Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 7 septembre 2011

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 10 heures 03.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous. Bien que les stores

  6   aient été baissés, nous sommes en fait en audience publique. Monsieur

  7   Tieger.

  8   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Merci pour ce

  9   rappel du fait que nous sommes en audience publique. Je voudrais aborder

 10   une série de questions relatives au calendrier, mais il me semble que,

 11   compte tenu des facteurs à examiner, il est préférable de rester à huis

 12   clos partiel.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous allons donc passer à

 14   huis clos partiel.

 15   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 18508-18509 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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  2   [Audience publique]

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, Monsieur Tieger, concernant la

  4   58e requête récemment déposée d'une violation des obligations de

  5   communication demandant des sanctions concernant le Témoin KDZ-056 [comme

  6   interprété], les Juges de la Chambre relèvent qu'il s'agit d'un témoin à

  7   venir, le Témoin KDZ-052, dont la déposition était prévue pour la semaine

  8   prochaine. Alors, est-ce que l'Accusation pourrait répondre à cette

  9   écriture de la Défense au cours de la journée d'aujourd'hui ? Nous

 10   souhaiterions demander à l'Accusation d'indiquer dans sa réponse les

 11   raisons pour lesquelles le compte rendu de la déposition de ce témoin

 12   auquel les écritures en question se réfèrent n'a pas été communiqué

 13   précédemment, plus tôt.

 14   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 15   M. TIEGER : [interprétation] Nous préparons des écritures de façon

 16   accélérée, Monsieur le Président. Nous nous attendons à les déposer

 17   aujourd'hui, si cela vous convient. Si les Juges de la Chambre préfèrent,

 18   en revanche, que nous prenions position de façon orale, nous sommes à la

 19   disposition des Juges.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Nous allons repasser à

 21   huis clos partiel et poursuivre -- non, excusez-moi. Je me suis trompé.

 22   Nous allons poursuivre en audience publique.

 23   Madame Edgerton.

 24   Mme EDGERTON : [interprétation] Si je puis me permettre, Monsieur le

 25   Président, je voudrais demander l'autorisation de quitter le prétoire afin

 26   de pouvoir poursuivre les préparatifs qui concernent le Témoin KDZ-601. M.

 27   Tieger et moi-même travaillons en étroite coopération, et M. Tieger est

 28   parfaitement préparé à poursuivre en mon absence.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Aucun problème, Madame Edgerton.

  2   LE TÉMOIN : KDZ607 [Reprise]

  3   [Le témoin répond par l'interprète]

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Bonjour, Excellence. Bonjour à tous.

  6   Contre-interrogatoire par M. Karadzic : [Suite]

  7   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

  8   R.  Bonjour, Docteur Karadzic.

  9   Q.  Etiez-vous au courant du massacre des Serbes commis à Borike par les

 10   forces musulmanes le 6 mai 1992 ?

 11   R.  Non.

 12   Q.  Merci. Vous avez parlé de Zlatni Do dans votre déclaration datée du 12

 13   janvier 1994, et ce, au paragraphe numéro 2. Je crois que ceci figure

 14   également dans la déclaration consolidée. Alors, est-ce que vous savez que

 15   le 22 mai -- en fait, c'est plus probable que cela ce soit passé le 20 --

 16   non, le 21 mai -- donc que le 21 mai, Drazenko Mihajlovic, policier serbe,

 17   a été tué pendant qu'il était en patrouille dans une zone qui faisait

 18   partie du territoire de la municipalité serbe de votre propre localité ?

 19   R.  Je ne suis pas au courant qu'il a été tué.

 20   Q.  Dans ce cas-là, vous ne savez probablement pas non plus que son corps

 21   n'a pas été remis, qu'ils ont refusé de remettre son corps alors qu'ils

 22   avaient dit qu'ils le feraient, comme cela a été le cas pour au moins une

 23   dizaine d'autres Serbes ?

 24   R.  Non, je ne suis pas au courant.

 25   Q.  Saviez-vous à quel entité constitutionnelle ou constitutive votre

 26   partie de municipalité devait être rattachée, tant au terme du plan

 27   Cutileiro, qu'au terme du plan Vance Owen ou Owen Stoltenberg, que j'ai

 28   accepté, et ensuite, ultérieurement également, en application du plan de


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  1   groupe de contact ?

  2   R.  Non. Je ne le savais pas.

  3   Q.  Alors, si, moi, je vous disais que s'il n'y avait pas eu de guerre ni

  4   de combat, dans chacun de ces plans, votre partie de la municipalité et

  5   d'autres parties de cette municipalité auraient été rattachées à l'entité

  6   constitutive musulmane, que répondriez-vous ?

  7   R.  Pourriez-vous préciser votre question ?

  8   M. TIEGER : [aucune interprétation]

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.

 10   M. TIEGER : [interprétation] Je soulève une objection, Monsieur le

 11   Président. Ceci est dénué de pertinence.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Lorsque nous en viendrons au paragraphe 54, je

 14   pense que tout un chacun verra à quel point ceci est pertinent.

 15   Je voudrais maintenant que l'on affiche le document 1D883, à l'écran, s'il

 16   vous plaît.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Est-ce que Medjedja et Ustipraca se trouvent à ce point près de votre

 19   municipalité qu'elles l'en sont en fait frontalières ?

 20   R.  Oui, en effet c'est sur la frontière de la municipalité.

 21   Q.  Merci. Savez-vous qu'à l'époque de cet événement, Medjedja et

 22   Ustipraca, il y avait 3 000 combattants musulmans qui essayaient d'établir

 23   une jonction entre le Podrinje et la Bosnie centrale ?

 24   R.  Excusez-moi, mais de quelle année parlez-vous ?

 25   Q.  Exactement à la date et pendant ces jours où se sont déroulés ces

 26   événements que je viens d'évoquer ?

 27   R.  Non, je n'ai pas connaissance qu'il y ait eu un nombre aussi important

 28   d'entre eux, présent.


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  1   Q.  Alors, je vous remercie. Veuillez examiner cette carte, qui s'est

  2   affichée. Laissez de côté la ligne jaune qui a été tracée et qui figure la

  3   Bosnie-Herzégovine telle que la prévoit les accords de Dayton. Ceci est la

  4   seconde carte de l'ambassadeur Cutileiro, alors que la première était un

  5   peu plus favorable aux Serbes.

  6   Est-ce que, sur cette carte, vous voyez votre propre municipalité ?

  7   R.  J'ai du mal à m'orienter sur cette carte. Je sais que Rogatica se troue

  8   dans la partie sud de la Bosnie orientale.

  9   Q.  Est-ce que vous voyez où se trouve Gorazde, est-ce que vous voyez que

 10   dans cette version-là aussi, Gorazde appartient à la fédération ?

 11   R.  Oui.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais demander à l'huissier de bien

 13   vouloir indiquer au témoin comment manier le stylet.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Si vous voyez où se trouve Foca, Gorazde et Visegrad, je vous prie

 16   d'indiquer l'emplacement de chacune de ces localités par la première

 17   lettre, F, G et V.

 18   R.  Est-ce que c'est cette carte dont il s'agit ?

 19   Q.  Ce qui est en vert, oui sur le territoire en vert, c'était la première

 20   carte à laquelle j'avais donné mon accord.

 21   R.  Je ne vois pas.

 22   Q.  Mais vous voyez que dans le cadre de cette ligne jaune, vous voyez où

 23   se trouve Gorazde, et que Gorazde est toujours sur le territoire de la

 24   fédération.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, pourquoi devons-nous

 26   nous reposer sur ce témoin pour indiquer l'emplacement de Gorazde, Foca et

 27   Visegrad ? Il s'agit de lieux que nous pourrions localiser en nous appuyant

 28   sur d'autres cartes. Mais le témoin devrait quand même pouvoir indiquer


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  1   l'emplacement de sa propre municipalité, afin de nous indiquer que même

  2   sans la guerre, cette municipalité serait revenue aux Musulmans.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger.

  4   M. TIEGER : [interprétation] Je crois que vous avez raison de dire,

  5   Monsieur le Président, que cette question ne peut pas être posée aussi

  6   simplement. Je crois que cette question revient à s'efforcer de verser ce

  7   document par l'intermédiaire de ce témoin, ce qui en temps normal ne serait

  8   pas possible. Nous savons où cette municipalité se trouve, et le simple

  9   fait pour l'accusé de demander au témoin de localiser cette municipalité

 10   sur cette carte, revient au fait pour lui à déposer sans que le témoin

 11   puisse véritablement dire ce qu'il a à dire, ni à ajouter quoi que ce soit

 12   de substantiel à la carte en elle-même.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suis d'accord, Monsieur Tieger.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur le Témoin, je voudrais attirer sur le paragraphe numéro 54 de

 16   votre déclaration. Est-ce que vous savez que premièrement --

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, Monsieur Karadzic.

 18   Monsieur Tieger, pouvez-vous m'indiquer le numéro exact du

 19   paragraphe, parce que ce numéro de 54 a probablement été modifié à un

 20   moment ou à un autre ?

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, il y a eu des changements. Alors, laissez-

 22   moi vérifier dans la nouvelle version, c'est le numéro 55.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Alors, Monsieur le Témoin, premièrement, est-ce que vous savez -- est-

 25   ce que vous avez vu personnellement ? Est-ce que vous saviez à titre

 26   personnel qu'à Jabuka, le 20 avril, on a utilisé des personnes comme

 27   bouclier humain ?

 28   R.  Oui, je le sais.


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  1   Q.  Comment le savez-vous ?

  2   R.  Je le sais grâce à un témoin qui se nomme --

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Donc, paragraphe 55 de la

  4   déclaration consolidée. Chargeons d'abord dans le prétoire électronique ce

  5   document, qui porte la cote P3289. Il ne faut pas diffuser la première

  6   page.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Laissons peut-être à l'affichage encore

  8   quelques instants cette carte, s'il vous plaît.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Monsieur le Témoin, avez-vous décrit cette tentative qui a consisté à

 11   essayer de vous transférer vers Olovo ?

 12   R.  C'était notre souhait à nous que de nous rendre à Olovo. Lorsque mon

 13   village a été attaqué, le 1er août 1992, nous avons été 23 personnes parmi

 14   lesquelles se trouvaient également 14 hommes et neuf femmes, nous avons

 15   exprimé le désir de prendre le chemin d'Olovo.

 16   Q.  Alors, je vous remercie. Pourquoi n'êtes-vous pas arrivé jusqu'à Olovo,

 17   et jusqu'où avez-vous pu arriver ?

 18   R.  Nous n'avons pas pu passer parce qu'il y avait des opérations de

 19   guerre. Et lorsque nous sommes arrivés à cet endroit, il y avait une

 20   embuscade et nous n'avons pas pu poursuivre notre chemin en direction

 21   d'Olovo.

