Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 20 juillet 2011

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.

  7   Comme nous l'avons annoncé, nous allons continuer de travailler en

  8   application de l'article 15 bis.

  9   A moins qu'il n'y ait quelque chose -- oui, Maître Harvey.

 10   M. HARVEY : [interprétation] Si je puis présenter une mademoiselle, qui

 11   vient nous aider, qui est là depuis quelques semaines, Mlle Tracy Begley.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 13   Avant d'oublier, je saisis l'occasion pour constater que notre

 14   sténotypiste, M. Wayne Bilko, quitte le Tribunal. C'est son dernier jour

 15   aujourd'hui. Je tiens à le remercier de son travail devant le Tribunal. Je

 16   vous remercie.

 17   Monsieur Karadzic.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Merci, Excellence.

 19   LE TÉMOIN : REYNAUD THEUNENS [Reprise]

 20   [Le témoin répond par l'interprète]

 21   Contre-interrogatoire par M. Karadzic : [Suite]

 22   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Theunens.

 23   R.  Bonjour, Monsieur Karadzic.

 24   Q.  Monsieur Theunens, plusieurs choses me posent problème.

 25   Alors, premièrement, je voudrais constater une chose; est-ce que l'on vous

 26   a permis d'avoir accès à l'ensemble des documents, qui vous a fourni les

 27   documents ? J'aimerais savoir qui vous a donné accès aux documents, ces

 28   documents sur la base desquels vous avez rédigé votre rapport ?


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  1   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, j'ai travaillé sur

  2   la base de données qui est à la disposition du bureau du Procureur. J'ai

  3   appliqué un certain nombre de critères que j'ai choisis moi-même pour

  4   procéder à ces recherches. Je pense que j'ai déjà brièvement évoqué cela

  5   pendant l'interrogatoire principal. Par exemple, je faisais des recherches

  6   sur la base des noms, noms d'individus, des toponymes, noms de lieux, des

  7   postes d'unités militaires, numéros de postes, ou noms d'unités militaires

  8   ou des noms de groupes. Vous avez pu voir vous-même dans les documents, y

  9   compris dans mon rapport, que souvent on trouve un numéro sur les documents

 10   militaires. Donc ils se réfèrent à des documents précédents ou d'autres

 11   documents, et ces numéros peuvent être utilisés comme un critère de

 12   recherche également. Puis, bien entendu, j'ai pu m'appuyer sur ce que

 13   j'avais fait comme recherche analogue dans les affaires précédentes.

 14   Donc c'est moi qui ai choisi ces critères de recherche, comme je viens de

 15   le dire, et pour terminer ma réponse, ces critères étaient fondés sur la

 16   manière dont j'ai compris la nature de la mission qui m'a été confiée, donc

 17   les sujets qui m'ont été donnés à explorer, à étudier dans mon rapport.

 18   Q.  Ce qui me préoccupe en fait c'est de savoir si vous avez eu accès à

 19   l'ensemble des documents. D'autre part, est-ce que vous avez vérifié

 20   l'authenticité de ces documents, parce qu'il y a des faux, nous en verrons

 21   quelques-uns aujourd'hui. Troisièmement, j'aimerais savoir si votre

 22   interprétation des documents était une interprétation exhaustive dans la

 23   mesure où ces documents se situent dans un contexte par rapport aux

 24   événements qu'il relate, et aussi par rapport aux subtilités linguistiques,

 25   qui ne sauraient être traduites et qui souvent se trouvent mal traduites.

 26   Donc j'aimerais que l'on s'attache un petit peu encore à cette question de

 27   la prise de pouvoir dans certaines localités.

 28   Hier, nous avons parlé de la prise de pouvoir à Bijeljina.


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  1   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  3   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, il faudrait

  4   que le témoin puisse répondre à la question posée par M. Karadzic, puisque

  5   l'objectif de l'exercice c'est exactement d'avoir le témoin répondre aux

  6   questions.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, justement j'allais dire cela.

  8   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] M. Karadzic a posé plus qu'une question

  9   en fait, donc peut-être il faudrait donner la possibilité au témoin de

 10   répondre à chacune de ces questions.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Theunens.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, merci.

 13   Je sais que le bureau du Procureur n'a pas en sa possession l'ensemble des

 14   documents. Toutefois, je dois dire que personne n'a limité mon accès aux

 15   documents, donc à ceux qui sont accessibles au bureau du Procureur, et je

 16   voudrais ajouter que, dans le cadre des différents procès dont a été saisi

 17   le TPIY de par le passé, la Défense, elle aussi, a présenté des documents

 18   qui se trouvent eux aussi maintenant dans la base de données que j'ai

 19   consultée dans le cadre de mes recherches.

 20   Pour ce qui est de l'authenticité des documents permanents, là encore, je

 21   dois dire que un nombre très considérable de ces documents avait déjà été

 22   utilisé de par le passé dans d'autres procès. Un grand nombre de documents

 23   militaires ont déjà été présentés aux témoins qui ont parlé des affaires

 24   militaires ou à des témoins potentiels, devrais-je dire aussi qui ont pu

 25   constater si ces documents étaient authentiques ou non, et effectivement,

 26   l'authenticité est une question-clé. Je voudrais aussi parler de la

 27   méthodologie que j'ai appliquée par rapport à la crédibilité -- à la

 28   vérification de la crédibilité des informations contenues dans le document.


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  1   Je ne vois plus d'autres points -- ou plutôt, je ne vois plus la

  2   question s'afficher à l'écran. Excusez-moi, je ne sais pas comment

  3   continuer.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Votre interprétation.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, excusez-moi. La question de la

  6   traduction.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Troisièmement, la question était de

  8   savoir si votre interprétation de tel ou tel document est une

  9   interprétation exhaustive par rapport à l'ensemble des événements qui

 10   constituent le contexte du document donné et aussi les questions de

 11   finesse, de subtilité au niveau linguistique, donc des questions de choses

 12   qui ne sauraient être traduites ou sont souvent mal traduites.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 14   Oui, justement, c'est de manière professionnelle que j'ai agit dans

 15   l'application de ma méthodologie. Il revient à la Chambre de première

 16   instance de tirer des conclusions, de penser si oui ou non, j'ai

 17   effectivement examiné l'ensemble des documents de la manière la plus

 18   complète ou la manière la plus objective et pragmatique possible.

 19   Quant aux traductions, effectivement, la terminologie militaire n'est

 20   pas toujours correctement traduite dans l'équipe d'analystes militaires. Je

 21   dois dire que nous avons des assistants linguistiques qui ont été formés à

 22   utiliser la traduction de la terminologie militaire et j'ai toujours

 23   systématiquement vérifié la traduction des documents avec l'aide de ces

 24   assistants linguistiques. Je veux dire, la traduction des documents

 25   militaires afin de m'assurer que la terminologie militaire serbe était

 26   correctement traduite en l'anglais.

 27   Sinon, je dois dire que beaucoup de ces documents sont des documents

 28   qui sont assez clairs, formulés d'une manière simple, donc si M. Karadzic


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  1   peut, effectivement, me signaler qu'il y a eu des documents où je n'ai pas

  2   fourni une interprétation pleine et entière, ou où il y a des erreurs de

  3   traduction, bien sûr, je suis tout à fait disposé à les revoir et

  4   réexaminer mes conclusions, si ce cas de figure devait se poser sur la

  5   base, donc, des documents supplémentaires.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, Monsieur Karadzic, n'oubliez pas

  7   que vos déclarations n'ont pas de poids, n'ont pas de valeur pendant le

  8   contre-interrogatoire. Ce qui est important, c'est ce que le témoin répond.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui, j'en suis absolument conscient, mais

 10   je voudrais permettre à M. Theunens de s'exprimer pleinement pour éviter

 11   toute confusion et pour qu'il n'ait pas la sensation que je l'attaque, lui.

 12   Non, j'attaque les lacunes, les limitations, les défauts, les imprécisions

 13   de son travail. Donc, je ne sais pas s'il a pu tout mener à bien comme il

 14   l'aurait souhaité. Voilà, c'est ça, mon intention.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Monsieur Theunens, comment est-ce que cette notion de prise de pouvoir

 17   a vu le jour, donc, au nord-ouest de la Bosnie, dans ces municipalités-là ?

 18   R.  Monsieur le Président, lorsque l'on se penche sur les différentes

 19   municipalités qui font l'objet de mon travail, de mon rapport, on a pu

 20   identifier un certain mode opératoire et ce mode opératoire englobe au

 21   moins deux volets : d'un côté, la préparation politique et d'autres part,

 22   la mise en œuvre. Donc, sur le plan des préparatifs politiques, je pense

 23   que, conformément aux consignes données par M. Karadzic et le SDS -- le

 24   SDS, donc, on a créé des cellules de Crise, des cellules de Crise serbes.

 25   Ces cellules de Crise, en fonction des différents lieux, ont pu déclarer

 26   l'état de danger imminent de guerre. C'est ce qui a été fait dans certaines

 27   municipalités où on déclarait la mobilisation. Ils ont pris part à la

 28   création de la Défense territoriale serbe locale et, en fonction des


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  1   différentes municipalités, ils ont aussi nommé des commandants à des -- au

  2   niveau municipalité et donc, apporter leur contribution à armer les

  3   défenses territoriales serbes locales.

  4   Le deuxième volet, la mise en œuvre de la prise de pouvoir, là, cela évolue

  5   d'une municipalité à une autre, varie d'une municipalité à une autre. Nous

  6   avons différentes forces qui sont présentes et on peut, de manière

  7   générale, dire qu'il s'agit de forces serbes. Donc, nous avons la Défense

  8   territoriale serbe locale. Parfois, comme à Zvornik, nous avons la Défense

  9   territoriale de la République de Serbe aussi. Parfois, la JNA. Certains

 10   éléments de la JNA, des volontaires, arrivaient de Serbie, qui reçoivent

 11   des renforts au niveau des volontaires locaux et aussi des groupes qui, à

 12   l'époque, sont qualifiées comme étant des volontaires, mais qui, en fait,

 13   maintiennent des liens particuliers avec le ministère de l'Intérieur de la

 14   République de Serbie. Par exemple, vous avez, dans ce cas de figure, les

 15   Tigres d'Arkan et aussi des individus ou des groupes qui sont appelés, pour

 16   simplifier, Bérets rouges. Donc, eux, ils prennent part à la mise en œuvre,

 17   à la prise de pouvoir physique. Donc, à Bijeljina, par exemple, ils ont

 18   enlevé les barricades qui avaient été installées par la partie musulmane et

 19   à partir du moment où il y a eu, physiquement, la prise de pouvoir, parfois

 20   et cela varie d'une municipalité à une autre, on écarte les non-Serbes. A

 21   partir de ce moment-là, les structures de pouvoir serbes de Bosnie

 22   consolident leur pouvoir, et là, on peut dire que la prise de pouvoir est

 23   terminée et c'est fait accompli.

 24   Ce n'est qu'un résumé de ce que j'ai vu, dans les différentes

 25   municipalités. J'ai évoqué cela municipalité par municipalité, et nous

 26   trouvons cela dans la partie deux de mon rapport, en particulier par

 27   rapport à la JNA, le MUP serbe de Bosnie, la Défense territoriale ou la

 28   VRS.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est ce que vous -- nous pouvons

  2   trouver dans les documents ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est la conclusion que j'ai tirée sur la

  4   base des documents. Ce sont les différents modes opératoires que j'ai pu

  5   identifier et qui varient d'une municipalité à une autre.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Mais, Monsieur Theunens, ne seriez-vous pas d'accord pour dire que

  8   chacun de ces cas constitue un crime grave de très grande envergure et que

  9   chacun mériterait une enquête, une instruction à fond ? Donc, est-ce que

 10   cette enquête a été menée dans chacun de ces cas ? Par exemple, pour ce qui

 11   est des événements de Bijeljina dont nous avons parlé hier, est-ce que

 12   l'enquête a été menée et, si oui, qui s'en ai chargé ?

 13   R.  Monsieur le Président, ce que je ne vois pas clairement, c'est ce que

 14   signifie la conclusion de M. Karadzic qu'il s'agit de crimes, bien entendu,

 15   dans le cadre de ces prises de pouvoir et par la suite de la prise de

 16   pouvoir, il y a eu des crimes qui ont été commis et j'emploie ce terme,

 17   "crime," en citant les documents qui proviennent de la police serbe de

 18   Bosnie dans ces différentes municipalités. Ces documents, donc, figurent

 19   dans mon rapport, mais je n'avais pas pour mission de mener à bien une

 20   enquête pénale. Je devais analyser le changement au niveau des instances de

 21   pouvoir -- ou plutôt, non, il faudrait que je reformule. Ma tâche n'était

 22   pas de savoir comment s'est produit le changement au niveau des instances

 23   de pouvoir, mais plutôt de savoir ce qui s'est produit dans ces

 24   municipalités, à partir du moment où le 12 mai 1992, à la 16e Session de

 25   l'Assemblée des Serbes de Bosnie, il y a eu proclamation publique des six

 26   objectifs stratégiques. Donc c'est le tournant, c'est l'événement clé, et

 27   pour autant que je sache, il n'y a jamais eu modification de ces objectifs

 28   stratégiques, de ces six objectifs. Donc en tant qu'analyste, dans le cadre


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  1   de l'examen des recherches menant à ce travail, à la rédaction de ce

  2   rapport, je voulais savoir comment on a mis en œuvre ces objectifs. La

  3   conclusion à laquelle je suis arrivé, est que la mise en œuvre de ces

  4   objectifs stratégiques à commencer avant qu'ils ne soient annoncés

  5   publiquement, et cette conclusion se fonde sur l'analyse de ce que -- de

  6   l'analyse de ces opérations de prise de pouvoir dans les municipalités de

  7   Bosnie-Herzégovine septentrionale. C'était ça l'objectif de mon analyse

  8   donc et non pas de mener une enquête au pénal.

  9   Q.  Mais, alors, Monsieur Theunens, de quoi parlons-nous si votre expertise

 10   ne fait pas partie d'un procès au pénal, alors à quoi se ramène-t-elle ?

 11   Qu'est-ce ?

 12   R.  L'envergure de mon rapport est expliquée dans le chapitre qui est

 13   consacré précisément à cela, "Envergure." Donc mon objectif était

 14   d'analyser le rôle joué par M. Karadzic, en tant que commandant suprême de

 15   la Défense territoriale serbe et de la VRS, comme je l'ai qualifié;

 16   cependant, j'ai légèrement modifié l'utilisation du terme "commandant

 17   suprême." Il faudrait en fait dire : "L'instance de pouvoir politique la

 18   plus haute qui soit de la Défense territoriale serbe de Bosnie." J'ai

 19   analysé cela en me focalisant sur deux aspects, premièrement, sa capacité

 20   de jure et de facto donc de commander, et deuxièmement, le fait qu'il y ait

 21   eu connaissance de la situation, donc les informations qu'il avait, la

 22   compréhension qu'il avait de la situation, la capacité des intentions de la

 23   Défense territoriale serbe de Bosnie et de la VRS.

 24   Q.  Bien. Maintenant, il nous faudra examiner des cas, des exemples

 25   concrets. Est-ce que vous maintenez aujourd'hui que, le 31 mars et le 1er

 26   avril, il y a eu une prise de pouvoir à Bijeljina par quel cas, qui le 31

 27   mars n'était pas au pouvoir ?

 28   R.  Monsieur le Président, je n'ai affirmé cela ni aujourd'hui ni hier, ni


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  1   dans mon rapport. Ce que je dis, dans mon rapport, en revanche, c'est que

  2   sur la base de l'examen des documents que j'ai vus, à partir de la nuit du

  3   31 mars, note de bas de page 380, les opérations militaires ou les

  4   activités qui peuvent être appelées militaires dans la mesure où les forces

  5   armées y prennent part, et là, je parle des membres de la Défense

  6   territoriale serbe de Bosnie qui vient d'être créée, qui est une

  7   organisation nouvelle, la Garde nationale serbe et les volontaires serbes,

  8   la Garde des volontaires serbes et ce sont des volontaires/paramilitaires.

  9   Ils ont commencé à enlever les barricades, qui à en juger d'après ma source

 10   donc avaient été dressées par entre guillemets, "des extrémistes

 11   musulmans." Cela continue pendant les journées qui suivent. Le 4 avril,

 12   note de bas de page - excusez-moi, de me répéter, j'en ai parlé déjà hier,

 13   mais apparemment, je n'ai pas été entendu - donc, le 4 avril, le

 14   commandement du 17e Corps de la JNA fait rapport que la ville de Bijeljina

 15   est contrôlée par le SDS et les hommes d'Arkan, qui n'ont même pas permis à

 16   l'Unité blindée de prendre cette disposition dans la ville.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc ce que vous dites, c'est que vos

 18   constatations sur Bijeljina se limite à cela ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je réponds à la question posée par M. Karadzic

 20   qui porte sur la prise de pouvoir et sur la question de savoir si

 21   l'instance de pouvoir change.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais qu'entendez-vous par "prise de

 23   pouvoir" ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Cela veut dire que vous écartez, vous prenez

 25   physiquement contrôle, c'est-à-dire d'après ce que l'on voie dans ce

 26   document, la JNA normalement devrait être capable de circuler librement

 27   dans la municipalité, dans celle-ci comme dans toute autre. Maintenant,

 28   elle ne peut même pas entrer dans Bijeljina, comme le dit la JNA, elle-


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  1   même, parce que Bijeljina est entre les mains et sous le contrôle du SDS et

  2   des hommes d'Arkan. Donc ils sont physiquement présents sur le terrain, ils

  3   limitent la liberté de mouvement de la JNA, et d'autres, comme nous pouvons

  4   le voir dans d'autres documents. Qui plus est, "la prise de pouvoir"

  5   signifie également que les autres structures de pouvoir politique

  6   s'emparent du pouvoir des mains, l'arrache des mains des autorités élues

  7   et, maintenant, nous avons de nouvelles instances qui sont en charge, en

  8   place. C'est le cas d'autres municipalités, par exemple, ce n'est pas

  9   uniquement la municipalité de Zvornik, on crée la municipalité serbe de

 10   Zvornik. Donc, ce sont des concepts qui n'avaient pas existé précédemment

 11   avant que le SDS n'annonce ou n'invite à la création des cellules de Crise

 12   dans les différentes municipalités donc pendant le printemps 1992, et le

 13   summum de cela est ce que j'appelle les opérations de prise de pouvoir.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, c'est ainsi que vous répondez à la

 15   dernière question posée par l'accusé. Il vous demande s'il y a eu une prise

 16   de pouvoir à Bijeljina; est-ce que vous répondez par un oui ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic, continuez.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Alors, dites-nous maintenant : qui a reçu -- qui a le pouvoir à partir

 21   de ce moment-là ? Qui a perdu le pouvoir à partir de ce moment-là ?

 22   R.  Monsieur le Président, mais j'ai déjà répondu plusieurs fois à cette

 23   question, et je vais le faire de nouveau.

 24   Donc, les autorités élues de Bijeljina, qui normalement rendaient

 25   compte dans le cadre d'une voie hiérarchique administrative civile, au sein

 26   de ces structures politiques de la République de Bosnie-Herzégovine, elles

 27   se trouvent remplacées par des structures créées par les Serbes de Bosnie,

 28   donc j'ai parlé des cellules de Crise. En parallèle, ce qui se passe, c'est


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  1   qu'il y a une intervention des forces paramilitaires, c'est-à-dire de

  2   groupes organisés de manière militaire et qui appliquent des techniques et

  3   une tactique militaire qui n'est pas dans le système des autorités de la

  4   République de Bosnie-Herzégovine, et qui en fait n'existait pas dans le

  5   cadre du contexte juridique ou du concept de la Défense populaire

  6   généralisée. Juste pour terminer, je parle du cadre juridique de la Loi sur

  7   la Défense populaire généralisée et ses amendements, donc la Loi de 1982.

  8   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] J'ai la sensation que nous

  9   n'avançons pas du tout. Ce n'est pas une fois, c'est plusieurs fois que le

 10   témoin a déjà répondu de manière similaire.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, j'ai permis que cela se

 12   poursuite puisqu'il y avait quelques points qui n'étaient pas clairs sur la

 13   signification du terme, "prise de pouvoir."

 14   Veuillez continuer, Monsieur Karadzic.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Monsieur Theunens, est-ce qu'il est exact de dire que M. Jesuric

 17   était le chef du poste de sécurité publique à partir des élections de 1989,

 18   c'est-à-dire de 1991 ou 1990 jusqu'à bien, bien dans la guerre ?

 19   R.  Je ne suis pas en mesure de répondre à cette question, parce que

 20   je ne connais pas bien la carrière de M. Jesuric. Je sais qu'il a signé le

 21   document que je mentionne dans la note de bas de page 382.

 22   Q.  Etes-vous d'accord pour dire que c'est le SDS qui était au

 23   pouvoir à Bijeljina et que la police fait partie des autorités et que rien

 24   n'avait changé là-bas ? Le seul changement était de déclarer la création

 25   d'une présidence de Guerre une fois que la guerre a éclaté, et il s'agit en

 26   fait d'un organe qui ne s'appelle pas exactement comme ça dans la Loi de la

 27   Défense nationale, mais c'est un organe qui s'appelle une présidence. Rien

 28   n'a changé jusqu'à ce qu'il y ait une escalade de la guerre ? Acceptez-vous


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  1   qu'il y avait des problèmes là-bas et que des tentatives avaient été faites

  2   par des extrémistes musulmans pour créer ce désordre, mais qu'ils n'y sont

  3   pas arrivés ? Donc ce n'est que le seul changement, n'est-ce pas ?

  4   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je crois avoir

  5   répondu à la question. Je n'ai rien d'autre à rajouter.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Continuons, Monsieur

  7   Karadzic.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Je regarde maintenant la page qui elle s'affiche. Aujourd'hui, vous

 10   avez dit que la TO serbe avait pris le pouvoir à Brcko. La TO serbe donc

 11   qui était une organisation ou une formation nouvellement constituée; savez-

 12   vous quand la Défense territoriale serbe a été créée ?

 13   R.  J'avais mentionné Brcko ce matin comme exemple, mais je n'ai pas dit

 14   qui avait pris le contrôle et quand.

 15   Pour ce qui est de la constitution de la TO bosno-serbe, j'essaie de

 16   retrouver le document en question, mais nous voyons que, durant le

 17   printemps 1992, une décision a été prise. Il y a également différents

 18   appels qui ont été réalisés. J'ai parlé hier d'un appel de M. Karadzic

 19   durant la Séance de l'Assemblée, je crois, du 22 [comme interprété] mars,

 20   et il demande aux délégués de mettre sur pied des Unités de TO serbe

 21   locales. Il ne les appelle pas "serbes locale," mais le message est clair,

 22   l'objectif est de mettre sur pied des unités de la TO, et de s'assurer

 23   qu'elles sont subordonnées à celles de la JNA. Si je ne m'abuse -- oui,

 24   effectivement, c'est ça, c'est mentionné à la note en bas de page 109.

 25   Dans mon document, je mentionne également la création ou l'introduction de

 26   la Loi sur la défense de la République serbe de Bosnie-Herzégovine, et cela

 27   commence par la référence en bas de page numéro 121.

 28   Q.  Est-ce que la Défense territoriale serbe n'a pas été constituée le 15


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  1   ou le 16 avril par le général Subotic ?

  2   R.  En fait, le 15 avril, la présidence de la République serbe de Bosnie-

  3   Herzégovine, donc de la SRBiH, et ceci est à la note en bas de page 135

  4   dans la partie 2 de mon rapport, déclare un état imminent de guerre ainsi

  5   qu'une mobilisation complète de la SRBiH, donc cela parle de la TO de la

  6   SRBiH. Mais nous voyons dans les documents que j'ai utilisés que les unités

  7   qui ont été identifiées comme étant les unités de la TO bosno-serbe ou

  8   comme étant identifiées sous le nom de la TO font de toute façon référence

  9   à la TO bosno-serbe, et j'en conclus d'après ce contexte que ces unités ont

 10   participé aux opérations visant à prendre le contrôle ou asseoir le

 11   contrôle bosno-serbe dans un certain nombre de municipalités.

 12   Q.  Monsieur Theunens, savez-vous que M. Izetbegovic a déclaré une

 13   mobilisation générale de la Défense territoriale et des forces de réserve

 14   des forces de police le 4 avril 1992 ?

 15   R.  C'est possible. Je n'ai pas analysé cela dans mon rapport. Mais dans

 16   ces débats, il est important de faire un distinguo entre la Défense

 17   territoriale de la République de Bosnie-Herzégovine, qui était une des TO

 18   prévues dans le concept de la Défense populaire, c'est-à-dire les TO

 19   étaient organisées au niveau des républiques, et ensuite aux niveaux

 20   régional et municipal. Donc, il faut faire cette distinction entre ce type

 21   de TO et, par exemple, la TO de la SRBiH, qui est une structure qui n'était

 22   pas prévue en vertu de la doctrine de la Défense populaire. Les TO avaient

 23   une composition multiethnique, elles reflétaient la composition ethnique

 24   des différentes républiques, alors qu'ici on voit qu'il s'agit d'une

 25   structure qui a prédominance serbe.

 26   Q.  Monsieur Theunens, afin de bien comprendre ce qui s'est passé au niveau

 27   militaire en Bosnie-Herzégovine, le moment important c'est la déclaration

 28   d'une mobilisation générale par les présidences croate et musulmane, et


Page 16966

  1   ceci, contre la volonté du Pr Koljevic et de Mme Plavsic. Vous ne prenez

  2   pas ceci en compte.

  3   Deuxièmement, qui a démantelé la Défense territoriale ? Est-ce exact de

  4   dire que M. Izetbegovic a démis de ses fonctions le serbe général

  5   Vukosavljevic qui occupait le poste au sein de la Défense territoriale

  6   jusqu'au 8 avril ?

  7   R.  Monsieur le Président, Mesdames les Juges, je n'ai pas analysé le

  8   démantèlement de la Défense territoriale de la République de Bosnie-

  9   Herzégovine. Je voudrais simplement rappeler la référence qui est

 10   mentionnée à la note en bas de page numéro 109, et qui porte sur un appel

 11   fait par M. Karadzic durant la 14e Séance de l'Assemblée du peuple serbe,

 12   qui a eu lieu le 27 mars, c'est-à-dire avant le 8 avril, et il demande aux

 13   délégués de s'organiser pour se défendre et d'organiser les populations à

 14   se défendre, et également de mettre sur pied la Défense territoriale et de

 15   subordonner la JNA à la TO.

