Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 13 novembre 2013

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 23.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes. Je m'excuse

  7   pour le retard. Et compte tenu de ce retard, nous pourrions siéger jusqu"à

  8   3 heures, si les parties en présence et le Greffier sont d'accord.

  9   Veuillez continuer, Monsieur Karadzic, je vous prie.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Bonjour, Excellences. Bonjour, à tous et

 11   à toutes.

 12   LE TÉMOIN : MOMCILO KRAJISNIK [Reprise]

 13   [Le témoin répond par l'interprète]

 14   Interrogatoire principal par M. Karadzic : [Suite]

 15   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président de l'Assemblée.

 16   R.  Bonjour.

 17   Q.  Pouvez-vous nous dire à qui le gouvernement et, ou plutôt, avant le

 18   gouvernement, le conseil des ministres avait été subordonné dans notre

 19   système ? De jure et de facto ?

 20   R.  Le gouvernement et avant cela le conseil des ministres, avaient été

 21   subordonnés à l'assemblée du peuple serbe en Bosnie-Herzégovine, par la

 22   suite à l'assemblée populaire de la Republika Srpska.

 23   Q.  Merci. Je vais vous donner lecture de ce qui est dit au paragraphe 92

 24   [comme interprété] du mémoire préalable au procès :

 25   "Le gouvernement et le conseil de ministres avant cela, était subordonné à

 26   Karadzic et Krajisnik et était encore l'un des mécanismes pour ce qui est

 27   de la mise en œuvre de leur politique de division ethnique."

 28   Que seriez-vous nous dire à ce sujet ?


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  1   R.  Je ne puis dire que c'est tout à fait erroné et je ne sais pas à partir

  2   de quoi on avait pu tirer une conclusion de ce genre.

  3   Q.  Merci.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Vous avez dit 52 du mémoire

  5   préalable ?

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] 92.

  7   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Maintenant que nous sommes en train de parler de cette assemblée,

 10   Monsieur le Président de cette assemblée, comment a-t-on pris les décisions

 11   ? Quel était le processus suivi ? Comment ce processus se déroulait-il ?

 12   Etait-ce chose aisée ? Y avait-il eu des difficultés ? Et comment se fait-

 13   il que très souvent les décisions se trouvaient être unanimes ?

 14   R.  La procédure de prise de décision au niveau de l'assemblée c'était

 15   habituel comme dans les autres parlements. A l'ordre du jour on mettait, on

 16   prévoyait des documents, ces documents étaient distribués très souvent aux

 17   députés, de même ce n'était pas inhabituel que de voir les documents

 18   distribués lors de la session même.

 19   Parce que très souvent on distribuait les documents juste avant l'arrivée

 20   des députés. Et il n'était pas rare non plus de voir des documents

 21   distribués à l'occasion de la session elle-même. Il y a eu des cas de

 22   figure, où on n'a pas réussi à préparer la documentation nécessaire en

 23   raison de la situation de guerre, et les députés en prenaient connaissance

 24   à l'occasion de la session même, mais c'était quand même assez rare.

 25   Les débats se tenaient, et tous les députés avaient la liberté d'exprimer

 26   leur opinion, de faire formuler les propositions, ou proposer des

 27   modifications au texte des documents proposés. Ce que je puis dire aussi,

 28   et vous allez le voir qu'au niveau de la documentation des différentes


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  1   pièces présentées ici, de façon très autonome, il y avait réflexion ou

  2   influence d'exercée pour ce qui est de la prise des décisions. Je vais dire

  3   encore un point important, très souvent ou presque toujours, avant la

  4   session il y avait une session du club des députés, et là, tous les députés

  5   faisaient partie du club, y compris les députés indépendants, les députés

  6   du SDS, et du Mouvement du Renouveau serbe. A l'occasion de ces discussions

  7   et débats il y avait des échanges très véhéments mais aussi très productifs

  8   qui permettaient d'aboutir à des solutions.

  9   Et très souvent, les propositions avancées - excusez-moi - se trouvaient

 10   être rectifiées, corrigées, modifiées, mais en raison de cette situation de

 11   guerre et des tensions en présence, moi, en ma qualité de président, et la

 12   politique aidant nous n'avons pas voulu écourter le temps pour

 13   l'harmonisation des positions parce qu'il était important d'aboutir à une

 14   solution et non pas de trancher et d'adopter une décision. Ce qui fait que

 15   les discussions qui avaient cours au fil de ces sessions ça donnait une

 16   image de l'ambiance qui y régnait. La conclusion pouvait peut-être paraître

 17   tout à fait différente.

 18   Ce dont je tenais compte et c'était aussi ma mission au parlement de la

 19   Bosnie-Herzégovine. Par la suite, je me suis efforcé de faire pareil à

 20   l'assemblée de la Republika Srpska. C'est de faire en sorte que chaque

 21   intervenant au débat, les députés, les membres du gouvernement, les membres

 22   de la présidence, puissent participer de façon active, apporter leur

 23   contribution. Et je me suis surtout efforcé de faire en sorte qu'il n'y ait

 24   pas de mise en minorité systématique. Parce que en raison de la situation

 25   qui -- telle qu'elle s'était présentée en Bosnie-Herzégovine où nous avons

 26   été de façon brutale mis en minorité, il y a eu une forte résistance de la

 27   part des députés à cette façon de procéder. Et je me suis efforcé de faire

 28   en sorte que les débats débouchent sur des solutions.


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  1   Je n'ai pas entravé les interventions des députés. J'ai prêté

  2   attention à la nécessité d'éviter les extrémismes pour ne le pas avoir des

  3   solutions qui seraient contraires à la législation ou qui seraient

  4   "détrimentaires" à notre politique pour aboutir sur des conclusions

  5   négatives. Alors, donc, la politique était celle d'arriver à des

  6   conclusions qui seraient au service de la mise en œuvre de notre politique.

  7   De même, ça devait être au service de la nécessité de ne pas enfreindre la

  8   constitution et la législation, parce que ce type de décisions serait

  9   préjudiciable à plusieurs titres.

 10   Je dois dire que nos députés qui étaient les intervenants principaux

 11   dans les débats ont influé de façon prédominante, certes, mais les

 12   personnes qui avaient des propositions diamétralement opposées ou

 13   radicalement négatives finissaient par tomber d'accord avec l'opinion de la

 14   majorité. Et c'est la raison pour laquelle l'image que donnait notre

 15   parlement a fait que nous étions presque absolument d'accord lorsque nous

 16   avions abouti à une harmonisation des positions.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] En page 3, lignes 7, 8, on n'a pas consigné une

 18   affirmation faite par le président Krajisnik qui est celle de dire que

 19   l'assemblée visait à trouver des solutions plutôt qu'à prendre -- qu'à

 20   faire prendre des décisions par mise en minorité systématique des autres.

 21   Et j'aimerais que ceci se -- fasse l'objet d'un prononcé de la part -- d'un

 22   prononcé d'opinion de la part du témoin. Vous pouvez réécouter.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux prendre la parole, Monsieur

 24   le Président ?

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous confirmez ceci, Monsieur

 26   Krajisnik ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact. Notre politique était celle-

 28   ci et justement, c'est moi qui étais chargé de sa mise en œuvre au


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  1   parlement. Il s'agissait d'aboutir à des positions harmonisées plutôt que

  2   de prendre des décisions par mise en minorité de quelqu'un. Donc, si il y

  3   avait une majorité contre, on rejetait une décision plutôt que de

  4   l'adopter. Donc, nous nous sommes efforcés d'harmoniser les positions et

  5   c'est ce qui a fait pendant toute la durée de la guerre que notre assemblée

  6   a, au final, été stable, caractérisée par de la cohésion.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Merci. Quelles sont les parties qui ont exercé leur influence sur les

  9   activités du parlement ou de l'assemblée et dans quelle mesure cela s'est-

 10   il fait ?

 11   R.  La majorité des députés étaient des députés du SDS. Mais il y avait

 12   aussi des députés du mouvement serbe -- du mouvement du renouveau serbe. Il

 13   y avait les ex-réformistes; c'étaient les réformistes qui étaient connus au

 14   niveau de l'ex-Yougoslavie. C'était le parti de Ante Markovic. Et il y

 15   avait les députés qui avaient repris la politique et l'idéologie des

 16   communistes et du système antérieurement en place. C'étaient les membres du

 17   Parti socialiste. Et ce que je puis affirmer, je crois que chaque député

 18   pourra le confirmer, la totalité de ces députés pouvait, sur un pied

 19   d'égalité, influer sur les décisions à prendre. Et je n'ai jamais permis

 20   qu'une majorité constituée par les députés du Parti démocratique serbe

 21   impose sa volonté s'il y avait des raisons justifiées de faire en sorte que

 22   les autres députés, ceux des autres partis, puissent formuler des positions

 23   différentes. Le traitement de tout un chacun était un traitement sur pied

 24   d'égalité. Tous pouvaient, de façon égale, influer sur les décisions à

 25   prendre. C'était des -- les propositions, la teneur, la qualité des

 26   propositions qui l'emportaient et non pas le nombre des députés que les uns

 27   pouvaient avoir contre les autres. Donc, on mettait au final au vote et on

 28   votait souvent par acclamation. Mais pour arriver à ce type de décision, il


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  1   fallait déployer pas mal d'activité pour que personne ne se sente offensé

  2   ou disqualifié de façon injuste.

  3   Q.  Que sous-entendait ce travail obstiné pour ce qui est des propositions

  4   formulées ?

  5   R.  Vous avez eu une façon de vous exprimer, Monsieur le Président, qui a

  6   fait qu'on vous a gardé en mémoire. Au bout de débats assidus, il

  7   s'agissait de faire travailler notre matière grise. Je ne sais pas comment

  8   les interprètes vont interpréter ceci. Le terme en serbe est "mozganje"

  9   [phon].

 10   L'INTERPRÈTE : En français, cela se traduit par "faire fonctionner sa

 11   matière grise".

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, quand il y a une proposition, il

 13   s'agissait de se pencher sur la teneur de celle-ci pour aboutir à une bonne

 14   solution. Et la qualité du débat au parlement, à l'assemblée, c'était le

 15   fait d'avoir par la suite -- de ne plus savoir qui avant avancé telle

 16   proposition plutôt qu'une autre, mais la décision, si elle était bonne,

 17   c'était le produit du travail de tous les intervenants dans l'assemblée. Et

 18   tout un chacun a fini par comprendre et considérer que cette proposition

 19   émanait de lui-même, alors que la proposition, en fait, venait d'une source

 20   ou de -- avait l'une origine et non pas plusieurs origines.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Combien de temps duraient nos sessions de l'assemblée ?

 23   R.  Eh bien, la meilleure façon de le dire que c'est -- que c'était sans

 24   fin. Pourquoi ? Eh bien, ça durait le temps qu'il fallait pour arriver à

 25   une solution qualitativement bonne. Parce qu'il n'y avait pas que moi en ma

 26   qualité de président de l'assemblée qui souhaitait arriver à une bonne

 27   solution. La grande majorité souhaitait aussi faire en sorte que nous

 28   n'allions pas dans la mauvaise direction. Parce que quand une proposition


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  1   venait et qu'on voyait que quelqu'un insistait sur des solutions extrêmes,

  2   les autres députés reprenaient la parole pour formuler des arguments en

  3   faveur du maintien sur la bonne route, afin de ne pas quitter la politique

  4   positive et afin aussi de ne pas aboutir à quelque chose qui nous

  5   reviendrait dans la figure comme un boomerang. Alors, tout ceci s'est fait

  6   en raison de notre politique, mais aussi en raison d'une attention

  7   vigilante des adversaires de tous ceux qui suivaient attentivement pour

  8   mettre toute chose sous un -- sous un verre grossissant, afin d'en voir les

  9   défauts. Et on peut voir ceci d'après les sténogrammes. Certaines sessions

 10   ont duré assez peu de temps. On parcourait plusieurs points à l'ordre du

 11   jour de façon assez rapide, mais c'étaient des points de l'ordre du jour

 12   qui étaient routiniers. Quand quelqu'un avait préparé une documentation où

 13   il s'agissait d'adopter des décisions de façon formelle, ça, ça se faisait

 14   d'affilée, mais c'était rare. Les questions les plus importantes, les

 15   solutions liées à la crise, au sort de la paix ou de la guerre, ça, ce sont

 16   des choses qui ont duré et des débats qui ont duré très longtemps pour

 17   donner lieu aux meilleures des solutions possibles.

 18   Q.  Merci. Ligne 12, page 5, vous avez dit qu'au final on avait ou on

 19   oubliait ou en venait à oublier qui est-ce qui avait avancé une

 20   proposition. Qu'entendez-vous par là ? Comment en arriviez-vous à faire en

 21   sorte que l'on oublie ou l'on perde de vue qui avait été l'initiateur d'une

 22   solution ?

 23   R.  J'ai essayé d'étoffer mon propos et d'expliquer. Si une proposition

 24   nous est communiquée, on fait un projet de résolution, et à l'ordre du

 25   jour, il y a par exemple un planning déterminé ou une chose importante,

 26   alors il s'agit de voir comment se pencher sur le projet en question. Ce

 27   sont des éléments particuliers ou des points particuliers de l'ordre du

 28   jour, alors si quelqu'un a proposé les modalités de mise en forme de


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  1   présentation des solutions qu'il convient d'adopter, alors un débat assez

  2   long avait lieu, et on avançait des propositions positives qui à l'origine

  3   ne s'y trouvaient pas. Et, au final, on donnait, on avait un projet

  4   meilleur que celui qui avait été avancé au départ, et on avait perdu de vue

  5   qui est-ce qui était intervenu en la faveur de telle solution, mais qui se

  6   trouvait être meilleure que la proposition du départ, et, ceux qui

  7   l'avaient proposée, l'adoptaient comme sienne. Donc ces interventions

  8   positives où tout le monde tombait donc au final, qui ont fait que très

  9   souvent on finissait par oublier qui est-ce qui était intervenu de façon

 10   aussi intelligente, tout le monde le considérait comme un avis étant le

 11   sien, et chaque participant ou intervenant ayant proposé la chose au départ

 12   faisait siennes les modifications suggérées entre-temps.

 13   Q.  Merci. Je voudrais vous faire part de ce qui se trouve au paragraphe 81

 14   du mémoire préalable au procès. On y dit :

 15   "L'assemblée était en fait une instance du parti, et plusieurs exerçaient

 16   sa fonction législative conformément à la politique telle que tracée par le

 17   Parti démocratique serbe dont les titulaires étaient bien entendu Krajisnik

 18   et Karadzic. On peut le voir d'après les nombreuses conclusions, décisions

 19   et lois adoptées à l'unanimité sans débat aucun."

 20   Que diriez-vous de cette façon de caractériser les travaux de notre

 21   assemblée nationale ?

 22   R.  Je me trouvais être tout à fait fier si cela était vrai en ce qui me

 23   concerne. Pourquoi ? Parce que la proposition aurait été bonne, parce que

 24   toutes les conclusions se seraient trouvées conformes à la constitution et

 25   à la législation, et aucune conclusion ou décision ne se retrouverait

 26   contraire à la constitution ou dirigée contre l'un des groupes ethniques en

 27   présence, mais cela ne s'est pas passé de la sorte. Il est vrai de dire que

 28   la direction complète avait toujours cherché à intervenir pour que les


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  1   propositions allant aux extrêmes soient atténuées. Il y en a eu aussi qui

  2   n'étaient pas mal intentionnés, mais il y avait des gens qui ressentaient

  3   le besoin de dire des choses qui n'étaient pas très sages sur un plan

  4   politique, et pas productives non plus, mais la composition toute entière

  5   du parlement comme je l'ai dit tout à l'heure, il y a quelques minutes de

  6   cela à peine, tous ces députés, représentants des différents partis

  7   étaient, avaient un traitement sur un pied d'égalité, il n'y avait pas

  8   prédominance du Parti démocratique serbe dans le sens qui est celui que

  9   vous venez de nous lire, peut-être  qu'ils expliquaient quelque peu

 10   davantage. Il y a eu des élections pluripartites, et il y a eu trois

 11   mouvements qui l'ont emportées, il y a eu une espèce d'homogénéisation

 12   politique. Dans l'un des partis, il y avait pratiquement toute la totalité

 13   des Musulmans ou la quasi-totalité des Musulmans. Dans l'autre, la totalité

 14   ou quasi-totalité des Croates. Et dans le troisième, la quasi-totalité des

 15   Serbes. Ça n'a pas été des membres du parti. Ils avaient, on avait soutenu

 16   de façon plébiscitaire les politiques en question qui étaient représentées

 17   par, par exemple, le Parti démocratique serbe au sommet. Mais ce que je

 18   peux vous affirmer, c'est que la politique qui a été promue par le Parti

 19   démocratique serbe c'était une politique qui sortait de la tête de la

 20   totalité du peuple serbe. On a pu le voir au plébiscite. On a pu le voir

 21   aussi lorsqu'on s'est entretenu avec chaque individu. 90 % de ces

 22   individus-là n'étaient pas des membres d'un parti quel qu'il soit. Ils

 23   étaient des sympathisants. Ils ont apporté leur soutien à cette politique.

 24   S'il n'y avait pas eu de soutien de ce type, ni l'assemblée, ni la

 25   présidence, ni le gouvernement n'aurait été à même de mettre cela en œuvre,

 26   et cela ne se serait pas soldé par le fait d'avoir cette politique comme

 27   étant formellement la politique d'un seul parti. Ce n'est pas vrai, ce

 28   n'était pas la politique du Parti démocratique serbe seul, c'était la


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  1   politique de la totalité des députés et de la totalité du peuple serbe

  2   pendant la guerre.

  3   Q.  Merci. Dans quelle mesure l'assemblée avait-elle été une instance

  4   centralisée, et dans quelle mesure pouvait-elle exercer son influence sur

  5   le terrain, c'est-à-dire sur les différentes municipalités, les autorités

  6   municipales sur le terrain ?

  7   R.  Dans mon témoignage d'hier, j'ai dit que ces municipalités en

  8   particulier en 1992, et par la suite, c'étaient des états à part, en fait

  9   de piètre de voie de communication, et de la situation matérielle au final.

 10   Parce que le peu de bien qu'il y avait, le peu de bien matériel ça se

 11   trouvait au niveau des municipalités. C'est les municipalités qui

 12   finançaient l'armée, qui avaient financé les activités et la défense. Ce

 13   qui fait que l'assemblée du peuple serbe, c'est-à-dire l'assemblée

 14   nationale, c'était un endroit où l'on conduisait la politique au sommet

 15   pour ce qui est des négociations, pour ce qui est de la détermination des

 16   plannings, mais cette assemblée n'a pas pu influer sur les décisions prises

 17   par quelle qu'autorité que ce soit à des niveaux municipaux.

 18   Moi, en ma qualité de président de l'assemblée, ni le président de la

 19   présidence non plus, ne pouvait influer sur le maire, le président de

 20   l'assemblée municipale, X ou Y, ils étaient autonomes pour ce qui est de la

 21   prise de décision, ils le faisaient de façon autonome. Personne d'entre

 22   nous n'avait le droit d'influer. Le gouvernement dans un petit segment

 23   d'après la constitution pouvait exercer son influence vis-à-vis des

 24   municipalités, mais ça ne s'est pas pratiquement fait parce que nous étions

 25   en état de guerre et bien que d'après la constitution il y a eu des

 26   compétences sur certaines petites parties des municipalités.

 27   Les municipalités, d'après la constitution, c'était autonome, c'était

 28   complètement séparé et distinct de toute autorité qui c'aura été celle de


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  1   l'assemblée du peuple serbe.

  2   Q.  Merci. Je vais vous donner lecture de ce qui y figure au paragraphe 53

  3   du mémoire préalable au procès. Il y est dit que :

  4   "L'assemblée était un forum important et centralisé pour la communication

  5   de la politique et des instructions afin de les propager et les diffuser

  6   jusqu'aux instances sur le terrain. A l'occasion des sessions de

  7   l'assemblée ou sessions des clubs de députés, Karadzic donnait des

  8   instructions aux députés du point de vue des séparations sur des bases

  9   ethniques pour que personne ne puisse vivre avec les Musulmans, et il y

 10   avait donc des instructions de données aux municipalités, et que l'objectif

 11   final des Serbes de Bosnie était une réunification avec les Serbes de

 12   Serbie".

 13   Est-ce que cette formulation pour ce qui est de la position

 14   constitutionnelle et de l'intervention de l'assemblée, et de moi-même et de

 15   mes compétences à moi, et de mes possibilités de donner des instructions

 16   aux députés, est-ce que tout ceci se trouve être exact ?

