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1 Le vendredi 9 décembre 2011
2 [Audience publique]
3 [Le témoin vient à la barre]
4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tout le monde. Et bonjour,
7 Monsieur Riedlmayer.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Si la Chambre m'y autorise, je souhaiterais
11 soulever une petite question avant que nous ne commencions.
12 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque je suis arrivé ici, je pensais
14 commencer ma déposition au début de la semaine et j'avais accepter de
15 présenter une conférence à Amsterdam vendredi après-midi. Nous sommes
16 maintenant vendredi, et je ne sais pas, je m'interroge, si nous pouvions
17 terminer un peu plus tôt que prévu, je pourrais être à temps pour ma
18 conférence à Amsterdam. Sinon, je devrais l'annuler, en tout cas prévenir
19 les organisateurs. Alors, je comprends très bien que ma première obligation
20 est par rapport à la Chambre et va pour desservir les intérêts de la
21 justice, mais j'aimerais toutefois pouvoir les informer de cette
22 annulation.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Après avoir entendu cela, nous allons
24 diminuer la durée de la pause de déjeuner, donc nous n'aurons pas une heure
25 mais une demi-heure, et nous pourrons ainsi conclure à 2 heures 30, et je
26 ne pense pas que M. Karadzic aura besoin de tout ce temps-là. Puisqu'il a
27 prévu trois heures pour votre contre-interrogatoire, donc je pense que nous
28 pourrons très certainement terminer vers 14 heures.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de commencer, et sans pour autant
3 passer à huis clos partiel, je souhaiterais faire une observation générale.
4 Je m'interroge, Monsieur Tieger, je me demande si l'Accusation est prête à
5 réagir à la requête présentée par l'accusé qui a trait à certaines
6 conditions afférentes à l'article 70. Vous voyez de quoi je veux parler,
7 Monsieur Tieger ?
8 M. TIEGER : [interprétation] Ecoutez, je n'en suis pas très sûr, Monsieur
9 le Président, mais quoi qu'il en soit, est-ce que vous pourriez peut-être -
10 - bon, si vous pensez à une période bien précise, je pourrais m'enquérir et
11 indiquer un peu plus tard à la Chambre quel est le point de vue de
12 l'Accusation ? Mais il me serait utile de savoir si vous, vous pensez à une
13 période particulière --
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous en traiterons en l'absence du
15 témoin. Mais la requête à laquelle je pensais a été déposée le 8 décembre.
16 M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland.
18 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,
19 Messieurs les Juges. Bonjour, Monsieur. Je n'ai pas l'intention, en fait,
20 d'utiliser la demi-heure dont je vous avais parlé hier en fin d'audience.
21 Excusez-moi. En fait, j'avais pris un peu les devants, donc je ne vais pas
22 m'attarder, parler pendant une demi-heure des prochaines photographies,
23 photographies que j'ai montrées maintenant. Je pensais que vous me parliez
24 de la durée de l'interrogatoire principal. Mais le fait est qu'aujourd'hui
25 nous avons également Mme Janet Stewart qui est avec nous en l'absence de M.
26 Reid.
27 LE TÉMOIN : ANDRAS JANOS RIEDLMAYER [Reprise]
28 [Le témoin répond par l'interprète]
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1 Interrogatoire principal par Mme Sutherland : [Suite]
2 Q. [interprétation] Et hier, Monsieur Riedlmayer, vous vous souviendrez
3 que nous nous intéressions aux caractéristiques des destructions.
4 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Et je souhaiterais que le document de la
5 liste 65 ter --
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Brièvement, avant cela, je me demande si
7 Mme Pelic a été présentée officiellement ?
8 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, mais pas en
9 audience publique. Effectivement, je dois indiquer qu'aujourd'hui nous
10 avons également parmi notre équipe Mme Lena Pelic.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
12 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Et je souhaiterais maintenant que le
13 document 23553 de la liste 65 ter soit affiché. Est-ce que la photographie
14 numéro 11 pourrait être affichée, elle figure à la page 11 pour le prétoire
15 électronique.
16 Q. Monsieur Riedlmayer, quelle est l'importance de la photographie que
17 nous voyons tous maintenant sur nos écrans ?
18 R. Il s'agissait d'une mosquée de la ville de Kozarac, dans la
19 municipalité de Prijedor. Il s'agit de la mosquée Mutnik, qui était une
20 vieille mosquée, un bâtiment important. Comme nous l'avons hier sur les
21 autres clichés, le repère le plus important était le minaret que nous
22 pouvons voir sur la photographie qui se trouve à la droite, la photographie
23 qui a été prise avant la guerre. La photographie sur la gauche a été prise
24 après la guerre, l'angle étant 90 degrés, vous voyez -- donc, 90 degrés par
25 rapport à l'angle de la photographie datant d'avant la guerre, et vous
26 pouvez voir que le minaret n'y figure plus. Le bâtiment a été complètement
27 incendié, et il faut remarquer, il est important de le dire, que ce
28 bâtiment se trouvait à quelque distance de la rue sur une petite élévation.
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1 Donc je dois dire qu'il est très peu vraisemblable qu'il ait été ciblé par
2 d'autres attaques. Le fait est que ce qu'il s'est passé s'est passé
3 précisément pour détruire ce bâtiment.
4 Q. Est-ce qu'il y a certaines catégories de bâtiments qui ont été beaucoup
5 plus endommagés ou détruits que d'autres ?
6 R. Oui. Comme je l'indique dans mon rapport, les mosquées anciennes, les
7 mosquées importantes, les mosquées qui dataient de l'ère Ottoman, et
8 notamment les mosquées qui étaient des monuments classés, donc qui
9 remontaient à l'époque Ottoman et autrichienne, les mosquées qui étaient
10 placées sous protection spéciale ont toutes beaucoup plus souffertes des
11 dégâts que les autres.
12 Q. Diapositive suivante. Alors, je pense que cela est l'un de vos deux
13 premiers exemples. Est-ce que vous pourriez nous décrire ce que l'on voit
14 sur cette photographie ?
15 R. Il s'agit de la mosquée d'Aladza à Foca. C'était un monument classé,
16 protégé, qui datait du XVIe siècle. Alors, la photographie de la gauche est
17 une photographie prise avant la guerre. Et la photographie que nous voyons
18 à la droite a été prise en 1996, après la fin de la guerre, et vous pouvez
19 voir que non seulement la mosquée a été détruite, mais que tous les
20 décombres ont été supprimés. On voit encore le périmètre des fondations, et
21 vous voyez le cercle qui correspondait aux fondations de la fontaine pour
22 les ablutions que nous pouvons voir d'ailleurs sur la photographie de la
23 droite, photographie qui date d'avant guerre.
24 Q. Autre photographie. Alors, je pense qu'il y a trois photographies pour
25 cet exemple.
26 R. Oui.
27 Q. Est-ce que vous pouvez nous décrire cette première photographie ?
28 R. Il s'agit de la mosquée du sultan Mehmed le Conquérant qui avait été
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1 construite sur une falaise d'une centaine de mètres à Kuslat, dans le sud
2 de la municipalité de Zvornik. Là encore, il s'agit d'un monument classé,
3 protégé, l'une des mosquées les plus anciennes en Bosnie. Donc vous avez
4 une photographie qui date d'avant la guerre qui avait été prise par
5 l'institut pour la protection des monuments, et vous voyez que la prise,
6 l'angle, était donc le bas de la falaise.
7 Q. Photo suivante.
8 R. Vous avez sur la gauche la photographie prise toujours par
9 l'institution pour la protection des monuments. Là, vous voyez la
10 photographie perchée en haut de la falaise. La photo de droite a été prise
11 en mai 2002. Et vous n'y voyez plus de mosquée. Si vous scrutez un peu la
12 photo, vous voyez le pic, en fait, qui se trouve sur la gauche de la
13 photographie, c'est là, ce qui correspond à l'emplacement de l'ancienne
14 mosquée. Donc, lors de mon séjour là-bas, moi je suis passé par là, j'ai
15 cherché la mosquée, je ne l'ai pas vue. J'ai posé des questions, et on m'a
16 dit : Vous savez, il faut deux heures pour grimper en haut de la falaise,
17 cela va vous prendre tout le reste de la journée. Bon, je ne l'ai pas fait,
18 mais nous avons quand même constaté et répertorié l'absence de la mosquée.
19 Q. Photographie suivante, je vous prie.
20 R. Voilà. En 2006, là, j'ai obtenu un certain nombre de photographies qui
21 avaient été prises sur le site par des journalistes, et cela est un exemple
22 de ces photographies qui montre que la mosquée a énormément été endommagée.
23 Le minaret, le toit et une grande partie des murs ont été détruits.
24 Q. Je souhaiterais maintenant que nous nous intéressions aux nouvelles
25 mosquées et aux églises. Est-ce qu'elles ont subi le même degré
26 d'endommagement ?
27 R. Je pense que -- enfin, peut-être que vous pourriez me montrer la
28 photographie suivante, car je pense que vous allez y faire référence.
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1 Q. Oui.
2 R. Comme je l'ai également indiqué dans mon rapport, j'ai constaté que
3 dans les zones où je me suis rendu, donc cela va de Sanski Most à l'ouest
4 jusqu'à Zvornik à l'est, j'ai constaté, disais-je, qu'il y avait un certain
5 nombre de mosquées et d'églises qui étaient en train d'être construites
6 juste avant la guerre. Certaines étaient déjà utilisées de façon officieuse
7 lorsqu'il y avait trop de fidèles pendant les vacances, mais elles
8 n'avaient pas encore été répertoriées officiellement auprès des autorités.
9 Dans un certain nombre de cas, il y avait également d'anciennes
10 mosquées et d'anciennes églises qui existaient, qui étaient à côté des
11 nouvelles mosquées et églises. Alors, les anciennes ont été détruites ou
12 considérablement endommagées, et les bâtiments dont la construction n'était
13 pas finie, là on pouvait voir des impacts. Mais en général, les dégâts
14 étaient peu importants.
15 Et là, il s'agit donc d'une mosquée de la municipalité de Sanski Most
16 à Kukavice. Vous voyez qu'il y a quand même deux impacts de projectiles sur
17 la façade, mais sinon, le dôme est intact. Et sur la droite, vous voyez
18 l'ancienne mosquée que nous allons voir sur la photographie suivante.
19 Q. Oui. Est-ce que nous pourrions justement présenter la photographie
20 suivante.
21 R. Il s'agit de l'ancienne mosquée. C'est une photographie qui a été prise
22 de l'autre côté du bâtiment. Donc vous voyez le mur arrière de la façade.
23 Et à côté, bon, vous voyez l'ancienne mosquée qui a été entièrement
24 incendiée. Sur la droite, il s'agit d'une photographie de l'intérieur. Je
25 sais que la qualité de la photographie est assez médiocre, je m'en excuse.
26 La couleur Xerox de la photographie n'est pas très bonne. Cela vient en
27 fait d'un musée. Mais vous pouvez voir, donc, l'endroit où les prières
28 avaient lieu, ainsi que le pupitre, et là vous voyez les dégâts au niveau
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1 du pupitre. Et, en fait, la photographie a été prise entre les deux
2 fenêtres sur la droite à l'intérieur de la mosquée.
3 Q. Photographie suivante, qui va vous montrer un autre exemple.
4 R. Oui. Là, il s'agit d'une mosquée à Donji Krizevici, municipalité de
5 Zvornik. D'après ce que je sais et d'après ce qui m'a été relaté par la
6 communauté islamique de Zvornik, il s'agit de la seule mosquée de la
7 municipalité de Zvornik sur plus d'une trentaine de mosquées qui était plus
8 ou moins intacte à la fin de la guerre. C'était une mosquée dont la
9 construction n'était pas terminée. Mais visiblement, c'est une mosquée.
10 Vous avez le dôme qui est très visible, et on voit derrière que le minaret
11 a commencé à être construit. Elle était très visible. On la voyait de
12 l'autoroute qui allait à Zvornik. Et pourtant, il n'y a pas eu de dégâts
13 hormis des graffitis et des matériaux de construction qui ont été volés,
14 quand même.
15 Q. Et quelles conclusions pouvez-vous tirer du fait que les nouvelles
16 mosquées n'ont pas été autant endommagées que les
17 anciennes ?
18 R. Je pense que cela indique qu'il y avait quand même une certaine
19 tendance à essayer d'endommager les mosquées qui avaient déjà été
20 répertoriées et enregistrées. Alors, j'hésite, je ne me hasarderais pas à
21 dégager des conclusions hormis ce que je viens de dire. Il appartient à la
22 Chambre de le faire. Mais je pense qu'il est assez important de constater
23 que les mosquées qui n'avaient pas été répertoriées et enregistrées mais
24 qui étaient visibles n'ont pas été touchées ou quasiment pas, alors que les
25 plus anciennes ont été détruites, quasiment toutes sans exception.
26 Q. Vous nous avez déjà parlé des bibliothèques religieuses ainsi que des
27 archives des communautés musulmane et catholique. Voilà deux exemples que
28 je souhaiterais montrer à la Chambre. Diapositive suivante, je vous prie.
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1 Quelle est l'importance de ce croquis et de cette photographie ?
2 R. Le croquis représente la mosquée de la ville de Bratunac. C'était le
3 siège de la communauté islamique dans la municipalité de Bratunac. Et je
4 présente un croquis plutôt qu'une photographie, parce que la photographie
5 qui a été prise avant la guerre avait été prise si longtemps avant la
6 guerre qu'on ne pouvait pas y voir le bâtiment qui se trouve à côté de la
7 mosquée qui était le bâtiment de la chancellerie où se trouvaient les
8 archives de la communauté islamique. La photographie de la droite, c'est
9 moi qui l'ai prise, et je pense en fait que nous voyons une partie de
10 l'allée qui se trouvait entre la mosquée qui n'existe plus et le bâtiment
11 adjacent qui ne se trouve plus là non plus. Donc tout le site de la mosquée
12 de la ville et de la fondation musulmane, où se trouvaient donc les bureaux
13 dont je vous ai parlé, ont été complètement rasés. Et cette photographie a
14 été prise en 2002.
15 Q. Bien. Est-ce que nous pouvons passer à la photographie suivante, je
16 vous prie.
17 R. Vous voyez maintenant la mosquée de la ville et les bureaux de la
18 communauté islamique de Zvornik. Cela se trouve en plein centre de la place
19 du marché à Zvornik. Sur la gauche, la photographie a été prise juste avant
20 le début de la guerre. Regardez à la gauche de la mosquée, vous voyez un
21 arbre. Il s'agit d'un tilleul. Un tilleul en Bosnie, c'est un arbre que
22 l'on appelle "lipa", et en règle générale, la coutume voulait en Bosnie que
23 l'on plante un tilleul juste à côté de l'entrée de la mosquée.
24 Je l'indique parce que sur la photographie de la droite, vous pouvez
25 toujours voir le fameux tilleul. Et là, l'angle de prise de vue est 90
26 degrés. Donc vous voyez le tilleul avec des conteneurs à poubelles devant,
27 et la mosquée qui se trouvait à côté n'existe plus. Les bureaux des
28 archives de la communauté islamique n'existent plus. Pendant la guerre et
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1 après la guerre, cela a été utilisé comme parking. Et puis, en 2002, il
2 faut savoir qu'une décision du tribunal a été prise pour contraindre les
3 autorités municipales à ériger une clôture autour de cet endroit.
4 Q. Une fois que les bâtiments ont été détruits -- j'aimerais que
5 maintenant nous nous intéressions au sort réservé aux sites religieux et
6 culturels. Quel a été le sort de ces sites ?
7 R. Comme je viens de l'indiquer, parfois ils ont été utilisés comme
8 parking, comme marché aux puces, très souvent comme dépotoir, comme
9 décharge. Parfois des carcasses de vieilles automobiles y étaient déposées.
10 Parfois les terrains ont été utilisés à d'autres fins.
11 Q. Est-ce que nous pourrions, je vous prie, présenter les trois
12 photographies suivantes. Premièrement, que voyons-nous sur cette première
13 photographie ?
14 R. Il s'agissait de la mosquée de Beksuja de Zvornik, Beksuja Dzamija.
15 C'était une vieille mosquée qui se trouvait dans un quartier résidentiel.
16 La mosquée n'existe plus. Vous continuez toutefois à voir que le tilleul
17 est présent. La photographie est très vieille, mais vous pouvez voir qu'il
18 reste quelques pans de mur, et puis vous voyez ces conteneurs avec ces
19 poubelles. Je dois dire que cette photographie a été prise en juillet, et
20 la puanteur était assez épouvantable. Et juste à côté, à gauche de cet
21 endroit, vous voyez qu'il y a un immeuble. Je dois dire que c'est quand
22 même un endroit assez étrange pour y déposer des poubelles.
23 Q. Photographie suivante.
24 R. Il s'agit de la troisième mosquée de Zvornik, la mosquée Zamlaz. Vous
25 voyez la photographie prise avant la guerre. Sur la droite de la
26 photographie, vous voyez qu'il y a un immeuble de trois étages et vous
27 voyez les bandes près de la fenêtre. Et puis, vous voyez le même bâtiment
28 qui se trouve sur la droite de la photographie prise après la guerre. La
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1 mosquée, elle n'existe plus. Vous voyez qu'il y a un autre immeuble qui est
2 en train d'être construit. Le site a été utilisé à des fins commerciales.
3 Q. [aucune interprétation]
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une petite seconde, Madame Sutherland.
5 Oui -- non, non. J'aimerais obtenir une précision. Parce qu'il se peut
6 qu'il y ait quelque chose qui m'ait échappé hier.
7 Est-ce que ce numéro a une importance ? Est-ce qu'il s'agit d'une référence
8 croisée ?
9 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, oui, Monsieur le Président. M.
10 Riedlmayer, pour aider la Chambre, vous donne le numéro du dossier formaté
11 pour cette mosquée.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Par exemple, là, je vois 22.31 --
13 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Donc, si vous prenez la pièce P4070, où
14 vous avez les dossiers formatés, vous y trouverez les mêmes photographies
15 avec tous les détails qui proviennent de la base de données de l'enquête.
16 Q. Corrigez-moi si je m'abuse, mais c'est bien cela, Monsieur Riedlmayer ?
17 R. Oui, tout à fait.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sont les dossiers formatés. Bien.
19 Mme SUTHERLAND : [aucune interprétation]
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Que nous avons reçus sous force de CD;
21 c'est cela ?
22 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Non, non, non. Ils ont été chargés dans
23 le prétoire électronique. Vous avez sur CD-ROM la base de données, parce
24 que là il s'agit des dossiers correspondant à 381 sites, et cela a été
25 placé sur un logiciel bien précis qui n'est pas compatible avec le système
26 du prétoire électronique.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien.
28 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Mais par contre, les dossiers formatés se
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1 trouvent dans le prétoire électronique.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien.
3 Mme SUTHERLAND : [interprétation]
4 Q. Monsieur Riedlmayer, que pouvons-nous voir sur ces photographies ?
5 R. Oui, il s'agit d'un autre lieu de culte musulman dans un village qui se
6 trouve à l'extérieur de Zvornik. Il s'agit du sanctuaire de Divic. Sur la
7 gauche, vous voyez ce dont il avait l'air un ou deux ans avant la guerre.
8 Ils venaient justement de le restaurer, et là il y avait une cérémonie de
9 prière. La photographie de droite a été prise par mes bons soins. Vous
10 voyez que le sanctuaire a complètement été rasé jusqu'aux fondations. Vous
11 voyez, il y a un vieux camion qui a été jeté ou déposé là. De l'autre côté,
12 au niveau d'une des extrémités des fondations, c'est là où se trouvaient
13 les tombes des saints musulmans qui avaient fondé ce sanctuaire.
14 Q. Et j'aimerais vous montrer les deux derniers clichés. Est-ce que vous
15 pourriez nous décrire les premières photographies ?