 16   L'analyse de l'état de préparation au combat, sans fournir des dates,

 17   montre également le rôle du SDS dans la constitution de ce qu'ils appellent

 18   des unités municipales, auto organisées, et d'autres unités régionales,

 19   auto organisées --

 20   Q.  Nous avons vu cela, Monsieur Theunens. Mais, s'il vous plaît, bornez-

 21   vous à répondre à mes questions.

 22   Est-ce que vous savez qu'Alija Izetbegovic, c'est-à-dire la partie

 23   croato-musulmane de la présidence, a démis de ses fonctions le général

 24   Vukosavljevic de son poste de commandant de la Défense territoriale de

 25   Bosnie-Herzégovine le 8 avril, et ceci a parce que, déséquilibré la

 26   composition ethnique en nommant à sa place un Musulman, Hasan Efendic ?

 27   Est-ce que vous êtes au courant de cela ?

 28   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je connais, de


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  1   manière générale, les événements du printemps 1992 en Bosnie-Herzégovine;

  2   cependant, je n'ai pas analysé plus précisément les modifications ou les

  3   décisions que M. Karadzic mentionne à présent.

  4   Maintenant, d'après mon rapport et d'après les documents que

  5   j'analyse dans mon rapport --

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que vous avez déjà

  7   répondu à la question.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] D'accord.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allez-y, Monsieur Karadzic.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Est-ce exact de savoir que vous saviez que Branko Grujic, le 5 avril,

 12   au niveau de la municipalité de Zvornik, avait déclaré une mobilisation

 13   générale, et que vous avez mentionné ceci dans votre rapport ?

 14   R.  C'est exact. Cela figure à la note en bas de page numéro 428.

 15   Pour donner une réponse complète, je souhaiterais rappeler que Branko

 16   Grujic était déjà commandant de la cellule de Crise dirigée par le SDS de

 17   la municipalité serbe dès la fin de l'année 1991, et ces notes en bas de

 18   page figurent toutes dans la deuxième partie du rapport, il va sans dire.

 19   Q.  Mais ce que j'aimerais savoir, c'est s'il est exact qu'il a déclaré la

 20   mobilisation générale dans la municipalité de Zvornik, le 5 avril, et ceci

 21   correspond au lendemain de l'appel à la mobilisation générale de M.

 22   Izetbegovic; oui ou non ? Ensuite, on peut tomber d'accord sur le fait, par

 23   conséquent, que le 5 d'un mois arrive après le 4 du même mois.

 24   R.  Il procède à un appel à la mobilisation de toutes les unités de la TO

 25   de la municipalité serbe de Zvornik le 5 avril, et effectivement, le 5 suit

 26   le 4 de n'importe quel mois.

 27   Q.  Merci. Est-ce exact de dire que le gouvernement de M. Izetbegovic, le 8

 28   avril, n'a pas uniquement démis de ses fonctions le général Vukosavljevic,


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  1   mais qu'il s'agissait d'un poste qui avait été prévu pour des Serbes dans

  2   les autorités conjointes et que Hasan Efendic a été nommé à ce poste et ils

  3   ont également déclaré un état de guerre imminent, n'est-ce pas ?

  4   R.  C'est possible, mais ceci ne rentre pas dans le cadre ou le périmètre

  5   de mon rapport et par conséquent, je n'ai pas analysé ceci dans mon

  6   rapport. Mais je ne vois pas non plus de lien causal entre les événements

  7   qui se sont déroulés le 4 qui ont été décrit par M. Karadzic, d'une part,

  8   et les événements qui ont eu lieu le 5, les jours d'après, mais également

  9   les jours d'avant d'autres part.

 10   Q.  Merci. Est-ce exact de dire que les Serbes ont procédé de la même

 11   manière une semaine plus tard, c'est-à-dire le 15 et le 16 avril en

 12   constituant une Défense territoriale serbe et en déclarant un état de

 13   guerre imminent ?

 14   R.  J'ai déjà répondu à cette question, Monsieur le Président, Madame,

 15   Monsieur les Juges. J'ai mentionné, effectivement, que le 15 avril, ils

 16   avaient déclaré un état de guerre imminent et ils avaient également créé un

 17   état-major pour la Défense territoriale ou - je vous prie de m'excuse - une

 18   mobilisation de la Défense territoriale des bosno-serbes. Mais d'après les

 19   documents que j'ai examinés, nous voyons que les unités, s'identifiant

 20   comme une unité bosno-serbe, avaient déjà été constitués avant le 15 avril.

 21   Q.  Dans les documents signés par le général Subotic ou par la présidence,

 22   je ne sais pas, dans ces documents, est-ce qu'il n'est pas mentionné qu'il

 23   s'agit de la Défense territoriale de la République serbe de Bosnie-

 24   Herzégovine et constitué par la présente ? Comment cette Défense

 25   territoriale aurait pu avoir déjà existé avant d'être dûment constituée ?

 26   Est-ce que l'on pourrait consulter ce document ? Vous l'avez mentionné; je

 27   crois que ce document a été versé au dossier.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous voir ce document qui mentionne


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  1   la constitution de la Défense territoriale de la République serbe de

  2   Bosnie-Herzégovine ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne remets pas en question le contenu du

  4   document ni la citation faite par M. Karadzic. Le paragraphe 1 - et ceci

  5   est lié à la note en bas de page 139 dans la partie 2 de mon rapport, dans

  6   le paragraphe 1 - on peut donc lire :

  7   "La Défense territoriale de la République serbe de Bosnie-Herzégovine

  8   sera constituée comme une force armée."

  9   Ensuite, il est mentionné SBIH. J'ai essayé d'expliquer que, d'après

 10   les documents que j'ai examinés et d'après mes analyses, les Bosno-serbes

 11   avaient pris le contrôle des municipalités en Bosnie du nord et nous voyons

 12   que avant le 15 avril, il est mentionné des Unités d'une TO. Quelquefois,

 13   il est mentionné "TO bosno-serbe;" quelquefois, l'adjectif "bosno-serbe"

 14   n'est pas mentionné.

 15   Q.  Mais, Monsieur Theunens, compte tenu de la loi sur la Défense

 16   populaire, savez-vous que chaque municipalité dispose de sa propre défense

 17   souveraine, de son propre état-major, de sa propre unité de TO, de son

 18   propre conseil de Défense nationale et son propre commandant qui est, de

 19   droit, le président de la municipalité et que ces unités de la Défense

 20   territoriale étaient conjointes, pas jusqu'au 8, mais jusqu'au 15, lorsque

 21   les Serbes ont déclaré leur propre Défense territoriale.

 22   R.  Je suis d'accord avec la première partie de la déclaration de ce

 23   qu'avance M. Karadzic, mais ce qui est important, je l'ai déjà mentionné.

 24   C'est que nous ne parlons pas uniquement de municipalités ou d'autorités

 25   municipales qui faisaient rapport aux autorités de la République de Bosnie-

 26   Herzégovine, mais nous parlons de municipalités serbes et il s'agit

 27   d'instances nouvellement constituée qui ont pris le contrôle dans un

 28   certain nombre de municipalités suite aux prises de contrôle en remplaçant


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  1   les autorités municipales qui avaient été élues légalement.

  2   Q.  Ceci s'est passé à Bijeljina, n'est-ce pas ?

  3   R.  Bijeljina est un des exemples, effectivement, et il est possible que,

  4   du côté serbe, les mêmes personnes soient restées au sein de ces nouvelles

  5   instances, mais ces instances, identifiées comme des autorités serbes, et

  6   puis, vous avez également des non-Serbes qui ne font plus partie de ces

  7   instances ou du moins, pas de la même mesure qu'ils l'étaient avant les

  8   prises de contrôle. Ces autorités ne rendent plus de comptes aux autorités

  9   de la République de Bosnie-Herzégovine, mais aux autorités de la République

 10   serbe de Bosnie-Herzégovine qui s'étaient auto constituées.

 11   Q.  Savez-vous comment, où et dans quel type de municipalités les nouvelles

 12   municipalités serbes ont été constituées ? Est-ce que cela signifiait que

 13   les Serbes prenaient le contrôle de la totalité de la municipalité en

 14   question ? Prenons, par exemple, Brcko, comme exemple. Les Serbes ont

 15   déclaré qu'il y avait une municipalité serbe de Brcko; est-ce que cela

 16   signifie qu'ils ont pris le contrôle de la totalité de la municipalité de

 17   Brcko en s'arrogeant l'autorité qui appartenait aux populations croates et

 18   musulmanes ?

 19   R.  Pour ce qui est de la situation précise à Brcko et au vu de la question

 20   de M. Karadzic, que l'on peut trouver, donc, mentionnée à la note en bas de

 21   page 564 dans la deuxième partie de mon rapport, on voit que, d'après le

 22   SJB de Bijeljina, il y a un rapport du 19 mai 1992, un rapport qui a été

 23   envoyé au ministère de l'Intérieur de la République serbe de Bosnie-

 24   Herzégovine, et je cite :

 25   "La TO serbe de Semberija et de Majevica, qui est un exemple d'une unité de

 26   TO bosno-serbe, a libéré et détient les trois quarts du territoire urbain

 27   de Brcko."

 28   Je continue :


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  1   "Les opérations de combat ont été menées dans un quartier de la ville

  2   appelé Klanac où les forces ennemies, ce qu'on appelle, donc, la TO de

  3   l'ABiH officielle, se concentre plus particulièrement."

  4   C'est ce que j'appelle, donc, une prise de contrôle. Mais le document

  5   lui-même utilise la terminologie d'une libération.

  6   Q.  Est-ce que c'est le document, qui mentionne cela officiellement, ou

  7   est-ce que c'est quelque chose que vous avez rajouté ?

  8   R.  Non, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges. J'ai donné

  9   lecture d'une citation que j'ai incluse dans mon rapport : note en bas de

 10   page 564, dans la deuxième partie du rapport, pages 181 et 182 de la

 11   version anglaise.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez le document de la

 13   liste 65 ter à ce sujet ?

 14   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui. Il s'agit du numéro 08200.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous voudriez consulter ce

 16   document, Monsieur Karadzic ?

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Il n'est pas mentionné "officiel," c'est un terme que vous avez

 20   rajouté. Vous avez, il est mentionné : "La Défense territoriale de

 21   l'ancienne Bosnie-Herzégovine," et pas de : "la Bosnie-Herzégovine

 22   officielle." Je vois ceci en langue anglaise, et  je vois que c'est

 23   également en serbe.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne me souviens pas avoir dit,

 25   "officiel," mais "official" en anglais.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais peut-être c'est une question --

 27   L'INTERPRÈTE : L'interprète se reprend.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne me souviens pas que le témoin ait


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  1   dit, "official" en anglais.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être c'est une question de traduction,

  3   mais je n'ai pas utilisé le terme, "official". J'ai utilisé le terme

  4   "former."

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Mais "Formal" et "official," ça n'a aucune différence ?

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce n'est pas "formal" qui avait été

  8   utilisé, mais "former," donc, pas "officiel" mais "ancien ou ex."

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] D'accord, "former" dans le sens de "ex, ancien"

 10   peut-être que j'ai entendu -- peut-être qu'ils ont entendu "formal," c'est-

 11   à-dire officiel et que ça a été traduit par "official."

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Je voudrais obtenir une précision. Monsieur Theunens, est-ce que vous

 14   savez qu'avant la déclaration de la guerre, les négociations avaient eu

 15   lieu en ce qui concerne la constitution de plus grandes municipalités qui

 16   seraient regroupées en deux ou trois municipalités déterminées en fonction

 17   des appartenances ethniques, tel que par exemple ce qui se passe à

 18   Bruxelles ou vous avez des municipalités plus petites qui sont divisées en

 19   fonction de l'appartenance linguistique ?

 20   R.  Je pense que ceci ne rentre pas dans le cadre de mon rapport. Je n'ai

 21   pas fait de comparaison sur la situation à Brcko et celle de Bruxelles. Je

 22   sais que la situation à Bruxelles est assez compliquée.

 23   Q.  C'est ce que j'avance dans ma thèse, Monsieur Theunens. Il y a un

 24   processus politique qui est en cours pour transformer la Bosnie-

 25   Herzégovine. Ce processus a vu le jour parce que nous avons abandonné

 26   l'idée de rester au sein d'une Yougoslavie unifiée, et que nous avons

 27   accepté l'idée d'une Bosnie-Herzégovine devenant indépendante à la

 28   condition qu'elle soit décentralisée; est-ce que vous étiez au courant de


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  1   cela ?

  2   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, il est fort possible

  3   que cela soit le cas mais, encore une fois, les documents - et, maintenant,

  4   je parle de Brcko - les documents, que j'ai incorporés dans ce rapport,

  5   visaient à analyser les événements qui se sont produits là-bas et à

  6   analyser la prise de contrôle et ne font pas référence à des processus

  7   politiques ou à des négociations de ce genre. Ils mettent l'accent sur les

  8   opérations militaires, sur les combats afin d'asseoir un contrôle bosno-

  9   serbe sur des grandes parties ou voir sur la totalité des municipalités,

 10   des grandes parties de municipalités ou des municipalités complètes, je

 11   répète.

 12   Q.  Maintenant, que nous parlons de Brcko, vous parlez de ceci dans votre

 13   page 104, petit (a), vous mentionnez qu'à l'instar d'autres villes, dans la

 14   Bosnie du nord-ouest, dans lesquelles les Bosno-serbes ont pris le pouvoir

 15   en avril et en mai 1992, la prise de contrôle à Brcko a été cruciale pour

 16   la mise en œuvre du premier objectif stratégique, en séparant le peuple

 17   serbe des deux autres communautés ethniques, et le deuxième objectif

 18   stratégique était d'établir un couloir ou un corridor. Ensuite, vous

 19   expliquez que la cellule de Crise de Brcko en avril 1992, basée sur une

 20   décision du SDS, a été constituée par les Serbes. Savez-vous que trois

 21   municipalités ont été constituées à Brcko, une municipalité serbe, reliée à

 22   la région serbe de Varos -- liée à la zone de la ville serbe appelée Varos

 23   ainsi que la partie musulmane, la municipalité croate de Brcko qui

 24   s'appelait Brcko Rahic. Donc vous aviez Brcko Ravne, Brcko Rahic et Brcko

 25   avec Varos qui était en son centre.

 26   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Ce n'est pas la page 104, c'est à la

 27   page 105.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela fait également partie du résumé.


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

  2   Juges, la synthèse ne se concentre que sur les éléments saillants de la

  3   conclusion, mais la discussion détaillée ou les point  détaillés concernant

  4   Brcko --

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est à la page 179.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Exactement, Monsieur le Président.

  7   Encore une fois, ce que M. Karadzic avance est tout à fait possible. Ce que

  8   je peux conclure, d'après les documents que j'ai consultés, et il y a un

  9   document supplémentaire mentionné en note de bas de page 162, qui est un

 10   document établi par la présidence de Guerre, c'est-à-dire une autre

 11   structure politique bosno-serbe. La présidence de Guerre de la municipalité

 12   de Brcko, qui stipule que les membres des forces serbes, le 2 mai 1992, ont

 13   réalisé une percée à travers les barricades érigées par les Bérets verts.

 14   Quand on parle de "Bérets verts," on parle des forces contrôlées par les

 15   Musulmans ou les Bosno-musulmans, et ont pris la plupart des structures

 16   importantes du centre de la ville. En attendant, dans le contexte dans ce

 17   rapport, il s'agit d'un élément vital et, encore une fois, je n'ai pas vu

 18   de document qui faisait référence aux négociations ni à la création de

 19   municipalités séparées après cette prise de contrôle ou après que les

 20   Bosno-serbes contrôlent la plus grande partie de la municipalité de Brcko

 21   et d'autres municipalités ou la totalité de la municipalité. Il est

 22   possible que ces négociations aient eu lieu avant ces opérations de prise

 23   de contrôle. Mais elles n'ont pas été affectées par la prise de contrôle

 24   réelle, ni par le fait que les Bosno-serbes avaient pris le contrôle de ces

 25   municipalités.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Mais ce n'est pas un fait établi, Monsieur Theunens, vous avez dit

 28   vous-même que les Bérets verts avaient érigé des barricades, qu'ils avaient


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  1   bloqué les Serbes à Brcko et à Varos. Est-ce que vous savez qu'il y avait

  2   une partie de Brcko qui s'appelait -- qui s'est toujours appelée le Varos

  3   serbe ?

  4   R.  Il est fort possible que ce soit le cas, mais cela ne change pas les

  5   conclusions que j'ai tirées suite aux documents que j'ai étudiés, à savoir

  6   que les forces serbes et leur nature ou leur composition qui sont

  7   mentionnées dans le rapport en détail ont pris le contrôle de la

  8   municipalité ou dans le cas de Brcko, d'après la note de bas de page, ont

  9   pris le contrôle de trois quarts de la municipalité.

 10   Q.  Monsieur Theunens, voilà ce que je vais vous dire, comme à Bijeljina,

 11   le conflit a commencé du côté des Musulmans. Les Bérets verts ont érigé des

 12   barricades dans la partie serbe de Varos, et les Serbes ainsi que les

 13   instances du gouvernement local régulier ont essayé d'empêcher cela. Ils

 14   ont coopéré avec leurs collègues musulmans dans un gouvernement conjoint.

 15   Etant donné qu'ils ont également attaqué la JNA, les Bérets verts ont

 16   perdu, et à partir de ce moment-là, les Serbes ont contrôlé la partie serbe

 17   de la municipalité de Brcko, les Croates ont contrôlé la partie croate de

 18   la municipalité de Brcko, et les Musulmans ont contrôlé la partie

 19   musulmane. Il y a un village qui s'appelle Brezovo Polje, qui est un

 20   village important musulman, et rien ne s'y est passé. Mais cela faisait

 21   partie de la partie serbe, alors que dans la partie musulmane il y avait un

 22   village serbe qui s'appelait Bukvik et qui a été complètement détruit et

 23   qui a été complètement réduit à néant et la population a été tuée. Saviez-

 24   vous, Monsieur Theunens, que les Serbes ne contrôlaient que la partie serbe

 25   de la municipalité de Brcko et qu'ils n'avaient fait aucun mal aux

 26   Musulmans qui vivaient dans ce grand village musulman appelé Brezovo Polje

 27   qui se trouvait dans la partie serbe de Brcko ?

 28   R.  Dans ma note de bas de page 562 [comme interprété], il est fait


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  1   référence à un document de Bijeljina du SJB de Bijeljina, et il y est dit

  2   que la Défense territoriale serbe contrôle les trois-quarts du territoire

  3   de la ville de Brcko.

  4   Alors, maintenant, s'agissant les crimes, dans ma note de bas de page 577,

  5   je cite un document de la présidence de Guerre de la municipalité de Brcko

  6   discutant en détail des différents crimes commis, et il y a aussi des

  7   documents postérieurs qui évoquent la présence d'unités paramilitaires

  8   armées, "Unités chetniks," et cetera, qui prennent part à ces événements.

  9   Nous voyons qu'il est fait référence à Arkan. Note de bas de page 580, et

 10   je cite :

 11   "…où il aurait pris part à des meurtres commis sans qu'il y ait eu de

 12   raison valable."

 13   Donc c'est ce qui se serait produit, ce qui aurait été fait par les

 14   Musulmans ou les Bosniens sort du cadre de mon rapport.

 15   Q.  Mais est-ce que cela a une influence sur le comportement serbe, est-ce

 16   que cela nous permet de le comprendre ?

 17   R.  Ecoutez, au moins d'un point de vue militaire, les crimes qui ont été

 18   commis ou qui auraient été commis par la partie adverse ne devraient pas

 19   servir de prétexte pour autoriser vos propres forces à commettre des

 20   crimes.

 21   Q.  Mais je ne parle pas de crimes, Monsieur Theunens. Vous voyez vous-

 22   même, vous citez des rapports des instances officielles serbes de Brcko qui

 23   s'opposent à ces crimes, qui prennent des mesures contre les crimes. Donc

 24   je ne parle pas de crimes en tant que réaction, en tant que riposte. Je

 25   parle de la Défense, je parle de la prise de contrôle sur son propre partie

 26   du territoire et ses propres localités. Est-ce que cela est légitime, si la

 27   partie musulmane commet des crimes ? Est-ce qu'il est légitime que la

 28   partie serbe protège sa partie de la ville et sa partie de la municipalité


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  1   ?

  2   R.  Votre question comporte plusieurs éléments, donc la question qui

  3   concerne les rapports faits par la police serbe de Bosnie sur ces crimes,

  4   la présidence de Guerre également. Il n'est pas toujours clair dans ces

  5   documents de savoir s'il y a des mesures qui sont effectivement toujours

  6   prises contre ces auteurs. Dans certains documents, il est fait mention

  7   d'Arkan, il est fait mention également des volontaires du SRS. Je n'ai pas

  8   vu quelles sont les mesures qui auraient été prises contre ces gens, je

  9   n'ai pas vu ça dans les documents.

 10   Pour ce qui est de la deuxième partie de votre question, dans les documents

 11   que j'ai examinés, il n'est pas dit que cette prise de contrôle ou la mise

 12   sur pied de ce contrôle serbe sur les municipalités ne constitue qu'un

 13   geste purement défensif. Lorsque vous regardez quel est le mode opératoire

 14   de ces prises de pouvoir dans les municipalités, quelles sont les forces

 15   qui participent, eh bien la conclusion à laquelle je suis arrivé est que

 16   cette prise de pouvoir constitue une partie de la mise en œuvre au moins de

 17   certains des six objectifs stratégiques.

 18   Q.  Mais, Monsieur Theunens, citez-nous, ne serait-ce, qu'un exemple de ce

 19   que vous appelez la prise de pouvoir dans les municipalités qui se serait

 20   produite sans que précédemment les forces irrégulières musulmanes n'aient

 21   mené une attaque; des barricades, prises des terrasses des maisons, des

 22   coups de feu, des tireurs isolés ? Donc donnez-nous un exemple d'une

 23   municipalité où les Serbes ont pris le pouvoir dans leur partie de la ville

 24   sur leur population sans qu'avant il y ait eu une attaque lancée par les

 25   irréguliers musulmans.

 26   A Bijeljina, est-ce que ce n'est pas, en premier lieu, que la partie

 27   musulmane jette une grenade à main, érige des barricades, installe des nids

 28   de snipers sur des bâtiments les plus élevés, le château d'eau, la mosquée,


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  1   l'église, et cetera, et cetera, donc est-ce que ce n'est pas la même chose

  2   qui se produit à Brcko ? Premièrement, ce qui se passe, ce sont les

  3   barricades. On opère un blocus de la partie serbe, ils tirent des coups de

  4   feu, et à partir du moment où ils perdent, ils disent : "Ce sont les Serbes

  5   qui nous attaquent."

  6   R.  Monsieur le Président, M. Karadzic ne représente pas de manière exacte

  7   les documents dont j'ai tenu compte dans mon rapport. Ces documents

  8   proviennent de la JNA, de la police serbe de Bosnie, de la présidence de

  9   Guerre, des cellules de Crise, et parfois il y est fait mention de

 10   barricades qui auraient été dressées par des extrémistes musulmans, mais

 11   rien ne permet de penser que ce mode opératoire qu'essaye de nous

 12   représenter M. Karadzic est quelque chose qui se soit produit dans la

 13   pratique. Dans les différentes municipalités, ces documents ne parlent pas

 14   d'action défensive dans le cadre de ces prises de pouvoir. C'est juste à

 15   l'opposé, et la prise de pouvoir va au-delà de la protection des parties

 16   que M. Karadzic représente comme étant des parties serbes de ces

 17   municipalités.

 18   Si je puis juste compléter ma réponse.

 19   Prenons Bosanski Samac, note de bas de page 504, nous avons un rapport de

 20   la 2e Région militaire de la JNA, rapport qui fait état de la capture de

 21   toutes les installations d'importance de Bosanski Samac, et cela est décrit

 22   comme un mouvement par anticipation. La prise de pouvoir -- ou plutôt,

 23   excusez-moi, la capture de ces installations de première importance est

 24   menée à bien par le Groupe tactique numéro 17 et les Unités de la Défense

 25   territoriale serbe et la police.

 26   Q.  Mais, Monsieur Theunens, je ne peux pas maintenant m'intéresser à

 27   Samac, parce qu'il ne fait plus partie de l'acte d'accusation contre moi.

 28   Mais 8 % de Musulmans de Samac constituent leur Défense territoriale


Page 16979

  1   séparée. Ils ont une Unité de Bérets verts, la Ligue patriotique, ils

  2   attaquent la JNA, et la Republika Srpska n'a rien à voir avec Samac. Ce

  3   sont eux qui attaquent la JNA, la JNA l'a emporté et les a capturés.

  4   C'étaient les 8 % de Musulmans de Samac qui voulaient s'emparer de la

  5   ville.

  6   Alors, je ne vous demande pas si vous avez trouvé ce document ou pas. Mais

  7   dans les documents que vous avez vus, est-ce qu'on y lit clairement qu'un

  8   premier pas a été d'ériger des barricades musulmanes, que ce soit à Brcko

  9   ou à Bijeljina, et que le deuxième mouvement était d'enlever ces barricades

 10   et de prendre le contrôle par les autorités légales ? Donc dites-moi :

 11   seulement oui ou non, est-ce que c'était bien le premier pas donc dans ces

 12   municipalités, le fait que l'on dresse des barricades ?

 13   R.  A Brcko et à Bijeljina, en effet, les documents font mention de

 14   barricades dressées par ce qui est appelé dans les documents des Bérets

 15   verts ou extrémistes musulmans; toutefois, ces documents ne disent pas que,

 16   par conséquent, ce qui se passe c'est que la mise sur pied d'un contrôle

 17   entre les mains des autorités légales, existantes, non. Ce qui est dit,

 18   dans ces documents, c'est que ce sont des structures bosno-serbes

 19   autoproclamées, qui prennent le pouvoir.

 20   Q.  Mais apportez-nous une preuve de cela. La veille et le lendemain à

 21   Bijeljina et à Brcko, qui est l'instance de pouvoir, quelle est la

 22   structure qui prend la suite ? Mais à Brcko, ce sont les Bérets verts qui

 23   imposent la terreur, et les autorités locales s'effondrent. Chaque autorité

 24   se retire dans sa partie de la municipalité, et précisément il était

 25   convenu de constituer trois municipalités. A Bijeljina, vous avez des

 26   patrouilles mixtes, le pouvoir conjoint, il n'y a aucune prise de pouvoir.

