Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 26 avril 2012

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 19.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes.

  7   Du fait de difficultés techniques, nous avons dû déménager vers le prétoire

  8   numéro III, et ça généré 15 minutes de retard pour ce qui est du début du

  9   procès.

 10   Où en étions-nous ? Madame West, veuillez continuer.

 11   Mme WEST : [interprétation] Merci. Bonjour, Madame, Messieurs les Juges.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, excusez-moi, j'ai omis de dire que

 13   nous étions en train de siéger en application du 15 bis, du fait de

 14   l'absence du Juge Morrison.

 15   LE TÉMOIN : EWA TABEAU [Reprise]

 16   [Le témoin répond par l'interprète]

 17   Mme WEST : [interprétation] Je voudrais que l'on nous montre le 65 ter

 18   11218, et ce qu'il nous faut, c'est la page 37 au prétoire électronique.

 19   Interrogatoire principal par Mme West : [Suite]

 20   Q.  [interprétation] Bonjour, Madame Tabeau.

 21   R.  Bonjour.

 22   Q.  Je voudrais vous rappeler, et me remémorer aussi, la nécessité de

 23   parler plus lentement.

 24   R.  Oui, bien sûr.

 25   Q.  Une fois que vous allez fournir votre réponse, je vais faire une pause

 26   pour que le compte rendu puisse nous rattraper.

 27   Hier, lorsque nous nous sommes arrêtées, on était en train de parler des

 28   sources que vous aviez utilisées pour la rédaction de votre rapport relatif


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  1   aux municipalités. Vous avez dit avoir utilisé le recensement de 1991, vous

  2   avez également utilisé des registres d'électeurs datant de 1997.

  3   Alors est-ce que vous pouvez nous rappeler combien de personnes il y a eu à

  4   être enregistrées pour le vote de 1997 ?

  5   R.  Oui. Le nombre des électeurs enregistrés était élevé. En termes

  6   absolus, ça faisait 2,5 millions de personnes enregistrées. C'était une

  7   participation très élevée allant jusqu'à 90 %.

  8   Q.  Pouvez-vous nous dire combien de personnes s'étaient enregistrées ou

  9   combien de personnes avaient été enregistrées à l'occasion du recensement

 10   de 1991 ?

 11   R.  La population qui s'est enregistrée pour ce recensement avait été de

 12   4,4 millions de personnes.

 13   Q.  Avez-vous procédé à une comparaison entre le recensement de 1991 et

 14   l'enregistrement des électeurs de 1997 ?

 15   R.  Oui. Cette comparaison a été faite, en premier lieu, par

 16   l'établissement d'un lien entre les fichiers individuels, chaque fiche

 17   représentant une personne, et nous avons ainsi essayé de tracer ce qui, en

 18   1991, avait été recensé pour avoir une source de la population ayant

 19   survécu au conflit. C'était ça les votants, les électeurs.

 20   Q.  Comment avez-vous établi le lien de ces pourcentages ?

 21   R.  A peu près 80 % de ces électeurs, qui avait été enregistré, qui avait

 22   été confirmé comme étant là par le recensement de la population.

 23   Q.  Etait-ce une méthodologie que vous avez utilisée pour votre analyse ?

 24   R.  Cet établissement d'un lien entre ces deux registres était à la

 25   substance même, au cœur de la méthodologie que nous avons utilisée. Nous

 26   avons eu la possibilité de comparer des éléments d'information au sujet des

 27   mêmes personnes à deux moments différents dans le temps, 91 et 97.

 28   Q.  Fort bien. Nous allons en parler plus en détail. Sur notre écran ou sur


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  1   votre écran, vous devriez avoir à présent un avenant, qui est l'avenant C.

  2   c'est la page 226 de cet avenant C où il est question de votre

  3   méthodologie.

  4   M. ROBINSON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais de

  5   ce côté-ci, le prétoire électronique ne fonctionne pas. Nous ne sommes pas

  6   à mêmes de suivre.

  7   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, ce que je peux voir c'est que mes

  9   documents peuvent être vus sur mon ordinateur personnel, mais ça ne marche

 10   pas sur celui qui est commun au prétoire.

 11   Mme WEST : [interprétation] Monsieur le Président, moi, je peux citer le

 12   numéro de la page du rapport. Si tous ont un exemplaire papier, on peut

 13   fonctionner avec.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez des copies papier?

 15   M. ROBINSON : [interprétation] Non, nous n'avons pas.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, étant donné que, peut-être

 17   pourrions-nous une toute petite pause, afin que les techniciens se penchent

 18   sur la question et réparent le système.

 19   Mme WEST : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vais consulter le Greffier.

 21   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, la Chambre va faire une pause de 10

 23   minutes, et nous espérons qu'entre-temps ce problème sera résolu.

 24   --- La pause est prise à 9 heures 25.

 25   --- La pause est terminée à 9 heures 37.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame West, veuillez continuer, je

 27   vous prie.

 28   Mme WEST : [interprétation] Merci.


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  1   Q.  Nous allons parler dans le concret au sujet de cette méthodologie,

  2   comme on peut le voir c'est abordé à l'annexe C.

  3   Docteur Tabeau, quelles ont été les trois variables que vous avez pris en

  4   considération pour votre analyse ?

  5   R.  Ce qui m'intéressait c'était le lieu de résidence des individus tel que

  6   déclaré au recensement de 1991, ça c'est d'un côté; d'autre part, pour ce

  7   qui est de la liste des électeurs après la guerre; et la troisième variable

  8   c'était l'appartenance ethnique qui a constitué la réponse apportée au

  9   recensement de 1991. On a pu proposer des possibilités déjà toutes faites,

 10   mais on pouvait se prononcer soi-même.

 11   Q.  En quoi avez-vous été intéressée par ces trois variables ?

 12   R.  Ces trois variables ont rendu possible l'étude des déplacements de la

 13   population entre 1991 et 1997, c'est-à-dire à deux périodes, 1991 et en

 14   1997, et ce, pour chaque groupe ethnique à part, et quand je dis "chaque

 15   groupe ethnique à part," ce que j'entends par là ce sont les groupes

 16   ethniques principaux, c'est-à-dire les Serbes, les Musulmans, les Croates

 17   et le groupe des minorités ethniques qui se prononçaient dans la rubrique

 18   "autres."

 19   Q.  Vous avez dit que, dans ce recensement de 1991, il y avait un lieu de

 20   résidence indiqué.

 21   R.  Oui. Nous avions les adresses détaillées de toute personne et des

 22   informations au sujet des agglomérations et des unités territoriales de

 23   plus grande envergure, c'est-à-dire le territoire des municipalités.

 24   Q.  1997, les électeurs et cet enregistrement -- à l'occasion de cet

 25   enregistrement indiquait-il où est-ce qu'ils résidaient en 1997 ?

 26   R.  Il y avait cette variable-là, le lieu de résidence déclaré par les

 27   électeurs, mais on a préféré se servir d'une autre variable, celle de

 28   l'enregistrement des électeurs. C'est en fonction du lieu déclaré où l'on a


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  1   voulu voter qui a été considéré comme étant le lieux de résidence.

  2   Q.  De façon générale, quel est le processus que vous avez utilisé pour

  3   déterminer qui avait fait partie de ce recensement de 1991 et qui s'était

  4   retrouvé également au niveau de l'enregistrement des électeurs en 1997 ?

  5   R.  Dans ce cas concret, les liens pouvaient être établis par l'utilisation

  6   du numéro d'identification du citoyen, le JMBG, et les listes qui étaient

  7   dans -- enfin des personnes dans le recensement et dans le registre étaient

  8   des personnes qui portaient le même numéro de matricule.

  9   Donc c'était la première des phases de l'établissement d'une corrélation.

 10   Alors il y a eu des groupes où on n'a pas pu procéder à ce type de démarche

 11   pour des raisons variées et nous avons dû utiliser d'autres systèmes tels

 12   que le nom de famille, le prénom du père, le surnom --

 13   L'INTERPRÈTE : Enfin le prénom, se corrige l'interprète.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] -- la date de naissance, lieu de naissance, et

 15   cetera, et c'était beaucoup plus complexe que dans le premier cas de

 16   figure. Donc il y avait des marquages numériques. Il était plus facile de

 17   procéder. Dans le deuxième cas de figure, c'était plus complexe, mais on

 18   pouvait le faire.

 19   Q.  Lorsque vous avez établi deux registres ainsi liés l'un à l'autre,

 20   qu'est-ce que ça vous a dit au sujet des personnes que vous avez pu

 21   identifier ?

 22   R.  Ces personnes que l'on avait liées les unes aux autres faisaient partie

 23   -- enfin fournissait des informations pour les deux années prises en

 24   considération, pour 1991 et 1997. Ce qui nous intéressait c'était les lieux

 25   de résidence pendant ces deux années-là, et on a pris leur appartenance

 26   ethnique. Ayant donc la totalité de ces informations en vue, nous avons

 27   choisi trois variables pour nous pencher dessus et établir des indicateurs

 28   statistiques qui sont fournis dans le rapport lié aux municipalités.


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  1   Q.  Justement, je veux plusieurs questions à ce sujet.

  2   Est-ce que l'établissement de ces liens vous indiquait si une personne a

  3   survécu à la guerre ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  L'établissement de ces liens vous indiquait-il l'appartenance ethnique

  6   d'une personne ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Est-ce que ça vous disait aussi où est-ce que telle personne résidait

  9   en 1991 ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Où est-ce que telle personne s'est enregistrée pour voter en 1997 ?

 12   R.  Exactement.

 13   Q.  Alors quelle signification avait eu pour vous le fait de savoir qu'une

 14   personne a résidé en 1991 à tel endroit à un autre endroit en 1997 ?

 15   R.  Ça a fourni une information qui a été considérée comme étant une

 16   information liée au déplacement d'une personne par rapport au lieu de

 17   résidence d'origine en 1991. On a pris des définitions statistiques pour

 18   décider si on pouvait considérer que telle personne était une personne

 19   déplacée, un réfugié, ou si une telle personne n'a pas changé de lieu de

 20   résidence.

 21   Q.  Fort bien. Vous nous avez mentionné dans votre témoignage le fait qu'il

 22   y avait eu des groupes d'individus qui n'étaient pas intégrés dans cet

 23   enregistrement de 1997. Vous avez dit que des gens peut-être n'avaient pas

 24   voulu s'enregistrer d'autres étaient trop vieux, trop malades, ou d'autres

 25   avaient été peut-être trop jeunes.

 26   Alors est-ce qu'à dans votre analyse vous avez intégré les personnes qui

 27   étaient nées en 1980 et après ?

 28   R.  Non. Le premier des critères c'était la possibilité d'aller voter. Donc


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  1   c'est le critère de l'âge. Il fallait avoir 18 ans ou plus pour aller voter

  2   aux élections. Les gens qui étaient nés après 1980 n'étaient pas consignés

  3   au registre des électeurs.

  4   Q.  En résultant de tout ceci, y a-t-il eu augmentation ou diminution des

  5   chiffres ?

  6   R.  Une diminution, bien sûr, mais parmi ces enfants qui avaient moins de

  7   18 ans et il y a eu des personnes en déplacement qui ont -- ce sont des

  8   personnes qui ont suivi leurs parents pour aller vivre ailleurs.

  9   Q.  Cette méthodologie que vous avez évoquée et les sources d'information,

 10   est-ce que ça peut être trouvé à l'avenant que nous avons sur nos écrans ?

 11   R.  Oui, précisément.

 12   Mme WEST : [interprétation] Monsieur le Président, je vais demander le

 13   versement au dossier du 65 ter 11218. Il s'agit d'un avenant au rapport.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Combien de rapports d'expert avez-vous

 15   l'intention de faire verser au dossier par le biais du Dr Tabeau ?

 16   Mme WEST : [interprétation] Au total six. Pour les municipalités, et il y a

 17   cet avenant que vous voyez. Il y a une partie de l'affaire qui est liée à

 18   Sarajevo, il y en a trois à ce sujet, et il y en a deux pour Srebrenica.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, ça fait 11 au total.

 20   Mme WEST : [interprétation] Je crois que les avenants ne sont que des

 21   rajouts aux rapports.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais, oui, vous demandez un versement.

 23   Mme WEST : [interprétation] Oui, bien sûr.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon. Y a-t-il des objections pour ce qui

 25   est du versement de ces documents ?

 26   M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera versé au dossier.

 28   Mme WEST : [interprétation] Merci beaucoup.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous allez être informée des cotes par

  2   le Greffier en temps utile.

  3   Mme WEST : [interprétation] Merci.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avançons.

  5   Mme WEST : [interprétation] Maintenant je voudrais qu'on nous montre le 65

  6   ter 10723; il s'agit de la page 28 au prétoire électronique.

  7   Q.  Docteur Tabeau, nous allons à présent nous entretenir au sujet des

  8   évaluations, ou estimations statistiques, que vous avez élaborées au sujet

  9   de ces rapports.

 10   Avant que de le faire, j'aimerais qu'on se penche sur votre rapport destiné

 11   à l'affaire Karadzic, et portant sur les municipalités, pour voir comment

 12   cela a été subdivisé.

 13   Dites-nous, d'abord, combien de municipalités il y avait eu en Bosnie-

 14   Herzégovine en 1991 ?

 15   R.  109.

 16   Q.  Après la fin de la guerre, combien de municipalités y a-t-il eu ?

 17   R.  189 codes ont été attribués à des secteurs municipaux, mais un certain

 18   nombre de ces codes est resté inutilisé. Ce qui fait que au total il y en a

 19   eu 149.

 20   Q.  Pourquoi y en a-t-il eu plus qu'avant la guerre ?

 21   R.  En raison des changements intervenus pendant la guerre, il y a eu des

 22   divisions de certaines municipalités suivant les lignes établies par

 23   Dayton. Ce qui fait que certaines municipalités se sont divisées en partie

 24   appartenant à la Republika Srpska et une partie appartenant à la Fédération

 25   de Bosnie-Herzégovine. Ça c'est la raison principale. Mais il y a eu un

 26   certain nombre d'autres raisons qui sont dues à la création de nouvelles

 27   municipalités, qui avaient été de petites zones qui se sont dissociées du

 28   territoire des anciennes municipalités en place.


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  1   Q.  Est-ce que vous avez pu faire un aperçu des résultats de ces partages

  2   que vous avez constatés ?

  3   R.  Oui, nous avons analysé les municipalités suivant la classification

  4   post-daytonnienne, la classification officielle, et c'est le chiffre qui se

  5   trouve être plus grand pour ce qui est des municipalités d'après la guerre.

  6   Q.  A l'avenant à votre rapport, qu'on voit sur votre écran, c'est-à-dire

  7   l'avenant A, il s'agit d'un document assez long, et j'aimerais que l'on

  8   parcourt assez rapidement.

  9   Dans le tableau numéro 1, on peut voir les résultats qui concernent des

 10   personnes de toutes les 27 municipalités pertinentes à l'acte d'accusation.

 11   R.  Le tableau 1 montre les changements survenus au niveau de la

 12   composition ethnique. On voit que la population était telle en 1991 et on

 13   voit la population totale et les différents échantillons de population qui

 14   sont issus du registre des électeurs de 1997.

 15   Q.  Lorsque vous avez parlé des groupes ethniques en 1991. Est-ce que vous

 16   avez pris ces groupes ethniques en compte ?

 17   R.  Oui, on a pris les principaux groupes serbes, musulmans et croates et

 18   "autres."

 19   Q.  Donc ça nous fait quatre au total. Est-ce qu'il y a quatre tableaux

 20   pour chaque municipalité à l'avenant ?

 21   R.  Oui. Chaque groupe ethnique fait partie ou fait l'objet d'un tableau à

 22   part. Il y a donc des changements intervenus au niveau de la composition

 23   ethnique qui se trouvent être faits pour les Serbes, les Croates, et

 24   autres, et chacun des tableaux et établis pour les 27 municipalités qui se

 25   trouvent être englobées par l'acte d'accusation dans ces affaires.

 26   Mme WEST : [interprétation] Pour les besoins du compte rendu d'audience, je

 27   précise que c'est la page 0964 à 0975 au prétoire électronique.

 28   Q.  Pour ce qui est du tableau numéro 2. Pouvez-vous nous dire de quoi il


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  1   s'agit ?

  2   R.  Le tableau numéro 2 c'est le nombre minimum des personnes

  3   internallement [phon] déplacées et des réfugiés qui sont établis par notre

  4   méthodologie d'établissement de lien.

  5   Q.  Qu'est-ce que ça veut dire ce nombre minimum ?

  6   R.  Ce nombre minimum -- ce sont les chiffres qui sont obtenus partant des

  7   liens entre les enregistrements d'électeurs qui sont comparés avec le

  8   recensement établi auparavant. Donc on prend cela comme étant les

  9   références minimums parce que le registre des électeurs c'est un

 10   échantillon, qui est très grand, mais c'est quand même un échantillon.

 11   Q.  Donc ces quatre tableaux nous parlent de chacune des 27 municipalités

 12   qui sont concernées par l'acte d'accusation, et pour les différents groupes

 13   ethniques ?

 14   R.  C'est exact.

 15   Mme WEST : [interprétation] Pour le besoin du compte rendu d'audience, je

 16   dirais qu'il s'agit des pages 0976 à 0987.

 17   Q.  J'aimerais qu'on se penche sur le tableau numéro 3. Que pouvez-vous

 18   nous dire à ce sujet.

 19   R.  [aucune interprétation]

 20   M. ROBINSON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais je

 21   voudrais demander au Procureur s'il va y avoir des expurgations pour

 22   refléter les 20 municipalités qui ont fait l'objet d'une décision des Juges

 23   de la Chambre en application de l'article 73 bis (D), et ce, en comparaison

 24   avec les 27 qui avaient fait initialement l'objet de l'acte d'accusation à

 25   l'époque où l'analyse a été rédigée.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame West.

 27   Mme WEST : [interprétation] Monsieur le Président, je comprends de quoi il

 28   s'agit puisqu'il y a suppression des sept municipalités, mais je crois, que


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  1   les observations relatives à Zepa, et les informations au sujet de ces sept

  2   se trouvent être toujours relatives à l'entreprise criminelle commune, et

  3   nous aimerions les inclure.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais on pourra alors calculer nous-mêmes

  5   partant des tableaux qui sont fournis.

  6   Mme WEST : [aucune interprétation]

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle est votre opinion, Monsieur

  8   Robinson ?

  9   M. ROBINSON : [interprétation] Je crois que nous devrions inclure aucune

 10   donnée pour ce qui est des sept municipalités qui ont été biffées de l'acte

 11   d'accusation. Pour ce qui est de la partie relative aux municipalités nous

 12   avons des décisions rendues par la Chambre au sujet de Brcko et autres

 13   municipalités où on a constaté qu'il y avait des documents qui étaient

 14   suffisants pour les 20 municipalités et qui n'étaient pas indispensables

 15   d'inclure des composantes d'autres municipalités pour montrer le modèle de

 16   comportement.

 17   Donc de façon cohérente avec la décision, je ne pense pas que les Juges de

 18   la Chambre devraient prendre en considération les sept municipalités qui

 19   ont été biffées de l'acte d'accusation.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Toutefois, pour des raisons pratiques,

 21   je ne pense pas qu'il soit nécessaire de demander au Dr Tabeau de faire les

 22   calculs elle-même alors que nous pouvons les faire nous-mêmes.

 23   M. ROBINSON : [interprétation] Oui.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, écoutez la chose entre les mains de

 25   la Chambre.

 26   M. ROBINSON : [interprétation] Merci.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est moi qui vous remercie.

 28   Continuons.


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  1   Mme WEST : [interprétation]

  2   Q.  Docteur Tabeau, est-ce que vous pouvez nous dire ce que c'est que ce

  3   tableau numéro 3 ?

  4   R.  Le tableau 3 suit le tableau numéro 2. Il présente des chiffres plus

  5   complets pour ce qui est des personnes déplacées de façon interne et du

  6   total des réfugiés. C'est beaucoup plus complet comme chiffre parce qu'on

  7   peut le considérer comme étant une estimation utile. C'est obtenu par

  8   l'utilisation des techniques statistiques habituelles pour ce qui est de

  9   l'évaluation de chiffres inconnus qui se trouvent être liés à des

 10   événements survenus au niveau de la population. Ce chiffre, estimé des

 11   personnes déplacées et des réfugiés, est présenté au tableau numéro 3, et

 12   on a les estimations statistiques et on y voit les degrés d'incertitude qui

 13   se trouvent également indiqués au niveau du tableau.

 14   Q.  Vous avez parlé du terme de "réfugié;" pouvez-vous nous donner la

 15   définition statistique de ce terme de réfugié ?

 16   R.  Un réfugié c'est une personne qui a quitté sa maison et qui est allé

 17   vivre dans un autre pays, et non pas en Bosnie-Herzégovine. C'est le

 18   contraire de la définition des personnes internement déplacées, qui ont

 19   changé de lieu de résidence, d'un lieu de résidence en Bosnie-Herzégovine

 20   pour aller vers un autre lieu en Bosnie-Herzégovine, mais pas dans un autre

 21   pays.

 22   Q.  Est-ce que vous comprenez la définition légale du terme de "réfugié,"

 23   qui se trouve être différente de la définition statistique ?

 24   R.  Oui, je suis consciente d'une telle définition. Nous avons parlé hier

 25   des différentes sources, nous avons eu une source qui est appelée DDPR

 26   [phon], c'est le registre officiel des personnes internement déplacées et

 27   des réfugiés en Bosnie-Herzégovine. Ce registre officiel a été établi par

 28   l'UNHCR aux côtés des autorités ou ensemble avec les autorités locales de


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  1   la Bosnie-Herzégovine. Ces sources de données nous montrent le chiffre des

  2   réfugiés et des personnes déplacées conformément à la définition légale de

  3   ce terme de réfugié, des personnes déplacées. Mais si l'on croise les

  4   références avec nos statistiques, je crois pouvoir dire qu'il y a une très

  5   grande cohérence entre les deux.

  6   Q.  Pour finir --

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame West, nous allons revenir à la

  8   question qui vient d'être évoquée par M. Robinson, tout à l'heure. Pour les

  9   besoins des Juges de la Chambre et pour être sûr de ce que l'on fait, je

 10   voudrais qu'on nous présente un tableau séparé avec les chiffres ou les

 11   ratios en consultation avec le Dr Tabeau, une fois qu'elle aura terminé de

 12   témoigner au sujet de ce qui constaterait la différence survenue pour ce

 13   qui est des municipalités qui ont été biffées de l'acte d'accusation mais

 14   pas maintenant, une fois que son témoignage sera terminé.

 15   Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous allons le

 16   faire.

 17   Q.  Docteur Tabeau, nous sommes en train de nous pencher sur la dernière

 18   partie des tableaux, tableaux 1 BH, 2 BH, 3 BH.

 19   R.  Ça coïncide avec les tableaux 1, 2 et 3, mis à part le fait qu'ils sont

 20   en train de montrer un secteur plus grand de la Bosnie-Herzégovine, dans

 21   l'ensemble, pour avoir des éléments de référence, pas rien de plus.

 22   Q.  Ça englobe la totalité des municipalités, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui. Ça englobe la totalité des municipalités de la Bosnie.

 24   Q.  Ce que vous nous avez montré au niveau des tableaux; est-ce que ceci

 25   est repris dans le texte de vos constatations au niveau du rapport ?

 26   R.  Oui. Les éléments établis de façon concrète et détaillée à l'avenant C

 27   se trouvent être repris de façon générale dans le corps du texte du

 28   rapport. Une fois de plus, cela est fait de façon distincte pour chaque


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  1   groupe ethnique.

