


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  1   partie qui venait d'être libérée pour construire les fortifications et pour

  2   pouvoir prendre le terrain par la suite.

  3   A un moment donné, on m'a fait sortir d'un groupe de prisonniers, sur la

  4   colline de Ravne. C'est un plateau qui se dirige vers la montagne ou qui

  5   est orientée vers la montagne, à la mi-août.

  6   L'INTERPRÈTE : Non inaudible de la montagne.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous étions en train de déblayer la forêt, à

  8   ce moment-là, de façon à avoir une clairière qui se trouvait dans ce cas,

  9   situer entre les deux armées, et cette forêt avait fait l'objet de tir la

 10   veille. Ensuite on l'avait incendié. Hormis le fait que nous étions en

 11   plein soleil, nous souffrions également de la chaleur et de l'incendie qui

 12   avait été déclenché dans cette région avant. Nous devions déblayer les

 13   arbres calcinés pour pouvoir avoir une clairière, et à ce moment-là, nous

 14   souffrions d'un manque de nourriture et d'eau. Nous souffrions de brûlure

 15   également, parce que nous n'avions pas le droit de tirer ces morceaux de

 16   bois qui fumaient encore, mais il fallait les transporter à un endroit où

 17   ceci allait être brûlé. Il y avait ceux qui souffraient d'épuisement, qui

 18   ne pouvaient ni travailler ni courir, et faisaient l'objet de torture

 19   physique. On les frappait ces personnes-là, et on les frappait avec des

 20   cross de fusil, et ce, aux mains des soldats serbes. Il y a un des doigts

 21   sur ma gauche qui a été touché. Lorsque je suis revenu par la suite au camp

 22   pendant un grand nombre de jours après cela, je n'ai eu aucun soin médical

 23   qui m'ait été prodigué pour cette blessure et donc la blessure s'est

 24   infectée, et je n'ai pu traiter cela qu'après mon invasion de prison, après

 25   le 15 décembre, lorsque je suis passé sur le territoire placé sous le

 26   contrôle de l'armée de Bosnie-Herzégovine, le 5 décembre.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur Muracevic, vous êtes en train de nous concocter une salade de


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  1   mensonges. Est-ce que les prisonniers se présentaient volontairement pour

  2   accomplir ces travaux ?

  3   R.  Il y avait certains travaux pour lesquels les détenus se présentaient,

  4   et quelquefois outre les travaux agricoles et le fait de creuser des

  5   tranchées, les prisonniers étaient utilisés comme bouclier humain, et il y

  6   avait de moins en moins de volontaires. Donc au début, au début du mois de

  7   septembre, personne quasiment ne souhaitait se porter volontaire pour un

  8   quelconque travail. Parce que tout un chacun savait que les prisonniers

  9   allaient servir de bouclier humain également ou peut-être qu'ils pouvaient

 10   faire l'objet de tir ou être inquiétés d'une autre façon.

 11   Q.  Alors dans la mesure du possible, veuillez répondre par oui ou par non.

 12   Avez-vous, vous êtes-vous présenté de façon volontaire pour accomplir ces

 13   travaux, et si oui, combien de fois ?

 14   R.  Je ne me suis jamais porté volontaire pour travailler de la sorte.

 15   Q.  Merci. Qui a été maltraité à la manière que vous décriviez, et qui

 16   ensuite a été frappé à l'aide de cross de fusil; veuillez nous donner un

 17   nom, s'il vous plaît ?

 18   R.  Suad Sosevic, Zahid Barucija, ainsi que d'autres personnes, et je ne me

 19   souviens pas de leur nom.

 20   Q.  Avez-vous vu cela ou est-ce quelqu'un qui vous l'a rapporté?

 21   R.  Je l'ai vu moi-même.

 22   Q.  Où ?

 23   R.  Suad Sosevic sur la colline de Ravne, au dessus de Semizovac et

 24   Barucija, sur le plateau de Zuci.

 25   Q.  Qui était -- qui en avait la charge à ce moment-là ? Qui vous avait

 26   escorté jusque-là, nom et prénom ?

 27   R.  Je ne peux pas vous donner le nom et prénom de la personne, du soldat

 28   qui le frappait. En réalité, je ne connaissais pas son nom. Mais la


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  1   personne, qui en avait la charge dans ce secteur, était Dragisa Damjanovic.

  2   Donc au moment où il a été maltraité, c'était quelque chose comme un

  3   commandant dans la région, Dragisa Damjanovic.

  4   Q.  Combien de gardes y avait-il dans la casemate, Monsieur Muracevic ?

  5   R.  Etant donné que ce chiffre variait, disons 15 à 20, mais je ne peux pas

  6   vous donner de chiffre définitif sur un nombre de personnes qu'il y avait

  7   là. Autour de la casemate, il y avait environ dix soldats, dix gardes à

  8   différents endroits.

  9   Q.  Connaissez-vous les noms des personnes qui vous ont emmené pour

 10   accomplir ces travaux ?

 11   R.  La plupart des gardes qui étaient là, nous les connaissions, mais très

 12   souvent, ce n'était pas les gardes qui faisaient sortir les prisonniers

 13   pour aller travailler. Ceux qui montaient la garde à l'endroit où nous

 14   étions retenus prisonniers, différentes personnes venaient, et c'étaient

 15   des membres, des unités militaires ou des membres de la police ou des

 16   Serbes de la région, et moi, je n'avais pas connaissance de ce que ces

 17   personnes faisaient en particulier dans ce secteur. Donc ce n'était pas les

 18   gardes qui nous escortaient, qui escortaient toujours les prisonniers

 19   jusqu'aux endroits où les prisonniers travaillaient, et la raison pour

 20   laquelle on les a fait sortir de l'endroit où ils étaient détenus.

 21   Q.  Donc on ne peut identifier le Serbe qui a maltraité ces deux hommes,

 22   parce qu'ils étaient si faibles; c'est exact ?

 23   R.  Cela n'est pas que nous ne pouvons pas le faire, mais je ne sais pas.

 24   Suad Sosevic a été particulièrement maltraité par Ranko Jankovic. C'est le

 25   frère d'un de mes amis de l'école, et il avait un poste de commandement ou

 26   quelque chose de la sorte dans ce secteur.

 27   Q.  Quelque chose que vous avez déjà déclaré auparavant ?

 28   R.  Oui, quelque part, mais je ne sais pas si ceci a été inclus dans les


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  1   déclarations, qui font partie de cette déclaration sublimée. Il y a eu

  2   beaucoup de déclarations, et je ne sais pas si toutes ces déclarations y

  3   figurent.

  4   Q.  Merci. Vous avez parlé de certaines personnes qui venaient de temps en

  5   temps, et qui venaient travailler, et qui portaient des cocardes; où ?

  6   R.  En général, au niveau de leur béret, de leur couvre-chef et de ce

  7   qu'ils avaient sur la tête.

  8   Q.  Vous dites que certaines personnes ont maltraité d'autres personnes

  9   mais ils ont dit que Branko Vlaco ne devrait pas être au courant. Aviez-

 10   vous l'impression qu'ils avaient peur de Vlaco ?

 11   R.  Branko Vlaco était le commandant de la prison, donc en toute logique,

 12   ses subordonnés avaient peur s'il apprenait ce qu'ils avaient fait, surtout

 13   s'il apprenait qu'ils avaient fait quelque chose qu'il ne leur avait pas

 14   demandé de faire. Cependant, quelquefois, certains directeurs de prison et

 15   gardiens faisaient venir des personnes que nous ne connaissions pas, ou des

 16   chiens, qui participaient eux-mêmes au maltraitement des prisonniers, et à

 17   ces occasions-là, ils nous disaient que nous ne pouvions pas dire ceci à

 18   Branko Vlaco, le commandant de la prison.

 19   Cependant, lorsqu'il y a eu des maltraitements, lorsque, par exemple, on a

 20   utilisé du gaz lacrymogène dans la casemate, devant ces gardes et devant

 21   Branko Vlaco, ce genre de chose arrivait mais ni lui, ni les gardes ne

 22   faisaient quelque chose pour nous protéger. Je ne sais pas si Branko Vlaco

 23   ne savait pas ce que faisaient ses subordonnés.

 24   Q.  Monsieur Muracevic, l'Accusation apprécierait beaucoup que vous vous

 25   conformiez à la vérité, et je crois que ce serait une très bonne chose,

 26   parce que vous êtes en train d'entacher votre crédibilité.

 27   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président --

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, Monsieur Karadzic. Madame


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  1   Sutherland ?

  2   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Il ne s'agit pas d'un commentaire qui

  3   devrait émaner de M. Karadzic.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poser une question au témoin.

  5   L'INTERPRÈTE : Précision de l'interprète : les noms cités sont Dragic

  6   Adamjanovic [phon], Ranko Jankovic [phon], Suad Sosovic [phon].

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Vous avez dit qu'ils craignaient Branko Vlaco, et vous avez même dit

  9   dans quelques déclarations que des gardiens ne vous ont pas maltraité mais

 10   que certains gardiens ont permis à des personnes inconnues de pénétrer sur

 11   les lieux et de maltraiter certaines personnes. A une occasion, lorsqu'ils

 12   ont jeté quelque chose qui ressemblait à du gaz, les gardes ont tenté de

 13   sauver certaines personnes.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que vous ne répondiez, Monsieur

 15   Muracevic, vous souhaitez connaître la référence ?

 16   Mme SUTHERLAND : [hors micro]

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Si je disposais du temps que j'aurais demandé,

 18   je serais en mesure de vous donner une référence également.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Avez-vous dit cela, Monsieur ? Qu'ils craignaient que Branko Vlaco

 21   n'apprenne ce qu'ils avaient fait ? C'est ma question, "oui" ou "non" ?

 22   R.  A savoir s'ils avaient peur ou pas, je ne me souviens pas d'avoir

 23   déclaré quelque part qu'ils avaient peur de ce Branko Vlaco. Cependant, en

 24   tant que personne qui était leur supérieur, si je puis m'exprimer ainsi,

 25   ils auraient dû en avoir peur s'ils avaient fait quelque chose dont il

 26   n'avait pas connaissance. Cependant, lorsque j'ai dit qu'en prison tous les

 27   gardes n'étaient pas des extrémistes et ont maltraité les détenus, par

 28   rapport à ce qui a été dit dans ma déclaration, mais certains d'entre eux


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  1   avaient une attitude extrême et certains nous ont maltraités, et ceux qui

  2   nous gardaient en même temps ont fait venir des personnes extérieures qui

  3   nous ont maltraités.

  4   Q.  Vous êtes en train de me faire perdre mon temps. Je vous ai simplement

  5   demandé s'ils vous ont menacés et que le directeur de la prison ne devait

  6   pas l'apprendre. Au paragraphe 11 de votre déclaration --

  7   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pardonnez-moi, mais le Dr Karadzic a dit

  8   que le témoin avait dit quelque chose. Le témoin a dit qu'il n'a pas dit,

  9   et ensuite il dit qu'il lui fait perdre son temps. Il répond simplement à

 10   l'allégation qui est faite.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  N'avez-vous pas dit dans une de vos déclarations par rapport aux

 13   personnes qui vous ont maltraité que ces personnes vous ont maltraité et

 14   ont dit que le directeur de la prison ne devait pas l'apprendre ?

 15   R.  Monsieur l'Accusé, il s'agit d'une situation dans un océan d'autres

 16   situations dans lequel eux et le directeur de la prison ont coordonné leurs

 17   efforts d'intimidation à l'égard des détenus. Il y a eu un moment où ils

 18   ont pris de l'argent sur quelqu'un qu'ils avaient fait venir en détention.

 19   Cette personne était allée chercher cet argent de façon à pouvoir acheter

 20   quelque chose pour d'autres citoyens. Ensuite ils l'ont menacé en lui

 21   disant qu'il ne devait pas en parler au directeur de la prison qu'ils lui

 22   avaient pris cet argent qu'il avait sur lui. Voilà, donc c'est à cela que

 23   vous voulez en venir, à savoir s'ils avaient peur ou non. Bien sûr qu'ils

 24   avaient peur, s'ils avaient pris quelque chose sur quelqu'un et qu'ils n'en

 25   ont pas informé l'administration de la prison.

 26   Q.  S'ils en avaient informé le directeur de la prison, ils auraient pu

 27   s'en tenir à cela ?

 28   R.  Personne ne m'a pris cet argent mais ils ont pris de l'argent d'Asif


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  1   Sehic. Dans la casemate, nous avons essayé de le ressusciter pendant trois

  2   jours parce qu'il avait été très sévèrement battu. Quand il est venu, il a

  3   dit qu'un gardien lui a pris de l'argent et l'a menacé et lui a dit qu'il

  4   ne devait pas en informer le directeur de la prison.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande aux Juges de la Chambre de bien

  6   vouloir m'accorder un autre volet d'audience de façon à ce que nous

  7   puissions parcourir toutes les autres déclarations de ce témoin. Il ne

  8   s'agit pas d'une question mais d'une demande.

  9   N'avez-vous pas dit au paragraphe 11 -- je vais vous le lire en anglais.

 10   Paragraphe 11 : 

 11   "La cellule de Crise municipale dont j'étais membre a participé aux travaux

 12   permettant aux réservistes de la police et de leur formation de tenir cet

 13   endroit, et ils ont ensuite recruté différentes personnes qui ont été

 14   intégrées à la nouvelle unité de la TO. En coopération avec la cellule de

 15   Crise municipale, j'ai été impliqué dans l'acquisition d'armes à

 16   destination de la localité de Svrake."

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, ce sont des

 18   questions qui ont été abordées avec le témoin hier. Je ne sais pas si M.

 19   Karadzic souhaite aborder ces questions à nouveau aujourd'hui. Il n'a que

 20   très peu de temps.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle est votre question, Monsieur

 22   Karadzic ?

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Ma question consiste à vous demander s'il est vrai que vous disposiez

 25   d'abris -- de tranchées-abris pour cacher ces armes.

 26   R.  Nous n'avions pas de tranchées-abris et il n'y avait pas d'armes

 27   particulières que nous étions censés cacher dans ces abris.

 28   Q.  Donc, dans ce cas, il nous faudra afficher un document. Il s'agit d'un


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  1   rapport de votre audition en tant que témoin le 15 mars 1993, l'ABiH contre

  2   moi-même. Numéro ERN 00287259. C'est ce que vous dites. Des fusils de

  3   chasse -- des armes de chasse que nous avions, nous avons caché dans des

  4   casemates, dans des tranchées-abris et des caves.

