Page 13796
1 Le mercredi 3 février 2000
2 [Audience publique]
3 [Les accusés entrent dans la Cour]
4 [Le témoin entre dans la Cour]
5 --- L’audience débute à 9 h 36
6 LA GREFFIÈRE : Affaire IT-95-14/2-T, Le Procureur
7 contre Dario Kordic et Mario Cerkez.
8 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Madame Somers, vous avez la parole.
9 Me SOMERS (interprétation) : Merci, Monsieur le Président.
10 TÉMOIN : MIRSAD AHMIC
11 (SOUS LE MÊME SERMENT)
12 INTERROGÉ PAR Me SOMERS
13 (interprétation) :
14 Q. Monsieur Ahmic, je vais vous aider à reprendre le fil. Hier, lorsque
15 nous nous sommes séparés, nous parlions de Monsieur Vujica et de son
16 appartenance à une unité spéciale. Vous avez indiqué hier qu’il
17 portait l’emblème des Jokeris et qu’il n’a pas fait la moindre
18 tentative pour le cacher.
19 Nous reprenons donc à cet endroit et je vous demande si vous avez passé
20 quelque temps avec Monsieur Vujica pour une raison ou pour une autre
21 alors que vous vous trouviez à Kratine.
22 R. Oui. Compte tenu des circonstances, j’ai passé la nuit entière à
23 ses côtés. En effet, lorsque nous sommes arrivés à Kratine, on nous a
24 tout de suite demandé de creuser des tranchées et nous avons creusé ces
25 tranchées jusqu’à tombée de la nuit. Moi, je suis porteur de lentilles
Page 13797
1 optiques et, donc, à la nuit tombée, je vois beaucoup moins bien.
2 C’est la raison pour laquelle je lui ai demandé de me libérer de cette
3 obligation de creuser des tranchées pendant la nuit pour éviter que je
4 ne me blesse moi-même ou quelque chose de ce genre. Il m’a répondu
5 qu’il n’y avait aucun problème et que je pourrais rester avec lui.
6 C’est ainsi que nous avons passé pratiquement toute la nuit à côté l’un
7 de l’autre.
8 Q. Connaissiez-vous Monsieur Vujica ou l’un quelconque des membres de
9 votre famille connaissait-il Monsieur Vujica ?
10 R. En fait, quand nous sommes arrivés, c’est lui qui m’a reconnu.
11 Moi, je ne l’ai pas reconnu tout de suite. Il m’a reconnu parce qu’il
12 connaissait mon épouse qui vient de Busovaca et ils se connaissaient,
13 donc, je ne sais plus si c’est du temps de l’école ou plus tard mais,
14 en tout cas, quand je suis arrivé, c’est lui qui m’a reconnu.
15 Q. Quand vous avez parlé avec lui pendant la nuit, avez-vous discuté
16 de près ou de loin de la question de Ahmici ?
17 R. Eh bien, à un certain moment, nous parlions de la vie en général et
18 c’est à ce moment-là que je lui ai posé une question. Je lui ai dit,
19 en fait, que je ne savais pas ce qu’il était advenu de notre maison. À
20 ce moment-là, il m’a demandé d’expliquer où se trouvait la maison.
21 J’ai essayé de lui décrire l’endroit et il m’a répondu que la maison
22 était certainement détruite.
23 Autrement dit, il m’a conseillé de ne pas compter la retrouver.
24 Q. Cette discussion a eu lieu à peu près une
25 semaine après les événements de Ahmici, n’est-ce pas ?
Page 13798
1 R. C’est à peu près cela. Oui, je crois que c’est à peu près cela.
2 Q. Avez-vous tiré des conclusions quelconques quant à l’importance des
3 connaissances qu’avait Monsieur Vujica au sujet de la façon dont avait
4 eu lieu l’attaque de Ahmici ?
5 R. Eh bien, compte tenu de la façon dont il m’a parlé de ce qu’il
6 était advenu de notre maison, la façon dont il en a parlé m’a indiqué à
7 moi qu’il avait été sur place au moment des événements, qu’il y avait
8 un lien, en tout cas, entre lui et les événements et je pense que les
9 informations qu’il avait étaient tout à fait pertinentes.
10 Q. Reparlons de la discussion que nous avons eue au sujet de Miroslav
11 Bralo. Vous avez déjà dit qu’il était surnommé Cicko. Je vous demande
12 si Monsieur Bralo a contraint l’un quelconque des membres de votre
13 compagnie ou vous-même à faire quelque chose qui était contraire à ses
14 pratiques religieuses.
15 R. Oui. Quand nous sommes arrivés à Kratine, Cicko a dit quelque
16 chose du genre : « Vous ne pourrez pas commencer à travailler tant que
17 vous n’aurez pas fait le signe de la croix » et il a demandé qui
18 d’entre nous savait faire le signe de la croix. Il se trouve que moi,
19 je savais le faire et il m’a dit : « Eh bien, tu as intérêt à apprendre
20 tout le reste parce que tous ceux qui ne feront pas le signe de la
21 croix seront tués. »
22 Q. Tous les autres, pour autant que vous le
23 sachiez, étaient-ils également musulmans ?
24 R. Absolument tous. En tout cas, dans ce groupe dont je faisais
25 partie, ce groupe de cinq ou six hommes dont j’ai fait partie à mon
Page 13799
1 arrivée.
2 Q. Bralo portait-il une arme quelconque qui pouvait laisser entendre
3 que sa menace de tuer serait exécutée ?
4 R. Bien, quand nous étions là-haut, il ne
5 portait aucune arme classique mais il avait une hache à la
6 main et c’est avec cette hache à la main qu’il nous a
7 menacés de nous tuer si nous ne faisions pas le signe de la
8 croix et il n’arrêtait pas de brandir et d’agiter cette hache.
9 Q. Pouvez-vous décrire les conditions dans lesquelles vous avez été
10 contraint de creuser des tranchées à Kratine ? Je vous demanderais, y
11 compris, de nous dire combien de jours vous avez creusé et si on vous a
12 autorisé à prendre du repos de temps en temps.
13 R. Eh bien, s’agissant du groupe dont je faisais partie, nous sommes
14 restés à peu près quatre nuits là-haut, pour autant que je m’en
15 souvienne. Nous travaillions jour et nuit avec des pauses de repos
16 d’une demi-heure dans la journée et puis deux ou trois heures pendant
17 la nuit. C’était la durée la plus longue et les conditions dans
18 lesquelles nous travaillions, eh bien, nous étions sur la ligne de
19 front même. Donc, des coups de feu provenaient d’en face, de sorte que
20 nous étions dans une situation où tout pouvait arriver mais il se trouve
21 que personne n’a été blessé.
22 Q. Encore quelques questions. Une dernière question à ce sujet : Où
23 se trouvait le mont Kuber par rapport à la ligne, à cette ligne ?
24 R. Le mont Kuber était un peu en amont. C’est eux qui disaient qu’il
25 s’agissait du mont Kuber et en aval, il y avait une espèce de petit
Page 13800
1 vallon de 300 mètres de profondeur, je dirais. Enfin, je ne sais pas
2 exactement mais, en tout cas, il y avait ce petit vallon puis le mont
3 Kuber et c’est de cet endroit que l’on tirait sur nous.
4 Q. Le 25 avril ou aux environs de cette date,
5 avez-vous vu Bralo infliger des violences à des prisonniers ?
6 R. Oui, oui, je l’ai vu. Nous étions à un endroit qui était un peu
7 au-dessus de la maison où les soldats du HVO se reposaient dans une
8 tranchée et j’ai vu Cicko, il était accompagné de trois hommes et il
9 leur a donné l’ordre de courir autour d’une étable, de se jeter au sol,
10 de se relever, de faire des pompes, ce genre de choses.
11 Q. Savez-vous ce qu’il est advenu de ces hommes ?
12 R. Je ne le sais pas exactement mais le soldat du HVO qui se trouvait
13 dans la même tranchée que nous a dit à peu près : « Cet imbécile va
14 très certainement les tuer. »
15 Q. Parlons à présent de la période qui a suivi votre libération de
16 Kratine ou plutôt, excusez-moi, parlons de la visite de la Croix-Rouge
17 Internationale à Kratine le 26 avril ou aux environs de cette date.
18 Quand est-ce que vous avez quitté Kratine et où êtes-vous retourné à ce
19 moment-là ?
20 R. Eh bien, écoutez, j’ai beaucoup de mal à me rappeler les dates
21 exactes mais cela a dû se passer quatre ou cinq jours après notre
22 arrivée là-haut. On nous a ramenés tard le soir, vers minuit, à
23 l’endroit d’où on nous avait fait partir.
24 Q. Et de là, êtes-vous allé à un endroit où on a
25 enregistré votre nom avant de vous remettre en liberté ?
Page 13801
1 R. Oui. Dans ce bâtiment du SDK, nous y avons encore passé quelques
2 jours avant que les gardiens ne nous disent un jour que nous pouvions
3 retourner à la maison, autrement dit, que nous étions remis en liberté
4 mais avant cela, il nous fallait nous rendre au cinéma où étaient
5 installés les services administratifs de la Croix-Rouge qui
6 effectuaient les enregistrements et avant notre départ, nous avons
7 également été enregistrés par le HVO.
8 Q. Savez-vous qui vous a enregistré et quelles étaient les questions
9 qui figuraient dans ce registre ? Quelles questions vous a-t-on posées?
10 R. Oui, je le sais. Il y avait là une jeune fille que je connaissais,
11 pas personnellement mais, enfin, je l’avais vue en ville. Elle
12 s’appelait Badrov. Je la connaissais parce qu’elle avait un frère qui
13 jouait au basket et qui était un petit peu connu localement. Donc, je
14 connaissais la famille. Elle portait un uniforme de camouflage et m’a
15 posé les questions habituelles, le nom, date de naissance, et cætera,
16 mais ensuite, elle m’a demandé si je voulais aller à Vitez ou dans la
17 direction de Travnik ou de Zenica.
18 Q. Mademoiselle Badrov portait-elle des emblèmes
19 du HVO ? Vous rappelez-vous ?
20 R. Oui, l’emblème du HVO. Je pense qu’elle l’avait sur la manche ou
21 sur la poche de poitrine. Je ne me souviens plus très bien.
22 Q. Mais comment le HVO se proposait-il de vous
23 emmener jusqu’à Travnik si vous exprimiez le désir de vous y rendre ?
24 R. Eh bien, au moment de notre sortie du cinéma, donc, déjà à ce
25 moment-là, il y avait des autobus qui étaient garés là et les gens qui
Page 13802
1 voulaient partir tout de suite pouvaient monter à bord de ces autobus. Je
2 crois même qu’il y avait un horaire. On savait tous qu’à 11 h 00
3 du matin, si je ne m’abuse, quelques autobus partaient dans cette
4 direction tous les jours.
5 Q. Ces autobus étaient-ils organisés, fournis par le HVO ?
6 R. Oui, je crois, parce qu’à ce moment-là,
7 personne d’autre n’aurait pu les organiser.
8 Q. Quelle a été votre décision eu égard au fait
9 de rester à Vitez ou d’aller ailleurs ?
10 R. Eh bien, je vais vous dire, ma famille et moi-même avions, à ce
11 moment-là, passé près de 25 ans à Vitez, 24 ans exactement. Donc, pour
12 nous, c’était inimaginable de quitter cette ville. Nous ne pouvions
13 même pas nous former cette idée dans l’esprit, l’idée de quitter Vitez,
14 et finalement, nous étions tous convaincus que tout cela n’allait pas
15 durer longtemps, qu’il fallait simplement supporter quelques jours
16 difficiles et que tout reviendrait à la normale.
17 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Peut-être peut-on accélérer un peu
18 l’interrogatoire.Vous avez décidé de rester à Vitez, n’est-ce pas,
19 Monsieur Ahmic ?
20 R. Oui.
21 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Pouvez-vous m’apporter votre aide
22 sur le point suivant ? Vous avez parlé du bâtiment SDK mais à quoi
23 servait-il avant la guerre ?
24 R. Ce bâtiment était celui qui servait à la comptabilité publique.
25 Autrement dit, c’était à cet endroit que des paiements étaient
Page 13803
1 effectués. Par exemple, si l’on prenait des leçons d’auto-école, c’est
2 là qu’on allait payer et puis s’il y avait des transferts d’argent
3 d’une entreprise à une autre entreprise, ce genre de choses.
4 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Donc, c’était un bâtiment de
5 bureaux ?
6 R. Oui.
7 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Bien !
8 Me SOMERS (interprétation) :
9 Q. Monsieur Ahmici, quand vous êtes retourné dans l’immeuble où vous
10 habitiez, vous rappelez-vous une conversation avec un soldat du HVO qui
11 était prénommé Ivica et venait de Zenica ?
12 R. Oui. J’ai fait sa connaissance tout à fait par hasard. Il venait
13 de temps en temps dans ce secteur et inspectait les caves dans
14 lesquelles nous nous trouvions et apportait de l’aide à certaines
15 personnes sous forme de cigarettes, de médicaments, ce genre de choses.
16 C’était son devoir de faire le tour de ce quartier et, donc, un jour,
17 il est arrivé, je l’ai rencontré. Nous avons commencé à parler. Nous
18 avons bu un café. Nous avons eu une discussion assez générale.
19 Q. Avez-vous fini par parler de la matinée du 16
20 avril et, si oui, qu’est-ce que Ivica a dit à ce sujet ?
21 R. Eh bien, oui, tout à fait par hasard. Je ne me rappelle pas le
22 contexte dans lequel ce sujet a été abordé au cours de la conversation
23 mais il m’a dit, en tout cas, qu’à 2 h 00 du matin le 16, ils ont été
24 réveillés et qu’on leur a dit qu’il fallait qu’ils partent en action
25 d’urgence et s’étant rendu compte qu’il avait trop parlé, il a ajouté :
Page 13804
1 « Nous nous attendions à une attaque. »
2 Q. Où l’unité de Ivica était-elle stationnée à
3 ce moment-là ? Où était-il logé à Vitez ?
4 R. À l’hôtel.
5 Q. Est-ce l’hôtel Vitez ?
6 R. Oui. C’est ce qu’il a dit.
7 Q. Eh bien, parlons maintenant du 15 mai. Vous rappelez-vous un
8 incident au cours duquel un véhicule de marque Golf dans lequel se
9 trouvaient des soldats s’est approché de votre immeuble ? J’ajoute
10 qu’il s’agissait de soldats du HVO.
11 R. Oui, je me rappelle à peu près. Je ne me
12 rappelle pas la date exacte mais je me rappelle ce véhicule.
13 Q. L’un ou l’autre des soldats qui étaient dans
14 cette voiture portaient-ils des emblèmes qui permettaient
15 de penser qu’ils appartenaient à une unité spéciale ?
16 R. Eh bien, je vais vous dire, puisque nous étions à une distance de
17 20 ou 30 mètres les uns des autres, je n’ai pas vu d’emblème sur leurs
18 uniformes mais il faut dire qu’à ce moment-là, mon épouse et moi-même
19 étions sur le balcon et elle a vu ces emblèmes. Elle a même reconnu
20 quelqu’un qu’elle connaissait avant la guerre, un de ses anciens amis.
21 Q. Qui était-ce ?
22 R. Je crois qu’elle m’a dit que ce jeune homme s’appelait Oliver
23 Petrovic. Il fréquentait la même école primaire qu’elle.
24 Q. À ce moment-là, vous a-t-elle décrit l’emblème qu’elle a vu ?
25 R. Oui. Elle a dit : « Ce sont les Jokeris qui
Page 13805
1 sont arrivés et j’ai reconnu Oliver qui était avec eux. »
2 Me SOMERS (interprétation) : Je prierais Monsieur l’Huissier de bien
3 vouloir montrer au témoin une feuille de papier sur laquelle est écrit
4 un nom. Si le témoin reconnaît ce nom, il ne doit, en tout cas, pas le
5 prononcer à haute voix et cette feuille de papier sera conservée sous
6 scellé.
7 Q. Ne prononcez pas le nom, Monsieur le Témoin.
8 R. [Signe affirmatif de la tête]
9 Q. Monsieur Ahmic, s’agissant du nom que vous venez de lire, je vous
10 demande si vous le reconnaissez mais je vous demande une nouvelle fois
11 de ne pas le prononcer.
12 R. Oui, je le reconnais.
13 Q. Nous parlons, donc, de cet incident des soldats du HVO dont l’un au
14 moins portait l’emblème des Jokeris ce jour-là. Si vous vous le
15 rappelez, je vous demanderais de nous dire ce qui est arrivé à la femme
16 dont le nom figure sur cette feuille de papier que je vous ai montrée.
17 R. Eh bien, les soldats qui sont arrivés dans ce véhicule, je crois
18 qu’ils étaient cinq, quatre ou cinq, en tout cas. Eh bien, deux ou
19 trois de ces soldats ont pénétré dans l’immeuble. À ce moment-là, mon
20 épouse et moi-même sommes passés dans une autre pièce que celle où nous
21 étions au départ parce que, de toute façon, quand des soldats étaient
22 près de l’immeuble, il était préférable de ne pas être vu.
23 Donc, nous sommes entrés dans la chambre et nous regardions dehors
24 derrière les rideaux et nous avons vu les soldats emmener cette femme
25 dont le nom est écrit sur la feuille de papier que vous m’avez montrée.
