Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 21 février 2013

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes. Le témoin

  7   peut-il prononcer la déclaration solennelle.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  9   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 10   LE TÉMOIN : MARINO ANDOLINA [Assermenté]

 11   [Le témoin répond par l'interprète]

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Andolina. Si vous voulez

 13   bien vous asseoir et vous installer.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour, Madame et Messieurs les Juges. Bonjour

 16   à tous.

 17   Interrogatoire principal par M. Karadzic :

 18   Q.  [interprétation] Bonjour, Docteur Andolina. Avez-vous remis une

 19   déclaration à mon équipe de la Défense ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Merci.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous voir le document 1D05009 sur nos

 23   écrans.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Docteur Andolina, voyez-vous à l'écran votre déclaration ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Merci. Et avez-vous lu cette déclaration et l'avez-vous signée ?

 28   R.  Oui, je m'en souviens.


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  1   Q.  Merci.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous voir la page suivante pour que

  3   le Dr Andolina puisse identifier sa signature.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. J'identifie mon paraphe.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Merci. Et depuis lors, depuis le 18 août 2009, y a-t-il quoi que ce

  7   soit de changé dans votre métier ?

  8   R.  Oui. Depuis un an, je suis à la retraite. Donc je suis un médecin à la

  9   retraite.

 10   Q.  Merci. Est-ce que cette déclaration reprend fidèlement ce que vous avez

 11   déclaré à l'équipe de la Défense ?

 12   R.  Oui, tout à fait.

 13   Q.  Merci. Docteur Andolina, si je devais vous poser les mêmes questions

 14   aujourd'hui ici même, questions qui vous ont été présentées lorsque vous

 15   avez remis cette déclaration, est-ce que vos réponses seraient au fond les

 16   mêmes ?

 17   R.  Oui, bien sûr.

 18   Q.  Merci.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite verser cette

 20   liasse au titre de 92 bis.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Des objections, Madame Iodice ?

 22   Mme IODICE : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Bien que l'on

 23   voie au compte rendu "92 bis", je présume que M. Karadzic a déclaré "92

 24   ter".

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, merci. Pourrions-nous passer à huis

 26   clos partiel brièvement.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 28   [Audience à huis clos partiel]


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 26   [Audience publique]

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Docteur Andolina.

 28   Oui. Nous allons donc admettre la déclaration relevant de 92 ter


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  1   ainsi que les pièces connexes.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, la

  3   déclaration 1D5009 de la liste 65 ter devient la pièce D3005, et 1D5010

  4   devient la pièce D3006.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Merci. Si vous voulez

  6   bien continuer, Monsieur Karadzic.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. J'aimerais maintenant lire le résumé de

  8   la déclaration du Dr Andolina en anglais.

  9   Le Dr Marino Andolina est médecin de Trieste, en Italie, spécialisé dans le

 10   traitement de la moelle épinière pour les enfants. En 1993, il s'est rendu

 11   pour la première fois en ex-Yougoslavie pour apporter des soins médicaux à

 12   des enfants pour lesquels était nécessaire un traitement de la moelle

 13   épinière. En un voyage, il s'est rendu en Republika Srpska où il a

 14   rencontré le président Radovan Karadzic.

 15   Le Dr Andolina s'est proposé de traiter des patients ayant besoin de greffe

 16   de la moelle épinière en Bosnie. Le président Karadzic en est convenu.

 17   Bientôt, il a conduit lui-même des convois et des camions de médicaments à

 18   Pale, et sur tout le territoire de la Republika Srpska également. De

 19   retour, il a emmené des enfants en Italie pour leur apporter les soins

 20   médicaux.

 21   Ce projet a duré environ six ans. Pendant cette période, il a rencontré le

 22   président Karadzic quatre à sept fois. Pendant ces rencontres, le président

 23   Karadzic a exprimé à nombre de reprises sa préoccupation pour pouvoir faire

 24   autant que faire se peut pour restreindre les dégâts pour les populations

 25   civiles en résultat du conflit. Il était particulièrement inquiet des

 26   souffrances des enfants de tous les groupes ethniques.

 27   Le président Karadzic est convenu de faciliter le travail du Dr Andolina en

 28   lui permettant d'appuyer librement les enfants de groupe ethnique bosno-


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  1   musulman et les transporter à travers le territoire de la Republika Srpska.

  2   Le 5 mai 1994, le Dr Karadzic lui a remis une lettre exprimant son appui

  3   aux activités du Dr Andolina et demandant que les autorités lui apportent

  4   toute l'aide nécessaire pour transporter les enfants de toutes les

  5   appartenances ethniques sur les territoires de la Republika Srpska.

  6   En 1994, le Dr Andolina était sollicité par le 5e Corps de la BiH pour

  7   aider les enfants dans la municipalité de Bihac. Pour atteindre Bihac, il a

  8   dû traverser des territoires serbes. Le Dr Andolina a demandé

  9   l'autorisation du Dr Karadzic. Le Dr Karadzic lui a fourni cette

 10   autorisation et a demandé au général Tolimir d'appuyer ce convoi pour en

 11   garantir la protection. En résultat des efforts du Dr Karadzic, les vies de

 12   nombre d'enfants ont été sauvées.

 13   Et c'était là un résumé bref, et pour l'heure, je n'ai pas d'autres

 14   questions à poser au Dr Andolina.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Docteur, comme vous l'avez

 16   relevé, votre interrogatoire au principal a été versé par écrit en lieu et

 17   place de votre déposition orale. Maintenant, vous allez subir le contre-

 18   interrogatoire du bureau du Procureur.

 19   Madame Iodice, si vous voulez bien continuer.

 20   Mme IODICE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 21   Contre-interrogatoire par Mme Iodice :

 22   Q.  [interprétation] Bonjour, Docteur Andolina. J'aimerais réitérer que

 23   hier nous nous sommes rencontrés, et j'aimerais vous en remercier. Au

 24   paragraphe 5 de votre déclaration, vous avez indiqué que vous avez

 25   rencontré M. Karadzic entre quatre à sept fois. Et hier, vous m'avez dit

 26   que ces rencontres étaient très brèves, qu'elles ont duré quelque dix

 27   minutes; est-ce exact ?

 28   R.  Pour autant que je m'en souvienne, puisque c'était il y a 20 ans, je le


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  1   confirme.

  2   Q.  Merci. Dans votre déclaration, vous décrivez également aux paragraphes

  3   6 et 7 comment M. Karadzic a facilité votre travail dans les Balkans.

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Est-il exact de dire que sans l'aval de M. Karadzic, vous n'auriez pas

  6   été en mesure de traverser le territoire de la Republika Srpska en camion ?

  7   R.  Oui. Ça aurait été impossible et très dangereux.

  8   Q.  En ce qui concerne votre vécu à Bihac, on vous a demandé d'apporter une

  9   aide humanitaire car les populations à Bihac mouraient de faim; est-ce

 10   exact ?

 11   R.  Oui. C'est sur la demande, je ne me souviens plus de quel corps, il

 12   s'agissait sans doute du 5e de l'armée. C'était leur demande.

 13   Q.  Merci. En dehors de la lettre que vous avez jointe à votre déclaration,

 14   les Serbes de Bosnie vous ont également remis une médaille pour votre

 15   travail ?

 16   R.  Oui. Je ne me souviens pas, mais vers la fin des années 1990 -- c'était

 17   une réussite malencontreuse. J'ai emmené une petite fille croate malade par

 18   la Republika Srpska, d'est en ouest, jusqu'à Banja Luka. Après l'opération

 19   Tempête, où la plupart des réfugiés se trouvaient, il y avait parfois des

 20   églises incendiées. Donc ils étaient terrifiés et angoissés. Il serait

 21   dangereux d'emmener une petite fille croate dans ce convoi, et cetera. Et

 22   donc, les autorités serbes m'ont permis de garder la petite fille et

 23   d'aller à Belgrade sans doute en avion, on a gardé la petite fille à

 24   l'hôpital quasiment secrètement, et nous sommes passés par le territoire de

 25   la Republika Srpska jusqu'à Banja Luka.

 26   Q.  Merci.

 27   R.  Et en quelques minutes, elle est morte dans les bras de sa mère, comme

 28   cela avait été demandé.


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  1   Q.  Merci.

  2   R.  Désolé. C'est pour cette raison, je ne me souviens pas si c'était le Dr

  3   Karadzic lui-même ou quelqu'un d'autre qui m'a donné cette médaille,

  4   puisque j'avais amélioré l'image humanitaire des Serbes.

  5   Q.  Très bien. Merci. Et comme vous me l'avez dit hier, les Bosno-Serbes

  6   vous ont utilisé aux fins de propagande, en quelque sorte ?

  7   R.  Eh bien, je ne sais pas si l'on pourrait dire propagande. Quoi qu'il en

  8   soit, je les ai aidés pour donner au monde la meilleure image -- leur

  9   meilleur image.

 10   Q.  Merci. Et vous avez également rencontré le général Tolimir et le

 11   général Mladic, n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui. Le général Tolimir était --

 13   Q.  Cela suffira. Merci.

 14   R.  Bien. Merci.

 15   Q.  J'ai d'autres questions. Et pendant ces réunions, vous n'avez jamais

 16   représenté le gouvernement italien ni aucune institution italienne, n'est-

 17   ce pas ?

 18   R.  Pas dans les années 1990.

 19   Q.  Merci. Et hier, vous m'avez également dit que vous avez rencontré le

 20   général Mladic. Vous avez rencontré M. Mladic pour faciliter la libération

 21   de deux pilotes français qui avaient été faits prisonniers; est-ce exact ? 

 22   R.  Difficile à dire. Donc, j'ai rencontré M. Mladic pour ma sécurité. Je

 23   craignais qu'il était inquiet que j'avais donné des informations concernant

 24   les prisonniers français. Je suis allé le voir pour lui serrer la main et

 25   l'assurer que j'étais donc un ami. Principalement pour ma propre sécurité.

 26   Q.  Merci.

 27   Mme IODICE : [interprétation] J'aimerais maintenant afficher le 65 ter

 28   24605.


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  1   Q.  Il s'agit de la note officielle rédigée par Ljubisa Beara, qui était le

  2   chef de la sécurité de l'état-major principal de la VRS, concernant la

  3   réunion du 17 septembre 1995, où vous avez parlé des pilotes français et

  4   autres questions.

  5   Mme IODICE : [interprétation] Si nous pouvions passer à la page 2 de

  6   l'anglais, et en bas de la page 1 en B/C/S.

  7   Q.  A la rubrique 3, nous y lisons que vous avez parlé avec Ljubisa Beara

  8   de la question des pilotes français qui avaient été faits prisonniers. Vous

  9   voyez que Beara aura indiqué que :

 10   "Lorsque le moment viendra et que nous n'aurons plus besoin de ces pilotes,

 11   nous déciderons de les libérer, et s'ils sont en vie, nous les remettrons à

 12   Andolina…"

 13   Et comme vous le confirmez --

 14   R.  Je n'ai pas mes lunettes, mais je ne me souviens pas complètement de ce

 15   document. Je ne l'ai jamais vu. Il m'est difficile de le lire.

 16   Q.  C'est donc une consignation en l'heure --

 17   R.  Je ne me souviens pas qu'il ait participé à la libération des pilotes.

 18   Non, je ne savais pas qu'ils voulaient me remettre les pilotes français.

 19   Q.  Mais suite à votre proposition, c'est ce que vous leur  avez proposé ?

 20   R.  Non, non.

 21   Mme IODICE : [aucune interprétation]

 22   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 23   L'INTERPRÈTE : La cabine française s'excuse.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourquoi ne montre-t-on pas au docteur

 25   la première partie de sa note officielle, le tout premier passage.

 26   Mme IODICE : [interprétation]

 27   Q.  Ceci est une note officielle qui a été rédigée par le chef de la

 28   sécurité de l'état-major principal de la VRS une fois que vous l'avez


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  1   rencontré. On a consigné que vous avez eu une réunion, et en première ligne

  2   on mentionne un prêtre, Ilija Ivic. Et vous pouvez voir que dans cette note

  3   officielle, il est dit que :

  4   "Ce prêtre, Ilija Ivic, et le Pr Dr Marino Andolina, qui était un citoyen

  5   italien et qui a reçu l'ordre de Nemanjic pour ses services rendus à la

  6   lutte du peuple serbe, qui est venu donc à l'administration de la sécurité

  7   le 17 septembre de cette année."

  8   Est-ce que ceci rafraîchit votre mémoire ?

  9   R.  Ils m'ont donné une médaille, oui. Probablement est-ce le nom de la

 10   médaille -- je ne sais pas quel type de médaille c'était, mais c'était la

 11   médaille pour le service rendu à la petite fille croate.

 12   Q.  J'aimerais que vous vous penchiez sur le point 1. On voit qu'après

 13   cette réunion, la toute première proposition émanant de Ljubisa Beara était

 14   de travailler avec lui pour identifier des extrémistes musulmans en Italie,

 15   et que cette information devrait être véhiculée au parlement italien pour

 16   que ce soit utilisé.

 17   R.  Oui. Je m'en souviens, mais je crois que certains membres de ces

 18   effectifs de sécurité -- un individu dont j'ai soigné le fils -- ah, merci

 19   de m'avoir apporté mes lunettes. Je pense que pour ce qui est des

 20   terroristes et pour autant que je m'en souvienne, le chef des effectifs de

 21   sécurité de la police à Banja Luka, après une visite médicale effectuée au

 22   niveau de son fils, il a dit qu'il avait donné une liste des terroristes

 23   musulmans, ou prétendument terroristes musulmans, en Italie.

 24   Q.  Merci. Et la dernière partie en anglais, qui commence à la page 2. Vous

 25   pouvez voir que ce que vous avez dit à Beara à l'époque, c'est que vous

 26   alliez véhiculer ces informations vers le parlement italien et leur dire

 27   qu'il voulait "bombarder les Serbes parce qu'on les considérait comme étant

 28   terroristes, mais que les vrais terroristes, c'étaient les Musulmans."


