Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 18853

  1   (Mercredi 17 mai 2000)

  2   (Audience publique)

  3   (L'audience est ouverte à 9 heures 34.)

  4   (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

  5   (Maître Sayers interroge le témoin.)

  6   M. le Président (interprétation): Maître Sayers, vous avez la parole.

  7   M. Sayers (interprétation): Bonjour Messieurs les Juges, bonjour

  8   commandant. A titre d'information pour les Juges, nous en étions vers la

  9   fin du paragraphe 26 dans ce résumé qui a été signé de la main du

 10   commandant Ljubas.

 11   Commandant, est-il exact de dire qu'une unité mobile de l'armée de Bosnie-

 12   Herzégovine, appelée unité des moudjahidin, était stationnée à Travnik,

 13   ceci juste avant le début de l'offensive lancée par l'armée de Bosnie-

 14   Herzégovine du 3 au 8 juin 1993?

 15   M. Ljubas (interprétation): Oui. Il y avait une unité de moudjahidin qui a

 16   été déployée. Elle était rattachée à la 7e brigade musulmane.

 17   Q.    Est-il exact de dire qu'il y avait de 120 à 150 moudjahidin dans

 18   le village proche de Mehurici, qui avaient coutume de traverser des

 19   villages uniquement croates en arborant des drapeaux, en chantant des

 20   chants religieux afin de harceler ou d'intimider la population locale

 21   croate?

 22   R.    Il est vrai dans le village de Mehurici, il y avait en

 23   permanence entre 120 et 150 moudjahidin alors que les autres ont été

 24   déployés dans les villages environnants, dans les maisons des Musulmans.

 25   Et ce sont les mosquées qui furent les lieux de rassemblement.


Page 18854

  1   Ils traversaient les villages croates, ils portaient des drapeaux vert et

  2   rouge, ils chantaient des chants religieux, des paroles religieuses

  3   également pour faire peur à la population croate.

  4   Q.    Merci commandant. Je crois que nous pouvons ignorer les

  5   paragraphes 27 et 28, puisque vous en avez déjà parlé hier au cours de

  6   votre déposition. Parlons du 3 juin 1993 et des événements qui

  7   accompagnèrent l'offensive lancée à grande envergure dans la région de

  8   Travnik et Novi Travnik contre le HVO. Où vous trouviez-vous au début de

  9   cette offensive, commandant?

 10   R.    En ce qui concerne le siège de mon commandement, il se trouvait

 11   à Dolac. Moi, j'étais de temps à autre dans mon commandement et de temps à

 12   autre, j'étais sur les lignes de front face aux Serbes et l'armée de la

 13   Republica Srpska

 14   Q.    Je crois qu'il est exact de dire, commandant, que nombre des

 15   maisons croates de Dolac ont été rasées par le feu et qu'elles ont été

 16   vandalisées, pillées, que parmi les bâtiments qui avaient été attaqués ou

 17   vandalisés, il y avait notamment une église, et que ceci était le fait de

 18   l'armée de Bosnie-Herzégovine ?

 19   R.    Oui, le 3 juin 1993, des provocations ouvertes ont déjà été

 20   déclenchées. Les tireurs d'élite également ont commencé à opérer, les

 21   premiers Croates ont été tués. On a opéré dans la direction de l'église à

 22   Dolac. Ces premiers jours, 12 civils ont été tués par les tireurs d'élite

 23   qui ont opéré à partir des villages musulmans, qui étaient dans les

 24   environs.

 25   Q.    Bien. Paragraphe 30 de votre résumé, vous parlez des attaques


Page 18855

  1   les plus violentes lancées par l'armée de Bosnie-Herzégovine le 8 juin

  2   1993. Pourriez-vous dire aux Juges ce qui s'est passé ce jour-là ?

  3   R.    Une attaque, la plus violente de l'armée de Bosnie-Herzégovine,

  4   a eu lieu le 8 juin 1993. C'était une journée tragique pour les Croates

  5   car en une seule journée, 92 Croates ont été tués parmi lesquels 24

  6   membres du HVO et 68 civils. Beaucoup de maisons également avaient été

  7   incendiées ; des femmes, des enfants et des vieillards ont été tués.

  8   C'était véritablement la journée la plus éprouvante pour les Croates de la

  9   municipalité de Travnik, de l'ensemble de la vallée de la Lasva.

 10   Comme je l'ai déjà précisé, ceux qui auraient dû protéger cette population

 11   se trouvaient sur la ligne de front face aux Serbes. C'est la raison pour

 12   laquelle la population, malheureusement, n'avait pas de défense, et c'est

 13   la raison également pour laquelle un grand nombre de civils avaient été

 14   tués.

 15   Q.    Vous avez déjà dit dans le cadre de votre déposition que c'était

 16   Jozo Leutar le commandant de la brigade Travnik et je crois que vous avez

 17   appris par l'intermédiaire du colonel Blaskic, commandant de la zone

 18   opérationnelle, que tous les civils croates qui se trouvaient dans les

 19   villages avoisinants devaient être évacués en direction de Nova Bila.

 20   R.    C'est mon commandant Jozo Leutar qui m'avait dit qu'il y avait

 21   de grandes victimes parmi les civils et j'ai appris également que le

 22   colonel Blaskic avait délivré un ordre pour protéger des civils. Il avait

 23   également demandé dans cet ordre qu'on installe les civils dans la région

 24   de Nova Bila où la population croate pouvait être protégée.

 25   Q.    Deux petites questions portant sur des faits: je pense qu'arrivé


Page 18856

  1   le 9 juin 1993, à ce moment-là, l'armée de Bosnie-Herzégovine avait le

  2   contrôle complet de la ville de Travnik et des villages croates

  3   avoisinants?

  4   R.    Eh bien, c'était le 7 ou le 8 juin jusqu'au 13 juin pendant

  5   lesquels les combats étaient les plus violents. Dans cette période,

  6   l'armée a réussi à prendre la ville de Travnik et la majorité des villages

  7   avoisinants qui étaient majoritairement habités par la population croate.

  8   Q.    Les combats se sont étendus au sud jusqu'à Novi Travnik, n'est-

  9   ce pas ?

 10   R.    Comme je l'ai déjà précisé, nous avons vu qu'il y avait de

 11   nombreuses troupes déployées à Travnik. Ils ont pris Travnik et des

 12   villages avoisinants ; l'armée de Bosnie-Herzégovine a commencé à attaquer

 13   Novi Travnik et c'est dans cette direction qu'ils ont commencé à opérer.

 14   Q.    Est-il exact de dire que le 14 juin 1993, l'armée de Bosnie-

 15   Herzégovine avait le contrôle complet de la route principale allant de

 16   Travnik à Zenica jusqu'à Guca Gora au sud?

 17   R.    Oui, jusqu'au 14, l'armée a réussi à passer sous son contrôle

 18   l'axe de communication Travnik, Guca Gora, Travnik, Zenica, partout où

 19   vivaient les civils croates qui ont été expulsés à cette époque-là.

 20   Q.    Avec l'autorisation de la Chambre, j'aimerais que soit diffusée

 21   une brève séquence filmée par la BBC à l'occasion de cette offensive. Ceci

 22   durera quelque deux minutes et nous avons la transcription destinée aux

 23   conseils de M. Cerkez, à vous, Messieurs les Juges et à la partie adverse.

 24   M. le Président (interprétation): Parfait.

 25   (Diffusion de la cassette)


Page 18857

  1   M. Sayers (interprétation): Peut-on avoir la cote ?

  2   Mme Ameerali (interprétation): Ce sera la pièce des D217/1 alors que la

  3   transcription sera 217A/1.

  4   M. Sayers (interprétation): Commandant, vous venez de voir ces images des

  5   événements qui ont entouré l'offensive lancée en Bosnie et nous avons

  6   entendu des commentaires du général Duncan. Pourriez-vous nous dire

  7   comment vous voyez les choses s'agissant de l'incidence de cette offensive

  8   sur la population civile croate de Travnik?

  9   R.    Oui. Comme vous l'avez déjà vu sur la cassette vidéo, vous avez

 10   pu remarquer que la population civile s'enfuit, paniquée. Ils ont peur de

 11   l'offensive. Vous avez vu une des routes qui a été empruntée par les

 12   Croates, par la population civile. Ce sont les Croates qui ont essayé de

 13   survivre. Vous avez pu voir également les gens qui fuyaient, qui

 14   emportaient dans les sacs à dos le minimum dont ils avaient besoin. Il y a

 15   plusieurs directions dans lesquelles ils se sont acheminés en traversant

 16   les forêts de Travnik vers Nova Bila et Novi Travnik. Vous avez vu

 17   également quelques unités ou plutôt des éléments des unités car c'étaient

 18   les gens qui étaient sur la ligne de front. Face à l'armée de la Republika

 19   Srpska et ils s'en retournaient parce qu'ils avaient peur pour leur

 20   famille au moment où ils ont appris ce qui se passait, quand ils ont

 21   appris également que des personnes avaient été tuées et que des maisons

 22   étaient incendiées. Les gens partaient sans penser à autre chose qu'à

 23   survivre. Ils sont retournés vers leur maison pour voir ce qui s'était

 24   passé avec les membres de la famille. C'est à ce moment-là également

 25   qu'ils se disaient qu'il fallait protéger, défendre les civils pour que


Page 18858

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18859

  1   les civils soient rassurés et acheminés vers des endroits qui étaient sûrs

  2   etc.

  3   Donc, dans une seconde étape, on était mieux organisés pour essayer

  4   d'arrêter l'offensive, mais dans un premier temps, c'était la panique qui

  5   régnait partout.

  6   Q.    Commandant, il a été suggéré dans le cadre de ce procès que ces

  7   civils prenaient la fuite à la suite de la propagande organisée par le HVO

  8   ou d'autres institutions politiques du parti des Croates de Bosnie….

  9   Mais dans un premier temps, c'étaient la panique et la terreur qui

 10   régnaient partout.

 11   Q.    Commandant, il a été suggérée ici dans le cadre de ce procès que

 12   ces civils prenaient la fuite à la suite de la propagande organisée par le

 13   HVO ou d'autres institutions politiques du parti des Croates de Bosnie

 14   plutôt que de fuir devant le feu déclenché par l'armée de Bosnie-

 15   Herzégovine. Avez-vous vous-même votre perspective s'agissant de ces

 16   évènements puisque vous avez pu assister et voir tout cela?

 17   R.    Jusqu'au 3 juin ou plutôt 8 juin, on aurait pu remarquer que ce

 18   n'était pratiquement pas imaginable qu'un conflit se déclencherait entre

 19   les Croates et les Musulmans. Ce n'est qu'à ce moment-là que nous avons

 20   compris que même au moment où Ivica Stojak, mon commandant, avait été tué,

 21   ce n'était pas tout à fait une coïncidence et tous les autres incidents

 22   ont démontré que ceci avait été préparé.

 23   Q.    Excusez-moi de vous interrompre. Ma question était plus simple

 24   que cela. Les civils croates prenaient-ils la fuite à cause de la

 25   propagande qui avait été organisée ou à cause d'autre chose ou parce


Page 18860

  1   qu'ils avaient peur pour leur vie ?

  2   R.    Mais il n'y avait absolument pas de propagande! Les civils

  3   fuyaient parce qu'ils avaient été attaqués. On les tuait ; on les frappait

  4   ; on les torturait. Ils fuyaient tout simplement pour sauver leur propre

  5   vie, pour sauver la vie des membres de leur famille.

  6   Q.    Parcourons rapidement le paragraphe 32. Plusieurs témoins sont

  7   venus nous dire que quelque 20000 civils croates avaient été chassés de la

  8   municipalité de Travnik. Etes-vous d'accord avec ce chiffre?

  9   R.    Oui.

 10   Q.    Que plus de 300 civils croates avaient été tués, que 900 avaient

 11   été blessés et que l'armée de Bosnie-Herzégovine avait massacré beaucoup

 12   de civils.

 13   R.    Oui, plus de 300 en plein milieu de l'offensive ont été tués

 14   dans la municipalité de Travnik et jusqu'à la fin de la guerre, ce chiffre

 15   a doublé. Un très grand nombre de civils et de membres du HVO avaient été

 16   tués. 1000 personnes avaient été tuées à peu près au cours de toutes ces

 17   attaques qui ont été préparées, organisées par l'armée de Bosnie-

 18   Herzégovine.

 19   Q.    Dernière pièce que je vous demanderai d'accepter au dossier,

 20   c'est un document que nous avons reçu du centre des Droits de l'Homme des

 21   Nations Unies. On y parle de l'incidence de ces offensives sur les

 22   villages environnants et les nombreux massacres commis par les troupes de

 23   l'armée de Bosnie-Herzégovine. Je voudrais avoir une cote pour cette pièce

 24   et puis, que nous en discutions.

 25   Mme Ameerali (interprétation) : Il s'agira du document D218/1.


Page 18861

  1   M. Bennouna : Maître Sayers, j'aimerais simplement, concernant aussi bien

  2   le témoignage que nous avons entendu hier qui était extrêmement émouvant

  3   et le témoignage d'aujourd'hui, vous rappeler ce que nous avons dit : nous

  4   ne sommes pas en train d'examiner une quelconque situation de

  5   représailles, de "dent pour dent" ; nous sommes absolument loin de ce

  6   contexte-là. Nous sommes dans un procès déterminé et nous ne devons pas

  7   dévier du procès où nous sommes.

  8   Il faudrait vous rappeler constamment la perspective dans laquelle nous

  9   sommes.

 10   M. Sayers (interprétation) : Tout à fait, Monsieur le Juge. Nous gardons

 11   cela à l'esprit et je pense que la présentation de nos témoins se fera

 12   dans ce sens. Comme je l'ai dit dans notre déclaration liminaire, nous

 13   n'avons voulu apporter que quelques rares exemples de municipalités comme

 14   Kakanj, Travnik, Bugojno à titre d'illustration pour voir qui faisait quoi

 15   et contre qui. Les allégations portées contre M. Kordic par exemple au

 16   chef 1, c'est qu'il y avait une politique omniprésente de persécution des

 17   Musulmans par les Croates de Bosnie sur le territoire de la HZ HB dans la

 18   municipalité de Zenica et ailleurs. Je crois que nous avons déjà dans une

 19   grande mesure parlé de Zenica et maintenant, nous essayons de voir qui

 20   persécutait qui dans la région de Travnik

 21   M. Bennouna : En fait, vous prenez deux ou trois échantillons et vous vous

 22   en tenez à cela.

 23   M. Sayers (interprétation) : Absolument, Monsieur le Juge. Nous avons

 24   gardé à l'esprit les observations formulées par vous, Messieurs les Juges,

 25   lorsque vous avez parlé de ces représailles ou de ces atrocités parce


Page 18862

  1   qu'il n'est pas justifiable de parler d'atrocités ou de faire des

  2   atrocités parce que quelqu'un d'autre en a commis contre vous.

  3   Commandant, nous avons ici un rapport de la commission des Nations unies

  4   pour la défense des Droits de l'Homme qui se rend à la paroisse de Brahic

  5   en 93 ou Brajkovici plus exactement. Je sais que vous ne comprenez pas

  6   l'anglais, mais j'aimerais relever les points saillants de ce document.

  7   Page 2.

  8   M. le Président (interprétation) : Un instant s'il vous plaît. Afin que

  9   nous puissions mieux comprendre : apparemment, il s'agit là de la

 10   traduction d'un rapport d'un service d'information chrétien plutôt que

 11   d'un rapport ordinaire.

 12   M. Sayers (interprétation) : Vous avez tout à fait raison, Monsieur le

 13   Président, je m'en excuse si je me suis trompé. Nous avons ici un rapport

 14   du service d'information chrétien Vjesnik qui rend visite à la paroisse de

 15   ce village en juin 93. Ceci est repris dans un rapport du centre des

 16   Nations unies pour la défense des Droits de l'Homme en juillet. Nous

 17   parlons des villages de Susanj, Zenica, où quelque 100 maisons ont été

 18   vidées, plusieurs civils détenus, surtout des femmes et des enfants. Sont

 19   énumérées 16 personnes dont la mort a été avérée. Est-ce que vous étiez au

 20   courant des atrocités commises dans le village de Susanj? En avez-vous

 21   jamais entendu parler pendant la période allant de juin à juillet 93?

 22   R.    Ce que je connais un peu mieux, ce sont les villages avoisinants

 23   à proximité de Susanj. Je ne peux rien dire de manière précise au sujet de

 24   Susanj.

 25   Q.    Suivons cette liste pour la municipalité de Travnik. Qu'en est-


Page 18863

  1   il de Hovnjak. Etes-vous au courant de meurtres commis dans ce village et

  2   aussi du pillage des maisons croates?

  3   R.    Oui?

  4   Q.    Nous parlons maintenant du village de Grahovcici.

  5   Apparemment plus de 4 civils auraient été tués et plus de 200 maisons dans

  6   ces villages ont été vidées et leurs habitants chassés vers Nova Bila.

  7   Est-ce que ceci correspond aux souvenirs des événements survenus à

  8   Grahovcici à cette période?

  9   R.    Oui. Je sais de quoi on parle dans ce rapport. Je connais ces

 10   éléments.

 11   Q.    Je poursuis cette liste. Nous parlons du village de Dolac et de

 12   Bila, municipalité de Travnik. Deux civils ont été tués et toutes les 65

 13   maisons du village ont été vidées, les habitants ont été chassés vers Nova

 14   Bila. Ceci cadre-t-il bien avec vos souvenirs?

 15   R.    En ce qui concerne Dolac, c'est Dolac qui se trouve à côté des

 16   mines Bila et Han Bila. Il ne faut pas faire la confusion avec Dolac du

 17   côté de Lasva. Par conséquent, il s'agit de Dolac à Han Bila. Ce n'est pas

 18   le même Dolac où j'étais moi-même.

 19   Q.    Merci. Il y a aussi le village de Podovi, en bas de la page 2,

 20   où on parle d'un incident, à l'avant dernière page, des exécutions à

 21   Bikosi. Nous n'allons pas nécessairement parler de façon plus

 22   circonstancié parce que nous avons soumis un affidavit de M. Pavo Barac,

 23   dans le cadre de la déposition de ce témoin à propos de cette offensive.

 24   Ce jeune homme se trouvait sur les lieux au moment où l'incident s'est

 25   produit.


Page 18864

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18865

  1   Mais nous parcourons cette liste et nous arrivons à ce que dit la

  2   commission à propos de la mort de 18 civils dans le village de Cukle. Est-

  3   ce que vous connaissez ces événements survenus en juin, juillet 1993?

  4   R.    Oui.

  5   Q.    Passons à la page suivante, village de Brajkovici. Apparemment,

  6   la commission a établi que 6 civils avaient été tués à Brajkovici et que

  7   plusieurs maisons avaient été vidées.

  8   Est-ce que ceci correspond également aux souvenirs que vous avez de ce qui

  9   s'est produit à cet endroit ?

 10   R.    Oui, je m'en souviens.

 11   Q.    Je passe rapidement au village de Novo Selo et au village de

 12   Konjevici, l'un se trouve dans la municipalité de Travnik et l'autre dans

 13   celle de Zenica. Les maisons ont été brûlées et incendiées, et les

 14   habitants croates ont été chassés alors que certains Musulmans se sont

 15   installés dans ce village.

 16   Est-ce que c'est bien votre souvenir ?

 17   R.    S'il s'agit de Novo Selo qui est à proximité du village Dolac, à

 18   ce moment-là, cela s'est passé de cette manière-là.

 19   Q.    Merci. A votre connaissance, il y avait environ 36 personnes

 20   portées manquantes à Maljine ?

 21   R.    Oui, Maljine.

 22   Q.    Sept civils tués à Guca Gora et enterrés au monastère ?

 23   R.    Oui, je me souviens. C'est l'année dernière que nous les avons

 24   exhumés et que nous les avons enterrés.

 25   Q.    A l'époque, aviez-vous compris que des attaques analogues


Page 18866

  1   étaient déclenchées par l'armée de Bosnie-Herzégovine dans la commune de

  2   Kakanj ?

  3   R.    C'est par la chaîne de commandement qui fut la mienne que j'ai

  4   reçu les informations d'après lesquelles, outre les offensives qui ont été

  5   citées, l'armée de Bosnie-Herzégovine avait organisé des offensives dans

  6   la municipalité de Novi Travnik, de Kakanj, de Zenica et dans d'autres

  7   municipalités.

  8   Nous avons appris également qu'il y avait un très grand nombre de civils

  9   tués, que des maisons ont été détruites, que les personnes ont été

 10   chassées, enfin des civils.

 11   Q.    A votre connaissance, est-ce qu'il y avait une politique

 12   officielle ou officieuse ou des recommandations faites dans le sens de la

 13   nécessité de persécuter ou de harceler les civils musulmans ? Est-ce que

 14   ceci aurait été une politique du HVO à Travnik et dans les villages

 15   environnants ?

 16   R.    A ma connaissance, il n'y avait pas de telle politique. Je ne

 17   l'ai jamais pratiquée. Je ne connais absolument personne qui soit membre

 18   du HVO et qui ait établi ou planifié ou incité une telle politique. La

 19   vérité était tout à fait autre et différente, sinon opposée.

 20   Q.    Avez-vous eu l'occasion de recevoir des ordres vous ordonnant de

 21   persécuter ou de harceler un membre quelconque de quelque groupe ethnique

 22   que ce soit ?

 23   R.    Non, j'ai eu un ordre express d'organiser le front face aux

 24   Serbes, donc d'organiser des équipes, de les faire relayer et de défendre

 25   la vallée de Lasva contre l'armée des Serbes.


Page 18867

  1   Q.    Est-ce que des soldats se trouvant sous votre commandement, à

  2   votre connaissance, indépendamment de l'existence ou de la non existence

  3   d'une telle politique, auraient harcelé ou intimidé des personnes qui

  4   n'auraient pas été d'appartenance ethnique croate ?

  5   R.    Les membres de mon unité n'ont jamais reçu un ordre dans le sens

  6   de persécuter ou d'expulser qui que ce soit.

  7   Q.    Je vous remercie, commandant. Je n'ai plus de question à vous

  8   poser.

  9   (Maître Mikulicic interroge le témoin.)

 10   M. Mikulicic (interprétation): Merci, monsieur Ljubas. Au nom de la

 11   défense de M. Cerkez, je vais vous poser quelques questions très brèves,

 12   et je vais vous demander de bien vouloir y répondre en fonction de vos

 13   souvenirs.

 14   Au cours de votre déposition hier, vous avez donné la description de la

 15   manière dont vous vous êtes organisés, comment ces unités avait été

 16   formées en 1992. Est-il vrai de dire qu'au cours de 1992 et tout au long

 17   de 1992 jusqu'à la grande offensive de l'armée de Bosnie-Herzégovine en

 18   juin 1993, l'unique et exclusif objectif de l'organisation de vos unités

 19   était de se défendre de la JNA et des Serbes de Bosnie ?

 20   M. Ljubas (interprétation): Oui.

 21   Q.    Est-il vrai de dire également qu'à ce moment-là, jusqu'à

 22   l'attaque qui a eu lieu en juin 1993, vous, en votre qualité de soldat,

 23   vous n'aviez aucun autre objectif que de faire face à l'armée des

 24   Musulmans de Bosnie-Herzégovine, et éventuellement aux attaques que cette

 25   armée aurait déclenchées ?


Page 18868

  1   R.    Oui.

  2   Q.    Au cours de votre déposition hier, monsieur Ljubas, vous avez

  3   dit que vous êtes au courant avec le fait selon lequel Alagic et Cuskic,

  4   membres de l'armée de Bosnie-Herzégovine à la fin de 1992, sont arrivés à

  5   Travnik de la république de Croatie ?

  6   R.    Oui.

  7   Q.    Est-ce que vous êtes au courant, monsieur Ljubas, que MM. Cuskic

  8   et Alagic, avant de se rendre sur le territoire de Bosnie-Herzégovine,

  9   étaient officiers dans les forces armées croates qui combattaient l'ex-JNA

 10   ?

 11   R.    Je ne suis pas au courant de ce fait.

 12   Q.    Vous avez dit également qu'au moment où ils sont arrivés, les

 13   incidents sont devenus plus fréquents dans la municipalité de Travnik ?

 14   R.    Oui.

 15   Q.    Pourriez-vous nous donner quelques exemples à titre

 16   d'illustration ?

 17   R.    Oui. Au moment où les unités de la 1ère et de la 7e brigade, qui a

 18   été rebaptisée 17e Krajiska, menées par Alagic et Cuskic à Travnik, nous

 19   avons pensé qu'avec leur arrivée, ils allaient renforcer nos rangs dans

 20   notre défense contre les Serbes. Et nous avons pensé que nous allions

 21   pouvoir récupérer la ville de Jajce grâce à ces renforts, mais ceci ne

 22   s'est pas passé: ils ont commencé à déployer leurs forces. A Travnik, ils

 23   ont stationné leurs forces.