16 R. Il s'agit de la mosquée de Novoseoci, dans la municipalité de Sokolac.
17 Sur la gauche, c'est la photographie qui avait été envoyée pour inviter les
18 gens à l'inauguration de cette mosquée, qui avait été reconstruite après
19 avoir été détruite pendant la Deuxième Guerre mondiale. Elle n'a été
20 reconstruite qu'en 1990. Et sur la droite, vous voyez le site après la
21 guerre, le site où se trouvait la mosquée, en septembre 1992. D'après les
22 informations fournies par la communauté islamique, la mosquée a été
23 détruite et les villageois ont été chassés.
24 Cliché suivant, je vous prie. Là, il s'agit des décombres ou des gravats de
25 la mosquée qui se trouvent dans la décharge municipale publique d'Ivan
26 Polja, à quelque 6 kilomètres du village. Tout ce qui restait, ces gravats
27 de la mosquée ont été jetés là avec des tonnes de déchets municipaux. Et en
28 2000, une exhumation a été organisée sur le site par l'Institut chargé des
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1 personnes portées disparues. Et en dessous des décombres et des gravats de
2 la mosquée, ont été retrouvés les restes de plus de 40 résidents de
3 Novoseoci qui avaient été vus pour la dernière fois en vie en novembre
4 1992.
5 Q. Est-ce que vous connaissez l'appartenance ethnique de ces personnes ?
6 R. Oui. Il s'agissait d'un village musulman, et il s'agissait en fait de
7 villageois musulmans qui étaient les fidèles de cette mosquée.
8 Q. Je vous remercie.
9 Mme SUTHERLAND : [interprétation] J'en ai terminé avec la présentation de
10 ces clichés. Je souhaiterais demander le versement au dossier de ces deux
11 documents.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, cela sera versé au dossier.
13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P4071, Monsieur le
14 Président.
15 Mme SUTHERLAND : [interprétation]
16 Q. Monsieur Riedlmayer, vous avez donc présenté votre rapport d'expert,
17 votre base de données sur votre étude ainsi que les dossiers formatés. Vous
18 avez présenté deux photographies que vous souhaitiez présenter comme
19 complément d'information à votre rapport d'expert. Et ces deux
20 photographies ont trait au site 17.9 des dossiers formatés, il s'agit de
21 Donje Puharska, dans la municipalité de Prijedor ?
22 R. C'est exact.
23 Q. Des copies de ces photographies ont déjà été versées au dossier, il
24 s'agit des documents P03564 et P03565. Je souhaiterais qu'ils soient
25 affichés maintenant.
26 Il s'agit de la pièce P03564.
27 R. Souhaitez-vous que je présente mes observations à ce
28 sujet ?
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1 Q. Oui, je vous en prie.
2 R. Oui. Je vais vous expliquer pourquoi j'ai été particulièrement ravi
3 d'obtenir ces deux photographies supplémentaires qui m'ont été fournies par
4 la communauté islamique de Prijedor. Moi, je me suis rendu sur ce site
5 précis en 2002, et il faut savoir que les gravats avaient déjà été enlevés,
6 supprimés, et qu'il ne restait plus que les fondations et la maison
7 endommagée qui se trouvait à la droite de la mosquée. Ces photographies ont
8 été prises à la fin de l'été 1992, en septembre 1992, me semble-t-il. Si
9 vous les regardez de très près, dans un premier temps vous comprenez très
10 rapidement qu'il s'agissait d'une mosquée. Car juste à la gauche de la
11 maison, vous voyez ce qui brille, ce qui est blanc, c'est ce qui est
12 utilisé pour couvrir le minaret de la mosquée. Cette mosquée a été la
13 première mosquée de la municipalité de Prijedor à être construite avec un
14 dôme et avec ce revêtement particulier qui recouvre le minaret.
15 Q. Il va falloir que je corrige quelque chose. Il s'agit de la pièce
16 P03565. Je vois cela en haut de l'écran. Mais je souhaiterais maintenant
17 demander l'affichage de la pièce P3564, qui correspond au document 10978 de
18 la liste 65 ter.
19 R. Ici, vous avez la même scène vue sous un autre angle. On voit encore
20 une fois le haut du minaret, et par terre, à droite, la pointe du minaret
21 en forme de cône.
22 Q. Merci. J'en ai terminé avec ces deux pièces. Monsieur Riedlmayer, dans
23 votre rapport, votre rapport d'expert, aux paragraphes 21 à 57, ces
24 paragraphes contiennent vos conclusions. Tout d'abord, pour ce qui est des
25 sites religieux islamiques, au paragraphe 26 de votre rapport, vous
26 déclarez que 266 sur les 281 mosquées avaient été très lourdement
27 endommagées, voire détruites, ou plutôt, 9 % [comme interprété] de ces
28 bâtiments ont été très lourdement endommagés ou détruits.
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1 Si nous tenons compte des sites qui ne figurent plus à l'annexe D, est-ce
2 que ceci change quelque chose au pourcentage que vous avez cité ?
3 R. En réalité, j'ai fait le calcul moi-même, et cela modifie le chiffre
4 d'un demi-pourcent.
5 Q. Alors, pour ce qui est des sites qui n'ont plus été retenus dans l'acte
6 d'accusation, nous arrivons au chiffre de 226 sur les 239 mosquées qui ont
7 fait l'objet de votre étude, avec un total de
8 94,6 %. C'est exact ?
9 R. C'est exact.
10 Q. Eu égard aux sites catholiques, au paragraphe 45, vous déclarez que sur
11 les 32 des 42 églises catholiques qui ont fait l'objet du rapport, 76 %
12 avaient été très lourdement endommagées ou détruites. Encore une fois, en
13 tenant compte des sites qui n'ont plus été retenus dans l'annexe D, ceci
14 change-t-il quelque chose à ce chiffre ?
15 R. C'est un changement minime, qui correspond à 2 %, me semble-t-il.
16 Q. Et avec ces nouveaux chiffres, les sites qui n'ont pas été retenus, des
17 26 sur les 42 églises catholiques qui ont fait l'objet de votre étude,
18 alors cela signifie que 74,3 % ont été lourdement endommagées ou détruites;
19 c'est exact ?
20 R. C'est exact.
21 Q. Avez-vous remarqué d'autres tendances eu égard à la destruction de ces
22 sites culturels et d'un nombre important de ces sites lors de vos
23 recherches ?
24 R. Oui. La destruction correspondait aux zones placées sous le contrôle
25 des forces serbes de Bosnie dans les mosquées que j'ai étudiées. Sur la
26 carte, nous retrouvons les lieux des mosquées détruites, et il était
27 quasiment possible de dessiner une carte territoriale des zones qui avaient
28 été conquises par les forces serbes de Bosnie. De l'autre côté, il y avait
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1 des dégâts provoqués au-delà de la ligne de confrontation -- et que des
2 dégâts -- et par ailleurs -- mais dans les zones qui étaient contrôlées par
3 les forces serbes de Bosnie, il n'y avait quasiment plus de mosquées
4 intactes. Il y a un exemple qui fait exception à cette règle dans la
5 municipalité qui ne fait pas partie de cette étude, à Mrkonjic Grad, où des
6 résidents serbes ont empêché des paramilitaires de détruire la mosquée.
7 C'est à Mrkonjic Grad, dans le village de Donja --
8 L'INTERPRÈTE : Nom inaudible.
9 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci, Monsieur Riedlmayer. Je n'ai pas
10 d'autres questions à vous poser.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Madame Sutherland.
12 Monsieur Karadzic, c'est à vous. Avant que vous ne commenciez, je dois vous
13 dire que nous siégeons aujourd'hui en vertu de l'article 15 bis également,
14 et je remarque également que Me Robinson n'est pas présent aujourd'hui pour
15 que ceci soit consigné au compte rendu d'audience.
16 A vous, Monsieur Karadzic.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour à vous, Excellences. Bonjour à toutes
18 les personnes présentes dans le prétoire.
19 Contre-interrogatoire par M. Karadzic :
20 Q. [interprétation] Bonjour à vous, Monsieur Riedlmayer.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellences, je pense qu'il y a encore de l'air
22 froid qui entre dans le prétoire, cela n'est pas dirigé contre moi, mais je
23 crois que l'air est malgré tout trop froid. Peut-être que je suis un petit
24 peu sensible au froid parce que je suis en convalescence, mais je pense
25 qu'au mois de décembre cela n'est pas utile. Peut-être que nous pourrions
26 changer la température du prétoire et de l'élever de deux degrés. Je
27 demande donc au Greffe de bien vouloir contrôler cela et voir s'il est
28 possible d'élever la température un petit peu dans le prétoire.
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1 Q. [aucune interprétation]
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.
3 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les Juges de la Chambre se pencheront
5 sur la question.
6 M. KARADZIC : [interprétation]
7 Q. Monsieur Riedlmayer, êtes-vous un scientifique ?
8 R. Non, je ne suis pas un scientifique dans cette exception du terme. J'ai
9 fait mes études dans les sciences sociales, les sciences naturelles et les
10 humanités.
11 Q. Et lorsque vous étiez à l'école, avez-vous passé des examens dans le
12 domaine des statistiques ?
13 R. Oui, tout à fait.
14 Q. Et quel est votre métier très exactement ?
15 R. Je suis un spécialiste en matière de documentation d'art. C'est ce que
16 je fais depuis 26 ans, c'est ma profession. J'ai un diplôme de l'école des
17 sciences de l'information et des bibliothèques, comme j'ai publié dans mon
18 domaine, et voilà pour l'essentiel mon métier.
19 Q. Merci. On vous a confié une mission, puisque c'est quelque chose dont
20 vous parlez dans le premier paragraphe, et votre mission consistait à
21 répertorier les dégâts infligés aux sites religieux et culturels dans les
22 communautés musulmanes de Bosnie et croates de Bosnie, à savoir les
23 Catholiques, dans au moins 14 municipalités. Vous avez eu pour mission de
24 référencer ces dégâts, de les répertorier. Est-ce que votre mission
25 consistait à répertorier seulement les objets et les sites musulmans et
26 croates ?
27 R. Lorsque j'ai reçu cette mission, comme les rapports précédents que j'ai
28 effectués dans d'autres affaires de ce Tribunal, j'ai demandé à avoir des
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1 précisions. J'ai demandé si mon rapport ne devait porter que sur les sites
2 musulmans de Bosnie ou croates de Bosnie, aussi si ça devait s'appliquer à
3 tout le patrimoine culturel, et on m'a répondu en disant qu'il fallait que
4 je documente les sites qui avaient trait aux communautés non serbes.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Sutherland.
6 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pardonnez-moi de vous interrompre. M.
7 Karadzic a parlé de 14 municipalités. Je me demande quel est le rapport
8 qu'il a actuellement. Parce que le rapport de M. Riedlmayer porte sur 22
9 municipalités, et je ne vois pas que ceci figure au paragraphe 1 de son
10 rapport.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est sans doute une erreur.
12 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Peut-être qu'il fait référence à six
13 autres des rapports de M. Riedlmayer.
14 M. LE JUGE KWON : Hm-hm.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il s'agit de la destruction du patrimoine
16 culturel en Bosnie-Herzégovine, droits d'auteur 2003, Andras Riedlmayer.
17 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui. Il s'agit d'un autre rapport. Peut-
18 être le rapport présenté dans l'affaire Krajisnik ou dans une autre
19 affaire.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, c'est possible, mais je pense que, pour
22 l'essentiel, c'est la même chose.
23 M. KARADZIC : [interprétation]
24 Q. Vous a-t-on dit de ne pas enquêter sur les dégâts affligés au
25 patrimoine culturel et religieux serbe, et n'avez-vous jamais été appelé à
26 la barre pour témoigner contre des dirigeants militaires et politiques
27 musulmans et croates ?
28 R. Comme je viens de vous le dire, j'ai déclaré que l'on m'a demandé de
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1 répertorier les dégâts provoqués au patrimoine culturel des communautés non
2 serbes, et dans ce contexte-là en Bosnie, je n'ai pas témoigné contre que
3 ce soit des dirigeants politiques militaires musulmans ou croates. Quoi
4 qu'il en soit, dans les deux autres affaires dans lesquelles -- pardonnez-
5 moi, les trois autres affaires dans lesquelles j'ai témoigné sur le Kosovo,
6 j'ai inclus des éléments du patrimoine culturel serbe. Je ne faisais
7 qu'appliquer les consignes que j'avais reçues.
8 Q. Merci. Donc vous dites que vous avez reçu des consignes du bureau du
9 Procureur, et ensuite vous dites que les constatations et conclusions de
10 ces rapports sont les conclusions de l'auteur. Si je vous ai bien compris,
11 les consignes qui vous ont été données correspondaient à ce que vous venez
12 de nous dire ?
13 R. Il s'agissait en fait du cahier des charges de ma mission. C'est ce que
14 l'on m'a demandé de faire et d'inclure dans mon rapport. Parce qu'il
15 s'agit, dans ce cas, des sites qui figurent dans l'acte d'accusation dans
16 cette affaire.
17 Q. Merci. Donc on vous a demandé de retrouver et de référencer des
18 bâtiments qui étayaient les accusations contenues dans l'acte d'accusation;
19 c'est exact ?
20 R. Je ne le dirais pas comme ça. On m'a demandé de faire une étude sur
21 l'état du patrimoine culturel des communautés non serbes dans ces
22 municipalités. Il ne m'a pas été dit si ceci allait confirmer ou infirmer
23 les chefs d'accusation.
24 Q. Mais aux lignes 22, 23 et 24 de la page 17, c'est précisément ce que
25 vous avez dit. Vous avez supposé ou on vous a donné une mission dans le
26 cadre de l'acte d'accusation, et dans ce sens-là, ceci est conforme aux
27 exigences de l'acte d'accusation ?
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland.
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1 Mme SUTHERLAND : [interprétation] De façon très manifeste, M. Karadzic est
2 en train de lire à partir d'un autre rapport. J'ai un exemplaire du rapport
3 de M. Riedlmayer --
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il n'a pas cité le compte
5 rendu d'audience aujourd'hui, lignes 22, 23 et 24 d'aujourd'hui ?
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, exactement.
7 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pardonnez-moi. Je ne sais pas si M.
8 Karadzic souhaite avoir un exemplaire du rapport qui a été versé au dossier
9 et qui porte la cote P4068.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Souhaitez-vous avoir un exemplaire ?
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense que je dispose d'un exemplaire en
12 anglais, mais j'ai fait mes notes sur mon exemplaire en serbe. Mais je
13 dispose d'un exemplaire en anglais. En tout cas, merci beaucoup.
14 M. KARADZIC : [interprétation]
15 Q. Est-ce que ceci signifie qu'une enquête devait être menée sur les
16 auteurs, les circonstances et l'intention ? Et plus précisément, qu'avez-
17 vous pu conclure au-delà de tout doute raisonnable ?
18 R. Eh bien, la question du doute raisonnable est quelque chose, à mon
19 sens, qui relève de la compétence des Juges de la Chambre, parce qu'il
20 s'agit de la responsabilité qui va être déterminée à terme. Mon travail a
21 porté sur des conclusions factuelles et statistiques, à savoir des
22 conclusions sur les objets, les bâtiments et les institutions que l'on m'a
23 demandé d'étudier. Et mon rapport inclut des entretiens que j'ai eus avec
24 des informateurs, dont certains évoquent la question de la responsabilité.
25 Mais il ne m'appartient pas de traiter de ce sujet-là. Mes entretiens avec
26 ces personnes-là portaient pour l'essentiel sur la date à laquelle ces
27 objets avaient été détruits. J'essayais d'exclure soit des bâtiments qui
28 avaient été détruits avant la guerre, soit des bâtiments qui avaient été
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1 détruits après la guerre. Cette enquête, pour l'essentiel, s'est déroulée
2 de plusieurs années après les événements en question; par conséquent, il
3 était crucial pour moi de découvrir dans quel état se trouvaient ces
4 bâtiments, en tout cas à la fin de la guerre.
5 Q. Merci. Vous avez donc pu établir au-delà de tout doute raisonnable que
6 quelque chose avait été détruit ou renversé ?
7 R. Oui. Dans un certain nombre de cas, j'ai pu, en observant les lieux en
8 question, établir comment le bâtiment avait été détruit, si c'était suite à
9 une explosion, à un incendie.
10 Q. Etes-vous un expert qui pourrait établir ces faits-là, ou pouviez-vous
11 parler ou entrer en contact avec un expert qui aurait pu établir tout cela
12 ?
13 R. Non, je n'ai pas de formation dans ce domaine-là. Les incendies
14 volontaires ne font pas partie des enquêtes que j'ai menées. Je ne suis pas
15 un expert en engins explosifs. Cependant, je dirais que cela fait une
16 décennie que je travaille sur ces sujets-là, que j'ai lu la littérature à
17 la profession, que j'ai visité et observé des milliers de bâtiments
18 détruits et que j'ai, suite à cela, développé une certaine expertise. La
19 plupart de mes observations se fondent sur le simple bon sens. Si un
20 bâtiment n'a plus de toit, si les murs sont calcinés et s'il y a des
21 morceaux de bois brûlé qui sont encastrés dans la maçonnerie, dans ce cas
22 tout semble indiquer qu'il y a eu un incendie. Je ne pense pas qu'il soit
23 nécessaire de mener à bien des tests scientifiques pour établir cela. S'il
24 y a des orifices plus importants dans les murs et qu'il manque des morceaux
25 de mur, que l'on voit ça à certaine distance, il est clair qu'il s'agit là
26 d'une explosion, et il est inutile d'être un expert militaire pour établir
27 cela.
28 Mais j'ai fait très attention aux termes que j'ai employés lorsque je parle
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1 d'explosion. Je fais des distinctions entre différents types de munitions,
2 parce que cela impose des limites. Je crois que je peux tirer des
3 conclusions qui sont utiles à partir de mes observations.
4 Q. Merci. Dans ce cas, avez-vous pu établir les circonstances dans
5 lesquelles ceci s'est passé ? Nous avons vu la mosquée de Hrustovo il y a
6 quelques instants. Saviez-vous ou savez-vous ce qui s'est passé à Hrustovo
7 ?
8 R. Eh bien, cela n'a pas fait partie de mon enquête. J'ai -- j'étais là
9 pour établir les faits concernant les bâtiments, mais non pas sur
10 l'ensemble du conflit.
11 Q. Donc vous n'avez pas déterminé s'il y avait eu des combats à un endroit
12 en particulier, et cette photographie où nous voyons un orifice dû à un
13 mortier n'a pas été expliquée et n'a pas été placée dans son contexte;
14 c'est exact ?
15 R. Dans de nombreux cas, j'ai pu déterminer les éléments suivants :
16 lorsque, par exemple, il y avait un nombre important d'orifices
17 correspondant à des balles ou lorsqu'il y avait des orifices dus à des
18 engins explosifs, oui. Mais non, je ne sais pas à quel moment il y a eu les
19 combats dans ce secteur-là ou précisément ce qui s'est passé. Je crois que
20 c'est quelque chose qui sera déterminé par d'autres sources ou personnes.
21 Q. Merci. Et vous n'avez rien établi eu égard aux auteurs de cela ?
22 R. Non. Cela ne relevait pas de mes compétences. Et ce que je pouvais
23 faire au mieux, c'était d'établir la date ou le moment où ceci s'était
24 passé. Je crois que l'on peut tirer des conclusions à partir de cela.
25 Q. Lorsque vous dites que quelque chose est détruit sur le territoire
26 serbe, eh bien, l'étape suivante consisterait à dire que ceci a été détruit
27 par les Serbes. Pourriez-vous nous dire quels Serbes, ou pourriez-vous nous
28 dire si ceci était le fait des autorités ou de quelqu'un d'autre ? Avez-
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1 vous établi quelles étaient les autorités qui étaient à l'origine de ces
2 événements-là ?
3 R. Encore une fois, établir la responsabilité des auteurs ne relève pas de
4 ma mission en tant qu'expert. Mais je peux faire l'observation suivante :
5 dans un certain nombre d'endroits, tels que Prijedor, des bâtiments avaient
6 été détruits à un moment où la communauté était placée sous le contrôle des
7 autorités serbes de Bosnie. Je connais dans les grandes lignes le
8 déroulement de la guerre en Bosnie.