 27   Mais continuons, citez-nous un exemple d'une autre municipalité, où est-ce

 28   que la partie serbe aurait fait quoi que ce soit avant que les Musulmans


Page 16980

  1   n'attaquent. Visegrad, par exemple, même si Visegrad n'est plus dans mon

  2   acte d'accusation ? Donc est-ce que ce sont les Serbes qui commencent, ou

  3   est-ce que ce sont les Musulmans qui terrorisent les Serbes pendant toute

  4   une année, de temps à autre, tuent, violent, terrorisent, imposent cet état

  5   de terreur, donc Visegrad ?

  6   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin a

  7   déjà répondu à cette question. Cette même question a été posée, il y a

  8   quelques minutes. 

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il a répondu au sujet de Bijeljina. Mais

 10   maintenant nous avons une nouvelle question qui concerne Visegrad.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Visegrad ne fait pas l'objet de mon rapport,

 12   je ne pourrais pas répondre à cette question donc.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Merci. Alors citez-nous une autre municipalité; est-ce que vous pouvez

 16   nous citer ne serait-ce qu'une autre municipalité, où les Serbes auraient

 17   attaqué avant d'être attaqués par les paramilitaires musulmans ?

 18   R.  Monsieur le Président, comme on le voit dans mon rapport, je n'avais

 19   pas à établir qui a commencé le conflit, et où.

 20   Q.  Bon. Alors est-ce que la finalité de votre rapport a été de priver les

 21   Serbes de leur capacité de se défendre, parce que de la manière dont vous

 22   qualifiez les mouvements de la partie serbe, c'est la prise de pouvoir de

 23   manière violente et illégale.

 24   R.  Monsieur le Président, j'ai déjà expliqué comment je comprends la

 25   notion de prise de pouvoir. Donc, ce que j'entends lorsque j'emploie ce

 26   terme, je n'ai pas parlé de recours à la force ou à la violence, ni

 27   d'illégalité, donc ce ne sont pas les termes que j'ai utilisés. A moins que

 28   ce terme ait figuré dans des documents dont je me suis servi pour étayer


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  1   mon -- dans le cadre de mon analyse et pour étayer mes conclusions.

  2   Q.  Donc vous vous contentez d'analyser un certain nombre de documents mais

  3   vous ne donnez pas toute l'image, tous les éléments relatifs aux événements

  4   qui se sont produits.

  5   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, j'ai tenu compte

  6   d'un certain nombre de documents dans mon rapport, et ces documents

  7   révèlent le mode opératoire dont j'ai parlé. J'ai déjà expliqué quelle a

  8   été la finalité de mon étude. J'ai expliqué l'envergure, le cadre de mon

  9   rapport, donc je cherchais de savoir s'il y avait des liens entre ces

 10   prises de pouvoir et les autorités de l'entité des Serbes de Bosnie ou de

 11   la République serbe de Bosnie-Herzégovine à l'époque, et également j'ai

 12   voulu savoir comme je l'ai déjà dit, comment et à quel moment on a mis en

 13   œuvre les six objectifs stratégiques.

 14   Q.  Est-ce que cela signifie que dans sa totalité, votre rapport porte sur

 15   les objectifs stratégiques et non pas sur la détermination de ce qui s'est

 16   produit sur le terrain ?

 17   R.  Monsieur le Président, mon rapport va au-delà de l'identification des

 18   objectifs stratégiques même s'ils sont très importants. J'étudie d'autres

 19   aspects comme cela a déjà été expliqué, d'autres aspects qui rentrent dans

 20   le cadre de mon rapport.

 21   Q.  Bon, très bien. Alors je vais vous demander la chose suivante : Qui a

 22   pris le pouvoir et de quelle manière dans la ville de Bosanski Brod ?

 23   R.  Bosanski Brod sort du cadre de mon rapport. Mais d'après ce que j'ai

 24   compris, dans le cadre de mes activités qui ne se sont pas déroulées au TPY

 25   -- au bureau du Procureur, les Croates et les Musulmans de Bosnie ont pris

 26   le pouvoir à Bosanski Brod, au printemps 1992; toutefois, en septembre

 27   1992, octobre 1992, c'est la VRS qui a pris le contrôle de Bosanski Brod.

 28   Q.  Est-il exact de dire qu'à Bosanski Brod, les schémas, qui ont été


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  1   tentés à Brcko, ont réussi, donc ils ont pris le pouvoir, et ils ont chassé

  2   les Serbes de Bosanski Brod; est-ce que c'est bien cela qui s'est passé ?

  3   L'INTERPRÈTE : L'interprète complète : les schémas de Brcko et de

  4   Bijeljina.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, comme je viens de le

  6   dire, les événements qui se sont produits à Bosanski Brod, au printemps de

  7   l'année 1992, sortent du cadre de mon rapport. Je ne peux donc pas répondre

  8   à cette question.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Mais est-ce que vous parlez de Modrica, quelque part ? Est-ce qu'il est

 11   exact de dire que le scénario de Brcko et de Bijeljina s'est mal terminé

 12   pour les Serbes à Modrica, donc même si les Serbes étaient majoritaires

 13   dans cette municipalité, ils ont été chassés de cette ville et ce sont les

 14   Bérets verts et la Ligue patriotique qui se sont emparés de la municipalité

 15   de Modrica, qui se situe dans la zone du corridor.

 16   R.  Il me semble que je mentionne Modrica dans mon rapport quelque part,

 17   j'essaie de retrouver cela.

 18   Q.   Dans un premier temps, qui avait pris le contrôle à Modrica et qui a

 19   chassé qui ?

 20   R.  Les documents que j'ai examinés ne mentionnent -- il s'agit de la note

 21   de bas de page 539, donc c'est un rapport du commandant du 17e Corps de la

 22   JNA, qui parle des événements après que la partie serbe n'ait pris le

 23   contrôle de la ville de Modrica. Jankovic parle en fait de l'arrivée des

 24   volontaires originaires de Serbie, de Vranjak, Koprina, donc cela fait

 25   partie du territoire de la municipalité de Modrica. Il s'agit de mars,

 26   avril 1992. Pages 174 et 75 dans la version anglaise du texte.

 27   Q.  Mais, dans un premier temps, qui est parvenu à prendre le contrôle de

 28   Modrica, et qui a chassé l'autre partie, ce sont les Serbes ou les


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  1   Musulmans ?

  2   R.  Monsieur le Président, les documents dont j'ai tenu compte dans mon

  3   rapport ne nous renseignent pas là-dessus.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais que dit le paragraphe suivant, il

  5   parle de 100 femmes et enfants brutalement tués.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait, mais --

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je n'ai pas vu le rapport, mais est-ce

  8   que cela dit que ce groupe les a tués ou bien qu'ils ont été tués avant

  9   leur arrivée ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] De la manière dont je comprends le rapport de

 11   Jankovic, il fait un lien entre les meurtres et l'arrivée ou la présence de

 12   ces volontaires de Serbie.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 14   Monsieur Karadzic.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Mais qui sont les victimes, Monsieur Theunens ?

 17   R.  Là encore, à en juger d'après le compte rendu du général Jankovic -- à

 18   en juger d'après le paragraphe précédent, ce sont des individus non serbes.

 19   Q.  Mais Jankovic il se trouve où, à ce moment-là, à Tuzla ?

 20   R.  Je ne sais pas où se trouve le général Jankovic à ce moment-là, mais il

 21   est exact de dire qu'il est le commandant du 17e Corps de la JNA, et à ce

 22   moment-là, le 17e Corps a été du moins officiellement retiré de Bosnie-

 23   Herzégovine.

 24   Q.  Qui prend le contrôle à Odzak, et qui en chasse l'autre partie ? Odzak

 25   c'est dans le voisinage de Bosanski Brod et Samac.

 26   R.  Je ne vois pas qu'on ait fait mention à Odzak dans les documents que

 27   j'ai cités, donc je ne pourrais pas vous répondre à cette question.

 28   Q.  Bien. Avançons de l'ouest vers l'est, sur la rivière Sava, est-ce que


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  1   l'on trouve une localité qui s'appelle Bosanska Dubica; est-ce qu'il y a

  2   une prise de pouvoir dans cette localité ? Si oui, par qui ?

  3   R.  Monsieur le Président, je ne me souviens pas, en fait, je ne pense pas

  4   que j'ai parlé de Bosanska Dubica dans mon rapport. Donc je ne suis pas en

  5   mesure de répondre à cette question. Effectivement, j'ai des souvenirs mais

  6   insuffisamment précis des événements qui se sont déroulés là-bas, mais cela

  7   se situe dans le cadre de mes activités qui ne sont pas liées au bureau du

  8   Procureur, de ce Tribunal, donc je ne pense pas que c'est suffisamment

  9   précis pour que je puisse répondre à la question de M. Karadzic.

 10   Q.  La municipalité de Srbac également sur la Sava, et il y a plusieurs

 11   villages serbes là, que s'est-il passé là ? La municipalité s'appelle

 12   "Srbac" d'après les Serbes donc et même si les Serbes constituent la

 13   majorité, est-ce qu'il n'y a pas eu des événements qui se sont produits là-

 14   bas, des incidents ?

 15   R.  La même réponse, Monsieur le Président, je n'ai pas examiné les

 16   événements de la municipalité de Srbac.

 17   Q.  Bosanska Gradiska, est-ce qu'il y a eu une prise de pouvoir là-bas,

 18   c'est également une localité sur la Sava ?

 19   R.  La même réponse, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges,

 20   vous avez dit que nous allions avancer de l'ouest vers l'est, mais il me

 21   semble que c'est dans le sens opposé que l'on avance.

 22   Q.  Non, non, Gradiska, puis Srbac, quand on avance vers l'est, Srbac c'est

 23   à l'est. Mais un petit peu vers le sud, par rapport à Srbac, à Prnjavor,

 24   est-ce qu'il y a eu une prise de pouvoir là-bas ?

 25   R.  Les événements de Prnjavor n'ont pas fait l'objet de mon examen

 26   détaillé, donc je n'ai pas particulièrement examiné cette municipalité-là

 27   dans le cadre des prises de pouvoir. Donc là encore, je ne peux pas

 28   répondre à votre question. Bien entendu, je reconnais les noms des lieux


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  1   que vous évoquez parce que j'ai travaillé sur beaucoup de questions

  2   relatives à la Bosnie-Herzégovine, à différents moments du conflit pendant

  3   que je n'étais pas membre du bureau du Procureur. Mais je n'ai pas

  4   travaillé sur cela dans le cadre de mon rapport, et je n'ai pas de souvenir

  5   précis des événements qui se sont produits dans ces municipalités-là.

  6   Q.  Mais, Monsieur Theunens, vous déployez des efforts pour démontrer quel

  7   a été le mode opératoire de la partie serbe, mais ce mode opératoire, il

  8   faudrait qu'il soit dominant dans la majorité des municipalités. Mais nous

  9   avons la preuve que cela n'a pas été le cas, et que les événements

 10   attribués aux Serbes, comme faisant partie de leur comportement

 11   systématique, sont des événements qui, à Bijeljina, à Brcko, ça a été

 12   l'échec dans la partie serbe, à Odzak, avec succès, chasser les Serbes,

 13   Modrica, les Serbes chassés, succès, mais les Serbes sont revenus. Brod,

 14   succès, les Serbes chassés. Doboj, division de la municipalité en deux

 15   parties. Donc ces événements sont dus à l'autre partie et non pas aux

 16   Serbes; est-ce que vous avez un autre exemple ?

 17   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] L'accusé fait toute sorte

 18   d'affirmation, le témoin a déjà précisé que cela sorte du cadre de son

 19   rapport.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous oubliez le

 21   conseil précieux qui vous a été donné par le Juge Baird. Comment pourrait-

 22   il répondre à cette question ? Je suis d'accord avec Mme Uertz-Retzlaff.

 23   Reformulez ou changez de sujet, reformulez.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Voilà ma question : Vous affirmez qu'il y a un mode opératoire qui

 26   correspond au comportement de la partie serbe. Moi, ce que je vous dis,

 27   c'est que vous n'avez pas pu l'établir, soit vous n'avez pas vu tous les

 28   document, soit vous avez mal tiré les conclusions. La thèse de la Défense


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  1   est la suivante, il n'y a pas de mode opératoire du côté serbe, il y a des

  2   tentatives musulmanes de s'emparer des municipalités, il y a une réponse à

  3   cela, une réaction serbe. Alors que pouvez-vous nous dire à cela ?

  4   R.  Monsieur le Président, j'ai conclu sur la base de l'examen des

  5   différentes municipalités, et je dois dire que ce n'est pas seulement une

  6   question de nombre mais en substance, comme j'ai essayé de le dire dans mon

  7   rapport, c'est une question de l'emplacement, de la taille, de la nature de

  8   la municipalité. Donc j'ai essayé d'établir un lien avec les objectifs

  9   stratégiques. Donc certains modes opératoires peuvent être identifiés sur

 10   la base de l'examen des municipalités que j'ai prises en compte sur le mode

 11   de prise de pouvoir, qui a pris part, quel type d'événement s'est produit,

 12   y compris les crimes qui ont été commis pendant ou après la prise de

 13   pouvoir.

 14   Q.  Mais pourquoi vous vous êtes contenté d'examiner juste quelques

 15   municipalités, juste la minorité et non pas la majorité des municipalités ?

 16   Comment peut-on conclure à un mode opératoire généralisé, à une

 17   systématicité, si vous ne prenez pas en compte la majorité ? Comment est-ce

 18   qu'une exception devient la règle, ne la confirme pas, devient la règle,

 19   devient l'action ?

 20   R.  Monsieur le Président, j'ai déjà répondu à toutes les questions par

 21   rapport aux municipalités que j'ai examinées. Donc compte tenu des

 22   municipalités que j'ai examinées, qui figurent dans mon rapport, j'ai

 23   identifié certains modes opératoires, certains schémas et j'ai expliqué

 24   lesquels ils sont.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Votre réponse à la première partie de la

 26   question, donc par rapport à la thèse de la Défense, vous répondrez par la

 27   négative, s'agissant des municipalités que vous avez pris en compte, c'est-

 28   à-dire est-ce qu'il y a eu, dans un premier temps, une attaque musulmane


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  1   dans ces municipalités, une tentative de s'emparer du pouvoir dans ces

  2   municipalités et puis une réponse serbe dans un deuxième temps ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans Bijeljina, Brcko, les documents

  4   effectivement font état des barricades dressées --

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, ma question est de savoir si vous

  6   répondez par non, ou si vous dites que vous ne savez pas.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas répondre à cette question,

  8   parce que je n'ai pas examiné de manière détaillée ce qu'a fait la partie

  9   adverse.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 11   Monsieur Karadzic.

 12    L'ACCUSÉ : [interprétation] Le moment de la pause est-il venu ?

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous ferons une pause dans cinq minutes.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, d'accord. Bien.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Vous mentionnez mes discours. Par exemple, vous mentionnez mon discours

 17   de mars que j'ai donné le 24 mars ou le 27 mars. C'est à ce moment-là que

 18   les Séances de l'Assemblée de la République serbe de Bosnie-Herzégovine ont

 19   eu lieu. Connaissez-vous le contexte de mon discours concernant les mesures

 20   à prendre sur le terrain et concernant ce qu'il fallait faire qui était

 21   vraiment nécessaire ? On avait décidé que la Bosnie disposerait de trois

 22   républiques constitutives basées sur les trois communautés ethniques. Il y

 23   a un chapitre intitulé : "Les principaux événements politiques." Est-ce que

 24   vous êtes au courant de cela ? Tout ceci, donc, qui s'est passé à partir du

 25   13 février, tout du moins de manière officieuse ?

 26   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je n'ai pas eu vent

 27   d'un document abordant ce qui semblait être une décision, mais d'après la

 28   question, je n'ai pas bien compris s'il s'agissait d'une décision


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  1   officielle ou officieuse concernant la séparation de la Bosnie-Herzégovine

  2   en trois républiques constitutives avez trois communautés ethniques. Si M.

  3   Karadzic dispose d'un document, je peux le consulter durant la pause et je

  4   pourrais peut-être l'aider après celle-ci.

  5   Q.  Savez-vous que j'ai fait ces déclarations ? Cela figure dans des

  6   articles de presse. Je n'ai pas parlé de division, mais de transformation.

  7   Nous avons mis sur pied cette transformation en faisant une offre à la

  8   communauté européenne, et le 18 mars, nous avons accepté les principes

  9   constitutionnels de cette Bosnie-Herzégovine future. C'était l'événement

 10   politique le plus important en Bosnie-Herzégovine que nous avons célébré

 11   comme la bouée de sauvetage de la Bosnie-Herzégovine. Cela s'est passé le

 12   18 mars. Lord Carrington et l'ambassadeur Cutileiro, après plusieurs mois

 13   de travail, étaient arrivés à cela. Donc, les choses -- certaines choses ne

 14   seraient pas modifiées. La seule chose qui allait rester en suspens était

 15   la définition des frontières, et puis, il y avait la question de l'armée et

 16   le référendum. Donc, il y avait trois éléments, trois questions en suspens.

 17   Etes-vous au courant de cet événement principal et de tous les discours que

 18   j'ai prononcés qui devraient être replacés dans ce contexte au vu de ce qui

 19   s'est passé du 15 février au 1er avril ?

 20   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, d'après mes

 21   activités hors du bureau du Procureur, j'ai eu vent des efforts de Lord

 22   Carrington et de l'ambassadeur Cutileiro et du plan Cutileiro, qui parlait

 23   d'une division de la Bosnie-Herzégovine à la Suisse. Mais, encore une fois,

 24   d'après les documents que j'ai examinés dans mon rapport, l'importance que

 25   donne M. Karadzic à ce plan et à ces événements ne se reflète pas dans les

 26   documents que j'ai examinés. Au contraire, nous voyons - et j'ai analysé ce

 27   qui s'est passé du côté des Bosno-serbes - que des efforts avaient été

 28   faits avant et durant la période mentionnée par M. Karadzic, pour


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  1   constituer des structures militaires, pour créer leur propre TO bosno-

  2   serbe, pour les armer, pour coopérer avec la JNA afin de mettre en œuvre

  3   certains objectifs.

  4   Q.  Monsieur Theunens, je ne comprends vraiment pas. Je ne peux pas gérer

  5   les limites que vous mentionnez ici. Vous parlez des documents que vous

  6   avez pu consulter et vous parlez de la totalité de contexte. Qui a

  7   sélectionné ces documents ?

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous avons, bien entendu, votre réponse.

  9   Nous allons faire la pause et nous allons faire une pause, donc, de 25

 10   minutes. Nous reprendrons à 11 heures.

 11   --- L'audience est suspendue à 10 heures 35.

 12   --- L'audience est reprise à 11 heures 10.

 13    M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Robinson.

 14   M. ROBINSON : [interprétation] Oui. Désolé de vous interrompre.

 15   Nous avons rencontré un problème, parce que la sécurité a interprété une

 16   décision précédente et notre chargé de l'affaire n'a pas le droit d'avoir

 17   des contacts avec le Dr Karadzic dans la cellule en attente, et je fais

 18   référence à une décision du 20 août 2010 où vous avez mentionné qu'à tout

 19   moment, seules deux personnes en plus du Dr Karadzic peuvent rester dans

 20   cette cellule d'attente pendant que l'expert est présent. Donc, il est

 21   mentionné que des questions supplémentaires et de précision pourraient être

 22   prises en compte en s'adressant au greffier par le biais de l'officier.

 23   Depuis cette décision, tous les jours nous avons eu un expert qui était

 24   présent, mais aujourd'hui les gardes de sécurité, compte tenu de la

 25   décision que vous avez prise le 20 août 2010, ont empêché cela. Donc, le Dr

 26   Karadzic a du mal à préparer la séance suivante lorsque vous n'avez pas la

 27   personne responsable des documents en présence avec lui, par conséquent,

 28   nous aimerions vous demander de modifier votre ordonnance de façon à ce


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  1   qu'une personne d'autre soit présente dans cette cellule où le Dr Karadzic

  2   est détenu entre les volets d'audience, ou alors on pourrait proposer

  3   également que le Dr Karadzic ne soit pas amené dans cette cellule durant

  4   les pauses pour qu'il puisse travailler dans le prétoire où nous sommes

  5   tous présents.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous nous pencherons sur cette question

  7   et nous reviendrons vers vous.

  8   Monsieur Karadzic, c'est à vous, vous pouvez continuer votre contre-

  9   interrogatoire.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Changeons de sujet, nous reviendrons à des événements que nous avons

 13   observés un peu plus tard.

 14   A la page 157, je crois -- nous avons fait fusionner plusieurs documents,

 15   donc je vois qu'il y a un problème au niveau de la pagination et des notes

 16   en bas de page. Il est mentionné : "La participation des volontaires de la

 17   BiH et le conflit en Croatie," c'est le chapitre en question, c'est le

 18   petit (e), et il est mentionné :

 19   "Le 22 septembre 1991, ou avant cette date, le président du SDS, le Dr

 20   Radovan Karadzic, a donné un ordre à tous les secrétaires de Défense

 21   nationale dans les municipalités autonomes serbes."

 22   Est-ce que vous vous souvenez de ce paragraphe, Monsieur le Témoin ?

 23   R.  Je me souviens du document, mais cela m'aiderait qu'on me donne le

 24   numéro de note de bas de page.

 25   Q.  Le numéro de note en bas de page est le 503, à moins que ceci ait été

 26   également modifié.

 27   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je viens de trouver

 28   le document.


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  1   Q.  Donc vous avez accepté ce document et vous avez pris position après

  2   avoir consulté ce document, et vous l'avez inclus dans votre rapport, et

  3   vous considérez qu'il s'agit d'un document important, n'est-ce pas ?

  4   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, j'ai choisi certains

  5   documents que j'allais inclure dans mon rapport sans pour autant essayer

  6   d'en tirer des conclusions, mais simplement pour mentionner le contenu.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais nous en sommes où ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Première partie, notes en bas de pages 502,

  9   503. Dans la version anglaise, c'est à la page 159 -- enfin, du moins c'est

 10   la pagination de la version dont je dispose.

 11   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait afficher le document

 13   00957 sur le système de prétoire électronique, s'il vous plaît, numéro ERN

 14   795 ? C'est le numéro le plus lisible. C'est la version la plus lisible.

 15   Donc numéro ERN 795. En fait, pour la version serbe, si vous avez le numéro

 16   95, ce serait encore mieux. Voilà, ça s'affiche sur mes écrans.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Est-ce que vous avancez qu'il s'agit d'un document authentique ? Est-ce

 19   que vous l'avez interprété comme tel ?

 20   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, j'ai cru comprendre

 21   que ce document avait été utilisé dans d'autres procès et avait été versé

 22   au dossier de ces autres procès, c'est la raison pour laquelle j'ai décidé

 23   de l'inclure dans mon rapport. Je n'ai pas été en mesure de déterminer

 24   précisément le caractère authentique de ce document.

 25   Q.  Je vais vous présenter certains éléments.

 26   Il n'y a pas de numéro d'immatriculation à ce document. L'adjectif "serbe"

 27   n'est pas en majuscules, et je n'aurais pas pu faire ce type d'erreur.

 28   Quant au reste du document, celui-ci est envoyé au secrétariat de la


Page 16992

  1   Défense nationale, SNO, donc secrétariat pour la Défense nationale, SAO

  2   Krajina, Romanija, et Bosnie du nord-est.

  3   Monsieur Theunens, au sein des SAO, est-ce qu'il y a des secrétariats pour

  4   la Défense nationale ?

  5   R.  Mis à part ce document, je n'ai vu aucune référence spécifique à des

  6   secrétariats pour la Défense nationale, mais il faut garder à l'esprit que

  7   dans des structures nouvellement établies, on voit apparaître des

  8   appellations anciennes, c'est-à-dire des appellations de structures qui

  9   existaient dans la RSFY, et dans ce cas particulier où l'on parle de

 10   questions de défense, et en vertu de la doctrine de la Défense populaire,

 11   quelquefois ces noms étaient utilisés même si l'on parlait de structures

 12   différentes. Ce matin, je crois que nous avons consulté des documents qui

 13   étaient utilisés où l'on pouvait voir au niveau national la mention de

 14   secrétariat pour la Défense nationale ou pour la Défense populaire.

 15   Q.  Monsieur Theunens, il s'agit principalement d'un sujet militaire. Etes-

 16   vous d'accord pour dire que le secrétariat pour la Défense nationale --

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde. Je n'ai pas compris votre

 18   question, Monsieur Karadzic.

 19   Est-ce que cet ordre -- ou ce document stipule que les destinataires sont

 20   le SNO de Krajina, de Romanija et de Bosnie du nord-est, et cetera, où

 21   pouvons-nous trouver cela dans le document ?

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je lis la version serbe dans le texte même de

 23   cet ordre :

 24   "A un moment critique pour le peuple Serbe" - et "Serbe" est en majuscule -

 25   ce qui est une erreur, une faute d'orthographe - "je donne, par la

 26   présente, l'ordre de fournir des assistants," et cetera, et cetera.

 27   "Et au niveau du SNO, des districts autonomes de Krajina, de

 28   Romanija, et de Bosnie du nord-ouest" - je n'arrive pas à lire cela - "vous


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  1   éliminez les éléments oustachis qui font partie de la constitution d'un

  2   gouvernement serbe unique, juste, équitable, dans les terres d'appartenance

  3   serbe."

  4   Il s'agit d'un faux, et c'est évident.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Tout d'abord, est-ce que vous êtes d'accord pour dire que les

  7   secrétariats de la Défense nationale tombaient sous la coupe de lu

  8   Secrétariat fédéral de la Défense nationale en Yougoslavie, et que c'est

  9   eux qui conservaient les archives militaires pour les conscrits et qu'ils

 10   étaient immédiatement responsables -- directement responsables au niveau du

 11   Secrétariat fédéral de la Défense nationale, c'est-à-dire le ministère de

 12   la Défense de Yougoslavie, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui, c'est ainsi que les choses auraient dû fonctionner, ou

 14   fonctionnaient lorsque la RSFY était encore en existence.

 15   Q.  Le 21 septembre -- ou plutôt, on voit que ceci a été reçu le 22

 16   septembre, et la Bosnie, la Yougoslavie existaient. Est-ce que le chef d'un

 17   parti politique peut donner des ordres au Secrétariat pour la Défense

 18   nationale ?