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  1   R.  Non --

  2   Q.  Vous souvenez-vous de cela ?

  3   R.  Je ne me souviens pas de ces propos. Je n'ai qualifié personne de

  4   terroriste. J'ai emporté une liste de noms d'intégristes arabes qui

  5   vivaient en Bosnie, rien d'autre. Des noms et des adresses. J'ai essayé de

  6   donner ceci aux autorités italiennes, mais ça a été rejeté comme étant

  7   dénué de pertinence. Et maintenant, je crains fort d'avoir porté à ces

  8   effectifs de sécurité italiens la liste des camps où les terroristes

  9   islamistes avaient procédé à l'entraînement des combattants de l'UCK. Et

 10   c'est la raison pour laquelle je me suis un peu impliqué dans la politique

 11   italienne à l'époque.

 12   Q.  Merci.

 13   Mme IODICE : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le

 14   Président.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour les besoins du compte rendu

 16   d'audience, en page 10, ligne 7, il est dit qu'il s'agissait de porter ces

 17   informations au parlement italien, et ensuite, il faudrait enlever les

 18   guillemets, parce qu'on pourrait comprendre que c'était vous, le

 19   représentant des autorités italiennes. Est-ce que vous confirmez, Madame

 20   Iodice ?

 21   Mme IODICE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Il est censé :

 22   "…porter ces informations vers le parlement italien," et ensuite, il

 23   devrait y avoir une fin de citation. C'était une citation émanant du

 24   document. Merci.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Est-ce que vous avez demandé un

 26   versement au dossier de ce document ?

 27   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 28   Mme IODICE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je m'excuse


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  1   d'avoir oublié. Je demande, en effet, le versement de ce document au

  2   dossier.

  3   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon. Nous allons le verser au dossier.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P6148.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.

  7   Avez-vous des questions supplémentaires, Docteur Karadzic ?

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Juste deux questions.

  9   Nouvel interrogatoire par M. Karadzic :

 10   Q.  [interprétation] Docteur Andolina, est-ce que vous vous souvenez du

 11   fait que cette conversation avait ou pas été enregistrée ?

 12   R.  Non.

 13   Q.  Merci. Quand on a parlé des périls que l'on encourait en voyageant au

 14   travers de la Republika Srpska, est-ce que vous pouvez nous indiquer à

 15   quelle distance des lignes de conflit vous avez voyagé ?

 16   R.  Ah, ça s'exprime en mètres.

 17   Q.  Merci. Est-ce que vous êtes passé du côté musulman ou croate en partant

 18   de la Republika Srpska et en traversant des lignes de conflit ?

 19   R.  A l'époque, lorsque j'ai essayé d'entrer dans Bihac, je suis passé par

 20   la Croatie pour arriver jusqu'à la République de la Krajina serbe. Ensuite,

 21   je me suis arrêté à un poste de contrôle érigé à Petrovo Selo, qui était

 22   tenu par des Polonais, j'imagine. Je me suis arrêté là parce que j'ai

 23   réalisé qu'on allait me kidnapper.

 24   Q.  Mais s'agissant de Sarajevo, est-ce que vous êtes allé dans la partie

 25   musulmane de Sarajevo en venant de la Republika Srpska ?

 26   R.  Non.

 27   Mme IODICE : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Je ne suis

 28   pas du tout sûre qu'il ait été question de tout ceci au contre-


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  1   interrogatoire.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] En effet. Vous pouvez passer à un autre

  3   sujet, Monsieur Karadzic.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je voulais juste que nous déterminions

  5   quels étaient ces périls qui le menaçaient, et on vient d'entendre qu'il a

  6   voyagé des fois à quelques mètres seulement des lignes de conflit.

  7   Merci, Docteur Andolina, non seulement pour votre témoignage, mais pour

  8   tout ce que vous avez fait pour les trois groupes ethniques en présence là-

  9   bas.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] A moins que mes collègues n'aient

 11   des questions, Docteur Andolina, ceci met un terme à votre témoignage. Au

 12   nom des Juges de la Chambre, je tiens à vous remercier d'être venu à La

 13   Haye. Vous êtes à présent libre de vous en aller.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 15   [Le témoin se retire]

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous avons d'autres témoins

 17   après celui qui vient maintenant, Monsieur Robinson ?

 18   M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Faisons donc entrer le témoin suivant,

 20   s'il vous plaît.

 21   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que le témoin peut faire sa

 23   déclaration solennelle, s'il vous plaît.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 25   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 26   LE TÉMOIN : ZORAN JOVANOVIC [Assermenté]

 27   [Le témoin répond par l'interprète]

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Bonjour, Monsieur Jovanovic.


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  1   Veuillez vous asseoir. Mettez-vous à l'aise, s'il vous plaît.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour. Merci.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que vous ne commenciez à

  4   témoigner, je tiens à attirer votre attention sur une Règle concrète de

  5   notre Règlement de procédure et de preuve, qui est celui du Tribunal, il

  6   s'agit de l'article 90(E). En vertu de cet article, vous pouvez faire

  7   objection pour ce qui est de l'apport de réponses à des questions posées

  8   par M. Karadzic, l'Accusation, ou voire même par les Juges, si vous estimez

  9   que vos réponses pourraient vous incriminer pour ce qui est de la

 10   perpétration d'un délit au pénal. Dans ce contexte, "incriminer" signifie

 11   que vous pourriez dire quelque chose qui pourrait constituer une

 12   reconnaissance de culpabilité pour un délit au pénal, ou la tenue de propos

 13   qui constitueraient un élément de preuve montrant que vous auriez commis un

 14   délit au pénal. Alors, si une réponse pourrait vous incriminer et que vous

 15   refusez de répondre, je me dois de vous indiquer que le Tribunal a

 16   l'autorité de vous obliger à répondre à ladite question, mais dans ce cas

 17   de figure, le Tribunal s'assurera du fait que ce témoignage, entendu sous

 18   de telles circonstances, ne pourrait être utilisé dans une autre affaire

 19   conduite à votre encontre pour quelque délit que ce soit, exception faite

 20   du délit de faux témoignage.

 21   Est-ce que vous avez bien compris ce que je viens de vous dire ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Absolument.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Jovanovic. Je vous

 24   remercie.

 25   Monsieur Karadzic, à vous.

 26   Interrogatoire principal par M. Karadzic :

 27   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Jovanovic.

 28   R.  Bonjour, Monsieur le Président.


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  1   Q.  Est-ce que vous avez fourni à mon équipe de la Défense une déclaration

  2   ? Je vous demanderais, avant que de répondre, de parler lentement, tous les

  3   deux, vous et moi, et faire des pauses entre vos phrases et les miennes,

  4   afin que l'on puisse nous suivre. Est-ce que vous avez bien fait une

  5   déclaration auprès de mon équipe de la Défense ?

  6   R.  Oui, j'ai fait une déclaration.

  7   Q.  Merci.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais qu'on nous affiche dans le prétoire

  9   électronique la pièce 1D7237.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Est-ce que vous voyez devant vous cette déclaration, Monsieur Jovanovic

 12   ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Merci. Est-ce que cette déclaration, vous l'avez relue et signée ?

 15   R.  Oui.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais qu'on nous montre à présent la

 17   dernière page afin que M. Jovanovic puisse identifier sa signature.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est bien ma signature.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Merci. Est-ce qu'à la relecture, vous avez constaté que cette

 21   déclaration transmet de façon fidèle ce que vous avez dit ?

 22   R.  Ça a repris de façon fidèle tout ce que j'ai dit, en effet.

 23   Q.  Merci. Si je venais aujourd'hui à vous poser les mêmes questions que

 24   celles qui vous ont été posées par les membres de mon équipe de Défense,

 25   est-ce que vos réponses en substance se trouveraient être les mêmes ?

 26   R.  S'agissant des questions qui m'ont été posées, les réponses seraient

 27   les mêmes.

 28   Q.  Merci.


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellences, je demande le versement au dossier

  2   de cette liasse de documents en application du 92 ter.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Robinson.

  4   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je crois qu'on

  5   voulait dire -- enfin, je n'avais pas l'intention de dire sous pli scellé.

  6   Mais toujours est-il qu'il y a une déclaration et six pièces connexes à

  7   verser au dossier. Aucune de ces pièces ne se trouve sur la liste 65 ter.

  8   Nous demandons l'autorisation à ce que ce soit rajouté, puisque cela a été

  9   fourni par le témoin une fois que nous avons communiqué la liste des pièces

 10   à conviction.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez dit six ?

 12   M. ROBINSON : [interprétation] Oui.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Parcourons-les une par une.

 14   M. ROBINSON : [interprétation] Oui. La première, ce serait le 1D13002.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous n'êtes pas en train de

 16   demander l'une des quatre pièces qui ont fait l'objection de la part de

 17   l'Accusation par e-mail.

 18   M. ROBINSON : [interprétation] Non, nous n'allons pas verser au dossier des

 19   vidéos, parce que nous allons les aborder viva voce, mais là nous ne sommes

 20   pas en train de demander des versements au dossier de vidéos en tant que

 21   pièces connexes.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon. Alors, est-ce que vous pouvez nous

 23   donner les références.

 24   M. ROBINSON : [interprétation] Fort bien. Alors, c'est le 1D --

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] 13002.

 26   M. ROBINSON : [interprétation] C'est le 1D13003, 1D13004, 1D51000, 1D51001

 27   et 1D51002.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et qu'en est-il du 1D5003 [comme


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  1   interprété] ? C'est également une vidéo.

  2   M. ROBINSON : [interprétation] C'est exact, et s'agissant des clips vidéo

  3   que nous allons utiliser, ce seront des pièces qui se font l'objet d'un

  4   interrogatoire viva voce.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je puis remarquer une chose ? Je

  6   n'ai pas dit "MFI", je n'ai pas dit "sous pli scellé". Moi, j'ai demandé un

  7   versement en application du 92 ter. Je ne sais pas comment cela a été

  8   interprété.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 10   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je dois dire que très souvent on me fait

 12   dire ce que je n'avais pas l'intention de dire. Y a-t-il des objections,

 13   Monsieur File, pour ce qui est de ces déclarations en application du 92 ter

 14   et des pièces connexes au nombre de six ?

 15   M. FILE : [interprétation] Juste une petite observation, Monsieur le

 16   Président. J'ai remarqué récemment que le 1D13004 est pratiquement un

 17   doublon de la pièce D1656, et c'est un document qui a déjà été versé au

 18   dossier suite à une décision des Juges de la Chambre de première instance

 19   datée du 4 novembre 2011. Je ne sais pas comment les Juges de la Chambre de

 20   première instance voudraient s'en occuper, mais je voudrais le faire

 21   remarquer pour les besoins du compte rendu d'audience.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si les parties pouvaient vérifier qu'il

 23   y a des parties non incluses par la pièce D1656, parce que s'il y a des

 24   parties qui n'ont pas été englobées, il faudrait peut-être rajouter ces

 25   éléments à la pièce déjà versée, qui est le D1565 [comme interprété].

 26   Autrement dit, nous allons donc admettre le versement de la déclaration en

 27   application du 92 ter et les cinq pièces connexes jointes.

 28   Et on va donner des chiffres qui se suivent.


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  1   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. La

  2   déclaration deviendra la pièce D3007, et les cinq pièces seront les pièces

  3   D3008 à D3012, respectivement.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Robinson, une fois qu'on aura

  5   vu le clip vidéo qui fera l'objet de questions viva voce, et je dirais que

  6   la Chambre a un peu eu l'occasion de se pencher sur les quatre pièces qui

  7   ont fait l'objet d'objections de la part de l'Accusation, et je dirais que

  8   les Juges de la Chambre sont d'accord pour dire que ceci n'est pas

  9   pertinent pour ce qui est de considérer que ces pièces peuvent fournir plus

 10   d'information que nécessaire au sujet de crimes qui ne sont pas englobés

 11   par l'acte d'accusation. Donc je ne suis pas du tout sûr que vous ayez

 12   besoin de ces pièces. Mais les Juges de la Chambre seront heureux de voir

 13   le clip vidéo qui porte la référence 1D51003.

 14   Veuillez continuer, Monsieur Karadzic, s'il vous plaît.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellences, est-ce que je dois dire quelque

 16   chose à ce sujet ? Moi, je demanderais à M. Robinson de présenter l'opinion

 17   de la Défense pour ce qui est de ces clips vidéo et pour ce qui est de leur

 18   pertinence.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'ai obtenu de la part de M. Robinson un

 20   courriel relatif à la pertinence. Le point auquel je faisais référence,

 21   c'est le fait que la déclaration du témoin peut parfaitement bien être

 22   comprise sans les clips vidéo. En bref, je ne pense pas que ce soit

 23   nécessaire que de les verser au dossier.

 24   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que vous

 25   parlez de ces pièces en tant que pièces connexes en termes d'inutilité, ou

 26   est-ce que vous avez un problème pour ce qui est de les faire passer ici et

 27   de poser des questions viva voce pour des commentaires du témoin ?

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vais d'abord entendre l'opinion de M.


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  1   File.

  2   M. FILE : [interprétation] Nous faisons valoir, Madame, Messieurs les

  3   Juges, qu'il ne semble pas y avoir d'affirmation indiquant que ces vidéos

  4   sont liées et qu'il y a un lien de cause à effet au document qui a été cité

  5   dans le courriel cité par Me Robinson. Je m'en remets aux Juges de la

  6   Chambre sur la question de savoir si vous souhaitez, Madame, Messieurs les

  7   Juges, visionner les séquences vidéo dans le prétoire ou pas.

  8   [La Chambre de première instance se concerte]

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela n'est que secondaire sur le plan de

 10   la pertinence, et compte tenu des circonstances, les Juges de la Chambre

 11   permettront à l'accusé d'interroger le témoin viva voce sur ces séquences

 12   vidéo.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je vais maintenant lire le résumé de M.

