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1 Le jeudi 1er décembre 2011
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour. Le Juge Morrison est indisposé
7 aujourd'hui, par conséquent, nous siégeons conformément à l'article 15 bis.
8 Je crois que le Dr Karadzic -- ou Me Robinson va présenter l'équipe de la
9 Défense.
10 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, bonjour. Je voudrais vous présenter le
11 Dr Dusan Dunjic, qui est un expert, et que les Juges de la Chambre ont
12 permis de prêter assistance durant la déposition de ce témoin.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Je vais demander au témoin de
14 prononcer la déclaration solennelle.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
16 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
17 LE TÉMOIN : RICHARD WRIGHT [Assermenté]
18 [Le témoin répond par l'interprète]
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Docteur. Veuillez vous mettre à
20 l'aise.
21 Oui, Monsieur Mitchell.
22 M. MITCHELL : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour.
23 Interrogatoire principal par M. Mitchell :
24 Q. [interprétation] Bonjour, Professeur.
25 R. Bonjour.
26 Q. Pouvez-vous décliner votre identité.
27 R. Richard Vernon Stafford Wright.
28 Q. Pourriez-vous nous informer des documents que vous avez devant vous ?
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1 R. Il s'agit des documents et des rapports que j'aie rédigés pour le TPY
2 concernant les exhumations.
3 Q. Merci.
4 M. MITCHELL : [interprétation] Pourrais-je avoir le document de la
5 liste 65 ter 3452, s'il vous plaît ?
6 Q. Professeur, vous avez fourni une copie de votre CV au bureau du
7 Procureur en novembre. Est-ce que le CV, qui est à l'écran, est le CV mis à
8 jour ?
9 R. Il faudrait en fait que je vois la date à la fin du document.
10 M. MITCHELL : [interprétation] Peut-on passer à la dernière page ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, effectivement, c'est le CV mis à jour.
12 M. MITCHELL : [interprétation]
13 Q. Vous nous avez parlé de votre parcours par le menu dans l'affaire
14 Krstic, et je verserais le compte rendu d'audience dans ce procès au
15 dossier de ce procès donc, mais je voudrais quand même vous poser quelques
16 questions concernant votre parcours.
17 M. MITCHELL : [interprétation] Peut-on passer à la première page du CV,
18 s'il vous plaît ?
19 Q. Vous êtes Professeur emeritus d'anthropologie de l'Université de
20 Sydney, mais en fait vous êtes archéologue, n'est-ce pas ?
21 R. Oui, je suis archéologue.
22 Q. Pourriez-vous nous expliquer quelle est la différence entre le titre
23 que vous avez et votre profession ?
24 R. Il n'y a pas vraiment de différence, puisqu'à l'époque, l'Université de
25 Sidney n'avait pas de département ou de faculté d'Anthropologie, c'est-à-
26 dire qu'anthropologie physique ainsi qu'archéologie et anthropologie
27 culturelle. Donc l'anthropologie était en fait une appellation globale, et
28 moi, j'étais responsable du volet archéologique de cette faculté
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1 d'Anthropologie.
2 Q. Merci. Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre en quoi consiste
3 l'archéologie et pourquoi ceci est pertinent dans l'exhumation des
4 charniers ?
5 R. L'archéologie est en fait l'étude de la terre, des terrains, et ceci
6 peut donc porter sur l'étude de restes humains, mais également d'autres
7 éléments que l'on peut retrouver dans la terre et qui auraient été
8 fabriqués par des êtres humains, tous ces éléments sont donc exhumés et
9 sont interprétés.
10 Q. Vous avez commencé à travailler pour le TPY en 1997, n'est-ce pas ?
11 R. Oui.
12 Q. Est-ce que vous aviez déjà procédé à l'exhumation de charniers ?
13 R. Oui. En 1990, le ministre de la Défense du gouvernement d'Australie
14 avait demandé de me rendre en Ukraine, qui faisait, à l'époque, partie de
15 l'Union soviétique, pour enquêter sur trois charniers de Juifs qui avaient
16 été tués en 1942. Comme je le disais, trois charniers ont fait l'objet de
17 cette étude, j'ai travaillé là-dessus de 1990 à 1991, et j'ai établi des
18 rapports que j'ai donc ensuite soumis au gouvernement d'Australie. Au total
19 800 corps ont fait l'objet de l'étude au sein de ces trois charniers. La
20 raison pour cela c'est qu'il y avait en fait trois hommes à Adelaide, dans
21 le sud de l'Australie, qui étaient accusés d'avoir participé à des meurtres
22 de Nazi en Ukraine en 1942 et ils avaient émigré en Australie après la
23 Deuxième Guerre mondiale.
24 Q. Merci. Au TPY, vous avez travaillé avec des spécialistes de
25 l'anthropologie, des spécialistes en pathologie, en médecine légiste; est-
26 ce que vous pourriez expliquer aux Juges de la Chambre comment ces
27 différentes disciplines sont liées les unes aux autres ?
28 R. Les anthropologues de mon équipe, ainsi qui étaient donc dans l'équipe
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1 d'exhumation, avaient une expérience en archéologie. Ils étaient donc tout
2 à fait à même d'étudier des restes humains que l'on retrouvait dans des
3 couches boueuses souterraines. Les anthropologues donc à la morgue, qui ne
4 faisaient pas partie de l'opération, procédaient à l'analyse des restes que
5 nous avions trouvés parce qu'ils avaient une connaissance du corps humain
6 et du squelette humain, qui leur permettaient également de pouvoir
7 préserver au mieux possible les restes humains que l'on découvrait sans
8 causer trop de dégâts.
9 Q. Qu'en est-il des spécialistes en pathologie ?
10 R. Non, nous n'avions pas de spécialiste en pathologie dans l'équipe.
11 Q. Mais à la morgue --
12 Q. Ah, d'accord.
13 Q. -- dans quelle mesure leur travail était lié au vôtre ?
14 R. Dans le processus, nous avions une morgue qui était à Visoko, c'est-à-
15 dire à proximité de Sarajevo, et nous envoyions donc les corps que nous
16 avions exhumés dans des camions frigorifiques en direction de la morgue à
17 Visoko. On faisait des analyses pour déterminer le profil biologique des
18 individus, c'est-à-dire leur âge, leur sexe, ainsi que les causes du décès
19 et la manière dont ils étaient décédés, et ceci était fait par les
20 anthropologues et par les spécialistes en pathologie et ceci ne faisait pas
21 en fait partie, à proprement parler, de notre équipe. Donc l'opération
22 était divisée de la manière suivante : vous aviez une équipe d'exhumation,
23 dont j'étais responsable, et vous aviez également les spécialistes en
24 anthropologie et en pathologie qui étaient à la morgue.
25 Q. Merci. La dernière exhumation qui a été réalisée pour les comptes du
26 TPY s'est faite en 2000, n'est-ce pas ?
27 R. Oui. C'était en septembre/octobre 2000.
28 Q. Est-ce que vous avez participé à des exhumations depuis ?
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1 R. Non, pas avec le TPY, mais j'ai participé à des exhumations de soldats
2 principalement australiens mais également britanniques qui ont été tués
3 durant la Première Guerre mondiale dans un lieu qui s'appelle Fromelles
4 dans le nord-est de la France, et j'étais le conseiller légiste en chef de
5 l'équipe d'archéologie d'Oxford, qui avait été chargée de s'acquitter de
6 cette mission, pour récupérer les corps, de récupérer également les
7 uniformes ainsi que tous les objets qui étaient associés aux corps qui
8 avaient été enterrés par les Allemands après cette bataille désastreuse. Il
9 était donc analysé sur place avec une prise d'échantillon ADN, mais je
10 n'avais donc pas un rôle exécutif si l'on peut dire.
11 Q. Merci. Est-ce qu'il y avait des signes particuliers quant à la
12 disposition des corps ?
13 R. Les corps avaient été rassemblés deux ou trois jours, probablement,
14 après la bataille et il y avait des corps qui n'étaient pas complets, étant
15 donné que certains avaient été tués suite à des bombardements par obus et
16 les Allemands les avaient enterrés. Il s'agissait d'un régiment bavarois,
17 mais, en fait, les Allemands les avaient enterrés en faisant preuve
18 d'énormément de respect. Il y avait, en fait -- ils étaient, donc, en
19 quinconce si l'on peut dire, donc certains faisaient face à l'est, d'autres
20 faisaient face à l'ouest. Il y avait deux rangées. Elles étaient séparées
21 par une petite quantité de terre. Au total, il y avait cinq charniers qui
22 contenaient 250 soldats enterrés avec leurs uniformes.
23 Q. Est-ce qu'il y avait des personnes en Bosnie qui ont été impliquées
24 dans cette exhumation ?
25 R. Oui. Deux des personnes, qui avaient travaillé avec moi en Bosnie
26 pendant certaines semaines, voire des mois -- en fait, Oxford archéologie
27 est une société d'expertise et conseils qui est très expérimentée, mais qui
28 n'avait pas d'expérience dans les charniers. Par conséquent, ils avaient
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1 employé des experts pour chacun de ces charniers. Une autre personne,
2 Caroline Barker, qui travaillait avec moi, était responsable du volet
3 anthropologie sur le site de Fromelles, et le photographe légiste avait
4 travaillé également avec moi. Donc, effectivement, les personnes qui
5 avaient travaillé avec moi en Bosnie ont bien sûr continué leur carrière.
6 Nous avons, pour ainsi dire, récupéré, pour travailler sur le site de
7 Fromelles, et je parle de quatre d'entre eux.
8 Q. Merci. Une dernière question concernant votre parcours. Sur votre CV,
9 nous voyons, tout en haut de la page, Sir Richard Wright AM. Ceci est
10 différent des autres -- des autres CV. Qu'est-ce que cela signifie ?
11 R. Il s'agit d'un titre honorifique : Membre de l'Ordre de l'Australie.
12 Cet AM, cela signifie, donc, Membre de l'Ordre d'Australie et c'est la
13 reine d'Angleterre qui décerne ces distinctions. Ceci était donc pour mes
14 travaux en matière d'archéologie légiste que j'avais réalisés.
15 Q. Maintenant, je voudrais revenir à vos activités au sein du TPY. Vous
16 avez rédigé deux rapports : Exhumations, donc, en Bosnie orientale en 1998,
17 et Excavations et exhumations en 1999 à Kozluk. Est-ce que vous vous
18 souvenez avoir parlé de ceci dans votre déposition dans l'affaire Krstic ?
19 R. Oui.
20 Q. Est-ce que vous avez la possibilité d'examiner à nouveau votre
21 déposition dans l'affaire Krstic ?
22 R. Oui.
23 Q. Je crois que vous souhaitez apporter une correction à cette déposition.
24 Page du compte rendu d'audience 3633, lignes 19 à 21, il y a deux
25 références aux termes -- qui sont mentionnées. On voit le terme objectif.
26 En fait, il faudrait que ce soit objet.
27 R. C'est exact. Il s'agissait de la récupération d'objets. Et en fait, ça
28 a été consigné comme objectif.
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1 Q. Merci. Est-ce qu'on peut confirmer qu'avec cette correction, ce compte
2 rendu d'audience est fidèle à votre déposition dans l'affaire Krstic ?
3 R. Oui.
4 Q. Est-ce que -- si on vous posait les mêmes questions, vous répondriez de
5 la même manière aujourd'hui ?
6 R. Oui.
7 M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaiterais
8 verser la déposition dans l'affaire Krstic qui a la référence 65 ter 03227.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous souhaitez également
10 verser le CV du Dr. Wright ?
11 M. MITCHELL : [interprétation] Oui, je vous prie de m'excuser,
12 effectivement.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons donc d'abord verser le CV au
14 dossier.
15 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document de la liste 65 ter 03452
16 deviendra la pièce P3998.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] La déposition du Pr Wright dans
18 l'affaire Krstic sera versée au dossier sous la cote P3999.
19 M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais également
20 verser les pièces associées ainsi que les deux rapports que j'ai
21 mentionnés. Le premier rapport intitulé : "Exhumations en Bosnie orientale
22 en 1998," qui porte la référence 65 ter 2496; et le deuxième rapport
23 intitulé : "Excavations et exhumations à Kozluk en 1999," à la référence 65
24 ter 2495.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Robinson.
26 M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ces deux rapports seront versés sous la
28 cote P4000 et 4001.
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1 M. MITCHELL : [interprétation] Je voudrais maintenant donner lecture du
2 résumé de la déposition du Pr Wright dans l'affaire Krstic.
3 Le Pr Wright a commencé à travailler pour le TPY en juin 1997. En 1998, il
4 a été à la tête d'une équipe d'exhumation au site de charnier au Barrage
5 rouge; Cancari road 3, 12; Hodzici road 3, 4 et 5; Liplje 2; et Zeleni
6 Jadar 5. En 1999, il a exhumé un charnier principal à Kozluk, et au moment
7 de sa déposition dans l'affaire Krstic, il travaillait sur des sites à
8 Prijedor.
9 Le Pr Wright a décrit comment l'excavation commençait par des enquêteurs du
10 TPY qui étaient donc acheminés en direction d'un site où l'on suspectait
11 qu'il y avait un charnier. C'était donc son rôle de trouver le site exact
12 du charnier dans la zone suspecte.
13 Tout d'abord, on vérifiait qu'il n'y avait ni mine, ni engin piégé et
14 une équipe de géomètres prenait des cotes concernant le charnier et ses
15 contenus. Ensuite, on commençait à gratter à la surface la couche
16 supérieure, donc, de la terre, jusqu'à ce que le Pr Wright puisse être
17 satisfait qu'on arrivait à la partie qui pouvait être considérée comme
18 étant le charnier.
19 Chacun des corps dans le charnier faisait l'objet d'une étude et d'un
20 système d'enregistrement en 3D. Chaque corps et chaque partie de corps
21 recevait un numéro unique et était photographié.
22 Une fois que les corps et les parties de corps étaient exhumés, ceux-
23 ci étaient envoyés à la morgue pour tes analyses pathologiques et
24 anthropologiques.
25 Les détails des huit charniers qui ont été exhumés par le professeur
26 Wright en 1998 sont les suivants. Il y a le premier site connu sous le nom
27 de Barrage rouge. Il s'agit d'un charnier principal qui avait été creusé
28 dans le mur de soutènement d'un barrage. Il y avait eu des pillages qui
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1 avaient été réalisés, cependant il y avait des restes humains fragmentés
2 qui d'après la morgue représentait un nombre minimum de personnes -- de 46
3 personnes.
4 Les sept autres sites qui ont fait l'objet d'une exhumation, Cancari
5 road 3, Cancari road 12; Hodzici road 3, 4 et 5; Zeleni Jadar 5; Liplje 2
6 étaient des charniers secondaires. Il a conclu que le charnier secondaire
7 Liplje 2 était lié au charnier principal du Barrage rouge en raison de
8 blocs -- de blocs géologiques qui -- que l'on retrouvait sur les deux
9 sites.
10 En 1998, le Pr Wright a également étudié 21 sites supplémentaires qui
11 se sont avérés étant des charniers. Il a évalué que sur ces 21 sites, au
12 total 2 571 corps supplémentaires avaient été découverts.
13 En 1999, le Pr Wright a exhumé un charnier principal qui avait été
14 partiellement pillé à Kozluk et on a conclu que ce site était relié à celui
15 de Cancari road 3, un charnier secondaire qu'il avait exhumé dans les
16 années précédentes, en raison de la présence de fragments de verre -- de
17 couleur verte qui étaient présents dans les deux sites.
18 Il en a conclu également que le site de Kozluk était un site
19 d'exécution en plus d'un site d'enterrement. Ce -- Cette conclusion était
20 basée sur l'absence de changements de position des membres des corps et
21 également par le fait qu'on avait retrouvé des balles qui étaient fichées
22 dans la roche sous les corps.
23 Le Pr Wright a observé que 42 % des 280 personnes du site de Kozluk
24 avaient leurs mains liées dans le dos, alors que 16 % des corps avaient,
25 portaient des bandeaux au niveau de la tête.
26 Le Pr Wright a également noté qu'il avait vu que des habits civils dans ces
27 charniers qui avaient été exhumés en 1998 et 1999.
28 J'annonce les questions supplémentaires.
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1 Q. Professeur, vous avez parlé des charniers primaires et secondaires, ou
2 principaux et secondaires, dans votre déposition précédente; est-ce que
3 vous pourriez nous définir de quoi il s'agit ?
4 R. Oui, en fait, il y a une première catégorie qui est un site
5 d'exécution. Ensuite un charnier principal, il s'agit de l'endroit où des
6 corps ont été transportés d'un site d'exécution en direction de ce site
7 pour être enterrés, et dans la plupart des cas, ces charniers ont ensuite
8 été retraités et les corps ont été transportés dans des charniers
9 secondaires. Donc on fait la différence entre des charniers principaux qui
10 est l'endroit où les corps ont été enterrés pour la première fois, et les
11 charniers secondaires qui constituent les endroits où les corps ont ensuite
12 été re-transportés à partir des charniers principaux.
13 Q. Dans vos rapports, vous utilisez le terme donc de "vol ou de pillage;"
14 est-ce que vous pourriez décrire ce que cela signifie ?
15 R. En fait nous utilisions le terme de "pillage" en archéologie pour
16 signifier que, lorsque vous procédez à l'excavation d'un site, vous voyez
17 que certains objets ont été pris ou certains éléments ont été pris. Cela
18 pourrait être considéré comme une activité criminelle, mais en fait ce
19 n'est pas nécessairement le cas. Il y a une partie dans le dictionnaire
20 anglais d'Oxford concernant le contexte archéologique, et qui explique
21 l'usage de ce terme de "rob," donc de vol ou de pillage dans un contexte
22 archéologique, et c'est de contexte-là que je l'utilisais
23 Q. J'aimerais que vous nous donniez, si vous pouvez, un exemple de ces
24 différentes catégories, c'est-à-dire site d'exécution, charnier principal,
25 charnier secondaire; est-ce que vous pourriez peut-être utiliser le site de
26 Kozluk pour nous expliquer comment cela fonctionnait ? Pourriez-vous tout
27 d'abord nous expliquer comment vous avez commencé à travailler sur le site
28 de Kozluk ?
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1 R. En 1998, nous procédions à des excavations dans un site que l'on
2 appelait Cancari Road 3, et les engins de terrassement délimitaient les
3 confins du charnier et, à ce moment-là, nous avons remarqué des centaines,
4 voire des milliers de petits bouts de verres de couleur verte. Et il
5 s'agissait pour la plupart de bouteilles qui avaient encore les petites
6 bagues au niveau du goulot de la bouteille, visibles, avec également des
7 étiquettes qui mentionnaient donc l'usine de bouteilles de Vitinka, à
8 Kozluk. Ce site, donc Cancari Road 3, est dans une partie assez reculée de
9 la Bosnie, c'était donc assez tard en décembre, et j'en avais conclu que
10 ces corps avaient été donc transportés ici avec les verres cassés, et cela
11 provenait donc d'un site principal ou d'un site d'exécution. Je ne sais pas
12 donc de quoi il s'agissait, mais le site principal ou le site d'exécution
13 était donc à proximité d'une usine de fabrication de bouteilles, qui donc
14 se débarrassait de ces bouteilles cassées.
15 Donc j'ai contacté le TPIY à ce sujet, ils ne savaient pas vraiment qu'il y
16 avait un site d'exécution ou un site principal dans cette zone, mais ils
17 ont dépêché quelqu'un immédiatement, et nous sommes allés voir donc cette
18 usine de fabrication de bouteilles, qui est à proximité de la rivière
19 Drina. Je crois que c'était en 1998 ou en 1999, et mon équipe est retournée
20 là-bas, et nous avons trouvé un site principal qui avait donc été pillé. Et
21 on a pu donc en conclure que les corps qui se trouvaient à Cancari 3,
22 avaient été transportés de Kozluk à Cancari 3 mais, en même temps, ils
23 avaient transporté donc ces restes de bouteilles ainsi que les étiquettes.
24 Et Cancari 3 était donc certainement un charnier secondaire, étant donné
25 que beaucoup de corps n'étaient pas complets, puisque certaines de corps
26 n'avaient pas été transportées.
27 Q. Je voudrais vous présenter certaines photos et je voudrais que vous
28 nous expliquiez donc ce que vous voyez.
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1 R. De quel site parlez-vous ?
2 Q. Kozluk.
3 M. MITCHELL : [interprétation] C'est le document de la liste 65, numéro
4 2459.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] 2495 ?
6 M. MITCHELL : [interprétation] Je crois qu'il s'agit de la cote 2495.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
8 M. MITCHELL : [interprétation] Je vous prie de m'excuser.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que c'est ce que nous avons déjà
10 versé au dossier, un des rapports d'expert ?
11 M. MITCHELL : [interprétation] Oui, effectivement. Pourrait-on passer à la
12 page suivante en B/C/S, s'il vous plaît ? C'est là où nous aurons la
13 description.