 17   R.  Madame, Messieurs les Juges, vous pouvez voir dans tous les

 18   documents et tous les sténogrammes, tout ceci, je me souviens d'aucune

 19   instruction qui aurait ou décision qui aurait eu force d'obligation pour ce

 20   qui est des assemblées municipales. Il se peut qu'il y ait eu des

 21   proclamations mais ce que l'assemblée promulguait c'étaient des lois. Et

 22   comme dans tout parlement, ces lois c'était quelque chose de mis en vigueur

 23   pour la totalité de la république. Mais pour ce qui est du plan politique

 24   ou du niveau politique, s'agissant de la formulation qu'on vient de nous

 25   lire, à savoir que l'assemblée devait donner des instructions de commission

 26   de crimes ou de séparation des groupes ethniques, je vous assure que, dans

 27   nos sténogrammes, il n'y a aucune décision de ce type.

 28   S'agissant du deuxième volet de votre question, pour ce qui est de savoir


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  1   si le président, par le biais du club des députés et par le biais de

  2   l'assemblée, donnait des instructions du point de vue de la séparation

  3   ethnique des populations, ça c'est une chose qu'il est aisé de déterminer

  4   le principe de la séparation ethnique était mentionné non pas dans un

  5   système -- dans un sens négatif mais pour créer des unités constitutives.

  6   Parce que les fondements du plan Cutileiro parlaient d'une séparation

  7   ethnique, c'est-à-dire, là, il y avait une majorité absolue ou simple. Il

  8   s'agissait de créer des unités constitutives mais ça ne signifiait pas que

  9   ces territoires-là devaient être nettoyés ou purifiés pour qu'il n'y ait

 10   pas là d'autre ressortissant ou d'autre groupe -- ressortissant d'autres

 11   groupes ethniques. C'était composite, c'était mixte. Et bien entendu dans

 12   chacune de ces unités constitutives il y aurait un peuple majoritaire et

 13   deux peuples minoritaires il y en aurait un qui aurait donc la majorité

 14   absolue et c'était là le préalable à la création d'unités constitutives.

 15   Mais pour ce qui est de ces instructions, vous pouvez voir comment cela

 16   s'est fait à la session du 27 mars 1992.

 17   Et quelles sont les instructions qui émanaient de la part du président, M.

 18   Karadzic ? Où il a été dit clairement quelles sont les suggestions qu'il

 19   formulait à l'égard des députés pour ce qu'il convenait de faire sur le

 20   terrain. Il était clair qu'il y avait une grande crainte de formulée, une

 21   grande appréhension formulée par les députés. On était en situation de

 22   guerre. Nous avions apporté notre soutien à l'armée populaire yougoslave

 23   qui était censée défendre ceux qui étaient attaqués. Nous ne voulions pas

 24   attaquer. Nous voulions nous défendre pour éviter notre sort de la Deuxième

 25   Guerre mondiale. Donc pour faire en sorte que les députés n'aient plus

 26   peur, le président Karadzic a dit clairement que la guerre ne convenait à

 27   personne. Et ça ne nous convenait pas plus qu'à quelqu'un d'autre. Moi, ou

 28   qu'aux autres d'ailleurs. Parce que les conférences ont visé


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  1   l'établissement de la paix. On voulait préserver nos territoires. Nous ne

  2   voulions pas nous emparer du territoire d'autrui. Donc si l'on restait dans

  3   une unité constitutive à nous les autres devaient être des citoyens sur un

  4   pied d'égalité.

  5   Tout cela est consigné dans nos procès-verbaux. Et ce sont des choses

  6   qui m'ont été proclamées au tout début de la guerre. Et tous ceux qui

  7   disent le contraire peuvent s'assurer de ce qu'un homme, un président a

  8   formulé comme instructions qui ne sont pas ce qui sont des choses

  9   interdites, mais au contraire, des objectifs visant à préserver la paix

 10   parce que nous étions assurés qu'il n'y aurait pas de guerre.

 11   Q.  Merci. Est-ce que l'assemblée a prescrit le serment à prêter par les

 12   soldats et qu'est-ce qu'à un moment donné il y a eu un amendement du texte

 13   de la loi, et si oui, pourquoi ? Vous en souvenez-vous ?

 14   R.  Eh bien, voyez-vous ces choses-là restent graver dans ma mémoire

 15   pendant longtemps. Le serment et l'accueil, les discussions ont duré

 16   longtemps, nous avons eu des réunions avec différents représentants de

 17   l'armée. Comment puis-je vous le dire ? Ils souhaitaient conserver les

 18   pratiques qui étaient celles de l'air communiste.

 19   Donc ce qui a été accepté, eh bien, c'était comme un plébiscite, si vous

 20   voulez, il fallait qu'il y ait de la place pour les membres d'autres

 21   groupes ethniques et je crois que ce serment a été corrigé par la suite, et

 22   donc cette espace a été accordée à ces peuples, et donc il s'agissait de

 23   dire qu'il n'y avait pas seulement les membres du peuple serbe qui

 24   pouvaient être membres de l'armée de la Republika Srpska. Mais que d'autres

 25   membres d'autres groupes ethniques, et d'autres peuples pouvaient en faire

 26   partie aussi.

 27   Et donc c'était dû à la chose suivante : Nous disposions d'information il y

 28   a eu certaines unités, elles étaient pas très nombreuses, certes, mais


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  1   certaines unités comprenaient des membres d'autres groupes ethniques et

  2   faisaient partie de la Republika Srpska donc nous ne souhaitions pas que

  3   ces personnes se sentent mal à l'aise, par conséquent nous avons estimé que

  4   ce serment devait être modifié de façon à ce que des membres d'une autre

  5   communauté ethnique puissent l'accepter aussi. Alors, moi, je peux vous

  6   dire ce qui était particulièrement important. A la télévision, nous avons

  7   vu ce que faisait l'autre partie, la partie adverse. Ils disaient qu'ils

  8   avaient tous les Bosniens, tous les habitants d'Herzégovine, les habitants

  9   de toutes les communautés et que leur accueil ou leur -- était purement

 10   islamique, ce qui n'était pas très agréable pour le peuple serbe. Donc pour

 11   que nous ayons un serment qui corresponde à quelque chose, et parce que le

 12   temps était difficile nous souhaitions que ce soit acceptable pour les

 13   membres des autres communautés ethniques.

 14   Q.  Merci.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on peut montrer au témoin le

 16   numéro 65 ter 17498, s'il vous plaît.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Ceci a-t-il été adopté par la présidence en se fondant sur une certaine

 19   autorité et ceci a-t-il été confirmé par l'assemblée ? Pouvez-vous lire

 20   ceci à voix haute le deuxième paragraphe, s'il vous plaît ?

 21   R.  "Je déclare solennellement sur la vie et d'honorer de défendre la

 22   souveraineté, le territoire, l'indépendance et l'ordre constitutionnel de

 23   la mère patrie, de la République serbe de Bosnie-Herzégovine et de servir

 24   fidèlement les intérêts de ces peuples. Que Dieu me vienne en aide pour

 25   cela."

 26   Q.  Alors au lieu ce n'était pas moi mais c'était le Pr Plavsic qui a signé

 27   cela, et l'assemblée a confirmé ceci au moment où vous avez pris -- où nous

 28   avons pris notre décision ? Nous devions  confirmer cela, n'est-ce pas ?


Page 43374

  1   R.  Oui. Alors chaque décision devait être confirmée par l'assemblée.

  2   Voyez-vous, le secrétaire de l'assemblée vérifiait cela, certifiait cela et

  3   il fallait avoir une copie certifiée conforme à l'original. Vous trouverez

  4   ceci également dans le journal officiel qui était publié, parce que sans

  5   cela le texte n'aurait pas été validé.

  6   Je dois attirer votre attention sur quelque chose. La date est très

  7   importante, c'est celle du 25 juin. C'était juste avant la journée du saint

  8   patron qui est Saint-Vitus dans la Republika Srpska. Je m'en souviens nous

  9   avons eu un débat que j'ai évoqué il y a quelques instants, à savoir nous

 10   nous sommes mis d'accord sur le fait que nos soldats, les représentants de

 11   l'armée. Nous nous sommes mis d'accord avec cela --

 12   L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète : Avec nos soldats, les

 13   représentants de l'armée.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Il fallait qu'ils aient une marge de manœuvre

 15   pour que ce serment soit acceptable pour les membres des autres communautés

 16   ethniques.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Merci.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, au compte rendu d'audience, ceci n'a pas

 20   été consigné correctement. Mais la traduction est exacte. On parle de

 21   peuples au pluriel; il ne s'agit d'un peuple dans le sens d'un peuple, mais

 22   le sens des peuples, au pluriel. Page 12. Pouvons-nous corriger le compte

 23   rendu. On le constate très clairement dans le document. Peut-on verser au

 24   dossier ce document, s'il vous plaît ?

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 26   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pièce D4004, Madame, Monsieur les

 27   Juges.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.


Page 43375

  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  A plusieurs endroits de l'acte d'accusation, il est stipulé ceci

  3   constitue le fondement même de l'acte d'accusation, il est stipulé que moi

  4   et mes collaborateurs, nous souhaitions avoir une Republika Srpska

  5   ethniquement pure, à savoir une entité serbe. Pourriez-vous nous dire ce

  6   que cela signifie en temps de guerre dans la terminologie que nous

  7   utilisons ? Que veut dire "nettoyer" et dans quel sens ?

  8   R.  Alors, pour pouvoir vous expliquer cela, je vais devoir revenir un

  9   petit peu en arrière, la période qui a précédé cela. Lorsque nous avons

 10   parlé avec M. Cutileiro et les trois partis et nous avons déclaré à ce

 11   moment-là qu'il fallait qu'il y ait une majorité absolue ou relative,

 12   autrement dit dans une entité constitutive, autrement dit, un nombre

 13   maximum d'une communauté ethnique et ensuite, le deuxième peuple et le

 14   troisième peuple. Je me souviens de cette conversation que nous avons eue

 15   avec M. Izetbegovic qui disait "S'il vous plaît, il devrait -- vous devriez

 16   être le moins nombreux possible dans notre secteur et nous devrions être

 17   les moins nombreux dans votre secteur." Qu'est-ce que cela voulait dire,

 18   comment puis-je vous le dire ? Alors, il faudrait avoir une délimitation

 19   qui soit la plus parfaite possible, que des membres d'un peuple dans la

 20   mesure du possible, devraient se retrouver dans cette unité ethnique.

 21   Alors, lorsqu'on parle d'un secteur ou d'une région et qu'on dit qu'elle

 22   est serbe, croate ou musulmane, en réalité, dans cette région-là, dans

 23   cette partie-là de la Bosnie-Herzégovine, la majorité ou la majorité

 24   absolue est celle de cette communauté ethnique-là en particulier.

 25   Et dans les pourparlers qui ont suivi, nous avons commencé à utiliser

 26   ce terme-là pour insister là-dessus et pour dire que c'était pur, un

 27   territoire purement croate, un territoire purement musulman et un

 28   territoire purement serbe. Cela n'a jamais signifié que, dans une région


Page 43376

  1   donnée, la population est mixte, dans une grande ou une petite mesure et

  2   que cette région devait être nettoyée pour que n'y réside plus qu'un seul

  3   peuple, autrement dit le peuple qui appartenait à cette unité constitutive,

  4   ou plutôt, le peuple à qui appartenait cette unité constitutive. Alors,

  5   comment puis-je vous le dire ? Alors, ces territoires purs, alors, cela

  6   était censé insister simplement sur l'appartenance de cette région et de

  7   l'association à une communauté ethnique. Peut-être que quelqu'un souhaitait

  8   qu'une partie du territoire appartienne à une autre unité constitutive.

  9   Par exemple, je vais vous donner un exemple. Grahovo, Glamoc, Drvar,

 10   il s'agit là de territoires qui sont purement serbes. Et à Drvar, la

 11   population était à 95 % serbe et -- 90 %; à Grahovac, 70 %; Glamoc, 80 %.

 12   Cela ne signifie pas pour autant qu'il n'y avait pas d'autres personnes qui

 13   habitaient là. Cela indiquait simplement qu'ils avaient la majorité absolue

 14   dans ces villes-là. Il serait peut-être préférable de dire que les

 15   territoires purs étaient les territoires où il y avait une majorité

 16   absolue.

 17   Et avant la guerre, personne ne prenait une réinstallation de la

 18   population, personne ne parlait du fait qu'un peuple devait être chassé par

 19   la force. Alors, ce qui se passe pendant une guerre, eh bien, relève de la

 20   guerre. Et dans certaines régions ou lorsqu'il y avait un pourcentage donné

 21   d'un ou de l'autre peuple, eh bien, il y avait un pourcentage d'un peuple

 22   donné parce qu'il y avait ces déplacements de population. Mais avant la

 23   guerre, la politique consistait à dire et tous les plans qui étaient prévus

 24   à l'époque consistaient à dire que la situation devait rester inchangée et

 25   que personne ne devait être déplacé. Et ces régions qui appartenaient à des

 26   unités en particulier devaient appartenir à l'unité en question, mais qu'il

 27   y aurait des minorités nationales qui vivraient sur ce territoire-là

 28   également. Donc, tous les termes qui étaient employés étaient des termes


Page 43377

  1   qui correspondaient à qui nous étions, à chaque nation, chaque peuple ainsi

  2   -- insiste sur quelque chose de façon à pouvoir se protéger de l'autre

  3   peuple qui tente de s'en emparer.

  4   Q.  Et lors de ce processus, au moment ou tout ceci a été mis en place, où

  5   les territoires ont été divisés et qu'il y avait donc des territoires

  6   contestés -- non contestés, comment établissez-vous un lien avec tout ceci

  7   ?

  8   R.  Alors, Messieurs les Juges, vous pouvez voir, en fait, il y a une carte

  9   qui figure dans le livre de M. Owen. Je crois que c'est la meilleure façon

 10   de comprendre la situation à l'égard de ces territoires contestés et non

 11   contestés. Alors, de quoi s'agit-il ? Quels étaient ces territoires ? Au

 12   début, chaque communauté nationale fournissait sa propre carte et sur cette

 13   carte étaient représentés les revendications territoriales des uns et des

 14   autres. Et ensuite, lorsque ces cartes ont été superposées, nous étions en

 15   mesure de comprendre quels étaient les territoires qui n'étaient pas

 16   contestés, à savoir les territoires sur lesquels une communauté nationale

 17   reconnaissait que tout ce qui n'était pas sur sa carte appartenait aux deux

 18   autres communautés nationales.

 19   Et de cette manière-là et en raison de cela, nous avions ces

 20   territoires contestés et non contestés. Pour ce qui est des pourcentages,

 21   nous nous sommes mis d'accord sur 80 % des territoires qui n'étaient pas

 22   contestés et 20 % de ces territoires, voire peut-être moins, étaient

 23   contestés. C'est -- cela était dû à la composition ethnique de ces

 24   territoires et d'autres raisons également. Il y avait une communauté

 25   nationale, par exemple, qui revendiquait le territoire et une autre

 26   communauté nationale -- ou deux autres communautés nationales

 27   revendiquaient le même territoire.

 28   Q.  Merci. Et s'agissant des allégations au sujet du nettoyage ethnique, au


Page 43378

  1   paragraphe 105 du mémoire préalable au procès, il est allégué que les

  2   cellules de Crise avaient demandé que l'armée rassemble ou capture autant

  3   de prisonniers que possible et que de cette manière-là, ils avaient ordonné

  4   le déplacement des civils, ils avaient organisé des convois pour faciliter

  5   l'expulsion de la population mis à disposition des autocars, l'escorte de

  6   la police, ont contrôlé les centres de détention, et cetera et ont fourni

  7   un appui à cela. L'armée a-t-elle rempli de telles tâches, a-t-elle répondu

  8   à de telles demandes ? En règle générale, les cellules de Crise font-elles

  9   cela et envoient-elles de demandes à l'armée et l'armée répond-elle à

 10   toutes ces demandes ?

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour être précis, s'il vous plaît, nous

 12   -- je -- souhaitons que vous téléchargiez cet extrait du mémoire préalable

 13   au procès. Où au paragraphe 105 ? Alors, les cellules de Crise qui

 14   ordonnent à l'armée, et cetera.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Au paragraphe 105, à moins qu'il n'y ait eu des

 16   changements, on dit : "Tout de suite après avoir établi le contrôle des

 17   municipalités et ensuite au point suivant, il surveillait le déplacement

 18   des non-Serbes et -- chose qui était effectuée par la défense territoriale,

 19   la police et l'armée. Les cellules de Crises ont demandé à l'armée, et

 20   cetera. Note en bas de page 241, et qu'il s'agissait de rassembler les

 21   prisonniers ou de capturer les prisonniers.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Dans le texte principal, il est

 23   dit --

 24   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète, à la ligne -- à la page 16, ligne 7,

 25   que l'armée devait rassembler ou capturer autant de Musulmans que possible.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Dans le texte principal, la

 27   cellule de Crise a parle de la mise en œuvre de certaines mesures. Au

 28   premier point, on parle de la surveillance et des demandes envoyées à


Page 43379

  1   l'armée. Veuillez poursuivre.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Vous souvenez-vous de la question, Monsieur le président ?

  4    R.  Oui, tout à fait. Alors, les cellules de Crise -- je dois être plus

  5   précis. Alors, jusqu'au moment où l'armée a été créée, c'était à la mi-

  6   juin, et plus tôt, lorsque la guerre a éclaté, des personnes armées étaient

  7   restées sur le terrain. Il n'y avait pas d'armée. Les gens se défendaient à

  8   leur manière. Et les cellules de Crise existaient déjà à ce moment-là, au

  9   début en tout cas. Et jusqu'à ce que les gouvernements interviennent pour

 10   démanteler les cellules de Crise, il s'agissait alors de créer des

 11   autorités reconnues par la loi.

 12   Les cellules de Crise n'avaient pas le temps de mener à bien ces activités,

 13   parce que ceci n'a duré que pendant un très court laps de temps. Et cela ne

 14   faisait pas partie de l'autorité dont ils étaient investis. L'armée

 15   n'existait pas à l'époque. Je crois qu'en guise de conclusion, sauf le

 16   respect que j'ai pour le bureau du Procureur, ceci est erroné parce qu'il

 17   était impossible de mettre en œuvre quelque chose comme ceci. L'armée

 18   n'existait pas et les cellules de Crise n'existaient pas en même temps.

 19   Cela relevait du domaine des cellules de Crise, mais l'armée n'était pas

 20   censée leur obéir. Les cellules de Crise n'existaient pas au moment où

 21   l'armée existait. Il n'y a pas eu de tels mouvements de population.

 22   Q.  Merci. Est-ce que nous avons endossé certaines responsabilités et

 23   obligations, et si oui, quelles étaient nos obligations vis-à-vis du

 24   déplacement de la population civile de secteurs ou de régions où la guerre

 25   faisait rage ?

 26   R.  Il existe des documents à cet effet, et je sais plus précisément que le

 27   CICR a signé un accord avec les trois parties dans le but suivant : si dans

 28   certaines régions la situation devenait difficile et que certaines couches


Page 43380

  1   de la population devenaient vulnérables, dans ce cas, la population, si

  2   elle le souhaitait, devait pouvoir quitter la région, avec l'idée, bien

  3   sûr, que la population pourrait revenir une fois écartée la situation qui

  4   était devenue dangereuse. Je parle surtout des peuples qui étaient en

  5   minorité. Et donc, il y a eu ces accords signés : en vos noms, je crois que

  6   c'était le ministre du MUP d'alors, M. Kalinic, qui a signé le document; du

  7   côté musulman, c'était M. Trnka ou M. Kurjak; et M. Coric qui représentait

  8   la partie croate. Et donc, en vertu de ces accords, nous avions

  9   l'obligation de nous conformer aux desiderata d'une partie de la population

 10   qui, si elle considérait qu'elle était vulnérable, devait pouvoir quitter

 11   le territoire. Et sous l'égide de la communauté internationale et de

 12   l'accord signé avec les représentants de la communauté internationale, nous

 13   avons pris nos responsabilités, nous avons dit qu'à la fin de la guerre,

 14   dans une telle situation - peut-être qu'il le serait possible pendant la

 15   guerre - mais que lorsque tout le danger était écarté, que chacun serait en

 16   droit de rentrer chez lui.

 17   Q.  Merci. Alors, est-ce une erreur que vous avez commise ou est-ce une

 18   erreur au niveau du compte rendu d'audience ? M. Kalinic, il était ministre

 19   de quoi ?

 20   R.  M. Kalinic était ministre de la Santé et de la Protection sociale, si

 21   je me souviens bien de son titre.

 22   Q.  Merci. Vous avez pensé à l'accord qui est daté du 22 mai ou des accords

 23   qui ont suivi ?

