LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE

Composée comme suit :
M. le Juge Richard May, Président
M. le Juge Mohamed Bennouna
M. le Juge Patrick Robinson

Assistée de :
Mme Dorothee de Sampayo Garrido-Nijgh, Greffier

Décision rendue le :
3 septembre 1999

LE PROCUREUR

C/

Dario KORDIC
Mario CERKEZ

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DÉCISION RELATIVE À LA RÉVOCATION PAR LE GREFFIER DE LA COMMISSION D’OFFICE D’UN CONSEIL DE LA DÉFENSE

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Le Bureau du Procureur :

M. Geoffrey Nice
Mme Susan Somers
M. Patrick Lopez-Terres
M. Kenneth Scott

Les Conseils de la Défense :

M. Mitko Naumovski, , M. Turner Smith Jr., Mme Ksenija Turkovic, M. Rober A. Stein, M. Stephen M. Sayers, M. David F. Geneson et M. Leo Andreis pour Dario Kordic
M. Bozadir Kovacic et M. Goran Mikulicic, pour Mario Cerkez

 

1. Le Greffier a révoqué la commission du Conseil de la Défense pour l’accusé Mario Cerkez par une décision déposée le 10 aout 1999, pour la raison qu’il a obtenu par les médias des informations révélant que l’accusé recevait un appui financier important pour défrayer sa défense, de la part d’un groupe de soutien croate appelé « Hrvatski uznik u Hagu », organisant des ventes aux enchères de peintures et d’œuvres d’art qui auraient rapporté 4 300 000 deutsche marks. L’accusé était par conséquent capable de financer sa propre représentation aux fins de l’article 19 A) de la Directive relative à la commission d’office d’un conseil de la défense (« la Directive »).

2. L’accusé a déposé devant la Chambre de première instance une exception préjudicielle contre cette révocation en application de l’article 19 D) de la Directive, pour les raisons suivantes :

3. La Chambre de première instance fait remarquer que dans une décision datée du 3 septembre 1999 relative à un sujet semblable dans l’affaire Kupreskic et consorts, la Chambre de première instance II du Tribunal international a conclu qu’une Chambre de première instance a « compétence pour entendre les recours prévus aux articles 19 D) et 13 C) de la Directive » car « si, après une comparution initiale, la Chambre de première instance est compétente pour statuer sur la commission d’un Conseil de la Défense par voie d’exception préjudicielle, elle a la même compétence aux étapes ultérieures de la procédure ».

4. La Chambre de première instance constate que les éléments de preuve étaient insuffisants pour permettre au Greffier de priver l’accusé du statut d’indigent de l’accusé et de révoquer la commission du Conseil de la Défense en cours d’instance. Comme la Chambre de première instance l’a fait remarquer dans Kupreskic et consorts, « les informations des médias peuvent être utilisées comme premier pas pour entreprendre une enquête afin de vérifier la véracité des faits rapportés. Les journaux et autres médias sont connus pour être rarement des sources d’informations fiables. Leurs informations, non corroborées par d’autres pièces, ne peuvent constituer en elles-mêmes des éléments de preuve suffisants devant une cour ». La présente Chambre de première instance estime que si les informations diffusées dans les médias ont mis en doute les revenus de l’accusé, une enquête aurait dû être menée avant de parvenir à quelque conclusion que ce soit.

 

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE

PAR CES MOTIFS

ANNULE les décisions du Greffier datées du 10 août 1999 en ce qui concerne l’accusé Mario Cerkez, et

ORDONNE la continuation sans interruption de la commission du Conseil de la Défense en ce qui concerne l’accusé Mario Cerkez.

 

Fait en anglais et en français, le texte en anglais faisant foi.

Le Président de la Chambre de première instance
/signé/
Richard May

Fait le 3 septembre 1999
La Haye (Pays-Bas)

[Sceau du Tribunal]