9 Je sais également dans combien d'endroits la destruction a été menée
10 après les premières explosions et coups de feu par les autorités
11 municipales qui se sont servi de l'équipement de la municipalité pour
12 enlever les gravats. Donc je peux tirer des conclusions limitées à partir
13 de cela.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que c'est ce que vous avez
15 entendu dire des gens sur place ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ce que j'ai entendu dire, et comme dans
17 l'exemple de Novoseoci, je crois que les faits indiquent que les gravats
18 ont été enlevés.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.
20 M. KARADZIC : [interprétation]
21 Q. Et si vous ne pouvez pas nous dire si ceci a été le fait de ou ceci a
22 été mené à bien par les autorités ou les forces paramilitaires; ai-je
23 raison de dire que vous avez rassemblé des éléments de preuve qui
24 concernaient la guerre civile, et non pas contre les Serbes ? Parce que si
25 c'est le cas, je peux être d'accord avec vous.
26 R. Je ne suis pas très sûr d'avoir bien compris votre question.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, soyez rassuré, M.
28 Riedlmayer a témoigné sur les faits. Il n'a pas témoigné sur la
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1 responsabilité des auteurs du tout.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
3 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
4 M. KARADZIC : [interprétation]
5 Q. Cependant, certaines conclusions m'inquiètent, et la manière dont ces
6 conclusions ont été tirées. Vous avez dit que les nouvelles mosquées
7 avaient été moins endommagées que les plus anciennes, et vous interprétez
8 cela en disant que les anciennes mosquées avaient été enregistrées. Est-ce
9 la seule interprétation, ou y a-t-il une autre interprétation possible ?
10 R. Ecoutez, je suis ouvert à d'autres interprétations, mais je n'en ai pas
11 trouvé.
12 Q. Etant donné que vous connaissez bien la culture islamique et l'Islam,
13 est-ce que vous savez que les mosquées sont des casernes en même temps et
14 servent de lieu de recrutement où des munitions sont déposées ainsi que des
15 engins explosifs, que c'est un point de distribution des armes, et qu'il
16 s'agissait dans ce cas essentiellement de mosquées anciennes, alors que les
17 nouvelles mosquées n'ont pas été utilisées à ces fins ?
18 R. Je n'ai jamais entendu parler de cela.
19 Q. Par exemple, lorsqu'une nouvelle mosquée a été inaugurée à Kakanj en
20 1990, lorsque l'imam a dit en public dans une allocution qu'il s'agira non
21 seulement d'un lieu de culte mais d'une caserne. Vous n'avez pas remarqué
22 des choses comme cela, n'est-ce pas ?
23 R. Kakanj n'était pas une des municipalités couvertes par mon étude, et je
24 ne suis pas au courant de la teneur des sermons.
25 Q. Merci. Qui était au pouvoir à Baljvine ? Vous avez dit qu'il s'agissait
26 d'une exception que vous aviez remarquée. Vous avez dit que les autorités
27 de Baljvine avaient réussi à dissuader les paramilitaires pour qu'ils ne
28 détruisent pas la mosquée. A Mrkonjic Grad et Baljvine, qui était au
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1 pouvoir à l'époque ?
2 R. Je n'ai pas dit que les autorités avaient dissuadé les paramilitaires.
3 Il s'agissait de résidents serbes qui défendaient leurs voisins. Et les
4 informations dont je dispose proviennent d'un ouvrage de Svetlana Broz, qui
5 a interviewé les résidents et qui l'a inclus dans son livre intitulé :
6 "Good People in an Evil Time", "Les bonnes personnes dans une période
7 maléfique".
8 Q. Saviez-vous que la police de Bijeljina, après que les forces
9 paramilitaires aient été arrêtées en 1992, les a interrogées sur la mosquée
10 détruite de Bijeljina ? Pourquoi ceci a-t-il été
11 fait, eh bien, il a été question du cuivre sur la mosquée. Et est-ce que
12 vous êtes au courant du fait que la police a enquêté là-dessus ?
13 R. Je ne suis pas au courant de l'enquête. Cependant, je suis au courant
14 de ce qu'il était advenu de la mosquée de Bijeljina. En 1992, il y avait un
15 vandalisme très marqué, il y a eu beaucoup de vandalisme sur la mosquée,
16 mais aucune mosquée n'a été détruite. Les mosquées de Bijeljina ont été
17 détruites au printemps de l'année 1993, lorsque Bijeljina était
18 complètement sous le contrôle des autorités serbes de Bosnie. Il n'y avait
19 pas de combat à ce moment-là dans la région, à ma connaissance.
20 Q. Vous avez également parlé de Brcko et de Bijeljina, et vous avez dit
21 que ces deux villes étaient placées sous le contrôle des forces serbes de
22 Bosnie. Est-ce que vous êtes au courant de la façon dont les autorités
23 fonctionnaient à Bijeljina et Brcko, et est-ce que vous êtes au courant des
24 efforts déployés par les autorités serbes pour éliminer les forces
25 paramilitaires dans ces villes-là ?
26 R. Cela ne faisait pas partie de mon étude.
27 Q. Monsieur Riedlmayer, vous ne pouvez pas avancer qu'ils étaient
28 totalement placés sous le contrôle des forces serbes, n'est-ce pas ?
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1 R. Tout ce que je sais, je le tiens des éléments d'information, des
2 éléments de contexte. Je sais qu'à ce moment-là, les mosquées ont été
3 détruites, mais il n'y avait pas de combat dans la zone en question. Dans
4 le cadre de mon étude menée sur le terrain, je n'étais pas censé enquêter
5 sur toutes les circonstances de la destruction.
6 Q. Merci. Toutefois, je souhaiterais que nous revenions sur cette question
7 de professionnalisme et d'objectivité. Est-ce que vous êtes intéressé par
8 l'aboutissement, le résultat, de mon procès ?
9 R. Je le suis, tout comme je suis de nombreux procès de ce Tribunal, mais
10 je ne suis pas ici pour vous juger. Cela est de la compétence des Juges.
11 Q. Merci. Toutefois, j'aimerais savoir si, de façon générale, vous êtes
12 intéressé par l'aboutissement des procès contre les Serbes ou contre la
13 Serbie ? Etes-vous vraiment un témoin impartial ?
14 R. Vous savez, je n'ai pas un intérêt précis qui desservirait la cause des
15 Serbes ou qui irait à l'encontre de la cause des Serbes. Je souhaiterais
16 que justice soit rendue, et peu importe qu'il s'agisse de Serbes, de
17 Musulmans ou de Croates ou d'Albanais, j'espère très sincèrement que les
18 personnes responsables de crimes contre l'humanité et d'autres violations
19 contre le droit international seront poursuivies et sanctionnées et punies.
20 Mais je ne suis pas partisan pour que l'on ménage des suspects non serbes
21 ou des suspects serbes. D'ailleurs, toute personne qui est inculpée et pour
22 laquelle il est prouvé qu'elle est innocente devrait, à mon avis, être
23 libérée.
24 Q. Toutefois, jusqu'à présent, vous avez dans une grande mesure participé
25 à des études ou à des travaux contre les structures serbes. Et je pense que
26 la conférence que vous allez donner aujourd'hui dessert également cet
27 objectif. Vous avez été jusqu'à présent extrêmement actif à présenter
28 différentes variantes de la culpabilité serbe ? Est-ce que vous l'avez fait
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1 de part le monde ?
2 R. Pour répondre à propos du sujet de ma conférence aujourd'hui, cette
3 conférence s'intéresse à des questions relatives à la reconstruction après
4 la guerre. Je ne vois pas comment cela milite à l'encontre des structures
5 serbes ou de toute autre chose. J'ai justement mis la touche finale à cette
6 conférence hier, et il y a des éléments qui sont assez critiques des
7 Musulmans et des Croates. C'est une conférence qui sera prononcée à
8 l'Institut pour les Amériques de l'Académie royale néerlandaise des
9 sciences. Cela ne s'inscrit absolument pas dans le cadre d'une conspiration
10 politique quelle qu'elle soit.
11 Q. Merci. Je ne vous parlais pas de conspiration. Je parlais en quelque
12 sorte de pigistes ou de free-lance. Mais est-ce que vous pouvez confirmer
13 que vous avez écrit une histoire succincte de la Bosnie-Herzégovine ?
14 R. Oui, je sais à quel document vous faites référence. Et d'ailleurs, il a
15 été présenté déjà dans l'affaire contre Milosevic. Il ne s'agit pas d'une
16 publication ou d'un ouvrage officiel. Il a été rédigé en 1993 et a été
17 placé sur un site Web. Il s'agit d'un pamphlet ou d'une histoire succincte.
18 Cela ne fait pas partie de ma bibliographie officielle. Ce qui a été versé
19 au dossier, c'est mon curriculum vitae officiel, et là vous trouvez tous
20 les ouvrages, tous les essais que j'ai écrits de façon officielle, et je
21 vous mets au défi d'y trouver quoi que ce soit qui ait une connotation
22 anti-Serbe.
23 Q. Mais dites-moi, je vous prie, ce qui suit : je ne suis pas seulement
24 intéressé par le fait que quelqu'un ait des sentiments anti-Serbe, mais ce
25 qui m'intéresse également, ce sont les compétences des personnes.
26 Est-ce que vous savez quel était l'ordre social en Bosnie-Herzégovine
27 au moment du Congrès de Berlin lorsque l'Empire austro-hongrois a reçu le
28 mandat de pénétrer en Bosnie ? Quel était l'ordre social en vigueur à
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1 l'époque ?
2 R. Il se trouve que j'ai écrit ma thèse de maîtrise à ce sujet. Cela s'est
3 passé il y a un certain temps, et il s'agissait essentiellement d'un
4 ouvrage relatif à l'histoire diplomatique, mais je sais pertinemment que
5 dans les années 1870, à la fin de l'Empire ottoman en Bosnie, il y avait de
6 grands propriétaires terriens. Il y avait également les Kmets, qui étaient
7 les équivalents des serfs, en quelque sorte, qui ne pouvaient pas être
8 propriétaires de leurs terres et qui étaient extrêmement exploités. Je sais
9 quel était l'ordre social. Mais je ne suis pas tout à fait sûr que cela ait
10 trait avec mon rapport d'expert actuel.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions, je vous prie, voir
12 le document 1D4902. Il s'agit de ce texte.
13 M. KARADZIC : [interprétation]
14 Q. Nous allons résumer. Vous convenez qu'en Bosnie-Herzégovine, au moment
15 du Congrès de Berlin, l'ordre social était représenté par le féodalisme,
16 n'est-ce pas ?
17 R. Vous savez, le féodalisme est très, très, très spécifique au contexte
18 occidental, mais je vous l'accorde, il y avait une distribution inéquitable
19 des terres, et la grande majorité des personnes était effectivement
20 exploitée. Mais c'était au XIXe siècle. Les mêmes conditions prévalaient en
21 Russie.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions, je vous prie,
23 demander l'affichage de la page suivante de ce document.
24 M. KARADZIC : [interprétation]
25 Q. Convenez-vous qu'en Serbie, dès l'année 1804, outre ce mouvement de
26 libération, nous avons pu assister à une révolution de type bourgeois ?
27 R. Les révolutions du XIXe siècle qui ont eu lieu dans différents pays des
28 Balkans étaient à la fois des [imperceptible], des révoltes de paysans
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1 ainsi que la révolte de la classe des commerçants. Karadjordje, le chef
2 serbe qui a dirigé la révolution de 1804, était lui-même un négociant fort
3 prospère. Il avait certaines aspirations qui trouvaient leur origine dans
4 le fait qu'il avait tout simplement été informé de certaines des idées qui
5 émanaient de la Révolution française et du Siècle des lumières. Mais je ne
6 sais pas franchement quelle est la pertinence de ceci par rapport à mon
7 rapport actuel.
8 Q. Nous allons voir quelle est cette pertinence, mais je suis sûr que vous
9 vous souviendrez de ce qu'a écrit Leopold Ranke. Il a écrit notamment un
10 essai intitulé : "La révolution serbe de 1804", n'est-ce pas ?
11 R. Je ne vous dirais pas non. Je ne peux pas vous dire que je l'ai lu,
12 parce que cela ne s'inscrivait pas véritablement dans mon domaine de
13 compétence.
14 Q. Merci. Regardez le deuxième paragraphe, où vous indiquez que la Serbie,
15 et je cite en anglais : "La Serbie, en 1389, avait subi une défaite
16 absolument humiliante imposée par les Turcs lors de la fameuse bataille du
17 Kosovo et avait été réduite au statut de vassal de l'Empire ottoman."
18 R. Oui.
19 Q. Est-ce que vous savez qu'à ce moment-là, la France commémorait la
20 victoire d'une armée chrétienne et que la Serbie a continué à souffrir
21 pendant 100 ans après cela ? C'était en quelque sorte match nul.
22 R. Oui. Mais là, nous nous replongeons dans le XIVe siècle. Ce que je
23 sais, c'est qu'à la fin de la bataille, à la fois le dirigeant serbe et le
24 sultan ottoman avaient péri, et que la Serbie n'a pas été complètement
25 effacée de la carte pendant environ 70 ou 80 ans. Pendant cette période
26 toutefois, la Serbie était effectivement un Etat vassal de l'Empire
27 ottoman. Et je vous rappellerais que vous êtes en train de prendre en
28 considération un récit historique qui est très officieux, en quelque sorte,
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1 qui couvre l'histoire des Balkans à partir de la fin de l'Empire romain
2 jusqu'à l'année 1993. Vous avez quelque six pages et demie sans notes en
3 bas de page. Donc vous ne pouvez pas vous attendre à y trouver des détails
4 précis.
5 Q. Bien. Alors, nous n'allons plus en parler. Mais vous avez également
6 fait référence au roi Tvrtko. Est-ce que vous savez que le roi Tvrtko est
7 un roi serbe ?
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Sutherland.
9 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je me suis abstenue de soulever des
10 objections, mais j'aimerais quand même savoir quelle est la pertinence de
11 ces questions posées à M. Riedlmayer qui a écrit son rapport d'expert ?
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien sûr.
14 M. KARADZIC : [interprétation]
15 Q. Très bien. Nous allons passer au paragraphe 3 de la page 3. Voilà ce
16 que vous dites, et je cite :
17 "Les Slaves musulmans ne voyaient pas d'avenir pour eux dans ce nouvel
18 ordre qui était proposé et ont continué à préconiser cet ancien idéal
19 bosnien de cette société pluraliste et à plusieurs religions. Pour des
20 raisons évidentes, ils avaient tendance à ne pas accepter que les autres
21 fassent l'objet de faveurs de la part des autorités hongroises."
22 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je m'excuse, mais à moins -- je ne
23 comprends pas la pertinence par rapport au rapport d'expert de M.
24 Riedlmayer.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'essaie de prouver que M. Riedlmayer est un
26 activiste, un militant qui est en train de jeter les bases de la
27 condamnation des Serbes pour tous les faits. Ce paragraphe montre que M.
28 Riedlmayer est convaincu que le système féodal de la Bosnie-Herzégovine,
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1 dans le cadre duquel les Chrétiens n'avaient pas le droit de détenir et
2 d'être propriétaires de terres et n'avaient d'ailleurs absolument aucun
3 droit, représentait l'idéal de la société multiethnique et
4 multiconfessionnelle. Toutefois, cela représentait l'esclavage pour les
5 Chrétiens.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, j'aimerais savoir
7 quel est le lien entre tout ceci et le rapport de M. Riedlmayer ?
8 D'ailleurs, j'aimerais corriger quelque chose que j'ai dit un peu plus tôt.
9 Page 22 du compte rendu d'audience. Une ligne de mes propos a été oubliée.
10 J'étais en train de vous dire que M. Riedlmayer n'était pas en train de
11 témoigner à propos de qui était responsable, mais à propos des faits. Ce
12 que j'entendais, c'est que la Chambre ne va pas utiliser les éléments de
13 preuve ou la déposition de M. Riedlmayer pour déterminer qui est
14 responsable de la destruction de ces bâtiments.
15 Je ne vois vraiment pas à quoi il nous sert d'étudier par le menu des
16 détails de l'histoire de la Serbie et de la Bosnie-Herzégovine, et je
17 pense, Monsieur Karadzic, qu'il serait peut-être plus important d'en venir
18 à l'essentiel.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Alors, je ne vais pas vous parler de
20 toutes ces périodes, mais il y a quand même quelque chose qui, pour moi,
21 représente une importance capitale, car je souhaiterais véritablement voir
22 si ce témoin est impartial, s'il s'agit d'un témoin au sens premier du
23 terme, et j'aimerais donc que nous puissions voir comment M. Riedlmayer
24 parle des Serbes pendant la Deuxième Guerre mondiale.
25 Page 4, je vous prie. Page 4 de ce document, troisième paragraphe. Est-ce
26 que nous pourrions avoir la quatrième page. Paragraphe 3 de la quatrième
27 page.
28 M. KARADZIC : [interprétation]
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1 Q. Regardez le deuxième paragraphe. Il est question de ce qui était la
2 Croatie des Oustachis. Regardez ce que vous dites à la fin de ce
3 paragraphe, qu'il y avait donc une division musulmane SS -- vous parliez
4 très certainement de la Division Handzar. Est-ce que vous savez que c'était
5 la division la plus cruelle, et vous savez qu'ils ont existé pendant deux
6 ans, n'est-ce pas ?
7 R. Oui, je suis informé de la Division Handzar.
8 Q. Toutefois, dans le paragraphe suivant, vous mettez sur un pied
9 d'égalité la Serbie et la Croatie pendant la Deuxième Guerre mondiale; est-
10 ce bien exact ? Vous dites qu'une campagne semblable avait été menée à bien
11 sous la houlette du général Nedic, qui avait des camps de concentration
12 pour les Juifs, les non-Serbes ainsi que pour ses opposants politiques
13 serbes ?
14 R. Oui, c'est exact. Je ne mets personne sur un pied d'égalité. Je me
15 contente tout simplement de décrire ce qui, d'après moi, correspond à des
16 faits qui, d'ailleurs, ont déjà été établis. Le régime croate sous Pavelic
17 a commis des actes maléfiques, et il en va de même pour Nedic. Le fait est
18 qu'il y avait des camps de concentration qui avaient été organisés et gérés
19 par Nedic d'ailleurs, et le fait est que dans ces camps de concentration il
20 y avait des Juifs et des opposants serbes qui y avaient été jetés, et le
21 fait est qu'ils avaient collaboré. Tout comme le général Pétain en France,
22 Nedic était absolument obsédé par un fait, par le fait qu'il y avait tant
23 de jeunes Serbes qui étaient tombés sur les fronts, sur les champs de
24 bataille. Et sa collaboration, elle vient de cela, il ne voulait pas que ce
25 massacre soit répété. Tout comme Pétain, Pétain qui avait des opinions qui
26 étaient d'extrême droite, en fait, ses opinions d'extrême droite
27 correspondaient aux idées sociales des nazis. Alors, je ne suis pas en
28 train de vous dire qu'il est exactement pareil à Pavelic, mais les deux,
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1 d'une façon ou d'une autre, ont collaboré.
2 Q. Oui, mais où se trouvait ce camp de concentration pour les Juifs qui
3 était dirigé par le gouvernement serbe, enfin le gouvernement de Nedic ? Où
4 se trouvait ce camp ?
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, ce n'est pas le bon
6 moment de parler de ce genre de choses. Je souhaiterais que nous en venions
7 à l'essentiel et à ce dont a parlé M. Riedlmayer lors de son interrogatoire
8 principal, je vous en prie.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaiterais qu'un document soit montré. Car
10 véritablement je dois vous montrer, vous prouver la partialité de M.
11 Riedlmayer. Je dois vous montrer qu'il est anti-Serbe et qu'il est partial,
12 et qu'il s'agit de quelque chose de très dangereux. Parce que dans un
13 premier temps, vous satanisez [phon] en quelque sorte quelqu'un, et ensuite
14 cela est suivi par des bombes. M. Riedlmayer est bel et bien intéressé par
15 l'aboutissement de ce procès.
16 Je vais passer à autre chose, mais avant je voudrais vous montrer un
17 document, le document 1D4922, pour vous montrer à quel point tout cela est
18 dangereux, périlleux, peut porter tort et est de toute façon erroné. Donc,
19 document 1D4922.