Page 13806
1 Ils se sont tous assis dans le véhicule et le véhicule est parti.
2 Q. Connaissiez-vous cette personne ? Habitait-
3 elle dans l’immeuble depuis longtemps ?
4 R. Oui. En fait, depuis que j’ai des souvenirs,
5 elle habitait dans l’immeuble.
6 Q. Si vous vous le rappelez, pouvez-vous nous
7 dire si d’autres membres de sa famille étaient avec elle, à
8 ce moment-là, mais ne donnez pas de nom ?
9 R. Pour autant que je le sache, deux autres
10 personnes habitaient avec elle, deux enfants, et je crois
11 que son mari, à ce moment-là, n’était même pas à Vitez.
12 Q. Passons maintenant au 8 ou 9 juin. Des
13 soldats du HVO ont-ils pénétré dans votre appartement aux
14 premières heures de la matinée et, si oui, à quelles fins ?
15 R. Oui. En fait, cela s’est passé tard la nuit, vers 1 h 00 du matin,
16 je pense. Nous nous préparions à aller nous coucher. Quelqu’un a
17 frappé à la porte. J’ai ouvert et un soldat a fait irruption dans
18 l’appartement.
19 Il avait un revolver à la main et puisque le couloir de l’entrée était
20 allumé, j’ai vu deux autres soldats, l’un qui était juste derrière la
21 porte et un autre dans les escaliers un peu plus bas mais il n’y en a
22 qu’un qui a pénétré dans l’appartement.
23 Il m’a poussé dans la salle de bain et m’a dit : « Mais qu’est-ce que
24 vous attendez ici ? Je reviendrai demain et je ne veux pas vous voir
25 ici. » Il m’a donné un coup de pied dans l’abdomen.
Page 13807
1 Q. Mais son arme était-elle pointée contre
2 quelqu’un en particulier, visait-elle quelqu’un en particulier ?
3 R. Oui. Quand la porte s’est ouverte et qu’il a
4 fait irruption dans l’appartement, il m’a poussé jusque
5 dans la salle de bain avec son revolver. Voilà !
6 Q. Entre le moment où vous êtes retourné dans votre appartement, après
7 avoir été remis en liberté, et cet incident, avez-vous vu un grand nombre
8 de musulmans se faire expulser de Vitez ?
9 R. Oui. Laissez-moi vous dire qu’à l’époque, nous avions pu entendre
10 bien des choses au sujet de ces gens qui sortaient comme ça mais on
11 peut dire que les gens qui se trouvaient à l’autre bout de la ville
12 quittaient leurs logements, à l’autre bout par rapport à l’endroit où
13 nous habitions nous-mêmes, et selon un ordre que l’on pourrait suivre,
14 nous aurions été parmi les derniers.
15 Je crois que jusque là, pratiquement tous étaient partis. Il ne
16 restait que quelques familles à Vitez.
17 Q. Quand vous dites que ces gens quittaient leurs logements, est-ce
18 que vous voulez dire par là qu’ils les quittaient de leur plein gré ?
19 R. Absolument pas car je connais bien des gens qui avaient la même
20 opinion que nous, qui ne voulaient à aucun prix quitter leurs maisons,
21 leurs foyers mais tout cela a été fait par le recours à la force, par
22 un recours direct à la force et puis d’autres gens, ayant vu un tel
23 recours à la force, se sont décidés à quitter, évidemment, puis ces
24 logements ont tous été occupés par la suite par des soldats du HVO.
25 Q. Est-ce que vous connaissez une personne dénommée Slaven Kraljevic ?
Page 13808
1 R. Oui.
2 Q. Est-ce qu’il est en relation de famille avec Darko Kraljevic ?
3 R. Oui. C’est son frère.
4 Q. Êtes-vous allé le voir pour lui demander de l’aide à cette période?
5 R. Oui. À l’époque, le poste de commandement de Darko se trouvait
6 dans un immeuble à proximité, donc, du bout de la ville et il passait
7 beaucoup de temps dans une cafétéria qui s’appelait Benz et je suis
8 allé voir Slaven pour lui demander de l’aide aux fins de nous permettre
9 de rester chez nous.
10 Q. Mais l’avez-vous connu ?
11 R. Oui. Nous appartenons à la même génération. Nous avons fréquenté
12 ensemble, à l’époque, l’école primaire.
13 Q. Vous a-t-il aidé ?
14 R. Oui, si l’on veut, si l’on peut dire. Je mettrais la chose entre
15 guillemets car il m’avait dit si je voulais véritablement rester, qu’il
16 me fallait mettre son nom et son prénom sur la porte d’entrée et que
17 cela influerait sur toute personne qui viendrait éventuellement frapper
18 à la porte pour nous en chasser.
19 Q. Est-ce que cela vous a aidé à empêcher toute éviction ?
20 R. Comme je l’ai déjà dit, indépendamment de la chose, nous avons été
21 éjectés de notre appartement.
22 Q. Mais qui est-ce qui vous a aidé, si quelqu’un vous a aidé, à
23 quitter Vitez ?
24 R. Comme nous avons vu qu’il n’y avait rien à faire, nous avons décidé
25 de nous diriger vers Zenica parce qu’il y avait là une bonne partie de
Page 13809
1 notre famille et nous avons essayé de trouver le moyen de le faire.
2 J’avais prié un collègue qui habitait là…
3 Q. Mais qui était-ce et de quelle appartenance ethnique était-il ?
4 R. Miroslav Pavlovic. Il était croate qui venait de Stari Vitez et
5 qui venait d’emménager là quelques jours auparavant dans un des
6 appartements qui avait été vidé de ses locataires.
7 Q. Pour accélérer un peu les choses, pouvez-vous nous dire si vous
8 aviez emporté des affaires avec vous et de quelle façon, par quel moyen
9 de transport avez-vous quitté Vitez ?
10 R. Puisque nous savions que les transferts se faisaient par Safradini,
11 c’est-à-dire par la vieille route vers Zenica, nous avions pris rien
12 que ce que nous pouvions emporter dans les mains. Il s’agissait, donc,
13 de marcher longtemps et nous avions pris deux sacs de voyage chacun.
14 J’avais demandé à quelqu’un de nous emmener jusqu’à Stari Vitez, c’est-
15 à-dire jusqu’au carrefour pour Zenica. C’est un homme qui s’appelait
16 Miroslav.
17 C’est à pied que nous nous sommes dirigés vers Zenica, c’est-à-dire
18 vers le territoire où nous pouvions aller.
19 Q. Mais est-ce que Monsieur Pavlovic vous a emmené là-bas et a-t-il
20 continué à vous aider ?
21 R. Il a dit qu’il devait d’abord se rendre en bas pour voir si l’on
22 pouvait sortir car il y avait des tirs parce qu’en état d’alerte, on ne
23 pouvait plus sortir.
24 Il y est allé, il a vérifié les choses et il est revenu 10 à 15 minutes
25 plus tard. Il nous a dit que tout allait bien en nous affirmant que
Page 13810
1 nous pouvions y aller.
2 Alors, nous avons déposé les affaires dans sa voiture. Il nous a
3 conduits jusqu’au carrefour, nous y a laissés puis est revenu, est
4 retourné. Il nous fallait par la suite attendre quelques soldats pour
5 qu’ils nous disent à quel moment nous pourrions traverser.
6 Q. Est-ce que les soldats sont venus vous le
7 dire et était-ce des soldats du HVO ?
8 R. Oui. Les soldats étaient du HVO et nous étions arrêtés là une
9 quarantaine de minutes, je ne m’en souviens plus exactement, et de
10 temps en temps, un soldat venait nous voir en nous disant que l’on ne
11 pouvait pas encore passer, que l’état d’alerte était encore en vigueur.
12 Une heure après, un homme est venu – je ne sais pas si c’était par
13 hasard ou pas – qui connaissait mon père et qui nous a dit qu’il nous
14 prendrait avec sa voiture vers le secteur de Krizancevo Selo, enfin,
15 emplacement qui nous laissait moins de chemin à traverser à pied.
16 Q. Cette localité de Krizancevo Selo se trouve-t-elle à Vitez et s’y
17 trouvait-il un certain groupe militaire ?
18 R. Oui. Cela se trouve à Vitez et nous avons été amenés face à une
19 localité, enfin, un emplacement qu’ils appelaient commandement. Vu de
20 l’extérieur, ça n’avait aucune apparence d’un commandement quelconque.
21 C’était la maison d’un homme et à côté, il y avait une espèce de
22 bâtiment qui devait être un petit peu un magasin et un petit peu un
23 bistrot.
24 Q. Qui était Vlado Krizanac ?
25 R. Vlado Krizanac était une personne dont c’était la maison là où
Page 13811
1 nous nous trouvions et pour autant que j’ai pu le remarquer, il était
2 une sorte de chef ou de commandant. J’ignorais ses fonctions. Il
3 appartenait aux Vitezovis, ça je le sais avec assurance, et les soldats
4 venaient de temps en temps jusqu’à lui, lui poser des questions. Lui
5 était là pour leur donner des ordres ou des informations.
6 Q. Ce Vlado Krizanac avait-il quelque insigne que ce soit vous
7 permettant de conclure qu’il appartenait effectivement aux Vitezovis ?
8 R. Oui. Il avait un insigne des Vitezovis sur l’épaule mais il ne le
9 cachait pas du tout et partant de l’entretien que j’ai eu avec lui, il
10 avait dit que dès le début de la guerre, il avait été l’un des
11 fondateurs du HOS à Vitez et que Darko Kraljevic venait souvent.
12 Pendant que nous étions là-bas, il était venu le voir. Je n’ai pas du
13 tout entendu de quoi ils ont parlé. Enfin, c’est ce que je peux vous
14 dire.
15 Q. Avez-vous personnellement vu Darko Kraljevic
16 lorsqu’il venait voir Vlado Krizanac ?
17 R. Oui. Je l’ai vu venir. Il s’installait dans cette espèce de
18 bistro. C’était à quelques cinq mètres à peu près face à nous.
19 Q. Monsieur Krizanac avait-il fait recours à un autre nom ?
20 R. Dans la famille et ceux qui s’adressaient à lui l’appelaient « Le
21 gris »… (l’interprète se reprend) … « Sidi » ou « Sivi ».
22 Q. Où vous trouviez-vous lorsque vous étiez à Krizancevo Selo ?
23 R. Le jour où nous avions pensé pouvoir passer de l’autre côté, on
24 nous avait dit que ce jour-là, il était impossible de passer et
25 l’épouse de Sidi, qui connaissait ma mère, nous a proposé de passer
Page 13812
1 chez eux, de prendre un café et de souffler un peu, et nous y avons
2 quelques quatre jours… ou plutôt quatre nuits, quatre ou cinq jours,
3 une espèce de détention provisoire.
4 Q. Pour finir, comment avez-vous réussi à vous rendre à Zenica. Avez-
5 vous pu vous y rendre sans préalable ou condition de quelque sorte ?
6 R. Eh bien, le lendemain, la même histoire s’est réitérée. Nous
7 avions voulu traverser. Ils nous ont dit que cela n’était pas
8 possible, que l’état d’alerte était toujours en vigueur. Puis, le
9 frère à Sidi était venu et un autre homme en uniforme avec lui et ils
10 ont dit à mon père qu’il devrait lui passer à Zenica. Ils lui ont
11 donné un bout de papier où il y avait des noms et prénoms et des
12 adresses. Je pense même qu’il y avait des numéros de téléphone de
13 personnes qu’il s’agissait de retrouver à Zenica et que ce n’était
14 qu’une fois qu’ils les ramèneraient de Zenica que nous pourrions nous-
15 mêmes être relâchés.
16 Q. Ces gens-là à Zenica étaient-ils musulmans, Croates ou Serbes ?
17 R. Ils étaient Croates, membres de la famille de l’homme qui était
18 venu, sa fille, ses deux enfants et son mari, et je crois qu’il y avait
19 deux tantes de Sidi et de son frère ainsi que leur fille et leur fils.
20 Q. Pour bien tirer les choses au clair, lorsque votre père s’est rendu
21 tout seul à Zenica, vous avez dû rester avec les membres de votre
22 propre famille dans cette maison de Krizanac et votre père était censé
23 revenir avec les personnes pour pouvoir vous échanger contre eux :
24 C’est bien cela ?
25 R. Oui, c’est ce qu’on nous a dit.
Page 13813
1 Q. Quel a été le résultat des recherches effectuées par votre père ?
2 R. Il a effectivement retrouvé les personnes qu’il était censé
3 retrouver, à l’exception d’un homme qui se trouvait dans une
4 correctionnelle, emprisonné, et il n’a pas pu le sortir de cette
5 correctionnelle, et la fille de l’autre homme avait fait une petite
6 déclaration écrite sur un papier en disant qu’elle ne voulait pas
7 quitter Zenica en donnant une explication brève quelconque et mon père
8 est revenu avec les deux tantes, la fille de l’une de ses tantes.
9 Q. Suite à cela, avez-vous été relâché, et si
10 cela a eu lieu, où êtes-vous allé ?
11 R. Oui. Ce jour-là, c’était dans la matinée vers 10 h 00. Mon père
12 est d’abord revenu avec l’une des tantes dont nous avons parlé. Il a
13 dit à Sidi que plus haut se trouvait l’autre tante et sa fille et il a
14 demandé que nous soyons relâchés. On nous a mis dans une voiture.
15 On nous a emmenés jusqu’à cette ligne de démarcation. Nous sommes
16 passés vers le côté tenu par l’armée de la Bosnie-Herzégovine, les
17 autres sont redescendus et nous avons été installés à quelques deux ou
18 trois kilomètres plus bas temporairement dans le village de Poculica.
19 Q. Quelque chose vous est-il arrivé lorsque vous y avez séjourné ?
20 R. Est-ce que vous pouvez me dire où ?
21 Q. Est-ce que vous avez eu, en d’autres termes, des blessures ? Avez-
22 vous été blessé pendant que vous étiez à Poculica ?
23 R. Oui, j’ai été blessé, probablement par un tireur embusqué au bras
24 droit.
25 Q. Avez-vous jamais appris ce qu’il était advenu de votre logement à
Page 13814
1 Vitez lorsque vous avez été donc évincé ?
2 R. Oui, nous avons appris la chose. Un jeune homme que j’avais connu,
3 sa femme et ses deux enfants avaient aménagé dans ce logement et
4 pendant tout ce temps, jusqu’à ce jour, ils se trouvent dans notre
5 logement.
6 Q. Est-ce que vous vous efforcez… enfin, entreprenez-vous des mesures
7 pour récupérer votre appartement : Oui ou non ?
8 R. Oui.
9 Q. Aussitôt après avoir été relâché de cette détention à Vitez, êtes-
10 vous revenu vers le village de Ahmici où se trouvait votre maison ?
11 R. Oui.
12 Q. Avez-vous pu voir dans quel état se
13 trouvaient les maisons croates de Ahmici ?
14 R. Dans la partie… c’est-à-dire par la route où nous arrivons à Ahmici
15 vers notre maison, nous avons dû passer par cette partie de Ahmici et
16 il apparaissait clairement… enfin, j’ignorais auparavant à qui
17 appartenait telle ou telle autre maison mais ce que je sais c’est que
18 les maisons de notre famille. Les maisons musulmanes avaient toutes
19 été incendiées, et quant aux maisons que je savais appartenir à des
20 Croates, je n’en ai vu aucune incendiée.
21 Donc, il était fort indicatif de constater que deux maisons incendiées,
22 puis une maison non-incendiée, puis trois incendiées, puis deux non-
23 incendiées… donc, on voyait bien que les maisons incendiées avaient été
24 incendiées de façon sélective.
25 Q. Vous avez eu des contacts avec Dario Kordic en personne. Si nous
Page 13815
1 revenons vers l’an 1992, pouvez-vous nous dire si vous avez eu
2 l’opportunité de contacter Dario Kordic vous-même ?
3 R. Je ne pourrais pas parler de contact personnel parce que je ne le
4 connaissais pas personnellement. Je savais qui il était. Certes, nous
5 nous étions trouvés très près l’un de l’autre en une occasion. Oui, je
6 l’avais vu. Il était fort près de moi.
7 Q. Pouvez-vous brièvement nous décrire les circonstances de
8 l’événement ?
9 R. À peu près, cela se situe dans la journée où il y a eu une attaque
10 de la JNA contre Busovaca. Nous étions, en ce moment-là, assis à une
11 terrasse d’une cafétéria. Nous avons vu les obus tombés et nous avons
12 pensé à une chose seulement, c’est-à-dire où est-ce que l’on pourrait
13 rechercher un abri.
14 L’événement était terrible en soi et nous nous sommes dirigés vers une
15 pièce à côté de la poste. C’est là que se trouvait un centre d’alerte
16 et nous savions qu’il s’y trouvait un abri souterrain et nous avions
17 pensé que nous pourrions en même temps obtenir des informations quant
18 aux événements en cours. Nous avons couru vers là-bas avec quelques
19 amis. Nous connaissions les jeunes gens qui y travaillaient.
20 Au bout d’une heure ou deux, Monsieur Kordic est arrivé en compagnie de
21 deux ou trois soldats. Il a accédé à l’intérieur de cette pièce et
22 c’est là la rencontre que j’ai eue avec lui.
23 Q. Si je ne me trompe pas, cela était en 1992 et
24 vous vous trouviez à Vitez lorsque ce pilonnage a eu lieu ?