 24   Ensuite, dans les villages avoisinants, avec leur arrivée, les relations

 25   se sont détériorées: ils ont commencé à provoquer les Croates. Il y avait


Page 18869

  1   des pannes d'électricité, des pannes de téléphone, il n'y avait pas d'eau.

  2   Ce sont eux qui contrôlaient tout cela. Il y avait également le siège du

  3   commandement à Plave Vode, où se trouvaient les groupes électrogènes et

  4   les aqueducs. D'autres incidents également se suivaient. Un certain nombre

  5   de personnes ont été provoquées ; on a tué des civils, des membres du HVO.

  6   Moi-même, j'ai été arrêté à un moment donné et on m'a désarmé. Plein de

  7   choses se passaient.

  8   Q.    Entendu. Monsieur Ljubas, vous avez dit que les unités qui

  9   avaient été commandées par Cuskic et Alagic étaient bien équipées et

 10   armées ?

 11   R.    Oui.

 12   Q.    C'étaient les unités qui ont été transportées dans les autocars,

 13   une vingtaine d'autocars, et qui étaient arrivées soi-disant de la

 14   république de Croatie. Pouvez-vous affirmer ce fait ? Est-ce que les

 15   plaques d'immatriculation étaient croates ?

 16   R.    Je ne sais pas quelles étaient les plaques d'immatriculation,

 17   mais j'ai vu les autocars qui les avaient transportés arriver à Travnik.

 18   Q.    Savez-vous que ces formations avaient été équipées, armées en

 19   république de Croatie?

 20   R.    A ma connaissance, il s'agissait en fait des unités équipées,

 21   armées et qui ont été transportées par les autocars de la république de

 22   Croatie. Comment, sous quelle forme, elles ont été entraînées, formées là-

 23   bas ? Je ne sais pas.

 24   Q.    Mais c'était probablement pour lutter contre un ennemi qui était

 25   commun ; l'ennemi commun, c'étaient les Serbes, l'armée de la Republika


Page 18870

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18871

  1   Srpska. C'était leur première tâche, n'est-ce pas ?

  2   R.    Oui. C'est ce que avons souhaité, c'est ce que l'on attendait.

  3   Q.    Entendu. Monsieur Ljubas, vous avez dit par ailleurs au cours de

  4   votre déposition d'hier que tout au début, le HVO, sur le plan de

  5   l'organisation, avait été mieux préparé, qu'ils avaient compris le danger

  6   face à la JNA et que, par la suite, l'armée de Bosnie-Herzégovine

  7   également s'est très bien préparée et organisée et qu'ils avaient dans

  8   leurs formations beaucoup d'officiers professionnels de l'ex-JNA. En

  9   conviendrez-vous avec moi ?

 10   R.    Il est vrai que l'armée de Bosnie-Herzégovine avait un plus

 11   grand nombre d'officiers de l'ex-JNA, par rapport à ceux que nous avions

 12   au sein du HVO.

 13   Q.    Au moment où nous avons parlé de ces deux messieurs, M. Fikret

 14   Cuskic et Mehmed Alagic, pourriez-vous nous confirmer qu'eux-mêmes étaient

 15   des professionnels, formés comme officiers au sein de l'ex-JNA ?

 16   R.    Oui, je l'affirme.

 17   Q.    Pourriez-vous nous confirmer que, dans la région de Novi Travnik

 18   et Travnik, c'étaient également des officiers de l'ex-JNA, Refik Lendo et

 19   Zurapi ?

 20   R.    Je ne peux pas vous l'affirmer. C'est une autre ville, ce

 21   n'était pas dans ma zone de responsabilité.

 22   Q.    Pourriez-vous nous dire si, dans votre zone de responsabilité, à

 23   Travnik, l'ex-officier de la JNA était M. Ahmed Kulenovic ?

 24   R.    Oui.

 25   Q.    Monsieur Ljubas, vous avez dit hier que l'armée de Bosnie-


Page 18872

  1   Herzégovine recevait l'équipement, les munitions -ce qui figure également

  2   dans le paragraphe 16- et que cet équipement venait des pays islamiques.

  3   Est-ce exact ?

  4   R.    Oui.

  5   Q.    Quels sont les moyens et comment, par quelle route, terrestre ou

  6   autre, comment cet équipement arrivait-il?

  7   R.    Par les voies terrestres.

  8   Q.    Est-il vrai de dire que ces routes, dans le territoire de

  9   Bosnie-Herzégovine, traversaient par les frontières ouest et sud-ouest et

 10   qu'elles traversaient le territoire de la Croatie?

 11   R.    Je pense que tous ces transports étaient effectués en provenance

 12   du Sud, c'est-à-dire la Bosnie centrale. Mais je ne peux pas vous dire

 13   exactement quelles étaient les routes qu'ils empruntaient.

 14   Q.    Par conséquent, vous ne pourriez pas ajouter plus de précisions

 15   à ce sujet-là. Monsieur Ljubas, j'ai terminé. Merci de vos réponses.

 16   (Maître Nice contre-interroge le témoin.)

 17   M. Nice (interprétation): Je n'avais pas tout à fait réalisé que Me

 18   Mikulicic avait terminé. Commandant, vous avez longuement déposé à propos

 19   de Travnik ; sans notes, vous avez fourni des chiffres, des points de

 20   détails. Avez-vous été en mesure de vous rafraîchir la mémoire avant de

 21   venir déposer, à l'aide de documents?

 22   M. Ljubas (interprétation): Non.

 23   Q.    Ce qui veut dire que… tous les chiffres que vous avez fournis,

 24   pouvez-vous nous dire d'où ils venaient ?

 25   R.    Ce sont des chiffres que, vu la fonction que j'exerce


Page 18873

  1   actuellement, je connais. Et puis, je les utilise, j'utilise ces chiffres

  2   au cours de mes activités actuelles également. Ce sont des chiffres que je

  3   connais depuis l'époque où les événements ont eu lieu ; c'est également

  4   l'époque où nous avons dressé des listes, où nous avons enterré des tués.

  5   Ce sont les journées noires qui nous ont éprouvés, qui ont porté malheur à

  6   mon peuple et à moi-même. Ce sont des chiffres et des dates que vous ne

  7   pouvez jamais oublier. Il y avait des êtres les plus chers que nous avons

  8   perdus.

  9   Q.    Vous nous avez dit que vous avez commencé en 1990, en tant que

 10   membre du parti politique que vous avez cité, et que vous en êtes toujours

 11   membre aujourd'hui?

 12   R.    Non. Moi, je suis devenu membre de ce parti jusqu'au moment où

 13   le HVO a été créé. A ce moment-là, j'ai gelé mes activités, si je puis

 14   ainsi dire. Je n'ai plus repris mes activités au sein du parti, car je

 15   suis devenu officier professionnel. Je suis toujours à ce poste-là.

 16   Q.    Vous nous avez parlé de la division existant entre l'élément

 17   militaire et l'élément civil du HVO. Ceci, vous pouvez nous le dire grâce

 18   à votre expérience personnelle, à vos connaissances propres ?

 19   R.    Oui. Dans le secteur où j'étais, dans le secteur de Nova Bila.

 20   Q.    Et puis il y a aussi l'expérience, la connaissance que vous avez

 21   de Travnik, de façon générale, eu égard aux rôles divers que vous avez pu

 22   jouer dans l'armée?

 23   R.    Pouvez-vous répéter votre question?

 24   Q.    Vous connaissez bien Travnik de façon générale: vous avez

 25   longuement déposé à propos des événements survenus à Travnik. Ceci


Page 18874

  1   découle, je suppose, de votre expérience acquise dans l'armée?

  2   R.    Oui. Ce sont toutes mes expériences que j'ai acquises. Je suis

  3   né à Travnik, j'ai été scolarisé, j'ai vécu tout au cours de cette guerre

  4   à Travnik. C'est sur la base de mon expérience personnelle que j'ai

  5   déposé.

  6   Q.    Vous avez parlé de M. Kordic: à votre avis, s'il avait un rôle

  7   quelconque, quel était-il pour ce qui est du HVO à Travnik?

  8   R.    A ma connaissance, M. Kordic était un homme politique actif et,

  9   pour ce qui me concerne personnellement, je n'ai jamais été en contact

 10   direct, du point de vue militaire, avec M. Kordic et il n'avait exercé

 11   aucune influence ni sur moi ni sur mon unité.

 12   Q.    Mais, en tant que second et puis en tant que commandant, je

 13   suppose que vous deviez savoir comment se faisait la guerre, comment elle

 14   se déroulait? Dans une certaine mesure du moins, n'est-ce pas?

 15   R.    Je ne sais pas de quelle partie de la guerre vous parlez.

 16   Q.    Je parle de Travnik.

 17   R.    Par conséquent, la guerre qui avait été menée contre l'armée de

 18   la Republika Srpska et, ensuite, la défense contre l'armée de Bosnie-

 19   Herzégovine.

 20   Q.    Pourrait-on présenter au témoin la pièce Z50?

 21   (L'huissier s'exécute.)

 22   Q.    Malheureusement ce document n'est pas rédigé dans votre langue,

 23   monsieur. Il s'agit d'un document préparé par certains observateurs

 24   européens et qui porte sur le mois de février 1992. Donc, nous sommes au

 25   tout début des événements. Mais déjà, vous y preniez part et ce rapport


Page 18875

  1   parle d'une réunion qui s'est d'abord tenue à Travnik, à laquelle

  2   participaient diverses personnes qui sont nommées. Il y a le maire de

  3   Travnik, M. Ludovic, M. Focic, M. Topalovic. Puis la réunion s'est

  4   déplacée à Donje Puticevo. M. Kordic en tant que vice-président de la

  5   communauté croate d'Herceg-Bosna était présent. Vous souvenez-vous de

  6   cette réunion qui s'est tenue à Travnik et Novi Travnik?

  7   R.    Je ne me souviens pas de cette réunion et je n'ai pas été

  8   présent à cette réunion.

  9   Q.    Fort bien, mais examinez le paragraphe 2. Désolé que cela soit

 10   en anglais. Je vais en donner lecture lentement, car c'est assez

 11   important: à propos de Novi Travnik, on dit qu'il y avait un barrage

 12   routier avec 150 hommes en uniforme qui portaient des uniformes de

 13   camouflage croates avec des emblèmes au couvre-chef, avec des emblèmes

 14   croates et aussi des écussons portés à l'épaulette qui étaient du HOS.

 15   Vous en souvenez-vous?

 16   R.    Moi, je n'étais pas à Novi Travnik au cours de la période dont

 17   vous parlez. Si vous m'avez suivi hier, j'ai dit que, le 27 février, nous

 18   étions dans le secteur de Nova Bila. Nous avons essayé de mettre en place,

 19   de créer une compagnie "Sveti Duh", Saint-Esprit, et ceci pour justement

 20   empêcher l'ex-JNA de prendre les armes des casernes et de les conduire

 21   ailleurs.

 22   Q.    Mais, vers cette époque, et c'est la raison pour laquelle je

 23   vous ai posé ces questions à propos de ce document, je suppose qu'alors,

 24   vous saviez ce qui s'est passé. Est-il exact de dire qu'il y avait des

 25   personnes arborant des enseignes croates et en uniforme de camouflage?


Page 18876

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18877

  1   Est-il vrai de dire que ces personnes avaient établi un barrage routier

  2   aux abords de Novi Travnik?

  3   R.    Une fois de plus, je vous rappelle ce que je vous ai dit hier

  4   lors de ma déposition: au cours de cette période, on avait le moral, on

  5   était prêts pour s'organiser pour la défense, mais on n'avait pas été bien

  6   équipés. On n'avait pas d'armes. Au cours de cette période, quand nous

  7   avons essayé d'arrêter les convois de transport des armes de la JNA, les

  8   hommes qui voulaient se défendre portaient des vêtements qu'ils portaient

  9   régulièrement, normalement dans la vie quotidienne et dans la vie

 10   courante.

 11   Q.    Peut-on présenter au témoin la pièce Z115?

 12   (L'huissier s'exécute.)

 13   Q.    La présidence de guerre de Travnik. Comme vous pouvez le

 14   constater, ce document émane de la communauté croate de Herceg-Bosna, du

 15   Conseil de la défense croate à Busovaca, adressé à la présidence de guerre

 16   de Travnik. Commandant, vous étiez bien là à ce moment-là?

 17   R.    A cette époque-là, j'étais à Dolac et sur le front face aux

 18   Serbes.

 19   Q.    Pourriez-vous nous aider sur ce point puisque vous avez

 20   longuement parlé de Travnik? On demande ici dans ce document de

 21   l'équipement MTS afin d'établir de bonnes lignes de communication avec

 22   Busovaca et les unités du HVO. Ici, on parle d'un répétiteur –je pense-

 23   dont les spécifications sont précisées et M. Florjan Radojcici…

 24   Connaissez-vous ce Radojcici?

 25   R.    Non, je ne le connais pas.


Page 18878

  1   Q.    Il y a aussi un certain Jovanovic. Le connaissez-vous?

  2   R.    Non.

  3   Q.    Et ce document est signé de Kordic au nom de l'état-major du HVO

  4   régional de Bosnie centrale. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi

  5   M. Kordic demande expressément ce type d'équipement de la part de la

  6   présidence de guerre de Travnik ?

  7   R.    Si vous m'avez bien suivi, à cette époque-là, j'étais le

  8   commandant de la 4e compagnie et en ma qualité de commandant de la

  9   compagnie, je n'étais pas au courant de tous ces faits parce que j'avais

 10   plein d'activités sur le front contre l'armée de la Republika Srpska, et

 11   je n'avais pas véritablement le temps de m'occuper de ces détails.

 12   Q.    Là, nous parlons de la pièce Z134. Et ce document concerne le 15

 13   juin 1992.

 14   (L'huissier s'exécute.)

 15   M. Nice (interprétation): Je crois qu'il faudra retirer cette pièce pour

 16   le moment. Nous y reviendrons plus tard, même si l'original parle de 1992.

 17   En fait, la date devait être celle de 1993, comme le suggère le numéro de

 18   référence. Excusez-moi de cet inconvénient. J'y reviendrai.

 19   M. le Président (interprétation): Est-ce que c'est le document à propos

 20   duquel nous avons déjà entendu certains témoignages?

 21   M. Nice (interprétation): Oui. Donc, je vais le remettre à la place qui

 22   lui convient dans le cadre de juin 1993.

 23   Je vais bientôt vous montrer un document si cela s'avère nécessaire, mais

 24   le 23 août 1992, n'y a-t-il pas eu une cérémonie de prestation de serment

 25   pour les officiers à Travnik, pour des officiers et des soldats?


Page 18879

  1   R.    Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît, me répéter la date?

  2   Q.    Le 23 août 1992.

  3   R.    Le 23 août, il faudrait, s'il vous plaît, me dire quelque chose

  4   de plus pour me rafraîchir la mémoire. Je ne peux pas m'en souvenir.

  5   Q.    Vous vous souvenez bien de cette cérémonie de prestation de

  6   serment à Travnik?

  7   R.    Je ne peux pas m'en souvenir véritablement. Si vous avez

  8   d'autres éléments, si vous pouvez éventuellement me rappeler de quelle

  9   cérémonie il s'agissait? Je ne connais pas exactement la date, les lieux,

 10   etc. Si vous aviez un détail de plus, éventuellement?

 11   Q.    Vous personnellement, avez-vous participé à cette cérémonie de

 12   prestation de serment?

 13   R.    Pouvez-vous me dire où cette prestation de serment avait eu lieu

 14   à la date précise?

 15   Q.    Je ne peux pas vous le dire plus précisément que je ne l'ai déjà

 16   fait. Je vous ai parlé de Travnik. Il faudra peut-être revenir à cet

 17   événement. Je vais essayer de vous remémorer ceci. Vous êtes devenu

 18   soldat; vous étiez supérieur par rapport à d'autres soldats. Y a-t-il eu

 19   une cérémonie au cours de laquelle vous avez prêté serment?

 20   R.    A ma connaissance, à cette période, j'avais beaucoup d'autres

 21   problèmes face à l'armée de la Republika Srpska. C'était extrêmement

 22   difficile d'établir la ligne de front, d'organiser la logistique qui était

 23   mal organisée. Par conséquent, des cérémonies solennelles, des prestations

 24   de tel type, je n'y ai pas participé. C'est la raison pour laquelle je

 25   vous ai demandé d'autres éléments, d'autres précisions pour savoir


Page 18880

  1   exactement de quoi il s'agissait.

  2   Q.    Au mois d'août 1992, est-ce que votre unité était toujours celle

  3   du Saint-Esprit?

  4   R.    En août? Oui, j'ai déjà dit que cette compagnie dénommée Saint-

  5   Esprit a été en fonction jusqu'au 8 avril et c'est à ce moment-là que le

  6   HVO a été créé. Moi, je suis devenu commandant de la 4e compagnie. C'était

  7   au mois d'avril 92.

  8   Q.    Je reviendrai à ceci lorsque je disposerai du document. Après la

  9   pause, peut-être avant.

 10   Pourrait-on montrer au témoin la pièce 229.1?

 11   M. Nice (interprétation): Vous êtes originaire de Travnik, n'est-ce pas?

 12   Voici un document qui parle de la nomination d'un certain Marinko Palavara

 13   qui va devenir membre de l'unité spéciale de l'administration de la

 14   police, plus exactement commandant de cette unité spéciale. On parle de

 15   l'approbation du vice-président de la HZ HB, M. Kordic, et de M.

 16   Kostroman. Il y a aussi une approbation de M. Pervan. Est-ce que tout ceci

 17   se recoupe bien pour vous qui êtes de Travnik? Est-ce que M. Kordic

 18   intervenait dès septembre 1992 dans la nomination de personnes à Travnik?

 19   R.    Il s'agit ici de

 20   la police civile et des activités civiles. C'est la raison pour laquelle

 21   j'ignore les activités de la police civile de l'époque.

 22   Q.    En qualité de commandant en second et puis de commandant, je

 23   suppose qu'inévitablement, vous aviez certains contacts de temps à autre

 24   avec des hommes politiques?

 25   R.    En ma qualité de commandant de la compagnie, je ne pouvais pas


Page 18881

  1   avoir des contacts avec des représentants des structures civiles car le

  2   niveau de la compagnie le rend impossible. Et puis, comme j'ai dit,

  3   j'avais une tâche tout à fait concrète pour établir la ligne de front et

  4   organiser des relèves face aux Serbes.

  5   Q.    Avant de progresser dans le temps, j'aimerais vous demander

  6   ceci: qui était en fait le responsable de l'organisation de cette guerre?

  7   Parce que… vous avez parlé de la voie hiérarchique. Qui est-ce qui donnait

  8   les consignes, les instructions militaires?

  9   R.    Au cours de ma déposition hier, j'ai déjà précisé qu'il y avait

 10   une chaîne de commandement. Et en tant que commandant de compagnie,

 11   j'avais mon commandant qui était mon supérieur et qui était au niveau du

 12   bataillon. Le commandant du bataillon recevait les instructions du

 13   commandant de la brigade ; le commandant de la brigade recevait des

 14   instructions du commandant de la zone opérationnelle.

 15   Q.    Il suffisait de suivre les actualités télévisées ou de jeter un

 16   peu un coup d'œil en arrière sur l'histoire de ce qui s'est fait.

 17   Vous savez qu'il y avait beaucoup de personnes qui avaient... et c'est

 18   vrai de toutes les guerres, il y a toujours un contrôle politique, un

 19   élément politique. Vous, vous avez longtemps participé à cette guerre à

 20   Travnik. Est-ce que les supérieurs militaires que vous aviez, ou même les

 21   officiers de votre grade, n'ont jamais discuté des questions fondamentales

 22   sur la manière de mener cette guerre?

 23   R.    Nous avions une filière de commandement que nous respections et

 24   des niveaux les plus élevés de commandement. Je parle donc du chef du

 25   grand état-major, du commandant de la zone opérationnelle avec lequel nous


Page 18882

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18883

  1   avions des contacts. Je n'en sais pas plus.

  2   Q.    Vous nous avez parlé de la distinction qui -disiez-vous-

  3   existait entre les éléments civils et les éléments militaires du HVO. Vous

  4   avez affirmé que les éléments civils du HVO étaient entièrement

  5   subordonnés aux éléments militaires du HVO?

  6   R.    Non.

  7   Q.    Merci. Donc, vous n'êtes pas en train de dire, n'est-ce pas, que

  8   le pouvoir était exclusivement militaire? Vous dites que le pouvoir était

  9   en partie politique, n'est-ce pas?

 10   R.    Non, il ne s'agissait absolument pas de dictature. Comme je l'ai

 11   déjà dit, l'armée avait pour devoir d'organiser les lignes de front et de

 12   conduire la défense. Quant aux civils, ils avaient leur propre mission:

 13   régler les problèmes d'alimentation, de soins médicaux, tous les problèmes

 14   liés à la population civile.

 15   Q.    Je reviendrai là-dessus. Le 21 octobre 1992, où vous trouviez-

 16   vous?

 17   R.    Le 21 octobre?

 18   Q.    Oui.

 19   R.    Comme je l'ai déjà dit, le 21 octobre 1992, mon commandant, à

 20   savoir le commandant du quartier général municipal de Travnik, a été tué.

 21   C'est donc une époque où des efforts ont été faits pour enterrer cet homme

 22   dans de bonnes conditions, sans nuire de quelque façon que ce soit à la

 23   défense contre les lignes de la Republika Srpska.

 24   Q.    Que faisiez-vous?

 25   R.    A ce moment-là, j'étais le commandant du 3ème bataillon.


Page 18884

  1   Q.    Etiez-vous sur le front ce jour-là? Avez-vous assisté aux

  2   funérailles? Etiez-vous avec vos soldats?

  3   R.    Je me suis occupé de mes soldats, et c'est le commandement de la

  4   brigade qui s'est occupé de tout ce qui avait un rapport avec l'inhumation

  5   de cet homme. Mais en tant que commandant, j'ai, bien sûr, fourni toute

  6   l'aide nécessaire à mon propre commandant.

  7   Q.    Je me demandais si je pouvais obtenir des commentaires de votre

  8   part sur la pièce à conviction 243.

  9   Nous avons eu entre les mains une carte du front ; peut-être pourrons-nous

 10   la récupérer après la pause. Mais le front dont vous parlez est bien,

 11   n'est-ce pas, le front nord-ouest qui séparait les forces serbes des

 12   vôtres?

 13   R.    Il s'agit du nord-ouest de la ville de Travnik.

 14   Q.    C'est une zone qui est non loin de Novi Travnik?

 15   R.    Travnik et Novi Travnik sont deux municipalité adjacentes.

 16   Q.    Je demande que la première page du document soit placée sous les

 17   yeux du témoin, je vous prie. Merci.

 18   (L'huissier s'exécute.)

 19   C'est un document qui décrit la situation sur le front de Novi Travnik le

 20   21 octobre alors que les forces musulmanes visent la ville de Novi

 21   Travnik.

 22   Une référence est faite aux forces musulmanes dans le village d'Opara et

 23   d'autres villages. Ensuite, on arrive au paragraphe suivant qui a trait

 24   aux unités du HVO qui bloquent les routes menant à Novi Travnik.

 25   Puis, nous trouvons dans le texte un certain nombre de détails


Page 18885

  1   supplémentaires. Tout cela concerne une région située tout près de la

  2   vôtre. Si nous prenons les paragraphes situés en bas de page, nous y

  3   lisons ce qui suit.

  4   Je cite: "Alors que les opérations de défense se mènent, le vice-président

  5   de l'Herceg-Bosna, Dario Kordic et moi-même, nous nous trouvons en

  6   permanence à Novi Travnik pour y mener les opérations militaires. Nous

  7   sommes parfaitement au courant de la situation et maintenons sous contrôle

  8   toutes les forces que nous commandons. Le commandant Filip Filipovic est

  9   également présent au quartier général." Fin de citation.

 10   Cette zone était tout près de la vôtre, n'est-ce pas ? Vous vous rappelez

 11   ce qui s'y est passé?

 12   R.    J'ai dit déjà qu'à ce moment-là, j'avais pour mission

 13   d'organiser les lignes de front face à l'armée de la Republika Srpska.

 14   C'était le moment où mon commandant a été tué. Dès mon retour du front,

 15   j'ai trouvé le temps pour aller rendre un dernier hommage à mon

 16   commandant.

 17   Q.    Très bien, mais la présence de Kordic au côté de Blaskic et de

 18   Filipovic sur la ligne de front vous a-t-elle surpris ou pas?

 19   R.    A ce moment-là, je n'étais pas sur ce territoire. Donc je ne

 20   peux rien dire à ce sujet.