14 Q. Professeur, la photo numéro 4, celle qui est en haut; est-ce que vous
15 pourriez nous dire ce que nous voyons ici ?
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde, s'il vous plaît. Si la
17 Défense est d'accord, nous pouvons agrandir la partie, la version anglaise
18 et ne plus avoir à l'écran la version en B/C/S.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit donc de détail de la surface
20 d'exécution Kozluk, KK2. La raison pour laquelle cet endroit est important,
21 c'est que vous êtes sur une zone élevée, et vous regardez une surface assez
22 plane où se trouvent ces restes humains, et nous avons pu les analyser
23 visuellement. Nous avons vu qu'il y en avait qui avaient des blessures par
24 balle, et les balles étaient -- s'étaient fichées dans le sol à environ 10
25 centimètres.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mitchell, est-ce que vous
27 souhaitez que le témoin annote cette photo ?
28 M. MITCHELL : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, ceci serait
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1 utile.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors attendez un instant que
3 l'huissière vous aide. Voilà, vous pouvez donc annoter cela.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà les parties donc qui sont planes, et
5 vous voyez que beaucoup des corps avaient les mains attachées dans le dos,
6 et nous avons donc trouvé des balles fichées dans le sol.
7 Ensuite ces corps ont été recouverts par une couche de terre, et
8 ensuite on a essayé, donc, pas nous, donc, et on a essayé de récupérer les
9 corps, et on commence à avoir une ancienne tranchée qui est à la limite de
10 l'endroit où se trouvent les corps.
11 M. MITCHELL : [interprétation] Est-ce que nous pouvons, s'il vous
12 plaît, regarder la photographie du bas ?
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je souhaite savoir si les annotations
14 faites par le professeur sont importantes pour vous. Est-ce que vous voulez
15 les conserver ?
16 M. MITCHELL : [interprétation] Pas pour le moment.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc nous pouvons montrer la
18 photographie d'en bas.
19 M. MITCHELL : [interprétation] La photographie numéro 5, s'il vous plaît.
20 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
21 M. MITCHELL : [interprétation]
22 Q. Vous voyez que nous voyons la bordure de la tranchée.
23 R. [aucune interprétation]
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous allez demander au
25 professeur d'annoter de nouveau ?
26 M. MITCHELL : [interprétation] Attendez, un instant, s'il vous plaît.
27 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
28 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il faudra probablement d'abord activer
2 cette modalité donc d'annotation à l'écran. Mme l'Huissière pourra nous
3 aider.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] J'avais mentionné précédemment donc cette
5 surface plane. Je ne sais pas si ça peut être utile, je peux indiquer les
6 endroits sans annoter.
7 M. MITCHELL : [interprétation]
8 Q. Oui.
9 R. Donc, en haut de la photographie vous voyez cette même surface plane,
10 vous voyez que les corps sont allongés dessus. En bas, vous voyez la
11 tranchée, et vous voyez les bordures. Vous voyez que cela traverse donc
12 cette tranchée passe en fait en plein milieu des corps et une jambe a été
13 coupée, et ça a été fait par une excavatrice à dent. L'excavatrice a enlevé
14 probablement des corps, certains qui se trouvaient donc là en bordure, vous
15 voyez, vous avez des marques qui sont laissées par l'excavatrice, cette
16 excavatrice -- cette pelle Canly [comme interprété].
17 Q. [aucune interprétation]
18 R. Les archéologues n'ont enlevé que la terre meuble. Donc je pense qu'il
19 n'y a pas eu d'exécution ici et qu'on a essayé de récupérer les corps.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que l'on peut faire un zoom avant
21 ? Oui. On le voit un peu mieux.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Donc je parle des corps qui n'ont pas été
23 touchés, en haut. On voit quelques membres qui ont été enlevés en bordure.
24 En bas, vous voyez qu'il y a ces tranchées qui traversent en fait la masse
25 des corps.
26 M. MITCHELL : [interprétation] Page 30 dans le prétoire électronique, s'il
27 vous plaît.
28 Q. Voyons la photographie numéro 9, ce sont des morceaux de verre vert
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1 dont vous avez parlé ?
2 R. Oui. Vous voyez ce verre vert que nous avons enlevé lorsque nous avons
3 envoyé les corps à la morgue. Il s'agit de l'endroit KK3. Nous avons trouvé
4 ici 280 corps entiers, et nous avons, en bas sur la pente, les corps qui
5 sont laissés, ainsi que le verre vert.
6 Q. En principe, vous avez préservé les objets que vous avez trouvés dans
7 les fosses ou les charniers ?
8 R. Oui, en général. Bien entendu, tout ce qui pouvait permettre
9 l'identification des individus. Mais il y a eu une exception qui a été
10 faite à Kozluk et à Cancari 3 on n'a pas ramassé le verre, parce qu'on a
11 estimé que cela n'avait pas d'impact sur quelque chose qui nous
12 intéressait, que ce fût simplement des déchets.
13 Q. Alors la page 25, ligne 13 rapporte vos propos comme disant qu'il ne
14 s'agissait pas d'un lieu d'exécution. C'est ce que vous avez dit ?
15 R. Non. Il y avait une exécution qui s'est déroulée là.
16 Q. Merci.
17 M. MITCHELL : [interprétation] Alors voyons maintenant la photographie
18 numéro 10.
19 Q. Page 13 de votre rapport, vous dites que vous estimez que 16 % des
20 corps comportaient des bandeaux sur les yeux et que 43 %, ou 124 corps,
21 avaient des liens. Alors, sur la base de cette photographie, est-ce que
22 vous pouvez nous dire comment vous interprétez qu'il s'agissait d'un
23 bandeau ou d'un lien ?
24 R. J'ai peur de toucher l'écran, et en fait j'aurais besoin d'annoter.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais vous expliquer comment se présente ce
27 corps. Vous avez là les cheveux de la tête. Vous avez l'épaule. Les côtes.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci de votre patience.
Page 22275
1 Nous pourrions placer la photographie sur le rétroprojecteur pour que le
2 professeur puisse travailler avec l'image.
3 M. MITCHELL : [interprétation] Oui, c'est bien, Monsieur le Président. Je
4 n'ai pas en fait cette photographie en couleur.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Même si vous l'avez en noir et blanc, ce
6 serait bien.
7 M. NICHOLLS : [interprétation] Je ne souhaitais interrompre, mais nous
8 pourrions peut-être faire une pause de cinq minutes. Peut-être que cela
9 vaudrait la peine pour que le témoin puisse annoter correctement.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de faire cette suspension,
11 Monsieur Tieger, nous avons reçu une requête de la Défense demandant, soit,
12 de reporter à plus tard la déposition de M. Jean-Rene Ruez ou bien de
13 demander qu'il dépose viva voce. Alors quand est-ce que vous allez pouvoir
14 ne répondre ?
15 M. TIEGER : [interprétation] Je pense que vous souhaitez que l'on réponde
16 le plus rapidement possible, dès que possible nous allons vous apporter
17 notre réponse.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc avant la fin de la journée de
19 travail demain, s'il vous plaît.
20 Nous allons suspendre pour cinq minutes, et annoncez-nous -- enfin,
21 informez-nous à partir du moment où ce sera prêt.
22 --- La pause est prise à 9 heures 39.
23 --- La pause est terminée à 9 heures 47.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci de votre patience. Vous pouvez
25 continuer.
26 M. MITCHELL : [interprétation] Merci.
27 Q. Donc, Professeur, nous devrions pouvoir continuer, maintenant. Tout est
28 en place. La question était de savoir : est-ce que vous identifiez un objet
Page 22276
1 qu'en constituant un lien ou un bandeau ?
2 R. Oui, justement, je montrais comment se présentait ce corps. Vous avez
3 les cheveux ici. Mais les problèmes recommencent.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Attendez un instant.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Pardon.
6 M. MITCHELL : [interprétation] Nous devrions voir la photographie du bas.
7 Nous avons ici des copies couleur.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne comprends pas ce qui se passe.
9 Plaçons une reproduction en couleur sur le rétroprojecteur. Ah, cela
10 fonctionne maintenant.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] La tête, les cheveux, les épaules, la colonne
12 vertébrale, les deux bras derrière le dos qui se rejoignent, et vous avez
13 ce tissu qui est attaché autour des bras. C'est ce qui les retient -- qui
14 les maintient jointent derrière le dos. Là, ce n'est -- cela ne se voit pas
15 très bien, mais c'est le bandeau au -- derrière le crâne. Donc, ces
16 morceaux de tissus, à mon sens, ne constituent pas les déchets se trouvant
17 dans la fosse, mais liés au corps, ce sont donc des objets qui doivent être
18 récupérés.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît,
20 signer et inscrite la date, la date d'aujourd'hui est celle du 1er décembre
21 ?
22 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Nous allons verser ces pages
24 séparément au dossier.
25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le document P4002, pièce à
26 conviction P4002.
27 M. MITCHELL : [interprétation] Page 32, s'il vous plaît.
28 Q. Très rapidement, Professeur, est-ce que vous vous souvenez de quoi
Page 22277
1 étaient faits les liens à cet endroit-là, sur ce site-là; est-ce que
2 c'était le même tissu ou est-ce que c'était autre chose ?
3 R. Je ne peux pas vous répondre. Je ne peux pas vous dire si tout était de
4 la même composition, parce que ce n'était pas quelque chose que j'ai
5 étudié. Mais, à Kozluk, la plupart des liens, je pense que tout ce que l'on
6 voie à l'image, maintenant, sont faits de tissu. Mis à part ces
7 photographies que nous avons prises pour nos archives, en principe, nous
8 n'avons pas analysé ce tissu, la composition des liens.
9 M. MITCHELL : [interprétation] Page 29, maintenant, s'il vous plaît.
10 Q. Donc vous avez dit déjà, Professeur, que vous avez considéré qu'il
11 s'agissait de liens ici, parce que les mains étaient attachées dans le dos,
12 les deux mains. Alors, maintenant, là, vous n'avez qu'un poignet, donc
13 comment est-ce que vous pouvez dire qu'il s'agit de lien ?
14 M. MITCHELL : [interprétation] Est-ce que l'on peut faire un zoom avant sur
15 la photo numéro 8 ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, là, vous avez un individu qui a ce lien
17 autour de son bras, il y a un nœud, et je suis arrivé à la conclusion que
18 ça s'est détaché de sa main gauche, mais pas de la main droite. Donc vous
19 voyez, là, le nœud, vous voyez comment ça s'est détaché.
20 M. MITCHELL : [interprétation] Je demande le versement.
21 Q. Professeur, est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît, parapher et
22 inscrire la date ?
23 R. [Le témoin s'exécute]
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera la pièce à conviction P4003.
25 M. MITCHELL : [interprétation] Merci.
26 Q. Professeur, changeons de sujet à présent. Je n'ai que quelques
27 questions à vous poser au sujet de l'instance à laquelle vous rendiez
28 compte, au TPIY, pendant ces exhumations.
Page 22278
1 R. Oui, donc compte tenu de la structure, de l'organisation du TPIY, à
2 l'époque, je rendais compte au chef des opérations.
3 Q. Est-ce que c'est lui qui dirigeait l'aspect professionnel de vos
4 activités sur les sites ?
5 R. Non. Il s'est rendu très rarement sur le terrain.
6 Q. Alors les enquêteurs qui se sont rendus sur place, est-ce qu'ils vous
7 ont donné des consignes sur la manière de procéder, de travailler ?
8 R. Non.
9 Q. Alors j'ai quelques questions à vous poser au sujet des protocoles que
10 vous respectiez sur le terrain. Qui a mis en place ces protocoles ?
11 R. Moi-même avec mon équipe. Maintenant, vous vous référez à un document
12 en fait qui comporte toute une série de paragraphes.
13 Q. Oui.
14 R. Est-ce que l'on pourrait l'afficher, s'il vous plaît ?
15 Q. Oui.
16 M. MITCHELL : [interprétation] Je demande le document 65 ter, 2495. C'est
17 le rapport Kozluk.
18 Q. Cela devrait se situer vers la page 6, cela commence par : "Procédures
19 d'exhumation."
20 R. Oui, c'est bien. Merci.
21 Q. Ce sont donc les protocoles que vous avez, vous, mis sur pied, et vous
22 les avez développés ?
23 R. Oui. C'était imprimé, c'était remis à chaque membre de l'équipe, et
24 j'ai expliqué moi-même ces protocoles à chaque membre de l'équipe. En
25 principe, cela décrit qui a la responsabilité de croire pendant
26 l'exhumation.
27 Q. Ces protocoles, est-ce qu'ils étaient déjà articulés, formulés pour
28 l'ensemble des sites de Srebrenica, les deux sites de Prijedor, et puis
Page 22279
1 vous avez travaillé à Redak, Pasinac, Kevljani ?
2 R. Oui, et c'était le même protocole au fond pour chaque site, mais il y
3 avait des différences qui en fait sont fonction de la nature du site, mais
4 au fond ils sont identiques. Donc on les a respectés en 1998, 1999 et 2000.
5 Q. Ces protocoles, est-ce qu'ils ont été acceptés par des équipes
6 travaillant à d'autres sites, qui ne sont pas liés au TPIY ?
7 R. Oui, ils ont été utilisés. Ils ne sont pas publiés. Les principes sur
8 lesquels ils reposent ont été incorporés dans un livre sur les enquêtes
9 scientifiques, sur les charniers, et les contributions à ce livre ont été
10 faites par des membres de mon équipe, de mes équipes, et ces protocoles en
11 fait, qui ont été développés, ne sont pas des protocoles que j'ai
12 développés personnellement. Mais ça a été développé en collaboration avec
13 les membres de mon équipe, les photographes, et aussi les agents qui ont
14 travaillé sur les sites.
15 Q. Alors, maintenant, nous parlons de Kozluk. Je vous ai demandé si vous
16 avez préservé les morceaux de verres cassés, vous avez dit que non. Est-ce
17 qu'il y a un autre moment où vous n'avez pas préservé d'objet ?
18 R. Au barrage rouge, nous y avons travaillé en avril 1998. Il n'y avait
19 pas là de corps entiers. C'étaient des os isolés, séparés, et il y avait
20 des morceaux de tissu dans ce charnier de barrage route qui n'étaient pas
21 en relation avec les os. C'étaient des morceaux de tissu qui n'auraient pas
22 permis d'identifier les individus. Donc, pour certains, ils ont été
23 replacés dans les charniers, et nous n'avons gardé, préservé que des pull-
24 overs en laine qui auraient pu être reconnus par des intéressés. C'est le
25 seul moment où j'ai jeté des objets, mais c'était après les avoir
26 photographiés.
27 Q. Alors les 21 sites, qui ont été vus en 1998, et sur lesquels on a
28 travaillé, vous estimez qu'ils ont comporté 2 571 corps; est-ce que par la
Page 22280
1 suite, vous avez revu ces estimations ?
2 R. J'ai eu les informations de la morgue, nombre de corps dans les sept
3 charniers secondaires qui avaient été ouverts par nous. Il y avait 21
4 charniers que nous avons sondés, et en principe, nous voulions bien
5 identifier l'emplacement du charnier, et montrer qu'il y avait plus que
6 deux individus par charnier, mais nous ne voulions pas les exhumer. Donc
7 nous avons fait des calculassions et des estimations, et je suis arrivé
8 avec le chiffre de 120 [comme interprété] individus par charnier, mais je
9 ne suis pas bon pour ce qui est des chiffres.
10 Est-ce que je peux voir mes notes --
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien sûr.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour le rapport concernant l'année 1998, nous
13 avons inspecté sept fosses secondaires. On m'avait demandé d'évaluer
14 combien de corps se trouvaient dans le site numéro 21 et j'ai calculé qu'il
15 y avait environ 2 571 et je -- j'étais préoccupé par le fait que mes
16 calculs ne soient peut-être erronés. Par conséquent, j'ai gardé le contact
17 avec les personnes qui ont travaillé depuis sur les sites d'excavation --
18 d'exhumation et sur ces fosses secondaires qui avaient fait l'objet de
19 sondages et que je n'avait pas exhumés par -- personnellement. Notamment,
20 M. Jon Sterenberg, qui a travaillé pour l'ICMP et qui m'a dit que d'après
21 les -- sur les personnes qui avaient été exhumées dans 10 de ces fosses,
22 qui avaient fait l'objet de sondages, il y avait, en moyenne 151 personnes
23 par fausse, ce qui signifie que mon évaluation à l'époque en 1999 était en
24 dessous de la réalité.
25 M. MITCHELL : [interprétation]
26 Q. D'accord.
27 R. J'ai également consulté un rapport beaucoup plus récent de Dusan Janc.
28 Il avait des informations, notamment l'année dernière, concernant le nombre
Page 22281
1 de personnes dans 19 des 21 fosses sondées qui correspondaient en moyenne
2 1376 [comme interprété], donc, j'avais sous-estimé dans mon rapport le
3 nombre de corps.
4 Q. Merci.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste une seconde.
6 Monsieur Karadzic, vous avez un problème ?
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, je crois que ça devrait être ça.
8 M. MITCHELL : [interprétation]
9 Q. Dans l'affaire Tolimir, on vous a présenté le rapport de Dusan Janc.
10 R. Je ne sais pas si on me l'a présenté l'année dernière ou après.
11 Q. Je voudrais parler d'un autre site d'exhumation à Glogova 1.
12 M. MITCHELL : [interprétation] Je voudrais que l'on affiche le document de
13 la liste 65 ter 2504.
14 Q. En attendant que ce document s'affiche, Professeur, est-ce qu'il
15 s'agissait des mêmes protocoles d'exhumation que ce que vous aviez utilisé
16 en 1998 et 1999 ?
17 R. Non, ce n'est pas exactement les mêmes protocoles, mais les principes
18 étaient les mêmes. Je pense qu'en 2000, où nous avions décidé -- enfin,
19 1999, nous avions décidé à Kozluk qu'il y avait des centaines, voire des
20 milliers de douilles ou de -- de douilles de balles et nous avons décidé
21 que nous n'allions pas toutes les étudier. Mais nous avons étudié toutes
22 celles que nous n'avons pas photographiées. Ceci, donc, est tout à fait
23 explicite dans nos protocoles de l'an 2000 -- pour l'année 2000, donc, mais
24 s'il ne s'agit d'objets, tels que, par exemple, des douilles d'AK-47, dans
25 ce cas-là, nous ne photographiions pas tous ces objets.
26 Q. D'accord.
27 R. Mais c'est ce genre de différences entre les protocoles, donc.
28 Q. Est-ce qu'il s'agit du rapport que vous avez rédigé sur cette
Page 22282
1 exhumation ?
2 R. Oui.
3 M. MITCHELL : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait passer à la page 26
4 ?
5 Q. Est-ce que vous pourriez nous décrire ce que nous voyons sur cette
6 photo ?
7 M. MITCHELL : [interprétation] Peut-être qu'on pourrait l'agrandir.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que la version B/C/S n'est
10 vraiment pas nécessaire.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit du site que l'on appelle Glogova 1.
12 Je n'ose pas toucher l'écran -- enfin, si, je vais risquer quand même de le
13 faire.
14 M. MITCHELL : [interprétation]
15 Q. Attendez un instant, Professeur.
16 R. Voilà. Voilà donc la zone du site Glogova 1, et de l'autre côté de la
17 route, vous avez Glogova 2, mais je n'étais pas responsable de l'exhumation
18 de ce site Glogova 2.
19 Q. Est-ce que vous pourriez --
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez inscrire les
21 chiffres 1 et 2 de façon à ce qu'on s'en souvienne ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] D'accord. [Le témoin s'exécute]
23 M. MITCHELL : [interprétation]
24 Q. Merci. Est-ce que vous pourriez nous aider à nous orienter ? Vous avez
25 une route en haut de la photo.
26 R. Oui, à gauche. Cet axe nous amène à Kravica et à l'entrepôt qui est
27 environ à six kilomètres et l'axe sur la droite, en direction de Bratunac.
28 Q. D'accord.
Page 22283
1 R. Puis, vous avez une route secondaire qui est en fait une route non
2 goudronnée qui vous amène en direction des deux sites de Glogova.
3 Q. Merci. Est-ce que vous pourriez parafer cette photo, s'il vous plaît ?
4 Merci.
5 R. [Le témoin s'exécute]
6 M. MITCHELL : [interprétation] J'aimerais verser cette photo au dossier.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ça deviendra la pièce P4004.
8 M. MITCHELL : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait passer à la page
9 28, s'il vous plaît ?
10 Q. Il s'agit d'un site complexe, Professeur. Donc, lorsque l'image
11 apparaît, est-ce que vous pourriez nous décrire la totalité du site et nous
12 expliquer, pour qu'on s'y retrouve, avec les différentes fosses voisines ?
