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2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 [Le témoin vient à la barre]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous. Oui, Maître
7 Harvey.
8 M. HARVEY : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,
9 Messieurs les Juges. Mme Samie Blasingame, qui est de l'Université d'Etat
10 de Californie, l'Université Long Beach, je dois la présenter, elle a un
11 diplôme de relations internationales. Elle est avec nous.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Maître Harvey.
13 Madame Edgerton.
14 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, très brièvement, quelque chose par
15 rapport à ce que nous avions dit hier. Le Dr Karadzic a soulevé un point au
16 sujet de la pièce P4484, conversation enregistrée entre lui-même et le
17 général Zivanovic. Il a posé une question en page du compte rendu
18 d'audience 42 518 au sujet de la date, et je voulais informer toutes les
19 personnes présentes des moyens de preuve concernant cette conversation.
20 Alors, je voudrais renvoyer le Dr Karadzic aux pages du compte rendu
21 d'audience 27 485 à 27 488, ainsi que la page 27 727, où le Dr Karadzic a
22 admis lui-même cette date comme étant la date de la conversation, je veux
23 dire la date du 8 juillet, et je pense qu'il a dû oublier ce détail. Donc
24 je voulais simplement répondre à ce qu'il nous a demandé hier.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et il s'agit de la déposition de qui ?
26 Mme EDGERTON : [interprétation] M. Butler.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
28 LE TÉMOIN : JOHN ZAMETICA [Reprise]
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1 [Le témoin répond par l'interprète]
2 Contre-interrogatoire par Mme Edgerton : [Suite]
3 Q. [interprétation] Monsieur Zametica, très rapidement, un point par
4 rapport à l'audience d'hier. Le document que nous étions en train
5 d'examiner, vous ne l'aviez jamais vu avant que je ne vous le montre hier ?
6 R. Ecoutez, je ne me rappelle plus de quel document il s'agit. Rappelez-
7 moi, s'il vous plaît.
8 Q. Alors, si vous vous ne souvenez plus du dernier document que nous avons
9 examiné hier, je vais simplement poursuivre, parce que c'était quelque
10 chose juste en passant très rapidement.
11 Le 13 juillet 1995, Monsieur Zametica, vous saviez que les forces serbes de
12 Bosnie à Srebrenica avaient des prisonniers; est-ce exact ?
13 R. Je ne suis pas sûr de la date, mais oui, puisque l'opération militaire
14 a réussi. Les forces serbes étaient entrées dans la ville. Et on pourrait
15 raisonnablement supposer, effectivement, qu'il y a eu des prisonniers.
16 Q. Très bien. Vous saviez qu'ils avaient des prisonniers à Potocari, en
17 fait ?
18 R. Non.
19 Q. Vous saviez que ces prisonniers étaient des hommes ?
20 R. Je ne savais pas s'ils étaient à Potocari. A l'époque, je ne savais pas
21 du tout ce qui était Potocari. Je ne connaissais pas la carte de cette
22 zone, je ne m'y étais jamais rendu de ma vie. Quant à savoir si je savais
23 que c'étaient des hommes, j'ai supposé que c'étaient des hommes.
24 Q. Vous l'avez supposé ?
25 R. Oui, tout à fait. Absolument.
26 Q. Parce qu'en fait, que vous avez dit le 13 juillet 1995 dans le cadre
27 d'un entretien pour la BBC, c'était exactement cela. On vous a dit que les
28 Serbes de Bosnie étaient en train d'arrêter tous les hommes musulmans de
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1 Srebrenica parce qu'ils étaient à la recherche de criminels de guerre, et
2 vous ne l'avez pas nié à ce moment-là. Vous avez dit : "Nous sommes en
3 train de séparer les hommes des femmes, des enfants et des personnes
4 âgées."
5 R. Qu'est-ce que je n'ai pas nié ? Je ne comprends pas très bien.
6 M. ROBINSON : [interprétation] Est-ce qu'on peut avoir une référence pour
7 cela ?
8 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, tout à fait. Il s'agira de la pièce
9 25328 de la liste 65. Il s'agit d'une transcription d'un entretien accordé
10 à la radio BBC 4, 18 heures 29 du 13 juillet 1995. Et le sujet traité est
11 Srebrenica. Je voudrais que l'on examine la page 3, s'il vous plaît.
12 Q. Monsieur Zametica, dans cet entretien, il est dit que ce ne sont pas
13 les Nations Unies qui séparent les hommes de leurs familles, en les faisant
14 embarquer à bord des autocars pour les sortir de leurs foyers. Et vous avez
15 dit : Nous sommes en train de séparer les hommes des femmes et des enfants
16 -- je vais terminer ma question, Monsieur Zametica. Vous avez dit : Nous
17 sommes en train de les séparer pour une raison tout à fait valable, à
18 savoir pour voir --
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donnez la possibilité au témoin de
20 prendre connaissance du texte, et vous pouvez votre question une fois qu'il
21 aura terminé.
22 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
23 Mme EDGERTON : [interprétation] Ce qui me préoccupe, c'est le temps qu'il
24 me reste. Bien entendu.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, je voudrais prendre connaissance
26 de la totalité de la page. Pour l'instant, je n'ai vu que deux paragraphes.
27 Oui, merci. Pour que je puisse bien voir le document. J'ai terminé la
28 lecture de cette page. Je vous remercie.
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1 Mme EDGERTON : [interprétation]
2 Q. Puisque vous avez lu la page, je vous invite à vous concentrer sur la
3 dernière affirmation qui vient du journaliste qui vous a accordé
4 l'entretien. Et c'est la raison pour laquelle tous les hommes âgés de 16
5 ans et plus, y compris les hommes âgés, ont été séparés de leurs familles.
6 R. Ecoutez, excusez-moi, non, je ne vois pas où est-ce que cela est dit
7 par la personne qui m'interroge. Où est-ce qu'il est question d'âgés de 16
8 ans ? C'est ce que lui est en train de dire.
9 Q. Est-ce que je peux terminer ma question ? Voyons le haut de la page
10 suivante, c'est quelque chose que vous n'avez pas réfuté. Prenons le début
11 de la page suivante. Vous répondez : Nous souhaitons mener à bien une
12 enquête approfondie.
13 Donc, Monsieur Zametica, il s'agit plus que d'une supposition raisonnable,
14 plus que d'une supposition que vous aviez des hommes entre vos mains. Vous
15 saviez, le 13 juillet 1995, que les forces serbes de Bosnie avaient fait
16 des prisonniers à Srebrenica ?
17 R. Mais absolument pas. Mais c'est tout à fait fantastique, ce que vous
18 dites. Reprenons la page précédente, s'il vous plaît, où la personne qui
19 m'interview dit : C'est la raison pour laquelle tous les hommes âgés de 16
20 ans et plus, et il ajoute plusieurs phrases à ça. Et à ce moment-là, je
21 réponds ou je réagis -- enfin, à la page suivante, mais cela ne s'ensuit
22 pas du tout. Il n'y a absolument pas de logique ici. Peut-être que je ne
23 l'ai pas entendu correctement. Vous savez, il m'a appelé de Londres,
24 c'était par téléphone qu'on s'est parlé, et peut-être que je n'ai pas
25 entendu ce chiffre 16. Mais vous ne pouvez pas extrapoler à partir de ça
26 que je savais qu'il y avait des hommes âgés de 16 ans et plus. Mais ça,
27 c'est quelque chose que j'aurais tout à fait réfuté. Cela n'est pas
28 logique.
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1 Q. Vous saviez qu'il y avait des prisonniers ?
2 R. Je savais qu'il y avait des prisonniers --
3 Q. [aucune interprétation]
4 R. Je ne savais pas l'âge des prisonniers.
5 Q. Mais vous saviez qu'on était en train de séparer les hommes des femmes
6 et des enfants --
7 R. Exact.
8 Q. -- c'est exact ?
9 R. Exact.
10 Mme EDGERTON : [interprétation] Je voudrais demander le versement de ce
11 document au dossier.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document sera admis au dossier.
13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce P6475.
14 Mme EDGERTON : [interprétation]
15 Q. Maintenant, à partir du moment où vous saviez qu'il y avait des
16 prisonniers qu'on était en train de séparer, vous saviez aussi qu'il
17 fallait les enregistrer ?
18 R. "Enregistrer", vous voulez dire quoi par là ? Puis-je avoir une
19 précision ?
20 Q. Enregistrés, donc, là où ils étaient placés en détention, enregistrés
21 par le CICR. Vous le saviez, n'est-ce pas ?
22 R. Non, je ne connaissais pas la procédure. Je ne savais pas quel
23 traitement il fallait réserver aux prisonniers de guerre. Vous savez, je
24 n'avais jamais eu l'occasion de faire un prisonnier de guerre par la suite.
25 Je n'avais pas de vécu direct là-dessus. J'étais un civil. Si vous me
26 demandez maintenant : Monsieur Zametica, est-ce que vous étiez au courant
27 de la procédure exacte, l'aspect papier, bureaucratie, comment il fallait
28 prendre en charge un prisonnier de guerre, je vais vous répondre par la
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1 négative. Je n'en avais pas la moindre idée. Je suppose que c'est l'armée
2 qui le savait.
3 Q. Mais vous saviez qu'un échange massif devait se produire à un certain
4 point ?
5 R. Vous avez dit "massif", échange massif ?
6 Q. Monsieur Zametica, est-ce que je dois répéter chacune de mes questions
7 que je vous pose ? Je n'étais pas claire ?
8 R. Oui, oui, vous n'étiez pas claire. Vous avez dit "massif", donc vous
9 laissez entendre par là que je connaissais le nombre de prisonniers. Mais
10 je n'en avais pas la moindre idée. Donc, laisser entendre que je savais
11 qu'il allait y avoir un échange massif de prisonniers, mais cela n'est pas
12 juste puisque je n'avais pas la moindre idée du nombre de prisonniers. Je
13 ne savais pas s'il y en avait un ou deux ou 2 000. Personne ne me l'a dit.
14 Q. Très bien, Monsieur Zametica. Mais il est clair, à en juger d'après cet
15 entretien que nous venons de voir, que vous viviez dans l'anticipation
16 d'une mise en liberté des prisonniers. Donc, Monsieur Zametica, vous saviez
17 qu'un échange devait avoir lieu ?
18 R. Vous savez, c'était monnaie courante, les échanges de prisonniers
19 pendant la guerre.
20 Q. Donc, où sont les registres avec les renseignements personnels
21 concernant ces prisonniers, Monsieur Zametica ?
22 R. Je n'en ai pas la moindre idée.
23 Q. Mais, Monsieur Zametica, où sont alors les traces de leur placement en
24 détention ?
25 R. Je n'en ai pas la moindre idée. Ce n'est pas à moi de m'occuper de ces
26 registres ou d'assurer un suivi de ce genre de chose.
27 Q. Mais est-ce que vous savez où se trouvent les traces où est-ce qu'on a
28 consigné ce qui a été recueilli lors de leur interrogatoire ?
Page 42533
1 R. Mais c'est complètement hors de mon domaine de responsabilité. Je n'en
2 ai pas la moindre idée.
3 Mme EDGERTON : [interprétation] Ecoutez, je voudrais que l'on voie cet
4 entretien que nous venons d'examiner, il s'agit du document 25328 de la
5 liste 65 ter. Est-ce qu'on peut l'afficher de nouveau, s'il vous plaît.
6 Reprenons la page 5.
7 Q. Monsieur Zametica, donc c'est la suite de la transcription. Vous parlez
8 d'enquêtes au pluriel. Vous dites que ces prisonniers allaient être
9 interrogés et vous dites qu'il s'agit d'un exercice rapide. Et vous dites
10 au monde entier que ces hommes allaient être pris en charge et relâchés en
11 l'espace de quelques semaines. Et maintenant, vous nous dites que vous ne
12 saviez pas du tout comment cela allait se produire ?
13 R. Non, non, non. Je veux dire, simplement parce qu'on ne connaît pas
14 l'aspect bureaucratique des choses, cela ne veut pas dire qu'on n'en a pas
15 la moindre idée. Du moins, c'est ce que vous venez de me souffler. Ce que
16 cela aurait dû me laisser entendre, c'est qu'un échange de prisonniers
17 allait avoir lieu. Mais c'était monnaie courante. C'était dans notre
18 intérêt, dans l'intérêt de la partie musulmane également, de procéder à
19 l'échange. C'est ce qu'on faisait tout le temps. Donc je m'attendais,
20 effectivement, à ce que les échanges aient lieu.
21 Q. Alors, très bien. Où sont-ils ? Où sont les prisonniers ? Où a eu lieu
22 l'échange ?
23 R. Mais on en a parlé hier. Je vous ai dit qu'il y a eu un massacre.
24 Q. O.K. Monsieur Zametica, parlons toujours de Potocari et parlons de ces
25 séparations dont vous avez parlé dans cet entretien. Svetozar Kosoric, qui
26 était à la tête du renseignement au sein du Corps de la Drina, est venu
27 déposer ici en tant que témoin à décharge de M. Karadzic --
28 R. De qui parlez-vous ?
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1 Q. De Kosoric.
2 R. Ah, Kosoric.
3 Q. Et lui-même, il s'est trouvé à Potocari le 12 juillet et il a passé la
4 nuit à Bratunac. Et pendant sa déposition, il a dit qu'il ne savait rien
5 des séparations. Page 38 698 du compte rendu d'audience, 38 705 à -07
6 également. Et Zvorko Bajagic, lui aussi, il faisait partie de la logistique
7 du Corps de la Drina - et je vous renvoie au document 1D09611, c'est sa
8 déclaration préalable de témoin - et lui aussi, il est venu déposer à
9 décharge pour Dr Karadzic et il est passé par Potocari le 13 juillet,
10 s'acheminant vers Srebrenica. Il a vu des autocars à Potocari. Il a vu des
11 Musulmans qu'on était en train de faire embarquer à bord de ces autocars.
12 Et il dit dans sa déclaration que je viens de vous citer qu'il n'a pas vu
13 d'hommes en train d'être séparés de femmes et d'enfants. Donc, pour ce qui
14 est des séparations, il semblerait que vous, qui étiez à Pale, étiez mieux
15 informé de ce qui se passait sur le terrain que les militaires qui y
16 étaient; exact ?
17 R. Non, non. Attendez. Quand on parle de cette séparation et lorsque
18 Bajagic dit qu'il n'en sait rien, nous ne savons pas de quelle date il
19 parle, de quelle heure, de quel endroit. Cette autre personne que vous avez
20 mentionnée précédemment, Kosoric, je pense que la même chose vaut pour lui.
21 Et vous me dites que les enfants et les femmes n'étaient pas séparés des
22 hommes; c'est ça que vous me dites ?
23 Q. Monsieur Zametica, écoutez, arrêtez de me poser des questions, parce
24 que ce n'est pas une conversation. Et si vous arrêtez de faire cela, on en
25 aura terminé beaucoup plus rapidement.
26 Maintenant, avançons dans le temps. Le 15 juillet 1995, vous saviez,
27 Monsieur Zametica, que vous aviez même plus de prisonniers, même davantage
28 de prisonniers à Srebrenica; exact ?
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1 R. J'attends votre question de suivi.
2 Q. Monsieur Zametica, c'est une question à laquelle vous pouvez répondre
3 par un "oui" ou un "non". Le 15 juillet 1995, vous saviez que vous aviez
4 même davantage de prisonniers; exact ?
5 R. Ce n'est pas une question à laquelle on peut répondre par un "oui" ou
6 un "non". C'est une question qui m'est posée sur des événements qui se sont
7 déroulés il y a quasiment 20 ans. C'est la raison pour laquelle je vous dis
8 que j'attends votre question de suivi.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne comprends pas votre réponse,
10 Monsieur Zemetica. Jusqu'à présent, nous avons parlé de la date du 13
11 juillet.
12 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et Mme Edgerton est passée à la journée
14 du 15. Elle vous a demandé si vous saviez qu'il y avait encore davantage de
15 prisonniers. Vous auriez pu répondre par un "oui" ou un "non", ou vous
16 auriez pu dire que vous ne vous en souveniez pas ou que vous ne le saviez
17 pas.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, de m'avoir
19 précisé cela. Dans ce cas-là, je vous réponds en disant que je ne m'en
20 souviens pas.
21 Mme EDGERTON : [interprétation]
22 Q. Donc vous ne saviez pas que l'état-major principal de la VRS avait fait
23 rapport au président le 15 juillet 1995, disant que l'effectif principal du
24 Corps de la Drina participait à la défense, tandis que les Brigades de
25 Milici ainsi que de Bratunac et ainsi que le Bataillon indépendant de
26 Skelani étaient en train de sécuriser le terrain et de prendre en charge un
27 grand nombre de combattants qui étaient en train de se rendre ? Vous ne le
28 saviez pas ?
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1 R. Je ne m'en souviens pas. Véritablement, je ne m'en souviens pas.
2 Mme EDGERTON : [interprétation] P4457, la référence à laquelle je vous
3 renvoie pour cela.
4 Q. Alors, Professeur Zametica, Dr Karadzic vous a montré hier le document
5 D3931, il s'agit de votre déclaration accordée à la presse en date du 17
6 juillet 1995, donc un de vos communiqués de presse. Il a été transmis par
7 l'AFP. Et ici, vous avez dit :
8 "Des allégations de torture, de meurtre, de viol et d'expulsion de
9 civils musulmans sont réitérées sans que l'on ait procédé à une
10 vérification indépendante. La vérité est que rien de tout cela ne s'est
11 produit."
12 Et vous avez dit aux Juges de la Chambre que vous pensiez que tout
13 s'était produit conformément à l'ensemble des conventions. Je vous renvoie
14 au compte rendu provisoire, page 57. Et cela, parce que vous avez dit que
15 Koljevic vous avait dit que Mladic avait affirmé qu'il allait permettre à
16 la Croix-Rouge d'accéder à Srebrenica à cause de l'accord. Et tout cela,
17 d'après vous, avait forgé un tableau complet.
18 R. Oui.
19 Q. Très bien. Donc le fait que Koljevic ait dit à Mladic qu'il allait
20 permettre à la Croix-Rouge de rentrer dans Srebrenica, et vu qu'il y avait
21 l'accord, c'était suffisant pour vous pour réfuter de manière crédible
22 toute allégation de torture, meurtre, viol et expulsion ?
23 R. Non, ce n'est pas ce que je dis. Je ne dis pas que c'était suffisant.
24 Mais quasiment 20 ans après les événements, ce sont deux éléments dont je
25 me souviens ou que j'ai pu voir dans les documents. Il se peut qu'il y ait
26 eu et il est probable qu'il y ait eu d'autres éléments, d'autres facteurs,
27 d'autres éléments d'information qui m'auraient conforté dans ma conviction
28 dans le fait que je pensais que tout s'était passé conformément aux
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1 conventions.
2 Q. Très bien. Alors, parlons de ces deux facteurs. Parlons de l'accord.
3 Cet accord, c'était de la pure propagande, Monsieur Zametica, n'est-ce pas
4 ?
5 R. Ecoutez, la définition de la propagande est de diffuser, dans le cadre
6 d'une propagande, diffuser des mensonges. Donc, est-ce que vous êtes en
7 train de dire que l'accord qui a été signé, entre autres, par le
8 représentant civil musulman de Srebrenica, ainsi que par le représentant
9 des Nations Unies, qu'il a pris part uniquement à une opération de
10 diffusion de mensonges ? C'est ce que vous êtes en train de dire ?
11 Q. Monsieur Zametica, je dis que cet accord était un faux accord qui a été
12 fabriqué par vous et Dr Karadzic et d'autres personnes pour éviter que l'on
13 ne vous reproche l'expulsion et le transfert forcé des civils de Srebrenica
14 ?
15 R. Non, pas du tout.
16 Q. Monsieur Zametica, ce qui est vrai au sujet de la situation qui était
17 celle des civils de Potocari, c'est qu'ils étaient des milliers rassemblés
18 là, ils étaient sans abri, ils ne pouvaient pas se déplacer, ils n'avaient
19 pas véritablement d'alternative sur partir ou laisser. N'est-ce pas vrai ?
20 R. Ecoutez, aujourd'hui, je me souviens d'un des facteurs qui m'ont incité
21 à avoir cette conviction, donc, que tout était de se dérouler aux
22 règlements et aux conventions. Je me souviens en fait que j'ai vu à la
23 télévision un enregistrement qui a été fait de Srebrenica et où on pouvait
24 voir le général Mladic sur place en ville devant une foule de civils
25 musulmans, surtout des hommes âgés, des femmes, des enfants, et si je me
26 souviens bien, il était en train de parler à ces gens-là. Et je pense que
27 dans cet enregistrement on a vu également ces civils -- en fait, certains
28 de ces civils monter à bord des autocars pour partir. Donc j'ai supposé que
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1 la population civile était en train d'être évacuée, et par la suite
2 j'allais apprendre qu'on les a évacués vers Tuzla. Donc c'est ça que j'ai
3 gardé en mémoire de ces jours-là.
4 Q. Mais, Monsieur Zametica, je vous demande très précisément ce qu'il en
5 est de la situation des civils à Potocari les 12 et 13, ainsi que le 14
6 juillet 1995 [comme interprété] et pendant les journées qui ont suivi.
7 C'étaient des milliers de gens, sans abri, incapables de circuler
8 librement, pas de vivres, pas d'infrastructures, pas de moyens de survie.
9 Oui ou non ?
10 R. Mais c'est précisément pour cette raison-là qu'on allait les évacuer
11 ailleurs. Je ne m'en souviens pas, mais vaguement il me semble qu'on leur a
12 demandé s'ils voulaient rester ou non, du moins on a posé cette question à
13 certains de ces civils. Mais d'après ce que j'ai compris, beaucoup de
14 Musulmans, et en particulier des hommes musulmans, avaient peur qu'il y ait
15 des actes de vengeance localement s'ils restaient à Srebrenica, à partir du
16 moment où les forces serbes de Bosnie avaient investi Srebrenica. Et donc,
17 la majorité avait pris la décision de partir, justement, précisément parce
18 qu'ils redoutaient cette vengeance de la part des Serbes du cru vu les
19 événements qui s'étaient produits pendant la période qui a précédé la
20 capture de Srebrenica par les forces serbes.
21 Q. Monsieur Zametica --
22 R. C'est très important. Je continue. Et le secteur autour de Srebrenica -
23 -
24 Q. Monsieur Zametica, je ne vous pose pas une question sur la période
25 avant la capture de ces prisonniers. Je vous pose des questions sur la
26 situation des civils à l'époque. Et votre réponse a été relativement
27 longue, mais je suppose, j'en conclus que ce que je vous ai raconté sur les
28 conditions de vie de ces civils est quelque chose que vous approuvez, avec
Page 42539
1 lequel vous êtes d'accord ?
2 R. Eh bien, la vie de ces civils n'était pas une situation idéale. Je suis
3 tout à fait d'accord avec vous. Mais je ne suis pas en train de dire que la
4 population civile qui avait été prise entre deux feux pendant le conflit
5 avait la vie facile. C'est pour cela, justement, que l'évacuation a été
6 organisée. Et, que je sache, cette évacuation a eu lieu.