 21   Q.    Vous êtes en train de dire que vous n'avez jamais entendu parler

 22   de sa venue sur la ligne de front?

 23   R.    De qui parlez-vous, je vous prie?

 24   Q.    De M. Kordic. Vous n'avez jamais entendu parler de sa venue sur

 25   le front?


Page 18886

  1   R.    Sur le front où j’exerçais mon commandement, je n'ai

  2   personnellement jamais vu M. Kordic. Quant aux autres fronts, je ne sais

  3   pas quelle était la situation.

  4   Q.    Avez-vous jamais entendu parler de sa venue sur le front?

  5   R.    Je ne peux pas faire de supputation, je ne peux répondre oui ou

  6   non à cette question mais, en tout cas, sur ma ligne de front, il n'est

  7   pas venu.

  8   Q.    Vous comprenez, commandant, que vous êtes en droit de nous dire

  9   ce que des tiers vous ont dit. Vous nous avez parlé assez fréquemment de

 10   villages, de personnes et d'autres éléments dont je ne crois pas que vous

 11   les avez vus vous-même. Vous pouvez donc nous dire si vous avez entendu

 12   parler du fait que Kordic serait venu sur le front. Quelqu'un vous en a-t-

 13   il parlé?

 14   R.    Ce que j'ai entendu dire au sujet de Kordic, c'est que,

 15   lorsqu'une vingtaine de milliers d'habitants de Travnik, les Croates, sont

 16   partis dans la direction de Zenica, j'ai entendu dire qu'il s’était

 17   présenté aux civils pour leur adresser la parole et leur dire qu’il

 18   s’occupait de leurs préoccupations. Je l'ai entendu avec certitude; ce

 19   sont des familles qui habitaient la région qui me l'ont dit.

 20   Q.    Sur le front, oui ou non, avez-vous entendu dire qu'il y est

 21   venu?

 22   R.    Vous pouvez répéter votre question: quelle ligne de front ?

 23   Q.    Le front, c’est un mot que vous utilisez vous-même. Vous avez

 24   décrit de quoi il s'agissait. M. Kordic n’a-t-il jamais été présent sur le

 25   front?


Page 18887

  1   R.    Non.

  2   Q.    Je suis maintenant en mesure de revenir à cette cérémonie de

  3   prestation de serment dont nous avons parlé tout à l'heure. Il est

  4   possible qu’il y ait des erreurs de date mais vous pourrez les corriger le

  5   cas échéant.

  6   Je demande qu'on présente au témoin la pièce à conviction 193.2, je vous

  7   prie.

  8   (L'huissier s'exécute).

  9   C'est un exemple type de document dont l'original est apparemment très

 10   abîmé pour une raison ou pour une autre et il est difficile, sinon

 11   impossible d’en obtenir une version de meilleure qualité.

 12   Mais je tâcherai de régler ce problème au cours de la pause.

 13   Commandant, je crois que vous constaterez que l'original de ce texte n'est

 14   lisible qu’en quelques rares endroits. Donc, si je le peux, je

 15   m'efforcerai de trouver une meilleure version de ce texte à votre

 16   attention après la pause. Pour l’instant, j’en lis un passage.

 17   "Compagnie du Saint-Esprit", était-ce la compagnie qui appartenait au

 18   groupe commandé par vous?

 19   R.    Je ne commandais pas la compagnie du Saint-Esprit.

 20   Q.    Pouvez-vous alors nous dire quelques mots d’explication au sujet

 21   de cette compagnie du Saint-Esprit ? Aviez-vous quelque chose à voir avec

 22   cette compagnie du Saint-Esprit ? Je ne sais pas très bien de quoi il

 23   s’agit, c’est ma faute.

 24   R.    J'étais membre de cette unité.

 25   Q.    Très bien. Eh bien, oublions la date au cas où elle serait


Page 18888

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18889

  1   erronée, mais je vous demanderai d’examiner ce document qui est le premier

  2   document en Croate ou plutôt en BCS et qui commence par les mots

  3   Postovanogac. Vous voyez ce document, vous en avez un exemplaire sous les

  4   yeux ?

  5   R.    Oui.

  6   Q.    Il en existe une version anglaise pour les Juges de cette

  7   Chambre. Je vous dis, pour ma part, que ce texte est le texte d’une

  8   allocation qui a été lue au cours de la cérémonie de prestation de

  9   serment. Je vous demanderai de bien vous lire ce texte à voix basse et

 10   j'en lirai une partie en anglais s’il se trouve sur le rétroprojecteur.

 11   (Les interprètes ne peuvent pas voir la liste des personnes à qui est

 12   adressé ce texte, car elle ne figure pas sur le rétroprojecteur.)

 13   (Monsieur Nice a lu une partie du texte invisible pour les interprètes.)

 14   M. Nice (interprétation): Pouvez-vous nous aider sur la date de cérémonie

 15   des prestations de serment?

 16   R.    D'abord, ce document que j'ai sous les yeux ne comporte aucune

 17   date et ne comporte pas non plus les annotations que l'on trouve

 18   habituellement sur un document officiel. C'était le 27 février 1992

 19   qu’avait eu lieu la prestation de serment de l'unité du Saint-Esprit, de

 20   la compagnie du Saint-Esprit. Donc, s'il était question d'un anniversaire,

 21   il aurait dû se dérouler le 27 février 1993.

 22   Q.    Merci. Le texte se poursuit; je cite: «Nous aimerions, au nom du

 23   Conseil croate de la défense de la municipalité de Travnik, vous féliciter

 24   pour ce premier anniversaire dans l'espoir que cette unité qui fonctionne

 25   en tant qu’élément de la brigade de Travnik continuera à mener avec succès


Page 18890

  1   toutes les tâches militaires qui sont les siennes.» Le texte se poursuit;

  2   je cite: «Il y a un an, nous avons créé cette unité chargée de la tâche de

  3   préparer la défense du peuple croate dans cette région et dans les

  4   secteurs de la municipalité de Travnik, ainsi que dans notre chère Herceg-

  5   Bosna.»

  6   Ensuite un paragraphe rayé à la main et le texte se poursuit comme suit:

  7   «Les premières armes de cette unité sont provenues de notre chère Croatie

  8   et cette distribution, cette obtention d’armes a été organisée par l'union

  9   démocratique croate, le HDZ.»

 10   Vous savez que les premiers militants du HDZ provenaient de ce secteur et

 11   qu’aujourd’hui encore, ils constituent l'épine dorsale de cette unité.

 12   Est-ce que ce qui figure dans ce paragraphe est exact? Saviez-vous que les

 13   premières armes destinées à cette unité sont provenues de Croatie?

 14   R.    Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je ne peux pas

 15   discuter de ce document, car je n'en connais pas la teneur. Il n’est pas

 16   signé…

 17   M. le Président (interprétation): Répondez à la question. Cette question

 18   ne porte pas sur le document.

 19   Ce que M. Nice vous demande c’est si les premières armes destinées à cette

 20   unité sont provenues de Croatie ? C'était cela la question qui vous était

 21   posée, Monsieur.

 22   R.    Je ne suis pas au courant. Les armes que j'ai obtenues, je les

 23   ai obtenues par le biais de quartier général de guerre de Travnik.

 24   M. Nice (interprétation): Le texte signale également dans le paragraphe

 25   que les premiers militants du HDZ provenaient de cette région, étaient


Page 18891

  1   originaires de cette région. Mais, d'après vous, les premiers militants du

  2   HDZ auxquels vous vous êtes joints venaient d’où? Ils venaient de Travnik?

  3   R.    Les premiers militants que j'ai rejoints se trouvaient dans le

  4   secteur où j'habitais, c’est-à-dire le secteur de Nova Bila. C'était des

  5   gens qui habitaient dans ce secteur.

  6   Q.    Le document se poursuit. En tout cas, la personne qui s'adresse

  7   à l'assemblée dit ce qui suit: "Nous avons à présent la première compagnie

  8   du Saint-Esprit qui est prête à se défendre contre les agresseurs de

  9   toutes sortes. Et, à nos yeux, un agresseur est toute personne qui arrive

 10   dans notre région de l'extérieur, sans notre accord, indépendamment de sa

 11   nationalité, qu'il s'agisse d'un Chetnik ou d'un Moudjahid. Nous avons sur

 12   notre territoire ces deux genres de personnes. Nous devons les combattre

 13   de façon que notre cher peuple croate puisse demeurer avec fierté sur son

 14   sol croate." Fin de citation.

 15   Ce paragraphe rend-il compte du genre de sentiment que ressentaient les

 16   dirigeants du HVO ou du HDZ à Travnik? D'après vous, au début de 1993?

 17   M. Sayers (interprétation): Monsieur le Président, j'ai une objection à ce

 18   document: d'abord, il est illisible ; son origine est assez dubitative. Je

 19   pense qu'il n'y a aucun fondement qui puisse être avancé à l'appui de ce

 20   document. Il n'est pas correct de traiter de documents que le témoin n'a

 21   jamais vu, en l'absence d'un fondement juridique valable, en lui

 22   soumettant des propositions contenues dans ce document comme si elles

 23   étaient le reflet de la réalité.

 24   M. le Président (interprétation): Monsieur Nice, qui est censé avoir

 25   prononcé cette allocution?


Page 18892

  1   M. Nice (interprétation): Si nous en arrivons au document suivant,

  2   Monsieur le Président, je montrerai que ces documents tous ensemble ont un

  3   rapport les uns avec les autres. Ce que vous voyez en deuxième page de la

  4   version anglaise et que le témoin peut voir sur la page suivante de son

  5   document en BSC -qui est malheureusement assez illisible-, c'est qu'une

  6   proposition a été faite d'organiser une cérémonie avec un certain nombre

  7   de dispositions tout à fait précises. Plusieurs éléments sont cités dans

  8   le texte comme caractérisant cette cérémonie et décrivant le maître de

  9   cérémonie. Il y a le détail d'un certain nombre de personnes qui ont

 10   participé à la cérémonie -j'allais y venir dans un instant-: le commandant

 11   Ivo Stojic, qui a reçu le rapport -qui doit être le document annexé- ; il

 12   est aussi question de Nakic qui se présente devant les unités et rend

 13   compte de ce qui s'est passé à cette cérémonie.

 14   M. le Président (interprétation): Il y a une difficulté au sujet de ce

 15   document, comme le dit le conseil de la défense: c'est qu'il est

 16   illisible, monsieur Nice.

 17   M. Nice (interprétation): Je vais peut-être pouvoir régler cela au cours

 18   de la pause.

 19   M. le Président (interprétation): Je pense que vous feriez mieux de le

 20   faire avant de poursuivre ce contre-interrogatoire sur ce sujet. C'est une

 21   question de principe: les documents illisibles ne peuvent pas être

 22   produits. Il doit en exister, je suppose, un exemplaire de meilleure

 23   qualité, ou autrement la traduction n'aurait pas pu être réalisée.

 24   M. Nice (interprétation): En effet, la seule possibilité qui est la nôtre

 25   est de voir ce qu'il en est au cours de la pause et si l'original est un


Page 18893

  1   document trop ancien, rédigé sur un papier qui s'est abîmé avec le temps.

  2   En tout cas, nous devons voir ce qu'il en est. Je reviendrai donc sur ce

  3   document, avec l'autorisation des Juges, un peu plus tard.

  4   Mais je voudrais vous demander, monsieur le Témoin, puisque nous en sommes

  5   arrivés à ce point, vous voyez bien que ce document a tout de même un

  6   rapport avec une unité que vous connaissez. Vous rappelez-vous la

  7   cérémonie concernant cette unité à présent?

  8   M. Sayers (interprétation): Objection supplémentaire, Monsieur le

  9   Président.

 10   M. le Président (interprétation): La question a été posée ; nous

 11   reviendrons sur ce document un peu plus tard. Votre objection porte-t-elle

 12   sur la question, maître Sayers ?

 13   M. Sayers (interprétation): Mon objection est liée au document, Monsieur

 14   le Président. Je peux me rasseoir.

 15   M. le Président (interprétation): Nous reviendrons sur le document après

 16   la pause.

 17   M. Nice (interprétation): Monsieur le Témoin, vous rappelez-vous la

 18   cérémonie qui avait un rapport avec l'unité que vous connaissiez ?

 19   M. Ljubas (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les Juges, il

 20   est question ici du 21, date à laquelle Ivica Stojak avait déjà été tué.

 21   Dans ce document, il est signalé que M. Stojak était présent. Donc, pour

 22   moi, c'est quelque chose d'un peu troublant; je ne peux pas répondre à

 23   cette question dans ces conditions.

 24   M. le Président (interprétation): La question qui vous était posée était:

 25   "Vous rappelez-vous -indépendamment de la date exacte- vous rappelez-vous


Page 18894

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18895

  1   une cérémonie de ce genre?

  2   M. Ljubas (interprétation): Une cérémonie de constitution de l'unité ou

  3   d'anniversaire de la création de l'unité?

  4   M. le Président (interprétation): Une cérémonie de n'importe quelle

  5   nature.

  6   M. Ljubas (interprétation): Je ne me rappelle pas exactement ce qui est

  7   dit ici, mais il y a eu une cérémonie anniversaire.

  8   M. le Président (interprétation): Vous vous la rappelez?

  9   M. Ljubas (interprétation): Oui, c'est écrit ici, mais c'est illisible.

 10   M. Bennouna: Laissez le document, ne vous occupez plus du document. Vous

 11   rappelez-vous avoir participé à des cérémonies au cours desquelles on

 12   prête serment à l'occasion d'anniversaires, qui ont un caractère très

 13   solennel, avec un caractère pratiquement religieux? C'est cela la question

 14   qui vous est posée.

 15   M. Ljubas (interprétation): Non.

 16   M. Nice (interprétation): Je ne savais pas que j'aurais besoin de vous

 17   imposer la lecture du document dont je vais parler maintenant, qui est

 18   déjà versé au dossier. C'est donc une pièce à conviction. Mais, en fait,

 19   tout bien réfléchi, je n'ai pas besoin de vous le soumettre. Je ne pense

 20   pas.

 21   Un homme appelé Mladen, qui plus tard est devenu chef adjoint de la

 22   police, le connaissiez-vous?

 23   R.    Il faudrait que l'on m'informe de son nom de famille.

 24   Q.    Comment? Excusez-moi, c'est ma faute. Un homme répondant au nom

 25   de Tolo Mladen ?


Page 18896

  1   R.    Il ne m'est pas connu.

  2   Q.    Au début de 1993, partagiez-vous votre temps entre Travnik et le

  3   front?

  4   R.    Au début de 1993, j'étais sur le front, face à l'armée de la

  5   Republika Srpska.

  6   Q.    Mais reveniez-vous à Travnik de temps en temps?

  7   R.    Lorsque j'étais commandant de bataillon, je venais à Travnik en

  8   général le soir, pour participer à des réunions d'information.

  9   Q.    Ce que je vous demandais, c'était simplement vos observations

 10   que je souhaitais obtenir sur le fait que la nomination de quelqu'un au

 11   poste de chef adjoint de la police aurait sans doute exigé l'approbation

 12   de M. Kordic. Ceci est en rapport avec une pièce à conviction tout à fait

 13   importante, Monsieur le Président, Messieurs les Juges: la pièce 353.2.

 14   Monsieur le Témoin, avez-vous eu quelque connaissance que ce soit de

 15   l'organisation d'événements particuliers à Travnik, qui correspondraient à

 16   ce je viens de dire, où M. Kordic aurait été impliqué dans un détail aussi

 17   important ?

 18   R.    Je ne suis pas au courant de cela. Je ne suis pas au courant des

 19   activités de M. Kordic ou de la police civile.

 20   Q.    Eh bien, je vous pose encore une question qui fera appel à votre

 21   mémoire, mais nous avons constaté que vous aviez une très bonne mémoire.

 22   Où vous trouviez-vous le 20 ou le 21 janvier 1993?

 23   R.    Le 20 janvier… Vous pouvez répéter votre question ? Je n'ai pas

 24   entendu l'année.

 25   Q.    Le 20 ou le 21 janvier 1993.


Page 18897

  1   R.    J'ai déjà dit que c'était la période où je me

  2   trouvais avec mon unité sur le front face à l'armée de la Republika

  3   Srpska.

  4   Q.    Je demanderais que l'on examine la pièce 534.1.

  5   M. le Président (interprétation): Après cela, nous lèverons la séance.

  6   M. Nice (interprétation): C'est un document qui vient du département de la

  7   défense de Travnik. Vous dites qu'il s'agit de l'élément civil du HVO ou

  8   de l'élément militaire, je parle toujours du département de la défense?

  9   M. Ljubas (interprétation): Le département de la défense dépendait de

 10   l'élément civil.

 11   Q.    Nous voyons dans ce document qu'il s'agit d'un ordre destiné au

 12   chef des municipalités des bureaux de la défense de Travnik, Novi Travnik,

 13   Vitez, Zenica et Vares dans le but de fournir les moyens nécessaires à la

 14   défense de la communauté croate d'Herceg-Bosna.

 15   Et cet ordre qui émane d'Ante Puljic, chef de l'administration chargé de

 16   la défense, est adressé à un certain nombre de chefs de municipalité et

 17   destiné à leur faire connaître les actions qui vont être entreprises pour

 18   créer ou réorganiser, restructurer les brigades.

 19   "Notre but est d'organiser des discussions avec le président du Conseil

 20   croate de défense en vue de mettre à jour la liste des conscrits" et, au

 21   point 3, "d'organiser un système de mobilisation applicable aux brigades",

 22   au point 4, "destiné à informer le chef de l'administration de la défense

 23   de Travnik de l'exécution de cet ordre".

 24   Il n'y avait pas de réelle distinction entre les affaires civiles et les

 25   affaires militaires, n'est-ce pas ? Nécessairement, les deux faisaient


Page 18898

  1   partie d'une seule et même opération, d'un seul et même fonctionnement,

  2   n'est-ce pas?

  3   R.    Ce n'est pas exact. Il existait des activités différentes pour

  4   l'élément civil et pour l'élément militaire.

  5   Q.    Admettez-vous que la teneur de cet ordre est de nature

  6   militaire?

  7   R.    Je n'ai pas eu de contact avec cet ordre, je n'en n'ai pas eu

  8   connaissance.

  9   Q.    Commandant, vous nous avez parlé de pratiquement tous les

 10   aspects de l'historique militaire et social de Travnik, au cours d'une

 11   période de deux ans. Et la plupart des choses que vous nous avez dites

 12   provenait sans doute de tiers. Alors pouvez-vous nous aider sur le point

 13   suivant: cet ordre est-il de nature militaire ou pas? Vous étiez vous-même

 14   un soldat, n'est-ce pas?

 15   R.    Non, si vous connaissez les tâches confiées à une administration

 16   chargée de l'ordre et de la défense, eh bien, c'est une administration qui

 17   est chargée d'affaires civiles, d'organiser l'aptitude à porter les armes

 18   des civils, mais du côté civil; qui est chargée d'enregistrer leur nom et

 19   de s'occuper des opérations de mobilisation. C'est une action civile qui

 20   consiste à enregistrer et à mobiliser les hommes. Sur le plan militaire,

 21   il n'est pas question ici de mener des hommes, de conduire des hommes ou

 22   de commander des hommes, ce qui serait une activité militaire.

 23   M. le Président (interprétation): Est-ce un moment opportun pour faire une

 24   pause ?

 25   M. Nice (interprétation): Oui, tout à fait.


Page 18899

  1   M. le Président (interprétation): Nous levons la séance et nous suspendons

  2   pendant une demi-heure.

  3   (L'audience, suspendue à 11 heures 5, est reprise à 11 heures 39.)

  4   M. le Président (interprétation): Maître Nice, vous avez la parole.

  5   M. Nice (interprétation): Pourrions-nous revenir à la question du

  6   document. Il demeurait une objection, me semble-t-il, qu'allait soulever

  7   Me Sayers. Si ce n'est pas le cas ou sous réserve de cela, je peux vous

  8   montrer les originaux dont nous disposons. Il y a une page qui est

  9   pratiquement illisible, une partie est vraiment tout à fait illisible, le

 10   reste est en grande partie lisible.

 11   M. le Président (interprétation): Voyons le document et puis nous le

 12   passerons à la défense.

 13   M. Nice (interprétation): Nous avons deux enveloppes ou deux chemises plus

 14   exactement, deux chemises séparées pour ce document. Je ne suis pas sûr de

 15   la cote. J'attends l'aide de mon assistante.

 16   (Les Juges se consultent sur le siège.)

 17   M. le Président (interprétation): Oui, Maître Sayers, cette version est

 18   beaucoup plus lisible.

 19   M. Sayers (interprétation): Tout à fait d'accord avec vous, Monsieur le

 20   Président. Je ne voulais soulever qu'une autre objection; la voici.

 21   Après la page 4 du document en anglais, tout en haut de la page, et ceci

 22   est tout à fait lisible dans la version croate, on voit "23 août ou

 23   kolozova en croate". Et le commandant a déjà déclaré dans sa déposition

 24   que l'anniversaire de la création de cette compagnie... Il a dit à la page

 25   34, lignes 13 à 17, que cette unité a été constituée au mois de février,


Page 18900

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18901

  1   le 27 février 1992. Je suppose que l'anniversaire de cette création devait

  2   être le 27 février 1993. A ce moment-là, Ivica Stojak était mort depuis

  3   quatre mois d'après la déposition du témoin.

  4   En l'absence d'une meilleure justification de la réalité de cet

  5   anniversaire, alors que ce n'est que proposé ici d'après l'ordre du jour,

  6   je crois que nous devrons maintenir notre objection.

  7   M. le Président (interprétation): Maître Nice, cette objection est en

  8   partie fondée vu l'absence d'une preuve nous attestant de la réalité de

  9   cette cérémonie. Apparemment ici, on la propose uniquement cette

 10   cérémonie.

 11   M. Nice (interprétation): Ceci ne concerne que la crédibilité accordée à

 12   ce témoin parce que ce témoin nous parle de la date de formation de cette

 13   unité, mais nous n'avons pas d'autres preuves ou aucun autre document, et

 14   c'est vrai de beaucoup de témoins de la défense.

 15   Donc je crois que la question de la date n'a aucun poids en soi. Le témoin

 16   a connaissance des événements qui se sont produits à ce moment-là, le 23

 17   août. C'était la date que je lui avais suggérée au départ. J'aurais dû me

 18   tenir à cette date avec plus vigueur parce qu'il est probable que ce soit

 19   la date exacte.

 20   J'aimerais poser d'autres questions à ce témoin à propos de la teneur de

 21   ce qui s'est dit ou de ce qui allait se dire, et aussi à propos des

 22   personnes qui ont assisté à cette cérémonie. Ceci revêt une certaine

 23   importance: il est important de consulter les documents de l'époque pour

 24   savoir quelle était l'attitude affichée par les participants de l'époque.

 25   Et je me permettrai de suggérer que ce document me permet de poser de


Page 18902

  1   telles questions. Il reviendra à la Chambre, en temps utile, d'évaluer le

  2   poids à donner aux réponses fournies par le témoin.

  3   M. le Président (interprétation): Ce document sera admis dans cette

  4   mesure-ci. Ce n'est pas là la preuve de la tenue de la cérémonie, ce n'est

  5   pas une preuve de la date précise. Cependant, il s'agit là d'une

  6   proposition qui est faite afin que soit tenue cette cérémonie.

  7   Et l'accusation a le droit de poser des questions à ce propos, comme il

  8   nous l'a dit, comme nous l'a dit M. Nice plus exactement, afin d'obtenir

  9   des informations sur les attitudes qu'adoptaient certains à l'époque, et

 10   afin d'établir si une proposition avait été faite afin que soit tenue une

 11   cérémonie de ce genre.

 12   M. Nice (interprétation): Peut-on présenter au témoin les originaux dont

 13   nous disposons puisqu'ils semblent être plus lisibles? Nous parlons ici

 14   des quatre pages originales.

 15   Commandant, nous remontons dans le temps, apparemment vers le 23 août

 16   1992. Examinez le document. Je crois que l'essentiel de ce document peut

 17   être lu. Vous verrez qu'on y propose la tenue d'une cérémonie. Je ne vais

 18   pas vous importuner pour ce qui est des détails mais vous rappeler ceci:

 19   on fait état de M. Stojak, vous l'avez dit vous-même, et on dit qu'un

 20   hymne a été joué, le drapeau a été hissé. Et on fait référence à ce qui

 21   sera dit par le responsable de la cérémonie.

 22   Je ne sais pas si vous pouvez rapidement parcourir ce document. Cette

 23   cérémonie est censée se terminer par une allocution de M. Kordic. Vous

 24   vous souvenez sans doute de cet anniversaire, vous souvenez-vous si M.