 24   R.  Alors, je me souviens de toutes ces activités assez bien, et dès le

 25   mois d'avril. Lors de la première visite de M. Cutileiro, on nous avait

 26   annoncé que nous allions signer un tel accord. C'était à Ilidza. Et après

 27   cela, il y a eu un accord à Genève, me semble-t-il, qui a été signé par M.

 28   Kalinic. Ceci a été suivi par un autre accord ou deux accords qui


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  1   complémentaient le premier, dès le mois de septembre, voire peut-être même

  2   plus tôt, et des documents existent à cet effet, documents dont dispose ce

  3   Tribunal. Et M. Samaruga et d'autres hauts représentants officiels du CICR

  4   ont fait des déclarations, ont parlé des dispositions et ont cité des

  5   extraits de l'accord que nous avions accepté et que M. Kalinic avait signé.

  6   Q.  Merci.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions maintenant montrer au

  8   témoin le 1D49012, s'il vous plaît.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Veuillez, je vous prie, regarder - nous avons la traduction également -

 11   sauver des vies en Bosnie-Herzégovine, Genève, le 3 octobre 1992, une

 12   déclaration qui émane de Cornelius Samaruga, et il s'agit d'organiser

 13   l'aide humanitaire. Au point 2 : Faciliter le transfert des civils les plus

 14   vulnérables et ceux qui souhaitent être réunis avec leurs familles et leur

 15   permettre d'atteindre des zones de sécurité. Et ensuite, on parle des

 16   prisonniers, et cetera, et on lance un appel ici à M. Izetbegovic, M. Boban

 17   et moi-même aux fins de faciliter tout cela. Quel était notre point de vue

 18   à l'égard de tout cela ? Pardonnez-moi, le deuxième point précise :

 19   Faciliter le transfert de ceux qui souhaitent être réunis avec leurs

 20   familles et leur permettre d'atteindre des zones de sécurité, leur

 21   permettre de s'installer dans des zones plus sûres et leur permettre

 22   d'aller dans d'autres pays jusqu'à ce qu'ils puissent rentrer chez eux.

 23   Quelle était notre position ? Est-ce que nous avons accepté cela ?

 24   R.  Cette disposition concerne justement ce que je viens d'aborder il y a

 25   quelques instants. Nous avions pour obligation de nous occuper de ces

 26   catégories de la population civile qui étaient vulnérables et de ceux qui

 27   souhaitaient partir en raison de la guerre. Et il s'agit d'une disposition

 28   qui est citée ici. Alors, notre point de vue était le suivant : nous


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  1   estimions que chaque homme devait avoir le droit de se déplacer librement,

  2   bien sûr, à condition que chacun puisse rentrer chez soi. Personne ne

  3   pouvait partir à moins d'en exprimer le souhait, et personne n'avait le

  4   droit de chasser qui que ce soit. Bien sûr, si quelqu'un avait recours à la

  5   force pour chasser quelqu'un, il s'agissait alors du cas où un individu

  6   violait notre politique et les dispositions de l'accord par le biais duquel

  7   nous avons accepté cette obligation, à savoir l'accord que nous avions

  8   accepté.

  9   Q.  Merci.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce document peut-il être versé au dossier ?

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel est ce document, Monsieur Karadzic

 12   ?

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il s'agit de la déclaration de Cornelius

 14   Samaruga faite à Genève le 3 octobre 1992 à l'occasion de nos pourparlers.

 15   Je ne sais pas très bien d'où cela vient, mais ce document comporte un

 16   numéro ERN, donc nous pouvons établir la provenance de ce document.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Où voyez-vous un numéro 

 18   ERN ? Mais je vais demander à M. Tieger. Avez-vous des objections ?

 19   M. TIEGER : [interprétation] Oui, dans la mesure où cela semble être un

 20   extrait -- des extraits qui ont été compilés dans un but donné. Et d'après

 21   ce que je vois, il ne s'agit pas de la déclaration en tant que telle. Il

 22   s'agit de certains passages -- semble représenter certains passages qui ne

 23   présentent pas l'intégralité du document pour que je puisse l'examiner et

 24   pour que les Juges de la Chambre puissent l'examiner. Je n'ai aucune raison

 25   de croire, donc, qu'il y ait des inexactitudes dans ces passages-là du

 26   document, mais de l'extraire et de le compiler de la sorte, à mon sens, est

 27   quelque chose de différent puisqu'on le présente comme s'il s'agit de

 28   l'intégralité de la déclaration qui a été faite.


Page 43383

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le B/C/S semble être estampillé document

  2   original. Alors, je ne sais pas pourquoi les pages 3 et 4 apparaissent

  3   comme cela. J'ai vu une note en anglais qui précisait que l'anglais était

  4   le document d'origine puisque la déclaration émane de la Croix-Rouge, et il

  5   y a des divergences entre la version B/C/S et la version qui a été annotée,

  6   si j'ai lu correctement. Alors, il s'agit d'une pièce qui vient de quelle

  7   affaire ?

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne le sais vraiment pas. Nous l'avons

  9   trouvée dans IDS. Peut-être que nous pourrions rétrécir un petit peu pour

 10   le numéro ERN. En tout cas, la version en serbe.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons lui attribuer une cote

 12   provisoire en attendant de connaître des parties l'origine du document.

 13   M. TIEGER : [interprétation] D'après ce que je vois, il y a des éléments

 14   manuscrits en haut dans la version serbe, et il doit s'agir d'un document

 15   qui a été versé par la Défense dans une autre affaire.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Telle était ma question. Nous

 17   allons attribuer une cote provisoire à ce document pour l'instant.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce MFI D4005, Madame,

 19   Messieurs les Juges.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] La version anglaise comporte un numéro en bas à

 21   droite, c'est un numéro d'identification, et je crois que c'est le numéro

 22   ERN, mais cela ne fait rien.

 23   Est-ce que nous pouvons maintenant afficher le 1D49011, s'il vous plaît.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Ceci est un document qui est daté de la même année, mais nous sommes

 26   deux mois plus tard, à la date du 4 décembre. Jean de Courten, directeur

 27   des opérations. Veuillez regarder ce document, s'il vous plaît. Vous en

 28   souvenez-vous ? Pouvez-vous simplement vérifier la teneur de ce document.


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  1   R.  Si vous me le permettez, et je crois que le document précédent ainsi

  2   que ce document proviennent de mon procès, il s'agit du D227. Et c'est un

  3   document utilisé lors de mon appel. Je connais bien ces deux documents. Je

  4   ne peux pas vous l'affirmer, alors je ne sais pas s'il s'agit de mon

  5   numéro, mais je sais que ces deux documents ont été utilisés lors de mon

  6   procès et ont été versés au dossier, me semble-t-il. Je peux lire ici, par

  7   exemple, que compte tenu de la gravité de la situation, le CICR a dû

  8   déployer plus de 150 délégués en ex-Yougoslavie, la plupart d'entre eux

  9   travaillent en Bosnie-Herzégovine et s'évertuent à améliorer la conformité

 10   au droit international humanitaire par les parties au conflit. Apporter de

 11   l'aide à quelque 500 000 personnes déplacées et quelque 40 000 personnes

 12   dans le besoin qui sont hébergées dans les hôpitaux et dans d'autres

 13   institutions sur 80 % du territoire de la république qui est maintenant

 14   accessible aux délégués du CICR, protéger la population civile, et cetera.

 15   Ceci indique qu'en réalité, il s'agit de la mise en œuvre des accords qui

 16   avaient été signés en Bosnie-Herzégovine. C'est en tout cas ainsi que je

 17   l'interprète.

 18   Q.  Je vous remercie.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut admettre ce document au

 20   dossier ?

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger.

 22   M. TIEGER : [interprétation] J'ai les mêmes observations que précédemment -

 23   -

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons accorder une cote

 25   provisoire, il s'agira du document D4006 MFI, jusqu'à ce que la provenance

 26   du document ne soit confirmée.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Alors, l'on voit ici dans ce document que des convois ont été organisés


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  1   avec une escorte policière. Le ministre Kalinic a signé des accords que

  2   vous avez mentionnés. Est-ce que c'était juste seulement dans ces

  3   documents-là que figure une contrainte pour nous, une obligation, nous

  4   obligeant à assurer les transports escortés par la police ?

  5   R.  Ecoutez, je ne peux pas vous dire exactement comment cela a été formulé

  6   dans l'accord, mais je sais que c'était uniquement sur une base de

  7   volontariat et de manière organisée qu'on a déplacé la population à partir

  8   du moment où les gens étaient partants. Il ne s'agit pas d'un nettoyage

  9   ethnique. Il s'agit de protéger les structures vulnérables de la

 10   population. Ç'aurait été du nettoyage ethnique si cela avait été imposé, si

 11   cela c'était passé sous la contrainte, donc, qu'on délocalise une

 12   population, qu'on la chasse d'un territoire. Mais ce n'était pas le cas.

 13   Q.  Je vous remercie.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, au paragraphe 72, il est

 15   dit que jusqu'à la constitution d'une présidence, il n'y avait pas de

 16   fonction de président, mais que rien n'a changé à partir du moment où il a

 17   été désigné par rapport aux véritables structures du pouvoir --

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez reprendre, s'il

 19   vous plaît. N'oubliez pas, s'il vous plaît, que les interprètes n'ont pas

 20   le mémoire préalable au procès sous les yeux.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il s'agit du paragraphe 72 du mémoire préalable

 22   au procès. Dans le texte, il est affirmé que Karadzic et Krajisnik ont

 23   conservé des positions dominantes au niveau du processus décisionnel et au

 24   niveau de la constitution des organes de pouvoir, les mêmes compétences

 25   qu'ils avaient avant la constitution de la présidence et après que le

 26   président ne soit nommé.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Dites-nous, est-ce que j'avais la position du numéro un au niveau des


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  1   organes décisionnaires et d'autorité de la Republika Srpska ?

  2   R.  Ecoutez, pour ce qui me concerne, on a l'impression que quelqu'un est

  3   en train de donner une évaluation pour se faire décorer. Si jamais j'avais

  4   eu ce pouvoir suprême, non, aucun individu, aucun groupe n'a disposé d'un

  5   tel pouvoir. C'étaient des organes collectifs de prise de décision, une

  6   réflexion collective. Les décisions issues de longs débats ont été

  7   traduites dans les faits. Je ne conteste pas que peut-être vu de

  8   l'extérieur du commun des mortels, on aurait pu avoir cette image-là. Parce

  9   que notre peuple aime bien hisser un individu sur un piédestal suprême, il

 10   a besoin de fétiche. Mais ces pouvoirs qui sont décrits ici n'étaient même

 11   pas dévolus à des rois dans le passé, encore moins aujourd'hui, à un moment

 12   où tout chacun qui avait un fusil ou qui avait libéré un territoire pouvait

 13   s'emparer d'un aspect du pouvoir. Donc je pense que cela ne correspond pas

 14   à la réalité. C'est de la fiction, voilà. On m'a reproché d'avoir eu entre

 15   les mains un pouvoir très considérable et d'avoir été en mesure de faire

 16   beaucoup, mais ce n'est pas la réalité.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Attendez. Monsieur Krajisnik, au début

 18   de votre réponse, vous avez dit, "Pour ce qui me concerne". Et à la fin,

 19   vous confirmez que vous avez effectivement été fonctionnaire d'Etat. Que

 20   diriez-vous au sujet de M. Karadzic ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je voulais vous relayer mon sentiment et ce

 22   qui me paraît être le plus directement intéressant, puisque j'avais -- j'ai

 23   un lien très proche avec M. Karadzic. Et vous voyez, ici, j'ai dit que même

 24   les rois de par le passé n'avaient des pouvoirs comme vous attribuez

 25   maintenant à nos -- à M. Karadzic et à moi-même. C'est une manière

 26   d'accorder -- de créer des fétiches. Notre peuple aime bien se doter de

 27   dirigeants suprêmes dotés de pouvoirs illimités, tout comme le pouvoir qui

 28   revenait à des souverains de par le passé. Donc, j'ai dit que ce sont des


Page 43387

  1   cons erronées et qu'on amplifie et exagère l'importance de M. Karadzic.

  2   Donc, encore une fois, ce qui est dit dans ce paragraphe est erroné. M.

  3   Karadzic n'était pas doté de ce pouvoir qui est décrit ici et je pense que

  4   c'est une vision qui n'est pas réaliste et qui a été partagée par beaucoup

  5   dans la population. C'est loin de la réalité des pouvoirs qui nous ont été

  6   dévolus à M. Karadzic et aussi à moi-même.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ligne 24, page 23, je pense que la traduction

  8   n'est pas la bonne. Lorsque l'on lit "As far as I'm concerned", "Pour ce

  9   qui me concerne", je pense que le témoin a dit pour ce qui me concerne,

 10   c'aurait été comme si on m'avait décoré, si on m'avait conféré un tel

 11   pouvoir.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que je peux

 13   expliquer ma pensée ?

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez simplement

 15   confirmer si ce qui vient d'être dit est exact ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit -- peut-être que ça n'a pas été bien

 17   précisé. J'ai dit que cette présentation de mon importance reviendrait à me

 18   proposer pour être décoré. Donc, en ventant mes mérites et mon travail.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'en ai plus pour longtemps. On va terminer.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Monsieur le Président, vous avez brièvement mentionné M. Holbrooke.

 22   Vous avez dit qu'il y a des choses qui ont été consignées dont on a gardé

 23   la trace et d'autres, non. Alors, j'aimerais savoir quelle est la partie

 24   qui est restée au niveau d'accord verbal, sans être couché par écrit.

 25   R.  Ce n'est -- cette obligation acceptée par M. Holbrooke comme quoi le

 26   Tribunal de La Haye et l'acte d'accusation contre M. Karadzic, ce n'est

 27   oublié s'il acceptait de se retirer de la vie publique. Donc, c'était ça

 28   qui n'a pas été consigné. Ce qui a été consigné, c'était que vous aviez


Page 43388

  1   abandonné tout poste et toute fonction sur la scène politique.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document D05921 et en

  3   attendant, j'aimerais vérifier si ce document est protégé ou non. Merci.

  4   Pas de protection. On vient de m'en informer. Nous n'avons qu'une version

  5   anglaise de ce document.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur le Président, connaissez-vous le nom de cet ambassadeur,

  8   Menzies, et vous-même, Krajisnik, avez-vous rencontré le 22 juillet 2006

  9   ces ambassadeurs ? Est-ce que vous pouvez vous reporter au résumé, s'il

 10   vous plaît ?

 11   R.  Est-ce que vous pourriez m'aider ? De quel pays s'agit-il ? Je ne

 12   retrouve pas là ce nom sur le champ. Est-ce que vous pourriez m'aider ?

 13   Q.  Les Etats-Unis d'Amérique.

 14   R.  J'ai vu l'ambassadeur de l'époque. Je sais qu'il est parti très

 15   rapidement. Et il me semble que c'était l'homme qui occupait le poste de

 16   secrétaire à ce moment-là qui allait devenir l'ambassadeur par la suite.

 17   Donc, j'ai -- je suis un petit peu -- pas tout à fait sûr.

 18   Q.  Au point 3(C) :

 19   "Ambassadeur DCM et Poloff ont rencontré le président de l'assemblée de la

 20   Republika Srpska, Momcilo Krajisnik et GORS", page suivante, s'il vous

 21   plaît, "et le ministre Aleksa Buha à Pale le 22 juillet. L'ambassadeur a

 22   informé Krajisnik et Buha qu'il avait eu l'occasion de parler à Holbrooke

 23   le 21 juillet et que Holbrooke a fait rapport à Washington. Ces accords

 24   écrits et oraux obtenus avec des représentants du GORS à Belgrade."

 25   D'après vous, cette partie orale de l'accord, à quoi correspond-elle ?

 26   R.  Je me souviens d'avoir parlé à ce moment-là avec l'ambassadeur des

 27   Etats-Unis d'Amérique. Et si je puis interpréter ce texte alors que je sais

 28   que cette partie orale de l'accord est effectivement ce que je viens de


Page 43389

  1   mentionner. Donc, dans cette partie orale qui n'a pas été couché par écrit

  2   dans l'accord, il est dit que le Tribunal de La Haye appartiendrait au

  3   passé, pour ce qui est de M. Karadzic et c'est ce qui a été confirmé par M.

  4   Holbrooke et c'est ce que tous les participants à cette réunion peuvent

  5   confirmer.

  6   Q.  Je vous remercie. Est-ce que vous avez eu le sentiment, pendant cette

  7   rencontre avec l'ambassadeur Holbrooke, qu'il ait été convaincu -- que

  8   j'étais effectivement responsable et coupable et que si tel avait été le

  9   cas, il aurait passé ce type d'accord s'il avait été convaincu que je

 10   m'étais livré coupable d'un tel crime ou de tels actes.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non. Contentez-vous de lui demander

 12   ce qui en est du sentiment de M. Holbrooke. Et comment pourrait-il savoir,

 13   d'ailleurs ?

 14   M. TIEGER : [aucune interprétation]

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] S'il vous plaît, reformulez votre

 16   question.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Pourriez-vous nous dire pour quelles raisons ont-ils formulé leurs

 20   demandes que je me retire de la vie politique. Et ont-ils fait part de

 21   leurs convictions selon laquelle je me serais rendu coupable d'un crime ou

 22   délit ?

 23   R.  Voici mon sentiment : M. Holbrooke a estimé qu'il était très important

 24   dans la poursuite des efforts de paix et de la mise en œuvre de l'accord

 25   que M. Karadzic soit écarté de cette mise en œuvre. Et il pensait que si on

 26   enlevait l'acte d'accusation, eh bien, M. Karadzic allait se retirer et que

 27   par la suite, on allait plus facilement ou facilement mettre en œuvre

 28   l'accord. Donc, cet accord avait pour objectif que l'on facilite la mise en


Page 43390

  1   œuvre de l'accord de Dayton, d'après lui. Certes, il a bien fait comprendre

  2   qu'il ne voulait pas s'aventurer dans la problématique consistante à savoir

  3   si cet acte d'accusation comportait ceci ou cela. C'était plutôt quelle

  4   était la finalité de cet acte d'accusation. Donc si on l'enlevait, on

  5   allait beaucoup plus facilement traduire dans les faits l'accord de Dayton

  6   si on écartait donc cet homme, s'il n'y participait pas.

  7   Donc j'avais l'impression, ce n'est pas qu'il pensait que -- ou

  8   plutôt, s'il avait pensé que M. Karadzic était coupable. Il n'aurait pas

  9   demandé qu'on enlève, qu'on annule cet acte d'accusation. Il n'aurait pas

 10   demandé cela. Il ne l'aurait pas demandé s'il avait pensé que l'acte

 11   d'accusation était fondé.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande que ce document soit admis au

 13   dossier.

 14   [Le conseil de la Défense et l'accusé se concertent]

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excusez-moi, est-ce qu'on peut afficher la

 16   dernière page.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  J'ai omis de donner lecture de quelque chose. Page 4 :

 19   "Buha a joué le rôle du bon, autant que possible. En privé et à part avec

 20   l'ambassadeur après la réunion, Buha a expliqué la proposition alléguée de

 21   Holbrooke afin que le Tribunal de La Haye disparaisse entre guillemets,

 22   après les élections de septembre."

 23   Alors comment est-ce que cela cadre avec ce que vous avez appris ?

 24   R.  Oui, cela est exact, parce que M. Buha a demandé à M. Holbrooke à la

 25   fin, alors dites-nous quelle est la conclusion ? Et, l'autre lui a répondu,

 26   le Tribunal de La Haye appartient au passé pour M. Karadzic. La seule chose

 27   qui est importante c'est qu'il quitte la vie publique. La seule chose qui

 28   est importante c'est qu'il respecte cet accord.


Page 43391

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, je vous

  2   remercie. Et, je demande le versement au dossier de ce document.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'ai GORS, à quoi cette abréviation

  4   correspond-elle ?

  5   M. ROBINSON : [interprétation] Gouvernement de la Republika Srpska.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait, s'il vous

  7   plaît, jeter un coup d'œil sur la première page ? A paragraphe 2(C), nous

  8   voyons quelques lignes vierges avec mention confidentielle. Est-ce que cela

  9   veut dire que ces lignes ont été expurgées ?

 10   M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Ce document nous

 11   a été fourni dans son intégralité. Vous verrez que les noms se suivent, que

 12   c'est une phrase logique avant et après le mot "confidentiel". Donc je

 13   pense que c'est simplement de cette manière-là que le document a été

 14   imprimé, mais nous avons une version intégrale ici. Il nous a été

 15   communiqué en lien avec la requête portant sur l'accord Holbrooke de 2009.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Objection, Monsieur Tieger ?

 17   M. TIEGER : [interprétation] Non, pas d'objection, Monsieur le Président.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document sera versé au dossier.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le document D4007.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons suspendre l'audience, et par

 21   la suite nous entendrons la comparution d'un autre témoin.