25 R. Oui.
Page 13816
1 Q. Pouvez-vous me dire comment Monsieur Kordic était vêtu lorsque vous
2 l’avez vu ?
3 R. Il portait un uniforme de camouflage et un couvre-chef. Il ne
4 portait pas d’arme. Du moins il ne portait pas de canon long. Je ne
5 sais pas s’il avait un revolver sur lui.
6 Q. Était-il seul ou en compagnie ?
7 R. Il était accompagné par deux soldats qui étaient également vêtus
8 d’uniforme. Il est entré dans les locaux de ce centre d’information et
9 d’alerte et il y avait là un soldat en uniforme. On avait dit qu’il
10 s’appelait Filip Filipovic. Pour être tout à fait sincère, je ne le
11 connaissais pas. Bien sûr, je l’avais par la suite vu à la télévision
12 locale. Monsieur Kordic était entré avec lui dans un bureau quelconque
13 et je crois qu’ils ont eu des entretiens là-bas.
14 Q. Une question de la télévision : Avez-vous jamais vu Monsieur
15 Kordic ou les membres de l’armée de Bosnie-Herzégovine et de la Défense
16 territoriale discuter vers fin 1992 ou début 1993, toujours parlant de
17 la télévision ?
18 R. Bien, laissez-moi vous dire que Monsieur Kordic était souvent
19 convié par cette télévision. Nous avons pratiquement pu le voir tous
20 les jours, sinon tous les jours, au moins dans des extraits. Il serait
21 peut-être intéressant de dire qu’il y eut une émission où j’ai pris
22 part personnellement. Il s’agissait d’une émission de type ouvert où
23 les téléspectateurs avaient le droit de poser des
24 questions et j’avais moi-même posé une question.
25 Q. Quelle question avez-vous posée au juste,
Page 13817
1 pourquoi aves-vous posé cette question et à qui avez-vous posé
2 la question ?
3 R. Je crois que Monsieur Kordic se trouvait être invité avec Monsieur
4 Sefkija Dzidic et il parlait de sujets qui étaient d’actualité à
5 l’époque, relations entre l’armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO. Ce
6 qui m’a dérangé c’était une déclaration de Monsieur Kordic qui avait
7 dit que les Croates étaient censés résoudre leur problème territorial
8 et national.
9 Comme cela me paraissait inachevé comme déclaration, j’ai demandé à
10 Monsieur Kordic : Mais où voyait-il les musulmans dans l’histoire ;
11 que fallait-il qu’il advienne avec les musulmans ?
12 La télévision a lu ma question avec mon nom et prénom. Toutefois, je
13 n’ai reçu aucune réponse. Pour ainsi dire, politiquement, on a évité
14 de donner quelque réponse que ce soit à celle-ci.
15 Me SOMERS (interprétation) : Je n’ai plus de
16 questions à vous poser. Je vous remercie.
17 Me STEIN (interprétation) : Avec l’autorisation
18 de Monsieur le Président, nous voudrions changer l’ordre
19 des intervenants dans le contre-interrogatoire.
20 CONTRE-INTERROGÉ PAR Me KOVACIC
21 (interprétation) :
22 Q. Bonjour. Je suis Me Kovacic et avec Me Mikulicic, je suis
23 défenseur de Monsieur Cerkez. Je me propose de vous poser plusieurs
24 questions. Je vous prie d’avoir la patience d’y répondre. Nous
25 parlons la même langue. Je vous prie de prêter attention au fait que
Page 13818
1 nos propos sont traduits de manière simultanée. Aussi faut-il que nous
2 procédions à des pauses entre les questions et les réponses.
3 Vous avez parlé de votre carrière, de vos activités dans la Défense
4 territoriale. Vous avez été mobilisé en juin 1992 dans la Défense
5 territoriale, n’est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 Q. Monsieur Ahmic, ayez s’il vous plaît l’amabilité de nous dire :
8 Lorsque vous avez été mobilisé, il y avait pratiquement plus de Croates
9 dans la Défense territoriale ou y en avait-il encore quelques-uns ?
10 Pouvez-vous nous le dire ?
11 R. Pour autant que je m’en souvienne, il y avait
12 deux jeunes gens peut-être.
13 Q. Pourrions-nous dire alors que cela était des temps où il s’est
14 opéré une sorte de concentration ethnique de part et d’autre, du moins
15 sur le territoire de la municipalité de Vitez, là où vous avez vécu ?
16 R. Du point de vue militaire, oui, on peut le dire.
17 Q. Donc, une division entre ces deux groupes
18 ethniques est devenue apparente déjà ?
19 R. Oui.
20 Q. Je vous remercie. Vous avez dit en outre qu’en date où ce conflit
21 a commencé, en date du 16 avril 1993, qu’à un moment donné, vous avez
22 entendu des explosions d’obus dans Stari Vitez. Compte tenu de la
23 position de votre immeuble, vous n’avez pas pu le voir mais vous avez
24 pu le déduire d’après ce que vous avez entendu, n’est-ce pas ?
25 R. Puis-je donner une explication très brève ? L’immeuble où j’ai
Page 13819
1 vécu, où je vivais, se trouve à 150 ou 200 mètres de distance de cette
2 ligne où s’est opérée la première attaque contre Stari Vitez et lorsque
3 des obus tombent à 150 mètres ou 200 mètres, on les entend fort bien.
4 Q. C’est exact. Est-ce que cela signifie que l’immeuble où vous
5 habitiez est la première rangée d’immeubles derrière l’hôtel ? Donc,
6 il y avait Stari Vitez, l’hôtel, puis les immeubles ?
7 R. Non. Non, la rangée devant. Mon immeuble
8 c’est le deuxième immeuble à côté de Stari Vitez.
9 Q. Donc, vous vous trouviez un peu sur cette ligne de démarcation
10 entre les forces antagonistes vers Stari Vitez ?
11 R. Je crois que la ligne c’était à peu près à 100 mètres. C’était la
12 route qui se trouvait derrière le vieux marché. Il y avait un complexe
13 de garages et cela faisait partie d’un segment de la ligne et notre
14 immeuble se trouvait à peut-être 150 mètres de là.
15 Q. Je vous remercie. Vous avez mentionné des soldats en uniforme de
16 camouflage pour lesquels vous avez dit qu’il s’agissait de Vitezovis et
17 vous aviez parlé d’une personne que vous connaissiez d’auparavant, à
18 savoir Monsieur Safradin. Ce nom de famille « Safradin » est un nom de
19 famille assez fréquent de Bosnie centrale, est-il vrai ?
20 R. Je sais, quant à moi, qu’il y a une partie de
21 l’agglomération qui s’appelle Safradini, pour Vitez du
22 moins. Pour Busovaca et Travnik, je ne sais pas.
23 Q. Donc, des Safradins, il y en a pas mal dans votre localité ?
24 R. Oui, on pourrait le dire.
25 Q. Alors, ces gens qui sont venus dans votre appartement et qui ont
Page 13820
1 enlevé leurs masques, vous ne les avez pas reconnus ?
2 R. Je me propose, si vous me le permettez, de vous expliquer. Je ne
3 les ai pas reconnues en tant que personnes que j’avais eu l’occasion de
4 rencontrer de la ville. Étant donné que je vis à Vitez depuis 25 ans,
5 je connaissais… c’est une petite ville, vous le nierez pas. Je
6 connaissais toutes les personnes qui vivaient là en ville et à
7 proximité de la ville. Ces gens-là ne venaient pas donc de la ville au
8 sens restreint du terme. Ils venaient peut-être de quelque
9 agglomération de la municipalité de Vitez, ça, je ne le sais pas.
10 Q. Mais ils venaient peut-être de l’extérieur
11 de la municipalité ?
12 R. Oui, peut-être mais ils étaient de Bosnie
13 centrale, j’en suis certain.
14 Q. Je vous remercie. Vous avez dit qu’en date
15 du 19 avril, des membres de la police militaire étaient
16 venus dans votre logis et vous ont expliqué que pour des
17 raisons de sécurité, pour des raisons… enfin, en raison du
18 fait qu’il y avait des soldats irrités et que pour votre
19 propre sécurité, ils vous emmenaient vers le bâtiment du
20 SDK.
21 Alors, est-ce que vous pouvez nous dire, pour que
22 les choses soient claires, que vous aviez considéré que
23 leur histoire, enfin, leurs dires étaient un prétexte ou
24 une chose véridique ?
25 R. Je croyais que ce n’était qu’un prétexte.
Page 13821
1 Q. Fort bien ! Lorsque par la suite vous étiez
2 dans le bâtiment du SDK et quand vous êtes ressorti de là,
3 est-il exact de dire qu’il y avait eu des incidents
4 effectivement et que des gens ont péri de façon tout à fait
5 inutile ? Sommes-nous d’accord pour le dire ?
6 R. Oui, il y a eu des incidents. Cela est vrai
7 mais je ne serais pas d’accord pour dire que c’était là
8 l’œuvre de particuliers hors de soi, du moins pas dans tous
9 les cas de figure.
10 Q. Très bien. Nous sommes arrivés jusqu’au
11 point où vous avez parlé du bâtiment du SDK. Est-ce qu’au
12 sein de ce bâtiment il s’est passé quoi que ce soit aux
13 détenus ?
14 R. Non.
15 Q. Est-ce que l’on peut dire qu’au sein de ce
16 bâtiment, le SDK, les gardes traitaient les détenus de
17 manière tout à fait correcte ?
18 R. Compte tenu des circonstances, oui.
19 Q. Ils ne vous infligeaient pas un mauvais
20 traitement ?
21 R. Non, pas classiquement.
22 Q. Vous aviez de quoi boire et manger ?
23 R. Oui.
24 Q. Les familles pouvaient vous rendre visite ?
25 R. Oui.
Page 13822
1 Q. Les familles pouvaient vous apporter quelque
2 chose si besoin en était ?
3 R. Oui.
4 Q. Est-ce que vous savez que plusieurs personnes
5 ont été amenées à l’extérieur afin de se faire examiner par
6 un médecin ?
7 R. Écoutez, en ce moment, je ne me souviens
8 vraiment pas mais probablement vous avez raison.
9 Q. En ce qui concerne les conditions hygiéniques
10 dans ce bâtiment, à quoi ressemblaient-elles ? Est-ce que
11 vous pouvez bénéficier de l’eau, des toilettes ?
12 R. Oui.
13 Q. Vous avez dit que de temps en temps, cette
14 personne surnommée Zabac, dont le nom de famille était
15 Kovac, venait. Il arrivait en véhicule où il était
16 clairement indiqué qu’il s’agissait du véhicule de la
17 police militaire ?
18 R. En ce qui concerne les insignes de la police
19 militaire, je ne me souviens pas qu’il y en avait vraiment
20 de très clairs.
21 Q. Et lui, sur son uniforme, est-ce qu’on voyait
22 clairement les insignes de la police militaire ?
23 R. Oui. Il portait le ceinturon qui était
24 caractéristique pour la police militaire et puis aussi les
25 pistolets dont disposaient tous les membres de la police
Page 13823
1 militaire à l’époque, et sur son épaule, il portait
2 également l’insigne de la police militaire.
3 Q. Merci. Vous avez dit que vous n’avez jamais
4 vu… pardon, je vais reformuler ma question.
5 Vous avez vu donc Cerkez à la télévision et à ce
6 moment-là, vous saviez qu’il était un officier au sein du
7 HVO et c’est par la suite que vous avez compris qu’il avait
8 visiblement la fonction d’un commandant ou bien commandant
9 de brigade ? C’est ce qu’on vous a dit ?
10 R. Oui.
11 Q. C’est exact ?
12 R. Oui.
13 Q. Est-ce que vous avez eu l’occasion de voir
14 personnellement Cerkez en sa qualité de l’officier du HVO ?
15 Est-ce que vous avez pu remarquer comment il se comportait,
16 comment il traitait ses subordonnés au sein du HVO ? Est-
17 ce que vous l’avez vu à quelque moment que ce soit en tant
18 qu’officier du HVO ?
19 R. Mis à part ses parutions à la télévision, je
20 n’ai pas eu d’autres occasions afin de le voir
21 personnellement, afin de le voir, par exemple, en train de
22 donner les ordres mais comme mon bâtiment se trouvait près
23 de l’hôtel, de temps en temps, je le voyais sortir de
24 l’hôtel, escorté, entré dans des véhicules militaires, et
25 cætera.
Page 13824
1 Q. Nous parlons de l’année 1992, début 1993
2 aussi ?
3 R. Oui, à peu près.
4 Q. Est-ce que vous savez exactement quel est le
5 nom de l’unité dont Cerkez était le commandant ?
6 R. Pour autant que je sache, la brigade
7 s’appelait la brigade de Vitez.
8 Q. Très bien, merci. C’est exact.
9 Est-ce que vous savez si le commandement de cette
10 brigade se trouvait dans le bâtiment de l’université
11 ouvrière ?
12 R. Je pense qu’ils étaient à l’hôtel. Je ne
13 sais pas quelle était leur structure organisationnelle très
14 exactement. Pour autant que je sache, d’après ce que mes
15 amis me disaient, le quartier général était à l’hôtel.
16 Q. Oui. Nous sommes d’accord là-dessus. Le nom
17 de Colonel Blaskic, est-ce qu’il vous dit quelque chose ?
18 R. Oui. Il était dans une situation semblable à
19 celle de Monsieur Cerkez.
20 Q. Sans entrer dans les détails, est-ce que vous
21 pouvez nous dire si la position de Blaskic était
22 supérieure ?
23 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Arrêtez-vous
24 là, s’il vous plaît. Où voulez-vous en venir ? Arrêtez-
25 vous s’il vous plaît. Où voulez-vous en venir avec ce
Page 13825
1 contre-interrogatoire ?
2 Nous connaissons quelle est votre attitude
3 concernant l’autorité et la position de votre client au
4 sein du HVO. Ce témoin n’a absolument aucune connaissance
5 concernant ce sujet. Donc, je crains que nous sommes en
6 train de perdre notre temps si l’on ne fait que répéter la
7 même chose sans arrêt.
8 Donc, à moins que ce témoin puisse connaître une
9 nouvelle information, dans ce cas-là, vous pouvez attirer
10 notre attention là-dessus, sinon continuez, s’il vous
11 plaît.
12 Me KOVACIC (interprétation) : Non, il n’y a pas
13 de nouvelle information.
14 Je souhaitais simplement établir ce que le témoin
15 connaît concernant l’hiérarchie et l’organisation du HVO
16 puisqu’il a été mentionné par ce témoin qu’il n’y avait pas
17 un rapport clairement défini entre Cerkez et Dario Kordic…
18 et Darko Kraljevic (se reprend l’interprète). Donc, c’est
19 pour cela que je lui ai posé cette question.
20 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Allez-y, dans
21 ce cas-là.
22 Me KOVACIC (interprétation) :
23 Q. Vous nous avez dit qu’il y avait peut-être
24 une relation, un rapport entre l’unité de Darko Kraljevic
25 et Monsieur Cerkez. Sur la base de quoi est-ce que vous
Page 13826
1 avez dit que Cerkez était supérieur à l’unité de Darko
2 Kraljevic ?
3 R. Voici pourquoi j’ai dit cela : C’est que le
4 HVO était beaucoup mieux organisé que l’armée de Bosnie-
5 Herzégovine et d’après les conclusions que nous avons pu
6 tirer sur le concept de l’autorité au sein du HVO et du
7 HDZ, il s’agissait là d’une organisation très ferme. Donc,
8 les liens n’étaient pas flous au sein de cette
9 organisation. Il n’y a pas eu de rapport flou. Donc, la
10 personne qui était le commandant de la brigade de Vitez
11 était le commandant pour la ville de Vitez.
12 Q. C’est votre évaluation ?
13 R. Bien sûr. Je n’ai pas de documents afin de
14 corroborer cela. C’est ce que je pense.
15 Q. Donc, nous sommes d’accord pour dire que vous
16 avez tiré cette conclusion sur la base de ce que vous avez
17 vu ? Vous n’avez pas vu de documents ? Vous n’avez pas
18 entendu quelqu’un affirmé cela avec certitude de la part
19 d’une personne interne à cette structure du HVO ?
20 R. Oui, bien sûr, je n’ai pas vu de documents
21 mais de toute façon, on ne cachait pas ce genre de chose.
22 À Vitez à l’époque, on savait qui appartenait à quelle
23 unité, qui commandait qui. Il n’y avait pas de secret à
24 l’époque à Vitez à ce sujet.
25 Q. Très bien. Vous avez donné votre déclaration
Page 13827
1 aux enquêteurs du Tribunal. À la page 2, vous avez dit au
2 premier paragraphe que tout le monde savait qui était le
3 commandant des Vitezovis et vous avez dit également – je
4 cite : « Je n’avais pas de connaissances en ce qui
5 concerne la personne qui était supérieure à Darko. »
6 Vous êtes d’accord avec ce que vous avez dit ?
7 R. Oui, probablement, mais ceci s’est passé il y
8 a un an. Si vous avez une question, posez-la.
9 Q. Très bien. Mais de toute façon, donc, tout
10 ce que vous dites se base sur votre propre évaluation, sur
11 des points de vue généraux ?
12 R. Oui, vous pourriez exprimer les choses ainsi.
13 Q. Un seul détail encore en ce qui concerne le
14 creusement des tranchées. Ceci n’a pas été dit dans votre
15 interrogatoire principal.