20 M. KARADZIC : [interprétation]
21 Q. Monsieur Riedlmayer, convenez-vous qu'il s'agit d'une carte des
22 territoires yougoslaves pendant la Deuxième Guerre mondiale ?
23 R. Oui.
24 Q. Est-ce que vous pouvez discerner une différence entre la Croatie et la
25 Serbie ? La Croatie étant un état indépendant.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, je ne vois absolument pas la
27 pertinence de ce document. Passez à autre chose, je vous prie.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, le camp dont parle M.
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1 Riedlmayer se trouve à Belgrade, mais dans l'Etat de Croatie. Vous voyez
2 quelles étaient les limites de l'Etat croate --
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous ai dit que cela n'avait
4 absolument aucune pertinente. Et je vous demande de passer à votre sujet
5 suivant.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que cette carte pourrait être versée au
7 dossier, tout simplement pour que la Chambre de première instance puisse en
8 disposer ?
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre vient de vous indiquer ce
10 qu'elle pensait de la pertinence de cette carte.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais écoutez, je suis un tant soit peu
12 perplexe. Comment se fait-il que je ne peux pas contester le
13 professionnalisme et la crédibilité ?
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, est-ce que vous êtes
15 en train de contester le fait que certaines mosquées auxquelles a fait
16 référence M. Riedlmayer aient véritablement été détruites ?
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce que je conteste, ce sont les conséquences
18 qui émanent de certaines conclusions avancées par M. Riedlmayer, à savoir
19 les conséquences, ce qui est implicite, à savoir que cela avait quelque
20 chose à voir avec les autorités serbes, plutôt, un Etat organisé, la
21 planification. Alors, je peux vous prouver quelle est la base de ce que
22 j'avance, et ensuite je vous dirais comment et pourquoi cela est erroné.
23 [La Chambre de première instance se concerte]
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je remarque l'heure qu'il est. La
25 Chambre va faire une pause d'une demi-heure, et nous reprendrons à 10
26 heures 55.
27 --- L'audience est suspendue à 10 heures 24.
28 --- L'audience est reprise à 10 heures 57.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.
2 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je souhaite
3 revenir sur la question que les Juges de la Chambre ont évoquée en début de
4 séance. Je vais en parler de façon générale, comme l'ont fait les Juges de
5 la Chambre. Je suis sûr que nous parlons de la même question, et je
6 souhaite informer les Juges de la Chambre du fait que l'Accusation ne
7 s'oppose pas à la requête.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
9 M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Docteur Karadzic, les Juges de la
10 Chambre estiment que cela devrait vous rassurer que les conclusions qui
11 pourraient être déduites des éléments de preuve présentés par ce témoin eu
12 égard à la question de la responsabilité des Serbes de la destruction des
13 mosquées n'est pas quelque chose qui serait envisagé par les Juges de la
14 Chambre. Et comme le témoin l'a dit à juste titre, le fait d'établir la
15 responsabilité des auteurs ne relève pas de son domaine d'expertise.
16 Le Président l'a dit avant la pause, et nous avons estimé qu'il était
17 nécessaire de le redire après la pause pour que vous soyez complètement
18 informé de la situation.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poursuivre.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Excellences. Je vais en terminer sur la
21 question historique avec une seule question.
22 M. KARADZIC : [interprétation]
23 Q. Est-il exact, comme le dernier paragraphe semble le dire, que vous avez
24 écrit un pamphlet dans le but de faire lever l'embargo sur les armes des
25 Musulmans ?
26 R. Est-ce que vous faites toujours référence au document que vous avez
27 affiché précédemment ?
28 Q. Oui, une courte histoire de la Bosnie.
Page 22578
1 R. Puis-je voir le dernier paragraphe, s'il vous plaît. Je ne m'en
2 souviens pas. Cela remonte à un certain nombre d'années.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. C'est le 1D4902. Non, pas ce
4 document-là -- une courte histoire.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] 79. La dernière page, s'il vous plaît. Une page
6 en arrière, s'il vous plaît. Histoire succincte de la Bosnie-Herzégovine.
7 M. KARADZIC : [interprétation]
8 Q. En attendant, c'est le dernier paragraphe à partir du bas.
9 "L'initiative en vue de lever l'embargo contre les armes imposé au
10 gouvernement de Bosnie et d'appeler une intervention musclée pour mettre un
11 terme au conflit avait été sans cesse entravée par les Nations Unies et les
12 autres communautés internationales."
13 Veuillez regarder l'ensemble du paragraphe, s'il vous plaît, où vous parlez
14 en faveur de la levée de l'embargo, à savoir vous vous opposez à tous les
15 pays qui souhaitent que l'embargo soit maintenu, n'est-ce pas ?
16 R. Eh bien, ceci a été rédigé en me fondant sur ma compréhension de
17 l'article 51 du chapitre 7 de la charte des Nations Unies, je crois que je
18 l'ai cité quelque part ici, qui déclare qu'il y a un droit à l'autodéfense
19 des Etats membres, mais que ceci ne peut lui être refusé qu'au moment où le
20 Conseil de sécurité peut établir la paix et la sécurité. Je paraphrase,
21 mais c'est pour l'essentiel. Et, en fait, en 1993 et par la suite, le
22 Conseil de sécurité des Nations Unies n'a pas réussi à imposer la paix et
23 la sécurité. Par voie de conséquence, j'ai pensé à l'époque que l'embargo
24 sur les armes était contreproductif.
25 Q. Merci. Cependant, il me semble que ceci découle de votre compréhension
26 de la structure interne de la Bosnie. A plusieurs endroits, vous dites
27 qu'il s'agit là du territoire occupé par les Serbes de Bosnie. Ne
28 comprenez-vous pas que les Serbes de Bosnie faisaient partie de la
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1 population qui vivait dans cette région depuis plus longtemps et couvrait
2 65 % du territoire ? En d'autres termes, ils n'étaient pas dans le pays de
3 quelqu'un d'autre. Ils étaient dans leur propre pays, ils étaient censés se
4 défendre contre ces personnes qui étaient là ? Il s'agissait d'un conflit
5 interne.
6 R. Madame, Messieurs les Juges, je ne suis pas ici pour parler du bien
7 fondé de la guerre en Bosnie. Il y a un certain nombre de questions que je
8 pourrais débattre, à savoir que les 65 % du territoire représentaient
9 l'endroit où les uns ont vécu avant les autres. Mais je ne vois pas en quoi
10 ceci a une quelconque incidence sur ma déposition.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
12 Monsieur Karadzic.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Dans ce cas, nous allons revenir au rapport en
14 tant que tel. Je vais afficher plusieurs documents qui concernent la
15 crédibilité et la partialité, et j'espère que j'aurai votre permission pour
16 le faire.
17 M. KARADZIC : [interprétation]
18 Q. Au point 1 de votre rapport, le contexte de votre étude, vous dites que
19 :
20 "… le conflit de 1995 en Bosnie, des rapports ont été présentés par les
21 différentes parties sur la destruction généralisée du patrimoine religieux
22 et culturel."
23 Par conséquent, des rapports avaient été rédigés sur la destruction
24 des bâtiments serbes, n'est-ce pas ?
25 R. C'est exact.
26 Q. Est-ce que vous voyez qu'il y a un lien entre la destruction d'une
27 série de bâtiments avec l'autre série de
28 bâtiments ? Est-ce que vous ne pensez pas que ceci a un caractère de
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1 représailles ? C'est quelque chose que vous avez abordé dans le procès
2 contre Milosevic. Est-ce vous qui établissez ce lien, ou est-ce que vous
3 pensez que ceci a été préparé ou planifié par un Etat ?
4 R. Si je me souviens bien de ma déposition dans l'affaire Milosevic, j'ai
5 indiqué qu'il y avait des cas précis de destruction en guise de
6 représailles à des endroits bien précis et à des dates bien précises, mais
7 ceci n'était pas le cas dans les municipalités en Bosnie, œil pour œil,
8 dent pour dent, en guise de représailles. Je pense, par exemple, aux
9 premiers mois de la guerre, le long de la Save, au nord et au sud de
10 Mostar, où il y avait justement ce genre d'événement qui se produisait
11 entre les milices croates et les forces serbes. Par exemple, à Mostar, il y
12 avait les deux églises catholiques de Mostar qui ont été touchées par les
13 forces serbes pendant le siège de l'année 1992, après quoi des
14 nationalistes croates ont plastiqué la cathédrale serbe et l'ancienne
15 église orthodoxe.
16 Donc le long de la Save, il y avait de tels incidents. Je dirais que j'ai
17 vu des traces de cela lorsque j'ai mené mon étude, mais le Tribunal ne m'a
18 pas demandé de me pencher sur la destruction des églises serbes. Lorsque
19 j'ai vu ces traces, c'est quelque chose que j'ai consigné parce que cela
20 m'intéressait. Par exemple, à Bukvik, près de Brcko, une église qui avait
21 brûlé.
22 Et à la fin de la guerre, en septembre et octobre de l'année 1995, il
23 y avait un certain nombre d'églises serbes qui avaient fait l'objet
24 d'attaques dans la partie occidentale de la Bosnie. Dans la municipalité de
25 Sanski Most essentiellement et dans la municipalité de Kljuc, l'armée serbe
26 de Bosnie est sortie de la poche de Bihac dans les dernières semaines de la
27 guerre, et à ce moment-là un certain nombre d'églises serbes ont été
28 incendiées. Je dispose d'une collection de photographies là-dessus et j'ai
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1 l'intention d'en faire quelque chose, mais ceci ne faisait pas partie de
2 mon cahier des charges dans le contexte de ce rapport.
3 Je souligne que dans la plupart des endroits en Bosnie, la
4 destruction était vraiment d'un côté seulement, et je crois qu'il faut
5 garder à l'esprit la chronologie sur ces événements.
6 Q. Est-ce que vous vous souvenez à quel moment Zitomislic, un très ancien
7 monastère qui remonte du XVIe siècle, quand Zitomislic - qui était un lieu
8 de culte très important pour les Serbes - savez-vous à quel moment ceci a
9 été détruit ?
10 R. D'après mon souvenir, ceci a été détruit au début de l'été 1992 par les
11 forces croates. J'ai, en réalité, rédigé un article là-dessus.
12 Q. Voyez-vous, vous avez cité le contexte de tout ceci, et cela est une
13 bonne chose. Mais n'avez-vous pas remarqué qu'il y avait un schéma ou une
14 tendance ? Vous avez dit que les églises catholiques en Bosnie occidentale
15 le long de la Save avaient été détruites, et la plupart de ces destructions
16 ont eu lieu en 1991, avant que la guerre n'éclate en Bosnie, et en 1995.
17 Avez-vous remarqué que ceci avait un lien avec l'éclatement du conflit en
18 Croatie et avec l'arrivée des réfugiés, à la fois en 1991 et 1995 ?
19 R. En réalité, j'apporterais une correction à ce que vous venez de dire.
20 Il y avait une destruction très peu importante en 1991, moment où le
21 conflit croate a débordé. La plupart des destructions ont eu lieu en 1992.
22 Et la deuxième de destruction a eu lieu en 1995, et ceci a coïncidé avec le
23 conflit renouvelé en Croatie.
24 Q. Merci. Et par opposition à cela, vous avez remarqué, et à juste titre,
25 mais je ne sais pas si votre interprétation était juste, que les églises
26 catholiques de Pale et le long de la Drina, à Cajnice et Rogatica, me
27 semble-t-il, n'avaient pas été détruites. Est-ce que vous êtes d'accord
28 pour dire que c'était le cas, parce que dans ce secteur il n'y avait aucun
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1 réfugié qui arrivait de Croatie; donc personne ne fuyait les Croates, et il
2 n'y avait pas réfugiés dont les églises avaient été détruites dans leurs
3 lieux d'origine ?
4 R. C'est une question en deux parties. Je souhaite tout d'abord répondre à
5 la première partie de votre question.
6 Je pense que les églises de Pale, de Rogatica et de Cajnice n'ont
7 fait l'objet que d'un vandalisme mineur, en grande partie parce qu'il y
8 avait très peu de Croates qui vivaient dans cette région. Et dans la
9 plupart des endroits où ces attaques ont eux lieu, ces attaques ont eu lieu
10 dans le cadre des attaques contre ces communautés. A Cajnice, par exemple,
11 je crois qu'il n'y avait pas plus qu'une poignée de Croates qui vivaient
12 là.
13 Pour ce qui est de la deuxième partie de votre question, concernant
14 les réfugiés, à ma connaissance, je ne sais pas dans quelle mesure les
15 réfugiés ont joué un quelconque rôle dans tout cela. Comme je vous l'ai
16 dit, cela n'est pas de mon rôle que de retrouver les auteurs individuels.
17 Q. Merci. En aucun cas, je ne ferais porter la faute aux réfugiés. Mais le
18 flot de réfugiés a néanmoins une incidence sur l'état d'esprit et change le
19 climat. Est-ce que l'atmosphère et le flot des réfugiés qui portent en eux
20 des récits tragiques, est-ce que vous ne pensez pas que ceci puisse avoir
21 une incidence sur l'état d'esprit général ? Est-ce que vous êtes d'accord ?
22 R. Sans doute.
23 Q. Vous venez de parler de vandalisme et des graffitis. Pensez-vous que
24 c'était l'œuvre des autorités ou est-ce que c'est quelque chose qui a été
25 fait sur les ordres donnés par eux, ou est-ce que vous pensez simplement
26 que l'émergence ou la présence de graffitis a quelque chose à voir avec les
27 autorités ? Je fais référence au paragraphe 42, mais il y en a d'autres où
28 ceci est mentionné.
Page 22583
1 R. J'ai simplement fait remarquer que ces graffitis existaient. Le
2 vandalisme pouvait être assez important. Par exemple, dans l'église de
3 Pale, les statues des saints avaient été brisées. La même chose avait pu
4 être remarquée à Brcko et dans un certain nombre d'autres endroits. Je ne
5 pense pas que ce soit les autorités qui aient fait cela. Cependant, je
6 pense que cela relève de la responsabilité des autorités d'empêcher ce
7 genre de choses et de les sanctionner.
8 Q. Merci. Au paragraphe 40, vous évoquez le fait que les décombres aient
9 été enlevés. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que ceci était
10 conforme aux règles afférant à la protection civile, à savoir que les
11 gravats liés à la destruction générale en ville devaient être enlevés parce
12 que des lieux publics devaient être dégagés ?
13 R. Je ne vais pas faire de commentaires sur la politique telle qu'elle
14 aurait dû être. Néanmoins, je me souviens du fait qu'à Bijeljina et à Banja
15 Luka, dans ces deux localités, j'ai vu des vidéos de la façon dont ceci a
16 été fait. A Bijeljina, par exemple, on peut voir l'ancienne mosquée en
17 ville qui est renversée par des bulldozers au moment où cette mosquée
18 tenait encore relativement bien debout. Donc je ne pense pas qu'il
19 s'agissait simplement d'une question de sécurité publique. A mon sens, je
20 pense que c'était une participation active à ces destructions.
21 Et dans un certain nombre d'endroits, et pas seulement dans ce
22 village que j'ai évoqué, mais dans des villes importantes, les décombres
23 des mosquées ont été placées dans les déchargés municipales et enterrées
24 sous des tonnes de détritus. Encore une fois, si les autorités avaient un
25 quelconque respect pour ces monuments, ils auraient simplement retiré les
26 décombres et ils les auraient peut-être conservés quelque part pour pouvoir
27 reconstruire l'édifice. Je ne peux pas en dire davantage. Je ne peux que me
28 livrer à des conjectures sur les actions menées par les autorités sur la
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1 base des éléments que j'ai rassemblées.
2 Q. Mais lorsque vous parlez du cas d'un bâtiment qui est encore intact,
3 est-ce que vous ne pensez pas qu'un expert aurait dû, sur l'élément
4 statique de l'édifice, aurait dû calculer si, oui ou non, cela présentait
5 un quelconque danger pour le public ? Est-ce que vous ne pensez pas que
6 c'était à eux d'en décider ?
7 R. Je pense que là nous commençons à entrer dans le domaine de la
8 spéculation. J'ai quelque expérience en matière d'architecture, et la façon
9 la plus simple, lorsqu'un bâtiment est instable, pour empêcher qu'il ne
10 puisse faire du mal à quelqu'un, c'est de mettre une clôture autour.
11 Q. Et si un bâtiment ne peut pas être reconstruit, est-ce que vous ne
12 pensez pas que ce serait une raison valable de retirer les gravats ?
13 R. Dans bon nombre de cas qui nous intéressent ici, les bâtiments étaient
14 des monuments classés qui revêtaient une importance historique. Et je pense
15 que, dans toute administration qui fonctionne normalement, il eût été
16 considéré normal de conserver ces sites pour pouvoir en envisager une
17 reconstruction éventuelle.
18 Q. Au paragraphe 31, vous parlez des minarets qui avaient été endommagés.
19 Avez-vous établi ou disposiez-vous d'informations indiquant que les
20 mosquées, et plus particulièrement les minarets, servaient de lieux pour
21 les nids de mitrailleuses.
22 Q. Je n'ai eu aucun élément d'information à cet effet. Mais lorsque les
23 minarets étaient encore debout, je regardais très attentivement pour voir
24 si ces minarets comportaient des traces de balles, ou sur le bâtiment, et
25 en général on s'attend, s'il y a des combats qui font rage autour du
26 bâtiment, à ce qu'il y ait des armes de poing qui aient peut-être été
27 impliquées dans cela. Je ne suis pas un expert militaire, très honnêtement,
28 mais je pense qu'un minaret ne constituerait pas une bonne position pour
Page 22585
1 quelqu'un qui dispose d'une mitrailleuse. Parce que l'escalier est assez
2 étroit et le balcon est très exposé. Je ne peux pas en dire davantage sur
3 la question.
4 Q. Merci. Avez-vous remarqué, et si oui, quel élément en particulier, pour
5 ce qui est des explosions ? Vous avez dit que dans la plupart des cas, les
6 engins explosifs avaient été placés à l'intérieur, n'est-ce pas, et que la
7 déflagration avait lieu à l'intérieur de la mosquée, n'est-ce pas ?
8 R. En réalité, je n'ai pas dit cela. J'ai dit que les engins explosifs
9 avaient été placés à l'intérieur de l'escalier du minaret, la cage
10 d'escalier, et non pas à l'intérieur de la mosquée. Et je suis certain
11 qu'il y a des cas où des mosquées étaient plastiquées à l'aide d'engins
12 explosifs placés à l'intérieur, mais dans la plupart des cas, lorsque vous
13 avez un bâtiment comme une mosquée, on regarde d'abord où les premiers tirs
14 ont été lancés, et ensuite on regarde les traces d'explosion au niveau des
15 murs. Ça n'est pas la même chose que le fait de faire exploser les
16 minarets. Parce que, très souvent, les minarets tombaient de telle façon
17 qu'ils tombaient de l'autre côté de la mosquée et fracassaient le toit et
18 le mur. J'ai un certain nombre d'exemples pour illustrer cela. Et je crois
19 que l'idée était de détruire la mosquée. Ce n'était pas accidentel et ce
20 n'était pas une coïncidence non plus.
21 Q. Je vous pose cette question parce que nous faisons valoir, en nous
22 fondant sur les éléments qui nous ont été communiqués, que certaines
23 mosquées contenaient des armes et des engins explosifs et que ces mosquées
24 ont été détruites en conséquence. Et dans certains cas, les dégâts étaient
25 très importants, et les structures contiguës ont été touchées également.
26 Est-ce que vous avez pu remarquer quelque chose comme cela ?
27 R. Encore une fois, c'est une question en deux parties. Pour ce qui est de
28 la première partie, à savoir que ces mosquées contenaient des armes et des
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1 engins explosifs, je n'ai pas vu d'élément ou de preuve de cela, et aucun
2 récit corroboré ne m'a été rapporté sur ce fait. En tout cas, je n'étais
3 pas en mesure d'enquêter dessus.