7 Q. Très bien. S'agissant de cette affirmation que je vous ai faite et sur
8 laquelle vous êtes d'accord, j'aimerais attirer votre attention -- ou,
9 plutôt, revenir à quelqu'un dont M. Karadzic vous a parlé hier, et c'est M.
10 Deronjic. Vous avez déclaré hier, lorsque le Dr Karadzic vous a posé une
11 question, que vous connaissiez M. Deronjic.
12 Maintenant, Monsieur Zametica, M. Deronjic a donné une déclaration écrite
13 au bureau du Procureur disant que cet accord dont nous parlons était son
14 idée parce que les meurtres à Srebrenica avaient déjà fait l'objet de
15 rapport, et le Dr Karadzic avait approuvé la rédaction du document. Et
16 vous, hier, vous avez déclaré que vous ne l'aviez pas rencontré
17 personnellement. Même si vous ne l'aviez pas rencontré personnellement, il
18 avait ajouté que vous aviez rejoint les débats qui avaient eu lieu sur ce
19 document parce que vous pourriez l'utiliser pour montrer au monde entier
20 que l'évacuation avait eu lieu correctement. Donc, c'est en fait de cette
21 façon-là que ce document a été créé, n'est-ce pas ?
22 R. Je ne me souviens pas de quoi que ce soit de ce genre. Pourrais-je voir
23 le document en question que M. Deronjic a signé ?
24 Q. Oui, bien sûr.
25 Mme EDGERTON : [interprétation] C'est le document 22299 de la liste 65 ter.
26 Passons au paragraphe 224, qui se trouve à la page 67, si je ne m'abuse, en
27 anglais, et 66 dans la version B/C/S.
28 Q. Et là, vous voyez la signature de M. Deronjic sur la page de couverture
Page 42540
1 de la version en B/C/S de cette déclaration. Et, au fait, la référence aux
2 éléments de preuve dont je viens de parler est également reprise au
3 paragraphe 221, qui ne se trouve pas à l'écran pour le moment.
4 R. [aucune interprétation]
5 Q. Mais regardons d'abord le paragraphe 224, s'il vous plaît, c'est le
6 troisième paragraphe plein à droite de l'écran, et vous y voyez que M.
7 Deronjic a faxé le document au Dr Karadzic et qu'il a parlé longuement de
8 ce document, et que vous, Monsieur Zametica, avez également participé à la
9 conversation.
10 R. Madame le Procureur, c'est un point technique. Si vous parlez
11 constamment, je ne peux pas lire en même temps. Soit je peux vous écouter,
12 soit je peux lire et me concentrer sur la lecture. Alors, si vous me le
13 permettez, j'aimerais lire le document. Mais avant de commencer à lire le
14 document, j'aimerais savoir à quelle date cette réunion avec M. Deronjic
15 aurait eu lieu. Est-ce que nous avons une date ?
16 Q. Monsieur Zametica, comme je vous l'ai dit, il ne s'agit pas d'une
17 conversation. Veuillez lire les paragraphes auxquels je vous ai renvoyé et
18 je vous poserai la question ensuite.
19 R. Ça ne m'intéresse pas d'avoir une conversation avec vous, Madame. Ce
20 qui m'intéresse, c'est de connaître la date de cette réunion.
21 Q. Mais pourquoi, Monsieur Zametica ? Vous venez de me dire que vous ne
22 vous en souveniez pas.
23 R. Non, non. Mais apparemment, il y a eu une réunion. Je ne m'en souviens
24 pas. Mais si cette réunion a eu lieu, j'aimerais connaître la date de cette
25 réunion.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que nous perdons du temps.
27 Peut-être que nous pourrions montrer au témoin les paragraphes précédents
28 où il a commencé à parler de ce sujet.
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1 Mme EDGERTON : [interprétation] Bien sûr. Les références commencent au
2 paragraphe 221.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Laissons tomber la version en B/C/S à
4 l'écran pour l'instant.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci. J'ai lu la page. Je suis prêt à
6 consulter la page suivante. J'ai lu le document.
7 Mme EDGERTON : [interprétation]
8 Q. Si vous l'avez lu, Monsieur Zametica, vous avez également constaté
9 qu'au paragraphe 226, M. Deronjic déclare également :
10 "J'aimerais dire que Karadzic et Zametica ainsi que moi-même et d'autres
11 personnes savions que des meurtres et des liquidations avaient lieu, ce
12 qui, bien sûr, n'est pas abordé dans ce document."
13 Donc, Monsieur Zametica, non seulement cet accord dont nous sommes en train
14 de parler est un document reprenant une propagande internationale dont
15 l'objectif est de susciter une réaction internationale et d'éviter le
16 transfert forcé des civils de Srebrenica, non seulement cela, mais aussi,
17 vous saviez que ces meurtres et ces liquidations avaient lieu, n'est-ce pas
18 ?
19 R. Non, c'est tout à fait faux. Voici ce que j'ai à vous dire sur ce
20 sujet. Je suis sûr à 99 % que je n'ai jamais, jamais rencontré quelqu'un
21 qui s'appelle M. Deronjic de ma vie. Certainement pas pendant la guerre,
22 peut-être après la guerre, mais il n'y a pas de visage qui me vient à
23 l'esprit quand on me dit ce nom-là, et j'ai une très, très bonne mémoire.
24 Donc je suis presque certain que je n'ai jamais rencontré de ma vie ni vu
25 cet homme, ni encore moins parlé avec cet homme.
26 Passons maintenant à cette déclaration. J'ai d'abord eu l'impression, à la
27 lecture de ce document, que l'incrédulité m'envahissait. Et lorsque j'ai
28 commencé à réfléchir au contenu de cette déclaration, en particulier
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1 réfléchir au paragraphe 226, où il nous dit : "J'aimerais dire que
2 Karadzic, Zametica et moi-même ainsi que d'autres personnes savions," et je
3 répète, "savions qu'il y avait des meurtres et des liquidations et que,
4 bien sûr, ce document n'aborde pas ces éléments-là," eh bien, je vous
5 affirme que cet homme avait un problème avec le Tribunal de La Haye, qu'il
6 avait passé un accord avec ce Tribunal ou les enquêteurs et qu'il avait
7 accepté de signer un faux, un document reprenant des mensonges. Et je vous
8 dis catégoriquement que ce document est monté de toutes pièces.
9 Q. Monsieur Zametica, dans ce même paragraphe que vous venez de nous lire
10 partiellement, M. Deronjic, lorsqu'il parle de l'accord, dit que cet accord
11 dont nous avons discuté ne reprend pas la réalité des événements qui ont eu
12 lieu en juillet 1995. Les conditions de l'évacuation de Potocari, la
13 situation à Potocari, et la situation dans le secteur plus largement
14 étaient telles qu'elles n'étaient pas favorables à la population, que cela
15 ne permettait pas à la population d'y rester. Est-ce exact ?
16 R. Non. Pourquoi, dès lors, le représentant des Nations Unies aurait-il
17 signé cet accord ?
18 Mme EDGERTON : [interprétation] J'aimerais verser au dossier ces deux
19 pages, Madame, Messieurs les Juges.
20 M. ROBINSON : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Tout
21 d'abord, M. Deronjic a déclaré qu'il ne s'agissait pas d'élément de preuve.
22 Les commentaires de M. Zametica sont les éléments de preuve. Et vous avez
23 déjà rejeté l'admission des déclarations de M. Deronjic lorsque
24 l'Accusation avait essayé de les faire admettre au titre de l'article 92
25 quater du Règlement. Donc je ne pense pas que l'on puisse faire passer par
26 la petite porte ce que vous avez déjà rejeté lorsque cela a été
27 officiellement demandé.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous maintiendriez votre objection
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1 à l'admission de ce document si les Juges de la Chambre sont prêts à
2 l'admettre aux fins d'étayer le contexte des propos de ce témoin ? Parce
3 qu'il n'y avait pas eu lecture à voix haute du document au témoin.
4 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, je maintiendrais mon objection. Les
5 parties du document sur lesquelles le témoin a apporté des commentaires lui
6 ont été lues et il a donné sa déposition. Je ne pense pas que cette partie
7 de la déclaration devrait être admise. Mais si Mme Edgerton pense qu'il y a
8 quelque chose dans la déclaration qu'elle aimerait obtenir, eh bien,
9 qu'elle pose la question au témoin et il fera ses commentaires.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez quelque chose à
11 ajouter, Madame Edgerton ?
12 Mme EDGERTON : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, en fait, je
13 demandais le versement de ce dossier et j'ai limité cette demande de
14 versement à ces pages pour que les Juges de la Chambre et les parties
15 puissent bien comprendre le point de vue de M. Zametica sur les éléments de
16 preuve et rien d'autre.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, pas pour la véracité du contenu
18 des passages ?
19 Mme EDGERTON : [interprétation] Non.
20 [La Chambre de première instance se concerte]
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] A cette fin-la, nous allons admettre ces
22 deux pages-là.
23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela devient la pièce P6476, Madame,
24 Messieurs les Juges.
25 Mme EDGERTON : [interprétation] Quelques instants, s'il vous plaît, je dois
26 retrouver quelque chose dans le compte rendu. Merci.
27 Q. Monsieur Zametica, lorsque je vous ai demandé ce que M. Deronjic avait
28 déclaré sur les conditions de l'évacuation à Potocari, vous avez répondu,
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1 et je cite : "Pourquoi le représentant des Nations Unies, dès lors, aurait-
2 il signé l'accord ?" M. Deronjic, le lieutenant-colonel Franken, le
3 représentant des Nations Unies dont le nom se retrouve dans cet accord, a
4 en fait confirmé que l'accord avait été mis en œuvre sous la contrainte,
5 qu'il s'agissait d'un faux. Il a déposé à plusieurs reprises devant
6 plusieurs Chambres de ce Tribunal et a déclaré que ce document, et plus
7 particulièrement la partie de l'accord qui dit que la population peut
8 rester dans l'enclave ou partir, est illogique parce que la population
9 n'avait pas vraiment le choix de rester ou de se déplacer dans quelque
10 direction que ce soit. La population n'avait pas le choix. Rester dans un
11 espace restreint sans aucun moyen de survie, contrôlés par les Serbes, en
12 ayant peur et en laissant les choses en l'état, n'était pas avoir un choix.
13 Et un ordre avait été donné pour que cette population se rende dans le
14 secteur de Kladanj. Il s'agissait d'une décision prise par le représentant
15 -- pardon, ce n'était pas une décision par les représentants, mais un ordre
16 de Mladic, donc cet ordre de se rendre dans le secteur de Kladanj.
17 Et cela se retrouve à la pièce P4175, paragraphe 105. Il a également ajouté
18 au paragraphe 106 :
19 "Je n'avais aucun contrôle sur les événements."
20 Donc, Monsieur Zametica, le représentant des Nations Unies qui a signé
21 l'accord a en fait corroboré ce que M. Deronjic a dit, corroboré ce que je
22 vous ai avancé, à savoir que cet accord est un faux et qu'il a été créé
23 pour manipuler et susciter une réaction internationale. Est-ce bien le cas
24 ?
25 R. Non, ce n'est pas le cas. A la lecture de certains passages de la
26 déclaration de M. Deronjic, je suis tellement outré que je crois que cela
27 se passe de tout autre commentaire; cet homme n'est tout simplement pas
28 crédible. Ce qu'il avance ici n'a pas eu lieu. Je n'ai pas dit que j'étais
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1 au courant des meurtres et des liquidations. Il s'agit là d'un montage
2 total, qui a été fait sous la contrainte, je l'imagine. Et donc, toute
3 question que vous me poseriez sur cette déclaration de M. Deronjic me
4 semble très suspecte. Parce que ce document en soit n'est pas suspect --
5 j'ai utilisé le mot "suspect", mais ce document est faux. Et je suis
6 totalement outré.
7 Q. Je vous ai posé une question sur la déposition du lieutenant-colonel
8 Franken, le représentant des Nations Unies qui a signé l'accord.
9 R. Je ne sais rien de ce lieutenant-colonel ou quel que soit son rang.
10 J'aimerais le voir, mais je suppose que nous n'avons pas le temps et je
11 garde un œil sur l'heure. Je n'ai aucune idée de ce qu'il a pu déclarer
12 après l'événement. Tout ce que je sais, c'est que le Bataillon néerlandais
13 à Srebrenica n'a pas fortement brillé lorsqu'il a dû mener sa mission au
14 sein des Nations Unies. Maintenant, peut-être que cet officier qui a signé
15 la déclaration avait honte ou voulait changer l'histoire à sa façon, je
16 n'en sais rien. Je ne peux pas me prêter à des conjectures. Mais tout ce
17 qui est lié à cette déclaration en particulier, cette déclaration de M.
18 Deronjic, est d'après moi scandaleux.
19 Q. Monsieur Zametica, en 1995, vous avez utilisé et vous avez utilisé à
20 outrance le fait que le nom du lieutenant-colonel Franken se retrouvait sur
21 l'accord. Vous avez fait des déclarations pour que la FORPRONU vous
22 soutienne s'agissant de l'évacuation, et je vais vous lire l'une de ces
23 déclarations. C'est la pièce P6410. C'est une déclaration que vous avez
24 faite le 17 juillet 1995 à la télévision Srpska de Banja Luka. Vous avez
25 déclaré :
26 "Ces derniers jours, les médias internationaux, aidés par les autorités
27 musulmanes, se sont prêtés à une propagande violente et ont rapporté des
28 événements irréalistes s'agissant des événements de Srebrenica. Des
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1 accusations portant sur la torture, des meurtres, des viols, des expulsions
2 alléguées de civils musulmans, répétées sans vérification indépendante. En
3 fait, aucune de ces accusations n'a de fondement. La FORPRONU était sur le
4 terrain à Srebrenica tout le temps et peut confirmer que la population
5 civile musulmane a bien été traitée par les Serbes."
6 Monsieur Zametica, cela n'est pas vrai ?
7 R. Eh bien, c'est vrai, en tout cas par rapport aux éléments dont je
8 disposais à l'époque. Alors, j'aimerais apporter un commentaire sur votre
9 affirmation au début de ce petit discours auquel vous venez de vous prêter.
10 Vous avez dit, et je cite, que "j'ai utilisé et utilisé à outrance la
11 déclaration qui avait été faite par" -- et j'ai oublié le nom de ce
12 Néerlandais. Alors, je n'ai pas utilisé et utilisé à outrance la
13 déclaration qu'il a signée. Il a signé cette déclaration. Je pense que vous
14 en conviendrez. Mais ce que vous réfutez, c'est qu'il l'ait fait
15 volontairement. Vous dites et vous affirmez qu'il l'a fait sous la
16 contrainte. Alors, est-ce que vous pourriez m'expliquer dans quelles
17 circonstances il se trouvait lorsqu'il a signé cette déclaration ? Est-ce
18 qu'il avait un pistolet à bout portant sur la tempe ? Est-ce qu'on l'a
19 forcé d'une arme ?
20 Q. Monsieur Zametica, ce n'est pas à vous de me poser des questions, avec
21 tout le respect que je vous dois. Je vous ai posé une question sur cette
22 affirmation selon laquelle la FORPRONU peut confirmer le fait que la
23 population civile musulmane a bien été traitée par les Serbes.
24 R. C'est exact, et ça a été confirmé.
25 Q. Eh bien, ce n'est pas vrai.
26 R. Non, mais la population était bien traitée. Vous venez juste de
27 convenir que ce document a été signé par cet homme. Je ne le savais pas --
28 alors, théoriquement, oui, peut-être qu'il l'a fait sous la contrainte.
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1 Admettons, théoriquement, que c'est possible. Mais comment étais-je censé
2 le savoir ? Si cette signature a eu lieu sous la contrainte, comment
3 aurais-je pu le savoir ? Est-ce que vous êtes en train de me dire que de
4 Pale, j'étais censé savoir ce qu'il était en train de se passer dans une
5 tente ou une maison à Srebrenica lors d'une réunion à propos des civils
6 musulmans de Srebrenica, réunion entre les forces serbes et les
7 représentants des Nations Unies ? Je n'en avais aucune idée.
8 Q. Mais lorsque vous avez dit que la FORPRONU a confirmé le fait que la
9 population civile musulmane avait bien été traitée par les Serbes, vous
10 n'en aviez aucune idée. Donc c'est un mensonge ?
11 R. Non, non, non. Je suis assez admiratif de votre persévérance, mais je
12 pense que nous n'avançons pas beaucoup ici. Je pense que j'ai déjà expliqué
13 mon point de vue très clairement, et je pense que vous le comprenez mais
14 que vous continuez à me titiller.
15 Q. Très bien, alors, Monsieur Zametica --
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je demander à l'Accusation de nous dire
17 quand pour la première fois Franken a déclaré que cela avait eu lieu sous
18 la contrainte ? Est-ce que c'était immédiatement après son retour ? Quand ?
19 Quand cela a-t-il eu lieu ?
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que cette intervention ne vient
21 pas à point nommé pour le moment. Vous pourrez soulever la question lors de
22 vos questions supplémentaires. Continuons.
23 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
24 Q. Vous avez expliqué votre travail, ce que vous deviez faire, et vos
25 obligations vis-à-vis du Dr Karadzic en long et en large. Et, entre autres,
26 l'un des aspects de votre travail consistait à vous occuper des affaires
27 étrangères et d'être en première ligne vis-à-vis des contacts avec les
28 médias internationaux; est-ce exact ?
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1 R. Oui. C'est exact, oui.
2 Q. Donc il serait normal dans le cadre de votre travail, et probablement
3 en qualité d'ex-résident du Royaume-Uni, que vous ayez suivi les nouvelles
4 dans la presse britannique ?
5 R. Oui.
6 Q. Donc, le 17 juillet 1995, vous auriez vu ou vous auriez été mis au
7 courant par le journal "The Independent" de l'article qui a fait la
8 première page et qui avait le titre suivant : "Les corps s'accumulent dans
9 l'horreur à Srebrenica" ? Car c'était votre travail.
10 R. Non, pas nécessairement. A cette époque, nous n'avions pas l'internet.
11 Donc la presse, les informations n'étaient pas immédiatement disponibles,
12 contrairement à aujourd'hui. Donc je ne me souviens pas particulièrement de
13 cet article dont vous venez de parler.
14 Q. Eh bien, cet article se fondait, Monsieur Zametica, sur cinq ou six
15 heures de tournage que l'auteur de l'article et un de ses collègues avaient
16 visionnées dans les bureaux du Studio B à Belgrade, et des parties de ce
17 film ont été utilisées dans un documentaire qui a été réalisé par le Studio
18 B le 15 juillet. Et, en fait, vous avez déjà fait référence au fait que
19 vous aviez vu certaines parties de ce film dans votre déposition il y a
20 quelques minutes. Alors, ces images ont été tournées dans la région de
21 Srebrenica le 13 et le 14 juillet 1995 et ont été filmées par un
22 journaliste serbe qui s'appelle Zoran Petrovic-Pirocanac. Et, entre autres,
23 on y voit des tas de corps contre un mur qui est criblé d'impacts de
24 balles, et l'endroit semble être l'endroit d'une exécution sommaire. Cela a
25 eu lieu le 17 juillet.
26 Mme EDGERTON : [interprétation] Les références sont P4397 et 4392. Nous
27 pourrions peut-être regarder l'article. La pièce P4397, je vous prie.
28 Agrandissons l'image, s'il vous plaît.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
2 Mme EDGERTON : [interprétation]
3 Q. Regardez l'article, et ensuite je vous poserai une question, Monsieur
4 Zametica.
5 R. Très bien. Je l'ai lu.
6 Q. Donc, Monsieur Zametica, ces rapports de sources serbes qui font
7 partie de ce que vous avez décrit dans un autre communiqué de presse du 17
8 juillet -- de ce que vous avez décrit comme étant une orgie de rapports non
9 critiques qui ont été rédigés avec l'aide des autorités musulmanes, vous
10 maintenez cela ?
11 R. Oui, et l'article le confirme. Et je vais m'expliquer. Tout d'abord,
12 pour répondre à votre première question qui me demandait si j'avais vu le
13 17 juillet cet article dans le journal "The Independent", eh bien, je peux
14 vous répondre, non. Je l'ai lu pour la première fois il y a quelques
15 instants.
16 Q. Très bien. Alors, si vous nous dites que c'est la première fois que
17 vous voyez cet article, nous allons passer à autre chose. Je n'ai plus de
18 questions à vous poser.
19 M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que le
20 témoin devrait avoir l'occasion de terminer sa réponse.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, je vais relire la question
22 de Mme Edgerton. Oui, Monsieur Zametica, veuillez continuer votre réponse.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Alors, l'article
24 que je viens de voir pour la première fois de ma vie, nous l'avons sous les
25 yeux, en fait, il confirme ce que j'ai dit lors de cette déclaration faite
26 par moi le 17 juillet au sujet de ce qui était non vérifié et tendancieux
27 dans les comptes rendus des médias occidentaux relatifs aux événements de
28 Srebrenica. Alors, vous insistez très lourdement sur le fait que ceci
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1 provient de sources serbes. Il s'agit effectivement d'une source serbe, en
2 l'espèce, B92 -- non, le Studio B, qui, de façon générale, était une
3 station ou une chaîne qui était hostile aux Serbes de Bosnie. C'était sa
4 politique. Mais peu importe. Mais même ce Studio B qui avait un biais
5 contre les Serbes de Bosnie dit ou suggère que ces soldats musulmans ont
6 été "tués au combat".
7 Alors, le journaliste Robert Block, dont je n'ai jamais entendu parler
8 auparavant, bien que j'aie suivi les travaux de ces journalistes, dit, je
9 cite :
10 "La scène, les lieux ressemblaient," et je répète, "ressemblaient plus à
11 l'endroit d'une exécution sommaire qu'à un théâtre de combat."
12 Alors, il donne son impression personnelle sur cette scène particulièrement
13 horrible, mais lui-même n'est pas sûr de la question de savoir s'il y a eu
14 des exécutions ou si ces soldats musulmans ont été tués en plein combat. Il
15 le dit lui-même, il dit que les lieux "ressemblaient" plus à une chose qu'à
16 l'autre. Donc, quelle preuve avons-nous ici que ces personnes ont été
17 exécutées ? Il met simplement en avant sa propre opinion, subjective, quant
18 à l'apparence de ces lieux. Il ne peut pas utiliser des termes plus
19 catégoriques parce que, en réalité, il n'est pas sûr lui-même et il ne peut
20 pas le démontrer. Et c'est en fait, ici, un bon exemple de la façon dont,
21 en jouant sur les mots, on peut finir par déformer les faits historiques.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Zametica, vous nous confirmez,
23 n'est-ce pas, que ce qui était spéculation de sa part à l'époque était
24 exact ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. Mais dans ce cas particulier, Madame
26 et Messieurs les Juges, je ne peux pas être sûr si c'était le cas ou non.