  5   Disposiez-vous de toutes ces armes le 2 mai ?

  6   R.  Chaque maison ou foyer, ou la plupart des maisons dans mon quartier

  7   disposaient de sous-sols. Nous n'avions pas de caves. Les casemates sont

  8   des endroits particuliers qu'il faut construire, alors outre différentes

  9   installations, à savoir si quelqu'un avait creusé une tranchée ou un abri,

 10   ou quelque chose pour se protéger des tirs qui étaient tirés sur notre

 11   village, ce genre de chose a existé. Mais il ne s'agissait pas de

 12   tranchées-abris particulières pour cacher des armes que nous n'avions pas.

 13   Q.  Est-ce que cela veut dire, Monsieur le Témoin, que nous ne devrions pas

 14   accepter vos déclarations littéralement ?

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland, avez-vous trouvé la

 16   référence ?

 17   Mme SUTHERLAND : [hors micro]

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Microphone, s'il vous plaît.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Le numéro 65 ter 22195 est la déclaration

 20   du 28 [comme interprété] mars.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez la montrer au témoin.

 22   Mme SUTHERLAND : [interprétation] En fait, je viens de dire, il y a

 23   quelques instants, que M. Karadzic ne disposait que de très peu de temps,

 24   et il a eu plus de quatre heures avec ce témoin. Ce n'est pas la position

 25   de l'Accusation, mais la sienne.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors où en sommes-nous ? Est-ce que

 27   nous pouvons avoir la référence aux casemates ?

 28   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Page 3 de la traduction anglaise.


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Page 2 en serbe.

  2   Mme SUTHERLAND : [aucune interprétation]

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] En attendant l'affichage, puis-je vous

  4   expliquer ceci ? Le témoin aujourd'hui a dit qu'il n'avait pas été informé

  5   des renseignements reçus par le MUP, ce qui montre qu'il a coopéré avec le

  6   MUP, et j'ai également dit qu'il achetait -- se fournissait en armes, et

  7   ensuite il dit n'avoir été en possession que de fusils de chasse.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  C'est la fin du deuxième paragraphe, Monsieur le Témoin. La fin du

 10   deuxième paragraphe.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Et en anglais, je vous demande de bien vouloir

 12   afficher la version anglaise pour les autres personnes présentes dans le

 13   prétoire.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] A ce stade, je ne pense pas que la

 15   traduction anglaise ait été téléchargée. Mais poursuivons.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  A la fin du deuxième paragraphe, vous dites :

 18   "Non loin du village -- ou plutôt, non loin de l'installation

 19   militaire de Semizovac, des tirs ont visé notre village et pendant deux

 20   jours nous avons opposé une certaine résistance grâce aux quelques armes de

 21   chasse que nous possédions. Nous nous sommes cachés dans des abris

 22   souterrains et dans des bunkers, en fait."

 23   Si tel n'était pas le cas, est-ce que cela signifie que nous ne

 24   devons pas prendre vos déclarations pour argent comptant ?

 25   R.  Désolé, cela ne signifie pas que vous ne devez pas prendre mes

 26   déclarations pour argent comptant. Tout cela, il faut le replacer dans son

 27   contexte. Quand on tire sur quelque chose, on doit être caché quelque part.

 28   Je veux dire, je parle dans mes déclarations de bunkers et d'abris


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  1   souterrains. Ce sont, en fait, des espèces de bunkers de fortune. Cela ne

  2   signifie pas qu'on est en présence de fortifications en bonne et due forme

  3   qui ont été construites avant les faits. Mais pendant l'attaque, des gens

  4   cherchaient à s'abriter, à se protéger des tirs qui les visaient, dans des

  5   abris souterrains. Et c'est de cette façon que ces abris ont été creusés.

  6   C'est ce qui figure dans ma déclaration. Il est vrai que nous cherchions à

  7   nous abriter face aux tirs.

  8   Mais dans votre question précédente, on vous a interrogé au sujet des

  9   bunkers, des abris souterrains, des caves, et il semble, d'après ce que

 10   vous dites, que nous aurions possédé d'énormes quantités d'armes qui

 11   étaient cachées dans ces abris souterrains, dans des bunkers et des caves.

 12   Si des actions de combat se déroulaient, cela signifie bien que nous ne

 13   pouvions pas cacher des armes. Nous les utilisions dès que possible.

 14   Q.  Je vous remercie. Monsieur le Témoin, après votre évasion le 5 décembre

 15   1992, est-ce que vous avez rejoint les rangs de l'armée de Bosnie-

 16   Herzégovine ? Vous pouvez répondre par "oui" ou par "non."

 17   R.  Après mon évasion de prison, j'ai rejoint l'armée de Bosnie-

 18   Herzégovine.

 19   Q.  Je vous remercie. L'armée de la Republika Srpska, le Corps de Sarajevo-

 20   Romanija, est-ce qu'il vous a permis de voir votre mère en 1993 ?

 21   R.  Ce n'est pas le Corps de Sarajevo-Romanija qui m'a donné cette

 22   possibilité. Cela s'est passé de la façon inverse. Avant la guerre, ma mère

 23   était soignée à l'hôpital de Kasindol. Une fois que je me suis évadé du

 24   camp, avec l'aide de la Croix-Rouge locale et de la Croix-Rouge

 25   internationale, j'ai réussi à transférer ma mère de l'hôpital de Kasindol à

 26   l'hôpital de Sarajevo où j'habitais.

 27   Q.  Pouvons-nous préciser ce point : Est-ce que l'hôpital de Kasindol était

 28   dans la partie serbe de Sarajevo, et donc sous contrôle serbe ?


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  1   R.  Elle était sous contrôle serbe, effectivement.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du 1D3353.

  3   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai un problème

  4   avec mon écran. Je ne peux pas faire défiler le compte rendu d'audience. Je

  5   me demandais si l'on ne pourrait pas faire appel à un technicien pour qu'il

  6   règle ce problème technique qui se pose à moi.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une façon de régler le problème c'est

  8   d'éteindre l'ordinateur et de le rallumer. Mais enfin, oui, on peut appeler

  9   un technicien pour qu'il se penche sur le problème. Cela ne me pose aucun

 10   problème.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Monsieur Muracevic, nous voyons ici que c'est l'état-major principal de

 13   l'armée de la Republika Srpska, commandement du Corps de Sarajevo-Romanija,

 14   et commandement du Corps de la Drina, qui sont les auteurs de ce document

 15   datant du 25 novembre 1993.

 16   A présent, je demande que l'on voie la page suivante, je cite :

 17   "Sur la route de Sarajevo à Grbavica" - je suppose - "et ensuite en passant

 18   par Pale en direction de Belgrade, les personnes suivantes rencontreront

 19   des membres de leur famille le même jour et sur les mêmes voies de

 20   communication."

 21   On voit le nom de Muracevic Rabija, et son fils, Muracevic Eset, et

 22   ensuite on a les autres noms des personnes concernées qui sont des Croates

 23   et des Musulmans. Ce document est signé par le général de division, Manojlo

 24   Milovanovic, chef d'état-major qui autorise donc le Corps de Sarajevo-

 25   Romanija à vous permettre de vous réunir avec votre mère.

 26   Est-ce que ce sont bien les choses qui se sont passées ?

 27   R.  Ça c'est quand ma mère a été échangée. Avec l'aide de la Croix-Rouge

 28   internationale, ma mère a été transférée de l'hôpital de Kasindol à


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  1   Sarajevo où j'habitais. Il est vrai que ce document date de l'époque où ma

  2   mère a été transférée dans la partie de Sarajevo sous contrôle de l'armée

  3   de Bosnie-Herzégovine, et elle m'a donc rejoint à ce moment-là.

  4   Q.  Mais en qualité de fils de votre mère, Eset Muracevic, vous dites

  5   qu'elle a été échangée. Qu'est-ce que les Serbes ont reçu en échange au

  6   moment de l'échange de votre mère ?

  7   R.  Comme je vous l'ai dit, avec l'aide de la Croix-Rouge internationale,

  8   ma mère a été réunie avec moi et elle est venue vivre avec moi. Je ne sais

  9   pas ce qui a précédé ce moment-là et quelle a été la réaction de l'armée de

 10   Bosnie-Herzégovine. Le seul détail que je connaissais à l'époque c'est que

 11   c'est avec l'aide de la Croix-Rouge que ma mère a été transférée, et c'est

 12   ce qui s'est passé. Mais je n'ai pas eu la possibilité de lire ce document

 13   à l'époque. Peut-être était-il enfoui quelque part dans les piles de

 14   documents. Mais je vois des signatures sur ce document. En tout cas, à

 15   l'époque, on m'a proposé au moment de la réunification avec ma mère, de

 16   signer certains documents.

 17   Q.  Monsieur Muracevic, avançons. Votre mère a continué à vivre sur le

 18   territoire serbe alors que vous étiez en détention, et elle a, à ce moment-

 19   là, était soignée dans un hôpital serbe. Et en novembre 1993, à votre

 20   demande, elle a été relâchée de l'hôpital et elle vous a rejoint, n'est-ce

 21   pas ?

 22   R.  Ma mère était censée être hospitalisée à Kosevo pour y suivre un

 23   traitement. Mais étant donné qu'elle avait déjà été soignée à Kasindol par

 24   le passé, elle a été hospitalisée à Kasindol. Elle est donc restée dans cet

 25   hôpital de Kasindol où elle-même a déclaré avoir été maltraitée parce que

 26   c'était une personne âgée qui souffrait d'hypertension et de diabète. Donc

 27   d'après ce qu'elle a dit après que nous ayons été réunis, elle n'a eu aucun

 28   problème particulier, sauf le fait que les membres de sa famille ne


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  1   pouvaient pas lui rendre visite.

  2   Q.  Je vous remercie.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons faire verser ce

  4   document au dossier ?

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  6   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document devient la pièce D1111,

  7   Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] 1111, d'accord.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais maintenant que nous examinions un

 10   document important, et si la Chambre de première instance m'y autorise,

 11   nous apporterons une démonstration plus fouillée des nombreuses

 12   incohérences que l'on trouve dans les déclarations de ce témoin, mais cela

 13   se fera à un autre moment.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur Muracevic, est-ce que vous avez apporté avec vous, ou en tout

 16   cas, est-ce que vous avez remis au Tribunal une liste - je demande

 17   l'affichage du document 1D3334 - donc une liste des habitants de Bosnie-

 18   Herzégovine tués à Vogosca par l'armée de l'agresseur ?

 19   R.  C'est une partie d'une liste qui a été donnée d'une certaine façon,

 20   dans le cadre des déclarations faites par moi. Mais le chiffre définitif

 21   calculé par moi eu égard au nombre de tués sur le territoire de la

 22   municipalité de Vogosca sous contrôle des autorités serbes, ce chiffre

 23   total tourne autour de 294 personnes. Au nombre de ces personnes certaines

 24   sont décédées ou d'autres ont été emmenées dans des lieux non identifiés.

 25   Nombre de ces personnes sont passées par les camps, c'est-à-dire la maison

 26   de Planjo et le garage et le bunker, et certaines ont été tuées dans leurs

 27   villages.

 28   Q.  Restons-en aux documents.


Page 12778

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Puisque nous n'avons pas de traduction

  2   anglaise de ce document, je vous demanderais de bien vouloir donner lecture

  3   des deux premières lignes de ce document, également de l'intitulé de ce

  4   document, Monsieur Muracevic ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Donc je répète que ceci est une des listes où

  6   l'on voit les noms des personnes qui ont péri --

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ayez la gentillesse de lire l'intitulé

  8   du document de façon à ce que cela soit interprété.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] "Liste des noms d'habitants qui, pendant

 10   l'agression contre la Bosnie-Herzégovine dans la période allant de 1992 à

 11   1995, ont été tués à Vogosca par l'armée de l'agresseur, c'est-à-dire

 12   l'armée des Bosno-serbes, et dont on ignore où ces personnes sont

 13   enterrées."

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Nous allons maintenant démontrer que s'agissant au moins des personnes

 17   dont les noms figurent ici et qui ont donc été recensés, je dis s'agissant

 18   au moins de ces personnes, ce qui ne signifie pas que c'est le chiffre

 19   définitif, donc s'agissant au moins de ces personnes qui ont été

 20   identifiées avec l'aide de l'ABiH comme ayant rejoint l'ABiH et ayant été

 21   ultérieurement tués au combat. Nous avons reçu une liste de telles

 22   personnes provenant de l'ABiH c'est le document 1D3355. J'en demande

 23   l'affichage sur la deuxième partie de l'écran, 1D3355. Je vais maintenant

 24   donner lecture des noms en question. Adnan Puris, tué au combat, il figure

 25   dans la liste au regard du numéro 50 --

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que nous avons quelques

 27   difficultés techniques.

 28   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]


Page 12779

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il va nous falloir suspendre quelques

  2   instants.

  3   --- La pause est prise à 11 heures 43.

  4   --- La pause est terminée à 11 heures 55.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous disposez de 15

  6   minutes.

  7   M. KARADZIC : [interprétation] 15 ?

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  9   M. KARADZIC : [interprétation] Je pense que j'ai besoin de bien plus que

 10   quinze minutes.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allons jusqu'à 20, peut-être, mais pas

 12   plus.

 13   M. KARADZIC : [interprétation] Je demande aux participants de prêter

 14   attention à la partie droite de l'écran. Nous voyons ici le centre chargé

 15   au niveau de la République des enquêtes au sujet des crimes au sein de la

 16   Republika Srpska en date du 28 février 2011. Cette instance informe du fait

 17   que la liste est demandée en rapport avec l'action du Tribunal de La Haye,

 18   comme le Tribunal est désigné dans ce document. Je vais vous donner lecture

 19   de ce courrier, je cite :

 20   "Veuillez trouver ci-joint la liste présentée sous format électronique qui

 21   vous est remise suite à votre demande concernant les membres de l'armée de

 22   Bosnie-Herzégovine tués pendant la guerre de 1992-1995. Cette liste a déjà

 23   été fournie au Tribunal de La Haye, et le Tribunal de La Haye a mis ces

 24   listes à la disposition de la Commission du gouvernement de la Republika

 25   Srpska qui s'occupe de Srebrenica, et à la disposition des archives de la

 26   Commission, qui sont conservées dans le centre chargé des Enquêtes

 27   relatives aux crimes de guerre au niveau de la République."