 22   M. ROBINSON : [interprétation] Tout à fait. C'est M. Puhalic qui viendra

 23   déposer.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et, le contre-interrogatoire de M.

 25   Krajisnik commencera probablement mercredi de la semaine prochaine ?

 26   M. ROBINSON : [interprétation] Je pense que ce sera mardi de la semaine

 27   prochaine.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mardi, très bien.


Page 43392

  1   L'avez-vous compris, Monsieur Krajisnik ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Mais est-ce que je

  3   peux ajouter une seule phrase ? Je tiens à vous remercier de m'avoir donné

  4   la possibilité d'entrer en possession des documents issus de ce procès, ce

  5   qui me permettra dans le cadre de la révision de mon propre procès. C'est

  6   tout.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Nous allons suspendre l'audience

  8   pendant 30 minutes, nous reprendrons à 11 h 16.

  9    [Le témoin quitte la barre]

 10   --- L'audience est suspendue à 10 heures 46.

 11   --- L'audience est reprise à 11 heures 22.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, je vous ai dit que nous

 13   allions parler de l'entretien de M. Kovacic [comme interprété] après la

 14   déposition au principal de M. Krajisnik, mais nous allons parler de cela

 15   demain à la première heure.

 16   M. TIEGER : [aucune interprétation]

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il y a un point que je voudrais soulever

 18   à huis clos. Et je vais demander que l'on passe à huis clos.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos.

 20   [Audience à huis clos]

 21  (expurgé)

 22  (expurgé)

 23  (expurgé)

 24  (expurgé)

 25  (expurgé)

 26  (expurgé)

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 28  (expurgé)


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 13  Pages 43393-43394 expurgées. Audience à huis clos.

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  1  (expurgé)

  2   [Audience publique]

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Le témoin est présent. Je

  4   vais demander au témoin de prononcer la déclaration solennelle.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  6   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  7   LE TÉMOIN : SLAVKO PUHALIC [Assermenté]

  8   [Le témoin répond par l'interprète]

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Puhalic.

 10   Avant de commencer votre déposition, Monsieur Puhalic, je dois attirer

 11   votre attention sur un article qui existe ici, il s'agit de l'article 90(E)

 12   du Règlement de procédure et de preuve de ce Tribunal. En vertu de cet

 13   article, vous pouvez refuser à répondre à toute question posée par M.

 14   Karadzic, le Procureur ou même par les Juges si vous pensez qu'en répondant

 15   à cette question vous pourriez vous incriminer dans le sens pénal du terme.

 16   Dans ce contexte, "incriminer" veut dire dire quelque chose qui pourrait

 17   être équivalent à un aveu de culpabilité ou aveu d'un acte susceptible

 18   d'être poursuivi au pénal. Et si vous pensez qu'en répondant à une question

 19   vous pourriez vous incriminer et si vous refusez de répondre à ladite

 20   question, eh bien, je dois vous dire que les Juges du Tribunal peuvent vous

 21   forcer à répondre à la question. Mais dans ce cas, le Tribunal va faire en

 22   sorte que la déposition obtenue de la sorte ne sera utilisée dans aucune

 23   affaire vous concernant pour rien d'autre mis à part le faux témoignage.

 24   Est-ce que vous m'avez compris ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

 27   Vous pouvez commencer, Monsieur Karadzic.

 28   Interrogatoire principal par M. Karadzic :


Page 43396

  1   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Puhalic.

  2   R.  Bonjour.

  3   Q.  Je vais vous demander de respecter un temps de pause entre mes

  4   questions et vos réponses et je vais vous demander aussi de parler plus

  5   lentement que d'habitude, car j'ai l'habitude moi aussi de parler

  6   rapidement, et tout cela pour que nos propos soient enregistrés au compte

  7   rendu d'audience.

  8   Est-ce que vous avez fourni une déclaration à l'équipe de la Défense ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Merci.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais demander que l'on montre dans le

 12   système de prétoire électronique le document 1D9280.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Est-ce que vous voyez votre déclaration sur l'écran ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Est-ce que vous l'avez lue, est-ce que vous l'avez signée ?

 17   R.  Oui.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourriez-vous montrer la dernière page au

 19   témoin pour qu'il puisse identifier sa signature.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est bien ma signature.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Cette déclaration, est-ce qu'elle reflète fidèlement ce que vous avez

 23   dit à l'équipe de la Défense ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Aujourd'hui, si je vous posais les mêmes questions que les questions

 26   qui vous ont été déjà posées, est-ce que vos réponses seraient, au fond,

 27   les mêmes ?

 28   R.  Oui.


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  1   Q.  Merci.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande que cette déclaration soit versée au

  3   dossier en vertu de l'article 92 ter.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous versez aussi les pièces

  5   connexes ?

  6   M. ROBINSON : [interprétation] L'enregistrement vidéo qui a été mentionné à

  7   la fin de la déclaration est versé en tant que pièce connexe.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que cette vidéo est téléchargée

  9   dans le système de prétoire électronique ?

 10   M. ROBINSON : [interprétation] Oui. Et je pense que nous avons fourni aussi

 11   bien aux Juges de la Chambre qu'aux parties un CD-ROM contenant la vidéo.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il y a des objections ?

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Nous avons

 14   une objection quant au versement à ce stade, car il n'y a pas de base

 15   d'étayée quant à la provenance et la façon dont cet enregistrement a été

 16   fait.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons tout d'abord traiter de la

 18   déclaration en vertu de l'article 92 ter.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pas d'objection.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, cette déclaration va être versée

 21   au dossier.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce D4008.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Peut-être que M. Karadzic pourrait

 24   aborder cet enregistrement vidéo de vive voix, et de cette façon nous

 25   allons procéder le plus vite. Et nous allons entendre aussi Mme Sutherland

 26   à ce moment-là.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais vous donner lecture du résumé de la

 28   déclaration de Slavko Puhalic en anglais, et ensuite nous allons parler de


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  1   la vidéo.

  2   Slavko Puhalic était membre de la 343e Brigade motorisée de Prijedor

  3   jusqu'en avril 1992. C'était une brigade de la JNA. On lui a demandé de

  4   rejoindre le commandant Slobodan Kuruzovic, le directeur du camp de

  5   Trnopolje, en tant que soldat chargé de la logistique qui participait

  6   surtout dans l'approvisionnement de la nourriture.

  7   Slavko Puhalic considère que l'objectif primaire du camp de Trnopolje

  8   était d'accueillir les civils non serbes venus de la zone où il y avait les

  9   opérations de combat, retenus à cet endroit pour leur propre sécurité et la

 10   sécurité de leurs familles. La Croix-Rouge a garanti l'arrivée des civils,

 11   et ils ont été enregistrés. Les civils avaient le droit de quitter le camp

 12   en toute liberté. Certains civils sont partis à l'étranger après avoir reçu

 13   la documentation pertinente de la Croix-Rouge.

 14   La sécurité dans le camp était organisée par les tours de garde dont

 15   l'objectif primaire était d'empêcher l'entrée des personnes non autorisées

 16   dans le camp. Slavko Puhalic était conscient du fait que le commandant

 17   Kuruzovic avait demandé à toutes les personnes présentes dans le camp de

 18   respecter le droit humanitaire international. Le commandant Kuruzovic a mis

 19   en garde ses subordonnés en leur demandant de mener à bien leurs missions

 20   de la meilleure façon possible, mais il ne pouvait pas être au courant de

 21   tout ce qui se passait dans le camp. Slavko Puhalic considère que les

 22   capacités d'accueil du camp étaient limitées, qu'il n'y avait pas

 23   suffisamment de place. Il y avait une cuisine improvisée qui ne pouvait

 24   préparer qu'un nombre limité de repas. Il y avait un dispensaire dans le

 25   camp dans le cas où l'aide médicale était nécessaire.

 26   D'après ce que Slavko Puhalic sait, les civils sont venus surtout

 27   pour demander la protection, la sécurité, et sont restés jusqu'à ce que les

 28   conditions se soient réunies pour qu'ils puissent quitter le territoire. Il


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  1   a lui-même aidé un certain nombre de personnes pour aller à Prijedor en

  2   toute sécurité.

  3   Il n'a pas entendu dire que des hauts responsables de Prijedor aient donné

  4   l'ordre pour un nettoyage ethnique, et il n'y avait pas de mention que

  5   Prijedor devait être une ville uniquement serbe.

  6   Slavko Puhalic se souvient d'une visite de journalistes étrangers qui

  7   avaient le droit de tourner à l'intérieur et à l'extérieur des camps et de

  8   parler avec qui ils voulaient parler. On n'a pas préparé l'arrivée des

  9   journalistes, et la clôture qui existait autour du camp n'a pas été

 10   modifiée depuis la clôture originale qui avait été placée à cet endroit

 11   avant la guerre.

 12   C'était donc le résumé concernant ce témoin --

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de poser des questions au sujet de

 14   l'enregistrement vidéo, je voudrais poser une question au témoin. A la fin

 15   du paragraphe 8, le témoin a dit que le commandant Kuruzovic ne pouvait pas

 16   être au courant de tout, et je voulais demander au témoin ce qu'il voulait

 17   dire par là. Qu'est-ce que vous vouliez dire par là, Monsieur le Témoin,

 18   quand vous avez dit que le commandant Kuruzovic ne pouvait pas être au

 19   courant de tout, et pourquoi dites-vous cela ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Croyez-moi, d'après ce que j'ai pu voir, il

 21   n'était pas présent tous les jours sur place. Ceux qui ont été présents,

 22   qui assuraient la garde, souvent, ne l'informaient pas de tout. Ils ne

 23   l'informaient pas de tout ce qui se passait au jour le jour dans le camp.

 24   Et dans ce sens, il ne pouvait pas être au courant de tout ce qui se

 25   passait dans le camp.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Merci.

 27   Vous pouvez continuer, Monsieur Karadzic.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.


Page 43400

  1   Je vais demander de voir l'enregistrement vidéo, 1D4808.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Monsieur Puhalic, de temps en temps je vais arrêter l'enregistrement et

  4   je vais vous poser des questions. Tout d'abord, pourriez-vous nous dire ce

  5   que l'on voit ici ?

  6   [Diffusion de la cassette vidéo]

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est l'immeuble - je ne sais pas comment vous

  8   dire - l'immeuble qui était à Trnopolje. C'est un foyer culturel, quelque

  9   chose dans ce sens.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Merci. Et pourriez-vous nous dire ce que l'on voit devant cette clôture

 12   ? Qui sont ces gens que l'on voit ici ?

 13   R.  Ce sont les gens qui étaient présents dans le camp. Ils sont arrivés

 14   dans le camp suite aux combats à Prijedor et aux alentours de Prijedor.

 15   Donc ce sont des gens qui sont venus dans le camp. 

 16   Q.  Est-ce qu'ici on ne voit que des civils, ou bien est-ce qu'il y a aussi

 17   des combattants parmi eux, d'après ce que vous 

 18   saviez ?

 19   R.  D'après ce que je savais, c'étaient des civils, mais j'avais aussi

 20   quelques amis parmi eux qui étaient du côté de l'ABiH.

 21   Q.  Merci. Est-il possible d'entendre aussi le son pour entendre la

 22   déclaration ? On va les entendre une par une. Est-ce que là nous avons donc

 23   la visite des journalistes ?

 24   R.  Ecoutez, je ne suis pas sûr que ce soit exactement cette visite dont je

 25   parlais. Ou bien, est-ce qu'il s'agit d'une autre visite ? Parce qu'on ne

 26   voit pas la date de cet enregistrement.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, est-ce que vous

 28   souhaitez qu'on entende le son ?


Page 43401

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Apparemment il y a un problème technique

  3   avec le son.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. On va continuer en attendant de

  5   résoudre le problème. Donc on va analyser uniquement les images. Je vais

  6   demander à voir 1 minute 35.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et si vous souhaitez que l'on entende

  8   l'interprétation, vous devriez peut-être distribuer le compte rendu aux

  9   interprètes. Voilà, je vois vous faites un signe affirmatif. Vous pouvez

 10   poursuivre.

 11   [Diffusion de la cassette vidéo]

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Est-ce que vous entendez ? Qui sont ces gens qui parlent avec le

 14   journaliste ?

 15   R.  Ce sont les gens qui étaient dans le camp.

 16   Q.  Et ils se trouvent où par rapport aux barbelés ?

 17   R.  Ils sont à l'extérieur, enfin, l'extérieur des barbelés. Ici, donc,

 18   vous avez la clôture.

 19   Q.  Pouvez-vous nous expliquer ce dessin.

 20   R.  Ici, vous avez une boutique où on vendait les outils agricoles, à côté

 21   il y avait un dépôt sans doute, et elle était clôturée avec des barbelés et

 22   avec du fil de fer. Donc le camp, le centre, n'était pas entouré de

 23   barbelés mais d'une clôture en métal assez basse qui donc entourait le

 24   foyer et l'école. Mais je ne sais pas s'il y avait une autre clôture entre

 25   l'école et les maisons. Mais il n'y avait pas de barbelé, c'était ouvert.

 26   Un pré, un terrain de jeux, il n'y avait rien de particulier, rien à

 27   signaler autour de ce terrain.

 28   Q.  Merci.


Page 43402

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, est-ce que ce dessin,

  2   est-ce qu'il fait partie de la vidéo ?

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, justement pour donner une explication

  4   visuelle de ce qu'il en voit, et je vais poser la question.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. On va s'occuper de la vidéo

  6   plus tard.  Allez-y.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Monsieur Puhalic, sur l'enregistrement nous avons pu voir qu'entre la

  9   caméra et les gens que l'on a filmés on voit un fil de fer barbelé. Quel

 10   est ce barbelé ? Où se trouvent les journalistes ? Où se trouvent les

 11   journalistes ?

 12   R.  Les journalistes sont à l'intérieur et les gens sont à l'extérieur.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Faites un arrêt sur image.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Ici, on voit clairement. Les journalistes sont

 15   à l'intérieur donc là vous voyez cette boutique qui était entourée de

 16   barbelé. Donc les journalistes sont à l'intérieur de ce qui est entouré de

 17   barbelé et les gens sont à l'extérieur.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Merci. Et qu'est-ce qu'on voit c'est une brouette ?

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous répéter la réponse ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est une brouette pour transporter du bois,

 22   et cetera.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Est-ce que, et ce, en attendant le son de la bande audio, vous avez

 26   mentionné une protection médicale. De quoi avait-elle l'air ?

 27   R.  Ecoutez, je ne sais comment vous dire, au début, il y avait là un

 28   médecin, peut-être même deux, je me souviens pas exactement. Je sais qu'il


Page 43403

  1   y en avait un pour sûr. Deux ou trois infirmières étaient là aussi. D'un

  2   autre côté aussi, il était venu un médecin, et un infirmier. Ils venaient

  3   tous les jours. Ils étaient présents lorsque l'on organisait ce tout ceci.

  4   Lorsque la Croix-Rouge est venue, et l'armée aussi, ça c'était organisé, et

  5   un médecin venait, peut-être même tous les jours pour soigner les gens et

  6   essayer de les aider au tant que faire se pouvait.

  7   Q.  Et les gens qui étaient là comment se sentaient-ils du point de vue de

  8   la sécurité, c'est-à-dire à l'intérieur du camp, par rapport à d'autres

  9   endroits qui étaient extérieurs au camp ?

 10   R.  Eh bien, là, ils avaient la possibilité dans la mesure de ce que le

 11   commandant Kuruzovic avait pu fournir ce qui était nécessaire, ils se

 12   sentaient plus en liberté là, qu'à l'extérieur du camp ou ailleurs.

 13   Q.  Quand vous avez parlé de médecins, pouvez-vous nous dire de quelle

 14   appartenance ethnique étaient ces médecins qui fournissaient une prestation

 15   de service ?

 16   R.  Je crois qu'il y en avait qui étaient musulmans et d'autres qui étaient

 17   serbes.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Est-ce qu'on peut maintenant essayer

 19   avec le son. Mais de toute façon il y a une traduction en sous-titre et

 20   donc on pourra suivre. Passez nous, je vous prie, la vidéo.

 21   [Diffusion de la cassette vidéo]

 22   L'INTERPRÈTE : La cabine française précise qu'elle n'entend rien du

 23   tout.

 24   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 25   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 26   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Aux fins de résoudre les difficultés

 28   techniques, il nous faut d'après ce qu'on m'a dit lever l'audience pendant


Page 43404

  1   dix minutes. Nous allons faire une pause de dix minutes.

  2   --- L'audience est suspendue à 11 heures 57.

  3   --- L'audience est reprise à 12 heures 08.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Continuons, s'il vous plaît,

  5   Monsieur Karadzic.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. J'aimerais qu'on nous passe maintenant

  7   de 16 secondes à 40 secondes, 0016 à 0040.

  8   [Diffusion de la cassette vidéo]

  9   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] "J'ai dû venir ici et il n'y avait pas de

 10   combats, et je n'ai rien à combattre -- je n'ai pas pourquoi combattre. Je

 11   suis venu avec des petits enfants, des touts petits. On a descendu le champ

 12   là-bas. Personne ne nous a poursuivis. Personne n'a levé pas même un doigt

 13   contre nous."

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Il y a deux pages, mais les

 15   interprètes ont fait savoir qu'ils n'arrivaient pas à trouver le passage.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais -- la traduction est sous-titrée, on la

 17   voit.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Mais on nous a fait savoir qu'il y

 19   avait un document de 15 pages.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est peut-être la traduction du film entier.

 21   Ici c'est du 0016 à 0045. Mais sur la transcription, ils peuvent retrouver

 22   le minutage.

 23   L'INTERPRÈTE : La cabine française indique qu'il n'y a pas de numérotation

 24   pour ce qui est du minutage. Il y a des lignes qui sont numérotées. Mais il

 25   est difficile de retrouver l'extrait en question.

 26   Le Juge Kwon fait savoir aux interprètes que les transcriptions

 27   seront distribuées.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors pourquoi ne discuterions pas


Page 43405

  1   entre-temps de l'origine de ce document ? Est-ce que c'est une version qui

  2   a été publié par vos soins, Monsieur Karadzic ?

  3   Monsieur Robinson ?

  4   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Ceci est un

  5   extrait provenant d'un film assez long qui est intitulé "Le Jugement rendu"

  6   et ça a été diffusé à la radiotélévision serbe. Nous avons prélevé des

  7   portions qui sont pertinentes pour ce qui est du témoignage de ce témoin.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais puisqu'il s'agit d'un extrait

  9   d'un programme de télévision -- d'un programme de la télévision serbe, on

 10   voit utilisées des images diffusées par Penny Marshall dans d'autres médias

 11   ?

 12   M. ROBINSON : [interprétation] C'est exact.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce film, vous pouvez le voir en entier sur

 14   YouTube.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci n'a guère d'importance.

 16   Madame Sutherland.

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, d'après ce

 18   que j'ai pu comprendre, il y a eu des informations de rajoutées avec les

 19   images de ITN.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Les informations ont été rajoutées

 21   par des médias serbes.

 22   M. ROBINSON : [interprétation] C'est la RTV serbe, radiotélévision de

 23   Serbie.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, ça n'a pas été rajouté par la

 25   Défense ?

 26   Mme SUTHERLAND : [interprétation] En effet. Mais c'est ce qui est -- ce

 27   qu'il convient de préciser pour ce qui est du commentaire et du diagramme.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et quelle est la raison pour laquelle


Page 43406

  1   vous faites objection au versement au dossier, Madame Sutherland ?

  2   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, jusqu'à présent,

  3   le témoin n'a été à même que d'identifier certains bâtiments et certaines

  4   structures à l'intérieur du camp. Il n'a pas commenté, on ne peut pas

  5   commenter jusqu'à présent les commentaires que l'on a pu entendre et quand

  6   bien même, cela n'aurait aucune valeur probante d'après moi.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il a confirmé l'emplacement de cette

  8   clôture en fil. Il a dit à quel endroit était l'équipe de télévision et à

  9   quel endroit se trouvaient des réfugiés.

 10   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je pense que

 11   c'est ce qu'il a fait.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Continuons.

 13   [Diffusion de la cassette vidéo]

 14   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] Les interprètes précisent que c'est

 15   pratiquement inaudible.

 16   "Je suis venu avec mes -- des enfants, des tous petits. On est descendus

 17   par les champs. Personne ne nous a poursuivis, personne n'a pas même levé

 18   le doigt contre nous."

 19   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Alors comment ceci coïncide-t-il avec ce que vous en savez pour ce qui

 22   est de la nature de ce camp ?

 23   R.  Il a dit la vérité.

 24   Q.  Merci.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais qu'on nous montre maintenant le

 26   fragment 050 à 059, s'il vous plaît.