 19   R.  Conformément à la législation qui était applicable en RSFY, non. Mais

 20   on peut voir un peu plus tard que, par exemple, les Bosno-Serbes ou les

 21   Serbes en Croatie ont commencé à établir leurs propres structures, comme je

 22   l'ai expliqué précédemment, quelquefois, ils utilisaient les anciennes

 23   appellations qui étaient utilisées en RSFY, même si la composition et les

 24   activités mais, ce qui est encore plus important, même si les liens entre

 25   ces nouvelles structures et le niveau supérieur avait changé. Ils ne sont

 26   plus responsables vis-à-vis des autorités de la république mais ils tombent

 27   sous le coup des autorités serbes ou, par exemple, des municipalités serbes

 28   ou des SAO serbes.


Page 16994

  1   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Monsieur Theunens, le Dr Karadzic vous

  2   a dit que ce document était un faux. Etes-vous en mesure de vous prononcer

  3   quant au caractère authentique de ce document et à ce qu'avance M. Karadzic

  4   ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

  6   Juges, je ne suis pas en mesure d'examiner ce document en version papier

  7   pour savoir s'il s'agit d'un document authentique ou pas; cependant,

  8   lorsque j'ai choisi ce document, j'avais cru comprendre que ce document

  9   avait déjà été utilisé dans d'autres procès et des objections de ce type

 10   n'avaient pas été soulevées lors de l'utilisation dans les procès

 11   précédents, ou tout du moins, je n'avais pas eu vent d'objection qui avait

 12   été soulevée en ce qui concerne le caractère authentique ou non authentique

 13   de ce document durant d'autres procès.

 14   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Merci.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Cela signifie que c'est encore pire pour les procès dont vous avez

 17   parlé -- ou plutôt, des personnes qui étaient accusées durant ces procès,

 18   Monsieur Theunens. Donc, le chef du parti, à ce moment-là -- enfin, de

 19   toute façon, il n'y a pas de République serbe de Bosnie-Herzégovine en

 20   septembre 1991, quoi qu'il en soit. Qu'en est-il des SAO qui venaient

 21   d'être promulguées et qui n'avaient pas d'organes, quels qu'ils soient ?

 22   Est-ce qu'ils disposaient de secrétariats pour la Défense nationale ?

 23   R.  Je crois que j'ai déjà répondu à la question, Monsieur le Président,

 24   Madame, Monsieur les Juges.

 25   Q.  Vous avez parlé au niveau de la municipalité, mais je parle du niveau

 26   supérieur, c'est-à-dire le niveau des SAO. Est-ce que il y a un secrétariat

 27   national pour la Défense ?

 28   R.  Au vu des documents que j'ai examinés, je n'ai pas analysé les SAO en


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  1   détail et je ne me suis pas penché sur l'ARK, par exemple, mais je n'ai pas

  2   l'impression que ces instances existaient. Mais il y a peut-être un exemple

  3   ou des exemples d'appellations qui étaient utilisées pour des instances qui

  4   avaient un rôle similaire au niveau des SAO.

  5   Q.  Est-ce que ces instances existaient dès le mois de septembre ? Ou

  6   d'ailleurs, est-ce qu'elles ont jamais existé au niveau des SAO ? Je parle

  7   d'un secrétariat pour la Défense nationale.

  8   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, j'ai déjà répondu à

  9   la question.

 10   Q.  Merci. Vous n'avez pas répondu à ma question. Je vous pose la question

 11   de savoir où ces structures avaient été établies. Si vous ne le savez pas,

 12   dites-nous que vous ne savez pas et on passera à autre chose.

 13   Mais le 21 septembre, est-ce qu'il y avait une SAO de la Krajina ?

 14   R.  Je ne peux pas répondre à la question parce que -- enfin, vous voulez

 15   dire, une Krajina ARK -- excusez-moi, vous voulez dire une Région autonome

 16   de la Krajina ? Je ne sais pas si elle était constituée mais, de toute

 17   façon, en Bosnie-Herzégovine, il n'y a jamais eu de SAO de Krajina.

 18   Q.  Merci. Est-ce qu'il a jamais existé une SAO de Bosnie du nord-est ?

 19   R.  Vous voulez savoir si elle a jamais existé ou si elle existait déjà le

 20   21 septembre ?

 21   Q.  Le 21 septembre, mais également j'aimerais savoir si elle a jamais

 22   existé, cette SAO de Bosnie du nord-est.

 23   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, j'ai inclus, dans

 24   mon rapport, une décision du 21 novembre 1991. Il s'agit de la note en bas

 25   de page numéro 77, qui parle de la vérification de la décision pour la

 26   proclamation des districts autonomes serbes en Bosnie-Herzégovine, et là,

 27   il est mentionné SAO de Bosnie du nord. Maintenant, ce document ne permet

 28   pas de déterminer si ces SAO, donc ces districts autonomes, tout du moins


Page 16996

  1   pour ce qui est de la Krajina, ont vraiment été constitués. Il s'agit de la

  2   note en bas de page numéro 77 dans la deuxième partie de mon rapport.

  3   Q.  Merci. Est-ce exact de dire que la Bosnie du nord-est comprend les

  4   territoires de Semberija et de Majevica, et est-ce qu'on l'appelait la SAO

  5   de Semberija et de Majevica ?

  6   R.  C'est exact, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges.

  7   Q.  Merci. Avez-vous jamais entendu parler de ce qu'on appelait "toutes les

  8   terres serbes" ?

  9   R.  L'expression "terres serbes" était utilisée habituellement à l'époque,

 10   mais je ne me souviens pas avoir vu l'expression "toutes les terres serbes"

 11   en tant qu'expression consacrée.

 12   Q.  Merci. Est-ce que vous avez consulté des documents ou est-ce que vous

 13   avez eu vent d'information laissant penser que nous disposions de cours

 14   martiales ?

 15   R.  Je sais qu'un système de justice disciplinaire militaire a été établi

 16   au sein de la VRS, mais je n'étais pas en mesure de déterminer, lorsque

 17   j'ai préparé ce rapport, si ce système existait également pour les unités

 18   de la TO bosno-serbe ou si les structures existantes des forces armées de

 19   la RSFY, c'est-à-dire de la JNA, étaient utilisées en la matière.

 20   Q.  Merci. Est-ce qu'à aucun moment, des cours martiales ont été créées, y

 21   compris pendant la guerre. Plus précisément, je vous demanderais s'il

 22   aurait pu exister une cour martiale en septembre 1991, c'est-à-dire en

 23   temps de paix.

 24   R.  Durant la préparation de mon rapport, si je me souviens bien, je n'ai

 25   trouvé aucun document où il était question de cour martiale, en dehors du

 26   document que nous sommes en train d'examiner en ce moment.

 27   Q.  Merci. Dans ces conditions, est-ce que vous admettez qu'il existe

 28   suffisamment d'éléments pour dire que ce document n'est pas un document


Page 16997

  1   authentique, mais qu'il s'agit d'un faux ?

  2   R.  Je suis d'accord avec M. Karadzic, Monsieur le Président, Madame,

  3   Monsieur les Juges, quant au fait qu'il existe un certain nombre de

  4   facteurs qui peuvent jeter un doute potentiel sur le contenu du document.

  5   Mais comme je l'ai déjà dit, deux fois, je le répète : ceux qui rédigeaient

  6   les documents n'étaient pas toujours très réguliers dans l'utilisation

  7   d'une terminologie unifiée. Le document que nous avons ici est signé par le

  8   docteur Karadzic, mais il a pu être rédigé par quelqu'un d'autre et le Dr

  9   Karadzic l'aurait signé. Donc, si nous tenons -- si nous tenons compte de

 10   cela, il importe d'être -- de faire preuve de précaution dans l'utilisation

 11   du document, mais je ne pourrais pas conclure qu'il s'agit d'un faux.

 12   Q.  Je vous remercie. Est-ce que vous auriez un numéro d'enregistrement

 13   tiré d'un registre qui permettrait de vérifier si ce document a bien été

 14   élaboré au sein du SDS ?

 15   R.  Je ne vois pas le document en cet instant même, mais je ne crois pas

 16   qu'on y trouve un numéro d'enregistrement. Cela étant, j'ai trouvé pas mal

 17   de documents émanant de diverses structures et de niveau hiérarchiques

 18   différents où il n'y avait pas de numéro d'enregistrement, donc c'est un

 19   élément à prendre en compte.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document devrait être téléchargé.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] 957.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Il n'y a pas de numéro d'enregistrement au niveau où nous trouvons

 24   l'identité du destinataire et l'en-tête du document, n'est-ce pas ?

 25   R.  C'est exact.

 26   Q.  Encore une question par rapport à ce document. Dans combien de

 27   municipalités ou de secrétariats à la Défense nationale ce document a-t-il

 28   été trouvé en tant que document qui est arrivé dans ces instances ?


Page 16998

  1   R.  Je ne saurais répondre à cette question. A ma connaissance, le bureau

  2   du Procureur ne possède qu'un seul exemplaire de ce document, mais il

  3   faudrait vérifier la base de données et vérifier également dans quelles

  4   conditions il a été obtenu et puis vérifier encore s'il existe des versions

  5   supplémentaires de ce document. Lorsque je dis "version supplémentaire", je

  6   pense à des exemplaires supplémentaires, en fait, qui aurait été reçus par

  7   d'autres destinataires.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Uertz-Retzlaff.

  9   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, selon ce que

 10   nous avons pu trouver en cet instant même, cette version a été saisie à

 11   Bihac en 1996, par un représentant du bureau du Procureur. Mais il semble

 12   qu'il en existe également une autre version, ici, au TPY, qui a également

 13   été saisie, mais à l'AID de Bihac en 1999, et nous pouvons procéder à

 14   quelques recherches complémentaires pour voir si nous disposons de versions

 15   additionnelles. Nous pouvons vérifier cela, mais il est difficile de le

 16   faire dans le prétoire.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 18   Les interprètes pourraient-ils avoir l'amabilité de bien vouloir lire

 19   la ligne qui figure en haut à gauche, la première ligne ? Est-ce qu'au

 20   niveau -- est-ce qu'on lit dans cette ligne les mots "reçu de" ?

 21   L'INTERPRÈTE : Réponse de l'interprète de cabine française : effectivement,

 22   il s'agit des mots "reçus de".

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais, apparemment, cette ligne a été ajoutée

 24   au document, car tout le reste est écrit en cyrillique alors que cette

 25   ligne, ces deux mots sont écrit en caractères latins.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et tapés à la machine.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Effectivement, Monsieur le Président.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, à vous.


Page 16999

  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Est-ce que vous vous rappelez, Monsieur Theunens, que le Parti

  3   démocratique serbe l'a emporté dans 47 municipalités et que Bihac ne

  4   comptait pas au nombre des municipalités dans lesquelles le parti

  5   démocratique serbe avait gagné les élections ?

  6   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, M. Karadzic a parlé

  7   de cela hier, mais je ne connais pas parfaitement bien la question. Je me

  8   rappelle qu'il n'y avait pas de présence significative des Serbes à Bihac,

  9   mais le fait que ce document a été obtenu de l'AID de Bihac ne signifie pas

 10   nécessairement que l'AID, qui était le service de Renseignement des

 11   Musulmans de Bosnie a saisi ou découvert le document à Bihac. Il faudrait

 12   vérifier dans quelque conditions l'AID a obtenu ce document, de qui, à quel

 13   endroit et comment ?

 14   Q.  Je vous remercie.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

 16   document.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document 957 ?

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] En même temps que l'allégation qu'il

 20   s'agit d'un faux ?

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Absolument. C'est un document qui fait partie

 22   du rapport et qui est évoqué dans une note en bas de page du rapport de M.

 23   Theunens.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suppose qu'il n'y a pas d'opposition

 25   de la part de l'Accusation.

 26   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document est admis.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il devient la pièce D1586, Monsieur le


Page 17000

  1   Président, Madame, Monsieur les Juges.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Dans le résumé paragraphe 24, vous dites et je vais lire à haute voix

  4   ce passage en serbe, je cite :

  5   "Dans la période allait de janvier à mars 1992, la situation qui prévalait

  6   en Bosnie-Herzégovine se caractérisait par un degré élevé de confusion,

  7   aussi bien du point de vue du statut à venir de la Bosnie-Herzégovine au

  8   sein de la RSFY, que du point de vue du rôle de la JNA en Bosnie-

  9   Herzégovine," et cetera, et cetera.

 10   Donc, un peu plus loin dans le texte, vous dites, je cite :

 11   "Au mois de mars 1992 au plus tard, les Unités de la JNA dominées par les

 12   Serbes menaient ouvertement des opérations, assuraient la protection,

 13   distribuaient des armes et apportaient leur aide de façon différente aux

 14   Serbes de Bosnie et aux zones de Bosnie-Herzégovine sur lesquels les Serbes

 15   avaient des prétentions."

 16   Un peu plus loin, nous lisons :

 17   "Dans le même temps, les commandements de la 2e Région militaire de la JNA

 18   --"

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il faut que vous ralentissiez votre

 20   lecture. Le paragraphe 24 est un paragraphe qui fait partie du corps du

 21   texte. Je ne suis pas sûr que les interprètes ont reçu le rapport.

 22   Ralentissez, Monsieur Karadzic.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-être pourrait-on afficher le document

 24   grâce au prétoire électronique ?

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous, nous avons le rapport sous les

 26   yeux. Vous pouvez soumettre votre question au témoin.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Bon, ma première question est la suivante : Est-ce que ce degré élevé


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  1   de confusion que vous avez constaté entre janvier et mars 1992 est survenu

  2   brusquement en janvier 1992, ou est-ce qu'il s'agit du résultat d'une crise

  3   qui s'est développé ?

  4   R.  Ce degré élevé de confusion n'est pas survenu brusquement. Il résulte

  5   de plusieurs facteurs. Manifestement, l'indépendance de la Slovénie, suivi

  6   par le conflit armé en Croatie, ainsi que les activités menées par les

  7   différents groupes ethniques en Bosnie-Herzégovine, ainsi que les actions

  8   de la présidence de la RFY et des autres dirigeants ont créé une situation

  9   dans laquelle l'avenir de la Bosnie-Herzégovine n'était plus très claire,

 10   une situation donc dans laquelle régnait une certaine confusion par rapport

 11   à ce statut futur.

 12   Q.  Merci. Est-ce que vous vous êtes rendu compte, est-ce que vous avez

 13   enregistré les déclarations constantes de Stjepan Mesic, qui plus tard

 14   devait devenir président de la Croatie, mais qui à ce moment-là, je pense,

 15   était président du Parlement croate, donc ses incessantes déclarations

 16   selon lesquelles la guerre allait se déplacer de la Croatie vers la Bosnie

 17   ?

 18   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je ne connais pas

 19   parfaitement la déclaration de M. Stjepan Mesic. Mais tous les

 20   représentants politiques, représentant tous les partis, faisaient des

 21   déclarations relatives à l'avenir de la Bosnie-Herzégovine, et à entendre

 22   ces déclarations, on se rend parfaitement compte que chacun d'entre eux

 23   voulait quelque chose de différent.

 24   Q.  Je vous remercie. Est-ce que la guerre en Croatie et en Slovénie a été

 25   menée par une armée républicaine très récente du point de vue de sa

 26   création qui se composait de la police, des différents corps de l'armée, du

 27   Corps de la Garde nationale et de la Défense territoriale ?

 28   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je n'ai pas analysé


Page 17002

  1   le conflit en Slovénie. Dans mon rapport, je parle du conflit en Croatie

  2   ou, en tout cas, de certains aspects du conflit qui a eu lieu en Croatie,

  3   ceci figure dans la première partie de mon rapport où j'évoque - je le

  4   répète encore une fois - la création des structures armées serbes en

  5   Croatie et les rapports entre ces structures armées des Serbes de Croatie

  6   et la JNA. Je sais, étant donné le travail que j'ai accompli pour un autre

  7   procès, le procès intenté à M. Gotovina, Cermak et Markac, que la

  8   République de Croatie, ses forces armées se divisaient en ZNG, TO serbe

  9   locale et autres structures associées.

 10   Q.  Dans le paragraphe 1 de votre résumé, vers la fin du paragraphe vous

 11   dites, je cite :

 12   "La mission des forces armées de la RSFY consistait à défendre

 13   l'indépendance, la souveraineté, l'intégrité territoriale et l'ordre social

 14   établi par la constitution de la RSFY."

 15   Vous mettez les événements que vous vous apprêtez à discuter dans le

 16   contexte de cette définition que l'on trouve dans la partie introductive de

 17   votre rapport. Alors, selon ce que vous écrivez dans ce passage, s'en suit-

 18   il que les forces armées de la RSFY avaient le devoir d'empêcher une

 19   sécession unilatérale, à savoir avaient le devoir de s'opposer à toute

 20   infraction par rapport à la souveraineté, à l'indépendance, à l'intégrité

 21   territoriale et à l'ordre social établi par la constitution de la RSFY ?

 22   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, M. Karadzic a cité

 23   le paragraphe 1 de la partie introductive de mon rapport, et ce faisant, il

 24   définit d'un point de vue juridique la mission des forces armées de la RSFY

 25   telle que déterminée, effectivement, par la constitution de 1974 et

 26   confirmée par la Loi sur la Défense populaire généralisée de 1982, mais

 27   j'ai également mis en exergue dans mon rapport, et ce, encore une fois, sur

 28   la base de documents que j'ai examinés que, durant l'année 1991 dont


Page 17003

  1   étaient investis ceux, qui restaient des forces armées de la RSFY en

  2   Croatie, a changé. Ceci, par exemple, est illustré par l'ancien secrétariat

  3   fédéral à la Défense populaire généralisée dans les propos du général

  4   d'armée Kadijevic, qui définit, de façon précise, les différentes phases du

  5   conflit en Croatie, à savoir que, dans la première phase, qui commence à la

  6   fin de l'été 1991, le général Kadijevic déclare que la JNA commence à se

  7   battre pour apporter son appui aux Serbes de Croatie, ce qui implique que

  8   l'objectif définit dans la constitution et la mission définie par la

  9   constitution n'étaient plus les mêmes.

 10   Q.  Je n'avais pas l'intention de traiter de cet aspect du problème, mais

 11   puisque vous l'évoquez, Monsieur Theunens, je vous demande s'il est exact

 12   que des modifications dans la situation de facto - et là, je ne parle donc

 13   pas de la situation de jure - ont eu lieu étant donné les attaques

 14   illégales contre la JNA et le fait que la JNA n'a pu survivre que dans les

 15   régions où elle était la bienvenue, à savoir les régions serbes de Croatie

 16   ? Autrement dit, est-ce que la constitution a changé, et est-ce qu'à ce

 17   moment-là, le rôle de la JNA a changé en conséquence, ou est-ce que, tout

 18   ceci, ce changement a été dû à des actions coercitives de la part d'armées

 19   illégales de Slovénie et de Croatie, et est-ce que c'est cela qui a réduit

 20   le rôle de jure de la JNA à un rôle de facto, à savoir n'existait que dans

 21   les régions qui lui étaient favorables ?

 22   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, la constitution n'a

 23   pas changé. Quant aux raisons qui ont débouché sur ces transformations de

 24   facto, M. Karadzic a présenté son point de vue sur ce point. Les documents,

 25   que j'ai examinés, décrivent une autre situation, à savoir qu'il y a des

 26   développements communs des objectifs poursuivis par les Serbes de Croatie

 27   et par la JNA, donc les deux groupes défendent les mêmes objectifs, et

 28   qu'avec l'aide du gouvernement de la République de Serbie, du point de vue


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  1   de l'organisation et de la distribution d'armes à des structures armées

  2   serbes locales, se divisant en Défenses territoriales et en polices, ainsi

  3   qu'avec l'aide de la participation de volontaires et de groupes de

  4   paramilitaires venus de Serbie dans le conflit en Croatie, toutes ces

  5   formations, avec la JNA, et le plus souvent sous un commandement unifié, se

  6   battent ou mènent des opérations militaires visant à établir un contrôle

  7   serbe sur les zones où la présence serbe était importante, ou plus

  8   précisément les zones qui étaient considérées comme serbes par la partie

  9   serbe.

 10   Q.  Vous êtes un universitaire, Monsieur Theunens, ce que vous êtes en

 11   train de dire est de la propagande politique. La question que je vous pose

 12   est la suivante : Est-ce que quelqu'un a donné l'ordre à la JNA, dans le

 13   respect de la constitution et de la loi, d'abandonner --

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quand vous dites, "faire une

 15   déclaration," vous devriez accorder la possibilité de répondre.

 16   Monsieur Theunens, vous avez été taxé de propagande politique.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'était pas mon intention, Monsieur le

 18   Président. Je ne faisais que résumer ce que j'ai mis par écrit dans mon

 19   rapport, dans la première partie du rapport qui concerne le conflit en

 20   Croatie. Encore une fois, je me suis fondé sur des sources de l'époque, des

 21   documents de la JNA, des documents des Serbes de la région, donc de la

 22   Défense territoriale serbe de Krajina, du MUP serbe de Krajina. Je me suis

 23   fondé sur l'ouvrage donc le général d'armée Kadijevic est l'auteur, je me

 24   suis fondé sur l'ouvrage dont le président de l'ancienne présidence

 25   fédérale, M. Jovic, est l'auteur, ainsi que sur d'autres documents. Les

 26   documents sont ici, donc il est facilement vérifiable que ce que je viens

 27   de dire n'est pas de la propagande uniquement.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.


Page 17005

  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Est-ce que vous voulez dire que la JNA a pu et donc a été autorisée à

  3   s'écarter de son rôle définit par la constitution de sa propre initiative,

  4   ou plus précisément, que son obligation constitutionnelle, précédant les

  5   évènements, a changé voire que des amendements ont été apportés à la

  6   constitution; est-ce que la JNA a pu et a eu l'autorisation de dire de sa

  7   propre initiative ? Je ne souhaite plus jouer le rôle qui est défini pour

  8   moi par la constitution. Vous êtes un expert des questions militaires; est-

  9   ce qu'une armée peut agir de la sorte ?

 10   R.  La JNA, en tant que composante des forces armées de la RSFY, était à

 11   l'époque subordonnée à la présidence de la RSFY. Il y a eu pas mal de

 12   transformation au sein de la présidence de la RSFY. Nous savons également à

 13   la lecture du livre de M. Jovic qu'en dehors de la présidence de la RSFY,

 14   il y a eu aussi des réunions entre pas seulement les membres de la

 15   présidence, mais aussi des réunions entre les membres de la présidence et

 16   les dirigeants de la République de Serbie-Monténégro, et que tous ces

 17   représentants partageaient le même objectif, qui n'était pas l'objectif

 18   défini par la constitution pour les forces armées de la RSFY, et cet

 19   objectif a été communiqué à l'armée dans le but d'être mis en œuvre. J'ai

 20   également évoqué l'aide apportée par le gouvernement de la République de

 21   Serbie, dans la distribution d'armes et l'organisation des structures

 22   armées serbes de la région locale, qui se composait de la police et de la

 23   Défense territoriale.

 24   Q.  Est-ce que vous pourriez répondre à ma question, je vous prie ? C'est

 25   une question de doctrine; est-ce qu'une armée --

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic --

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je suis en train de perdre mon temps, nous

 28   perdons notre temps, Excellence. Je n'ai pas suffisamment de temps. Je n'ai


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  1   pas demandé ce qui s'était passé en 1992, au témoin.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Votre réponse n'est pas -- votre

  3   question n'est pas une question à laquelle il est possible de répondre par

  4   un simple oui ou non; c'est la raison pour laquelle le témoin a besoin de

  5   développer. Il faut l'autoriser à le faire, c'est à vous de planifier votre

  6   contre-interrogatoire pour qu'il soit suffisamment efficace, Monsieur

  7   Karadzic.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Est-ce que je peux simplifier la question ? En 1991, la JNA ou quelle

 10   qu'autre armée du monde pouvait-elle redéfinir, elle-même, de sa propre

 11   initiative le rôle qui lui incombait du fait de la constitution, sans

 12   qu'aucun amendement n'ait été officiellement apporté à cette constitution ?

 13   Est-ce qu'elle avait le droit de dire : je ne veux plus remplir le rôle qui

 14   m'est donné par la constitution ?

 15   R. Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, j'ai déjà répondu à

 16   cette question.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avançons.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] D'accord.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Etes-vous en train de dire que la JNA n'était pas déployée dans les

 21   régions majoritairement habitées par des Musulmans et des Croates qui

 22   reconnaissaient les institutions yougoslaves ? Est-ce que vous n'avez

 23   jamais mis en lumière un fait de cette nature ?

 24   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je ne suis pas sûr

 25   de bien comprendre la question. Je suppose que nous parlons de la Bosnie-

 26   Herzégovine, mais de quelle période sommes-nous en train de parler ?

 27   Q.  Je parle, en ce moment, de la Croatie aussi. Est-ce que la JNA s'est

 28   retirée dans les zones habitées par des Serbes, parce que des Serbes


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  1   habitaient ces zones, ou parce que dans ces zones, personne ne l'attaquait

  2   ?

  3   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, si nous parlons de

  4   la Croatie, je dirais qu'il y a eu des attaques sur les casernes de la JNA,

  5   et ce fait d'ailleurs a été rendu public par pas mal de sources publiques.

  6   Mais les recherches auxquelles j'ai procédé ne m'ont pas permis de

  7   démontrer qu'il existait dans tous les cas un lien de cause à effet entre

  8   le redéploiement de la JNA et les opérations de combat menées par la JNA

  9   d'une part, et les attaques contre les casernes de la JNA d'autre part.

 10   Je peux vous donner un exemple de mémoire, la JNA pénètre à Baranja, dans

 11   l'est de la Croatie, en août 1991, sans aucune nécessité militaire. Parce

 12   que, dans cette région de la Croatie, la présence de la JNA était très

 13   réduite, et il n'y a pas eu d'attaque contre la JNA avant le redéploiement

 14   de celle-ci par apport de forces supplémentaires, de forces complémentaires

 15   dans cette partie de la Croatie. Puis il y a d'autres exemples du même

 16   genre, il en existe. Je voudrais pour ne pas être trop long, renvoyer

 17   chacun aux notes de bas de page 381 et page 382, qui figurent dans la

 18   première partie du rapport, où est expliqué le contexte politique ou, en

 19   tout cas, cet aspect particulier du contexte politique qui a trait à la

 20   transformation de la mission de la JNA en Croatie.

 21   Q.  Je vous remercie. Conviendrez-vous que jusqu'au 6 avril 1992, la

 22   Bosnie-Herzégovine faisait intégralement partie de la Yougoslavie, aussi

 23   bien de jure que de facto ?

