Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi 28 janvier 2000

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés entrent dans la Cour]

  4   --- L’audience débute à 9 h 05

  5   LA GREFFIÈRE (interprétation) :  Il s’agit de l’affaire IT-95-14/2-T,

  6   Le Procureur contre Dario Kordic et Mario Cerkez.

  7   Me NICE (interprétation) :  Avant de parler de la

  8   question du témoin expert, il reste une question

  9   d’intendance que je dois aborder.  Il s’agit du témoin dont

 10   la comparution devait être forcée par voie de subpoena pour

 11   cette semaine.  Vous avez demandé le matériel écrit et j’ai

 12   vérifié auprès du greffe et voici ce qu’il en est.

 13   Le rapport initial a été déposé et la lettre importante concernant ce

 14   témoin en date du 31 décembre 1999 est déjà déposée auprès du greffe. 

 15   Vous en recevrez copie aujourd’hui et je n’ai rien d’autre en guise de

 16   matériel que ce qu’il y a dans cette lettre et dans ce rapport

 17   initial et je vous demanderais d’agir à partir de ces documents.

 18   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Bien, je crois

 19   que Madame la Greffière en a pris bonne note.

 20   Me NICE (interprétation) :  S’agissant du témoin

 21   expert, Madame Somers va vous parler des détails qui vont

 22   peut-être surgir mais en guise d’introduction générale, je

 23   peux vous dire ceci.  Ce témoin avait été prévu en tant que

 24   témoin dans la première liste et le résumé a été communiqué

 25   à la Défense et au moment de la communication du rapport,


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  1   la Défense a simplement dit qu’elle voulait le contre-interroger.

  2   Même si nous avons répondu au plan de l’argumentaire de la Défense par

  3   simple courtoisie, nous pensons que c’est prématuré parce que c’est

  4   manifestement un expert que cet homme qui est tout à fait estimé et

  5   respecté.  Il avait écrit un livre sur le nettoyage ethnique en 1995. 

  6   Je pense qu’il est bien trop tôt pour parler de son degré de savoir et

  7   d’expérience parce qu’en général, normalement, il comparaît et il est

  8   contre-interrogé par l’autre partie.

  9   La Chambre remarquera que, de toute façon, l’interrogatoire principal

 10   ne durera pas très longtemps puisqu’il suffira d’adopter le rapport

 11   qu’il va produire en y ajoutant quelques détails.  Voilà ce que je

 12   dirais en guise d’introduction.  Me Somers est à votre disposition

 13   pour toute question supplémentaire.

 14   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Ce n’est pas

 15   une question de détail mais bien de principe.  J’aimerais

 16   avoir votre assistance sur ce point, en mon nom personnel,

 17   bien sûr.  C’est en ce nom personnel que je m’exprime ici.

 18   Je veux savoir la mesure dans laquelle ceux qui

 19   viennent d’une tradition de common law sur la question ou

 20   la règle de la question ultime, nous voulons savoir dans

 21   quelle mesure ce témoin va tirer peut-être des conclusions

 22   qu’il revient à nous, Juges, en fait, de tirer.

 23   Je pense, notamment, aux conclusions dont il est fait état simplement à

 24   titre d’exemple et là, j’examine plus précisément la version de la

 25   Défense, celle qui est en couleur.  Ce sera peut-être plus simple pour


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  1   suivre l’argumentaire de chacune des parties.  Je ne sais pas si

  2   vous l’avez à la page 19.

  3   Est-ce que vous avez ce passage ?

  4   Me NICE (interprétation) :  Oui.

  5   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  « Au vu des

  6   éléments de preuve utilisés ci-dessous, on peut conclure

  7   que Kordic était un responsable officiel suprême du HVO et

  8   du HDZ en Bosnie centrale et qu’il a fait preuve d’autorité

  9   et de pouvoir dans les domaines traditionnels civils et

 10   militaires, de l’exercice du pouvoir, de la responsabilité,

 11   et cette alliance de qualité lui permettait de contrôler et

 12   de maîtriser des événements importants.  On peut également

 13   conclure qu’il a essayé de mettre en œuvre des politiques

 14   qui avaient déjà été prévues et l’on peut conclure qu’il a

 15   poussé à une politique de confrontation avec la communauté

 16   bosniaque. »

 17   Je poursuis : « Conformément à ses déclarations,

 18   des politiques avaient été préparées ainsi que des ordres

 19   destinés à ses subordonnés.  Étant donné l’ampleur de ses

 20   pouvoirs, les conclusions raisonnables qu’on peut tirer à

 21   partir des éléments de preuve, c’était qu’il était au

 22   courant de telles activités.  Le degré de sa participation

 23   et la portée de ses responsabilités en tant que supérieur

 24   hiérarchique montrent qu’il y avait des éléments armés

 25   importants qui intervenaient dans ces actions. »  Fin de


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  1   citation.

  2   Est-ce que ce n’est pas important de déterminer

  3   cela ?

  4   Me NICE (interprétation) :  Ces conclusions sont,

  5   effectivement, des questions qu’il faut soumettre à

  6   l’examen des Juges mais, en fait, ce sont des conclusions

  7   globales puisque le reste du rapport de l’expert

  8   aboutissant à ces conclusions d’expert est souvent étayé

  9   par des notes en bas de page et je crois que c’est l’une

 10   des caractéristiques de son rapport.  C’est qu’il y a une

 11   première section assez courte qui sont ici essentiellement

 12   des conclusions, des questions de comportement général ou

 13   répété et tout ceci est soutenu par ces notes en bas de

 14   page.  Il arrive, enfin, à la fin de son rapport à la

 15   conclusion tout à fait générale. 

 16   Quant à la question de savoir aujourd’hui s’il est

 17   possible et autorisé d’avoir un expert qui va fournir un

 18   avis personnel sur les questions les plus globales, c’est

 19   une question que nous avons évoquée dans le plan que nous

 20   vous avons soumis, vous vous en souviendrez, et nous

 21   estimons qu’il est, bien sûr, autorisé, bien sûr, sous

 22   réserve de certaines qualifications dans certains systèmes

 23   nationaux.

 24   C’est ce qu’on dit au paragraphe 9 : « Nous sommes

 25   autorisés à avoir des experts qui vous offrent des avis,


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  1   des opinions sur les questions déterminantes. »  Dans

  2   quelle mesure les Juges sont-ils influencés par cela, bien

  3   sûr, c’est une question qu’il reste à trancher par les

  4   Juges.

  5   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  C’est ce que

  6   vous dites, Me Nice, mais je doute que ce soit

  7   effectivement le cas.  Le fait que de telles choses se

  8   produisent est en général un peu négligé mais je ne suis

  9   pas du tout convaincu que ce soit là la règle ou l’attitude

 10   ordinaire.

 11   Autre chose :  Est-ce que ceci nous aide en quoi

 12   que ce soit parce que ce sont des questions qu’il nous

 13   revient de trancher parce qu’après tout, ici, vous faites

 14   un résumé de votre thèse de poursuite ?

 15   Me NICE (interprétation) :  Le tout dernier

 16   paragraphe contient des parties qui représentent nos

 17   stratégies et nos tactiques de base mais examinez les

 18   conclusions à l’appui de ces arguments où vous trouverez

 19   des arguments de nature à étayer cette thèse et ce sont ces

 20   questions de principe qui ne sont pas nécessairement de

 21   l’expérience de la Chambre et pour lesquelles il est

 22   important d’avoir l’avis des experts parce

 23   qu’effectivement, l’expert fait le tour des documents,

 24   procède à son analyse finale et tire des conclusions.

 25   C’est, donc, un travail d’expert qu’il fait,


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  1   plutôt que d’émettre des conclusions tout à fait générales. 

  2   À notre humble avis, voici la situation dans laquelle se

  3   trouve la Chambre.  Les documents qui aboutissent à cette

  4   conclusion de l’expert doivent être examinés et admis et la

  5   Chambre aura libre loisir de voir dans quelle mesure elle

  6   veut s’intéresser à cette toute dernière conclusion du

  7   rapport.

  8   Nous serions enclins à vous dire qu’il est tout à

  9   fait autorisé et adéquat de garder cette dernière

 10   conclusion à l’esprit lorsque des Juges ou un Juge avec

 11   jury entendent souvent des avis formulés sur les questions

 12   finales et déterminantes et c’est vrai de tous les

 13   systèmes.  Les Juges et jurys ont toujours le loisir de se

 14   dire qu’un expert n’est après tout qu’un témoin, un témoin

 15   que la Chambre peut retenir en tout ou en partie, dont la

 16   Chambre peut s’inspirer pour confirmer sa propre opinion,

 17   qu’elle peut prendre en compte pour voir si la Chambre ou

 18   le jury est d’accord avec cet avis ou le rejette

 19   totalement.

 20   Je pense qu’on pourrait croire que ceci est plus

 21   aisément réalisé par des Juges de métier que par des jurys

 22   mais aujourd’hui, c’est aussi le travail de jurys, ce qui

 23   veut dire que, pour répondre à votre question, Monsieur le

 24   Président, effectivement, je pense qu’il serait adéquat de

 25   garder à l’esprit ces conclusions finales tirées par


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  1   l’expert mais ce sont finalement les documents dont il

  2   s’est servi qui sont beaucoup plus importants et d’une

  3   valeur plus précise pour vous.

  4   Permettez-moi de poser une question à ma collègue.

  5   [La Chambre discute]

  6    Me NICE (interprétation) :  J’essayais de me

  7   remémorer quelque chose parce qu’il n’est pas facile de

  8   retrouver quelque chose dans un document.  J’ai parlé du

  9   paragraphe 9 mais, en fait, on reprend au paragraphe 10 la

 10   question des toutes dernières conclusions et c’est aux

 11   points 15 et 16 que vous verrez la citation des questions

 12   fondamentales, à moins que Me Somers ne veuille attirer mon

 13   attention sur autre chose, mais c’est finalement tout le

 14   travail qui précède ces conclusions qui sera vraiment d’une

 15   importance capitale pour la Chambre.

 16   Permettez-moi, Messieurs les Juges, d’élaborer sur

 17   ce que je disais au début puisque je pensais que la

 18   question était soulevée de façon prématurée.  À ce stade de

 19   la procédure, je pense qu’il est préférable de poser une

 20   telle question au témoin lorsqu’il sera cité à la barre

 21   mais ici, vous pouvez avoir la présence du témoin qui vous

 22   expliquera sa méthode de travail si une question est posée

 23   là-dessus et sur son savoir ainsi que son savoir-faire.  La

 24   Chambre pourra alors déterminer quels sont les détails ou

 25   justifications que la Chambre souhaite par rapport à son


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  1   rapport et si la Chambre décide de ne pas écouter les

  2   dernières conclusions, la Chambre pourra, bien sûr, en

  3   décider ainsi mais il est préférable d’aborder une telle

  4   question en présence du témoin.

  5   Pour ce qui est de ce que va vous dire Madame

  6   Somers en élaborant sur ce que je disais, l’importance

  7   d’avoir un expert de ce genre sur les points de fait pour

  8   des Juges qui jugent et déterminent aussi sur les faits,

  9   toutes les façons et modalités que j’ai déterminées, vous

 10   savez que nous appelons ce témoin pratiquement à la fin de

 11   la présentation de nos témoins.

 12   Nous verrons ainsi de quelle façon ce qu’il aura à

 13   dire correspond ou ne correspond pas aux conclusions que

 14   vous auriez peut-être déjà citées ou tirées.  Je pense que

 15   c’est en général pour cette raison-là que nous avons la

 16   présence d’un expert qui, en règle générale, intervient

 17   après que d’autres témoins ont été entendus et ce qu’il

 18   aura à dire est utilisé pour vérifier d’une façon ou d’une

 19   autre ce qu’il en a été dans d’autres témoignages et

 20   surtout lorsqu’il aura formé son avis déjà plus tard.

 21   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  S’il forme un

 22   avis sur la responsabilité du supérieur hiérarchique,

 23   question complexe où interviennent des points de fait et

 24   des points de droit, à notre avis, je pense qu’il faudrait

 25   accepter ou rejeter un tel avis, peu importe ce qu’il a à


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  1   dire à propos de la supériorité hiérarchique.  Bien sûr,

  2   c’est notre décision.

  3   Me NICE (interprétation) :  Bien sûr, c’est votre

  4   décision, Messieurs les Juges, mais rien n’empêche que vous

  5   écoutiez l’avis d’expert, de quelqu’un d’autre sur ce sujet

  6   et j’irai plus loin, pendant toute la présentation des

  7   éléments de preuve, des témoins se sont prononcés,

  8   notamment sur ce sujet de façon directe lorsqu’ils parlent…

  9   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Bien sûr, cela

 10   va de soi mais ce témoin n’a rien fait.  Il s’est contenté

 11   de rassembler des éléments pour arriver à une opinion.

 12   Me NICE (interprétation) :  Mais il réunit des

 13   éléments ou des documents avec un savoir que nous n’avons

 14   pas parce qu’il est reconnu, il est estimé comme étant

 15   expert dans ce domaine auquel il a consacré beaucoup

 16   d’années de sa vie et il a rassemblé des éléments dont nous

 17   ne disposons pas en règle générale et il savait où chercher

 18   ces documents et ceci le distingue en tant que tel, en tant

 19   qu’expert, ceci lui donne une valeur toute particulière,

 20   une compréhension particulièrement profonde du problème.

 21   Permettez-moi de dire que, bien sûr, les avocats

 22   de common law sont, en règle générale, inquiétés de voir un

 23   expert exprimer un avis final, déterminant mais cette

 24   évolution va dans le sens de la disparition de telles

 25   inquiétudes.  Je crois que, notamment, lorsqu’on a parlé de


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  1   la diminution de la responsabilité mentale où les Juges se

  2   sont souvent inquiétés de savoir si on pouvait entendre un

  3   psychiatre se prononcer sur un avis définitif, tout ceci a

  4   évolué et au pénal, on a constaté cette évolution mais

  5   aussi au civil et dans d’autres systèmes.

  6   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Ça dépend de

  7   la forme du savoir ou de la nature de l’expert mais ceci

  8   pourrait faire l’objet de toutes sortes de discussions.

  9   M. LE JUGE BENNOUNA :  Monsieur Nice, est-ce qu’en

 10   dehors de cette affaire de conclusion générale, « ultimate

 11   issue », est-ce que dans le rapport d’expertise et dans ce

 12   que vous attendez comme expertise en appelant le témoin à

 13   la barre, il y a des éléments que nous ne connaissons pas

 14   et que Monsieur Cigar est susceptible de nous apporter à

 15   travers cette expertise ? 

 16   C’est cela qui est important si on laisse de côté,

 17   évidemment, la conclusion générale qui relève,

 18   effectivement, de la Chambre et au sujet de laquelle

 19   l’opinion de cet expert ne nous sera pas d’une grande

 20   utilité.