 28   Premièrement, je ne suis pas sûr que cette liste ait été communiquée, et


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  1   deuxièmement, je demanderais qu'elle s'affiche à l'écran. 1D3348. Il nous

  2   faut la liste de tout à l'heure et la liste que je demande maintenant

  3   devrait s'afficher à côté de la liste précédente, et la deuxième liste a

  4   pour numéro 1D33348. Bon. Ou plutôt, 1D3334. Voilà. Elle est à l'écran

  5   maintenant. Alors je voudrais que l'on cherche maintenant dans la liste de

  6   gauche grâce au prétoire électronique que l'on cherche la page 453.

  7   Q.  Monsieur Muracevic, vous employez les termes, je cite :

  8   "…tué par l'armée de l'agresseur."

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors je demande sur l'écran que l'on présente

 10   les deux listes, d'un côté de l'écran la liste 1D3334, de l'autre côté de

 11   l'écran la liste 1D3348, et que dans la liste 1D3348, on présente la page

 12   453 grâce au prétoire électronique.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Vous mentionnez dans ce document - et cette liste a été présentée par

 15   votre truchement - vous avancez que ces personnes ont été tuées. Est-ce

 16   que, dans notre langue maternelle, vous faites un distinguo entre quelqu'un

 17   qui meurt et quelqu'un qui est tué ?

 18   R.  Monsieur Karadzic, à la gauche de l'écran, nous -- à la partie gauche

 19   de l'écran donc, nous voyons la liste des membres de l'ABiH, et sur la

 20   droite de l'écran il s'agit d'une liste que j'ai fournie recensant les

 21   personnes qui ont été tuées sur le territoire qui était sous votre

 22   contrôle. La liste de gauche recense les noms des personnes qui étaient

 23   considérées comme étant membres des forces armées. Sur cette liste il n'est

 24   pas mentionné quelles sont les causes de leur décès. Quant aux personnes

 25   qui sont sur la liste de droite, il s'agit de personnes qui se trouvaient à

 26   Vogosca sous contrôle serbe, et ces personnes étaient soit détenues dans le

 27   même centre que celui où j'avais été placé en détention, ou que ce

 28   [inaudible], où j'avais été placé en détention, tel que, par exemple, le


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  1   garage, le bunker ou la maison de Planjo, ou bien il -- on les avait fait

  2   sortir de chez eux et on les avait exécuté pour ainsi dire.

  3   Donc la liste que j'ai fournie reprend les noms de personnes tuées sur le

  4   territoire contrôlé par les Serbes de la région. Au moment où ces personnes

  5   ont été tuées, ils n'étaient pas membres d'une formation armée quelconque

  6   de l'ABiH. Cela signifie qu'ils n'étaient pas membres d'une unité qui

  7   attaquait les Serbes de la région. Ils ont perdu leurs vies en tant que

  8   prisonniers, en tant que personnes qui ne possédaient pas d'armes, mais qui

  9   étaient sur le territoire sous votre contrôle. Il est fort probable qu'en

 10   fonction de l'engagement dont ils avaient fait montre avant d'avoir été

 11   fait prisonnier, c'est-à-dire s'ils faisaient partie des forces de police

 12   de réserve ou de la police régulière, il est possible que leurs familles

 13   avaient la possibilité de considérer que leur statut était membres des

 14   forces armées, et la liste de gauche montre les personnes dont les familles

 15   ont pu faire reconnaître le statut de ces personnes comme étant membre des

 16   forces armées. Ils ont été tués, cependant, sur le territoire sous contrôle

 17   serbe, mais ils n'ont pas été tués alors qu'ils portaient des armes ou des

 18   fusils. Il s'agissait de personnes sans armes.

 19   Q.  Merci, mais est-ce que vous pouvez essayer de donner des réponses

 20   succinctes ? Est-ce que vous dites qu'Adnan Puris a été tué à Vogosca en

 21   tant que prisonnier ? Si la réponse est affirmative, est-ce que vous pouvez

 22   nous dire où et quand ?

 23   R.  Lorsque je suis venu ici, j'ai fourni une liste. Je ne sais si elle

 24   vous a été transmise. Il y a 294 personnes sur cette liste qui ont trouvé

 25   la mort sur le territoire sous contrôle serbe. Peut-être que l'on pourrait

 26   demander l'affichage de ces documents, parce que cette liste reprend la

 27   date et le lieu où ils ont trouvé la mort.

 28   Q.  Est-ce que vous dites qu'Ibrahim Brkic a été tué en tant que prisonnier


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  1   ? Ou est-ce qu'il était tué en tant que combattant ?

  2   R.  Non, certainement pas en tant que combattant. Il a été tué alors qu'il

  3   était détenu sur le territoire sous contrôle serbe. Par conséquent, il n'a

  4   pas été tué en tant que combattant, c'est-à-dire en tant que personne qui

  5   aurait participé à des combats en portant une arme à la main. Il a été tué

  6   sur le territoire sous contrôle ou tenu par les Serbes, et il n'était pas

  7   armé.

  8   Q.  Maintenant pouvez-vous nous dire quand Adnan Puris a été tué ? Est-ce

  9   que vous pouvez nous dire cela ?

 10   R.  Il y a 294 personnes.

 11   Q.  Mais quand Adnan Puris a été tué ?

 12   R.  Vous ne pouvez pas me demander de vous fournir ce genre de détail comme

 13   cela à brûle pourpoint. Il y a 294 personnes sur cette liste, et si vous me

 14   permettez de consulter cette liste je pourrais vous transmettre ces

 15   informations.

 16   Q.  Est-ce que l'on pourrait demander aux participants de consulter le

 17   document 50291 ? Le numéro 50291, Adnan Puris, né à Foca, vivant à Vogosca,

 18   est tué le 21 février 1991. "A", cela signifie une armée. Il a été tué. Ce

 19   n'était pas un civil. Il a été tué. Il n'a pas -- il a été abattu. Il n'a

 20   pas été tué. Il a été tué aux combats. Il n'a pas péri, n'est-ce pas ?

 21   R.  Vous nous montrez la liste de gauche où il s'agit de personnes qui ont

 22   été tuées alors qu'elles étaient dans les forces armées. Vous avez Adnan

 23   Puris, qui a vraiment été tué sur le territoire de Vogosca, qui était sous

 24   le contrôle de nos forces.

 25   Q.  Mais quand et où ?

 26   R.  Peut-être que l'on pourrait demander l'affichage du document que j'ai

 27   apporté avec moi. Je ne sais pas si vous avez reçu ce document.

 28   Q.  D'accord. Merci. J'espère que nous pourrons avoir accès aux documents


Page 12783

  1   que vous avez emmenés avec vous. Moi, je ne l'ai pas. Je ne l'ai pas reçu,

  2   mais passons à autre chose, Monsieur le Témoin.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Sutherland.

  4   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Ce document était fourni à M. Karadzic

  5   avec les notes de récolement. Il s'agit du document numéro 13 qui est lié à

  6   cette note.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'ailleurs, est-ce que l'on pourrait

  8   procéder à l'agrandissement de la partie gauche du document où l'on peut

  9   voir différentes colonnes avec les différents titres ? Est-ce que l'on

 10   pourrait commencer par la première colonne ? La première ligne. Est-ce que

 11   vous pourriez donner lecture de cette colonne ? Parce que nous n'avons pas

 12   en fait la traduction anglaise, Monsieur Muracevic. Est-ce que vous pouvez

 13   le lire ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout d'abord, la première colonne, c'est RB,

 15   et je suppose que c'est un numéro d'ordre. Ensuite il y a le nom de famille

 16   et puis le nom des parents, et puis le prénom, et puis vous avez JMBG -

 17   c'est un numéro d'identification unique - et puis il y a la municipalité de

 18   naissance, la municipalité de résidence, la date du décès et l'appartenance

 19   ethnique ainsi que la cause du décès.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez lire la

 21   première colonne qui est juste en dessous de la cause du décès ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Il est mentionné "poginuo," c'est-à-dire aux

 23   combats --

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord. La personne que nous avons

 25   vue, Adnan Puris ? Oui, voilà. C'est ça. Puris. Adnan Puris, quand est-ce

 26   que cette personne est décédée ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Le 21 février 1995, d'après cette liste.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Et vous vouliez consulter les


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  1   documents que vous aviez amenés avec vous, n'est-ce pas ? Est-ce que l'on

  2   pourrait revenir à l'agrandissement précédent où l'on pouvait voir le

  3   prénom, c'est-à-dire où l'on voyait Adnan Puris. Est-ce que vous avez cela

  4   avec vous, Madame Sutherland ?

  5   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui. M. Reid est en train de télécharger

  6   ce document.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Monsieur Karadzic, entre-

  8   temps vous pouvez continuer, s'il vous plaît.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Tout d'abord je voudrais recommander aux

 10   participants -- tout d'abord, cette liste de gauche a été donnée à l'armée

 11   de la Republika Srpska par l'ABiH dans le cadre d'un échange mutuel

 12   d'information concernant les personnes qui avaient été tuées. Par

 13   conséquent, je voudrais attirer l'attention de tout un chacun à la colonne

 14   où il est mentionné "Appartenance," et où vous avez les lettres A et B.

 15   Donc, vous avez armée, police, ou inconnu. Puis sur la colonne "Cause du

 16   décès," vous avez péri et inconnu. Donc "N" c'est "inconnu" et "P" c'est

 17   pour péri.

 18   Je demande donc à toutes les parties présentes dans ce prétoire, dès que

 19   les documents seront téléchargés, de consulter le numéro qui est à gauche

 20   sur la liste de droite, et vous avez donc ici un recensement des membres de

 21   l'ABiH qui ont péri. Est-ce que vous pouvez maintenant lire ou regarder la

 22   page suivante de cette liste de droite ?

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Est-ce que les personnes recensées ici sont originaires de pays arabes

 25   ? Ils sont recensés sous les numéros 61 à 65.

 26   R.  Je ne sais pas si ces personnes sont originaires de pays arabes, mais

 27   les documents ont été retrouvés dans le bâtiment municipal, et l'armée de

 28   la Republika Srpska a mentionné que ces personnes avaient péri durant cette


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  1   période et dans cette zone, mais je ne sais pas de qui il s'agit. Ils ont

  2   été tués dans la zone qui était tenue par les Serbes de la région. Je ne

  3   sais pas qui ils étaient. Ils ont été emmenés dans les centres de détention

  4   où j'étais détenu moi-même. J'ai trouvé ces noms dans les documents que

  5   nous avons retrouvés après le 23 février 1996, lorsque nous sommes entrés

  6   dans cette partie du secteur. Nous avons trouvé ces documents qui avaient

  7   été laissés derrière elles par les autorités serbes.

  8   Q.  [aucune interprétation]

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, gardez à l'esprit que

 10   les Juges de la Chambre ne disposent pas de traduction anglaise. Donc, la

 11   première chose que vous devriez faire, c'est de demander au témoin de lire

 12   les parties manuscrites de façon à que nous puissions suivre. Il faudrait

 13   savoir qui a rédigé cela. Ensuite, vous pouvez poser des questions. Est-ce

 14   que vous pourriez donc donner lecture de ce qui est écrit à la main ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça, c'est la liste que j'ai fournie. Les

 16   numéros apposés à gauche de cette liste ont été ajoutés par quelqu'un, je

 17   ne sais pas par qui. Très précisément, les cinq derniers noms de la liste,

 18   Majrem Abu, Maris Abu, Imran Abu, Muraj Abu, Talha Abu, étaient rajoutés à

 19   la main et à côté, il y avait cette mention "Kosu ovi arapi" [phon], "Qui

 20   sont ces Arabes ?" Voilà ce que je peux dire à titre d'information au sujet

 21   de cette liste.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Muracevic.

 23   Madame Sutherland ?

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, c'est ce que

 25   j'allais aborder. Ce document n'avait aucun numéro inscrit en marge, sur le

 26   côté, quand le témoin l'a remis au bureau du Procureur.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 28   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Il n'y avait pas non plus ce commentaire


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  1   qui figure au regard des numéros 61 à 65.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous convenez que ces

  3   commentaires et cette note ont été apportés par la Défense ? Oui, je vous

  4   remercie.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis d'accord. Sur la gauche, dans la marge,

  6   la Défense a ajouté les numéros que l'on voit, qui ont donc été ajoutés à

  7   cette liste remise à notre intention par l'ABiH. Quant à la mention "Qui

  8   sont ces Arabes," elle a probablement été ajoutée à la main par un

  9   enquêteur de la Défense. Ces Arabes ne figurent pas sur la liste des

 10   soldats décédés de l'ABiH.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Monsieur Muracevic, qui a rédigé cette liste, qui a établi les listes

 13   que vous avez apportées ?

 14   R.  Cette liste que nous sommes en train de regarder, qui figure à droite

 15   de l'écran, est une liste que j'ai établie en m'appuyant sur les

 16   renseignements dont je disposais et sur les documents que nous avons

 17   découverts sur le territoire dans lequel nous sommes entrés le 23 février

 18   1996. Des documents qui avaient donc été laissés par les autorités serbes

 19   au moment de leur départ.

 20   Q.  Mais selon ce que nous voyons ici, il s'avère que les Serbes ont fait

 21   prisonniers ces six Arabes et les ont placés en détention avant de les

 22   tuer; c'est bien cela ?

 23   R.  En fonction des documents que j'ai pu avoir sous les yeux, dans tous

 24   les documents en question, il est indiqué que ces personnes ont été tuées

 25   ce jour particulier sur le territoire de Vogosca, mais nous n'avons pas pu

 26   déterminer si ces personnes avaient été faites prisonnières ou si elles

 27   avaient été liquidées quelque part, donc tuées sur place. Ça, je ne le sais

 28   pas. Les circonstances détaillées ne figurent pas sur ces documents, c'est-


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  1   à-dire les circonstances de leur décès.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais l'affichage du document 1D335, sur

  3   la droite de l'écran. 1D3335.