  2   Q.  Docteur Tabeau, nous n'allons pas parcourir la totalité des tableaux à

  3   présent. Je crois que le mieux serait d'étudier ces informations en nous

  4   servant d'exemple. Je crois que vous avez préparé un petit document qui

  5   nous montrerait un exemple de cette nature; est-ce bien exact ?

  6   R.  Oui, c'est exact.

  7   Mme WEST : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, il s'agit du 65

  8   ter, 23719. Les parties ont été saisies de ce document.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que ça a été présenté ou préparer

 10   pour présentation au prétoire.

 11   Mme WEST : [interprétation] Oui, nous allons montrer la page 1.

 12   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire la source de la documentation pour

 13   ceci ?

 14   R.  Ceci vient de mon rapport ou provient de mon rapport, ce sont des

 15   tableaux 1, 2 et 3 figurant à l'avenant A.

 16   Q.  Nous pouvons voir ici un tableau numéro 1, et on voit qu'il s'agit de

 17   Prijedor, n'est-ce pas ?

 18   R.  C'est exact.

 19   Q.  Pouvez-vous nous dire une fois qu'on se penche sur les colonnes, on

 20   voit en haut appartenance ethnique, puis on voit 1991, puis on voit des

 21   chiffres qui sont indiqués. Qu'est-ce que cela représente ?

 22   R.  Ce tableau de façon générale nous montre quels sont les changements

 23   intervenus au niveau de la composition ethnique entre 1991 et 1997. La

 24   première partie des chiffres au niveau du 1991 et du 1997, indique les

 25   chiffres absolus relatifs au nombre d'individus que nous avons étudiés.

 26   Q.  Fort bien. Quand vous dites chiffres absolus, lorsqu'on se penche sur

 27   la colonne relative à 1991, est-ce que ce sont véritablement les chiffres

 28   qui sont sortis ou tirés du recensement ?


Page 28142

  1   R.  Oui, par exemple, tous les groupes ethniques, 94 028 individus, nés

  2   avant 1981 sont situés au niveau du recensement.

  3   Q.  Quand on se penche sur l'année 1997, dans cet alinéa, est-ce qu'il y a

  4   là les chiffres réels qui sont pris dans le registre des électeurs ?

  5   R.  C'est exact. C'est un échantillon pour ce qui est des électeurs

  6   enregistrés et c'était lié au recensement de la population.

  7   Q.  Alors regardons le paragraphe qui évoque les pourcentages. Si nous

  8   regardons la ligne où il est dit, 1991, les pourcentages, s'agit-il là de

  9   groupes ethniques qui représentent l'ensemble de la population dans le

 10   pays, en 1991 ?

 11   R.  Oui, il s'agit juste d'un exemple pour une municipalité.

 12   Q.  Pardonnez-moi.

 13   R.  Alors nous parlons de la municipalité de Prijedor. Dans la deuxième

 14   partie du tableau, il faut lire le tableau en deux colonnes, il y a la

 15   composition ethnique exprimée en terme de pourcentage, il s'agit des

 16   personnes vivant dans la municipalité de Prijedor. Dans la deuxième

 17   colonne, nous voyons la représentation du groupe ethnique, encore une fois

 18   représentée en terme de pourcentage, correspondant à l'année 1997. Il

 19   s'agit de chiffres comparables en raison de leurs caractères relatifs par

 20   opposition aux caractères absolus de ces chiffres, car nous avons une

 21   difficulté ici c'est que 1991 représente l'ensemble de la population alors

 22   que 1997 représente un échantillon.

 23   Donc des comparaisons sont toujours possibles et ont un sens si nous

 24   regardons les pourcentages. Les pourcentages représentent très bien

 25   l'ensemble de la population, dans les deux cas.

 26   Q.  Regardons ce qui est advenu de la population serbe à Prijedor, entre

 27   1991 et 1997 ?

 28   R.  La population serbe ou la part de la population serbe s'est accrue dans


Page 28143

  1   la municipalité de Prijedor, est passée de 43.4 % en 1991, à 89 % en 1997.

  2   Il s'agit d'une augmentation de plus de 100 %.

  3   Q.  Alors regardons ce qui est advenu de la population musulmane.

  4   R.  La part de la population musulmane en 1991 représentait 92.6 % [phon],

  5   et en 1997, 1 % simplement. Il s'agit d'une diminution fort importante de

  6   97.6 %. C'est ainsi qu'il faut lire ces chiffres et les chiffres de mon

  7   rapport.

  8   Q.  Maintenant passons à la figure numéro 1; s'agit-il d'une représentation

  9   visuelle de ces chiffres ?

 10   R.  Oui, tout à fait. Il s'agit exactement des mêmes chiffres que ceux qui

 11   figurent dans le tableau numéro 1, et qui sont représentés ici de façon

 12   graphique dans la figure numéro 1. La couleur rouge représente les Serbes,

 13   et la couleur verte représente les Musulmans, les deux groupes ethniques

 14   dont nous venons de parler.

 15   Q.  Si nous passons au tableau numéro 2, il s'agit là des chiffres globaux

 16   des réfugiés et personnes déplacées à l'intérieur de leur pays. Est-ce que

 17   ce tableau est une compilation des autres données qui figurent dans les

 18   autres tableaux ?

 19   R.  Oui, tout à fait. Ce tableau fournit des informations sur le

 20   déplacement de la population. Mais il y a des éléments d'information qui

 21   proviennent des trois autres tableaux, tableaux 1, 2 et 3 qui ont été mis

 22   les uns à côté des autres, ce qui permet d'avoir une image plus complète

 23   que si vous regardez un tableau après l'autre.

 24   Q.  Pourriez-vous regarder les colonnes et nous dire à quoi ceci correspond

 25   ?

 26   R.  Bien sûr, la première colonne s'explique d'elle-même. Il s'agit de

 27   groupes ethniques qui sont listés.

 28   La deuxième colonne fournit des éléments d'information sur le recensement


Page 28144

  1   de l'année 1991 de personnes qui sont nées avant l'année 1980. Une

  2   explication courte par rapport à cette partie du tableau c'est que nous

  3   souhaitons comparer les données qui sont comparables, autrement dit les

  4   mêmes segments correspondant aux mêmes années, 1991 et 1997, et nous ne

  5   voulons pas mélanger l'ensemble de la population dont nous avons les

  6   chiffres grâce au recensement de 1991 avec un échantillon des personnes

  7   âgées de plus de 18 ans et qui sont en droit de voter.

  8   Donc si nous revenons au tableau, le recensement de 1991 est inclus ici

  9   pour nous fournir une référence.

 10   En fait la colonne suivant nous donne un chiffre minimum représentant le

 11   nombre de personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays et les

 12   réfugiés de Prijedor.

 13   Q.  Lorsque vous dites "chiffre minimum," est-ce que c'est le chiffre que

 14   vous avez réellement dénombré à partir de la liste électorale de 1997 ?

 15   R.  Oui, c'est exact. C'est le chiffre minimum, et ce fichier correspond au

 16   recensement et nous avons pu comparer cela avec le lieu de résidence de ces

 17   personnes.

 18   Q.  La colonne suivante, il s'agit d'une estimation.

 19   R.  [aucune interprétation]

 20   Q.  D'où proviennent vos informations ?

 21   R.  Cette information se fonde sur la même proportion de personnes

 22   déplacées à l'intérieur de leur pays et de réfugiés que les personnes

 23   déplacées. Il s'agit en fait d'un échantillon des électeurs, en termes

 24   statistiques, il s'agit d'une proportion de l'échantillon. Nous appliquons

 25   ceci à la population exposée et le recensement de 1991, et nous fournissons

 26   ainsi une estimation qui doit être perçue comme un chiffre plus complet,

 27   comme une extrapolation de l'échantillon, sans pour autant donner le

 28   chiffre total de la population. Ça c'est une estimation, c'est un -- c'est


Page 28145

  1   une --

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame West, tous ces chiffres

  3   proviennent des tableaux qui existent dans notre rapport. Par exemple, 642.

  4   Donc en ce qui concerne ce tableau, ce tableau numéro 2, nous avons des

  5   chiffres précis et je souhaite que l'on me montre chaque tableau qui

  6   indique ce chiffre. Où est-ce que nous pouvons retrouver ce chiffre de 642

  7   ?

  8   Est-ce que vous me suivez ?

  9   Mme WEST : [interprétation] Oui, tout à fait.

 10   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 11   Mme WEST : [interprétation] Mme Tabeau a indiqué que sur le tableau plus

 12   petit qui se trouve en dessous --

 13   Q.  Madame Tabeau, peut-être que vous pourriez nous dire comment est

 14   représenté le plus petit tableau.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, pour que nous comprenions mieux,

 16   le petit tableau et ensuite revenir à ce tableau de façon à ce que nous

 17   puissions mieux comprendre.

 18   Mme WEST : [interprétation] Est-ce que vous souhaitez que je fasse ceci

 19   pendant la présentation ?

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maintenant, maintenant.

 21   Mme WEST : [aucune interprétation]

 22   Q.  Alors prenons le chiffre de 642.

 23   R.  Oui.

 24   Q.  [aucune interprétation]

 25   R.  [aucune interprétation]

 26   Q.  Pourriez-vous nous dire exactement sur quelle page de l'annexe nous

 27   trouvons ce chiffre ?

 28   R.  Alors, cela provient du petit tableau qui se trouve en bas. Nous


Page 28146

  1   pouvons voir que le chiffre correspondant aux Serbes provient du tableau

  2   numéro 2 correspondant à la lettre S. Ce tableau est disponible à la page

  3   51. Donc il faut nous reporter à la page 51, tableau numéro 2, les Serbes.

  4   Mme WEST : [interprétation] Le numéro ERN se termine dans ce cas par 0986.

  5   Dans le prétoire électronique, il s'agit du numéro 65 ter 10723.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc c'est la suite du tableau numéro 2.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je vous demander

  8   de vous reporter à cet endroit correspondant dans le tableau ?

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Avec le prétoire électronique nous

 10   pouvons suivre.

 11   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je l'ai retrouvé…

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ainsi que nous lisons ou interprétons

 14   les références qui figurent en bas.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'aimerais que vous nous expliquiez

 16   comment ce chiffre de 642 -- pardon, 642, comment vous parvenez à ce

 17   chiffre de 642 dans ce tableau.

 18   Est-ce que nous pouvons le télécharger ?

 19   Mme WEST : [interprétation] Oui, s'il vous plaît. Donc encore une fois --

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est page 51.

 21   Mme WEST : [aucune interprétation]

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Numéro ERN qui se termine par 986 dans

 23   notre document papier.

 24   Mme WEST : [aucune interprétation]

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il s'agit du numéro 65 ter 10723.

 26   Page suivante.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Page suivante. Oui.

 28   Alors, si nous nous penchons sur la colonne, le point 14, qui correspond à


Page 28147

  1   Prijedor, et si nous nous déplaçons vers la droite, donc la ligne 14 et

  2   nous regardons la colonne, nous regardons les différentes colonnes… je me

  3   suis trompée. Je pense qu'il ne faut pas faire ce que je viens de faire.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, nous voyons le chiffre de 642.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Donc nous voyons les personnes déplacées à

  6   l'intérieur de leur propre pays.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Comment êtes-vous parvenue à ce chiffre

  8   ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans ce tableau, nous n'avons fourni des

 10   informations seulement des chiffres correspondant à notre analyse des

 11   concordances. Ce chiffre de 642 fichiers, dossiers ou personnes ont été

 12   identifiés sur la liste des électeurs et nous avons comparé ceci avec les

 13   chiffres du recensement de 1991, et pour ces 642 personnes, nous avons

 14   comparé le lieu de résidence en 1991 par opposition à leur lieu

 15   d'inscription sur les listes électorales, c'est qu'il s'agit d'une donnée

 16   approximative concernant leur lieu de résidence. Nous en avons donc conclu

 17   que leur lieu de résidence était différent et donc, par conséquent, nous

 18   les avons étiquetés comme étant des personnes déplacées.

 19   Alors, différent signifie que ces personnes se sont déplacées de

 20   municipalité précédant -- avant la guerre où elles habitaient, elles se

 21   sont déplacées et se sont installées dans d'autres municipalités en Bosnie-

 22   Herzégovine, municipalités toutes différentes, et également, peut-être, et

 23   c'est probable que certaines de ces personnes se soient installées à

 24   l'étranger.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 26   Donc, Madame Tabeau, pourriez-vous nous expliquer, dans ce cas, ces

 27   chiffres qui figurent dans cette colonne, 14 Prijedor, s'il vous plaît -- à

 28   la ligne 14 Prijedor.


Page 28148

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Le premier chiffre, la première colonne,

  2   49 019, cela correspond au chiffre total de la population identifiée en

  3   1997. Il s'agit là de la population qui résidait à l'origine à Prijedor et

  4   qui figure dans les chiffres du recensement de 1991. C'est en somme cette

  5   population-là qui constitue notre échantillon d'électeurs correspondant à

  6   Prijedor.

  7   Pour ces 49 019, nous pouvons dire combien de ces personnes sont devenues

  8   des personnes déplacées et combien de ces personnes résident toujours dans

  9   leur municipalité d'origine, à savoir Prijedor.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, dès le départ, vous avez parlé de

 11   49 019 correspondant à la population totale identifiée en 1997.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Mais il s'agit du tableau qui correspond

 13   aux Serbes. Donc nous parlons des Serbes, ici, de Prijedor.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Hm-hm, bien. Mais vous avez également

 15   dit que c'est la population qui vivait à l'origine à Prijedor dont les

 16   éléments ont été fournis en 1991 ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, ce tableau, il est important de

 18   comprendre que ce tableau est constitué à partir du lieu de résidence

 19   d'origine en 1991. Le lieu de résidence d'origine en 1991. Nous regardons

 20   ces personnes qui vivaient à l'origine en 1991 à Prijedor, toute

 21   appartenance ethnique confondue et nous les suivons sur la liste des

 22   électeurs.

 23   Sur la liste des électeurs, nous avons une population au totale de

 24   Prijedor correspondant à 49 019.

 25   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Sur ces 49 000, il y en avait 24 070 qui

 27   sont des Serbes, et nous parlons maintenant de l'appartenance à un groupe

 28   ethnique qui est représenté sur ce tableau.


Page 28149

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous allez nous

  2   expliquer le chiffre suivant, 21 964 ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] 21 964, cela correspond au chiffre sur les 49

  4   019 qui sont devenus des personnes déplacées en 1997.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit de deux chiffres de référence

  7   correspondant à Prijedor. A l'ensemble de la municipalité. Alors, si nous

  8   regardons maintenant une autre partie du tableau, nous voyons le chiffre de

  9   24 070 dans la première colonne correspondant aux Serbes. Cela signifie que

 10   nous avions 24 070 Serbes qui ont été identifiés sur les 49 019. D'accord ?

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Ensuite, les 642 sont consignés dans ce

 13   rapport et figurent comme des personnes déplacées, des Serbes déplacés.

 14   Donc le chiffre de 642 doit être compris par rapport au chiffre de 24 070.

 15   Bien évidemment, il s'agit d'un petit pourcentage de 2,7 %.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pardonnez-moi, cela n'est pas clair à

 17   mes yeux je ne sais pas comment vous parvenez à ce chiffre de 642.

 18   Cela, en fait, est un chiffre qui provient d'une enquête ou d'une recherche

 19   distincte.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce chiffre ne peut pas être calculé à partir

 21   de ce tableau-ci. Cela n'est pas possible. Ce chiffre a été obtenu lors du

 22   processus de corrélation, et à partir de ce processus de corrélation, nous

 23   pouvons estimer les résultats qui correspondent à ce qui est présenté dans

 24   ce tableau.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, est-ce que nous pouvons trouver

 26   ceci dans votre rapport ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, j'ai trouvé ce chiffre de 642, et

 28   l'explication est fournie en langage de néophyte, ce n'est pas comme si je


Page 28150

  1   vous remettais les données en tant que telles. Je peux compiler des listes

  2   exactes, et vous pourriez recevoir, de moi, une liste qui correspond à

  3   Prijedor. Le chiffre minimum est de 21 964, donc ce serait une liste qui

  4   contiendrait quasiment 22 000 noms, et à partir de cette liste-là, vous

  5   pouvez parvenir au chiffre de 642 correspondant au nombre de Serbes

  6   déplacés.

  7   Mme WEST : [interprétation]

  8   Q.  [aucune interprétation]

  9   Mme WEST : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me le permettez.

 10   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 11   Mme WEST : [interprétation]

 12   Q.  Alors, pour pouvoir dénombrer ces 642 personnes, est-ce que vous

 13   comprenez les personnes qui en 1991, les Serbes qui en 1991, vivaient à

 14   Prijedor et qui, en 1997, habitaient ailleurs ?

 15   R.  Ce chiffre de 642 correspond aux Serbes qui vivaient en 1997 ailleurs.

 16   Telle est l'explication de ce chiffre.

 17   Mme WEST : [interprétation] Si cela vous agréez, nous pouvons vous fournir

 18   une liste de ce 642 personnes.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que ces éléments ont été

 20   communiqués à la Défense ?

 21   Mme WEST : [interprétation] La Défense a reçu les chiffres du recensement

 22   de 1991 et la liste des électeurs de l'OSCE, et s'ils souhaitent faire

 23   leurs propres calculs, ils peuvent le faire.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, ayez l'amabilité de bien vouloir

 25   nous montrer le passage en question, en langage de néophyte, s'il vous

 26   plaît, comme nous a dit Mme Tabeau, qui traite de ces 642 personnes ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, dans le rapport, les

 28   municipalités ne sont pas évoquées les unes après les autres car elles sont


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  1   beaucoup trop nombreuses. En revanche, ce qui est fait dans le rapport est

  2   le suivant, il y a des résumés de ces résultats qui sont présentés, qui

  3   représentent l'ensemble de la région les 27 municipalités, et ensuite pour

  4   chaque groupe séparément. Un des ces groupes représenté est le groupe de

  5   Serbes. Nous pouvons nous tourner vers le rapport et je pourrais vous dire

  6   à quel endroit ceci est évoqué de façon générale pour les Serbes pour

  7   l'ensemble de la région dans le rapport.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Est-ce que vous pourriez demander

  9   à Mme Tabeau quelle méthodologie elle a utilisée et comment elle est

 10   parvenue à ce chiffre.

 11   Mme WEST : [interprétation] Oui, tout à fait.

 12   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 13   Mme WEST : [interprétation]

 14   Q.  Donc, Madame Tabeau, nous allons maintenant regarder la façon dont vous

 15   êtes parvenu à ce chiffre de 642 et nous allons comparer les chiffres du

 16   recensement et les archives de l'OSCE.

 17   Lorsque vous avez établi cette comparaison, est-ce que vous avez comparé

 18   les différents noms ?

 19   R.  Bien sûr. Monsieur le Président, que les choses soient claires et que

 20   nous sachions de quoi nous parlons, dans cette analyse, d'un côté, je

 21   disposais d'une base de données comportant 4,4 millions de colonnes. Ça

 22   c'est mon point de départ, et les chiffres dont je disposais. Les chiffres

 23   du recensement.

 24   Il y a une autre base de données qui comprend 2,5 millions de

 25   dossier, de fichiers et de colonnes dans ce tableau. Donc mon objectif

 26   consiste à établir un lien entre ces deux tableaux pour autant de personnes

 27   que possible.

 28    Dans la grande majorité des cas, c'est tout à fait faisable parce que je


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  1   le fais en utilisant le système JMBG, en utilisant le numéro d'identifiant

  2   qui est unique.

  3   Ensuite, j'améliore cela en ajoutant d'autres critères de corrélation

  4   autant que possible. Une fois que j'en ai terminé avec la corrélation, pour

  5   chaque personne qui a un lien avec ou pour lequel une concordance peut être

  6   établie entre les tableaux, je regarde l'ensemble des informations

  7   concernant cette personne et je compare énormément d'éléments, comme le

  8   lieu de résidence, entre autres. Alors, si je prends le cas d'une colonne

  9   du tableau A et si je compare avec une colonne du tableau B, tableau A et B

 10   un recensement de 1991, et tableau B correspondant à la liste des

 11   électeurs, et si je regarde, par exemple, un tel X, Cekic, je prends le cas

 12   de Cekic, par exemple, et si je regarde -- je me penche sur son prénom, son

 13   nom de famille, le nom de son père, son lieu de date de naissance, son lieu

 14   de résidence, et où il vivait en 1991 et où il s'est inscrit sur les listes

 15   électorales en 1997.

 16   Donc, si les deux endroits correspondent, j'inscris ceci au niveau des

 17   variables dans mon dossier. Si cette personne est devenue déplacée, je

 18   l'indique également, et donc je créé une donnée, et une variable, qui me

 19   signale pour chaque personne sur laquelle une correspondance, une

 20   concordance a été établie, si cette personne s'est déplacée oui ou non.

 21   Lorsque j'en ai terminé avec ce genre de -- j'ai terminé de

 22   répertorier tout ceci je passe à l'étape suivante. J'inscris les éléments

 23   dans mon propre tableau et j'indique quelles sont les personnes qui ont été

 24   déplacées. Je dispose d'information sur ces personnes, sur leur groupe

 25   ethnique, leur âge et bon nombre d'autres choses, et donc, à la phase

 26   suivante, je peux créer des tableaux comme celui-ci, il s'agit d'agréger

 27   toutes les données avec les variables nouvelles dont je dispose comme le

 28   chiffre de 642 personnes serbes déplacées de Prijedor.


Page 28153

  1   Q.  Madame Tabeau, il s'agit de 642, c'est le chiffre que nous

  2   voyons. C'est le nombre de Serbes qui, d'après les chiffres du recensement

  3   de 1991. habitaient à Prijedor, et il s'agit là des mêmes Serbes avec

  4   lequel vous avez établi une corrélation avec les listes électorales de 1997

  5   qui n'habitaient à Prijedor.

  6   R.  [aucune interprétation]

  7   Q.  Avez-vous procédé de même pour toutes les municipalités et pour les

  8   quatre groupes ethniques ?

  9   R.  Oui.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, retournons au tableau de

 11   présentation.

 12   Mme WEST : [interprétation] Qui correspond au numéro 65 ter 23717 [comme

 13   interprété], page du prétoire électronique numéro 3.

 14   Q.  Donc, ce tableau numéro 3 qui se trouve en haut porte sur la

 15   composition ethnique –

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame West, est-ce que nous n'étions

 17   pas encore à la page électronique, page 2, tableau numéro 2 ?

 18   Mme WEST : [interprétation] Oui. Nous pouvons y revenir. Merci beaucoup.

 19   Donc, page 2, tableau numéro 2 qui se trouve en bas.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, nous venons d'aborder le chiffre

 21   de 642.

 22   Mme WEST : [interprétation] Mais, maintenant, nous pouvons parler de

 23   l'estimation.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 25   Q.  Madame Tabeau, voyez-vous ce chiffre de 1 089 ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Comment êtes-vous parvenue à cette estimation ?

 28   R.  Il s'agit de la proportion d'échantillon qui s'applique au recensement


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  1   de la population de 1991, donc un nouveau chiffre est fourni, qui est bien

  2   évidemment plus important que le chiffre de 642; 642 était un chiffre

  3   minimum, comme je vous l'ai expliqué. Il s'agit là de ce chiffre de 1 089,

  4   qui comprend ce chiffre de 649 [comme interprété] plus –

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

  6   Le tableau fait référence au trois années [comme interprété]. Est-ce que

  7   nous allons nous pencher sur ces trois années, et voir comment ce chiffre

  8   est calculé ? A titre d'exemple, je souhaite simplement faire cet exercice,

  9   s'il vous plaît.