 27   [Diffusion de la cassette vidéo]

 28   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] "Depuis le tout premier jour, on est là. Les


Page 43407

  1   gens sont venus de leur plein gré, parce qu'il y avait des pénuries de

  2   vivres."

  3   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire quel a été le rôle joué par cette

  6   femme ? Et dites-nous aussi si elle dit la vérité d'après ce que vous en

  7   savez ? Est-ce que ce qu'elle dit est exact, est vrai ?

  8   R.  Je n'arrive pas à me souvenir de qui il s'agit. C'est probablement la

  9   dame qui travaillait pour la Croix-Rouge. Je ne me souviens pas de son nom,

 10   mais je pense qu'elle dit la vérité.

 11   Q.  Merci.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on eut maintenant aller ou commencer

 13   à 131, s'il vous plaît ?

 14   [Diffusion de la cassette vidéo]

 15   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] "Est-ce que vous êtes en sécurité ?"

 16   La personne dit : "Je pense que c'est -- nous sommes en sécurité, mais

 17   c'est dur."

 18   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Est-ce que vous avez entendu l'interprétation de ce que a dit ce Mehmed

 21   ?

 22   R.  Oui, j'ai entendu deux ou trois mots ?

 23   Q.  De quelle façon ceci coïncide-t-il avec ce que vous avez appris au

 24   sujet de ce camp ?

 25   R.  Il a dit la vérité. C'était -- ils étaient en sécurité, mais c'était

 26   dur. Il n'y avait pas assez de vivres. Il y avait beaucoup de trop de

 27   personnes et il fallait les nourrir tous. Les conditions étaient précaires.

 28   Q.  Merci. Est-ce que vous pouvez nous dire si vous avez à même d'apprendre


Page 43408

  1   comment ce camp a été présenté par les médias, lorsque -- enfin, suite à

  2   cette visite ? Comment a-t-on présenté ceci au niveau des médias ? Est-ce

  3   que vous avez pu l'apprendre ?

  4   R.  Je n'ai pas vu grand-chose, mais j'ai ouïe dire de la part de mes amis

  5   que cela a diffusé une image très vilaine. Ça a été diffusé pour indiquer

  6   que ce n'était pas un campement, mais un camp et que ces personnes étaient

  7   exposées à de mauvais traitements et étaient traités de tous les noms.

  8   Q.  Merci. Je vous prie maintenant de vous pencher sur ces images-ci. On

  9   voit le Mehmed qui a pris la parole tout à l'heure et on voit un homme

 10   maigre. D'après vous, est-ce que cet homme a maigri pendant qu'il était au

 11   camp ?

 12   R.  Je ne sais pas au juste si il a maigri dans le camp ou avant d'être

 13   venu dans ce camp. Je ne pense pas qu'il ait pu maigrir autant en si peu de

 14   temps pour avoir un aspect tel qu'on le voit ici.

 15   Q.  Merci. 

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande un versement au dossier des

 17   séquences de vidéo que nous avons déjà visionnées.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Maintenant, nous allons entendre

 19   votre opinion, Madame Sutherland.

 20   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, nous n'avons

 21   pas d'objection pour ce qui est du versement au dossier de ces fragments,

 22   mais l'enregistrement audio et les commentaires des gens qui ont tourné

 23   avec les -- les commentaires des gens qui ont tourné le film --

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que la Défense sera d'accord.

 25   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, nous le sommes.

 26   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera versé au dossier.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce à conviction D4009, Madame,


Page 43409

  1   Monsieur les Juges.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions pour le moment,

  3   Excellences.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.

  5   Monsieur Puhalic, comme vous venez de -- enfin, comme vous le savez

  6   certainement, exception faite des questions posées au sujet de

  7   l'enregistrement vidéo, votre témoignage au principal dans cette affaire se

  8   trouve être versé au dossier par écrit, sous forme de déclaration. Et vous

  9   allez à présent être contre-interrogé par le représentant du bureau du

 10   Procureur. Le comprenez-vous ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] D'accord.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland, nous -- vous -- nous

 13   pouvons continuer. Nous allons travailler jusqu'à 1 heure moins le quart et

 14   puis, nous allons faire une pause déjeuner. D'accord ? Oui.

 15   Mme SUTHERLAND : [interprétation] En effet.

 16   Contre-interrogatoire par Mme Sutherland :

 17   Q.  [interprétation] Monsieur Puhalic, la déclaration que vous avez signée

 18   lundi et qui vient d'être versée au dossier, quand avez-vous élaboré une

 19   première version de ladite déclaration ?

 20   R.  Une première version, un premier jet, je vais peut-être vous mentir,

 21   mais je crois que ça s'est fait peut-être en janvier 2013.

 22   Q.  Et qui a recueilli cette déclaration de votre part ?

 23   R.  J'ai fait ma déclaration auprès des gens de la Défense. Il s'appelait -

 24   - c'était un certain M. Todic.

 25   Q.  Est-ce que vous connaissez son prénom ?

 26   R.  Je n'arrive pas en m'en souvenir.

 27   Q.  Est-ce que ces questions qui vous ont été posées ont été fournies à

 28   l'avance ou est-ce que vous vous êtes entretenu et on a pris des notes au


Page 43410

  1   fur et à mesure ?

  2   R.  Oui. On s'est entretenu, lui et moi, et au fil de notre entretien, il

  3   consignait mes réponses.

  4   Q.  Je suis quelque peu très perplexe pour ce qui est de la façon dont les

  5   choses se passaient lorsque vous êtes arrivé au camp. Au paragraphe 3 de la

  6   déclaration, vous dites : "Une fois que le camp a été créé." Ensuite, dans

  7   ce même paragraphe, vous dites : "Au début, une fois que le camp a été

  8   créé." Alors, quand ceci s'est-il passé ? Au début, une fois que le camp a

  9   déjà été créé, ou lorsqu'il s'est écoulé un certain temps après sa création

 10   ?

 11   R.  Eh bien, c'était peut-être un, deux, trois jours après. Il s'est passé

 12   beaucoup de temps depuis l'époque. Je n'arrive pas à m'en souvenir. M.

 13   Kuruzovic a dit qu'il y avait des problèmes et qu'il ne pouvait pas se

 14   débrouiller mais qu'il avait besoin d'aide, et il a obtenu de la part de

 15   l'armée -- mais comme on était voisins et amis, il m'a demandé de le suivre

 16   là-bas pour l'aider là-bas, parce qu'il arrivait beaucoup de gens à bord de

 17   camions, de tracteurs, à bord de voitures privées dans ce camp. Et il m'a

 18   demandé de l'aider, il fallait des vivres, plein de choses, et il fallait

 19   l'aider.

 20   Q.  Monsieur Puhalic, excusez-moi, vous avez déjà répondu à ma question,

 21   puis vous êtes passé au sujet de la nourriture. Je vous ai interrompu,

 22   parce que j'ai une requête, à savoir de répondre le plus brièvement

 23   possible à mes questions.

 24   R.  Bien.

 25   Q.  Au paragraphe 5 de votre déclaration, vous dites que vous n'aviez

 26   aucune connaissance au sujet des ordres donnés pour ce qui est de la

 27   création de ce camp et vous ne saviez pas de qui cela venait puisque vous

 28   étiez simple soldat. C'est bien cela ? Vous n'en aviez pas connaissance ?


Page 43411

  1   R.  Oui, c'est vrai.

  2   Q.  Vous avez dit qu'il y avait eu un certain nombre d'excès au début et

  3   que c'était le fait de personnes qui avaient fait intrusion dans le camp,

  4   mais ce n'est pas vrai ? Il y a eu des individus qui ont été tués en juin

  5   et juillet, n'est-ce pas, et ça a été le fait du personnel du camp tout

  6   autant que les soldats qui y venaient ?

  7   R.  Je ne serais pas d'accord avec cette constatation-là.

  8   Q.  Mais qu'en est-il de ce grand nombre de la famille Foric qui ont tous

  9   été tués ? Et encore un homme et son fils, Zoran, qui auraient été tués en

 10   juillet ? Et Sulejman Kekic aurait été tué par un gardien en juillet. Un 

 11   certain Talic aurait succombé à des passages à tabac. Des soldats sont

 12   venus en juillet et ont pris 11 hommes vers un champ de maïs pour les

 13   exécuter. Est-ce que vous n'êtes pas au courant de ces événements au camp ?

 14   R.  J'ai déclaré ce que je savais s'être passé pour ce qui est des gens qui

 15   se trouvaient dans le camp, et c'est eux qui m'ont raconté. C'est là que

 16   j'ai inscrit dans ma déclaration ce que je savais. Je ne peux pas parler de

 17   choses que j'ignore --

 18   Q.  Monsieur Puhalic, vous n'avez donc pas eu à connaître de ces quatre cas

 19   de figure où des gens ont été tués au camp; c'est bien cela ?

 20   R.  Je ne me souviens pas de toutes les personnes qui étaient là. Pour

 21   d'autres personnes, je ne connaissais pas leurs noms. J'ai dit que j'étais

 22   au courant de deux ou trois cas de figure où il y aurait eu mort d'homme.

 23   Et je l'ai mentionné au début, j'ai dit qu'il y avait eu un certain nombre

 24   d'excès, de passages à tabac. Mais M. Kuruzovic a été mis au courant de

 25   tout ceci. A-t-il pris des mesures ou pas ? J'imagine qu'il est allé à la

 26   police et a demandé à l'armée de protéger ces gens. Mais toujours est-il

 27   qu'il y a eu quelqu'un d'affecté pour les soins médicaux, on en a pris soin

 28   du point de vue médical.


Page 43412

  1   Q.  Vous nous dites donc qu'au fil des six mois d'existence de ce camp,

  2   vous avez appris que deux ou trois personnes en l'espace de ces six mois

  3   ont perdu la vie; c'est bien cela ? Ça peut recevoir une réponse par oui ou

  4   par non.

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Il y a eu en juin et juillet des viols aussi. Une femme a

  7   systématiquement été violée par le directeur du camp pendant tout le mois

  8   de juillet. Puis, au mois d'août, plusieurs jeunes femmes ont été sorties

  9   la nuit de là-bas pour être violées ou pour faire l'objet de maltraitance

 10   sexuelle. Là, vous nous avez dit que vous avez eu à connaître de certains

 11   cas de viol; c'est bien cela ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Et des passages à tabac d'individus, c'est une chose qui se produisait

 14   de façon récurrente. Un certain Jakupovic a été tabassé et il a été traité

 15   dans le dispensaire. Il a eu des blessures à l'œil et au corps, et il a eu

 16   des coupures aux poignets parce qu'il avait été attaché. Et un autre

 17   prisonnier avait été passé à tabac et est mort suite à ces passages à

 18   tabac.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous montrer, je

 20   vous prie, la pièce 65 ter P03986.

 21   Q.  Monsieur Puhalic, il s'agit d'une photo de ce M. Jakupovic. Est-ce que

 22   vous reconnaissez -- est-ce que vous vous souvenez d'avoir vu des blessures

 23   de ce type subies par les détenus au camp de Trnopolje ?

 24   R.  Je n'arrive pas à m'en souvenir, mais je précise que je suis resté là-

 25   bas jusqu'au 11 juin. Après cela, je suis parti pour soin dans une station

 26   thermale, et j'y suis resté jusqu'au 17 juillet. Et je suis retourné pour

 27   dix ou 15 jours à Trnopolje, puis j'ai regagné les rangs de mon unité. Ce

 28   qui fait que je ne peux pas tout savoir. Ce que je sais, je l'ai consigné


Page 43413

  1   dans ma déclaration, et ça, je le maintiens.

  2   Q.  Alors, aux fins de bien comprendre votre témoignage, vous êtes venu

  3   dans le camp deux ou trois jours après son ouverture, vers la fin du mois

  4   de mai. Vous y avez passé quelque deux semaines, jusqu'au 11 juin, puis

  5   vous avez été présent encore du 17 juillet jusqu'au 27 juillet à peu près.

  6   Est-ce que c'est bien ce que vous êtes en train de nous dire, sont-ce là

  7   les deux seules périodes de temps que vous avez passées au camp ?

  8   R.  Oui, à peu près. Peut-être suis-je resté jusqu'au 15, mais je ne me

  9   souviens pas de la date exacte à laquelle je suis rentré dans mon unité.

 10   Q.  Donc vous n'avez pas estimé que ceci était pertinent que de placer dans

 11   vos déclarations l'information disant que vous n'avez passé au camp de

 12   Trnopolje que 24 jours au fil des six mois en question ?

 13   R.  Je ne sais pas. Personne ne m'a posé la question.

 14   Q.  Bon. D'après votre témoignage qui a été versé au dossier ici, vous êtes

 15   un soldat ordinaire qui s'occupait d'acheminer des vivres vers le camp. On

 16   en parlera plus tard, des vivres. Mais quelques mots à votre sujet. Parmi

 17   tous ceux qui sont intervenus au camp de Trnopolje en 1992, vous êtes le

 18   seul, n'est-ce pas, qui s'appelle Slavko ?

 19   R.  Peut-être il y avait d'autres personnes qui s'appelaient Slavko. Je

 20   n'étais pas le seul à porter ce prénom.

 21   Q.  Je suis en train de parler de personnes qui étaient gardiens dans le

 22   camp, qui assuraient la sécurité du camp.

 23   R.  Alors, je n'étais pas gardien.

 24   Q.  Vous êtes le seul Slavko dont la profession était celui de boucher,

 25   n'est-ce pas ?

 26   R.  Cela se peut. Je ne sais pas quelle était la profession des autres

 27   personnes, mais il est vrai que je m'appelle Slavko et que je suis boucher

 28   de profession.


Page 43414

  1   Q.  Vous souvenez-vous d'un certain Vasif Gutic, qui était un étudiant en

  2   médecine de Kozarac qui a été détenu à Trnopolje et qui était à

  3   l'infirmerie ?

  4   R.  Je ne me souviens pas de ce nom-là. Je ne sais pas qui est cette

  5   personne. Beaucoup de temps s'est écoulé depuis ce moment-là.

  6   Q.  Il a témoigné dans l'affaire Tadic en 1996 et il s'est souvenu de vous.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] De qui s'agit-il ?

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Il s'agit de Vasic Gutic.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez marquer une pause.

 10   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Veuillez

 11   afficher le numéro 65 ter 25630, s'il vous plaît.

 12   Q.  A la page du compte rendu d'audience 4 709, M. Gutic a dit que Slavko

 13   Puhalic avait un bureau dans l'ancien bureau du bâtiment de la communauté

 14   locale "où Slavko emmenait des détenus pour qu'ils y soient interrogés, et

 15   une fois interrogés, certains d'entre eux ont été frappés."

 16   Vous avez emmené des prisonniers pour être interrogés, n'est-ce pas ?

 17   R.  Il y avait des amis avec lesquels je parlais, tout comme je parle

 18   aujourd'hui. Cela se peut, je ne sais pas. Ce n'était pas un bureau.

 19   C'était une petite pièce. Et même en bas où se trouvait le "dom", où

 20   j'étais assis, il y avait un Albanais, un monsieur, Izet Beri [phon], nous

 21   étions assis ensemble et nous avons parlé. Peut-être que quelque chose

 22   s'est passé après moi, mais il n'y a pas eu de passages à tabac.

 23   Q.  Avez-vous participé aux passages à tabac de l'une quelconque des

 24   personnes qui se trouvaient au camp de Trnopolje ?

 25   R.  Non.

 26   Q.  Avez-vous assisté aux passages à tabac ?

 27   R.  Je ne m'en souviens pas vraiment. C'était il y a longtemps. Je ne m'en

 28   souviens pas.


Page 43415

  1   Q.  Connaissez-vous un homme qui répond au nom d'Adem Dzihic, qui était

  2   originaire de Kozarac et qui a également été détenu à Trnopolje ?

  3   R.  Non.

  4   Q.  Il a fait une déclaration qu'il a remise aux autorités de Bosnie.

  5   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Numéro 65 ter 25607, s'il vous plaît.

  6   Q.  Il s'agit de la déclaration qu'il a donnée en septembre 1994. Et à la

  7   page 3, il a dit que :

  8   "Le commandant de la police qui gardait et interrogeait les prisonniers du

  9   camp était Slavko Puhalic, qui autrefois était propriétaire de sa boucherie

 10   à Prijedor."

 11   C'est vous, n'est-ce pas ?

 12   R.  Je n'avais pas de boucherie. Je travaillais en tant que boucher dans

 13   une société qui était étatisée.

 14   Q.  Vous avez travaillé dans une boucherie à Prijedor, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Je vous remercie. J'en ai terminé avec ce document. Mladen Mitrovic et

 17   Goran Nisevic [phon] étaient des gardiens du camp, n'est-ce pas ?

 18   R.  Sans doute. Je ne me souviens plus du nom des gardiens.

 19   Q.  Au paragraphe 25 de votre déclaration, concernant le fait jugé 1 237,

 20   vous avez dit qu'au début il y avait des cas de maltraitance. Vous avez dit

 21   qu'il y avait quelques cas dont vous aviez connaissance et dont le

 22   commandant Kuruzovic a été informé. Connaissez-vous Mustafa Nuhanovic, qui

 23   était originaire de Trnopolje et qui a été détenu dans le camp ?

 24   R.  Non.

 25   Q.  Eh bien, lui, il vous connaît.

 26   R.  Je ne m'en souviens pas.

 27   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Numéro 65 ter 25604.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] S'agit-il du paragraphe 25 de sa


Page 43416

  1   déclaration ?

  2   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, c'est un des paragraphes qui ont été

  3   ajoutés. A la page 9 de la version anglaise.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne dispose peut-être que de

  5   l'ancienne version.

  6   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  7   Q.  Mustafa Nuhanovic a également témoigné dans l'affaire Tadic le 7 août

  8   1996, et en bas de la page 4 841, on lui a demandé s'il avait jamais été

  9   frappé dans le camp de Trnopolje. Il a répondu, Oui, à plusieurs reprises.

 10   Y a-t-il eu des moments qui étaient particulièrement graves ? Réponse :

 11   Oui, deux fois. A deux reprises, c'était assez violent. Et où cela s'est-il

 12   passé ? En haut de la page 4 842, A côté du bâtiment ou du centre que l'on

 13   appelait le laboratoire. Qui vous y a emmené ? Réponse : Mladen Mitrovic.

 14   Et ensuite, on lui a demandé, Quand on vous a emmené -- à la ligne 23 de

 15   cette même page, Lorsqu'on vous a emmené dans le laboratoire pour y être

 16   frappé, avez-vous reconnu l'une quelconque des personnes qui participaient

 17   à ces passages à tabac ? Oui, un certain Slavko de Prijedor, un capitaine,

 18   tel était son grade, je peux parler de l'insigne, il avait trois étoiles,

 19   c'était un capitaine, et il m'a interrogé. Je ne sais pas. C'était un

 20   boucher à Prijedor. Je crois que son nom de famille était Pahovski ou

 21   quelque chose comme ça.

 22   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Est-ce que nous pourrions regarder la

 23   page du compte rendu d'audience 4 844, s'il vous plaît.

 24   Q.  Et on lui a posé la question lors du premier passage à tabac avec quel

 25   objet on l'a frappé. Et il a répondu à la ligne 10, Ils m'ont frappé avec

 26   tout ce qu'ils avaient sous la main, que ce soit des battes de baseball,

 27   des câbles, des bottes, les mains et même avec une chaise. Est-ce que leurs

 28   coups étaient portés à certains endroits du corps, et si oui -- et il a


Page 43417

  1   répondu, A l'endroit du cœur et des reins, sinon sur tout le corps. Ils

  2   m'ont frappé partout, y compris à la tête. Et les blessures qu'il a subies,

  3   à la ligne 19, La première fois, c'était au niveau des veines de ma jambe

  4   qui a été coupée. Une fracture à la tête. Et ensuite, des fractures ici, 5

  5   à 6 centimètres, et j'avais beaucoup de blessures.

  6   A la page 4 845, on lui a demandé s'agissant du deuxième passage à tabac,

  7   Et ça, qui est-ce que c'était ? On vous a emmené pour être passé à tabac

  8   une deuxième fois. C'est le même homme, en quelque sorte, que ce Mladen,

  9   mais il y en avait d'autres également en compagnie de Cigo qui était là. Et

 10   il a dit que le nom de famille de Cigo était Nisevic, Goran Nisevic.