  4   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, encore une fois je

  5   fais remarquer pour le compte rendu que s'agissant des indications figurant

  6   sur ce document, en marge, elles ne figuraient pas sur le document fourni

  7   par le témoin, donc c'est sans doute la Défense qui les a ajoutées.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic en a déjà

  9   convenu.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  J'aimerais vous demander, Monsieur Muracevic, de lire le texte qui

 12   figure au-dessus des noms.

 13   R.  Nous parlons du document qui figure sur la partie droite de l'écran et

 14   qui est intitulé : "Liste des citoyens qui pendant l'agression contre la

 15   Bosnie-Herzégovine, de 1992 à 1995, ont été faits prisonniers par les

 16   soldats de l'agresseur, c'est-à-dire par l'armée des Bosno-serbes, et

 17   placés en détention dans les camps sous leur contrôle, à Vogosca, puis à

 18   partir de là, emmenés dans des directions inconnues."

 19   Q.  Je vous remercie. Est-ce que nous pourrions maintenant voir les noms

 20   qui figurent au regard du numéro 5031, par exemple. 5031, Hajrudin Rifet.

 21   Qu'est-ce qu'on voit au regard de ce numéro 50301 dans l'autre liste ? A

 22   péri le 16 juin 1992. Voilà, on l'a ici, 50301, Hajrudin, fils de Rifet.

 23   Vogosca, donc né à Vogosca, où il a vécu, et décédé le 16 juin 1992, membre

 24   de l'ABiH. Vous dites qu'il a été fait prisonnier. Est-ce qu'il était

 25   prisonnier ? Est-ce que vous essayez de dire également que cette famille a

 26   manipulé les informations ?

 27   R.  Monsieur Karadzic, sur la partie gauche de l'écran, il y a une liste de

 28   noms qui sont des personnes dont les familles ont réussi à trouver des


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  1   éléments d'information après leur disparition. Donc les familles ont appris

  2   que ces personnes ont péri et elles ont communiqué la situation de ces

  3   personnes décédées en indiquant que ces personnes avaient été membres des

  4   forces armées. Sur la droite de l'écran, vous avez la liste de toutes les

  5   personnes qui ont été faites prisonnières et placées en détention par les

  6   Serbes sur le territoire de la municipalité de Vogosca, qui était sous

  7   votre contrôle. Précisément, vous parlez de Hajrudin Rifet. C'était l'un

  8   des hommes qui a été emmené à partir de la maison de Planjo, donc de la

  9   prison qu'était la maison de Planjo à Svrake, en juin 1992, par des

 10   représentants de l'armée serbe. Il a été emmené dans une direction inconnue

 11   et c'est donc depuis ce moment-là qu'on n'a plus entendu parler de cet

 12   homme. Nous ne savons pas quel a été son sort depuis ce moment-là et

 13   jusqu'à aujourd'hui. Son cadavre n'a jamais été retrouvé. Il figure

 14   toujours sur la liste des personnes portées disparues qui habitaient le

 15   village de Svrake.

 16   Dans cette liste, on trouve aussi le nom de Hasan Abaz au numéro 1, qui a

 17   horriblement été torturé dans le camp. Il a été roué de coups. On lui a

 18   versé du sel -- Il a été forcé de sauter d'une hauteur de 3 mètres. On lui

 19   a imposé des relations homosexuelles, il a été contraint à pratiquer des

 20   relations homosexuelles avec d'autres prisonniers. En juin 1992, cet homme

 21   a été emmené avec un groupe de 278 hommes venant de Svrake dans une

 22   direction inconnue, puisqu'il était dans le garage de Naka, et depuis, nous

 23   n'avons rien appris à son sujet. Nous ne savons pas quel a été son sort. La

 24   plupart des personnes dont les noms figurent dans cette liste sont des

 25   personnes dont le sort est inconnu aujourd'hui. Entre-temps, certains

 26   cadavres ont toutefois été exhumés.

 27   Q.  Monsieur Muracevic, lorsque vous avez été fait prisonnier, dites-nous

 28   rapidement à quel moment cela s'est passé ? Est-ce que vous avez été fait


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  1   prisonnier et placé en détention ?

  2   R.  Oui, j'ai été placé en détention par l'armée serbe. J'ai été emmené à

  3   la caserne qui servait de camp.

  4   Q.  Oui. Nous savons tout cela. Mais si vous aviez été tué après 1993, est-

  5   ce que vous auriez été recensé en tant que personne portée disparue ou est-

  6   ce que vous auriez été recensé au nombre des personnes ayant péri ?

  7   R.  Selon les structures légales du pouvoir de Bosnie-Herzégovine, j'aurais

  8   été recensé comme responsable de la communauté locale d'une municipalité

  9   particulière et ma famille aurait probablement essayé de me faire obtenir

 10   le statut de membre de l'armée, parce que les membres de la Défense

 11   territoriale, de la police et des forces de réserve, même s'ils mouraient

 12   dans des camps de détention, étaient considérés comme membres de l'ABiH, et

 13   donc comme ayant péri en tant que membres de l'ABiH.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que l'heure est venue que vous

 15   mettiez un terme à votre contre-interrogatoire. Nous nous occuperons des

 16   documents plus tard, mais maintenant, posez vos dernières questions.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur Muracevic, vous affirmez que cette liste qui figure à gauche

 19   de l'écran, qui est un document officiel de l'ABiH où l'on voit que

 20   certains hommes se voient attribuer le statut d'hommes ayant péri, ou sont

 21   décrits comme sort inconnu, ayant succombé à des blessures, est-ce que vous

 22   êtes en train de dire que cette liste est inexacte ? Je rappelle que c'est

 23   la liste que vous avez apportée. Est-ce que vous dites que cette liste est

 24   inexacte ou est-ce que vous dites qu'elle est exacte ? Est-ce que vous

 25   dites qu'en réalité, nous ne devrions pas tenir compte de cette liste qui

 26   figure à gauche de l'écran ?

 27   R.  La liste dont vous parlez, qui est à gauche de l'écran, est une liste

 28   où figurent les noms de personnes dont les familles -- Nonobstant le fait


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  1   que ces hommes ont été fait prisonniers et placés en détention, leurs

  2   familles ont essayé de déterminer officiellement leur statuts, parce que

  3   ces hommes étaient membres soit des forces de police, soit des forces de

  4   réserve, soit de la Défense territoriale. Donc leurs familles ont voulu

  5   leur faire donner le statut de membre de l'ABiH. C'est une liste d'hommes

  6   dont les familles ont réussi à obtenir, pour ces hommes, le statut de

  7   membres de l'ABiH, quelles que soient les conditions dans lesquelles ces

  8   hommes sont décédés.

  9   La liste qui est à gauche de l'écran -- ou plutôt, à droite de l'écran, est

 10   une liste sur laquelle figure le nom d'un certain nombre d'hommes qui ont

 11   péri ou dont on ne connaît pas la situation, péri en raison d'actes commis

 12   par les Serbes de Bosnie. Au moment où ces hommes ont péri ou sont morts

 13   pour diverses raisons, ils ne faisaient pas parti de formations armées.

 14   C'était simplement des prisonniers sans armes qui, à l'époque, étaient

 15   détenus par les forces serbes dans des camps tel que le garage de Naka, la

 16   maison de Planjo et d'autres lieux de détention.

 17   Q.  Monsieur Muracevic, est-ce que vous avez la moindre preuve de ce que

 18   vous dites ou est-ce que nous devons simplement vous faire confiance sur

 19   parole ?

 20   R.  Regardez --

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, le témoin a répondu à

 22   la question. Si vous contestez ce qu'il dit, vous devez le faire savoir à

 23   un autre moment de la procédure, mais ne vous querellez pas avec le témoin.

 24   Le témoin déclare que la liste qui figure à l'écran ne précise pas les

 25   conditions du décès. Donc avancez -- ou plutôt, vous devriez mettre un

 26   terme à votre contre-interrogatoire maintenant.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Je pense, Monsieur le Témoin, que ce que vous venez de dire constitue


Page 12791

  1   des mensonges graves qui sont une insulte pour les victimes et pour leurs

  2   familles. Répondez par "oui" ou par "non".

  3   R.  Monsieur Karadzic, je ne peux pas comprendre que vous m'adressiez une

  4   telle remarque. Est-ce que vous avez l'intention d'utiliser ce tribunal

  5   pour m'intimider ou pour me forcer à oublier ce que j'ai vécu ? Sur la

  6   partie gauche de l'écran, nous voyons une liste de noms qui sont les noms

  7   de personnes qui étaient en détention, donc en captivité, dans des camps

  8   contrôlés par des membres de l'armée de la Republika Srpska. Ces personnes

  9   ont été emmenées et ont péri, ou en tout cas ont été emmenées vers des

 10   destinations inconnues à partir de l'endroit où elles étaient en captivité.

 11   Par exemple, si nous regardons les noms d'Alic, Enes -- Entre-temps, son

 12   cadavre a été exhumé, car il y a eu un certain nombre de cadavres qui ont

 13   été exhumés. Nous avons exhumé le cadavre de trois personnes dans le lit de

 14   la rivière, trois personnes qui étaient détenues dans ce camp. Leurs

 15   cadavres ont été retrouvés à une dizaine de kilomètres plus bas à partir de

 16   Svrake, dans la rivière. Voilà où les cadavres ont été exhumés. L'autre

 17   possibilité, s'agissant des personnes dont les noms figurent à droite de

 18   l'écran, c'est que ces personnes aient été faites prisonnières et placées

 19   en détention dans des endroits où je les ai vues, comme par exemple le

 20   bunker, la maison de Planja, le garage de Naka, qui étaient tous des lieux

 21   de détention. Quelquefois, on voyait passer des prisonniers dans ces lieux

 22   qui étaient gardés par des membres de l'armée de la Republika Srpska. Mais

 23   les personnes dont les noms figurent sur la liste de droite, au moment de

 24   leur mort, ne faisaient partie d'aucune formation armée. C'était simplement

 25   des personnes qui étaient détenues en tant que prisonniers. Je ne sais pas

 26   quel autre qualificatif leur donner.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Merci. Je demande le versement au

 28   dossier des trois listes.


Page 12792

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que nous avons vu quatre

  2   documents. D'abord le 1D3334, puis le 1D3335, listes A et B. Donc, la

  3   lettre de conformation, 1D3355 et enfin, la liste qui constitue la pièce

  4   1D3348. Est-ce que vous demandez le versement de tous ces documents ? Est-

  5   ce que nous devrions les enregistrer aux fins d'identification en attente

  6   de traduction ?

  7   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, le 1D3334 et le

  8   1D3335 ont été lus et figurent donc au compte rendu d'audience, en tout cas

  9   pour leur titre et le haut du document, donc je pense qu'ils peuvent être

 10   versés au dossier.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ah, oui, oui, oui. Nous pouvons donc

 12   admettre ces deux documents sans avoir à attendre leur traduction anglaise,

 13   parce que nous pouvons lire l'ensemble. Donc, nous admettons ces deux

 14   documents avec annotations complémentaires apportées sur ces documents par

 15   l'équipe de la Défense.

 16   Entre-temps, nous enregistrons aux fins d'identification le 1D3348 et le

 17   1D3355, pour lesquels je demande des numéros de pièce à conviction.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais tous les noms n'ont pas besoin

 19   d'être traduits puisqu'il n'y a que des colonnes dans ces documents.

 20   [La Chambre de première instance se concerte]

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que ceci doit être également

 22   traduit, donc nous admettons le 1D3348. Mais ce document comporte 700

 23   pages.

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] La seule chose que les Juges ont besoin

 25   de savoir c'est la signification à donner aux abréviations, parce que je

 26   vois des N et d'autres sigles.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous avons entendu ce que cela voulait

 28   dire. Nous avons entendu ce que la Défense a dit.


Page 12793

  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Il y a "poginuo," c'est bien cela, et

  2   puis "DR" [comme interprété].

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvons-nous avoir l'aide des

  4   interprètes ?

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Si je peux apporter mon aide. Je suppose que --

  6   bon, "poginuo" signifie dans notre langue que c'est quelqu'un qui a péri,

  7   sous-entendu péri dans des combats, ou bien ça veut dire quelqu'un qui a

  8   été tué, simplement. Le "A" signifie membre de l'armija; le "P", membre de

  9   la police. Donc cela signifie qu'il n'y a pas de civils sur cette liste, il

 10   n'y a que des membres de l'armija et de la police.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 12   Madame Sutherland, est-ce que vous avez des questions supplémentaires ?

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, peut-être 15 minutes.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous pourrions peut-être faire la

 15   deuxième pause maintenant.

 16   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Peut-être 20 minutes.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quand est-ce que nous reprenons ? Bien.

 18   Il faut changer les cassettes, donc il faut une demi-heure de pause. Une

 19   demi-heure de pause.

 20   --- L'audience est suspendue à 12 heures 30.

 21   --- L'audience est reprise à 13 heures 01.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Sutherland.

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais

 24   revenir au document que nous avons abordé précédemment.

 25   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Est-ce que je pourrais vous interrompre

 26   pour prêter mon assistance concernant un petit élément ?

 27   Mme SUTHERLAND : [aucune interprétation]

 28   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Je voudrais revenir à la


Page 12794

  1   déclaration du témoin dans sa déclaration harmonisée, le paragraphe 13.

  2   L'attaque contre Svrake, c'est le paragraphe 13. Est-ce que vous l'avez

  3   devant vous ? Il est mentionné, "Des personnes ont été blessées et tuées."

  4   Il y une conjonction de coordination "et," c'est-à-dire que des personnes

  5   ont été blessées et tuées. Vous êtes d'accord, n'est-ce pas ?

  6   Mme SUTHERLAND : [aucune interprétation]

  7   L'INTERPRÈTE : Mme Sutherland n'a pas le micro branché.

  8   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Il est mentionné dans une note en bas

  9   de page que quatre personnes ont été blessées et une a été tuée.

 10   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui.

 11   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Donc ce n'est pas la même chose. Il y a

 12   des personnes qui ont été blessées et d'autres qui ont été tuées.

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui.

 14   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Vous voulez que les Juges de la Chambre

 15   se penchent sur quelle déclaration, puisqu'il semble qu'il y ait des

 16   incohérences entre ces déclarations ?

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] En fait, il est mentionné qu'une personne

 18   a été tuée et d'autres personnes ont été blessées. En fait, ci mentionné,

 19   "Des gens ont été blessés et une personne a été tuée." 