 10   Mme WEST : [interprétation] Merci. Donc, pour ce qui est des 3S, numéro 65

 11   ter 10723, et c'est le numéro ERN qui se termine par 0998, s'il vous plaît.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Disposez-vous d'un numéro de page pour

 13   un document papier ?

 14   Mme WEST : [interprétation] Numéro 63.

 15   Q.  Madame Tabeau, est-ce exact ?

 16   R.  Oui, tout à fait.

 17   Q.  Donc, nous abordons actuellement les estimations faites pour Prijedor.

 18   Si nous regardons la ligne 14 correspondant à Prijedor.

 19   R.  Oui. Encore une fois, sur ce tableau, la première colonne fait

 20   référence à l'ensemble de la population, et les trois dernières colonnes ne

 21   font référence qu'à la population serbe de Prijedor.

 22   Donc, si nous regardons la quatrième colonne -–

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, pourquoi ne pas commencer par la

 24   première colonne, l'estimation. Les estimations ici, les chiffres estimés.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] 45 688, c'est le premier chiffre qui est

 26   inscrit sur ce tableau, et qui correspond à Prijedor. Il s'agit du chiffre

 27   estimé du nombre total de personnes déplacées et de réfugiés de Prijedor.

 28   A côté de ce chiffre-là, il y a deux chiffres; 45 536, ça c'est le premier


Page 28155

  1   chiffre, et ensuite, 45 841, c'est le second chiffre.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, simplement, pour marquer une

  3   pause. Le chiffre que nous avons vu dans le tableau précédent 2S correspond

  4   à l'ensemble de la population identifiée en 1991 qui vivait dans la région

  5   de Prijedor en 1991 correspondait à 49 019. Donc comment est-ce que vous

  6   êtes parvenue à ce chiffre de 45 688 [comme interprété] ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Il ne faut pas comparer ces deux chiffres-là.

  8   Le premier chiffre est un simple échantillon d'électeurs de Prijedor qui a

  9   été identifié et corrélé avec le recensement de 1991.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Comment parvenez-vous à ce chiffre de 45

 11   688 [comme interprété] ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce chiffre est un chiffre estimé correspondant

 13   aux personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays et de réfugiés.

 14   De personnes déplacées. Il s'agit d'une estimation. Ce que signifie que

 15   nous ne pouvons comparer ce chiffre avec aucun autre chiffre, et encore

 16   moins avec la taille de l'échantillonnage, car il s'agit d'une estimation

 17   que nous avons utilisée en appliquant la proportion de l'échantillon et

 18   appliquée et comparée avec le recensement de 1991.

 19   Il s'agit d'une analyse complexe que nous présentons dans ce rapport. D'un

 20   côté, les chiffres que nous donnons sont des chiffres qui correspondent à

 21   des chiffres pour lesquels nous disposons de documents, de noms, et

 22   d'autres éléments d'information concernant les personnes en question. Les

 23   estimations, en revanche, correspondent à autre chose. Ces estimations sont

 24   fournies à partir de données statistiques qui permettent d'exprimer en

 25   chiffres quels éléments d'information manquent et par rapport aux chiffres

 26   minimums.

 27   Donc, si nous revenons au tableau que nous venons d'évoquer à propos de

 28   Prijedor, et si nous aimerions comparer ce chiffre de 45 000 avec un


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  1   chiffre approprié de l'autre tableau, dans ce cas, il faudrait que nous

  2   obtenions un chiffre de 21 964, qui correspond au chiffre que nous trouvons

  3   à la page 2 de notre présentation.

  4   Si nous passons à la page 2 de notre présentation, au tableau numéro 2, et

  5   ensuite au niveau de la deuxième colonne, en bas, nous avons le chiffre

  6   total de toutes les personnes déplacées de Prijedor, qui correspond à 21

  7   964. Je répète 21 964.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Si on passe à la colonne suivante, le total au

 10   bas est celui de 45 688. C'est exactement le même chiffre que nous avons pu

 11   voir tout à l'heure en page 63 sur le grand tableau dans l'annexe.

 12   Alors ces deux chiffres peuvent être comparés.

 13   Le chiffre estimé, le chiffre de l'estimation qui se lit comme 45 688, est

 14   produit par l'utilisation des estimations techniques, qui s'appelle

 15   extrapolation de l'échantillonnage des proportions. C'est décrit dans le

 16   rapport Slobodan Milosevic. Ce chiffre 45 688 inclut les 21 964 qui ont été

 17   identifiés comme étant le chiffre minima et, en sus, il y a une partie qui

 18   ne peut être documenté par des noms et des listes. C'est cette partie-là

 19   qu'on appelle la partie relative à l'estimation. Et bien que cela n'ait pas

 20   été documenté, l'estimation qui se fonde sur une bonne qualité statistique,

 21   et je vais vous dire pourquoi, c'est parce que cette estimation n'englobe

 22   pas le chiffre minimum qui ne peut être documenté pour des raisons

 23   différentes, et c'est là la différence que nous avons entre les deux

 24   chiffres.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Docteur, j'entendais la fin de

 26   l'interprétation en français.

 27   Comme vous pouvez le voir, ce tableau, tableau numéro 2 de votre

 28   présentation, le rapport, le ratio entre le chiffre minimum et le chiffre


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  1   estimé est différent par groupe ethnique. Par exemple, s'agissant des

  2   Serbes le chiffre a augmenté de 642 [comme interprété] à 1 089 [comme

  3   interprété], alors que pour les Musulmans ça a augmenté plus de deux fois.

  4   Alors, moi, ce qui m'intéresse, c'est comment vous vous êtes procurée ces

  5   chiffres en utilisant la méthode statistique afin que nous autres profanes,

  6   nous comprenions également.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Les évaluations sont faites pour chaque

  8   groupe ethnique de façon distinct, et pour une bonne raison.

  9   Parce que les ratios des déplacements sont différents pour les groupes

 10   ethniques différents. Il n'y a pas de taux uniforme de déplacement de

 11   constaté pour la totalité de la population, et ce, partant des données

 12   brutes que nous avions eu à notre disposition. Donc ce que vous avez relevé

 13   au niveau du tableau est tout à fait bien observé; ces ratios sont

 14   différents pour les différents groupes ethniques en présence. Ces ratios

 15   ont été évalués partant de nos analyses, et par comparaison des dossiers

 16   individuels pour chaque personne au niveau de chacun des groupes ethniques,

 17   partant du recensement.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez utilisé le même

 19   ratio pour ce qui est du même groupe ethnique, indépendamment de la région

 20   ou des municipalités ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Ces ratios ont été obtenus de façon distincte

 22   pour chaque municipalité, chaque groupe ethnique. Ce qui fait que nous

 23   n'avons pas assumé qu'il n'y avait pas de différences entre les différentes

 24   régions, puisque les choses se sont produites de façon différente.

 25   Donc, on s'est étroitement tenus aux données que nous avons trouvées dans

 26   les analyses.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 28   Madame West, je voudrais maintenant que nous parlions de la façon dont on


Page 28158

  1   en est arrivé à ce ratio.

  2   Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation]  C'est moi qui vous remercie.

  4   Mme WEST : [interprétation]

  5   Q.  Je voudrais que vous nous disiez, puisque vous venez de mentionner les

  6   ratios que vous avez utilisés pour chacune des municipalités et chaque

  7   groupe ethnique.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais je remarque l'heure.

  9   Est-ce que nous allons faire une pause ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Hm-hm.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons faire, du fait des

 12   interruptions que nous avons eues, une pause de seulement 25 minutes.

 13   Nous allons reprendre à 11 heures.

 14   --- L'audience est suspendue à 10 heures 36.

 15   --- L'audience est reprise à 11 heures 01.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame West, veuillez continuer, je vous

 17   prie.

 18   Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Ce que je voulais

 19   indiquer, c'est qu'au compte rendu d'aujourd'hui, page 24, ligne 2, il y a

 20   des chiffres qui sont indiqués, et je crois avoir dit des noms.

 21   Alors, j'aimerais que l'on nous montre à cet effet le 65 ter 11218,

 22   page 40 du prétoire électronique.

 23   Q.  Docteur Tabeau, nous allons maintenant parler de la façon dont vous

 24   avez fait vos estimations. Aujourd'hui, au compte rendu, page 17, ligne 11,

 25   vous avez dit :

 26   "Ces estimations se basent sur un échantillon proportionnel des

 27   personnes déplacées de façon interne, et des réfugiés, donc de toutes les

 28   personnes déplacées. Alors l'échantillon des électeurs, sa fraction en


Page 28159

  1   termes statistiques, elle se trouve être un échantillon de la proportion."

  2   Alors, que vouliez-vous dire par "échantillon de la proportion" ou du

  3   "ratio" ?

  4   R.  Je propose que nous passions à la page 51, tableau 2S, pour Serbes. Je

  5   parle de l'avenant A du rapport relatif aux municipalités préparé pour

  6   cette affaire-ci.

  7   Mme WEST : [interprétation] Ce serait le 65 ter 10723. Le ERN se termine

  8   par les chiffres 986.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] -- 986.

 10   Mme WEST : [interprétation] C'est cela. Merci.

 11   Q.  Alors, on en a parlé de ce tableau, et en particulier, de ce chiffre de

 12   642 Serbes déplacés de Prijedor, si on se réfère à la ligne 14, où il est

 13   dit Prijedor.

 14   Dans la troisième des colonnes, à partir de la fin, il y a ce chiffre

 15   de 642, à côté de ce chiffre, il y a un pourcentage qui 2.7, celui-ci nous

 16   dit quel a été le ratio dans l'échantillonnage des Serbes déplacés par

 17   rapport à la population identifiée des électeurs du groupe ethnique serbe.

 18   Au fond, si on se penche sur ce tableau, les 642 doit être divisé par 24

 19   070. 24 070 c'est la population serbe originaire de Prijedor, identifiée

 20   partant de ce registre des électeurs de 1997.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Docteur, si vous pouviez nous rappeler

 22   que signifie ce chiffre de 24 070 ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] 24 070, c'est mon échantillon des Serbes parmi

 24   les électeurs enregistrés. C'est mon échantillon pour ce qui est des Serbes

 25   en 1997. Ils sont 24 070, alors sur les 24 070, de la totalité des Serbes

 26   de mon échantillon pour l'année 1997, j'ai identifié 642 d'entre eux comme

 27   étant des personnes déplacées. Ce qui me fournit un pourcentage, à savoir

 28   2.7 % pour ce qui est des Serbes déplacés.


Page 28160

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvez-vous nous dire une fois de plus

  2   la signification de ce chiffre de 21 964 ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Ah, oui, la deuxième colonne, 21 964. C'est

  4   plus que le chiffre des Serbes, c'est le total des personnes déplacées et

  5   des réfugiés de tous les groupes ethniques, pour ce qui est de mon

  6   échantillon complet pour Prijedor.

  7   Alors, l'échantillon complet englobe la totalité des groupes

  8   ethniques. L'échantillon relatif aux Serbes, ne parle que des Serbes sur le

  9   reste des groupes ethniques.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais pourquoi l'échantillon des Serbes,

 11   qui est de 24 070, se trouve-t-il être plus grand que l'échantillon relatif

 12   à la totalité des groupes ethniques ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, 24 070, ça devrait être comparé avec le

 14   chiffre de 49 019. Ce sont deux chiffres qui peuvent et doivent être

 15   comparés. 49 019, ça englobe la totalité des groupes ethniques en 1997.

 16   24 070 sont des Serbes. La population déplacée c'est 21 964, pour la

 17   totalité des groupes ethniques. Sur cela, 642 se trouvent être des Serbes.

 18   Donc les trois premières colonnes dans ce tableau sont des colonnes de

 19   référence. On verra que c'est la même chose pour tous les groupes

 20   ethniques. Ce n'est que les trois colonnes suivantes qui se rapportent au

 21   groupe ethnique donné, et c'est indiqué au titre, et c'est indiqué au

 22   numéro qui est fourni au niveau du tableau.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais est-ce que le dernier pourcentage,

 24   2.9 a une signification ou pas ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas le cas pour mon estimation. C'est

 26   donné pour avoir une référence, pour savoir quelle est la fraction des

 27   Serbes parmi la totalité des personnes déplacées, et là, ce serait le

 28   pourcentage de 2.9.


Page 28161

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, ça c'est le ratio qu'on obtient

  2   quand on divise 642 par 21 964 ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exactement la façon dont on a

  4   procédé pour obtenir un pourcentage.

  5   Pour mon estimation, c'est l'autre pourcentage qui importe, à savoir le

  6   2.7. C'est un pourcentage différent.

  7   Mme WEST : [interprétation]

  8   Q.  Et pour --

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.

 10   Mme WEST : [interprétation] Excusez-moi.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Maintenant vous pouvez continuer.

 12   Mme WEST : [interprétation]

 13   Q.  Le 2.7 que vous avez calculé pour ce qui est des Serbes à Prijedor,

 14   c'est un chiffre unique pour ce qui est des Serbes à Prijedor, n'est-ce pas

 15   ?

 16   R.  Oui, c'est exact. Si on veut voir le même pourcentage s'agissant des

 17   Musulmans, nous devrions passer à une autre page, qui est la page numéro

 18   42.

 19   Q.  Bon. Alors attendez un peu, je voudrais vous poser une autre question.

 20   R.  Oui, allez-y.

 21   Q.  Cette proportion au niveau de l'échantillonnage, le 2.7 c'est différent

 22   pour tous les groupes ethniques et pour chacune des municipalités en

 23   présence, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui, c'est exact. C'est la façon dont ça s'est fait et c'est la

 25   spécificité et l'unicité des ratios d'échantillonnage.

 26   Q.  Ces pourcentages, ces ratios que vous avez utilisés pour la

 27   détermination de vos échantillonnages`; c'est bien cela ?

 28   R.  Oui, je viens de vous dire que j'ai utilisé le 2.7 pour les Serbes.


Page 28162

  1   S'agissant des Musulmans, il faudrait qu'on se penche sur le recensement de

  2   la population de 1991, à savoir le tableau numéro 1. Si vous voulez que je

  3   continue à parler au sujet des Serbes, je peux parler de ce ratio

  4   d'échantillonnage qui donne 2.7, et ce ratio est pris pour être appliqué

  5   sur le recensement de la population au niveau des Serbes de Prijedor. C'est

  6   ce que j'ai ramené au tableau numéro 1, page 39 de l'avenant A.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que d'aller de l'avant, ma toute

  8   dernière question au sujet de ce tableau-ci.

  9   Pour en revenir au chiffre de 642, que vous avez calculé, vous-même -

 10   - vous et votre équipe, vous nous avez dit que vous avez annoté la

 11   documentation en terme d'indication apposée sur les tableaux; est-ce que la

 12   documentation a été communiquée à l'accusé pour qu'il puisse vérifier si ça

 13   a été fait de façon correcte ou pas ?

 14   Mme WEST : [interprétation] Monsieur le Président, je vais parler de

 15   cela plus à l'occasion d'une pause. Mais si j'ai bien compris le

 16   recensement et les registres de l'OSCE ont été communiqués à l'accusé pour

 17   qu'il puisse faire ses propres calculs. Je ne sais pas si on lui a

 18   communiqué les tableaux annotés, et je vais me prononcer, je reviendrai

 19   plus tard avec cette information vers les Juges de la Chambre.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 21   Mme WEST : [interprétation]

 22   Q.  Maintenant nous allons passer au 65 ter qui a un numéro ERN se

 23   terminant par 0974.

 24   R.  Page 39, tableau 1, oui, pour Prijedor.

 25   Q.  Merci, voilà. Alors est-ce que vous pouvez, que vouliez-vous nous

 26   montrer avec ce tableau, Docteur ?

 27   R.  Les Serbes, c'est bon, ligne 14, on nous parle de Prijedor, et une

 28   deuxième colonne se rapporte à Prijedor. On voit un chiffre qui est celui


Page 28163

  1   de 40 822. 40 822.

  2   Q.  Excusez-moi Docteur Tabeau, je suis en train de me pencher sur notre

  3   écran, ligne 14 pour Prijedor, moi, je vois 40 825.

  4   R.  Oui, excusez-moi, 25. Je voyais 25, mais j'ai dit 22.

  5   Q.  Bon, allez-y.

  6   R.  Bon, je disais, 40 825. C'est ce que nous donne le recensement de 1991,

  7   pour la population serbe originaire de Prijedor. Bien entendu, ce sont

  8   seulement ceux qui sont nés avant 1980. Autrement je n'aurais pas pu

  9   comparer ce chiffre avec celui que j'aie au niveau du registre des

 10   électeurs. Donc nous avons 40 825, j'ai multiplié ce chiffre avec 2.7 %.

 11   C'est la proportion d'échantillonnage que j'ai déterminée pour ce qui est

 12   des Serbes déplacés originaires de Prijedor. Le résultat de cette formule

 13   nous donne un chiffre 1 089 au niveau du tableau numéro 3, et dans notre

 14   rapport c'est ce qui est présenté comme étant le chiffre des Serbes que

 15   l'on a estimés comme étant des personnes déplacées de Prijedor -- nous

 16   passons maintenant à la présentation en page 2.

 17   Mme WEST : [interprétation] 65 ter, 23719, prétoire électronique, page 2,

 18   s'il vous plaît.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Le tableau 2 se trouve au bas de la page. Pour

 20   ce qui est des Serbes, le chiffre estimé des personnes déplacées et des

 21   réfugiés est de 1 089. C'est ainsi que nous avons mis en œuvre cette

 22   méthode.

 23   Pour ce qui est de quelque autre groupe ethnique que ce soit, les ratios de

 24   l'échantillonnage sont différents, enfin l'échantillon est différent et,

 25   bien entendu, le recensement 1991 des populations sont différents [comme

 26   interprété] pour ce qui est de la taille d'une population. Les résultats

 27   sont donnés dans la troisième colonne pour ce qui est des chiffres estimés

 28   alors que le total pour la totalité des groupes ethniques se trouve être


Page 28164

  1   correspondant à 45 688. C'est le chiffre plus complet estimé des personnes

  2   déplacées et des réfugiés originaires de Prijedor.

  3   Q.  Bien.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Je vais retourner vers ce

  5   chiffre de 40 825 de ceux qui vivaient à Prijedor en 1991.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que ce sont des Serbes ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maintenant gardons ceci à l'esprit et

 10   revenons vers la page 52 du rapport.

 11   Mme WEST : [interprétation] C'est le document 65 ter 10723.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] En effet.

 13   Mme WEST : [interprétation] Le ERN, le 09 --

 14   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 15   Mme WEST : [aucune interprétation]

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Moi, je suis en train de revenir à la

 17   page 51.

 18   Mme WEST : [interprétation] Le ERN est le 0986.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ici, la population totale qui est

 20   identifiée comme ayant vécu à Prijedor en 1991 pour l'année 1997 dit

 21   49 019.

 22   Pouvez-vous expliquer la différence entre ces deux chiffres ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Le chiffre de 40 825, c'est ce qui concerne

 24   les Serbes de 1991, et ça devrait être comparé avec le chiffre de 24 070 en

 25   provenance du tableau 2S, page 51.

 26   Vous avez mentionné, Monsieur le Juge, le chiffre de 49 000 de ce tableau.

 27   Le 49 019 est un chiffre plus grand parce qu'il englobe la totalité des

 28   groupes ethniques. Si on veut comparer les Serbes avec les Serbes, il faut


Page 28165

  1   aller plus à droite sur le tableau et rechercher le chiffre de 24 070.

  2   Alors 24 070 c'est un échantillon de ces 40 825. C'est un très grand

  3   échantillon, de ceux qui sont déclarés au recensement -- qui sont déclarés

  4   comme tels au recensement, et je me sers de cet échantillon pour aboutir à

  5   un chiffre plus complet s'agissant des personnes déplacées.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, est-ce que vous pouvez nous dire

  7   une fois de plus en quoi consiste la signification de ce chiffre de 40 825

  8   ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] 40 825 c'est le nombre des Serbes qui sont

 10   listés dans le recensement en 1991 pour Prijedor, et ils se trouvent être

 11   nés avant l'année 1980.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et 24 000 ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] 24 070 c'est un échantillon de ceux des Serbes

 14   qui sont listés dans le recensement pour Prijedor qui sont également

 15   identifiés comme étant des électeurs enregistrés sur les listes électorales

 16   de 1997.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, d'abord, 4,4 millions et 2,5

 18   millions de l'autre côté ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact. En établissant un lien entre les

 20   individus pour les deux années prises en considération.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 22   Continuons.

 23   Mme WEST : [interprétation] Grand merci.

 24   Nous allons maintenant revenir vers le document 23719, page 2 du prétoire

 25   électronique. Merci de nous la montrer.

 26   Q.  On a vu le nombre des Serbes qui se trouve être une estimation et ce

 27   chiffre est de 1 089. Nous pouvons voir ensuite dans une colonne 95 %

 28   intervalle de probabilité.


Page 28166

  1   Est-ce que c'est donc la probabilité de l'erreur statistique que vous

  2   prenez ici ?

  3   R.  Oui. Il s'agit d'une estimation. Nous ne pouvons pas avoir de certitude

  4   au sujet de ce que nous avons estimé. Nous pouvons parler d'une probabilité

  5   ou d'une fiabilité du chiffre estimé, et ça, on le voit au tableau 2. Dans

  6   ce cas concret, on parle de l'intervalle de probabilité qui nous exprime

  7   l'éventail des incertitudes qui se situe à 5 % d'erreur au niveau de

  8   l'estimation. Si on se penche sur le nombre des Serbes, le chiffre estimé

  9   des Serbes, 1 089, et si on voit les deux chiffres qui sont juste à côté,

 10   le premier dit 1 036 et l'autre, le second, nous dit 1 142. Vous pouvez

 11   voir que l'estimation se trouve être au milieu de ces deux valeurs-là, la

 12   valeur supérieure et la valeur inférieure dans l'intervalle des

 13   probabilités, et l'intervalle des probabilités nous fournit une fiabilité

 14   de l'ordre de 95 % pour ce qui est d'avoir été bon dans notre estimation.

 15   Q.  Merci. Je voudrais qu'on se penche maintenant sur les deux dernières

 16   colonnes pour en arriver au pourcentage minimum et pour ce qui est du

 17   pourcentage estimé.

 18   Dites-nous quelque chose au sujet de ces deux colonnes-là.

 19   R.  Certaines de ces colonnes sont placées dans une corrélation mutuelle.

 20   En termes de calculs simples on procède par nombre minimum obtenu par la

 21   division de la population en 1191 et on arrive à un pourcentage de 1,6 %.

 22   C'est la part ou le ratio du nombre minimum des personnes déplacées par

 23   rapport au recensement de 1991, et à côté, on voit ce pourcentage de 2,7

 24   qu'on a déjà vu, auparavant, et ça se rapporte au chiffre estimé des

 25   personnes déplacées par rapport au total de la population en 1991.

 26   Q.  Merci. Nous n'allons pas maintenant prendre les chiffres relatifs aux

 27   Musulmans, mais comme nous avons procédé à des estimations relatives aux

 28   Serbes de Prijedor qui se trouvent être déplacés, à savoir les 1 089,


Page 28167

  1   quelle est l'estimation que vous faites pour ce qui est des Musulmans

  2   originaires de Prijedor et qui se trouvent être des personnes déplacées ?

  3   R.  Ce chiffre des personnes musulmanes déplacées au tableau numéro 2 nous

  4   dit 19 290.

  5   Q.  Alors ça c'est le chiffre absolu minimal ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Quelle est l'estimation ?