 14   Zoran Jovanovic en anglais.

 15   Zoran Jovanovic était chef du centre des transmissions au sein de la

 16   Brigade de Vlasencia. Il a également dirigé le magazine "Vlasenicke

 17   Novosti".

 18   La structure ethnique de Vlasenica, où il habitait, était de l'ordre de

 19   50/50 réparti entre les Serbes et les Musulmans. Le SDS et le SDA étaient

 20   les partis les plus importants après l'élection, suivis par l'Alliance des

 21   forces réformistes de Yougoslavie pour la Bosnie-Herzégovine et le SDP. Le

 22   pouvoir était donc partagé entre ces quatre partis. Des désaccords ont

 23   rapidement surgi et se sont amplifiés avec le temps. La fondation de partis

 24   nationaux a aggravé les relations interethniques étant donné qu'ils

 25   critiquaient les autres partis. Les Musulmans, en particulier, souhaitaient

 26   avoir une Bosnie-Herzégovine souveraine, indépendante et indivisible. On a

 27   dit à de nombreux Serbes de se rendre en Serbie étant donné que la Bosnie-

 28   Herzégovine n'était pas leur pays.


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  1   En 1991, lorsque la guerre a éclaté et que les Musulmans ont appuyé les

  2   Croates dans leurs efforts pour faire sécession de la Yougoslavie, Zoran

  3   Jovanovic savait que s'ils devaient réussir, les Musulmans de Bosnie-

  4   Herzégovine feraient de même et la guerre serait inévitable. Les Musulmans

  5   ont envoyé des hommes en Croatie pour suivre des formations au sein de la

  6   police et de l'armée. Les Musulmans n'ont pas reconnu la JNA comme étant la

  7   seule force armée en Yougoslavie, et la jeunesse musulmane n'a pas été

  8   envoyée à la JNA pour faire son service militaire.

  9   Lorsqu'une unité de la JNA a été mobilisée, les dirigeants du SDA ont

 10   exhorté les membres musulmans de quitter la JNA. Les Serbes ont reconnu que

 11   la guerre pouvait être empêchée s'ils restaient unis et ont fait part de

 12   ceci aux Musulmans. Cependant, la majorité des soldats musulmans ont quitté

 13   la JNA, et il est apparu clairement à Zoran Jovanovic que les Musulmans se

 14   préparaient à la guerre. Il a été confirmé en même temps que la Ligue

 15   patriotique avait été créée à Vlasenica.

 16   Les Serbes étaient très inquiets au sujet de la situation à Vlasenica étant

 17   donné que les Musulmans s'armaient et avaient créé des formations

 18   militaires. Des hauts dirigeants du SDA avaient fourni des armes aux

 19   Musulmans. Ces informations ont été découvertes par l'armée qui montrait

 20   que les Musulmans avaient commencé à se préparer à la guerre bien avant que

 21   ce qui avait été estimé auparavant. Ils avaient fait des plans pour

 22   détruire des bâtiments et tuer ou échanger en leur faveur des personnes

 23   serbes. En réponse, les Serbes ont donc tenté de se protéger en se

 24   procurant des armes.

 25   En avril 1992, la Défense territoriale serbe des villages voisins sont

 26   entrées à Vlasenica et ont pris le contrôle de la ville. Personne n'a été

 27   tué au cours de cette opération, et les Musulmans ont dû remettre leurs

 28   armes dans le cadre d'un appel qu'on leur a lancé. Environ 900 armes ont


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  1   été remises, et à la fin du mois de juin, 2 000 armes environ avaient été

  2   rendues. Il y a ensuite eu des négociations avec des formations

  3   paramilitaires et une unité de la JNA. Cependant, la situation devenait de

  4   plus en plus difficile en raison de tractations sur la division du

  5   territoire. Les Musulmans et les Serbes se rendaient d'une partie de la

  6   municipalité à l'autre en fonction de la majorité ethnique qui se trouvait

  7   dans l'une ou l'autre communauté.

  8   En mai 1992, les Musulmans ont tué huit civils serbes, dont deux étaient

  9   des femmes. Les civils se rendaient à leur travail au moment où ils ont été

 10   tués. En outre, des Serbes sont tombés dans une embuscade pendant leur

 11   travail. Ceci a provoqué la panique, et de nombreuses personnes, des

 12   Musulmans et des Serbes, ont fui Vlasenica.

 13   Les autorités municipales ont tenté de résoudre la question de

 14   l'hébergement qui avait été créée en raison d'un déplacement important de

 15   la population dans la municipalité. Des maisons abandonnées ont été fermées

 16   et utilisées comme moyen d'hébergement pour les réfugiés serbes, mais ceci

 17   a donné lieu à des sentiments d'amertume de la part des Serbes.

 18   Les Musulmans ont ensuite attaqué les villages voisins, ils ont incendié

 19   des maisons et d'autres bâtiments, ils ont fait prisonniers des Serbes, ils

 20   ont tué de nombreux habitants serbes, notamment des personnes âgées, et ils

 21   ont pillé des biens. Ceci s'est produit à plusieurs reprises dans certains

 22   villages.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Je souhaite maintenant vous demander ceci --

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Me Robinson s'est excusé.

 26   Monsieur Karadzic, le fait que je vous ai autorisé à poser des questions

 27   viva voce au témoin sur ces cinq séquences vidéo, cela ne signifie pas pour

 28   autant que la Chambre de première instance est d'accord avec la pertinence


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  1   de cela. Parce que les Juges de la Chambre n'ont pas eu l'occasion de voir

  2   la vidéo, donc nous réservons notre appréciation de cela et attendons de

  3   voir les vidéos pour vous dire si cela est pertinent ou pas. Et nous les

  4   verserons au dossier éventuellement plus tard.

  5   Veuillez poursuivre.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Peut-on montrer au témoin le 1D51003,

  7   s'il vous plaît.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Pourriez-vous vous préparer à nous expliquer ce que représente ces

 10   images et à quelle période cela correspond, s'il vous plaît.

 11   R.  Nous n'avons pas le son.

 12   L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine française précise qu'ils ne

 13   disposent pas de transcription, qu'elle fait une traduction à vue du compte

 14   rendu d'audience.

 15   [Diffusion de la cassette vidéo]

 16   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 17   "Il y a 260 jeunes hommes à Vrsinje qui sont prêts pour la libération

 18   de notre région. Nous sommes tous membres du SDA. Nous allons nous battre

 19   pour l'indépendance."

 20   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre ce que représente cette

 23   lettre U que nous avons vue sur la dernière image.

 24   R.  L'ensemble de ces images ont été tournées à la fin du mois d'août 1991

 25   dans un village très éloigné en haut de Vrsinje dans la région de

 26   Vlasenica. Ces images prouvent qu'à l'époque, même si la guerre faisait

 27   rage en Croatie et en Slovénie, je ne pouvais même pas imaginer qu'il y

 28   aurait une guerre en Bosnie, mais ceci montre que les Musulmans avaient


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  1   commencé à se préparer à la guerre bien avant le début même de la guerre.

  2   Et ils montrent le signe qui serait l'emblème pour lequel ils seraient

  3   prêts à se battre, à savoir la libération qu'ils ont évoquée dans la vidéo.

  4   La libération de qui, de quoi ? Eh bien, de toute façon, tout ceci montre

  5   qu'ils se préparaient à la guerre pour libérer ces territoires dans le

  6   cadre d'une Bosnie indépendante et libre, que tout ceci se terminerait dans

  7   un bain de sang puisqu'il y aurait un règlement de compte.

  8   Q.  Mais cette lettre U, que signifie-t-elle ?

  9   R.  La lettre U est un symbole qui représente les Oustashi, les putains

 10   fascistes de la Deuxième Guerre mondiale qui ont commis des crimes atroces

 11   dans toute la région de Birac et sur tout le territoire de la Bosnie

 12   orientale.

 13   Q.  Avez-vous reconnu -- vous dites au paragraphe 16 que vous avez reconnu

 14   certaines personnes.

 15   R.  Je ne les connaissais pas personnellement, mais je les ai identifiées

 16   lorsque j'ai vu ces images vidéo avec l'aide de leurs voisins qui les

 17   connaissaient. Un ami, Dragan Lukovic, m'a aidé, c'est un voisin dans ce

 18   village de Gornje Vrsinje.

 19   Q.  Au paragraphe 30, vous parlez de l'attaque contre Rogosija et

 20   Nedjeljista, ce village --

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous montrer au témoin la pièce

 22   1D13005, s'il vous plaît.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Pourriez-vous nous expliquer quel est le sens de ces images. Nous avons

 25   la transcription de la traduction.

 26   L'INTERPRÈTE : Les interprètes de la cabine anglaise précisent qu'elles

 27   n'ont pas de transcription pour cette vidéo. Et l'interprète de la cabine

 28   française précise qu'elle fait une traduction à vue du compte rendu


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  1   d'audience.

  2   [Diffusion de la cassette vidéo]

  3   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  4   "Prodanovic, nous allons lui demander ce qui s'est passé dans ce

  5   village.

  6   Mon voisin, Becirevic Hasan, a brûlé ma maison jusqu'au sol. Et il

  7   s'est enfui de ma maison, s'est échappé par la cour, et j'ai appelé mon

  8   fils Ilija et Nenad Pandic. J'ai appelé : 'Où êtes-vous, mes enfants ? Les

  9   maisons sont en train de brûler.'

 10   Derrière, se trouve l'ancienne école primaire de Nedjeljista. Vous

 11   avez construit ceci ensemble, puisque les enfants musulmans et serbes

 12   allaient à l'école ensemble. Comment vivez-vous ceci maintenant ?

 13   Comment ? Il y avait 70 élèves ici, 70 de chez eux et quatre de chez

 14   nous seulement, des trois villages. Pourquoi devrais-je continuer à vivre

 15   ici si j'ai peur chaque nuit que quelqu'un va venir m'égorger, me trancher

 16   la gorge ?"

 17   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur Jovanovic, veuillez nous dire qui a tourné ces images.

 20   R.  Le journaliste c'est moi, et le caméraman c'est Milan, et il n'avait

 21   même pas reçu de formation parce que nous avions reçu cette caméra quelques

 22   jours avant. C'était un de nos premiers caméscopes que nous avons pu

 23   utiliser.

 24   Q.  Merci. D'après-vous, s'agit-il d'un incident isolé ou ceci faisait-il

 25   globalement partie d'un plan ? Aviez-vous des informations là-dessus ?

 26   R.  Quelques jours auparavant, le 25 juin, le village serbe de Rogosija a

 27   été entièrement brûlé. Il comportait dix à 12 maisons, et toutes ces

 28   maisons ont brûlé. Même le cimetière a été profané. Et ce village se trouve


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  1   à côté de Nedjeljista. Et ensuite, quelques jours plus tard, au mois de

  2   juin, Nedjeljista a été attaqué. Cependant, à Rogosija et Nedjeljista, il

  3   n'y a pas eu de victimes car la population avait réussi à s'enfuir, mais

  4   toutes les maisons ont été pillées, tout a été emmené et les maisons ont

  5   été brûlées entièrement à Rogosija. La plupart des maisons serbes à

  6   Nedjeljista ont été brûlées, parce que Nedjeljista était un village mixte.

  7   Il y avait un nombre assez important de Musulmans qui étaient juste à côté.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, nous allons verser au dossier les

  9   séquences vidéo une à une. Nous allons admettre le versement du 1D51003 et

 10   lui accorder une cote.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la cote D3013, Madame, Messieurs

 12   les Juges.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je souhaite connaître des parties quelle

 14   est la pertinence de la séquence vidéo que nous venons de voir, 1D13005.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Avant cela, puise-je poser une question au

 16   témoin ? Puis-je poser une question au témoin et expliquer pourquoi j'ai

 17   montré cela ?

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Comment ceci a-t-il eu une incidence sur le climat de Vlasenica ? Je

 21   veux parler des deux groupes ethniques.

 22   R.  Dans la région de Vlasenica, à la fin du mois de mai et au début du

 23   mois de juin, la situation était telle que les tensions augmentaient sans

 24   cesse. Autrement dit, la situation dans son ensemble et les relations entre

 25   la population et la vie à Vlasenica, tout ceci était chaotique. Les

 26   réfugiés arrivaient de partout - de Kladanj, de Gorazde, d'Olovo - et il y

 27   avait de nombreux réfugiés qui sont arrivés au début du mois de juin de

 28   Gorazde lorsque de nombreuses personnes ont été blessées lors d'une


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  1   embuscade à Rogatica, et 30 personnes ont été tuées au cours de cette

  2   embuscade. Vlasenica, si je puis dire, était occupée par des réfugiés, si

  3   je puis m'exprimer ainsi. Dans ma maison, qui fait 93 mètres carrés,

  4   pendant deux ou trois nuits, il y avait 30 personnes, et 30 personnes ont

  5   dormi dans ma maison. Il s'agissait de réfugiés qui venaient de Gorazde. La

  6   situation, globalement, ainsi que les relations entre les personnes de

  7   Rogatica pourraient être décrites comme étant chaotiques. La situation

  8   était chaotique, ce qui a conduit à - comment puis-je vous le dire ? - à la

  9   colère et à un sentiment de révolte parmi un certain nombre de personnes

 10   qui se trouvaient là.

 11   Q.  Merci. Ce document, qui est le 1D13005, ceci concerne Nedjeljista, et

 12   là où il est précisé quels sont les objets qui doivent être brûlés et

 13   détruits et la population tuée. S'agit-il en fait du même Nedjeljista que

 14   nous avons vu, et est-ce que c'est effectivement ce qui a été fait ?

 15   R.  Le lendemain de l'incendie de Nedjeljista, le 26, les forces serbes ont

 16   mené à bien une contre-attaque, ils ont repoussé les attaquants. Au cours

 17   de cette opération militaire menée par la Défense territoriale serbe, l'on

 18   a trouvé la sacoche d'officier, d'un lieutenant de réserve de l'ex-JNA qui

 19   faisait partie de la Défense territoriale avec moi, parce que moi aussi

 20   j'ai été un officier de la réserve à l'époque. On se connaissait très bien.

 21   Et on a trouvé aussi son cahier dans ce sac, et moi, je vous l'ai montré.

 22   C'est quelque chose qui a été écrit bien avant l'opération, et on voit bien

 23   qu'ils avaient planifié l'attaque à l'avance, qu'ils savaient qui ils

 24   allaient attaquer, quand, qui allait faire l'objet d'un échange, et cetera.