 20   M. LE JUGE BAIRD : [aucune interprétation]

 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation] La note en bas de page n'a pas été versée

 22   au dossier. C'est simplement donc la déclaration consolidée du témoin, et

 23   vous avez des notes en bas de page qui permettent d'aider la Défense --

 24   M. LE JUGE BAIRD : [aucune interprétation]

 25   Mme SUTHERLAND : [aucune interprétation]

 26   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Oui, lorsqu'il est mentionné, "Des

 27   personnes ont été tuées," il ne faut pas prendre ceci au pied de la lettre

 28   parce qu'en fait il n'y avait qu'une seule personne.


Page 12795

  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation] En fait, il y a des personnes qui ont été

  2   blessées et une personne a été tuée. Je comprends ce que vous voulez dire.

  3   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Merci. Donc une personne a été

  4   tuée ?

  5   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui.

  6   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Merci beaucoup.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous n'avons pas donné de cote aux

  8   derniers documents. Est-ce qu'on pourrait le faire maintenant ?

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document 1D3355 recevra la cote

 10   MFI D1112. Ensuite 1D3334 deviendra la pièce D1113, et 1D3335 deviendra la

 11   pièce D1114, et le document 1D3348 recevra la cote D1115.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, à un moment donné,

 13   est-ce que vous n'avez pas dit que vous alliez présenter les différentes

 14   parties incohérentes des déclarations de témoins faites par ce témoin ?

 15   Est-ce que ce n'est pas ce que vous avez dit ?

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, effectivement. Désolé, j'attendais en fait

 17   la fin de l'interprétation.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais pour faire cela, est-ce que vous ne

 19   devez pas, Maître Robinson, verser toutes les déclarations de témoins ?

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux vous dire ce que j'avais à

 21   l'esprit ? Je voulais avoir la permission de procéder à cette comparaison

 22   et de verser uniquement les pages en question. Pas tous les documents.

 23   Parce qu'au total il y a une quinzaine ou une vingtaine de déclarations et

 24   de dépositions. Si elles avaient toutes été versées, j'aurais pu les

 25   traiter dans mes arguments de clôture.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si ce n'est pas versé au dossier, vous

 27   ne pouvez pas procéder à cette comparaison. C'est la raison pour laquelle

 28   je m'étais tourné vers Me Robinson.


Page 12796

  1   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, il est dommage

  2   qu'il n'ait pas eu suffisamment de temps pour faire ceci de manière

  3   appropriée, c'est-à-dire qu'on aurait pu présenter ceci au témoin et voir

  4   quels étaient ses commentaires. Mais si vous souhaitez, vous pouvez

  5   accepter d'admettre ces pièces au dossier, ça semble être une bonne

  6   solution, compte tenu du temps que nous n'avions pas à notre disposition

  7   pour utiliser des méthodes de récusation traditionnelles.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland.

  9   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je ne suis pas

 10   d'accord. Toute incohérence que M. Karadzic considère comme figurant dans

 11   ses déclarations auraient dû être présentées dès que possible. Et pas

 12   simplement une fois qu'il a quitté le Tribunal.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais j'ai besoin de temps.

 14   [La Chambre de première instance se concerte]

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous sommes d'accord avec vous, Madame

 16   Sutherland. C'est à vous pour les questions supplémentaires.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que cela signifie que je vais obtenir

 18   plus de temps ?

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, Monsieur Karadzic.

 20   Allez-y, Madame Sutherland.

 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Concernant la pièce D1115 qui vient

 22   d'être versée au dossier, il s'agit de la liste de personnes, la plus

 23   longue de ces listes, M. Karadzic a déclaré que le terme "poginuo," p-o-g-

 24   i-n-u-o, signifie "mort au combat." En fait, cela signifie uniquement "tué"

 25   et ça peut être une mort naturelle, mais ça ne signifie pas "mort au

 26   combat."

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Nous prenons bonne note de cela.

 28   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Nous invitons les Juges de la Chambre à


Page 12797

  1   demander conseil auprès du CLSS à ce sujet.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Revenons à la première page de ce

  3   document, pourquoi ne pas demander une traduction de cette première page.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] "Ubijen" et "poginuo" signifient quelque chose

  5   de totalement différent. Si quelqu'un est "tué" et s'il est membre d'une

  6   armée, même s'il n'est pas tué au combat, s'il périt, s'il perd la vie, le

  7   statut de son décès reste le même et sa famille a les mêmes droits, s'il

  8   est membre d'une armée.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pouvez présenter des arguments

 10   écrits et nous pouvons également obtenir des précisions auprès d'un expert

 11   linguistique. Ce n'est pas le moment de discuter ceci plus avant.

 12   C'est à vous, Madame Sutherland.

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 14   Nouvel interrogatoire par Mme Sutherland :

 15   Q.  [interprétation] Monsieur Muracevic, ce matin, à la page 50, M.

 16   Karadzic vous a demandé de consulter une des listes que vous aviez

 17   fournies, une liste de personnes qui avaient été tuées, et vous avez

 18   mentionné que :

 19   "Cette liste avait été fournie dans le cadre de la déclaration.

 20   Cependant, le total des personnes qui avaient été tuées dans la

 21   municipalité de Vogosca qui était sous le contrôle des autorités serbes

 22   était donc de 294."

 23    Tout d'abord, la liste précédente qui était à l'écran avait été

 24   fournie au bureau du Procureur en 2001, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui.

 26   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pourrais-je avoir à l'écran le document

 27   de la liste 65 ter 90236.

 28   Q.  Est-ce que vous reconnaissez ce document qui est à l'écran ?


Page 12798

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Il s'agit d'une liste de 294 personnes que vous avez fournie à

  3   l'Accusation lorsque vous êtes venu à La Haye ce week-end, n'est-ce pas ?

  4   R.  C'est exact.

  5   Q.  Est-ce qu'il s'agit de la liste que vous avez mentionnée précédemment

  6   dans votre déposition ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Quand avez-vous préparé cette liste ?

  9   R.  Cette liste a été établie dès le moment où j'ai été détenu, mais a été

 10   mise à jour jusqu'à ce que j'arrive dans ce prétoire. Donc jusqu'à

 11   aujourd'hui. Cela signifie que cette liste a été travaillée sur la base

 12   d'informations qui ont été glanées après la guerre également. Il s'agit

 13   d'une liste qui inclut un nombre important de personnes qui étaient

 14   détenues dans le bunker, dans la maison de Planjo ainsi que dans d'autres

 15   sites de détention. On les a fait partir de chez eux et ils ont souffert

 16   dans les parties occupées du territoire de la municipalité de Vogosca.

 17   Q.  Lorsque vous dites que cette liste a été établie à partir du moment où

 18   vous étiez détenu jusqu'à aujourd'hui, est-ce que cela signifie que vous

 19   avez mis à jour cette liste ou est-ce que cela signifie que quand vous avez

 20   obtenu d'autres informations concernant des exhumations, par exemple, vous

 21   avez mis à jour cette liste ?

 22   R.  C'est exact. Toute information découlant des exhumations, ou une fois

 23   que nous avons retrouvé la trace des personnes portées disparues signifiait

 24   que nous pouvions rajouter des éléments sur cette liste. Cette liste est

 25   donc évolutive.

 26   Q.  Est-ce que l'on pourrait avancer jusqu'à la dernière page, s'il vous

 27   plaît, la page 19, et je pense que c'est ce que vous mentionnez en bas du

 28   document, n'est-ce pas ?


Page 12799

  1   R.  Tout à fait. Il s'agit d'une liste de noms, et sur la base des

  2   exhumations ou des déclarations de témoins, il s'agit de personnes qui

  3   peuvent être considérées comme ayant perdu leurs vies sur le territoire

  4   contrôlé par les Serbes sur la municipalité de Vogosca.

  5   Q.  Quand vous parlez de déclarations de témoins, est-ce que vous parlez de

  6   personnes qui sont originaires de cette municipalité ?

  7   R.  Je parle de personnes qui étaient détenues avec moi dans certains des

  8   centres de détention ou des camps ou durant la période où le territoire de

  9   la municipalité de Vogosca était sous contrôle serbe, ils vivaient sur ce

 10   territoire. A la fin de la guerre en 1995, nous avons retrouvé la trace

 11   d'une centaine de personnes qui étaient Musulmans et qui avaient passé la

 12   plupart de la guerre dans ce secteur.

 13   Q.  Il s'agit donc de ces personnes qui vous ont transmis ces informations,

 14   n'est-ce pas ?

 15   R.  Compte tenu des informations, effectivement, qu'ils nous ont

 16   transmises, mais également sur la base d'informations données par des

 17   personnes qui connaissaient les personnes qui avaient été tuées ou qui

 18   avaient été portées disparues dans une zone donnée.

 19   Q.  Merci.

 20   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je voudrais verser cette pièce au

 21   dossier.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons devoir lui donner une cote

 23   provisoire.

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, effectivement, car ce document n'a

 25   pas encore été traduit.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic ?

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que les Juges de la Chambre permettent à

 28   la Défense d'apporter une annotation à côté de chacun de ces noms, ces noms


Page 12800

  1   de personnes qui figurent sur cette liste avec la nature ou la cause du

  2   décès ? Donc est-ce que nous pouvons verser ce document sans passer par un

  3   témoin ?

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous parlerons de tout cela lorsque

  5   cette pièce sera versée. Je ne suis pas en mesure de répondre à votre

  6   question sans savoir de quoi il s'agit exactement.

  7   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Ce document a été communiqué à la

  8   Défense, donc ils auraient pu l'utiliser durant le contre-interrogatoire

  9   s'ils l'avaient souhaité.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Nous allons donc accorder une

 11   cote provisoire à ce document.

 12   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la cote MFI P2397.

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 14   Q.  [aucune interprétation]

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que vous me permettez de prendre la

 16   parole ?

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allez-y.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voulais éviter de faire une remarque de ce

 19   genre à l'attention de Mme Sutherland. Ce document est communiqué vraiment

 20   à la dernière minute. Je crois que nous l'avons reçu lundi alors que je

 21   préparais d'autres témoins. Donc nous l'avons vraiment reçu à la dernière

 22   minute.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, continuons.

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Effectivement, il est mentionné que ce

 25   document a été apporté par le témoin durant le week-end et a été communiqué

 26   dimanche.

 27   Q.  Aux pages 24 et 25, aujourd'hui, M. Karadzic vous a posé des questions

 28   pour savoir si vous aviez été animé par une revanche personnelle. Dans


Page 12801

  1   votre réponse, vous avez dit que c'était quelque chose qui était coordonné

  2   qui avait été réalisé par les Serbes de la région et vous avez parlé d'un

  3   document de Jovan Tintor. M. Karadzic vous a demandé si vous étiez d'accord

  4   à savoir que Jovan Tintor avait remis le contrôle de ce bâtiment au début

  5   du mois de mai, puis encore une fois vers la mi-juillet.

  6   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait demander

  7   l'affichage du document de la liste 65 ter 01509, s'il vous plaît.

  8   Q.  Est-ce que vous reconnaissez ce document, Monsieur le Témoin ?

  9   R.  Oui, tout à fait.

 10   Q.  C'est un document que vous avez apporté avec vous durant le week-end,

 11   mais en fait ce document était un document de la liste 65 ter dans cette

 12   affaire depuis un certain temps déjà.

 13   Mais revenons à ce document. Est-ce que c'est celui que vous avez mentionné

 14   un peu plus tôt dans votre déposition d'aujourd'hui ?

 15   R.  Il s'agit du document que j'ai mentionné et qui montre que Jovan

 16   Tintor, en tant que président de la cellule de Crise, avait donné l'ordre

 17   au propriétaire de l'auberge Kontiki et à son fils de mettre à disposition

 18   ses locaux pour l'interrogatoire de personnes détenues. Cela signifie

 19   qu'avant l'attaque contre mon village, ils avaient planifié certaines

 20   activités et ils s'étaient rendus compte qu'ils auraient besoin de locaux

 21   pour procéder aux interrogatoires de personnes qui allaient en faire

 22   l'objet.

 23   Q.  Merci.

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je souhaiterais verser cette pièce au

 25   dossier, Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P2398.

 28   Mme SUTHERLAND : [interprétation]


Page 12802

  1   Q.  [aucune interprétation]

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux faire un commentaire ? Ce

  3   n'est pas un ordre de M. Tintor, c'est un ordre de l'un de ses adjoints.

  4   Deuxièmement, ce sont les autorités civiles qui demandent de réquisitionner

  5   certains biens immobiliers et de les remettre à la police. Il semble que le

  6   témoin ait dit quelque chose de différent.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pouvez présenter les arguments

  8   écrits à ce sujet. Nous pouvons de toute façon tous lire ce document.

  9   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 10   Q.  Quant à l'autre document que vous avez mentionné, Monsieur Muracevic,

 11   je ne vais pas demander l'affichage de ce document à l'écran, car il a déjà

 12   été versé au dossier. Hier --

 13   Hier, comme je disais, on vous a posé des questions concernant ces

 14   documents et M. Karadzic se fourvoyait lorsqu'il avançait que vous aviez

 15   examiné certains documents qui vous avaient été donnés par la commission.

 16   Vous avez précisé tout cela en disant que ces documents avaient été

 17   retrouvés à la municipalité de Vogosca, mais ensuite vous avez dit que vous

 18   aviez eu la possibilité d'examiner ces documents et vous avez parlé d'une

 19   cassette audio concernant un discours que M. Karadzic aurait prononcé.

 20   Est-ce que vous vous souvenez de cela ?

 21   R.  Oui, je m'en souviens. Les documents en question nous les avons trouvés

 22   après la réintégration du secteur de Vogosca dans le territoire de la

 23   Fédération, c'est-à-dire après le 23 février 1996. La plupart de ces

 24   documents, je dois dire la quasi-totalité des documents, qui ont été

 25   présentés aujourd'hui et qui font partie de mes déclarations, il s'agit de

 26   documents que nous avons retrouvés dans le bâtiment municipal de Vogosca ou

 27   dans d'autres bâtiments qui auparavant étaient sous le contrôle serbe.

 28   Q.  Monsieur Muracevic, je vous arrête. Je voudrais que l'on consulte un


Page 12803

  1   document pour confirmer qu'il s'agit bien d'un enregistrement audio que

  2   vous avez mentionné dans le compte rendu d'hier.