  8   R.  L'estimation dit 39 322.

  9   Q.  Je voudrais maintenant --

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] En fin de compte, quand on parle de

 11   personnes déplacées, la raison du déplacement n'a pas été prise en

 12   considération. Est-ce que c'est des déplacements forcés ou est-ce que ce

 13   sont des déplacements de plein gré, vous n'avez pas étudié ces questions-

 14   là.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous n'avons pas pris en cause les raisons des

 16   déplacements dans ce rapport. Ici, nous avons procédé à des mesures, c'est-

 17   à-dire à des chiffrages de déplacement.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 19   Mme WEST : [interprétation]

 20   Q.  Docteur, nous venons de parler de Prijedor au concret. Maintenant

 21   j'aimerais que nous passions aux chiffres totaux de ces populations dans 27

 22   municipalités.

 23   Si on passe à la page suivante qui se trouve en bas, tableau numéro

 24   4, qui est le même que pour Prijedor, mais ici on a la totalité des 27

 25   municipalités. Penchons-nous maintenant sur la ligne qui se rapporte aux

 26   Musulmans.

 27   Si on commence par 481 109, dites-nous ce que signifie ce chiffre.

 28   R.  Ça c'est le recensement de 1991 pour ce qui est du nombre des Musulmans


Page 28168

  1   au sein des 27 municipalités qui sont prises en considération dans

  2   l'affaire Karadzic.

  3   Q.  Le chiffre de 161 047, que représente-t-il ?

  4   R.  Ce chiffre représente le nombre minima des Musulmans déplacés

  5   originaires des dites municipalités.

  6   Q.  Quelle est l'estimation à laquelle vous avez abouti, en vous servant

  7   des échantillons de proportion ou de ration des Musulmans ?

  8   R.  C'est 284 239. C'est l'estimation totale du nombre des Musulmans

  9   déplacés originaires de ces municipalités-là.

 10   Q.  Le Président de la Chambre vient de vous demander si vous aviez analysé

 11   les causes de leur déplacement, et vous avez dit non. Mais avez-vous pu

 12   analyser le moment du déplacement, c'est-à-dire au fil de cette période

 13   allant de 1991 à 1997 pour ce qui est du moment où ces gens se sont

 14   déplacés ?

 15   R.  Il n'est guère facile d'analyser les cadres temporels parce que les

 16   sources qui parlent des cadres temporelles n'ont pas été mises à notre

 17   disposition. Mais nous avons quand même pu retrouver quelques sources

 18   signalant le fait que début 1993 et début 1995 il y a des chiffres qui sont

 19   comparables.

 20   Q.  Si on passe à la page suivante, page 4 du prétoire électronique, en

 21   haut, on pourra voir tableau numéro 2, changement intervenu au niveau de la

 22   population dans certaines municipalités.

 23   On voit que le tableau commence par une séparation par groupes ethniques.

 24   Ça commence en 1991, et ça se termine en 1997 mais, au milieu, nous avons

 25   les années 1993 et 1995. Quelles sont les sources que vous avez utilisées

 26   pour obtenir les informations relatives à 1993 et 1995 ?

 27   R.  Ces deux sources sont fournies par les autorités de la Republika

 28   Srpska, à savoir le ministère de l'Intérieur de la Republika Srpska,


Page 28169

  1   pendant le conflit même, en réalité. Il s'agit de sources assez abondantes

  2   qu'on ne peut pas comparer avec le recensement de la population, qui a été

  3   établi par les autorités statistiques, mais ce sont là des chiffres

  4   approximatifs qui sont utiles à des fins de comparaison avec d'autres

  5   données statistiques.

  6   Q.  On peut voir ici qu'il est énuméré rien que neuf municipalités.

  7   Pourquoi neuf et non pas 27 ?

  8   R.  C'est parce que les sources ont été si spécifiques. Qu'elles n'ont

  9   couvert que la région de Banja Luka, et c'est différent des 27

 10   municipalités que nous avons examinées. Mais il y a un nombre de

 11   municipalités, un total de 9, qui se chevauche avec deux autres sources,

 12   les nôtres, et les sources de la Republika Srpska.

 13   Q.  Nous allons nous pencher en particulier sur ce tableau relatif aux

 14   Musulmans qui se trouve en haut, et comme on a parlé de Prijedor, revenons

 15   vers Prijedor.

 16   Ici, s'agissant de Prijedor, il est dit pour l'année 93, départ, 42 000.

 17   Que nous dit ce chiffre ?

 18   R.  C'est le chiffre approximatif des Musulmans originaires de Prijedor qui

 19   sont cités par les sources de la RS, comme étant des personnes qui sont

 20   parties de cette municipalité, qui ont quitté la municipalité, dès début

 21   1993.

 22   Q.  Et ensuite, à la colonne 1995, il est dit "résidents," de Prijedor, 3

 23   600. Qu'est-ce que signifie ce chiffre-là ?

 24   R.  Ce chiffre représente le nombre des Musulmans qui se trouvent encore

 25   enregistrés au niveau des sources de la RS; ils sont donc encore dans la

 26   municipalité de Prijedor. Alors, c'est le 3 600 qui était recensé dans la

 27   population de 1991 où le chiffre total pour Prijedor était de 49 351.

 28   Q.  Donc quand on parle du cadre temporel, quelles sont les conclusions que


Page 28170

  1   vous avez tirées pour ce qui est du fait de savoir quand est-ce que ces

  2   Musulmans de Prijedor ont quitté la région ?

  3   R.  Bien, évidemment, déjà dès le début de l'année 1993, un nombre

  4   important de Musulmans de Prijedor ont fait l'objet de rapport

  5   d'information par des sources indépendantes comme étant des personnes qui

  6   étaient parties. Donc cela permet de dater le moment où les personnes se

  7   sont déplacées et sont devenues des personnes déplacées.

  8   Q.  Alors, dans les deux cases en bleu que nous voyons sur ces tableaux,

  9   est-ce qu'il s'agit de corrections qui ont été apportées ?

 10   R.  Oui. Il y a eu une erreur au niveau de Sanski Most, c'est ce qui est

 11   surligné en bleu ici.

 12   Q.  Est-ce que nous pouvons passer à la page suivante, s'il vous plaît ?

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Puisque nous sommes encore sur cette

 14   page, je vous demande de bien vouloir regarder le bas du tableau qui évoque

 15   les Serbes, cela devrait être C, et non pas un petit (b).

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ici, pour Prijedor, nous voyons le

 18   chiffre de 47 581 en 1991. Est-ce que c'est un chiffre que nous avons déjà

 19   vu en parcourant les différents tableaux qui portaient sur le nombre de

 20   Serbes à Prijedor ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous n'avons pas pu voir ce chiffre auparavant

 22   car ce chiffre comprend toutes les tranches d'âge de la population de

 23   Prijedor. A savoir toutes ces personnes qui y vivaient, en tenant pas

 24   compte de leur date de naissance.

 25   Dans d'autres tableaux, nous avons regardé un segment de la population, un

 26   segment important de la population qui, en 1997, sont arrivés à l'âge de 18

 27   ans et pouvaient voter et pouvaient être inscrits sur les listes

 28   électorales. Donc notre population de 1991 est, bien entendu, moins


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  1   importante que ce qui est indiqué sur ce tableau.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  3   Mme WEST : [interprétation] Page suivante, s'il vous plaît.

  4   Q.  Alors, ici, nous avons deux graphiques, figures 14 et 15. Est-ce qu'il

  5   s'agit de représentations visuelles de ce que nous avons vu à la page

  6   précédente ?

  7   R.  Oui. Il s'agit des mêmes chiffres que ce que nous avons vu à la page

  8   précédente. La figure numéro 14 représente le nombre de Musulmans. La

  9   figure numéro 15, le nombre de Serbes.

 10   Ce qui est montré dans ces deux figures sont les populations en 1991 par

 11   opposition aux populations de 1995. Donc ce qui est en marron foncé cela

 12   représente l'année 1991. Ce qui est indiqué en vert représente l'année

 13   1995, dans les deux cas, et un pourcentage est indiqué. Il ne s'agit pas

 14   dans ce cas de chiffres absolus, il s'agit d'un pourcentage qui est une

 15   mesure que l'on peut comparer aisément.

 16   Pour ce qui est des Musulmans, ceci montre qu'en 1995, leurs proportions

 17   étaient extrêmement basses par rapport à 1991, et ce qui confirme ce que

 18   nous avons fait dans notre étude et consigné dans notre rapport. A la

 19   figure numéro 15, nous voyons l'inverse. Le nombre de Serbes s'est accru

 20   considérablement en 1995, par opposition à l'année 1991, et encore une

 21   fois, les mêmes résultats ont été obtenus dans notre rapport.

 22   Q.  Merci, Madame Tabeau.

 23   A la page suivante de votre document, vous avez fait une analyse

 24   comparable et vous l'avez appliquée à la municipalité de Srebrenica ?

 25   R.  Aux municipalités de Srebrenica, c'est exact.

 26   Q.  Dans ce cas, il s'agit d'analyse portant sur les personnes déplacées à

 27   l'intérieur de leur propre pays, et non pas de personnes tuées.

 28   R.  Il s'agit de personnes déplacées et non tuées.


Page 28172

  1   Q.  Est-ce que vous avez utilisé la même méthode que celle que vous avez

  2   appliquée au chiffre de Prijedor ?

  3   R.  Oui, il s'agit de la même méthode et les mêmes sources.

  4   Mme WEST : [interprétation] Monsieur le Président, je vais maintenant

  5   passer au rapport de Sarajevo.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je souhaite puisque nous passons à autre

  7   chose, je souhaite remarquer que nous avons la pièce 5065 [comme

  8   interprété], au numéro 65 ter, et que c'est le chiffre actuel de la pièce à

  9   conviction de l'Accusation.

 10   M. ROBINSON : [interprétation] Je vous félicite. Je félicite l'Accusation.

 11   Mme WEST : [aucune interprétation]

 12   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 13   Mme WEST : [interprétation]

 14   Q.  Donc nous allons passer à Sarajevo. Bon, vous avez travaillé pour le

 15   bureau du Procureur pendant de nombreuses années; quelle était la première

 16   étude que vous avez faite relative à Sarajevo ?

 17   R.  Alors, le premier rapport que j'ai préparé dans un ordre chronologique,

 18   était le rapport Galic.

 19   Q.  Ce rapport Galic correspondait à la période allant de septembre 1992 à

 20   août 1994, la période de temps où Galic commandait le Corps de Sarajevo-

 21   Romanija ?

 22   R.  Oui, pour autant que je m'en souvienne.

 23   Q.  Le rapport suivant sur Sarajevo, le suivant concernant Dragomir

 24   Milosevic, allant de septembre 1994 à novembre 1995.

 25   Q.  Etait-ce, à ce moment-là, que Dragomir Milosevic commandait le corps ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Quel était le dernier rapport que vous avez rédigé sur Sarajevo ?

 28   R.  Le dernier rapport que j'ai rédigé est celui qui concerne l'affaire


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  1   Karadzic et qui porte sur les cinq premiers mois du siège, à savoir du mois

  2   d'avril 1995 au 9 septembre 1995.

  3   Q.  Donc il s'agit du mois d'avril 1992 ?

  4   R.  Oui, pardonnez-moi, bien évidemment, avril 1992.

  5   Q.  Donc le rapport Karadzic couvre les périodes -- la période citée dans

  6   l'affaire Milosevic, et Galic ?

  7   R.  Oui, ces rapports sont des rapports dédiés exclusivement à cette

  8   affaire, couvrent la période du mois d'avril 1992 au mois de novembre 1995.

  9   Q.  Donc couvrent les trois périodes. Nous allons procéder par ordre

 10   chronologique parce que vous parlez de ces rapports. Alors, qu'est-ce --

 11   R.  Ma tâche consistait à fournir un chiffre fiable de victimes du siège,

 12   des victimes civiles et victimes militaires.

 13   Q.  Pour chacun de ces trois rapports, vous avez étudié la même méthode ?

 14   R.  Alors deux de ces rapports se fondaient sur la même méthode, et les

 15   mêmes sources, et le troisième rapport dans l'affaire Dragomir Milosevic,

 16   est un rapport qui était quelque peu différent, et qui utilisait toujours

 17   les méthodes standard utilisées au fil des ans par ce Tribunal.

 18   Mme WEST : [interprétation] Est-ce que nous pouvons afficher le numéro 65

 19   ter, 2130, s'il vous plaît, -- 12130.

 20   Q.  Madame Tabeau, il s'agit ici de votre rapport qui correspond à cette

 21   affaire, avril 1992, au mois de septembre 1992. Quelles zones géographiques

 22   couvrent ce rapport ?

 23   R.  Alors, la zone géographique couverte par ce rapport est ce qui a été

 24   communément appelé la zone située entre les lignes de front à Sarajevo, et

 25   les municipalités comprises entre ces lignes de front couvrent six

 26   municipalités urbaines, Sarajevo, et ces municipalités sont énumérées dans

 27   mon rapport.

 28   Q.  Quelle a été la principale source que vous avez utilisée pour préparer


Page 28174

  1   ce rapport ?

  2   R.  La source principale que j'ai utilisée pour compiler les statistiques,

  3   encore une fois, j'ai utilisé le critère du nombre minimum, les personnes

  4   tuées, et les personnes blessées. J'ai utilisé ce qui est communément

  5   appelé l'étude des foyers de Sarajevo. Ceci a été mené pour l'essentiel à

  6   Sarajevo, par des chercheurs sur place à la mi-1994. Donc à l'intérieur de

  7   ces zones, de ces lignes de front, cette zone qui se situait entre les

  8   lignes de front à ce moment-là.

  9   Q.  C'est quelque chose que nous allons aborder votre étude dans le détail

 10   dans quelques instants.

 11   Mais avez-vous consulté d'autres sources également ?

 12   R.  Bien évidemment, il y avait une autre source, une autre source qui

 13   s'était penchée là-dessus, le "Bakije funeral," il s'agit en fait d'un

 14   cimetière, du cimetière le plus ancien de Sarajevo, où était enterrée la

 15   population musulmane. Nous avons utilisé cette source pour pouvoir fournir

 16   une estimation plus complète du nombre de victimes. Cette source n'a pas

 17   été utilisée pour afficher les données statistiques sur le nombre de

 18   personnes blessées ou tuées.

 19   Nous avons également utilisé une autre source qui est celle du recensement

 20   de l'année 1991, qui était une source que nous utilisons en réalité toutes

 21   les fois que nous travaillons sur le cas des victimes, sur des victimes,

 22   pour tout d'abord valider les informations sur les personnes qui figurent

 23   dans une source portant sur des victimes, nous souhaitons savoir comment

 24   cette personne est répertoriée dans le recensement. Il s'agit dans ce cas

 25   de la validation des archives ou dossiers sur les victimes. Nous essayons

 26   d'améliorer ces chiffres quelquefois, en utilisant les chiffres du

 27   recensement.

 28   Deuxièmement, nous utilisons le recensement, les chiffres du


Page 28175

  1   recensement pour comprendre quelle est l'appartenance ethnique des

  2   victimes. Nous utilisons toujours cette même définition de l'appartenance

  3   ethnique, sur la question qui reste une question ouverte se fondant sur la

  4   population -- le recensement de la population en 1991.

  5   Outre le recensement, nous utilisons également des listes militaires des

  6   forces armées qui étaient engagées au combat en Bosnie, et ces listes ont

  7   été utilisées, ont permis de nous donner des informations sur qui peut être

  8   considéré comme un militaire ou soldat, et qui peut être considéré comme un

  9   civil.

 10    Dans le cas qui nous intéresse, pour ce qui est de cette étude qui a

 11   porté sur les foyers de Sarajevo, nos statuts de militaire étaient

 12   disponibles, et nous ont été fournis par notre source principale.

 13   Q.  Donc nous allons parler maintenant de cette source principale sur les

 14   foyers de Sarajevo, et dans le rapport Galic, vous avez parlé de ceci en

 15   détail, à la page 10. Inutile de voir cette page.

 16   Pouvez-vous nous dire quand cette étude sur les foyers de Sarajevo a

 17   été menée ?

 18   R.  A la mi-1994, pour autant que je m'en souvienne, d'avril à août, voir

 19   même peut-être le début du mois de septembre 1994.

 20   Q.  Qui a mené cette étude ?

 21   R.  Le groupe qui a mené cette étude et qui a défini les questions étaient

 22   des chercheurs de l'Institut chargé des crimes de guerre et des droits

 23   internationaux à Sarajevo. Ces personnes ont pu établir ce questionnaire à

 24   une époque difficile, parce que cette étude était fort importante, et ils

 25   ont été très aidés dans leur travail pour les autorités statistiques ou

 26   l'institut statistique de Bosnie-Herzégovine.

 27   Q.  Quelles zones a couvert cette étude ?

 28   R.  Comme je vous l'ai dit, il s'agissait de la région qui se trouvait


Page 28176

  1   entre les lignes de front, six municipalités urbaines, les parties

  2   importantes de ces municipalités. Un nombre important d'individus, de

  3   foyers ont été inclus dans cette étude, et ce chiffre était très élevé, 85

  4   000 foyers qui ont fait l'objet d'une interview dans le cadre de cette

  5   étude; 85 000 foyers correspondent à environ 340 000 individus.

  6   Q.  Bien. Vous avez dit qu'il y a eu des interviews; est-ce qu'il

  7   s'agissait d'interviews individuelles, face à face ?

  8   R.  Oui, tout à fait. Interviews individuelles qu'on menait par des

  9   personnes qui avaient été formées à cet effet et qui avaient des

 10   instructions sur comment poser les questions aux foyers en question.

 11   Q.  Vous venez d'évoquer le fait qu'il y avait 85 000 foyers ce qui

 12   correspondent à environ 340 000 individus; comment savez-vous que cela

 13   correspond à 340 000 individus ?

 14   R.  C'est un chiffre approximatif. Le chiffre exact je ne le connais pas,

 15   et je ne le sais pas parce que ces documents tellement volumineux n'ont

 16   jamais été saisis dans un système informatique. Nous n'avons utilisé que

 17   les éléments dont nous avions besoin pour nos travaux de recherche et tout

 18   ceci a été saisi dans nos systèmes informatiques, cela représentait un

 19   nombre -- un très grand travail.

 20   Ce chiffre de 340 000 individus est une estimation qui se fonde sur

 21   l'hypothèse qu'un foyer comporte quatre personnes.

 22   Q.  Avant la guerre, saviez-vous quelle était la taille moyenne d'un foyer

 23   ?

 24   R.  Oui, c'était plus petit, c'était moins de quatre personnes. C'était

 25   trois et quelque chose, et il y a une note en bas -- et des poussières,

 26   trois et des poussières. Il y a une note en bas de page dans mon rapport --

 27   Q.  Pourquoi avez-vous augmenté ce chiffre ?

 28   R.  J'ai augmenté ce chiffre parce qu'il y a eu de nouveaux entrants, de


Page 28177

  1   nouveaux -- personnes nouvellement arrivées à Sarajevo qui sont venues

  2   s'installer et vivre avec des membres de leur famille à Sarajevo, ça c'est

  3   une des raisons. Dans le rapport Galic, nous avons également calculé les

  4   taux démographiques, à savoir le taux relatif de personnes blessées et

  5   tuées, et si la taille de la population était évaluée ou était trop petite,

  6   dans ce cas, ceci aurait une incidence sur les taux et les augmenterait, ce

  7   que nous ne souhaitions pas faire. Nous souhaitions inclure un nombre plus

  8   important de la population à risque.

  9   Q.  Vous avez dit qu'un questionnaire avait été établi. Le questionnaire se

 10   trouve dans une des annexes du rapport Karadzic. Pourriez-vous nous dire

 11   quelles questions vous intéressaient particulièrement ?

 12   R.  Il s'agissait de questions qui avaient trait à la chose suivante, à

 13   savoir s'il y avait des membres de la famille qui avaient été tués pendant

 14   la guerre dans une famille donnée, s'il y avait des personnes blessées,

 15   s'il y avait des personnes qui étaient mortes de cause naturelle. Je crois

 16   que c'était les trois principales questions qui m'intéressaient.

 17   Q.  D'accord. Une fois que les interviews ont été menées -- supprimez cela.

 18   Le fait de saisir toutes ces données et de les filtrer, est-ce quelque

 19   chose auquel vous avez participé ?

 20   R.  Oui. En réalité, nous n'avons même pas demandé à recueillir une base de

 21   données de l'institut qui a mené cette étude, parce qu'il ne disposait pas

 22   -- l'institut ne disposait pas d'une base de données. Ce dont il disposait

 23   c'était les questionnaires d'origine qui ont dû être saisis dans

 24   l'ordinateur, c'est ce que nous avons fait. C'était -- cela relevait de ma

 25   responsabilité et j'ai participé à cela avec d'autres collègues qui

 26   travaillaient dans le même service que moi. Donc nous avons sélectionné un

 27   échantillon de questions d'origine, nous avons copié et nous avons saisi

 28   dans le système informatique de façon à avoir des données d'entrer, et ceci


Page 28178

  1   s'est intitulé : Le projet de l'unité démographique.

  2   Q.  Donc, sur ces 85 000 foyers -- ces questionnaires portant 80 000 [comme

  3   interprété] foyers, combien avez-vous sélectionné ?

  4   R.  Environ 40 000. C'est le nombre de questionnaires qui fournissaient des

  5   éléments d'information sur des personnes tuées, sur des personnes blessées

  6   ou sur des personnes mortes de cause naturelle dans un foyer donné.

  7   Q.  Pour ce qui est des 45 000 restant, et bien ne -- n'affichaient pas

  8   d'informations qui vous intéressaient ?

  9   R.  C'est exact.

 10   Q.  Nous avons déjà évoqué la concordance des différents éléments.

 11   S'agissait-il du même processus que vous avez utilisé ?

 12   R.  Oui. Il s'agissait de la procédure de corrélation standard utilisée

 13   dans d'autres cas.

 14   Q.  Les 40 000 questionnaires dont vous disposiez; est-ce que vous les avez

 15   comparés aux chiffres du recensement ?

 16   R.  Il y a un taux de concordance élevé qui correspond à plus de 81 %.

 17   Q.  Ce faisant, pour ce qui est des 81 %, est-ce que vous avez compris

 18   comment ce 81 % permettait d'illustrer l'appartenance ethnique ?

 19   R.  Oui. Par le système de corrélation, nous savions comment ces personnes

 20   s'étaient présentées dans le recensement de 1991.

 21   Q.  Alors nous pouvons maintenant passer au document papier 23719 ou

 22   regarder la page du prétoire électronique numéro 16, ou page 6 sinon. Le

 23   tableau qui porte sur le rapport Karadzic-Sarajevo que nous avons indiqué

 24   dans le document papier, pages 5 et 6.

 25   L'INTERPRÈTE : 4 et 5, correction de l'interprète.

 26   Mme WEST : [interprétation]

 27   Q.  -- souhaite que nous regardions certains des résultats que vous avez

 28   trouvés. Ici, si nous regardons le tableau numéro 1, un aperçu du résumé


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  1   des statistiques portant sur -- de l'étude sur les foyer, alors, si vous

  2   regardez les variables, ce qui est indiqué comme variables, quelle est la

  3   taille de l'échantillon ?