 11   A la page 4 846. Vous avez perdu connaissance lors d'un de ces passages à

 12   tabac. Il a dit "Oui. Ils m'ont frappé. Il m'a frappé, mais je ne me

 13   souviens pas combien de temps cela a duré. Cela a semblé comme une -- me

 14   semblait comme une éternité. Pour finir, il y a quelqu'un qui m'a traîné

 15   par les pieds, qui m'a placé à côté du mur et un autre est venu pour me

 16   frapper avec ses mains, avec ses pieds, donc. De telle sorte que j'ai --

 17   j'avais -- je me sentais vomir. Et j'ai vomi. Ensuite, brusquement, je

 18   souhaitais à nouveau vomir et je ne le pouvais pas. Il y avait un liquide

 19   jaune qui est sorti de ma bouche et c'était tellement amer que je n'ai

 20   jamais rien goûté de la sorte dans ma vie. Et ensuite, j'ai dû perdre

 21   connaissance. On lui a demandé "Vous a-t-on jamais dit pourquoi vous avez

 22   été frappé à plusieurs reprises, pourquoi vous ont-ils frappés ?" Ils vous

 23   demandaient des fusils et de l'argent et de l'or.

 24   Et Mustafa se souvient d'avoir participé à ces passages à ces

 25   passages à tabac dans le camp. Vous souvenez-vous avoir été présent ou

 26   participé à un quelconque de ces événements ?

 27   R.  D'abord, je vous ai dit que j'étais un simple soldat et je n'avais pas

 28   de grade. Peut-être qu'il y avait un autre Slavko, un capitaine. Je ne m'en


Page 43418

  1   souviens pas. Je ne connais pas cette personne. Je n'ai pas participé à ces

  2   passages à tabac. Je ne me souviens pas de ce Mitrovic et je ne me souviens

  3   pas -- et qu'est-ce que vous avez dit, quel était son nom ? Cigo ? Je ne

  4   m'en souviens pas, ces personnes. Je n'ai pas participé à cela, non.

  5   Q.  Et vous exerciez une certaine autorité dans le camp. Vous pouviez

  6   arrêter les détenus -- vous pouvez empêcher les détenus d'être maltraités

  7   si vous l'aviez souhaité, n'est-ce pas ?

  8   R.  Je n'avais aucune autorité. J'ai essayé d'aider les personnes autant

  9   que faire se peut.

 10   Q.  En réalité, vous avez enlevé de l'argent -- pris de l'argent aux

 11   détenus, à condition de -- d'arrêter ces choses néfastes qui se

 12   produisaient, comme les passages à tabac par les gardiens, n'est-ce pas ?

 13   R.  Non, non.

 14   Q.  Vous connaissez une personne qui répond au nom de Rifet Zenkic ? Il

 15   avait environ 14 ans de plus que vous. Vous étiez un de ses voisins, un

 16   voisin de la fille de sa sœur. Vous avez -- lui avez pris de l'argent en

 17   échange de l'arrêt des passages à tabac par Skrbic, par le -- en échange de

 18   l'arrêt des passages à tabac par son fils, Skrbic, n'est-ce pas ? Et

 19   pourquoi riez-vous de la sorte, Monsieur Puhalic ?

 20   R.  Je ne m'en souviens vraiment pas, je suis vraiment désolé. Mais il y a

 21   les choses -- je ne le comprends pas. Il ment.

 22   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Alors, numéro 65 ter 25606, s'il vous

 23   plaît.

 24   Q.  Une déclaration recueillie de M. Zenkic au mois d'août ou septembre

 25   1994, donc un ou deux ans après l'événement en question, page 11 de la

 26   déclaration. Il parle de son fil qui est interrogé à cinq reprises par une

 27   personne qui s'appelle Skrbic et le -- la sixième fois, je cite, maintenant

 28   le deuxième paragraphe dans sa totalité, à commencer par "Mon fils a


Page 43419

  1   interrogé -- a été interrogé cinq fois."

  2   "La sixième fois, je suis allé voir Slavko et j'ai plaidé auprès de lui

  3   pour qu'il épargne mon fils."

  4   Pardonnez-moi. Il vous identifie déjà à la page 8.

  5   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Page 8, s'il vous plaît.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] A qui a été donnée cette déclaration, je vous

  7   prie ?

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation] La déclaration a été remises aux

  9   représentants du bureau du Procureur. Première page, ici, les coordonnées.

 10   Page 8, s'il vous plaît.

 11   Q.  [inaudible] de -- d'être interrogé et le -- un lieutenant de la police

 12   militaire qui portait un uniforme de camouflage avec deux étoiles devait

 13   l'interroger. Cela précisait que c'était un lieutenant et en fait, le --

 14   celui qui m'a interrogé était -- s'appelait Slavko Puhalic. Page 11.

 15   Ensuite, il a dit "J'ai vu Slavko. Je me suis rendu auprès de Slavko et

 16   j'ai plaidé auprès de lui pour qu'il suave mon fils, parce que j'ai vu

 17   qu'ils allaient tuer mon fils. Je l'ai vu plus tard."

 18   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je m'excuse auprès des interprètes.

 19   Q.  "Et il s'était entretenu avec Skrbic et mon fils avait une chaîne en

 20   or. Cela signifie qu'il fallait le payer avec la chaîne en or. Et j'ai dit

 21   à Slavko que d'autres avaient déjà pris la chaîne et que j'avais 150 marks

 22   allemands sur moi. Il a pris l'argent et par la suite, il est venu me voir

 23   et il a dit qu'il s'était entretenu avec Skrbic et que cela n'allait plus

 24   se reproduire."

 25   Vous souvenez-vous de cela ?

 26   R.  Je me souviens peut-être d'y être allé. Je crois que le nom de son fils

 27   était Adjin [phon], si je ne me trompe pas. Ai-je raison ?

 28   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je vais le confirmer après la pause de


Page 43420

  1   déjeuner, Madame, Monsieur les Juges. Pensez-vous que c'est un -- il

  2   convient de faire la pause, maintenant ?

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Soit. Oui, nous allons avoir une pause

  4   pendant 45 minutes et nous reprendrons à 13 heures 38.

  5   --- L'audience est suspendue à 12 heures 48.

  6   --- L'audience est reprise à 13 heures 40.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Madame Sutherland.

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  9   Q.  Le fils de M. Zenkic est en réalité, vous avez dit, Ajdin, A-J-D-E-N, à

 10   la page 7 de sa déclaration. Donc, vous vous souvenez, n'est-ce pas, avoir

 11   pris l'argent de Réfugiés [phon] Zenkic -- Rifet Zenkic pour que son fils

 12   ne soit plus frappé par M. Skrbic, n'est-ce pas ?

 13   R.  Non. Je me souviens de cette famille.

 14   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète : Le témoin peut-il s'approcher du

 15   microphone, s'il vous plaît ?

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Puhalic, veuillez vous

 17   rapprocher du microphone, s'il vous plaît.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Etant donné que vous avez dit que c'était une

 19   famille de voisins, maintenant, je me souviens de cette famille. Ils

 20   avaient insisté pour que j'aide cet homme à Zengic [comme interprété]. Je

 21   crois que vous avez dit que c'était son nom. Et je suis allé. C'était peut-

 22   être à 800 mètres, voire un kilomètre à l'extérieur du camp. J'ai trouvé

 23   cette famille à cet endroit et je lui ai dit d'aller dans le camp, que

 24   c'était le lieu le plus sûr. C'était l'alternative la plus sûr, chose qu'il

 25   n'a pas acceptée. Donc, je suis retourné dans le camp et je n'avais aucune

 26   idée de ce qui est arrivé par la suite. Je n'avais aucune idée s'agissant

 27   de cet argent dont vous parlez. J'ai essayé d'aider cette personne. Cette

 28   personne ne l'a pas accepté. Alors, ce qu'il s'est passé après,


Page 43421

  1   honnêtement, je ne peux pas vous le dire.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Au compte rendu d'audience, s'il vous plaît --

  3   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète de la cabine anglaise : Il y a trois

  4   microphones qui sont actuellement ouverts.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] A la ligne 9, le témoin a dit "non" et ensuite,

  6   "Je me souviens de cette famille".

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  9   Q.  Vous connaissez un certain Bosko Lakic qui est gardien de camp, n'est-

 10   ce pas ?

 11   R.  Non, je ne m'en souviens pas. Je n'avais aucun contact avec les gardes.

 12   Cela ne relevait pas de mon travail. C'était -- cela revenait à M.

 13   Kuruzovic.

 14   Q.  Vous êtes allé dans certains endroits du camp où les femmes étaient

 15   hébergées, y compris dans un abri en bois, n'est-ce pas ?

 16   R.  Je ne sais pas de quoi vous parlez. Les femmes étaient autour du camp,

 17   à l'intérieur du camp, dans des tentes, dans des camions, dans des

 18   voitures, là où il était -- on pouvait se reposer, dormir. Les femmes

 19   étaient partout avec leurs enfants et les hommes -- tous ceux qui étaient

 20   là.

 21   Q.  Y avait-il un endroit -- un abri en bois où les femmes dormaient ? Vous

 22   y êtes allé avec une lampe torche et vous avez appelé les femmes pour

 23   qu'elles sortent en pleine nuit ?

 24   R.  Non, jamais.

 25   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Est-ce que nous pouvons passer à huis

 26   clos partiel, s'il vous plaît ?

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes actuellement à huis clos


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  1   partiel, Madame, Messieurs les Juges.

  2   [Audience à huis clos partiel]

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 27   [Audience publique]

 28   Mme SUTHERLAND : [interprétation]


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  1   Q.  Voici ce qu'a dit Slobodan Kuruzovic, commandant du corps, à propos des

  2   allégations de viol lorsqu'il a été interrogé :

  3   "Peut-être que ce n'est pas quelque chose qui est agréable à dire, mais les

  4   Musulmans plus âgés qui étaient à l'intérieur faisaient des plaisanteries à

  5   ce sujet, parce que nous sommes ce genre de peuple-là. La femme plus âgée a

  6   dit qu'elle s'était bien amusée. Ça n'est pas agréable à dire, mais ce que

  7   j'ai entendu dire quelques -- deux jours plus tard."

  8   Et ensuite, il poursuit en disant :

  9   "Eh bien, c'est ainsi que les choses se sont passées. Il y a eu -- je crois

 10   que personne n'a été blessé physiquement. C'était juste des fanfaronnades."

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Est-ce que

 12   nous avons ce document ?

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Cela se

 14   trouve -- oh, pardonnez-moi. Page du compte rendu d'audience 14829. Deux

 15   pages plus loin.

 16   M. ROBINSON : [interprétation] En réalité, il s'agit d'une déposition dans

 17   l'affaire Stakic; il ne s'agit pas d'un entretien.

 18   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, je vous remercie. Vous avez raison.

 19   En fait, déposition dans l'affaire Stakic datée du 31 mars 2003. Alors ce

 20   que je vous ai lu est un extrait et qui correspond aux lignes 12 à 16 et

 21   ensuite, l'une -- des lignes 20 à 22.

 22   Q.  Et il fait référence à l'entretien qu'il a eu l'année précédente. Et M.

 23   Malik [phon] lui a demandé, "Vous voulez dire la personne qui a été violée

 24   trouvait que c'était très agréable ?" Et vous avez répondu en disant "Oui,

 25   à savoir si elle a été violée, je ne sais pas. Je n'en sais rien. De toute

 26   façon, il n'y a pas eu d'examen. Je ne suis pas interrogé du fait que ces

 27   femmes aient été déflorées.

 28   Q.  Monsieur Puhalic, ceci résume, n'est-ce pas, la manière dont le


Page 43425

  1   commandant de camp abordait la question des allégations de viol et

  2   d'agression sexuelle dans son camp, n'est-ce pas ?

  3   R.  Alors en ce qui concerne cette femme qui a dit cela, il s'agissait de

  4   viol. Je ne me souviens pas de la date exacte.

  5   Q.  Je vais vous arrêter là. Le passage que je vous ai lu à huis clos

  6   partiel, je ne souhaite pas que vous répétiez le nom de la personne en

  7   question parce que nous étions à huis clos partiel. Les allégations qui

  8   sont abordées ici avec M. Kuruzovic, les allégations de viol concernant un

  9   certain nombre de femmes qui se sont plaint du fait qu'on les avait fait

 10   sortir du camp pour être violées. Donc il s'agit de deux situations

 11   différentes. Alors là où je veux en venir c'est la chose suivante, ceci

 12   résume, n'est-ce pas, les positions du commandant du camp vis-à-vis des

 13   allégations de viol et d'agression sexuelle dans le camp de Trnopolje,

 14   n'est-ce pas ?

 15   R.  Non. Je souhaite vous l'expliquer. Alors, ce cas, M. Kuruzovic a dit

 16   exactement à cette personne, c'était la personne qui a été violée, en même

 17   temps que cinq, six voire sept autres femmes. Lorsque je suis arrivé à

 18   Trnopolje le matin, le commandant n'y était pas. Lorsque je suis entré dans

 19   le camp, une femme est venue jusqu'à moi et elle a dit que son enfant avait

 20   été violé. Cela m'a vraiment bouleversé, en tant que personne, j'ai tout de

 21   suite demandé où se trouvait cette personne. Elle a répondu, en disant

 22   c'est ma fille. Et la jeune fille a dit entre autres choses qu'elle n'y

 23   était pas toute seule, qu'il y avait une autre personne qui était là. Je

 24   lui ai demandé si elle savait qui était cette autre personne, et elle a

 25   répondu, je ne m'en souviens pas, je ne me souviens pas du nom. Quoi qu'il

 26   en soit, j'ai retrouvé ces six ou sept femmes, et entre autres choses,

 27   enfin par rapport à ce qu'a dit le commandant Kuruzovic, alors quelqu'un a

 28   dit, une femme a dit, et peut-être que c'était en guise de plaisanterie, je


Page 43426

  1   ne sais pas, mais elle a dit cela au sujet de cet homme, et c'est la raison

  2   pour laquelle je me souviens de cela. Et, lorsque le commandant est arrivé,

  3   je lui en ai informé de façon à ce que des activités puissent être

  4   organisées. Le médecin est venu également. J'ai trouvé ces personnes

  5   quelque part à l'extérieur du camp, il y avait trois ou quatre femmes qui

  6   étaient à l'extérieur du camp, et je crois qu'il y en avait trois qui

  7   étaient dans le camp, qui venaient du camp. Il y avait cette jeune fille,

  8   et ces deux femmes donc le médecin a --

  9   Q.  Monsieur Puhalic, ces femmes ont été emmenées à l'hôpital, en fait,

 10   elles ont été examinées à l'hôpital. Vous avez dit que les responsables de

 11   ces viols ont été arrêtés. Quels sont leurs noms ?

 12   R.  Je n'arrive pas à retrouver là le nom de ce gars, car j'ai participé à

 13   l'arrestation. Et, la police, et en fait, ces femmes m'ont dit où cela se

 14   trouve à Kozarac. Et, j'y suis allé avec la police militaire, avec la

 15   police civile, tant que j'ai compromis ma propre sécurité, ma vie, je suis

 16   allé pour que ce gars soit arrêté, lui et plusieurs autres qui ont pris

 17   part. Et, cette jeune femme, cette fille --

 18   Q.  Je vais vous interrompre là, Monsieur Puhalic. Cette personne ou ces

 19   individus n'ont jamais fait l'objet de poursuite, n'est-ce pas, pour ce

 20   viol au camp de Trnopolje ?

 21   R.  Ça, je ne sais pas. Je vous dis que cet individu qui a pris part, mais

 22   c'est pas lui qui a commis le viol. Donc puisqu'il y avait cette jeune

 23   fille, en fait, elles étaient deux sœurs. Elle m'a dit que précisément ce

 24   gars que nous avons arrêté avait une bague au doigt, et que c'est lui qui a

 25   aidé qu'elle ne soit pas violée. On l'a interpellé, on l'a amené au

 26   commandement, il y est resté, je ne sais pas deux ou trois heures, je ne

 27   sais pas si c'était pour être interrogé. Mais pendant que j'étais encore au

 28   commandement, ces gars qui l'auraient fait, ce groupe-là a appelé le


Page 43427

  1   commandement et ils ont dit, je cite : Qu'ils allaient attaquer Prijedor si

  2   ce gars n'était pas relâché. Donc j'ai quitté cet endroit, je suis revenu

  3   au camp, excusez-moi, je vais juste terminer. Donc je suis revenu au camp,

  4   et le lendemain matin, ce groupe est arrivé avec deux chars, ils sont

  5   arrivés au camp, et moi, d'après les bruits que j'ai entendus, j'ai compris

  6   quelque chose était en train de se passer, j'ai réussi à écarter de la

  7   route les soldats. Je les ai placés derrière les maisons. Et, pour ce qui

  8   est de la population civile, j'ai réussi à faire qu'ils se mettent à l'abri

  9   à l'école, et à l'intérieur. Et, ils sont arrivés, ils m'ont désarmé. Je me

 10   suis retrouvé seul au milieu de la route devant, et je ne sais pas comment

 11   j'y suis parvenu, en l'absence du commandant. Il y avait juste un Albanais,

 12   Izet Beri, qui était là à l'intérieur de ce bâtiment puisque j'ai vu qu'ils

 13   étaient plutôt ivres, voilà. Je lui ai demandé une bouteille, je ne sais

 14   pas si c'était du raki ou autre alcool, et il m'a donné ça. C'est ce que je

 15   leur ai remis, et j'ai réussi à les convaincre qu'il n'y ait pas de coup de

 16   feu de tiré. Je ne sais pas comment ni quoi, mais enfin c'est comme ça que

 17   ça s'est terminé.

 18   Q.  Et en fait ce qui s'est passé c'est qu'ils n'ont jamais connu de

 19   poursuite pour avoir commis ces viols au camp de Trnopolje; exact ?

 20   R.  Ecoutez, ça, je ne sais pas. Comme je vous disais, je ne suis pas bien

 21   placé pour en juger. Qui a fait quoi, et est-ce qu'on a déployé des

 22   mesures, je n'ai pas eu le temps de vérifier tout ça. Moi, je n'étais que

 23   simple soldat, je vous l'ai dit.

 24   Q.  Il n'y a pas eu d'enquête non plus d'amorcée au sujet des meurtres ou

 25   des passages à tabac qui ont eu lieu au camp. Cela est exact, n'est-ce pas,

 26   pour autant que vous le sachiez, il n'y a jamais eu d'enquête de menée ?

 27   R.  Pour autant que je le sache, non. Ça concernait surtout le commandant

 28   Kuruzovic.


Page 43428

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Microphone pour l'Accusation.

  2   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  3   Q.  Au paragraphe 11, vous avez dit et brièvement : Qu'il y avait une

  4   infirmerie au camp, et que des soins médicaux y étaient donnés. Vous avez

  5   dit qu'un ou deux médecins y ont travaillé ainsi que deux ou trois

  6   infirmières, et vous avez dit qu'un médecin d'appartenance ethnique serbe y

  7   a travaillé.

  8   C'est ce que vous avez dit aujourd'hui dans votre déposition. Mais vous

  9   savez très bien qu'il y avait une clinique de fortune avec du matériel

 10   médical qui n'était pas approprié par rapport aux milliers de détenus qui

 11   étaient au camp de Trnopolje ?

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Une intervention sur le compte rendu d'audience

 13   avant la réponse. Ligne 16, les interprètes n'ont pas entendu que le témoin

 14   a dit que c'était le commandant Kuruzovic qui s'était surtout occupé de

 15   cela.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Est-ce que vous pouvez

 17   répondre à la question, s'il vous plaît.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il n'y avait pas de conditions

 19   appropriées.

 20   Q.  Vous avez également dit au paragraphe 21 de votre déclaration préalable

 21   par rapport aux faits jugés 1230 que Trnopolje n'a jamais été entièrement

 22   entouré de soldats, qu'il n'y avait pas de nids de mitrailleuses ou de

 23   fusils qui auraient été pointés dans la direction du camp. Cela est

 24   complètement inexact, n'est-ce pas ?

 25   R.  Non. Par rapport à ce que j'en sais.

 26   L'INTERPRÈTE : Les interprètes signalent qu'ils n'ont pas bien entendu la

 27   réponse du témoin.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que vous


Page 43429

  1   pouvez répéter votre dernière réponse ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour autant que je le sache, non.

  3   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  4   Q.  Mis à part les témoins qui sont venus déposer en l'espèce qui ont dit

  5   qu'il y a eu des postes de garde autour du camp et en particulier, j'attire

  6   l'attention des Juges et de M. Karadzic sur la pièce P03880. Nous avons

  7   aussi un témoin indépendant qui est venu déposer. Il s'est rendu au camp,

  8   fin août, début septembre, et voilà ce qu'il a dit :

  9   "Il semblait que cela se trouvait sur -- à l'emplacement d'une ancienne

 10   école."

 11   Je suis en train de lire la déposition de Charles McLeod, P00712.

 12   "Donc, il semblerait que c'était l'emplacement d'ex-école. Le camp

 13   est -- avait des deux côtés une route et au point où se rencontraient les

 14   deux routes, il y avait une mitrailleuse qui, en fait, pouvait couvrir cet

 15   espace des deux routes qui couvrait aussi l'espace qui s'étendait au loin

 16   le long de ces routes. Le camp était appelé Centre de rassemblement

 17   ouvert."