  3   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je vais référence à la pièce P00958. Est-

  4   ce que l'on pourrait passer à la page 6 de la traduction en anglais.

  5   M. ROBINSON : [interprétation] J'ai une objection, Monsieur le Président.

  6   Ceci ne rentre pas dans le cadre des sujets abordés durant le contre-

  7   interrogatoire. Si ceci était considéré comme important par l'Accusation,

  8   ce discours de M. Karadzic aurait dû faire l'objet de questions durant

  9   l'interrogatoire principal. Mais je ne pense pas que ce soit le moment de

 10   le mentionner, cela ne semble pas très équitable ni juste.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland, est-ce que vous

 12   pourriez nous dire comment ceci découle du contre-interrogatoire ?

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Parce que M. Karadzic demandait au témoin

 14   s'il avait reçu ces documents auprès des autorités. En fait, je peux

 15   procéder d'une autre manière, Monsieur le Président. En fait, il y a eu une

 16   discussion un peu plus tard durant le contre-interrogatoire concernant la

 17   vente de terrains et le fait qu'il n'était pas possible de vendre des

 18   terres à des Musulmans. C'est aux pages 12 687 et 12 688. Le témoin a parlé

 19   du fait que 215 ressortissants ou citoyens d'ethnicité serbe habitant dans

 20   la municipalité de Vogosca où il y avait donc des représentants des

 21   populations, tant que bosno-musulmanes, que bosno-serbes, que bosno-

 22   croates, avaient donc envoyé une pétition à l'assemblée municipale de

 23   Vogosca en demandant d'interdire la vente de maisons serbes à des

 24   Musulmans.

 25   Est-ce que l'on pourrait demander l'affichage du document de la liste 65

 26   ter 90235.

 27   L'INTERPRÈTE : L'interprète précise, correction : Et de ne pas interdire

 28   aux Musulmans de construire des maisons dans le village.


Page 12804

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je pourrais demander à Mme

  2   Sutherland de nous faire savoir exactement de quel document il s'agit de la

  3   Chambre ne savent pas de quel document il s'agit.

  4   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Le document qui est à l'écran est la

  5   transcription du discours de M. Karadzic concernant le référendum du peuple

  6   serbe de novembre 1991, qui a été mentionné par le témoin hier.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais quand ceci a été présenté ?

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce n'est pas utilisé pour l'instant.

  9   Passons à autre chose, Monsieur Karadzic. Elle n'utilise pas ce document.

 10   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Est-ce que je peux revenir à cela,

 11   Monsieur le Président ?

 12   Q.  Monsieur Muracevic, est-ce que vous avez rédigé un livre, écrit un

 13   livre ?

 14   R.  Oui, j'ai écrit un livre : "Les personnes tuées et portées disparues

 15   dans la zone de la municipalité de Vogosca de 1992 à 1995." Il y a un

 16   extrait de mon livre que l'on peut voir à l'écran. Je parle d'une partie

 17   d'une déclaration de M. Karadzic durant la période du référendum. Il avait

 18   pris la parole lors d'un meeting. Il y a une note en bas de page où l'on

 19   peut voir la source, qui est donc le bulletin de la Commission d'état, qui

 20   avait établi des faits concernant les crimes de guerre sur le territoire de

 21   la République de Bosnie-Herzégovine, et il y a toutes les informations que

 22   je mentionnais.

 23   Q.  [aucune interprétation]

 24   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que c'est

 25   une autre manière d'aborder le même thème qui, selon moi, n'entre pas dans

 26   le cadre du contre-interrogatoire, qu'il s'agit d'un discours. De

 27   mentionner les discours directement ou indirectement, je m'en tiens à mon

 28   objection. Je voudrais également que Mme Sutherland nous dise quand elle


Page 12805

  1   nous a communiqué ce document, parce que nous ne nous en souvenons pas.

  2    Mme SUTHERLAND : [interprétation] Ceci a été communiqué conformément à

  3   l'article 66 (b). Je vais retrouver la date. Monsieur le Président, si je

  4   puis répondre à Me Robinson, il ne s'agit pas de la façon dont il faut

  5   communiquer ces documents. Il faut le faire d'une autre façon. J'ai montré

  6   cela pendant le contre-interrogatoire et j'aurais dû être plus claire,

  7   Monsieur Karadzic. Ce témoin -- nous parlons en réalité de l'allocution de

  8   M. Karadzic lorsqu'il dit que ce terrain ne doit pas être vendu aux

  9   Musulmans. Le témoin a évoqué un document qu'il a vu et cette pétition 215.

 10   M. Karadzic dit :

 11   "Avez-vous vu cela ? Où sont vos déclarations précédentes ?"

 12   Il dit :

 13   "Je l'ai déjà dit à plusieurs reprises."

 14   Je demande simplement au témoin de regarder cet ouvrage et de lui montrer

 15   qu'il a évoqué ceci en 2002. Nous disposons de cette pétition 215, que je

 16   souhaite présenter comme élément de preuve ou de pièce à conviction.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.

 18   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je voulais simplement demander au témoin

 19   de regarder tout d'abord cet ouvrage et lui demander s'il reconnaît ce

 20   document.

 21   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. La pétition, je

 22   crois, est très claire et découle du contre-interrogatoire. Mais le

 23   discours ou l'allocution de M. Karadzic ne découle pas de cela.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je demander une autre précision, s'il vous

 26   plaît ? Quand cet ouvrage m'a-t-il été communiqué ? Si le témoin a écrit

 27   quelque chose, la Défense devrait être en possession de cet ouvrage.

 28   Deuxièmement --


Page 12806

  1   L'INTERPRÈTE : Les personnes se chevauchent.

  2   Mme SUTHERLAND : [interprétation] 2009.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] La deuxième question, tout portait sur la

  4   question de savoir si le témoin a vu ce discours publiquement ou s'il l'a

  5   obtenu des services de Sûreté de l'Etat. La note en bas de page numéro 3

  6   confirme que ce témoin a été assisté dans la préparation de son témoignage,

  7   sur la base des documents fournis par les services de Sûreté de l'Etat.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc nous n'allons pas intervenir

  9   davantage. Poursuivons, Madame Sutherland.

 10   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Est-ce que nous pourrions regarder la

 11   note en bas de page suivante. La page suivante, s'il vous plaît, de ce

 12   document ?

 13   Q.  Nous voyons ici, Monsieur Muracevic, la référence -- note en bas de

 14   page numéro 4.

 15   R.  Oui, oui. Effectivement, je le vois.

 16   Q.  Donc ce document porte sur cette pétition 215.

 17   R.  C'est bien ce document, qui fait partie des documents que nous avons

 18   trouvés dans le bâtiment de la municipalité, que nous avons remis pour

 19   qu'ils soient conservés. Il s'agit bien de ce document-là.

 20   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Il n'y a pas d'interprétation.

 22   L'INTERPRÈTE : Note de la cabine anglaise : Est-ce que nous pourrions avoir

 23   la note en bas de page numéro 4 ainsi que la note en bas de page numéro 3,

 24   de façon à ce que nous puissions la traduire ? Est-ce que le témoin peut

 25   les lire, de façon à ce que ces notes en bas de page soient traduites ?

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez lire, s'il vous plaît, Monsieur

 27   Muracevic, la note en bas de page numéro 4.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Note en bas de page numéro 4 déclare que les


Page 12807

  1   archives des instituts chargés d'enquêter sur les crimes contre l'humanité

  2   et du droit international à Sarajevo, à partir de maintenant dénommé AIIZ,

  3   numéro d'inventaire 31185, des citoyens du village de Krivoglavci,

  4   municipalité de Vogosca, à l'intention du président de l'assemblée de la

  5   République socialiste de Bosnie-Herzégovine et autres, "Très estimés

  6   Messieurs."

  7   C'est quelque chose que la population du village de Krivoglavci, est

  8   envoyée par des habitants serbes. C'est une pétition envoyée à l'assemblée

  9   municipale de Vogosca et ainsi qu'à d'autres destinataires, y compris le

 10   président de l'assemblée de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine.

 11   En réalité, il s'agit d'un document que j'ai trouvé dans le bâtiment

 12   municipal de Vogosca, et ceci a été remis ou placé dans les archives de

 13   l'institut pour que cet institut conserve ce document, cette pétition.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande simplement au témoin de lire

 15   la note en bas de page numéro 3. Il a lu la note en bas de page numéro 4.

 16   Laisse-le lire le numéro 3, de façon à ce que nous puissions voir sur quoi

 17   se fonde la déposition de ce témoin. Il témoigne en se fondant sur des

 18   documents d'archives qui lui ont été remis. Ce témoin ne témoigne pas en

 19   tant que témoin expert.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Mais je pense qu'il est juste de

 21   demander au témoin de lire la note en bas de page numéro 3.

 22   Mme SUTHERLAND : [aucune interprétation]

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous lire la note en bas de

 24   page numéro 3, s'il vous plaît ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, si vous me le

 26   permettez, une ou deux choses que je souhaite dire à propos de la note en

 27   bas de page numéro 4.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mme Sutherland reviendra vers vous, le


Page 12808

  1   cas échéant. Mais nous vous demandons pour l'instant de bien vouloir lire

  2   la note en bas de page numéro 3.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Note en bas de page numéro 3 déclare comme

  4   suit :

  5   "Le bulletin de la Commission d'état chargée de rassembler des faits sur

  6   les crimes de guerre sur le territoire de la République de Bosnie-

  7   Herzégovine."

  8   Le texte, ci-après dénommé bulletin numéro 7, février 1994, pages 3

  9   et 4, bulletin qui a été publié et qui était accessible au public.

 10   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, Monsieur Karadzic. Non, Monsieur

 12   Karadzic.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Regardons le 4, tout simplement, pour voir

 14   l'année.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci a été lu.

 16   Madame Sutherland, veuillez poursuivre.

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Puis-je avoir à l'écran, s'il vous

 18   plaît, le numéro 65 ter 90233, s'il vous plaît. Mais, Madame, Messieurs les

 19   Juges, je ne dispose pas de traduction anglaise de ce document.

 20   Merci, Monsieur le Président. Numéro 65 ter, 90233. Pardonnez-moi, je

 21   n'ai pas la traduction anglaise.

 22   Q.  Monsieur Muracevic, reconnaissez-vous ce qui est à l'écran?

 23   R.  Oui, tout à fait, c'est précisément la pétition qui comporte 215

 24   signatures des habitants. Non seulement j'ai trouvé le document dans le

 25   bâtiment municipal, mais en 1996, j'étais secrétaire de la communauté

 26   locale. J'ai assisté au conseil municipal et ce sujet était à l'ordre du

 27   jour lorsque le conflit a éclaté dans la municipalité de Vogosca. Il s'agit

 28   d'un des premiers documents que les délégués ou députés ou membres de


Page 12809

  1   l'assemblée - je ne sais pas comment on les appelait à l'époque - du Parti

  2   démocratique serbe présentaient à l'assemblée municipale de Vogosca.

  3   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le

  4   versement au dossier de ce document. Est-ce que nous pourrions voir la

  5   deuxième page, s'il vous plaît, de façon à ce que le témoin dans le

  6   prétoire et M. Karadzic puissent voir la deuxième page ?

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc la note en bas de page,

  8   numéro 4, que nous avons vue précisément, fait référence à ce document-ci,

  9   Monsieur le Témoin ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact, Monsieur le Président.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais je me souviens du fait que la note

 12   de bas de page ne comporte pas de date, n'est-ce pas ?

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Il s'agit

 14   simplement d'un numéro apposé par les archives de l'institut.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous demandez le versement au

 16   dossier de l'extrait de ce livre ?

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] On voit effectivement ce chiffre qui est

 18   le chiffre d'archive, note en bas de page. Si vous regardez cet ouvrage, il

 19   y a un numéro et un tampon qui se trouvent en bas du document, à la page 2.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vois.

 21   Mme SUTHERLAND : [aucune interprétation]

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous demandez le versement au

 23   dossier de l'extrait de cet ouvrage ?

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Les pages pertinentes ont été lues et

 25   sont consignées au compte rendu d'audience. Je m'en remets à vous, Madame,

 26   Messieurs les Juges.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors nous pouvons l'admettre au

 28   dossier.


Page 12810

  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Nous allons télécharger la page de

  2   couverture de l'ouvrage du témoin.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc nous allons les marquer aux fins

  4   d'identification.

  5   M. ROBINSON : [interprétation] Mais en fait, à propos du livre, cela me

  6   pose quelque problème. Je m'excuse d'intervenir, mais en regardant la

  7   communication du 13 octobre 2009 -- à mon sens, cette lettre comporte 20

  8   pages et cet ouvrage n'est pas mentionné. Il s'agit de la communication de

  9   documents liés à la mort de certaines personnes en Bosnie, en vertu de

 10   l'article 66(B). C'est ainsi que ce livre nous a été communiqué, ce qui ne

 11   nous permet pas de contre-interroger ce témoin comme il se doit. Nous

 12   demandons donc à ce que ce témoin reste pour que nous puissions lire cet

 13   ouvrage ce soir, pour pouvoir lui poser des questions supplémentaires, à

 14   moins qu'on puisse nous prouver autre chose. Mais ceci vient d'être porté à

 15   notre attention. C'est notre faute si cela nous a échappé en l'espèce, mais

 16   effectivement, c'est le cas. Nous voyons ceci pour la première fois et nous

 17   n'avons pas établi de lien entre cet ouvrage et cet homme. Nous aurions dû

 18   le lire et nous sommes pris de court un petit peu. Nous aurions dû le lire.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, dans l'index qui a

 20   été fourni, la description de l'ouvrage et de cette personne entre 1992 et

 21   1995, présenté par Stephen Margetts et Bilal Hasanovic [phon]. Le titre de

 22   livre ainsi que la source ont été remis.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'était en 2009.

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Le 13 octobre 2009.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pensais que ce serait dans l'intérêt

 26   de la Défense que de verser au dossier cet ouvrage. Je suppose que vous

 27   vous opposez au versement au dossier des deux pages de ce livre.