 25   Kordic y assistait?


Page 18903

  1   M. Ljubas (interprétation): (Hors micro.)

  2   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, j'ai déjà dit que la compagnie

  3   dénommée Saint-Esprit existait depuis un mois et demi, et aucune des

  4   formations n'a porté ce nom. Quand les cérémonies ont eu lieu, je n'ai pas

  5   dit quand et je n'ai pas précisé de date. Ces cérémonies et ces

  6   anniversaires sont célébrés pratiquement tous les ans. Et comme je l'ai

  7   déjà dit, je ne suis pas au courant de ce document mais il s'agissait

  8   d'une proposition.

  9   Q.    Est-ce que M. Kordic a assisté à certaines de ces cérémonies?

 10   Tout du moins, est-ce qu'il était censé être le dernier intervenant et dès

 11   lors le plus important de celles-ci?

 12   R.    Pour ce qui concerne les cérémonies auxquelles j'ai assisté,

 13   c'étaient les cérémonies après la guerre. Pendant la guerre, j'étais sur

 14   la ligne de front. Par conséquent, je ne suis pas au courant.

 15   Q.    Examinons dès lors le document suivant.

 16   Nous pourrons examiner les quatre pages qui se trouvent dans la chemise

 17   verte. Nous pourrons examiner l'une ou l'autre version précédente de ce

 18   discours. C'est cette page-là qui nous intéresse, monsieur l'huissier.

 19   Ayez l'obligeance d'imaginer cette hypothèse-ci. Imaginez que ce document

 20   porte sur une période qui se situe au milieu de l'année 1992. Me suivez-

 21   vous, monsieur? Je voulais simplement que vous fournissiez vos

 22   commentaires sur les sentiments qui sont exprimés ici.

 23   J'aimerais savoir de votre part si vous pouvez vous attendre à ce type de

 24   sentiment qui soit exprimé en public à Travnik, à l'époque?

 25   Nous avons parlé de la compagnie du Saint-Esprit face aux moudjahidin et


Page 18904

  1   aux Serbes. Puis il y a cet objectif sacré qui consiste "à préserver la

  2   paix et la coexistence pacifique avec ceux qui désirent vivre avec nous

  3   dans notre Herceg-Bosna, dans notre région croate".

  4   Est-ce que c'est ce genre de choses qu'on expliquait en public à l'époque?

  5   M. Sayers (interprétation): Il y a deux documents séparés ici et, je crois

  6   que vous avez déjà pris une décision, Messieurs les Juges, au sujet du

  7   premier.

  8   M. le Président (interprétation): Nous avons amené les deux documents.

  9   M. Nice (interprétation): Vous souvenez-vous de la question, commandant?

 10   M. Ljubas (interprétation): Est-ce que vous pouvez répéter votre question,

 11   s'il vous plaît ?

 12   Q.    Vous voyez tout ceci sur le document, vers les deux tiers de la

 13   page: "Les objectifs sacrés des Croates dans ce territoire, c'était la

 14   préservation de la paix et de la coexistence avec ceux qui souhaitaient

 15   vivre avec nous dans notre province croate, dans notre Herceg-Bosna."

 16   Est-ce qu'on pouvait s'attendre à ce que des gens expriment ce type de

 17   sentiment en public à l'époque?

 18   R.    Comme vous pouvez le constater dans le document que vous venez

 19   de me demander de parcourir, vous parlez de 1993 alors qu'ici, il y a un

 20   salut qui est adressé à la première compagnie Saint-Esprit qui, à cette

 21   époque-là n'existait même pas. Je vous ai dit qu'un mois et demi, cette

 22   compagnie a existé, après plus aucune formation n'était baptisée de cette

 23   façon-là.

 24   Q.    Encore une question dans le même sens: elle vous aidera peut-

 25   être à mieux répondre à la question. N'examinez pas le document, ce n'est


Page 18905

  1   pas nécessaire; ou plutôt cette partie du document à l'avant-dernière

  2   phrase de la deuxième page: "Les moudjahidin et les chetniks ne peuvent

  3   pas vivre en coexistence avec nous et c'est la compagnie du Saint-Esprit

  4   qui doit montrer la force qu'ont les soldats croates". Est-ce là aussi un

  5   sentiment courant à l'époque, en 1992?

  6   R.    Comme vous parlez de la compagnie Saint-Esprit, c'était au mois

  7   de février ou mars 1992. On ne parle pas de moudjahidin. Je n'ai jamais

  8   parlé, lors de ma déposition, pendant que la compagnie Saint-Esprit

  9   existait, je n'ai jamais mentionné les moudjahidin.

 10   Q.    Je n'irai pas plus loin, Monsieur le Président, vu les réponses

 11   fournies par le témoin.

 12   Est-ce que nous pouvons reprendre les originaux?

 13   M. le Président (interprétation): Eh bien, c'est un bon exemple du sort à

 14   réserver à ce document. Je suppose que vous allez le reprendre?

 15   M. Nice (interprétation): Je vais soulever la question de nouveau à la fin

 16   de la déposition, ou peut-être reporter cette question en même temps que

 17   d'autres à vendredi?

 18   M. le Président (interprétation): Nous en discuterons vendredi.

 19   M. Nice (interprétation): Commandant, le HVO était une instance qui avait

 20   une base croate, qui défendait les intérêts croates?

 21   M. Ljubas (interprétation): Oui.

 22   Q.    Cela veut dire inévitablement que ceci avait une incidence sur

 23   tous ceux qui n'étaient pas croates à Travnik?

 24   R.    Non.

 25   Q.    Par exemple. Puis, je reviens à notre chronologie des


Page 18906

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18907

  1   événements: en avril 1993, accepterez-vous le fait qu'à Travnik, on

  2   hissait des drapeaux croates? Ceci a eu un effet: pratiquement, cela a

  3   suscité des indignations, n'est-ce pas?

  4   R.    Je ne suis pas d'accord avec vous. Il y avait des drapeaux qui

  5   ont été hissés au moment de Pâques. Mais on peut dire également que, quand

  6   il avait des fêtes musulmanes, des drapeaux étaient hissés, qui ne

  7   dérangeaient pas du tout les Croates.

  8   Q.    Oui, mais le fait de hisser des drapeaux croates, cela -c'est

  9   certain- a vraiment importuné ou perturbé les Musulmans, car cela

 10   représentait une menace pour eux. Le reconnaissez-vous?

 11   R.    Ceci n'était aucunement une menace. C'était quelque chose de

 12   tout à fait habituel. De plus, l'un et l'autre, quand il y avait des

 13   fêtes, hissaient des drapeaux devant leurs propres bâtiments. C'était leur

 14   symbole.

 15   Q.    Un document déjà versé au dossier porte la cote 634.1. Il n'est

 16   pas nécessaire que je vous le soumette, monsieur le témoin, puisque vous

 17   reconnaissez qu'une décision avait été prise à Travnik, décision prise par

 18   M. Pervan, le 9 avril. Elle visait à hisser des drapeaux croates sur

 19   divers bâtiments, par exemple, à la gare autoroutière. Vous reconnaissez

 20   ceci, n'est-ce pas?

 21   R.    Je ne sais pas qui avait pris la décision au niveau civil à ce

 22   sujet-là, mais j'ai vu que les civils avaient brûlé des drapeaux.

 23   Q.    Et puis, ici, il s'agit de la pièce 635; c'est un bref extrait

 24   que je vais lire. Les observateurs de l'ECMM, vous les connaissiez? Aviez

 25   vous à faire avec eux?


Page 18908

  1   R.    J'ai déjà précisé que j'étais commandant du bataillon qui avait

  2   sa tâche très précise sur le front. Tout autre contact était à un niveau

  3   supérieur par rapport au poste que j'occupais.

  4   Q.    Vous avez été amené ici comme témoin pour parler pratiquement de

  5   Travnik et à propos de tout ce qui s'est passé à Travnik. Ici, je vous

  6   soumets ce qu'on dit les observateurs de l'ECMM. Avez-vous des raisons de

  7   mettre en doute la bonne foi de ces observateurs qui opéraient dans votre

  8   secteur?

  9   R.    Je ne peux pas faire des commentaires des déclarations des

 10   observateurs, des membres de l'ECMM: j'étais sur la ligne de front.

 11   Q.    Je vais vous donner lecture d'un extrait d'un rapport de ces

 12   observateurs. Je ne sais pas si vous voulez voir l'original: il s'agit de

 13   la pièce 635. Je lis: "Les tensions ont monté au cours de la soirée

 14   lorsque qu'un Musulman aurait tiré sur un Croate qui était en train de

 15   hisser un drapeau croate, ce qui a donné lieu à des combats. Mais le calme

 16   était revenu à 10 heures 30 du soir". Fin de citation.

 17   Ceci ne vous surprendra sans doute pas? Vous admettez ceci, n'est-ce pas?

 18   R.    Si vous m'avez suivi, j'ai dit que, le 9 avril, les Musulmans

 19   ont arrêté des personnalités éminentes de la municipalité de Travnik; ils

 20   les ont capturées et les ont gardées en détention.

 21   Q.    Je vous reposerai une question en temps utile à ce propos, mais

 22   je veux que vous répondiez à ma question. Je vous lis le reste de la

 23   citation de cet observateur de l'ECMM. Il a dit ceci: "Un officier de

 24   l'armée de Bosnie-Herzégovine a imputé les problèmes à Mate Boban qui est

 25   venu à Travnik et qui s'est plaint du drapeau ou de l'absence de drapeau


Page 18909

  1   croate". Et il poursuit en disant: "Travnik restera un lieu où il peut y

  2   avoir une étincelle parce que c'est une région musulmane alors que le plan

  3   Vance-Owen la place dans un district croate, ce qui explique le maintien

  4   des combats dans cette zone après la publication du plan". Fin de

  5   citation.

  6   Parlons de la visite de Boban: avez-vous des raisons de croire que ce dont

  7   fait rapport cet observateur ne soit pas exact, à savoir que Boban a rendu

  8   visite à la région et a demandé qu'il y ait davantage de drapeaux? Avez-

  9   vous des raisons de mettre en doute une telle affirmation?

 10   R.    Je ne suis pas au courant que le défunt Boban ait été à Travnik

 11   à cette époque-là.

 12   Q.    On fait un commentaire sur l'effet qu'aurait le plan Vance-Owen,

 13   puisque celui-ci placerait Travnik dans une région croate alors que la

 14   population est majoritairement musulmane. Acceptez-vous le fait que vous

 15   vous soyez trouvé là et que c'était là, sinon la cause principale, une des

 16   causes des difficultés qui surgissaient?

 17   R.    Pouvez-vous être un peu plus concret? Je ne comprends pas votre

 18   question.

 19   Q.    Ce qui est suggéré ici par l'observateur de l'ECMM, c'est que

 20   Travnik deviendrait une zone, un point chaud, une région difficile puisque

 21   la population est essentiellement musulmane, alors que le plan Vance-Owen

 22   place la ville dans une région croate et que ceci explique la continuation

 23   des combats après la publication du plan Vance-Owen. Acceptez-vous ce

 24   commentaire fait par l'observateur de l'ECMM? Admettez-vous que ce

 25   commentaire soit exact pour autant que vous puissiez en juger, car vous


Page 18910

  1   vous êtes originaire de Travnik?

  2   R.    Selon le recensement de 1991, Travnik avait 37 % de Croates,

  3   8000 Serbes et entre 5 et 6000 habitants qui se déclaraient autrement; le

  4   reste, c'étaient des Musulmans.

  5   Q.    Vous avez bien compris ma question? Je vous ai relaté les propos

  6   de l'observateur de l'ECMM qui dit que c'était le plan Vance-Owen, entre

  7   autres, qui constituait une des difficultés rencontrées. Vous avez bien

  8   compris ma question?

  9   R.    Non, je ne suis pas au courant du plan Vance-Owen, pas dans la

 10   totalité.

 11   Q.    Commandant, vous avez répondu non seulement aux questions posées

 12   par Me Sayers, mais vous avez aussi répondu, avec beaucoup de détails, aux

 13   questions posées par Me Mikulicic; et maintenant, vous avez des

 14   difficultés à suivre les questions que je vous pose?

 15   R.    Non.

 16   Q.    Je vais abandonner cette pièce pour passer à autre chose.

 17   Là où vous vous trouviez à Travnik, est-ce que vous avez appris quoi que

 18   ce soit à propos d'Ahmici?

 19   R.    Vous me demandez si j'avais appris quelque chose sur Ahmici?

 20   Oui.

 21   Q.    Qu'avez-vous appris et de qui teniez-vous ces informations?

 22   R.    A ce moment-là, j'étais sur le front face aux Serbes. Mais, plus

 23   tard, j'ai appris les événements qui ont eu lieu à Ahmici.

 24   Q.    Quand l'avez-vous appris? De qui l'avez-vous appris?

 25   R.    J'ai appris les détails après la fin de la guerre et j'ai appris


Page 18911

  1   ce qui s'était passé à Ahmici. Mais avant, j'avais beaucoup de problèmes

  2   sur la ligne de front; par conséquent, je ne connaissais pas tous les

  3   détails et ce qui se passait dans d'autres municipalités.

  4   Q.    Je ne vais à aller plus loin. Maintenant, examinons la pièce

  5   939.2. Il s'agit d'un document en date du 18 mai 1993. Il s'agit d'un

  6   document émanant de votre commandant, monsieur, le commandant Leutar.

  7   Il s'agit d'un ordre émis le 18 mai 1993 par M. Leutar et qui porte sur un

  8   accord conclu à Sarajevo par Petkovic et Mladic afin que soit mis en œuvre

  9   un cessez-le-feu conjoint, aux lignes de contact séparant le HVO de

 10   l'armée serbe. Vous en souvenez-vous, monsieur?

 11   R.    Oui.

 12   Q.    Et ceci ne concerne pas l'armée ou n'implique pas l'armée de

 13   Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas?

 14   R.    Comme je l'ai déjà dit, deux tiers de la ligne de front a été

 15   tenus par le HVO. Et c'était normal de recevoir de tels ordres, d'aboutir

 16   à des cessez-le-feu, ceci pour procéder aux échanges des prisonniers et

 17   des personnes qui ont été tuées ou d'autres qui ont été blessées, etc.

 18   Q.    Je vous fais valoir que ce que vous avez dit à propos du HVO,

 19   qui détiendrait les deux tiers de la ligne de front, c'est peut-être vrai

 20   pour Travnik. Mais on peut dire que, sur l'ensemble du front, c'était

 21   l'armée de Bosnie-Herzégovine qui détenait l'essentiel; en tout cas, plus

 22   de parties de cette ligne de front que le HVO. Qu'en dites-vous?

 23   R.    Quand j'ai dit deux tiers de la ligne de front, je parlais de la

 24   municipalité de Travnik, car je les connais. Et je ne connais pas d'autre

 25   ligne de front.


Page 18912

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18913

  1   Q.    Parce que, si l'on s'en tient à la manière dont vous avez

  2   déposé, vous sembliez dire que le HVO détenait deux tiers de la ligne de

  3   front mais vous ne parliez pas de la ligne de front générale. Vous parliez

  4   de la ligne de front à Travnik, est-ce exact?

  5   R.    Je pense qu'il s'agissait d'une ligne de front assez large.

  6   C'était au nord-ouest de Travnik.

  7   Q.    Je crois qu'il est utile aussi de faire remarquer que cette

  8   lettre de Leutar est adressée au 1er, au 2e et au 3e bataillons. N'est-il

  9   pas exact de dire que ces bataillons étaient parfaitement constitués à ce

 10   moment-là, à la date du 18 mai 1993?

 11   R.    Sur le plan administratif, oui.

 12   Q.    Apparemment, ils disposaient de tous les effectifs nécessaires?

 13   R.    J'ai dit du point de vue administratif, oui.

 14   Q.    Vous voudrez peut-être répondre à la question suivante: est-ce

 15   que, sur le plan militaire, la formation de ces unités était complète?

 16   R.    Du point du administratif, oui. Mais sur le terrain, nous avons

 17   eu beaucoup de problèmes pour créer des unités dans le vrai sens de ce

 18   mot. Sur le plan personnel également, de commandement qui n'a pas été

 19   formé sur le plan militaire. Sur le papier, c'était bien formulé mais,

 20   dans la pratique, c'était beaucoup plus dur et beaucoup plus difficile.

 21   Q.    J'essaie de vous comprendre monsieur. Vous reconnaissez que tous

 22   les effectifs destinés à ces trois bataillons étaient présents?

 23   R.    Je le répète administrativement, oui. Mais dans la pratique,

 24   non.

 25   Q.    Et hier, vous nous avez dit qu'il y avait eu un renforcement des


Page 18914

  1   effectifs musulmans dès le mois d'avril 1993, n'est-ce pas?

  2   R.    J'ai dit qu'à partir du 3 juin 1993, il a été démontré que, déjà

  3   depuis octobre 1992, les forces armées ont été déployées dans la

  4   municipalité de Travnik. Donc entre octobre 1992 et juin 1993.

  5   Q.    Qu'on me corrige si je me trompe, car je n'ai pas vérifié le

  6   compte rendu d'audience aujourd'hui, mais lorsque vous avez parlé de ce

  7   renforcement d'effectifs, vous parliez plus précisément de la période

  8   allant d'avril 1993 et de la période qui s'en est suivie, n'est-ce pas?

  9   R.    J'ai dit qu'en octobre 1992, Alagic et Cuskic sont arrivés avec

 10   les deux brigades, la 1e et la 7e. Ils les ont stationnées dans cette

 11   région. Ensuite, ils ont déployé des unités telles la 7e brigade musulmane

 12   ainsi que des moudjahidin. Au début du mois de juin, on a rassemblé les

 13   forces. J'ai cité les brigades et j'ai dit que jusqu'à début juin, il y

 14   avait 10000 soldats qui avaient été déployés dans la municipalité de

 15   Travnik.

 16   Q.    On ne peut ni confirmer ni infirmer les chiffres que vous

 17   fournissez, mais je crois qu'il est exact de dire que nous sommes ici au

 18   paragraphe 26 du résumé.

 19   La 306e, la 312e et la 17e brigades de la Krajina étaient toutes basées à

 20   Travnik, n'est-ce pas?

 21   R.    Oui. La 306e, la 312e, la 17e brigades de Krajina, des parties de

 22   la 7e brigade musulmane, des moudjahidin et des parties de la 305e de

 23   Jajce.

 24   Q.    Vous devancez presque ma question suivante. Vous avez fait

 25   référence à d'autres brigades qui sont en fait basées ailleurs, et je ne


Page 18915

  1   peux pas vous donner plus de détails sur ce point suivant. Mais on

  2   pourrait dire qu'à la rigueur il était peut-être possible qu'elles étaient

  3   déployées à Travnik?

  4   R.    Vous n'avez pas parlé de 305e dénommée la brigade de Jajce qui a

  5   été déployée également à cet endroit-là.

  6   Q.    Puisque vous parlez de cette dernière brigade, je vous demande

  7   si l'hypothèse que je vous ai soumise est exacte: toutes ces autres

  8   brigades étaient basées ailleurs et si on les voyait aussi à Travnik, ce

  9   n'était qu'un déploiement partiel, est-ce exact?

 10   R.    C'est exact.

 11   Q.    Hier, vous avez présenté quelques observations destinées à

 12   comparer les unités. Admettez-vous que le 3e Corps d'armée de l'armée de

 13   Bosnie-Herzégovine était ou devait correspondre à la zone opérationnelle

 14   centrale du HVO, et qu'il y avait là pratiquement une situation où vous

 15   aviez dix brigades de chaque côté?

 16   R.    Je connais la municipalité de Travnik de l'époque mais quelle

 17   était la situation au sein du 3e Corps d'armée et de la zone

 18   opérationnelle? Je ne connais pas.

 19   Q.    Ce qui veut dire que les réponses que vous avez fournies,

 20   s'agissant des comparaisons entre les forces respectives de ces zones ou

 21   de ces groupes opérationnels, doivent être abandonnées ou ignorées puisque

 22   vous ne semblez pas avoir de connaissance extérieure à Travnik?

 23   R.    Non, au moment où j'ai fait la comparaison, je n'ai pas parlé de

 24   la Bosnie centrale, j'ai parlé des forces du HVO et de l'armée de Bosnie-

 25   Herzégovine dans la municipalité de Travnik.


Page 18916

  1   Q.    Donc vous ne pouvez nous parler que des forces armées se

  2   trouvant à Travnik, d'où que soient venues ces différentes forces armées,

  3   est-ce exact?

  4   R.    Les forces qui étaient basées à cette époque-là dans le secteur

  5   de la municipalité de Travnik.

  6   Q.    Par conséquent, je n'aborderai pas davantage de statistiques

  7   avec ce témoin, si ce n'est pour dire que nous rejetons la partie du

  8   témoignage qu'a fournie ce témoin hier vu les réponses qu'il a fournies

  9   aujourd'hui.

 10   Au mois de juin 1993, et un des témoins a comparu ici pour nous le dire,

 11   il s'agissait du M. Morsink, le HVO s'est replié. Avez-vous des

 12   informations sur le fait que les archives locales du HVO aient été

 13   détruites par le feu?

 14   R.    Je ne suis pas au courant de ce fait. Mais le HVO n'a pas battu

 15   en retraite, ils ont été poussés à cause de l'offensive violente qui a été

 16   déclenchée par l'armée de Bosnie-Herzégovine.

 17   Q.    Monsieur, veuillez examiner une série de documents. Il s'agit de

 18   rapports présentés par la communauté internationale s'agissant des

 19   événements qui sont survenus du 4 au 7 juin.

 20   Il s'agira d'abord de la pièce 1065.

 21   (L'huissier s'exécute.)

 22   Je vais vous remettre ce document, même s'il est en version anglaise,

 23   Monsieur le témoin. On va le placer sur le rétroprojecteur, ce qui

 24   permettra au public et aux interprètes de suivre. Vous allez le voir sur

 25   votre écran. Il est en anglais. Il y a trois paragraphes à lire; nous


Page 18917

  1   commencerons par le paragraphe 14, à la page 3.

  2   Rappelez-vous ceci: à vous qui êtes de Travnik, je vais vous demander

  3   votre avis sur les observations rapportées ici par des officiers ou des

  4   observateurs de l'ECMM pour vous demander si elles sont exactes.

  5   Travnik est la seule région où les Croates et les Musulmans semblaient

  6   bien coopérer en dépit d'un certain nombre de combats. Mais, le 4 juin,

  7   les Croates ont évacué Travnik en direction de Novi Travnik, de Vitez et

  8   de Turbe qui étaient sous le contrôle des Serbes, et des allégations ont

  9   été répandues sur des atrocités commises par les Musulmans. Les Musulmans

 10   ont contrôlé d'abord Travnik, puis la route de montagne qui mène de

 11   Travnik à Zenica.

 12   Nous avons des preuves selon lesquelles le HVO a délibérément retiré la

 13   population civile croate de la région de Travnik afin d'essayer de faire

 14   contrepoids à leur "éviction par rapport aux événements qui se sont

 15   produits à Mostar." Fin de citation.

 16   Nous allons prendre ceci, paragraphe par paragraphe.

 17   S'agissant de ce paragraphe que je viens de vous lire, avez-vous des

 18   commentaires à formuler?

 19   R.    Je ne suis pas d'accord.

 20   Q.    Je suppose que vous serez d'accord pour dire qu'on alléguait des

 21   atrocités commises par les Musulmans?

 22   R.    Lors de ma déposition, j'ai déjà donné quelques exemples

 23   d'incidents et de massacres commis.

 24   Q.    Je vous donne lecture du paragraphe suivant, le paragraphe 15:

 25   "L'évacuation de 3500 Croates en passant par le nord de la Bosnie en


Page 18918

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18919

  1   direction de la Croatie suggère qu'il y a collusion entre Croates et

  2   Serbes.

  3   L'emprisonnement de 750 membres du HVO à Manjaca est à placer au regard de

  4   la libération de civils serbes du village de Raskani au sud-est de

  5   Tomislavgrad où ils avaient été "détenus en vue d'assurer leur protection"

  6   depuis le début du conflit. A une réunion au plus haut niveau à Celebici

  7   le 15 juin, les Serbes de Bosnie et des Croates se sont mis d'accord pour

  8   procéder à un échange officiel de biens et de populations dans leurs zones

  9   respectives". Fin de citation.

 10   Acceptez-vous que ce texte soit exact?

 11   R.    Lors de ma déposition d'hier, j'ai dit que, le 13 juin, j'ai été

 12   blessé et j'étais à l'hôpital. C'est la raison pour laquelle je ne pouvais

 13   pas être au courant de tout cela.