 24   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, cette question sort

 25   du champ de mon rapport. Mais me fondant sur ce que j'ai pu apprendre avant

 26   de travailler pour le bureau du Procureur, j'aurais tendance à être

 27   d'accord avec M. Karadzic.

 28   Q.  Merci. Quand la JNA s'est retirée de la Slovénie et de la Croatie pour


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  1   se diriger vers la Bosnie, qui faisait partie du territoire de la

  2   Yougoslavie, à ce moment-là, est-il exact donc que, lorsqu'il a eu ce

  3   retrait de la JNA vers la Bosnie, celle-ci a évité la partie orientale de

  4   l'Herzégovine, qui était majoritairement habitée par des Croates, parce

  5   qu'elle prévoyait qu'elle n'y serait pas la bienvenue ?

  6   R.  La JNA se retire de Slovénie après les événements de juin, juillet

  7   1991. Quant à la Croatie, là-bas, la situation est plus complexe, car il y

  8   a retrait officiel de la JNA de la Croatie. Evidemment, la JNA se retire

  9   des parties de la Croatie, où il n'y avait pas de présence serbe importante

 10   ou des parties de la Croatie qui n'étaient pas sous le contrôle des Serbes.

 11   Mais les parties de la Croatie qui restent sous le contrôle serbe, nous

 12   savons qu'à leur sujet un accord a été conclu qui repose sur le plan Vance,

 13   et que l'application du plan Vance impliquait de démilitariser ce qu'on

 14   appelait les Casques bleus des Nations Unies, mais dans la pratique -- les

 15   forces de police des Nations Unies, mais dans la pratique et on peut

 16   trouver cela dans la première partie du rapport, les représentants de la

 17   JNA qui avaient été amenés dans ces zones mais qui éventuellement étaient

 18   originaires d'autres parties de la Yougoslavie sont restés dans cette

 19   région. Les équipements militaires, ils les ont laissés derrière eux.

 20   Ensuite, disons au mois d'avril 1992, des effectifs humains et un appui

 21   logistique continue à être apporté à la Défense territoriale locale serbe,

 22   qui ensuite devait devenir, qui par la suite, devait devenir la SVK. Comme

 23   je l'ai déjà dit, il y a également l'appui fourni par la République de

 24   Serbie aux forces du ministère de l'Intérieur de l'entité serbe de Croatie,

 25   c'est-à-dire de la RSK.

 26   Alors, les unités qui se sont retirées vers la Bosnie-Herzégovine ou

 27   redéployées en Bosnie-Herzégovine, sont effectives, sont réelles. Mais je

 28   n'ai pas détaillé les raisons pour lesquelles ces unités ne sont pas


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  1   entrées dans l'est de l'Herzégovine dans mon rapport.

  2   Q.  Je parlais de l'ouest de l'Herzégovine, parce que c'est cela la partie

  3   croate. Mais je vais vous poser la question suivante : Est-il exact que la

  4   structure de commandement de l'armée croate et de la Défense territoriale

  5   croate se composait d'officiers qui avaient quitté les rangs de la JNA, et

  6   que c'était également le cas pour l'armée musulmane composée de Musulmans

  7   ayant quitté la JNA ?

  8   R.  En effet, je sais que les officiers croates ou musulmans, c'est-à-dire

  9   bosniens qui servaient dans les rangs de la JNA, pour un certain nombre

 10   d'entre eux, ils ont quitté la JNA pour diverses raisons afin de se joindre

 11   aux forces armées créées dans l'entité dont ils relevaient ou en tout cas

 12   dans leur groupe ethnique.

 13   Q.  Je vous remercie. J'ai posé toutes ces questions dans l'ordre d'aboutir

 14   sur ce que je vais dire maintenant. Quel est le point de vue adopté dans le

 15   rapport eu égard au fait que le Parti démocratique serbe, plutôt que de

 16   déployer des forces armées relevant du parti, n'a cessé d'apporter son

 17   soutien à la JNA pendant toute cette période et a donc soutenu l'appel à la

 18   mobilisation de la JNA, ou est-ce que -- agir de la sorte était conforme à

 19   la loi ?

 20   R.  Comme nous l'avons vu, par exemple, dans le document -- dans le rapport

 21   du général Kukanjac -- ce rapport est donc envoyé le 20 mars concernant la

 22   situation en Bosnie-Herzégovine, et nous voyons que les objectifs du SDS et

 23   de la JNA semblent converger. Kukanjac parle, par exemple, de la manière

 24   dont le peuple serbe, y compris des dirigeants du SDS, ont pris en leur

 25   sein la JNA, même s'il y a des exemples de critiques ou d'attaques de

 26   membres du SDS contre certaines actions de la JNA, parce qu'ils veulent

 27   disposer de leurs propres forces et parce qu'ils nourrissent certains

 28   soupçons vis-à-vis de ce qu'ils appellent la JNA communiste.


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  1   Q.  Est-ce que le SDS disposait de ses propres forces, ou est-ce que les

  2   jeunes Serbes étaient incorporés au sein de la JNA alors que les jeunes

  3   Musulmans et Croates se trouvaient dans des unités sous le commandement de

  4   leurs propres dirigeants ethniques ?

  5   R.  C'est une question compliquée, parce que le SDS -- ou plutôt, les

  6   dirigeants du SDS, y compris M. Karadzic, demandent à constituer ou à

  7   mobiliser les Unités de la TO serbe locale, alors qu'ils demandent aux

  8   municipalités serbes d'envoyer les jeunes hommes au sein de ces unités de

  9   la TO. Alors qu'auparavant, il y avait eu un appel visant à envoyer les

 10   jeunes recrues au sein de la JNA, mais à un moment, il y a un changement

 11   qui s'opère, au printemps 1992, et il est mentionné que cette TO bosno-

 12   serbe devrait être subordonnée à la JNA. Par conséquent, on peut voir une

 13   évolution ici.

 14   Pour conclure, concernant la note en bas de page numéro 71 dans la deuxième

 15   partie de mon rapport, on voit ici une explication des liens ou du rôle du

 16   SDS dans le processus que l'on peut voir dans l'analyse de la VRS de l'Etat

 17   de préparation au combat.

 18   Q.  Etant donné que vous venez de mentionner cela, voilà ce que je souhaite

 19   vous présenter comme thèse : jusqu'au 27 mars, le point de vue du SDS était

 20   qu'il y avait de jeunes recrues serbes, qui étaient donc des sympathisants

 21   du SDS, et qu'ils devraient répondre à l'appel de mobilisation de la JNA.

 22   Est-ce qu'il s'agissait d'un point de vue ou d'une action légitime et

 23   légale en gardant à l'esprit que la JNA était la seule force armée

 24   légitime?

 25   R.  Le point de vue du SDS tel que présenté par M. Karadzic, et ceci, avant

 26   le 27 mars, correspond à la législation en vigueur au sein de la RSFY,

 27   c'est-à-dire qu'il y avait un appel de mobilisation par la JNA, et ceux qui

 28   faisaient l'objet de cet appel devaient rejoindre les rangs de la JNA.


Page 17011

  1   Q.  Passons à autre chose. Vous avez dit qu'à la fin du mois de mars, à

  2   l'Assemblée, j'ai lancé un appel pour constituer la Défense territoriale.

  3   Savez-vous que, le 18 mars, nous avons reçu le droit de créer notre propre

  4   unité constitutive et qu'au sein de cette unité, nous aurions la

  5   possibilité de créer une armée, ou si ce n'est une armée, une garde

  6   nationale ? La question de l'armée a été reportée à une date ultérieure.

  7   Savez-vous que j'ai fait cette recommandation dans le contexte des accords

  8   conclus avec la Communauté européenne ?

  9   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, afin de répondre à

 10   cette question, je devrais examiner ces accords, et je n'ai pas eu la

 11   possibilité de le faire jusqu'à présent, donc à ce stade, je ne peux pas

 12   répondre à cette question.

 13   Q.  Merci. Vous êtes critique vis-à-vis du SDS en raison de sa politique en

 14   Bosnie-Herzégovine. Pensez-vous que vous deviez avoir plus d'éléments

 15   concernant le principal processus politique et les événements y afférant, y

 16   compris la Conférence sur la Bosnie-Herzégovine, afin d'arriver à ces

 17   conclusions ?

 18   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je ne suis pas

 19   critique vis-à-vis du SDS ni de tout autre parti ou organisation. Dans mon

 20   rapport, je me borne à présenter -- à illustrer les activités du SDS sur la

 21   base des documents que j'ai pu trouver dans la base de données ou dans les

 22   archives du bureau du Procureur, ou dans les documents auxquels celui-ci a

 23   accès. Lorsque je parle d'activités du SDS, je parle d'activités visant à

 24   constituer une structure militaire, et je parle également du rôle qui a été

 25   joué dans la prise de contrôle de municipalités. Enfin, voilà.

 26   Q.  Merci. Je voudrais vous présenter des éléments de la vie politique qui

 27   ont semé cette confusion que vous avez remarquée, du mois de janvier au

 28   mois de mars, et je ne vous tiendrai pas rigueur si vous n'êtes pas au


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  1   courant de cela. Mais nous nous devons de savoir si vous étiez au courant

  2   ou pas.

  3   Saviez-vous que le SDS et le SDA partageaient la même opinion quant au

  4   changement qui devait s'opérer dans le système politique et quant à la

  5   préservation de la Yougoslavie ?

  6   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je n'ai pas analysé

  7   les opinions du SDA sur le futur de la Bosnie-Herzégovine ni sur la

  8   préservation de la Yougoslavie telle qu'elle existait à ce moment-là, donc

  9   je ne peux pas répondre à cette question.

 10   Q.  Merci. Saviez-vous que le SDA, le SDS et le HDZ avaient gagné plus de

 11   90 % des voix, et le SDS disposait d'un tiers du pouvoir dans toute la

 12   Bosnie au niveau central ?

 13   R.  Oui, je me souviens, alors que je travaillais ailleurs qu'au sein du

 14   bureau du Procureur, que durant les dernières élections en Bosnie-

 15   Herzégovine, c'est-à-dire avant le conflit, les partis qui s'étaient

 16   constitués sur une base ethnique avaient gagné une majorité très

 17   importante.

 18   Q.  Merci. Savez-vous que le SDA, dès la fin du mois de janvier 1991, a

 19   changé son attitude vis-à-vis de la Yougoslavie, et en février et en mars,

 20   ils ont essayé de faire passer une décision concernant la souveraineté de

 21   la Bosnie-Herzégovine par le biais de l'Assemblée, qui constituait un des

 22   premiers pas vers l'indépendance, et qu'ils n'ont pas pu faire passer cette

 23   mesure en raison d'un mécanisme constitutionnel, à savoir le Conseil sur

 24   l'Egalité ethnique, prévoyant que les décisions doivent être prises par

 25   consensus ?

 26   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je ne connais pas

 27   complètement les modifications de l'attitude telles que mentionnées par M.

 28   Karadzic. Cela ne rentre pas dans le cadre de mon rapport, donc je ne peux


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  1   pas faire de commentaire à ce sujet.

  2   Q.  Très bien. Alors, passons à des questions militaires.

  3   Saviez-vous que le 31 mars 1991, une décision a été adoptée visant à

  4   constituer une armée secrète appelée la Ligue patriotique, et que le 30

  5   avril, cette structure a effectivement été créée ? Il s'agissait d'une

  6   formation militaire du parti du SDA.

  7   R.  Je connais l'existence d'une structure ou d'une formation armée qui

  8   s'appelait la Ligue patriotique et de ses liens avec le SDA, mais encore

  9   une fois, cela ne rentre pas dans le cadre de mon rapport et, par

 10   conséquent, je ne peux pas vous fournir d'information supplémentaire à ce

 11   sujet.

 12   Q.  Merci. Savez-vous que le 10 juin, le Conseil pour la Défense des

 13   Musulmans a été créé, et il s'agissait d'une structure composée de membres

 14   politiques de la Ligue patriotique à Sarajevo ? Vous n'êtes pas sans savoir

 15   que l'Assemblée serbe avait créé un Conseil pour la Sécurité nationale,

 16   c'était un organe consultatif, et ceci, en 1992. Saviez-vous qu'une

 17   instance issue d'un parti, celui-ci étant monoethnique, avait été

 18   constituée par les Musulmans le 10 juin 1991 ?

 19   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je ne connais pas

 20   très bien la décision du 10 juin 1991. Je peux simplement mentionner que le

 21   Conseil de la Sécurité nationale -- ou le Conseil national pour la

 22   Sécurité, a été créé par l'Assemblée du peuple serbe de Bosnie-Herzégovine,

 23   le 27 mars 1992, et cela figure à la note en bas de page numéro 89 dans la

 24   deuxième partie de mon rapport.

 25   Q.  Merci. Saviez-vous qu'à la fin du mois de juin 1991, les présidents

 26   Kucan et Tudjman, ainsi que le président de la présidence collective de

 27   Bosnie-Herzégovine, M. Izetbegovic, étaient arrivés à un accord -- ou

 28   plutôt, avaient conclu un pacte militaire secret contre la Yougoslavie et


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  1   contre la JNA ? Il s'agit d'une question militaire.

  2   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, effectivement, il

  3   s'agit d'une question militaire, mais cela ne rentre pas dans le cadre de

  4   mon rapport et, par conséquent, je n'ai pas de mémoire ou de souvenir de ce

  5   qui est qualifié de pacte militaire secret.

  6   Q.  Saviez-vous qu'en juillet et en août 1991, la partie serbe a abandonné

  7   l'idée de la régionalisation des SAO ainsi que d'autres mesures politiques,

  8   pour préconiser un accord historique, serbo-musulman, proposé par un Parti

  9   musulman minoritaire, mais qui était soutenu par le président Izetbegovic,

 10   et ces activités -- et ces pourparlers ont continué jusqu'en juin ou en

 11   juillet ou en août ?

 12   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, il en va de même que

 13   pour la question précédente. Ce n'est pas une question militaire et cela ne

 14   rentre pas dans le cadre de mon rapport. Par conséquent, je n'ai aucun

 15   souvenir de cela.

 16   Q.  Je pense plutôt à votre chapitre qui a une grande importance, qui est

 17   consacré aux événements politiques importants, car vous en avez un de

 18   chapitre consacré aux événements politiques importants.

 19   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, j'ai choisi les

 20   événements politiques les plus importants sur la base de l'envergure de mon

 21   rapport. C'est pourquoi cette sélection -- ce tri a été fait.

 22   Q.  Merci. J'ai une question militaire maintenant : est-ce que vous savez

 23   que le Parti d'Action démocratique, vers le 26 septembre, a décidé

 24   d'accroître son niveau de surveillance du comportement et de la structure

 25   de la JNA en Bosnie-Herzégovine et, bien sûr, du SDS et des Serbes ? Est-ce

 26   que vous savez que le SDA a commencé à espionner la JNA, qui était pourtant

 27   leur armée légitime ?

 28   R.  Là encore, Monsieur le Président, cela sort du cadre de mon rapport et,


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  1   par conséquent, je ne suis pas en mesure de fournir des éléments

  2   d'information supplémentaires.

  3   Q.  Savez-vous où saviez-vous -- ou plutôt, avez-vous jamais entendu parler

  4   e Sefer Halilovic ? Savez-vous qui c'est ?

  5   R.  Oui, Monsieur le Président, je sais qui est Sefer Halilovic. A un

  6   moment donné, il a été chef de l'état-major général de l'ABiH, mais il a

  7   été écarté de ce poste. Je pense que c'était au cours de l'année 1993.

  8   Pendant que j'étais employé par le bureau du Procureur, je n'ai pas eu

  9   d'activités professionnelles liées à Sefer Halilovic ou à l'ABiH, mais

 10   effectivement, je le connais grâce à des activités que j'ai eues avant de

 11   commencer à travailler pour le bureau du Procureur.

 12   Q.  Savez-vous que Sefer Halilovic, avant de devenir publiquement le

 13   commandant de l'ABiH, était commandant clandestin, secret, de la Ligue

 14   patriotique, et dans plus de 98 municipalités, il avait des états-majors,

 15   cinq états-majors régionaux, et un total de 100 000 militaires ? Puis,

 16   c'est devenu en mars 103 municipalités et 120 000 militaires, donc en mars

 17   1992.

 18   R.  Monsieur le Président, cela sort du cadre de mon rapport. Je ne je suis

 19   pas penché sur la création, la structure ou les activités de la Ligue

 20   patriotique.

 21   Q.  Mais, Monsieur Theunens, les Serbes vivaient-ils dans le vide ? Est-ce

 22   que leur conduite peut être examinée hors contexte que constitue le

 23   comportement de leurs voisins et futurs adversaires ? Qu'est-ce qui vous a

 24   permis d'apprécier et d'évaluer le comportement de la partie serbe si vous

 25   n'avez absolument pas tenu compte du fait que c'est sous leurs yeux, sous

 26   leur nez, dans les municipalités où ils vivent ensemble, y compris les 47

 27   municipalités où ils sont majoritaires et où ils détiennent le pouvoir, une

 28   armée clandestine au niveau de la république est en train de voir le jour


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  1   dans 103 municipalités et qu'elle prépare une guerre civile ?

  2   R.  Monsieur le Président, je me suis focalisé sur un aspect particulier

  3   dans mon rapport. Cela ne veut pas dire que tout ce qui sort du cadre de

  4   mon rapport manque de pertinence, mais tout simplement, cela veut dire que

  5   cela sort du cadre, et ce cadre est très clair. Il y a beaucoup d'aspects

  6   du conflit qui peuvent être étudiés, analysés, des conclusions peuvent être

  7   tirées, sans avoir à analyser ou à tirer des conclusions sur les activités

  8   d'autres acteurs qui auraient pu participer aux événements. Donc, là

  9   encore, ce n'est pas une analyse du conflit de Bosnie-Herzégovine, c'est

 10   une analyse des gestes de M. Karadzic, du rôle qu'il a joué par rapport à

 11   la position d'autorité qu'il a occupée vis-à-vis de la Défense territoriale

 12   bosno-serbe et la VRS.

 13   Q.  Mais vous vous êtes également intéressé au contexte politique du

 14   comportement serbe de Bosnie-Herzégovine, leur rapprochement avec la JNA en

 15   dépit des différences idéologiques, les appels qui ont été lancés à la

 16   mobilisation. Donc au cours de votre travail, est-ce que vous avez remarqué

 17   nos mises en garde qu'une guerre civile était en train de se préparer, que

 18   nous souhaitions trouver des solutions politiques, une réponse politique à

 19   ce qui était en train de se fomenter là sous nos yeux ? Donc est-ce que

 20   vous avez remarqué ces gestes politiques de notre part ? Etait-il justifié

 21   -- était-il rationnel, ou bien était-il comme le laisse entendre votre

 22   rapport, plutôt une activité de sabotage et de rébellion qui allait

 23   perturber l'idylle de la vie commune en Bosnie-Herzégovine ?

 24   R. Monsieur le Président, si je parle de l'aspect politique, c'est afin de

 25   définir et d'expliquer le rôle joué par le SDS ou par d'autres partis

 26   politiques créés par les Serbes de Bosnie. Le rôle que le SDS a joué, a

 27   organisé, a armé, a apporté son soutien aux structures militaires qu'ils

 28   ont établi. Je n'avais pas pour intention, et encore une fois, cela sort du


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  1   cadre de mon rapport, de déterminer si cela a été justifié ou non, si

  2   c'était raisonnable ou pas. Dans mon rapport, je ne parle pas de

  3   coexistence idyllique en Bosnie-Herzégovine. Cela sort du cadre de mon

  4   rapport.

  5   Q.  Mais, Monsieur Theunens, de manière implicite, votre rapport, suggère

  6   que les Serbes se sont livrés à des actions illégales, impermissibles

  7   [phon], qui menacent la paix, qui compromettent la paix. Mais dans nos

  8   appels, dans nos activités, dans notre comportement, il y a eu suffisamment

  9   d'éléments qui vous ont permis de voir si ces mises en garde sont fondées,

 10   si effectivement une armée secrète n'est pas en train d'être organisée qui

 11   va commencer une guerre civile en Bosnie. Donc est-ce que cela ne vous a

 12   permis de voir que les Serbes étaient fondés, avaient des raisons de faire

 13   ce qu'ils font ? Est-ce que qui que ce soit vous a interdit de chercher et

 14   de trouver les raisons de leur comportement ?

 15   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, personne ne me l'a

 16   interdit, et personne ne m'a demandé non plus de m'intéresser aux causes

 17   des événements qui se sont produits en Bosnie-Herzégovine. Donc je n'ai pas

 18   tiré de conclusions sur les responsabilités ni sur l'origine donc qui a

 19   commencé, quoi et où, et à quel moment. Donc ce que j'ai fait sur la base

 20   des documents auxquels j'avais accès, et dans le cadre du contexte de mon

 21   rapport, j'ai essayé d'analyser le rôle joué par M. Karadzic en tant

 22   qu'instance de pouvoir politique la plus haut placée vis-à-vis de la

 23   Défense territoriale et de la VRS serbe, donc de Bosnie. Je me suis

 24   polarisé sur deux choses, son autorité de supérieur hiérarchique, sa

 25   capacité à émettre des ordres, à contrôler la mise en œuvre de ces ordres,

 26   et deuxièmement le fait qu'il a été au courant de la situation. C'est peut-

 27   être un champ très limité, mais c'est ce que c'est.

 28   Q.  Merci. Cependant, dans le chapitre de Défense territoriale de la


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  1   République serbe de Bosnie-Herzégovine, au petit (b), événements politique

  2   les plus importants vous dites que les Serbes de Bosnie avec le SDS à leur

  3   tête ont mis sur pied des structures parallèles politiques de Bosnie-

  4   Herzégovine, ce qui a eu pour apogée la proclamation de la République serbe

  5   de Bosnie-Herzégovine, le 9 janvier 1992, et vous dites que, le 24 octobre,

  6   nous avons mis sur pied une Assemblée du peuple serbe. Au point 1, puis au

  7   petit (a), (b) que l'Assemblée du peuple serbe a déclaré son soutien plein

  8   et entier à la JNA.

  9   Donc, avez-vous pu savoir si, d'un point de vue constitutionnel, nous

 10   avons été lésés ? Est-ce que nous avons donné la chance aux Croates et aux

 11   Musulmans de corriger la situation ? Est-ce que nous avons répondu

 12   simplement en mettant sur pied notre assemblée ? Est-ce que nous nous

 13   sommes simplement contentés toujours de réagir face aux actions de l'autre

 14   partie ou bien cela ne vous semble pas important ?

 15   R.  Monsieur le Président, j'ai déjà essayé de répondre à cela dans

 16   mes réponses précédentes. Ces éléments sortent du cadre de mon rapport.

 17   Alors le fait qu'ils sortent du cadre de mon rapport, ne signifie pas que

 18   je les estime moins importants ou pas importants.

 19   J'ajouterais que la question des droits constitutionnels, est-ce

 20   qu'il y a eu ou non une violation de ces droits, cela sort aussi de mon

 21   domaine de compétence. C'est quelque chose qu'il faudrait demander à un

 22   expert constitutionnel.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais mis à part cette question de

 24   l'ordre du droit constitutionnel, vous n'étiez pas au courant de ces faits

 25   ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour certains d'entre eux, j'étais au courant

 27   de ces faits grâces aux activités que j'ai eues avant de commencer à

 28   travailler pour bureau du Procureur, mais ce n'est pas quelque chose que


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  1   j'ai étudié pour mon rapport. C'est la raison pour laquelle je réponds

  2   toujours de la même façon, à savoir que je ne suis pas en mesure de fournir

  3   des éléments supplémentaires puisque ma mémoire n'est pas précise, ma

  4   mémoire de ces autres événements.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Mais de quelle structure parallèle parlons-nous des Serbes de Bosnie,

  8   quelles sont ces structures qui effectivement existent avant le mois

  9   d'avril 1992 ? Quelles sont ces structures qui commencent à fonctionner ?

 10   Les SAO, est-ce qu'ils ont un pouvoir ? Est-ce que l'Assemblée des Serbes

 11   de Bosnie agit en tant qu'un conseil populaire pendant que nous

 12   fonctionnons encore dans les instances régulières; est-ce qu'il y a ne

 13   serait-ce qu'une seule instance parallèle serbe qui aurait commencé à

 14   fonctionner avant le mois d'avril 1992 et qu'elle ait exercé un pouvoir ?

 15   R.  Je ne peux que dire la chose suivante : un certain nombre d'organes

 16   sont créés avant le mois d'avril 1992, et ils sont mentionnés dans le

 17   chapitre consacré aux principaux événements politiques. Nous avons

 18   l'assemblée, la proclamation des SAO, ainsi que la décision création du

 19   gouvernement.

 20   Mais pour répondre à la question qui est de savoir s'ils ont exercé

 21   un pouvoir quelconque. Le Conseil de Sécurité nationale du 27 mars 1992,

 22   qui est la date de sa création, émet ou prend un certain nombre de

 23   décisions même si les rapports que j'ai sur les activités du conseil de

 24   sécurité nationale ne datent que des dates qui se situent après le 1er

 25   avril. Maintenant, le 1er avril, c'est la prise de pouvoir à Bijeljina, et

 26   raisonnablement, on pourrait supposer que, si le SDS et Arkan, à en juger

 27   par la JNA, prennent le contrôle -- ou plutôt, excusez-moi, enlèvent,

 28   démantèlent les barricades qui avaient été érigées par ce qui est appelé


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  1   Bérets verts, et s'ils prennent le contrôle dans la municipalité, ces

  2   structures et leur coopération sont normalement là depuis avant la date du

  3  1er avril. Je veux dire, d'un point de vue militaire, ce n'est pas seulement

  4   quelque chose que vous décidez le 1er avril dans la matinée, et puis après,

  5   vous agissez selon. Non, il vous faut un plan pour mettre cela sur pied.

  6   Donc, à Bijeljina, il y a d'autres groupes qui prennent par à la prise de

  7   pouvoir, et tout cela, il a fallu l'organiser, le planifier.

  8   Q.  Mais ce que je vous soumets, Monsieur Theunens, c'est qu'à Bijeljina,

  9   ce sont les instances de pouvoir légitimes qui se sont défendues face à des

 10   Bérets verts, et vous n'arrêtez pas de dire qu'il y a eu une prise de

 11   pouvoir à Bijeljina, mais on a pris le pouvoir à qui ?

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Là encore, c'est une question à laquelle

 13   on a déjà répondu.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, mais nous avons de nouveau reçu une

 15   réponse erronée, donc je voudrais qu'on m'apporte une preuve, une preuve à

 16   ce qui est affirmé.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous n'avons pas suffisamment de temps

 18   pour reprendre les mêmes questions tant de fois.