13 M. MITCHELL : [interprétation] Peut-être que la page 29 serait mieux.
14 Q. Il y a six fosses voisines ici ?
15 R. Il y en a fait six fosses voisines qui existent encore. En fait, il y a
16 deux grandes zones sur ce site. Vous avez celle que j'avais entourée en
17 rouge et je vais apposer le numéro 1. Vous avez trois petites fosses à
18 gauche, E, K et L, et puis vous avez la zone à droite qui représente une
19 zone plus importantes de fosses, au pluriel, et là, vous avez donc les
20 fosses H, S et C. Vous avez, donc, des corps qui restent et qui sont issus
21 d'une fosse qui a été pillée en octobre 1995, et donc, ça, c'est ce qui est
22 resté. Pour ce qui est de la partie gauche, ce sont les fosses qui n'ont
23 pas été perturbées en octobre 1995.
24 Q. Comment savez-vous que ces fosses ont été pillées en octobre 1995 ?
25 R. Parce qu'on voit les signes d'engins de terrassement qui ont en fait
26 creusé à travers ces corps et qui ont donc laissé des bouts de membres
27 après cette tentative de retirer les corps.
28 Q. Comment savez-vous exactement que cela s'est produit en octobre 1995 ?
Page 22284
1 R. On m'a montré des images aériennes qui j'ai inclues dans mon rapport,
2 et donc on voit ce qui s'est passé en juillet 1995, donc, où les
3 inhumations ont eu lieu. Puis ensuite nous voyons en octobre 1995 ces
4 photos aériennes qui montrent que la zone que j'ai entourée en rouge a donc
5 été perturbée et vous avez une photo qui montre un engin de terrassement
6 présent dans cette zone, et là, je l'ai annoté. Il se trouvait dans cet
7 endroit où j'ai mis un point avec le chiffre 2.
8 Q. Est-ce que vous pouvez apposer la date et vos initiales également ?
9 R. [Le témoin s'exécute]
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Professeur, est-ce que vous avez
11 incorporé ces photos aériennes que vous avez vues à l'époque dans votre
12 rapport ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous allons accepter cette
15 représentation comme pièce P4005. Est-ce que vous avez le rapport devant
16 vous, Monsieur Mitchell ?
17 M. MITCHELL : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je crois que
18 c'est à la page 27. Il s'agit d'une photo aérienne qui porte la date du 27
19 juillet -- non, pardon, quatre photos aériennes, 5 juillet, 17 juillet, 27
20 juillet et 30 octobre.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Après avoir sauvegardé l'image qui est à
22 l'écran, je voudrais que l'on passe à la page 27 du rapport pour consulter
23 rapidement ces photos.
24 Monsieur le Professeur, je crois que vous avez ces photos devant vous.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous donner des
27 explications.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Voilà donc la zone
Page 22285
1 qui a fait l'objet de nos enquêtes. Le 5 juillet, vous voyez que la terre
2 n'a pas été remuée, rien n'a été perturbé. Puis le 17 juillet, vous voyez
3 que la terre a été remuée. Vous ne pouvez pas creuser des fosses sans
4 remuer de la terre. Donc cette zone que j'encercle ici est la zone où les
5 inhumations ont eu lieu. Les lettres que nous avons utilisées ici, les
6 lettres bleues, représentent les zones où vous avez des corps qui sont
7 restés sur place, et les autres endroits n'ont pas été perturbés.
8 Puis, pour ce qui est du 27 juillet, vous voyez que la zone a été à nouveau
9 aplanie. En bas de la photo, vous avez les lettres K et L. Il s'agit de
10 fosses qui n'étaient pas présentes le 17 juillet, je vais apposer la lettre
11 [comme interprété] 2, vous avez donc ces deux fosses qui ont vu le jour par
12 la suite.
13 Ce qui s'est passé le 30 octobre, vous voyez qu'il y a eu de nouveaux
14 endroits où la terre a été remuée, comme par exemple, ce que je viens
15 d'encercler ici, mais ça n'a pas touché les fosses, K, E et L.
16 La photo de l'engin de terrassement, qui était en fonctionnement à
17 l'époque, ne m'avait pas été fournie lorsque j'ai rédigé ce rapport, donc
18 elle n'est pas inclue dans ce rapport.
19 M. MITCHELL : [interprétation]
20 Q. Est-ce que vous pouvez apposer vos initiales et inscrire également la
21 date ?
22 R. [Le témoin s'exécute]
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] P4006.
24 Oui, Monsieur Mitchell.
25 M. MITCHELL : [interprétation] Merci.
26 Q. Est-ce que vous avez pu établir des liens entre ce charnier à Glogova 1
27 et la fosse secondaire ?
28 R. Oui. De la même manière que nous avons établi un lien entre Cancari
Page 22286
1 Road 3 et Kozluk, nous avons en fait trouvé une des fosses secondaires pour
2 le site de Glogova avant de trouver la fosse principale. La fosse
3 secondaire, nous l'avons trouvée en 1998, à la fin de la saison, et c'est
4 Zeleni Jadar 5. A Zeleni Jadar 5, il y avait en fait des caractéristiques
5 qui étaient vraiment propres à ce site par rapport aux autres fosses que
6 nous avions étudiées. Par exemple, il y avait beaucoup de pièces détachées
7 de voitures, il y avait des fils de fer barbelés, il y avait également du
8 foin. Tout ceci était donc amalgamé avec les corps. Il y avait également
9 une pomme qui n'était pas mûre, et ça peut paraître tout à fait anodin
10 comme détail, mais ceci permet en fait de déterminer exactement à quelle
11 période de l'année nous nous trouvions lorsque les corps ont été enterrés.
12 En 2000, nous avons procédé à l'excavation du site de Glogova, et nous
13 avons retrouvé des pièces détachées de voitures, des fils de fer barbelés,
14 et ce site était à proximité de vergers.
15 Q. Vous avez retrouvé également du foin ?
16 R. Nous avons trouvé du foin à Glogova 1. Il y a une photo dans mon
17 rapport de ce foin. Plus précisément, ce qui était très intéressant pour
18 les enquêteurs, nous avons trouvé également des morceaux d'un bâtiment
19 détruit, et M. Mike Hedley, qui était un officier de police britannique,
20 qui devait rédiger le rapport sur les parties de ce bâtiment que l'on avait
21 trouvées à Glogova, a pu déterminer qu'il s'agissait en fait de l'entrepôt
22 de Kravica. Il y avait la porte, il y avait les parties de l'encadrement de
23 la porte, il y avait la porte à proprement parler, il y avait des morceaux
24 de ciment qui étaient peints en blanc et d'autres peints en rouge, ainsi
25 que du polystyrène qui était utilisé. On pouvait voir ceci à l'entrepôt, le
26 polystyrène était utilisé comme isolant entre les différentes parois. Mais
27 je n'ai pas fait une analyse. Je me suis fait une impression de tout cela.
28 Mais une analyse distincte a été réalisée.
Page 22287
1 Q. Un autre objet, un autre type d'objet, que vous décrivez dans cette
2 fosse, à savoir des éclats d'obus ainsi que des objets liés à des grenades.
3 M. MITCHELL : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait passer à la page 37
4 sur le système de prétoire électronique, s'il vous plaît ?
5 Q. Pourriez-vous nous expliquer ce qui est représenté sur ces cinq photos,
6 en commençant par celle qui est en haut de la page, 56763_15 ?
7 R. Oui. Il s'agit en fait d'une pomme et d'un morceau de métal qui s'est
8 fiché dans la pomme.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourquoi ne pas agrandir la première
10 photo ?
11 M. MITCHELL : [interprétation] Merci.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Ici, nous voyons un crâne, un crâne qui est
13 pratiquement désintégré, et vous avez un bout de métal qui est en fait une
14 grenade qui n'avait pas explosé.
15 M. MITCHELL : [interprétation] Merci.
16 Est-ce qu'il faut sauvegarder cette page, maintenant, avant de passer à la
17 page suivante ?
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourquoi ne pas --
19 M. MITCHELL : [interprétation] En fait, nous pouvons la sauvegarder tel
20 quel en apposant le paraphe du témoin ainsi que la date.
21 Q. [aucune interprétation]
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pièce 4007.
23 M. MITCHELL : [interprétation] Si l'on descend un peu plus bas dans la page
24 il y a deux autres photos.
25 Q. Est-ce que vous pouvez décrire ce que l'on voit ici ?
26 R. Eh bien --
27 Q. [aucune interprétation]
28 R. -- il s'agit en fait de tissus humains, c'est de la chair que l'on voit
Page 22288
1 ici, peut-être qu'il s'agit de l'épaule. Vous avez une photo plus générique
2 et vous en avez une qui est en fait un agrandissement, il y a un morceau de
3 métal qui est logé dans la chair.
4 M. MITCHELL : [interprétation] Pour les besoins du compte rendu d'audience,
5 il s'agit de la photo 56715_04a. Est-ce que l'on peut maintenant passer de
6 l'autre côté de la page de façon à obtenir le numéro de la deuxième photo.
7 Pourrait-on sauvegarder cela.
8 Q. Professeur, est-ce que vous pouvez apposer votre paraphe et la date.
9 R. [Le témoin s'exécute]
10 Q. Pour les besoins du compte rendu d'audience, la deuxième photo que nous
11 venons de consulter est la photo 56715_05a. Maintenant, on peut passer aux
12 deux photos du bas de la page, à savoir 56726_25.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les deux précédentes seront versées sous
14 la cote P4008 ?
15 M. LE GREFFIER : [interprétation] C'est exact.
16 M. MITCHELL : [interprétation]
17 Q. La deuxième photo que nous consultons ici qui est sur la droite est la
18 photo 56757_24. Professeur, pouvez-vous nous décrire ce que vous voyez ?
19 R. Il s'agit d'une partie de métal que nous avons vue à proximité du
20 corps. Et on m'a expliqué qu'il s'agissait en fait de munitions qui
21 n'avaient pas explosé, il s'agit en fait d'une partie d'une grenade que
22 l'on utilise pour dégoupiller la grenade, qui ensuite donc explose. Et puis
23 vous en avez une autre qui est en meilleur état que la première qui était
24 pliée.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait passer à la
26 page 17 sur le système de prétoire électronique, 17 en version anglaise, 16
27 en version B/C/S.
28 Q. Dans votre version papier, Professeur, il s'agit de la page 16.
Page 22289
1 R. Est-ce que vous voulez que j'appose des annotations ?
2 Q. [aucune interprétation]
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non, non, vous n'avez apposé aucune
4 annotation.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] D'accord.
6 M. MITCHELL : [interprétation]
7 Q. Dans cette partie du rapport, vous mentionnez qu'il y a des blessures
8 qui sont des blessures liées au souffle d'une explosion ainsi que d'autres
9 qui sont liées au processus d'inhumation. Est-ce que vous pourriez donc
10 expliquer ?
11 R. Ici, les os s'étaient beaucoup plus désintégrés dans les vêtements que
12 dans n'importe quel autre site que nous avions étudié. Les parties de
13 métal, qui s'étaient logées dans les corps, m'ont amené à conclure qu'il
14 s'agissait en fait de résultats d'une explosion ou d'un souffle. Mais, bien
15 sûr, tous ces corps ont ensuite été envoyés à la morgue, parce que, là, il
16 ne s'agissait que d'impressions qui avaient été recueillies dans l'urgence,
17 d'impressions que je me fais lorsque je suis sur le site, mais je suis
18 convaincu que ces corps avaient été soumis à une explosion ou à un souffle
19 d'explosion.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous consultons quel paragraphe sur
21 cette page ?
22 M. MITCHELL : [interprétation] C'est tout à fait en bas de la page.
23 Veuillez m'excuser. C'est à la page 16, le paragraphe qui commence par "In
24 the light of," et cetera.
25 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
26 M. MITCHELL : [interprétation] Paragraphe 3.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ah, d'accord. Merci.
28 M. MITCHELL : [interprétation]
Page 22290
1 Q. Je voudrais parler d'un autre sujet, il s'agit d'une vidéo --
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous voulez verser ce rapport
3 au dossier, s'il vous plaît ?
4 M. MITCHELL : [interprétation] Oui, s'il vous plaît.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous ne versez pas le rapport
6 provisoire, n'est-ce pas ?
7 M. MITCHELL : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera la pièce P4009.
9 Je suppose qu'il n'y a pas d'objection.
10 M. ROBINSON : [interprétation] Non.
11 M. MITCHELL : [interprétation] Il ne nous reste qu'un seul sujet à aborder,
12 il s'agit d'une vidéo d'environ dix minutes, mais avec les pauses et les
13 explications ceci nous prendra au moins 15 [comme interprété] minutes.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous allons faire une pause
15 dans quelques minutes. Mais avant cela, je voudrais maintenant m'intéresser
16 aux pièces associées --
17 M. MITCHELL : [aucune interprétation]
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] -- par exemple, le compte rendu
19 d'audience que vous versez.
20 Ma première question : Il y a deux rapports d'expert qui ont déjà été
21 versés et qui sont sur la liste des pièces associées, vous ne voulez pas
22 les verser séparément ?
23 M. MITCHELL : [interprétation] Effectivement, il faudrait qu'il y ait deux
24 cotes séparées en vertu de l'article 94, et par conséquent, elles ne
25 devraient pas être considérées comme des pièces associées.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document de la liste 65 ter 20576.
27 Non, avant cela, le document de la liste 65 ter 2494. Est-ce que l'on peut
28 le charger sur le système de prétoire ? Il s'agit d'un diagramme d'une
Page 22291
1 page. D'après le compte rendu d'audience, le docteur a identifié
2 différentes parties de ce diagramme en utilisant des couleurs, mais moi je
3 n'ai que la version en noir et blanc. Est-ce que l'on pourrait charger le
4 document 2924 [comme interprété] sur le système de prétoire électronique ?
5 Est-ce que vous avez une version originale en couleur ?
6 M. MITCHELL : [interprétation] J'ai essayé de regarder cela. Et je ne crois
7 pas que nous ayons une version en noir et blanc, mais le Pr Wright en a une
8 version en couleur.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvez-vous vous occuper de cela durant
10 la pause ?
11 M. MITCHELL : [interprétation] D'accord.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maintenant, le document qui a la
13 référence 20576, le docteur a expliqué qu'il avait apposé des notes en
14 rouge, mais je ne vois que des notes en jaune sur cette photo. Je parle
15 donc de la photo 20576. Encore une fois, est-ce que vous pouvez vérifier
16 tout cela pendant la pause ?
17 M. MITCHELL : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons faire une pause d'une demi-
19 heure et nous reprendrons à 11 heures.
20 --- L'audience est suspendue à 10 heures 28.
21 --- L'audience est reprise à 11 heures 01.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, est-ce que tout va
23 bien ?
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pas pour le moment, mais j'espère que cela va
25 s'arranger.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Continuons, Monsieur
27 Mitchell.
28 M. MITCHELL : [interprétation] Donc vous nous avez posé des questions sur
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1 donc la pièce 2495, c'est le rapport Kozluk. Nous allons télécharger la
2 version en couleur, et puis la photographie, la bonne photographie n'est
3 pas la 2706, la bonne a déjà été versée au dossier comme pièce P2016. Elle
4 fait partie de la décision en application de la requête 92 bis, KDZ-069,
5 donc c'est la bonne pièce.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons maintenant voir la pièce
7 connexe, qui sera le dernier élément, la vidéo.
8 M. MITCHELL : [interprétation] Oui.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson, y a-t-il objection ?
10 M. ROBINSON : [interprétation] Non.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc l'ensemble des pièces connexes
12 seront versées au dossier, et on leur attribuera une cote en temps voulu.
13 Continuons.
14 M. MITCHELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
15 Q. Professeur, nous allons visionner une vidéo. La vidéo du site Cancari
16 12, c'est en 1998 que vous l'avez exhumé. Avant le visionnage; est-ce que
17 vous pourriez un petit peu replacer cette vidéo dans le contexte, comment
18 est-ce que cela s'est déroulé ?
19 R. Oui, le site Cancari 12 est le premier que nous avons exhumé en 1998.
20 C'est une fosse secondaire. C'est au bout de ce que nous appelons la route
21 Cancari, qui se situe donc à l'extrémité du champ par rapport à la rivière
22 Drina, donc plus loin de la rivière Drina. Nous avons été emmenés là par
23 les enquêteurs, il a fallu que je voie s'il était possible d'exhumer à cet
24 endroit. Nous avons effectivement pu avoir tout ce qui était nécessaire à
25 placer sur le site pour travailler, donc, les bâtiments nécessaires.
26 Q. Donc nous allons peut-être commencer, vous allez nous décrire ce que
27 nous voyons. Vous allez nous expliquer les images.
28 M. MITCHELL : [interprétation] Commençons.
Page 22293
1 [Diffusion de la cassette vidéo]
2 M. MITCHELL : [interprétation] Arrêtez, s'il vous plaît. Le "time code"
3 indique 00 : 25 secondes.
4 Q. Qu'avons-nous vu à l'instant, Professeur ?
5 R. Donc nous avons vu la fosse, donc avant le début des travaux
6 d'excavation, il y avait le personnel qui était là pour installer leur
7 équipement pour faire des travaux de géomètre.
8 M. MITCHELL : [interprétation] Reprenons la vidéo.
9 [Diffusion de la cassette vidéo]
10 M. MITCHELL : [interprétation] Faites un arrêt, s'il vous plaît, c'est à 01
11 : 05 secondes.
12 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire ce que nous voyons ?
13 R. Nous voyons ici la recherche des limites de la fosse, c'est ce que nous
14 avons fait dans un premier temps. Donc en archéologique, la règle est qu'on
15 cherche d'abord à délimiter l'emplacement de la fosse avant de commencer à
16 exhumer les corps. Comment est-ce qu'on établit où se trouvent les
17 frontières ? C'est la terre qui comporte les éléments minéraux des
18 profondeurs et mélangés à des éléments organiques, et vous voyez ici donc
19 cette pelleteuse qui cherche à identifier donc la nature du sol.
20 Q. Qu'est-ce que vous cherchez très précisément, quels sont les signes
21 très précis, donc le changement de la texture du sol, la couleur de la
22 terre; quels sont les indices que vous recherchez ?
23 R. Mais comme je viens de vous le dire, il y a un mélange des couches du
24 sol, là où se trouve la fosse, la fosse qui a été donc creusée, donc les
25 archéologues cherchent à identifier ces changements de texture ou de
26 couleur, et voir si cela correspond à un endroit aux limites de la fosse.
27 Q. Très bien.
28 M. MITCHELL : [interprétation] Continuons.
Page 22294
1 [Diffusion de la cassette vidéo]
2 M. MITCHELL : [interprétation] Arrêtons ici, s'il vous plaît.
3 Q. J'ai deux questions pour vous. Premièrement, quels sont ces signes
4 orange, les markers orange ?
5 R. Ce sont des markers provisoires qui indiquent de l'avis de
6 l'archéologue les frontières de la fosse.
7 Q. Est-ce que vous pourriez nous expliquer à quoi correspond la couleur du
8 sol ici, à l'image où nous sommes ?
9 M. MITCHELL : [interprétation] Donc l'arrêt sur image c'était 01 : 47
10 secondes.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. La couleur naturelle du sol ici est
12 noire, à l'horizon organique à la couche supérieure, et puis cela devient
13 rougeâtre, et puis beaucoup plus pâle. C'est le dépôt naturel, et lorsque
14 les corps ont été placés dans la fosse, et la fosse a été comblée, le sol
15 autour des corps a changé de couleur. Donc il y a de l'oxyde de fer dans le
16 sol qui a été modifié à cause de la putréfaction des corps, donc l'action
17 des bactéries. C'est un phénomène que l'on observe là où il y a du fer. Il
18 y a une perte d'oxygène à cause de la putréfaction. Donc ce qui est très
19 utile ce sont ces sols qui deviennent vert bleuâtre. C'est la perte des
20 molécules d'oxygène. C'est un indicateur très utile. Cela indique qu'il y a
21 eu de la matière organique à cet endroit.
22 M. MITCHELL : [interprétation] Est-ce que nous pouvons continuer.
23 [Diffusion de la cassette vidéo]
24 M. MITCHELL : [interprétation] Arrêtons ici.
25 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
26 M. MITCHELL : [interprétation]
27 Q. Alors à quel stade sommes-nous du processus ?
28 R. Précédemment, nous avons vu des gens avec des bêches et des pelles. Ils
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1 n'étaient pas là pour enlever les corps, mais ils suivaient l'excavatrice
2 pour bien indiquer l'endroit où se situe la fosse. Puis ensuite, là où on
3 estime que se trouve la fosse, on cherche, effectivement, à vérifier s'il y
4 a des corps. On fait des échantillonnages.
5 M. MITCHELL : [interprétation] Nous sommes à 2 minutes 49 secondes. Est-ce
6 que vous pouvez continuer.