4 Et pour ce qui est des dégâts très conséquents infligés aux structures
5 contiguës, un exemple que j'ai à donner, c'est quelque chose que j'ai
6 montré aujourd'hui, la mosquée Aladza à Foca, où, en 1996, les bâtiments
7 qui étaient autour présentaient des signes de d'endommagement dus à
8 l'explosion. Mais la mosquée d'Aladza à Foca a été détruite quelques mois
9 après la prise de contrôle de Foca par la VRS, et donc cela m'étonnerait de
10 constater qu'il y avait encore des Musulmans qui auraient caché des armes
11 dans la mosquée dans cette ville, parce que cette ville était déjà sous le
12 contrôle de leurs adversaires de la partie adverse.
13 Q. Mon point de vue est quelque peu différent lorsqu'il s'agit de la
14 portée de l'explosion. Par exemple, l'église catholique de Doboj,
15 lorsqu'elle a été détruite, un certain nombre de structures aux alentours
16 de bâtiments ont été détruites en même temps ?
17 R. Je sais que l'église catholique de Doboj a été détruite par une
18 explosion. Et lorsque je me suis rendu à Doboj en 2002, aucun dégât ne
19 pouvait être constaté au niveau des maisons voisines, mais je ne peux pas
20 exclure que ceci n'ait pas été le cas. Je me suis entretenu avec le prêtre
21 de la paroisse qui m'a relaté la façon dont l'église avait été détruite.
22 Q. Moi, je fais valoir, et c'est ma thèse, Monsieur Riedlmayer, que ceci a
23 été l'œuvre de personnes qui n'étaient pas des professionnels, qui ont posé
24 des engins explosifs de façon non professionnelle. Parce que des
25 professionnels auraient agi différemment, ne pensez-vous pas ?
26 R. Il y a beaucoup de suppositions qui sont faites ici, Monsieur. J'ai
27 entendu des récits de destruction ailleurs qui avaient été l'œuvre de
28 professionnels. Par exemple, les mosquées de Banja Luka. Toutes les
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1 mosquées ont été détruites dans ce secteur au moment du couvre-feu. Et
2 d'après un récit d'un informateur, la mosquée Ferhadija de Banja Luka a été
3 anéantie avant d'être détruite, et les résidents des bâtiments voisins ont
4 eu des consignes, ils devaient ouvrir leurs fenêtres de façon à ce que les
5 fenêtres ou les vitres ne se cassent pas. Il me semble que c'est assez
6 professionnel comme manière de faire.
7 Q. Connaissez-vous un seul bâtiment qui ait été détruit pendant la journée
8 par des professionnels ? Avez-vous entendu parler de professionnels qui se
9 seraient vantés d'avoir détruit de tels bâtiments, ou est-ce que tout ceci
10 s'est fait dans la clandestinité et la nuit ?
11 R. A l'exception d'un petit nombre de cas, j'ai les dates de destruction,
12 mais je n'ai pas l'heure du jour. C'est tout ce que je peux dire par
13 rapport à votre question.
14 Q. Avez-vous entendu parler de quelqu'un qui s'en serait vanté ou qui en
15 serait fier, ou est-ce que ceci s'est fait de façon
16 cachée ?
17 R. J'ai lu un entretien assez long publié dans le magazine "Salam" de
18 quelqu'un qui prétendait avoir fait partie de l'équipe qui avait détruit la
19 mosquée de Prijedor. Ils ont décrit la manière dont ils sont arrivés avec
20 leurs outils et ils ont dit qu'ils avaient un système d'annonce publique.
21 Ils ont annoncé Black Sabbath publiquement sur leur système d'annonce. Ils
22 ont tout sorti, et tout ce qui pouvait être enlevé a été retiré avant sa
23 destruction. Il avait l'air d'être assez fier de cela.
24 C'était quelque chose que je n'ai pas inclus dans mon rapport parce que
25 c'était quelqu'un qui avait un pseudonyme, et parce que le bâtiment n'avait
26 pas été détruit, et parce que cela n'était pas sur la liste des monuments
27 que l'on m'a demandé d'étudier. Mais puisque vous posez la question…
28 Q. Mais le héros a utilisé un pseudonyme, n'est-ce pas ?
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1 R. Oui, tout à fait.
2 Q. Je suis un peu perplexe par rapport aux statistiques que vous avancez.
3 Par exemple, vous parlez de 200 ou je ne sais pas combien, 107 ont été
4 endommagées, et un pourcentage très élevé est mentionné. Je cherche
5 l'endroit en question. Vous en souvenez-vous, n'est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 Q. Je vous ai posé une question à propos des statistiques pour la raison
8 suivante : avez-vous analysé ces 107 mosquées ? A ce moment-là, vous auriez
9 réalisé un pourcentage de 100 % ? N'est-ce pas inhabituel de dire que sur
10 tel et tel nombre des mosquées faisant partie de l'étude, le pourcentage
11 est élevé ? Et le pourcentage aurait été encore plus élevé, à savoir 100 %,
12 si vous n'aviez étudié que ces 107 mosquées ?
13 R. Je ne comprends pas où vous voulez en venir, Monsieur.
14 Q. Moi, je ne sais pas. Vous dites que 107 mosquées ont été détruites et
15 qu'il y a un pourcentage beaucoup plus important qui a fait l'objet
16 d'études, mais par rapport à quoi ?
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons voir le passage.
18 Madame Sutherland.
19 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, j'allais justement demander la
20 citation exacte.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Excusez-moi. Je vais la retrouver. Le témoin
22 sait de quoi je parle, mais je vais retrouver ceci.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Paragraphe 26 pour la version anglaise.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Là où vous faites référence à un total
25 de 266 mosquées; c'est cela ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et vous dites que sur ces 266 mosquées,
28 125 ont été lourdement endommagées; c'est cela ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est le paragraphe auquel vous faites
3 référence, Monsieur Karadzic ?
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, mais c'est une référence que l'on trouve à
5 plusieurs endroits, me semble-t-il.
6 M. KARADZIC : [interprétation]
7 Q. Sur 120, 107 étaient endommagées. Mais dans ce paragraphe, il est
8 indiqué que sur un nombre X de mosquées inspectées -- est-ce que vous
9 acceptez que le nombre de mosquées inspectées est variable et qu'il est
10 assez difficile de dégager une conclusion de ce fait ?
11 R. Monsieur, si vous lisez mon rapport avec attention, vous verrez que je
12 dis dans un paragraphe précédent - et je m'excuse, parce que là je n'ai pas
13 le numéro du paragraphe - mais je dis que dans la plupart des municipalités
14 où nous nous sommes rendus, et je dis "nous" parce que j'étais accompagné
15 d'un chauffeur, j'ai pu étudier la plupart des sites dans toutes les
16 municipalités, j'ai pu m'entretenir avec le conseil local de la communauté
17 islamique ou le prêtre de la paroisse qui m'ont fourni une liste des lieux
18 de culte dans leur zone et qui ont tous, d'ailleurs, proposé de me servir
19 de guide.
20 S'il y a des mosquées intactes que je n'ai pas vues, je serais le
21 premier à être ravi d'en entendre parler, mais ceci étant dit, je ne pense
22 pas qu'il en existe.
23 Q. Bien. Au paragraphe 14, vous dites que vous vous êtes rendu dans 49 %
24 des localités, et vous donnez un pourcentage de 51 %, et ce, d'après
25 d'autres informations qui vous ont été données; c'est cela ?
26 R. Oui, c'est exact.
27 Q. Est-ce que vous aviez un guide serbe qui pouvait également vous fournir
28 des renseignements, ou est-ce que vous avez obtenu tous vos renseignements
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1 de la part des communautés religieuses qui avaient été touchées ?
2 R. Non, non. J'ai obtenu des renseignements d'une grande multitude de
3 sources. Par exemple, de l'institut pour la protection des monuments. Pour
4 ce qui est des sources serbes, je vous dirais que dans un certain nombre de
5 municipalités, je me suis efforcé d'obtenir des renseignements ou les
6 extraits du cadastre pour bien m'assurer que le site sur lequel on m'avait
7 emmené correspondait à une église ou à une mosquée. Je n'ai pas entièrement
8 et seulement été tributaire des communautés religieuses. Toutefois, étant
9 donné qu'ils étaient quand même les parties intéressées essentiellement,
10 ils ont été une source qui a été utilisée, bien entendu.
11 Q. Bien. Au paragraphe 22, vous allez même jusqu'à mentionner la période
12 englobée par l'acte d'accusation, et vous dites qu'il n'y aucune mosquée
13 qui a survécu à la guerre. Vous dites que 15 mosquées, à savoir 5 % du
14 total des mosquées, ont été évaluées comme étant légèrement endommagées.
15 Est-ce que c'est à dessein que vous faites référence à la période comprise
16 ou englobée par l'acte d'accusation ou est-ce que c'est un lapsus de votre
17 part ?
18 R. Non, non. La période de l'acte d'accusation faisait partie du mandat
19 qui m'avait été octroyé. Et comme je vous l'ai déjà indiqué un peu plus
20 tôt, j'ai fait des efforts pour exclure les bâtiments qui avaient été
21 endommagés soit avant, soit après la guerre. Mais la période à prendre en
22 considération est la période de la guerre.
23 Q. Merci. Au paragraphe 23, vous déclarez que les mosquées qui ont des
24 minarets sont visibles de très loin. Est-ce que vous êtes en mesure de nous
25 dire si dans d'autres lieux, d'autres bâtiments, tels que des écoles
26 coraniques ou des écoles théologiques islamiques, sont visibles également,
27 même s'ils n'ont pas ces caractéristiques extérieures visibles ? Est-ce
28 qu'il est difficile de les reconnaître et de la classer par rapport à leur
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1 objectif, tout comme les mosquées ayant des minarets ?
2 R. Monsieur, comme je l'ai indiqué dans mon rapport, les "mektebs", les
3 écoles coraniques et les écoles théologiques islamiques n'ont pas de
4 minaret. Comme je l'ai indiqué dans mon rapport, elles ont été moins
5 détruites en règle générale, et je suppose que c'est parce qu'il est plus
6 difficile de les identifier de l'extérieur. Et lorsqu'elles ont été
7 détruites, je suppose qu'elles ont été détruites soit parce que les gens y
8 sont entrés, soit parce que les gens du coin savaient ce qu'elles étaient.
9 Mais je ne voudrais surtout pas me livrer à des conjectures. Je cite des
10 exemples d'un certain nombre de ces édifices. Ils se trouvent d'ailleurs
11 dans ma base de données, et vous pouvez tout à fait citer des références et
12 nous pouvons en parler.
13 Q. Bien. Au paragraphe 31, vous dites qu'il a été dit fréquemment que
14 toutes les mosquées qui se trouvaient sur le territoire et qui avaient été
15 contrôlées par les forces serbes de Bosnie pendant la guerre avaient été
16 complètement détruites, ce qui n'est pas tout à fait exact. Vous donnez le
17 nom de municipalités où les bâtiments n'ont pas été détruits. Nous pouvons
18 donc supposer, puisqu'il s'agit de politique de l'Etat, que dans ces
19 municipalités la population n'a pas obéi aux autorités centrales, ou peut-
20 être qu'alors il ne s'agissait absolument pas d'une politique de l'Etat ?
21 R. Une fois de plus, je ne veux surtout pas me livrer à des conjectures à
22 propos des mobiles ou des motivations, mais j'aimerais corriger quelque
23 chose dans la question que vous m'avez posée.
24 Au paragraphe 31, j'essaie de faire comprendre quelque chose,
25 j'essaie d'indiquer que tout n'a pas été rasé, que tout n'a pas été nivelé.
26 Lorsque l'on dit "raser complètement" en anglais, cela signifie que non
27 seulement le bâtiment a été rasé, mais qu'il est absolument entièrement
28 détruit, qu'il n'en reste plus rien. Il y a eu beaucoup d'utilisation
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1 d'hyperboles, en quelque sorte. Après la guerre, les gens avaient tendance
2 à exagérer la portée de la destruction. Et très souvent, dans les petits
3 villages, dans les petites localités, les mosquées avaient été complètement
4 détruites, anéanties et rasées -- ou plutôt, cela n'était pas si fréquent
5 dans les petits villages. Cela s'est passé plutôt dans les grandes
6 agglomérations. Et le seul endroit où j'ai remarqué qu'il y avait eu une
7 tentative faite pour détruire une mosquée, c'était à Mrkonjic Grad, à
8 Baljvine.
9 Q. Je vous remercie. Mais la mosquée à Pale, elle n'a pas été détruite non
10 plus ?
11 R. Je n'ai pas accès à ma base de données. Je pense que ce fut
12 effectivement un édifice qui a été légèrement endommagé. Il y a eu des
13 actes de vandalisme, mais non pas des actes de destruction.
14 Q. Merci. Vous avez mentionné aujourd'hui Novoseoci. Est-ce que vous savez
15 quand sont morts les hommes de Novoseoci ?
16 R. Ecoutez, je ne sais pas quand est-ce qu'ils sont morts, quand est-ce
17 qu'ils ont été tués, mais je pense -- enfin, je l'ai lu, j'ai lu un
18 témoignage, et je l'indique dans une note en bas de page, soit pour
19 l'affaire Krajisnik ou l'affaire Brdjanin, probablement pour l'affaire
20 Krajisnik d'ailleurs, ils avaient été vus en vie pour la dernière fois en
21 septembre 1992. Ecoutez, Madame, Messieurs les Juges, vous avez peut-être
22 déjà entendu des témoignages à ce sujet, donc ce n'est pas la peine que
23 j'essaie de résumer ce qui s'est passé. Mais je me souviens que l'on a
24 séparé les femmes des hommes. Les femmes ont dû marcher, enfin franchir la
25 ligne de confrontation en direction de Sarajevo, et puis les hommes n'ont
26 plus jamais été revus jusqu'à ce que leurs corps aient été découverts en
27 dessous des gravats de la mosquée, donc dans le dépotoir à Ivan Polje.
28 Q. Mais vous avez également utilisé des comptes rendus d'audience, n'est-
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1 ce pas, lorsque vous avez rédigé votre rapport ?
2 R. Oui. Oui, oui, j'ai fait référence dans plusieurs paragraphes à des
3 comptes rendus d'audience. Je ne les ai pas beaucoup utilisés, mais j'y ai
4 fait référence lorsque cela était pertinent pour parler d'un monument ou
5 d'un bâtiment précis tel que, par exemple, dans le cas de Novoseoci.
6 Q. Et c'est l'Accusation qui vous a remis ces comptes rendus d'audience ?
7 R. Non, personne ne m'a remis les comptes rendus d'audience. J'ai fait ce
8 que le public peut faire en règle générale. Je suis allé sur le site du
9 Tribunal et j'ai utilisé le moteur de recherche du Tribunal, comme tout un
10 chacun peut le faire.
11 Q. Merci. Est-ce que vous vous souvenez des témoins dont vous avez utilisé
12 les comptes rendus d'audience comme source
13 d'information ?
14 R. Non. J me suis contenté de consigner le passage en question. Je ne me
15 souviens plus des noms.
16 Q. Est-ce que vous vous souvenez des municipalités auxquelles il était
17 fait référence dans les comptes rendus d'audience ?
18 R. Eh bien, il y a un exemple dont je me souviens, Novoseoci, mais il se
19 peut qu'il y en ait d'autres. Novoseoci, qui se trouve dans la municipalité
20 de Sokolac.
21 Q. Merci. Au paragraphe 55, vous faites référence à la bibliothèque de la
22 vieille mosquée de Janja et vous dites que cela a été détruit. Mais est-ce
23 que vous savez que pendant toute la guerre, Janja n'a été habitée que par
24 des Musulmans, qui y résident toujours d'ailleurs ?
25 R. Ecoutez, je me suis rendu à Janja et j'ai parlé à la population là-bas,
26 ce qui explique ce que je sais à propos des manuscrits qui y ont été
27 détruits lorsque les bulldozers sont passés sur la mosquée.
28 Et j'ai également entendu de la part des personnes avec qui je me
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1 suis entretenu, et j'ai également lu cela dans des articles de presse,
2 qu'il y a eu des expulsions de la ville de Janja pendant la guerre. Je me
3 souviens que dans ma base de données il y a trois entrées qui concernent
4 Janja : la vieille mosquée de Janja, la nouvelle mosquée de Janja et les
5 archives dans la bibliothèque de la communauté islamique de Janja. Tout
6 cela a été détruit. Et je dispose de nombreuses photographies. Il y a
7 d'ailleurs une photographie qui a été prise alors que la vieille mosquée
8 était détruite par les bulldozers. Voilà, cela nous a permis de déterminer
9 quand est-ce que cela a été fait puisqu'il y avait une date sur la
10 photographie en question.
11 Il y avait également à Janja des ouvrages qui avaient été publiés et une
12 étude qui a été faite sur les manuscrits avant la guerre.
13 Q. Bien. Nous allons compléter cela avec d'autres éléments. Dans le même
14 paragraphe, vous parlez de Kula Grad à Zvornik. Savez-vous que Kula Grad
15 était entre les mains des Musulmans pendant longtemps, qu'ils ont converti
16 cela en ligne de front, qu'ils ont tiré à partir de là, et ils auraient pu,
17 et peut-être même qu'ils l'ont fait, évacuer tout ce qu'ils souhaitaient
18 évacuer ?
19 R. Je sais qu'après la chute de Zvornik il y avait une résistance à Kula
20 Grad. Je ne suis pas au courant des événements historiques du conflit dans
21 ce secteur, et je ne sais pas ce qui a été évacué.
22 Mais ce que je peux dire et ce dont je peux parler, c'est trois
23 monuments qui se trouvent à Kula Grad. Il y avait un monument qui
24 correspondait à celui que vous avez cité, le lieu de pèlerinage de Hasan
25 Kaimija, et -- que j'ai visité. J'ai un grand nombre de photographies
26 portant sur la période d'avant et d'après la destruction, avant la
27 destruction et la période de reconstruction. Et le deuxième monument de
28 Kula Grad était la mosquée de Kula Grad, dont il ne restait que très peu
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1 d'éléments. Parce que ceci a été détruit par une explosion. Et la troisième
2 est la mosquée d'Avdo Tuhcic, qui se trouvait sur une colline derrière Kula
3 Grad. Cette mosquée-là a été fortement endommagée pendant la guerre
4 également et a été reconstruite par la suite. Et c'est ce dont je peux
5 parler avec précision. Je ne peux pas parler du type de combat qu'il y a eu
6 dans cette région. Mon rapport ne porte pas là-dessus.
7 R. Merci.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions regarder le 1D1606,
9 rapidement.
10 M. KARADZIC : [interprétation]
11 Q. Qui vous a parlé de Kula Grad ? Qui a été votre guide ?
12 R. Alors, mon guide à Kula Grad étai, me semble-t-il, l'imam en chef
13 de Zvornik.
14 Q. Il ne vous a pas informé du fait qu'il y avait une église
15 orthodoxe à cet endroit-là et qu'elle n'y était plus, et il ne vous a pas
16 dit que Zvornik porte le nom de l'église, et plus précisément du clocher de
17 l'église ?
18 R. Je connais cette histoire parce que Branko Grujic, qui était le
19 maire pendant la guerre de Zvornik, a donné de longs entretiens, et il a
20 parlé de l'église orthodoxe médiévale qui prétendument était érigée dans la
21 citadelle et il souhaitait la voir reconstruite.
22 Lorsque j'ai visité la citadelle, on voyait déjà le début d'une
23 reconstruction. On voyait un clocher, mais l'église orthodoxe n'a pas été
24 détruite au cours de cette guerre-là. L'église orthodoxe avait disparu bien
25 des siècles avant cette date. Donc je ne vois pas en quoi ceci serait
26 pertinent dans mon rapport.
27 Q. Monsieur Riedlmayer, cette église a été reconstruite à plusieurs
28 reprises et souvent détruite. Quelqu'un vous a-t-il parlé de cela ?
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1 R. Je ne connais pas en fait l'historique de ce bâtiment dans le
2 détail, mais je sais que cette église n'existait pas à la fin du XXe
3 siècle.