  4   R.  Alors la taille de l'échantillon est une sélection de cas, de dossiers

  5   sur l'ensemble des questionnaires des foyers -- sur les foyers de Sarajevo,

  6   et la taille de l'échantillon correspond aux éléments rassemblés sur les

  7   personnes tuées et blessées. Cela porte sur une période précise de l'acte

  8   d'accusation, avril 1992 au 9 septembre 1992, et donc il n'y a que ces

  9   dossiers-là qui ont été sélectionnés, parce qu'ils relevaient de cette

 10   période-là. Donc, pour ce qui est de la taille de l'échantillon de la

 11   deuxième colonne, nous avons l'ensemble des chiffres, le total, et sous --

 12   ou dans la colonne où il est marqué "personnes tuées," il y a un chiffre

 13   qui est indiqué; 2 028, c'est le chiffre, et c'est le chiffre -- c'est un

 14   chiffre minimum de personnes tuées qui ont été sélectionnées à cause de

 15   leur pertinence eu égard à cette période couverte par l'acte d'accusation.

 16   Tous ces cas de meurtre se sont déroulés dans cette zone se situant entre

 17   les lignes de front à Sarajevo à l'année 1994, et le chiffre suivant, le

 18   chiffre absolu suivant qui se trouve dans l'avant-dernière colonne, est le

 19   chiffre de 7 374. Je répète le chiffre, 7 374. Il s'agit là du chiffre qui

 20   correspond au nombre de personnes blessées sur le même territoire et

 21   correspondant à la même période.

 22   Q.  Merci. Dans le questionnaire, vous avez inclus des éléments

 23   d'information suivants, à savoir si la personne tuée ou blessée était un

 24   civil ou un soldat.

 25   R.  Oui, cela était précisé -- précisait le statut, à savoir si la personne

 26   était un civil ou un soldat.

 27   Q.  Outre le fait d'avoir décrit les événements à l'origine de la blessure

 28   ou du meurtre de cette personne, de quel type d'information disposiez-vous


Page 28180

  1   ?

  2   R.  Nous avons des informations sur la date de naissance, donc nous

  3   pouvions analyser les tranches d'âge de ces personnes tuées ou blessées. Ce

  4   qui est encore plus important, nous disposions d'informations sur les

  5   causes du décès, à savoir la mort ou les causes de leurs blessures.

  6   Eléments que nous avons pu traiter parce que nous avons ainsi pu mettre ces

  7   données dans des catégories, que ce soit pilonnage, que ce soit tir

  8   embusqué, emploi d'armes à feu, et ainsi que d'autres causes.

  9   Q.  Cette information-là -- ces informations-là se trouvent en bas de ce

 10   tableau-ci; c'est exact ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Alors, dans le deuxième tableau, vous avez extrait les civils; c'est

 13   exact ?

 14   R.  Oui, c'est exact.

 15   Q.  Donc si nous passons à la page suivante de notre document, à la page 7

 16   --

 17   L'INTERPRÈTE : Précision de l'interprète : il s'agissait bien de la page 6

 18   et 7 précédemment.

 19   Mme WEST : [interprétation]

 20   Q.  Page 8. Alors, ici, nous avons les causes du décès qui sont indiquées

 21   et les raisons pour lesquelles les personnes ont été blessées, les causes

 22   de leurs blessures, et donc nous voyons cinq catégories en particulier.

 23   Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre comment vous êtes arrivée à

 24   définir ces cinq catégories ?

 25   R.  Ces causes ont été fournies par les personnes répondant aux

 26   questionnaires sans aucune instruction ou catégorie prédéfinie. Les

 27   personnes ont évoqué ces causes telles qu'elles les avaient vécues. Donc ma

 28   tâche a consisté à étudier ces rapports pour établir un classement qui


Page 28181

  1   avait un sens. Quelque chose qui pouvait être fait de telle sorte que

  2   chaque cause soit identifiée de façon cohérente. Pendant ce processus-là,

  3   nous avons donc standardisé ces données nous avons gardé les catégories

  4   d'origine dans la mesure du possible, et ce que nous constatons ici, au

  5   niveau des armes à feu, par exemple, au niveau du pilonnage, du

  6   bombardement, pilonnage, de tir de façon générale, il s'agit là de

  7   catégories qui à l'origine avaient été fournies par les personnes

  8   interviewées.

  9   Q.  Je souhaite me pencher sur la catégorie des armes à feu pendant

 10   quelques instants, et dans la colonne qui se trouve complètement à droite

 11   de chaque tableau, vous avez un pourcentage.

 12   R.  Oui.

 13   Si vous additionnez le pourcentage du tableau numéro 2 correspondant aux

 14   armes feu, ce qui correspond à 59,7 % et 14,1 %, et jusqu'à 5,1 %, quel est

 15   le pourcentage total de personnes décédées ou mortes parce qu'ils ont fait

 16   l'objet de tir par armes à feu ?

 17   Q.  Alors, le pourcentage total de décès dû aux armes à feu ?

 18   R.  88,4 %, c'est un nombre très important.

 19   Q.  Donc il s'agit là de personnes tuées. Alors, si nous pensons aux

 20   personnes blessées et que nous procédons de la même manière et que nous

 21   ajoutons ou additionnons les pourcentages quel est le chiffre total ?

 22   R.  Dans ce cas, ce pourcentage est encore plus élevé et correspond à 98,8

 23   %, quasiment 97 %.

 24   Q.  Jusqu'à présent, dans ce rapport, les chiffres que nous avons évoqués

 25   sont des chiffres minimums. Ce sont des chiffres que vous avez dénombrés

 26   vous-même. Avez-vous pu traduire ces chiffres en estimation réelle de

 27   personnes tuées ou blessées ?

 28   R.  Oui. Les chiffres qui sont inclus dans le tableau numéro 1 sont des


Page 28182

  1   chiffres minimums. Il s'agit de chiffres minimums parce que, même si notre

  2   source était très fiable et très importante, malgré cela une source ne peut

  3   pas fournir des éléments d'information sur toutes les victimes de guerre,

  4   ce n'est pas ainsi que nous travaillions. L'expérience nous l'a démontrée.

  5   Ce n'est pas ainsi que nous travaillions dans le cadre d'un conflit, donc

  6   il est certain que l'étude portant sur les ménages de Sarajevo n'est pas

  7   une source exhaustive. L'estimation que nous avons faite a tenu compte de

  8   deux sources. La première est l'étude menée sur les foyers de Sarajevo, et

  9   la seconde source est le BKMG [phon].

 10   Q.  Sur le cimetière de Bakije, pour pouvoir donner une estimation et un

 11   cadre temporel, quel est l'outil statistique que vous avez utilisé ?

 12   R.  Une méthode simple qui est plus précisément utilisée pour faire des

 13   estimations de ce type. Ça s'appelle capture et re-capture.

 14   Q.  Avec cette méthode, est-ce qu'il vous faut une source indépendante, ou

 15   vous faut-il deux sources ?

 16   R.  Cette méthode exige deux sources, au moins deux sources indépendantes.

 17   Il est possible d'en avoir trois, si cette troisième source existe. Dans

 18   notre cas nous avons utilisé deux sources indépendantes qui étaient à notre

 19   disposition. Donc les estimations de capture et de re-capture et ceci a été

 20   fait sur la base des deux sources.

 21   Q.  Alors, l'une de ces deux sources, nous en avons déjà parlé en détail,

 22   il s'agit des rapports concernant les foyers, et la deuxième source dont

 23   vous avez parlé étaient les données émanant du cimetière Bakije; pouvez-

 24   vous nous en dire plus ?

 25   R.  Cette salle funéraire Bakije est une salle funéraire musulmane, ce qui

 26   veut dire qu'à partir de cette source, nous avions des données relatives au

 27   décès des Musulmans uniquement. Le nombre relatif à toute la période de la

 28   guerre qui a été obtenu, grâce à cette source est à peu près 12 000


Page 28183

  1   individus, et si on compare ce résultat avec les résultats obtenus par

  2   d'autres sources, telles que l'étude relative aux foyers de Sarajevo, il

  3   concorde mais il ne concerne que les Musulmans.

  4   Q.  Dans ces données, nous savons qu'elles couvrent une période de temps

  5   plus importante que la période de temps qui a été prise en compte dans ce

  6   rapport, n'est-ce pas ?

  7   R.  Exact. Mais les données relatives aux dates de décès sont très proches

  8   des dates de placement dans la salle funéraire et nous avons donc à notre

  9   avis obtenu des résultats assez bons.

 10   Q.  Vous avez déjà parlé de l'outil statistique appelé capture et re-

 11   capture. De façon générale, est-ce que vous pouvez nous expliquer en quoi

 12   il consiste ?

 13   R.  Oui. Une remarque encore au sujet de la salle funéraire Bakije. Cette

 14   source nous a permis de traiter les décès par balle et les décès à présent

 15   mort naturelle. C'est un point de départ important pour la façon dont nous

 16   avons utilisé le système de capture-re-capture. Ce système de capture-re-

 17   capture est une méthode qui a été mise au point pour estimer les

 18   populations difficilement mesurables au départ.

 19   Si l'on pense aux populations piscicoles, par exemple, il n'est pas

 20   possible de plonger dans l'océan pour dénombrer chacun des poissons

 21   présents dans l'eau. Dans de tel cas, des échantillons sont utilisés qui

 22   sont prélevés dans la mer et comparés sur la base de cette méthode pour

 23   obtenir des estimations qui nous fournissent un total inconnu jusque-là. La

 24   même méthode a été appliquée aux populations humaines, comme par exemple,

 25   les patients souffrant du Sida qui sont également dénombrés difficilement

 26   et ce sont des estimations que l'on obtient à leur sujet grade à diverses

 27   études par l'utilisation de la méthode capture-re-capture. Cette méthode

 28   repose sur une hypothèse simple, à savoir que lorsque l'on compare le


Page 28184

  1   résultat fourni par deux échantillons on obtient un élément00 d'information

  2   significatif qui peut nous emmener à obtenir la taille totale d'une

  3   population.

  4   En langage commun, cela signifie que si nous disposons d'un

  5   échantillon prélevé dans une population importante, si nous marquons donc

  6   des individus sélectionnés aux fins de constitution de cet échantillon et

  7   qu'on les mélange de la population, on a obtenu, on a réalisé la première

  8   étape de cette méthode, "capture/recapture."

  9   Dans la deuxième étape, on sélectionne un deuxième échantillon, et on

 10   vérifie le nombre d'individus appartenant au deuxième échantillon qui ont

 11   été marqués dans le cadre de la première étape, avec le premier

 12   échantillon. Les individus que l'on observe qui faisaient déjà partie du

 13   premier échantillon, qui donc sont des doublons dans le second échantillon

 14   peuvent être utilisés dans les deux échantillons.

 15   La méthode repose sur une hypothèse simple, à savoir que la

 16   proportion tirée du premier échantillon et donc relative à la population

 17   dont la taille est inconnue est exactement identique à la proportion des

 18   individus recapturés dans le cadre du deuxième échantillon.

 19   Donc on dispose de deux proportions : la première proportion illustre

 20   les individus recapturés grâce à l'échantillon numéro 2, qui nous permet de

 21   nous faire une idée de la taille de ce deuxième échantillon; et l'autre

 22   proportion c'est l'échantillon complet numéro 1, qui est relatif à la

 23   population dont le nombre est inconnu.

 24   Q.  Si vous appliquez cette proportion à toute la population, comment est-

 25   ce que vous obtenez votre estimation ?

 26   R.  Encore une fois, on extrapole la proportion échantillonnée afin

 27   d'estimer la taille complète de la population inconnue. Les détails de

 28   cette méthode sont décrits en annexe du rapport.


Page 28185

  1   Q.  On trouve tous les détails de cette méthode dans le rapport Karadzic,

  2   pages 30 et 58.

  3   Mme WEST : [interprétation] J'aimerais que nous passions à la page

  4   suivante, je vous prie.

  5   On y trouve le tableau numéro 12 dans lequel vous avez appliqué votre

  6   estimation. Et nous voyons une fragmentation liée au groupe ethnique pour

  7   la période considérée, c'est-à-dire 1992 dans cette zone géographique

  8   déterminée.

  9   Q.  A la rubrique "constaté," nous voyons Croates, 53. Qu'est-ce que cette

 10   rubrique, "constaté" ?

 11   R.  Eh bien, on y trouve exactement les mêmes nombres que ceux que

 12   l'on trouve dans le tableau numéro 1. Donc dans le tableau numéro 12, la

 13   population globale est de 2 028 individus, c'est-à-dire exactement égale au

 14   nombre de tués que l'on trouve dans le tableau numéro 1.

 15   Donc ce qui est constaté ce sont les nombres qui ont été tirés de

 16   l'étude des foyers de Sarajevo, et le groupe ethnique est maintenant pris

 17   en compte pour lier ces individus aux victimes à partir du recensement de

 18   1991. On a une petite catégorie d'inconnus, 470, qui concernent les

 19   individus dont le groupe ethnique ne correspondait pas.

 20   Q.  D'accord. Donc le groupe ethnique dont vous rendez compte dans ce

 21   tableau c'est -- enfin comment est-ce que vous avez déterminé ce groupe

 22   ethnique à partir du recensement, c'est bien dans le recensement que vous

 23   l'avez trouvé ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Lorsque l'on voit à la rubrique "constaté" 53 Croates par rapport à un

 26   nombre estimé de 80, vous avez appliqué la méthode "capture/recapture" pour

 27   obtenir ce nombre de 53, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui. Mais la méthode qui est appliquée est un peu plus complexe, dans


Page 28186

  1   ce cas, car, comme je l'ai dit, la salle funéraire de Bakije ne concernait

  2   que des données relatives aux Musulmans. Par ailleurs, elle englobe à la

  3   fois les tués et les personnes décédées de mort naturelle.

  4   Donc la méthode, "capture/recapture," a été appliquée dans sa

  5   première étape à la population musulmane uniquement. Les Musulmans, c'est-

  6   à-dire les Musulmans qui sont morts par balle, et les Musulmans qui sont

  7   morts de mort naturelle, selon les chiffres qui sont rapportés à partir des

  8   deux sources. Donc, on fait une comparaison entre les deux uniquement pour

  9   les Musulmans, tués par balle et morts et mort naturelle, dans la prise en

 10   compte des deux sources.

 11   Lorsqu'on applique la méthode, "capture/recapture," à une catégorie,

 12   le travail n'est pas très compliqué. Une fois que ceci est fait, à l'étape

 13   suivante on extrapole ces résultats. On fragmente d'abord l'estimation

 14   entre les tués par balle et les morts de mort naturelle. Par la suite,

 15   lorsque l'on prend en compte uniquement les tués par balle, on obtient le

 16   nombre de Musulmans tués par balle, et on constate que ce nombre est plus

 17   important que celui qui était obtenu grâce aux résultats de la méthode,

 18   "capture/recapture". Une fois que ce travail est terminé, on applique le

 19   même degré d'augmentation à chaque groupe ethnique.

 20   Donc la méthode est appliquée dans des étapes sud-est, dans trois

 21   étapes. Fondamentalement, on présente ici dans le tableau 12 des

 22   pourcentages pertinents, 100 % de résultats pertinents liés uniquement aux

 23   personnes décédées par balle et à la période prise en compte dans l'acte

 24   d'accusation.

 25   Q.  D'accord.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame West, prenons l'exemple des

 27   Musulmans dont on voit le nombre dans ce tableau 12.

 28   Est-ce que le témoin pourrait nous expliquer comment il a été possible


Page 28187

  1   d'obtenir ce nombre de 1 811 individus à l'aide de la méthode,

  2   "capture/recapture" ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr, bien sûr.

  4   Je propose que nous passions à l'annexe du rapport.

  5   Mme WEST : [interprétation]

  6   Q.  Je suppose qu'il s'agit de l'annexe 6 ?

  7   R.  Page 59.

  8   Mme WEST : [interprétation] Il s'agit du document 65 ter numéro 12130, et

  9   le numéro ERN de la page qui nous intéresse se termine par 8525. Cette

 10   annexe se trouve pratiquement à la fin du document.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] L'avant-dernière page.

 12   Mme WEST : [interprétation] Merci beaucoup.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Penchons-nous, si vous le voulez bien, sur le

 14   tableau A6.1 qui se trouve au milieu de la page.

 15   Dans ce tableau sont reprises les données qui ont été introduites dans

 16   l'étude aux fins d'obtention de cette estimation. On voit que sont pris en

 17   compte à la fois les morts de mort violente et les morts de mort naturelle,

 18   que l'on a obtenu à partir des deux sources. D'abord, on voit la rubrique

 19   HSS 1994, qui est le chiffre obtenu grâce à l'étude sur les foyers de

 20   Sarajevo. Grâce à cette source, on voit que le nombre des Musulmans morts

 21   de mort violente et des Musulmans morts de mort naturelle, une fois

 22   additionné, nous donne un total de 1 707 individus. Le nombre équivalent,

 23   c'est-à-dire des morts de mort violente et des morts de mort naturelle que

 24   l'on obtenait grâce à l'étude de la salle funéraire Bakije est de 1 576

 25   individus.

 26   On compare les résultats des deux sources en termes d'individus, et on

 27   obtient donc les individus qui donnent les mêmes résultats à partir des

 28   deux sources. Ce qui signifie que l'on obtient les individus qui figurent


Page 28188

  1   dans les résultats obtenus grâce aux deux sources, et ce nombre d'individus

  2   présents, dans les résultats obtenus grâce aux deux sources, est de 1 039.

  3   Si l'on descend un peu dans le tableau, on trouve une formule. Vous

  4   voyez le N majuscule, circonflexe, c'est la taille inconnue de la

  5   population estimée, et on peut obtenir ce nombre grâce à une opération

  6   simple, qui consiste en une multiplication du nombre obtenu dans

  7   l'échantillon 1 par le nombre d'individus obtenus dans l'échantillon 2, et

  8   ce total de la multiplication est divisé par le nombre d'individus

  9   résultant des deux échantillons. Ceci nous permet d'obtenir le nombre que

 10   l'on trouve dans le dernier paragraphe au bas du tableau, qui nous montre

 11   que N majuscule, circonflexe, égal 2 589,251. Ce nombre de 2 589 à peu

 12   près, est le nombre estimé des Musulmans morts de mort violente et des

 13   Musulmans morts de mort naturelle, et c'est le résultat de la première

 14   étape de l'application de notre méthode, "capture/recapture."

 15   A partir de là, on applique la proportion, qui distingue entre morts

 16   de mort violente et morts de mort naturelle, tirée de l'étude des foyers de

 17   Sarajevo, et on répartit ce nombre en deux catégories. Une portion est

 18   obtenue à partir de la proportion de morts de mort violente résultant de

 19   l'étude des foyers de Sarajevo, et elle nous donne le nombre estimé que

 20   l'on trouve dans le tableau 12, à savoir 1 811 individus.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde, je vous prie. Je dois

 22   admettre que tout ceci dépasse mes capacités.

 23   Maître Robinson, est-ce que vous contestez la formule que l'on trouve dans

 24   ce tableau et qui concerne uniquement l'application scientifique de la

 25   méthode "capture/recapture" ?

 26   M. ROBINSON : [interprétation] Je vais devoir m'en remettre à M. Karadzic,

 27   qui s'est entretenu avec notre expert, qui ne parle pas anglais. Donc, pour

 28   ma part, je ne sais pas.


Page 28189

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellences, rappelons-nous cet échantillon

  2   concernant les animaux dans un océan, où il est impossible de différencier,

  3   d'appliquer des différenciations. Il n'est absolument pas applicable à un

  4   environnement civilisé.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne vous interroge pas au sujet de

  6   l'applicabilité de cette formule au cas de Sarajevo. Ce que je vous

  7   demande, c'est si vous contestez la formule en tant que telle, qu'elle

  8   s'applique aux animaux ou à d'autres populations. Car si vous contestez la

  9   formule, alors il faudra demander au témoin de nous l'expliquer plus en

 10   détail, puisque nous sommes des profanes par rapport à ce travail

 11   scientifique.

 12   Si vous ne contestez pas la formule, nous pouvons poursuivre.

 13   M. KARADZIC : [interprétation] Je conteste la formule.

 14   [La Chambre de première instance se concerte]

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans ce cas, il sera consigné par écrit

 16   que votre expert conteste la formule en tant que telle, n'est-ce pas.

 17   Très bien.

 18   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Madame Tabeau, vous avez entendu que le

 19   Dr Karadzic conteste la formule. Vous serait-il peut-être possible de nous

 20   l'expliquer de façon plus simple, de façon à ce que cette formule soit plus

 21   facilement digérable ?

 22   Est-ce que c'est possible ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Honnêtement, je croyais que je vous l'avais

 24   expliquée en termes très simples.

 25   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Vraiment ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ce que je pensais.

 27   Mais je pourrais vous donner un autre exemple, mais pour ce faire, il

 28   faudrait que je prépare ma présentation. Je peux faire de mon mieux et vous


Page 28190

  1   citer un exemple peut-être un peu plus simple, car le méthode est simple,

  2   elle repose sur la qualité de deux proportions différentes.

  3   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Nous vous serions reconnaissants de

  4   nous fournir une présentation plus simple.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr.

  6   Mais j'aimerais faire une remarque, si vous me le permettez. Ce n'est

  7   pas que j'aie inventé tout cela, ce n'est pas que je vous parle d'une

  8   formule que j'ai élaborée à moi seul, ou ce genre de chose. Voyez-vous, je

  9   vous ai donné les estimations d'erreurs, et tous les détails.

 10   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] C'est ce que nous pensions également.

 11   Mme WEST : [interprétation] Puis-je faire une proposition ?

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les Juges de la Chambre doivent

 13   participer à une réunion interne à 12 heures 30, donc je m'apprêtais à

 14   proposer à suspendre pour la pause.

 15   Mais je vous entends donc, Madame West.

 16   Mme WEST : [interprétation] Je m'apprêtais à proposer que Mme Tabeau

 17   revienne devant les Juges un autre jour. Donc nous pourrions peut-être

 18   mettre de côté cet exemple et revenir sur cet exemple plus tard.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais j'espère que les parties ont été

 20   informées du fait que nous reprendrons nos débats mardi, à 11 heures, étant

 21   donné que l'accusé a un entretien avec un témoin. Bien.

 22   Nous suspendons l'audience pour le moment pour la pause déjeuner, et

 23   reprendrons à 13 heures 30.

 24   --- L'audience est suspendue pour le déjeuner à 12 heures 21.

 25   --- L'audience est reprise à 13 heures 30.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame West, vous pouvez poursuivre.

 27   Mme WEST : [interprétation] Je voudrais apporter trois corrections au

 28   compte rendu d'audience : Page 9, ligne 19, il faudrait lire "Musulmans" et


Page 28191

  1   pas autre chose. Ensuite, à la page 39, ligne 11, il faudrait lire

  2   "causes," et pas "cautions."

  3   Q.  Madame Tabeau, quand nous avons fini la dernière session, nous étions

  4   en train de parler des estimations, et puis maintenant, je voudrais parler

  5   d'une autre partie de votre rapport, à savoir le moment où est survenu la

  6   mort des civils comparé aux soldats tués par jour.

  7   Pourriez-vous nous dire de quoi cela sert-il que de faire une telle

  8   analyse ?

  9   R.  Quand il s'agit d'analyser le moment de la mort, c'est important si

 10   l'on se penche sur l'intensité du siège. On peut faire cela en analysant

 11   l'heure, le temps de la blessure infligée aux soldats ou bien de leur mort.

 12   Puis, le but était aussi de se pencher sur les heures aux cours desquelles

 13   les civils ont été tués ou blessés. Il s'agissait donc de déterminer s'ils

 14   sont morts en même temps ou non, si le nombre des civils tués était le

 15   même, plus haut ou plus bas, par rapport au nombre de soldats tués.