7 [Diffusion de la cassette vidéo]
8 M. MITCHELL : [interprétation]
9 Q. Nous voyons que l'on creuse une tranchée ici. Est-ce que vous pouvez
10 nous dire à quel stade de l'excavation sommes-nous ?
11 R. Nous avons vu que l'on a creusé par échantillonnage précédemment, dans
12 la partie précédente de la vidéo, et lorsqu'on a pu établir grâce à cela
13 qu'il y a des corps, maintenant il faut enlever la terre qui recouvre les
14 corps. S'il y a le danger qu'au cours du travail, l'eau remplit la fosse.
15 Il faut, en fait, creuser une tranchée plus profonde tout autour du
16 périmètre de la fosse pour y recueillir l'eau, si jamais l'eau arrivait.
17 Q. Alors, nous voyons qu'il y a la pelle qui travaille et puis tout le
18 reste du travail est fait à la main, manuellement.
19 R. Tout le travail autour des corps est fait manuellement. La pelle sert
20 uniquement à enlever le matériel qui ne comporte pas les corps.
21 M. MITCHELL : [interprétation] On peut continuer, s'il vous plaît.
22 [Diffusion de la cassette vidéo]
23 M. MITCHELL : [interprétation] Arrêtez, s'il vous plaît.
24 Q. Que voyons-nous ici ?
25 R. Nous avons fait un bond en avant de plusieurs jours par rapport à
26 l'image précédente, donc vous voyez qu'il y a cette tranchée autour de la
27 fosse, avec des planches. Les corps sont exposés, et on les emporte dans
28 les housses, dans le camion frigorifique, et celui-là les emmène à la
Page 22296
1 morgue de Visoko. Donc, il s'est passé beaucoup de temps entre les deux
2 séquences.
3 Q. Cette machine que nous voyons ici, cet appareil ?
4 M. MITCHELL : [interprétation] A 4 minutes 22 secondes.
5 R. C'est un instrument de mesure que nous utilisons pour localiser tout
6 objet ou toute partie corporelle par rapport aux mètres de distance -- non
7 -- en -- une distance en mètres par rapport aux points cardinaux est, nord,
8 et également l'altitude ainsi que la date. Et à partir de cela, c'est en
9 trois dimensions que nous pouvons reconstruire le site où on a localisé un
10 objet ou une partie du corps.
11 Q. Vous utilisez 12 points pour localiser chaque corps ?
12 R. Oui. La tête, les omoplates, les coudes, les poignets, le bassin, les
13 genoux, les chevilles, et on reconstruit une image en trois dimensions que
14 l'on peut tourner.
15 Q. Très bien.
16 M. MITCHELL : [interprétation] Continuons.
17 [Diffusion de la cassette vidéo]
18 M. MITCHELL : [interprétation] Nous avons fait un arrêt sur image à 5
19 minutes 2 secondes.
20 Q. Est-ce que vous pouvez nous décrire, s'il vous plaît, ce que nous
21 voyons à l'image, Professeur ?
22 R. Oui. Je tiens à dire qu'il s'agit de la fosse secondaire de Cancari 12,
23 et les corps avaient été enlevés d'un site qui, d'après ce qu'on m'a dit,
24 était la ferme de Branjevo. Pendant qu'on a enlevé les corps de la fosse
25 d'origine à la ferme de Branjevo, il y a eu beaucoup de corps qui ont été
26 disloqués, donc nous avons des mains et des membres. Ici, je ne me souviens
27 pas exactement de quel individu il s'agit, ce que nous voyons à l'image,
28 mais nous avons la main et puis il y a des tissus au niveau du poignet,
Page 22297
1 donc des liens.
2 M. MITCHELL : [interprétation] Continuons, s'il vous plaît.
3 [Diffusion de la cassette vidéo]
4 M. MITCHELL : [interprétation] Arrêtez, s'il vous plaît.
5 Q. Quel est ce code que nous voyons ?
6 R. On ne voit pas le C à cause de la motte de terre qui le cache, donc
7 normalement ce serait CR12, l'indication du site, et puis A046 signifie
8 qu'il s'agit du 46e objet. Je ne sais pas de quel objet il s'agit,
9 probablement, le lien que nous avons vu précédemment. Je ne suis pas
10 certain pour autant. Ensuite, on enregistre ces informations dans un
11 carnet. Donc vous avez un carnet qui attribue à chaque site, et chaque
12 objet y est répertorié.
13 M. MITCHELL : [interprétation] Il s'agit d'un arrêt sur image à 5 minutes,
14 31 secondes, je précise pour le compte rendu d'audience. Continuons.
15 [Diffusion de la cassette vidéo]
16 M. MITCHELL : [interprétation] Arrêtez, s'il vous plaît, à 6 minutes, 22
17 secondes.
18 Q. Pouvez-vous nous dire à quoi correspond cet objet blanc que l'on voit à
19 l'écran ?
20 R. C'est une des housses que nous avons utilisée avec une fermeture
21 éclaire tout le long de la housse. Nous voyons le code B095, CR12. Je pense
22 que, là, c'est un 9. Cela veut dire que c'est un corps entier qui rentrera
23 dans cette housse. Alors, parfois, l'on ne peut pas enlever le corps en
24 tant qu'une pièce, mais certaines parties corporelles doivent être
25 prélevées séparément, donc, à la fin, la housse comporterait quasiment tout
26 le corps et est transportée dans le camion frigorifique.
27 Q. Alors, un code pour les parties corporelles serait différent ?
28 R. Oui, je pense que ce serait BP092, BP signifiant partie corporelle.
Page 22298
1 Q. Merci.
2 M. MITCHELL : [interprétation] Continuons.
3 [Diffusion de la cassette vidéo]
4 M. MITCHELL : [interprétation] Arrêtez, s'il vous plaît.
5 Q. Alors quelle est cette feuille que nous voyons ici ?
6 R. C'est une des feuilles d'enregistrement des corps. La personne, qui
7 sera responsable du retrait du corps, renseignera des informations, plus
8 particulièrement comment était disposé le corps, s'il y avait des traces
9 sur le corps, quel type de vêtement recouvrait le corps, est-ce qu'il y
10 avait des objets associés, ils seraient enregistrés. Puis, c'était
11 simplement pour que la personne, qui a enlevé le corps, puisse suivre un
12 protocole, puisse savoir quelle remarque il convient d'enregistrer. Tout en
13 bas, il y a un petit schéma, un croquis pour montrer comment était disposé
14 le corps.
15 M. MITCHELL : [interprétation] C'était à 6 minutes 40 secondes. Continuons.
16 [Diffusion de la cassette vidéo]
17 M. MITCHELL : [interprétation] Arrêtez à 7 minutes 52 secondes.
18 Q. Nous avons plusieurs parties corporelles qui sont placées dans une
19 housse. Est-ce que vous pouvez simplement décrire ce que nous voyons à
20 l'image.
21 R. Oui. Nous avons vu très rapidement l'étiquette. C'était une étiquette
22 qui indiquait qu'il s'agissait d'un corps entier, mais le corps est prélevé
23 dans la fosse par morceaux. Donc maintenant, l'ensemble de ces pièces sont
24 placées dans cette housse ensemble pour contenir donc le corps entier.
25 M. MITCHELL : [interprétation] Continuons.
26 [Diffusion de la cassette vidéo]
27 M. MITCHELL : [interprétation] Arrêtez.
28 Q. Où est-ce qu'on emporte ce corps à présent, Professeur ?
Page 22299
1 R. Donc, au tout début de la séquence, vous avez vu que les sacs en
2 plastique étaient placés sur les mains. Enfin, les mains étaient placées
3 dans ces sacs en plastique, ainsi que les pieds, pour que ces différentes
4 parties ne se perdent pas, qu'elles restent ensemble. Maintenant, le corps
5 est emporté dans le camion frigorifique sur un brancard.
6 M. MITCHELL : [interprétation] C'était à 8 minutes 38 secondes.
7 [Diffusion de la cassette vidéo]
8 M. MITCHELL : [interprétation] Arrêtons ici, à 9 minutes 8 secondes.
9 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire ce qui se passe ici, Professeur ?
10 R. Oui, il y a deux choses, en fait -- ou plutôt, une chose. Ils cherchent
11 des portefeuilles ou toute forme d'identification; un collier, quelque
12 chose que nous pourrions prendre en photographie. Il ne s'agit pas d'un
13 moment final d'étude des documents retrouvés avec le corps, mais simplement
14 parce que nous avions peur que ces documents ne se décomposent à partir du
15 moment où ils seront sortis de la fosse. Donc, par exemple, nous vérifions
16 s'il y avait un portefeuille dans la poche. On l'ouvrait, parce que quand
17 vous l'ouvrez, normalement vous trouvez des pièces d'identité, et puis on
18 prenait une photographie et puis on replaçait le portefeuille dans la
19 poche.
20 Alors, pour deux raisons, parce qu'on voudrait qu'il y a un minimum
21 de contacts avec l'oxygène. Donc, à partir du moment où la housse est
22 refermée, il ne va pas y avoir d'oxygène. Donc, ce n'endommagera pas
23 grandement les pièces d'identité, et deuxièmement, c'est frigorifié pour
24 que la dégradation due aux bactéries soit réduite au minimum.
25 Q. Vous ne pouvez peut-être pas nous donner une réponse exacte, mais à
26 quelle rapidité un morceau de papier se dégraderait lorsque vous l'excavez
27 ? Est-ce que c'est une question de jour, de semaine, d'heure ?
28 R. Il y a des principes généraux, bien sûr. Si c'est un document qui est
Page 22300
1 déjà en mauvais état, et s'il n'a pas la possibilité, si on avait la
2 possibilité de le faire sécher, enfin, je ne sais pas. Vous savez, ça
3 dépend des conditions.
4 M. MITCHELL : [interprétation] Nous allons poursuivre le visionnage de la
5 vidéo.
6 [Diffusion de la cassette vidéo]
7 M. MITCHELL : [interprétation] Nous allons nous arrêter là. 10 minutes 10
8 secondes au compteur.
9 Q. Est-ce qu'il s'agit du camion frigorifique que nous venons de voir sur
10 la photo ?
11 R. Oui. Vous avez également vu les responsables des agents de la police
12 scientifique qui étaient responsables de la remise des corps et des objets.
13 Q. Donc les corps vont vers la morgue ?
14 R. Oui.
15 Q. C'est à ce moment-là que les anthropologues et les pathologistes
16 commencent leurs examens, n'est-ce pas ?
17 R. Oui, les enquêteurs donc commencent leurs examens et leurs tests sur
18 les objets.
19 M. MITCHELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Professeur, je n'ai pas
20 d'autres questions.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
22 Oui, le moment est donc venu pour M. Karadzic de commencer son contre-
23 interrogatoire. Une seconde. Je crois que cette vidéo faisait partie des
24 pièces associées, mais est-ce qu'elles devraient recevoir une cote séparée.
25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela deviendra la pièce P4027.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
27 Oui, Monsieur Karadzic, allez-y.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,
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1 Messieurs les Juges. Bonjour à tous.
2 Contre-interrogatoire par M. Karadzic :
3 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Professeur.
4 R. Bonjour, Monsieur Karadzic.
5 Q. Au départ, je voudrais vous dire combien que je tiens à haute estime le
6 travail que vous avez réalisé, et je voudrais que vous compreniez que, du
7 point de vue de la Défense, nous devons déterminer quelles sont les parties
8 de vos activités qui peuvent être considérées comme étant des éléments au-
9 delà de tout doute raisonnable, puisqu'il s'agit du concept en droit pénal
10 que nous utilisons ici, à savoir ce qui a pu vraiment être déterminé et
11 d'autre part ce qui pourrait être remis en question. En d'autres termes, il
12 s'agit d'une activité gigantesque et impressionnante, et je ne vais pas
13 chercher à la miner d'une manière ou d'une autre, mais j'essaie simplement
14 de déterminer ce qui peut être utile ou pas.
15 Est-ce que vous êtes d'accord avec notre manière de procéder ?
16 R. Oui.
17 Q. Alors je voudrais commencer par vous poser une question sur ce que vous
18 avez dit au départ, à savoir que vous avez travaillé pour la Cour pénale
19 internationale. Ai-je raison de dire que vous travaillez pour le bureau du
20 Procureur ?
21 R. Oui, je travaillais sous contrat.
22 Q. Je vous pose cette question parce que, dans notre système juridique, il
23 y a un juge d'instruction qui est engagé, qui doit être impartial, alors
24 que quelqu'un travaillant pour le bureau du Procureur n'est pas
25 nécessairement impartial. Donc en fait, qui était votre employeur au niveau
26 du bureau du Procureur ?
27 R. Mon supérieur hiérarchique était le chef des opérations. Trois
28 personnes ont occupé ce poste durant ces quatre années, c'était donc mon
Page 22302
1 supérieur hiérarchique et qui pouvait donc engager ou renvoyer les membres
2 de son équipe, et donc moi-même.
3 Q. Vous parlez du chef des opérations. Est-ce que, mis à part ces
4 opérations précises, il était responsable d'autres opérations ? Est-ce que
5 vous pourriez nous aider à décrire le profil du poste d'un chef des
6 opérations ? Quand on parle d'opération, il s'agissait de quel type
7 d'opération.
8 R. Monsieur Karadzic, je ne sais pas, je ne suis pas en mesure de répondre
9 à cette question. Je n'étais pas employé dans la structure générale ou
10 l'organigramme général du TPIY. Par conséquent, je ne connais pas les
11 responsabilités des autres personnes, mis à part celles qui étaient les
12 miennes.
13 Q. Merci. Dans votre deuxième phrase, dans les propos introductifs, vous
14 parlez donc de Glogova 1, et vous dites : "On m'a demandé d'identifier et
15 de procéder à l'exhumation de fosses ou de charniers qui avaient recueilli
16 des personnes qui avaient soi-disant été tuées après la prise de
17 Srebrenica."
18 Est-ce exact ?
19 R. Oui.
20 Q. Peut-on considérer, par conséquent, que tous les corps auxquels vous
21 avez pu avoir accès, c'est-à-dire les corps que votre équipe a exhumés, que
22 pour ce qui est de ces corps, vous avez pu déterminer que ces personnes
23 étaient décédées après la prise de Srebrenica ?
24 R. Est-ce que vous parlez de Glogova uniquement, ou est-ce que vous parlez
25 de tous les sites que nous avons abordés aujourd'hui ?
26 Q. Est-ce que vous aviez reçu une mission pour uniquement pour Glogova ou
27 pour tous les sites ?
28 R. Non, parce que j'ai posé une question, et parce que d'activités que
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1 j'ai menées, n'étaient pas liées à l'affaire Srebrenica. J'ai travaillé à
2 Prijedor. Mais pour ce qui est des sites que nous avons abordés
3 aujourd'hui, effectivement, d'après ce que j'avais compris, le TPIY pensait
4 qu'il s'agissait de personnes qui avaient été tuées après la chute de
5 Srebrenica.
6 Q. Ce qui m'intéresse c'est la Bosnie orientale et pas Prijedor. Ce qui
7 m'intéresse, c'est ce qui rentre dans le cadre de cette affaire.
8 Monsieur le Professeur, est-ce que vous avez obtenu d'autres informations
9 de qui que ce soit ? Est-ce que l'on vous a informé de ce qui s'était passé
10 là-bas, et avec qui vous devriez traiter, et qu'est-ce que vous devriez
11 gérer sur place, si l'on peut s'exprimer ainsi ?
12 R. Qu'est-ce que vous voulez dire ? Vous voulez dire ce qui s'était passé
13 à Srebrenica, ce que je pourrai m'attendre à trouver là-bas ? Je ne
14 comprends pas très bien les termes de votre question.
15 Q. Je vais être plus simple. La guerre a commencé là-bas en avril 1992. La
16 guerre a continué jusqu'au mois d'octobre 1995. Srebrenica a été déclaré
17 une zone de sécurité ou une zone protégée, en mai 1993. Avant juillet 1993,
18 environ 2 000 combattants ont perdu leur vie uniquement à Srebrenica. Je ne
19 parle pas uniquement de Srebrenica, c'était également, alors qu'ils
20 partaient en direction de territoires détenus par les Serbes. Est-ce que
21 vous pouviez -- pourriez faire un distinguo entre ceux qui avaient perdu
22 leur vie avant la prise de contrôle de Srebrenica et ceux qui avaient perdu
23 leur vie après celle-ci ?
24 R. Non, je ne vois pas comment j'aurais pu déterminer cela, et je ne veux,
25 par conséquent, pas répondre à votre question.
26 Q. Merci, Monsieur le Professeur. Vous avez donné une réponse et je ne me
27 remets pas en question les résultats de vos recherches vous avez fait un
28 travail énorme. Mais est-ce que vous savez que des gens ont péri tous les
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1 jours dans cette zone, des Serbes, des Musulmans périssaient tous les jours
2 ? Est-ce que l'on vous a donné ce type d'information ?
3 R. Non, en ma qualité officielle d'enquêteur indépendant sur ces
4 charniers, mais j'ai lu les journaux, j'avais entendu des nouvelles
5 concernant les différents événements qui s'étaient produits là-bas. Mais
6 d'un point de vue officiel on ne m'a pas vraiment dit quoi que ce soit sur
7 la chute de Srebrenica. On m'a demandé d'enquêter sur certaines fosses et
8 de déterminer combien de personnes se trouvaient dans ces fosses, à qui
9 appartenaient ces corps, quelles étaient les [inaudible] associées. Je ne
10 suis pas un expert dans l'histoire de la guerre.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour être simple, en terme plus simple,
12 Professeur, vous avez mentionné, en page 47, la ligne 18, j'avais cru
13 comprendre que le TPY, et je suppose que vous voulez dire le bureau du
14 Procureur, donc vous disiez, Je suppose que le TPY pensait que ces
15 personnes avaient été tuées après la chute de Srebrenica, mais ce n'était
16 pas à vous de déterminer cela.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que c'était ma responsabilité de
18 déterminer cela.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je voulais dire le fait qu'ils étaient
20 tués après la chute de Srebrenica ou avant celle-ci.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Ah, je vois que vous voulez dire. J'avais cru
22 comprendre que ces personnes avaient péri après la chute de Srebrenica.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais est-ce que vous avez pu conclure
24 cela ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je dirais que j'ai pu conclure qu'il
26 s'agissait de personnes qui avaient péri après la chute de Srebrenica. Je
27 suppose que les personnes, qui avaient péri avant la chute de Srebrenica,
28 donc dans l'enceinte de Srebrenica, dans les confins de Srebrenica,
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1 auraient été enterrés là-bas. Mais je n'ai pas travaillé dans cette zone-
2 là. Nous avons travaillé dans les zones où les corps ont été transportés.
3 Ces personnes avaient donc quitté Srebrenica -- on leur avait fait quitter
4 Srebrenica et je ne pense pas donc que ces personnes aient péri avant la
5 chute de Srebrenica.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, dans votre mission, est-ce que
7 vous deviez également déterminer à quel moment ces personnes -- ces corps
8 étaient des corps de personnes qui avaient péri à tel ou tel moment ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, ça aurait été le
10 cas. On m'a demandé de déterminer s'il était raisonnable de penser que ces
11 personnes avaient péri après la chute de Srebrenica.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Merci.
13 Monsieur Karadzic, vous pouvez poursuivre.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
15 M. KARADZIC : [interprétation]
16 Q. Est-ce que vous avez pu conclure et est-ce qu'on vous a montré des
17 charniers -- en fait, est-ce que votre mission était de rechercher et
18 d'examiner l'ensemble des charniers connus ?
19 R. Non, Monsieur Karadzic, l'on m'a montré des photographies aériennes,
20 des photographies qui montraient des endroits où la terre avait été remuée
21 fraîchement et c'étaient des photographies d'octobre 1995. On m'a montré
22 des photographies où j'ai pu compter à peu près 28 endroits avec cette
23 terre remuée qui s'est manifestée sur quelques jours en octobre 1995, et je
24 suis allé à tous ces endroits pour voir où nous pouvions exhumer. Donc nous
25 avions six mois à peu près à notre disposition et donc j'ai cherché à voir
26 combien de sites nous pouvions raisonnablement choisir pour y travailler
27 pendant cette période-là. Donc on n'a pas pu en choisir plus que sept
28 pendant le temps donné, mais comme je l'ai déjà dit, nous avons fait des
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1 échantillonnages, nous avons sondé les autres sites qui apparaissaient sur
2 les photographies aériennes donc pour constater s'il y avait de multiples
3 restes humains à ces endroits mais nous ne les avons pas examinés. Donc,
4 pour répondre, oui, effectivement, j'étais tenu d'enquêter sur l'ensemble
5 des charniers mais pas d'exhumer à tous les endroits, donc j'en ai -- je me
6 suis limité à sept sites.
7 Q. Alors, quelle est la méthode que vous avez appliquée pour déterminer le
8 moment du décès ?