 21   Me NICE (interprétation) :  Pour répondre à votre

 22   question, Monsieur le Juge, effectivement, il y a des

 23   éléments ou des experts particuliers et nous avons essayé

 24   de présenter dans l’argumentaire que nous avons essayé de

 25   préparer ces éléments.


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  1   Pourquoi est-ce que je parle de tentative ?  Bien

  2   sûr, nous n’avons, bien sûr, pas essayé de demander à

  3   Monsieur Cigar de justifier le fait qu’il soit expert par

  4   notre truchement et le fait qu’il soit expert puisque la

  5   question était posée.  Je pense que ce n’est là pas une

  6   bonne démarche parce que nous avons déterminé son domaine

  7   de savoir, nous l’avons dit dans ce plan que nous avons

  8   soumis et nous avons vérifié auprès de l’expert qu’il était

  9   d’accord pour que nous soumettions ses arguments à vous,

 10   Messieurs les Juges, et il a confirmé le fait que c’est,

 11   notamment, la méthode qui est importante.

 12   À notre humble avis, il serait tout à fait erroné

 13   de refuser et de récuser cet expert, soi-disant parce qu’il

 14   ne serait pas expert.  Il faut le voir pour pouvoir tirer

 15   une telle conclusion parce que nous estimons qu’il est

 16   manifeste qu’il est expert, ne serait-ce que par les

 17   domaines et les documents qu’il a produits mais aussi parce

 18   qu’il connaît bien la langue notamment et pour toutes les

 19   autres raisons que nous avons consignées dans notre plan.

 20   Peut-être pourrait-on permettre à Madame Somers

 21   d’intervenir si ceci vous perturbe encore parce que je

 22   crois qu’elle a étudié dans le détail cette question et

 23   elle a aidé à préparer le témoignage de ce témoin mais je

 24   dois ajouter que ce témoin, même s’il ne comparait ici que

 25   dans l’affaire Kordic, est un témoin ou un type de témoin


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  1   qui pourrait être tout à fait précieux dans les affaires

  2   portées devant ce Tribunal.  Par conséquent, est-ce qu’on

  3   peut exclure d’autorité d’office simplement sur papier ce

  4   témoin ?

  5   Nous ne le pensons pas.  Il faut lui donner

  6   l’occasion de s’expliquer et de confirmer ce que nous

  7   disons à propos de la connaissance dont il dispose parce

  8   que quelquefois, il est un peu aisé et facile de croire que

  9   ce qu’on peut dire de l’avis d’un expert n’est simplement

 10   qu’une compilation de documents.  Nous savons, à

 11   l’expérience de ces procès, que la compilation de documents

 12   a été reconnue comme étant une forme adéquate de preuve ici

 13   et nous l’avons dit.

 14   Nous l’avons fait au début du procès mais nous ne

 15   voulons pas insister sur cette ligne pour la comparution de

 16   ce témoin dont nous disons que c’est un excellent expert,

 17   un véritable expert, tout à fait estimé et respecté et dont

 18   la production de documents vous permettra de vous aider

 19   pour ce qui est des comportements, des schémas de

 20   comportements aussi et pour ce qui est des sources dont

 21   nous disposons.

 22   Mais je vais demander à Madame Somers d’intervenir

 23   directement plutôt que me donner de l’aide par la voie de

 24   petits papiers, pour bien répondre à votre question.

 25   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Le Juge


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  1   Robinson voulait intervenir et puis nous entendrons Madame

  2   Somers, mais très brièvement.

  3   M. LE JUGE ROBINSON (interprétation) :  Me Nice,

  4   j’enchaîne sur les inquiétudes manifestées par le Président

  5   sur cette question du principe de la « ultimate or final

  6   issue » parce que ce débat finalement ne se bâtit-il pas

  7   sur des déductions ?

  8   Me NICE (interprétation) :  C’est vrai dans une

  9   large mesure, comme je l’ai dit au début.  Au début, je ne

 10   savais pas combien de témoins directs, de preuves directes

 11   j’allais aller voir et je vous ai dit d’emblée

 12   qu’effectivement, toute cette affaire pourrait se

 13   construire, se bâtir sur des déductions ou des conclusions. 

 14   Effectivement, alors que le procès se déroule, je constate

 15   qu’il y a plus de preuves directes mais il n’empêche que

 16   vous avez tout à fait raison, Monsieur le Juge.

 17   M. LE JUGE ROBINSON (interprétation) :  Et la

 18   question de la responsabilité du supérieur hiérarchique

 19   pourrait trouver l’essentiel de sa résolution sur les

 20   conclusions ou déductions que pourra attirer la Chambre à

 21   partir de faits présentés au cours de dépositions à

 22   l’audience.  L’inquiétude qui est exprimée ici est celle-ci

 23   parce qu’en fin de compte, il revient à la Chambre de tirer

 24   ses conclusions à partir des faits que nous entendons, à

 25   partir des témoins que nous entendons ou d’autres formes de


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  1   témoignages.

  2   Dans quelle mesure serons-nous aidés par la

  3   présence d’un témoin qui nous parlera de l’avis qu’il a sur

  4   cette question définitive, sur cette question ultime ? 

  5   C’est ça qui nous inquiète parce que c’est une question que

  6   nous devons, nous, trancher à partir des faits présentés.

  7   Cet expert ne va pas venir déposer sur n’importe

  8   quel fait particulier, non, il va nous fournir son avis sur

  9   le niveau de responsabilité qu’aurait tel ou tel accusé. 

 10   Il le fera à partir de documents qui sont entrés en sa

 11   possession par le biais, comme vous le dites, de son

 12   savoir-faire, mais finalement c’est à nous qu’il revient de

 13   décider et je ne sais pas dans quelle mesure nous serons

 14   aidés par la présence de ce témoin.

 15   Ainsi, est-ce que ceci va faire progresser vos

 16   poursuites plus facilement si vous, dans vos arguments,

 17   vous arguez du fait que vous avez suffisamment présenté de

 18   faits nous permettant de tirer des conclusions sur la

 19   question de la responsabilité du supérieur hiérarchique ? 

 20   Est-ce que vous pourrez ainsi mieux faire valoir vos

 21   arguments que si vous avez un témoin qui vient vous parler

 22   du niveau de responsabilité hiérarchique à partir de ce

 23   qu’il sait ?  Je doute que ceci vous fasse vraiment

 24   avancer.

 25   Me NICE (interprétation) :  Mais il est utile,


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  1   Monsieur le Juge, d’entendre vos inquiétudes pour essayer

  2   d’y répondre.  Je peux essayer de reformuler de façon plus

  3   utile mes arguments avec une analogie en sus.

  4   Pour répondre à votre question, Monsieur le Juge,

  5   effectivement, ceci peut vous être utile et de façon

  6   considérable, vous serez aidés dans votre tâche.  Avant de

  7   vous réexpliquer pourquoi, permettez-moi d’insister sur une

  8   caractéristique de cet expert, caractéristique qu’on

  9   néglige quelquefois lorsque, dans le système

 10   contradictoire, on discute d’une question de la sorte parce

 11   que cette question, ce système contradictoire implique des

 12   sélections quelquefois tactiques ou stratégiques.

 13   Ce n’est pas le cas pour nous du côté du Bureau du

 14   Procureur mais c’est souvent ce qu’on pense qui arrive. 

 15   Mais même s’il y avait une sélection tactique ou

 16   stratégique des témoins factuels, ce qui n’a pas été le

 17   cas, et même quand c’est le cas, le témoin compte, si vous

 18   voulez, comme personne indépendante, comme instance

 19   indépendante.

 20   En Angleterre, et ailleurs aussi je suppose, de

 21   plus en plus, on exige que l’expert soit vraiment l’expert

 22   de la Chambre, de la Cour.  Je sais que dans certains

 23   contextes en Angleterre, la Cour désigne un expert, ce qui

 24   voudra dire qu’il sera tout à fait neutre mais c’est là la

 25   confirmation de ce qu’il a toujours dû être, une personne


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  1   neutre.

  2   Alors, si vous dites, Monsieur le Juge, que c’est

  3   bien aux Juges qu’il incombe de tirer des conclusions, des

  4   faits en tant que tel, pour répondre à votre question, je

  5   dirais non.  Bien sûr, la Chambre a pour obligation de

  6   tirer des conclusions s’agissant de tous les éléments de

  7   preuve qui incluent des faits à partir desquels on tire des

  8   déductions mais ces faits incluent également des avis

  9   d’experts pertinents que la Chambre peut entendre et je

 10   reviens à la formulation que j’avais utilisée au départ de

 11   ma présentation.

 12   Étant donné que les documents que vous recevez

 13   sont des faits de la forme de déposition mais aussi des

 14   avis et opinions, ce que nous avons droit sous les deux

 15   formes de vous présenter, la Chambre ainsi aidée par

 16   l’expert peut se souvenir que l’expert est indépendant,

 17   qu’il n’est pas d’un parti pris pour tel ou tel parti, et

 18   ici en l’espèce, nous avons déjà établi de diverses façons,

 19   même avant l’ouverture du procès ou même à l’idée qu’on

 20   aurait le procès, qu’il s’agit d’un expert, d’un homme

 21   d’une grande et longue intégrité.

 22   La Chambre pourra peut-être entendre son avis, le

 23   prendre en considération pour appuyer quelque chose, pour

 24   vérifier quelque chose ou encore pour rejeter autre chose. 

 25   Est-ce que c’est là quelque chose d’utile ?  Mais bien sûr


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  1   qu’oui.

  2   Autre exemple précis qui n’a rien à voir avec les

  3   faits de l’espèce mais qui reste utile néanmoins.  Pour ce

  4   qui est de la responsabilité mentale amoindrie, la

  5   diminution de responsabilité, il y a une affaire

  6   britannique que le Juge Bennouna ne connaîtra peut-être pas

  7   directement, mais si nous revenons à cette question de la

  8   diminution de la responsabilité individuelle.

  9   Rappelez-vous, Messieurs les Juges, cette

 10   question, les critères qui s’appliquent pour l’établir, et

 11   je crois que ceci intervient dans une certaine mesure ici. 

 12   Ce sont des critères que ne connaissent pas bien les

 13   psychiatres, par exemple, puisque ces critères ont été

 14   établis par des avocats dans l’intérêt de l’application de

 15   la législation de l’époque, mais il n’en demeure pas moins

 16   que ces seuils aux critères impliquent tout un discours

 17   quasi-psychiatrique.

 18   Alors, c’est là un critère ou une série de

 19   critères dont on pourrait penser qu’un membre d’un jury, un

 20   profane, peut aborder et traiter lui-même, d’autant que la

 21   terminologie ne s’intègre pas bien dans la phraséologie

 22   d’un témoin-expert et il est certain que lorsqu’à un membre

 23   de jury, un jury, on pose une question sur la diminution de

 24   la responsabilité individuelle, à ce moment-là, il doit

 25   s’occuper, il doit se saisir de tous les éléments de


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  1   preuve.  Il peut être aidé par un expert qui va intervenir

  2   pour examiner les mêmes documents que le jury.

  3   Par exemple, ce sont des rapports psychiatriques

  4   et il s’appuie sur les documents ordinaires et les

  5   documents d’experts pour soumettre des avis ou conclusions. 

  6   Le juge ou le jury accepte cet avis, en tout cas, le gère

  7   comme il le veut, mais ceci s’intègre dans la présentation

  8   des éléments de preuve.

  9   M. LE JUGE ROBINSON (interprétation) :  Comme

 10   disait le Président de la Chambre, ici, c’est un cas tout à

 11   fait particulier d’une législation qui arrête une

 12   définition bien précise de la diminution de la

 13   responsabilité individuelle.  Donc là, ce sont des cas tout

 14   à fait précis et je ne pense pas qu’ainsi, on s’écarte ou

 15   on déroge au principe général.

 16   Me NICE (interprétation) :  C’est peut-être une

 17   espèce particulière mais qui n’en diminue pas pour autant

 18   la valeur de la démarche.  Je pense à beaucoup d’autres

 19   exemples où en règle générale, de façon classique, à

 20   présent, on pose des questions aux experts.  Même dans

 21   beaucoup d’autres affaires, il faut appliquer des critères

 22   qui peuvent être en partie d’ordre juridique ou d’ordre

 23   factuel.  Il y a pratiquement des exemples innumérables.

 24   Si on avait le temps, on pourrait procéder à cet

 25   exercice de critères ou tests appliqués qui sont inspirés


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  1   par des règles, des statuts, des règlements particuliers

  2   et/ou dans la common law, lorsqu’il y a déjà tout un jeu de

  3   critères déterminés.  En général, on appelle l’expert. 

  4   L’avis de cet expert sera considéré comme l’un des éléments

  5   du dossier à partir duquel la Chambre va trancher.  En

  6   règle générale, quasiment toujours, aujourd’hui, ces

  7   experts se prononcent sur la question de fond, la question

  8   déterminante :  Oui, il y a eu, par exemple, négligence ;

  9   oui, il y a eu velléité.

 10   Tout ceci se rapproche très fort de la question de

 11   la supériorité hiérarchique et dans de tels cas, les Juges

 12   ne se privent pas de l’avantage que peut leur offrir de

 13   tels experts et en fin de compte, ces experts sont utilisés

 14   par les Juges afin de vraiment corroborer ou d’étayer leur

 15   avis ou encore ils rejettent un tel avis parce qu’un juge

 16   de métier… vous savez qu’en règle générale en Angleterre,

 17   les affaires sont jugées par des juges de métier seuls et

 18   ils n’ont aucune difficulté à gérer les documents qui leur sont soumis.

 19   Je pense que c’est la démarche que vous devriez retenir, Messieurs les

 20   Juges, ici, et tout ceci cadre parfaitement avec les cas ou procès où

 21   en général des avis d’experts sont reçus et considérés comme

 22   admissibles.Je ne sais pas.  J’espère que ceci aura répondu à vos

 23   inquiétudes, Monsieur le Juge Robinson, et pour revenir à la question

 24   posée par Monsieur le Juge Bennouna, peut-être que Madame Somers pourra

 25   vous aider sur telle ou telle question de détail.


Page 13286

  1   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Effectivement !

  2   Me SOMERS (interprétation) :  Les experts que nous avons entendus

  3   précédemment ont pu vous soumettre les faits et les questions de temps

  4   qui se posent ici et ils ont pu les preplacer dans un contexte

  5   socioculturel.  Ils se sont arrêtés là où leurs connaissances d’expert

  6   s’arrêtaient parce que je crois qu’ici, il faut consigner pour cette

  7   Chambre le contexte politique et militaire sur lesquels ne peut se

  8   procéder aucun témoin factuel ou aucun expert qui inévitablement devait

  9   s’arrêter là où se limitaient leurs connaissances d’expert.