 14   Q.    Dernier paragraphe, je vous le lis: "En théorie, le commandement

 15   et le contrôle du HVO se font par la voie hiérarchique habituelle, même si

 16   les événements récents démontrent sans aucun doute que les factions sont

 17   loin d'être en mesure de mettre en œuvre l'accord de cessez-le-feu signé

 18   par les deux commandants en chef. Des soldats du HVO, sous contrôle ou

 19   sans contrôle, continuent d'empêcher la liberté de mouvement ou

 20   l'acheminement d'aide humanitaire à Travnik ou dans d'autres régions de la

 21   Bosnie centrale. En particulier, la police militaire ne répond qu'au

 22   ministère de la défense du HVO, Stojic et Boban, et contrôle la

 23   circulation en Bosnie-Herzégovine. Dans la région de Busovaca, nous avons

 24   des interventions du HVO qui empêchent le déplacement de convois et ne

 25   répondent qu'à Dario Kordic". Nous avons un commentaire à son propos.


Page 18920

  1   Y a-t-il quoi que ce soit dans son paragraphe qui ait trait à Travnik et

  2   pour lequel vous ne seriez pas d'accord? On parle de la voie hiérarchique

  3   militaire habituelle, de soldats du HVO qui sont contrôlés ou ne le sont

  4   pas par leurs supérieurs et on parle aussi du fait que la police militaire

  5   n'obéit qu'à Boban. Est-ce exact ou faux?

  6   R.    Pour ce qui concerne la chaîne de commandement, la police

  7   militaire, je ne sais pas comment ils étaient constitués à cette époque-

  8   là. Mais ce n'était pas sous mon commandement.

  9   Q.    Pièce suivante. Elle porte la cote 1019.1. Vous venez d'examiner

 10   un document, monsieur. Il portait sur le 16 juin. Vous comprendrez que

 11   l'on commence le récit des événements qui se sont produits le 4 juin,

 12   alors que ce document-ci est un document militaire et qu'il a une date

 13   plus précise: celle du 5 juin 1993, à savoir avant votre blessure.

 14   Veuillez me fournir un commentaire. Il ne porterait que sur l'exactitude

 15   du texte. Je vous le lis: "Suite au pilonnage des bus civils, hier, des

 16   enquêtes ont révélé que le convoi -qui était un convoi de l'agence d'aide

 17   humanitaire Muhamed Aid Agency-, qui n'avait pas été accrédité par le HCR,

 18   se trouvait en route de l'Autriche vers Tuzla". Fin de citation. Vous

 19   souvenez-vous de cela?

 20   R.    Non. Je ne m'en souviens pas.

 21   Q.    Si c'est le cas, à moins que vous ne vouliez que je lise,

 22   Messieurs les Juges, le reste du paragraphe 1, je passe au paragraphe 2.

 23   Le dirigeant du convoi, Jasmin, son prénom n'étant pas connu, affirme

 24   qu'hier, son convoi avait été arrêté au barrage routier de Stojkovici où

 25   tous les bus ont été fouillés de façon très agressive par le HVO. Il y


Page 18921

  1   avait dans un des bus des médicaments destinés à Tuzla et le HVO a affirmé

  2   que ces bus acheminaient de l'aide aux Musulmans. Finalement, le convoi a

  3   pu poursuivre sa route et le dirigeant du convoi, au moment de partir, a

  4   observé un soldat du HVO qui parlait en utilisant son poste radio. Lorsque

  5   le convoi est arrivé au carrefour de Novi Travnik, il a de nouveau été

  6   arrêté par des membres du HVO".

  7   On fait ensuite référence au fait que ce convoi avait été ciblé

  8   délibérément. Vous en souvenez-vous?

  9   R.    Non. On parle d'un certain nombre d'événements qui ont eu lieu

 10   dans une autre municipalité. Je n'y étais pas.

 11   Q.    "L'officier de liaison de Travnik -vous savez que c'était un

 12   officier de liaison militaire- a assisté à une réunion qui s'est tenue

 13   dans le bâtiment des PTT à Travnik, là où se trouve le quartier général

 14   conjoint afin d'essayer d'obtenir un cessez-le-feu entre le HVO et l'armée

 15   de Bosnie-Herzégovine. Alagic, Merdan et Kulenovic représentaient l'armée

 16   de Bosnie-Herzégovine alors que Leutar représentait le HVO en compagnie du

 17   maire et du président du gouvernement civil qui, hier, a passé ses

 18   pouvoirs aux militaires". Fin de citation.

 19   Première question: ce récit est-il exact? Vous étiez présent le 5 juin?

 20   Est-ce que les civils ont passé leurs pouvoirs aux militaires le 4 juin?

 21   R.    J'ai dit que je n'étais pas sur place au cours de cette période.

 22   A côté de mon QG, de mon poste de commandement, à côté de Polje, il y

 23   avait déjà plein d'événements qui se sont passés et je n'y étais pas.

 24   Q.    Vous avez parlé de beaucoup de villages où se sont produits

 25   divers événements, mais vous ne les avez pas vus de vos propres yeux. Vous


Page 18922

  1   n'en étiez pas le témoin oculaire?

  2   R.    Tout dépend de la période dont il est question.

  3   Q.    Souvenez-vous de ce matin. M. Sayers vous a fait parcourir

  4   plusieurs villages dans le cadre d'un rapport et vous avez pu fournir des

  5   commentaires sur des personnes qui avaient subi des blessures à divers

  6   endroits. Mais vous, vous n'étiez pas sur place chaque fois, n'est-ce pas?

  7   R.    J'ai parlé de ce secteur au moment où moi, j'avais été

  8   commandant. Moi, j'ai eu l'occasion pendant cette période de voir ces

  9   lieux et toute cette région qui était sous mon commandement, je l'ai

 10   visitée. Au moment où ma formation a été restructurée, où j'ai été affecté

 11   dans un autre commandement, il y avait également des échanges

 12   d'informations entre les formations qui étaient avoisinantes.

 13   Q.    Où se trouvait le village de Bukovica par rapport à votre

 14   commandement?

 15   R.    Ce village se trouvait à droite par rapport à mon poste de

 16   commandement, au nord, du côté de Vlacic. Il y a donc poste de

 17   commandement, ensuite Bukovica et ensuite, le répétiteur à Vlacic. Si on

 18   parle de Velika Bukovica étant donné qu'il y a eu un autre village dénommé

 19   de la même façon et qui est à Novi Travnik.

 20   Q.    Qu'en est-il de Radojcici? Où se trouvait ce village par rapport

 21   à votre zone de commandement?

 22   R.    En ce qui concerne Radojcici, il n'était pas dans ma

 23   responsabilité. Je ne sais pas de quelle période nous parlons, mais si on

 24   parle de la période où fonctionnait la brigade Franco Panac, là, Radojcici

 25   n'était pas dans ma zone de responsabilité.


Page 18923

  1   Q.    Puis, dans ce même rapport, l'observateur dit: "Merdan a affirmé

  2   que 18 Musulmans ont été massacrés dans le village de Bukovica et que des

  3   événements similaires s'étaient produits à Radojcici". Est-ce faux ou

  4   exact? Est-ce que des Musulmans avaient été massacrés à votre connaissance

  5   à l'époque? Nous parlons ici du 5 juin.

  6   R.    Non. A mon avis, ceci ne s'est pas produit dans cette zone de

  7   responsabilité.

  8   Q.    Nous terminons ce passage. L'observateur dit ceci: "A ce moment-

  9   ci, il n'y a pas d'appui permettant de corroborer l'une ou l'autre

 10   affirmation. Alagic et Leutar ont affirmé qu'ils n'avaient pas discerné de

 11   cause précise à ces combats qui avaient éclaté. Néanmoins, ils se sont mis

 12   d'accord à 11 heures 10 d'informer leurs commandants respectifs de

 13   l'existence d'un cessez-le-feu qui devait être mis en œuvre à 13 heures.

 14   Et puis, ils ont demandé que soient mises en œuvre diverses mesures

 15   pratiques à cet effet".

 16   Veuillez maintenant examiner le document 1020. Est-ce que ceci vous dit ce

 17   qu'il en est exactement de la position à Travnik? Dans notre document en

 18   anglais, c'est la quatrième page.

 19   Au sujet de Travnik, on y lit ce qui suit. Je cite. Il faut que je vous

 20   donne la date de ce document: la date enregistrée est celle du 6 juin;

 21   c'est bien celle-là. Il s'agit donc d'un rapport au sujet de quelque chose

 22   qui s'est produit avant le 6 juin ou le 6 juin même.

 23   Au sujet de Travnik, nous lisons ce qui suit: "La situation à Travnik

 24   demeure très tendue avec de nombreux échanges de tirs de mortier qui se

 25   poursuivent dans la ville et dans les villages environnants pendant toute


Page 18924

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18925

  1   la journée. Les combats cependant sont moins intenses qu'hier. Un rapport

  2   indique que des tirs de mortier ont été entendus dans la région. On

  3   confirme des morts à Slimena. La position est référencée".

  4   Ensuite, nous lisons: "Les membres du barrage routier affirment qu'ils

  5   contrôlent aujourd'hui le village de Bukovica qui était tenu précédemment

  6   par l'armée de Bosnie-Herzégovine et qu'il y a un certain nombre de morts

  7   et de blessés qui sont encore dans cette région". Fin de citation.

  8   Je vous repose la question: y a-t-il eu des combats à Bukovica à l'issue

  9   desquels le HVO aurait pris le contrôle du village?

 10   R.    J'ai dit que Bukovica à cette époque-là n'était pas dans ma zone

 11   de responsabilité. Je ne connais pas ces actions.

 12   Q.    Ensuite, il est signalé que des personnes détenues -je crois-

 13   sont rassemblées dans le village croate de Canovo. Avez-vous quelque

 14   information que ce soit au sujet de ce document? On lit dans le texte -je

 15   cite-: "Parmi ces personnes se trouvaient environ 200 soldats du HVO et

 16   les Croates présents à Ovcarevo ont affirmé qu'ils avaient été pris pour

 17   cible des tirs à partir des positions détenues par l'armée de Bosnie-

 18   Herzégovine à Turbe".

 19   Cela correspond-il à quelque chose dont vous ayez été informé?

 20   R.    Je ne suis pas au courant car Ovcarevo dépendait de la

 21   municipalité de Travnik. Je ne pouvais pas me trouver là à ce moment-là.

 22   Q.    Le même auteur du texte affirme également avoir vu un certain

 23   nombre de personnes déplacées se diriger vers le même village en

 24   provenance des reliefs situés au sud de Travnik.

 25   J'aimerais obtenir vos commentaires au sujet d'un résumé de la situation à


Page 18926

  1   Travnik que

  2   l'on trouve au paragraphe 10, qui se trouve à la page suivante. Il y est

  3   question de deux réunions tenues par M. l'ambassadeur Thébault et les

  4   représentants du régiment britannique du Prince-de-Galles, en présence de

  5   certains officiers britanniques. Leutar était présent. Vous voyez la liste

  6   des autres personnes qui ont participé à cette réunion.

  7   "La réunion ne s'est pas déroulée dans un climat de méfiance mais plutôt

  8   de tristesse, compte tenu du risque de voir disparaître la coexistence

  9   entre les Croates et les Musulmans qui avait été défendue par Travnik".

 10   Fin de citation.

 11   C'est ce qu'on lit dans le texte. Est-ce que ces propos correspondent aux

 12   souvenirs de ce que avez des événements à Travnik? Y avait-il eu une

 13   coexistence de longue durée qui, désormais, pour une raison ou une autre,

 14   n'était plus possible en juin 1993?

 15   R.    Travnik avait été et pouvait demeurer une zone de coexistence.

 16   Mais, au début du mois de juin 1993, l'armée de Bosnie-Herzégovine a

 17   suscité une série d'incidents qui ont provoqué la mort d'un certain nombre

 18   de Croates, ce qui a créé un sentiment de malaise parmi la population.

 19   Q.    Donc vous dites que les événements ont été unilatéraux dans la

 20   région de Travnik? Vous n'admettez pas que le HVO, organisation croate,

 21   ait eu un quelconque rôle à jouer dans la dégradation de la situation?

 22   R.    Ce n'est pas ce que j'ai dit.

 23   Q.    Donc vous admettez que le HVO a bien joué un rôle dans la

 24   dégradation des relations entre les deux communautés? Si tel est bien le

 25   cas, pouvez-vous nous dire quel était ce rôle?


Page 18927

  1   R.    Je ne peux pas être d'accord avec cela: le HVO n'a pas joué un

  2   rôle quelconque dans la dégradation des relations entre les communautés;

  3   au contraire, il a agi pour que cette situation s'apaise.

  4   Q.    Très bien. Eh bien, puisque je souhaite vous donner la

  5   possibilité de commenter totalement ce document, compte tenu du fait que

  6   vous venez de Travnik, nous poursuivons sa lecture.

  7   On y lit par la suite que "toutes les parties conviennent du fait que les

  8   événements survenus à Travnik ont été une catastrophe pour les Croates et

  9   les Musulmans de la province 10, qui était le dernier exemple de

 10   coexistence désormais disparue. Les deux parties souhaitent que Blaskic,

 11   entre autres, participe à une réunion un peu plus tard."

 12   C'est une affirmation qui revient souvent. "Leutar et un autre homme,

 13   Bilandjia, déclarent que les Croates de Travnik souhaitent quitter la

 14   ville; Bilandjia affirmant être prêt à abandonner tous ses biens compte

 15   tenu des circonstances".

 16   Ce rapport est-il exact?

 17   R.    Non.

 18   Q.    Etes-vous en train de dire qu'ils ne souhaitaient pas quitter la

 19   ville? Est-ce sur ce point que vous n'êtes pas d'accord?

 20   R.    Non. Mais je ne sais rien de cette réunion et je ne suis pas au

 21   courant du fait qu'il aurait dit cela.

 22   Q.    A-t-il était décidé d'organiser un cessez-le-feu immédiat? A-t-

 23   il été décidé que les négociations allaient reprendre plus tard, comme

 24   cela est indiqué au paragraphe 12?

 25   Je crois que nous n'avons pas besoin de lire le texte en détail


Page 18928

  1   maintenant, et que nous y reviendrons plus tard. Mais je vais maintenant

  2   m'occuper d'un dernier document. Peut-être serait-il bon d'examiner les

  3   deux textes en même temps, en tout cas pour la dernière page?

  4   Je cite: "Les perspectives d'un cessez-le-feu à Travnik sont peu

  5   prometteuses des deux côtés, les deux parties manifestant peu de foi dans

  6   les motifs exposés par leur interlocuteur. Le 3e Corps, à en juger par

  7   l'attitude de son commandant, est orienté vers la poursuite d'une action

  8   militaire et a totalement rejeté l'idée d'une négociation. L'influence

  9   négative au moment présent semble venir de la progression d'un convoi

 10   nombreux, d'un grand convoi au Nord; il est dirigé vers Tuzla. Les combats

 11   ont repris dans la vallée de la Lasva, à l'est de Travnik, empêchant la

 12   circulation sur la route." Fin de citation.

 13   Commandant, avez-vous quelque chose à dire au sujet de ce convoi qui se

 14   dirigeait vers Tuzla?

 15   R.    Comme je l'ai déjà dit il y a quelque temps, j'ai entendu parler

 16   de ce convoi pour la première fois quand j'étais à l'hôpital.

 17   Q.    Dans ce cas, le dernier document sur ce sujet va vous être

 18   présenté maintenant et je souhaiterais obtenir votre commentaire sur ce

 19   document. Il s'agit de la pièce 1025.1, qui concerne le 7 juin, le

 20   lendemain du jour dont on vient de parler.

 21   Le texte au sujet de Travnik est très long. J'aimerais le délimiter de

 22   façon plus précise pour les Juges.

 23   Au paragraphe 3, nous lisons que "la situation était calme le 7, en

 24   l'absence apparente de combat, bien que les combats se poursuivaient à

 25   Dolac, Grbavice et Slimena."


Page 18929

  1   Au paragraphe, on peut lire ensuite: "La visite du commandant Leutar. Il

  2   est affirmé que Travnik avait été totalement détruite. Par ailleurs, les

  3   zones précédemment tenues par les Croates et menant au quartier général en

  4   passant par Travnik, notamment les quartiers de Kalibunar et de Jankevice,

  5   ont été complètement vidées de leur population croate."

  6   Admettez-vous l'exactitude de ces propos?

  7   R.    Je ne connais pas ce document.

  8   Q.    Je ne vous demandais pas ce que vous pensiez de l'exactitude du

  9   document mais de son contenu. Comprenez-vous la distinction entre les

 10   deux?

 11   R.    Oui. Mais vous lisez ces informations dans ce document.

 12   M. le Président (interprétation): Monsieur Nice, nous n'irons pas plus

 13   loin sur ce point. Le témoin refuse de suivre vos questions apparemment.

 14   M. Nice (interprétation): Je suis tout à fait d'accord avec cela. Mais

 15   j'aimerais rechercher, si vous me le permettez, un point précis de ce

 16   document, que j'aimerais évoquer. Je vous demande un instant, si vous me

 17   le permettez. Ce passage se trouve au paragraphe 5, je pense.

 18   J'aimerais obtenir un commentaire du témoin, s'il veut bien nous le

 19   fournir ou s'il peut le faire sur ce point.

 20   Ce rapport est donc un rapport rédigé par un militaire et nous y lisons

 21   dans un extrait, Commandant, la chose qui suit: "Une source de l'armée de

 22   Bosnie-Herzégovine, habituellement fiable, propose l'explication suivante

 23   de certains événements survenus à Travnik. Il affirme qu'un ordre a été

 24   émis par le HVO de Travnik qui ordonnait l'évacuation des Croates en

 25   direction d'Ovcarevo, à partir des villages environnants. Au nombre de ces


Page 18930

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18931

  1   villages, affirmait-il, se trouvaient Jankevice, Bilici, Paklarevo,

  2   Pirota, Kraljenice. Il affirme ensuite que des hommes, au nombre desquels

  3   se trouvaient des soldats du HVO qui s'étaient débarrassés de leur

  4   uniforme, se sont dirigés hors d'Ovcarevo et ont, semble-t-il, traversé

  5   les lignes serbes de Bobanovac, la même source affirmant que cela faisait

  6   partie d'un accord très organisé, au terme duquel le HVO devait rendre ses

  7   positions de défense, dans les environs de Travnik et de Turbe, à l'armée

  8   de Bosnie-Herzégovine." Fin de citation.

  9   La source de cette information est-elle exacte, commandant?

 10   R.    Dans ma déposition, j'ai dit avoir entendu dire que le colonel

 11   Blaskic avait émis un ordre destiné à protéger, à défendre la population

 12   civile, et donc à organiser son départ vers des zones plus sûres, que cela

 13   s'était passé dans le secteur de Nova Bila et que le commandant des 1er et

 14   2e bataillons dans le secteur nord de Travnik avait dû recevoir des ordres

 15   à cet effet. Mais moi, je ne connais pas la teneur de ces ordres. Cette

 16   information m'a été donnée par mon commandant.

 17   Q.    Mais comment ces hommes ont-ils traversé les lignes serbes,

 18   s'ils ne l'ont pas fait sur base d'un accord avec les Serbes?

 19   R.    Je ne le sais pas, je ne connais pas ce détail. Je ne peux

 20   parler que de ce qui s'est passé sur le territoire où je me trouvais moi-

 21   même.

 22   Q.    Je vais maintenant vous demander de concentrer votre attention

 23   très brièvement sur une pièce à conviction versée précédemment au dossier,

 24   qui a trait à la journée du 21 octobre, date de l'enterrement de votre

 25   dirigeant, comme vous nous l'avez dit. Je ne vous montrerai pas ce


Page 18932

  1   document, car vous ne l'avez jamais vu. Jusqu'à présent, vous ne le

  2   connaissez pas.

  3   C'est un document dans lequel Kordic et Blaskic affirment diriger les

  4   opérations dans la région.

  5   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, on trouve cela au paragraphe

  6   3, et j'aimerais obtenir le commentaire du témoin sur ce point. Je cite:

  7   "Ces mêmes hommes, à savoir Blaskic et Kordic, affirment dans la lettre ce

  8   qu'ils affirment au sujet d'Ivica Stojak, de sa mort et des négociations

  9   qui ont suivi."

 10   Ils disent -je cite-: "La situation à Travnik, Zenica, Vitez, Busovaca,

 11   Kiseljak, Fojnica, Kresevo, Vares et Kakanj est totalement sous le

 12   contrôle du HVO mais le comportement des militaires du HVO et du personnel

 13   civil de Travnik est incompréhensible. Ils ont commencé des négociations

 14   et ont pris des dispositions en vue d'un cessez-le-feu, après l'assassinat

 15   du commandant du quartier général de Travnik, feu Ivica Stojak, sans que

 16   le commandant supérieur soit au courant. Et pour ce faire, ils ont tiré

 17   profit des préoccupations qui étaient les nôtres au sujet la situation à

 18   Novi Travnik et à Vitez." Fin de citation.

 19   Commandant, admettez-vous que les militaires et les civils locaux à

 20   Travnik ont négocié un cessez-le-feu sans que le commandant situé au

 21   niveau supérieur soit au courant?

 22   R.    J'ai dit que j'étais commandant de bataillon à l'époque et que

 23   je me battais contre les forces de l'armée de la Republika Srpska. Il

 24   n'était pas dans mes prérogatives de savoir ce qui se passait au sein du

 25   commandement supérieur.


Page 18933

  1   Q.    Je n'ai encore que quelques documents à montrer au témoin.

  2   J'espère pouvoir y parvenir avant le déjeuner. Je sais que vous allez dire

  3   que vous avez été blessé et que tout cela se passait hors de votre zone de

  4   responsabilité.

  5   Mais je vous demanderais tout de même de commenter le document qui va vous

  6   être montré, le document Z134 dont la date est d'ailleurs erronée: il

  7   s'agit de la date du 15 juin 1993. A ce moment-là, vous étiez blessé,

  8   n'est-ce pas? Etiez-vous blessé le 15 juin?

  9   R.    Oui.

 10   Q.    Vous pouvez examiner le document qui est écrit dans votre

 11   langue, qui est scellé, qui porte un sceau et qui porte également les

 12   signatures de Kordic et de Blaskic.

 13   Pouvez-vous expliquer, au vu de ce document, comment à ce moment-là des

 14   ordres militaires étaient émis par Kordic et Blaskic, un ordre de bataille

 15   adressé à la brigade Tomasevic?

 16   R.    Puis-je voir le document?

 17   Q.    Bien entendu. Il s'agit du document Z134. Est-il sur le

 18   rétroprojecteur?

 19   R.    Mais je voudrais le voir intégralement.

 20   Q.    Avez-vous placé l'original sur le rétroprojecteur ou, en tout

 21   cas, peut-on donner l'original au témoin, détacher l'original de la

 22   liasse?

 23   R.    Dans le texte original, ici en tout cas, ce que vous appelez

 24   l'original, la date est celle du 15 juin 1992.

 25   Q.    (hors micro).


Page 18934

  1   R.    Vous m'avez interrogé au sujet du 15 juin 1993.

  2   Q.    Je vous demanderais d'examiner la teneur du document. Si vous

  3   regardez les numéros au-dessus de la date, les numéros de référence, vous

  4   constaterez que 1992 est une erreur et qu'il s'agit bien de 1993.

  5   Mais j'aimerais obtenir votre commentaire, si vous pouvez nous le fournir,

  6   quant à la possibilité pour Blaskic et Kordic d'élaborer un ordre de ce

  7   genre.

  8   R.    Je ne suis pas au courant qu'ils aient émis cet ordre. Comme je

  9   l'ai dit, le 15, j'étais blessé. Le 15 juin 1993.

 10   M. Nice (interprétation): Franchement, il y aurait pas mal de questions

 11   que j'aimerais aborder avec ce témoin de Travnik mais j'ai le sentiment...

 12   Je vous prie de m'excuser, Monsieur le Président, j'ai fait preuve de

 13   manque de courtoisie, je n'ai pas vu que vous consultiez vos collègues.

 14   M. le Président (interprétation): Je crois que nous pourrions en finir sur

 15   ce point.

 16   M. Nice (interprétation): Oui, je crois que c'est le cas, car je ne crois

 17   pas que je puisse avancer avec ce témoin. J'ai, je crois, rempli

 18   entièrement et plus qu'entièrement la mission qui était la mienne vis-à-

 19   vis de ce témoin. Merci.

 20   (Maître Sayers interroge le témoin.)

 21   M. Sayers (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

 22   Quelques questions encore, Commandant, au sujet de certains des documents

 23   qui viennent de vous être montrés.