9 R. Les montres que portaient certains individus, d'après ce que nous avons
10 pu comprendre, correspondaient à la date des exécutions, et cette analyse
11 est contenue dans mon rapport, donc il y a cette correspondance. Puis nous
12 avons également trouvé des objets, par exemple, un journal néerlandais qui
13 a été utilisé pour rouler des cigarettes et nous l'avons trouvé dans des
14 poches de victimes. Mais la méthode principale que nous avons utilisée pour
15 savoir de quand dataient les charniers, c'était que les fosses secondaires
16 des exhumations de 1998 ne sont pas visibles avant octobre 1995. Nous avons
17 des images de ces mêmes endroits sur le terrain avant octobre 1995 et puis
18 soudain on voit apparaître ces fosses, donc c'était la meilleure façon
19 d'identifier le moment où la fosse a été crée.
20 Q. Oui, mais le moment du décès n'est pas la même chose que le moment où
21 la fosse a été creusée. Donc comment est-ce que vous avez pu établir le
22 moment du décès des individus ?
23 R. Je n'ai pas pu établir cela si ce n'est par rapport au contexte, donc
24 je n'ai pas pu par rapport au contexte de l'ensemble des objets qui ont été
25 extraits des charniers.
26 Q. Donc vous êtes en train de nous dire que les montres affichaient la
27 date et l'heure de l'exécution, le jour, le mois, l'année de l'exécution.
28 R. Ces montres dont je parle ce sont des montres automatiques qui
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1 s'arrêtent en l'espace de 24 ou 48 heures à partir du moment où l'individu
2 qui les porte a cessé de bouger. Donc d'après ce que l'on m'a dit c'est que
3 les exécutions ont eu lieu le vendredi du 14 juillet du samedi 15 ou du
4 dimanche 16, ce qui correspond à l'information que nous avons reçue sur la
5 date des exécutions. Mais, mis à part cela, je sais à partir de quel moment
6 les fosses sont apparues. Mais je ne peux pas vous dire à quel moment les
7 individus sont décédés.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.
9 M. MITCHELL : [interprétation] Si l'on continuera à explorer la question
10 des montres, je pense qu'il serait utile de se référer au rapport, document
11 2496 sur la liste 65 ter et c'est vers la page 28 que l'on commence à
12 parler de ces questions-là. Cela commence ce chapitre.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Monsieur Karadzic.
14 M. KARADZIC : [interprétation]
15 Q. Donc toutes ces montres étaient des montres mécaniques ou automatiques,
16 il n'y avait pas de montre qui marchait avec des batteries --
17 L'INTERPRÈTE : -- des piles, se corrige l'interprète.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait des montres que l'on remonte et des
19 montres électroniques mais, là, vous n'avez pas -- ces montres-là ne me
20 montrent pas le jour et la date. Je pense vraiment qu'il faudrait que l'on
21 voit l'image de ces -- les photographies de ces photos.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, c'est l'avant-dernière page du --
23 du premier rapport. Il s'agit de documents de la pièce P4000.
24 Il s'agit de la page 181 dans le prétoire électronique. C'est à cela que
25 vous pensiez ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est à ce type de montre que j'ai pensé.
27 M. KARADZIC : [interprétation]
28 Q. Donc, on ne peut pas remonter cette montre, n'est-ce pas ? On ne
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1 voit pas le bouton qui sert à remonter. Ça, c'est un -- c'est une montre
2 automatique, électronique -- automatique, c'est ce qui est écrit dessus,
3 n'est-ce pas ?
4 R. Oui, une montre mécanique automatique qui se remonte automatiquement,
5 mais qui s'arrête à partir du moment où il n'y a pas eu de mouvement. Donc,
6 au bout de 24 ou 48 après la cessation de -- de tout mouvement, et nous
7 voyons qu'il s'agit d'une montre italienne ou espagnole, parce que ça
8 indique SAB pour samedi, le samedi 15. Donc, cela correspond à l'exécution
9 du vendredi 14 et c'est ce que nous avons vu sur 8 sur 10 montres. Je dis,
10 dans mon rapport, que la probabilité que 8 sur 10 montres nous affichent,
11 donc, exactement cette date correspond à une très, très, très grande
12 probabilité qu'effectivement, la date de l'exécution a été celle comme
13 indiquée. Donc vous avez demandé ce qui en est, donc des montres
14 électroniques. Bien sûr, elles -- ce -- ce sont des montres à pile. Elles
15 continuent jusqu'à ce que la pile ne -- ne se vide, ne s'use. Donc, on ne
16 peut pas savoir exactement la date. Donc, ce qui est important pour ces
17 montres-là, c'est qu'elles nous montrent la date -- donc le jour, la date.
18 Q. Oui, mais on n'a pas le mois, on n'a pas l'année, n'est-ce pas ?
19 R. Non, non, on n'a pas l'année, on n'a pas le mois. Donc, ce n'est pas
20 aussi fiable que ça pourrait.
21 Q. D'accord, Professeur, mais est-ce qu'on vous a dit -- est-ce qu'on vous
22 a informé des coutumes, voire même des lois qui étaient en vigueur chez
23 nous, à savoir que les détenus ne pouvaient pas garder leurs pièces
24 d'identités, pas de montres, aucun objet de valeur. Ils n'avaient --
25 l'argent, par exemple, ils n'avaient aucun droit de garder cela, les gens
26 capturés, détenus tant que leur innocence n'a pas été prouvée ?
27 R. Non, Monsieur Karadzic, j'ignore complètement cette --
28 Q. Mais est-ce que cela vous paraîtrait crédible si je vous disais que nos
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1 peuples, quelque soit leur confession ne prennent -- ne prélèvent jamais
2 rien sur un corps qui -- sur un cadavre et qu'on -- on peut prendre des
3 choses à des vivants ?
4 R. Je peux vous faire confiance si vous me dites que c'est une coutume,
5 mais ce n'est pas quelque chose que je connaisse.
6 Q. Merci. Est-ce que l'on vous a dit que ces jours-là, pendant la chute de
7 Srebrenica et après ces dates-là, donc, il y a beaucoup de combats autour
8 de Srebrenica et qu'il y a eu beaucoup de gens qui ont péri dans ces
9 combats de part et d'autre ?
10 R. Vous me demandez si j'ai -- j'en ai été informé. On ne m'a pas briefé
11 spécifiquement là-dessus par les employés du TPY, mais c'est quelque chose
12 que j'ai vu dans la presse, oui, ou ailleurs. J'ai -- j'étais informé là-
13 dessus.
14 Q. Donc, est-ce que vous avez eu pour consigne d'identifier dans ces
15 charniers qui étaient ceux qui ont été exécutés donc dont la vie s'est
16 terminée de manière illégale, en aillant recours à des moyens illégaux
17 après la chute de Srebrenica, ou vous deviez juste savoir combien il y a eu
18 de personnes qui ont perdu leur vie ?
19 R. J'ai eu pour consigne d'examiner ces charniers, et comme je vous ai
20 dit, en 1998, il s'est avéré que c'étaient des fosses secondaires, et j'ai
21 eu pour consignes de réunir les éléments sur lesquels j'ai déjà déposé.
22 Donc, les éléments de preuve. Donc, bien entendu, j'ai pu constater, donc,
23 qu'il y avait des blessures par balles sur ces corps, mais il ne
24 m'appartenait pas de déterminer quelle était la cause de leur mort. C'était
25 la responsabilité des anthropologues et des médecins légistes qui
26 travaillaient à la morgue. Ce sont eux qui ont établi des rapports
27 officiels là-dessus. Quand je suis allé travailler en Ukraine, il y a eu,
28 là, donc, des centaines de personnes qui avaient été fusillées. Je sais à
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1 quoi ressemblent des blessures par balles, donc je peux vous dire que je
2 suis arrivé à la conclusion que c'est de manière violente que ces gens on
3 perdu leur vie, mais il ne m'appartenait pas de déterminer le -- comment
4 ces gens ont perdu la vie.
5 Q. Je vais vous poser une question d'ordre général. Si l'on vous donnait
6 la même consigne, on vous confiait la même mission aujourd'hui sur le même
7 terrain, comte tenu de votre expérience acquise, est-ce que vous vous y
8 prendriez différemment maintenant pour mener ce même type de travail ? Est-
9 ce que vous amélioreriez, modifieriez votre approche, votre démarche ?
10 R. Je ne changerais pas au fond les procédures que nous avons appliquées,
11 à savoir le fait d'identifier l'emplacement du charnier en dérangeant le
12 moins les corps. Je procéderais de nouveau à l'enlèvement des corps.
13 J'enregistrerais, je mesurerais l'ensemble des éléments pour savoir
14 exactement d'où on les a prélevés dans le charnier. En -- je ferais des
15 photographies de chacun des corps et des objets avant de les enlever. Non,
16 je ne changerais rien à ces procédures-là, et ce sont d'ailleurs celles que
17 je continue de pratiquer, enfin, que l'on continue d'utiliser pour exhumer
18 les soldats, par exemple, à Formelles. Je l'ai mentionné, donc, ce site de
19 la Première Guerre mondiale. Donc, je ne modifierais en rien ces
20 procédures-là de fond.
21 Q. Merci. Changeriez-vous quelque chose suite à certaines remarques et
22 objections qui ont été faites à propos de votre rapport rendu définitif.
23 Vous avez répondu à certains de ces commentaires et objections et vous en
24 avez acceptés certains. Quels seraient ces changements que vous feriez en
25 tenant compte de ces commentaires ou objections ?
26 R. Je crains que je ne sache pas très bien de quoi il s'agisse lorsque
27 vous parlez de ces commentaires et de ces objections qui ont été faites à
28 propos de mon rapport définitif. Il faudrait que vous précisiez avant que
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1 je ne puisse répondre à cette question, et je ne sais pas dans quel
2 contexte ces objections ont été faites outre ma déposition dans trois
3 affaires précédentes, Krstic, Popovic et Tolimir, devant ce Tribunal.
4 Q. Je vais essayer de circonscrire ma question. Est-il exact que le Dr
5 Zoran Stankovic a fait le commentaire suivant en vertu de l'article 19 du
6 protocole additionnel des conventions de Genève, ou en se fondant sur un
7 autre document, que chaque partie en présence a le droit de prendre part ou
8 d'être présent en tant qu'observateur lors de l'inspection ? Je crois que
9 vous avez dit que c'était peut-être le cas, mais que cela ne relevait pas
10 de vos fonctions, à savoir d'autoriser ce genre de chose.
11 R. C'est la même réponse que je donnerais maintenant. Je n'étais pas
12 responsable de la partie logistique ni de la sécurité concernant ces
13 travaux-là, et je ne me souviens pas que l'on m'ait posé cette question,
14 plus particulièrement dans l'affaire Krstic. Mais cela ne relève pas de mes
15 fonctions que de décider qui doit être autorisé à être présent sur le site
16 ou non.
17 Q. Merci. Cependant, lorsque vous avez déclaré quelles personnes ont
18 participé à l'exhumation, vous avez dit qu'aucun citoyen de l'ex-
19 Yougoslavie n'avait participé à ces travaux. Est-ce qu'un citoyen de l'ex-
20 Yougoslavie a assisté à ces travaux ?
21 R. Non. Cette déclaration est exacte. Aucun citoyen de l'ex-Yougoslavie
22 n'avait été autorisé à venir sur les lieux pendant les quatre années où je
23 me suis occupé de ces excavations, et la nuit, les sites étaient protégés
24 par des gardes armés pour empêcher quiconque d'entrer.
25 Si le TPIY m'avait demandé de permettre à quelqu'un d'assister à ces
26 exhumations, je l'aurais fait, mais en règle générale, aucun citoyen de
27 l'ex-Yougoslavie n'était autorisé à s'approcher des sites.
28 A côté du barrage rouge où nous avions besoin d'une lourde
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1 excavatrice, le chauffeur de l'excavatrice n'a pas été autorisé à entrer
2 sur le site pour se rapprocher des lieux en question. Donc c'était un de
3 nos ingénieurs qui a conduit l'excavatrice jusqu'aux lieux en question.
4 Donc la politique était strictement appliquée.
5 Q. Je vous remercie. Alors, si je vous ai bien compris, ce n'est pas
6 quelque chose qui a été mis en place par vous. C'était une interdiction qui
7 avait été formulée par quelqu'un d'autre, n'est-ce pas ?
8 R. C'était une politique qui avait été mise en place -- une interdiction,
9 en anglais, a un sens bien particulier, mais c'était la politique adoptée,
10 nous n'avions pas le droit d'autoriser quiconque à entrer sur le site.
11 J'avais un directeur de projet qui s'occupait du site, et cette personne
12 s'occupait de ce genre de questions. Ça n'était pas à moi de le faire.
13 J'étais là simplement pour accomplir les travaux revenant à un homme de la
14 police scientifique. Je n'étais pas là pour me mêler de questions de
15 politique.
16 Q. Merci. Ceci n'est pas une attaque à votre encontre de quelque manière
17 que ce soit. Je souhaite simplement savoir qui a enfreint le droit de la
18 Republika Srpska en vertu de l'article 19 des protocoles additionnels, à
19 savoir que des citoyens de ce pays auraient le droit de participer à ces
20 exhumations. Vous n'étiez pas responsable de cela, mais c'est un droit qui
21 a été enfreint, n'est-ce pas ?
22 R. Ecoutez, je ne suis pas au fait de ces droits, et donc je ne peux pas
23 faire de commentaires sur ce sujet.
24 Q. Merci. Je pense que vous avez vu et que vous avez commenté le fait que
25 vous étiez d'accord avec l'objection formulée par le Dr Zoran Stankovic, un
26 expert en matière de fouilles scientifiques, quelqu'un de Belgrade, mais
27 cela ne relevait pas de vos fonctions. Donc je vais retrouver la référence
28 et nous allons essayer d'établir cela d'une autre manière.
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1 Donc vous admettez que cet article du protocole additionnel existe
2 bien ?
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le témoin a dit qu'il n'était pas au
4 courant de cela, donc veuillez poursuivre.
5 M. KARADZIC : [interprétation]
6 Q. Vous avez dit un peu plus tôt, si cela m'a été correctement traduit,
7 vous nous avez dit que vous vous êtes occupé des travaux relevant d'un
8 membre de la police scientifique. Est-ce que vous êtes un expert en matière
9 de fouilles scientifiques ?
10 R. Je suis archéologue et je suis spécialisé dans ce qui relève des
11 travaux de la police scientifique. Donc je suis expert, non pas dans tous
12 les domaines, mais je m'occupe de travaux de recherches archéologiques
13 scientifiques et, dans une certaine mesure, d'anthropologie scientifique.
14 Alors, si je suis un expert scientifique au sens large du terme, non. Je
15 vous répondrais que je ne sais rien pour ce qui est des analyses d'ADN. Je
16 ne sais rien à propos des empreintes digitales. Mais je sais comment il
17 faut mener à bien une excavation et comment il faut appliquer les règles
18 sur un site où ces travaux sont menés.
19 Q. Merci. Est-ce que nous pouvons convenir du fait que cela ne relève pas
20 de vos fonctions que de faire des autopsies et d'établir les circonstances
21 et l'heure du décès ?
22 R. Cela -- je ne peux pas fournir un avis d'expert devant des Juges, cela
23 n'est pas acceptable, et je ne peux pas vous donner mon avis sur les
24 circonstances et l'heure du décès. Cela ne fait pas partie de mon domaine
25 d'expertise.
26 Q. Merci. Alors, compte tenu du temps qui me reste, je vais vous citer un
27 exemple, l'exemple de Glogova 1 de l'année 2000, où vous fournissez une
28 explication de l'endroit en question. Il s'agit là d'une description de
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1 Glogova 1, de ce site, où vous avez déclaré que vous avez remarqué six
2 zones où il y avait des restes humains qui avaient été placés, ainsi que
3 des emplacements où des tentatives d'inhumation avaient été faites dans le
4 but de déplacer les corps. Etes-vous en mesure de nous dire autre chose à
5 propos de ces tentatives-là ? S'agissait-il de tentatives ou est-ce que
6 ceci a été réellement fait ?
7 R. C'était des tentatives, ceci n'a pas été fait jusqu'au bout. Ces
8 informations nous proviennent de photographies aériennes qui ont été prises
9 en octobre 1995. Un certain nombre de corps ont été enlevés, parce que nous
10 avons retrouvé des parties vides dans ces fosses, et il y a des parties
11 manquantes. Mais il est vrai qu'il s'agissait d'une tentative, à savoir
12 s'il s'agissait d'une tentative d'enlever tous les corps, nous ne le savons
13 pas. Mais, en tout cas, ils n'ont pas réussi à enlever tous les corps,
14 parce qu'il en restait un certain nombre. Il y avait des restes humains qui
15 étaient tombés des corps et cela provenait des corps qui avaient été
16 enlevés.
17 Q. Ce que je souhaite savoir néanmoins, c'est qu'auraient été vos
18 conclusions, eu égard à la fosse E, si vous aviez creusé plus en
19 profondeur, vous avez dit que cette fosse avait été pillée. Enfin, vous
20 n'avez pas utilisé le mot "pillée"; vous avez dit qu'un certain nombre de
21 corps avaient été enlevés, et fort heureusement, vous avez dit : "Lorsque
22 nous avons creusé plus en profondeur, nous en avons conclu que cela n'était
23 pas le cas." Est-ce exact ?
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous pouvons avoir le numéro
25 de la page ?
26 Monsieur le Professeur, veuillez nous dire à quel endroit cela se trouve.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, à quelle page cela se
28 trouve-t-il ?
Page 22315
1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il s'agit de votre rapport, la pièce
2 P4009.
3 M. KARADZIC : [interprétation]
4 Q. Page 6.
5 R. [aucune interprétation]
6 Q. Je crois que cela se trouve à la page 6, et le titre de ce chapitre est
7 : "Description du site de Glogova."
8 R. Oui, je comprends la question que vous me posez. Pour ce qui est de la
9 fosse E, il ne s'agissait pas de la fosse --
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Page suivante. Un instant, s'il vous
11 plaît. Fosse E.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] La fosse E était une fosse qui, au mois
13 d'octobre, n'avait subi aucune modification. La raison pour laquelle je dis
14 cela, c'est parce que c'est ce que nous avons constaté, au niveau des
15 excavations ainsi que des photographies aériennes, il n'y a eu aucun
16 déplacement au niveau de la fosse E.
17 M. KARADZIC : [interprétation]
18 Q. Cependant, vous avez établi que ce n'est qu'après avoir creusé plus à
19 profondeur que vous avez tout d'abord conclu qu'on y avait creusé de façon
20 illégale et que cette fosse avait fait l'objet de pillage ?
21 R. C'est exact. Parce que lorsque nous avons creusé en surface dans cette
22 fosse, nous n'avons trouvé aucun corps, mais alors que nous creusions plus
23 en profondeur, nous avons découvert quelques corps.
24 Q. Merci. Quelque chose vous a-t-il empêché de creuser plus en profondeur
25 dans les autres fosses ?
26 R. Non. J'avais pour tâche, étant donné que j'avais commencé les
27 excavations sur un site donné, de m'assurer que chaque corps avait été
28 levé. De façon à ce que nous ne laissions aucun corps sur ces sites, nous
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1 faisions les travaux d'excavation en dessous des fosses de façon à pouvoir
2 parvenir à la terre. Donc, pour revenir à la fosse E, nous n'avons trouvé
3 aucun corps en surface, et nous avons creusé jusqu'à la terre, et au bas de
4 la fosse, nous avons trouvé les corps dans la fosse E.
5 Avant de déblayer une fosse, avant d'arriver au fond, nous enlevons
6 toujours de la terre pour nous assurer de tomber sur la terre elle-même.
7 Dans mon rapport sur Glogova, je parle -- excusez-moi, veuillez m'accordez
8 quelques instants. Je parle à la page 7 de mon rapport. Je montre la terre
9 --
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Deux pages plus loin, s'il vous plaît.
11 Est-ce bien la bonne page, Monsieur le Professeur ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président. J'ai
13 reconstitué le terrain avant qu'aucune fosse ne fasse l'objet d'une
14 excavation. Donc c'est une excavation que nous avons faite à l'extérieur de
15 l'endroit où se trouvaient les fosses de façon à avoir une idée de comment
16 nous parvenions à cette terre naturelle. Donc, dans tous ces secteurs qui
17 figurent sur ma carte de l'excavation de Glogova, nous avons creusé jusqu'à
18 ce que nous atteignions la terre pour nous assurer qu'il ne restait aucun
19 corps dans ces fosses.
20 M. KARADZIC : [interprétation]
21 Q. Maintenant je vais demander de reporter votre attention au chapitre
22 suivant, lorsque vous parlez au fait que ces fosses ont été creusés et ont
23 fait l'objet de pillage. Vous avez déclaré dans vos conclusions qu'il n'y
24 avait aucune raison pour croire que les corps de Glogova 1 avaient été à
25 l'origine enterrés ailleurs, avaient été exhumés et ensuite enterrés à
26 Glogova. Et vous déclarez :
27 "Au contraire. D'après nos indications, les corps ont été exhumés de
28 Glogova 1 et emmenés ailleurs."
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1 Avez-vous pu établir que Glogova 1 était en réalité le lieu de
2 l'exécution ?