 25   Q.  Merci.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs les

 27   Juges, cet enregistrement de Nedjeljista accompagne la pièce 1D13003.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous souhaitez verser tout cela avec


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  1   l'enregistrement vidéo que l'on vient de voir, à savoir l'entretien entre

  2   M. Prodanovic et M. Jovanovic.

  3   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Monsieur Jovanovic, est-ce que cet enregistrement est plus long que ce

  6   que l'on a vu ?

  7   R.  Oui, c'est un petit peu plus long, mais vous savez, Ljubo Prodanovic,

  8   est décédé en 1995. Il n'a pas vécu longtemps, mais ses enfants sont restés

  9   derrière, sa femme, à l'époque, aussi. Ecoutez, je ne sais pas si elle est

 10   encore en vie aujourd'hui. Je connais ses fils, et ils travaillent au jour

 11   d'aujourd'hui à Vlasenica.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur File.

 13   M. FILE : [interprétation] J'ai un certain nombre de points à soulever

 14   brièvement. Tout d'abord, il ne faut pas oublier que les Juges de la

 15   Chambre ont fait une différence dans le passé entre les preuves qui ont été

 16   présentées avec de moult détails concernant les points et qui relèvent

 17   d'une défense de tu quoque, et la Chambre ne les a pas acceptées, et je

 18   pense que là, nous sommes vraiment dans cette catégorie-là. Aussi, je pense

 19   que les vidéos où on voit que les tensions se sont accrues, et cetera, ne

 20   parlaient pas de ce que M. Robinson décrit dans son courriel, à savoir le

 21   meurtre à Susica.

 22   Et le troisième point que je souhaite soulever, c'est que le témoin

 23   vient dire quelque chose qui, justement, empêche le versement de cette

 24   vidéo, parce qu'il parle des tensions qui se sont accrues suite à l'arrivée

 25   des réfugiés, à l'embuscade, et d'autres éléments auxquels on ne fait pas

 26   référence dans la vidéo. Donc, je pense que cette vidéo n'apporte rien et

 27   qu'elle devrait être réfutée. 

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il est vrai que nous pourrions


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  1   tout à fait comprendre la déposition du témoin sans cet enregistrement, et

  2   on est dans un cas limite, mais vu que le témoin a tout de même confirmé

  3   cette déclaration de troisième personne, sur cette base-là, nous allons

  4   verser au dossier la vidéo.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D3014.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pouvez poursuivre.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Monsieur Jovanovic, ceci s'est produit au mois de juin. Au niveau du

  9   paragraphe 31, vous parlez de l'attaque sur Kljestani. Vous parlez aussi du

 10   meurtre de quatre personnes âgées et de cette arrivée en masse de réfugiés.

 11   Vous parlez du meurtre autour de Vlasenica. Je voudrais savoir comment tout

 12   cela a influé sur les autorités à Vlasenica et leur capacité de gérer cette

 13   fureur dont vous avez parlé tout à l'heure.

 14   R.  C'était très difficile. Je pense que les autorités étaient pratiquement

 15   impuissantes et ne savaient pas comment gérer cette rage des gens qui

 16   avaient été expulsés d'autres zones, surtout quand il y a eu les meurtres

 17   dans les zones habitées par les Serbes autour de Vlasenica. Ensuite, cette

 18   rage s'est accrue parmi les villageois, et surtout parmi les villageois qui

 19   vivaient autour de Vlasenica.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais demander maintenant de montrer au

 21   témoin la pièce 1D4144.

 22   [Diffusion de la cassette vidéo]

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Pourriez-vous nous dire de quoi il s'agit. Qu'est-ce qu'on voit sur cet

 25   enregistrement et à quel moment cet enregistrement a été tourné.

 26   R.  Il s'agit des conséquences de l'attaque sur le village serbe de

 27   Kljestani. Quatre personnes âgées, deux hommes et deux femmes, ont été

 28   tuées. Tous avaient plus de 60 ans. Il s'agissait de civils qui n'avaient


Page 34183

  1   aucun moyen de se défendre. Ici, on a déjà commencé les préparatifs pour

  2   les funérailles et l'on voit quelle a été la réaction de la famille, des

  3   voisins, suite au meurtre.

  4   C'est quelque chose qui s'est produit le 15 août 1992. Le même jour, une

  5   autre vidéo a été tournée. Là, à cette occasion, 14 personnes ont été tuées

  6   dans le village de Gornji Sadici. Nous allons sans doute voir cette vidéo

  7   aussi.

  8   Q.  Merci.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais demander de voir la pièce 1D41143.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. J'ai du mal à comprendre

 11   quelle est la pertinence de cette vidéo. Pourquoi avons-nous besoin de

 12   verser cela au dossier, Maître Robinson ?

 13   M. ROBINSON : [interprétation] Je laisse M. Karadzic répondre.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellences, je réponds au Procureur parce

 16   qu'il a dit que le discours que je prononçais lors des funéraires vers la

 17   fin du mois de septembre était un discours enflammé qui a conduit aux

 18   crimes, et ici j'essaie de montrer qu'il y ait pu avoir d'autres causes de

 19   la rage de la population, des auteurs de ces crimes. C'est le Procureur qui

 20   l'a demandé. Moi, je n'ai fait que répondre.

 21   Avant Rogosija et ces funérailles, il y a eu deux autres villages où

 22   des crimes ont été commis. Entre le mois de juin et le mois de septembre,

 23   plusieurs villages ont été endeuillés.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les Juges considèrent que cette vidéo

 25   n'est pas pertinente et qu'elle n'est pas nécessaire. Nous n'allons pas la

 26   verser au dossier. 

 27   Vous pouvez poursuivre.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais montrer la vidéo suivante et deux


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  1   autres, et ensuite vous décidez ce que vous souhaitez faire, Monsieur le

  2   Président. Moi, je voudrais les montrer, en tout cas.

  3   [Diffusion de la cassette vidéo]

  4   L'INTERPRÈTE : Les interprètes signalent qu'elles n'ont pas reçu la

  5   transcription.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, cela ne sert à rien

  7   si nous n'entendons pas la traduction.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais nous avons une transcription.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] On va s'arrêter là. Est-ce que vous

 10   l'avez communiquée aux interprètes ?

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pensais que tout le monde avait accès aux

 12   fichiers informatiques et je pensais qu'ils les ont ouverts eux-mêmes, que

 13   tout le monde a pu les ouvrir.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les interprètes ne peuvent pas faire

 15   cela depuis la cabine.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  En attendant, Monsieur Jovanovic, où étaient basées les forces

 18   musulmanes, celles qui ont fait des incursions dans votre village ? Ces

 19   forces venaient d'où ?

 20   R.  Il s'agissait des voisins. C'étaient des voisins à nous. La plupart

 21   étaient stationnés dans leurs villages. Cerska était tout près, et là-bas

 22   il y avait des fortes formations de l'armée musulmane.

 23   Q.  Merci.

 24   R.  Il est peut-être important de dire qu'en ce qui concerne cette vidéo,

 25   moi, personnellement, j'ai porté une plainte au pénal il y a sept, huit

 26   ans, contre les auteurs de ce massacre, et on a toujours rien fait. Je l'ai

 27   fait auprès du bureau du procureur de Bosnie-Herzégovine.

 28   Q.  Donc, cela veut dire qu'on en connaît les auteurs de ces crimes ?


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  1   R.  Moi, j'en ai découvert quelques-uns personnellement dans le cadre de

  2   mes enquêtes. J'ai eu l'occasion d'obtenir certaines informations.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] En attendant de régler cette question avec les

  4   interprètes, est-il possible de voir la pièce 1D5104. 

  5   Vous savez, les comptes rendus d'audience sont dans le système de

  6   prétoire électronique, mais je ne savais pas que les interprètes ne

  7   pouvaient pas ouvrir les fichiers dans le système de prétoire électronique.

  8   Donc, ils y sont.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Attendez. On va faire une pause

 10   maintenant et on va donner aux interprètes les transcriptions de ces

 11   enregistrements.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, oui. Très bien.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur le Procureur, votre contre-

 14   interrogatoire va durer combien de temps ?

 15   M. FILE : [interprétation] Quarante cinq minutes.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons prendre une pause d'une

 17   demi-heure, et nous allons reprendre nos travaux à 10 heures 45.

 18   --- L'audience est suspendue à 10 heures 14.

 19   --- L'audience est reprise à 10 heures 46.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Continuez, Monsieur Karadzic.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-il possible de demander de voir cette vidéo

 22   depuis le début, 1D4143, avec le compte rendu d'audience que les

 23   interprètes possèdent à présent.

 24   [Diffusion de la cassette vidéo]

 25   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 26   "Ici vous avez le cadavre carbonisé de Milivoje Mesic. Il y a eu le

 27   feu et ils hurlaient : 'Hourra, à l'avant,' et nous étions là. Quand ils

 28   ont chopé ce type, Gojko Vukovic, ils hurlaient, ils disaient : 'Super. On


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  1   avance. Voilà un Chetnik avec la barbe blanche. J'encule sa mère de

  2   Chetnik.' On est arrivé. On a vu le feu et les cendres, et ensuite nous

  3   sommes venus voir les cadavres. On a trouvé deux cadavres ici. On a trouvé

  4   cette femme qui était coupée entre les jambes, Peja Misicka, la femme de

  5   Misic Nedzo.

  6   Zoran Jovanovic : Ils ont tué combien de gens ? Ils en ont massacré combien

  7   ?

  8   Ils ont tué dix personnes, et je pense que dix personnes ont été enterrées

  9   ici. Donc avec ce qui se passe à Gornji Sadice, nous avons 11 maisons qui

 10   ont été incendiés, et dans le village voisin de Jaskovici, cinq des maisons

 11   qui ont été brûlées jusqu'aux fondations.

 12   Zoran Jovanovic : Qu'ont fait les Musulmans ? Tout ça a été fait par les

 13   Musulmans ?

 14   Oui, oui. Tous des Musulmans, des voisins. Avant on était vraiment des

 15   amis.

 16   Samirka Savic : On est sorti là. Ils ont commencé à crier : 'Super,

 17   hourra. Ils sont tombés sur le flanc droit. J'encule leurs mères de

 18   Chetnik.' Et ils ont commencé à crier tous ensemble. On ne pouvait plus

 19   distinguer ceux qui tiraient d'en haut, d'en bas, de tous les côtés. Et moi

 20   j'ai traversé le ruisseau, et à ce moment-là les maisons ont été

 21   incendiées.

 22   Zoran Jovanovic : Misic Jovanka, qui a été violée, vous pouvez voir la

 23   blessure sur sa jambe. Elle a été tuée avec une balle dans le front.

 24   Regardez à quoi ressemble son front. C'est vraiment terrible. A côté, c'est

 25   Misic Peja. Regardez comment elle a été égorgée. Elle a été égorgée à deux

 26   reprises. Elle a été violée. Elle a souffert le martyr. Regardez à quoi

 27   elle ressemble. Regardez comment elle a été coupée. Il faut regarder. Il

 28   faut regarder. C'est vraiment la honte."


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  1   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Qui a fait cette vidéo ?

  4   R.  Mon caméraman, j'étais avec lui. C'était le 16 août. Nous l'avons

  5   tournée le lendemain de ce massacre.

  6   Q.  Et dans le paragraphe 32 --

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons traiter ces vidéos au cas

  8   par cas.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Ces événements, ces attaques en chaîne sur les villages, quel impact

 11   cela a-t-il eu sur la situation à Vlasenica ?

 12   R.  Bien, ça a eu une influence et un impact sur la population et sur les

 13   gens qui vivaient à Gornji Nedzarici, un certain nombre d'entre eux avaient

 14   vécu à Vlasenica pendant un certain moment. L'impact était extrêmement

 15   négatif sur leur comportement, sur leur sentiment. Il y avait des gens que

 16   vous ne pouviez plus contrôler.

 17   Q.  Merci.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur File.

 19   M. FILE : [interprétation] Eh bien, je vais tout simplement réitérer

 20   l'objection que j'ai formulée précédemment.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous souhaitez ajouter

 22   quelque chose, Monsieur Robinson ?

 23   M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 24   [La Chambre de première instance se concerte]

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Selon les Juges de la Chambre, nous

 26   n'avons pas besoin de verser la vidéo au dossier. Ce qui est dans la vidéo

 27   a été repris, et nous n'admettrons pas cette vidéo.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Le dernier extrait vidéo, j'aimerais


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  1   vous présenter le suivant :

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Au paragraphe 32, vous avez déclaré que le 14 décembre, deux jours

  4   avant l'attaque contre ce village de Podravanje, cette attaque s'est

  5   produite ?

  6   R.  Oui. Podravanje se trouve près de la mine de Boksit. Ils avaient leur

  7   siège à Vlasenica. L'attaque a été réalisée contre Podravanje ainsi que

  8   contre la mine.

  9   Q.  Merci.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous aimerions voir le document 1D51004.

 11   [Diffusion de la cassette vidéo]

 12   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 13   "Eh bien, vous voyez les différentes façons. Nous avons cette

 14   personne ici qui a été tuée par des explosifs qui ont explosé. Cette

 15   personne ici, ses deux jambes ont été amputés, sans doute également la tête

 16   et le bras. Ici, il a été écrasé par un char ou quelque chose d'autre. Vous

 17   voyez que la poitrine est écrasée, la tête éclatée, et la tête et le corps

 18   sont complètement aplatis. Ici, vous voyez que les deux jambes ont été

 19   amputées par explosif et brûlées. Vous avez celui-ci qui est totalement

 20   carbonisé. Je pense qu'il y a eu contact avec des explosifs qui lui ont

 21   arraché les jambes et les bras, et ensuite il a été incendié et

 22   complètement carbonisé."

 23   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Avez-vous été en mesure de formuler une opinion quant au but ou le

 26   besoin de cette attaque contre les villages ?