 24   D'abord la pièce 243, qui est une annonce, rapport relatif à la situation

 25   régnant à Novi Travnik et à Jajce, ou peut-être un tel rapport, car je


Page 18935

  1   constate qu'il n'y a pas de signature. Mais, en tout cas, je vous

  2   demanderais de bien vouloir jeter un coup d'œil sur la liste des

  3   destinataires de ce texte. En traduction anglaise, il est signalé que les

  4   destinataires sont tous des chefs de quartiers généraux municipaux de la

  5   communauté croate d'Herceg-Bosna. Etaient-ce des organismes militaires ou

  6   des organismes civils, Commandant?

  7   M. Ljubas (interprétation): Eh bien, il existait des quartiers généraux

  8   municipaux civils du HVO et des quartiers généraux municipaux militaires

  9   du HVO, à ce moment-là.

 10   Q.    Très bien. Cette annonce a-t-elle été envoyée à des organes

 11   civils de ces municipalités ou aux organes militaires de ces municipalités

 12   à titre d'information? Ou est-ce que vous n'êtes pas au courant?

 13   R.    Je ne peux pas le dire à la lecture de ce document que je n'ai

 14   pas reçu à l'époque des faits.

 15   Q.    On vous a posé un certain nombre de questions relatives à M.

 16   Puljic qui était chef de l'administration de la défense à Travnik. Est-il

 17   exact que l'administration civile de la défense était chargée de

 18   l'enregistrement des conscrits et de la mobilisation des conscrits qui

 19   ensuite étaient envoyés à l'armée pour être intégrés à la chaîne de

 20   commandement militaire? Etait-ce exact ou pas?

 21   R.    Il est exact que le bureau chargé de la défense avait une tâche

 22   administrative qui consistait à enregistrer et à recenser les moyens

 23   disponibles.

 24   Q.    Commandant, eh bien, je dois vous dire que, dans le pays d'où je

 25   suis originaire, une telle conception est assez étonnante. Mais je vais


Page 18936

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18937

  1   vous poser la question suivante: eu égard à M. Puljic que nous avons

  2   identifié comme étant le chef de l'administration de la défense à Travnik,

  3   était-il exact que c'est lui qui rendait compte au ministre de la défense

  4   de la communauté croate d'Herceg-Bosna, Bruno Stojic, ou bien rendait-il

  5   compte à quelqu'un d'autre?

  6   R.    Je ne connais pas totalement la hiérarchie du département de la

  7   défense, mais je sais qu'il y avait des bureaux de la défense au niveau

  8   municipal. Maintenant quels étaient les niveaux supérieurs de cette

  9   hiérarchie, je ne le sais pas exactement car nous ne travaillions pas dans

 10   ce domaine.

 11   Q.    Il y a quelque chose d'un peu curieux: vous faites référence aux

 12   quartiers généraux municipaux, mais ces quartiers généraux municipaux dont

 13   vous parlez étaient-ils des organismes civils ou militaires, monsieur?

 14   R.    Si nous parlons des quartiers généraux de guerre, il s'agissait

 15   des quartiers généraux qui avaient pour tâche d'organiser les choses du

 16   point de vue militaire. Mais si nous parlons des quartiers généraux

 17   municipaux, c'étaient les organes chargés des affaires civiles.

 18   Q.    Voyons si nous pouvons faire la clarté sur ce point, en nous

 19   référant à un autre document au sujet duquel un certain nombre de

 20   questions vous ont été déjà posées. Je parle de la pièce à conviction

 21   Z534.1.

 22   (L'huissier s'exécute.)

 23   J'aimerais que ce document soit placé sur le rétroprojecteur pour que

 24   chacun puisse en prendre connaissance. C'est un ordre signé par M. Puljic,

 25   chef de l'administration civile de la défense à Travnik, en date du 12


Page 18938

  1   mars 1993. Et, comme vous pouvez le voir, il est adressé au chef des

  2   bureaux de la défense municipaux de Travnik, Novi Travnik, Vitez, Zenica

  3   et Vares.

  4   Ces bureaux municipaux de la défense, monsieur, faisaient-ils partie de

  5   l'administration de la défense civile ou de la chaîne de commandement

  6   militaire? Pouvez-vous nous aider sur ce point?

  7   R.    Les bureaux de la défense étaient des organes civils.

  8   Q.    Très bien, monsieur. La pièce suivante au sujet de laquelle

  9   j'aimerais vous poser une question est la pièce Z193.2 qui traite de cette

 10   cérémonie, anniversaire de la création de la compagnie du Saint-Esprit à

 11   une date incertaine.

 12   D'abord, commandant, ce document est écrit en langue croate et quelques

 13   lignes y ont été raturées par quelqu'un. Avez-vous la moindre idée de la

 14   personne qui a pu raturer ces lignes?

 15   R.    Comme je l'ai déjà dit, la compagnie du Saint-Esprit n'a existé

 16   qu'un mois et demi à peu près. Donc je ne connais pas ce document.

 17   Q.    Oui, commandant, vous avez dit cela mais, si vous me le

 18   permettez, j'aimerais appeler votre attention sur ce document tout de

 19   même. Avez-vous la moindre idée de la personne qui aurait pu raturer ces

 20   quelques lignes dans ce document pour y inscrire des mots différents

 21   apparemment?

 22   R.    Je ne sais pas.

 23   Q.    Pouvez-vous nous dire si ce document d'une page a un rapport

 24   quelconque avec le document qui lui est annexé?

 25   R.    Vous pensez aux deux documents que j'ai sous les yeux?


Page 18939

  1   Q.    Oui, je vous demande s'il y a un rapport quelconque entre ces

  2   deux documents dont vous pourriez nous parler.

  3   R.    Sur le second document, en tout cas pour l'exemplaire que j'ai

  4   sous les yeux, on ne voit rien. Quant au premier, il traite de la

  5   compagnie du Saint-Esprit dont je viens de parler.

  6   Q.    Oui, en effet. Eh bien, parlons de la proposition de cérémonie

  7   qui a été faite, indépendamment de la date à laquelle elle a été faite. Je

  8   vous invite à prendre la page 2 de l'original croate -en tout cas, je

  9   crois qu'il s'agit de la page 2- sous l'intitulé "Maître des cérémonies",

 10   paragraphe 7.

 11   Le premier nom que l'on trouve ici est M. Pero Krizanac, ce qui devait

 12   prendre la parole devant toutes les personnes présentes. Il est identifié

 13   comme étant président en exercice du HVO de Travnik. Etait-ce un organisme

 14   civil ou un organisme militaire, monsieur?

 15   R.    Vous parlé du paragraphe commençant par Pero Krizanac, c'était

 16   un organisme civil.

 17   Q.    Oui. Bien. En août 1993, monsieur, il n'existait pas de HVO de

 18   Travnik, n'est-ce pas, pour autant que vous le sachiez? Il avait été

 19   nettoyé, éliminé un mois avant par l'armée de Bosnie-Herzégovine?

 20   R.    Vous parlez du mois d'août 1993?

 21   Q.    Oui, tout à fait.

 22   R.    Non, à Travnik en août 1993, il n'y avait aucune institution ni

 23   civile ni militaire.

 24   Q.    Très bien, encore un détail sur ce point. Au paragraphe 8 du

 25   texte intitulé en anglais "sécurité"... Je vous prie de m'excuser: c'est


Page 18940

  1   au paragraphe 9, intitulé "La cérémonie" où l'on trouve mention de la

  2   personne qui devait agir en qualité de maître des cérémonies.

  3   Nous voyons d'abord le nom du président du HVO de Travnik. Je suppose

  4   qu'il s'agissait de M. Krizanac, n'est-ce pas?

  5   R.    De quelle époque parlez-vous?

  6   Q.    Eh bien, à quel moment M. Krizanac était-il président du HVO de

  7   Travnik pour autant que vous le sachiez? Je vous le demande.

  8   R.    Pour autant que je le sache, il a été en 1993.

  9   Q.    Jusqu'à quelle date?

 10   R.    Cela je ne me rappelle pas, je ne sais pas jusqu'à quelle date

 11   en d'autres termes, car je m'occupais exclusivement d'affaires militaires.

 12   Q.    La seconde allocution devait être prononcée par un représentant

 13   de la défense territoriale qui était, n'est-ce pas, un organe militaire

 14   musulman mais purement militaire à Travnik?

 15   R.    Au début, avant que l'armée de Bosnie-Herzégovine ne soit

 16   baptisée "armée de Bosnie-Herzégovine", c'est la dénomination "défense

 17   territoriale" qui était utilisée pour la désigner.

 18   Q.    Avez-vous jamais assisté à une cérémonie de prestation de

 19   serment de quelque nature que ce soit, à quelque moment que ce soit, au

 20   cours de laquelle une allocution aurait été prononcée devant les nouveaux

 21   soldats ou les hommes qui s'enrôlaient pour devenir membres de la défense

 22   territoriale?

 23   R.    Non.

 24   Q.    Très bien. J'aurais encore quelques questions en rapport avec

 25   deux documents. Mais avant cela, je vous demande si vous n'avez jamais


Page 18941

  1   entendu dire que M. Boban se soit rendu à Travnik en avril 1993?

  2   R.    Non.

  3   Q.    Avez-vous jamais entendu dire que M. Boban ait visité Travnik en

  4   1992?

  5   R.    Non. Pendant la durée de la guerre, je n'ai pas été informé du

  6   fait que M. Boban soit venu à Travnik.

  7   Q.    Très bien. Encore deux dernières questions en rapport avec le

  8   bulletin d'information militaire que l'on vous a montré, la pièce Z1019.1,

  9   datée du 5 juin 1993. Il n'est pas nécessaire de vous la soumettre une

 10   nouvelle fois. Je lirai simplement le passage qui nous intéresse.

 11   Monsieur l'huissier, il s'agit de la référence que l'on trouve en page 2,

 12   référence au commandant du 3e Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine, le

 13   général Hadzi Hasanovic, qui aurait déclaré avoir peu de confiance dans la

 14   diplomatie et le processus politique.

 15   Et puis il est fait référence à un autre homme répondant au nom de Suvalic

 16   qui aurait déclaré, je cite: "Les Musulmans se sentaient abusés et déçus

 17   par la communauté internationale" et "qu'il ne leur restait guère

 18   d'alternative sinon l'action militaire pour résoudre leurs problèmes." Fin

 19   de citation.

 20   Un commentaire est ajouté selon lequel "bien qu'aucune des parties ne

 21   pouvait répondre à la question de savoir ce que serait l'étape suivante,

 22   la conclusion inévitable était que l'armée de Bosnie-Herzégovine n'était

 23   plus prête à se restreindre et qu'elle allait sans doute lancer des

 24   initiatives militaires dans la vallée de Lasva où elle bénéficiait d'un

 25   avantage tactique sur le HVO." Fin de citation.


Page 18942

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18943

  1   Avez-vous jamais entendu dire, commandant, que le général Hadzi Hasanovic,

  2   à l'époque, refusait de rencontrer le colonel Blaskic pour tenter de

  3   résoudre les différends, en évitant le combat?

  4   R.    Non, à mon niveau, je n'ai rien entendu de ce genre.

  5   Q.    Eh bien, voyons si je peux vous rafraîchir la mémoire. Je

  6   m'appuie sur la pièce à conviction 1020, et c'est la dernière question que

  7   je vous poserai avant la suspension. On ne vous a pas interrogé au sujet

  8   du paragraphe 12 de ce bulletin d'information militaire du régiment

  9   britannique daté du 6 juin 1993, mais voici ce qu'on lit dans ce

 10   paragraphe. Je cite: "Les négociations ont repris à 18 heures mais en

 11   l'absence de Blaskic et de Hasanovic qui auraient dû y participer. Blaskic

 12   était désireux d'assister à la rencontre mais Hadzi Hasanovic en dépit de

 13   l'intervention du BHC a maintenu sa position antérieure et a déclaré qu'il

 14   était désormais trop tard pour des négociations. Il a affirmé qu'il

 15   bénéficiait du plein soutien du général Halilovic eu égard à la position

 16   adoptée par lui." Fin de citation.

 17   Ensuite, d'autres commentaires sont ajoutés au texte. Ceci vous rappelle-

 18   t-il quelque chose? Avez-vous le moindre souvenir du fait que le général

 19   Hadzi Hasanovic ait refusé de participer à des négociations avec le

 20   colonel Blaskic en affirmant qu'il était trop tard pour des négociations?

 21   R.    Je ne suis pas au courant de cela.

 22   M. le Président (interprétation): Commandant Ljubas, merci d'être venu

 23   devant le Tribunal pour y témoigner. Vous êtes désormais libre de vous

 24   retirer et l'audience est suspendue et reprendra à 14 heures 30.

 25   (L'audience, suspendue à 13 heures 10 est reprise à 14 heures 40.)


Page 18944

  1   (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

  2   M. le Président (interprétation): Le juge Robinson n'est pas bien. Il doit

  3   avoir la grippe. Il n'est donc pas en mesure de siéger avec nous cet

  4   après-midi. En l'absence d'objection de la part des parties, nous allons

  5   rendre une ordonnance en vertu de l'article habituel, l'article 15 du

  6   Règlement, afin que les deux Juges que nous sommes soient autorisés à

  7   siéger.

  8   Il va peut-être être de retour demain, mais il n'en est pas sûr. Y a-t-il

  9   des objections?

 10   M. Naumovski (interprétation): Non, pas du tout.

 11   M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Je vais rendre une

 12   ordonnance dans ce sens.

 13   Monsieur le témoin, veuillez donner lecture de la déclaration solennelle.

 14   M. Civcija (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

 15   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 16   (Maître Naumovski interroge le témoin.)

 17   M. Naumovski (interprétation): Merci Monsieur le Président.

 18   Bonjour Monsieur Civcija. Pouvez-vous décliner votre identité?

 19   R.    Je m'appelle Zlatan Civcija.

 20   Q.    Vous êtes né à Travnik en 1954?

 21   R.    Oui.

 22   Q.    Vous êtes Croate, vous êtes ressortissant de Bosnie-Herzégovine

 23   et vous avez vécu à Novi Travnik une quarantaine d'années jusqu'en 1994.

 24   R.    C'est tout à fait vrai.

 25   Q.    Avec votre famille, en ce moment, vous habitez dans une petite


Page 18945

  1   ville à Grahovo au sud-ouest de la Bosnie-Herzégovine?

  2   R.    Oui.

  3   Q.    Vous travaillez comme conseiller juridique dans la société

  4   publique dénommée Sume.

  5   R.    Oui.

  6   Q.    Mais avant, entre avril 1996 et septembre 1997, vous étiez

  7   directeur en exercice à Grahovo. C'était plutôt le maire de la ville. Est-

  8   ce que cela correspond un peu à cela?

  9   R     Oui, tout à fait.

 10   Q.    Je vais vous demander de ménager des pauses car les interprètes

 11   doivent d'abord interpréter vers l'anglais et le français pour que vous

 12   puissiez être entendu par les interprètes et être interprété de votre

 13   côté. Je vous demande maintenant si vous étiez adjoint du maire de Grahovo

 14   de 1997 jusqu'en mars de l'an 2000?

 15   R.    Oui.

 16   Q.    En ce qui concerne votre information, vous êtes diplômé de la

 17   faculté de Droit à Sarajevo en 1980 et comme juriste, vous avez travaillé

 18   dans l'usine d'armement Bratstvo à Novi Travnik et vous avez travaillé

 19   également dans cette même entreprise comme directeur du service du

 20   personnel, n'est-ce pas?

 21   R.    C'est exact.

 22   Q.    En 1990, par conséquent avant que la guerre ne se déclenche, la

 23   guerre civile, vous êtes devenu commandant de la police à Novi Travnik. Je

 24   dirais que vous étiez chef plutôt et pas véritablement directeur car

 25   c'était plutôt un poste administratif. Ai-je raison ou tort?


Page 18946

  1   R.    En ce qui concerne le poste que j'ai occupé en 1990, au mois de

  2   mars, si je ne m'abuse, c'était chef du poste de police. C'est le poste de

  3   sécurité publique si je traduis à la lettre.

  4   Q.    Merci. En ce qui concerne la police à Novi Travnik, vous êtes

  5   resté jusqu'au 28 septembre 1993. C'est là que vous avez rejoint les rangs

  6   de la brigade Stjepan Tomasevic du HVO à Novi Travnik?

  7   R.    C'est exact.

  8   Q.    Vous avez rejoint les rangs du HVO ou plutôt de la brigade dont

  9   il a été question. Vous étiez commandant du détachement. Vous étiez membre

 10   du HVO jusqu'à la fin de la guerre civile qui a eu lieu entre les

 11   Musulmans et les Croates. Par conséquent, vous étiez sur les lignes de

 12   front, les lignes de défense jusqu'au printemps 1994? Ai-je tort ou

 13   raison?

 14   R.    Vous avez raison.

 15   Q.    Et puis encore une autre donnée concernant votre formation et

 16   votre carrière, en 1995 vous avez travaillé au ministère des Affaires

 17   intérieures de la république de Croatie d'Herceg-Bosna à Mostar.

 18   R.    C'est exact.

 19   M. Bennouna: Maître Naumovski, je voudrais demander au témoin, M. Civcija,

 20   ce qu'il fait actuellement. Quelle est sa profession actuelle ou quelle

 21   est sa profession de 1995 à maintenant?

 22   M. Naumovski (interprétation): Avez-vous compris la question que M. le

 23   Juge Bennouna vous a posée?

 24   M. Civcija (interprétation): Tout à fait. Je peux répondre à cette

 25   question si vous me le permettez. Comme le conseil vient de le dire, en


Page 18947

  1   1995, j'ai travaillé au ministère des Affaires intérieures de la

  2   république croate d'Herceg-Bosna à Mostar. D'avril 1996 jusqu'à la fin de

  3   1997, j'ai travaillé comme commissaire gouvernemental pour Bosanska

  4   Grahovo. Après les élections locales, j'ai été nommé adjoint du maire de

  5   la commune de Grahovo et j'étais à la fois chef du département chargé des

  6   questions économiques. Je suis resté à ce poste jusqu'au mois de mars

  7   cette année et c'est au mois d'avril que nous avons procédé aux élections

  8   locales et moi, j'ai été à la tête de la liste du parti HDZ. Nous n'avons

  9   pas encore nommé les membres du nouveau gouvernement. Nous attendons les

 10   résultats ces jours-ci.

 11   Entre-temps, j'ai commencé à travailler dans la société publique nommée

 12   Sume. C'est une société cantonale qui s'occupe de l'exploitation et de la

 13   préservation des forêts. Moi, j'occupe le poste de conseiller juridique.

 14   Q.    Merci. Nous pouvons poursuivre monsieur Civcija. Quelques

 15   données concernant la municipalité de Novi Travnik. D'après le recensement

 16   de la population en 1991, la municipalité de Novi Travnik regroupait 12500

 17   Croates soit 40 % à peu près de la totalité. Les Musulmans étaient moins

 18   nombreux: 11600 soit 38 % de la population. Il y avait 16 % de Serbes et

 19   ensuite, il y avait une catégorie qui se déclarait différemment.

 20   R.    Je pense que vos données sont correctes.

 21   Q.    En ce qui concerne ces trois groupes ethniques, trois peuples,

 22   qui habitaient dans la ville de Novi Travnik, ils respectaient les

 23   traditions et les coutumes des uns et des autres. Je pense que nous

 24   pouvons dire pratiquement que cette communication était bonne, mais chaque

 25   groupe ethnique vivait en quelque sorte si je peux dire enfermé dans son


Page 18948

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18949

  1   groupe ethnique. Ceci est notamment vrai pour les milieux villageois. Est-

  2   ce que vous êtes d'accord avec moi?

  3   R.    Oui. On peut dire qu'un tiers de la population, soit 10000

  4   personnes, habitait la ville alors que deux tiers, soit 20000, habitaient

  5   les villages, les banlieues, les grands faubourgs.

  6   Q.    Un de ces groupes ethniques, un de ces peuples en ex-Yougoslavie

  7   dans l'autre régime était quelque peu privilégié par rapport aux autres

  8   peuples, n'est-ce pas?

  9   Est-ce que vous pouvez dire à la Chambre en quelques mots de quels peuples

 10   s'agissait-il et comment ces privilèges se sont reflétés sur les activités

 11   et sur la vie de tous les jours?

 12   R.    Certes. L'ex-Yougoslavie était un Etat fédéral, un Etat qui se

 13   composait de six républiques et de deux provinces autonomes. Dans cet

 14   Etat, le peuple majoritaire était le peuple serbe. Ce peuple avait ses

 15   privilèges dans un certain sens par rapport aux autres peuples parce que

 16   c'était eux qui contrôlaient en majorité l'armée: 90% d'officiers étaient

 17   des Serbes. Ils contrôlaient la police, le secteur public, les sociétés

 18   publiques. C'est tout ce que j'avais à dire.

 19   Q.    En ce qui concerne les ressortissants de Bosnie-Herzégovine, les

 20   deux autres peuples, les Musulmans et les Croates, à cette époque-là

 21   étaient discriminés dans un certain sens, à travers les fonctions qu'ils

 22   auraient pu ou n'ont pas pu exercer dans des institutions dont il a été

 23   question.

 24   Vous connaissez, je pense, également la structure des dirigeants au sein

 25   de la police en Bosnie-Herzégovine étant donné que c'était également en


Page 18950

  1   quelque sorte une de vos activités? Et vous savez qu'il y avait des

  2   peuples qui ont été quelque peu mis à l'écart à cette époque-là?

  3   R.    Oui. Pendant une période assez longue, le peuple prédominant

  4   dans tous les postes dirigeants était des Serbes. Par conséquent, aussi

  5   bien les Croates que les Musulmans ont été discriminés et les Croates

  6   notamment parce qu'ils étaient les moins nombreux en tant que peuple.

  7   Q.    En ce qui concerne les postes dirigeants à la police vers les

  8   années 1980-1990, enfin cette décennie, je pense qu'il y avait quand même

  9   une tentative de corriger et de modifier cette structure en faveur des

 10   Croates. C'est pourquoi quelques Croates, parmi lesquels vous-même,

 11   avaient été nommés à un poste au niveau de la police.

 12   R.    Oui. En ce qui concerne 1989, il faut dire que dans l'ensemble

 13   de la Yougoslavie, il y avait une certaine démocratisation qui s'est

 14   ouverte, vu les changements intervenus dans les pays de l'est, je pense

 15   aux pays du bloc de l'Est. Même si la Yougoslavie était un pays qui était

 16   beaucoup plus libéral par rapport à ce bloc des pays de l'Est, c'était

 17   quand même un Etat où il n'y avait qu'un seul parti politique et ceci ne

 18   pourrait pas correspondre aux normes, si on parle des normes de l'Europe

 19   occidentale.

 20   Mais la chute du mur de Berlin, les modifications également qui sont

 21   survenues par la suite au sein de l'ex-Union soviétique se sont reflétées

 22   sur ce qui se passait dans notre pays. On a donc essayé quelque peu

 23   d'équilibrer les choses et c'est la raison pour laquelle on a essayé de ne

 24   plus privilégier un seul peuple.

 25   Dans ma république de Bosnie-Herzégovine, à un moment donné, les


Page 18951

  1   directeurs de poste de police dans plusieurs municipalités étaient des

  2   Croates et parmi ces Croates, il y en avait une dizaine à peu près qui ont

  3   été nommés comme chefs de poste de police. J'y étais également.

  4   Q.    En 1990, il y avait les premières élections multipartites qui

  5   ont été organisées en Bosnie-Herzégovine dans toutes les municipalité,

  6   entre autres dans la municipalité de Novi Travnik. Lors de ces élections

  7   pour le pouvoir de Travnik, le parti principal des Croates en Bosnie-

  8   Herzégovine, le HDZ a obtenu le plus grand nombre de places; ensuite le

  9   SDA, le parti principal des Musulmans; et puis en troisième position

 10   venaient d'autres partis. Etes-vous bien d'accord avec moi?

 11   R.    Tout à fait, vous avez tout à fait raison.

 12   Q.    C'est en fonction de ces résultats également que les autorités

 13   se sont constituées et les fonctions ont été partagées. Le Croate est

 14   devenu maire de la ville alors que le Musulman est devenu le président du

 15   gouvernement municipale -pour que la Chambre puisse nous suivre mieux-,

 16   les Serbes ont obtenu le poste du secrétaire. C'est donc en fonction des

 17   résultats électoraux qu'on a distribué les postes également, n'est-ce pas?

 18   R.    C'est exact.

 19   Q.    Au moment où ces fonctions avaient été distribuées, les Croates

 20   ont maintenu le poste de la police civile et vous, vous avez poursuivi vos

 21   activités, mais cette fois-ci, bien évidemment, en accord avec tous les

 22   partis?