 10   Par ses connaissances d’expert, le Dr Cigar est capable d’évaluer, de

 11   synthétiser et de tirer des conclusions tout à fait neutres quant au

 12   rôle joué par les diverses entités dans le cadre d’événements qui se

 13   sont déroulés simultanément et parce que le Professeur Cigar va

 14   examiner les événements du côté croate, du côté serbe, du côté bosnien,

 15   et pour les Croates aussi bien en Croatie qu’en Bosnie, parce qu’il va

 16   examiner tous ces événements aux divers instants liés aux faits que les

 17   Juges de cette Chambre ont à examiner, il est très utile pour vous

 18   d’entendre ce qu’il a à dire quant au rapport, au lien qui existe entre

 19   ces différents événements parce que les faits peuvent être appréciés

 20   différemment selon le contexte et c’est la raison pour laquelle il est

 21   tout à fait fondamental que les Juges de cette Chambre se voient

 22   présenter le contexte qui a présidé à ce conflit.

 23   C’est exactement la même chose que ce que font les analystes des

 24   services de renseignements et c’est ce que se propose de faire le

 25   Professeur Cigar devant ce Tribunal, c’est-à-dire présenter toutes les


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  1   sources, tous les éléments de preuve, et d’après ce que nous savons de

  2   ce que ce Monsieur peut apporter à la Chambre, il est capable de

  3   présenter une vision tout à fait unique des médias croates et des

  4   médias de l’ex-Yougoslavie qui ont déjà comparu devant ce Tribunal.

  5   Il est tout à fait critique d’entendre un individu

  6   qui est formé à l’appréciation de sources et qui parlera devant ce

  7   Tribunal des informations dont il dispose.  La capacité à examiner des

  8   événements sur une longue période de temps de façon à apprécier si les

  9   choses se sont passées de façon aléatoire ou préparée est également

 10   tout à fait fondamental.

 11   Je répète que pas un seul témoin factuel, je crois même pouvoir dire

 12   qu’aucun des témoins qui ont parlé des faits, compte tenu des limites

 13   qui leur étaient imposées sur le terrain, ne peut apporter ce genre

 14   d’information. 

 15   C’est la raison pour laquelle la présentation des choses par le Dr

 16   Cigar, par le Professeur Cigar, est tout à fait fondamental quant au

 17   sens à accorder à une personnalité politique par rapport à une

 18   personnalité militaire ainsi qu’à la structure politique par rapport à

 19   la structure militaire.

 20   Comme Monsieur Nice l’a déjà indiqué, la question s’est posée à

 21   nombreuses reprises et donc, disposer de la personne la plus compétente

 22   pour traiter de ce problème suffit à justifier la présence du

 23   Professeur Cigar dans cette salle.

 24   Je répète que dans ce conflit, des faits, des informations ont été

 25   évoquées qui dépendent beaucoup du contexte et nous tous qui nous


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  1   efforçons de comprendre ces faits et ces événements, nous sommes

  2   limités soit par des problèmes de langue, soit par l’incapacité dans

  3   laquelle nous sommes d’apprécier toute la portée de ce volume très

  4   important d’informations.

  5   Comme Monsieur Nice l’a déjà dit, le Professeur Cigar a la capacité

  6   d’accéder à toutes ces sources et c’est ce qui justifie que sa

  7   déposition fasse partie du dossier de ce procès.  Bien entendu, le

  8   rejet ou l’admission de certains éléments est du ressort exclusif des

  9   Juges mais la capacité de démontrer comment les choses se sont passées,

 10   de constater qu’elles ne se sont pas passées dans le vide mais qu’elles

 11   se sont passées dans le cadre d’une politique systématique est un

 12   élément tout à fait critique et ce témoin est manifestement le témoin

 13   capable de présenter tout cela aux Juges de cette Chambre.

 14   J’en ai terminé, Monsieur le Président, à moins

 15   que vous ayez des questions à m’adresser.

 16   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Merci.

 17   Me NICE (interprétation) :  Je n’ai rien d’autre à

 18   ajouter à ce stade mais Mademoiselle Guariglia

 19   rappelle que dans l’affaire Tadic, au

 20   paragraphe 10, il y a une référence liée au point

 21   que nous discutons s’agissant des témoins.

 22   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Mais cette personne a déposé dans

 23   l’affaire Kovacevic.  Il s’agit d’une historienne spécialisée en droit

 24   de l’homme qui a élaboré un rapport quant à la situation régnant à

 25   Prijedor et je crois que c’est la raison pour laquelle elle a déposé.


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  1   Me NICE (interprétation) :  L’objection élevée contre sa déposition,

  2   qui a été rejetée, a reposé sur le fait que le jugement formulé

  3   appartenait aux Juges du Tribunal et pourtant, malgré cela, malgré

  4   cette objection, les Juges ont décidé d’entendre son audition.

  5   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Oui. Me Stein, vous avez la parole.

  6   Me STEIN (interprétation) :  Merci, Monsieur le Président.  Je voudrais

  7   d’abord détruire le mythe du fait que le Professeur Cigar serait neutre

  8   ou aurait des connaissances d’expert.  En 1993, il est venu devant ce

  9   Tribunal mais n’était pas dépourvu de subjectivité.  En fait, il a

 10   présenté son projet au Tribunal en 1996, après avoir prononcé des

 11   déclarations qui montrent qu’il n’est absolument pas neutre.  On voit

 12   cela en page 134 de son livre qui est public.

 13   En outre, il ne propose aucune connaissance d’expert dont le Tribunal

 14   ne disposerait pas déjà.  Son doctorat de philosophie porte sur

 15   l’histoire du Moyen-Orient et traite de la chronique d’un certain

 16   nombre d’événements.  Son livre est rédigé en français.  Bien

 17   entendu, il est très spécialiste en affaires internationales et il a

 18   traité d’un domaine qui est directement lié aux études de l’Union

 19   Soviétique.

 20   Tout ce que je veux dire en énumérant tous ces faits c’est que ce

 21   monsieur n’est pas plus expert que les Juges de cette Chambre.  Ses

 22   connaissances, si on les compare aux connaissances juridiques qui sont

 23   les nôtres, sont tout à fait comparables à celles de Juges de cette

 24   Chambre.

 25   Il intervient très tardivement dans la présentation des éléments de


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  1   preuve de l’Accusation et prétend conclure cette présentation.  Bien

  2   entendu, il y aura un contre-interrogatoire.  Si l’Accusation renonce à

  3   son réquisitoire, il peut être utilement remplacé par le Professeur

  4   Cigar, auquel cas, nous pourrons renoncer y compris à notre contre-

  5   interrogatoire.

  6   Ce que je veux dire c’est que ce que ce professeur se propose de faire

  7   est très insidieux.  Nous vous avons déjà cité un grand nombre

  8   d’exemples qui indiquent très clairement ce qu’il fait et ne fait pas. 

  9   Son travail repose sur des articles de presse, des déclarations de

 10   témoins disponibles au Bureau du Procureur, des documents vidéos et

 11   audios et d’autres dépositions faites devant ce Tribunal et on le voit

 12   très clairement à la lecture du résumé de sa déposition.

 13   Il y a également des notes en bas de pages qui indiquent qu’il va

 14   aborder des questions liées à l’ouï-dire, y compris de l’ouï-dire

 15   indirect de deuxième, de troisième main et il y a d’autres arguments

 16   qui sont indiqués dans nos écrits et qui prouvent que sa déposition

 17   ne peut pas être fiable.

 18   Le Procureur, dans sa réponse à notre document et dans les propos qu’il

 19   vient de tenir ici dans cette Chambre, dit ce qui suit : « Les

 20   questions soumises au Tribunal sont complexes et susceptibles

 21   d’interprétations diverses. »  Page 4 du document : « Les faits peuvent

 22   être interprétés de diverses façons. »  Paragraphe 4 : « L’examen des

 23   faits et des événements d’une manière tout à fait unique est

 24   nécessaire. »  Page 6 : « Un grand nombre d’éléments de preuve qui,

 25   dans un certain contexte, peuvent sembler indiquer une certaine réalité


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  1   et, dans un autre contexte qui sera évoqué par l’expert sur la base de

  2   sa formation et de sa spécialisation, de son expérience, peuvent

  3   indiquer une chose inverse. »

  4   Alors, tout ce que cela veut dire c’est que les faits présentés à la

  5   Chambre sont par nature ambigus.  Les éléments de preuve soumis à la

  6   Chambre sont ambigus.  Ils peuvent donner lieu à des interprétations

  7   diverses mais la seule interprétation qui compte, c’est celle des

  8   Juges.

  9   L’Accusation a décidé de recourir à un expert pour lui demander de

 10   passer en revue non pas le dossier de ce procès mais celui d’un autre

 11   procès.  Il passera en revue non pas les comptes rendus d’audience qui

 12   lui ont été soumis car il n’a entendu ni le contre-interrogatoire de la

 13   Défense, ni les arguments de la Défense.  Ce qu’il a fait c’est

 14   examiner toute une série d’articles de presse, toute une série

 15   d’éléments qui lui ont été fournis par le Tribunal, qui proviennent de

 16   témoins dont certains ont comparu et d’autres n’ont pas comparu, et

 17   c’est sur cette base qu’il a tiré ses conclusions.

 18   Ce qu’il y a de pire au sujet des conclusions qu’il a tirées c’est

 19   qu’il les a tirées en ayant déjà pris une décision quant à la

 20   fiabilité, à la crédibilité des déclarations de témoins, des articles

 21   de journaux qu’il a eus à sa disposition, c’est-à-dire qu’il a formulé

 22   ses conclusions en ayant déjà accepté certains de ces éléments et en en

 23   ayant rejeté d’autres, ce que l’Accusation a caché dans ses écrits.

 24   En page 5 de son document écrit, l’Accusation admet que le rapport de

 25   Monsieur Cigar se fonde sur des articles de presse et sur ce qu’elle


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  1   appelle des sources ouvertes dont la fiabilité mérite d’être analysée

  2   plus en détail.  Ces sources ouvertes sont, apparemment, une expression

  3   utilisée dans certains milieux pour parler de certaines déclarations

  4   préalables de témoins et indiquer, qualifier leur fiabilité.

  5   C’est peut-être l’ironie du sort mais Monsieur Cigar a décidé lui-même

  6   qui avait tenu des propos fiables et qui avait tenu des propos non

  7   fiables et il présente son analyse aux Juges dans le cadre d’un dossier

  8   qui est un dossier parallèle à celui de ce procès et qui lui est

  9   propre.

 10   L’Accusation insiste pour que Monsieur Cigar soit entendu mais vous

 11   êtes des Juges professionnels qui avez une expérience du droit

 12   international et c’est pour cela que ce témoin ne peut rien ajouter à

 13   ce dont vous disposez déjà. 

 14   À la fin de la présentation des éléments de preuve de l’Accusation, je

 15   ne sais pas si vous délibérez toujours ensemble ou si vous réfléchissez

 16   individuellement mais vous disposez de toute une série de preuves que

 17   vous analysez. 

 18   Vous décidez quelle est votre opinion sur tel ou tel élément, ce que

 19   vous considérez crédible et non crédible. 

 20   Vous examinez les circonstances liées aux éléments de preuve dont vous

 21   disposez, éléments de preuve qui sont des preuves de première main, et

 22   finalement, vous tirez vos conclusions.

 23   Le Dr Cigar marche sur vos plates-bandes, si je puis dire, et nous

 24   estimons que c’est aux Juges qu’il appartient de prendre une décision

 25   quant aux preuves sur les faits au-delà de tout doute raisonnable. 


Page 13293

  1   Le Professeur Cigar, pour sa part, analyse ces éléments mais dans le

  2   cadre d’un processus qui, pour l’essentiel, sape à la base le sacro-

  3   saint travail des Juges et, franchement, son rapport n’est rien de plus

  4   qu’un résumé comparable à celui que l’on trouve dans le dossier Tulica. 

  5   Son rapport est tout à fait comparable à celui des enquêteurs au sujet

  6   de Tulica et, comme cela était le cas avec les enquêteurs qui ont

  7   travaillé sur le rapport Tulica, il ne tient pas compte du contre-

  8   interrogatoire – je l’ai déjà signalé – mais n’examine les faits qu’à

  9   première vue, que d’après leur première apparence.

 10   Parlons maintenant, si vous le voulez bien, de la méthode.  C’est

 11   important également.  Je ne vais pas rentrer dans des détails

 12   juridiques.  Je me contenterai d’y consacrer quelques instants.  En

 13   effet, la méthode utilisée par le Professeur Cigar est inintelligible

 14   et c’est intentionnellement qu’elle l’est.

 15   En page 15, le Professeur Cigar parle de sa méthode basée sur la

 16   synthèse et la déduction différentes de celles utilisées par les autres

 17   experts spécialisés dans la même discipline.  En page 9, paragraphe 12,

 18   il signale que cette discipline est très interdisciplinaire.  En page

 19   12, il est signalé que le processus lié aux renseignements ne se résume

 20   pas à une formule mathématique.

 21   En bref, le Professeur Cigar est incapable de décrire sa méthode

 22   autrement qu’en disant : « Je regarde, je déduis, je compare, je mets

 23   en confrontation et il y a plusieurs écoles à ce sujet, plusieurs

 24   chapelles, plusieurs lignes d’enseignement et je suis incapable de le

 25   définir mieux que cela. »


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  1   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Mais tout cela fait partie du

  2   contre-interrogatoire.  S’il y a des questions qui se posent au sujet

  3   des connaissances spécialisées du témoin, des documents qu’il a

  4   analysés et au sujet desquels il a exprimé un point de vue, de la

  5   méthode qu’il a utilisée pour tirer ses conclusions, tout cela peut

  6   être abordé dans le contre-interrogatoire.  Tout cela peut être

  7   apprécié à sa juste valeur ultérieurement, n’est-ce pas ?

  8   Me STEIN (interprétation) :  Malheureusement, Monsieur le Président,

  9   avec le respect que je vous dois, je répondrai non à la question que

 10   vous venez de poser.  En effet, tout ce dont Madame Somers a parlé tout

 11   à l’heure se résume dans une expression utilisée devant les tribunaux

 12   américains qui est celle de « jargon scientifique sans aucune valeur ». 

 13   C’est l’avis qui a été cité par Madame Somers dans son rapport écrit et

 14   je pense qu’à l’examen des faits, chacun ne peut qu’être d’accord avec

 15   elle.

 16   En effet, ce que fait l’Accusation par l’intermédiaire de cet expert,

 17   c’est uniquement exprimer un avis et si l’on examine l’affaire Kumho

 18   Tire contre Carmichael de mars 1999, on trouve une justification de ce

 19   que la Défense affirme devant ce Tribunal quant à l’expression

 20   d’opinions et non un examen objectif des faits et cela se passait

 21   devant un jury, alors qu’ici, c’est encore plus grave car vous êtes des

 22   juges professionnels dans un procès sans jury et, donc, vous n’avez pas

 23   besoin de ce type d’aide.