27 Je peux ni dire oui ni dire non parce que s'il s'était agi de prisonniers
28 qui ont été exécutés -- oui, je ne peux pas exclure la possibilité qu'ils
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1 aient été exécutés. Mais sur la base uniquement de cet article particulier,
2 on ne peut pas avoir de certitude. C'est tout ce que j'essaie de dire.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Madame le
4 Procureur.
5 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.
6 Q. En tant que conseiller et porte-parole de la plume de M. Karadzic et
7 membre de son cabinet, vous étiez au courant, n'est-ce pas, des lettres
8 officielles émanant des autorités parties prenantes de la communauté
9 internationale qui s'adressaient à M. Karadzic, n'est-ce pas ?
10 R. Oui, en général, dans la mesure où il avait décidé de me les présenter.
11 Et s'il s'agissait de lettres importantes, il me les présentait.
12 Q. Très bien. Dans ce cas-là, M. Karadzic vous aura présenté la lettre
13 officielle reçue par lui de la part du Rapporteur spécial de la Commission
14 pour les droits de l'homme, M. Mazowiecki, rédigée par celui-ci le 24
15 juillet, dans laquelle il protestait contre le déplacement forcé de 40 000
16 personnes hors de Srebrenica et relevait que plusieurs milliers d'habitants
17 supplémentaires étaient portés disparus et que leur sort était inconnu.
18 Dans cette lettre, il demandait également que soit permis l'accès aux
19 personnes détenues. Parce que c'était une lettre assez importante, n'est-ce
20 pas ?
21 R. Excusez-moi -- mais ce n'est pas une question. N'est-ce pas, est-ce que
22 je vous ai bien entendu parler du 24 juillet ?
23 Q. Oui.
24 R. Merci. Le 24 juillet, j'étais au Monténégro, donc il n'a pas pu me
25 montrer cette lettre parce qu'il n'aurait pas eu la possibilité de le
26 faire.
27 Q. Mais M. Karadzic vous aura certainement montré la lettre de M. Akashi
28 datée du 12 août 1995, dans laquelle ce dernier exprimait sa grande
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1 préoccupation de voir que le sort de très nombreux habitants de Srebrenica
2 était toujours inconnu et relevait les comptes rendus faisant état de
3 charniers qui avaient été identifiés par le gouvernement américain. Cette
4 même lettre du 12 août vous demande de donner l'autorisation à la FORPRONU
5 d'enquêter sur ces allégations et demande l'accès pour les membres de la
6 FORPRONU, du HCR, du CICR et d'autres organisations internationales aux
7 personnes déplacées hors de Srebrenica, ainsi que hors de Zepa à ce stade,
8 et qui étaient détenues dans des secteurs contrôlés par vous. Il vous
9 l'aurait montrée, n'est-ce pas ?
10 R. C'est possible. Mais je dois vous dire que je m'en souviens pas. A la
11 date que vous évoquez, celle du 12 août, je ne m'en souviens pas, il y
12 avait beaucoup de choses qui se produisaient. Nous venions juste d'avoir
13 une tentative de coup d'Etat --
14 Q. Je ne vous ai pas posé de question au sujet d'un coup d'Etat; je vous
15 ai posé une question au sujet d'une lettre.
16 R. Excusez-moi --
17 M. ROBINSON : [interprétation] Juste une remarque.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci a été dit dans le contexte de ce
19 qu'a dit le témoin pour expliquer pourquoi il ne pouvait pas se souvenir de
20 cette lettre. Laissez-le poursuivre, Madame Edgerton.
21 Mme EDGERTON : [interprétation] Très bien.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] L'autre sujet très important, mis à part le
23 coup d'Etat qui nous préoccupait à l'époque, c'était la situation militaire
24 très préoccupante dans les parties occidentales du pays. Donc ma réponse
25 sera la suivante : M. Karadzic peut m'avoir présenté cette lettre, mais il
26 est certain que je ne m'en souviens pas. Bien que je doive ajouter encore
27 une chose : si je l'avais vue et si je l'avais lue, je serais peut-être en
28 état de m'en souvenir, de me souvenir avoir lu quelque chose de cette veine
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1 il y a longtemps, mais à ce stade, aujourd'hui, je ne m'en souviens pas.
2 Mme EDGERTON : [interprétation]
3 Q. Monsieur Zametica, vous n'avez mené aucune enquête, n'est-ce pas, pour
4 essayer de déterminer où se trouvaient les personnes au sujet desquelles M.
5 Akashi a relevé que leur sort était totalement inconnu ? Vous n'avez
6 procédé à aucune enquête, que ce soit au mois de juillet, au mois d'août,
7 ni à aucun moment postérieur à ces deux mois ?
8 R. Laissez-moi vous répéter que je ne suis pas au courant de cette lettre
9 envoyée par Yasushi Akashi, et je ne peux absolument rien ajouter à cela.
10 Q. Ma question est la suivante : vous n'avez mené aucune enquête au sujet
11 de l'endroit où se trouveraient les personnes dont M. Akashi, apparemment,
12 savait qu'elles étaient portées disparues ? C'est le même groupe de
13 personnes dont M. Mazowiecki fait savoir qu'elles sont portées disparues et
14 le même groupe de personnes également au sujet duquel la communauté
15 internationale avait réagi de façon véhémente en mettant en avant que leur
16 sort était inconnu. Donc vous n'avez mené aucune enquête à l'époque, au
17 mois de juillet, ni au mois d'août, ni à aucun moment plus tard, n'est-ce
18 pas ?
19 R. Compte tenu du contexte de tout ce qui se passait à l'époque dans les
20 parties occidentales de la Republika Srpska, j'étais très certainement,
21 pour ma part, préoccupé par ces événements ailleurs dans le pays -- alors,
22 je ne sais pas ce qu'il en est de M. Karadzic et de ce qu'il a peut-être
23 fait, ni de la façon dont il a répondu à cette lettre dont vous dites que
24 M. Akashi l'a écrite à son attention. Vous feriez peut-être mieux de poser
25 la question à M. Karadzic à ce sujet.
26 Q. Je vous ai demandé si, oui ou non, à cette époque, vous avez mené une
27 enquête quant à l'endroit où se trouvaient les habitants de Srebrenica qui
28 avaient été portés disparus. Oui ou non ?
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1 R. Je ne m'en souviens pas.
2 Q. En fait, Monsieur Zametica, est-ce que vous continuez de répéter qu'au
3 mois de juillet 1995, en fait, le 31 juillet, vous persistez à répéter
4 qu'il n'y avait pas eu de nettoyage ethnique, qu'il n'y avait pas
5 d'atrocités, vous dites que tout cela, c'étaient des mensonges et des
6 inventions ? Vous avez dit cela, Monsieur Zametica, au journal "USA Today"
7 en réaction aux récits faits par les survivants qui s'étaient frayés un
8 chemin jusqu'au territoire tenu par les Musulmans de Bosnie, n'est-ce pas ?
9 R. Je voudrais pouvoir consulter cet article.
10 Q. Tout à fait.
11 Mme EDGERTON : [interprétation] C'est la pièce 25323 de la liste 65 ter.
12 Q. Les propos que je viens de citer figurent à la cinquième phrase à
13 partir du bas.
14 R. Oui. Oui, oui, nous avons, là encore, une confirmation de ce que je ne
15 cessais de répéter, à savoir qu'à l'époque nous ignorions entièrement
16 l'existence de quelque atrocité que ce soit qui aurait été commise. C'est
17 ce que j'ai dit le 17 juillet, et je vois qu'ici nous avons la confirmation
18 que je l'ai également déclaré le 31 juillet, en effet.
19 Q. Quand êtes-vous revenu du Monténégro, Monsieur Zametica ?
20 R. Vers la fin du mois de juillet.
21 Q. Très bien. Monsieur Zametica, ceci n'est pas vrai, n'est-ce pas ?
22 R. Qu'est-ce qui n'est pas vrai ?
23 Q. Votre déclaration d'après laquelle il n'y avait pas de nettoyage
24 ethnique, il n'y avait pas d'atrocités, que ceci n'était que mensonge ? En
25 fait, cela est en soi-même un mensonge, n'est-ce pas ?
26 R. Je suis vraiment surpris de voir que nous perdons autant de temps sur
27 quelque chose au sujet de quoi j'ai déjà très clairement expliqué ma
28 position. Mais je vais répéter. A l'époque, je n'étais au courant d'aucune
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1 atrocité. Ce n'est qu'ultérieurement que j'ai appris qu'il y avait eu des
2 atrocités, et je suis d'accord quant au fait qu'il y a eu un massacre à
3 Srebrenica. Je l'ai déjà dit hier. Pourquoi ne cessons-nous de revenir
4 encore et toujours sur ce point en particulier, alors que j'ai reconnu
5 clairement qu'il y avait bien eu un massacre commis à Srebrenica ? Je ne
6 comprends pas.
7 Q. Merci.
8 Mme EDGERTON : [interprétation] Puis-je demander le versement de cette
9 pièce, Madame, Messieurs les Juges ?
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.
11 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote P6477.
12 Mme EDGERTON : [interprétation]
13 Q. Monsieur Zametica, ces propos, ces déclarations, ne sont rien d'autre
14 que des tentatives de dissimulation, tout comme l'accord est une tentative
15 de dissimulation de ce qui a véritablement eu lieu à Srebrenica, n'est-ce
16 pas ?
17 R. Non.
18 Q. Monsieur Zametica, je vais vous donner lecture de quelque chose que
19 vous avez dit en 1997 pendant un entretien avec le journaliste Jovan
20 Janjic, entretien publié dans le journal "Nin", dans une article intitulé :
21 "Karadzic n'ira pas à La Haye." Vous avez déclaré :
22 "La raison d'être du Tribunal est précisément de condamner Karadzic et
23 Mladic. C'est-à-dire, la nation serbe. Les gens devraient comprendre que la
24 mise en place de ce Tribunal ad hoc à La Haye est une farce judiciaire sans
25 précédent dans l'histoire des Nations Unies."
26 Est-ce que vous maintenez ces propos, Monsieur Zametica ?
27 R. Est-ce que je pourrais consulter l'article, s'il vous
28 plaît ?
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1 Q. C'est une question qui appelle une réponse par "oui" ou "non". Est-ce
2 que vous maintenez ceci, oui ou non ?
3 M. ROBINSON : [aucune interprétation]
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je voudrais pouvoir consulter l'original
5 en serbe.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne vois pas de problème avec le fait
7 de vous présenter le document.
8 Mme EDGERTON : [interprétation] Moi non plus, Madame, Messieurs les Juges.
9 C'est le document numéro 25243 de la liste 65 ter.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais en serbe, s'il vous plaît.
11 Mme EDGERTON : [interprétation] Et je vous laisse un peu de temps, si vous
12 voulez. Alors, pouvons-nous passer à la page suivante en serbe. Au passage,
13 je signale qu'en anglais la référence qui nous intéresse figure en pages 6
14 et 7. Je pense que je me référais peut-être à une autre version en anglais.
15 Alors, pour le texte anglais, revenons, s'il vous plaît, à la page
16 précédente. Excusez-moi. Je vais vérifier mon exemplaire papier pour
17 retrouver le passage précis -- ou, plutôt, le numéro de page précis en
18 anglais.
19 M. ROBINSON : [interprétation] Je crois que c'est en haut de la page 4, il
20 me semble, peut-être également la fin de la page 3.
21 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci, Maître.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai beaucoup de mal à lire les petits
23 caractères dans la version serbe. Et je voudrais vraiment retrouver le
24 passage exact, si on en a la possibilité.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous pouvons renoncer à la version
26 anglaise pour quelques instants.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien. Merci.
28 Alors, oui, j'ai lu la traduction. Pour en vérifier l'exactitude, je n'ai
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1 pas d'objection majeure concernant la traduction. Donc, pour vous répondre,
2 non, je ne maintiens pas ceci. J'ai changé d'avis.
3 Mme EDGERTON : [interprétation]
4 Q. Et comment en êtes-vous venu à changer d'avis ?
5 R. Eh bien, je vais vous répondre, Madame Edgerton. Récemment, ce même
6 Tribunal a acquitté l'ancien chef de la Sûreté de l'Etat de la République
7 de Serbie, M. Stanisic, et au vu de cet acquittement, j'ai réfléchi de
8 nouveau et je me suis reposé la question de ce qu'était ce Tribunal pour
9 finir par constater qu'il s'agissait d'une institution qui agissait de
10 façon équitable.
11 Q. Quelques instants, s'il vous plaît. Je voudrais pouvoir vérifier un
12 point. Je vous remercie. Je n'ai pas d'autres questions.
13 Mme EDGERTON : [interprétation] Excusez-moi, pourrions-nous, concernant ce
14 document numéro 25243 de la liste 65 ter, procéder à son versement parmi
15 les pièces de l'Accusation, s'il vous plaît ?
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Soit.
17 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote P6478, Madame et
18 Messieurs les Juges.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suppose, Monsieur Karadzic, que vous
20 aurez des questions supplémentaires. Alors, est-il préférable de faire la
21 pause maintenant ou souhaitez-vous démarrer dès à présent ?
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Eh bien, nous pouvons également faire une
23 pause, Madame et Messieurs les Juges, si vous le souhaitez.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non, je m'en remets à vous.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Dans ce cas-là, prenons peut-être la pause
26 maintenant et nous commencerons après.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons donc faire une demi-heure de
28 pause et reprendrons nos débats à 11 heures moins dix.
Page 42558
1 --- L'audience est suspendue à 10 heures 20.
2 --- L'audience est reprise à 10 heures 53.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, veuillez poursuivre.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour, Excellences. Bonjour à tous.
5 Nouvel interrogatoire par M. Karadzic :
6 Q. [interprétation] Docteur Zametica, bonjour. On vous a demandé
7 aujourd'hui si vous aviez mené des enquêtes sur le fondement d'allégations
8 selon lesquelles certaines personnes étaient portées disparues, et on vous
9 a également interrogé au sujet d'échanges de prisonniers. Par conséquent,
10 je souhaiterais vous demander si, à la lumière de votre expérience
11 personnelle, c'était là la première fois que nous avions fait des
12 prisonniers ? Ou, plutôt, si pendant toutes les trois années et demie qu'a
13 durées la guerre nous n'avons jamais été en présence d'événements au cours
14 desquels des prisonniers de guerre auraient été liquidés et exécutés ?
15 R. Je suis tout à fait au courant du fait que nous avons eu des
16 prisonniers pendant la guerre, tout comme l'autre partie ou les autres
17 parties avaient certains de nos hommes capturés et faits prisonniers.
18 C'était une pratique courante de procéder à des échanges de ces
19 prisonniers. Et je ne suis, en revanche, certainement pas au courant que
20 nous n'ayons jamais liquidé le moindre prisonnier.
21 Q. Merci. On vous a présenté le journal de feu le Pr Koljevic. Il a écrit,
22 entre autres, sur la capture du personnel des Nations Unies lors des
23 frappes aériennes, tout comme au sujet de Srebrenica. Je souhaiterais vous
24 présenter un extrait.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande donc l'affichage du document
26 1D09847. Page 1. Pourrions-nous écarter la page de couverture. Voilà.
27 M. KARADZIC : [interprétation]
28 Q. Je voudrais attirer votre attention sur le troisième paragraphe. Je
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1 vais en donner lecture :
2 "Entre-temps, entre la seconde et la troisième frappes, Tuzla a été
3 bombardé et un événement s'est produit au sujet duquel il serait
4 extrêmement difficile de déterminer exactement ce qui s'est passé. Très
5 probablement, un massacre de civils avait été mis en scène dans un
6 restaurant à Tuzla, semblable à ce qui s'était passé rue Vase Miskina et au
7 marché de Markale. Il est très improbable que qui que ce soit parmi nos
8 hommes aurait pris de sa propre initiative la décision de faire quoi que ce
9 soit de cette nature, et certainement pas sur la base d'un ordre reçu à cet
10 effet, parce que cela aurait été pure folie à cette époque-là, à ce moment-
11 là."
12 Alors, comment ceci cadre-t-il avec votre expérience ?
13 R. Je crois que dans ma déclaration on trouve une mention d'un incident de
14 ce type-là, celui de Markale, au mois de février 1994, je crois. Et je
15 crois également avoir dit dans ma déclaration que tout cela se présentait
16 comme s'il s'était agi d'un massacre mis en scène. Cependant, jusqu'à
17 aujourd'hui, je dois dire que j'ignore ce qu'est la vérité vraie en la
18 matière. Je crois avoir déjà dit que les faits n'ont pas été établis avec
19 une certitude totale. Mais un événement de cette sorte jouait en faveur des
20 Musulmans pour des raisons de propagande tout à fait évidentes, et ils ne
21 sont pas privés d'en faire usage à des fins de propagande. Parce que cela
22 apportait aux Musulmans la sympathie du monde entier.
23 Donc je ne serais pas surpris, à la lumière de ceci, que cet
24 événement de Tuzla que vous venez de porter à mon intention et dont il est
25 question dans le journal du Pr Koljevic, je ne serais donc pas surpris que
26 cet événement, lui aussi, appartienne à cette même catégorie. Cependant, je
27 dois souligner que je n'ai aucune connaissance, aucun élément d'information
28 qui me permettrait de dire quoi que ce soit avec la moindre certitude en la
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1 matière. Et je crois devoir ajouter également que, tout comme le Pr
2 Koljevic le dit ici, il aurait sans le moindre doute été tout à fait
3 contraire aux intérêts serbes d'agir de la sorte.
4 Q. Merci.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on verser au dossier cette page du journal
6 du Pr Koljevic, bien que, à vrai dire, il serait préférable de verser au
7 dossier les deux volumes de cet ouvrage dans leur intégralité.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] M. Zametica a dit n'avoir aucune
9 connaissance de ceci et toutes les réponses qui ont une importance ont été
10 consignées. Donc, est-ce que nous devons malgré tout verser ceci au dossier
11 ? Maître.
12 M. ROBINSON : [interprétation] Eh bien, je crois que puisque nous avons
13 également eu la déclaration de Deronjic, et vous avez décidé de la verser
14 au dossier --
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Mais dans ce cas précis, les
16 passages importants ont été lus à haute voix et consignés au compte rendu.
17 M. ROBINSON : [interprétation] Bien. Dans ce cas-là, je crois que cela
18 devrait suffire.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Poursuivez, s'il vous
20 plaît.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. En fait, pour être tout à fait
22 clair, je souhaitais simplement demander au Dr Zametica si ce schéma était
23 connu de lui et dans quelle mesure il pouvait considérer que c'était bien
24 de cela qu'il s'agissait avec un certain degré de certitude.
25 M. KARADZIC : [interprétation]
26 Q. Alors, Docteur Zametica, vous avez également entendu les questions qui
27 vous ont été posées au sujet de la connaissance que vous aviez des
28 événements survenus à Srebrenica. Je voudrais vous présenter un autre
Page 42561
1 extrait du journal du Pr Koljevic, donc, pièce 1D9748. Pendant que nous en
2 attendons l'affichage, est-ce que nous avions un seul ou plusieurs
3 commissaires civils pour Srebrenica, si vous le savez ?
4 R. Je n'arrive pas à m'en souvenir.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez répéter votre
6 réponse ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me rappelle pas combien de commissaires
8 civils nous avions pour Srebrenica.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Peut-on afficher la page 3. Peut-on
10 faire défiler la page vers le bas.
11 M. KARADZIC : [interprétation]
12 Q. J'attire votre attention sur le dernier paragraphe :
13 "Pour l'essentiel, nous subissons de nouveau d'énormes pressions de la part
14 des médias. On parle du plus grand nettoyage ethnique, bien que les
15 Musulmans aient quitté Srebrenica de leur plein gré en présence de la
16 FORPRONU. J'ai discuté de ceci avec notre commissaire nouvellement nommé à
17 Srebrenica, qui a étudié il y a une dizaine d'années à la faculté de
18 philosophie de Sarajevo, et c'est de lui, de sa bouche, que j'ai entendu
19 qu'il n'y avait véritablement eu aucun meurtre de civils et que les
20 Musulmans ne souhaitaient pas rester à Srebrenica, que ce soit par peur
21 compte tenu du fait qu'ils savaient ce que leurs combattants avaient fait
22 aux Serbes dans les secteurs environnants ou à cause de menaces venant de
23 Sarajevo. Ils ont reçu l'ordre de partir, ils l'ont reçu directement de
24 Sarajevo."
25 Alors, comment ceci cadre-t-il avec votre expérience et votre connaissance
26 ? Il s'agit du 21 juillet 1995 et de sa rencontre avec notre commissaire
27 civil.
28 R. Vous vous souviendrez que j'étais déjà parti de Pale, j'étais parti au
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1 Monténégro ce jour-là, donc je n'ai pas pu en parler avec le Pr Koljevic,
2 même si je le rencontrais quotidiennement, presque aussi fréquemment que je
3 réunissais avec vous. Je peux, toutefois, tout à fait considérer que ce
4 qu'écrit ici le Pr Koljevic est entièrement juste.
5 Je souhaite ajouter que de mon point de vue, donc subjectivement,
6 mais de mon point de vue, le journal du Pr Koljevic constitue une source
7 très importante quant aux événements survenus pendant la guerre en Bosnie-
8 Herzégovine. C'est une source de la plus grande authenticité. Il avait
9 l'habitude d'enregistrer sur un dictaphone les événements de la journée
10 tard le soir avant d'aller se coucher, et je crois que le lendemain son
11 secrétaire dactylographiait ceci. Donc c'est une source d'une très grande
12 authenticité quant à tous les événements qui se sont produits. Et je
13 souhaite ajouter que le Pr Koljevic était un homme d'une très grande
14 intégrité, que l'on ne peut absolument pas soupçonner d'avoir inventé quoi
15 que ce soit dans son journal. C'est simplement ce que je souhaitais ajouter
16 à cet égard.
17 Q. Merci, Docteur Zametica. Est-ce que le fait que déjà depuis la mi-
18 janvier 1997 le Dr Koljevic n'était plus parmi nous, est-ce un fait qui a
19 une importance d'après vous ? Puisqu'il n'avait plus la possibilité
20 d'apporter quoi que ce soit dans son journal.
21 R. Je n'ai pas très bien compris votre question. Pourriez-vous la poser
22 autrement ?
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Peut-être que vos propos se chevauchent,
24 surtout en ce qui concerne la traduction. Pourriez-vous répéter la réponse
25 ? Et puis, je vais vous demander à l'avenir de marquer un temps de pause
26 entre la question et la réponse.
27 M. KARADZIC : [interprétation]
28 Q. J'ai voulu vous demander quel est votre point de vue là-dessus, à
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1 savoir tout d'abord quand est décédé le Dr Koljevic, d'après ce que vous
2 savez.
3 R. Eh bien, c'est très connu. Il s'est suicidé, je pense, au mois de
4 janvier 1997.
5 Q. Merci. Est-ce que vous avez eu des contacts proches avec le Dr Koljevic
6 pendant que vous participiez à la délégation de Dayton ?