 23   R.    C'est exact.

 24   Q.    Vous étiez chef du poste de sécurité publique. Il y avait le

 25   commandant qui était musulman, si je ne m'abuse?


Page 18952

  1   R.    Oui.

  2   Q.    Quelques questions au sujet au paragraphe 9 pour savoir ce qui

  3   s'était passé en Croatie à la seconde moitié de 1991 quand vous, et je

  4   pense aux Croates de Bosnie-Herzégovine, vous avez suivi par la radio, par

  5   la télévision et par les mass médias tout ce qui se passait au cours de la

  6   guerre et qui faisait rage sur le territoire de la république de Croatie.

  7   Comment avez-vous vécu cette guerre et comment avez-vous pensé ce qui

  8   éventuellement aurait pu arriver sur le territoire de Bosnie-Herzégovine à

  9   partir donc de ce que vous avez vu à la télévision?

 10   R.    La guerre et le déroulement de la guerre en 1991 en Slovénie

 11   pour commencer, ensuite en Croatie, ont troublé tous les peuples et tous

 12   ceux qui habitaient le territoire de Bosnie-Herzégovine tout

 13   particulièrement des Croates. Tous les jours, ils pouvaient suivre les

 14   scènes tragiques de la guerre. On pilonnait Dubrovnik, Jadar, Vukovar,

 15   d'autres villes également en Croatie, ce qui a perturbé la communauté

 16   croate en Bosnie-Herzégovine, ce qui les a paniqués et terrorisés à la

 17   fois.

 18   Q.    Mais tout ce que vous avez vu et ce qui se passait en république

 19   de Croatie, avez-vous commencé à penser également comment organiser votre

 20   propre défense, la défense de votre territoire en Bosnie-Herzégovine?

 21   R.    Nous étions parfaitement conscients qu'après une longue période

 22   de l'existence de la Yougoslavie, qui était un régime dictatorial, que cet

 23   Etat allait se dissoudre. Par conséquent tous ceux qui étaient au niveau

 24   de la fédération pratiquement voulaient se retirer vers leur propre état.

 25   C'était le cas en Slovénie, en Croatie, en Macédoine. Donc la Bosnie-


Page 18953

  1   Herzégovine également, on l'a bien compris, deviendra un état

  2   internationalement connu. Et c'est dans ce sens-là que nous avons commencé

  3   à nous préparer pour cette indépendance et la proclamation de

  4   l'indépendance.

  5   Q.    Il y avait un certain nombre d'événements qui ont eu lieu en

  6   Bosnie-Herzégovine quand quelques villages croates avaient été détruits,

  7   mais je pense que la réaction de tous les peuples n'était pas

  8   véritablement la même.

  9   Est-ce qu'entre vous, Croates et Musulmans, à cette époque-là, il y avait

 10   quelque discorde et malentendu au sujet de ce qui allait se passer? Est-ce

 11   que les dirigeants politiques des Musulmans, et ceci du point de vue de

 12   Novi Travnik et de votre perspective, partageaient votre point de vue ou

 13   pas?

 14   R.    Comme vous me posez la question, je vais vous répondre. Il y a

 15   un village dénommé Ravno qui se trouve au sud-est de Bosnie-Herzégovine,

 16   et c'est à titre d'exemple que je vous cite ce qui s'est passé à ce

 17   niveau-là. Nous avons été très surpris, désagréablement surpris, quand

 18   nous avons appris que l'armée, l'ex-JNA et les paramilitaires avaient

 19   pilonné ce village Ravno. Nous avons été étonnés de la manière dont les

 20   Musulmans et le gouvernement fédéral de Bosnie-Herzégovine avait réagi.

 21   Q.    Je pense que la Chambre est au courant et les Juges savent ce

 22   qui s'est passé à Ravno. Nous n'allons pas insisté, mais je pense que de

 23   l'autre côté, du côté des Musulmans, les dirigeants politiques musulmans

 24   n'étaient pas tellement préoccupés de ce qui se passait en Croatie, en

 25   Slovénie et ailleurs, n'est-ce pas?


Page 18954

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18955

  1   R.    Je vais vous donner la réponse: en ce qui concerne les

  2   dirigeants politiques des Musulmans, ils ont pensé qu'ils allaient pouvoir

  3   obtenir leur propre Etat et que le garant serait l'ex-JNA, une armée

  4   étrangère. Ils n'ont pas compris le danger et ils n'ont pas compris ce qui

  5   s'était passé en Slovénie. On peut en Croatie beaucoup plus, sans parler

  6   de la Bosnie-Herzégovine et de tout ce qui s'est passé sur le territoire

  7   de la Bosnie-Herzégovine par la suite.

  8   Q.    Quand j'ai posé la question des préparatifs des Croates en

  9   Bosnie-Herzégovine, je ne sais pas si vous êtes d'accord avec moi pour

 10   dire que des centaines de Croates de Bosnie-Herzégovine ont rejoint les

 11   rangs de l'armée la République de Croatie, qui venait d'être créée, pour

 12   aider la Croatie dans sa défense de son propre territoire.

 13   R.    Oui, certes. Nous devons constater que l'agression a été faite

 14   par l'ex-JNA et par une partie de l'armée paramilitaire sur la Croatie. Je

 15   considère qu'il y avait une quinzaine de milliers de Croates de Bosnie-

 16   Herzégovine qui sont allés, sur base totalement volontaire, défendre la

 17   République de Croatie ; l'Etat nouvellement créé.

 18   Q.    Au moment où la guerre en Croatie s'est terminée, où le cessez-

 19   le-feu avait été signé, la majorité de ces gens-là, de ces Croates de

 20   Bosnie-Herzégovine sont retournés dans leurs foyers, chez eux, en Bosnie-

 21   Herzégovine?

 22   R.    Oui. La majorité est retournée en Bosnie-Herzégovine; ils ont

 23   raconté tout ce qu'ils ont vécu, les malheurs et les épreuves qu'ils ont

 24   traversés. Vous ne pouviez pas tout voir à la télévision. C'est pour cela

 25   que tout ce qui nous a été relaté par ces gens était assez tragique et


Page 18956

  1   sinistre.

  2   Q.    Vous voulez dire que tous ces gens-là qui, au moment où la

  3   guerre civile s'est déclenchée en Bosnie-Herzégovine, sont retournés de la

  4   Croatie pour défendre leurs propres foyers en Bosnie-Herzégovine, par

  5   conséquent, ils continuent à défendre leur territoire, cette fois plus en

  6   Croatie mais en Bosnie-Herzégovine?

  7   R.    Vous avez parfaitement raison. C'était logique: les gens qui

  8   sont allés défendre la Croatie, ils retournent en Bosnie-Herzégovine car,

  9   à ce moment, c'est leur propre patrie qui a été menacée, qui était en

 10   danger. C'est la raison pour laquelle ils ont tout fait pour défendre ce

 11   territoire, ce territoire où ils sont nés et où ils vivaient depuis

 12   toujours. C'est leur propre Etat, la Bosnie-Herzégovine.

 13   Q.    Dans votre ville, où vous avez passé une quarantaine d'années,

 14   par conséquent la plupart du temps, il y avait une grande usine dénommée

 15   Bratstvo; c'est une usine d'armement. Ces armes étaient envoyées à l'ex-

 16   JNA ; elles ont été utilisées en Croatie pour mener la guerre contre les

 17   Croates. Par la suite, également en Bosnie-Herzégovine. N'est-ce pas ?

 18   R.    En ce qui concerne les événements qui ont eu lieu en Croatie, je

 19   dois dire d'abord que les gens avaient d'abord peur, qu'ils exprimaient

 20   leur mécontentement, qu'ils étaient déçus. Il y avait donc cette première

 21   étape. Mais le fait que nos voisins ont été attaqués par les armes qui

 22   avaient été fabriquées dans notre propre usine nous désolait encore

 23   davantage. C'est la raison pour laquelle nous avons absolument voulu faire

 24   quelque chose pour l'empêcher. Car on ne pouvait pas le permettre. On

 25   était mécontent.


Page 18957

  1   Q.    D'accord. Mais, étant donné que les membres de tous les groupes

  2   ethniques travaillaient dans cette usine, entre les musulmans et les

  3   Croates, il y avait un certain malentendu. Car vous, les Croates, vous ne

  4   vouliez pas qu'on livre ces armes alors que les Musulmans, en revanche,

  5   voulaient faire fonctionner l'usine pour des raisons économiques. De toute

  6   façon, ces armes ont été fabriquées et étaient destinées à l'armée, à

  7   l'ex-JNA, n'est-ce pas ? Est-ce que c'est dans ce sens-là qu'il y avait un

  8   malentendu entre les Musulmans et les Croates?

  9   R.    Oui, mais j'aurais formulé cela différemment. Il y avait une

 10   tentative du côté de la direction de l'usine, car ce sont eux qui

 11   décidaient, qui prenaient les décisions sur les livraisons des armes ; ils

 12   ont essayé de démontrer soi-disant que, pour des raisons économiques, ils

 13   livrent les armes à l'ex-JNA. Ce n'était pas vrai, car les hommes

 14   politiques des Musulmans, qui avaient simplement accepté cette

 15   information, n'étaient pas du tout conscients de l'aspect hypocrite de ces

 16   paroles, de ces slogans: l'armée populaire yougoslave avait pour objectif

 17   de sortir toutes les armes et de déposer ces armes dans leurs propres

 18   entrepôts. Ils avaient déjà beaucoup d'armements ; ils n'en avaient pas

 19   tellement besoin, mais l'essentiel pour l'ex-JNA, c'était que ces armes ne

 20   restent dans les usines en Bosnie-Herzégovine et dans les entrepôts. La

 21   direction politique des Musulmans, malheureusement, n'a pas véritablement

 22   marché, n'a pas compris ce piège qui a été tendu.

 23   Q.    Encore une donnée. L'usine Bratstvo était une usine militaire.

 24   Par conséquent, cette direction était composée d'ex-officiers de la JNA,

 25   des gens qui bénéficiaient de la confiance de l'ex-JNA, n'est-ce pas?


Page 18958

  1   R.    Oui. Tout à fait, vous avez raison. Je vais tout simplement vous

  2   expliquer comment moi, je voyais les choses. Depuis que l'usine a été

  3   créée jusqu'à la fin, plutôt jusqu'à la veille de la guerre, les

  4   dirigeants étaient des officiers. C'étaient les membre de la JNA. Par

  5   conséquent, tous ceux qui occupaient des postes dirigeants étaient des

  6   membres de la JNA. Et quand je le dis, cela veut dire 99 % qui étaient des

  7   gens appartenant au groupe ethnique serbe. C'étaient des Serbes. Il était

  8   normal qu'en tant que militaires, ils recevaient des ordres de leurs

  9   supérieurs qui se trouvaient à Belgrade et les mettaient en œuvre.

 10   Q.    Il y avait un certain nombre de malentendus entre les Musulmans

 11   et les Croates mais, malgré ces malentendus, vous avez réussi, vous les

 12   Croates, à arrêter la livraison de quelques armes ; vous les avez gardées

 13   sur place et vous n'avez pas permis que ces armes soient livrées à la JNA.

 14   Mais vous n'avez pas gardé ces armes pour vous-mêmes: je pense qu'une

 15   décision a été prise au niveau supérieur. Elle demandait de partager les

 16   armes moitié-moitié avec des Musulmans. Vous souvenez-vous de qui a

 17   délivré un tel ordre?

 18   R.    Très franchement parlant, les Croates, en tant que groupe

 19   ethnique à Novi Travnik, ont bloqué la route à ceux qui transportaient des

 20   armes et ont ainsi empêché que ces armes soient livrées à la JNA. A un

 21   moment donné, ils ont réussi à prendre des armes. La guerre s'approchait

 22   des frontières de la Bosnie-Herzégovine: un danger était déjà présent et

 23   on était pratiquement à l'imminence de la guerre sur le sol de la Bosnie-

 24   Herzégovine. Nous avons donc arrêté les convois qui transportaient les

 25   armes; un ordre a été délivré par le ministère de la défense de la


Page 18959

  1   République de Bosnie-Herzégovine. A ce moment-là, je crois que le ministre

  2   était Jerko Doko, à mon avis. Je me souviens que ce convoi a été arrêté.

  3   Puis, j'ai participé à un certain nombre de réunions. Il y avait M.

  4   Stjepan Klujic également à l'époque, qui était au sein de la Présidence,

  5   qui avait insisté pour que ces armes soient distribuées sur un pied

  6   d'égalité. Nous avons mis en œuvre cette décision qui nous est parvenue du

  7   ministère de la défense.

  8   Q.    Monsieur Klujic et M. Doko étaient des représentants croates au

  9   sein des autorités de la Bosnie-Herzégovine de l'époque?

 10   R.    Oui, oui.

 11   Q.    Monsieur, vous savez qu'il y avait plusieurs cas où les armes

 12   avaient été distribuées; c'est d'ailleurs marqué dans le paragraphe 13.

 13   C'est pourquoi je ne vais pas y insister. Très brièvement, pouvez-vous

 14   dire à la Chambre comment vous vous êtes pris, comment vous avez partagé

 15   avec des Musulmans des armes qui se trouvaient dans l'usine Bratstvo?

 16   C'étaient des armes antiaériennes. Je pense que vous ne les avez pas

 17   gardées pour vous? Vous en avez donné également une partie aux Musulmans.

 18   Est-ce que je me trompe ou pas?

 19   R.    Comme je l'ai déjà dit au début, Bratstvo était une usine

 20   militaire. Toutes les usines militaires sont assurées d'une façon assez

 21   précise. Bratstvo également était une usine assurée; elle disposait

 22   également de pièces d'artillerie antiaérienne, de canons antiaériens qu'on

 23   gardait à Bratstvo. Bratstvo avait même une formation spécialisée qui, au

 24   cours de 40 ans d'existence de l'usine, devait être en fonction de la

 25   défense de cette usine. C'est la raison pour laquelle nous avons distribué


Page 18960

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18961

  1   ces armes entre les Musulmans et les Croates sur un pied d'égalité. Et au

  2   moment où nous avons commencé à nous préparer pour la défense contre

  3   l'agression de la JNA et de l'armée des Serbes de Bosnie-Herzégovine.

  4   Q.    Nous allons très vite parcourir le reste. Vous avez partagé

  5   également des armes qui ont été prises par la JNA qui se trouvait à

  6   Stojkovici dans la caserne de la JNA, Slimena également. La Chambre le

  7   sait: il y avait un entrepôt Slimena dans la municipalité de Travnik. Il y

  8   avait également les armes restées à Travnik une fois que la JNA a battu en

  9   retraite. Il y avait également des armes au club sportif.

 10   R.    Oui. Tout à fait. Personnellement, j'ai participé au partage qui

 11   a été exécuté. Monsieur Filipovic également, le colonel, était présent.

 12   Moi, en personne, j'ai avec mon collègue procédé au partage des munitions.

 13   Il y avait 4 clubs sportifs dans la ville. J'ai participé également au

 14   transport des armes de l'usine Bratstvo pour les besoins de l'armée

 15   musulmane.

 16   Ensemble, avec M. Cengic, à deux reprises, nous avons transporté 24

 17   remorques qui contenaient des armes jusqu'à Visoko et cela nous a aidé

 18   pour défendre la ville de Sarajevo qui subissait déjà le pilonnage de

 19   l'armée de la Republika Srpska. C'est grâce à ces armes que Sarajevo a été

 20   défendue.

 21   Q.    En ce qui concerne ce convoi de 24 remorques qui se déplaçait à

 22   destination de Visoko, vous étiez vous-même parmi ceux qui escortaient le

 23   convoi, je pense? Corrigez-moi si je n'ai pas raison.

 24   R.    Non. Vous avez raison. Monsieur Hasam Cengic était quelqu'un qui

 25   était chargé de la logistique. Il était l'un des principaux personnages


Page 18962

  1   chargés de la logistique.

  2   Moi-même, à ce moment-là, j'ai occupé un poste important.

  3   M. le Président (interprétation): Un instant. Permettez-moi de vous

  4   interrompre monsieur le témoin, monsieur Civcija, nous avons entendu

  5   beaucoup de témoins qui sont venus déposer ici et qui ont parlé de ces

  6   événements. Je crois qu'il serait utile de passer aux parties plus

  7   pertinentes. Merci, maître Naumovski de le faire.

  8   M. Naumovski (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Nous pouvons

  9   poursuivre. Nous passons au paragraphe 14. La Chambre avait déjà

 10   l'occasion d'entendre que le 29 février et le 1er mars 1992, le référendum

 11   a été organisé sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine, ce référendum

 12   où l'on a pris la décision de la création du nouvel Etat de Bosnie-

 13   Herzégovine et de l'indépendance de cet Etat.

 14   Il faut quand même que je vous rappelle quelques faits. En ce qui concerne

 15   la manière dont la question a été formulée, il y avait, je pense, un

 16   malentendu qui a surgi entre les Croates et les Musulmans. Les Croates

 17   étaient 17,4 %. Vous étiez minoritaires et vous avez souhaité assurer ce

 18   statut d'égalité comme ce fut le cas dans l'ex-Etat de la république de

 19   Bosnie-Herzégovine.

 20   R.    Oui. La question de l'indépendance de l'Etat, partout, chaque

 21   peuple considère cette question comme la question la plus importante.

 22   C'est la raison pour laquelle, aussi bien les Croates que les Musulmans

 23   étaient favorables à ce que l'Etat de Bosnie-Herzégovine soit un état

 24   indépendant.

 25   Mais avant que l'on ne se prononce pour l'indépendance, nous avons


Page 18963

  1   souhaité simplement mettre en place un certain nombre de mécanismes et

  2   voir si le peuple minoritaire allait pouvoir bénéficier de quelques

  3   garanties. C'est un des peuples les plus anciens sur le sol de Bosnie-

  4   Herzégovine. Par conséquent, il aurait dû être le peuple constitutif pour

  5   qu'il n'y ait pas de vote de majorité etc.

  6   Mais du côté des Musulmans et des Croates, il y avait un certain nombre de

  7   discordes. Au moment où le référendum a été organisé et au moment où nous

  8   avons eu à nous proclamer pour l'indépendance, c'est grâce au vote d'un

  9   peuple de l'autre que l'Etat de la Bosnie-Herzégovine est devenu un état

 10   indépendant. Il faut dire que sans les voix des Croates, l'Etat de Bosnie-

 11   Herzégovine n'aurait jamais été proclamé indépendant. Le peuple

 12   majoritaire, les Serbes, n'ont pas voulu participer au référendum.

 13   M. Bennouna: Maître Naumovski, vous savez très bien que nous avons eu

 14   beaucoup de témoignages sur la naissance de l'Etat de Bosnie-Herzégovine,

 15   sur les conditions du vote, etc. Je crois que c'est une perte de temps de

 16   revenir à nouveau là-dessus à ce stade du procès.

 17   M. Naumovski (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Je suis tout à

 18   fait d'accord avec vous. C'était plutôt à titre d'information et

 19   d'introduction que j'ai posé la question. Monsieur Civcija, nous allons

 20   accélérer votre déposition.

 21   Indépendamment du fait que la Bosnie-Herzégovine ait été proclamée

 22   indépendante un mois plus tard, la guerre civile en Bosnie-Herzégovine

 23   s'est déclenchée, étant donné que l'armée de la Republika Srpska et la JNA

 24   ont commencé les offensives militaires sur le sol de la Bosnie-

 25   Herzégovine. Etes-vous bien d'accord avec moi?


Page 18964

  1   R.    Oui. Je vais vous répondre très brièvement. C'est exact.

  2   Q.    Lors de cette première attaque militaire, l'armée des Serbes de

  3   Bosnie, la JNA, il y avait des Croates et des Musulmans ou plutôt la

  4   majorité des Croates et des Musulmans qui habitaient le nord et le nord-

  5   ouest de la Bosnie-Herzégovine ont été expulsés de leurs foyers et une

  6   grande majorité de ces réfugiés s'est retirée en Bosnie centrale et à Novi

  7   Travnik également, n'est-ce pas?

  8   R.    C'est exact. Mais je voudrais mettre l'accent sur un autre

  9   point. Il y avait le premier convoi des réfugiés. Il y avait des femmes et

 10   des enfants. C'est un premier convoi qui est venu de Sarajevo. Ce sont les

 11   Serbes qui les ont arrêtés pendant 2 ou 3 jours dans un endroit appelé

 12   Ilija. Ils étaient 10000 au total.

 13   Il y a eu une seconde vague au mois de mai et juin 1992 de réfugiés du

 14   nord-ouest et de réfugiés de l'est de Bosnie-Herzégovine. Par conséquent,

 15   à Travnik, Novi Travnik, la vallée de la Lasva ont vu arriver des colonnes

 16   de femmes, d'hommes, des convois qui étaient assez nombreux.

 17   Q.    Par conséquent malgré cette agression qui a été une surprise, le

 18   HVO a été préparé et a réussi à organiser la défense. Vous étiez quelque

 19   peu plus organisés et mieux organisés que la Défense territoriale. Je

 20   parle du printemps, très tôt au printemps 1992.

 21   R.    Oui. J'en ai parlé quelque peu. Au début, nous avons reconnu,

 22   nous nous attendions à ce que ceci se produise sur notre sol. Nous avions

 23   compris qu'il y avait des risques depuis le moment où nous avions vu ce

 24   qui se passait en Slovénie et en Croatie. C'est la raison pour laquelle

 25   nous nous sommes mieux préparés, un peu mieux que nos partenaires


Page 18965

  1   musulmans. C'est la raison pour laquelle nos formations se sont rendues

  2   sur le terrain pour défendre le territoire de la JNA et de l'armée des

  3   Serbes de Bosnie.

  4   Q.    Nous allons poursuivre. Vous avez parlé de ce nombre de

  5   réfugiés. Vous avez eu d'autres problèmes également étant donné que chaque

  6   village, chaque agglomération, pratiquement disposait de sa propre unité.

  7   Ces unités coordonnaient bien leurs activités et c'est ce qui a compliqué

  8   quelque peu votre tache?

  9   R.    Oui. La situation était fort complexe. Au cours de cette

 10   période, nous avons obtenu, nous avons voté pour l'Etat de Bosnie-

 11   Herzégovine, mais cet Etat n'avait pas son armée. Sur son sol, il y avait

 12   des formations militaires d'un autre Etat et personne ne s'est posé la

 13   question de savoir comment résoudre ce problème.

 14   Un certain nombre de fonctionnaires qui occupaient des postes supérieurs

 15   en Bosnie-Herzégovine n'étaient pas conscients du danger de la présence de

 16   cette armée étrangère. Elle appartenait pour 99% aux Serbes. Ils n'ont pas

 17   su reconnaître le danger. Cette armée nous a attaqués. Elle a commis une

 18   agression sur nous. Nous avons essayé de nous défendre de cette armée des

 19   Serbes de Bosnie et c'est la raison pour laquelle nous avons créé le HVO

 20   civil et militaire. Mais c'était un processus. Au début, ce n'était pas

 21   facile. C'était assez pénible.

 22   M. le Président (interprétation): Ce type de déposition très générale est

 23   tout à fait superflue. Permettez-moi de dire que nous avons entendu et

 24   réentendu encore ce type de débat. Nous ne voulons pas ici de discours

 25   politique. Nous voulons des dépositions concrètes, précises. Nous voulons


Page 18966

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18967

  1   savoir ce que cet homme sait à propos de Novi Travnik. Veuillez progresser

  2   plus rapidement. Passons par exemple au point 18.

  3   M. Naumovski (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Nous allons

  4   passer à la situation à Novi Travnik. Monsieur Civcija, on parle de ce

  5   flux massif des réfugiés, des hommes en âge de combattre. Ils sont arrivés

  6   de la Bosnie du nord-ouest, de l'est. Au moment où ils sont arrivés, il y

  7   a un équilibre qui a été mis en cause. Il y avait un équilibre ethnique

  8   qui a été mis en cause entre les Croates et les Musulmans. La structure

  9   démographique a connu des changements qui ont exercé une influence sur ce

 10   qui se passait à Novi Travnik.

 11   R.    Oui. La population a doublé. Les Musulmans ont doublé leur

 12   population.

 13   Q.    Entendu, mais cette vague massive de réfugiés, des gens qui sont

 14   restés sans foyer, a créé une certaine ambiance également d'un chaos. Il

 15   n'y avait pas de loi, la police ne pouvait pas réagir de la manière où

 16   elle devait agir, etc. Elle ne pouvait pas contrôler sur le plan sécurité.

 17   A Novi Travnik, il y avait plein de problèmes, n’est-ce pas?

 18   R.    Oui, je l’ai précisé tout à l’heure, la situation était fort

 19   complexe.