4 Q. Merci. Pourriez-vous, s'il vous plaît, regarder ce document
5 maintenant qui évoque des actions de combat depuis la citadelle de Zvornik
6 et où une demande est faite aux fins de tirer sur Kula parce qu'il y avait
7 des attaques et il y avait des tirs qui provenaient de Kula et il était
8 nécessaire de neutraliser ces tirs ?
9 R. Madame, Messieurs les Juges, Kula Grad est en réalité l'ancienne
10 citadelle turque qui se trouve au-dessus de Zvornik. Zvornik se trouve le
11 long de la rive de la Drina et remonte la colline d'un côté, et l'ancienne
12 forteresse, qui est en ruine, se trouve sur une montagne et surplombe cela.
13 Donc c'est vrai qu'il s'agit d'une position de défense naturelle. J'en
14 conviens.
15 Mais les dégâts provoqués, en tout cas la mosquée qui a été plastiquée, et
16 le dégât provoqué au niveau du lieu de culte ou de pèlerinage de Hasan
17 Haimija avaient l'air très conséquents. Je n'avais pas l'impression qu'il
18 s'agissait d'un effet de tir croisé.
19 Q. Mais vous n'êtes pas un expert militaire, n'est-ce pas ?
20 R. Je ne prétends pas l'être.
21 Q. Merci. Au paragraphe 54, ici, vous parlez de M. Besic, vous parlez de
22 sa carte, et ce qui m'intéresse, c'est de savoir si vous vous êtes penché
23 sur ces aspects-là de notre guerre civile, à savoir les hostilités dirigées
24 contre les symboles religieux, ou est-ce que vous cherchiez simplement des
25 preuves de la culpabilité serbe ?
26 R. Alors, très exactement quelle était votre question ? Comment la
27 destruction d'édifices religieux constitue-t-elle une catégorie à part, par
28 opposition à la catégorie de symboles
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1 religieux ? Je ne sais pas très bien où vous voulez en venir.
2 Q. Ma question porte sur ceci : avez-vous enquêté ou avez-vous analysé ces
3 aspects-là de notre guerre civile, ou cherchiez-vous simplement des preuves
4 de la culpabilité serbe ?
5 R. Eh bien, je pense que nous avons déjà couvert ce domaine. J'ai parlé de
6 mon cahier des charges par rapport à mon étude, j'ai dit que ceci portait
7 sur la destruction de lieux culturels non serbes, édifices culturels.
8 Néanmoins, sur un plan purement professionnel et en tant que chercheur, ce
9 qui est advenu du patrimoine culturel de toutes les communautés en Bosnie-
10 Herzégovine m'intéressait. Et je sais que je n'ai pas fait d'études sur le
11 terrain pour le Tribunal sur ces questions-là parce qu'on ne m'a pas
12 demandé de le faire.
13 Q. Avez-vous rédigé des articles sur les dégâts au niveau du patrimoine
14 culturel et religieux serbe accessoirement ? N'avez-vous jamais publié
15 quelque chose sur la question ?
16 R. Oui, j'ai rédigé un article sur Zitomislic et qui portait sur le
17 patrimoine serbe au Kosovo, et non pas en Bosnie. J'ai publié un certain
18 nombre d'articles là-dessus. Je n'ai pas encore publié quelque chose de
19 plus détaillé sur les dégâts provoqués au niveau du patrimoine culturel
20 serbe en Bosnie, mais j'ai l'intention d'inclure ceci dans une description
21 plus générale de dégâts provoqués pendant la guerre, qui est quelque chose
22 que je mettrais peut-être sur un site internet ou peut-être un article,
23 voire même un livre.
24 Q. Merci. Je pense que je sème peut-être la confusion parce que j'ai un
25 autre document. Mais ce qui m'intéresse, c'est de savoir si vous maintenez
26 l'affirmation, ou si vous la rejetez, que des monuments revêtant une
27 importance historique et culturelle très importante avaient été pris pour
28 cibles pour être détruits ? Est-ce quelque chose que vous avez établi, est-
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1 ce qu'il était de l'intention d'aucuns de détruire ces édifices ?
2 R. Eh bien, les principaux monuments, ceux qui ont été pris pour cible et
3 qui devaient être protégés au plan juridique en vertu des lois en ex-
4 Yougoslavie, ont été davantage endommagés. Alors, je ne sais pas si ceci
5 peut évoquer une quelconque intention ou autre chose, de toute façon je
6 m'en remets aux Juges de la Chambre pour déterminer la question, mais il
7 s'agit en tout cas d'un fait réel. Et il n'y avait pas de sites de
8 patrimoine culturel en Bosnie avant la guerre. Un site a été ajouté à la
9 liste faisant partie du patrimoine culturel, il y a maintenant le pont de
10 Mostar. Il y avait des sites très importants qui ont été détruits, comme la
11 mosquée d'Aladza, qui apparemment devait figurer sur la liste du patrimoine
12 culturel de l'UNESCO. Et il y a eu des pertes innombrables sur le plan
13 culturel, non seulement au niveau des communautés locales, mais des
14 bâtiments qui revêtaient d'une importance historique et culturelle capitale
15 ont été très fortement endommagés, et ce, de façon non proportionnée par
16 rapport à ce qui se passait.
17 Q. Avez-vous une explication à fournir ? Par exemple, est-ce que vous
18 pensez que les bâtiments les plus anciens se trouvent dans les zones
19 urbanisées, plus denses, où l'antagonisme se fait plus présent ?
20 R. Ecoutez, je n'en suis pas sûr. J'ai donné un exemple où un tel
21 bâtiment, la mosquée de Kuslat, qui se trouvait très loin de tout, d'une
22 zone urbanisée, et qui était toute seule. Et la mosquée d'Ustikolina, par
23 exemple, qui se trouve dans un tout petit village et qui était censée être
24 la mosquée la plus ancienne de Bosnie, qui a été complètement détruite. Et
25 je pense que si on devait se livrer à des conjectures sur des explications
26 à fournir et pourquoi ces édifices-là ont davantage attiré l'attention, eh
27 bien, parce que c'étaient des édifices qui étaient plus connus tout
28 simplement et, par conséquent, qui présentaient un plus grand attrait, dans
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1 le mauvais sens du terme.
2 Q. Et la mosquée d'Ustikolina, vous dites que c'est la plus ancienne,
3 quand cette mosquée a-t-elle été construite ?
4 R. A l'origine, à la fin du XVe siècle. 1449 est la date qui est citée,
5 mais je pense que l'ouvrage que nous avons aujourd'hui a été érigé plus
6 tard. Il a été réparé à plusieurs reprises au cours de l'histoire. Les
7 éléments les plus vulnérables des mosquées sont les minarets, qui peuvent
8 être touchés par l'éclair ou endommagés par ailleurs, et donc ce sont en
9 général les éléments qui sont le plus souvent remplacés. J'ai vu une image
10 de la mosquée datant du XIXe siècle où la mosquée avait un minaret assez
11 petit en bois, et par la suite un minaret en pierre a été reconstruit.
12 Donc tous ces bâtiments qui sont utilisés sont des structures vivantes, et
13 je crois que ce que l'on peut dire, c'est qu'on connaît la date de la
14 construction de l'édifice, mais on ne sait pas si l'ensemble du bâtiment
15 correspond effectivement à cette date-là.
16 Q. Merci. Je pose la question parce qu'au paragraphe 27, une réponse s'est
17 glissée. En fait, on parle du début de XIVe siècle, au début des années --
18 oui.
19 R. A quel endroit ?
20 Q. Au paragraphe 27 : 46 % des 281 mosquées faisant l'objet de l'étude
21 remontaient à l'époque ottomane, au début du XIVe siècle --
22 R. Ceci fait référence à l'ère ottomane, et non pas à l'ère des premières
23 mosquées. Les Ottomans sont entrés en Bosnie dans les premières décennies
24 des années 1400.
25 Q. Vous souvenez-vous de l'année ?
26 R. A différentes époques, à différentes dates, 1420, 1430, il y a eu une
27 guerre civile contre les nobles de Bosnie, et ensuite ils ont occupé une
28 partie de la vallée de la Drina. La dernière région à succomber aux
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1 Ottomans était dans le secteur nord-ouest, autour de Bihac, et ceci, un
2 siècle après l'arrivée des Turcs.
3 Q. Merci. L'époque des incursions est une époque qui est différente de
4 celle où la Bosnie a été placée sous le contrôle turc ?
5 R. Il y avait déjà des administrations turques en Bosnie à la fin du XVe
6 siècle. Ils n'ont pas attendu la chute de Bihac pour établir le
7 gouvernement ottoman en Bosnie. Tout ce que je dis, c'est que la Bosnie
8 n'est pas tombée d'un coup. Elle est tombée à des moments différents.
9 Q. Merci. Saviez-vous -- ou connaissiez-vous l'attitude des autorités à
10 cet égard, à l'égard de la destruction des édifices, quels que soient les
11 édifices, qui se trouvaient dans des régions en dehors des zones de combat
12 ? Etiez-vous au courant d'ordres sur la poursuite des auteurs de ces actes
13 ?
14 R. Je suis au courant de l'existence d'un ordre qui d'ailleurs a été
15 réimprimé, il s'agit en fait d'un ouvrage intitulé "Ma défense", qui a été
16 publié alors qu'il était encore en fuite. Il remonte au mois de mai 1993,
17 cet ouvrage, et il a été présenté par M. Milosevic pendant son procès. Je
18 suis informé de l'existence de cet ouvrage.
19 Je ne suis pas au courant de poursuites de personnes responsables de
20 la destruction de mosquées ou d'églises catholiques. Ceci étant dit, vous
21 pouvez toujours éclairer ma lanterne.
22 Q. Merci.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] D106, est-ce que nous pourrions rapidement
24 examiner ce document.
25 M. KARADZIC : [interprétation]
26 Q. J'aimerais entre-temps vous poser une question, car vous dites que les
27 autorités serbes ont construit une église à Divic. Mais est-ce que vous
28 conviendrez que ce ne sont pas les autorités qui construisent des églises;
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1 ce sont les croyants qui construisent des églises ?
2 R. Les croyants, eux, ils construisent des églises à condition d'avoir des
3 permis ou des autorisations de la part des autorités. Ils ne peuvent pas
4 d'ailleurs construire sur un terrain qui ne leur appartient pas. Qui plus
5 est, pour ce qui est de ce cas d'espèce, je pense que la communauté
6 islamique a poursuivi en justice les autorités et il a été décidé que les
7 autorités étaient fautives. Ce fut la décision prise par la chambre
8 responsable pour les droits de l'homme. Après, il a fallu attendre des
9 années pour que cela devienne une réalité.
10 Q. Mais est-ce qu'il s'agit du document auquel vous avez fait référence
11 lorsque j'ai donné l'ordre de renforcer la patrouille et de faire en sorte
12 que les lieux de culte soient protégés ? Et cela, d'ailleurs, en l'année
13 1993, n'est-ce pas ?
14 R. Oui, oui. Oui, oui, tout à fait. C'est un document du 12 mai 1993.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] D1736, je vous prie.
16 M. KARADZIC : [interprétation]
17 Q. Voyez la façon dont les autorités locales de Kljuc condamnent dans un
18 communiqué à la radio les actes commis et mentionnent une enquête portant
19 sur les auteurs de ces actes, à savoir le fait d'avoir détruit la mosquée,
20 et vous voyez quand elle a été détruite, à 3 heures 05 du matin ?
21 R. Y a-t-il une date indiquée ?
22 Q. Je pense que ceci correspond à 1992. Je ne vois pas de date. Le 1er
23 juillet 1992.
24 R. Merci. Alors, concernant le document du 12 mai, je crois qu'il faut
25 relever qu'à l'époque où ce document a été émis, il a été, -- juste après
26 la destruction des principales mosquées du centre de Banja Luka, la
27 Ferhadija et l'Arnaudija, vers le 8 mai. Ce dont je me souviens, encore une
28 fois à partir du procès Milosevic, c'est le fait que concernant Banja Luka,
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1 un ordre a pu être émis, mais à l'époque il y avait d'autres mosquées
2 encore intactes à Banja Luka, et au cours des mois suivants, elles ont été
3 une à une détruites. Au mois de décembre, il n'y en avait plus une
4 subsistant à Banja Luka. Je m'interroge quant à l'efficacité d'un tel
5 ordre.
6 Q. Moi aussi, je m'interroge. Mais est-ce que vous vous rappelez que
7 j'avais qualifié ceci d'acte de terrorisme et que j'avais demandé que l'on
8 traite cela de façon identique à des actes de terrorisme ?
9 R. Je crois que l'ordre se passe de commentaires. Je n'ai pas besoin de
10 commenter ceci.
11 Q. Merci.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on maintenant examiner le document 17581
13 de la liste 65 ter.
14 M. KARADZIC : [interprétation]
15 Q. Voyez ce document. C'est le général Talic, commandant du 1er Corps de
16 Krajina, secret militaire, à traiter comme un document confidentiel. A la
17 date du 23 juin, il donne l'ordre de sécuriser les lieux de culte et de les
18 protéger contre les actes de profanation. Concernant les activités de
19 combat, il indique qu'il n'est permis d'ouvrir le feu en direction de ces
20 lieux du culte seulement si des tirs en proviennent. Il interdit les
21 mauvais traitements infligés aux ministres du culte, et cetera. Est-ce que
22 vous seriez d'accord pour dire qu'il s'agit là d'un exemple de mesures
23 appropriées prises par le commandant de corps ?
24 R. A mon avis, ceci est un type d'ordre susceptible d'être émis par un
25 commandant responsable, en effet.
26 Q. Merci.
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on verser ce document.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous aviez l'intention de
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1 demander le versement de l'ordre du général Jankovic --
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense que ceci a déjà été versé sous la cote
3 D106.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non. Je me référais à 1D1606, concernant
5 Kula Grad, qui était un de vos documents.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je pensais que ceci avait été versé.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je dois me tourner vers le greffe dans
8 ce cas.
9 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est D1606.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Nous allons verser au dossier ce
12 document du 1er Corps de Krajina.
13 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il reçoit la côte D1979, Madame,
14 Monsieur les Juges.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Peut-on maintenant examiner le document
16 numéro 17848 de la liste 65 ter. Juste avant cela, peut-on afficher la page
17 suivante du document qui est à l'écran afin de vérifier quels sont tous les
18 destinataires du document. Est-ce qu'on peut l'afficher ? Bon, tant pis.
19 M. KARADZIC : [interprétation]
20 Q. Voyez ceci maintenant. A la date du 3 août, nous avons un nouvel
21 avertissement portant sur l'interdiction de détruire les édifices du culte.
22 Tous les commandants d'unités se voient ici avertir qu'il convient pour eux
23 d'empêcher des actes aussi inappropriés. Il dit également, je cite :
24 "La non-exécution de mon ordre sera considérée comme une infraction
25 au pénal, et c'est ainsi qu'on procédera à l'avenir."
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons voir la page suivante
27 pour vérifier quelle est la liste de tous les destinataires de ce document
28 émis à la date du 3 août.
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1 M. KARADZIC : [interprétation]
2 Q. Cela a été envoyé à chaque unité. En première page, il est dit :
3 "Secret militaire, strictement confidentiel, à conserver sans limitation de
4 durée." Il ne s'agit pas d'un acte de propagande, il s'agit d'un document
5 strictement confidentiel.
6 Manifestement, son premier ordre du 23 juin n'a pas porté ses fruits.
7 Ou plutôt, Monsieur Riedlmayer, conviendrez-vous qu'un édifice du culte
8 peut également être détruit par quelqu'un qui n'est pas membre de l'armée
9 et que le général Talic n'a, dans ce cas-là, aucune compétence concernant
10 des personnes qui ne sont pas placées sous son commandement ?
11 R. Encore une fois, c'est une double question que vous me posez.
12 Certainement, quelqu'un qui n'appartient pas aux forces armées peut
13 également détruire un édifice du culte. Quant à une limitation de la
14 responsabilité de commandement du général Talic, c'est une question sur
15 laquelle je ne peux pas me prononcer et que je ne peux que laisser à la
16 prestation des Juges.
17 Q. Merci.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on verser ce document.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Il reçoit la cote D1980.
20 M. KARADZIC : [interprétation]
21 Q. C'est à contrecoeur maintenant que je me trouve contraint d'examiner
22 une autre question, celle de votre partialité. Est-il exact que vous avez
23 en diverses occasions exprimé des regrets, par exemple, concernant le fait
24 que la Serbie n'ait pas été condamnée pour génocide en Bosnie ?
25 R. J'ai été témoin pour la partie bosniaque à la CIJ. Dans mon souvenir,
26 je dirais que la Serbie a effectivement enfreint la convention sur le
27 génocide, et ceci, en manquant à son obligation d'empêcher le génocide ou
28 d'en punir les auteurs en Bosnie.
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1 Quant à votre question consistant à me demander si j'avais exprimé
2 des regrets, si j'avais regretté que le jugement ne soit pas allé plus
3 loin, je ne me rappelle pas d'exemple précis, mais je conviens de la chose
4 suivante, à savoir que oui, j'aurais souhaité que le jugement aille plus
5 loin dans la position qui a été prise.
6 Q. Merci.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on examiner le document 1D4903.
8 M. KARADZIC : [interprétation]
9 Q. Il semblerait que ce soit de façon très précoce que vous ayez pris une
10 position très critique à l'égard des Nations Unies, y compris également à
11 l'encontre des hommes politiques occidentaux, en raison de
12 l'incompréhension qui était la leur de la crise, n'est-ce pas ?
13 R. Je ne vois pas de date.
14 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
15 M. KARADZIC : [interprétation]
16 Q. Décembre 1994.
17 R. Oui. C'est l'époque à laquelle le Secrétaire général s'est vu remettre
18 une récompense à l'Université de Harvard. J'ai émis quelques critiques. On
19 me cite ici, et l'on m'attribue les propos suivant, je cite :
20 "Les forces de protection de l'ONU ne peuvent même pas se protéger elles-
21 mêmes, et à plus forte raison, elles ne sont pas en mesure de protéger les
22 zones de sécurité, ni d'assurer la livraison de l'aide ou la surveillance
23 des zones d'exclusion.
24 "Je crois que c'est là un précédent particulièrement grave que de remettre
25 une récompense à quelqu'un pour un échec aussi évident."
26 Je crois que plus tard le Secrétaire général, lui-même, a reconnu l'échec
27 des Nations Unies dans leur mission en Bosnie. Je ne crois pas qu'il y ait
28 quoi que ce soit de controversé ici.
Page 22606
1 Q. Mais vous rappelez-vous que ce même Secrétaire général a déclaré que
2 ces zones de protection étaient devenues des points d'appui armés des
3 forces armées musulmanes qui en abusaient ?
4 R. Je n'ai pas connaissance qu'il ait déclaré quoi que ce soit de ce type,
5 mais ce n'est pas impossible.
6 Q. Je vous remercie.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on maintenant examiner le document 1D4905.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me rappelle ceci : une pétition circulait
9 qui appelait à l'arrestation des fugitifs. Je n'ai pas rédigé le texte de
10 cette pétition, mais j'ai fait partie des signataires. Je crois que des
11 milliers d'autres personnes l'ont signée. Si vous examinez la version
12 anglaise ou bosniaque, il est indiqué, je cite :
13 "Nous, soussignés, estimons qu'il est du devoir moral de nos gouvernements
14 d'ordonner à leur troupes en Bosnie de procéder immédiatement à
15 l'arrestation de Radovan Karadzic et Ratko Mladic qui ont été accusés par
16 le TPIY de génocide et de crimes contre l'humanité."
17 Je crois qu'il s'agit là purement et simplement d'une déclaration factuelle
18 de ce que représentent les faits. Le Tribunal vous a bien mis en
19 accusation, vous-même et le général Mladic, et c'était du devoir des Etats
20 membres des Nations Unies que de mettre à exécution ce mandat d'arrêt des
21 Nations Unies. Je ne vois absolument rien de préjudiciable ici, ni de
22 controversé.
23 Q. Mais combien de pétitions avez-vous signées qui portaient sur d'autres
24 accusés ?
25 R. Je ne m'en souviens pas. J'ai tout à fait pu signer plus d'une
26 pétition.