 28   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, tout à fait. Parce que nous estimons ne


Page 12811

  1   pas avoir été suffisamment avertis à l'avance.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Alors nous allons simplement

  3   verser au dossier la pétition qui sera marquée aux fins d'identification en

  4   attendant la traduction.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] MFI 2399, Madame, Messieurs les Juges.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  7   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Le document est cité en note de bas de

  8   page, ce que nous avons également, mais je ne sais pas si cela est

  9   nécessaire.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est à vous d'en décider, Madame

 11   Sutherland.

 12   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 13   Q.  Monsieur Muracevic, hier, M. Karadzic, à la page du compte rendu

 14   d'audience 12 678 ou 12 677, encore une fois, évoquait des documents que

 15   vous aviez trouvés en rapport avec le nombre de personnes qui ne vivaient

 16   plus dans la municipalité de Vogosca. J'ai présenté ces deux documents hier

 17   à M. Karadzic, pendant son contre-interrogatoire, et je les ai proposés

 18   pendant son contre-interrogatoire.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Puis-je avoir le numéro 65 ter, s'il vous

 20   plaît, 90230. Nous nous excusons pour la qualité de ce document par avance,

 21   Monsieur le Président. Je veux parler du B/C/S.

 22   Q.  Reconnaissez-vous le document qui est à l'écran, Monsieur Muracevic ?

 23   R.  Oui, effectivement.

 24   Q.  Il s'agit d'une décision aux fins de nommer une commission municipale

 25   pour le recensement de 1993, et cette décision est rendue par le président

 26   du comité exécutif de la municipalité de Vogosca; est-ce exact ?

 27   R.  Oui, c'est exact.

 28   Q.  Suite à cette décision, un autre document que vous avez cité hier a été


Page 12812

  1   fourni.

  2   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Puis-je avoir le numéro 65 ter 90231 à

  3   l'écran, s'il vous plaît ?

  4   Q.  Connaissez-vous ce document ?

  5   R.  Je reconnais ce document. Il s'agit d'un extrait d'habitants énumérés

  6   dans les régions contrôlées par les Serbes de la région, conformément à

  7   cette décision visant à créer cette commission chargée du recensement.

  8   Q.  Résultats pour les différents districts et hameaux. La date est celle

  9   de 1993. Vous dites qu'il n'y avait pas d'habitants de Svrake qui vivaient

 10   encore dans la municipalité à l'époque.

 11   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Est-ce que nous pouvons passer à la page

 12   2 en B/C/S et la page 2 de l'anglais également.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai un commentaire à faire. Il ne s'agit pas

 14   d'un recensement officiel, mais d'une liste préparée par la municipalité de

 15   ces villages où le recensement a pu être effectué. Une politique sociale

 16   avait été mise en place et différents services sociaux étaient accessibles

 17   aux habitants. Il s'agit d'une liste de ces habitants et de ceux qui y ont

 18   emménagé pour qu'ils puissent bénéficier de ces avantages sociaux. Mais

 19   dans certains villages, il était impossible de se rendre, ce qui ne

 20   signifie pas pour autant qu'il n'y a pas d'habitants de ce village.

 21    M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 22   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Ce commentaires n'est pas nécessaire.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous ne faites pas de commentaire. Le

 24   cas échéant, après les questions supplémentaires, vous pouvez demander à

 25   poser des questions supplémentaires, après le contre-interrogatoire. Mais

 26   vous n'êtes pas en droit d'intervenir pendant les questions supplémentaires

 27   sont posées et cela n'est pas utile aujourd'hui.

 28   Mme SUTHERLAND : [interprétation]


Page 12813

  1   Q.  Oui, nous voyons, Monsieur Muracevic, que pour le village de Svrake il

  2   n'y a pas de Musulmans qui y vivent à partir du mois de juin 1993; est-ce

  3   exact ?

  4   R.  Dans ce document, on voit qu'il n'y avait pas de Musulmans. Svrake

  5   était sous le contrôle des Serbes de la région. Ils auraient pu entrer

  6   puisqu'ils contrôlaient le village; ils le contrôlaient à ce moment-là.

  7   Toutes ces localités qui sont citées sur cette liste étaient placées sous

  8   le contrôle plein et entier des autorités serbes. Tous ces villages et

  9   hameaux étaient des villages et hameaux dans lesquels ils pouvaient entrer.

 10   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le

 11   versement au dossier du document 90230 ainsi que de la décision de Koprica

 12   :

 13   "Conformément aux conclusions de la 17e [comme interprété] Séance de

 14   l'assemblée de la Republika Srpska, un comité sera constitué --"

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous avons une traduction

 16   anglaise de cela ?

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les deux documents seront versés au

 19   dossier.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce seront les pièces P2400 et 2401

 21   respectivement, Madame, Messieurs les Juges.

 22   M. ROBINSON : [interprétation] Pardonnez-moi, Monsieur le Président, il y a

 23   quelques pièces à conviction que nous ne connaissons pas. Si nous pouvions

 24   revenir à la pétition, s'il vous plaît, le numéro 65 ter 90233, qui a été

 25   versée au dossier. Je demande à quel moment ce document nous a été

 26   communiqué. Est-ce que vous pourriez l'afficher sur votre écran ? Je crois

 27   que ce serait utile.

 28   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Nous avons obtenu ce document ce matin,


Page 12814

  1   vers l'heure indiquée en haut de la page de ce document.

  2   M. ROBINSON : [interprétation] De toute façon, je crois que l'Accusation

  3   aurait besoin d'une autorisation pour ajouter ce document sur sa liste de

  4   documents 65 ter. Nous avons remarqué en regardant la télécopie que c'était

  5   le 2 mars 2011; sinon, nous penserions que ce document faisait partie des

  6   deux millions de documents qui nous ont été communiqués au fil des

  7   dernières années. Et maintenant, nous découvrons que ceci a été proposé

  8   sans qu'une requête soit déposée aux fins de l'ajouter sur la liste 65 ter

  9   de documents. Je crois qu'il faudrait retirer ce document comme pénalité

 10   pour procéder de cette façon.

 11   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Il s'agit de questions supplémentaires et

 12   pas de l'interrogatoire principal.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La pétition a été mentionnée de façon

 14   précise pendant le contre-interrogatoire.

 15   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, mais ce document ne nous a pas été

 16   communiqué auparavant.

 17   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me le

 18   permettez.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Attendez, je vais consulter mes

 20   collègues, s'il vous plaît. Un instant.

 21   [La Chambre de première instance se concerte]

 22   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Maître Robinson, pourriez-vous me dire

 23   ceci : Est-ce que vous avez été pris de court par ce document ?

 24   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, tout à fait. Nous avons été totalement

 25   surpris par ce document.

 26   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Oui, c'est exact.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cette pétition a été évoquée pendant la

 28   contre-interrogatoire et nous estimons que l'Accusation est en droit de


Page 12815

  1   présenter ce document et, le cas échéant, la Défense est en droit de poser

  2   des questions supplémentaires sur ce document, compte tenu de la

  3   communication et de l'heure de la communication de ce document.

  4   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pardonnez-moi, Monsieur le Président,

  5   mais l'Accusation fait valoir que des documents utilisés pendant les

  6   questions supplémentaires ne doivent pas être communiqués à la Défense

  7   avant d'avoir été utilisés pendant les questions supplémentaires.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Avant d'avoir été utilisés, ou

  9   pendant, ou juste au début des questions supplémentaires. Je crois, oui.

 10   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 12   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, de façon à ce que

 13   nous soyons sur la même longueur d'ondes, dans le cas où cette question

 14   serait reposée à nouveau, il s'agit de savoir si nous commençons le contre-

 15   interrogatoire. Nous envoyons par courrier électronique nos listes de tous

 16   les documents que nous avons l'intention d'utiliser, donc plus tard,

 17   l'Accusation doit communiquer ces documents au début des questions

 18   supplémentaires. Cela n'aurait, en l'espèce, pas fait une très grande

 19   différence, mais je comprends que ce serait la procédure habituelle de

 20   communication lors des questions supplémentaires. Si le document n'a pas

 21   été communiqué auparavant, à ce moment-là, avant ou au moment où commencent

 22   les questions supplémentaires, un courrier électronique devrait être envoyé

 23   à nous et aux Juges de la Chambre sur lequel figurent les documents qui

 24   seront utilisés pendant les questions supplémentaires. Ceci doit être

 25   communiqué. Est-ce que les mêmes principes ne doivent pas être appliqués au

 26   contre-interrogatoire ?

 27   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, pardonnez-moi,

 28   mais les questions supplémentaires découlent du contre-interrogatoire, et


Page 12816

  1   vous savez, nous faisons ceci de façon un petit peu spontanée. Cinq minutes

  2   avant la fin du contre-interrogatoire, nous réagissons en nous procurant un

  3   document et en le présentant au témoin dans un cadre donné. Je crois qu'en

  4   le présentant ainsi, ce que demande Me Robinson est tout à fait inutile, et

  5   difficile à mettre en œuvre.

  6   [La Chambre de première instance se concerte]

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je dire quelque chose ?

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non. Non, pas cette fois-ci, Monsieur

  9   Karadzic.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ai-je le droit de réagir à ce qu'a dit Mme

 11   Sutherland à propos du contre-interrogatoire ?

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'ai dit non, Monsieur Karadzic.

 13   L'Accusation est en droit d'utiliser des documents qui ne figuraient pas

 14   sur la liste 65 ter pour autant que ce thème découle du contre-

 15   interrogatoire. Non pas en raison de l'heure de la communication, mais en

 16   raison de la teneur de ce document qui est porté à la connaissance de la

 17   Défense, pour la première fois, nous allons autoriser la Défense à poser

 18   des questions, le cas échéant, et uniquement sur ce fondement-là.

 19   Poursuivons, Madame Sutherland.

 20   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, le fait que le

 21   teneur soit pour la première fois porté à la connaissance de la Défense --

 22   il ne s'agit pas d'information nouvelle. Nous avons d'autres pièces à

 23   conviction, par exemple, qui contiennent des informations analogues à

 24   celles-ci.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre est d'avis que la Défense

 26   n'est pas en mesure de connaître cette pétition et ce qu'elle contient.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je avoir un temps supplémentaire ?

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Seulement concernant la pétition, oui.


Page 12817

  1   Madame Sutherland.

  2   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   Q.  Monsieur Muracevic, suite à la décision en vertu d'une conclusion du

  4   gouvernement de la Republika Srpska aux fins de créer un comité chargé du

  5   recensement, les conclusions de ces commissions du recensement en juin

  6   1993. Ensuite, dans votre déposition hier, vous avez parlé de 13 157

  7   personnes qui ont été chassées de la municipalité, et M. Karadzic vous a

  8   posé une question au niveau de ce chiffre et vous a demandé où vous vous

  9   étiez procuré ce chiffre. Vous avez répondu en disant que vous disposiez

 10   des documents et que vous aviez les documents sur vous -- avec vous.

 11   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Puis-je avoir le numéro 65 ter 90232 à

 12   l'écran, s'il vous plaît.

 13   Q.  Est-ce que vous reconnaissez ce document ?

 14   R.  Oui. C'est moi qui l'ai compilé en comparant les chiffres du

 15   recensement officiel de Bosnie-Herzégovine de 1991 et le recensement qui a

 16   été réalisé en juin 1993 par les autorités serbes sur le territoire qui

 17   était sous leur contrôle. Après avoir fait cette comparaison, je n'ai

 18   inclus que les localités qu'ils avaient recensées et qui étaient sous leur

 19   contrôle.

 20   Q.  Et lorsque vous mentionnez les documents qui étaient recensés sur leur

 21   document, il s'agit du document que nous venons de voir, qui porte la date

 22   du 17 juin 1993, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui. Je parle de ces documents-là.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai une objection. Ce témoin n'est pas un

 25   expert démographe, ni un expert dans une autre matière. C'est un témoin

 26   oculaire. Par conséquent, j'aurais besoin de temps supplémentaire pour mon

 27   contre-interrogatoire. Ici, nous avons des éléments et des données qui

 28   viennent d'être présentés et qui ne figuraient pas dans la déposition de


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  1   départ du témoin. De plus, j'ai l'impression d'avoir été pris en embuscade

  2   car il s'agit d'éléments que je ne connaissais pas, et on ne m'a pas averti

  3   de la présentation de ces éléments. Je parle du livre, de la pétition, et

  4   cetera.

  5   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs

  6   les Juges, M. Karadzic a demandé au témoin comment il avait obtenu ce

  7   chiffre de 13 157. C'était simplement pour montrer que le témoin avait

  8   compilé ce document en utilisant les chiffres du recensement réalisé par

  9   les Serbes et du recensement de 1992, et le recensement de 1992 a la

 10   référence 65 ter 00242.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela fait partie des documents qu'il a

 12   apportés avec lui.

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui. Ça a été communiqué à la Défense

 14   dimanche.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il s'agit de l'écriture manuscrite du

 16   témoin, n'est-ce pas ?

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne vois aucun problème au versement

 19   de ce dossier de ce document. Est-ce que l'on pourrait avoir une cote

 20   provisoire ou pas ?

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, nous avons reçu

 22   ça lundi soir. Il s'agit d'un travail d'expert produit par ce témoin, et

 23   nous avons reçu ce document lundi soir. On m'a communiqué ce document après

 24   mon retour du prétoire lundi soir.

 25   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, on n'a pas besoin

 26   d'un expert pour dresser un tableau.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera aux Juges de la Chambre de

 28   décider du poids qu'ils accorderont à ce document.


Page 12819

  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation] J'aimerais passer aux pages 2, 3 et 4 de

  2   ce document. Je suis désolée. J'aurais dû le faire avant de verser ce

  3   document au dossier.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allez-y, Madame Sutherland.

  5   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  6   Q.  Monsieur Muracevic, est-ce que vous pourriez expliquer aux Juges de la

  7   Chambre ce qui figure aux pages 2, 3 et 4 de ce document ?

  8   R.  Il s'agit des résultats du recensement officiel réalisé en Bosnie-

  9   Herzégovine en 1991 et ici, vous avez la totalité de la municipalité de

 10   Vogosca. Vous avez recensé ici les villages ainsi que les localités qui ont

 11   également fait l'objet du recensement réalisé par les autorités serbes en

 12   1993. Donc, en comparant les chiffres du recensement officiel et les

 13   chiffres qui ont été obtenus suite à leur recensement, nous avons obtenu

 14   les résultats mentionnés dans le document précédent.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci fait partie intégrante au document.