16 Vous avez dit que d’abord, vous avez été amené à
17 Vranjska, position de Vranjska, et que vous y êtes resté
18 pendant deux ou trois heures : C’est exact ?
19 R. C’est exact.
20 Q. Ensuite, la police militaire vous a amené
21 encore une fois au deuxième emplacement à Kratine : Est-ce
22 exact ?
23 R. Oui.
24 Q. Préalablement, vous avez dit dans votre
25 déclaration que de Vranjska, vous avez d’abord été amené à
Page 13828
1 Bungalow et ensuite, vous avez changé de moyen de transport
2 et vous avez été amené à Kratine : Est-ce exact ?
3 R. Non. Le Bungalow ou le chalet se trouve sur
4 le chemin de Kratine. Donc, nous nous sommes simplement
5 arrêtés là. Les jeunes hommes sont entrés à l’intérieur.
6 Je ne sais pas ce qu’ils faisaient. Ils nous ont dit
7 simplement que nous pouvions sortir de la camionnette et
8 éventuellement fumer une cigarette.
9 Q. Très bien. En ce qui concerne ce premier
10 lieu où vous avez creusé les tranchées, Vranjska, cette
11 partie appartenait à Rijeka, n’est-ce pas ?
12 R. Oui, ça faisait partie de la région appelée
13 Rijeka.
14 Q. Là, on ne vous maltraitait pas ?
15 R. Oui, c’est exact.
16 Q. Vous avez travaillé dans un rythme normal,
17 vous avez reçu des cigarettes, de la nourriture, des
18 boissons ?
19 R. Je crois que nous n’avons pas reçu de
20 nourriture parce que nous n’avons pas passé beaucoup de
21 temps là-bas mais pour le reste, c’est vrai.
22 Q. Lorsque vous dites « brièvement », vous
23 parlez de plusieurs heures ?
24 R. Oui.
25 Q. Est-ce que vous avez pu distinguer quelle
Page 13829
1 unité était chargée de cette position à Vranjska, à
2 Rijeka ?
3 R. Je crois que c’était une unité… je vais le
4 dire ainsi. Il y avait plusieurs jeunes hommes de la
5 région, des gens locaux, et certains d’entre eux, je les ai
6 reconnus comme des gens locaux de Rijeka, de cette région.
7 Q. Très bien ! Mettons-nous d’accord sur le
8 plan géographique. En ce qui concerne Kratine, d’abord, je
9 vais vous demander si vous connaissez à peu près les
10 frontières municipales de la municipalité de Vitez. Est-ce
11 que vous savez que Kratine, par exemple, se trouve à la
12 frontière même vers la région de Zenica à l’est ?
13 R. Oui. Approximativement, oui, pour autant que
14 je le sache.
15 Q. Vous serez d’accord avec moi pour dire que la
16 région de Kratine où vous avez creusé les tranchées se
17 trouve seulement à 500 mètres à peu près de Loncari ?
18 R. Je n’ai jamais été à Loncari. Donc, c’est
19 seulement sur la base de ce que ces jeunes hommes là-bas
20 nous ont montré que je peux conclure qu’oui, que Loncari
21 devrait se trouver dans cette direction-là.
22 Q. Très bien ! Dites-nous, s’il vous plaît,
23 Témoin Ahmic, c’est la police militaire qui vous a amené
24 jusqu’à cette position à Kratine. Est-ce qu’il y avait une
25 seule position ou bien est-ce qu’il y avait plusieurs
Page 13830
1 positions qui étaient reliées d’une certaine manière à cet
2 endroit ?
3 R. Je ne sais pas.
4 Q. D’après ce que vous avez pu voir.
5 R. Du point de vue militaire, je ne sais pas si
6 c’était des positions séparées ou reliées. Je peux parler
7 aussi seulement de la partie où moi, je pouvais me
8 déplacer. Moi, j’avais l’impression que cette position
9 constituait une unité.
10 Q. Est-ce que vous avez pu voir s’il y avait
11 plusieurs unités sur place ou une seule unité ?
12 R. Je vais vous dire ce que je pense. Moi, j’ai
13 trouvé ça assez intéressant puisque moi-même, j’étais
14 membre de la Défense territoriale. Je trouvais cela
15 intéressant de voir que les commandants de ligne – c’est
16 comme ça qu’ils les appelaient – étaient les Jokeris.
17 Donc, ce Monsieur dont je parlais tout à l’heure, Ivica
18 Vujica, il était membre des Jokeris et on l’appelait
19 Commandant de ligne, Commandant de la ligne, et lui, il
20 nous amenait entre les tranchées en nous indiquant où il
21 fallait creuser, et cætera. Il a passé deux jours en haut
22 et ensuite, une autre personne, qui lui aussi était membre
23 des Jokeris, est venue prendre sa relève.
24 Q. C’est pour cela que vous avez conclu que
25 cette région était contrôlée par les Jokeris ?
Page 13831
1 R. Absolument pas.
2 Q. Quelle est votre conclusion, alors ?
3 R. J’ai conclu qu’il s’agissait des unités
4 régulières du HVO qui étaient commandées, pour une raison
5 inconnue par moi, par les commandants de Jokeris pendant
6 ces quelques jours. Donc, ce n’était pas les Jokeris qui
7 contrôlaient la ligne, c’était les membres du HVO qui
8 contrôlaient les lignes et ils étaient sous le commandement
9 des commandants de Jokeris.
10 Q. Très bien ! En ce qui concerne ces personnes
11 que vous mentionnez en tant que soldats réguliers du HVO,
12 elles étaient de Vitez ou d’ailleurs ?
13 R. Je pense que pour la plupart, c’était des
14 gens locaux mais j’ai cru comprendre qu’il y avait quelques
15 personnes aussi, un grand nombre, un nombre relativement
16 grand de personnes de Zenica et de Busovaca. J’ai appris
17 cela en suivant leurs conversations. J’ai appris qu’ils
18 étaient tous de la Bosnie centrale.
19 Q. Merci. Vous avez mentionné aussi la
20 conversation avec une personne à l’hôtel, un membre du HVO
21 qui a parlé trop peut-être. Vous avez dit que c’était
22 quelqu’un de Zenica. Est-ce que, sur la base de cette
23 conversation, vous avez pu comprendre que cet Ivica
24 appartenait à la police militaire lui aussi ?
25 R. Oui. Il venait lui aussi de temps en temps.
Page 13832
1 Il portait son ceinturon blanc et à l’époque, il portait
2 des vestes caractéristiques de la police militaire.
3 Q. Donc, cette personne faisait partie du même
4 contexte et son unité était à l’hôtel ?
5 R. Oui. C’est ce qu’il m’a dit très
6 concrètement et clairement qu’il était à l’hôtel lorsque la
7 sonnette d’alarme a été sonnée.
8 Q. Cette femme que vous avez mentionnée dont
9 nous ne dirons pas le nom et qui aurait été amenée à
10 l’extérieur de sa maison, vous avez regardé tout cela.
11 Est-ce qu’il y a eu des signes de résistance qu’elle
12 essayait de manifester ? Est-ce que vous avez pu remarquer
13 quelque chose comme cela ?
14 R. Non, pas vraiment de signes caractéristiques
15 et très clairs. Peut-être des indices de quelque chose
16 comme ça mais je ne peux pas l’affirmer. Je ne pouvais
17 affirmer, ni remarquer cela avec certitude.
18 Q. Très bien ! Vous avez aussi parlé de la
19 manière dont les soldats sont passés par votre appartement
20 et ils vous ont menacé avec un pistolet et vous ont dit
21 d’aller dans la salle de bain mais vous n’avez pas reconnu
22 ces soldats. C’est ce que vous avez dit ?
23 R. Oui.
24 Q. Quel était l’uniforme que la personne qui
25 vous menaçait portait ?
Page 13833
1 R. C’était un uniforme de camouflage avec les
2 insignes du HVO.
3 Q. Mais pas d’autres insignes ?
4 R. Je ne les ai pas remarqués.
5 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire si c’était
6 une personne locale ?
7 R. Qu’est-ce que vous voulez dire par personne
8 locale ?
9 Q. Lorsque je dis « locale », je parle des gens
10 de Vitez et des villages aux alentours.
11 R. Oui. Dans ce cas-là, c’était une personne
12 locale.
13 Q. C’est ce que vous croyiez ?
14 R. À 100 pour cent.
15 Q. Est-ce que vous pouvez nous donner une
16 description de cette personne ?
17 R. Eh bien, c’était quelqu’un d’assez grand,
18 fort. Sa peau était claire, de même que ses cheveux et
19 puis il était ivre, je dirais, à l’époque.
20 Q. Et son âge ?
21 R. Entre 25 et 30 ans.
22 Q. Est-ce que vous avez pu entendre quel était
23 son surnom de la part des autres ?
24 R. Les autres ne sont pas entrés dans
25 l’appartement.
Page 13834
1 Q. Mais ils ne criaient pas quelque chose, les
2 autres ?
3 R. Non, pas du tout, sauf que l’homme lui-même,
4 l’homme qui était devant la porte a dit à un moment :
5 « Dépêche-toi, dépêche-toi. »
6 Q. Très bien ! Merci. Même si, comme Slaven
7 Kraljevic l’avait dit, le nom de Kraljevic était écrit sur
8 votre porte, ces hommes n’ont pas respecté cela, n’est-ce
9 pas ?
10 R. Non.
11 Q. Et vous êtes d’accord avec moi pour dire que
12 lorsqu’on parle des gens locaux, et peu importe à quelle
13 unité ils appartenaient, ils savaient exactement qui
14 étaient les Vitezovis ?
15 R. Oui, absolument.
16 Q. Donc, est-ce que vous croyez que des gens
17 locaux, malgré le fait que le nom de Slaven Kraljevic était
18 mis sur votre porte, qu’ils auraient fait quelque chose
19 pour violer son ordre ?
20 R. Écoutez, je ne sais pas. Peut-être c’est
21 Slaven lui-même qui les a envoyés.
22 Q. Donc, d’un côté, vous croyez que Slaven
23 voulait vous aider mais vous ne croyez pas qu’il le faisait
24 sincèrement ?
25 R. Je n’ai pas de preuve de cela.
Page 13835
1 Q. Nous avons mentionné Darko Kraljevic et son
2 unité et le fait qu’il contrôlait la situation dans la
3 partie de la ville appelée Kolonija ?
4 R. Écoutez, je ne peux parler que de mon opinion
5 personnelle, de mes impressions. Je n’ai pas de document
6 afin de corroborer cela mais je ne peux que répéter mon
7 opinion qui est la suivante. C’est que l’organisation même
8 du HVO était très bonne et je pense que, quand même, les
9 gens qui étaient assis à l’hôtel contrôlaient entièrement
10 la situation, étaient maîtres de la situation.
11 Q. Mais vous êtes d’accord avec moi pour dire
12 que les Vitezovis étaient une unité reconnaissable dans la
13 ville ?
14 R. Oui, on pourrait le dire. S’ils
15 constituaient une réelle force, on peut dire que c’était
16 une force reconnaissable.
17 Q. Est-ce que les gens étaient intimidés par eux ?
18 Est-ce qu’ils avaient peur d’après ce qu’ils disaient ?
19 Vous êtes passé à travers la détention dans le bâtiment du
20 SDK, et cætera, les gens parlaient. Est-ce que vous aviez
21 l’impression qu’ils avaient peur d’eux ?
22 R. Je n’ai pas remarqué quoi que ce soit
23 d’horrible. Ils ne faisaient pas vraiment exception vis-à-
24 vis des Jokeris ou bien des autres, au moins de mon point
25 de vue.
Page 13836
1 Q. Très bien ! Une seule question encore…
2 (l’interprète se reprend) deux seules questions encore.
3 Tout d’abord, votre appartement où ils sont venus,
4 ils vous ont menacé et ils vous ont expulsé. Comme vous le
5 dites, un soldat y vit encore aujourd’hui. En ce qui
6 concerne cet appartement, c’est votre père qui avait le
7 droit d’y résider ?
8 R. Oui.
9 Q. Donc, d’après la loi, c’est votre père qui
10 avait le droit d’utiliser cet appartement ?
11 R. Depuis 1968.
12 Q. Donc, il n’était pas le propriétaire de cet
13 appartement ?
14 R. Non.
15 Q. En ce qui concerne la procédure que vous avez
16 mentionnée conformément à la législation en vigueur dans la
17 Fédération de Bosnie-Herzégovine, vous avez le droit de
18 restituer, de regagner ce droit de résident et retourner
19 vivre dans votre appartement ?
20 R. En principe, oui.
21 Q. Dites-nous une seule chose afin que les
22 choses soient claires. Donc, c’est la police militaire qui
23 vous a amené depuis votre appartement jusqu’au bâtiment du
24 SDK ?
25 R. Oui.
Page 13837
1 Q. C’est la police militaire qui vous a amené du
2 bâtiment du SDK jusqu’à Zaselje, jusqu’à Vranjska ?
3 R. Oui.
4 Q. Et de Vranjska à Kratine, c’est encore la
5 police militaire qui vous a amené là-bas ?
6 R. Oui.
7 Q. C’est la police militaire qui vous a ramené
8 au bâtiment du SDK, n’est-ce pas ?
9 R. Écoutez, pour vous dire les choses tout à
10 fait honnêtement, il était très tard, entre 12 h 00 et 1 h
11 00 du matin, et il faisait très noir. Donc, je n’ai pas
12 vraiment vu leurs insignes. Donc, je ne peux pas
13 l’affirmer avec certitude.
14 Q. En ce qui concerne le bâtiment du SDK, c’est
15 la police militaire qui le gardait ?
16 R. Oui.
17 Q. Merci.
18 Me KOVACIC (interprétation) : Je n’ai plus de
19 questions.
20 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Pendant que
21 nous parlons de cela, Me Kovacic, je souhaite savoir s’il
22 serait possible d’examiner la pièce à conviction D52/2. Il
23 s’agit d’une carte.
24 Me KOVACIC (interprétation) : Je ne dispose pas
25 de ma propre copie parce que c’est le greffe qui doit
Page 13838
1 l’avoir mais j’ai une carte semblable, pratiquement
2 identique. Il me faut 20 secondes pour la trouver. Est-ce
3 que vous avez besoin d’une nouvelle carte ?
4 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Ce n’est pas
5 grave. Nous avons la carte.
6 Est-ce que l’huissier pourrait placer cela sur le
7 projecteur ?
8 J’aimerais que le témoin nous aide sur un point
9 particulier s’il peut le faire. Est-ce que Krizancevo
10 Selo… il l’a mentionné dans son témoignage avant, nous
11 avons entendu à un certain moment qu’il y a eu des
12 activités militaires qui se déroulaient dans cette région
13 et ici, je ne vois pas ce genre de marque. C’est marqué à
14 Sivrino Selo.
15 Donc, je souhaite demander au témoin où on en est
16 en ce qui concerne Krizancevo Selo. Est-ce que c’est la
17 même chose que Sivrino Selo ou bien ailleurs ?
18 Me KOVACIC (interprétation) : Monsieur le
19 Président, le témoin nous aidera mais je vais essayer aussi
20 de vous aider. Il ne faut pas être surpris par le fait que
21 vous ne le trouvez pas sur la carte puisque ceci n’est pas
22 marqué sur la carte.
23 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Effectivement.
24 Me KOVACIC (interprétation) : Krizancevo Selo,
25 simplement, fait partie d’un village appelé au sens large
Page 13839
1 du terme Sivrino Selo et ceci appartient à la partie
2 Dubravica de ce village. Le témoin peut l’indiquer ou bien
3 moi-même, je peux le faire.
4 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Laissez le
5 témoin le faire d’abord.
6 Me KOVACIC (interprétation) : Monsieur
7 l’Huissier, veuillez placer la carte sur le rétroprojecteur
8 de telle manière que Vitez se trouve au centre. Veuillez
9 ouvrir la carte et maintenant, nous avons besoin d’agrandir
10 cette partie. Très bien !
11 Q. Monsieur Ahmic, est-ce que vous pourriez
12 montrer aux Juges… tout d’abord si vous pouvez trouver sur
13 la carte et ensuite, indiquer avec le pointeur Krizancevo
14 Selo et nous indiquer très exactement quelle est la partie
15 du village qui s’appelle ainsi. Je vais essayer de vous
16 aider. Est-ce que vous avez trouvé Dubravica un peu plus
17 en bas à gauche de Sivrino Selo ?
18 R. Oui.
19 Q. Pour autant que je sache, la partie appelée
20 Krizancevo Selo, c’est vraiment au-dessous de la lettre B.
21 Est-ce que vous êtes d’accord avec moi ?
22 R. Oui. Ceci se trouve à peu près ici
23 [indication du témoin]. Je pense que c’est à peu près ici.
24 Je crois qu’il y a même les maisons qui sont indiquées.
25 C’est ici que j’indique. Pour autant que je sache, c’est
Page 13840
1 ici Krizancevo Selo.
2 Q. Vous parlez de ce sommet ?
3 R. Non, pas du sommet. Un peu en aval, un peu
4 en bas. Voilà, à peu près ici où l’on voit ces maisons
5 [indication du témoin]. Je crois que c’est ça les maisons.
6 Donc, pas ici au sommet mais ici.
7 Q. Et si on prend la route, si on descend par
8 cette même route, est-ce que vous pouvez nous montrer où se
9 trouvait l’école ?