 24   Le point de vue moderne que l’on trouve dans l’affaire Kumho Tire c’est

 25   qu’un Juge n’a pas besoin de ce jargon scientifique de bas étage.  Il a


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  1   besoin de la présentation d’un rapport d’expert basé sur une méthode

  2   capable de présenter les faits de façon organisée et précise.  Il faut

  3   que le point de vue exprimé soit fiable, probant, alors que dans le cas

  4   actuel, compte tenu de la méthode utilisée, tout cela ne semble pas

  5   exister.

  6   On se propose de vous présenter toute une série de renseignements basés

  7   sur des sources matérielles dont la fiabilité est douteuse puisqu’il

  8   s’agit d’opinions et non seulement ces informations sont les opinions

  9   d’un seul homme mais finalement, je pense que ce témoignage doit être

 10   refusé en raison de son caractère insidieux dont nous avons déjà parlé.

 11   S’agissant du commandement, du contrôle, de la responsabilité, il y a

 12   toute une série de témoins qui étaient tout à fait compétents pour

 13   parler de cela, alors que ce témoin ne l’est pas.  Il se propose de

 14   vous présenter des éléments de preuve liés à de l’ouï-dire qui a été

 15   entendu hors la présence de Monsieur Kordic et Monsieur Cigar est, en

 16   fait, quelqu’un qui a déjà porté un jugement sur des faits avant même

 17   que vous l’ayez fait.  Il n’a pas examiné des documents d’experts, des

 18   documents universitaires.  Il n’a rien à voir avec les autres experts

 19   entendus dans cette affaire qui, au moins, ont essayé de lire un

 20   certain nombre de documents valables relatifs aux événements dont il

 21   traite.  Ce n’est absolument pas le cas de l’expert dont nous parlons

 22   ici aujourd’hui.

 23   M. LE JUGE ROBINSON (interprétation) :  Êtes-vous en train de dire ce

 24   que je vais dire maintenant : premièrement, que Monsieur Cigar n’est

 25   pas un expert, ce qui, bien entendu, serait un point tout à fait


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  1   préliminaire dans notre réflexion – si vous avez raison et qu’il ne

  2   s’agit pas d’un expert, nous ne devons pas l’entendre – êtes-vous en

  3   train de dire, deuxième possibilité, qu’il est un expert mais que son

  4   travail d’expert a été réalisé d’une façon insatisfaisante, ce qui

  5   n’interdit pas de l’entendre puisque cela peut être abordé au cours du

  6   contre-interrogatoire, ou bien êtes-vous en train de dire, troisième

  7   possibilité, que le sujet sur lequel il est invité à témoigner n’est

  8   pas celui de ses compétences spécialisées ?

  9   Il y a également le problème de son audition très tardive qui est

 10   également un sujet dont nous pouvons discuter.

 11   Me STEIN (interprétation) :  Je vais prendre vos propositions dans

 12   l’ordre.  La seule raison pour laquelle je conteste le témoignage de

 13   Monsieur Cigar c’est la valeur de sa qualification en tant qu’expert. 

 14   Il est vrai que le fait de décider si oui ou non il s’agit d’un expert

 15   est un point très important pour les Juges, qui peut justifier qu’ils

 16   admettent ou rejettent sa déposition.

 17   La deuxième question que je soulève c’est celle de la méthode utilisée. 

 18   En effet, la méthode d’un certain nombre d’experts qui se présentent

 19   devant les tribunaux américains est tout à fait inappropriée et cela se

 20   passe dans des procès avec jury qui n’ont rien à voir avec celui auquel

 21   nous participons ici.

 22   Troisième point tout à fait indépendant des deux précédents, c’est un

 23   point lié à l’appréciation que l’on peut faire de la qualité de son

 24   travail, à savoir un travail basé sur des opinions et non sur un examen

 25   objectif d’un certain nombre de faits.


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  1   Mais j’espère que j’ai répondu à vos questions et la raison pour

  2   laquelle je présente ces arguments de façon préliminaire c’est que si

  3   l’on permet à Monsieur Cigar de s’exprimer, eh bien, le procès est

  4   clos.  Il n’est pas nécessaire de continuer.  Il n’est pas nécessaire

  5   pour l’Accusation de présenter un réquisitoire, étant donné toutes les

  6   conséquences de la déposition de Monsieur Cigar devant ce Tribunal où

  7   il a déposé dans des affaires multiples et différentes.  C’est un peu

  8   comme ouvrir des vannes sans pouvoir les refermer.

  9   Donc, Monsieur le Président, je voudrais ne pas abuser du temps qui m’a

 10   été imparti mais le point le plus important, me semble-t-il, c’est que

 11   la déposition de ce témoin serait comparable à une invasion de votre

 12   territoire, Monsieur le Président et Messieurs les Juges, et puis, j’ai

 13   évoqué également le problème de la formation de cet expert et de la

 14   confrontation de ses opinions à la réalité des faits.  Voilà ce que

 15   j’avais à dire. 

 16   Franchement, je n’ai pas d’autres arguments sur lesquels j’aimerais

 17   insister aujourd’hui en dehors du fait que bien entendu, il s’agit

 18   d’ouï-dire et d’ouï-dire indirect bien souvent.

 19   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Merci, Me Stein.  Monsieur Nice.

 20   Me NICE (interprétation) :  D’abord, je dirais que la plupart des

 21   arguments avancés par Me Stein peuvent être présentés dans le cadre du

 22   contre-interrogatoire.  La qualité d’experts, la méthodologie, et

 23   cætera, sont des points dont les Juges ne peuvent pas traiter, me

 24   semble-t-il, ici aujourd’hui.  La qualification de l’expert est décrite

 25   dans son rapport et signalée en page 11 de nos écrits.  Mais quoi qu’il


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  1   en soit, juger de cela aujourd’hui serait impossible car il est trop

  2   tôt pour le faire.

  3   S’agissant maintenant des sources de ce que la Défense a dit au sujet

  4   de la fiabilité des sources utilisées par cet expert, il est vrai que

  5   cet expert se réfère à des articles de presse et il utilise le terme

  6   « fiabilité » pour parler de ses sources qui ne sont, en tout cas, pas

  7   moins fiables que des citations.  Il s’appuie donc sur des articles de

  8   presse et des émissions de télévision, et cætera.

  9   S’agissant du fait qu’il aurait dû éventuellement procéder à l’analyse

 10   de ces éléments avant de les présenter, je dirais deux choses : 

 11   D’abord, s’il avait procéder à une telle analyse, il serait

 12   effectivement en train de marcher sur les plates-bandes des Juges. 

 13   Deuxième point :  En ce qui concerne les différences entre ce qu’il

 14   dit et d’autres témoignages, c’est un point bien entendu qui peut être

 15   abordé dans le cadre du contre-interrogatoire, effectivement, il s’agit

 16   non pas d’articles de presse pour la plupart des sources qu’il utilise

 17   mais d’interviews et d’interviews d’hommes aussi importants que Boban,

 18   Kordic et autres.

 19   Donc, je ne suis pas personnellement en mesure de contester la valeur

 20   de sa spécialisation en tant qu’expert, d’ailleurs c’est la raison pour

 21   laquelle on l’a appelé à parler, mais je dirais que certaines de ses

 22   compétences spécialisées sont celles qui permettent à des armées et à

 23   des responsables politiques de prendre leur décision aujourd’hui.  Ce

 24   sont des points importants.  Ce sont des points qui sont des qualités

 25   d’expert et je crois qu’il appartient aux Juges de déterminer si oui ou


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  1   non ce que ce témoin a à vous dire est d’une quelconque valeur.

  2   Ce témoin est ici pour permettre de vérifier un certain nombre de

  3   points.  C’est la raison pour laquelle il est cité à la fin de la

  4   présentation des éléments de l’Accusation et non au début, auquel cas

  5   son rôle aurait été moins utile.

  6   Puis, je m’oppose aux critiques tout à fait extravagantes qui ont été

  7   formulées à l’encontre de ce témoin mais en tout cas, Me Stein, s’il

  8   juge ces critiques fondées, peut les présenter dans le cadre du contre-

  9   interrogatoire.

 10   Pour en revenir maintenant aux trois questions posées par Monsieur le

 11   Juge Robinson, nous disons qu’il n’y a aucune justification à exclure

 12   ce témoignage.

 13   En effet, est-ce que les questions qu’il aborde sont des questions qui

 14   peuvent faire l’objet d’un rapport d’expert ?  C’est à lui de vous en

 15   convaincre dans le cadre de sa déposition.  Pour le reste, les points

 16   évoqués peuvent l’être dans le contre-interrogatoire et ne sont pas

 17   des éléments qui sont susceptibles d’interdire l’audition du témoin au

 18   départ.

 19   Il n’y a donc aucun fondement à rejeter l’audition du témoin au départ

 20   car les conclusions finales devront être tirées et ce témoin peut aider

 21   les Juges à tirer leurs conclusions finales.  Je ne crois pas qu’il

 22   soit utile que j’ajoute d’autres arguments.  J’ajouterais simplement

 23   que son interrogatoire principal ne devrait pas être très long et que

 24   c’est aux Juges qu’il appartiendra… ah ! Me Stein semble vouloir

 25   s’exprimer une nouvelle fois.


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  1   Mais avant qu’il ne prenne la parole, j’ajouterais que la capacité des

  2   Juges à réglementer le déroulement du procès est entière et que ce

  3   n’est pas le témoin ou Me Somers par ses arguments qui peut nuire à

  4   cette aptitude. 

  5   En effet, c’est aux Juges qu’il appartient de rejeter sur le fond tel

  6   ou tel élément de preuve et lorsque les éléments de preuve sont

  7   présentés aux Juges, ceux-ci peuvent nous inviter à traiter d’un

  8   certain nombre de points avant de décider si oui ou non, tel ou tel

  9   paragraphe de tel ou tel document va être versé au dossier.

 10   C’est une décision qui relève entièrement du pouvoir discrétionnaire

 11   des Juges.  Nous n’avons aucune intention d’imposer aux Juges la

 12   totalité, l’intégralité de la déposition du témoin.  Ils ont toute

 13   liberté de choisir tel ou tel passage.

 14   Nous avons présenté un résumé de la déposition de cet expert et nous

 15   ajoutons que si cela est possible, nous ne demanderons au témoin que de

 16   confirmer des points sur lesquels nous les guiderons et pour d’autres,

 17   il s’exprimera librement.

 18   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Me Stein, en général, nous ne

 19   permettons pas à une partie d’intervenir une deuxième fois.

 20   Me STEIN (interprétation) :  Mais vous savez, l’Accusation avait

 21   commencé la première.  Je n’ai que deux minutes d’intervention à faire.

 22   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Vous savez, bien sûr, ils étaient

 23   intervenus en premier lieu, vous aviez le droit de réponse, vous n’avez

 24   pas le droit de réponse.  Merci, Me Stein, nous vous avons entendu

 25   suffisamment.


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  1   [La Chambre discute]

  2   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Nous avons examiné la question. 

  3   Nous gardons à l’esprit l’Article 94 bis, bien sûr, cela va de soi,

  4   lequel envisage une procédure spécifique s’agissant de la déposition

  5   d’un expert.  Cependant, ceci n’a aucune incidence sur les pouvoirs

  6   dont dispose la Chambre de première instance à rejeter tel ou tel

  7   élément de preuve en vertu de l’Article 89 ou comme c’est le cas ici,

  8   en vertu du 80(C), lequel autorise à une Chambre à recevoir tout

  9   élément de preuve pertinent dont elle estime qu’il a valeur probante.

 10   La plupart des griefs formulés par la Défense à l’encontre de ce

 11   témoin, ce sont là des questions qui peuvent faire l’objet d’un contre-

 12   interrogatoire et qui relève de la question de la valeur probante à

 13   attribuer.

 14   Toutefois, les questions et les griefs formulés par la Défense

 15   soulèvent une question fondamentale, la suivante :  Que fait au fond et

 16   à toutes fins utiles ce témoin ?  Il fournit un avis plutôt qu’un

 17   témoignage sur précisément les questions que devra trancher à la fin du

 18   procès la Chambre de première instance et comme ceci a été fort bien

 19   indiqué, c’est là une invasion, un empiétement sur les obligations et

 20   compétences expresses qu’a la Chambre de première instance pour

 21   trancher ces questions.

 22   Nous avons entendu un échange d’arguments sur ces points, je pense

 23   notamment aux conclusions relatives à la responsabilité du supérieur

 24   hiérarchique, mais le témoin ne serait pas un si bon chemin.  On trouve

 25   tout au long de sa déposition ou de son rapport des conclusions, des


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  1   déductions qu’il tire, des conclusions qu’il tire, alors que c’est là

  2   l’apanage de cette Chambre de première instance.

  3   C’est elle qui doit en fin de compte trancher et on a dit à juste titre

  4   que c’est nous les Juges qui devons décider et qu’il n’incombe pas à

  5   l’expert de le faire.  Il se peut que selon les circonstances, des

  6   experts soient désormais autorisés à déposer sur la question de fond

  7   qui se pose en fin de procès mais nous ne pensons pas que de telles

  8   pratiques qui se présentent aujourd’hui s’appliquent à notre espèce

  9   parce que je pense que nous sommes ici régit par l’alinéa (C) de

 10   l’Article 89.  Nous doutons que son intervention soit utile pour la

 11   Chambre.  Le 89(C) parle de tout élément de preuve pertinent dont la

 12   Chambre pense qu’il peut avoir valeur probante mais puisque ce rapport

 13   porte sur des questions qui reviennent aux Juges, puisque ce sera à

 14   partir des conclusions qu’il incombe aux Juges de tirer, nous estimons

 15   que nous ne sommes pas aidés et qu’il n’y a donc pas de valeur probante

 16   à ce rapport.

 17   Nous gardons, bien sûr, à l’esprit tous les éléments de preuve que nous

 18   avons entendus ces 10 derniers mois et par conséquent, nous rejetons ce

 19   témoignage.

 20   Me NICE (interprétation) :  Monsieur le Président, le témoin suivant va

 21   produire la cassette vidéo.  Je n’ai pas encore pu m’entretenir avec

 22   lui.  Je pense que la cassette est arrivée à la régie.  Je pense que le

 23   témoin est à l’extérieur du prétoire.  Est-ce que nous pourrions avoir une

 24   brève interruption, ce qui voudrait dire que non seulement nous

 25   pourrions en avoir terminé avant midi et demi.


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  1   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Nous pouvons fort bien avoir une

  2   pause maintenant.Pause de 20 minutes.

  3   Me NICE (interprétation) :  Merci.

  4   --- Suspension de l’audience à 10 h 15

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  1   --- Reprise de l’audience à 10 h 38

  2   [Le témoin entre dans la Cour]

  3   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Le témoin est-il présent au prétoire ?

  4   Monsieur, pouvez-vous donner lecture de la déclaration solennelle ?

  5   LE TÉMOIN :  Je déclare solennellement que je dirai la vérité, toute

  6   la vérité et rien que la vérité.