 22   Q.  Merci. Est-ce que, sur cette carte, vous pourriez nous indiquer l'axe

 23   le long duquel vous vous êtes déplacé. Est-il exact que vous avez avancé

 24   sur ce territoire indiqué en rouge, qui correspond à la municipalité de

 25   Sokolac ? Est-il exact qu'il s'agit là d'un territoire serbe ? Est-il exact

 26   que la ligne de confrontation se trouvait là où passe cette ligne jaune

 27   près de Sokolac, et que cette ligne de confrontation est restée à cet

 28   endroit ?


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  1   R.  Je ne peux pas vous l'indiquer sur la carte, mais je sais par où nous

  2   sommes passés. Si je dois l'expliquer, je peux vous dire par quel chemin

  3   nous sommes passés.

  4   Q.  Merci. Cela n'a pas beaucoup d'intérêt si vous ne pouvez pas nous le

  5   dessiner sur la carte. Alors, en fait, pour cet événement du 20 avril,

  6   c'est quelque chose que vous ne savez pas directement, on vous l'a raconté,

  7   n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui. Il s'agissait d'un homme qui a survécu à cette utilisation en tant

  9   que bouclier humain et qui vivait à Gorazde.

 10   Q.  Merci. Est-ce que vous saviez -- est-ce que vous aviez vu de vos

 11   propres yeux le massacre de Kalimanic, au mois de juillet 1992 ?

 12   R.  Non, je n'ai pas été présent, mais il y avait un témoin de ces

 13   événements qui était de Gorazde. Il vivait à Gorazde, il a réussi à

 14   échapper à cette fusillade, et c'est lui qui a raconté cela.

 15   Q.  Vous, vous vous contentez simplement de relater ce que lui vous a

 16   raconté, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Est-ce que vous saviez ce qui figure au point petit (C), à savoir qu'au

 19   mois de juillet 1992, à Novoseoci, un groupe important de Musulmans a été

 20   emmené hors du village; est-ce que vous avez été présent personnellement ?

 21   Est-ce que vous en avez une connaissance directe ?

 22   R.  Non, je ne l'ai pas vu, mais je l'ai entendu dire, et cela a été

 23   confirmé ultérieurement par une exhumation.

 24   Q.  Je vous remercie. Ensuite, ce qui concerne Kramer Selo, au mois d'août

 25   1992, est-ce que vous avez été présent ? Est-ce que vous avez vu cela de

 26   vos propres yeux ?

 27   R.  Non, je n'étais pas présent, mais il y a eu une exhumation ultérieure

 28   qui a confirmé qu'il s'agissait bien là de ces corps-là, au moyen d'analyse


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  1   d'ADN. Des analyses d'ADN sont en cours et les résultats sont attendus sous

  2   peu qui devraient confirmer qu'il s'agissait bien de ces personnes.

  3   Q.  Concernant ce que vous expliquez au paragraphe 4 et vos positions

  4   politiques en général, est-ce qu'il résultait de ce que vous saviez à titre

  5   personnel ?

  6   R.  De quels événements politiques parlez-vous ?

  7   Q.  Après les élections, les événements en général. Est-ce que vous suiviez

  8   le déroulement de ces événements ?

  9   R.  Je ne sais pas ce que vous me demandez. Est-ce que vous voulez que je

 10   vous dise combien de sièges ont été obtenus par chaque parti ?

 11   Q.  Voyez le paragraphe 12, par exemple, on parle d'une attaque visant

 12   Kramer Selo encore une fois; est-ce que vous étiez au courant des attaques

 13   lancées par les Musulmans contre des villages serbes de votre municipalité

 14   ?

 15   R.  Non.

 16   Q.  Est-ce que vous êtes au courant d'un seul village serbe qui aurait été

 17   -- qui a été incendié dans votre municipalité ?

 18   R.  Non. Je ne suis au courant d'aucun cas de ce type puisque je vous ai

 19   dit déjà que je me trouvais dans ce village qui se trouvait dans la

 20   direction de Sarajevo. Je sais que des villages musulmans ont été

 21   incendiés, mais je ne suis pas au courant de l'incendie du moindre village

 22   serbe.

 23   Q.  Merci. Est-ce que vous savez quel était l'objectif de l'armée de

 24   Bosnie-Herzégovine par rapport à votre municipalité ?

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant avant d'entendre votre

 26   réponse, Monsieur le Témoin.

 27   Monsieur Tieger.

 28   M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi, je voulais simplement inviter M.


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  1   Karadzic et le témoin à ménager des pauses entre les questions et les

  2   réponses.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Tieger.

  4   Monsieur Karadzic, Monsieur le Témoin, veuillez garder à l'esprit que les

  5   pauses entre les questions et les réponses sont importantes.

  6   Veuillez poursuivre, Monsieur Karadzic.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne savais pas quelle était la mission de

  8   l'armée de Bosnie-Herzégovine, mais je sais, avec certitude, que l'armée de

  9   Bosnie-Herzégovine défendait la population musulmane.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord pour dire, Monsieur le Témoin, que le but

 12   poursuivi par l'armée musulmane était la libération de toute la Bosnie-

 13   Herzégovine ?

 14   R.  Je ne crois pas que cela ait été son objectif.

 15   Q.  Merci. Au paragraphe numéro 11, vous parlez de la date du 22 mai et

 16   vous parlez de Zlatni Do, mais vous ne savez pas qu'un policier de Zlatni

 17   Do, Mihajlovic, a été tué le 22 mai et que c'était là le début de la guerre

 18   ?

 19   R.  Non, je ne suis pas au courant du meurtre de ce policier.

 20   Q.  Merci.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, je me demande, Excellence, s'il ne

 22   serait pas préférable que vous suggériez à l'Accusation de ne pas préparer

 23   des déclarations d'une portée aussi ambitieuse et aussi exhaustive avec des

 24   témoins qui ne sont au courant d'aucun incident -- en fait, qui connaissent

 25   un seul incident. La Défense est maintenant sous une pression considérable

 26   pour essayer de jeter la lumière sur chaque incident particulier alors que

 27   le témoin ne sait pratiquement rien d'un tel nombre d'incidents, que

 28   finalement j'en viens à me demander pourquoi la déclaration ne comprend que


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  1   ce seul incident dont le témoin est au courant ?

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est encore un exemple de propos

  3   inappropriés de votre part. Ce qui vous revient, Monsieur Karadzic, c'est

  4   la conduite du contre-interrogatoire. Vous pouvez poser des questions. Si

  5   le témoin ne sait pas, vous devez vous en accommoder. Veuillez poursuivre.

  6   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Dans votre déclaration du 12 janvier 1994, vous parlez de rumeurs selon

  9   lesquelles les Chetniks plaçaient des Musulmans en détention, les

 10   emprisonnaient, et qu'ils harcelaient et tuaient des Musulmans. Alors, à

 11   quoi pensiez-vous, à quel emprisonnement précis ?

 12   R.  Est-ce que vous pourriez préciser un peu votre question ?

 13   Q.  Dans votre déclaration du 12 janvier 1994, dans le paragraphe numéro 2,

 14   vous avez indiqué qu'il y avait des rumeurs, rumeurs selon lesquelles les

 15   Chetniks emprisonnaient des Musulmans, les harcelaient et les tuaient.

 16   R.  Oui, oui, oui. Il y avait du harcèlement et il y avait des histoires

 17   qui circulaient qui parlaient de mauvais traitements, d'emprisonnement,

 18   d'arrestations.

 19   Q.  Oui, mais c'était des rumeurs, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Vous faites référence à Mehmedagic et Bahtanovic. Est-ce qu'il y a deux

 22   personnes répondant au nom de Bahtanovic ?

 23   R.  Non, il n'y en a qu'un qui fut arrêté avec son frère. Donc, il a été

 24   arrêté lorsqu'il essayait de contourner un poste de contrôle à Mahala et,

 25   bon, il est passé -- bon, je ne sais pas -- enfin, ce que je sais plutôt

 26   c'est qu'il a été arrêté ainsi que son frère.

 27   Q.  Mais est-ce que vous savez quel rôle il jouait pour ce qui était

 28   d'armer et d'organiser les Musulmans dans votre municipalité ?


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  1   R.  Non, je ne le sais pas.

  2   Q.  Est-ce que vous savez que Mehmedagic était en temps de paix le chef de

  3   la Défense territoriale, mais savez-vous quel fut son rôle lorsqu'en mai,

  4   il s'est rendu dans son village et a assumé le commandement d'une unité qui

  5   a été ensuite -- qui a suivi une certaine préparation ?

  6   R.  Non. Je sais qu'il travaillait au QG de la Défense territoriale.

  7   Q.  Est-ce que vous savez qu'il a quitté la ville immédiatement et qu'il a

  8   ensuite pris le commandement ou assumé le commandement d'unités ?

  9   R.  Est-ce que vous pourriez me dire de quelles unités et dans quel village

 10   ?

 11   Q.  Alors, il faudra lui montrer sa déclaration dans laquelle ces détails

 12   sont mentionnés.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bon, ce n'est pas la peine que le document soit

 14   versé au dossier d'ailleurs. Nous voulons tout simplement le montrer. 1D --

 15   document 1D04167.

 16   M. ROBINSON : [interprétation] En attendant que le document ne soit affiché

 17   à l'écran, je voulais juste saisir cette occasion. Puisqu'il s'agit de

 18   montrer une déclaration d'une partie tierce, vous m'avez invité à fournir

 19   des conseils au Dr Karadzic en la matière, mais je suis désolé de vous

 20   décevoir mais je lui ai indiqué en fait qu'il pouvait montrer à un témoin

 21   la déclaration d'une partie tierce s'il pense que, dans ladite déclaration,

 22   il pourrait trouver des éléments de preuve positifs à propos desquels il

 23   pourrait poser des questions au témoin en question, mais je lui ai dit

 24   qu'il faudrait qu'il pose une question extrêmement ciblée au témoin à

 25   propos de ladite déclaration de la partie tierce. Donc, je ne voudrais

 26   surtout pas que vous pensiez qu'il ne tient pas compte en fait de mon

 27   conseil, bien que parfois il ne fasse pas forcément exactement ce que je

 28   lui demande ou ne procède pas exactement de la façon dont je lui fourni


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  1   conseil.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'aimerais dans un premier temps

  3   entendre la question, et après avoir entendu la réponse du témoin, bon,

  4   s'il pense que cela est nécessaire de prendre en considération la partie

  5   pertinente de la déclaration. Bon, il pourra le faire, mais pour commencer

  6   d'emblée à parler de déclarations de parties tierces, je ne pense pas que

  7   cela ne soit très très utile. De toute façon, il passe beaucoup de temps à

  8   lire des documents, et lire des passages de déclaration, surtout lorsqu'il

  9   s'agit de déclarations des parties tierces, qui ne seront de toute façon

 10   pas versées au dossier, ne nous mène pas à grand-chose. Si vous pouviez lui

 11   transmettre ce message.

 12   M. ROBINSON : [interprétation] Mais, oui, je lui ai déjà dit et je pense

 13   qu'il est absolument important qu'il présente une conclusion, qu'il dégage

 14   une conclusion lorsqu'il présente la déclaration d'une partie tierce. Je

 15   pense que c'est ce qu'il va essayer de faire.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Je pense qu'il peut comprendre.