3 R. Non. Je n'en ai pas conclu qu'il s'agissait du lieu d'exécution, car
4 contrairement à Kozluk, il n'y avait aucune douille d'obus. Il y avait
5 quelques balles auprès des corps et une ou deux cartouches, mais il n'y en
6 avait pas suffisamment. Il n'y avait pas suffisamment de douilles, de
7 pistolets, de fusils, pour permettre de croire que les corps avaient été
8 exécutés à Glogova même et enfouis sous le sol. Donc il ne m'a pas semblé
9 qu'il s'agissait d'un lieu d'exécution. Mais par ailleurs, il n'y avait
10 rien qui indiquait, comme à Cancari 12 et sur d'autres sites, que de -- des
11 morceaux de terre qui ne provenaient pas de cette région.
12 C'est ce que recherche un archéologue : êtes-vous sûr que ces corps
13 n'ont pas été enterrés dans un endroit A, exhumés et ensuite emmenés à
14 Glogova ? Et la terre, dans ce cas, voyage en même temps que les corps. Et
15 la terre est différente. C'est quelque chose que nous n'avons pas constaté
16 à Glogova. Nous avons retrouvé des objets, nous avons retrouvé du plâtre et
17 des morceaux de lambris de porte qui semblaient indiquer que les corps
18 étaient venus d'ailleurs. Et nous en avons conclu que ce "ailleurs" était
19 le dépôt de Kravica. Mais ces corps n'avaient pas été enterrés ailleurs
20 avant cela.
21 Monsieur le Président, le compte rendu d'audience indique qu'ils
22 avaient été enterrés ailleurs. J'ai précisé que ces corps n'avaient pas été
23 enterrés ailleurs avant cela, me semble-t-il.
24 Q. Je vous remercie de bien vouloir faire preuve de compréhension.
25 J'attends la fin de la traduction vers le serbe avant de vous poser ma
26 question suivante. Je vous demanderais maintenant d'être plus précis.
27 Combien de fosses primaires avez-vous retrouvées ?
28 R. En rapport avec les sites qui, d'après nous, semblaient être liés à
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1 Srebrenica -- c'est sur lequel j'ai travaillé, c'était le site du barrage
2 rouge. Celui-ci avait été pillé. Le site primaire suivant était Kozluk, que
3 nous avons découvert en raison du verre retrouvé à Cancari 3, et le
4 troisième site primaire était Glogova. Donc, compte tenu de ces enquêtes
5 qui avaient été menées en particulier, il y avait trois sites primaires.
6 Q. Merci. Mais ce n'est qu'à un endroit, au barrage rouge, que vous
7 avez établi, que la fosse primaire correspondait également au lieu
8 d'exécution; c'est exact ?
9 R. Au barrage rouge, il y avait un nombre très important de douilles et
10 d'ossements qui jonchaient le sol à l'endroit où la fosse avait été
11 creusée, donc il me semblait qu'il s'agissait là d'un lieu d'exécution. Les
12 corps, d'après moi, ou en tout cas les corps qui étaient dans la fosse
13 provenaient de cette exécution, mais bien évidemment, les corps avaient été
14 enlevés des fosses et il ne restait que quelques ossements.
15 Vous m'avez posé la question, le barrage rouge, oui, mais ce n'est
16 pas dans un seul endroit que j'ai établi que la fosse correspondait au lieu
17 d'exécution, parce qu'il s'agit là pour l'essentiel de mon interprétation
18 de ce qui s'était passé à Kozluk. Il s'agissait à la fois d'un lieu
19 d'exécution et d'inhumation. Mais Glogova n'était pas un lieu d'exécution.
20 C'est un endroit où les personnes avaient été placées. C'était leur premier
21 lieu d'inhumation.
22 Q. Ces personnes avaient été tuées ailleurs; c'est cela ?
23 R. Les personnes de Glogova n'avaient pas été tuées à Glogova même, oui.
24 Q. Merci. Comment avez-vous écarté l'idée que Glogova était un endroit où
25 il y avait eu assainissement ? Comment pouviez-vous écarter cette
26 éventualité qu'il s'agissait là de corps qui avaient été rassemblés lors du
27 ratissage du terrain de soldats qui avaient été tués ailleurs et qui
28 avaient été enterrés dans cette fosse-là suite à l'application de mesures
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1 d'hygiène ?
2 R. Ecoutez, je ne peux pas complètement écarter cette idée-là. D'après mes
3 observations, c'est qu'il n'y avait pas un seul morceau de vêtement
4 militaire qui a été retrouvé à Glogova, un échantillon de vêtement
5 militaire. Les corps avaient été inhumés dans des conditions propres et ne
6 montraient aucun signe d'insectes. Les corps étaient restés à l'intérieur
7 et ensuite rassemblés. En général, ce sont des mouches qui attaquent les
8 corps, et cela se retrouve sur les corps, et on retrouve les ailes très
9 souvent sur les corps. Donc, il ne s'agissait pas de corps qui avaient été
10 laissés dehors et qui avaient été rassemblés par la suite. Donc, j'avais de
11 bonnes raisons de croire qu'il s'agissait de corps qui provenaient de
12 différents endroits.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.
14 M. MITCHELL : [interprétation] Pardonnez-moi si je vous interromps, mais il
15 y a une correction que je dois apporter au compte rendu d'audience à la
16 ligne 16. Le mot "assignation", je crois que ça devait être le terme en
17 B/C/S, "asanacija".
18 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]
19 M. KARADZIC : [interprétation]
20 Q. Monsieur le Professeur, tout ce que je tente de faire maintenant c'est
21 d'établir la chose suivante : est-ce que vous dites que tous les corps
22 retrouvés à Glogova 1 étaient dans un même état de décomposition, ou est-ce
23 que ces corps étaient dans des états de décomposition différents ?
24 R. Eh bien, les corps étaient vraiment dans des états de décomposition
25 différents. Cela dépendait de l'endroit où le corps était situé dans la
26 masse de corps. Lorsqu'on est enterré dans une fosse commune, au bord, eh
27 bien, la putréfaction est beaucoup plus rapide et l'état squelettique
28 survient beaucoup plus rapidement que pour un corps qui se trouve au milieu
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1 de la masse des corps. Donc, tous ces corps n'ont pas été retrouvés dans un
2 même état de décomposition, mais la différence eu égard aux états de
3 décomposition peut être interprétée en fonction de l'endroit où se retrouve
4 le corps dans la masse des corps lorsqu'il y a excavation. La raison pour
5 laquelle j'ai dit qu'il n'y avait aucune trace d'insectes, c'est parce que
6 les insectes sont des indices, et si sur certains corps il y a des insectes
7 et sur d'autres, non, cela nous permet de déterminer que ces corps
8 proviennent d'autres endroits à des moments différents, mais nous n'avons
9 rien constaté de la sorte. Je n'ai rien vu qui pouvait me porter à croire
10 qu'il y avait différents événements ou des événements différents qui
11 étaient à l'origine de la mort de ces personnes à Glogova, et, à mon sens,
12 ceci peut être expliqué par un seul et même massacre.
13 Q. Merci. Alors, regardons maintenant ce que vous avez dit au chapitre :
14 "Caractéristiques des fosses et des corps". Cela se trouve à la page 15 de
15 mon exemplaire. Ensuite, vous dites que :
16 "L'état de conservation des corps dépend s'ils sont soit à l'état de
17 squelette ou comportent de nombreux lambris de chair. Au tableau numéro 8.
18 Ces états de conservation ne permettent pas de dire qu'il s'agit de dates
19 d'inhumation différentes."
20 Je ne sais pas si en anglais, "ne doit pas ou ne devrait pas être
21 compris comme". En serbe, nous avons "ne doit pas être compris comme
22 étant."
23 Est-ce que vous pouvez nous dire pourquoi ces différences doivent ou
24 ne devraient permettre de déterminer ?
25 R. Je comprends bien les difficultés qu'il y a au niveau des termes
26 utilisés. Il ne faut pas conclure que ces corps ont été tués ou ont fait
27 l'objet de massacre à différentes dates, parce que nous avons remarqué
28 qu'il y avait des états de conservation différents qui, en fait, étaient
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1 dus à l'emplacement du corps dans la fosse commune.
2 Je n'ai pas dit qu'il ne s'agissait -- que cela n'était pas le cas,
3 mais nous n'avions pas besoin d'expliquer ces différences au niveau de la
4 conservation, parce qu'outre le fait -- nous avons simplement précisé que
5 cela dépendait de l'emplacement du corps à l'intérieur de la fosse.
6 Q. Je me propose, avec votre permission, d'en donner lecture en anglais.
7 Je crois que c'est bien traduit. On y dit :
8 "Ces différences en l'état de préservation ne doivent pas être
9 comprises comme indiquant des périodes différentes d'ensevelissement."
10 R. Oui.
11 Q. Donc, on exclut la possibilité d'avoir eu des ensevelissements
12 effectués à des moments différents ? Alors, en quoi cela se trouve-t-il
13 être exclu ?
14 R. C'est précisément la raison pour laquelle j'ai dit auparavant que
15 j'étais d'accord pour indiquer que des interprétations différentes sont
16 possibles, mais que ce n'est pas nécessairement le cas d'une interprétation
17 qui se ferait du point de vue des niveaux différents de préservation. C'est
18 ce que je voulais dire. Donc, je suis en train de me conformer à un
19 principe que l'on essaie d'introduire pour expliquer les choses
20 différemment. Mais je ne vois pas pourquoi l'on ferait cela si on n'est pas
21 contraint. En anglais -- en Angleterre, nous appelons cela "Occam's razor,"
22 la lame de rasoir d'Occam. Alors, si vous trouvez des squelettes au bas et
23 par-dessus des corps qui sont entiers, moi, je dirais que ces corps qui
24 sont devenus des squelettes ont été apportés d'un autre endroit, parce
25 qu'il n'est pas possible, du point de vue de la décomposition des corps, de
26 voir des corps frais en haut. Mais nous n'avons pas trouvé chose semblable,
27 justement.
28 Q. Merci. Mais vous a-t-on indiqué où se trouve la fosse commune, le
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1 charnier, des personnes enterrées alors qu'ils ont été tués au mois de mai
2 1992 à Glogova, parce qu'il y a eu de gros combats et il y a eu, semble-t-
3 il, des exécutions illégales. Alors, est-ce qu'on vous a montré ce
4 charnier-là ?
5 R. Non. On ne m'a pas dit de rechercher un charnier que l'on avait
6 considéré avoir été créé en 1992, non.
7 Q. Mais est-ce que vous excluez la possibilité de voir dans ce charnier
8 qui a été créé en 1992, on ait pu enterrer ultérieurement des corps à
9 l'occasion du processus d'assainissement du terrain ?
10 R. Est-ce que vous voulez dire par l'a, Monsieur Karadzic, que la totalité
11 des corps y avaient été ensevelis ? Ou alors, que des corps ont été
12 ensevelis plus tard par-dessus les autres cadavres qui se trouvaient déjà
13 là-bas ?
14 Q. Mais alors, est-ce que vous pouvez nous dire combien vous avez trouvé
15 de corps dans Glogova 1 ?
16 R. Deux cents -- non, 191 corps complets et 249 parties de corps, d'après
17 ce que dit mon rapport.
18 Q. Merci. Mais on sait qu'environ 64 victimes sont tombées en mai 1992.
19 Alors, est-ce que quelqu'un vous a prévenu de ce fait-là ?
20 R. Non. Je ne me souviens pas que quelqu'un m'ait dit ceci.
21 Q. Personne ne vous a fait savoir non plus qu'il y a eu des combats au fil
22 des trois années écoulées, mais au mois de juillet de cette année. Sur ce
23 territoire entier, il y a eu des combats qui se sont prolongés sur une
24 dizaine de journées.
25 R. Alors, puis-je vous demander si vous vous référez à juillet 1995 ou
26 1992 ?
27 Q. 1995, avant la chute de Srebrenica et après la chute de Srebrenica. Il
28 y a eu des combats, non pas des exécutions. Est-ce que vous avez donc été
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1 informé du fait que des combats avaient eu lieu et qu'un grand nombre de
2 combattants musulmans essayaient de se frayer un passage en direction de
3 Tuzla en se battant, et bon nombre d'entre eux sont tombés à l'occasion de
4 ces combats-là ?
5 R. Non, je ne suis pas au courant de l'histoire de ces événements.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, je vois que l'heure
7 est venue de faire la pause. Si cela vous arrange, nous pouvons faire la
8 pause maintenant.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. J'ai beaucoup de
10 questions encore. C'est un témoin très important. Le Procureur a utilisé
11 deux heures. Je devrais en avoir au moins six.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons faire une pause d'une heure,
13 et nous allons reprendre à 1 heure 35.
14 Oui, Monsieur Nicholls.
15 M. NICHOLLS : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais
16 nous n'avons pas d'autre témoin de prévu pour aujourd'hui.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, c'est ce qu'on nous a dit. C'est ce
18 que j'ai cru comprendre.
19 M. NICHOLLS : [interprétation] Fort bien. Je voulais juste le dire de façon
20 claire. Merci.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] A 1 heure 35.
22 --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 35.
23 --- L'audience est reprise à 13 heures 36.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, allez-y, Monsieur Karadzic.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
26 M. KARADZIC : [interprétation]
27 Q. Professeur, vous avez indiqué que dans le cas de figure de Glogova 1,
28 vous aviez constaté que beaucoup de gens avaient péri suite à des
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1 explosions; c'est bien cela ?
2 R. J'ai constaté deux choses à Glogova. Ma réponse pour répondre à votre
3 question est oui, mais permettez-moi de dire pourquoi. J'ai constaté qu'il
4 y avait des ossements qui étaient plus cassés qu'ailleurs et j'ai aussi
5 trouvé des bouts, des fragments d'explosif et des bouts d'obus ou fragments
6 de métal qui devaient se trouver dans les corps.
7 Q. Merci. Je comprends parfaitement que vous vous absteniez de faire des
8 évaluations médico-légistes pour ce qui est du moment de la mort du décès
9 et des causes de décès. Mais toujours est-il que je voudrais savoir si vous
10 avez déterminé l'ancienneté du charnier, de la fosse commune, quand est-ce
11 que ce charnier ou tel autre a été constitué ?
12 R. Je n'ai pas déterminé la chose par mes enquêtes médico-légales, parce
13 que les images aériennes ont montré que la terre n'a pas été remuée à la
14 date du 5 juillet 1995, mais qu'il y a eu des déplacements de terre avant
15 le 20 juillet 1995. C'est la raison pour laquelle j'estime qu'on peut
16 déterminer l'ancienneté des différents charniers.
17 Q. Est-ce que vous pouvez déterminer s'il y a eu ou pas avant cela à ce
18 même endroit un charnier, suite à quoi il y aurait rajout de corps, ou est-
19 ce que c'est un charnier qui a été placé là au mois de juillet ? Exception
20 faite du site de Glogova, parce que pour d'autres sites nous savons qu'il y
21 a eu beaucoup de morts à être ensevelis en 1992 et 1993 à cet endroit-là ?
22 R. Il y a deux choses que je voudrais évoquer pour répondre à votre
23 question. Tout d'abord, des bouts de l'entrepôt de Kravica étaient mélangés
24 avec les corps. Là-bas il n'y a pas de couche inférieure de cadavres qui
25 n'aurait pas eu des bouts d'entrepôt de mélangés au reste. Ensuite, je suis
26 au courant de charniers, non pas à Glogova mais ailleurs, où on a enseveli
27 des gens, puis s'est passé un certain temps, puis on a ensuite enseveli des
28 cadavres à titre complémentaire. Comment on peut distinguer la chose, par
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1 l'utilisation de méthodes archéologiques ? Si un charnier est laissé ouvert
2 avec des cadavres exposés aux intempéries, alors il y a des insectes qui
3 s'attaquent aux cadavres, comme je l'ai déjà expliqué auparavant, la
4 chitine qui constitue les corps d'insectes, c'est quelque chose qui dure
5 très longtemps, et lorsqu'on retrouve cela c'est une indication fiable pour
6 dire que les corps ont été exposés aux intempéries.
7 Deuxièmement, ces cadavres qui sont exposés aux intempéries se
8 détériorent beaucoup plus vite du fait du climat, les os se craquellent, et
9 on voit cela à la surface. Il n'y a pas d'os brisés, mais il y a des
10 craquelures qui apparaissent.
11 A Glogova, nous n'avons jamais vu des signes de dégâts sur des
12 couches antérieures de cadavres. Nous n'avons pas trouvé de couche de
13 cadavres antérieurement posés là. Je répète donc que nous avions constaté
14 que des bouts d'entrepôt s'étaient mélangés aux corps. Il n'y a pas eu de
15 terre de retrouvée qui aurait enseveli des couches antérieurement posées de
16 cadavres ni des dégâts dus aux intempéries auxquelles auraient été exposés
17 certains cadavres. Partant de tout ceci et d'autres éléments de preuve,
18 j'ai pu conclure de façon unique -- enfin, de façon tout à fait claire
19 qu'il s'agit d'un ensevelissement en un temps.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez évoqué un lien potentiel entre
21 le site de Glogova et l'entrepôt de Kravica. Est-ce que vous excluez la
22 possibilité qu'il y aurait eu des corps dans ce charnier à avoir été
23 transportés là depuis un autre site d'ensevelissement ou d'exécution ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'exclurais pas la chose. Mais ce que je
25 dirais, Monsieur le Président, c'est que ce type de cadavres ont été
26 ensevelis en même temps, si tant est que cela s'est produit.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon. Merci.
28 A vous, Monsieur Karadzic.
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1 M. KARADZIC : [interprétation]
2 Q. Vous avez mentionné la chose, et peut-être puis-je introduire un
3 nouveau terme. S'il y a eu des tombes de "pillées", est-ce qu'on peut
4 appeler certaines tombes d'enrichies a posteriori ? Vous avez mentionné ce
5 site-là, mais y a-t-il eu d'autres sites encore où il y aurait eu des corps
6 de rajoutés a posteriori ? Donc, par opposition aux tombes pillées, y aura-
7 t-il eu des tombes enrichies, comme on en a vu pour le barrage rouge ?
8 R. Non. J'ai compris la question, et j'ai compris le terme que vous
9 utilisez pour dire "enrichies". Non, je n'ai pas trouvé de tombes qui
10 auraient été ré-ouvertes pour qu'on puisse y poser d'autres corps.
11 Q. Mais vous avez dit tout à l'heure que vous aviez vu des charniers de ce
12 type où il y a eu des enterrements faits a fortiori. Alors, est-ce que ce
13 n'est que le barrage rouge ou ce n'est même pas le cas pour le barrage
14 rouge non plus ?
15 R. Je suis navré, mais je ne me suis peut-être pas exprimé de façon
16 claire. Les tombes que j'ai eu l'occasion de voir n'ont rien à voir avec ce
17 que vous êtes en train d'évoquer. Ils ne tombent pas sous la catégorie de
18 tombes où il y aurait eu des corps de rajoutés. Les tombes que j'ai vues
19 par la suite, c'est-à-dire en Ukraine et un autre charnier à Prijedor
20 tombent sous une autre catégorie, mais ça ne fait pas l'objet de mon
21 témoignage. Alors, pas un seul des charniers que nous sommes en train
22 d'évoquer à présent n'est pas un charnier où l'on aurait ajouté a
23 posteriori des corps.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Professeur, il y a peut-être une erreur
25 d'interprétation. Vous avez dit que vous aviez eu à connaître de cas de
26 charniers, "non pas à Glogova mais ailleurs, où il y aurait eu des corps
27 d'ensevelis, puis au bout d'un certain temps, on aurait enseveli d'autres
28 personnes dedans." Mais vous voulez dire que vous n'avez pas trouvé des
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1 exemples de ce genre en Bosnie ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président. Je ne me
3 suis peut-être pas expliqué de façon appropriée. Je ne l'ai pas vu à
4 Glogova, et je ne l'ai vu à aucune des tombes ou charniers qui sont liés
5 aux événements de Srebrenica. J'ai vu un cas de figure de ce type en
6 Bosnie, mais c'est des exécutions qui dataient de 1992.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
8 M. KARADZIC : [interprétation]
9 Q. Merci. On y reviendra. Je sais que vous avez mentionné le barrage rouge
10 à cet effet.
11 Mais finissons-en avec les insectes. Etes-vous d'accord avec moi pour dire
12 qu'en page 15, dans la variante serbe, vous avez indiqué qu'il fallait
13 tenir compte du fait que les corps ont été enlevés des charniers et qu'ils
14 étaient recouverts de boue, donc il était difficile de voir clairement
15 quels étaient toutes les caractéristiques de ces cadavres. On a, par
16 exemple, indiqué sur certains formulaires que les constations n'étaient que
17 des constations à caractère provisoire. Alors, ce travail d'identification,
18 de vérification des changements intervenus sur les corps, ils ont été au
19 final effectués dans la morgue. Donc, ce n'est que de la morgue que des
20 conclusions finales pouvaient provenir. C'est bien cela ?