 27   R.  A Vlasenica, dans cette municipalité, la façon dont j'ai vu les choses,

 28   il y a eu ce désir de détruire tout ce qui était serbe et dans


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  1   l'environnement -- aux environs de Vlasenica, pour que Vlasenica soit

  2   complètement encerclée par des forces musulmanes. Dans le cas de

  3   Podravanje, où la mine de Boksit a été attaquée, à cette occasion les

  4   installations de la mine ont été pillées et détruites. Tous les biens ont

  5   été enlevés.

  6   Q.  Merci. Le 26, il s'agissait de Rogosija. L'enterrement s'est tenu le 29

  7   septembre à Vlasenica. Y avez-vous pris part ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Dans votre déclaration, vous déclarez que vous ne vous souvenez pas de

 10   mon allocution. Vous a-t-on dit que mon allocution était pugnace, combative

 11   et entraînait à provocation ? Les gens ont-ils remarqué ?

 12   R.  J'ai votre allocution dans mes documents, et quand j'ai su que je

 13   devais venir en titre de témoin, je l'ai revue. Je la connais quasiment par

 14   cœur. J'en ai d'ailleurs une bande vidéo au cas où cette allocution n'est

 15   pas encore versée. J'ai la version intégrale.

 16   Q.  Désolé, je pense qu'il y a eu difficulté. Le témoin ne semble pas s'en

 17   souvenir.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur File.

 19   M. FILE : [interprétation] Cela va, Monsieur le Président.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Un autre témoin a dit qu'il ne s'en souvenait pas. Qui a enregistré

 23   cette allocution ?

 24   R.  Moi-même en partie, et l'autre partie par mon caméraman, qui n'avait

 25   pas beaucoup d'expérience. Donc, la caméra tremble. On vous entend, ainsi

 26   que donc ceux qui sont présents, et Velibor Ostojic également.

 27   Q.  Quelle a été votre impression de cette allocution, mon allocution ?

 28   R.  A l'époque, et je m'en souviens bien comme aujourd'hui d'ailleurs, vous


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  1   avez essayé d'atténuer les tensions, de calmer les sentiments de ceux qui

  2   sont réunis et des proches de ceux qui avaient été tués.

  3   Lorsque j'ai entendu, par exemple, que vous étiez accusé d'avoir

  4   provoqué certains événements qui s'étaient tenus par la suite, dans ces

  5   situations difficiles, j'ai également été ébranlé, car nombre de mes amis,

  6   de leurs fils, ont été tués. Mais si j'ai une observation à faire sur cette

  7   partie-là des chefs d'accusation, selon moi vous avez essayé d'atténuer et

  8   de calmer la douleur, leurs souffrances.

  9   Q.   Merci. Les personnes, savaient-elles comment s'étaient passés

 10   les attaques et les crimes ? Est-ce que les gens en ont parlé et comment ?

 11   R.  Oui, bien sûr, c'était bien connu.

 12   M. FILE : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Ceci

 13   devient tendancieux.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président. Je n'ai pas

 16   d'autres questions. Je demande le versement de ces deux extraits vidéo.

 17   Vous avez refusé le premier. Donc, je verserais le deuxième, le 24

 18   septembre, c'est-à-dire cinq jours avant mon allocution.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour la même raison, la Chambre

 20   n'admettra pas la pièce 1D51004.

 21   Je vous répéterai à nouveau, Monsieur Karadzic, il convient que vous

 22   décidiez de la façon dont vous allez utiliser vos plages de temps de la

 23   Défense, mais je soulignerais que ce n'est pas là une utilisation à bon

 24   escient du temps des Juges de la Chambre que de prendre du temps pour

 25   projeter des pièces qui ne sont admises et qui ne sont pas pertinentes.

 26   J'aimerais que vous consultiez Me Robinson à l'avenir.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, si nous savions ce qui

 28   faisait partie de l'acte d'accusation et ce qui en a été écarté, ce


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  1   processus serait bien plus court. Mais si nous avons en conclusion le

  2   Procureur déclarant que mon discours était une provocation et qu'il a

  3   entraîné des crimes, il faut que j'évalue tous les éléments de preuve

  4   ensemble et vous les présente.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les Juges de la Chambre ne débattent pas

  6   avec vous mais réitèrent que dans ce cas, même ici, vous n'auriez pas

  7   besoin de cette vidéo.

  8   Monsieur Jovanovic, comme vous l'avez relevé, vos éléments au principal ont

  9   été admis par écrit en lieu et place de votre déposition. Maintenant, c'est

 10   le bureau du Procureur qui va passer à votre contre-interrogatoire, il

 11   s'agit de M. Jason File.

 12   M. FILE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour à tous.

 13   Contre-interrogatoire par M. File :

 14   Q.  [interprétation] Monsieur Jovanovic, j'ai remarqué dans votre

 15   déclaration préalable que vous avez omis de déclarer les postes que vous

 16   avez tenus au cours du conflit de la VRS de 1992 à 1995. Est-il vrai que

 17   vous étiez capitaine réserviste dans le Corps de la Drina ?

 18   R.  Oui, oui, oui.

 19   Q.  Et lorsque le commandant du Corps de la Drina, Zivanovic, a mis en

 20   place le centre de presse du Corps de la Drina le 19 novembre 1992, il vous

 21   a nommé comme l'un des premiers membres dudit centre; est-ce exact ?

 22   R.  Oui. J'étais le chef du service d'information du Corps de la Drina.

 23   Q.  Le général Zivanovic vous a également nommé au poste de correspondant

 24   de guerre dans le département des affaires morales et religieuses du Corps

 25   de la Drina; est-ce exact ?

 26   R.  Non, non.

 27   M. FILE : [aucune interprétation]

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. Il ne m'a pas nommé.


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que le témoin pourrait avoir la

  2   possibilité de terminer sa réponse plutôt que d'être obligé à regarder le

  3   document comme s'il n'avait rien dit.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais chef du service d'information du Corps

  5   de la Drina. La tâche principale consistait à informer le public des

  6   événements au sein du Corps de la Drina en termes d'opérations de guerre ou

  7   de la vie civile lorsqu'il y avait une accalmie.

  8   M. FILE : [interprétation]

  9   Q.  Très bien. J'aimerais raviver votre souvenir en regardant un document,

 10   il s'agit du document 24637 de la liste 65 ter. Nous n'avons pas de

 11   traduction en anglais, malheureusement. Pourriez-vous simplement, à partir

 12   du numéro 1, lire, là où se trouve votre nom.

 13   R.  "Zoran Jovanovic, nom du père Tomislav, réserviste de l'infanterie au

 14   poste de capitaine, spécialité 31102, numéro de registre JTZ, 1951." C'est

 15   l'année. "Nommé à titre de correspondant de guerre au département du moral,

 16   des affaires juridiques et religieuses, spécialité militaire 31001,

 17   capitaine de première classe - major."

 18   Q.  Merci.

 19   M. FILE : [interprétation] Monsieur le Président, nous aimerions verser ce

 20   document.

 21   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection.

 22   M. FILE : [interprétation] Et il nous faut donner une cote.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je ajouter quelque chose ?

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est exactement ce que j'allais dire.

 25   Vous n'avez pas posé de question en la matière.

 26   Oui, Monsieur Jovanovic.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas averti de ce document. Il est

 28   possible que ceci ait été un projet. J'étais chef nommé par intérim de ce


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  1   service, ce qui veut dire que je n'ai pas été nommé à cette position

  2   puisque j'étais réserviste. Je n'étais pas à ce poste de façon permanente

  3   parce que je n'étais pas officier. Il est possible que ce document ait été

  4   rédigé comme si j'étais correspondant de guerre. D'ailleurs, j'en ai rempli

  5   les fonctions pour la bonne raison que j'ai coopéré avec un certain nombre

  6   de différentes publications.

  7   M. FILE : [interprétation]

  8   Q.  Donc vous avez exercé les fonctions qui sont décrites ici à titre de

  9   correspondant de guerre.

 10   R.  Un reporter de guerre serait une meilleure explication.

 11   M. FILE : [interprétation] Nous souhaitons verser ce document.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et nous le recevons.

 13   M. LE GREFFIER : [interprétation] Et reçoit la cote P6149 MFI, Monsieur le

 14   Président.

 15   M. FILE : [interprétation]

 16   Q.  Monsieur Jovanovic, l'une des fonctions du centre de presse du Corps de

 17   la Drina était de s'assurer de l'utilisation efficace de la propagande;

 18   est-ce exact ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Vous souvenez-vous avoir envoyé des invitations aux séminaires dans le

 21   domaine d'opération du Corps de la Drina qui visaient les personnes qui

 22   étaient chargées de la soi-disant information et propagande ?

 23   R.  Oui, à deux occasions.

 24   Q.  J'aimerais attirer votre attention sur la destruction de la mosquée

 25   Hajrija à Vlasenica dont vous avez été témoin, pour la bonne raison que

 26   vous l'avez filmée; est-ce exact ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  La mosquée de Hajrija a été détruite par le génie militaire de la VRS ?


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  1   R.  Je ne sais pas de qui étaient ces forces. La plupart de ceux qui y ont

  2   pris part ne sont plus des nôtres. Je ne sais pas de qui ils étaient les

  3   hommes. C'était le 19. Je me souviens de la date, le 19 août 1992. Le Corps

  4   de la Drina n'avait toujours pas été créé et il y avait différentes

  5   formations paramilitaires qui étaient sur place. Je ne saurais affirmer

  6   qu'il s'agissait des forces de la VRS.

  7   Q.  Très bien. Je vais vous lire la déposition du Témoin ST-19 [comme

  8   interprété] de l'affaire Stanisic/Zupljanin du 11 mars 2010. La question

  9   était :

 10   "Etiez-vous averti de la destruction de mosquées à Vlasenica à l'été 1992

 11   ?"

 12   Réponse :

 13   "Je savais que ceci se produirait deux ou trois heures auparavant car

 14   cela allait être réalisé par les forces de l'armée. Et donc, nous avons

 15   reçu préavis deux ou trois heures avant pour nous assurer que les

 16   populations qui vivaient dans le voisinage seraient évacuées. Dès que nous

 17   en avons été avertis, j'ai averti les agents de police de s'y rendre,

 18   d'informer les populations dans les environs de quitter les environs

 19   puisque nous ne savions pas quand est-ce que l'explosion se produirait.

 20   "Question : Vous souvenez-vous s'il s'agissait du génie de la VRS ou de la

 21   JNA à cette étape ?

 22   "Réponse : L'armée de la Republika Srpska. Et la JNA n'y étaient plus

 23   officiellement dès août."

 24   Ceci ravive-t-il votre souvenir quant à l'identité des personnes qui

 25   étaient chargées de la destruction de la mosquée ?

 26   R.  Je vous ai dit ce qu'était la situation à Vlasenica. Lorsque j'ai

 27   appris que la mosquée de Hajrija allait être détruite, je me suis enquis,

 28   puisque je voulais savoir pourquoi, qui et comment, quels sont les


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  1   explosifs. On m'a dit : "Ce n'est pas possible. Vous allez détruire la

  2   moitié de la ville." Et on m'a dit de m'occuper de mes propres oignons. En

  3   qualité d'officier de la réserve, j'étais en situation de mettre feu à 100

  4   grammes de TNT, mais le volume dont ils voulaient se servir allait souffler

  5   la moitié de la ville. Il n'en reste pas moins que je pense que ceux qui

  6   ont ordonné la chose voulaient que la ville soit détruite.

  7   Ma caméra était sur un trépied, et en raison de l'explosion, c'était

  8   en octobre --

  9   Q.  Vous avez obtenu un film de deux Musulmans qui se trouvaient devant la

 10   mosquée un jour avant qu'elle n'ait été détruite disant qu'elle n'avait pas

 11   été profanée; est-ce exact ?

 12   R.  Pour autant que je le sache, elle ne l'avait pas été.

 13   Q.  Bien, vous êtes allé à la télévision de la Republika Srpska vers la mi-

 14   septembre pour montrer un clip vidéo de deux Musulmans qui étaient en face

 15   de la mosquée le jour d'avant sa destruction, et vous avez dit que :

 16   "C'était la meilleure preuve pour ce qui est de ceux qui avaient

 17   affirmé que les Serbes étaient des barbares et des destructeurs de lieux

 18   saints, et que tout ceci était faux."

 19   C'est bien ce que vous avez dit ?

 20   R.  Je ne connais pas ce clip vidéo. Est-ce que vous l'avez ?

 21   Q.  Moi, je vous demanderais de répondre à la question.

 22   R.  Mais vous êtes en train de parler d'une chose que j'ignore, que je me

 23   serais entretenu avec quelqu'un et que j'aurais diffusé cela. Il se peut

 24   qu'il y ait eu des échanges. Mais que dans ce contexte-là j'aie montré ce

 25   clip, non, surtout pas après la destruction de la mosquée.

 26   M. FILE : [interprétation] Je voudrais que nous nous penchions sur le

 27   document 65 ter numéro 24633.

 28   Vous allez voir ici qu'il s'agit d'un extrait d'un recueil de communiqués


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  1   et de débats d'une table ronde portant sur les guerres en Yougoslavie de

  2   1991 à 1999. C'est une table ronde qui s'est tenue à Belgrade du 7 au 9

  3   novembre 2001.

  4   Et si vous vous penchez sur la page 2 en version anglaise et à la page 5 en

  5   version B/C/S.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais qui a organisé cette table ronde ? On ne

  7   le dit pas.

  8   M. FILE : [interprétation] Monsieur le Président, je vais parcourir le

  9   document maintenant --

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais je crois que la question qui s'est

 11   posée était celle de l'origine de ce document.

 12   M. FILE : [interprétation] Ce document est un recueil de documents et -- à

 13   l'origine, ça a été versé au dossier en tant que pièce à conviction de la

 14   Défense, DH1600, dans l'affaire Hadzihasanovic. Et je dirais que je me

 15   propose de montrer un extrait d'un recueil portant la référence ERN Y005-

 16   2655 à 2707. C'est versé au dossier dans l'affaire Hadzihasanovic.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais c'était quoi le sujet de la

 18   conférence ?