10 R. À peu près ici [indication du témoin].
11 Q. Donc, vers le bas, tout à fait en bas ?
12 R. Oui, à peu près ici, près de cette autre
13 route qui rejoint la première [indication du témoin].
14 Q. D’accord. Donc, près de ce carrefour ?
15 R. Oui, à peu près. Je ne peux pas être tout à
16 fait précis.
17 Q. Et si l’on parle de ceci, peut-être vous
18 pourriez montrer aux Juges également cette gare que vous
19 mentionnez.
20 R. Oui. Avant, c’était la gare mais nous
21 l’appelons toujours la gare.
22 Q. Et Novaci ?
23 R. Novaci ?
24 Q. Oui.
25 R. Novaci ? Un instant, s’il vous plaît, que je
Page 13841
1 trouve. Je crois que ça devrait se trouver à peu près ici
2 [indication du témoin].
3 Me KOVACIC (interprétation) : Monsieur le
4 Président, ceci n’est pas lié à ce témoin, à sa déclaration
5 mais peut-être nous pouvons profiter de sa présence. Le
6 village qui se trouve à droite de Sivrino Selo, ça se voit
7 sur la carte, Pirici et Vidovici, et après, ça deviendra
8 pertinent. Parfois, il y a une confusion de noms entre les
9 deux villages.
10 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Qu’est-ce que
11 vous voulez dire, qu’il y a une erreur sur cette carte ?
12 Me KOVACIC (interprétation) : Oui.
13 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je ne sais pas
14 si nous allons accepter cela.
15 Me KOVACIC (interprétation) : Ceci est un fait
16 connu et reconnu. Même l’Otan le savait et nous pouvons
17 vérifier avec le témoin s’il est au courant de cela.
18 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Oui. Nous
19 pouvons lui poser la question.
20 Me KOVACIC (interprétation) :
21 Q. Monsieur Ahmic, ici, vous voyez les villages
22 de Pirici et Vidovici à droite de Sivrino Selo ?
23 R. Oui.
24 Q. Est-ce que vous êtes d’accord pour dire que
25 ces noms correspondent aux villages ou bien est-ce qu’il y
Page 13842
1 a eu des confusions, est-ce que leurs places ont été
2 changées, leurs places respectives, si vous le savez ?
3 R. Mon opinion est que peut-être vous avez
4 raison.
5 Q. Donc, vous admettez que peut-être il y a eu
6 une confusion entre les deux noms ?
7 R. Oui, c’est fort possible mais je ne suis pas
8 sûr.
9 Q. Très bien ! Merci.
10 Me KOVACIC (interprétation) : Autre chose,
11 Monsieur le Président ?
12 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Non, merci,
13 Monsieur Kovacic. Nous allons faire une pause maintenant
14 jusqu’à 11 h 30.
15 --- Suspension de l’audience à 11 h 03
16 --- Reprise de l’audience à 11 h 35
17 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Oui, Me Stein.
18 Me STEIN (interprétation) : Merci, Monsieur le
19 Président, mais nous n’avons pas de questions à poser. Je
20 vous remercie.
21 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Est-ce qu’il y
22 a des questions supplémentaires à poser ?
23 Me SOMERS (interprétation) : Oui, quelques
24 questions, si vous le permettez.
25 RÉINTERROGÉ PAR Me SOMERS
Page 13843
1 (interprétation) :
2 Q. Monsieur Ahmic, on vous a demandé pour ce qui
3 était de l’époque que vous avez été mobilisé dans la
4 Défense territoriale, et je crois savoir que c’était en
5 juin 1992 à peu près, on vous avait demandé s’il y avait eu
6 des Croates dans la Défense territoriale. Pourriez-vous
7 nous dire, vu que le HVO avait officiellement été mis en
8 place en avril 1992, pouvez-vous nous dire s’il y avait des
9 musulmans dans le HVO de votre région ?
10 R. Oui. Je crois savoir qu’il y en avait eu
11 mais pas un grand nombre.
12 Q. Donc, en fait, il s’agissait d’une deuxième
13 force militaire en présence qui rassemblait en premier lieu
14 des Croates : Est-ce bien vrai ?
15 R. Oui.
16 Me SOMERS (interprétation) : Je vous remercie.
17 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Monsieur
18 Ahmic, je crois que nous avons fini avec votre témoignage.
19 Vous pouvez vous retirer. Je tiens à vous remercier d’être
20 venu témoigner devant ce Tribunal International.
21 LE TÉMOIN (interprétation) : Je vous remercie
22 également.
23 [Le témoin se retire]
24 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Monsieur Nice,
25 permettez-moi de traiter de plusieurs questions
Page 13844
1 administratives.
2 Demain, nous allons siéger, dans le cas ou
3 d’autres propositions ne seraient faites, entre 9 h 00 et
4 12 h 30.
5 Pour ce qui des enregistrements audios dont nous
6 avons discuté hier, il s’est avéré que la traduction
7 pourrait être effectuée jusqu’au 14 février mais il me
8 semble qu’il se pourrait que les parties conviennent de la
9 chose au niveau de la traduction.
10 Me NICE (interprétation) : La question qui se
11 pose n’est pas savoir si la traduction de la deuxième bande
12 correspondra à la traduction de la première bande, c’est-à-
13 dire savoir si les traductions seront identiques. Je crois
14 que la Défense pourrait fort bien être d’accord avec cette
15 assertion. Mais nous voudrions écouter, réécouter les deux
16 enregistrements et je crois que cela nous permettrait de
17 résoudre le problème.
18 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Mais est-ce
19 que cela pourrait être fait dans les quelques journées qui
20 viennent et nous pourrions demander que ces enregistrements
21 soient entendus dans leur traduction.
22 Me STEIN (interprétation) : Nous aurions dû les
23 recevoir dans la matinée d’aujourd’hui mais nous ne les
24 avons pas reçus encore et je crois que cela pourrait être
25 résolu pendant le week-end et l’autre partie devrait
Page 13845
1 pouvoir l’obtenir lundi ou mardi, dans le cas où il n’y
2 aurait pas de problème au niveau de l’unité de traduction.
3 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je crois que
4 cela pourrait nous convenir. Où se trouve cet
5 enregistrement ?
6 Me STEIN (interprétation) : Je crois que cela
7 devrait se trouver au niveau du greffe.
8 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je pose la
9 question au greffe : Est-ce que cela pourrait être résolu
10 dans le cadre temporel imparti ?
11 LA GREFFIÈRE : Le greffe va faire en sorte que ce
12 soit résolu dans le cadre temporel imparti.
13 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je vous
14 remercie.
15 Me NICE (interprétation) : Auparavant, je
16 voudrais émettre l’hypothèse que nous allons finir avec le
17 témoin dans l’après-midi.
18 Pour ce qui est des cartes dont nous allons nous
19 entretenir demain, Monsieur Lopez-Terres s’en est entretenu
20 avec Monsieur Kovacic et Monsieur Stein et pour autant que
21 je le sache, il y a eu un accord concernant la nécessité de
22 pouvoir disposer d’encore un laps de temps.
23 Je crois que nous ne pourrons pas nous en
24 entretenir dans la journée de demain, ce qui fait que nous
25 avons la journée de demain de disponible et je me demande
Page 13846
1 si nous allons pouvoir remplacer cet entretien par la
2 présentation d’une déclaration de témoin.
3 Je ne voudrais certainement pas que nous perdions
4 de temps et ce que je voudrais demander c’est de savoir si
5 nous pourrions nous pencher sur des documents relatifs aux
6 villages dont nous devions nous entretenir en date du 14
7 février mais je pense que nous pourrions même en traiter
8 demain.
9 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Nous pouvons
10 en convenir lorsque nous aurons vu comment l’évolution de
11 l’interrogatoire avec le témoin se fera.
12 Me NICE (interprétation) : Je crois que dans ce
13 cas, nous pouvons faire entrer le témoin.
14 [Le témoin entre dans la Cour]
15 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je demande au
16 témoin de faire sa déclaration solennelle.
17 LE TÉMOIN (interprétation) : Je déclare
18 solennellement que je dirai la vérité, toute la vérité et
19 rien que la vérité.
20 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Monsieur
21 Fleming, je vous prie de vous asseoir.
22 TÉMOIN : JEREMY FLEMING
23 (ASSERMENTÉ)
24 INTERROGÉ PAR Me NICE (interprétation) :
25 Q. Pouvez-vous nous décliner votre identité ?
Page 13847
1 R. Je m’appelle Jeremy Norton Fleming.
2 Q. Monsieur Fleming, vous avez été membre de
3 l’infanterie pendant 10 ans et puis ensuite, vous avez été
4 manager de British Petroleum pendant 18 ans et vous êtes
5 devenu propriétaire de votre propre société, vous
6 travaillez en Afghanistan, et je crois qu’en 1992, vous
7 étiez devenu observateur de l’ECMM, d’abord en Croatie,
8 puis ensuite en Bosnie centrale ?
9 R. Oui, c’est cela.
10 Q. Si je dis que vous avez tenu à jour un
11 journal et que vous avez pris des notes pendant votre
12 activité d’observateur, cela correspond à la vérité ?
13 R. Oui, c’est cela.
14 Q. Cela a été remis à cette institution dans le
15 cadre d’une autre équipe qui ne les a pas examinées mais
16 est-ce que vous avez… dites-nous si vous avez eu l’occasion
17 de jeter un œil sur vos notes pour vous rafraîchir la
18 mémoire ?
19 R. Oui.
20 Q. Est-ce que ce même document que vous utilisez
21 appartient à un autre type d’activité ? Je crois qu’il
22 s’agissait de l’observation des élections.
23 R. Oui. J’ai été chargé du contrôle des
24 élections au nom de l’OSCE et ce document a été utilisé en
25 qualité de journal quotidien, enfin, journalier.
Page 13848
1 Me SAYERS (interprétation) : Si le témoin a tenu
2 à jour un journal pour pouvoir se rafraîchir la mémoire, il
3 l’utilisera probablement dans la journée d’aujourd’hui et
4 la Défense voudrait demander de pouvoir disposer d’un
5 exemplaire de celui-ci, exception faite des parties qui
6 sont de caractère personnel.
7 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Vous avez vu
8 le journal en question, Monsieur Nice ?
9 Me NICE (interprétation) : Non, je ne l’ai pas
10 vu. Le témoin s’est penché sur le journal pour se
11 rafraîchir la mémoire et je ne pense pas qu’il contienne
12 plus que ce qui est dit dans le résumé. Il s’agit d’une
13 confirmation des assertions préalables.
14 Je crois que le témoin n’est pas inquiété par la
15 possibilité que quelqu’un d’autre puisse lire les
16 renseignements qu’il a portés dans ce journal et je crois
17 que nous pourrions suggérer de voir comment ce témoignage
18 va évoluer, et bien sûr, si l’on fait référence à des pages
19 particulières, je crois que nous pouvons remettre le
20 journal à la Défense.
21 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Oui.
22 Me NICE (interprétation) : Je ne l’ai pas vu moi-
23 même mais j’ai relié la chose avec un élastique et cela
24 devrait servir d’aide-mémoire pour le témoin dans le cas où
25 il voudrait y faire recours.
Page 13849
1 Q. Avez-vous travaillé d’abord à Split,
2 Monsieur, et collecté des renseignements portant sur
3 l’armée, sur les commandements, sur les déplacements des
4 brigades de l’armée croate, leur discipline, leur moral et
5 ainsi de suite ?
6 R. Je suis arrivé à Zagreb en ma qualité
7 d’observateur en février 1992 et ce n’est qu’en mai 1992
8 que j’ai été envoyé à Split pour effectuer la même mission.
9 Q. Les activités que nous venons de mentionner
10 étaient votre travail en fait ?
11 R. Oui, tout à fait.
12 Q. En été 1992, quelle a été votre appréciation
13 relative au professionnalisme de l’armée croate, de la
14 discipline et des armements, pour autant que vous ayez pu
15 en juger ?
16 R. Au cours de l’été 1992 pendant que j’étais
17 stationné à Split, il y a eu un changement considérable
18 dans ma façon de voir le professionnalisme des forces
19 croates. Il s’agit en effet d’une période d’application du
20 Plan Vance-Owen dans la ville de Sinj. Il y avait là-bas
21 un entrepôt d’armements qui avait été en possession des
22 forces croates et mon travail avait consisté en la
23 vérification des armements en question.
24 En voyageant de Split vers Sinj et autour, nous
25 avons constaté la présence de troupes qui se déplaçaient,
Page 13850
1 donc, depuis cet entrepôt-ci à Sinj où les recrues avaient
2 une formation militaire et au courant de cet été, il est
3 devenu clair que ces troupes-là marchaient fort bien à la
4 différence des marches précédentes qui avaient été assez
5 maladroites. On pouvait remarquer que leurs uniformes
6 étaient propres, repassés, que les armes, donc, les fusils,
7 les Kalashnikovs, AK-47, semblaient être relativement
8 neuves et le tout semblait être bien discipliné lorsqu’il
9 n’était pas de fonction dans la ville de Split même ou il
10 semblait se déplacer en ville en uniforme mais avec une
11 affectation particulière.
12 Q. Je crois que c’est bien ce que je voulais
13 entendre.
14 Monsieur Fleming, c’est bien vous qui avez rédigé
15 un aide-mémoire au chef de la mission de l’ECMM à Zagreb
16 avec des recommandations concernant la réalisation de la
17 présence de l’ECMM en Bosnie centrale ?
18 R. Oui, c’est cela.
19 Q. Pouvez-vous nous citer les sources
20 d’information qui vous ont fait proposer une telle
21 décision ?
22 R. Durant les activités quotidiennes que je
23 viens de vous décrire, il y avait une unité sise entre Sinj
24 et Sibenik qui se trouvait être dans ma zone de
25 responsabilité et j’ai remarqué, chose qui avait été
Page 13851
1 confirmée par la suite, que cette unité était sujette à des
2 changements. J’ai oublié le terme professionnel dont il
3 s’agit mais cette zone-là comportait des troupes, des
4 soldats de niveau professionnel bien moins élevé et c’était
5 des soldats qui avaient des heures de travail réduites et
6 ils se rassemblaient ailleurs et ils avançaient vers l’est
7 de Split.
8 L’INTERPRÈTE : Votre micro, Monsieur Nice.
9 Me NICE (interprétation) : Je suis désolé.
10 Q. Il nous convient d’identifier les sources de
11 ces informations. Vous aviez deux sources d’information,
12 l’une qui était en relation avec ce que vous disait votre
13 interprète ?
14 R. Oui, en effet. À l’hôtel Split, il y avait
15 un interprète et nous allions séjourner dans cet hôtel.
16 C’était un interprète qui a travaillé avec moi pendant
17 plusieurs mois. Son père avait été commandant de l’unité
18 se trouvant à proximité justement de Sinj et Sibenik et
19 c’était ma relation avec l’unité en question.
20 Q. Comment avez-vous appris qu’il y avait eu des
21 déplacements de ces effectifs-là ? De la part du fils ?
22 R. Non, ce n’est pas de la part du fils que je
23 l’ai appris. C’était une chose que j’ai appris moi-même.
24 J’ai eu une rencontre par la suite avec un collègue à
25 Zenica qui lui a confirmé avoir vu le père de cet
Page 13852
1 interprète en Bosnie.
2 Q. Vous avez dit que c’était une perception que
3 vous aviez eue au sujet des déplacements d’unités. Ce
4 n’est pas le fils qui vous aurait parlé de la chose ?
5 R. Non, pas du tout.
6 Me NICE (interprétation) : Il y a deux
7 photographies au sommet du paquet de documents qui se
8 trouve devant le témoin. Je crois que nous pourrions
9 distribuer ces photographies aux Juges et aux conseils de
10 la Défense et je vous prie de remettre au témoin toute la
11 liasse en question. Cela nous facilitera la tâche.
12 Je vous prierais de bien placer ces photographies
13 sur le rétroprojecteur.
14 Q. La première photo : Je pense que sur cette
15 photo-là, nous pouvons voir le père dont il a été question
16 tout à l’heure ?
17 R. Oui, le père se trouve du côté droit.
18 Q. Une deuxième photo où il y a trois
19 personnes : Il s’agit d’une identification. Le fils se
20 trouve au milieu ?
21 R. En effet, c’est cela.
22 Q. Pouvez-vous vous rappeler leurs noms à
23 présent ?
24 R. J’ai bien peur que non.
25 Q. En tout état de cause, il s’agissait de
Page 13853
1 soldats croates, n’est-ce pas ?
2 R. Oui, tout à fait.
3 Q. Je vous remercie. Suite à cela, vous avez
4 établi un centre de coordination de l’ECMM à Zenica ?
5 R. Oui, tout à fait.
6 Q. Qu’avez-vous appris pour ce qui est des rôles
7 joués par Messieurs Blaskic et Kordic ?
8 R. Une partie de notre accord avait été
9 d’établir des relations avec les représentants militaires
10 des zones où nous nous trouvions et bien entendu, le
11 Colonel Blaskic était un personnage-clé dans la structure
12 militaire de cette région tandis que Dario Kordic… en fait,
13 j’étais moins convaincu du fait qu’il s’agissait là d’un
14 militaire, d’une personnalité militaire.
15 Q. Comment auriez-vous décrit sa position dans
16 cette formation initiale ? Est-ce que vous vous en
17 souvenez ?