 19   Je pense que le moment est venu de faire la pause.

 20   Maître Robinson, la sécurité ne s'opposera pas, d'après ce que l'on me dit,

 21   à ce qu'un troisième membre de l'équipe de la Défense rencontre M. Karadzic

 22   dans la cellule d'attente pendant les pauses. Par conséquent, les jours où

 23   la Chambre a accepté qu'un expert de la Défense soit présent dans le

 24   prétoire, cet expert pourra rencontrer M. Karadzic dans la cellule pendant

 25   les moments d'attente, en plus des deux autres membres de l'équipe.

 26   M. ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, et je remercie également

 27   la sécurité.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons faire une pause, et nous


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  1   reprendrons à 13 heures 24.

  2   --- L'audience est suspendue pour le déjeuner à 12 heures 33.

  3   --- L'audience est reprise à 13 heures 26.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, à vous.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Monsieur Theunens, je vais essayer de faire en sorte que nous puissions

  7   examiner le plus vite possible des sujets qui sont essentiels pour moi. Ne

  8   vous sentez pas gêné s'il y a quelque chose que vous ignorez, parce que

  9   vous avez travaillé avec les documents qui vous ont été remis mais, pour

 10   moi, il est important de savoir ce que vous avez pris en compte et ce que

 11   vous n'avez pas pris en compte.

 12   Alors, est-ce que la partie serbe en Bosnie-Herzégovine, et non pas

 13   uniquement le SDS mais toutes les parties présentes à l'Assemblée du peuple

 14   serbe en Bosnie-Herzégovine ont bien renoncé à cet objectif du maintien au

 15   sein de la Yougoslavie pour accepter l'idée d'un maintien -- de leur

 16   maintien au sein de la Bosnie-Herzégovine, à condition que cette dernière

 17   soit décentralisée, et savez-vous que ceci est intervenu dès la fin 1991 ?

 18   R.  Les deux premiers éléments d'abord. Tout d'abord, il ne s'agit pas là

 19   de savoir quels documents j'ai reçus. J'ai moi-même sélectionné les

 20   documents à partir des matériaux qui n'étaient disponibles par

 21   l'intermédiaire des bases de données du bureau du Procureur. Il n'y avait

 22   pas de restrictions imposées à l'accès à ces documents.

 23   Deuxième partie de la question, je ne peux pas commenter parce que je n'ai

 24   pas fait d'analyse politique. J'ai fait une analyse militaire. Donc, la

 25   proposition avancée par le Dr Karadzic sort du cadre de mon rapport.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, à ce stade, vous

 27   devriez savoir quel était le cadre du rapport rédigé par le témoin. Alors,

 28   je vous en prie, je considère que ce type de question que vous venez juste


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  1   de poser compromet l'efficacité de votre contre-interrogatoire. Une

  2   question en elle-même n'a aucune valeur, à moins que le témoin ne soit en

  3   mesure d'y répondre. Vous aurez d'autres occasions de présenter vos idées

  4   devant d'autres témoins.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais Excellence, si vous aviez un peu plus foi

  6   en moi, vous verriez que je vais droit au but, à savoir les six objectifs

  7   stratégiques sont-ils quelque chose de nouveau en politique serbe ou  bien

  8   tout ceci a-t-il fait l'objet d'un accord avec la communauté

  9   internationale, avec les Musulmans et les Croates en Bosnie dès la fin 1991

 10   ? Est-ce l'un ou l'autre ? Parce que maintenant, nous passons au sujet de

 11   ces objectifs stratégiques.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Alors, Monsieur Theunens, savez-vous que ces six objectifs stratégiques

 14   pour lesquels vous avez indiqué avoir observé que l'on y avait travaillé

 15   dès avant le mois de mai, savez-vous donc que tous ces objectifs

 16   stratégiques, à l'exception de l'objectif stratégique numéro 2, avaient

 17   fait partie des sujets abordés pendant les pourparlers consacrés à la

 18   Bosnie-Herzégovine, dès que nous avons renoncé à notre maintien au sein de

 19   la Yougoslavie ?

 20   R.  Madame et Messieurs les Juges, je ne peux pas répondre à la question.

 21   C'était peut-être le cas, mais je n'ai pas analysé les activités de la

 22   Conférence internationale sur l'ex-Yougoslavie, pas plus que les activités

 23   de M. Cutileiro ou de Lord Carrington dans le cadre de cette conférence.

 24   Q.  Merci. Mais vous avez dit que la VRS avait été constituée avec pour

 25   objectif et pour mission la réalisation de six objectifs stratégiques,

 26   n'est-ce pas ?

 27   R.  Je ne crois pas avoir choisi cette formulation. Il est exact, en

 28   revanche, que ce que je montre dans le rapport, c'est que les six objectifs


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  1   stratégiques constituent un socle pour les opérations menées par la VRS

  2   pendant toute la durée de son existence jusqu'à la conclusion d'un accord

  3   de paix en novembre 1995, et il y avait eu un cessez-le-feu juste avant. On

  4   le voit également dans les directives émises par l'état-major principal

  5   ainsi que dans deux directives émises par M. Karadzic en qualité de

  6   commandant suprême, tout comme dans les ordres adressés aux unités

  7   subordonnées, ainsi que nous l'avons discuté déjà lors de l'interrogatoire.

  8   Q.  Monsieur Theunens, voici comment les choses se présentent : est-ce que

  9   le premier objectif stratégique, à savoir la séparation ethnique des Serbes

 10   des autres communautés ethniques, a été établi avant mai 1992, avant

 11   l'éclatement de la guerre, pendant la conférence; oui ou non ? Est-ce que

 12   nous avons obtenu que la Communauté européenne propose qu'il y ait trois

 13   communautés ethniques constitutives, les Serbes, les Croates et les

 14   Musulmans, et dont les droits devaient être protégés ? Parce que si vous

 15   n'avez pas pris en compte ceci, comment pouvons-nous prendre en

 16   considération votre rapport en premier lieu, si vous ignorez ceci ?

 17   R.  Je me réfère à la note en bas de page 163 de la partie numéro 2 de mon

 18   rapport. M. Karadzic présente les objectifs stratégiques lors de la 16e

 19   Séance de l'Assemblée. Il dit que, concernant le premier objectif, il vise

 20   à, je cite :

 21   "Séparer -- obtenir la séparation de ceux qui sont nos ennemis et qui

 22   avaient utilisé toutes les occasions, notamment dans ce siècle, de nous

 23   attaquer, et qui continueraient à se livrer à de telles pratiques si nous

 24   devions rester au sein du même Etat."

 25   Alors, c'est la façon dont M. Karadzic présente cet objectif aux membres de

 26   l'Assemblée des Serbes de Bosnie-Herzégovine. Il ne fait aucune référence à

 27   cet objectif ou à cette séparation dans les plans de paix présentés par

 28   l'Union européenne, ou la Communauté européenne, ou d'ailleurs toute autre


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  1   organisation internationale.

  2   Encore une fois, en examinant ces documents, à la fois les objectifs

  3   stratégiques des Serbes de Bosnie que les directives, il n'y a aucune

  4   adoption de ces objectifs, et encore moins une mise en œuvre.

  5   Q.  Monsieur Theunens, mais n'est-ce pas l'intolérance ethnique qui a mené

  6   les Slovènes et les Croates à quitter la Yougoslavie, et ensuite les

  7   Musulmans à quitter cette Yougoslavie tronquée ? N'ai-je pas moi, ensuite,

  8   devant l'assemblée, déclaré : Si vous, vous ne souhaitez pas vivre au sein

  9   de la Yougoslavie, parce que vous avez peur d'être mis en minorité, nous

 10   non plus, nous ne voulons pas vivre à vos côtés en Bosnie parce que c'est

 11   vous qui allez nous mettre en minorité. Dans chaque guerre, les Musulmans

 12   se sont toujours rangés aux côtés des Croates et des Allemands et nous ont

 13   attaqués, et tout cela était vrai. Monsieur, tout ceci a été prononcé

 14   publiquement :

 15   "Nous ne devons pas rester au sein du même système politique avec

 16   vous, d'autant plus que vous avez choisi le fondamentalisme islamique comme

 17   programme de base pour votre futur Etat."

 18   Cela a été dit publiquement. Si vous aviez suivi les événements tels

 19   qu'ils se sont déroulés de façon tout à fait publique, vous l'auriez su.

 20   Est-ce que vous savez que c'est l'intolérance ethnique qui a été le

 21   fondement de toutes les sécessions en ex-Yougoslavie, y compris notre

 22   effort visant à transformer la Bosnie-Herzégovine ?

 23   R.  Madame et Messieurs les Juges, ma réponse est probablement déjà connue.

 24   L'intolérance ethnique en tant que motivation d'une sécession de la RSFY

 25   sort du cadre de mon rapport. C'est pourquoi je ne l'ai pas analysée.

 26   Q.  Mais vous prenez les choses à l'envers, vous partez de la conséquence

 27   des choses.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, si vous le préférez,


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  1   vous pouvez vous installer dans le siège du témoin. Ne polémiquez pas avec

  2   le témoin.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je compte sur l'honnêteté du témoin. J'essaie

  4   simplement de faire valoir auprès de lui que l'approche qu'il a choisie est

  5   erronée. Je lui demande de se demander s'il est exact que --

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous connaissez la

  7   position du témoin. Vous la connaissez déjà. Vous connaissez également le

  8   cadre de ses travaux et de son rapport. C'est à vous qu'il revient, en

  9   temps voulu, de présenter des arguments relatifs à la crédibilité ou à

 10   l'exhaustivité des travaux du témoin. Mais ne polémiquez pas avec le témoin

 11   et ne perdez pas de temps, Monsieur Karadzic.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur Theunens, saviez-vous qu'avant la guerre, nous avions accepté

 15   de renoncer à la continuité territoriale, que l'objectif stratégique numéro

 16   2 n'était pas indispensable et que cet objectif stratégique numéro 2 s'est

 17   imposé à nous, en fait, précisément à cause de la guerre ?

 18   R.  Madame et Messieurs les Juges, c'est là l'interprétation de M.

 19   Karadzic. Dans mon rapport, j'ai essayé d'expliquer ce que j'appelle les

 20   opérations de prise de contrôle en Bosnie-Herzégovine du nord-est, ce qui

 21   correspond aux événements d'avril/mai 1992. Ces événements font partie de

 22   la mise en œuvre de l'objectif stratégique numéro 2, à savoir la mise en

 23   place d'un couloir entre la Krajina et la Semberija.

 24   Q.  Mais avez-vous établi qu'avant que nous ne ménagions ce couloir,

 25   l'autre partie avait pris le pouvoir à Derventa, à Modrica, à Odzak, à

 26   Orasje, et à Bosanski Brod, n'est-ce pas exact, dans l'ancienne province

 27   numéro 3 du plan Owen-Stoltenberg, à savoir en Posavina ? Saviez-vous que

 28   préalablement à ce que ce couloir soit ménagé, ils avaient rendu toute


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  1   communication impossible pour nous, ils avaient tout bloqué après avoir

  2   pris le contrôle de ces localités ?

  3   R.  Madame et Messieurs les Juges, afin de pouvoir répondre à la question,

  4   je voudrais me référer à la note en bas de page numéro 163 ainsi que 164 de

  5   la deuxième partie de mon rapport, où nous avons, encore une fois, le

  6   procès-verbal de la 16e Session de l'Assemblée, et d'après ce procès-

  7   verbal, nous pouvons voir que, concernant le second objectif stratégique,

  8   M. Karadzic explique qu'il est, je cite :

  9   "…de l'importance la plus cruciale pour le peuple serbe, parce que

 10   cela permet d'intégrer les terres serbes."

 11   Monsieur Karadzic dit ensuite que, je cite :

 12   "La Krajina, la Krajina serbe, la Krajina de Bosnie, où les lignes,

 13   existant entre les Etats serbes, ne sont pas viables à moins que nous ne

 14   ménagions ce couloir qui nous permettra de circuler sans entrave."

 15   Q.  Je vous ai posé une autre question.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, veuillez écouter la

 17   réponse du témoin.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais ce n'est pas la question que j'ai posé,

 19   Excellence. Je lui ai demandé s'ils avaient pris le contrôle --

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur le Témoin.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 22   Lorsque M. Karadzic a expliqué aux membres de l'Assemblée ce qu'était cet

 23   objectif stratégique numéro 2, il ne s'est pas référé aux activités qui

 24   avaient été celles des autres partis et qui avaient visé à couper ou à

 25   interrompre ce couloir. Il s'est référé à cette raison principale en disant

 26   que, je cite :

 27   "La raison principale était de permettre et de s'assurer de

 28   l'alliance des Etat serbes et de la circulation sans entrave d'une partie à


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  1   l'autre de notre Etat."

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, vous ne savez pas si ceci a été

  3   déclenché par la guerre ou non ? Parce que c'est ce que -- c'est ce à quoi

  4   M. Karadzic a fait allusion.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Ce que je veux

  6   dire est la chose suivante : si cela avait été déclenché par les

  7   agissements des autres partis ou la guerre, je me serais attendu à ce que

  8   M. Karadzic l'explique, lors de la Séance de l'Assemblée, et qu'ils disent

  9   aux membres présents que les autres partis avaient coupés ou interrompu ce

 10   couloir et que c'était là l'une des raisons, mais on ne retrouve pas la

 11   moindre explication de ce type dans le procès-verbal.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Mais conviendrez-vous que les Krajina pouvaient survivre à ceci près

 15   que toute communication entre elles avait été interrompue et que

 16   l'interruption de ces communications est intervenue, justement, pendant la

 17   guerre.

 18   R.  Je ne suis pas sûr d'avoir bien compris la question, parce que le

 19   couloir de Posavina relie la Semberija aux deux Krajina, la Krajina de

 20   Bosnie et la Krajina Croate. C'est deux Krajina sont reliées à l'exception

 21   de ce que est devenu ensuite la poche de Bihac. Quand à savoir si ceux deux

 22   Krajina auraient pu ou non survivre sans le couloir, d'après ce que vous

 23   dites, le 12 mai 1992, le couloir était crucial, essentiel, pour permettre

 24   une circulation sans entrave d'une partie à l'autre de l'Etat. Il y avait,

 25   manifestement une motivation politique, aussi, à ménager ce couloir. Vous

 26   dites que sans cela, l'alliance des Etats serbes n'était pas praticable.

 27   Lorsque je me penche, par ailleurs, sur l'opération couloir, juin-juillet

 28   1992, lorsque l'on voit des éléments de la RSK, c'est-à-dire de la Défense


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  1   territoriale de la RSK, tout comme des effectifs du MUP de la RSK opéraient

  2   de façon conjointe sous commandement de la VRS afin de ménager ce couloir

  3   et de l'élargir, là encore, la nature vitale de ce couloir est tout à fait

  4   claire dans la vision qui est celle des Serbes et dans la façon dont ils

  5   ont mis en avant ce caractère absolument crucial.

  6   Q.  Peut-être serait-il plus simple que je vous demande la chose suivante :

  7   Est-ce qu'avant que ce couloir ne soit ménagé, la Krajina de Bosnie et la

  8   Krajina serbe étaient complètement encerclés par l'ennemi ?

  9   R.  Madame, Messieurs les Juges, je peux parler de la Krajina de Croatie et

 10   je ne dirais pas que pendant le conflit en Croatie, cette Krajina ait été

 11   assiégée. Je ne donnerai pas cette caractérisation.

 12   Q.  Soit, mais est-ce que vous vous rappelez que le troisième objectif

 13   stratégie consistait en l'établissement d'une frontière flexible ou souple

 14   sur la Drina, qu'il n'y ait pas de frontières entre deux mondes, en quelque

 15   sorte et non pas qu'il s'agisse d'une frontière entre deux Etats serbes,

 16   comme vous l'avancez dans votre rapport.

 17   R.  Pour être tout à fait clair, j'utilise, pour ma part, le terme de "Etat

 18   serbe". Un Etat n'est pas nécessairement la même chose qu'un pays. Et

 19   encore une fois dans le texte, je n'ai pas besoin de le lire, mais au 2(c),

 20   on voit la façon dont M. Karadzic présente la chose aux membres de

 21   l'assemblée. Il met en avant l'importance de cet objectif stratégique afin

 22   de porter préjudice aux intérêts de l'ennemi.

 23   Q.  Où cela est-il écrit ?

 24   R.  Excusez-moi. C'est la note en bas de page numéro 163. Il est question

 25   des six objectifs stratégiques et ensuite, je cite -- A partir du procès-

 26   verbal de la 16e séance de l'assemblée, si vous le souhaitez, je peux en

 27   donner lecture. Je cite : Concernant le troisième objectif stratégique,

 28   Monsieur Karadzic indique --


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous êtes en train de lire.

  2   Madame Uertz-Retzlaff, est-ce que vous avez le numéro de document 65

  3   ter ? Je crois que c'est son -- c'est le compte rendu de la 16e séance,

  4   n'est-ce pas ?

  5   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui.

  6   Madame, Monsieur les Juges, c'est la pièce P00781.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous l'afficher à l'écran ?

  8   Ce n'est pas de cela qu'il s'agit. P1355 est la cote, alors que le procès-

  9   verbal a une cote différente.

 10   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] --

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, si c'est le compte rendu, nous en aurons

 12   l'utilité également.

 13   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] C'est en fait plutôt la cote P00956.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous d'abord avoir le compte rendu

 15   pour pouvoir constater ce qu'il en est et ensuite, nous passerons au

 16   procès-verbal.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Pendant que nous en attendons l'affichage, Monsieur Theunens, ce point

 19   qui concernait les objectifs stratégiques, faisait-il partie de l'ordre du

 20   jour et a-t-il été adopté, a-t-il fait l'objet de décisions au moment du

 21   vote ?

 22   R.  Une décision a bien été adoptée et diffusée au moyen d'un document

 23   référencié en note de bas de page numéro 163, diffusé, donc, sous la forme

 24   de la décision concernant les six objectifs stratégiques numéro 02-130/92

 25   signé par Momcilo Krajisnik, président de l'assemblée.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Essayons de retrouver le passage de ce

 27   document.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, en anglais,


Page 17030

  1   lorsque M. Krajisnik présente les objectifs stratégiques, en fait, c'est la

  2   page 9523 à 9524, en numérotation ERN, 0198523 [comme interprété] à 24.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais nous n'avons pas de tels numéros

  4   ERN.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Oui, mais là, c'est le procès-verbal dont il s'agit. Moi, ce que

  7   j'avance, c'est que M. Theunens, il n'a à aucun moment, ni à l'ordre du

  8   jour, ni dans les décisions adoptées par l'assemblée la moindre mention des

  9   six objectifs stratégiques. Il s'agissait d'informations que je fournissais

 10   par rapport à notre position dans les pourparlers, mais il n'y a pas de

 11   document officiel de l'assemblée qui les mentionne, ni de décision. Nous

 12   pouvons -- nous pouvons examiner tous les documents officiels relatifs à

 13   cette Séance de l'Assemblée, nous ne retrouvons aucune mention.

 14   Alors, si quelqu'un dispose d'une copie papier, je veux bien qu'on

 15   nous montrer qu'il s'agissait là d'un document officiel qui a fini par être

 16   adopté.

 17   R.  Madame, Messieurs les Juges, je viens de m'y référer. En plus du

 18   procès-verbal, nous avons également ce document intitulé : "Décision

 19   concernant les six objectifs stratégiques et signés par M. Krajisnik". A la

 20   même date --

 21   Q.  Nous y viendrons. Nous y viendrons et nous verrons comment ceci a été

 22   généré.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais peut-on voir ce qu'il en est ici, dans ce

 24   document ? Donc, les numéros 1, 2, 3 n'ont rien à voir avec ce dont nous

 25   parlons.

 26   Pouvons-nous passer à la page suivante ?

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Les décisions qui ont été adoptées, est-ce que, parmi ces décisions,


Page 17031

  1   l'on trouve cette décision portant adoption des six objectifs stratégiques

  2   ?

  3   R.  Non, pas sur cette page.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous voir la page suivante ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Si l'on revient à la page précédente, on

  6   pourra voir qu'il s'agit là de décisions qui doivent être ratifiées ou

  7   confirmées. Dans la discussion et la présentation des six objectifs

  8   stratégiques ainsi que le débat qui s'ensuit, apparaissent plus loin dans

  9   le document.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Voyez-vous qu'il est question ici d'une plateforme de négociations avec

 12   la Yougoslavie, et qu'ensuite lorsqu'on m'invite en tant qu'orateur, je me

 13   vois demander de fournir une évaluation de la situation politique ainsi de

 14   notre position dans les négociations. Alors, est-ce qu'un débat et

 15   l'adoption d'une décision concernant les objectifs stratégiques figurent

 16   officiellement à l'ordre du jour, et trouve-t-on la moindre trace de

 17   l'adoption d'une décision concernant ces six objectifs stratégiques ?

 18   R.  Pas sur cette page.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous passer à la page suivante alors ?

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Vous voyez ici qu'au point numéro 16, nous avons la fin de la section

 22   qui concerne les décisions. Alors, ceci doit déjà faire partie du procès-

 23   verbal, et je commence, je m'exprime ici en fait. C'est le début de mes

 24   propos, "Mesdames et Messieurs," c'est le début de l'allocution que je

 25   prononce, n'est-ce pas ? Il est dit ici, je cite : Il a déjà quelque chose

 26   qui n'est déjà advenu dans le passé, mais notre réponse est différente. Il

 27   est question de la création du HDZ en Croatie et de l'influence de ce

 28   facteur sur notre destinée.


Page 17032

  1   Pourrions-nous maintenant passer aux six objectifs stratégiques ?

  2   Page suivante, s'il vous plaît.

  3   Vous êtes d'accord pour dire que nous avons ici à un exposé du président de

  4   la république, adressé à l'assemblée et qui porte sur les informations dont

  5   il dispose et sur la position qui est la sienne concernant la situation

  6   politique ?

  7   R.  Oui, j'en conviens.

  8   Q.  Merci.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous maintenant passer à la page où je

 10   m'exprime sur le sujet des six objectifs stratégiques.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Nous verrons que c'est une conférence dont il s'agit et il est dit ici,

 13   nous avons obtenu un grand succès à cette conférence on obtenant

 14   l'assentiment de la communauté internationale en l'espèce de la Communauté

 15   européenne, quant à une Bosnie tripartite, une Bosnie constituée de trois

 16   états nationaux dont les rapports seront plus ou moins étroits. Nous, nous

 17   étions en faveur pour des rapports moins étroits, alors que les Croates

 18   voulaient quant à eux des rapports encore moins proches. Alors qu'en

 19   Europe, on défendait l'idée de rapport plutôt étroit. Mais ce qui est

 20   important, c'est que sur le plan politique nous ayons obtenu la

 21   reconnaissance de cette volonté qui est la nôtre de disposer d'une unité

 22   étatique légitime au sein de la Bosnie-Herzégovine et la reconnaissance

 23   également du fait que personne ne peut nous contester ceci, et cetera, et

 24   cetera.

 25   Ensuite, il est dit plus bas, je cite; cependant, juste après la

 26   reconnaissance internationale, ces messieurs de la Communauté ethnique

 27   musulmane ont publié d'ailleurs avant même, la reconnaissance de l'état que

 28   leur participation à la conférence n'était qu'une tactique visant à gagner


Page 17033

  1   du temps pour obtenir la reconnaissance l'état. Ils ont commencé à saboter

  2   de façon éhontée la conférence en question d'une façon qui était tout à

  3   fait inouïe sur la scène européenne, et les diplomates européens ne

  4   pouvaient en croire à leurs yeux ni leurs oreilles et se sont retrouvés

  5   dans l'impossibilité de comprendre qu'ils étaient en présence de telles

  6   manipulations, manipulations au sujet desquelles nous n'avons cessé de les

  7   mettre en garde, et cetera, et cetera.

  8   Alors, pouvons-nous maintenant passer au passage, à cet extrait en fait où

  9   je m'exprime quant aux six objectifs stratégiques. Est-ce que vous êtes

 10   d'accord pour dire, Monsieur Theunens, que tout ceci porte sur la

 11   conférence et sur les circonstances prévalentes en Bosnie ainsi que

 12   l'organisation interne de cette dernière, l'organisation nouvelle,

 13   l'ensemble de mon exposé, je dirais ?

 14   R.  Ce que je comprends ici, Madame et Messieurs les Juges, c'est que M.

 15   Karadzic fournit son interprétation, sa compréhension des activités qui ont

 16   eu lieu dans le cadre de la Conférence internationale sur la Yougoslavie,

 17   sur l'ex-Yougoslavie. Il s'exprime sur les problèmes associés et il fait

 18   part de ses positions, à ce sujet devant les membres de l'assemblée.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est le document auquel vous vous

 20   référez dans la note de bas de page numéro 163 ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il y a deux documents évoqués dans cette

 22   note de bas de page. Il y a le procès-verbal, et également le document

 23   signé par M. Krajisnik, qui confirme l'établissement de ces six objectifs

 24   stratégiques ainsi que leur diffusion, la diffusion de ces objectifs ou de

 25   l'information correspondante aux membres de l'Assemblée de Bosnie-

 26   Herzégovine.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous poursuivre et en venir à la

 28   partie où je parle des objectifs stratégiques. Quel est le numéro de page


Page 17034

  1   ERN, si l'on peut m'aider ? Pouvons-nous avancer quelques pages ?

  2   Pouvons-nous avancer encore dans le document, nous n'avons toujours pas les

  3   objectifs stratégiques ici.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Il est ici question du partage du ministère de l'Intérieur. Savez-vous

  6   qu'aux termes -- que dans le cadre de la conférence, nous avons réussi à

  7   faire reconnaître le droit de disposer de notre propre police ?

  8   R.  Comme je l'ai dit ce matin, je n'ai pas analysé les activités

  9   intervenues dans le cadre de la conférence; cependant, si on m'avait

 10   demandé de le faire, j'aurais consulté non seulement le procès-verbal et

 11   l'intervention de M. Karadzic quant à ce qui se jouait dans cette

 12   conférence, mais également les documents relatifs à la conférence en

 13   question, les documents émanant de ces membres, et cetera. ¸

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Alors savons-nous quelle est la

 15   référence chiffrée de ceci, je crois que c'est le second paragraphe.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Pouvez-vous vous pencher sur ceci, je cite : Nous avons tout fait pour

 18   qu'il n'y ait pas la guerre. Mais quand la guerre est arrivée, nous avons

 19   fait tout notre possible pour qu'elle s'arrête et pour que s'installe la

 20   paix qui aurait permis une résolution. Les cessez-le-feu sont avant tout

 21   violés par les Musulmans à Sarajevo et les Croates en Posavina, c'est là le

 22   couloir.