  7   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Je vous remercie, Monsieur. 

  8   Veuillez vous asseoir.

  9   TÉMOIN :  JEAN PIERRE CAPELLE

 10   (ASSERMENTÉ)

 11   INTERROGÉ PAR Me NICE (interprétation) :

 12   Q.  Monsieur Capelle, je crois que vous avez été lieutenant colonel dans

13   l’armée française, vous avez passé beaucoup d’années en Bosnie au moment du

14   conflit et, plus récemment, vous avez travaillé en tant qu’analyste

15   militaire pour le Bureau du Procureur.  Est-ce exact ?

 16   R.  C’est exact.

17   Q.  Pourriez-vous nous parler davantage du temps que vous avez passé en

18   Bosnie pour nous donner une idée de la connaissance que vous avez de la

19   région ?  Combien d’années avez-vous passées là ?

20   R.  J’ai travaillé en Bosnie pour la première fois en 1991, avant le

21   conflit, au sein de la Communauté européenne comme observateur.

22   Je suis revenu en Bosnie en 1992 avec le premier mandat de

23   l’UNPROFOR où j’étais au sein de l’état-major

24   qui travaillait à Sarajevo et j’étais adjoint à l’officier

25   transport de la force.  Je suis revenu fin 1993 en Bosnie.


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  1   J’ai été observateur militaire à Sarajevo.  En 1994, j’ai été

  2   affecté comme officier de liaison auprès de l’état-major du

  3   HVO à Posusje et fin 1994, j’ai été affecté à un poste

  4   central à l’état-major de Zagreb comme officier aux

  5   renseignements de l’état-major des observateurs militaires

  6   de l’UNPROFOR, et ce jusqu’en 1995.

  7   En 1995, j’ai rejoint le Tribunal comme analyste

  8   militaire et, quelques mois après mon arrivée, j’ai été

  9   affecté de nouveau en Bosnie, j’ai travaillé au bureau de

 10   Sarajevo et j’y suis resté à peu près un an et demi.

 11   Q.  La vidéo que nous allons regarder, quand a-t-

 12   elle été réalisée, quel jour a-t-elle été réalisée ?

 13   R.  Cette vidéo a été réalisée le 27 mai 1996.

 14   Q.  Je pense que vous avez participé à la

 15   préparation de la mission au cours de laquelle cette vidéo

 16   a été réalisée mais en fin de compte, vous ne vous êtes pas

 17   déplacé dans l’hélicoptère alors que la vidéo était filmée,

 18   enregistrée ?

 19   R.  C’est exact.  J’ai préparé cette mission et

 20   il y avait deux phases dans cette mission, une première

 21   phase de prise de vue à terre dans l’ensemble des villages

 22   que nous allons voir.  La deuxième phase, c’était cette

 23   vidéo que j’ai préparée et j’ai participé à l’élaboration

 24   du plan de vol.

 25   Me NICE (interprétation) :  La Chambre va peut-


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  1   être vouloir utiliser une carte.

  2   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  On demandera

  3   au témoin de bien vouloir ralentir son débit.

  4   Me NICE (interprétation) :  Je sais

  5   qu’effectivement, le témoin est tout à fait bilingue.  Il

  6   parle français pour diverses raisons ici au prétoire.  Vous

  7   allez peut-être constater qu’il parle peut-être un peu plus

  8   lentement en anglais mais je suppose qu’il parle les deux

  9   langues.

 10   Q.  De toute façon, quoi que vous parliez,

 11   Monsieur le Témoin, veuillez parler lentement.

 12   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Vous

 13   choisissez votre langue, Monsieur le Témoin, celle que vous

 14   préférez mais parlez-la lentement.

 15   R.  Très bien.  Merci.

 16   Me NICE (interprétation) :  Messieurs les Juges,

 17   vous serez peut-être aidés par cette carte parce que nous

 18   allons parcourir beaucoup de territoires en peu de temps. 

 19   Je peux dire aux Juges d’abord que nous allons remonter la

 20   vallée de la Lasva et puis rebrousser chemin.  Il ne sera

 21   peut-être pas nécessaire d’aller au-delà du premier tronçon

 22   de l’itinéraire.  Je pense que ceci va nous prendre un peu

 23   moins d’une heure.

 24   J’ai posé la question à la Défense, question de

 25   savoir s’il serait utile, bien sûr, sous réserve de l’avis


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  1   de la Chambre, que le témoin puisse interrompre la

  2   diffusion ou plutôt que la Défense aussi intervienne plutôt

  3   que de recommencer la rediffusion par la suite, au moment

  4   de questions éventuelles.  Il se peut que ceci pose des

  5   problèmes pour ceux qui prennent des notes, je ne sais pas

  6   mais sous réserve de tous ces problèmes, je vous propose

  7   ceci comme modalité de travail.

  8   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Me Stein, Me

  9   Kovacic, ça me semble être une bonne démarche, à moins que

 10   vous ne vouliez procéder d’autres manières.

 11   Me STEIN (interprétation) :  Il se peut qu’à un

 12   moment donné, nous arrêtions la diffusion mais à la fin de

 13   la diffusion, par le contre-interrogatoire ou par d’autres

 14   questions, nous aimerions poser des questions à la Chambre

 15   sur ce qui ne se trouve pas sur la cassette.

 16   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Si à un moment

 17   donné, vous voulez soulever une question, je pense qu’il

 18   est peut-être préférable d’arrêter la diffusion pour voir

 19   la question qui vous préoccupe.

 20   Me STEIN (interprétation) :  Merci, Monsieur le

 21   Président.

 22   Me NICE (interprétation) :  Je pense que le témoin

 23   demandera l’interruption de cette diffusion de temps à

 24   autre, ne serait-ce que pour expliquer ce que nous sommes

 25   en train de faire.  La Chambre souhaitera sans doute


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  1   examiner le lieu de Kaonik.  Il n’est pas facile de voir

  2   Kaonik depuis la route mais on peut l’entrapercevoir à

  3   travers les arbres.  Vous le verrez sur la cassette.

  4   Si l’on voit, à un moment donné, la route de

  5   montagne, et je pense que ce sera le cas – le Colonel

  6   Capelle semble être de cet avis – il y a des reliefs

  7   différents par rapport à cet endroit et au reste de la

  8   vallée qui est plus engoncée mais il se peut qu’à d’autres

  9   moments, le témoin souhaite interrompre la vidéo.  Il

 10   s’agit de la pièce 2799.  Je demanderais qu’on la diffuse

 11   et je demanderais l’autorisation de m’asseoir, sauf pour

 12   les moments où je devrai intervenir.

 13   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Cela va de

 14   soi, Me Nice.

 15   [DIFFUSION D’UNE CASSETTE VIDÉO]

 16   R.  La vidéo commence par le survol du village de

 17   Tulica qui se situe à 11 kilomètres au sud-est de Kiseljak.

 18   Me NICE (interprétation) :  Sans que soit

 19   interrompue la diffusion, est-ce qu’en temps utile, le

 20   témoin peut indiquer un point où il faut arrêter parce

 21   qu’on voit des toits détruits, des bâtiments démolis ? 

 22   Ainsi, nous pourrons mieux les reconnaître nous-mêmes par

 23   la suite.

 24   R.  Nous arrivons, en effet, maintenant dans les

 25   zones de destruction de Tulica.  L’une des caractéristiques


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  1   c’est que, justement, la plupart des toits ont disparu.  La

  2   présence de toits ne signifie pas forcément que les maisons

  3   sont intactes.  Il est possible de voir à partir des vidéos

  4   bien souvent les zones autour des fenêtres de ces maisons

  5   qui sont noircies car les maisons ont brûlé, bien que le

  6   toit soit toujours en place.

  7   On aperçoit, effectivement, sur Tulica que la

  8   majeure partie des toits des maisons ont disparu. 

  9   L’hélicoptère maintenant, enfin, survole autour de zones où

 10   ont été creusées des tranchées dans la région de Tulica. 

 11   Elles apparaissent maintenant très nettement sur l’écran. 

 12   On aperçoit aussi qu’il existe plusieurs lignes de

 13   tranchées, ce qu’on retrouve sur le terrain la plupart du

 14   temps, au moins deux lignes de tranchées.

 15   L’hélicoptère maintenant est remonté vers

 16   Kiseljak, c’est-à-dire vers le nord-ouest, et rejoint la

 17   région de Grahovci, Han Ploca.  Le village est situé le

 18   long d’une piste qui elle-même remonte sur les crêtes qui

 19   dominent la vallée où passe la route Kiseljak-Sarajevo.  Là

 20   aussi, on s’aperçoit que quelques maisons ont gardé leur

 21   toit.  La majeure partie d’entre elles sont détruites.  Là

 22   aussi, on retrouve des réseaux de tranchées au-dessus du

 23   village de Han Ploca, Grahovci.

 24   On rejoint le village de Rotilj qui est un peu

 25   plus au nord, cette fois-ci à l’ouest de Kiseljak, au sud-


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  1   ouest de Kiseljak, à deux kilomètres au sud-ouest de

  2   Kiseljak.  En regardant la vidéo, vous allez vous

  3   apercevoir que les fenêtres de la plupart des maisons ont

  4   disparu et que, justement, l’intérieur des maisons est

  5   détruit.  Certaines de ces maisons n’ont plus de toit.

  6   Me NICE (interprétation) :  On va interrompre la

  7   diffusion.

  8   [INTERRUPTION DE LA DIFFUSION]

  9   Q.  Monsieur le Témoin, si vous voyez des

 10   exemples de toits qu’on peut distinguer parfois, de toits

 11   appartenant à des maisons musulmanes ou à des maisons

 12   croates, veuillez attirer l’attention des Juges sur cette

 13   différence, Monsieur le Témoin.

 14   R.  Oui, je le ferai.

 15   [REPRISE DE LA DIFFUSION]

 16   R.  Nous avons rejoint Kiseljak.  Nous voyons au

 17   centre de l’image la mosquée de Kiseljak dont le minaret a

 18   disparu.  Cette mosquée est située au nord de la ville,

 19   près de la route Kiseljak-Busovaca.  L’appareil survole

 20   maintenant les hauteurs de Kiseljak et va rejoindre les

 21   casernes du HVO de Kiseljak.  Les casernes sont situées au

 22   sud-ouest de la ville, le long de la route Kiseljak-

 23   Kresevo.

 24   L’hélicoptère va maintenant rejoindre les hauteurs

 25   ouest par rapport à Kiseljak et le village de Visnjica, qui


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  1   est à trois kilomètres et demi à l’ouest de la ville. 

  2   L’hélicoptère suit la route, la route principale dans un

  3   premier temps puis la piste qui va mener à Visnjica.

  4   On peut arrêter la caméra.

  5   [INTERRUPTION DE LA DIFFUSION]

  6   R.  Sur les flancs des collines qui sont en face

  7   de nous maintenant à droite de l’écran, on s’aperçoit

  8   qu’effectivement, il n’y a plus de fenêtres.  Ces maisons

  9   ont été détruites à l’intérieur.  Je me suis moi-même rendu

 10   sur ces maisons, enfin, ou dans ces maisons et la plupart

 11   des maisons qui étaient sur la crête ici ont été détruites.

 12   Continuez maintenant.

 13   [REPRISE DE LA DIFFUSION]

 14   R.  Nous arrivons dans Visnjica maintenant. 

 15   Visnjica est dans une vallée.  Là aussi, la quasi totalité

 16   des maisons du hameau ont été détruites.  On voit

 17   maintenant que ces maisons sont le long des armes, le long

 18   de la route.  On passe maintenant devant la mosquée.  Ce

 19   que vous avez en face de vous est la mosquée de Visnjica. 

 20   Nous arrivons à la fin du village de Visnjica. 

 21   L’hélicoptère va survoler les hauteurs du village.  Les

 22   maisons que vous avez devant vous actuellement ont été

 23   détruites.  En fait, il n’y avait pas d’habitants quand

 24   nous étions là en 1996, même pour les maisons qui

 25   comportent des toits. 


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  1   L’appareil fait demi-tour.  On revoit la mosquée

  2   sur l’écran.  Elle disparaît sur votre droite.  L’appareil

  3   maintenant rejoint Polje Visnjica qui est le long de la

  4   route principale Kiseljak-Busovaca, où là, les maisons

  5   détruites se trouvaient… en fait, il y avait aussi des

  6   maisons intactes habitées par la population croate de la

  7   région de Kiseljak.  On trouve quelques destructions au

  8   milieu de ces maisons.

  9   On peut arrêter la caméra.

 10   [INTERRUPTION DE LA DIFFUSION]

 11   R.  Vous voyez maintenant sur le haut de l’écran

 12   et à droite, là c’est relativement clair aussi… stoppez la

 13   caméra, s’il vous plaît.  Merci.  Il faut revenir très

 14   légèrement en arrière d’une ou deux secondes.  On a manqué

 15   cette phase.  Vous voyez très clairement au milieu des

 16   maisons justement qui n’avaient pas de toit, on voyait

 17   très, très clairement cette fois deux ou trois maisons qui

 18   avaient des toits mais dont l’intérieur avait dû brûler et

 19   le tour des fenêtres était bien noir.  On a passé ces

 20   images, je crois.

 21   Continuez.

 22   [REPRISE DE LA DIFFUSION]

 23   R.  L’appareil maintenant va suivre la route

 24   Kiseljak-Busovaca.  On passe au-dessus de Hercezi Duhri

 25   dont on vient de voir la mosquée.  Là, nous sommes toujours


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  1   dans la même zone, très près de Visnjica et assez près de

  2   Kiseljak.  Nous sommes à quelques kilomètres, deux, trois

  3   kilomètres de Kiseljak.

  4   L’appareil survole toujours la même zone.  On voit

  5   très nettement la mosquée au centre de l’écran maintenant,

  6   plutôt à gauche.  Au centre maintenant.  L’appareil ensuite

  7   passe la route Kiseljak-Busovaca, franchit cette route et

  8   part vers le nord-est, vers Gomionica.  Effectivement, les

  9   destructions sont beaucoup plus évidentes.  La quasi

 10   totalité des maisons ont perdu leur toit. 

 11   Behrici est le village qui jouxte Gomionica.  Les

 12   villages sont situés sur les pentes qui font face à la

 13   route Kiseljak-Busovaca.  L’appareil a effectué un cercle

 14   et revient sur Gomionica.

 15   On peut arrêter la caméra.  Est-ce qu’on peut

 16   arrêter l’appareil, s’il vous plaît ?

 17   [INTERRUPTION DE LA DIFFUSION]

 18   R.  Là, on voit de nouveau, on est sur un… merci. 

 19   On voit de nouveau qu’on a en face de nous un groupe de

 20   maisons.  La totalité de ces maisons ont été détruites, la

 21   totalité.  Vous voyez bien que certaines maisons, par

 22   exemple, la maison qu’on a le plus à droite et vers nous a

 23   toujours son toit mais on voit les entrées de cette maison,

 24   elle est détruite, l’intérieur de la maison est détruit et

 25   il en était de même pour les maisons qui étaient derrière.