21 R. Oui, c'est exact.
22 Q. Merci. Sur le film, on a pu voir qu'il s'agissait de la mi-mai. Est-ce
23 que vous pouvez nous dire quelle était la température qui était celle des
24 morgues ?
25 R. J'ignore quelle était la température, mais ça devait être un peu au-
26 dessus de zéro. La température idéale serait de cinq degrés. Mais je ne
27 sais pas ce que les techniciens ont pu régler comme température et quelle
28 était la température qui régnait à l'intérieur. Mais oui, j'ajoute cinq
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1 degrés Celsius.
2 Q. Merci. Alors, vous nous avez dit que périodiquement vous avez procédé à
3 des transports de cadavres vers la morgue de Visoko. Alors à quelle
4 fréquence avez-vous procédé à ces transports-là ?
5 R. Je devrais dire qu'en moyenne, ça devrait être une semaine entre
6 l'exhumation et le moment où il y avait suffisamment de corps au niveau de
7 la morgue pour être acheminés vers Visoko. Donc, c'était à peu près une
8 semaine, des fois un peu moins.
9 Q. Merci. Est-ce que vous avez reçu des informations en retour pour ce qui
10 est de savoir quand est-ce, après l'arrivée, on a procédé aux autopsies ?
11 R. Ça, je ne le sais pas, Monsieur Karadzic. Je suis allé à plusieurs
12 reprises jusqu'à la morgue, mais je n'ai pas participé à ce qui a été fait
13 là-bas, ce qui fait que je ne sais pas combien de temps il s'est passé
14 entre l'arrivée des cadavres et l'autopsie en tant que telle, autopsie
15 effectuée par les pathologues [phon] et les anthropologues.
16 Q. Merci. Est-il exact de dire que certaines fosses communes, comme celle
17 de Cancari, par exemple, qu'on a pu constater sur les prises de vues en
18 1995, et ça été exhumé en 1998 seulement ?
19 R. Oui. C'est précisément le cas.
20 Q. Merci. Alors, y a-t-il des indices qui permettent de calculer
21 l'ancienneté des fosses communes ou est-ce que nous ne pouvons nous référer
22 qu'aux prises aériennes, seules ?
23 R. Pour être précis, oui, il faut que nous nous appuyions sur les prises
24 de vues aériennes. Il existe des méthodes, telle que le carbone radioactif,
25 qui nous permettraient à présent, si ce n'est pas à l'époque, nous donner
26 une idée approximative du moment de la mort d'une personne, mais ce n'est
27 pas la précision qui peut nous être fournie par les prises de vues
28 aériennes. Je vais être un peu plus explicite. Ce carbone radioactif est
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1 utilisé depuis de longues années déjà, mais la forme concrète de cette
2 détermination de l'ancienneté d'un cadavre avec le carbone radioactif,
3 c'est ce qui est utilisé par des explosions de bombes à hydrogène, vers le
4 début des années 1960 [comme interprété], et c'est ce qui est utilisé à
5 présent pour voir la décomposition de ce carbone radioactif qui est utilisé
6 pour les besoins de la police aux fins de déterminer le moment du décès de
7 quelqu'un. Par exemple, on retrouve quelqu'un dans une forêt à l'extérieur
8 de Sydney et puis les gens du laboratoire m'ont dit que c'était une
9 personne décédée en 1985 et 1992, mais ce n'est pas plus précis que cela.
10 Q. Merci. Vous avez dit que dans les poches il y avait des balles, des
11 balles intactes. Ce que je voudrais savoir, c'est ces journaux hollandais,
12 est-ce qu'on peut confirmer de -- enfin, des bouts de journaux qui étaient
13 utilisés, probablement, pour rouler des cigarettes. Est-ce qu'on a
14 déterminé de quand dataient ces bouts de journaux -- de journaux quotidiens
15 ?
16 R. Je suis certain du fait que cela aurait pu se faire, mais je ne me
17 souviens pas d'avoir vu un bout de papier de journal où il y aurait une
18 date. Peut-être pourrait-on avoir lu le texte et ensuite déterminé, partant
19 du texte, quand est-ce que le journal a été imprimé, mais ça, je ne peux
20 pas vous le dire.
21 Q. Mais ces articles-là, ces objets-là, ont-ils été sauvegardés ?
22 R. Ça, c'est une question qu'il faudra poser aux enquêteurs du TPIY, parce
23 qu'une fois que j'ai restitué les corps, je n'assume plus aucune
24 responsabilité. Je ne le sais pas.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je demander à M. Mitchell -- l'imprimante
26 de la Défense ne fonctionne pas. Je voudrais qu'on nous imprimer les ERN
27 1086397 et 98, et j'aimerais que ce soit placé sur le rétroprojecteur. En
28 même temps, je fais savoir au bureau du Procureur que j'ai l'intention de
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1 me référer à ces documents-là.
2 M. KARADZIC : [interprétation]
3 Q. Merci d'avoir répondu, Professeur, à mes questions.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous avons une référence 65
5 ter pour ces documents ?
6 M. KARADZIC : [interprétation]
7 Q. En attendant que la chose ne soit faite, je vous rappelle qu'il y a une
8 page 17 où vous avez donné les indications -- des indications de blessures,
9 éclats d'obus, balles, fragments de balles, on a retrouvé des bouts de
10 grenades à main, des morceaux de projectile, et on a trouvé aussi des
11 balles entières dans les poches de certaines personnes. Est-ce que ces
12 balles, dans les poches de quelqu'un, ça indique bel et bien qu'il
13 s'agissait là d'un combattant ?
14 R. Il y a deux choses à dire à ce sujet. Tout d'abord, il n'y a qu'un seul
15 individu qui avait eu des balles dans sa poche. Ça se trouve illustré à la
16 photo numéro 17 de mon rapport. On a retrouvé ces balles avec d'autres
17 objets personnels. Mais le fait que quelqu'un porte des balles dans ses
18 poches ne me laisse pas entendre en soi que c'est nécessairement un
19 combattant. Je ne sais rien d'autre au sujet de cette personne si ce n'est
20 le fait qu'il y avait des balles dans sa poche.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.
22 M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit d'un
23 document -- il vaut mieux peut-être le donner au témoin, ou --
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, non, on peut le montrer aux Juges et le
25 placer sur le rétroprojecteur ensuite. Ah, l'imprimante s'est mise à
26 travailler -- à fonctionner. Elle n'avait pas fonctionné pendant plus d'une
27 heure. Alors, j'aimerais demander à ce que ce document soit placé sur le
28 rétroprojecteur.
Page 22331
1 M. KARADZIC : [interprétation]
2 Q. Si je vous ai bien compris, il s'agit d'un courrier émanant de vous à
3 l'intention de M. McCloskey.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mettons d'abord cela sur le
5 rétroprojecteur.
6 M. KARADZIC : [interprétation]
7 Q. Vous souvenez-vous de ce courrier, Monsieur ?
8 R. Monsieur le Président, est-ce que je peux prendre lecture de ce
9 courrier ?
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais faites, Professeur.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais le lever -- le rapprocher un peu.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Une autre copie peut être placée sur le
13 rétroprojecteur au profit des autres personnes dans le prétoire. Donc, vous
14 pouvez garder une copie entre les mains et l'autre copie, la faire mettre
15 sur le rétroprojecteur.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je n'ai pas pu me souvenir de la totalité
17 des détails de la lettre, mais je confirme qu'il s'agit bel et bien de ma
18 lettre.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on nous montrer la page suivante, s'il
20 vous plaît ?
21 M. KARADZIC : [interprétation]
22 Q. Au paragraphe 3, on mentionne l'article 90 des protocoles additionnels,
23 et vous dites que vous n'avez jamais demandé cela mais que vous n'auriez
24 jamais refusé si on vous avait demandé de le faire. C'est bien ce que vous
25 avez dit ?
26 R. C'est exact, et j'ai déjà répondu auparavant à cette même question de
27 façon identique. Mais ce n'est pas parce que je connais bien la teneur de
28 cet article 90. Je ne sais pas au juste ce que le protocole en question
Page 22332
1 nous dit. Ce que je veux dire, c'est qu'on m'a demandé d'autoriser la
2 présence d'un expert à l'occasion des analyses de fosses communes, et je
3 n'aurais eu aucune objection à cela.
4 Q. Merci.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on verser ce document au dossier, s'il
6 vous plaît.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D1974.
9 M. KARADZIC : [interprétation]
10 Q. Pour ce qui est de ce paragraphe qui commence par" : "Je suis d'accord
11 pour dire que le chiffre exact ne peut être déterminé qu'en procédant à des
12 exhumations réelles," êtes-vous d'accord pour dire que, si vous tenez
13 compte des quatre années de guerre et qu'un nombre important de personnes
14 ont perdu la vie, il est encore plus difficile d'évaluer le nombre de cas
15 au cours duquel les personnes sont décédées après la chute de Srebrenica ?
16 Peut-être que ma question était beaucoup trop compliquée. Il y a eu une --
17 il y avait une guerre, et voici -- et ma question : pour ce qui est de
18 faire des estimations, est-ce que ceci n'a pas été rendu encore plus
19 compliqué, à savoir une estimation quant à la -- ou portant sur la chute de
20 Srebrenica ? Ce que je veux dire, c'est estimer le nombre de cas ou le
21 nombre de cadavres, si vous voulez.
22 R. Alors, pour ce qui est de l'estimation des corps trouvés dans ces sites
23 que nous avons vus sur ces images, c'est quelque chose auquel j'ai répondu
24 lorsque j'ai répondu au Procureur. J'ai dit que j'avais vérifié cela par la
25 suite pour constater que ces fosses avaient fait l'objet d'excavation et
26 que mon estimation, des corps retrouvés dans les fosses, était légèrement
27 sous-évaluée, donc, pour ce qui est des sites que nous voyons sur ces
28 photographies aériennes, je m'en tiendrais à la méthode que j'aie appliquée
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1 lorsque j'ai rédigé mon rapport en 1998, portant sur 1998. Ces estimations
2 font l'objet de critiques dans cette lettre et se sont avérées depuis être
3 des estimations raisonnables du nombre de corps qui ont été retrouvés dans
4 les fosses secondaires restantes.
5 Q. Je ne conteste pas cela. Ce qui m'intéresse maintenant c'est ceci :
6 Tous ces corps, corps retrouvés dans des fosses qui sont censés ne pas
7 avoir fait l'objet d'exhumation, et si nous tenons compte de ces moyennes,
8 est-ce que tous ces corps sont liés à la chute de Srebrenica en écartant
9 complètement l'idée que la guerre avait fait rage pendant quatre ans
10 auparavant ?
11 R. Je ne peux pas commenter cela, Monsieur Karadzic. Je ne peux pas parler
12 des sites que j'aie excavés moi-même personnellement. Ce dont je parle ici,
13 lorsque je parle d'estimation, porte sur des fosses dont -- que je n'ai pas
14 excavées donc je ne peux pas faire de commentaire, à savoir si ces fosses
15 portaient sur Srebrenica. Je ne peux en parler qu'en disant qu'il
16 s'agissait de fosses qui apparaissaient sur les images aériennes et qui
17 dataient du mois de juillet 1995. Je ne suis pas retourné en Bosnie après
18 l'an 2000 lorsque nous en avions terminé à Glogova. Ces autres sites ont
19 fait l'objet d'excavation par d'autres personnes.
20 Q. Merci. Mais êtes-vous d'accord pour dire qu'on peut avec exactitude
21 déterminer l'heure du décès en procédant à des autopsies plutôt qu'en
22 utilisant des photographies aériennes ?
23 R. J'en doute. Je pense que, même dans le cas de personnes qui sont
24 décédées la semaine dernière, le débat est posé sur l'heure exacte du
25 décès. Dans le cas qui nous intéresse il y a des corps qui étaient dans des
26 fosses et ces corps sont datés grâce aux images aériennes, et à mon sens,
27 les scientifiques sont plus à même de déterminer l'heure de la mort. Ils
28 sont plus à même de le faire -- ou, en tout cas, la façon dont j'entends le
Page 22334
1 travail des pathologistes, des légistes, à mon sens, il s'agit là de la
2 meilleure façon de déterminer l'heure du décès meilleure que les travaux
3 menés par les pathologistes.
4 Q. Alors qu'en est-il des fosses secondaires, comment pouvons-nous établir
5 à quel moment les personnes qui se trouvent dans des fosses secondaires
6 sont décédées ?
7 R. Comme nous l'avons fait, dans nombreux cas, nous pouvons qu'identifier
8 les fosses primaires d'où provenaient ces corps, telle que la ferme de
9 Branjevo, le barrage rouge, et déterminer l'âge de ces fosses d'après les
10 images aériennes. Donc le fait qu'il y ait des fosses secondaires ne
11 signifient pas que nous ne pouvons pas dater les fosses primaires et d'où
12 provenaient les corps. Je n'ai pas conduit une analyse détaillée des images
13 aériennes à l'époque. J'ai vu des photographies qui correspondaient à des
14 photographies aériennes datées qui concordent avec les décès du mois de
15 juillet 1995.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mitchell.
17 M. MITCHELL : [interprétation] Pardonnez-moi, si j'interromps à nouveau,
18 Monsieur le Président. Simplement une idée qui a été lancée il y a quelques
19 instants, à savoir que les exhumations d'une manière ou d'une autre ne
20 correspondaient pas aux conventions de Genève. Je me demande si M. Karadzic
21 pourrait nous indiquer quelle disposition précisément et celle sur laquelle
22 il se repose pour parler de cela en ces termes-là, parce que l'article 90
23 n'a rien à voir avec les exhumations de fosses communes. L'article 120 de
24 la 3e Convention de Genève n'aborde absolument pas la question des
25 procédures qui sont adoptés de -- qui sont appliquées aux prisonniers de
26 guerre et ne parle absolument pas des experts. Donc peut-être que M.
27 Karadzic pourrait se pencher sur la question de façon plus précise ou, en
28 tout cas, retirer cette question.
Page 22335
1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Me le Juge Lattanzi a trouvé l'article
2 34, je ne sais pas très bien si c'est exact. L'article 90 également,
3 l'article 90.
4 M. MITCHELL : [interprétation] S'agit-il des protocoles additionnels ? Est-
5 ce que nous parlons ici des protocoles additionnels ?
6 [La Chambre de première instance se concerte]
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suppose que M. Karadzic va faire
8 valoir des arguments plus précis.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
10 En principe, dans le cas de Markale et tout le reste, nous avons
11 demandé à ce que la partie serbe assiste aux exhumations mais c'est quelque
12 chose qui nous a toujours été refusé. Peut-être qu'il s'agit d'une erreur
13 typographique en tout cas puisque cet article a été photocopié.
14 M. KARADZIC : [interprétation]
15 Q. Est-ce que je peux en terminer sur le sujet de Glogova ?
16 Vous avez retrouvé 16 victimes à cet endroit-là dont les mains étaient
17 ligotées avec des bandeaux.
18 R. C'est exact.
19 Q. Quelque part, vous avez retrouvé des corps de ce type-là
20 également à Kozluk à un endroit comme cela, je crois ?
21 R. Oui, c'est exact, et de nombreux cas de ce genre dans les fosses
22 secondaires également.
23 Q. Merci. Lorsqu'on vous a posé la question de savoir de quoi ces bandeaux
24 étaient faits, vous avez dit que c'était du tissu. Est-ce qu'il s'agissait
25 de parties d'uniforme ou pas ?
26 R. J'ai répondu en disant que je ne me souvenais pas si le morceau de
27 tissu utilisé était différent ou pas, que je ne m'en souvenais pas.
28 Q. Mais vous n'avez pas remarqué qu'il s'agissait d'un morceau de tissu
Page 22336
1 provenant d'un uniforme ?
2 R. Est-ce que vous parlez de Kozluk ou de ce site de Glogova ?
3 Q. Monsieur le Professeur, sur toutes les photos aériennes que nous avons
4 vues où nous avons vues des ligatures des bandeaux sont différents. Il
5 semble que tout ceci soit un peu amateur. Les personnes ont utilisé ce
6 qu'ils trouvaient sous la main pour leur ligoter les mains. Ce n'est pas
7 comme s'il y avait un même morceau de tissu qui avait été prévu à cet
8 effet.
9 R. Je n'ai pas étudié ou analysé ce morceau de tissu mais je me suis
10 entretenu avec un enquêteur sur le sujet qui m'a dit qu'après que les corps
11 étaient été envoyés à la morgue il y en avait beaucoup qui étaient faits
12 dans le même tissu -- qui provenaient du même tissu. Mais moi je ne peux
13 pas en parler parce que ce n'est pas moi qui ai analysé ces morceaux de
14 tissu aux sites à Glogova où ces personnes avaient les mains bandées.
15 C'était dans ce cas une corde en polyéthylène. Il ne s'agit pas d'un
16 morceau de tissu.
17 Q. Merci. Vous avez analysé les nombres de personnes exhumées mais vous
18 avez également estimé le nombre de corps qui avaient été retrouvés dans
19 toutes les fosses, n'est-ce pas ?
20 R. Oui, j'ai fourni des estimations de nombre de corps retrouvés dans
21 toutes les fosses dans mon rapport et j'ai également dit que le chiffre
22 définitif devait être déterminé à la morgue.
23 Q. Merci. Savez-vous que dans différents sites des liens ont été établis
24 sur la base de l'ADN ?
25 R. Je suis au courant parce que j'ai lu des articles là-dessus. Mais ceci
26 n'avait pas commencé avant mon départ de la Bosnie. Il s'agit de travaux
27 récents.
28 Q. Merci. Je ne recherche aucun coupable. Je souhaite simplement établir
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1 ce qui suit : si vous êtes d'accord pour dire qu'à Cancari 3, sur les 138
2 corps levés, il n'y en avait que 40 qui avaient un lien avec Kozluk, on ne
3 peut pas estimer que les autres corps avaient un quelconque lien avec
4 Kozluk ?
5 R. Monsieur Karadzic, vous vous fondez sur des informations qui ne sont
6 pas en notre possession. Je suppose que vous vous fondez sur des études
7 faites sur l'ADN.
8 Q. Oui, oui, tout à fait. Ce sont des études faites sur l'ADN des corps,
9 et des liens ont été établis entre les fosses secondaires, des parties de
10 corps, et cetera, et ces liens ont été établis sur la base d'analyses
11 d'ADN, et à Cancari 3, sur les 138 corps --
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourquoi ne posez-vous pas cette
13 question à un autre témoin ? Le témoin a déjà dit qu'il n'était pas au
14 courant de ces analyses.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
16 M. KARADZIC : [interprétation]
17 Q. Monsieur le Professeur, votre réponse me convient pour ce qui est
18 d'établir un nombre.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande, néanmoins, à afficher le numéro 65
20 ter 21024, une lettre rédigée par un enquêteur, M. Dusan Janc. 2009 -- ou
21 mars 2009. Il existe une traduction en serbe également, mais cela ne
22 correspond pas.
23 M. KARADZIC : [interprétation]
24 Q. Puis-je vous demander de regarder ce document, s'il vous plaît. Est-ce
25 que ceci correspond à ce que vous avez dit il y a quelques instants, à
26 savoir que ceci ne permet pas d'établir le nombre de corps ?
27 R. Vous devez me permettre de lire ce document.
28 Je l'ai lu. Pouvez-vous me répéter votre question, s'il vous plaît.
Page 22338
1 Q. Ceci correspond-il avec ce que vous avez dit il y a quelques instants,
2 à savoir que ces estimations ne permettent pas de déterminer un chiffre ?
3 Le chiffre doit provenir de la morgue -- plutôt, à partir de toutes les
4 exhumations, et pour finir, déterminé par la morgue.
5 R. Oui, je crois, néanmoins, que cette correction apportée par M. Janc ne
6 porte pas sur le calcul des corps retrouvés, et porte davantage sur la
7 provenance des corps plutôt que sur le nombre de corps retrouvés dans les
8 fosses. Mais peut-être que je n'ai pas compris votre question.
9 Q. Dans l'avant-dernier paragraphe, on peut lire :
10 "Néanmoins, le chiffre exact ne peut pas être fourni".
11 Est-ce que vous convenez que si nous parlons d'endroits différents, nous ne
12 pouvons pas dire que les causes sont les mêmes ? Causes du décès,
13 j'entends, bien sûr.
14 R. Oui, tout à fait. Si les analyses d'ADN ont montré que la plupart des
15 corps dans les fosses communes de Glogova provenaient de l'entrepôt de
16 Kravica mais que d'autres ne provenaient pas de cet endroit-là, je pense
17 dans ce cas qu'ils, ces corps, auraient des caractéristiques différentes,
18 peut-être, ou peut-être pas.