18 R. Non. En l’occasion de cette première
19 information au briefing, il avait été décrit en tant que
20 personnalité supérieure, enfin éminente, dans le parti HDZ
21 mais de là à savoir ce que le HDZ était supposé faire dans
22 une situation militaire par excellence, c’est une chose que
23 l’on ne nous a jamais dévoilée.
24 Q. Avez-vous jamais participé à des réunions où
25 se trouvaient tant Blaskic que Kordic ?
Page 13854
1 R. J’essaie de m’en rappeler mais je pense que
2 non. Je pense qu’ils n’ont jamais été ensemble, quoiqu’ils
3 aient été effectivement conviés.
4 Q. D’une manière générale, les informations qui
5 vous parvenaient disaient-elles que le rôle de Kordic était
6 clair à titre complet ou entier où y a-t-il eu des zones
7 d’ombre ?
8 R. Oui, c’était certainement moins clair. Si
9 nous nous penchons sur la liasse de documents où l’on parle
10 de document… du militaire HVO…
11 Q. Il s’agit de la pièce à conviction 283.3.
12 Me SAYERS (interprétation) : Monsieur le
13 Président, quelle est la source de ce document ? Nous ne
14 l’avons pas vu jusqu’à présent et il me semble que nous
15 aurions dû en avoir communication auparavant.
16 Me NICE (interprétation) :
17 Q. Pouvez-vous nous dire qui est-ce qui vous a
18 fait parvenir ce tableau au paragraphe 6 ?
19 R. Nous avons reçu cela en date du 17 novembre
20 1992 de la part du commandement de la FORPRONU en Bosnie
21 centrale à Kiseljak, c’est-à-dire du commandement de
22 Kiseljak. Ils avaient une unité où il y avait un officier
23 de liaison de la Communauté européenne et ces officiers de
24 la FORPRONU nous avaient remis le tableau en question et
25 ils pensaient que cela correspondait à la situation
Page 13855
1 prévalant en date du 17 novembre 1992.
2 Q. Vous étiez en train de répondre à ma question
3 concernant le rôle de Kordic pour savoir si ce rôle était
4 devenu clair ou pas.
5 R. Mais la relation entre Kordic et Blaskic
6 n’était jamais claire. J’ai interrogé bien des gens, y
7 compris le chef du QG de Kiseljak, et à aucune occasion…
8 enfin, cette relation était un peu mystérieuse, quoique si
9 nous nous penchons à nouveau sur le tableau en question, il
10 semblerait que Kordic avait été le supérieur de Blaskic
11 mais comme je vous l’ai déjà dit, je ne le parierais pas.
12 Q. Nous parlerons maintenant du paragraphe 7 du
13 résumé.
14 Monsieur Fleming, s’il vous plaît, exprimez-vous
15 librement. Ne suivez pas le résumé, si vous pouvez le
16 faire.
17 Est-ce qu’au mois de décembre, votre base de
18 Zenica a été transférée à Busovaca ?
19 R. Oui. La mienne, oui, mais le centre de
20 coordination qui se trouvait à Zenica y est resté avec le
21 personnel. Cette nouvelle unité s’appelait Commission
22 conjointe et elle a été créée suite à la recommandation
23 faite par le chef du QG du commandement de l’ONU à
24 Kiseljak, qui était à l’époque le brigadier, le Général de
25 brigade Cordy-Simpson.
Page 13856
1 L’idée était de résoudre les problèmes qui se
2 posaient soit entre les groupes ethniques, donc, l’armée de
3 Bosnie-Herzégovine et le HVO, en créant une équipe dans
4 laquelle moi, je devais représenter la mission
5 d’observateurs européens, ensuite, un officier d’état-
6 major, à savoir le commandant du 3e corps d’armée pour
7 l’armée de Bosnie-Herzégovine et puis un officier du même
8 niveau que Blaskic devait nommer. Nous étions les trois
9 personnes qui avons reçu la protection par le biais d’un
10 véhicule blindé et puis, nous avions des moyens de
11 communication à notre disposition. Au cours de la première
12 réunion, six personnes ont assisté et par la suite, ce
13 numéro a été dédoublé.
14 Q. Lorsque vous dites que vous étiez le
15 représentant de l’ECMM, vous étiez en fait le Président ?
16 R. J’étais le représentant de l’ECMM dans cette
17 équipe mais j’étais en même temps le Président de cette
18 Commission et Président de toutes ces équipes qui s’étaient
19 déplacées sur le terrain.
20 Q. Est-ce qu’au début de l’année 1993, il y a eu
21 un incident au cours duquel une explosion a eu lieu devant
22 votre hôtel ?
23 R. Oui. Si je me réfère à mon journal, je peux
24 dire que ceci était autour du 10 février, un jour ou deux
25 jours plus tôt, puisque selon le journal, il est dit – je
Page 13857
1 cite : « Nous voulions retourner les restes de cet obus,
2 les fragments de cet obus. »
3 Sur la base de mes connaissances militaires, il
4 s’agissait d’une pièce d’équipement connu comme MLRS,
5 c’est-à-dire un lance-roquette multiple et celui-ci a jeté
6 une roquette près de l'hôtel. J’ai pris le téléphone et
7 j’ai voulu voir Kordic mais je n’ai pas reçu une réponse
8 positive à cela – d’ailleurs, c’est ce qui se passait
9 régulièrement – mais j’ai réussi à obtenir les fragments et
10 je les ai chez moi.
11 Q. Je m’excuse de cette pause mais je l’ai fait
12 afin d’attendre la fin de l’interprétation des interprètes.
13 R. Merci.
14 Q. En ce qui concerne cette explosion et ces
15 fragments d’obus que vous avez trouvés, est-ce que vous
16 pouvez nous dire quelle était leur provenance ?
17 R. Non. Le bataillon néerlandais, qui était lui
18 aussi stationné dans notre hôtel, a pris ces fragments afin
19 qu’une étude criminologique soit menée mais ils ne m’ont
20 jamais raconté les détails en ce qui concerne les résultats
21 de cette enquête. Les seuls renseignements que j’ai
22 obtenus à ce sujet étaient que ceci avait été tiré de Nora,
23 N-O-R-A, et j’ai marqué cela sur ma carte mais c’est le
24 seul indice en ce qui concerne la provenance de l’obus.
25 Q. Nora c’était une pièce d’armement de quelle
Page 13858
1 taille ?
2 R. Il m’est difficile de dire quoi que ce soit.
3 Q. Merci. En ce qui concerne le lieu que vous
4 mentionnez, est-ce que vous pourriez l’utiliser ? Peut-
5 être ce n’est pas la peine d’utiliser la carte puisque nous
6 connaissons peut-être déjà cette information.
7 R. D’après moi, ceci se trouvait à 15 kilomètres
8 nord-ouest de Busovaca.
9 Q. Quel était l’endroit où ça se trouvait ?
10 R. C’était le sommet d’une montagne.
11 Q. Est-ce qu’une réunion a eu lieu le 30 janvier
12 1993, une réunion de votre Commission ?
13 R. Oui. Ceci s’est produit à Vitez.
14 Q. Quelle était l’issue de cette réunion ?
15 R. C’était une réunion où beaucoup de personnes
16 ont assisté. Il y avait le Colonel Bob Stewart, le
17 commandant du Cheshire Regiment ; ensuite, moi-même en tant
18 que Président de la Commission conjointe ; ensuite, il y
19 avait le Général Morillon qui était le commandant de la
20 FORPRONU de Sarajevo ; et puis, les adjoints de commandants
21 du HVO et de l’armée de Bosnie-Herzégovine, c’est-à-dire du
22 3e corps d’armée de Bosnie-Herzégovine ; puis, il y avait
23 aussi les représentants de la Croix-Rouge Internationale et
24 du HCR.
25 C’était donc une grande réunion qui a eu lieu afin
Page 13859
1 d’exprimer notre mécontentement face à la manière dont le
2 cessez-le-feu était respecté et la manière dont nous avons
3 exprimé cela était telle qu’aucune des parties n’a été
4 exclusivement accusée d’avoir provoquer cette situation.
5 Nous avons dit que les deux parties se comportaient de
6 manière reprochable – c’est ce que j’ai dit – et le but de
7 la réunion était de les inciter à arriver à un autre accord
8 de cessez-le-feu.
9 Q. [Hors microphone] Peut-être nous pourrions
10 d’abord voir la version en anglais, 422(A) et ensuite les
11 deux documents précédents. Ceci nous permettra de
12 clarifier certaines choses.
13 Si l’on examine la traduction de ce texte, est-ce
14 que l’on peut dire que c’était un accord ?
15 Est-ce que vous avez ce document ?
16 R. Oui.
17 Q. Paragraphe 2 : « Cessez-le-feu urgent qui
18 devait entrer en vigueur » ; paragraphe 3 : « Les unités
19 des deux côtés doivent garder leur position actuelle et les
20 unités doivent se retirer. » ; paragraphe 4 :
21 « L’ouverture des routes » ; ensuite, paragraphe 5 :
22 « L’échange de prisonniers » et d’autres dispositions, y
23 compris point 8 concernant les communications
24 téléphoniques, et cætera.
25 Si nous examinons maintenant la page 1 de ce
Page 13860
1 document, à droite, nous pouvons voir qu’il a été envoyé au
2 Colonel Tihomir Blaskic et au Colonel Dario Kordic.
3 Si vous regardez de nouveau la liasse de documents
4 et puis le document précédent qui est en langue B/C/S où le
5 nom « FORPRONU » est indiqué en haut.
6 Sur ce document, nous pouvons voir qu’il est
7 inscrit « PUK » et je crois que c’est une abréviation
8 dénotant « colonel ». Donc, Colonel Blaskic est le PUK,
9 l’abréviation pour colonel, pour Kordic, et puis à la page
10 suivante, nous pouvons voir que les noms des signataires
11 ont simplement été tapés à la machine. Donc, il n’y a pas
12 de vraies signatures même si le sceau de l’Herceg-Bosna et
13 le sceau bosniaque y figurent.
14 Si vous revenez au premier document maintenant,
15 vous pouvez voir que maintenant, nous avons les vraies
16 signatures de signataires, c’est-à-dire Merdan, Nakic,
17 Stewart, Fleming, de la Mota et Whitworth. À la première
18 page de ce document, nous pouvons voir qu’il est inscrit
19 simplement à la main Blaskic et Kordic. Donc là, il n’y a
20 pas de mention de grade de colonel.
21 Tout d’abord, est-ce que vous êtes d’accord pour
22 dire que ceci est le document qui reflète l’accord qui a
23 été conclu ?
24 R. Là, vous parlez du document numéro 385 ?
25 Q. 422.
Page 13861
1 R. Oui mais les deux versions.
2 Q. Oui, vous avez raison, il y a deux versions.
3 R. Pour autant que je m’en souvienne, en ce qui
4 concerne ce qui a été signé, c’était le document 422 et je
5 crois, et j’espère d’ailleurs, qu’en ce qui concerne le
6 document 422(A), que celui-ci représente une traduction
7 précise de ce document.
8 Me NICE (interprétation) : Monsieur le Président,
9 Messieurs les Juges, vous pouvez remarquer qu’en ce qui
10 concerne la version de l’Herceg-Bosna, l’en-tête est
11 quelque peu différent vis-à-vis de celui qui figure sur le
12 document émanant des Nations unies et seulement le document
13 émanant des Nations unies comporte la signature.
14 Q. Paragraphe 10 : Vous étiez, donc, Président
15 de la Commission. Est-ce que vous rencontriez de temps en
16 temps Kordic, vous, en tant que Président de la
17 Commission ?
18 R. Oui.
19 Q. Et comment était-il habillé, qui
20 l’accompagnait et où est-ce que ceci se passait ?
21 R. C’était toujours à Busovaca, pour autant que
22 je m’en souvienne, et ceci se produisait dans la cave d’un
23 bâtiment en briques qui se trouvait dans le centre-ville de
24 Busovaca. Il était toujours accompagné de membres de son
25 équipe et puis, bien sûr, aussi de membres de mon équipe à
Page 13862
1 moi, surtout les interprètes.
2 Kordic était d’habitude habillé de manière
3 militaire. Je ne dirais pas plus que cela. Donc, je veux
4 dire par là un T-shirt de camouflage mais il ne portait pas
5 d’emblème indiquant le grade, ni d’insigne, ni de symbole
6 en drapeau de damier indiquant ou mentionnant le HDZ ou
7 quoi que ce soit. Il n’avait pas de couvre-chef et j’avais
8 toujours l’impression de me trouver face à quelqu’un qui
9 était le numéro 1 et puis la mentalité de cet homme, je la
10 décrivais comme la mentalité d’homme de blockhaus et même
11 si on avait l’impression d’avoir un rapport personnel
12 correct, c’était surtout… puisque moi, de toute façon,
13 j’étais un soldat, même si je n’étais pas habillé comme un
14 soldat. Je crois que c’est ce qui a facilité notre
15 rapport.
16 Q. Vous avez eu deux rencontres avec lui les 2
17 et 3 février. Vous pouvez vous baser sur le résumé si vous
18 le souhaitez mais simplement pour vous rafraîchir la
19 mémoire mais, s’il vous plaît, essayez de parler librement
20 d’après vos souvenirs et dites-nous si vous avez des notes
21 dans votre journal ou dans d’autres documents et si vous
22 avez besoin de vous en servir afin de vous rafraîchir la
23 mémoire.
24 R. En ce moment, je suis en train de regarder
25 mon journal et puis j’essaie de me rafraîchir la mémoire en
Page 13863
1 me basant sur le résumé. Je peux dire la chose suivante.
2 D’après mes souvenirs, c’était une rencontre qui devait
3 donner la suite à ce qui a été convenu lors de la réunion
4 du 30 janvier et le Colonel Stewart et le Général Morillon
5 m’ont donné, au cours de cette première réunion, des tâches
6 spécifiques concernant l’accord de cessez-le-feu et le
7 respect du cessez-le-feu dans la région et puis nous avons
8 dû parler aussi des dispositions qui ont été mentionnées
9 dans le document 422(A).
10 Q. Très bien ! Donc, c’était l’une des
11 réunions. Est-ce que vous vous souvenez de quoi que ce
12 soit concernant la réaction de Kordic au cours de cette
13 réunion ou pas ? Est-ce que votre journal vous indique
14 quelque chose ?
15 R. Je suis en train d’examiner mon journal en ce
16 moment et il n’y a pas ou peu de commentaires concernant
17 cette réunion, peu de commentaires utiles.
18 Q. Très bien ! En ce qui concerne le 3 février,
19 est-ce que cette réunion concernait un terrain miné qui se
20 trouvait sur la route entre Vitez et Zenica ?
21 R. Je vais encore une fois me référer au résumé.
22 Oui, c’est exact. Un glissement de terrain a été provoqué
23 par une explosion et ensuite, d’autres engins explosifs ont
24 été placés pour ralentir et rendre plus difficile le
25 processus de déminage.
Page 13864
1 Q. Quelle a été la réaction ou l’approche de
2 Kordic cette fois-ci ?
3 R. Je ne m’en souviens pas. Je me souviens de
4 ce qui a été dit dans le paragraphe 12 du résumé.
5 Q. Dites-le nous dans ce cas-là pour que ce soit
6 consigné au compte rendu.
7 R. Apparemment, il a été empêché dans ce
8 processus de déminage par ce qu’il appelait – je cite :
9 « Les soldats extérieurs, externes. » Fin de citation.
10 Quant à la question de savoir qui étaient très exactement
11 ces soldats, nous ne le savons pas. Il y a eu des
12 références vagues portant sur les Mujahedins, sur les
13 mercenaires. Donc, il voulait nous faire comprendre qu’il
14 s’agissait de personnes qui n’étaient pas placées sous le
15 contrôle de l’organisation et de la structure militaire
16 officielle dans la région.
17 Q. Le document suivant dans la liasse est le
18 document 445. Veuillez nous dire quelque chose à ce sujet.
19 C’est un rapport journalier en date du 6 février. Est-ce
20 que vous vous souvenez si c’était vous l’auteur de ce
21 document ou bien pas ?
22 R. Oui. C’est moi qui l’ai créé et moi, j’ai
23 été l’auteur du document.
24 Q. Il est dit que ceci concerne la Commission
25 conjointe de Busovaca.
Page 13865
1 R. Oui, c’est exact.
2 Q. À la page 2, paragraphe 6 de ce document,
3 vous parlez des activités de la CJCB, donc, les activités
4 de la Commission présidée par vous. Vous avez présidé à
5 une réunion. Vous parlerez de cela dans un instant. Vous
6 avez parlé aussi de la libération des prisonniers de
7 Katici. Est-ce qu’il s’agissait là de quelque chose que
8 vous avez pu relire pendant la nuit ? Est-ce que vous avez
9 des souvenirs un peu plus précis à ce sujet en ce moment ?
10 R. Je me réfère au résumé encore une fois.
11 Q. Ceci ne figure pas dans le résumé. Est-ce
12 que ceci concerne quelque chose que vous avez eu l’occasion
13 d’examiner un peu plus pendant la nuit ? Est-ce que vous
14 avez des souvenirs un peu plus précis à ce sujet en ce
15 moment ? Donc, en ce qui concerne la libération, la mise
16 en liberté des prisonniers de Katici.