 16   Q.  Avant d'examiner les résultats de votre analyse, de le faire en détail,

 17   pourriez-vous nous dire quelles ont été vos conclusions générales à ce

 18   sujet ?

 19   R.  De façon générale, je dirais que, pour commencer cette analyse, je suis

 20   partie du fait que quand on regarde les moments de morts ou blessures des

 21   civils, et quand on compare cela aux heures concernant les soldats, on voit

 22   que le nombre de civils tués doit être insignifiant par rapport au nombre

 23   de soldats tués, s'il s'agit des activités de combat. Puisqu'on part de

 24   l'hypothèse qu'au cours de combats, ce sont avant tout les soldats qui sont

 25   tués. Si, de façon collatérale, il y a des civils qui sont tués, le nombre

 26   de civils tués doit être bien moindre au nombre de soldats tués, et c'est

 27   quelque chose qui devrait être valable pour toute la période du siège.

 28   Donc c'était notre hypothèse de départ.


Page 28192

  1   Le résultat de notre analyse a confirmé que, dans l'épisode du siège

  2   de Sarajevo, hypothèse n'a pas été confirmée. Il y a eu de nombreuses

  3   journées de siège au cours desquelles un nombre de civils tués a dépassé de

  4   loin le nombre de soldats tués, ou bien ce chiffre était le même, ou bien

  5   un tout petit peu moindre au nombre de soldats tués. Donc cette conclusion

  6   est tout à fait contraire à l'hypothèse de départ, et nous avons donc parlé

  7   de cela dans le rapport dans l'affaire Karadzic dans le paragraphe consacré

  8   aux heures, aux dates de mort.

  9   Mme WEST : [interprétation] Je vais demander à voir la page 18. Il s'agit

 10   donc du document que nous avons déjà sur l'écran, 65 ter 12130. Voilà.

 11   Q.  Donc, là, nous avons la partie de votre rapport qui concerne le moment

 12   de la mort, et je vais vous poser quelques questions au sujet de ce

 13   paragraphe qui est tout en haut.

 14   Donc nous avons entendu votre hypothèse :

 15   "Et la raison pour cela réside dans la croyance que les civils

 16   n'étaient pas impliqués dans les combats de façon active, donc ils sont

 17   restés à côté. Et dans ce cas, il s'agirait de penser que leur mort était

 18   accidentelle et non intentionnelle, et que ce chiffre doit être bien

 19   moindre que le nombre de soldats tués."

 20   Est-ce que c'est de cela que vous parliez quand vous avez exposé

 21   votre hypothèse ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Est-ce que les résultats ont appuyé cette hypothèse ?

 24   R.  Non, au contraire.

 25   Q.  Bien.

 26   Mme WEST : [interprétation] Nous allons examiner à présent la page 28.

 27   Q.  Juste en dessous de ce tableau, de ce qui est encadré, vous parlez des

 28   résultats auxquels vous êtes arrivée. Donc vous avez dit :


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  1   "Les observations ci-dessus nous ont amenés à la conclusion que deux

  2   différents processus étaient responsables de la victimisation des civils et

  3   des soldats. Un de ces processus résidait dans la force qui était derrière

  4   les meurtres, les blessures des civils. L'autre processus est resté

  5   derrière les meurtres et les blessures de soldats."

  6   Madame Tabeau, à quoi faites-vous référence exactement quand vous

  7   parlez du "processus" ?

  8   R.  Quand je parle du processus dans ce paragraphe, c'est les facteurs

  9   déterminants, les facteurs déterminants qui ont fait que des civils et des

 10   soldats soient tués.

 11   Les facteurs déterminants n'ont pas été étudiés ici, on a étudié

 12   uniquement les causes du décès, tel que rapporté dans le rapport, y compris

 13   les incidents de pillage, des tirs, des activités des tireurs embusqués,

 14   des activités de guerre indirectes. Donc c'est par le biais de ces

 15   processus que l'on en est arrivé à la mort de civils et de soldats.

 16   Q.  Est-ce que ces processus pouvaient inclure aussi des activités

 17   militaires ?

 18   R.  Oui, bien sûr. Quand on parle du pilonnage ou bien des activités des

 19   tireurs embusqués. Il s'agit là des activités de combat, des activités

 20   militaires, et donc il nous mène vers ces causes exprimées sous forme de

 21   pilonnage, de tirs et des activités des tireurs embusqués.

 22   Mme WEST : [interprétation] Je vais demander à nouveau de voir la page 30

 23   tout en haut.

 24   Q. Ici, vous dites :

 25   "Sur la base de ces résultats, il existe deux mécanismes différents qui

 26   provoquent la victimisation de civils et de soldats, et ceci a été

 27   confirmé. Il n'y a pas de raison de croire que des meurtres et des

 28   blessures de civils étaient une conséquence directe, ou avaient un rapport


Page 28194

  1   avec les combats des armées à Sarajevo et autour de Sarajevo."

  2   Ma question concerne justement ces mécanismes. Vous dites qu'il y avait

  3   deux mécanismes différents. Que voulez-vous dire par là ?

  4   R.  Deux différents mécanismes, si on dit que des soldats ont été tués au

  5   moment des activités de combat, là, nous avons ce mécanisme-là, à savoir

  6   l'activité de combat qui fait que des soldats sont tués. Mais la question

  7   qui se pose c'est de savoir quel est le mécanisme dans le cadre duquel on

  8   tue des civils. S'il ne s'agit pas des activités de combat, il faut que des

  9   civils soient pris pour cible. Donc ce que j'essaie de dire, c'est que,

 10   d'après moi, il devait y avoir donc cette activité dans le cadre de

 11   laquelle on visait de façon délibérée les civils, et le résultat de cela,

 12   c'est le nombre de morts au sein de la population civile qui dépasse

 13   largement le nombre de soldats tués, qui est disproportionné dans le

 14   rapport à ces chiffres-là.

 15   Q.  Maintenant je vais demander la page 9 parce que nous allons aborder les

 16   chiffres. Il faut voir votre tableau. C'est le tableau 8 qui vient de votre

 17   rapport.

 18   Là, il s'agit de ce chiffre, de ce pourcentage correspondant à 15 %

 19   qui correspond au nombre de soldats tués par jour. Pourriez-vous nous

 20   expliquer cela ?

 21   R.  Dans ce tableau, vous avez une sélection des informations concernant la

 22   mort de soldats. Cette sélection concerne uniquement les dates au cours

 23   desquelles on a pu noter 15 % d'incidents de tuerie de soldats, donc, si on

 24   compare les dates, les dates du siège où on énumère tous les incidents au

 25   cours desquels les soldats ont été tués.

 26   Ici, on va trouver uniquement les 15 % où on a le plus grand nombre

 27   de soldats tués. Ensuite, pour ces 15 % avec le plus grand nombre de morts

 28   de soldats tués, nous avons deux variables. D'un côté, le nombre de civils


Page 28195

  1   tués à cause de toutes les causes, et ensuite le nombre de soldats tués.

  2   Ensuite, nous essayons de calculer le ratio entre les deux catégories. Le

  3   ratio c'est CS nous montre la proportion des soldats tués comparés au

  4   nombre de civils tués.

  5   La valeur pour la première date, donc le 2 mai 1992, correspond

  6   au chiffre 6. Tout ce que cela veut dire est que pour un civil tué ce jour-

  7   là il y a six soldats de tués.

  8   Q.  Donc, si on revient à l'hypothèse de départ que vous avez utilisée, à

  9   savoir s'il y a un grand nombre de soldats tués, le nombre de civils tués

 10   va être moindre. Est-ce que cela va à l'appui de votre hypothèse ?

 11   R.  Oui, ceci montre que le ratio CS est plus élevé que, un. Si nous avons

 12   le ratio 1 ça veut dire que les deux chiffres correspondent parfaitement.

 13   Si c'est plus élevé que un, par exemple, 6 dans la première colonne, cela

 14   veut dire que bien davantage de soldats ont été tués par rapport aux civils

 15   tués.

 16   Dans ce tableau, par rapport à toutes les dates mises à part deux

 17   dates, pour toutes les autres dates ce ratio est plus élevé que un.

 18   Q.  Si on continue dans ce sens, est-ce qu'on s'attendrait donc de voir que

 19   le jour où le plus grand nombre de civils sont tués il y a eu encore

 20   davantage de soldats tués ?

 21   R.  Oui, c'est exactement notre hypothèse.

 22   Mme WEST : [interprétation] On va voir donc la page suivante, le tableau 6.

 23   Q.  Pourriez-vous nous dire de quoi il s'agit ?

 24   R.  Ici, il s'agit d'un tableau très similaire au tableau précédent. La

 25   seule différence c'est que la sélection des dates a été faite sur la base

 26   du nombre de civils tués. Ce tableau donc va représenter le 15 %

 27   représentant le plus grand nombre de civils tués. Les dates auxquelles le

 28   plus grand nombre de civils ont été tués. Donc, là, à nouveau, nous avons


Page 28196

  1   fait le même calcul, donc le ratio entre le Conseil de sécurité et dans la

  2   dernière colonne du tableau quand j'ai écrit, "oui," j'ai marqué ces

  3   valeurs par moins que un, ou bien égale à un. Ceci indique que le nombre de

  4   civils tués a été supérieur au nombre de soldats tués. Qu'est-ce que cela

  5   veut dire ? Cela veut dire que c'est parfaitement contraire à ce que nous

  6   avons dit vu dans le tableau décrivant la mort de soldats. Donc le 15 % où

  7   il y a le plus grand nombre de morts.

  8   Q.  Mais que cela signifie-t-il par rapport à ce mécanisme, la mort de

  9   soldats comparée aux morts des civils ?

 10   R.  Ce mécanisme est très différent, et je l'ai confirmé par bien d'autres

 11   analyses qui se trouvent dans mon rapport dans cette section et qui est

 12   consacrée au moment des morts de ces deux catégories.

 13   Q.  [aucune interprétation]

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'ai quand même quelques questions, s'il

 15   vous plaît. La distinction entre les civils et les soldats venait de deux

 16   sondages différents. Le sondage des foyers et le matériel de Bakije.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] La distinction qui se trouve dans ce tableau

 18   vient d'une seule source, donc les sondages effectués au niveau des foyers

 19   de Sarajevo.

 20   Mais pour être vraiment du côté sûr, nous avons fait une deuxième

 21   comparaison, à savoir nous avons comparé ce rapport avec une autre

 22   approche, à savoir nous avons comparé l'enquête qui a été effectuée auprès

 23   des foyers de Sarajevo avec les listes des militaires et, là, nous avons

 24   tenu compte du statut militaire et nous les avons comparés.

 25   Nous avons donc comparé ces deux approches et dans la deuxième le

 26   nombre des civils tués a été un petit plus élevé qu'en utilisant la

 27   première approche, le premier critère. Donc, pour être le plus prudent

 28   possible, nous avons gardé le rapport qui a été élaboré à partir des


Page 28197

  1   informations concernant les foyers de Sarajevo. Mais j'ai voulu quand même

  2   vous dire que nous avons eu deux sources que nous avons comparées.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Docteur, que voulez-vous dire par "la

  4   liste des militaires" ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Plus tôt au cours de la journée d'audience

  6   d'aujourd'hui, quand nous avons parlé de sources j'ai dit que nous avons

  7   utilisé un certain nombre de sources supplémentaires. Pas en ce qui

  8   concerne la liste des témoins mais pour les besoins d'analyse, telle que

  9   celle-ci. Les listes des militaires sont les listes que j'aie obtenues du

 10   ministère de la Défense de la Republika Srpska et de la Fédération de

 11   Bosnie-Herzégovine. Il s'agit donc des listes des personnes qui sont, soit,

 12   portées disparues alors qu'elles faisaient partie de l'armée, ou bien qui

 13   ont été tuées, alors qu'elles faisaient de l'armée.

 14   Il s'agissait là de trois armées : La VRS, l'ABiH, et le HVO. Donc nous

 15   avons à peu près 50 000 morts du côté des militaires pour tout le pays qui

 16   sont répertoriés dans ces listes.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'attendais la traduction française.

 18   Quant à votre conclusion qui indique que l'on a pris pour cible les civils

 19   de façon délibérée, par rapport à cela, je me pose la question suivante le

 20   fait qu'il y a de nombreuses victimes civiles est-ce que ce fait en soi

 21   suffirait pour arriver à une telle conclusion ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas le seul fait que j'ai pris en

 23   compte, pas seulement le fait qu'il y a eu donc autant de victimes parmi la

 24   population civile comparer au nombre de victimes du côté des militaires.

 25   Moi, je me suis aussi penchée sur les similitudes quant au moment des morts

 26   des civils et des soldats, et je fais cela en utilisant des études

 27   statistiques. Je fais cela aussi pour les blessures infligées aux uns et

 28   aux autres, donc j'ai calculé différentes mesures statistiques pour voir


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  1   quelles sont les similitudes ou les différences, et j'ai pu établir qu'il y

  2   avait deux modèles différents qui sont différents du point de vue de

  3   statistique mais aussi qui ont une signification différente. J'ai aussi

  4   utilisé d'autres techniques qui m'ont poussé à arriver à la même

  5   confirmation.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'ai cru comprendre que davantage des

  7   gens sont morts à cause des incidences de pilonnage, qu'à cause des tirs ou

  8   bien des incidents des tireurs embusqués ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est probablement exact, mais, si l'on

 10   revient vers le tableau où on voit les causes de la mort, on pourrait

 11   éventuellement vérifier votre conclusion. Mais je pense qu'elle est bonne.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que l'endroit où se trouve

 13   l'armée a une incidence quelconque sur ce résultat, sur ce fait ? Si, par

 14   exemple, si l'armée se trouve au milieu de la population civile, est-ce que

 15   cela va avoir une incidence sur votre conclusion, sur ce résultat ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je pense que oui. Je pense que c'est

 17   important de savoir où se trouve l'armée, absolument. En ce qui concerne le

 18   pilonnage, l'analyse va être différente et on la trouve dans le rapport, et

 19   c'est là que j'ai comparé les victimes de pilonnage du côté de la

 20   population civile et militaire, et la conclusion n'est pas vraiment

 21   différente par rapport à cette catégorie-là. Donc je dirais que là, nous

 22   avons deux modèles différents.

 23   En ce qui concerne l'endroit où se trouve l'armée, l'armée de la VRS, ça a

 24   été dans les collines, elle avait une très bonne vue sur la ville qui était

 25   dans la vallée. C'était une localité parfaite pour se livrer au pilonnage

 26   quelle que soit la victime.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 28   Vous pouvez poursuivre, je suppose que vous êtes allée à Sarajevo ?


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. A de nombreuses reprises, et j'ai eu la

  2   possibilité de voir, de me déplacer le long des lignes de front et aussi

  3   dans les collines.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  5   Mme WEST : [interprétation]

  6   Q.  Je voudrais maintenant avec vous voir le bas de la page, où on voit un

  7   autre chiffre. Donc, là, nous avons encore un tableau qui -- un diagramme

  8   qui nous montre une meilleure visualisation des chiffres.

  9   De quoi s'agit-il ?

 10   R.  Là, à nouveau, on a choisi les dates qui concernent les sièges, en tout

 11   nous avons 162 dates, et on a montré dans ce tableau 51 jours, et ce sont

 12   les jours qui correspondent au nombre de jours au cours duquel la

 13   population civile a été tuée en plus grand nombre que la population de

 14   soldats. Il s'agit là d'un pourcentage important puisqu'il s'agit de 31.5

 15   %.

 16   Q.  Est-ce que vous avez fait la même analyse dans votre deuxième et

 17   troisième rapport qui concerne Sarajevo ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Maintenant, je vais parler du deuxième rapport, c'est le rapport dans

 20   l'affaire Galic.

 21   Mme WEST : [interprétation] Je vais demander de voir la pièce 65 ter,

 22   12131.

 23   Q.  Là, nous avons à peu près la même -- nous avons l'époque qui commence

 24   là où s'arrête le rapport Karadzic.

 25   R.  Effectivement.

 26   Q.  Quelle est la zone ?

 27   R.  C'est exactement la même zone géographique, à savoir à l'intérieur des

 28   lignes de front autour de Sarajevo, et j'ai utilisé exactement les mêmes


Page 28200

  1   sources.

  2   Q.  Vous avez répondu même à ma deuxième question. Donc vous avez utilisé

  3   aussi l'étude des foyers ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Les résultats sont similaires ?

  6   R.  Oui, mais les nombres sont plus importants par rapport au premier

  7   épisode, puisque cet épisode a été plus long.

  8   Q.  En ce qui concerne le rapport Galic, c'est un épisode qui dure

  9   pratiquement deux années ?

 10   R.  Oui.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi d'aller et venir comme cela, mais

 12   maintenant je voudrais demander d'examiner la page 10; c'est la page 11

 13   dans le système du prétoire électronique.

 14   Q.  Je voudrais vous demander d'examiner avec moi des tableaux dans le

 15   rapport Galic, qui sont fort similaires aux tableaux dans l'affaire

 16   Karadzic.

 17   Tout d'abord, nous allons examiner le tableau 1.

 18   Mme WEST : [interprétation] Pour cela, j'aurais besoin de voir la pièce 65

 19   ter 23719, page 11 dans le système de prétoire électronique. Je pense que

 20   tout le monde a aussi les exemplaires en papier.

 21   Q.  Donc c'est le tableau 1 qui est sous nos yeux; pouvez-vous nous en

 22   parler ?

 23   R.  C'est le même tableau que celui qui a déjà été monté au sujet du

 24   premier épisode, c'est-à-dire en relation avec le rapport Karadzic. Ici,

 25   les nombres ont plus élevés.  Le nombre de tués est de 3 798, quant au

 26   nombre de blessés, il est de 12 919.

 27   Un peu plus bas dans le tableau, nous avons intégré la répartition par

 28   sexe, par âge, par et par statut, c'est-à-dire en distinguant les civils


Page 28201

  1   des militaires et, bien entendu, par cause de la mort ou de la blessure.

  2   Q.  D'accord.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une question.

  4   S'agissant de distinguer entre les civils et les soldats, que représentent

  5   ces exemples de statut inconnu ? Est-ce que ça signifie que ce sont des

  6   personnes qui n'ont pas répondu à cette question ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, exactement. Aucune réponse à la question

  8   concernant le statut civil ou militaire.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 10   Mme WEST : [interprétation]

 11   Q.  Sous l'intitulé : "Statut," dans ce tableau, nous voyons le nombre de

 12   civils tués, qui est 1 399, et de civils blessés qui est de 5 093. Ensuite

 13   on passe au tableau suivant.

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Est-ce que c'est à cet endroit que l'on parle précisément des civils ?

 16   R.  Oui, uniquement des civils.

 17   Q.  D'accord. Donc la répartition se fait de la même façon ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  J'aimerais que nous passions à la page 11. Une nouvelle fois, nous

 20   trouvons là un autre tableau que nous connaissons déjà assez bien qui

 21   concerne les tués, le nombre des tués, la cause du décès, le nombre de

 22   blessés et la cause de la blessure.

 23   Penchons-nous sur le tableau 6, le chapitre du haut où il est question des

 24   armes à feu. Quel est le total si on ajoute tous ces chiffres ?

 25   R.  Le total est très élevé pour le nombre de tués par arme à feu,

 26   puisqu'il est de 89.2 %. Quant au pourcentage de blessés par arme à feu, on

 27   a un pourcentage de 95.4 %. Donc les armes à feu interviennent dans 95.4 %

 28   dans les cas de blessure.


Page 28202

  1   Les autres causes sont moins significatives.

  2   Q.  Je vous remercie.

  3   Mme WEST : [interprétation] Pouvons-nous passer à la page suivante.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non, une question avant cela.

  5   S'agissant du deuxième groupe, de la deuxième catégorie de causes de décès,

  6   s'agissant des victimes directes de la guerre, je vois "bouclier humain" au

  7   regard du numéro 4. Comment pouvons-nous arriver à cette conclusion ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas une conclusion qui vient de moi,

  9   ce sont les chiffres tels que fournis par les personnes qui ont répondu aux

 10   questions.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc certaines personnes sont mortes en

 12   ayant servi ce bouclier humain ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est, je suppose, je crois le comprendre la

 14   signification de la réponse.

 15   L'effet de mon travail est très limité, s'agissant de ce tableau. Comme je

 16   l'ai déjà dit, ma mission consistait à nettoyer un peu les réponses et à

 17   les regrouper de façon à les présenter dans un tableau. Il ne m'incombait

 18   pas, et ce n'est pas ce que j'ai fait de distinguer entre des personnes

 19   ayant servi de bouclier humain et des personnes ayant eu un autre statut.

 20   Je n'ai pas fait ce genre de distinction.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 22   Madame West.

 23   Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 24   J'aimerais maintenant que nous passions au document 65 ter, numéro 12130.

 25   Q.  Je voudrais donc revenir un instant au rapport Karadzic au

 26   questionnaire qui a été utilisé dans l'étude relative aux familles dans le

 27   document 65 ter numéro 12130. J'aimerais que s'affiche la page dont le

 28   numéro ERN se termine par 8506. Page 40, je crois, en numérotation papier.


Page 28203

  1   Nous avons là la traduction anglaise et une page du questionnaire, et vous

  2   avez déjà dit que ce qui vous intéressait plus particulièrement c'était les

  3   tués et les blessés, correspondant ici aux numéros 5 et 6.

  4   Q.  Pouvez-vous nous parler des questions qui étaient posées à ce sujet ?

  5   R.  Comme nous le voyons, en ce qui concerne les personnes tuées - et le

  6   même processus se répète pour les personnes blessées - donc, en ce moment,

  7   je parle des questions correspondant au numéro 5, les renseignements

  8   demandés au sujet de ces personnes tuées étaient les nom et prénom, l'année

  9   de naissance, le rôle dans le foyer, la date de la mort, le lieu de la

 10   mort, la cause du décès et le statut civil ou militaire. Il s'agissait donc

 11   d'éléments qui faisaient l'objet de questions explicites dans le

 12   questionnaire.

 13   Q.  Donc, lorsque vous avez reçu des informations que vous pouviez intégrer

 14   à votre tableau, par exemple les victimes directes de la guerre, comme nous

 15   venons de le voir, il y a un instant, qui ensuite étaient réparties en

 16   victimes d'exécution, victimes pour avoir servi de bouclier humain,

 17   victimes de disparition, est-ce que tous ces renseignements provenaient

 18   précisément des questions posées qui figuraient dans le questionnaire ?

 19   R.  Oui. Tous ces éléments sont le résultat des réponses aux questions

 20   posées.

 21   Q.  Je parle bien du questionnaire dans l'affaire Karadzic que nous sommes

 22   en train de voir en ce moment. Mais est-ce le même questionnaire qui a été

 23   utilisé dans l'affaire Galic ?

 24   R.  Oui, c'est le même questionnaire qui a été utilisé ainsi que la même

 25   source.

 26   Mme WEST : [interprétation] J'aimerais maintenant que nous passions à la

 27   page 12 de ce document que nous examinons progressivement.

 28   Q.  Nous avons déjà parlé tout à l'heure de cette formule utilisée dans


Page 28204

  1   l'application de la technique de "capture/recapture," je ne vais pas

  2   revenir dans le détail sur ce sujet car nous en avons parlé assez

  3   longuement. Mais j'aimerais savoir si vous pourriez nous en dire un peu

  4   plus des résultats obtenus grâce à cette formule dans l'affaire Galic.0

  5   Tableau 18, voyons quels sont les chiffres -- les nombres que l'on

  6   trouve dans ce tableau --

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde. Cela devrait être en page

  8   suivante, dont je demande l'affichage.