27 Q. Et ceci, en faveur de l'arrestation de qui ? Savez-vous combien de
28 personnes ont été mises en accusation ici et combien il y a eu de fugitifs
Page 22607
1 ? Pour quelles personnes avez-vous demandé qu'elles soient arrêtées ?
2 R. Manifestement, j'ai souscrit pour vous-même et pour M. Mladic qui étiez
3 les fugitifs les plus en vue de ce Tribunal et qui aviez été en fuite le
4 plus longtemps. Pour la plupart des autres fugitifs, je dirais qu'ils ne
5 représentaient pas une question aussi publique que la vôtre ou celle du
6 général Mladic, en tout cas pas de la même façon.
7 Q. Merci. Pouvons-nous examiner la page 9 de ce même document où figure
8 votre signature. N'est-ce pas ?
9 R. Laissez-moi juste le retrouver.
10 Q. C'est la dernière avant les caractères plus petits.
11 R. Oui, je vois.
12 Q. Merci.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on verser ce document.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous demandez le versement de
15 document précédent aussi ?
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, nous pouvons le verser.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, c'est à vous qu'il revient de
18 décider.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, très bien.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous allons verser les deux
21 documents.
22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, le
23 document 1D4903 reçoit la cote D1981. Le document 1D4905 reçoit la cote
24 D1982. Je vous remercie.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on maintenant examiner le document 1D4907.
26 M. KARADZIC : [interprétation]
27 Q. Vous avez été collaborateur du gouvernement du Kosovo dans les efforts
28 de ce dernier visant à obtenir son indépendance, et vous êtes intervenu en
Page 22608
1 matière de patrimoine culturel, n'est-ce pas ?
2 R. J'ai participé à un projet sous l'intitulé Patrimoine culturel du
3 Kosovo. Nous avons reconstitué un certain nombre de monuments nationaux et
4 de monuments culturels endommagés au Kosovo. J'ai également été engagé pour
5 apporter mon aide dans le cadre de la bibliothèque nationale du Kosovo.
6 Tout ceci est tout à fait public. Et je n'avais rien à voir avec la
7 déclaration de l'indépendance du Kosovo. Nous avons en fait dans ce
8 document une interview avec le Dr Shukriu, et elle me remerciait de mon
9 intervention au Kosovo pour avoir documenté les destructions qui y sont
10 survenues.
11 Je voudrais vous rappeler que j'ai également documenté les
12 destructions du patrimoine culturel serbe au Kosovo et que j'ai été à
13 différents moments en contact avec l'église orthodoxe serbe dans mes
14 travaux où je m'efforçais de travailler également sur le patrimoine
15 culturel serbe au Kosovo.
16 Q. Merci. Alors, cet entretien s'est déroulé dans le cadre des
17 préparatifs qui étaient les siens avant le quatrième round des pourparlers,
18 avec la Serbie, dans un domaine plutôt technique; c'est ce qui est écrit,
19 n'est-ce pas ?
20 R. Eh bien, ce qui est indiqué ici au premier paragraphe, c'est
21 qu'elle se préparait pour cette quatrième série de négociations. Je n'ai
22 pas participé aux négociations, pas du tout. Je me trouvais tout simplement
23 au Kosovo pendant une très courte visite de 48 heures, et j'ai eu un
24 entretien qui a duré peut-être un quart d'heure, photographies y comprises
25 et remerciements y compris dans ces 15 minutes. Si j'avais fait partie de
26 ce round de négociations, cela se serait passé de façon tout à fait
27 différente. La plupart des rencontres que j'ai eues au Kosovo avaient trait
28 au patrimoine culturel au Kosovo et aux autorités qui en étaient
Page 22609
1 responsables et qui utilisaient la base de données, base de données que
2 j'ai également soumise dans le cadre de l'affaire Milosevic, qui était
3 l'une des bases de données utilisées pour l'inventaire des monuments et du
4 patrimoine culturel au Kosovo.
5 Q. Merci.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on verser ce document.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Il reçoit la cote D1983.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Avant la pause, pouvons-nous examiner un
9 document assez bref, 1D4909.
10 M. KARADZIC : [interprétation]
11 Q. Alors, nous devrions avoir quelque part une traduction en anglais. Je
12 vais vous en donner lecture. Il est dit ici :
13 "Contactez Washington. Que l'on entende également votre voix."
14 Et il est question ici -- voilà, je vais lire, je cite :
15 "Si nous n'élevons pas la voix et ne protestons pas, cela signifie que nous
16 aidons l'Occident et ses dirigeants à s'en sortir avec leur nouvelle
17 'politique' envers la Bosnie, ignorer toutes les décisions et les
18 ultimatums qui ont été posés."
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, si nous ne disposons
20 pas de la traduction anglaise, veuillez d'abord nous informer de la nature
21 de ce document.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ici, il s'agit d'une action sur internet, une
23 action de soutien à la partie musulmane en Bosnie. Elle comprend également
24 une lettre de M. Riedlmayer adressée au président Clinton, et pour moi,
25 cette lettre est significative. Peut-on avoir la page 3. M. le Témoin s'en
26 souviendra.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Riedlmayer -- non,
28 excusez-moi. Madame Sutherland.
Page 22610
1 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je m'apprêtais à
2 dire qu'il existe une version anglaise de ce document. Donc, si les Juges
3 de la Chambre ont l'intention de prendre la pause dès maintenant, cela
4 permettra peut-être à la Défense de se procurer la version anglaise du
5 document.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous allons donc faire une
7 pause maintenant, pause d'une demi-heure, et nous reprendrons à 13 heures.
8 --- L'audience est suspendue à 12 heures 28.
9 --- L'audience est reprise à 13 heures 02.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour cette partie de l'audience, la
11 Chambre siège en application des dispositions de l'article 15 bis du
12 Règlement, c'est-à-dire en l'absence du Juge Morrison et du Juge Lattanzi,
13 qui est justifiée par des motifs personnels urgents.
14 Bien. Poursuivons. Monsieur Karadzic.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis malgré tout un peu déçu, car j'aurais
16 souhaité que Mme le Juge Lattanzi soit présente dans le prétoire de façon à
17 ce que je puisse lui présenter mes meilleurs vœux pour les fêtes à venir.
18 Mais je peux toutefois déclarer que j'en terminerai en une demi-heure.
19 Je demande l'affichage du document 1D4909. Est-ce que nous avons bien reçu
20 la traduction en anglais ?
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cette traduction a-t-elle été
22 téléchargée ?
23 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas réussi
24 à la retrouver. Mais de toute évidence M. Riedlmayer a écrit ce qu'il a
25 écrit en anglais, donc il doit s'agir du document à partir duquel une
26 traduction a été réalisée --
27 Mais la Défense n'a pas non plus réussi à le retrouver.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.
Page 22611
1 Est-ce que vous reconnaissez ce document, Monsieur Riedlmayer ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je reconnais cette déposition. Et je reconnais
3 qu'il y a quelques problèmes liés à la traduction.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic, à vous.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons avoir les pages 2 et 3
6 à l'écran.
7 M. KARADZIC : [interprétation]
8 Q. Vous rappelez-vous, Monsieur Riedlmayer, qu'il s'agit d'une lettre que
9 vous avez adressée au président Clinton ?
10 R. Oui, je m'en souviens.
11 Q. Page 3 à l'écran, je vous prie, et je donnerai lecture du paragraphe
12 pertinent. Je cite :
13 "La levée des sanctions sur les armes les aideraient à convaincre
14 l'agresseur que le temps ne joue plus en leur faveur. Le gouvernement de
15 Bosnie, reconnu au niveau international, a accepté tous les plans de paix
16 qui lui ont été soumis, nonobstant la qualité malhonnête ou douloureuse de
17 ces plans. Les extrémistes de Pale, quant à eux, ont rejeté tous les plans
18 qui leur étaient soumis par la communauté internationale."
19 Alors, qui est-ce qui vous a fourni ce genre de renseignement, Monsieur
20 Riedlmayer ? Etant donné que j'ai accepté quatre des cinq plans proposés,
21 alors que les Musulmans ont rejeté le plan Cutileiro qui aurait pu nous
22 aider à empêcher la guerre ? Qui vous a mal informé à ce point ?
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, une question à la
24 fois. Interrompons-nous ici et posons une question à M. Riedlmayer de façon
25 à ce qu'il puisse y répondre.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] D'accord. Tout cela se passait il y a très
27 longtemps, Monsieur le Président, donc je vous réponds de mémoire, mais à
28 l'époque je dépendais de ma lecture de la presse, et je parlais de plans
Page 22612
1 tels que le plan Vance-Owen, qui a été rejeté.
2 Je tiens également à souligner, Monsieur le Président, Monsieur le
3 Juge, qu'avec le temps chacun se forge une opinion par rapport à des
4 situations diverses, et notamment par rapport aux situations politiques. Ce
5 que j'écrivais, je l'écrivais en tant que citoyen des Etats-Unis et
6 j'adressais ma lettre à des représentants élus de mon pays. Ce qui, en soi,
7 n'empêche pas que j'aie pu écrire un rapport factuel objectif et
8 professionnel.
9 Les positions que je défendais à ce moment-là dans les circonstances
10 de l'époque - nous parlons de l'été 1995 - étaient, à mon avis, tout à fait
11 acceptables.
12 M. KARADZIC : [interprétation]
13 Q. Merci. Est-ce que vous saviez que la partie musulmane avait déjà rejeté
14 à ce moment-là l'accord de Lisbonne et qu'elle était très près de rejeter
15 le plan Owen-Stoltenberg ?
16 R. Si je me souviens bien, le gouvernement de Bosnie avait d'abord hésité,
17 et ensuite, sous les pressions, avait fini par accepter le plan Owen-
18 Stoltenberg, alors que la Republika Srpska et son parlement l'ont rejeté.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et qu'en était-il de l'accord de
20 Lisbonne ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] L'accord de Lisbonne a fait l'objet, à un
22 stade très précoce, de nombreuses controverses quant au fait de savoir
23 pourquoi le gouvernement de Bosnie l'avait rejeté. Je ne me rappelle plus
24 exactement les détails, mais cela se passait deux ans avant que je n'envoie
25 cette lettre.
26 M. KARADZIC : [interprétation]
27 Q. Merci. Je vais vous corriger sur un point. Le Parlement serbe a accepté
28 le plan Owen-Stoltenberg, alors que le Parlement de Bosnie, ou le Parlement
Page 22613
1 musulman, l'a rejeté. Mais revenons sur le paragraphe que j'ai cité :
2 "S'agissant de la FORPRONU et du Groupe de contact, les efforts déployés
3 pour parvenir à une solution du conflit de Bosnie sont devenus
4 insignifiants. La seule chose que craignent Karadzic et ses sbires, c'est
5 que leurs victimes puissent réussir à obtenir des moyens pour la défense,
6 voire des moyens financiers."
7 Tout d'abord, est-ce que vous savez que mon gouvernement à l'époque était
8 parmi les gouvernements les plus éduqués d'Europe et que, au nombre de nos
9 représentants gouvernementaux, figuraient un certain nombre de professeurs
10 et de professionnels hautement qualifiés dans divers domaines ?
11 R. C'est exactement le problème qui se pose avec la traduction, le
12 problème dont je parlais tout à l'heure. Mon texte original parlait de
13 personnes hors-la-loi, "outlaw" en anglais qui est un terme tout à fait
14 précis. Cela peut vouloir dire pas mal de choses, depuis des fugitifs qui
15 fuient la loi jusqu'à des bandits de grand chemin, mais cela peut également
16 avoir une connotation se référant à des actions qui sont contraires à la
17 loi. Il y a des gouvernements félons, il y a des organisations félonnes.
18 Je vous rappellerais, Monsieur, que le gouvernement de Bosnie était le
19 gouvernement d'un Etat membre des Nations Unies. C'était un Etat qui
20 jouissait de la reconnaissance internationale, alors que vous aviez un
21 ministre des Affaires étrangères, mais pour autant que je le sache, vous
22 n'étiez même pas officiellement reconnu par la Serbie. Et deuxième point,
23 il y avait une longue liste de résolutions des Nations Unies qui
24 exprimaient une certaine méfiance par rapport à vous. Je l'indique car le
25 motif se trouvait dans des actions contraires à la loi commise par vous.
26 Tout ceci étant dit, c'était quelque chose de très particulier à
27 l'époque, et cela se passait bien avant qu'on ne m'ait demandé d'intervenir
28 en tant que témoin expert devant ce Tribunal.
Page 22614
1 Q. Je vous remercie. Savez-vous que le gouvernement de Bosnie ne peut
2 exister qu'aussi longtemps qu'il se compose de représentants légitimes des
3 trois populations, et non de deux, et que nous représentions la troisième
4 partie prenante du gouvernement.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, n'entrons pas dans ce
6 sujet. Veuillez poursuivre.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
8 M. KARADZIC : [interprétation]
9 Q. Encore une question. Savez-vous que pendant toute la guerre, la partie
10 musulmane a reçu des armes en Bosnie ?
11 R. Cela ne me surprendrait pas, mais ce n'est pas une question qui relève
12 de mon domaine de spécialité.
13 Q. Merci.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Etant donné que j'ai donné lecture de ce
15 passage, est-ce que je peux en demander le versement au dossier.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce document peut être admis au dossier
17 étant entendu que la traduction anglaise soit téléchargée en temps utile
18 dans le prétoire électronique.
19 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons pour l'instant l'enregistrer
21 aux fins d'identification par souci de sécurité.
22 Mme SUTHERLAND : [interprétation] C'est l'original qui est en anglais,
23 Monsieur le Président. Il ne s'agit pas de traduction anglaise.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, oui, effectivement, la traduction
25 n'est pas une traduction en anglais.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, vous vous rappellerez
27 peut-être que ce document a déjà été produit pendant l'affaire Karadzic --
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous parlez sans doute de l'affaire
Page 22615
1 Milosevic ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, pardon, je pensais à l'affaire
3 Milosevic. Toutes mes excuses.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Aucun doute que l'Accusation
5 retrouvera ce document.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, le document
9 D4909 devient la pièce D1984, enregistrée aux fins d'identification. Merci.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document 1D4910.
12 M. KARADZIC : [interprétation]
13 Q. Nous sommes ici face à une situation assez comparable à celle de tout à
14 l'heure, c'est-à-dire que l'original est en anglais, et la traduction à
15 partir de l'anglais.
16 Vous avez créé, n'est-ce pas, une organisation dont le nom est Action
17 de coalition bosniaque ? Ou alors, vous en étiez membre ?
18 R. J'en étais membre.
19 Q. Je vous demande, en l'absence de traduction, si vous vous rappelez que
20 vous avez eu un entretien avec des représentants de cette organisation ?
21 Nous avons le texte de cet entretien; c'est celui qui est à l'écran en ce
22 moment.
23 R. Est-ce que vous avez la date ?
24 Q. Nous allons la rechercher. Elle ne figure pas sur le texte de la
25 traduction.
26 R. J'ai un vague souvenir de ceci, mais cela s'est passé il y a très
27 longtemps. J'étais interrogé au sujet de Dayton et de ses conséquences.
28 C'est bien de ce document-là que nous parlons ?
Page 22616
1 Q. Oui. Affichage de la page 2, je vous prie. Dans cette interview, vous
2 parlez de façon assez péjorative d'un certain nombre de représentants
3 politiques américains et d'Europe occidentale. Le pouvoir a joué un rôle
4 très important pour décourager le gouvernement Clinton de jouer un rôle
5 actif, et cetera.
6 Vous vous rappelez de tout cela, n'est-ce pas ? Vous avez évoqué la
7 doctrine Powell également ?
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde. Pourrait-on peut-être
9 agrandir le texte à l'écran, que les interprètes puissent le lire plus
10 facilement.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. On pourrait agrandir le bas du texte, le
12 bas de la page.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
14 M. KARADZIC : [interprétation]
15 Q. Voilà, nous lisons :
16 "Aux Etats-Unis, le général Colin Powell, membre de l'état-major conjoint,
17 a joué un rôle très important au sein du gouvernement américain pour que
18 celui-ci joue un rôle-clé. 'Nous parlons de déserts, et non de montagnes,"
19 a dit avec insistance le général Powell."
20 Vous évoquez cela comme étant la doctrine Powell. Et un peu plus bas dans
21 le texte, nous lisons, je cite :
22 "Le président Clinton, déjà affecté par le succès de la contre-attaque du
23 général Powell, Powell qui a réussi à empêcher la présence d'homosexuels
24 dans l'armée américaine --"
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Plus lentement, je vous prie.
26 M. KARADZIC : [interprétation]
27 Q. Dans ce paragraphe, vous êtes très critique de l'action du président
28 Clinton, n'est-ce pas ?
Page 22617
1 R. Oui.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Affichage de la page 8, je vous prie.
3 M. KARADZIC : [interprétation]
4 Q. Savez-vous, Monsieur Riedlmayer, que les Serbes considèrent que les
5 Musulmans sont Serbes à l'origine et que nous sommes fiers du fait que les
6 plus grandes personnalités musulmanes, telles que Selimovic et, avant lui,
7 Hasan Ribac, ou Osman Djikic, soient des Serbes, et que nous les
8 considérons comme des Serbes ?
9 R. Je sais qu'il y a certains Musulmans qui s'identifient comme étant
10 Serbes. Je sais également que les nationalistes serbes affirment avec
11 insistance que les Musulmans sont des Serbes convertis à l'Islam. De même,
12 les nationalistes croates affirment avec insistance que les Musulmans sont
13 en fait des Croates. Je pense que ce qui importe, c'est ce que chacun pense
14 être lui-même, plutôt que de savoir ce qu'une tierce personne affirme avec
15 insistance quant à ce que vous êtes.
16 Q. Je suis d'accord, mais je vous disais que nous sommes fiers de savoir
17 que certaines des personnalités les plus importantes et les plus créatives
18 parmi celles qui ont embrassé la religion musulmane ont veillé à conserver
19 leurs racines. Mais voyons ce que vous dites dans cette page, comment est-
20 ce que vous répondez aux accusations selon lesquelles vous présentez le
21 conflit de façon simpliste comme étant un conflit opposant les méchants
22 Serbes à leurs victimes impuissantes. Voilà quelle est votre réponse à
23 cette affirmation, je cite :
24 "C'est une façon méprisante de décrire la situation. Tout d'abord, il ne
25 s'agit pas du conflit entre une nation victime et une nation qui serait
26 l'agresseur. C'est un conflit plus complexe. Les nationalistes serbes,
27 dirigés par Karadzic, croient en un Etat pur sur plan racial et sur le plan
28 ethnique. Pour obtenir l'existence d'un tel Etat, ils ont expulsé et tué
Page 22618
1 tous ceux dont ils estimaient qu'ils n'avaient pas des origines pures, un
2 sang serbe pur. Ils ont considéré qu'il était un crime pour des non-Serbes
3 de se marier ou d'avoir des rapports sexuels avec eux. Les 20 % à 30 % de
4 personnes mariées dans un couple mixte en Bosnie ont été décrétés citoyens
5 de deuxième zone qui devaient être éliminés," et cetera, et cetera.
6 Qui vous a poussé à adopter une telle position dans cette interview ?
7 R. D'accord. Je devrais revoir la version anglaise de ce texte pour
8 vérifier les mots exacts que j'ai utilisés. Je dirais que ce n'est pas la
9 position que j'ai aujourd'hui. Les choses sont très simples. Aujourd'hui,
10 je dispose de renseignements dont je ne disposais pas à cette époque-là.
11 Manifestement, nous sommes ici face à une action de défense, et les
12 mots prononcés par moi viennent des sentiments que je ressentais, mais je
13 répète une nouvelle fois ici que ce processus s'est déroulé il y a plus de
14 20 ans et qu'au cours de 20 ans, chacun d'entre nous apprend beaucoup.
15 Q. Merci. Vous convenez que vous n'avez pas eu sous les yeux le moindre
16 texte législatif qui aurait été de nature discriminatoire, que ce soit sur
17 le plan politique ou sur le plan racial, si je puis m'exprimer ainsi, même
18 si les Musulmans et nous-mêmes appartenons à la même race et que, à notre
19 avis, nous faisons partie également du même groupe ethnique ?