19 Q. Merci.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux demander le versement au
21 dossier de ce document, s'il vous plaît ?
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que ceci doit être versé au
23 dossier par l'Accusation. Je ne vais pas prendre position.
24 M. MITCHELL : [interprétation] M. Janc va venir témoigner à la barre, donc
25 nous pourrions le faire maintenant ou à ce moment-là.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, attendez peut-être la
27 déposition de M. Janc. Moi, je n'ai pas de problème à le verser au dossier
28 en tant que pièce de la Défense.
Page 22339
1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ecoutez, la raison pour laquelle je souhaite le
2 faire maintenant, c'est que j'ai demandé le versement au dossier d'une
3 partie de la déposition de Karavelic. Le Procureur souhaitait verser au
4 dossier l'ensemble de la déposition de Karavelic, en pensant qu'ils
5 allaient citer cette personne à la barre en tant que témoin. J'étais
6 d'accord parce que je pensais qu'il allait venir ici. Mais ceci n'est pas
7 juste parce que finalement ils n'ont pas cité à la barre ce témoin, et il
8 me revient maintenant de citer ce témoin-là à la barre. C'est la raison
9 pour laquelle j'agis ainsi maintenant.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, je ne vois aucune difficulté à
11 ce que ce document soit versé au dossier. Pièce D1975.
12 M. KARADZIC : [interprétation]
13 Q. Conviendriez-vous, Monsieur le Professeur, que les Serbes ont enterré
14 leurs propres morts sur leur territoire en s'organisant avec les familles,
15 alors que les victimes de l'autre partie ont été inhumées dans des fosses
16 communes, et vice-versa ? Les Musulmans ont enterré leurs propres morts
17 dignement, en s'organisant avec les familles -- les familles se sont
18 organisées pour ce faire, et les soldats serbes ont été inhumés dans des
19 fosses communes. Est-ce que c'est quelque chose qui correspond à ce qu'on
20 avait l'habitude de faire ou pas ?
21 R. Je n'ai aucune idée à propos de ce que vous venez de me dire parce que
22 je ne peux ni l'infirmer ni le confirmer.
23 Q. Si je vous disais qu'une partie de Podrinje a été placée sous contrôle
24 musulman pendant un certain temps, et que 50 fosses communes serbes ont été
25 retrouvées à cet endroit-là, et lorsque nous avons libéré ce territoire,
26 ces corps ont été exhumés et ces corps ont été enterrés par les familles,
27 le général Morillon a assisté à certaines de ces exhumations, est-ce que
28 cet élément d'information jette davantage de lumière sur la question que je
Page 22340
1 vous ai posée précédemment ?
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.
3 M. MITCHELL : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir une date,
4 s'il vous plaît, pour pouvoir placer ceci dans son contexte ?
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'était en 1993, le printemps de l'année 1993,
6 lorsque nous avons libéré les territoires serbes qui étaient placés sous le
7 contrôle musulman jusqu'à cette date. C'est un fait communément accepté, il
8 y avait une cinquantaine de fosses communes, et après cela les enterrements
9 ont été organisés par les familles. Vice-versa. Les Musulmans ont enterré
10 des soldats serbes et des civils serbes dans des fosses communes, et ils
11 ont enterré leurs propres défunts, et ce sont les familles qui s'en sont
12 chargées. L'inverse était également vrai.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur Karadzic, je n'aime jamais entendre
14 parler d'atrocités, je n'ai aucune raison de ne pas croire ce que vous
15 dites, mais je suis un expert scientifique à propos des fosses communes que
16 j'ai exhumées. Je ne -- vous donner d'avis sur -- je ne peux pas donner mon
17 opinion sur les événements historiques qui n'ont pas fait l'objet de ma
18 propre enquête. J'ai enquêté sur le meurtre de civils serbes et ceci a été
19 organisé par le TPY près de Gospic. C'était un événement épouvantable. Je
20 suis -- je peux vous parler de cela, mais je ne peux pas vous parler de ce
21 qui s'est passé en Bosnie orientale, de ce qui s'est passé dans des fosses
22 communes sur ce territoire-là. Je ne peux pas vous parler des fosses que je
23 n'ai pas -- que le TPY -- sur lesquelles le TPY ne m'a pas demandé
24 d'enquêter.
25 Q. Monsieur le Professeur, je souhaite que nous regardions ceci. Vous avez
26 déclaré sur la base de 121 ou 151, quelque soit le nombre total de corps
27 inhumés dans les fosses communes de Podrinje, la vallée de la Drina, tout
28 ceci a-t-il un lien avec Srebrenica et comment peut-on faire la différence
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1 entre les corps qui sont liés à Srebrenica et ceux qui ne le sont pas du
2 tout ?
3 R. Je suppose que vous voulez parler de la vallée de Podrinje, vous voulez
4 dire -- lorsque vous dites parler de la vallée de la Podrinje, vous voulez
5 parler de Glogova, le site de Glogova ? Je ne connais pas la géographie
6 très bien de Glogova.
7 Q. -- "réponse," Podrinje correspond à la vallée de la Drina, la rive
8 gauche de la Drina, entre Kozluk et Bratunac. Tout cela correspond à
9 Podrinje. Nous appelons cette région qui se -- qui jouxte la Drina,
10 Podrinje, que cela comprend Kozluk également, là où vous avez travaillé.
11 R. J'ai certainement déclaré avoir découvert plus de 120 -- plus de 121 ou
12 150 corps dans cette région dont vous parlez. J'ai en trouvé plusieurs
13 centaines, à savoir si ces corps avaient un quelconque lien avec la chute
14 de Srebrenica, à mon sens, on ne peut le déterminer qu'en interprétant les
15 images aériennes et sur la base d'objets retrouvés dans les fosses. Mais à
16 mon sens, ceci est accessoire ou secondaire par rapport aux photographies
17 aériennes qui permettent de déterminer la date à laquelle ces corps ont été
18 inhumés.
19 Q. Oui, Monsieur le Professeur, mais comment savons-nous que les personnes
20 qui ont été tuées en juillet 1995 ont été déplacées d'une fosse commune à
21 une fosse secondaire -- une fosse primaire à une fosse secondaire ? Comment
22 pouvons-nous déterminer si elles ont perdu la vie avant cela ?
23 R. Parce que comme je vous l'ai dit auparavant, ces fosses primaires qui
24 nous intéressent sont datées grâce à l'image aérienne et bien sûr que ces
25 personnes ont perdu la vie avant d'avoir été placées dans les fosses
26 secondaires. Mais, à ma connaissance, il n'y a pas de fosse primaire qui
27 aurait permis de découvrir des corps de fosses secondaires et qui seraient
28 datées d'avant 1995 ou avant la date du mois de juillet 1995. Je n'en
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1 connais -- je ne connais aucun cas de ce type.
2 Q. Je vous remercie. Je ne veux pas parler des fosses que vous avez
3 ouvertes vous-mêmes. Je souhaite parler de la méthode que vous avez
4 appliquée pour vous permettre de faire cette estimation. Est-ce que vous
5 excluez la possibilité ou est-ce que vous acceptez la possibilité que dans
6 les fosses secondaires, il y avait également des corps pour lesquels ceux-
7 là constituaient une fosse primaire ?
8 R. Le fait que les corps soient placés dans des fosses secondaires, pour
9 moi, constituait un seul et unique événement. Nous n'avons vu aucun signe
10 d'exécution ou indice d'exécution autour des fosses secondaires.
11 Q. Donc il ne s'agissait pas de ce cas de lieux d'exécution. Est-ce que
12 vous écartez cette possibilité tout simplement ou est-ce que vous pensez
13 que cette éventualité existe, à savoir que certains corps avaient été
14 ajoutés dans certaines fosses, donc pour certains corps, il s'agirait de
15 fosses primaires et pour d'autres corps, il s'agirait de fosses secondaires
16 ?
17 R. Je crois que, dans ces circonstances-là, on ne peut rien n'exclure,
18 mais lorsque nous avons conduit ou fait nos analyses, nous n'avons pas
19 toujours procédé avec le plus grand soin. La stratigraphie, par exemple,
20 des fosses, la différenciation en -- dans l'état de décomposition des
21 corps, comme j'ai déjà évoqué, des membres de mon équipe sont des gens
22 expérimentés en archéologie stratigraphique et les effets sur les corps et
23 les dégâts que cela provoque sur les corps lorsque d'autres corps sont
24 placés au-dessus, des corps plus frais, vous m'avez demandé d'exclure cela.
25 C'est quelque chose qui est toujours difficile pour un expert scientifique
26 et j'hésite à le faire. Mais, à mon sens, cela ne fait pas l'ombre d'un
27 doute. Je ne pense tout simplement pas qu'il s'agissait la de fosses que
28 nous avons -- à propos desquelles ou compte tenu des événements -- compte
Page 22343
1 tenu des éléments dont nous dispositions pour lesquels nous avons fait des
2 interprétations erronées.
3 Q. Alors, veuillez nous dire ceci s'il vous plaît. Vous avez exhumé cette
4 fosse. C'est exact ?
5 R. Cette fosse secondaire, oui.
6 Q. Qu'en est-il des fosses primaires ? Personne n'a exhumé les fosses
7 primaires, c'est exact ? D'après vos estimations, cela portait sur combien
8 de fosses ? Vous avez établi un certain nombre de choses par rapport aux
9 corps que vous avez exhumés. Vous avez fait des estimations en vous fondant
10 là-dessus. Sur la base de combien de sites au total -- de fosses au total -
11 -
12 M. MITCHELL : [interprétation] Ecoutez, je crois que ceci sème un petit peu
13 la confusion. Est-ce que nous parlons des estimations de -- des 21 fosses
14 communes, des -- de 20 071, est-ce cela dont nous voulons parler, en fait,
15 de ces fosses qui ont fait partie de cette étude ?
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne vous suis pas non plus.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ecoutez, voici l'idée que je souhaite vous
18 soumettre. Je crois que le professeur sait très bien de quoi nous parlons.
19 Certaines ont été exhumées alors que d'autres -- pour d'autres, des
20 estimations ont été fournies sur la base de moyennes qui avaient été
21 calculées.
22 M. KARADZIC : [interprétation]
23 Q. Alors, combien de fosses -- pour combien de fosses les exhumations ont-
24 elles été faites et -- pour combien des estimations ont-elles été faites,
25 tout simplement ?
26 R. J'ai déjà expliqué cela. J'ai vérifié. Je vais revenir à votre question
27 -- à votre première question. Alors qu'en est-il des fosses primaires,
28 personne ne les a exhumées ? Bien. Les fosses primaires ont été exhumées,
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1 par exemple, la ferme de Branjevo a été exhumée en 1996, mais pas par mon
2 équipe. Les fosses primaires dans le sud de Nova Kasaba, dans cette région,
3 ont été exhumées en 1996. C'est moi-même -- J'ai exhumé la première fosse
4 primaire -- la fosse primaire importante de Kozluk. Donc, les fosses
5 primaires ont été exhumées.
6 Maintenant, pour ce qui est de la question des estimations, comme je l'ai
7 déjà dit, on me -- en 1999, en me fondant sur les travaux effectués en 1998
8 que vous avez cités, mais que j'ai déjà dit aux Juges de la Chambre, j'ai
9 vérifié ces chiffres et le nombre de corps qui ont été retrouvés dans ces
10 fosses dont -- que je n'ai pas exhumés, 21 au total fosses secondaires. Il
11 s'est avéré qu'à la lumière des exhumations actuelles des fosses
12 secondaires, c'est 21, j'ai légèrement sous-estimé le nombre de corps qui
13 pouvaient être retrouvés dans ces fosses que je n'ai pas exhumées.
14 Q. Très bien. Donc, c'est -- je comptais sur votre réponse à propos de ces
15 estimations. Donc, les autres ont été exhumées par quelqu'un d'autre. Est-
16 ce que vous êtes en mesure de vous en tenir aux conclusions des experts qui
17 ont travaillé dans ces fosses. Vous avez fait des estimations sur -- des
18 estimations de fosses que vous n'avez pas exhumées vous-même et êtes-vous
19 en mesure de réexaminer vos travaux et de maintenir les résultats de leurs
20 travaux ?
21 R. Ecoutez, je sais que Jon Sterenberg a continué -- est resté en Bosnie -
22 - qu'il a -- elle a continué à travailler sur les lieux pendant quatre ans,
23 et d'après moi, et je sais que je peux me reposer sur ses conclusions. Je
24 ne connais pas M. Dusan Janc. Je ne sais pas -- je ne peux pas faire de
25 commentaire au sujet de la fiabilité de ses travaux. Je n'ai aucune raison
26 de croire que c'est un observateur peu fiable mais, encore une fois, je ne
27 le connais pas, je le reconnais.
28 Q. Bon, c'est tout à fait équitable comme réponse, mais je ne sais pas si
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1 mon temps est révolu ou s'il me reste encore un peu de temps ?
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, tant que vous vous en
3 tenez à des questions pertinentes, je vous laisserai continuer.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
5 M. KARADZIC : [interprétation]
6 Q. Est-ce que vous avez eu à connaître du sort des différents objets
7 retrouvés ? Qu'en a-t-il été ? Vous les avez sélectionnés, et qu'avez-vous
8 fait de tous les objets retrouvés à l'occasion de ces exhumations ?
9 R. Je n'ai pas procédé à une sélection de ces objets retrouvés. Il se peut
10 qu'il y ait une erreur de traduction. Moi, j'ai retrouvé des objets. Je les
11 ai consignés dans des registres, qui ont été remis au TPIY, mais les objets
12 ont été envoyés en tant que tels à la morgue, et je crois que les
13 enquêteurs ont analysé tout cela. Qu'est-il advenu par la suite de tous ces
14 objets, je ne sais pas, et je ne sais pas où ça se trouve à présent.
15 Q. Merci. Vous avez trouvé des pièces d'identité ayant appartenu à des
16 individus, n'est-ce pas ?
17 R. Oui.
18 Q. Saviez-vous que chez nous, la pratique et la coutume, et peut-être une
19 réglementation dirait-elle aussi, qu'un prisonnier, quelqu'un de capturé ne
20 conserve pas ses pièces d'identité mais il doit les restituer, ou
21 autrement, ces personnes étaient susceptibles de pouvoir s'échapper ?
22 R. Je n'ai aucune idée de tout cela pour ce qui est de la réglementation
23 qui était celle de la Republika Srpska ou de ce qui avait été mis en place
24 comme réglementation à l'époque.
25 Q. Mais est-ce que dans votre pays, un prisonnier peut conserver son
26 passeport ?
27 R. Pour dire vrai, Monsieur Karadzic, je n'ai jamais été arrêté moi-même,
28 alors est-ce qu'on m'autoriserait à garder mon passeport ou pas, je ne le
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1 sais pas.
2 Q. Merci. Bon, alors je suppose -- mais vous ne savez pas répondre. La
3 personne où on a retrouvé une pièce d'identité, c'était quelqu'un qui
4 n'était pas fait prisonnier auparavant, mais laissons cela de côté. Est-il
5 exact de dire qu'il est question de voir qu'à Glogova 1 et Glogova 2, il y
6 avait un mélange, c'est-à-dire que les ADN dans ces fosses communes ont pu
7 être retrouvés dans d'autres fosses communes aussi ? Il y a eu six cas de
8 figure où l'on a démontré qu'une partie d'un corps s'était retrouvée à un
9 endroit et d'autres parties de ce même corps étaient retrouvées à un autre
10 endroit.
11 R. Je ne suis pas au courant de ce cas concret que vous êtes en train
12 d'évoquer, mais ça ne me surprend pas, compte tenu de la façon dont les
13 corps ont été transportés. Il se peut que des parties de corps soient
14 tombées et aient fini dans un autre camion, vers une autre fosse commune.
15 Mais revenons à la question de Glogova 1 et Glogova 2. Moi, je ne puis vous
16 parler que de Glogova 1. Glogova 2, ça a été excavé une fois que j'ai cessé
17 de travailler pour le TPIY.
18 Q. Merci. Mais vous voyez ce qu'on a retrouvé. A Glogova 1, on a retrouvé
19 un lien 11 avec le numéro 2, puis 3 avec le numéro 1, 13 avec Bjecevo
20 [phon] 3, 3 en liaison avec Zeleni Jadar numéro 13, 13 avec Zeleni Jadar 5,
21 6 avec Zeleni Jadar 4, et cetera. Ce qui fait que là, il s'agit d'un
22 mélange absolu de constaté à Glogova 1. Je comprends parfaitement bien que
23 vous n'ayez pas pu le savoir parce qu'on n'avait pas fait d'analyses d'ADN
24 à l'époque. Mais est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire que les
25 choses semblent être beaucoup plus complexes que cela n'avait semblé être
26 le cas au départ ?
27 R. Je ne sais pas si j'ai eu quelque chose à voir avec ces fosses à Budak,
28 mais j'ai certainement eu quelque chose à voir avec les tombes de Zeleni
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1 Jadar. C'étaient des tombes secondaires, des fosses secondaires, et il y
2 avait des bouts de corps que nous avions constatés avoir été acheminés là
3 depuis Glogova, donc suite à des pillages de Glogova. Donc, en octobre
4 1995, des cadavres ont été enlevés de Glogova mais des parties de ces corps
5 étaient restées derrière. Les corps qui ont été enlevés ont été réensevelis
6 à Zeleni Jadar. Je ne me souviens pas du nombre exact, mais il me semble
7 que c'était cinq. Alors, je m'attendrais, bien entendu, à ce que des
8 parties de corps ou des bouts de personnes soient retrouvés tant à Glogova
9 qu'à Zeleni Jadar. Mais je ne peux pas parler des autres sites de Budak,
10 Budak 2 et 3 que vous avez évoqués, parce que je n'en sais strictement
11 rien.
12 Q. Monsieur le Professeur, est-ce que vous savez que des objets et du
13 matériel médico-légal ont été détruits suite à acheminement vers les locaux
14 de ce bureau du Procureur ici présent ?
15 R. Comme je vous l'ai déjà dit, je ne sais pas ce qu'il est advenu des
16 objets retrouvés une fois que je les ai rétrocédés. Je n'ai pas été un
17 employé de ce Tribunal pénal international. Je suis un intervenant sur
18 contrat.
19 Q. Merci, Professeur. Merci de vos réponses aimables. Excusez-moi si
20 parfois il y a eu des imprécisions. Je suis à la recherche de ces
21 précisions moi-même, donc je vous remercie, vous avez été d'une grande
22 assistance.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai plus de questions, Excellences, parce
24 que je n'ai pas eu le temps d'étudier le reste des documents. Mais je crois
25 bien que ce que nous avons consacré comme temps à ces questions a été fort
26 édifiant.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mitchell, avez-vous des
28 questions complémentaires ?
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1 M. MITCHELL : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien.
3 Ceci met un terme à votre témoignage, Professeur. Au nom des Juges de la
4 Chambre et du Tribunal dans son ensemble, je tiens à vous remercier d'être
5 venu une fois de plus témoigner devant ce Tribunal.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est moi qui vous remercie, Monsieur le
7 Président.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, nous allons lever l'audience.
9 Oui, Monsieur le Professeur, vous pouvez vous en aller maintenant.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
11 [Le témoin se retire]
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Nicholls.
13 M. NICHOLLS : [interprétation] Excusez-moi, Madame, Messieurs les Juges.
14 Nous avons heureusement encore un peu de temps, et je voudrais présenter
15 une brève requête orale, s'il n'y a pas d'opposition de la partie adverse.
16 Je voudrais que l'on verse au dossier la feuille de corrections que M.
17 Brown a évoquée le 24 novembre, à la fin de son témoignage. Il s'agit d'un
18 ERN, il s'agit du 65 ter 90303. Il s'agit donc d'une feuille de
19 rectificatifs qui a été établie suite aux questions posées à M. Brown à
20 l'occasion du contre-interrogatoire.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que ce sera versé au dossier
22 comme une pièce distincte de l'Accusation ?
23 M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, s'il vous plaît.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, bien ce sera fait.
25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P1428, Madame, Messieurs
26 les Juges.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Y a-t-il d'autres sujets à aborder ?
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Du point de vue des cadences de travail, je
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1 suis certain, pour ce qui me concerne, que je n'ai plus 25 ans depuis très
2 longtemps, et je crois que les cadences pour ce qui est du fonctionnement
3 de ce procès pour tout un chacun ici, c'est quelque chose de plutôt très
4 rapide.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, nous sommes en train de siéger cinq
6 jours par semaine, mais il nous reste moins d'un mois avant la pause
7 d'hiver.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, mais c'est des journées très longues.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon. L'audience est levée à demain 9
10 heures.
11 --- L'audience est levée à 14 heures 42 et reprendra le vendredi 2 décembre
12 2011, à 9 heures 00.
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