LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE

Composée comme suit :
M. le Juge Richard May, Président
M. le Juge Mohamed Bennouna
M. le Juge Patrick Lipton Robinson

Assistée de :
Mme Dorothee de Sampayo Garrido-Nijgh, Greffier

Ordonnance rendue le :
14 septembre 1999

LE PROCUREUR

C/

Dario KORDIC
Mario CERKEZ

 

CONFIDENTIEL

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ORDONNANCE RELATIVE À LA REQUÊTE DE L’ACCUSÉ MARIO CERKEZ AUX FINS DE MISE EN LIBERTÉ PROVISOIRE

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Le Bureau du Procureur :

M. Geoffrey Nice
Mme Susan Somers
M. Patrick Lopez-Terres
M. Kenneth Scott

Les Conseils de la Défense :

M. Mitko Naumovski, M. Turner T. Smith Jr., Mme Ksenija Turkovic, M. Rober A. Stein, M. Stephen M. Sayers, M. David Geneson et M. Leo Andreis pour Dario Kordic
Bozidar Kovacic et M. Goran Mikulicic, pour Mario Cerkez

 

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE III du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (« le Tribunal international »),

VU la Requête de remise en liberté provisoire déposée le 2 septembre 1999 (« la Requête ») par l’accusé Mario Cerkez dans le but de rendre visite à son père qui se trouve dans un état critique à l’hôpital de Split, en Croatie,

VU le certificat de l’hôpital de Split délivré le 2 septembre 1999 confirmant que la vie du père de l’accusé est en danger et que le pronostic est incertain,

APRÈS AVOIR INFORMÉ les représentants des Pays-Bas et obtenu leur aval,

VU la réponse du Procureur déposée le 6 septembre 1999 qui soutient que l’accusé n’a pas établi l’existence des circonstances exceptionnelles visées à l’article 65 du Règlement de procédure et de preuve (le « Règlement »),

VU que, dans une lettre du 6 septembre 1999 adressée au Greffier, l’ambassade de la République de Croatie aux Pays-Bas garantit, au nom de la Croatie, que l’accusé Mario Cerkez « au cas à la Chambre de première instance faisait droit à sa demande de mise en liberté provisoire, sera placé sous le contrôle des autorités compétentes de la République de Croatie. Il sera immédiatement placé en détention s’il essaye de quitter son lieu de résidence ou s’il viole de quelque autre façon les termes et conditions de sa mise en liberté provisoire énoncés par la Chambre de première instance » ; la République de Croatie a accepté, au paragraphe 5 de ladite lettre, de se plier à toutes les mesures que la Chambre de première instance pourrait décider,

ATTENDU, EN OUTRE, que le 14 septembre 1999, la République de Croatie a accepté de garantir le respect des conditions pour la mise en liberté provisoire de l’accusé décrites à l’Annexe A,

ATTENDU QUE, dans la Requête, le Conseil de l’accusé donne « des garanties que, s’il est libéré, M. Cerkez sera remis en détention dans un délai laissé à l’appréciation de la Chambre de première instance »,

ATTENDU QUE , le 14 septembre 1999, l’accusé Mario Cerkez s’est engagé et a accepté de se plier pleinement aux conditions fixées pour sa mise en liberté provisoire, exposées à l’Annexe B,

VU les arguments des parties et du représentant de la République de la Croatie entendus le 13 septembre 1999,

ATTENDU QUE l’accusé Mario Cerkez s’est livré volontairement au Tribunal international le 10 octobre 1997,

ATTENDU QUE la conjugaison des motifs susmentionnés et leur effet cumulé, dans les circonstances particulières de cette affaire, suffisent pour constituer des circonstances exceptionnelles justifiant la mise en liberté provisoire au moins pendant une période limitée, et que les aspects humanitaires vont dans le sens d’une acceptation de la requête,

ATTENDU, EN OUTRE , QUE à la lumière de l’engagement de Mario Cerkez, la Chambre de premire instance est convaincue qu’il honorera sa parole et qu’il se représentera pour son procès ;

ATTENDU ÉGALEMENT que la Chambre de première instance considère que l’accusé n’est pas susceptible de représenter un danger pour les victimes, les témoins ou toute autre personne ; la Chambre de première instance n’a pas connaissance de témoins de l’Accusation vivant à Split,

POUR CES MOTIFS,

FAIT DROIT À LA REQUÊTE ET ORDONNE :

1) Avant sa mise en liberté provisoire, l’accusé devra être emmené à l’aéroport de Schipol le vendredi 17 septembre 1999 par les autorités néerlandaises à qui l’on demande, par la présente, d’assurer son transport à destination et en provenance de l’aéroport de Schipol.

2) L’accusé sera provisoirement placé sous la garde d’un agent officiel croate à l’aéroport de Schipol qui l’accompagnera pendant toute la durée du vol.

3) La période de la mise en liberté provisoire débutera le vendredi 17 septembre 1999, dès que l’accusé sera confié à la garde de l’agent officiel croate désigné, et prendra fin dès qu’il sera remis à la garde des autorités néerlandaises, le lundi 20 septembre 1999 à 14h00 au plus tard, sous réserve uniquement de retard de son vol.

4) Durant son vol de retour, l’accusé sera de nouveau accompagné par un agent officiel croate désigné qui le remettra aux mains des autorités néerlandaises à l’aéroport de Schipol. Ces dernières le ramèneront au quartier pénitentiaire des Nations Unies.

5) L’accusé devra observer les conditions suivantes, dont les autorités croates garantissent l’observation :

  1. L’accusé ne quittera pas la municipalité de Split ;
  2. L’accusé restera en permanence, 24 heures sur 24, sous la surveillance de la police croate ;
  3. L’accusé livrera son passeport à la police croate à Split ;
  4. L’accusé se rendra une fois par jour à la police locale qui tiendra un registre et qui remettra un rapport écrit au Tribunal international confirmant qu’il s’y est rendu tous les jours ;
  5. L’accusé n’aura aucun contact, quel qu’il soit et ne portera atteinte à quiconque ayant témoigné, ou étant susceptible de témoigner à son procès ;
  6. L’accusé n’entrera en aucun cas en contact avec des personnes autres que les membres de sa famille et ses amis proches ;
  7. L’accusé ne parlera de son procès à personne ;
  8. L’accusé accepte que son procès continue à se dérouler en son absence ;
  9. L’accusé prendra à sa charge tous les frais de transport aller-retour entre La Haye et Split;
  10. L’accusé sera immédiatement placé en détention s’il essaye de quitter son lieu de résidence ou s’il viole de quelque autre façon les termes et conditions de sa mise en liberté provisoire énoncés par la Chambre de première instance.

6) La Chambre de première instance enjoint les autorités de tous les États susceptibles d’être traversés par l’accusé :

  1. de ne jamais le laisser sans surveillance pendant ses périodes de transit à l’aéroport et
  2. en cas de tentative d’évasion, de l’arrêter et de l’écrouer dans l’attente de son retour au quartier pénitentiaire des Nations Unies.

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le Juge Président
______(signé)____
Richard May

Fait le 14 septembre 1999
La Haye (Pays-Bas)

Le sceau du Tribunal