Page 13315

  1   Continuez.

  2   [REPRISE DE LA DIFFUSION]

  3   R.  On est toujours au-dessus de Gomionica. 

  4   L’appareil a simplement effectué un cercle.  Il se dirige

  5   maintenant vers Svinjarevo, un tout petit peu plus au nord,

  6   à un kilomètre au nord de Gomionica, toujours le long de la

  7   route Kiseljak-Busovaca.  C’est Svinjarevo dont je parlais

  8   à l’instant, village qui jouxte Behrici et Gomionica. 

  9   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Est-ce que

 10   c’est une vallée qu’on est en train de survoler, qu’on

 11   remonte ?

 12   [INTERRUPTION DE LA DIFFUSION]

 13   R.  Absolument, on remonte une vallée.  Les

 14   villages que nous venons de voir sont sur le flanc des

 15   collines qui jouxtent la vallée.  Je crois que la rivière

 16   qui coule dans cette vallée est la Mlava.  Nous ne sommes

 17   pas encore dans  la vallée de la Lasva.  Nous sommes au sud

 18   de Busovaca.  Cette vallée est la Mlava.

 19   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Est-ce qu’on

 20   parle quelquefois de cette vallée comme étant la vallée de

 21   Kiseljak ou est-ce que celle-là se trouve ailleurs ?

 22   R.  Il y a plusieurs vallées autour de Kiseljak.

 23   Donc, je ne pense pas qu’on parle de la vallée de Kiseljak

 24   mais l’axe qui est au nord de Kiseljak, qui remonte vers

 25   Busovaca, longe une vallée jusqu’à la zone où nous nous


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  1   trouvons actuellement ou dans une vallée.

  2   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Nous pouvons

  3   poursuivre.

  4   [REPRISE DE LA DIFFUSION]

  5   R.  On peut arrêter la caméra.

  6   [INTERRUPTION DE LA DIFFUSION]

  7   R.  Ce qui apparaît un peu plus nettement ici sur

  8   l’image, quand on voit la mosquée de Svinjarevo et que le

  9   toit semble intact, il est vrai que la qualité de l’image

 10   ne nous permet pas de voir les détails mais ce toit, on

 11   s’en aperçoit, est partiellement détruit et, comme dans la

 12   plupart des mosquées que nous avons pu voir sur le

 13   territoire, le minaret a été détruit et, bien souvent, les

 14   minarets étaient détruits à l’explosif.

 15   On peut continuer.

 16   [REPRISE DE LA DIFFUSION]

 17   R.  On peut arrêter la caméra.

 18   [INTERRUPTION DE LA DIFFUSION]

 19   R.  Il est indiqué sur l’écran que l’appareil

 20   quitte la zone de Svinjarevo et en même temps, nous

 21   quittons la zone de Kiseljak.  En fait, nous avons longé…

 22   vous avez eu une question concernant cette vallée.  Oui,

 23   nous avons longé une vallée et nous avons observé un

 24   certain nombre de villages qui sont situés de part et

 25   d’autre de cette vallée à partir de Kiseljak.


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  1   On a vu ces villages jusqu’à Svinjarevo.  Ils sont

  2   à droite et à gauche d’une route qui serpente dans cette

  3   vallée et on va maintenant rejoindre une autre zone qui est

  4   la zone de Busovaca.  Ces zones étaient séparées par un

  5   corridor contrôlé par les forces bosniaques pendant le

  6   conflit. 

  7   [REPRISE DE LA DIFFUSION]

  8   R.  Les prochaines images sont des images de

  9   villages qui vont être au sud de Busovaca.  Il y a toute

 10   une zone qu’on appelle le couloir de Kacuni, qui ne va pas

 11   être présentée sur l’écran maintenant.

 12   Le premier village que nous allons voir maintenant

 13   au sud de Busovaca est le village de Ocenici, situé au sud-

 14   est de Busovaca.  On est toujours à Svinjarevo, oui.  On

 15   nous montre maintenant les tranchées à la hauteur au-dessus

 16   de Svinjarevo.  Ici, ces maisons ont leur toit et on

 17   s’aperçoit – c’est très, très évident sur l’image – que les

 18   maisons sont détruites.

 19   Me NICE (interprétation) : 

 20   Q. Veuillez parler de la forme des toits si vous

 21   en avez l’occasion.

 22   R.  Oui.  La plupart des maisons musulmanes ont

 23   des toits à quatre pans.  Vous le remarquerez sur les...

 24   vous l’avez peut-être déjà remarqué par rapport aux maisons

 25   que nous verrons dans les villes ou villages croates.  La


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  1   plupart des maisons bosniaques ou musulmanes ont des toits

  2   à quatre pans. 

  3   Maintenant, on a déjà rejoint la région de

  4   Busovaca et on est à deux, trois kilomètres au sud de

  5   Busovaca.  La région se trouve sur les hauteurs qui

  6   dominent la route Busovaca-Kiseljak.  Le terrain à cet

  7   endroit est particulièrement accidenté et, malheureusement,

  8   le fait de prendre des images d’hélicoptère gomme en partie

  9   la notion de relief.

 10   Ces destructions sont très claires même lorsqu’on

 11   s’aperçoit qu’il reste des parties de toits comme c’est le

 12   cas sur l’écran actuellement.  On est toujours dans la même

 13   zone mais dans les hauteurs sud de Busovaca.

 14   On arrive maintenant au-dessus du camp de Draga au

 15   sud de Busovaca, camp qui est situé dans une vallée

 16   encaissée juste avant l’entrée de la ville.  On arrive, on

 17   est au-dessus de la route Busovaca-Kiseljak actuellement. 

 18   Sur notre gauche, on va à Kiseljak, sur la droite de

 19   l’écran, on va vers Busovaca. 

 20   Ce bâtiment qui se trouve en face de nous en

 21   construction est un bâtiment qui est occupé par les forces

 22   du HVO.  L’appareil maintenant quitte le camp et remonte

 23   vers Busovaca, vers la ville de Busovaca.  On voit ici

 24   quelques destructions.  Il est évident que lorsque les

 25   maisons n’ont plus leur toit, c’est très clair mais


Page 13319

  1   certaines de ces maisons aussi disposaient d’un toit et

  2   étaient intérieurement détruites.

  3   On voit les destructions.  On vient de les voir,

  4   elles sont en périphérie de la ville, au nord.  Il y a une

  5   indication de la mosquée de Busovaca mais qu’on n’arrive

  6   pas à voir sur l’écran, ce n’est pas clair.  On survole les

  7   faubourgs nord de la ville.

  8   On rejoint maintenant… à quelques kilomètres de

  9   Busovaca, on rejoint Kaonik, le camp de Kaonik. Vous pouvez

 10   vous apercevoir que les bâtiments de ce camp sont entourés

 11   d’arbres.  Il est quasiment impossible depuis la route, et

 12   on aperçoit cette route sur la gauche de l’écran dans le

 13   coin, il est pratiquement impossible de voir les bâtiments

 14   du camp de Kaonik.  Le camp de Kaonik est très bien, très

 15   bien masqué à cette végétation et se trouve au sommet d’une

 16   colline.

 17   Nous ne sommes qu’à deux kilomètres 500 environ de

 18   Busovaca.  On survole toujours les bâtiments du camp

 19   actuellement.  L’appareil maintenant quitte le camp de

 20   Kaonik.  Il va se diriger vers l’ouest, vers les villages

 21   de Strane et Merdani.  Les villages sont dans la vallée de

 22   la Lasva.  On passe Strane actuellement.  Les destructions

 23   sont très claires.

 24   On est à deux, trois kilomètres à l’ouest du camp

 25   de Kaonik et près de la route Busovaca… enfin, Vitez-Kakanj


Page 13320

  1   ou Vitez-Zenica.  On arrive ensuite à franchir cette vallée

  2   de la Lasva pour se rendre au nord de la vallée et survoler

  3   les villages de Putis, Jelinak, Loncari.  Nous y sommes là.

  4   À votre gauche, vous pouvez distinguer des

  5   hauteurs qui sont les contreforts du massif de Kuber.  Nous

  6   avons visité ce village.  Il était déjà en cours de

  7   reconstruction.  C’est pourquoi vous pouvez vous apercevoir

  8   qu’un certain nombre de toits sont tout à fait neufs.  Nous

  9   venons de passer des maisons dont les toits sont absolument

 10   neufs.  On s’en aperçoit, le terrain est beaucoup plus

 11   accidenté que dans la vallée précédemment survolée aux

 12   environs de Kiseljak ou de Busovaca.  On voit aussi sur

 13   l’image qu’un certain nombre de toits étaient des toits

 14   neufs. 

 15   On est toujours dans la même zone qui est juste au

 16   sud du massif de Kuber.  On survole maintenant la ville de

 17   Kuce.  Nous ne sommes quand même qu’à huit kilomètres de

 18   Vitez environ.  On est à un maximum de dix minutes de

 19   voiture de Vitez.  On nous indique la mosquée de Putis mais

 20   ce n’est pas évident du tout sur l’écran.  Un grand nombre

 21   de maisons de Putis avaient déjà été réparées ou en cours

 22   de réparation quand nous avons fait le film.

 23   Sur l’écran, il est indiqué que la zone survolée

 24   n’est pas réellement connue.  En fait, il pourrait s’agir

 25   du hameau de Bakije qui est situé entre Loncari et Putis au


Page 13321

  1   sommet d’une colline.  Nous sommes toujours dans la même

  2   zone au sud du massif de Kuber, zone très importante au

  3   plan stratégique pour la liberté d’action sur l’axe Vitez-

  4   Busovaca. 

  5   Nous allons quitter cette zone maintenant pour

  6   nous rapprocher de Vitez et survoler ensuite Nadioci et

  7   Ahmici.  On arrive maintenant à Nadioci le long de la

  8   vallée de la Lasva.  Voilà la route Vitez-Busovaca, proche

  9   aussi de la position du Bungalow, qui était appelé le

 10   Bungalow, et Nadioci.  La quasi totalité des maisons de

 11   Nadioci étaient détruites.

 12   L’appareil maintenant survole les hauteurs de

 13   Nadioci et on va approcher Ahmici.  Aussi, ces villages

 14   situés sur les contreforts des massifs qui dominent la

 15   route ont une importance capitale pour la liberté de

 16   circulation sur cette route. 

 17   On nous montre maintenant le site du Bungalow.  On

 18   vient de le passer.  Il est détruit.  On va approcher

 19   Ahmici par le sud.  On voit la route devant nous, on voit

 20   la route Vitez-Busovaca et on distingue au milieu de

 21   l’écran la route qui monte vers Ahmici.  On est maintenant

 22   de l’autre côté de la route et on survole Ahmici.

 23   On survole actuellement la partie la plus proche

 24   de la route Vitez-Busovaca.  La quasi totalité des maisons

 25   sont détruites ici.  Il ne restait que quelques maisons


Page 13322

  1   intactes habitées par des Croates.  On aperçoit maintenant

  2   au milieu de l’écran la mosquée de la partie basse de

  3   Ahmici.  Elle disparaît sur la droite de l’écran.  On la

  4   reverra tout à l’heure en gros plan.

  5   On remonte vers le centre de Ahmici et maintenant

  6   vers la partie haute de Ahmici.  Nous sommes sur les

  7   hauteurs de Ahmici.  Aussi, la présence des toits pourrait

  8   laisser penser que ces maisons sont intactes.  Elles sont

  9   détruites.  Je parle des maisons que nous voyons

 10   actuellement sur l’écran. 

 11   Nous sommes toujours sur les hauteurs de Ahmici,

 12   sur la partie haute du village.  La mosquée de la partie

 13   haute du village… la mosquée de la partie basse du village

 14   dont le minaret a été cassé et repose sur le toit de la

 15   mosquée.  En bas, la route Vitez-Busovaca. 

 16   L’appareil tourne maintenant et on voit tout à

 17   fait au fond, au niveau des fumées qu’on voit au fond, en

 18   fait, nous sommes à Vitez, à cinq minutes de la ville. 

 19   L’appareil longe la route maintenant et se dirige vers

 20   Santici qui jouxte le village de Ahmici quand on se rend

 21   vers Vitez.  On voit bien les massifs qui dominent la

 22   vallée et au fond Kuber. 

 23   Nous sommes à deux kilomètres et demi environ de

 24   Vitez.  Nous sommes dans la région de Pirici.  On voit là

 25   que des toits ont été reconstruits sur l’écran.  C’est très


Page 13323

  1   clair.  Le toit qui disparaît sur la droite de l’écran a

  2   été reconstruit.  Il y a une annotation sur l’écran car

  3   toutes les zones que vous voyez sur l’hélicoptère ont été

  4   visitées auparavant et dans la zone survolée actuellement,

  5   il y avait, effectivement, un problème, une présence de

  6   mines lorsque nous avons rempli cette mission et nous

  7   n’avons pas pu continuer à cause du danger, on n’a pas pu

  8   continuer à pied dans le village.

  9   On survole toujours la partie nord de la route

 10   Vitez-Busovaca, toujours la région de Pirici avec cette

 11   fois un survol au niveau des tranchées.  Il n’était pas

 12   possible de se rendre sur ces hauteurs à l’époque à cause

 13   du danger de mines.

 14   Nous sommes sur les parties hautes de Sivrino Selo

 15   et on rejoint progressivement Vitez.  Sivrino Selo dont je

 16   viens de parler est situé juste au nord de Dubravica, dans

 17   les faubourgs de Vitez.  L’hélicoptère est actuellement au

 18   niveau de Stari Vitez.  Il va survoler l’usine chimique. 

 19   On aperçoit le premier bâtiment.  L’usine chimique et de

 20   fabrication d’explosifs vient à continuer à fonctionner

 21   pendant le conflit.

 22   On approche de Gacice, qui est à l’ouest de Vitez,

 23   près de l’usine chimique, et Veceriska, aussi à proximité

 24   de Vitez.  Nous sommes à deux kilomètres de Vitez.  On

 25   s’aperçoit que les hauteurs qui dominent l’usine sont


Page 13324

  1   détruites, les hauteurs de Gacice.

  2   Q. Si vous voyez la route de montagne qui mène à

  3   Zenica, n’hésitez pas à arrêter l’image pour nous

  4   l’indiquer.

  5   R.  Pour le moment, nous ne sommes pas du tout

  6   dans la région de cette route.  Nous sommes au sud,

  7   sud/sud-ouest de Vitez.  La route dont vous parlez est au

  8   nord, nord/nord-est.

  9   Toujours dans la région de Gacice, sur les

 10   hauteurs proches de l’usine chimique, toujours à l’ouest de

 11   Vitez, on aperçoit, effectivement, l’usine sur la gauche de

 12   l’écran.

 13   Toujours à Gacici mais cette fois sous un autre

 14   angle vu du nord.