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton.
8 Mme EDGERTON : [interprétation] Au cours de notre contre-interrogatoire,
9 nous avons pas du tout mentionné le Dr Koljevic. Donc je considère que ces
10 questions ne cadrent pas avec le contre-interrogatoire.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] On a parlé de son journal dans
12 l'interrogatoire principal.
13 Mme EDGERTON : [interprétation] Nous avons discuté d'une page de son
14 journal. Mais nous n'avons pas parlé du rapport du témoin avec le Dr
15 Koljevic, de sa présence à Dayton éventuelle, et cetera. Donc toutes les
16 questions qu'on est en train de poser au témoin, eh bien, elles ne
17 découlent pas du contre-interrogatoire.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson.
19 M. ROBINSON : [interprétation] Je pense qu'il serait utile que M. Karadzic
20 montre au témoin le document suivant qui est peut-être pertinent.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais ajouter que le Dr Zametica a dit
22 qu'il s'agissait là d'un document très fiable et très important, et c'est
23 pour cela que j'ai voulu établir jusqu'à quelle date M. Koljevic était en
24 mesure de tenir son journal.
25 M. KARADZIC : [interprétation]
26 Q. Et puis, maintenant, cette question au sujet de Dayton. Est-ce que vous
27 étiez ensemble dans la délégation à Dayton ? Est-ce qu'il était aussi bien
28 que vous le membre de cette délégation ?
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1 R. Oui. Le Pr Koljevic était membre de la délégation de la Republika
2 Srpska au cours des négociations de paix à Dayton, et donc, effectivement,
3 nous étions en contact au jour le jour. Donc la réponse est oui.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais demander que l'on montre dans le
5 système de prétoire électronique le document 1D09751. La page 3, s'il vous
6 plaît. Donc, là, nous avons une entrée pour le 19 novembre 1995.
7 M. KARADZIC : [interprétation]
8 Q. Et puis, je vais vous demander d'examiner le premier paragraphe, donc
9 ce qui est écrit ici. Si vous le souhaitez, je peux vous donner lecture de
10 cela.
11 "Cependant, la campagne anti-Serbe de La Haye a continué sans merci
12 jusqu'au bout. Vendredi, le 17 novembre, le 'New York Times', à nouveau, a
13 tiré son artillerie verbale contre Karadzic et Mladic avec des détails
14 frais et terrifiants des faits allégués de Srebrenica, en décrivant comment
15 les enfants musulmans ont été tués devant leurs mères, devant un grand-père
16 que l'on a forcé à manger le foie de son petit-fils. Si tout cela était
17 vrai, ces soldats serbes ne seraient pas traduits devant le Tribunal de La
18 Haye mais devant un tribunal militaire serbe qui les punirait de la façon
19 la plus drastique possible. Heureusement, mais aussi on peut dire qu'on le
20 regrette, ces histoires ressemblent beaucoup trop au 'témoignage'
21 imaginaire de nos ex-voisins, et il est parfaitement impossible de croire
22 ces histoires."
23 Comment vous pouvez faire un lien entre ce que nous venons de lire et
24 ce que vous avez vu dans les médias concernant les Serbes ? Est-ce qu'on
25 pouvait vraiment croire ces médias ? Et est-ce que vous étiez de la même
26 opinion que le Pr Koljevic à ce sujet ?
27 R. Eh bien, le Pr Koljevic dans son journal a écrit des informations qui
28 datent de la période de Dayton, donc il est clair qu'il était en train de
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1 lire les médias américains. Et c'est quelque chose dont nous étions
2 conscients à l'époque. Mais je dois dire aussi qu'à l'époque, on était bien
3 plus préoccupés, pas par la propagande contre les Serbes de Bosnie, mais
4 plutôt nous étions préoccupés par le cours que prenait la conférence à
5 Dayton. Et donc, nous n'en avons pas beaucoup parlé.
6 Mais je voudrais ajouter quelque chose, parce que tout ceci se
7 déroule au moment, justement, de la conférence de Dayton. Je dois dire que
8 pendant la conférence de Dayton, même si nous, en tant que délégation et en
9 tant qu'individus faisant partie de la délégation de la Republika Srpska,
10 même si nous étions fréquemment en contact avec les représentants des
11 organisations internationales qui étaient présentes sur place, et tout le
12 monde était présent d'ailleurs, l'Union européenne, le Groupe de contact --
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Attendez. Attendez, Monsieur Zametica,
14 parce que je me demande dans quelle direction nous nous dirigeons en ce
15 moment. Parce que je ne suis vraiment pas sûr que c'est une question qui
16 découle du contre-interrogatoire.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Moi, j'ai demandé au témoin s'il partageait la
18 même opinion que le Pr Koljevic, et le Dr Zametica voulait justement
19 décrire les informations qui leur parvenaient pendant qu'ils étaient à
20 Dayton. Donc, vers la fin du mois de novembre. Concernant justement les
21 informations, les informations auxquelles on avait accès à l'époque. Donc
22 la question porte sur les informations qui nous arrivaient à l'époque.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que le Dr Zametica a répondu à
24 votre question. Et si vous avez besoin d'autres éléments, eh bien, veuillez
25 lui poser la question.
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
27 M. KARADZIC : [interprétation]
28 Q. Pendant la conférence à Dayton, est-ce que vous avez reçu davantage
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1 d'information oralement que les informations qui vous parvenaient dans les
2 médias écrits ? Est-ce que l'on a abordé les crimes de Srebrenica lors de
3 la conférence ?
4 R. Oui, justement, j'ai voulu en parler, mais le Président m'a interrompu,
5 donc je vais poursuivre. Même si tout le monde était présent à Dayton, donc
6 les représentants de la communauté internationale, j'ai commencé à les
7 énumérer, l'Union européenne, le Groupe de contact, et cetera, et, bien
8 sûr, les Etats-Unis [comme interprété], la conférence s'est déroulée sur
9 trois semaines. Elle a duré trois semaines, donc une période assez longue.
10 Mais personne, personne de la communauté internationale n'a jamais, que je
11 sache, soulevé la question de Srebrenica, ne nous a parlé de la question de
12 Srebrenica.
13 Q. Merci. Et puis, la dernière question, et là, il s'agit plutôt de
14 l'interprétation. Quand vous avez dit que j'étais un président faible, est-
15 ce que vous vouliez dire que j'étais un mauvais président ? Parce que c'est
16 ce que l'on a pu trouver dans les médias --
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne pense pas que Mme Edgerton ait
18 posé cette question ou des questions à ce sujet.
19 Mme EDGERTON : [aucune interprétation]
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais il s'agit d'un problème de traduction.
21 Parce que là, vous avez une phrase en anglais qui doit être traduite
22 différemment en serbe. Il s'agit d'une demi-phrase, pas plus, alors je vous
23 demande de me permettre de poser cette question.
24 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
25 [La Chambre de première instance se concerte]
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pourrais poser la question autrement.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cette question ne découle pas du contre-
28 interrogatoire, mais il semblerait qu'il s'agisse d'un problème de
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1 traduction, donc, de la signification de certains termes, donc on vous
2 permet de poser la question, effectivement.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
4 M. KARADZIC : [interprétation]
5 Q. Docteur Zametica, au cours du contre-interrogatoire, l'on a contesté
6 votre point de vue à savoir que je ne contrôlais pas tous mes éléments.
7 Sans doute que vous vous êtes référé au statut constitutionnel de la
8 fonction du président. Que vouliez-vous dire par là ? Est-ce que vous
9 vouliez dire que j'étais un mauvais président ou bien un président qui ne
10 contrôlait pas ses institutions mais qui les laissait travailler ?
11 R. Je pense que vous avez posé une question légitime parce que là il
12 s'agit bel et bien d'un problème de traduction. Le terme anglais "faible",
13 quand on le traduit vers la langue serbe, on en arrive à la traduction
14 "slab", donc "faible" en serbe. Mais dans la langue serbe, c'est un terme
15 qui a une double signification. Cela peut vouloir dire faible, mais aussi
16 mauvais, donc pas bon. Eh bien, je voudrais bien dire cela : quand j'ai dit
17 que vous étiez un président faible, je n'ai voulu pas dire que vous étiez
18 un mauvais président. Je voulais dire que vous étiez un président faible
19 dans le sens anglais du terme.
20 Mme EDGERTON : [interprétation] Je suis en train de regarder le compte
21 rendu d'audience de ces derniers jours et je n'ai jamais vu ce mot, le mot
22 "faible" en anglais, dans le compte rendu d'audience, donc peut-être qu'il
23 y a un problème d'interprétation ici.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est pendant l'interrogatoire principal
25 que l'on en a parlé.
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Mais au cours du contre-interrogatoire, on
27 a justement contesté cela, c'est-à-dire que l'on a contesté la position du
28 Dr Zametica. Et on voulait faire valoir, au contraire, que j'avais un
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1 contrôle fort des institutions.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] On ne va pas aller plus loin sur ce
3 terme.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
5 M. KARADZIC : [interprétation]
6 Q. Merci, Docteur Zametica. Je n'ai pas d'autres questions.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Eh bien, avec ceci se termine votre
8 déposition, Monsieur Zametica. Au nom des Juges de la Chambre et au nom du
9 Tribunal, je souhaite vous remercier d'être venu à La Haye pour déposer. A
10 présent, vous pouvez disposer.
11 [Le témoin se retire]
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le témoin suivant est prêt à témoigner ?
13 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, effectivement, Monsieur le Président.
14 C'est le général Milenko Zivanovic.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, devons-nous verser au
16 dossier ces pages, ou bien vous pensez qu'il est suffisant de les avoir
17 lues pour le compte rendu d'audience ?
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que vous les avez lues et cela
19 nous suffit.
20 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur, je vais vous demander de
22 prononcer la déclaration solennelle.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
24 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
25 LE TÉMOIN : MILENKO ZIVANOVIC [Assermenté]
26 [Le témoin répond par l'interprète]
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Général Zivanovic. Vous pouvez
28 vous asseoir et vous pouvez vous mettre à l'aise.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de commencer votre déposition, je
3 dois attirer votre attention sur certaines règles qui prévalent ici devant
4 ce Tribunal. C'est l'article 90(E) du Règlement de procédure et de preuve.
5 D'après cet article, vous pouvez refuser de répondre aux questions posées
6 par M. Karadzic, le Procureur ou même les Juges si vous pensez que vous
7 pourriez vous incriminer en répondant à ces questions. Et dans ce contexte,
8 quand je dis "vous incriminer", je veux dire qu'il s'agirait des éléments
9 qui pourraient correspondre à un aveu de culpabilité pour un crime ou que
10 vous pourriez dire quelque chose qui indiquerait que vous avez commis un
11 crime. Mais je dois vous dire que, donc, vous pouvez refuser de répondre à
12 cette question; cela étant dit, les Juges de ce Tribunal ont la possibilité
13 de vous forcer à répondre tout de même à la question. Mais dans ce cas, la
14 réponse obtenue de la sorte ne pourrait en aucun cas être utilisée contre
15 vous pour des crimes autres que le crime de faux témoignage.
16 Est-ce que vous m'avez compris ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vous ai compris.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Général Zivanovic.
19 Monsieur Karadzic, vous pouvez continuer.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
21 Interrogatoire principal par M. Karadzic :
22 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Général.
23 R. Bonjour, Docteur Radovan Karadzic.
24 Q. Eh bien, je vais vous demander d'observer un temps de pause entre mes
25 questions et vos réponses pour gagner du temps parce que, dans le cas
26 contraire, il faudra apporter des corrections à nos propos parce qu'il faut
27 du temps aux interprètes pour nous interpréter.
28 R. Oui, je vais faire un effort pour parler clairement pour que tout le
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1 monde puisse comprendre.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais là, vous avez répondu trop
3 rapidement. Il faut attendre que l'interprétation soit terminée. Donc,
4 respectez un temps de pause, s'il vous plaît.
5 M. KARADZIC : [interprétation]
6 Q. Général, est-ce que vous avez fait une déclaration pour mon équipe de
7 Défense ?
8 R. Oui, je l'ai faite, et je l'ai signée aussi.
9 Q. Merci.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais demander que l'on présente dans le
11 système de prétoire électronique le document 1D09060.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Quel est ce document ?
13 M. KARADZIC : [interprétation]
14 Q. C'est votre déclaration, vous allez la voir. Et je vais vous demander
15 de me confirmer si c'est bien la déclaration que vous avez faite. Est-ce
16 bien la déclaration que l'on voit sur l'écran à présent ?
17 R. Un instant, s'il vous plaît. Oui, c'est bien cela.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais demander que l'on montre la dernière
19 page au témoin pour qu'il puisse reconnaître sa signature.
20 M. KARADZIC : [interprétation]
21 Q. Général, est-ce que vous avez bien lu cette déclaration et est-ce que
22 vous l'avez signée ?
23 R. Oui.
24 Q. Merci. Est-ce que cette déclaration traduit fidèlement vos propos, ce
25 que vous avez dit à l'équipe de la Défense ?
26 R. Oui.
27 Q. Attendez un petit instant. Parce que j'ai l'impression que la version
28 que l'on a sur l'écran, c'est la version non définitive de la déclaration.
Page 42571
1 Entre la première déclaration et pendant la session de récolement, est-ce
2 que vous avez voulu apporter quelques corrections à la déclaration ?
3 R. Oui, j'ai voulu compléter. J'ai ajouté quelques éléments d'information,
4 et je l'ai signée.
5 Q. Et donc, c'est quelque chose qui a été fait plus tard, n'est-ce pas, au
6 mois d'octobre ?
7 R. Oui.
8 Q. Bien. On va voir aussi sur l'écran cette version-là de la déclaration.
9 Mais dites-moi, si aujourd'hui, si je vous posais les mêmes questions que
10 les questions que l'on vous a posées à l'époque, est-ce que vous répondriez
11 de la même façon, donc, de la façon dont vous avez répondu dans la version
12 définitive de la déclaration ?
13 R. Oui.
14 Q. Merci.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez téléchargé ces
16 éléments supplémentaires avec un numéro à part ?
17 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, effectivement. C'est le numéro 1D9753.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, excusez-moi, parce que j'ai cité la
19 mauvaise cote. C'est la bonne cote, et je vais demander qu'on montre donc
20 ce document dans le système de prétoire électronique. Surtout sa dernière
21 page.
22 M. KARADZIC : [interprétation]
23 Q. Le 27 octobre, est-ce bien le jour où vous avez signé cette déclaration
24 mise à jour ?
25 R. Oui.
26 Q. Merci.
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Et je vais demander que cette déclaration soit
28 versée au dossier en vertu de l'article 92 ter.
Page 42572
1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons parler des pièces connexes
2 plus tard. Madame Pack, est-ce que vous avez une objection quant au
3 versement de la déclaration et de son addendum ?
4 Mme PACK : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'ai une question tout de même au sujet
6 du paragraphe 40 et 41, où il dit qu'il n'a pas participé à cette
7 conversation interceptée alléguée. Quelle est la pertinence ? Parce que
8 j'ai du mal à comprendre pourquoi on veut verser cela. Est-ce que vous
9 voulez faire cela pour empêcher le Procureur de verser cette conversation
10 interceptée ?
11 M. ROBINSON : [interprétation] Je pense que c'est cela l'idée. Mais si vous
12 ne souhaitez pas verser cela, nous n'allons pas insister.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Tout d'abord, je vais poser la question
14 à Mme Pack : est-ce que vous vouliez présenter ces deux conversations
15 interceptées ? Sinon, nous allons demander à la Défense de biffer ces deux
16 paragraphes.
17 Mme PACK : [interprétation] Non, moi, je n'ai pas eu l'intention de traiter
18 de ces deux conversations interceptées. Mais de toute façon, ces documents
19 ont été versés au dossier par le biais d'un autre témoin en tant que pièce
20 P05294. C'est la version expurgée et sous pli scellé en tant que pièce
21 P0293 [comme interprété] --
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel est ce document ?
23 Mme PACK : [interprétation] Eh bien, c'est le document qui est identifié en
24 tant que document 1D09010.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans ce cas-là, il faudrait garder le
26 paragraphe, parce qu'il parle justement de --
27 Mme PACK : [interprétation] Eh bien, il appartient à l'accusé de voir. En
28 ce qui nous concerne, les choses sont claires. C'est une conversation
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1 interceptée qui a été versée par le biais d'un autre témoin. Et en ce qui
2 concerne le paragraphe suivant, là, on est dans le même cas de figure.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans ce cas-là, nous allons verser ces
4 documents tels quels, sans rien changer, aussi bien la déclaration que
5 l'addendum. Je vais demander que l'on attribue des cotes à ces documents.
6 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que dans l'addendum nous avons
8 aussi la déclaration ?
9 M. ROBINSON : [interprétation] Oui.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Dans ce cas-là, nous allons le
11 verser.
12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document 65 ter 1753 [comme
13 interprété] va devenir la pièce à conviction D3932.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mis à part ces deux conversations
15 interceptées, est-ce que vous avez d'autres objections quant aux pièces
16 connexes, Madame Pack ?
17 Mme PACK : [interprétation] Oui, effectivement, j'ai quelques objections
18 par rapport à ces pièces connexes. En ce qui concerne le document 1D09017,
19 c'est un petit point d'observation, mais je dois qu'on n'a pas étayé la
20 base pour verser au dossier les photos qui se trouvent sur les pages 1 et 3
21 du document. On a téléchargé uniquement la page 2. En ce qui concerne le
22 document 1D09025, là, c'est un article -- à savoir, une interview, une
23 interview du témoin, mais c'est ce qui se trouve uniquement sur les pages 1
24 et 2 du document qui est versé au dossier. Et dans la troisième page, on
25 trouve un autre article, et je m'oppose à ce que l'on verse la troisième
26 page.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dont les deux derniers chiffres sont 25
28 ?
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1 Mme PACK : [interprétation] Oui, c'est bien cela.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais ce document, l'interview, qui
3 comporte justement ce numéro 65 ter, se termine à la page 27.
4 Mme PACK : [interprétation] Ah, merci, Monsieur le Président. Oui, vous
5 avez tout à fait raison. Donc c'est le document auquel j'ai fait référence.
6 C'est le document avec l'interview.
7 Ensuite, en ce qui concerne le document P04553, il s'agit d'un ordre
8 du président du 14 juillet, on n'a pas étayé la base pour le paragraphe 36
9 pour, donc, verser au dossier cette pièce à conviction.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais ce document a peut-être déjà été
11 versé au dossier.
12 Mme PACK : [interprétation] Oui, peut-être -- peut-être que dans la
13 déclaration on fait référence à une pièce qui n'est pas la bonne. Mais je
14 vous -- la décision vous appartient.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Moi, je ne pense pas que la Défense
16 souhaite verser ce document.
17 Mme PACK : [interprétation] Une autre pièce également, la pièce P5219. Je
18 voudrais, simplement à titre d'avertissement, préciser que cette pièce a
19 déjà été admise sous pli scellé, et cela devrait rester le cas.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour ces deux conversations, donc l'une
21 a déjà été admise, comme Mme Pack vient de le faire observer, donc cela ne
22 pose aucun problème. Mais pour ce qui est du reste, 1D9018, il n'y a pas de
23 fondement pour l'admission. Donc nous n'allons pas admettre ce document au
24 dossier. Et les Juges de la Chambre estiment que le document suivant ne
25 constitue pas partie inséparable ou indispensable de la déclaration
26 préalable ou que le témoin n'a pas suffisamment parlé de ce document. Les
27 documents concernés sont : le 1D9003 qui fait l'objet du paragraphe 17; le
28 1D9016, paragraphe 47; et -- c'est tout. Donc n'allons pas admettre ces
Page 42575
1 documents-là.
2 Et enfin, le 1D9021 constitue une déclaration distincte, pour ainsi dire.
3 Je ne suis pas certain si ce type de document peut être versé au dossier en
4 tant que pièce connexe ou afférente. Si la Défense a l'intention de le
5 verser au dossier, à ce moment-là je demanderais à l'accusé de poser des
6 questions à ce sujet au témoin directement pour qu'on ait un témoignage de
7 vive voix.
8 Je pense que notre décision est suffisamment claire.
9 Et enfin, je suppose que cela ne posera aucun problème à la Défense si
10 seule page 2 est admise au dossier, comme Mme Pack l'a annoncé.
11 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, c'est exact, Monsieur le Président. Et
12 pour ce qui est du document 9027, nous n'allons admettre que les pages 1 et
13 2.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela m'a échappé. Les Juges de la
15 Chambre estiment que cela ne constitue pas partie inséparable et
16 indispensable, donc nous n'allons pas le verser au dossier. Si la Défense
17 estime que cela est important, il faudra poser des questions dans le
18 prétoire pour avoir une déposition de vive voix. Et avec cette réserve
19 près, le reste du document peut être admis au dossier. Le Greffe attribuera
20 les cotes en temps voulu.
21 Monsieur Karadzic.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie. Je me propose de donner
23 lecture d'une brève déclaration du général Zivanovic à présent en anglais.
24 Le général Milenko Zivanovic a occupé le poste de commandant du Corps de la
25 Drina de l'armée serbe de Bosnie, de la VRS, à partir du mois de novembre
26 1992 jusqu'au mois de juillet 1995. Le Corps de la Drina avait pour mission
27 principale de défendre la population serbe de la zone de la vallée de la
28 Drina en Bosnie orientale. Les forces musulmanes dans les enclaves de
Page 42576
1 Srebrenica, Zepa et Gorazde n'arrêtaient pas de lancer des attaques contre
2 des civils serbes. Ils ont incendié des maisons serbes et tué femmes,
3 enfants et personnes âgées. Le Corps de la Drina prônait une véritable
4 démilitarisation de cette zone, mais cela n'a jamais eu lieu.
5 En dépit de l'échec de la démilitarisation des enclaves, le général
6 Zivanovic a facilité l'approvisionnement en aide humanitaire de la
7 population de ces zones, et ce, par les Nations Unies et par les
8 organisations humanitaires internationales.
9 A partir du moment où les Musulmans de Bosnie avaient élargi le
10 secteur de l'enclave de Srebrenica pour qu'elle touche et soit liée à celle
11 de Zepa, et lorsqu'ils se sont servi de ce passage afin de passer en
12 contrebande des armes vers l'enclave de Srebrenica en juillet 1995, le
13 Corps de la Drina a déployé des efforts pour séparer les enclaves. Après le
14 début de cet effort, le général Zivanovic a eu une conversation par
15 téléphone avec le président Karadzic, et cette conversation a été
16 enregistrée. Au cours de la conversation, le président Karadzic a souligné
17 que le personnel des Nations Unies déployé à Srebrenica devait être traité
18 correctement. Il n'y a jamais eu de plan afin de déloger ou tuer des
19 Musulmans de Bosnie de Srebrenica, et il n'a jamais parlé avec le président
20 Karadzic d'un tel plan.
21 Le général Zivanovic a eu une autre conversation par téléphone avec
22 le président Karadzic la nuit après que l'armée serbe de Bosnie soit entrée
23 dans Srebrenica. Le président Karadzic a demandé ce qu'il en était du
24 nombre de victimes et s'est montré satisfait lorsqu'on lui a dit qu'il n'y
25 avait pas eu de victimes. Il n'y a jamais eu de conversation entre le
26 général Zivanovic et le président Karadzic sur une exécution de
27 prisonniers. Le général Zivanovic, d'après son expérience et ses contacts
28 avec le président Karadzic, est tout à fait convaincu que le président
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1 Karadzic n'aurait jamais été favorable ou n'aurait jamais approuvé une
2 telle exécution de prisonniers. Le général Zivanovic n'était pas au courant
3 de l'existence d'un plan visant à exécuter les prisonniers de Srebrenica et
4 n'avait pas la moindre idée que qui que ce soit ferait une telle chose.