 17   Monsieur Tieger.

 18   M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi, mais juste pour enchaîner à la

 19   suite des propos qui viennent d'être tenus. Pour qu'il n'y ait aucun

 20   malentendu, je crois -- bon, je comprends que lorsqu'un témoin n'a

 21   absolument aucune connaissance de la déclaration, je pense que, là, c'est

 22   une perte de temps pour ce qui est de la Chambre de première instance et je

 23   pense que l'approche, qui a été suggérée par la Chambre, est beaucoup plus

 24   utile.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur Tieger.

 26   M. ROBINSON : [interprétation] Mais il se peut que le témoin soit enclin à

 27   accepter ce qui est indiqué dans une partie de la déclaration, donc je

 28   pense que, dans certains cas, il peut parfois être beaucoup plus utile de


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  1   montrer ladite déclaration, mais nous comprenons tout à fait l'approche

  2   retenue par la Chambre et préconisée par la Chambre.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions, je vous prie,

  4   examiner la page 5 ? En fait, cela correspond peut-être à la page 9 pour le

  5   prétoire électronique. Mais, au bas, vous verrez qu'il -- que vous

  6   trouverez le numéro ou le chiffre 5.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Mais regardez ce qui est écrit lorsqu'il est écrit -- là, où il est

  9   écrit :

 10   "A l'époque, il n'y avait pas d'organe qui fonctionnait à Rogatica. Je

 11   réglais toutes les questions, en tant que commandant de la Défense

 12   territoriale, avec mes associés, mes associés étant Kasim Delic, Nermin

 13   Pisto, Osman Muhic et Emir Braulovic. J'ai été nommé à ce poste environ

 14   vers le 15 avril 1992. Mais pour ce qui est de Lutvic Adil, ce que je veux

 15   dire c'est que je travaillais conformément à ce, ou en accord avec les

 16   unités dans les villages de Kramer Selo, Kovanj, Zepa, Kukavica, et en

 17   ville avec -- dans pour ce qui était des quartiers de Podljun et Podhrid."

 18   Donc, Monsieur, à partir du 15 avril --

 19   L'INTERPRÈTE : Les interprètes aimeraient indiquer que le texte anglais

 20   n'est pas le bon texte, dans un premier temps.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Donc, Monsieur le Témoin, à partir du 15 avril, cet homme avait des

 23   unités postées à Zepa, Kukavica, et vous dites que vous n'en saviez

 24   absolument rien; c'est cela ?

 25   R.  Ecoutez, je ne souhaite pas faire d'observation à ce sujet. Je vous ai

 26   dit que, moi, j'étais dans mon village. Je n'étais pas dans ces autres

 27   villages mentionnés. Je ne sais pas quelles étaient les affectations. Mon

 28   village n'est absolument pas mentionné dans cette liste.


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  1   Q.  Merci. Mais, hier, vous avez nié qu'il y avait présence d'unité à

  2   Kramer Selo mais, maintenant, vous voyez qu'en fait il y en avait.

  3   R.  Ecoutez, moi, je ne sais pas combien il y en avait, parce que je ne me

  4   suis jamais rendu à Kramer Selo, en tout cas, je ne m'y suis jamais arrêté,

  5   donc, je ne sais pas combien d'unités y étaient présentes.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, c'est mon dernier

  7   avertissement, Monsieur Karadzic, ma dernière mise en garde. Si vous

  8   souhaitez contester le contenu d'une déclaration de partie tierce, si vous

  9   voulez indiquer que cela n'est pas vrai, alors, sans doute, ce cas

 10   d'espèce, l'Accusation pourrait présenter des dizaines de milliers de

 11   documents. Donc n'oubliez pas ce que vous a dit Me Robinson, car à

 12   l'avenir, il se peut que nous vous empêchions de présenter des déclarations

 13   émanant de partie tierce.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, mais, moi, ce que je conteste ici c'est la

 15   pertinence des propos de ce témoin à propos de tout ce qui est indiqué par

 16   lui, hormis ce qui lui est arrivé. Il n'a aucun autre élément de preuve à

 17   apporter, hormis le fait qu'il s'agissait d'un théâtre de guerre.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez tout à fait droit de contester

 19   tout ce que dit le témoin, mais nous faire lecture d'une déclaration d'une

 20   partie tierce n'a aucun sens et ne sert à rien. Vous pouvez lui poser votre

 21   question, puis ensuite vous pouvez lui présenter la déclaration de la

 22   partie tierce.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, est-ce que nous pouvons le voir --

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger.

 25   M. TIEGER : [interprétation] Pour que tout soit clair, et par souci

 26   d'équité envers le témoin, je viens de vérifier si ce qu'a avancé l'accusé,

 27   parce qu'il a dit que le témoin -- ce qu'a dit l'accusé était vrai. Il a

 28   dit que le témoin avait nié quelque chose hier, quelque chose qui était


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  1   exact. Je viens de lire le compte rendu d'audience, le témoin a dit, dans

  2   sa réponse -- ou plutôt, on a demandé au témoin s'il était conscient que

  3   certaines choses étaient passées, il a répondu par la négative. Il a dit :

  4   Non, je ne le savais pas, je n'étais pas informé. Il y a une différence

  5   entre les termes de récusations alléguées et d'utilisation de ce document.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense qu'il y a une erreur d'interprétation,

  7   parce que je n'ai pas dit qu'il avait refusé. J'ai dit qu'il n'en savait

  8   rien. Mais j'accepte que le témoin a bel et bien indiqué qu'il n'était pas

  9   au courant, qu'il n'était pas informé. Il y a une déclaration importante de

 10   la part de ce témoin, il ne sait pas grand-chose. Il a seulement entendu

 11   parler de ces événements.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Mais vous savez, vous êtes au courant de cet événement fort fâcheux qui

 14   est arrivé. Donc, nous allons nous concentrer sur cela.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pour ce faire, est-ce que nous pouvons passer à

 16   huis clos partiel ?

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Nous passerons à huis clos

 18   partiel.

 19   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 18525-18531 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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  9   [Audience publique]

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Je souhaite vous remercier pour votre déposition et j'aimerais vous

 12   dire que je vous ai posé des questions un peu détaillées parce que, dans

 13   votre déclaration, il y a de nombreux éléments qui correspondent à des

 14   choses que vous avez entendues. Donc, je voudrais vous exprimer ma

 15   solidarité et vous dire à quel point je suis heureux de constater que vous

 16   avez survécu à tout cela.

 17   R.  Merci. J'ai dit que j'avais prononcé une déclaration solennelle, et que

 18   je ne pouvais pas parler d'événements ou d'incidents que je n'ai pas

 19   observés moi-même.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger ?

 21   M. TIEGER : [interprétation] Je n'ai pas de questions supplémentaires à

 22   poser au témoin. Merci.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur. Vous êtes

 24   arrivé au terme de votre déposition. J'aimerais, au nom de cette Chambre

 25   ainsi qu'au nom de l'ensemble du Tribunal, vous remercier, vous remercier

 26   d'être venu à La Haye pour déposer. Vous pouvez donc disposer. Mais je vous

 27   demanderais quand même de rester assis un petit moment, je vous prie.

 28   Alors, nous allons repasser brièvement à huis clos partiel.


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  1   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

  2   partiel.

  3   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 18534-18540 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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 15   [Audience publique]

 16   [Le témoin est introduit]

 17   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour. Je déclare solennellement que je

 19   dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 20   LE TÉMOIN : MUNIRA SELMANOVIC [Assermenté]

 21   [Le témoin répond par l'interprète]

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Madame Selmanovic, et merci

 23   beaucoup.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez vous asseoir, je vous prie,

 26   confortablement.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Uertz-Retzlaff, veuillez


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  1   procéder.

  2   Interrogatoire principal par Mme Uertz-Retzlaff :

  3   Q.  [interprétation] Bonjour encore une fois, Madame Selmanovic.

  4   R.  Bonjour.

  5   Q.  Pourriez-vous décliner vos noms et prénoms, je vous prie ?

  6   R.  Munira Selmanovic.

  7   Q.  Madame Selmanovic, vous avez fait une déclaration à l'intention du

  8   bureau du Procureur le 23 janvier 2009, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Avez-vous eu la possibilité de relire cette déclaration hier pendant

 11   les séances de récolement préparatoire à votre déposition ?

 12   R.  Je n'ai pas eu la possibilité de relire cette déclaration. Je ne l'ai

 13   pas demandée, mais personne ne m'a dit que je pouvais le faire.

 14   Q.  Madame Selmanovic, lorsque nous nous sommes entretenues dans la pièce

 15   voisine vous avez dit éprouver des difficultés à entendre correctement ce

 16   qui vous était dit dans vos écouteurs. Ceci est-il toujours le cas ?

 17   R.  Oui, c'est exact. Nous avons discuté.

 18   Q.  M'entendez-vous ?

 19   R.  Je vous entends.

 20   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame,

 21   Messieurs les Juges, le témoin m'a fait savoir qu'elle avait des problèmes

 22   avec les écouteurs et qu'elle ne comprenait pas vraiment complètement les

 23   questions qui lui étaient posées.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Réessayez.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] J'augmente le volume. Parce que ça bourdonne

 26   dans mes oreilles. Peut-être devrait-on baisser le volume un peu.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur l'Huissier, pouvez-vous

 28   intervenir ?


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  1   L'INTERPRÈTE : Intervention de l'huissier.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que cela va mieux j'espère,

  3   maintenant, Madame Selmanovic ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, ça va mieux.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Peut-être pourriez-vous vous rapprocher

  6   aussi des micros de façon à ce que les interprètes vous entendent bien. Ne

  7   vous en faites pas, Madame.

  8   Madame Uertz-Retzlaff, veuillez procéder.

  9   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

 10   Q.  Je vais reposer ma question et j'espère que vous l'entendrez mieux.

 11   Madame Selmanovic, votre déclaration de janvier 2009 rédigée en anglais,

 12   vous a-t-elle été lue pendant la séance de récolement ?

 13   R.  Je me rappelle que oui, que vous me l'avez lue, qu'il y a eu une petite

 14   discussion, est-ce qu'il fallait, comment il fallait le faire. Mais oui,

 15   oui, je me souviens maintenant qu'elle m'a été lue.

 16   Q.  Merci. Pouvez-vous confirmer que cette déclaration rend fidèlement

 17   compte des renseignements fournis par vous en 2009 ?

 18   R.  Ça je ne peux pas vous le dire parce que je suis intervenue à plusieurs

 19   reprises et je n'avais rien pour écrire, je n'avais pas de papier ou quoi

 20   que ce soit.

 21   Q.  Ce que vous avez dit aux enquêteurs en 2009 était-il conforme à la

 22   vérité ? Est-ce exact ?

 23   R.  C'est la vérité. D'après ce dont je me souviens, de ce que j'ai dit,

 24   c'était exact. Ce que j'ai dit était la réalité, au sujet de ce qui s'est

 25   passé dans mon village.