 23   Alors est-ce que vous voyez que notre position consiste ici à dire qu'il

 24   n'y aurait pas dû y avoir une guerre, qu'il fallait l'éviter et quand cette

 25   guerre est survenue, voyez que, moi, le 22 avril, j'ai présenté une

 26   plateforme portant sur l'arrêt de la guerre qui était en fait de nature

 27   militaire; est-ce que vous connaissez ceci ? C'est un document original

 28   émanant de l'acteur même dont vous avez étudié le comportement.


Page 17035

  1   R.  Je ne me rappelle pas exemple dans quel document on trouve ce

  2   programme. Mais si M. Karadzic veut me le montrer, je pourrais le lire.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Document 65 ter numéro 1033. Je demanderais

  4   qu'il s'affiche pendant un instant, après quoi nous reviendrons au document

  5   affiché en ce moment. Donc, document 65 ter numéro 1033. Entre-temps, nous

  6   pourrons trouver le document où figurent les six objectifs stratégiques.

  7   C'est un document distinct.

  8   Nous avions, jusqu'à ce moment-là, discuté d'un cessez-le-feu qui n'a pas

  9   été appliqué, et le 22, je présente ce programme. Voilà, c'est le programme

 10   bien connu du Tribunal qui s'affiche en cet instant sur les écrans.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Est-ce que vous voyez que je propose un cessez-le-feu sans condition,

 13   une reprise immédiate de la conférence, le fait que dessiner les cartes

 14   doit être une priorité pour la conférence puisque c'est la conclusion que

 15   nous avions atteinte le 12 avril avec l'ambassadeur Cutileiro ? Puis, il

 16   est question aussi de l'obligation suivante qui est faite à toutes les

 17   parties en présence en Bosnie, je cite :

 18   "…ne devenir partie intégrante d'aucun Etat limitrophe et qu'aucune force

 19   armée extérieure à la Bosnie-Herzégovine ne soit appelée en Bosnie-

 20   Herzégovine ou acceptée sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine.

 21   "Une obligation publique faite à toutes les parties en présence en Bosnie-

 22   Herzégovine de refuser d'accepter une politique du fait accompli, qui n'est

 23   pas une politique héritée du communisme, et qu'il ne soit accepté qu'aucun

 24   avantage obtenu par la force ne puisse être utilisé.

 25   "Application la plus immédiate possible d'un nouvel accord constitutionnel

 26   avec des garanties de la part de la Communauté internationale.

 27   "Début d'un processus de démobilisation et transfert du rôle de la JNA dans

 28   une période convenue."


Page 17036

  1   Je pense qu'il s'agissait de cinq ans.

  2   Donc, je pense que cette période était de cinq ans, la période durant

  3   laquelle l'armée devait rester sur place pour empêcher de nouveaux

  4   conflits. Est-ce que vous étiez au courant de ce programme ?

  5   R.  Je n'ai pas eu ce document sous les yeux jusqu'à présent. Comme je l'ai

  6   déjà dit, j'avais connaissance des conclusions de la Conférence

  7   internationale de l'ex-Yougoslavie avant de travailler au sein du bureau du

  8   Procureur, mais je n'avais pas encore vu l'original de ce document.

  9   Alors, à titre de commentaire, je dirais que, si M. Karadzic pouvait

 10   s'engager sur un cessez-le-feu immédiat et sur l'accord du 12 avril, c'est

 11   exact, mais je ne connais pas le contenu de l'accord du 12 avril, et d'un

 12   point de vue militaire, ceci signifierait que le président d'un parti peut,

 13   au moins vis-à-vis des forces qui sont de son côté, s'engager de cette

 14   façon à imposer le respect unilatéral du cessez-le-feu, effectivement.

 15   Q.  Merci. Ceci n'a rien à voir avec l'action de la communauté

 16   internationale mais avec mon action.

 17   Je demande le versement au dossier de ce document.

 18   Je pense que ce document aurait dû figurer dans votre rapport, n'est-ce pas

 19   ?

 20   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, si je devais

 21   analyser les activités de la conférence de paix, bien sûr, je devais le

 22   faire. Mais je pense que, si ma mission avait été située dans ce cadre,

 23   j'aurais intégré ce document, car comme je l'ai déjà dit à l'instant,

 24   j'aurais constaté que, dans ce document est confirmée l'autorité de M.

 25   Karadzic sur les forces bosno-serbes, car si l'on voit le paragraphe 1 de

 26   ce texte, on voit qu'en vertu de cette autorité, il pouvait prendre

 27   l'engagement d'un cessez-le-feu inconditionnel et immédiat.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce document sera versé au dossier --


Page 17037

  1   est-ce que vous avez une objection du côté de l'Accusation ?

  2   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Non. Je vous remercie, Monsieur le

  3   Président.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce document devient la pièce D1587.

  5   Mais pourquoi a-t-il été traduit aux Nations Unies -- car c'est un document

  6   à nous, oui, on voit notre en-tête ?

  7   Veuillez poursuivre.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois qu'il a été envoyé au bureau du

  9   Procureur, Excellence, voilà pourquoi. La date est celle du 22 avril 1992.

 10   Il a été envoyé au bureau du Procureur, puis traduit et transmis aux

 11   Nations Unies. En tout cas, c'est l'en-tête du Tribunal qu'on voit sur ce

 12   document.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela n'a pas d'importance. Veuillez

 14   poursuivre, Monsieur Karadzic.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche le document P956,

 16   encore une fois.

 17   Alors, retrouvons la page où il est question des six objectifs stratégiques

 18   pour l'afficher en compulsant le document page par page.

 19   Bon, page 7 en version serbe, et page correspondante en version anglaise.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Monsieur Theunens, est-ce que vous avez lu l'exposé que j'ai présenté à

 22   l'assemblée lorsque vous pensiez à ce programme, ou est-ce que vous n'avez

 23   pris connaissance que des six objectifs stratégiques ?

 24   R.  J'ai lu tout le document, et je me suis servi de clés de recherche, qui

 25   sont donc des mots, pour trouver un certain nombre de points particuliers

 26   dans ce document.

 27   Q.  Merci. Bien, dans cette page, nous lisons ce qui suit :

 28   "La partie serbe en Bosnie-Herzégovine, la présidence, le gouvernement, le


Page 17038

  1   Conseil de Sécurité nationale que nous avons créé, ont adopté les priorités

  2   stratégiques du peuple serbe."

  3   Donc, le mot priorité est utilisé, pas le mot objectif.

  4   La page correspondante est la page numéro 9 dans la version anglaise.

  5   Le premier objectif stratégique consiste à se séparer des deux autres

  6   communautés. Est-ce que vous convenez que c'était bien là le premier des

  7   principes résultant de la Conférence de Lisbonne ?

  8   R.  Je crois avoir déjà répondu à cette question quand j'ai cité une partie

  9   des explications fournies au moment de l'assemblée par M. Karadzic, à

 10   savoir qu'il ne parle pas de la Conférence de Lisbonne lorsqu'il explique

 11   cet objectif aux membres de l'assemblée, et je n'ai pas analysé ce

 12   document, pas plus que la Conférence de Lisbonne ou l'ICFY.

 13   Q.  Est-ce qu'il n'avait pas déjà parlé de la conférence un peu plus tôt ?

 14   R.  Il l'avait fait plus tôt, Monsieur le Président, mais lorsqu'il parle

 15   de ces six objectifs stratégiques, à ce moment précis, et lorsqu'il parle

 16   du premier de ces six objectifs stratégiques, il ne fait pas référence à la

 17   Conférence de Lisbonne. En relisant le document -- enfin, le procès-verbal

 18   de cette assemblée, je n'ai trouvé aucune mention qui permette d'établir un

 19   lien entre ce premier objectif et les explications fournies précédemment

 20   par lui sur la Conférence de Lisbonne. Et d'ailleurs, si j'avais trouvé une

 21   mention de la Conférence de Lisbonne ou de l'action de l'ICFY, j'aurais

 22   voulu relire les documents originaux de ces conférences pour voir ce qui

 23   était précisément proposé dans ces documents et, ce qui est encore plus

 24   important, pour vérifier la réaction des autres parties aux négociations

 25   par rapport à une proposition de séparation de peuple vis-à-vis des autres

 26   et de sa légitimité constitutionnelle.

 27   Q.  Voyons ce qui est dit au sujet du deuxième objectif stratégique, parce

 28   que dans la suite de l'intervention, il est dit que, si nous devons rester


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  1   ensemble au sein du même Etat, ils vont continuer à nous attaquer. Le

  2   deuxième objectif stratégique porte sur le corridor. Il est dit que c'est

  3   un élément qui peut nous contraindre à sacrifier quelque chose ici et là,

  4   mais que c'est un objectif d'une importance stratégique extrême.

  5   Est-ce que vous comprenez, Monsieur Theunens, que lorsque je dis que nous

  6   sacrifierons quelque chose, cela signifie que la partie serbe aux

  7   négociations va devoir abandonner un certain nombre de territoires pour

  8   obtenir le corridor en échange ?

  9   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, c'est fort possible.

 10   Mais ici, dans cette partie du texte, nous voyons -- enfin, je veux dire,

 11   le conflit a duré pendant toute la période où existait la VRS. En mai 1992,

 12   en particulier, jusqu'à la signature de l'accord de Dayton et du cessez-le-

 13   feu qui a précédé cet accord, disons jusqu'en novembre 1995. Nous voyons

 14   que maintenir ouvert ce corridor était une priorité pour la VRS qui

 15   exigeait de sa part de réduire ces effectifs dans d'autres régions pour

 16   disposer d'effectifs et d'équipements suffisants afin de maintenir le

 17   corridor ouvert, parce que ce corridor était une ligne vitale pour -- avec

 18   la Serbie -- de relations avec la Serbie. Donc, d'un point de vue

 19   militaire, sacrifier quelque chose ici et là est lié au fait que les

 20   effectifs numériques présents dans d'autres zones devaient être réduits ou

 21   limités parce qu'ils étaient nécessaires dans le corridor. Voilà ce que

 22   cela signifie.

 23   Q.  Je ne sais pas, Monsieur Theunens. Mais est-ce que vous savez que j'ai

 24   accepté le plan Vance-Owen en application duquel le corridor ne nous

 25   appartenait pas, que nous n'avions besoin du corridor qu'en cas de paix, au

 26   cas où nous faisions la guerre, mais --

 27   L'INTERPRÈTE : -- qu'en cas de guerre, correction de l'interprète, au cas

 28   nous faisions la guerre, mais qu'en cas de paix, nous n'en avions pas


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  1   besoin.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Est-ce que vous savez que j'ai signé cet accord le 1e mai 1993, accord

  4   selon lequel nous devions perdre la province numéro 3 ?

  5   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je connais le plan

  6   Vance-Owen, étant donné mon action avant de travailler pour le bureau du

  7   Procureur. Mais je me souviens aussi que les Bosno-Serbes ont rejeté les

  8   cartes qui allaient de pair avec le plan Vance-Owen sur la base d'un vote

  9   de l'assemblée pendant une Séance de l'Assemblée qui a eu lieu à Pale et à

 10   laquelle ont assisté y compris le président de la République de Serbie, M.

 11   Milosevic, Séance de l'Assemblée devant laquelle le général Mladic a

 12   expliqué quelles concessions territoriales les Bosno-Serbes devaient

 13   accepter si le plan Vance-Owen devait être adopté.

 14   Donc, je pense que nous devrions prendre en compte ces différents

 15   aspects des négociations, cette différente phase de la négociation, en les

 16   considérant comme un tout et prendre en compte, aussi, le résultat final

 17   qui a été le rejet, par les Bosno-Serbes, du plan Vance-Owen.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais la question qui vous a été posée

 19   portait sur la province numéro 3.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

 21   Juges, il faudrait que je revoie les cartes. Je ne me rappelle pas où se

 22   situe exactement la province numéro 3. M. Vance-Owen avait prévu dix

 23   provinces et je pense qu'il fallait aussi qu'il y ait un statut

 24   international pour la ville de Sarajevo, mais je ne me rappelle pas

 25   exactement les emplacements sur la carte.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Bon, est-ce que vous vous rappelez que moi, j'ai admis -- et pourtant

 28   ici, c'est moi qui suis jugé et pas le peuple serbe. Moi, j'ai accepté,


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  1   mais l'assemblée n'a pas pu se décider et a mis cette question au

  2   référendum et le peuple serbe a répondu non à cette question au référendum.

  3   Mais, moi, j'avais dit oui, or, c'est moi que l'on juge, ici.

  4   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, c'est exact. C'est

  5   le peuple serbe qui a refusé. Cela m'était un peu sorti de la tête. Le

  6   peuple bosno-serbe, bien sûr, a refusé.

  7   Q.  Merci. Est-ce que vous pourriez voir l'objectif stratégique numéro 3.

  8   Troisième objectif stratégique :

  9   "Création d'un corridor à partir de la vallée de la Drina, donc suppression

 10   de la Drina en tant que frontière séparant deux mondes différents."

 11   Est-ce que, dans le texte original, les mots utilisés sont "frontière entre

 12   deux mondes" ou "frontières entre deux Etats" ?

 13    R.  Dans ce texte, il est dit : "La Drina en tant que frontière entre deux

 14   mondes."

 15   Q.  Est-ce que vous savez que la Drina représentait une frontière entre

 16   l'est et l'ouest de l'Empire romain et qu'aujourd'hui encore, c'est un

 17   point de contact entre le monde occidental et le monde oriental, y compris

 18   le monde de l'Islam ? Est-ce que c'est bien la signification de cette

 19   expression "frontière entre deux mondes," c'est-à-dire la frontière entre

 20   l'est et l'ouest ? Est-ce que nous voulions, effectivement, supprimer le

 21   rôle de frontière de la Drina ?

 22   R.  Il est possible que tel soit l'explication. Mais quand on poursuit la

 23   lecture, on voit que vous dites, je cite :

 24   "Nous sommes des deux côtés de la Drina et notre intérêt stratégique ainsi

 25   que notre espace vital se trouve à cet endroit."

 26   Quand on se penche sur la carte et qu'on vérifie quelles sont les

 27   populations ou les entités ou les Etats présents d'un côté de la Drina et

 28   de l'autre, eh bien, on voit que du côté est se trouve la République de


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  1   Serbie et que du côté ouest se trouve, entre autres, les Bosno-Serbes.

  2   Donc, ma conclusion, c'est que le mot "nous" fait référence au peuple

  3   serbe.

  4   Q.  Mais est-ce que vous savez que Saint Sava, qui était un prince serbe,

  5   un moine du XXIIIe siècle, a dit :

  6   "Nous sommes l'ouest par rapport à l'est et nous sommes l'est par

  7   rapport à l'ouest et nous devrions jeter un pont entre l'est et l'ouest."

  8   Quand je reprend ces paroles, je parle de quelque chose qui est clair

  9   pour tous les Serbes, mais peut-être ne le comprenez-vous pas parce que

 10   vous ne connaissez pas Saint Sava ? Mais nous nous considérons comme une

 11   passerelle entre l'est et l'ouest. Est-ce que vous saviez cela ?

 12   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je connais, en gros,

 13   Saint Sava, mais dans mon analyse, les déclarations de Saint Sava n'avaient

 14   aucune pertinence.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, les sujets que l'on trouve dans la

 16   deuxième et la troisième phrase sont identiques. Ce "nous" signifie la même

 17   chose dans les deux phrases ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Quand on voit ce terme "nous," moi, je

 19   l'interprète comme faisant référence aux pourparlers qui portaient sur le

 20   peuple serbe ou sur les Serbes, et eux ne faisaient pas de différence entre

 21   les Serbes qui résidaient en Croatie, en Bosnie-Herzégovine, en Serbie, au

 22   -- ou même au Monténégro.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Bien entendu, nous sommes un seul et même peuple. Mais regardez ce que

 25   nous disons un peu plus loin. Je cite :

 26   "Des municipalités musulmanes doivent être créées sur la rive de la Drina

 27   et représentaient des enclaves."

 28   Donc le mot "nous" utilisé ici fait référence aux dirigeants de la


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  1   Republika Srpska et je parle de la conclusion définitive de la conférence.

  2   Je dis qu'il y aura des municipalités musulmanes sur les rives de Drina.

  3   Comment ceci peut-il correspondre aux conclusions tirées par vous selon

  4   lesquelles nous aurions attaqué Srebrenica parce que nous ne voulions pas

  5   qu'existe des enclaves ? Même si nous avons toujours été favorables à ce

  6   que les Musulmans aient des territoires de la zone de la Drina ?

  7   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je reprends

  8   maintenant la question de M. Karadzic. Il a dit que :

  9   "Nous aurions attaqué Srebrenica parce que nous ne voulions pas

 10   qu'existent des enclaves."

 11   Ce n'est pas une conclusion qui a été tirée par moi. Nous avons

 12   discuté de la directive numéro, signée par M. Karadzic. D'ailleurs, c'est

 13   peut-être la directive numéro 7, je ne sais plus très bien. Mais enfin,

 14   quoi qu'il en soit, directive numéro 6 ou numéro 7 qui a été versée au

 15   dossier de l'espèce dans laquelle sont énumérés les objectifs définis par

 16   M. Karadzic. Je veux dire les objectifs militaires définis par M. Karadzic

 17   pour l'avenir de ces enclaves et les populations qui allaient y vivre.

 18   Q.  Je dis, Monsieur Theunens, que nous avons mis en œuvre une action qui

 19   visait à séparer Zepa et Srebrenica, mais pas à nous en emparer, parce

 20   qu'eux nous tuaient au quotidien, et vous voyez que le troisième objectif

 21   stratégique n'a rien à voir avec l'élimination des enclaves, parce que

 22   notre position consistait à dire qu'ils devaient pouvoir avoir des enclaves

 23   dans la Région de la Drina. Est-ce que ce n'est pas ce qui est écrit dans

 24   ce document, et est-ce que vous ne savez pas que pratiquement dans tous les

 25   plans, nous avons accepté que la zone de la Drina appartienne aux Musulmans

 26   ?

 27   R.  Oui, mais, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, il faut

 28   prendre en compte l'ensemble du paragraphe. M. Karadzic dit même -- ou


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  1   plutôt, les dirigeants de la Republika Srpska, comme il les appelle, disent

  2   même qu'ils envisagent la possibilité que certaines municipalités

  3   musulmanes soient crées dans les enclaves situées le long de la Drina pour

  4   leur permettre de jouir de leurs droits, mais que cette ceinture qui

  5   existerait le long de la Drina doit, sur le plan -- doit finalement

  6   appartenir aux Bosno-serbes et à l'Herzégovine. De la suite de son propos,

  7   il dit qu'au départ, il tolérera peut-être l'existence de telles enclaves

  8   mais que, manifestement, il a d'autres visées pour la suite par rapport à

  9   l'existence de ces enclaves. C'est ce qu'on voit dans les phrases suivantes

 10   -- enfin, dans les trois dernières lignes du paragraphe.

 11   Q.  Mais où est-ce que -- voyons ce qui est dit au début, je cite :

 12   "…afin qu'ils jouissent de leurs droits, mais cette ceinture le long

 13   de la Drina devra finalement appartenir aux Bosno-Serbes et à

 14   l'Herzégovine, même si sur le plan stratégique, cela pouvait être positif

 15   pour nous, cela nous aidait puisque cela nuisait aux intérêts de notre

 16   ennemi. Je veux parler de la création de ce corridor. Est-ce que vous

 17   pensez que le fondamentalisme islamique aurait pu être notre ami et que

 18   nous n'avions pas le droit d'empêcher la progression du fondamentalisme

 19   musulman dans notre pays ? Moi, je ne m'occupe pas de l'Europe. Donc,

 20   l'Europe, je la laisse se débrouiller par elle-même.

 21   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, cette question -- je

 22   veux dire, la question de -- entre guillemets, "le fondamentalisme

 23   islamique," sort du champ de mon rapport. Quand je parle des objectifs

 24   stratégiques, je n'exprime aucun jugement par rapport au fait de savoir

 25   s'ils sont bons ou mauvais, ou quoi que ce soit d'autre. Je ne fais que

 26   citer ces objectifs factuellement. Lorsque j'ai analysé les documents que

 27   j'avais à ma disposition, j'en suis arrivé à la conclusion qu'il y avait

 28   cohérence entre les objectifs stratégiques et le plus haut niveau de


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  1   l'orientation politique et militaire d'une part, et d'autre part, les

  2   opérations menées par la VRS entre le moment où elle s'est créée en mai

  3   1992 et l'accord de cessez-le-feu de l'automne 1995.

  4   Mais j'aimerais d'ailleurs apporter une correction à ma réponse

  5   précédente, lorsque j'ai dit que je ne savais plus très bien si c'était la

  6   directive numéro 6 ou la numéro 7. J'aurais dû dire directive numéro 7.

  7   Elle est évoquée dans la note en bas de page 371 de la deuxième partie du

  8   rapport.

  9   Q.  Nous y viendrons plus tard.

 10   M. KARADZIC : [interprétation] Voyons et affichons le document 1D3926 pour

 11   voir ce qu'a dit le fils d'Alija Izetbegovic, Bakir, dans son discours

 12   inaugural au moment de son élection à la présidence de Bosnie-Herzégovine,

 13   grâce aux accords de Dayton, présidence composée de trois membres. Cela a

 14   un rapport avec le troisième objectif stratégique.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Uertz-Retzlaff.

 16   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que

 17   nous pourrions avoir des précisions au sujet de la pertinence de tout ceci,

 18   parce que ceci me semble sortir du champ temporel dont nous parlons ?

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais il dit que ceci a un rapport avec

 20   le troisième objectif stratégique. Je ne peux pas me prononcer tant que je

 21   n'ai pas vu le document.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Dans ce document, M. Izetbegovic - donc, nous

 23   sommes en novembre 2010 - dit, une nouvelle fois, que la Bosnie est un

 24   point de contact entre deux mondes. C'est cela qui est important à mes

 25   yeux. Il faut que je retrouve la ligne -- ah, elle est au paragraphe numéro

 26   4. En fait, numéro 3. Voilà.

 27   "Alors, l'idée selon laquelle la Bosnie-Herzégovine, manifestement,

 28   transcende sa superficie géographique et ses frontières, étant donné


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  1   qu'elle est une ligne de contact entre deux mondes, donc, il ne s'agit pas

  2   uniquement de la Bosnie-Herzégovine mais d'intérêts mondiaux qui sont liés

  3   ou pas."

  4   En fait, ce ne sont pas les "intérêts" mais les "relations," donc des

  5   relations internationales qui sont unies ou pas.

  6   Est-ce que vous voyez, Monsieur Theunens, que la logique des

  7   dirigeants -- du dirigeant musulman et du dirigeant serbe sont les mêmes

  8   par rapport à ce fait qu'il s'agit d'un point de contact entre deux mondes

  9   en Bosnie ?

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il est temps que vous nous expliquiez la

 11   pertinence de ce document par rapport à l'objectif stratégique numéro 3.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, je parle de frontières qui

 13   transcendent leur rôle de frontière, qui sont des frontières entre deux

 14   mondes et pas seulement entre les Serbes, et ceci a un rapport avec

 15   l'objectif stratégique numéro 3 parce que la Drina était également

 16   qualifiée de frontière entre deux mondes. C'était la frontière entre deux

 17   parties de l'Empire romain, et cette idée était très présente dans nos

 18   esprits, et un analyste n'aurait pas dû commettre la moindre erreur par

 19   rapport à cela.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais en quoi est-ce que ce passage

 21   concerne des frontières entre deux mondes ? J'ai quelque difficulté à

 22   comprendre.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne dis pas que la Drina doit être une

 24   frontière entre deux Etats serbes. Je parle de la Drina en tant que

 25   frontière entre deux mondes, et c'est également ce que dit M. Izetbegovic.

 26   Nous parlons de quelque chose de global. C'est un élément qui est très

 27   présent dans nos âmes. Il ne s'agit pas de frontières entre deux Etats.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais quel rapport avec votre affaire,


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  1   avec votre thèse ? Votre thèse consiste à dire que la Drina était une

  2   frontière entre deux mondes, l'est et l'ouest, comme vous l'avez dit, c'est

  3   cela ?

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. S'agissant du troisième objectif

  5   stratégique, je dis que nous devrions faire en sorte que la Drina ne soit

  6   plus une frontière entre deux mondes, mais je ne parle pas de deux Etats

  7   serbes. Or, selon les accusations retenues contre moi, j'aurais parlé de

  8   deux Etats serbes.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vais consulter mes collègues.

 10   [La Chambre de première instance se concerte]

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre ne voit pas de pertinence aux

 12   propos du fils de M. Izetbegovic après tant d'années, alors avancez, je

 13   vous prie, et passez au document suivant.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, je voudrais que l'on passe un extrait

 15   d'enregistrement vidéo pour que l'on voie ce que j'ai dit lors d'une

 16   émission télévisée, lors d'un entretien à la télévision, en 1993,

 17   concernant cet objectif stratégique numéro 3. Je pense qu'il n'y a pas

 18   d'ambiguïté et que c'est bien cette époque-là dont il s'agit.

 19   [Diffusion de la cassette vidéo]

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Les interprètes ont la transcription, donc nous

 21   demanderons aux interprètes de bien vouloir assurer l'interprétation de ces

 22   propos.

 23   [Diffusion de la cassette vidéo]

 24   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 25   "Le journaliste : Voici les dernières questions des téléspectateurs,

 26   et puis ensuite nous devrons terminer l'émission.

 27   A quel moment les frontières entre la Serbie et la Republika Srpska

 28   s'assoupliront-elles ? Est-ce que le monde extérieur est au courant qu'il


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  1   n'existe aucune frontière comparable entre la Croatie et la Bosnie-

  2   Herzégovine ?

  3   Radovan Karadzic : Il me semble qu'en exprimant leur volonté que ce soit le

  4   pouvoir central qui défende les frontières --"

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Revenons en arrière. Reprenons.

  6   [Diffusion de la cassette vidéo]

  7   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  8   "Le journaliste : Bien. Voici les dernières questions des

  9   téléspectateurs. Ensuite nous devrions terminer l'émission.