 19   M. FILE : [interprétation] Le titre de la conférence, Monsieur le

 20   Président, était celui de "Guerres en Yougoslavie de 1991 à 1999."

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Veuillez continuer.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je vais poser la question à présent qui

 23   serait celle de savoir pourquoi interroge-t-on alors que la mosquée n'est

 24   pas citée dans l'acte d'accusation ?

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ça a à voir avec la crédibilité de ce

 26   témoin.

 27   Veuillez continuer.

 28   M. FILE : [interprétation] Vous pouvez voir que ce chapitre que nous avons


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  1   sous les yeux est intitulé "Destruction des édifices du culte islamique

  2   pendant l'agression sur la Bosnie-Herzégovine entre 1991 et 1995." Et

  3   j'attire l'attention des Juges de la Chambre sur la page 4 de la version

  4   anglaise, à savoir la page 6 de la version en B/C/S. S'agissant de la

  5   version en B/C/S, nous allons nous pencher sur la colonne de gauche, avant-

  6   dernier paragraphe.

  7   Q.  Monsieur Jovanovic, ici, dans ce paragraphe, il est dit :

  8   "Ceux qui ont planifié la destruction de mosquées importantes, avant

  9   leur destruction, ont filmé des récits au sujet de ces bâtisses en montrant

 10   des Musulmans devant et pour indiquer que ça n'avait pas été profané. Ça a

 11   été gardé pour être diffusé au bon moment. Et ça a été le cas de cette

 12   mosquée Hajrija à Vlasenica. A la mi-septembre 1992, un récit a été diffusé

 13   au sujet de cette mosquée sur la télévision serbe de Bosnie en montrant

 14   deux Bosniens qui sont devant cette mosquée pour indiquer que personne ne

 15   l'avait profanée. Et le journaliste Zoran Jovanovic nous a montré que

 16   c'était la meilleure des preuves que de montrer que c'étaient des fausses

 17   accusations de la part de ceux qui avaient voulu montrer les Serbes comme

 18   étant des barbares et des destructeurs de sites sacrés. La vérité est tout

 19   à fait autre, parce que l'enregistrement ou le filmage avait été fait un

 20   jour avant que la mosquée ne soit détruite et la diffusion s'est faite

 21   quelque 20 jours après sa destruction."

 22   Alors, Monsieur Jovanovic, est-ce que ceci n'est pas véritablement un

 23   exemple du type de propagande que vous avez essayé de montrer pour donner

 24   des leçons aux autres prétendus journalistes pour ce qui est de

 25   l'utilisation du Corps de la Drina ?

 26   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Moi, je crois que nous devons d'abord savoir

 28   qui a dit ceci.


Page 34199

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout d'abord, tout ceci est tout à fait

  3   faux. Ceci est absolument faux. Donnez-moi une preuve. Donnez-moi

  4   l'enregistrement. Est-ce que le clip existe ? Moi, je sais tout ce que j'ai

  5   filmé pendant ces quatre années. Je l'ai encore de nos jours. Ce n'est

  6   absolument pas vrai. Absolument pas. Ça n'a pas pu se produire.

  7   Et je vais vous donner un exemple de propagande, parce que j'ai vu

  8   des journalistes qui sont sortis de l'œuf hier et qui sont issus de

  9   certains services d'information de certaines brigades. Je leur ai raconté

 10   ceci : Pour que vous compreniez bien ce que c'est que la propagande en

 11   temps de guerre et ce que c'est que les informations en temps de guerre,

 12   j'ai cité Churchill - je l'ai cité, mais je vais paraphraser maintenant -

 13   Churchill a déclaré que la vérité en temps de guerre est si précieuse qu'il

 14   faut qu'il y ait une garde de corps rapprochée composée de mensonges. Et

 15   certains des journalistes se comportent de façon à rédiger des rapports

 16   comme si tout était mensonge. Au contraire.

 17   M. FILE : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur Jovanovic, je crois que maintenant nous sommes en train de

 19   nous éloigner de la substance de la question.

 20   M. FILE : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je demander le

 21   versement au dossier de ce document.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Un instant. Enlevez de

 23   l'écran la version en B/C/S et montrez-nous la première page en anglais.

 24   Il est dit ici qu'il s'agit d'un recueil de documents et de débats qui se

 25   sont tenus à une table ronde. Ensuite, on parle de page 369, page 370.

 26   Puis, page suivante. Ça se poursuit avec 371 et 372. Page suivante, s'il

 27   vous plaît. Et ici, on voit que le format a changé, que les lettres ne sont

 28   plus les mêmes. Je ne comprends pas de quoi il s'agit, Monsieur File.


Page 34200

  1   M. FILE : [interprétation] Je vais vous l'expliquer très volontiers.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  3   M. FILE : [interprétation] La traduction existante que nous avions pour ce

  4   document n'avait pas englobé les trois derniers paragraphes de la page 370.

  5   Aussi, avons-nous demandé à ce que ces paragraphes soient traduits, ce qui

  6   fait que j'ai fourni la traduction existante pour une question de contexte.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais est-ce que vous pouvez répondre à

  8   la question posée par l'accusé. Est-ce que c'est un papier, c'est-à-dire

  9   une étude de quelqu'un ou un extrait de discours de quelqu'un à la

 10   conférence ?

 11   M. FILE : [interprétation] Nous pensons que ce papier, ce document, a été

 12   présenté en tant qu'étude à la conférence.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais qui a dit cela, qui a écrit

 14   cela ?

 15   M. FILE : [interprétation] Le nom de l'auteur est à --

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Montrez-nous la page.

 17   M. FILE : [interprétation] La page B/C/S -- numéro 5. C'est Muharem Omerdic

 18   qui est cité du côté droit.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais ça, c'est la page 369, et le nom de

 20   l'auteur n'a pas été traduit pour ce qui est de la version anglaise.

 21   M. FILE : [interprétation] Je pense --

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ai-je bien compris ?

 23   M. FILE : [interprétation] Je ne pense pas qu'il y ait un texte en B/C/S

 24   autour de l'auteur pour qu'il y ait eu une traduction. Il s'agit juste d'un

 25   nom.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais dans la traduction, le nom de

 27   l'auteur a été omis.

 28   M. FILE : [interprétation] Je crois que c'est exact, et je crois que la


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  1   traduction commence un peu plus bas à la page qui porte le numéro 369.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, ça a commencé à partir du segment

  3   qui a été surligné.

  4   M. FILE : [interprétation] C'est exact.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je comprends. Maître Robinson.

  6   M. ROBINSON : [interprétation] Je ne pense pas avoir en dire long, Monsieur

  7   le Président. Pour ce qui est des questions de fiabilité, c'est une

  8   déclaration d'une partie tierce datée de 2001 que le témoin n'a confirmé en

  9   rien. Et conformément à la pratique qui est la vôtre, ce ne serait pas

 10   admissible, ne serait pas recevable, quand même bien il s'agirait d'un

 11   document dénué de fiabilité que celui-ci semble l'être.

 12   M. FILE : [interprétation] Puis-je être entendu, Monsieur le Président ?

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais est-ce que ceci ne serait pas

 14   quelque chose de lié à la crédibilité, Monsieur Robinson ?

 15   M. ROBINSON : [interprétation] C'est un document pertinent, mais c'est une

 16   déclaration d'un tiers, comme vous l'avez déjà fait de par le passé en les

 17   excluant quand il s'agissait du document de ce type. Ça été montré au

 18   témoin. Il a dit ce qu'il en pensait. Il n'a confirmé aucune partie de ce

 19   document, donc cela ne devrait pas être recevable au dossier.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur File.

 21   M. FILE : [interprétation] Monsieur le Président --

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je dire quelque chose ?

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. C'est une question technique

 24   qui est maintenant une affaire de juristes.

 25   Monsieur File.

 26   M. FILE : [interprétation] Je ne pense pas que ce soit une déclaration.

 27   C'est un enregistrement ou un extrait d'une conférence, et je voudrais

 28   faire référence à l'article 94 pour ce qui est d'un document qui a été


Page 34202

  1   versé au dossier dans un procès précédent. Je crois que ceci satisfait à la

  2   question d'authenticité. Or, comme ceci est en corrélation directe avec le

  3   témoignage du témoin et de ce qu'il est venu dire dans ce procès, je crois

  4   que ceci a plus à voir avec le poids à lui attribuer plutôt qu'à la

  5   recevabilité de ce document.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que pour ce qui est du constat

  7   judiciaire pour ce qui est d'une authenticité, nous avons besoin de plus

  8   d'exigences qui devraient être satisfaites, mais je me propose de consulter

  9   mes collègues.

 10   [La Chambre de première instance se concerte]

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Conformément à la pratique qui est celle

 12   de la Chambre, nous n'allons pas verser ce document au dossier en ce

 13   moment-ci, Monsieur File.

 14   M. FILE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 15   Je demande maintenant à ce que l'on se penche sur le paragraphe 4. 

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux ajouter quelque chose ?

 17   M. FILE : [aucune interprétation]

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, Monsieur Jovanovic. Nous n'avons

 19   pas versé ce document au dossier. Si nécessaire, M. Karadzic va l'aborder

 20   ultérieurement. Continuons à présent.

 21   M. FILE : [interprétation]

 22   Q.  Je voudrais attirer votre attention sur le paragraphe 4 de la

 23   déclaration que vous avez faite, où vous indiquez que :

 24   "La structure ethnique de Vlasenica avant la guerre était de 50 %

 25   pour le Serbes et 50 % pour les Musulmans, avec quelques Yougoslaves, Rom,

 26   Croates et autres minorités ethniques. D'après le recensement de 1991, la

 27   municipalité de Vlasenica avait compté quelque 33 000 habitants".

 28   Est-ce que vous maintenez ce que vous avez dit ?


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  1   R.  C'est ce qui a été constaté par le dernier recensement. Il y avait un

  2   peu plus de Musulmans, mais il y en avait -- enfin, personne n'avait

  3   dépassé les 50 % du total de la population.

  4   M. FILE : [interprétation] Est-ce qu'on peut se pencher sur la pièce 65 ter

  5   242L, je vous prie.

  6   Q.  Vous allez voir qu'il s'agit là d'une copie du recensement de 1991 que

  7   vous citez dans votre déclaration.

  8   M. FILE : [interprétation] Et j'aimerais que l'on nous affiche à présent la

  9   page 2 du prétoire électronique.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux poser une question au sujet

 11   de ce document ? Une fois de plus, on ne se sert uniquement que des

 12   documents croates qui parlent de parties au conflit. Ça, c'est un document

 13   croate. La Bosnie a ses propres documents pour ce qui est de son propre

 14   recensement, et la Croatie était une partie belligérante au conflit de la

 15   Bosnie.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je trouve que cette intervention est

 17   inadéquate, Monsieur Karadzic. Elle n'est pas appropriée. Je crois que vous

 18   pouvez évoquer la question à l'occasion de vos arguments plus tard, où vous

 19   pouvez revenir sur le sujet pour montrer des statistiques bosniaques, si

 20   besoin.

 21   Continuons, Monsieur File.

 22   M. FILE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 23   Q.  Sur cette page, vous allez voir les entrées relatives à Vlasenica. Dans

 24   la première colonne, vous avez un total de la population en 1991, à savoir

 25   33 942. Dans votre déclaration, je crois que vous étiez très proche de ce

 26   chiffre. Et ensuite, dans les colonnes plus loin, on voit la population

 27   répartie par Croates, Musulmans, Serbes, Yougoslaves, et autres, et les

 28   pourcentages afférents. Alors, si vous vous penchez sur le nombre des


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  1   Musulmans --

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Eliminez la version anglaise

  3   de l'écran. Continuez maintenant.

  4   M. FILE : [interprétation] Oui, c'est mieux.

  5   Q.  Alors, si on se penche sur la catégorie des Musulmans et des Serbes, on

  6   verra qu'il y a eu 55 % de Musulmans et 42 % de Serbes, pour ce qui est de

  7   la population totale. Le voyez-vous ?

  8   R.  Oui, je le vois.

  9   Q.  Vous reconnaissez donc que ce que vous avez dit dans votre déclaration,

 10   et que vous avez réitéré à l'occasion de votre témoignage d'aujourd'hui,

 11   pour ce qui est de 50/50 pour les uns et les autres, c'est une exagération,

 12   puisque les Musulmans ont une majorité absolue avec 55 %, alors que les

 13   Serbes ne constituaient que 42 % de la population.

 14   R.  Moi, en ma qualité de journaliste, j'ai toujours disposé de données

 15   pertinentes. Le recensement de 1991 que vous montrez, je l'avais, ce

 16   renseignement. Je ne savais pas que vous alliez me poser la question.

 17   J'aurais pu vous apporter le même document. Mais ça n'a jamais été confirmé

 18   de façon officielle par quelle que instance compétente que ce soit de la

 19   Bosnie-Herzégovine. Je pense que le recensement de 1991 a été fait à la va-

 20   vite et qu'il y a eu là différente --

 21   Q.  Excusez-moi de vous interrompre, mais vous avez cité le recensement de

 22   1991 dans votre propre déclaration pour étayer des chiffres relatifs au

 23   nombre d'habitants; c'est bien cela ?

 24   R.  Oui. Je me suis référé au recensement de 1991, mais je n'ai jamais

 25   reconnu ce recensement comme étant bon dans mes activités de journaliste.

 26   J'ai utilisé les données de 1981, et je crois qu'il serait une chose très

 27   intéressante que de procéder à des comparaisons de différentes données.

 28   Q.  A titre d'éclaircissement, quand vous dites dans votre déclaration que


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  1   la structure rythmique de Vlasenica avant la guerre était de 50 %/50 % pour

  2   ce qui est des Serbes et des Musulmans, est-ce que vous entendez là que

  3   vous aviez parlé de la structure de Vlasenica en 1971 où le ratio était de

  4   50 %/50 % ? C'est ce que vous disiez ?

  5   R.  Dans ma tête, c'était toujours 50 %/50 %, exception faite de la période

  6   avant la Deuxième Guerre mondiale, où il y ait eu beaucoup plus de Serbes,

  7   mais qui ont été très nombreux à périr pendant la guerre.