 15   Une vue au-dessus de Vitez et Stari Vitez,

 16   toujours au-dessus de l’usine.

 17   L’appareil devrait se diriger ensuite vers le sud

 18   de Vitez, dans la région de Kruscica, toujours près de

 19   l’usine.  Donc, on est toujours près de Veceriska, de

 20   Gacice.  Actuellement, c’est Veceriska que nous voyons.

 21   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Nous avons vu

 22   suffisamment de vues de l’usine chimique.  Est-ce que nous

 23   pouvons peut-être passer à un autre plan ?

 24   R.  On va passer très, très prochainement à

 25   Kruscica.


Page 13325

  1   Me NICE (interprétation) :

  2   Q. Je crois que nous approchons du moment où

  3   l’hélicoptère va faire demi-tour.  Je crois qu’à ce moment-

  4   là, nous pourrons interrompre la diffusion.  Nous pourrions

  5   peut-être passer en accéléré.

  6   R.  Il y a encore quelques images peut-être

  7   intéressantes qui sont les images de la carrière qui était

  8   située au nord-ouest de Vitez où se trouvait l’artillerie

  9   du HVO et il y a quelques images de Kruscica.

 10   Donc, actuellement, on est à Stari Vitez.  Ici, on

 11   peut avoir une idée des destructions de Stari Vitez.  Un

 12   grand nombre de ces maisons étaient déjà réparées.  Elles

 13   le sont quasiment toutes aujourd’hui.

 14   L’appareil survole Stari Vitez et la zone où ont

 15   été enterrées les victimes de Ahmici.

 16   On domine actuellement la route qui quitte Vitez,

 17   la route au nord de Vitez, Vitez-Travnik, et on entre à

 18   Vitez par le nord.  On va voir bientôt sur la droite de

 19   l’écran l’hôtel Vitez, l’état-major du HVO.  On y est.  Il

 20   apparaît, pardon, sur la gauche de l’écran.  On voit

 21   maintenant l’hôtel Vitez tout à fait à gauche.

 22   Au haut de l’écran à droite, le cinéma.  Il a

 23   disparu de l’écran.  Actuellement, on se dirige vers le sud

 24   de Vitez.  Quelques destructions disparaissent de l’écran.

 25   L’appareil a effectué un cercle et repart vers le


Page 13326

  1   nord de la ville.  On va voir bientôt l’école de Vitez et

  2   on devrait revoir le cinéma, je pense.

  3   On y arrive.  Le centre culturel était tout à fait

  4   à gauche.  Il vient de disparaître de l’écran.  On le

  5   revoit tout à fait à gauche en haut de l’écran ainsi que

  6   l’école.  Il réapparaît sur l’écran à gauche.

  7   Ça donne aussi une idée des distances au sein de

  8   la ville entre l’état-major, l’hôtel de Vitez et le centre

  9   de culturel.  Vous voyez qu’il y a quelques dizaines de

 10   mètres.  Le bâtiment est le bâtiment municipal de Vitez où

 11   se trouve l’administration.

 12   C’est possible d’accélérer l’image ?  Vous pouvez

 13   ralentir maintenant.  On approche de Kruscica au sud de

 14   Vitez, zone contrôlée pendant le conflit par les musulmans.

 15   On peut accélérer l’image, je pense.  L’appareil

 16   devrait survoler par la suite de nouveau la partie nord de

 17   Vitez et la carrière au nord de Vitez.

 18   L’appareil remonte vers Vitez.

 19   Q. Est-ce que nous sommes déjà à l’endroit où

 20   l’hélicoptère est sur le point de faire demi-tour ?

 21   R.  Pas encore.  Ça se passera après le survol de

 22   la carrière.  On devrait arriver très prochainement à la

 23   carrière.

 24   Q.À moins qu’il y ait des passages

 25   intéressants, je pense que par la suite, nous pourrons


Page 13327

  1   peut-être en rester là.

  2   R.  En effet.  On ne fait que survoler de nouveau

  3   les mêmes zones que celles qui ont été vues et les seules

  4   images différentes qui figurent sur ce film sont celles de

  5   la carrière avant le posé de l’appareil et je ne pense pas

  6   que ça présente un intérêt au niveau… un intérêt majeur, si

  7   ce n’est de voir l’aspect des lieux et il n’y a pas d’image

  8   de destruction ou quoi que ce soit à ce niveau-là.

  9   Q. Nous allons, effectivement, regarder la

 10   carrière parce qu’elle fait partie des éléments de preuve

 11   qui ont été présentés.  J’espère qu’il ne faudra pas trop

 12   longtemps pour y arriver.  Nous n’avons rien vu de la route

 13   de montagne mais on voit de façon générale la taille de ces

 14   massifs, de ces montagnes au nord de Vitez.

 15   Pendant que nous survolions Busovaca, je ne sais

 16   pas si vous connaissez bien la route qui mène à Tisovac

 17   mais c’était à peine visible, même si on pouvait voir les

 18   forêts par lesquelles passe cette route.

 19   R.  L’appareil remonte par le bypass, Grbavica et

 20   on va arriver aux carrières assez rapidement maintenant. 

 21   On voit au fond Grbavica, village qui est complètement

 22   détruit.  On est sur la colline qui disparaît à droite de

 23   l’écran maintenant. 

 24   On arrive à la carrière.  Est-ce que vous pouvez

 25   ralentir l’image ?  On est à trois kilomètres, trois


Page 13328

  1   kilomètres et demi au nord de Vitez.

  2   Q. Quand on parle de « Nora », on voit ceci

  3   apparaître sur l’écran, qu’est-ce qu’était Nora ?

  4   R.  Il s’agit d’une pièce d’artillerie que

  5   possédait le HVO et dont on dit qu’elle était sur cette

  6   zone dans la carrière.

  7   On descend de la carrière.  Il existe des zones

  8   assez dégagées où il est parfaitement possible d’implanter

  9   des pièces d’artillerie.  On est, effectivement, autour de

 10   la carrière.  On s’en aperçoit c’est qu’elle est très

 11   encaissée et que, par conséquent, elle offre une protection

 12   importante au matériel qui pouvait être stocké

 13   Maintenant, nous allons quitter la carrière.  Je

 14   ne sais pas si vous voulez voir la suite du film.  On voit

 15   de nouveau Vitez.  Là, c’est la vallée de la Lasva.  On a

 16   une idée du relief sur cette image.

 17   [FIN DE LA DIFFUSION]

 18   Me NICE (interprétation) :  Je crois que cette

 19   cassette se termine.  La décision n’est plus à prendre par

 20   qui que ce soit.  Voilà, c’est terminé.

 21   Je ne voulais pas poser d’autres questions à

 22   Monsieur Capelle.  Je lui sais gré de ses commentaires

 23   fournis au cours de la diffusion.

 24   Me NAUMOVSKI (interprétation) :  Merci, Monsieur

 25   le Président.


Page 13329

  1   CONTRE-INTERROGÉ PAR Me NAUMOVSKI

  2   (interprétation) : 

  3   Q. Monsieur le Témoin, j’ai quelques questions à

  4   vous poser, des questions de principe.  J’aimerais me

  5   présenter, je m’appelle Mitko Naumovski.  Je suis un avocat

  6   de Zagreb et je suis un des conseils du premier accusé,

  7   Monsieur Kordic. 

  8   Dites-nous, s’il vous plaît, combien de temps vous

  9   avez passé en Bosnie centrale.  Est-ce que vous pouvez me

 10   dire à peu près, approximativement ?

 11   R.  Je n’ai pas vécu en Bosnie centrale mais je

 12   suis passé dans cette zone à plusieurs reprises.  J’ai eu à

 13   y circuler de nombreuses fois pour me rendre à Kiseljak, à

 14   l’état-major de Kiseljak, pour voyager entre Sarajevo et

 15   Kiseljak, pour aller à Gornji Vakuf, pour voyager entre

 16   Gornji Vakuf et Vitez, pour voyager entre Posusje, Gornji

 17   Vakuf, Vitez, Zepce.

 18   Donc, j’ai sillonné cette zone assez souvent, à de

 19   nombreuses reprises mais je n’ai pas vécu en Bosnie

 20   centrale.

 21   Q. Pourriez-vous nous dire si vous êtes au

 22   courant, si vous savez, si on vous a dit quelles sont les

 23   municipalités qui font partie de la Bosnie centrale ?

 24   R.  Absolument mais là, je n’ai pas pris de notes

 25   pour cela.  Oui, on m’a parlé des municipalités de la


Page 13330

  1   Bosnie centrale.  Oui.

  2   Q.Si je vous ai bien compris, Monsieur, c’est

  3   vous qui avez fait le plan d’enregistrement.  Vous n’étiez

  4   pas présent mais c’est vous qui avez fait le plan ?

  5   R.  Pour cette mission, on m’a donné une liste de

  6   villages qui devaient être visités par l’équipe d’enquête. 

  7   Les délais qui nous étaient impartis étaient relativement

  8   brefs.  Donc, il convenait de le faire de façon logique,

  9   d’extraire les coordonnées qui permettraient aux gens qui

 10   nous accompagnaient, c’est-à-dire aux gens de SFOR, de

 11   travailler dans des conditions convenables avec nous et,

 12   donc, j’ai fait un travail qui était plus un travail de

 13   topographe et d’officier opération, un travail d’historien

 14   ou de géographe, comme vous venez de l’indiquer.

 15   Je n’ai pas eu, pour effectuer ce travail, à me

 16   préoccuper des municipalités sur lesquelles se trouvaient

 17   les villages, par exemple.

 18   Q. Pourriez-vous me dire qui vous a dit ce qu’il

 19   fallait enregistrer, filmer ?

 20   R.  Je n’ai pas tourné le film moi-même.  Donc,

 21   on ne m’a pas dit ce qu’il fallait filmer et si je m’étais

 22   trouvé dans l’hélicoptère, j’aurais sans doute tourné un

 23   film différent.  Je ne suis pas un technicien vidéo.  On

 24   m’a simplement dit de prévoir un plan pour visiter ces

 25   villages, dans un premier temps, avec des véhicules et pour


Page 13331

  1   en faire l’inspection et faire un rapport photos et,

  2   ensuite, on m’a demandé de faire un plan de survol de cette

  3   zone, chose que j’ai eu à faire à plusieurs reprises.

  4   Q. Ce n’est pas à ça que je pensais.  Je n’étais

  5   probablement pas précis.  Excusez-moi, je vais répéter. 

  6   Qui vous a donné la liste des villages, des localités qu’il

  7   fallait filmer ?  C’est ça que je voulais demander.

  8   R.  La personne qui m’a fourni cette liste était

  9   le responsable de l’enquête qui travaille pour le Bureau du

 10   Procureur et c’est ce responsable d’enquête qui m’a fourni

 11   la liste des villages et qui m’a indiqué ce qu’il voulait

 12   faire.  Cette personne était, d’ailleurs, dans l’appareil,

 13   raison pour laquelle j’ai pu voir moi-même qu’un survol

 14   avait été fait deux fois au-dessus de Ahmici pour des

 15   raisons qui appartiennent uniquement à cet enquêteur et non

 16   pas à ce qu’il m’avait demandé.

 17   Q.Si je vous comprends bien, c’était quelqu’un

 18   du Bureau du Procureur.  Pourriez-vous nous donner le nom

 19   de la personne en question ?

 20   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Mais quel est

 21   l’intérêt de cette question ?  Me Naumovski, est-il

 22   important de connaître le nom de cette personne et quel est

 23   l’intérêt de savoir quelle était la nature des instructions ?

 24   Cette déposition a pour seul objet de nous montrer quels

 25   étaient les lieux et l’état des lieux en 1996.  Puisque


Page 13332

  1   nous n’allons pas nous rendre dans la région, l’idée,

  2   c’était de nous donner précisément une idée du paysage de

  3   la région.  C’est tout ce qu’on recherche à faire.  Le

  4   reste n’a aucune pertinence.

  5   Me NAUMOVSKI (interprétation) :  C’est justement

  6   la question que je voulais poser parce que c’était juste à

  7   titre d’introduction que j’ai posé cette première question. 

  8   Si vous permettez, Monsieur le Président…

  9   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Posez votre

 10   question suivante.

 11   Me NAUMOVSKI (interprétation) :  Je vais poser la

 12   question suivante.  Merci.

 13   Q. J’ai pu constater, Monsieur le Témoin –

 14   c’était la raison pour laquelle j’ai commencé à vous poser

 15   les questions – que toute une série de villages manque sur

 16   le film, sur la cassette vidéo.  Je vais juste vous donner

 17   un exemple.  Vous avez passé de la municipalité de

 18   Kiseljak, donc, il y a cette séquence, ensuite, la dernière

 19   place est Svinjarevo et dans la municipalité de Busovaca,

 20   c’est Ocenici. 

 21   Par conséquent, il y a toute une série de villages

 22   entre Bilalovac et Kacuni qui manque et, ensuite, il y a

 23   une série de villages croates, Oseliste, Gusti Grab,

 24   Nezirovici, et cætera.  Pourriez-vous nous dire quelles

 25   sont les raisons pour lesquelles vous n’avez pas filmé ces


Page 13333

  1   villages ?

  2   R.  Je ne suis pas en mesure de dire pour quelle

  3   raison ces villages n’ont pas été filmés car on m’a demandé

  4   de procéder à un travail purement technique pour situer à

  5   préparer un itinéraire pour des gens qui devaient eux-mêmes

  6   procéder à un travail technique, de prendre des photos.  Ni

  7   moi-même, au niveau de la préparation de cette mission, ni

  8   les photographes, ni les techniciens vidéo n’ont fait eux-

  9   mêmes un choix des villages qui devaient être photographiés

 10   ou filmés.

 11   Donc, le choix ne m’appartenait pas.  On m’a donné

 12   une liste.  À partir de cette liste, j’ai essayé de faire

 13   un travail cohérent.

 14   M. LE JUGE BENNOUNA :  Me Naumovski, je crois que

 15   ce que vient de dire mon collègue le Juge May… ne vous

 16   sentez pas obligé de faire un contre-interrogatoire

 17   absolument quelle que soit la situation.

 18   Ici, c’est une présentation d’un certain nombre de

 19   lieux.  Si vous voulez, ajouté par le Procureur, qui

 20   remplace, effectivement, parce qu’il n’y a pas eu de visite

 21   sur le site… si vous pensez – c’est à vous puisque là, vous

 22   avez en face de vous un technicien – qu’il y a certains

 23   lieux qui ne figurent pas sur cette cassette, vous le

 24   mentionnez pour le compte rendu.  Il ne faut pas prolonger

 25   le contre-interrogatoire d’une façon tout à fait


Page 13334

  1   artificielle.

  2   Vous avez en face de vous un technicien qui a mis

  3   en œuvre un programme décidé par le Procureur.  Alors, à

  4   vous de nous dire si, dans ce programme, il y a des choses

  5   qui manquent et puis ça pourrait être très rapide.