  9   Mme WEST : [interprétation] Merci.

 10   Q.  Pouvez-vous nous parler des résultats que l'on voit dans cette page du

 11   tableau qui couvrent une période de deux ans ?

 12   R.  Je parle donc des résultats du tableau 18 relatifs à la méthode de

 13   "capture/recapture," et la méthode utilisée ainsi que les source utilisées

 14   sont absolument identiques à celles qui ont été utilisées pour rédiger le

 15   rapport Karadzic. Les éléments dont il est rendu compte ici incluent le

 16   nombre estimé pour chaque groupe ethnique, et en particulier pour les

 17   Musulmans, et nous avons ce résultat de 3 437 individus. C'est le résultat

 18   qui a été fourni au moment de l'estimation initiale, c'est-à-dire après la

 19   réalisation de la première étape de l'estimation et de suivi d'une

 20   extrapolation à la phase suivante, exactement de la même façon que ce

 21   travail a été accompli dans l'affaire Karadzic.

 22   Q.  Nous voyons sous "Musulmans" que l'étude pendant la période concernée

 23   nous donne un nombre de 2 340 individus. A quoi correspond cette estimation

 24   ?

 25   R.  L'estimation est de 4 352 pour l'ensemble des groupes ethniques. Le

 26   nombre de 2 963 individus est inférieur à celui que nous avons vu dans le

 27   tableau 1, parce que dans le cas qui nous intéresse ici, seules les

 28   réponses liées figurent, ce qui fait la différence, qui rend compte de


Page 28205

  1   cette différence.

  2   Q.  D'accord.

  3   R.  Mais il s'agit des données identiques dans les deux cas.

  4   Q.  Quand vous dites "liées," liées à quoi ?

  5   R.  Dans ce rapport-ci, le rapport Galic, les liens, entre l'étude des

  6   foyers de Sarajevo et la salle funéraire de Bakije concernent le

  7   recensement de la population, existent au niveau du recensement de la

  8   population. Nous avons des individus qui correspondent aux deux groupes

  9   grâce au recensement de population. Par conséquent, on a des chiffres

 10   inférieurs au nombre total que l'on trouve dans le tableau 1.

 11   Q.  Passons maintenant au moment des événements. Vous avez dit que vous

 12   aviez réalisé la même analyse temporelle pour la rédaction du rapport Galic

 13   que celle que vous aviez faite pour la rédaction du rapport Karadzic.

 14   Voyons ce qu'il en est ici au tableau 13. Pouvez-vous nous parler de ce

 15   tableau ?

 16   R.  Le tableau 13 rend compte du nombre de civils et de soldats tués

 17   pendant la période de temps considérée. Dans ce tableau qui couvre une

 18   année sur les deux années étudiées, nous avons donc des résultats

 19   correspondants à cette première année, et pour la deuxième année, il ne

 20   s'agit que d'une sélection. Dans le rapport, pour la première année, nous

 21   avons un autre tableau de façon à ce que l'analyse soit complète. Donc dans

 22   ce tableau-ci, quand on passe en revue les nombres de civils et de soldats

 23   tués, nous voyons qu'en dehors de deux dates particulières, le nombre des

 24   civils tués est plus important que le nombre de soldats tués. Même

 25   observation pour la sélection d'un certain nombre de journées au cours

 26   desquelles le nombre de victimes était le plus important pendant la

 27   première année du siège. Dans le tableau annexé au rapport, on trouve des

 28   résultats similaires.


Page 28206

  1   Q.  Passons au tableau 14, où nous voyons que le nombre de civils tués est

  2   même plus important encore, ou est-ce qu'il s'agit de blessés ?

  3   R.  De blessés.

  4   Q.  Quelles ont été vos conclusions ?

  5   R.  Encore une fois, ce tableau rend compte des jours où le nombre de

  6   victimes était le plus élevé, jusqu'à 20 civils blessés en une seule

  7   journée, ce qui est beaucoup. Donc toujours le même schéma, les nombres de

  8   civils blessés sont beaucoup plus élevés que les nombres de soldats

  9   blessés. Même conclusion s'agissant du rapport concernant la première

 10   période.

 11   Q.  Quelle est la signification de ces chiffres à votre avis ?

 12   R.  Ces chiffres confirment la conclusion que j'avais déjà présentée pour

 13   le premier épisode du siège discuté dans le rapport Karadzic. Je crois que

 14   ces conclusions sont toujours valables dans le présent rapport.

 15   Q.  J'aimerais maintenant que nous passions au troisième rapport de

 16   Sarajevo, document 65 ter numéro 12135. C'est un rapport qui date de

 17   l'époque où Dragomir Milosevic commandait le corps d'armée. Quelle est la

 18   période prise en compte pour la rédaction de ce rapport ?

 19   R.  Ce rapport recouvre les événements datant de la dernière année du

 20   siège, c'est-à-dire de l'année qui sépare le mois d'août 1994 du mois de

 21   novembre 1995, dernier moment de la guerre. La situation est similaire,

 22   mais pas identique à celle que l'on voit décrite dans les rapports

 23   précédents. Ce rapport-ci s'appuie sur des sources différentes. La méthode

 24   utilisée est la même, mais en raison de la différence de nature des

 25   sources, la zone est légèrement différente.

 26   Q.  D'accord.

 27   R.  Mais en ce qui concerne les chiffres fondamentaux, ils demeurent les

 28   mêmes.


Page 28207

  1   Q.  D'accord. Donc ce rapport s'appuie sur la même méthodologie.

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Pourquoi est-ce que vous avez utilisé des sources différentes ?

  4   R.  En raison de la difficulté manifeste due au fait que le rapport sur les

  5   foyers de Sarajevo se terminait au mois d'août/septembre 1994, et

  6   qu'ensuite il n'existait plus de chiffres. Donc ce que j'ai étudié pour la

  7   rédaction du rapport Dragomir Milosevic n'était pas couvert par l'étude

  8   relative aux foyers de Sarajevo.

  9   Q.  Quelles sources avez-vous utilisées ?

 10   R.  Les sources sont différentes -- ne sont plus l'étude sur les foyers de

 11   Sarajevo, mais elles sont également fiables, et elles ont été mises au

 12   point par des statisticiens professionnels. J'ai d'abord utilisé des

 13   chiffres relatifs à la Republika Srpska et également des chiffres émanant

 14   de la Fédération, donc deux bases de données qui sont intéressantes car

 15   elles expriment de façon électronique ce qui figure sous un mode

 16   statistique dans les deux formulaires, comme on les appelle. Ici, nous

 17   avons un formulaire qui est utilisé dans le cas d'une notification

 18   officielle de décès que tous les citoyens sont tenus de remplir en cas de

 19   décès d'un membre de leurs familles pour présentation aux instances

 20   chargées des statistiques. Donc ce sont mes sources les plus importantes.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame, pour le compte rendu d'audience,

 22   est-ce que vous pourriez citer ces deux sources ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] DEM-2, DEM signifiant notification

 24   démographique.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 26   Mme WEST : [interprétation]

 27   Q.  Pouvez-vous poursuivre ?

 28   R.  Ces bases de données reposaient, comme je l'ai dit, sur les certificats


Page 28208

  1   officiels de décès rédigés pendant la période de la guerre. Donc si l'on

  2   prend en considération l'ensemble du pays ces bases de données comprenaient

  3   140 000 certificats où l'on voit donc des cas de décès et les causes des

  4   décès. Le renseignement recueilli par les autorités est traité ici

  5   regroupait les décès par mort violente et les décès par mort naturelle.

  6   Nous avons, bien sûr, demandé les causes de décès par mort naturelle afin

  7   de pouvoir les exclure de toute analyse ultérieure. Mais au cas où ce

  8   renseignement ne nous était pas fourni, ils nous étaient difficiles

  9   d'éviter un mélange entre un décès par mort naturelle et un décès par mort

 10   violente.

 11   Q.  D'accord. Quelles autres sources avez-vous utilisées ?

 12   R.  Il s'agit de la troisième source qui s'ajoute aux deux premières, et

 13   c'était la liste dressée par le CICR relative aux personnes portées

 14   disparues. Le CICR c'est le Comité international de la Croix-Rouge,

 15   organisation qui est mandatée pour rechercher les personnes disparues en

 16   cas de conflit et de guerre. J'ai inclus la liste de ces personnes

 17   disparues du CICR parce que les personnes disparues ne figurent pas dans

 18   les certificats officiels de décès. Donc il était important de vérifier

 19   qu'aucun certificat de décès n'existait pour ces individus, premièrement.

 20   Deuxièmement, j'ai choisi le CICR pour la qualité de son travail de façon à

 21   ce que ces trois sources soient de même qualité puisqu'elles recensent

 22   toutes des listes des victimes.

 23   Q.  Parlons maintenant des sources que vous avez utilisées pour recueillir

 24   le nombre de blessés. Quelles étaient ces sources ?

 25   R.  Pour les personnes blessées, leur nombre était établi à partir des

 26   registres de l'hôpital de Sarajevo. J'ai pu utiliser les registres de trois

 27   hôpitaux de Sarajevo à cette fin, mais ce n'est pas l'intégralité des

 28   registres hospitaliers disponibles pour cette période. Il y avait davantage


Page 28209

  1   que trois hôpitaux. Il y avait deux hôpitaux de guerre à Sarajevo. Il y

  2   avait un poste de santé d'urgence dont les registres n'ont pas été

  3   utilisés. Donc trois hôpitaux ont servi à ce travail. Je les ai utilisées

  4   pour définir un petit échantillon relatif à tous les modes de blessures des

  5   personnes. L'échantillon est très petit, car c'est un très bon échantillon.

  6   En effet, la sélection est concentrée sur les civils. Tous des hommes d'au

  7   moins 18 ans et de moins de 65 ans. Je pense que les autres ont été exclus,

  8   elles ne figurent pas dans l'échantillon. Seules les personnes en dessous

  9   de 18 ans et les femmes sont incluses, donc un nombre limité.

 10   L'INTERPRÈTE : Les hommes de 18 ans -- de moins de 18 ans et de plus de 65

 11   ans ont été exclus.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde. Voilà, le temps qui aurait

 13   dû représenter une pause de votre part. La traduction française vient de

 14   s'achever.

 15   Veuillez poursuivre, Madame West.

 16   Mme WEST : [interprétation] Je vous remercie.

 17   Q.  J'aimerais maintenant que nous parlions de la méthode que vous avez

 18   utilisée pour obtenir le nombre des tués.

 19   Dans les rapports disponibles aux parties, j'indique que ce passage

 20   commence à la page 11.

 21   Veuillez nous dire quelle a été la première étape de votre travail

 22   lorsque vous vous êtes penchée sur l'ensemble de ces sources pour les

 23   regrouper.

 24   R.  Nous avons au début étudié chacune des sources, nous en avons apprécié

 25   la qualité, nous les avons un peu négocié, nous avons exclu les doublons

 26   pour obtenir des sources de bonne qualité relative aux victimes. Dans une

 27   deuxième étape, nous avons intégré l'ensemble des sources relatives aux

 28   victimes dans une base de données plus importante.


Page 28210

  1   Q.  Donc si nous parlons d'intégrer est-ce que cela signifie que vous avez

  2   mélangé les bases de données DEM-2 avec les listes du CICR ?

  3   R.  Oui, c'est ce que cela signifie. Grâce à ce mélange, le nombre de cas

  4   augmente puisqu'on l'utilise deux sources au lieu d'une.

  5   Q.  Quelle a été l'étape suivante ?

  6   R.  Ces trois sources, les deux bases de données DEM et les listes CICR

  7   sont les sources principales mais la base de données relative à l'ensemble

  8   du pays a été mise au point en ajoutant à ces trois sources une autre

  9   source qui est l'étude relative aux foyers de Sarajevo et l'étude relative

 10   à la salle funéraire Bakije. Pour les périodes antérieures, c'est ce qui a

 11   été fait mais pas pour la période relative à Dragomir Milosevic. Mais cela

 12   ne change pas la nature des données qui ont été utilisées pour Dragomir

 13   Milosevic, je l'indique au passage.

 14   Donc ayant mélangé ces listes, l'étape suivante consistait à définir

 15   les individus qui figuraient dans plusieurs de ces listes. Autrement dit,

 16   les chevauchements, ce qui signifie que l'on trouve à plusieurs reprises

 17   les données relatives à un même individu dans plusieurs sources. Comme on

 18   imagine facilement dans les deux bases de données DEM on trouvait un

 19   certain nombre de doublons, en particulier, en raison de l'intégration de

 20   la partie relative à la Fédération et de l'intégration de l'étude relative

 21   aux foyers de Sarajevo. Par ailleurs, nous savons déjà que l'étude relative

 22   aux foyers de Sarajevo présentait pas mal de doublons avec l'étude relative

 23   à la salle funéraire Bakije. Donc il y avait pas mal de chevauchements et

 24   de doublons dans ces listes. Mais, bien entendu, nous avons une technique

 25   qui est tout à fait au point pour identifier ces doublons et les supprimer

 26   des registres afin d'éviter que les victimes figurent à plusieurs reprises

 27   dans telles ou telles bases de données. Donc c'est ce que nous avons fait

 28   dans cette phase de notre travail.


Page 28211

  1   Q.  A ce stade, vous disposiez d'une base de données importante concernant

  2   l'ensemble du pays et toute la période de la guerre, n'est-ce pas ?

  3   R.  Exact.

  4   Q.  Donc lorsqu'il vous a fallu vous concentrer uniquement sur la période

  5   visée dans l'acte d'accusation concernant Dragomir Milosevic et sur le

  6   secteur géographique de Sarajevo, qu'avez-vous fait ?

  7   R.  Pour nous concentrer sur ces deux éléments il nous a fallu extraire une

  8   partie de la base de données, à savoir la partie relative à Sarajevo, et

  9   une fois que nous avons disposé de la partie de la base de données

 10   uniquement relative à Sarajevo, il nous a fallu en supprimer tous les

 11   doublons, afin de disposer finalement d'une liste fiable d'où nous avons pu

 12   extraire les données pertinentes pour rédiger le rapport relatif à Dragomir

 13   Milosevic.

 14   Q.  Lorsque vous êtes arrivée à la période de temps et à la zone

 15   géographique qui vous intéressait, vous disposiez de combien d'individus ?

 16   R.  26 000 à peu près. 26 466 pour être précis. Et ce nombre de 26 466

 17   concerne toute la période de la guerre, c'est-à-dire la période qui va de

 18   janvier 1992 à décembre 1995, et non pas six mais bien dix municipalités de

 19   Sarajevo. Ces dix municipalités de Sarajevo sont l'addition des six

 20   municipalités urbaines qui avaient été prises en compte dans l'étude ayant

 21   la rédaction du rapport Galic et dans l'étude ayant permis la rédaction du

 22   rapport Karadzic, donc ces six municipalités urbaines auxquelles ont été

 23   ajoutées quatre municipalités péri urbaines. Il s'agit d'une sélection très

 24   large. Aujourd'hui, on ne réalise pas des bases de données aussi

 25   importantes et des questions peuvent surgir qui pourraient aller au-delà de

 26   ce que nous avons utilisé pour la rédaction du rapport à strictement

 27   parler. L'idée de réaliser une base de données telle que celle-ci est liée

 28   à la possibilité que des questions supplémentaires se posent à l'avenir.


Page 28212

  1   Mais une fois réalisée, cette base de données, nous en avons sélectionné et

  2   extrait les données pertinentes à la période de temps et à la zone que nous

  3   étions chargés d'étudier.

  4   Q.  D'accord. Donc maintenant nous avons une base de données qui concerne

  5   cette période de temps et ce secteur géographique déterminé. Est-ce que

  6   cette base de données fait une distinction entre les soldats et les civils

  7   ?

  8   R.  Dans les bases de données DEM-2, ainsi que dans la liste du CICR aucune

  9   information ne figure quant au statut civil ou militaire d'un individu.

 10   Donc il nous a été impossible de procéder à cette distinction sur la base

 11   de nos sources initiales pour introduire cette distinction dans nos

 12   statistiques.

 13   Q.  Qu'avez-vous fait par conséquent ?

 14   R.  Dans ce cas, nous avons utilisé les listes de l'armée dont j'ai déjà

 15   parlé aujourd'hui, et nous avons croisé les données entre cette liste de

 16   l'armée et les différentes autres listes dont nous nous sommes servis, en

 17   particulier les données figurant dans la base de données de Sarajevo.

 18   Q.  Si vous découvriez des données relatives à un individu qui était un

 19   soldat, même si le renseignement découvert ne correspondait pas à ce que

 20   vous aviez découvert auparavant, dans quelle catégorie est-ce que vous

 21   placiez cet individu ?

 22   R.  Dans un premier temps, nous nous contentions d'enregistrer ce

 23   renseignement confirmant que l'individu était bien un soldat selon les

 24   listes militaires. Ça, c'était la première étape, et puis dans une deuxième

 25   étape, nous nous servions de l'étude relative aux foyers de Sarajevo, de

 26   façon à comparer le nombre d'individus concernés dans un cas et dans

 27   l'autre, et nous avons donc croisé les données entre la liste des

 28   militaires et la liste issue de l'étude relative aux foyers de Sarajevo.


Page 28213

  1   Dans de nombreux cas, les données relatives à chaque individu

  2   correspondaient. C'était la majorité des cas, mais dans un nombre très

  3   limité de cas, nous avons découvert une différence entre le statut d'un

  4   individu dans l'une ou l'autre des listes. Donc, encore une fois, nous

  5   avons choisi la précaution, et nous avons dans ce cas enregistré la

  6   personne comme étant un soldat.

  7   Q.  J'aimerais que nous passions maintenant au dossier, page 13, c'est le

  8   tableau numéro 6 qui nous intéresse, en haut de la page.

  9   Que pouvez-vous nous en dire ?

 10   R.  Ce tableau concerne l'intégralité de la base de données. Nous voyons en

 11   haut, le nombre total d'individus qui a été inclus dans l'étude. Vous voyez

 12   le nombre total de 26 466 qui figure dans la troisième colonne. Ce nombre

 13   concerne l'intégralité de la base de données relative à Sarajevo pour toute

 14   la période de la guerre, et au-dessus de ce nombre, vous voyez un certain

 15   nombre de chiffres qui concernent la répartition du total en plusieurs

 16   catégories, civiles, militaires ou soldats, et puis une troisième

 17   catégorie, "inconnu," comme vous pouvez le lire vous-même. Ce qui nous

 18   intéresse à ce stade, c'est particulièrement cette catégorie inconnue. Il

 19   s'agit du nombre d'individus au sujet desquels nous ne disposions d'aucun

 20   renseignement une fois que nous avons croisé les données de notre base de

 21   données avec les listes de l'armée. Mais plus le nombre d'inconnus est

 22   élevé, plus il nuit à la précision de l'analyse des données. Par ailleurs,

 23   un grand nombre de ces inconnus bénéficiaient de données très précises dans

 24   l'étude relative aux foyers de Sarajevo.

 25   Donc nous avons repris cette étude des foyers de Sarajevo pour vérifier la

 26   situation des individus figurant comme inconnus, dans ce tableau numéro 6,

 27   et évidemment, nous avons trouvé deux composantes qui figurent dans le

 28   tableau que vous avez sous les yeux, dans la colonne correction avec un


Page 28214

  1   nombre total de 1 715 individus qui étaient considérés initialement comme

  2   des civils. Nous les avions donc enregistrés en tant que civils, et les

  3   avons enlevé du total des inconnus.

  4   Ensuite, nous avons examiné la situation des soldats qui figuraient

  5   parmi les inconnus. Nous avons trouvé 886 individus qui avaient été

  6   enregistrés comme soldats dans l'étude relative aux foyers de Sarajevo.

  7   Nous les avons donc enregistrés en tant que soldats, et les avons enlevés

  8   du total des inconnus pour les classer dans la catégorie, soldats. C'est

  9   donc une des corrections que nous avons faites, améliorer la précision du

 10   nombre relatif aux inconnus.

 11   Mais comme je le dis, nous avons toujours croisé les données lorsque

 12   nous disposions de plusieurs informations pour un seul et même individu. En

 13   croisant le statut d'un individu tel que consigné dans l'étude relative aux

 14   foyers de Sarajevo d'une part, et dans l'étude militaire d'autre part, nous

 15   avons obtenu un nombre limité de 608 individus qui étaient considérés comme

 16   civils dans notre premier travail mais qui sont apparus comme étant des

 17   soldats dans l'étude relative à Sarajevo. Afin de ne pas gonfler

 18   exagérément le nombre des civils, nous les avons enregistrés en tant que

 19   soldat parce que ce nombre ne pouvait pas être mieux défini à partir des

 20   deux sources que nous avons utilisées et que nous ne voulions pas augmenter

 21   inconsidérément le nombre des civils. Donc nous souhaitions que ce nombre

 22   demeure le plus bas possible, car nous voulions adopter une démarche

 23   prudente. Nous ne voulions pas faire figurer des chiffres supérieurs à la

 24   réalité.

 25   Q.  Donc si nous prenons la colonne intitulée : "Nombre définitif," nous

 26   voyons que vous avez modifié vos chiffres, mais nous retrouvons les

 27   chiffres enlevés de ce total dans les chiffres figurant dans la colonne

 28   "inconnu" du tableau ?


Page 28215

  1   R.  Oui. Nous ne pouvions rien faire au sujet de ce chiffre relatif aux

  2   inconnus. Donc ce sont des cas qui sont demeurés en l'état, nous n'avions

  3   simplement qu'un espoir c'est que le nombre des inconnus dans le rapport

  4   Dragomir Milosevic et avec le temps se réduise, et nous verrons ce qu'il en

  5   a été dans un autre tableau.

  6   Q.  Très bien. Passons maintenant au tableau 11, on y voit deux tableaux.

  7   Commençons par celui de gauche; pouvez-vous nous en parler ?

  8   R.  Oui. J'aimerais d'abord parler du nombre d'individus pris en compte, et

  9   si nous prenons le total incluant le nombre de personnes pour lesquelles le

 10   statut civil ou militaire était inconnu, nous avons 571 individus liés à la

 11   période pendant laquelle Dragomir Milosevic était commandant, et à la zone

 12   considérée, où on voit ce nombre au bas du tableau de gauche, les inconnus.

 13   Q.  Arrêtons-nous un instant ici.

 14   Ce nombre est de 571 n'est pas le même que le nombre d'inconnus figurant

 15   dans le tableau 6, qui était de 3 454, n'est-ce pas ?

 16   R.  Bien sûr. 

 17   Q.  Pourquoi ?

 18   R.  Parce que, dans le tableau 11, nous avons fait un effort supplémentaire

 19   entre le tableau 6 et 11. Dans le tableau 11, nous parlons donc d'une

 20   sélection de cas sélectionnés dans la base de données de Sarajevo. Il

 21   s'agissait d'une sélection pertinente pour l'affaire Milosevic, Dragomir

 22   Milosevic. Exception fait des morts de mort naturelle, et ils ont été

 23   inclus dans le deuxième tableau, et je vais l'expliquer dans un instant.

 24   Donc nous avons isolé les cas qui sont relatifs uniquement à l'affaire

 25   Dragomir Milosevic.

 26   Q.  Donc le tableau 11 parle uniquement de la période qui concerne Dragomir

 27   Milosevic ?

 28   R.  Exact.


Page 28216

  1   Q.  Ensuite ?

  2   R.  Le deuxième problème qu'il s'agissait de résoudre, c'était les civils

  3   ou militaires, le statut donc inconnu, avec la cause de décès inconnue.