 26   Q.  Merci, Madame Selmanovic. Madame Selmanovic, est-ce que vous donneriez

 27   les mêmes renseignements aux Juges de la Chambre si vous étiez à nouveau

 28   interrogée sur les mêmes sujets, aujourd'hui ?


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  1   R.  Oui. Si quelque chose n'était pas clair à mes yeux, je dirais que ce

  2   n'est pas clair pour moi. Mais ce qui est tout à fait clair, je le dirais.

  3   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le

  4   versement au dossier de cette déclaration qui constitue le document 65 ter,

  5   numéro 22600, dans le cadre de l'application de l'article 92 ter, du

  6   Règlement.

  7   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document est admis.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il devient la pièce P3295, Monsieur le

 10   Président, Madame, Messieurs les Juges.

 11   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je vais maintenant avec

 12   l'autorisation de la Chambre donner lecture d'un bref résumé de la

 13   déposition versée au dossier, je cite :

 14   Mme Selmanovic vivait dans le village de Novoseoci avec sa famille, dans la

 15   municipalité de Sokolac. C'était un village habité par 60 à 70 familles

 16   musulmanes, entre autres. Les rapports avec les villages serbes voisins

 17   étaient paisibles. Une fois que la guerre a éclaté, les villageois

 18   musulmans ont été invités à remettre leurs armes, par exemple, leur fusil

 19   de chasse, et ils ont obtempéré. On leur a également garanti qu'ils

 20   pourraient continuer à vivre à Novoseoci en l'absence de toute crainte.

 21   Le 22 septembre 1992, Novoseoci a été attaqué par les soldats serbes. Les

 22   villageois ont été regroupés dans une prairie surplombant le village.

 23   Pendant ce regroupement, une femme habitant le village a été tuée. Les

 24   soldats ont pillé les maisons musulmanes et le père du témoin a subi des

 25   exactions.

 26   Les hommes et les garçons suffisamment âgés ont été séparés des femmes, des

 27   enfants et des personnes âgées, et le deuxième groupe a été conduit à bord

 28   d'un autobus jusqu'à la ligne de confrontation. A partir de cet endroit,


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  1   ils ont dû marcher à pied dans la direction de Sarajevo, et 44 hommes et

  2   jeunes gens ont dû rester sur place dont le mari de Mme Selmanovic et son

  3   fils de 18 ans, ainsi que d'autres membres de sa famille.

  4   Le cadavre de nombre de ces hommes et jeunes gens, qui étaient restés

  5   sur place, a été découvert par la suite et exhumé dans une fosse située

  6   dans la municipalité de Sokolac. Le cadavre du mari du témoin n'a pas été

  7   retrouvé jusqu'à aujourd'hui.

  8   Monsieur le Président, ceci met un point final à la lecture du résumé

  9   de la déposition de ce témoin, et je n'ai que quelques petites questions à

 10   se poser, Madame Selmanovic.

 11   Q.  Dans votre déclaration, je parle ici des paragraphes 3 et 4, plus

 12   particulièrement de celle-ci. Vous avez dit qu'au printemps, les villageois

 13   ont remis leurs armes et que, par la suite, d'autres hommes sont arrivés

 14   dans le village pour poser des questions au sujet de ces armes.

 15   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Dans ce cadre, je demanderais

 16   l'affichage de la pièce -- du document 65 ter, 05384. Vous pouvez voir

 17   apparaître le document à l'écran. Il s'agit d'un certificat établi suite à

 18   la saisie des armes dans le village de Novoseoci. Ce document émane de la

 19   2e Brigade de Romanija. Il porte la date du 27 juillet 1992.

 20   Q.  Madame Selmanovic, vous rappelez-vous que jusqu'au mois de juillet

 21   encore, les armes étaient réclamées ?

 22   R.  Ça, je ne m'en souviens pas. La seule chose dont je m'en souviens,

 23   c'est que le 27 ou, en tout cas, aux environs du 27, il y a eu une

 24   intervention, et le 1er mai aussi. Ils ont dit, ça c'était le 27, que les

 25   gens qui restaient là pouvaient travailler tranquillement et continuent à

 26   vivre paisiblement, qu'on allait les aider, qu'on pouvait aller à Sokolac

 27   pour se procurer du carburant, et tout ce dont nous avions besoin. Il y en

 28   a un même qui a dit : "Eh bien, vous savez, une fois que vous aurez remis


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  1   vos armes, vous pouvez travailler sans problème. Vous n'avez pas à vous

  2   sentir mal parce que vous n'avez plus d'armes." Voilà, c'était ça, c'est ce

  3   qui s'est passé.

  4   Q.  Je vous remercie.

  5   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le

  6   versement au dossier de ce document.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde, je vous prie. Y a-t-il

  8   objection ?

  9   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'y en a pas, il n'y en a pas.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document est admis en tant que pièce

 12   à conviction.

 13   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il devient la pièce P3296.

 14   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je demanderais à présent l'affichage

 15   du document 65 ter, numéro 7064.

 16   Q.  En attendant l'apparition du texte à l'écran, Madame Selmanovic, je

 17   vous rappelle que dans votre déclaration, et plus particulièrement dans le

 18   paragraphe 15, vous décrivez avoir fait sortir votre père de la maison, et

 19   avoir vu des soldats en train de piller des maisons, à ce moment-là. Nous

 20   disposons d'un document qui porte la date du 26 septembre 1992, qui

 21   provient d'un certain commandant Krstic, dans lequel il donne son accord à

 22   un conscrit pour qu'il transporte des meubles et d'autres équipements

 23   ménagers depuis Novoseoci jusqu'à Sokolac. Il est également indiqué, dans

 24   ce passage du document, que les objets ainsi transportés vont finalement

 25   être installés dans une maison de Novoseoci, que la personne dont le nom

 26   figure plus haut a choisi pour y résider désormais.

 27   Madame Selmanovic, qu'est-il arrivé à vos meubles ? Est-ce que vous le

 28   savez, ainsi qu'à tous les équipements et objets qui se trouvaient dans


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  1   votre maison ?

  2   R.  Mon père se trouvait dans la maison. Les soldats m'ont dit que je

  3   devrais le faire sortir, qu'il ne devait pas rester à l'intérieur. Alors

  4   que je le faisais sortir, en le soutenant en même temps qu'un de nos

  5   voisins, les soldats étaient déjà en train d'entrer dans la maison pour

  6   emporter des objets. Ça, c'est la vérité, des choses ont été emportées hors

  7   de la maison. Voilà, j'ai fait lever mon père, je l'ai aidé à sortir, je

  8   l'ai aidé à se rendre jusqu'à la route et je suis revenu jusqu'à l'endroit

  9   où tous les villageois étaient regroupés, mais je ne suis pas rentrée dans

 10   la maison par la suite.

 11   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le

 12   versement au dossier de ce document.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne suis pas sûr que ce témoin soit le

 14   témoin le plus approprié pour effectuer le versement au dossier de ce

 15   document.

 16   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, ce témoin a

 17   décrit les pillages qui ont eu lieu dans le village, et ce document

 18   confirme les dires du témoin. Les événements survenus à Novoseoci ont eu

 19   lieu le 27 septembre, et nous avons ici un certificat dans lequel le

 20   commandant Krstic autorise quelqu'un, en fait, un soldat à emporter --

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quand vous dites "emporter," vous voulez

 22   dire emporter des objets volés, dans le cadre d'un pillage ?

 23   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui, depuis Novoseoci jusqu'à

 24   Sokolac.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que ce document évoque le fait

 26   que ces objets sont volés ?

 27   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Il est écrit : "Accord pour le

 28   transport de meubles et d'autres équipements," et cetera, et cetera, depuis


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  1   Novoseoci jusqu'à Sokolac. Selon la déposition de ce témoin, Novoseoci est

  2   un village musulman et donc ces objets ne peuvent être que de maisons

  3   musulmanes. C'est la simple raison pour laquelle je pense que ce document

  4   confirme les dires du témoin.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai une objection.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Je vous donnerai la parole

  7   dans un instant.

  8   Madame Selmanovic, est-ce que vous pouvez lire le document ? Pouvez-vous

  9   nous dire ce que contient ce document ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne vois pas bien, pas suffisamment pour le

 11   lire. Mais dites-moi de quoi il est question. Je ne vois pas assez bien

 12   pour le lire.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic ?

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Avant toute chose, il est difficile de

 15   comprendre comment tout ceci sera transporté de Novoseoci à Sokolac alors

 16   qu'il est indiqué que la personne concernée s'apprête à résider à

 17   Novoseoci. Puis, le deuxième point c'est que ce document n'est pas signé

 18   par Krstic. Il est indiqué ici que ce document est signé au nom du

 19   commandant. Or, ce n'est pas ce qui a été dit verbalement dans ce prétoire

 20   à l'instant. Il n'a pas été indiqué que ce document n'est pas signé par le

 21   commandant Krstic, mais au nom du commandant Krstic.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Uertz-Retzlaff, vous avez quelque

 23   chose à ajouter ?

 24   M. TIEGER : [interprétation] Permettez-moi de dire quelques mots, Monsieur

 25   le Président.

 26   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation] 

 27   M. TIEGER : [interprétation] C'est pertinent parce que je veux parler de

 28   quelque chose qui s'est passé hier alors que Mme Uertz-Retzlaff n'était pas


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  1   dans le prétoire, et ceci a un rapport avec les consignes qui ont été

  2   données eu égard au versement au dossier des documents, s'agissant du

  3   contexte et de l'authenticité en particulier. Suite au débat qui a eu lieu,

  4   il devrait apparaître clairement - et je crois que la Chambre se rappellera

  5   ce qui s'est passé hier - que le témoignage de ce témoin par rapport à ce

  6   document --

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça y est; maintenant, je me souviens. Je ne

  8   sais pas qui exactement a emporté les meubles, si c'est Krstic ou quelqu'un

  9   d'autre, mais je me rappelle que les meubles ont été emportés au moment où

 10   nous revenions sur les lieux et on nous a regroupés. J'ai vu qu'ils étaient

 11   plusieurs à transporter des objets. Je ne sais pas qui exactement a pillé

 12   et emporté tout cela. Mais, en tout cas, quand je suis rentrée après avoir

 13   fait sortir mon père, ce qui importe c'est que le pillage était en cours.

 14   Ils entraient, ils faisaient sortir les objets, et il ne s'agissait pas

 15   d'un petit nombre de soldats. Ils étaient nombreux et ils emportaient tout

 16   et n'importe quoi, depuis les meubles jusqu'à la farine. Ils l'ont fait

 17   dans ma maison. Je n'ai pas pu voir ce qui s'est passé ailleurs. Mais ce

 18   que j'ai vu et ce que je vous dis ça s'est passé dans ma maison.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Madame Selmanovic.