  6   Me NAUMOVSKI (interprétation) :  Merci, Monsieur

  7   le Juge.  Je m’y conforme.  C’est à titre d’information que

  8   je voulais poser la question au témoin.  Ce n’est pas pour

  9   véritablement procéder à un contre-interrogatoire.  Je

 10   pense que nous nous sommes mis d’accord et le témoin vient

 11   de me donner la réponse car moi, je voulais justement

 12   présenter aux Juges le fait que ce que nous avons vu, il y

 13   a un certain nombre de villages qui manquent.  Là, nous

 14   sommes parfaitement bien d’accord. 

 15   Q. Donc, j’ai une autre question à poser, une

 16   dernière.  Monsieur le Témoin, nous sommes bien d’accord

 17   pour dire que vous n’avez pas filmé aucun village de la

 18   municipalité de Travnik et de Novi Travnik, alors que ces

 19   municipalités également font partie de la Bosnie centrale ?

 20   R.  C’est qu’on ne m’a pas demandé d’effectuer le

 21   travail, de planifier quoi que ce soit sur les villages

 22   appartenant à Novi Travnik ou Travnik, à ces municipalités.

 23   Me NAUMOVSKI (interprétation) :  Et puis la toute

 24   dernière question, Monsieur le Président, Messieurs les

 25   Juges.


Page 13335

  1   Q. Monsieur le Témoin, tout à l’heure, vous avez

  2   mentionné le village Bakir entre Loncari et Putis.  Un mot. 

  3   Vous avez dit qu’il y avait un certain nombre de maisons

  4   qui ont été détruites.

  5   R.  C’est exact.

  6   Q.Est-ce que nous sommes d’accord pour dire que

  7   vous ne savez pas exactement quelle est la partie du

  8   village qui appartenait aux Croates ou habitée par les

  9   Croates, la partie du village où, majoritairement, étaient

 10   des musulmans ou l’autre partie qui a été détruite et où

 11   habitaient les musulmans ?  Là, vous ne le savez pas

 12   précisément

 13   R.  Absolument pas.  Pour le village de Bakir,

 14   quelle était la partie du village qui appartenait et qui

 15   était habitée par des Croates ou la partie du village

 16   habitée par des musulmans.

 17   Me NAUMOVSKI (interprétation) :  Merci, Monsieur

 18   le Témoin.

 19   Merci au Président et aux Juges.

 20   Me KOVACIC (interprétation) :  En toute franchise,

 21   Monsieur le Président, je suis confus, je suis dans la

 22   confusion la plus absolue parce que j’ai l’impression que

 23   la cassette vidéo est en fonction… comme Monsieur le Juge

 24   Bennouna l’avait précisé, a été faite justement pour

 25   comprendre mieux le contexte et les localités dont il est


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  1   question depuis le mois d’avril déjà.

  2   C’est la raison pour laquelle je ne sais

  3   véritablement pas s’il faut procéder à un contre-

  4   interrogatoire car nous savons fort bien quel était le rôle

  5   du témoin mais pour exclure un élément de preuve à

  6   l’encontre de mon client, je voudrais tout simplement poser

  7   une question si vous me le permettez, Monsieur le

  8   Président, Messieurs les Juges.

  9   CONTRE-INTERROGÉ PAR Me KOVACIC

 10   (interprétation) : 

 11   Q. Tout premièrement, Monsieur le Témoin, vous

 12   nous avez dit que sur les maisons, on voyait un certain

 13   nombre de signes et que, selon ces signes, on pouvait

 14   conclure s’il y avait des choses qui ont été détruites ou

 15   non.  Est-ce que toutes ces maisons qui ont été détruites,

 16   d’après vous, prouvent ou peuvent nous conduire à conclure

 17   que la maison a été détruite lors des combats directs, que

 18   c’était un objectif, par exemple, de défense ou, tout

 19   simplement, que c’était par incident que la maison a été

 20   détruite, qu’elle a été détruite à l’explosif ?

 21   Est-ce que vous-même, vous pouvez dire en tant que

 22   technicien quelle est la cause de la destruction de la

 23   maison ?

 24   R.  Dans certains cas, les causes de destruction

 25   des maisons sont évidentes pour moi qui suis militaire et


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  1   pour moi qui suis artilleur ou qui ai eu à utiliser des

  2   munitions comme des roquettes, des roquettes anti-char et

  3   différents types de munitions.  Dans certains cas, il est

  4   évident, j’ai pu voir des destructions causées par des

  5   munitions.  J’ai pu voir des destructions causées par de

  6   l’explosif.

  7   Un exemple :  Sur le film que nous venons de voir,

  8   il est évident que le minaret de la mosquée de Ahmici, de

  9   la partie basse de Ahmici, il est évident que ce minaret a

 10   été détruit à l’explosif.  Il est vrai que dans certains

 11   cas, il conviendrait de procéder à une étude technique à

 12   l’aide de spécialistes en balistiques, de spécialistes en

 13   explosifs, et cætera, pour savoir quelles sont les causes

 14   exactes des destructions.

 15   Maintenant, ce que je voulais vous dire c’est

 16   qu’au cours de cette mission, qui s’est déroulée en mai

 17   1996, nous avons vu des centaines, je dis bien des

 18   centaines de maisons détruites, et ce en six jours, et le

 19   but de cette mission était de réaliser un reportage

 20   photographique et un reportage qui permet, par des films

 21   vidéos pris au sol ou par hélicoptère, d’avoir une idée de

 22   ces destructions.

 23   Maintenant, nous n’avons pas procédé, lors de

 24   cette mission, à une étude technique sur les causes des

 25   destructions.


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  1   Q.Je vous comprends.  Même pas les

  2   circonstances dans lesquelles ces destructions ont eu

  3   lieu ?

  4   R.  Ce n’était pas l’objet de cette mission.  En

  5   ce qui concerne les circonstances, il convient, pour

  6   connaître les causes d’une destruction, de disposer

  7   d’experts, d’experts balistiques, d’experts en explosifs,

  8   et cætera, mais aussi, bien sûr, de procéder à une étude

  9   historique précise de l’événementiel dans les zones

 10   considérées.

 11   Q.Monsieur le Témoin, au moment où vous avez

 12   élaboré le plan et vous y avez participé, est-ce que vous

 13   vous êtes adressé à quelqu’un qui était sur place pour

 14   coopérer avec vous et qui aurait pu éventuellement vous

 15   dire qu’un tel et tel village porte tel et tel nom ou une

 16   partie du village est dénommée de cette manière-là et que,

 17   souvent, sur la carte topographique, vous ne trouvez pas de

 18   telle désignation locale utilisée par les villageois et ce

 19   ne sont qu’eux-mêmes qui le savent ?  Est-ce que,

 20   éventuellement, vous avez été aidé par des experts de ce

 21   type-là ?

 22   R.  Au cours de la mission que nous avons remplie

 23   en 1996, les seules personnes qui ont participé à cette

 24   mission étaient des techniciens photos, vidéos, des

 25   enquêteurs du Bureau du Procureur et des gens de SFOR,


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  1   c’est-à-dire des militaires de SFOR.  Je ne pense pas qu’il

  2   y ait le moindre doute au niveau localisation concernant

  3   les villages dont nous avons parlé car nous disposions,

  4   d’une part, de cartes détaillées, d’autres part, de moyens

  5   techniques nous permettant de vérifier de façon extrêmement

  6   précise la localisation des endroits où nous devions nous

  7   rendre.

  8   Effectivement, nous n’avons pas utilisé l’aide, si

  9   j’ai bien compris votre question, l’aide de locaux pour,

 10   éventuellement, connaître les noms de lieux dits, et

 11   cætera.  Nous avons travaillé sur les villages qui sont

 12   clairement indiqués sur les cartes.

 13   Q.Merci.  En d’autres termes, au moment où vous

 14   avez élaboré le plan, vous vous êtes appuyé sur les noms

 15   qui existaient sur les cartes topographiques.  Est-ce que

 16   c’est bien ça ?

 17   R.  C’est exact.

 18   Q.Monsieur, est-ce que, éventuellement, vous

 19   avez pu constater que cette carte standard militaire

 20   utilisée dans la région présente une erreur ?  Moi

 21   personnellement, j’ai passé une nuit là-dessus.  Il y a

 22   inversion qui a été faite entre Pirici et Vidovici, à côté

 23   de Sivrino Selo.

 24   R.  Pour répondre à votre question, je voudrais

 25   vous dire qu’ici, nous utilisons, effectivement, ce que


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  1   vous appelez une carte standard qui est, je crois, une

  2   carte au cent millième, pour travailler, pour le travail

  3   technique car il y avait d’autres aspects que la

  4   localisation, il y avait l’aspect sécurité, il y avait

  5   l’aspect axé aux différentes zones où nous devions

  6   travailler. 

  7   Nous avons travaillé avec du matériel beaucoup

  8   plus performant et avec d’autres jeux de cartes qui nous

  9   ont été fournis par la SFOR.  Donc, j’ai fait un travail

 10   technique qui ne reposait pas uniquement sur l’étude de

 11   cartes au cent millième. 

 12   D’autre part, vous venez de l’indiquer, il arrive

 13   relativement rarement mais il arrive que certaines cartes

 14   présentent des défauts au niveau de l’indication des noms,

 15   des localisations et, à ce moment-là, on procède à des

 16   comparaisons avec d’autres jeux de cartes établis de façon

 17   différente par d’autres organismes.

 18   Q. Merci.  Une toute dernière question.  Vous

 19   serez d’accord avec moi pour dire que nous n’avons pas vu

 20   sur la cassette vidéo… j’aimerais vous demander de bien

 21   vouloir jeter un coup d’œil sur la carte que vous aviez

 22   tout à l’heure, Monsieur le Témoin. 

 23   Je pense que nous serons d’accord pour dire qu’il

 24   n’y avait aucune séquence qui serait un peu plus au nord

 25   vis-à-vis de Sadovace, Jardol, Krcevine et Sivrino Selo. 


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  1   Tout ceci est parallèle avec la route principale et au nord

  2   de Vitez mais on ne voit aucune séquence qui est un peu

  3   plus au nord ?

  4   R.  Non.  Il n’y a pas eu de séquence sur les

  5   hauteurs nord que vous indiquez.  Effectivement, la

  6   séquence portait sur des villages situés sur les coteaux ou

  7   sur les flancs des collines qui bordent la vallée de la

  8   Lasva mais absolument pas sur les hauteurs que vous

  9   indiquez.  C’est exact.

 10   Q.Merci.  Encore une autre question.  Vous nous

 11   avez dit qu’on vous a demandé de faire le plan.  Est-ce

 12   qu’au moment où on vous l’a demandé, on a parlé de liaison

 13   des localités que vous avez filmées avec les endroits où se

 14   trouvait la brigade de Vitez ?

 15   R.  Non.  Lorsque ce travail a été effectué, il

 16   n’était absolument pas question de localisation militaire. 

 17   C’est un travail purement technique qui portait sur la

 18   localisation de villages ou de hameaux et je vous dis qu’on

 19   n’a pas fait le parallèle avec un déploiement militaire

 20   et/ou avec un événementiel.  Il n’y a pas eu d’étude

 21   historique ou d’étude de répartition d’unités liée à ce

 22   travail.

 23   Me KOVACIC (interprétation) :  Je vous remercie,

 24   Monsieur.

 25   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je


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  1   n’ai pas d’autres questions.

  2   Me NICE (interprétation) :  Un point encore ou

  3   deux si vous me le permettez, Monsieur le Président.

  4   RÉINTERROGÉ PAR Me NICE

  5   (interprétation) : 

  6   Q.  Monsieur Capelle, vous avez parlé d’une série

  7   de photographies qui ont été prises en même temps qu’a été

  8   filmée cette vidéo.  Ces photographies, toutes ensemble en

  9   tant que jeu de photographies, existent-elles encore

 10   quelque part ?

 11   R.  Je n’ai pas fait de recherche au sujet de ces

 12   photographies mais j’imagine qu’elles sont à la disposition

 13   du Bureau du Procureur qui était le bureau demandeur à

 14   l’époque pour cette mission.

 15   Q.  Avez-vous également limité la portée de ces

 16   photographies aux villages que l’on peut voir de

 17   l’hélicoptère ou bien avez-vous photographié également

 18   d’autres villages, peut-être certains des villages auxquels

 19   la Défense peut s’intéresser ?

 20   R.  Je n’ai pas pris pour venir ici la liste de

 21   tous les villages inspectés à l’époque.  Je sais que

 22   certains villages que nous avons inspectés n’ont pas été

 23   survolés par l’hélicoptère mais nous avons eu à traverser

 24   des villages qui n’étaient pas forcément indiqués sur cette

 25   vidéo.


Page 13343

  1   Un travail photographie a été effectué en

  2   parallèle et qui ne recoupe pas intégralement le travail

  3   vidéo que vous avez pu voir aujourd’hui.

  4   Me NICE (interprétation) :  Monsieur le Président,

  5   si Monsieur Capelle me donne cette liste et si la Défense

  6   me dit quels sont les villages qui l’intéressent, nous

  7   pourrons rechercher ces photographies.

  8   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Très bien.

  9   Me NICE (interprétation) :  Je pense que ce qui

 10   intéresse le Colonel Capelle, c’est la personne qui lui a

 11   donné des instructions sur ce point.  Ces personnes ont été

 12   remplacées par d’autres compte tenu de la nature de

 13   l’institution.

 14   R.  Je voudrais être assez précis concernant la

 15   dernière question qui m’a été posée sur des localisations

 16   au nord de la route Vitez-Busovaca.  C’est sur les hauteurs

 17   au nord de cette route.  Nous n’avons pas procédé à un

 18   travail ni au sol, ni par hélicoptère dans les villages au

 19   nord, ceux que vous avez indiqués tout à l’heure, ceux que

 20   la Défense a indiqués tout à l’heure.  Nous n’avons pas

 21   procédé à un travail dans cette zone-là, définitivement, et

 22   nous avons eu un problème.

 23   Il faut savoir que les crêtes qui dominent la

 24   vallée de la Lasva étaient ce qu’on a appelé pendant le

 25   conflit la ligne de confrontation et que, pour des raisons


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  1   de sécurité, il n’était pas question de se déplacer à pied

  2   ou en véhicule sur des pistes ou des zones qui, à l’époque,

  3   étaient encore considérées pour certaines comme polluées

  4   par des mines.

  5   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : 

  6   Très bien ! 

  7   Colonel Capelle, merci beaucoup

  8   d’être venu ici pour

  9   témoigner.  Vous pouvez à présent vous retirer.

 10   [Le témoin se retire]

 11   M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Nous allons

 12   suspendre l’audience jusqu’à 9 h 30 lundi matin.

 13   --- L’audience est levée à 12 h 20

 14   pour reprendre le lundi

 15   31 janvier 2000 à 9 h 30

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