5 Le général Zivanovic n'a jamais informé le président Karadzic du fait
6 que les prisonniers de Srebrenica seraient, étaient ou avaient été
7 exécutés. Le général Zivanovic n'a jamais vu un rapport écrit, un document
8 dans lequel on aurait mentionné l'exécution de prisonniers de Srebrenica.
9 M. KARADZIC : [interprétation]
10 Q. Avant que je ne cède ma place au Procureur pour qu'il vous contre-
11 interroge, j'aimerais savoir s'il est vrai que vous avez remis une carte,
12 Général, à la Défense ?
13 R. Oui.
14 Q. Je vous remercie.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document 1D9755 dans
16 le prétoire électronique. Est-ce qu'on peut agrandir
17 cela ?
18 M. KARADZIC : [interprétation]
19 Q. Est-ce que vous pourriez nous donner lecture du titre de cette carte ?
20 Qu'est-ce qui est mentionné sur cette carte et pourquoi est-ce important ?
21 R. Cette carte constitue un document qui s'est trouvé dans mon bureau à
22 partir du moment où il a été réalisé, en février 1993, jusqu'à -- et nous
23 voyons qu'il a survécu jusqu'à aujourd'hui.
24 Q. Mais qu'est-ce qui rend ce document important ? Quelle est sa
25 signification ?
26 R. Le titre nous dit :
27 "Aperçu de la destruction des villages serbes sur le territoire des
28 municipalités de Srebrenica et de Bratunac à partir du mois de mai 1992
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1 jusqu'en janvier 1993."
2 Autrement dit, ici, il n'est pas encore question d'enclaves. C'est le tout
3 début du conflit et de la guerre dans ces contrées.
4 Q. Je vous remercie. Et qui est l'auteur de cette carte ?
5 R. Ce sont mes spécialistes supervisés par moi directement qui ont produit
6 cette carte. Pourquoi ? Parce que c'est un document qui a une importance
7 cruciale sur le plan de la vérité, parce qu'il nous montre que le peuple
8 serbe a été pratiquement anéanti dans cette région-là.
9 Q. Je vous remercie. Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre, s'il vous
10 plaît, ce qui s'est produit à partir du mois de janvier 1993 et pourquoi ?
11 Ou, surtout, dites-nous pourquoi c'est uniquement en janvier ou en février
12 1993 que vous avez mis fin ou interrompu cet état des choses ?
13 R. Si on prend en considération cette carte dans sa totalité, ce que l'on
14 peut voir, c'est que pratiquement plus de 90 % du territoire des
15 municipalités de Srebrenica et de Bratunac a été physiquement détruit. Ce
16 que l'on voit sur cette carte, ce sont des frappes lancées par les forces
17 armées musulmanes de Srebrenica, et ce, au fil des mois. Et nous pouvons
18 voir cela dans la légende. Est-ce qu'on peut nous afficher la légende, s'il
19 vous plaît ? Voilà, c'est bien.
20 Q. A quel moment est-ce qu'on a créé le Corps de la Drina et pour quelle
21 raison ?
22 R. Le Corps de la Drina a été constitué le 1er novembre 1992. L'objectif
23 principal de sa création était d'empêcher que la population serbe ne soit
24 totalement anéantie dans cette zone de Zvornik à Visegrad, y compris Han
25 Pijesak, Sokolac et Rogatica, ces trois municipalités.
26 Q. Est-ce que vous pouvez maintenant nous expliquer un petit peu la
27 légende et les couleurs ? Ou plutôt, les formes tout d'abord, les cercles
28 et les rectangles ?
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1 R. Oui, c'est bien. Ces symboles - dans le jargon militaire, ce sont des
2 symboles topographiques - nous indiquent, et ce, par moi, quel a été l'axe
3 de mouvement des forces ennemies, des forces musulmanes, et leurs actons
4 contre les forces serbes. Alors, les cercles que nous voyons nous montrent
5 les conséquences des activités de l'armée musulmane au mois de mai 1992, et
6 c'est ce que nous pouvons retrouver dans la légende. Chacun de ces cercles
7 correspond à une localité serbe.
8 Q. [aucune interprétation]
9 R. Attendez. Si vous me permettez. Cela veut dire que là où il y a eu un
10 cercle, le village a été détruit. Tous ceux qu'on a pu tuer -- donc, pour
11 ce qui est de la population, elle a été soit tuée, soit blessée, et ceux
12 qui ont eu un peu de chance ont pu prendre la fuite.
13 Si l'on se penche sur ces résultats des activités du mois de mai dans cette
14 légende, et si l'on voit les activités du mois de juin. Eh bien, en juin on
15 verra les carrés. Justement, là, nous sommes en train de montrer mon
16 village natal. Le 21 juin, ce village a été complètement détruit, et non
17 seulement le village mais tous les hameaux qui en dépendaient. Et si vous
18 pouviez, s'il vous plaît, attendre un instant, attendez, avec les
19 explications de cette carte.
20 Mme PACK : [interprétation] Objection.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Pack.
22 Mme PACK : [interprétation] Cela semble s'annoncer comme constituant un
23 examen approfondi des crimes allégués commis contre la population civile
24 serbe. A partir du moment où cela devait être le cas, je m'y opposerais, je
25 soulèverais une objection. La Chambre a déjà fait savoir qu'elle
26 n'accepterait pas des éléments de preuve tu quoque. Donc je pense que juste
27 quelques questions de ce genre peuvent être acceptées.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce sont les raisons qui ont présidé à la
2 création du Corps de la Drina que je souhaite obtenir de la part de ce
3 témoin, les raisons et les objectifs des forces armées musulmanes qui ont
4 conditionné le comportement du Corps de la Drina. Donc il s'agit pas du tu
5 quoque. Je ne cherche pas de justification; je cherche à comprendre pour
6 quelle raison on a cherché à créer le Corps de la Drina.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, les Juges de la Chambre vont vous
8 permettre de continuer puisque cela pourrait peut-être nous permettre de
9 comprendre le contexte et les raisons de la création du Corps de la Drina.
10 Mais il faut savoir que ce n'est pas très utile si vous examinez cela avec
11 trop de détails.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
13 M. KARADZIC : [interprétation]
14 Q. Mon Général, puisque, à l'évidence, nous n'avons pas suffisamment de
15 temps, est-ce que vous pouvez résumer, s'il vous plaît ? Donc les cercles
16 nous montrent les villages qui ont été incendiés en mai, les carrés
17 correspondent aux villages détruits en juin. Est-ce que vous pouvez nous
18 dire quels ont été les objectifs de ces actions de l'ABiH qui ont entraîné
19 par la suite vos actions ?
20 R. Comme je l'ai déjà dit, la légende nous montre ces différents symboles
21 géométriques et ils sont répartis d'après les localités qui ont été
22 détruites au fil des mois et cela se termine au 17 janvier 1993. Et nous
23 avons le chiffre au final 157, 157 localités indépendantes qui ont été
24 détruites.
25 Q. Très bien. Alors, quel a été l'objectif de ces actions menées par des
26 groupes armés dans nos arrières ? Ou plutôt, où était situé le front vis-à-
27 vis de l'ABiH à ce moment-là ?
28 R. Hélas, ces villages n'étaient pas défendus, n'étaient pas protégés. Il
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1 n'y avait pas de front là. Jusqu'au 42, jusqu'au 19 mai 1992, c'était la
2 JNA qui avait compétence sur ces régions-là, l'armée populaire yougoslave.
3 Et il faudra leur demander à eux quels sont les rapports qu'ils ont reçus
4 sur la destruction de ces villages et sur l'extinction de toute vie là-
5 dedans.
6 Q. Est-ce que l'ABiH avait des raisons particulières pour continuer à
7 combattre dans cette zone pour que la guerre ne se termine pas là ?
8 R. Ecoutez, il ne faut pas être particulièrement sensé pour comprendre que
9 c'est un nettoyage ethnique classique mené contre la population non
10 musulmane. Je ne sais pas comment vous dire cela, en quels termes, mais il
11 n'y a pas une seule maison qui aurait été épargnée, pas une seule famille
12 serbe à qui on aurait donné la possibilité de se maintenir là, de continuer
13 d'y vivre. Si cela avait continué, eh bien, ces massacres auraient été sans
14 fin. Donc on a eu pour seule option de créer un corps d'armée qui pourrait
15 couvrir l'ensemble de ces zones et empêcher l'anéantissement total de la
16 population serbe dans ces contrées.
17 Q. Je vous remercie. Et les raisons militaires, pourriez-vous nous les
18 expliquer, les raisons stratégiques, pour quelle raison est-ce qu'on a
19 voulu empêcher ces activités et ces contacts ?
20 R. Mais cela se comprend, toute communication s'arrête - toute
21 communication pacifique, disons - dans ces régions à partir du moment où,
22 le long de la Drina, on ne peut plus communiquer, circuler. Et puisqu'il
23 existe des preuves incontestables qu'on voulait détruire aussi la centrale
24 électrique de Bajina Basta, cela aurait eu l'effet d'un tsunami sans
25 précédent. Puis, cette zone importante sur le plan économique. Toute
26 activité s'est arrêtée.
27 Q. Et où étaient ces gens-là, l'effectif du Corps de la
28 Drina ? Etaient-ce des militaires d'active ? Enfin, est-ce que vous pouvez
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1 nous dire qui étaient ces soldats que vous avez commandés ?
2 R. Alors, pour l'essentiel, pour ce qui est de l'effectif du Corps de la
3 Drina, c'étaient les hommes aptes du cru, donc des municipalités qui vont
4 de Zvornik à Visegrad, Sokolac, Rogatica et l'ensemble de cette zone vers
5 la Drina. Nous étions aussi quelques-uns qui étions des officiers d'active
6 de la JNA mais qui étions aussi originaires de cette zone, et nous avons eu
7 pour charge de créer ce corps d'armée, d'organiser ses différentes unités
8 et de prendre en charge cette zone et sa population.
9 Q. Et vous avez dit que ceux qui ont eu un peu de chance ont pu s'enfuir
10 de ces villages qu'on détruisait. Est-ce que vous avez eu des militaires
11 qui étaient originaires de ces villages détruits ?
12 R. La majorité des soldats du Corps de la Drina étaient effectivement
13 originaires de ces villages détruits, et du jour au lendemain ce sont des
14 gens qui se sont retrouvés sans abri. Quand j'ai vérifié leurs dossiers,
15 leurs renseignements personnels, eh bien, pour la majorité, je me suis
16 rendu compte qu'ils étaient originaires de ces zones. Les Brigades de
17 Milici, de Sekovici, et cetera, vous voyez, lorsque vous consultez leurs
18 noms, vous vous rendez compte que toutes ces unités subordonnées étaient de
19 cette région-là, portaient le nom de ces localités de là-bas.
20 Q. Et est-ce que c'était difficile pour vous d'établir un contrôle sur ces
21 hommes qui avaient tout perdu, leurs foyers, leurs familles, et cetera ?
22 R. Je dois dire très franchement que du côté du commandement, on a dû
23 déployer des efforts considérables pour qu'il n'y ait pas de vengeance,
24 qu'on ne réponde pas au mal par le mal; que tout simplement, à partir du
25 moment où les conditions allaient être réunies de nouveau, qu'on rétablisse
26 la vie normale, mais que l'on ne se livre pas aux actes de vengeance.
27 Q. Je vous remercie.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais que cette carte soit versée au
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1 dossier.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Pack.
3 Mme PACK : [interprétation] Le texte n'a pas été traduit. Je demanderais
4 que cela soit fait. A partir du moment où cela aura été traduit, je ne
5 m'opposerais pas à son admission.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous allons attribuer une
7 cote provisoire ?
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Le document
9 1D9755 de la liste 65 ter devient le document D3954 MFI.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pour l'instant, je n'ai pas d'autres questions
11 à poser au général Zivanovic. Je vous remercie.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Comme vous l'avez constaté, votre
13 déposition dans le cadre de l'interrogatoire principal en l'espèce a été
14 admise par écrit pour la plus grande part de cette déclaration, et cela
15 remplace votre déposition orale. Maintenant, c'est Mme Pack qui va vous
16 contre-interroger au nom du bureau du Procureur.
17 Madame Pack.
18 Mme PACK : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
19 Contre-interrogatoire par Mme Pack :
20 Q. [interprétation] Général, vous avez eu des contacts avec les enquêteurs
21 de l'accusé le 20 mars 2013. Est-ce que vous avez parlé à M. Milomir Savcic
22 ?
23 R. Oui, oui.
24 Q. Et vous lui avez dit que vous avez reçu des menaces de mort par un
25 groupe d'extrémistes musulmans à Vienne, que votre tête avait été mise à
26 prix, et que celui qui apporterait votre tête sur un plateau serait
27 récompensé en or, et vous avez dit que vous ne seriez pas prêt à déposer
28 quel qu'en soit le prix. Est-ce que vous vous rappelez cela ?
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1 R. Oui.
2 Q. Et, en fait, Milomir Savcic n'a pas prêté foi à ce que vous avez dit.
3 Il a dit qu'il pensait que les raisons que vous avez données n'étaient pas
4 vraies et n'étaient pas justifiées, et qu'en fait on vous a donné pour
5 consigne de ne pas déposer. Est-ce exact ? Vous n'avez pas dit la vérité à
6 l'enquêteur de l'accusé ?
7 R. Ecoutez, je vis uniquement aux côtés de la vérité, et je ne baigne que
8 dans la vérité depuis que je suis né. Jusqu'à ce moment, toute ma vie, je
9 n'ai jamais vécu autrement. Et ce que vous venez de dire, qu'en fait on m'a
10 donné pour consigne de ne pas déposer, ça, je ne sais pas qui a dit ça.
11 Qu'est-ce que c'est que ça ?
12 Mme PACK : [interprétation] Je voudrais que l'on consulte le document 25455
13 de la liste 65 ter. Il s'agit d'une note officielle de Milomir Savcic qui
14 porte la trace de cette conversation avec ce témoin.
15 Q. Donc c'est en anglais. Je vais donner lecture de ce dernier paragraphe
16 à votre attention :
17 "Je pense que les raisons qui ont été citées par M. Zivanovic ne sont pas
18 justifiées parce qu'elles ne sont pas véridiques. Je pense qu'il y a eu
19 pour consigne de refuser de déposer," et le texte se poursuit.
20 Alors, est-ce que vous avez inventé ces menaces de mort pour éviter
21 de déposer ?
22 R. Non, rien de tout cela ne tient. D'abord, je ne sais pas d'où vient
23 cette conclusion de M. Savcic, car je connais ce monsieur depuis la guerre.
24 En fait, il ne s'est pas présenté comme un responsable officiel. Il est
25 simplement venu avec un journaliste, comme quoi on était des camarades de
26 guerre et on allait se rencontrer, se parler de manière informelle de ce
27 que nous avons vécu pendant la guerre et d'avant la guerre. Et que j'aurais
28 menti en disant que je n'allais pas venir déposer --
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1 Ecoutez, moi, je suis un invalide, mutilé de guerre, et j'ai eu beaucoup de
2 mal à venir. Mes deux poumons ont été transpercés. J'ai encore un éclat
3 d'obus dans mon corps. Je suis hypertendu. Je souffre de diabète. Mais
4 justement pour le bien de la justice et de la vérité, et compte tenu que
5 j'ai traversé ces temps difficiles, j'ai pu trouver la force de me déplacer
6 et d'être présent ici aujourd'hui, et c'est un honneur pour moi de pouvoir
7 être ici en votre compagnie, avec mes respects les plus profonds.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Cela n'a pas été consigné au compte rendu
10 d'audience, je veux parler du fait qu'il avait encore des éclats d'obus à
11 l'intérieur du corps.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. J'ai parlé de balles. Permettez-moi, s'il
13 vous plaît --
14 Mme PACK : [interprétation]
15 Q. Alors, le Corps de la Drina a été créé le 1er novembre 1992, et vous
16 avez été nommé à la tête de ce corps en qualité de commandant ?
17 R. Oui, c'est exact.
18 Q. Le 8 novembre, peu de temps après la création du corps, vous avez
19 assisté à une réunion en présence de l'accusé, du général Mladic, du
20 ministre de la Défense, Subotic, Krajisnik, ainsi que d'autres commandants
21 de corps. Vous en souvenez-vous de cette réunion qui s'est tenue le 8,
22 réunion qui a duré toute la journée ?
23 R. Alors. écoutez, il faut que vous compreniez qu'il y a eu plusieurs
24 réunions. Alors, pour ce qui est du jour exact, après 20 ans, eh bien, la
25 teneur de ces réunions et la teneur de tous les détails, écoutez, il
26 faudrait que je l'analyse en profondeur avant de pouvoir me souvenir de
27 tout. Il y a eu plusieurs réunions, mais je dois vous dire qu'aucune de ces
28 réunions, en tout cas d'après mes souvenirs, aucune de ces réunions n'a
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1 porté sur des méfaits ou des mauvaises actions. Aucune de ces réunions ne
2 pouvait donner lieu à des violations des lois et coutumes de la guerre.
3 Voici ma réponse.
4 Mme PACK : [interprétation] Alors, nous allons afficher maintenant le
5 P01481.
6 Q. Qui va vous permettre de vous rafraîchir la mémoire. Il s'agit en fait
7 d'un extrait du carnet manuscrit de Mladic. La date qui nous intéresse est
8 celle du 8 novembre 1992.
9 Mme PACK : [interprétation] Page 141 du prétoire électronique dans la
10 version anglaise. Et en B/C/S, il s'agit de la page 141. Est-ce que nous
11 pouvons avoir la transcription en B/C/S plutôt que la version manuscrite,
12 s'il vous plaît. Merci.
13 Q. Il s'agit des notes de Mladic concernant une réunion à laquelle vous
14 avez assisté le 8 novembre 1992. Et vous pouvez constater qu'à cette
15 réunion, c'est une réunion des commandants de corps. L'intitulé qui se
16 trouve en haut, la date qui se trouve en haut, ainsi que l'heure.
17 R. Oui. Merci.
18 Q. Alors, cela vous permet de vous rafraîchir la mémoire ? Autrement dit,
19 vous avez assisté à cette réunion en présence de Karadzic et d'autres
20 personnes, n'est-ce pas ?
21 R. Oui. Ecoutez, je n'ai jamais dit que je n'ai pas assisté à la réunion.
22 Bien sûr que j'y ai assisté. Tous les documents l'attestent.
23 Mme PACK : [interprétation] Est-ce que nous pourrions regarder la page 143,
24 s'il vous plaît. Dans les deux langues, s'il vous plaît.
25 Q. Vous constatez qu'au point 5, ici, votre nom est cité. Et vous dites
26 que le corps a maintenant huit jours d'existence. Vous vous souvenez
27 maintenant que vous étiez là ?
28 R. Oui.
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1 Mme PACK : [interprétation] Est-ce que nous pourrions passer à la page 146,
2 s'il vous plaît -- 145, pardonnez-moi.
3 Q. Et ici, au milieu de la page, l'intitulé -- le président Karadzic, ce
4 qu'il dit, ce sont les propos de Karadzic à cette réunion, propos qu'il a
5 tenus à cette réunion, n'est-ce pas ?
6 R. Oui, je le vois, je le vois.
7 Q. Merci.
8 Mme PACK : [interprétation] Alors, est-ce que nous pourrions maintenant
9 passer à la page suivante, s'il vous plaît, 146.
10 Q. Et nous pouvons constater que le président Karadzic conclut la réunion
11 à la fin de l'entrée où ses propos sont relatés : Peut-être qu'il serait
12 bien de régler le problème de la Drina.
13 Si vous regardez la partie qui se trouve à gauche, c'est là que vous
14 trouvez le texte en B/C/S. Vous l'avez trouvé ?
15 R. Oui, oui.
16 Q. Et Karadzic parle ici. Nous avons Krajisnik. Voyez-vous cela ?
17 R. Oui.
18 Q. Et le texte commence comme suit : "J'admire les succès militaires,"
19 vous pouvez suivre en B/C/S pendant que je vous lis le texte en anglais.
20 "Il est très dangereux de s'emparer de leurs territoires, la Drina et la
21 Neretva. Nous avons un engagement disproportionné de l'armée par rapport
22 aux objectifs stratégiques."
23 Mme PACK : [interprétation] Donc il faut tourner la page, page 147, s'il
24 vous plaît.
25 Q. Le texte se poursuit :
26 "Nous n'avons pas pu atteindre la Neretva, la mer et le secteur de
27 Podrinje. Nous avons réussi à prendre le corridor et à effectuer la
28 séparation des Musulmans."
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1 Et ensuite, il poursuit en disant :
2 "Il faut que la guerre se termine. L'élément le plus important est le
3 ratissage d'Orasje et ensuite de résoudre le problème du secteur de
4 Podrinje et de la vallée de la Neretva et de cette région dès que possible.
5 Les Musulmans ne doivent pas rester parmi nous et il ne faut leur accorder
6 aucune forme d'autonomie. L'objectif le plus important est la tâche qui a
7 été assignée à Zivanovic, le ratissage de la Drina. La tâche la plus
8 importante est la séparation des Musulmans."
9 R. Ecoutez, si vous regardez le fait que l'on mentionne le ratissage de la
10 Drina, il n'y a rien de mal à cela. Cela correspond aux villages que nous
11 avons vus il y a quelques instants, ces zones serbes dévastées. Si
12 seulement je pouvais vous montrer les cartes de Sekovici, Han Pijesak et
13 Zvornik, à ce moment-là il serait plus aisé de comprendre sa déclaration.
14 Mais un peu plus bas, on parle de la "séparation des Musulmans"; on ne dit
15 pas qu'il faut "tuer les Musulmans". On parle de "séparation des
16 Musulmans".
17 Si quelqu'un, et Dieu m'en préserve, m'avait dit --
18 Q. Pardon.
19 R. Pardon, pardon, nous allons parler plus lentement.
20 Q. Alors, procédons par étapes.
21 R. Permettez-moi.
22 Q. Vous êtes d'accord que ce qui est consigné ici, que cela correspond à
23 ce qu'il a dit, n'est-ce pas, à cette réunion ?