17 R. J’examine mon journal. Oui. Sur la base de
18 mon journal, je peux dire que j’ai écrit que le 3 février…
19 c’était la première fois que l’on mentionne Katici dans mon
20 journal et ce que j’ai écrit concernait le déplacement des
21 civils de Merdani à Katici.
22 Q. De quoi vous souvenez-vous en ce qui concerne
23 cet incident, s’il s’agit là du même incident que celui
24 dont vous vous êtes souvenu un peu plus précisément pendant
25 la nuit ? Qu’est-ce que vous pouvez nous dire à ce sujet ?
Page 13866
1 De quoi vous souvenez-vous ? Où étaient les prisonniers ?
2 Étaient-ils des hommes ou des femmes ? Qu’est-ce qui leur
3 est arrivé, et cætera ?
4 R. Le village de Katici… le village de Merdani,
5 pardon, se trouve à trois ou quatre kilomètres à l’est de
6 Katici. D’après mes souvenirs, certains soldats ont pris
7 les hommes et les femmes et les ont amenés de Merdani à
8 Katici. En ce qui concerne l’endroit où les hommes ont été
9 détenus, ceci n’a jamais été dévoilé et moi, je ne les ai
10 jamais revus. Je ne les ai jamais vus du tout.
11 En ce qui concerne les femmes et les enfants, ils
12 ont été placés, ils ont trouvé des logements à Katici et,
13 si j’ai bien compris, c’est-à-dire d’après la manière dont
14 je comprenais les choses, ils ont dû se déplacer à
15 l’endroit de leur propre choix sous l’égide de la Croix-
16 Rouge Internationale.
17 Q. Est-ce que vous avez réussi à trouver les
18 personnes responsables pour la séparation entre les hommes
19 et les femmes et pour le déplacement des hommes ? Si la
20 réponse est oui, dites-nous comment est-ce que vous avez
21 réussi à retracer les responsables. Si la réponse est non,
22 inutile d’entrer dans d’autres détails à ce sujet.
23 R. Mon officier d’état-major, qui était chargé
24 de l’armée de Bosnie-Herzégovine et qui était membre de mon
25 équipe, a parlé avec un représentant de l’armée de Bosnie-
Page 13867
1 Herzégovine sur le terrain qui gardait, je suppose, qui
2 gardait les civils dans la maison et c’est sous son égide
3 que les négociations ont été entamées afin de libérer les
4 femmes et les enfants et afin de leur permettre d’aller à
5 l’endroit de leur propre choix.
6 Q. La question était la suivante : Est-ce que
7 vous avez appris qui était la personne responsable de cette
8 action ? Si vous ne connaissez pas la réponse, dites-le et
9 nous allons passer à autre chose.
10 R. Je me réfère à mon journal et je ne souhaite
11 pas deviner les choses. Donc, peut-être il vaut mieux dire
12 je ne sais pas.
13 Q. Très bien ! Revenons maintenant au
14 paragraphe 6 du document que nous avons examiné. Le
15 paragraphe 6(c) concerne votre réunion avec Kordic
16 concernant le déminage du barrage routier et la mise en
17 liberté des prisonniers. Vous voyez comment il est décrit
18 dans cette partie du paragraphe 6. Est-ce que vous pouvez
19 expliquer cela ?
20 R. Non, je ne peux pas. Il était connu en
21 général comme Colonel Kordic et je suppose qu’il n’y a pas
22 eu d’autres éclaircissements à ce sujet.
23 Q. Et quelle était sa position, son attitude au
24 cours de cette réunion ?
25 R. Je pense que je peux dire que son attitude
Page 13868
1 était positive en ce qui concerne le déminage et
2 l’élimination du barrage routier.
3 Q. Très bien ! Pour autant que vous le sachiez,
4 est-ce que les représentants de l’armée de Bosnie-
5 Herzégovine n’ont pas assisté à cette réunion ?
6 R. Non, je ne m’en souviens pas.
7 Q. Est-ce que vous vous souvenez d’une autre
8 réunion à laquelle ont assisté Viktor Andrejev et un homme
9 nommé Bozic ?
10 R. Oui, je m’en souviens.
11 Me NICE (interprétation) : Je vois qu’il est 12 h
12 30. Nous ne pourrons pas encore terminer avec
13 l’interrogatoire principal.
14 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Très bien !
15 Nous allons procéder à une pause jusqu’à 2 h 30.
16 Monsieur Fleming, nous avons une pause-déjeuner un
17 peu plus longue que d’habitude. Veuillez rentrer ici à 2 h
18 30 et je dois vous dire la même chose que je dis à tous les
19 témoins, à savoir de ne pas parler avec qui que ce soit, y
20 compris les membres du Bureau du Procureur, de votre
21 déposition avant la fin de la déposition.
22 R. Oui, Monsieur le Président.
23 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Nous
24 procéderons à une pause jusqu’à 2 h 30.
25 --- Suspension de l’audience à 12 h 30
Page 13869
1 --- Reprise de l’audience à 14 h 36
2 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Monsieur Nice,
3 c’est à vous.
4 Me NICE (interprétation) :
5 Q. Nous allons parler de la question entre
6 Kordic, Andrejev et Bozic. Pourriez-vous nous dire quelque
7 chose à ce sujet ?
8 R. Vous pensez à la réunion qui s’est tenue le 7
9 février ?
10 Q. Je pense que vous seriez plus à même de
11 déterminer la date de cette réunion. Il s’agit du
12 paragraphe 14. Donc, s’il s’agit bien du 7 février,
13 pourriez-vous nous le confirmer, s’il vous plaît ?
14 R. Je pense que cela s’est produit, en tout cas,
15 avant le 7 février. Les personnes qui ont assisté à cette
16 réunion étaient Viktor Andrejev qui traitait des questions
17 de la police civile à Kiseljak au nom de la FORPRONU. Il y
18 avait également Jean-Jacques Bousseau. Il était le
19 Commandant régional de la mission des observateurs
20 européens à Split, et Zenica et Busovaca dépendaient de la
21 région de Split en ce qui concerne l’ECMM. Le chef de la
22 police était également présent.
23 Je souhaiterais encore une fois jeter un coup
24 d’œil sur mon journal. La réunion, en réalité, traitait du
25 problème suivant. Il s’agissait des activités civiles des
Page 13870
1 Nations unies et il fallait empêcher que la situation ne
2 devienne un problème exclusivement militaire et pour
3 comprendre la situation sur place à l’époque, il est
4 nécessaire de comprendre trois choses.
5 Tout d’abord, il s’agissait d’une situation sur le
6 terrain et peut-être plus que je n’ai pu le ressentir,
7 surtout tout au début. Ensuite, la structure même des
8 forces armées sur le terrain était telle que ces forces,
9 finalement, défendaient leur territoire. Des soldats
10 étaient armés et ils défendaient leurs maisons.
11 À l’époque, j’ai commencé à ressentir que plus
12 tard, un certain nombre de documents qui avaient été signés
13 par des supérieurs hiérarchiques n’étaient pas respectés,
14 en tout cas, pas dans la mesure où ils auraient dû être
15 respectés. Donc, cette situation… en réalité, il y avait
16 plusieurs situations où des familles ont été maltraitées,
17 où des maisons avaient été endommagées et on pouvait
18 s’attendre à ce qu’un soldat armé monte la garde devant un
19 endroit ou une maison sans faire quoi que ce soit d’autre.
20 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, vous
21 pouvez penser alors que cette situation était assez
22 explosive, qu’elle était difficile à résoudre sans
23 changement de politique et il fallait tout d’abord déplacer
24 les soldats de leur terrain, c’est-à-dire de leurs propres
25 maisons.
Page 13871
1 Q. Donc, nous en venons à nouveau à cette
2 réunion. Comment avez-vous compris la situation sur le
3 terrain ? De quelle manière avez-vous expliqué cette
4 situation lors de cette réunion ?
5 R. De la façon dont je viens de vous parler car
6 moi, j’avais l’impression que cette situation n’était plus
7 une situation qui relevait de l’armée mais plutôt que les
8 solutions résidaient dans la police, que la police avait la
9 clé d’une résolution de la situation. Il n’y avait pas
10 vraiment d’activités militaires sur le terrain. C’était
11 surtout des actes criminels qui avaient été commis.
12 Q. Qu’avait dit Kordic quand vous avez donné
13 votre point de vue ?
14 R. Je pense qu’il m’a soutenu mais il fallait en
15 réalité que j’essaie de convaincre Viktor Andrejev
16 puisqu’il était chargé des affaires civiles et il fallait
17 aussi que j’essaie de convaincre le coordinateur, Monsieur
18 Jean-Jacques Bousseau, et j’ai dû essayer de les convaincre
19 de faire appel à la police civile de la FORPRONU pour les
20 entraîner à effectuer des missions de police sur le
21 terrain.
22 On a toujours expliqué que toutes les personnes en
23 âge de combattre, tous les hommes en âge de combattre
24 avaient déjà été mobilisés dans différentes armées, qu’il
25 n’en restait pas suffisamment pour améliorer la situation
Page 13872
1 dans la police civile, surtout en ce qui concerne
2 l’entraînement.
3 Ensuite, moi, j’avais l’impression que Monsieur
4 Kordic me soutenait dans mon idée. La police, qui s’est
5 basée sur une base ethnique, devait refléter la situation
6 ethnique sur le terrain et c’était un deuxième problème qui
7 avait été évoqué lors de cette réunion et cette proposition
8 – c’était la deuxième proposition – elle avait été
9 acceptée.
10 Q. Kordic a-t-il dit qu’il allait parler avec
11 quelqu’un à ce sujet et, si oui, avec qui ?
12 R. Oui. Il a dit, si je me souviens bien… la
13 conversation s’est prolongée. On a parlé de l’idée que
14 j’ai émise, à savoir d’essayer de neutraliser les points de
15 contrôle, les points où l’on contrôlait des véhicules.
16 Comme la Chambre de première instance doit le savoir, les
17 points de contrôle qui avaient été contrôlés et tenus par
18 le HVO avaient causé, provoqué l’établissement d’un point
19 de contrôle de l’armée de Bosnie-Herzégovine peut-être 300
20 mètres plus loin et moi, j’avais proposé que ces points de
21 contrôle soient neutralisés de la façon suivante. J’ai
22 proposé que l’on rapproche ces points de contrôle
23 graduellement sur une durée de plusieurs mois pour que les
24 soldats enlèvent leurs uniformes de l’armée et pour qu’ils
25 mettent des uniformes de police.
Page 13873
1 À partir du moment où la situation devenait
2 meilleure, par exemple, un membre du HVO devait travailler
3 à côté d’un soldat de l’armée de Bosnie-Herzégovine et,
4 donc, ils devaient recommencer à communiquer puisque
5 c’était des personnes qui sont allées à l’école ensemble,
6 qui se connaissaient. Donc, en principe, cela ne devait
7 pas être trop difficile et Kordic a dit qu’il allait
8 discuter avec le chef de police de Mostar pour qu’il fasse
9 parvenir des uniformes.
10 Q. Le 13 avril, une réunion… le 13 février (se
11 reprend l’interprète), une réunion s’est-elle tenue sous
12 l’égide de la commission conjointe de Busovaca et Blaskic
13 et Hadzihasanovic ont-ils signé un ordre à Kakanj ?
14 R. Oui.
15 Q. À cette époque, l’armée de Bosnie-Herzégovine
16 a-t-elle reçu l’ordre de signer un accord de cessez-le-feu
17 de Sarajevo ?
18 R. Oui.
19 Q. Et que les points de contrôle soient enlevés,
20 démantelés ?
21 R. Oui.
22 Q. Quel était le point de vue de Blaskic ?
23 R. C’était difficile de le dire à l’époque car
24 on parlait beaucoup au moment de ces réunions. Moi, j’ai
25 présidé la réunion. Les membres de la FORPRONU étaient là.
Page 13874
1 C’était le régiment de Cheshire. Il y avait aussi
2 l’officier de liaison de la Communauté européenne qui est
3 venu de Kiseljak et il y avait aussi les représentants du
4 HVO et de l’armée de Bosnie-Herzégovine.
5 À partir du moment où on avait émis des
6 propositions suite à la réunion qui s’est tenue, dont nous
7 avons parlé dans le paragraphe 14 du résumé, ensuite, on a
8 beaucoup discuté, on a discuté très longtemps et on a
9 abouti à un accord et cet accord avait été signé.
10 Q. Blaskic a-t-il parlé de forces extérieures,
11 oui ou non ?
12 R. Je ne m’en souviens pas vraiment mais je ne
13 serais pas surpris si cela avait été le cas car je sais
14 qu’il a souvent parlé des forces venant de l’extérieur.
15 Q. Il nous reste encore quelques documents.
16 Peut-être ne sera-t-il pas nécessaire de montrer plus que
17 deux documents mais ces documents ne sont pas rangés en
18 ordre logique ou chronologique mais je vais vous demander
19 tout d’abord de regarder le document 464(A).
20 R. Oui. Ce document se trouve avec le document
21 464 ?
22 Q. Oui. C’est la version anglaise. Pourriez-
23 vous nous dire si cela fait partie des documents habituels
24 que vous aviez l’habitude de voir à l’époque ?
25 R. Je ne m’en souviens pas.
Page 13875
1 Q. La question que je vais vous poser est la
2 suivante : Le 13 février, à 12 h 30, Blaskic avait émis
3 l’ordre d’améliorer l’état des préparations au combat et
4 moi, je vous l’ai dit… pour poser la question au témoin :
5 À quelle heure s’est tenue la réunion dont vous parlez ?
6 Est-ce que cette réunion s’est tenue avant ou après 12 h
7 30, c’est-à-dire le moment où l’ordre avait été émis ?
8 R. La réunion qui s’est tenue à Kakanj s’est
9 tenue tard dans la nuit.
10 Q. Si nous regardons le document 463.1, je pense
11 qu’il y a une date sur ce document. C’est bien ce
12 document, un des documents qui a été produit à la suite de
13 cette réunion ?
14 R. Oui.
15 Q. Donc, ce document, il s’agit d’un ordre
16 commun sur le retrait des troupes pour la libération de la
17 circulation, les prisonniers, et cætera. Pourriez-vous
18 nous dire qui sont les signataires de cet ordre ?
19 R. Les Commandants du 3e corps d’armée.
20 Q. Blaskic ?
21 R. Hadzihasanovic, Blaskic et moi-même en tant
22 que Président de la réunion.
23 Me NICE (interprétation) : Monsieur le Président,
24 Messieurs les Juges, je suis conscient de la quantité des
25 documents qui avaient déjà été versés au dossier. Les
Page 13876
1 autres documents qui sont disponibles pour la Défense, je
2 pense qu’il n’est pas nécessaire de les verser au dossier
3 séparément mais, en tout cas, nous les tenons à votre
4 disposition.
5 Q. Monsieur Fleming, après avoir regardé votre
6 journal ce matin et après avoir préparé le résumé de votre
7 déclaration, pouvez-vous vous souvenir d’autres événements
8 concernant Merdani et certaines femmes de Merdani ?
9 R. Je ne me souviens plus qui m’en a parlé, si
10 cette information est venue par téléphone ou bien par notre
11 canal de communication normal venant de Zagreb mais, en
12 tout cas, j’ai reçu un rapport de Busovaca nous disant,
13 nous indiquant que sur le territoire de Merdani, un certain
14 nombre de musulmans ont été fusillés devant un mur.
15 Ce que j’ai fait ensuite a été de me rendre au
16 quartier général du HDZ, à la présidence du HDZ où, dans
17 une petite pièce, une toute petite pièce, j’ai vu des
18 femmes et des enfants qui étaient gardés par des militaires
19 et ces femmes et ces enfants étaient visiblement en état de
20 choc.
21 Après avoir discuté avec l’officier le plus haut
22 placé que j’ai pu trouver sur le terrain, nous nous sommes
23 mis d’accord que j’allais rencontrer le représentant du HDZ
24 devant le quartier général du HDZ le lendemain matin à 6 h
25 30. Donc, moi, j’y suis allé. Cependant, ce représentant
Page 13877
1 du HDZ n’est pas venu. Donc, j’ai décidé de me rendre à
2 Merdani pour voir si j’allais découvrir des signes, des
3 indices que des personnes avaient été fusillées dans ce
4 village.
5 Donc, j’ai discuté avec un certain nombre de
6 villageois qui m’ont dit qu’ils n’en savaient rien et
7 qu’ils n’allaient pas me dire quoi que ce soit. En tout
8 cas, même s’ils savaient quelque chose, ils ne voulaient
9 pas me le dire.
10 Alors, j’ai regardé un petit peu autour dans le
11 village et je n’ai pas trouvé des indices qui auraient pu
12 me montrer qu’une tuerie avait eu lieu dans ce village,
13 qu’il y a eu une effusion de sang. Je n’ai pas vu de tombe
14 non plus. J’ai entendu dire qu’une ou deux personnes
15 avaient été transportées dans l’hôpital de Zenica mais je
16 n’ai pas eu de moyen pour vérifier l’exactitude de cette
17 information.
18 Donc, cet incident s’avérait être faux. Moi, ce
19 que j’ai fait, c’était d’informer des événements mais je
20 n’ai pas pu les corroborer avec d’autres informations.
21 Q. Avez-vous trouvé un indice, quelque chose
22 d’important dans le fait que ces femmes ont porté plainte
23 au sein du HDZ ? C’est un parti politique.