 20   Il y avait de plus en plus d'unités militaires, de particuliers vêtus en

 21   uniforme qui traversaient le territoire; il était fort difficile également

 22   de contrôler et de surveiller la situation, qu’il s'agisse des unités du

 23   HVO ou des unités musulmanes. Je parle des unités militaires musulmanes.

 24   Q.    Outre ces groupes de réfugiés, vous-même qui avez occupé un

 25   poste important au sein de la police, vous saviez probablement que les


Page 18968

  1   criminels ont été détenus à l'établissement pénitentiaire et qu'on les a

  2   relâchés pour que d'autres détenus, d'autres prisonniers qui avaient

  3   commis des crimes ou des actes criminels devaient y être basés.

  4   R.    Oui, c'est tout à fait exact. Il était extrêmement difficile,

  5   comme je l’ai dit, de contrôler toutes ces personnes ; il y avait

  6   énormément d'actes criminels qui avaient été commis et c'est pour cela

  7   qu'on les a emprisonnés dans ces établissements pénitentiaires et de

  8   relâcher ceux qui y étaient auparavant.

  9   Q. En ce qui concerne le HVO, d’un côté, la TO, d'un autre côté, il y

 10   avait également d'autres unités qui étaient stationnées; il y avait par

 11   exemple le HOS. Il y avait d’autres unités, d’autres groupements, des

 12   unités qui incorporaient des Croates, d'autres qui incorporaient des

 13   Musulmans.

 14   Par conséquent, ceci perturbait la population et il faut dire que ceci a

 15   causé également un certain nombre de tensions entre les Croates et les

 16   Musulmans. Avez-vous réussi quand même à vous mettre d'accord sur comment

 17   organiser la vie entre vous? Ou bien ces accords n’existent pas entre vous

 18   et les Musulmans? Qu’en pensez-vous?

 19   R.    En fait, il y avait deux types de problèmes: comment établir

 20   l'élément militaire et comment assurer la coopération entre les deux

 21   côtés, comment assurer la coopération entre les deux côtés civils. Nous

 22   avions une cellule de crise qui a essayé de jouer le rôle qu'avait

 23   auparavant le gouvernement municipal qui avait cessé de fonctionner. Mais

 24   même cela n'a pas marché, car des membres du groupe ethnique serbe ont

 25   quitté ces institutions. Par conséquent, il était difficile de parvenir à


Page 18969

  1   quelque accord que ce soit.

  2   Q.    Nous pouvons passer à une étape ultérieure au paragraphe 21.

  3   Nous avions cette cellule de crise qui n'était pas efficace, qui ne

  4   parvenait pas à rétablir l’ordre sur le territoire de Novi Travnik et le

  5   gouvernement du conseil croate de défense a été constitué à ce moment-là.

  6   R.    Oui, c’est exact.

  7   Q.    Monsieur le Président, Messieurs les Juges, j’aimerais demander

  8   le versement au dossier d'un document.

  9   Mme Ameerali (interprétation): Le document sera enregistré sous la cote D

 10   219/1.

 11   M. Naumovski (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 12   il s'agit d'une décision concernant la nomination du chef du bureau

 13   municipal dont le témoin vient de parler à Novi Travnik.

 14   Monsieur Civcija, ce document est signé par le Président de la communauté

 15   croate Herceg-Bosna, Mate Boban, et a été adopté le 13 juillet 1992.

 16   M. Civcija (interprétation): Une petite correction: ce document n’a pas

 17   été adopté le 3 juillet mais le 13 juin. Il a tout simplement été rédigé

 18   le 3 juillet.

 19   Q.    Oui, oui, d'accord. C’est ce qui est stipulé sur le document

 20   mais le HVO a été créé. C'était une mesure censée être provisoire et

 21   destinée à tenter d’organiser la vie à Novi Travnik, n’est-ce pas? Pouvez-

 22   vous dire aux Juges de cette Chambre quels étaient les représentants

 23   membres de ce gouvernement du HVO?

 24   R.    Oui, il y avait des Croates et des Musulmans comme Enes Sehic,

 25   par exemple, qui avant était directeur d'une banque et d'un établissement


Page 18970

  1   de la ville, il était économiste. M. Feriz Rizvic a été nommé au poste de

  2   membre du gouvernement et M. Safet Koco, ingénieur en construction, était

  3   également nommé au sein de ce gouvernement de Novi Travnik.

  4   Q.    Donc c'étaient des représentants musulmans que vous venez de

  5   citer?

  6   R.    Oui.

  7   Q.    Cependant, y compris après la création du HVO, les problèmes

  8   n’ont pas être tous réglés. Je vous demande si le HVO a cherché le moyen

  9   de renforcer les relations avec la partie musulmane, s’il a tenté de

 10   parvenir à une solution pour des problèmes qui vous semblaient

 11   particulièrement difficiles ou s’il n’a pas fait d'effort de ce genre.

 12   R.    L'objectif était d'organiser la vie sur ce territoire alors que

 13   l’agression avait déjà commencé. Il convient de dire qu’à ce moment-là,

 14   les obus avaient déjà commencé à tomber sur la région. Les avions nous

 15   bombardaient, la ville était prise pour cible, les réfugiés étaient

 16   nombreux; nous nous attendions à que ce gouvernement commence à

 17   fonctionner pour assurer la sécurité de la majeure partie de la

 18   population. Mais cela a posé de grands problèmes. A de nombreuses

 19   reprises, nous nous sommes réunis pour trouver un moyen de fonctionner.

 20   Tout cela a été très difficile.

 21   Q.    Merci. Donc c’est un fait que les représentants des Musulmans

 22   ont fait partie de ce gouvernement du HVO dont nous parlons. Mais des

 23   responsables politiques ont tout de même organisé ce que j'appellerai une

 24   présidence de guerre musulmane, c’est-à-dire composée exclusivement de

 25   Musulmans. Et cette présidence de guerre a repris une partie de la gestion


Page 18971

  1   de la ville, notamment pour les quartiers peuplés majoritairement de

  2   Musulmans.

  3   R.    Oui, c'est absolument exact. Il s'agit de personnes que nous

  4   appelons les «durs», dans notre jargon, sur le plan politique. Ce sont des

  5   personnes qui en fait ne voulaient pas de la coopération et ils ont créé

  6   un gouvernement séparé sur le territoire qu’ils estimaient contrôler, le

  7   territoire peuplé majoritairement de Musulmans.

  8   Q.    Pouvez-vous dire aux Juges les noms de ces représentants

  9   politiques dont vous parlez, les Musulmans?

 10   R.    Eh bien, notamment M. Salih Krnjic, qui était président du SDA à

 11   ce moment-là et avant il était Président du gouvernement local. Et il y en

 12   a à un autre, je ne me rappelle pas de son nom.

 13   Q.    Est-ce que le nom de Ragib Zukic vous dit quelque chose?

 14   R.    Oui, il s’appelait Ragib Zukic.

 15   Q.    A l'examen du premier conflit qui a commencé le 19 juin 1992.

 16   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, nous avons vu un plan de la

 17   ville qui était une pièce à conviction de la défense que nous avons reçue

 18   du Procureur. Nous aimerions maintenant demander que l'on passe sur le

 19   rétroprojecteur cette pièce sur laquelle le témoin a ajouté quelques

 20   annotations.

 21   M. le Président (interprétation): Maître Naumovski, à partir de

 22   maintenant, il faudrait préférable que vous ne dirigiez pas le témoin dans

 23   ses réponses. Laissez-le répondre par lui-même.

 24   M. Naumovski (interprétation): Oui, absolument, Monsieur le Président.

 25   Monsieur Civcija, nous voyons donc ce plan de la ville sur lequel vous


Page 18972

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18973

  1   avez de votre main indiqué l'emplacement d'un certain nombre de bâtiments

  2   qui nous intéressent. Pouvez-vous très rapidement expliquer aux Juges de

  3   cette Chambre qui a provoqué le conflit en juin 1992? Quels étaient les

  4   endroits d’où est provenue l'attaque et ce genre de chose mais très

  5   rapidement?

  6   Vous pouvez utiliser le pointeur, et lorsque vous parlez d’un bâtiment ou

  7   d’un endroit, il faut le montrer sur l’écran.

  8   R.    Je comprends. A ce moment-là, le commandant de l’armée des

  9   Musulmans sur le territoire de Novi Travnik a été Refik Lendo qui

 10   auparavant était membre de l’armée populaire yougoslave. C'était un homme

 11   dur, qui n'était pas enclin à la coopération et avec lui nous n’avons pu

 12   conclure aucun accord quant à une coopération éventuelle des deux parties

 13   contre l'armée des Serbes de Bosnie-Herzégovine. Cet homme a mis en oeuvre

 14   une ligne politique assez dure et il souhaitait représenter toutes les

 15   forces en présence sur le territoire de Novi Travnik.

 16   Une tentative de prise de contrôle des principaux bâtiments de la ville a

 17   été réalisée le 19 juin. Comme vous le voyez sur ce dessin, la ville

 18   s’étend du nord au sud. Au nord, on entre dans la ville à ce carrefour, le

 19   Mali raj et on arrive ensuite à la caserne des pompiers qui va vers la

 20   caserne Bratstvo qui se trouve à deux ou trois kilomètres plus loin.

 21   Ce jour-là, ce qu'ils ont voulu faire, ils ont voulu dresser un barrage

 22   routier au niveau de ce carrefour Mali raj. Ils sont arrivés à ce

 23   carrefour avec un canon mais quelques membres des formations armées du HOS

 24   les ont repoussés sans recours à la violence.

 25   Ils les ont repoussés en se contentant de crier et de faire du bruit. Et


Page 18974

  1   dans l’après-midi, les coups de feu ont commencé en ville. Plus tard, j'ai

  2   appris que les bâtiments suivants avaient été attaqués, le bâtiment de la

  3   police où se trouvait le commandement de la défense territoriale

  4   également, c'est-à-dire des forces musulmanes, ensuite le bâtiment de la

  5   poste, le bâtiment de l'école, dont ils se sont emparés, des coups de feu

  6   ont été tirés contre la mairie et la maison de la culture, ainsi que

  7   contre le quartier général de l'armée des Croates.

  8   Le carrefour menant à la caserne des pompiers a été occupé. La route a été

  9   barrée vers la caserne Bratstvo et tout était fait pour empêcher une

 10   opposition de la part du HVO qui était sur la route de montagne et dont la

 11   mission consistait à défendre le quartier général depuis cet endroit.

 12   Q.    Je vous demanderai de parler un peu plus lentement, s'il vous

 13   plaît, pour faciliter le travail des interprètes.

 14   R.    Par la suite, les personnes présentes sur les diverses positions

 15   ont fait ce qu'il fallait pour repousser ces attaques contre les bâtiments

 16   que je viens de citer. Aux alentours de la poste, une vingtaine de membres

 17   de la défense territoriale ont été arrêtés, ils s’étaient rendus. Le

 18   bâtiment de la police a également été abandonné par les personnes qui

 19   l’occupaient et le quartier général de la Défense territoriale ne s'y est

 20   plus trouvé. L’école, la municipalité, la maison de la culture ont été

 21   défendues également et il n’est plus resté que la caserne des pompiers.

 22   Et cette maison dont je n’ai pas parlé tout à l’heure, ce bâtiment qui se

 23   trouve vers le haut de la ville, au sud ouest de la municipalité a été

 24   conservé par eux. Un autre bâtiment a été attaqué et le bâtiment que l'on

 25   voit ici à l’endroit que j'indique actuellement qui était un bâtiment très


Page 18975

  1   important a été attaqué et défendu.

  2   Q.    Ce jour-là, si je vous ai bien compris, un certain nombre de

  3   bâtiments ont été attaqués.

  4   R.    C'est absolument exact. Ce jour-là, le commandant de la Défense

  5   territoriale M. Lendo a émis un ordre selon lequel la plupart des

  6   bâtiments importants de la ville devaient être pris car il pensait sans

  7   doute qu'avec la prise de contrôle de ces bâtiments importants, il se

  8   serait emparé de la ville tout entière. Mais il n'est pas parvenu à son

  9   objectif, le HVO a manifesté sa force. Elle a remporté le succès et tous

 10   les bâtiments pris ont été ensuite repris par le HVO.

 11   Q.    Monsieur Civcija, pendant la durée de ces combats avez-vous été

 12   informé du fait qu'à l'intérieur de la maison de la culture, une réunion

 13   se déroulait entre des représentants musulmans et des représentants

 14   croates?

 15   R.    Oui. De toute façon des réunions de ce genre étaient très

 16   fréquentes à l’époque. Et dans cette maison de la culture se trouvaient

 17   également des pièces appartenant au HDZ et au SDA, ainsi qu’au SDS, le

 18   parti des Serbes de Bosnie. Donc des réunions de ce genre y étaient très

 19   fréquentes.

 20   Lorsqu'il y a eu une accalmie des combats vers la fin de la journée, je me

 21   suis rendu à cet endroit pour y vérifier qui s'y trouvait. La nuit était

 22   déjà tombée, la lumière était allumée dans les rues. J'ai entendu beaucoup

 23   de bruit mais sans pouvoir reconnaître les gens.

 24   En sortant du bâtiment, j’ai vu M. Salic Konic, qui était un dirigeant

 25   politique local représentant les Musulmans, ainsi qu'un membre du HOS qui


Page 18976

  1   lui parlait brutalement et le menaçait de quelque chose. J'ai saisi cet

  2   homme par le bras, et j'ai défendu le dirigeant musulman contre les

  3   attaques de cet homme en l'emmenant dans un quartier de la ville qui était

  4   plus sûr.

  5   Le matin lorsque les combats ont cessé et que le colonel Filipovic est

  6   arrivé, Monsieur Salic a remis ses fonctions à M. Filipovic. Ce que j'ai

  7   entendu dire, c'est qu'il l’a emmené jusqu'au nouveau quartier général de

  8   la Défense territoriale où il a été remplacé par M. Jozo Sekic, notre

  9   représentant du HVO. Et à cet endroit au carrefour près de la caserne des

 10   pompiers, il a été arrêté et emmené jusqu’à la caserne Kasapevic qui se

 11   trouve à l'ouest de la ville, le lendemain.

 12   Q.    Où avez-vous emmené M. Salih Krnjic, je vous prie?

 13   R.    Je l'ai emmené dans l'ouest de la ville où il n’y avait pas de

 14   combat. Je l'ai installé temporairement dans un café-restaurant qui

 15   s'appelait Mali raj.

 16   Q.    Merci. Avant de poursuivre, je demanderai la cote de cette pièce

 17   à conviction.

 18   Mme Ameerali (interprétation): Cette cote est D 220/1.

 19   Q.    Merci. Encore une ou deux questions au sujet de ce conflit du

 20   mois de juin.

 21   Ce conflit au mois de juin 1992 était parmi les premiers conflits opposant

 22   les Croates et les Musulmans sur le territoire de la Bosnie Centrale,

 23   n’est-ce pas? Pouvez-vous nous dire en tant qu’habitant de Novi Travnik

 24   comment vous avez vécu la situation qui a suivi ce conflit? Que s'est-il

 25   passé à ce moment-là?


Page 18977

  1   R.    Je dois dire qu'il est regrettable que ce conflit ait eu lieu.

  2   Ce qu'il s'est passé, c’est quelque chose à quoi je n'aurais jamais pu

  3   m’attendre en tant qu’habitant de la ville, en tant que personne ayant

  4   vécue toute sa vie dans cette ville. Par la suite, la situation s'est

  5   aggravée considérablement car les gens ont perdu confiance.

  6   Et des actions ont commencé destinées à permettre à certaines personnes de

  7   partir des quartiers de la ville où elles ne se sentaient pas en sécurité,

  8   pour aller vers d’autres quartiers où elles se sentaient plus en sécurité.

  9   Et ces déplacements ont créé un très grand désordre ressenti par les deux

 10   parties. Un grand nombre des unités du HVO et des unités des forces armées

 11   musulmanes se sont avérées très indisciplinées et j'ai dit qu'il y a eu de

 12   nombreuses sanctions. On a pu assister très souvent à des sévices imposés

 13   à la population. Et dans cette situation très complexe, les habitants

 14   cherchaient à déterminer où ils pouvaient s’abriter au mieux pour être le

 15   plus en sécurité et une fois qu'ils avaient trouvé cet endroit, ils s'y

 16   rendaient.

 17   Q.    Pour toutes ces raisons, la ville de Novi Travnik après le

 18   conflit du mois de juin s'est trouvée officieusement divisée en deux

 19   parties. Est-il permis de parler ainsi?

 20   R.    Oui. D'ailleurs, on peut dire qu'elle est encore divisée en deux

 21   aujourd'hui. Elle l’a été pendant toute la période en question.

 22   Q.    Très bien, Monsieur Civcija, vous avez travaillé pratiquement

 23   toute votre vie professionnelle dans la police civile. En 1992, au début

 24   de 1992, la police civile fonctionnait normalement. Elle travaillait comme

 25   toute autre police dans n’importe quel pays du monde?


Page 18978

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18979

  1   R.    Absolument. La police de Travnik faisait son travail normalement

  2   en 1990, en 1991, et elle a continué à le faire jusqu’au printemps de

  3   1992.

  4   Q.    Qu'est-ce qui s'est modifié dans le travail de la police civile

  5   après le mois d’avril 1992?

  6   R.    J'ai déjà indiqué que la situation est devenue très compliquée

  7   sur le plan du logement car il y avait de très nombreux membres de

  8   diverses unités qui portaient des uniformes et qui se sont retrouvés

  9   regroupés sur un territoire très restreint. Et la police peu à peu a perdu

 10   son rôle en tant que police civile.

 11   Le second fait, c'est qu'il y avait des attaques incessantes de la part de

 12   l'agresseur serbe qui ont abouti à ce que nous engagions un grand nombre

 13   de policiers pour qu'ils se rendent sur les lignes de front face aux

 14   Serbes de Bosnie-Herzégovine, c'est-à-dire aux soldats de la JNA. A partir

 15   de ce moment-là, il s'est trouvé un grand nombre de policiers qui ont été

 16   enrôlés.

 17   Q.    Mais Monsieur, dans cette période particulière après le

 18   printemps de 1992, la police civile de Novi Travnik avait-elle une

 19   quelconque compétence ou un quelconque contrôle sur les unités armées,

 20   donc sur les membres de l'armée qui éventuellement commettaient des crimes

 21   sur le territoire de la municipalité de Novi Travnik?

 22   R.    Absolument , la police civile n'avait aucune compétence de ce

 23   genre, aucune compétence sur les unités militaires qui avaient leurs

 24   propres commandants. Et à l'époque, comme je l'ai déjà dit,

 25   malheureusement un certain nombre d'actions regrettables ont été commises,


Page 18980

  1   il y a même eu des meurtres, des expulsions de domiciles.

  2   Je crois qu'il s'est produit 2 ou 3 fois qu'un Croate assassine un

  3   Musulman. Il y a eu des cas où un Musulman assassinait un Serbe. Il y

  4   avait des cas où un Serbe assassinait un Musulman, où un Croate

  5   assassinait un Croate.

  6   En tout cas, il s'agissait toujours de membres de certaines unités

  7   militaires qu’il était particulièrement difficile de contrôler. Je ne

  8   dirais pas seulement que la police civile n'avait aucune compétence sur

  9   ces hommes, mais il me semble que les membres de la police militaire ne

 10   parvenaient pas à maîtriser le comportement des membres des unités

 11   militaires des deux côtés.

 12   Q.    Dites-nous, après les premières élections multipartites, la

 13   police civile avait une composition mixte à Novi Travnik. Pouvez-vous nous

 14   dire jusqu’à quelle date les policiers musulmans ont continué à travailler

 15   au poste de police? Quand ont-ils quitté leurs fonctions et dans quelles

 16   conditions?

 17   R.    Ce que je peux dire, c'est que jusqu’au 19 juin 1992, c’est-à-

 18   dire jusqu’au début du premier conflit, plutôt quelques policiers

 19   musulmans ont continué à venir au poste de police y compris dans les

 20   quelques jours qui ont suivi le début de ce conflit. Mais après cela, ils

 21   ont cessé de venir et ont créé leur propre poste de police qui s'est

 22   installé dans un bâtiment situé dans un quartier de la ville contrôlé par

 23   l’armée musulmane.

 24   Q.    Donc, dans cette période, la police civile s’est scindée en deux

 25   parties sur le territoire de la ville.


Page 18981

  1   R.    Malheureusement, c’est un événement qui a eu lieu à cette

  2   période.

  3   Q.    Très bien, merci. A la mi 1992, la police civile se divise en

  4   deux et la direction de la police de Travnik est créée, n'est-ce pas?

  5   Pouvez-vous nous dire en deux mots ce qu’était cette administration de la

  6   police? Elle était responsable de toute la vallée de la Lasva sur le plan

  7   territorial, donc de plusieurs municipalités et entre autres de la

  8   municipalité de Novi Travnik. C'était une instance supérieure par rapport

  9   aux différents postes de police que l'on trouvait dans les localités des

 10   diverses municipalités, n'est-ce pas?

 11   R.    Oui, c’était une administration de la police régionale qui avait

 12   son siège à Novi Travnik. En dehors de cette administration basée à

 13   Travnik, il y en avait à Jajce, à Livno et à Mostar.

 14   S’agissant de l’administration de la police de Travnik, elle recouvrait un

 15   certain nombre de municipalités, Travnik, Novi Travnik, Vitez, Busovaca,

 16   Fojnica, Kiseljak, Gornji Vakuf, Bugojno. Je crois que j’ai énuméré toutes

 17   les municipalités concernées. Cette instance a commencé à fonctionner à la

 18   mi 1992 avec son siège à Travnik. D'abord dans l'école de musique, et un

 19   peu plus tard dans l'ancienne caserne de la JNA.

 20   Q.    Un détail que vous pourriez rendre plus clair pour les Juges. Au

 21   niveau municipal, on trouve des postes de police municipaux, au niveau

 22   régional, on trouve les administrations de la police et la direction de la

 23   police, mais qu’est-ce qui se trouve au-dessus de ces administrations de

 24   police?

 25   R.    Au-dessus, on trouve le département de l’intérieur à Mostar


Page 18982

  1   dirigé à l’époque par M. Dranak Gijecic. Il était membre du gouvernement

  2   du HVO en sa qualité.

  3   Q.    J'aimerais demander le versement au dossier de la dernière pièce

  4   qui sera présentée par M. Civcija. Nous n'en n'avons pas pour longtemps.

  5   M. le Président (interprétation): Très bien. Monsieur l'huissier, je vous

  6   prie? Après cela, nous suspendrons.

  7   M. Naumovski (interprétation): Une minute, Monsieur le Président, et j'en

  8   aurai terminé.

  9   Mme Ameerali (interprétation): Ce document sera enregistré sous la cote

 10   D21/1.

 11   M. Naumovski (interprétation): Je crois qu'il y a une erreur. Je pense

 12   qu'il s'agit plutôt de la pièce D221, n'est-ce pas?

 13   Mme Ameerali (interprétation): Oui, D221/1.

 14   M. Naumovski (interprétation): Merci.

 15   Monsieur Civcija, en deux mots, ce document est une décision signée par le

 16   représentant du département de l'intérieur, ce que l'on pourrait appeler

 17   le ministère, car plus tard, en Herceg-Bosna, ce département a changé de

 18   nom pour s'appeler ministère. Et par cette décision, monsieur Civcija,

 19   vous êtes nommé au poste de chef de police de Novi Travnik?

 20   M. Civcija (interprétation): Oui. C'est exact.

 21   Q.    Il est stipulé dans ce document que votre nomination a été

 22   proposée par le chef de l'administration de la police de Travnik, donc par

 23   le chef de cet organe qui était hiérarchiquement situé à un niveau au-

 24   dessus de vous, n'est-ce pas, dans la hiérarchie policière?

 25   R.    Oui absolument. Le commandant de l'administration de la police


Page 18983

  1   qui siégeait à Travnik était mon supérieur direct.

  2   M. Naumovski (interprétation): Très bien. Monsieur le Président, le moment

  3   est opportun pour une suspension d'audience.

  4   M. le Président (interprétation): Monsieur Civcija, nous allons suspendre

  5   nos travaux jusqu'à demain matin, je vous demanderai de revenir dans cette

  6   salle demain à 9 heures 30 pour la suite de votre témoignage. Dans

  7   l'intervalle, je vous prierai d'essayer de ne parler à personne du contenu

  8   de votre témoignage. Bien sûr, vous ne devez pas non plus laisser qui que

  9   ce soit parler avec vous de ce témoignage. Ceci concerne également les

 10   membres de la défense. Veuillez revenir ici demain matin à 9 heures 30.

 11   (L'audience est levée à 16 heures.)

 12  

 13 

14         

15         

16         

17         

18         

19         

20         

21         

22         

23         

24         

25