24 R. Oui, cela, il l'a dit. Cela n'est pas contesté. Je ne sais pas ce dont
25 nous parlons ici. Je ne sais pas si je suis d'accord avec ce que quelqu'un
26 aurait dit à la réunion. Mais s'agissant de cet ennemi, alors, ça, c'est
27 leur façon de parler, ils sont libres de le faire. Nulle partie n'est-il
28 précisé qu'il faut tuer les Musulmans ? On parle uniquement de séparation.
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1 Si on avait parlé du meurtre de Musulmans, à ce moment-là ils ne m'auraient
2 plus jamais revu.
3 Q. Mais si on parle de nettoyage ethnique, cela n'est pas un problème ?
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous indiquer à quel endroit
5 le ratissage correspond à un nettoyage ethnique ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, quel nettoyage ethnique ? Si vous
7 regardez la carte que nous venons de voir, cela ressemble à une peau de
8 léopard. Sur tout le territoire, il y avait 157 villages dans lesquels
9 toutes les personnes ont été tuées. Un Serbe ne pouvait pas entrer dans ce
10 village, et il ne pouvait même pas accueillir une prune sur le prunier. Et
11 toute personne qui entrait dans ce village était considérée comme morte.
12 C'était ça, le problème.
13 Mme PACK : [interprétation]
14 Q. Vous saviez, n'est-ce pas, Général, que votre tâche était la tâche la
15 plus importante de la VRS, et cette tâche consistait à procéder au
16 nettoyage ethnique de Podrinje, n'est-ce pas ?
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Objection rejetée. Veuillez poursuivre,
19 Madame Pack.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non.
21 Mme PACK : [interprétation]
22 Q. Et vous-même, vous pensiez qu'il n'y avait pas de place pour les
23 Musulmans et que vous ne pouviez pas coexister avec eux, n'est-ce pas ?
24 R. Si seulement vous pouviez comprendre combien de temps j'ai passé à
25 vivre aux côtés des Musulmans avant la guerre et pendant la guerre, vous ne
26 me poseriez jamais cette question. Moi, j'ai offert mon sang aux blessés
27 musulmans. J'ai sauvé des Musulmans. Les Musulmans m'ont invité et m'ont
28 demandé de remplir le rôle de commandant. Ils souhaitaient que je devienne
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1 leur commandant. Pouvez-vous imaginer ce que cela représente, les efforts
2 que nous avons déployés pour aider ces gens-là ? Vous essayez de me
3 dépeindre comme un bourreau. Vous ne devriez pas me poser cette question.
4 Vous devriez poser la question à mes amis proches, amis musulmans proches,
5 qui ont été mes témoins de mariage. Demandez-leur ce qu'ils en pensent.
6 Q. Alors, en qualité de commandant du Corps de la Drina, vous n'auriez
7 jamais dit quelque chose comme cela, n'est-ce pas ? Comme : Il n'y a pas de
8 place pour une coexistence. Ce n'est pas le genre de chose que vous diriez
9 dans ce cas-là, n'est-ce pas ?
10 R. Ecoutez, attendez un instant. De quelle coexistence s'agit-il si vous
11 avez une ligne de front entre deux parties belligérantes ? Et lorsque la
12 guerre est terminée, lorsque la ligne de front n'existe plus, dans ce cas
13 nous n'avions pas d'autre choix, nous devions vivre ensemble. C'est comme
14 l'alpha et l'oméga dans notre région. Il nous faut vivre ensemble, alors
15 que des auteurs individuels doivent être traduits en justice, doivent être
16 tenus responsables. Et l'objectif vague de nous tous, y compris ce très
17 respecté Tribunal, consiste à pouvoir créer des meilleurs conditions de vie
18 dans notre région.
19 Mme PACK : [interprétation] Je souhaite maintenant afficher le 1D090097
20 [comme interprété] s'il vous plaît.
21 Q. Il s'agit ici d'un extrait d'un entretien que vous avez donné le 22
22 juillet 1993.
23 Mme PACK : [interprétation] Je souhaite passer à la page 3, s'il vous
24 plaît, de l'anglais.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Ça, c'est ma maison. Où vous êtes-vous procuré
26 ce document ? Ça, c'est ma maison.
27 Mme PACK : [interprétation]
28 Q. Alors, je vais vous demander de regarder une partie de ce document, la
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1 deuxième colonne, je vous prie. Deuxième colonne qui se trouve sur la
2 deuxième page du texte en B/C/S. Voilà, ça y est. Merci. Le deuxième
3 paragraphe dans cette deuxième colonne, je vais maintenant vous donner
4 lecture de ce passage. Et vous pourriez peut-être me dire si vous êtes au
5 bon endroit. Vous dites -- alors, ici nous parlons des enclaves qui ont été
6 créées :
7 "Même si notre armée respecte les accords de manière disciplinée, ils se
8 soustraient à" --
9 R. J'arrive à suivre.
10 Q. Je vais d'abord le lire en anglais, et ensuite vous pourrez suivre en
11 B/C/S :
12 "… ils se sont soustraits à cela parce qu'ils pensaient que ce statut-là
13 leur donnera plus temps. Mais comme le commandant du corps a résolu la
14 partie militaire du problème Podrinje, mon message à eux consiste à dire :
15 Ne prêtez pas le flanc à la critique. Il ne faut pas qu'ils succombent à
16 l'hystérie collective. Encore une fois, nous leur proposons un épilogue
17 honorable. Et dans ce cas, je dois être sincère. Il n'y a pas de place pour
18 la coexistence. Cela signifie simplement que mon Ratkovici et Ducici ne
19 craindront plus jamais la mort aux mains d'un étranger qui a un couteau
20 dans le dos.
21 "Je connais les normes de la communauté internationale, chacun doit revenir
22 dans son foyer. Mais ici, il n'y a plus de foyers. Il n'y a plus que des
23 cendres."
24 Et ensuite, le texte se poursuit.
25 R. Oui. Il n'y a plus que les foyers brûlés de nos maisons. Regardez la
26 date, regardez la date que vous m'avez montrée vous-même lorsque le
27 journaliste a écrit ce reportage.
28 Q. Général --
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1 R. Alors, puis-je vous poser la question : savez-vous que sans que
2 Karadzic ni Mladic ne soient au courant, même si je sais que Karadzic
3 aurait été d'accord à 100 %, c'est la raison pour laquelle j'ai agi ainsi ?
4 J'ai moi-même mis en place une ligne téléphonique d'urgence entre mes
5 forces et les forces musulmanes. Ça, c'était au mois de février 1993. Et
6 j'ai proposé plus d'une fois que chacun devait rester dans ses foyers, dans
7 ses maisons qui n'étaient pas détruites.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que vous ne poursuiviez, Général,
9 je souhaite que vous répondiez tout d'abord à la question. Mme Pack vous a
10 demandé si vous aviez tenu ces propos.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Cette formulation est celle du journaliste.
12 Vous voyez la photographie qui représente ma maison qui a été incendiée,
13 vous voyez le pas de la porte de ma maison. Et sur une autre photographie,
14 vous voyez le cimetière qui a été dévasté et là où ont été enterrés mes
15 parents. Dans ces conditions-là, est-ce que l'on peut parler de coexistence
16 ? Oui, la coexistence est possible, mais seulement dans le cas où ceux qui
17 sont responsables de ces crimes sont traduits en justice.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] La traduction n'est pas bonne. Cette
19 photographie correspond à la maison où le témoin est né, et dans la
20 traduction anglaise nous n'avons pas entendu cela.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, ça a été un jour très difficile de ma
22 vie lorsque j'ai vu ce qui restait de ma maison, les débris, le cimetière
23 où mes parents avaient été enterrés. Tout cela était détruit. Qui aurait pu
24 avoir quelque chose contre mes parents ? Ma mère avait nourri plus
25 d'enfants musulmans que les siens.
26 Mme PACK : [interprétation]
27 Q. Alors, restons sur ce document. Vous ne niez pas, donc, avoir tenu ces
28 propos-là ?
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1 R. A ce moment-là, avec ces sentiments-là, j'aurais pu tenir des propos
2 encore plus durs, mais je ne l'ai pas fait. Je n'ai pas signé ce document,
3 cela étant dit. Il s'agit d'un article écrit par un journaliste qui est le
4 reflet de certaines de ses pensées. Mais si on parle de co-existence ce
5 jour-là, jour où je suis venu dans la maison où je suis né et où j'ai vu ce
6 que j'ai vu, je dois vous poser et je dois me poser la question à moi-même
7 et poser la question à tout un chacun : Qui a défendu mon village, quelle
8 armée a défendu mon village ? Quelle armée a défendu mon village ?
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pardonnez-moi, mais je crois que vous ne
10 répondez toujours pas à la question. Je vous demande de bien vouloir
11 répondre à la question, s'il vous plaît. Ou alors, moi, je vais demander à
12 Mme Pack de reposer la question.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je simplement vous avertir du fait que le
14 compte rendu d'audience n'est pas tout à fait exact. Peut-être que cela
15 donne une impression fausse. Le général Zivanovic a dit : "Je ne nie pas
16 les pensées qui sont exprimées dans cet entretien, mais c'est le
17 journaliste qui en est l'auteur." Et le fait que le général Zivanovic ait
18 dit "Je ne nie pas les pensées qui sont exprimées dans l'entretien" ne soit
19 pas consigné au compte rendu d'audience.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je m'en remets à vous, Madame Pack.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Et, encore une fois, ceci n'a pas été consigné.
22 Le témoin a dit : "Et ça, c'est la réponse."
23 Mme PACK : [interprétation]
24 Q. Vous ne niez pas votre point de vue ni votre tâche, à savoir qu'il
25 fallait vivre à Podrinje débarrassé des Musulmans, n'est-ce pas ?
26 R. Non, non. Non, non. Non, nous devions séparer.
27 Mme PACK : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite simplement
28 demander le versement au dossier de cette page du document et cette page
Page 42595
1 seulement.
2 M. ROBINSON : [interprétation] Nous demandons à ce que ce document soit
3 versé dans son intégralité. C'est une pièce connexe. On y voit, par
4 exemple, la photographie de sa maison qu'il cite dans sa déclaration. Il
5 n'a pas été dit pourquoi ceci ne fait partie de sa déclaration plus
6 exhaustive, mais il a fourni une explication concernant la photographie et
7 concernant le texte également. Je pense que l'intégralité devrait être
8 versée.
9 Mme PACK : [interprétation] Je ne m'oppose pas au versement au dossier de
10 l'intégralité du document.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vais rapidement regarder le
12 paragraphe 16. Un instant, s'il vous plaît. Fort bien. Nous allons
13 l'admettre.
14 En tant que pièce de l'Accusation ou pièce de la Défense ?
15 M. ROBINSON : [interprétation] Ecoutez, nous apprécierions le fait que ce
16 soit versé en tant que pièce à charge de la Défense, mais ça n'est pas si
17 important que cela.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Pack.
19 Mme PACK : [interprétation] Pas d'objection.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons verser ce document en tant
21 que pièce de la Défense.
22 M. LE GREFFIER : [aucune interprétation]
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous allons avoir une pause ?
24 Si cela vous agrée.
25 Mme PACK : [interprétation] Oui, tout à fait. Je vous remercie, Monsieur le
26 Président.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons avoir une pause de 45
28 minutes, et nous reprendrons à 13 heures 15.
Page 42596
1 --- L'audience est suspendue à 12 heures 30.
2 --- L'audience est reprise à 13 heures 22.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Madame Pack.
4 Mme PACK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
5 Q. Alors, la directive 4, nous allons parler de la directive 4, qui est la
6 première à régir les activités du Corps de la Drina, n'est-ce pas ?
7 R. Oui, c'est exact.
8 Mme PACK : [interprétation] Le P009176, s'il vous plaît. Je vais demander à
9 ce que la page 5 de l'anglais soit affichée et la page 11 de la version en
10 B/C/S, s'il vous plaît.
11 Q. Alors, je vais vous demander de regarder un paragraphe, je pense que
12 vous le connaissez bien, sous l'intitulé : "Tâches de l'unité." Il s'agit
13 des tâches confiées au Corps de la Drina, au point D. Et on constate qu'il
14 s'agit ici du deuxième paragraphe en B/C/S -- pardon, est-ce la page 11 de
15 la version en B/C/S que vous avez sous les yeux ? Oui. Vous pouvez lire ce
16 que dit le texte. Je vais le lire à voix haute :
17 Depuis ses positions actuelles, ses forces principales doivent défendre
18 avec la plus grande persistance Visegrad, le barrage, Zvornik et le
19 corridor, alors que le reste de ses forces dans le secteur de Podrinje au
20 sens large doivent épuiser l'ennemi, infliger les pertes les plus lourdes
21 possibles et ensuite les contraindre à quitter Bihac, Zepa et Gorazde en
22 même temps que la population musulmane. Vous connaissez bien cet ordre,
23 cette directive, n'est-ce pas ?
24 R. Oui.
25 Q. Alors, nous allons regarder maintenant le P0285, qui est votre document
26 du Corps de la Drina qui vient après la directive 4.
27 Mme PACK : [interprétation] Est-ce que nous pourrions afficher, s'il vous
28 plaît, la première page de ce document dans les deux langues.
Page 42597
1 Q. Alors, nous constatons que cet ordre est dérivé de la directive 4 et
2 qu'il a été rédigé conformément à l'article 4, n'est-ce pas ? Oui ?
3 R. Oui, oui, c'est exact.
4 Q. Je souhaite que vous regardiez maintenant, s'il vous plaît, le premier
5 paragraphe, le paragraphe 1. Vous avez ordonné ceci : Lancer une attaque
6 avec l'essentiel des troupes et l'essentiel du matériel pour infliger à
7 l'ennemi les pertes les plus importantes possibles, les épuiser, les faire
8 reculer et les contraindre à se rendre, et contraindre la population locale
9 musulmane à abandonner le secteur de Cerska, Zepa, Srebrenica et Gorazde.
10 R. Oui, je l'ai lu.
11 Q. Et telle était votre mission qui vous a été confiée en vertu de la
12 directive 4, y compris le fait de forcer la population musulmane à partir,
13 contraindre à partir, donc pour qu'elle abandonne le secteur, n'est-ce pas
14 ?
15 R. Oui. Mais cette population musulmane habitait dans des villages serbes
16 et s'était emparée de biens serbes également. Pourquoi ? Parce que toutes
17 les fois qu'ils prenaient le contrôle d'un territoire, ils ne permettaient
18 aux citoyens serbes d'y avoir accès. Je ne parle pas de soldats serbes. Je
19 parle de propriétaires, de civils. Lorsque des gens qui étaient Serbes
20 essayaient d'entrer dans leur propre village, ils étaient tués. Ça, c'est
21 la situation factuelle. A savoir, la population qui se trouvait dans nos
22 secteurs était censée quitter ces secteurs, et à mon sens, cela est
23 compréhensible. Si mon frère revient dans son village et dans sa propre
24 maison, ou les restes calcinés de sa maison, il y a ce Musulman qui
25 l'attend chez lui, dans sa maison, dans son champ. Moi, je ne vais pas
26 envoyer mon frère dans un village musulman, je vais envoyer mon frère dans
27 son propre village. Tel est l'essentiel de ma réponse à ce paragraphe
28 numéro 1. Vous devez le comprendre. Et je répète qu'aucun Serbe ne pouvait
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1 accéder à un seul mètre carré de territoire dont les Musulmans avaient pris
2 le contrôle, jamais.
3 Q. Alors, vous devez m'aider à comprendre votre déclaration, Général. Vous
4 dites que les zones répertoriées ou mentionnées dans votre ordre, les
5 régions ou les secteurs de Cerska, Zepa, Srebrenica et Gorazde, vous dites
6 qu'il s'agit en fait de secteurs serbes où se trouvent les maisons des
7 Serbes qui ont été incendiées, et vous souhaitiez remplacer la population
8 musulmane avec des Serbes ? Je ne comprends pas très bien où vous voulez en
9 venir.
10 R. Lorsque vous parlez de "Srebrenica", regardez la centrale
11 hydroélectrique qui était à Bajina Basta, remontez ensuite jusqu'à
12 Drinjaca, ça, c'était Srebrenica à mon sens. Lorsque je parle de "Cerska",
13 je veux parler de tous les villages qui se trouvaient à l'est de Vlasenica
14 et jusqu'à à Kamenica, le long de la Drina. Donc il s'agit simplement d'une
15 version abrégée. Donc, il s'agit de secteurs serbes dont les Musulmans
16 avaient pris le contrôle, et il fallait remettre ceux-là à leurs
17 propriétaires légitimes.
18 Je n'ai pas énuméré une cinquantaine de villages de la Drina jusqu'à
19 Srebrenica et jusqu'à Drinjaca. Cela correspond à 80 kilomètres. J'ai
20 simplement indiqué quelle était la région centrale. Et je vous prie de bien
21 vouloir noter qu'on parle de la route et que la route devait être réparée.
22 Milici, Konjevic Polje, Zvornik, s'il vous plaît, où cela se trouve-t-il ?
23 Et cette route est une voie de communication essentielle, vitale, et menait
24 à l'usine d'Alumina, depuis les mines de bauxite jusqu'à l'usine d'Alumina,
25 donc la route devait rester ouverte. Et de part et d'autre de cette route,
26 il y a des secteurs musulmans, des secteurs serbes, et en particulier
27 lorsqu'on sait, comme c'est le cas, que les conducteurs qui conduisaient le
28 minerai ont été tués à Konjevic Polje, non pas en tant que soldats mais en
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1 tant que conducteurs.
2 Q. Est-ce que vous dites, en somme, que le fait de faire partir la
3 population musulmane de ce secteur était justifié parce que vous souhaitiez
4 les remplacer par des Serbes ?
5 R. Je souhaitais simplement les protéger pour qu'ils ne puissent pas
6 perdre la vie. Telle est ma réponse. Je voulais les protéger pour qu'ils ne
7 perdent pas la vie. Et vous pourrez les sauver s'ils sont à une grande
8 distance des lignes de front, car même les innocents sont tués au front.
9 Q. Et avez-vous dû incendier les maisons dans les villages que vous avez
10 attaqués ?
11 R. De quelles maisons voulez-vous parlez ?
12 Q. Vous incendiez des maisons, n'est-ce pas ?
13 R. Alors, je vous en prie, il s'agit ici de mots très durs, de mots trop
14 durs. Il ne s'agit pas de maisons. Il s'agit de points de résistance de
15 l'ennemi, armé depuis chaque fenêtre. Et je répète, depuis chaque fenêtre
16 il y avait des mitrailleuses qui tiraient. Il y avait des observateurs
17 également qui guidaient les tirs. Donc il s'agit de bastions et de bastions
18 de combat. Pourquoi n'ai-je pas brûlé Srebrenica ? Ou, par exemple,
19 pourquoi n'avons-nous pas incendié cette localité à Jadar qui a été
20 utilisée par les Musulmans et qui a été mise en place par les Nations Unies
21 ? Alors, j'ai dit que s'il n'y avait pas de résistance, il n'y aurait pas
22 d'incendie. Et c'est la raison pour laquelle Srebrenica a conservé ses
23 maisons.
24 Q. Nous ne parlons pas encore de Srebrenica.
25 Mme PACK : [interprétation] Je souhaite maintenant que nous regardions la
26 pièce P03162, s'il vous plaît.
27 Q. Alors, vous dites que le Corps de la Drina devait -- cela faisait
28 partie de ses droits et de ses obligations de garantir la restitution des
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1 maisons et du terrain des civils serbes. C'est ce que vous dites dans votre
2 déclaration, n'est-ce pas ? Si nous regardons l'ordre --
3 R. Qui d'autre ?
4 L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète de la cabine anglaise : Nous n'avons
5 pas pu entendre la fin de la phrase.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je demander si le témoin dispose d'un
7 exemplaire de sa propre déclaration ?
8 Mme PACK : [interprétation] Je ne sais pas. Je lui montre un document à
9 l'écran, le D -- le P03162.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous pouvons lui remettre un exemplaire papier,
11 si vous me le permettez.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
13 Mme PACK : [interprétation]
14 Q. Alors, j'essaie de comprendre votre déposition au paragraphe 15.
15 Veuillez le regarder, s'il vous plaît. Alors, veuillez regarder la dernière
16 phrase, celle que je viens de lire. Ça y est ? Dernière phrase, s'il vous
17 plaît. Je viens de la lire et je souhaite que vous regardiez ensuite le
18 document qui se trouve à l'écran.
19 R. Pardon, qu'est-ce que vous avez lu ?
20 Q. La dernière phrase du paragraphe 15.
21 R. Vous voulez dire, la cible de l'attaque n'a jamais été des civils
22 musulmans, mais il n'y avait que les forces musulmanes qui massacraient les
23 civils serbes. Et donc, le Corps de la Drina avait le droit et l'obligation
24 de garantir la restitution des maisons et du terrain qui appartenaient aux
25 civils serbes. Qu'est-ce que vous me demandez ? Qu'est-ce qui n'est pas
26 clair ?
27 Q. Regardez, s'il vous plaît, ce document et ce rapport que vous avez à
28 l'écran. Alors, ici, vous pouvez constater qu'il s'agit d'un rapport qui
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1 émane d'Andric, lieutenant-colonel Andric à ce moment-là. La date est celle
2 du 2 mars. Un rapport envoyé au commandement du Corps de la Drina le 2 mars
3 1993, n'est-ce pas ? Je souhaite que vous regardiez le deuxième paragraphe,
4 s'il vous plaît, la dernière phrase. Alors, ce qu'il dit, et je vais le
5 lire :
6 "Le village de Gobelji a été incendié, et demain il est prévu de s'occuper
7 de Paljevine."
8 Est-ce que vous voyez cela ?
9 R. Je le vois.
10 Q. Et vos unités brûlaient des villages, n'est-ce pas ?
11 R. Un instant, s'il vous plaît. Un instant, s'il vous plaît. Je vais vous
12 poser une question. Alors, pourquoi ne pas lire le premier paragraphe de ce
13 même document ? Nous ne devrions pas regarder simplement certains passages
14 des documents. Il faut regarder l'intégralité des documents et les
15 analyser. Regardez le premier paragraphe et regardez ce que dit ce premier
16 paragraphe.
17 Q. Moi, je vous pose une question à propos de cette dernière phrase ainsi
18 que de ce village-là.