 20   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, les commentaires du

 21   témoin confirment ce que je m'apprêtais à dire, à savoir que nous parlons

 22   de deux facteurs importants. En l'espèce, c'est le contexte qui importe. Je

 23   crois qu'il est clair que ce document se situe tout à fait bien dans le

 24   contexte décrit par le témoin. Donc l'exigence du contexte est remplie et,

 25   hier, il a également été discuté de la possibilité que la question de

 26   l'authenticité puisse être confirmée par ce document. Les éléments invoqués

 27   par le Dr Karadzic peuvent porter sur le poids à accorder à ce document

 28   mais pas sur son authenticité. Donc ce document rempli bien les exigences


Page 18550

  1   qui ont été imposées suite au débat relatif à l'admission des documents au

  2   dossier.

  3   [La Chambre de première instance se concerte]

  4   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Madame Uertz-Retzlaff, nous avons un

  5   problème. Le fait que le témoin ait admis se trouver dans l'incapacité de

  6   lire nous incite à nous demander, comment elle pourra identifier les

  7   documents qui lui seront soumis ? Avez-vous une méthode pour ce faire ?

  8   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge. Nous l'avons

  9   déjà fait très simplement pendant la séance de récolement. Nous avons lu

 10   les documents au témoin. Le document que j'ai présenté à l'instant a déjà

 11   été lu au témoin, et d'autres suivront. Je pourrais donc donner lecture de

 12   ce qui figure dans le document pour que cela soit consigné au compte rendu

 13   d'audience, ce qui permettra au témoin de n'être pas dans la nécessité de

 14   lire elle-même.

 15   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Peut-être pourriez-vous agir ainsi de

 16   façon à garantir que la déclaration faite par elle se situe dans le

 17   contexte approprié ?

 18   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Juge.

 19   Q.  Madame Selmanovic, je vais maintenant vous donner lecture du document

 20   que vous avez sous les yeux à l'écran, je cite :

 21   "Commandement de la 2e Brigade motorisée de Romanija" - et ensuite il y a

 22   un numéro de référence, et ensuite la mention - "Sokolac, 26 septembre

 23   1992." Le texte est intitulé : "Agrément" et se lit comme suit, je cite :

 24   "Par la présente, il est certifié que le conscrit Dragomir Bozic de la 2e

 25   Brigade motorisée de Romanija a reçu un agrément lui permettant de

 26   transporter des meubles, des machines, un frigidaire, une plaque de

 27   cuisson, une machine à laver, des chaises, deux lits, et un congélateur

 28   depuis Novoseoci jusqu'à Sokolac.


Page 18551

  1   "Les articles susmentionnés vont être transportés pour être installés dans

  2   une maison de Novoseoci, que la personne dont le nom figure ci-dessus a

  3   choisi pour son lieu de résidence à venir."

  4   "Commandant, colonel Radislav Krstic," signé et estampillé, et nous voyons

  5   une signature manuscrite qui n'est pas celle de M. Krstic, comme l'a

  6   indiqué M. Karadzic.

  7   Voilà ce qui figure dans ce document.

  8   R.  Je peux vous dire ceci pour répondre. Tout ce que vous avez dit, y

  9   compris le nom de Krstic, moi, je ne peux pas vous dire quelle est

 10   l'identité exacte des hommes qui ont emporté ces objets. La seule chose que

 11   je peux vous dire c'est qu'ils ont regroupé tous les villageois, dont, moi,

 12   sur une prairie et que j'ai reçu l'ordre d'aller chez moi pour en faire

 13   sortir mon père. Entre-temps, ils ont emporté toutes sortes de choses de la

 14   maison. Est-ce que c'était Krstic personnellement qui l'a fait ou quelqu'un

 15   d'autre ? Je ne sais pas. Mais toutes sortes d'objets, y compris le

 16   frigidaire, et tout le reste, ont été emportés hors de ma maison. Bien sûr,

 17   je ne peux pas vous dire si tout cela a ensuite été installé dans une autre

 18   maison ou pas.

 19   Ils sont montés dans un autobus avec les enfants, mais nos hommes sont

 20   restés sur place, et à partir de ce moment-là, je ne sais pas. Je ne sais

 21   pas qui a emporté quoi. Est-ce que c'était Krstic en personne ou quelqu'un

 22   d'autre. Quoi qu'il en soit, dans ma maison, en tout cas, tout ce que j'ai

 23   vu emporté a bel et bien été emporté.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux aider ma consoeur de

 25   l'Accusation ?

 26   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Merci.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde. L'interprète pourrait avoir

 28   l'amabilité de lire ce qui figure à l'intérieur du sceau. Pour ma part, je


Page 18552

  1   lis le mot "Vojna."

  2   L'INTERPRÈTE : Poste militaire.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Au milieu, on lit : "Sokolac;" c'est

  4   bien ça ?

  5   L'INTERPRÈTE : C'est exact, Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Uertz-Retzlaff, est-ce que vous

  7   savez que M. Krstic était stationné à Sokolac à cette époque-là ?

  8   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je le suppose à la lecture du

  9   document, mais il importerait que je lise d'autres documents pour le

 10   confirmer à 100%. En tout cas, à partir de ce document, on peut penser

 11   qu'il était dans la région en qualité de commandant.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ma question consistait à demander

 13   si la 2e Brigade de Romanija était bien stationnée à Sokolac.

 14   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 16   [La Chambre de première instance se concerte]

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aurais pu sans doute apporter mon aide à la

 18   solution de cette question.

 19   [La Chambre de première instance se concerte]

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois que je peux vous être d'un certain

 21   secours.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous pouvez parler

 23   quand la Chambre vous donne la parole. En cet instant, la Chambre n'a pas

 24   besoin de votre aide.

 25   Madame Uertz-Retzlaff, la Chambre n'est pas convaincue que ce document bien

 26   particulier soit lié sur le plan du contexte au pillage dont parle le

 27   témoin. La déposition du témoin a été enregistrée au compte rendu

 28   d'audience, et vous aurez d'autres possibilités de demander le versement au


Page 18553

  1   dossier de ce document, grâce à d'autres témoins ou peut-être par versement

  2   direct des pièces sans présence de témoin dans le prétoire, nous verrons.

  3   Donc, pour l'instant, nous ne versons pas ce document au dossier par le

  4   biais de ce témoin.

  5   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le

  6   Président. J'ai encore un document à discuter avec le témoin. Je demande

  7   l'affichage du document 65 ter, numéro 22869.

  8   Q.  Madame Selmanovic, dans votre déclaration écrite - et je vous renvoie

  9   au paragraphe 22 de celle-ci - vous parlez de l'exhumation qui a été

 10   effectuée d'une fosse commune située à Ivan Polje. Vous rappelez-vous à

 11   quel moment cette exhumation a eu lieu ?

 12   R.  Je crois que c'était en l'an 2000, en septembre ou octobre à peu près.

 13   Je n'ai pas mémorisé la date exacte, mais c'était, en tout cas, en l'an

 14   2000.

 15   Q.  Avez-vous assisté à cette exhumation; est-ce que vous avez regardé ce

 16   qui était en train de se faire ?

 17   R.  Oui. Nous avons été invités pendant trois jours, et pendant trois

 18   jours, ils ont tout fouillé. C'était dans une vallée à Ivan Polje, et nous

 19   sommes les personnes qui ont reconnu les lieux pour commencer. C'était sur

 20   la gauche de la vallée, nous savions qu'il y avait là une mosquée, et nous

 21   avons pensé que c'était sans doute le lieu. Ils ont travaillé pendant trois

 22   jours mais c'est seulement le quatrième qu'ils ont retrouvé les corps, et

 23   en particulier les restes de mon fils.

 24   C'était dans un puits. Alors ils nous ont appelés, nous les villageois pour

 25   qu'on voie ce qu'ils avaient retrouvé parce qu'il y avait quelques éléments

 26   d'habillement aussi qui avaient été retrouvés, et il y avait trois cadavres

 27   dans cette fosse. J'ai immédiatement reconnu mon enfant parce que j'ai vu

 28   le T-shirt et le collier qu'il portait. Ensuite, ils ont déplacé ces petits


Page 18554

  1   ossements de nos enfants en nous posant des questions sur ceci ou cela;

  2   est-ce que c'est lui, et bien sûr, j'ai répondu oui.

  3   D'abord, ils nous ont montré les cadavres qui étaient à l'avant, et ensuite

  4   ceux qui étaient à l'arrière. J'ai pu voir qu'il y avait des balles qui

  5   sortaient de ces restes morelles. J'ai vu le corps de mon fils dans un T-

  6   shirt allongé paisiblement et je me suis rendu compte que c'était lui. J'ai

  7   aussi survécu à cette terrible épreuve mais c'était mon enfant, je l'ai

  8   reconnu. Voilà exactement comment les choses se sont passées.

  9   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que

 10   vous voyez sur l'écran devant vous ? Est-il bien le rapport d'exhumation

 11   qui détaille les modalités d'exhumation de cette fosse particulière évoquée

 12   par le témoin ?

 13   L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète : Remplacer par : Est-il par Est

 14   ?

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 16   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

 17   Q.  Est-ce que vous vous rappelez, Madame Selmanovic, qu'avec l'aide d'un

 18   interprète, vous avez relu tous les noms qui figurent dans ce document, le

 19   nom de tous les corps exhumés ? Est-ce que vous en avez le souvenir que

 20   vous l'avez fait hier ou avant-hier ?

 21   R.  Je me souviens. Tous les noms sont là. Tous les corps qui ont été

 22   retrouvés. Plus tard, tout le monde a reconnu les siens. Quand on nous a

 23   appelés à venir identifier les corps, je n'ai pas identifié mon mari, pas

 24   plus que l'autre membre de la famille, parmi ces 40 cadavres à peu près.

 25   Leur cadavre n'était pas sur place. J'ai vu les noms des fils, des pères

 26   d'un certain nombre de personnes.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Uertz-Retzlaff, je ne pense pas

 28   que la Défense opposerait une objection.


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  1   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je demande le versement au dossier de

  2   ce document, et j'en ai terminé de mes questions dans le cadre de

  3   l'interrogatoire principal.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons donner un numéro de pièce au

  5   rapport d'exhumation.

  6   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce rapport devient la pièce P3297.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Y a-t-il des pièces associées ?

  8   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Madame Uertz-Retzlaff.

 10   Madame Selmanovic, vous allez, maintenant, être interrogée par

 11   l'accusé, M. Radovan Karadzic, dans le cadre de son contre-interrogatoire.

 12   M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, une petite

 13   question de calendrier à vous soumettre. En effet, à la demande du bureau

 14   chargé de la Défense, il avait été prévu que les entretiens dont nous avons

 15   parlé commencent à 14 h, mais il faut ménager une période de transport

 16   d'une heure. Les responsables des rendez-vous de la Défense comprennent

 17   très bien que le calendrier de la Chambre dicte l'horaire des

 18   visioconférences mais il serait bon de savoir de façon définitive à quel

 19   moment la Chambre pense suspendre l'audience et remettre le contre-

 20   interrogatoire à une date ultérieure ou est-ce qu'elle veut continuer et

 21   terminer la déposition de ce témoin, auquel cas la visioconférence devrait

 22   être ajournée.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de rendre une décision, de combien

 24   de temps vous aurez besoin, Monsieur Karadzic ?