 18   Et nous avons également eu Dr Mrdjanic [phon] qui a déposé pièce

 19   P03808, que des postes de garde se trouvaient autour de Trnopolje, partout

 20   autour. Page du compte rendu d'audience 7732. Puis 7753, qu'il y avait un

 21   nid de mitrailleuses sur ce poste de contrôle qu'il nous a montré sur une

 22   carte.

 23   Q.  Donc, il est tout à fait inexact de dire ce que vous êtes en train de

 24   dire qu'il n'y avait pas de poste de garde autour du camp et pas de nid de

 25   mitrailleuses, n'est-ce pas ?

 26   R.  Ecoutez, je n'arrive pas à m'en souvenir. Il est possible qu'un soldat

 27   ait posé son fusil à côté de l'endroit où il montait la garde et que le

 28   fusil se soit retrouvé là. Mais pendant que je passais là, je n'ai pas vu


Page 43430

  1   de mitrailleuses ni de fusils pointés sur des civils. Ça, je n'ai pas

  2   remarqué cela pendant que j'y étais.

  3   Q.  Au paragraphe 19, par rapport au fait jugé 1225, vous dites que

  4   personne n'a été amené de contrainte au camp de Trnopolje. Hors, les moyens

  5   de preuve en l'espèce montrent que l'écrasante majorité des personnes qui

  6   ont été amenées au camp de Trnopolje n'y sont pas venues de leur plein gré,

  7   qu'en fait, on les a rassemblées et amenées à bord d'autocars et à pied. Et

  8   vous savez cela. Vous le saviez également à l'époque, n'est-ce pas ?

  9   R.  Ecoutez, je n'ai jamais été présent pendant que qui que ce soit était

 10   amené par autocar. Je sais que c'est à bord de tracteurs ou de voitures ou

 11   de camions que les gens sont venus là. Comment dire, il y a eu beaucoup de

 12   voitures et de tracteurs --

 13   L'INTERPRÈTE : Interrompu par l'Accusation.

 14   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 15   Q.  Excusez-moi de vous interrompre. Ils sont arrivés à bord d'autocars,

 16   c'était organisé, on les a rassemblée, on les a amenés de Kozarac, de

 17   Jazkici [phon], on les a amenés de Trnopolje, de Brdo, fil juillet, après

 18   le nettoyage. Donc, des témoins sont venus déposer ici qu'on a rassemblé

 19   ces gens et qu'on les amenés au camp contre leur volonté.

 20   Alors, ce que vous nous dites, vous, c'est que vous n'avez vu aucun

 21   de ces autocars ces -- pendant ces 24, 25 ou 26 jours que vous avez passés

 22   au camp ?

 23   R.  Vous venez de nous [inaudible] juin ou juillet, hors je vous ai dit que

 24   c'était à partir du 10 au 11 juillet que j'étais absent, jusqu'au 17 ou 18

 25   -- ou plutôt, 10 au 11 juin se corrige l'interprète, donc je n'étais pas

 26   présent lorsque cela s'est produit. Et je vous dis ce que j'ai vu. Je ne

 27   sais pas, peut-être qu'au tout début, quand il y a eu l'attaque sur

 28   Prijedor, alors est-ce que peut-être à ce moment-là, il y a eu quelques


Page 43431

  1   personnes ou des individus, je ne sais pas, je ne m'en souviens pas, qui

  2   auraient été emmenés. Mais Kozarac, écoutez, les gens sont venus à pied

  3   parce qu'à ce moment-là, il y a eu des combats. Personne n'avait le temps

  4   de s'occuper de prendre en charge des gens pendant que les balles

  5   pleuvaient ou les obus, que -- personne n'a pu s'occuper de mettre des gens

  6   à bord des autobus, des autocars. On allait -- on essayait de sauver sa

  7   tête, c'est tout.

  8   Q.  Monsieur le Témoin, d'après les moyens de preuve, on les mettait à bord

  9   des autocars. On les amenait également à pied et on les faisait escorter

 10   par des soldats. Alors, maintenant, d'après votre déposition, après les

 11   premiers jours, la sécurité du camp a été améliorée pour protéger les

 12   civils, c'est bien ça ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Mais cela n'est pas exact. En fait, ce qui s'est passé, est qu'on a

 15   augmenté les mesures de sécurité, parce qu'on avait peur que les gens ne se

 16   sauvent du camp. C'est bien ça la véritable raison, n'est-ce pas ?

 17   R.  Ah, non, ça je ne m'en souviens pas. Peut-être qu'il y avait des gens

 18   qui sont partis ou des gens qui ont réussi à s'évader, mais ça, je ne peux

 19   pas vous le dire, parce que, moi, j'étais pas responsable de surveiller ça.

 20   Je vous ai dit ça que j'étais plus dans le sens de m'occuper des vivres, de

 21   la nourriture, comme je vous l'ai déjà dit. Cela, je ne peux pas vous en

 22   parler. Il faut surtout voir ça avec Kuruzovic. Lui, il est le mieux placé

 23   --

 24   Q.  Il serait -- le mieux serait que je -- excusez-moi. L'interprète n'a

 25   pas entendu la fin. J'ai réagi trop rapidement. Excusez-moi. Vous n'aviez

 26   pas terminé votre réponse. Les interprètes n'ont pas entendu la fin de

 27   votre réponse. Le mieux pour moi serait quoi ?

 28   R.  Le mieux placé pour connaître cela, c'était le commandant Kuruzovic. Le


Page 43432

  1   commandant, comment dirais-je, c'était son grade de commandant, Kuruzovic.

  2   Il était le mieux informé de tout cela, tout ce qui se passait.

  3   Q.  Eh bien, vous avez dit que le camp de Trnopolje était en -- l'endroit

  4   où les gens pouvaient se rendre ou que personne n'a été placé en détention.

  5   Il n'y avait pas de gardes. Mais en fait, ce n'est pas comme ça que les

  6   choses se sont passées, pas du tout. Ce qui s'est passé, c'est qu'au

  7   départ, il a été d'abord créé et ensuite, on a augmenté le nombre de gardes

  8   parce qu'on avait peur d'une évasion.

  9   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Et je vais maintenant demander

 10   l'affichage du 1D5886 de la liste 65 ter.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien --

 12   Mme SUTHERLAND : [interprétation] C'est la date du 31 mai. C'est une

 13   conversation interceptée croate et qui nous dit :

 14   "Il existe un camp de rassemblement pour la population non-serbe du village

 15   de Trnopolje au stade. L'ennemi a peur d'une évasion, donc un ordre a été

 16   donné pour que les mesures de sécurité soient augmentées, si nécessaire

 17   triplées."

 18   Q.  Si c'est un camp qui est complètement ouvert ou tout un chacun est

 19   libre de circuler, comme vous le dites, alors pourquoi est-ce qu'ils ont

 20   peur que les gens ne s'évadent et pourquoi est-ce qu'ils triplent les

 21   mesures de sécurité à cause de cette peur ?

 22   R.  Ecoutez, là encore, je ne sais pas.

 23   Q.  Il s'agit de personnes qui étaient détenues au camp.

 24   R.  Ecoutez, je ne vous ai pas compris.

 25   Q.  Je suis en train de dire qu'il s'agit d'une évasion possible de ce camp

 26   où ils sont placés en détention par les autorités serbes. C'est ça ma

 27   position. S'ils n'avaient pas été détenus, ils n'auraient pas besoin de

 28   vouloir s'évader. Ecoutez, vous avez dit au paragraphe 7 de votre


Page 43433

  1   déclaration préalable, que les gens pouvaient circuler, qu'ils pouvaient

  2   aller chercher des vivres, mais qu'il fallait qu'ils laissent leurs

  3   papiers. Et vous avez répété ça au paragraphe 9 légèrement différemment.

  4   Vous avez dit qu'ils étaient libres de quitter le camp librement après

  5   avoir annoncé leur départ aux gardes et après avoir laissé leurs papiers

  6   d'identité. Donc aux fins ils étaient libres de partir de ce secteur,

  7   n'est-ce pas ? Parce que si leurs papiers -- si leurs pièces d'identité

  8   étaient détenus par les autorités du camp, alors ils pouvaient se rendre

  9   nulle part ?

 10   R.  Non, tout simplement je sais pas. Je sais pas si c'est le commandant

 11   Kuruzovic qui a dit ça qu'il fallait faire de la sorte. Mais vous aviez des

 12   gens qui sont partis également sans pièce d'identité, qui allaient chez eux

 13   pour rapporter, je sais pas, une couverture pour mieux dormir ou un peu de

 14   nourriture. Il y a eu des gens qui sont rentrés chez eux pour se changer,

 15   prendre un bain. Enfin pour des mesures d'hygiène personnelle. Ça c'est ce

 16   qui se produisait. Quant à l'évasion, alors ça je n'ai pas été informé de

 17   quoi que ce soit de la sorte. Peut-être qu'une certaine partie, voire même

 18   -- enfin il m'est arrivé dans une voiture de trouver un pistolet même de 9

 19   millimètres. C'est un homme musulman qui l'avait, et il y a eu peut-être

 20   d'autres pièces d'armement. Ça je ne peux pas dire. Ecoutez, il y a des

 21   choses qui se sont produites de ce type, des choses à l'intérieur du camp

 22   aussi. Excusez-moi, je voudrais terminer. Donc alors pourquoi est-ce qu'on

 23   avait l'armée là sur place, une présence armée ? Ecoutez, c'était déjà la

 24   guerre à Bihac, à Cazin, les personnes déplacées arrivaient. On se dit

 25   qu'il allait pouvoir y avoir des actes de vengeance.

 26   Q.  Monsieur, vous n'êtes pas en train de répondre à ma question.

 27   R.  Mais si, mais si, mais justement je suis en train de le faire. L'armée

 28   était là justement, parce que si on avait des réfugiés qui arrivaient de


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  1   Bihac et qui étaient de nationalité serbe, pour qu'il n'y ait pas d'acte de

  2   vengeance. C'est pour ça qu'il y avait l'armée pour protéger cette

  3   population, pour qu'il n'y ait pas d'irruption. Vous savez, il y avait pas

  4   mal de civils qui se sont mis en uniforme et qui venaient là sur place, il

  5   fallait protéger la population à cause de ça, vu cela. Et puis vous aviez

  6   aussi des gens qui se rendaient chez eux pour revenir.

  7   Q.  Je vais vous interrompre, Monsieur Puhalic. Ma question est la suivante

  8   : Les gens n'étaient pas libres de partir parce que leurs pièces d'identité

  9   étaient -- ils devaient remettre leurs pièces d'identité aux autorités du

 10   camp. C'était pas un camp libre, on pouvait circuler librement, entrer et

 11   sortir. En fait, vous avez placé en détention les gens et vous gardiez

 12   leurs pièces d'identité pour qu'ils ne puissent pas partir justement pour

 13   qu'ils ne puissent pas se rendre ailleurs lorsqu'ils sortaient pour aller

 14   chercher de la nourriture.

 15   R.  Ecoutez, ça je ne le sais pas. Je ne sais pas pourquoi. Il y avait ce

 16   risque -- enfin -- ou plutôt, cette probabilité que les gens -- peut-être

 17   c'était pour qu'ils rentrent, pour qu'on en garde une trace. Pourquoi est-

 18   ce qu'on sortirait ? Comment est-ce que je peux tout vous expliquer ? Où

 19   est-ce qu'un Musulman pouvait se rendre, en fait ?

 20   Q.  Savez-vous, Monsieur, que les autorités politiques et militaires des

 21   Serbes de Bosnie considéraient que Trnopolje était un centre de détention

 22   dans leur correspondance. Je signale la pièce D1872. Il parle d'un camp de

 23   prisonniers de guerre lorsqu'il parle de la fermeture de ce camp de

 24   Trnopolje. Et aussi dans un autre document militaire P03721. Ils parlent

 25   d'une décision de la présidence de la Republika Srpska. Par cette décision,

 26   il s'agit de garantir l'amnistie contre poursuite au pénal lorsqu'il est

 27   question de prisonniers de guerre de Manjaca et de Trnopolje, de ces

 28   prisons-là. Donc il s'agissait pas d'un camp ouvert comme vous voulez nous


Page 43435

  1   le faire croire, n'est-ce pas ?

  2   R.  Je ne suis pas d'accord avec vous.

  3   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je voudrais que l'on nous affiche la

  4   pièce 1D09763 de la liste 65 ter.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il faudrait peut-être préciser avec le témoin à

  6   quoi correspond la réponse négative qu'il a donnée. Il a dit, Non. La

  7   question était trop complexe pour que l'on puisse comprendre à quoi

  8   correspond son non.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. Mais je voudrais justement répondre.

 10   C'était un centre qui était à caractère ouvert.

 11   Mme SUTHERLAND : [interprétation] D'accord.

 12   Q.  Si c'était un centre à caractère ouvert --

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Alors je voudrais qu'on nous affiche le

 14   document 1D09763 sans le diffuser à l'extérieur du prétoire. Page 42, s'il

 15   vous plaît.

 16   Q.  Il s'agit du registre du protocole de l'hôpital de Prijedor. Et nous

 17   avons une entrée, une mention pour Salih Softici,  le 17 juin 1992. C'est

 18   un prisonnier de Trnopolje, d'après la mention.

 19   Alors pourquoi est-ce qu'il est qualifié comme prisonnier de Trnopolje si

 20   Trnopolje était un camp à caractère ouvert, comme vous l'affirmez ?

 21   R.  Je me pose [inaudible 03, cela figure que c'est un prisonnier. Je ne

 22   vois pas où c'est écrit.

 23   Q.  C'est la deuxième mention à partir du bas de la page. Le numéro 3349 --

 24   excusez-moi, page 62. Est-ce que vous le voyez à présent ?

 25   R.  Je vois. Oui.

 26   Q.  Alors pourquoi est-ce qu'il est présenté comme prisonnier de Trnopolje

 27   si il n'y a pas de détenu à Trnopolje ?

 28   R.  Ecoutez, je sais pas. Il faudra demander cela à celui qui a renseigné


Page 43436

  1   cette motion. Moi, je peux pas vous en parler.

  2   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je demande que

  3   cette page soit versée au dossier.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Robinson.

  5   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous pourrions accorder une

  7   cote provisoire plutôt ?

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, jusqu'à ce

  9   que la traduction anglaise soit prête. Et aussi pour des raisons de

 10   confidentialité on pourrait peut-être expurger tous les noms que je n'ai

 11   pas mentionnés, je veux dire tous les noms mis à part celui que j'ai

 12   mentionné.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, tout à fait.

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce --

 15   L'INTERPRÈTE : Les voix se chevauchent note de la cabine.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez redonner la cote

 17   ?

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] MFI P6501.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier,

 20   je vous présente mes excuses.

 21   Je voudrais également demander une cote provisoire pour la conversation

 22   interceptée, s'il vous plaît.

 23   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Nous allons admettre ce document.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le document P6502 MFI.

 26   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 27   Q.  Au paragraphe 10 de votre déclaration préalable, vous dites que vous

 28   avez aidé plusieurs personnes à avoir un sauf-conduit, et vous avez


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  1   également aidé à ce que Kuruzovic donne son approbation; une approbation

  2   pourquoi, pourquoi faire ?

  3   R.  Comment dirais-je, c'était une espèce de laissez-passer pour les gens

  4   qui étaient dans le camp pour qu'ils puissent passer; comment dirais-je,

  5   par un poste qui était tenu par la police, pour qu'ils puissent être

  6   escortés jusqu'à la ville, jusqu'à leurs proches d'où ils allaient pouvoir

  7   repartir ailleurs, être transportés, ou qu'en sais-je, ils allaient pouvoir

  8   s'installer ailleurs.

  9   Q.  Et, pour quelle raison ne souhaitez-vous pas citer le nom de ces

 10   personnes pour lesquelles vous êtes intervenu pour qu'elles obtiennent un

 11   laissez-passer ?

 12   R.  Mais ce n'est pas un problème, hein. Comment, je ne peux pas retrouver

 13   tous les noms, tous les prénoms. Il y avait la famille Izet Beri de

 14   Kozarac, du côté des Albanais. Ensuite des gens de Prijedor, des Albanais

 15   également. Piste, puis M. Idriz Hosic, qui avait été membre de la sélection

 16   Yougoslavie de football de par le passé. Familles croates de Rajkovic.

 17   Enfin je ne peux pas vous énumérer tous ces noms, et d'ailleurs je n'arrive

 18   pas à les retrouver tous, mais il y a eu pas mal de personnes. Et, il y a

 19   eu peut-être une centaine, voir plus de personnes pour que j'ai aidé ces

 20   gens à ce qu'ils trouvent un moyen de partir en passant par la Croatie,

 21   enfin je ne sais pas comment ils ont procédé, par où ils sont passés, ça,

 22   je ne le sais pas. Mais je sais que --

 23   Q.  --

 24   R.  Mais je sais que encore aujourd'hui, parmi ces gens, il y en a qui se

 25   rendent à Prijedor, et en passant par Prijedor, ils viennent me dire

 26   bonjour d'une certaine manière, ils me sont reconnaissants, et ils me le

 27   montrent donc pour ce que j'ai fait pour eux.

 28   Q.  Nous allons parler de leur transport que vous avez assuré dans un


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  1   instant. Mais à partir du moment où les autorités avaient pris une décision

  2   sur ce qu'il fallait faire, comment il fallait procéder avec les détenus.

  3   On a organisé des convois, et c'était régulier, n'est-ce pas ?

  4   R.  Je ne sais pas exactement. J'étais présent lors d'un convoi, je ne sais

  5   trop comment et pourquoi, mais il y avait des autocars, il y avait des gens

  6   à bord de ces autocars, et on les a emmenés soit en direction de Travnik ou

  7   de Turbe. Je ne sais pas exactement, c'est le commandant Kuruzovic qui s'en

  8   occupait, moi, non.

  9   Q.  Mais quand est-ce que ceci s'est passé et combien de personnes y avait-

 10   il dans ce convoi ?

 11   R.  Je ne sais pas vous le dire exactement. C'était, je ne sais à quelle

 12   date, mais c'est ce que j'ai vu. J'ai vu des gens qui s'en allaient. Je

 13   crois qu'ils partaient pour Travnik, mais je n'en suis pas certain.

 14   Q.  On va essayer de le déterminer. Etait-ce avant votre départ vers les

 15   thermes 3 : 52 ou après ?

 16   R.  Je ne voudrais pas vous mentir, je n'en suis pas sûr. Je ne m'en

 17   souviens pas.

 18   Q.  Alors vous avez été soigné dans une station thermale, et c'était donc

 19   le 17 juillet. Etait-ce peu après votre retour ?

 20   R.  Mais je ne m'en souviens vraiment pas.

 21   Q.  Et, en tant qu'agent de la logistique auprès de M. Kuruzovic, c'est ce

 22   que vous nous avez indiqué avoir été, étiez-vous censé coordonner ces

 23   convois ou faire quoi que ce soit, et si oui, quoi ?

 24   R.  Non, je n'avais rien à voir avec.

 25   Q.  Dans votre déclaration, vous indiquez qu'il n'y a eu aucune espèce de

 26   préparatif avant l'arrivée des journalistes des médias étrangers, c'est-à-

 27   dire avant la visite du 5 août. Et, vous dites qu'une fois parti, on n'a ni

 28   placé, ni enlevé la clôture en fil de fer, mais on a constaté que vous


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  1   n'étiez pas au camp, puisque vous êtes revenu le 17 juillet. Et, si vous y

  2   avez passé dix à 15 jours par la suite, comme vous nous l'avez dit, ça veut

  3   dire que vous étiez peut-être resté jusqu'à la fin juillet ou peut-être

  4   jusqu'au 1er août, n'est-ce pas ?

  5   R.  Je ne sais pas au juste. Toujours est-il qu'il y avait une équipe de

  6   journalistes qui était venue. Quand, je ne m'en souviens pas.

  7   Q.  Arrêtez-vous, je vous prie. La vidéo que nous avons visionnée ce matin,

  8   on y a vu une journaliste anglaise en t-shirt rose, Penny Marshall. Est-ce

  9   que vous étiez là-bas lorsque cette visite de journaliste s'est faite le 5

 10   août ?

 11   R.  Je ne sais pas, je n'y étais pas, moi. Je ne suis pas trop sûr. Il y

 12   avait une autre équipe de Genève ou des gens de la Croix-Rouge, ce genre de

 13   chose. Je pense que c'était une autre équipe.

 14   Q.  Monsieur Puhalic, je suppose que c'est là une chose dont vous vous

 15   souviendriez, parce que c'était la première fois qu'un journaliste quel

 16   qu'il soit s'est déplacé pour voir le camp. Est-ce que vous étiez au camp

 17   lorsque le premier journaliste s'est rendu là-bas ?