  8   Q.  Alors, je souhaite vous poser une question à propos des paragraphes 23

  9   et 24 de votre déclaration où vous parlez d'un débat qui faisait rage au

 10   sein de l'assemblée de Vlasenica sur la question du partage du territoire

 11   dans la municipalité de Milici, la partie serbe de Vlasenica et la partie

 12   musulmane de Vlasenica. Vous poursuivez en disant que les Musulmans et les

 13   Serbes se déplaçaient d'une partie de la municipalité à l'autre en fonction

 14   de l'endroit où la communauté ethnique était majoritaire. Vous avez dit que

 15   les Musulmans se trouvaient dans la partie nord en direction de Cerska,

 16   alors que les Serbes se trouvaient dans la partie sud.

 17   En 1991, les Musulmans étaient également majoritaires dans la ville de

 18   Vlasenica ainsi que dans de nombreux villages voisins; n'est-ce pas ?

 19   R.  A Vlasenica même, oui. Il y avait davantage de Musulmans. Je ne sais

 20   pas exactement combien, mais vous trouverez ceci dans les données

 21   statistiques de 1991. Mais je ne suis pas tout à fait certain. Je ne sais

 22   pas si c'est vrai, car cette campagne qui a été menée en 1991, les villages

 23   voisins, autour de Vlasenica, sont majoritairement serbes, autour de la

 24   ville. Je peux vous énumérer les noms de ces villages.

 25   Q.  Moi, je parle de villages comme Drum et Zaklopaca. Ces villages étaient

 26   majoritairement musulmans, n'est-ce pas ?

 27   R.  Zaklopaca même, le centre de la ville est musulman. Autour de Zaklopaca

 28   se trouvent des villages serbes, et c'est la même chose pour Drum.


Page 34207

  1   Q.  Donc, je souhaite vous poser une question à propos du paragraphe 29 de

  2   votre déclaration, où vous dites que :

  3   "Les autorités municipales ont créé un centre de rassemblement pour les

  4   Musulmans dans des installations de la TO dans la banlieue de Susica afin

  5   de les protéger des attaques des Serbes qui avaient été chassés et qui

  6   venaient de différentes régions. Je me suis rendu une fois dans cette

  7   installation pour aller chercher des cigarettes et d'autres

  8   approvisionnements de mes amis, et je leur ai demandé comment cela se

  9   passait pour eux, et ils ont répliqué que ce n'était pas mal, parce que

 10   personne ne les dérangeait."

 11   Tout d'abord, vous êtes-vous rendu personnellement au camp de Susica ?

 12   R.  Oui. Cette fois-là uniquement, pour apporter de la nourriture et des

 13   cigarettes.

 14   Q.  Et alors que vous étiez là, vous avez rencontré Dragan Nikolic, n'est-

 15   ce pas, qui dirigeait le camp ?

 16   R.  Non. Non. Je n'ai pas rencontré Dragan Nikolic cette fois-là. J'ai

 17   rencontré Veljko Basic, qui était un officier de police à la retraite, et

 18   je lui ai demandé de me permettre de remettre ce que j'avais pris à ces

 19   personnes-là.

 20   Q.  Et vous saviez qui était Dragan Nikolic, n'est-ce pas ?

 21   R.  Je connaissais Dragan Nikolic, mais je ne l'ai pas vu cette fois-là, la

 22   seule fois où je me suis rendu au camp. Et après cela, je n'ai pas eu le

 23   temps d'y aller. J'avais d'autres travaux à accomplir, d'autres missions,

 24   et je ne l'ai pas vu cette fois-là.

 25   Q.  Vous savez, n'est-ce pas, que Nikolic a plaidé coupable devant ce

 26   Tribunal pour des crimes qui ont été commis à Susica ?

 27   R.  Je le sais.

 28   Q.  Et savez-vous que le jugement qui a été rendu en l'espèce le 18


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  1   décembre 2003 a conclu que le hangar où les détenus étaient hébergés était

  2   bondé de personnes et que les conditions de vie étaient déplorables. Des

  3   familles entières s'y trouvaient, notamment des femmes, des personnes âgées

  4   et des enfants qui avaient 8 ans, parmi les plus jeunes. De nombreuses

  5   femmes détenues ont été soumises à des sévices sexuels, notamment le viol,

  6   et Nikolic a admis avoir participé personnellement au meurtre de neuf

  7   personnes, de torture, et d'avoir facilité les sévices sexuels et le viol

  8   de femmes en permettant aux gardes, soldats et autres hommes d'avoir accès

  9   à ces femmes de façon répétée et d'avoir encouragé ces sévices sexuels.

 10   Donc, voici ma question : lorsque vous vous êtes entretenu avec ces amis

 11   que vous décrivez, vous dites qu'ils vous ont dit que ce n'était pas si mal

 12   parce que personne ne les dérangeait, vous parlez de qui, exactement ?

 13   R.  Il y en avait un qui était le propriétaire de la blanchisserie de

 14   Vlasenica. Je vais essayer de me souvenir de son nom. Il a confirmé ce que

 15   j'ai cité un peu plus tôt. J'essaie de me souvenir de son nom. Je ne

 16   m'attendais pas à cette question. Très peu de temps après cela, il a été

 17   transféré à Batkovic, dans un groupe plus important.

 18   Ce que vous venez de me dire, c'est quelque chose dont je n'ai jamais

 19   entendu parler à cette occasion-là et plus tard non plus de la bouche de

 20   témoins pertinents. Même que Dragan Nikolic, que j'ai vu plusieurs fois par

 21   la suite, n'a jamais parlé de cela.

 22   Q.  Très bien. Soyons plus précis. Lorsque vous étiez à Susica, avez-

 23   vous jamais assisté au viol d'une femme et vous étiez là sans rien faire ?

 24   R.  Non, jamais.

 25   M. FILE : [interprétation] Je ne souhaite pas que ceci soit diffusé à

 26   l'extérieur. Pouvons-nous avoir le numéro 65 ter 24643, s'il vous plaît.

 27   Nous n'allons pas diffuser cela en raison de l'identité d'une victime de

 28   viol.


Page 34209

  1   Q.  Il s'agit ici d'une lettre d'un médecin pour un patient pour que ce

  2   dernier puisse aller consulter un spécialiste. Ceci est daté du 17

  3   septembre 1993. Nous allons regarder les passages pertinents de ce

  4   document.

  5   "A la mi-avril 1992, ma fille était avec son père près du camp de Susica.

  6   J'étais à la maison. Six Chetniks sont arrivés. Ils étaient armés. Ils

  7   m'ont donné l'ordre de courir en direction du camp. C'est mon voisin,

  8   Radenko Krstic, qui m'a donné cet ordre. Ils m'ont fait venir dans le camp.

  9   Ils m'ont emmenée dans la maison des gardiens où ils enregistraient des

 10   données personnelles et ils prenaient les effets personnels de ces

 11   personnes. Dragan Nikolic et Zoran Jovanovic étaient là. Ils ont ordonné à

 12   Pero Djuric d'Elastik de me fouiller. Ils m'ont placé dans le hall

 13   d'entrée. On m'a contrainte à m'asseoir sur du béton. Dans la soirée,

 14   Dragan Nikolic est venu et il a pointé un fusil automatique sur moi et m'a

 15   donné l'ordre de me lever. Il m'a dirigée vers la cour du camp et a exigé

 16   que je lui dise qui était mon frère. J'ai dit à Pero Djuric qu'il devait me

 17   tuer. Ils m'ont frappée, ils m'ont maltraitée et ils m'ont dit qu'ils

 18   avaient tué mon mari. Ils m'ont frappée très fort. Ils ont utilisé un

 19   couteau et ils ont gravé des lettres sur mon corps.

 20   "Le deuxième soir, Pero Djuric et Dragan Nikolic m'ont fait sortir

 21   une nouvelle fois. Ils m'ont emmenée à la maison des gardiens. Il y avait

 22   là un lit et une chaise. Ils m'ont interrogée une nouvelle fois. Ensuite,

 23   Dragan Nikolic est sorti et Pero Nikolic m'a dit : 'Tu es maintenant entre

 24   mes mains, fille de pute.' Il m'a violée à cet endroit-là devant Zoran

 25   Jovanovic. Les autres étaient là, assis tout autour, et regardaient ce qui

 26   se passait et ils riaient."

 27   Je vais m'arrêter là.

 28   Vous souvenez-vous de cela ?


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  1   R.  Ceci est insensé. Il s'agit d'un mensonge tout à fait flagrant avec ce

  2   Dragan Nikolic et Pero Nikolic, des gens que je connais. Je n'ai jamais

  3   passé même cinq minutes avec eux pendant la guerre à aucun endroit, encore

  4   moins à Susica. Ceci est invraisemblable. J'ai lu sur des sites internet

  5   musulmans toutes sortes de contrevérités flagrantes qui me prenaient pour

  6   cible, mais je suis franchement choqué que quiconque ait pu rédiger cela.

  7   Ceci n'a rien à voir avec la vérité, que j'aie observé la scène, c'est

  8   invraisemblable. D'autant que je n'ai même pas passé cinq minutes pendant

  9   la guerre avec Dragan Nikolic et les autres personnes citées ici. J'ai

 10   peut-être passé deux minutes avec Dragan Nikolic dans une zone de guerre

 11   quelque part.

 12   Ceci est invraisemblable, Monsieur le Procureur. D'autant que je ne connais

 13   pas cette femme.

 14   M. FILE : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le versement

 15   au dossier de ce document.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je n'ai aucune idée. Je ne sais pas qui

 17   est ce Zoran Jovanovic qui est cité dans ce document. S'agit-il du témoin ?

 18   M. FILE : [interprétation] Le témoin a en tout cas dit dans sa déposition

 19   qu'il était dans le camp.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson.

 21   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Encore une fois,

 22   il s'agit d'une déclaration d'un tiers. La date est celle du 17 septembre

 23   1993, à la deuxième ligne sous le nom, et donc il ne s'agit pas d'une

 24   déclaration d'époque. Compte tenu des pratiques adoptées, ceci n'a pas été

 25   confirmé par le témoin, et donc, conformément à notre pratique, ceci ne

 26   peut pas être versé au dossier.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous souhaitez ajouter

 28   quelque chose, Monsieur File ?


Page 34211

  1   M. FILE : [interprétation] Non, je vous remercie. Je vais poursuivre, tout

  2   simplement.

  3   Q.  J'ai quelques questions à vous poser au sujet de --

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Combien de temps vous faut-il encore ?

  5   Je crois que le temps imparti est quasiment écoulé.

  6   M. FILE : [interprétation] J'ai encore quatre ou cinq questions, Monsieur

  7   le Président.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.

  9   M. FILE : [interprétation]

 10   Q.  Après 1995, lorsque vous dirigiez Radio Vlasenica après le conflit,

 11   avez-vous jamais annoncé à la radio que Ratko Mladic était un grand homme

 12   et dont le rôle en Bosnie-Herzégovine consistait à empêcher que l'Islam ne

 13   se répande dans le reste de l'Europe ?

 14   R.  Je le pense encore aujourd'hui, si c'est la question que vous me posez.

 15   A savoir si je l'ai dit ou non, à savoir s'il y a une émission à la radio

 16   qui abordait la question, à savoir si des journalistes ont préparé une

 17   émission, un reportage, je ne m'en souviens pas, mais c'est possible.

 18   Q.  Vous êtes le co-auteur d'un ouvrage publié en 2010 - la deuxième

 19   édition a été publiée en 2012 - intitulé "Srebrenica, ce qui s'est

 20   véritablement passé". Est-ce exact ?

 21   R.  "Srebrenica, comment les choses se sont véritablement passées." Tel est

 22   le titre de l'ouvrage, pas "ce qui s'est passé", mais "comment les choses

 23   se sont véritablement passées".

 24   Q.  Maintenez-vous tout ce qui figure dans cet ouvrage ?

 25   R.  Certainement, et je vais écrire d'autres livres. Je combats pour la

 26   vérité. Je ne veux pas dissimuler un quelconque crime serbe, mais je ne

 27   souhaite pas que les crimes commis contre les Serbes soient dissimulés. Je

 28   regrette que votre bureau du Procureur ait repris tous ces documents, mais


Page 34212

  1   que vous n'ayez jamais diligenté des enquêtes.

  2   Q.  Maintenez-vous là ce que vous dites dans l'avant-propos de l'ouvrage ?

  3   Je cite maintenant Peter Priskil. Je cite :

  4   "Il s'agit d'un mensonge, de la propagande qui ne peut pas être

  5   considérée comme la vérité, même si on le dit fort et on le répète de façon

  6   fréquente."

  7   Et il poursuit en disant que :

  8   "Il s'agit d'une propagande concernant Srebrenica et un faux

  9   Auschwitz de l'OTAN."

 10   Etes-vous d'accord avec cela ?

 11   R.  Ceci a été écrit par Peter Priskil, un Allemand de Freiburg, en se

 12   fondant sur des faits qu'il était en mesure de se procurer. Il s'agit d'une

 13   personne qui tentait de prouver qu'il s'agissait d'un mensonge éhonté

 14   appelé Srebrenica, et je ne dis pas qu'il n'y a pas eu de crimes commis par

 15   les Serbes, mais non pas à la manière dont ceci a été dépeint. Et vous

 16   aurez bientôt l'occasion de découvrir la vérité.

 17   Q.  Je crains que telle n'ait pas été la question que je vous ai posée. Ma

 18   question était : est-ce que vous maintenez cette déclaration ?

 19   R.  Qu'il s'agisse d'un mensonge éhonté, oui, mais le commentaire

 20   correspond à sa vision des choses qui est quelque chose qui est ma vision

 21   également, mais je ne dirais pas qu'il s'agit de la vérité absolue.

 22   Q.  Est-ce que vous diriez que la propagande de Srebrenica correspond au

 23   faux Auschwitz de l'OTAN ?