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Toutes mes excuses, j'attendais la fin de

 26   l'interprétation. Excellences, je m'efforcerais d'en terminer en une heure,

 27   mais je crains fort que ce ne soit difficile, étant donné les

 28   circonstances. Il sera difficile d'obtenir les réponses.


Page 18556

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc d'après vous, d'après vos

  2   évaluations, il vous faudrait, vous ne pourriez pas terminer en une heure ?

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai bien peur que non. Je peux déployer tous

  4   mes efforts, je peux faire ce que je peux. Je vais essayer.

  5   [La Chambre de première instance se concerte]

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous ne souhaitons pas remettre à plus

  7   tard la déposition de ce témoin, la remettre à la semaine prochaine. Je

  8   pensais en fait que vous auriez besoin de bien moins qu'une heure, quand je

  9   vous ai posé ma question. Commençons.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous verrons bien. Merci. 

 11   Contre-interrogatoire par M. Karadzic :

 12   Q.  [interprétation] Bonjour, Madame Selmanovic.

 13   R.  Bonjour.

 14   Q.  Je tiens avant tout vous dire que je comprends toute la douleur qui est

 15   la vôtre à cause de ce qui vous est arrivé d'avoir perdu vos proches.

 16   Alors, je vais commencer par la fin de votre récit. Il y avait l'exhumation

 17   là où il y avait un cimetière et une mosquée.

 18   R.  Non, non pas de cimetière, c'était une vallée. C'est là qu'ils ont tué

 19   les nôtres qui ont été capturés par Pajic. Il les a capturés, il les a fait

 20   travailler et il les avait laissées là. C'est Pajic qui est coupable, Pajic

 21   est coupable de ce qui a été fait. Il a abandonné nos enfants et nos maris

 22   et nos pères, de 15 ans à 80 ans. Il les a tous fait travailler là, et puis

 23   à Ivan Polje, il les a emmenés dans cette vallée. Je ne sais pas si c'est

 24   exactement là, et après c'est dans cette vallée qu'on a fait jeter la

 25   mosquée et tous les déchets de Sokolac, et pendant trois jours on a dû

 26   chercher là pour les retrouver.

 27   Q.  Vous mentionnez la mosquée, donc, c'est la raison pour laquelle

 28   je vous pose la question. A chaque fois que vous avez la possibilité de


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  1   répondre par un oui --

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez répéter votre

  3   question ? Reprenez -- reprenez la question.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  J'ai dit, aujourd'hui, vous avez mentionné la mosquée pour la première

  6   fois, de là, ma question. Répondez, s'il vous plaît - quand cela est

  7   possible - par un "oui" ou un "non," pour qu'on puisse terminer plus

  8   rapidement. Donc, aujourd'hui, vous avez dit que vous l'avez reconnu

  9   d'après un collier ?

 10   R.  D'après ses vêtements, et son collier, et les petits os qu'on a

 11   trouvés. C'est ses ossements. Comme les autres, c'est comme ça que j'ai

 12   reconnu mon enfant. Je suis allée à Ivan Polje tous les jours, au premier

 13   jour, deuxième jour, troisième jour, en attendant là.

 14   La commission de Sokolac disait : "Mais rien, il n'y a rien, il n'y a

 15   rien," et puis il y a eu des bulldozers qui sont arrivés et puis ils ont

 16   commencé à trouver. Donc, on a tout trouvé, on a nettoyé. On nous a fait

 17   venir là où ils ont allongé tout ça - je ne sais pas comment dire - dans

 18   des sacs. Ils ont posé ça sur comme des sacs en plastique, et puis on se

 19   rapprochait. Moi, j'ai reconnu tout de suite mon enfant d'après ses

 20   vêtements. Ils nous ont dit : "Il ne faut pas toucher. Il ne faut rien

 21   toucher, mettre dans vos mains." Ce sont eux qui ont tout tourné, retourné,

 22   et cetera, et donc, j'avais vraiment des choses à découvrir.

 23   Donc, c'était Pajic, Pajic qui a fait ça. C'était la volonté de qui ? De

 24   lui. Et de qui ?

 25   Q.  Je vous remercie. Vous dites qu'il y avait des vêtements et des

 26   chaussures, des chaussures et des vêtements, et que ce n'était pas

 27   détérioré ?

 28   R.  Non, non, pas détruit. Parce qu'il y a -- c'était comme un pull


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  1   synthétique en polyester, et il n'avait rien, rien. Il était intact de

  2   devant, comme s'il n'y avait pas de balle qui serait passée par là, et le

  3   dos n'était pas là. Les chaussures, elles étaient complètes, comme

  4   normales, et puis il n'y avait que des os dans les chaussures. Puis, pour

  5   ce qui est de la veste, il n'y avait que quelques filaments, mais il y

  6   avait que -- mais il y avait le pull entier.

  7   Q.  Donc, les différents vêtements et les corps, est-ce qu'ils n'étaient

  8   pas au même niveau de détérioration ?

  9   R.  Non, non, il n'y avait rien de différent. On a reconnu les nôtres, nos

 10   proches, tout un chacun.

 11   Q.  Vous dites que plusieurs balles sont tombées du corps.

 12   R.  Oui, du corps de mon enfant. Sept balles sont tombées.

 13   Q.  Merci. Alors, reprenons au début si vous voulez bien. Au printemps

 14   1992, vous avez demandé aux autorités serbes de Sokolac de vous permettre

 15   d'évacuer le village. Or, ils vous ont répondu en fait en vous convaincant

 16   de rester; c'est bien cela ?

 17   R.  Non, nous n'avons pas -- si. Enfin, d'accord, on a demandé -- non, ils

 18   sont venus de Sokolac et ils ont encouragé les gens : "Vous savez, il ne

 19   faut pas partir. On ne va pas s'en prendre à vous. S'il y a un problème on

 20   va venir vous informer."

 21   Jusqu'au 1er mai, les gens ont travaillé dans l'entreprise, et après

 22   il y a eu des congés. Puis, ils sont venus prendre les armes le 27, et

 23   ensuite un homme a dit : "Bien, écoutez, voyez-vous, maintenant que vous

 24   avez pris ces armes, on n'est plus en sécurité pour vivre ici." On a

 25   répondu "Si, si. Mais pourquoi vous ne travaillez pas ?" "Mais on n'a pas

 26   de carburant, on ne peut pas utiliser les machines. On n'a rien." Ils ont

 27   dit : "Allez à Sokolac, achetez du carburant, continuez de travailler. Pas

 28   de problème."


Page 18559

  1   C'est ce qu'on a dit aux hommes. Pas à nous, les femmes, mais aux

  2   hommes. Et donc voilà.

  3   Q.  Merci. 65 ter 22604, page 1, dans une déclaration donnée par Mme

  4   Selmanovic avant, ils sont allés demander l'évacuation du village et qu'on

  5   leur a dit de ne pas le faire. Drago Macar serait venu aussi, d'après ce

  6   que vous avez dit, et d'autres, et qu'ils vous auraient dit qu'il fallait

  7   rester sur place; c'est ça ?

  8   R.  Oui. Drago Macar est venu tout d'abord et il a dit : "Mais il n'y a pas

  9   besoin de partir, restez." Puis ensuite, Velimir Elez et Savic Milorad sont

 10   venus. "Ecoutez, allez acheter du carburant, même avec leurs voitures tout

 11   de suite. Allez-y, pas de problème."

 12   Q.  Merci. Puis les armes ont été rendues, et ce, par trois reprises ?

 13   R.  La troisième fois, je ne sais pas. Je sais que ça a eu lieu deux fois,

 14   vers le 27 et le 1er mai aussi. Mais tu sais, moi, les dates je ne peux pas

 15   te dire exactement. C'était au printemps, en mai, puis là le 27, et c'est

 16   comme ça que ça c'est passé, et puis les gens ont commencé à moissonner, à

 17   travailler.

 18   Q.  Puis vous dites le 6 juillet - 22604, c'est la cote de votre

 19   déclaration - le 6 juillet, vous dites, 1992, il y a eu, de nouveau,

 20   quelques armes qui ont été rendues. Alors, vous ne savez pas pourquoi tout

 21   le monde n'a pas rendu son arme tout de suite ?

 22   R.  Parce qu'ils n'en avaient pas. Comment voulez-vous qu'ils donnent ce

 23   qu'ils n'ont pas ? Tout ce qu'il y a et tout ce qu'il y avait a été donné.

 24   Q.  Merci.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Examinons maintenant 65 ter 5385, s'il vous

 26   plaît. Je suis convaincu qu'il y a une traduction, parce que je l'ai vue.

 27   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, c'est une

 28   pièce déjà que j'avais envisagé d'utiliser. Nous avons une traduction, oui.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne suis pas certain que cela ait été

  2   versé au dossier. Avec un autre numéro 65 ter ?

  3   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] M. Karadzic a bien cité le numéro 65

  4   ter, et je l'ai, j'ai le document et la traduction.

  5   M. Reid va le télécharger. Il n'était pas téléchargé.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Madame Selmanovic, en attendant cette traduction anglaise, je vais vous

  8   lire une phrase qui concerne Novoseoci. C'est le commandement du Corps de

  9   Sarajevo-Romanija, le 27 juillet. C'est une information, un compte rendu à

 10   l'état-major principal de la Republika Srpska. Ils disent :

 11   "Dans le village de Novoseoci, au sud de Sokolac, à cinq ou six

 12   kilomètres, la prairie de --"

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous êtes en train de lire ce document.

 14   Les interprètes vous demandent la référence.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. C'est le dernier tiers du premier

 16   paragraphe, ça commence par : "Au village de Novoseoci."

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Donc je reprends :

 19   "Au village de Novoseoci, au sud de Sokolac, cinq ou six kilomètres de là,

 20   la prairie de Glasinacko Polje, l'on a procédé à une reddition d'armement

 21   et d'engins explosifs de la part de la population musulmane, représentant

 22   de la 2e Brigade de Romanija. Cette remise d'armes s'est déroulée selon un

 23   accord, et on estime que l'on n'a pas tout rendu."

 24   R.  J'estime que le 27, ce Pajic est venu et que c'est ce qui a été dit. Il

 25   a demandé aux gens de donner et les gens ont donné ce qu'ils avaient. Mais,

 26   maintenant, vous me lisez autre chose, les armes et tout ce qui pouvait

 27   causer la mort, mais je suppose que les gens n'avaient pas cela. Ils ne

 28   l'ont pas donné, et après, on leur a promis de rester et c'est en confiance


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  1   qu'ils sont restés.

  2   Q.  Merci.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut verser cela au dossier, 22604

  4   ? Je voudrais le revoir de nouveau maintenant.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Uertz-Retzlaff.

  6   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je sais que c'est très comparable à

  7   ce que nous avons eu précédemment, mais l'Accusation ne s'opposera pas au

  8   versement puisque cela correspond à ce que le témoin a dit.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] A la lumière de l'argument de Mme Uertz-

 10   Retzlaff, le document sera versé au dossier.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le document D1667.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je m'exprime en mon nom propre. Je me

 13   demande si cela est utile, Monsieur Karadzic, d'examiner des documents avec

 14   ce témoin, vu le temps qui est à notre disposition.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Alors, dans ce cas-là, je me

 16   limiterais à interroger uniquement sur les déclarations de Mme le Témoin.

