LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE

Composée comme suit :
M. le Juge Richard May, Président
M. le Juge Mohamed Bennouna
M. le Juge Patrick Robinson

Assistée de :
Mme Dorothee de Sampayo Garrido-Nijgh, Greffier

Ordonnance rendue le :
4 août 2000

LE PROCUREUR

C/

DARIO KORDIC
MARIO CERKEZ

EX PARTE

PARTIELLEMENT CONFIDENTIEL

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ORDONNANCE AUX FINS DE PRODUCTION
DE DOCUMENTS PAR LA MISSION DE CONTRÔLE DE LA
COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE ET SES ÉTATS MEMBRES

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Le Conseil de la Défense :

M. Mitko Naumovski et M. Stephen Sayers, pour Dario Kordic
M. Bozidar Kovacic et M. Goran Mikulicic, pour Mario Cerkez

Mission de contrôle de la Communauté européenne :

M. Tony McCourt

La Présidence du Conseil de l’Union européenne (la République française)

La Commission de l’Union européenne/Communauté européenne

Les États membres de la Communauté européenne :

Allemagne, Belgique, Danemark, Espagne, France, Grèce, Irlande, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, Portugal et Royaume-Uni.

 

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (le «Tribunal international»),

ATTENDU d’une part, qu’en application de l’article 70 du Règlement de procédure et de preuve du Tribunal international (le «Règlement»), la Mission de contrôle de la Communauté européenne (l’«ECMM» ou la «MCCE») a consenti à ce que le Bureau du Procureur (l’«Accusation») utilise un certain nombre de ses documents, qui ont été soumis comme éléments de preuve en l’espèce, et d’autre part, qu’un certain nombre d’anciens observateurs ou représentants de l’«ECMM» ont témoigné devant la Chambre de première instance lors de la présentation des moyens de preuve à charge,

VU la Décision confidentielle et ex parte relative à la requête ex parte aux fins de la délivrance d’une ordonnance adressée à la Mission de contrôle de la Communauté européenne, rendue par la Chambre de première instance le 3 mai 2000 (la «Décision du 3 mai»), aux termes de laquelle il est demandé à la Présidence du Conseil de l’Union européenne et à la Commission de la Communauté européenne/Union européenne de communiquer à la Défense les documents et pièces énumérés dans l’annexe confidentielle de la Décision du 3 mai,

VU les assertions faites par le Conseil de l’accusé Dario Kordic au cours de l’audience du 3 août 2000 consacrée à une «Requête conjointe [ de la Défense] aux fins d’exclure des pièces à conviction et des témoignages de la MCCE», selon lesquelles aucun document n’avait jusqu’alors été produit en application de la Décision du 3 mai,

VU le Mémorandum d’accord relatif aux activités de surveillance en Bosnie-Herzégovine (le «Mémorandum») auquel sont parvenus le 1er octobre 1991 les douze États alors membres de la Communauté et la Commission européennes d’une part et les autorités fédérales de la RSFY et la République de Bosnie-Herzégovine d’autre part,

ATTENDU que, en application de l’article VII (chaîne de responsabilité) du Mémorandum, l’«ECMM» agit sous la responsabilité de son «Chef [ …g qui est ressortissant de l’État membre de la Communauté européenne occupant la Présidence du Conseil de cette dernière»,

ATTENDU que la République française est le membre qui occupe actuellement la Présidence du Conseil de l’Union européenne,

ATTENDU que l’article 21 du Statut du Tribunal international (le «Statut») prévoit certaines garanties minimales au bénéfice de l’accusé, notamment le droit à un procès équitable,

ATTENDU d’une part, que la Chambre de première instance devrait user de tous les moyens que le Statut met à sa disposition pour concourir à la promotion de l’équité du procès et, d’autre part, que la Chambre de première instance est d’avis que l’accusé devrait avoir accès aux documents spécifiés, dans les mêmes conditions que l’Accusation,

ATTENDU que l’article 29 du Statut exige que tous les États répondent sans retard à toute demande d’assistance ou à toute ordonnance émanant d’une Chambre de première instance du Tribunal international,

ATTENDU que les requêtes aux fins d’ordonnances adressées à un État en vue de la production de documents ou d’informations en application de l’article 54 du Règlement sont maintenant régies par l’article 54 bis de ce Règlement,

ATTENDU que l’article 54 bis E) du Règlement prévoit que si, au vu des circonstances, une Chambre de première instance a de bonnes raisons de le faire, elle peut délivrer une ordonnance en vertu de l’article 54 bis du Règlement sans que l’État soit notifié ou ait la possibilité d’être entendu,

ATTENDU ÉGALEMENT qu’il n’y a pas de raison que la Décision du 3 mai demeure confidentielle, exception faite de l’annexe qui est jointe,

EN APPLICATION de l’article 29 du Statut du Tribunal International et des articles 54, 54 bis et 81 du Règlement,

ORDONNE ce qui suit :

1) la confidentialité de la Décision du 3 mai est levée et une copie de cette décision est jointe à la présente ordonnance,

2) l’annexe de la Décision du 3 mai demeure confidentielle ;

3) les États membres de la Communauté européenne au moment de l’entrée en vigueur du Mémorandum, à savoir l’Allemagne, la Belgique, le Danemark, l’Espagne, la France, la Grèce, l’Irlande, l’Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas, le Portugal et le Royaume-Uni, ainsi que la Présidence du Conseil de l’Union européenne et la Commission de l’Union européenne/Communauté européenne communiqueront à la Défense, le 30 septembre 2000 au plus tard, les documents et les pièces énumérés dans l’annexe confidentielle ci-jointe, et

DEMANDE au Greffier du Tribunal international de prendre toutes les mesures nécessaires pour notifier, en application de l’article 54 bis E) du Règlement, la présente Ordonnance aux États ou aux organes concernés.

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

 

Le Président de la Chambre de première instance
(signé)
M. le Juge Richard May

Fait le 4 août 2000
La Haye (Pays-Bas)

[Sceau du Tribunal]