19 R. Non, non, non, non. Je ne peux pas répondre avant que vous ne lisiez le
20 paragraphe 1 officiellement. Veuillez lire le premier paragraphe, et
21 ensuite nous allons voir comment, effectivement, les forces d'Andric se
22 trouvent dans les secteurs mentionnés. Nous devons tenir compte du
23 paragraphe 1. C'est le premier paragraphe qui porte sur l'évolution de la
24 situation. Veuillez lire le premier paragraphe, comme vous avez demandé à
25 ce que soit lu l'autre paragraphe.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne comprends pas votre réponse. Ce
27 document a déjà été versé au dossier. Vous pouvez lire le premier
28 paragraphe, mais si vous le souhaitez, vous pouvez vous reporter au
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1 paragraphe 1. Veuillez répondre à la question, je vous prie.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Ceci porte sur une contre-attaque d'une unité
3 de la Brigade de Birac et commandée par Svetozar Andric. Bien évidemment,
4 ces deux villages qui ont été cités étaient des poches de résistance de
5 l'ennemi lors d'opérations de combat. On aurait pu omettre cela, si vous
6 regardez la nature du terrain et les forces impliquées, et si vous regardez
7 la mission elle-même. Moi, je ne justifie pas l'incendie de villages, ni de
8 ces villages, mais si un village devient une poche de résistance à partir
9 de laquelle l'ennemi commence à ouvrir le feu, dans ce cas,
10 malheureusement, ce village-là fera l'objet de sévices de la part de la
11 même partie qui aura transformé ce village en poche de résistance ennemie.
12 Donc ma réponse est oui, et --
13 Q. [aucune interprétation]
14 R. Je ne sais vraiment pas pourquoi vous m'interrompez au milieu de phrase
15 ou au milieu d'un mot. J'ai dit que les villages mentionnés n'étaient pas,
16 a priori, censés être incendiés. C'était l'ennemi qui était censé être
17 chassé de ces villages. L'ennemi. Je répète, l'ennemi. Il ne s'agit pas des
18 gens qui constituaient les ennemis, et les gens ne constitueront jamais
19 l'ennemi, c'est ce qui est dit ici.
20 Q. Mais ce que vous avez déclaré ici, c'est que ce village a été incendié,
21 n'est-ce pas ?
22 R. Il a été incendié, oui, parce que ce village a été utilisé par la
23 partie adverse pour ces opérations de combat. Parce qu'elle a choisi cette
24 zone du village. Alors, pourquoi n'a-t-elle pas choisi une autre zone, en
25 montagne, par exemple, et pourquoi ne s'est-elle pas mise à l'écart en
26 prenant des positions dans les montagnes où quelqu'un --
27 Q. [aucune interprétation]
28 R. -- nous ne serions même pas arrivés en contact. Avec ce village-là, il
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1 y a eu contact entre des unités et des armées. Ce n'est pas ici l'attaque
2 d'une armée dirigée contre un village innocent qui a eu lieu. Pour que les
3 choses soient bien claires, ce sont des unités qui se sont retrouvées au
4 contact dans les combats. Et ce contact s'est fait dans ce village. Donc il
5 ne faut pas ici avoir à l'esprit le village en tant que village. Mais
6 malheureusement, cela a été le cas de nombreux villages qui ont été
7 utilisés de cette façon et qui ont eu à subir des dégâts considérables.
8 Personne ne conteste cela. En tout cas, si l'on procédait de cette manière,
9 beaucoup de villages auraient à souffrir.
10 Mme PACK : [interprétation] Pouvons-nous maintenant passer à la pièce
11 P03161, s'il vous plaît. En B/C/S, je souhaiterais que nous passions à la
12 page 2.
13 Q. Donc c'est le deuxième paragraphe de la page 2 qui m'intéresse. Je vais
14 vous donner lecture de l'anglais :
15 "Pendant la journée, des unités spéciales de la 1ère Brigade d'infanterie
16 légère de Birac ont pris et détruit le village de Gobelji, libérant ainsi
17 le flanc gauche du gros des effectifs engagés dans l'attaque sur la Cerska.
18 A l'entrée du village, nos soldats ont trouvé des armes ainsi que du
19 matériel militaire, des vivres et du bétail que l'ennemi avait laissés
20 derrière lui dans sa fuite devant nos forces."
21 L'ennemi était donc parti. Il avait fui, et ensuite le village a été
22 incendié; ai-je raison ? Tout le village a été incendié alors qu'il était
23 vide ?
24 R. Que voulez-vous dire par chassé ou expulsé, si on a retrouvé des
25 vivres, des armes, du bétail ? Ils se sont probablement extraits d'une
26 façon ou d'une autre. Mais être chassé, c'est une autre notion dans la
27 terminologie militaire. On a retrouvé sur place ceux qui avaient transformé
28 ce village en une position de combat, puisqu'on a retrouvé aussi bien des
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1 hommes que des armes, du matériel, et cetera. Et comme vous pouvez le voir,
2 il n'y a plus personne de la population du village. La population du
3 village en a été extraite. Donc nous n'avons pas chassé cette population.
4 Ce sont deux notions différentes.
5 Q. Mais ils n'avaient pas besoin d'incendier ce village, n'est-ce pas ?
6 R. Qu'est-ce qui était nécessaire et qu'est-ce qui ne l'était pas, c'est
7 quelque chose qui peut déjà largement davantage être débattu. Parce que
8 tant qu'il y a une résistance qui est opposée dans un secteur, vous ne
9 pouvez pas traverser ce secteur pendant que l'ennemi est toujours en train
10 de vous prendre pour cible. C'est là ce qui est au cœur du sujet. Le but,
11 ce n'est pas de détruire la maison de qui que ce soit. Ce qui est
12 important, c'est que personne ne puisse vous tuer à partir des maisons en
13 question.
14 Q. Mais c'est vous, Général, vous-même, qui avez donné l'ordre d'incendier
15 et de détruire ce village, n'est-ce pas ?
16 R. Non --
17 Q. [aucune interprétation]
18 R. -- il s'agissait d'une riposte à leur attaque, dont il est question
19 dans le point 1 du document dont nous venons de parler. Il s'agit des mêmes
20 combats qui sont décrits ensuite.
21 Mme PACK : [interprétation] Pouvons-nous voir la pièce P5261, s'il vous
22 plaît.
23 Q. C'est une conversation interceptée datée du 8 février 1993,
24 interception d'une conversation qui s'est tenue entre vous et le lieutenant
25 en second Slobodan Gaborovic, appartenant à --
26 L'INTERPRÈTE : Nom d'unité inaudible pour l'interprète.
27 Mme PACK : [interprétation]
28 Q. -- vous vous en souvenez, n'est-ce pas ?
Page 42605
1 R. Oui.
2 Q. Alors, vous dites avoir parlé à un certain capitaine Jevdjevic. Il
3 s'agit de Milenko Jevdjevic, n'est-ce pas, le commandant du 5e Bataillon
4 des Transmissions ?
5 R. Oui, oui, bien entendu. Tout à fait.
6 Q. Il s'agit d'un échange que vous avez eu avec Gaborovic à la date du 8
7 février 1993, n'est-ce pas ?
8 R. Je ne sais pas de quoi j'ai pu parler avec untel ou untel. Comment
9 voulez-vous que je sache ? Il faut que je puisse voir. Et franchement, si
10 ceci cadre avec mon souvenir, je vous répondrais que ça a bien été le cas;
11 mais si cela ne cadre pas, eh bien, je vous répondrais non. Mais pour cela,
12 il faut que je puisse lire le texte avant.
13 Q. J'ai simplement besoin que vous lisiez les cinq lignes du bas pour vous
14 rappeler ce que vous avez dit.
15 R. Très bien.
16 Q. Vous pouvez le lire en B/C/S. Vous dites :
17 "Rattrapez-les et foutez-les en l'air maintenant" --
18 R. Non, non, non, non, non.
19 Q. Laissez-moi finir de lire.
20 Gaborovic dit : "Compris."
21 Ensuite, vous dites :
22 "Tenez les positions très fermement. Est-ce que les maisons des Turcs
23 brûlent ?"
24 Gaborovic : "Oui, elles brûlent. Elles brûlent."
25 Vous-même : "Très bien. Que ce soit autant que possible."
26 Alors, c'est vous, n'est-ce pas ? C'est vous qui donnez pour instruction à
27 vos unités d'incendier autant de maisons de Musulmans que possible, n'est-
28 ce pas ?
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1 R. Chère Madame, excusez-moi, mais des propos aussi vulgaires n'ont jamais
2 pu sortir de ma bouche, que ce soit dans un bar et encore à plus forte
3 raison dans une conversation officielle. Je n'aurais jamais pu prononcer de
4 tels termes, pour commencer.
5 Deuxièmement, que j'aie incité mes unités à accomplir la tâche qui leur
6 avait été confiée, bien entendu que je l'ai fait. C'est le travail même
7 d'un commandant. Non pas de commettre des crimes, mais il s'agit
8 d'accomplir une mission qui a été confiée. C'est de cela qu'il s'agit, et
9 c'est ma réponse.
10 De plus, il s'agit ici d'officiers des transmissions. Je ne suis pas
11 en train d'avoir une conversation avec le commandant, que ce soit le
12 commandant subordonné ou le commandant supérieur. Je ne vois pas comment
13 ceci pourrait être cohérent avec ce type de langage vulgaire et familier,
14 comment ça pourrait cadrer avec ce que vous présentez. En revanche, dire à
15 ses soldats et à ses unités d'aller jusqu'aux lignes et de faire leur
16 travail, la mission qui leur a été confiée, évidemment, tout commandant
17 partout dans le monde fera cela. Parce que vous n'allez quand même pas
18 laisser vos hommes vous faire tuer.
19 Q. Mais vous dites "autant que possible", n'est-ce pas ? C'est bien cet
20 que vous avez dit ?
21 R. Mais qu'est-ce que vous auriez voulu de que je dise ? Que je leur dise
22 aussi peu que possible, et que des nôtres il en meure davantage, il en
23 meure plus ? Mais je le leur demande simplement d'être aussi efficaces que
24 possible dans les combats. Mais à aucun moment je ne dis de tuer le moindre
25 civil. Et vous ne trouverez pas de tels propos dans ma bouche, parce que je
26 n'en ai jamais tenus. Le fait est que j'étais commandant --
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur le Témoin, Mme Pack ne vous a
28 pas demandé si vous aviez ordonné de tuer qui que ce soit. Elle vous
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1 demande si vous avez ordonné d'incendier les maisons. Est-ce que vous voyez
2 cette phrase où on vous répond : "Elles brûlent, elles brûlent" ? Juste
3 avant, vous posez la question : "Est-ce que les maisons des Turcs brûlent
4 ?" Est-ce que vous voyez cela ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je le vois. Merci.
6 Madame, Messieurs les Juges, est-ce que je dois répéter 100 fois que ces
7 maisons sont des cibles, parce que ce sont des constructions utilisées par
8 l'ennemi pour nous tirer dessus ? Et ce ne sont même plus des maisons.
9 Elles ont été transformées en bunkers à plusieurs étages par l'ennemi.
10 C'est complètement différent de la situation dans laquelle quelqu'un lance
11 une attaque sur une maison qui est habitée par ses propres habitants, par
12 des civils. Ça, c'est une situation que je ne pourrais jamais justifier. En
13 revanche, si quelqu'un a quitté la maison dans laquelle il vivait et que
14 des hommes se sont installés à l'intérieur et ont mis en place un nid de
15 mitrailleuses dans cette maison, en le protégeant au moyen de sacs de
16 sable, alors cette maison devient une cible, une installation de l'ennemi.
17 Ce n'est plus une maison de civil. Malheureusement, ça s'est produit à une
18 échelle très importante.
19 Mme PACK : [interprétation] Peut-on maintenant afficher la pièce P04253,
20 s'il vous plaît.
21 Q. Les conséquences de tous ces incendies, Général, étaient que vous
22 n'aviez plus de maisons dans lesquelles vous auriez pu installer la
23 population serbe une fois que la population musulmane avait quitté le
24 secteur, n'est-ce pas ? Voyons cet ordre. Excusez-moi, c'est un rapport. Je
25 vais répéter ma question une fois que vous aurez consulté le document.
26 C'est un rapport émanant du commandant Vinko Pandurevic et portant la date
27 du 10 mars 1993. En bas du texte en anglais ainsi qu'en B/C/S, la dernière
28 phrase, il est recommandé ce qui suit :
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1 "Nous proposons que les maisons ne soient pas incendiées lorsque Konjevic
2 Polje sera conquis et lorsque l'on en prendra le contrôle, mais plutôt, que
3 ces maisons soient habitées par les habitants de Tuzla et d'autres
4 secteurs."
5 Vous voyez ?
6 R. Oui.
7 Q. Alors, ici, il suggère, n'est-ce pas, que la brigade cesse d'incendier
8 les maisons afin qu'elles puissent être habitées par des Serbes ?
9 R. Dans ce secteur qui est celui de Konjevic Polje, qui est dans une
10 cuvette, dans une vallée, il n'y a pas de combat, il n'y a pas de
11 résistance opposée. C'est là l'essentiel, parce que Konjevic Polje n'était
12 défendue par aucune force. Ce n'était pas une position de défense. Et donc,
13 il était logique que le commandement des forces ennemies avait considéré
14 que c'était un endroit où il aurait été suicidaire de se poster. Et, par
15 conséquent, ils se sont postés à au moins 4 ou 5 kilomètres de distance de
16 Konjevic Polje pour éviter des pertes superflues à Konjevic Polje. Et donc,
17 c'était la même chose qu'à Srebrenica. A partir du moment où les maisons
18 n'ont pas été transformées en bunkers et qu'il n'y avait pas de tirs
19 ennemis provenant de ces maisons, les maisons en question n'ont pas été
20 incendiées. Alors, il est exact qu'il y avait des personnes qui se sont
21 retrouvées sans domicile au même moment, et tout d'un coup vous vous
22 retrouviez avec 15 ou 20 maisons intactes qui ne se sont jamais trouvées
23 dans une zone de combat. Et je le répète, les maisons n'ont jamais été
24 incendiées parce que les forces musulmanes ne s'étaient pas organisées sur
25 place dans ces maisons pour les utiliser à des fins militaires.
26 Q. Mais ce n'est pas le cas, n'est-ce pas, Général ? Parce que vous
27 demandez si les maisons des Turcs brûlent ? Vos unités incendiaient
28 délibérément les villages, n'est-ce pas, et ceci, en exécution de vos
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1 ordres ?
2 R. Je le répète pour la énième fois : aucun ordre n'a été donné
3 d'incendier les maisons. Mais comme vous avez pu le constater vous-même, il
4 y avait dans ces maisons des soldats ennemis avec des armes et des moyens
5 défensifs de l'ennemi. Et si vous pouvez essayer de vous souvenir de ma
6 maison qu'on a vue à l'écran il y a peu de temps. Là, il y a eu destruction
7 de maisons et des dégâts infligés à des gens innocents. Alors, je le répète
8 pour la énième fois : pourquoi Srebrenica n'a-t-elle pas été incendiée ?
9 Pourquoi les localités où il n'y a pas eu organisation sur place aux fins
10 d'utiliser les installations dans le cadre des combats n'ont-elles pas été
11 incendiées ? Parce qu'elles ne l'ont pas été.
12 Q. Je voudrais examiner les différents moyens auxquels vous avez recouru
13 pour essayer de chasser la population civile de Podrinje. Il ne s'agissait
14 pas uniquement de lancer des attaques contre leurs villages et de les
15 incendier, n'est-ce pas ? Vous avez également restreint la liberté de
16 circulation et le passage de l'aide humanitaire.
17 R. Je m'attendais à ce que vous me lisiez que ces personnes qui
18 s'occupaient d'acheminer l'aide humanitaire m'avaient en fait cité en
19 exemple, cité pour que je sois remercié et décoré, parce que je ne
20 m'attendais certainement pas à ce que vous me disiez maintenant qu'on me
21 reproche d'avoir restreint le passage de l'aide humanitaire. Parce que
22 c'est complètement inexact. L'accusé en l'espèce, M. Karadzic, a insisté
23 sans cesse pour que l'aide humanitaire soit transportée à Srebrenica, même
24 si cela se faisait à un coût très élevé pour nous. Au mois de novembre
25 1992, Karadzic m'a ordonné à moi de faire passer un convoi d'aide
26 humanitaire par Bratunac en assurant son escorte, et ceci, je l'ai fait au
27 prix d'efforts considérables qui m'ont permis de convaincre aussi bien les
28 autorités que la population de Bratunac que ce convoi devait passer pour
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1 atteindre la population musulmane de Srebrenica.
2 Et je me suis trouvé dans des difficultés considérables. J'aurais pu
3 y laisser ma peau dans cette situation parce que j'étais sous la menace de
4 toutes sortes d'hommes des forces armées mais également qui n'étaient pas
5 des militaires.
6 Mme PACK : [interprétation] Je voudrais demander l'affichage du document
7 01201 de la liste 65 ter. Il faudrait que nous le versions au dossier sous
8 pli scellé -- enfin, en tout cas, je crois qu'il ne doit pas être diffusé
9 hors de la salle d'audience. Et nous allons peut-être devoir passer à huis
10 clos partiel pour pouvoir l'examiner.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.
12 Mme PACK : [interprétation] Merci.
13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Madame
14 et Messieurs les Juges.
15 [Audience à huis clos partiel]
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13 [Audience publique]
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez répéter le numéro.
15 Mme PACK : [interprétation] Oui, 09194 dans la liste 65 ter. Alors, nous
16 avons ici un bulletin du HCR, le Haut-commissariat aux Réfugiés.
17 Q. Encore une fois, Général, il s'agit d'un texte anglais. Je vais vous
18 lire les trois paragraphes du bas :
19 "Malgré les efforts quotidiens du HCR afin d'atteindre les enclaves
20 orientales, aucun convoi ne s'est vu autoriser à livrer l'aide à la ville
21 de Gorazde" --
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3 Mme PACK : [interprétation] Je vais juste donner lecture des trois derniers
4 paragraphes :
5 "Malgré les tentatives quotidiennes du HCR d'atteindre les enclaves
6 orientales, aucun convoi ne s'est vu autoriser à livrer son aide à la ville
7 de Gorazde depuis le 19 janvier. Zepa n'a reçu aucuns vivres depuis le 17
8 janvier, et tous les convois à destination de Srebrenica ont été bloqués et
9 interdits depuis le 10 décembre 1992. Le HCR s'est vu refuser tout accès au
10 secteur de Cerska/Kamenica, bien que les forces serbes aient ouvert à titre
11 temporaire un convoi humanitaire à sens unique permettant aux personnes de
12 quitter le secteur mais ne permettant à aucune aide d'entrer dans ce
13 secteur.
14 "Près de 5 000 personnes ont déjà été contraintes de fuir vers Tuzla, la
15 plupart dans des conditions extrêmement difficiles, certaines perdant des
16 doigts et des orteils à cause d'engelures. Le HCR a reçu des rapports non
17 confirmés faisant état de 5 000 personnes supplémentaires à Srebrenica
18 attendant de pouvoir en sortir."
19 Q. Ici, vous avez une condamnation internationale, et vous étiez conscient
20 de cela ? On condamne le blocus de l'aide humanitaire que l'on apporte dans
21 la zone.
22 R. Le document émanant d'un tel niveau n'est jamais arrivé jusqu'à mon
23 niveau de commandement. Je répète, nous n'avons jamais essayé d'obstruer
24 les ordres venus de notre commandement supérieur.
25 Q. Vous avez créé le corridor à voie unique dans la zone de Cerska et
26 Kamenica ?
27 R. Non, non, non. Moi, j'avais un commandement supérieur. N'essayez pas de
28 me décrire comme un commandant qui ne recevait pas d'ordres, qui ne
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1 recevait pas d'instructions, de directives, des ordres. J'avais un
2 commandement, moi aussi. Et la "subordination" existait bel et bien, c'est
3 un fil rouge omniprésent dans l'armée et surtout en temps de guerre. Donc
4 je vous demande de ne jamais m'accuser d'avoir empêché quoi que ce soit
5 alors que, au prix de risquer ma vie, j'ai tout fait pour faire entrer les
6 convois à Srebrenica. Demandez justement aux responsables de ces convois
7 avec qui ils ont eu la meilleure qualité de coopération. J'ai été blessé au
8 mois de novembre 1992, n'empêche je les ai laissés entrer. J'ai créé les
9 conditions pour qu'ils puissent passer. Et j'ai toujours été celui qui
10 voulait aider la population, aider la population. Et ne dites pas, s'il
11 vous plaît, j'ai été coupable de ne pas avoir laissé les convois passer.
12 Q. Je vous ai posé une question précise au sujet de ce convoi précis. Donc
13 il parle d'un corridor humanitaire qui fonctionne uniquement dans un sens,
14 dans Cerska/Kamenica.
15 Mme PACK : [interprétation] Mais avant d'aborder la question suivante, je
16 vais demander que ce document soit versé au dossier.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.
18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P6480.
19 Mme PACK : [interprétation] Merci. Avant d'aborder un autre thème, je vais
20 vous demander d'examiner le document 65 ter 09379.
21 Q. C'est vous qui aviez le contrôle de l'accès à ces zones, les zones qui
22 faisaient l'objet de vos attaques ?
23 R. Oui, c'étaient les ordres que j'ai reçus, mais je n'ai rien fait de mon
24 propre chef, avec un rapport clair envoyé suite à la mission accomplie.
25 Donc j'ai agi en fonction des ordres reçus. Il ne fallait jamais voler quoi
26 que ce soit de ces convois. Il ne fallait pas rendre la tâche des
27 travailleurs humanitaires plus difficile. En revanche, il s'agissait bel et
28 bien de contrôler le contenu de ces convois. J'avais toujours cela à
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1 l'esprit. Vous devez comprendre cela. Et d'ailleurs, la personne qui
2 m'était subordonnée était consciente de cela aussi. Mais c'est vrai qu'on a
3 fourni de gros efforts pour que ces convois atteignent, effectivement, la
4 population musulmane.
5 Q. Oui. Donc vous avez agit en fonction des ordres reçus. C'est ce que
6 vous dites, non ? Donc, quand il s'agit de faire le blocus de l'aide
7 humanitaire ?
8 R. Oui, mais il ne s'agissait pas d'empêcher les convois d'entrer dans le
9 territoire. Il s'agissait avant tout de contrôler le contenu de ces
10 convois. Vous devez examiner tous les ordres le long de la chaîne de
11 commandement. Il n'a jamais été question d'arrêter les gens qui se
12 trouvaient à bord de ce convoi ou bien d'aliéner les denrées qui étaient
13 dans les convois. Non.
14 Q. Eh bien, on va regarder justement le cas de ce corridor, ce corridor
15 qui fonctionnait dans un sens et qui est décrit dans ce document, et c'est
16 un de vos rapports de combat du 1er février 1993. Et nous allons regarder le
17 troisième paragraphe où on décrit la situation sur le territoire de l'AOR,
18 où on dit que :
19 "Les leaders des Oustacha ont eu l'impression que leurs habitants
20 allaient quitter la zone de Cerska/Srebrenica et cesser d'être leurs
21 otages. J'ai décidé de permettre aux habitants de partir…"
22 Et ensuite, vous dites que :
23 "Il serait possible pour tous les gens de quitter le territoire sans
24 exception, mais avec ma permission," comme vous dites dans ce document.
25 Donc ce document vient de vous, n'est-ce pas, vous êtes le commandant
26 du Corps de la Drina, vous l'avez signé ?
27 R. Oui.
28 Q. Et là, il s'agit d'un corridor que vous contrôlez, et par le biais de
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1 ce corridor vous empêchez l'accès à l'aide humanitaire ?