 17   Donc, je demande l'affichage du 65 ter, 22604.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Je voudrais vous lire quelque chose, c'est la deuxième phrase de la

 20   déclaration.

 21   "A peu près au début du mois de juin, nos villageois Mustafa Selmanovic,

 22   Hilmija Karic et Lutvo Ocuz sont allés au mont Romanija voir Slavko Djokic

 23   pour envisager une évacuation de notre village. Parce que même s'il n'y

 24   avait pas de menace, nous commencions à avoir peur que notre village allait

 25   être attaqué par des hommes à Arkan et à Seselj, venus de Serbie."

 26   Est-ce que c'est ainsi ?

 27   R.  Non, non, ce n'est pas comme cela. Je ne connais pas cela parce que

 28 personne ne se déplaçait. Les gens travaillaient jusqu'au 1er mai. Or, le 1er


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  1   mai, on les a mis en congé. Ils ont dit, on va vous demander de revenir

  2   travailler, personne n'a bougé à partir de ce moment-là, personne n'a

  3   circulé. Macar et Savic sont venus, Velimir, ils sont tous venus et en plus

  4   Rade Dubovina, il venait quasiment tous les jours. Et toujours il a parlé

  5   aux gens, écoutez, il n'y a pas besoin. Je vous ai déjà tout dit. Pour

  6   Mustafa, non, ça ce n'est pas exact.

  7   Q.  D'accord. Mais c'est ce que vous dites dans ce paragraphe. Vous parlez

  8   de Pero Dubovina, et de Rade Dubovina, et vous dites qu'ils cherchaient à

  9   vous convaincre de rester.

 10   R.  Rade Dubovina, fils de Ljubo Dubovina, il est venu dans le village,

 11   jusqu'au jour où ils ont été capturés. Ce soir-là, il était dans le

 12   village.

 13   Q.  Merci. Le 6 juillet, au paragraphe suivant, vous dites qu'ils sont

 14   arrivés à Bogovici, Milorad Savic, et d'autres et qu'ils ont demandé que

 15   les armes soient rendues et qu'il y ait un échange de devise pour l'argent

 16   serbe.

 17   R.  Non, Bogovici, je ne l'ai pas mentionné ni Savic, je n'ai pas

 18   mentionné. Les billets de banque, ça a été dit en passant par les leurs, en

 19   disant qu'il fallait qu'on aille changer l'argent. Mais Bogovici, non,

 20   rien, non, rien du tout. Mais ceux qui sont venus, Rade Dubovina, oui, ils

 21   ont dit qu'il faut aller changer l'argent, vous ne pouvez pas utiliser chez

 22   nous cet argent là. Donc on est allé prendre leur argent, et puis ils sont

 23   venus dans notre argent [phon], vous avez besoin de quoi ? Qu'on vous

 24   apporte quoi dans votre village ? Donc c'était pour arranger les gens.

 25   Q.  Les Serbes.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, avant d'interroger le

 27   témoin au sujet des documents en particulier s'il s'agit d'une déclaration

 28   du témoin, je voudrais que vous expliquiez au témoin de quoi il s'agit, en


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  1   quoi consiste le document que vous allez lui présenter. Page 2, nous

  2   n'avons pas la signature du témoin. Il faut d'abord tout présenter au

  3   témoin.

  4   Oui, Madame Uertz-Retzlaff.

  5   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Il faudrait aussi mettre en garde par

  6   rapport aux noms qui sont mentionnés. Il faut que les noms soient bien

  7   prononcés. Parce qu'il me semble que le nom de Jolovic n'a absolument pas

  8   été entendu clairement par le témoin.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

 10   M. KARADZIC : [interprétation] 

 11   Q.  C'est le 11 janvier 1993, que vous avez donné cette déclaration. Est-ce

 12   que vous l'avez donnée à Jusuf Begic à Sarajevo; est-ce que c'est votre

 13   déclaration ?

 14   R.  Je vous ai dit que je ne m'en souviens pas. Je n'ai pas annoté les

 15   dates. Mais j'ai donné des déclarations, j'avais mal à l'âme, je souffrais.

 16   Q.  Mais est-il exact que près de votre village, il y avait des villages

 17   musulmans armés qui ont combattu, qui avaient leurs unités ?

 18   R.  Ça, je ne le sais pas, rien de tout cela. Parce qu'on ne bougeait pas,

 19   on était dans son village. Ces gens sont venus, ils nous ont informés, tout

 20   ça, je n'en sais rien, non, ni de ces villages alentours, dans les

 21   environs.

 22   Q.  Merci. Alors, vous avez dit à l'instant que ces gens cherchaient à

 23   arranger les villageois qui voulaient apporter des choses, c'étaient des

 24   autorités serbes de Sokolac ?

 25   R.  Tout ça c'était de Sokolac, c'est dans notre voisinage. Ils sont de

 26   Sokolac, Savic, Milorad et Velimir Elez, ils ont dit : Voilà maintenant

 27   vous pouvez aller avec nous acheter du carburant pour pouvoir travailler

 28   avec vos machines, pour acheter des vivres et puis les gens ont continué.


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  1   Ils allaient dans les villages, ils demandaient s'il fallait prendre

  2   quelque chose. C'était comme ça que ça se faisait.

  3   Q.  Mais dites-nous, il y a eu des coups de feu - page 2 de cette

  4   déclaration - vous dites que le 27 juillet, il y a eu des coups de feu

  5   intenses, qu'on a utilisé toute sorte d'armes, et on vous a invité à

  6   remettre vos armes; c'est ça ?

  7   R.  Non, non, ce n'était pas comme ça. Plutôt, ils sont venus ceux-là pour

  8   dire aux gens de rester, qu'ils pouvaient rester sur place. Non, non, nous

  9   les femmes, on n'était pas là. En fait, c'étaient des hommes qui leur ont

 10   parlé, mais il n'y a pas eu d'attaque sur le village. Personne n'a attaqué.

 11   Q.  Il n'y a pas eu d'attaque sur le village.

 12   R.  Non, il n'y a pas eu d'attaque sur le village.

 13   Q.  Merci. Quand ils sont venus le 22 septembre également, il n'y a pas eu

 14   d'attaque, mais c'est par hasard que vous les avez mentionnés -- observés ?

 15   R.  Non, ce n'était pas hasard, c'est le 22 au matin, il fallait qu'on

 16   aille travailler. On a commencé à se réveiller, et eux, ils -- et dans la

 17   prairie, on a vu des soldats qui nous forçaient à sortir dans la prairie.

 18   Moi, la première, j'ai été la première. Puis, mon enfant a été le premier à

 19   être arrêté, puis moi, puis mon fils, et mon mari est allé chercher

 20   l'enfant, et puis moi aussi, et puis mon beau-fils, ma belle-fille. On

 21   était tous dans cette espèce de puits, et autour il y avait l'armée, les

 22   militaires. On était six là-dedans, mais je ne voyais pas mes enfants.

 23   Parce que mon enfant était le premier a être parti, je demande : "Où

 24   est mon enfant ?" Ils disent : "Ah, il est avec Mican Jolovic." "Mais

 25   pourquoi ? Qu'est-ce qu'il fait avec Mican Jolovic ?" C'est en face de

 26   notre village. Enfin, oui, c'est un village qui fait face au notre. Ils ont

 27   dit : "Non, non, n'aies pas peur, n'aies pas peur. Maintenant, il va se

 28   trouver dans cette prairie et vous allez tous être là."


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  1   C'est comme ça que cette armée nous a emmenés là, sur cette prairie.

  2   Tous les villageois, on se trouvait là, et puis quand tous les villageois

  3   s'y sont trouvés, il a commencé à lire sur un papier. Pajic, Momcilo,

  4   c'était lui. Il a dit : "Est-ce que tous les villageois sont là ?" Puis, il

  5   y en avait un qui manquait, un. Excusez-moi, on avait interdit à nos

  6   enfants. Il faut que tous les villageois soient là; sinon, on va vous tuer.

  7   Donc, les enfants ont eu peur. Ils sont allés de maison en maison. On

  8   est tous sortis pour l'amour de nos enfants, et Karic [phon] n'y était pas.

  9   Sa femme est allée le chercher. Sa femme a été tuée. Il est venu et puis

 10   Momcilo Pajic a lu ça : "Il y a des armes dans votre village. On va

 11   fouiller les maisons." Les villageois disaient : "Mais non, il n'y en a

 12   pas." C'était vrai. Tout ce qu'on avait, on a rendu. On a rien. Et voilà,

 13   c'était comme ça.

 14   Puis, il dit : "Vous savez, vous savez ce qu'on va faire. On va

 15   attendre." Il a un poste, une radio sur lui. Il a appelé, il a dit : "Bon,

 16   maintenant je vais aller à Sokolac pour voir ce qui va vous arriver." Puis,

 17   Pajic Momcilo revient de Sokolac et nous dit : "Vous savez, voilà ce qui va

 18   se passer. Les enfants, les femmes, les invalides, il va y avoir un autocar

 19   près de la mosquée, et puis tous ceux qui sont valides ils vont rester pour

 20   travailler. Il y a une obligation de travail."

 21   On avait très peur, c'était la panique pour l'enfant, comment faire ?

 22   Eux, ils nous repoussaient avec des fusils.

 23   Q.  Madame, je vais vous demander pourquoi les enfants sont-ils allés

 24   chercher des chevaux ?

 25   R.  Parce qu'ils en avaient besoin. Nous voulions travailler. Parce

 26   qu'avant cela ils ont conduit des bois à Hazim, un voisin, et ils ont voulu

 27   lui porter du bois. Voilà, c'est comme ça.

 28   Q.  Donc transporter du bois pour avoir de l'argent, pour gagner de


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  1   l'argent ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Parce que dans la déclaration on dirait, d'après ce qu'on voit, qu'ils

  4   étaient obligés de travailler, mais c'était -- c'est ce qu'ils faisaient

  5   pour de l'argent ?

  6   R.  Oui, quand on était en paix c'est comme ça. Et puis il y en avait un

  7   dont je ne retrouve pas le nom.

  8   Q.  D'accord. Devla qui est mort maintenant ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Donc c'est la femme de cet homme qui n'a pas répondu à l'appel, qui

 11   était absent ?

 12   R.  [aucune interprétation]

 13   Q.  Elle a eu une brouille avec une femme sur qui allait chercher son mari,

 14   et c'est elle qui est partie.

 15   R.  Oui, avec la belle-fille qui a dit : "Je ne peux pas laisser les

 16   enfants." Et l'autre a dit : "Je vais aller chercher mon mari." Et on l'a

 17   tuée en bas de la mosquée, et malheureusement, on l'a également égorgée.

 18   Q.  Mais est-ce que vous avez vu cela ?

 19   R.  Oui, on a vu cela quand ils l'ont apportée en face de la mosquée. On

 20   l'a vue, elle baignait dans le sang.