 16   Il s'agit de la structure de la municipalité de Vogosca, répartie en

 17   villages et en hameaux, et vous avez le nombre d'habitants avec leur

 18   nationalité, nombre de personnes, donc qui résidaient en 1991 dans ces

 19   hameaux et dans ces villages. Si l'on parle de ma commune locale de Svrake

 20   plus précisément - c'est la quatrième ligne en partant du haut - vous voyez

 21   qu'il y avait 1 245 habitants, 1 036 Musulmans, 170 Serbes, deux Croates,

 22   21 Yougoslaves et 16 autres ou divers.

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Ces renseignements ont déjà été versés au

 24   dossier. Je voudrais --

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense qu'il est préférable de lui

 26   accorder une cote provisoire en attendant la traduction.

 27   Mme SUTHERLAND : [interprétation] D'accord.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera -- cote MFI 2402.


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  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, c'est 2400 ?

  3   M. LE GREFFIER : [interprétation] Non, P2402.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] 02, d'accord. Si nécessaire, Monsieur

  5   Karadzic, comme nous l'avons mentionné, nous vous permettons de poser des

  6   questions portant sur cette pétition. C'est le document que l'on a affiché

  7   à l'écran avant le dernier document.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais j'aimerais poser des questions également

  9   concernant le recensement, parce que ceci n'a pas été mentionné dans

 10   l'interrogatoire principal. J'ai quelques questions à poser.

 11   Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Karadzic :

 12   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez trouvé ce

 13   document dans les bâtiments de la municipalité de Vogosca en 1996 ? Je

 14   parle de la pétition.

 15   R.  Monsieur l'Accusé, j'ai trouvé ce document en 1996 lorsque nous sommes

 16   arrivés à Vogosca; cependant, ce n'est pas la première fois que j'avais eu

 17   connaissance de ce document. J'avais déjà vu ce document auparavant car en

 18   tant que secrétaire de la commune locale, je participais aux réunions de

 19   l'assemblée municipale de Vogosca et j'ai eu la possibilité de me rendre

 20   dans les locaux de la municipalité lorsque cette pétition avait été abordée

 21   et était à l'ordre du jour de la réunion. C'était avant le commencement du

 22   conflit de 1992. C'était donc la période qui a suivi les premières

 23   élections multipartites et 1991. Je ne me souviens pas exactement de quelle

 24   session il s'agit, ni la date de cette session; cependant, j'ai déjà vu ce

 25   document auparavant, comme je l'ai vu en tant que secrétaire de la commune

 26   locale, je ne prenais pas uniquement connaissance de ces documents. Je

 27   recevais régulièrement des documents pour les réunions de l'assemblée, et

 28   dans le cadre des documents que je recevais, j'ai également pris


Page 12821

  1   connaissance de ce document.

  2   Q.  Hier, après la levée de l'audience, à qui avez-vous parlé ?

  3   R.  Que voulez-vous dire après la levée de l'audience ? De quoi parlez-vous

  4   ? Vous parlez après avoir quitté ce bâtiment ou en ville ?

  5   Q.  Avec qui avez-vous parlé de ce document afin de l'obtenir ?

  6   R.  Personnellement, je n'ai parlé à personne. Mais je suppose que le

  7   Procureur -- enfin, personnellement, je n'ai parlé à personne afin

  8   d'obtenir ce document; cependant, étant donné que l'endroit où se trouve le

  9   document est mentionné en note en bas de page, je suppose que l'Accusation

 10   a reçu le document.

 11   Q.  Quelqu'un a donc dû appeler l'institut et demander d'envoyer ce

 12   document.

 13   R.  Vous me posez une question sur quelque chose dont je n'aurais pas pu

 14   être à l'origine. Je n'ai contacté personne hier à Sarajevo, et

 15   certainement pas pour obtenir un document.

 16   Q.  Mais ce document est un document public depuis 1991, n'est-ce pas ?

 17   R.  La pétition était mentionnée; cependant, je ne veux pas dire si ceci

 18   avait été publié dans un média quel qu'il soit. Et compte tenu du nombre de

 19   destinataires qui est recensé ici, je suppose que c'était un document

 20   public.

 21   Q.  Mais ce n'est pas l'original, parce qu'il y a une note qui mentionne

 22   que le document d'origine est conservé par le secrétaire de l'assemblée de

 23   la république et il peut être consulté, si nécessaire. Est-ce que vous avez

 24   la date de cette pétition ? Il doit y avoir une date sur l'original, un

 25   cachet avec la date d'arrivée lorsque ça a été reçu par l'assemblée de la

 26   Bosnie-Herzégovine.

 27   R.  En tant que secrétaire de la commune locale, je recevais des duplicatas

 28   de ces documents qui étaient envoyés à tous les députés qui étaient membres


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  1   du conseil municipal, donc je n'ai pas reçu l'original, qui a dû être reçu

  2   par l'assemblée de Bosnie-Herzégovine. De toute façon, je n'avais pas

  3   besoin de l'original.

  4   Q.  Mais alors quel est le lien que vous avez établi entre ces informations

  5   et mes informations concernant ma conversation avec Izetbegovic en ce qui

  6   concerne votre citation ?

  7   R.  Je n'ai établi aucun lien entre cette pétition et votre conversation

  8   avec M. Izetbegovic. Ça n'a simplement -- ça n'a été mentionné que dans le

  9   contexte de votre discours enflammé que vous avez prononcé concernant le

 10   référendum, lorsque vous avez dit précisément et personnellement que dans

 11   les zones en question qui allaient être sous le contrôle serbe, aucune

 12   vente de terres ou de terrains ne serait permise aux Musulmans, et que la

 13   construction de bâtiments à usage résidentiel par les Musulmans dans les

 14   zones contrôlées par les Serbes était également interdite.

 15   J'ai également mentionné une partie de votre discours dans lequel vous

 16   mentionnez que toute fondation qui était construite par les Musulmans

 17   devait être détruite sur ces territoires. La pétition elle-même était

 18   mentionnée puisque, d'une certaine manière, les représentants du SDS, qui

 19   étaient membres du conseil municipal -- enfin, dans un des documents qui a

 20   été présenté à la séance conjointe, qui avait la participation de Musulmans

 21   mais également de Serbes, il demandait l'interdiction de la vente de terres

 22   par les Serbes aux Musulmans, et interdisait également que les Musulmans

 23   construisent des bâtiments dans ces villages. Donc c'est en lien avec ce

 24   que j'ai mentionné.

 25   Q.  Merci. Mais vous ne connaissez pas la date ? Est-ce que vous savez si

 26   j'ai dit publiquement ou si ce document était lié à un meeting politique de

 27   mon parti ou d'un parti quelconque ?

 28   R.  En lisant la note en bas de page, il y a une partie qui est une


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  1   citation, et j'ai fait référence à un document qui avait été publié dans le

  2   bulletin, et ceci est mentionné dans une des notes en bas de page.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Sutherland.

  4   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, M. Karadzic a posé

  5   exactement la même question au témoin hier.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que vous avez fait le tour de

  7   ce sujet. Nous vous permettons encore de poser une ou deux questions

  8   concernant le recensement.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Au moins une question concernant le

 10   recensement.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Monsieur Muracevic, la phrase que j'ai mentionnée, est-ce qu'elle

 13   faisait référence aux Musulmans de la région ?

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 15   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je pensais que votre décision portait sur

 16   le fait qu'il ne pouvait poser des questions que concernant la pétition.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non. Nous -- je suis désolé de ne

 18   pas vous l'avoir demandé, mais nous avons en fait accepté de lui permettre

 19   de poser des questions concernant le recensement, une ou deux questions.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Monsieur Muracevic, ce que j'ai dit à mes collègues du parti concernant

 22   ma conversation avec M. Izetbegovic, est-ce que cela avait trait à l'achat

 23   ou l'interdiction d'achat de terres ou de terrains par les Musulmans de la

 24   région ou est-ce que ceci portait sur l'achat de terrains ou la vente de

 25   terrains à des immigrants turcs, ce qui changerait la composition

 26   démographique de la Bosnie ?

 27   R.  Monsieur Karadzic, je ne sais pas ce que vous entendiez lorsque vous

 28   parliez de Musulmans. Lorsque vous parliez de Musulmans, je pensais que


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  1   vous parliez de tous les ressortissants qui appartenaient à ce groupe

  2   ethnique, et je ne pouvais pas me lancer dans des devinettes pour savoir ce

  3   que vous aviez à l'esprit, car je n'ai pas eu la possibilité vraiment de

  4   savoir ce que vous entendiez exactement par le terme "musulmans."

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais comment est-ce que cette question

  6   est liée au recensement ?

  7   Oui, Madame Sutherland.

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je m'étais levée pour poser la même

  9   question. Cette question ne porte par sur le recensement, elle revient à

 10   nouveau sur un autre thème.

 11    L'ACCUSÉ : [interprétation] Je croyais que je pouvais poser deux questions

 12   concernant la pétition, et deux concernant le recensement. C'est la raison

 13   pour laquelle je voulais poser la question de savoir si ce document

 14   montrait vraiment ce que j'avais dit à M. Izetbegovic.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez d'autres questions

 16   à poser concernant le recensement que nous venons de voir ?

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, s'il vous plaît.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur le Témoin, j'aimerais que vous nous disiez la chose suivante :

 20   J'aimerais savoir si, durant la guerre, à Hotonj, Kamenica, Kobilja Glava,

 21   Perca, Tihovici, Ugljesici, il y avait des Musulmans ? Est-ce qu'il y avait

 22   des Musulmans qui vivaient dans ces villages durant toute la période de la

 23   guerre ?

 24   R.  Monsieur Karadzic, votre question va bien au-delà du recensement et du

 25   document que nous venons de voir, car le recensement qui a été compilé par

 26   les autorités serbes --

 27   Q.  Je vous pose les questions que je vous pose.

 28   R.  Une des parties de Kobilja Glava. Les certains autres hameaux étaient


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  1   sous le contrôle de l'armée de Bosnie-Herzégovine. Effectivement, des

  2   Musulmans résidaient là-bas; cependant, pour ce qui est de la question de

  3   faire une comparaison entre le recensement de 1991 et celui de 1993, on ne

  4   prenait en compte que les parties qui étaient sous contrôle serbe, et pas

  5   le territoire qui était sous le contrôle de l'armée de la Bosnie-

  6   Herzégovine.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ne rentrez pas dans une querelle avec le

  8   témoin.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Donc est-ce que ces [inaudible] étaient restés vierges, même s'ils

 11   étaient sur la liste ? Donc tout ce qui est vierge signifie que c'est dans

 12   ces villages ?

 13   R.  J'aimerais pouvoir consulter ce document à nouveau, où l'on voit la

 14   synthèse de ce recensement. Mais dans les villages que vous contrôliez --

 15   ou plutôt, avant que vous ne preniez le contrôle de ces villages, il y

 16   avait un certain nombre de Musulmans, de Croates et d'autres personnes qui

 17   y vivaient, des Serbes et Yougoslaves, et des personnes appartenant à

 18   d'autres groupes ethniques. Donc dans mon village à Svrake, il y avait 1

 19   036 Musulmans qui y habitaient, alors que suite au recensement de 1993,

 20   réalisé par les autorités serbes, il est mentionné qu'il n'y avait pas un

 21   seul Musulman qui était résident dans ce village. Le village de Tihovici

 22   était à 100 % musulman, et en 1991, il avait 367 Musulmans qui habitaient.

 23   Alors que votre recensement de 1993 ne semble pas avoir identifié un seul

 24   résident musulman là-bas. Ils ne pouvaient pas les trouver, parce que le 4

 25   juillet, ce village a été attaqué par l'armée de la Republika Srpska, et

 26   plus d'une trentaine de résidents du village ont été tués, les autres ont

 27   été expulsés. Il s'agit d'un indicateur comparatif, qui montre quelle était

 28   la situation dans les villages qui étaient sous votre contrôle, et cela


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  1   montre également qu'avant d'avoir gagné le contrôle sur ces territoires, un

  2   certain nombre de Musulmans habitaient sur place. Donc il s'agit de ces

  3   territoires qui sont exclusivement sous le contrôle de l'armée serbe. En

  4   1991, il y avait 11 331 Musulmans, alors qu'en 1993 il n'y en avait que

  5   210. En 1991, il y avait 660 Croates, en 1993, il n'en avait que 302, et

  6   pour ce qui est du reste, c'est-à-dire Yougoslaves et autres groupes

  7   ethniques, il y en avait 1 098 en 1991, et en 1993, vos agents de

  8   recensement n'ont fait état que de 239 habitants rentrant dans cette

  9   catégorie.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que cela est plus que

 11   suffisant. Nous pouvons nous en arrêter là.

 12   Pour ce qui est de la demande Me Robinson, de demander au témoin de rester

 13   présent à La Haye jusqu'à demain, afin de poser plus de questions

 14   concernant le livre, et compte tenu de la période à laquelle ce document a

 15   été communiqué, nous pensons qu'il est nécessaire, au du moins nous ne

 16   faisons pas droit à cette requête, s'il s'agissait d'une requête.

 17   Ceci conclut votre déposition, Monsieur Muracevic. Merci pour votre

 18   patience et merci d'être venu à La Haye. Vous pouvez maintenant disposer.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   [Le témoin se retire]

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je me demande si vous pensez qu'il est

 22   judicieux de faire comparaître le témoin suivant. Je m'en remets à vous,

 23   Monsieur Tieger ou M. Hayden.

 24   M. HAYDEN : [interprétation] Je crois qu'il nous reste que six minutes, en

 25   regardant l'horloge. Donc je ne pense pas que cela vaille le coût.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous n'avons pas vraiment abattu

 27   beaucoup de travail aujourd'hui. Nous remercions le personnel du prétoire,

 28   les interprètes, ainsi que les sténotypistes. Nous allons avoir cinq


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  1   séances d'une heure demain, de 9 heures à 15 heures 15. La semaine

  2   suivante, Monsieur Tieger, il semble peu probable que l'on puisse avoir des

  3   séances prolongées, compte tenu du calendrier, puisqu'il y a un autre

  4   procès qui aurait lieu dans l'après-midi.

  5   Nous reprendrons donc notre audience demain à 9 heures.

  6   --- L'audience est levée à 14 heures 23 et reprendra le jeudi 3 mars 2011,

  7   à 9 heures 00.

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