20 R. Je ne connais pas toute la législation de votre gouvernement. Je sais
21 que des accusations figurent dans ce document selon lesquelles les mariages
22 mixtes étaient interdits et que ceci est une erreur. Ce qui est dit dans ce
23 texte est fondé sur certaines informations erronées. Depuis, j'ai appris un
24 certain nombre de choses, et en particulier la réalité qu'il y avait
25 derrière toute cette situation, à savoir que les membres des couples mixtes
26 étaient encouragés à émigrer, ce qui n'est pas tout à fait la même chose,
27 je l'admets. Mais voilà quel était l'état de mes connaissances à cette
28 époque-là. Si je me souviens bien, avant la fin de la guerre, aux environs
Page 22619
1 du mois d'octobre, c'est encore le genre d'information qui circulait au
2 moment où les négociations de Dayton étaient en cours.
3 Q. Merci. Si je devais vous dire qu'au sein de mon bureau, des Musulmans
4 et des représentants de familles musulmanes jouissant de ma confiance la
5 plus entière travaillaient à mes côtés, étaient mes collaborateurs les plus
6 proches et qu'ils provenaient de mariages mixtes, est-ce que ceci vous
7 aiderait à rejeter les conceptions erronées qui étaient les vôtres ?
8 R. Je viens de le dire, je me suis écarté de ces positions. J'ai désavoué
9 ces conceptions erronées il y a déjà de nombreuses années.
10 Q. Merci.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Si le fait que j'aie donné lecture du passage
12 qui m'intéressait suffit pour obtenir le versement au dossier, Excellences,
13 je vous demande le versement avec un enregistrement aux fins
14 d'identification en attente de traduction comme pour le document précédent.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons l'enregistrer aux fins
16 d'identification en attente de traduction.
17 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document devient la pièce D1985,
18 enregistrée aux fins d'identification.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document 4923.
20 M. KARADZIC : [interprétation]
21 Q. Ce document est intitulé "Génocide spirituel", et il est tiré du site
22 internet de l'église orthodoxe serbe.
23 Je demande l'affichage de la page 7. Ce n'est pas le texte qui m'intéresse,
24 ce sont les photos. Agrandissement, je vous prie, à l'écran.
25 Est-ce que les images que l'on voit ici sont plus agréables ou plus
26 acceptables que celles que vous avez montrées tout à l'heure, ou est-ce que
27 la situation que décrivent ces images est assez
28 similaire ?
Page 22620
1 R. On voit ici l'image d'une église qui semble avoir été plastiquée. Je
2 connais le livre et je connais les illustrations que l'on trouve dans cet
3 ouvrage.
4 Q. Ce que nous voyons ici était une basilique. Elle avait été construite
5 en 1853.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le bas de la page à présent.
7 M. KARADZIC : [interprétation]
8 Q. Je vais lire ce passage du texte, je cite :
9 "L'église du saint martyr de George à Donja Sopotnica est parmi les églises
10 les plus anciennes qui aient été construites entre 1539 et 1631 -- "
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, quelle est la
12 pertinence de ce passage ? Passez à votre sujet suivant.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, je voulais que l'on voie tout de
14 même quelle était la situation de l'autre côté, car cette église Herceg
15 Stjepan est une église très ancienne --
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce n'est pas un sujet correspondant aux
17 connaissances de ce témoin.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie. Page suivante à l'écran
19 pendant quelques instants. Je ne vais pas lire quoi que ce soit, mais je
20 voudrais simplement que chacun puisse voir quelle était la situation grâce
21 aux illustrations.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non. Passez à votre sujet suivant.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document 1D4924, et
24 je demanderais le versement au dossier du document que je suis en train de
25 faire afficher.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non, je ne l'autoriserai pas.
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne parle pas du document précédent. Je parle
28 de celui dont je demande l'affichage maintenant, le 1D4924.
Page 22621
1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Sur votre liste, nous lisons "Lieux de
2 culte orthodoxe endommagés dans l'ex-Yougoslavie." Cela n'a rien à voir
3 avec la déposition de ce témoin, Monsieur Karadzic. Arrivez-en à vos
4 dernières questions, je vous prie.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, la thèse que je défends consiste à
6 dire que des habitants de ces localités ont fui et sont devenus des émigrés
7 et que le chaos créé par la guerre civile a donné lieu à toutes ces
8 conséquences. Et qu'il importe, dans des conditions aussi complexes, de
9 comprendre de façon approfondie les événements qui ont eu lieu dans le
10 cadre de ce qui était une guerre civile, de comprendre en particulier que
11 tous les événements qui ont eu lieu ne sont pas nécessairement de la
12 responsabilité d'un gouvernement, mais qu'ils sont la conséquence d'une
13 guerre civile. Enfin, si vous refusez que je présente cette thèse, je
14 passerai à autre chose.
15 [La Chambre de première instance se concerte]
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre est d'un avis unanime à ce
17 sujet. Veuillez passer à votre sujet suivant, Monsieur Karadzic.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] En fait, Excellences, je serais en position
19 d'en terminer à ce stade. Je souhaite remercier M. Riedlmayer. Je vous
20 souhaite bon voyage et bonnes fêtes, comme à tous d'ailleurs, comme à tous
21 les présents, les Juges de la Chambre ainsi que toutes les personnes
22 présentes. Je leur souhaite bonnes fêtes et tous mes meilleurs vœux.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland.
25 Mme SUTHERLAND : [interprétation] J'ai quelques points à apporter, Monsieur
26 le Président.
27 Nouvel interrogatoire par Mme Sutherland :
28 Q. [interprétation] Monsieur Riedlmayer, ce matin, M. Karadzic, en page 35
Page 22622
1 du compte rendu d'audience, a indiqué ce qui suit. Il a dit, je cite :
2 "Voyez-vous un lien entre la destruction d'un ensemble de bâtiments et
3 celle d'un autre ensemble de bâtiments ? Ne voyez-vous pas que le second
4 événement est le résultat d'un désir de revanche ou de représailles ?"
5 Ensuite, vous avez répondu et, entre autres, vous avez indiqué, je cite :
6 "Je soulignerais que dans la plupart des localités de Bosnie, la
7 destruction n'intervenait que d'un seul côté, et je garderais à l'esprit
8 l'enchaînement des événements."
9 Vous vous rappelez le premier transparent qui vous a été présenté ce matin
10 concernant la mosquée de Mutnik à Kozarac, transparent P04071. Pendant
11 qu'on attend l'affichage, savez-vous ce qu'il est advenu de l'église serbe
12 orthodoxe de Kozarac ?
13 R. Pour autant que je le sache, elle est restée intacte pendant toute la
14 durée de la guerre.
15 Q. Nous avons vu ceci ce matin. Si nous pouvions voir la page numéro 11.
16 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pièce P00550.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais si ceci est autorisé, on devrait
18 m'autoriser aussi à présenter des documents concernant des édifices serbes.
19 Mme SUTHERLAND : [interprétation]
20 Q. Monsieur Riedlmayer, est-ce bien ce dont je parlais ?
21 R. C'est la vieille église de Kozarac, la vieille église serbe.
22 Q. Savez-vous quelle était la distance entre la mosquée de Mutnik et cette
23 église ?
24 R. Elles n'étaient pas très éloignées l'une de l'autre.
25 Q. Le deuxième sujet que je souhaitais aborder figure en page 42 du compte
26 rendu d'aujourd'hui. M. Karadzic vous a demandé si vous étiez au courant de
27 l'existence de héros qui se seraient vantés d'avoir fait sauter certains
28 édifices. Je voudrais passer un bref enregistrement vidéo d'un discours du
Page 22623
1 commandant du Corps de la Drina, le général Milenko Zivanovic, le 12
2 juillet 1995.
3 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Le numéro 65 ter est 40538 [comme
4 interprété]. La transcription de l'extrait vidéo qui va être diffusé figure
5 dans le document de la liste 65 ter numéro 03098 [comme interprété]. Ceci
6 commence en page 16, bas de la page 16, jusqu'à la page 17. La vidéo est
7 sous-titrée, Messieurs les Juges.
8 L'INTERPRÈTE : Note de la cabine française : Les interprètes n'ont pas reçu
9 de transcription nonobstant la présence de sous-titres.
10 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Le temps à partir duquel je souhaite
11 faire démarrer la diffusion de cet enregistrement est 00:38:36.4 [comme
12 interprété].
13 [Diffusion de la cassette vidéo]
14 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Nous nous sommes arrêtés à la cote temps
15 00:39:32.5.
16 Q. Monsieur Riedlmayer, savez-vous s'il y a eu la moindre mosquée détruite
17 --
18 L'INTERPRÈTE : Note de la cabine française : Mme Sutherland pourrait-elle
19 répéter sa question en parlant plus lentement ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai couvert Srebrenica. Pour le
21 procès précédent, je me suis rendu à Srebrenica pour une étude. Srebrenica
22 disposait de cinq mosquées. Toutes étaient détruites. Vous pouvez voir le
23 minaret dans la vidéo de Petrovic, lorsque les troupes serbes entrent en
24 ville. Et ensuite, au cours des jours suivants, vous disposez également de
25 photographies montrant les dommages subis par les mosquées suite aux
26 explosions. Au moment où je me suis rendu sur place, elles avaient été
27 toutes réduites à l'état de décombres. L'une des mosquées en face de
28 l'église serbe de l'autre coté de la place du marché avait été complètement
Page 22624
1 rasée et l'on avait disposé des épaves de véhicules au-dessus de
2 l'emplacement. La vieille mosquée n'avait plus que des fragments de mur
3 debout. La même chose s'appliquait à la mosquée située à l'entrée nord de
4 Srebrenica, au quartier général de la communauté musulmane ainsi que dans
5 la mosquée de Petric Mahala. Complètement détruite. Il ne restait que des
6 ruines.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste un instant. L'ensemble des
8 monuments culturels détruits auxquels se réfère l'acte d'accusation
9 correspond à 1992, n'est-ce pas ? Annexe D.
10 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je crois qu'il y a également peut-être
11 quelque dates en 1993.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai une objection à cela.
13 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Vous avez raison, Monsieur le Président,
14 c'est 1992, mais ceci se rapportait à une question posée par M. Karadzic.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cette vidéo concerne 1995, alors je vous
16 invite à passer à autre chose.
17 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je ne demande
18 pas le versement de cet enregistrement vidéo.
19 Q. Monsieur Riedlmayer, la deuxième question que je souhaite vous
20 soumettre --
21 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je voudrais juste corriger le compte
22 rendu. Page 76, ligne 15, le numéro de document dans la liste 65 ter pour
23 l'enregistrement vidéo est de 40582.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Juste pour le compte rendu d'audience, puis-je
25 dire simplement que ceci ne découle pas de ma question. Moi, j'ai posé une
26 question qui portait sur les terroristes, alors que le général Zivanovic
27 parle de combats et d'attaques. Moi, j'ai demandé si c'était en secret ou
28 en public qu'ils procédaient à des destructions --
Page 22625
1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci n'est pas utile. Avancez.
2 Mme SUTHERLAND : [interprétation]
3 Q. En page 55 du compte rendu d'aujourd'hui, Monsieur Riedlmayer, M.
4 Karadzic vous a demandé si vous étiez informé de l'attitude de ces
5 autorités à l'égard de la destruction de tout édifice se trouvant en dehors
6 des zones de combat. Vous rappelez-vous de quoi que ce soit qui aurait été
7 déclaré par les autorités serbes de Prijedor concernant la destruction des
8 édifices religieux, notamment de Bijeljina ?
9 R. Je me rappelle un entretien avec Simo Drljaca, qui était le chef de la
10 police de Prijedor et qui, je crois, avait une certaine autorité sur
11 d'autres parties de la Krajina de Bosnie. Il disait que pour les mosquées,
12 il n'était pas suffisant d'en détruire les minarets, mais qu'il fallait
13 aller jusqu'à détruire les fondations. Et que c'était là le seul moyen de
14 faire partir les Musulmans sans aucune possibilité de retour ni de
15 reconstruction.
16 Q. Et pour finir, en page 47 du compte rendu d'audience, M. Karadzic a
17 avancé que la mosquée de Pale n'avait pas été détruite non plus. Vous avez
18 répondu en indiquant que vous n'aviez pas accès à votre base de données.
19 Peut-être que Mme l'Huissière pourrait vous apporter son aide en vous
20 remettant cette version papier de la base de données que vous avez
21 constituée. Avec un post-it de couleur jaune, j'ai indiqué le début de la
22 section consacrée à la municipalité de Pale.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je dois encore une fois --
24 Mme SUTHERLAND : [interprétation]
25 Q. Est-ce que vous pourriez examiner très rapidement l'étude à laquelle
26 vous avez procédé --
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, Mme Sutherland.
28 Quelle est votre objection, Monsieur Karadzic ?
Page 22626
1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas parlé de villages de la
2 municipalité de Pale, mais de la ville de Pale elle-même. Je sais qu'il
3 s'est passé toutes sortes de choses dans les villages, mais dans la ville
4 de Pale elle-même, c'est sur cela que portait ma question. C'est là-bas que
5 nous trouvons aussi bien une mosquée qu'une église catholique qui soient
6 restées intactes.
7 Mme SUTHERLAND : [interprétation]
8 Q. Monsieur Riedlmayer, est-ce que vous pourriez nous donner votre
9 confirmation après avoir vérifié --
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.
11 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
12 [La Chambre de première instance se concerte]
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.
14 [La Chambre de première instance se concerte]
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Puisque vous n'aviez pas limité votre
16 question à la seule ville, nous allons permettre à Mme Sutherland de
17 poursuivre.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien. Les entrées qui concernent Pale
19 concernent tous les villages à l'exception de l'église catholique qui est
20 en ville. Je ne disposais d'informations précises concernant la mosquée de
21 Pale. Vous vous rappellerez peut-être que dans mon rapport, j'ai pris garde
22 à n'inclure que des sites pour lesquels des photographies et/ou des
23 informations croisées et vérifiées étaient disponibles. Mais j'ai entendu
24 dire que la mosquée de Pale a subi des actes de vandalisme sans avoir pour
25 autant été détruite.
26 Mme SUTHERLAND : [interprétation]
27 Q. Et les enregistrements de votre base de données concernant Pale ?
28 R. Il y a là plusieurs villages. Praca, où la mosquée a été complètement
Page 22627
1 détruite. Il y avait une vieille mosquée datant du XVIe siècle. A Podvitez,
2 par exemple, ainsi qu'à Bogovici, nous avons là deux exemples de villages
3 où les mosquées ont été détruites. Dans la ville de Pale, les statues
4 votives de saints sur l'autel principal ont été détruites dans l'église
5 catholique, mais l'église catholique elle-même n'a pas subi de dommage pour
6 ce qui est de sa structure.
7 Cela se limite à ceci -- non, il y a également Praca. A côté de la mosquée,
8 il y avait un mausolée qui a subi des dégâts, qui a été légèrement
9 endommagé. C'est là toute l'étendue dans laquelle j'ai traité de la
10 municipalité de Pale. Je dois dire que cette demande d'inclure la
11 municipalité de Pale n'est arrivée qu'en avril 2009 et que je n'ai pas été
12 en mesure de me rendre compte de visu de ce qu'il en était de l'ensemble de
13 cette municipalité. Je me suis appuyé sur une documentation photographique
14 pour tout ceci.
15 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci, Monsieur Riedlmayer. Je n'ai pas
16 d'autres questions.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Ceci met un terme à votre
18 déposition, Monsieur Riedlmayer. Au nom des Juges de la Chambre, je
19 souhaite vous remercier de votre venue encore une fois devant ce Tribunal
20 pour déposer.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, et merci de vous
22 être assuré de la possibilité de mon départ à temps.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie pour votre indulgence.
24 Je vous souhaite un bon voyage de retour, et vous pouvez disposer dès
25 maintenant.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
27 [Le témoin se retire]
28 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, juste une question
Page 22628
1 encore. Le document D01736, le document de la radio de Kljuc présenté par
2 M. Karadzic. Vous avez demandé une date -- ou plutôt, M. Riedlmayer a
3 demandé s'il y avait une date sur ce document. M. Karadzic a donné celle du
4 1er juillet 1992. En fait, le document n'est pas daté.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
6 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Excusez-moi, j'aurais dû également
7 relever que le rapport expurgé et les enregistrements expurgés ont été
8 chargés dans le système cet après-midi.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. J'en prends note.
10 Avant de lever l'audience, Monsieur Tieger, j'ai été informé que la Chambre
11 a reçu une copie de la requête demandant une prorogation du délai de
12 communication. Il serait probablement utile d'entendre la réponse de la
13 Défense. Pourriez-vous donc expliquer oralement -- ou en tout cas aborder
14 ceci oralement afin que M. Karadzic en soit informé et comprenne de quoi il
15 s'agit.
16 M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Comme c'est
17 indiqué dans notre requête, l'Accusation s'est acquittée des recherches
18 nécessaires et est prête à communiquer le résultat de ses recherches, à
19 savoir les documents retrouvés dans ces bases de données et ces archives,
20 en tout cas celles qui sont accessibles. Pendant ce travail, et dans le
21 cadre de l'effort qui a été accompli, comme nous le décrivons dans notre
22 requête, nous nous sommes conformés intégralement aux instructions des
23 Juges de la Chambre.
24 Pendant que ce travail était fait, cependant, nous avons relevé qu'il
25 y avait des références à certains documents qui n'ont pas été retrouvés au
26 cours des recherches. Nous avons donc envisagé la possibilité de
27 l'existence de tels documents en d'autres endroits qui auraient été soit
28 inconnus, soit inaccessibles aux représentants de l'Accusation. C'est la
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1 raison pour laquelle nous avons proposé de procéder à des recherches
2 supplémentaires en vue de nous conformer davantage encore à l'ordonnance de
3 la Chambre et de minimiser les risques d'être passé en quelque sorte à côté
4 de documents existants. Mais avant de procéder de la sorte, un temps non
5 négligeable sera nécessaire pour procéder à des recherches manuelles et
6 pour scanner certains documents, ainsi que pour procéder à des recherches
7 électroniques. Dans l'ensemble, nous avons estimé que ce processus de
8 recherche supplémentaire ne pourrait être achevé avant le 31 janvier de
9 l'année prochaine, et c'est pourquoi nous avons demandé une prorogation de
10 délai à cet effet.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, est-ce que vous avez
12 suivi ?
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. En fait, je préfère que ce soit Me
14 Robinson qui se charge de ce type de question, mais je crois que nous
15 aurions plutôt tendance à accepter ceci. Puisqu'il ne semble pas y avoir
16 d'alternative. Il est essentiel qu'à l'issue de ce processus nous nous
17 voyions octroyer, nous aussi, le temps nécessaire et suffisant à l'examen
18 de toute cette documentation.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. La Chambre estime que votre
20 demande est raisonnable. Par conséquent, il y est fait droit, Monsieur
21 Tieger.
22 A moins qu'il y ait d'autres sujets à apporter à notre attention,
23 l'audience est à présent levée. Nous allons reprendre nos débats à la date
24 du 10 janvier, Monsieur Tieger, date à laquelle vous avez prévu une
25 vidéoconférence à 8 heures du matin, n'est-ce pas ?
26 M. TIEGER : [interprétation] C'est cette date-là que nous visons, Monsieur
27 le Président. Bien entendu, les Juges de la Chambre seront informés de
28 toute complication éventuelle, mais nous espérons que cela ne sera pas le
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1 cas. Et nous nous attendons à ce que la reprise se fasse le 10.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je m'en réjouis, parce que le 9 janvier c'est
3 la journée de la Republika Srpska et, par conséquent, c'est un jour qui ne
4 sera pas ouvré pour nous. Donc je me réjouis que nous ne siégions pas ce
5 jour-là.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je souhaite à tout un chacun de bonnes
7 fêtes.
8 L'audience est levée.
9 --- L'audience est levée à 13 heures 50 et reprendra le mardi 10 janvier
10 2012, à 8 heures 00.
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