  4   Dans notre base de données, il y avait deux rapports parallèles concernant

  5   les causes du décès. D'un côté, nous avons les rapports qui viennent de

  6   sources médicales, qui sont relatifs aux causes du décès. L'exemple se

  7   trouve dans le rapport qui concerne donc les causes médicales. Je pense que

  8   c'est quelque chose que l'on trouve -- c'est le tableau 12, à la page 26.

  9   Donc les causes médicales, par exemple, les blessures, toutes sortes de

 10   blessures, ou différentes sortes de blessures, les blessures à tête

 11   ouverte, des fractures du cou. Donc, là, vous avez la cause du décès qui

 12   est exprimée en tant que catégorie médicale. La liste se trouve dans le

 13   tableau 12, à la page 26.

 14   Q.  La page 26 du document 65 ter 12135. Mais on ne va pas vraiment

 15   élaborer toutes ces causes du décès. Mais dites-nous : d'où viennent les

 16   sources de cela, de ces informations ?

 17   R.  Ce rapport se trouve dans la base de données DEM-2. Il s'agit d'une

 18   grande base de données qui était une des sources principales de ce rapport,

 19   mais comme je l'ai déjà dit, mis à part les causes médicales du décès, il y

 20   avait une autre façon de parler des causes du décès. Là, on trouve une

 21   notion spécifique où l'on dit s'il s'agit d'un décès qui est lié à une mort

 22   violente relative à la guerre. Pour nous, cette information était

 23   essentielle, parce que nous n'étions pas intéressés par toutes les causes

 24   médicales du décès. Il s'agissait de trouver des causes pertinentes. Donc

 25   il était important pour nous d'isoler ces cas de mort violente relative à

 26   la situation de guerre. Donc c'était pertinent pour notre analyse.

 27   Ensuite, au tableau 11, dans la partie gauche du tableau, vous pouvez lire

 28   qu'il y avait 981 cas de morts violentes ou relatives à la guerre, 981, et


Page 28217

  1   c'est le chiffre total de cette catégorie. Ce nombre donc, 981, c'est un

  2   minimum absolu des cas que nous considérons être des victimes dont la mort

  3   est liée au dernier épisode du siège, celui qui est pertinent pour le

  4   rapport dans l'affaire Dragomir Milosevic.

  5   Q.  Merci. A présent --

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourrions-nous revenir sur le tableau

  7   12, là où nous voyons les causes du décès par mort violente ou liée à la

  8   situation de guerre.

  9   Mme WEST : [interprétation] Il s'agit de la page 26 dans le système de

 10   prétoire électronique.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce la page qui se termine par les

 12   chiffres 6397 ? Oui.

 13   Mme WEST : [interprétation] Vous avez une question à ce sujet, Monsieur le

 14   Président ?

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, effectivement, j'ai une question.

 16   J'ai trouvé des causes de décès assez étranges. Par exemple, numéro 53,

 17   effets toxiques d'abus d'alcool, numéro 49, empoisonnement par des

 18   diurétiques et autres médicaments non spécifiés et des substances

 19   biologiques. Je voudrais savoir de quelle façon ces causes ont un rapport

 20   avec les causes liées à la situation de guerre et des causes de mort

 21   violente.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour ces deux cas, nous disposions aussi des

 23   indications que ces deux cas donc étaient des cas de décès relatifs à la

 24   guerre. Ils étaient identifiés comme des victimes de la guerre. Evidemment,

 25   quand vous avez l'empoisonnement ce n'est pas la même catégorie que la

 26   catégorie relative aux tirs, pilonnage, et cetera. C'est une catégorie

 27   complètement différente. Cela étant dit, elle est tout à fait possible dans

 28   un territoire sous siège et normalement devrait se trouver dans une autre


Page 28218

  1   catégorie et pas la catégorie concernant des incidents de pilonnage ou bien

  2   de tirs embusqués. Mais on les trouve dans une catégorie à part où il

  3   s'agit des cas indirects de décès violent lié à la guerre.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  5   Mme WEST : [interprétation] Maintenant, je vais demander à voir la page 13,

  6   et nous voyons donc sur la gauche le nombre en vert et puis sur la droite

  7   le nombre qui se trouve dans la section inconnue aussi en vert.

  8   Q.  Pourriez-vous nous dire de quelle façon vous avez ventilé ces chiffres

  9   ?

 10   R.  Ce qui est en vert sont les inconnus du côté des civils et des

 11   militaires, et aussi en ce qui concerne donc la cause du décès. En ce qui

 12   concerne les inconnus, nous pension qu'il s'agissait là des deux catégorie,

 13   les catégories des morts naturelles, des personnes mortes par la mort

 14   naturelle, ou bien par mort violente. Donc ce que nous avons fait du point

 15   de vue des statistiques, nous avons essayé de faire une ventilation avec

 16   deux couleurs, une couleur orangeâtre [comme interprété] et puis la verte.

 17   Q.  Donc, là, on voit la ventilation en ce qui concerne les proportions.

 18   R.  Oui. Ce sont les proportions des inconnus par rapport aux deux

 19   catégories bien définies en utilisant le principe de proportionnalité,

 20   c'est l'hypothèse.

 21   Q.  Bien. Maintenant nous allons parler des blessés. Pourriez-vous nous

 22   parler des sources d'information pour ce tableau-ci ?

 23   R.  Ce tableau a été fait sur la base des informations trouvées dans les

 24   trois hôpitaux de la ville. Il s'agit donc des personnes blessées

 25   hospitalisées seulement. Le total des cas pour toute la période du siège

 26   correspond à 2 036.

 27   L'INTERPRÈTE : 3 036, se reprend l'interprète.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Là-dessus, nous en avons identifié 405


Page 28219

  1   personnes comme des personnes hospitalisées et blessées, et qui concernent

  2   l'affaire Dragomir Milosevic. Là encore, nous avons été guidés par les

  3   critères de temps, et évidemment, la zone va être la même pour les trois

  4   affaires.

  5   Q.  Donc ce chiffre, c'est encore un chiffre minimal, très prudent ?

  6   R.  Oui, absolument minimal.

  7   Q.  Maintenant, nous allons parler de la page 16, et nous allons parler des

  8   moments de la mort pour l'affaire Milosevic, donc les critères du temps.

  9   Est-ce que vous avez procédé à l'analyse de la même façon dont vous

 10   l'avez fait pour les affaires Karadzic et Galic ?

 11   R.  Oui. Nous avons approché ces critères exactement de la même façon.

 12   Q.  Donc nous avons vu différents types de tableaux, et à nouveau, ici,

 13   c'est un troisième type de tableau.

 14   Pourriez-vous nous dire de quoi il s'agit ?

 15   R.  Ici, nous avons le résumé par rapport aux journées avec le plus petit

 16   nombre et les journées avec le plus gros nombre, donc c'est un résumé, nous

 17   n'avons pas vraiment la revue de tous les jours. Donc il s'agit du résumé

 18   des nombres des civils et soldats tués pour les journées où il y a eu peu

 19   de morts et les journées où il y a eu beaucoup de morts. Donc en ce qui

 20   concerne les journées avec peu de morts, nous tournons autour d'un ou deux

 21   morts par jour. Pour les journées avec beaucoup de morts, ce sont des

 22   journées où on a pu observer trois ou plus morts par jour.

 23   Si l'on examine la deuxième colonne du tableau, nous allons voir le numéro

 24   de jours. Combien de jours y a-t-il eu au cours du siège ? Deux cent vingt

 25   quatre jours que l'on peut considérer comme des jours où il y a eu peu de

 26   morts, et 107 jours correspondant aux journées avec beaucoup de morts. Le

 27   total, c'est un total de 487 jours.

 28   Pour les journées avec peu de morts, le nombre de civils tués était au


Page 28220

  1   total 160; soldats, 102; 46 inconnus. Le nombre de civils, comme on peut le

  2   voir, est bien plus élevé que le nombre de soldats tués.

  3   Les jours où il y a eu beaucoup de morts, le nombre de civils tués

  4   correspond à 289 civils tués, et pour les soldats, 317. Le nombre de civils

  5   tués est moindre - même s'il n'est pas beaucoup plus petit - que le nombre

  6   de soldats tués.

  7   Q.  Docteur, quelles sont les conclusions auxquelles vous êtes arrivée sur

  8   la base de ces chiffres ?

  9   R.  La conclusion va être exactement la même que la conclusion

 10   à laquelle je suis arrivée dans les deux autres rapports, mais je voudrais

 11   tout de même dire que ces conclusions sont tirées sur une sélection des

 12   différentes analyses qui se trouvent dans le rapport.

 13   Donc le nombre de morts du côté de la population civile et militaire est

 14   différent, et significativement différent, et les civils devaient être pris

 15   pour cible parce que leur nombre est plus élevé à de nombreuses journées à

 16   tout moment du siège.

 17   Mme WEST : [interprétation] Est-il possible à présent de voir la pièce 65

 18   ter 12135, page 5, s'il vous plaît ?

 19   Q.  En bas de la page, on voit donc le rapport Milosevic, et dans le

 20   dernier paragraphe, vous parlez des conclusions. Vous dites :

 21   "Les deux conclusions suggèrent que la population civile de Sarajevo a été

 22   prise pour cible de façon systématique au cours des attaques militaires ne

 23   tenant pas compte le fait qu'il y avait eu des activités de combat intenses

 24   ou non. Ceci indique aussi qu'il y a eu une activité de terreur qui ciblait

 25   la population civile et qui s'est poursuivie sans doute entre le mois

 26   d'août 1994 et le mois de novembre 1995."

 27   Madame Tabeau, comment expliquez-vous cette conclusion à laquelle vous

 28   arrivez, à savoir qu'il y avait une campagne, il s'agissait de semer la


Page 28221

  1   terreur sur la population civile de Sarajevo ?

  2   R.  Je suis arrivée à cette conclusion quand j'ai vu cette différence

  3   considérable entre le moment où ont été tués les civils et les soldats ou

  4   blessés, civils et soldats. Souvent il est arrivé, et à tout moment du

  5   siège, que le nombre de civils tués a été plus élevé que le nombre de

  6   soldats tués, si les mécanismes avaient été les mêmes au cours des

  7   activités de combat, je n'aurais pas pu tirer la même observation. Donc

  8   s'il y a eu autant de civils de tués, c'est qu'ils devaient être pris pour

  9   cible, quelles que soient les activités de combat au cours du siège.

 10   Mme WEST : [interprétation] Maintenant je voudrais parler des rapports

 11   Srebrenica, et je me demande si le moment est venu de le faire.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je voulais vous suggérer d'arrêter pour

 13   aujourd'hui, puisque je devais soulever un certain nombre de points, et

 14   puis aussi M. Karadzic souhaite soulever un point.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] En ce qui me concerne, Monsieur le Président,

 16   moi, je souhaite que le témoin soit présent.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne suis pas sûr que l'interprétation

 18   se fasse.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je peux répéter. Le point que je souhaite

 20   soulever, Monsieur le Président, nécessite la présence du témoin. Je

 21   voudrais qu'elle entende ce que j'ai à dire.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allez-y, Monsieur Karadzic.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais vous informer du fait que Mme

 24   Tabeau a été suffisamment gentille de rencontrer la Défense. Nous nous

 25   sommes mis d'accord que tous les rapports scientifiques de Mme Tabeau,

 26   comme dans toutes sciences, peuvent être refaits en utilisant donc les

 27   mêmes méthodes, les bases de données pour arriver à des conclusions

 28   similaires. C'est pour cela que je voudrais obtenir tous les matériaux qu'a


Page 28222

  1   utilisés le Dr Tabeau. Par exemple, je voudrais utiliser la liste

  2   électorale de 1997 et 1998, ainsi que la composition ethnique des

  3   autorités, des organes au pouvoir pour 1996, 1997, et 1998. Elle n'a pas

  4   utilisé ces documents.

  5   Je voudrais aussi avoir le recensement de la population de 1991 comportant

  6   toutes les informations importantes, le nom du père, et cetera.

  7   Je voudrais aussi demander à Mme Tabeau de nous communiquer les outils

  8   qu'elle a utilisés et qui lui ont servi pour éliminer les doublons et les

  9   répétitions. Elle les a mentionnés, mais ils ne figurent pas dans son

 10   rapport.

 11   Je lui demande aussi de nous fournir les informations concernant les

 12   réfugiés ou les personnes déplacées pour le pays tout entier, ainsi que la

 13   structure de ces informations. Aussi les informations concernant les

 14   personnes décédées ou portées disparues au niveau de tout le pays. Puis le

 15   dernier point soulevé par Mme Tabeau, à savoir - elle a dit cela à la page

 16   89 - à savoir que les analyses qui ont servi à établir le dernier tableau

 17   ne se trouve pas dans son rapport, nous souhaitons tout de même le

 18   recevoir.

 19   J'ai besoin de toutes ces informations pour pouvoir me préparer pour le

 20   contre-interrogatoire. Je vous remercie.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais, avant de vous répondre, j'aimerais

 22   entendre ce que Mme Tabeau a à dire.

 23   Avant d'interroger Mme Tabeau, je vous demanderais, Monsieur Karadzic, de

 24   bien vouloir nous dire pourquoi vous n'avez pas demandé tous ces éléments

 25   par vous-même. Pourquoi le faites-vous maintenant seulement ?

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, je ne savais pas sous quelle forme

 27   ces résultats seraient présentés, et je ne savais pas quelles seraient les

 28   conclusions qui seraient évoquées pendant l'interrogatoire principal.


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  1   Manifestement, il importe que je reproduise ces procédures pour vérifier

  2   quels résultats seront obtenus par la Défense, et comment ils pourront être

  3   comparés aux résultats obtenus par le témoin. Dans un contexte général, il

  4   s'avère aujourd'hui que ces renseignements sont tout à fait nécessaires car

  5   je viens d'apprendre que le recensement de 1996 était hors rapport, qu'il

  6   avait été refusé, alors que c'est le recensement qui a été réalisé

  7   immédiatement après la guerre, contrairement au recensement de 1997 et de

  8   1998. Donc je me suis rendu compte qu'il fallait également vérifier du côté

  9   de la Défense les renseignements relatifs à ce recensement.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous avez sans doute reçu le

 11   rapport du témoin il y a déjà très longtemps, mais enfin.

 12   Vous avez une observation, Madame West ?

 13   Mme WEST : [interprétation] C'est à un stade vraiment tardif que l'accusé

 14   demande ces éléments. Les hypothèses faites par lui auraient pu lui

 15   permettre de tirer ses propres conclusions sur le plus gros des rapports et

 16   également en s'appuyant sur le recensement de 1991, ainsi que sur la liste

 17   électorale de 1997 et 1998. Ces documents ont été communiqués.

 18   Je fais remarquer qu'il vient de parler du recensement de 1996. Peut-être y

 19   a-t-il eu erreur d'interprétation. Car on ne voit pas très bien ce qui

 20   pourrait justifier, eu égard à ce recensement, que l'accusé présente sa

 21   demande aujourd'hui alors qu'il aurait pu le faire il y a deux ans.

 22   Par rapport aux critères de comparaison qu'il a demandés, il n'y a rien de

 23   nouveau qui ait été utilisé par rapport à ce dont il a disposé déjà depuis

 24   très longtemps.

 25   Enfin, le rapport Karadzic sur les municipalités s'appuie sur les mêmes

 26   méthodes et sur les mêmes sources que le rapport Galic. Rien de nouveau

 27   encore une fois dans ce cas. Le rapport le plus récent qui a été fourni,

 28   c'est le rapport Srebrenica, qui est récent parce que Mme Tabeau l'a rédigé


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  1   sur la base des informations disponibles dans la base de données du ICPM,

  2   et les nombres sont supérieurs, car la méthode et les sources sont

  3   différentes.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans la partie précédente de l'audience

  5   vous avez dit que vous reviendriez nous parler de ces documents,

  6   recensement de 1991 en particulier, s'agissant du dénombrement de personnes

  7   déplacées.

  8   Mme WEST : [interprétation] Nous essayons de le faire en ce moment.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Une correction. Je n'ai pas parlé de

 11   recensement de 1996, mais bien de la liste électorale de 1996.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, excusez-nous, nous parlons

 13   ensemble.

 14   [La Chambre de première instance se concerte]

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Tabeau, est-ce que vous avez une

 16   observation à faire par rapport à la demande de M. Karadzic ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, si vous me le permettez. D'abord, je me

 18   rends bien compte de la pratique mise en œuvre par le bureau du Procureur

 19   dans d'autres affaires s'agissant de communiquer les sources utilisées pour

 20   la rédaction des rapports démographiques et autres. Toutes ces sources que

 21   j'ai utilisées dans mon rapport ont été communiquées par le bureau du

 22   Procureur, je suppose, et je crois pouvoir penser que cette communication a

 23   eu lieu il y a longtemps. Donc le recensement de la population de 1991, les

 24   listes électorales de 1997, 1998, les listes militaires ont sans doute été

 25   communiqués il y a longtemps, et par ailleurs, je suis certaine que l'étude

 26   relative aux foyers de Sarajevo et l'étude Bakije, ainsi que les deux bases

 27   de données DEM ont également été communiquées. Il est impossible qu'il en

 28   ait été autrement. J'en termine sur ce point.


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  1   Communiquer les sources et décrire les méthodes, le plus exactement

  2   possible à l'intention d'une tierce personne c'est une chose, mais refaire

  3   l'analyse sur la base des mêmes données est pratiquement impossible. Donc

  4   je crois que pour contester ce que j'ai fait, M. Karadzic dispose de tout

  5   ce dont il a besoin. Il est très naïf de penser que l'ensemble du travail

  6   accompli par moi pourrait être reproduit en un seul week-end.

  7   Donc voilà ma conclusion. Nous parlons de millions et de millions de

  8   données enregistrées qui ont été analysées par moi. Donc refaire tout cela

  9   un jour ou même trois jours, même si le week-end est un week-end prolongé,

 10   je ne crois pas que ce soit réalisable.

 11   [La Chambre de première instance se concerte]

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je répondre ?

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, brièvement, Monsieur Karadzic.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce que nous voudrions faire, c'est prélever un

 15   échantillon significatif et retravailler sur cet échantillon. Je ne suis

 16   pas sûr que j'ai reçu l'ensemble des données qui viennent d'être évoquées

 17   pour l'ensemble du pays. C'est absolument impossible, parce que le système

 18   en vigueur à l'époque était un système fermé, qui avait des frontières très

 19   imperméables et il était difficile de sortir du pays à l'époque.

 20   Les fluctuations de population à l'intérieur du pays étaient énormes, et

 21   pour moi ce qui importe, c'est de disposer des données en question pour

 22   l'ensemble du pays et pas pour neuf ou dix municipalités uniquement.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ayant entendu les parties ainsi que Mme

 24   Tabeau, la Chambre souhaite en rester là pour le moment et, le cas échéant,

 25   ceci pourrait faire l'objet d'une audience spécifique.

 26   Je remarque l'heure, mais étant donné que nous avons commencé un peu en

 27   retard aujourd'hui, je crois qu'il me reste suffisamment de temps pour

 28   rendre oralement deux décisions.


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  1   Alors, la Chambre va commencer par rendre oralement une décision relative à

  2   la requête de l'accusé en vue d'admission comme document public de la pièce

  3   à conviction conservée sous pli scellé déposée confidentiellement le 10

  4   avril 2012.

  5   Dans cette requête, l'accusé demande que la Chambre réaffecte un nouveau

  6   numéro de pièce à conviction à toutes les pièces qui ont été admises sous

  7   pli scellé en l'espèce en dehors des déclarations de témoin et des accords

  8   de plaidoyer, et que donc tous ces documents soient admis en tant que

  9   documents publics afin que les parties et la Chambre puissent se référer à

 10   ces documents dans des écritures ou interventions publiques et dans le

 11   jugement final sans que ces pièces soient associées à un témoin

 12   particulier.

 13   L'Accusation a déposé sa réponse le 19 avril 2012 en demandant que la

 14   Chambre rejette la requête de l'accusé sur la base du fait que l'accusé

 15   n'avait pas déterminé une quelconque pièce confidentielle qu'il souhaitait

 16   voir devenir une pièce publique et qu'il n'avait pas corroboré sa demande

 17   en vue d'un nouvel examen de toutes les décisions de la Chambre qui ont

 18   permis d'admettre des pièces confidentiellement, et, enfin, en raison du

 19   fait que la démarche proposée est irréalisable et inefficace.

 20   La Chambre rappelle tout d'abord que lorsqu'elle a soupesé l'importance

 21   d'un procès public qui protège bien entendu l'identité des témoins et des

 22   victimes, elle a exercé un degré très élevé de précaution pour déterminer

 23   si les pièces à conviction devaient être placées sous pli scellé pendant

 24   l'ensemble du procès. La Chambre rappelle également un nombre innombrable

 25   de cas où elle s'est enquise proprio motu au sujet de la nécessité de

 26   conserver une pièce à conviction sous pli scellé, et, chaque fois que la

 27   chose était possible, la Chambre a ordonné aux parties de produire des

 28   versions expurgées et publiques des pièces qui étaient conservées sous pli


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  1   scellé.

  2   Par ailleurs, la Chambre fait remarquer que dans sa requête, l'accusé n'a

  3   fourni aucun exemple précis de pièces admises sous pli scellé dont il

  4   affirme qu'elles devraient être rendues publiques. A cet égard, la Chambre

  5   estime que la requête de l'accusé est vague, n'est pas motivée et frise le

  6   frivole, et elle ne procèdera pas à un réexamen de chacune de ses décisions

  7   d'admission de pièces à conviction sous pli scellé en l'espèce.

  8   Ensuite, la Chambre va maintenant rendre oralement une décision, au sujet

  9   de la requête de l'accusé déposée hier, d'admettre au dossier les versions

 10   publiques, et sous pli scellé, de la déclaration complémentaire de KDZ612,

 11   étant donné que l'attestation requise en vertu de l'article 92 bis (B)

 12   [comme interprété] du Règlement était fournie.

 13   Ayant examiné la version sous pli scellé de la déclaration complémentaire

 14   qui a été téléchargé dans le prétoire électronique en tant que document

 15   1D5557, la Chambre est convaincue que la procédure de certification remplie

 16   les exigences requises par l'article 92 bis (B) du Règlement.La Chambre,

 17   par conséquent, demande au Greffe d'enregistrer que la version

 18   confidentielle de la déclaration complémentaire de KDZ612 est admise au

 19   dossier, et demande au Greffe de lui affecter un numéro de pièce à

 20   conviction.

 21   En ce qui concerne la version expurgée publique de la déclaration

 22   complémentaire de KDZ612, qui a été téléchargée dans le prétoire

 23   électronique en tant que document 1D5558, la Chambre prend acte du fait que

 24   l'attestation dûment requise par l'article 92 bis (B) du Règlement n'est

 25   pas annexé. La Chambre, par conséquent, demande à l'accusé d'annexer une

 26   version expurgée de son attestation au titre de l'article 92 bis au

 27   document actuellement téléchargé en tant que document 1D5558. La Chambre

 28   donne instruction au Greffe également d'affecter un numéro de pièce à


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  1   conviction à ce document et de l'enregistrer en tant que document admis au

  2   dossier.

  3   M. KARADZIC : [interprétation] Je voudrais une petite intervention par

  4   rapport au compte rendu d'audience.

  5   J'ai dit : Pas seulement pour les Musulmans et pas seulement pour 27

  6   municipalités. Au compte rendu, on ne voit que le mot Musulmans.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. C'est noté.

  8   L'audience est suspendue.

  9   [Le témoin quitte la barre]

 10   --- L'audience est levée à 15 heures 06 et reprendra le mardi, 1er mai

 11   2012, à 11 heures 00.

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