2 R. Non, ce n'est pas exact. Nous protégeons le convoi. Pourquoi ? Parce
3 que la route était menacée. Parce qu'il y a eu des éléments introduits.
4 Parce que les temps étaient tels qu'une structure paramilitaire musulmane
5 ou serbe quelconque pouvait, par exemple, arrêter un camion, arrêter le
6 chauffeur et amener le camion dans une direction inconnue. Et c'était moi
7 qui étais responsable de cela. Et moi, je ne pouvais pas, par exemple,
8 permettre le passage d'un convoi alors que ce même convoi pouvait être
9 détruit le chemin faisant. Ceci aurait été irresponsable de ma part. Un
10 commandement à la légère, à court terme. Et moi, j'avais des
11 responsabilités par rapport à mes supérieurs hiérarchiques, par rapport à
12 la FORPRONU, par rapport aux commandements civils. Et donc, il fallait
13 assurer la sécurité des convois.
14 Vous ne pouvez pas laisser passer un convoi au milieu de la nuit
15 alors qu'il y a les menaces partout. Parce que là, je me rappelle la
16 situation, et vous devez me permettre de vous expliquer quelle était la
17 situation. On ne pouvait pas à un instant ou comme on le voulait laisser
18 entrer ou ne pas entrer les convois. Avant tout, nous étions préoccupés par
19 la sécurité des gens. Même s'il fallait que les convois prennent du retard,
20 il fallait absolument les contrôler, vérifier le contenu des convois,
21 assurer la sécurité, créer les conditions pour que les convois puissent
22 avancer en toute sécurité. C'était là notre première préoccupation. Parce
23 qu'après ce moment-là la nuit tombe, et là vous vous trouvez dans un
24 environnement fort hostile.
25 Mme PACK : [interprétation] Je voudrais demander le versement au dossier de
26 ce document.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.
28 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P6481.
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1 Mme PACK : [interprétation]
2 Q. Je voudrais voir quelle était exactement votre mission en fonction de
3 la directive 4, la mission que vous étiez en train de mener, à savoir de
4 créer les conditions pour forcer la population musulmane à quitter la zone
5 de Podrinje. 1994.
6 Mme PACK : [interprétation] Veuillez, s'il vous plaît, examiner la pièce
7 P04075.
8 Q. Sur l'écran, vous voyez que là nous avons un rapport qui émane de
9 Slavko Ognjenovic, qui à l'époque était le commandant de la Brigade de
10 Bratunac. Donc, 4 juillet 1994. Et je vais vous demander d'examiner le
11 premier paragraphe. Donc il écrit ce rapport, comme vous pouvez le voir,
12 pour sa brigade suivant une réunion au Corps de la Drina, au commandement
13 du Corps de la Drina à Vlasenica. Et donc, il s'agissait d'une réunion à
14 laquelle a participé le général Mladic.
15 Vous, Général, vous, Ognjenovic et les autres commandants du Corps de la
16 Drina, vous étiez tous présents au moment de la réunion du 1er juillet 1994
17 ?
18 R. Si c'est ce qui est écrit dans le document, c'est sans doute exact.
19 Q. Donc vous êtes d'accord d'avoir participé à la réunion. On va voir ce
20 que dit Ognjenovic.
21 Mme PACK : [interprétation] Donc, page 2 en anglais, s'il vous plaît, et 2
22 en B/C/S. En anglais, on va assez vite tourner sur la page 3.
23 Q. Donc, là, nous avons un rapport qui a été écrit suite à la réunion en
24 question, où l'on peut lire :
25 "Nous avons gagné la guerre à Podrinje, mais nous n'avons pas battu les
26 Musulmans complètement, et c'est quelque chose que nous devons accomplir
27 dans la période à venir. Nous devons atteindre notre objectif final :
28 obtenir Podrinje entière serbe. Les enclaves de Srebrenica, Zepa et Gorazde
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1 doivent être défaites du point de vue militaire. Nous devons continuer à
2 armer, entraîner, discipliner et préparer l'armée de la Republika Srpska
3 pour mener à bien cette mission cruciale : expulser les Musulmans de
4 l'enclave de Srebrenica. Et il n'y aura pas de retrait quand il s'agi de
5 l'enclave de Srebrenica. Nous devons avancer. La vie de l'ennemi doit être
6 rendue insoutenable et leur séjour temporaire dans l'enclave impossible, de
7 sorte qu'ils quittent l'enclave en masse le plus rapidement possible,
8 qu'ils comprennent qu'ils ne peuvent pas survivre dedans."
9 Donc, là, Ognjenovic ne fait que répéter un ordre donné par Mladic lors de
10 la réunion à laquelle vous avez participé à Vlasenica le 1er juillet,
11 n'est-ce pas ?
12 R. Oui, oui. Mais les propos n'étaient pas vraiment les mêmes que ceux que
13 l'on voit dans le document. Parce que, à un moment donné, il dit qu'ils
14 doivent subir une défaite militaire. Car nous, nous nous trouvons de deux
15 côtés opposés. Parce que c'est avec Dayton que la guerre s'est arrêtée,
16 mais ce Dayton, il aurait dû intervenir bien plus tôt déjà en 1992.
17 Quelqu'un devait arrêter tout cela bien plutôt que cela. Mais ici, on parle
18 bien d'une défaite militaire.
19 Et Ognjenovic -- eh bien, ne méprenez pas, mais vous savez, il a eu une
20 expérience politique, il a fait des études au niveau de la politique, alors
21 il s'est permis pas mal de choses, et je pense que c'est sans doute pour
22 cela qu'il a été démis de ses fonctions à un moment donné. Il n'est pas
23 besoin que je vous parle d'Ognjenovic à présent. Mais il est tout à fait
24 logique quand vous êtes dans une guerre, tant qu'on vous tire dessus ou
25 bien qu'on vous menace de tir, eh bien, qu'est-ce que vous allez essayer de
26 faire, vous allez essayer d'empêcher cela.
27 Et vous savez très bien qu'à l'époque, cette enclave soi-disant protégée
28 devenait une unité de la taille d'une division, et une division, vous
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1 savez, c'est une unité importante au sein d'une armée. Et cette division a
2 vu le jour dans une enclave protégée. Il fallait lire ce que les Musulmans
3 demandaient en ce qui concerne les munitions quand ils se sont adressés à
4 Tuzla, parce qu'il vous serait plus facile d'interpréter ce document. Parce
5 qu'ils voulaient tellement d'armes qu'ils pouvaient tuer tous ceux qui
6 vivaient de là à Belgrade.
7 Parce qu'il y avait là un danger latent que l'on soit rayés de la
8 surface de la terre à partir du moment où la 28e Division lance son
9 attaque, on allait tous s'écraser dans l'enclave, à Tuzla, Sarajevo.
10 Qu'est-ce qu'il fallait que je fasse ? Que je les laisse nous écraser, nous
11 tuer tous, nous anéantir, laissés là comme des brebis ?
12 Q. La vie de l'ennemi doit être rendue impossible et leur séjour
13 temporaire dans l'enclave rendu impossible de sorte qu'ils quittent
14 l'enclave en masse le plus rapidement possible, en comprenant qu'ils ne
15 peuvent pas survivre dans la région. Je vais vous poser la question.
16 Donc, là, il s'agissait d'un ordre, d'un ordre donné par Mladic le 1er
17 juillet, lors de la réunion de Vlasenica, n'est-ce pas ?
18 R. Non, non. Là, ce n'est pas un ordre. Permettez-moi de vous le dire,
19 ceci n'est pas un ordre. Un ordre commence par : J'ai décidé que. Tout le
20 reste ne sont que des conversations, les préparatifs, des paroles, des
21 mots. Vous savez, un ordre a une forme claire et nette où on dit clairement
22 qui doit faire quoi. C'est cela, la définition d'un ordre.
23 Q. Votre objectif était de créer des conditions pour que les enclaves
24 disparaissent, n'est-ce pas ? C'était cela, votre objectif.
25 R. Et de l'autre côté, vous aviez l'objectif qui visait à ce que tout ce
26 qui est serbe disparaisse de Podrinje. Est-ce que notre ennemi ne voulait
27 pas que toute la population serbe de Podrinje disparaisse ? Ou bien, est-ce
28 qu'ils avaient un autre objectif ? Soyons honnêtes. L'objectif de l'ennemi
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1 était de faire disparaître la population serbe de Podrinje. Notre objectif
2 était de survivre, et nous avons survécu. D'ailleurs, eux aussi, ils ont
3 survécu.
4 Q. Votre objectif était de rendre la vie impossible, insoutenable pour
5 eux, de sorte qu'ils ne puissent pas survivre, n'est-ce pas ? C'était cela,
6 vous vouliez qu'ils partent ?
7 R. Ils avaient détruit ma vie. Moi, j'avais préservé leurs vies. Vous
8 devez comprendre qu'on aurait pu les anéantir. On avait suffisamment
9 d'armes pour les anéantir, comme ils nous ont anéantis. Est-ce qu'ils ont
10 laissé qui que ce soit en vie derrière leur
11 passage ?
12 Q. Vous, en tant que commandant, vous avez tenu un journal en tant que
13 commandant du Corps de la Drina, et ce journal a été confisqué dans votre
14 maison au mois d'octobre 2009 et se trouve aujourd'hui en possession du
15 bureau du Procureur de ce Tribunal. Est-ce que vous vous souvenez de cela,
16 au mois d'octobre 2009 ?
17 R. Oui, oui, je me souviens de cet incident fort désagréable. C'était le
18 16 juillet 2010, pas en 2009.
19 Q. Eh bien, c'est le MUP qui avait confisqué ce journal. Et donc,
20 maintenant, je vais demander que l'on examine ce document, ce journal,
21 surtout l'année 1994. Il s'agit du document 65 ter 21899A. Et donc, nous
22 allons examiner quelques extraits de ce journal, de ce cahier. C'est un
23 extrait de votre journal concernant la réunion du 1er juillet 1994 avec
24 Mladic et Ognjenovic.
25 R. Oui. Oui.
26 Q. Vous le reconnaissez ?
27 R. Oui. Mais vous ne m'avez pas permis de vous dire de quelle façon ce
28 cahier personnel, ce document personnel, est arrivé jusqu'à vous. Parce que
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1 vous auriez dû me permettre de vous donner quelques explications à ce
2 sujet.
3 Q. Je vais vous poser quelques questions au sujet de ce qui est écrit ici
4 pour la date du 1er juillet 1994. Donc je vais vous demander d'examiner
5 cela. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que ce sont vos notes que
6 vous avez faites suite à la réunion au Corps de la Drina à Vlasenica ?
7 R. Oui.
8 Q. Donc, à l'époque, vous avez pris des notes ?
9 R. Oui, tous les officiers prennent des notes. Et donc, moi aussi, je les
10 ai prises.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je demander que l'on permette au témoin de
12 lire à voix haute ce qui est écrit ici parce que la traduction n'est pas
13 bonne. Ce n'est pas peut-être très, très important, mais la traduction
14 n'est pas bonne.
15 Mme PACK : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.
16 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]
17 Mme PACK : [interprétation] Monsieur le Président, nous allons parcourir
18 pas mal d'extraits.
19 Q. Mais pour l'instant, je voudrais tout simplement demander au général si
20 c'est bien lui qui a noté cela et qui a noté les propos du général Mladic.
21 C'est bien de cela qu'il s'agit ?
22 R. Oui, oui.
23 Q. Allez-y, lisez-nous ce qu'il a dit là.
24 R. Ouvrir les six yeux, qu'est-ce que cela veut dire ?
25 Q. [aucune interprétation]
26 R. Vous avez quatre yeux, mais il faut vraiment être très, très prudent,
27 bien observer, parce que le danger est énorme.
28 Q. Faites une pause là. Nous ne voulons pas entendre vos interprétations
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1 de ce qui est écrit ici. Je vais le lire en anglais tout simplement peut-
2 être.
3 Mme PACK : [interprétation] Donc, là, on va passer à la page 2, la page
4 suivante, et je vais le lire en anglais. Parce que --
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous tenir compte de ce que
6 vous dit le sténotypiste ? La question va venir.
7 Mme PACK : [interprétation] Je vais lire, donc :
8 "Les propos les plus importants et les instructions pour le
9 reporting. Faire des rapports de façon ouverte. Raconter les choses telles
10 qu'elles sont. Je n'en vais pas vous faire de louanges. Vous avez fait
11 beaucoup. Nous sommes sur le bon chemin pour nettoyer les enclaves."
12 Q. Donc, là, vous avez noté les propos de Mladic lors de la réunion à
13 Vlasenica le 1er juillet, n'est-ce pas ?
14 R. Oui.
15 Q. Ensuite, la page suivante. Et donc, je vais continuer à lire ce que
16 Mladic a dit. Donc, en bas de la page, le général Mladic dit :
17 "Ne pas laisser, pour l'instant, passer les convois en direction de Tuzla."
18 Donc, là encore, vous avez noté ce que Mladic a dit, non ?
19 R. Oui.
20 Q. La page suivante --
21 R. Est-ce que vous me permettez de vos donner quelques explications ?
22 Q. On va le faire à la fin. Pour l'instant, je veux juste lire ce qui est
23 écrit dans le cahier.
24 R. [aucune interprétation]
25 Q. Donc, page 4. Donc, dans l'ordre s'expriment Mladic, Krstic, Mladic. Et
26 là, à la page suivante, Mladic dit :
27 "Contrôler en détail les convois. Se battre même avec la FORPRONU" --
28 R. [aucune interprétation]
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1 Q. C'est en bas de la page. Je pense que c'est sous la ligne que vous avez
2 dessinée.
3 R. [aucune interprétation]
4 Q. Et là, on peut lire :
5 "Passer, couper le secteur autour de la route."
6 Et ensuite, on peut lire :
7 "Les enclaves --"
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il est absolument inacceptable qu'on déforme
9 comme cela les mots. La traduction n'est pas bonne. Il y a une erreur dans
10 la traduction.
11 Mme PACK : [aucune interprétation]
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Moi, je demande que l'on permette au témoin de
13 répondre à chaque phrase, alors que là on fait une salade russe de tout ce
14 qui est écrit.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Justement, Mme Pack en est arrivée au
16 bout où il est écrit : "L'enclave ne doit pas survivre, mais elle doit
17 disparaître." Et je pense que c'est ce qui l'intéresse avant tout.
18 Mme PACK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Ensuite, je vais
19 lire encore un extrait et je ne vais plus parler de cette réunion.
20 Q. Vous pouvez voir Ognjenovic, c'est souligné, donc peut-être qu'il a dit
21 quelque chose, mais ensuite nous avons à nouveau Mladic qui parle :
22 "Les enclaves peuvent servir de terrains d'atterrissage. La guerre
23 n'a même pas commencé et elle n'est surtout pas terminée. Réduire
24 l'enclave." Donc on va s'arrêter là.
25 Donc on va regarder le terme utilisé par Mladic, parce que vous
26 l'avez nommé :
27 "Nous sommes sur la bonne voie pour nettoyer l'enclave. L'enclave ne
28 doit pas survivre, elle doit disparaître."
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1 Voici la question que j'ai à vous poser, Mon Général : c'était cela votre
2 tâche dans le Corps de la Drina, créer des conditions telles que la
3 population civile quitte les enclaves, n'est-ce pas ?
4 R. Et il vaudrait mieux que la population civile parte là où il n'y avait
5 pas de combat que de rester dans la région où il n'y avait pas des
6 conditions de vie. Srebrenica était pleine à craquer après notre offensive
7 qui a eu lieu en 1993, au printemps. Parce qu'ils ont refusé, d'ailleurs,
8 la solution pacifique que je leur avais proposée. Et vous devez bien
9 comprendre qu'ici on dit que ces enclaves protégées deviennent des terrains
10 d'atterrissage, de descente. Et vous devez bien comprendre de quoi il
11 s'agit, parce qu'en sachant que sur ce même terrain on était en train de
12 créer une unité militaire très puissante, que voulez-vous que l'on dise ?
13 Evidemment qu'on était en train de créer les conditions pour des descentes
14 aériennes. Et la population serbe s'était échappée. Tous ceux qui pouvaient
15 s'enfuir se sont enfuis, ils sont tous partis.
16 Et donc, on pensait que leur population pouvait tout simplement
17 quitter ce terrain qui n'était vraiment pas propice à la vie où à la
18 survie, parce que vous n'aviez pas un hectare de terre arable. Aucune usine
19 ne fonctionnait. Moi personnellement, j'ai fait des efforts, j'ai fourni
20 des efforts pour que l'on achemine l'eau. Moi personnellement, parce que --
21 pourquoi vous ne lisez pas cela ? Cela se trouve là dans le texte. Parce
22 que moi, je savais très bien à quel point c'était important. Parce que se
23 cacher derrière le peuple et en même temps créer ou essayer de créer une
24 division, j'avais du mal à accepter cela.
25 Parce qu'il faut protéger la population avant tout. Protéger, cacher
26 la population civile, l'abriter des activités de guerre. Bien sûr qu'on ne
27 voulait pas les mettre à l'écart pour les tuer, mais bien sûr que non. Bien
28 sûr que non, il fallait les mettre en sécurité.
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1 Q. Donc c'est ce que vous dites, vous dites que ce est indiqué ici, le
2 sens de ceci est que "la population devrait tout simplement quitter un
3 secteur qui était très peu favorable pour qu'on puisse y vivre." Mais,
4 Général, c'était un endroit très peu favorable pour pouvoir y vivre
5 justement à cause des conditions que vous y aviez créées, n'est-ce pas ?
6 R. Comment ça ? Vous avez oublié la carte présentée au début de ma
7 déposition ? Comment pouvez-vous dire ceci ? Où sont donc les 157 villages
8 serbes incendiés ? Je vous en prie. Vous êtes trop intelligente quand même
9 pour avoir oublié si rapidement cela. Vous pouvez monter dans un
10 hélicoptère et puis faire le tour aujourd'hui encore de ces ruines de
11 villages incendiés qui n'ont toujours pas été reconstruits aujourd'hui
12 encore.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Peut-on poursuivre demain ?
14 Mme PACK : [aucune interprétation]
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, s'il vous plaît, je dois encore
16 ajouter une phrase. On ne dit jamais ici que la formation armée de la 28e
17 Division des Musulmans utilisait sa propre population pour s'abriter
18 derrière elle et que sais-je encore. Et j'ai réussi à obtenir ce que j'ai
19 obtenu, et 20 ans plus tard, on nous présente les choses de cette façon.
20 Cela semblait être un problème pour tout le monde sauf pour les formations
21 de l'armée des Musulmans.
22 Et c'est comme ça que ça s'est passé. Vous savez ce qu'ils m'ont
23 écrit à moi personnellement en plein milieu de la guerre alors qu'ils m'ont
24 assiégé et sont venus dans mon commandement pour me sauver ? Pourquoi ne
25 lisez-vous pas cette lettre ? Vous l'avez. Voilà, j'ai fini.
26 Mme PACK : [aucune interprétation]
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Zivanovic, vous avez dit qu'il
28 y avait une carte dans votre bureau. Donc elle était accrochée au mur de
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1 votre bureau ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, sur le mur.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et pourquoi, quel était l'intérêt de
4 faire cela ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] A cause des figures géométriques - des
6 cercles, des trapèzes, des rectangles - qui étaient tracées sur cette
7 carte. Ceci indiquait la façon dont l'ennemi organisait ses activités, et
8 nous les suivions de cette façon. Les axes d'attaque; les intentions du
9 commandement de l'ennemi; la prise des installations d'importance vitale,
10 qu'elles soient économiques ou autres; les points topographiques. Parce
11 qu'il y avait toujours également la menace de cette usine d'électricité à
12 Bajina Basta et de sa destruction -- ce barrage hydroélectrique, en fait,
13 dont la destruction aurait engendré un déversement d'une grande quantité
14 d'eau empoisonnée par le zinc et par les mines de plomb, et cela aurait
15 entraîné la mort de beaucoup d'organismes. Et il y avait toutes ces
16 installations que nous devions donc sauvegarder.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Pack, à moins que vous ayez
18 d'autres questions urgentes, est-ce que nous pourrions nous interrompre
19 maintenant ?
20 Mme PACK : [interprétation] Oui, si vous le préférez. Monsieur le
21 Président, si vous préférez vous pencher sur la question du versement
22 demain, c'est la seule chose qui me reste.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. S'il n'y a pas d'objection.
24 Mme PACK : [interprétation] Merci.
25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document reçoit la cote P6482.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de lever l'audience, la Chambre va
27 rendre une décision orale relative à la requête de l'Accusation aux fins
28 d'exclure en partie la déposition du Témoin Miroslav Toholj déposée le 22
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1 octobre 2013, ainsi qu'à la requête de l'Accusation aux fins de se voir
2 autoriser à répliquer à la réponse de Karadzic déposée le 29 octobre 2013.
3 L'Accusation demande que toute une série de paragraphes soient exclus de la
4 déclaration de Miroslav Toholj qui est présentée pour versement sous le
5 régime de l'article 92 ter sur le fondement que ces paragraphes sont sans
6 pertinence au regard des charges de l'acte d'accusation. L'accusé a déposé
7 sa réponse le 28 octobre, s'opposant à la requête en question.
8 La Chambre a examiné les arguments mis en avant par les parties et
9 s'est penchée sur la déclaration. Elle considère que les paragraphes numéro
10 5, 6, 7, 8, 13, 14, 15, 18, 21, les deux premières phrases du paragraphe
11 27, les paragraphes 32, 35, 46, 47, les deux dernières phrases du
12 paragraphe 56, les paragraphes 57, 58, 59 dans son intégralité, 68, 69 et
13 70 doivent être exclus dans la mesure où ils traitent en détail de sujets
14 qui ne sont pas pertinents au regard des chefs d'accusation. La Chambre
15 considère, cependant, que les paragraphes numéro 11, 12, 19 et 20 peuvent
16 subsister dans le cadre de cette déclaration dans la mesure où ils
17 présentent une certaine pertinence.
18 La Chambre fait donc partiellement droit à la requête et ordonne
19 l'exclusion des paragraphes identifiés précédemment, y compris l'exclusion
20 proprio motu du paragraphe numéro 59 dans son intégralité. La Chambre
21 autorise l'accusé à présenter pour versement le reste de la déclaration du
22 Témoin Toholj sous le régime de l'article 92 ter et rejette la requête de
23 l'Accusation aux fins de se voir autorisée à répliquer.
24 Monsieur Zivanovic, nous allons lever l'audience d'aujourd'hui. Nous
25 reprendrons nos débats demain à 9 heures du matin. Je souhaite vous donner
26 pour instruction de ne discuter avec personne du contenu de votre
27 déposition ici devant ce Tribunal pendant que vous êtes cité comme témoin.
28 L'audience est levée.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci. Merci beaucoup pour vos conseils.
2 --- L'audience est levée à 14 heures 49 et reprendra le jeudi 31 octobre
3 2013, à 9 heures 00.
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