24 R. Moi, j’ai voulu savoir uniquement… enfin,
25 pour moi, le plus important était de savoir où elles
Page 13878
1 voulaient aller, voulaient-elles rentrer chez elles dans
2 leurs maisons, s’abriter à Zenica, rester au sein du UNHCR ?
3 Je n’ai pas pu vraiment obtenir de réponse et cela
4 s’ajoute à ma constatation que rien ne s’est produit.
5 Me SAYERS (interprétation) : Monsieur le
6 Président, j’ai préparé beaucoup de questions mais je crois
7 que la Chambre a déjà entendu beaucoup de réponses. Donc,
8 la Défense de Monsieur Kordic n’a pas de questions pour ce
9 témoin.
10 Me MIKULICIC (interprétation) : La Défense de
11 Monsieur Cerkez n’a pas de questions pour ce témoin.
12 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Monsieur
13 Fleming, ceci conclut votre témoignage. Je vous remercie
14 d’être venu témoigner devant le Tribunal International.
15 Maintenant, vous pouvez partir.
16 LE TÉMOIN (interprétation) : Je vous remercie,
17 Monsieur le Président.
18 [Le témoin se retire]
19 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : [Hors
20 microphone]
21 Me NICE (interprétation) : Comme la Chambre le
22 sait, nous n’avons plus de témoin pour aujourd’hui et pour
23 demain non plus et j’avais envisagé de voir comment le
24 temps à notre disponibilité pourrait être utilisé de la
25 meilleure des façons possibles et je crois que nous sommes
Page 13879
1 tombés d’accord entre les parties ici présentes pour que
2 nous puissions débattre de trois fascicules portant sur les
3 crimes commis dans les villages et je crois qu’il s’agit de
4 Busovaca, Vares… ah non, il faut me rectifier étant donné
5 que cela a été traité avec Monsieur Scott.
6 Me SAYERS (interprétation) : Nous avons convenu
7 avec Monsieur Scott et le bureau du Procureur pour débattre
8 des dossiers de Zenica, Busovaca et Zepce.
9 Me NICE (interprétation) : En outre, Monsieur
10 Kovacic a suggéré – je pense que cela a eu lieu hier ou
11 avant-hier – que nous pourrions préparer un petit ordre du
12 jour pour ce qui est des témoins dont nous allons obtenir
13 les dépositions par écrit et nous l’avons, d’ailleurs,
14 fait. Nous allons obtenir ces transcriptions et des copies
15 ont été préparées pour la Chambre de première instance.
16 Il est évident que nous n’avons pas encore entendu
17 toutes les remarques concernant les témoins à entendre mais
18 je crois que la Défense pourra désigner le nombre de
19 témoins ou il n’y a pas d’objection à présenter ainsi que
20 ceux où des objections existent et nous pourrions ensuite
21 convenir de la lecture de certains transcripts, comptes
22 rendus d’audience, à moins que quelqu’un ait quelque chose
23 à ajouter.
24 Me SAYERS (interprétation) : Je tiens à ajouter
25 qu’il y a 46 témoins. Vous pouvez vous imaginer la
Page 13880
1 quantité de comptes rendus d’audience qu’il s’agit
2 d’examiner. Ce n’est pas là une chose simple. Ce n’est
3 pas une affaire mais plusieurs affaires dont nous parlons
4 et la meilleure des façons de procéder qui me tombe à
5 l’esprit, c’est de traiter du principe général de savoir si
6 les comptes rendus d’audience d’une affaire peuvent être
7 transférés vers une autre.
8 Cela soulève des problèmes sérieux ainsi que des
9 questions d’ordre légal et lorsque l’on parle des 46
10 témoins que nous venons de mentionner, nous demanderions à
11 la Chambre de première instance de nous accorder un peu de
12 temps pour que nous puissions analyser leurs témoignages
13 afin d’aboutir à des réponses raisonnables et intelligentes
14 et, entre-temps, nous pourrions en débattre en termes
15 généraux.
16 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je vous prie
17 de voir la décision portant sur l’affaire Aleksovski.
18 Me SAYERS (interprétation) : C’est justement ce
19 que j’avais en tête, Monsieur le Président.
20 Me KOVACIC (interprétation) : Si je puis ajouter
21 quelques faits fort brièvement, les débats portant sur les
22 témoins dont les témoignages pourraient être versés au
23 dossier ici ont été entamés entre les deux parties et mon
24 idée avait été d’essayer d’accélérer les choses. Aussi,
25 ai-je été d’avis que cette façon de procéder a été entamée
Page 13881
1 assez tard mais je pense qu’il nous appartient de donner au
2 plus vite une réponse.
3 Toutefois, cela est difficile car, comme l’a dit
4 mon collègue, il y a 46 témoins à étudier, enfin, leurs
5 témoignages et je demanderais que l’Accusation nous
6 fournisse des résumés concernant les déclarations de ces
7 témoins, comme cela avait été le cas auparavant, avant que
8 nous puissions procéder à une classification et dire :
9 untel n’a pas trop d’importance, untel autre en a. Donc,
10 sans avoir à vérifier trop de détails et procéder de façon
11 plus rapide et quelle que sera l’attitude à cet égard, nous
12 pourrions nous pencher par la suite avec attention sur ces
13 comptes rendus d’audience.
14 Toutefois, l’un des problèmes qui pourrait
15 occasionner des difficultés, compte tenu du laps de temps
16 restant à notre disposition, c’est le problème de la
17 traduction. Je n’insiste pas sur la nécessité d’avoir tous
18 les témoignages des autres affaires traduites mais il y
19 aura certainement un certain nombre de témoins suite à ce
20 premier examen où nous aurons certainement besoin
21 d’analyser leurs dires plus en détail et parfois, cela
22 n’est pas possible sans une participation du client lui-
23 même et je pense qu’il ne fait aucun doute qu’il dispose du
24 droit d’être informé, ne serait-ce que des questions
25 essentielles et nous sommes en train de parler de questions
Page 13882
1 essentielles et il a le droit d’en être informé en langue
2 croate.
3 C’est la raison pour laquelle, dans les deux ou
4 trois jours à venir, je serai en mesure de réagir à la
5 proposition tout en me réservant le droit d’émettre des
6 réserves. Comme l’a dit mon collègue, Me Sayers, il s’agit
7 de questions juridiques et, d’autre part, je pense que ce
8 qui nous aidera grandement en la matière, c’est, comme l’a
9 dit Monsieur le Président, le cas de l’affaire Aleksovski.
10 Je crois que nous pourrions fondamentalement dire
11 que tel nombre de témoins nous convient, nous ne nous
12 opposerons pas à la lecture des comptes rendus d’audience
13 et leur versement au dossier et il n’y en aura peut-être
14 pas plus que huit ou dix dont nous aurions besoin d’avoir
15 la traduction et, dans un délai raisonnable, nous serions
16 en mesure soit de tomber d’accord, soit d’émettre des
17 oppositions pour ce qui est du versement au dossier de ces
18 comptes rendus d’audience en tant qu’éléments de preuve.
19 Je resouligne une fois de plus que cette façon de
20 procéder a été entamée assez tard mais je suis
21 reconnaissant à l’Accusation pour les efforts déployés et
22 je suis bien d’accord pour ce qui est d’accélérer tout
23 cela, de gagner du temps et de présenter, donc, les résumés
24 dont je viens de parler.
25 À ce sujet, je tiens à soulever quelques questions
Page 13883
1 encore. Vous avez émis une ordonnance portant calendrier.
2 Vous nous avez donné des délais à respecter et il y a deux
3 éléments qu’il nous convient de tenir en vue. La première
4 chose, c’est la réponse à l’admissibilité des documents
5 concernant le conflit armé international et là, nous avons
6 une date qui est celle du 15 février 2000. Nous allons
7 nous en tenir à cette date-là. Nous avons presque terminé
8 à ce sujet et nous serons probablement en mesure de vous
9 soumettre les documents afférents plus tôt.
10 Le deuxième document est à l’alinéa 3 de
11 l’ordonnance qui consiste en la définition des pièces à
12 conviction jusqu’au 28 janvier 2000 et la Défense est tenue
13 de répondre dans un délai de 14 jours. Quoiqu’une grande
14 partie des documents a été fournie pendant le week-end, il
15 y a quelques 28 à 30 pour cent qui ne l’ont pas encore été
16 et je crois que dans la semaine du 29 au 30, nous avons
17 reçu des éléments, des documents. Nous travaillons de
18 façon très intense. Je ne sais pas combien de documents il
19 nous reste. C’est une liasse énorme qu’il nous convient de
20 passer par les mains, enfin, au moins, et voir quels sont
21 ceux à mettre de côté et quels sont ceux sur lesquels il
22 faut se pencher avec plus d’attention et qui requièrent un
23 peu plus de temps.
24 C’est la raison pour laquelle je vous demande avec
25 insistance… si le délai prévu par le paragraphe 3 ne nous
Page 13884
1 laisse que 14 jours, nous devrions alors arriver au 13 ou
2 14 février. Je vous demanderais de nous accorder au moins
3 la moitié de la semaine suivante, c’est-à-dire tomber vers
4 le 16 ou 17 ou, mieux, vers la fin de cette semaine-là.
5 Dans le cas contraire, je serais forcé de faire
6 comme vous l’avez demandé mais j’ai peur de commettre des
7 erreurs.
8 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Monsieur
9 Kovacic, voyez un peu comment vous avancez en la matière et
10 si jamais vous avez trop de difficultés, eh bien, vous
11 pourrez faire une nouvelle requête.
12 Me KOVACIC (interprétation) : Je vous remercie,
13 Monsieur le Président.
14 Me NICE (interprétation) : Juste quelques points
15 encore. Quand il s’agit des témoins dont nous entendons
16 lire les comptes rendus d’audience, qui figurent sur la
17 liste des témoins, certains ne sont pas concrétisés.
18 Enfin, certains le sont pour ce qui est des dossiers
19 relatifs aux villages mais 12 témoins qui ont été mis de
20 côté pour témoigner concernant les comptes rendus
21 d’audience, nous avons examiné en date du 12 novembre les
22 résumés et je crois que la Défense devrait répondre d’ici
23 demain et je crois qu’il faudrait accorder la priorité à
24 ces témoins-là et en discuter demain puis commencer à
25 partir du haut de la liste pour aller vers le bas et passer
Page 13885
1 en revue un maximum de témoins.
2 Je me féliciterais si possible demain de souligner
3 l’importance considérable de l’utilisation de ces comptes
4 rendus d’audience et ce que nous pourrions aussi étudier,
5 ce sont les enregistrements vidéos. Nous en avons bien
6 d’autres. Certains enregistrements proviennent des
7 stations de télévision ou, alors, ce sont des
8 enregistrements issus de différentes réunions et je crois
9 que nous pourrions voir si ces enregistrements pourraient
10 être versés en tant qu’éléments de preuve ou, alors, nous
11 faudra-t-il produire des témoins qui parleront de ce qui a
12 été présenté sur ces enregistrements vidéos.
13 Je pense que c’est un sujet auquel nous pourrions
14 nous vouer demain.
15 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Par
16 conséquent, je convie la Défense à se concentrer, pour ce
17 qui est des comptes rendus d’audience, sur les témoins qui
18 se trouvent sur le résumé réitéré, présenté par le bureau
19 du Procureur en date du 10 novembre, chose dont vous
20 disposez depuis cette date-là et je parle là de la page 21
21 qui porte le titre : « Témoins à ne pas convier et
22 transcriptions ». Je vois qu’il y a sur cette liste huit
23 témoins dont l’un a déjà témoigné.
24 Me NICE (interprétation) : Oui.
25 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Nous allons
Page 13886
1 nous pencher également sur la même chose.
2 [La Chambre discute]
3 M. LE JUGE BENNOUNA : Me Nice, j’étais en train
4 de parler avec mon collègue, le Juge May, au sujet de cette
5 question des transcripts. Alors, je n’étais pas du tout au
6 fait de cette affaire de transcripts parce que j’entends
7 parler de 45 témoins à travers des comptes rendus. Je ne
8 sais pas si c’est des comptes rendus qui n’ont rien à voir
9 avec les dossiers ou bien si on compte là-dessus ceux qui
10 rentrent dans les dossiers parce que là, on ne sait pas
11 trop mais, en tout cas, le chiffre est impressionnant de
12 45, surtout presqu’à un mois de la clôture de la
13 présentation par le Procureur de son affaire.
14 Alors, ma question est la suivante : est-ce que
15 vous comptez nous informer de cette affaire de transcripts
16 et justifier la raison pour laquelle vous avez demandé à
17 introduire ces comptes rendus, à ce moment-là, parce que
18 pour l’instant, nous ne sommes pas au courant, nous ne
19 sommes pas censés être au courant de cette affaire de
20 comptes rendus ?
21 Moi, j’en entends parler ici en audience mais je
22 n’ai rien vu passer. Alors, je me suis enquis auprès de
23 mes collègues qui, eux aussi, n’ont rien vu passer.
24 Me NICE (interprétation) : Certains de ces
25 comptes rendus sont des parties de dossiers portant sur les
Page 13887
1 villages et je crois que nous pourrions en décider lorsque
2 nous déciderons au niveau des dossiers relatifs aux
3 villages. Vous savez que Monsieur Scott a proposé un ordre
4 du jour en conformité avec la proposition, la demande de
5 Monsieur Kovacic et nous avons des témoins dont les comptes
6 rendus sont recueillis.
7 Je pense que la Chambre de première instance a été
8 rappelée quant à l’importance de ces transcriptions et nous
9 sommes tout à fait disposés à répondre à toutes les
10 questions y relatives.
11 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Nous allons
12 entendre demain les arguments portant sur ces
13 transcriptions. Il est clair que plus il y a de pièces à
14 conviction découlant de l’accord des deux parties, mieux
15 cela vaudra. Le reste pourra être débattu.
16 Me NICE (interprétation) : Si nous n’allons pas
17 arrêter nos travaux d’aujourd’hui, nous pourrions entendre
18 les enregistrements et en discuter demain et je crois que
19 les arguments soulevés par la Défense auront quelque chose
20 à voir avec les témoins qui devront témoigner concernant
21 les enregistrements et il sera peut-être nécessaire d’en
22 convier davantage.
23 Dernier point. Lorsqu’il s’agit du témoin de
24 Vares, évidemment, nous ne pouvons pas citer publiquement
25 son nom en ce moment. Lorsque nous avons eu un témoin de
Page 13888
1 Vares, je crois que la Chambre de première instance se
2 souviendra que son nom figure dans les documents du
3 bataillon nordique et il n’était pas connu à notre équipe
4 jusque là.
5 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Oui.
6 Me NICE (interprétation) : J’ai demandé de
7 poursuivre l’interrogatoire et cela a été fait, pour autant
8 que faire se pouvait, et nous avons établi que non
9 seulement le document dont a parlé le témoin, qui avait,
10 donc, eu ce document sous les yeux, mais nous avons trouvé
11 dans le cadre des documents du bataillon nordique une
12 interview de cet homme-là par le bataillon nordique et si,
13 toutefois, cela traite d’une autre personne de Stupni Do et
14 non pas de la même que celle que nous avions eue
15 auparavant, je pensais devoir mettre cela à la disposition
16 de la Défense et j’ai l’intention de le faire aujourd’hui
17 ou demain.
18 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Est-ce que
19 l’autre partie aurait quelques points à soulever
20 également ?
21 Me KOVACIC (interprétation) : Il serait peut-être
22 bon de rappeler à nos collègues que nous avons avancé au
23 niveau des plans, des cartes et je tiens à informer la
24 Chambre de première instance que nous avons établi une
25 méthodologie et des démarches à suivre et il serait
Page 13889
1 probablement préférable de restreindre le fossé ou l’écart
2 existant sur les points où nous pouvons être d’accord et
3 ceux où on ne peut pas l’être.
4 Pour ce qui est des cartes, cela risque de nous
5 faire économiser beaucoup de temps, non pas seulement
6 maintenant mais même par la suite, lorsque la Défense
7 présentera ses éléments de preuve.
8 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Oui.
9 Me KOVACIC (interprétation) : Nous sommes
10 disposés à profiter de cette opportunité pour faire un
11 maximum et, comme nous avons convenu hier, il se peut que
12 nous aboutissions à une solution avant la fin de la semaine
13 suite à la pause que nous allons avoir mais, de toute
14 manière, cela aura lieu dans la semaine, enfin, dans cet
15 intervalle-là.
16 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Bien ! Je
17 crois que vous pouvez présenter toute l’affaire comme vous
18 avez convenu.
19 Allez-y, Monsieur Sayers.
20 Me SAYERS (interprétation) : Je voudrais demander
21 au bureau du Procureur une biographie au sujet de Monsieur
22 Elford. Nous n’avons aucune information à son sujet.
23 Me NICE (interprétation) : Je leur communiquerai
24 volontiers tout ce que j’ai à son sujet. Le reste, je vais
25 essayer de le retrouver.
Page 13890
1 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je vous
2 remercie. Fort bien ! Nous pouvons reporter nos travaux,
3 nos sessions à demain matin, 9 h 00.
4 --- L’audience est levée à 15 h 20
5 pour reprendre le vendredi
6 4 février 2000 à 9 h 00
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
Page 13891
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 Page blanche insérée aux fins d’assurer la correspondance entre la
14 pagination anglaise et la pagination française.
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25