 10   A quel moment les frontières entre la Serbe et la Republika Srpska

 11   s'assoupliront-elles ? Est-ce que le monde extérieur est au courant qu'il

 12   n'existe aucune frontière comparable entre la Croatie et la Bosnie-

 13   Herzégovine ?

 14    Radovan Karadzic : Il me semble qu'en exprimant leur volonté, que ce soit

 15   le pouvoir central qui défende les frontières, les dirigeants musulmans

 16   avaient plutôt en tête la frontière entre l'Herzégovine et la Croatie, à

 17   laquelle n'est attachés aucune restriction que la frontière sur la Drina.

 18   Nous ne permettrons jamais, car il s'agit de l'un des objectifs

 19   stratégiques que notre assemblée a adopté, nous ne permettrons jamais

 20   qu'une frontière qui traverse des territoires serbes deviennent une

 21   véritable frontière assortie de restrictions, même si cela a été le cas

 22   pendant un certain temps en raison de la nature des relations économiques

 23   et autres, qui a fait qu'il a fallu que tel soit le cas pendant quelque

 24   temps, mais à présent cela va changer du tout au tout. En fin de compte,

 25   ceci est conforme à l'accord de Lisbonne et à ces documents, c'est-à-dire à

 26   tout ce qui définit actuellement la tendance observée en Europe. C'est un

 27   droit dont jouissent les Allemands et les Français, c'est un droit garanti

 28   à l'Alsace  et à Loraine, ce sont des droits qui doivent aussi être


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  1   garantis au Serbes qui vivent sur les deux rives de la Drina."

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez parlé alors que

  3   l'interprétation n'était pas terminée, vous avez donc à répéter.

  4   L'INTERPRÈTE : Note de la cabine française : L'interprétation fournie était

  5   la traduction de la transcription fournie en cabine et non pas

  6   l'interprétation de la bande de son qui n'est pas de qualité suffisante

  7   pour être interprété.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il manque --

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation]  Il y en a un peu plus, je parle de la tendance

 10   européenne et je parle de l'assouplissement des frontières qui doivent être

 11   mis en place.

 12   Alors je voudrais qu'on liste l'intégralité de la transcription.

 13   L'INTERPRÈTE : Un passage manqué dans l'interprétation française :

 14   Mais à présent cela va changer du tout au tout. En fin de compte, les

 15   régions serbes de l'ex-Bosnie-Herzégovine auront une grande liberté pour

 16   établir des liens économiques et autres avec qui elles voudront. Les

 17   invalides et autres qui se sont battus avec courage, nous ne permettrons

 18   jamais qu'une frontière qui traverse les territoires serbes soit une

 19   véritable frontière assortie de restrictions même si cela a été le cas à

 20   une certaine époque. Les rapports économiques et autres ont fait en sorte

 21   que ceci a dû être le cas pendant quelque temps. Mais à partir de

 22   maintenant, les choses vont changer de ce point de vue du tout au tout. En

 23   fin de compte les Régions serbes de l'ex-Bosnie-Herzégovine auront une

 24   grande liberté pour établir des liens économiques et autres avec qui elles

 25   voudront. Ceci est conforme à l'accord de Lisbonne et au document dont nous

 26   parlons, c'est-à-dire à tout ce qui est défini actuellement la tendance

 27   observable en Europe. C'est un droit dont jouissent les Allemands, et les

 28   Français, c'est un droit garanti à l'Alsace et à la Loraine, ce sont des


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  1   droits qui doivent aussi être garantis aux Serbes vivant sur les deux rives

  2   de la Drina."

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, cela vient d'être interprété.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  L'Alsace et la Loraine, les Allemands et les Français, comprenez-vous

  6   maintenant que le troisième objectif stratégique était conçu comme celui ou

  7   comme la présence d'une frontière, mais d'une frontière molle, non assortie

  8   de -- une frontière souple non assortie de restrictions draconiennes, une

  9   frontière telle qu'il en existait en Europe ? Il ne s'agissait pas du tout

 10   de l'idée d'unifier deux états serbes ?

 11   R.  Je ne parle pas d'unification d'état serbe, Madame et Messieurs les

 12   Juges, je parle juste de l'élimination de la Drina en tant que frontière.

 13   Ensuite j'ai ajouté la séparation des états serbes, parce que c'est

 14   l'interprétation qui est la mienne de la seconde phrase apparaissant dans

 15   ce paragraphe, où l'on discute des objectifs stratégiques, et c'est là ce

 16   que dit M. Karadzic devant les membres de l'assemblée. Il dit :

 17   "Nous sommes des deux côtés de la Drina, et notre intérêt stratégique ainsi

 18   que notre espace vital se situe là-bas."

 19   Je me fonde également sur l'entretien que nous avons entendu au début, mon

 20   impression est que M. Karadzic souligne le fait que l'existence d'une

 21   frontière entre les Serbes se trouvant de part et d'autre de la Drina, est

 22   inacceptable."

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans l'entretien, M. Karadzic dit que

 24   les Serbes se trouvant des deux côtés de la Drina doivent bénéficier de ses

 25   droits, n'est-ce pas ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Madame et Messieurs les Juges.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on verser ce document ?

 28   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel était le numéro de ce document dans

  2   votre liste 65 ter, Monsieur Karadzic ?

  3   Nous réglerons cette question --

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] 1D3930.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  6   Le document sera versé.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document reçoit la cote D1588, Madame

  8   et Messieurs les Juges.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous maintenant réafficher le document

 10   précédent, le procès-verbal de la Séance de l'Assemblée, afin d'examiner ce

 11   qu'il en est des quatrième, cinquième et sixième objectifs stratégiques.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Vous rappelez-vous que la première carte nous a signifié l'existence

 14   d'une frontière sur les rivières Una, Sava, Drina et partiellement

 15   également sur la rivière Neretva, dans son cours supérieur. Je parle de la

 16   carte et du plan Cutileiro mais également de toutes les autres cartes.

 17   Aujourd'hui, nous sommes présents et sur la Drina, et sur la Sava et sur

 18   Una et sur le cours supérieur de la Neretva, en vertu des accords de

 19   Dayton, qui nous ont reconnu ce droit.

 20   R.  Madame et Messieurs les Juges, j'ai examiné ces cartes, dans le cadre

 21   de mon travail, mais je souhaitais pouvoir les consulter à nouveau. Je vois

 22   qu'il est fait référence dans le procès-verbal à des versions de travail

 23   des cartes en question, ce qui n'est pas la même chose qu'une version

 24   finale. Par conséquent, il conviendrait également de faire la distinction

 25   entre les différentes versions qui ont existé de ces cartes.

 26   Q.  Merci. Mais, Monsieur Theunens, dans chacune de ces cartes, nous

 27   débouchions sur la rivière Una, sur la rivière Sava, sur la Drina, sur la

 28   Neretva également, dans chacune de ces cartes; est-ce que vous le saviez ?


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  1   Est-ce que vous saviez qu'il ne s'agissait en rien d'un objectif

  2   stratégique nouveau mais que c'était là un programme sur la base duquel les

  3   négociations ultérieures devaient se dérouler, c'était là les exigences que

  4   nous allions présenter de toute façon, parce que c'est ce que nous avions à

  5   offrir et qui n'avait -- que ce n'était pas controversé ?

  6   R.  Je me rappelle les différentes cartes qui ont été proposées, Madame et

  7   Messieurs les Juges, pendant toute la durée du conflit, à l'occasion des

  8   différentes tentatives de la communauté internationale visant à trouver une

  9   solution pacifique du conflit. Le plan Cutileiro, le plan Vance-Owen, le

 10   plan Owen-Stoltenberg, le plan du Groupe de contact, et pour finir la carte

 11   des Accords de Dayton. Alors, c'est une question d'interprétation en fait,

 12   il a pu y avoir des zones sous contrôle serbe qui étaient frontalières des

 13   rivières que vient d'énumérer M. Karadzic. Mais je peux vous dire, sans

 14   même consulter les cartes, qu'il y a là des différences assez importantes,

 15   notamment quant au nombre d'entités et quant au pourcentage du territoire

 16   qui devait être accordé aux différentes entités -- aux différentes parties.

 17   Q.  Mais, Monsieur Theunens, dans la proposition de M. Cutileiro avant la

 18   guerre, est-ce bien également la rivière Una qui a été mise en avant en

 19   tant que frontière pour les Serbes, et en tant que frontière naturelle, du

 20   reste ?

 21   R.  Madame et Messieurs les Juges, je ne me rappelle pas exactement la

 22   carte et la carte finale qui a été avancée dans le cadre du plan Cutileiro,

 23   mais en tout état de cause, cela sort du cadre de mon travail.

 24   Q.  Très bien. Mais vous prenez position par rapport à ceci et vous

 25   considérez les raisons -- les motifs de l'existence de la VRS et vous

 26   faites une équivalence entre ses motifs avec des objectifs politiques qui

 27   auraient existé et qui auraient fait l'objet d'un accord dès avant la

 28   guerre. Par conséquent, il s'agit là d'un élément crucial dans votre


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  1   rapport. Ces objectifs stratégiques, vous les présentez comme la motivation

  2   même de l'action de la VRS. Mais, moi, ce que je vous dis, c'est que pour

  3   les municipalités musulmanes dans le Podrinje, nous n'avons jamais dénié

  4   leur existence, les villages et les municipalités musulmanes de la vallée

  5   de la Drina. Savez-vous que le président Milosevic, à Dayton, en accord

  6   avec moi, a indiqué qu'il était possible de négocier la restitution de Zepa

  7   et de Srebrenica aux Musulmans ? Si vous consultez les procès-verbaux,

  8   auxquels nous, nous n'avons pas accès, vous le verrez, cela a été dit avec

  9   mon accord. Ce n'était pas notre objectif que de leur dénier tout droit à

 10   exister là-bas. Il ne s'agissait que de les empêcher de nous tuer, et même

 11   à Dayton, nous avons reconnu la possibilité qu'ils aient leur propre

 12   municipalité là-bas.

 13   R.  Je ne peux répondre qu'en me référant, encore une fois, à l'opération -

 14   - aux opérations numéro 7, notes en bas de page numéro 370 et 371, partie 2

 15   de mon rapport. Il y est établi que la tâche confiée au Corps de la Drina

 16   de la VRS, en fait, s'insère dans le cadre de la directive signée par M.

 17   Karadzic, et en tant que commandant suprême --

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous y reviendrons demain.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste un instant. Monsieur le Témoin,

 20   que répondez-vous ? Est-ce que vous savez ou vous ne savez pas ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous voulez dire ma réponse ?

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La question portait sur les négociations

 23   de Dayton et le fait que M. Karadzic et M. Milosevic aient prévu ou accepté

 24   la possibilité que les Musulmans disposent de leur propre municipalité là-

 25   bas.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Probablement, au sens où un accord a été passé

 27   et qu'à présent, ceci -- après Dayton, et que telle ou telle municipalité,

 28   après les accords de Dayton, est devenue une municipalité bosnienne ou


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  1   musulmane à Srebrenica -- donc, Srebrenica est devenue une municipalité

  2   musulmane.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  4   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Pourriez-vous examiner le cinquième objectif stratégique ?

  7   Voyez-vous que notre position était que l'on ne partage pas la Bosnie mais

  8   que l'on procède à une réorganisation administrative, et que l'on procède -

  9   - que l'on évite, en fait, une division de la ville, et que l'on la

 10   réorganise en dix municipalités sur une base ethnique, comme Bruxelles, et

 11   que nous avons fourni, comme exemple, non pas Beyrouth, non pas Nicosie,

 12   mais Bruxelles. Est-ce que vous le saviez ?

 13   R.  Encore une fois, je ne sais pas ce que les Serbes de Bosnie ou M.

 14   Karadzic ont présenté pendant les négociations. Je ne me rappelle pas les

 15   détails de ces pourparlers. Mais je crois que ce que nous trouvons ici dans

 16   cette explication est tout à fait clair. Il dit "Alija," et il se réfère là

 17   à Izetbegovic. Il dit :

 18   "…aussi longtemps qu'Alija n'a pas d'Etat, alors que nous, nous avons

 19   une partie de Sarajevo," et cetera.

 20   Je crois que c'est important pour comprendre et évaluer l'objectif

 21   stratégique numéro 5 dans son contexte et avec toute la pertinence qu'il a

 22   aux yeux de M. Karadzic.

 23   Q.  Très bien. Mais vous devriez savoir, n'est-ce pas, qu'il ne s'agit pas

 24   là d'un objectif nouveau établi à la date du 12 mai, qu'il s'agit en

 25   revanche d'un objectif dont il a été discuté et qu'il y avait deux

 26   variantes, à savoir qu'au terme de la variante numéro 1, Sarajevo devait

 27   jouir d'extraterritorialité et qu'il devait être temporairement administré

 28   par les Nations Unies, et variante numéro 2, si la guerre n'intervenait


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  1   pas, que certaines municipalités se réorganisent et que l'on permette

  2   l'existence d'une municipalité croate, serbe, musulmane; n'est-ce pas ?

  3   Vous ne le saviez pas -- mais si vous ne le saviez pas, reconnaissez-le.

  4   R.  Madame, Messieurs les Juges, je ne suis pas familier de ce que dit M.

  5   Karadzic à l'instant. Peut-être était-ce son pendant à l'époque. Mais nous

  6   pouvons également voir ce qui s'est passé sur le terrain à Sarajevo dès

  7   avant l'annonce de ces six objectifs stratégiques. Lorsque je parle de

  8   Sarajevo dans mon rapport à partir de la note en bas de page 657 et jusqu'à

  9   la note en bas de page 666, où j'aborde les activités des forces des Serbes

 10   de Bosnie, y compris des cellules de Crise, dans différentes municipalités

 11   et à Sarajevo aux mois d'avril et de mai 1992.

 12   Q.  Est-ce que votre position consiste à dire que les Serbes assiégeaient

 13   Sarajevo ?

 14   R.  Madame et Messieurs les Juges, c'est là une question différente.

 15   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Monsieur Theunens, pouvez-vous répondre

 16   par oui ou non ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, Madame et Messieurs les Juges. Je

 18   ne peux pas répondre par oui ou non.

 19   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Très bien. Continuez.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas un souvenir exact de ce qui figure

 21   dans tous les documents relatifs au Corps de Sarajevo-Romanija. Si je suis

 22   censé répondre à la question de savoir si Sarajevo était assiégée ou non,

 23   je dois dire que je n'ai pas analysé le statut de Sarajevo pendant la durée

 24   du conflit. Je peux répondre à la question si l'on retrouve cette même

 25   terminologie dans l'une des directives ou dans l'un ou l'autre des

 26   documents du commandement de la VRS et que l'on retrouve cette notion

 27   d'assiégement, de siège de la ville, parce que, dans ce cas-là, je pourrais

 28   me baser sur ce document. Alors, je peux évidemment procéder à cette


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  1   recherche en dehors du prétoire mais, par ailleurs, je n'ai pas évalué ni

  2   analysé le statut de Sarajevo pendant l'année 1992 et jusqu'en 1995.

  3   M. KARADZIC : [interprétation] Merci.

  4   Q.  Alors, objectif stratégique numéro 6. Est-ce que vous savez que le

  5   président Tudjman, M. Izetbegovic et moi-même sommes parvenus à un accord

  6   au terme duquel la Bosnie-Herzégovine devait renoncer à ses droits à Neum

  7   et que les Serbes et les Musulmans se voient attribuer chacun 8 kilomètres

  8   de littoral pour accéder à la mer dans un territoire adjacent au

  9   Monténégro, et que ceci a été reconnu et accepté dans le cadre du plan

 10   Owen-Stoltenberg, qui était le deuxième, alors que le plan Cutileiro était

 11   le premier, et le plan Owen-Stoltenberg était en fait le troisième, et que

 12   l'on y retrouve en fait ce qui était prévu pour notre accès à la mer ? Oui

 13   ou non. Est-ce que vous saviez, oui ou non ?

 14   R.  Oui, Madame et Messieurs les Juges. Je crois que ceci était également

 15   connu sous le nom des négociations ou des pourparlers "Invincible," parce

 16   que les pourparlers ont eu lieu à bord du navire l'Invincible de la marine

 17   britannique.

 18   Q.  Merci. Pouvez-vous nous dire si nous avons jamais essayé d'accomplir ce

 19   sixième objectif stratégique par des moyens militaires ?

 20   R.  Madame et Messieurs les Juges, je ne peux pas répondre de tête. Il

 21   faudrait d'abord que je puisse examiner les directives afin de vérifier si

 22   elles comportent des instructions, donc, si ces neuf directives comprennent

 23   la moindre instruction indiquant à la VRS de conduire de telles opérations.

 24   Alors, je me rappelle, sur la base de mes activités externes au

 25   bureau du Procureur qu'aucune opération militaire de cette nature n'a eu

 26   lieu, à l'exception de ce qui suit. De façon occasionnelle, et notamment au

 27   début de la saison touristique, la VRS se lançait dans des opérations

 28   d'artillerie de caractères symbolique visant l'arrière-pays, au sens large,


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  1   de Dubrovnik. Cela s'est présent, par exemple, lorsque j'étais en service

  2   au sein de la FORPRONU. Alors, ne croyons pas que l'objectif des Serbes de

  3   Bosnie était de percer en direction de la mer pour y avoir accès. A notre

  4   sens, il s'agissait davantage de harcèlement visant les Croates.

  5   Q.  Excusez-moi, mais je crois qu'il faut que nous apportions des

  6   précisions. Ici, notre intérêt n'était pas de nous disputer avec les

  7   Croates. Nous avions de bonnes relations pendant les guerres, nous

  8   commercions avec eux et mon armée n'aurait pas pu se maintenir sans

  9   coopération avec les Croates. Est-ce que vous saviez cela ? Parce que,

 10   comme vous l'avez dit vous-même, au mois d'août 1994, la Yougoslavie a mis

 11   en place des sanctions à l'égard de la Republika Srpska.

 12   R.  Madame, Messieurs les Juges, la question comporte plusieurs aspects.

 13   Il y a les relations entre les Serbes de Bosnie et les Croates de

 14   Bosnie. Cela n'est pas abordé dans mon rapport, mais je sais, d'après les

 15   travaux qui ont été les miens avant de rejoindre le bureau du Procureur,

 16   qu'à l'échelon local et notamment à Kiseljak, mais également ailleurs, il y

 17   avait de bonne relations entre les Croates de Bosnie et les Serbes de

 18   Bosnie. Ceci a évolué dans le temps, notamment après que l'accord portant

 19   sur la fédération ne soit adopté, en 1994. Par ailleurs, il y avait,

 20   effectivement, des sanctions imposées par le président de la République de

 21   Serbie au moins d'août 1994, à l'encontre des Serbes de Bosnie et ceci,

 22   pour les punir de leur refus du plan du Groupe de contact. Alors, lorsque,

 23   dans ce document, il est question des relations entre la VJ et la VRS, il

 24   convient de dire que les sanctions en question n'ont pas mis un terme à

 25   l'aide apportée par la VJ à la VRS. Ceci est également visible, par

 26   exemple, lorsque l'on s'intéresse aux procès-verbaux du Conseil suprême de

 27   la Défense de la RFY. C'est quelque chose qui a également été mis en avant

 28   dans l'interrogatoire principal.


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  1   Q.  Merci, Monsieur Theunens, mais vous élargissez sans cesse les champs.

  2   Vous parlez de l'armée dont j'ai été le commandant suprême et le chef. Vous

  3   dites que cette armée aurait bombardé Dubrovnik dans le but de lui infliger

  4   des dommages et de compromettre sa saison touristique, et moi, j'ai dit que

  5   ceci est inexact. Nous avions une bonne coexistence avec les Croates. Nous

  6   leur fournissions de l'électricité, eux nous fournissaient du carburant.

  7   Avec Boban, j'ai réussi à pacifier un nombre considérable de kilomètres de

  8   ligne de front dès la date du 5 mai, mais c'est quelque chose que vous

  9   ignorez probablement, et nous avons parvenus -- nous sommes parvenus à ceci

 10   à Graz.

 11   Alors, au compte rendu d'hier, page 7, ligne 28, jusqu'à la ligne 8, page

 12   25, on voit qu'une question vous est posée. On vous demande si j'aurais pu

 13   ordonner qu'une enquête soit diligentée. Ensuite, on vous a présenté un

 14   document dans lequel on voit qu'une commission a été mise en place,

 15   commission censée enquêter sur les événements de Banja Luka survenus au

 16   mois de septembre 1993. Donc cela est consigné en page 7, ligne 27, page 8,

 17   ligne 25.

 18   Monsieur Theunens, s'agit-il ici d'une enquête au pénal ou d'une enquête de

 19   nature politique, une enquête confiée à une commission parlementaire ?

 20   R.  Madame, Messieurs les Juges, il y a un document auquel je me réfère qui

 21   parle d'une commission d'enquête. Il n'y est ajouté aucun qualificatif

 22   d'enquête au pénal ou d'enquête parlementaire, mais je crois qu'il y a

 23   également un autre document qui aborde cette question.

 24   Q.  Est-ce que vous trouvez des noms de juristes, de juges, d'avocats, au

 25   pénal, ou bien s'agit-il ici de parlementaires, de représentants de l'état-

 26   major principal du chef de mon cabinet militaire ? En un mot en commençant,

 27   on vous a demandé si moi, en ma qualité de commandant suprême, j'avais

 28   qualité et possibilité pour ordonner qu'une enquête soit diligentée, une


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  1   enquête ou des enquêtes, à vrai dire. On vous a présenté ce document, comme

  2   exemple, mais, moi, ce que je vous dis, c'est que cet exemple vous montre

  3   le cas d'une enquête parlementaire et non pas d'une enquête au pénal, parce

  4   que le président n'a pas qualité pour ordonner aux organes judiciaires de

  5   procéder à une enquête. Il ne peut que prendre position, mais il ne peut

  6   pas ordonner qu'une enquête soit diligentée.

  7   Est-ce que vous avez retrouvé le moindre exemple où le président

  8   aurait interféré avec le travail des tribunaux ?

  9   R.  Je n'ai pas retrouvé de document ni consulté de documents où l'on

 10   verrait M. Karadzic ordonner au système judiciaire civil de diligenter une

 11   enquête. Cependant, en note en bas de page numéro 1029, page 295 de la

 12   seconde partie de mon rapport, je vois que le 15 mars 1995, M. Karadzic

 13   émet une instruction directe adressée au général Tolimir et, je cite, il

 14   ordonne aux organes de Sécurité de la VRS de prendre des mesures, je

 15   reprends ensuite la situation, de prendre des mesures appropriée à l'égard

 16   du commandement à Olovo. Alors, d'après ce document, M. Karadzic avait des

 17   informations indiquant que le commandant de ce bataillon avait commis

 18   plusieurs crimes et il s'agissait davantage de criminalité en cols blancs

 19   ou économiques. Alors, je conviens qu'il ne s'agit pas ici d'un ordre

 20   demandant qu'une enquête soit diligentée, mais il s'agit d'ordonner quand

 21   même à quelqu'un de procéder à des recherches et à une enquête et il s'agit

 22   des organes de la sécurité qui doivent ici prendre des mesures appropriées.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle note en bas de page ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Note en bas de page numéro 1029, partie 2 du

 25   rapport.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel est le numéro de page ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans ma version --

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est probablement un numérotage


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  1   différent.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Je vous remercie, mais vous avez probablement retrouvé des documents

  4   indiquant qui -- enfin, où j'écrivais qu'il fallait aller plus vite, qu'il

  5   ne fallait pas relâcher les criminels, et cetera. Est-ce que vous avez

  6   trouvé le moindre exemple d'interférence de ma part, d'interférence avec

  7   les organes de l'Accusation et les organes judiciaires en général ? Tolimir

  8   est partie intégrante du processus de mise en accusation et je lui demande,

  9   simplement, de faire quelque chose. Mais est-ce que vous avez trouvé des

 10   exemples où moi, j'aurais interféré avec le travail de qui que ce soit.

 11   Parce que demandé que l'on accélère les choses, ce n'est pas interférer

 12   avec le travail de la justice au sein stricte ?

 13   R.  Madame, Messieurs les Juges, je n'ai pas retrouvé de tels documents ni

 14   de tels exemples.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons lever l'audience pour

 16   aujourd'hui.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaitais pouvoir poser encore une question

 18   si nous avons le temps.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, encore une question seulement.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Page 64 du compte rendu, ligne 20, jusqu'à la page 65, on vous a posé

 22   des questions relatives aux centres de documentation d'Etat censés enquêter

 23   sur les crimes de guerre commis à l'encontre de Serbes. Donc, on vous pose

 24   une question concernant ce centre de Documentation, qui est consacré aux

 25   crimes commis contre les Serbes. Alors, est-ce que ce centre de

 26   Documentation est une instance -- est un organe qui collecte des archives,

 27   ou bien fait-il partie entière du processus d'enquête au pénal ? C'est la

 28   page 16 en anglais de votre rapport ?


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  1   C'est un centre documentaire d'état, censé collecter des informations sur

  2   le territoire où nos organes d'instruction n'ont pas accès. Alors, à sa

  3   tête, nous trouvons l'homme de lettre célèbre, M. Tohoj; est-ce que, compte

  4   tenu de cela, ce centre de Documentation est un pur centre de Documentation

  5   et d'archive, ou bien a-t-il sa place au sein d'une procédure au pénal ? En

  6   d'autres termes, il n'y a pas de juges ni d'avocats, est-ce que malgré cela

  7   ce centre pouvait se substituer à qui que ce soit dans une procédure au

  8   pénal en Republika Srpska ?

  9   R.  Madame et Messieurs les Juges, concernant le centre de Documentation,

 10   nous avons également vu un ordre émanant du colonel Lugonja. Cela été

 11   abordé à l'interrogatoire principal. Il était chef des organes de sécurité

 12   au sein du Corps de Sarajevo-Romanija, et ceci concernait des crimes commis

 13   contre des Serbes et non pas des non-Serbes. Alors, je suis d'accord avec

 14   M. Karadzic pour dire que les motifs sous jacents à la mise en place de ce

 15   centre ne sont pas tout à fait clairs. Les ordres demandant de collecter

 16   ces informations ou ces documents, ordres émanant de Lugonja non plus.

 17   Cependant, ceci ne permet pas de conclure que ce centre viendrait se

 18   substituer à qui que ce soit dans le cadre de la procédure au pénal ou de

 19   la procédure judiciaire.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous devons maintenant lever l'audience.

 21   Nous reprendrons à 9 heures, demain matin.

 22   [Le témoin quitte la barre]

 23   --- L'audience est levée à 15 heures 03 et reprendra le jeudi 21 juillet

 24   2011, à 9 heures 00.

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