 18   R.  Si c'est ça les vues de la première fois, oui, je m'y trouvais.

 19   Q.  Bon. Et, vous venez de nous dire qu'il n'y avait pas eu de fil de fer

 20   de posé ni avant ni après leur départ. Mais, nous avons des éléments de

 21   preuve qui montrent qu'il y avait eu des fils de placés avant qu'ils ne

 22   viennent, et que ça a été enlevé suite à la première visite, et avant la

 23   deuxième des visites, avant que l'équipe ITN ne revienne. Je vais vous

 24   montrer deux clips vidéo très brefs.

 25   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Et à ce titre, j'aimerais qu'on nous

 26   diffuse la pièce P03785. Il s'agit d'une vidéo où l'on peut voir la

 27   première visite, et on passera le fragment allant de 19 : 50 à 20 : 06.

 28   [Diffusion de la cassette vidéo]


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  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  2   Q.  Est-ce que vous voyez la clôture ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Donc ça avait été placé là lorsque les gens de Keraterm ont été

  5   transférés là ?

  6   R.  Ça, je ne le sais pas, je n'y étais pas.

  7   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Bon. Qu'on nous montre maintenant, je

  8   vous prie, le 40168G de la liste 65 ter. C'est un autre clip vidéo.

  9   [Diffusion de la cassette vidéo]

 10   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 11   "On voit arriver des vivres, les queues sont longues, et il y a des

 12   instances serbes qui fournissent abri et assistance. Et, cette clôture a

 13   été enlevée, parce qu'elle avait choqué le monde. Et, tout ceci a été fait

 14   avant l'arrivée de la Croix-Rouge et des journalistes. Et, ces conditions

 15   avaient été améliorées, mais la Croix-Rouge n'a pas eu la possibilité de

 16   visiter d'autres camps et on supervise de près nos visites."

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 18   Q.  Alors est-ce que ceci rafraîchit votre mémoire ? Est-ce que vous vous

 19   souvenez de l'enlèvement de cette clôture ?

 20   R.  Non.

 21   Q.  Alors ce rapport dit que les gens de la Croix-Rouge internationale

 22   n'avaient pas eu l'autorisation d'accéder au camp.

 23   Ils ne sont pas entrés avant le 10 août 1992, n'est-ce pas ? Et c'est là

 24   que l'on a consigné les détenus de façon appropriée.

 25   R.  Ça, je ne peux pas vous le confirmer. Je ne le sais pas.

 26   Q.  Vous avez dit --

 27   Mme SUTHERLAND : [interprétation] En fait, je voudrais demander d'abord un

 28   versement au dossier de ce clip.


Page 43441

  1   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection tant que le commentaire

  2   n'est pas inclus.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Moi, je ne vous ai pas bien compris,

  4   Monsieur Robinson.

  5   M. ROBINSON : [interprétation] Eh bien, étant donné que cette personne

  6   n'était pas présente à ce moment-là, ça fait partie des situations où on a

  7   fait passer nous aussi un clip. Ça veut dire que l'Accusation avait demandé

  8   à ce que le commentaire du journaliste ne soit pas versé au dossier. Nous

  9   avons la même situation.

 10   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président --

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Navré, mais dans le cas du vidéoclip de

 12   la Défense, il y a eu un commentaire de versé au dossier avec une précision

 13   faite en précisant que les médias serbes avaient fait ce commentaire.

 14   M. ROBINSON : [interprétation] Eh bien, j'ai peut-être mal compris, mais

 15   j'ai cru comprendre que c'était sans ce commentaire et j'avais dit que

 16   j'étais d'accord --

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Peut-être n'ai-je pas bien compris moi

 18   non plus. Madame Sutherland.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, j'étais sur la même longueur

 20   d'onde que M. Robinson. Je pensais que le commentaire fait par ces gens --

 21   ou plutôt, les gens avec qui on a eu des entretiens, c'était versé au

 22   dossier, mais pas le commentaire fait par les auteurs du documentaire.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, il n'y avait que moi à ne pas

 24   avoir compris. Donc vous n'avez pas d'objection pour ce qui est d'un

 25   versement au dossier sans audio ?

 26   Mme SUTHERLAND : [interprétation] C'est cela, Monsieur le Juge.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P6503, Madame, Messieurs


Page 43442

  1   les Juges.

  2   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  3   Q.  Donc ce n'est qu'après cette première visite des journalistes étrangers

  4   que Kuruzovic a placé une inscription disant centre de rassemblement

  5   ouvert, et c'était en anglais et en serbo-croate au centre de la Croix-

  6   Rouge en face du camp, juste de l'autre côté de la rue, n'est-ce pas ?

  7   R.  Non, je ne le sais pas --

  8   Q.  Bon. Alors, vous ne le savez pas parce que début août -- non, excusez-

  9   moi. Vous nous avez dit que vous avez été au camp le 5 août. Alors, quand

 10   est-ce que, suite à cette journée, vous avez été rejoindre les rangs de

 11   votre unité ? Parce que vous nous avez mentionné plus tôt dans le courant

 12   de cette matinée que vous étiez revenu au camp le 17 juillet, que vous y

 13   avez passé dix à 15 jours, et puis que vous avez regagné les rangs de votre

 14   unité. On a déterminé que vous étiez en fait resté au moins jusqu'au 5

 15   août, date à laquelle cette équipe de télévision ITN était arrivée. Alors,

 16   combien de journées êtes-vous resté encore au camp après le départ de

 17   l'équipe de télévision ?

 18   R.  Je vous dis que je ne sais pas si c'était cette équipe-là de télévision

 19   ou une autre. Je ne peux pas vous l'affirmer avec certitude, cela. Ce que

 20   vous me demandez maintenant, je vais répondre que je ne sais pas exactement

 21   quand est-ce que je suis retourné. Mais cet enregistrement vidéo et le fil,

 22   je ne l'avais pas vu, donc je ne peux pas en parler.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux vous aider ? En page 50,

 24   ligne 9, le témoin a dit que jusqu'à cette époque-là, il se trouvait

 25   probablement là-bas. Je ne vais pas donner de date pour ne pas souffler

 26   quoi que ce soit au témoin.

 27   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci, Monsieur Karadzic. C'est

 28   exactement le point auquel je veux en arriver. Le témoin nous a dit qu'il


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  1   est rentré au camp le 17 juillet. Il a dit qu'il était resté là-bas dix ou

  2   15 jours, et d'après mes calculs, ça se situe vers le 1er août, puis il a

  3   dit avoir rejoint les rangs de son unité. Or, il a tout à l'heure indiqué

  4   dans son témoignage qu'il était présent lorsqu'un groupe de gens des médias

  5   était venu au camp.

  6   Q.  Par conséquent, Monsieur Puhalic, ce que j'essaie de vous dire pour

  7   vous aider à vous rappeler si cela avait été une première visite au camp,

  8   vous nous avez dit que vous avez été présent au camp à l'occasion de cette

  9   première visite. Cela signifie que vous étiez encore au camp le 5 août. Et

 10   à ce titre, je pose ma question : combien de temps êtes-vous encore resté

 11   au camp après cette visite ? Trois jours, trois semaines ? Parce que le

 12   camp n'a pas été fermé jusqu'à la fin octobre -- novembre ?

 13   R.  Non. Je vous redis que je ne sais pas de quelle équipe de télévision il

 14   s'agissait. Je sais qu'une dame de Genève était venue et elle a interviewé

 15   des gens. On a probablement pu me voir sur certaines images. Elle s'est

 16   entretenue à l'intérieur avec des civils, avec le personnel et autres. Et

 17   était-ce après -- mais pour autant que je m'en souvienne, je crois que

 18   c'était avant le mois d'août, ou peut-être était-ce encore le mois de

 19   juillet. Mais je vous dis, je ne m'en souviens pas. Et dans ce contexte,

 20   combien de temps suis-je resté par la suite, deux ou trois jours encore, à

 21   Trnopolje, parce qu'on m'avait dit que je devais regagner les rangs de mon

 22   unité. Ça, je ne m'en souviens plus.

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que mon

 24   temps est près de s'écouler. Et étant donné les trois pages

 25   complémentaires, voire les trois [comme interprété] paragraphes

 26   complémentaires de cette déclaration, j'avais l'intention de demander plus

 27   de temps. J'ai réussi à couvrir un certain nombre de sujets, mais il en

 28   reste encore deux que j'aimerais parcourir avec le témoin, si vous me le


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  1   permettez.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] De combien de temps pensez-vous encore

  3   avoir besoin ?

  4   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je crois pouvoir le faire en dix à 15

  5   minutes. Mais comme vous le savez, je ne suis pas des meilleurs pour ce qui

  6   est des estimations de temps.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Continuez donc, Madame Sutherland.

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  9   Q.  Monsieur Puhalic, au paragraphe 13, vous nous avez dit que bon nombre

 10   de personnes voulaient quitter la municipalité de Prijedor en raison de la

 11   guerre, pour sauver leurs vies, et probablement la plupart de ces gens-là

 12   n'avaient pas souhaité faire la guerre. Mais vous serez d'accord avec moi

 13   pour dire que compte tenu de tout ce qui s'est passé là-bas et de tout ce

 14   qui est arrivé aux biens des non-Serbes et aux membres de leurs familles,

 15   vous serez d'accord avec moi pour dire qu'ils avaient peur pour leurs vies

 16   ?

 17   R.  Bien sûr que oui. Nous aussi, nous avions peur pour nos vies, nous, les

 18   gens de la ville. Moi, j'avais peur pour ma vie, la vie de ma famille et de

 19   mes enfants, vous l'avez bien dit --

 20   Q.  Est-ce qu'un grand nombre d'entre eux --

 21   R.  [aucune interprétation]

 22   Q.  Vous pouvez continuer.

 23   R.  J'ai voulu mentionner justement ce monsieur qui a fait l'objet d'une

 24   question tout à l'heure. Vous avez posé des questions au sujet de son fils,

 25   Ajdin. Donc, ce monsieur --

 26   Q.  Monsieur Puhalic, je suis passée à un autre sujet par rapport à M.

 27   Zenkic et sa famille. Vous avez répondu à ma question. Vous m'avez dit

 28   qu'ils avaient peur pour leurs vies et que vous aussi, vous aviez peur pour


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  1   votre propre vie.

  2   R.  [aucune interprétation]

  3   Q.  Mais vous savez qu'un grand nombre d'entre eux n'avaient pas de maison

  4   pour y retourner, parce que la plupart des maisons étaient brûlées ou

  5   détruites et l'ambiance était si oppressante que la plupart des gens

  6   n'avaient d'autre choix que de partir. Etes-vous d'accord avec moi ?

  7   R.  C'est vrai qu'ils n'avaient pas où revenir.

  8   Q.  Vers la fin du mois de septembre, début du mois d'octobre, à peu près 1

  9   500 personnes ont quitté le camp de Trnopolje à bord des autocars en

 10   direction de Karlovac, en Croatie. Vous souvenez-vous de cela ?

 11   R.  Non.

 12   Q.  Savez-vous qu'il restait encore à peu près 3 000 personnes à Trnopolje

 13   au mois d'octobre et au mois de novembre ?

 14   R.  Non.

 15   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je vais demander le document 65 ter

 16   25609. Ici, nous avons un rapport de la Croix-Rouge serbe du 30 septembre

 17   1992 pour la période entre le 5 mai et le 30 septembre 1992.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-il possible de voir à nouveau le

 19   système de prétoire électronique sur l'écran ?

 20   Mme SUTHERLAND : [interprétation] C'est la page 9 qui m'intéresse.

 21   Q.  On peut lire, c'est au milieu de la page en anglais, 23 000 personnes

 22   ont été hébergées dans le centre de réception de Trnopolje, nous en avons

 23   envoyées 1 561 dans le centre de réception de Karlovac avec l'aide de la

 24   Croix-Rouge internationale. Le 29 septembre 1992, un convoi a été envoyé à

 25   Karlovac en présence des observateurs européens. Le problème de Trnopolje

 26   devient de plus en plus compliqué avec le début de l'automne de sorte que

 27   tous ceux qui sont restés sans foyer arrivent en grands nombres. A présent,

 28   il y a plus de 


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  1   3 000 personnes là-bas. Et ensuite, un peu plus bas, on peut lire : il y a

  2   une grande pression exercée pour que les citoyens de nationalité musulmane

  3   ou croate quittent la Région autonome de Krajina. Donc cela nous montre

  4   comment les choses se sont déroulées, n'est-ce pas ?

  5   R.  Je suis dans une certaine mesure d'accord avec vous, et dans une

  6   certaine mesure, non.

  7   Q.  Vous êtes d'accord avec quoi ?

  8   R.  Je suis d'accord pour dire qu'il y avait des familles qui n'avaient pas

  9   où retourner et qui ont demandé à partir pour leur propre sécurité. Et je

 10   ne suis pas d'accord pour dire que la population musulmane qui habitait

 11   dans les maisons dans la ville, il y en avait qui partaient, quittaient

 12   leurs maisons parce qu'il n'y avait pas de travail. Donc ils partaient.

 13   Q.  Etes-vous d'accord pour dire qu'il y a eu à peu près 23 000 personnes

 14   qui sont passées par le centre de réception ? Est-ce que cela correspond

 15   aux chiffres dont vous vous rappelez ?

 16   R.  Non, je ne saurais pas répondre à la question, pas avec exactitude.

 17   Q.  Par rapport à la logistique concernant la nourriture, vous saviez à peu

 18   près quel était le nombre de personnes dans le camp ? En tout cas,

 19   pourriez-vous nous dire il y avait combien de personnes dans le camp à la

 20   fois, à peu près ?

 21   R.  Pendant que j'y étais, entre 2 et 3 000 personnes à la fois.

 22   Q.  Et vous êtes d'accord, parce qu'on en a parlé tout à l'heure, qu'il y a

 23   eu des pressions d'exercées sur les citoyens musulmans et croates pour

 24   qu'ils quittent la région ?

 25   R.  Je ne sais pas. Je ne dirais pas vraiment des pressions. Mais il est

 26   vrai que ceux qui ne pouvaient pas survivre, l'hiver s'approchait, et il

 27   fallait continuer à vivre.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Là, il s'agit d'une question qu'il ne faudrait


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  1   pas poser dans les questions supplémentaires. Il s'agit là d'une

  2   interprétation de fait quand on dit qu'on a exercé des pressions sur les

  3   citoyens. Je voudrais qu'on explique exactement de quoi il s'agit. Qui a

  4   exercé des pressions ?

  5   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je vais passer à autre chose.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais on n'en a pas parlé dans les

  7   questions précédentes ?

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] On va continuer.

 10   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je vais demander que ce document soit

 11   versé au dossier.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Robinson.

 13   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons verser ce document au

 15   dossier.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] La pièce P6504.

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 18   Q.  Le camp de Trnopolje a fait l'objet d'une inspection de la Mission de

 19   l'OSCE vers la fin du mois d'août ou bien début du mois de septembre 1992.

 20   Un rapporteur, John Thompson, du Royaume-Uni, était à la tête de la mission

 21   et il a fait un rapport, et je vais vous le lire. C'est un rapport qui a

 22   été fait entre le 29 août et le 4 septembre 1992.

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je vais demander à cet effet que l'on

 24   examine le document 65 ter 05616C, s'il vous plaît.

 25   La page 25 du rapport, s'il vous plaît, et je pense que là nous avons

 26   une page de garde et ensuite nous avons les pages. Et les pages qui

 27   m'intéressent, ce sont les pages 25 et 26.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] J'ai l'impression que nous ne l'avons pas


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  1   parmi les pièces dans le système du prétoire électronique.

  2   M. ROBINSON : [interprétation] Mais nous avons, en revanche, le document

  3   05616 sans lettres qui accompagnent le document.

  4   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, parce qu'ici nous avons juste un

  5   extrait de ce document.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-il possible de voir ce document-là,

  7   alors, 5616 ?

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, effectivement, on pourrait faire

  9   cela et examiner justement la page 25 de ce document. C'est bien la page --

 10    M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, oui, sur la page 25.

 11   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Donc il faut que l'on lise 25 en bas de

 12   la page ? Est-il possible de voir la page suivante, voilà, c'est bien cela,

 13   mémorandum concernant Trnopolje.

 14   Q.  Donc ici, au niveau du deuxième paragraphe, on peut voir, enfin, de la

 15   deuxième phrase dit, donc c'est la conclusion à laquelle ils sont arrivés :

 16   Après avoir visité Trnopolje, ces gens partent terrorisés, et la mission de

 17   l'OSCE pensait qu'ils ont de bonnes raisons pour avoir peur.

 18   Et ensuite la dernière phrase : Quelle que ce soit leurs espoirs

 19   longs [inaudible], personne ne souhaite à présent de revenir dans leur

 20   foyer dans la Bosnie occidentale, car l'administration du cru ne veut pas

 21   ou ne souhaite pas, ou ne peut pas garantir leur sécurité.

 22   Est-ce que vous êtes d'accord avec cela ?

 23   R.  Ecoutez, je ne vois absolument pas de quoi il s'agit. Qui doit

 24   retourner en Bosnie occidentale ?

 25   Q.  C'est un rapport qui a été fait par la mission, par une équipe de

 26   l'OSCE. Et, au deuxième paragraphe, vous pouvez lire qu'un grand nombre de

 27   détenus dans le centre, dont un grand nombre sont Musulmans, presque tous,

 28   se trouvent donc dans le camp, et sont au nombre de 2 000. Et donc ils


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  1   disent que ces gens sont terrifiés, et qu'ils ont de bonnes raisons pour

  2   avoir peur. Et, je dis que ce document correspond par rapport à ce que nous

  3   avons établi tout à l'heure, à savoir, vous, vous étiez d'accord avec moi

  4   pour dire que la population non-serbe vivait dans la peur. Parce qu'ils

  5   n'avaient pas de choix, ils n'avaient pas de choix à cause de l'ambiance

  6   qui régnait à l'époque dans la région, que d'avoir peur. Et, cette ambiance

  7   était créée par quelqu'un. C'est exact, n'est-ce pas ?

  8   R.  Croyez-moi que si j'avais le choix, je serai parti quelque part

  9   moi aussi pour survivre. Je me serai abrité quelque part, et sans doute

 10   qu'ils ont fait exactement la même chose.

 11   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions,

 12   Monsieur le Président.

 13   Je voudrais tout de même demander le versement de ce document.

 14   M. ROBINSON : [interprétation] Objection, Monsieur le Président, vu

 15   qu'il s'agit de la période du 29 août, à l'époque, le témoin n'était pas

 16   présent, et il n'était pas en mesure de confirmer ce qui est écrit dans le

 17   document non plus.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Moi,

 20   je lui ai demandé si cela correspondait à la situation telle qu'elle

 21   prévalait à l'époque, au moment où il était à Trnopolje.

 22   Q.  Donc Monsieur Puhalic, quand vous étiez dans le camp de [inaudible], et

 23   tout à l'heure vous étiez d'accord avec moi pour dire que la population

 24   non-serbe vivait dans la peur, car il y avait une ambiance de coercition,

 25   vous n'avez pas de maison où aller. Et, ce document correspond à ce que

 26   nous avons dit, n'est-ce pas, et je dois dire que vous n'avez pas vraiment

 27   répondu à la question que je vous ai posée. Parce que vous avez dit que

 28   vous, vous serez parti quelque part si vous aviez le choix de partir pour


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  1   survivre justement, et c'est ce qu'ils ont dit, ce qu'ils ont fait eux

  2   aussi, n'est-ce pas, c'est exact, ils ont fait cela ?

  3   R.  Eh bien, si j'avais où aller, je serai parti moi aussi dans les

  4   circonstances, telles qu'elles étaient. Parce que nous, nous avions peur

  5   nous aussi, c'était la guerre.

  6   [La Chambre de première instance se concerte]

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons verser au dossier la page de

  8   garde de cette page-là, la page 25.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] P6505.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] On va continuer demain. Vous êtes

 11   d'accord Monsieur Karadzic ?

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je suis d'accord, Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Puhalic, nous allons poursuivre

 14   nos travaux demain matin. Je voudrais vous demander de ne parler avec qui

 15   que ce soit de votre déposition.

 16   Oui, Monsieur Tieger.

 17   M. TIEGER : [interprétation] Très rapidement, Monsieur le Président. Les

 18   Juges de la Chambre nous ont demandé de télécharger une nouvelle traduction

 19   pour la pièce P6455. Vous nous avez demandé de le faire au plus tard

 20   aujourd'hui, eh bien, c'est chose faite à présent.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La séance est levée.

 22   --- L'audience est levée à 14 heures 58 et reprendra le jeudi, 14 novembre

 23   2013, à 9 heures 00.

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