 24   R.  C'est en tout cas sa définition. A la fin, quand tout ceci sera

 25   terminé, nous verrons à quoi ceci correspond. Il s'agit ici de la

 26   déclaration de Priskil. A quoi correspondent les choses, nous ne le saurons

 27   que lorsque toutes les enquêtes seront terminées, mais nous ne cesserons

 28   jamais de rechercher la vérité tant que nous serons en vie.


Page 34213

  1   M. FILE : [aucune interprétation]

  2    M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur File. Avez-

  3   vous des questions supplémentaires à poser, Monsieur Karadzic ?

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai juste quelques questions à poser, et je

  5   vais conclure rapidement.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poursuivre.

  7   Nouvel interrogatoire par M. Karadzic :

  8   Q.  [interprétation] Monsieur Jovanovic, on vous a posé une question à

  9   propos de propagande ou de travaux de renseignement. Avez-vous pu établir

 10   en tant que journaliste, qu'il y avait, en parallèle au conflit armé, une

 11   guerre de propagande ?

 12   R.  Oui, certainement. Nous avons perdu la guerre des médias. Pourquoi ?

 13   Parce que notre peuple, qui était censé y réfléchir, n'était pas disposé à

 14   payer pour la vérité. Nous pensions tous que la vérité allait surgir et

 15   nous le pensons encore aujourd'hui, mais pour que la vérité puisse être

 16   établie, il faut beaucoup d'argent.

 17   Q.  Lorsqu'il a été question de la destruction de la mosquée, d'après-vous,

 18   cette mosquée a-t-elle été détruite par des professionnels ?

 19   R.  A mon avis, cela n'a pas du tout été fait par des professionnels. Et

 20   compte tenu de la conférence qui a été organisée, moi, je n'ai jamais écrit

 21   une seule ligne dans aucun magazine. Pourquoi ? Parce que ceci avait été

 22   tellement mal fait que la moitié de mon village natal a été détruit et j'ai

 23   été choqué par tout cela.

 24   Q.  Quelle a été l'attitude des autorités ou la participation des autorités

 25   de Vlasenica à cet événement ?

 26   R.  Moi, j'étais là, sur place, et aucun représentant des autorités n'était

 27   proche de cet endroit. Je n'ai pas pu constater après non plus que

 28   quelqu'un parmi les autorités locales de Vlasenica avait été impliqué.


Page 34214

  1   Q.  Merci.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le témoin n'a pas dit qu'il n'avait pas entendu

  3   parler de cela non plus après que les autorités aient été impliquées.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Cet élément-là figurera sans doute dans un de

  5   mes livres que j'écris depuis plusieurs années maintenant, et les images

  6   qui ont survécu figureront dans le documentaire.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Monsieur Kovacevic [sic], est-il exact de dire que vous n'avez pas

  9   entendu parler de cela non plus après que les autorités aient été

 10   impliquées dans tout ceci ?

 11   R.  C'est exact.

 12   Q.  Compte tenu du fait que cette destruction a eu lieu le 19 août, qu'en

 13   est-il de cet incident-là ? Quel rapport cet incident a-t-il avec les

 14   autres incidents qui se sont déroulés le 15 août et le 16 août ?

 15   M. FILE : [aucune interprétation]

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que vous ne répondiez.

 17   Monsieur File.

 18   M. FILE : [interprétation] Tout d'abord, il s'agit d'une question

 19   directrice. Et puis ce qui est encore plus important, ce n'est pas une

 20   question qui découle des questions posées au sujet de la crédibilité, que

 21   l'on a posées au cours du contre-interrogatoire.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Robinson.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, la crédibilité de ce

 24   témoin n'est pas du tout mise en question. Moi, j'ai voulu savoir qui a

 25   détruit la mosquée et pour quelle raison vu que l'on m'a dit que ce sont

 26   les unités spécialisées du génie de l'armée qui ont fait cela, et je suis

 27   sûr que les unités de génie auraient fait cela différemment.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, la destruction de la


Page 34215

  1   mosquée n'est pas pertinente. En tout cas, cette question ne découle pas du

  2   contre-interrogatoire. Passez à autre chose.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. On va abandonner ce thème.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Monsieur Jovanovic, vous ne figuriez pas sur la liste du SDS, mais d'un

  6   autre parti --

  7   R.  C'était l'Alliance des forces réformatrices de la Yougoslavie. A

  8   l'époque, il y avait un Ante qui était à la tête, mais j'ai oublié son nom

  9   de famille.

 10   M. FILE : [interprétation] Ceci ne ressort pas du contre-interrogatoire.

 11   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais non, il faut me laisser terminer. Moi,

 13   j'essaie -- il s'agit d'une question qui porte sur le nombre d'habitants.

 14   Nous, on a parlé d'un rapport 50/50. Il y a des doutes.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur File.

 16   M. FILE : [interprétation] Je ne vois pas de quelle façon son éventuelle

 17   appartenance à un parti politique est pertinente par rapport à cela.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] On va voir la question.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Qu'avez-vous dit ? Qui était le chef au niveau de la Bosnie ?

 21   R.  Nenad Kecmanovic, et au niveau de la Yougoslavie, Ante Markovic, qui

 22   était le premier ministre fédéral à l'époque.

 23   Q.  Y avait-il d'autres serbes dans ce parti et dans d'autres partis qui

 24   n'étaient pas le parti du SDS ?

 25   R.  Oui, bien sûr, aussi bien dans les Forces réformatrices que dans le

 26   SDP, qui est en partie découlant du Parti communiste.

 27   Q.  Et qui a remporté les élections à Vlasenica ?

 28   R.  Le SDS 27, SDA 26, les Forces réformatrices 4, et le SDP 3. En tout, il


Page 34216

  1   y avait 60 députés dans l'assemblée. Parmi les quatre députés des Forces

  2   réformatrices, j'y étais aussi.

  3   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation] 

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le SDA avait 26 députés, et pas 426.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Il faudrait lire dans le compte

  6   rendu d'audience que le SDA avait 26 membres.

  7   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] On va poursuivre.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Vu qu'au moins les membres de vos familles ont voté pour vous et pour

 11   les autres députés élus au nom des autres partis, comment expliquez-vous,

 12   en tenant cela en compte, que les chiffres reflétant la victoire du SDS ait

 13   été corrects ?

 14   M. FILE : [interprétation] Là, il s'agit d'une question directrice à

 15   nouveau.

 16   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 17   M. KARADZIC : [aucune interprétation]

 18   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 19   M. FILE : [aucune interprétation]

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Ce n'est pas important. Je laisse

 21   tomber.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous voulez reformuler cette question ?

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Oui, je peux le faire. L'électorat serbe était-il partagé entre

 25   différents partis ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Comment voyez-vous la victoire du SDS par rapport aux informations qui

 28   découlent du recensement de la population ?


Page 34217

  1   R.  J'ai voulu en parler, parce que je sais que ce recensement de 1992 n'a

  2   jamais été adopté en Bosnie-Herzégovine, et d'ailleurs l'assemblée

  3   municipale de Vlasenica ne l'a pas adopté non plus, parce qu'il fallait

  4   adopter ce recensement, et je sais qu'il y a eu une campagne violente pour

  5   ce recensement, et je suis sûr que c'est louche, la façon dont le

  6   recensement a été fait. A l'appui de ces faits, vous avez la victoire du

  7   SDS dans la municipalité de Vlasenica alors que s'il y avait deux partis

  8   nationalistes, le SDS et le SDA, les résultats de l'élection devaient être

  9   différents en dépit de l'existence des partis de gauche.

 10   Q.  La dernière question. Même si le document n'a pas été versé - mais il a

 11   été versé sans doute ailleurs - dans ce document, il est écrit qu'à la mi-

 12   avril 1992, sa fille avait été emprisonnée, et cetera. Est-ce que vous, à

 13   la mi-avril, vous aviez la possibilité de voir qu'il y avait un camp de

 14   Susica réservé aux Musulmans ? Est-ce que vous vous êtes rendu à Susica à

 15   la mi-avril ?

 16   R.  J'ai oublié de le dire. A la mi-avril, cela n'existait pas. La seule

 17   visite que j'ai faite à Susica était au début du mois de juin, le 3 ou le 4

 18   juin, et c'était vraiment la seule visite. Je l'ai notée quelque part.

 19   Q.  Bien. A la mi-avril, Susica était-elle créée pour y accueillir des

 20   Musulmans ?

 21   R.  Non, absolument non.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'ai pas

 23   d'autres questions.

 24   Merci, Monsieur Jovanovic. Mais c'est vrai que vous auriez pu aussi faire

 25   partie du SDS.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je remercie le

 27   Tribunal s'il n'y a pas d'autres questions.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous êtes resté jusqu'à quand dans le


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  1   Corps de la Drina, Monsieur Jovanovic ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai été démobilisé le 27 mars 1996.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Avec ceci se termine votre

  4   déposition, Monsieur Jovanovic. Au nom des Juges de la Chambre, je souhaite

  5   vous remercier d'être venu à La Haye pour déposer. A présent vous pouvez

  6   disposer.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci. Je vous souhaite la bonne poursuite des

  8   débats.

  9   Je vous remercie, Monsieur le Président, Madame, Monsieur le Juge.

 10   [Le témoin se retire]

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Y a-t-il d'autres questions que l'on

 12   souhaite soulever ? Si j'ai bien compris, nous n'avons pas de témoins pour

 13   le reste de la journée.

 14   M. ROBINSON : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. Nous

 15   n'avons aucun point à soulever.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Dans ce cas-là, il y a deux

 17   points que, moi, je souhaite soulever.

 18   Tout d'abord, le 15 février 2013, le Procureur a posé une question devant

 19   le Juge de la Chambre concernant une identification potentielle d'un témoin

 20   protégé de la part de l'accusé le 14 février 2013.

 21   Les Juges ont réfléchi à la question posée et aux requêtes faites par les

 22   parties le 15 février 2013.

 23   En tenant compte de la situation dont a parlé le Procureur, les Juges

 24   profitent de l'occasion pour réitérer leur position concernant la

 25   communication au public, y compris des autres témoins, toute information

 26   confidentielle ayant rapport au témoin. Comme il est écrit dans le

 27   paragraphe 34(1) de la "Décision portant mesures de protection concernant

 28   les témoins" datant du 30 octobre 2008, il n'est pas interdit à l'accusé de


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  1   communiquer des informations confidentielles concernant les témoins dans la

  2   mesure où cette communication est nécessaire pour la préparation et la

  3   présentation de ses moyens de preuve. Les Juges rappellent à l'accusé que

  4   ceci ne peut être fait que pour un but concret et dans des circonstances

  5   exceptionnelles. Par rapport à la situation qui s'est présentée le 14

  6   février, la question posée par l'accusé n'était pas telle que le compte

  7   rendu du témoin protégé devait être lu au témoin qui était en train de

  8   déposer. De plus, vu que le témoin qui était à la barre à ce moment-là

  9   avait déjà dit qu'il n'était pas au courant de la situation en question, il

 10   n'était absolument pas nécessaire de se référer à la déposition d'un témoin

 11   protégé. De plus, le fait que l'on passe à huis clos partiel ne suffit pas

 12   pour protéger l'identité de ce témoin par rapport au témoin qui était à la

 13   barre.

 14   C'est pour cela que la Chambre rappelle à l'accusé qu'il est nécessaire de

 15   faire extrêmement attention à la nécessité de respecter les ordres de la

 16   Chambre concernant les mesures de protection attribuées au témoin.

 17   Ensuite, la question suivante concerne les informations données par la

 18   Défense concernant l'article 92 ter.

 19   La Chambre a aussi réitéré sa position concernant de nombreuses 

 20   versions des notifications en vertu de l'article 92 ter et des déclarations

 21   des témoins. Il est nécessaire de communiquer en temps voulu uniquement une

 22   version de travail et la version modifiée d'un tel document.

 23   Les Juges de la Chambre sont préoccupés par cette tendance récente

 24   qui a eu pour résultat une perte de temps, de ressources pour la Chambre.

 25   Il y a eu de nombreuses occasions quand le jour de la déposition du témoin,

 26   la Défense réduit de façon drastique le nombre de pièces connexes pour

 27   lesquelles on demande le versement, alors que ceci aurait dû être fait bien

 28   plus tôt. Ceci aurait pu être fait à partir du moment où on a soumis une


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  1   version modifiée de la notification en vertu de l'article 92 ter et à

  2   partir du moment où M. Karadzic ou un autre membre de l'équipe de la

  3   Défense a fait sa session de récolement de témoins. Et ceci est arrivé même

  4   quand le Procureur n'a pas soulevé des objections par rapport aux pièces

  5   annexes.

  6   Donc, les Juges rappellent la Défense que cette décision doit être

  7   prise au moment où la Défense soumet la notification modifiée en vertu de

  8   l'article 92 ter pour ne pas perdre le temps des Juges et du Procureur.

  9   L'accusé est rappelé de la nécessité de verser uniquement les pièces qui

 10   sont vraiment importantes en l'espèce et d'éviter à verser ou demander le

 11   versement des documents qui sont moins importants par le biais des

 12   déclarations 92 ter et pour décider, in fine, de ne pas verser ces

 13   documents ou de ne pas les utiliser avec ce témoin.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux dire quelque chose ?

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Eh bien, Monsieur le Président, je dois vous

 17   dire qu'il est dans mon intérêt de protéger le témoin, de ne pas déroger

 18   aux questions de confidentialité, et je vais toujours, toujours essayer de

 19   le faire.

 20   En ce qui concerne la deuxième question, eh bien, M. Robinson va être peut-

 21   être mieux à même de répondre, mais tout ce que je peux vous dire c'est que

 22   nous sommes très conservateurs quant aux connaissances précises du témoin

 23   au sujet de certains documents. C'est pour cela que nous nous efforçons

 24   d'exclure tout document qui n'a pas été suffisamment corroboré par le

 25   témoin, vérifié avec le témoin.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ayez à l'esprit ce que je vous ai dit.

 27   S'il n'y a pas d'autres questions, eh bien, nous allons lever la séance et

 28   continuer nos travaux mardi de la semaine prochaine.


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  1   --- L'audience est levée à 12 heures 06 et reprendra le mardi, 26 février

  2   2013, à 9 heures 00.

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