 21   Q.  Mais, Madame, vous avez dit qu'elle a commencé à marcher un peu

 22   rapidement, plus rapidement, et c'est là qu'on l'a tuée.

 23   R.  Un peu plus rapidement, mais en fait elle sautait par-dessus -- c'était

 24   juste pour enjamber en fait une clôture. Elle s'est un peu dépêchée. Quand

 25   on t'envoie quelque part, toi aussi, tu aurais couru.

 26   Q.  Mais, Madame, si c'était en courant, quelqu'un a pu interpréter cela

 27   comme le fait qu'elle prenait la fuite. Je vais retrouver ça dans les

 28   documents. Vous avez dit qu'elle a un petit peu accéléré.


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  1   R.  Oui, mais pour traverser, pour traverser une clôture ou quelque chose,

  2   pour passer par-dessus en contrebas devant la mosquée, c'est là qu'on l'a

  3   tuée. Mais je ne sais pas comment elle a marché, comment elle s'est

  4   déplacée. Ça je ne sais pas.

  5   Q.  Mais vous avez dit que vous n'avez pas vu ce moment-là. Vous avez vu

  6   son corps, n'est-ce pas, par la suite, mais pas le moment même ?

  7   R.  Ecoutez, on était tous rassemblés là-haut et son mari n'était pas

  8   encore arrivé, et soudain il y a eu un coup et tous les soldats autour ils

  9   ont pointé leurs fusils sur nous. Ils se sont dressés soudain. Nail, son

 10   mari, est venu et il a dit : "Malheureusement, on m'a tué Devla." Voilà.

 11   Q.  D'accord.

 12   R.  Puis, ils nous ont escortés jusqu'aux bus, et là, le corps a été

 13   apporté sur notre ancien cimetière, et là, on la recouverte d'une

 14   couverture. On a enveloppé Devla, et sa belle-fille est venue la voir et

 15   elle a dit : "Elle est toute ensanglantée." Je n'ai rien à te dire de plus.

 16   Q.  Mais vous ne l'avez pas vue. C'est elle qui vous l'a dit ?

 17   R.  Oui, elle me l'a dit mais on l'a vue, nous. Nous, on l'a vue. On a vu

 18   qu'elle gisait, qu'elle était couverte de sang, et que c'était ça.

 19   Q.  Parce que, dans 22603, dans cette déclaration il est dit que Papic,

 20   Veljko a demandé qu'on lui apporte du bois, et ça on a tiré ça au clair. On

 21   leur donnait de l'argent en échange.

 22   R.  Ils sont allés chercher du bois et mon enfant a dit ça le matin tôt

 23   qu'il allait faire ça, parce qu'il fallait bien gagner un peu d'argent. On

 24   nous a dit qu'on était libres, qu'on était en paix et qu'on pouvait

 25   circuler.

 26   Q.  Avant cet événement, votre fille et votre beau-fils, ils sont partis à

 27   Sarajevo en passant par le territoire serbe. Ils ont passé sans problème,

 28   n'est-ce pas ?


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  1   R.  Je pense qu'ils sont partis en avril, mars, avril, oui, en passant par

  2   des territoires serbes.

  3   Q.  Merci. Est-ce que vous savez où se trouvent Banja Lucica, Kaljina, et

  4   ces villages-là ?

  5   R.  Bien, Kaljina, je sais. Banja Lujica, non, je ne sais pas. Je ne suis

  6   jamais allée. Kaljina, en tant qu'enfant, il m'est arrivé d'y aller.

  7   Q.  Mais vous savez que Banja Lucica se trouve également dans votre

  8   municipalité; c'est bien cela ?

  9   R.  Je ne sais pas si c'est là ou pas. Je ne sais pas si Kaljina fait

 10   partie de notre municipalité.

 11   Q.  Bien. Alors, ensuite, c'est dans des autobus qu'on vous a emmenés près

 12   de la ligne de front et vous êtes allés à Sarajevo; c'est ça ?

 13   R.  [aucune interprétation]

 14   Q.  Puis, en 1993, vous avez donné une déclaration et vous avez bien

 15   énuméré tout ce que vous avez laissé à Sokolac, et vous avez demandé que

 16   quelqu'un vous récompense ou dédommage.

 17   R.  Oui, peut-être que je l'ai demandé. D'ailleurs, je demande toujours

 18   qu'on m'indemnise pour ces dommages, parce que tout a été détruit, abîmé :

 19   la maison, la terre.

 20   Q.  Merci. Vous avez dit à ce moment-là que votre frigo et vos meubles

 21   étaient restés dans la maison.

 22   R.  Et l'âme et tout le reste.

 23   Q.  Vous avez dit à ce moment-là qu'il restait dans votre maison les

 24   meubles et d'autres objets. Vous n'avez pas dit que ces articles avaient

 25   été emportés.

 26   R.  Comment ? Je l'ai bien dit. J'ai dit que, quand je suis venue chercher

 27   mon père - parce que je devais venir chercher mon père - ils avaient déjà

 28   tout emporté, le frigidaire, le canapé. Tout était renversé et on emporte.


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  1   Qu'est-ce que je peux te dire ? Est-ce que j'ai dit, est-ce que je n'ai pas

  2   dit ? Oui, je l'ai dit. Je suis revenue pour prendre mon père qui ne

  3   pouvait rien et j'ai vu que tout était déjà emporté, tout était en

  4   mouvement déjà.

  5   Q.  Bon. Mais, à ce moment-là, vous ne saviez pas que les vôtres avaient

  6   été tués. Savez-vous à quel moment les deux membres de votre famille dont

  7   vous savez qu'ils ont été tués, à quel moment qu'ils ont été tués, dans

  8   quelle circonstance ?

  9   R.  Je ne sais toujours pas dans quelle circonstance. Est-ce que c'est un

 10   enlèvement, est-ce que c'était autre chose ? Parce que nous, nous étions

 11   des femmes et des enfants, alors chaque fois qu'on voyait quelqu'un, ceux

 12   des nôtres, quand on allait à Sokolac, quand on avait l'occasion, parce

 13   qu'en 1997 et 1998, on y allait déjà. Chaque fois qu'on y allait, on posait

 14   des questions et on nous dit : C'est l'armée qui les a emmenés. Alors, on

 15   disait : Quelle armée ? On demandait qui est-ce qui a arrêté les nôtres et

 16   qui est-ce qui les a emmenés dans l'autobus ? De quelle armée on parle,

 17   moi, je n'en sais rien. J'ai demandé dans quelle direction on les avait

 18   emmenés, et on répondait : Mais peut-être qu'ils sont allés à Novakova

 19   Pecina. Vous savez où c'est, Novakova Pecina ? On n'y allait jamais,

 20   c'était si loin. Voilà, les choses ont été comme cela, toujours comme cela

 21   jusqu'au moment où on a découvert cet élément.

 22   Parce que nous les femmes, nous étions devant la mosquée, et devant

 23   la mosquée, on parlait ensemble et on se posait des questions et on a

 24   réfléchit et on s'est dit : Eh bien, ça ne peut pas être ailleurs qu'ici.

 25   Donc c'est là qu'on a fait des recherches. Mais personne ne voulait nous

 26   dire directement où ils étaient, enfin, les nôtres, puisqu'on parle de

 27   cela. On a même demandé à des villageois -- d'autres villageois, qui ont

 28   dit : Pourquoi est-ce que vous posez des questions, pourquoi vous ne posez


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  1   ces questions à nous ? Ils sont sous la terre et on ne peut pas les

  2   retrouver. Puis, il y avait ce vieux cimetière qui avait été creusé, et des

  3   pierres avaient été emportées. Ils ont construit une caserne là-bas, et ils

  4   ont dit que c'était désormais un vieux cimetière et nous avons dit : Oui,

  5   mais on veut savoir où sont les villageois qui ont été emmenés aujourd'hui.

  6   Q.  Merci. Vous ne savez pas, vous n'avez jamais retrouvé à quel

  7   moment ils ont été tués, et dans quelle circonstance ?

  8   R.  Nous n'avons jamais découvert dans quelles circonstances, mais c'était

  9   le même jour où le lendemain. C'est la seule chose que la personne qui les

 10   a laissés sur place a pu nous dire.

 11   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Docteur Karadzic, je m'exprime, en

 12   mon nom personnel, mais je me demande quel est l'objet d'une telle série de

 13   questions dans votre contre-interrogatoire de ce témoin.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'était ma dernière question, Excellence. Je

 15   souhaitais savoir si ce témoin savait ce qu'il était advenu exactement des

 16   hommes. Les femmes et les enfants ont été évacués; je voulais simplement

 17   savoir ce qui était arrivé aux hommes, si le témoin le savait. Parce que

 18   jusqu'à ce que je reçoive l'acte d'accusation, je n'avais jamais entendu

 19   parler de ce village.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Merci, Madame Selmanovic. Je n'ai plus de questions à vous poser. Soyez

 22   assurée, Madame Selmanovic, qu'aucun de mes amis, aucun de ceux qui ont du

 23   respect pour moi, aucun de mes partisans n'aurait la volonté de toucher un

 24   seul cheveu à un témoin ou aux membres de sa famille. Ceci ne nous est

 25   jamais arrivé. C'est une recommandation qui a été faite en public à tout le

 26   monde de respecter tous les témoins en particulier les victimes.

 27   R.  Je parle publiquement ici aussi, et je dis que la personne qui nous a

 28   regroupés, à ce moment-là, qui a séparé les enfants des hommes et de nos


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  1   maris, il doit venir dire s'il l'a fait de sa propre volontaire ou s'il l'a

  2   fait autrement, et ce, pour -- ou s'il l'a fait par amour pour vous ou

  3   autrement.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Madame Selmanovic.

  5   Madame Uertz-Retzlaff, est-ce que vous avez des questions dans le cadre des

  6   questions supplémentaires ?

  7   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Selmanovic, ceci met un point

  9   final à votre déposition. Au nom de la Chambre et du Tribunal dans son

 10   ensemble, je tiens à vous remercier d'être venu à La Haye pour témoigner.

 11   Vous pouvez maintenant vous retirer. Je vous souhaite au nom de la Chambre

 12   un bon voyage de retour à votre domicile.

 13   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais qu'il en soit avant qu'il y ait

 15   d'autres questions évoquées, nous allons suspendre pour cette semaine et

 16   reprendrons la semaine prochaine, mardi.

 17   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Mais nous siégeons demain, Monsieur

 18   le Président.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Toutes mes excuses. C'était une erreur

 20   de ma part. Oui, nous siégeons demain à 9 h. Je prenais mes désirs pour des

 21   réalités.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois qu'il importe de corriger ce que vous

 23   avez dit.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Bien, nous suspendons

 25   pour aujourd'hui jusqu'à demain, 9 h.

 26   L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète : Le dernier propos de Karadzic :

 27   Je pense qu'il ne faudrait pas qu'on vous corrige, Monsieur le Président.

 28   --- L'audience est levée à 13 heures 41 et reprendra le jeudi 8 septembre


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  1   2011, à 9 heures 00.

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